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Full text of "Encyclopédie de la musique et dictionnaire du Conservatoire .."

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ENCYCLOPÉDIE 

DE  LA  MUSIQUE 

ET 

DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


DEUXIÈME    PARTIE 

PÉDAGOGIE  -  ÉCOLES  —  CONCERTS  —  THÉÂTRES 


ENCYCLOPEDIE 


DE  LA  MUSIQUE 


ET 


DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Fondateur  :  Directeur  : 

Albert  LAVIQNAC  Lionel  de  la  LAURENCIE 

Professeur  au  Conservatoire  Ancien  Président 

Membre  du  Conseil  supérieur  d'Enseignement.  de  la  Société  française  de  Musicologie. 


DEUXIEME   PARTIE 

TECHNIQUE  -  ESTHÉTIQUE  -  PÉDAGOGIE 

*  *  *  *  *  *  T%  ESERVED 

PÉDAGOGIE  -  ÉCOLES     X\jEADlîfaCE 
CONCERTS  -  THÉÂTRES 

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PARIS 

LIBRAIRIE     DELAGRAVE 

15,    RUE    SOUFFLOT,    13 


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Tous  droits  de  reproduction,  de  traduction  et  d'adaptatio 
réservés  pour  tous  pays. 


Copyright  by  Librairie  Delagrave,  1934, 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL' 


Par  Théodore  DUBOIS 

DE    L'iNSTITUT 


INTRODUCTION 

CONSIDÉRATIONS  GÉNÉRALES   PRÉLIMINAIRES 

Enseigner,  du  lalin  insignire,  instruire,  donner 
des  leçons,  peut  s'appliquer  à  toute  connaissance 
humaine,  de  quelque  nature  qu'elle  soit.  L'Ensei- 
gnement est  relativement  facile  s'il  est  d'ordre  scien- 
tifique ou  matériel,  car  il  peut  s'appuyer  sur  des 
certitudes,  sur  des  principes  précis,  exacts. 

Il  n'en  est  pas  de  même  lorsqu'il  s'agit  d'un  ensei- 
gnement artistique  dont  l'essence  est  d'être  avant  tout 
idéale.  L'Art  évolue,  progresse;  il  ne  se  développe 
jamais  par  saccades,  et  bien  que  le  génie  soit  en 
quelque  sorte  spontané,  il  n'eu  est  pas  moins  vrai 
que  les  plus  grands  innovateurs  ne  sont,  en  réalité, 
que  la  résultante,  le  produit  d'efforts  séculaires, 
dont  ils  constituent,  en  les  personnifiant,  la  suprême 
manifestation.  C'est  là  surtout  ce  que  la  science  et 
les  études  historiques  rétrospectives  ont  pour  but  de 
démontrer,  et  c'est  dans  ce  sens  que  doit  être  dirigé 
l'enseignement  lorsque  son  objectif  est  de  former 
des  artistes. 

Il  doit  s'adresser  à  l'esprit,  viser  haut  et  développer 
le  sens  esthétique. 

De  là,  la  condamnation  des  faiseurs  de  systèmes 
conçus  tout  d'une  pièce,  dont  les  innombrables  écrits 
n'ont  jamais  provoqué  même  une  déviation  dans 
l'évolution  capricieuse  de  l'art  musical,  infiniment 
immatériel,  et  par  conséquent  inaccessible  à  toute 
influence  systématique. 

Tout  art  se  compose  de  deux  parties  également  im- 
portantes :  l'esthétique  et  la  technique. 

Le  génie  crée;  la  science  intervient  ensuite  pour 
expliquer,  justifier,  désapprouver  parfois,  codifier 
enfin  ce  que  l'esprit  et  l'imagination  ont  créé  en  toute 
liberté,  sans  autre  guide  que  l'aspiration  vers  la 
beauté,  dont  l'idéal  varie  autant  que  les  individus, 
les  climats  et  les  époques. 


Les  leTaie 
Leur  ensei 
A  fermer 


baleine  harmonieuse  et  pure. 

savantes  mains  prenaient  mes  jeunes 

les  baissaient,  reconimeru  aient 

nt  ainsi,  quoique  faibles  encor 


Ce  n'est  pas  par  l'étude  du  dessin  géométrique 
que  l'on  apprend  aux  jeunes  peintres  à  dessiner  ce 
qu'ils  voient;  ce  n'est  pas  davantage  par  l'étude 
sèche  et  aride  du  contrepoint  que  l'on  apprend  aux 
jeunes  musiciens  à  traduire  les  émotions  de  l'âme. 

Néanmoins,  la  science  est  nécessaire  au  génie,  et 
sans  elle,  ses  manifestations  ne  pourraient  se  produire 
dans  toute  leur  puissance,  leur  éclat,  leur  beauté. 

Au  premier  rang  donc,  la  partie  idéale,  artistique; 
au  second,  la  partie  scientifique,  technique.  Ces 
deux  parties,  intiment  fiées,  ne  peuvent  se  passer 
l'une  de  l'autre.  -  • 

Enseigner  la  partie  technique  de  l'Art  musical  est 
déjà  difficile  et  méritoire,  mais  enseigner  ce  qui  lou- 
che à  l'idéal,  au  rêve,  à  l'impalpable,  à  l'infini,  quelle 
tâche  grandiose  et  merveilleuse!  Ne  faut-il  pas  don- 
ner toute  son  âme,  se  livrer  tout  entier,  découvrir 
aux  autres  la  cause  des  plus  intenses  émotions,  com- 
muniquer la  flamme  dont  on  est  soi-même  dévoré, 
faire  pénétrer  dans  l'esprit  d'autrui  les  raisons  pro- 
vocatrices mystérieuses  de  la  beauté? 

Cet  enseignement  n'est  pas  banal  et  ne  ressemble 
à  aucun  autre.  Il  n'y  a  pas  de  règle  pour  le  savoir 
donner.  L'artiste  en  puise  la  force  et  la  vertu  dans 
son  cœur. 

II  est  basé  sur  le  passé  qu'il  consacre,  et  prépare 
l'avenir. 

Encore  y  a-t-il  certaines  parties  de  l'Art  qui  ne  se 
peuvent  enseigner!  Qui  donc  peut  donner  du  génie 
et  de  l'imagination  à  celui  que  la  nature  n'a  pas  élu 
entre  tous?  Le  bon  maître  peut  simplement  aider, 
s'il  est  à  la  hauteur  de  sa  mission,  à  l'éclosion  de 
ces  merveilleuses  facultés  dont  les  êtres  privilégiés 
ont  en  eux  le  germe  divin  et  fécondant. 

Tout  peut  être  enseignement  pour  le  jeune  musi- 
cien observateur  :  ce  qu'on  apprend  dans  les  écoles, 
la  lecture,  l'audition  fréquente  etraisonnée  des  chefs- 
d'œuvre  au  théâtre,  au  concert,  à  l'église,  la  fréquen- 
tation des  grands  artistes,  la  vue  de  belles  choses 
de  toute  nature,  etc.,  tout  peut  être  pour  lui  source 
de  profit  intellectuel  et  artistique,  s'il  sait  voir, 
écouter,  lire,  observer. 


Il  est  indispensable  que  le  professeur  soit  instruit 
et  en  pleine  possession  de  son  art,  qu'il  ait  l'esprit 
cultivé,  ouvert  à  tout  ce  qui  est  beau,  grand,  géné- 
reux, élevé,  distingué;  qu'il  soit  perspicace,  afin  île 
discerner  sûrement  quelle  semence  il  convient  de 
distribuer  à  ses  élèves,  selon  le  tempérament  parti- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


ailier  de  chacun;  il  doit,  en  outre,  être  à  la  l'ois  ferme 
et  affectueux,  inspirer  confiance  et  respect  par  l'au- 
torité du  talent  et  du  caractère,  aimer  ardemment 
son  art,  encourager  et  protéger  ses  élèves,  n'être 
ménager  ni  de  son  temps  ni  de  ses  peines;  en  un 
mot,  être  pour  ses  disciples  une  sorte  de  père  ten- 
dre, bon  et  ferme  à  la  fois. 

S'il  a  toutes  ces  qualités,  s'il  aime  l'enseignement, 
s'il  s'y  dévoue  passionnément,  s'il  est  heureux  des 
progrès  et  des  succès  de  ses  élèves,  il  aura  sur  eux 
une  inlluence  morale  très  grande,  très  nécessaire, 
liés  efficace.  De  là  souvent,  viendront  leurs  elforts, 
aussi  bien  pour  lui  plaire  que  pour  satisfaire  leur 
propre  conscience  d'artiste.  Autant  de  profits  pour 
l'art,  dus  aux  qualités  du  Maître! 

Le  rôle  de  celui-ci  est  facile  avec  des  natures  bien 
douées  et  laborieuses;  il  devient  difficile,  ingrat, 
parfois  même  impossible  avec  des  natures  rebelles  et 
paresseuses.  Son  devoir,  en  ce  cas,  devoir  dur,  mais 
impérieux,  est  de  décourager  l'élève  fourvoyé 'impru- 
demment dans  une  carrière  où  il  ne  peut  récolter 
que  déboires  et  désenchantements.  Que  peut  produire 
un  enseignement,  quelque  merveilleux  qu'il  soit,  si 
le  terrain  est  inapte  à  le  recevoir? 

Le  professoral  ainsi  conçu  est  un  sacerdoce;  il 
n'est  pas  de  plus  noble  carrière,  et  les  plus  grands 
maîtres  ne  doivent  pas  dédaigner  de  s'y  adonner 
pour  la  plus  grande  gloire  de  l'art. 


En  musique,  l'enseignement  individuel  a  une  réelle 
supériorité  sur  l'enseignement  collectif,  l'élève  rece- 
vant directement,  et  adaptés  à  sa  personnalité,  les 
préceptes  du  maître.  Toute  la  substance,  toute  la 
quintessence  de  l'enseignement  sont  pour  lui  seul. 
L'expérience  a  si  bien  démontré  les  avantages  de  ce 
système,  que  même  dans  les  établissements  comme 
le  Conservatoire,  où  plusieurs  élèves  sont  réunis  dans 
la  même  classe,  chacun  d'eux  reçoit  pourtant  l'en- 
seignement individuel.  Le  professeur  ne  fait  pas  un 
cours,  il  donne  à  chacun  sa  leçon  en  présence  des 
autres,  de  sorte  que  les  conseils,  les  remarques,  les 
préceptes  profitent  à  tous.  C'est  un  enseignement  à 
la  fois  individuel  et  collectif,  propre  à  exciter  l'ému- 
lation et  à  développer  l'esprit  critique,  l'esprit  d'ob- 
servalion  et  d'analyse. 

Cette  forme  d'enseignement  est,  du  reste,  indis- 
pensable dans  les  Conservatoires,  où  il  n'y  a  pas 
deux  élèves  absolument  au  même  point.  On  ne  pour- 
rait raisonnablement  retarder  les  études  des  uns 
pour  attendre  les  autres. 

Dans  certains  cas  toutefois,  l'enseignement  collec- 
tif est  excellent  et  même  le  seul  possible. 

C'est  d'abord,  lorsque  le  nombre  des  élèves  est 
considérable,  et  qu'il  s'agit  de  l'étude  du  solfège,  de 
la  théorie,  du  chant  d'ensemble,  des  éléments  d'har- 
monie; puis,  pour  l'histoire  de  la  musique,  de  la  lit- 
térature dramatique  et  pour  la  classe  d'orchestre, 
qui  n'en  pourraient,  du  reste,  avoir  d'autre.  Il  est 
encore  possible  au  début  de  l'étude  des  instruments  : 
le  maître  peut  alors  indiquer  à  tous  certaines  règles 
sur  la  tenue,  les  doigtés,  l'émission  du  son,  etc., 
mais,  assez  rapidement,  la  leçon  et  le  travail  indi- 
viduel deviennent  indispensables  pour  développer 
en  toute  liberté  les  progrès  et  la  personnalité  de 
chacun. 

Les  avantages  de  l'enseignement  individuel  sont, 
dans  la  plupart  des  cas,  tellement  évidents  qu'il 


semble  inutile  d'insister  davantage  sur  ce  point.  Le 
bon  sens  est  là-dessus  d'accord  avec  les  résultats  de 
l'expérience. 


L'enseignement  artistique  ne  doit  dans  aucun  cas 
annihiler  la  personnalité  de  l'élève,  qu'il  s'agisse 
d'interprétation  ou  de  création. 

En  ce  qui  concerne  la  partie  technique,  une  exces- 
sive sévérité  est  nécessaire;  le  professeur  ne  doit 
rien  laisser  passer,  mais  ensuite,  après  avoir  ensei- 
gné selon  ses  idées,  selon  ses  convictions,  selon  les 
traditions  qu'il  croit  les  meilleures,  il  doit  laisser  à 
son  élève,  si  celui-ci  est  virtuose,  une  certaine  liberlé 
d'interprétation  lui  permettant  de  dégager  sa  per- 
sonnalité, tout  en  respectant  la  pensée  de  l'auteur. 
Il  arrive  qu'un  interprète  supérieur  et  génial  donne 
une  saveur  particulière  à  une  œuvre,  et  devient,  en 
quelque  sorte,  pour  une  partie,  le  collaborateur 
du  compositeur.  11  appartient  au  maître  de  ne  pas 
étouil'er  ces  germes  d'originalité  si  précieux  et  si 
rares,  qu'ils  semblent  un  don  du  ciel. 

Si,  au  contraire,  le  disciple  se  dirige  vers  la  com- 
position et  veut  devenir  lui-même  créateur,  le  pro- 
fesseur, après  avoir  fait  admirer  et  pénétrer  dans 
l'esprit  de  son  élève  les  beautés  des  grandes  œuvres 
consacrées,  après  les  avoir  analysées  avec  lui  au 
point  de  vue  de  la  construction,  du  style,  du  senti- 
ment, de  la  couleur,  etc.,  doit  lui  laisser,  lorsqu'il 
sera  devenu  complètement  maître  de  sa  main  et  de 
sa  plume,  toute  liberté  au  point  de  vue  de  la  route 
à  suivre;  il  le  dirigera  prudemment,  avec  des  lisières 
très  douces,  très  souples,  de  manière  à  faire  éclore 
toute  la  fraîcheur,  la  saveur,  l'originalité,  la  puis- 
sance, la  couleur,  la  force  du  fruit  qui  va  arriver  à 
maturité. 

Il  évitera  surtout  d'imprimer  Irop  fortement  sa 
personnalité  sur  le  talent  de  ses  élèves,  et  de  provo- 
quer cette  exclamation  si  souvent  entendue,  hélas  : 
«  On  voit  bien  que  X.  est  élève  de  Z.  » 

Les  qualités  du  professeur  sont  ici  :  outre  le  sa- 
voir profond,  un  tact  parfait,  une  intelligence  supé- 
rieure, une  abnégation  entière.  Sa  mission  est  haute  : 
diriger  les  jeunes  esprits  verslacréationde  la  beauté, 
du  sublime,  de  l'idéal! 


Il  est  très  désirable  que  le  professeur  puisse  en- 
seigner pratiquement  :  qu'il  soit  virtuose  s'il  s'agit 
de  musique  instrumentale,  chanteur  s'il  s'agit  de 
musique  vocale,  théoricien  spécialiste  s'il  s'agit  dr 
solfège,  d'harmonie,  de  contrepoint,  etc  ,  composi- 
teur, s'il  s'agit  de  composition  ou  d'instrumentation. 
En  un  mot,  il  est  désirable  que  le  professeur  puisse 
prêcher  d'exemple.  C'est  ainsi  qu'il  inspirera  une 
entière  confiance  à  ses  élèves.  Il  est  certain  qu'un 
professeur  d'harmonie  ou  de  contrepoint  qui  ne 
pourrait  immédiatement  et  avec  facilité  corriger  les 
devoirs  de  ses  élèves,  perdrait  toute  autorité  sur  eux. 

Il  y  a  pourtant  quelques  exceptions, surtout  dans 
le  domaine  instrumental  et  vocal,  mais  elles  ne  font 
que  confirmer  la  règle. 

Il  est  une  opinion  assez  répandue  et  parfaitement 
erronée  qui  consiste  à  penser  que,  pour  des  com- 
mençants, la  médiocrité  du  professeur  est  sans  im- 
portance. Dans  le  monde,  les  parents  confient  volon- 
tiers la  première  éducation  musicale  de  leurs  enfants 
à  dçs  professeurs  sans  talent.  Il  est  difficile  d'en  pé- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3139 


nétrer  la  raison.  Ils  ont  sans  doute  la  conviclion 
qu'il  suffira  plus  tard  d'un  bon  maître  pour  redres- 
ser les  défauts  contractés  au  cours  de  cette  première 
et  défectueuse  éducalion.  Grave  erreur!  II  faut  sou- 
vent un  temps  considérable  pour  obtenir  ce  résul- 
tai; encore  ne  l'obtient-on  pas  toujours,  et  en 
reste-t-il  fréquemment  une  intluence  persistante  et 
désastreuse  sur  le  reste  de  la  carrière.  L'enseigne- 
ment doit  donc  toujours  être  confié,  même  au  débul, 
à  des  professeurs  d'une  capacité  notoire;  c'est  une 
vérité  dont  on  ne  saurait  assez  se  pénélrer. 


Si  l'on  convient  assez  facilement  que  les  instru- 
mentistes ont  besoin  d'être  en  pleine  possession  de 
leur  technique,  il  n'en  est  pas  toujours  de  même 
relativement  à  la  composition,  et  il  n'est  pas  rare 
d'entendre  émettre,  même  par  des  gens  qui  semblent 
raisonnables,  la  théorie  absurde  que  les  études  d'har- 
monie, de  contrepoint,  de  fugue  sont  inutiles. 

On  entend  également  assez  souvent  des  amateurs 
s'écrier  :  «  Avant  de  rien  savoir,  je  composais,  j'écri- 
vais,, j'avais  des  idées;  depuis  que  j'ai  appris  l'har- 
monie, je  ne  trouve  plus  rien.  »  Ils  en  concluent  que 
la  science  tue  le  génie.  Ils  prenaient  sans  doute  pour 
l'expansion  du  génie  les  misérables  platitudes  qu'ils 
écrivaient  autrefois,  et  dont  ils  auraient  honte  incon- 
sciemment aujourd'hui,  étant  un  peu  plus  éclairés. 
Celte  aberration  de  l'esprit  ne  peut  s'expliquer  que 
de  cette  façon. 

Ce  qu'on  peut  affirmer  indéniablement,  indiscuta- 
blement, c'est  qu'il  faut  être  maître  absolu  de  son 
métier  pour  n'être  pas  gêné  dans  l'expression  de  sa 
pensée.  On  peut  affirmer  également  que  la  demi- 
maîtrise  est  une  faiblesse. 

Il  est,  en  effet,  aussi  indispensable  au  musicien  de 
savoir  complètement  son  métier  qu'au  littérateur  de 
savoir  parfaitement  l'orthographe  et  la  syntaxe,  et, 
en  dépit  des  détracteurs  de  dogmes,  il  n'en  est  pas 
moins  vrai  que  l'étude  de  l'harmonie  et  du  contre- 
point est  la  meilleure  des  gtjmnastiques  pour  un  jeune 
musicien  qui  veut  arriver  à  la  maîtrise  de  son  art. 
Aucune  étude  ne  peut  remplacer  celle-là  au  point 
de  vue  pratique,  et  il  n'est  pas  difficile  de  reconnaître 
les  auteurs  qui  se  sont  nourris  de  cette  moelle  subs- 
tantielle. 

Et  qu'on  n'aille  pas  croire,  comme  les  esprits  uto- 
pistes et  paradoxaux  visés  plus  haut  voudraient  l'af- 
firmer, que  cette  élude  étouffe  et  atrophie  le  génie; 
tout  au  contraire,  les  élèves  doivent  être  convaincus, 
comme  le  dit  excellemment  F.  Hichteb,  dans  une 
Hemarque  de  son  Traité  d'harmonie,  que  ce  qui  leur 
sera  défendu  n'entravera  eu  rien  leur  liberté  dans 
leurs  productions  futures;  ils  se  seront  tellement 
identifiés  avec  les  principes  qui  sont  la  base  de  l'art, 
que  leurs  facultés  naturelles  se  développeront  avec 
plus  de  vigueur.  Avec  les  commençants,  le  travail  du 
maître  consiste  à  mettre  de  sages  entraves  à  des 
fantaisies  déréglées  qui,  souvent,  ne  sont  qu'une 
preuve  de  faiblesse  d'esprit.  Pense-t-on  que  les 
grands  mailres  que  nous  admirons  auraient  produit 
les  œuvres  qui  ont  fait  leur  gloire  s'ils  n'avaient  su 
leur  métier?  Est-il  besoin  de  rappeler  à  ce  sujet  les 
grands  noms  de  Bach,  Haydn,  Mozart,  Beethoven, 
Weber,  Mendelssohn,  Schuma.nn,  R.  Wagner,  Brahms, 
Hameau,  Gluck,  Méhul,  Gounod,  A.  Thomas,  Bizet, 
Lalo,  C.  Franck,  Cherubini,  Rossini,  Verdi,  pour  ne 
•  parler  que  de  quelques  morts  illustres? 


On  cite  quelquefois  Berlioz  comme  ayant  eu  une 
éducation  première  incomplète,  qui  ne  nuisit  pas  à 
l'expansion  de  son  génie.  Il  est  vrai  que,  tel  qu'il 
nous  apparaît  par  son  œuvre  si  puissante,  si  colorée, 
si  personnelle,  il  a  élé  grand;  mais  ne  l'eùt-il  pas 
été  davantage  encore  sans  cette  lacune?  On  raconte 
qu'un  jour  Gounod,  dans  une  saillie  humoristique 
et  quelque  peu  paradoxale,  se  serait  écrié  en  par- 
lant de  Berlioz  :  »  C'est  l'apôtre  de  la  fausse  basse.  » 
—  Cette  boutade,  bien  que  notablement  exagérée,  a 
pourtant  un  semblant  de  vérité,  et  jamais,  certes, 
Gounod  n'eût  songé  à  dire  cela  de  Bach,  de  Beetho- 
ven, de  Wagner... 

D'où  vient  cette  sotte  idée  de  croire  que  la  science 
peut  être  fatale  à  l'inspiration?  Sans  doute,  de  l'or- 
gueil de  ceux  qui  ne  savent  rien  et  qui  voudraient 
en  imposer  à  l'esprit  de  naïfs  et  crédules  auditeurs! 

A  propos  de  Verdi,  il  convient,  de  remarquer  et 
d'admirer  la  haute  intelligence  et  l'énergique  volonté 
de  ce  maître,  ayant  été  lui-même,  après  ses  premiers 
succès,  son  propre  éducateur,  se  fortifiant  peu  à  peu 
dans  l'art  d'écrire,  et  ne  cessant  jusqu'à  la  fin  de  sa 
vie  de  faire  les  efforts  les  plus  admirables,  n«n  seu- 
lement pour  acquérir  une  plus  grande  maîtrise,  mais 
encore  pour  transformer,  épurer,  élever  son  style. 
Superbe  exemple  d'enseignement  pour  les  autres! 


Si   le   j le    musicien   appartient    à    une   famille 

intelligente,  à  l'esprit  cultivé,  s'il  a  reçu  lui-même 
une  instruction  suffisante  et  une  bonne  éducation,  il 
se  trouve  plus  apte  à  recevoir  avec  fruit  l'enseigne- 
ment artistique  qui  lui  est  donné.  Dans  le  cas  con- 
traire, il  se  voit  souvent  obligé  à  de  plus  grands 
efforts  pour  obtenir  des  résultats  moindres  et  plus 
lents.  On  peut  dire  que  l'éclosion  est  plus  probable 
et  plus  facile  dans  la  première  hypothèse,  le  terrain 
étant  mieux  préparé. 

On  croit  souvent  que  l'atavisme  est  une  cause  dé- 
terminante de  dispositions,  de  facilités,  d'aptitudes 
particulières.  Le  contraire  se  voit  si  souvent  qu'une 
affirmation  dans  ce  sens  serait  bien  hasardée. 

Ce  qui  est  certain,-  c'est  qu'un  élève  qui,  au  cours 
de  ses  études,  a  la  bonne  fortune  de  vivre  dans  un 
milieu  éclairé,  sympathique  à  ces  études  mêmes, 
en  reçoit  un  réconfortant  très  favorable  au  dévelop- 
pement de  ses  progrès. 

D'autre  part,  le  professeur,  par  la  dignité  de  sa 
vie,  par  la  noblesse  de  son  caractère,  par  son  amour 
et  son  respect  de  l'art  qu'il  cultive,  peut  avoir  une 
inlluence  très  heureuse  sur  l'esprit  de  ses  élèves. 
C'est  encore  de  l'enseignement,  et  du  plus  grand, 
car  toutes  ces  qualités  morales  rejaillissent  sur  l'art 
lui-même,  lui  donnant  plus  de  beauté,  plus  de  pureté. 

Un  professeur,  dont  le  caractère  et  la  vie  seraient 
peu  estimables,  ne  peut  guère  développer  chez  ses 
élèves  d'idées  nobles,  élevées.  A  son  insu,  son  ensei- 
gnement s'en  ressent,  au  grand  détriment  de  l'art. 

Donc,  éducalion  première,  air  et  milieu  ambiants 
favorables,  dignité  du  professeur,  sont  autant  de 
conditions  très  propices  à  la  réceptivité  heureuse  de 
l'enseignement. 

Il  n'est  pas  inopportun  de  faire  remarquer  ici,  au 
moment  où  tant  de  gens  demandent  légèrement, 
après  d'autres  qui  l'ont  demandé  aussi  légèrement 
qu'eux,  a  si  le  séjour  de  Home  est  utile  aux  musi- 
ciens »,  combien  sont  fragiles  les  bases  de  leurs  ar- 
guments. 


I\i  )  'CI  OPÊlim  DE  I.A  MUSIQUE  ET  DICTION, \  AIRE  DU  CONSERVATOIRE 


A  ce  propos,  lu  lettre  suivante,  adressée  par  l'au- 
teur de  cet  article  an  directeur  du  Monde  musical,  le 
30  avril  1903,  peut  être  opportunément  reproduite 
ici.  Il  s'en  dégage  cette  vérité  que  le  séjour  à  la 
Villa  Médicis  est  encore  de  l'enseignement,  et  du 
plus  haut.  Les  professeurs  y  sont,  :  la  nature,  les 
chefs-d'œuvre,  les  souvenirs,  le  milieu  admirable,  le 
travail,  la  réflexion,  la  contemplation,  etc.  Us  en 
valent  bien  d'autres! 

Voici  cette  lettre  : 

»  Cher  Monsieur, 
«  Votre  lettre  soulève  une  question  tant  de  fois 
agitée  et  à  laquelle  il  a  été  répondu  si  souvent  d'une 
façon  victorieuse,  qu'il  semble  inutile  d'y  revenir  à 
nouveau;  cependant,  puisque  vous  la  remettez  sur 
le  tapis,  je  veux  vous  en  donner  mon  avis. 

«  Combien  de  fois  ne  m'a-t-onpas  dit  :  «  Que  vont 
faire  les  musiciens  à  Rome?  »  Eh!  mon  Dieu,  ils  n'y 
sont  pas  envoyés  précisément  pour  «  produire  », 
mais  aussi  et  surtout  pour  apprendre  à  penser,  à  ré- 
fléchir, pour  élever  leur  esprit  dans  un  milieu  artis- 
tique unique  au  monde,  pour  digérer  les  études  faites 
scholastiquemenl  et  quelquefois  trop  rapidement, 
pour  oublier  l'aris  et  sou  snobisme  musical,  pour 
devenir  des  hommes  entin,  en  contemplation  avec 
les  helles  choses  de  la  nature  et  de  l'art. 

«  Croyez-vous  donc,  en  outre,  que  la  vie  en  com- 
mun, les  échanges  d'idées  avec  des  jeunes  gens  cul- 
tivant un  art  différent,  ne  puissent  avoir  une  influence 
heureuse  sur  l'épanouissement  de  l'intelligence? 
Croyez-vous  donc  qu'il  soit  inutile  de  se  recueillir  un 
peu  avant  de  se  lancer  dans  le  tourbillon  de  la  lutte? 

«  Les  jeunes  gens  sont  souvent  trop  pressés  de 
«  produire  »  en  vue  du  succès  et  de  la  réputation 
immédiate.  Quand  ils  auront  passé  deux  années  en 
Italie  et  une  année  en  Allemagne,  remplissant  scru- 
puleusement les  conditions  du  règlement  très  sage 
et  très  libéral  de  l'Académie,  qu'ils  auront  su  voir  et 
comprendre,  je  vous  assure  qu'ils  seront  armés  pour 
la  lutte  et  pour  la  production. 

«  Que  s'il  se  trouve  des  gens  —  et  il  s'en  trouve, 
hélas!  —  pour  ne  rien  entendre  de  tout  ce  que  je 
viens  de  vous  dire,  et  même  pour  en  sourire,  je  les 
plains  et  reste  sans  espoir  de  les  convaincre!  Mais 
vous,  cher  monsieur,  qui  venez  de  passer  quelque 
temps  à  Rome,  je  suis  persuadé  qu'avec  votre  intel- 
ligence des  choses  de  l'art,  vous  n'êtes  pas  loin  d'être 
de  mon  avis. 

«  Du  reste,  le  séjour  de  Home  a-t-il  donc  été  si 
néfaste  à  nos  compositeurs  anciens  pensionnaires? 
A-t-il  tué  la  personnalité  de  quelqu'un  d'entre  eux? 
Il  est  facile  de  démontrer  le  contraire  en  citant  seu- 
lement quelques  noms  tels  que  Berlioz,  Bi/.et,  Char- 
pentier, Debussy.  Qui  ne  se  rappelle  Gounod  parlant 
de  Rome  et  de  l'Italie?  Qui  n'a  lu  les  impressions 
de  Gœthe  sur  Rome?  A  de  rares  expressions  près, 
je  suis  sûr  que  tous  les  musiciens  ont  conservé  de 
leur  passage  à  la  Villa  Médicis  un  souvenir  exquis, 
durable  et  profitable. 

ii  Quant  à  moi,  je  n'y  pense  jamais  sans  émotion, 
et  je  dois  dire  que  le  peu  de  sentiment  de  l'art  que 
je  puis  avoir,  c'est  là  que  je  l'ai  senti  naître  et  se 
développer.  » 


Le  professeur  enseignant  la  composition  fera  re- 
marquer à  ses  élèves  les  rapports  existant  entre  l'Art 
musical  et  les  autres  arts.  Ils  sont  beaucoup  plus 


étroits  ivecjla  littérature  quave;  la  peinture  et  la 
sculpture;  en  effet,  de  beaux  vers,  une  belle  langue 
sont  une  harmonie;  un  beau  poème  lyrique  peut 
évoquer  des  idées  musicales.  La  peinture  et  la  sculp- 
ture parlent  surtout  aux  yeux,  à  l'esprit,  à  l'imagi- 
nation; les  impressions  qu'elles  suscitent  peuvent  se 
graver  lentement  et  se  fixer  fortement  dans  le  sou- 
venir, la  durée  visuelle  en  étant,  si  l'on  veut,  indé- 
finie; tandis  que  la  musique  s'adresse  au  senti- 
ment, au  cœur,  provoque  des  impressions  très  vives, 
chevaleresques,  tendres,  ardentes,  tristes,  gaies,  poé- 
tiques, violentes,  passionnées,  mais,  hélas!  fugitives 
comme  l'est  toute  chose  qui  passe  rapidement,  non 
ici  devant  les  yeux,  mais  devant  les  oreilles. 

Au  point  de  vue  de  la  forme,  l'architecture  est,  de 
tous  les  arts,  celui  qui  a  le  plus  de  points  de  cou- 
tact  avec  la  musique. 

Une  belle  symphonie  est  comme  un  beau  monu- 
ment :  toutes  les  parties  doivent  être  en  parfait  équi- 
libre, d'une  forme  élégante  ou  puissante,  sévère  ou 
gracieuse,  selon  le  caractère;  les  détails  doivent  être 
en  harmonie  et  en  unité  de  style  avec  l'ensemble. 
On  dit  d'un  morceau  de  musique  bien  construit  qu'il 
est  «  d'une  belle  architecture  ».  Les  grandes  œuvres 
des  maîtres  classiques  les  plus  célèbres  ont  toutes 
ces  qualités  de  forme,  de  pondération,  qui  en  font  des 
modèles  qu'on  ne  peut  cesser  d'admirer. 

Un  morceau  de  musique  mal  construit  ressemble 
assez  à  une  maison  dont  les  différentes  parties  n'au- 
raient aucune  symétrie,  dont  les  proportions  sem- 
bleraient plutôt  le  résultat  du  hasard  que  dé  calculs 
heureux,  étudiés,  propres  à  donner  une  impression 
d'équilibre,  de  stabilité,  de  beauté  esthétique  et 
artistique. 

Hélas!  combien  de  morceaux  de  musique  ressem- 
blent à  cette  maison!  Aucun  plan,  aucune  forme! 
C'est  une  improvisation  perpétuelle,  où  l'imagination 
la  plus  folle,  la  plus  désordonnée  peut  se  donner 
libre  carrière,  et  où  le  nec  plus  ultra  du  sublime 
est  l'absence  de  toute  beauté  !  L'incohérence  passe 
alors  pour  du  génie!  C'est  laque  le  rôle  du  profes- 
seur devient  important  et  sacré;  il  a  charge  d'âmes 
et  doit  faire  voir  le  néant  de  ces  doctrines;  il  doit 
analyser  avec  ses  élèves  les  belles  œuvres  des  maî- 
tres, d'une  si  parfaite  ordonnance,  d'une  si  belle 
architecture,  d'une  tenue  si  admirable,  œuvres  qui 
satisfont  à  la  fois  l'esprit  et  le  sentiment. 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL  AU   COURS   DES  AGES 
I  iiups  primitifs.  —  Antiquité. 

A  l'origine  des  temps,  l'enseignement  musical,  re- 
posant sur  la  seule  pratique,  se  borna  évidemment 
à  des  instructions  matérielles  et  verbales  d'un  chan- 
teur à  d'autres  chanteurs,  d'un  instrumentiste  à 
d'autres  instrumentistes.  A  mesure  que  la  musique 
prit  plus  d'importance  dans  la  vie  des  sociétés,  l'en- 
seignement dut  adopter  des  formes  plus  générales. 
La  connaissance  de  la  théorie,  c'est-à-dire  des  lois 
et  des  rapports  des  sons,  devint  nécessaire  aux  mu- 
siciens, et  ce  genre  d'enseignement  exigeant  des  dé- 
monstrations minutieuses,  des  explications  longues 
et  détaillées,  on  conçoit  qu'il  devait  être  donné  dans 
des  réunions  et  devant  des  auditoires  d'éièves  pou- 
vant profiter  collectivement  du  discours  d'un  seul 
maître. 

Comme  la  musique,  dans  les  temps  anciens,  de- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3M 


meurail  intimement  et  presque  exclusivement  liée 
aux  pratiques  religieuses,  il  était  tout  naturel  que 
les  éducateurs  musicaux  fussent  des  prêtres,  et  on 
ne  peut  guère  douter  que  chez  les  Hébreux,  les 
Perses  et  les  Chinois,  de  tout  temps  épris  de  musi- 
que, l'éducation  musicale  eût  lieu,  comme  plus  tard 
chez  les  Egyptiens,  au  sein  des  assemblées  religieu- 
ses. Les  Grecs  mêmes,  pendant  plusieurs  siècles, 
durent  étudier  la  musique  dans  les  temples.  Les 
oracles  des  plus  anciens  sanctuaires,  ceux  de  Dodone 
et  de  Delphes,  étaient  rendus  en  vers  et  chantés.  Le 
lyrisme  grec  naquit  et  se  développa  en  grande  par- 
tie sous  l'influence  de  cultes,  comme  ceux  d'Apollon 
et  de  Dionysos.  Ce  n'est  que  vers  la  (in  du  vie  siècle 
que  le  premier  théoricien,  Lasos  d'Ilermione,  écrivit, 
parait-il,  un  traité  sur  la  musique;  mais  des  cultes 
secrets,  qu'on  appelait  mystères  et  où  la  musique 
jouait  certainement  un  rôle  très  important  (mystères 
de  Dionysos  Zagreus,  célébrés  par  les  Orphique?, 
mystères  d'Eleusis),  existaient  depuis  des  temps 
très  reculés. 

On  n'a  pas  de  données  précises  sur  la  manière 
dont  était  cultivée  la  musique  dansla Chine  antique, 
mais  on  sait  que  cet  art  y  tenait  une  grande  place 
dans  les  préoccupations  morales  et  politiques. 

Confucius,  excellent  musicien  lui-même  et  habile 
exécutant,  reconnaissait  dans  la  science  musicale  le 
moyen  le  plus  sûr  et  le  plus  agréable  de  réformer 
les  mœurs  publiques.  Il  estimait,  comme  plus  tard 
Platon,  qu'elle  devait  être  considérée  comme  un  des 
principaux  éléments  de  l'éducation.  Celte  vénération 
pour  la  musique,  le  divin  philosophe  l'avait  puisée 
dans  les  livres  sacrés,  tels  que  le  Li-ki,  où  elle  est 
célébrée  ardemment  et  où  on  lui  attribue  une  sorte 
de  toute-puissance  sur  les  humains,  el\eChou-Kinij, 
où  il  était  rapporté  que  L'Empereur  Chim,  eu  nom- 
mant le  sage  Kouei  pour  présider  à  cet  art,  lui  dit  : 
«  Je  vous  charge  de  présider  à  la  musique;  enseignez- 
la  aux  fils  des  grands  pour  leur  apprendre  à  allier 
la  droiture  avec  la  douceur,  la  politesse  avec  la  gra- 
vité, la  bonté  avec  le  courage,  la  modestie  avec  le 
mépris  des  vains  amusements.   » 

Le  gouvernement  attachait  tant  d'importance  à  la 
musique  qu'il  s'en  réservait  la  direction  exclusive 
et  en  formulait  les  règles  générales.  Le  son  fonda- 
mental, appelé  Koung,  élait  fixé  par  lui,  et  les  dimen- 
sions du  tuyau  qui  le  donnait,  gravées  sur  les  monu- 
ments publics,  servaient  de  métrique  musicale1. 

En  Egypte,  un  usage  analogue  fut-  adopté2;  les 
prêtres  faisaient  tracer  sur  des  tables  exposées  aux 
yeux  de  tous,  des  modèles  de  mélodie  et  d'harmo- 
nie3, alin  d'entretenir  dans  l'esprit  du  peuple  la 
connaissance  el  le  culte  des  formes  parfaites. 

11  n'était  permis  à  personne  de  changer  quoi  que 
ce  fût  à  ces  modèles.  Celte  pratique  montre  le  cas 
que  l'on  faisait  de  l'enseignement  musical,  consi- 
déré comme  un  bien  public,  conception  qui  lut  plus 
tard  celle  des  Crées.  On  sait  que  Platon  reconnais- 
sait à  l'art  musical  une  influence  souveraine  sur  la 
forme  du  gouvernement,  et  assurait  qu'on  ne  pou- 
vait effectuer  aucun  changement  dans  la  musique 
sans  en  faire  naître  un  correspondant  dans  la  cons- 

1.  Kabixe  d'Ouvet,  La . Vusique  exph  q  urr  cn„t,»c  setfn  ce  et  comme  art. 

2.  Le  système  musical  si  anci<-n  des  Chinois  se  retrouve,  avec  cer- 
taines différences,  dans  tous  les  pays  habites,  ou  avant  été  habites 
par  des  peuples  civilisés  :  l'Arabie  le  tint  de  la  l'erse,  qui  le  tenait  des 
Hindous,  et  il  est  permis  de  penser  que  l'usage  d'exposer  les  «  tables 
de  la  loi  musicale  »  aux  yeux  de  tous  venait  de  la  même  source,  par 


3.  Je  laisse  a  F* 


la  responsabilité  < 


titution  de  l'Etat1.  Il  pensait  même  qu'on  pouvait 
juger  du  caractère  d'un  homme  d'après  ses  goûts 
en  musique;  il  voulait  qu'on  formât  de  bonne  heure 
les  jeunes  gens  à  connaître  et  à  pratiquer  la  musique, 
et  que  celte  éducation  fût  faite  d'après  un  plan  mé- 
thodique. 

«  Un  Etat  bien  gouverné  par  de  bonnes  lois,  dit-il, 
ne  laisse  jamais  au  caprice  des  poètes  et  des  mu- 
siciens ce  qui  concerne  les  choses  de  l'éducation  dans 
la  musique;  il  règle  ces  choses,  ainsi  qu'on  le  fait  en 
Egypte,  où  la  jeunesse  est  accoutumée  à  suivre  ce 
qu'il  y  a  de  plus  parfait,  tant  dans  la  mélodie  que 
dans  la  forme  du  mode.  » 

L'historien  Polybe  attachait  aussi  à  la  musique  le 
pouvoir  d'adoucir  les  mœurs.  Il  rapporte  que  de  tous 
les  peuples  de  l'Arcadie,  les  Cynèthes,  étrangers  à  la 
musique,  étaient  regardés  comme  les  plus  féroces; 
il  attribue  hardiment  leur  férocité  à  leur  éloigne- 
ment  de  cet  art,  et  il  les  oppose  aux  autres  Arca- 
diens  qui,  ayant  reçu  de  leurs  législateurs  des 
règlements  propies  à  leur  inspirer  le  goût  de  la 
musique,  se  distinguaient  par  leurs  mœurs  douces 
et  religieuses. 

Terpandre,  qui,  avec  Clonas  et  Olyjipos,  forme  le 
groupe  archaïque  des  musiciens  de  l'antiquité5,  éta- 
blit la  musique  à  Sparte.  Cette  ville  fut  longtemps  le 
centre  de  l'art  musical,  qui  était  considéré  comme 
institution  nationale  ;  on  y  comptait  (vn«  et  vic  siècles 
av.  J.-C.)  de  nombreux  représentants  :  Tpialktas  de 
Gortyne,  XENODAMOsde  Cythère,  Xénocrite  de  Locres, 
Alcman  de  Sardes.  Ces  musiciens  poètes  constituèrent 
les  dilférents  genres  du  lyrisme  choral  qu'on  appelle 
le  péan,  l'hyporchème,  le  parthénée,  et  le  dithy- 
rambe0. 

Les  colonies  de  l'Italie  méridionale  et  de  la  Sicile, 
Locres,  Tarente,  Ilhegium,  Syracuse,  Agrigente,  de- 
vinrent, dès  lors,  des  centres  de  haule  culture  musi- 
cale. C'est  vers  cette  époque  que  Pvthagore  lit  des 
découvertes  importantes.  Le  fondement  du  système 
de  ce  philosophe,  c'est  que  l'essence  de  toutes  cho- 
ses est  le  nombre.  Fondateur  des  mathématiques 
en  Grèce,  il  appliquait  à  tout  le  calcul  mathéma- 
tique, et  c'est  ainsi  qu'il  arriva,  le  premier,  à  voit  le 
rapport  qui  existe,  en  musique,  entre  la  sensation 
auditive  et  le  nombre  qui  représente  la  longueur  de 
la  corde  sonore. 

Elant  donné  la  haute  signilication  que  les  Grecs 
attribuaient  à  la  musique  et  la  noble  fonction  qu'ils 
lui  assignaient  dans  la  vie  des  peuples,  il  était  naturel 
que  beaucoup  de  philosophes  s'occupassent  d'en 
pénélrer,  d'en  fixer  et  d'eu  enseigner  les  lois  si 
étroitement  liées,  dans  leur  esprit,  aux  grandes  lois 
de  l'Univers. 

Gevaert,  l'illustre  historiographe  de  la  musique 
antique,  à  qui  nous  empruntons  quelques  passages, 
a  énuméré  les  ouvrages  théoriques  parvenus  jusqu'à 
nous.  Nous  reproduisons  ici  cette  liste  : 


4.  Celte  idée,  disail-il,  appartient  a  LUmu.v  , 
leçons  de  musique  a  Suuiaik,  et,  après  l'avoir  le 
crate,  il  l'avait  développée  par  ses  éludes  et   ses 

5.  Voir  A.  et  M  .  Croiset.  Histoire  de  la  littéral 

avec  accompagnement  de  cithare;  Cturvvs  et  Oi.v 

accompignés  par  la  lliite  ou  même  pour  la  llùle  ! 

S.  A.  et  M.  Croiset,  op.  cit.,  vol.  Il,  rii.  ri  .Lj 


m    .oait    donné    de* 
méditations. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


.:.  \ «ma      m:  (iiïusA.  —  Manuel  d'harmonique. 

i.  Ai  vimis.  —  Introduction  musicale. 
:..  (Vu-m-M'i".  —  futroduction  harmonique. 

l'Aucibm.   —  Introiluclian  n  l'art  instrumental  (KSS- 

ii.l  tp.  J.-C). 
7.   Auis'riDii  QuiNTiLiEN.  —  De  la  U usique (3  liv.l. 
s.  Clause  Ptoi.bmbe.  —  Harmonique  (sous  M,iiv-AurHri. 
B.   Porphyre.  —  Commentaires  sur  l'Harmonique  de  P »ik 

(vecs  BG6). 

10.  Mamcbi  i;u\E->M  .       Harmonique. 

11.  rraiM  lie  Musique.  —  Anonyme. 

lï.    Manuel  île  l'art  uinsicnl  harmonique  ri  /initiquc.  Aimnvmr. 
13.    Hacciiius  l.B  Yib.ix.  —  Introduction  a  l'art  musical. 
1  ;.    (i,,,,!,  ,.  .  i'v,     ■    ,    ,.,        -  traite  l'harmonique. 

15.    ARISTOXt  NI'. fcniuienls    nttliaiqiiei   l  - 1  i  1 1  -■   'Il', I]. i.l,    uin-li: 

l.-C.) 
16     PLDl  S.BQOE.         Dl'l  '<"/«<•  8»f  (A  musique. 

.    -    Irtlile  urouslico-mlixical  {*.<u*   A.lricii. 
118-138). 

D     -  divi  ps  êi  rits,  notamment  au  ni"  chap. 
des  Problèmes  et  au  8«  llvi         I    P  1    fa» 

19.    l'OI.IJX.—  Vaiieaa    ! 0    '  .-,!■:     Il     piTrilr  <  :.  >mm .  .1 1 1  . 

-_!■.,    et  5'  livres  du  Banquet  des  Savants. 
21.  Miche]   Psei.u».  iVriviiiu  liyzanlin  ilu  xi"  siècle. 
82,  Martiancs  Capeli  a.  —  Romain. 
28,  Boece,  -  -  Romain. 

C'est  le  dernier  document  latin  pouvant  être  classé 
parmi  les  écrits  antiques  sur  la  musique. 

Sans  entrer  dans  des  détails  concernant  la  ma- 
tière ou  l'esprit  de  leurs  ouvrages,  nous  pouvons  no- 
ter que  tous  ces  écrivains  se  divisent  en  deux  camps  : 
Pythagoriciens  ou  Néo-Platoniciens,  et  Aristoxéniens. 
Pour  les  premiers,  la  musique  était  «  une  subdivi- 
sion des  mathématiques  >•  (Gevaert);  ils  fondaient 
leurs  théories  sur  des  lois  scientifiques  et  des  spécu- 
lations philosophiques. 

Les  derniers  n'envisageaient  que  le  but  pratique 
de  l'enseignement  ;  ils  voulaient  avant  tout  former  de 
bons  musiciens,  préconisaient  le  jugement  de  l'oreille 
et  les  calculs  de  l'expérience,  et  nous  apparaissenl 
donc  comme  les  «  avancés  »  de  cette  époque,  s'op- 
posait au  dogmatisme  établi  et,  en  quelque  sorte, 
officiel.  Leur  système,  plus  rapproché  de  la  physique 
d'AniSTOTE,  plus  clair  que  celui  de  Pythagore,  était 
plus  accessible  à  la  masse  et  faisait  de  nombreux 
adeptes, d'autant  qu'ÀRisiozÈNE, n'étant  pas  «  initié  », 
pouvait  parler  ouvertement  et  gagnait  ainsi  la  con- 
fiance populaire.  De  plus,  les  esprits,  portés  alors 
au  matérialisme,  s'accommodaient  bien  de  ces  prin- 
cipes fondés  sur  des  lois  tangibles  et  dégagés  de 
préoccupations  métaphysiques. 

Mais  tous  ces  auteurs  rivaux  ou  antagonistes,  au- 
tour desquels  se  formaient  des  partis,  tousces  écrits 
qui  donnaient  lieu  à  des  discussions  passionnées  ne 
s'occupaient  guère,  contrairement  à  ce  qu'on  pour- 
rait croire,  que  de  questions  dont  l'importance  nous 
parait  aujourd'hui  tout,  à  fait  secondaire  et  qu'un 
élève  de  solfège  résout,  apprend  et  retient  en  quel- 
ques leçons  :  genres,  échelles,  intervalles,  etc. 

Le  mot  harmonique  n'est  en  aucune  façon  chez  eux 
synonyme  de  notre  harmonie;  il  signifie  l'art  des  lois 
qui  régissent  les  sons  dans  leurs  rapports  mutuels 
d'acuité  et  de  gravité.  Les  Grecs  étaient  un  peuple 
plastique;  la  musique,  corollaire  de  la  poésie,  les 
préoccupe  surtout  dans  ses  parties  pour  ainsi  dire 
palpables,  hauteur  de  sons,  rapports  acoustiques  et 
rythmiques,  etils  appliquaient  ces  différents  éléments 
à  l'expression  des  sentiments  et  des  idées  (presque 
toujours  matérialisés),  ou  a  l'évocation  des  images 
suscitées  par  l'inspiration  des  poètes  ou  par  la  tra- 
dition mythique.  On  comprend  donc  que  l'enseigne- 
ment de  la  musique  eut  comme  conséquence  logique, 
ou  comme  préparation,  l'enseignement  des  arts  dont 
elle  était  inséparable,  el  que  les  académies  de  musi- 


que fussent  forcément  aussi  des  académies  intellec- 
tuelles et  physiques. 

La  musique  chantée  à  l'unisson  constituait,  à 
vrai  dire,  l'art  musical  des  Grecs;  Platon  dit.  qu'il 
faut  laisser  aux  musiciens  de  profession  la  musique 
accompagnée  d'instruments  faisant  une  partie  dis- 
tincte. Toutes  leurs  préoccupations  techniques  si 
minutieuses  se  rapportaient  donc  à  la  monophonie, 
et  l'on  peut  en  conclure  que  leur  faculté  de  percep- 
tion quant  aux  intonations  et  aux  rythmes  était 
beaucoup  plus  exercée  que  la  mitre1. 

A  Rome,  la  musique,  enseignée  par  des  pédago- 
gues grecs,  entre  dans  le  programme  de  l'éducation. 
Thrasylle  et  Didyme  sons  Néron,  Adraste  sous 
Trajan,  Théon  de  Smyrne  sous  Adrien,  Xi  coma  ou 
sous  Antonin  le  Pieux,  sont  parmi  les  plus  célèbres 
écrivains  didactiques. 

Toujours  les  deux  écoles,  pythagoricienne  et  aris- 
toxénienne,  se  combattent  l'une  l'autre.  Au  n"  siècle, 
un  rapprochement  semble  s'effectuer;  les  Aristoxé- 
niens paraissent  adopter  quelques  principes  de  leurs 
adversaires.  Ptolémée  résume  les  travaux  des  deux 
sectes,  Plutaroue  écrit  son  dialogue  sur  la  musique; 
Dicxis  d'Halicarnasse  le  Jeune  compose  un  traité. 

Ce  n'est  plus  l'ère  de  l'inspiration,  de  l'invention 
musicales,  mais  la  science  et  l'étude  sont  bien  repré- 
sentées. On  voit  se  former  des  agones;  Auguste  en 
institue  à  Nicopolis,  Néron  à  Home,  Domitien  leui 
donne  un  nouveau  développement  et  l'ait  bâtir  une 
salle  de  concerts  contenant  12.000  auditeurs. 

Adrien,  Antonin  le  Pieux,  Marc-Aurèle  protégeaient 
la  renaissance  des  corporations  d'artistes  musiciens. 
Puis,  les  luttes  entre  le  paganisme  et  le  christia- 
nisme amènent  la  décadence  (c'est  de  cette  époque 
que  datent  presque  tous  les  traités),  et  l'avènement 
de  Constantin  coïncide  avec  l'extinction  définitive  de 
la  musique  antique  gréco-romaine. 

Après  la  fermeture  des  écoles  païennes  (sous  Théo- 
dose),  la  théorie  musicale,  n'étant  plus  enseignée 
nulle  part,  tomba  vite  dans  l'oubli.  Les  prêtres  cul- 
tivaient l'enseignement  du  chant  religieux,  mais, 
tout  comme  la  musique  profane,  la  musique  d'église 
était  enseignée  d'une  manière  purement  empirique. 
Pour  apprendre  à  chanter,  à  composer  ou  à  jouer 
d'un  instrument,  on  n'eut  plus,  comme  dans  les  temps 
primitifs,  que  l'exemple  du  maître,  l'oreille  et  l'ha- 
bitude. Cela  suffisait  pour  établir  la  connaissance 
des  modes  et  des  rythmes. 

Quelques  rar/es  érudits,  en  ces  siècles  d'ignorance, 
tels  que  Cassiodore  ou  Isidore  de  Séville,  s'occu- 
paient, il  est  vrai,  de  science  musicale;  mais  ce  que 
l'on  décorait  alors  de  ce  nom  consistait  en  spécula- 
tions mathématiques  sur  les  rapports  des  sons  et  des 
intervalles,  auxquelles  on  accolait  quelques  extraits 
généralement  mal  compris  des  écrivains  musicaux  de 
l'antiquité,  le  tout  sans  aucune  application  pratique. 
C'est  par  la  mémoire  que  se  conservaient  et  se 
transmettaient,  au  moyen  d'auditions  fréquentes, 
les  canlilènes  adoptées  pour  le  service  religieux. 

Devenu  partie  intégrale  du  culte,  le  chant  prit 
une  place  importante  dans  l'éducation  des  jeunes 
élevés.  Il  s'éleva,  autour  des  basiliques  épiscopales, 
des  séminaires,  où  l'on  formait  des  lecteur*.,  ainsi 
qu'on  les  appelait,  «  adolescents  aux  voix  limpides  » 
chargés  des  récitations  bibliques  et  qui  devaient  re- 
tenir par  cœur  toutes  les  mélodies  rituelles-. 


,  Histoire  et  Théorie  île  lu  musique  dans  I  antiquité. 
Le  Mélopée  antique  dans  le  chant  île  t'Kqlise  la/lu 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3443 


Les  fonctions  musicales  étaient  confiées  aux  prê- 
tres, et  à  Home,  une  belle  voix  conduite  avec  talent 
était  le  plus  sûr  moyen  d'arriver  aux  hautes  desti- 
nées ecclésiastiques. 

La  musique  religieuse  prenait  une  place  de  plus 
en  plus  vaste  et,  les  anciens  théâtres  étant  fermés 
ou  détruits,  il  n'y  eut  plus  bientôt  pour  tout  aliment 
esthétique,  pour  toute  distraction,  que  les  chants 
sacrés1.  Mais  l'invasion  des  barbares  porta  un  grand 
ravage  dans  les  arts;  la  musique  souffrit  cruelle- 
ment de  la  destruction  des  églises,  des  temples  et 
autres  lieux  où  elle  figurait  à  divers  titres.  Seul 
Théodoric,  roi  des  Ostrogoths,  qui  régnait  sur  l'I- 
talie, montra  du  goût  pour  les  ouvrages  et  les  no- 
bles occupations  de  l'esprit;  ayant  séjourné  comme 
otage,  dans  sa  jeunesse,  à  Constantinople,  il  y  avait, 
dans  la  fréquentation  des  Grecs,  pris  le  goût  des 
arts  et  des  lettres.  Devenu  roi,  il  les  cultiva  en  ama- 
teur éclairé;  sur  la  demande  de  Clovis,  qui  désirai! 
étahlir  dans  sa  capitale  et  dans  les  principales  villes 
de  la  France  l'étude  du  chant,  afin,  sans  doute,  de 
perpétuer  par  ce  moyen  la  gloire  de  ses  exploits,  il 
envoya  à  ce  monarque  le  chanteur  Acoride,  qui  se 
rendil  en  Gaule,  portant  avec  lui  une  cithare  grecque. 

Acoride  organisa  des  «  musiques  de  chapelle  » 
composées  d'enfants  de  chœur,  et  placées  sous  la  con- 
duite d'un  chef  dont  ils  dépendaient  entièrement2. 

Moyen  âge. 

Los  agitations  de  la  guerre  exaltaient  à  un  point 
extrême  la  ferveur  religieuse;  un  grand  nombre  d'é- 
glises furent  réédifiées,  et  la  vie  se  concentra  dans 
ces  asiles  de  recueillement  et  de  paix. 

La  musique,  qui  faisait  le  plus  hel  ornement  des 
fêtes  ecclésiastiques,  nécessitait  des  interprètes  de 
plus  en  plus  habiles.  Un  décret  émanant  de  Home  en 
595,  ayant  défendu  le  chant  proprement  dit  aux  prê- 
tres et  aux  diacres,  entraîna  la  création  d'un  corps 
spécial  de  chantres  :  la  Schola  cantonim  fut  fondée 
avec  son  double  caractère  didactique  et  pratique, 
avec  sa  hiérarchie  et  son  personnel,  composé  d'élè- 
ves adultes  et  d'enfants  destinés  à  l'état  ecclésias- 
tique. 

Pépin  le  Bref  établit  dans  son  palais  un  corps 
d'ecclésiastiques  destiné  à  célébrer  l'office  divin. 
Mais  c'est  l'avènement  de  Charlemagne  qui  peut  être 
considéré  comme  le  véritable  point  de  départ  de 
l'enseignement  musical  dans  les  temps  modernes.  Ce 
prince  montra  pour  la  musique  un  amour  véhément 
et  paternel;  il  lit  venir  de  Home  des  maîtres  renom- 
més, les  chargea  de  répandre  les  traditions  du  chant 
grégorien  à  travers  les  Gaules,  et  provoqua  un  mou- 
vement général  d'études  musicales  dans  tout  l'Occi- 
dent. Par  une  lettre  circulaire  adressée  en  787  aux 
métropolitains,  il  ordonnait  que  des  écoles  fussent 
établies  dans  tous  les  monastères  et  dans  toutes 
les  cathédrales  des  grandes  villes. 

La  musique  et  le  chant  occupaient  une  grande 
place  dans  cet  imposant  effort  de  culture  intellec- 
tuelle :  tous  les  prêtres  étaient  tenus  de  s'y  adonner; 
«  l'entrée  du  palais  était  interdite  à  ceux  d'entre 
eux  qui  ne  savaient  pas  lire  et  ne  connaissaient  pas 
la  musique  ». 

Il  est  probable  que  l'introduction  de  l'orgue  dans 
l'église  date  de  cette  époque  :  le  premier  de  ces  ins- 

1.  Gevaebt,  fftsloir:' r{  throric  (/-■  la  musique  de  l'antiquité  (1S7:>, 
1»81). 
-  2.  A.  Hann^bohchk,  Les  /Musiciens  et  compositeurs  français,  pré- 


truments  connu  en  Occident  l'ut  un  présent  de  l'em- 
pereur Constantin  Copronyme  à  Pépin  le  Bref,  qui  le 
lit  placer  à  l'église  de  Saint-Corneille  à  Compiègne3, 
L'apparition  et  l'usage  de  l'orgue  amenèrent  évi- 
demment une  évolution  et  un  progrès  dans  l'ensei- 
gnement. Il  est  permis  de  penser  que,  dans  la  soli- 
tude et  le  demi-jour  des  basiliques,  quelques-uns  de 
ces  hommes  pieux,  nourris  de  mélodie,  trouvèrent, 
en  laissant  errer  leurs  doigts  sur  le  clavier  des  orgues, 
les  premières  simultanéités  sonores,  qui  plus  tard, 
sous  le  nom  de  Diaphonie,  puis  de  Discantus,  formè- 
rent la  base  du  grand  édifice  harmonique. 

A  la  mort  de  Charlemagne,  la  Gaule  septentrio- 
nale se  trouva  livrée  de  nouveau  à  la  désolation  par 
les  guerres  civiles  et  la  fureur  belliqueuse  des  IS'or- 
mands.  L'éducation  en  général,  et  par  conséquent 
l'enseignement  de  la  musique  furent  arrêtés,  anéan- 
tis dans  le  tumulte  et  la  cruauté  dévastatrice  des 
armées. 

Ce  n'est  que  vers  la  fin  du  ixc  siècle  qu'on  voit  repa- 
raître un  souci  de  culture  intellectuelle.  Des  écoles 
tentèrent  de  se  reformer.  Rémi  d'Auxerre,  Heginon, 
abbé  de  Pruym,  Odon  de  Cluny  s'attachent  à  relever 
l'âme  et  l'esprit  des  peuples,  luttent  contre  l'igno- 
rance qui  les  entoure.  Us  s'occupent,  entre  autres 
choses,  de  musique,  écrivent  des  hymnes,  des  ouvra- 
ges sur  le  chant;  Hdcbald,  célèbre  moine  de  Saint- 
Amand,  commence  à  parler  de  la  musique  à  plu- 
sieurs voix;  enfin  Gerhert,  devenu  pape  en  999  sous 
le  nom  de  Sylvestre  II,  imprima  aux  sciences  et  à 
l'enseignement  en  général  une  impulsion  puissante. 
Tandis  que  la  musique  grave  et  savante  se  pour- 
suivra dans  les  églises  et  les  écoles,  un  autre  mou- 
vement s'opérera  dans  les  milieux  populaires  sous 
l'action  des  troubadours.  Le  règne  de  ces  habiles 
musiciens  fut  d'environ  trois  cents  ans;  il  s'étendit 
depuis  le  milieu  du  xie  siècle  jusqu'au  commence- 
ment du  xv=.  En  Provence  les  troubadours,  dans  le 
Nord  les  trouvères,  en  Flandre  et  en  Angleterre  les 
ménestrels,  parcouraient  les  contrées  en  chantant, 
et  entretenaient  le  culte  aimable  et  fantaisiste  de  la 
musique  populaire  et  instrumentale.  Au  Carême,  les 
chants  cessaient  jusqu'à  Pâques,  et  ils  profitaient  de 
ce  repos  obligatoire  pour  se  réunir  en  assemblées 
où  ils  enseignaient  chansons  et  refrains,  et  pour  re- 
nouveler leur  répertoire  en  apprenant  de  nouvelles 
mélodies.  Ces  sorles  d'écoles,  appelées  Schola  Mima 
rttm  ou  Mënestrandies,  sont  nos  premiers  Conserva- 
toires de  musique.  On  en  voyait  un  à  Soissons,  un 
à  Metz,  un  à  Poitiers,  d'autres  à  Clermont,  à  Aix,  à 
Orléans,  etc. 

L'influence  des  ménestrels  et  des  trouvères  devient 
graduellement  de  plus  en  plus  prépondérante;  ceux 
qui  accompagnaient  les  croisés  en  Terre  sainte, 
importèrent  en  Europe  les  ornements  de  chant  dont 
les  peuples  de  ces  pays  surchargeaient  leurs  mélo- 
dies; ces  nouvelles  formes  s'introduisirent  dans  les 
chants  populaires  et  pénétrèrent  insensiblement 
jusque  dans  la  musique  d'église;  le  chant  grégorien 
en  perdit  peu  à  peu  son  caractère  austère  et  sa  belle 
simplicité1.  Mais  il  est  permis  de  croire,  qu'à  ces 
reflets  orientaux,  l'horizon  de  la  musique  profane 
s'élargit  et  s'illumina. 

L'apparition  de  ces  musiciens  nomades  dans  les 
châteaux  et  les  campagnes  eut  pour  conséquence  la 


rëilcs  d'un    Essai  sur  l'histoire   dr  la  Masojue  eu 
dt-r-se/dieme  .w.'c/cj  P.-tris.  IH'.lO,  |i.  8. 

3.  Voir  Encyclopédie,  II"  partie,  pp.  lu.'iS,  1051. 


NCrCLOfÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICÏIOS'NAIIIE  DU  CONSERVATOIRE 


formation  des  cours  d'amour,  des  Jeux  floraux,  des 
académies  du  «  gai  sçavoir  »,  et  plus  tard  des  Puys, 
des  «  jeux  sous  l'Ormel  »,  et  autres  sociétés  litté- 
raires et  musicales  où  s'organisaient  des  concours. 

Jusqu'à  quel  point  peut-on  considérer  ces  aima- 
bles cénacles  comme  ayant  contribué  à  l'éducation 
musicale?  La  musique  y  avait  certainement  moins 
de  part  quu  la  poésie,  mais  il  est  bien  probable  que 
les  auteurs  trouvaient  dans  l'émulation  de  ces  dé- 
bats artistiques  un  stimulant  à  imaginer  de  nou- 
velles formes,  et  de  nombreuses  occasions  d'émettre 
et  d'enseigner  des  idées  sur  la  musique. 

Tandis  que  l'éducation  musicale  se  confirmait 
dans  les  maîtrises,  les  ménestrels,  troubadours  ou 
ion"leurs  étaient  les  éducateurs  laïques  du  peuple 
et  de  la  noblesse.  Les  princes  et  les  grands  de  tous 
les  pays  avaient  des  musiciens  à  gages.de  véritables 
corps'de  musique.  En  Espagne,  ils  apportaient  une 
ardeur  extrême  à  la  musique;  des  ménestrels  venus 
d'Allemagne,  de  Lombardie,  de  France,  et  d'Angle- 
terre, y  avaient  importé,  dès  le  xu*  siècle,  le  goût 
de  la  musique  instrumentale1. 

En  outre,  l'humeur  chorégraphique  des  Espagnols 
et  la  fantaisie  des  danseurs,  stimulaient  évidemment 
la  production  musicale. 

Ouant  à  la  musique  religieuse,  comment  n'aurail- 
elle  pas  été  en  honneur  chez  cette  nation  dévote, 
fanatique  et  éprise  de  cérémonial?  Les  seigneurs 
avaient  leur  chapelle,  tout  comme  les  rois,  et  sous 
Charles-Quint  et  Philippe  II,  ces  chapelles  et  ces 
maîtrises,  déjà  brillantes  et  savantes,  s'enrichirent 
d'une  nouvelle  science  et  d'un  nouvel  éclat,  ceux  de 
la  musique  llamande2. 

Quatorzième,  quinzième  et  dix-septième  siècles. 

La  Flandre  fut,  en  elfet,  aux  xiv",  xve  et  xvie  siècles, 
le  centre  incomparable  de  toute  production  et  de 
toute  éducation  musicales.  Les  maîtres  de  tout  ordre 
et  de  tout  genre  y  abondaient,  les  chapelles  y  attei- 
gnaient une  rare  perfection.de  grands  compositeurs 
reculèrent  les  bornes  de  l'horizon  artistique  par 
des  trouvailles  de  génie,  par  de  patients  et  métho- 
diques labeurs.  Il  n'est  guère  possible  de  citer  tous 
les  hommes  de  valeur  et  de  fonctions  diverses  qui 
apportèrent  au  progrès  musical  une  collaboration 
féconde  ou  un  noble  effort;  ils  sont  innombrables, 
mais  certains  noms,  comme  ceux  de  Guillaume  du 
Fay,  d'OcKEGHEM,  d'OtiLANDO  Lasso,  de  Jean  TlNCTO- 
ris,  sont  et  demeureront  illustres.  Les  maîtres  de 
chant,  les  organistes,  les  écrivains  didactiques  pul- 
lulent, actifs,  remuants,  nomades,  entretenant  avec 
les  pays  voisins  des  relations  artistiques  continuel- 
les, les  inÛuençant  par  leur  exemple,  ou  puisant  en 
eux  des  enseignements  qu'ils  faisaient  ensuite  habi- 
taient fructifier.  A  Anvers,  à  Liège,  à  Cambrai,  à 
Tournai,  à  Audenarde,  à  Bruxelles,  à  Ypres,  à  Har- 
lem, à  Bruges,  etc.,  les  églises  possèdent  des  maî- 
trises où  le  chant  est  savamment,  cultivé.  Les  mai- 

•es  de  chapelle  prennent  des  élèves  à  demeure. 
Certains  d'entre  eux  recevaient  des  émoluments 
destinés  à  payer  la  nourriture  et  le  logement  des 
enfants  de  chœur;  eux-mêmes  étaient  logés  gratui- 
tement. Ils  devaient  apprendre  à  ces  pensionnaires 


1.  Fcsntes,  Historia  de  la  musica  espafiola. 

'i.  Certains  Espagnols  revendiquent  pour  leur  patrie  l'honneur  d'a- 
voir inculque  au»  Flamands  l'amour  de  la  musique;  cela  ne  parait 
guère  probable.  En  tout  cas,  pendant  le  xvi"  siècle,  les  destinées  mu- 
sicales d  :  ces  dcui  pays  se  confondent  ;  d'illustres  Flamands  son!  ap- 


les  principes  du  plain-chanl,  tandis  qu'un  maître  spé- 
cial était  chargé  de  leur  enseigner  le  latin. 

Les  chapelles  royales  et  princiôres  étaient  égale- 
ment des  pépinières  musicales  :  on  y  entrait  enfant 
et  apprenti,  on  en  sortait  souvent  maître;  la  coha- 
bitation, l'émulation,  le  souci  continuel  et  en  com- 
mun des  mêmes  préoccupations  mélodieuses,  for- 
maient un  corps  remarquablement  uni  et  homogène 
d'artistes  accomplis.  Cependant,  les  primitives  com- 
pagnies de  ménestrels  se  développaient  activement 
dès  le  xive  siècle;  en  Flandre,  ces  plaisants  compa- 
gnons deviennent  de  véritables  musiciens;  non  seu- 
lement, ils  contribuaient  à  répandre  et  à  perfection- 
ner le  goût  de  la  musique  instrumentale,  mais  encore 
ils  vulgarisent  et  propagent  les  chants  patriotiques; 
ils  se  groupent  en  confréries,  se  donnent  un  roi 
chargé  de  veiller  à  leurs  bonnes  mœurs,  à  l'harmo- 
nie de  leurs  relations  et  à  les  diriger.  Il  y  eut  des 
Rois  de  Menestreulx,  comme  il  y  eut  des  Rois  d'armes, 
des  Rois  de  Ribauds,  des  Rois  de  tir;  et  plus  lard,  le 
1Î0(  des  violons,  en  France,  fut  le  dernier  rejeton  de 
cette  «  lignée  ».  Les  ménestrels,  isolés  ou  en  groupe, 
étaient  inséparables  des  réjouissances  publiques, 
des  tournois,  des  foires,  des  processions  et  même 
des  fêtes  privées,  des  fêles  de  famille. 

Ils  employaient  la  harpe,  le  luth,  la  viole,  qu'ils 
consacraient  plus  spécialement  à  la  musique  reli- 
gieuse; la  cornemuse,  le  hautbois  qu'ils  associaient 
plutôt  à  une  idée  héraldique  ou  symbolique,  la  trom- 
pette, usitée  dans  des  circonstances  solennelles,  la 
tlûte,  le  fifre  et  le  tambour  qui  servaient  plus  parti- 
culièrement aux  manifestations  de  la  gaieté  popu- 
laire (Van  der  Straeten).  Leurs  confréries  étaient 
basées  sur  la  nécessité  de  former  sans  cesse  des  re- 
présentants prêts  à  suppléer  ceux  d'enlre  eux  qui, 
pour  cause  de  maladie  ou  d'aulre  empêchement, 
délaissaient  la  corporation.  Peu  à  peu,  ces  sociétés 
prirent  plus  d'importance  et  un  caractère  plus  grave. 
Toutes  sortes  d'institutions  musicales  libres  se  for- 
maient. A  Audenarde,  dans  les  anciennes  Chambres 
de  rhétorique,  on  se  réunissait  pour  des  cours  ou 
pour  de  la  musique  d'ensemble  vocale,  soit  libre, 
soit  en  contrepoint.  A  Bruxelles,  VOrdo  nuisicorum 
réunissait  des  mélomanes  el  des  professionnels  qui 
venaient  périodiquement  parler  musique  ou  en  faire. 
Valenciennes  fondait  des  associalions  connues  sous 
le  nom  de  Palinods  et  qu'imitèrent  Amiens,  Bouen, 
Caen,  Dieppe  et  plusieurs  autres  villes  du  nord  de 
la  France.  On  y  comptait  aussi  une  institution  dite 
«  du  Salut  de  la  Musique  »  et,  plus  tard,  en  1687, 
Valenciennes  posséda  une  véritable  Académie  de 
Musique.  A  Mons,  il  y  avait  une  Association  de 
Sainte-Cécile;  à  Hasselt,  une  Confrérie  de  Sainte- 
Cécile;  h  Wasemael,  une  société  musicale  libre  éta- 
blie sous  le  patronage  de  saint  Job.  A  Bruxelles, 
à  Lille,  à  Courtrai,  à  Delft,  à  Douai,  à  Gand,  à 
Halkmaar,  à  L'trecht,  des  confréries,  des  collèges, 
des  chapelles,  des  associations  de  tout  genre  fleu- 
rissent. Ce  ne  sont  pas  des  écoles  proprement  dites, 
mais  on  y  apprend  le  métier  musical  par  appren- 
tissage, c'est-à-dire  par  le  meilleur,  peut-être,  de 
lous  les  moyens.  Quelques-unes  se  rangeaient  sous 
la  bannière  d'un  saint,  d'autres  appartenaient  à  des 
sociétés  de  rhétorique3. 


pelés  en  Espagne  pour  diriger  les  maîtrises,  de  jcuues  Espagnols 
doués  de  belles  voix  viennent  en  Flandre  pour  se  perfectionner. 

3.  On  s'attachait  extrêmement  à  la  bonne  diction  :  il  est  à  remar- 
quer (voir  les  Grecs)  qu'à  toutes  les  époques  de  grande  et  belle  florai- 
son musicale,  on  s'est  appliqué  à  unir  IVnseignemcol  de  la  musique 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3445 


Les  événements  de  la  Réforme  chassèrent  la  mu- 
sique des  Pays-Bas;  les  écoles  se  fermèrent  au  milieu 
de  guerres  et  de  révoltes.  Les  musiciens  flamands 
privés  de  ressources  émigrèrent  vers  l'Allemagne, 
qui  les  recueillit,  et  où  l'on  voit  se  former  alors  un 
grand  nombre  de  nouvelles  académies.  La  France 
avait  été,  pour  ainsi  dire,  l'amie  et  l'alliée  de  la 
Flandre  musicale;  un  échange  continuel  d'apports 
esthétiques  existait  entre  les  deux  pays.  La  musique 
avait  atteint  en  France  de  hautes  destinées,  les 
grands  compositeurs  y  étaient  nombreux,  mais  l'en- 
seignement n'y  était  pas  plus  régulièrement  orga- 
nisé que  dans  les  autres  pays;  on  y  voit  pourtant 
quelques  tentatives  de  cénacles  musicaux  à  l'imita- 
tion des  conservatoires  d'Italie.  Le  mot  Conser- 
vatoire est  traduit  de  l'Italien  «  Conservatorio  »  qui 
signifie  asile,  hospice,  orphelinat;  en  etfet,  les  pre- 
miers conservatoires  furent  des  orphelinats  dans 
lesquels  les  enfants  qui  montraient  des  dispositions 
spéciales  recevaient  une  éducation  musicale.  Tels  le 
Conservatoire  Santa-Maria  di  Loreto,  fondé  en  1S37  à 
Naples,  et  les  trois  autres  conservatoires  de  la  même 
ville  :  Délia  Pietà  di  Turchini,  Dei  poveri  di  Gesù 
Christo,  di  Sant'Onofrio,  datant  également  du  xvie  siè- 
cle. Les  anciennes  écoles  de  musique  de  Venise  ne 
portaient  même  pas  le  nom  de  conservatoire,  mais 
bien  celui  d'hùpital  :  Ospedale  délia  Pietà,  Ospedale 
dei  Mendicanti,  etc. 

A  Paris,  les  plus  marquants  parmi  ces  essais  d'en- 
seignement organisés  furent  l'Académie  qu'établit 
chez  lui,  en  1570,  le  poète  Baïf,  dans  le  but  de 
«  répandre  le  goût  de  l'art  et  de  perfectionner  le 
chant  et  l'instrumentation  »,  puis  la  Confrérie  de 
Sainte-Cécile  fondée  par  «  les  musiciens  zélateurs 
et  amateurs  de  la  capitale  »  dans  l'église  des  Grands- 
Augustins.  Des  concours  de  composition  y  avaient 
lieu  :  «  Seront  adverlis,  dit  l'article  S),  tous  bons  et 
excellents  musiciens  du  royaume  d'envoyer  pour  la 
fêle  de  sainte  Cécile  quelques  motets  nouveaux  et 
autres  cantiques  honnêtes  de  leurs  œuvres  pour 
être  chantés,  afin  de  connaître  et  remarquer  les  bons 
auteurs,  nommément  celui  qui  aura  le  mieux  fait, 
pour  être  honoré  et  qualifié  de  quelque  présent  ho- 
norable. »  —  Cette  confrérie  était  sans  doute  une 
imitation  de  celle  qui  fut  établie  sous  le  patronage 
de  la  sainte  à  Evreux.  Les  associations  musicales 
avaient  en  effet  fleuri  dans  les  provinces  françaises 
à  l'instar  de  ce  qui  se  passait  en  Flandre,  en  Fran- 
che-Comté,notamment,eten  Bourgogne,  qui  tenaient 
depuis  longtemps  la  musique  en  grand  honneur. 
Déjà  au  vmc  siècle,  à  Dijon,  l'église  de  Sainte-Bénigne 
avait  été  dotée  d'une  école  de  musique  religieuse. 
Charles  le  Téméraire  composait  et  entretenait  des 
relations  suivies  avec  l'illustre  du  Fay.  La  maîtrise 
de  l'église  métropolitaine  de  Besançon,  dirigée  par 
d'anciens  chantres  de  la  Chapelle  Sixtine,  s'attachait 
à  perpétuer  les  traditions  de  cette  grande  école.  La 
musique  y  était  pratiquée  de  manière  consciencieuse 
et  sévère.  Apprenant  que  Guillaume  du  Fay  était 
arrivé  à  la  cour  du  duc  de  Bourgogne,  les  chanoines 
de  Besançon  lui  demandèrent  de  vouloir  bien  leur 
donner  une  consultation  à  propos  d'une  antienne 
qui  soulevait  des  discussions.   Le   grand   Gouuimel, 


et  celui  des  lettres.  En  Espagne,  les  élèves  des  chapelles  musicales 
étaient  instruits  dans  les  belles-lettres,  à  Alcala.  Les  enfants  de  la 
Chapelle  de  Bruxelles  étaient,  à  l'époque  de  la  mue,  placés  dans  les 
Universités  pour  poursuivre  leurs  hautes  études;  il  est  évident  que 
ceui  dont  la  voix  était  restée  belle  reprenaient,  après  celle  période, 
1-e  service  musical,  et  que  la  double  éducation  reçue  dans  l'enfance 


qui  était  Bisontin,  ayant  accompli,  comme  tout  mu- 
sicien sérieux  de  ce  temps,  son  pèlerinage  à  Rome, 
y  fonda  une  école  musicale  dont  Palestrina  fut  plus 
tard  élève.  A  partir  du  xvie  siècle,  le  théâtre  et  le 
ballet  s'emparent  de  l'engouement  public.  L'opéra 
entre  eu  France  et  amèneaveclui,  d'Italie, des  comé- 
diens, des  mimes,  des  danseurs,  des  chanteurs;  l'é- 
ducation musicale  tend  vers  tout  ce  qui  regarde  le 
théâtre,  et  c'est  au  théâtre  qu'elle  se  fait  surtout. 

En  1669,  l'abbé  Perrin  obtient  des  lettres  patentes 
portant  permission  d'établir  dans  la  ville  de  Paris 
et  autres  du  royaume  des  académies  de  musique 
pour  chanter  en  public  des  pièces  de  théâtre,  comme 
il  se  pratique  en  Italie,  en  Allemagne  et  en  Angle- 
terre. Aidé  de  son  associé  Cambert,  il  appelle  du  Lan- 
guedoc les  plus  illustres  musiciens  des  églises  cathé- 
drales, parmi  eux  Beaumavielle  et  Clédièhe  qui, 
l'un  et  l'autre,  sont  les  soutiens  les  plus  solides  de 
son  théâtre.  Quand  Lully  prend  possession  de  l'O- 
péra, il  se  hâte  d'y  fonder  une  école  de  chant  et  de 
déclamation.  Marthe  lb  Rochois, créatrice  â'Armide, 
retirée  de'.la  scène  en  1698,  ouvre  chez,  elle  une  école 
de  chant  dans  la  rue  Saint-Honoré1. 

Temps  iiioilernes. 

Après  la  mort  de  Lui.lv,  le  niveau  musical  baissa 
sensiblement,  et  en  1713,  Louis  XIV,  alarmé,  signa  un 
règlement  ordonnant  qu'une  école  de  musique,  une 
de  danse  et  une  d'instruments  fussent  établies  où 
seraient  élevées  des  artistes  destinées  à  l'Académie 
Royale  de  Musique.  Ceux  qui  étaient  admis  dans 
ces  écoles  vêtaient  instruits  gratuitement. 

Cette  institution  fut  appelée  le  Magasin,  du  nom  de 
l'hôtel  où  logeaient,  rue  Saint-Nicaise,  le  directeur 
et  les  personnes  attachées  à  l'Académie  Royale. 

En  1781,  le  baron  de  Breleuil  obtint  de  Louis  XVI 
l'ordonnance  suivant,'  : 

,.  Le  Roi,  ayant  reconnu  que  ce  qui  pourrait  con- 
tribuer le  plus  efficacement  à  donner  à  un  spectacle 
aussi  intéressant  pour  le  public  (que  l'Opéra)  un  nou- 
veau degré  de  perfection,  ce  serait  d'établir  une  école 
où  l'on  put  former  tout  à  la  fois  des  sujets  utiles  à 
l'Académie  Royale  de  Musique  et  des  élèves  propres 
au  service  de  la  chapelle  de  Sa  Majesté,  ordonne  : 

«  Article  premier.  —  A  compter  au  1"  aoûtpro- 
chain,  il  sera  pourvu  à  l'établissement  d'une  école 
tenue  par  d'habiles  maîtres  de  musique,  de  clavecin, 
de  déclamation,  de  langue  française  et  autres,  char- 
gés d'y  enseigner  la  musique,  la  composition  et  en 
général  tout  ce  qui  peut  servir  à  perfectionner  les 
différents  talents.  » 

Gossec  fut  un  des  directeurs;  parmi  les  professeurs, 
on  comptait  Piccini  qui  enseignait  le  chant2,  Bodol- 
phb  qui  enseignait  le  solfège,  Molle,  puis  Dugazon 
et  Fleury,  qui  enseignaient  la  diction.  Les  chaires 
d'instruments  étaient  également  bien  tenues;  on  y 
enseignait  aussi  la  langue  française,  l'histoire,  les 
armes,  et  la  danse.  Cette  école  ouvrit  ses  portes,  en 
1784,  en  l'hôtel  des  Menus  Plaisir*.  11  y  avaitclasse 
tous  les  jours,  sauf  le  dimanche;  les  élèves  étaient 
admis  après  avoir  passé  un  examen  devant  tous  les 
professeurs  de  musique  et  de  chant. 


>s  complets,  à  l'âge  de  raiso 
iècles,  l'enseignement  du  chant  allait  i 
de  la  philosophie. 

riNur,  Histoire  anceelotique  du  Co)isc 
onipositeur  enseignant  le  chant,  voilà 


.  En  llali: 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  CONSERVATOIRE 


On  \  donna  en  1783  une  représentation  de  Roland, 
par  1rs  seuls  élèves  de  l'école  premier  exemple  de 
nos  ,.  exercices  publics  •■■  Cette  école  connut  bien  des 
vicissitudes,  essuya  toutes  sortes  de  critiques,  fut 
prônée  el  blâmée  avec  une  égale  violence;  elle  produi- 
sit de  hous  élèves  et  dura  jusqu'en  I7SS.  Kn  1792,  un 
projet  colossal  s'ébauche  :  celui  d'un  grand  théâtre 
où  tous  les  genres  seraient  représentés  et  auquel 
serait  attachée  une  école  de  musique;  mais  L'argent 
n'abonde  point  el  le  projet  est  abandonné. 

Bernard  Sarrette,  capitaine  d'état-major,  avait,  en 
1789,  pour  constituer  la  musique  de  la  garde  natio- 
nale, réuni  quarante-cinq  hommes  et  les  avait  l'ait 
instruire.  En  1792,  la  Commune  institue  l'Ecole  gra- 
tuite de  musique  de  la  garde  nationale  parisienne.  Les 
élèves  ont  de  dix  à  vingt  ans,  doivent  se  pourvoir  d'un 
uniforme,  se  fournir  d'instruments,  de  papier  à  musi- 
que sur  lequel  ils  transcriront  durant  une  heure  tous 
les  jours  les  ouvrages  nécessaires  à  leurs  études;  ils 
recevaient  par  semaine  deux  Leçons  de  solfège,  trois 
d'instruments.  I.e  30  brumaire,  l'école  de  la  garde 
nationale  donne  son  premier  exercice  public  sur  le 
théâtre  de  la  rue  Feydeau.  Le  10  nivôse,  on  célèbre 
la  prise  de  Toulon  :  la  musique  militaire  parisienne 
figure  encore  brillamment. 

On  le  voit,  ici,  comme  dans  toute  la  Révolution 
française,  l'esprit  néo-antique  apparaît. 

C'est  pour  ressembler  aux  Grecs  et  aux  Romains 
qu'on  mêle  la  musique  à  toutes  les  manifestations 
populaires;  c'est  pourse  conformer  aux  préceptes  de 
la  République  de  Platon  qu'on  tend  à  faire  dépendre 
du  gouvernement  l'enseignement  musical.  Gossec, 
Catel,  Méhul,  Cherubini,  Lesueur,  écrivaient  des 
hymnes,  des  cantates  de  toutes  sortes  pour  accom- 
pagner les  innombrables  cérémonies,  commémora- 
tives  ou  inauguratives,  et  la  production  musicale 
amena  peu  à  peu  la  transformation  de  l'Ecole  de 
la  Garde  en  Institut  national  de  musique.  Son  rôle 
est  intimement  lié  à  la  politique:  il  est  sorti  de  la 
grande  effusion  lyrique  de  la  Révolution  et  du  besoin 
de  s'unir  en  chantant  pour  tlétrir  ce  qu'on  déteste,  ou 
pour  exalter  ce  qu'on  adore.  Le  18  brumaire,  l'Ins- 
titut national  donne  un  exercice  public;  il  prend  part 
aux  obsèques  de  Féraud,  il  prête  son  concours  à  la 
plupart  des  solennités. 


Le  Conservatoire. 


Ses  vicissitudes. 


Enfin  le  16  thermidor,  Marie-Joseph  Chénier,  au  nom 
de  Comité  d'Instruction,  fait  adopter  un  décret  orga- 
nisant le  Conservatoire  national  de  musique. 

En  voici  les  deux  premiers  articles  : 
,  I.  «  Le  Conservatoire  de  musique,  créé  sous  le 
nom  d'Institut  national  parle  décret  du  18  brumaire 
an  deuxième  de  la  République,  est  établi  dans  la 
commune  de  Paris  pour  exécuter  et  enseigner  la  mu- 
sique. Il  est  composé  de  115  artistes.  » 

II.  «  Sous  le  rapport  d'exécution,  il  est  employé  à 
célébrer  les  fêtes  nationales;  sous  le  rapport  d'en- 
seignement, il  est  chargé  de  former  les  élèves  dans 
toutes  les  parties  de  l'art  musical.  » 

Les  matières  enseignées  étaient  Les  suivantes  : 
solfège,  clarinette,  flûte,  hautbois,  basson,  cor, 
trompette,  trombone,  serpent,  buccini,  tuba?  corvaî, 
timbales,  violon,  basse,  contrebasse,  clavecin,  or- 
gue, vocalisation,  chant  simple,  chant  déclamé, 
accompagnement,  composition. 

Sarrette  est  nommé  commissaire  à  l'effet  d'orga- 
niser définitivement   le  Conservatoire.  Cinq  inspec- 


teurs de  l'enseignement  sont  aussi  nommés  :  ce  sont 
les  citoyen  Méhul,  Gréthy,  Gossec',  Lesueur  et  Cheru- 
bini. 

Il  y  avait  environ  huit  cents  élèves;  le  premier 
concours  eut  lieu  en  l'an  six  et  donna  trente  lauréats. 
La  première  distribution  des  prix  eut  lieu  le  3  bru- 
maire de  la  même  année  (23  octobre  1797). 

Voici  la  relation  qu'en  donne  le  .tournai  de  Paris 
du  I01'  novembre  : 

«  Le  3  brumaire,  le  Directoire  exécutif,  les  Minis- 
tres, le  Corps  diplomatique,  l'Institut  national  et  les 
autorités  constituées  ont  assisté  à  la  distribution  des 
prix  du  Conservatoire  de  musique,  qui  s'est  faite 
dans  la  salle  de  i'Odéon. 

«  Il  était  difficile  de  choisir  un  lieu  plus  propre  à 
cette  solennité.  Le  Conservatoire,  composé  des  pro- 
fesseurs et  des  élèves  en  état  d'exécuter,  formait  un 
orchestre  de  l.'iO  musiciens  qui  remplissaient  le  théâ- 
tre, décoré  de  colonnes  et  de  guirlandes  de  fleurs.  Le 
gouvernement  et  le  Corps  diplomatique  occupaient 
une  vaste  tribune  qui  avait  été  préparée  à  cet  effet  et 
qu'on  avait  magnifiquement  ornée;  aux  deux  côtés 
du  gouvernement,  dans  la  galerie,  se  trouvait  celte 
réunion  d'hommes  célèbres  que  l'Europe  admire  : 
l'Institut,  et  après  lui,  les  autorités  constituées. 

«  Le  reste  de  la  salle  était  rempli  par  une  grande 
quantité  de  femmes  dont  la  beauté,  la  parure  ajou- 
taient au  spectacle,  et  par  une  afiluence  considérable 
de  citoyens.  Lorsque  le  Directoire,  précédé  de  son 
cortège,  est  entré  dans  la  salle,  les  applaudissements 
se  sont  fait  entendre  de  toutes  les  parties;  chaque 
citoyen  semblait  témoigner  sa  satisfaction  de  voirie 
Gouvernement  de  la  grande  nation,  après  avoir  assuré 
le  triomphe  de  la  République  française,  venir  encou- 
rager les  arts  qui  doivent  l'embellir;  on  se  rappelait 
surtout  les  services  rendus  à  la  Révolution  par  le 
Conservatoire  de  musique  et  on  était  touché  de  la 
reconnaissance  du  Gouvernement. 

«  L'ouverture  du  Jeune  Henry,  morceau  savant  et 
dramatique  de  Méhul,  a  ouvert  l'exercice  musical; 
cette  ouverture,  exécutée  par  les  nombreux  et  rares 
talents  qui  composaient  ce  brillant  orchestre,  apro- 
duit  un  enthousiasme  général... 

«  Cette  séance,  qui  a  duré  quatre  heures  et  demies 
a  indiqué  aux  spectateurs  ce  que  peuvent  devenir 
les  arts  dans  une  république,  lorsqu'ils  sont  honorés 
par  le  gouvernement.  » 

Le  crédit  de  l'école  était  alors  de  275.200  fr.,  mais 
la  situation  budgétaire  ne  permit  pas  de  le  mainte- 
nir sur  ce  pied.  Une  première  réduction,  en  1800. 
ramène  le  nombre  des  professeurs  à  82,  celui  des 
classes  à  79  et  celui  des  élèves  à  400.  En  1802.  on 
effectue  une  nouvelle  et  sensible  réduction,  le  total 
des  professeurs  ne  s'élevant  plus  qu'à  38. 

Le  titre  de  directeur  fut  donné  à  Sarrette  à  partir 
de  1800. 

Les  attaques  contre  le  Conservatoire  sont  aussi 
anciennes  que  l'établissement  lui-même;  déjààcette 
époque,  il  en  fut  lancé  de  très  malveillantes,  auxquel- 
les le  Directeur  non  plus  n'échappa  pas. 

Lesueur  fut  un  de  ses  plus  archanés  détracteurs. 
Sarrette  voulut  alors  lui  donner  sa  démission.  Il 
resta  cependant  directeur  jusqu'en  1815.  De  1802 
à  1815,  les  inspecteurs,  qui  étaient  en  même  temps 
professeurs  de  composition,  fuient  réduits  à  trois, 
IiRétry  s'élant  retiré  pour  raison  de  santé,  et  Lesueur 
ayant  été  invité  à  suspendre  ses  fonctions  en  raison 
de  ses  violentes  et  injustes  attaques  contre  le  Con- 
servatoire. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3447 


En  1806,  un  décret  impérial  créa  un  pensionnat 
pour  les  élèves  chanteurs;  douze  élèves  hommes 
logèrent  dans  le  Conservatoire,  et  six  élèves  femmes 
furent  pensionnées  chez  leurs  parents  ou  dans  une 
pension  particulière.  Ce  pensionnat  subsista  jusqu'en 
1870  avec  de  légères  modifications  de  détail.  Des 
classes  de  déclamation  furent  également  créées  à 
celte  époque. 

Dès  1808,  des  exercices  publics  furent  organisés, 
donnèrent  des  résultats  excellents  et  excitèrent  une 
émulation  très  profitable  au  développement  des 
études1. 

Un  événement  important  fut  la  construction  d'une 
salle  de  spectacle  et  d'une  bibliothèque.  L'inaugu- 
ration de  cette  nouvelle  salle  se  fit  le  7  juillet  181 1 . 
Jusqu'à  la  chute  de  l'Empereur  Napoléon,  celte  pé- 
riode fut  féconde  pour  le  Conservatoire,  qui  pour- 
suivait ses  travaux  avec  une  infatigable  activité,  en 
y  mettant  l'esprit  de  méthode,  la  rectitude  de  prin- 
cipes indispensables  aux  progrès  des  grands  établis- 
sements d'instruction. 

La  chute  de  l'Empereur  suspendit  le  développe- 
ment de  l'Ecole.  Saruette  fut  révoqué  le  17  no- 
vembre 1814,  mais  au  retour  de  Napoléon,  il  reprend 
ses  fonctions  (23  mars  1815).  Le  décret  suivant  fut 
promulgué  : 

n  Article  premier. —  Les  dispositions  de  l'ordon- 
nance du  28  mai  dernier,  touchant  nos  théâtres 
impériaux,  et  les  ordres  donnés  le  28  décembre  der- 
nier pour  la  suppression  du  Conservatoire  et  la  dis- 
position des  édifices  qui  y  étaient  affectés  sont  re- 
gardés comme  non  avenus... 

«  Article  3.  —  Le  directeur,  les  inspecteurs  et  pro- 
fesseurs du  Conservatoire  de  musique  rentreront 
également  dans  leurs  fonctions...  » 

A  la  rentrée  des  Bourbons,  Sarrette  est  destitué 
(28  déc.  181b).  En  1816,  le  gouvernement  supprime 
l'organisation  du  Conservatoire  et  rétablit  celle, beau- 
coup plus  restreinte,  de  l'ancienne  Ecole  Koyale.  Le 
nombre  des  professeurs  descendit  à  trente-six,  celui 
des  élèves  à  cent  quarante,  et  le  crédit  à  80000  fr. 
Il  n'y  eut  plus  de  directeur.  Per.nk  fut  nommé 
Inspecteur  général.  Les  anciennes  fonctions  d'ins- 
pecteur furent  supprimées.  Cherubini  et  Mèhi-l  res- 
tèrent simplement  professeurs  de  composition.  En 
f818,  Lesueur  reprit  ses  fonctions  de  professeur.  L'en- 
seignement supérieur  était  donc  ainsi  représenté  : 
Cherubini,  Berton,  Lesueur,  Eler,  Heicha. 

Mais  l'école  ne  donna  en  cette  période  que  de  très 
faibles  résultats.  On  appela  alors  à  sa  tête  (en  1822) 
Cherubini,  qui  avait  fait  partie  de  l'ancien  Conser- 
vatoire, et  qui  s'attacha  à  faire  renaître  sa  tradition 
florissante.  Dès  cette  époque,  le  nombre  des  pro- 
fesseurs s'éleva  à  cinquante-huit,  celui  des  élèves  à 
trois  cent  dix-sept,  et  le  crédit,  qui  était  de  141.350  fr. 
s'éleva  progressivement  jusqu'à  1 .18.000, chiffre  atteint 
en  1842,  époque  de  sa  mort. 

La  direction  de  Cherubini  donna  une  grande  et 
bienfaisante  impulsion  à  tous  les  services  de  l'école. 
Son  grand  talent,  son  caractère  ferme  et  quelque 
peu  autoritaire  inspirèrent  le  respect  et  servirent  à 
établir  une  discipline  utile  et  solide. 

Auber  lui  succède  de  1842  à  1871.  Sa  direction  fut 
paternelle,  presque  impersonnelle,  mais  l'impulsion 
de  la  régularité,  de  l'ordre,  du  devoir,  étaient  telle- 


l'organisation  du  Conservatoire,  s*s 


i.   Pour  tout  ce  qui 
programmes  d'études,  ses  règlements,  les  arrêtés  speck  __ 
cernant,  les  projets  de  réorganisation,  les  décrets  qui  le  régi 
qu'il  est  impossible  d'cnumêrer  et  de  détailler  ici,  tellement 


ment  dans  les  habitudes  de  tous,  que  ce  fut  une 
époque  de  tranquille  prospérité  pour  le  Conserva- 
toire. 

Les  matières  enseignées  étaient  :  solfèee,  harmo- 
nie orale,  étude  du  clavier,  étude  des  rôles,  chant, 
déclamation  lyrique,  piano  et  harpe,  instruments  à 
archet,  instruments  à  vent,  ensemble  instrumental, 
harmonie,  orgue,  composition,  déclamation  drama- 
tique. 

Le  règlement  de  1850  édicté  :  «  Il  y  a  un  pen- 
sionnat de  dix  élèves  hommes  spécialement  destinés 
aux  études  lyriques. 

«  Un  nombre  égal  de  pensions,  de  800  fr.  chacune, 
est  attribué  aux  élèves  femmes. 

«  Huit  pensions,  de  800  fr.  chacune,  sont  attribuées 
aux  élèves  des  deux  sexes  qui  suivent  les  classes  de 
déclamation  spéciale.  » 

Des  examens  semestriels,  des  concours,  des  exer- 
cices, étaient,  comme  aujourd'hui,  la  sanction  des 
études.  Bien  qu'un  décret  de  Napoléon,  du  15  oc- 
tobre 1812,  décidât  qu'il  y  aurait  au  Conservatoire 
un  professeur  de  grammaire,  d'histoire  etde  mytho- 
logie, et  que  la  même  idée  eût  élé  reprise  en  1817  et 
en  1824,  il  n'y  avait  jamais  eu  jusque-là  de  cours 
véritable  d'histoire  de  la  littérature  théâtrale  ni  de 
la  musique.  Cette  lacune  fut  comblée  en  partie  par 
l'arrêté  du  22  décembre  1854,  signé  Achille  Fould, 
qui  créa  «  une  classe  d'histoire  et  de  littérature  au 
point  de  vue  de  l'art  et  du  théâtre  »,  dont  le  premier 
titulaire  fut  le  célèbre  Samson.  Pour  la  musique,  ce 
ne  fut  qu'en  1871  qu'Ambroise  Thomas,  à  son  avène- 
ment comme  directeur,  parvint  à  faire  créer  un 
«cours  d'esthétique  et  d'histoire  de  la  musique  ». 

Auber  mourut  pendant  la  guerre  de  1870-1871. 
A.  Thomas  lui  succéda,  et  fut  un  directeur  très  assidu 
et  très  dévoué.  Il  n'eut  qu'à  continuer  les  traditions 
fortement  établies  par  ses  prédécesseurs,  en  y  ap- 
portant les  améliorations  imposées  par  les  circons- 
tances et  par  l'expérience.  Il  fut  secondé  par  un 
homme  de  haute  valeur,  M.  E.  Rety,  dont  le  juge- 
ment, le  tact,  la  perspicacité,  la  droiture  ont  été  au- 
dessus  de  tout  éloge. 

De  nouveaux  règlements  furent  élaborés  en  1878, 
en  1894  et  en  1896,  qui  modifiaient,  non  l'organisa- 
tion générale  du  Conservatoire,  mais  seulement  cer- 
tains détails.  C'est  ainsi  qu'on  créa,  par  exemple, 
en  1804,  une  seconde  classe  d'opéra,  une  classe 
d'alto,  etc. 

C'est  ainsi  encore  que  les  deux  classes  préparatoires 
de  déclamation  dramatique  qui  existaient  furent  sup- 
primées, et  que  le  nombre  des  classes  de  déclama- 
tion dramatique  fut  porté  à  six. 

Le  nombre  maximum  des  élèves  dans  chaque 
classe  fut  aussi  modifié,  ainsi  que  le  maximum  de 
durée  des  études. 

Beaucoup  d'autres  modifications  jugées  nécessaires 
intervinrent  par  ces  décrets;  on  ne  peut  toutes  les 
mentionner2. 

A.  Thomas  adopta  avec  un  grand  empressement 
provoqua  même  celles  de  ces  mesures  qui  furent 
promulguées  de  son  vivant. 

A  sa  mort,  en  1896,  l'auteur  de  cet  article  fut 
nommé  directeur  du  Conservatoire;  il  fit  tous  ses 
efforts,  non  seulement  pour  maintenir,  mais  encore 
pour  élever  le  niveau  des  études,  et  pour  améliorer 


S'. '.S 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


le  fonctionnement  de  tous  les  services.  A-t-il  réussi 
dans  la  lâche  qu'il  s'était  imposée'.'  Ce  n'est  pas  à 
lui  qu'il  appartient  de  se  prononcer  sur  ce  point. 
S'étant  retiré  volontairement  en  1903,  on  nomma 
pour  lui  succéder  Gabriel  Fauré,  auquel  succéda 
M.  IUbaud. 

Les  plus  grands  parmi  les  musiciens  et  les  comé- 
diens en  tout  genre  ont  toujours  lenu  à  honneur 
de  professer  au  Conservatoire  de  Paris.  Pour  donner 
une  idée  de  la  valeur  de  l'enseignement,  il  convient 
de  citer,  —  depuis  la  fondation  jusqu'à  nos  jours,  — 
parmi  les  professeurs  morts  ou  qui  ont  abandonné 
l'enseignement  du  Conservatoire1,  les  noms  suivants-  : 
Gossec,  Grétry,  Mébul,  Lesueur,  Cherubihi,  Berton, 
Catel,  Kreutzer,  Rode,  Tolou,  Martini,  Baillot,  L. 
Adam,  Boïbldieu,  Piccinm,  Garât,  Monsigny,  Talma, 
Haléw,  Zimuermann,  Habeneck,  Reiciia,  Ponchard, 
Provost,  Bordogni,  Fétis,  Lecouppby,  Nourrit,  Sain- 
ton,  Mmo  Damoheau,  Panseron,  Mahmontel  père,  A. 
Savard,  Batiste,  11.  Duvernoy,  Bazin,  Levasseur,  Gar- 
cia, Duprez,  Pasdeloup,  Alard,  Massart,  M"'  Mars, 
H.  Herz,  Mme  Farenc,  Moreau-Sainti,  A.  Adam,  Fran- 
ghomme,  V.  Massé,  11.  Ueber,  Régnier,  A.  Thomas, 
Battaille,  Faure,  Chevillard,  Dorus,  Verroust,  AfUo 
A.  Brohan,  G.  Mathias,  Sauzay,  Larro,  Delle  Sedie, 
Bax,  Roger,  Obin,  Couderc,  Dancla,  Mohr,  Bressant, 
Mad.  Viardot,  Th.  Dubois,  Mme  Massart,  E.  Boulan- 
ger, Massenet,  Guiraud,  Deldevez,  C.  Franck,  Mau- 
rin,  Ismaél,  Crosti,  Jacquard,  Rose,  Got,  Delaunay , 
Délires,  Delsart,  Worms,  Maubant,  B.  Godard,  Warot, 
de  Bériot,  Fissot,  Rabaud,  Marsick,  Pugno,  Samuel 
Rousseau,  Taskin,  Turban,  Taffanel,  pour  ne  nom- 
mer que  les  plus  célèbres. 

Les  exercices  publics. 

Le  principe  des  exercices  publics  d'élèves  remonte 
très  loin.  Déjà,  il  en  fut  question  dans  un  Mémoire 
en  1766,  mais  ce  n'est  que  vingt  ans  plus  tard,  le 
18  avril  1786,  que  le  premier  exercice  fut  donné  à 
l'Ecole  royale  de  chant  et  de  déclamation.  On  y  fit 
entendre  l'opéra  Roland,  de  Piccinni. 

Le  règlement  de  l'Ecole  de  musique  de  la  garde 
nationale,  fondée  en  juin  1792,  prévoyait  un  exer- 
cice public  annuel,  et  le  règlement  portant  organi- 
sation du  Conservatoire  de  musique  (3  juillet  1706) 
instituait  6  exercices  par  an,  lesquels  devaient  avoir 
lieu  dans  la  grande  salle  du  Conservatoire,  en  pré- 
sence du  Directoire,  des  Ministres  et  de  l'Institut. 

Des  difficultés  d'ordre  différent  mirent  obstacle  à 
la  réalisation  des  prescriptions  édictées,  mais  on 
entendit  annuellement  les  élèves  lauréats  à  la  séance 
de  distribution  des  prix,  dont  la  première  eut  lieu 
avec  un  grand  succès  dans  la  salle  de  l'Odéon,  le 
24  octobre  1797. 

Ce  n'est  qu'en  1800  (6  novembre)  et  en  1801  (13  jan- 
vier) que  deux  véritables  exercices  d'élèves  purent 
avoir  lieu.  La  Décade  philosophique  en  rend  compte 
en  ces  termes  :  «  Un  orchestre  nombreux,  composé 
tout  entier  déjeunes  gens  qui  ont  l'air  de  former  une 
pension,  exécute  avec  ensemble,  précision  et  fermeté 
et  met,  ce  qui  est  plus  difficile,  dans  l'accompagne- 
ment, l'intelligence  et  les  ménagements  que  ce  genre 
exige...  Ces  exercices  sont  d'une  grande  utilité  pour 
l'émulation  et  les  progrès  des  élèves...  » 


1.  On  conçoit  facilement  qu'il 
fesseurs  en 


Les  noms  en  italiques  appartiennent  à  la  dcclamali™  dramali- 


Le  budget  du  Conservatoire,  qui  supportait  les 
dépenses  occasionnées  par  ces  exercices,  ne  put  pas 
continuera  les  imputer  sur  son  crédit,  après  que  sa 
dotation  l'ut  réduite,  en  l'an  X,  de  230.000  fr.  à  100.000. 

Ces  concerts  allaient  forcément  disparaître,  lors- 
que les  élèves,  reconnaissant  combien  ils  étaient 
utiles  à  leurs  études,  et  soucieux  d'en  continuer 
l'exécution,  se  réunirent,  fondèrent  la  société  des 
Concerts  français,  qui  donna  desconcerts  par  abon- 
nement, rue  de  la  Victoire,  dans  le  foyer  de  la  salle 
du  Théâtre  Olympique. 

La  première  séance  eut  lieu  le  30  brumaire  an  X 
(21  novembre  1801).  Mme  Bonaparte  et  Mllc  Beau- 
harnais  soutinrent  celte  tentative  par  leur  souscrip- 
tion personnelle.  Mais  si  le  succès  artistique  fut  vif, 
il  n'en  fut  pas  de  même  au  point  de  vue  financier. 
Les  frais  étaient  à  peine  couverts.  Les  élèves  obtin- 
rent alors  la  jouissance  de  la  salle  du  Conservatoire, 
avec  l'autorisation  de  percevoir  une  rétribution  pour 
subvenir  aux  frais. 

Ce  fut  là,  en  quelque  sorte,  l'embryon  de  l'organi- 
sation de  la  Société  des  Concerts  actuelle. 

Douze  concerts  furent  ainsi  donnés  du  21  novem- 
bre 1802  au  1er  mai  1803.  Les  programmes  se  com- 
posaient presque  toujours  d'une  symphonie  de 
Haydn,  d'une  ouverture,  d'airs  de  chant  et  souvent 
d'un  chœur.  On  y  exécuta  même  des  productions  d'é- 
lèves de  composition  du  Conservatoire. 

Des  instrumentisles  se  faisaient  entendre  aussi 
dans  ces  concerts.  Parmi  eux,  brillaient  au  premier 
rang  Habeneck  et  Tolou.  Le  premier  s'exerçait  déjà 
dans  la  direction  de  l'orchestre,  et  préludait  ainsi  au 
rôle  si  important  qu'il  remplit  plus  lard  comme  fon- 
dateur et  chef  d'orchestre  de  la  célèbre  Société  des 
Concerls. 

Malgré  que  le  résultat  financier  fût  médiocre,  ces 
concerts  se  poursuivirent  plus  ou  moins  régulière- 
ment jusqu'à  la  chute  de  l'Empire,  qui  entraîna  la 
suppression  momenlanée  du  Conservatoire,  et  en 
même  temps  la  ruine  des  concerts. 

«  Ramenant  systématiquement  le  Conservatoire 
aux  proportions  de  l'école  fondée  sous  Louis  XVI,  le 
gouvernement  royal,  parla  dispersion  de  la  majeure 
partie  des  élèves  et  des  professeurs,  empêcha,  de 
fait,  la  continuation  des  exercices.  Ce  fut  la  fin  d'une 
période  unique,  singulièrement  active,  prospère  et 
particulièrement  brillante3.  » 

Cet  orchestre  d'élèves  fit  entendre  pour  la  première 
fois  trois  des  symphonies  de  Beethoven,  dont  celle  en 
ut  mineur,  ce  qui  provoqua  l'appréciation  suivante 
d'un  critique  du  temps1  :  «  Cet  auteur  souvent  bizarre 
et  baroque,  étincelle  quelquefois  de  beautés  extra- 
ordinaires. Tantôt,  il  prend  le  vol  majestueux  de  l'ai- 
gle, tantôt,  il  rampe  dans  des  sentiers  rocailleux. 
Après  avoir  pénétré  l'àme  d'une  douce  mélancolie, 
il  la  déchire  aussitôt  par  un  amas  d'accords  barba- 
res. Il  me  semble  voir  renfermer  ensemble  des 
colombes  et  des  crocodiles.  » 

La  critique  a  fait  bien  du  chemin  depuis!  Mais  on 
sent  pourtant  que  ces  œuvres  ne]  peuvent  laisser  les 
auditeurs  indiTérents. 

Sous  la  Restauration,  les  exercices  furent  peu 
nombreux,  très  espacés  et  peu  brillants. 

Après  la  nomination  de  Cherubini,  le  gouverne- 
ment voulut  «  restituer  à  l'Ecole  royale  de  musique 


que.  Ces  noms  sont  mis  dans  l'ordre  - 

de  leur  entrée  en  fonctions. 
3.  C.  Pierbe,  Le  Conservatoire  I\'a, 
i.  Les  Tablettes  de  Polymnie. 


<  peu  de  chose  près  - 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    34 


la  réputation  que  cette  même  Ecole  avait  acquise 
sous  la  dénomination  de  Conservatoire,  par  les  exer- 
cices publics  où  les  symphonies  des  Haydn  et  des 
Mozart  étaient  exécutées  d'une  manière  distinguée, 
où  le  chant,  les  solos  d'instruments  et  la  déclama- 
tion spéciale  avaient  participé  à  la  perfection  desdits 
exercices  ».  Il  porta  donc  de  six  à  douze  le  nombre 
des  séances  annuelles.  Les  places  étaient  payantes, 
et  chaque  exécutant  recevait  un  jeton  de  présence. 
Six  exercices  furent  donnés  sous  ce  régime  en 
1823  et  trois  en  182t.  Les  recettes  se  montrèrent 
insuffisantes  à  couvrir  les  frais,  et  à  partir  d'un 
dernier  concert  qui  eut  lieu  en  1825,  il  ne  fut  plus 
question  d'exercices  d'élèves. 

Quelques  essais  furent  pourtant  tentés  de  1828  à 
1834,  époque  à  laquelle  Cherlt.ini,  très  désireux  de 
rétablir  les  exercices  dans  des  conditions  artistiques 
favorables  au  développement  du  talent  des  élèves, 
sollicita  du  gouvernement  l'autorisation  de  faire  un 
essai  le  27  mai,  avec  la  Fêle  du  village  voisin  et  un 
fragment  de  grand  opéra.  Cet  essai  ne  se  renouvela 
que  cinq  ans  après,  en  1839  et  en  1840,  encore  fut-ce 
à  huis-clos. 

Ce  n'est  qu'en  1841  qu'on  rétabli t  déOnitivement 
les  exercices  d'élèves.  Il  devait  y  avoir  tous  les  mois, 
à  huis-clos,  des  exercices  lyriques  et  dramatiques 
dans  la  salle  du  Conservatoire,  exercices  considérés 
comme  travail  d'école.  En  outre,  de  grands  concerts 
publics  devaient  avoir  lieu  de  janvier  à  avril.  Tout 
se  passa  comme  le  prescrivait  le  règlement;  le  public 
vint  aux  grands  concerts  par  invitations;  il  n'y  avait 
plus  rien  d'une  spéculation;  le  seul  et  unique  but 
était  d'intéresser,  d'instruire  les  élèves,  d'exciter  en 
eux  une  noble  et  salutaire  émulation,  de  montrer  et 
de  donner  des  exemples  des  résultats  de  leurs  etïorts 
et  de  leurs  travaux. 

De  1841  à  1862,  les  exercices  conservèrent  ce 
caractère  el  se  succédèrent  régulièrement.  Les  pro- 
grammes se  composaient  presque  exclusivement 
d'ouvrages  lyriques  ou  dramatiques,  donnés  en 
entier  ou  par  fragments.  Parmi  les  ouvrages  lyri- 
ques on  relève  :  le  Comte  Or;/;  la  Pie  voleuse;  Orphée; 
les  Noces  de  Figaro;  le  Maître  de  chapelle  ;  le  Barbier  ; 
Moïse;  l'Irato;  Marie;  Don  Juan;  Armide;  Œdipe  à 
Colone;  le  Petit  Chaperon  rouge;  le  Calife  de  Bag- 
dad; Jean  de  Paris;  les  Voitures  versées;  Fidelio; 
Zémire  et  Azor;  le  Tableau  parlant  ;  Joconde;  Joseph  ; 
VEclair;  les  Noces  de  Jeannette,  etc. 

Parmi  les  ouvrages  dramatiques  :  l'Epreuve;  le  Jeu 
de  l'amour  et  du  hasard;  le  Distrait;  le  Légataire 
universel;  les  Folies  Amoureuses  ;  le  Barbier  de  Sé- 
rille;  le  Mariage  de  Figaro;  le  Dépit  amoureux;  les 
Précieuses  ridicules;  Don  Juan;  Tartuffe;  Iphigénie 
en  Aulide ;  Andromaque ;  Mahomet:  les  Enfants  d'E- 
douard ;  les  Horaces :  Britannicus,  etc.'. 

«  Ces  représentations  -  cessèrent  en  1863.  Elles 
occasionnaient  des  dépenses  pour  location  de  cos- 
tumes, de  perruques,  d'accessoires,  indemnité  aux 
machinistes,  gardes,  artistes  adjoints  et  frais  de  co- 
pie de  musique,  achat  de  partitions,  éclairage,  etc. 
Les  répétitions,  assez  nombreuses,  n'étaient  pas 
sans  apporter  quelque  dérangement  dans  les  études 
fondamentales;  des  questions  d'amour-propre,  des 
rivalités  s'élevaient  entre  les  élèves  chargés  des  pre- 


1.  Pour  plu1;  de  détails  voir  l'article  d'A.  Y 
des  Concerts  du  Conservatoire  et  les  grandes 

1.  Les  deui  paragraphes  suivants  sont 
volume  de  Constant  Pierre. 


miers  rôles  et  ceux  auxquels  on  confiait  les  emplois 
secondaires  ou  qui  étaient  réduits  au  rôle  obscur  de 
choristes.  Ces  divers  inconvénients  contribuèrent, 
autant  que  leur  peu  d'utilité  en  général",  à  la  sup- 
pression des  exercices. 

«  Ils  ne  furent  rétablis  que  dix  ans  plus  lard,  en 
1874,  après  la  création  de  la  classe  d'orchestre.  Les 
exercices  devinrent  annuels  et  on  leur  restitua  leur 
caractère  primitif.  Ce  sont  maintenant  des  concerts 
comportant  des  œuvres  d'ensemble  pour  orchestre 
et  chœurs,  seuls  ou  associés,  des  solos  de  piano  ou 
de  violon,  des  morceaux  de  musique  de  chambre, 
des  airs  et  scènes  d'opéras  ou  des  fragments  d'ora- 
torios, d'œuvres  sacrées,  etc.  De  grands  oratorios. 
tels  que  le  Messie,  Elle  et  la  Création,  lurent  intégra- 
lement exécutés.  Par  suite  de  circonstances  diverses, 
les  exercices  de  1882  et  de  1886  n'eurent  pas  lieu, 
puis  la  série  en  fut  interrompue  de  1889  à  1896,  le 
professeur  de  la  classe  d'orchestre  ayant  du  résigner 
ses  fonctions  pour  raison  île  maladie.  On  les  reprit 
en  1897,  sous  la  direction  de  M.  Théodore  Dubois, 
et  depuis,  ils  ont  été  régulièrement  donnés,  non  sans 
un  très  réel  succès.  » 

Pour  avoir  une  idée  de  l'esprit  qui  présida  à  la 
confection  des  programmes  de  ces  exercices  aux 
diverses  époques  auxquelles  ils  eurent  lieu,  il  con- 
vient d'en  mettre  quelques-uns  sous  les  yeux  du 
lecteur  : 
Au  IX,  23  nivôse  (13  janvier  1801).  2e  exercice. 
1.  Concerto  pour  le  piano-forte,  Stbibklt  :  Kaklbren- 
ner.  —  2.  Concerto  pour  le  cor.  Punto  :  Dauphat.  — 
3.  Trio,  Mengozzi  :  Mlle  Uibon,  MM.  Monti.ai  a,  Ro- 
land. —  4.  Litanies,  Durante  (soli  et  chœurs). 

{Décade philosophique,  t.  XXVIII.) 
An  X,  20  pluviôse  (9  février  1802).  5«  concert. 

1.  Symphonie  dite  de  la  Reine,  Haydn.  —  2.  Air  de 
Montano  et   Stéphanie,  Berton  :  Mlle  Pelet.  —  3. 
Concerto  pour  la  clarinette,  Dacosta  :  l'auteur.  —  4. 
Ouverture  d'Elisa  ou  le  voyage  au  Mont  Saint-Bernard. 
Cherubini.  —  o.  Air  :  M"e  Péreaut.  —  6.  Symphonie 
concertante  pour  violon  et  basse  :  Habeneck  et  Giérin. 
(Journal  des  Arts,  Sciences,  etc.;  n°  18b 
du  25  pluviôse  an  X,  p.  236.) 
An  XI,  1"  ventôse  (5  mars  1803).  7'  exercice. 

1.  Symphonie,  Haydn.  —  2.  Sonate  pour  la  harpe, 
Naderman  :  Foir.NET.  —  3.  Alceste ,  Gluck  (Air)  : 
Mlle  Lechesne.  —  4.  Nozze  di  Figaro,  Mozart  (duo)  : 
M"c  Renaud,  M.  Roland.  —  5.  Concerto  pour  le  vio- 
lon, Hugot.  —  6.  Ouverture  de  Semiramis,  Catel.  — 
7.  Concerto  pour  le  violon,  Maréchal.  —  Orchestre 
sous  la  direction  d'HABENECK. 

[Correspondance  des  professeurs,  etc., 

n°  15  du  4  ventôse,  an  XL) 

1807,  10  mai.  "e  exercice. 

1.    Symphonie,   Beethoven.   —    2.   Air,   Mozart  : 

M,lc  Goria.  —  3.  Messe  des  morts,  Gossec   (trio)    : 

M11'  Himm,  MM.  Nourrit,  Ai'bry.  —  4.  Concerto  pour 

la  clarinette,  Dacosta  :  l'auteur.—  5.  Air,  Nicolwi  : 

M11"  Goria.   —  Concerto  pour  le  violon,  Auber  : 

Mazas.  —  Litanies.  Durante. 

(Moniteur,  p.  508;  Journal  de  Paris; 
Décade  philosophique.) 


311,  5  mai. 

.  Symphonie  i 


iOe  exercice. 
.,  Beethoven.  —  2.  Lina,  Dalay- 


abilité  de  coite 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONS' AIRE  1)1!  CONSERVATOIRE 


Higai  i.i'  el  Li  comte.    -  3.  Concerto  pour  le 
iano,  Dt  sskb  :  Lambert,      i.  /.'  [«berge  de  Bagnères, 

C-ATEl     I  lin)  :  M11"  CALLANT,  MM.  PONCHARD,  LevASSEUR. 

—  .;.  Ouverture  $  Idn'en,  Méhul.  -  6.  Serment  d'A- 
Ihalie,  Gossbc  chœur).  7.  Fragment  de  sympho- 
nie, Haydn. 

Courrier  des  spectacles,  i  et  '■  mai;  -tournai 
de  Paris;  Tablettes  de  Polymmie.) 
1814,  28  juillet. 

1.  Symphonie,  Mozart.  —  2.  Air,  Weigl  :  M1"  Al- 
bert. —  -'i.  Concerto  pour  ri,, Ion,  VlOTTl  :  J.  HaBENECK. 

i.  Duo,  Mozart:  M,le  Albert,  M.  Ponchard  aîné. 

-  :,.  Ouverture  de  Prométhée,  Beethoven.  —  6.  Air, 
Mozart  :  M11»  Albert.  —  7.  Les  Deux  .tournées,  Che- 
rubini  (final  du  1"  acte)  :  MM.  Ponchard  aîné,  Pon- 
chard jeune,  Louvet  et  Levasseur.  -  s-  Fragment 
de  symphonie,  Haydn. 

1823,  16  mars.  3'  exercice. 

1.  Symphonie  [sol  min.},  Mozart.  —  2.  Emma, 
Aider  (trio)  :  Mlles Frémont,  Melro  el  M.  Prévôt.  — 
:.  Symphonie  concertante  pour  deux  cors,  Lindpaint- 
ier  :  Jacqmin  et  Meifred.  4.  Armide,  Gluck  :  1° 
Sommeil  île  llenaud  :  Lafond,  2°  choeur  à  4  voix  : 
M"'  Lebrun,  MM.  Thian,  Brocard  et  Serda.  —  '■>. 
Rondo  pour  piano  (à  4  mains),  Czekn\  :  Axkan  (8  ans) 
et  Dêiazet.  —  <i.  Ouverture  du  Jeune  Henry,  Méhul. 

—  7.  Air,  Rossini  :  M"0  Colomhelle.  —  8.  Concerto 
le  violon,  Kreutzer  :  Tolrecqie,  2e.  —  9.  Fragment 
l'une  symphonie,  Haydn. 

1841,  6  novembre.  (Petite  Salle.) 

1.  Le  Maître  de  Chapelle,  Paér  :  Barnabe,  Chapelle; 
Benedetto,  Giraud;  Ortrude,  Mlle  Rouvroy.  —  2.  Le 
Légataire  Universel,  Regnard  :  Géronte,  Senès; 
Eraste ,  Ponchard;  Crispin  ,  Bellevant;  Clistorel  , 
M"-  Bertin;  Scrupule,  Fleuret;  Gaspard,  Rert;  un 
laquais  de  Géronte,  Got;  un  laquais  de  M.  Armante, 
Pépin  ;  Mml!Argante,Chapuis;  Isabelle,  Volei  ;  Lisette, 
Patureï. 

1847,  6  juin. 

1.  Les  Enfants  d'Edouard ,  Casimir  Delavij;ne  : 
Edouard  Y,  M110  Lévy  ;  le  duc  d'York,  M"0  l'avarl  ; 
Glocester,  Gibeau;  Tyrrel,  L.  Beauvallet  fils  :  Elisa- 
belb,  MIle  Crosnier.  —  2.  Le  Siège  de  Corinthe,  Ros- 
siki  :  Mahomet,  Evrard;  Cléomène,  Gueymard;  Pa- 
myra,  Mlle  Poinsot;  Néoclès,  Barbot;  Hiéros,  Balan- 
qué;  Ismène,  Mlle  Décrois.  —  Orchestre  dirigé  par 
Habeneck. 

1856,  29  avril. 

Orphée.  Gluck  :  Orphée,  M,11"  de  Lapommkraye;  Eu- 
rydi'ce,  M""  Debay;  l'Amour,  M"e  Dupuy.  —  Orchestre 
dirigé  par  Pasdeloup. 

1858,  17  juin. 

i,  Ouverture  d'Egmont,  Beethoven.  — 2.  Britanni- 
cus,  Racine  (1er  acte)  :  Britannicus,  Eassier;  Burrhus, 
Uemy;  Narcisse,  Avisse;  Agrippine,  M"''  Méareli; 
Albine,  M"°  Montagne.  —  -i.  Ouverture  de  la  Flûte 
Enchantée,  Mozart.  —  4.  Don  Juan  ou  le  Festin  de 
Pierre,  Molière  (2e  acte)  :  Don  Juan,  Finsterwald; 
Sganarelle,  Lemesnil;  Pierrot,  E.  Provost  (ils;  La 
Ramée,  Avisse;  Charlotte,  Mlle  Cellier;  Matburine, 
MUe  Uambricourt;  —  5.  Deuxième  concerto  pour  le 
violon,  Alard  :  Sarasate  (1er  prix  de  1857).  —  6.  Les 
Héritiers,  Alex.  Du  val  :  Antoine  Kerlebon,  Léautaud; 
Jacques  Kerlebon,  Godfrin;  Henri,  Fassier;  Duper- 
ron,  E.  Provost  (ils;  Jules,  Avisse;  Alain,  Lemesnil; 
Mme  Kerlebon,  M"e  Boucbenè;  Sophie,  M"c  Brémond. 
—  Orchestre  dirigé  par  Pasdeloup. 


t.  Symphonie  en  ré  maj.  Beethoven.  —  2.  Armide, 

Gluce  :  Air,  Caisso;  Ch -.  —  Oberon,  Webeb  (final 

du  1er  acte)  :  a.  Air:  Mu«  Bilbaut  Vauchelet;  6.  Duo  ; 
MUw  Bilbaut  Vauchelet  et.  Relgirard;  c.  Marche 
finale  (solo  et  chœurs).  —  4.  Trio  en  ut.  min.  Men- 
delssohn  (andt0  et  finale)  :  Chabeaux,  Lefôrt  et  Gros 
Saint-Ange.  —  5.  les  Noces  de  Figaro,  Mozart  (air  ; 
M""  Belc.irard.  —  6.  Romance  en  fa,  pour  le  violon, 
Beethoven  :  Mlle  Pommereul.  —  7.  Joseph,  Mehul 
(entr'acle  et  prière).  —  8.  Le  Siège  de  Corinthe,  Ros-  ' 
siM  (scène  et  chœur)  :  solo,  Couturier. 
1881,  1er  mai. 

1 .  Symphonie  en  la  maj.  Mendelssohn.  —  2.  La  Fliite 
enchantée,  Mozart  (air)  :  M"e  Jacob.  —  3.  Iphigénie 
en  Tauride,  Gluck  (fragment  du  2e  acte  :  Dethuren- 
et  Bolly.  — La  Fiancée  du  Roi  de  Garbe,  Auber  (chœur 
des  Pages).  —  ,ï.  Variations  concertantes  pour  piano 
et  violoncelle,  op.  17.  Mendelssohn  :  M""  Talfimh  u. 
M.  Pai'in.  —  6.  Trio  en  sol  (op.  4),  pour  instruments  à 
cordes,  Beethoven  (fragments)  :  M"'  Harkness, 
MM.  Carembat  et  Papin.  —  7.  Fernand  Cortes,  Spon- 
tini  (scène  de  la  Révolte)  :  Lama&che.  —  s.  Les  SToces 
de  Figaro,  Mozart  (air)  :  Mlu  Mansour.  —  9.  Le  Siège 
de  Corinthe,  Rossini  (finale  du  2e  acte)  :  Mlle  Fincren  ; 
MM.  Bolly  et  Ver.nouillet. 
1900,  10  mai. 

1.  Ouverture  de  Timoléon,  Méhul.  —  2.  Cantate 
pour  tous  les  temps  (fragments).  J.  S.  Bach  :  soli  : 
Mllcs  Mellot,  Demouceot  et.  Cortez,  MM.  RoossouliêrÈ 
et  Baer  :  a.  Symphonie;  6.  chœur;  c.  air  de  so- 
prano; d.  récit,  quatuor  et  chœur;  e.  récit,  trio  et 
chœur;  f.  air  de  ténor;  g.  quatuor  et  chœur  final. 
—  :i.  Symphonie  en  la  min.  Mendelssohn  (scherzo  el. 
adagio).  —  4.  Chœurs  sans  accompagnement  :  a. 
Crucifi.vus,  Lotti;  h.  Ferme  les  yeux,  Schumann  :  solo. 
M"e  Huchet.  —  .'i.  a.  Quatuor  en  mi\?,  Beethoven 
(and"')  :  piano,  M"e  Demarne;  violon,  MUe  Laval: 
alto,  Raii.ly;  violoncelle,  Richet;  6.  Quatuor  en  mi  ., 
Schumann  (scherzo)  :  piano,  MllE  Blancard;  violon, 
Schneider;  alto,  M  archet;  violoncelle,  Fournier.  — 
6.  Iphigénie  en  Aulide,  Gluck  (fragments  du  1er  actei  : 
Agamemnon,  Rider;  Calchas,  Bover  :  a.  ouverture; 
o.  air  d'Asiamemnon;  c.  chœur  et  récit  de  Calchas  ; 
d.  récit  et  air  d'Agamemnon;  e.  récits  et  air  de  Cal- 
chas; /'.  chœur.  —  7.  flfors  et  Vita.  Ch.  Gounod. 
1905,  11  mai. 

1.  Ouverture,  Scherzo  et  Finale  (op.  52),  R.  Schu- 
mann. —  2.  Magnificat  pour  soli,  chœurs,  orgue  et 
orchestre  (1723),  J.-S.  Bach  :  a.  Magnificat,  chœur  à 
cinq  voix:  b.  Et  exultavit.  air  de  mezzo-soprano: 
M,le  Lamare;  c.  Quia  respexit,  air  de  soprano  : 
M""  Mancini;  Hautbois  d'amour  :  M.  Henri;  d.  Omnei 
generationes,  chœur  à  cinq  voix;  e.  Quia  fec.it,  air  de 
basse  :  M.  Cazaux  :  f.  Et  misericordia,  duo  de  con- 
tralto et  ténor  :  M"e  Lapevrette,  M.  Lucazeau;  g.  Fe- 
cit  potentiam,  chœur  à  cinq  voix;  h.  Deposuit  paten- 
tes, air  de  ténor  :  M.  Lucazeau;  i.  Esuricntes  impie- 
vit.  air  de  contralto  :  M"e  Lapeyrette  :  Flûtes  : 
MM.  Grisard,  Joffroy;,/.  Suscepit  Israël,  chœur  à 
trois  voix  de  femmes;  h.  Sicut  locutus  rst,  fugue  à 
cinq  voix;  /.  Gloria  Patri,  chœuràcinq  voix;  Orgue  : 
Mlle  N.  Boulanger.  —  Trompette  :  M.  Godebert;  •'(. 
a.  Pièces  en  concert  (La  Livri,  L'Agaçante,  L'Indis- 
crète), J.-Ph.  Rameau  :  piano,  Mllc  Marcelle  Weiss; 
flûte,  M.  Joffroy;  violoncelle,  M.  Louis  Bosoor;  6. 
Final  du  Trio  en  sol  mineur.  R.  Schumann  :  piam., 
Mrae  Antoinette  Lamv;  violon,  M.  Saurv;  violoncelle. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 

M.  Doucet.  —  +.  Chasse  fantastique,  Ernest  Guiraud. 
—  5.  Trois  Chœurs  à  quatre  voix  mixtes  sans  accom- 
pagnement 11370),  Guillaume  Costeley  :  a.  Je  voy 
des  glissantes  eaux  ;  6.  Allons  au  vert  bocage  ;  e. 
Laulrier  priay  de  danser.  —  6.  Fantaisie  pour  piano, 
chœur  et  orchestre ,  L.  van  Beethoven  :  piano, 
M.  Amour;  soli,  Mlll!s  Ennerie,  Mancini  et  Laniare; 
MM.  Fra.ncell,  Corpait  et  Pérol. 


L'ENSEIGNEMENT   MUSICAL   (ACTUEL",   EN   FRANCE 
Conservatoire  national. 

La  première  place  revient  de  droit  au  Conserva- 
toire national  de  Paris. 

Voici  les  grandes  lignes  de  son  organisation  ac- 
tuelle. 

Il  n'y  a  que  des  élèves  externes.  L'enseignement 
se  divise  en  neuf  sections  :  1°  solfège  et  théorie 
musicale;  2"  harmonie,  orgue,  contrepoint  et  fugue, 
composition;  3°  chant,  déclamation  lyrique;  4°  piano, 
harpe;  b°  instruments  à  archet;  6°  instruments  à 
vent;  7°  classes  d'ensemble  ;  8°  Inclure  à  haute  voix, 
diction  et  déclamation  dramatique;  9°  histoire  gé- 
nérale de  la  musique;  histoire  et  littérature  drama- 
tique. 

Le  Conservatoire  est  placé  sous  l'autorité  d'un  di- 
recteur, qui  règle  tous  les  travaux  et  préside  tous 
les  comités. 

Le  corps  enseignant  se  compose  de  professeurs 
titulaires,  de  chargés  de  cours,  d'accompagnateurs 
chargés  de  l'élude  des  rôles. 

Lin  conseil  supérieur  d'enseignement  donne  son 
avis  sur  toutes  les  questions  qui  lui  sont  soumises 
par  le  ministre  ou  par  le  directeur. 

On  n'est  admis  élève  que  par  voie  d'examen  pour 
certaines  classes  et  de  concours  pour  d'autres. 

Un  minimum  et  un  maximum  d'Age  sont  fixés 
pour  l'admission. 

Sont  fixés  aussi  le  nombre  maximum  des  élèves 
dans  les  différentes  classes  el  le  maximum  de  durée 
des  études. 

Les  aspirants  de  nationalité  étrangère  sont  admis, 
mais  leur  nombre  est  limité  dans  chaque  classe.  Ils 
jouissent  des  mêmes  avantages  que  les  Français. 

Il  y  a  un  jury  d'admission  pour  chaque  section 
d'enseignement. 

Les  épreuves  à  subir  sont  déterminées  par  un  rè- 
glement. 

Tout  élève  admis  dans  une  classe  de  chant  ou  de 
déclamation  doit  signer,  avant  son  entrée,  un  enga- 
gement qui  l'astreint  à  certaines  obligations  envers 
l'Etat. 

Le  directeur  répartit  les  élèves  admis  par  les  ju- 
rys, et  place  les  élèves  de  chant  dans  les  classes  d'o- 
péra et  d'opéra-comique. 

Des  auditeurs  en  nombre  limité  peuvent  être  admis 
à  assister  aux  classes. 

Douze  pensions  de  1.200  à  1.800  fr.  peuvent  être 
attribuées  aux  meilleurs  élèves  des  classes  de  chant, 
et  dix  pensions  de  600  fr. à  ceux  de  déclamation  dra- 
matique. 

Il  y  a  un  comité  d'examen  pour  chaque  section 
de  l'enseignement 

Il  y  a  deux  examens  semestriels  :  l'un  au  mois  de 
janvier,  l'autre  au  mois  de  juin. 

A  chaque  examen,  le  comité  se  prononce  sur  le 
maintien  ou  le  renvoi  des  élèves  et  donne  à  chacun 
une  note  d'examen. 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3451 

Il  y  a  des  concours  annuels  pour  les  prix. 

Les  concours  de  fugue,  de  contrepoint  et  d'harmo- 
nie se  font  en  loge.  Les  concours  de  sol fïtje,  d'accom- 
pagnement au  piano,  d'oryue,  des  liasses  préparatoi- 
res de  piano  et  de  ci"lon  ont  lieu  à  buis-clos. 

Ceux  de  chant,  d'opéra,  d'ojiéra-comiqw.de  piano. 
de  harpe,  de  violon,  d'alto,  de  violoncelle,  de  contre- 
basse, d'instruments  ii  veut  et.  de  déclamation  draina- 
tique  se  font  en  séance  publique. 

Les  sujets  de  concours  sont  détermines,  chaque 
année,  par  les  comités  d'examen. 

Les  élevés  de  nationalité  étrangère  ne  peuvent 
concourir  que  dans  leur  deuxième  année  d'études. 

Les  récompenses  consistent  en  médailles  pour  les 
classes  préparatoires,  en  prix  et  accessits  pour  les 
classes  supérieures. 

L'enseignement  du  Conservatoire  est  gratuit. 

En  principe,  il  est  individuel.  Exception  est  faite 
pour  les  classes  d'ensemble  vocal,  d'orchestre,  d'his- 
toire de  la  musique  et  d'histoire  de  la  littérature 
dramatique.  Dans  les  classes  de  solfège,  il  est  indi- 
viduel pour  la  lecture,  collectif  pour  la  dictée  et  la 
théorie. 

Chaque  classe  se  compose  de  dix  ou  douze  élèves, 
excepté  celles  de  solfège  des  chanteurs,  d'ensemble 
vocal,  d'ensemble  instrumental,  d'orchestre,  d'his- 
toire de  la  musique,  d'histoire  de  la  littérature  dra- 
matique, de  maintien  et  d'escrime,  où  le  nombre  est 
indéterminé. 

Chaque  élève  reçoit  dans  s,i  .hisse  , sauf  les  excep- 
tions signalées  ci-dessus)  un  enseignement  particu- 
lier, et  profile  en  même  temps  de  la  leçon  donnée  à 
ses  condisciples.  Le  résultai  de  ce  système  a  tou- 
jours donné  jusqu'ici  d'excellents  résultats. 

La  libellé  la  plus  entière  est  laissée  aux  profes- 
seurs pour  le  choix  et  l'emploi  des  méthodes  qu'il 
leur  convient  d'adopter.  Eu  cela,  l'autorité  n'inter- 
vient pas.  Elle  constate  les  résultats  et  fait  des  ob- 
servations s'il  y  a  lieu. 

Le  Conservatoire  de  Paris  a  toujours  eu  à  se  féli- 
citer de  ce  régime  de  liberté,  qui  laisse  à  chaque 
professeur  une  large  initiative  et  entretient  ainsi 
une  grande  et  bienfaisante  émulation  entre  les  di- 
verses classes  d'enseignement  similaire. 

L'enseignement  du  solfège  comprend  la  dictée,  la 
théorie  et  la  lecture  à  changements  de  ciels.  Il  y  a 
des  classes  distinctes  pour  les  instrumentistes  et 
pour  les  chanteurs. 

L'enseignement  de  l'harmonie  comprend  la  théorie 
des  accords,  la  réalisation  à  plusieurs  parties  de 
basses  et  de  chants  donnés  de  diverses  natures  et 
de  différents  styles.  Cet  enseignement  est  poussé  très 
loin.  Le  style  iinilatif,  conlrepoinlé.  concertant,  y 
est  l'objet  d'une  élude  spéciale,  el  fait  de  l'harmonie 
ainsi  enseignée  une  sorte  de  contrepoint  moderne 
du  plus  haut  intérêt. 

Dans  les  classes  de  composition,  l'enseignement 
comprend  le  contrepoint  rigoureux  sous  toutes  ses 
formes1,  la  fugue,  la  composition  proprement  dite, 
vocale  et  instrumentale,  symphonique  et  dramati- 
que, l'esthétique,  l'analyse  raisonnée  des  chefs- 
d'œuvre,  l'instrumentation.  C'est  dans  ces  classes 
qu'on  prépare  les  élèves  pour  le  concours  du  Grand 
Prix  de  Home. 

L'enseignement  de  l'orgue  porle  sur  l'accompa- 
gnement du  plain-chant  liturgique,  l'improvisation 


'enseignement  du  contrepoint  est  actuellement  séparé* 
Jgue,  et  a  été  confié  à  deu\  professeurs  spéciaux. 


:'.-'i  i-J 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


d'une  fugue  et  d'un  morceau  moderne  sur  tics  sujets 
donnés,  et  l'exécution  de  pièces  des  grands  maîtres 
de  l'orgue. 

L'accompagnement  au  piano  comprend  l'accom- 
pagnement de  la  basse  chiffrée,  l'accompagnement 
improvisé  d'une  mélodie  donnée,  la  transposition, 
la  lecture  au  piano,  la  réduction  improvisée  de  la 
partition  d'orchestre. 

L'enseignement  du  chant  a  pour  objet  l'émission 
et  la  pose  de  la  voix,  la  vocalisation  et  l'étude  des 
airs  de  tous  les  styles  des  meilleurs  maîtres. 

L'enseignement  de  la  déclamation  lyrique  et  de 
la  déclamation  dramatique  comprend  l'étude  en 
scène  des  œuvres  ou  de  fragments  d'œuvres  les  plus 
célèbres  du  répertoire  classique  et  moderne. 

L'enseignement  dans  les  classes  instrumentales 
comprend  la  partie  technique  et  l'étude  des  belles 
œuvres  classiques  et  modernes  spéciales  à  chaque 
instrument.  La  lecture  y  est  aussi  l'objet  de  soins 
incessants  et  vigilants. 

Une  classe  d'ensemble  vocal  existe  pour  tous  les 
élèveschanteurs.  Klle  a  pour  objetl'étude  deschœurs, 
et  prend  part  à  l'exercice  ou  aux  exercices  publics 
que  le  Conservatoire  donne  chaque  année. 

Une  classe  d'orchestre  réunit  les  meilleurs  élèves 
des  classes  instrumentales.  On  y  étudie  les  œuvres 
symphoniques  du  répertoire  classique  sous  la  direc- 
tion d'un  maître  éminent  et  expérimenté,  qui  fait 
en  même  temps  de  chaque  œuvre  étudiée  un  com- 
mentaire analytique  et  historique.  Celle  classe  cons- 
titue ainsi  une  sorte  d'annexé  au  Cours  d'histoire 
de  la  musique. 

Les  meilleurs  travaux  des  élèves  des  classes  de 
composition,  choisis  par  un  comité,  sont  essayés  à 
cette  classe,  et  l'auteur  est  invité  à  diriger  lui-même 
son  œuvre.  Les  élèves  retirent  ainsi  de  ces  séances 
un  haut  enseignement  esthétique  et  pratique.  C'est 
la  meilleure  leçon  de  composition  et  d'orchestration 
qu'ils  puissent  recevoir. 

Trois  classes  d'ensemble  instrumental  réunissent 
tous  les  lauréats  des  classes  d'instruments.  Le  ma- 
gnifique répertoire  de  musique  de  chambre  y  est 
étudié  avec  un  soin  méticuleux,  et  aide  puissamment 
au  développement  du  goût  et  du  style. 

Un  cours  d'histoire  de  la  musique  ,  obligatoire 
pour  les  élèves  d'harmonie  et  de  composition, et  un 
cours  d'histoire  de  la  littérature  dramatique,  obli- 
gatoire pour  les  élèves  de  déclamation,  sont  aussi 
accessibles  au  public  sur  le  vu  de  cartes  délivrées 
par  l'Administration.  Ces  cours,  très  bien  faits, 
complètent  heureusement  l'éducation  des  élèves. 

Enfin,  deux  classes  de  maintien  et  une  d'escrime 
sont  instituées  pour  les  élèves  qui  se  destinent  au 
théâtre. 

En  tout,  on  compte  plus  de  80  professeurs,  chargés 
de  cours,  accompagnateurs,  pour  donner  l'enseigne- 
ment à  près  de  800  élèves. 

La  sanction  des  études  est  dans  les  examens  et 
concours.  Les  examens  (janvier  et  juin)  ont  pour 
objet  de  constater  l'état  des  études  et  les  progrès 
des  élèves;  en  outre,  celui  de  juin  fixe  le  choix  des 
élèves  qui  doivent  prendre  part  aux  concours  de  fin 
d'année. 

Les  épreuves  imposées  lors  de  ces  examens  et 
ooncours  sont  conformes  au  programme  d'études 
indiquées  pour  chaque  spécialité  de  l'enseignement. 


Pour  les  classes  instrumentales,  on  ajoute  un  mor- 
ceau de  lecture  à  vue  ou  morceau  d'exécution. 

Pour  les  examens  d'harmonie,  de  contrepoint,  de 
fugue,  les  élèves  sont  enfermés  en  loge  pendant 
quatre  ou  huit  heures,  et  pour  les  concours  pendant 
dix-huit  heures. 

Il  y  a  des  examens  de  composition,  mais  il  n'y  a 
de  concours  que  celui  institué  pour  l'obtention  du 
Grand  Prix  de  Home,  auquel  peuvent  prendre  part, 
du  reste,  de  jeunes  artistes  étrangers  au  Conserva- 
toire. 

Tous  les  morceaux  et  scènes  imposés  pour  les 
concours  sont  choisis  un  mois  à  l'avance  par  un 
comilé.  Les  textes  imposés  pour  les  concours  de  sol- 
fège, d'harmonie,  de  contrepoint,  de  fugue,  d'orgue, 
d'accompagnement,  sont  donnés  par  la  direction. 
Les  comités  d'examen  et  les  jurys  de  concours  sont 
nommés  par  le  ministre  des  Beaux-Arts  et  fonction- 
nent sous  la  présidence  du  directeur. 

Les  concours  ont  lieu,  pour  chaque  spécialité, 
entre  les  élèves  désignés  par  les  comités  d'examen. 
Les  récompenses  sont  1res  recherchées,  et  quelques- 
unes  d'entre  elles  entraînent  des  faveurs  spéciales 
à  l'égard  de  leurs  titulaires,  notamment  celles  qui 
procurent  de  droit  à  ceux-ci  des  engagements  dans 
les  théâtres  subventionnés. 

Tel  est,  dans  ses  grandes  lignes,  le  fonctionnement 
de  l'enseignement  donné  au  Conservatoire  de  Paris. 

Snccnrsalos.  —  Éoolrs  nationales. 

En  1826,  des  succursales  du  Conservatoire  furent 
instituées  â  Lille  et  à  Toulouse;  en  1841,  à  Marseille 
et  à  Melz;à  Dijon  en  1845;  à  Nantes  en  1846;  à  Lyon 
en  1874  et  à  Avignon  en  1884. 

Depuis  1884,  de  nouvelles  succursales  el  des  Kco- 
les  nationales  ont  été  créés.  Les  unes  et  les  autres 
sont  aujourd'hui  au  nombre  de  40. 

En  outre  de  la  principale  subvention  donnée  par 
la  municipalité,  toutes  ces  Ecoles  reçoivent  un  sub- 
side du  gouvernement,  quelques-unes  du  départe- 
ment. Elles  sont  visitées  chaque  année  par  un  ins- 
pecteur du  ministère  des  Beaux- Arts,  chargé  de 
constater  l'état  des  études  et  d'en  faire  un  rapport 
au  ministre.  Elles  ne  dépendent  pas  du  Conservatoire, 
et  ressortissent  directement  au  ministère  des  Beaux- 
Arts. 

L'enseignement,  gratuit,  est  modelé  sur  celui  du 
Conservatoire  de  Paris,  autant  que  le  permettent 
les  usages  locaux,  la  quantité  el  la  qualité  des  élè- 
ves, celles  mêmes  des  professeurs,  et  diverses  consi- 
dérations inutiles  àénumérer1. 

En  188 i,  quelques  maîtrises  furent  assimilées  aux 
Ecoles  nationales  et  reçurent  une  subvention  de  l'E- 
tal, laquelle  fut  supprimée  récemment. 

Les  résultats  dans  les  Ecoles  des  départements 
sont,  pour  la  plupart,  satisfaisants,  mais  accusent  un 
niveau  sensiblement  inférieur  à  celui  du  Conserva- 
toire de  Paris,  où  quelques-uns  des  meilleurs  élèves 
seulement  parviennent  à  ensuite  se  faire  admettre. 

En  somme,  il  en  est  de  la  musique  en  France 
comme  des  autres  arts  :  Paris  absorbe  tout,  et  mal- 
gré les  efforts  faits  en  vue  de  la  décentralisation, 
celle-ci  n'existe  réellement  pas  à  l'égal  de  ce  qu'on 
voit  par  exemple  en  Allemagne,  en  Italie,  et  même 
en  Belgique.  Il  esl  permis  de  le  regretter2. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L  ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3453 


Écoles  libres  et  diverses. 

Paris  possède,  en  dehors  du  Conservatoire  natio- 
nal, quelques  Ecoles  libres  d'un  haut  intérêt,  qui 
méritent  une  mention  toute  spéciale.  Les  plus  im- 
portantes sont  :  l'Ecole  de  musique  classique  fondée 
par  Niedermeyer,  sous  le  titre  de  :  Ecole  de  micsique 
religieuse,  dirigée  il  y  a  quelques  années  avec  une 
grande  autorité  par  M.  Lefèvre,  et  actuellement  par 
Mme  Lefèvre-Heuutel,  la  Schola  Cantorum  fondée  par 
M.  V.  d'Indy  et  dirigée  par  lui,  enfin  l'Ecole  normale 
de  musique  que  dirige  M.  A.  Mangeot. 

L'Ecole  de  musique  classique  a  donné  souvent  de 
brillants  résultats.  Elle  peut  citer  avec  fierté  parmi 
ses  anciens  élèves  les  plus  distingués  les  noms  de 
Gabriel  Fauré,  A.  Périlhou,  Messager,  A.  Georges, 
le  regretté  Boellmann,  etc.  L'extrait  suivant  de  ses 
statuts  indique  clairement  son  but,  son  programme, 
son  fonctionnement. 

«  L'Ecole  de  musique  classique,  qui  célébrait  ré- 
cemment son  cinquantième  anniversaire,  a  été  fon- 
dée en  1853  par  Louis  Niedermeyer.  C'est  une  école 
libre,  et  la  Direction  reste  absolument  maîtresse  de 
son  administration,  des  prix  de  pension,  du  pro- 
gramme des  cours,  qui  peuvent,  selon  les  circons- 
tances et  les  nécessités,  être  réformés,  améliorés, 
agrandis. 

«  Dès  sa  fondation  et  sans  discontinuité,  M.  le  mi- 
nistre de  l'Instruction  publique,  des  Cultes  et  des 
Beaux-Arts  a  bien  voulu  accorder  à  cet  établisse- 
ment son  puissant  appui.  Depuis  1853  (décret  du 
28  novembre),  36  paris  de  bourse  de  500  francs  ont 
été  instituées  en  faveur  de  l'Ecole  et  sont  accordées 
à  des  élèves  désignés  par  le  ministre.  Par  un  arrêté 
en  date  du  1er  juillet  1854,  le  ministre  a  fondé  trois 
premiers  prix  pour  la  composilion  musicale,  l'or- 
gue, l'accompagnement  du  plain-chant.  Un  nouvel 
arrêté,  en  date  du  14  avril  1857,  a  de  plus  décidé 
que  des  diplômes  de  maître  de  chapelle  et  d'orga- 
niste seraient  accordés,  après  examen,  aux  élèves 
qui  auraient  achevé  leurs  éludes.  Les  conseils  géné- 
raux et  municipaux  de  plusieurs  départements  ac- 
cordent également  des  subventions  pour  le  paye- 
ment d'une  partie  de  la  pension. 

«  L'Ecole  a  pour  but  de  former,  par  l'étude  des 
chefs-d'œuvre  classiques  des  grands  maîtres  du  .wic 
au  xixe  siècle,  des  compositeurs,  des  organistes,  des 
maîtres  de  chapelle  et  des  pianistes  qui  unissent  à 
une  profonde  connaissance  de  leur  art  toutes  les 
qualités  qu'une  bonne  éducation  littéraire  et  morale 
peut  seule  offrir.  Elle  a  principalement  la  légitime 
ambilion  de  donner  à  ses  élèves  une  instruction  so- 
lide dans  toutes  les  branches  de  leur  art;  de  leur 
faire  faire  leurs  «  humanités  musicales  »,  afin  que, 
suivant  leurs  aptitudes  spéciales,  ils  puissent  ensuite 
devenir  des  compositeurs,  des  organistes,  des  pia- 
nistes, des  professeurs  expérimentés. 

«  Par  l'étude  du  plain-chant  et  de  l'orgue,  l'Ecole 
permet  aux  élèves  de  trouver  facilement  des  places 
d'organistes  ou  de  maîtres  de  chapelle  dans  les 
églises  de  tous  les  cultes,  et  leur  procure  ainsi  des 
émoluments  fixes;  n'étant  plus  entraves  par  la  re- 
cherche de  moyens  d'existence,  ils  peuvent  alors, 
lorsqu'ils  sont  bien  doués,  s'adonner  librement  à  la 
composition. 

«  L'enseignement  musical  comprend  :  le  solfège,  le 


chaut,  la  musique  d'ensemble,  le  plain-chant  écrit  et 
accompagné,  le  piano,  l'orgue,  l'harmonie,  le  con- 
trepoint, la  fugue,  la  composition  musicale,  l'har- 
monie pratique,  l'accompagnement  de  la  partition, 
l'improvisation,  l'histoire  de  la  musique. 

«  L'enseignement  général,  donné  par  des  profes- 
seurs de  l'Uuiversité,  comprend  la  langue  et  la  litté- 
rature françaises,  l'histoire  et  la  géographie, les  élé- 
ments des  sciences  et  du  latin.  Les  étrangers  peu- 
vent recevoir  des  leçons  de  français  particulières. 

«  L'Ecole  est  avant  tout  un  internat,  où  les  élèves 
bien  doués,  par  cela  seul  qu'ils  vivent  dans  un  mi- 
lieu musical  unique,  voient  leurs  facultés  se  déve- 
lopper bien  plus  rapidement  que  partout  ailleurs  '.  •• 

La  Schola  Cantorum,  fondée  par  M.  V.  d'Indy,  a 
pour  principe  d'accueillir  et  d'encourager  tous  les 
jeunes  gens  qui,  par  leurs  dispositions  naturelles, 
paraissent  appelés  à  suivre  la  carrière  artistique.  L'E- 
cole  normale  de  musique  poursuit  un  but  analogue2. 


On  verra  plus  loin  l'importance  donnée  à  l'ensei- 
gnement supérieur  de  la  musique  dans  les  Univer- 
sités allemandes.  En  France,  il  n'a  longtemps  existé 
que  des  chaires  pour  «  l'Histoire  de  l'Art  »,  et,  par 
là,  on  a  toujours  entendu  les  Arts  plastiques.  La 
musique  n'avait  pas  de  place  distincte.  Si  elle  figu- 
rait, exceptionnellement,  dans  certains  programmes 
de  cours,  c'était  à  propos  d'une  étude  d'acoustique, 
ou  de  physiologie,  ou  de  psychologie,  ou  de  littéra- 
ture; ou  bien  c'était  encore  par  une  extension  toute 
fortuite  que  le  professeur  donnait  au  mot  «  Art  ». 
S'il  était  musicien,  il  interprétait  le  mot  dans  un 
sens  très  large  et  il  parlait  de  musique,  mais  rien 
ne  l'y  obligeait.  A  la  direction  de  l'enseignement 
supérieur,  on  ne  reconnaissait  pas  d'existence  légale 
à  la  musique. 

Cependant,  un  essai  avait  été  tenté  et  un  arrêté 
ministériel  de  1004  nommait  M.  Jules  Couuariel, 
docteur  es  lettres,  «  chargé  de  cours  d'histoire  de  la 
musique  au  Collège  de  France,  pour  cinq  ans,  à  titre 
d'essai  ».  Ce  cours,  très  remarquable,  inspira,  sans 
doute,  aux  autorités,  l'idée  de  donner  de  l'extension 
à  cette  tentative  et  de  poursuivre  l'organisation  de 
l'enseignement  supérieur  de  la  musique  dans  les 
Universités.  Toutefois,  actuellement,  l'Histoire  de  la 
musique  n'est  l'objet  de  cours  spéciaux  que  dans 
deux  Universités,  celles  de  Paris  el  de  Strasbourg. 

En  revanche,  l'enseignement  du  solfège  et  du 
chant  choral  est  organisé  dans  les  lycées,  dans  les 
écoles  communales  de  la  Ville  de  Paris  et  dans  les 
écoles  normales  d'instituteurs  el  d'institutrices. 

Cet  enseignement  donne  des  résultats  apprécia- 
bles qu'on  ne  saurait  trop  encourager,  mais  il  est 
très  élémentaire. 

Faut-il  rattacher  à  l'enseignement  les  nombreuses 
sociétés  d'orphéons,  de  musiques  d'harmonie,  de 
fanfares  répandues  sur  le  territoire  fiançais?  Certes 
ces  sociétés  font  des  efforts,  mais  bien  peu  attei- 
gnent un  certain  niveau  artistique.  Le  solfège  et  la 
lecture  devraient  être  le  but  de  leurs  études.  Il  en 
est  rarement  ainsi.  On  se  contenle  trop  souvent  de 
chanter  ou  de  jouer  plus  ou  moins  bien  des  mor- 
ceaux laborieusement  serinés  par  le  chef.  Cependant, 
il  y  a  là  une  mine  féconde  à  exploiter.  Il  est  à  souhai- 
ter que  des  efforts  sérieux  soient  faits  dans  ce  sens3. 


2.  Voir  !es  articles  Schola  Canli 

3.  Voir  plus  loin  l'article  de  M, 


,  Ecole  normale  de 
uet.  sur  les  Oi-phèo. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


L'ENSEIGNEMENT   MUSICAL  A   L'ETRANGER' 
Allemagne.  —  Autriche. 

Sur  vingt  Universités  que  compie  l'Allemagne, 
seize  ont  à  lettre  programmes  an  enseignement  delà 
musique,  et  les  candidats  au  doctorat  philosophique 
peuvent  choisir  la  science  de  la  musique  comme 
branche  principale9.  Rien  de  semblable  n'existe  en 
France.  Cela  tienl  à  ce  i|u'en  Allemagne  la  musique 
est  nue  fonction  vitale  de  la  société  el  qu'elle  est 
enseignée  dans  les  écoles  de  toute  espèce.  Les  Alle- 
mands aiment  la  musique;  ils  la  comprennent;  elle 
est  pour  eus  comme  un  organisme  vivant  dont  ils 
saisissent  facilement  la  complexité.  I ,n  lui  faisant  une 

place  dans  ses  prograut s,  l'Université  allemande 

donne  satisfaction  à  des  aptitudes  et  à  des  besoins 
réels.  De  sorte  qu'une  excellente  confraternité  existe 
généralement,  entre  les  élèves  des  Conservatoires  et 
ceux  des  Facultés  de  Philosophie,  Lettres  et  Sciences. 

Dans  toutes  ces  Universités,  l'enseignement  est  très 
élevé,  el  donné  par  des  professeurs,  presque  tous 
«  musiciens  de  métier  ».  Les  titres  de  ces  professeurs, 
quoique  différents  :  professeurs  ordinaires,  extraor- 
dinaires, privatdocenten,  directeurs  de  la  musique, 
lecteurs,  n'impliquent  pas  nécessairement  une  clas- 
sification de  leur  mérite. 

SriTTA  à  Berlin,  Hanslick,  à  Vienne  ont  eu  une 
iullueiioe  considérable.  Le  premier,  a  pour  ainsi  dire, 
créé  la  philologie  musicale.  Son  action  a  été  féconde, 
et  ses  nombreux  élèves,  aujourd'hui  des  maîtres 
éminents,  témoignent  hautement  de  la  gloire  de 
sou  enseignement. 

Le  livre  de  Hanslick,  Le  Beau  musical,  lui  fit  une 
grande  réputation.  Plein  d'aperçus  nouveaux,  mais 
d'un  esprit  systématique  el  intransigeant,  il  fut  très 
discuté.  Spitta  était  un  philologue,  Hanslick  est  un 
philosophe. 

Voici  un  exposé  de  l'enseignement  musical  supé- 
rieur dans  les  Universités  allemandes  :  contrepoint, 
harmonie  moderne,  principes  de  la  fugue,  de  la  com- 
position, de  l'orchestration,  leçons  sur  les  formes 
musicales,  analyse  des  œuvres  classiques  et  mo- 
dernes, histoire  de  la  musique,  etc.  On  voit  que  la 
technique  y  est  jointe  à  l'esthétique  et  à  l'érudition 
musicales,  et  que  cet  enseignement  peut  être  fécond. 
i  in  él  udie  avec  un  soin  particulier  toulce  qui  touche 
aux  xv",  xvie  et  xvnc  siècles;  on  déchill're,  critique  et 
établit  définitivement  les  texles,  on  compare  les  ver- 
sions, on  met  en  partition,  enfin  ou  fait  un  véritable 
travail  de  philologie  musicale,  qui  permet  de  re- 
donner une  nouvelle  vie  à  des  œuvres  du  plus  haut 
intérêt,  jusque-là  enfouies  dans  la  poussière  des 
bibliothèques.  En  outre,  des  chœurs  sont  organisés 
dans  plusieurs  Universités.  Ces  chœurs,  composés 
d'étudiants  de  toute  sorte,  exécutent  a  cappella  des 
œuvres  des  vieux  maitres  de  la  Renaissance  et  de 
J.-S.  Bach. 

L'art  contemporain  fait  également  l'objet  des  étu- 


nents  (le  ce  chapitre  sont  empruntes  a  une  étude  très 
et  remarquablement  faite  de  M.  Maurice  Emmanuel 
sur  la  musique  en  Allemagne.  Chargé,  sur  la  propositiou  de  M.  Th.  Do- 
nojs,  par  le  goiiYcnii'inent  français  d'une  mission  d;ins  les  Universités 
et  Conservatoires  allemands,  M.  Maurice  Cmmancel  en  a  rapporté  les 
informations  les  plus  précises.  (Les  citations  sont  entre  guillemets. 
—  On  ne  perdra  pas  de  vue  que  le  présent  article  a  été  écrit  avant 
la  guerre;  il  a  été  mis  à  jour,  du  moins  au  point  de  vue  des  désigna- 
tions des  établissements  et  de  leurs  directeurs,  à  l'aide  de  V&esses 
Muaiker  Kalender  pour  1929.)  [N.  D.  L.  D.] 


des  de  ces  musiciens  philologues,  mais  tout  cela  se 
fait  avec  calma  et  dignité,  et  si  tout  le  monde  admire 
Wagner,  personne  n'en  fail  un  Dieu  unique. 

On  comprend  qu'avec  une  pareille  éducation,  les 
musicologues  exercent  une  réelle  inlluence  sur  le 
goût  du  public;  ils  savent  au  moins  ce  dont  ils  par- 
lent; on  n'en  pourrait  dire  autant  dans  tous  les 
pays. 

Tels  sont,  résumés  brièvement,  les  objets  essentiels 
de  l'enseignement  supérieur  de  la  musique  dans  les 
Universités  allemandes. 


L'enseignement  dans  les  Conservatoires  allemands 
est.  très  différent  de  ce  qu'il  esl  en  France.  «  Les 
traités  dits  élémentaires  ne  ressemblent  pas  aux 
nôtres.  Les  artifices  précieux  de  la  simplification 
pédagogique  pratiquée  dans  nos  écoles  n'ont  pas 
cours  en  Allemagne  :  on  peut  le  dire,  presque  sans 
exagération,  les  études  y  sonl,  dès  le  principe, 
transcendantes  et  tout  imprégnées  d'un  esprit  philo- 
sophique qui  tend  à  l'encyclopédie  ». 

Dès  le  début,  on  se  préoccupe  de  tout  embrasser  et 
on  rattache  volontiers  à  une  étude  toutes  les  con- 
naissances secondaires  qu'on  juge  nécessaires.  «  Dans 
les  leçons  les  plus  élémentaires,  le  professeur  trouve 
l'occasion  de  philosopher,  parfois  copieusement  ». 

On  se  croirait  plutôt  à  l'Université  que  dans  une 
école  de  musique.  «  Une  leçon  sur  la  tonalité,  par 
exemple,  devient,  dans  la  bouche  d'un  de  ces  maitres 
diserts,  un  très  noble  exposé  de  grammaire  musi- 
cale. Les  élèves  prennent  des  notes,  comme  des 
étudiants  de  facultés.  » 

«  Médiocre  souci  d'une  instruction  progressive, 
tendance  à  philosopher  dans  les  leçons  les  plus  élé- 
mentaires, méthodes  d'enseignement  assez  souvent 
flottantes,  toujours  complexes,  faisant  une  grande 
place  aux  connaissances  encyclopédiques,  tels  sont, 
m'a-t-il  semblé,  les  caractères  de  la  pédagogie  mu- 
sicale allemande...  L'apprentissage  du  métier,  qui 
est  le  revers  obligé  de  tout  art,  parait  quelque  peu 
mesquin  à  des  maitres  qui,  jusque  dans  la  direction 
d'une  classe  primaire,  restent  ce  qui  est  le  propre  et 
aussi  le  charme  de  leur  race,  des  Allemands  rêveurs.  » 

»  La  pédagogie  musicale  allemande  est  ce  qu'elle 
doit  être,  et  il  serait  absurde  de  la  condamner  parce 
qu'elle  est  assez  souvent  tout  l'envers  de  la  nôtre. 
Elle  est  conforme  à  la  nature  et  aux  besoins  des  es- 
prits qu'elle  façonne.  » 

Pour  avoir  une  idée  exacte  de  ce  qu'est  l'enseigne- 
ment musical  en  Allemagne  et  en  Autriche,  il  suffit 
de  réunir  dans  un  aperçu  collectif  les  Conservatoires 
les  plus  importants  :  ceux  de  Berlin3,  Munich',  Co- 
logne', Leipzig6  et  Vienne". 

«  La  Constitution  et  l'administration  de  ces  écoles 
varient,  mais  l'esprit  pédagogique  est  le  même  dans 
les  cinq  maisons. 

«  Des  cinq  écoles,  trois  seulement  porlent  le  nom 
de  Conservatoire  :  ce  sont  les  établissements  privés 


2.  Lu  Autriche,  trois  Universités  sur  cinq  possèdent  une  organisa. 
lion  musicale  analogue. 

3.  Staatlichr  Aktidrmischr  Itnclischidr  fur  Muxik  m  Hrrltn. 
Prof.    t'r.   SOBHBKER. 

4.  Staatiiche  Akademie  der  Toltkunsl.  Direct.  D'.  S.  vos  Haussegeh. 
3.  Sêantlirlie  Hoschschule  fur  Musik.  Prof.  H.  Aiiesdboth. 

6.  Landes  Konservatorium  der  Musik  l'rof.  M.  Pacer. 

7.  Fachkuc/tschule  und  Akademie  fur  Musik  >md  darstelleud? 
funslRector.  Prof.  F.  Sgiimibi  el  Xeurs  Wirirer  Kùnsereatorium. 
Pr.  J.  FUmar.. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL 


de  Vienne,  Cologne  et  Leipzig.  Mais  l'Ecole  supé- 
rieure de  musique  à  Berlin  et  l'Académie  à  Munich, 
tous  deux  établissements  d'Etat  sous  la  dépendance 
du  ministère  de  l'Instruction  publique,  sont  familiè- 
rement désignées  en  Allemagne  sous  le  nom  de 
Conservatoires.  Il  y  a  entre  les  deux  groupes,  ins- 
tituts privés  et  écoles  d'Etat,  celte  difi'érence  que 
l'Etat  n'alloue  à  ceux-là  qu'une  subvention  sans  im- 
portance, taudis  qu'il  inscrit  au  budget  annuel  une 
somme  assez  considérable  pour  soutenir  celles-ci,  et 
pensionne  leurs  professeurs,  lorsqu'ils  ont  droit  à  la 
retraite. 

«  Les  cinq  établissements  perçoivent  des  rétribu- 
tions scolaires.  Le  système  de  la  gratuité  n'est  appli- 
qué nulle  part,  et  je  ne  saurais  dire  assez  fortement 
quel  prestige  vaut  à  notre  Conservatoire  de  Paris 
son  désintéressement  absolu.  J'ai  compris  aussi,  à 
voir  fonctionner  les  écoles  musicales  payantes,  quelle 
supériorité  notre  école  musicale  gratuite  pourra 
garder  sur  elles.  » 

A  Munich  seulement,  les  fonctions  de  directeur  sont 
remplies  par  l'intendant  général  de  la  Musique 
royale.  A  Berlin,  la  direction  est  collective  :  quatre 
directeurs-professeurs  et  le  secrétaire  de  l'Académie 
des  Arts.  A  Vienne  et  à  Cologne,  la  direction  cen- 
trale, composée  de  hauts  fonctionnaires  et  de  ci- 
toyens notables,  est  chargée  de  la  surveillance  de 
l'école;  elle  nomme  le  directeur  artistique.  A  Leip- 
zig, on  a  rétabli  depuis  peu  la  place  de  directeur 
musical,  supprimée  depuis  la  mort  de  Mendelssohn. 
On  voit  qu'en  Allemagne  la  direction  prend  des  for- 
mes assez  diverses. 

Les  intérêts  généraux  de  l'école  sont  discutés  par 
l'assemblée  des  professeurs,  sous  la  présidence  du 
directeur. 

Les  élèves  sont  admis  après  un  examen  spécial.  Il 
n'y  a  pas  de  concours  d'entrée.  Le  nombre  n'en  est 
pas  limité,  et  le  jury  accepte  tous  ceuxqui  lui  parais- 
sent bien  doués.  La.  limite  d'âge  miuima  est  généra- 
lement plus  tardive  qu'en  France,  excepté  à  Leipzig, 
où  aucune  limite  n'est  lixée.  On  exige  des  aspirants 
une  instruction  générale  suffisamment  solide,  et  il 
paraîtrait  inadmissible  qu'un  musicien  distingué  ne 
sût  pas  l'orthographe  et  les  éléments  de  l'histoire 
politique  et  littéraire  de  son  pays. 

«  Tout  élève,  au  Conservatoire,  a  le  droit  de  choi- 
sir sa  branche  principale,  objet  spécial  de  ses  études  : 
le  chant,  le  piano,  le  violon,  un  instrument  quelcon- 
que, rarement  la  composition  musicale.  Mais  il  ne 
doit  pas  négliger  les  branches  secondaires  obligatoires  : 
elles  seront,  à  la  tin  de  ses  études,  lorsqu'il  postu- 
lera le  certificat  de  maturité,  l'objet  d'un  examen 
méthodique  au  même  titre  que  la  spécialité  choisie. 
C'est  ainsi  que,  dans  les  écoles  musicales  allemandes, 
le  piano,  l'harmonie  dans  sa  théorie  générale  et  dans 
ses  applications  élémentaires,  le  chant  choral  pen- 
dant trois  ans,  V histoire  de  la  musique  dans  le  cercle 
complet  de  ses  périodes,  sont  imposés  à  tous  les 
élèves.  On  ne  conçoit  pas,  en  Allemagne,  qu'un  vir- 
tuose s'efforce  d'acquérir  un  talent  .1  monogame)). 
Il  n'y  a  pas  de  concours,  comme  en  France.  La 
sanction  des  études  consiste  en  uncertificat  de  matu- 
rité, qui  est  comme  un  diplôme  et  qui  confère  à  celui 
qui  le  possède  le  droit  d'enseigner  la  musique.  Ce 
certificat  s'obtient  à  la  suite  d'un  examen  individuel 
sérieux  et  difficile,  portant  à  la  fois  sur  la  branche 
principale  et  sur  les  branches  secondaires  obligatoires. 
Telle  est,  en  résumé  et  dans  son  ensemble,  l'orga- 
nisation des  Conservatoires  en  Allemagne  et  en  Au- 


triche. On  voit  combien  elle  ditl'ère  de  ce  qui  est 
pratiqué  en  France.  L'esprit  de  l'une  et  de  l'autre 
nation  explique  et  justifie  cette  différence.  «  Nous 
pensons  et  nous  parlons  avec  rapidité,  avec  clarté  : 
chez  nous  l'amour  de  la  précision  va  quelquefois 
jusqu'à  la  sécheresse.  Les  Allemands  ont  du  rêve 
dans  l'àme,  toujours,  et  leur  pensée,  qui  se  complaît 
en  elle-même,  s'enveloppe  dans  les  formes  compli- 
quées d'un  langage  très  riche,  dont  la  netteté  n'est 
pas  la  qualité  première.  » 

Au  Conservatoire  de  Vienne  seulement,  existe  l'en- 
seignement de  la  déclamation  dramatique.  Partout 
ailleurs,  la  musique  seule  règne  en  souveraine. 

Il  est  à  remarquer  que  l'étude  du  solfège,  qui  est 
si  développée  chez  nous  et  considérée  comme  la  base 
des  études  postérieures,  est  presque  inconnue  en 
Allemagne.  On  n'eu  fait  qu'un  usage  très  restreint. 
En  revanche,  le  chant  choral  y  a  une  importance 
considérable  et  tous  les  élèves  y  sont  astreints.  Les 
exercices  publies  y  sont  aussi  fort  en  honneur,  et  les 
élèves  de  composition  peuvent  y  produire  et  y  diri- 
ger leurs  essais. 

Pour  être  à  peu  près  complètes,  ces  informations 
doivent  aussi  signaler  qu'en  Allemagne  renseigne- 
ment du  contrepoint  et  de  l'harmonie  est  volontai- 
rement confondu.  Le  contrepoint  rigoureux  n'y  est, 
pour  ainsi  dire,  plus  enseigné,  et  les  étude'-  qu'on 
fait  dans  ce  genre  correspondent  à  peu  près  à  ce  qui 
se  pratique  dans  les  classes  d'harmonie  en  Fiance, 
où  l'enseignement  est  poussé  très  loin,  aus^i  bien  au 
point  de  vue  théorique  qu'au  point  de  vue  technique, 
et  où  les  travaux  des  élevés  pourraient  être  qualifiés 
de  contrepoint  moderne.  Ce  n'est  point  ici  le  lieu  de 
rechercher  quel  est  le  meilleur  des  deux  systèmes; 
on  peut  cependant  regretter  que,  sous  prétexte  de 
rajeunir  le  contrepoint,  on  t'ait  presque  complète- 
ment abandonné.  Au  point  de  vue  purement  vocal, 
c'est  un  exercice  très  salutaire,  et  ou  peut  dire  avei 
raison  que  «  conserver  dansles  études  toute  sa  rigueur 
au  contrepoint,  ce  n'est  pas  faire  de  l'art  archaïsant, 
au  détriment  de  l'art  contemporain;  c'est  obliger 
l'élève  à  réaliser,  dans  une  écriture  irréprochable, 
l'organisme  le  plus  délicat  de  notre  art  :1e  chœur  à  plu- 
sieurs voix,  sans  accompagnement  «...  La  maîtrise 
qu'on  acquiert  par  l'étude  du  contrepoint  vocal  rigou- 
reux vaut  bien  quelques  efforts,  et  le  jeune  artiste 
qui  le  pratique  est  largement  payé  de  sa  peine,  d'au- 
tant que  le  contrepoint  soi-disant  rajeuni  ou  moderne 
ne  peut  produire  le  même  résultat. 


D'autres  écoles  moins  importantes  existent  encore 
en  Allemagne  et  en  Autriche,  qui  méritent  d'être 
signalées,  ce  sont  : 

Le  Conservatoire  de  Prague',  fondé  en  1811.  Dans 
cette  école,  on  enseigne,  outre  la  musique,  qui  est 
la  branche  principale,  la  religion  catholique,  la 
grammaire  allemande,  la  géographie,  etc.  C'est 
donc  une  sorte  d'Université. 

Le  Conservatoire  Hem,  la  plus  ancienne  école  de 
musique  de  la  ville  de  Berlin,  fut  fondé  en  1850,  et 
est  actuellement  encore  très  florissant. 

Le  Conservatoire  de  Dresde'1,  fondé  en  18.Ï6,  com- 
prend des  classes  d'instruments,  d'opéra,  de  décla- 
mation, et  de  pédagogie  pour  former  des  profes- 
seurs. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Le  Conservatoire  de  Stuttgard1,  composé  de  deux 
sections  distinctes,  L'une  pour  les  artistes,  l'autre 
pour  les  amateurs,  a  eu  une  grande  renommée,  sur- 
tout au  point  de  vue  de  l'enseignement  du  piano. 

L'Ecole  nationale  de  musique  de  V/urzbourq\  fondée 

.MltSlII. 

Le  Conservatoire  lloch1  à  Francfort,  récemment 
fondé  (en  1878),  brillamment  doté  par  un  riche  ama- 
teur, est  appelé  à  un  grand  développement;  son 
avenir  semble  certain. 

Puis  encore  d'autres  écoles,  qu'il  suffit  de  men- 
tionner : 

L'Institut  royal  de  musique  d'église,  à  Breslau;  le 
Conservatoire  de  Hambourg;  l'Ecole  de  musique  reli- 
gieuse, à  Ratisbonne;  Ecole  granducale  d'orchestre 
et  de  musique,  à  W'eimar;  Ecole  de  musique  franc- 
fortoise;  Conservatoire  Raff;  Conservatoire  granducal 
de  Carlsruhe;  Conservatoire  de  Wiesbaden;  Conserva- 
toire  Scharwenka  à  Berlin; 

l'Académie  nationale  de  Budapest  ;  le  Conservatoire 
national  (même  ville)*,  et  l'Académie  de  musique,  à 
Bude; 

L'Ecole  de  musique  de  Graz;  les  écoles  de  musique 
d'Innspruek,  de  Lemberq,  de  Salzbourq. 

Italie. 

L'Italie  est  très  riche  en  Conservatoires  et  écoles 
de  musique.  Les  plus  importants  de  ces  établisse- 
ments sont  ceux  de  Milan,  Turin,  Venise,  Bologne, 
Florence,  Parme,  Home,  Pesaro,  Naples,  Païenne. 

On  pourrait  croire  que  le  mot  conservatoire,  qui 
vient  de  l'italien  conservatorio,  a  pour  significa- 
tion :  établissement  destiné  à  la  «conservation  »  de 
l'art.  11  n'en  est  rien.  Comme  on  l'a  vu  plus  haut, 
les  premiers  Conservatoires  étaient  des  orphelinats 
portant  le  nom  à'ospedale  (hôpital). 

Milan.  —  Milan,  qui  peut  être  considéré  comme  la 
capitale  musicale  de  l'Italie,  possède  le  Conservatoire 
le  plus  important.  Son  nom  est  :  Conservatoire  Royal 
Verdi. 
Il  date  de  1807. 

La  pédagogie  artistique  y  est,  comme  dans  toutes 
les  autres  écoles  d'Italie,  très  différente  de  ce  qu'elle 
est  en  Allemagne.  Elle  se  rapproche  davantage  delà 
notre,  c'est-à-dire  qu'elle  est  plutôt  pratique  que 
théorique,  encyclopédique,  philosophique.  Elle  est 
adaptée  au  caractère  de  la  nation,  caractère  vivant, 
ardent,  vibrant,  peu  porté  vers  le  rêve. 

Le  Conservatoire  de  Milan  reçoit  une  subvention 
de  100.000  fr. 

C'est  le  plus  richement  doté  de  l'Italie. 
L'enseignement,  fortement  basé  sur  le  classique, 
a  un  œil  volontiers  ouvert  sur  le  moderne,  sans  que 
cette  tendance  soit  exagérée.  L'harmonie,  le  contre- 
point, la  fugue,  la  composition  et  l'étude  des  instru- 
ments tiennent  la  plus  grande  place  dans  l'enseigne- 
ment. Les  résultats  sont  excellents.  Moins  satisfai- 
sants sont  ceux  des  classes  de  chant,  peu  suivies  par 
les  élèves  hommes.  Pourquoi?  Une  des  raisons  ne 
serait-elle  pas  que,  les  scènes  n'étant  pas  subven- 
tionnées, aucun  avantage  particulier  n'est  assuré 
aux  élèves  sortants,  et  que  ceux-ci  n'ont  pas,  comme 
en  France,  le  droit  d'être  engagés  au  théâtre?  Les 
professeurs  libres  font,  sur  ce  point,  une  concurrence 
redoutable  au  Conservatoire. 


Les  ouvrages  didactiques  adoptés  pour  les  classes 
d'harmonie,  de  contrepoint  et  fugue,  de  composi- 
tion, sont  à  peu  près  les  mêmes  que  ceux  du  Con- 
servatoire de  Paris. 

Parmi  les  travaux  des  élèves  de  composition,  qui 
sont  très  divers,  musique  de  chant,  musique  de  cham- 
bre, musique  d'orchestre,  etc.,  ou  choisit  les  mor- 
ceaux qui  devront  figurer  aux  programmes  des 
exercices  publics  de  fin  d'année,  lesquels  sont  don- 
nés par  l'orchestre  des  élèves,  renforcé  de  quelques 
artistes  étrangers. 

Les  élèves  sont  admis  au  Conservatoire  après  exa- 
men, mais  l'admission  n'est  définitive  que  l'année 
suivante,  après  un  nouvel  examen  (csame  di  con- 
t'erma).  Arrivé  à  sa  septième  année  (ou  avant,  selon 
avis  favorable  du  professeur),  l'élève  subit  l'examen 
de  promotion  qui  lui  permet  de  passer  du  cours 
normal  au  cours  supérieur,  lequel  comporte  encore 
deux  années  d'étude.  Epreuves  de  l'examen  de  pro- 
motion :  pour  les  compositeurs  :  une  fugue,  un  ma- 
drigal, et  une  mélodie  sur  des  thèmes  donnés  par  la 
commission.  Les  élèves  sont  enfermés  en  loge  pen- 
dant un  maximum  de  18  heures.  Pour  les  instru- 
mentistes :  deux  études  tirées  au  soit  eu  leur  pré- 
sence par  la  commission  (sur  huit  présentées),  un 
morceau  de  concert  préparé  par  l'élève  à  son  choix, 
déchiffrage  et  transposition  un  ton  au  dessus  et  un 
ton  au  dessous. 

L'examen  de  licence,  qui  donne  à  l'élève  le  diplôme 
de  professeur,  comporte  pour  les  compositeurs  :  une 
fugue  sur  thème  donné,  un  madrigal  ou  un  chœur 
sur  livret  donné,  un  temps  de  sonate  pour  piano 
et  violon  sur  thème  donné,  une  scène  dramatique 
pour  chant  et  orchestre  sur  livret  donné  (pour  cha- 
que épreuve,  ou  donne  un  maximum  de  dix-huit 
heures  de  loge),  la  lecture  d'un  morceau  de  parti- 
lion  d'orchestre.  Pour  les  instrumentistes  :  deux 
études  tirées  au  sort  par  l'élève  sur  huit  qu'il  a  pré- 
sentées; les  pianistes  tirent  au  sort,  vingt-quatre 
heures  avant  l'examen,  une  des  fugues  du  Clavecin 
bien  tempéré  de  Bach,  un  morceau  de  concert  choisi 
par  l'élève;  puis.ee  sont  :  déchilfrage  et  transposi- 
tion, exécution  d'un  morceau  choisi  par  la  commis- 
sion et  pour  l'étude  duquel  l'élève  est  enfermé  en  loge 
pendant  trois  heures,  interrogations  sur  l'histoire 
de  l'instrument  et  exposition  d'une  méthode  d'en- 
seignement. 

Telles  sont  les  sérieuses  épreuves  remplaçant  nos 
concours  de  fin  d'année.  Si  elles  flattent  moins  la 
vanité,  elles  ont  au  moins  l'avantage  île  confirmer 
par  un  diplôme  précieux  et  bien  mérité  les  connais- 
sances acquises. 

Afin  d'habituer  les  élèves  à  jouer  en  public,  cha- 
que classe  donne  des  séances  dans  une  petite  salle 
contenant  deux  cents  personnes.  Eu  outre,  trois  ou 
quatre  exercices  publics  ont  lieu  chaque  année  en 
juin  dans  la  grande  salle,  contenant  quinze  cents 
personnes.  Les  élèves  instrumentistes  désignés  par  le 
conseil  (directeur  et  quatre  professeurs)  y  jouent 
avec  accompagnement  d'orchestre,  de  piano  ou  d'or- 
gue; puis,  figurent  au  programme  les  meilleures 
compositions  des  élèves  compositeurs. 

L'enseignement  est  donné  par  des  maîtres  émi- 
nents  qu'on  ne  peut  nommer  tous  dans  un  ouvrage 
de  ce  genre,  et  la  direction  de  M.  Pizzetti  est  au- 
dessus  de  tout  éloge. 


Dir.  prof.  ' 
.  Dir.  prof. 


■i.  If  Jtochs  Komenatorium.  Dir.  B.  S 
4.  Franz  Litzt  Landesltoclischule  pli- 
lonai  «ontero.  far  Viiik. 


Budapest  Ung. 


TECH.VIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    345? 


Telle  est  l'organisation  de  l'enseignement  au  Con- 
servatoire royal  Verdi  de  Milan,  qui  passe,  à  bon 
droit,  pour  le  plus  complet  de  l'Italie. 


Les  autres  écoles  de  musique  de  ce  pays  présen- 
tent presque  toutes  un  grand  et  réel  intérêt,  autant 
par  la  qualité  des  professeurs  que  par  l'ardeur  des 
élèves.  Partout,  un  grand  souci  du  progrès.  Quelques 
différences  sont  à  signaler  dans  les  programmes; 
c'est  pourquoi  chaque  école  doit  être  l'objet  d'une 
étude  particulière.  Cette  étude  sera  moins  étendue 
que  pour  le  Conservatoire  royal  Verdi,  qui  peut,  en 
quelque  sorte,  être  considéré  comme  type  général. 

Turin.  —  Le  Liceo  musicale  di  Torino  G.  Verdi*, 
fondé  en  1867  par  Pedrotti,  et  actuellement  dirigé 
par  Franco  Alfa.no,  porte  principalement  ses  efforts 
vers  l'harmonie,  le  contrepoint,  la  composition.  Le 
chant  y  semble  peu  cultivé. 

Venise.  —  A  Venise,  le  Conservatorio  civico  Bene- 
delto  Marcello  est  installé  dans  le  palais  Pisani.  Il  a 
été  fondé  en  1887,  et  reçoit  une  subvention.  Les  pro- 
fesseurs d'harmonie  sont,  en  même  temps,  profes- 
seurs de  contrepoint,  et  la  fugue,  pratiquée  dans  la 
classe  de  composition,  a  toutes  les  allures  de  la 
fugue  libre,  indépendante2. 

L'enseignement  du  chant,  ce  bel  canto  autrefois 
si  florissant  en  Italie,  périclite  aussi  quelque  peu  à 
Venise,  comme  dans  beaucoup  d'autres  villes.  Les 
impresarii,  pressés  de  rendre  immédiatement  les 
belles  voix  productives,  sont  à  leur  recherche  et  dé- 
tournent les  jeunes  artistes  d'études  nécessaires 
qui,  autrefois,  occupaient  plusieurs  années.  C'est  un 
signe  des  temps  :  tout  doit  se  faire  rapidement.  El 
puis,  où  est  le  bel  canto  dans  les  compositions  mo- 
dernes, et  pourquoi  les  jeunes  chanteurs  consacre- 
raient-ils tant  de  temps  à  étudier  un  art  qu'ils  ne 
trouvent  presque  jamais  l'occasion  d'exercer?  Là, 
peut-être,  est  la  raison  de  la  faiblesse  des  études  de 
chant,  non  seulement  en  Italie,  mais  généralement 
un  peu  partout. 

L'enseignement  des  instruments  à  cordes  est  très 
brillant  au  Conservatorio  Benedetto  Marcello.  La  classe 
de  quatuor  donne  des  résultats  excellents,  et  aide 
puissamment  à  répandre  le  goût  de  la  musique  de 
chambre. 


Bologne.  —  A  Bologne  le  conservatoire  est  muni- 
cipal. Il  a  pour  titre  Liceo  musicale  G.  B.  Martini. 
C'est  une  des  plus  anciennes  écoles  de  musique  de 
l'Italie.  Elle  fut  fondée  il  y  a  plus  de  cent  ans  par  le 
père  Martini.  Sous  l'impulsion  du  directeur  actuel, 
Césare  N'ordio,  cette  école  ne  peut  manquer  de  don- 
ner des  résultats  brillants.  Le  chant  y  est  en  honneur, 
et  les  instruments  à  cordes  sont  depuis  longtemps  la 
gloire  principale  du  conservatoire  de  Bologne. 

Une  subvention  municipale  de  60.000  francs3  vienl 
encourager  ses  efforts.  Des  examens  seulement  sont 
la  sanction  des  études.  Le  nombre  des  élèves  s'élève 
environ  à  deux  cent  cinquante. 

Florence.  —  Florence  possède  le  Rrgio  htituto 
musical''  Luiiji  Chcrubini,  sous  la  direction  d'Alberto 


Franchetti1.  Cette  école  reçoit  de  l'Etat  une  subven- 
tion d'environ  80.000  francs.  Le  chant  y  est  très 
cultivé.  Les  femmes  sont  admises  dans  toutes  les 
classes,  et  l'on  a  vu  une  jeune  Uùtiste  obtenir  un 
diplôme  de  licence. 

Le  directeur  donne  régulièrement  des  séances 
d'orchestre  et  de  chœurs  consacrées  soit  aux  «  Ou- 
vertures dans  l'art  italien  »,  soit  à  la  «  musique  tos- 
cane »,  soit  à  «  Lulli  et  Cherubini,  les  deux  maîtres 
florentins  »,  soit  simplement  pour  «  l'exercice  et  la 
culture  des  élèves  ».  On  y  a  même  produit  Manfred 
de  Schumann,  avec  le  concours  de  «  l'école  royale  de 
déclamation  ». 

Cette  école  est  des  plus  intéressantes. 

Parme.  —  Le  Regio  Conservatorio  di  musica  de 
Parme  est  une  des  écoles  de  musique  les  plus  réputées 
de  l'Italie. 

Sous  ce  titre,  //  Reale  Conservatorio  di  musica  in 
Parma,  M.  Guido  Gasperini  a  publié  un  excellent 
résumé  historique  sur  cette  école  intéressante,  où 
il  occupe  les  doubles  fonctions  de  bibliothécaire 
et  de  professeur  d'histoire  de  la  musique.  11  résulte 
de  ce  résumé  que  le  Conservatoire  de  Parme,  établi 
dans  les  bâtiments  d'un  ancien  couvent  de  Carmé- 
lites, a  succédé  à  une  simple  école  de  chant  l'ondée 
en  1818,  et  devenue  plus  tard  Ecole  royale  de  musi- 
que. Il  n'a  pris  le  titre  de  Conservatoire  qu'en  1888. 
Après  toute  une  série  de  progrès  successifs,  il  pos- 
sède aujourd'hui  un  enseignement  complet,  vocal  et 
instrumental,  qui  comprend  toutes  les  branches  de 
l'art,  et  les  élèves  ont  à  leur  disposition  une  biblio- 
thèque qui  ne  compte  pas  moins  de  42.000  volumes. 
Les  directeurs  de  l'ancienne  Ecole,  depuis  1818 
jusqu'à  sa  transformation  en  Conservatoire,  ont 
été  Ferdinando  Simonis,  Giuseppe  Alinovi,  Giovanni 
Rossiet  Giusto  Dacci.  C'est  le  fameux  contrebassiste 
et  compositeur  Bottksimi  qui  fut,  en  1888,  le  premier 
directeur  du  Conservatoire  proprement  dit;  lui  suc- 
cédèrent :  Franco  Faccio  (1890),  M.  Giuseppe  Galli.- 
g.nani  (1891,  ancien  directeur  du  Conservatoire  de 
Milan),  M.  Giovanni  Tebaldini  (1897),  M.  Amilcare  Za- 
nella  (1903),  M.  Guido  Alberto  Fano  (1903,  qui  fut  di- 
recteur du  Conservatoire  de  Naples),  et  enfin  M.  Gu- 
glielmo  Zuelli  (1911).  —M.  Gasperini  termine  son 
intéressant  résumé  historique  en  donnant  de  courtes 
notices  biographiques  sur  les  professeurs  actuels  du 
Conservatoire. 

L'école  jouit  d'une  réputation  méritée.  Elle  est 
une  des  rares  qui  reçoivent  des  pensionnaires. 
Comme  presque  partout  le  chant  y  est  très  négligé., 
hélas!  La  classe  n'a  que  huit  élèves! 

Rome.  —  Le  Regio  l'unscrralori"  di  musica  di  Santa. 
Cecilia  à  Rome  est  dirigé  par  le  maestro  Giuseppe 
Mule5.  Cette  école,  d'une  grande  importance,  reçoit 
une  subvention  de  80.000  francs11.  Les  études  y  sont 
très  actives  et  le  chant  y  est  particulièrement  en 
grand  honneur,  grâce  surtout  à  Mme  Falchi,  chan- 
teuse remarquable. 

Il  y  a  un  cours  spécial  pour  la  tragédie  et  la  co- 
médie, mais  là,  pas  plus  qu'ailleurs,  on  ne  trouve;, 
comme  en  France,  d'enseignement  pour  la  déclama- 
tion lyrique. 

Des  artistes  lyriques  brillants  sont  pourtant  sortis 
du  Conservatoire  de  Rome.  Parmi  eux,  il  faut  citer 


6.  Presque  tous  les  renseignements  concernant  les  conservaloin 
l'Italie  oui  pour  source  principale   les    rapports  laits   par  M.   Eugèl 
uveruement  français.   Il  \ 
is    rapports   sont   des    pri 


:urur,  charge  de   m 

lire   que   les  pris  indiqué 

t  guerre. 


Copyrigth  by  Librairie  Delagrave,  1929. 


217 


3458 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


le  ténor  Signorini  et  le  ba- 


il»»"  PlNTA   et    PETRELL; 

rvton  de  Lucca. 

Des  examens  sanctionnent  les  études. 

Tous  les  élèves  sont  obligés  de  suivre  un  cours 
élémentaire  de  piano  et  d'harmonie.  On  ne  peut  que 
louer  cette  mesure.  L'enseignement,  basé  sur  le 
classique,  poursuit  sa  marche  vers  le  moderne  pour 
s'arrêter  à  Wagner.  Il  est,  de  tous  les  conservatoires 
italiens,  celui  qui  jette  le  regard  le  plus  favorable 
sur  la  musique  française. 

En  général,  l'enseignement  dans  cette  école  est 
l'objet  de  soins  minutieux  pour  toutes  les  spécialités. 


Naples.  —  Le  Conservatoire  de  Naples  [Regio  Con- 
servatorivdi  musica  diNapoli)  date  de  1500.  C'est  le 
plus  ancien  de  l'Italie.  L'éminent  compositeur  Mar- 
ti'cci  en  a  été  le  directeur,  qui  est  actuellement 
Francesco  Cilea1.  La  tendance  actuelle  de  l'ensei- 
gnement est  plutôt  dirigée  vers  la  symphonie,  et, 
au  point  de  vue  dramatique,  Wagner  est  le  modèle 
admiré.  Singulier  signe  des  temps  et  de  l'évolution 
accomplie!  Naples,  berceau  et  asile  de  l'opéra  bouffe, 
Naples,  ville  du  rire,  devenue  le  temple  du  wagné- 
risme! 

11  y  a  un  internat  qui  reçoit  30  ou  40  pensionnaires, 
dont  quelques-uns  payent  un  faible  droit  d'entrée,  et 
les  autres  une  pension  annuelle  de  800  francs. 

Près  de  trois  cents  élèves  reçoivent  l'enseignement 
dans  cette  école,  où  les  classes  de  chaut  sont  excep- 
tionnellement très  suivieset  brillamment  professées. 

Excepté  pour  la  composition  et  le  violoncelle,  les 
sexes  sont  séparés  dans  toutes  les  autres  classes. 
Les  cours  de  piano  sont  ceux  qui  attirent  le  plus 
grand  nombre  d'élèves. 

Le  système  des  concours,  en  si  grand  honneur  et 
si  grande  faveur  en  France,  est  inconnu  à  Naples, 
comme  dans  toutes  les  autres  villes  d'Italie.  Seuls, 
des  examens  sanctionnent  les  études. 

A  signaler  une  classe  dont  il  y  a  fort  peu  d'exemples 
dans  les  autres  conservatoires  du  monde  entier  : 
celle  d'acoustique!  Voilà  un  culte  rendu  à  la  science 
pure  et  qui  permet  aux  élèves  d'apprendre  bien  des 
choses  généralement  ignorées! 


Pesaro.  —  Rossini  a  légué  à  la  ville  de  Pesaro 
une  somme  de  3  millions  pour  la  fondation  d'une 
école  de  musique  qui  porte  le  nom  de  Liceo  musi. 
cale  Rossini.  Toutes  les  branches  de  l'enseignement 
y  sont  représentées.  Eu  outre  des  classes  usuelles 
qui  forment  le  fond  de  toutes  les  écoles  de  musique, 
il  y  a  dans  celle-ci  une  classe  d'alto,  une  classe  d'o- 
péra, une  classe  d'instrumentation  pour  musique 
militaire,  une  classe  d'esthétique,  une  classe  pour  la 
musique  religieuse  et  le  chant  grégorien. 

Les  cours  les  plus  suivis  sont  ceux  décomposition, 
de  piano  et  de  violon.  Le  chant  y  est  quelque  peu 
négligé. 

L'enseignement  n'est  pas  gratuit,  mais  quelques 
bourses  sont  attribuées.  Les  pensionnaires  versent 
annuellement  une  somme  maximum  de  500  francs. 

Le  Liceo  musicale  Rossini  est  actuellement  sous  la 


direction  du  compositeur   Zanella,   précédemment 
directeur  du  Conservatoire  de  Parme. 


Palerme.  —  Le  Rt't/in  Comcrrutorio  di  musica  V.  Bel- 
linide  Palerme  fut  fondé  en  1615  sous  le  nom  de 
Conservatorio  del  Buon  Pastore.  Il  a  pour  directeur  le 
maestro  Antonio  Savasta2,  qui  donne  à  son  école  une 
impulsion  très  vigoureuse  et  très  nette.  Les  tendan- 
ces de  l'école  se  résument  en  ceci  :  «  le  classicisme 
le  plus  vrai  et  le  plus  élevé  »,  et  voici  les  modèles 
proposés  aux  élèves  :  pour  la  musique  pure,  Pales- 
trina,  Corelli;  pour  la  polyphonie  vocale,  Zarli.no; 
pour  les  fugues,  le  père  Martini  et  Bach;  pour  la 
musique  dramatique,  Montevirde,  Piccini,  Bellini, 
Wagner. 

Sur  un  théâtre  que  possède  le  Conservatoire,  on 
exécute  de  petits  opéras  des  élèves  de  composition. 
L'orchestre,  les  artistes,  les  choeurs  sont  exclusive- 
ment recrutés  parmi  les  élèves  de  l'école. 

Tous  les  élèves,  sauf  quelques  boursiers,  payent 
une  taxe  scolaslique  de  50  fr.  par  an.  En  outre,  quel- 
ques internes  hommes  (l'internat  n'existe  pas  pour 
les  femmes)  payent  une  pension  annuelle  de  500  fr. 


Quelques  aulres  villes  d'Italie  possèdent  des  écoles 
de  moindre  importance,  mais  qui  méritent  cepen- 
dant d'être  signalées.  C'est,  à  Gênes,  le  Civico  Conser- 
vatorio di  musica  N.  Payajiini2,  dont  les  elforts  por- 
tent principalement  sur  la  culture  générale  du  chant 
(«  classe  de  chant  choral  »),  solfège  parlé  et  chanté. 

—  A  Brescia,  Civico  lstituto  musicale  Venturi*,  où 
l'on  s'occupe  plus  spécialement  df-s  instruments  à 
cordes  et  de  l'étude  du  chant  choral.  —  A  Ferrare, 
Scuola  musicale  Frescobaldi,  où  tous  les  instruments 
sont  enseignés,  excepté  le  piano,  la  harpe  et  l'orgue. 

—  A  Ravenne,  lstituto  Giuscppe  Verdi,  où  les  prin- 
cipaux efforts  sont  dirigés  vers  l'élude  du  cor,  ins- 
trument devenu  une  spécialité  curieuse,  intéressante 
et  quasi  célèbre  de  l'école  de  Ravenne.  —  A  Rimini, 
à  Padoue  et  à  Catane,  de  petites  écoles,  dont  les 
efforts  ne  sont  pas  inutiles  à  la  diffusion  et  au  pro- 
grès de  l'art.  Enfin,  il  convient  de  signaler  à  Rome, 
VIstituto  Nazionale  di  musica,  dir.  Riccardo  Storti0. 

On  voit  quelle  place  tient  l'enseignement  de  la 
musique  en  Italie.  On  y  aime  passionnément  cet  art 
et  on  le  cultive  avec  amour. 

Belgique '• 

Si  l'on  considère  la  Belgique  au  point  de  vue  de 
l'étendue  de  son  territoire,  on  est  étonné  de  la  quan- 
tité et  de  l'importance  des  écoles  de  musique  qu'elle 
possède.  C'est  peut-être  le  pays  du  monde  où  elles 
soient  relativement  aussi  nombreuses.  II  n'est  pour 
ainsi  dire  pas  de  petite  ville  qui  n'ait  son  école  de 
musique.  Comme  les  Allemands,  les  Relges  aiment 
la  musique,  et  la  divulgation  de  son  enseignement 
répond  à  un  besoin  réel  de  la  population. 

Bruxelles.  —  En  première  ligne  se  place  le  Con- 
servatoire Royal  de  Bruxelles,  l'un  des  plus  consi- 
dérables du  monde,  dirigé  aujourd'hui  par  l'éminent 
compositeur  Joseph  Jongen. 


98. 


5.  Musik.  Kal.,  Il,  p.  65. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3459 


Il  fut  fondé  en  1813  comme  école  municipale  de 
musique  et  ne  devint  institution  de  l'Etat  qu'en  1832, 
avec  Fétis  comme  ^directeur,  auquel  ont  respective- 
ment succédé  F. -A.  Gevaert,  Edgar  Tinel  et  Léon  Du- 
Bois. 

L'enseignement  y  est  gratuit  pour  les  nationaux, 
mais  les  étrangers  y  sont  admis  moyennant  une  re- 
devance annuelle  de  1000  francs. 

L'enseignement  du  Conservatoire  comprend  les 
matières  suivantes  :  la  théorie  élémentaire  de  la 
musique  et  le  solfège;  le  chant  individuel  (monodie)  ; 
le  chant  d'ensemble;  la  diction  et  la  déclamation 
françaises;  la  déclamation  lyrique  et  les  études  dra- 
matiques; la  mimique;  l'exercice  des  instruments 
employés  parles  compositeurs  modernes;  l'ensemble 
instrumental  (musique  de  chambre  et  musique  d'or- 
chestre); l'harmonie,  le  contrepoint,  la  fugue,  et  la 
composition. 

Outre  le  personnel  administratif,  à  la  tèle  duquel 
est  le  directeur,  il  existe  une  commission  de  sur- 
veillance composée  de  douze  membres,  non  compris 
le  bourgmestre  de  Bruxelles,  qui  en  est  le  président 
d'honneur. 

Pour  être  admis,  chacun  des  postulants  est  exa- 
miné par  le  directeur  et  le  professeur  dont  il  désire 
suivre  le  cours.  S'il  s'agit  d'un  cours  donné  par  plus 
d'un  titulaire,  le  postulant  est  examiné  par  les  divers 
professeurs  de  ce  cours,  réunis  à  cet  eliet.  S'ils  con- 
cluent à  l'admission,  la  classe  qu'il  doit  suivre  lui 
est  indiquée  par  le  directeur. 

Le  nombre  maximum  d'élèves  effectifs  est  fixé  à 
douzeparclasse.il  y  a, en  outre, des  élèves  auditeurs 
admis  el  d'autres  élèves  simplement  autorisés  à  assis- 
ter à  la  leçon.  Ceux-ci  sont  en  nombre  indéterminé. 

En  dehors  du  cours  principal  auquel  ils  ont  été 
admis,  les  élèves  sont  tenus  de  fréquenter  les  cours 
parallèles  qui  leur  sont  indiqués.  Ces  cours  sont  ceux 
de  solfège,  de  lecture  musicale,  d'harmonie  théorique, 
d'harmonie  écrite,  d'harmonie  pratique  (réalisée  au 
clavier),  d'ensemble  vocal,  de  classe  d'orchestre,  de 
déclamation  pour  les  élèves  des  classes  de  chant. 

La  sanction  des  études  consiste  en  examens,  con- 
cours, diplômes  de  virtuosité. 

Les  classes  el  les  élèves  admis  à  concourir  sont 
désignés  à  la  suile  d'un  examen  général  que  préside 
le  directeur. 

Les  concours  sont  publics,  à  l'exception  de  ceux  de 
solfège  et  de  fugue,  d'harmonie,  de  contrepoint,  qui 
ont  lieu  à  buis  clos. 

Dans  les  classes  instrumentales,  outre  un  morceau 
généralement  imposé  et  un  morceau  au  choix,  les 
concurrents  doivent  exécuter  de  mémoire  un  mor- 
ceau choisi  par  le  jury  dans  une  liste  présentée 
par  eux. 

Le  concours  de  chant  comporte  deux  degrés  : 

a)  Degré  inférieur,  concours  à  huis  clos; 

b)  Degré  supérieur,  concours  public. 

Le  diplôme  de  virtuosité  peut  être  obtenu  par  les 
élèves  pianistes,  organistes,  violonistes,  violoncel- 
listes et  autres  instrumentistes,  chanteurs,  et  par 
ceux  des  classes  d'art  lyrique,  de  tragédie,  comédie 
et  de  musique  de  chambre. 

Voici,  comme  spécimen,  les  épreuves  auxquelles 
sont  soumis  les  chanteurs;  ou  en  déduira  facile- 
ment celles  qui  s'appliquent  aux  autres  spécialités  : 

a)  deux  airs  d'opéra  et  deux  airs  d'oratorio  du 
répertoire  antérieur  au  xix=  siècle; 

6)  deux  airs  ou  scènes  de  compositeurs  du  xixe  siè- 
cle (dont  un  d'oratorio); 


c)  trois  airs  ou  scènes  de  compositeurs  contempo- 
rains, dont  un  d'oratorio  et  un  de  musique  belge; 

d)  huit  mélodies,  dont  une  de  Schubert,  Schumann, 
Brahms,  Fauré,  et  deux  d'auteurs  belges. 

Le  directeur  a  toute  autorité  sur  l'enseignement, 
les  études  et  la  discipline;  il  prononce  l'admission 
et  le  renvoi  des  élèves. 

Quinze  bourses  de  500  fr.  peuvent  être  conférées 
à  des  élèves  après  leur  première  année  d'études.  En 
outre,  deux  bourses  de  300  fr.  chacune  peuvent  être 
attribuées  à  des  élèves  de  chant. 

Les  concerts  du  Conservatoire  de  Bruxelles  ont  une 
réputation  méritée.  Ils  sont  donnés  avec  le  concours 
des  professeurs,  des  anciens  élèves  et  des  élèves  du 
Conservatoire.  Ils  constituent  depuis  1926  une  asso- 
ciation autonome,  à  la  tète  de  laquelle  se  trouve  le 
directeur  des  concerts  du  Conservatoire. 

Ce  résumé  sur  le  fonctionnement  du  Conservatoire 
de  Bruxelles  et  sur  son  organisation  montre  à  peu 
près  autant  d'analogie  avec  ce  qui  se  pratique  en 
Allemagne  qu'avec  ce  qui  se  pratique  en  France.  Un 
éclectisme  a  présidé  à  l'élaboration  des  règlements, 
et  il  semble  qu'on  ait  eu  pour  objectif  d'adopter  ce 
qu'il  y  a  de  meilleur  dans  les  deux  pays.  Les  résul- 
tats prouvent  qu'on  a  eu  raison,  et  font  du  Conser- 
vatoire de  Bruxelles  un  établissement  de  tout  pre- 
mier ordre. 


Trois  autres.  Ecoles  de  musique  de  la  Belgique 
portent  le  litre  de  :  Conservatoire  royal.  Ce  sont 
celles  de  Liège,  Gand  et  Anvers. 

A  la  première  appartient  la  priorité  de  l'ancien- 
neté. 

Liège.  —  o  Liège  ne  possédait  jadis  que  la  cathé- 
drale et  six  collégiales,  savoir  :  Saint-Pierre,  Saint- 
Paul,  Saint-Martin,  Saint-Barthélémy,  Saint-Denis 
et  Saint-Jean,  qui  fussent  de  véritables  pépinières 
d'artistes. 

«  Les  virtuoses  et  compositeurs  formés  à  ces  éco- 
les se  répandaient  dans  les  différentes  villes  de 
l'Europe,  où  la  plupart  savaient  se  créer  une  exis- 
tence souvent  fort  brillante... 

«  C'est  en  nivôse  de  l'an  VI  (27  décembre  1707)  que 
le  Jury  d'Instruction  publique,  établi  à  Liège,  pré- 
senta à  l'administration  centrale  du  département 
de  l'Ourthe  un  mémoire  demandant  qu'une  école  de 
musique  lut  fondée  en  cette  ville'.  » 

Cette  demande  resta  alors  sans  elfet,  et  ce  ne  fut 
qu'en  1826  «  que  le  roi  Guillaume  lor  des  Pays-Bas 
eut  la  pensée  de  créer  quatre  écoles  de  musique 
dans  quelques  villes  importantes  du  pays  :  Bruxelles, 
Liège,  La  Haye  et  Amsterdam  furent  les  villes  de 
son  choix2  ». 

Daussoigne,  sur  la  désignation  de  Cherubini,  fut 
choisi  pour  diriger  l'école  de  musique  de  Liège. 

Daussoigne,  neveu  de  Méhll,  était  un  musicien 
distingué;  il  avait  fait  de  brillantes  études  au  Con- 
servatoire de  Paris,  et  Cherubini  le  recommandait  en 
ces  termes  :  u  C'est  un  esprit  pratique  et  un  grand 
musicien,  il  s'acquittera  à  merveille  de  sa  lâche.  » 

Les  classes  s'ouvrirent  le  1er  mai  1827,  avec  trente- 
cinq  élèves. 

Celle  école  progressa  rapidement.  En  1831,  un 
arrêté  royal  lui  donna  le  titre  de  Conservatoire 
royal  de  musique,  et  en  18o0,  on  compte  déjà  vingt- 


3  i<ÏO 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


trois  professeurs  et  deux  cents  élèves,  tous  animes 
ii'une  réelle  émulation.  Daussoighi  organisa  des 
exercices  d'ensemble  pour  l'orchestre;  les  élèves 
prenaient  ainsi  connaissance  des  chefs-d'œuvre 
classiques,  et,  «  à  partir  de  ce  moment,  on  peut 
déclarer  le  Conservatoire  royal  de  Liège  assis  sur 
des  bases  solides.  » 

Etienne  Soi'hre  succéda  à  Dalssoigne  en  1862,  et 
l'école  prit  sous  sa  direction  un  notable  développe- 
ment. Lors  de  son  décès  en  1871,  le  nombre  des 
cours  s'élevait  à  quarante  et  un,  et  celui  des  élèves 
dépassait  trois  cents. 

En  1872,  le  23  septembre,  M.  Théodore  Radoux  fut 
nommé  directeur.  A  sa  mort,  en  1911,  il  a  été  rem- 
placé par  M.  Sylvain  Dupuis,  auquel  a  succédé,  au 
moment  de  sa  retraite,  en  1925,  l'excellent  compo- 
siteur M.  François  Rasse. 

De  nouveaux  cours  ont  été  créés,  et  aujourd'hui, 
plus  de  sept  cents  élèves  fréquentent  cet  établisse- 
ment, qui  donna  des  résultats  généraux  dignes  des 
sacrifices  que  les  administrations  publiques  font 
pour  lui. 

Son  école  de  violon  est  particulièrement  brillante 
et  jouit  dans  le  monde  musical  d'une  grande  et  légi- 
time réputation.  Il  suffit  de  citer  Massart,  Léonard, 
Thomson,  Ysaye,  Musin,  Marsick,  pour  être  convaincu 
que  celte  réputation  n'est  pas  usurpée. 

Parmi  les  compositeurs,  le  Conservatoire  de  Liège 
peut  revendiquer  avec  orgueil  César  Franck. 

En  résumant  les  épreuves  imposées  pour  les  con- 
cours, on  se  fera  une  idée  très  exacte  d«s  programmes 
d'enseignement  de  cette  école  et  de  leur  application. 

Les  conditions  d'admissibilité  aux  concours  sont  à 
peu  près  les  mêmes  que  celles  exigées  au  Conserva- 
toire de  Bruxelles.  Les  concours  sont  de  deux  sortes  : 
concours  ordinaires  ;  concours  supérieurs. 

Voici  les  épreuves  imposées  aux  concours  ordi- 
naires. 

A.  Pour  les  pianistes  : 

1°  Exécution  d'un  morceau  indiqué  un  mois  à 
l'avance;  2°  lecture  à  première  vue;  3°  exécution 
de  plusieurs  préludes  et  fugues  de  Rach;  4°  exé- 
cution d'un  morceau  au  choix  du  concurrent. 

B.  Pour  les  violonistes  : 

I"  Exécution  d'un  morceau  désigné  un  mois  à 
l'avance;  2°  lecture  à  première  vue;  3°  exécution 
de  plusieurs  études  choisies  dans  les  œuvres  de  Gavi- 
niès,  de  Fiorillo,  de  Kreutzer,  de  Rode,  de  Vieux- 
temps,  etc.  ;  4°  exécution  d'un  morceau  au  choix  du 
concurrent. 

C.  Pour  les  altistes;  D.  Pour  les  violoncellistes; 
E.  Pour  les  contrebassistes  :  des  épreuves  à  peu  près 
équivalentes. 

F.  Pour  les  élèves  des  classes  de  musique  de 
chambre  (piano  et  archets)  :  1°  exécution  d'un  trio 
désigné  un  mois  à  l'avance;  2"  exécution  d'un  trio 
au  choix;  3°  exécution  du  trio  du  répertoire. 

G.  Pour  les  élèves  des  classes  de  musique  de  cham- 
bre (instruments  à  archet)  :  les  mêmes  épreuves  que 
ci-dessus,  mais  avec  substitution  du  quatuor  au  trio. 

H.  Pour  les  chanteurs  : 

1"  Exécution  d'un  air  classique  avec  vocalises; 
2°  exécution  d'un  air  au  choix;  3°  lecture  à  pre- 
mière vue. 

I.  Pour  les  élèves  de  déclamation  lyrique  :  exé- 
cution d'une  scène  comprenant  au  moins  un  air  et 
un  duo  développés. 

Les  épreuves  des  concours  supérieurs  sont  analo- 
gues aux  précédentes,  mais  sensiblement  plus  dif- 


ficiles. Pour  les  instrumentistes,  on  y  ajoute  notam- 
ment la  transposition,  et  les  organistes  y  figurent 
avec  un  programme  très  substantiel. 

Pour  les  concours  supérieurs,  les  conditions  sui- 
vantes sont  requises  des  aspirants  : 

1°  Si  le  postulant  est  instrumentiste,  il  devra  avoir 
pris  part  au  concours  d'harmonie  ; 

2°  S'il  est  organiste,  il  devra  avoir  obtenu  une 
distinction  pour  la  fugue; 

3°  S'il  est  violoniste,  altiste,  pianiste  ou  violon- 
celliste, il  devra  avoir  remporté  une  distinction  dans 
les  concours  de  musique  de  chambre,  indépendam- 
ment de  sa  participation  au  concours  d'harmonie. 

Comme  au  Conservatoire  de  Bruxelles,  les  élèves 
sont  astreints  à  suivre  des  cours  parallèles,  lesquels 
sont  ceux  de  solfège,  de  chant  d'ensemble,  d'harmo- 
nie, d'ensemble  instrumental  (classe  d'orchestre)  et 
de  musique  de  chambre. 

Tel  est,  dans  ses  grandes  lignes,  le  résumé  de  l'en- 
seignement donné  au  Conservatoire  de  Liège. 


Gand.  —  Le  Conservatoire  royal  de  Gand,  comme 
les  écoles  similaires  de  Bruxelles,  de  Liège  et  d'An- 
vers, est  une  institution  de  l'Etat,  subsidiée  par  la 
commune  et  la  province.  Son  budget  s'élève  à 
100.000  fr.  '.  —  Le  personnel  enseignant  compte  cin- 
quante-sept professeurs. 

L'enseignement  comprend  le  solfège  et  la  théorie 
musicale,  léchant  individuel,  le  chant  d'ensemble; 
la  diction  et  la  déclamation  française  et  néerlan- 
daise; la  prononciation  des  langues  italienne,  latine,, 
allemande  et  anglaise  dans  leurs  rapports  avec  la 
musique;  le  maintien  et  l'art  de  la  scène;  les  instru- 
ments à  vent,  à  cordes,  à  clavier;  l'ensemble  ins- 
trumental; la  musique  de  chambre  dans  toutes  ses 
combinaisons;  l'harmonie  et  l'accompagnement,  le- 
contrepoint,  la  fugue;  l'étude  des  formes  et  des  pro- 
cédés techniques,  la  composition;  enfin  la  lecture 
critique  d'ouvrages  d'esthétique,  d'acoustique,  d'his- 
toire de  la  musique. 

L'enseignement  se  donne  aux  trois  degrés  :  infé- 
rieur, moyen,  supérieur. 

L'ne  commission,  nommée  par  les  différents  pou- 
voirs qui  interviennent  dans  la  formation  du  bud- 
get, est  chargée  de  gérer  la  partie  administrative. 

Le  Conservatoire  donne  trois  grands  concerts  de 
symphonie  (avec  ou  sans  l'élément  choral)  par  hiver, 
plus  un  nombre  variable  de  séances  de  musique  de 
chambre,  avec  la  participation  des  professeurs  et 
des  élèves.  Les  programmes  de  ces  concerts  et  audi- 
tions ont  autant  que  possible  une  physionomie  his- 
torique. 

Vers  la  fin  del'année  scolaire,  devant  un  jury  d'ar- 
tistes étrangers  au  Conservatoire,  ont  lieu  des  con- 
cours pour  l'obtention  de  diplômes.  N'y  sont  admis 
que  les  élèves  ayant  satisfait  à  un  examen  sur  les 
matières  vues  dans  le  courant  de  l'année.  Pour  les. 
cours  de  piano,  de  violon,  d'orgue  notamment,  les 
concurrents  doivent  présenter  un  morceau  imposé 
(concerto  avec  accompagnement  de  quatuor),  un 
morceau  choisi  par  l'élève,  plus  un  répertoire  d'au 
moins  cinq  œuvres,  parmi  lesquelles  le  jury  désigne 
un  ou  plusieurs  morceaux  à  exécuter  séance  tenante.. 

Nul  n'est  admis  à  concourir  s'il  n'a  obtenu  une 
distinction  dans  le  cours  de  lecture  musicale. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3461 


L'enseignement  se  donne  en  français  et  en  fla- 
mand. 

Les  élèves  payent  un  droit  d'inscription  de  2  fr.  50 
et  une  rétribution  annuelle  de  10  fr.  pour  certains 
«ours,  de  20  fr.  pour  d'autres. 

Six  cents  élèves  environ,  moiliéjeunes  gens,  moilié 
jeunes  filles,  fréquentent  l'école. 

Le  Conservatoire  de  Gand  a  été  fondé  en  1812  sous 
le  nom  d'Académie  de  musique,  par  un  groupe 
d'amateurs.  Adoptée  par  la  commune  en  1835, 
l'Académie  prend  le  titre  d'Ecole  de  musique,  et 
devient  en  1871  Conservatoire  royal. 

Ses  directeurs  ont  été  : 

Joseph  Mengal,  de  183a  à  1851; 

Jean  Andries,  de  1851  à  1856  ; 

Charles  Méry,  de  1856  à  1871; 

Adolphe  Samuel,  de  1871  à  1898; 

Emile  Mathieu,  de  1898  à  1924. 

M.  Martin  Lunssens,  actuellement  directeur,  est  un 
compositeur  fort  distingué,  et  le  Conservatoire  de 
Gand  ne  peut  que  se  développer  encore  sous  son 
active  et  intelligente  direction. 


Anvers.  —  A  Anvers  existe  un  Institut  musical 
portant  le  titre  de  :  Conservatoire  Royal  flamand 
d'Anvers.  Il  a  eu  pour  origine  une  école  de  caractère 
privé,  érigée  en  1842  grâce  à  l'initiative  de  trois 
musiciens  dévoués  :  François  Aerts,  Joseph  Bessems 
et  Corneille  Scnermers. 

Ouverte  en  1845,  sous  la  dénomination  française 
d'école  de  musique  de  la  ville  d'Anvers,  elle  avait 
pour  but  l'enseignement  du  solfège,  du  violon,  du 
violoncelle  et  du  piano  à  de  jeunes  gens  du  sexe 
masculin. 

En  1859,  elle  devint  propriété  de  la  ville  et  prit 
plus  d'extension  grâce  à  un  modeste  subside,  alloué 
par  l'administration  communale. 

Le  17  novembre  1867,  M.  Peter  Benoit  fut  appelé  à 
la  diriger.  Elle  subit  une  réorganisation;  son  pro- 
gramme fut  complété,  et  le  directeur  établit  plus  d'u- 
nité dans  l'enseignement.  Elle  prit  le  titre  de  Antuer- 
pens  Vluamsche  Miiziekschool  (Ecole  de  musique  fla- 
mande de  la  ville  d'Anvers).  Depuis  ce  jour,  les  trois 
pouvoirs  publics  la  soutiennent  par  leurs  subsides. 

Par  arrêté  royal  du  25  juin  1898,  elle  fut  élevée 
au  rang  de  conservatoire  sous  le  titre  de  Koninhlyh 
Vlaamsch  Conservatorium  van  Anlieerpm  (Conser- 
vatoire Royal  flamand  d'Anvers). 

Les  jeunes  gens  des  deux  sexes  y  sont  initiés,  dans 
toutes  les  branches- de  l'art  dramatique  et  musical, 
par  des  professeurs  versés  dans  la  connaissance  de 
la  langue  flamande  et  des  termes  techniques  de  cette 
langue. 

Le  Conservatoire  est  administré  par  un  conseil  de 
neuf  membres,  dont  le  gouverneur  de  la  province 
et  le  bourgmestre  de  la  ville  sont  de  droit  président 
et  vice-président. 

Le  fondateur-directeur,  mort  le  8  mars  1901,  eut 
pour  successeur  un  de  ses  élèves,  M.  Jan  Blockx,  mort 
le  26  mai  1912,  et  auquel  ont  succédé  M.  Emile  Wam- 
bach  (f  1924)  et  M.  Lodewyk  Mortelmans,  actuelle- 
ment directeur. 

En  1845,  l'école  de  musique  comptait  vingt-deux 
professeurs  et  trois  cent  quatre-vingts  élèves;  au 
Conservatoire  actuel,  le  nombre  des  professeurs  est 
de  trente-six,  celui  des  professeurs  adjoints  de  neuf; 
celui  des  moniteurs  de  six,  et  celui  des  élèves  de  douze 
cents. 


L'institut  comprend  trois  sections  :  la  section 
école  ou  primaire,  la  section  conservatoire  ou 
moyenne,  et  la  section  université  ou  supérieure. 

La  fréquentation  des  cours  dans  la  section  école 
est  gratuite  pour  les  élèves  belges;  les  élèves  de  na- 
tionalité étrangère  y  sont  admis  moyennant  un  droit 
d'inscription  de  dix  francs*.  Pour  les  cours  de  la 
section  Conservatoire,  les  Belges  payent  cinq  francs, 
les  étrangers  cinquante  francs  par  an'2. 

Les  élèves  de  la  section  conservatoire  ayant  obtenu 
un  diplôme  de  solfège  peuvent  être  autorisés  à  se 
présenter  devant  le  jury  pour  l'obtention  d'un  diplôme 
de  capacité  dans  la  branche  qu'ils  ont  choisie. 

Il  y  a  des  diplômes  de  différents  degrés  :  le  di- 
plôme avec  fruit,  correspondant  à  un  deuxième  prix; 
le  diplôme  avec  distinction,  équivalant  à  un  premier 
prix  simple;  le  diplôme  avec  grande  et  le  diplôme 
avec  la  plus  grande  distinction,  équivalant  récipro- 
quement à  un  premier  prix  avec  distinction  et  avec 
grande  distinction. 

Les  élèves  ayant  obtenu  un  diplôme  avec  distinc- 
tion (un  des  premiers  prix)  font  partie  de  la  section 
université,  laquelle  embrasse,  en  outre,  tous  les  ar- 
tistes flamands  qui  se  distinguent  dans  la  musique, 
dans  l'art  dramatique  et  dans  la  littérature. 

Chaque  année,  il  y  a  plusieurs  auditions  d'élèves, 
pendant  le  mois  d'avril,  pour  la  section  école  et  au 
mois  de  juillet,  pour  la  section  conservatoire. 


Malines.  —  Après  ces  trois  grandes  Ecoles  doit 
être  placée,  comme  importance,  l'Ecole  êpiscopale  et 
interdiocésaine  de  musique  religieuse,  fondée  à  Ma- 
lines par  le  célèbre  organiste  Lenijiens,  sous  le  titre 
de  :  Institut  Lemmens,  en  1879.  Il  fut  aidé  dans  cette 
lâche  par  un  chanoine  très  distingé,  l'abbé  van 
Dahme,  qui  devint  un  collaborateur  ardent,  actif  et 
dévoué.  Les  débuts  furent  difficiles.  Il  y  avait  peu 
d'élèves,  pas  de  local;  on  dut  installer  les  services 
chez  un  facteur  d'orgues,  M.  Loret.  L'établissement 
commençait  à  prospérer  lorsque,  le  30  janvier  1881, 
survint  la  mort  du  noble  artiste  qui  l'avait  fondé. 
Cette  mort  fut  le  signal  d'une  crise  redoutable  pour 
l'institution.  Néanmoins,  tous  les  obstacles  furent 
surmontés,  et  l'Ecole,  dont  la  direction  fut  confiée 
dès  cette  époque  à  M.  Edgar  Tinel  (f  1912),  s'ache- 
mina, progressant  continuellement,  vers  les  bril- 
lantes destinées  auxquelles  elle  est  parvenue.  Le 
directeur  actuel  est  le  chanoine  van  Nuffel,  l'éminent 
maître  de  chapelle  de  la  Collégiale  Saint-Rombaut. 

Un  orgue  fut  construit;  un  local  fut  trouvé;  l'Ecole 
progressait;  le  nombre  des  élèves  augmentait;  la 
réputation  de  l'établissement  s'étendait  à  l'étranger- 

L'Ecole  épiscopale  et  interdiocésaine  de  musique  re- 
ligieuse a  pour  but  spécial  de  former  des  chantres, 
des  organistes,  des  maitres  de  chapelle  et  des  com- 
positeurs pour  le  culte  catholique.  Voici  les  princi- 
pales dispositions  qui  régissent  son  fonctionnement 
administratif  et  artistique  : 

Les  élèves  doivent,  pour  être  admis,  savoir  lire, 
écrire,  calculer  et  connaître  les  éléments  de  la  mu- 
sique. 

L'admission  se  fait  par  le  directeur  de  l'école, 
l'aumônier  et  le  délégué  du  cardinal  archevêque. 

Les  élèves  sont  externes  et  doivent  habiter  un 
quartier  approuvé  par  l'aumônier.  Ils  payent  à  l'é- 


I.  Prix  d'Luant-.'iKT 


si  ci 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


cole  228  IV.1  par  an.  Ils  doivent  accomplir  stricte- 
ment leurs  devoirs  religieux.  11  leur  est  sévèrement 
interdit  d'aller  au  théâtre. 

L'enseignement  comprend  les  matières  suivantes  : 

Lecture  musicale  et  théorie; 

Lecture  au  piano  d'oeuvres  pour  cet  instrument; 

Lecture  à  l'orgue  d'oeuvres  pour  cet  instrument; 

Lecture  à  l'orgue  de  partitions  chorales; 

Chant  grégorien,  exécution  et  harmonisation; 

Chant  d'ensemble; 

Harmonie; 

Contrepoint  et  fugue; 

Piano  ; 

Orgue; 

Transposition; 

Improvisation; 

Composition; 

Histoire  de  la  musique  sacrée; 

Religion  ; 

Liturgie; 

Latin. 

L'année  scolaire  se  termine  par  une  audition  pu- 
blique des  meilleurs  élèves.  Cette  audition  est  pré- 
cédée d'un  examen  général  de  tous  les  élèves. 

Il  est  décerné  trois  espèces  de  diplômes  :  un  du 
Troisième  Degré,  un  du  Deuxième  Degré  et  un  du  Pre- 
mier Degré. 

Les  seuls  élèves  ayant  obtenu  un  diplôme  sont 
considérés  comme  capables  de  remplir  les  fonctions 
d'organisle  et  de  maître  de  chapelle,  ou  les  deux 
fonctions  réunies. 

Le  nombre  des  élèves  recevant  annuellement  l'en- 
seignement dans  cette  école  n'est  pas  considérable, 
car  depuis  la  fondation  en  1879,  c'est-à-dire  en  l'es- 
pace de  vingt-huit  ans,  on  ne  compte  que  deux  cent 
vingt  élèves. 

Mais,  dira-t-on,  de  ces  deux  cent  vingt  élèves, 
c'est  à  peine  si  on  voit  la  trace  dans  nos  églises, 
tant  leur  action  sur  la  réforme  des  tribunes  est  peu 
apparente.  Que  sont  donc  devenus  tous  ces  jeunes 
musiciens? 

La  question  posée  à  l'ancien  directeur  de  l'Ecole, 
M.  Edgar  Tinel,  a  provoqué  la  réponse  suivante  : 

«  La  question  n'est  pas  pour  me  déplaire,  et  je  vais 
y  répondre. 

«  Et  d'abord  la  sentence  :  «  Beaucoup  d'appelés 
et  peu  d'élus,  »  s'applique  ici  comme  ailleurs;  nous 
n'avons  pas  la  présomption  de  croire  que  tous  nos 
élèves  soient  des  musiciens  d'église  accomplis;  ce 
litre  ne  convient  qu'au  petit  nombre,  à  nos  élèves 
diplômés,  ainsi  que  le  dit  expressément  le  Règle- 
ment de  l'Ecole.  Or,  quarante-six  élèves  seulement, 
en  un  quart  de  siècle,  ont  reçu  le  certificat  de  ca- 
pacité que  le  diplôme  représente,  et  sur  ce  nombre 
figurent  douze  différents  degrés  de  talent,  attendu 
que  l'établissement  décerne  trois  espèces  de  diplô- 
mes, chacune  d'elles  divisible  en  quatre  grades. 
C'est  assez  dire  de  quelles  garanties  nous  nous  en- 
tourons avant  de  donner  Yexeat  à  nos  élèves,  même 
aux  moindres  d'entre  eux,  je  veux  dire  à  ceux  que 
leur  genre  de  talent  destine  aux  fonctions  plus  mo- 
destes d'organiste  extra  muros. 

«  Maintenant,  ces  quarante-six  élèves  diplômés, 
que  font-ils? 

«  Voici  :  environ  les  deux  tiers  occupent  des  fonc- 
tions en  Belgique,  les  autres  à  l'étranger. 
«  Ces  derniers  ont  choisi  la  meilleure  part;  haute- 


ment considérés  dans  leur  patrie  d'adoption,  on  leur 
y  accorde  toute  latitude  pour  faire  fructilier  l'ensei- 
gnement reçu  à  Malines. 

«  Les  conditions  d'existence  de  ceux  qui  sont  res- 
tés en  Belgique  sont,  je  dois  en  faire  l'aveu,  moins 
satisfaisantes;  ils  sont,  en  trop  d'endroits,  contre- 
carrés dans  leurs  tentatives  d'établissement  d'une 
pratique  musicale  conforme  aux  prescriptions  litur- 
giques, et  deviennent  ainsi,  par  la  force  des  'choses, 
la  semence  tombée  parmi  les  ronces...  » 

Il  n'y  a  pas,  hélas!  qu'en  Belgique  que  les  choses 
se  passent  ainsi,  et  il  y  a  partout  des  elforts  considé- 
rables à  accomplir  pour  faire  disparaître  du  réper- 
toire d'un  grand  nombre  d'églises  «  les  triviales  et 
écœurantes  romances  à  paroles  latines  »  qui  en  for- 
ment souvent  le  fond  le  plus  solide. 

On  peut  dire  que  VEcole  épiscopale  et  intercliocé- 
saine  de  mimique  religieuse  de  Malines  rend  à  l'art 
religieux  de  grands  et  réels  services,  et  l'on  ne  peut 
que  souhaiter  la  continuation  de  son  développement 
normal  et  ininterrompu. 


La  Belgique  possède  encore,  outre  ses  quatre  Con- 
servatoires royaux  et  l'Ecole  spéciale  de  musique 
religieuse  de  Malines,  de  nombreuses  Ecoles  de 
musique  dont  voici  les  principales  :  Conservatoire 
de  Mons ;  Académie  de  musique  de  Malines;  Académie 
de  musique  de  Tournai;  Conservatoire  de  Verviers  ; 
Ecole  de  musique  de  Namur;  Ecole  de  musique  de  Lou- 
vain;  Ecoles  de  musique  Saint  Josse  ten  ISoode,  Schaer- 
beck,  Ixclles,  et  Saint-Gilles;  Conservatoire  de  Bruges; 
Conservatoire  de  Charleroi;  Académie  de  musique  d'Os- 
lende;  Ecole  de  musique  de  Hasselt,  etc.  Ces  écoles 
peuvent,  pour  la  plupart,  être  assimilées  aux  écoles 
nationales  françaises  des  villes  de  province.  Elles 
aident,  dans  une  large  mesure,  à  la  diffusion  de  la 
musique  dans  toutes  les  classes  de  la  société,  et  con- 
tribuent puissamment  à  en  répandre  et  développer 
le  goût  dans  ce  pays  déjà  si  imprégné  de  cet  art  et 
si  bien  préparé  à  recevoir  la  substance  de  son  ensei- 
gnement. 


Genève.  —  La  principale  Ecole  de  musique  de  la 
Suisse  est  le  Conservatoire  de  musique  de  Genève, 
fondé  en  1835  par  M.  Bartholoni.  Pendant  plusieurs 
années  les  progrès  furent  lents.  Il  y  avait  alors  dans 
l'austère  Genève  peu  de  goût  pour  la  musique  :  pas 
de  concerts,  pas  de  musique  de  chambre! 

A  partir  de  1848,  on  entra  enfin  dans  une  période 
d'essor  qui  n'a  fait  que  se  développer  jusqu'aujour- 
d'hui. 

En  1833,  le  généreux  et  riche  fondateur  Bartho- 
loni donna  un  million  pour  l'érection  d'un  monu- 
ment destiné  à  devenir  le  temple  de  la  musique  à 
Genève  :  le  Conservatoire  de  musique,  très  bien  amé- 
nage pour  l'enseignement  et  possédant  une  jolie  salle 
de  concert. 

Le  goût  de  la  musique,  l'éducation  du  public  ont 
fait  alors  d'immenses  progrès;  les  concerts,  les  réu- 
nions bénéficient  d'une  vogue  toujours  croissante; 
c'est  un  résultat  notable  qu'il  faut  certainement  attri- 
buer pour  la  plus  grande  part  au  Conservatoire2. 

L'enseignement  donné  dans  cette  école  de  musique 


2.  Il  n'y  a  pas  d'examc 
faire  inscrire  et  de  paye 


iuffit,  pour  être 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3i63 


se  rapproche  beaucoup  de  celui  en  usage  dans  les 
conservatoires  allemands  :  le  but  poursuivi  est,  avant 
tout,  de  faire  des  musiciens,  et  non  pas  seulement 
des  virtuoses.  De  là,  un  grand  nombre  de  cours  théo- 
riques destinés  à  développer  l'oreille,  le  goût  musi- 
cal des  élèves,  à  leur  inculquer  le  sens  du  rythme, 
à  former  leur  style,  à  leur  apprendre  à  se  rendre 
compte  de  la  structure,  de  la  facture  des  œuvres 
qu'ils  exécutent,  etc.,  etc. 

En  regard  de  chaque  classe  instrumentale,  il  existe 
une  classe  parallèle  de  solfège,  théorie,  harmonie,  etc. 

Une  place  prépondérante  est  faite  à  la  lecture 
à  vue,  qui,  aux  examens  des  classes  d'instruments, 
compte  autant  que  l'exécution. 

Les  tendances  sont  classiques  avec  Bach  et  Bi:e- 
thoven  pour  base;  cependant,  une  très  large  place 
est  faite  aux  œuvres  modernes,  aux  écoles  les  plus 
avancées  :  Wagner,  Strauss  et  autres  noms  moder- 
nes y  sont  en  grand  honneur. 

La  même  importance  est  accordée  aux  études 
vocales  et  aux  éludes  instrumentales,  mais  il  y  a 
plus  d'instrumentistes  que  de  chanteurs;  le  piano 
est  particulièrement  prédominant  et  compte  plus  de 
cinq  cents  élèves  sur  quatorze  cents. 

Amateurs  et  professionnels  sont  mêlés  dans  les 
classes,  et,  comme  en  Allemagne,  les  études  théo- 
riques, solfège,  harmonie,  composition,  instrumen- 
tation, histoire  de  la  musique,  etc.,  marchent  de 
front  avec  les  études  vocales  et  instrumentales. 

En  classe  normale  et  en  classe  de  virtuosité  (en- 
seignement supérieur),  les  instrumentistes  et  chan- 
teurs commencent  la  composition. 

En  classe  normale  de  piano,  outre  la  composition, 
l'élève  doit  suivre  obligatoirement  une  classe  de 
fugue,  une  d'histoin'  île  la  musique  et  une  de  cours- 
conférences  (étude  pratique  et  analytique  des  grandes 
œuvres  classiques  et  modernes  avec  les  sonates  de 
Beethoven  pour  point  de  départ). 

La  classe  de  virtuosité  de  violon,  outre  la  composi- 
tion, comporte  des  cours  obligatoires  d'histoire  de  la 
musique,  d'orchestre,  de  quatuor  et  de  piano. 

Chaque  enseignement  est  divisé  en  trois  degrés, 
élémentaire,  secondaire  et  supérieur.  Dans  chaque 
branche,  il  existe  en  outre  une  classe  de  perfection- 
nement, dite  classe  normale,  comprenant  deux  an- 
nées d'étude,  à  l'issue  desquelles  les  élèves  peuvent, 
après  un  examen  spécial,  recevoir  les  diplômes  de 
capacité  et  de  virtuosité. 

Des  examens  sanctionnent  les  études.  Comme  con- 
sécration de  ces  examens,  le  jury  décerne  annuel- 
lement aux  élèves  des  prix  et  des  accessits. 

Les  matières  enseignées  sont  : 

Solfège  à  divers  degrés;  vocalisation,  art  du  chant 
et  chant  en  chœur;  diction  lyrique;  déclamation; 
lecture  vocale  et  instrumentale;  piano;  orgue  et 
harmonium;  instruments  à  cordes,  instruments  à 
vent;  harpe;  théorie;  harmonie;  composition;  ac- 
compagnement ;  quatuor;  histoire  de  la  musique; 
instrumentation;  histoire  des  formes  et  des  styles 
musicaux;  improvisation;  orchestre. 

Le  Conservatoire  ne  forme  pas  de  sujets  pour  le 
théâtre;  les  professeurs  de  chant  ont,  chez  eux,  des 
cours  privés  pour  l'étude  des  rôles  et  du  répertoire. 

Il  y  a  une  dizaine  d'exercices  publics  par  an,  dont 
deux  avec  orchestre;  les  autres  consistent  en 
récitals  de  piano,  de  violon,  d'orgue,  en  exécutions 
de  musique  de  chambre,  etc. 

Le  Conservatoire  est  administré  par  un  comité  de 
quinze  membres,  lequel  nomme  un  directeur,  chargé 


défaire  exécuter  le  règlement1.  Le  comité  élit  aussi 
son  bureau. 

Tel  est,  en  substance,  le  fonctionnement  du  Con- 
servatoire de  Genève,  qui  rend  des  services  signalés 
au  développement  de  la  musique,  et  dont  le  corps 
enseignant  est  remarquable. 

La  Suisse  compte  encore  des  écoles  de  musique 
importantes  à  Zurich,  Bâle,  Berne,  Lausanne,  qui 
méritent  d'être  signalées.  Mais  il  suffit  d'avoir  mon- 
tré l'organisation  du  Conservatoire  de  Genève  pour 
avoir  une  idée  exacte  de  ce  qu'est  l'enseignement 
de  la  musique  dans  ce  pays. 

Russie. 

Ancien  régime.  —  En  Russie,  l'organisation  de 
l'enseignement  musical  officiel  a  été  très  particu- 
lière. C'est  la  Société  Impériale  Russe  de  musique  qui 
en  assura  le  fonctionnement  et  qui  en  eut  toute  la 
responsabilité.  Voici  l'origine  de  celle  société  : 

Vers  le  milieu  du  xixe  siècle,  on  vit  surgir  une 
pléiade  de  jeunes  maîtres.  Glinka  était  à  leur  tête. 
Ils  éveillèrent  en  Russie  l'amour  de  la  musique  clas- 
sique et  de  la  musique  nationale.  Peu  à  peu,  le  pu- 
blic sentit  la  nécessité  d'avoir  une  organisation 
musicale  pouvant  donner  à  la  Russie  des  professeurs 
de  musique,  des  artistes  et  des  compositeurs. 

C'est  alors  (en  1840)  que  fut  fondée  la  Société 
Impériale  Russe  de  musique,  sous  l'appellation  de 
«  Société  S.vmphonique  ».  Elle  n'eut  que  dix  années 
d'existence.  En  1851,  elle  ferma  ses  portes,  faute  de 
ressources.  Huit  ans  plus  tard  (en  i8i>9),  elle  fut 
réorganisée.  Le  célèbre  Anloine  Rurinstein  fut  l'àme 
de  cette  entreprise,  et,  dès  la  première  saison  de 
concerts,  le  succès  s'affirma  si  éclatant  que,  d'ac- 
cord avec  le  comité  des  directeurs,  A.  Rubinstein 
décida  de  fonder  à  Moscou  une  section  de  la  Société 
Impériale  Russe  de  Musique. 

Nicolas  Rubinstein,  avec  un  Comité  de  Directeurs, 
se  vit  placé  à  la  tète  de  cette  société.  Dès  ledébut,  il 
organisa  des  cours  de  piano,  de  théorie  musicale  et 
un  cours  de  chant  d'ensemble.  Ce  fui  l'aube  du  Con- 
servatoire de  Moscou.  Le  public  suivait  avec  un 
iutérêl  toujours  croissant  les  progrès  de  cette  société 
naissante.  Les  concerts  étaient  suivis  avec  un  grand 
enlhousiasme. 


Ici,  il  est  indispensable  de  mettre  sous  les  yeux 
du  lecteur  les  principaux  extraits  des  statuts  de  la 
Société  Impériale  Russe  de  musique  concernant  les 
Conservatoires  et  les  Ecoles  de  musique  qui  dépen- 
dent d'elle,  avec  les  dernières  modifications  appor- 
lées  et  approuvées  : 

«  La  Sociélé  Impériale  Russe  de  musique  a  pour 
but  de  coopérer  à  la  propagation  de  l'instruction 
musicale  en  Russie,  de  contribuer  au  développement 
de  toutes  les  branches  de  l'art  musical  et  d'encou- 
rager les  artistes  russes  capables  (compositeurs  et 
exécutants),  ainsi  que  les  professeurs  de  musique. 

«  Dans  ce  but,  la  société  a  le  droit  : 

«  1°  de  fonder  dans  diverses  villes  de  Russie  des 
classe  de  musique,  ainsi  que  des  Ecoles  de  musique 
et  Conservatoires; 

«  2°  d'organiser  pour  ses  membres  des  réunions 
musicales  et  concerts... 


Henri  Gagnera  {.Vmikcr  K<iln,dc, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DfCTIOVIVAritE  DU  CONSERVATOIRE 


ii  i  i  société  se  compose  de  sections  fondées  dans 
lès  diverses  villes  de  la  Russie,  routes  ces  sections, 
dans  leur  ensemble,  forment  la  Société  Impériale 
Russe  de  musique,  et  chacune  de  ces  sections  porte 
le  nom  de  la  ville  dans  laquelle  elle  se  trouve. 

«  La  direction  générale  de  la  société  se  compose 
du  président,  du  vice-président,  de  l'adjoint  au  pré- 
sident pour  la  partie  musicale,  des  directeurs  des 
Conservatoires  de  la  société  (qui  en  font  partie  de 
droit),  de  deux  membres  permanents  et  d'un  membre 
délégué  de  chacune  des  sections  locales. 

«  Le  président  de  la  société  est  élu  par  la  direc- 
lion  générale  pour  cinq  ans. 

«  La  direction  générale  veille  à  l'unité  de  vues  et 
d'action  des  diverses  sections  locales,  de  même  qu'à 
l'observation  en  tous  points,  par  celles-ci,  des  clau- 
ses  des  statuts. 

«  Chaque  section  de  la  Société  Impériale  Russe  de 
musique  est  administrée  par  une  direction  locale 
qui  gère  toutes  les  affaires  au  point  de  vue  musical, 
économique  et  administratif.  » 

Voici  maintenant  les  articles  essentiels  des  statuts 
régissant  tous  les  Conservatoires  et  Ecoles  de  musi- 
que russes  dépendant  de  la  Société  Impériale  : 

«  Le  but  du  Conservatoire  est  de  former  des  exé- 
cutants pour  l'orchestre,  des  virtuoses,  des  chan- 
teurs de  concert,  des  artistes  dramatiques  et  lyri- 
ques, des  chefs  d'orchestre,  des  compositeurs  et  des 
professeurs  de  musique. 

«  L'enseignement  du  Conservatoire  compsrte  deux 
branches  :  l'enseignement  artistique  et  l'enseignement 
scientifique. 

«  L'enseignement  artistique  comprend  :  la  connais- 
sance des  instruments  composant  un  orchestre,  l'é- 
lude du  piano,  de  l'orgue,  le  chant,  la  théorie  de  la 
musique,  l'histoire  de  la  musique,  l'histoire  de  l'art, 
l'esthétique,  l'étude  de  la  mise  en  scène,  de  la  décla- 
mation, delà  mimique,  de  la  danse,  etc.1. 

«  L'enseignement  scientifique  comporte  des  cours 
de  religion,  d'arithmétique,  de  géographie,  d'histoire 
universelle,  d'histoire  de  la  Russie,  etc.2. 

«  L'étude  de  deux  langues  étrangères  est  exigible. 

«  Chaque  Conservatoire  possède  un  musée,  une 
bibliothèque,  etc. 

«  L'argent  apporté  par  les  élèves  du  Conservatoire 
en  constitue  les  ressources.  En  outre,  le  Conserva- 
toire de  Pétersbourg  reçoit  de  l'Etat  un  subside 
de  15.000  roubles;  celui  de  Moscou,  un  subside  de 
20.000  roubles3. 

«  Les  Conservatoires  sont  sous  la  dépendance  du 
président  de  la  Société  Impériale  Russe  de  musique 
dont  ils  font  partie. 

«  Le  président  confirme  les  programmes  et  plans 
d'études  soumis  à  son  approbation  par  les  directions 
locales,  etc.  Il  confirme  ou  rejette  la  nomination  de 
directeurs  de  Conservatoires,  de  professeurs,  inspec- 
teurs, etc.,  faites  par  les  directions  locales. 


«  Toutes  les  directions  locales  doivent  veiller  au 
bien-être  du   Conservatoire  placé  sous  leur  dépen- 


1.  Cet  enseignement  comportait  deui  degrés,  destinés  aui  virtuoses 
et  aux  pédagogues,  avec  diplômes  pour  chacune  de  ces  catégories. 

2.  Enseignement  de  culture  générale  et  obligatoire,  a  moins  qu'on 
ne  présentât  un  diplôme  de  gymnase. 

3.  Ces  allocations  ont  été  augmentées  depuis  l'époque  où  l'article  a 
été  rédigé. 


dance,  et  chercher  surtout  à  en  augmenter  les  res- 
sources pécuniaires,  etc. 

«  La  direction  de  chaque  Conservatoire  est  com- 
posée comme  suit  :  directeur,  conseil  artistique, 
conseil  scientifique,  inspecteur  du  Conservatoire,  ins- 
pecteur de  l'enseignement  scientifique,  secrétaire, 
gérant  du  musée,  trésorier,  surveillant,  expédition- 
naire. 

«  Le  directeur  doit  être  un  homme  s'occupant 
spécialement  de  musique;  il  doit  être  sujet  russe. 

«  Le  directeur  est  nommé  et  révoqné  par  le  pré- 
sident de  la  Société  Impériale  llusse  de  musique, 
sur  l'avis  de  la  section  locale. 

«  Le  directeur  est  membre  de  la  direction  locale 
et  de  la  direction  générale. 


«  Sont  admis  au  Conservatoire  les  élèves  des  deux 
sexes  et  appartenant  à  tous  les  rangs  de  la  société. 

«  Tous  les  élèves  sont  externes1.  Avant  d'être 
admis,  le  postulant  doit  subir  un  examen  qui  le 
place,  selon  ses  connaissances,  dans  telle  ou  telle 
classe.  Les  connaissances  requises  pour  l'admission 
au  Conservatoire  sont  les  mêmes  que  dans  les  lycées 
de  garçons  et  de  filles.  Néanmoins,  pour  le  postulant 
doué  de  grandes  qualités  dans  le  domaine  de  l'art, 
ayant,  par  exemple,  une  très  belle  voix,  le  niveau 
des  connaissances  requises  peut  être  abaissé.  Ceux 
qui  se  destinent  à  l'étude  du  chant  ou  de  tout  ins- 
trument à  vent  doivent  subir  un  examen  médical 
afin  d'acquérir  la  certitude  que  leurs  études  ne  se 
feront  pas  au  préjudice  de  leur  santé. 


«  Les  élèves  sont  admis  à  titre  d'élèves  ou  d'au- 
diteurs. 

«  Les  élèves  sont  ceux  qui  suivent  le  cours  com- 
plet :  artistique  et  scientifique.  Les  auditeurs  sont 
ceux  qui  ne  fréquentent  que  quelques  classes  à 
leur  gré. 

«  La  direction/de  la  section  locale  détermine  le 
payement  annuel  de  chaque  élève. 

«  Une  réduction  peut  être  accordée  à  certains 
élèves'1. 

«  Les  élèves  sont  tenus  de  prêter  leur  concours 
aux  séances  musicales,  dramatiques,  lyriques  du 
Conservatoire  et  de  la  section  locale  de  la  Société. 


«  Pendant  leur  stage  au  Conservatoire,  les  élèves 
subissent  des  concours  d'épreuve,  des  examens  et 
des  concours  de  sortie. 

«  Les  concours  de  sortie  seuls  sont  publics. 


«  Les  concours  de  sortie  se  font  en  présence  d'un 
délégué  du  gouvernement  envoyé  par  le  ministre  de 
l'Intérieur,  d'un  délégué  envoyé  par  le  président  de 
la  Société,  et  enfin  de  l'un  des  directeurs  de  la  sec- 
tion locale,  choisi  par  la  direction. 


«  Ceux  des  élèves  qui  subissent  avec  succès  les 
examens  reçoivent  un  attestât,  un  diplôme  ou  une 
médaille.  Ceux  qui  méritent  un  diplôme  prennent  le 
titre  d'artiste  libre.  A  ceux  des  élèves  qui  ont  rem- 


4.  Dans  les  deriii-»i'v  i.mi^.s  .lu  t/arisme,  on  avait  nu.  nagé  des  loge- 
ments pour  les  élèves. 

5.  Ces  payements  étaii'iit  de  200  roubles  ou  de  100  roubles  pour  les 
très  bons  élèves.  Des  bourses  étaient  aussi  distribuées,  et  les  élevés 
des  classes  d'instruments  à  vent  recevaient  gratuitement  l'enseigne- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PEDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3465 


porté  des  succès  notoires,  et  qui  sont  doués  de  qua- 
lités spéciales,  on  ajoute  au  diplôme  une  médaille 
■en  argent  petite  ou  grande,  ou  en  or. 

«  Les  élèves  auditeurs  peuvent  également  recevoir 
des  attestais,  des  diplômes,  s'ils  subissenlavec  succès 
les  examens. 

«  Sont  admis  aussi  à  subir  lesdils  examens  les 
«lèves  n'ayant  pas  fait  leurs  études  au  Conserva- 
toire; ils  peuvent  également  recevoir  un  attestât  et 
un  diplôme. 

«  A  la  fin  du  concours  d'épreuve,  a  lieu  le  grand 
concours  de  sortie  annuel,  où  l'on  fait  connaître  la 
décision  du  conseil  artistique  confirmée  par  le  pré- 
sident de  la  Société  au  sujet  de  la  distribution  des 
récompenses. 

«  Les  élèves  sont  soumis  à  la  loi  militaire,  mais, 
pour  ne  pas  interrompre  leurs  études,  leur  entrée 
au  service  peut  être  retardée  jusqu'à  vingt-deux  ans.  » 

Le  petit  historique  suivant  du  Conservatoire  de 
Moscou  et  de  celui  de  Saint-Pétersbourg  établira  clai- 
rement la  situation  ancienne  de  l'enseignement  mu- 
sical en  Russie,  puisque  le  fonctionnement  de  tous  les 
autres  Conservatoires  était  sensiblement  identique. 


Moscou.  —  En  18G6,  après  les  premières  épreu- 
ves relatées  au  début  de  cet  article  et  les  premières 
difficutés  franchies,  une  ère  nouvelle  s'ouvrit  pour 
la  Société.  Ce  fut  l'inauguration  du  Conservatoire  de 
Moscou,  qui  eut  lieu  le  Ie'-'  septembre.  Nicolas  Rubin- 
stein  en  fut  nommé  directeur.  Il  était  de  plus  chef 
d'orchestre  des  concerts  symphoniques,  et  virtuose 
exécutant.  Son  immense  prestige  artistique  contri- 
bua puissamment  au  rapide  développement  de  la  So- 
ciété et  du  Conservatoire. 

Bien  avant  l'ouverture  du  Conservatoire,  le  nom- 
bre des  classes  de  l'Ecole  de  musique  fondée  par 
N.  Rubinstein  avait  considérablement  augmenté.  En 
1861-62,  on  comptait  déjà  deux  classes  de  chant,  une 
de  violon,  une  de  violoncelle,  deux  de  piano  (cours 
élémentaire),  deux  de  piano  (cours  supérieur),  une  de 
flûte,  une  de  trompette,  trois  de  théorie  musicale. 

A  la  fin  de  1866,  Tchaïrowski,  à  peine  sorti  du  Con- 
servatoire de  Pétersbourg,  fut  nommé  professeur 
d'harmonie  au  Conservatoire  de  Moscou.  Les  autres 
professeurs  étaient  le  violoniste  Laub,  le  pianiste 
Klindwouth,  le  chanteur  Galyani.  etc. 

En  1867,  on  créa  de  nouvelles  classes  :  une  de  con- 
trebasse, une  de  déclamation  et  de  mise  en  scène, 
une  de  danse  et  une  d'escrime  pour  les  chanteurs. 
L'enseignement  scientifique  fut  organisé.  Les  bons 
élèves  instrumentistes  furent  admis  dans  la  compo- 
sition de  l'orchestre  des  concerts  symphoniques.  De 
grands  perfectionnements  furent  apportés  à  l'étude 
de  la  théorie  musicale  et  du  solfège. 

En  1870  on  décerna  les  premières  récompenses. 
C'est  aussi  à  cette  époque  que  fut  organisé  le  premier 
exercice  d'élèves.  On  monta  l'opéra  de  Glinra.  La  Vie 
pour  le  Tzar.  En  1872,  on  monta  {'Orphée  de  Gluck. 

En  1881,  Nicolas  Rubinstein  mourut.  Il  fut  rem- 
placé par  un  des  professeurs  du  Conservatoire, 
M.  Goubert,  lequel  n'exerça  les  fonctions  de  direc- 
teur que  pendant  deux  ans.  Tanéiew  lui  succéda  en 
1884.  C'est  alors  seulement  que  fut  créée  la  première 
classe  d'orchestre. 


ii[il;n  an   - 


En  1889,  Tanéiew  se  démit  de  ses  fonctions  et  fut 
remplacé  par  M.  Saronoff,  qui  les  conserva  jusqu'en 
1906,  époque  à  laquelle  il  fut  lui-même  remplacé 
par  le  distingué  compositeur  M.  Ippolitoff  Ivanoff. 

II  y  avait,  avant  1917,  trente-sept  professeurs  pour 
l'enseignement  artistique,  plus  un  maitre  de  danse, 
un  maître  de  gymnastique,  et  dix-sept  professeurs 
pour  l'enseignement  scientifique. 

Le  Conservatoire  de  Moscou  a  exercé  une  influence 
considérable  sur  le  développement  de  la  musique  en 
Russie,  où  existe  aujourd'hui  une  admirable  école 
de  compositeurs  pleins  de  talent,  d'originalité,  de 
vitalité,  de  sève  nationale,  sur  laquelle  le  monde 
entier  a  les  yeux. 

En  dehors  du  Conservatoire  fondé  par  la  Société 
Impériale  Russe  de  musique,  Moscou  possédait  un 
second  conservatoire  placé  sous  le  patronage  de  Son 
Altesse  Impériale  la  grande  duchesse  Elisabeth.  Il  a 
été  fondé  par  Chestakowski,  musicien  et  professeur 
de  piano,  et  porte  le  nom  de  Conservatoire  Chesta- 
kowski de  la  Société  philharmonique  de  Moscou;  il 
ne  reçoit  aucun  subside  de  l'Etat. 

Il  a  la  même  importance  que  le  Conservatoire  de  la 
Société  Russe  et  à  peu  près  la  même  organisation1. 

De  plus,  il  existait  à  Moscou  un  nombre  considé- 
rable d'écoles  de  musique  privées,  plus  ou  moins 
importantes. 


Saint-Pétersbourg.  —  Le  Conservatoire  de  Saint- 
l'étersbourg,  aujourd'hui  sous  la  direction  du  oélèbre 
compositeur  A.  Glazounow,  a  étéfondé  en  1859,  sous 
forme  de  «  classes  musicales  »,  par  A.  Rubinstein, 
et  réorganisé  en  1862,  époque  à  laquelle  il  reçut  le 
nom  de  Conservatoire. 

Il  y  avait  été  créé  sous  les  auspices  de  la  section 
de  Saint-Pétersbourg  de  la  Société  Impériale  Russe 
de  musique,  qui  l'administrait  et  en  nommait  le 
directeur  jusqu'en  1905.  A  cette  date,  le  ministre  de 
l'intérieur  appliqua  au  Conservatoire  les  Rèr/tements 
temporaires  qui  venaient  d'être  introduits  dans  les 
établissements  supérieurs  d'instruction,  et  qui  leur 
concédaient  le  droit  de  s'organiser  de  manière  auto- 
nome et  d'élire  le  directeur. 

En  1908,  les  rapports  entre  la  section  de  Saint- 
Pétersbourg  et  la  Société  Impériale  russe  se  voyaient 
réduits  au  minimum,  et  il  était  à  prévoir  que,  très 
prochainement,  le  Conservatoire  passerait  dans  le 
ressort  du  ministère  de  l'Instruction  publique. 

Le  Conservatoire  était  placé  sous  la  direction  :  1° 
d'un  directeur  élu  par  le  Conseil;  2°  du  Conseil  dont 
dépendait  le  cours  normal  des  études,  car  c'était  ce 
conseil  qui  prenait  toutes  les  mesures  nécessaires, 
sous  sa  propre  responsabilité,  pour  assurer  l'ordre, 
le  travail  et  la  tranquillité  de  la  vie  académique 
dans  l'établissement.  Ce  Conseil  était  composé  des 
professeurs  des  classes  supérieures  2. 

Le  directeur,  de  son  côté,  avait  la  charge  de  faire 
appliquer  les  décisions  prises  par  le  Conseil  ;  et  c'est 
lui  qui  présentait  à  celui-ci  les  propositions  et  pro- 
jets de  règlement. 

Au  point  de  vue  financier,  la  question  est  alors  très 
compliquée,  carie  budget  des  dépenses  est  fort  con- 
sidérable, et  les  ressources  apparaissent  très  res- 
treintes. Les  élèves,  au  nombre  de  950  en  1906,  payent 
100,  200,  230  et  300  roubles  par  an,  suivant  les  cours 
qu'ils  suivent  et  les  professeurs   avec  lesquels  ils 


nportait  deux  degn's.  l'-li'iue 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


travaillent1,  et,  à  l'enseignement  instrumental,  tous 
les  élèves  sont  tenus  de  suivre  un  cours  d'harmonie. 
Tous  également,  sans  exception,  doivent  suivre  les 
cours  de  solfège  pendant  trois  ans,  à  moins  que,  par 
un  examen,  il  soit  constaté  qu'ils  puissent  en  être 
dispensés  et  entrer  dans  une  classe  supérieure. 


La  Société  Impériale  Hussede  musique  avait  encore 
des  sections  dans  les  principales  villes  de  province 
suivantes  : 

Wladicaucase;  Woronesch;  Ekaterinoslav;  Kazan; 
Kiew;  Nijni-Novogorod;  Odessa;  Penza;  Rostow- 
s.-Don;  Saratow;  Kharkow;  laroslav;  Wilna;  Eka- 
lerinodar;  Irkoutsk;  Nikolaiew;  Orel;  Poltava;  Riga; 
Samara;  Slawropol  de  Caucase;  Tambow;  Tiflis, 
Tomsk,  Bakou,  Astrakhan. 

A  Varsovie,  il  y  a  un  Institut  de  musique.  En  outre, 
des  écoles  privées  fonctionnent  très  avantageusement 
à  Pétersbourg,  Moscou,  Varsovie  et  dans  plusieurs 
villes  dé  province. 

D'autre  part,  le  Conservatoire  louchait  une  subven- 
tion de  15.000  roubles  du  gouvernement  et  20.000  rou- 
bles par  an  comme  intérêts  des  capitaux  qui  lui 
appartenaient. 

Les  traitements  des  professeurs  étaient  très  mé- 
diocres. 

Les  directeurs  qui  se  sont  succédé  depuis  la  fon- 
dation sont  : 

Antoine  Rubinstew;  Zaremba;  Azantchf.fski;  Char- 
les Davidow;  Antoine  Rubinsteim  (réélu);  Johansen; 
Bernard  et  Glazounow,  directeur  actuel. 

L'enseignement  donné  au  Conservatoire  de  Saint- 
Pétersbourg  est  à  peu  près  semblable  à  celui  du 
Conservatoire  de  Moscou.  Les  résultats  artistiques 
sont  des  plus  satisfaisants. 

Le  génial  Rimsky-Korsakow  y  fut  professeur,  ainsi 
que  Liadow  :  c'est  dire  le  haut  et  brillant  enseigne- 
ment que  reçoivent  dans  cette  Ecole  les  jeunes  com- 
positeurs. 

Dans  ces  deux  conservatoires,  les  études  d'har- 
monie, de  contrepoint,  de  fugue,  de  composition 
tiennent  une  très  grande  place.  On  attache  une  égale 
importance  à  l'enseignement  vocal. 

De  tout  ce  qui  précède,  on  peut  se  faire  une  idée 
de  ce  qu'était  l'enseignement  musical  dans  l'immense 
empire  des  tzars.  En  peu  d'années,  il  avait  pris  un 
développement  considérable  et  acquis  une  vitalité 
qui  va  sans  cesse  s'accentuant  et  qui  fait  présager  les 
plus  brillantes  destinées  pour  la  musique  dans  ce 
pays. 

Dans  les  dernières  années  de  l'ancien  régime  et 
pendant  la  guerre,  l'autonomie  des  conservatoires 
s'est  accentuée.  On  a  décidé  aussi  que  les  professeurs 
toucheraient  une  pension  après  vingt  ans  de  services. 
Des  facultés  ou  branches  fuient  instituées,  chacune 
d'elles  élisant  un  comité  mixte  composé  de  profes- 
seurs et  d'élèves  de  la  branche,  ceux-ci  en  nombre 
moitié  moindre  que  les  professeurs.  Ces  comités  se 
réunissaient  pour  discuter  des  questions  intéressant 
les  diverses  branches.  Quant  au  conseil  composé  des 
professeurs  des  classes  supérieures,  dont  il  a  été 
question  plus  haut,  il  continuait  son  exercice. 

Les  élèves  virtuoses,  à  la  fin  de  leurs  études,  de- 
vaient donner  un  récital  public. 

i.  Les  prix  payés  par  les  élèves  dépendent  :inssi  de  la  position  so- 
ciale de  ceux-ci.  Les  élevés  libres  ou  auditeurs  payent  les  prix  les  plus 
élevés. 


Régime  actuel.  —  Au  cours  des  deux  premières 
années  du  nouveau  régime  de  la  Russie,  aucun 
changement  notable  ne  s'est  produit  dans  le  fonc- 
tionnement des  conservatoires.  Vers  1920,  le  com- 
missariat de  l'Instruction  publique,  qui  avait  rem- 
placé le  ministère  de  même  nom,  a  commencé  à 
s'immiscer  dans  la  gestion  de  ces  établissements.  On 
décida  d'abord  qu'il  n'y  aurait  pas  d'élèves  payants» 
et  que  le  nombre  des  élèves  serait  diminué;  ensuite, 
les  traitements  des  professeurs  furent  augmentés  au 
prorata  du  nombre  des  élèves  supprimés.  Mais  les 
divisions  instituées  par  l'ancien  régime  sous  forme 
de  degrés,  élémentaire,  supérieur,  se  virent  mainte- 
nues. 


Conservatoires.  —  Les  deux  conservatoires  de 
Leningrad  et  de  Moscou  comptent  chacun  de  six 
cents  à  six  cent  cinquante  élèves.  Ces  établissements 
n'ont  plus  d'autonomie.  Les  directeurs,  appelés  rec- 
teurs, sont  nommés  par  les  conseils  des  professeurs 
où  figurent  des  délégués  des  conseils  des  élèves;  la 
nomination  se  fait  par  élection,  laquelle  est  sanction- 
née ou  infirmée  par  la  section  artistique  de  l'Ins- 
truction professionnelle  du  Commissariat  de  l'Ins- 
truction publique.  Les  Conservatoires  se  trouvent 
sous  la  dépendance  absolue  de  cette  section,  dont 
un  délégué  assiste  à  tous  les  examens  et  à  toutes  les 
auditions  d'élèves,  ainsi  qu'aux  épreuves  d'admission 
des  élèves2.  Le  recteur  actuel  du  Conservatoire  de 
Moscou  est  M.  Igounow.  De  même,  les  professeurs 
sont  élus  par  le  conseil  des  professeurs,  dans  lequel 
les  élèves  sont  représentés,  et  cela  sous  la  sanction 
de  la  section  artistique  de  l'Instruction  profession- 
nelle du  Commissariat  de  l'Instruction  publijue; 
cette  disposition  engendre  des  conflits  entre  maîtres 
et  élèves.  Au  point  de  vue  financier,  ce  fut  d'abord 
le  Commissariat  de  l'Instruction  publique  qui  assura 
le  budget  intégral  des  conservatoires  comme  celui 
de  toutes  les  écoles,  en  dépit  des  conflits  continuels 
qui  s'élevaient  à  l'égard  de  la  «  typisation  »  de  ces 
écoles,  c'est-à-dire  de  leur  classement  dans  une  des 
trois  catégories  :  primaire,  secondaire,  supérieure. 
Mais  actuellement,  le  Commissariat  se  borne  à  ver- 
ser un  appoint  dont  le  montant  apparaît  d'ailleurs 
très  variable.  Il  appartient  aux  conservatoires  d'as- 
surer le  reste  des  ressources  nécessaires  à  leur 
fonctionnement,  en  faisant  payer  les  élèves,  tout 
en  maintenant  partiellement  le  régime  des  bourses. 
C'est  le  conseil  des  élèves  qui  a  qualité  pour  dési- 
gner les  bénéficiaires  de  bourses, et  aussi  ceux  d'entre 
les  étudiants  qui  doivent  apporter  une  contribution 
scolaire. 

En  ce  qui  concerne  les  programmes  de  l'organisa- 
tion des  cours,  peu  de  changements  importants  sont 
à  signaler,  du  moins  à  l'égard  de  l'enseignement 
instrumental.  Ainsi,  le  piano  et  le  violon  comportent 
chacun  neuf  cours,  dont  cinq  préparatoires  et  quatre 
supérieurs.  Pour  le  violon  supérieur,  l'examen  final 
exige  l'exécution  des  fugues  de  Max  Reger,  alors  que 
l'examen  de  piano  comporte  une  œuvre  russe  mo- 
derne sans  désignation  d'auteur.  Mais  les  idées  ré- 


2.  Nous  somme-  redevables  a  M.  Gi.wi'rN'tw,  directeur  du  Conser- 
vatoire de  Leningrad,  et  à  Mil.  Codes  et  Calowe,  anciens  professeurs 
au  Conservatoire  de  Moscou,  des  renseignements  qui  suivent  sur  l'en- 
seignement musical  actuel  en  Russie.  Nous  les  prions  de  vouloir 
bion  agréer  tous  nos  remerciements.  (N.  D.  L.  D.) 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    3', 


puantes  ont  déterminé  une  extension  considérable 
du  programme  de  culture  générale,  surtout  en  ce 
qui  concerne  les  matières  d'ordre  historique  et  so- 
ciologique. Et  la  répercussion  de  ces  idées  s'observe 
même  sur  le  terrain  musical  proprement  dit;  c'est 
ainsi  que,  dans  une  classe  d'harmonie,  on  prendra 
de  préférence  comme  mélodie  à  harmoniser  un  type 
provenant  du  folk-lore.  Cette  tendance  a  rencontré 
l'approbation  du  corps  professoral. 

On  a  aussi  introduit  de  nouveaux  cours  :  cours  de 
direction  de  l'orchestre  et,  au  degré  élémentaire, 
surtout  dans  les  écoles  techniques,  cours  d'audition 
destiné  à  apprendre  à  écouter.  De  plus,  les  profes- 
seurs s'efforcent  continuellement  de  réformer  et 
d'améliorer  l'enseignement  à  tous  les  degrés.  Dans 
chaque  classe,  les  élèves  doivent  tenir  un  journal  de 
l'enseignement  de  leur  maître. 

A  l'origine,  l'organisation  des  concerts  et  specta- 
cles était  subordonnée  à  l'autorisation  stricte  du 
Commissariat  de  l'Instruction  publique,  mais,  depuis 
quelques  années,  ce  régime  d'absolutisme  s'est  beau- 
coup atténué.  On  mobilise  les  musiciens  pour  des 
concerts  destinés  au  peuple,  aux  malades,  aux  ou- 
vriers d'usine,  etc.;  ces  déplacements  offrent  aux 
artistes  un  sérieux  intérêt  matériel,  car  souvent  ils 
recevaient  des  contributions  en  nature;  mais,  après 
un  certain  tlottement,  on  est  revenu  au  payement  en 
argent. 


Autres  établissements.  —  Les  écoles  privées, 
très  rares,  ont  d'abord  été  soumises  au  même  ré- 
gime que  les  conservatoires,  mais,  maintenant,  en 
conformité  avec  la  réaction  qui  s'est  produite  dans 
la  politique  inlérieure,  une  détente  se  dessine  dans 
un  sens  plus  libéral. 

On  peut  noter  qu'au  printemps  de  1928,  un  concert 
composé  exclusivement  d'étudiants  s'est  organisé  à 
Leningrad  dans  un  but  pédagogique. 

Angleterre  et  Ainériqne. 

En  Angleterre  et  en  Amérique,  Londres  et  Boston 
méritent  des  mentions  spéciales. 

Londres.  —  A  Londres  fonctionnent  cinq  conser- 
vatoires. Deux  d'entre  eux  tiennent  la  tête,  ce  sont  : 
1°  Royal  Collège  of  masic,  ayant  pour  directeur  Sir 
Hugh  P.  Allen1.  Il  fut  fondé  en  1876  par  Sullivan 
sous  le  titre  de  National  Iraining  School  of  music,  et 
prit  son  nouveau  titre  en  1883.  Cette  institution, 
de  grand  avenir,  possède  un  capilal  considérable. 
2°  Royal  Academy  of  music,  fondée  en  1822,  directeur 
Dp  J.-B.  Mac  Ewen2.  Dans  ces  deux  établissements, 
l'enseignement  a  les  tendances  classiques;  le  con- 
trepoint, la  fugue,  la  composition  y  tiennent  une 
très  grande  place;  l'importance  accordée  à  l'ensei- 
gnement vocal  et  à  l'enseignement  instrumental  est 
égale;  la  sanction  des  études  consisle  en  examens 
et  concours  dont  les  résultats  n'ont,  du  reste,  aucune 
influence  sur  la  carrière  des  lauréats,  et  ne  leur 
confèrent  aucun  avantage  particulier.  Enfin,  il  y  a 
des  exercices  publics. 

Les  trois  autres  conservatoires  établis  à  Londres 
sont  :  London  Academy  of  music,  fondée  en  1861,  spé- 
cialement destinée  aux  amateurs;  Trinity  Collège, 
fondé  en  1872,  société  de  rapport  distribuant  des 


1.  Zfnsik.  Kalemler.  1929,  II,  p. 

2.  Ibid.,  II,  p.  48. 


diplômes;  et  Guild  Hall  School  of  music,  fondée  en 


Enfin,  nous   trouvons  un  conservatoire   à  Edim- 
bourg, un  à  Dublin,  un  à  Glasgow. 


Boston.  —  Le  conservatoire  le  plus  grand  du 
monde  est,  dit-on,  celui  de  Boston3,  où  fréquentent 
deux  mille  élèves,  avec  dix-huit  professeurs  de 
piano,  deux  d'orgue,  quatorze  de  chant,  etc.  Il  y  a 
aussi,  ce  qui  fait  l'originalité  de  cette  école,  des 
professeurs  de  littérature,  de  rhétorique,  d'histoire, 
d'expression,  d'interprétation  artistique,  de  dévelop- 
pement de  la  voix  parlée  :  en  tout  quatre-vingts  pro- 
fesseurs. 

Comme  en  Allemagne,  on  forme  l'esprit  de  ceux 
qui  sont  appelés  à  faire  la  critique  et  on  leur  ensei- 
gne ce  qui  doit  les  rendre  compétents!  11  y  a  donc 
un  cours  de  journalisme  musical,  de  crilique  et  de 
littérature  musicales.  «  Ce  cours,  dit  le  programme, 
comprend  la  connaissance  générale  de  tous  les  chefs- 
d'œuvre  du  répertoire  classique,  la  connaissance 
pralique  des  instruments  de  l'orchestre  et  de  leur 
usage  dans  les  œuvres  modernes;  la  compréhension 
des  différentes  écoles  de  composition  et  la  technique 
des  exécutions;  des  exercices  pratiques  de  critique 
et  d'études,  et  toute  la  routine  du  travail  journalier.  » 

Beau  programme  pour  assurer  la  compétence  de 
la  critique!  Il  ne  serait  peut-être  pas  inutile  de  le 
méditer  et  de  le  pratiquer  en  France  et  ailleurs!  Et 
puis,  il  y  a  le  côté  pratique,  que  ne  dédaigent  jamais 
les  Américains,  car,  ajoute  le  même  programme, 
«  il  y  a  des  demandes  croissantes  de  critiques  mu- 
sicaux expérimentés  dans  toutes  les  villes  des  Etats- 
Unis.  Quelques-unes  d'entre  elles,  même  parmi  les 
plus  grandes,  sont  à  présent  très  pauvres  à  cet  égard, 
les  besoins  étant  beaucoup  plus  grands  que  les 
offres.  » 

Le  budget  du  Conservatoire  est  de  1.500.000  fr.  ; 
cependant  les  élèves  payent  une  rétribution  scolaire 
assez  élevée  (environ  1250  fr.  par  an*). 

Au  nombre  des  choses  enseignées,  il  faut  remar- 
quer que  les  élèves  de  piano  apprennent  obligatoi- 
rement à  démonter  et  à  remonter  les  pianos,  afin 
d'en  bien  connaître  la  construction  et  de  savoir  les 
accorder  eux-mêmes. 

Détail  curieux  :  on  compte,  répartis  dans  les  dif- 
férentes classes,  douze  orgues  à  tuyaux  et  un  grand 
orgue.  La  soufflerie  de  tous  ces  instruments  marche 
à  l'électricité.  Il  n'y  a  pas  d'exemple  d'autre  établis- 
sement renfermant  une  aussi  grande  quantité  d'or- 
gues! 

Autre  particularité  plus  curieuse  encore  :  si  l'on 
veut  obtenir  un  diplôme  de  gradué  ou  de  profes- 
seur du  Conservatoire,  il  faut  suivre,  à  l'université 
de  Boston,  les  cours  de  langues  modernes  et  an- 
ciennes, mathématiques  et  sciences  naturelles,  géo- 
métrie, trigonométrie,  physique,  chimie,  biologie, 
histoire,  littérature,  droit,  économie  politique,  psy- 
chologie, logique,  théorie  de  la  connaissance,  prin- 
cipes de  métaphysique,  éthique!  Universalité  de 
connaissances! 

A  signaler  encore  un  pensionnat  spécial  pour 
les  élèves  femmes  dont  les  parents  n'habitent  pas 
Boston. 


3.  Boston  Conservatory  of  i 
lender,  1929,  II,  p.  417. 

4.  Hrix  d'avant-guerre. 


Agide  Ja 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


On  vnit  combien  ['organisation  du  Conservatoire 
de  Boston  le  différencie  singulièrement  des  autres 
établissements  similaires.  Il  a  ainsi  son  originalité. 


D'autres  écoles  de  musique  fonctionnent  encore 
d'une  manière  très  intéressante  aux  Etats-Unis  et  ail- 
leurs; néanmoins,  il  faut  se  borner,  et  l'on  ne  peut 
décrire  parle  détail  (cela  deviendrait  du  reste  super- 
llu)  ce  qu'est  l'enseignement  musical  dans  le  monde 
entier.  Après  ce  qui  a  été  dit  sur  son  organisation 
-et  son  fonctionnement  en  France,  en  Allemagne,  en 
Autriche,  en  Italie,  en  Belgique,  en  Suisse,  en  Russie, 
en  Angleterre,  en  Amérique,  il  suffira  de  mention- 
ner :  le  Conservatoire  d'Amsterdam1,  fondé  en  1862; 
le  Conservatoire  de  Rotterdam,  fondé  en  1845;  à  la 
Haye,  le  Haagsch  Conservatorium,  directeur  Siegfried 
Blaai'w,  fondé  en  1826  (très  florissant,  enseigne- 
ment gratuit)  et  le  Koninklyk  Conservatorium  voorMu- 
ziek,  dir.  D.  J.  Wagenaah  [Musik.  liai.,  II,  p.  138);  le 
conservatoire  de  Luxembourg,  fondé  en  1864,  assez 
important;  dir.  Luc  Lambote. 

D'autres  pays  encore  ont  des  conservatoires  dignes 
d'être  signalés  :  ceux  de  Copenhague,  fondé  en  1867; 
de  Christiania,  fondé  en  1865;  deStockholm,  fondé  en 
1871,  comme  institution  d'Etat  avec  l'enseignement 
gratuit;  de  Madrid,  fondé  en  1830;  de  Saragosse  et 
de  Valence;  de  Lisbonne,  fondé  en  1836,  etc. 

Grèce 2. 

Athènes. —  Le  Conservatoire  de  musique  et  de 
déclamation  d'Athènes  ou  Odéon  d'Athènes,  n'est 
pas  subventionné  par  l'Etat.  Il  doit  sa  fondation  aux 
philhellènes  MM.  Averof  et  Singros,  et  à  certaines 
colonies  grecques  à  l'étranger  qui  ont,  dans  ce  but, 
fait  don  de  fortes  sommes  au  gouvernement  hellé- 
nique. Fondé  en  1871,  le  Conservatoire  d'Athènes  fut 
réorganisé  par  M.  Nasos,  directeur  honoraire  actuel, 
qu'imposa  M.  Averof.  Sous  cette  condition,  ce  der- 
nier versa  une  nouvelle  somme  de  deux  millions. 

Administré  par  un  conseil  de  neuf  membres,  que 
préside  M.  Georges  Averof,  et  ayant  comme  sous- 
directeur  M.  C.  Nikolau,  le  Conservatoire  comporte 
un  enseignement  payant,  mais  dont  le  prix  varie  avec 
les  diverses  classes.  Toutefois,  un  certain  nombre 
d'élèves,  dont  la  situation  mérite  cette  faveur,  sont 
admis  à  titre  gratuit. 

L'année  scolaire,  d'une  durée  de  neuf  mois,  com- 
mence le  1er  septembre  et  se  termine  le  31  mai. 

Les  classes  sont  les  suivantes  : 

Théorie  et  solfège.        Contrebasse.  Musiqued'ensemble- 
Harmonie.  Klùle.  Chant. 
Composition.  Clarinette.  Déclamation. 
Piano.  Hautbois.  Histoire  de  la   mu- 
Harpe.  Basson.  sique. 
Violon.  Cor.  Histoire  de  l'art  dra- 
Alto.  Trompette.  matique. 
Violoncelle,  Trombone. 

L'enseignement  admet  trois  degrés  :  élémentaire, 
moyen  et  supérieur.  11  est  donné  par  des  «  profes- 
seurs »  pour  le  degré  supérieur,  et  par  des  «  maî- 
tres »   pour  les   degrés  moyen  et   élémentaire.   On 

1.  M.  Daniel  de  Linge,  ancien  directeur  de  ce  Conservatoire,  musi- 
cien instruit,  est  l'auteur  d'une  théorie  musicale  contenant  desaper. 
rusingénieux  et  nouveaux,  lesquels  exigeraient  un  long  développe- 
ment. La  nature  et  le  caractère  de  Y  Encyclopédie  ne  permettent 
malheureusement  que  île  la  mentionner  et  J'en  signaler  l'intérêt. 

Ledirecteur  actuel  est  Sem  Dresde»  (Musik.  Kalender,  II,  130). 


compte  environ  vingt-cinq  professeurs  et  une  tren- 
taine de  maîtres.  Le  nombre  des  élèves  est  actuelle- 
ment de  six  cent  cinquante  environ,  répartis  de  la 
façon  suivante  entre  les  différentes  classes  : 

l'iano 210    Violoncelle 30    Harpe 10 

Chant 200    Contrebasse...     20    Trompette 10 

Violon 11)0    Clarinette 15    Trombone 5 

Les  classes  d'harmonie  et  d'histoire  de  la  musique 
sont  obligatoires  pour  tout  élève  instrumentiste;  de 
même,  la  classe  de  déclamation  est  obligatoire  pour 
les  chanteurs. 

L'âge  d'admission  est  compris  entre  les  limites 
de  neuf  et  de  dix-neuf  ans.  Si  un  élève  se  présente  à 
partir  de  l'âge  de  douze  ans,  il  doit  justifier  de  quel- 
ques notions  musicales. 

Les  classes  comprennent  des  élèves  hommes  et 
des  élèves  femmes,  et  les  cours  ont  lieu  deux  fois 
par  semaine. 

Aucun  élève  ne  peut  changer  de  classe,  en  cours 
d'année,  sans  une  autorisation  spéciale  de  la  direc- 
tion et  sans  le  consentement  du  professeur  de  sa 
classe. 

Les  examens  de  fin  d'année  ont  lieu  du  18  mai  au 
10  juin.  Chaque  élève  qui  en  est  jugé  digne  reçoit 
un  diplôme;  le  nombre  de  ces  diplômes  n'est  pas 
limité,  mais  ceux-ci  comportent  différentes  catégo- 
ries. Ainsi,  le  diplôme  de  «  soliste  »  n'est  délivré  qu'à 
la  suile  d'un  concours  dont  le  programme  comprend 
un  récital  très  chargé.  Le  diplôme  de  «  maître  »  est 
donné  également  au  concours,  mais  avec  un  pro- 
gramme moins  difficile,  dont  l'exécution  en  récital 
n'est  pas  exigée.  II  y  a  enfin  des  diplômes  simples. 
On  accorde  aussi  des  médailles  d'or  à  titre  excep- 
tionnel, ainsi  que  des  médailles  d'argent  et  de 
bronze. 

Il  y  a  une  vingtaine  d'années,  on  a  fondé  un  or- 
chestre du  Conservatoire  qui  comportait  alors  une 
quarantaine  d'exécutants.  Le  nombre  de  ceux-ci  est 
actuellement  de  quatre-vingts,  et,  depuis  trois  ans, 
l'Etat  subventionne  l'orchestre. 

Nous  noterons  que  plusieurs  écoles  de  musique, 
portant  le  nom  de  conservatoire,  ont  pris  naissance 
récemment  ;  la  plus  ancienne  de  celles-ci  (après  le 
Conservatoire  d'Athènes)  est  VOdéon  Hellénique. 

D'autres  villes  de  Grèce  possèdent  également  des 
écoles  de  musique;  ce  sont  :  le  Pirée,  Salonique, 
Volo,  Calamata,  Patras.  Mais  l'enseignement  donné 
à  Athènes  reste,  sans  contredit-,  très  supérieur  à 
celui  que  dispensent  ces  écoles.  Athènes  compte,  en 
outre,  de  très  nombreux  concerts,  et  des  virtuoses 
internationaux  y  passent  presque  lous  les  ans.  Aussi, 
l'Orient  vient-il  chercher  dans  cette  ville  les  élé- 
ments d'art  qui  ne  peuvent  aller  jusqu'à  lui. 


CONSERVATOIRE  IDÉAL 

Après  avoir  passé  en  revue  l'organisation  des  dif- 
férentes écoles  de  musique  les  plus  importantes  du 
monde,  il  serait  peut-être  intéressant  de  montrer  ce 
que  pourrait  et  devrait  être  un  Conservatoire  modèle, 
le  Conservatoire  idéal. 

Tout  d'abord,  le  Conservatoire  idéal  devrait  être 
largement  subventionné  par  l'Etat  pour  pourvoir  à 


Nous 


devables  de  la  révision  et  i 

e  la  mise  à  jour  de 

01,  a  l'obligeance  de  M.  Mai 

rite  N.xcuis,  profes- 

d'Orléans  et  ancien  profess 

eur  au  Conservatoire 

rions  de  vouloir  bien  trouv 

r  ici  l'expression  -te 

ts.  (N.  D.L.  D.) 

TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL    346» 


tous  les  besoins  d'un  enseignement  intégral  et  gra- 
tuit, tel  qu'il  va  être  formulé  ci-après.  La  question 
d'argent  doit  donc  être  écartée. 

Le  Conservatoire  de  Paris,  semblant  le  plus  com- 
plet au  point  de  vue  des  études  purement  musicales 
et  dramatiques,  peut  être  pris  avec  avantage  pour 
type,  mais  avec  des  modifications  et  des  adjonctions 
dont  voici  l'exposé  : 

Le  Directeur  ne  s'occuperait  que  de  la  partie  artis- 
tique. Il  serait  secondé  par  un  sous-directeur,  chargé 
de  l'inspection  des  classes,  un  administrateur  chef  du 
secrétariat,  un  sous-chef  du  secrétariat  et  le  nombre 
de  commis  nécessaire. 

Tous  les  professeurs,  répétiteurs,  accompagnateurs 
seraient  convenablement  et  même  largement  appoin- 
tés. Il  n'est  pas  digne  d'un  établissement  de  l'Etat 
d'accepter  des  services  gratuits  de  ses  professeurs. 

On  voit  fréquemment  dans  les  classes  de  tout  en- 
seignement des  élèves  complètement  illettrés.  Cela 
est  déplorable,  inadmissible  et  nuisible  à  leur  déve- 
loppement intellectuel  et  artistique;  ne  pourraient 
donc  être  admis  que  ceux  qui  fourniraient  la  preuve 
d'études  antérieures  suffisantes;  en  outre,  des  clas- 
ses de  grammaire,  orthographe,  littérature,  histoire, 
seraient  créées  pour  certaines  catégories  d'élèves. 

L'étude  des  formes  musicales,  l'analyse  des  œuvres 
devraient  être  l'objet  d'une  étude  spéciale.  Le  pro- 
fesseur de  composition  ne  peut  tout  faire,  tout  ensei- 
gner :  un  cours  annexe  aux  classes  de  composition 
serait  donc  très  utile  et  devait  être  créé  dans  ce  but. 
L'élude  du  chant  choral,  imposée  a  tous  les  élèves, 
aiderait  à  développer  chez  eux  le  sens  de  la  justesse 
absolue,  du  style  polyphonique,  à  leur  faire  con- 
naître les  belles  œuvres  vocales.  On  obtiendrait  ainsi 
des  ensembles  vocaux  capables  de  rendre  les  plus 
grands  services,  car  tout  musicien  doit  pouvoir  chan- 
ter en  chœur,  même  avec  une  voix  médiocre  :  des 
classes  d'ensemble  vocal  pour  tous  les  élèves  seraient 
dont  créées. 

On  voit  souvent  des  lauréats  de  solfège  lire  très 
faiblement  dans  les  classes  instrumentales.  Les  pro- 
fesseurs de  ces  classes  n'ont  pas  le  temps  nécessaire 
pour  s'occuper  utilement  de  la  lecture  :  des  cours 
spéciaux  de  lecture  seraient  institués  pour  les  ins- 
trumentistes. 

11  est  indispensable  que  toutmusicien  ait  au  moins 
un  aperçu  de  l'histoire  de  la  musique.  La  plupart 
des  élèves  sont,  à  cet  égard,  d'une  ignorance  absolue. 
Il  serait  utile  d'avoir,  en  dehors  du  Cours  d'histoire 
de  la  musique  existant  déjà,  et  obligatoire  pour  tous 
les  élèves  d'harmonie  et  de  composition,  un  autre 
cours  primaire  d'histoire  musicale,  obligatoire  pour 
tous  les  élèves. 

Il  semble  que  tout  musicien  doive  avoir  des  con- 
naissances sur  la  théorie  de  la  langue  des  sons. 
Beaucoup  en  ignorent  même  les  éléments;  c'est  une 
grave  lacune  qu'il  faut  .combler  en  instituant  des 
classes  élémentaires  d'harmonie  pour  tous  les  élèves 
instrumentistes. 

Les  compositeurs  devraient  connaître  la  technique 
de  tous  les  instruments;  mais  cela  est  presque  im- 
possible. Les  plus  indispensables  étant  le  piano  et 
les  instruments  à  cordes,  des  classes  spéciales  de 
piano  seraient  obligatoires  pour  tous  les  élevés  des 
classes  d'harmonie  et  décomposition,  et  des  classes 
spéciales  de  violon  et  de  violoncelle  pour  tous  les 
élèves  de  composition.  Ceux-ci,  devant  avoir  l'esprit 
particulièrement  cultivé,  suivraient  en  outre  des  cours 
de  littérature  et  d'histoire,  créés  pour  eux. 


La  durée  des  études  des  élèves  chanteurs  devrait 
être  de  cinq  ans. 

Généralement  moins  musiciens  que  les  instrumen- 
tistes, ils  ont  un  temps  moins  long  pour  parfaire 
leurs  études!  Ils  arrivent  le  plus  souvent  complète- 
ment ignorants  dans  les  classes;  il  leur  faut  ap- 
prendre le  solfège,  la  vocalisation,  l'émission  de 
la  voix,  l'art  si  difficile  du  chant,  etc.  Cinq  années 
ne  sont  pas  de  trop  pour  remplir  ce  programme. 
En  outre,  tous  les  chanteurs  devraient  savoir  jouer 
un  peu  du  piano,  afin  de  pouvoir  s'accompagner  et 
maintenir  la  justesse  dans  leurs  études.  Cela  leur 
serait  d'un  très  grand  secours!  Des  classes  de  piano 
spéciales  aux  chanteurs  devraient  être  établies. 

Afin  de  permettre  aux  meilleurs  élèves  chanteurs- 
de  faire  leurs  études  sans  préoccupation  matérielle, 
de  s'y  adonner  entièrement,  et  aussi  afin  de  les 
soustraire  aux  sollicitations  extérieures,  un  pen- 
sionnat serait  établi  pour  les  hommes  et  un  pour  les 
femmes;  vingt  élèves  de  chaque  sexe  y  seraient  ad- 
mis après  désignation  des  comités  d'examen.  Une 
éducation  musicale  et  littéraire  complète  leur  serait 
donnée. 

Les  cours  de  grammaire,  orthographe,  littérature, 
histoire,  seraient  suivis  également  par  tous  les  au- 
tres élèves  de  chant  et  ceux  de  la  déclamation  dont 
l'éducation  première  ne  serait  pas  reconnue  suffi- 
sante. 

On  a  constaté  souvent  qu'un  trop  grand  nombre 
d'élèves  dans  une  classe  nuisait  à  leurs  études  et  à 
leurs  progrès,  les  soins  du  maître  se  trouvant  trop 
dispersés  :  le  nombre  des  élèves  ne  pourrait  être 
supérieur  à  huit. 

L'instrumentation  moderne  faisant  un  emploi  fré- 
quent des  gros  cuivres,  il  semble  très  utile  que  leur 
mécanisme  soit  enseigné  aux  élèves  :  une  classe  spé- 
ciale devrait  leur  être  consacrée. 

Il  serait  également  désirable  qu'on  étudiât  le  saxo- 
phone et  le  sarrussophone,  instruments  fort  usités 
aujourd'hui.  Leur  étude  pourrait  être  réunie  à  celle 
de  la  clarinette  et  du  basson. 

L'art  de  blouser  les  timbales  devrait  aussi  être 
l'objet  d'un  enseignement. 

Les  perfectionnements  importants  :  prolongement 
des  sons,  célesta,  etc.,  apportés  à  l'harmonium  de- 
puis plusieurs  années,  justifieraient  actuellement  la 
création  d'une  classe  pour  l'enseignement  de  cet 
instrument. 

Une  seule  classe  de  musique  de  chambre  n'est  pas 
suffisante  pour  tous  les  élèves  d'une  grande  école. 
On  devrait,  selon  les  besoins,  en  créer  d'autres1,  et 
surtout  instituer  une  classe  spéciale  de  quatuor  à 
cordes. 

Bien  que  l'art  de  diriger  un  orchestre  ne  puisse 
guère  être  l'objet  d'un  enseignement  spécial,  bien 
que  l'expérience  ait  démontré  qu'il  faut  surtout  avoir 
le  don,  et  que  ceux  qui  ont  été  et,  sont  les  meil- 
leurs chefs  d'orchestre  n'ont  guère  appris  leur  métier 
que  d'eux-mêmes,  il  n'est  pas  moins  vrai  que  la  pra- 
tique en  ceci  est  la  meilleure  leçon,  et  que  les  dons 
naturels  peuvent  se  développer  avec  l'occasion  de 
les  exercer  et  les  conseils  d'un  chef  expérimenté.  A 
la  classe  d'orchestre,  certains  élèves  pourraient  être 
appelés  à  prendre  la  direction  de  l'orchestre,  sous 
l'œil  du  maître.  Les  élèves  de  composition,  dont  les 
œuvres  auraient  été  choisies  par  le  comité  pour  être 


1.    Depuis   i]ll 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET 


DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


essayées  à  la  classe  d'orchestre,  seraient  obligés  de 
conduire  leurs  œuvres. 

Les  femmes  élant  actuellement  en  très  grand 
nombre  dans  les  classes  de  violon,  d'alto  et  de  vio- 
loncelle,  il  n'y  a  aucune  raison  pour  ne  pas  séparer 
les  sexes,  connue  on  le  fait  pour  le  piano.  11  y  aurait 
donc,  pour  ces  instruments,  des  classes  d'hommes  et 
des  classes  de  femmes;  les  concours  pour  les  prix 
devraient  aussi  être  distincts. 

Puisqu'il  y  a  des  épreuves  de  lecture  pour  tous 
les  concours,  on  se  demande  pourquoi  les  chanteurs 
en  sont  exemptés. 

Celte  épreuve  devrait  d'autant  plus  leur  être  impo- 
sée qu'elle  stimulerait  leur  zèle  pour  les  études  de 
solfège,  dont  ils  ont  généralement  plus  besoin  que 
les  autres.  La  lecture  ferait  donc  partie  des  épreuves 
du  concours  pour  les  chanteurs. 

Pour  l'enlraineinent  des  élèves,  pour  habituer  ceux- 
ci  à  faire  de  la  musique  ensemble  et  à  se  produire 
en  public,  quatre  exercices  ne  seraient  pas  de  trop  : 
deux  avec  orchestre  et  chœurs,  et  deux  de  musique 
de  chambre  et  chant.  Aux  exercices  d'orchestre,  on 
ferait  entendre  les  meilleurs  essais  des  élèves  de 
composition  dirigés  par  les  auteurs  :  un  ou  deux 
morceaux  de  ce  genre  figureraient  à  chaque  pro- 
gramme. 

11  serait  également  intéressant  d'établir  un  exer- 
cice spécial  pour  les  élèves  de  déclamation. 

Lorsqu'un  professeur  est  absent  par  maladie  ou 
par  congé,  sa  classe  ne  doit  jamais  être  interrompue, 
et  son  fonctionnement  doit  être  assuré  immédiate- 
ment. 

Des  professeurs  suppléants  devraient  être  nommés 
et  tenus  de  se  rendre  au  premier  appel  de  l'admi- 
nistration. 

Uien  ne  serait  changé  aux  concours  pour  l'admis- 
sion ni  aux  examens  semestriels.  Quant  aux  con- 
cours publics  de  fin  d'année,  ils  sont  tellement  dans 
les  mœurs  en  France  et  ils  entretiennent  une  telle 
émulation,  qu'il  serait  difficile  de  les  supprimer,  bien 
que  l'émotion  fasse  perdre  à  beaucoup  de  concur- 
rents leurs  meilleures  qualités  et  ne  leur  permette 
pas  toujours  de  donner  la  mesure  exacte  de  leur  talent. 
Mais  il  ne  serait  que  juste  d'instituer  à  cûté  des  con- 
cours des  examens  sérieux  de  fin  d'études,  à  la  suite 
desquels  l'élève  qui  le  mériterait  recevrait  un  certi- 
ficat, un  diplôme  de  capacité.  Ce  serait  quelque 
chose  comme  le  certificat  de  maturité  en  Allemagne 
ou  le  diplôme  de  licence  à  Milan. 

Cette  sanction  des  études  serait  conforme  à  la  jus- 
tice et  à  l'équité,  et  nul  n'aurait  plus  le  droit  de  se 
plaindre.  Il  ne  paraît  pas  impossible  de  mettre  en 
pratique  une  telle  mesure  en  en  réglant  bien  tous  les 
détails.  Pour  les  bons  élèves,  le  certificat  de  fin  d'é- 
tudes constituerait  une  garantie  et  comme  un  passe- 
partout,  et  quelle  que  fût  ensuite  l'issue  du  con- 
cours, leur  science  et  leur  talent  seraient  constatés 
officiellement.  Les  autres  élèves,  médiocres  ou  mau- 
vais, n'entrent  pas  en  ligne  de  compte. 

Il  serait  urgent  de  rendre  l'obtention  des  prix  plus 
difficile  et  d'en  restreindre  le  nombre,  si  l'on  ne  veut 
voir  diminuer  le  prestige  qui  s'y  attache. 

Excepté  le  concours  pour  le  (irand  Prix  de  Home, 
auquel  peuvent  du  reste  prendre  part  des  concur- 
rents étrangers  au  Conservatoire,  rien  ne  sanctionne 
les  études  des  classes  de  composition.  On  pourrait 
imposer  aux  élèves  une  épreuve  consistant  en  :  un 
lied,  madrigal  ou  chœur  sur  une  poésie  donnée;  un 
morceau  de  musique  de  chambre  pour  piano  et  vio- 


lon ou  violoncelle  sur  un  thème  donné,  et  une  petite 
scène  dramatique  pour  chant  et  orchestre  sur  livret 
donné.  Les  élèves  seraient  enfermés  en  loge  pour 
chaque  épreuve  pendant  un  maximum  de  dix-huit 
heures. 

Les  concours,  constituant  une  sanction  des  élu- 
des de  l'école,  doivent  se  faire  dans  l'école  même  et 
non  au  dehors.  11  devrait  êlre  absolument  interdit  au 
public  de  manifester  contre  les  concurrents  et  contre 
les  décisions  du  jury. 

Afin  de  laisser  aux  artistes  spéciaux  la  très  grande 
prépondérance  dans  les  jurys  de  concours  et  d'exa- 
mens, l'Etat  ne  se  ferait  représenter  dans  ces  jurys 
que  par  un  seul  membre. 

La  question  des  costumes  et  des  décors  aux  con- 
cours publics  a  été  si  souvent  agitée  qu'il  en  faut 
bien  parler.  Il  est  évident  que  les  jurys,  très  com- 
pétents, n'ont  pas  besoin  du  costume  pour  juger  de 
la  valeur  réelle  de  l'élève;  le  port  du  costume  don- 
nerait donc  surtout  satisfaction  au  public;  peut-être 
aussi,  le  costume  conférerait-il  à  l'élève  un  certain 
relief,  une  certaine  excitation  favorable  à  son  jeu.  Il 
n'y  aurait  aucun  inconvénient  à  en  faire  l'essai  si  des 
difficultés  presque  insurmontables  ne  se  présen- 
taient :  les  concurrents  lirenl  au  sort  l'ordre  dans 
lequel  ils  doivent  subir  le  concours;  cet  ordre  doit 
être  respecté;  or,  comment  un  concurrent  trouvera- 
l-il  le  temps  de  changer  de  costume  s'il  doit  donner 
la  réplique  au  concurrent  suivant'.'  Inversement,  com- 
ment celui  qui  donne  une  réplique  trouvera-t-il  le 
temps  de  changer  de  costume  s'ii  passe  son  propre 
concours  immédiatement  après'.'  Ces  questions  pa- 
raissent insolubles,  à  moins  de  supprimer  le  tirage 
au  sort  des  scènes  et  de  les  combiner,  de  manière 
à  permettre  aux  concurrents  de  changer  opportuné- 
ment de  costumes  pour  leurs  concours  et  pour  leurs 
répliques. 

Le  changement  de  décors  est  également  difficile 
et  compliqué,  à  moins  de  laisser  entre  chaque  scène 
le  temps  nécessaire  pour  ce  changement;  mais  que 
de  temps  perdu  pour  le  jury!  Et  la  durée  du 
concours! 

Tout  cela  mérite  cependant  une  étude  sérieuse. 

En  continuant  les  modifications  et  adjonctions 
précédemment  indiquées  avec  ce  qui  existe  déjà 
actuellement,  voici  quel  serait  le  programme  défi- 
nitif des  études  du  Conservatoire  idéal  : 

1.  Solfège  des  instrumentistes,  classes  des  hommes. 

2.  Solfège  des  instrumentistes,  classes  des  femmes. 

3.  Solfège  des  chanteurs,  classes  des  hommes. 

4.  Solfège  des  chanteurs,  classes  des  femmes. 

5.  Harmonie,  hommes. 

6.  Harmonie,  femmes. 

7.  Harmonie  élémentaire  pmir  les  inslrumeutistes,  hommes. 
S.  Harmonie  élémentaire  pour  les  instrumentistes,  femmes. 
9.  Contrepoint. 

10.  Fugue,  composition,  instrumentation. 

11.  Etude  des  formes,  analyse  des  œuvres. 

12.  Orgue. 

13.  Accompagnement  au  piano. 

14.  Piano,  hommes. 

15.  Piano,  femmes. 

16.  Piano  spécial  pour  les  élèves  des  classes  d'harmomie  et  de 

composition. 

17.  Piano  spécial  pour  les  chanteur9. 

18.  Piano  préparatoire,  hommes. 
10.  Piano  préparatoire,  femmes. 

20.  Harpe. 

21.  Harmonium. 

22.  Chant,  hommes. 

23.  Chant,  femmes. 

24.  Opéra. 

25.  Opéra-comique. 

26.  Déclamation  dramatique. 

27.  Violon,  hommes. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


RENSEIGNEMENT  MUSICAL    3471 


Violon,  femmes. 
Violon  préparatoire,  hommes. 
Violon  préparatoire,  femmes. 
Violon  spécial  pour  les  élèves  de  composition. 
Alto,  hommes. 
Alto,  femmes. 
Violoncelle,  hommes. 
Violoncelle,  femmes. 

Violoncelle  spécial  pour  les  élèves  de  composition. 
Contrebasse. 
Flûte. 
Hautbois. 

Clarinette,  saxophone. 
Basson,  sarrussophone. 
Cor. 

Trompette. 
Cornet  à  pistons. 
Trombone. 

Instruments  en  cuivre  (tubas). 
Ensemble  vocal  (chant  choral)  pour  tous  les  élèves. 
Ensemble  instrumental  (musique  de  chambre). 
Orcheslre. 

Histoire  de  la  musique,  obligatoire  pour  les  élèves  d'ha 
nie  et  de  composition. 


51.  Cours  primaire  d'histoire  musicale,  obligatoire  pour  tous  les 

élèves. 

52.  Histoire  de  la  littérature  dramatique,  obligatoire  pour  les 

élèves  de  déclamation. 

53.  Grammaire,    orthographe,   littérature,  histoire,    pour    les 

élèves  du  chant  et  de  la  déclamation. 
53  bis.  Littérature,  histoire,  pour  les  élèves  de  composition. 

54.  Lecture  spéciale  pour  chaque  classe  d'instruments. 

55.  Timbales. 

56.  Maintien. 

57.  Escrime. 

Si  une  telle  école  fonctionnait  régulièrement  avec 
des  règlements  bien  étudiés,  bien  observés,  avec  une 
direction  énergique  et  un  corps  de  professeurs 
éminents  et  dévoués,  on  peut  supposer  que  les  ré- 
sultats seraient  de  tout  premier  ordre,  et  que  Yen- 
seignement  musical  qui  y  serait  donné  porterait  d'ad- 
mirables fruits!  Avec  de  l'argent,  c'est  un  essai  à 
tenter. 

Th.  DL'BOIS. 


L'ENSEIGNEMENT  DRAMATIQUE 


Par  MM.  J.  CLARETIE 

DE   L'ACADÉMIE    FRANÇAISE 

et  J.  TRUFFIER 

i;iiIK-FliAN.:\ISF,  PROFESSEUR  AU  CONSKHVATilIK  !■ 


CONSIDÉRATIONS  GÉNÉRALES 

C'est  un  préjugé  très  répandu  que  celui  qui  con- 
siste à  voir  dans  l'art  d'interprétation  dramatique 
un  ensemble  d'actes  faciles  à  accomplir  :  «  Jouer  la 
comédie,  qu'est-ce,  après  tout?  C'est  parler,  mar- 
cher, gesticuler  comme  dans  la  vie  ;  pour  être  bon,  un 
acteur  n'a  qu'à  être  naturel.  » 

Faire  résonner  un  instrument  de  musique,  mode- 
ler de  la  glaise,  faire  de  la  peinture,  on  comprend 
que  cela  nécessite  de  longues  et  laborieuses  études 
spéciales;  maisjouer  la  comédie,  c'est  simple  comme 
bonjour  :  il  n'y  a  qu'à  faire  «  comme  dans  la  vie  ». 

Et  à  ceux  qui  croient  cela,  il  sera  bien  malaisé  de 
faire  admettre  que  l'art  du  comédien  comporte  une 
technique  à  lui,  aussi  particulière,  aussi  rigoureuse 
et  aussi  complexe  que  celle  de  tout  autre  art. 

C'est  encore  cette  présomption  qui  enfante  la  dé- 
plorable plèbe  des  amateurs  et  des  comédiens  impro- 
visés. 

Toutefois,  le  préjugé  en  question  ne  diminue  pas 
le  goût  de  la  foule  pour  les  spectacles  dramatiques; 
mais  il  voue  à  l'obscurité  le  labeur  initial  du  comé- 
dien. 

Si  le  moins  averti  des  spectateurs  se  doutait  du 
travail  didactique  de  l'acteur,  il  serait  plus  circons- 
pect dans  les  manifestations  de  son  sentiment  à 
l'égard  des  artistes  qui  jouent  sous  sesyeux. 

La  vérité,  c'est  que  l'éducation  du  comédien  digne 
de  ce  nom  apparaît,  à  quiconque  la  considère  sérieu- 
sement, comme  une  manière  de  Thébaïde  studieuse 
et  inaccessible.  L'acteur,  ainsi  paré  de  quelques  ves- 
tiges de  sa  religiosité  primitive,  devient  un  officiant, 
l'officiant  d'un  culte  de  l'Idéal. 

Le  théâtre  a  commencé  avec  l'amour  de  l'humanité 
pour  le  rêve,  et  tout  nous  fait  croire  qu'il  subsistera 
toujours.  Il  faut  donc  instruire  le  mieux  possible  les 
jeunes  officiants  de  ce  culte  dramatique  presque 
aussi  vieux  que  le  monde  et  qui,  perpétuellement, 
se  renouvelle  tel  que  le  vieux  inonde.  Mais  comment 
édicter  les  lois  de  l'Enseignement  Dramatique?  Il 
se  peut  définir  par  cette  courte  formule  :  la  nature 
réduite  en  'principes. 

Or,  ces  principes,  malgré  toutes  les  tentatives  de 
révolte  rééditées  sans  cesse  par  certains  esprits  moins 
originaux  que  simplement  paresseux  [car  la  carac- 
téristique desljeunes  comédiens  de  nos  jours,  c'est 
de  peu  travailler  et  d'arriver  tout  de  suite,  à  la  faveur 


de  quelques  coups  de  surprise),  ces  principes,  disons- 
nous,  sont  immuables  comme  les  règles  de  la  nature 
elle-même. 

Le  jugement,  l'expression,  le  geste  peuvent  cons- 
tituer ce  qu'on  appelle  les  dons  naturels,  mais  seuls 
les  principes  peuvent  perfectionner  ces  dons  et  les 
rendre  utiles.  En  art  dramatique,  plus  qu'en  tout 
autre  art  d'interprétation  de  la  nature,  la  méthode  est 
indispensable,  et  ceux  qui  tentent  de  s'en  passer 
n'arriveront  jamais  qu'à  peu  près. 

L'art  du  théâtre  a  donc  un  fond  positif,  mathé- 
matique, qu'il  faut  au  début  étudier  comme  une 
science.  Plus  lard,  lorsque  l'acteur  pratiquera  devant 
le  public,  lorsqu'il  saura  bien  son  métier,  il  devra 
oublier  qu'il  fit  des  études  pour  être  comédien. 

Les  plus  grands  génies  dramatiques,  invoqués  par- 
fois comme  exemples  et  héros  delà  seule  Inspiration 
et  comme  s'étant  affranchis  de  la  loi  commune  des 
études  préparatoires,  tels  que  Talma  ou  Frédéric 
Lemaitre  (pour  ne  citer  que  les  deux  plus  illustres), 
étaient  au  contraire  des  parangons  de  méthode! 

Nous  avons  recueilli  de  la  bouche  même  de  Fré- 
déric Lemaitre,  vieux  et  désabusé,  qu'il  ne  laissa 
jamais,  dans  son  jeu,  rien  au  hasard,  et  que  la  dic- 
tion était,  avec  la  mimique,  le  plus  indispensable, 
le  plus  noble  objet  primordial  des  études  théâtrales. 
Il  poussait  la  conscience,  dans  ses  belles  années, 
comme  à  la  fin  de  sa  carrière,  jusqu'à  «  mâcher  », 
à  syllaber  ses  rôles,  afin  de  les  avoir  bien  en  bouche, 
et  cela,  dès  le  lendemain  de  la  lecture  d'une  pièce; 
il  tenait  aussi  à  répéter  tout  de  suite  avec  les  acces- 
soires, témoin  ce  fait  au  sujet  du  Vieux  Caporal  : 
Frédéric,  ne  sachant  naturellement  pas  son  rôle  à 
la  première  répétition,  en  fit  tenir  la  copie  sous  ses 
yeux  par  un  camarade,  afin  de  pouvoir  lire  le  ma- 
nuscrit en  manœuvrant  ses  accessoires,  le  sac  de 
soldat,  le  fusil,  etc. 

L'Art  dramatique  n'est  d'ailleurs  honorable  que 
lorsque  ses  desservants  croient  au  culte  du  Dieu.  Il 
faut  que  l'acteur  se  dépense  et  excelle  dans  l'emploi 
où  l'ont  classé  ses  préférences,  ses  qualités  physi- 
ques, etc.  Le  reste  n'est  que  honteux  cabotinage  ou 
dégradante  exhibition. 

On  a  tant  de  fois  prédit  l'irrémédiable  décadence 
du  théâtre,  toujours  renaissant  et  reverdissant,  qu'il 
faut  espérer  que  l'art  triomphera  du  mercantilisme 
et  des  music-halls.  11  y  a  un  peu  plus  de  cent  ans,  un 
réformateur,  dont  je  trouve  l'ouvrage  analysé  dans  le 
Journal  de  Paris  du  mercredi  3  mai  1787,  recherchait 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  DRAMATIQUE 


comme  aujourd'hui  les  moyens  de  faire  des  comé- 
diens excellents,  et  ces  pages  sont  intéressantes  à  re- 
lever à  distance  : 

La  réforme  des  théâtres,  ou  vues  d'un  amateur  sur  les 
moyens  d'avoir  toujours  des  acteurs  à  tulens  sur  les 
théâtres  de  Paris  et  des  grandes  villes  du  royaume 
et  de  prévenir  les  abus  de  troupes  ambulantes  sans 
priver  les  petites  villes  de  l'agrément  des  spectacles. 
Ouvrage  dédié  au  Théâtre-Français  par  MM.  XXX  de 
Saint-Aubin.  A  Paris,  chez  Caillot,  libraire  de  Mon- 
sieur, Frère  du  Roi,  rue  Saint-Jacques,  vis-a-vis  celle 
des  Mathurins.  In-S°  de  125  pages. 

Cet  ouvrage  a  deux  parties.  La  première  contient 
le  tableau  des  abus  qui  se  commettent  en  Province  par 
les  comédiens.  Rien  de  plus  propre  à  entretenir  le 
préjugé  sur  cet  état  que  la  manière  dont  la  plupart 
d'entre  eux  se  conduisent  dans  les  petites  villes,  et 
celle  dont  ils  se  recrutent  tous  les  ans  à  Pâques  dans 
un  petit  café,  rue  des  Boucheries,  faubourg  Saint- 
Germain.  A  cette  époque,  l'ailluence  y  est  si  nom- 
breuse que,  la  salle  ne  pouvant  les  contenir,  ils  four- 
millent dans  la  rue.  Les  bons  acteurs  sont  retenus 
d'avance  ;  le  directeur  qui  n'est  pas  pourvu  est  donc 
obligé  de  choisir  bien  vite  dans  cette  cohue  :  il  fait 
déclamer  quelques  tirades  à  l'un,  chanter  quelques 
ariettes  à  l'autre,  et  d'après  ces  épreuves  aussi  équi- 
voques que  précipitées,  il  engage,  débourse,  donne 
des  avances,  paye  des  voitures,  et  emmène  triomphant 
un  troupeau  d'aigrefins  destinés  à  sa  ruine  et  au  tour- 
ment du  piddic  :  ce  sont  les  termes  de  M.  de  Saint- 
Aubin,  qui  parait  connaître  à  fond  la  matière  qu'il 
a  entrepris  de  traiter  dans  cette  brochure.  Les  suites 
d'une  direction  commencée  sous  de  tels  auspices 
sont  aisées  à  prévoir.  La  nouveauté  attire  les  bour- 
geois des  petites  villes  aux  premières  représenta- 
lions;  mais  leur  modique  revenu  et  le  peu  de  talent 
des  acteurs  leur  font  bientôt  déserter  le  spectacle. 
Alors,  les  comédiens  se  flattent  qu'en  forçant  par  une 
pièce  à  fracas,  par  une  nouveauté  à  la  mode,  ils  ra- 
mèneront la  foule.  Ils  se  mettent  à  l'élude,  répètent, 
se  tourmentent,  végètent  pendant  quelques  jours 
pour  accoucher  d'une  représentation  qui  leur  produira 
peut-être  deux  cents  livres;  et  dans  cet  intervalle, 
ils  ont  mangé,  ou  se  sont  endettés  de  cent  pistoles. 
Ce  premier  pas  une  fois  fait,  ils  ne  sauraient  plus 
reculer;  et,  loin  d'apercevoir  la  fausseté  de  leur  cal- 
cul, ils  ne  font  que  s'enfoncer  davantage  dans  le 
bourbier.  Cependant  les  créanciers  pressent,  les  four- 
nisseurs crient  :  c'est  alors  qu'il  faut,  comme  on  dit, 
fondre  la  cloche.  Cela  veut  dire  que  chacun  s'en  va 
de  son  côté,  exemple  donné  souvent  par  le  directeur 
lui-même  qui,  partant  avec  ce  qu'il  a  pu  ramasser, 
livre  la  troupe  à  la  fureur  des  créanciers  et  aux  ou- 
trages de  la  populace.  Qu'on  soit  étonné  après  cela 
de  l'opinion  déplorable  que  l'on  a  des  troupes  de 
comédiens  dans  les  petites  villes  de  Province.  Dans 
les  bourgs,  c'est  encore  pis.  Les  gens  qui  y  dressent 
des  tréteaux  sont  des  charlatans,  des  escamoteurs, 
des  joueurs  de  marionnettes,  etc.  Voilà  ce  que  le 
paysan  prend  pour  des  acteurs.  Imbu  de  ce  principe, 
il  va  au  marché  dans  la  ville  voisine  où  la  nouvelle 
du  jour  est  l'évasion  furtive  d'un  comédien;  il  la  re- 
cueille, la  reporte  à  ses  voisins,  après  avoir  raconté 
ce  qu'il  a  vu  chez  lui.  C'est  ainsi  que  la  réputation  se 
détruit,  que  l'aversion  se  propage,  et  que  les  vrais 
artistes  sont  avilis  par  la  conduite  honteuse  de  leurs 
méprisables  singes.  » 

Un  chapitre  est  intitulé  :  Des  reproches  à  faire  aux 


comédiens  en  général.  «  Il  y  a  dans  la  comédie,  dit 
l'auteur,  nombre  de  personnes  vraiment  respectables, 
qui  fout  leur  état  avec  autant  de  droiture  et  de  pu- 
reté d'intention  qu'ils  rempliraient  loule  autre  fonc- 
tion dans  l'ordre  civil...  Mais  aussi  que  de  faquins! 
Que  de  Lais!...  Prouver  que  la  Comédie  doit  et  peut 
être  une  profession  honnête,  faire  voir  les  raisons 
qui  s'opposent  à  cet  heureux  changement,  trouver 
les  moyens  d'y  remédier;  voilà  mon  but.  »  C'est 
effectivement  l'objet  qu'il  s'efforce  de  remplir,  après 
avoir  parlé  des  torts  vrais  ou  supposés  du  public  en- 
vers les  comédiens,  des  Comédies  bourgeoises  et  des 
Maîtres  de  Comédies-  Mais  quels  sont  ces  moyens  de 
remédier  aux  abus  et  d'avoir  toujours  des  acteurs  à 
talent  sur  les  théâtres  de  Paris  et  des  grandes  villes  du 
Royaume,  comme  l'annonce  le  titre?  C'est  d'abord 
d'établir  à  Paris  un  bureau  général  d'administra- 
tion des  spectacles  de  France,  présidé,  au  nom  des 
Gentilshommes  de  la  Chambre,  par  un  Directeur  gé- 
néral, et  un  autre  composé  de  douze  membres  tirés 
des  comités  des  trois  théâtres  royaux.  «  On  y  porte- 
rait tous  les  objets  relatifs  au  régime  des  spectacles 
tant  des  villes  de  France  que  des  pays  étrangers  où 
il  y  a  Comédie  Française.  »  C'est  ensuite  de  suppri- 
mer les  petites  troupes  ambulantes;  de  faire  enre- 
gistrer les  comédiens  au  bureau  d'administration; 
de  réduire  toute  la  France  en  dix-huit  départements 
ou  directions  de  comédies,  auxquelles  seraient  atta- 
chées des  troupes  subalternes  qui  iraient  jouer  dans 
les  petites  villes.  Chacune  de  ces  directions  aurait 
un  inspecteur  général  pour  la  surveiller.  Les  pro- 
duits des  directeurs  étant  accrus  et  assurés,  ils  con- 
tribueraient tous  aux  frais  de  l'établissement,  et  en 
feraient  leurs  soumissions  en  obtenant  leurs  privi- 
lèges. Enfin,  on  établirait  en  même  temps,  sous  les 
ordres  de  la  même  administration,  un  bureau  de 
correspondance  générale  pour  tous  les  théâtres  du 
royaume,  auquel  tous  les  entrepreneurs  et  tous  les 
acteurs  seraient  obligés  de  s'adresser. 

Il  est  certain  que  l'exécution  de  ce  plan  pourrait 
remédier  à  beaucoup  de  désordres;  mais  que  par  ce 
moyen  on  multiplie  les  acteurs  à  talens,  c'est  le  point 
le  plus  difficile  à  persuader. 

Vanité  des  conseils  et  des  projets! 

Ainsi,  à  un  siècle  de  distance,  il  est  bon  de  cons- 
tater que  les  artistes  ont  gagné  en  dignité,  et  je  crois 
bien  que  les  petites  troupes  ambulantes,  que  voulait 
supprimer  le  réformateur  de  1786,  devraient  se  mul- 
tiplier au  contraire.  Et,  à  vrai  dire,  c'est  ce  qui  arrive  ; 
la  décentralisation  artistique,  nuisible  sans  doute 
commercialement  aux  théâtres  officiels  de  Paris,  qui 
lui  fournissent  leurs  expédients,  leurs  comédiens. 
peut  et  doit  devenir  utile  à  l'art  dramatique  popu- 
laire. Les  théâtres  en  plein  air  se  multiplient,  même 
après  Orange,  Bussang,  après  Béziers,  Cauterets  et 
Champigny.  Tout  le  monde  aime  le  théâtre,  et  on 
pourrait  presque  dire,  tant  le  nombre  des  manus- 
crits se  multiplie,  tout  le  monde  fait  du  théâtre.  Que 
de  vocations  à  la  fois  d'acteurs  et  d'auteurs  assiègent 
les  directions,  fondent  des  scènes  nouvelles,  cher- 
chent des  débouchés  à  leur  activité  et  à  leurs  œuvres! 
Ce  n'est  point  par  la  réglementation,  comme  le  vou- 
lait l'auteur  de  la  Réforme  des  théâtres,  mais  par  la 
liberté,  par  l'effort  individuel,  que  la  solution  du  pro- 
blème (nourrir  et  satisfaire  tant  de  gens)  peut  être 
trouvée.  Emulation,  concurrence,  lutte  pour  la  vie, 
course  à  la  gloire.  Et,  quant  à  la  meilleure  méthode 
à  employer  pour  devenir  un  artiste  dramatique  : 


xr, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


écouter,  observer,  vivre,  travailler.  Pour  le  comédien 
comme  pour  l'écrivain,  pour  l'artiste  peintre  ou 
pour  le  poète,  ces  quatre  mots  disent  tout.  Ce  sont 
des  mots  d'ordre  :  bien  voir  et  bien  traduire. 

De  nos  jours,  où  le  théâtre  semble  être  devenu 
l'apanage  d'amateurs  exotiques  et  d'associations 
étrangères  ou  cosmopolites,  le  petit  talent  de  jouer 
assez  bien  de  petites  improvisations  éphémères  sur 
de  petites  scènes  improvisées,  ce  talent  (c'était  l'opi- 
nion de  la  Clairon  dès  la  lin  du  xvm*  siècle)  semble 
ne  plus  valoir  la  peine  de  s'en  glorifier;  mais  ce  n'est 
là  qu'un  malaise  passager,  et  l'art  dramatique  n'a 
rien  à  voir  avec  les  productions  hâtives,  pornogra- 
phiques ou  simplement  faisandées,  dont  le  théâtre 
en  France  souffre  depuis  une  quinzaine  d'années, 
au  grand  étonnement  chagriné  de  nos  vrais  admira- 
teurs à  l'étranger.  Au  cours  de  ses  trois  voyages  en 
Orient,  Truffier  a  recueilli  des  doléances  curieuses. 

Il  faut  donc  travailler,  et  beaucoup,  le  vrai  talent 
consistant  à  cacher  l'effort  qui  soutient  la  nature  et 
qui  parfois  devient  plus  naturel  que  la  nature  elle- 
même,  parce  qu'elle  n'est  plus  alors  que  cette  vérité 
choisie  et  supérieure  dont  parle  Alfred  de  Vigny 
pour  définir  l'art  en  général.  Victor  Hugo  avait  dit 
déjà  :  «  L'Art  existe  aussi  naturellement  que  la 
nature.  L'Art  est  à  l'homme  ce  que  la  nature  est  à 
Dieu.  » 

De  tout  temps,  les  besoins  de  réformes,  les  métho- 
des d'enseignement  ont  préoccupé  les  meilleurs  es- 
prits. Je  crois  bien  que  toute  la  réforme  artistique 
ou  sociale  tient  dans  un  mot  :  le  travail.  On  travail- 
lait beaucoup  autrefois,  et  je  trouve  celte  indication 
bien  curieuse  dans  une  lettre  que  l'auteur  de  La 
Chercheuse  d'esprit,  M.  Favarl,  écrit  au  comte  de 
Durazzo  (2  décembre  1760)  : 

«  Jamais  les  comédiens  français  n'ont  montré  tant 
d'ardeur  et  fait  plus  d'attention  pour  tout  ce  qui 
peut  contribuer  au  succès  d'un  ouvrage  dramatique  : 
il  faut  vingt  répétitions  pour  la  moindre  situation; 
les  plus  petits  accessoires  ne  sont  pas  méprisés,  et 
le  costume,  qui  était  totalement  ignoré  ou  au  moins 
négligé  dans  le  dernier  siècle  et  au  commence- 
ment de  celui-ci,  est  observé  aujourd'hui  aussi  régu- 
lièrement qu'il  est  possible,  car  toutes  les  diffé- 
rentes façons  de  s'habiller  ne  conviennent  pas  au 
théâtre.  » 

Les  vingt  répétitions  de  1760  sont  parfois  quarante 
et  cinquante  répétitions  de  nos  jours.  Il  faut  tra- 
vailler, travailler  encore  et  toujours  travailler.  Mais 
lant  de  sollicitations,  d'occasions,  de  tentations, 
d'impresarii,  les  besoins  plus  pressants,  la  facilité 
des  tournées  par  les  chemins  de  fer,  —  l'automobi- 
lisme  de  l'art,  —  ne  sont-ils  pas  un  danger  pour  l'a- 
venir de  l'art? 

Ceux-là  qui  recherchent  sincèrement  la  gloire  dans 
la  carrière  dramatique  doivent,  dès  le  début,  se  pré- 
parer à  un  travail  sans  loisir,  le  comédien  se  trou- 
vant sans  cesse,  et  quoi  qu'il  ail  déjà  fait  de  bon,  à  la 
veille  d'un  examen,  et  prenant  à  nouveau  chaque 
jour  ses  grades  devant  le  public,  jusqu'au  moment 
de  la  retraite  définitive.  Un  insuccès  après  trente  ans 
de  triomphes  vous  met  aussi  bas  qu'un  débutant.  Je 
n'oublierai  jamais  la  douleur  de  Got  après  le  désas- 
tre du  Roi  s'amuse.  On  en  arrivait  à  nier  ses  plus 
belles  créations  :  «  Il  n'avait  jamais  eu  que  des  suc- 
cès de  hasard;  c'était  un  artiste  surfait,  »  etc.,  etc., 
et  d'autres  aménités  dont  Got  soulTritprofondément. 


DE  LA  SCIENCE   DU  THÉÂTRE 

En  combien  de  parties  se  divise  donc  la  Science  du 
Théâtre?  Les  livres  les  plus  compacts  ne  fournissent 
à  l'élève  comédien  que  peu  de  choses  au  delà  de 
quelques  règles  générales.  Ces  règles  doivent  être  la 
base  de  l'enseignement.  Hélas!  au  Conservatoire 
comme  ailleurs,  malgré  la  sollicitude  du  directeur 
et  du  comité  des  éludes,  les  premiers  principes  sont 
parfois  négligés,  pour  cette  simple  raison  que  les 
maîtres,  la  plupart  du  temps,  ne  se  peuvent  persua- 
der qu'il  soit  nécessaire  d'apprendre  aux  autres  ce 
qu'il  leur  parait  impossible  d'ignorer.  J'ai  constaté, 
en  remplaçant,  une  fois  unique,  à  litre  amical,  M.  de 
Féraudy,  dans  sa  classe  au  Conservatoire,  en  1904, 
que  l'enseignement  technique  n'existait  pas  alors,  à 
dire  vrai. 

Il  faudrait  donc  d'abord  que  l'élève  apprit  à  lire, 
à  bien  connaître  la  ponctuation,  la  quantité,  le  nom- 
bre el  la  cadence,  quelques  règles  de  la  versification 
et  de  la  prosodie,  alin  d'arriver  à  cette  première 
science  du  théâtre,  à  la  plus  haute  qui  est  celle  de 
la  diction.  Qu'on  y  prenne  garde,  cet  art  aristocra- 
tique auprès  duquel  le  reste  n'est  que  cabotinage,  cet 
art  s'en  va.  On  ne  l'enseigne  plus  suftisamment. 

Bien  dire,  c'est  plus  que  l'élégance,  c'est  la  probité 
de  l'arl  dramatique;  c'est  un  art  supérieur  dans  l'Art. 
Il  est  à  la  portée  de  tous,  et  se  peut  dispenser  pres- 
que du  moindre  «  matériel  »,  puisque  le  bon  diseur 
porte  tout  avec  soi. 

Voici  donc,  d'abord,  selon  la  formule  de  notre 
maître  et  ami  Régnier,  les  quelques  conseils  préli- 
minaires qu'il  préconisait  chaque  jour,  et  que  je  ne 
cesse  de  répéter  aux  jeunes  gens  : 

Il  n'est  pas  de  meilleure  élude  pratique  que  celle 
du  vieux  répertoire.  C'est  en  étudiant  les  mailres  du 
répertoire  qu'on  apprend  à  bien  jouer  les  auteurs 
modernes.  L'ancien  langage,  avec  ses  tours  différents 
des  nôtres,  exige  une  diction  ferme,  nette,  dégagée 
de  tout  vice  de  prononciation;  le  grasseyement,  ce 
défaut  particulier  des  Parisiens,  recommandé  par 
les  réalistes  comme  l'expression  du  naturel,  le  gras- 
seyement doit  être  sévèrement  banni.  Ce  défaut, 
comme  tant  d'autres  habitudes  nonchalantes  du  par- 
ler moderne,  ne  tend  qu'à  altérer  la  délicatesse  et 
le  caractère  de  la  prononciation,  à  dénaturer  le  son 
des  voyelles,  elà  amortir  l'accentuation  des  conson- 
nes; imparfaitement  corrigé,  il  fait  tomber  dans 
un  autre  défaut,  la  préciosité.  Aussi,  n'est-ce  pas  à 
demi  qu'il  faut  en  triompher,  c'est  absolument,  car 
le  grasseyement  ne  donne  pas  le  naturel,  il  ôte  l'é- 
nergie ;  il  imprime  en  outre  à  la  diction  un  accent 
pauvre  ou  vulgaire,  destructif  de  tout  ce  qui  est  style 
ou  poésie.  Le  poète  Longfellow,  grand  admirateur  de 
la  Comédie  française,  s'étonnait,  à  chacun  de  ses 
voyages  en  France,  de  la  modification  apportée  par 
les  nouveaux  venus  dans  leur  façon  de  prononcer.  Il 
ne  reconnaissait  pas  l'accent  des  Fleury.  Et  cela  ne 
semblait  pas  du  tout  un  progrès  à  l'auteur  d'Excelsior. 

C'esl  avec  les  classiques  des  premier  et  second 
ordres,  et  aussi  avec  les  poètes  de  toutes  les  épo- 
ques, qu'il  est  bon  de  se  former  aux  sonorités,  tantôt 
viriles,  tantôt  délicates,  du  verbe  fiançais.  Une  fois 
prises,  ces  saines  habitudes  ne  se  perdront  jamais,  et 
le  comédien  sera  tout  assoupli  pour  bien  dire  tout 
ce  qu'il  aura  à  dire.  De  même  que  les  tours  de  force 
et  d'adresse,  que  la  manœuvre  des  armes,  que  les 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 

mouvements  de  la  danse,  que  tous  les  exercices  qui 
mettent  les  membres  en  activité  ne  deviennent  faci- 
les à  ceux  qui  les  exécutent,  et  surtout  ne  paraissent 
faciles  à  ceux  qui  les  voient  exécuter,  qu'au  prix  de 
beaucoup  de  fatigue  et  de  peine,  de  même  le  comé- 
dien ne  peut  acquérir  de  la  netteté  dans  sou  articu- 
lation, de  la  correction  dans  sa  manière  de  prosodier, 
et  parvenir  à  se  délivrer  de  cette  affectation  que  don- 
nent au  début  les  exercices  de  prononciation,  qu'en 
s'astreignant  à  une  discipline  rigoureuse  et  à  une 
constante  surveillance  de  soi-même.  Pour  arriver  à 
bien  parler,  il  faut  qu'il  parle  pour  ainsi  dire  machi- 
nalement. C'est  ce  qui  fait,  qu'on  ne  peut  jouer  un  rôle 
qu'en  sachant  d'abord  le  texte  machinalement.  Les 
mots  doivent  ne  pas  compter  pour  l'acteur  ;  la  situa- 
tion devient  tout. 

C'est  donc  par  une  répétition  antérieure  et  fré- 
quente des  mêmes  mots,  des  mêmes  accents,  expri- 
més autant  que  possible  avec  l'émotion,  le  mouve- 
ment, le  sentiment  requis  par  la  situation  dans 
laquelle  l'auteur  les  a  introduits,  que  le  comédien 
peut  assurer  ses  moyens  d'exécution. 

II  doit,  par  des  exercices  multipliés,  travailler  la 
justesse  de  son  oreille,  l'étendue  de  sa  voix,  la  netteté 
de  sa  prononciation,  afin  de  pouvoir  tour  à  tour  et 
sans  efforts  apparents,  jeter  un  cri,  un  éclat  de  rire, 
un  sanglot,  un  accent  de  colère  ou  de  joie,  tout  ce 
qui  doit,  enfin,  paraître  sortir  de  l'àme  d'un  jet 
spontané. 

Il  faut  donc  se  soumettre  d'abord  à  la  discipline 
de  l'enseignement,  et,  plus  tard,  quand  on  volera 
de  ses  propres  ailes,  on  consultera  attentivement  la 
tradition  ;  c'est  un  mot  dont  on  a  pris  l'habitude  de 
se  moquer,  mais  sur  lequel  il  est  nécessaire  de  s'en- 
tendre :  la  tradition  ne  consiste  pas  dans  les  lazzis, 
les  altérations  de  texte,  les  fantaisies  parasites  que 
le  souffleur  recueille  scrupuleusement  dans  ses  no- 
tes, et  transmet  à  chaque  débutant,  sous  l'autorité 
de  l'usage.  Ainsi  comprise,  elle  ne  mérite  pas  d'être 
consultée,  sinon  par  curiosité.  La  tradition,  telle 
qu'il  la  faut  concevoir,  ne  s'applique  pas  à  faire  un 
acteur  à  l'empreinte  d'un  autre  acteur,  mais  elle 
s'emploie  à  profiter  de  la  science  d'un  artiste  disparu 
pour  en  former  un  nouveau  et  perpétuer  les  acqui- 
sitions de  chacun.  Un  acteur  ne  se  produit  pas  spon- 
tanément, il  procède  toujours,  quoi  qu'il  fasse,  d'un 
autre  artiste.  Son  originalité  n'est  qu'un  prolonge- 
ment perfectionné,  si  c'est  possible,  de  ceux  qui  l'ont 
précédé,  et  la  dillérence  qui  existe  entre  lui  et  eux 
tient  seulement  à  son  intelligence  et  à  ses  moyens 
personnels.  Donc,  la  tradition  véritablement  utile  et 
à  rechercher  est  celle  qui  dérive  de  la  pensée  même 
du  poète  communiquée  à  ses  premiers  interprètes, 
c'est  celle  qui  explique  le  caractère,  l'esprit  du  rùle, 
et  donne  la  connaissance  des  jeux  de  scène  qui  le 
colorent  et  le  fortifient,  alors  que  l'auteur  n'a  pu 
tout  dire,  et  qu'il  a  laissé  au  comédien  le  soin  de 
compléter  ses  intentions  par  son  jeu.  Une  longue 
succession  de  représentations  a  amené,  d'âge  en 
âge,  des  effets  qui  ont  éclairé  et  parfois  rehaussé 
l'ouvrage;  il  serait  absurde  de  les  dédaigner. 

C'est  dans  les  souvenirs  des  comédiens,  des  let- 
trés, des  gens  du  monde,  c'est  dans  les  journaux  du 
passé  et  même  dans  quelques  livres  très  étrangers 
au  théâtre,  qu'on  trouve  parfois,  inopinément,  d'u- 
tiles renseignements  sur  la  tradition  théâtrale;  il 
faut  toujours  avoir  l'esprit  éveillé  pour  les  recueillir, 
mais  il  faut  aussi  apporter  beaucoup  de  discerne- 
ment à  en  user. 


L'ENSEIGNEMENT  DRAMATIQUE    3475 


L'ENSEIGNEMENT   DRAMATIQUE  ACTUEL 

Après  ces  considérations  préliminaires,  revenons- 
en  donc  à  l'Enseignement  dramatique  actuellement 


en  cours  au  Conservatoire  de  Paris,  et 


aux  critiques 


qu'il  suggérait  il  y  a  quelque  temps  encore. 

Il  nous  sera  d'abord  utile,  bien  que  les  réformes 
demandées  par  l'un  des  plus  fidèles  collaborateurs 
du  Congrès  International  de  l'Art  Théâtral  tenu  à 
l'Exposition  Universelle  de  1900,  fussent  un  peu  trop 
compliquées,  et  que  ce  nouveau  programme  imposât 
trop  de  travail  à  des  élèves  qui  doivent  avant  tout 
être  nés  artistes,  il  n'est  pas  inutile  de  résumer  cet 
important  travail  et  de  donner  quelques  extraits  des 
projets  exposés  par  un  des  membres  les  plus  assi- 
dus des  séances,  M.  Darmont,  comédien  de  longue 
expérience,  doublé  d'un  auteur  dramatique  apprécié, 
d'un  directeur  avisé. 

Estimant  que  les  cours  de  notre  Conservatoire  se 
réduisent  en  réalité  à  un  seul,  celui  de  déclamation, 
il  semblerait  établir  que  la  déclamation  est  en  réa- 
lité la  base  et  le  couronnement  de  tout  l'édifice  édu- 
catif de  notre  art  dramatique,  ce  en  quoi  il  se 
trompe,  hélas!  Mais  il  dit  juste,  je  crois,  lorsqu'il 
se  demande  quel  enseignement  les  élèves  du  Conser- 
vatoire reçoivent.  Voici  brièvement  le  résumé  de  cet 
enseignement  :  les  élèves  ont  été  admis  après  un 
examen  préalable,  après  avoir  récité  une  ou  deux 
tirades,  un  fragment  ou  deux  de  scène;  dès  son  ins- 
cription faite,  chaque  élève  n'a  qu'une  préoccupa- 
lion  :  choisir,  apprendre  une  autre  tirade,  une  autre 
scène  pour  être  de  nouveau  admis  à  concourir  en 
public  à  la  fin  de  cette  première  année.  Et  le  pro- 
fesseur l'aide  dans  son  choix. 

Or,  c'est  donc  cette  unique  scène  arrêtée,  que  l'é- 
lève va  passer  des  jours  à  triturer,  s'il  est  un  tra- 
vailleur; c'est  cette  unique  scène,  comique  ou  tra- 
gique, que  l'élève,  pour  toute  éducation  dramatique, 
va  répéter  devant  le  maître,  en  essayant  de  retenir 
toutes  les  intlexions,  toutes  les  nuances  que  ce  der- 
nier s'applique  très  laborieusement  à  lui  donner  en 
exemple. 

Et  c'est  tout. 

Et,  vu  le  nombre  des  élèves,  ceux-ci  recevront  de 
leur  maître  une  moyenne  de  douze  leçons  sembla- 
bles dans  toute  l'année. 

Certes,  on  les  aura  invités  à  suivre  les  cours  de 
littérature,  d'escrime  et  de  maintien  ;  mais  ils  auront 
préféré  aller  jouer  la  comédie  à  Versailles  ou  à 
Etampes,  ou  au  Grand  Guignol,  et  c'est  ainsi  qu'ils 
arriveront  au  concours  public  avec  un  peu  de  métier 
acquis  hors  de  l'Ecole,  et  sachant  à  peu  près  une 
scène  imitée  de  leur  professeur. 

Et  le  dommage  c'est  qu'avec  le  don  d'assimilation 
extraordinaire,  si  commun  chez  les  femmes,  cette 
imitation  produit  parfois  un  feu  d'artifice  aussi  mer- 
veilleux que  trompeur...  Nous  en  avons,  chaque  an- 
née, des  exemples  probants. 

Aussi,  pour  que  le  comédien  arrive  à  la  perfection 
relative,  puisque  la  perfection  absolue  est  inacces- 
sible à  la  nature  humaine,  lui  faut-il  de  longues,  de 
très  longues  années,  années  d'énergie  et  de  persé- 
vérance, alors  qu'autour  de  lui  tout  agit  par  l'élec- 
tricité. 

C'est  pourquoi,  après  nous  l'être  longtemps  de- 
mandé à  nous-même,  nous  venons  poser  ici  l'in- 
terrogation suivante  :  serait- il  donc  si  contraire  au 


BMOrCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  Ut!  CONSERVATOIRE 


progrès  que  de  vouloir  espérer  de  vrais  comédiens 
ayanl  l'âge  où  le  public  est  prêt  d'en  regretter  la 
perte?  Seràil-il  donc  si  contraire  au  progrès  et  à  la 

raison  que  de  vouloir,  parmi  mode  d'éludés  définies, 
abréger  les  difficultés  de  cet  art  multiple,  dévelop- 
per 1rs  dispositions,  indiquer  les  routes  sûres  et 
procurer,  en  moins  de  temps,  une  expérience  que 
l'acteur  de  nos  jours,  faute  d'école,  doit  mettre  vingt 
ans  el  plus  à  acquérir,  à  la  condition  d'être,  pour 
ainsi  dire,  (oui  l'inventeur  de  son  talent? 

Non!  C'est  une  nécessité  de  l'heure  présente,  el 
pour  donner  à  celle  grave  question  la  solution 
qu'elle  mérites  il  ne  faut  pas  hésiter  à  créer  pour 
Renseignement  dramatique  une  technique  éduca- 
(rice  générale,  ainsi  qu'on  a  bien  su  le  faire  pour 
les  autres  ordres  d'enseignement. 

Ce  n'est  rien  moins  qu'une  Ecole  normale  des 
artistes  que  M.  Darmont  prétend  fonder.  Imposant 
aux  candidats  tragédiens,  mais  à  ceux-là  seuls,  une 
sorte  de  revision  qui  rétablirait  le  «  beau  canon» 
des  Grecs,  il  répartit  l'enseignement  qu'il  juge  né- 
cessaire aux  artistes  en  quatre  sections  et  dix-huit 
subdivisions  qu'il  serait  un  peu  long  d'énumérer  ici- 

Reprenant  en  détail  chacune  des  parties  de  son 
très  vaste  programme,  M.  Darmont  en  soutient  avec 
■des  arguments  tirés  des  faits,  de  l'histoire,  de  l'art 
en  général,  le  bien  fondé,  l'utilité,  sinon  la  nécessité. 
La  partie  technique  des  études  de  l'artiste  drama- 
tique s'enrichit  singulièrement  dans  cette  refonte 
totale  de  son  enseignement.  L'élève  débute  par  des 
lectures  de  chefs-d'œuvre  qui,  tout  en  le  familiari- 
sant avec  la  littérature  des  grands  maîtres,  le  dé- 
grossissent, pour  ainsi  dire,  dans  la  parlie  matérielle 
de  son  art.  Le  cours  de  mimique  pratique  très  déve- 
loppé donnerait  alors  au  comédien  apprenti  l'habi- 
tude de  la  réllexion  et  celle  de  l'effort,  habitudes 
nécessaires  toutes  les  deux  pour  atteindre  le  résultat 
visé.  Cette  classe,  jointe  à  celle  de  diction  simple, 
aboutirait  à  la  formation  d'un  cours  de  jeux  scéni- 
ques  préparatoire  et  précurseur  d'exécutions  d'en- 
semble qui  ne  seraient,  sous  une  forme  nouvelle  et 
féconde,  que  le  «  Théâtre  d'application  »  irréalisable 
jusqu'à  ce  jour  et,  si  l'on  voulait  aller  jusque-là,  le 
«  Théâtre  populaire  »  lui-même,  dont  on  a  tant  parlé 
depuis  un  an  et  dont  on  parlera  toujours...  car  il 
n'y  a  pas  de  théâtre  populaire  à  proprement  parler. 
Il  y  a  le  théâtre  en  général  :  le  beau  et  le  mauvais  ! 
Ces  projets  sont  certes  louables,  mais  combien  peu 
pratiques  à  notre  époque  où,  d'année  en  année,  le 
nombre  des  aspirants  grossit  sans  cesse  à  la  rentrée 
des  classes  du  Conservatoire. 

La  critique  y  esl,  là  plus  que  partout  ailleurs, 
plus  aisée  que  l'art  spécial  et  difficile  qu'on  y  en- 
seigne. C'est  ainsi  qu'en  ces  derniers  temps,  on  a 
beaucoup  épilogue  sur  l'intronisation  du  répertoire 
moderne  au  Conservatoire. 

M.  L.  Brémont  a  formulé  sur  ce  sujet  quelques  re- 
marques sagaces  : 

«  L'art  du  théâtre,  dit-il,  va  se  compliquant  de 
jour  en  jour...  Songeons  qu'en  se  compliquant,  le 
théâtre  devient  changeant  comme  la  mode  elle- 
même,  et  bornons-nous  plutôt  ii  rechercher  les  bases 
qui  restent  immuables  en  lui,  pour  y  établir  un  en- 
seignement moins  sujet  à  l'erreur.  » 

M.  Biièmont  conclut  en  faveur  de  cet  art  absolu, 
de  cet  art  où  les  changements  que  la  mode  peut 
apporter  ne  sont  qu'apparents,  tandis  que  le  fond  ne 
varie  pas. 

Surtout,  ajoule-t-il,  «  ne  nous  laissons  pas  égarer 


par  la  préoccupation  d'être  modernes  :  nous  détrui- 
rions par  là  toute  la  raison  d'être  du  Conservatoire. 

"  Si,  comme  son  nom  l'indique,  cette  Ecole  a  vrai- 
ment la  mission  de  conserver  quelque  chose,  c'est 
le  goftt  des  études  fortes  et  difficiles,  le  sens  et  le 
respect  des  beautés  les  plus  certaines  et  les  plus 
hautes.  Elle  propose  un  but  auquel  quelques  rares 
élèves  peuvent  atteindre  :  à  tous,  il  restera  une 
force  plus  grande  pour  l'avoir  seulement  tenté. 

«  Ayons  donc  le  courage  de  le  dire  :  il  faut  ici 
retourner  en  arrière,  revenir  résolument  et  presque 
exclusivement  au  répertoire  classique.  Oui,  il  faut 
enseigner  que  les  mots  n'ont  par  eux-mêmes  aucune 
importance  (excepté  toutefois  chez  les  romantiques), 
que  les  dessous  d'une  phrase  lui  donnent  sa  vraie 
valeur;  ce  dont  il  faut  se  méfier,  c'est  que  l'élève 
puisse  trouver  dans  le  choix  d'une  scène  une  flatte- 
rie pour  un  juré  ou  encore  un  moyen  trop  facile 
d'arracher  des  applaudissements  par  surprise.  » 

A  notre  avis,  ces  paroles  sont  excellentes. 


OPINIONS  SUR  L'ENSEIGNEMENT   DRAMATIQUE 

Nous  devons  à  l'enseignement  du  Conservatoire 
actuel,  quoi  qu'on  dise,  nos  premiers  comédiens  el 
nos  plus  parfaites  comédiennes,  Sarah  Bër.nhardt, 
Bartet,  Réjane,  etc. 

Nous  n'ignorons  pas  que  Mme  Réjane  a,  dans  la 
National  Review,  chanté  les  bienfaits  de  l'enseigne- 
ment de  la  seule  nature,  d'une  façon  peut-être  un 
peu  sommaire,  en  reniant  les  bienfaits  de  la  vieille 
école,  lorsqu'elle  s'écrie  :  «  La  nature,  pour  le  comé- 
dien, voilà  le  plus  complet,  le  plus  varié,  le  plus 
sûr  des  maîtres.  C'est  là  qu'il  trouvera  pour  son  art, 
qui  n'est  autre,  en  somme,  qu'une  perpétuelle  imi- 
tation de  la  vie,  d'inépuisables  et  prodigieuses  res- 
sources. Savoir  regarder,  voir,  comprendre,  enre- 
gistrer, classer  et  traduire  enfin,  avec  nos  moyens 
propres,  tout  ce  que  la  vie  quotidienne  nous  montre 
avec  une  inlassable  générosité,  voilà  ce  qu'un  ensei- 
gnement parallèle,  juxtaposé  à  l'enseignement  tra- 
ditionnel, devrait  tenter  d'apprendre  aux  commen- 
çants. L'effort,  dans  leur  cerveau,  serait  double  et 
simultané,  et  ceux  qui  sont  appelés  à  parvenir  plus 
tard  aux  premiers  rangs,  y  pourraient  atteindre  plus 
vite,  car  ils  seraient  moins  longtemps  encombrés 
d'inutiles  habitudes  acquises  pendant  des  années 
d'une  instruction  dramatique  incomplète,  puisqu'elle 
ne  s'occupe  que  trop  du  métier  el  pas  assez  de  ce  qui 
mène  à  l'art.  »  Simple  littérature  que  ceci,  car 
qu'est-ce  que  Mme  Réjane,  qui  sut,  elle,  profiter  du 
Conservatoire,  entend  par  ce  qui  mène  à  l'art,  sinon 
l'étude  âpre  et  quotidienne  de  cette  nature  mise  en 
principes  dont  nous  parlions  au  début"? 

Ajoutez  à  cela  l'art  des  temps,  les  «  grâces  addi- 
tionnelles »,  comme  on  les  appelait  à  l'époque  où 
vivait  Garrick,  les  valeurs,  les  préparations,  c'est-à- 
dire  le  jeu  muet  avant  le  mot  prononcé,  qui  fait  que 
l'acteur  a  l'air  de  trouver  et  non  de  réciter  sa  répli- 
que. Au  total,  tout  cela  s'appelle  la  vie. 

Sont-elles  bien  sincères  aussi  les  récriminations 
ingénieuses,  auxquelles  M.  Antoine  nous  habitua 
dans  ses  lettres  ouvertes  et  dans  ses  causeries  tou- 
jours intéressantes  d'ailleurs?  Les  idées  qu'il  énon- 
çait dans  la  conférence  qu'il  fil,  dit-on,  le  16  octobre 
1903,  à  l'Odéon  de  Buenos-Ayres,  sont-elles  si  neu- 
ves et  si  originales  qu'elles  le  voudraient  être? 
«  L'art,  dit  M.  Antoine,  traverse  chez  nous  une  phase 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ENSEIGNEMENT  DRAMATIQUE    3477 


de  transition;  il  faudra  évidemment  que  les  futurs 
interprètes  des  drames  de  demain  deviennent  des 
créatures  de  chair  et  d'os,  humaines  et  agissantes, 
vivant  sous  les  yeux  du  public,  au  lieu  des  statues 
pompeuses,  à  la  vois  posée  et  factice,  aux  mouve- 
ments d'opéra,  aux  gestes  conventionnels,  qu'ils 
sont  encore  à  cette  heure.  Il  faudra  faire  disparaître 
de  nos  troupes  les  fâcheuses  étoiles  qui  faussent  par 
leur  personnalité,  je  dirai  volonliers  par  leur  trop  île 
talent,  les  détails  d'un  ensemble  ou  la  signification 
d'une  pièce. 

«  Stendhal  disait  qu'il  n'avait  jamais  vu  dans  sa  vie 
qu'une  seule  fois  une  pièce  parfaitement  bien  jouée  : 
dans  une  grange,  en  Italie,  par  des  acteurs  inconnus. 
Il  faillira  que  les  comédiens  modernes  renoncent  à 
leur  voix,  leur  seule  ressource  d'à  présent,  qu'ils 
cultivent  comme  des  chanteurs;  il  faudra  qu'ils  re- 
noncent à  tout  l'outillage  vieillot  des  clichés,  des 
effets  personnels  qui  font  à  chaque  moment  de  l'ac- 
tion apparaître  le  comédien  derrière  son  personnage, 
qu'ils  soumettent  leurs  dictions  impeccables  et 
«  monotones  »  à  la  variété,  à  l'imprévu  des  nuances 
de  la  vie,  des  intonations  indirectes,  des  silences 
éloquents  du  dialogue  moderne;  enfin,  «  qu'ils 
vivent  »  leur  personnage,  au  lieu  de  «  réciter  »  leur 
rôle  avec  plus  ou  moins  de  virtuosité.  Tant  que  notre 
enseignement  officiel  en  France  continuera  à  fabri- 
quer des  mannequins  plus  ou  moins  habilement  ar- 
ticulés, tant  que  le  public,  complice  inconscient, 
fêtera  trop  personnellement  les  artistes  et,  au  lieu 
de  les  ignorer,  les  séparera  sans  cesse  de  leurs  per- 
sonnages à  tous  les  moments  de  l'action,  nous  ne 
saurons,  ni  vous  ni  moi,  ce  que  c'est  qu'une  pièce 
vraiment  bien  jouée.  » 

Tout  ceci  est  assez  juste,  mais  un  peu  fantaisiste. 
D'abord  Stendhal,  que  cite  M.  Antoine,  prit  sans 
fruit  des  leçons  de  déclamation  de  Dazincoi'rt  et  de 
Ougazom;  il  sembla  toujours  enrager  d'être  un  mau- 
vais amateur,  et  il  a  prouvé  qu'en  matière  de  théâtre, 
il  parlait  de  ce  qu'il  ignorait,  Puis  ces  mêmes  théo- 
ries ont  été  développées,  il  y  a  longtemps,  et  bien 
avant  Stendhal,  par  Le  Kain,  Talma,  MicHELOTet  tutti 
t/uanti!  C'est  le  lieu  commun  des  ennemis  de  l'en- 
seignement dramatique  officiel.  Au  surplus,  voirie 
mal,  le  signaler,  c'est  beaucoup;  mais  il  serait  mieux 
encore  d'y  apporter  remède. 

Dans  une  lettre  inédite  d'Alfred  de  Vigny,  il  est  dit 
que  le  comédien  est  le  cheval  dont  l'auteur  est  le 
centaure.  La  comparaison  signifie  que  l'auteur  et 
l'acteur  ne  font  qu'un.  Mais  si  l'auteur  dirige,  le  co- 
médien agit,  et  c'est  même  là  son  titre  :  acteur.  Donc, 
c'est  à  l'acteur  qu'il  faut  s'adresser  pour  connaître 
les  règles  de  son  art. 

Et  après  les  vivants,  on  pourrait  interroger  les 
morts.  Quelques  préceptes  des  grands  comédiens  du 
temps  passé  mériteraient  d'être  mis  sous  les  yeux 
des  comédiens  du  temps  présent.  «  N'usons  du  pitto- 
resque qu'avec  ménagement,  »  disait  par  exemple 
Le  Kain.  Et  Garrick,  pour  exprimer  la  puissance  du 
geste,  celle  de  la  main  :  «  Les  doigts  sont  autant  de 
langues  qui  parlent.  »  Donc,  une  étude  du  geste  est 
utile.  Et  le  geste  ne  doit  jamais  être  désordonné. 
«  Laissez  deviner  nos  nerfs,  »  [répétait  Mole.  Rap- 
pelons ce  mot  de  Talma  :  «  De  toutes  les  monotonies, 
celle  de  la  force  est  la  plus  insupportable.  » 

Je  sais  bien  qu'il  faut  cependant  mettre  dans  son 
art  toute  sa  foi,  et,  sinon  de  la  force,  toutes  ses 
forces. 
Pour  la  voix,  qui  est  le  charme  du  théâtre,  Talma 


était  d'avis  qu'il  faut,  avant  tout,  parvenir  à  satisfaire 
sa  propre  oreille.  Et  la  voix  souriante  de  M"e  Mars, 
la  voix  sourde  d'Adrienne  Lecouvreur,  la  voix  sourde 
de  Le  Kain,  cherchaient,  les  unes  et  les  autres,  ce 
médium  sans  lequel,  au  dire  de  Mole,  il  n'y  a  pas  d'il- 
lusion, pas  de  vérité.  «  Je  suis  musicien  avant  d'être 
acteur,  disait  encore  Talma  qui,  comme  Molière  lui- 
même,  notait  ses  intonations,  et  qui  voulait  qu'on 
parlât  au  théâtre,  mais  en  trempant  son  langage  de 
musique  et  de  poésie. 

11  faut  être  vrai,  vivant,  dépouiller  l'idéal  de  con- 
vention, la  routine  d'école,  renoncer  à  cette  vocifé- 
ration surhumaine  qui  rappelle  le  temps  des  masques 
antiques,  l'heure  où  Apulée  pouvait  dire  :  Tragmdus 
vociferalur,  cnmœdus  srrmocinatur.  «  Le  public  ne  se 
gène  pas  avec  celui  qui  crie,  disait  un  vieil  amateur. 
Il  faut  parler  bas  pour  être  entendu.  »  Racine  a  ma- 
gnifiquement parlé  de  «  cette  tristesse  majestueuse 
qui  fait  tout  le  plaisir  de  la  tragédie  ».  Mais,  lors- 
qu'il servit  de  guide  à  la  Champmeslé,  que  lui  ensei- 
gna-t-il?  A  conduire  sa  voix,  à  éviter  l'emphase. 
Avant  Baron,  on  chantait  :  il  vint,  il  parla.  Et  Le- 
couvreub  fut  son  élève,  inventant  l'expression,  dé- 
blayant les  effets  inutiles  (à  la  Duclos)  —  allant  au 
mot,  au  geste,  à  l'accent  qui  prend  le  cœur  du  pu- 
blic. «  M"e  Dumesnil  a  été  mère  dans  Mérope.  Quel 
étonnement  !  »  s'écriait  un  spectateur.  Il  faut  que  les 
artistes  qui  jouent  les  mères  soient  mères  tous  les 
jours. 

Cela  revient  à  dire  qu'il  faudrait  que  les  comédiens 
éprouvassent  tous  les  sentiments  de  l'humanité,  et 
«  ce  n'est  point  assez,  dit  La  Bruyère,  que  les  mœurs 
du  théâtre  ne  soient  point  mauvaises;  il  faut  encore 
qu'elles  soient  décentes  et  instructives.  »  Elles  le  sont 
devenues  et  le  deviennent  de  plus  en  plus.  Le  pré- 
jugé contre  le  comédien  était  une  barrière,  et  l'on 
trouve  cet  étrange  paradoxe  daus  un  article  de  Ca- 
simir Bonjour  sur  les  Comédiens  d'autrefois  et  les  Co- 
médiens d'aujourd'hui[l&  boutade  date  de  longtemps): 
«  Le  jour  où  les  mœurs  sont  entrées  au  théâtre,  le 
talent  en  est  sorti.  » 

Baron  demandait  que  les  comédiens  fussent  élevés 
sur  les  genoux  des  reines  et  des  impératrices.  C'était 
une  façon  de  dire  qu'il  fallait  que  les  comédiens 
eussent  de  la  noblesse,  fussent,  pour  parler  comme 
à  présent,  distingués. 


CONCLUSION. 


PROGRAMME   D'ENSEIGNEMENT 
DRAMATIQUE 


Maintenant  que  nous  avons  analysé,  synthétisons. 

Sous  le  bénéfice  des  considérations  critiques,  des 
documents,  des  faits,  — des  anecdotes  significatives 
aussi,  —  dont  l'exposé  précède,  tentons  de  formuler 
une  conclusion  pratique. 

Voici,  dicté  par  l'expérience,  le  programme  qu'il 
nous  parut  bon  d'élaborer,  et  qui  pourrait  convenir 
à  l'enseignement  dramatique  dé  tous  les  Conserva- 
toires du  monde.  Ce  programme  lut  approuvé  par 
toute  la  critique  et  par  tous  les  pédagogues,  lorsque 
M.  le  ministre  de  l'Instruction  publique  nous  chargea 
d'établir  les  bases  de  l'Enseignement  dramatique  au 
sein  de  VOdêon  d'Athènes. 

On  diviserait  cet  enseignement  en  trois  cours  prin- 
cipaux, plus  un  cours  supplémentaire  : 

Premier  cours.  Lecture  et  littérature.  Y  seraient 
enseignées  les  spécialités  suivantes  :  bonne  pronon- 
ciation de  la  langue  nationale,  lecture  à  première  vue, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


lecture  détaillée,  dégagée  de  tous  défauts,  d'accents 
incorrects.  Analyse  des  œuvres  et  des  rôles.  Histoire 
générale  du  théâtre  nationaleldesthéâtresétrangers. 
La  durée  du  séjour  des  élèves  dans  ce  cours  de  lec- 
ture et  de  littérature  ne  pourrait  être  fixée  de  façon 
précise.  Elle  dépendrait  de  l'éducation  de  chaque 
élève  et  des  soins  qu'elle  exige.  Certains  sujets  pour- 
raient même  entrer  directement  dans  le  cours  de 
déclamation  dés  leur  admission  à  l'Ecole. 

Deuxième  cours.  Déclamation  et  exercices  profes- 
sionnels. Pose  de  la  voix,  respiration,  articulation, 
tonalilés  des  différents  diapasons  dans  les  scènes 
d'ensemble;  distribution  des  rôles  aux  élèves  selon 
l'emploi  particulier  vers  lequel  le  sujet  devrait  par- 
ticulièrement être  dirigé,  d'après  ses  qualités  physi- 
ques et  ses  moyens  de  voix  et  d'expression  drama- 
tique ou  comique,  etc.,  adéquats  aux  rôles  distri- 
bués. Exercices  de  mimique. 

La  distribution  des  rôles  étant  d'une  importance 
capitale,  cette  distribution  serait  faite  selon  l'avis  des 
professeurs  réunis,  lesquels  discuteraient  avec  soin 
le  pour  et  le  contre,  avant  de  donner  tel  ou  tel  rôle 
à  l'élève. 

Troisième  cours.  Cours  d'ensemble,  mise  en  scène 
pratique.  Exécutions  théâtrales  complètes  d'actes 
entiers  choisis  dans  les  chefs-d'œuvre  tragiques,  dra- 
matiques et  comiques  des  répertoires  ancien  et  mo- 
derne. 

Cours  complémentaire.  Exercices  du  corps.  Assou- 
plissement des  membres,  maintien,  danse,  escrime, 
etc. 

A  toutes  les  époques,  ce  programme  pourra  suffire 
en  tant  qu'Enseignement  Dramatique.  Il  vient  d'être 
excellemment  mis  en  pratique,  grâce  aux  réformes 
actuelles  de  M.  le  Sous-Secrétaire  d'Etat. 

Il  va  sans  dire  que  chaque  siècle  impose  des  règles 
soi-disant  nouvelles  à  la  forme  des  ouvrages  de 
théâtre  et  à  leur  exécution;  mais  les  règles,  en  dehors 
de  celles  que  nous  signalons,  changent  comme  les 
modes,  et  chaque  génération  s'imagine  toujours 
avoir  décrété  les  meilleures.  Les  règles  immuables 
sont  d'ailleurs  élastiques  et  se  peuvent  assouplir  à 
l'individualité  de  chaque  talent.  Donc,  quand  bien 
même  l'élève  aurait  satisfait  à  ce  programme,  si  la 
Nature  lui  a  refusé  le  don,  il  ne  sera  jamais,  quel- 
que intelligence  dont  il  dispose,  qu'un  professionnel 
quelconque;  car  si  nous  sommes  tous  singes  par 
l'esprit,  nous  ne  sommes  artistes  originaux  que  par 
l'âme,  selon  qu'Apollon  aura  eftleuré  plus  ou  moins 
cette  âme  du  divin  rayon.  Si,  au  contraire,  le  sujet 


est  doué  (vérité  de  La  Palisse  dont  l'évidence  se  nie 
parfois  et  cause  tant  de  malentendus),  il  pourra 
prendre  progressivement  sa  place  dans  tel  ou  tel 
théâtre.  Il  n'y  a  pas  deux  manières  de  faire  de  l'art; 
il  n'y  a  pas  de  grand  ni  de  petit  art;  il  y  a  l'Art 
qu'on  peut  eiercer  noblement  dans  toutes  les  caté- 
gories de  la  profession. 

Que  le  comédien  garde  les  traditions  de  notre 
génie  national!  Qu'il  nous  aide  à  rester  en  pleine 
possession  des  origines  de  notre  esprit,  car  un  pays 
qui  laisse  envahir  son  génie  par  les  œuvres  de  l'é- 
tranger, se  prépare  à  d'autres  invasions. 

M.  Frédéric  Masson  a,  d'ailleurs,  excellemment 
résumé  nos  théories  générales,  en  rappelant  à  l'Aca- 
démie française,  dans  son  discours  de  réception,  les 
hautes  aspirations  auxquelles  devaient  prétendre  les 
membres  de  la  Fondation  de  Richelieu.  Ces  aspira- 
tions doivent  être  aussi  celles  de  la  nuise  dramatique 
au  sein  de  la  Comédie  française  :  «  Dans  notre  pays, 
où  l'ardeur  du  changement  et  la  passion  des  nou- 
veautés passagères  absorbent,  depuis  un  siècle, 
l'activité  des  forces,  l'Académie  est  la  gardienne  de 
ce  qui  est  le  lien  sacré  des  individualités  françaises, 
de  l'âme  même  de  la  patrie,  du  Verbe,  par  qui,  aux 
jours  de  splendeur,  s'atteste  le  rayonnement  de  sa 
puissance,  par  qui,  aux  jours  de  désastre,  la  nation 
se  cherche  et  se  retrouve,  affirme  son  unité  et  re- 
trouve son  droit  à  vivre. 

«  Parlée,  la  langue  d'un  jieuple,  c'est  sa  vie  même  ; 
écrite,  c'est  son  immortalité...  Il  faut  entourer  celte 
langue  d'un  respect  religieux,  en  protéger  les  formes, 
en  sauvegarder  le  génie  :  c'est  donc  aux  hommes 
que  leur  talent  et  leur  caractère  ont  placés  au-des- 
sus des  accidents  du  succès,  que  le  culte  en  doit  être 
remis,  afin  qu'ils  opposent  une  barrière  solide  aux 
entraînements  momentanés,  aux  goûts  vulgaires, 
aux  modes  étrangères,  et  qu'ils  maintiennent  fer- 
mement la  tradition!  » 

En  cet  appel,  joignons  les  comédiens  aux  écri- 
vains, afin  que  les  uns  et  les  autres  s'unissent  pour 
diriger  la  langue  et  la  muse  dramatique  nationales. 
Certes,  en  art  dramatique,  comme  en  tout,  il  faut, 
dans  la  vie,  tendre  et  conclure  «  dans  le  sens  des 
choses  futures  »;  à  la  condition  toutefois  de  ne  pas 
altérer  les  principes  immuables,  fondamentaux,  sous 
peine  de  s'exposer  non  seulement  à  rétrograder, 
au  lieu  d'avancer,  mais  encore  à  disparaître! 

Jules  CLAREIÏE  et  Jules  TRUFFIER. 


L'INSTITUT  DE  FRANCE  ET  LE  PRIX  DE  ROME 


Par  Paul  LANDORMY 

AGRÉGÉ    DE    PHILOSOPHIE 

et  Joseph  L01SEL 

AGRÉGÉ    DES    LETTRES 


L'INSTITUT   DE  FRANCE 

ET 

L'ACADÉMIE  DES  BEAUX-ARTS 

La  création  de  l'Institut  de  France  dale  de  1795. 
La  fondation  de  diverses  Académies  remonte  à  des 
temps  beaucoup  plus  anciens.  Dès  la  seconde  moitié 
du  xvi"  siècle,  en  1570,  le  poète  Antoine  de  Baif  eut 
l'idée  de  former  une  société  de  littérateurs  et  de  mu- 
siciens à  laquelle  il  donna  le  titre  d'Académie  de 
poésie  et  de  musique.  Il  obtint  de  Charles  IX  des  let- 
tres patentes  (novembre  1570)  qui  lui  octroyaient  le 
privilège  d'instituer  ces  réunions.  Mais  de  graves 
difficultés  furent  soulevées  à  l'occasion  de  l'examen 
des  statuts  par  le  Parlement  de  Paris.  Il  fallut  pres- 
que un  lit  de  Justice  pour  vaincre  cette  opposition, 
et  de  nouvelles  lettres  du  Roi  firent  défense  «  qu'au- 
cun obstacle  fût  apporté  au  fonctionnement  de  l'A- 
cadémie ».  Les  premiers  «  Académiques  »  furent  des 
poètesdelaPléiade:  Dorai,  Ronsard,  Jamyn,  Jodelle, 
Remy  Relleau,  Ponthus  de  Tbiard.  Baif  voulait  à 
tout  prix  plier  la  langue  française  aux  règles  de  la 
prosodie  grecque  ou  latine;  il  composa  de  délicieux 
«  vers  mesurés  à  l'antique  »  qui  furent  pour  Claude 
le  Jeune  et  Mauduit  l'occasion  de  charmantes  inspi- 
rations musicales.  L'Académie  fut  sans  cesse  en  butte 
aux  attaques  des  envieux.  L'intervention  du  Roi  de- 
vint souvent  utile.  Sous  Henri  III,  Guy  de  Pibrac 
plaida  chaleureusement  la  cause  de  l'Académie 
et  proposa  d'ajouter  à  ses  occupations  poétiques  et 
musicales  l'étude  des  sciences  morales  et  politiques, 
de  la  grammaire  et  de  la  philologie.  Le  Roi  accepta 
ces  modifications  aux  statuts,  et  prit  le  titre  de  pro- 
tecteur de  l'Académie,  qui  s'appela  désormais  l'.lca- 
démie  du  Palais  :  elle  tint  l'assemblée  au  Louvre,  et 
Ronsard  assure  que  le  Roi  assistait  habituellement 
aux  séances.  A  la  mort  dePibrac(1584),  les  réunions 
cessèrent  d'avoir  lieu. 

En  1589,  Mauduit  essaya  de  constituer  une  Académie 
de  musique  qui  dura  peu. 

On  peut  rattacher  encore  à  ces  diverses  tentatives 
les  réunions  organisées  par  Marguerite  de  Valois,  et 
les  conférences  académiques  dont  parle  Bacon. 

La  fondation  de  l'Académie  française  dale  officiel- 
lement des  lettres  patentes  signées  par  Louis  XIII 
en  janvier  1635. 

L'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  fut 
créée  en  1663  par  Louis  XIV,  et  l'Académie  des  scien- 


ces, sur  [la  proposition  de  Colbert,  le  22  décembre 
1666. 

La  Corporation  de  Saint-Luc,  fondée  en  1391,  per- 
sécutait tellement  les  artistes  indépendants  et  même 
les  peintres  et  les  sculpteurs  brevetés  par  le  Roi, 
que  Charles  Lebrun  résolut  de  les  affranchir  en  éta- 
blissant une  Académie  royale  de  peinture  et  de  sculp- 
ture, à  laquelle  une  ordonnance  royale  du  24  décem- 
bre 1654  et  un  brevet  du  Roi,  enregistré  au  parle- 
ment le  23  juin  1655,  accordèrent  les  lettres  de  maî- 
trise, le  logement  au  Collège  de  France  et  quelques 
privilèges  de  l'Académie  française.  En  1692,  l'Acadé- 
mie de  peinture  et  de  sculpture  s'installa  au  Louvre. 
Le  nombre  des  membres  y  était  illimité;. les  femmes 
mêmes  y  étaient  admises  :  il  n'y  en  eut  jamais  beau- 
coup, du  reste.  Cette  Académie  avait  un  caractère 
mixte  :  c'était  à  la  fois  une  compagnie  de  maîtres 
artistes,  et  une  école.  L'accès  en  était  relativement 
aisé.  Elle  disparut  pendant  la  Révolution. 

En  1655,  Colbert  avait  formé  un  conseil  des  bâti- 
ments pour  examiner  les  projets  d'achèvement  du 
Louvre  présentés  par  Perrault.  Ce  conseil  se  trans- 
forma plus  lard  en  une  Académie  d'architecture,  dont 
la  première  séance  eut  lieu  le  21  décembre  1671  au 
Palais-Royal,  sous  la  présidence  de  Colbert.  Les  let- 
tres patentes,  les  statuts  et  les  règlements  ne  datent 
que  de  février  1717.  La  dernière  assemblée  a  eu  lieu 
le  o  août  1793. 

La  loi  du  8  août  1793  prononça  la  suppression  de 
toutes  les  Académies.  La  Convention,  après  un  inter- 
valle de  deux  années,  créa  l'Institut  de  France. 

Le  22  août  1795  est  promulguée  la  Constitution 
adoptée  par  la  Convention  nationale.  Nous  y  trou- 
vons un  article  298  ainsi  conçu  :  «  Il  y  a,  pour  toute 
la  République,  un  Institut  national  chargé  de  recueil- 
lir les  découvertes,  de  perfectionner  les  arts  et  les 
sciences.  »  La  loi  du  25  octobre  1795  (3  brumaire 
an  IV)  organisait  l'Institut. 

Dans  l'histoire  de  l'Institut,  il  faut  distinguer  qua- 
tre périodes,  qui  commencent  respectivement  le 
25  octobre  1795,  le  23  janvier  1803,1e  21  mars  1816  et 
le  25  octobre  1832. 

Première  période  (1795-1803).  —  L'Institut  est 
composé  de  3  classes,  divisées  en  sections,  au  nom- 
bre total  de  vingt-quatre,  chacune  de  six  membres. 
Dans  chaque  classe,  on  élit  huit  associés  étrangers 
et  des  associés  non  résidants  en  nombre  égal  aux 
membres  titulaires. 

La  première  classe,  celle  des  Sciences  physiques  et 


3480 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


mathématiques, comprend  soixante  membres,  huit  as- 
sociés  étrangers  el  soixante  associés  non  résidants. 

I  i  deuxième  classe,  celle  des  Sciences  morales  et 
politiques,  comprend  trente-six  membres,  huit  asso- 
ciés étrangers,  et  trente-six  membres  non  résidants. 

La  troisième  classe,  celle  de  Littérature  el  des 
Beaux- Arts,  comprend  <|uarante-huit  membres,  huit 
associés  étrangers,  el  quarante-huit  associés  non  rési- 
dants. La  huitième  section  de  la  troisième  classe  por- 
tait ce  litre  :  musique  et  déclamation. 

Le  caractère  le  plus  frappant  de  la  nouvelle  insti- 
tution, c'en  est  l'unité.  Les  membres  des  trois  classes 
avaient  le  même  titre,  les  mêmes  droits,  les  mêmes 
fonctions,  les  mêmes  honneurs,  le  même  costume, 
la  même  indemnité;  il  était  interdit  de  faire  partie 
de  deux  classes  en  même  temps;  mais  tout  acadé- 
micien pouvait  siéger  et  prendre  la  parole  dans  une 
séance  de  n'importe  quelle  classe.  Pour  chaque 
vacance  dans  chaque  classe,  les  élections  étaient 
faites  par  l'Institut  tout  entier.  Une  fois  par  mois 
avait  lieu  une  séance  commune  à  toutes  les  classes. 
Chacune  des  classes  prenait  à  tour  de  rôle  la  prési- 
dence de  l'Institut  pendant  un  mois.  Le  traitement 
de  chaque  membre,  fixé  à  1300  francs,  était  déclaré 
par  la  loi  insaisissable,  et  non  soumis  aux  lois  sur  le 
cumul.  Les  classes  décidèrent  que  le  cinquième  des 
traitements  formerait  une  masse  à  distribuer  en 
jetons  de  présence  dont  la  valeur  varierait  selon  l'assi- 
duité des  membres. 

L'Institut  fut  installé  au  Louvre.  La  première  classe 
prit  le  local  de  l'ancienne  Académie  des  sciences;  la 
deuxième  classe,  celui  de  l'Académie  française;  la 
troisième  classe,  celui  de  l'Académie  des  inscriptions 
et  belles-lettres.  Les  séances  publiques  eurent  lieu 
dans  la  salle  des  Cariatides. 

La  troisième  classe,  qui  nous  intéresse  ici  spécia- 
lement, représentait  à  la  fois  l'Académie  française, 
l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres,  l'Acadé- 
mie de  peinture  et  de  sculpture,  l'Académie  d'archi- 
tecture, et  plus  encore,  puisqu'elle  comprenait  une 
section  composée  de  musiciens  et  d'artistes  drama- 
tiques. 

Les  quarante-huit  premiers  membres  titulaires  de 
l'Institut  furent  nommés  au  mois  de  novembre  179a, 
par  arrêté  du  Directoire.  Le  6  novembre  1795,  les 
membres  ainsi  nommés  se  réunirent  à  la  salle  de 
l'Ancienne  Académie  des  Sciences  sous  la  présidence 
de  Daubenton,  doyen  d'âge,  et,  dans  trois  séances 
tenues  le  9,  le  10  et  le  12  décembre,  ils  élurent  le 
second  tiers  des  membres  de  l'Institut;  enfin  dans 
trois  autres  réunions,  le  13,  le  14  et  le  15  décembre, 
le  dernier  tiers  fut  élu.  Le  22  décembre,  une  pre- 
mière séance  générale  fut  nécessaire  pour  nommer 
douze  membres  chargés  de  préparer  le  règlement. 
Le  21  janvier  1796,  l'Institut  se  présente  au  Conseil 
des  Cinq  Cents  pour  déposer  le  projet  qu'il  avait 
adopté.  Après  exécution  de  l'Hymne  «  Veillons  au 
salut  de  l'Empire  »  par  les  artistes  du  Conservatoire 
sous  la  direction  de  Cherubini,  Treilhard,  président 
de  la  séance,  souhaite  la  bienvenue  aux  membres  de 
l'Institut.  Lacépède  répond  au  nom  de  ses  collègues, 
et  termine  ainsi  son  discours  :  «  Trop  longtemps,  les 
sciences  et  les  arts,  naturellement  fiers  et  indépen- 
dants, ont  porté  le  joug  monarchique  dont  le  génie 
n'a  pu  les  préserver  :  aujourd'hui,  la  liberté  protège 
les  lumières,  et  les  lumières  font  chérir  la  liberté  : 
Nous  jurons  haine  â  la  royauté.  »  La  loi  approuvant 
le  règlement  fut  proclamée  le  4  avri'  1796.  Le  même 
jour,  une  séance  solennelle  d'inauguration  eut  lieu 


au  Louvre,  salle  des  Cariatides.  Daunou,  membre 
de  la  classe  des  sciences  morales  et  politiques,  pro- 
nonça le  discours  d'ouverture,  dans  lequel  nous  re- 
levons le  passage  suivant  :  «  Et  maintenant,  en  pleine 
possession  de  la  liberté,  la  République  nous  appelle 
pour  rassembler  et  raccorder  toutes  les  branches  de 
l'instruction,  reculer  les  limites  des  connaissances, 
rendre  leurs  éléments  moins  obscurs  et  plus  accessi- 
bles, provoquer  les  efforts  des  talents,  récompenser 
les  succès,  recueillir  et  manifester  les  découvertes, 
recevoir,  renvoyer,  répandre  toutes  les  lumières  de 
la  pensée,  tous  les  trésors  du  génie.  Tels  sont  les 
devoirs  que  la  loi  impose  à  l'Institut.  » 

Après  cela,  chaque  classe  tint  régulièrement  ses 
séances  hebdomadaires,  l'Institut  ses  réunions  men- 
suelles, et[au  début  de  chaque  trimestre,  une  séance 
publique  était  consacrée  à  la  lecture  des  mémoires 
sur  des  sujets  divers. 

Deuxième  période  (1803-1816).  —  Bonaparte  son- 
geait à  reconstituer  l'ancienne  Académie  française. 
Il  ne  réalisa  pas  absolument  celte  réforme;  mais,  du 
moins,  il  modifia  profondément  la  première  organi- 
sation de  l'Institut  de  France. 

L'arrêté  du  23  janvier  1803  porte  à  quatre  le  nom- 
bre des  classes  : 

La  première  classe,  celle  des  Sciences,  est  augmen- 
tée de  la  section  de  Géographie. 

La  classe  des  Sciences  morales  et  politiques  est  sup- 
primée. 

La  classe  de  Littérature  est  remplacée  par  trois 
classes  : 

La  deuxième  classe,  celle  de  la  Langue  et  de  la  Lit- 
térature française. 

La  troisième  classe,  celle  de  l'Histoire  et  de  la  Lit- 
térature ancienne. 

La  quatrième  classe,  celle  des  Beaux-Arts,  dans 
laquelle  on  réduisait  la  section  de  musique  à  trois 
membres  et  on  supprimait  les  fauteuils  des  artistes 
dramatiques. 

Le  nombre  des  membres  s'élevait  à  cent  soixante- 
quatorze,  au  lieu  de  cent  quarante-quatre.  Le  chiffre 
des  associés  étrangers  restait  le  même.  Au  lieu  de 
cent  quarante-quatre  associés  non  résidants,  il  y 
avait  cent  quatre-vingt-seize  membres  correspon- 
dants des  départements  et  même  de  l'étranger.  Les 
secrétaires  perpétuels  étaient  rétablis  :  deux  pour  la 
classe  des  sciences,  un  pour  chaque  autre  classe. 

Les  anciennes  Académies  se  trouvaient  à  peu  près 
reconstituées  sous  d'autres  noms.  Les  classes  étaient 
autonomes  :  chacune  faisait  ses  élections  pour  les 
sièges  vacants.  Il  n'était  plus  interdit  d'appartenir 
comme  membre  titulaire  à  deux  classes  distinctes. 
Mais  le  principe  d'unité  était  fortement  maintenu 
sur  d'autres  points  :  tout  membre  d'une  classe  quel- 
conque pouvait  assister  aux  séances  des  quatre 
classes,  y  lire  des  rapports.  Il  y  avait  toujours  des 
séances  générales.  Le  titre,  le  costume,  le  traite- 
ment restaient  les  mêmes  pour  tous  les  membres  de 
l'Institut. 

En  180a,  l'Institut  est  doté  du  Palais  des  Quatre- 
Nations,  qu'il  a  conservé  depuis. 

Sous  la  première  Restauration,  une  ordonnance 
du  Roi  (S  mars  1813)  modifia  la  constitution  de 
l'Institut,  mais  cette  ordonnance  fut  annulée  le 
24  mars  par  l'Empereur,  qui  prit  le  titre  de  protec- 
teur de  l'Institut  (10  avril  1815).  Pendant  les  cent 
jours,  le  gouvernement  porta  de  vingt-neuf  à  qua- 
rante le  nombre  des  membres  de  la  classe  des 
Beaux-Arts.  Mais  le  2  août  suivant,  le  lloi  décida 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3481 


que  l'élection  de  ces  nouveaux  membres  sérail  con- 
sidérée comme  nulle  et  non  avenue. 

Troisième  période  (1816-1832).  —  Une  ordon- 
nance royal.-  du  21  mars  1816  rend  aux  classes  l'an- 
cien titre  d'Académies  et  le  nom  des  compagnies 
dont  elles  étaient  issues,  et  dans  chaque  Académie, 
sauf  l'Académie  française,  dix  places  de  membres 
libres  sont  créées. 

L'Académie  française  (non  divisée  en  sections) 
comprend  quarante  membres. 

L'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  (non 
divisée  en  sections)  comprend  quarante  membres 
titulaires,  dix  membres  libres,  huit  associés,  et  trente 
correspondants. 

L'Académie  des  sciences  (divisée  en  onze  sections) 
comprend  soixanle-cinq  membres  titulaires,  dix 
membres  libres,  buitassociés  et  cent  correspondants. 

L'Académie  des  beaux-arts  (divisée  en  cinq  sec- 
tions, dont  la  cinquième  est  dénommée  de  composi- 
tion musicale)  comprend  quarante  et  un  membres 
titulaires,  dix  membres  libres,  dix  associés,  qua- 
rante correspondants. 

Le  gouvernement,  pour  des  raisons  politiques, 
raye  les  noms  de  vingt-deux  académiciens.  De  l'Aca- 
démie des  beaux-arts  se  trouvent  ainsi  exclus  : 
David,  Rerton,  Costellan  et  Thibault;  les  trois  der- 
niers avaient  été  élus  en  1815;  ils  reprirent  plus 
tard  leurs  fauteuils. 

Quatrième  période  (à  partir  de  1832).  —  L'ordon- 
nance royale  du  26  octobre  1832  rend  à  l'Institut 
«  la  plénitude  des  droits  qui  lui  furent  attribués  à 
l'époque  de  sa  création  ».  Elle  rétablit  l'Académie 
des  sciences  morales  et  politiques,  supprimée  en  1803, 
sous  le  titre  de  deuxième  classe  de  l'Institut. 

Depuis  lors  il  ne  fut  plus  apporté  que  des  modifi- 
cations sans  importance  à  l'organisation  de  l'Ins- 
titut. 

L'institul  comprend  actuellement  cinq  Académies  : 

1°  L'Académie  française  (fondée  en  1635). 

2°  L'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  (fon- 
dée en  1663). 

3°  L'Académie  des  Sciences  (fondée  en  1666). 

4°  L'Académie  des  beaux-arts  (fondée  en  1795). 

5°  L'Académie  des  sciences  morales  et  politiques 
(fondée  en  1795). 

Chaque  Académie  exerce  la  présidence  à  son  tour, 
et  pour  un  an. 

Une  commission  centrale  formée  des  six  secrétaires 
perpétuels  et  de  deux  membres  de  chaque  Académie, 
élus  pour  un  an  et  toujours  rééligibles,  s'occupe  de 
l'administration. 

L'Institut  nomme  en  séance  générale  le  biblio- 
thécaire, les  sous-bibliothécaires,  le  chef  de  secré- 
tariat, et  l'agent  spécial  qui  est  chargé  de  la  comp- 
tabilité. 

Le  budget  de  l'Institut  est  voté  tous  les  ans  par 
les  Chambres. 

Une  séance  plénière  non  publique  réunit,  au  moins 
une  fois  par  trimestre,  les  cinq  Académies.  Le 
25  octobre,  jour  aniversaire  de  la  fondation  de  l'Ins- 
titut, a  lieu  la  séance  plénière  publique. 

Chaque  compagnie  a  ses  règlements  particuliers, 
qu'elle  modifie  à  son  gré.  Elle  décide  de  l'ordre  de 
ses  travaux,  du  mécanisme  de  ses  élections,  de  l'or- 
ganisation de  ses  concours,  du  mode  d'attribution  de 
ses  prix  et  récompenses. 

Les  membres  titulaires,  les  membres  libres  et  les 
membres  associés  de  l'Institut  ont  le  droit  de  porter 
le  costume  dessiné  par  David  et  adopté  le  12  mai  1801. 


LA  SECTION   DE   MUSIQUE   DE   L'ACADÉMIE 
DES   BEAUX-ARTS 
1.  —  Historique. 

Dans  la  première  organisation  de  l'Institut,  à  la 
section  de  musique  et  de  déclamation  appartenaient 
trois  compositeurs  et  trois  sociétaires  de  la  Comédie 
française. 

Sous  le  régime  de  1803,  la  section  de  composition 
musicale  comprend  trois  fauteuils,  et  les  sièges  des 
trois  artistes  dramatiques  sont  supprimés. 

Le  décret  du  27  avril  1815  crée  trois  nouveaux 
fauteuils  dans  la  section  de  musique,  mais  aussitôt 
après  la  chute  de  Napoléon  ICl',  le  ministre  de  l'in- 
térieur fait  savoir  que  les  trois  nouveaux  membres 
élus  pendant  la  période  des  cent  jours  ne  feront 
pas  partie  de  l'Institut. 

L'ordonnance  du  21  mars  1816  reconstitue  l'Aca- 
démie des  beaux-arts  et  attribue  six  membres  à  la 
section  de  musique. 

S.  —  statuts  de  l'Académie  des  Bcanv- Arts. 

Composition  de  L  Académie.  —  Article  premier.  — 
L'Académie  des  beaux-arts  est  composée  d'acadé- 
miciens, d'académiciens  libres  et  d'associés  étran- 
gers. 

Académiciens.  —  Art.  2.  —  Les  académiciens 
sont  au  nombre  de  quarante.  Ils  sont  choisis  parmi 
les  peintres,  les  sculpteurs,  les  architectes,  les  gra- 
veurs et  les  compositeurs  de  musique  les  plus  distin- 
gués par  leurs  talents  et  leurs  ouvrages. 

_A,.(.  3.  _  JSul  ne  peut  être  académicien  s'il  n'est 
Français,  âgé  de  vingt-cinq  ans  au  moins,  et  domi- 
cilié à  Paris. 

Art.  4.  —  Les  quarante  académiciens  sont  ré- 
partis en  cinq  sections,  ainsi  qu'il  suit  :  dans  la  sec- 
tion de  peinture,  quatorze;  dans  la  section  de  sculp- 
ture, huit;  dans  la  section  d'architecture,  huit;  dans 
la  section  de  gravure,  quatre;  dans  la  section  de 
musique,  six. 

Art.  5.  —  Le  secrétaire  perpétuel  peut  être  choisi 
hors  du  nombre  des  quarante  académiciens.  Dans 
ce  cas,  il  jouit  du  litre  et  de  tous  les  droits  d'aca- 
démicien ;  mais  il  ne  fait  partie  d'aucune  des  cinq 
sections.  Lorsqu'il  est  choisi  parmi  les  membres 
d'une  section,  sa  place  y  devient  vacante. 

Académiciens  libres.  —  Art.  6.  —  La  classe  des 
académiciens  libres  est  composée  de  dix  membres. 
Ils  sont  choisis  parmi  les  hommes  distingués,  soit 
par  leur  rang  et  leur  goût,  soit  par  leurs  connais- 
sances théoriques  ou  pratiques  dans  les  beaux-arts, 
ou  qui  auraient  publié  sur  ce  sujet  des  écrits  re- 
marquables. 

Art,  7.  —  Les  académiciens  libres  ont  voix  délibé- 
rative  dans  toutes  les  discussions  relatives  aux 
sciences,  aux  lettres  et  aux  arts.  Ils  peuvent  faire 
partie  de  toutes  les  commissions  nommées  dans  le 
sein  de  l'Académie  (autres  que  celles  qui  ont  rap- 
port à  l'administration),  et  concourir  à  la  nomination 
de  ces  mêmes  commissions.  Ils  jouissent  de  toutes 
les  prérogatives  des  académiciens,  excepté  du  droit 
de  suffrage  pour  les  élections  aux  places  vacantes 
dans  les  sections,  et  pour  celle  du  secrétaire  per- 
pétuel. 

Art.  8.- —  Néanmoins,  les  académiciens  libres  ont 
droit  de  voter  avec  les  autres  académiciens  pour  les 


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:;'.S2 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


élections  aux  places  qui  viennent  à  vaquer  :  1°  dans 
la  classe  des  académiciens  libres;  2°  dans  celle  des 
associés  étrangers;  3°  parmi  les  correspondants. 

,\rt.  <).  _  Les  académiciens  libres  ne  peuvent, 
dans  aucun  cas,  être  élus  aux  places  d'académiciens 
vacantes  dans  les  cinq  sections  ci-dessus  dénommées. 

Art.  10.  —  Les  académiciens  lilires  n'ont  d'autre 
indemnité  que  celle  du  droit  de  présence. 

Associés  étrangers.  —  Art.  11.  —  Le  nombre  des 
associés  étrangers  de  l'Académie  ne  peut  excéder 
dix.  Ils  sont  choisis  parmi  les  artistes  les  plus  célèbres 
et  les  amateurs  des  beaux-arts  les  plus  distingués. 

Art,  io_  —  Les  associés  étrangers,  lorsqu'ils  se 
trouvent  à  Paris,  jouissent  du  droit  de  siéger  dans 
les  assemblées  de  l'Académie.  Ils  ne  font  partie 
d'aucune  section,  ne  touchent  aucun  traitement  ni 
droit  de  présence.  Ils  ne  peuvent  voter  ni  dans  les 
élections  des  membres  de  l'Académie,  ni  dans  les 
jugements  des  grands  prix  annuels  et  autres  concours 
publics,  mais  ils  ont  voix  délibérative  dans  toutes 
les  discussions  relatives  aux  sciences,  aux  lettres  et 
aux  arts. 

Organisation  de  l'Académie.  —  Art.  13.  —  Le 
bureau  de  l'Académie  est  composé  d'un  président, 
d'un  vice-président  et  d'un  secrétaire  perpétuel. 

Art.  14.  —  Tous  les  ans,  dans  la  première  séance 
de  janvier,  l'Académie  nomme,  selon  les  formes  ci- 
après  prescrites,  et  parmi  les  académiciens  membres 
des  sections,  un  vice-président  qui,  l'année  d'après, 
devient  de  droit  président,  et  ne  peut  pas  être 
immédiatement  réélu. 

Art.  15.  —  Les  fonctions  de  président  sont  de 
proposer  les  sujets  de  délibération  ou  de  discussion, 
île  maintenir  l'ordre  dans  l'assemblée,  de  dépouiller 
les  scrutins  et  d'en  prononcer  les  résultats.  Il  est 
spécialement  chargé  de  veiller  à  l'exécution  des 
statuts  et  des  règlements  de  l'Académie,  et  d'y  rap- 
peler ceux  qui  pourraient  s'en  écarter. 

Art.  16.  —  Le  vice-président  supplée  le  président 
dans  toutes  ses  fonctions  :  en  cas  d'absence  de  l'un 
et  de  l'autre,  l'Académie  est  présidée  par  le  prési- 
dent de  l'année  précédente;  à  défaut  de  celui-ci, 
par  le  doyen  d'âge  des  académiciens. 

Art.  17.  —  Les  fonctions  de  secrétaire  perpétuel 
sont  de  recueillir  en  substance  tout  ce  qui  est  pro- 
posé, examiné  et  résolu  dans  les  séances  de  l'Aca- 
démie; de  tenir  note  des  lectures,  rapports  ou  dis- 
cours qui  y  sont  faits,  de  dresser  du  tout  un  procès- 
verbal  qui,  après  avoir  été  lu  en  séance  et  approuvé 
par  l'Académie,  est  consigné  dans  un  registre  à  ce 
destiné;  d'entretenir  la  correspondance,  soit  avec 
le  ministère,  soit  avec  l'Kcole  de  lîome,  soit  avec  les 
particuliers;  de  signer,  conjointement  avec  le  prési- 
dent, tous  les  actes  et  rapports  de  l'Académie;  d'en 
délivrer,  au  besoin,  des  copies  ou  extrails  certifiés  ; 
de  rédiger  les  mémoires  de  l'Académie  et  les  notices 
historiques  de  la  vie  et  des  ouvrages  des  académiciens 
décédés;  de  surveiller  le  dépôt  de  tous  les  actes, 
titres,  papiers  et  registres  concernant  l'institution  et 
les  travaux  de  l'Académie. 

Art.  18.  —  En  cas  d'absence  momentanée,  de 
maladie  ou  de  mort,  le  secrétaire  perpétuel  est  rem- 
placé dans  l'intérim  par  le  vice-président,  ou,  à 
défaut  de  celui-ci,  par  le  plus  anciennement  élu  des 
membres  présents. 

Art.  19.  —  En  exécution  de  l'article  5  de  l'ordon- 
nance du  roi  du  21  mai  1816,  l'Académie  nomme, 
dans  la  première  séance  de  chaque  année,  deux  de 
ses  membres  pour  faire  partie    de    la  commission 


centrale  chargée  de  régir  et  d'administrer  les  pro" 
priétés  communes  aux  cinq  Académies  qui  compo- 
sent l'Institut,  et  les  fonds  y  affectés.  Les  commis- 
saires sont  élus  chacun  pour  un  an,  et  sont  toujours 
rééligibles. 

Art.  20.  —  Le  président,  le  vice-président,  le 
secrétaire  perpétuel  et  les  deux  membres  de  la  com- 
mission centrale  administrative  désignée  dans  l'ar- 
ticle précédent  forment  un  comité  qui,  aux  termes 
de  l'article  0  de  la  susdite  ordonnance,  est  chargée 
de  régir,  au  nom  de  l'Académie,  ses  propriétés  et 
fonds  particuliers,  et  de  proposer  l'état  annuel  de 
ses  dépenses. 

Art.  21.  —  L'Académie  nomme  encore,  au  commen- 
mencement  de  l'année,  une  commission  dont  l'objet 
est  de  prendre  communication  des  discours,  notices 
historiques  et  rapports  de  ses  travaux,  que  le  pré- 
sident, le  secrétaire  ou  tout  autre  académicien  est 
chargé  de  faire  au  nom  du  corps.  Celte  commission 
est  composée  de  cinq  membres,  pris  dans  les  cinq 
sections,  et  d'un  sixième  choisi  parmi  les  académiciens 
libres.  Ces  commissaires  sont  toujours  rééligibles. 

Tenue  des  séances.  —  Art.  22.  —  Les  séances 
ordinaires  et  les  séances  publiques  de  l'Académie 
sont  tenues  par  le  bureau. 

Art.  23.  —  Les  séances  ordinaires  de  l'Académie 
ont  lieu  le  samedi  de  chaque  semaine;  elles  com- 
mencent à  trois  heures  après  midi. 

Art.  24.  —  Si  le  samedi  est  un  jour  de  fête,  la 
séance  est  remise  à  un  autre  jour  :  les  académiciens 
sont  prévenus  de  ce  changement  par  des  billets  à 
domicile. 

Art.  25.  —  Lorsqu'il  y  a  lieu,  le  bureau  peut  con- 
voquer une  assemblée  extraordinaire. 

Art.  26.  —  Aucune  personne,  hors  les  membres 
dont  est  composée  l'Académie  et  ses  correspondants, 
les  membres  et  correspondants  des  autres  Académies 
faisant  partie  de  l'Institut,  ne  peut  assister  aux  As- 
semblées ordinaires  ou  extraordinaires,  si  elle  n'y 
est  admise  par  le  bureau  sur  la  présentation  d'un 
académicien. 

Art.  27.  —  Une  des  séances  du  mois  d'octobre 
désignée,  chaque  année,  par  l'Académie,  est  rendue 
publique. 

Art.  28.  —  Dans  cette  séance  publique,  le  secré- 
taire perpétuel  lit  la  notice  historique  des  académi- 
ciens décédés.  Le  président  proclame  les  noms  des 
élèves  des  beaux-arts  qui  ont  remporté  les  grands 
prix  de  peinture,  de  sculpture,  d'architecture,  de 
gravure  et  de  composition  musicale,  il  leur  distribue 
les  médailles  et  les  diplômes  qui  consacrent  leurs 
récompenses. 

Attributions  de  l'Académie.  —  Art.  29.  —  L'Aca- 
démie dirige  spécialement  les  concours  qui  ont  lieu 
annuellement  pour  les  grands  prix  de  peinture,  de 
sculpture,  architecture,  gravure  et  composition  mu- 
sicale. Elle  en  donne  les  sujets,  en  rédige  les  pro- 
grammes, en  juge  les  résultats;  et  lorsque  ses  juge- 
ments sur  les  différents  concours  sont  prononcés, 
elle  en  fait  part  au  ministre. 

Art.  30.  —  Dans  sa  séance  publique  du  mois  d'oc- 
tobre, elle  proclame  les  élèves  qui  ont  remporté  les 
grands  prix,  et  leur  en  fait  la  distribution  solennelle. 

■Art,  31.  —  L'Académie,  d'après  le  renvoi  qui  lui 
est  fait  par  le  ministre,  des  rapports  du  directeur  de 
l'Ecole  de  Home,  ainsi  que  des  ouvrages  et  morceaux 
d'études  des  pensionnaires,  juge  du  progrès  des 
élèves,  de  la  manière  dont  ils  remplissent  les  obli- 
gations qui  leur  sont  imposées,  de  l'état  enfin  de 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3483 


l'établissement  et  des  améliorations  dont  il  peut 
paraître  susceptible.  Elle  consigne  ses  observations  à 
ce  sujet  dans  un  rapport  qu'elle  adresse  au  ministre 
pour  être  transmis  au  directeur,  et  par  lui,  lorsqu'il 
y  a  lieu,  communiqué  aux  pensionnaires. 

Art.  32.  —  Tous  les  six  ans,  à  l'époque  du  renou- 
vellement du  directeur  de  l'Ecole  de  llorae,  ou  en 
cas  de  rappel,  de  démission  ou  de  mort,  l'Acadé- 
mie, sur  la  notification  du  ministre,  présente  trois 
candidats  pour  la  place  à  donner. 

Travaux  de  l'Académie.  —  Art.  33.  —  Les  séan- 
ces que  l'Académie  ne  consacre  pas  à  l'exercice  des 
attributions  ci-dessus  énoncées  sont  employées,  soit 
à  la  lecture  des  mémoires  et  dissertations  de  ses 
membres  ou  des  étrangers  admis  par  le  bureau  à 
lui  faire  part  de  leurs  recherches,  soit  à  examiner 
les  découvertes,  les  procédés  nouveaux  ou  les  nou- 
velles applications  d'anciens  procédés  dont  le  gou- 
vernement ou  les  particuliers  lui  soumettent  le 
jugement.  Elle  discute  les  articles  du  Dictionnaire 
général  des  beaux-arts  qu'elle  est  appelée  à  compo- 
ser, d'après  la  rédaction  d'une  commission  spéciale 
formée  dans  son  sein,  qui  prépare  chaque  article,  et 
le  soumet  à  l'adoption  de  l'Assemblée  générale. 

Art.  34.  —  L'Académie,  étant  formée  pour  s'occu- 
per de  tout  ce  qui  contribue  aux  progrès  et  au  per- 
fectionnement des  différentes'parlies  des  beaux-arts, 
donne  son  avis  motivé  sur  tous  les  projets,  problè- 
mes, difficultés  ou  questions  d'art  qui  lui  sont 
adressées  par  le  gouvernement;  et  s'il  est  nécessaire, 
elle  accompagne  son  rapport  de  dessins  ou  de  mo- 
dèles pour  faciliter  l'intelligence  du  sujet.  Elle 
propose  tous  les  projets  d'amélioration  dont  l'étude 
des  beaux-arts  est  susceptible. 

Commissions.  —  Art.  35.  — Pour  préparer,  faciliter 
et  exécuter  les  différents  travaux  dont  l'Académie 
est  chargée  par  les  statuts,  ou  peut  l'être  acciden- 
tellement sur  les  demandes  qui  lui  sont  adressées, 
elle  nomme  plusieurs  sortes  de  commissions,  les  unes 
permanentes,  les  autres  annuelles,  quelques-unes 
dont  l'exislence  n'a  d'autre  durée  que  celle  du  travail 
qui  leur  est  confié. 

Art.  36.  —  L'Académie,  selon  la  nature  des  ques- 
tions et  des  travaux,  peut  inviter  des  membres 
d'autres  Académies  faisant  partie  de  l'Institut  à  y 
prendre  part,  et  les  associer  à  ses  commissions. 

Art.  37.  —  Les  membres  du  bureau  peuvent  assis- 
ter à  toutes  les  commissions,  et  y  ont  voix  délibé- 
rative,  mais  ne  composent  pas  nécessairement  le 
bureau   de  ces  commissions. 

Nominations,  élections  et  délibérations  par  scru- 
tin. —  Art.  38.  —  La  mort  d'un  académicien,  mem- 
bre des  sections,  est  notifiée  par  le  président  dans  la 
séance  qui  suit  immédiatement  le  décès.  A  la  cin- 
quième séance  ordinaire  après  cette  nolilication , 
l'Académie  délibère  s'il  y  a  lieu  ou  non  de  procéder 
à  remplir  la  vacance,  après  avoir  entendu  sur  ce 
sujet  le  rapport  de  la  section  dans  laquelle  la  place 
est  vacante. 

Les  sections  de  l'Académie  sont  prévenues  par  let- 
tres. 

Art.  39.  —  Si  l'Académie  juge  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de 
procéder  au  remplacement  dans  les  délais  d'usage, 
elle  détermine  en  même  temps  l'époque  à  laquelle 
la  section  sera  de  nouveau  consultée. 

Art.  40.  —  Lorsque  l'Académie  a  décidé  qu'il  y  a 
lieu  de  procéder  au  remplacement,  les  membres  des 
cinq  sections  sont  convoqués  pour  la  séance  suivante; 
dans  cette  séance,  le  bureau  fait  connaître  à  l'Aca- 


démie les  noms  et  les  titres  des  candidats  à  la  place 
vacante. 

Aussitôt  après  cette  communication,  chaque  aca- 
démicien peut  proposer  le  nom  d'un  candidat,  qui 
sera  inscrit  par  le  secrétaire,  pourvu  qu'un  autre 
académicien  appuie  la  proposition.  Les  noms  de 
celui  qui  aura  fait  et  de  celui  qui  aura  appuyé  la 
proposition  seront  également  inscrits  au  proces- 
verbal. 

Art.  41.  —  Pour  la  séance  suivante,  les  membres 
des  cinq  sections  sont  de  même  convoqués,  et  la  sec- 
tion dans  laquelle  la  place  est  vacante  présente  trois 
candidats  au  moins  et  cinq  au  plus,  dans  l'ordre  de 
préférence  qu'elle  leur  accorde.  Dans  cette  même 
séance,  l'Académie  peut  discuter  le  mérite  des  can- 
didats présentés  par  la  section.  L'Académie  ajoute, 
s'il  y  a  lieu,  à  la  liste  de  la  section,  de  nouveaux 
candidats,  dont  le  nombre  ne  doit  pas  dépasser  cinq, 
et  qui  ne  peuvent  être  pris  que  sur  la  liste  générale 
des  candidats  arrêtée  dans  la  séance  précédente. 
Chaque  candidat  doit  réunir  la  majorité  absolue  des 
suffrages. 

Art.  42.  —  Dans  la  séance  qui  suit  celte  double 
présenlation,  séance  pour  laquelle  tous  les  membres 
sont  de  nouveau  convoqués,  si  les  deux  tiers  sont 
présents,  l'on  procède  à  l'élection,  à  la  majorité  abso- 
lue des  sulfrages  et  par  la  voie  du  scrutin,  ainsi  qu'il 
sera  expliqué  ci-après1. 

Art.  43.  —  Lorsque  la  place  de  secrétaire  perpé- 
tuel vient  à  vaquer,  l'Académie  procède  à  sa  nomina- 
tion, dans  la  même  forme  que  pour  la  nomination 
d'académiciens,  avec  ces  deux  différences  :  1°  qu'elle 
ne  délibère  pas  s'il  y  a  lieu  ou  non  d'élire;  2°  que  la 
liste  des  candidats  est  formée  par  une  commission 
de  cinq  membres,  pris  dans  les  cinq  sections. 

Art.  il.  —  Lorsqu'une  place  d'académicien  libre 
vient  à  vaquer,  il  est  procédé  à  l'élection  dans  les 
formes  ci-dessus;  mais  l'Académie  ne  délibère  point 
s'il  y  a  lieu  ou  non  à  remplacement,  et  la  liste  des 
candidats  est  formée  par  une  commission  de  cinq 
membres  pris  dans  les  cinq  sections,  et  d'un  sixième 
pris  dans  la  classe  des  académiciens  libres.  Cette 
commission  délibère  dans  les  mêmes  formes  que 
les  sections;  les  membres  du  bureau  n'en  font  donc 
point  partie. 

Art.  45.  —  Le  mode  indiqué  dans  l'article  précédent 
est  suivi  pour  la  nomination  des  associés  étrangers. 

Diverses  sortes  de  scrutin.  —  Art.  46.  —  L'Aca- 
démie procède  diversement  aux  scrutins  qui  ont  lieu, 
soit  dans  ses  délibérations,  soit  pour  les  différentes 
nominations  et  élections  qu'elle  doit  faire. 

Art.  47.  —  Dans  les  discussions  où  il  s'agit  de 
recueillir  ses  avis,  elle  vote  par  voie  d'appel  nomi- 
nal, et  à  la  majorité  absolue  des  suffrages,  à  moins 
qu'un  membre  ne  réclame  la  voie  du  scrutin  secret. 

Art.  48.  —  S'il  s'agit  d'un  choix  d'ouvrages,  de 
projets,  de  programmes,  etc.,  l'Académie  procède 
par  scrutin  secret  et  décide  d'avance  s'il  y  a  lieu 
d'exiger  la  majorité  absolue,  ou  de  se  contenter  de 

majorité  relative. 

Art.  49.  —  S'il  s'agit  de  nommer  des  membres  des 
commissions  passagères  et  accidentelles,  on  procède 

ces  nominations  (à  moins  que  l'Académie  n'en 
charge  le  bureau),  soit  par  scrutin  secret,  individuel, 
soit  par  scrutin  de  liste  secret,  et  à  la  simple  plura- 
lité relative,  s'il  n'en  est  autrement  décidé  d'avance. 


Lorsque 


l'elecLion  tombe  I 


:i',8', 


'NCYCLOPÉDJS  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


An.  ;;o.  —  Les  membres  du  bureau, ceux  des  coin- 
missions  permanentes  ou   annuelles,  les  associés 
étrangers  el  1rs  correspondants  sont  élus  à  la  majo- 
rité absolue  el  par  la  voie  du  scrutin  secret  et  de  bal- 
tel  qu'il  va  être  défini. 

Art.  31.  —  Si  le  premier  tour  de  scrutin  ne  donne 
pas  de  majorité  absolue,  on  procède  à  un  second.  S'il 
n'en  résulte  point  encore  de  majorité  absolue,  on 
fait,  un  scrutin  de  ballottage  entre  les  deux  candidats 
qui  ont  réuni  le  plus  de  votes.  Un  seul  ayant  plus  de 
suffrages  que  tous  les  autres,  sans  avoir  la  majorité 
absolue,  s'il  s'en  trouvait^deux  ou  plusieurs  qui  eussent 
un  nombre  égal  de  suffrages,' le  scrutin  de  ballottage 
se  fait  d'abord  entre  ceux-ci,  jusqu'à  ce  que  l'un  d'eux 
soi!  supérieur  aux  aulres  en  suffrages  obtenus,  et  ce 
dernier  est  ballotté  ensuite  avec  celui  qui  a  eu  le 
premier  la  majorité  relative.  Si  les  suffrages  se  trou- 
venl  partagés  également  entre  deux  candidats,  le  bal- 
lottage est  réitéré  dans  la  même  séance,  jusqu'à  ce  que 
l'un  des  deux  noms  réunisse  la  majorité  requise. 

.1/7.; 52.—  Les  académiciens  membres  de  sections, 
le  secrétaire  perpétuel  et  les  académiciens  libres  sont 
nommés  à  la  majorité  absolue,  et  par  la  voie  du 
scrutin  secret,  mais  réitéré  sans  ballottage,  jusqu'à  ce 
que,  par  la  réunion  de  plus  de  la  moitié  des  suffrages, 
l'un  des  candidats  obtienne  la  majorité  absolue. 

Art.  53.  —  Les  séances  consacrées  aux  nomina- 
tions sont  secrètes,  c'est-à-dire  que  ni  les  étrangers, 
ni  même  les  correspondants  de  l'Académie  ne  peu- 
vent y  être  admis. 

Art.  54.  —  Les  nominations  des  académiciens,  du 
secrétaire  perpétuel,  des  académiciens  libres  et  des 
associés  étrangers  sont  soumises  à  l'approbation  du 
chef  de  l'Etat. 

Des  indemnités.  —  Art.  55.  —  Chacun  des  mem- 
bres qui  composent  les  sections  de  l'Académie  jouit 
de  l'indemnité  entière  de  1.500  francs  qui  lui  est 
accordée  par  l'ordonnance  du  21  mars  1816;  cepen- 
dant, il  est  prélevé  sur  cette  indemnité  une  somme 
de  300  francs  pour  former  un  fonds  de  droits  de  pré- 
sence à  répartir  seulement  |entre  les  membres  qui 
assistent  aux   séances  de  l'Académie. 

Art.  56.  —  A  cet  eifet,  et  pour  constater  cette  as- 
sistance, chacun  signe  en  entrant  une  liste  de  pré- 
sence, qui  est  close  et  arrêtée  par  le  secrétaire  per- 
pétuel au  moment  de  l'ouverture  de  la  séance. 

Art.  57.  —  Les  droits  de  présence  des  absents, 
quel  que  soit  le  motif  de  leur  absence,  accroissent 
ceux  qui  assistent  à  la  séance  '. 

Art.  58.  —  Tout  membre  qui  s'absente  plus  d'une 
année  sans  l'agrément  de  l'Académie  est  censé  avoir 
donné  sa  démission,  à  moins  qu'il  n'ait  reçu  une  mis- 
sion ou  une  autorisation  expresse  du  gouvernement. 

Des  correspondants.  —  Art.  59.  —  Le  nombre  des 
correspondants  de  l'Académie  ne  peut  pas  excéder 
cinquante.  Ils  sont  choisis  parmi  les  étrangers  et 
les  régnicoles  non  domiciles  à  Paris  qui,  par  leurs 
connaissances,  leurs  talents  et  leurs  ouvrages,  sont 
propres  à   seconder  l'Académie  dans  ses  travaux. 

Leur  classification  étant  la  même  que  celle  des 
académiciens  ordinaires  et  libres,  ils  sont  répartis  de 
la  manière  suivante  : 

Peintres 14 


ivhitei-lrç  . 


!.  L'Académie  a  dérogé  i 
en  faveur  des  octogénaires 


Art.  60.  —  Ils  sont  élus,  ainsi  qu'il  a  été  dit 
(art.  50),  sur  une  liste  de  trois  candidats  au  moins, 
de  cinq  au  plus,  présentée,  pour  les  peintres,  sculp- 
teurs, architectes,  graveurs,  compositeurs  de  mu- 
sique, (iar  la  section  compétente,  et  pour  les  corres- 
pondants libres,  par  une  commission  composée  con- 
formément à  l'article  44.  L'Académie  complète  les 
listes  de  présentation,  selon  le  mode  indiqué  par 
l'article  41  Ms. 

Art.  61.  —  Lorsqu'ils  se  trouvent  à  Paris,  les  cor- 
respondants assistent  aux  séances  de  l'Académie,  et 
prennent  part  à  toutes  les  discussions  qui  ont  les 
arts  pour  objet. 

Extraits  des  procès-verbaux  de  l'Académie 
contenant  des  arrêtés  réglementaires. 

Disposition  relative  aux  correspondants  adoptée 
dans  la  séance  du  11  décembre  1847.  —  Tout  cor- 
respondant qui  aura  fixé  son  domicile  à  Paris  per- 
dra, après  un  an  de  séjour  dans  la  capitale,  à  partir 
du  jour  où  l'Académie  aura  pris  cette  décision,  son 
titre  de  correspondant. 

Disposition  relative  aux  funérailles  des  membres 
de  l'Académie  adoptée  dans  la  séance  du  27  novem- 
bre 1847.  —  L'Académie  décide  que  les  membres  de  la 
section  à  laquelle  appartient  le  défunt  seront  lenus, 
ainsi  que  les  membres  du  bureau,  d'assister  aux  obsè- 
ques, en  costume  d'Institut,  el  que,  de  plus,  une  com. 
mission  composée  des  derniers  membres  de  chaque 
section  et  d'un  académicien-libre,  de  l'élection  la  plus 
récente,  sera  nommée  dans  la  première  séance  de 
chaque  année,  et  renouvelée  tous  les  ans,  pour  se 
joindre  aux  membres  précédemment  désignés,  pa- 
reillement en  costume. 

3.  —  Fondations  et  legs  faits  à  l'Académie1. 

Extrait  du  testament  de  M.  Bordin,  en  date  du 
26  mai  1835.  —  Je  donne  et  lègue  à  l'Institut  royal 
de  France  12.000  francs  de  rente  5  pour  cent  de  con- 
solidés sur  l'Etat.  Cette  rente  sera  divisée  et  répartie 
chaque  année  entre  l'Académie  française,  l'Acadé- 
mie des  inscriptions  et  belles-lettres,  l'Académie  des 
sciences  et  l'Académie  des  beaux -arts,  à  raison  de 
3.000  lianes  de  rente  pour  chacune  des  trois  pre- 
mières Académies  et  de  2.500  francs  de  rente  pour 
l'Académie  des  beaux-arts,  pour,  lesdites  Académies, 
faire  annuellement  de  la  portion  de  rente  dévolue  à 
chacune  d'elles  l'emploi  qui  va  être  ci-après  fixé... 

Quant  aux  500  francs  de  rente  de  surplus,  ils  res- 
teront à  la  disposition  de  ce  corps,  pour  le  couvrir 
et  l'indemniser  des  frais  et  dépenses  annuels  que 
pourront  lui  occasionner  les  détails  d'exécution  des 
dispositions  relatives  à  la  distribution  des  prix  qui 
seront  ci-après  fondés,  que  chaque  Académie  devra 
faire  tous  les  ans,  jusqu'à  concurrence  de  la  portion 
de  rente  à  elle  attribuée. 

L'Institut  sera  saisi  de  cette  rente  de  12.000  francs 
du  jour  de  mon  décès;  mais  son  entrée  en  jouissance 
ne  commencera  que  du  jour  du  décès  de  Mrae  Bordin, 
si  elle  me  survit,  attendu  l'usufruit  qu'elle  aura  pen- 
dant sa  vie  de  l'universalité  des  biens  de  ma  succes- 
sion. Cette  rente  de  12.000  francs  sera  fournie  à 
l'Institut  soit  par  le  transfert  qui  lui  sera  fait  dépa- 
reille quotité  de  rente  à  prendre  dans  celles  de  même 
nature  que  je  délaisserai,  soit,  à  défaut,  par  l'achal 


legs  i 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3485 


qui  en  sera  fait  des  deniers  de  ma  succession.  L'ins- 
criplion  de  cette  rente  de  12.000  francs  devra  être 
délivrée  au  profit  de  ma  femme  pour  l'usufruit  pen- 
dant sa  vie,  si  elle  m'a  survécu,  et  au  nom  de  l'Ins- 
titut pour  la  nue  propriété,  à  laquelle  se  réunira  la 
jouissance  au  décès  de  ma  femme.  Elle  sera  inalié- 
nable par  l'Institut,  le  tout  conformément  et  aux 
termes  de  1  acte  qu'il  conviendra  de  passer  préala- 
blement entre  mes  légataires  universels  et  les  délé- 
gués ou  représentants  de  l'Institut,  pour  constater 
l'origine,  la  cause  et  le  but  de  ladite  inscription,  et 
motiver  la  raison  pour  laquelle  elle  doit  être  inalié- 
nable par  l'Institut. 

Les  portions  de  rente  attribuées  à  cbaque  Acadé- 
mie, dans  la  rente  totale  de  12.000  francs,  serviront 
à  fournir  et  composer  les  prix  que  je.  fonde  par  mon 
.présent  testament,  jusqu'à  concurrence  de  la  valeur 
desdites  portions  de  rente,  pour  être  délivrés  an- 
nuellement par  cbaque  Académie  aux  auteurs  qui 
auront  le  mieux  rempli  les  programmes  et  traité  les 
sujets,  soit  en  prose,  soit  en  vers,  qu'elle  aura  pro- 
posés. La  première  distribution  des  prix  n'aura  lieu, 
comme  de  raison,  qu'après  l'expiration  de  l'année 
dans  laquelle  l'Institut  sera  entré  en  jouissance  de 
ladite  rente  de  12.000  francs.  Le  nombre  et  la  valeur 
de  ces  prix  seront  tous  les  ans  déterminés  par  les 
programmes,  en  sorte  que  chaque  année  la  portion  de 
rente  appartenant  à  chaque  Académie  pourra  com- 
poser un  ou  plusieurs  prix  de  quotités  différentes, 
suivant  l'importance,  la  nature  et  la  difficulté  des  su- 
jets à  traiter.  Les  juges  du  concours  pourront  même, 
d'après  la  manière  satisfaisante  dont  le  programme 
aura  été  rempli  et  la  supériorité  du  travail  de  l'un 
des  concurrents  sur  les  compositions  des  autres, 
annuler  les  portions  divises  qui  auront  été  d'abord 
fixées  et  les  réunir  en  un  moindre  nombre,  ou  même 
en  une  seule,  en  faveur  de  l'auteur  de  la  meilleure 
composition.  Les  sujets  mis  au  concours  auront  tou- 
jours pour  but  l'intérêt  public,  le  bien  de  l'huma- 
nité, les  progrès  de  la  science  et  l'honneur  national. 
Si  même  un  ouvrage  important  en  prose  comme  en 
vers,  soit  dans  la  littérature,  soit  dans  les  sciences, 
soit  dans  les  arts,  avait  été  récemment  publié  et  pa- 
rassait  digne  par  son  mérite  et  la  supériorité  de 
talent  avec  lequel  il  aurait  été  traité,  d'une  distinction 
éclatante  et  d'une  honorable  rémunération,  l'Insti- 
tut entier,  sur  la  proposition  de  l'Académie  que  la 
matière  traitée  concernerait  plus  particulièrement, 
pourra  suspeDdre  dans  ce  cas,  en  tout  ou  en  partie, 
les  concours  et  distribution  des  prix  d'une  année, 
et  remettre  et  délivrer  le  montant  des  prix  suspendus 
à  l'auteur  de  l'ouvrage,  fùt-il  même  membre  de 
l'Institut,  e  ce,  à  titre  d'honneur,  de  reconnaissance 
et  d'encouragement.  Cette  résolution  sera  prise  par 
l'Institut  en  corps  sur  une  convocation  spéciale,  en 
la  forme  ordinaire  de  ses  délibérations,  et  il  en  sera 
délivré  une  ampliation  à  l'auteur  lors  de  la  remise 
qui  lui  sera  faite  de  la  somme  qui  lui  aura  été 
allouée. 

Dans  le  cas  où,  par  des  motifs  et  considérations 
que  je  ne  puis  prévoir,  l'Institut  de  France  ou  la 
Compagnie  des  notaires  de  Paris  n'aurait  pas  jugé 
convenable  d'accepter  les  legs  que  je  leur  ai  faits 
sous  les  conditions  y  attachées,  ou  n'aurait  pu  en 
obtenir  l'autorisation  si  elle  était  nécessaire,  je  vais 
disposer  de  la  manière  suivante  du  montant  de  cha- 
cun desdils  legs  qui  deviendra  ainsi  caduc. 

Si  c'était  le  legs  fait  à  la  Compagnie  des  notaires 
de  Paris  relativement  à  la  fondation  par  moi  faite 


d'une  école  de  notariat,  dont  j'ai  confié  la  direction 
et  la  surveillance  à  ladite  Compagnie,  l'institution 
de  cette  école  n'aurait  point  lieu  par  ce  seul  fait. 
Ce  legs  deviendrait  nul  dans  sa  totalité,  et  les  fonds 
que  j'y  ai  consacrés  seront  répartis  ainsi  qu'il  suit  : 
Premièrement,  je  donne  et  lègue  à  l'administra- 
tion des  hospices  de  Paris... 


Deuxièmement,  je  donne  et  lègue  à  l'Institut  de 
France,  sur  ledit  legs  fait  à  la  Compagnie  des  notaires 
de  Paris,  qui  serait  devenu  caduc,  les  3  000  francs 
de  rente  formant  l'autre  moitié  des  6.000  francs  de 
rente  5  °/0  consolidés  sur  l'Etal  que  j'avais  légués  à 
ladite  Compagnie  des  notaires,  ce  qui,  joint  aux 
12.000  francs  de  rente  de  même  nature  par  moi  déjà 
légués  à  l'Institut,  portera  la  totalité  de  mon  legs  à 
15.000  fr.  de  rente  sur  l'Etat,  desquels  3. 000  francs 
de  rente  de  supplément  il  reviendra  et  appartiendra 
500  francs  de  rente  à  l'Académie  des  beaux-arts, 
pour  lui  compléter,  avec  les  2.500  francs  de  même 
rente  qui  lui  ont  été  déjà  légués,  3.000  francs  de  rente 
comme  aux  trois  premières  Académies,  et  les 
2.500  francs  restants  reviendront  et  appartiendront 
à  l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques, 
pour  les  employer  chaque  année  en  distribution 
de  prix,  conformément  et  ainsi  qu'il  a  été  ci-devant 
réglé  et  déterminé  pour  les  quatre  autres  Acadé- 
mies, et  sous  les  mêmes  charges  et  conditions  qui 
leur  sont  imposées. 

Extrait  du  testament  de  M.  le  comte  de  Maillé- 
Latour-Landry,  en  date  du  25  mars  1839.  —  Je 
lègue  à  l'Académie  française  et  à  l'Académie  royale 
des  beaux-arts  une  somme  de  30.000  francs  pour  la 
fondation  d'un  secours  à  accorder  chaque  année,  au 
choix  de  chacune  des  deux  Académies  alternative- 
ment, à  un  jeune  écrivain  ou  artiste  pauvre  dont  le 
talent,  déjà  remarquable,  paraîtra  mériter  d'être 
encouragé  à  poursuivre  sa  carrière  dans  les  lettres 
et  les  beaux-arts. 

Ce  capital  sera  employé  en  rentes  sur  l'Etat  et 
s'appellera  Prix  comte  de  Maillé-Latour-Landry. 

Extrait  du  testament  de  M.  Lambert,  en  date  du 
30  juin  1849.  —  ...  Comme  toutes  mes  dispositions 
sont  (engrande  partie)  en  faveur  d'artistesou  hommes 
de  lettres  ou  leurs  veuves,  je  désire  qu'une  commis- 
sion de  deux  membres,  nommée  par  l'Institut,  s'u- 
nisse à  M.  Foucher  pour  s'entendre  sur  l'exécution 
de  ce  testament 


Ces  deux  objets  terminés,  l'Institut  s'occuperait  de 
distribuer,  de  mes  3.629  francs  de  rente,  des  secours 
à  de  pauvres  artistes,  peintres,  musiciens,  hommes 
de  lettres  ou  à  leurs  veuves.  Je  commence  par  dési- 
gner une  rente  viagère  de  1.200  francs  de  rente,  que 
je  lègue  à  Benoit  Mozin,  compositeur,  professeur  de 
piano,  demeurant  rue  Hauteville,  57,  et  avant,  ave- 
nue de  Gentilly,  12,  près  des  Gobelins.  Cette  rente 
viagère  serait  réversible  sur  Mme  Mozin;  mais,  Mon- 
sieur et  Madame  morts,  cette  rente  retournerait  à 
l'Institut  pour  être  distribuée  avec  ce  qui  reste  des 
3.629  francs  à  de  pauvres  artistes  vieux,  ou,  comme 
motif  d'encouragement,  à  de  jeunes  artistes  pour 
une  production  remarquable;  alors  ce  legs  prendrait 
le  titre  de  Prix  Lambert. 


Les  dons  distribués  aux  malheureux  artistes  ou 
hommes  de  lettres  seraient  intitulés  :  Bienfaisance 
Lambert. 

Par  un  décret  en  date  du  11  juillet  1853,  le  mon- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


tant  de  la  rente  a  été  partagé  également  entre  l'A- 
cadémie française  et  l'Académie  des  beaux-arts, 
qui  sont  chargées  d'en  faire  emploi  selon  les  inten- 
tions du  testateur. 

Extrait  du  testament  de  M.  le  baron  de  Trémont, 
en  date  du  5  mai  1847.  -  ...  Il  sera  formé  deux  prix 
d'encouragement  de  mille  francs  chacun,  misa  la  dis- 
position de  l'Académie  des  beaux-arts  de  l'Institut, 
pour  être  décernés  par  elle  à  deux  jeunes  peintres 
ou  statuaires  et  à  un  musicien,  pauvres  et  distingués 
dans  leurs  études.  Les  élèves  qui  auront  obtenu  le 
grand  prix  de  Home  n'y  participeront  qu"à  leur  retour, 
et  dans  le  cas  seulement  où  le  manque  de  travaux 
les  mettrait  dans  la  gêne.  Je  désire  que  les  seconds 
prix  appellent  principalement  l'attention  de  l'Aca- 
démie. Lorsqu'elle  le  jugera  convenable,  elle  pourra 
partager  l'encouragement,  ou  le  différer  et  encore  le 
continuer  au  même  sujet. 

La  peinture  d'histoire  aura  d'abord  la  préférence 
ensuite  le  paysage,  puis  les  autres  genres.  En  cas 
d'absence  de  sujets  de  grande  espérance,  l'Acadé 
mie  pourra  faire  son  choix  parmi  les  élèves  en  ar- 
chitecture et  en  gravure. 

Extrait  du  testament  de  M.  Jean  Chartier,  en 
date  du  27  avril  1858.  —  Je  donne  et  lègue  à 
l'Institut  de  France,  classe  de  l'Académie  des  beaux- 
arts,  une  rente  annuelle  de  700  francs  pendant  cent 
ans,  à  partir  du  jour  de  mon  décès,  en  faveur  des 
meilleures  œuvres  de  musique  de  chambre,  trios, 
quatuors,  quintetti  et  sextuors,  qui  approchent  le 
plus  des  chefs-d'œuvre  en  ce  genre  de  Boccherini, 
Haydn,  Mozart,  Beethovem,  Onslow,  Mendelssohn, 
Weber,  Spohr,  Fesca,  Benincori,  Heber,  Mayseder, 
Bertini,  Hummel,  Kuhlau,  Reissiger,  Reicha,  Krom- 
mer,  avec  ou  sans  piano,  pour  instruments  à  vent 
ou  instruments  à  cordes.  La  somme  de  700  francs  ci- 
dessus  pourra  être  délivrée  soit  en  numéraire,  soit 
en  médailles  ;  l'Académie  pourra  disposer  des  som- 
mes qui  leur  seraient  affectées  en  récompense  aux 
éditeurs  de  musique  qui  feraient  graver  et  donne- 
raient de  nouvelles  éditions  des  chefs-d'œuvre  les  plus 
remarquables  des  compositeurs  désignés  ci-dessus, 
dont  les  planches  sont  cassées  ou  anéanties,  ou  bien 
encore  reporter  sur  l'année  suivante  les  sommes  qui 
seraient  restées  sans  emploi. 

Extrait  du  testament  de  M.  Gioachino-Antonio 
Rossini,  en  date  du  25  juillet  1858.  —  Je  veux 
qu'après  mon  décès  et  celui  de  mon  épouse,  il  soit 
fondé  à  perpétuité  à  Paris,  et  exclusivement  pour  les 
Français,  deux  prix  de  chacun  trois  mille  francs  pour 
être  distribués  annuellement,  un  à  l'auteur  d'une 
composition  de  musique  religieuse  ou  lyrique,  lequel 
devra  s'attacher  principalement  à  la  mélodie  si 
négligée  aujourd'hui  ;  l'autre,  à  l'auteur  des  paroles 
(prose  ou  vers)  sur  lesquelles  devra  s'appliquer  la 
musique  et  y  être  parfaitement  appropriée,  en  ob- 
servant les  lois  de  la  morale  dont  les  écrivains  ne 
tiennent  pas  toujours  assez  de  compte.  Ces  produc- 
tions seront  soumises  à  l'examen  d'une  commis- 
sion spéciale  prise  dans  l'Académie  des  beaux-arts 
de  l'Institut,  qui  jugera  celui  des  concurrents  qui 
aura  mérité  le  prix  dit  Rossini,  qui  sera  décerné  en 
séance  publique,  après  l'exécution  du  morceau,  soit 
dans  le  local  de  l'Institut  ou  au  Conservatoire. 

Mrae  veuve  Rossini  étant  décédée  au  commence- 
ment de  l'année  1878,  l'Académie  des  beaux-arts 
s'est  conformée  au  vœu  du  testateur. 

Prix  Monbinne.  —  Par  acte  en  date  du  19  juillet 
1877,  MM. Eugène  Lecomle  et  Léon  Delaville  Le  Roulx,  ' 


en  souvenir  de  M.  Théodore-Nicolas-Marie  Monbinne, 
décédé  le  21  mars  1875,  ont  fait  don  à  l'Académie 
des  beaux-arts  d'une  inscription  de  quinze  cents 
francs  de  rente,  à  l'effet  de  fonder  un  prix  biennal 
qui  portera  le  nom  de  Prix  Monbinne,  et  qui  sera 
décerné  à  l'auteur  de  la  musique  d'un  opéra- 
comique  en  un  ou  plusieurs  actes,  que  l'Académie 
aura  jugé  le  plus  digne  de  celte  récompense,  soit 
parmi,  les  opéras-comiques  qui  auront  été  repré- 
sentés pour  la  première  fois  dans  le  cours  des  deux 
dernières  années  écoulées  avant  le  jour  où  le  juge- 
ment sera  rendu,  soit  parmi  ceux  qui  auront  été, 
dans  les  quatre  dernières  années,  soumis  à  l'examen 
de  l'Académie  à  titre  d'envois  de  Rome. 

A  défaut  d'un  opéra-comique  remarquable,  le  choix 
de  l'Académie  pourra  se  porter  sur  une  œuvre  sym- 
phonique  purement  instrumentale,  ou  avec  chant, 
et  de  préférence  sur  une  composition  religieuse. 

Prix  Jean  Reynaud.  —  Mm6  veuve  Jean  Reynaud, 
«  voulant  honorer  la  mémoire  de  son  mari  et  perpé- 
tuer son  zèle  pour  tout  ce  qui  touche  aux  gloires  de 
la  France  »,  a,  par  un  acte  en  date  du  23  décembre 
1878,  fait  donation  à  l'Institut  d'une  rente  de  dix 
mille  francs,  destinée  à  fonder  un  prix  annuel  qui 
sera  successivement  décerné  par  chacune  des  cinq 
Académies. 

Conformément  au  vœu  exprimé  par  la  donatrice, 
«  ce  prix  sera  accordé  au  travail  le  plus  méritant, 
relevant  de  chaque  classe  de  l'Institut,  qui  se  sera 
produit  pendant  une  période  de  cinq  ans. 

«  Il  ira  toujours  à  une  œuvre  originale,  élevée  et 
ayant  un  caractère  d'invention  et  de  nouveauté. 

«  Les  membres  de  l'Institut  ne  seront  pas  écartés 
du  concours. 

«  Le  prix  sera  toujours  décerné  intégralement. 

«  Dans  le  cas  où  aucun  ouvrage  ne  paraîtrait  le 
mériter  entièrement,  sa  valeur  serait  délivrée  à  quel- 
que grande  infortune  scientifique,  littéraire  ou  ar- 
tistique. 

«  Il  portera  le  nom  de  son  fondateur  Jean  Reynaud.  » 

Prix  Jean-Jacques  Berger.  —  Par  son  testament 
en  date  du  10  juin  1873,  M.  Pierre-Guiliaume- 
Amédée  Berger,  président  à  la  Cour  des  Comptes, 
a  chargé  M.  Yverl  de  faire  don  à  l'Institut  de  France 
de  la  nue  propriété  d'un  capital  auquel  l'usufruit 
sera  réuni  postérieurement  pour  fonder,  avec  le 
revenu  de  ce  capital,  un  prix  qui  portera  le  nom  de 
M.  Jean-Jacques  Berger,  ancien  préfet  de  la  Seine, 
sénateur,  père  de  M.  le  président  Berger,  et  qui 
serait  donné  alternativement,  par  chaque  Académie, 
aux  meilleures  œuvres  sur  la  ville  de  Paris. 

Prix  Nicolo.  —  Par  son  testament  en  date  du 
20  novembre  1875,  M'le  Isouard,  dite  Mcolo,  a  légué 
à  l'Académie  des  beaux-arts  la  nue  propriété  d'un 
capital  de  dix  mille  francs,  auquel  l'usufruit  sera 
réuni  postérieurement,  à  l'effet  de  fonder  un  prix 
qui  portera  le  nom  de  Prix  Nicolo,  et  qui  sera  dé- 
cerné tous  les  cinq  ans,  après  concours,  à  la  meil- 
leure composition  mélodique. 

Prix  Kastner-Boursault.  —  Mme  Léonie  Bour-  • 
sault,  veuv.'  de  M.  Georges  Kastner,  par  son  testa- 
ment du  6  janvier  1880,  a  légué  à  l'Académie  des 
beaux-arts  une  somme  suffisante  pour  la  fondation 
d'un  prix  triennal  de  deux  mille  francs  qui  sera 
décerné  la  première  année  au  meilleur  ouvrage  de 
littérature  musicale,  fait  en  France  ou  à  l'étranger, 
qui  traitera  de  l'influence  de  la  musique  sur  le  déve- 
loppement de  la  civilisation  dans  la  vie  publique  et 
dans  la  vie  privée. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3i87 


Après  quoi,  l'Académie  sera  libre  de  mettre  d'au- 
tres sujets  au  concours  pour  les  prix. 

Prix  Houllevigne.  —  M.  Houllevigne  (Adrien- 
Stanislas)  a,  par  son  testament  en  date  du  30  mars 
1880,  légué  à  l'Institut  de  France  un  titre  nomi- 
natif de  cinq  mille  francs  de  rente  3  p.  100,  à  l'effet 
de  fonder  un  prix  annuel  de  pareille  somme,  «  qui 
devra  porter  son  nom  et  qui  sera  décerné,  à  tour 
de  rôle,  par  l'Académie  des  sciences  et  l'Académie 
des  beaux-arts  ». 

L'Académie  des  beaux-arts,  dans  sa  séance  du 
2o  février  1893,  a,  en  ce  qui  la  concerne,  arrêté  le 
programme  et  les  conditions  du  prix  dans  les  termes 
suivants  : 

«  1°  Ce  prix  de  cinq  mille  francs,  qui  est  biennal, 
ne  pourra  être  partagé  ; 

«  2°  Il  ne  pourra  être  décerné  qu'à  des  artistes  ou 
à  des  écrivains  français  n'appartenant  pas  à  l'Ins- 
titut; 

(c  3°  Il  sera  attribué  par  l'Académie  des  beaux- 
Arts,  soit  à  l'auteur  d'une  œuvre  remarquable  pro- 
duite dans  le  cours  des  quatre  dernières  années,  en 
peinture,  sculpture,  architecture,  gravure  ou  com- 
position musicale,  soit  à  un  ouvrage  sur  l'Art  ou 
l'histoire  de  l'Art,  avec  ou  sans  planches,  publié 
dans  le  même  délai  ; 

«  4°  Une  commission  mixte,  composée  de  douze 
membres  de  l'Académie  des  beaux-arts,  soit  deux 
pour  chaque  section,  et  deux  membres  libres,  sera 
chargée  de  chercher  les  œuvres  qui  pourront  être 
l'objet  de  ces  propositions.  » 

Fondation  Gouvy.  —  Par  un  codicille  ajouté  à  son 
testament  du  17  janvier  1800,  M.  Théodore  Gouvy, 
correspondant  de  l'Institut,  a  légué  à  l'Académie 
des  beaux-arts  une  somme  de  douze  mille  cinq 
cents  francs  dont  la  rente  devra  servir  de  pension  à 
un  musicien  nécessiteux,  de  préférence  à  un  musi- 
cien d'orchestre. 

Fondation  Joseph  Pinette.  —  M.  Joseph  Pinette, 
par  son  testament  en  date  du  22  janvier  1888,  a  pris 
les  dispositions  suivantes  : 

«  Désirant  encourager  les  jeunes  gens  qui  se  con- 
sacrent à  la  composition  musicale  et  voulant  les 
aider  dans  les  débuts  difficiles  de  leur  vie  d'études, 
je  donne  et  lègue,  à  titre  particulier,  à  l'Institut  de 
France,  pour  l'Académie  des  beaux-arls,  la  somme 
nécessaire  afin  de  constituer  douze  mille  francs  de 
rente  3  p.  100  sur  l'Etat  français. 

«  Celte  rente  sera  divisée  en  quatre  parties  égales 
de  trois  mille  francs  chacune,  qui  seront  servies, 
durant  quatre  années  consécutives,  aux  pension- 
naires musiciens  de  l'Académie  de  France,  dès  qu'ils 
auront  terminé  leur  temps  de  pension,  tant  à  Home 
que  dans  les  autres  pays  qui  leur  sont  indiqués  par 
les  règlements. 

«  Les  susdits  pensionnaires  musiciens  ne  jouiront 
de  cette  rente  que  s'ils  ont  rempli,  durant  toute  la 
durée  de  leur  pension,  toutes  leurs  obligations  envers 
l'Etat. 

«  Cette  condition  est  de  rigueur,  et  si  un  pension- 
naire n'avait  pas  rempli  ces  obligations,  l'Académie 
des  beaux-arts  ferait  de  la  rente  dont  il  se  serait 
rendu  indigne,  tel  usage  qu'elle  jugerait  convenable, 
en  faveur  d'un  ou  de  plusieurs  autres  musiciens.  Il 
en  serait  de  même  au  cas  où  le  bénéficiaire  de  l'une 
desdites  rentes  croirait  devoir  y  renoncer  à  raison  de 
sa  situation  de  fortune  personnelle. 

«  Cette  donation  devra  porter  le  nom  de  Fondation 
Joseph  Pinette.  » 


Prix  Estrade-Delcros.  —  M.  Estrade-Delcros,  par 
son  testament  en  date  du  8  février  1876,  a  légué 
toute  sa  fortune  à  l'Institut.  Le  montant  de  ce  legs 
devra  être  partagé,  par  portions  égales,  entre  les  cinq 
classes  de  l'Institut,  pour  servir  à  décerner,  tous  les 
cinq  ans,  un  prix  sur  le  sujet  que  choisira  chaque 
Académie. 

Ce  prix,  de  la  valeur  de  huit  mille  francs,  sera 
décerné  par  l'Académie  des  beaux-arts  à  une  œuvre 
appartenant  soit  à  l'un  des  arts  du  dessin  (peinture, 
sculpture,  architecture,  gravure  en  taille-douce,  gra- 
vure en  médailles),  soit  à  l'art  de  la  composition 
musicale,  qui  aura  été  produite  dans  le  cours  des 
cinq  dernières  années,  et  que  l'Académie  aura  jugée 
particulièrement  digne  d'être  signalée  au  public. 

Le  prix  Estràde-Delcros,  qui  ne  devra  en  aucun 
cas  être  partagé,  ne  sera  attribué  qu'à  des  artistes 
français  n'appartenant  pas  à  l'Académie  des  beaux- 
arts. 

Prix  du  baron  de  Joest.  —  Ce  prix,  de  la  valeur  de 
deux  mille  francs,  doit  être  attribué  successivement 
par  les  cinq  Académies,  à  celui  qui,  dans  l'année,  aura 
l'ait  une  découverte  ou  écrit  l'ouvrage  le  plus  utile  au 
bien  public. 

Fondation  veuve  Buchère.  —  Le  revenu  de  sept 
cents  francs  de  celte  fondation  sera  employé,  tous 
les  ans,  en  deux  portions  égales  :  trois  cent  cinquante 
francs  en  faveur  d'une  ou  plusieurs  jeunes  filles, 
élèves  du  Conservatoire,  pour  le  perfectionnement 
de  leur  éducation  musicale,  et  trois  cent  cinquante 
francs  en  faveur  d'une  ou  plusieurs  jeunes  filles, 
élèves  du  même  établissement,  se  destinant  à  la 
comédie  ou  à  l'art  dramatique. 

Prix  veuve  Beulé.  —  Ce  prix  annuel  de  quinze 
cents  francs  devra  être  donné  au  pensionnaire  de  la 
Villa  Médicis  à  Home,  musicien,  sculpteur  ou  pein- 
tre, qui,  étant  à  sa  dernière  année  de  séjour  à  la 
Villa,  aura  fait,  cette  année-là,  l'envoi  de  l'œuvre 
ugée  la  meilleure  par  l'Académie.  II  sera  décerné  à 
la  suite  de  la  lecture  du  rapport  sur  les  envois  de 
Home. 

Don  Charlotte  Nathaniel  de  Rothschild.  —  Mme  la 
baronne  Nathaniel  de  Hothschild  a  légué  à  l'Acadé- 
mie des  beaux-arts  une  rente  de  cinq  mille  francs 
«  pour  être  atlribuée  à  un  ou  plusieurs  artistes  aflli- 
gés  de  cécité,  paralysie  ou  autre  infirmité  qui  les 
empêche  de  vivre  de  leur  talent  ». 

Fondation  Clamageran-Hérold.  —  Mme  Adèle  Hé- 
rold,  veuve  de  M.  Jean-Jules  Clamageran,  en  son  vivant 
sénateur,  ancien  ministre,  a  fait  donation  entre  vifs 
à  l'Académie  des  beaux-arts  d'une  somme  de  soixante 
mille  francs,  dont  les  arrérages  appartiendront  cha- 
que année  à  l'élève  musicien  qui  aura  obtenu  le 
second  prix  de  Home,  en  composition  musicale. 
Ce  prix  est  de  la  valeur  de  dix-huit  cents  francs. 
Fondation  baron  Alphonse  de  Rothschild.  — 
M.  le  baron  Alphonse  de  Rothschild  a,  par  legs  ver- 
bal, consenti  par  ses  héritiers  par  acte  du  28  décem- 
bre 1906,  donné  à  l'Académie  des  beaux-arts  une 
somme  de  deux  cent  mille  francs  pour  la  fondation 
d'un  prix  biennal  portant  son  nom,  el  dont  l'Acadé- 
mie devra  déterminer  les  conditions  générales  d'at- 
tribution. 

L'Académie  des  beaux-arts,  à  qui  il  appartenait 
de  déterminer  les  conditions  générales  d'attribution 
de  ce  prix,  a,  dans  la  séance  du  22  juin  1907,  décidé 
que  ce  prix  sera  destiné  à  encourager  les  travaux 
d'un  artisle  de  mérite,  ou  à  récompenser  une  car- 
rière artistique. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Au  début  du  ohaque  période  biennale,  t'Acadéi 

sera  invitée  à  nommer  une  commission  mixte  de 
douze  membres.  Cette  commission  déposera  son 
rapport  au  bout  d'un  mois,  et  l'Académie  statuera 
quinze  jours  après. 

Les  présentations  ne  pourront  être  faites  que  par 
les  membres  de  l'Académie  des  beaux-arts. 

Legs  Ardoin.  —  M'""  Ardoin,  par  son  testament 
du  15  septembre  187".,  a  laissé  à  l'Académie  des 
beaux-arts  la  nue  propriété  d'une  somme  d'environ 
qoaranti  tiuil  mille  francs  pour  la  fondation  d'un 
prix  en  laveur  déjeunes  filles  pauvres  qui  se  desti- 
nent à  la  carrière  des  arts. 

L'usufruitier  des  titres  de  ce  legs  étant  décédé  le 
1 1  décembre  1907,  l'Académie  a  pu  réaliser  les  géné- 
reuse^ intentions  de  la  testatrice,  à  partir  de  l'an- 
née 1909. 

Prix  Marinier  de  Lapeyrouse.  —  M»«  veuve  Poyard 
i  légué  a  l'Académie  des  beaux-arts  une  somme  de 
cinquante  mille  francs  environ  pour  fonder  un  prix 
sous  le  nom  de  prix  Marillier  de  Lapeyrouse,  en  faveur 
d'un  ou  plusieurs  professeurs  de  piano  (femmes). 

Articles  adoptés  dans  les  séances  du  24  juillet 
1844  et  du  29  mars  1845.  —  Chaque  année,  à  la 
séance  publique,  après  la  distribution  des  grands 
prix,  les  noms  des  artistes  appelés  à  la  jouissance  de 
«es  legs  seront  proclamés,  et  ceux  des  bienfaiteurs 
rappelés  à  la  reconnaissance  publique. 

La  rente  provenant  du  legs  Deschaumes  pourra 
être  accordée  durant  quatre  années  de  suite  à  un 
architecte  qui  se  trouvera,  autant  que  possible,  dans 
les  conditions  de  ce  legs,  c'est-à-dire  qui  fera  preuve 
de  talents  et  de  vertus  domestiques1. 

La  même  rente  annuelle  de  1.200  francs  servira, 
chaque  cinquième  année,  à  doter  un  concours  de 
poésie,  qui  s'ouvrira  pour  la  scène  lyrique  à  mettre 
en  musique  au  concours  de  composition  musicale. 

Il  sera  ouvert,  chaque  année,  un  concours  de  poé- 
sie, dont  le  sujet  sera  la  scène  lyrique  à  mettre  en 
musique  pour  le  concours  de  composition  musicale, 
et  une  médaille  de  300  francs'2  sera  accordée  à  l'au- 
teur de  la  pièce  de  vers  qui  aura  été  jugée  la  meil- 
leure. 

4.  —  Décret  et  règlements  pour  les  concours 
Ci;.:  aux  grands  prix  de  Rome. 

Le  président  de  la  République  française,  sur  la 
proposition  du  ministre  de  l'instruction  publique, 
des  cultes  et  des  beaux-arts, 

Vu  la  loi  organique  du  3  brumaire  an  IV  (25  octobre 
1795); 

Vu  la  loi  du  15  germinal  an  IV  (4  avril  1796), 

Vu  l'arrêté  du  gouvernement  de  la  République  du 
3  pluviôse  an  XI  (22  janvier  1803);] 

Vu  l'ordonnance  royale  du  4  août  1819; 

Vu  le  décret  impérial  du  13  novembre  1863; 

Décrète  : 

Titre  premier  ;  des  concours  aux  grands  prix 
de  Rome. 

Article  premier.  —  Les  concours  aux  grands  prix 

de  Rome  se  font  à  l'Ecole  nationale  des  beaux-arts. 

Tous  les  artistes  âgés  de  quinze  à  trente  ans,  qu'ils 


l.  Voir  l'extrait  du  testament. 

■1.  La  médaille  a  été  portée.  p;ir  un  vote  du  9  .' 
ir  une  somme  complémentaire  prise  sur  une 
m  vertu  du  moine  testament. 


soient  ou  non  élevés  de  l'Ecole,  pourvu  qu  us  soient 
Français,  peuvent  concouriraux  grands  prix  de  Rome 
après  avoir  subi  deux  épreuves  préalables. 

Art.  2.  —  Le  programme  des  épreuves  prépara- 
toires et  du  concours  définitif  est  réglé  par  l'Acadé- 
mie des  Beaux-Arts. 

Les  résultats  des  épreuves  et  du  concours  sont 
jugés  par  les  diverses  sections  de  l'Académie.  Chaque 
section  s'adjoindra  pour  ses  jugements,  parmi  les 
artistes  étrangers  à  l'Académie,  un  nombre  égal  à  la 
moitié  du  nombre  de  ses  membres,  savoir  : 

7  peintres,  4  sculpteurs,  4  architectes,  2  graveurs, 
3  compositeurs  de  musique. 

Ces  artistes  adjoints  participeront  à  tous  les  tra- 
vaux de  chaque  section  pendant  les  concours. 

Art.  3.  —  Le  jugement  définitif  sera  prononcé  en 
assemblée  générale  par  toutes  les  sections  réunies. 

Art.  4.  —  Toutes  les  fois  qu'un  jugement  de  sec- 
tion sera  validé  par  les  suffrages  de  l'Académie,  la 
majorité  absolue  suffira. 

Lorsque,  au  contraire,  ce  jugement  préparatoire 
devra  être  réformé  par  la  substitution  d'un  autre 
lauréat  au  lauréat  proposé,  la  majorité  des  deux 
tiers  des  membres  présents  sera  nécessaire. 

Art.  5.  —  A  l'avenir,  les  jeunes  gens  qui  auront 
obtenu  les  grands  prix  de  peinture  et  de  sculpture, 
et  qui  seront  envoyés  à  Rome,  devront  y  rester 
quatre  années. 

Les  lauréats  de  la  section  d'architecture  devront, 
dans  leur  quatrième  année,  se  rendre  à  l'Ecole  d'A- 
thènes. Un  séjour  de  deux  années  à  Rome,  sur  les 
quatre  années  formant  la  durée  totale  de  la  pension, 
sera  exigé  des  pensionnaires  musiciens,  avec  faculté 
pour  eux  de  prolonger  à  partir  de  la  troisième 
année  leur  séjour  en  Italie,  mais  avec  l'obligation  de 
visiter,  pendant  la  quatrième  année,  l'Allemagne, 
l'Autriche-llongrie  et  d'y  séjourner. 

Art.  6.  —  Le  directeur  de  l'Académie  de  France 
est  nommé  pour  six  ans,  par  décret  du  président  de 
la  République,  sur  la  proposition  du  ministre  de 
l'instruction  publique  et  des  beaux -arts,  d'après 
une  liste  de  trois  candidats  présentés  par  l'Académie 
des  beaux-arts. 

Titre  II. 

Article  unique.  —  Sont  abrogées  les  dispositions 
des  ordonnances  et  règlements  antérieurs  en  tant 
qu'elles  sont  contraires  au  présent  décret,  qui  aura 
son  effet  à  partir  du  1er  janvier  1872,  et  dont  le  mi- 
nistre de  l'instruction  publique  assurera  l'exécution. 

Fait  à  Versailles  le  13  novembre  1871. 

Signé  :  A.  Thiers. 

Le  ministre  de  l'instruction  publique,  des  cultes 
et  des  beaux-arts. 

Signé  :  Jules  Simon. 

Règlements  de  l'Académie  des  beaux-arts 
pour  les  concours  aux  Grands  Prix  de  Rome. 

Chapitre  premier.  —  Dispositions  générales. 

I.  —  Des  concours.  —  Conditions,  ordre  et  expo- 
sition des  concours. 

II.  —  Jugements  des  essais  et  jugements  prépara- 
toires des  concours  définitifs.  —  Jurés  adjoints.  — 
jugements  définitifs. 

Chapitre  II.   —  Organisation   et  police  des  con- 
cours. 
I.  —  Concours  de  peinture,  de  sculpture,  d'archi- 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3489 


lecture,  de  gravure  en  taille-douce,  de  gravure  en  ( 
médailles  et  en  pierres  fines. 

II.  —  Concours  de  composition  musicale. 

Chapitre  III.  —  Dispositions  spéciales.  —  Hègle- 
ments  particuliers  des  concours  :  1°  de  peinture; 
2°  de  sculpture;  3°  d'architecture;  4°  de  paysage 
historique;  5"  de  gravure  en  taille-douce;  6°  de  gra- 
vure en  médailles  et  en  pierres  fines;  7°  de  compo- 
sition musicale. 

Chapitre  IV.  —  De  la  distribution  des  prix.  —  Des 
premiers  grands  prix  et  de  l'exemption  du  service 
militaire.  —  Des  seconds  grands  prix  et  des  mentions 
honorables. 

Conditions  dans  lesquelles  se  trouvent  placés  ceux 
qui  ont  obtenu  ces  récompenses. 

Chapitre  premier  :  Dispositions  générales. 

I.  Des  concours.  -  Conditions.  —  Ordre  et  exposition 
des  concours. 

Article  premier.  —  Sous  la  direction  de  l'Académie 
des  beaux-arts  de  l'Institut,  il  est  ouvert,  tous  les 
ans,  un  concours  public  de  peinture,  de  sculpture, 
d'architecture  et  de  composition  musicale. 

Art.  4.  —  Les  récompenses  obtenues  dans  ces  con- 
cours ont  la  dénomination  de  Grands  Prix. 

Art.  5.  —  Pour  être  admis  à  prendre  part  aux 
coucours  des  Grands  Prix,  il  faut  être  Français  ou 
naturalisé  Français,  n'avoir  pas  trente  ans  accomplis 
au  1er  janvier  de  l'année  où  s'ouvre  le  concours;  de 
plus,  tout  candidat  doit  être  porteur  d'un  certificat 
délivré  par  son  professeur  ou  |par  un  artiste  connu 
attestant  qu'il  est  capable  de  prendre  part  au  con- 
cours. Les  artistes  mariés  ne  peuvent  concourir. 

Art.  6.  —  Tous  les  ans  au  |mois  de  janvier,  l'ordre 
des  concours  qui  auront  lieu  dans  le  courant  de  l'an- 
née et  l'époque  de  l'ouverture  de  ces  concours  sont 
annoncés  au  Journal  officiel. 

Art.  7.  —  Chaque  concours  se  divise  en  concours 
d'essai  et  en  concours  définitif. 

Art.  8.  —  L'époque  de  l'ouverture  des  premiers 
concours  d'essai  est  fixée  de  la  manière  suivante  : 
pour  la  peinture,  au  dernier  jeudi  de  mars;  pour  la 
sculpture,  au  ["jeudi  d'avril;  pour  l'architecture,  au 
2e  mardi  de  mars;  pour  la  gravure  en  taille-douce, 
au  2e  lundi  de  mars;  pour  la  gravure  en  médailles 
et  pierres  fines,  au  2e  mercredi  de  mars;  pour  la 
musique,  au  1er  samedi  de  mai. 

Art.  9.  —  Le  tableau  des  dispositions  générales 
des  concours  est  affiché  à  l'École  des  beaux-arls  et 
au  Conservatoire  de  musique  quinze  jours  au  moins 
avant  l'ouverture  de  ces  concours. 

Art.  10.  —  Les  programmes  des  concours  d'essai 
et  des  concours  définitifs  sont  fixés  par  l'Académie 
des  beaux-arts  comme  il  est  dit  au  règlement  spé- 
cial de  chaque  section. 

II.  —  Jugements  des  essais  et  jugements  prépara- 
toires des  concours  définitifs.  —  Jurés  adjoints.  — 
Jugements  définitifs. 

Art.  12.  —  Les  jugements  des  concours  d'essai  et 
les  jugements  préparatoires  des  concours  définitifs 
sont  rendus  par  les  sections,  qui  s'adjoignent  à  cet 
effet,  parmi  les  artistes  étrangers  à  l'Académie,  un 
nombre  d'assesseurs  égal  à  la  moitié  du  nombre  des 
membres  de  chaque  section,  à  savoir  : 

7  peintres,  4  sculpteurs,  4  architectes,  2  graveurs, 
3  compositeurs  de  musique. 

Art.  13.  —  Les  artistes  qui  seront  appelés  à  pren- 
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dre  part  aux  jugements  de  sections  ou  jurés  adjoints 
seront  pris  sur  une  liste  portant  un  nombre  de  can- 
didats dépassant  de  moitié  le  nombre  des  jurés  ad- 
joints qui  seront  appelés  à  prendre  part  aux  travaux 
de  chaque  section,  à  savoir  : 

11  peintres,  6  sculpteurs,  6  architectes,  3  graveurs, 
'6  compositeurs  de  musique. 

Art.  14.  —  Cette  liste  sera  formée  de  la  manière 
suivante  : 

Chaque  section  nommera  au  scrutin  de  liste  un 
nombre  de  candidats  égal  à  la  moitié  de  ses  membres. 
L'Académie  complétera  par  la  même  voie  le  nom- 
bre des  candidats  spécifié  plus  haut. 

Art.  15.  —  Lorsque  les  listes  des  candidats  seront 
formées,  les  jurés  adjoints  seront  désignés  par  le 
sort.  Les  noms  des  jurés  adjoints  seront  publiés 
par  ordre  alphabétique. 

Art.  16.  —  Lesjurés  adjoints  forment  avec  les  sec- 
tions des  commissions  dites  commissions  de  juge- 
ment. 

Art.  17.  —  Le  jugement  définitif  sera  prononcé 
en  assemblée  générale  par  toutes  les  sections  de 
l'Académie  réunies. 

Art.  18.  —  Toutes  les  fois  qu'un  jugement  de  sec- 
tion devra  être  validé  par  les  suffrages  de  l'Acadé- 
mie, la  majorité  absolue  des  suffrages  suffira.  Lors- 
que, au  contraire,  le  jugement  préparatoire  devra 
être  réformé  par  la  substitution  d'une  autre  œuvre 
à  l'œuvre  proposée,  la  majorité  des  deux  tiers  des 
membres  présents  sera  nécessaire. 

Néanmoins,  après  trois  jours  de  scrutin  sans  ré- 
sultat, l'Académie  décidera  s'il  y  a  lieu  de  suspen- 
dre la  séance,  et  dans  tous  les  cas  où  la  majorité  des 
deux  tiers  est  stipulée  ci-après. 

Lorsqu'une  œuvre  proposée  pour  une  récompense 
par  la  section  compétente  ne  l'aura  pas  obtenue  de 
l'Académie,  cette  œuvre  sera  considérée  comme  pro- 
posée a  fortiori  pour  la  récompense  suivante,  à 
moins  que  son  auteur  ne  l'ait  déjà  reçue  dans  un 
concours  précédent,  et  elle  pourra  l'obtenir  des  suf- 
frages de  l'Académie  à  la  simple  majorité  absolue. 
Les  autres  propositions  de  la  section  seront  con- 
sidérées comme  faites  dans  l'ordre  déterminé  par 
elle  pour  les  récompenses  que  l'Académie  aurait 
encore  à  décerner,  dans  le  cas  où  les  auteurs  des 
œuvres  proposées  auraient  antérieurement  rem- 
porté semblables  récompenses,  et  ces  propositions, 
descendues  ainsi  d'un  degré,  pourront  être  validées 
également  par  la  simple  majorité  absolue  des  suf- 
frages de  l'Académie1. 

Si  le  premier  second  Grand  Prix  n'est  pas  décerné, 
le  concurrent  qui  obtiendra  la  récompense  suivante 
n'aura  d'autre  titre  que  celui  de  deuxième  second 
Grand  Prix  (bien  que  le  premier  demeure  sans  titu- 
laire), et  ne  pourra  par  conséquent  prétendre  aux 
avantages  attachés  à  l'obtention  de  ce  premier 
second  Grand  Prix. 

Dans  le  cas  où,  la  section  n'ayant  pas  fait  de  pro- 
position pour  une  des  récompenses  quelle  qu'elle 
soit,  l'Académie  jugerait  qu'il  y  a  lieu  de  décerner 
cette  récompense,  le  candidat  qu'elle  aura  choisi 
devra,  pour  l'obtenir,  réunir  sur  son  nom  la  majo- 
rité des  deux  tiers. 

Si,   dans   l'énoncé  du  jugement   préparatoire,  la 


Dan^  le  ras  nu  «les  reeom[e  n-es  n'ain I    [us  elé  proposées  par 

■lion.  1  Académie  votera  neininoins  mit  rha<pie  récompense  dans 
ordre  ,1e  dénomination.  Toutefois,  1rs  propositions  de  la  section 
jurront  èlre  infirmées  que  si  les  deux  tiers  des  voix  se  sont 
LOncés  en  ce  sens  (décision  de  l'Académie  du  6  juillet  1007). 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTION  N  AME  DU  COS'SERVATOIRE 


section  n'a  pas  cru  devoir  mettre  hors  de  concours 
un  "ii  plusieurs  concurrents,  les  propositions  faites 
à  ce  sujet,  dans  la  séance  de  l'Académie,  ne  devien- 
dront exécutoires  qu'autant  qu'elles  auront  réuni 
les  deux  tiers  des  voix.  11  en  sera  de  même  dans  le 
cas  contraire,  c'est-à-dire  que  les  concurrents  dont 
la  section  aura  jugé  a  propos  de  prononcer  la  mise 
hors  de  concours  devront,  pour  être  réintégrés  par 
l'Académie,  obtenir  cette  majorité  des  deux  tiers. 
Dans  ce  dernier  cas,  la  section  se  réunira  de  nouveau 
pour  examiner  l'œuvre  relevée  par  l'Académie  de 
la  mise  hors  de  concours  et  modifier,  s'il  y  a  lieu, 
par  suite  de  cet  examen,  ses  propositions,  pour  l'at- 
tribution des  récompenses  à  décerner. 

Les  votes  étant  secrets,  en  cas  de  partage  des  voix, 
celle  du  président  ne  saurait  jamais  être  prépondé- 
rante. 

Dans  tous  les  scrutins  qui  se  succèdent  au  cours 
des  opérations  de  jugement,  les  bulletins  blancs  ne 
sont  pas  comptés.  Ils  sont  défalqués  de  l'ensemble 
de  votes,  et  le  chiffre  de  la  majorité  se  trouve  ainsi 
modifié.  Les  bulletins  portant  un  zéro  sont  seuls 
valables  pour  exprimer  un  vole  négatif. 

Si  ces  zéros  s'élèvent  à  un  chiffre  représentant  les 
deux  tiers  des  voix,  ils  annulent  la  décision  de  la 
section,  à  supposer  que  celle-ci  ait  présenté  un  can- 
didat, et  ils  établissent  d'autre  part  que  la  récom- 
pense pour  laquelle  ce  candidat  avait  été  proposé  ne 
sera  décernée  à  personne. 

Les  numéros  sur  les  bulletins  de  vote  devront  être 
écrits  en  toutes  lettres. 

Aucune  discussion  sur  les  œuvres  en  cause  ne  peut 
avoir  lieu  pendant  le  dépôt  des  bulletins  dans  l'urne 
ni  pendant  le  dépouillement  du  scrutin. 

Lorsque  le  dépouillement  du  scrutin  sera  com- 
mencé, aucun  bulletin  qu'on  aurait  omis  préalable- 
ment de  déposer  ne  pourra  être  reçu. 

Les  votes  de  l'Académie,  les  scrutins  une  fois  dé. 
pouillés,  sont  irrévocablement  acquis,  sauf  le  cas 
où  une  récompense  précédemment  obtenue  par  un 
des  concurrents  lui  aurait  été  attribuée. 

En  ce  qui  concerne  le  jugement  du  concours  de 
composition  musicale,  tout  membre  de  l'Académie 
ou  tout  juré  adjoint  qui  n'aurait  pas  assisté  à  la 
séance  à  partir  de  l'exécution  du  premier  morceau 
de  concours,  ne  pourra  être  admis  à  voter. 

Pendant  la  durée  des  séances  consacrées  au  juge- 
ment préparatoire  et  au  jugement  définitif  des  con- 
cours pour  les  Grands  Prix,  à  quelque  section  de 
l'Académie  que  ces  concours  se  rattachent,  aucun 
des  membres  de  l'Académie,  aucun  des  jurés  ad- 
joints ne  pourra  quitter  la  salle  où  l'on  sera  réuni, 
avant  que  les  opérations  de  jugement  soient  com- 
plètement terminées. 

Aucune  modification  aux  dispositions  qui  précè- 
dent ne  saurait  être  mise  en  discussion  dans  le  cours 
des  sessions  mêmes  de  jugement.  Elle  ne  pourra 
être  discutée  qu'en  séance  ordinaire  de  l'Académie, 
après  convocation  spéciale  eu   vue  des  sessions  à 

Art.  19.  —  En  principe,  il  ne  peut  être  décerné 
par  an  dans  chaque  section  qu'un  premier  Grand 
Prix,  el  deux  autres  récompenses,  soit  seconds 
Grands  Prix,  soit  mentions  honorables. 

Art.  20.  —  Dans  le  cas  où  l'Académie  n'aurait  pas 
décerné  le  premier  Grand  Prix,  cette  récompense 
sera  réservée  pour  être  décernée  l'année  suivante, 
s'il  y  a  lieu,  à  titre  de  deuxième  premier  Grand  Prix. 
Toutefois,  cette   récompense   ne   diminuera  pas   le 


nombre  de  celles  que  l'Académie  peut  décerner  tous 
les  ans. 

Art.  21.  —  Lorsque  tous  les  jugements  sont  ter- 
minés, le  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie  adresse 
au  ministre  un  l'apport  où  sont  consignés  les  résul- 
tats des  concours  des  Grands  Prix. 

Art.  22.  —  Il  est  tenu  par  le  secrétaire  perpétuel 
de  l'Académie  un  registre  particulier  contenant  les 
procès-verbaux  de  toutes  les  séances  des  jugements 
des  concours  des  Grands  Prix. 

Chapitre  II  :  organisation  et  police  des  concours. 

II.  —  Composition  musicale. 
Art.  42.  —  L'Académie  des  beaux-arts  délègue  à 
l'Administration  des  Beaux-Arts  le  soin  de  maintenir 
et  de  faire  exécuter  les  règlements  à  observer  dans 
le  concours  de  composition  musicale  ainsi  que  la 
surveillance  des  concurrents. 

Art.  43.  —  Les  jeunes  artistes  qui  désirent  prendre 
part  au  concours  pour  le  Grand  Prix  de  musique  et 
qui  remplissent  les  conditions  déterminées  par  l'ar- 
ticle 5  doivent  se  taire  inscrire  à  l'administration  des 
Beaux-Arts  (bureau  des  théâtres)  dans  les  délais 
annoncés  au  Journal  officiel  et  affichés  au  Conserva- 
toire. 

Art.  44.  —  Dans  les  différents  concours,  l'appel  des 
concurrents  aura  lieu  à  dix  heures  précises  du  matin; 
ceux  qui  se  présenteront  après  cet  appel  ne  pourront 
être  admis. 

Art.  45.  —  Il  sera  donné  connaissance  aux  con- 
currents, avant  leur  entrée  en  loge,  du  règlement  sur 
les  concours  et  des  obligations  imposées  à  ceux  qui 
remportent  le  premier  Grand  Prix,  tant  par  rapport 
à  leur  départ  pour  lîome  qu'à  leur  séjour  à  la  Villa 
Médicis,  à  leurs  voyages  et  aux  travaux  qu'ils  sont 
tenus  d'exécuter  pendant  la  durée  de  leur  pension. 

Art.  40.  —  Pendant  le  concours,  un  extrait  du  rè- 
glement est  affiché  à  l'entrée  des  loges. 

Ait.  47.  —  Toute  infraction  à  la  sincérité  du  con- 
cours entraine  la  mise  hors  de  concours. 

Art.  48.  —  Aucun  concurrent  ne  pourra  soustraire 
son  ouvrage  au  jugement  de  l'Académie  sous  quelque 
prélexte  que  ce  soit. 

Art.  49.  —  Tous  les  concurrents  reçoivent  une 
imdemnité  pour  les  frais  de  concours1. 

Cette  indemnité  sera  perdue  pour  ceux  des  concur- 
rents qui  n'auraient  pas  rempli  les  conditions  du  con- 
cours, à  moins  que  l'Académie  n'en  décide  autrement. 

Art.  50.  —  Les  concurrents  sont  spécialement  pla- 
cés sous  la  surveillance  de  l'Administration  des  Beaux- 
Arts  chargée  de  faire  observer  les  règlements  rela- 
tifs à  la  police  du  concours. 

Art.  51.  —  Les  concurrents  ne  peuvent  introduire 
dans  leur  loge  aucune  personne  étrangère  ni  s'in- 
troduire dans  la  loge  d'un  autre  concurrent,  sous 
peine  d'être  exclus  du  concours. 

Art.  52.  —  Si  quelque  difficulté  imprévue  entra- 
vait l'exécution  du  règlement,  le  service  de  surveil- 
lance prononcerait  provisoirement  sur  le  point  en 
litige,  en  référerait  immédiatement  à  l'Académie, 
par  un  rapport  adressé  à  son  président.  Celui-ci, 
après  avoir  consulté  l'Académie,  qui  appréciera  et 
jugera  en  dernier  ressort,  transmettra  la  décision 
arrêtée  à  l'Administration  des  Beaux-Arts  pour  la 
mettre  aussitôt  à  exécution,  et  l'avis  en  sera  donné 
au  ministre  compétent. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3491 


Art.  53.  —  Le  conservateur  du  Palais  de  Com- 
piègne  est  chargé  de  l'exécution  de  ces  dispositions. 

Art.  ">'t.  —  Il  a  toujours,  ainsi  que  les  surveillants 
du  Palais,  le  droit  d'entrer  dans  les  loges. 

Chapitre  III  :  Dispositions  spéciales.  —  Règlements 
particuliers  à  chacun  des  concours. 


Article  premier.  —  Il  y  a  tous  les  ans  un  concours 
de  composition  musicale. 

Art.  2.  —  Le  concours  de  composition  musicale 
comprend  un  concours  d'essai  et  un  concours  défi- 
nitif. 

Concours  d'essai.  —  Art.  3.  —  Le  concours  d'es- 
sai pour  le  Grand  Prix  de  composition  musicale  a 
lieu  invariablement,  chaque  année,  le  premier  sa- 
medi de  mai. 

Art.  4.  —  Le  concours  d'essai  consiste  :  1°  en  une 
fugue  vocale  a  quatre  parties  au  moins;  le  sujet  en 
est  donné  au  moment  de  l'entrée  en  loge;  2°  en 
un  chœur  à  quatre  voix,  au  moins,  avec  orchestre; 
le  texte  du  chœur  est  donné  au  moment  de  l'entrée 
en  loge. 

Art.  5.  —  Sont  admis  à  prendre  part  au  concours 
d'essai  les  jeunes  artistes  qui  remplissent  les  condi- 
tions déterminées  à  l'article  o  des  dispositions  géné- 
rales du  présent  règlement. 

Art.  6.  —  Le  jour  fixé  pour  l'ouverture  du  con- 
cours, les  membres  de  la  section  de  composilion  mu- 
sicale, réunis  sous  la  présidence  du  président  de  l'A- 
cadémie, assisté  des  autres  membres  du  bureau, 
s'assemblent  dans  la  matinée  au  Palais  de  Compiègne 
pour  arrêter  les  sujets  des  concours  d'essai. 

Art.  7.  —  Chaque  membre  de  la  section  de  mu- 
sique devra  fournir  un  sujet  de  fugue. 

Art.  8.  —  Les  seuls  membres  de  la  section  choi- 
sissent ensuite,  au  scrutin,  et  à  la  majorité  absolue 
des  sutl'rages,  trois  des  sujets  proposés.  Si  l'un  des 
trois  sujets  de  fugue  soumis  au  scrutin  obtient  l'u- 
nanimité des  voix,  il  devient  le  sujet  du  concours. 
Dans  le  cas  où  cette  unanimité  ne  pourrait  être 
obtenue  au  premier  tour  de  scrutin,  le  sujet  de  la 
fugue  est  désigné  par  le  sort. 

Art.  9.  —  Chaque  membre  de  la  section  propose 
un  ou  plusieurs  sujets  de  chœur. 

Art.  10.  —  Les  seuls  membres  de  la  section  choi- 
sissent ensuite,  au  scrutin  et  à  la  majorité  absolue 
des  suffrages,  trois  des  sujets  proposés. 

Art.  11.  —  Si  l'un  des  trois  sujets  de  chœur  soumis 
au  scrutin  obtient  l'unanimité  des  voix,  il  devient 
le  sujet  du  concours.  Dans  le  cas  où  cetle  unanimité 
ne  pourrait  être  obtenue  au  premier  tour  de  scrutin, 
le  sujet  du  chœur  est  désigné  par  le  sort. 

Art.  12.  —  Lorsque  le  choix  de  la  fugue  et  celui 
du  chœur  ont  été  arrêtés,  les  concurrents  sonl  intro- 
duits. Il  leur  est  donné  connaissance  des  sujets  de 
ces  épreuves,  et  il  leur  eu  est  fait  la  dictée  séance 
tenante. 

Art.  13.  —  Les  concurrents  sont  ensuite  conduits 
en  loge  par  le  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie 
des  beaux-arts,  accompagné  de  deux  membres  de  la 
section  de  composition  musicale,  désignés  par  l'Aca- 
démie. 

Art.  14.  —  Les  concurents  tirent  au  sort  les  loges 
dans  lesquelles  il  subissent   les  épreuves  des  con- 
cours d'essai. 
Art.  la.  —  Il  est  accordé  six  jours  entiers  aux  con- 


currents pour  la  composition  de  la  fugue  et  du 
chœur.  Pendant  ces  six  jours,  les  concurrents  restent 
en  loge,  sans  qu'ils  puissent,  sous  aucun  prétexte, 
avoir  communication  avec  le  dehors. 

Art-  16.  —  Est  interdite  l'introduction  dans  les 
loges  de  tout  morceau  de  musique,  de  tout  ouvra™e 
sur  la  musique  comme  de  tout  document  pouvant 
aider  les  concurrents  dans  leur  travail. 

Art.  17.  —Chaque  concurrent,  en  sortant  de  loge, 
consigne  entre  les  mains  du  conservateur  du  Palais 
de  Compiègne  sa  partition  mise  sous  enveloppe. 

Art.  18.  —  La  partition  et  l'enveloppe  portent  le 
numéro  sous  lequel  le  concurrent  a  été  admis  en 
loge.  Le  tout  est  déposé  dans  une  boite  scellée  du 
sceau  de  l'Institut.  Il  sera  pris  acte  du  dépôt  sur  une 
feuille  préparée  à  cet  effet. 

Les  parlitions  seront  mises  en  possession  du  jury 
du  concours  par  les  soins  de  l'administration  des 
Beaux-Arts. 

Art.  19.  —  Toute  infraction  à  ces  disposions 
sera  déférée  à  l'Académie  et  pourra  motiver  la  mise 
hors  de  concours. 

Jugement  du  concours  d'essai.  —  Art.  20.  —  Les 
membres  de  la  section  de  composition  musicale,  et 
les  jurés  adjoints,  réunis  en  commission  de  juge- 
ment, sous  la  présidence  du  président  deTAcadémie, 
assisté  des  autres  membres  du  bureau,  s'assemblent, 
au  jour  indiqué,  au  Conservatoire  de  musique,  pour 
procéder  au  jugement  des  concours  d'essai. 

Art.  21.  —  Les  membres  du  bureau  prennent  part 
à  toutes  les  discussions,  mais  ne  votent  que  s'ils 
sont  membres  de  la  section. 

Art.  22.  —  Le  jugement  de  la  fugue  et  du  chœur  se 
fera  dans  une  seule  et  même  séance. 

Art.  23.  —  Le  nombre  des  concurrents  admis  au 
concours  définitif  est  de  six  au  plus. 

Art.  24.  —  Immédiatement  japrès  le  jugement, 
une  affiche  placée  au  Conservatoire  de  musique  fera 
connaître  les  noms  des  élevés  admis  au  concours 
définitif  et  rappellera  le  jour  fixé  pour  l'ouvertur' 
de  ce  concours. 

Concours  définitif.  —  Art.  25.  —  Le  concours 
définitif  consiste  à  mettre  en  musique  une  scène 
lyrique  à  trois  ou  à  deux  voix  autant  que  possible 
inégales.  A  celte  fin,  il  est  ouvert  tous  les  ans  un 
concours  de  poésie,  dont  le  sujet  est  une  scène  lyri- 
que à  trois  ou  à  deux  personnages.  Cette  scène  de- 
vra donner  matière  à  un  air  ou  à  un  solo,  plus  ou 
moins  développé.'pour  chaque  personnage;  à  un  duo 
et  en  outre  à  un  trio,  si  la  scène  est  à  Irois  voix, 
ainsi  qu'à  des  récitatifs  reliant  les  différents  mor- 
ceaux. 

Art.  26.  —  L'avant-veille  de  l'ouverture  du  con- 
cours définitif,  les  membres  de  la  section  de  compo- 
sition musicale,  réunis  sous  la  présidence  du  prési- 
dent de  l'Académie,  assisté  des  autres  membres  du 
bureau,  procèdent,  par  voie  d'élimination,  au  choix 
des  meilleures  scènes  lyriques. 

Art.  27.  —  La  veille  de  l'ouverture  du  concours 
définitif,  les  membres  de  la  section,  réunis  dans  les 
mêmes  conditions,  s'assemblent  pour  choisir  entre 
les  pièces  réservées  celle  qui  paraîtra  la  plus  propre 
à  être  mise  en  musique.  Ce  choix  est  fait  au  scrutiu 
et  à  la  majorité  absolue  des  suffrages. 

Art.  28.  —  Le  jour  de  la  mise  en  loge,  le  secré- 
taire perpétuel  de  l'Académie,  accompagné  de  deux 
membres  de  la  section  de  composilion  musicale,  se 
rend  à  l'endroit  désigné  pour  la  mise  en  loge;  lec- 
ture est  donnée  aux  concurrents  de  la  scène  choisie 


ESCYCLOI'ÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  CONSERVATOIRE 


la  veille.  Elle  leur  est  dictée  séance  tenante.  Les 
concarrents  sont  ensuite  conduits  en  loge  par  le 
secrétaire  perpétuel  et  les  deux  membres  de  la  sec- 
tion de  musique  qui  l'ont  accompagné. 

Art.  -9-  —  La  musique  de  cette  scène,  écrite, 
autant  que  possible,  pour  voix  inégales,  sera  précé- 
dée d'une  introduction  instrumentale.  Si  la  scène  est 
à  trois  personnages,  une  partit'  du  trio,  si  le  sujet  le 
comporte,  pourra  être  écrite  sans  accompagnement. 

fat.  30.  — Les  concurrents  ont  trente  jouis  pleins 
pour  écrire  leur  partition.  Ils  passent  tout  ce  temps 
eu  loge  sans  pouvoir  entretenir  aucune  communica- 
tion avec  le  dehors.  Après  la  sortie  des  loges,  les 
concurrents  sont  convoqués  et  tirent  au  sort,  à  l'aide 
de  numéros,  l'ordre  dans  lequel  leurs  ouvrages  se- 
ront exécutés. 

Jugement  du  concours  définitif.  —  Art.  31.  —  La 
veille  du  jour  fixé  pour  le  jugement  définitif,  les 
membres  du  bureau  de  l'Académie,  les  membres  de 
la  section  de  composition  musicale  et  les  jurés  ad- 
joints à  cette  section  s'assemblent  au  Conservatoire 
pour  entendre  une  première  fois  les  scènes  lyriques. 

Ellessontexécutéesavecarcompagnementde  piano 
par  les  chanteurs  choisis  par  les  concurrents.  Les 
concurrents  sont  libres  d'accompagner  eux-mêmes 
leur  ouvrage.  Les  concurrents  et  les  artistes  qui 
prennent  part  à  l'exécution  des  scènes  lyriques  sont 
autorisés  à  assister  à  l'exécution  de  tous  les  ouvrages 
du  concours. 

Art.  32.  —  Le  jour  fixé  pour  le  jugement  du  Grand 
Prix  de  composition  musicale,  l'Académie  des  beaux- 
arts  et  les  jurés  adjoints  à  la  section  de  composition 
musicale  s'assemblent  à  1  heure  à  l'Institut  pour 
entendre  l'exécution  des  scènes  lyriques  et  procéder 
ensuite  au  jugement  du  concours. 

Art.  33.  —  L'Assemblée  étant  réunie  et  la  séance 
ouverte,  les  scènes  lyriques  sont  exécutées  dans  le 
même  ordre,  par  les  mêmes  artistes  et,  d'une  ma- 
nière absolue,  dans  les  mêmes  conditions  que  la 
veille. 

Jugement  préparatoire.  —  Art.  34.  —  Après  l'au- 
dition des  partitions,  le  président  déclare  le  huis- 
clos,  et  la  séance  générale  est  suspendue.  Aussitôt, 
la  section  et  les  jurés  adjoints  se  forment  en  com- 
mission de  jugement  sous  la  présidence  du  président 
de  l'Académie,  assisté  des  autres  membres  du  bu- 
reau. La  commission  procède  en  comité  secret  au 
jugement  préparatoire,  comme  il  est  dit  à  l'article  21 
du  présent  règlement.  Elle  décide,  au  scrutin,  à  la 
majorité  absolue  des  suffrages  et  sans  ballottage,  à 
quel  numéro  doit  être  accordé  le  premier  Grand  Prix. 

Art.  3b.  —  Dans  le  cas  où,  après  trois  tours  de 
scrutin,  la  majorité  ne  serait  pas  obtenue  par  l'un 
des  concurrents,  le  vote  sera  interrompu  et  le  prési- 
dent ouvrira  de  nouveau  la  discussion  sur  le  mérite 
des  ouvrages  qui  sont  en  concours. 

Art.  36.  —  La  commission  décide  ensuite,  en  ob- 
servant les  mêmes  formes,  s'il  y  a  lieu  d'accorder 
deux  autres  récompenses,  soit  deux  seconds  grands 
prix  et  une  mention  honorable,  soit  deux  mentions 
honorables.  Dans  ces  limites,  le  vote  sera  continué 
tant  que  la  majorité  ne  se  prononcera  pas  pour  la 
négative. 

Art.  37.  —  L'opinion  de  la  commission  sur  le  mé- 
rite des  ouvrages  récompensés  est  recueillie  et  som- 
mairement motivée  dans  un  procès- verbal,  signé  du 
président  et  du  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie. 
Les  chilfres  des  majorités  seront  consignés  dans  le 
procès- verbal  ainsi  que  le  nombre  des  scrutins. 


Jugement  définitif.  —  Art.  38.  —  Celte  opération 
terminée,  la  séance  générale  est  reprise.  Les  jurés 
adjoints  assistent  alors  à  la  séance  avec  voix  con- 
sultative seulement.  Le  secrétaire  perpétuel  fait 
connaître  à  l'Académie  le  procès-verbal  de  la  séance 
qui  vient  d'être  tenue  par  la  commission  de  juge- 
ment, le  résultat  du  jugement  préparatoire  rendu 
par  elle  et  les  motifs  de  ce  jugement. 

Art.  39.  —  Le  président  invite  alors  l'Académie  à 
voter  immédiatement.  La  question  est  posée  dans  les 
termes  suivants  :  «  A  quel  numéro  doit  être  accordé 
le  premier  Grand  Prix.'  »  L'Académie,  au  scrutin,  à 
la  majorité  absolue  des  suffrages  et  sans  ballottage, 
décide  à  quel  numéro  le  premier  Grand  Prix  doit  être 
accordé. 

Art.  40.  —  Dans  le  cas  où  l'Académie  n'aurait  pas- 
accordé  le  premier  Grand  Prix,  ce  premier  Grand 
Prix  restera  en  réserve  pour  le  concours  suivant,  s'il 
y  a  lieu. 

Art.  41.  —  Dès  que  le  premier  Grand  Prix  est  dé- 
cerné, l'on  fait  connaître  les  numéros  des  scènes 
lyriques  dont  les  auteurs  ont  obtenu  un  premier 
second  Grand  Prix  dans  les  concours  précédents. 
Lorsqu'il  aura  été  statué  en  ce  qui  concerne  le  pre- 
mier second  Grand  Prix,  l'on  fera  connaître  les  nu- 
méros des  scènes  lyriques  dont  les  auteurs  ont  obtenu 
un  deuxième  second  Grand  Prix  dans  les  concours 
précédents.  Il  sera  procédé  de  même  en  ce  qui  con- 
cerne les  mentions  honorables. 

Art.  42.  —  Ces  récompenses,  telles  qu'elles  sont 
prévues  par  l'article  36  du  présent  règlement,  sont 
accordées  en  observant  les  formes  déterminées  à 
l'article  39. 

Art.  43.  —  Les  noms  de  ceux  qui  ont  remporté  le 
Grand  Prix  et  les  autres  récompenses  sont  affichés  au 
Conservatoire  de  musique  aussitôt  après  le  jugement. 

La  partition  qui  obtiendra  le  Grand  Prix  de  com- 
position musicale  sera  déposée  à  la  bibliothèque  du. 
Conservatoire. 

Chapitre  IV  :  De  la  distribution  des  prix.  —  Des 
premiers  Grands  Prix  et  des  autres  récom 
penses. 

Article  premier:  —  L'Académie  des  beaux-arts, 
dans  sa  séance  publique  annuelle,  distribue  les  prix 
remportés  dans  les  concours  de  l'année. 

Art.  3.  —  Dans  la  séance  publique  sera  exécutée 
la  scène  lyrique  qui  a  remporté  le  premier  Grand 
Prix,  et,  si  le  premier  Grand  Prix  n'a  pas  été  donné, 
celle  qui  aura  obtenu  le  second  Grand  Prix.  Sera, 
également  exécuté  dans  cette  séance  un  morceau  de 
musique  instrumentale  composé  par  le  pension- 
naire musicien  de  troisième  année. 

Art.  4.  —  Les  artistes  qui  ont  remporté  les  pre- 
miers Grands  Prix  reçoivent  un  diplôme  qui  cons- 
tate l'obtention  de  ces  prix  et  une  médaille  d'or;  ils 
vont,  en  qualité  de  pensionnaires  de  l'Etat,  passer  à 
Rome  un  nombre  d'années  déterminé  pour  chacun 
des  différents  arts,  ainsi  qu'il  est  dit  au  règlement 
de  l'Académie  de  Erance  à  Rome. 

Art.  5.  —  Ceux  qui  remportent  les  seconds  Grands 
Prix  recevront  un  diplôme  et  une  médaille  d'or. 

Art.  6.  —  Jouissent  de  l'exception  conditionnelle 
du  service  militaire,  en  vertu  du  paragraphe  9  de 
l'article  20  de  la  loi  sur  le  recrutement  de  l'armée, 
du  27  juillet  1872,  ainsi  conçu  : 

Sont,  à  titre  conditionnel,  dispensés  du  service  mili- 
taire : 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3493 


§  3.  Les  artistes  qui  ont  remporté  les  Grands  Prie  de 
l'Institut,  à  condition  qu'ils  passeront  à  l'Ecole  de 
Rome  les  années  réglementaires  et  rempliront  toutes 
leurs  obligations  envers  l'Etat'. 

Art.  7.  —  Les  ouvrages  qui  auront  obtenu  les  pre- 
miers Grands  Prix  ne  pourront  èlre  retouchés  après 
le  jugement  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit. 

Art.  8.  —  Ceux  qui  auront  obtenu  les  seconds  prix 
ou  des  mentions  honorables  ne  pourront  être  retou- 
chés avant  l'exposition  générale  des  prix. 

Art.  9.  —  Les  élèves  qui  ont  remporté  un  second 
grand  prix  ne  peuvent  concourir  que  pour  le  pre- 
mier dans  le  même  art.  Ceux  qui  ont  déjà  obtenu 
une  mention  honorable  ne  peuvent  prétendre  qu'au 
second  et  au  premier  prix. 

Liste  îles  membres  de  l'Académie 

des  Beaux-Arts. 

Section  de  Musique. 


23  mai 

Ï83&. 

—  Reicha,  f  28  mai  1836. 

1836. 

—  Hu.EVï.f  17  mars  1862. 

29  juillet 

1851. 

—  Secrétaire  perpétuel. 

26  août 

1S51. 

—  Clapisson.x  19  mars  1866 

19  mai 

1860. 

—  Gocnod,  f  10  octobre  1893 

19  mai 

IS'Il. 

—  Th.  Dcbois,  —  11  juin  1924 

26  mai 

1795. 
1816. 

—  Mole,  fil  décembre  1S02 

—  Chkrcbini,-;-  15  mars  1S42 

19  novembre  1842.  —  Onslow,  f  3  octobre  1S53. 
12  novembre  1  sort.  —  Reber.-J -24  novembre  1SS0. 
19  février        1881.  —  Saint-Saens,  f  16  décembre 


11   avril 

1829. 

—  Ai-ber,  f  11  mai  1871. 

20  janvier 

1872. 

—  V.  Masse,  y  5  juillet   1884. 

16  décembre 

1884. 

—  Delibes,  -f-  16  janvier  1891. 

21  mars 

1891. 

—  Goiraod,  -j-6  mai  1892. 

2  juillet 

1S92. 

—  Paladilhe,t  7  janvier  1926. 

IV. 

1795. 

—  Grétry,  -{-1S13. 

16  octobre 

1813. 

—  MossiGNY,-j-14janvierlS17. 

1"  mars 

1817. 

—  Catel,  f  29  novembre  1S30. 

29  janvier 

1831. 

—  Paer,  f  3  mai  1S39. 

15  juin 

1S39. 

—  Spontini,  j24  janvier  1851. 

22  mars 

1851. 

—  Ambroise  Thomas,  -j-12   fé- 
vrier 1896. 

2  mai 

1896. 

—    tENBPVEn,  -j- 1910. 

29  octobre 

191fl. 

—  Widor,  secrétaire  perpétuel, 
18  juillet  1914. 

2S  décembre 

19+8. 

—  Henri  Rabaud. 

V. 

1795. 

-  Préville,  f  1796. 

1796. 

—  GRANDMÉNiL.f  24mailsl6. 

Juin 

1816. 

—  Berton,  +22  avril  1841. 

22  juin 

1814. 

—  Adam,  -j-  3  mai  1856. 

21  juin 

1S56. 

—  Berlioz,  f  S  mars  1869. 

1869. 

—  Félicien  David,  j  29  août 
1S76. 

1 1  novembre 

1876. 

—  Reyer,  f  l"  janvier  1909. 

13  mars 

1909. 

—  Fhke.  j  S  novembre  1924. 

VI. 

1795 

—  Monvel,  f  1816. 

1816. 

—  Lesueor,  -j-6  octobre  1837. 

18  novembre 

is:n. 

—  Carafa  de  Colobrano,  —27 
juillet  1872. 

5  avril 

1S73 

—  Bazin,  f  2  juillet  1878. 

30  novembre 

1878 

—  Massenet,  +  13  août  1912 

26  octobre 

1912 

—  Gustave  Charpentier. 

i.  Cette  loi  a  été  modifiée  par  celle  du  15  juillet  1889  qui  stipule 
que  les  Grands  Prix  de  Rome  a  sont,  sur  leur  demande,  envoyés  ou 
maintenus  définitivement  en  congé  dans  leurs  foyers,  jusqu'à  la  date 
■de  leur  passage  dans  la  réserve,  pourvu  qu'ils  aient  une  année  de  pré- 
sence sous  les  drapeaux  ». 

Elle  a  été  modifiée  ensuite  par  celle  du  21  mars  1905  qui  stipule 
que  le  service  militaire  est  égal  pour  tous  et  que,  hors  le  cas  d'inca- 
pacité  physique,  il  ne  comporte  aucune  dispense. 


Liste  des  membres  libres  de  l'Académie 
des  Beaux-Arts* 


1816. 

—  De  Vaublanc. 

1845. 

—  De  Cailleux. 

1876. 

—  Perrin. 

1885. 

—  A.  de  Rothschild. 

1905. 

—  Hicher. 

1816. 

—  Le  duc  de  Blacas. 

1839. 

—  A.-L.  Dumont. 

1853. 

—  De  NieuAverkerke. 

1892. 

—  Km.  Michel. 

1909. 

—  Comte. 

1913. 

—  Lemonnier  (Joseph-Henri). 

1816. 

—  De  Vaudreuil. 

1817. 

—  Le  duc  de  Richelieu. 

1822. 

—  De  Lauriston. 

1828. 

—  Siméon. 

1846. 

—  Duchatel. 

1868. 

—  H.  Delaborde. 

1874. 

—  De  Cardaillac. 

1880. 

—  Le  duc  d'Aumale. 

1S97. 

—  Le  Prince  d'Arenberg. 

1816. 

—  Pradel. 

1>:.7. 

—  Fould. 

1867. 

—  Haussmann. 

1891. 

—  Alphan.l. 

1S92. 

—  Lafeneslre. 

19-19. 

De  Curiéies  de  Castelnau. 

1816. 

—  Castellan. 

1838. 

—  De  Clarac. 

1S47. 

—  Taylor. 

1879. 

—  De  Chennevières. 

1899. 

—  Roujon. 

1903. 

—  Georges  Berger. 

1910. 

—  Homolle. 

1816. 

—  Turpin  de  Crissé. 

1859 

—  Kastner. 

1868. 

—  Comte  Walewski. 

1868. 

—  Charles  Blanc. 

1882. 

—  Du  Sommerard. 

1885. 

—  Heuzey. 

1810. 

—  De  Choiseul-Goufiîer. 

1817. 

—  De  Chabrol. 

1S43. 

—  De  Rambuteau. 

1869. 

—  A.  Lenoir. 

1891 

—  Duplessis. 

1899. 

—  Guiflrey. 

1919. 

—  Maurice  Fenaille. 

1816 

—   Gois. 

1S23. 

—  De  Pastoret. 

1857. 

—  Le  prince  Napoléon. 

1891. 

—  Larroumet. 

1898 

—  Le  comte  Delaborde. 

1S99. 

—  Philippe  Gille. 

1901. 

—  Aynard. 

1913 

—  De  Boussès  de  Fourcaud 

1918. 

—  Michel  (Paul-André). 

1816. 

—  De  Forbin. 

1841. 

—  D'Houdetot. 

1859. 

—  De  Mercey. 

1S60. 

—  Jules  Pelletier. 

1875. 

—  Gruyer. 

1910. 

—  De  Selves. 

1816. 

—  De  Senonnes. 

1840. 

—  De  Montalivet. 

18S0 

—  Barbet  de  Jouy. 

1896 

—  Corroyer. 

1904 

—  Bouchot. 

1906 

Le  baron  Edmond  de  Roths- 

child. 

Liste  des  associés  étrangers  des  Beaux-Arts. 


1801.  —  Haydn. 
1809.  —  Paisiei.lo. 
1820.  —  Antolini. 
1841.  —  Cockerell. 
1863.  —  Donaldson. 
1885.  —  Rosa. 


EXcrc.LOPÉniE  de  la  musique  et  /iictio.v.xaihe  du  CONSEIÏVATOIHE 


1897 

—  Devriendt. 

1900 

—  Monteverde. 

1919 

—  Appolloni. 

1802 

—  Canova. 

1823 

—  Alvarez. 

1832 

—  Ranch. 

isr.s 

—  Rilschell. 

[882. 

—  De  Hess. 

is,::;. 

—  Kaulbach. 

IS74. 

—  Matejko. 

1893. 

—  Hunt. 

1895. 

—  Menzel. 

1905. 

—  Sargent. 

lso2. 

—  Calderari. 

1S05. 

—  Marvuglia. 

1823. 

—  Scbinkel. 

1841. 

—  De  lileuze. 

1864. 

—  staler. 

1865. 

—  Slraek. 

1881. 

—  De  Ferstel. 

1883. 

—  Da  Silva. 

1895. 

—  Guypers. 

1803. 

—  Appiani. 

1820. 

—  Camucini. 

1844. 

—  Overbeck. 

1870. 

—  Gallait. 

1888. 

—  Antokolski. 

1902. 

—  Israé'ls. 

1911. 

—  Sorolla-Baslida. 

1803. 

—  R.  Morghen. 

1834. 

—  Meyerbeer. 

1864. 

—  Verdi. 

1901. 

—  Venturi. 

1803. 

—  Serge). 

ls-<::. 

—  Longhi. 

1832. 

—  Toschi. 

1854 

—  Felsing. 

1883. 

—  Mercuri. 

ISSi. 

—  Sir  F.  Leighton. 

lS'.lli. 

—  Herkomer. 

1918 

—  Sbannon. 

1803. 

—  Gdglielmi. 

1805. 

—  Salieri. 

1830. 

—  Cambray-Digny. 

1843 

—  Canina. 

1856. 

—  Mbrcadante. 

1873. 

—  Gevaert. 

1909. 

—  Warren. 

1803 

—  B.  West. 

îxa.'t. 

—  Rossini. 

1S69. 

—  Dupré. 

ixsa 

—  Sir  J.  Millais. 

1896 

—  De  Brozik. 

1901 

—  Orchardson. 

1910 

—  Boïto. 

1919 

—  Cnrrado  Ricci. 

1823 

—  Thorwaldsen. 

1844 

—  Tenerani. 

1870 

—  Drake. 

i*sa 

—  Vêla. 

1891 

—  Aima  Tadema. 

1913 

—  Jacobsen. 

1918 

—  Brangwyn. 

1823 

—    ZlNc.AREI.LI. 

1838 

—  Cornélius. 

1867 

—  Schnoor  de  Carolsfel 

1873 

—  Madrasso. 

1894 

—  Pradilla. 

Liste  des  correspondants  de  l'Académie 

des  Beaux-Arts. 

Section  V.  —  Composition  musicale. 

1796.  —  Foiitï. 
1803.  —  Cabrlli. 
1832.  —  Mayer. 
1846.  —  Mercadante. 
1856.  —  Kastner. 
1859.  —   Vebdi. 
1864.  —  De  Flotow. 

1883.    —    LlMNAKDBR. 


ISU2 

1894 

TCHA1K.OWSKY. 

—  Cui. 

1796 

—  Van  Podckk. 

1809 

—  Fiorillo. 

1824 

—  Dannecker. 

1841 

—    TlECK. 

1S52 

WlCHMANN. 

1859 

—    CoNTI. 

1S7S 

—  Gade. 

1891 

—  Grieo. 

1907 

RlMSKY-KORSAKOW. 

1908 

—  Homperdinck  (dontl'élec- 

tion   a  été   annulée  par 

décision  de  l'Académie, 

5  décembre  1911). 

1796 

—  Préville. 

1800 

—  Bonnet-Beadval. 

1827 

—  De  Saint-Mesmin. 

1853 

—  Martin-Beaolieu. 

1S<',1 

—  Bbnedict. 

18S5 

—  Deffès. 

1900 

SVENDSEN. 

1911 

—  Glazohnow. 

1S24 

—  Mattel. 

1830 

—  Meyerbeer. 

1834 

—  Dacssoigne-Mébol. 

1875 

RUBINSTEIN. 

1894 

GODVY. 

1898 

—  Max  Bruch  (dont  l'élection 

a  été  annulée  par  déci- 

sion de  l'Académie,  5  dé- 

cembre 1914). 

1S63 

—  De  Valldemosa. 

1SV3 

—  Peter-Benoit. 

1901 

—  Lacombe. 

1863 

—  Gaspari. 

1881 

—    LlSTZ. 

1888 

—  Sgambati. 

Liste  des   correspondants  libres  de 
des  Beaux-Arts. 


17 '.ici. 

—  Bardin. 

ISII'.l' 

—  A.  Moitié. 

is;:0 

—  Debret. 

I  -  42 

—  Jesi. 

1S:>3. 

—  Felsing. 

1859. 

—  Pittakis. 

1863 

—  Rosa. 

1S85 

—  De  Geymuller. 

1910 

—  Chevalier  de  Stuers. 

1796 

—  lieck. 

1810 

—  Burnev. 

1814 

-  Jay. 

1836 

—  Anderlovic. 

1S50 

—  Visconti. 

1881 

—  Carapanos. 

1796 

—  Moreau. 

1307 

—  Thibault. 

1821 

—  Cochet. 

1S35 

—  Raimbach. 

1843 

—  De  Dietrichstein. 

1866 

—    FlORELLI. 

1892 

—  I.anciani. 

1805 

—  G.  de  Rossi. 

1S27 

—  Nibby. 

1811 

—  Ross. 

1S62 

—  Waagen. 

1S6S 

—  Perkins. 

1886 

—  Salinas. 

1918 

—  Kervyn  de  I.ettenhove 

1863 

—  (H  fers. 

1873 

—  Wallace. 

1890 

—  Le  prince  Czartorysky. 

1894 

—  Le  prince  de  Scalcx. 

1863 

—  Tolstoy. 

1S82 

—  Marionneau. 

1S96 

—  Hymans. 

1912 

—  Reymond. 

1863 

—  De  Gilles. 

1866 

—  Newton. 

1S95 

.  —  Natalis  Rondol. 

1900 

—  Brédins. 

TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3495 


18B7 

—  Venturi. 

1901. 

—  Comte   de    San  Mari 

Valperga. 

IRAS. 

—  Mazel. 

1887. 

—  Le  Breton. 

1R63. 

—  Jeanron. 

1877. 

—  De  Soulza-Holstein. 

1R79. 

—  Le  marquis  d'Adda. 

1SR1. 

—  Massarani. 

1905. 

—  L'abbé  Requin. 

État  de  l'Académie  des  Beaux-Arts  (sectio 
musique)  au  1er  janvier  1920. 

Membres  de  l'Académie.  —  Saint-Sabns. 


Aradéniiriens  libres. 


Widok,  secrétaire  perpétuel. 

Heuzey. 

Prince  d'Arenberg. 

Richer. 

Edmond  de  Rothschild. 

De  Selves. 

Homolle. 

Lemonnier. 

Michel. 

Fenaille. 

De  Curiéres  de  Caslelnau. 

Pradilla. 

Cuyper.-. 

Venturi. 

Sargent. 

Warren. 

Sorolla  y  Bastida. 

Brangwyn. 

Shannon. 

Ricci. 

Cdi. 


Bredins. 

San  Martino  e  Valperga. 

Kervyn  de  Lettenhove. 


BIOGRAPHIES  DES   MEMBRES  DE   L'ACADÉMIE 

DES  BEAUX-ARTS   iSECTION   DE   MUSIQUE) 

PAR   ORDRE  ALPHABÉTIQUE 

Adam. 

Adophe-Charles  Adam  naquit  à  Paris  le  24  juillet 
1803.  Son  père  Louis  Adam,  né  à  Miettershollz 
(Alsace)  le  3  décembre  17d8,  mort  à  Paris  le  11  avril 
1848,  était  un  bon  musicien;  il  fut,  de  1797  à  1843, 
professeur  de  piano  au  Conservatoire  de  Paris. 

«  J'adorais  la  musique,  disait  plus  tard  Adolphe 
Adam  parlant  des  premiers  temps  de  son  enfance, 
mais  je  ne  voulais  pas  l'apprendre.  Je  restais  des 
heures  tranquille,  à  écouter  mon  père  jouer  du 
piano,  et  sitôt  que  j'étais  seul  je  tapotais  sur  l'ins- 
trument sans  connaître  mes  notes.  Je  savais  trouver 
des  harmonies  sans  m'en  douter.  Je  ne  voulais  pas 
faire  une  gamme,  ni  lire;  j'improvisais  toujours.  » 

On  désespérait  de  faire  de  lui  un  musicien. 

A  16  ou  17  ans,  une  fois  ses  études  classiques  tant 
bien  que  mal  terminées  (car  en  tout  il  fut  d'abord 


un  écolier  très  indocile),  Adolphe  Adam  déclara  à 
son  père  qu'il  désirait  dorénavant  se  consacrer  à  la 
musique  et  entrer  au  Conservatoire.  Mais  le  père 
ne  voulait  rien  entendre,  n'ayant  aucune  confiance 
dans  l'avenir  artistique  de  son  fils.  Il  finit  tout  de 
même  par  céder,  et  laissa  le  jeune  Adolphe  entrer 
dans  la  classe  d'orgue  de  Benoist.  Alors  seulement,  le 
futur  compositeur  commença  son  éducation  musi- 
cale. C'est  à  peine  s'il  savait  les  éléments  de  solfège. 
Successivement  élève  d'ELrcn,  puis  de  Ueicha  pour 
le  contrepoint,  de  Boïeldieu  pour  la  composition, 
Adam  se  préparait  au  concours  pour  le  prix  de  Rome. 
Cependant,  il  gagnait  sa  vie  en  donnant  des  leçons, 
en  jouant  du  triangle  ou  de  la  timbale  dans  les  or- 
chestres, en  écrivant  des  romances,  des  airs  de  vau- 
devilles et  des  morceaux  de  piano. 

Il  concourut  deux  lois  pour  le  prix  de  Rome 
sans  arriver  à  obtenir  la  suprême  récompense.  L)e 
dépit,  il  abandonna  définitivement  la  lutte,  et  se 
vengea  plus  tard  de  ses  juges  en  faisant  applaudir 
dans  le  Chalet  toute  une  scène  empruntée  à  sa  can- 
tate Ariane,  qui  ne  lui  avait  valu  que  le  deuxième 
second  Grand  Prix  (182:;). 

Adam  élait  devenu  l'un  des  élèves  favoris  de 
Iîoïeldieu.  Son  maître  le  choisit  tout  naturellement, 
ainsi  que  son  camarade  Labarbe,  pour  l'aider  à 
mettre  la  dernière  main  à  la  partition  d'orchestre 
de  la  Dam''  blanche.  Il  lui  facilita  les  démarches  au- 
près des  éditeurs,  lui  procura  des  relations  utiles. 
bu  reste,  Adam  avait  un  sens  des  affaires  et  une 
habileté  qui  lui  permirent  de  se  faire  rapidement 
une  place  parmi  les  compositeurs  de  théâtre. 

Le  28  décembre  1827,  il  faisait  représenter  avec 
succès  au  Gymnase  un  opéra-comique  en  un  acte, 
paroles  de  Scribe  et  Mélesville,  le  Mal  du  Pays  ou  la 
Batelière  de  Brientz.  C'est  son  premier  ouvrage  un 
peu  important.  Il  comprend  une  ouverture  et  onze 
morceaux. 

Dès  lors,  il  se  mettait  à  composer  avec  une  fécon- 
dité inépuisable,  qui  ne  se  démentit  point  jusqu'à  la 
lin  de  sa  vie. 

Le  9  février  1829,  il  débutait  à  l'Opéra-Comique  par 
un  ouvrage  en  2  actes,  Pierre  et  Catherine,  qui  fut  joué 
plus  de  quatre-vingts  fois  de  suite. 
Le  jeune  auteur  était  lancé. 
Sept  mois  après,  le  12  septembre,  il  épousait, 
contre  la  volonté  de  sa  famille,  une  choriste  du  Vau- 
deville, qui  le  rendit  malheureux  pendant  six  ans  et 
dont  il  fut,  enfin,  obligé  de  se  séparer. 

En  1832,  Adam,  fuyant  le  choléra  qui  dépeuplait 
Paris,  partit  pour  Londres  :  il  y  resta  neuf  mois.  Il 
y  écrivit  deux  opéras-comiques,  The  firsl  campaign 
et  The  dark  Diamond,  qui  furent  bien  accueillis.  Il 
revint  à  Paris  pour  assister  à  la  première  représen- 
tation du  Pré-aux-Clercs,  et  usa  des  bons  offices  de 
son  ami  Hérold  pour  se  réconcilier  avec  sa  famille 
qui  était  restée  brouillée  avec  lui  depuis  son  ma- 
riage. Il  repartit  pour  Londres  le  21  janvier  1833, 
pour  y  faire  représenter  son  ballet,  Faust. 

L'année  1834  allait  apporter  à  Adam  le  plus  grand 
succès  de  toute  sa  carrière. 

La  partition  du  Chalet,  écrite  en  quinze  jours  sur 
un  livret  de  Scribe  et  Mélesville  imité  de  la  pièce 
de  Gœlhe  intitulée  Jerij  und  Bœtely,  exécutée  pour 
la  première  rois  à  l'Opéra-Comique  le  25  septembre 
1834,  devait  atteindre  à  sa  millième  audition  le 
18  janvier  1873. 

Le  l"1'  mai  1836,  Adam  élait  nommé  chevalier  de  la 
Légion  d'honneur. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Avec  la  Fille  dit  Danube,  représentée  à  l'Opéra  le 
21  septembre  18.16,  Adam  obtint  son  premier  succès 
dans  an  genre  où  il  devait  se  créer,  pour  un  temps, 
une  renommée  particulière  :  le  ballet,  lit  cependant, 
de  quelle  singulière  façon  ne  clé  fi  ni  t— il  pas  le  rôle 
du  compositeur  de  musique  chorégraphique.  A  pren- 
dre sa  tâche  aussi  légéremenl,  comment  a-t-il  pu 
l'accomplir  à  la  satisfaction  de  ses  contemporains? 
«  Travail  de  manœuvre,  dit-il.  Point  d'ellbrt  et  nulle 
responsabilité.  J'écris  les  idées  qui  me  viennent,  et 
elles  viennent  toujours,  les  aimables  filles...  Il  né 
s'agit  plus  de  se  dire,  en  se  grattant  le  front  :  Voilà 
une  idée  qu'il  nie  semble  avoir  saluée  déjà,  chez 
moi  ou  ailleurs.  Ce  motif  est-il  suffisamment  origi- 
nal? Cette  harmonie  n'est-elle  point  trop  plate?... 
Faire  un  ballet,  c'est  oublier  tout  cela...  On  ne  tra- 
vaille plus,  on  s'amuse.  Ce  n'est  plus  l'humiliation 
de  se  sentir  inférieur  à  son  œuvre.  C'est  l'orgueil  de 
se  savoir  au-dessus  de  sa  besogne.  »  Ne  nous  éton- 
nons point  si  des  ouvrages  bâclés1,  avec  cette  insou- 
ciance, n'ont  pas  mieux  résisté  à  l'épreuve  du  temps. 

Trois  semaines  après  la  représentation  de  la  Fille 
du  Danube  à  l'Opéra,  le  Postillon  de  Longjumeau 
passe  sur  la  scène  de  l'Opéra-Comique,  et  ce  fut  tout 
de  suite  un  triomphe  qui  dépassa  toutes  les  prévi- 
sions, même  les  plus  optimistes,  de  l'auteur  ou  des 
interprètes.  La  vogue  du  Postillon  se  maintint  long- 
temps en  France  :  elle  dure  encore  en  Allemagne. 
L'ouvrage  valait  surtout  par  son  entrain,  par  sa 
gaieté,  parfois  bien  vulgaire. 

Dès  lors,  Adam  était  «  arrivé  »,  et,  avec  Auber  et 
Halévy,  il  accapara  pendant  des  années  l'Opéra- 
Comique. 

Le  29  septembre  1839,  Adam  partit  pour  la  Russie, 
dont  Boïeldiel-  lui  avait  souvent  parlé  avec  enthou- 
siasme. Il  recevait  là-bas  un  accueil  des  plus  flat- 
teurs de  la  part  du  tsar  et  de  la  cour.  Mais  au  bout 
de  quelques  semaines,  il  tombait  gravement  malade. 
Quand  il  fut  remis,  malgré  les  offres  du  tsar  qui  lui 
olirait  les  fonctions  magnifiquement  rétribuées  de 
maître  de  chapelle,  Adam  ne  songea  plus  qu'à  fuir 
un  climat  qui  avait  failli  lui  être  fatal.  Il  partit  pour 
Paris,  où  il  arriva  le  27  mai  1840,  après  un  court 
séjour  à  Berlin. 

Berton  étant  mort  le  22  avril  1844,  Adam  se  porta 
candidat  à  sa  succession  à  l'Académie  des  beaux- 
arts.  Il  fut  élu  dès  le  premier  tour  de  scrutin  par 
dix-sept  voix,  contre  neuf  données  à  Berthon  et 
quatre  à  Ambroise  Thomas. 

C'est  alors  que  commence  dans  la  vie  du  compo- 
siteur, jusque-là  si  heureux,  une  dernière  période 
agitée  de  cruels  soucis.  S'étant  brouillé  avec  le  di- 
recteur de  l'Opéra-Comique,  Adam  eut  l'idée  de  fon- 


der 


une  scène  musicale  populaire,  l'Opéra  National, 


qui  devint  plus  tard  le  Théâtre  Lyrique.  Le  nouveau 
théâtre  ouvrit  ses  portes  le  15  novembre  1847.  Ses 
débuts  furent  brillants.  Mais  l'affaire  devint  bientôt 
désastreuse,  et  le  20  mars  le  pauvre  Adam  était 
obligé  de  se  retirer.  Il  était  ruiné.  Pendant  des  an- 
nées, il  va  désormais  lutter  pour  se  soustraire  à  la 
misère,  pour  éteindre  ses  dettes,  pour  faire  face  à 
tous  ses  engagements. 

A  pat  tir  de  ce  moment,  pour  augmenter  ses  ressour- 
ces, Adam  commença  d'écrire  régulièrement  des  feuil- 
letons, d'abord  au  Constitutionnel,  puis  à  l'Assemblée 
Nationale.  Ses  articles  eurent  beaucoup  de  succès  : 
ils  étaient  pleins  d'esprit,  de  malice,  et  d'entrain. 


D'autre  part,  Adam  arrivait  à  faire  créer  en  sa 
faveur  une  quatrième  classe  de  composition  au  Con- 
servatoire, qui  lui  assurait  2.400  fr.  de  traitement 
par  an.  «  Avec  cette  somme,  dit-il,  mon  journal  et 
l'Institut,  j'avais  400  fr.  par  mois.  »  C'était  tout  juste 
do  quoi  vivre.  Mais  il  fallait  aussi  payer  les  créan- 
ciers. Et  pour  cela,  Adam  ne  pouvait  compter  que 
sur  ses  droits  d'auteur.  On  ne  voulait  pas  de  Giralda. 
11  composa  le  Toréador  en  six  jours.  Ce  fut  un  succès 
immédiat  et  durable  (18  mai  1849). 

Adam  finit  par  obtenir  que  Giralda  fût  représentée. 
Mais  le  directeur  de  l'Opéra-Comique,  Perrin,  mettait 
toute  la  mauvaise  volonté  imaginable  à  monter  cette 
pièce,  sur  laquelle  il  ne  comptait  pas  du  tout.  11  la 
fil  passer  en  plein  été,  le  20  juillet  1850,  et  avec  une 
débutante  dans  le  rôle  principal,  M"e  Miolan  (la 
future  Mme  Carvalho),  dont  l'avenir  paraissait  en- 
core très  incertain.  Le  nouvel  opéra-comique  fut 
bien  accueilli,  mais  les  recettes,  vu  la  saison,  furent 
moins  élevées  que  ne  l'avait  espéré  Adam. 

C'est  alors  que  toutes  sortes  de  tristesses  assom- 
brirent l'existence  déjà  si  difficile  du  compositeur.  Le 
fils  qu'il  avait  eu  de  son  premier  mariage  se  suicide. 
Peu  après,  il  perd  une  toute  petite  fille.  Lui-même 
tombe  très  gravement  malade.  Il  n'était  pas  encore 
complètement  guéri  qu'il  mettait  sur  pied  en  quel- 
ques semaines,  et  sans  avoir  quitté  le  lit,  la  Poupée 
de  Nuremberg,  qui  fut  jouée  pour  la  première  fois  le 
21  février  1852. 

La  même  année,  Si  j'étais  roi  fut  donné  avec  une 
double  distribution,  chaque  rôle  ayant  été  appris 
par  deux  interprètes  qui  le  tenaient  alternative- 
ment. Ce  fut  là  une  innovalion  qui  piqua  la  curiosité 
du  public  et  ne  fut  pas  sans  contribuer  au  succès  de 
l'ouvrage. 

<c  L'année  1852,  dit  Adam  dans  ses  Mémoires,  vil 
terminer  mes  tourments  et  mes  ennuis  d'inlérêts. 
Je  pus  enfin  toucher  ce  que  je  gagnais.  Je  ne  devais 
plus  rien!  Ce  fut  une  grande  joie  dans  la  maison.  » 

Malheureusement,  au  mois  de  juin  1853,  Adam 
perdait  sa  belle-sœur,  la  femme  de  son  frère,  puis, 
trois  mois  après,  son  frère  lui-même,  qui  lui  laissait 
à  régler  des  affaires  extrêmement  embrouillées.  Et 
voici  de  nouveau  notre  compositeur  dans  les  soucis 
d'argent. 

Mais  l'activité  d'ADAM  était  incroyable.  Il  se  dé- 
pense sans  relâche  en  visites,  en  démarches;  il  pro- 
duit œuvre  sur  œuvre  avec  une  rapidité  extraordi- 
naire. Encore  une  fois,  il  triomphe  de  toutes  les  dif- 
ficultés. 

Trois  jours  après  la  représentation  des  Pantins  de 
Violette,  le  3  mai  1856,  Adam  mourut  subitement, 
dans  sa  cinquante-troisième  année. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  D'ADOLPHE  ADAM 

MUSIQUE    HE    THÉÂTRE 

Pierre  et  Marie  ou  le  Suidai  ménétrier,  1  acte,  Gymnase,  27  jan- 
vier 1824. 

Le  Baiser  au  porteur,  1  acte,  Gymnase,  9  juin  1S24. 

Le  Bal  champêtre,  1  acte,  Gymnase,  21  octobre  1S24. 

La  Haine  d'une  femme,  1  acte,  Gymnase,  1  i  décembre  1S24. 

L'Exilé,  2  actes,  Vaudeville,  0  juillet  1S25. 

La  Dame  jaune,  1  acte,  Vaudeville.  7  mais  1826. 

L'Oncle d'Amérique,  1  acte.  Gymnase,  14  mars  1 S 2 1 ", . 

L' Anonyme,  2  actes.  Vaudeville,  29  mai  1S20. 

Le.  Hussard  de  Frhlieim.  3  actes,  Vaudeville,  9  mars  1S27. 

L'Héritière  et  (Orpheline,  2  actes,  Vaudeville,  12  mai  1827. 

Perkins  Warbecl,  on  le  Commis  marchand,  2  actes,  Gymnase, 
15  mai  1S27. 

Mon  ami  Pierre,  1  aele,  Nouveautés,  S  septembre  1827. 

Monsieur  Boite.  3  actes.  Vaudeville,  t.".  novembre  IS27. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LTNSTITUT  DE  FRANCE    3497 


Lidda  ou  la  jeune  serrante,  1   acle.  Nouveautés,  16  janvier  1828. 

La  Reine  de  sei:e  „ns,  2  actes,  Gymnase,  30  janvier  1828. 

Le  Barbier  cliulclain  nu  lu  tôlerie  de  Fruncfort,  3  ailes.  Nouveautés, 
7  février  1828. 

Les  Comédiens  par  testament ,  1  acte,  Nouveautés  11  avril  1828. 

tes  Trois  Cantons  ou  lu  Fédération  Suisse,  3  actes,  Vaudeville, 
16  juin  1828. 

Xalcnline  ou  la  chute  des  feuilles,  Nouveautés,  2  octobre  1S2S. 

La  Cle,  3  actes.  Vaudeville,  5  novembre  1828. 

Le  Jeune  Propriétaire  et  le  rieur  fermier  nu  la  Ville  et  le  Villnije, 
3  actes,  Nouveautés,  6  février  1829. 

Pierre  et  Catherine,  2  actes,  Opéra-comique,  9  février  1829. 

Jsaure,  3  actes,  Nouveautés,  1«  octobre  1829. 

Henri  V  et  ses  compagnons  (pastiche),  3  actes,  Nouveautés,  27  fé- 
vrier 1S30. 

Rafaël  (postiche),  3  actes,  Nouveautés,  26  avril  1830. 

Danilowa,  3  actes,  Opéra-Comique,  avril  1830. 

La  Chatte  blanche,  ballet-pantomime,  en  collaboration  avec  Gide, 
Nouveautés,  26  juillet  1830. 

Trois  jours  en  une  heure,  1  acle,  en  collaboration  avec  Romagnesi, 
Opéra-Comique,  21  août  1S30. 

Les  Trois  Catherine,  3  actes,  en  collaboration  avec  Gide,  Nou- 
veautés, 1S  novembre  1830. 

Joséphine  ou  le  retour  de  Wuprum,  1  acte,  Opéra-Comique,  2  dé- 
cembre 1830. 

Le  Morceau  d'ensemble,  1  acte,  Opéra-Comique,  7  mars  1831. 

Le  Grand  Prix  ou  le  voyage  à  frais  communs,  3  actes,  Opéra-comi- 
que, 9  juillet  1831. 

Casimir  nu  le  premier  lUe-ii-lête,  2  actes,  Nouveautés,  1"  dé- 
cembre 1831. 

The  First  Cumpaign,  2  actes,  Covent-Garden,  1S32. 

The  Darb  Diamond,  1  acle,  Covent-Garden,  1S32. 

Faust,  ballet,  3  actes,  King's  Theater  (Londres),  1^33. 

Le  Proscrit  ou  le  tribunal  invisible,  3  actes,  Opéra-Comique. 
18  septembre  1833. 

Une  Bonne  Fortune,  1  acte,  Opéra-Comique,  23  janvier  1831. 

Le  Chalet,  1  acte,  Opéra-Comique,  25  septembre  1831. 

Lu  Marquise,  1  acte,  Opéra-Comique,  28  février  1835. 

Micheline,  1  acte,  Opéra-Comique,  29  juin  1835. 

La  Fille  du  Danube,  ballet,  2  actes,  Opéra,  21  septembre  1S36. 

Le  Postillon  de  Longjumeau,  3  actes,  Opéra-Comique,  13  octobre 
1836. 

Les  Mohicuns,  ballet,  2  actes,  Opéra,  5  juillet  1837. 

Le  Fidèle  Berger,  3  actes,  Opéra-Comique,  6  janvier  1S3S. 

Le  Brasseur  de  Preston,  3  actes,  Opéra-Comique,  31  octobre  1838. 

Régine,  2  actes,  Opéra-Comique,  17  janvier  1839. 

La  Reine  d'uni  jour,  3  actes,  Opéra-Comique.  19seplembre  1S39. 

Marskoi  Raobonick,  ballet,  2  actes,  Saint-Pétersbourg,  21  février 
1810. 

Ilie  Hamadrijaden.  opéra-ballet,  2  actes,  Berlin,  28  avril  1840. 

La  Rose  de  Péronne,  3  actes,  <  opéra-Comique,  décembre  1810. 

Gisellc  ou  les  Wittis,  ballet,  2  actes,  opéra,  28  juin  1841. 

La  Main  de  fer  ou  le  mariage  secret,  3  actes,  Opéra-Comique, 
26  octobre  1841. 

La  Jolie  Fille  de  Gand,  ballet,  3  actes,  Opéra,  22  juin  1842. 

Le  Roid'Yvetot,  3  actes,  Opéra-Comique,  13  octobre  1S12. 

Lambert  Simnel  (partition  de  Mompou,  achevée  par  Adam),  3  actrs, 
Opéra-Comique,  1  1  septembre  1813. 

Cagliastro,  3  actes,  Opéra-Comique,  10  février  1811. 

Richard  en  Palestine,  3  actes.  Opéra.  7  octobre  1844. 

Le  Diable  à  quatre,  ballet,  2  actes,  Opéra,  11  août  1815. 

The  Marble  Maiden,  ballet,  Th.  Drury  Lane,  27,  septembre   18  là. 

La  Bouquetière,  1  acle.  Opéra,  31  mai  1847. 

Les  Premiers  pas,  prologue  pour  l'in:uiguration  de  l'Opéra  Natio- 
nal, en  collaboration  avec  Auber,  Carafa  et  Hai.evy,  1 
acte,  Opéra  National,  15  novembre  1847, 

Grisélidis  on  les  cinq  sens,  ballet,  3  actes,  Opéra,  16  février  ISIS. 

Le  Toréador,  2  actes,  Opéra-Comique.  18  mai  1819. 

La  Filleule  des  fées,  ballet,  en  collaboration  avec  Clemenceau  de 
Saint-Julien, 3  acteset un  prologue, Opéra,  SoctobrelS49. 

Le  Fanal,  2  actes,  Opéra,  24  décembre  1849. 

Ciralda  ou  la  nouvelle  Psyché,  3  actes.  Opéra-Comique,  20  juil- 
let 1850. 

Les  Nations,  cantate.  Opéra,  6  aoôt  1851. 

La  Poupée  de  Nuremberg,  1  acte,  opéra  National,  21  février  1852. 

Le  Farfadet,  1  acle,  en  collaboration  avec  de  Groot,  Opéra-Comi- 
que, 19  mars  1852. 

S;  j'étais  roi,  3  actes,  Théâtre  Lyrique,  4  septembre  1852. 

La  Fête  des  Arts,  cantate,  opéra-Comique.  16  novembre  1852. 

Orfa,  ballet,  2  actes,  Opéra,  29  décembre  1852. 

La  Faridonduine,  drame  mêlé  de  chant,  5  actes,  Porte  Saint- 
Martin,  30  décembre  1852. 

Le  Sourd,  3  actes.  Opéra-Comique,  2  février  1853. 

Le  Roi  des  Halles,  3  actes,  Théâtre  Lyrique,  1 1  avril  1853. 

Le  Bijou  perdu,  3  actes,  Théâtre  Lyrique,  6  octobre  1853. 


Le  Muletier  de  Tolède,  ::  arles.  Théâtre  Lyrique,  lOdécembre  1854. 
A  Clichy,  1  acte,  T.iéâtre  lyrique,  21  décembre  1854. 
Victoire,  cantate,   Opéra  Comique  et  Théâtre  Lyrique,    13  sep- 
tembre 1855. 
I.e  Ronsard  de  Bercheny,  2  actes,  <  ipéra-Comique,  17  octobre  1S55. 
Falsla/f,  1  acte,  Théâtre  Lyrique,  18  janvier  1856. 
Le  Corsaire,  ballet.  2  acles.  Opéra,  23  janvier  1856. 
Cantate,  Opéra,  17  mars  1856. 

Mumzelle  Geneviève,  2  acles.  Théâtre  Lyrique,  21  mars  Ixr.o. 
Les  Pantins  de  Violette,  1  acte,  Bouffes-Parisiens.   29  avril  1SÔ6. 
Le  Dernier  Uni,  :;  actes,  inédit. 

MUSIQUE    HBI.lUIErsE 

Messe  solennelle,  4  voix  et  chœur,  orgue,  violoncelles,  contrebas- 
ses, trombones,  ophicléides  et  cornets  à  pistons,  église 
Saint-Eustache.   26  mars  1S37.  Paris,  Régnier-Canaux. 

Messe  à  trois  voix,  en  collaboration  avec  Clemenceau  de  Saint- 
Julien. 

Messe  de  Sainte-Cécile,  soli.  eh.-ur  et  nrchestre,  exécutée  le 
22  novembre  1850.  Pans,  Jules  Heinz. 

Messe  de  l'Orphéon,  en  collaboration  avec  Halkvv,  Clapisson  et 
Ambroise  Thomas.  Cathédrale  de  Meaux,  26  avril  1851. 
Paris,  Jules  Heinz. 

Mois  de  Marie  de  Saint-Philippe,  8  motets  avec  accompagnement 
d'orgue,  dédiés  à  Sa  Majesté  très  Iblèle  Doua  Maria  da  Glo- 
ria, reine  de  Portugal.  Paris,  Brandus. 

Domine  Salvum,  trio  et  chœur  avec  accompagnement  d'orgue, 
Paris,  Régnier-Canaux. 

Hymne  u  la  Vierge,  à  voix  seule.  Paris,  Gros. 

Soél,  à  voix  seule,  Paris,  Gros. 

Grande  Marche  religieuse  de  I  Annonciation. 

0  Salutaris,  à  deux  voix,  Paris,  Escudier. 

il  Salutaris,  avec  orgue  et  orchestre,  Paris,  Escudier. 

COMPOSITIONS    DIVERSES 

Romances,  mélodies,  ballades,  chansonnettes,  etc. 

Les  Métiers,  chœurs  populaires  à  4  voix  d'hommes.  Paris,  Brandus. 

Les  Enfants  de  Paris  (1848),  chœur  à  1  voix  d'hommes  sans  ac- 
compagnement. 

La  Garde  mobile  (1848),  chœur  à  quatre  voix  d'hommes  sans 
accompagnement. 

La  Marche  républicaine  (ISIS  ,  chœur  à  4  voix  d'hommes  avec 
accompagnement  d'orchestre. 

La  Muette,  chœur  à  4  voix  d'hommes  sans  accompagnement. 

Morceaur  pour  le  piano  et  pour  l'harmonium. 

Bibliographie. 

Adam  (Adolphe). — Souvenirs  d'un  musicien,  in-12.  Paris,  Lévy. 

—  Derniers  Sourenirs  d'un  musicien,  in-12,  Paris,  Lévy,  1859. 

Annuaire  dramatique  pour  /SS9.  Bruxelles. 

Aubavet  (Xavier).  —  Les  Jugements  nouveaux,  in-12.  Paris,  Li- 
brairie Nouvelle.  1800. 

Clément  (Félix).  —  Les  Musiciens  célèbres,  in-s<\  Paris,  Ha- 
chette, 1868. 

Escudier  (Léon). —   Mes  Sourenirs,  in-12,  Paris,  Dentu,  1803. 

Fétis.  —  Biographie  universelle  des  musiciens. 

A.  Pougin.  — Supplément  à  la  Biographie  de  Fetts. 

Halbvy.  —  Nolice  sur  ta  vie  et  les  nurrayes  de  M.  Adolphe  Adam, 
in-8°,  Paris,  Didot,  1859  (reproduite  dans  Souvenirs  el  Por- 
traits, in-12,  Paris,  Lévy,  1860). 

Mirecourt  (Eugène  de)  —  Adolphe  Adam,  in-18,  Paris,  Faure, 
1868. 

A.  Pouoin.  —  Adolphe  Adam,  in-16,  Paris,  Charpentier,  1*77. 


Daniel -François- Esprit  Aumbr  est  né  à  Caen  le 
29  janvier  1782.  Son  grand-père,  «  peintre  du  Roi  », 
sculptait  et  dorait  les  canons  de  Louis  XVI.  Son  père, 
officier  des  chasses  royales,  habitait  le  faubourg 
Saint-Denis,  à  Paris;  et  c'est  seulement  le  hasard 
d'un  voyage  d'agrément  qui  amena  sa  mère  à  lui 
donner  le  jour  dans  la  capitale  de  la  Normandie. 

La  Révolution  ruina  la  Camille,  et  l'ancien  officier 
des  chasses  royales  se  lit  éditeur.  Il  ouvrit,  rue  Saint- 
Lazare,  un  maeasin  d'estampes.  Sous  le  Directoire  et 
le  Consulat,  sa  situation  était  devenue  prospère,  et 
son  salon  était  fréquenté  par  les  artistes  à  la  mode. 
Le  jeune  Aliber,  âgé  de  16  ans,  jouait  du  piano  et  du 
violon,  et  chantait  agréablement.  Il  commençait 
même  à  composer,  en  amateur,  et  une  de  ses  ro- 
mances, le  Bonjour,  obtint  alors  une  certaine  vogue. 


3498 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONS AIDE  f>U  CONSERVATOIRE 


Mais  il  ne  songeait  pas  encore  à  se  consacrer  entiè- 
rement à  la  musique.  Sun  përe  voulait  qu'il  lui  suc- 
cédâl  et  qu'il  reprît  su  maison  d'édition.  Un  séjour 
de  Iti  mois,  que  le  jeune  homme  lit  à  Londres  pour 
s'initier  aux  affaires  et  apprendre  l'anglais,  fut  la 
seule  absence  un  peu  prolongée  qui  éloigna  pour  un 
temps  de  Paris  le  Parisien  obstiné  que  resta  toujours 

Al'RER. 

In  opéra-comique  Pn  un  arte,  l'Erreur  d'un  mo- 
ment, composé  en  1803  pour  une  société  d'amateurs, 
quelques  œuvres  de  musique  île  chambre  écrites  en 
1806  ne  sont  encore  que  des  passe-temps  de  dilet- 
tante. 

C'est  seulement  à  23  ans  qu'AuBEB,  présenté  par 
son  père  à  Ciieiutrini,  se  mil  tout  à  fait  sérieusement 
à  l'étude  de  la  musique  sous  la  direction  de  ce  maî- 
tre excellent,  et  suivit  dès  lors  résolument  sa  voca- 
tion. 

Après  quelques  succès  de  salon  qu'il  dut  surtout  à 
la  protection  du  comte  de  Caraman,  plus  tard  prince 
de  Chimay,  puis  de  la  fameuse  M""'  Tallien,  Auber 
débuta  au  théâtre  le  27  février  1813  avec  le  Séjour 
militaire,  opéra-comique  en  1  acte.  Mais  c'est  seule- 
ment avec  la  Bergère  châtelaine  (1820)  qu'il  devait 
commencer  à  retenir  l'attention  du  public. 

L'arrivée  à  Paris  de  Rossini  fut  une  bonne  fortune 
.  pour  le  jeune  compositeur.  Auber  entra  en  relations 
avec  le  maître  :  il  étudia  ses  œuvres,  lui  emprunta 
quelques-unsde  ses  procédés, mais surtouts'écbauffa, 
s'anima  au  contact  d'un  artiste  dont  la  verve  prime- 
sautière  l'émerveillait. 

Auber  fit  aussi,  à  cette  époque,  la  connaissance  de 
Scribe,  et  dès  lors,  commença  entre  le  littérateur 
et  le  musicien  celte  collaboration  de  quarante 
années  qui  leur  valut  à  tous  deux  une  réputation 
incomparable  dans  le  monde  entier,  et  la  fortune. 

Voici  comment  ils  entendaient  le  travail  en  com- 
mun :  Scribe  traçait  le  plan  de  l'ouvrage,  puis  Auber 
cherchait  ses  principaux  motifs;  après  quoi,  Scribe 
y  adaptait  des  paroles.  La  poésie  ne  pouvait  pas  être 
davantage  la  très  humble  servante  de  la  musique. 

Auber  avait  perdu  son  père,  après  une  fin  d'exis- 
tence attristée  par  des  revers  de  fortune.  Il  avait 
à  sa  charge  une  nièce,  un  frère  et  une  sœur.  Il  ne 
regrettait  point  d'avoir  choisi  la  carrière  musicale, 
où  il  commençait  de  recueillir,  non  seulement  des 
applaudissements,  mais  encore  d'importants  droits 
d'auteur. 

Dès  lors,  la  vie  d'AuBER  s'écoule  sans  incidents  no- 
tables. Elle  n'est  ni  passionnée,  ni  romanesque.  Elle 
est  tout  unie,  régulière,  presque  monotone. 

Auber  n'avait  pas  écrit  une  œuvre  qui  compte 
avant  la  quarantaine.  Mais  il  se  rattrapa  ensuite.  En 
30  ans,  jusqu'en  1848,  il  fit  représenter  34  ouvrages; 
et  de  1849  à  1870,  il  augmenta  encore  son  bagage  de 
Il  œuvres  dramatiques. 

Auber  fut  donc  un  grand  travailleur.  Mais,  en  même 
temps,  il  fut  un  mondain.  Jamais  il  ne  manqua  sa 
promenade  à  cheval  quotidienne,  ni  ses  visites,  ni 
les  soirées  à  la  mode.  Il  conciliait  les  exigences  con- 
tradictoires de  sa  vie  en  partie  double  grâce  a  un  pri- 
vilège inestimable  de  son  tempérament  :  il  n'avait 
pas  besoin  de  sommeil. 

Il  finit  par  affecter,  à  l'égard  de  son  art,  une  pro- 
fonde indifférence  et  même  de  l'ennui  :  «  J'ai  aimé 
la  musique  jusqu'à  trente  ans,  disait-il,  une  véri- 
table passion  de  jeune  homme!  Je  l'ai  aimée  tant 
qu'elle  a  été  ma  maîtresse,  mais  depuis  qu'elle  est 
devenue  ma  femme!...  »  Et  il  déclarait  à  Richard 


Wagner  :  «  Je  n'aime  que  les  femmes,  les  chevaux, 
les  boulevards  et  le  bois  de  Boulogne.  >• 

C'était  un  petit  homme  élégant  et  fin,  plein  d'es- 
prit, et  qui,  sans  être  beau,  plaisait  infiniment  aux 
femmes.  Tous  les  soirs,  il  allait  au  théâtre  ou  dans 
quelque  salon,  et  il  rentrait  tort  tard  chez  lui,  sou- 
vent avec  quelques  amis,  pour  le  souper  tradition- 
nel qui  l'attendait.  A  6  heures  il  était  au  travail,  et 
il  y  restait  jusqu'à  midi. 

En  1829,  Aurer  fut  nommé  membre  de  l'Institut; 
en  1839,  directeur  des  concerts  de  la  Cour;  en  1842, 
directeur  du  Conservatoire  de  musique,  en  l'empla- 
cement de  Ciieruhini,  démissionnaire;  en  1832,  direc- 
teur de  la  Chapelle  impériale.  En  1823,  il  avait  reçu 
la  croix   de  chevalier  de   la    Légion    d'honneur;  en 

1833.  il  était  promu  officier;  en  1847,  commandeur; 
en  1861,  grand  officier. 

Sur  la  fin  de  ses  jouis,  Auber  disait  :  «  Il  ne  faut 
d'exagération  en  rien;  j'ai  trop  vécu.  »  11  mourut  en 
elfet  fort  Agé,  le  12  mai  1871,  dans  sa  quatre-vingt- 
dixième  année. 

Aurer  a  incarné  l'esprit  de  l'opéra-comique  français 
au  xix"  siècle,  et,  à  ce  titre,  son  importance  histori- 
que est  indéniable.  Ce  fut  un  gai  conteur,  plein  d'a- 
dresse, un  peu  froid,  un  peu  sec,  mais  vraiment 
spirituel.  11  faut  bien  avouer  tout  de  même  que  cet 
art  très  «  bourgeois  »  a  contribué  plus  que  nul  autre 
à  détourner  les  Français  de  toute  musique  sérieuse 
et  profonde,  de  tout  idéal  un  peu  élevé,  et  a  répandu 
—  au  détriment  d'oeuvres  plus  nobles  —  le  goût 
superficiel,  et  bien  parisien,  du  «joli  ». 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES   D'AUBER 

OPÉRAS    ET    OPÉRAS-COMIQUES 

1805.  L'Erreur  d'un  moment,  1  acte  de  Monvel. 

1812.  Courin,  3  actes  de  Népomucène  Lemercier. 

1813.  Le  Séjour  militaire,  1  acte  de  Bouilly  et  Dupaty. 
1819.  Le  Testament  et  les  billets  doux,  1  acte  de  Planird. 
1S20.  La  Bergère  châtelaine,  3  actes  de  Flanard. 

1821.  Emma  ou  la  promesse  imprudente.  3  actes  de  Planard. 
1823.  Leicesler  nu  le  château  de  Kenilworth,  3  actes  de  Scribe  et 
Mélesville. 

—  La  Neige  ou  le  nourel  Eginhard,  4  actes  de  Scribe  et  Ger- 

main Delavigne. 

—  Vendante  en  Espagne,  1  acte  de  Mennechet  et  Empis  (eCcol- 

laboration  avec  Hérold). 
1821.  Les  Trois  Genres,  1  acte  de  Scribe  (en  collaboration  avec 

BoÏELOIEU). 

—  Le  Concert  li  la  cour  ou  la  débutante,  1  acte  de  Scribe  et  Mé- 

lesville. 

—  Léocadie,  3  actes  de  Scribe  et  Mélesville. 

1S25.  Le  Maçon,  3  actes  de  Scribe  et  Germain  Delavigne. 
1826.  Le  Timide  ou  le   nouveau  séducteur,    1  acte    de    Scribe    et 
Xavier  (Saintine). 

—  Fiarella,  3  ac.tes  de  Scribe. 

1828.  La  Muette  de  Porlici,  5  actes  de  Scribe  et  Germain  Dela- 
vigne. 
1S29.  La  Fiancée,  3  actes  de  Scribe. 

1830.  Fra  Diarolo  ou  l'h'ileltcrie  de  Terracine,  3  actes  de  Scribe. 

—  Le  Dieu  et  la  Butjadére,  2  actes  de  Scribe. 

1831.  Le  Philtre,  2  actes  de  Scribe. 

—  La  Marquise   de  Brinrilliers,  3  actes  de  Scribe  et  Castil- 

Blaze. 

1832.  Le  Serment  nu  les  [aux  mounuijeurs,   3  actes  de  Scribe  et 

Mazéres. 
1S33.  Gustave  III  ou  le  bal  masqué,  5  actes  de  Scribe. 

1834.  Leslocq  ou  l'intrigue  et  l'amour,  4  actes  de  Scribe. 

1835.  Le  Cheval  de  Bronze,  3  actes  de  Scribe. 
1S36.  Action,  1  acte  de  Scribe. 

—  Les  Chaperons  blancs,  3  actes  de  Scribe. 

—  L'Ambassadrice,  3  actes  de  Scribe. 
1837.  Le  Domino  noir,  3  actes  de  Scribe. 

1839.  Le  Lnc  des  fées,  5  actes  de  Scribe  et  Mélesville. 

1840.  Zanetta  ou  jouer  arec  le  [eu,  3  actes  de  Scribe  et  Saint- 

Georges. 

1S41.  Les  Diamants  de  la  Couronne,   3  actes  de  Scribe  el  s, nul- 
Georges. 

1842.  Le  Dur  d'Olnune.  :\  actes  de  Scribe  cl  Saintine. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3409 


La  Part,  du  Dialilt,  3  actes  de  Scribe. 

La  Sirène,  3  actes  de  Scribe. 

La  Bnrcarolle  ou  l' autour  et  la  musique,  3  actes  de  Scribe. 

Ilaydèe  ou  le  Secret,  3 actes  de  Scribe. 

L'Enfant  prodigue,  5  actes  de  Scribe. 

Zerline  ou  lu  corbeille  d'oranges,  2  actes  de  Scribe. 

Marco  Spada,  3  actes  de  Scribe  et  Germain  Delavigne. 

Jenny  Bell,  3  actes  de  Scribe. 

Manon  Lescaut,  3  actes  de  Scribe. 

La  Circassienne,  3  actes  de  Scribe. 

La    Fiancée  du  roi  de  Gurbe,  3  actes  de  Scribe  et  Sait 

Georges. 
Le  Premier  jour  de  bonheur,  3  nctes  de  d'Knnery  et  Corme 
Rive  d'amour,  3  actes  de  d'Ennery  et  Cormon. 


Arrangement  de  Marco  S/o,da  en  haibd    :;  .i.-ic- 

Direrlisscmeul  de  Versailles, 

Cérémonie  du  lîtiuri/eins  i/cutiihiimine. 

Air  de  danse  pour  Iphigcnie. 

Pas  styrien. 

Diane  chasseresse. 

2  pas  pour  Mlle  Taguoni. 

Cachncha. 

El  Taleo. 

Pas  de  dsux  pour  Mllc  Aogosta. 

Pas  à  deux  faces. 

Pas  des  hussards. 

L'Athénienne. 

Pas  de  deux  pour  la  Muette, 


.l'.TE    RELIcillî 


Messe  de  Chimay. 

Litanies  de  la  sainte  Vier 

Noël. 

Hymne  à  sainte  Cécile. 

:>0  motels  ou  pièces  religii 


Douze  caulates. 
Scènes  et  airs. 
Romances  cl  chan. 


MUSIQrE    INSTRUMENTAI  E 

Pour  orchestre  : 
Concerto  pour  riolon. 
Deux  ouvertures  de  concert. 
Marche  funèbre  pour  les  funérailles  de  Napoléon  !•'. 
Marche  triomphale  pour  l'Exposition  unirersclle  de  Londr 
Marche  militaire. 

Pour  instruments  à  cordes  : 
2  quatuors. 

Fugue  sur  un  thème  de  Funiska. 
Trio,  piano,  riolon  et  violoncelle. 
Concerto  pour  violon,  alto,  violoncelle  et  piano. 
Derniers  quatuors, 
ft  Pièces  pour  S  violoncelles 
S  Pièces  pour  quatuor. 
S  Concertos  faussement  attribués  à  Umibe. 

Pour  piano  : 


illustres.    T.. nie    VII 


Bibliographie 

Anonyme.    —    Galerie  des   Contempora 

M.  Auber,  Paris,  1S44. 
Bertrand  (Gustave).  —  Les  Xatianalites  musicales  étudiées  dans 

le  drame  lyrique,  1  vol.  in-S»,  Paris,  Didier,  1S72. 
Blaze  de  Bcry  (Henri1.  —  Musiciens  contemporains,  1  vol.  in-Sn, 

Paris,  Michel  Lévy,  1856. 
Bulletin  de  la  Société  des  Beaux-Arts  de  Caen.  Discours  prononcés 

à  l'inauguration  de  la  statue  d'AuBER,  Caen,  18S5. 
Carlez  (Jules).—  L'Œuvre  d'Auber,  1  vol.  in-S°,  Caen,  lS7i. 
—  Auber,  aperçu  biographique  et  intime,  1875. 
Delaborde  (vicomte  Henri).  —  Eloge  d'AuBER  prononcé  à  l'Aca- 
démie des  beaux-arts,  1871. 
Dumas  fils  (Alexandre).   —   Discours  prononcé   aux    obsèques 

d'ADBER,  1871. 
Eyma  (Xavier  et  Arthur  de  Lucv).  Ecrivains  et  artistes  rivants, 

français  et  étrangers,  1  vol.  in-Ui,  Paris.  ISil. 
Gumprecbt  (Otto).  —  Xeiiere  Meister,  musil.alisvlie  Lcbens  und  Chu- 

rakterbilder,  2  vol.  in-S»,  Leipzig,  1SS3  (2'  éd.). 


Jdi.i.ien  (Adolphe).  —  Musiciens  d'aujourd'hui  (2'  série),  1  vol. 

in-8»,  Paris.  1891. 
Legentil  (V.).  —  Une  Statue  à  Auber,  brochure  gr.  in-8",  Capn, 


LOMÉNIE  (Louis 

—  r.„i 

•rie  des  contemporains 

Id.siies 

par  m 

homme  de 

in-16,  Paris,  1842. 

Malherbe  (Char 

—  A  ni 

■r.  1  vni.de  la  collccli 

n  «  Les 

Musi- 

ciens  célt 

.  Pa 

!s.  Laurens,  101 1. 

Mirecoort  (Eue 
Podgin  (Arthurl 

éne 

de).  - 

-  Les  Contemporains,   brochure 

in-16, 

1 

Auber, 

les  commencements,  le 

origines  de  sa 

Carrière,  1 

vol 

in-12 

Pans,  1873. 

—  Musiciens  du 

//>- 

eurien 

c  siècle,  I  vol.  in-8», 

Paris, 

'isch- 

hacher,  1011. 
Scudo  (B.).  —  Critique  et  littérature  i 

Hachette,  1859. 
Soubies(A.)  et  Malherb 

La  seconde  salle  Favarl, 

Flammarion,  1S92. 
Wagner    (Richard).    —   Erinnerung  an  Auber.   t.  IX,    Fritzch, 

Bazin. 

François-Emmainiel-Joseph  Bazin  est  né  à  Marseille 
le  4  septembre  I8IG.  Il  entra  au  Conservatoire  de 
Paris  le  18  octobre  1834.  Il  étudia  l'harmonie  et  l'ac- 
compagnement avec  Ijouhlen  et  Le  Couppey,  l'orgue 
avec  Benoist,  la  composition  avecHALÉvv  et  Berton. 
En  183(5,  il  obtint  la  première  récompense  pour  l'har- 
monie et  l'accompagnement;  l'année  suivante,  le 
second  prix  d'orgue,  et  le  second  de  contrepoint  et 
de  fugue.  En  1830,  il  concourut  pour  le  prix  de  Borne 
et  une  seconde  récompense  lui  fut  décernée  :  en 
même  temps,  il  remportait  le  premier  prix  d'orgue 
au  Conservatoire.  Enfin  sa  cantate  Loyse  de  Mont- 
fort  lui  valut,  en  1840,  le  premier  grand  prix  de 
Rome. 

Pendant  son  séjour  en  Italie,  Bazin  composa  une 
Messe  solennelle,  qui  fut  exécutée  à  l'église  Saint- 
Louis  des  Français  en  1842  et  1843,  l'oratorio  la 
Pentecôte,  et  le  psaume  Super  flumina  Babylonis. 

De  retour  à  Paris,  Bazin  fut  nommé  professeur  de 
solfège  au  Conservatoire;  il  y  devint  par  la  suite 
professeur  d'harmonie. 

Il  lit  ses  débuts  à  l'Opéra-Comique  en  mai  1846 
parun  petitacte  intitulé  le  Trompette  de  M.  le  Prince, 
qui  fut  accueilli  assez  favorablement.  Le  Malheur 
d'être  jolie  (1847),  la  Nuit  delà  Saint-Sylvestre  (1849), 
Madelon  (1852),  Mattre  Palhelin  (1836),  les  Désespérés 
(1859),  assurèrent  à  leur  auteur  l'estime  de  la  cri- 
tique. Mais  Bazin  ne  connut  le  succès  véritable  au- 
près du  grand  public  qu'avec  les  deux  ouvrages  sui- 
vants :  le  Voyage  en  C7w'ne(1865),  et  l'Oursel  le  Pacha 
(1869). 

Cependant,  Bazin  avait  acquis  une  grande  réputa- 
tion comme  professeur.  Son  Cours  d'harmonie  théo- 
rique et  pratique  avait  été  très  remarqué.  Lorsque,  à 
la  mort  d'AuBER  (1871),  Ambroise  Thomas  fut  nommé 
directeur  du  Conservatoire,  Bazin  lui  succéda  comme 
professeur  de  composition.  L'année  suivante,  il  était 
élu  membre  de  l'Académie  des  beaux-arts. 

Il  mourut  à  Paris  le  2  juillet  1878. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  FRANÇOIS  BAZIN 


1840. 

Loyse  de  Monlforl,  cantate. 

1842 

La  Pentecôte,  oratorio. 

1846 

Le  Trompette  de  M.  le  Prince,  opéra- 

1847 

/.c  Malheur  d'être  jolie,  opéra-comiqi 

ISi'.l 

La  Nuit  de  la  Saint-Sgleeslre,  opéra. 

IS.-.2 

Madelon,  opéra-comique. 

1S56. 

Maître  Palhelin,  opéra-comique. 

1859. 

Les  Désespères,  opéra-comique. 

1865 

Le  Voyage  en  Chine,  opéra-comique. 

1869 

LOurs  et  le  Pacha,  opéra-comique. 

ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIO.VVAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


I.r  Départ  des  Apôtres.  \ 

Claire  ii  la  France ,  ! 

les  Vendangeurs  du  Rhin.  >  Chœurs. 

les  Noces  de  Cerna.  1 

M  Mu  devant  Rome.  \ 

tes  Nocts  de  l'Adriatique.,  / 

Truite  d'harmonie  théorique  et  prati<iue. 
Traité  de  contrepoint. 


Fétis.  —  Biniiriipliie  des  mnsieiens. 
Podgin.  —  Supplément  u  t.i  lliojirapliie  dr  Fclis. 
Massbnkt.  —  Notice  lue  ii  l'Académie  des  Béai 
tel  1870. 


Louis-Hector  Berlioz  est  né  à  la  Côte  Saint-André 
(Isère)  le  11  décembre  1803.  —  Son  goùtpourla  mu- 
sique qui,  dès  l'âge  de  12  ans,  lui  faisait  composer 
des  romances  et  des  quintettes,  dont  il  reprendra 
plus  tard  les  thèmes  dans  l'ouverture  des  Francs 
Juges  et  dans  la  Symphonie  fantastique,  se  déve- 
loppa en  dépit  de  tous  les  obstacles  qu'il  rencontrait 
dans  l'indilférence  complote  de  ses  compatriotes  (il 
n'existait  pas  un  seul  piano  à  la  Côte  Saint-André)  et 
dans  l'hostilité  de  sa  famille,  qui  voulait  faire  de  lui 
un  médecin  et  l'envoya  dans  ce  but  à  Paris.  Mais  lu, 
le  théâtre  qu'il  fréquente,  les  opéras  de  Gluck  pour 
lesquels  il  s'enthousiasme,  l'amitié  de  Lesueur  nour- 
rissent sa  passion.  Elève  du  Conservatoire,  à  23  ans, 
sans  même  avoir  eu  le  temps  d'apprendre  les  pre- 
miers éléments  de  son  art,  il  produit  trois  chefs- 
d'œuvre  :  les  Francs  Juges  (1827),  les  Huit  Scènes  de 
Faust  (1828),  qui  contiennent  les  pagesles  plus  carac- 
téristiques de  la  Damnation,  la  Symphonie  fantasti- 
que, épisode  de  la  vie  d'un  artiste  (1830). 

Malheureusement,  Berlioz  ne  saura  pas  discipliner 
•son  génie  naturel  ;  il  lui  aurait  fallu  apprendre  l'har- 
monie, le  contrepoint,  la  composition.  Son  profes- 
seur Lesueur  était  incapable  d'être  pour  lui  un  guide 
sur  à  une  époque  où  les  théories  les  plus  contradic- 
toires se  heurtaient;  toute  son  influence  se  réduisit 
à  l'orienter  vers  la  musique  descriptive  et  la  sym- 
phonie à  programme.  Jamais  Berlioz  ne  s'astreindra 
à  une  étude  minutieuse  des  opéras  de  Gluck  ou  des 
symphonies  de  Beethoven,  dont  il  entendit  les  pre- 
mières exécutions  à  Paris;  il  se  contentera  de  les 
sentir  avec  son  âme  passionnée.  Emporté  par  sa  sen- 
sibilité, entraîné  par  son  imagination,  il  dédaignera 
d'apprendre  «  le  métier»;  créateur  d'émotions  musi- 
cales d'un  ordre  absolument  nouveau,  sensible  sur- 
tout à  des  sonorités  d'orchestre,  mais  incapable  de 
construire,  Berlioz  restera  pénétré  de  l'idée  roman- 
tique que  le  délire  de  la  passion  suffit  à  créer  le  chef- 
d'œuvre.  En  même  temps,  par  manque  de  volonté,  il 
n'orientera  vers  un  idéal  précis  ni  sa  vie  ni  son  œuvre. 
Il  les  livrera  l'une  et  l'autre  aux  caprices  du  hasard, 
aux  suggestions  de  ses  sentiments  du  moment  ;  d'a- 
bord romantique  plus  exagéré  que  les  romantiques 
les  plus  farouches,  plus  tard,  son  admiration  pour 
Gluck,  son  sens  de  la  beauté  artistique,  son  culte 
pour  Virgile  feront  de  lui  un  classique  par  la  noblesse 
et  la  pureté  de  lignes  de  certaines  pièces;  mais  tou- 
jours, il  restera  incapable  de  parfaire  une  œuvre 
dans  toutes  ses  parties.  Toujours  à  côté  de  trouvail- 
les de  génie,  on  peut  relever  chez  lui  des  incohé- 
rences, des  faiblesses.  Par  là  s'expliquent  toutes  les 
tristesses  de  sa  vie  artistique  et  sentimentale;  par  là 
s'expliquent  ses  échecs,  ses  découragements. 

En  1830,  après  trois  tentatives  vaines,  Berlioz 
finissait  par  obtenir  le  prix  de  Borne.  D'Italie,  il  rap- 


porte l'ouverture  du  Roi  Lear  et  Leiio  ou  le  Retour  à 
la  vie.  Mais  le  succès  d'enthousiasme  qu'il  avait 
obtenu  auprès  du  public  entre  1828  et  1830,  il  ne  le 
retrouve  plus;  malgré  tous  ses  efforts  pour  entretenir 
sa  popularité  par  le  spectacle  d'une  vie  bizarre  et 
tourmentée,  qu'il  étale  complaisamment  aux  yeux 
de  tous,  malgré  ses  multiples  articles,  particulière- 
ment dans  le  Journal  des  Débats,  où  il  se  révèle 
comme  un  écrivain  spirituel  et  mordant. 

De  plus  en  plus,  la  faveur  du  public  l'abandonne; 
le  zèle  de  quelques  amis  parvient  à  soutenir,  au 
moins  en  apparence,  le  succès  d'Harold  en  Italie 
(1834)  et  du  Requiem  (1837).  Après  l'échec  de  Benve- 
nutoCellini,  sifflé  en  1838,  il  faut  toute  la  réclame 
laborieusement  faite  par  Berlioz  pour  assurer  à  Ro- 
méo et  Juliette  un  succès  factice  (1839).  La  Symplwnie 
funèbre  et  triomphale,  composée  pour  l'inauguration 
de  la  Colonne  de  Juillet  (1840),  se  perd  au  milieu  des 
clameurs  soulevées  par  les  passions  politiques.  La 
Damnation  de  Faust  (1846)  passe  inaperçue. 

L'étranger,  il  est  vrai,  accueille  plus  favorablement 
les  œuvres  de  Berlioz,  mais,  malgré  les  consolations 
qu'il  trouve  dans  ses  tournées  en  Allemagne  (1843), 
en  Autriche  (1845)  et  surtout  en  Bussie  (1843),  l'ar- 
tiste se  déclare  en  1848  «  vieux,  fatigué,  pauvre  d'il- 
lusions ».  Il  doute  de  son  œuvre;  il  a  perdu  la  foi 
dans  son  art;  sa  jeunesse  s'est  en  allée,  emportant 
avec  elle  ses  espoirs  et  ses  rêves.  Ce  désenchante- 
ment se  manifeste  dans  les  dernières  de  ses  œu- 
vres, dans  l'Enfance  du  Christ  (1850-1854),  dans  les 
Troyens  (1855-1863),  dans  Béatrice  et  Rénédict  (1862). 
Sa  vie  sentimentale  ne  pouvait  lui  faire  oublier  les 
déboires  de  sa  vie  d'artiste.  Les  idées  romantiques 
sur  bs  droits  absolus  de  la  passion  firent  son 
malheur.  Tout  jeune,  séduit  par  la  façon  dont  elle 
jouait  la  Juliette  de  Shakespeare,  Berlioz  s'était 
épris  d'une  actrice  anglaise,  Henriette  Smithson,  qui 
le  repoussa.  Dans  son  désespoir,  il  accepte  toutes 
les  calomnies  qu'on  lui  rapporte  sur  son  idole;  il  se 
venge  de  ses  dédains  par  l'odieux  portrait  qu'il  trace 
d'elle  dans  la  Symphonie  fantastique.  Plus  tard,  par 
une  de  ces  inexplicables  inconséquences  de  l'amour, 
lorsque  Henriette  Smithson  est  devenue  vieille,  lors- 
qu'elle est  endettée,  il  l'épouse,  pour  s'apercevoir 
aussitôt  qu'elle  ne  répond  en  rien  à  l'image  que  sa 
fantaisie  s'était  faite  d'elle,  m'abandonne  alors  pour 
une  mauvaise  chanteuse  espagnole,  Maria  REcio,qui 
le  couvre  de  ridicule,  l'oblige  à  lui  chercher  des  en- 
gagements, mais  qu'il  aime.  Les  deuils  se  multiplient 
autour  de  lui.  Successivement,  disparaissent  son 
père,  sa  mère,  Henrietle  Smilhson,  Maria  IIecio,  son 
fils.  Pour  Berlioz,  c'est  l'isolement,  c'est  l'ennui, 
c'est  le  vide  d'une  existence  sans  croyance  et  sans 
but.  Sans  espoir,  sans  enthousiasme,  par  habitude, 
parentrainement,  ilachèvela  tâche  commencée;  crai. 
gnant  la  mort,  et  l'appelant  comme  une  libératrice. 

Le  8  mars  1869  s'achevait  enfin  dans  la  tristesse 
une  vie  brillamment  commencée,  lamentablement 
terminée,  parce  que,  pour  reprendre  une  phrase  de 
Berlioz  lui-même,  «  le  hasard...  y  avait  joué  un  trop 
grand  rôle  »,  parce  que,  victime  de  sa  sensibilité, 
l'artiste  n'avait  pas  su  l'organiser,  parce  que  la  vo- 
lonté lui  avait  toujours  manqué. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  BERLIOZ 

Mrsiyci;    SYMPHONIQUK    ET    PRAMÂTIQriî 

Le  Cherat  arabe,  cantate  pour  basse  et  orchestre,  1 S22. 
Le  Passai/e  de  lu  mer  Romje,  oratorio.  1S25,  détruit. 
La  Mort  d'Orphée,  Concours  de  Rome,  1827. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3501 


Serve  héroïque  sur  lu  Révolution  grecque,  1826. 

Grande  Ouverture  de  Warerley,  1S27-1S2S,  op.  1,  publiée  chez  Ri- 

chaull. 
Ouverture   des  Francs  Juges,   IS28.  op.    3,    publiée  en    1S34  chez 

Richault. 
Huit  Scènes  de  Faust,  182S,  publiées  en  1828  chez  Schlesinger. 
Episode  de  la  vie  d'au  artiste,  symphonie  fantastique,   1830-1832, 

publiée  en  1846  chez  Richault. 
La  Marseillaise,  pour  grand  orchestre  et  double  chœur,  1S30. 
Fantaisie  sur  ta  Tempête,  pour  chœur,  orchestre  et  piano,  1830. 
Ouverture  dnCorsaire,  1831,  op.  21,  corrigée  et  publiée  en  1855. 
Grande  Ouverture  du  Roi  Lear,  1831,  op.  -S. 
lnlrata  di  Bob  Roy  Mac  Gregor,   1831-1832,  publiée  en  1900,  par 

MM.  Gh.  Mai.hkrbe  et  Weingartner. 
Le  Retour  à  la  vie,  faisant  suite  à  la  Symphonie  fantastique,  1831- 

1832,  éditée  en  1855. 
Les  Francs  Juges,  opéra,  1S27-1834. 

llarold  en  Halte,  symphonie  en  quatre  parties  avec  un  alto  prin- 
cipal, 1834,  publiée  chez  Richault. 
Renveaulo  Cellini,  opéra  en  deux  actes,  1834-1837,  op.  23. 
Romeo  et  Juliette,  grande   symphonie  dramatique,  1839,  op.  17, 

chez  Brandus,  1857. 
Symphonie  funèbre  et  triomphale,  pour  harmonie  militaire,  1S40, 

op.  15,  chez  Brandus. 
Le  Freischûtz,  opéra  romantique  en  trois  actes,  musique  de  Cari 

Maria  ne  Weiier,  celle  des  récitatifs  de  M.   Hector  Ber- 
lioz, 1841,  chez  Brandus. 
Le  Carnaval  romain,  ouverture  caractéristique  à  grand  orchestre, 

1843,  op.  9,  chez  Brandus. 
La  Tour  de  Nice,  ouverture,  1844,  détruite. 
Marche  marocaine  do  Léopold  de  Meyer.  instrumentée  par  Berlioz, 

1845,  chez  Escudier. 
Marche  hongroise   de  Rakoc://    (introduite  dans  la   Damnation  de 

Faust),  1S16. 
Lu  Damnation  de  Faust,  légende  dramatique  en   4  parties,   1846, 

publiée  en  1854. 
La  Nonne  sanglante,  opéra,  1S41-1S47,  détruit  en  grande  partie. 
Marche  funélire  pour  la  dernière  scène  dllamlel,  pour  orchestre  et 

chœur,  op.  1S,  n»  3,  1847. 
Apothéose,   arrangement  sur  des  paroles  d'A.  Deschamps  de  la 

dernière  partie  de  la  Symphonie  fnnèbre. 
Vax  poputi,  deux  grands  chœurs  avec  orchestre,  op.  20,  publiée 

chez  Richault,  1851. 
La  Fuite  en  Egypte,  fragment  d'un  mystère  en  style  ancien  publié 

chez  Kistner  à  Leipzig. 
Tristia,  trois  chœurs  avec  orchestre,  1S5Ù,  op.  18,  Richault,  1854. 
Arrangement  pour  orchestre  du  Roi  des  Aulnes,   de  Schui.ert,  1S50. 
L'Enfance  du  Christ,  trilogie  sacrée,  1S54,  chez  Richault,   1855. 
L'Impériale,  cantate  pour  deux  chœurset  orchestre,  1855, op. 26, 

chez  Brandus. 
Les  Troyens,  poème  lyrique  en  deux  parties  —  I.   La    Prise  de 

Troie.  II.  Les  Troyens  à  Carthage,  1X56-1X63,  chez  Chou- 

dens,  1863. 
Plaisir  d'Amour  de  Martini,  instrumenté  pour  petit  orchestre,  1859. 
Le  Temple  universel,  pour  double  chœur  el  orgue,  op.  2s,  1860-6 1 . 
Béatrice  et  Bcnedict,  opéra-comique  en  deux  actes,    1860-1862, 

chez  Brandus,  1862. 


5ICSIQ.CE    DU   CHANT 

(Chœurs.  —  Mélodies.) 

Recueil  de  Romances,  avec  accompagnement  de  guitare,  1815- 
1829  (manuscrit  au  musée  de  la  Cote  Saint-André). 

Romances  tirées  de  l'Estelle  de  Florian. 

Le  Dépit  de  la  Bergère,  romance.  1823,  chez  Auguste  Le  Duc. 

Le  Montagnard  exilé,  chant  élégiaque  à  deux  voix  égales,    1826. 

Toi  qui  m'aimes,  rerse  des  pleurs,  romance,  1826. 

Amitié,  reprends  ton  empire,  romance,  1S26. 

Le  Maure  jaloux,  romance,  1826. 

Pleure,  pauvre  Colette,  romance  à  deux  voix  égales.  1826. 

Le  Pécheur,  ballade,  1827,  publiée  ,-n  IS32-1S33. 

Quartette  e  Coro  dei  Magot,  1828-1832,  envoi  de  Rome. 

Ilcrminie  et  Tanerede,  cantate  de  concours,  1828. 

Fugue  à  4,  fugue  à  U  parties,  1828  ou  1829. 

Cleopùlre,  cantate  de  concours,  1829. 

Neuf  Mélodies  irlandaises  pour  une  ou  deux  voix,  1829-1S30, 
rouvre  2,  chez  Richault  en  1S30  et  1S34. 

L<t  Dernière  Nuit  de  Sardanapale,  cantate  de  concours,  1830. 

Chanson  de  brigands,  n°  2  de  Lelio,  1S30. 

Chaut  de  bonheur,  tiré  de  la  Mort  d'Orphée,  a"  3  de  Lelio,  publié  en 
1832  ou  33. 

Méditation  religieuse.  <.  Ce  inonde  entier  n'est  qu'une  ombre  fugi- 
tive »,  chœur  à  six  voix,  lS3l,n"  1  de  Tristia.  op.  18. 

Lu  Cuplire,  mélodie  avec  violoncelle  ad  libitum,  1832,  publiée 
chez  Richault,  op.  12. 

Sara  la  baigneuse,  pour  trois  chœurs  et  deux  voix  d'hommes, 
1831,  édité  pour  deux  voix  et  piano,  chez  Richault,  1850, 


Le  Jeune  Pâtre  breton,  fragment  de  Marie  de  Brizeux 


Les  Champs,    mélodie    publiée  par  le  journal  la  Romance  (avril 
1834),  édition  allemande,  Vienne,  Mechetti. 

Je  crois  eu  vous,  publiée  par  le  journal /e  Prolee,  septembre  1834. 

Le  cinq  mai  ou  la  mort  de  Napoléon,  pour  20  voix  de  basse  à  l'unis- 
son, 1834,  publiée  chez  Richault,  op. 6. 

Les  Nuits  d'été,  6  mélodies  pour  mezzo-soprano  ou  ténor,  1S41 
chez  Catelin,  orchestrées  en  1856. 

Hymne  vocal  exécuté  à  Marseille,  1843,  puis  arrangé  pour  six 
instruments  nouveaux  d'Adolphe  Sax. 

Hymne  ,1  la  France,  1S4  4,  publié  n°  2  de  Vox  populi. 

La  Belle   Isabean,  conte   pendant  l'orage,  pour  mezzo   soprano, 
1S55. 

Le  Chanteur  danois,  pour  baryton,  1855. 

laide  boléro,  1S'»5,  publié  en  allemand,  Vienne,  Mechetti. 

Le  Chant  des  chemins  de  fer,  chœur  avec  solo  de  ténor,  1850,  pu- 
blié dans  Feuillets  d'album,  op.  19,  n"  3. 

La   Mort  d'Ophèlio,  pour  soprano   ou  ténor,    1817,    publié  dans 
l'album  de  la  Gazette  musicale,  ISiS. 

Fleurs  des  landes,  5  mélodies  pour  une  ou  deux  voix  et   chœur,. 
1848-1819,  op.  13,  chez  Richault,  1850. 
euillels  d'album,  3  chants,  1850,  seconde  édition  augmentée  de 
3  chants,  op.  19. 

L'Adieu  des  bergers,  chanson  en  chœur  de  Pierre  Ducré,  1850. 

Collection  de  .'.'2  (puis  ,-î.v)  Mélodies,  après  1860. 


Messe  solennelle.  1X24-1827. 

Grande  Messe  des  Morls,  1X37,  op.  5,  chez  Brandus,  1838,  nou- 
velle édition  chez  Kicordi  à  Milan. 

Plains-chants  de  l'Eglise  grecque  à  4  voix,  arrangés  à  16  voix  pour 
la  chapelle  de  romp-rour  de  Russie  ;  existence  douteuse! 
1843.  " 

Paler  nosier,  Adoremus,  deux  chœurs  a  capella  d'après  Bort- 
niansky,  1S50. 

Te  Deum  pour  3  chœurs  avec  orchestre  et  orgue,  1855,  op.  22, 
chez  Richault. 


Deux  Sextuors,  pour  instruments  à  cordes,  flûte  et  cor,  1819  (dé- 
truits). 

Le  Ballet  des  Ombres,  ronde  nocturne  pour  piano,  1829,  œuvre  2, 
chez  schlesinger,  183U. 

Rêverie  el  Caprice,  romance  pour  violon  solo  et  orchestre,  1S39, 
op.  8,  Vienne,  Mechetti,  1841,  Richault. 

Sérénade  ii  la  Madone,  Hymne  et  Toccata  pour  harmonium,  1845, 
publiés  parCh.  Malherbe. 

Ouvrage  didactique. 

Grand  Traite  d'Instrumentation  et  d'Orchestration  modernes,  Paris, 
Schonenberger,  1844.  Nouvelle  édition  en  1856,  suivie  de 
l'Art  du  chef  d'orchestre.  Traduit  en  allemand  par  J.-C. 
Grunbaum,  par  Leibrok,  par  Ddnfel,  traduction  anglaise. 


Œuvres  littéral. 


1S23-1S3S.   Pol, 
1829-1869.  An 

1832.  Lettre  d'i 

1833.  Articles  l 


es  au  Corsaire. 
pondant. 

:  a  la  Revue  européenne. 
'Europe  littéraire. 


1833-35.  Rerue  musicale  au  Rénova 

1834-1859.  Collaboration  àla  Revue  et  Gazelle  Musicale. 

1831-1863.  Collaboration  au  Journal  des  Débals. 

1835.  Collaboration  au  Monde  dramatique  et  à  l'Italie  pittoresque. 

1836-1838.   Collaboration  à  la  Chronique  de  Paris. 

1839.  Collaboration  à  la  Revue  musicale. 

1S58-1859.  Souvenirs  du  Monde  musical  el  Mémoires  d'un  musicien 
dans  le  Monde  Illustre. 

1844.    Voyage  musical  eu  Allemagne  el  en  //«/(.-(Paris,  lxilj. 

1852.  Les  Soirées  de  l'orchestre,  1852. 

1859.  Les  Grotesques  de  In  musique  (Calmann-Lévy),  1859. 

IS62.  A  travers  chants  (Calmann-Lévy),  1S02. 

1874.  M.  Glinka  (Milano). 

1870.  Mémoires  d'Hector  Berlioz  (Paris,  2'  édition  en  2 vol.,  1878). 

1993.  Les  Musiciens  el  la  musique. 

Livrets  delà  Symphonie  fantastique,  de  Lelio,  du  Freijschùlz.  de  la 
Finie  eu  Egypte,  de  l'Enfance  du  Christ,  des  Troyens,  do 
Béatrice  el  Bénèdicl. 

Correspondance  inédite  d'Hector  Berlioz  (1819-1868).  —  Calmann- 
Lévy,  187S. 

Lettres  intimes  à  Humberl  Ferrund  (1S25-1S6S).  —  Calmann-Lévy, 
1882. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSEHVATOtRE 


Briefe  ri'ii  Hector  Berlioz  an  die  Fuvslm  t'.arolynr  Sayn-\\  illgeuslem 

(Breitkopret  Hftrtel,  1904). 
Vue  l'une  •'■  ■•m  ■  ir  -•'  fati  /«.-,  Lûllres  h  H»>«  Estelle  F.  (éditions  de 

..■//■       ■  ;;  ■r'tiaz  ii  Thomas  Ciuiiel   Grenoble,  1903). 
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Ans  dem  Qpcrnlelien  der  Cegenwart  (1885  et  1889);  Suite, 
Aufsuizc  unf  Musil,  und  Uusiker  (1879-1S85)  ;  Concerte,  Corn- 
ponisten  und  Virtuosen  der  lelzen  i:,  Jahren  (1886);  Musiku- 
lisclies Skizzenbuch  (1896);  Musikulisclies  und  Lilerarisches 
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TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


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Quicherat  (Louis).  —  Adolphe  Nourrit,  sa  rie,  son  talent,  son  ca- 
ractère, sa  correspondance  (Paris,  Hachette,  1807). 
Reyer  (Ernest).  —  Noies  de  musique  (Paris,  Charpentier,  1875). 
Kitter  (Hermann).  —  Einiges  zum  Yersliinduiss  von  Berlioz  lla- 
roldsinfonie  und  Berlioz  Kunsttcrischer  Bedeulnng  (oppeln., 
1899). 
Rolland  (Amédée).  —  //.  Berlioz  (le  Diogéne,  1"  février  1857). 
Rolland  (Romain).  —  Berlioz  (Revue  de  Paris,  mars  1904). 
Rocgier  (Elzéard).  —  Hector  Berlioz;  La  Damnation  de  Faust  a 

Marseille  (Paris,  188i). 
Rudolf  (Louis).  —  Hector  Berlioz  (Leipzig,  1903). 
Saint-Saens  (Camille).  —  Souvenirs  et  portraits  (Paris,  1900). 
Sadrin.  —  Bererley  ou  le  Joueur,  pièce  en  5  actes(Théàtre-Fran- 

çais,  1808). 
Scheverleer  (D.-F.).  —  Twe  Titivieii  der  argenlieinle  ecuw,  Hector 

Berlioz  en  Antoine  W'iertz  (Haarlem,  1S~8). 
Schindler.  —  Beethoven  in  l'oris  (Munster  Aschendorff,  1812). 
Scddo  (P.).  —  Critique  et  Littérature  musicale  (Paris,  Hachette, 

1850). 
Schomann  (Robert).  —  Cesammelte  Sehriflen  liber  ilusik  und  ilu- 
siker  (Leipzig,  1888);  Ecrits  sur  la  musique  et  les  musiciens, 
trad.  H.  de  Corzon,  1"  série  (Paris,  Fischbacher,  1894); 
Briefe  (Leipzig,  Breitkopf). 
SEGHAN(Ch.).  —  Soureiiirsil'iiiiliomine de  théâtre,  1831-lS35(Paris, 

C.-Lévy,  1893:. 
Second  (Albéric).  —Les  petits  mystères  de  l'Opéra  (Paris,  184-4). 
Serviéres  (Georges).  —  Richard  Wagner  juge  en  France  (Paris, 

1S87). 
Smoliau  (Arlhur).  —  Operiifiihrer  :  Die  Trojaner,  Benvenuto  Cel- 

lini  vou  H.  Berlioz  (Leipzig,  1900). 
Grande   Soe.ele   phtlhunnnnique   de  l'uns.   Ileg/emeuts    et   Statuts, 

10  juillet  1850,  Rapport  de  la  Commission. 
Solenière  (E.  del.   —    1800-1900,  Cent  années  de  musique   fran- 
çaise (Paris,  1901). 
Stassof  (\V.).  —  Liszt,  Schumann  et  Berlioz  en  Russie  (Saint-Pé- 
tersbourg,  1896). 
Stockmavkr  (Karl  von).  —  Hector  Berlioz.   Fcslsehrifl  zur  Feier 
des  lOOJahrigen  C.ehurlslugsronll.  Berlioz  (stutlgard,  1903). 
T  Réunion  des  Sociétés  chorales  d'Alsace,  Festival  de  Stras- 
bourg, 20,  21,  22  juin  1S63. 
Tiersot  (Julien).   —  Hector   Berlioz  et   la  Société  de  son   temps 
(Paris,  Hachette,  1904);  Les  Trayais  eu  Allemagne  (Revue 
internationale  de  musique,  15  juin  1S9S);  llerlioztana  (le 
Ménestrel,  1903-1904). 
Wagner    (Richard).    —    Gesammelle   Schriften    und   Diehlungen, 
10    vol.  (Leipzig,    1897);    Nachgelasseueu    Sehriflen     mut 
Diehlungen  (Leipzig,  Breitkopf). 
Weckeblin.  —  ilusieiauii  :  Souvenu  Mil  iciauit  z   Dernier  ilitsiciuno 

(Paris,  Garnier,  1877,  1890,  1899). 
Weingartner  (Félix).  —  Die  Sgiuphonie  nuch  Beethoven  (Berlin, 
1898),  trad.deMmûC.  Chbvillard  (Paris,  Durand,  1900); 
cf.  Hugues  Imbekt,  Lu  Symphonie  après  Beelhnrea,  réponse 
à  M.  Weingartner  (Paris,  Fischbach.i.  1900). 
Voir  les  journaux  de  musique  :  Reniée!  Gazelle  musicale  de  Dans  : 
le  Ménestrel,  le  Guide  Musical;  le  Monde  artiste;  la  Renais- 
sance musicale  :  l'Iu  lépeuiauee  m  uicale  i  88 1  - 1  Ss3:,  la  Ré- 
publique de  l'Isère  ^16  et  21  août  1903.;  Discours  de  : 
Reyer,  Macssnbt,  Sai.vt-SabïIS  ■■!  Maréchal  aux  fêtes 
de  Grenoble  et  delà  Côte  Saint-Andrc  (15  et  23  aoùl); 
îiques  de  musi- 


que (Fétis,  Poouin,  Grove,  Me 


Berton. 
Henri   Montan  Bf.rton  est  né  à  Paris  le   17   sep- 
tembre 1767.  Son  père  Pierre  Montan  Berton  (1727- 
1780)  avait  été  chanteur,  compositeur,  directeur  de 
l'Opéra,  et  lorsqu'il  mourut,  sa  veuve  obtint  une  pen- 


sion de  3.000  francs,  et  sou  fils  en  eut  une  autre  de 
1.500  francs. 

Henri  Berton  commença  de  très  bonne  heure  d'ap- 
prendre la  musique.  A  15  ans,  il  entrait  à  l'Opéra 
comme  violoniste.  Il  étudia  la  composilion  d'abord 
avec  Rey,  chef  d'orchestre  de  l'Opéra,  puis  avec  Sac- 
cbini.  En  1786,  il  faisait  entendre  ses  premiers  ouvra- 
ges au  Concert  Spirituel.  L'année  suivante  il  donnait 
son  premier  opéra  à  la  Comédie  Italienne,  les  Pro- 
messes de  mariage,  et  bientôt  il  devenait  un  des  au- 
teurs aimés  du  public. 

En  1795,  lorsque  le  Conservatoire  de  musique  fut 
définitivement  organisé,  Berton  y  enseigna  l'har- 
monie. 

De  1807  à  1809,  il  fut  directeur  de  la  musique  à 
l'Opéra  Italien  et  il  eut  l'honneur  de  faire  entendre 
pour  la  première  fois  aux  Parisiens  les  JVo;;e  di 
Figaro  de  Mozart. 

De  1809  à  181b,  Berton  exerça  les  fonctions  de  chef 
du  chant  à  l'Opéra. 

En  juin  1815,  le  nombre  des  membres  de  la  section 
de  musique  à  l'Institut  ayant  été  porté  de  trois  à  six, 
Berton,  Catel  et  Cheruoini  furent  désignés  pour  oc- 
cuper les  trois  nouveaux  fauteuils. 

Bientôt  après,  le  roi  le  faisait  chevalierde  la  Légion 
d'honneur. 

Lors  de  la  réorganisation  du  Conservatoire  de 
musique  en  1816,  Berton  y  fut  appelé  comme  pro- 
fesseur de  composition. 

Il  mourut  à  Paris  le  22  avril  1844. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  BERTON 


Ahsalon.  oratorio,  Concert  Spirituel,  1780. 

Jephte,  oratorio,  Concert  Spirituel. 

David  dans  le  temple,  oratorio,  Concert  Spirituel. 

Les  Bergers  de  Belh/eem,  oratorio,  Concert  Spirituel. 

La  Gloire  de  Sioa,  oratorio,  Concert  Spirituel. 

Marie  de  Segmours,  cantate,  Concert  Spirituel. 

Orphée  dans  les  bois,  cantate,  Concert  Spirituel. 

Le  Premier  Navigateur,  opéra  en  un  acte  inédit,  I7S0. 

Les  promesses  de  mariage,  2  actes,  Comédie-Italienne,  juillet  1787. 

L'Amant  ù  l'épreuve,  2actes,  Comédie-Italienne.  5  décembre  1787. 

Cora,  opéra  en  3  actes,  répété  ^éiiéraleinent  à  l'Académie  royale 
de  musique  en  I7S9,  et  dont  la  représentation  fut  empê- 
chée par  les  troubles  révolutionnaires. 

Les  Brouilleries,  Comédie-Italienne,  1"  mars  1790. 

Les  Rigueurs  du  Cloître,  2  actes,  Comédie-Italienne,  23  août  1790. 

Le  Nouveau  d'Assas,  1  acte,  Comédie-Italienne,  octobre  1790. 

Les  Deux  Sentinelles,  1  acte,  Théâtre  Favart,  27  mars  1791. 

Eugène,  3  actes,  Théâtre  Feydeau,  1 1  mars  1793. 

Le  Congrès  des  Rois,  en  collaboration  avec  11  autres  composi- 
teurs, 3  actes,  Théâtre  Favart.  20  février  179  4. 

Eugène  Viola  ou  le  lieras  de  la  Dnratiee,  1  acte,  Théâtre  Fevdeau, 
9  octobre  1794. 

Tyrlèe  (Legouvé),  2  actes,  répété  généralement  à  l'Opéra,  mais 
non  joué. 

l'once  de  Léon,  3  actes,  Théâtre  Favart,  mars  1797. 

Le  Rendez-vous  suppose  ou  le  souper  de  famille,  2  actes,  Théâtre 
Favart,  5  août  1798. 

Montana  et  Stéphanie,  3  actes.  Théâtre  Favart,  1799. 

La  Nouvelle  au  camg  de  l'assnssuiu!  '//'s  miuis/re'i  front  n/\  u  linsl.fU, 
scène  patriotique,  Opéra,  14  juin  1799. 

L'Amour  bizarre  mi  les  projets  déranges,  3  actes.  Théâtre  Favart, 
30  août  1799. 

Le  Délire  ou  les  suites  d'une  erreur,  1  acte,  Théâtre  Favart,  0  dé- 
cembre 1799. 

Les  Deux  Sons-Lieutenants  ou  le  concert  iitlerrom/m,  1  acte,  Théâ- 
tre Feydeau,  29  mai  1802. 

Aline,  reine  de  Golconde,  3  actes,  Opéra-Comique,  3  septembre 
1S03. 

La  Romance,  1  acte,  Opéra-Comique,  21  janvier  IS01. 

rrasibule,  cantate  scénique,  Hôtel  de  Ville,  10  décembre  1804. 

Le  Vaisseau  Amiral  ou  Forbin  et  Delville,  1  acle,  Opéra-Comique, 
1"  avril  1805. 

Délice  el  Venlikan,  1  acte,  Opéra-Comique,  8  mai  1S05. 

Les  Maris  garçons,  1  acte,  Opéra-Comique,  15  juillet  ISOfi. 

Le  Chaut  du  Retour,  cantate,  Opéra-Comique,  28  juillet  1807. 
Le  Chevalier  de  Sènangis,  3  actes,  Opéra-Comique,  23  juillet  1808. 


ENCYCLOPEDIE  de  la  musique  et  dictionnaire  du  conservatoire 


Sinon  cli,-  »«••■  de  Sciii/nc,  1  acte,  opéra-Comb lui-,  2ii  septembre 
1808. 

Foi.t,  3acles,  Opéra-Comique,  28  janvier  Imv.i. 

in  Charme  tel»  Vins,  1  acte,  Opéra-Comique,  24  janvier  1811. 

I.»  Victime  des  Arls  ou  In  {fie  de  famillt.  2  actes,  en  collaboration 
avec  Niooi.0,  Isouaiw  cl  Souk,  opéra-Comique,  £8  février 
1811. 

I.' Enlaçaient  îles  Snl'ines,  ballet  en  3  actes,  Opéra,  2".  juin  1S11. 

L'En/tml  prodigue,  ballet  eu  3  actes,  28  avril  1812. 

Vnleiilin  nu  te  paijsan  romanesque,  S  actes,  Qpéra-Comiçfue, 
18  septembre  lsia. 

L'Oriflamme,  l  acte,  eu  collaboration  avec  Mkhui.,  Paer  et 
Kiiki-t/rr,  Opéra,  1er  février  1814. 

L'Heureux  Retour,  ballet  en  1  acte,  en  collaboration  avec  Pkksdis 
et  Kreutzer,  Opéra,  25  juillet  1815. 

Les  Dieux  Rivaux  ou  In  {été  <le  Cythère,  1  acte,  en  collaboration 
avec  Spontini,  I'krsuis  et  Kreutzer,  Opéra,  21  juin  isiu. 

ftaitr  ou  If  batelier  du  Don,  1  acte,  Opéra-Comique,  15  octobre 
1816. 

Roger  (te  Sicile  ou  le  roi  troubadour,  3  actes,  Opéra,  4  mars  1817. 

Carisaudre  ou  ta  rose  magique,  3  actes,  Opéra-Comique,  29  juillet 
1820. 

Blanche  de  Provence  ou  ta  cour  des  Fées,  1  acte,  en  collaboration 
avec  Boïbldied,  Cherdbini,  Kreutzer  et  Paer,  Opéra, 
3  mai  1821. 

Virginie  ou  les  Décennies,  3  actes,  Opéra,  11  juin  1823. 

Les  Deu.r  Mousquetaires  nu  la  robe  de  chambre,  1  acte,  Opéra-Co- 
mique, 22  décembre  1824. 

La  bière  et  lu  Fille,  3  actes,  non  représenté. 

l'hnranwnil,  3  actes,  en  collaboration  avec  BoIeldieuc!  Kbbitzer, 
opéra,  10  juin  1S25. 

Les  Créoles,  3  actes,  Opéra-Comique.  14  octobre  1827. 

Les  Petits  Appartements,  1  acte,  Opéra-Comique,  9  juillet  1827. 

/,./  Marquise  de  llrinrilliers,  3  actes,  en  collaboration  avec  8  autres 
compositeurs,  opéra-Comique,  31  octobre  1831. 

Cantiques  de  Saiul-Sulpice,  accompagnement  à  3  voix,  Paris,  Ba- 
beuf, in-S°. 

Recueil  de  9  cumins  ù  S  et  4  roix,  Paris,  Dutian. 

I  ;  Canons,  dédiés  à  la  Société  de  la  Goguette. 

Iliuiiunces,  duos,  Irios,  etc. 

Le»  Sérénades  de  Paris  «a  les  Petits  Concerts  de  Société  en  trio, 
Paris,  de  la  Chevardière. 

Traité  d'harmonie,  suivi  d'un  Dictionnaires  des  accords,  4  vol.  in- 
4°,  Paris,  1815. 

De  la  Musique  mécanique  et  de  In  Musique  philosophique,  in-8°,  Pa- 
ris, 1826. 

Réponses  à  quelques  propositions  erronées,  avancées  dans  le  Jour- 
nal du  miroir  par  M.  le  Grand,  juge  des  réputations  lit- 
téraires et  musicales,  in-8%  Paris. 

1k  la  Musique  mécanique  et  ttt 'la  Musique  philosophique,  Paris,  1822, 
24  pages,  in-S°. 

E/iilrc  n  nu  célèbre  compositeur  français  (Boïelmeu),  précédée  de 
quelques  observations  sur  la  musique  mécanique  et  sur 
la  musique  philosophique,  Paris,  1829,  48  pages.  in-8°. 

Articles  sur  la  Musique,  dans  l'Encyclopédie  publiée  par  Courtin. 

Bibliographie. 

Raoul  Rochette.  —  Xolice  historique  sur  la  Vie  et  les  Ouvrages 

de  M.  Berlon,  Paris,  Didot,  1816. 
Henri  Blanchard.  —  Biographie  des  compositeurs,  Paris,  1839, 

Fétis. —  Biographie  universelle  des  Musiciens. 

A.  Pougin.  —  Supplément  ii  la  Mogruphie  de  Fclis. 

A.  Poouin. —  L'Opéra-Cnnnque  pendant  la  Rernhilioii,  Paris,  1891. 


Boïeldieu. 

François-Adrien  Boïeldieu  est  né  le  15  décembre 
1775  à  Rouen.  Ses  parents  étaient  de  bons  bourgeois 
aisés.  De  bonne  heure,  le  petit  Boïeldieu  entra, comme 
enfant  de  chœur,  à  la  maîtrise  de  la  cathédrale,  et 
c'est  là  qu'il  apprit  la  musique  sous  la  direction  du 
féroce  M.  Broche,  maître  de  chapelle,  qui  l'accablait 
de  coups.  Une  représentation  de  Barbe-Bleue  de  Se- 
daine  et  Ghétry  au  Théâtre  des  Arts  l'enthousiasma 
et  lui  découvrit  peut-être  sa  véritable  vocation.  Le 
2  novembre  1793,  il  faisait  représenter  à  Rouen  un 
opéra-comique  en  2  actes,  la  Fille  coupable,  dont  le 
livret  était  de  son  père.  Ce  fut  un  succès;  et  deux 
ans  plus  tard,  Rosalie  et  Mirza,  pièce  en  trois  actes 
(28  oct.  1795),  due  encore  à  la  collaboration  du  père 
et  du  fils,  obtint  de  nouveau  les  applaudissements  des 
Kouennais. 


Mais  Boïeldieu  veut  connaître  Paris.  Il  a  vingt  ans. 
Il  se  sauve  de  la  maison  paternelle  en  grand  mystère- 
II  est  rattrapé  par  un  vieux  serviteur  de  la  famille, 
Delys,  qu'on  a  lancé  à  sa  poursuite,  non  pour  le 
ramènera  Rouen,  mais  pour  lui  donner  une  lettre 
de  recommandation  auprès  de  Mollien,  le  grand 
financier. 

Voici  Boïeldieu  qui  fréquente  les  salons  parisiens, 
qui  y  chante  ses  romances,  et  partout  où  il  passe  il 
plaît.  Pour  gagner  sa  vie,  il  accorde  les  pianos  chez 
Erard,  mais  il  y  donne  aussi  des  concerts. 

Le  5  septembre  1791,  il  fait  ses  débuts  à  la  salle 
Feydeau  avec  un  petit  acte,  La  Dot  de  Suzette,  très- 
favorablement  accueilli.  La  Famille  suisse  (février 
1797)  et  Zoraïme  et  lidnare  (1798)  répandent  davan- 
tage son  nom  dans  le  public.  Mais  voici  que  sa  répu- 
tation s'établit  définitivement  avec  le  Calife  de  Bag- 
dad (16  déc.  1800),  dont  sept  cents  représentations 
consécutives  n'épuiseront  pas  le  succès  vraiment 
extraordinaire. 

Boïeldieu  fait  alors  la  connaissance  de  Chehubini, 
qui  lui  donne  quelques  conseils,  dont  il  avait  grand 
besoin,  car  il  ne  savait  pas  grand'chose  de  son  métier 
de  compositeur,  et  c'est  d'instinct  qu'il  composait. 

Le  Conservatoire  venait  d'être  fondé  :  Boïeldieu  y 
entra  comme  professeur  à  l'âge  où  d'autres  sont 
élèves.  Il  donne  des  leçons,  quand  il  devrait  encore 
en  recevoir.  N'importe!  Il  entraine  ses  élèves  par  son 
exemple,  et  s'il  ne  leur  apprend  pas  grand'chose,  il 
a  la  modestie  de  reconnaître  son  ignorance. 

Ma  Tante  Aurore  (13  janvier  1803),  abrégée  de  trois 
actes  en  deux,  devient  une  des  pièces  favorites  du 
public. 

D'une  liaison  fort  romanesque  avec  une  dame  du 
monde,  Boïeldieu  a  une  fille,  qu'il  reconnaît,  et  qui 
aura  toute  l'amabilité,  tout  le  charme  de  son  père- 
Mîis  Boïeldieu  fait  la  sottise  de  se  laisser  conduire 
au  mariage  par  une  danseuse  de  l'Opéra,  Mlie  Clotilde 
Malfleuroy.  La  vie  n'est  pas  tenable  avec  elle.  11  la 
fuit,  il  se  sauve  à  l'autre  bout  de  l'Europe.  Marié  le 
19  mars  1802,  Boïeldieu  arrive  à  Saint-Pétersbourg 
en  avril  1803. 

11  restera  huit  années  auprès  du  tsar,  dont  il  devint 
le  maître  de  chapelle,  à  la  condition  de  lui  fournir 
trois  opéras  chaque  année. 

Inutile  d'observer  que  Boïeldieu  passa  à  côté  de  la 
musique  populaire  russe  sans  même  la  remarquer. 
Pour  un  Français  d'alors,  ces  Barbares  valaient-ils  la 
peine  d'être  écoulés? 

Les  Voitures  versées  furent  le  meilleur  ouvrage- 
écrit  par  Boîeld'ieu  en  Russie. 

En  1811,  Boïeldieu  revient  à  Paris.  En  son  absence, 
Nicolo  a  pris  la  première  place.  Ses  Rendez-vous 
bourgeois  (1807)  ont  fait  courir  toute  la  ville. 

Boïeldieu  débute  par  un  coup  de  maître,  Jean  de 
Paris  (4  avril  18)2).  Le  <•  style  troubadour  »  en  plaît 
infiniment.  Puis  c'est  le  Nouveau  Seigneur  du  village 
(29  juin  1863),  où  le  célèbre  baryton  Martin  trouve 
une  de  ses  plus  belles  créations. 

Cependant  Nicolo  donnail  en  1814  son  chef-d'œu- 
vre :  Joconde  ou  les  Coureurs  d'aventures. 

Boïeldieu  répond  par  sa  Fête  du  village  voisin 
(18  juin  1816),  avec  la  délicieuse  romance  de  Rémy  : 
«  Simple,  innocente  et  joliette.  » 

La  rivalité  des  deux  compositeurs  est  près  de  unir. 
La  mort  de  Méhul  laisse  un  siège  vacant  à  l'Institut. 
Nicolo  et  Boïeldieu  se  disputent  la  place.  C'est  Boïel- 
dieu qui  l'obtient.  Quelques  mois  après,  Nicolo  en 
meurt  de  dépit. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3505 


Le  Petit  Chaperon  rouge  (30  juin  1818)  ajoute  encore 
à  la  renommée  d'un  auteur  toujours  heureux. 

Mais  voici  un  nouveau  venu  qui  pourra  détourner 
sur  lui  l'affection  du  public.  Le  Barbier  de  Sèville  de 
Rossini  est  représenté  à  Paris  en  1819,  et,  après 
quelques  hésitations  du  public,  le  succès  prend  peu 
■a  peu  les  proportions  d'un  triomphe  éclatant.  Boïel- 
dieu  n'en  a  point  ombrage.  Il  est  des  premiers  à 
vanter  les  mérites  de  cette  musique  italienne  si 
facile,  si  coulante,  si  lumineuse.  Lui-même,  qu'a-t-il 
à  envier  aux  autres?  Il  va  bientôt  écrire  pour  l'Opéra- 
iComique  un  des  ouvrages  qui  reliendronl  le  plus 
longtemps  et  de  la  façon  la  plus  continue  la  faveur  du 
tpublic;  la  Dame  blanche  (10  décembre  1825). 

Boïeldieu  est  presque  devenu  un  grand  homme. 
La  duchesse  de  Berry  se  l'est  attaché  comme  com- 
positeur ordinaire.  Le  roi  lui  fait  une  pension  de 
1.200  francs.  Il  jouit  de  sa  gloire  très  simplement,  et 
sans  s'exagérer  les  mérites  qui  la  lui  ont  value. 

Le  22  janvier  1827,  Boïeldieu,  enfin  veuf,  se  remarie 
avec  la  sœur  de  la  chanteuse  Philis,  elle-même  veuve, 
née  Jenny  Desoyres.  Il  vieillit  déjà  et  se  fatigue. 
Souvent  il  se  repose  à  sa  maison  de  campagne  de 
Villeneuve-Saint-Georges. 

La  Révolution  de  1830  met  Boïeldieu  dans  l'em- 
barras. Sa  santé  ne  lui  permet  plus  de  faire  sa  classe 
au  Conservatoire.  Sa  pension  sur  la  cassette  du  roi 
lui  fait  défaut.  Il  n'apas  d'économies.  Heureusement, 
bientôt  un  ministre  généreux  lui  accorde  une  nou- 
velle pension  de  trois  mille  francs. 

Boïeldieu  est  maintenant  très  malade.  Il  souffre 
d'une  phtisie  laryngée.  Ce  musicien,  qui  ne  pouvait 
composer  qu'en  chantant,  ne  compose  plus.  Il  peint, 
il  dessine.  II  voyage,  il  cherche  le  soleil.  Il  s'établit 
enfin  dans  une  maison  de  campagne  près  des  ruines 
de  l'abbaye  de  Jarcy,  au  voisinage  de  la  forêt  de  Se- 
nart,  et  c'est  là  qu'il  meurt  le  8  octobre  1834,  après 
un  dernier  essai  interrompu  de  voyage  dans  le  Midi- 

Quoiqu'il  n'eût  fait  que  des  études  techniques  insi- 
gnifiantes, la  facture  des  œuvres  de  Boïeldieu  est 
assez  soignée.  Il  est  le  plus  remarquable  représen- 
tant de  l'opéra-comiqui-  français  de  1800  à  18:10.  Il  a 
des  inspirations  charmantes  de  fraîcheur  et  de  naï- 
veté, d'un  contour  mélodique  très  pur,  qui  rappel- 
lent parfois  Mozart,  sans  sa  profondeur,  sans  son 
intimité,  mais  avec  quelque  chose  de  son  esprit  et  de 
sa  légèreté.  A  cet  égard,  certaines  pages  de  Ma  Tante 
Aurore  et  du  Nouveau  Seigneur  sont  plus  significatives 
que  la  trop  célèbre  Dame  blanche. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  BOÏELDIEU 

1793.  Lu  Fille  coupable,  2  actes. 
1795.  Rosalie  cl  Mirza,  3  actes. 

1797.  la  Famille  suisse,  1  acte. 
L'heureuse  nouvelle,  1  acte. 
Le  Pari,  1  acte. 

1798.  Zoraiuic  et  Zulaare,  3  actes. 
La  dot  de  Susette,  1  acte. 

1799.  Les  méprises  espagnoles,  1  acte. 
Emma  ou  la  Prisonnière,  1  acte. 

1800.  Beniowski,  3  actes. 

Le  Calife  de  Bagdad,  1  acte. 
1803.  Hâtante  Aurore,  3  actes,  puis  2. 
Le  Baiser  et  la  Quittance,  3  actes. 

1801.  Aline,  reine  de  Golconde,  i  actes. 
Amour  et  ilijslère,  1  acte. 
Abderilian,  1  acte. 

Un  tour  de  soubrette,  1  acte. 
1805.  La  jeune  femme  colère,  1  acte. 
1S06.   Télemaque,  3  actes. 
1808.  Les  toitures  versées,  2  actes. 

La  dame  invisible,  1  acte. 
1810.  Bien  de  trop,  1  acte. 


1812.  Jean  de  Paris,  2  actes. 

1S13.  Le  nouveau  seigneur  du  village,  1  acte. 

1811.  Bayari  a  blèzières,  1  acte. 

Le  Béarnais,  1  acte. 

Angola,  1  acte. 
1810.  La  Fête  du  village  voisin,  3  actes. 

Charles  de  France,  2  actes. 
ISIS.  Le  petit  chaperon  rouge,  3  actes. 
1821.  Blanche  de  Provence,  1  acte. 
1823.  La  France  et  l'Espagne,  intermède. 
1S24.  /.c.\*  Trois  genres,  à  pi'upns  pnur  le  théàlie  <!<'  l'Oib'nn. 
1825.  Pharamond.  3  actes. 

La  Dame  blanche,  3  actes. 
1S29.  Les  deux  nuits,  3  actes. 
1831.  La  marquise  de  Briurilliers,  3  actes. 
Romances,  15  recueils. 

Trois  Sonates  pour  le  forte-piano,  dédiées  à  Rode. 
Grande  Sonate  pour  le  forte-piano  enso/  mineur. 
Duos  pour  la  harpe  et  le  forte-piano. 
Trio  pour  forte-piano   avec  accompagnement   de  violon  et  de 

violoncelle. 
Sii  Valses  pour  le  forte-piano. 
Air  arec  neuf  variations,  pour  piano  et  harpe. 
Air  anglais  varié  pour  le  piano. 


Bibliographie. 

la  fui  de 


rochure,  Paris, 


Aigoin  (Louis).  —  Boïeldieu 

1902. 

Afgé  un  Lassos.  —  Boïeldieu,   1  vol.  de  la  collection  lies  Mu- 
siciens Célèbres,  Paris,  Laurens. 
Boïeldieu  aux  Champs-Elijsées  et  son  apothéose,  tableau  en  un  acte 

mêlé  de  chants,  Rouen,  1834,  in-S°,  de  32  pages. 
Boïeldieu  et  les  honneurs  rendus  à  ee  eelebre  compositeur,  Rouen, 

P.  Baudry,  1836,  in-8°  de  20  pages. 
Doval  (Em.).  —  Boïeldieu,  notes  et  fragmenta  inédits,  Genève, 

1883. 
Héqoet  (G.).  —  .4.  Boïeldieu,  sa  vie  et  ses  œuvres,  Paris,   ISoi, 

grand  in-8°  de  115  pages. 
Lambert  (G.).  —  Discours  pour  la  translation  du  cirur  de  Boïeldieu 

a  Rouen  le  I S  novembre  1834,  Paris,  1846,  in-8°deI2S  pages, 
Poogin  (Arthur).  —  Boïeldieu,  sa  vie  et  ses  oeuvres,  1  vol.  in-S°. 

1875. 
Précis  du  procès  de  la  sérénade    donnée  le  -15    'octobre    1829  ;ï 

M.  Boïi.i.DiKO,  Rouen,  1829,  in-8°  de  tapages. 
Procès-Verbal   de  la   cérémonie  funèbre  en   l'honneur  de  Rineldieu, 

Rouen,  1835,  grand  in-8"  de  39  pages. 
Rbfpveii.le.  —  Boïeldieu,  sa  vie  et  ses  œuvres,  Rouen,  1851,  in-S» 

de  43  pages. 


Carafa. 

Michel-Henri-François-Vincent-AIoys-Paul  Carafa 
de  Colobrano,  compositeur  d'origine  italienne,  na- 
turalisé Français,  est  né  à  Naples  le  17  novembre 
1787. 

Il  était  le  second  fils  du  prince  de  Colobrano,  duc 
d'Alvito,  lui-même  compositeur  assez  distingué. 

Il  commença  l'étude  de  la  musique  à  8  ans  au 
couvent  de  Monte  Oliveto,  et  il  y  réussit  tellement 
bien  qu'il  se  risqua,  jeune  encore,  à  composer,  mais 
en  simple  amateur,  sa  naissance  le  destinant  au  mé- 
tier des  armes. 

11  était  officier  dans  l'armée  napolitaine  lorsqu'il 
fut  fait  prisonnier  par  les  Français  au  combat  de 
Campo-Tenese,  en  1806.  II  plut  à  Murât,  qui  se  l'atta- 
cha comme  écuyer  particulier.  Il  fit  ensuite  l'expé- 
dition de  Sicile  comme  lieutenant  de  hussards  du 
nouveau  roi;  puis  il  l'accompagna  comme  officier 
d'ordonnance  pendant  la  campagne  de  Russie,  d'où 
il  revint  chef  d'escadron  et  chevalier  de  la  Légion 
d'honneur. 

Bevenu  après  1814  à  la  vie  civile,  Carafa,  quoi- 
que riche,  songea  à  employer  autrement  qu'en 
amateur  ses  dons  de  musicien.  Il  avait  fait  jouer  à 
Naples  en  1802  un  petit  opéra,  il  Fantasma;  en  1811, 
un  ouvrage  plus  important,  il  Vascello  d'Occidente.  Il 
se  mit  à  composer  des  opéras  pour  les  théâtres  des 
grandes  villes  de  l'Italie.  Puis  il  vint  se  fixer  à  Paris, 
où  il  obtint  bientôt  une  réputation  enviée. 
22» 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MISKjUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


En  1837,  il  fut  élu  membre  de  l'Académie  des 
beauj  arts,  en  remplacement  de  Lbsueur.  En  1838, 
on  le  nomma  directeur  de  Gymnase  de  musique  mi- 
litaire, el  en  1840  professeur  de  composition  au  Con- 
servatoire. 

Carafa  mourut  le  26  juillet  1X7-2. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES   DE  CARAFA 

OI'ÉIUS    REPRÉSENTÉS    EN    ITALIE    OIT    A    VIENNE 

Il  Fantasma,  opéra  semi-seria,  2  actes,  Naples,  1802. 

/;  Vascellod'Ocàilente.  opéra  séria,  2  actes,  Naples, Fondo,  lbll. 

;.,i  Getosifl  corretta,  ossia  mariti  aprite  gli  occlii,  opéra  semi-seria, 

2  actes,  Naples,  Fiorentini,  1815. 
Sàbriellt  di  Yergi,  opéra  séria,  3  actes,  Naples,  Fonde-,  3  juillet 

1816. 
JUgenia  in  ïauride,  opéra  séria,  2  actes,  Naples,  San- Carlo, 

I  S  17. 

Adèle  di  Lusigmno,  opéra  séria,  2  actes,  Milan,  Scala,  27  sep- 
tembre 1817. 

Bérénice  ni  Siriu,  opéra  séria,  2  actes,  Naples,  San-Carlo,   1818. 

Elisaielln  in  Derigshire,  opéra  séria,  2  actes,  Venise,  26 décembre 
1818. 

//  Sucri/izii,  d'Epito,  opéra  séria,  2  actes,  Venise,  1819. 

C.li  due  Fn/aro  ossia  il  »»(««*  «>«<  cominediu,  opéra  bufta, 2  actes, 
Milan,  Scala,  ô'juin  1820. 

Lu  Capricciosa  ed  il  soldato,  ossia  m  momento  di  leswne,  opéra 
semi-seria,  2  actes,  Rome,  1823. 

Eufemio  di  Slessiua .  opéra  séria,  2  actes,  Home,  1823. 

Al'iifur  ossia  la  famiglia  arabe,  opéra  séria,  2  actes,  Vienne, 
Théâtre  Italien,  1823. 

Il  Soiinaittiuln,  opéra  semi-seria,  2  actes,  Milan,  Scala,  13  no- 
vembre 1824. 

Aristodemo. 

Gt'ltalici  e  gl'Indiani. 

OPÉRAS    ET    BALLETS    REPRÉSENTÉS    EN    FRANCE 

Jeanne  d'Arc,  3  actes,  Opéra-Comique,  10  mars  1821. 

Le  Solitaire,  3  actes,  Opéra-Comique,  17  août  1822. 

Le  Valet  de  chambre,  1  acte,  Opéra-Comique,  16  septembre  1S23. 

L'Auberge  supposer,  3  actes,  Opéra-Comique,  26  avril  1824. 

La  Belle  au  bois  dormant.  3  actes,  Opéra,  2  mars  1825. 

Saimarido,  1  acte,  Opéra-Comique,  19  mai  1827. 

Musaniello  ou  le  pêcheur  napolitain,  4  actes,  Opera-Comique, 
27  décembre  1827. 

La  Violette,  en  collaboration  avec  Leborne,  3  actes,  Opéra-Comi- 
que, 7  octobre  1828. 

denuij,  3  actes,  Opéra-Comique,  26  septembre  1S29. 

Le  Sozze  di  Lammermoor.  Théâtre  Italien,  12  décembre  1829. 

L'Auberge  d'Auraij,  en  collaboration  avec  Hérold,  Opéra-Comique, 

II  mai  1830. 

L  Orgie,  bal'et  en  3  actes.  Opéra,  18  juin  1831. 

Le  Livre  de  l'ermite,  3  actes,  Opéra-Comique,  11  août  1831. 

Nathalie  ou  la  laitière  suisse,  en  collaboration  avec  Gyrowetz, 

ballet  en  2  actes,  Opéra,  7  novembre  1S32. 
La  Prison  d'Edimbourg,  3  actes,  Opéra-Comique,  20  juillet  1833. 
Une  Journée  de  la  Fronde,  Opéra-Comique,  7  novembre  1833. 
La  Grande  Duchesse,  4  actes,  Opéra-Comique,  16  novembre  1835. 
Thérèse,  2  actes,  opéra- Comique,  26  septembre  1838. 


Il  Natale  di  Ciove;  Achille  e  Deidamia,  cantates  (œuvres  d'extrême 
jeunesse). 

Tamerlana,  opéra  séria,  1822,  non  représenté. 

Sœur  Agnès  ou  la  religieuse,  scène  lyrique. 

La  marquise  de  Brinvilliers,  3  actes,  en  collaboration  avec  Auber, 
Batton,  Berton,  Blangini,  Boïeldieu,  Cherobini,  Hé- 
rold, Paer,  Opéra-Comique,  31  octobre  1831. 

Les  premiers  pas,  prologue  en  1  acte,  pour  l'ouverture  de  l'Opéra 
National,  en  collaboration  avec  Adam,  Acber  et  Halévy, 
15  novembre  1847. 

Rocilatifs  pour  la  Sèmiramis  de  Rossini,  opéra,  4  juillet  1860. 

blessa  di  Gloria,  à 4  voix. 

blessa  di  Requiem, 

Stabat  Mater. 

Are  rerum  pour  ténor  solo,  chœurs  et  orchestre. 

Solos  pour  flûte,  clarinette,  hautbois,  basson,  cor  avec  accom- 
pagnement d'orchestre. 

Bibliographie. 

Fétis.  —  Biographie  uitii  erselle  des  Musiciens. 
Pougin.  —  Supplément  à  la  Biographie  de  Felis. 
François  Bazin.  —Notice  sur  Carafa,   Paris,  Didot,  in-4»,  1873. 


Catel. 

Charles-Simon  Catel  est  né  à  Laigle,  dans  le 
département  de  l'Orne,  le  10  juin  177:s.  Nous  possé- 
dons peu  de  renseignements  sur  son  enfance,  et 
nous  ignorons  dans  quelles  circonstances  se  mani- 
festa son  goût  pour  la  musique.  Tout  ce  que  nous 
savons  de  cette  période  de  sa  vie,  c'est  que,  venu 
très  jeune  à  Paris,  il  fut  remarqué  par  Sacchini, 
que  séduisit  la  beauté  de  sa  voix.  En  1781,  à  l'âge 
de  onze  ans,  il  entrait  à  l'Ecole  royale  de  chant  et 
de  déclamation,  fondée  l'année  précédente,  sur  les 
sollicitations  de  l'intendant  général  Papillon  de  la 
Ferté,  en  vue  du  recrutement  et  de  la  formation 
d'artistes  pour  l'Opéra  et  pour  la  chapelle  du  roi. 
Le  jeune  Catel  y  étudia  le  piano  sous  la  direction 
de  Gobert;  Gossec,  qui  le  prit  en  affection,  lui  donna 
des  leçons  d'harmonie  et  de  composition;  vers  le 
milieu  de  1787,  il  était  nommé  accompagnateur  et 
professeur  adjoint  à  l'Ecole  royale  de  chant. 

La  dévolution  fournit  à  Catel  les  occasions  de 
se  faire  connaître  :  dès  le  16  août  1789,  il  signait 
un  engagement  volontaire  dans  la  garde  nationale 
de  Paris,  «  à  la  charge  de  s'habiller  à  ses  frais  ».  En 
1790,  il  était  attaché  comme  musicien  de  première 
classe  au  corps  de  musique  de  la  garde  nationale 
que  venait  d'organiser  son  ami  Sarrette.  Dès  lors, 
à  côté  du  lieutenant  Gossec,  son  ancien  professeur, 
il  prend  part  à  toutes  les  manifestations  musicales 
de  l'époque.  Il  écrit  des  pas  redoublés,  des  marches 
militaires,  généralement  adoptés  par  les  demi-bri- 
gades pendant  les  guerres  de  la  Révolution;  pour 
la  pompe  funèbre  de  Gouvion,  major  général  de  la 
garde  nationale,  il  compose  un  De  Profundis  avec 
chœur  et  orchestre  (11  juin  1792);  pour  une  fête  ré- 
volutionnaire sur  des  paroles  de  M.-J.  Chénier,  un 
Hymne  ii  l'Egalité. 

Vers  cette  époque,  il  semble  avoir  été  attaché  à 
l'armée  du  Rhin,  probablement  en  qualité  de  chef 
de  musique,  et  n'être  revenu  à  Paris  que  le  30  no- 
vembre 1792.  C'est  alors  qu'il  est  nommé  professeur 
de  première  classe  de  solfège  et  d'harmonie  dans  la 
musique  de  la  garde  nalionale,  et  en  même  temps 
accompagnateur  à  l'Opéra,  fonction  qui  lui  rapporte 
2.000  livres  d'appointements  (sans  compter  plus 
tard  une  pension  de  1.500  livres  qu'il  conservera  jus- 
qu'au 6  septembre  1803). 

Les  années  qui  suivirent  sont  celles  de  la  produc- 
tion la  plus  intense  de  Catel  :  s'étant  rendu  compte 
de  l'insuffisance  et  des  inconvénients  de  l'emploi 
des  instruments  à  cordes  pour  des  fêtes  qui  avaient 
lieu  en  plein  air,  il  écrit  surtout  pour  les  voix  ou 
pour  les  instruments  à  vent,  comme  l'avait  déjà  fait 
Gossec  dans  le  Te  Deum  du  14  juillet  1790  {Ouverture, 
Hymne  sur  la  reprise  de  Toulon,  exécutés  dans  un 
concert  du  20  novembre  1793).  En  1794,  il  multiplie 
ses  compositions,  et,  sur  vingt-qua'tre  œuvres  de 
Catel  écrites  pendant  la  période  révolutionnaire, 
dix  au  moins  datent  de  cette  année  :  Stances  pour 
la  fabrication  des  canons,  poudres  et  salpêtres;  Mar- 
che, Pas  de  manœuvre,  Marche  pour  instruments  à 
vent;  Hymne  à  la  Victoire  sur  la  bataille  de  Fleurus; 
la  Bataille  de  Fleurus;  Marche,  Symphonie  militaire; 
Marche,  Ouverture  pour  instruments  à  vent.  11  colla- 
bore activement  aux  répétitions  qui  précèdent  la 
fête  de  l'Etre  suprême,  et  figure  parmi  les  signataires 
de  la  lettre  collective,  adressée  par  certains  musi- 
ciens au  Comité  de  Salut  public,  pour  annoncer  leur 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3507 


intention  d'aller  dans  les  sections  apprendre  au 
peuple  à  chanter.  Catel  est  désigné  pour  faire 
répéter  les  hymnes  révolutionnaires  à  la  section 
Marat.  En  juillet  1794,  il  prend  comme  compositeur 
une  part  importante  à  l'organisation  de  concerts  du 
peuple  dans  le  jardin  des  Tuileries.  Les  années  qui 
suivent  sont  marquées  par  l'apparition  d'un  certain 
nombre  d'œuvres  nouvelles  (Symphonie,  Stances  pour 
l'anniversaire  du  '.)  thermidor,  Hymne  du  10  août, 
Chant  du  banquet  républicain,  Chant  pour  l'anniver- 
saire de  la  fête  de  la  République,  Hymne  à  la  souve- 
raineté du  peuple).  Aussi,  lorsque,  le  22  septembre 
1796,  la  Convention  remerciait  officiellement  les 
«  poètes  et  les  compositeurs  qui  avaient  contribué  à 
l'ornement  des  fêles  nationales  »,  Catel  était  nommé 
en  troisième  place,  immédiatement  après  Gossec  et 
Méhul.  Sans  doute,  dans  toutes  ces  compositions 
pour  les  fêtes  révolutionnaires,  Catel  n'invente  au- 
cune forme  nouvelle  et  reste  le  disciple  fidèle  de 
Gossec;  cependant,  avec  un  certain  goût  pour  l'é- 
criture polyphonique,  il  semble  avoir  compris  ce 
qu'exigeaient  les  circonstances  très  spéciales  dans 
lesquelles  ces  œuvres  étaient  exécutées. 

Fournisseur  presque  attitré  des  fêtes  révolution- 
naires, Catel  joua  aussi  un  rôle  important  dans  l'or- 
ganisation du  Conservatoire  de  musique,  où  il  avait 
été  nommé  professeur  d'harmonie  dès  l'ouverture 
de  l'école.  En  face  de  la  variété  des  méthodes  em- 
ployées, en  face  de  l'incohérence  qui  en  résultait,  les 
professeurs  avaient  bientôt  senti  la  nécessité  d'une 
unité  dans  l'enseignement.  Une  commission  avait 
été  créée  en  1799  peur  la  rédaction  des  principes 
élémentaires  de  musique;  Catel  joua  dans  celte 
commission  un  rôle  important.  Ce  fut  lui  encore  qui 
parvint  à  mettre  d'accord  les  membres  de  la  com- 
mission chargée  d'unifier  l'enseignement  de  l'har- 
monie; son  projet  fut  adopté  et  devint,  en  1802,  le 
Traité  d'harmonie,  que  louait  Cherubini  et  qui,  pen- 
dant 20  ans,  resta  classique  au  Conservatoire. 

Son  succès  au  Conservatoire  fut  peut-être  une  des 
causes  de  ses  échecs  au  théâtre.  La  lutte  était  vive, 
en  effet,  entre  partisans  et  adversaires  de  la  nouvelle 
école,  et  lorsque,  le  4  mai  1802,  Catel  donna  à  l'O- 
péra sa  Sêmiramis,  il  eut  contre  lui  tous  les  détrac- 
teurs de  son  système  d'harmonie;  la  pièce  n'eut  que 
vingt-quatre  représentations.  La  musique  de  Catel 
était  considérée  comme  une  «  musique  savante  », 
épithète  qui  était  de  nature  à  la  rendre  suspecte  au 
public.  Aussi,  ne  connul-il  jamais  le  succès  au  théâ- 
tre, ni  dans  les  Artistes  par  occasion,  ni  dans  l'Au- 
berge de  Bagnères,  ni  dans  les  Aubergistes  de  qualité. 
Cependant,  son  ballet  héroïque  Alexandre  chez  Apelle 
offrait  une  nouveauté,  l'emploi  pour  la  première  fois 
à  l'Opéra  du  cor  anglais;  les  Bayadères,  un  opéra 
représenté  le  8  août  1810,  réussit  un  peu  mieux  et 
fut  joué  cent  quarante  fois  jusqu'en  1828. 

Comme  sous  la  Révolution,  Catel  conserva  sous 
l'empire  son  rôle  de  musicien  officiel;  le  17  mai 
1807,  il  faisait  exécuter  un  Chant  triomphal  à  l'oc- 
casion du  dépôt  de  l'êpée  de  Frédéric  le  Grand  aux 
Invalides;  en  1813,  il  écrivait,  pour  une  réception  de 
Marie-Louise  à  la  préfecture  de  Caen,  une  Cantate 
dans  laquelle  il  introduisait  des  chœurs  en  patois  du 
pays  (24  août).  Le  12  février  1814,  en  collaboration 
avec  Boïeldieu  et  Cheiubi.ni,  il  composait  une  œuvre 
de  circonstance,  Boyard  â  Méziêres.  Son  Auberge  de 
Bagnères  avait  oblenu  une  mention  très  honorable  à 
l'un  des  concours  décennaux  institués  par  .Napoléon 
(17  juin  1812). 


Mais  Catel  avait  joué  sous  la  Révolution  un  rôle 
trop  important;  il  avait  trop  manifesté  ses  senti- 
ments bonapartistes  sous  l'Empire,  reprenant  même 
du  service  comme  lieutenant  du  corps  de  musique 
au  moment  du  rétablissement  de  la  garde  nationale 
pendant  les  Cent  Jours,  pour  être  épargné  par  la 
Restauration.  Le  22  mars  1816,  mis  en  réforme,  il 
était  contraint  d'abandonner  le  poste  de  professeur 
d'harmonie  et  d'inspecteur  suppléant  au  Conserva- 
toire, qu'il  occupait  depuis  le  26  décembre  1810.  Dès 
lors,  Catel  vit  dans  une  demi-retraite,  refusant  tous 
les  emplois  qu'on  lui  offre.  Trois  fois  encore,  il  tente 
le  succès  au  théâtre  :  Wallace  ou  le  Ménestrel  écossais, 
représenté  à  l'Opéra  le  4  décembre  1817,  est  peut- 
être,  par  le  sentiment  dramatique  et  le  coloris  mu- 
sical, la  meilleure  de  ses  œuvres.  Zirphile  et  Fleur  de 
myrte,  dont  la  première  eut  lieu  à  l'Opéra  le  29  juin 
1818,  n'eut  que  douze  représentations;  l'Officier  en- 
levé ne  fut  pas  mieux  accueilli  à  l'Opéra-Comique  le 
4  mai  1819.  Découragé  par  ces  échecs,  Catel  se  con- 
damna au  silence  et  se  livra  à  la  culture  des  roses 
dans  son  jardin  du  faubourg  Saint-Denis  et  dans  sa 
maison  de  campagne  de  la  Varenne-Saint-Hilaire. 

Deux  événements,  cependant,  étaient  venus  con- 
soler dans  sa  retraite  celui  qui,  sous  la  Révolution, 
avait  mené  une  vie  si  active.  A  la  mort  de  Monsigny, 
Catel  avait  été  nommé  membre  de  l'Institut;  il  fal- 
lut douze  tours  de  scrutin  pour  décider  entre  les 
trois  candidats  Nicolo,  Boïeldieu  et  Catel,  et  ce 
n'est  qu'à  une  voix  de  majorité  que  celui-ci  fut 
nommé.  D'autre  part,  le  17  mai  182S,  l'amitié  de 
Boïeldieu  lui  fit  obtenir  la  croix  de  la  Légion  d'hon- 
neur qu'il  n'avait  jamais  voulu  solliciter. 

Il  mourut,  17,  rue  du  Faubourg-Poissonnière,  le 
29  novembre  1830,  s'étant  acquitté  jusqu'à  son  der- 
nier jour  de  ses  fonctions  de  rapporteur  à  l'Acadé- 
mie des  beaux-arts. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  CATEL 

1.    PIÈCES    A    L'USAGE    DES    FETES    NATIONALES 

1791.  Deuxième  Hardie  militaire. 

1792.  11  juin.  De  Profundis. 

19  juin.  Hymne  à  l'Egalité,  paroles  de  M.-J.  Chénier. 
3.   20  novembre.  Ode  patriotique. 

20  novembre.  Ouverture  pour  instruments  il  vent. 
1.  Stances  pour  la  fabrication  des  canons,  poudres  et  salpêtres. 

Marche  pour  instruments  à  vent. 

Pas  de  mano-uvre  pour  instruments  a  vent. 

Hardie  pour  instruments  à  vent. 

Hymne  à  ta  Victoire  sur  la  bataille  de  l'Intrus. 

Marche  militaire. 

Hymne  à  l'Être  Suprême. 

Symphonie  militaire. 

Mardie  pour  instruments  à  vent. 

Ourerlure  pour  instruments  à  vent. 

Ode  au  vaisseau  le  Vengeur. 
5.  Symphonie  pour  instruments  à  vent. 

Stances  pour  l'anniversaire  du  :'  Thermidor. 

Hymne  du  10  août. 
'6.  Chant  du  banquet  républicain. 

Chaut  pour  l'anniversaire  de  lu  fric  de  lu  République. 

Chants  pour  le  lieeueil  des  chanls  cirii/ues. 
9.  Hymne  à  ta  Souveraineté  du  peuple. 
7.   17  mai.  Chant  triomphal. 
3.  24  août.  Cantate  pour  la  réception  de  l'impératrice  il  Caen. 

2.    MUSIQUE    DE    CHAMMIE 

S.  Trois  Quatuors  pour  flûte,  clarinette, cor  et  basson. 

7.  Six  Quintettes,  pour  2  violons,  2  altos  et  basse,  op.  1  et  2. 

7.  Six  Sonates  faciles  pour  piano. 


3.     ŒOVBES   DRAMATIQUE 


4  mai.  Sêmiramis.  Opér 
22  janvier.  Les  Artistes  j 
de  Duval. 


de  Desriaux. 

Opéra-Comiqu 


350K 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


ïi  l'fvriur.  L'Auberge  de  llagneres,  opéra-Cniiique,  livret  de 
Jalauert. 
1SUS.  20  décembre.    Mcraiulre  chez  Apcllc,  ballet   héroïque    de 
pierre  Sardel. 

1810.    Sam'il.  /.es  Ilm/adeves.  Opéra,  livrel  de  ÏOUV. 

IMÏ.   17)iiiii.  ;.«  Xubergislei  de  i/uutil,-.  '  ipéra-Coniique,  llvrilt 

de  .i.uiy . 
L8M.   12  février.  Bayardù  Méiièreslen  collaboration  avec  Boîel- 

orau,  Chi'Bdbini  et  Nicoto). 
S  novembre,  premier  en  date,  i  i|ii'Tfi-ComiTjae. 
1*11.'  WW/«c«  u»  /<•  ménestrel  écossais,  Opéra-Comique,  livret  de 

s.uiil    M.ircellin. 
P818.  89   piiu.  Zirphile  et  /leur  de  myrte,   Opéra,  livret  de  Jouy 
.■t  Noël  Lefebvre. 

I /    «  '  ■  0  r  ,vi/,vv.  llpéra-ComiqUC. 


1.    OIIVRAOËS    TUBOUIQl'ES 


Solfèges  Su  Conserva 

mélhodiqr. 
Iruité  d'harmonie.  1 


2"  Wltion,  1815,  avec  une 
i  principes  de  la  musique. 


Bibliographie. 


Caklez  (.1.).  —  Cnlel,  Bélesques,  1894. 

Choron  bIFayolle.  —  Dictionnaire  historique  des  musiciens. 

EscrjDiER.  —  Les  Musiciens  du  temps  de  l'empire. 

Fétis.  —  Biographie  universelle  des  musiciens. 

Grove.  —  Bietioniini  o[  miisie  and  miisicians.  London,  1910. 

Hellooin  (Frédéric)  et  Joseph  Picard.  —  On    Musicien  oublié. 

Calcl,  Paris,  Fischbacher,  1910. 
Moniteur  universel,  an  X. 
Pierre  (Constant).  —  Le  Conservatoire  national  de  musique  et  de 

deelumitlton,  Paris,   1900. 
—  Musique  des  ;eies  et  eevemonies  de  la  Révolution. 
Souries  (A.i.  —  Les  Membres  île  l'Académie  des  beaux- 

2°  série. 
Tiersot  (J.).  —  Les  Fêles  de  la  Révolution,  Paris,  Hachette 


s,  Pari 


Gustave  Charpentier. 

Gustave  Charpentier  est  né  à  Dieuze,  en  Lorraine, 
le  23  juin  1860.  Après  la  guerre  de  1870,  ses  parents 
quittèrent  leuT  pays,  qui  avait  été  annexé  à  l'Alle- 
magne, et  se  fixèrent  à  Tourcoing.  Leur  fils  fit  ses 
premières  études  dans  les  écoles  de  la  ville,  et  se  fit 
remarquer,  pour  ses  belles  aptitudes  musicales,  aux 
classes  de  violon,  de  clarinette  et  de  solfège.  A 
quinze  ans,  il  entrait  comme  employé  dans  une  fila- 
ture, où  il  devait  rester  jusqu'en  1879.  Pendant  ses 
heures  de  loisir,  il  enseignait  le  violon  à  son  patron, 
et  organisait  avec  lui  une  société  symphonique.  Ce  ne 
fut  qu'à  dix-neuf  ans  que  Gustave  Charpentier  suivit 
décidément  sa  vocation  :  il  se  fil  admettre  au  Conser- 
vatoire de  Lille.  Il  y  obtint  un  prix  de  violon  el  un 
prix  d'harmonie;  et  alors,  la  ville  de  Tourcoing  lui 
accorda  une  pension  annuelle  de  d.200  francs  pour 
venir  terminer  ses  études  à  Paris.  En  1881,  il  entre 
au  Conservatoire  dans  la  classe  de  Massart;  mais 
après  deux  concours,  n'ayant  obtenu  aucune  récom- 
pense, il  abandonne  le  violon  et  passe  dans  la  classe 
d'harmonie  d'Hector  Pessard.  Au  bout  de  deux  an- 
nées, il  ligure  au  palmarès  avec  un  second  accessit. 
Enfin  en  188a,  Massexet  l'accueille  dans  sa  classe 
de  composition,  et  en  1887,  il  remporte  le  grand  prix 
de  Home  avec  sa  Didon,  qui  fut  exécutée  aux  Con- 
certs Colonne,  à  Bruxelles  et  à  Tourcoing. 

Le  séjour  de  Charpentier  à  Home  fut  la  période  de 
beaucoup  la  plus  féconde  d'une  vie  où  le  travail 
ne  semble  pas  avoir  occupé  par  la  suite  une  place 
considérable.  Cet  artiste,  plus  que  tout  autre  amou- 
reux de  Paris,  de  son  agitation,  de  ses  plaisirs,  de 
ses  passions  trépidantes,  s'ennuyait  dans  la  Ville 
éternelle.  Ennui  salutaire  qui  détermina  chez  le 
jeune  musicien  une  véritable  fièvre  de  composition. 
De  Rome  il  rapporta  les  Impressions  d'Italie,  la  Vie 
du  Poète,  et  le  premier  acte  de  Louise,  c'est-à-dire 


presque  la  moitié  et  en  tout  cas  la  plus  belle  partie 
de  son  œuvre  entière. 

De  retour  à  Paris,  Gustave  Ciiar-pentier  loua  une 
chambre  à  Montmartre,  et  toute  la  vie,  toute  la  na- 
ture, toute  l'humanité  furent  désormais  enfermées 
pour  lui  dans  les  étroites  limites  de  la  u  Hutte  sa- 
crée ».  Là,  il  mène  l'existence  d'une  sorte  derapin 
mystique,  pris  sans  cesse  entre  le  vertige  de  l'Idéal 
et  les  dégoûts  de  l'orgie.  Il  se  débat  contre  le  doute, 
l'obsession  de  l'impuissance,  le  désespoir.  Il  se  re- 
prend par  moments  et  rêve  d'une  œuvre  de  justice 
sociale  à  laquelle  il  se  consacrerait  et  qui  le  relè- 
verait à  ses  propres  yeux.  Il  vit  réellement  lu  Vie  (lu 
Poêle,  poète  anarchiste  et  révolutionnaire  qui  chante 
la  Ronde  (les  Compagnons,  la  Veillée  rouge,  la.  Chan- 
son du  Chemin.  C'est  le  poète  des  rues,  des  rues  du 
Paris  où  l'on  s'amuse,  où  l'on  fait  la  fête,  où  l'on 
est  triste  aussi  les  lendemains  d'ivresse,  triste  et 
révolté,  où  de  sombres  drames,  où  d'affreuses  tragé- 
dies succèdent  aux  joies  exubérantes  de  la  fantaisie 
déchaînée.  C'est  le  poète  qui  a  pitié  de  toutes  les 
misères  et  veut  les  éclairer  une  heure  au  moins  de 
l'illusion  du  plaisir  et  de  l'amour.  Il  organise  des 
divertissements  populaires  dont  il  est  le  musicien. 
Le  9  novembre  1896,  il  entraîne  toute  une  foule  après 
lui,  au  jardin  du  Luxembourg,  donner  une  Sérênaêe 
à  Watteau.  Le  26  juillet  1898,  c'est,  sur  la  place  de 
l'Hôtel  de  Ville,  une  manifestation  bien  plus  gran- 
diose qu'il  dirige,  celle  du  Couronnement  de  la  Muse. 

Toute  cette  activité,  un  peu  désordonnée,  ces  rê- 
veries vagues  et  inconsistantes,  cette  débauche  de 
lyrisme  généreux,  mais  qui  cherche  en  vain  son  objet, 
et  le  goût  des  libres  et  courtes  aventures  du  cœur 
avec  tout  ce  qu'elles  contiennent  d'amertume  et  de 
désolation,  et  les  gamineries,  la  «  blague  »,  les  pué- 
rils amusements  d'une  population  qui  s'étourdit  pour 
oublier  ses  souffrances  et  l'enfer  d'une  vie  sacrifiée, 
tout  cela  se  résume  dans  un  roman  musical,  Louise, 
dont  la  première  représentation  eut  lieu  à  l'Opéra- 
Comique  le  3  février  1900,  quelques  semaines  avanl 
l'ouverture  de  l'Exposition  universelle,  et  dont  l'im- 
médiat et  prodigieux  succès  en  France  et  à  l'étran- 
ger s'explique  en  grande  partie  par  l'attrait  qu'exerce 
sur  le  monde  entier  Paris,  ville  des  plaisirs,  et,  dans 
Paris,  Montmartre. 

En  même  temps  1 i960  ,  Gustave  Charpentier  fon- 
dait VOEuvre  de  Mirni  Pinson,  qui  avait  primitive- 
ment pour  but  dVilliii  des  places  de  théâtre  aux 
ouvrières  parisiennes.  En  1902,  il  complétait  cette 
première  institution  par  la  création  de  cours  popu- 
laires et  gratuits  de  musique  et  de  danse.  Et  il  espé- 
rait que  le  Conservatoire  iiopulaire  de  Mirni  Pinson 
fournirait  un  jour  ses  éléments  à  un  véritable  Théâ- 
tre du  peuple. 

La  Vie  du  Poète,  remaniée,  parut  au  théâtre  en  1913 
sous  le  titre  de  Julien,  drame  lyrique  en  cinq  actes. 

Gustave  Charpentier  est  chevalier  de  la  Légion 
d'honneur;  il  a  été  nommé  membre  de  l'Institut  en 
1912. 

CATALOGUE  DES   ŒUVRES 
DE  GUSTAVE  CHARPENTIER 


Poèmes  chaules.  Paris.  Ileugel.  ÎS'.'-S. 

LesFleurs  du  Mal  (Ch.  liaudelaire  ,  Paris,  Heugel,  1S95 


Poèmes  chaules,  Paris,  Heugel,  lv"  l. 

Impressions  fausses  ;Paul  Verlaine).  Paris,  ilm^rl.  Iv.r.. 
Sérénade  à  Watteau  (Paul  Verlaine  .  Paris,  Heugel,  1896. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3509 


Chant  d'iipol lieuse,    mêlé  de  danses  à  la  mode  antiqu 
Georges  de  Bouhélicr),  1902,  non  publié. 

MTlsI.jlE    SYMPBONIQUK 

Impressions  d'Italie,  suite  d'orchestre.  Paris,  Heugel,  18 
Deuxième  Suite  d'orchestre  (1894-1SU7).  Manuscrit  brûlé 
incendie. 


Didon  (Auge  de  Lassus),  cantate  du  prix  de  Rome,   ISS7,  Paris, 

Heugel. 
La  Vie  du  Poète,  symphonie-drame  en  3  actes  et  4  tableaux  (ISS9- 

1S91),  Paris,  Choudens. 
Louise,  roman  musical  en  4  actes  et  7  tableaux,  Opéra-Cuiiiique, 

3  février  1900,  Paris,  Heugel. 
Julien,  drame  lyrique  en  5  actes,  Opéra-Comique,  1913,  Paris, 

Max  Eschig. 

Bibliographie. 

Alfred  Brunead.  —  Musiques  d'hier  et  de  demain,  Paris,  1900. 

—  La  Musique  française.  Paris,  1901. 

Et.  Desteangks.  —  Consonances  et  Disséminées.  Paris,  1906. 
Arlhur  Hervev.  —  l'rench  Musie  m  the  Sineleenth  Ceiiturij,  Lon- 

don,  1903. 
Hugues  Imburt.  —  Médaillons  contemporains,  Paris,  1902. 
Octave  Séré.  —  Musiciens  français  d'aujourd'hui,  l'aris,  Mercure 

de  France,  1911. 
Léon  Abric  —  Gustuee  Charpentier,  dans  la  Revue  Illustrée  du 

15  mars  1900. 
C.  Bellaigue.  — Louise.  Revue  des  Deux  Mondes  du  lPr  mars 

1900. 
P.  de  Bréville.    —  le  Couronnement   de  la  Muse.  Mercure    de 

France  de  septembre  1S9S. 

—  Louise.  Mercure  de  France  de  mars  l'.ioû  et  mars  190L. 

.1.  Combaried.  —  A  propos  de  la  Centième  de  Louise.  Revue  Musi- 
cale de  janvier  1901. 

—  A  propos   du   Couronnement  de  la   Muse.   Revue  Musicale   du 

1"  octobre  1906. 

V.  Derav.  —  Amant  la  •<  Première  »  de  Louise.  Courrier  Musical 
du  27  janvier  1900. 

Louis  Doyen.  —  Louise.  Grande  Revue,  l"r  mai  1900. 

Paul  Dukar.  —  A  propos  du  Couronnement  de  ta  Muse.  Revue  Heb- 
domadaire, août  1S98. 

—  Louise.  La  Chronique  des  Arts,  17  février  1900,  et  Revue  Heb- 

domadaire de  mars  1900. 
Eloiteriadis.  —  Gustuee  Charpentier  en  A/lemai/ne.  Comœdia  du 

25  janvier  1910. 

Hugues  Imbert.  —  La  Vie  du  Poêle.  Guide  Musical  du  26  juin  et 

du  3  juillet  1892. 
Adolphe  Jolijen.  —  Louise.  Le  Théâtre  d'avril  1900. 
M.  Kofferath.   —  Louise .  Guide  Musical  du  10  février  190 1 . 
Pierre  Lalo.  —  Louise.  Le  Temps  du  13  février  1900. 

—  Une  Enquête  sur  la  musique.  Le  Temps  du  30  octobre  1900. 
Louis  Lalov.  —  Le  Drame  musical  moderne.  Les  Yeristes  Français  : 

Gustave  Charpentier.  Mercure  musical  du  1er  juillet   1905. 
Tristan  Leclere.  —  Les  Musiciens  de  Verlaine.  Revue  Bleue  du 

14  novembre  1903. 
Romain  Rolland.  — Louise.  Rivista  Musicale  Italiana,  vol.  VII, 

1900. 
Ernest  Rêver.  —    La    Vie  du    Poêle.    Journal    des  Débats   du 

26  juin  1892. 

Saint-Georges  DEBonnÉLii  r.  —  Les  Soliveaux  Maîtres.  Le  Figaro 
du  19  septembre  1902. 

Cherubihi. 

Marie-  Lcniis-Charles-Zénobi-  Salvador  Gherubini 
naquit  à  Florence  le  14  septembre  1 76(1.  Telle  est  du 
moins  la  dale  indiquée  par  son  acte  de  baptême,  et 
c'est  par  une  erreur  assez  étrange  que  Cherubini 
donna  toujours  le  8  septembre  comme  date  de  sa 
naissance.  11  était  le  dixième  enfant  d'une  famille 
qui  en  compta  douze.  Ses  parents  étaient  de  condi- 
tion très  modeste;  cependant,  son  père,  musicien 
à  l'orcbestre  de  la  Pergola,  était  propriétaire  de  la 
maison  qu'il  habitait  Via  Fiesolana,  n°  0886,  aujour- 
d'hui n»  22. 

L'enfance  du  jeune  Salvador  fut  studieuse;  dès 
l'âge  de  six  ans.  il  était  déjà  l'élève  de  son  père, 
qui  l'initiait,  trois  ans  plus  tard,  aux  éléments  du 
contrepoint.  A  dix  ans,  il  passait  sous  la  direction 
de  Barthélémy  et  d'Alexandre  Felici,  qui  lui  ensei- 
gnaient  l'harmonie  et  l'accompagnement;   Bizarri, 


Castrucci  furent  ses  professeurs  de  composition  et 
de  chant.  Ses  progrès,  furent  si  rapides  qu'à  treize 
ans,. il  écrivait  une  il/esse  à  quatre  voix  avec  accom- 
pagnement d.'orchestre,  exécutée  à  Florence.  Cette 
première  œuvre  se  vit  bientôt  suivie  de  beaucoup 
d'autres,  surtout  dans  le  genre  de  la  musique  reli- 
gieuse; deux  Messes,  deux  Dir.it,  des  Lammtaliansde 
■lèrêmie,  un  Miserere,  un  Te  Deum,.  eulin  un  Inter- 
mède, représenté  sur  un  théâtre  de  société. 

En  1778,  une  pension  du  grand  duc  de  Toscane 
permit  au  jeune  Cherubini  d'aller  à  Bologne  prendre 
des  leçons  de  Sarti,  qui  passait  alors  pour  le  premier 
musicien  de  l'Italie.  Sous  sa  direction,  il  apprit  à 
admirer  Palestrina  et  ne  composa  guère  à  celte 
époque  que  des  antiennes;  en  même  temps,  il  s'ini- 
tiait à  toutes  les  connaissances  nécessaires  à  un 
compositeur  de  théâtre.;  il  semble  même  que,  pour 
le  former  par  la  pratique,  Sarti  lui  ait  souvent  confié 
le  soin  d'écrire  les  seconds  rôles  de  ses  opéras.  Après 
quelques  années  d'études,  d'abord  à  Bologne,  puisa. 
Milan,  où  il  avait  suivi  son  maître,  Cherubini  se  crut 
dé  taille  à  allronter  la  scène,  et  le  succès  justifia  ses- 
espérances.  C'est  l'époque  de  ses  opéras  italiens  des- 
tinés aux  diverses  scènes  de  la  péninsule  :  //  Quinto 
Fabio  à  Florence,  et.  dans  l'espace  de  quelques  aiir 
nées,  Adriano  in  Siria  à  Livourne;  Messenzio  et  Ar- 
rnida  (le  sujet  même  qu'avait  traité  Gluck)  à  Flo- 
rence; en  1783  à  Home,  une  nouvelle  version  de 
Quinto  Fabio,  à  Venise  un  opéra  bouffe,  l'Epoux  de 
trois  femmes,  le  mari  d'aucune;  en  1784,  à  Mantoue, 
Alessandro  nell'lndie.k  Florence Idalide.  Entre  temps, 
il  écrit  dix  Nocturnes,  à  deux  voix,  qualre  Mélodies... 
pour  une  voix;  deux  Airs  et  deux  Duos  d'opéras. 
Déjà  la  réputation  de  Cherubini  est  solidement  éta- 
blie; les  Vénitiens  l'appellent  «  il  Cberubino  », 
moins  pour  rappeler  son  nom  que  pour  célébrer  le 
charme  et  la  grâce  de  ses  mélodies.  Les  Jésuites  de 
Florence,  désireux  d'attirer  la  foule  dans  leur  église, 
lui  demandent  un  oratorio,  construit  sur  les  thèmes 
les  plus  fameux  de  ses'  opéras. 

En  1784,  Cherubini  est  appelé  à  Londres,  où  son 
nom  était  déjà  fameux;  et  pendant  son  séjour  en 
Angleterre,  il  compose  deux  opéras,  la  Finta  princi- 
pessa  en  1785  et  Gittlio  Sabino  en  1786.  La  même 
année,  il  part  pour  Paris  où  l'attire  son  ami  Viotti  ; 
tous  deux  s'installent  20,  rue  Notre-Dame-des-Vic- 
toires.  Sauf  un  court  séjour  à  Florence  en  1788, 
Cherubini  ne  retournera  plus  en  Italie;  il  ne  reverra 
plus  sa  famille  italienne  et  passera  en  France,  pres- 
que sans  interruption,  cinquante-six  ans. 

Dès  les  premiers  temps  de  son  séjour,  il  cherche 
à  se  familiariser  avec  la  langue  française,  qu'il  n'ar- 
rivera jamais  à  prononcer  correctement;  pour  s'as- 
similer la  prosodie  française,  il  met  en  musique  les 
18  Romances  du  roman  d'Estelle'.  Cependant,  avec 
une  habileté  toute  italienne,  il  cultive  toutes  les 
relations  susceptibles  de  l'aider;  il  fait  la  connais- 
sance de  Marmontel;  il  se  fait  présenter  à  Versailles 
à  Marie- Antoinette.  Et  lorsque  Léonard,  le  coiffeur 
de  la  reine,  devenu  concessionnaire  du  Théâtre  Ita- 
lien, s'adjoint  Viotti,  celui-ci  charge  son  ami  d'é- 
crire les  morceaux  à  intercaler  dans  les  partitions 
italiennes;  c'est  ainsi  que  des  trios  et  des  quatuors, 
introduits  dans  Viaggiatori  felici,  dans  VItaliuna  in 
Londra,  dans  de  nombreuses  œuvres,  font  peu  à  peu 
connaître  au  public  français  le  nom  de  Cherubini. 


CliillVe  donné  par  le  Catalogue  des  œuvres  de  Ckeiiubim.  M.  H... 
,iser  donne  le  chiffre  de  19  {Luigi  Cherubini,  sein  Lehen  mol 
Werke,  Leipzig,  1013,  p.  84). 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Kntin  U'  2  décembre  1788,  il  hasarde  ;\  l'Opéra 
D&mophon,  sa  première  œuvre  française  Urée  d'un 
poème  de  Marmontcl.  L'opéra  eut  peu  de  succès; 
peul  être  cet  échec  découragea-t-il  le  compositeur, 
qui  n'acheva  même  pas  la  partition  d'une  Marguerite 
d'Anjou.  Ce  n'est  qu'en  1794  qu'il  s'essayera  de  nou- 
veau au  théâtre  avec  LodoiskUj  représentée  à  la  salle 
des  r/uileries  (ancien  Théâtre  Italien,  plus  tard  salle 
de  la  rue  Favart),où  il  donnera  successivement  Elisa 
o:t  le  voyage  au  mont  Saint-Bernard  (1793),  Médée 
(1797),  l'Hôtellerie  portugaise  (1798),  la  Punition 
(1799),  les  Deux  Journées  (1800),  auxquels  il  faut 
ajouter  la  Prisonnière,  en  collaboration  avec  Boïel- 
dieu  1799  .  et  EjJt'cure,en  collaboration  avec  Méhul 
(1800). 

Pendant  les  premières  années  de  la  Révolution, 
la  situation  matérielle  de  Cherubini  semble  avoir 
été  fort  précaire  :  la  musique  parvenait  à  peine  à 
le  faire  vivre;  ses  œuvres  ne  se  vendaient  plus;  les 
leçons  et  les  travaux  de  copie  étaient  de  plus  en  plus 
rares  :  Lodoïska  n'avait  été  donnée  qu'une  douzaine 
de  fois.  D'autre  part,  l'héritage  de  son  père,  mort  le 
10  septembre  1792,  n'avait  pas  contribué  à  augmen- 
ter ses  ressources,  puisque,  après  la  vente  de  la  mai- 
son de  Florence,  il  avait  à  peine  de  quoi  assurer  une 
modique  pension  à  l'une  de  ses  sœurs  restée  vieille 
fille.  L'incertitude  de  l'avenir  obligea  même  Cheru- 
bini à  différer  un  projet  de  mariage  avec  la  fille  de 
Jean  Courette,  ancien  chanteur'  haute-contre  de  la 
chapelle  du  roi.  Et  Cherubini  multiplie  vainement 
ses  etlbrls  pour  améliorer  sa  situation.  Cependant, 
l'espoir  d'être  nommé  musicien  dans  la  garde  natio- 
nale le  décide  à  se  marier,  le  12  avril  1794.  Mais  la 
peur  de  compromettre  sa  candidature  le  contraint  à 
prendre  de  nmlliples  précautions  pour  la  célébration 
du  mariage  religieux;  c'est  de  nuit,  dans  une  cave, 
qu'un  prêtre  insermenté  bénit  les  nouveaux  époux. 
Enfin,  le  20  juin  1794,  le  citoyen  Brielle  ayant 
donné  sa  démission  de  musjcien  ,  Cherubini  était 
appelé  à  le  remplacer  comme  triangle  dans  la  garde 
nationale,  et  loO  livres  lui  étaient  allouées  pour  son 
équipement.  On  le  retrouve  chargé,  avec  Gossec  et 
Méhul,  du  choix  et  de  la  confection  des  morceaux 
qui  doivent  être  exécutés;  à  la  fin  de  1794,  il  partage 
avec  Lesueur,  Gossec  et  Méhul  le  soin  de  surveiller 
l'enseignement  et  de  diriger  les  répétitions  générales. 
Les  appointements  étaient  modestes,  mais  quelques 
leçons,  des  arrangements  de  musique,  des  travaux 
de  copie,  la  composition  d'hymnes  patriotiques, 
quelques  auditions  dans  les  concerts,  assuraient  des 
ressources  au  jeune  ménage,  qui,  le  27  janvier  179S, 
s'augmentait  par  la  naissance  d'une  fille. 

Lorsqu'un  décret  de  la  Convention  eut  décidé,  le 
3  août  1793,  la  fondation  du  Conservatoire,  Chéru- 
bin] se  multiplie  pour  seconder  Sarrette;  le  24  oc- 
tobre 1795,  il  fait  partie  du  jury  d'admission  aux 
emplois  de  professeurs.  C'est  à  l'art,  non  à  un  parti 
politique,  qu'il  se  dévoue;  mais  comme  il  sent  la 
nécessité  de  donner  des  preuves  de  civisme,  il  met  en 
musique  des  vers  patriotiques,  un  Hymne  à  la  Fra- 
ternité de  Desoignes  (1794)  et  un  Hymne  du  Panthéon 
de  M.-J.  Chénier  la  même  année;  un  Chant  républi- 
cain de  Lebrun  en  1793;  en  1797  un  Hymne  funéraire 
sur  la  mort  du  général  Hoche  de  M.-J.  Chénier  et  un 
Hymne  du  combat  de  Davrigny;  en  1798,  ce  sera  une 
Ode  sur  le  IS  fructidor  et  le  Salpêtre  républicain,  en 
1799  un  Hymne  pour  la  fête  de  la  jeunesse  de  Parny. 
Sous  le  Consulat,  qui  le  maintient  dans  son  poste 
au  Conservatoire,  Cherubini,  moins  préoccupé  de  pa- 


raître bon  républicain,  manifeste  ses  sentiments  reli- 
gieux en  faisant  baptiser  sa  fille,  alors  âgée  de  6  ans 
(il  avril  1801),  et  son  fils  Salvador,  né  le  10  novembre 
1801.  Cependant,  l'empire  allait  être  pour  le  musicien 
une  époque  funeste.  Ainsi  que  le  prouvent  de  nom- 
breuses anecdotes,  Napoléon  avait  pourCiiERuniNi  une 
antipathie  qu'il  manifesta  en  maintes  occasions,  et 
surtout  en  1804  lorsque,  malgré  l'insistance  de  Méhul, 
il  refusa  de  comprendre  Cherubini  dans  la  première 
promotion  de  la  Légion  d'honneur.  D'autre  part, 
deux  tentatives  nouvelles  au  théâtre  avec  l'opéra 
d'Anacréon  ou  l'Amour  fugitif  (4  octobre  1803)  et  le 
ballet  Achille  à  Scyros  (1804)  avaient  abouti  à  deux 
échecs.  Knfin  une  maladie  nerveuse,  dont  il  souffrait, 
s'était  aggravée  encore  au  moment  de  la  mort  de 
son  beau-frère  (8  octobre  1803).  Aussi,  triste,  démo- 
ralisé, Cherubini  demanda  un  congé  et  accepta 
les  propositions  qu'on  lui  faisait  à  Vienne;  les  ar- 
tistes du  Conservatoire  profitèrent  de  son  voyage 
pour  le  charger  de  remettre  à  Haydn  la  médaille  d'or 
qu'ils  avaient  fait  frapper  en  son  honneur  (26  juin 
1805). 

A  Vienne,  Cherubini  fait  représenter  Lodoïska 
(15  février  1806),  et  compose  pour  le  théâtre  de  la 
Porte  de  Carinthie  l'opéra  de  Faniska  (25  février 
1806).  Il  espère  même  un  instant  gagner  la  faveur 
impériale;  Napoléon,  le  sachant  à  Vienne,  le  charge 
d'organiser  des  concerts  au  quartier  général  de 
Schœnbrunn.  Mais  c'est  en  vain  que  Cherubini  dé- 
pense tout  son  zèle.  A  son  retour  à  Paris,  où  il  est 
fêté  par  ses  collègues  du  Conservatoire,  en  protes- 
tation contre  la  défaveur  impériale,  il  trouve  toutes 
les  places  occupées,  et  Paër,  dont  l'empereur  a 
entendu  l'Achille  à  Dresde,  le  supplante  dans  la  di- 
rection de  la  musique  particulière  de  la  cour,  tandis 
que  la  surintendance  de  la  chapelle  impériale  était 
confiée  à  Paisiello,  le  musicien  favori  de  Napoléon. 
Découragé,  Cherubini  semble  vouloir  renoncer  à 
la  musique  pour  se  livrer  à  la  botanique  et  au  des- 
sin, pour  lequel  il  avait  de  rares  dispositions,  mais  à 
ce  moment,  un  brusque  revirement  se  produit  en  lui. 
Une  de  ses  élèves,  la  comtesse  de  Caraman,  l'ayant 
emmené  dans  son  château  de  Chimay,  Cherubini,  eu 
entendant  une  messe  d'HAVON,  se  sent  pris  d'une 
sorte  de  remords  d'avoir  abandonné  la  musique.  Il 
reprend  courage,  se  remet  au  travail,  écrit  une  Messe 
à  i  voix  qui,  exécutée  en  mars  1809  à  l'hôtel  de  Chi- 
may à  Paris,  y  remporte  un  sucées  éclatant.  Mais 
trois  nouvelles  tentatives  au  théâtre  n'ont  pas  de 
meilleurs  résultats  que  les  précédentes;  Pygmalion, 
Le  Crescendo  (1810),  les  Abencérages  (6  avril  1813) 
sont  très  froidement  accueillis  du  public.  Cependant, 
le  24  octobre  1814,  Cherubini  recevait  avec  Spontini 
le  diplôme  fort  recherché  alors  de  membre  de  l'Aca- 
démie royale  de  Suède. 

Pendantcette  période.  Cherubini  s'était  activement 
occupé  d'une  tentative  assez  orignale,  l'exploitation 
commerciale  de  leurs  ouivres  parles  auteurs  eux- 
mêmes.  Le  5  août  1802,  un  groupe  de  musiciens  du 
Conservatoire  avaient  fondé  un  magasin  de  musique 
au  n°  78  de  la  rue  Richelieu.  Cherubini  en  avait  eu 
seul  d'abord  la  gérance;  puis  la  raison  sociale  était 
devenue  Cherubini,  Méhul  et  Cie.  Chacun  des  associés, 
parmi  lesquels  figuraient  Bode,  Kreutzer,  Nicolo, 
Boïeldieu,  s'engageait  à  fournir  annuellement  un 
ouvrage  de  théâtre  ou  cinq  pages  de  musique.  Sauf 
Nicolo,  tous  faillirent  à  leur  engagement;  l'affaire, 
liquidée  le  12  août  )812,  fut  reprise  par  Jacques-Jo- 
seph Frey. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3511 


La  Restauration  répare  l'injustice  de  l'empire  à 
l'endroit  de  Cherubini.  Dès  le  13  décembre  1814, 
avant  les  Cent  jours,  Cherubini  est  fait  chevalier  de 
la  Légion  d'honneur.  Après  un  voyage  en  Angle- 
terre, motivé  par  le  désir  de  rencontrer  Viotti  et  de 
s'acquitter  de  certains  engagements  envers  la  Société 
philharmonique  de  Londres,  Cherubini  rentre  à  Paris 
le  8  juin.  La  suppression  du  Conservatoire  par 
louis  XVIII  risquait  de  lui  faire  perdre  une  partie 
de  ses  ressources,  mais  les  compensations  lui  vien- 
nent nombreuses  :  nommé  d'abord  surintendant  de 
la  chapelle  du  roi,  il  devient  bientôt,  à  la  mort  de 
Martini  (10  février  18161,  chef  de  la  chapelle  avec  un 
traitement  de  ">.820  francs.  Lorsque  le  Conservatoire 
estrélahli  sous  le  nom  d'Ecole  royale  de  musique,  Che- 
rubini y  est  appelé  comme  professeur  de  composition 
avec  2.910  francs  de  traitement,  auxquels  viennent 
s'ajouter  dans  la  suite  une  pension  de  7%  francs  et 
de  nombreuses  gratifications  l  o82  francs  pour  la 
surintendance,  291  francs  pour  l'Ecole  royale  de 
musique).  Vers  la  fin  de  1816,  la  situation  de  Cheru- 
bini est  devenue  plus  stable,  et  sa  fille,  Victorine,  peut 
épouser  un  sous-intendant  militaire,  Turcas. 

Membre  de  l'Institut  le  26  mai  1816,  chevalier  de 
l'ordre  de  Saint-Michel,  il  devient  le  compositeur 
officiel  de  la  cour;  c'est  ainsi  que  le  Moniteur  du 
14  juin  1816  annonce  que  Cherubini  a  été  chargé  de 
mettre  en  musique  la  Cantate  écrite  pour  le  banquet 
royal  à  l'occasion  du  mariage  du  duc  de  Berry.  C'est 
lui  qui  compose  la  Messe  chantée  le  12  février  1821  à 
Saint-Denis  pour  le  repos  de  l'âme  du  duc  de  lîerry, 
lui  encore  qui,  en  collaboration  avec  Berton  et  Boïel- 
dieu,  est  chargé  de  la  partie  musicale  dans  la  fête  du 
30  avril  1821  pour  le  baptême  du  duc  de  Bordeaux, 
lui  aussi  qui,  avec  Bebton,  Boieldieu,  Kreutzer  etPAËR, 
écrit  la  musique  de  Blanche  de  Provence,  pièce  de 
circonstance  représentée  le  1er  mai  à  l'Opéra.  La 
ville  de  Paris  lui  alloue  de  son  coté  2.600  francs  de 
gratifications  à  l'occasion  de  ces  fêtes.  En  mai  1822, 
Cherubini  est  nommé  directeur  de  l'Ecole  royale  de 
musique;  pendant  21  ans,  il  remplira  ces  fonctions, 
qu'il  prenait  très  au  sérieux,  se  préoccupant  de  la 
discipline  et  de  l'exactitude,  surgissant  sans  cesse 
dans  les  classes  ou  dans  les  bureaux,  sa  montre  à  la 
main,  multipliant  observations  et  semonces,  faisant 
jouer  et  chanter  les  élèves  du  Conservatoire  pour  les 
habituer  à  la  scène.  Aussi  l'esprit  d'ordre,  de  minu- 
tie, de  manie  même  de  ce  «  tout  pi-lit  vieillard  aux 
yeux  pleins  de  feu  »,  sa  franchise,  sa  dureté,  son 
accueil  froid  et  bourru,  tel  celui  de  «  quelqu'un  qui 
commence  par  se  mettre  sur  la  défensive  »,  V  «  ani- 
mation grognonne  »  et  presque  comique  de  sa 
parole,  les  inégalités  de  son  humeur  n'ont  pas 
manqué  de  lui  faire  de  nombreux  ennemis.  En  géné- 
ral, son  administration  a  été  fort  sévèrement  jugée; 
c'est  ainsi  que  Pastou,  un  professeur  de  l'époque, 
assurait  que,  »  malgré  son  indiscutable  énergie,  il  ne 
fut  pas  de  tout  point  bon  administrateur,  à  cause  de 
son  entêtement  modèle,  de  ses  préventions  qui  sou- 
vent ont  occasionné  de  grands  dommages  aux  artistes 
et  à  l'école  ». 

Le  24  avril  1828,  Cherubini  obtient  avec  Habeneck 
l'autorisation  de  créer  les  concerts  du  Conservatoire. 
D'ailleurs,  sans  attendre  l'approbation  officielle,  il 
avait,  dès  le  9  mars,  donné  un  premier  concert,  au 
programme  duquel  il  figurait  avec  trois  de  ses  œuvres  : 
un  chœur  de  Blanche  de  Provence,  l'ouverture  des 
Abencéràges,  le  Kyrie  et  le  Gloria  de  la  Messe  du 
Sacre. 


L'avènement  de  Louis-Philippe,  décidé  à  procéder 
à  de  sérieuses  économies,  marque  une  notable  dimi- 
nution des  ressources  de  Cherubini;  la  suppression 
de  la  surintendance  de  la  chapelle  et  de  la  pension 
royale  lui  enlève  environ  9.000  francs  de  traitement 
annuel.  11  songe  alors  au  théâtre,  malgré  le  peu  de 
succès  qu'il  y  avait  trouvé  :  Ali-Baba  ou  les  quarante 
voleurs,  sur  un  livret  de  Scribe,  destiné  d'abord  à 
l'Opéra-Comique,  n'est  en  réalité  qu'un  ancien  opéra 
écrit  en  1793,  Koukourgy,  remanié  quarante  ans  plus 
tard.  Représenté  à  Versailles  le  22  juillet  1833,  puis 
à  l'Opéra  de  Paris,  il  ne  dépassa  pas  la  onzième 
représentation.  Cependant,  l'offre  de  la  partition  au 
roi  de  Prusse  valut  au  compositeur  un  cadeau  de 
2.000  francs;  peut-être  le  souverain,  connaissant  la 
situation  moins  aisée  de  Cherubini  depuis  la  chute 
de  Charles  X,  avait-il  saisi  ce  prétexte  pour  déguiser 
le  secours  qu'il  lui  envoyait.  Une  pension,  votée  par 
le  ministère  de  l'intérieur  en  juillet  1837,  vint  aussi 
aider  Cherubini  à  liquider  d'anciennes  dettes. 

A  la  mort  de  Boieldieu,  Cherubini  voulut  faire 
entendre  un  de  ses  Requiem  pour  voix  d'hommes  et 
de  femmes,  mais,  l'autorité  ecclésiastique  interdi- 
sant les  voix  mixtes,  il  en  écrivit  un  autre  pour  voix 
d'hommes  seules  (1836),  qui  devait  être  exécuté  à 
ses  propres  funérailles. 

En  1842,  il  était  nommé  commandeur  de  la  Légion 
d'honneur  au  moment  où  il  prenait  sa  retraite  de 
directeur  du  Conservatoire  (3  février  1842)  :  aucun 
musicien  n'avait  encore  obtenu  pareille  distinction. 
L'n  mois  plus  tard,  le  1">  mars  1842,  Cherubini  mou- 
rait à  l'âge  de  quatre-vingt-un  ans,  et,  après  des 
funérailles  solennelles  à  Saint-lîoch  (19  mars  ,  il 
était  enterré  au  Père-Lachaise. 

«  Les  sensations  qu'on  éprouvait  en  approchant  de 
Cherubini,  écrit  Ad.  Adam,  étaient  si  étranges  qu'on 
avait  peine  à  les  définir  et  plus  encore  à  les  com- 
prendre.» La  vénération  que  l'on  éprouvait  pour  son 
grand  âge  et  pour  son  beau  talent  était  altérée  par 
le  ridicule  des  minuties  auxquelles  il  s'attachait,  par 
le  comique  de  son  accent  italien,  par  une  froideur  et 
une  dureté  qui  cependant  n'excluaient  pas  une  cer- 
taine bonté. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  CHERUBINI 

Y.  BOTTÉE  DE  Toolmos.  —  St'lice  de<  minus   rtts    au' 

la  musique  composée  par  feu  M.  !..  C.  Z.  S.  Cherubini,  ex- 

Stirint.-ildtint  'h-  lu  «.«'(if  du  r.n.  i-f-direrte.tr  dit  f.n.isrrrn- 
toirede  musique,  etc.,  Paris,  1843,  in-S°,  36  pages. 

MUSIQUE    RELIGIEUSE 

Il  Messes  solennelles.  —  2  messes  de  Requiem  avec  orchestre.  — 
Kyrie,  Gloria,  Credo,  Sanctus  de  diverses  combinaisons. — 
Credo  à  S  voix  avec  orgue.  —  i  Huit.  —  I  Magnificat, 
4  voix  et  orgue.  —  /  Miserere,  i  voix  et  orchestre.  —  /  Te. 
Deum,  4  voix  et  orchestre.  —  ;  litanies  de  la  Vierge.  — 
i  Lamentations  de  Jérèmie,  2  voix  et  orchestre.  —  /  Ora- 
torio. —  38  motels,  tjrtttlitek,  htjmnes,  ele.  —  20  aittien  tes, 
sur  le  plain-chant. 

MUSIQUE    INSTRUMENTALE 

(  Symphonie.  —  10  Ouvertures.  —  Entr'acles,marelies  et  couire.lau- 
ses.  —  15  Marches  et  pus  redoublés  pour  instruments  à  vent. 
—  6  Quatuors.  —  1  Quintette.—  13  Sonates  pour  2  orgues.  — 
6  Sonates  pour  piano.—  2 pièces  pour  deux  orgues  à  cylindre. 
I  Fantaisie  pour  piano.  —  Nombreux  morceaux  détachés. 

MUSIQUE   VOCALE 

30  Airs  italiens.  —  9  Duos.  —  3  Trios  et  Quatuors.  — 

d'ensemble.  —  17  Airs. —  n  grandes  Cantates  et  morceaux 

de  lireoustunee.  —  .1  lli/mues  et  eltants  révolutionnaire..  — 
77  Nocturnes  et  chunls  italiens.  —  Xombreii.r  canons  et  linéi- 
ques madrigaux  italiens. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 

le  midi  de  la  France  en  donnant  des  concerts.  Ses 
parents  s'étant  fixés  à  Bordeaux,  il  entra  comme 
premier  violon  a  l'orchestre  du  Grand  Théâtre.  Un 
musicien  de  la  ville,  Hippolyte  Sonnet,  lui  donnait 
des  leçons  d'harmonie.  Il  vint  bientôt  terminer  ses 
études  à  Paris;  il  fut  admis  dans  la  classe  d'HABENECK 
pour  le  violon  eu  1830,  et  obtint  un  second  prix  en-1833. 
En  même  temps,  il  travaillait  la  composition  avec 
Reiciia.  Il  devint  successivement  premier  violon  aux 
Italiens  et  second  violon  à  l'Opéra.  Il  se  fit  d'abord 
connaître  comme  compositeur  par  six  quatuors  pour 
voix  d'hommes  qui  furent  chantés  aux  concerts  du 
Conservatoire,  puis  par  une  suite  de  six  morceaux 
à  deux  voix,  intitulés  te  Vieux  Paris.  Il  débuta  au. 
théâtre  le  24  août  1838  avec  la  Figurante,  opérai- 
comique  en  cinq  actes  qui  fut  accueilli  avec  une 
faveur  assez  marquée.  Par  la  suite,  il  eut  le  tort 
d'employer  d'assez  mauvais  livrets,  et  comme  sa 
musique  n'avait  pas  d'ailleurs  d'originalité  bien 
saillante,  ses  ouvrages  ne  se  maintinrent  jamais 
longtemps  au  répertoire. 

A  la  mort  d'HALÉvy,  Clapisson  fut  élu  membre  de 
l'Académie  des  beaux-arts,  et  en  1861,  il  fut  nommé 
professeur  d'harmonie  au  Conservatoire. 

Clapisson  avait  réuni  une  très  curieuse  collection 
d'anciens  instruments  de  musique.  En  1861,  il  la 
céda  à  l'Etat  moyennant  une  somme  de  30  000  francs, 
une  pension  de  3  000  francs,  dont  moitié  réversible 
sur  sa  veuve,  le  titre  de  conservateur  du  Musée  que 
l'Etal  institua  au  Conservatoire  avec  cette  collection 
comme  premier  fond,  et  le  logement  dans  le  bâti- 
ment même  où  fut  installé  le  Musée. 

Clapisson  n'avait  pas  vendu  à  l'Etat  tous  les  pré- 
cieux objets  qu'il  avait  rassemblés.  Après  sa  mort, 
une  yenle  en  fut  faite  sous  ce  titre  :  Collection  de 
sifflets,  instruments  de  musique  et  curiosités  diverses 
de  feu  M.  Clapisson,  membre  de  l'Institut  et  professeur 
au  Conservatoire  (Paris,  Delange,  1866,  in-!S"). 

Clapisson  est  mort  à  Paris,  presque  subitement, 
le  19  mars  1866,  d'une  imprudence.  S'étant  purgé, 
il  n'attendit  pas  l'elfetde  la  médecine  pour  prendre 
abondamment  de  la  nourriture. 


Italien*  : 

1780'.  Il  Quiuto  Fabio.  opéra. 
17S2.   Attriiino  iii  Siriii ,  Livourne. 

Unstnsia,  fflorenoe. 

Annula.  Florence. 
1783.  //  Qiuiitii  Fabio.  nouvelle  version,  Rome. 

L'Epoux  'le  Irait  itmme»,  Il  mari  d'aucune,  opéra  bouffe, 

I7S{.  Alessandronell'  ludie,  Mantoue. 
Iduliile,  Florence. 

1755.  La  Fin/a  principessa,  Londres. 

1756.  ûiulio  Sabiuo,  Londres. 
1788.   l/igenia  in  Aalide,  Turin. 
1S0S.  Pygmalion,  Paris. 

16  opéras  français  dont  7  n'ont  pas  été  publiés  et  4  en  collabo- 
ration parmi  lesquels  : 

1788.  Déinophon,  Opéra. 

Marguerite  d'Anjou,  inachevé. 
1701.  Lodoiska.  Salle  .les  Tuileries. 
1794.  Elise  ou  le  voyage  an  Mont  Saint-Bernard.  \ 

1797.  Médèe. 

1798.  L'Hôtellerie  portugaise. 
1790.  u,  Punition. 

la  Prisonnière,  en  colla].. .ration  avecBoÏEUDiEU. 
1800.   Les  deux  journées. 

Epieure,  en  collaboration  avec  Méhul. 
1808,   Anaercon  on  /'amour  fugitif. 
1806.   l'aniska,  Vienne. 
1810.  Le  Crescendo,  Opéra- Comique. 
1813.  Les  Abencèrages. 
1821.  Blanche  de  Provence,  en  collaboration  avec  Berton,  Boïel 

dieu,  Kreutzer  et  Paer. 
1833.  Ali-Baba  ou  les  quarante  voleurs. 
1  ballet. 
1804.  Achille  àScyros. 

OUVRAGES    THÉORIQUES 


Bibliographie. 

/..  CheriiHni's  kur;e  Biographie   nml  a-sllietische   Darstellumj  seiner 

Werke,  Erfurf,  1809,  in-S°. 
Adolphe  Adam.  —  Souvenirs  d'un  musicien. 
—  Article  de  la  France  musicale,  1842. 
Berlioz.  —  Mémoire-,. 

Blaze  de  Bury.  —  Musiciens  roui riuporains. 
Bottée  de  Toulmon.  —  Chcruhiiii,  Sotice  sur  sa  jeunesse,  Paris, 

1843,  in-S». 
Biographie  des  odeurs  de  Paris,  1837. 
Comettant.  —  Lettres  inédites  de  Ilagdu,  Cherubini,  Méhul,  Boiel- 

dieu. 
Crowest.  —  Cherubini,  London,  1890,  in-16. 
Fétis.  —  Biographie  universelle  des  musiciens. 
r.RiMM.  — Décembre  17SS,  janvier  17^9. 
FfoHENEMSER.  —  L.  Cherubini,  sein  Lcben  iiud  seine  Wcrke,  Leipzig. 

1913, in-S°. 
Louis  de  Loménie.  —   Cherubini   par  un  homme  de  rien,    Paris, 

1841,in-12. 
Antoine  Miel.  — Notice  sur  la  Vie  et  les  Ouvrages  de  Cherubini, 

Paris,  1842,  in-8». 
Luigi  Picohianti.  —  Noticie  su/la  rila  cl  suite  opère  di  L.  Cheru- 
bini, Milan,  1843. 
Charles  Place.  —  Essai  sur  la  composition  musicale.  Biographie  cl 

analyse  phrénologi,jue  de  Cherubini,  Paris,  1842,  in-8°. 
Arthur  Pougin.  —  Ménestrel,  1892  (critique  .le  ses  œuvres). 
Quatreli.es  (Lépine).  —  Cherubini,  Lille,  1913. 
Revue  des  Deux  Mondes.  1"  février  1862. 
Raoul  Rochette.  —  Notice  lue  dans  la  séance  de  l'Académie  des 

beaux-arts  du  7  octobre  1843. 
Schumann.  —  Écrits  sur  lu  musique  et  les  musiciens. 
A.  Soubies.  —  Les  Membres  de  l'Académie  des  beaux-arts,  2*  sé- 
rie, 1816-1852,  Paris,  1906. 


Clapisson. 

Antonin-Louis  Clapisson  est  né  à  Naples  le  15  sep- 
tembre 1808.  Son  père,  professeur  au  Conservatoire 
de  Naples  et  premier  cor  au  théâtre  San-Carlo,  était 
attaché  au  service  du  roi  Murât.  Il  rentra  en  France 
en  1815.  Le  jeune  Antonin  Clapisson,  qui  avait  déjà 
un  remarquable  talent  de  violoniste,  parcourut  alors 


CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  CLAPISSON 

Lu  Figurante,  5  actes,  Opéra-Comique,  24  août  1S3S. 

Lu  Symphonie,  1  acte,  1839. 

La  Perruche,  1  acte,  1S  40. 

Le  Pendu.  I  acte,  1841. 

l'rrre  et  Mari.  1  acte,  1841. 

Le  Code  noir,  3  actes,  t S  12. 

Cibbg  la  Cornemuse.  3  actes,  1X46. 

Don  Quichotte elSanclio,  lacté,  Opéra-Comique,  1 1  décembre  1847. 

Jeanne  ta  Folle,  5  actes,  opéra,  1S4S. 

La  Statue  équestre,  1  acte,  1850. 

Les  Minières  d'Adolphe,  3  actes,  1852. 

Lu  Promise,  3  actes,  1854. 

Data  les  Vignes.  Théâtre  Lyrique,  1854. 

Li ■  Co/fret  de  Saint-Dominique,  opéra  de  salon,  salle    Herz,    1S55. 

Les  Amoureux  de  Pcrretle.  Théâtre  de  Bade,  1855. 

Le  Sylphe.  Théâtre  de  Bade,  1856. 

Ftiuchouitetle.  3  actes.  Théâtre  Lyrique,  mars  1856. 

Margot,  3  actes,  Théâtre  Lyrique,  1857. 

Les  Trois  Mcolas,  3  actes,  i  ipéra-Comique,  1S5S. 

Madame  Grégoire,  Théâtre  Lyrique,  1860. 


Six  Quatuors  pour  v..ix  d'hommes. 

Le  Vieux  Paris,  suite  de  six  morceaux  à  deux  voix. 

Chœurs  orpheonique:-  :  les  Enfants  du  Désert,  Paris,  la  Parole  de 
Dieu,  Voici  le  port,  les  Chants  de  nos  pères,  Au  point 
du  jour,  le  Bronze,  les  Harmonies  de  la  nuil,  la  Puissance 
de  sainte  Cécile,  le  Rémouleur,  les  Enfants  des  ombres, 
Aux  armes,  etc. 

Romances  (200  environ). 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3513 


Biographie  générale.  —  Didot  frères. 
KÉTis.  —  Bioi/ruphie  unii  cruelle  des  musiciens. 
Pougin.  —  Supplément  il  lu  Biographie  rie  Fetis. 

Félicien  David. 

Félicien-César  David  naquit  à  Cadenet  (Vaucltise) 
le  13  avril  1810.  Son  père,  après  avoir  amassé  une 
fortune  assez  considérable  à  Saint-Domingue,  avait1 
dû  quitter  l'île  lors  de  la  révolte  des  noirs  en  1790, 
et  il  était  revenu  en  France  ruiné.  Il  habita  d'abord 
Marseille,  puis  Cadenet,  où  il  mourut  en  1815.  C'était 
un  bon  amateur  de  musique,  qui  jouait  agréable- 
ment du  violon.  Mais  Félicien  David  ne  connut  pas 
longtemps  son  père,  et  il  avait  perdu  sa  mère  tout 
de  suite  après  sa  naissance,  de  sorte  qu'il  fut  privé 
de  bonne  heure  des  tendres  soins  dont  son  cœur 
aimant  éprouvait  plus  qu'un  autre  le  besoin.  Ses 
dispositions  musicales  se  manifestèrent  très  tût;  le 
16  juillet  1818,  il  était  admis  à  la  maîtrise  de  Saint- 
Sauveur  à  Aix,  où  sa  jolie  vois  lui  valut  le  surnom 
de  c  roi  des  enfants  de  chœur  ».  A  quinze  ans  il 
entrait  au  collège  des  Jésuites  de  Saint-Louis,  et 
commençait  à  devenir  un  bon  violoniste.  En  1828, 
le  collège  Saint-Louis  fut  fermé  par  arrêté  royal', 
comme  tous  les  autres  établissements  des  jésuites,  et 
Félicien  David  dut  chercher  au  plus  vite  une  situation. 
D'abord  second  chef  d'orchestre  du  théntre  d'Aix, 
puis  clerc  d'avoué,  il  finit  par  trouver  une  position 
un  peu  plus  avantageuse  comme  chef  de  la  maîtrise 
de  Saint-Sauveur,  et  déjà  il  s'essayait  à  composer. 

Mais  Paris  l'attirait,  et  un  beau  jour  il  partit  y 
chercher  la  fortune  et  surtout  la  gloire.  Cherubini  le 
fit  entrer  au  Conservatoire,  où  il  travailla  l'harmo- 
nie et  le  contrepoint  sous  la  direction  de  Millal'd  et 
de  Fétis,  et  l'orgue  sons  celle  de  Benoist.  Il  menait 
une  vie  dure;  un  oncle,  qui  lui  avait  promis  des 
subsides,  ne  les  lui  fournissait  pas,  et  son  frère  Char- 
les, qui  le  recueillit  pendant  un  certain  temps,  ne 
pouvait  pas  lui  être  d'un  grand  secours. 

En  1831,  Félicien  David  fait  la  connaissance  d'un 
peintre  nommé  Justin  qui  l'entraîna  dans  les  rangs 
des  saint-simoniens,  donl  il  devint  le  compositeur 
en  titre  et  pour  ainsi  dire  le  «  maître  de  chapelle  »; 
et  lorsque,  en  1832,  les  principaux  chefs  du  saint- 
simonisme  sont  condamnés  et  leur  maison  commune 
fermée,  le  jeune  musicien  part  avec  quelques-uns 
d'entre  eux  pour  l'Orient,  dans  l'espoir  d'y  répandre 
la  doctrine  nouvelle.  Assez  mal  reçus  à  Conslanti- 
nople  par  le  sultan,  les  voyageurs  durent  s'éloigner, 
visitant  Ténédos,  Mytilène,  Rhodes,  Phocée,  Smyrne, 
Jérusalem,  Alexandrie,  sans  pouvoir  se  fixer  nulle 
part.  La  petite  troupe  se  démembrait  peu  à  peu,  et 
renonçait  à  son  beau  rêve.  Le  19  juin  183o,  après 
bien  des  aventures,  mais  aussi  après  avoir  recueilli 
des  impressions  fécondes,  Félicien  David  aborda  à 
Marseille. 

Alors  commencèrent  ces  années  de  lutte  patiente 
et  opiniâtre  qui  se  retrouvent  dans  la  vie  de  tout 
artiste,  pour  vaincre  l'indifférence  du  public,  des 
éditeurs,  des  critiques,  pour  éveiller  l'attention, 
pour  se  faire  écouter,  pour  trouver  l'occasion  favo- 
rable au  succès.  Enfin  le  8  décembre  1844,  la  pre- 
mière audition  du  Désert  rendait  tout  d'un  coup 
David  célèbre.  «  Un  grand  compositeur  vient  d'appa- 
raître, un  chef-d'œuvre  vient  d'être  dévoilé,  écrivait 
Berlioz.  Le  compositeur  se  nomme  Félicien  David, 
le  chef-d'œuvre  a  pour  titre  le  Désert...  Nous  avons 


été  frappés  d'admiration,  touchés,  entraînés,  écra- 
sés... »  Dix  ans  plus  tard,  il  est  vrai,  le  même  Ber- 
lioz écrivait  à  un  ami:  «  David  a  donné  deux  concerts 
qui  lui  ont  fait  perdre  1800  fr.  On  trouve  maintenant 
cette  musique  enfantine...  Le  temps  est  un  grand 
maître;  je  ne  sais  comment  on  pourra  lutter  contre' 
les  enseignements  de  ce  maître-là, 

Et  de  David  éteint  rallumer  le  flambeau.  « 

Le  fait  est  que  Félicien  David  eut  bien  de  la  peine 
à  retrouver  un  second  succès  comparable  à  celui  de 
cette  première  audition  du  Désert.  Moïse  ou  Sinai, 
Christophe  Colomb,  l'Eden,  la  Perle  du  Brésil,  Hercu- 
lanum  ne  réussirent  que  médiocrement.  Ce  fut  seule- 
ment en  1862,  avec  Lalla  Hoiiklt,  que  le  public  fut  de 
nouveau  séduit  par  l'orientalisme  du  compositeur 
qu'il  avait  condamné,  selon  le  joli  mot  d'AuBER,  «  à 
ne  plus  descendre  de  son  chameau  », 

Des  lors,  Félicien  David  ne  vit  plus  dans  la  gêne. 
Déjà,  à  partir  de  18o8,  les  saint-simoniens  Emile  et 
lsaac  Pereire  lui  avaient  assuré  une  rente  annuelle 
de  1200  IV.  En  1860,  Napoléon  III  lui  avait  accordé 
une  pension  de  2400  fr.  Lalla-Iloukh  lui  vaut  main- 
tenant des  droits  d'auteur  importants.  En  1867,  l'Ins- 
titut lui  décerne  le  prix  biennal  de  20.000  fr.  fondé 
par  l'empereur  pour  récompenser  «  l'œuvre  ou  la 
découverte  la  plus  propre  à  honorer  le  pays  ». 

Eh  même  temps  viennent  les  honneurs  :  Félicien 
David  reçoit  le  ruban  rouge;  il  succède  à  Berlioz  à 
l'Académie  des  beaux-arts,  et  il  hérite  de  ses  fonc- 
tions de  bibliothécaire  du  Conservatoire. 

Mais  il  ne  rencontre  plus  la  veine  heureuse  de  ses 
premières  inspirations.  Le  Saphir  est  assez  froide- 
ment accueilli  à  l'Opéra-Comique.  Il  se  retire  alors 
dans  une  maison  de  campagne  à  Saint-Cermain-en- 
Laye,  et  il  cesse  de  composer.  D'ailleurs,  ses  forces 
déclinent  peu  à  peu;  il  meurt  enfin  le  29  août  1876. 
Ses  funérailles  eurent  lieu  le  1er  septembre  :  elles 
furent  purement  civiles,  conformément  à  la  doctrine 
saint-simonienne,  et  l'on  y  remarqua  d'assez  fâcheu- 
ses abstentions. 

L'art  de  Félicien  David,  poétique  et  coloré,  man- 
que de  vigueur;  il  a  charmé  nos  pères;  l'éclat  en 
est  pâli;  mais  ne  respirons-nous  pas  parfois  avec 
plaisir  le  parfum  mélancolique  des  (leurs  oubliées 
entre  les  feuillets  d'un  vieux  livre? 

CATALOGUE  DE  L'ŒUVRE  DE  FÉLICIEN  DAVID 

ORATORIOS,  OPÉRAS  ET  OPKRAS-COMIO.OES 

Le  Désert,  ode-svmphonie  en  3  parties,  paroles  d'Auguste  Colin, 
1S41. 

Moïse  au  Sinai,  oratorio  en  deux  parties,  paroles  de  Sylvain 
Saint-Elienne,  1846. 

Christophe  Colomb  ou.  la  déeimrerte  du  Soureau  Mande,  ode-sympho- 
nie en  4  parties,  paroles  de  Méry,  Chaubet  et  Sylvain 
Saint-Elienne,  1816. 

i:E,ten.  mvslère  en  2  parties,  paroles  de  .Méry,  ISiS. 

la  Perte  dit  Brésil,  opéra  en  3  actes,  paroles  de  J.  Gabriel  el 
Svlvain  Saint-Etienne,  18.-)1. 

Bereulaaum,  opéra  en  4  actes,  paroles  de  Méry  et  Hadot,  1859. 

I.ullu  Bouhh,  opéra-comique  en  2  actes,  paroles  d'Hippohte  Lu- 
cas et  Michel  Carré,  1S62. 

Le  Saphir,  opéra-comtque  en  3  actes,  paroles  de  De  Leuven,  Mi- 
chel Carré  et  Hadot,  1865. 

La  Captive,  opéra  en  3  actes,  paroles  de  Michel  Carré  (œuvre 
posthume). 

MÉLODIES    ET    CHOïrRS 

MénilmoiUant,  chants  religieux,  is:;:;. 

Lu  Bûche  harmonieuse,  30  chants  à  4  voix  d'hommes. 

Chaut  du  Soir,  chœur  avec  accompagnement  d'orchestre. 

Motels  née  accompagnement  d'orgue. 

Nombreuses  mélodies  avec  accompagnement  de  piano. 


i:.\cYc.i.oi'i:i)ii:  de  la  musique  et  i)ictio.\naihe  du  conservatoire 


Ml   SUJI'H    INST1U7M 

en  fa. 
■  en  mi. 

■if  eu  mi  bémol. 

:■■  Symphonie  en  ut. 

'.'        .    s  '/soin  ■  2  i  .piinlrlles  p.iin 
.'  .Vo«i7//  pout  Inslram 

mr  Insti  nmei  i-  dea 

.•  Hrfoi  pour  pian..,  «iol i  i  iolonce 

les  Brises  i  Orient,  Les  h 
Nombreux  morceaux  pour  piano. 


instruments  à  cordes). 


■s,  Paris,  1898. 
«Mrs  musicales,  Paris,  1872. 

.'m/ dans   le  .Journal  tics  Délai* 
mposé  par   M.  II.il.HTS    :   il 

»(,  Collection  des 


Omettant  (O.j.  —  les  Compositeurs  illustres,  Paris,  18S3. 

Esci  dieb  (Léon).  —  Ses  Souvenirs,  Taris.  tSiCî. 

Fi  ris.  —  Biographie  universelle  tics  musiciens,  Paris,  1S01. 

Poogin  (Arthur).  —  Supplément  il  la  Biographie  de  Fbtis,  1878. 

liuovi.:  ~ir  Gaor^e  .  —  Diciiouar//  of  mits/c  auu '  niusieiuns,  London, 
1896. 

Mirecoubt  (E.  de).  —  Félicien  Uiiriil,  Paris,  1S56. 

PitonuiiMME.  —  Félicien  lluviil  d'après  su  correspondance  inédile  cl 
celle  de  ses  amis,  dans  le  Mercure  musical,  Paris,  1907. 

Reïer  (E.).  —  Soliec  sur  Félicien  llarid,  lue  à  l'Institut  le  17  no- 
vembre 1S77. 

Saint-Etienne  (Sylvain).  —  Biographie  de  Félicien  David,  Mar- 
seille, 1849. 

Saint-Siens.  —  Harmonie  cl  Mélodie,  Paris. 

Soleniêrb  (oe).  —  Cent  iiiinees  de  uiiis/i/iie  française,  Paris. 

Tajan-Rogé.  —  Fausses  notes;  les  Anabaptistes  et  Félicien  David; 
le  Saiiil'Simiinismeel  la  musique.  Paris,  1862. 

Léo  Delihes. 

Clémenl-Philibert-Léo  Delihes  est  né  le  21  février 
1836  à  Saint-Germain-du-Val  (Sarthe)).  Il  perdit  son 
père  de  tonne  heure,  et,  en  1848,  sa  mère  vint  se 
fixer  à  Pari?.  Bientôt,  le  jeune  Léo  entra  comme 
enfant  de  chœur  à  la  maîtrise  de  la  Madeleine  :  il 
avait  une  très  jolie  voix.  Presque  en  même  temps.il 
était  admis  au  Conservatoire  dans  une  classe  de 
solfège.  Dès  son  premier  concours,  une  seconde  mé- 
daille lui  était  décernée,  et  l'année  suivante  (1830), 
il  obtenait  la  première.  Après  avoir  travaillé  le  piano 
avec  Le  Coitppey,  l'harmonie  avec  Bazin,  l'orgue  avec 
Benoist,  il  outra  dans  la  classe  de  composition  que 
dirigeait  Adolphe  Adam,  Cràce  à  l'appui  de  son 
maître,  il  devenait,  en  1853,  accompagnateur  au 
Théâtre  Lyrique,  et  organiste  de  l'église  Saint-Pierre 
de  Chaillot,  et  il  quittait  le  Conservatoire  sans  autre 
récompense,  outre  sa  première  médaille  de  solfège, 
qu'un  deuxième  accessit  d'accompagnement. 

Alors,  pendant  une  dizaine  d'années,  Léo  Delihes 
écrit  pour  les  Bouffes  ou  pour  les  Variétés  une  foule 
de  petites  opérettes,  —  succès  faciles,  mais  vite 
oubliés. 

Heureusement,  il  trouve  ailleurs  le  juste  emploi  de 
ses  dons.  En  186b,  il  quitte  ses  fonctions  d'accom- 
pagnateur au  Théâtre  Lyrique  et  il  entre  à  l'Opéra 
comme  second  chef  des  chœurs.  Là,  il  est  tout  de 
suite  distingué  par  Perrin ,  qui  lui  commande  la 
musique  de  deux  tableaux  d'un  ballet,  dont  le  reste 
fut  confié  à  la  plume  d'un  musicien  russe  nommé 
Mixiiois.  La  première  représentation  de  la  Source 
eut  lieu  le  12  novembre  1866.  «  La  faveur  du  public 
comme  celb:  des  artistes,  raconte  Ernest  Guiraud,  se 
fixa  avec  une  préférence  marquée  sur  les  pages 
écrites  par  Delibes,  que  l'on  reconnaissait  facilement 
à  l'originalité  et  à  la  distinction  du  style.  » 


Le  succès  de  ce  premier  essai  fut  tel  que  l'admi- 
nistration de  l'Opéra  demandait  aussitôt  au  jeune 
auteur  la  musique  d'un  divertissement  nouveau,  qui 
devait  accompagner  une  reprise  du  Corsaire  d'Anui 
(21  octobre  1867).  Enfin,  le  2b  mai  1870,  la  réputation 
de  Léo  Délires  se  trouvait  définitivement  établie  par 
le  triomphe  de  Cappella  ou  la  Fille  aux  yeux  d'émail, 
«œuvre  exquise  et  charmante,  a-t-on  dit,  qui  se 
distingue  par  l'abondance  mélodique,  la  franchise 
des  rythmes,  l'intelligence  scénique,  la  richesse, 
l'éclat  et  la  variété  de  l'instrumentation  ».  Un  autre 
ballet  représenté  à  l'Opéra  le  14  juin  1876,  Sylvia  ou 
la  Nymphe  de  Diane,  valait  à  Delibes  les  mêmes  ap- 
plaudissements pleinement  justifiés  par  la  vivacité, 
l'entrain,  la  couleur,  le  charme  séduisant  d'une  mu- 
sique toujours  personnelle.  L'année  suivante,  le  com- 
positeur était  nommé  chevalier  de  la  Légion  d'hon- 
neur. 

De  1862  à  1871,  il  avait  tenu  l'orgue  de  l'église 
Saint-Jean-Saint-François. 

En  1872,  il  avait  épousé  la  fille  d'une  ancienne 
artiste  de  la  Comédie  française,  Mme  Denain. 

En  1881,  à  la  mort  de  Henri  Reber,  il  fut  nommé 
professeur  de  composition  au  Conservatoire. 

Goppélia  et  Sylvia  sont  certainement  les  deux 
plus  jolis  ballets  qu'ait  produits  l'Ecole  française 
au  xixe siècle.  La  gloire  d'en  être  l'auteur  ne  suffisait 
pas  à  Delibes.  Il  voulut  avoir  d'autres'succès,  d'un 
ordre  qui  passait  alors  pour  infiniment  plus  relevé. 
C'est  ainsi  qu'il  fit  représenter  successivement  à 
l'Opéra-Comique  en  1873  Le  Hoi  l'a  dit,  en  1880  Jean 
île  Nivelle  qui  eut  cent  représentations  consécutives, 
en  1883  enfin  Lakmé  qui  devait  faire  plus  pour  sa 
célébrité  que  tous  ses  autres  ouvrages.  C'est  là,  il 
faut  le  reconnaître,  une  partition  d'un  attrait  poéti- 
que parfois  très  prenant;  il  lui  manque  malheureu- 
sement, pour  qu'on  la  classe  parmi  les  chefs-d'œuvre, 
d'avoir  échappé  à  l'intluence  de  la  mode,  d'avoir 
évité  les  formules  consacrées,  il  lui  manque  un  peu 
d'indépendance  et  de  sincérité. 

Pour  la  postérité,  pour  l'histoire,  Deliiu:-  restera 
surtout  l'auteur  de  Coppélia  et  de  Sylvia,  et,  à  ce 
litre,  il  sera  considéré  comme  un  précurseur.  «  Dans 
un  genre  jusque-là  fort  relâché,  dit  très  justement 
M.  Octave  Séré,  il  apporta  une  élévation  et  une 
vigueur  de  style,  une  ampleur  de  formes  et  une 
richesse  d'instrumentation  inconnues  avant  lui.  Le 
premier,  il  introduisit  la  musique  symphonique  dans 
le  ballet,  tout  en  demeurant  bien  français,  et  tout 
en  conservant  à  la  musique  chorégraphique  cette 
élégance  légère,  cette  grâce  caressante,  cette  viva- 
cité spirituelle  qui  sont  comme  les  ailes  de  la  danse. 
Le  glorieux  privilège  lui  revient  d'avoir  précédé 
dans  cette  voie  Edouard  Lalo,  M.  André  Messages, 
d'autres  encore,  jusqu'à  ceux  de  nos  plus  jeunes 
contemporains,  que  l'exemple  récent  des  liasses 
entraîne  à  s'y  manifester  aussi.  » 

En  décembre  1884,  Léo  Delibes  fut  élu  meinbre-Je 
l'Institut  en  remplacement  de  Victor  Massé,  et  en 
1889  il  reçut  la  rosette  d'officier  de  la  Lésion  d'hon- 
neur. H  n'avait  que  cinquante-cinq  ans  lorsque,  eu 
1891,  il  mourut,  frappé  subitement  d'une  congestion. 


DES   ŒrVUKS    di: 


Riijuiidun,  Paris,  Ileugel. 

Romance  hongroise  sans  pan. les.  Paris 

Souvenir  lointain,  Paris,  Ileugel. 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    351  E 


PIANO    A.    QUATRE    MAINS 

Wfemezso,  Paris,  Heugel,  1892. 

MUSIQUE    DE    DANSE 

Echo,  polka,  Taris,  Gallet. 

Les  Lanciers  de  la  Gante,  quadrille,  Paris,  Gallet. 

/.(■  Muletier  île  Tolède,  polka-mazurka,  Paris,  Gallet. 

Musette,  polka-mazurka,  Paris,  Gallet. 

IVkîl  à  Sentie,  polka,  Versailles,  Le  Boulet. 

CHANSONNETTES 

Les  Anima*  de  Granville  (A.  Vialon),  Paris,  Labbé. 
Code  fashional/le  (A.  Vialon),  arrangé  pourchœurM 

titre  Dandys  parisiens,  Paris,  Labbé. 
Les  Deux  Moulins  (A.  Vialon),  Paris,  Labbé. 
Taxe  sur  la  viande  (.1.  Moniaux),  Paris,  Gallet. 

MÉLODIES 

.1  nia  mignonne  [3.  Renaut),  Paris,  Heugel. 
Arioso  (Armand  silvestre),  Paris,  Heugel. 
Anil  (Remy  Belleau  .  Paris,  Heugel 


Chrysanthème    p.  n    r    .  ■  -  .  l'.n-is,  Heugel. 

Bfftoffue    V.  Hugo  .  Paris,  Gallet! 

Epilhatamc    Edouard  Grenier  .  Paris,  Heugel. 

Faut-il  chanter?  (V.  de  Borelli),  Paris,  Heugel. 

Les  filles  de  Cad'u    A.  de  Musset),  Paris,  Gallet. 

Heure  du  soir  (A.  Silvestre),  Paris,  Heugel. 

Le  meilleur  moment  îles  amours  (Sully  Prudhomme),  Paris,  Heugel. 

J17W»  (A.  Silvestre'.  Paris.  Heugel. 

Ilente  ,1'anioiir  (A.  Silvestre),  Paris,  Heugel. 

Que  l'heure  est  donc  brève    l.  Silvestre),  Paris,  Heugel 

Regrets  (A.  Silvestre),  Paris,  Heugel. 

Le  Rossignol (?),  Paris,  Heugel. 

Sérèiiaile  »  .Viu./u  (A.  de  Musset),  Paris,  Heugel. 

Vieille  chanson  du  «  Roi  s'amuse  »  (V.  Hugo),  Paris,  Heugel. 


Chant  .le  I ,"    I.    ■;:-■  OT.ir.l   . '    i   Voix.   lMi  i-s.  Pinalel. 

Chants  lorrains  (Ph.  Gille),  à  -i  voix  d'hom s,  Paris,  Gallet. 

La  Cour  îles  miracles  (E.  de  Lyilen),  à  3  et  1  voix,   Paris,  Pinatel. 
Le  Dimanche  (Henri  Murger),  à  2  et  3voix  égales,  Paris,  Pinatel. 
L'Eehereau  île  fil  [Louis  Ralisbonne),  à  '!  voix  égales,  Paris,   Pi- 
natel. 
En  avant  (Paul  de  France),  à  3  et  4  voix  égales,  Paris,  Pinatel. 
Hymne  de  Soël,  à  i  voix,  Paris,  Costallat. 
La  Nuit  île  Nnel  (Pli.  Gille  .  à  i  voix  d'hommes. 
les  Lansquenets  (Ph.  Gille),  à  4  voix  d'hommes,  Paris,  Gallet. 
Le  Marchand  d'oubliés  (Aug.  Parmentier).,  à  2  voix   d'hommes, 

Paris  Gallet. 
Marehe  ite  soldats  [Nuitter),  à  l  voix  d'hommes,  Paris,  Pinatel. 
Noël  (Bouéry),  à  ,'i  voix  égales.  Pari*,  Pinatel. 
Les  norvégiennes  (Ph.  Gille),  à  2  voix  de  femmes,  Paris,  Heugel. 
Les  Nymphes  des  Lois  vCh.  Nuitter),  à  2  voix  de  femmes,   Paris, 


Sérénade  de  llm/  Bios  iV.  Hugo),  chant  des.  Lavandières,  solo  et 

chœur,  1S79,  Paris,  Heugel. 
Trianon    E.  de  Lyden),  à  i  voix  d'hommes,  Paris,  Gallet. 
Les  trois  oisean.i  i  l-'r.  Coppée),  à  2  voix  de  femmes,  Paris,  Heugel. 
Voyage  enfantin  (Ph.  Gille),  à  3  voix  égales,  1S84,  Paris,  Heugel. 


MUSIQUE    RELIGIEUSE 

Agnus  dei 

à2v 

oix,  Paris 

Heugel. 

Are  Mûris  Siel/u 

a  2  voix, 

Paris,  Heugel. 

Are  verum 

a  2 

oix,  Pari 

,  Heugel. 

Messe  brie 

,à2 

voix  égale 

,  Paris,  Pinatel 

0  Siiluluri 

,  à2 

ou  3  voix 

égales. 

Deux  sous  de  charbon,  opérelle  en   1  acle,  polies-Nouvelles,  1S55. 
Les  deux  vieilles  gantes,  opéra-bouffe  en  i  acte,  Bouffes  Parisiens, 
8  août  1S56,  Paris,  Joubert. 


Bouffes-Pari- 


Six  demoiselles  a  marier,  opéretle-houiïe  m   1  act 
siens,  12novembre  1S56,  Paris,  Heugel. 

L'ttmclelle  .i  la  Fallcaihùclie,  op.Te.lte  bouffe  en  lacté,  Bouffes-Pa- 
risiens, 8  juin  1859,  Paris,  Heugel, 

Monsieur  de  Bonite  Etoile,  opérette  en  l'acte,  Bouffes-Parisiens, 
4  février  1860. 

tes  Musicien*  de  l'orchestre,  opérette  en  2  actes,  Bouffes-Pari- 
siens, 25  janvier  1S61. 

Mon  ami  Pierrot,  opérette  en  t  acle,  Kursaal  d'Kins,  juillet  1862. 

Les  Eaux  ifEms,  opérelle  en   1  acle,  Kursaal  d'Kins,  juillet  18u2. 

La  Tradition,  prologue,  Bouffes-Parisiens,  5  janvier  1864. 

I.e  Serpent  a  plumes,  opéra-bouffe  en  1  acte,  Bouffes-Parisiens, 
16  décembre  1S64,  Paris,  Gallet. 

Le  Bœuf  Apis,  opérette  en  2  actes,  Bouffes-Parisiens,  le  25  avril 
1865.  Parlilion  détruite  par  l'auleur. 

Vallrough  s'en  va-t-en  guerre,  grande  opérette  en  4  actes,  en  col- 
laboration avec  Bizet,  Jonas  et  Legouix,  Athénée,  13  dé- 
cembre 1867. 

L'Ecossais  de  Chatou,  bouffonnerie  en  1  acte,  Bouffes-Parisiens, 
16  janvier   1869,  Paris,  Joubert. 

La  Cour  du  roi  Pèlaud,  opéra-bouffe  en  3  actes,  Variétés,  24 avril 
1869,  Paris,  Leduc. 

La  Fille  du  Golfe,  opérette  publiée  dans  le  Journal  des  Demoi- 
selles. 


Monsieur    Cri/fard,    npéra-comiqu"  en  1   acle,   Théâtre  Lyrique, 

3  octobre  1SÔ7,  Paris,  Labbé. 
Le  Jardinier  et  son  seiauenr,  opéra-comique  en    1  acte,  Théâtre 

Lyrique,  1"  mai  1803.  Paris,  Gallet. 
Alger,  cantate,  opéra,  15  août  1805. 
/.e  Uni  l'a  dit,  ..pér  i-c  unique  en  3  actes,  Opéra-Comique,  21  mai 

l.a  mot  dnr/.'i  -,  -cil.'  drainalique,  Tr.ua. l.'l'O,  25  juillet  1878, 
Paris,  Heugel. 

Jean  de  Nivelle,  opéra  en  3  actes,  Opéra-Comique,  8  mars  1SS0, 
Paris,  Heugel. 

Lakmè,  opéra  en  3  actes,  Opéra-Comique,  I  i  avril  I8S3,  Paris, 
Heugel. 

Kassija,  opéra  en  4  actes  et  5  tableaux.  Récitatifs  ajoutés  et  ins- 
trumentation achevée  par  Massenet.  Opéra-Comique, 
21  mars  1893.  Paris,  Heugel. 


l.a  Source,  ballel  eu  ::  acles  et  i  lab b  aux.  p',n  collaboration  avec 
Minkous  (le  2'-'  et  le  3^  tableau  sont  de  Déliées),  Opéra, 
12  novembre  1866,  Paris,  Heugel. 

Valse  ou  pas  des  /leurs,  divertissement  pour  la  reprise  .lu  Corsaire 
d'Ai.AM,  opéra,  21  octobre  1-0,7,   l'ai.-,  II<ii."i. 

Coppêlia  ou  la  fille  aux  yeux  d'émail,  ballet  en  2  actes,  Opéra, 
21  mai  1870,  Paris,  Heugel. 

Sijlvia  ou  la  nymphe  île  Diane,  ballet  en  3  actes  e!  5  !  ibli  aux, 
Opéra,  1 1  juin  1S76,  Paris,  Heugel. 

Le  Roi  s'amuse,  six  airs  de  danse  dans  le  style  ancien,  Théâtre- 
Français,  22  novembre  1882,  Paris,  Heugel. 

Bibliographie. 

A.  Bruneau.  —  La  Musique  française,  Paris,  Fasquelle,  1901. 

Henri  Delabobde.  —  Discours  prononcé  au  nom  de  l'Académie 
des  beaux-arts  aux  funérailles  deLéoDEUBES,  le  19  jan- 
vier 1891,  Paris,  Didot. 

Alfred  Ernst.  —  Léo  Delibes,  Paris.  La  Grande  Encyclopédie. 

Ernest  Guiradd.  —  Notice  sur  m  vie  et  les  .mires  de  Léo  Delibes, 
lue  le  2  avril  1S92  à  l'Académie  des  beaux-arts,  Paris, 
Didot. 

Adolphe  Jn.i.iEN.  —  Miisnie  is  d'aujourd'hui,  2"  série,  Paris,  Li- 
brairie de  l'Art,  1894. 

Gustave  Larroumet.  —Discours  prononcé  aunom  duMinistre  de 
l'Instruction  publique  et  des  beaux-arts  aux  funérailles 
de  Léo  Delibes,  le  19  janvier  1S91,  Paris,  Imprimerie 
Nationale. 

Arthur  Pougin.  —  Musiciens  du  dix-neuvième  siècle,  Paris,  Fisch- 
bacher,  1911. 

Octave  Séré.  —  Musiciens  français  d'aujourd'hui,  Paris,  Mercure 
de  France,   1911. 

Camille  Bellaigue.  —  Kassija.  Revue  des  Deux  Mondes,  l"r  avril 
1S93. 

H.  Blaze  de  Bcry.  —  Cappella.  Revue  des  Deux  Mondes, 
15juinlS70. 

—  Le  Roi  l'a  dit.  Revue  des  Deux  Mondes,  l"juin  1873. 

—  Sylvia.  Revue  des  Deux  Mondes,  1"  juillet  1S76. 

—  Jean  de  Nivelle.  Revue  des  Deux  Mondes,  15  octobre  1880. 

—  M.  Léo  Delibes  cl  Lai.  me,    Félicien   David  et    la  Perle  du  Brésil. 

Bhel  et  Carmen.  Revue  des  Deux  Mondes,  15  juillet  ISS3. 
Henri  de  Curzon.  —  Lakmè  et  Carmen.  Le  Théâtre,  juillet,  I, 
1905.  —  Léo  Delibes.  sa  rie  et  ses  œuvres,  Paris,  Legouix, 
1926. 


ENGYGLOPÉDJE  DE  LA  MUS/QUE  ET  DICTION* AIRE  DU  CONSERVATOIRE 


II. 

DécA,  —  Jt 

mi  de  Xuriic  à  la 

Qatté  Lyrique.  i.< 

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i  Roi  i  g  dit. 

Le  rhéâtre,  avril 

89  s. 

D. 

.InPVIN.    — 

îjjto* 

.  Le  Figaro, 

13  juin  IS78. 

A. 

Pouam.  — 

1891. 

Léo 

Dilibes.   R< 

vu,'  lincyclopédiq 

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'  i  ■>  \ières  Journal  des  Débats,  13  a 
7,  de  Chaîna.  Journal  des  Débats,  lu  nuvem 
SiiielU.  Journal  des  Débats,  13  mars  1880. 

.  Journal  îles  Déliais,  2ii  .1 ■mure  1SS2. 

■nii-iul  ,li's  Débits,  il  avril  1SS3,  16  maie 

ISSi. 


—  la  ilorl  d'Ilrphee.  Journal  « l ■_- -s  Débats.  31)  mars  IsS",. 

—  Syh'ia.  Journal  des  Débats,  20  juin  1892. 

Henry  Ron.iox.  —  Discours  prononcé  aux  fêles  d'inauguration 
du  monument  élevé  à  la  mémoire  de  Léo  Df.libes  à  la 
Flèche  le  lSjuin  1899.  Le  Ménestrel,  23  juin  1899. 

Francis  Tiio.mé.  —  l.eo  Uelibes.  La  Revue  de  Famille,  février.  189 1 . 

Théodore  Dubois. 

Théodore  Di'nois  est  né  à  Itosnay,  aux  environs 
de  Reims,  en  1837,  d'une  famille  de  vanniers.  A 
10  ans,  il  entend  la  grand'messe  à  la  cathédrale  de 
Reims,  et  son  âme  s'ouvre  à  la  musique.  Il  a  trouvé 
s  i  vocation;  il  veut  être  organiste.  Deux  fois  par  se- 
maine, il  fait  à  pied  les  treize  kilomètres  qui  sépa- 
rent son  village  de  la  ville  pour  aller  prendre  les 
leçons  du  musicien  Louis  I'anart.  A  16  ans,  il  vient  à 
Paris;  il  entre  au  Conservatoire.  Il  apprend  le  piano 
avec  Marmontel,  l'harmonie  avec  Bazin,  l'orgue  avec 
Bkhoist,  la  composition  avec  Ambroise  Thomas,  et 
déjà  il  remplit  les  fonctions  d'organiste  accompa- 
gnateur à  la  chapelle  des  Invalides.  Successivement, 
il  oblient  les  premiers  prix  d'harmonie,  de  contre- 
point et  de  fugue,  d'orgue,  et  enfin  avec  Atala  (1861) 
le  grand  prix  de  Home. 

D'Italie  il  rapporte  une  Messe  solennelle,  un  opéra, 
et  deux  ouvertures.  L'exécution  à  Sainte-Clotilde  de 
son  premier  grand  ouvrage,  Les: Sept  Plwolesdli  Christ 
(1867),  attire  l'attention.  Il  quitte  Sainte-Clotilde  où 
il  avait  été  d'abord  organiste  accompagnateur  (1858- 
1861),  puis  maître  de  chapelle  (1863-1868).  Il  est 
nommé  maître  de  chapelle  de  la  Madeleine  (1868- 
1875)  et  il  succède  dans  cette  même  église  à  M.  Saint- 
Saëns  comme  organiste  (1875-1896).  Professeur 
d'harmonie  au  Conservatoire  (1871-1801),  professeur 
de  composition  (1891-1896),  et  inspecteur  de  l'ensei- 
gnement musical  (1884-1896),  il  est  chargé  en  1896 
de  la  direction  du  Conservatoire,  et  il  la  conserve 
jusqu'en  1905.  En  1894,  il  avait  été  élu  membre  de 
l'Académie  des  beaux-arts  en  remplacement  de 
Gounod. 

Th.  Dubois  est  mort  à  Paris,  le  11  juin  1924. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  THEODORE  DUBOIS 

ŒUVRES   THEATRALES 

187?.  La  Guzla  de  Vcmir,    opéra-comique  en  1   acte.   Athénée 

lyrique.  Heugel. 
1379.  Le  Pain  l/is,  opéra-comique  eu  1  acte.  Opéra-Comique, 

Joubert. 
1SS3.  La  Farandole,  ballet  en  3  actes.  Opéra.  Heugel. 
lS8i.  Aben  Hamel,  opéra  en  i  actes.  Théâtre  Italien.  Heugel. 
1895.  Xavier  e,   idylle   dramatique  en  3   actes.  Opéra-Comique. 

Heugel. 
Miyuela,  opéra  inédit. 

ŒUVRES    LTBICjUBS 

1867.  Les  Sepl  Paroles  da  Chris:/,   oratorio   pour  soli,  chœurs  et 

orchestre.  Sainte-Clotilde.  Heugel. 
1873.  Le  Paradis  perdu,  drame-oratorio  en  4  parties  pour  soli, 

chœurs  et  orchestre.  Colonne.  Leduc. 


1873.   I/Eulèremeu!  de  Proscrpinc,  scène  lyri  |ue  pour  soli,  chœurs 
el  orchestre.  Leduc. 

1880.   Ilergerette,   mélodie  provençale  pour,  solo,  chœurs  et  or- 
chestre.  Heugel. 

1893.   llijlas,  scène  lyrique  pour.soli,  chœurs  etorchestre.  Heugel. 
Les  vivants  et  les  mdrls,  strophes  pour  soli,  chœurs  el  or- 
chestre, Heugel. 
Valse  mélancolique,  solo,  chœurs  de  femmes  et  orchestre. 
Heugel. 

1897.  Notre  Dame  de  la  mer.,  poème  légendaire  pour  soli,  chœurs- 
etorchestre.  Lamoureux.  Heugel. 

1899.  Le  Baplémede  Clans,  ode  de  Léon  XIII,  en  3  parties,  pour 

soli,  chœurs  et  orchestre.  Cathédrale  de  Reims.  Heugel. 

Vtiitraïun  /es-  aisritu.i  rhanlrnl,  roule  mystique  pour  soprano 
et  orchestre.  Durand. 

A  Douariieae:  ni  llrelni/ne.  mélodie  pour  baryton  et  orches- 
tre. Heugel. 

Tarentelle,  mélodie  pour  soprano  et  orchestre,  Ilmue!. 

1900.  Kijbèle,  poème  pour  solo,  chœurs  et  orchestre.  Société  des 

Concerts.  Heugel. 
1918.  La  Prière  de  France. 

ŒUVRES    SVMI-HOMQIES    ET    MORCEAUX    DE    CONCERT 


.   Deurièmc  Ourertnre  de  concert,  en  ré  majeur.  Durand. 

'.   Trois  Airs  de  bulle! .  Heugel.  —  I.  Tempo  di  valza.  —  II. 

Allegretto.  —  III.  Saltarello. 
.  Concerto  cnpriceioso  pour  piano  et  orchestre,  Heugel. 
'.  Suite  rillai/eoise  pour  orchestre.  Colonne.  Heugel.  —  I. 

Paysage.  —II.  Intermède.  —  III.  Fête. 
.  Ourertnre  sijmphonique.  en  ut  majeur.  Heugel. 
.  Ourertnre  de  r-Vii/iw/Aîléiiende  Scandinave).  Colonne.  Heugel. 
.  Première  Suite  sur  lu  Farandole.  Heugel.  —  I.  Les  Tam- 
bourinaires. —  II.  Les  Ames  infidèles.  — III.  La  Pro- 
vençale. —  IV.  Sylvine.  —  V.  Farandole  fantastique. 
Deuxième  Suite  sur  lu  Farandole.  —  I.  Adagio.  —  II.  Valse 
des  Olivettes.  —  III.  Cloches  et  violoneux.  —  IV.  Petit 
Menuet.  —  V.  Valse  des  Ames  infidèles. 
.  Murchc  héroïque  de  Jeanne  d'Are.   Heugel.    —  La  même, 

pour  musique  d'harmonie  et  pour  fanfare.  Id. 
.  Fantaisie  triomphale  pour  grand  orgue  et  orchestre.  Clayton 

et  Summy  (de  Chicago)  et  Heugel. 
.   )lrdi!ai/aii-Pnnc.  pour  orchestre  à cordes,  liiiilbois,  harpe 

et  orgue.  Heugel. 
.   Trais  petites  pièces  pour  orchestre.  Leduc.  —  I.   Air  h 
danser.  —  II.  Chanson  d'Orient.  —  III.  Histoire  bi- 
zarre. 
Mélodie  religieuse  pour  violon,  avec  orchestre.  Heugel. 
Ballet  d'Abeu  Hamel  (fête  orientale).  Heugel.  —  I.  Allegro 
moderato.  _  II.  Andanle.  —  111.  Allegro  non   Iroppo. 
Amiante  eaulabile  pour  violoncelle  avec  orchestre.  Heugel. 
Esquisse  et  Eiilr'ucte-ltiijaiidon  de  Sariere.  pour  violoncelle 

et  petit  orchestre.  Heugel. 
Intermède  siimphoniqne  de  Sotre-Damc  de  lu  mer.  Heugel. 
.  Hymne  nuptial  pour  orchestre,  Heugel. 
,  Concerto  pour  violon  et  orchestre.  Colonne.  Heugel. 
.  Dcurinne  Concerto,  en  fa  mineur,  pour  piano  et  orchestre. 
Société  des  Concerts.  Heugel. 
Suite -Miniature.  Heugel.  —  I.  Prologue.  —  II.  Badinago. 

III.  Andantino-réverie.  —  IV.  Petite  Marche. 
Deiw  petites  pièces  pour  orchestre  à  cordes,  Heugel.  —  I. 
Prélude.  —  II.  Esquisse. 
.  Adonis,  poème  symphonique  pour  orchestre,  en  trois  par- 
ties. Société  des  Concerts.  Heugel.  —  1.  Mort  d'Adonis. 
—  II.  Déploration  des  Nvmphes.  —    III.  Réveil   d'A- 
donis. 
.  Fantaisie  pour  harpe  et  orchestre.  Heugel. 
Quatre  Cumins  pour  piano  pédalier,  de  Schpmans.  trans- 
crits pour  orchestre.  Heugel. 
Prélude    du  Paradis  perda.  Leduc. 
Heur  pièces  ni  fnruir  eauamiiue  pour  hautbois  et  violoncelle. 

avec  orchestre  à  cordes.  Heugel. 
Pauses  cévenoles  de  Xavière.  Heugel. 
Sijmphame  française.  Bruxelles.  Heugel. 
Deux  petits  rères  d'enfant.  Heugel. 
Deux  pièces  pour  violon  el  orchestre.  Heugel. 
Nocturne  pour  violoncelle  et  orchestre.  Heugel. 
Est/iusses  orchestrales. 
Ueuricme  Sijaipliauie .  Colonne. 

Fanlaisie-Sliiek  pour  violoncelle  et  orchestre.  Lamoureux. 
Fantiisiethi  pour  instruments  soli  et  orchestre  à  cordes. 

Lamoureux.  1919. 
Suite  concertante  pour  violoncelle,  piano  et  orchestre.  La- 
moureux. 
lu  memnrtuui  umrtunrum.  Lamoureux. 
Suite  pour  piano  et  orchestre  à  cordes.  Lamoureux. 


TECUMQVE,  ESTHÉTIQUE  ET  PEDAGOGIE 


LINSTITUT  DE  FRANCE 


CHŒCHS    SANS    ACCOMPAGNEMENT 

Le  Pas  d'armes,  chœur  à  4  voix  d'hommes.  Heugel. 

La  Voix  île  la  nature,  chœur  à  -i  voix  d'hommes,  Leduc. 

TareilKUe,  chœur  à  i  voix  d'hommes,  Leduc. 

I.e  Drapeau  français,  chœur  à  3  voix  d'enfants,  Arrenaud, 

62,  avenue  Faidherbe. 
Le  Renard  el  la  Cigogne  (fable  de  La  Fontaine;,  chœur  à 

2  voix  d'enfants,  avec  accompagnement  de  piano.  Le- 

beau. 
Après    la   moisson,  Bcène   chorale   pour  voix   d'hommes. 

Heugel. 
Le  Chine  el  le  Roseau  (fable  de  La  Fontaine),  scène  chorale 

pour  voix  d'hommes,  Ileugel. 
llqmue  un  priulemi's,   s'erne  chorale  pour  voix  d'hommes. 

Heugel. 
Lu  Forêt,  scène  chorale  pour  voix  d'hommes. 
Le  Champagne,  scène  chorale  pour  voix  d'hommes. 
Le  Coureur,  pour  voix  mixtes.  —  Réveil,  chœur  mixte  avec 

soli.  —  Barcaralle,  solo  de  ténor  et  chœur.  —  Vers  tes 

Blés,  quatuor  vocal. 


siqte  d'or 


(de  1S80  k  1900  en  gêné 


18S3.  Pieee  d'orgue   Journal  3e  la  M.iitrise'..  Ileugel. 

18S6.  Douze  pièces  d'orgue.  Leduc.  —  I.  l'rélude,  en  fa.  —  IL 
Offertoire,  en  mi.  —  III.  Toccata,  en  sol.  —  IV.  Verset 
de  procession,  en  ré.  —  V.  Offertoire,  en  mi  7.  —  VI.  Ver- 
set choral,  en  la  mineur.  —  VII.  Fantaisie,  en  mi.  — 
VIII.  Méditation,  en  mi  ,.  —  IX.  Marche  des  Trois  Ma- 
ges, en  mi.  —  X.  offertoire,  en  mi  -,.  —  XI.  Cantilène 
nuptiale,  en  la  -,. 

1887.  Dix  pièces  pour  orgue  et  harmonium,  Heugel.  —  I.  En- 
trée, en  sol  mineur.  —  II.  Entrée  (carillon),  en  si  mi- 
neur. —  III.  ollerloire,  en  si  mineur.  —  IV.  Offertoire, 
en  mi.  —  V.  Elévation,  en  ri.  —  VI.  Elévation,  en  si. 

—  VII.  Communion,  en  sol  \,.  —  VIII.  Communion, 
en  sol.  —  IX.  Sortie  (fughetta),  en  re.  —  X.  Sortie, 
en  la. 

1S91.  Messe  de  mariage  pour  grand  orgue  (ô  pièces).  Leduc.  — 
I.    Entrée    du    cortège.   —  II.    Bénédiction   nuptiale. 

—  III.  Offertoire.  —  IV.  Invocation.  —  V.  Laus  Deo 
(sortie). 

Trois  pièces  d'orgue.  Schmitt  (Boston)  et  Durdilly  (Paris). 
I.  Prwlintiiiin  grave.  —  II.  Adoralio  et  Vax  angelica.  — 
III.  Hosiuinah    chorus  mai/nus). 

1S93.  Douze  nouvelles  pièces  d'orgue  Leduc.  —  I.  Prélude  et 
fugue,  en  ré.  —  II.  Chant  pastoral,  en  ut  mineur.  — 
III.  Cortège  funèbre,  en  fa  mineur.  —  IV.  La  Fête- 
Dieu,  en  ut.  —  V.  Canon,  en  la  i».  —  VI.  Alléluia,  en 
mi]).  —  VIL  Noël,  en  la  mineur.  —  VIII.  Fiat  lux,  en 
mi.  —IX.  In  Paradisum,  en  sol.  —  X.  Offertoire,  en 
rémineur.  — XI.  Thème  provençal  varié,  en  lit  mineur. 
XII.  Marche  triomphale,  en  mi?. 

1900.  Sept  petites  pièces  pour  orgue.  Novello  (Londres). 

tt      '%Aséendil  Deus,  offertoire  pour  l'Ascension.  Heugel. 

1907.  Postlude  pour  harmonium. 
Entrée  pour  grand  orgue. 

1911.   Pastorale  champenoise,  pour  grand  orgue  .ni  harmoninm. 
Prélude, \>ouv  grand  orgue  ou  harmonium. 

Transcriptions  pour  grand  orgue. 

isSS.  Marche  héroïque  de  Jeanne  d'Arc.  Heugel. 

18S9.  Fantaisie  triomphale,  Clayton  et  Suoimy  (Chicago)  el  Heugel. 

Œuvres  des  grands  maîtres. 

188S.  Six  transcriptions  pour  grand  orgue.  Durand.  —  I.  Alléluia, 
du  Messie  (H.endel).  —  II.  Marche  d'Athulic  (Men- 
delssohn).  — III.  Marche  du  Songe  d'une  nuit  d'etc  (lu.). 
—  IV.  Introduction  du  3'  acte  et  chœur  des  Fiançailles, 
de  Lohengriii  (R. Wagner).  —  V.  Marche  reliée  use  de 
Lohengrin  (In.).  —  VI.  Marche  de  Vmnhmaer  (In.). 

1X94.  Six  nourrîtes  transcriptions.  Durand.  —  I.  Marche-gavolle, 
de  Josui  (H.esdkl).  —  II.  Prélude,  de  Lohengrin  [R. 
Wagner).  —  III.  Chœur  de  Paulin  'Mknuki.ssohn).  — 
IV.  Introduction  du  3«  acte  et  chœur  des  Pèlerins,  de 
Tatmhseuser  (R.  Wagner).  —  V.  Chorus  myslicus,  de 
Faust  (Schdmann1.  —  VI.  Psaume.  —  I.  Cieli  immensi 
(B.  Marcello;. 

MCSIQOE    DE    CHANT 

1SS3.  Recueil  de  vingt  mélodies,  dans  deux  tons.  Leduc. — I.  Baiser 
maternel.  —  IL  Ballade  de  la  belle  Viroise.  —  III.  La 
Menteuse.  —  IV.  L'Adieu.  —  V.  Sous  bois.  —  VI. Le 
Nuage.—  VII.  Madrigal.  —  VIII.  Douce  Ivresse.— 
IX.  La  Fée  Jeunesse.  —  X.  Rondel.  —  XI.  Chanson 


d  ele.   —  XII.  Credo.  —  XIII.  Le  Baiser  de  paix    — 

XIV.  Poème  de  mai.  —  XV.  Chant  du  soir.  —  XVI 
™,STfinl.Jean\~  XVI1'  Cha»s<>n  de  printemps.  - 

imi     R  '  *erL>lla?e; .-  XIX-  Exlaoe,-  XX.  Le  Galop. 

1887.    Recueil  de  vingt  mélodie-  nouvelles,  dans  deux  tons   Heugel 

—  I.  La  Chanson  de  ma  mie.  —  II.  A  Douane  ne/en' 
Bretagne  (la  même,  avec  orchestre).  —  m  Près  d'un 
«Uisagau.  -  IV.  Parle  sentier.  -  Trimazo,  chanson 
de  mai,  avec  chœur  de  jeunes  filles  à  l'unisson  et  ad 
libitum.  —  VI.  Matin  d'avril.  -  VII.  Asperula.  —  VIII 
Mignonne.  —  IX.  Le  Baiser.  -  X.  Les  Vivants  et  les 
Morts,  strophes,  avec  soli  et  chœurs  (la  même  avec 
orchestre).  —  XL  Rosées.  —XII.  Tarentelle  (1b  même 
avec  orchestre).  —  XIII.  Matin.  —  XIV.  Brunette.  — 

XV.  Bergerette,  mélodie  provençale,  solo  et  chœurs 
(la  même  avec  orchestre).  —  XVI.  J'ai  rêvé.  —  XVII 

Madrigal.  —  XVIII.  Berceuse.  —  XIX.  Allez-vous-en 

—  XX.  Yseult. 

1900.  Les  vaines  tendresses,  six  mélodies,  dans  deux  tons,  Heu- 
gel. —  I.  Prière.  —  II.  L'Etoile  au  cœur.  —  III  Au 
bord  de  l'eau.   —  IV.  Enfantillage.  —  V.  Pèlerin, 

—  VI.  Sur  un  album. 

Délivrance,  cantate,  pour  soli  et  chœurs,  avecaccomp.V'ne- 
de  piano.  Noi  1. 
Dates  diverses  :  Jeanne.  —  L'Aveu.  Oirod.  —  Pourquoi  tes  oiseaux 
chaulent,  coule  mystique  (le  même  avec  orchestre).  Du- 
rand. —  Le  Vitrail.  Enoch.  —  Noël,  avec  accompagne- 
ment de  piano  ou  d'orgue.  Hachette.  —  Désir  d'avril. 
Ileugel.  —  Sérénade.  Id.  —  La  terre  a  mis  sa  robe  blan- 


Nou 


Id. 


Id.  —  Dormir  et  river.  Id.  —  L'air  riait  doux.  Id.  — lu 

désir.  Id.  —  La  voie  lactée.  Id.  —  Le  dernier  adieu.  Id. 
—  L'eufaut  à  sou  amie  gardien.  Id.  —  Miigiielonne.  Id.— 
Les  heures.  Id,  —  L'oubliée.  Id.  —  Ce  qui  dure,  Id.  — 
Éclaircie.  Id.  —  ,l  l'Océan,  Id.  —  Lamenté.  Id.  —  La 
chanson  Je  Colin,  Id.  —  Ha  effeuillant  des  marguerites.  — 
Le  invd.ii  d  amour.  —  //  m'aime.  —  Propos  d'umoiir.  — 
Ecoule  la  siimphonie.  —  La  lune  s'effeuille  sur  l'eau.  —  Un 
petit  roseau.  —  Si  j  ai  parle.  —  Vitanellc.  —  Autre  baiser. 

—  L'e/fenillement.  —  Printemps. 
1907.  Odelettes  antiques,  à  mélodies, 

I90S.  La  Cliaiisou  des  roses.  —   Viatique.—  Trop  tard. 
1910.   Musique  sur  l'eau.  6  mélodies. 

1913.  Chanson  JcSlar,olrc.  7  mélodies  et  un  grand  nombre  de 
mélodies  séparées  de  dates  diverses. 

MDSIQOE    DE    PIANO 

Avant  1S70.  Scherzo  el\  choral.  Heugel.  —  Marche  orienlule.   Id. 

—  Scherzo  en  fa  mineur.  Id.  —  Clucur  et  Danse  de  lutins. 
Id.  —  Bluelle  pastorale.  Id.  —  Rêverie-prélude.  Id.  — 
Allegro  de  Bravoure.  Id.  —  Divertissement.  Id.  —  Inter- 
mezzo. Id. 

Dates  diverses.  Chuconne.  Heugel.  —  Clair  de  lune.  Id.  —  Réveil. 
Id.  —  Danse  des  Nymphes  (ex.  traite  à'ilylas),  Id.  — 
Thème  curie.  Id.  —  Deux  préludes  (preludio  patelico, 
preludio  saltarello).  Id.  —  Impromptu,  Id.  —  Morceaux 
detitches  de  la  Farandole.  Id.  —  Un  soir  au  bord  du  lac. 
Mennesson.  —  Un  rêve  après  le  liai.  L.  Grus. 

1S73.  Doute  petites  pièces,  en  deux  suites.  Heugel.  —  I.  Prélude 
(transcription  du  n"  1  de  la  Suite-Miniature  pour  or- 
chestre). —  II.  Esquisse. —  III.  Badinage  (transcrip- 
tion du  n"  2  de  la  Suite-Miaiiitare  pour  orchestre.  — 
IV.  C.mzonetta.  —  V.  Adagietto.  —  VI.  Scherzetto. 
VII.  Petite  maz-urka. —  VIII.  Toccata.  —  IX.  Andan- 
tino  rêverie  (transcription  du  n"  3  de  la  Suite-Miniature 
pour  orchestre).  —  X.  Petite  Marche  (transcription  du 
n°4  de  la  Suite-Miniature  pour  orchestre).  —  XI.  Alle- 
grelto-Capriccio.  —  XII.  Impromptu  final. 

1875.  Trois  airs  de  ballet.  Heugel  (transcription  des  mêmes  poui 
orchestre).  —  I.  Tempo  di  valza.  —  II.  Allegretto.  — 

III.  Saltarello. 

1SS0.  Vingt  pièces  nouvel/es.  A.  Leduc.  —  I.  A  l'aube.  —  II.  Air 
à  danser  (transcription  du  n°  1  des  Trois  petites  pièces 
d'orchestre).  —  III.  Interlude.  —  IV.  Sonnet.  —  V. 
Remember.  —  VI.  Histoire  bizarre  (transcription  du 
n°  3  des  '/'rei\  petites  pièces  d'orchestre).  —  VII.  Duet- 
tino.  —  VIII.  Chanson  d'Orient  (transcription  du  n"  2 
des  Trois  petites  pièces  d'orchestre.  —  IX.  Fanfare.  — 
X.  A  la  veillée.  —  XI.  Choral.  —  XII.  Petite  valse.  — 
XIII.  Chanson  Lesbienne.  —  XIV.  Ronde  des  archers. 
—  XV.  Sorrente.  —  XVI.  Histoire  triste.  —  XVII. 
Menuet.  —  XVIII.  Stella  matutina.  —  XIX.  Fragment 
de  ballet.  — XX.  Chant  bachique. 

1S93.  Poèmes  sylvestres  (six  pièces).  Heugel.  —  I.  L'Allée  soli- 
taire. —  II.  Les  Myrtilles.  —  III.  Les  Bûcherons.  — 

IV.  Le  Banc  de  mousse.  —  V.  La  Source  enchantée.  — 
VI.  Danse  rustique. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


1S97.    Poèmes  rirgiliens  (six   pièces).  Heugel.  —  I.  Tilvre. 

Qalatea.  —  01.  Daphnie.  —  IV.  Les  Abeilles.  — 

Lethé.  —  vi.  Diana. 
190 1.  .lu  jardin,   scènes  mignonnes  [six   pièces).   Heugel. 

Les  Oiseaux.  ■ 

Petites  Visites.  —  IV.  Qouttes  de  | 

tils  Canards.  —VI.  La  Première  l 
Marche  héroïque  de  Jeaiue  d  1rs  pour  pi 

tion  |mmi r  orchesb  e  .  MennessoD. 
DeuxCautilèuet,  transcrites  dugrand  01 

A.  Leduc, 
l'.m::.  Ombres  et  lumières  (0  p.).  Heugel. 
1905.  Causone,  Heugel. 
1908.  Douze  études  de  concert,  Heugel. 

1907,  Menez  tiagio.  Sonate.  Heugel. 

1908,  Su  pelilei  Valu*  inlimett.  Heugel. 

1909,  Pi     ;  -  o  pettrei.  Heugel. 
uni.  la  journée  de  Veafaal  (12  p.).  Heugel. 
1914.  A  l'aventure  (12  p.).  Heugel. 
191  ' .  Prélude  et  fugue,  Heugel. 

Deuxième  tlurerture  de  concert,  en  ré.  A 
Ouverture  symphoaique  en  ut.  Heugel. 
Suite  villageoise.  Heugel. 
Ouverture  de  Frithioff.   Heugel. 
Fantaisie  triomphale.  Heugel. 
Adonis,  poème  symphonique.  Heugel. 
Symphonie  française. 
Suite-  Miniature. 
Quatuor  a  cordes. 

Deuxième  Symphonie.] 
Fantasiella. 
1921.  Esquisses  orchestrales. 


Farandole  juuhislique,  par  Lack.  Heugel. 

Deux  Suites,  sur  des  pièces  d'orgues  choisies  pari.  Philipp. 
A.  Leduc.  Première  suile  :  I.  Prélude.  —  II.  Cortège 
funèbre.  —  III.  Scherzo.  —  IV.  Thème  provençal  va- 
rié. —  V.  Finale.  =  Deuxième  suite  :  I.  Entrée.  —  II. 
In  Paradisum.  —  III.  Marche  des  Rois  Mages.  —  IV. 
Toccata. 

Thème  varié,  transcrit  par  I.  Philipp.  Heugel. 

MUSIQUE    DE    CHAMBRE 

De  1S60  à  1870.  Mélodie,  en  sol,  pour  violon  ou  violoncelle,  avec 
piano.  Legouix. 
Contemplation,  pour  violon,  avec  piano.  Legouix. 
Berceuse,  pour  violon,  avec  piano.  Legouix. 
Duettino  d'amore,  pour  violon  et  violoncelle  ou  alto,  avec 

piano.  Heugel. 
Andante-Cantabile,  pour  violoncelle,  avec  piano.  Le  même 

avec  orchestre.  Heugel. 
Cavatine,  pour  violoncelle,  avec  piano.  Heugel. 
Avant    1870.    Caprice    mélodique  et    Prière,    pour   harmonium. 
Alexandre. 
Fantaisie  pastorale,  pour  harmonium,  Alexandre. 
Trois  transcriptions,  pour  violon,  piano  et  harmonium.  Alexandre. 
I.  Allegretto  de  la  Symphonie  en  la,  Beethoven. 

II.  Adagio  du  Septuor,  Beethoven. 

III.  Adagio  de  la  Symphonie  en  /«mineur,  Mendelssohn. 
Fantaisie    pour   musique    d'harmonie,    sur    Aben-Hamel 

(transcription  de  G.  Parés).  Evette. 
la  Farandole,  puur  musique  d'harmonie  (transcription  de 

G.  Parés).  Evette. 
La  Farandole,  pour  musique  d'harmonie  (transcription  de 
L.  Ivarrcn.  Evette. 
1880.  Saltarello,  pour  violon  avec  piano  (transcripiion  du  n°  3 

des  Airs  de  flallel,  avec  orchestre.  Heugel. 
1SS7.  ilétodie  religieuse,   pour  violon,   avec  orgue  et  harpe  ou 
piano  (réduct.  de  la  même  pour  orchestre).  Pérégally. 
Andante  religioso,  pour  violoncelle,  avec  orgue.  Pérégallv. 
1890.  Mèdilalion-I'riére,  pour  violon  solo,  harpe  et  orgue  (réduc- 
tion de  la  même  pour  orchestre.  Heugel. 
PremiéreSuile  pour  instruments  à  vent  :  2  flûtes,  1  hautbois, 
2  clarinettes,  1  cor  et  2  bassons.  Heugel.  —  I.  Petite 
mazurka.  —  II.  Canzonetta.  —  III.  Chaconne. 
Deuxième  Suile  pour  instruments  à  vent  :  2  flûtes,  1  hautbois, 
2  clarinettes,  lcor  et  2  bassons.  A.  Leduc.  —  I.  Ronde 
des  archers  —  II.  Chanson  Lesbienne.  —  III.  Petite 
Valse.  —  IV.  Stella  Malulina  —  V.  Menuet. 
Sonate,  eour  piano  et  violon.  Heugel. 
18U3.  Hymue  nuptial,    pour  violon,  alto,   violoncelle,  harpe   et 
orgue  Réduction  du  même  pour  orchestre).  Heugel. 
Le  même,  pour  violon,  piano  et  orgue.  Heugel. 
1896.  Concerlo-Capriceioso  pour  piano,  avec  second  piano  (réduit 
de  l'orchestre),  Heugel. 


1897.  Deuxième  Concerto,  pour  piano,  eu  fa  mineur,  avec  second 

piano  (réduit  de  l'orchestre).  Heugel. 
189S.  Concerto,  pour  violon,  avec  piano  (réduit  de  l'orchestre). 

Heugel. 

1900,  Deux  Pièces  canoniques,  pour  hautbois  et  violoncelle,  avec 

piano  (réduction  des  mêmes  avec  orchestre).  Heugel. 
Méditation,  pour  violon  et  hautbois,  avec  piano  ou  orgue. 

Heugel. 
Cantilène,  pour  cor    ou  violoncelle  et  violon,   avec  piano 

ou  orgue,  Heugel. 
Menuet,  pour  violoncelle,  avec  piano.  Heugel. 
Orientale,  pour  hautbois  ou  flûte,  avec  piano.  Ricordi  (de 

Milan). 
Sonale  pour  deux  violons.  Heugel. 
1903.  Fantaisie,  pour  harpe,  avec  piano  (réduit  de  l'orchestre). 

Heugel. 
1"'  Trio  pour  piano,  violon,  violoncelle.  Heugel. 

1901.  Quintette  avec  hautbois.  Heugel. 

I9U5.  Sonate  pour  violoncelle  et  piano.  Heugel. 
1906.  Quatuor  avec  piano.  Heugel. 

De  1903-1907.  Promenade  sentimentale,  piano,  violon,  violoncelle. 
Heugel. 

Deux  petits  rêves  d'enfant,  quatuor  à  cordes. 

Deux  pièces  pour  violon  et  piano.  Heugel. 

Nocturne  pour  violoncelle.  Heugel. 

Terzellino  pour  flûte,  alto  et  harpe.  Heugel. 

Morceau  de  concert,  pour  trombone.  Heugel. 

Au  Jardin,  instruments  à  vent.  Heugel. 

Entr'acte  Rigaudon  do\Xueière,  pouralto,  violoncelle.  Heugel. 

Esquisse  pour  violoncelle.  Heugel. 

Aubade  prinlaniere,  pour  harpe.  Heugel. 

Ballade,  pour  violon.  Heugel. 

Rêverie  scherzo,  pour  violon.  Heugel. 

1908.  Quatuor  à  cordes.  Heugel. 

1909.  Dixluor  pour  double  quintette.  Heugel. 

1910.  1"  Trio  avec  piano.  Heugel. 


Accompagnement  pratique  du  plain-chant.  Pérégally. 

Soles  et  éludes  d'harmonie,  pour  servir  de  supplément  au  Traité 

de  H.  Reber.  Heugel. 
Quatre-vingt-sept  leçons  d'harmonie.  Heugel. 
Traité  de  contrepoint  et  de  fugue.  Heugel. 
Petit  manuel  théorique  de  l'harmonie.  Heugel. 

En  préparation  :  Traite  pratique  et  théorique  d'harmonie.  Heugel. 
1916.  2e  Quatuor  à  cordes.  Heugel. 
1918.  Fantaisie  pour  trompette.  Heugel. 
1915.  Canon  pour  violon  et  violoncelle.  Heugel. 


MUSIQCK  RELIGIEUSE 

Vers  1860.  Cinq  motels,  avec  accompagnement  d'orgue.  Janit 
(Lyon).  —  I.   Ascendil  liens,  offertoire  en  si\,,  solo  en 
chœurs.  —  II.  0  Sulutaris,    en   fa,  solo  de    ténor,  et 
chœur  ad  libitum.  —  III.  Agnns  Dei,  solo  pour  mezza- 
soprano.  —  IV.  Ave  Verum,  en  fa,  pour  ténor,  ou  so- 
prano. —  V.  0  Salnturis,  en  fa,  pour  ténor  ou  soprano. 
1862- 1866.  SIesse    Pontificale,   soli   et    chœurs    à  quatre   voix 
S.  A.  T.  B.  avec  orchestre.  [Partition  réduite  par  l'au- 
teur. Cette  messe  a  été  exécutée  pour  la  première  fois  à 
Saint- Eustache  par  l'Association  des  Artistes  musiciens 
(fête  de  sainte  Cécile,  novembre  1895).  Heugel. 
1876.  Messe  brève  en  mi  \,  à  trois  voix  S.  T.  B.,  avec  orgue  ou  or- 
chestre. Heugel. 
1S91.  Messe  brève,  en  la  \>  majeur  à  trois  voix  S.  T.  D  ,  soli  et 
chœurs  avec  orgue.  Heugel. 

Messe  pour  les  morts,  soli  et  chœurs  à  quatre  voix  mixtes 
avec  orgue  ou  orchestre.  Madeleine. 

Kyrie  en  ut  mineur,  chœur  et  solo  de  ténor. 

Domine  Jesu  Christe,  soli  et  chœurs. 

Sanctus,  chœur. 

Pie  Jesu,  duo  et  chœur. 

Agnns  Dei,  soli  et  chœurs. 

Libéra,  chœur  et  solo  de  baryton  avec  orgue  ou  orchestre. 

Petite  Messe  pour  les  morts,  chœurs  à  trois  voix  S.  T.  B., 
avec  orgue. 

Libéra,  offertoire  en  sol  mineur,  pour  deux  ténors. 

Pie  Jesu,  en  k/#  mineur,  chœur  à  quatre  voix  et  soli. 

Pie  Jesu,  en  mi  [J,  petit  chœur  à  quatre  voix. 

Pie  Jesu,  en  la  mineur,  chœur  à  trois  voix  et  soli  pour 
deux  ténors. 

Pie  Jesu,  en  ut  mineur,  solo  de  ténor. 

Absolve  Domine,  motet,  solo  de  baryton  et  chœur  (extrait  de 
Mendelssohn). 
1895.  Molet  solennel  pour  la  fêle  de  la  suinte  Vierge,  soli,  chœurs 
et  orchestre.  Première  audition  parla  Société  des  Con- 
certs du  Conservatoire  (24  février  1895). 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L  INSTITUT  DE  FRANCE 


Messe  brève,  en  /«   majeur  à  quatre  voix  S.  A.  T.  B.  avec 

orgue.  Heugel. 
Messe  brève,  en  (a  majeur  a  qualre  voix  S.  A.  T.  B.  avec 

ou  sans  accompagnemeut  d'orgue,  style  palestinien. 

Heugel. 
Credo,  puur  une  messe  brève,  quatuor  d'hommes,  soli  et 

chœurs  à  voix  mixtes,  avec  orgue.  Heugel. 
Messe  brève,  à  troix  voix  d'hommes,  avec  orgue.  Heugel. 
diverses,  Mulets  au  suint -sacrement.  Heugel  : 
0  Salutaris,  en  ré,  solo  de  soprano  ou  ténor. 
OSuliilaris,  en  Injf  solo  de  baryton  avec  violon,  harpe. 

orgue  et  contrebasse. 
0  Salutaris  en  lu  -,,  duo  pour  ténor  et  baryton. 
OSalularis,  en  mi  $  majeur,  chœur  à  trois  voix  S.  T.  I). 
0 Salutaris,  eu  si  $  majeur,  chœur  à  quatre  voix  S.  A.  T.  li. 
0  Salutaris,  en  sol,  solo  de  ténor  et  chœur. 
0  Salutaris,  en  ta  j?  (extrait  de  Beethoven),  solo  de  so- 


praiiM 


eh. 


Il  Salutaris,  en  sol  (extrait  de  Mozart),  solo  de  baryton  et 

chœur. 
0  Salutaris,  en  ut,  solo   de   ténor  et  chœur,  avec  cor  an- 
glais, harpe,  orgue  et  contrebasse. 
Le  même,  avec  orchestre. 
Il  Salutaris,  en  si}/,  solo  de  soprano  et  chœur  d'hommes 

avec  clarinette  ou  violon,  orgue  et  contrebasse. 
Le  même,  avec  orchestre. 
Ave    Verum,   en  rr'9,  solo  de  mezzo-soprano  ou  barvton 

élevé. 
Ave  Verum,  en  la  #  majeur,  chœur  pour  voix  d'hommes. 
Ave  Verum ,  en  la  [J,  solo  de  ténor  et  chœur  ait  libitum. 
Le  même,  en  fa,  pour  mezzo-soprano  ou  baryton. 
Ave  Verum,  en  fa,  >olo  de  mezzo-soprano  avec  violon. 
Ave  Verum,  en  mi  majeur,  solo  de  ténor  avec  violoncelle  ou 

clarinette. 
Le  même  pour  ténor  et  orgue  seul. 
Le  même,  pour  mezzo-soprano  et  orgue  seul. 
Ave  Verum,  en  si  \,  (extrait  de  Mendelssohn),  solo  de  so- 
prano ou  ténor  avec  clarinette  ou  violon. 
Ave  Verum,  en  fa,  solo  de  baryton  et  chœur  ad  libitum  avec 

violoncelle,  harpe  et  orgue. 
Ave  Verum,  en  mi  if,  solo  de  soprano  et  chœur  ad  libitum. 
Ave  Verum,  a  cappella. 
Pauis  angelicits   (à  César  Franck)  en   s»#  mineur,  avec 

Chœur  ad  libitum. 
Le  même,  en  /((  mineur,  pour  mezzo-soprano. 
Le  même,  en  sol  mineur,  pour  contralto. 
Le    même,  en  s/jf  mineur,    avec  violon   ou  vioL .nt'id !.-. 

harpe  et  orgue. 
Le  même,  en  la  mineur,  avec  violon  ou  violoncelle,  harpe 

et  orgue. 
l'anis  ungelicus,  en  ré  majeur,  solo  de  ténor  avec  harpe 

et  violoncelle  et  orgue. 
Le  même,  avec  orgue  seul. 

Le  même,  en  ut,  pour  mezzo-soprano  et  orgue  seul. 
Le  même,  avec  orchestre. 

Pauis  angeliciis,  en   si#  majeur,  solo  de  mezzo-soprano 
avec  chœur  d'hommes  et  harpe,  violoncelle,   orgue, 
contrebasse  et  violon  ad  libitum. 
Ecce  pauis,  en  mi  \>,  duo  pour  soprano  et  baryton. 
Eeec  punis,  en  mi  [>,  duo  pour  deux  sopranos. 
Ecce  panis,  en  si'r,,  chœur  à  quatre  voix  d'hommes. 
Tànlinn  ergo,  en  ««'majeur,  solo  de  soprano  ou  ténor. 
Tantum  ergo,  en  sol,  chœur  à  quatre  voix  d'hommes. 
Tantum  ergo,  en  mi  jj,  ehœur  à  qualre  voix  S.  A.  T.  B. 
Tantum  ergo,  en  mi  [?,  solo  de  baryton  et  chœur. 
Le  même,  avec  orchestre. 
Tantum  ergo,  en  si  \j,  solo  de  ténor  et  chœur. 
Tantum  ergo,  en  mi  <t  majeur,  solo  de  baryton  avec  \iolon, 
violoncelle,  harpe  et  chœur  ai  libitum. 
.  Messe  solennelle  de  saint  Rémi,  soli,  chœurs,  orchestre.  Pre- 
mière audition  à  Saint-Éustache,le23  novembre  1900. 
Heugel. 
.  Sanctus,  pour  chœur  et  orgue.  Heugel. 
Tantum  ergo. 
0  Saerum  convivium,  solo  de  soprano  ou  ténor  avec  orgue 

ou  orchestre. 
0  Saerum  convivium,  chœur  à  quatre  voix  S.  A.  T.  B. 


Bone  paslor,  en  fa  majeur,  choral  à  quatn 

(extrait  de  Menoelssohn). 
lauda  Sion,  en  ut,  soli  et  chœur  à  quatre 

(extrait  de  Beethoven). 
Dates  diverses.  Motets  il  la  sainte  Vierge  . 
Ave.  Maria,  en  sol  (à  M.  Miquel),  solo  de  s 
Le  même,  en  fa.  pour  mezzo-soprano. 
Le  même,  en  mi\y,  pour  contralto  où  bar 
Are  Maria,  en  mib,  solo  de  soprano. 
Are  Maria,  en  la  majeur,  solo  de  ténor  ou 
Ave  Maria,  en  »«' b,  solo  de  baryton. 


voix  S.  A.  T.  B. 


«>i  mm  m,  en  in  mineur,  s»io  de  soprano  et  chœur. 

Aie  Van,,  en  la  y,  duo  pour  ténor  et  baryton  avec  chœur. 
]  Su/,  luum,  en  rc;,  tno  pour  soprano,  loi, or  et  basse.  Par- 
ties de  violon  et  harpe. 

Sub  luum,  en  sot  majeur,  trio  pour  soprano,  ténor  et  basse. 

Su*  luum,  en  la[,,  quatuor  pour  soprano,  contralto,  téinu' 
et  basse. 

«egina  eali,  en  si  >,  solo  1 
chœur  à  trois  voix. 


duetto  de  soprani  1 


Le  même,  avec  orchestre. 

0  pr.v    mu/ieribus,  offertoire   pour  les  fêtes  de  la  sainte 

Vierge,  chœur  à  trois  voix  S.  T.  B. 
Ego  Mater,  solo  de  soprano. 
Le  même,  pour  mezzo-soprano. 
Are.  Maria,  en  la  majeur,  solo  de  soprano. 
Christus  resurrexil  (extrait  de  Marcello)  solo  de  baryton  et  chœur 

avec  grand  orgue  alterné. 
Le  même,  avec  orchestre. 
0  filii  et  filial,  arrangé  avec  violoncelle,   orgue,  contrebasse  et 

harpe  ad  libitum. 
Ave  Maria,  eulab  (à  M.  Bosquin),  solo  de  soprano  ou  ténor. 
Le  même,  en  fa,  pour  mezzo-soprano. 
Le  même,  en  mih,  pour  contralto  ou  baryton. 
Le  même,  en  la\>,  pour  soprano  ou  ténor  avec  violon  on  violon- 
celle et  harpe,  par  Samuel  Rousseau. 
Le  même  en  fa,  pour  mezzo-soprano  avec  violon,  violoncelle  et 

harpe. 
Eranl  aposlnli,  solo  de  baryton  et  cbœur. 
Air  de  la  Cantate  (de  J.-S.  Bach),  solo  de  baryton. 
Fulgebunl  jusli,  chœur  pour  soprano,  ténor,  basse,  solo  de  basse 

et  quartelto  de  soprani. 
Adeste  fidèles,  solo  et  chœur  avec  violon  ou  violoncelle,  harpe  et 

Ecce  advcitit  Itumiualor  Dominas,  chœur  à  qualre  voix  sans  accom- 
pagnement, orgue  ad  libitum. 

Tu  es  Peints,  en  si--,,  chœur  avec  grand  orgue  alterné  ou  solo  de 
baryton  et  chœur. 

Le  même,  avec  orchestre. 

Tu  es  Peints,  en  si$  majeur,  chœur  et  solo  de  ténor  avec  violon- 
celle, harpe  et  contrebasse. 

Tu  es  Peints,  ensi#  majeur  (extrait  du  précédent  et  contenant 
également  le  texte  du  Tu  es  Sacerios),  tutti  de  basse  et 
chœur  à  trois  voix  S.  T.  B. 

Tu  es  Parus,  chœur  et  2  orgues  sur  un  thème  grégorien. 

ilénéiielion  pontificale,  a  cappella  (1911). 

Veui  Sanete  Sptritus,  duo  pour  soprano  et  ténor. 

Veni  Creator  en  mi  jf,  solo  de  baryton  et  chœur  à  quatre  voix 
S.  A.  T.  B.,  avec  violon,  violoncelle,  harpe,  orgue  et 
contrebasse  (transcription  de  Samuel  Rousseau). 

Benediciit  rubis  en  si^,  chœur  pour  voix  d'hommes  et  voix  d'en- 
fants ai  libitum  et  duetto  pour  soprano  ou  ténor  et  ba- 
ryton avec  orgue,  violoncelle,  harpe  et  contrebasse  ad 
libitum. 

Deus  Abraham  en  fa,  chœur  avec  soli  de  basse  et  ténor. 

Le  même,  avec  orchestre. 

I.andale  l).  0.  </.,  chœur  à  quatre  voix 

1913.  Messe  brève,  a  trois  voix  dans 
Heugel. 

1917.  Messe  ie  la  Délivrance.  Heugel. 

Agitus  Uei.   en  la    majeur.  Duo   pour  soprano   et  ténor. 

Heugel. 
Agnns  Dci,  en  la  majeur.    Duo    pour    lénor   et    barvton. 
Heugel. 


int-Georges.  1911- 


Bibliorjiaphie 

Journal  de  l'Université  des  A niialr  -,  . ",  1 , 

1915,  9«  année  scolaire. 
T.  II,  n°  double,  20-21. 
Hugues  Imbert.  —  nouveaux  Profil*  de  musiciens.  Taris.  Librairie 

Fischbacher. 
Les  Galettes  politiques  et  lillérinres,  deuxième  année,  avril  1900. 
Le  Momie  musical,  articles  de  M.  Lucien  Chevaii.lier,   15  juin 

1912;  30  mai  1912;  30  juin  1912. 
La  Revue  musicale,   1"  avril   1910.  Article  de  Jules  Combariec 

(conférence  à  la  Société  des  Grandes  Conférences,   14  mars 

1910). 

Gabriel  Fauré. 

Gabriel  Fauré  est  né  le  13  mai  184b  à  Pamiers 
(Ariège),  où  son  père  exerçait  les  fonctions  d'inspec- 
teur primaire,  avant  d'être  nommé  directeur  de  l'é- 


(NCYCLoPEdΠ DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


cole  normale  d'instituteurs  de  Koix  (1848).  En  lS.'li, 
les  dispositions  musicales  manifestées  par  le  jeune 
Gabriel  décidèrent  ses  païen ts  à  l'envoyer  à  "Paris,  à 
l'Ecole  de  musique  religieuse  fondée  par'NlEDERMEYER. 
Dès  la  fin  de  la  première  année,  il  obtenait  une  ré- 
compense pour  le  piano.  Mais  les  frais  qu'entraînaient 
ces  études  semblaient  lourds  au  directeur  de  l'école 
normale  deFoix;  aussi  songeait-il  à  l'aire  abandon- 
ner à  son  fils  ses  études  si  bien  commencées.  Pour 
conserver  un  brillant  élève,  Niedermeyer  lui  accorda 
la  gratuité  de  la  pension.  En  août  1S;>:>,  après  avoir 
suivi  les  leçons  de  Niedermeyer,  de  Dietsch  et  de  Ca- 
mille Saint-SaëNS,  Gabriel  Faiué  remportait  les  prix 
de  piano,  d'orgue,  d'harmonie  et  de  composition 
musicale.  En  janvier  1866,  il  devenait  organiste  à 
['.église  Saint-Sauveur  à  Itennes. 

En  mars  1870,  il  revenait  à  Paris,  comme  organiste 
accompagnateur  à  l'église  Notre-Dame  de  Clignan- 
court.  Il  n'occupa  ce  poste  que  quelques  mois,  et,  dès 
les  premiers  jours  de  la  guerre,  s'engagea  dans  les 
voltigeais  de  la  garde.  Après  l'armistice,  il  accepte 
la  direction  d'une  classe  à  l'Ecole  Niedermeyer 
et  le  poste  d'organiste  à  l'église  Saint- Honoré 
d'Eylau.  Nommé  quelques  années  plus  tard  orga- 
niste accompagnateur  à  Saint-Sulpice,  il  remplace 
en  1877  Théodore  Dubois  comme  maître  de  cha- 
pelle a  la  .Madeleine. 

Cette  même  année  et  les  années  suivantes  sont 
marquées  par  de  nombreux  voyages  en  Allemagne, 
d'abord  à  Weimar  pour  assister  à  la  première  repré- 
sentation du  Samson  et  bailla  de  Saint- Sauns, 
ensuite  à  Cologne,  à  Munich,  partout  où  il  peut 
entendre  les  œuvres  de  Wagner. 

Déjà  Gabriel  Fauré  s'était  fait  connaître  comme 
compositeur.  Le  8  février  1873,  à  la  Société  nationale 
de  musique,  dont  il  fut  undesfondateuis,  Mme  Edouard 
Lalo  avait  chanté  sa  Chanson  du  pécheur;  le  13  février 
1874,  sa  Suite  d'orchestre  en  la,  qui  ne  fut  jamais 
publiée,  avait  été  exécutée  chez  Colonne.  Mais  jus- 
qu'au S  juillet  1878,  jour  où  fut  jouée,  aux  Concerts 
de  musique  de  chambre  du  Trocadéro,  sa  Sonate 
en  la  pour  piano  et  violon  op.  13,  le  nom  de  Gabriel 
Fauré  ne  s'était  pas  imposé  au  public.  Longtemps 
encore,  malgré  l'article  enthousiaste  que  lui  avait 
consacré  Camille  Saint-Saëns,  la  réputation  de 
Gabriel  Fauré  ne  devait  pas  s'étendre  au  delà  du 
cercle  assez  étroit  des  connaisseurs;  longtemps,  il 
devait  rester  presque  inconnu  du  grand  publie,  et 
cela  en  raison  même  du  genre  de  musique  qu'il 
écrivait.  Seules  en  France,  les  œuvres  d'orchestre 
ou  de  théâtre  font  la  popularité  d'un  musicien. 

Pour  le  théâtre,  Gabriel  Fauré  n'avait  écrit  que 
la  musique  de  scène  de  Caligula  (1888),  de  Shylock 
(1889),  et  un  Promélhée,  joué  en  1900  et  en  1901  aux 
Arènes  de  Béziers.  Jamais  son  nom  n'avait  figuré  sur 
les  affiches  de  l'Opéra  ni  de  l'Opéi a-Comique;  il  sem- 
blait même  craindre  de  parler  la  langue  musicale 
accessible  au  grand  public;  une  seule  fois,  en  1913, 
il  finira  par  se  risquer  au  théâtre  (Monte-Carlo, 
Théâtre  des  Champs-Elysées,  Paris),  avec  une  Péné- 
lope, œuvre  émouvante  dans  sa  simplicité,  tragédie 
forte  qui  restera  un  des  chefs-d'œuvre  de  l'école 
française.  D'au  Ire  part,  il  écrivait  peu  pour  l'orchestre; 
un  Concerto  de  violon,  exécuté  en  1879,  ne  fut  jamais 
publié;  une  Symphonie  en  ré  mineur  (concerts  Co- 
lonne, 15  mars  188o|  resta  manuscrite.  Pour  expri- 
mer la  délicatesse  de  ses  sentiments,  il  lui  fallait 
l'intimité  de  la  musique  de  chambre,  et  avec  sa 
Sonate  de  violon,  ses  deux  Quatuors  pour  piano  et 


instruments  à  cordes  (1882-1887),  ses  recueils  de 
lieds  demeureront  ses  vrais  titres  de  gloire. 

v  La  musique  de  M.  Gabriel  Fauré,  élégante,  sub- 
tile et  raffinée,  dit  excellement  M.  Octave  Séré,  ne 
peut  être  pleinement  goûtée  que  des  délicats.  »  Ceux- 
ci  ont  su  apprécier  la  pureté  de  sa  ligne  mélodique, 
la  netteté  de  ses  architectures  qui  font  de  lui  un 
classique,  mais  un  classique  aux  harmonies  singu- 
lièrement hardies,  un  classique,  devenu  impression- 
niste au  contact  de  Verlaine,  dont  il  sut  traduire 
musicalement  les  nuances  et  la  tendresse  sensuelle, 
un  classique  qui  serait  en  même  temps  le  très  réel 
précurseur  des  révolutionnaires  les  plus  modernes. 

Toutes  ces  qualités  n'échappèrent  pas  aux  délicats. 
Sans  le  tapage  d'un  gros  succès  populaire,  de  plus 
en  plus,  la  gloire  de  Gabriel  Fauré  s'affirmait; 
les  titres,  les  honneurs  marquaient  le  progrès  de 
cette  réputation.  En  1883,  l'Académie  des  beaux-arts 
lui  accordait  le  prix  Chartier  pour  ses  œuvres  de 
musique  de  chambre.  En  1892,  il  succédait  à  Ernest 
Guiraud  comme  inspecteur  des  Beaux-Arts.  Titulaire 
du  grand  orgue  de  la  Madeleine  le  2  juin  1896,  pro- 
fesseur de  composition,  de  contrepoint  et  de  fugue 
au  Conservatoire  (10  octobre  1896),  nommé  directeur 
du  Conservatoire  (juin  190o)  en  remplacement  de 
Théodore  Dubois,  il  conservera  ce  poste  jusqu'au 
1er  octobre  1920.  Critique  musical  au  Figaro,  depuis 
la  fin  de  1902,  président,  depuis  1909,  de  la  Société 
musicale  indépendante  (S.  M.  I.),  Gabriel  Faire  a 
été  élu  en  1909  membre  de  l'Institut  et  élevé,  le  30  dé- 
cembre 1910,  au  grade  de  commandeur  de  la  Légion 
d'honneur.  Il  est  mort  le  2  novembre  1924. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES   DE  GABRIEL  FAURE 


Irais  Uomunees  sons  paroles,  op.  17.  1863,  Paris,  1 1 : ■  i n ._■  1 1  ■  ■ . 

/"■  Impromptu  op.  25.  ISs3,  Paris,  I Iaiin-11..-. 

f"  Barcarollé,  op.  26,  1883,  Paris,  Hamelle. 

{«  Valse-Caprioe,  op.  30,  1SS3,  Paris,  Hamelle. 

8< Impromptu,  op.  31,  1S83,  Paris,  Hamelle. 

Mazurka,  op.  32,  1883,  Paris,  Hamelle. 

Trois  Nocturnes,  op.  33,  1883,  Paris,  Hamelle. 

.,"■  Impromplu.  ..p.  ::',,  1883,  Paris,  Hamelle. 

4'  Nocturne,  ç>p.  36,  lSsi,  Paris,  Hamelle. 

y  Nocturne,  op.  37,  1884,  Pans,  Hamelle. 

:"■  Yalse-Cnprue,  op.  3s,  |  ssi.  Paris,  Hamelle. 

:'<•  Barcarollé,  op.  41,  1885,  Paris,  Hamelle. 

3' Barcarollé,  op.    12,  1885,  Paris,  Hamelle. 

4'  Barcarolte,  op.  44,  lsso.  Pans,  Hamelle. 

..''  Valse-Càprioe,  op.  59,  1S91,  Paris,  Hamelle. 

;•■  Vnlse-ijipnec.  op.  62,  1*94  (î),  Paris,  Hamelle. 

6- Nocturne,  op.  63,  1895  (?),  Paris,  Hamelle. 

.V  nnrairol/c,  op.  lit;,  1895  ;'?).  Paris.  Hamelle. 

i?  Barcarollé,  op.  70,  »896  (î),  Paris,  Hamelle. 

Thème  et  rariations,  op.  73,  1897,  Paris,  Haraelle. 

;<•  nocturne,  op.  74,  1898,  Paris,  Hamelle. 

Huit  pièces  hreres.  op.  Si,  1898-1902  :1a  dernière  est  le  8> 

lurne),  Paris,  Hamelle. 
7e  Barcarollé,  op.  90,  1906,  Paris,  Heugei. 
,'  Impromptu,  op.  91,  1906,  Paris.  I  Liilt-I . 
î«  Uiireariille.  op.  ! 


97. 


9'  Barcarollé,  op.  loi,  1910,  Pan-,  Hi  ugi  I. 
.V  Impromptu,  op.  102,  1910,  Paris.  Heugei. 
Neuf  Préludes,  op.  103,  1910-1911,  Paris,  He 


JATRE     MAINS 


Impromptu,  op.  86.  pour  harpe  seule.  199  i,  Paris,  Durand. 


Le  Papillon  et  la  Fleur  (V.  Hugo),  op.  1.  Pans,  Hamelle. 
Uni  (V.  Hugo),  op.  1,  Paris,  Hamelle. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3521 


Dans  les  ruines  d'une  abbaye  orcheslrée)  (V.  Hugo),  op.  2,  Paris, 

Hamelle. 
Les  Matelots  (Th.  Gautier),  op.  2,  Paris,  Hamelle. 
Seule!  (Th.  Gautier),  op.  3,  Paris,  Hamelle. 
Sérénade  toscane  (Romain  Bussine),  op.  3,  Paris,  Hamelle. 
Chanson  du  pécheur  (Th.  Gautier),  orchestrée,  op.  4,  Paris,  Ha- 

Ladia    Leconte  de  Lisle),  op.  4,  Paris  Hamelle. 

Chant  d'automne  (Ch.  Baudelaire),  op.  5,  Paris,  Hamelle. 

Réee  d'amour  (Victor  Hugo),  op.  5,  Paris,  Hamelle. 

L'Absent  (V.  Hugo),  op.  5,  Paris,  Hamelle. 

Aubade  i  Louis  Pommey),  op.  6,  Paris,  Hamelle. 

Tristesse  (Th.  Gautier),  op.  6,  Paris,  Hamelle. 

Sylvie  (Paul  de  Choudens),  op.  6,  Paris,  Hamelle. 

Après  un  réee   Romain  Bussine),  op.  7,  Paris.  Hamelle. 

Hymne  (Ch.  Baudelaire),  op.  7,  Paris,  Hamelle. 

Barcarolle  (Marc  Monnier),  op.  7,  Paris,  Hamelle. 

Au  bord  de  l'eau  (Sully  Prudhomme),  op.  8.  Paris,  Hamelle. 

La  Rançon  (Ch.  Baudelaire),  op.  8,  Paris,  Hamelle. 

Ici-bas  (Sully  Prudhomme),  op.  S,  Paris,  Hamelle. 

Ces  vingt  premières  mélodies  ont  été  écrites  vers  1865. 

Scll  (Leconte  de  Lisle),  op.  1S,  1SS0  (?),  Paris.  Hamelle. 

Le  Voyageur  (Armand  Silvestre  '■■.op.  IS.  1880  (?),  Paris,  Hamelle 

Automne  (Armand  Silvestre),  op.   18,    18S0    i  ,  Paris,  Hauelle. 

Poème  d'un  jour.  3  mélodies,  op.  21,  1881.  Paris.  Durand. 

Les  Berceaux  (Sully  Prudhomme).  op.  23,  ISS2,  Paris,  Hamelle. 

Solrc  amour  (A.  Silvestre),  op.  23.  1SS2.  Palis.  Hamelle. 

Le  Secret  ,A.  Silveslie  ,  op.  23.  1882.  Paris,  Hamelle. 

Chanson  d'amour  ,A.  Silvestre).  op.  27,   1883.  Paris,  Hamelle. 

La  Fee  au.e  chansons  (A.  silvestre),  op.  27.  1S83,  Paris,  Hamelle 

Aurore  (A.  Silvestre),  op.  39,  1884,  Paris,  Hamelle. 

Fleur  jetée  (A.  Silvestre  ,  op.  39,  1884,  Paris.  Hamelle. 

Le  Pays  des  rêves  ;  A.  Silvestre),  op.  1884,  Paris,  Hamelle. 

Les  Roses  d'is/ialion  Leconte  de  Lisle),  op.  39,  1S84,  orchestrée, 
Paris.  Hamelle. 

Noël  (Wilder),  op.  43,  1SS6\  Paris.  Hamelle. 

Koctune  (Villiers  de  l'Isle-Adam,  op.  13.  1880.  paris,  Hamelle. 

/.csPr«c«/s(Villiersderi9le-Adaiti).op.46. 13*7,  Paris,  Hamelb  . 

Clair  de  luue;  Verlaine),  orchestrée,  op.  46,  1887,  Paris,  Hamelle 

Larmes  Jean  Riehepin  .  op.  r.l,  18S9  (.'),  Paris,  Hamelle. 

Au  cimetière  (Jean  Riehepin  ,  op.  51,  1889  ('?),   Paris.  Hamelle 

Spleen  (Verlaine),  op.  51,  1889  ;'?  .  Paris.  Hamelle. 

La  Rose  (Leconte  de  Lisle  ,  op.  51.  1889  (?',  Paris,  Hamelle. 
Cinq  mélodies  : 

Mandoline  (Verlaine),  op,  58,  1890,  Paris,  Hamelle. 

Eu  sourdine  (Verlaine!,  op.  58,  1890.  Paris,  Hamelle. 

Green  (Verlaine),  op.  58,  1890,  Paris,  Hamelle. 

A  Clymène  (Verlaine),  op.  5S,  1890,  Paris,  Hamelle. 

C  est'  l'écluse  (Verlaine),  up.  58,  1890,  Paris,  Hamelle. 

I.o  Houiie  Chanson    Verlaine),  op.  61.  1891-92,  Paris,  Hamelle. 

Le  Par/ um  impérissable  (Leconte  de  Lisle1,  op.  76,  1S97,  Paris. 
Hamelle. 

Arpège   A.  Samain),  op.  76,  1897,  Paris,  Hamelle. 

Prison  (Verlaine),  op.  83,  1900,  Paris,  Hamelle. 

Soir  (A.  Samain),  op.  S3,  1900.  Paris,  Hamelle. 

Omis  la  forêt  de  septembre  (Catulle  Mendés),  op.  85,  1903,  Paris, 
Hamelle. 

La  /leur  qui  ra  sur  l'eau  (C.  Mendés),  op.  85,  1903,  Paris,  lïamelle. 

Accompagnement  (A.  Samain),  Paris,  Hamelle. 

Le  plus  doux  chemin    A.  Silvestre),  op.  S7,  1904,  Paris,  Hamelle. 

Le  Don  silencieux   Jean  Dominique),  op.  92.  1906,  Paris,  Heugel. 

Chanson  (Henri  de  Régnier  .  op,  94,  1907,  Paris,  Heugel. 

La  Clianson  d'Eté  Charles  van  Lerberghe),  10  mélodies,  op.  95. 
1907-1910,  Paris,  Heugel. 

Enpri<re(StéphanBordèse)  sans  numéro  d'oeuvre,  Paris,  Durand 
orchestrée). 

Le  Ramier  (A.  Silvestre1,  sans  numéro  d'oeuvre,  1901,  Paris,  Ha- 
melle. 

Vocalise,  sans  numéro  d'oeuvre,  Paris,  Leduc  1907. 

DOOS,    CHŒURS    ET    SCÈNES 

Puisque  ici-bas  (V.  Hugo),  duo  pour  2  sopranos,  op.  10,  1870  (?), 
Paris,  Hamelle. 

Tarentelle  (Marc  Monnier),  duo  pour  2  sopranos,  op.  10, 1870  (?), 
Paria,  Hamelle. 

Cantique  de  Jeun  Racine,  chœur  à  i  voix  mixtes,  avec  accompa- 
gnement d'harmonie  et  de  quintette  à  cordes,  op.  11, 
1S73    ' ■    orche-trée),  Paris.  Hamelle. 

Les  Djinns  (V.  Hugo  ,  chœur  à  i  voix  mixtes  avec  accompagne- 
ment d'orchestre,  op.  12,  1875  ('?),  Paris,  Hamelle. 

le  Ruisseau,  chœur  pour  2  voix  de  femmes,  op.  22,  Paris.  Ha- 
melle. 

La  Sais-sauce  de  Venus  Paul  Collin),  scène  mythologique  pour  soli. 
chœurs  et  orchestre,  op.  29.   1882,  Paris,  Hamelle. 

Madrigal  (A.  Silvestre),  quatuor  vocal  avec  accompagnement 
d'orchestre,  op.  35,  1S84,  Paris,  Hamelle. 

Copyright  by  Librairie  Delagrave,  1929. 


Fleurs   d'or  ,A.  Samain),  duo  p- 
1S96  (?),  Paris,  Hamelle 


MUSIQUE   RE 


0  Saluions,   à  I  voix,  op.  47,  1S87  (?),  Paris,  Hamelle. 

Maria,  mater  gratis,  duo,  op.  47,  tss7  (?),  Paris,  Hamelle. 

Messe  de  Requiem,  pour  soli,  chœur  et  orchestre,  op.  18,  |>S7, 
Paris,  Hamelle. 

Ecce  fidelis  servus,  pour  soprano,  ténor  et  baryton,  avec  accom- 
pagnement d'orgue  et  contrebasse,  op.  54,  1890  (?),  Paris 
Hamelle. 

Tautumergo,  pour  solo  et  chœurà  4  voix,  op.  55,  1890  (?),  Pa- 
ris, Hamelle. 

Are  rerum,  duo  pour  2  vqjx  de  femmes,  op.  65,  1891  ■  '  ,  Paris, 
Hamelle. 

Tantum  ergo,  choeur  pour  3  voix  de  femmes  avec  soli,  op.  65, 
1894  (?),  Paris,  Hamelle. 

Salve  Regiaa.  à  1  voix,  op.  97,  1896  (?),  Paris,  Hamelle. 

Aie  Maria,  à  1  voix,  op.  67,  1S95  ('),  Paris.  Hamelle. 

.lie  Maria,  duo,  op.  93,    1006,  Paris,  Heugel. 

Tuiilum  ergo,  pour  soprano  ou  ténor  et  chœur  mixte,  sans  nu- 
méro d'œuvre,  Paris,  Durand. 

Tu  es  Petrus,  pour  baryton,  solo  et  chœur  mixte,  sans  numéro 
d'œuvre,  Paris,  Durand. 

Messe  basse,  pour  3  voix  de  femmes  avec  accompagnement  d'or- 
gue (œuvre  ancienne),  Paris,  Heugel,  1907. 


Sonate,  piano  et  violon,  op.  13.  1876,  Leipzig.  Breilkopf. 

Ier  Quatuor,  en  ut  mineur,  piano  et  cordes,  ..p.  15,  1879,  Paris, 

Hamelle. 
Berceuse,  violon  et  piano,  op.  16,  1880,  Paris,  Hamelle. 
Élégie,  violoncelle  et  piano,  op.  16,  1»S0,  Paris,  Hamelle. 
2'  Quatuor,  en  sol  mineur,  piano  et  cordes,  op.    15,  18S6,  Paris, 

Hamelle. 
Petite  pièce,  violoncelle  et  piano,  op.  19,   1889  (?).  Non  publiée. 
Romance,  violoncelle  et  piano,  op.  6o,  is'.pô  i  '  .   paris,  Hamelle. 
Andaate,  violon  et  piano,  op.  75,  1898,  Pans,  Hamelle. 
Papillon,  violoncelle  et  piano,  ,,p    ::,  isos,  Paris,  Hamelle. 
Sicilienne,  violoncelle  et  piano,  op.  78,  1898,  Paris,  Hamelle. 
Fantaisie.  _  fin  te  et  piano   (concours  du  Conservatoire),  op.   79, 

1898,  Paris,  Hamelle. 
Quintette,  en  ré  mineur,  piano  et  cordes,  op.  89, 1906,  New- York, 

Schirmer. 
Sérénade,  violoncelle  et  piano,  op.  98,  1908,  Paris,  Heugel. 

MUSIQUE    SYMPH0NIQUE 

Concerto,  violon  et  orchestre,  op.  11.  1878.  Non  publié. 

Ballade,  piano  et  orchestre,  op.  19,  1881,  Paris,  Hamelle. 

Suite  d'orchestre,  op.  20,  ts75.  Non  publiée. 

Allegro  sijmphonique,  op.  68,  extrait  de  la  Suite  d'orchestre,  op.  20, 
Paris,  Hamelle. 

Romance,  violon  et  orchestre,  op.  28,  1882,  Paris,  Hamelle. 

Symphonie,  en  ré  mineur,  op.  10,  188  i.  Non  publiée. 

Pavane  pour  orchestre  avec  chœur  ad  libitum,  op.  50,  1SS7,  Pa- 
ris, Hamelle. 

Pelléas  et  Mètisande,  suite  d'orchestre,  op.  80,  1S98,  Paris.  Ha- 


MUSIQUE    DE    SCENE 

Caligula  (Alexandre  Dumas  père!,  op.  52,  Odéon,  8  novembre 
1886,  Paris,  Hamell". 

Shylock  (Edmond  Haraucourt  .  op.  57,  Odéon,  17décembre  1SS9, 
Paris,  Hamelle. 

Le  Voile  du  bonheur  (G.  <;.l.-m.-nceau),  op.  88,  Renaissance,  4  no- 
vembre 1901.  Non  publié. 

MUSIQUE    DRAMATIQUE 

Promelliee,  tragédie  lyrique  (Jean  Lorrain  et  E.-A.  Héroid),  op.  82, 
Béziers,  27  août  1900.  Paris,  Hamelle. 

Pénélope,  poème  lyrique  en  3  actes  René  Fauchois),  Monte- 
Carlo,  4  mars  1913.  Paris.  Heugel. 

Bibliographie. 

Camille  Bellaigue.  —  Eludes  musicales,  3r  série,  Paris,  Dela- 
grave, 1907. 

Camille  Benoit.  —  Le  Requiem  de  Gabriel  Fanré,  Mayence-Bruxel- 
les,  ScholtetC",  1888. 

Charles  Bordes.  —  Gabriel  Fauré,  Paris,  La  Grande  Encyclo- 
pédie. 

Alfred  Bruneau.  —  La  Musique  française,  Paris,  Fasquelle,  1901. 

Ph.  Fauré-Fremiet.  —  Gabriel  Faure.  1929. 

Arthur  Hervev.  —  Musler.  ,■■  French  Slusic,  London,  1S94. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Hugues  Imuert 
1888. 


Profils    de   musiciens.    Paris,    Kischbnrher, 


Vincent  ii'Inuv.  —  Cours  de  composition  musical,-,  2"  livre,  Paris, 

Durand,  1909. 

Octave  Skhiï.  -  ■  Musiciens  (mutais  d'aujourd'hui.  Paris,  Mercure 

de  France,  1911. 

!..  \.;n.rr\NT.  —  Les  Mélodies  île  Gabriel,  Faure.  Courrier  Musi- 
cal, t"  février  1903. 

A.  Bri'Nkai'.  —  Lu  Direction  du  Cnnxerratoirc.  Le  Malin,  13  juin 
1905. 

O  Carrah».  —  La  Musique  pure  dans  I  Ecole  (rnnçaise  contempo- 
raine. S.  i.  M.,  août-septembre  1910. 

J  Comruuku  —  M.  l'unie  et  lu  Direction  ilu  Conserrulnire.  I.a 
Revue  Musicale,  1«  juillet  1905. 

Taul  DOKAS.  —  l'romclhce.  SI.  G.  Faurè.  Revue  hebdomadaire, 
octobre  1900. 

Tristan  Ki.isc.sor.  -  Les  Musiciens  elles  Pactes  contemporains. 
Mercure  de  France,  novembre  1900. 


Paul    La 


La    lionne   Chanson.   Courrier    Musical, 


31  mars  et  7  avril  1900. 
Pierre  Lalo.  _  Promellicc.  Le  Temps,  5  octobre  1900  et  10  de- 

cembre  1907.  . 

--   /,-  \„urcuu  Directeur  du  Conserrntoirc.  Le  Temps,  20  juin  190o. 

—  Les  Réformes  ilu  Conseriatoire.  Le  Temps,  22  août  et  17  octo- 

bre 1905,  27  avril  1906. 
_  Le  Requiem, le  M.  hume.  Le  Temps,  27  janvier  1906. 
_  ic  Quintette  noureau  de  il.  Faurè.  Le  Temps,  13  juillet  1906. 

—  1/ Ancien  et  le  Soureuii  Cnserraloire.  Le  Temps,  9  août  1910. 

—  La  Chanson  d'Ere.  Le  Temps,  31  août  1910. 

Tristan  Leci-èrb.   -   Les  Musiciens  de  Verlaine.  Revue  Bleue, 

11  novembre  1903. 
Kené  Maizeroy.  —  Promclhée  aux  Fêles  de  Bè:iers.  Le  Théâtre, 

octobre,  I,  1900. 
Ch.  Malherbe.   -   Gabriel  Faurè.  S.   I.   M.,   août- septembre 

1910. 

C.  Macclair.  —  Le  Liai  (rançon  contemporain .  Musica,  novembre 

1908. 
O.  Mads.  —  Gabriel  Fiiurc.  L'Art  moderne,  25  mars  1906. 
Jacques  Mkraly.  —  fi.  Faurè  et  la  Bonne  Chanson.  La  Revue 

Musicale,  15  novembre  1903. 
Mosica.  —  Numéro  consacré  à  Fauré,  février  1909. 

D.  Ch.  Plaschet.  —  Kotes  sur  G.  Faurè.  Le  Censeur,  4  janvier 

1908. 

—  Berne  musicale.  N»  consacré  a  Gabriel  Fiiurè.  1"  octobre  1922. 
J.  Saint-Jean.  —  SI.  Gabriel  Fauré.  La  Nouvelle  Revue,  lcrjuil- 

letlOOô. 

—  La  Musique  de  piano  de  G.  Fauré.  La  Nouvelle  Revue,  15  jan- 

vier 1910. 

C.  Saint-Saens.  —  Une  Simule.  Le  Journal  de  musique,  7  avril 
1877. 

G.  Servierbs.  —  La  Donne  Chanson.  Le  C.uide  Musical,  23  dé- 
cembre 1894. 

Les  Mélodies  récentes  de  G.  Fauré.  Le  Guide  Musical,  23  jan- 


Faul  de  Stœcklin. 
1Ç 


Gabriel   Faurè.   C.uide  Musical,   1"  av 


Julien  Tiersot.  —  Gabriel  Faurè.  Bulletin  mensuel  de  la  Société 
Internationale  de  musique,  novembre  1905. 

Julien  Torchet.  —  G«tnW  Faure  directeur  du  Conseriatoire  de  Pa- 
ris   Le  Guide  Musical,  25  juin  et  2  juillet  1905. 

Fr    Vf.rhelot.  -  Le  Requiem  de  M.  Fauré.  Uurendal,  février  190 1 . 

E.  Voillermoz.  —G.  Faure.  Courrier  Musical,  lorjuin  1905. 

—  G.  Fauré.  Revue  illustrée,  1"  juillet  1905. 

Gossec. 

François-Joseph  Gossé,  dit  Gossec,  est  né  à  Ver- 
gnies,  dans  les  environs  de  Maubeuge,  le  17  janvier 
1734.  Ses  parents  étaient  très  pauvres.  Il  fut  d'abord 
gardeur  de  vaches.  Ou  dil  qu'il  avait  fabriqué  une 
sorte  de  violon  avec  un  sabot  ;  il  chaulait  en  s'ac- 
compagnant  de    ce  grossier  instrument.  Un  oncle 


ayant  remarque  ses  a| 


itiludes  musicales,  le  fait  en- 


voyer à  l'école  et  au  lutrin.  Le  jeune  garçon  passe  de 
là  au  chapitre  de  Sainte-Aldégonde  de  Maubeuge, 
puis  à  la  cathédrale  d'Anvers,  où  il  devient  premier 
chantre,  où  il  apprend  le  clavecin  et  le  violon  et 
s'essaye  dans  la  composition. 


A  dix  sept-ans,  Gossec, 


ià  marié  avec  Marie- 


F.Iisabeth  Georges1,  arrivait  à  Paris  (1751).  Il   eut  la 
bonne  fortune  d'entrer,  grâce  à  la  recommandation 


1    Sur  celte  question  contestée  du  ma 
»oir  Dofrane,  Gossec,  19-7,  p.  18  et  sui 


de  Rameau,  comme  cbef  d'orchestre  dans  la  maison 
du  fermier  général  Le  Miche  de  la  Pouplinière. 

C'est  alors  que  notre  compositeur  crut  bon  de 
modilier  son  nom  en  lui  donnant  une  apparence  ita- 
lienne ou  allemande;  il  se  faisait  appeler  tantôt 
Gossei,  tantôt  Gossec2. 

Il  écrivait  déjà  force  musique  instrumentale  :  duos, 
trios,  quatuors,  symphonies.  Il  est  possible  que 
quelques-uns  de  ses  ouvrages  aient  été  exécutés  au 
Concert  spirituel  dès  1753.  Son  nom  est  mentionné 
pour  la  première  fois  par  le  Mercure  de  France,  le 
I."  avril  1757. 

La  Messe  des  morts,  qu'il  fit  entendre  aux  Jacobins  de 
la  rue  Saint-Jacques  en  mai  J760,  attira  l'attention 
sur  son  nom,  définitivement  tiré  de  l'obscurité.  Cette 
Messe  des  morts  se  jouera  continuellement  aux  céré- 
monies funèbres  pendant  toute  la  fin  du  xvm"  siècle 
et  jusqu'en  1814,  où  on  l'entendit  pour  la  dernière 
lois  à  l'église  Saint-Moch  pour  l'anniversaire  de  la 
mort  de  Grétry. 

A  la  mort  de  la  Pouplinière,  Gossec  entra  chez  le 
prince  de  Conti  (1762).  Puis  il  devint,  entre  1766  et 
1769,  intendant  de  la  musique  du  prince  de  Condé. 

Cependant  Gossec  cherchait  d'autres  succès  que 
ceux  du  concert  ou  de  l'église.  II  débuta  à  la  Comé- 
die Italienne,  en  1765,  avec  de  petits  opéras-comi- 
ques, dont  aucun  n'obtint  une  fortune  très  brillante. 
Gossec  renonce  momentanément  à  continuer  ses 
essais  dans  un  genre  où  il  n'arrivait  pas  à  réussir. 

En  1769  s'ouvre,  à  l'hôtel  de  Soubise,  le  fameux 
Concert  des  amateurs.  La  direction  artistique  en  est 
confiée  à  Gossec.  Il  y  réunit  un  orchestre  de  premier 
ordre,  pou  r  lequel  il  composera  «  ses  grandes  sympho- 
nies avec  l'emploi  de  tous  les  instruments  à  vent  ». 

En  février  1773,  Berton  et  Dauverg.ne  abandonnent 
la  gérance  du  Concert  spirituel.  Gossec  la  reprend 
avec  les  violonistes  Gavimès  et  Ledcc  aine,  et  immé- 
diatement l'entreprise  redevient  prospère. 

Le  20  mars  1774,  il  fait  exécuter  celle  de  ses  sym- 
phonies qui  restera  la  plus  connue,  la  Citasse.  Le 
24  décembre  de  la  même  année,  c'est  la  première 
audition  de  son  oratorio  La  Nativité,  qui  fut  repris 
les  années  suivantes  à  chaque  fête  de  Noël, 

En  février  1777,  le  Concert  spirituel  changeait 
encore  une  fois  de  direction.  Le  chanteur  Legros  suc- 
cédait à  Gossec,  Gavimès  et  Leduc. 

Le  7  avril  1777,  une  symphonie  de  Gossec  obtenait 
un  tel  succès  qu'elle  était  bissée  par  l'audiloire,  fait 
peut-être  sans  précédent  dans  l'histoire  des  concerts 
français. 

Après  l'Arche  d'alliance,  en  mars  1782,  Gossec  fut 
par  deux  fois  acclamé. 

11  possédait  dès  lors  en  France  la  première  place 
parmi  les  compositeurs  de  musique  instrumentale. 

Le  9  déeembre  1782,  parait  son  fameux  O  Salutaris 
à  3  voix,  qui  devait  se  transformer,  sous  la  Mévolu- 
tion,  en  un  Hymne  à  la  Liberté,  et  dont  un  arrange- 
ment pour  3  cors  fut  souvent  exécuté  sous  l'Empire 
dans  les  exercices  du  Conservatoire. 

Des  Chœurs  d'Athalie  écrits  pour  la  tragédie  de 
Itacine  fuient  chantés  à  la  cour,  à  Fontainebleau, 
le  3  novembre  1785,  puis  au  théâtre  de  la  Nation  à 
partir  du  17  juin  1791.  Un  fragment  de  cet  ouvrage, 
remanié  en  1795  et  adapté  à  des  paroles  de  M.-J.  Ché- 
llier,  deviendra  le  Serinent  républicain. 

Cependant  Gossec  était  revenu  au   théâtre,  où  il 

véritable  non.  de 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3523 


aurait  bien  voulu  recueillir  quelques  succès  égaux  à 
ceux  de  ses  symphonies.  Une  tragédie  lyrique,  fiabi- 
nus  (22  février  1774),  ne  réussit  que  médiocrement. 

En  avril  1773,  Gossec  fait  partie  du  personnel  de 
l'Opéra  comme  «  maître  de  musique  pour  le  service 
du  théâtre  ». 

En  avril  1778,  il  passe  «  maître  de  musique  des 
chœurs  ». 

On  apprécie  beaucoup  son  talent,  mais  quelques 
essais  de  musique  dramatique  qu'il  risque  encore  ne 
sont  guère  heureux. 

On  le  charge  volontiers  de  besognes  de  second 
ordre,  comme,  par  exemple,  d'ajouter  à  VIphigênie 
en  Tauride  de  Gluck  la  musique  pour  un  divertisse- 
ment de  Noverre  :  les  Scythes  enchaînés. 

En  avril  1780,  nouvel  avancement  :  Gossec  devient 
«  maître  de  musique  des  chœurs  »  sans  augmentation 
de  traitement,  mais  avec  part  dans  les  bénéfices. 
En  avril  1781,  il  prend  le  titre  de  «  sous-directeur  du 
chant  »,  et  en  avril  1782,  il  figure  en  tête  de  la  liste 
du  personnel  comme  «  compositeur  ». 

Arrive  la  Révolution.  Gossec  en  adopte  les  princi- 
pes avec  ardeur.  Il  devient  In  plus  fécond  collabora- 
teur des  fêtes  nationales.  A  lui  seul,  il  fournit  33  de 
ces  grandes  compositions  populaires  et  patriotiques 
que  le  gouvernement  réclamait  alors  des  musiciens. 
On  lui  donne  le  surnom  de  «  Tyrtée  de  la  Révolu- 
tion ».  Plus  tard  on  dira  :  «  La  Révolution  peut  être 
comparée  à  un  grand  drame  lyrique,  paroles  de 
M.-J.  Chénier,  musique  de  Gossec,  décoration  de 
David'.» 

Le  1er  vendémiaire  an  V  (22  septembre  1796), 
dans  une  proclamation  laite  au  Champ  de  Mars 
pour  l'anniversaire  de  la  fondation  de  la  République, 
on  cite  «  les  noms  des  poètes  et  des  compositeurs 
qui  ont  contribué  à  l'ornement  des  fêtes  nationales 
depuis  la  conquête  de  la  liberté  et  auxquels  la  nation 
adresse  un  tribut  de  reconnaissance...  Au  premier 
rang  des  compositeurs  républicains,  la  nation  place 
et  proclame  :  le  citoyen  Gossec,  l'un  des  cinq  inspec- 
teurs du  Conservatoire  de  musique,  connu  par  vingt- 
trois  morceaux  de  musique,  et  qui  ne  laisse  guère 
échapper  une  seule  fête  civique  sans  offrir  son  tribut 
de  talent  à  la  patrie.  » 

Gossec,  qui  avait  été  directeur  de  ÏEcolc  Royale  de 
chant  et  de  déclamation  sous  l'ancien  régime2,  était 
devenu  d'abord  «  lieutenant  maître  de  musique  » 
des  musiciens  de  la  garde  nationale  réunis  par  S.\n- 
rette,  puis  le  principal  organisateur  de  l'enseigne- 
ment de  la  niHsique  à  V Institut  national  de  musique, 
jusqu'à  ce  que  la  loi  du  3  août  1793,  ayant  constitué 
définitivement  le  Conservatoire  national  de  musique, 
sous  la  direction  de  Sarrette,  attribue  à  Gossec  les 
fonctions  d'inspecteur  et  de  professeur  de  composi- 
tion avec  un  appartement  dans  les  locaux  du  fau- 
bourg Poissonnière  et  des  appointements  qui  varie- 
ront par  la  suite  sans  jamais  dépasser  3.000  francs. 

Gossec  dépensa  dès  lors  la  plus  grande  partie  de 
son  activité  dans  le  professorat  et  dans  l'étude  des 
questions  pédagogiques. 

Il  prit  sa  retraite  le  1er  janvier  1816,  à  81  ans.  Il 
était  alors  le  doyen  des  musiciens  et  des  composi- 
teurs. Il  n'a  plus  d'autre  occupation  que  de  suivre 
les  représentations  de  l'Opéra-Comique  et  les  séan- 
ces de  l'Institut  (il  en  faisait  partie  depuis  la  fonda- 

i.  France  musicale,  1841,  p.  14.5. 

2.  Celle  école,  instituée  par  un  arrêt  du  Conseil  d'Etat  du  Roy  du 
3  janvier  1784,  ounit  ses  portes  le  1"  avril  suivant.  Cf.  Dcfhahe,  op. 


tion,  12  décembre  1703,  et  il  avait  été  nommé  che- 
valier de  la  Légion  d'honneur  en  1804).  A  partir  de 
1823,  ses  facultés  s'affaiblirent  considérablement. 
Il  s'éteignit  doucement  à  Passy,  le  16  février  1829,  à 
l'âge  de  96  ans. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  GOSSEC 


MDM'_>rr 


i  lll:.VTBK 


nquo,  1  acle. 


Le  Tonnelier,  op.'-i  ;,  - 
Le  Faux  Lord. 
Les  Pêcheurs,  opéra-comique,  1  acte. 
Toiuou  cl  Toinetlc,  opéra-comique,  2  actes. 
Le  Doulite  Déijiiisement,  opéra-comique,  2  acles. 
llijlns  el  Sylvie,  musique  de  scène. 
Saliiuus,  tragédie  lyrique,  4  actes. 
Berlhe,  opéra,  5  actes. 
Alexis  et  Daphnê,  fragments. 
Philèmnn  el  Bauca,  fragments. 
La  Fêle  du  village,  intermède,  1  acte. 
Les  Scythes  enchaînes,  ballet. 
Myr;a,  ballet,  3  actes. 
Thésée,  tragédie  lyrique,  4  actes. 
Electre,  chœurs. 
Alhalie,  chœurs. 

L'Offrande  it  la  Liberté,  scène  patriotique. 
Le  Triomphe  de  la  République  m  le  Camp  de  Grand  Pré,  di- 
vertissement lyrique,  1  acte. 
La  Nouvelle  au  camp  ou  le  Cri  de  vengeance,  scène  lyrique. 
Hitocris,  opéra,  3  acles. 
Callislo,  ballet,  3  actes. 

MOSIO.CE   IN'STBXMENTALE 


1753.  Sir  Sonates  pour  deux  violons  et  basse,  op.  1. 

1755.  Ssx  Duos  pour  deux  fliib's  ou  deux  violons,  op.  2. 

1756.  Six  Symphonies  à  4  parties,  op.  3. 
1759.  Sci  Sinfonie  a  piu  stromenti,  op.  i. 
17*31 .  S?«  Sinfonie  à  piu  stromenti,  op.  5. 
1763.  Six  Symphonies,  op.  6. 

1765.  Six  Duos  pour  deux  violons,  op.  7.  Trois  Grandes  , 

nies,  op.  8. 

1766.  Six  Trios  pour  deux  violons  el  hautbois  avec  cor  ad 


17'.'.'. 


Su  Symphonies,  a  grand  orchestre,  op.  12. 

Pures  pour2  clarinettes,  2  cors  el  2  bassons. 

Six  Quatuors  pour  flûte  et  violons,  op.  14. 

Six  Quatuors  pour  2  violons,  alto  et  basse,  op.  15. 

l'eue  Symphonies. 

Trois  Grandes  Symphonies. 

Sinfouia  da  caccia. 

Sinfonia  périodique  u  piu  struinenli  (douteux  ;  nom  de  Go 

ajouté  à  la  plume). 
Snmphouie  concertante,  à  plusieurs  instruments. 
Symphonie  à  n  parties. 


Messe  des  Morts. 

liies  irx.  " 

Cariste  redemplor. 

La  Nativité,  oratorio. 

Te  Deunt. 

L'Arche  d'alliance,  oratorio. 


iidiat. 
Domine  salvum.  —  0  Salutaris. 

Dernière  Messe  des  niants. 

Terrihile  esl  (3  voix  et  orchestre). 

Jubilait-  Deo, 

Du  il  Dominas. 

Kyrie  et  Gloria. 

Quam  dilecla. 

Eleniia  passer. 

Iienti  qui  habitant. 

Dominas  a  devins. 

Suite  de  Noël. 


An  VII.  Odes  d'Anacrëon  (en  collaboration  avec  Giebobini,  Li 

soeor  et  Mehdl). 
S.  D.  Invocation  il  Mahomet,  scène. 

Le  Bouquet,  scène  pour  une  fête  à  laquelle  assistait  le  ri 

(vers  1785). 
Ouverture  de  l'erriu  cl  Perretle. 
1X11.  Arrangement  sur  la  chanson  Charmante Gahrielle. 
S.  D.  Divertissement  instrumental. 
Chagvin  d'amour,  romance. 


3524 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


.■ampoiilious  palrioliquci  \  .  Constant  imurre,  Musi- 
que des  l'êtes  et  cérémonies  île  la  Heenliilioii)  ;  S»i>»i''(»'«r> 
militaires  (17S9).  —  Murriif  lugubre  (  171)0).  —  CAnBi  du 
i;  ;mi7M  (171)2).  —  Ihjmne  i  Voltaire  (1791).  —  Boude 
nationale,  —  Hymne  à  l'être  suprême  (  1791).  —  2  orches- 
lr. liions  de  la  Marseillaise. 

1701  .    i  raile  île  l'harmonie  à  l'usage  îles  écoles  nationales  de  Paris. 

Au  \  111.  Principes  clcmeiiluircs  de  musique,  arrêtés  par  les  membres 
ila  Conservatoire  de  miisii/ne. 

Happons  a  l'Institut  (V.  les  tables  du  Moniteur). 


Bibliographie. 


is;  i 


Ad.  Adam.  —  Derniers Snurcnirs  il  un  musicien,  Pari 

Bachaomont.  —  Mémoires. 

Biographie  national!  de  Belgique,  arlicle  Gossec,  Bruxelles,  1SS4- 

1885. 
Boysse.  —  Journal  de  la  Ferlé  (1SS7). 
Michel  Brknet.  —  La  Messe  îles  Morts.  Journal  Musical,  août 

1899. 

—  Les  Concerts  eu  France  sous  l'ancien  Régime, 

—  Biitleliude  l'Académie  royale  île  Belgique. 

Choron  et  Fayolle.  —  Dictionnaire  historique  des  musiciens. 

Contant  d'Orville.  —  Histoire  de  l'opéra  bouffon.  Amsterdam, 
1708. 

Desboolmiers.  —  Histoire  aueciotiqut  ci  raisonnée  du  ThélUre Ita- 
lien, Paris,  1769. 

Louis  Dufrane.  —  Gnssec,  Paris,  1927. 

Escodier.  —  Les  Musiciens  du  temps  de  l'Empire. 

Fétis.  —  Biographie  unirerselle  des  Musiciens. 

A.  Poogin.  —  Supplément  ii  lu  Biographie  do  Fetis. 

GRHBorRE.  —  Les  Gloires  de  l'opéra,  Bruxelles,  1S78. 

Gmmm.  —  Correspondance  littéraire. 

Frédéric  IIei.louin.  —  Gossec  et  la  musique  française  à  la  fin  du 
dix-huitième  siècle,  Paris,  A.  Charles,  1903. 

Journal  de  Paris. 

La  Borde.  —  Essais  sur  la  musique. 

Mercure  de  France,  passim. 

D'dKU.NY.  —  Annules  du  Théâtre  Italien  (1788). 

Frères  Parfaict.  —  Histoire  de  l'opéra  hvujfon  (1768). 

Constant  Pierre.  —  Musique  des  fêtes  et  cérémonies  delà  Révolu- 
tion, Paris.  —  L'École  de  chant  de  l'Opéra,  Paris,  1896.  — 
Le  Magasin  de  musique  à  l'usage  des  (clés  nationales,  Paris, 


•i.  Ti 


:  de  la  Bêrolulion,  Paris,  Hachette. 


Gounod 


Charles-François  Gounod  naquit  à  Paris  le  17juin 
1818.  Son  grand-père  était  «  fournisseur  du  Roi  »; 
son  père,  second  prix  de  Rome  en  1783,  était  dessina- 
teur. Malgré  son  talent  de  graveur  et  de  lithographe, 
il  ne  lit  pas  fortune;  et  lorsqu'il  mourut  en  1823,  sa 
veuve  dut  donner  des  leçons  de  piano  pour  élever  ses 
deux  fils,  Charles,  le  futur  musicien,  et  Urbain,  qui  fut 
architecte. 

Gounod  a  noté  lui-même  les  impressions  artistiques 
de  son  enfance  : 

«  Six  ans  et  demi;  premières  sensations  musicales, 
le  Freischùtz  à  l'Odéon. 

«  Douze  ans  et  demi  :  Otello  aux  Italiens,  la  Mali- 
bran. 
«  Treize  ans  et  demi  :  Don  Giovanni.  » 
Déjà  le  jeune  Gounod  se  sentait  pour  la  musique 
une  irrésistible  vocation;  mais,  fort  respectueux  de 
l'autorité  de  sa  mère,  il  lui  adressa  une  longue  lettre 
dans  laquelle  il  la  suppliait  de  le  laisser  suivre  sa 
vocation.  Celle-ci,  avant  de  prendre  une  décision, 
consulta  le  proviseur  du  lycée  Saint-Louis,  où  son 
fils  faisait  alors  ses  études.  Très  large  d'idées,  grand 
amateur  de  musique,  le  proviseur  imposa  à  l'enfant 
une  petite  épreuve  :  il  lui  demanda  de  mettre  en  mu- 
sique les  paroles  de  la  célèbre  romance  de  Méhtl  : 

«  A  peine  au  sortir  de  l'enfance Etonné  de  la 

façon  dont  le  jeune  Gounod  s'était  tiré  d'affaire,  il  lui 
dit,  en  le  serrant  dans  ses  bras  :  «  Va,  mon  enfant, 
et  fais  de  la  musique.  »  Tout  en  prenant  des  leçons 
de  Reicha,  Gounod  n'en  continua  pas  moins  ses 
études  classiques,  qu'il  poursuivit  jusqu'à  son  bacca- 
lauréat. 


Il  entra  alors  au  Conservatoire,  dans  la  classe- 
d'HALÉvv,  pour  le  contrepoint  et  la  fugue,  puis  suc- 
cessivement, pour  la  composition  lyrique,  dans  celles 
de  Berton  et  de  Lesueur.  En  1839,  à  21  ans,  il  obte- 
nait le  grand  prix  de  Rome,  et  avant  son  départ  pour 
l'Italie,  il  dirigeait,  dans  l'église  Saint-Eustache,  une 
messe  à  grand  orchestre  de  sa  composition. 

Le  séjour  de  Gounod  en  Italie,  où  il  composa  le 
Sot?',  le  Vallon,  une  il/esse  à  trois  voix  (1841)  et  un 
Requiem  (1842),  est  important  dans  la  carrière  du 
musicien,  au  point  de  vue  artistique  comme  au  point 
de  vue  religieux.  C'est  alors  qu'il  étudia  les  œu- 
vres de  Palestrina  et  que  Fanny  Hensel,  la  sœur  de 
Mendelssohn,  lui  lit  connaître,  pendant  l'hiver  et  le 
printemps  de  1840,  les  maîtres  allemands,  et  en  par- 
ticulier Bach  et  Beethoven  (ses  sonates  et  Fidelio). 
D'autre  part,  sous  l'influence  d'un  de  ses  anciens 
condisciples,  Charles  Gay,  qui  faisait  à  Rome  ses 
études  de  théologie  et  plus  tard  entra  dans  les  ordres, 
sous  l'impression  de  l'éloquence  du  Père  Lacordaire, 
se  développaient  et  se  précisaient  les  inclinations  re- 
ligieuses que  Gounod  avait  manifestées  dès  l'enfance  ; 
il  songeait  même  alors  à  se  faire  prêtre,  et  il  aurait 
abandonné  la  musique,  si  sa  mère,  comprenant  qu'il 
faisait  fausse  route,  ne  l'avait  délourné  de  son  projet. 
Le  voyage  entrepris  par  Gounod,  après  son  séjour 
à  Rome,  à  travers  l'Autriche  et  l'Allemagne  (Vienne,. 
Prague,  Dresde,  Berlin,  Leipzig)  lui  permit  d'entrer 
en  relation  avec  Mendelssohn.  Les  œuvres  de  l'auteur 
des  Romances  sans  parole  l'enthousiasmèrent,  etc'est 
par  elles  que  s'établit  chez  lui  le  contact  entre  la 
musique  française  et  la  musique  allemande. 

A  son  retour  à  Paris,  malgré  ses  fonctions  de- 
maitre  de  chapelle  de  l'église  des  Missions,  Gounod 
délaisse  la  musique  pour  se  consacrer  tout  entier 
aux  études  théologiques.  Il  signe  ses  lettres  :  l'abbé 
Gounod;  il  porte  l'habit  ecclésiastique;  mais  bientôt 
la  musique  lui  manque;  il  s'aperçoit  que  son  art  est 
devenu  indispensable  à  sa  vie;  et  en  1851,  il  débute- 
au  théâtre  avec  l'opéra  de  Sapho,  que  ne  peuvent 
sauver  ni  le  talent  de  Mme  Viardot,  la  principale 
interprète,  ni  les  excellentes  pages  que  contient  la 
partition.  —  Le  public  accueille  avec  la  même  froi- 
deur Ulysse  (Théâtre-Français,  1852),  et  la  Nonne  san- 
glante (Opéra,  1854),  dont  l'échec  semble  plus  expli- 
cable. Mais  ce  que  n'avaient  pu  de  longues  partitions,, 
une  courte  page  le  réalisa;  la  Méditation  sur  le  pre- 
mier prélude  de  Bach  établit  définitivement  auprès 
du  public  la  réputation  de  Gounod,  qui,  depuis  1852, 
dirigeait  l'Orphéon  (association  des  sociétés  chorales 
et  des  écoles  de  chant  de  Paris). 

Le  public  de  l'Opéra-Comique  trouva  sans  gaieté  la 
musique  du  Médecin  malgré  lui  (13  janvier  1858).  Un 
an  plus  tard  (19  mars  1359),  le  Théâtre  Lyrique  don- 
nait la  première  de  Faust,  qui  marque  dans  l'histoire 
de  l'opéra  fiançais  une  date  importante.  Gounod  ve- 
nait de  créer  une  forme  nouvelle,  qui  pendant  long- 
tempsjrestera  celle  de  tout  notre  théâtre  musical; 
moins  pompeuse,  moins  déclamatoire  que  les  opéras 
de  l'époque;  familière,  intime  sans  avoir  le  laisser 
aller  des  opéras-comiques,  pénétrée  de  poésie,  fai- 
sant à  la  mélodie  une  large  place  sans  lui  sacrifier 
pourtant  l'harmonie,  la  musique  de  Faust  réalisait 
pleinemenl  l'idéal  français.  Et  cependant,  l'œuvre, 
a-t-on  dit,  n'aurait  pas  été  comprise  des  premiers 
auditeurs;  une  telle  opinion  semble  au  moins  fort 
exagérée  :  le  chiffre  des  recettes  prouve  suffisamment 
le  succès  d'une  œuvre  dont  la  popularité  devail  s'é- 
tendre non  seulement  en  France,  mais  dans  le  monde 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3525 


•entier.  Faust,  d'ailleurs,  reste  unique  dans  l'œuvre  de 
Gounod  :  aucune  de  ses  autres  partitions  (Philémon 
etBaucis,  1860;  la  Reine  de  Saba,  1862;  Mireille,  1864; 
la  Colombe,  1866;  Roméo  et  Juliette,  1867)  ne  peut  lui 
être  comparée. 

Après  Roméo,  dont  le  succès  ne  se  maintint  pas 
avec  la  continuité  de  celui  de  Faust,  et  cela  peut- 
être  en  raison  de  la  hâte  avec  laquelle  l'opéra  avait 
été  improvisé,  Gounod,  de  nouveau,  se  sent  attiré  par 
la  musique  religieuse.  Il  part  pour  Home  en  décem- 
bre 1868,  se  proposant  d'y  composer  un  oratorio, 
Sainte  Cécile;  mais,  dès  janvier  1869,  il  abandonne 
l'œuvre  commencée  et  entreprend  d'écrire  le  poème 
•et  la  musique  de  Rédemption,  Lravail  énorme  qui 
•devait  l'occuper  pendant  plus  de  douze  ans.  Distrait 
de  sa  tâche  par  les  enchantements  de  Home,  où  il 
rencontre  Liszt,  à  son  retour  à  Paris,  il  se  remet  à 
l'œuvre.  La  guerre  franco-allemande  l'interrompt. 
Le  lo  septembre  1870,  fuyant  l'invasion,  Gounod 
quitte  la  France  et  se  réfugie  en  Angleterre.  Les  trois 
ans  qu'il  y  passe,  séparé  des  siens,  sont  les  plus 
■tristes  de  sa  carrière.  Il  se  lie  avec  une  médiocre  can- 
tatrice, Mme  Weldon,  qui  cherche  à  exploiter  commer- 
cialement son  génie,  ses  œuvres,  sa  gloire  même. 
Enfin,  en  1874,  ses  amis  parviennent  à  l'arracher  à 
cette  influence  funeste  et  le  ramènent  en  France. 

Il  n'y  retrouve  la  faveur  du  public  ni  avec  Cinq- 
Mars  (Opéra-Comique,  1877),  ni  avec  Polyeacte  (Opéra, 
1878),  ni  avec  le  Tribut  de  Zamora  (Opéra,  1881),  et 
revient  de  nouveau  à  la  musique  religieuse;  nul  ne 
pourrait  contester  la  sincérité  de  la  foi  du  musicien 
dans  d<'S  œuvres  comme  Rédemption  (1882),  comme 
Mors  et  Vita  (188o);  mais  on  serait  en  droit  d'y  re- 
gretter quelque  fadeur,  exagération  fâcheuse  de  la 
douceur,  dans  certaines  pages  de  ces  partitions. 

La  carrière  artistique  de  Gounod  était  terminée; 
peut-être  s'était-il  rendu  compte  du  danger  de  la 
voie  dans  laquelle  il  avait  engagé  la  musique  reli- 
gieuse; tel  semble  du  moins  le  sens  de  la  lettre  qu'il 
adressait  à  Charles  Bordes  en  1892  :  «  Il  est  temps 
que  le  drapeau  liturgique  remplace  dans  nos  églises 
celui  de  la  cantilène  profane,  et  que  la  Fresque  musi- 
cale proscrive  toutes  les  guirlandes  de  la  romance  et 
toutes  les  sucreries  de  piété  qui  ont  trop  longtemps 
gâté  nos  estomacs.  »  C'était  presque  condamner 
une  partie  de  son  œuvre,  c'était  surtout  comprendre 
l'orientation  nouvelle  que  les  Chanteurs  de  Saint- 
Gervais  allaient  donner  à  la  musique  religieuse,  et 
la  restauration  liturgique  que  préparait  Dom  Potier. 
Cependant,  il  serait  injuste  de  méconnaître  l'in- 
fluence énorme  exercée  par  Gounod  sur  la  musique 
contemporaine;  un  César  Franck,  un  Henri  Dui'arc, 
un  Bizet  et  un  Massenet  doivent  beaucoup  à  celui 
que  M.  Camille  Bellaigue  considère  comme  digne 
«  d'être  nommé,  non  pas  à  côté,  mais  à  propos  de 
Mozart  ;>. 

Le  18  octobre  1893,  Gounod  mourait,  dans  sa  pro- 
priété de  Montretout,  d'une  congestion  qui  le  frappa 
pendant  qu'il  jouait  du  piano. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  GOUNOD 


Sapho,  opéra  en  trois  actes,  16  avril  1851. 
Ulysse,  musique  de  scène  et  chœur,  18  juin  1852. 
La  Nonne  sanglante,  opéra  en  cinq  acte,  18  octobre  1854. 
Le  Bourgeois  gentilhomme,  cérémonie  et  divertissement,  15  jan- 
vier 1857. 
Le  Médecin  maigre  lui,  opéra-comique  en  ::  arp's,  15  janvier  1S5S. 
Fin^l.  opéra  dialogué  en  cinq  actes,  19  mars  1859. 
Philémon  ei  Rancis,  opéra  en  trois  actes,  18  février  1860. 


La  Colnmlie,  opéra-comique  en  un  acte,  3  août  1860. 

La  Reine  de  Salin,  opéra  en  quatre  actes,  29  février  1862. 

Mireille,  opéra  dialogué  en  cinq  actes,  19  mars  1864. 

Roméo  et  Juliette,  opéra  en  cinq  actes,  27  avril  1S67. 

Les  deux  reines  de  France,  musique  île  scène  et  choeurs,  27  no- 
vembre 1S72. 

Jeanne  d'Arc,  musique  de  scène,  danses  et  chœurs,  8  novembre 
1873. 

Cinq-Mars,  opéra  dialogué  en  5  actes,  5  avril  1877. 

Polyeuete,  opéra  en  cinq  actes,  7  octobre  1878. 

Le  Trilnit  de  Zamora.  opéra  en  cinq  actes,  1"  avril  1881. 

Les  Drames  sacres,  drame  lyrique  en  trois  actes,  17  mars  1S93. 

Ivan  le  Terrible,  opéra  non  terminé  et  détruit  (1S57). 

Georges  liaudia.  opéra-comique  inédit. 

Maître  Pierre,  opéra  inachevé. 


Messes. 

.  Messe  à  trois  voix,  chœur  et  orchestre. 

.  Messe  de  Requiem,  à  plusieurs  voix  sans  accompagnement. 

.  Messe   à    quatre  voix   d'hommes    sans    accompagnement 
(messe  des  sociétés  chorales). 

.  Messe  à  trois  voix  d'homme  sans  accompagnement  (messe 
des  orphéonistes). 

.  Messe  solennelle  de  Saiule-Cccilc.  chœurs  et  orchestre. 

.  Deuxième  Messe  solennelle,  chœur  et  orchestre. 

.  Messe  des  Anges  garliens,  quatre  voix  et  orgue. 

-73.  Messe  trêve  pu-  les  morts. 

.  Messe  instrumentale,  p  uir  orchestre  seul,  voix  ad  libitum. 

i.  Messe  du  Sacré-Cœur,  quatre  voix  et  orgue. 

.  Messe  de  Pâques  (troisième  messe   s  dcrmellc),   ebo-ur  et 
orchestre. 

.    Messe  a  lu  mémoire  de  Jeanne  d'Arc,  soli,  chœurs,  trompet- 
tes et  orgue. 

i.   Mes,,-  de  Claris,  d'après  le  chant  grégorien,  quatre  voix  et 
orgue. 
Messe  en  l'honneur  du  bienheureux  .lean-lluplislc  de  lu  Salle, 
d'après  le   chant  grégorien,  quatre  voix  et  orgue  (qua- 
trième messe  solennelle). 

!.   Requiem  à  quatre  voix  et  orchestre. 

Oratorios  et  cantates  avec  orchestre. 
I.  Pierre  l'Ermite. 
i.  L'Ange  et  TolHe. 
).  Super  /lamina  Balnjlonis,  psaume. 

1.  Gallia,  lamentation. 
1-72.  L'Annonciation. 
1-72.  La  Nativité. 

S.  Te  Deum  en  l'honneur  du  bienheureux  Jean-Baptiste  de 

la  Salle, 
"i.  Cantate  en  l'honneur  du  bienheureux  Jean-Baptiste  de  la 

Salle. 
3.  Jésus  sur  le  tue  de  Tibcriade. 

2.  Rédemption. 
j.  Mors  et  Vita. 

3.  La  Communion  des  Saints. 

Chœurs  avec  ou  sans  accompagnement  d'orchestre. 
3.  Offices  delà  semaine  sainte,  à  4  voix  d'hommes. 
3.  Pastorale  sur  un  Noël  du  xvnie  siècle,  à  4  voix  mixtes. 
1.   Prière  à  Marie. 

5.  Le  Vendredi  saint,  à  6  voix  mixtes. 
1.  L'Adoration  des  Mages. 
i.   Hijninc  a  saint  Augustin. 

L'Angelns. 

A  saint  Jean  l'Ecanyéiisle,  à  4  voix  mixtes. 

Le  Crucifix,  à  4  voix  mixtes. 

Déjà  l'Ange  des  deux,  à  2  voix. 

D'un  cœur  qui  t'aime,  double  chœur  à  voix  mixtes. 

Hail,  gladdening  lighl,  à  4  voix  mixtes. 

Le  Jour  de  Noël,  à  4  voix  mixtes. 

Les  Martyrs,  à  4  voix  d'hommes. 

Noél,  à  2  voix  de  femme  et  orgue. 

0  Jésus,  mij  Lord,  double  chœur  à  voix  mixtes. 

The  old  hundrelh  Psalm,  à 4  voix  mixtes. 

Omnipotent  Lord,  à  4  voix  mixtes. 

Portuguese  hymn  (Adeste  fidèles).  i\  i  voix  mixtes. 

Prière  an  soir  et  du  matin,  à  6  voix  mixtes. 

Russia  anlliem. 

Les  Sept  Paroles  du  Christ,  h  4  voix  mixtes. 

Sicut  cerrus,  à  4  voix  mixtes. 

Tout  l'unirers  est  plein  de  sa  magnificence,  double  chœur  1 

Motets. 
a.  En  chœurs  avec  orchestre  ou  orgue. 
»   Dei  (1838);   Are  verum  (1S53);    Ave  rerum  (quatre   voix 
mixtes);  Benedictus  ;  lia  pacem  ;  Inviolata ;  Kyrie;  Libéra; 


ENCYCLOPÉDIE  />E  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


11  cal;  Uiserert  (quatre  va 
.-  (/  sanetiisima  (quatre  voi: 
tre  voix  mixtes  ;  Requit  i 
i;  Va-il  ta  Régit,  etc. 


C.intigiies  ou  mcilodies  : 
A  une  voix,  avec  orgue  ■ 

L'Aimiri rsairc  des  mnrli/rs ;  Arc  Maria  iel 


communion  ; 

ment;  Ce  ■/«'(/  faut  «  mou  i    ■     I  s  »i  iti  la  terre, 

('.limite:-,  roi.e  In-nies ;  l.r  ilepnrl  ,/,■-  ,,,..i  .o-ian c< .  lionne: 
divin  Enfant  ;  Elévation;  Hymne  .1    "l-:n.-li;iri~t  ii-  ;  llymin 

\i; .  ii-iiu  :   '  •  .    ■.'.•   '  Jérusalem  ;  .'■■  nom 

salue,   pleine  île  grâce.    Mai  u  ■  :   Les  mailurs. 

Noël  (avec  orgue  el  violon  ;  M  v  /,  .«  rfe  Hfsrie, 
Solrc-llamc  de.  /vt;ï.<  enfant.  :  I'  ■  ■  Jeanne  .1  Are  ;  Piièn 
du  soir;  t«  retour  île  Tohie,  Saiulc  Mine  .  Salut,  e,  Vierge  . 
Sois  noire  mire;  Vierge,  épouse  et  mire  de  Dieu;  Vierge  lia- 
ne, ô  Sninie  Mire,  etc. 


PROl  \:., 


I8S7. 
1838. 
1839. 
1856. 
1858. 
1862. 

1870. 


Cantates  avec  orchestre. 
Marie  Statut  et  Rizzio  (2e  grand  prix  de  Rome). 
Lu  Vendetta. 

Vernnntl  ([■'  grand  prix  de  Kome). 
Vire  l'Empereur. 

Cantate  pour  l'anniversaire  de  Molière. 
Hymne  »  la  musique. 
Le  Temple  de  l'harmonie, 
A  la  frontière. 
Itala. 

oldat. 
La  liberté  éclairant  le  momie. 
Vue  la  France. 


Chœurs, 
u.  A  quatre  voix  (avec  ou  sans  accompagnement) 
Adam  eou/,1  [nul  no  ■mlitlpeace ;  The  Ml;  Brighl  star  of  Ere 


li.  A  [roi,  voix  (avec  ou  sans  accompagnement). 

Le  catéchisme ,  Le-  floches  ;  Les  couronn  ■•.•■'■   ;,■■.  ,ia  :  I  ■  dislril'iiliuu 

des  prit  :  L'écriture;  La  grammaire  :  !  i  <  menaces,  etc. 


Au  pciutemp  .  Ba     -, 

'  e;   Bi'i 

r*nm  ■    .    .  inir  sincère;  ll/essed  i. 

llic  mai,     Cha 

■•■  ■■■     i.    ttilène  de  Ronsard;  Dèji 

l'azur  des  l  ici 

m6e  matin  île;  Dieu  partout;  Lu  Féti 

des  courom  es . 
voix  du  cie  : 

''   fM' 

mes  compagnons  ;  Jeanne  d'Are  et  le, 

-  Hanai.es:  Les  Jeunes  Françaises 

Par  nue  i,  le  1 

■u  .  1  a  1 

■icre  de  Jeanne  d'Arc  ;  Virât  !  llijmn, 

pourlarèi  .  ' 

'que,  etc. 

Mélodies 

pour  vo 

x  seules  (avec  piano).' 

Plus  de  deux  cenls. 

Scherzo  (1*37):  S; mpliuiiie  ru   rc     I  v,:.   ,    Sumphunie   en  mi  lu-mal 
(1855);  Sait  irella  (1877  ;  Mari  h    .  i  liait  lie;  Sou  cuirs  d'un 

'""(orc Il     à  cordes    td    ,       I    -       So,   Ko  pour  ins- 

truments  vent;4farc*e/  m  re  d'une  marionnette  ;  Scherzo 
pour  deux  contrebasses  ;  Le  ca  me,  méd  tation  pour  violon 
'■1  orchestre;  La  ris, ou  de  Janine  d'Are,  pour  violon  et  or- 
chestre (ou  orgue);  Méditation  sur  un  prélude  de  Ituch  ;  trois 
Quatuors  pour  instruments  à  cordes. 

Piano. 
L'Angelus;  Bal  d'enfants;  Danse  de  l'épie;  Dodelinetle;  La  f'-lc  de 
Jupiter;  Grande  valse  {en  ri);  Impromptu;  Invocation;  Le 
lierre; Muselle:  Pussacaille :  Les  patriotes,  marche;  Les  Pif- 
ferari;  Prilude;  Royal-Menuet;  s,  rènade;  Valse  caractéristi- 
que; Valse  des  I  Barcarolle,  etc. 


Orgue. 


entrées  et  sorties  pour  le  son  ice  di 
aime  Cécile  (avec  piano  et  violon). 


Marches 

Illimité  o 

Offerloir  . 

Sérénade  (avec  piano  el  violon 

Trois  chorals  et  fugues. 

Trois  préludes  et  fugues. 

Piano-pédalier. 
u.  Avec  orchestre 


.•  Suite  concertante. 


Canzenetta  en  rc;  '!'■- 


La  Jeune 

Mcdilul, 

Religieuse,  de  Schubert,  pour  piano,  violon,  violoncelle 
harmonicorde    1856). 

u  sur   un   prélude   de    Bach   pour    violon   principal,  cor 
digé  et   orchestre   (1855),  puis  pour  orgue,   piano   et 

Chant  il, 

Quilllcll, 

sJ 

dt 

coliites.  lieux  Chants  écossais. 
Cosi  fan  lutte,  de  Mozart,  po 

io,  violoncelle  et 

Belle  m 
Choix  de 

du 

,  mélodie  sur  une  étude  de  Chopin. 
mis  de  Bach,  transcrits  pour  orgue 

Bibliographie. 

Méthode 

.1/.'  u  ira    l'un  artiste,  t  vol., 

Paris 

Calmann-I.évy. 

Camille 

laigur.—  Gounod,  1  vol.  de 

la  collection  des  a  Mai- 

lr  ■-  de  la  Musique  »,  Paris,  Alcan. 
P.-L.  Hillehacbrr.  —  Charles  Gonnod,    I   vol.  de  la 

Les  Musiciens  célèbres  »,  Paris,  I, aurais. 
J.-G    Pboi  homme  et  A.  Dandelot.  —  Gounod,  2vol.,  Paris,  De- 
Louis  Pagnerre.  — Charles  Gounod,  sa  vie  et  ses  œuires,  i  vol., 

Paris,  !..  Sauvaitre,  1890. 
E.  Ssrbt.  —  1-annij  Mendelssohn,  d'après  les  no-moi, es  de  sou  fil.., 

1  vol..  Paris,  Fischbacher,  1888. 
Camille  Saint-Saens. —  Porlraitset  souvenirs,  l  vol.,  Paris.  So- 
ciété d'édition  artistique. 
.Iules  -Simon.  —  Fugues  et  croquis,  1  vol.,  Paris,  Flammarion. 

Grandménil. 

Jean-Baptiste  Fauchaid  de  Grandménil  naquit  en 
1737  à  Taris.  Desliné  au  barreau  par  son  père,  il  fut 
reçu  avoc«t  au  Parlement  et  plaida  avec  succès 
quelques  causes  remarquables.  Mais  il  était  attiré  par 
le  métier  de  comédien.  A  la  suite  de  certains  démê- 
lés qu'il  eut  avec  sa  famille,  il  quitta  brusquement 
la  France,  avec  sa  femme,  el  s'engagea  au  théâtre  de 
Bruxelles.  Il  appartint  ensuite  aux  théâtres  de  Bor- 
deaux et  de  Marseille,  où  il  acquit  une  grande  répu- 
tation dans  les  rôles  de  valet.  Le  31  aoiït  1700  il  dé- 
butait à  la  Comédie  française  dans  le  rôle  d'Arnolphe 
de  VEcole  des  femmes.  11  devint  plus  laid  sociétaire, 
et  ne  prit  sa  retraite  que  le  1er  avril  1811.  Sa  terre 
patrimoniale  de  Grandménil,  le  produit  de  ses  éco- 
nomies, et  les  pensions  qu'il  obtint  en  se  retirant  lui 
composaient  un  revenu  assez  considérable.  Il  mou- 
rut à  Paris  le  24  mai  1810,  âgé  de  70  ans. 

Sous  l'Empire,  Grandménil  avait  été  nommé  pro- 
fesseur de  déclamation  au  Conservatoire,  et  l'Institut 
l'avait  élu  membre  de  sa  quatrième  classe. 

Lors  de  la  réorganisation  de  l'Académie  des  beaux- 
arts  en  1816,  une  ordonnance  du  ttoi  lui  attribuait 
dans  cette  compagnie  un  fauteuil  qu'il  ne  devait  pins 
occuper  que  pendant  quelques  semaines. 

On  a  de  Grandménil  : 

Le  Savetier  joyeux,  opéra-comique  en  l  acte  mon 
représenté),  Paris,  Prault,   17;i0,  in-8°  de  4-7  pages. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L  INSTITUT  DE  FRANCE    3 527 


Bibliographie. 

Almanaeli  des  spectacles,  1760,  p.  94. 

Michaud.  —  Biographie  unirersclle,  Paris. 

Locis.  —  Dictionnaire  portatif  des  Théâtres,  2=  édition,  p.  39S. 

Journal  de  lu  Lihrairic,  1810,  p.  188. 

Journal  de  l'ons.  lu  juillet  ISlfi. 

?  des  comédiens  [ceux  d'hier).  G 


Opinion  du  parterre,  tome  IX,  pâlies  170-178. 

Raoul    Rochgtte.  —  Discours  prononcé  au  nom  de  l'Académi. 

des  beaux-art*  sur  la  (.aube  de  i'.hanumiïnil. 


Grétry. 

Grétry  est  né  à  Liège  le  II  février  1741.  Son  père 
était  violoniste.  De  très  bonne  heure,  il  entra,  comme 
enfant  de  chœur,  dans  une  maîtrise  où  il  subit  telle- 
ment de  mauvais  traitements  de  la  part  d'un  maître 
de  chapelle  barbare  qu'il  faillit  prendre  la  musique 
en  dégoût.  Ce  cauchemar  dura  quatre  ou  cinq  ans, 
après  quoi,  il  fut  rendu  à  sa  famille  comme  décidé- 
ment incapable.  L'enfant  continua  d'apprendre  la 
musique,  et  dans  des  conditions  meilleures.  Mais  le 
grand  événement  de  sa  jeunesse  qui  confirma  défi- 
nitivement sa  vocation,  ce  fut  l'arrivée  à  Liège  d'une 
troupe  italienne  qui  jouait  des  opéras-bouffes.  Grétry 
s'enthousiasma  pour  Pergolèse,  et  ne  rêva  plus  que 
théâtre.  Il  obtint  ses  entrées  à  la  salle  des  Italiens, 
et  tous  les  soirs  il  assistait  au  spectacle.  Les  acteurs 
s'intéressèrent  à  lui  et  lui  apprirent  à  chantera  l'ita- 
lienne; il  se  découvrit  un  l'oit  joli  soprano;  bientôt 
après,  il  rentrait  triomphalement  à  la  maîtrise  qu'il 
avait  quittée  quelque  temps  auparavant,  comblé  de 
flatteries  par  le  maître  qui  naguère  le  rouaitde  coups. 
Mais  on  abusa  de  sa  voix  et  de  ses  forces,  et  sa 
santé  en  fut  pour  toujours  compromise.  Les  leçons 
de  l'organiste  Reneei.n  et  du  maître  de  musique  de 
Saint-Paul,  Moheau,  ne  lui  suffirent  pas  longtemps, 
et,  après  avoir  composé  six  petites  Symphonies  et  une 
il/esse  solennelle,  il  partit  à  pied  pour  l'Italie,  le  cer- 
veau bouillonnant  de  musique.  Il  avait  alors  18  ans. 
A  Rome,  il  trouva  un  asile  dans  le  Collège  liégois, 
où  il  resta  de  1759  à  1766,  travaillant,  rêvant,  se  pro- 
menant, suivant  les  théâtres,  les  concerts  et  les 
exécutions  de  musique  religieuse  dans  les  églises, 
voyageant  parfois.  Tant  d'années  d'observations  ou 
d'études  ne  lui  apprirent  pas  gratid'chose  de  l'har- 
monie ou  du  contrepoint  :  c'est  de  sa  musique  qu'on 
dira  plus  tard  :  «  Entre  la  partie  de  basse  et  celle  du 
premier  violon  on  ferait  passer  un  carrosse  à  quatre 
chevaux,  »  tellement  la  trame  en  était  lâche.  Du 
reste,  les  compositeurs  italiens  ne  lui  donnaienl-ils 
pas  eux-mêmes  l'exemple  de  la  négligence  dans  la 
facture  de  leurs  opéras  si  vite  bâclés? 

Avant  de  quitter  l'Italie,  Grétry  se  fit  recevoir 
membre  de  l'Académie  des  philharmonistes  de  Bo- 
logne, et  donna  au  théâtre  Alibert  de  Rome  les  Ven- 
dangeuses (1766),  qui  remportèrent  un  éclatant  suc- 
cès. Après  quoi,  il  quitta  l'Italie,  s'arrêta  six  mois 
à  Genève,  où  il  demanda  audience  à  Voltaire,  et  vint 
se  fixer  à  Paris. 

Il  commence  par  prendre  contact  avec  le  nouveau 
milieu  dans  lequel  il  se  trouve  tout  d'un  coup  trans- 
porté. Il  suit  l'Opéra;  mais  Rameau  l'ennuie.  Il  s'en- 
thousiasme alors  pour  le  Théâtre-Français  et  pour 
les  grands  acteurs  d'alors  :  «  Leur  déclamation  me 
semblait  le  seul  guide  qui  me  convint,  le  seul  qui 
pût  me  conduire  au  but  que  je  m'étais  proposé.  » 
Il  consulte  Mlle  Clairon  et  note  en  musique  «  ses 
intonations,  ses  intervalles  et  ses  accents  ».  Diderot 


l'engage  à  persévérer  dans  cette  voie,  et,  après  un 
premier  insuccès,  sans  conséquence  (Les  Mariages 
samnites),  Grétry  remporta  une  victoire  décisive  avec 
le  Huron  (176^).  On  goûta  l'expression  juste  et  variée, 
la  grâce  et  le  naturel,  la  fantaisie  poétique  d'un  art 
d'ailleurs  si  conforme  aux  traditions  créées  par 
Philidor  et  Monsigny.  Puis  vinrent  Emile  (1709),  avec 
son  fameux  quatuor  :  «  Où  peut-on  être  mieux  qu'au 
sein  de  sa  famille?  »  le  Tableau  Parlant  (1769),  la 
Fausse  Magie  (177b),  Richard  Cœur  de  lion  (1784)  et 
bien  d'autres  ouvrages  dont  le  succès  eut  son  reten- 
tissement à  l'étranger,  en  Italie,  en  Belgique,  en 
Allemagne  et  jusqu'en  Suède. 

La  situation  de  Grétry  était  devenue  fort  brillante- 
Pensionné  du  roi  depuis  1773,  pensionné  de  l'Opéra 
depuis  1782,  il  avait  été  nommé  de  plus  directeur  de- 
la  musique  particulière  de  la  Reine,  censeur  royal 
pour  la  musique  et  inspecteur  de  la  Comédie  Ita- 
lienne (1787).  La  Révolution  le  met  dans  la  misère. 
Heureusement,  il  obtint  une  des  places  d'inspecteur 
du  Conservatoire,  et  un  des  trois  fauteuils  de  musi. 
cien  à  l'Institut  (1795),  et  d'ailleurs  le  gouvernement 
lui  accorde  une  petite  pension.  Mais  sa  sauté  devenait 
fort  précaire,  et  il  préfère  renoncer  à  ces  fonctions 
au  Conservatoire  pour  se  retirer  dans  l'Ermitage  de 
J.-J.  Rousseau,  à  Montmorency,  qu'il  venait  d'acheter. 
En  1802,  Napoléon  lui  accordait  la  croix  de  la  Légion 
d'honneur.  Il  s'éteignait  enfin  le  24  septembre  1813. 
Depuis  bien  longtemps  il  ne  composait  plus. 

Grétry  a  joué  un  rôle  considérable  dans  l'histoire 
de  la  musique  française.  Il  a  repris  les  principes  de 
Liilly  en  les  appliquant  à  l'opéra-comique,  il  a  subi 
l'influence  de  l'école  des  symphonistes  de  Mannheim 
et,  indirectement,  il  a  préparé  la  voie  à  l'opéra  de 
Gluck. 

M.  Ci  i  i tx  a  défini  fort  ingénieusement  la  parenté 
de  beaucoup  de  thèmes  beelhovéniens  avec  des  mo- 
tifs des  opéras-comiques  de  Ghetry.  Ce  ne  fut  pas 
seulement  un  grand  artiste,  mais  aussi  un  théoricien 
de  son  art,  parfois  très  perspicace.  Ses  Mémoires  ou 
Essais  sur  la  musique  renferment  des  vues  intéres- 
santes sur  l'ouverture  à  programme,  sur  l'entr'acte 
servant  de  commentaire  psychologique  à  une  situa- 
lion,  sur  la  peinture  des  passions  et  des  caractères 
parle  moyen  des  sons,  et  sur  les  matériaux  et  les 
procédés  dont  elle  suppose  l'analyse  exacte.  Il  rêve 
d'une  tragédie  musicale  où  le  dialogue  serait  parlé,, 
l'orchestre  caché;  d'un  théâtre  du  peuple,  de  jeux 
nationaux.  Il  voudrait  introduire  le  chant  dans  l'en- 
seignement primaire.  Tout  cela  présenté  d'une  façon 
un  peu  confuse,  mais  témoignant  d'une  intelligence 
curieuse  et  d'un  esprit  inventif. 

CATALOGUE  DE  L'ŒUVRE  DRAMATIQUE  DE  GRÉTRY 

1766.   le  Xeivlcninmitrice  (Les  Vendangeuses), 2  actes  représentés 
a  u.um-    |iai-iitnm  |.i'hlur  ..u  détruite). 

1707.  Isabelle  et  Gerlruâe,  1  acte  de  Favart,  représenté  à  Genève 

1708.  Les  ilimaoet  sonui'lc-,  :;  aeO'-  de  l.r-ier,  représentés  à  Pari8 


Le-  Dent  Aime-,  -.'  ad--  -1.-  l--e-n-.iiill.il  de  Faltaire. 
L'Amitié  a  fe-.ireaie,  -'  a.  I--  de  Favart,  partition  remaniée 

leniire  elAsor,  i  actes  de  Marmontel. 

772.  L'Ami  ,le  lu  maison,  Marmontel. 

773.  Le  Magnifique,  3  actes  de  Se. laine. 

La  Itosiere  de  Snteiicij,  i  aclci  de  Masson  de  Pezay.  (Parti- 
tion remaniée  en  3  actes,  en  1771.) 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Cepliale  el   Proeris,  3  acles  île  Maniuilllel.  (  I  >:i  l-l  ilii  m  ri-m;i- 

niée  en  177S el  en  1777.) 

I.a  Emisse  Magie.  -  actes  de  M  irinontel. 

Z.i'.v  »™,jn ■  samuites,  3  actes  de  ilu   H.izy.   ^'artilion  re- 
maniée en  1782.) 

Malroco,  i  actes  de  Liinjou.  (Partition  déiruilc) 

Les  Irais  Ages  de  l'Itpera.  prologue  île  l>e  Vismes. 

Le  Jugement  de  Midtis.  :t  acles  de  Haies. 

L'Amant  jaltiur,  3  actes  de  Sales. 

Les  Événements  imprévus,   3  acles  de  Halos,  (l'artitiou  re- 

Auetushiei  Hiéelelte,  lactesde  Sedaine'.  (Partition  rema- 

<i< i  3  actes  en  1788.) 

kniromttj  te,  2  ictes.lc  l'iiia.  i,  Partition  remaniée  en  17  M.) 
Emilie,  i  ai  te  de  Guillard. 

Caliiielte  «  la  cour,  3  actes  de  Lourde!  de  Santerre  (addi- 
tions ,ii  1785  . 
L'Embarras  îles  richesses,  :î  actes  de  Lourde!  de  Santerre. 

(Partition  remaniée  en  1782.) 
La  Caravane  du  Cuire,  ;;  aeles  de  Morel  de  Chefdeville. 
L'Épreuve  villageoise,  2  actes  de  Desforges. 
Weliaril  Cnur  de  lion,  3  aeles  de  Sedaine.  (Partition  rema- 
niée en   i  aeles,  puis  en  3  actes  en  1785.) 
Pauurge  dans  file  îles  Lanternes,  3  actes  de  Morel. 
Amphitryon,    3  actes  de  Sedaine  (partition  remaniée  en 

1788). 
Les  Méprises  par  ressemblance,  3  actes  de  Patrat. 
;..'  Comte  il' Albert,  3  actes  de  Sedaine. 
La  Suite  tin  Cmnle  il  Albert.  1  acte  de  Sedaine. 
.   Le  Prisonnier   anglais,  3  actes  de  Desfontaines  (partition 

remaniée  en  1788  et  1793). 
.   Le  Rival  confident,  2  acles  de  Forgeot. 
.  Riiniit  Barbe-Bleue,  3  actes  de  Sedaine. 

Aspasie,  2  actes  de  Morel. 
.  Pierre  le  Grand,  i  actes  de  Bouilly. 
.  Guillaume  Tell,  3  actes  de  Sedaine. 

.  Clarisse  el  Ermunee  ou  les  deux  couvents,  3  actes  de  Desprez. 
Basile,  nu  ii  trompeur,  trompeur  et  ilemi,  1  acte  de  Sedaine. 
.  Lu  Rosière  républicaine,  1  acte  de  Silvain  Maréchal. 
Joseph  llnrra,  1  acte  de  Lévrier. 

Denys  leTyran, maître d'écelt à  Syracuse,  l  acted'Hoffmann. 
lisbeth,  -'  actes  de  Favières. 
Anaerèmi  eke:  l'olgerme,  3  actes  de  Guy. 
Le  Barbier  du  village  nu  le  Rerenaiit,  I  acte  de  Grétry  neveu. 
Eliseti  mi  l'amour  maternel,  3  actes  de  Faviéres  (additions 

Le  Casque  et  les  Colombes,  1  acte  de  Guillaud. 
.  Dctphis  et  Mopsa,  2  actes  de  Guy. 


Bibliographie. 


r,. nnhn 


Michel  Bbknf.t.  —  Grétry,  sa  vie  el  ses  leum 
Villars,  1SS4,  in-S°  de  287  pages. 

Henri  de  Cdrzon.  —  Grétry,  Paris,  H.  Laurens,  collection  des 
Musiciens  célèbres. 

Georges  CnctiEL.  —  Les  Créateurs  de  l' opéra-comique  français,  Pa- 
ris, Alcan,  1914,  collection  des  Maîtres  de  la  musique. 

Édition  ilei  œuvres  de  Crelry,  publiée  par  le  gouvernement  belge, 
chez  Breitkopf  et  Haertel  à  Leipzig;  37  volumes  in-4° 
actuellement  parus. 

Fetis.  —  Biographie  ituirerselli1  îles  musiciens. 

Ed.-G.-J.  Grégoire.  — Grétry,  Bruxelles,  1883. 

Romain  Rolland.  —  Musiciens  d'autrefois,  Paris,  190S,  in-16. 

J.-B.  Ronqé.  —  Grétrij.  dans  la  Biographie  nationale  publiée  par 
l'Académie  nivale  de  Belgique,  tome  VIII,  Bruxelles, 
1884-1885. 

Ernest  Guiraud. 

Ernest  Guiraud  naquit  le  23  juin  1837,  à  la  Nou- 
velle-Orléans. Son  père,  Jean-Baptiste  Guiraud,  ancien 
grand  prix  de  Rome,  avait  vainement,  à  deux  repri- 
ses, tenté  de  faire  entendre  ses  œuvres  à  Paris;  les 
difficultés  de  la  vie  l'avaient  contraint  d'émigrer  en 
Amérique,  et  il  vivait  à  la  Nouvelle-Orléans,  du 
produit  des  leçons  qu'il  donnait.  De  bonne  heure, 
son  fils  ayant  manifesté  des  dispositions  pour  la 
musique,  son  père  lui  en  avait  enseigné  les  premiers 
éléments;  vers  1849,  il  l'aurait  amené  à  Paris,  pour 
lui  ouvrir  l'imagination,  le  former  par  l'audition 
d'oeuvres  musicales  et  préparer  son  avenir.  Il  serait 
même  reparti  pour  la  Nouvelle-Orléans,  avec  un 
certain  nombre  de  livrets  d'opéra,  qu'il  aurait 
achetés  pour  exercer  son  fils  à  la  composition. 


Ce  qui  reste  certain,  c  est  qu'à  13  ans,  le  jeune 
Ernest  avait  déjà  fait  représenter  un  opéra  :  le  Roi 
David,  qui  avait  été  en  1847  la  première  œuvre  dra- 
matique de  Mermet,  fut  favorablement  accueilli  au 
Théâtre  Français  de  la  Nouvelle-Orléans. 

Peu  de  temps  après,  Guiraud  parlait  pour  la 
France,  pour  y  continuer  ses  études  musicales.  Il  y 
trouvait  les  anciens  amis  de  son  père,  parmi  les- 
quels Croizilles,  violon  solo  de  l'Opéra-Comique,  et 
Barbereau,  ancien  condisciple  de  son  père,  chez 
Keicha,  qui  lui  donna  des  leçons  d'harmonie.  Adm>s 
au  Conservatoire,  d'abord  dans  la  classe  de  piano  de 
Marmontel,  il  obtint  un  premier  accessit  en  1855,  un 
second  prix  en  1837,  et  en  18o8  un  premier  prix.  Il 
passa  alors  dans  la  classe  de  composition  d'HALÉw. 

A  cette  époque,  Guiraid  vit  de  quelques  leçons 
et  d'un  modeste  emploi  de  timbalier  au  théâtre  de 
l'Opéra-Comique,  qui  lui  permet  de  se  familiariser 
avec  les  œuvres  nouvelles.  Il  fréquente  certains  ar- 
tistes el  fait  la  connaissance  de  Berlioz  :  «  Le  fils  de 
Guiraud,  écrit  celui-ci  au  moment  des  répétitions  de 
l'Enfance  du  Christ,  m'a  été  bien  utile.  C'est  un  char- 
mant garçon  qui  deviendra  un  homme.  »  La  prédic- 
tion de  Berlioz  ne  tarda  pas  à  se  réaliser  :  en  1859, 
à  son  premiers  concours,  Guiraud  remportait  le 
grand  prix  de  Rome  avec  la  caniate  Bajazet  et  le 
joueur  de  flûte;  le  jury  le  lui  décernait  à  l'unanimité. 

Guiraud,  avec  sa  nature  ardente  et  enthousiaste, 
garda  de  son  séjour  en  Italie  un  souvenir  très  vif. 
Chacune  des  années  qu'il  y  passa  fut  marquée  par  un 
envoi  qui  déjà  portait  la  marque  caractéristique  de 
son  talent  :  des  idées  musicales  délicates  el  distin- 
guées, exprimées  avec  une  rare  correction.  Son  pre- 
mier envoi  fui  une  Messe  solennelle;  son  second  un 
opéra  bouffon  italien  en  un  acte,  Gli  Avventurieri ;  le 
troisième  un  opéra-comique,  Sylvie,  qui  fut  représenté 
le  il  mai  1864  à  Paris,  et  dont  on  cite  encore  un 
charmant  duo  avec  chœur  dans  la  coulisse. 

Après  Sylvie,  Guiraud  dut  attendre  cinq  ans  une 
nouvelle  occasion  de  se  produire.  Alors  commença 
pour  lui  une  vie  de  luttes  et  de  déceptions  dans 
laquelle  il  fut  soutenu  par  un  ami  de  la  première 
heure,  Bizet.  A  peu  près  du  même  âge,  les  deux  mu- 
siciens partagèrent  leurs  souffrances  et  leurs  joies, 
n'engageant  rien  sans  se  consulter,  se  confiant  tous 
leurs  projets,  s'en  remettant  chacun  au  jugement  de 
l'autre. 

Guiraud,  pendant  une  grande  partie  de  sa  vie, 
semble  avoir  été  poursuivi  par  une  malchance  qui 
l'empêche  de  profiler  du  succès.  C'est  d'abord  la  re- 
présentation de  En  prison,  donné  au  Théâtre  Lyrique 
le  5  mars  1869  contre  le  gré  du  musicien;  mécontent 
du  livret,  mécontent  même  de  la  partition,  il  ne 
voulait  pas  laisser  jouer  la  pièce.  Le  Kobold,  repré- 
senté le  2  juillet  1870  sur  la  scène  de  l'Opéra- 
Comique,  s'annonçait  comme  un  succès;  les  repré- 
sentations furent  brusquement  interrompues  par 
la  déclaration  de  guerre.  Pendant  la  guerre,  Guiraud 
ne  voulut  pas  profiter  de  l'exemption  de  service  à 
laquelle  lui  donnait  droit  son  prix  de  Rome;  il  s'en- 
gagea dans  un  régiment  de  marche  et.  lit  sou  devoir 
à  côté  du  peintre  H.  Regnault,  particulièrement  à 
l'affaire  de  Montretout. 

Après  la  guerre,  Guiraud  se  consacra  au  relève- 
ment de  la  musique  française;  courageusement, 
malgré  le  peu  de  succès  de  ses  premières  œuvres,  il 
se  mil  au  travail.  Le  23  novembre  1872,  il  donnait 
au  théâtre  de  l'Athénée  Madame  Turlupin,  dont  les 
critiques  louèrent  la  finesse  et  l'élégance.   Déjà    le 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3529 


■28  janvier,  les  Concerts  populaires  avaient  exécuté 
une  Suite  d'orchestre  de  lui,  et  Pasdeloup  l'avait 
choisi  en  1873  pour  composer  une  des  trois  ouver- 
tures qu'il  s'était  engagé  à  faire  exécuter  l'année 
suivanle  pour  favoriser  l'essor  de  la  musique  fran- 
çaise. Cette  œuvre  figura  au  programme  du  con- 
cert du  1er  mars  1874,  bientôt  suivie,  le  6  décembre, 
d'un  Air  de  ballet. 

Une  nouvelle  tentative  au  théâtre  s'était  de  nou- 
veau heurtée  à  la  fatalité  qui  semblait  s'acharner 
contre  Guiraud.  L'incendie  de  l'Opéra  vint  arrêter 
brusquement  le  succès  de  Gretna-Grecn, un  ballet  en 
un  acte  joué  le  S  mai  1873.  Aulhéàtre,  Guiraud  don- 
nera encore  Piccolino,  en  1870,  à  l'Opéra-Comique,  et 
en  1882  la  Galante  Aventure,  qui  fut  mal  accueillie 
du  public.  Enfin,  désireux  de  donner  la  mesure  de 
son  talent  dans  le  genre  dramatique,  Guiraud  avait 
entrepris  une  grande  œuvre,  que  la  morl  ne  lui 
laissa  pas  le  temps  de  terminer.  Mais,  là  encore,  il 
lui  avait  fallu  lutter  contre  de  multiples  difficultés. 
Un  premier  ouvrage,  entrepris  avec  Edmond  Gondi- 
net,  avait  été  inlerrompu  par  la  mort  de  son  colla- 
borateur. Une  deuxième  tentative  avait  échoué  pour 
des  raisons  demeurées  inconnues.  Enfin,  Guiraud 
avait  découvert  dans  les  Récits  des  temps  mérovin- 
giens d'Augustin  Thierry,  un  sujet  qui  lui  plaisait;  en 
peu  de  temps,  il  en  avait  terminé  trois  actes;  le  qua- 
trième était  déjà  ébauché.  Pour  pouvoir,  pendant  ses 
vacances,  travailler'  en  toute  tranquillité,  il  s'était  fait 
bâtir  une  modeste  maison  au  bord  de  la  mer,  à  côté 
de  celle  de  son  collaborateur.  L'œuvre  resta  inache- 
vée, et  la  Frédêgonde  de  Guiraud,  terminée  par 
Saint-Salns,  fut  froidement  reçue  par  le  public  de 
l'Opéra  en  1893. 

Mais  depuis  longtemps  déjà,  Guiraud  ne  pouvait 
consacrer  à  la  composition  que  les  loisirs  assez 
courts  que  lui  laissaient  ses  fonctions  de  professeur. 
En  novembre  1876,  il  avait  été  nommé  professeur 
d'harmonie  et  d'accompagnement  au  Conservatoire, 
à  la  place  d'Edouard  Baptiste.  La  classe  qui  lui  était 
confiée  était  très  faible;  Guiraud  parvint  à  la  relever. 
Quand  la  maladie  força  Victor  Massé  à  abandonner 
son  cours  de  composition,  Guiraud  fut  appelé  à  lui  suc- 
céder. Sa  fonction  de  professeur  développa  en  lui 
des  qualités  nouvelles;  par  intérêt  pour  ses  élèves,  a 
noté  un  de  ses  biographes,  «  Guiraud  d'indolent  de- 
vint actif;  Guiraud  devint  exact,  Guiraud  sut  l'heure 
qu'il  était  ».  Certains  lui  ont  reproché  d'avoir  assisté 
en  spectateur  un  peu  timide  à  l'évolution  de  la  mu- 
sique française  dans  la  seconde  moitié  du  xixe  siècle; 
on  a  prétendu  qu'il  était  resté  par  trop  fidèle  aux 
principes  anciens.  Cependant,  il  sut  toujours,  avec 
une  grande  largeur  d'esprit,  admettre  les  principes 
nouveaux,  et  les  noms  de  quelques-uns  de  ses  élèves, 
parmi  lesquels  on  cite  Claude  Debussy  et  Paul  Du- 
ras, prouvent  que  jamais  son  enseignement  n'étouffa 
l'originalité  de  ceux  qu'il  considérait  comme  des 
amis. 

En  mars  1891,  il  avait  remplacé  Léo  Delibes  à 
l'Institut.  En  1892,  un  an  après  sa  nomination,  il 
mourait  brusquement  au  Conservatoire  même,  dans 
le  cabinet  du  secrétaire  général  qu'il  était  venu  en- 
tretenir de  questions  relatives  à  son  enseignement. 

Comme  homme,  avec  un  charme  et  une  noncha- 
lance qu'il  devait  à  sa  patrie,  avec  une  droiture  et 
un  dévouement  dont  il  donna  de  multiples  preuves, 
Guiraud  se  faisait  remarquer  surtout  par  sa  bonté. 
«  Le  bon  Guiraud  »,  ainsi  le  désignait-on  couram- 
ment. Son  obligeance  était  telle  que,  lui  qui  ne  con- 


nut jamais  le  succès  au  théâtre,  il  s'employa  avec 
une  énergie  qu'il  n'avait  pas  pour  la  défense  de  ses 
intérêts  personnels,  à  sauver  de  l'oubli  les  œuvres 
île  ses  amis;  on  sait  tout  ce  que  Bizet  lui  doit;  plus 
lard,  il  orchestra  les  Contes  d'Hoffmann,  après  la  mort 
d'OFFENBACH,  et  Kassya,  après  celle  de  Délire?. 

CATALOGUE  DES   ŒUVRES   D'E.    GUIRAUD 

ŒUVRES    Dn    THEATRE 

1S52.  le  Roi  David,  la  Nouvelle-Orléans. 
Il  mai  1S64.  Sylvie,  1  acte,  Opéra-Comique. 
5  mars  1S09.   En  prison,  1  acte,  Théâtre  Lyrique. 
2  juillet  1870.   Le  Kobold,  1  acte,  opéra. 
23  novembre  1872.   Madame  Tiirlitpin,  Athénée, 
r.  mai  1873.  Gretna-Green,  ballet,  Opéra. 
11  avril  1S76.  Piccolino,  Opéra-Comique. 
IS82.  La  Galante  Aventure,  Opéra-Comique. 
Œuvre  posthume.  Frédêgonde,  opéra,  1895. 
Orchestration  des  Coules  d'Hoffmann  (I'Ofpenbach,  el  de  Kassya 
de  L.  Delibes. 


28  janvier  1872.  Suite  d'orchestre,  Concerts  PasnYwup. 

1er  mars  1S74.  Ouverture  de  concert  (arrangée  à  quatre  main*). 

G  décembre  1874.  —  Air  de  ballet  (danse  persane). 

En  outre,  Mélodies,  chant  et  piano;  Traite  pratique  d'i 


Bibliographie. 

Th.  Ddbois.  —  Discours'  prononcé  aux  funérailles  d'E.  Guiraud^ 
Paris,  1892,  in-4". 

Grove's.  —  [lielionanj  ofmusic  and  inusiciiins,  London,  1910. 

H.Imbert.  —  Portraits  et  Etudes,  Paris,  1894.  Lettres  de  Bizet  o 
E.  Guiraud. 

Massf.net.  —  Discours  prononce  oui  funérailles  d'E.  C,:nrrf.  fa- 
ns, 1892,  in-4». 

Paladilhe.  —  notice  sur  E.  Guiraud,  Paris,   1893,  in-4". 

A.  Poogin.  — Supplément  a  la  Biographie  universelle  de  Félis. 

II.  RIemann.  —  Dictionnaire  de  musique,  trad.  Humbekt,  Paris, 
1899. 

Renie  des  Deu.v  Mondes  :  Gretna-Green,  P'r  juin  1873  ;  Fridàgonde, 
15  janvier  1896. 

Julien  Tiersot.  —  Un  Demi-Siècle  de  Musique  française,  Alcali, 


J.  Halévy. 

Jacques-Fromental-Elie  Halévy  est  né  le  27  mai 
1799  à  Paris,  dans  une  maison  de  la  rue  Neuve-des- 
Mathurins,  détruite  au  moment  de  la  construction  du 
Grand  Opéra.  Sa  famille,  originaire  de  Furth  en  Ba- 
vière, s'était  établie  à  Paris  à  la  fin  du  xvme  siècle. 
Son  père,  Elie  Halévy,  était  un  littérateur,  qui  célé- 
bra la  paix  d'Amiens  par  un  hymne  hébreu  qui  fut 
chanté  à  la  synagogue.  De  son  vrai  nom,  il  s'appe- 
lait Lévy;  en  1807,  lorsque  les  Israélites  de  France 
furent  invités  par  mesure  gouvernementale,  en  ac- 
cord avec  une  décision  du  grand  Sanhédrin,  à  chan- 
ger ou  à  modifier  leurs  noms  de  famille  pour  éviter 
des  confusions,  provenant  de  la  similitude  d'un 
grand  nombre  de  noms,  il  ajouta  à  son  nom  l'aftîxe 
hébraïque  Hal.  Halévy  était  d'ailleurs  le  nom  de  plu- 
sieurs talmudistes  célèbres,  notamment,  au  xvie  siè- 
cle, celui  d'un  poète  fameux,  Jédédias  Halévy. 

A  dix  ans,  le  jeune  Jacques  Halévy  entra  au  Con- 
servatoire, dans  la  classe  de  Cazot  pour  le  solfège, 
dans  celle  de  Lambertpoui-  le  piano  (1810).  En  1811, 
il  suivait  les  cours  d'harmonie  de  Berton.  Pour  la 
composition,  il  fut  l'élève  el  l'élève  préféré  de  Cee- 
rubini;  c'est  Cherubini  qui  fut  son  véritable  maître; 
c'est  à  lui  qu'il  doit  son  éducation  forte,  sa  science, 
son  goùlpour  la  musique  religieuse  etpour  les  tona- 
lités liturgiques,  son  mépris  du  lieu  commun  et  son 
horreur  delà  trivialité.  A  quinze  ans,  à  dix-sept,  pré- 
tendent d'autres  biographes,  il  fut  nommé  répéti- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  Ml'SIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


leur  el  bientôt  après  professeur-adjoint  de  solfège; 
beaucoup  de  ses  élèves  étaient  plus  jeunes  que  lui. 

Trois  fois  il  concourut  pour  le  prix  de  Rome,  et 
il  l'obtint,  à  peine  âgé  de  vingt  ans,  avec  la  cantate 
Herminie.  La  mort  de  sa  mère,  survenue  la  même 
année,  lui  Qt  différer  d'un  an  son  départ  pour  Rome, 
pour  obéir  au  désir  de  son  père.  Cetie  ciconstance 
l'amena  a  écrire  sa  première  œuvre  :  un  De  Profundis 
à  grand  orchestre,  dédié  à  Cuerubim  et  exécuté 
dans  la  synagogue  à  l'occasion  de  la  mort  du  duc 
de  lien  y. 

Pendant  son  séjour  à  Home,  il  fait  la  connaissance 
de  Rossim;  à  Xaples.il  écrit  3  actes  de  ballet  pour  le 
théâtre  San-Carlo  et  trois  canzonelte  en  dialecte 
napolitain.  Pendant  les  trois  ans  qu'il  passe  ensuite 
en  Allemagne  et  en  Autriche,  il  va  voir  Beethoven 
et  s'essaye  dans  le  genre  du  grand  opéra  avec  une 
ouverture  à  grand  orchestre  et  un  final  italien  pour 
Marco  Curzio,  représenté  à  Vienne. 

A  son  retour  à  Pans,  en  1822,  Haléw  reprenait 
son  poste  au  Conservatoire;  mais  s'il  retrouvait  du 
travail  et  une  vie  assurée,  les  succès  du  théâtre  de- 
vaient se  faire  attendre  pour  lui.  Jusqu'à  la  première 
de  la  Juive,  c'est-à-dire  pendant  treize  ans,  il  va 
connaître  les  luttes,  les  déboires,  les  décourage- 
ments, les  déceptions  mêlés  de  quelques  victoires 
éphémères. 

Avant  son  départ  pour  l'Italie,  il  avait  écrit  pour 
l'Opéra  Les  Bohémiennes'qai  ne  furent  jamais  repré- 
sentées. Eratostrate,  un  opéra  en  trois  actes,  reçu 
en  1825  par  le  jury  de  lecture,  ne  fut  pas  même  mis 
en  répétition.  La  carrière  de  Pygmalibn  fut  un  peu 
plus  longue;  les  rôles  furent  distribués;  l'œuvre  ar- 
riva même  jusqu'aux  répétitions  du  quatuor;  mais 
elle  n'alla  pas  plus  loin.  Haueneck  s'y  opposa.  A  l'O- 
péra-Comique, l'Artisan  fut  peu  joué  en  1827. 

Cependant  on  reconnaissait  volontiers  la  valeur 
d'HALÉVY;  c'est  ainsi  qu'en  1826,  il  avait  été  nommé  ac- 
compagnateur, puis  chef  de  chant  au  Théâtre  Italien, 
en  remplacement  d'HÉROLD,  qui  passait  à  l'Opéra  avec 
avec  le  même  titre.  En  1828,  il  était  chargé  d'écrire 
pour  la  fête  de  Charles  X  une  pièce  de  circonstance, 
le  Roi  et  le  Batelier.  Son  poste  au  Théâtre  Italien  lui 
ayant  permis  d'étudier  toutes  les  ressources  de  la 
voix  de  la  Malibran,  il  écrivit  pour  elle  Clari,  sur  les 
paroles  du  Florentin  Giannone.  L'œuvre,  représentée 
en  1829,  fut  bien  reçue  du  public.  A  Clari  succéda 
la  même  année  le  Dilettante  d'Avignon.  Ces  imita- 
tions du  style  italien  contribuèrent  à  établir  la  répu- 
tation d'HALÉVY  auprès  du  grand  public,  mais  sans 
le  détourner  du  but  qu'il  poursuivait,  la  composi- 
tion d'un  grand  opéra. 

En  1827,  il  avait  été  nommé  professeur  d'harmonie 
et  d'accompagnement  au  Conservatoire.  Il  était, 
appelé  à  l'Opéra  comme  chef  du  chant,  à  côté  d'HÉ- 
ROLD, dont  il  épousait  la  fille.  Un  certain  nombre  de 
tentatives  heureuses  lui  gagnaient  la  confiance  de 
l'administration;  h  Manon  Lescaut,  un  ballet  joué  à 
l'Opéra  en  1830,  succède  Yelva,  un  opéra-comique  en 
un  acte,  qui,  mis  en  répétition,  ne  fut  jamais  repré- 
senté, le  théâtre  ayant  fermé  ses  portes  à  cause  des 
mauvaises  affaires  du  directeur.  En  1831,1a  nouvelle 
direction  de  l'Opéra-Comique  y  fait  jouer  la  Langue 
musicale.  Eu  1832,  Haléw  compose  la  partie  vocale 
d'un  ballet  mêlé  de  chants,  la  Tentation,  qui  est. 
monté  à  l'Opéra.  En  1833,  il  était  nommé  professeur 
décomposition  au  Conservatoire.  L'année  suivante, 
la  rentrée  de  Martin  à  l'Opéra-Comique  lui  fournis- 
sait l'occasion  d'écrire  un  petit  acte,  les  Souvenirs 


<le  La/leur,  qui  eut  du  succès.  La  même  année,  il 
était  choisi  pour  terminer  un  ouvrage  qu'HÉROLO 
avait  commencé,  mais  dont  il  n'avait  eu  le  temps 
d'écrire  que  quatre  morceaux,  Ludovic. 

1835  marque  l'apogée  de  la  carrière  musicale 
d'HALÉvy.  La  direction  de  l'Opéra  lui  avait  demandé 
une  œuvre  en  cinq  actes.  Scribe  en  écrivit  le  livret; 
c'était  la  Juive.  Ayant  à  décrire  les  souffrances  de 
ses  coreligionnaires,  Haléw  se  sentit  vraiment  ins- 
piré et  sut  trouver  des  accents  sincères.  Cependant, 
la  Juive  fut  reçue  assez  froidement;  la  richesse  des 
décors,  le  luxe  de  la  mise  en  scène,  tirent  croire  au 
public  que  la  musique  était  sacrifiée.  Les  envieux 
allaient  même  jusqu'à  prétendre  qu'HALÉw  avait 
puisé  dans  le  portefeuille  d'HÉROLD,  et  dérobéà  Ros- 
sini  le  trio  du  second  acte.  C'est  cependant  l'œuvre 
d'HALÉVY  qui  resta  le  plus  longtemps  au  répertoire. 

La  même  année,  il  donnait  à  l'Opéra-Comique 
l'Eclair,  dont  l'aisance  aimable  contrastait  singuliè- 
rement avec  la  sombre  tristesse  de  la  Juive. 

Après  l'Eclair,  Halévy  reste  deux  ans  et  demi 
avant  d'aborder  de  nouveau  la  scène.  En  mars  1838, 
il  fait  jouer  à  l'Opéra  Guido  et  Ginevra  ou  la  Peste  de 
Florence;  le  sujet  était  si  sombre  que  l'œuvre  eut 
peu  de  succès.  Les  années  suivantes  sont  malheu- 
reuses pour  Haléw;  elles  sont  marquées  par  deux 
échecs  successifs  :  celui  des  Treize  à  t'Opéra-Comi- 
que en  1839,  en  1840  celui  du  Drapier  à  l'Opéra.  En 
1841,  il  donnait  la  Reine  de  Chypre,  écrite  pour  la 
voix  de  Mmc  Stolz.  En  1843,  Halévy  trouvait  des 
accents  patriotiques  dans  Charles  VI ;  l'opéra  avait 
chance  de  tenir  longtemps  l'affiche;  des  raisons  d'E- 
tat en  interrompirent  les  représentations;  on  crai- 
gnit que  le  chant  «  guerre  aux  tyrans  »  n'amenât 
des  complications  extérieures. 

Halévy  donnera  encore  sur  les  scènes  de  l'Opéra- 
Comique  et  du  Théâtre  Lyrique  diverses  œuvres, 
parmi  lesquelles  on  peut  citer  les  Mousquetaires  de 
la  Reine,  le  Val  d'Andorre,  qui  en  1848  sauve  un 
théâtre  de  la  ruine,  la  Dame  de  pique  (1830),  la  Tem- 
pesta,  écrite  pour  le  théâtre  de  la  Reine  à  Londres 
(1850)  et  jouée  à  Paris  en  1851,  le  Juif  errant  (1852), 
le  Nabab  (1S33),  Jaguarita  l'Indienne  (1833),  Valen- 
tine  d'Aubigny  (1836),  la  Magicienne  (1857).  Mais 
jamais,  il  ne  tiendra  avec  aucune  de  ces  œuvres  u» 
succès  franc.  A  sa  mort,  il  laissait  inachevés  deux 
grands  opéras,  Vanina  d'Ornano  et  Noé  ou  If  Déluge. 

Cependant,  en  1836,  Halévy  avait  été  nommé 
membre  de  l'Institut;  il  devint  secrétaire  de  l'Aca- 
démie des  beaux-arts  en  1834,  à  la  mort  de  Raoul 
ltochette;  à  ses  travaux  comme  membre  de  l'Institut 
se  rattachent  des  Leçons  de  lecture  musicale  et  un 
Mémoire  sur  le  diapason.  Il  commença  la  publication 
d'un  Dictionnaire  des  Beau.r-Aiis. 

Malade,  il  refusa  d'abord  de  quitter  Paris  comme 
le  médecin  le  lui  conseillait  ;  il  savait  sa  présence  utile 
dans  les  six  commissions  dont  il  faisait  partie.  Enfin, 
devant  l'aggravation  de  son  état,  il  se  rendit  à  Nice, 
où  il  languit  tout  l'hiver,  entouré  des  soins  de  sa 
femme  et  de  ses  enfants.  Il  y  mourut  le  17  mai  1862. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES   DE  F.    HALÉVY 


l  :•<  Bohémiennes,  opéra,  non  représenté. 
/'•■  ■■  ■  le,  opéra,  non  représenté. 
Vijumiitinu,  l'prr.-i,  non  représenté. 
;.!•«  ttfitj  pavillons.  npéra-Comique. 
l'Artisan,  i  acte,  Théâtre  Feydeau. 
Le  Roi  et  te  Batelier. 
Cluri,  3  a.,  Théâtre  Italien. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3531 


1829.  Le  Dilettante  rfJiJw»,    1  a..  Théâtre  Feydeau. 

1830.  Attendre  et  eourir,  Opéra-Comique  (avec  de  Ruolz). 

1830.  Manon  Lescaut,  ballet,  3  a,  Opéra. 

IS30.   Yelva,  1  acte,  opéra-comique,  non  représenté. 

1831.  La  Langue  musicale,  1  acle,  Opéra-Comique. 

1832.  La  Tentation,  5  actes,  Opéra,  ballet  avec  chœur,  en  colla 

boration  avec  Gide. 

1834.  Les  Soutenir*  de  Lu/leur,  1  acle,  opéra-Comique. 

1835.  La  Jttire,  5  actes,  Opéra. 

183S.   Guido  et  Cinevra,  5  actes.  Opéra. 
1S39.  Les  Treize,  3  actes,  Opéra-Comique. 

1539.  LeSrhéri/T,  3  actes,  Opéra-Comique. 

1540.  Le  Drapier,  3  actes,  Opéra. 

1841.  La  Reine  de  Chypre,  5  actes,  Opéra. 
1841.  Le  Guitarero,  3  actes,  Opéra-Comique. 

1843.  Charles  VI,  5  actes,  Opéra. 

1844.  Le  Lassarone,  2  actes,  Opéra. 

1846.  Les  Mousquetaires  de  la  Urine,  3  actes,  Opéra-Comique. 

1847.  Les  Premiers  pas,   inauguration   de   l'Opéra    (avec   Ada 

et  Aubert). 

1848.  Le  Val  d'Andorre,  3  actes,  Opéra-Comique. 

1849.  La  Fée  aux  roses,  3  actes,  opéra-Comique. 
lsr.iï.  Lu  Dame  de  pique,  3  actes,  Opéra-Comique. 
185(1.  La  Tempesta,  Londres,  théâtre  de  la  Reine. 

1851.  La  Tempesta,  Paris,  Théâtre  Italien. 

1852.  Le  Juif  errant,  5  actes,  opéra. 
1853;   te  Naiab,  3  actes,  opéra-Comique. 

1S55.  Jaguarila  l'Indienne.  3  acles,  Thé/itre  Lyrique. 

1856.  Vanina  d'Anhigny,  3  actes,  Opéra-Co pie. 

1S5S.  La  Magicienne,  5  actes,  Opéra. 

1858.   Valeiitine  d'Ornano,  opéra  laissé  inachevé. 

1858.  Noé  ou  le  déluge,  opéra  laissé  inachevé. 

MUSIQUE:    VOCALE 

1S  mars  1849.  Quelques  scènes  du  l'rnmcthrc  d'Eschyle  traduite 
par  son  frère  Léon  Ilalévy.  Conservatoire. 

Cantate,  les  Plages  du  SU. 

Plusieurs  Messes.  —  De  profundis.  —  Romances. 

Chœurs  orphèoniqncs  parmi  lesquels  :  France  et  Italie,  Chant  du  [m 
geroa,  y  ourdie  Alliance. 


.11  si.jr-i.- 


IUMENTALE 


n.i-s 


Nombreux  Eloges  et  Soliees 

beaux-arts. 
I. crans  de  lecture  musicale.  Taris.   1  s r. 7  . 
Stiurenirs  cl  portraits,  Paris,  ISOI. 
Derniers  Souvenirs  cl  portraits,  Paris,   1  863. 

<>u  lui  attribue: 
Sous  le  pseudonyme  iI'Ai.herti,  l'Inconsolable, 

Lyrique,   13  juin  1S55. 
Cantate  officielle  Italie,  Opéra-Comique,  7  juii 


ecrelaire  de  l'Académie  des 


de  F.  liai, 


Bibliographe 


Beolk.  —  Notice  sur  la  rie  cl  les   ouvrai 

prononcé  à  l'Académie  des  beaux-arts. 
Bi.aze  de  Bury.  —  Musiciens  du  pusse,    du  présent  1!  de  larcin  -, 

Paris,  1880. 
Comettaxt.  —  Les  Compositeurs  illusties  de  nuire  siècle,  Paris, 

1S83. 
P. -A.  Fiorextixo.  —  Préface  des  Derniers  Soiirenirs  de  F.  tint.-.  1, 

Paris,  1S63. 
Fins.  —  Biographie  universelle  des  musiciens. 
A.  Pougix.  — Supplément  ,1  la  Biographie  uuircrsrlle. 
Orove's.  —  Dictionary  of  music  and  musiciens,  London,   1910. 
Léon  Haléyy.  — F.  ilalen/.sa  vie,  ses  a-unes,  in-8",  Paris.  1802 

(2' version  dans  le  Ménestrel,  1SÛ3). 
—   Hommage  à  F.  Halerg.   intermède   lyrique,    opéra-Comique, 

27  mai  1864,  musique  de  Jules  Cohens  sur  des  motifs 

tirés  des  opéras  d'ILu.KvY,  Paris,  Heugel,  1S64,  in-S». 
Edouard  Monnais.  —  F.  Ilafénj,  sinirc/nrs  d'un  ami,  pour  joindre 

il  ceux  d'un  frère,  Paris,  1903.  in-8«. 
A.  Pocgix.  —  F.  llalenj  écrivain,  Paris.  1805.  in-S". 
Richard  Wagner.  —  Œuvres  eu  prose,  traduction  de  Prud'homme, 

tome  I,  Paris. 
Rci  ne  des  lieux  Mondes  :  La  Reine  de  Chypre,  1"  janvier   1842.  — 

Charles  VI,  15  avril  1813.  —  La  Tempesta,  1"  août  1850, 

1er  février  et  15  mars  1851.  —  Le  Nabab,   15  novembre 

1S53.  —  LaJaguarila.   1  cr juillet  1S55.  —  Lu  Magicienne, 

1"  avril  185S.  —  L'Éclair,  15  juin  1S64.  —  La  Reine  île 

Chypre,  15  août  1877. 


Charles  Lenepveu. 

Charles- Ferdinand  Lrnepveu  naquit  le  i  octobre 
1840,  au  numéro  34  de  la  rue  de  l'Ecole,  à  Rouen. 
Son  père,  avocat  à  la  Cour  d'appel,  le  destinait  au 
barreau  ou  à  la  magistrature.  Aussi  lui  fit-il  faire 
au  lycée  de  Houen  de  solides  études  classiques,  et, 
jusqu'à  son  baccalauréat,  ce  fut  seulement  dans  ses 
heures  de  loisir  qu'il  put  se  livrer  à  la  musique,  pour 
laquelle  il  éprouvait  déjà  une  véritable  passion. 
C'est  ainsi  qu'il  fut  autorisé  à  apprendre  le  solfège 
et  le  violon,  à  la  condition  formelle  que  ces  éludes 
d'agrément  ne  nuiraient  pas  à  sou  travail. 

Une  fois  bachelier,  Lenepveu  obtint  l'autorisation 
de  venir  à  Paris  poursuivre  ses  éludes  de  droit.  Sans 
doute  espérait-il,  à  la  faveur  de  cet  éloignement, 
pouvoir  plus  librement  continuer  ses  études  musi- 
cales, les  seules  qui  l'intéressaient.  Sans  en  rien  dire 
à  sa  famille,  il  étudia  avec  Savard  le  solfège  et  l'har- 
monie, et  s'initia,  sous  la  direction  de  Chauvet, 
organiste  de  la  Trinité,  aux  secrets  du  contrepoint 
et  de  la  fugue.  Pour  la  première  fois,  en  1862,  il  osa 
se  produire  en  public  et  lenter  les  chances  d'un  con- 
cours. La  Cantate  qu'il  composa  pour  le  Centenaire 
de  la  Société  d'agriculture,  de  commerce  et  d'industrie 
de  Caen  fut  couronnée  et  exécutée  le  22  juillet  à  l'hô- 
tel de  ville  de  Caen. 

Sans  enthousiasme,  Lenepveu  termina  son  droit, 
ne  perdant  aucune  occasion  de  marquer  à  ses  pa- 
rents sa  volonté  de  se  livrer  exclusivement  à  la  mu- 
sique. Enfin,  licencié  en  droit,  malgré  l'opposition 
palernelle,  il  entra  au  Conservatoire  dans  la  classe 
d'Ambroise  Thomas. 

En  1865,  il  concourt  pour  le  prix  de  Home;  classé 
le  second  pour  l'entrée  en  loge,  il  obtient  à  l'unani- 
mité le  premier  grand  prix  avec  la  cantate  Renaud 
dans  les  jardins  d'Armide,  qui,  exécutée  le  :;  janvier 
1866  au  Conservatoire,  est  favorablement  accueillie 
du  public. 

Le  séjour  qu'il  fait  à  la  Villa  Médicis  contribue 
à  la  formation  de  son  esthétique;  les  discussions 
qu'il  a  avec  les  autres  pensionnaires,  la  vue  des  mer- 
veilles artistiques  de  Borne  développent  en  lui  cer- 
taines théories  auxquelles  il  restera  fidèle.  En  même 
temps,  il  se  prépare  au  concours  de  composition 
dramatique  institué  par  le  ministre  des  beaux-arts, 
et  le  Florentin,  tout  imprégné  des  parfums  de  l'Italie, 
est  couronné  en  1860. 

Pendant  la  guerre,  Lenepveu  considère  comme  étant 
de  son  devoir  de  quitter  Rouen,  où  il  se  reposait,  pour 
venir  s'enfermer  dans  Paris.  L'inlluence  de  l'année 
terrible  se  fait  sentir  non  seulement  dans  la  Messe  de 
Requiem  exécutée  à  Bordeaux  le  20  mai  1871,  au  pro- 
fit des  victimes  et  des  orphelins  de  la  guerre,  mais 
dans  presque  toutes  ses  œuvres  postérieures,  toutes 
échauffées  d'un  patriotisme  ardent  et  sincère. 

Cependant,  la  direction  de  l'Opéra-Comique  hésitait 
à  faire  représenter  le  Florentin;  pour  triompher  de 
sa  mauvaise  volonté,  il  fallut  une  campagne  de  presse 
et  un  ordre  formel  de  l'administration  des  beaux- 
arts.  L'œuvre,  jouée  le  2o  février  1874,  fut  reçue  avec 
sympathie;  le  succès  aurait  pu  s'affirmer,  si  la  direc- 
tion avait  tenté  le  moindre  elfort  pour  soutenir  la 
pièce;  elle  ne  fit  rien,  et  le  Florentin  ne  fut  donné 
que  huit  fois.  La  pièce,  par  la  suite,  devait  être  montée 
à  Bordeaux,  à  Aix,  à  Rennes,  à  Marseille.  Sans  doute, 
Lenepveu  ne  s'y  est  pas  encore  complètement  dégagé 
des  influences  d'école;  on  le  sent  hanté  du  souveni 


.V.:S2 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONS  AIRE  DU  CONSERVATOIRE 


de  Mbyi  rberr,  de  Gounod  et  de  Verdi,  soucieux  île 
prouver  son  savoir;  mais  on  a  pu  justement  y  louer 
la  clarté  el  l'aisance  dans  !<•  maniement  des  masses. 
Découragé  par  Le  peu  de  succès  du  Florentin,  Le- 
mim'.i  reprend  sa  Messe  de  Requiem,  son  oeuvre  de 
prédilection,  colle  à  laquelle  il  reviendra  toute  sa 
vie.  Il  paraît  se  désintéresser  du  théâtre,  et  cepen- 
dant, il  se  met  à  la  recherche  d'un  livret;  il  refuse 
une  Clarine;  il  parcourt  les  vieilles  chroniques,  relit 
Augustin  Thierry,  s'enthousiasme  pour  l'évêque  Pré- 
textât. Un  jour  enfin,  un  de  ses  amis,  dont  les  con- 
seils le  réconfortaient,  lui  signale  la  figure  de  Vel- 
léda.  Lenepveu  se  met  à  l'œuvre  et  termine  rapide- 
ment les  quatre  actes  de  son  opéra.  Les  difficultés 
commencèrent  quand  il  s'agit  de  le  faire  représen- 
ter ;  Lenepveu  ne  savait  pas  solliciter  :  plutôt  que 
de  consentir  à  des  démarches  qu'il  considérait 
comme  humiliantes,  il  garda  sa  partition,  jusqu'au 
jours  où  la  Patti,  mise  au  courant  de  l'affaire  par 
Jules  Hia/.  de  Soria,  lui  demanda  à  l'entendre.  L'œuvre 
lui  plut;  elle  la  présenta  au  théâtre  de  Covent  Gar- 
den,  et  y  créa  le  rôle  de  Velléda  le  4  juillet  1882.  En 
France,  l'œuvre  ne  fut  montée  qu'au  Théâtre  des  Arts 
de  Rouen.  Aujourd'hui,  malgré  des  qualités  réelles, 
l'œuvre  parait  vieillie,  car  elle  date  d'une  époque  où 
l'on  exigeait  encore  du  compositeur  tous  les  orne- 
ments qui  pouvaient  faire  valoir  le  ténor  ou  le 
soprano.  C'est  la  seconde  et  la  dernière  œuvre  de 
Lenepveu  écrite  pour  le  théâtre. 

Vers  188,ï,  commence  une  nouvelle  période  dans 
la  vie  de  jLenepvei'.  Malgré  le  temps  que  lui  pre- 
naient ses  fonctions  de  professeur  de  la  classe  d'har- 
monie femmes  du  Conservatoire  (1881)  el  d'inspec- 
teur de  l'enseignement  musical,  il  compose,  surtout 
pour  la  ville  de  Rouen,  quelques  œuvres,  dans  les- 
quelles se  manifeste  plus  nettement  sa  personnalité. 
Le  19  mars  1885,  à  l'occasion  du  deuxième  cente- 
naise  de  P.  Corneille,  on  exécute  au  palais  archié- 
piscopal de  Rouen  une  Méditation  sur  la  traduc- 
tion de  Corneille  d'un  texte  de  l'Imitation  (III,  40). 
Msr  Thomas  lui  demande  une  nouvelle  œuvre;  c'est 
la  Jeanne  d'Arc,  en  forme  d'oratorio,  exécutée  par 
500  chanteurs  et  instrumentistes  dans  la  cathédrale 
de  Rouen  le  1er  juin  1886,  reprise  à  Bordeaux,  à  Tou- 
louse, à  Marseille,  à  Dijon,  à  Besancon,  à  Lille,  à 
Valenciennes,  au  Havre,  à  Saint-Omer,  etc.,  et  con- 
nue à  Paris  seulement  par  la  Marche  funèbre,  mise 
au  programme  des  concerts  Lamoureux  en  1897.  La 
même  année,  en  1886,1a  Société  Guillot  de  Sainbris 
interprète  une  lphiyCnie  de  Lenepveu,  el  le  14  juillet 
1889,  à  la  demande  de  la  municipalité  de  Rouen, 
il  écrit,  pour  l'inauguration  du  mausolée  élevé  à  la 
mémoire  des  soldats  morts  pour  la  patrie,  un  Hymne 
funèbre  et  triomphal  dans  lequel  circulent  les  accents 
de  la  Marseillaise.  Cet  Hymne  a  été  plus  tard  exécuté 
dans  diverses  circonstances  :  à  Abbeville,  pour  l'inau- 
guration du  monument  de  l'amiral  Courbet;  à  Be- 
sançon, pour  la  fête  commémorative  du  cimetière  du 
Champ  Bruloy  :  à  Angoulème,  pour  l'inauguration  du 
monument  Carnot. 

Pendant  quatre  ans,  Lenepveu  ne  produit  aucune 
œuvre  importante;  en  1892,  l'inauguration  à  Rouen 
de  la  statue  de  Jeanne  d'Arc  de  Barrias  lui  fournit 
l'occasion  d'écrire  son  Ode  triomphale,  qui  est  comme 
le  prolongement  et  le  couronnement  de  sa  Jeanne 
d'Arc. 

Enfin,  le  23  mars  1893,  on  exécute  à  Rouen  son 
œuvre  capitale,  cette  Messe  de  Requiem,  qui  l'avait 
occupé  toute  sa  vie.  De  la  première  version  de  1871 


dont  on  avait  pu  entendre  des  fragments  chez  Pas- 
deloup,  chez  Colonne  et  chez  Lamoureux,  il  ne  restait 
que  \' Introït  et  le  Dies  ira?. 

Plus  encore  qu'un  compositeur,  Lenepveu  a  été  un 
professeur,  et  là  peut-être  est  sa  véritable  gloire. 
Avant  d'accepter  le  poste  qui  lui  était  offert  au  Con- 
servatoire, Lenepveu  s'était  essayé  dans  le  professo- 
rat libre;  il  ne  voulait  pas  s'engager  dans  l'enseigne- 
ment avant  d'être  certain  que  le  professorat  ne  le 
rebuterait  pas.  Lorsque,  en  1881,  il  eut  accepté  une 
chaire  de  professeur  d'harmonie,  il  donna  à  ses 
élèves  la  plus  grande  partie  de  son  temps.  Avec 
Théodore  Dubois,  il  fut  un  de  ceux  qui  contribuè- 
rent le  plus  au  relèvement  des  études  harmoniques 
au  Conservatoire.  En  1893,  il  était  chargé  d'une 
classe  de  composition,  et  les  succès  de  ses  élèves  aux 
concours  pour  le  prix  de  Rome  témoignent  de  l'ex- 
cellence de  son  enseignement.  Dans  les  trois  der- 
nières années  de  sa  vie,  gravement  malade,  il  n'avait 
pas  voulu  abandonner  sa  classe,  où  Georges  Caussade 
le  suppléait;  il  tenait  à  assister  aux  concours  de 
Rome,  bien  que  paralysé  du  côté  droit.  Comme  il  ne 
pouvait  marcher,  on  le  portait.  Et  il  y  avait  quelque 
chose  d'émouvant  à  voir  cet  homme  obstiné  à  son 
devoir,  malgré  la  souffrance. 

Depuis  1896,  il  avait  succédé  à  l'Institut  à  son 
ancien  professeur  Ambroise  Thomas.  Il  mourut  en 
1910. 

Sans  doute,  son  œuvre,  presque  uniquement  con- 
sacrée à  la  glorification  de  Jeanne  d'Arc  et  au  sou- 
venir de  ceux  qui  sont  morts  pour  la  patrie,  ne 
marque  pas  une  date  dans  l'histoire  de  la  musique. 
Traditionnahste,  il  a  voulu  tout  exprimer  dans  la 
langue  un  peu  restreinte  des  vieux  auteurs,  et  n'a 
jamais  cherché  de  frisson  nouveau. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DK  LENEPVEU 

MUSIQUE    INSTRUMENTALE 

Piano  seul.  Barcarolle.  Berceuse,  Ballade.  Caprice.  Divertissement 

île  Vellida.  Marche  funèbre  'le  Jeanne  (l'Arc. 
Piano  à  4    mains.  Divertissement   île    Vellida.   Marche  funèbre  de 

Jeanne  d'Arc. 
2  pianos  à  4  mains.  Marche  funèbre  de  Jeanne  d'Arc. 
2  pianos  à  4  mains  avec  harmonium.  Marche  du  sacre  de  Jeanne 

d'Arc. 
Piano  et  violon  ou  violoncelle.  Romance  sans  paroles. 
Piano  et  violon  ou  alto.  Récit  el  cantaHle: 

MCSIQOE    RELIGIEUSE 

OSalularis  (ténor).  —  0  Salnlaris  (ténor  avec  orgue  et  violon- 
celle). —  Are  Maria  (ténor,  soprano).  —  Laudale  Domiuiim 
(soli,  chœurs,  orchestre  et  orgue).  —  Messe  de  mariage.  — 
Salve  Regina  (baryton).  —  Le  même  (ténor).  —  Le  même 
(soprano).  —  Sub  luum,  chœur  à  quatre  voix  mixtes.  — 
Tautum  enja  (chœur  à  quatre  voix  mixtes.  —  Messe  de  Re- 
i/uiem  (soli,  chœurs,  orchestre  et  orgue). 

MÉLODIES    ET    SCENES    LTRIQUES 

Adieu  (A.  de  Musset).  —  Aubade  (Ed.   Guinaud).  —  Aujourd'hui 

'  (Ed.   Blau).   —  Chant  du  CrèpUSCUlç  (V.   HUgo).  —  Chanson 

(A.  de  Musset).  —  Contemplation  (A.  de  Musset).  —  Dor» 
mense  (Ed.  Guinaud).  —  l'eut!  d'avril  (A.  Theurieti.  — 
Fils  de  la  Vierge  (S.  Bordèse).  —  Gloria  rictis  (J.  Chante- 
pie).  _  la  Jeune  Captive  (A.  Chénier).  —  Lamenta  (Th. 
.  Gautier).  —  Nocturne,  scène  d'tlernani  (V.  Hugo).  —  /.» 
Notice  (Alex.  Bisson).  —  Le  Porte  mourant  (Millevoye).  — 
Rêverie  (Ed.  Guinaud).  —  Rappelle-toi  [A.,  de  Musset).  — 
Souvenir  (V.  Hugo).  —  Vision  (D.  Gérard). 


Renaud  et  Armide,  soprano  et  ténor  (Gain,  du  Locle). 
t)  doux  printemps  soprano  et  contralto  (Ed.  Guinaud). 
Idylle,  mezzo-soprano  et  baryton  (Paul  Fuona), 
Méditation,  soprano  et  contralto  (P.  Corneille). 
Salve  Regiita,  mezzo  soprano  etbaryton,  orgue  et  baijm 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3533 


CHŒURS    A   QUATRE    VOIX 

Cantate  pour  le  centenaire  île  lu  Société  d'agriculture,  de 

d'industrie  de  Cuen  (inédit). 
La  Caravane,  deux  ténors  et  deux  Lasses  (Ad.  Vautier). 
Recueil  de  leçons  d'harmonie. 
Iphii/enie  (Ed.  Guinaud). 
Méditation  (P.  Corneille). 

Hymne  funèbre  et  triomphal  (V.  Hugo),  chœur  et  orchestre. 
Le  même,  chœur  et  harmonie. 

Dde  triomphale  à  Jeanne  d'Arc  (Paul  AUard),  chœur  et  orchestre. 
La  même,  chœur  et  harmonie. 


L'Anniversaire,   opéra-comique,    1    acte  (Alex.  Bisson),  dans    le 

journal  le  Magasin  des  demoiselles. 
Le  Retour  de  Jeanne,  opéra-comique,  1  acte  (Alex.  Bisson). 
Le  Florentin,  opéra-comique,  3  actes  (H.  de  Saint-Georges). 
Vellêda,  opéra.  4  actes  (A.   Challamel  et  J.  Chantepie). 
Jeanne  d  Arc,  drame  lyrique.  3  parties  (Paul  AUard). 

Bibliographie. 

Brévannes.—  Article  surCh.  Lenepecu,  Mu  sic  a .  octobre  1910. 

Grove's.  —  Dicliouiirij  of  music  and  musicians,  London,  1910. 

A.  Podgin.  —  Supplément  d  la  Biographie  universelle  des  musiciens 
de  Fétis. 

Revue  des  Deux  Mondes,  15  janvier  1S96. 

H.  Rieman.n.  —  Dictionnaire  île  musique,  traduction  de  G.  Hou- 
bert.  Paris,  Perrin,  1899. 

Raoul  de  Saint-Arroman.  —  Charles  l.enepreu.  étude  biographi- 
que, Paris,  le  Journal  musical,  1898. 


Lesueur. 

Jean-François  Sueur,  dil  Lesueur,  est  né  le  15  fé- 
vrier 1760  au  hameau  de  Plessiel,  près  d'Abbeville. 
Son  père  était  un  paysan,  batleur  en  grange  chez 
M.  Descaule,  receveur  du  domaine  de  Ponthieu. 
Avec  l'appui  de  son  patron,  il  réussit  à  faire  entrer 
le  petit  Jean-François  à  la  maîtrise  de  Saint-Vulfran 
d'Abbeville,  d'où  il  passa  peu  de  temps  après  (1770) 
à  celle  de  la  cathédrale  d'Amiens. 

Une  maîtrise  était  alors  un  petit  internat,  où  une 
douzaine  d'enfants,  liés  par  un  engagement  de  dix 
ans,  menait  une  vie  fort  laborieuse,  chantant  à  l'é- 
glise le  dimanche,  de  quatre  heures  du  matin  à  midi, 
recevant  pendant  la  semaine  des  leçons  de  latini 
d'arithmétique,  de  chant,  de  contrepoint,  el  même 
de  composition.  Au  xvin8  siècle,  la  maîtrise  d'Amiens 
passait  pour  la  meilleure  de  France. 

A  16  ans,  le  talent  de  Lesueur  était  déjà  reconnu, 
puisqu'il  obtenait  du  chapitre  que  de  la  musique  de 
sa  composition  serait  exécutée  dans  la  cathédrale  à 
la  fête  de  l'Assomption. 

Le  2  octobre  1776,  il  quittait  la  maîtrise,  par  autori- 
sation spéciale,  avant  le  terme  fixé  dans  son  engage- 
ment, et  il  entrait  au  collège  d'Amiens  pour  y  faire 
sa  rhétorique.  Avant  même  la  Un  de  l'année  scolaire, 
il  renonçait  à  ces  nouvelles  études,  pour  accepter  la 
place  de  maître  de  musique  de  la  cathédrale  de  Séez, 
près  d'Alençon. 

Lesueur  resta  deux  ans  à  Séez.  Il  fut  alors  nommé 
sous-maître  à  l'église  des  Saints-Innocents  de  Paris, 
et  comme  ses  fonctions  lui  laissaient  quelque  loisir, 
il  en  profita  pour  prendre  des  leçons  d'harmonie 
avec  l'abbé  Rose. 

En  1781,  Lesueur  obtenait  la  direction  d'une  aussi 
importante  maîtrise,  celle  de  la  cathédrale  de  Dijon. 
Là  il  trouva  un  riche  amateur,  M.  Songer,  conseil- 
ler au  Parlement,  qui  mit  à  sa  disposition  sa  riche 
bibliothèque.  Lesueur  y  put  lire  une  foule  de  parti- 
tions, surtout  italiennes,  qu'il  ne  connaissait  pas  en- 
core. Mais  Lesueur  quittait  bientôt  Dijon  pour  Saint- 
Martin  de  Tours,  et  en  1 784,  il  revenait  à  Paris,  comme 


maître  de  musique,  cette  fois,  à  l'église  des  Saints- 
Innocents. 

Il  entre  en  ce  moment  en  relations  avec  Sacchini,, 
qui  lui  donna  quelques  conseils  el  lui  accorda  sa 
protection.  C'est  ainsi  qu'en  1785  Lesueur  put  faire 
entendre  au  Concert  Spirituel  une  ode  de  J.-B.  Rous- 
seau qu'il  avait  mise  en  musique,  et  qui  fut  accueil- 
lie avec  assez  de  faveur. 

Voici  Lesueur  à  la  veille  de  devenir  célèbre.  La 
place  de  maître  de  chapelle  de  Notre-Dame  étant 
devenue  vacante  fut  mise  au  concours,  et  notre  jeune 
musicien  l'obtint.  Tout  de  suite,  il  voulut  réaliser  des 
projets  de  rénovation  de  l'art  musical  religieux, 
qu'il  portait  depuis  longtemps  dans  sa  tête.  Substi- 
tuer aux  simples  chants  rituels  de  véritables  orato- 
rios, comme  il  le  dit  lui-même,  des  «  drames  sa- 
crés »,  pendant  les  célébrations  des  offices  solennels, 
tel  était  son  but.  Les  moyens  employés  dans  de  telles 
œuvres  devaient  être,  selon  lui,  les  mêmes  que  ceux 
de  la  musique  dramatique,  avec  une  plus  grande 
part  encore  peut-être  pour  l'imitation,  la  descrip- 
tion. De  plus,  chaque  composition  devait  s'adapter 
étroitement  aux  circonstances  religieuses  de  la  fête 
à  célébrer.  «  Ainsi,  le  Kyrie  de  la  Messe  de  Noël  ne 
doit  point  être  désolé,  mais  respirer  la  confiance 
des  fidèles  qui  savent  que  ce  jour  leur  apporte  la 
rédemption.  »  C'est  le  motet  chanté  la  veille  de  la 
fête  qui  servira  de  base  à  tout  l'édifice  sonore,  jouant 
ainsi  un  rôle  jusqu'à  un  certain  point  analogue  à 
celui  de  I'  »  idée  fixe  »  de  Berlioz  et  du  «  motif  conduc- 
teur »  de  Wagner.  Ce  sera  de  la  «  musique  à  pro- 
gramme »,  dont  toutes  les  intentions  demandent  à 
être  éclairées  par  des  notices  explicatives  que  l'au- 
teur ne  se  fera  pas  faute  de  développer  abondam- 
ment, et  qui  seront  distribuées  avant  l'exécution  de 
chaque  oratorio.  Quatre  Messes  solennelles  furent 
aussi  composées  à  cette  époque  par  Lesuf.ur  pour 
Noël,  pour  Puques  et  pour  l'Assomption.  Elles  n'ont 
point  élé  gravées  et  se  sont  perdues.  On  peut  se  faire 
une  idée  de  ce  qu'elles  devaient  être  d'après  trois 
Messes  solennelles  et  ['Oratorio  de  Noèl  publiés  qua- 
rante ans  plus  tard.  «  La  première  impression  qu'on 
ressent,  dit  M.  F.  Lamy,  est  un  peu  de  surprise.  Les 
théories  de  Lesueur  vous  ont  préparé  à  des  compli- 
cations très  grandes  :  on  se  trouve  devant  une  mu- 
sique d'une  extrême  simplicité  :  presque  pas  de 
contrepoint;  une  harmonie  plutôt  pauvre;  jamais 
un  accord  dissonant,  peu  de  modulalions  et  seule- 
ment aux  tons  voisins.  Rien  que  des  chants  super- 
posés sur  une  série  d'accords  parfaits...  Mais  les 
rythmes  sont  variés  et  bien  choisis.  Les  voix,  sans 
complications  inutiles,  sont  habilement  disposées. 
Sans  apprêt,  mais  d'un  dessin  net  et  d'un  ton  origi- 
nal, la  mélodie  est  franche,  naturelle,  claire,  ex- 
pressive. » 

Dès  la  première  audition  de  ces  curieuses  Messes 
(15  août  1786),  le  succès  fut  considérable,  et  il 
grandit  encore  par  la  suite.  Cela  devint  de  l'en- 
gouement. La  reine  Marie-Anloinette  fit  appeler 
Lesueur  pour  le  féliciter.  L'archevêque  de  Paris 
voulait  l'attacher  définitivement  à  l'Eglise,  et  le  faire 
entrer  dans  les  ordres. 

Les  envieux  entrèrent  alors  en  scène,  et  cherchèrent 
à  ruiner  la  situation  du  jeune  et  heureux  artiste.  Des 
facturas  circulèrent  dans  lesquels  on  représentait 
cette  musique  nouvelle  comme  contraire  à  l'esprit 
véritable  de  la  religion;  et  l'on  insistait  sur  le  scan- 
dale d'une  niasse  chantée  par  des  «  chanteurs  d'o- 
péra ».  On  surnomma  bientôt  Notre-Dame  «  l'Opéra 


:;!■>!•■ 


'NCYCLOPÉIUE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


des  gueux  ».  <>n  lit  tant  et  si  bien  qu  un  mois  après 
l'exécution  de  la  Ifessa  de  Vtetomption  (13  août  1787), 
qui  fut  un  triomphe  pour  l'auteur,  Lesurur  élait  re- 
mercié par  le  chapitre  Je  Notre-Dame,  et  se  trouvait 
sans  place. 

Tous  les  confrères  île  Lesurur  rendirent  alors  un 
bel  hommage  à  son  talent  et  à  son  caractère.  Una- 
nimement, ils  refusèrent  sa  succession.  Un  concours 
lut  annoncé  :  personne  ne  se  présenta.  On  finit  par 
confier  à  un  étranger  une  partie  des  fonctions  qui 
avaient  été  exercées  auparavant  par  Lesueur,  mais 
il  n'y  eut  plus  de  maître  de  chapelle  en  titre  à  Notre- 
Dame  jusqu'à  la  Révolution. 

Chassé  de  l'église,  Lesueur  se  tourne  vers  le 
théâtre.  Il  avait  fait  recevoir  à  l'Opéra  un  Télémaque 
qui  n'y  avait  pas  encore  été  représenté.  11  se  mit  au 
travail  pour  remanier  cet  ouvrage,  et  il  composa 
sur  un  livret  du  même  auteur,  Dercy,  La  Caverne, 
un  drame  lyrique  en  trois  actes  qui  fut  accepté  au 
Théâtre  Feydeau. 

Cependant  un  généreux  ami,  le  chanoine  Bochart 
de  Champigny,  possesseur  d'une  très  grande  fortune, 
avait  offert  à  Lesueur  le  vivre  et  le  couvert,  et  le  déli- 
vra ainsi  de  tout  souci  matériel. 

La  première  représentation  de  la  Caverne  eut  lieu 
le  21  février  1793.  Ce  fut  un  succès  prodigieux,  qui  se 
maintint  pendant  plus  de  cent  représentations  dans 
l'espace  de  quinze  mois.  Les  théâtres  de  province 
reprirent  la  pièce  et  la  conservèrent  longtemps  à  leur 
répertoire.  Elle  se  jouait  encore  à  Nantes  en  1831. 

Le  13  janvier  1794,  nouveau  succès  de  Lesueur  au 
Théâtre  Feydeau  avec  Paul  et  Virginie. 

Deux  ans  après  (mai  1796),  Télémaque  dans  l'île 
de  Calypso  ou  le  Triomphe  de  la  sagesse  paraissait 
enfin  sur  la  même  scène,  et  recueillait  à  son  tour  les 
applaudissements  du  public. 

Dans  l'avertissement  que  l'auteur  a  fait  imprimer 
en  tète  de  la  partition,  nous  lisons  qu'il  s'est  attaché 
à  mettre  en  usage  «  les  diverses  propriétés  des 
modes,  nomes,  rythmes  et  mélopées  de  la  musique 
antique  ».  Et  nous  aurons,  en  effet,  une  ouverture  sur 
le  mode  hypodorien  et  sur  le  nome  spondaïque, 
selon  la  mélopée  mésoïde,  un  chœur  sur  le  nome 
dactylo-spondaique,  etc.,  etc.  Il  y  avait  beaucoup  de 
chimère,  de  rêverie,  d'aventureuses  hypothèses  dans 
la  prétendue  érudition  de  Lesueur.  Il  est  incontes- 
table cependant  qu'il  tira  quelque  parti  de  l'étude 
des  rythmes  antiques.  Il  voulait  aussi  —  et  cela 
est  assez  remarquable  —  obtenir,  encore  à  l'imi- 
tation des  Grecs,  «  l'accord  parfait  et  simultané  des 
traits  mimiques  et  pittoresques  de  l'orchestre  avec 
l'action  de  la  scène,  avec  l'attitude  et  les  mouve- 
ments de  l'acteur  chantant  ».  Combien  d'artistes 
l'ont  eue,  celte  idée!  Il  fallut  la  puissance  de  génie 
d'un  Wagner  pour  la  réaliser. 

Mais  la  Révolution  ouvrait  une  autre  carrière  à 
l'activité  des  musiciens.  Comme  Grétry,  comme 
Méhul,  comme  Catel,  Cherubini  ou  Gossec,  Lesueur 
fournit  sa  contribution  aux  grandes  fêtes  nationales. 
Ce  fut  d'abord  le  Chant  des  triomphes  de  la  République 
de  la  Harpe,  qu'il  mit  en  musique  pour  la  fête  du 
30  vendémiaire  an  III  (21  oct.  1794).  Puis  il  com- 
posa successivement  un  Hymne  en  l'honneur  de  l'a- 
griculture, un  Hymne  pour  la  fête  de  la  vieillesse,  un 
Chant  pour  le  9  Thermidor  et  un  Chant  national  pour 
l'anniversaire  du  21  janvier  (ces  deux  derniers  sont 
perdus).  Son  œuvre  capitale,  dans  ce  domaine,  fut  le 
Chant  du  /"  Vendémiaire,  qu'il  écrivit  sous  le  Con- 
sulat, en  1800.  Il  y  employait  quatre  chœurs,  deux 


avec  les  orchestres  disposés  dans  les  deux  bas 
côtés  de  la  nef  (la  cérémonie  avait  lieu  à  la  chapelle 
des  Invalides),  un  troisième  dans  la  coupole  avec 
des  harpes,  le  dernier  dans  la  tribune  de  l'orgue.  Il 
renchérissait  sur  Méhul,  qui,  le  14  juillet  précédent, 
n'avait  usé  que  de  trois  chœurs. 

Dès  le  21  novembre  1793,  Lesueur  était  entré 
comme  compositeur  à  ['Institut  national  de  musique 
créé  par  la  Convention.  Lorsque,  le  3  août  1793,  cette 
école  fut  réorganisée  sous  le  nom  de  Conservatoire 
national  de  musique  et  de  déclamation,  Lesueur  fut 
désigné  comme  l'un  des  cinq  inspecteurs  chargés 
de  la  direction.  On  sait  comment  le  trop  habile 
Saiuiette  finit  par  se  substituer  à  ce  comité  de  cinq 
musiciens  comme  administrateur,  puis  comme  di- 
recteur véritable  du  Conservatoire.  Lesueur,  qui  était 
un  homme  très  honnête,  très  généreux,  très  désin- 
téressé, mais  plein  d'illusions,  un  peu  trop  suscep- 
tible et  prodigieusement  maladroit,  eut  le  tort  d'user 
maintes  fois  vis-à-vis  de  Sarrette  d'une  trop  rude 
franchise.  11  s'en  fit  un  ennemi.  La  lutte  fut  vive 
entre  les  deux  adversaires.  Elle  se  termina  par  la 
défaite  de  Lesueur,  qui  fut  obligé  de  donner  sa  dé- 
mission, et  resta  sans  ressources  pour  vivre  et  pour 
faire  vivre  son  père  qu'il  avait  pris  avec  lui,  ainsi 
qu'un  petit  neveu  orphelin. 

Fort  heureusement,  il  arriva  peu  de  temps  après 
(mars  1804)  que  Paisiello  quitta  son  emploi  de 
maître  de  chapelle  du  premier  consul,  et  Lesueur 
hérita  de  ses  fonctions,  avec  mille  francs  par  mois 
d'appointements. 

Voilà  Lesueur  revenu  à  la  musique  d'église.  Pour 
les  messes  fort  courtes  (elles  ne  duraient  que  vingt- 
cinq  minutes)  du  premier  consul,  devenu  bientôt 
l'empereur,  Lesueur  composa  un  grand  nombre 
d'oeuvres  qu'il  appelle  des  oratorios,  mais  qui  sont 
plutôt  des  motets  largement  développés,  offrant  tou- 
jours, dit  M.  F.  Lamy,  «  le  contraste  d'intentions  très 
compliquées  avec  des  procédés  très  simples  ».  Une 
partie  seulement  de  ces  oratorios  (quinze  volumes) 
a  été  gravée  de  1823  à  1829. 

Cependant,  Lesueur  ne  négligeait  point  le  théâtre, 
et  le  10  juillet  1804,  la  première  représentation  des 
Bardes  obtint  un  succès  éclatant,  «  succès  d'enthou- 
siasme, dit  le  Moniteur,  et  que  nulle  voix  n'a  con- 
testé ».  C'est  avec  les  Bardes  que  l'Opéra  encaisse 
pour  la  première  fois  des  receltes  supérieures  à 
10.000  francs. 

La  réputation  de  Lesueur  était  à  son  apogée.  Il 
avait  été  compris  dans  la  première  promotion  de  la 
Légion  d'honneur.  Le  public  lui  faisait  fête.  L'empe- 
reur lui  marquait  une  estime  particulière. 

Le  3  juin  1806,  Lesueur  épousait,  à  la  mairie  du 
IIe  arrondissement  et  à  l'église  Saint-Louis  d'Anlin, 
Mlle  Adeline  Janart  de  Courchangs,  fille  d'un  haut 
fonctionnaire  des  finances.  11  avait  alors  quarante- 
cinq  ans.  Sa  femme  en  avait  dix-neuf.  Malgré  cette 
grande  différence  d'âge  enlre  les  deux  époux,  l'union 
fut  très  heureuse.  Lesueur  eut  quatre  enfants.  Le  pre- 
mier ne  vécut  pas.  Des  trois  filles  qui  vinrent  ensuite, 
l'ainée  mourut  à  vingt  ans,  en  1828,  la  seconde 
épousa  le  compositeur  Boisselot,  et  la  troisième 
M.  de  Civray. 

Deux  opéras  de  Lesueur  furent  encore  très  ap- 
plaudis, le  Triomphe  de  Trajan,  en  1808,  et  Adam  en 
1809,  Adam  dont  Beethoven  aurait  dit  en  le  lisant  : 
«  Cette  musique  semble  guérir  mes  maux!  Lesueur 
a  donc  retrouvé  un  archet  que  les  anges  témoins  de 
la  Création  ont  laissé  tomber  des  cieux!  » 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3535 


Après  les  événements  de  1814  et  de  181b,  Lesueur 
se  demanda  s'il  resterait  maître  de  chapelle  des 
Tuileries.  Il  alla  faire,  comme  les  autres,  sa  visite  de 
fonctionnaire  à  la  Cour.  «  On  dit  que  vous  aimez 
beaucoup  Iïonaparle,  »  lui  lança  aigrement  Mmc  la 
duchesse  d'Angoulême.  Lesueur  eut  le  courage 
de  répondre  :  «  On  dit  vrai,  Madame.  L'empereur 
a  été  mon  hienfaiteur  :  je  ne  l'ouhlierai  jamais.  » 
Cette  belle  franchise  ne  lui  nuit  point  :  il  conserva 
sa  place. 

En  1822,  à  la  mort  de  Méhul,  Lesueur  fut  nommé 
professeur  de  composition  au  Conservatoire. 

De  1822  à  1839,  le  grand  prix  de  Home  fut  remporté 
quatorze  fois  par  des  élèves  de  Lesueur.  Il  eut  le 
mérite  de  former  des  musiciens  comme  Ambroise 
Thomas  et  surtout  Berlioz.  Gounod  se  souvenait 
avec  reconnaissance  des  excellents  conseils  qu'il  en 
avait  reçus. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  LESUEUR 

MCSIQUE    RELIGIEUSE    GRAVÉE    EN    DIX-SEPT    VOLUMES 

Tome  I.  Première  Messe  solennelle  à  grand  orchestre. 

Tome  II.  Oratorio  de  Dehliorah  à  grands  chœurs,  et  à  grand 
orchestre  (1828). 

Tome  III.  Trois  Te  Deum  à  grand  orchestre. 

Tome  IV.  Deux  Oratorios  de  la  Passion,  pouvant  être  exécutés 
pendant  les  messes  basses. 

Tome  V.  Deuxième  Messe  solennelle  à  grands  chœurs  et  grand  or- 
chestre. 

Tome  VI.  Sn/ier  /lamina  Dubq/onis,  à  grands  chœurs  et  grand  or- 
chestre. —  Troisième  Oratorio  du  carême  et  morceaux 
d'ensemble.  —  lu  rirlule  tua  :  piano,  solo,  chœur  et 

Tome  VII.  Itachcl,  oratorio  historique  et  prophétique  à  grand 
orchestre  et  grand  chœur  avec  soit. 

Tome  VIII.  Hutli  ri  Sueiui,  suivi  de  Hulli  et  lloo:,  cliœur  et  sym- 
phonie hypocritiques. 

Tome  IX.  Premier  Oratorio  pour  le  couronnement  des  princes 
souverains  de  toute  la  chrétienté  ,  n'importe  la  com- 
munion. 

Tome  X.  Deuxième  Oratorio  pour  le  couronnemeut  des  princes 
souverains. 

Tome  XI.  Troisième  Oratorio  puur  le  couronnement  des  princes 
souverains. 

Tome  XII.  Troisième  Messe  solennelle. 

Tome  XIII.  Cantate  religieuse,  suivie  du  motet  :  Veui  Sponsa,  eo- 
ronalieris. 

Tome  XIV.  DeuxPsaiimes  :  Ait  templiim  eredidi,  soli  et  chœurs.  — 
Cir/i  enurrnnl,  soli  et  chœurs. 

Tome  XV.  Messe  liasse  et  Domine  snlrnm.  —  Motet  :  Mannes  bap- 
tisat.  Domine  snlrnm  avec  accompagnement  d'orgue. 

Tome  XVI.  Oratorio  de  Sort,  à  grand  orchestre  et  grands  chœurs. 

Tome  XVII.  Domine  snlrnm.  pièce  pour  l'empereur.  —  0  Snlulu- 
ris,  chœur.  —  Chœur  0  /ilii  avec  un  majeur  composé 
sur  le  même  rythme.  —  Slabiit,  sur  des  motifs  liturgi- 
ques traditionnels. 

MUSIQUE    DES    FETES    CIVIQUES 

Chant  des  triomphes  delà  République,  paroles  de  La  Harpe,  30  ven- 
démiaire an  III. 
Ode  pour  la  fête  de  la  Liberté,  paroles  de  Lebrun,    10  thermidor 

an  VI. 
Chant  national  pour  l'anniversaire  du  21  janvier,  paroles  de  Le- 
brun, an  VII. 
Chaut  du  [i  Thermidor,  paroles  de  Desorgues,  an  VIL 
Chaut  rillageois.  pour  la  l'été  de  l'Agriculture. 
Hymne  il  lu  rieillesse,  pour  les  fêtes  décadaires. 

Ces  deux  e position-,  existent  en  manuscrit  dans  la  collection 

Malherbe. 
Chaut  du  premier  rend  ■miaire  en  fureur  du  rétablissement  de  la  pair, 
paroles  d'Esmenard,  quatre  chœurs,  grand  orchestre  et 

Matériel  manuscrit  incomplet  à  la  Bibliothèque  du  Conser- 


La  Caverne  ou  le  Repentir,  drame  lyrique  en  3  actes,  paroles  de 

Deray,  théâtre  Feydeau,  10  février  179:).   Edité  chez  Na- 

dermann. 
Paul  et  Virginie  ou   le  Triomphe  de  la  vertu,  drame  lyrique  en 

3  actes,  paroles  de  Dubreuil,  Théâtre  Feydeau,  13  janvier 

1704.  Nadermann. 


■que  duos  llle  de  Cahjpso  „>i  le  Triomphe  de  In  sagesse,  tra- 
gédie lyrique  en  3  actes,  paroles  de  Dercv,  Théâtre 
Feydeau,  11  mai  1790.  Nadermann. 

.  tragédie  lyrique,  reçue  au  Théâtre  des  Arts  en  1796;  ne 
fut  jamais  exécutée  m  gravée. 

rxe.  tragédie  lyri.jn.-  \-en-  au  Théâtre  des  Arts  en  1801; 
ne  fut. jamais  exécutée  ni  gravée. 

OU  les  Bardes,  opéra  en  5  actes,  paroles  de  Dercy  et  Des- 
cliamps.  Académie  impériale  de  musique,  S  juillet  180 ï. 
Gravé  parHugue.  Edité  chez  Imbault. 

omphe  de  Trujan,  opéra  en  trois  actes  en  collaboration  avec 
Persdis,  paroles  d'Esmenard,  1807. 

ration  du  temple  de  lu  Victoire,  en  collaboration  avec  Peu- 


thèque  de  1  Opéra. 


ECRITS    HTSTOllIol'Es    ET   THEORIQUES 

Eiposé  d'une  musique  une.  imilulire  et  particulière  à  chaque  solennité, 
où  l'on  donne  les  principes  généraux  sur  lesquels  on  l'é- 
tablit et  le  plan  d'une  messe  propre  à  la  fêle  de  Noël,  essai 
par  M.  Lesueur,  maître  de  chapelle  de  l'Église  de  Paris. 
A  Paris,  chez  la  veuve  Hérissait,  imprimeur  du  chapitre, 
rue  Neuve-Notre-Dame,  k  la  Croix  d'or,  1787. 

Suite  île  l'essai  sur  la  musique  sucrée  cl  iiniiaiive...  avec  le  plan  d'une 
messe  pour  Pâques. 

Exposé  d'une  musique  imitutire,  avec  le  plan  d'une  messe  pour  la 
Pentecôte,  suite  de  l'essai. 

Suite  de  l'Exposé...  avec  une  messe  propre  à  l'Assomption. 

Projet  d'un  plan  général  de  l'instruction  musicale  en  France, 
in-4°  d'une  feuille  sans  nom  d'auteur,  Paris,  an  IX.  Gé- 
néralement attribué  à  Lesueer. 

Lettre  en  réponse  a  Gaillard  sut  l'opéra  de  la  Mort  d'Adam,  Paris, 
Beaudouin,  ruede  Grenelle-Saint-Germain, n°  1131.  Bru- 
maire an  X. 

Éloge  funèbre  de  Picciui,  S  mai  1S0 1. 

Kotice  sur  la  mélopée,  lu  rglhmopée  cl  les  grands  caractères  de  ta 
musique  antique,  appendice  a  la  traduction  d'Anacréon  du 
professeur  Gail,  1793. 

Notice  sur  Paisiello,  1816.  Annales  de  la  musique  de  Gardeton. 

Manuscrits  de  la  collection  Malherbe,  renfermant  d'importants  frag- 
ments d'une  Histoire  générale  de  la  musique,  des  Considéra- 
tions philosophiques,  des  t'.ousei/saiii  jeunes  compositeurs,  etc. 

Bibliographie. 

Ad.  Bosciior.  _  La  Jeunesse  d'un  romantique.  Paris,  Plon-Nour- 

rit,  1906. 
F.  LiMY.    —  Jeun- François  Lesueur  (1700-1837),  1    vol.  in-S°, 

Paris,  Fischbacher. 
Kerviéres.  —  Articles  du  Guide  musical  (1905)  et  de  la  Tribune 

de  Suiul-Geriais  (1905). 
J.  Tiersot.  —  Les  t'êtes  et  les  ('.hauts  de  la  Révolution  française. 

Paris,  Hachette,  1908. 


Victor  Massé. 

Félix-Marie  Massé,  dit  Victor  Massé,  naquit  à  Lo- 
rient  le  7  mars  1822.  Tout  jeune,  il  fut  amené  à 
Paris;  à  12  ans,  le  15  octobre  1834,  il  était  admis 
au  Conservatoire,  où  il  fut  successivement  l'élève 
de  Zimmërmann  pour  le  piano,  de  Dourleu  pour  l'har- 
monie, d'HALÉVY  pour  la  composition.  Chaque  année 
lui  apporte  une  récompense  nouvelle  :  accessit  et 
second  prix  de  solfège  en  1836  et  J837,  deuxième  et 
premier  prix  de  piano  en  1838  et  1830,  premier  prix 
d'harmonie  et  d'accompagnement  en  1840;  accessit 
de  fugue  et  second  prix  de  Home  en  1840;  premier 
prix  de  fugue  en  1843;  premier  prix  de  Home  en 
1843  avec  le  Renégat  de  Tanger,  cantate  du  marquis 
de  Paslorel.  Aucune  surprise  dans  cette  carrière 
d'élève;  c'est  progressivement,  d'une  marche  régu- 
lière, qu'il  s'élève  jusqu'au  grand  prix  de  Rome. 

Après  avoir  fait  entendre  sa  cantate  à  l'Opéra,  où 
elle  fut  très  froidement  accueillie,  Victor  Massé  part 
pour  Rome,  d'où  il  envoie,  parmi  les  travaux  régle- 
mentaires, un  opéra  italien,  la  Favorila  e  la  schiaca; 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIOUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


il  voyage  en  Italie  et  va  jusqu'en  Allemagne.  En 
184R,"  il  était  de  retour  à  Paris,  puisqu'il  prit  part 
au  concours  ouvert  par  le  ministre  de  l'instruction 
publique  pour  la  composition  de  chants  natio- 
naux :  son  Hymne  à  la  Fraternité  sur  des  paroles 
d'Alexandre  Cosnard  et  son  Hymne  àla  Concorde  sur  un 
texte  d'Edouard  Plouvier  lui  valurent  deux  médailles. 
Ce  succès  fut  le  prélude  de  quelques  autres.  Comme 
tous  les  jeunes  compositeurs,  Victor  Massé  visait  au 
théâtre.  En  1840,  il  débutait  par  un  succès  avec  la 
Chambre  gothique.  Dans  la  suite,  il  fut  favorisé  par 
les  circonstances;  d'abord,  il  eut  la  chance  de  trou- 
ver une  scène  pour  faire  jouer  ses  œuvres  :  Emile 
Perrin,  qui,  plus  tard,  devait  devenir  directeur  de 
l'Opéra  et  administrateur  de  la  Comédie  française, 
venait  de  prendre  la  direction  de  l'Opéra-Comique- 
Confiant  dans  le  talent  de  V.  Massé  et  désireux  de 
le  lancer,  il  lui  ouvrit  son  théâtre.  De  plus,  V.  Massé 
eut  le  bonheur  de  trouver  trois  livrets  excellents,  la 
Chanteuse  voilée,  Galathée,  les  Noces  de  Jeannette. 

Ainsi  débutant  très  jeune,  V.  Massé  connut  rapide- 
ment le  succès;  les  huit  années  qui  suivirent  son  re- 
tour de  Rome  sont  marquées  par  l'apparition  de  sept, 
ouvrages.  Tous  ne  réussirent  pas  comme  Les  Noces  de 
Jeannette  qui  ont  été  jouées  plus  de  douze  cents  fois. 
V.  Massé  connut  des  revers  avec  La  Fiancée  du  diable, 
Miss  Fauvette  et  Les  Saisons.  —  De  nouveau,  le  public 
l'applaudit  au  Théâtre  Lyrique  avec  La  Reine  Topaze 
et  La  Fée  Carabosse.  —  Les  échecs  successifs  du  Fils 
du  brigadier,  de  Fiord'Aliza,  de  La  Mule  de  Pedro  dé- 
couragent un  peu  V.  Massé,  qui,  pendant  près  de  dix 
ans,  reste  éloigné  du  théâtre. 

Evitant  le  bruit,  craignant  les  indiscrets,  vivant 
loin  de  toute  coterie,  ennemi  de  la  popularité 
bruyante,  V.  Massé  travaille  silencieusement  dans 
son  pavillon  de  la  cité  Frochot,  au  milieu  de  sa 
femme  et  de  ses  enfants.  Esprit  vif,  plein  de  finesse, 
prompt  à  la  réplique,  volontiers  railleur,  il  se  montre 
un  causeur  amusant  qui  ne  craint  pas  les  gauloi- 
series. Pour  se  reposer  de  ses  travaux  de  longue 
baleine,  il  écrit  des  mélodies  dont  on  vante  la  cou- 
leur :  Chants  bretons,  Chants  du  soir,  Chants  d'au- 
trefois. 

En  1860,  il  avait  succédé  à  Dietsch  comme  chef  du 
chant  à  l'Opéra;  en  1866,  il  était  nommé  professeur 
de  composition  au  Conservatoire,  et  membre  de  l'A- 
cadémie des  beaux-arts  en  1872,  à  la  mort  d'AcBER. 

Après  les  succès  qui  avaient  marqué  les  débuts 
de  sa  vie  à  Paris,  V.  Massé  pouvait  considérer  sa  car- 
rière sinon  comme  glorieuse,  du  moins  comme  très 
brillante.  Et  cependant,  elle  lui  semblait  incomplète  ; 
il  aurait  voulu  prouver  qu'il  n'était  pas  un  simple 
faiseur  d'opéras-comiques  et  qu'il  était  capable  de 
s'élever  jusqu'à  l'opéra.  Depuis  longtemps,  il  travail- 
lait à  un  opéra,  et,  en  1874,  il  avait  déjà  terminé  la 
musique  de  son  Paul  et  Virginie.  Mais,  les  circons- 
tances, qui  avaient  favorisé  ses  débuts,  ne  se  pré- 
sentaient plus  les  mêmes;  l'Opéra  ne  semblait,  pas 
disposé  à  monter  cet  ouvrage,  et  le  Théâtre  Lyrique, 
qui  aurait  pu  l'accueillir,  n'existait  plus.  11  lui  fallut 
attendre  deux  ans;  d'ailleurs,  Paul  et  Virginie  prouva, 
comme  La  Nuit  de  Ctéopdtre,  jouée  à  l'Opéra-Comique 
après  la  mort  de  Victor  Massé,  qu'il  n'était  pas  fait 
pour  les  grands  sujets,  qu'il  se  trouvait  gêné  dans 
l'expression  des  passions  violentes.  En  effet,  ses  dra- 
mes lyriques  ne  se  distinguent  guère  de  ses  opéras- 
comiques. 

Après  une  longue  maladie  dont  il  souffrit  pendant 
quinze  ans  et  qui  l'obligea,  en  1880,  à  prendre  sa 


retraite  de  professeur  au  Conservatoire,  Victor  Massé; 
mourut  le  S  juillet  1884. 


CATALOGUE  DES  ŒUVRES   DE  V.   MASSÉ 

ŒUVRES   DRAMATIQUES 

La  Chambre  gothique,  Opéra-Comique,  1849. 

La  Chanteuse  voilée,  1  acte,  Opéra-Comique,  26  novembre  1S50. 

Galathée,  2  actes,  Opéra-Comique,  li  avril  1852. 

Les  Noces  de  Jeannette,  1  acte,  opéra-Comique,  4  février  1S53. 

La  Fiancée  il«  diable,  3  actes,  Opéra-Comique,  5  juin  1854. 

Mv.s  Lancette,  1  acte,  Opéra-Comique,  13  février  1855. 

LesSahans,  3  actes,  Opéra-Comique,  22  décembre  1855. 

La  Reine  Topaze,  3  actes,  Théâtre  Lyrique,  2»  décembre  1S56. 

Le  Cousin  ite  Marivaux,  1  acte,  Bade,  1857. 

Les  Chaises  à  porteurs,  1  acte,  opéra-Comique,  28  avril  1S58. 

La  Fée  Carahnsse,  3  actes  et  prulogue,  Théâtre  Lyrique,  28  février 

1859. 
Manette  ta  promise,   1802. 

La  Mute,  de  Pedro,  2  actes,  Opéra,  6  mars  1863. 
Fiord'Aliza,  4  actes,  Opéra-Comique,  6  lévrier  1866. 
Le  Fih  du  brigadier,  3  actes,  25  février  1867. 
Poulet  Virginie,  3  actes,  Théâtre  Lyrique,  15  novembre  1876. 
La  Suit  de  Cteopdlre,  3  actes,  Opéra-Comique  (œuvre  posthume),. 

25  avril  1885. | 

Opérettes  : 

Le  Prix  de  famille,  1  acte  (publié  dans  le  Magasin  des  demoiselles). 

Une  Loi  sompluaire,  2  actes. 

La  Trouvaille,  1  acte. 

Les  Enfants  de  Perrette,  2  tableaux. 

Lu  Petite  Sœur  d'Achille,  2  tableaux. 


Recueils  de  mélod 
Chants  bretons. 
Chants  du  soir. 
Chants  d'autrefois. 


MUSIQUE    VOCALE 


Bibliographie. 


L.  Delibes.  —  Discours  pvonoiice  n  l'inniiijiiration    de  la  statue   de 

Victor  Massé  d  Loricnl,  Paris,  1887,  in-4". 
FÉTis.  —  Biographie  universelle  des  musiciens. 
A.  Podgin.  —  Supplément  à  la  Biographie  universelle. 
Grove's.  —  Dictionavij  nf  music  and  musieians,  London,  1910. 
A.  Pougin.  —  Les  Musiciens  du  dix-neuvième  siècle,  Paris,  Fisch- 

bacher,  1911. 
Hugo  Riemann.  —  Dictionnaire  de  musique,  traduction  Hu.mbert, 

Paris,  Perrin,  1899. 
Revue  des  Deux  Mondes.  Galathée,    1er  juillet    1S52.  —  Les  Noces 

de  Jeannette,    15  février  1853.    —  La   Fiancée   du  diable, 

15  juin  1S54.  —  La  Reine  Topaze,  1er  février  1857.  —  La 

FeeGural'osse,  15  mars  lsr.'.l.  —  La  Mule  de  Pedro,  1"  avril 

1862.  —  Fior  d'Aliza,  15  février  1866. 
Saixt-Saens.  —  Victor  Massé.  La  France,  6  septembre  18S7. 


Massenet. 

Jules-Emile-Frédéric  Massenet  est  né  le  12  mai 
1842  au  lieu  dit  de  la  Terrasse,  dans  la  commune 
de  Montaud,  près  Saint-Etienne  (Loire).  Son  père, 
officier  du  génie  sous  le  premier  Empire,  avait  dé- 
missionné lors  de  la  Restauration,  et  s'était  établi 
maître  de  forges  dans  son  pays  d'origine  :  plus 
exactement,  il  fabriquait  des  faux.  Il  avait  épousé 
en  secondes  noces  M"e  Roger  de  Marancourt,  qui 
fut  la  mère  du  grand  musicien. 

La  Révolution  de  1848  ruina  la  famille,  qui  vint 
se  fixer  à  Paris.  Le  petit  Massenet  suivit  les  cours  du. 
lycée  Saint-Louis  :  mais,  en  même  temps,  il  se  pré- 
parait à  entrer  au  Conservatoire.  Il  y  fut  admis  en 
octobre  1851.  Successivement,  il  obtint  le  premier 
prix  de  piano  en  1859,  un  premier  accessit  d'harmo- 
nie en  1860,  un  premier  prix  de  fugue  en  1863,  en 
même  temps  que  le  grand  prix  de  Rome. 

De  son  séjour  en  Italie,  Massknet  rapporta  une 
Ouverture  symjihonique,  un  Requiem  à  quatre  et  huit 
voix  avec  accompagnement  d'orgue,  de  violoncelle 
et  de   contrebasse,  un   drame  sacré,  Harie-Magde- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3537 


^eiiie,  où  s'affirmait  déjà  pleinement  son  originalité, 
un  recueil  de  mélodies,  Poème  d'avril,  et  les  Scènes 
napolitaines  pour  orchestre. 

Dès  sa  première  .jeunesse,  se  manifeste  chez  cet 
artiste  une  puissance  de  travail  exceptionnelle,  qui 
s'accrut  encore  par  la  suile  et  ne  faiblit  jamais. 

De  retour  à  Paris,  Massenet  a  vite  fait  de  trouver 
les  occasions  de  présenter  ses  œuvres  au  public. 
Dès  1866,  les  sociétés  de  concerts  jouent  son  Ou- 
verture symphonique,  une  suite  d'orchestre  intitulée 
Pompeia,  et  deux  Fantaisies.  Le  24  mars  1867,  Pasde- 
loup  donne  sa  Première  Suite  d'orchestre,  et  le  3  avril 
de  la  même  année,  l'Opéra-Comique  représente  sa 
première  œuvre  de  théâtre,  Lu  Grand' tante. 

En  1868,  Massenet  fait  la  connaissance  d'un  jeune 
éditeur,  Georges  Hartmann,  qui  devient  bientôt  son 
ami  et  va  collaborer  de  la  façon  la  plus  active  et  la 
plus  éclairée  à  la  préparation  et  à  l'exploitation  de  ses 
prochains  succès.  L'exécution  de  Marie-Magdcleinc, 
à  l'Odéon,  le  11  avril  1873,  met  décidément  le  jeune 
Massenet  hors  de  pair.  Trois  ans  après,  il  est  décoré 
de  la  Légion  d'honneur;  à  trente-six  ans,  le  7  oc- 
tobre 1878,  il  est  nommé  professeur  de  composition 
au  Conservatoire,  et  le  30  novembre  1878,  il  entre  à 
l'Institut. 

L'histoire  de  la  vie  de  Massenet  n'est  plus  guère 
après  cela  que  celle  de  ses  œuvres.  Ses  deux  plus 
grands  succès  au  théâtre  furent  et  restent  encore 
Manon,  représentée  pour  la  première  fois  à  l'Opéra- 
comiquele  l'J  janvier  188i,et  Werther,  qui  parut  d'a- 
bord sur  la  scène  de  l'Opéra  de  Vienne  le  16  février 
1892,  puis  à  TOpéra-Comique  de  Paris  le  16  janvier 
1893. 

A  la  mort  d'Ambroise  Thomas,  on  offrit  à  Massenet 
la  direction  du  Conservatoire.  Il  la  refusa  et  donna 
sa  démission  de  professeur  de  composition  (18  oc- 
tobre 1896). 

Officier  de  la  Légion  d'honneur  depuis  1888,  com- 
mandeur depuis  1895,  il  fut  promu  au  grade  de  grand 
officier  en  décembre  1899. 

Jusqu'au  dernier  jour,  il  mena  la  même  vie  régu- 
lière, où  le  travail  occupait  une  si  grande  place.  Il 
mourut  le  13  août  1912,  sans  avoir  interrompu  sa 
tâche. 

Massenet  a  connu  une  extraordinaire  popularité. 
«  Ses  victoires,  dit  fort  justement  M.  Alfred  Brunkau, 
sont  incalculables,  et,  chose  singulière,  uniqueadans 
les  annales  du  théâtre;  elles  ont  toujours  été  obte- 
nues sans  peine,  sans  lutte,  par  les  mêmes  moyens 
séduisants  et  aimables.  Ce  n'est  pas  l'auteur  de 
Manon  qui  bataillera  ni  changera  jamais.  Dès  ses 
débuts,  dès  qu'il  prit  contact  avec  le  public,  il  réa- 
lise d'un  coup  son  rêve.  Il  voulait  plaire,  plaire  aus- 
sitôt que  possible  et  au  plus  grand  nombre  de  spec- 
tateurs possible.  D'emblée,  il  plut  à  la  masse  de  ces 
spectateurs;  durant  un  quart  de  siècle1,  il  ne  cesse 
de  lui  plaire  et  lui  plait  encore  aujourd'hui.  » 

On  a  reproché  à  Massenet  d'avoir  abusé  de  sa 
puissance  de  séduction  sur  les  foules,  et  des  moyens 
dont  il  avait  une  première  fois  éprouvé  le  succès.  Il 
est  certain  que  la  recherche  de  l'effet  gâte  parfois 
ses  plus  charmantes  inventions  musicales. 

Cependant  l'intluence  de  Massenet  surl'art français 
—  influence  considérable  et  qui  ne  s'exerça  pas  seule- 
ment sur  ses  disciples  avoués  —  fut  en  grande  partie 
heureuse.  Après  Goinod,  il  eut  le  mérite  de  ramener 
peu  à  peu  notre  musique  au  souci  de  la  distinction 


mélodique,  de  la  finesse  harmonique,  du  choix  des 
sonorités  savoureuses,  de  l'ingéniosité  des  dispositifs 
orchestraux  et  vocaux.  Il  renouait  ainsi,  par-dessus 
Berlioz,  avec  de  lointains  ancêtres,  Maudlit,  Claude 
le  Jeune,  Couperin,  Rameau.  Et,  en  même  temps,  il 
préparait  l'avenir.  D'une  sensibilité  mobile  et  déli- 
cate, souvent  trop  vivement  touché  pour  être  pro- 
fondément ému,  mais  capable  d'impressions  subtiles 
et  nuancées,  il  ouvrait  la  voie  aux  recherches  plus 
hardies  de  nos  modernes  impressionnistes;  et  ceux- 
ci,  loin  de  songer  à  nier  leur  dette,  sont  les  premiers 
à  reconnaître  en  Massenet  un  de  leurs  plus  avérés 
précurseurs.  Ce  sont  là  de  beaux  titres  à  notre  re- 
connaissance. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  MASSENET 


Dix,  pièces  de  genre,  op.  18,  1S06,  Paris,  Fromont. 

Improvisations,  sept  pièces,  1S66,  Paris,  Heugel. 

Le  Roman  d'Arlequin,  pantomimes  enfantines,  1870,  Paris,  Heugel. 

Toccata,  1S92,  Paris,  Heugel. 

lieux  Impromptus,  1890,  Paris,  Heugel. 

t'n  ilcmenln  musical,  1897,  Milan,  Sonzogno. 

Valse  folle,  L898,  Paris,  Heugel. 

Val. e  1res  lente,  1901,  Paris,  Heugel. 

Musique  pour  bercer  les  petits  enfouis,  1902,  Paris,  Heugel. 

Deux  pièces.  1907,  Paris,  Heugel. 

PIANO    A    QUATRE    MAINS 

Trois  pièces;  op.  11,  Paris,  Durand. 
Scènes  Je  bal,  op.  17,  1865,  Paris, Heugel. 

.Unce passée,  suite  de  pièces  en  4  livres,  1897,  Paris,  Heugel. 


Sonv 


,le    Y, 


(A.  de  Musset),  1805,   Paris, 


Ileueel. 


trois  mélodie-,  iC.  Distel),  op.  2,  18'is,  Paris,  Durand. 

Poème  d'avril  (A.  Silvestre),  op.  14,  1866,  Paris,  Heugel. 

L'Estime  (Th.  Gautier1',  1808,  Paris,  I.aurens. 

Le  Portrait  d'un  enfant  (Ronsard),  1868,  Paris,  Laurens. 

La  fie  d'un,  rose  (,1.  Ruelle',  1868,   Paris,  Laurens. 

Sirènade  une  mariés  (J.  Ruelle),  186S,  Paris,  Laurens. 

Poème  du  sourenir  (A.  Silvestre),  1S08,  Paris,  Heugel. 

Chants  intimes  (G.  Chouquet),  1S69,  Paris,  Heugel. 

Chant  provençal  Michel  Carré),    1*69.  Orchestré,   Paris.  Heugel. 

Sérénade  du  passant    F.  Coppée),  1809.  Orchestré,  Paris,  Heugel. 

Sonnet  (G.  i'radel).  1869,  Paris,  Heugel. 

Sous  les  briuehcs.  A.  Silvestre),   1x69,  Paris,  Heugel. 

A  Columbiue  (Louis  Gallet),  1870,  Paris,  Heugel. 

Chanson  de  Capri   (Louis  Gallet),  1872,  Paris,  Heugel. 

(Air  île  hallet  des  Scènes  pittoresque*.) 
Élégie,  orchestrée.  Paris,  Heugel. 
Il  pleuvait  (A.  Silvestre),  Paris,  Heugel. 
Llmpmvistileur  {'R.  Bussine  jeune),  Par, 
Madiii),il[\.  silvestre).  Pans,  Heugel. 
Sérénade  d'automne  (M.  Blancliotte),  Paris,  Heugel. 
Sonnet  p.ucn   A.  Silvestre),  Paris,  Heugel. 
Stances    Gilbert),  Paris,  Heugel. 
Un  Adieu   A.  Silvestre),  Paris,  Heugel. 
Poème  pastoral  (Florian  et  A.  Silvestre),  1874.  Orchestrée,  Paris, 

Heugel. 
Poème  d'octobre  (Paul  Collin),  1876,  Paris,  Heugel. 
Si  lu  ceux,  mignonne. (G.  Bover),  1S76.  orchestré,  Paris,  Heugel. 
I a  Veillée  ,1 1  .•■■'  '  ./•■  V.Th.-nriel),   1876,  Paris,  Heugel. 

iitbade  G    Prévosl  ,  1877,  Paris,  Heugel. 

LesOUelet     1.  Normand  .  1877,  Paris,  Heugel. 

I  c  Sentier  perdu    Paul  de  Chninlens  ,  1X77,  Paris,  Heugel. 

Poème  d'amour   Paul  B  Mqnel     I  179,  i  m  ris,  Heugel. 

Anmeer  airt    \    -    i   stre     1--   .  P.ni-.  Heugel. 

/.,■  .«,..-/        >.  .   ,..;  i;  ,  i   .     .   :    -      !■  lis,  Heugel. 


slroe,  Paris,  IleU'.'-l. 
222 


3.VÎS 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


l'orme  il'lm  er  [A.  Silvestre),  1SS2,  Paris,  Heugel. 

Printemps  dernier  (Vh.  Gillr),  ISS.".,  Pans,  Hcugel. 

Guitare  {V.  Hugo),  lSSli,  Paris,  Heugi'l. 

A»«r  </<■  «oci's  (Sléphan  Hnrd.'-siO,  1SS6,  l'aris,  Heugel. 

(luanrf  on  ii/mr  (Eug.  Manuel),  sérénade,  ISSU,  l'aris,  Heugel. 

les  Alcyons  (J.  Autran  ,  18S7,  l'aris,  Heugel. 

/.oi;i  de  moi  M  lèvre  qui  ment  (J.  Aicard),  IS8S  (?),  Paris,  Heugel. 

Fleurs  cueillies   (Louis  Bricourt),  1888,  Rouen,  Klein,  l'aris, 

Heugel. 
Marquise  (A.  Silvestre),  1S8S.  Orchestrée,  Paris,  Heugel. 
Socl  païen  (A.  Silvestre),  18S8.  Orchestrée,  Paris,  Heugel. 
Pensée  d'automne  (A.  Silvestre),  1SS8.  Orchestrée,  Paris,  Heugel. 
Je  tours  après  le  bonheur  (Guy  de  Maupassant),  1SSS  ('?),  Paris, 

Heugel. 
/.<•  Poète  esl  roi  (G.  Boyer),  1SSS  ('?),  Paris,  Heugel. 
Enchantement  (Jules  Ruelle),  1890,  Paris,  Heugel. 

(Sur  un  air  de  ballet  d'Ilérodiade.) 
l'Ame  des  fleurs  (Paul  Delair),  1891,  Paris,  Gregh  fils. 
lieauxyeux  que  j'aime  (Th.  Maquet),  1S91,  Paris,  Heugel. 
l'.!,unson  nudalousc  (Jules  Ruelle),  1881,  Paris,  Heugel. 

(Sur  un  air  de  ballet  du  Cid.) 
Dons  lesentier parmi  les  roses  (Jean  Bertheroy),  1891,  Paris,  Heugel. 
Les  Belles  de  nuit  (Th.  Maquet),  1891,  Paris,  Heugel. 
Lui  et  Elle  (Th.  Maquet),  à  2  voix  :  1.  Lui,  2.  Elle.  1891,  Paris, 

Heugel. 
La  Neige  (Stéphan  Bordèse),  1891,  Paris,  Heugel. 
Le  Poète  et  le  Fantôme,  1S91.  Orchestré,  Paris,  Heugel. 
Septembre  \W">  Vacaresco),  1891,  Paris,  Heugel. 
L'Éi>«tta!'<(Stop),  1892,  Paris,  Heugel. 
Us  Hères  (G.  Boyer),  1892,  Paris,  Gregh  fils. 
Se  donne  pas  Ion  cœur  (P.  Mariéton),  1892,  Paris.^Heugel. 

Plus  vile  (Mme  Vacaresco),  1892,  Paris,  Heugel. 

Séparation  (P.  Mariéton),  1S92,  Paris,  Heugel. 

Devant  l'infini  (E.  Truillet),  1S92  (?),  Paris,  Heugel. 

Chant  de  guerre  cosaque  (1P«  Vacaresco),  1S93,  Paris,  Heugel. 

Départ  (Guérin-Catelain),  1893.  Orchestrée,  Paris,  Heugel. 

Lire  aimé  (S.  Hugo),  1893,  Paris,  Heugel. 

Portières  (M.  Léné),'  1S93,  Paris,  Heugel. 

Je  l'aime  (il""1  Bozzani),  1893.  Orchestrée,  Paris,  Heugel. 

larmes  maternelles  (M.    C.  Delines),    1S93.  Orchestrée,  Paris, 
Heugel. 

Pensée   de  printemps  (A.    Silvestre),   1893.   Orchestrée,   Paris, 
Heugel. 

Mienne  (Ernest  Laroche),  1891,  Paris,  Heugel. 

Soir  de  printemps  (G.  Martin),  1894,  Paris,  Heugel. 

Tristesse  (P.  Carrier),  1894,  Paris,  Heugel. 

L'Ame  des  oiseaux  (Mm°  Vacaresco),  1895.  Paris,  Heugel. 

Elle  s'en  est  allée  (Lucien  Solvay),  1895,  Paris,  Heugel. 

IIijimc  d'amour  (Pa.u\  Desachy),  1895.  orchestrée,  Paris,  Heugel. 

Poème  d'un  soir  (Georges  Vanor),  1895,  Paris,  Heugel. 

Sèvitlana  (J.  Ruelle),  1S95.  Orchestrée,  Paris,  Heugel. 

(Sur  l'entracte  de  DonO'sar  de  Bazan.) 

Berceuse  (H.  Gibont),  1898,  Paris,  Heugel. 

Lu  Chanson  des  lèvres  (Jean  Lahor),  1897,  Paris,  Heugel. 


Chanson  po 


ot),    1S97,  Paris,  Heugel. 
)'rmand),  1897.  Orchestrée,  Paris,  Heugel. 
ni  (Mm  M.  de  Valandré),  1897,  Paris,  Heugel. 
1  Garcia  Marsilla),  1897,  Paris,  Heugel. 
riéton),  1897,  Paris,  Heugel. 
■mnuth),  1898,  Paris,  Heugel. 


(L.  Le 


S'.K,  1';, 


lleuge 


Par 


Heoard  d'enfant  :  Léon  G.  pélissier),  189S,  Paris,  Heugel. 

Vieilles  lettres  (J.  Normand),  1S9S,  Paris,  Heugel. 

.1  deux  pleurer   J.  Le  Croze),  1899,  Paris,  Heugel. 

Amours  bénis  (André  Alexandre),  1899,  Paris,  Heugel. 

L'Ange el  l'Enfant  (Marie  Barbier),  1S99,  Paris,  Heugel. 

Arrilol  la    François  Ferrand),  1899,  Paris,  Heugel. 

Ce  sont  les  petits  que  /e  veux  chauler  (Ed.  Grieunaud),  1899,  Paris, 

Coupe  d'ivresse  (H.  Ernest  Simon),  1899,  Paris,  Heugel. 

Eternité  (Marg.  Girard),  1899,  Béziers,  J.  Robert. 

Us  maint  (Noël  Bazan),  1899,  Paris,  Heugel. 

Passionnément  (Ch.  Fuster),  1S99,  Paris,  Heugel. 

Le  pelit  Jésus  (G.  Boyer),  1899.  Orchestrée,  Paris,  Heugel. 

Petite  Mireille  (F.  Beissier),  1899,  Paris,  Heugel. 

Pour  Antoinette  (P.  .le  Chabalevret),  1899,  Paris,  Heugel. 

Première  danse  (J.  Normand),  1899.  Orchestrée.  Paris,  Heugel. 

Vous  qui  passe:- (P.  de  Chabaleyret),  1899,  Paris,  Heugel. 

Amoureux  appel  (Georges  de  Dubor),  1900,  Paris,  Heugel. 

Au  très  aimé  (Caroline  Duer),  1900,  Paris,  Heugel. 

Avril   est   amoureux   (J.    d'Halmont),    1900.    Orchestrée,  Paris, 

Heugel. 
Ce  que  disent  les  cloches  (J.  de  la  Vingtrie),  1900,  Pari*,  Heugel. 
Mon  Pane  (M.  de  Théus'.  1900,  Paris,  Heugel. 
La  Rivière  (C.  Bruno),  19)0.  orchestrée.  Paris,  Heugel. 
Ronde!  de  la  Belle  au  Bois  (Julien  Gruaz),  1900,  Paris,  Heugel. 


Sœur  d'élection  (E.  Trolliet),  1900,  Paris,  Heugel. 

(Instrumentée  pour  petit  orchestre  sous  le  titre  de  Cantique.) 
Mousmé  (André  Alexandre),  1901,  Paris,  Heugel. 
On  dit  (J.  Roux),  1901,  Paris,  Heugel. 

(Transcrite  sous  le  titre  de  Simple  Phrase.) 
Le  Printemps  risite  la  lerre  (Jeanne  Chaffotte),  1901,  Paris,  Heugel. 
Voir  de  femmes  (Pierre  d'Amor),  1901,  Paris,  Heugel. 
Les  amoureuses  sont  des  folles  (duc  de  Tarcnte),  1902,  Paris,  Heugel. 
Arec  loi{J.  Gruaz),  1902,  Paris,  Heugel. 
Ave,  Margarita  (Ed.  Noël),  1902,  Paris,  Heugel. 
Extase  printanière  (André  Alexandre),  1902,  Paris,  Heugel. 
L'Heureuse  souffrance  (G.  de  Dubor),  1902,  Paris,  Heugel. 
L'Heure  volée  (Catulle  Mendés),  1902,  Paris,  Heugel. 
Je  m'en  suis  allèvers  l'amour  (Th.  Madurer),  1902,  Paris,  Heugel. 
Poésie  de  Mijlis,  1902,  Paris,  Heugel. 

Quelques  chansons  maures  (André  Lebey),  1902,  Paris,  Heugel. 
Sainte  Thérèse  prie(P.  Silvestre),  1902.' orchestrée,  Paris,  Heugel. 
Sur  une  poésie  de  Van  llassell,  1902,  Paris,  Heugel. 
.4«  delà  du  rêve  (Gaston  Hirsch),  PJ03,  Paris,  Heugel. 
Ma  petite  mère  a  pleuré  (Paul  Gravollet),  1903,  Paris,  Heugel. 
Oh. 'si  les  fleurs  avaient  dès  yeux  (G.  Buchillot),  1903,  Paris,  Heugel. 
(Extrait  de  Chérubin.) 
Trois  poèmes  chastes,  1903,  Paris,  Heugel. 
Chunt  de  nourrice  (J.  Aicard),  1905,  Paris,  Heugel. 
Chanson  juanesque  (F.  Champsaur),  1905,  Paris,  Heugel. 
Dors,  Manda  (A.  Silvestre),  1905,  Paris,  Heugel. 
El  puis...  (M.  Chassang),  1905,  Paris,  Heugel. 
La  Marchande  de  rêves  (A.  Silvestre),  1905,  Paris,  Heugel. 
Les  Veux  Clos  (G.  Buchillot),  1905,  Paris,  Heugel. 
Tes  Cheveux  (C.  Bruno),  1905,  Paris,  Heugel. 
C'est  le  printemps  {A.  Gillouin),  1906,  Paris,  Heugel. 
En  chantant  (G.  Boyer),  1906,  Paris,  Heugel. 
Éveil  (A.  Gassier),  1906,  Paris,  Heugel. 
Ivre  d'amour  (d'après  le  poème  de  Grégoire   Akhtamar),  1906, 

Paris,  Heugel. 
Orphelines  (Ludana),  1906.  Paris,  Heugel. 

La  Mélodie  des  baisers  (A.  Alexandre),  1906,  Paris,  Astrue. 
L'Heure  douce    Em.  Chebroux),  1907,  Paris,  Heugel. 

Lu  Lettre  (Mme  Catulle  Mendès),  1967),  Paris,  Heugel. 

Si  vous  roule:  bien  me  le  dire   Ludana),  1907,  Paris,  Heugel. 

C'est  l'amour  (V.  Hugo),   19ns,  Paris,  Heugel). 

Dormons  parmi  les  //«(Hélène  Picard),  1908,  Paris,  Heugel. 

Le  Noël  des  humbles  (J.  Aicard),  1908,  Paris,  Heugel. 

La  Gavotte  de  Puyjoli  (Ed.  Noël),  1909,  Paris,  Heugef. 

Ton  souvenir  (Emile  Feillet),  1909,  Paris,  Heugel. 

Tout  passe  (Camille  Bruno),  1909,  Paris,  Heugel. 

Chanson  désespérée  (Ed.  Teulet),  1910,  Paris,  Heugel. 

Dieu  créa  le  désert  (Madeleine  Grain),  1910,  Paris,  Heugel. 

Dites-lui  que  je  l'aime  (G.  Fleurv-Daunijean),  1910,  Paris,  Heugel, 

Rèrerie  sentimentale  (Mathvlde  PevreK  1910,  Paris,  Heugel. 

Toujours  (Paul  Max),  1910,  Paris,  Heugel. 

La  Mort  de  la  cigale  (Maurice  Faure),  1911,  Paris,  Heugel. 

DCOS,    TRIOS,    CUOiCRS 

Rien  ne  passe  (Lucien  Monrousseau),  1911,  Paris,  Heugel. 

Alléluia  (G.  Chouquel),  chœur  à  4  voix  mixtes,  1866,  Paris,  Ha- 
chette. 

Le  Moulin  (G.  Chouquet),  etneur  à  i  voix  d'hommes,  1866,  Paris, 
Hachette. 

La  Caravane  perdue  (Noilhan-Lemontier),  chœur  à  4  voix  d'hom- 
mes, 1867,  Paris,  Heugel. 

Deux  Duos  et  un  Trio  (C.  Disleli.  1852,  Paris,  Durand,  op.  2. 

Salut,  printemps  !  (L.  Baillet),  à  deux  voix  égales,  IS72,  Paris,. 
Heugel. 

Villanelle  (J.  Ruelle),  choeur  à  4  voix  d'hommes,  1872,  Paris, 
Heugel. 

Moines  et  For/mus  (G.  Chouquet),  chœur  à  quatre  voix  d'hommes,. 
1877,  Paris,  Heugel. 

Cantate  en  l'honneur  du  bienheureux  J.-G.  Perboijre,  chœur  à  4  voix 
d'hommes  et  baryton  solo  avec  ou  sans  accompagnement, 
1879,  Paris,  Heugel. 

Le  Sijlphe  (E.  Bernier),  choeur  à  4  voix  d'hommes,  1S79,  Paris, 
Heugel. 

Amour  (Paul  Milliel),  chœur  à  quatre  voix  d'hommes,  1SS0,  Pa- 
ris, Heugel. 

Alerte  (J.  Massiat),  chœur  à    i  voix  d'hommes,  Paris,  Heugel. 

1811  (E.  Morcau),  choeur  à  i  voix  d'hommes,  1SS6,  Paris,  Heugel. 

Donnons  (G.  Bover),  chœur  à  4  voix  d'hommes,  1886  (?),  Paris, 
Heugel. 

La  Fédérale  (G.  Boyer),  cho'ur  à  l'unisson,  1890,  Paris,  Heugel. 

Aux  Étoiles  (Th.  Maquet),  duo  ou  chœur  pour  2  voix  de  femmes, 
1891,  Paris,  Heugel. 

Chant  de  concorde  (Simon  S.dmona),  chœur  à  i  voix  d'hommes,. 
1893,  Paris,  Heugel. 

Horace  et  Lydie  (A.  de  Musset),  duo  pour  baryton  et  mezzo-so- 
prano,  1S93,  Pans,  Heugel, 

Les  Fleurs  (J.  Normand),  duo  pour  baryton  et  soprano,  1891. 
Orchestrée,  Paris,  Heugel. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    353.) 


La  Cherrière  (E.  Noël),  petit  conte  rustique  pour  deux  voix  de 

femmes  et  solo  avec  accompagnement  de  piano,  1895, 

Paris,  Heugel. 
Les  Bleuets  (Jeanne  Chaffotle),  chœur  pour  voix  de  femmes  avec 

accompagnement  de  piano  à  quatre  mains,  1899,  Paris, 

Heugel. 
Chanson  tics  Buis  d'Aiiiaranlhe  (Marc    Legrand  d'après   Retwitz), 

suite  pour  quatuor  vocal  et  piano  (ou  orchestre;,  1900, 

Paris,  Heugel. 
.1  ta  jeunesse  (J.  Combarieu),  chœur  à  deux  voix  de  femmes  sans 

accompagnement,  1904,  Paris,  Heugel. 
Le  temps  et  l'amour  (Ludana),  duo  pour  ténor  et  basse,   1907, 

Paris,  Heugel. 
L'Heure  solitaire  (J.  Ader),  duo  pour  voix  de  femmes,  1908,  Pa- 
ris, Heugel. 
Poème  des  /ïeHrs  (BiagioAllievo,  traduction  Armand  Gasquy),  suite 

pour  voix  de  femmes  et  piano,  1907,  Paris,  Heugel. 
Immortalité,  canon  à  2  voix,  1909,  Revue  Musicale,  15  octobre 

1909. 


Are  Maris  Stella,  motet  à  2  vmx,  1886,  Paris,  Heugel. 
Soutenez-vous,   Vierge  Marie  (G.  Boyer),  chœur  et  solo,  orgue  et 

orchestre,  1887,  Paris,  Heugel. 
l'ic  Jesu,  avec  accompagnement  de  violoncelle,    1893,   Paris, 

Heugel. 
Are  Maria  (méditation  de  Thaïs),  1S94,  Paris,  Heugel. 
0  Salutaris,  pour  soprano,  orgue,  harpe  et  chœur,  1894,    Paris, 

Heugel. 
Punis  angelicus,  pour  voix  d'homme  cl  de  femme  et  solo,    1910, 

Paris,  Heugel. 


Vuverlurede  Concert,  op.  1,  1863,  Paris,  Heugel. 

F*  Suite  d'orchestre,  op.  13,  1865,  Paris,  Durand. 

Scènes  hongroises,  2'  suite  d'orchestre,  1871,  Paris,  Heugel. 

Scènes  dramatiques,  V  suite  d'orchestre,  Paris,  Heugel. 

Ouverture  de  Phèdre,  1873,  Paris,  Heugel. 

Scènes  pittoresques,  4°  suite  d'orchestre,  1874,  Paris,  Heugel. 

Sarabande  espagnole  du  seizième  siècle,  pour  petit  orchestre,  1875, 

Paris,  Heugel. 
Scènes  napolitaines,  5e  suite  d'orchestre,  1S74,  Paris,  Heugel. 
Marche  héroïque  de  Szabady,  orchestration  de  Massenet,  1879, 

Paris,  Heugel. 
Scènes  de  féerie,  6'  suite  d'orchestre,  1879,  Paris,  Heugel. 
Scènes  alsaciennes,  7e  suite  d'orcheslre,  1S81,  Paris,  Heugel. 
Parade  militaire,  1SS7,  Paris,  Heugel. 
Visions,  poème  symphonique,  1890  ('?),  Paris,  Heugel. 
Devant  la  Madone,  puur  petit  orchestre,  IS97,  Paris,  Heugel. 
Fantaisie,  pour  violoncelle,  soloetorcheslre,  1897,  Paris,  Heugel. 
Marche  solennelle,  1S97,  Paris,  Heugel. 
Brumaire,   ouverture   pour  le  drame  d'Kd.    Noël,   1899,  Paris, 

Heugel. 
ta  Grands  Violons  du  Boy,  pour  1"  et  8e  violons,  1900  ('?),  Paris, 

Heugel. 
Les  Rosati,  divertissement,  1992,  Paris,  Heugel. 
Concerto  pour  piauo  et  orchestre,  1903,  Paris,  Heugel. 

MUSQUE    DU    SCENE 

Les  Érijnnies  (Leconte  de  Lisle),  Odéon,  6  janvier  1873,  Paris, 

Heugel. 
Vu  Dramesous  Philippe  I  (de  Portn-Richc),  odéon,  tlavril  1875. 

La  «  Sarabande  espagnole  >    seule  est   éditée,  Paris,  Heugel. 
Naua-Sahib  (Jean  Richepin),  Porte- Sainl-Marlin ,  20  décembre 

1883. 
Théodora  (Victorien  Sardou),  Porte  Saint-Martin,  26  décembre 


Le  Crocodile  (Victorien  sardou),  P.n  k-s.unl-Martln,  21  décem- 
bre 1886,  Paris,  Heugel. 

Phèdre  (Racine),  Odéon,  8  décembre  1900,  Paris,  Heugel. 

Le  Grillon(h.  de  Francmesnild'apré-  Indiens),  odéon,  1er  octo- 
bre 1905,  Paris,  Heugel. 

Le  Manteau  du  roi  (Jean  Aicard),  Porte  Saint-Martin,  22  octobre 
1907.  Non  publié. 

Perce-Neige  et  les  sept  gnomes  (Jeanne  Dorlzal),  Théâtre  Femina, 
2  février  l'.<09.  Non  publié  . 


Le  Carillon  (C.  de  Roddaz  et  Van  Dyck),  opéra  de  Vienne,  21  fé- 
vrier 1902,  Paris,  Heugel. 

Cigale  (Henri  Cain),  opéra-Comique,  4  février  1904,  Paris, 
Heugel. 

Espada  (René  Maugars),  Théâtre  de  Monte-Carlo,  15  février  1908, 
Paris,  Heugel. 


Marie-Magdeleine.  Louis  Gallet  ,  3  actes  et  4  parties,  1866,  Odéon, 
11  avril  1873,  Paris,  Heugel. 

Ere  (Louis  Gallet),  mystère  en  3  parties,  1874.  Cirque  d'Été, 
19  mars  1875,  Paris,  Heugel. 

Narcisse  (Paul  Collin),  idylle  antique,  soli  et  chœur,  1877,  Paris, 
Heugel. 

La  Vierge  (Charles  Grandmougin),  légende  sacrée  en  4  scènes, 
1878.  Concerts  historiques  de  l'Opéra,  22  mai  1880,  Pa- 
ris, Heugel. 

Biblis  (G.  Boyer),  soli  et  chœurs,  1886,  Paris,  Heugel. 

/.«  Terre  promise  (Massenet,  d'après  la  Vulgate),  oratorio  biblique 
en  3  parties,  1899.  Eglise Saint-Eustache,  15  mars  1900, 

MUSIOCE    DRAMATIQUE 

La  Grand'tante,  1  acte,  Opéra-Comique,  3  avril  1867.  Paris,  Fro- 
ment. 

Don  César  deBazan.  4  actes,  opéra-Comique,  30novembre  1872. 
Paris,  Heugel. 

Le  Roi  de  Lahore.  5  actes  et  7  tableaux,  Opéra,  27  avril  1877.  Pa- 
ris, Heugel. 

llèrodiade,  i  actes  et  7  tableaux,  Bruxelles,  Monnaie,  19  décem- 
bre 1881.  Paris,  Heugel. 

Manon,  5  actes  et  6  tableaux,  Opéra-Comique,  19  janvier  1884. 
Paris,  Heugel. 

Le  Cid,  4  actes  et  10  tableaux,  Opéra,  30  novembre  1S85.  Paris, 
Heugel. 

Esclarmonde,  3  actes  et  8  tableaux,  Opéra-Comique,  14  mai  18S9. 
Paris,  Heugel. 

Le  Mage,  5  actes  et  6  tableaux,  Opéra,  16  mars  1891.  Paris, 
Heugel. 

Werther,  3  actes  et  4  tableaux,  Opéra  de  Vienne,  16  février  1892. 
Paris,  Heugel. 

Thaïs,  3actes  et  7  tableaux,  Opéra,  16mars  1894.  Paris,  Heugel. 

Le  Portrait  de  Manon,  1  acte,  Opéra-Comique,  8  mai  1894.  Paris, 
Heugel. 

La  Xararraise,  2  actes,  Covent-Garden,  20  juin  1894.  Paris, 
Heugel." 

Sapho,  i  actes,  Opéra-Comique,  27  novembre  1897.  Paris, 
Heugel. 

Cendrillon.  4  actes  et  6  tableaux,  Opéra-Comique,  24  mai  1899. 
Paris,  Heugel. 

Grisèlidis,  3  actes  et  1  prologue,  Opéra-Comique,  20  novembre 
1901.  Paris,  Heugel. 

Le  Jongleur  de  Notre-Dame,  3  actes,  théâtre  de  Monte-Carlo, 
18  février  1902.  Paris,  Heugel. 

Chérubin,  3  actes,  théâtre  de  Monte-Carlo,  14  février  1905.  Pa- 
ris, Heugel. 

Ariane,  5  actes,  Opéra,  31  octobre  1906.  Paris,  Heugel. 

Thérèse,  2  actes,  théâtre  de  Monte-Carlo,  7  février  1907.  Paris, 
Heugel, 

Bacchus,  4  actes  et  7  tableaux,  Opéra,  5  mai  1909.  Paris,  Heugel. 

bon  Quichotte,  5  actes,  théâtre  de  Monte-Carlo,  19  février  1910. 
Paris,  Heugel. 

Borna,  4  actes,  théâtre  de  Monte-Carlo. 

Vannrge,  4  actes,  Gaîté  Lyrique. 

ŒUVRES    DÉTRUITES    OU    UTILISEES    AILLEURS 

Grande  Fantaisie  de  Concert  sur  le  Pardon  de  Ploermel  de  Meyerbeer, 
Paris,  Brandus  et  S.  Dufour,  1861.  (Détruit  vers  1900, 
sur  la  demande  de  l'auteur.) 

Requiem  à  4  et  8  voix,  avec  accompagnement  d'orgue,  de  violon- 
celles et  de  contrebasses.  (Envoi  de  Rome,  1S65.) 

Esmeralda,  Opéra,  1865. 

Pompèia,  suite  symphonique  (musique  utilisée  dans  les  Erynnies). 

Deux  Fantaisies  pour  orchestre ,  Concert  des  Champs-Elysées, 
juillet  1866. 

La  Coupe  du  roi  de  Thulè,  3  actes,  1867.  (Musique  utilisée  dans 
les  Erynnies,  Eve,  Marie- Magdeleine,  Le  Roi  de  Lahore,  la 
Vierge.) 

Paix  et  Liberté,  cantate,  15  août  1867. 

Méduse,  3  actes,  1868. 

Manfred,  opéra  inachevé,  1869. 

Introduction  et  Variations,  pour  quatuor  à  cordes,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  cor  etbasson,  1871.  Joué  à  la  société  classique 
Armingadd  le  26  mars  1872. 

Dialogue  nocturne  (A.  Silvestre),  duo,  Paris,  Hartmann,  1872. 

fierons,  c'est  l'heure  (Verlaine),  duo,  Paris,  Hartmann,  1872. 

Le  Soir  (L.  Baillet),  duo,  Paris,  Hartmann,  1872. 

L'Adorable  Bel-Bout,  Cercle  des  Mirlitons,  1874. 

Lamenta  pourorchestre,  suite  à  l'occasion  de  la  mort  de  G.  Hizet, 
Concerts  Colonne,  31  octobre  1875. 

Bérengère  et  Anatole,  Cercle  de  l'Union  artistique,  février  1876. 

Mon  père  est  oyseau,  ma  mère  est  oyselte,  air  pour  Notre-Dame  de 
Paris  (V.Hugo),  Théâtre  des  Nations,  i  juin  1879. 


35« 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIOS  XAIRE  DU  COXSERVATOIRE 


Robert  de  Fronce,  drame  lyrique,  1880, 
Les  Girondins,  opéra,  issi. 
Montait»  m. 

Chant  i- 11  l'honneur  de  Routier.  Le  Figaro,  s  février  18S4. 
Apollon  aux  Muses,  isiii  (dans  le  S"  acte  du  Vaoe) 
Quatuor  ii  cordes. 

Bibliographie. 

Paul'ACKBK.  —  Petites  Confessions,  Paris,  Fontaanoing,  1904. 

I.éon.ArBiN.  —  Le  Drame  lyrique,  Tours,  l'.Mis. 

C.  Bellaiook.  —  L'Année  musicale  issu,  Paris,  Delagrave. 

—  L'Année  musicale  IS9I,  Paris,  Delagrave. 

—  L'Année  musicale  IBM,  Paris,  Delagrave. 

A.  Brisson.  —  Portraits  intimes.  2»  série,  Paris,  Colin,  1896. 
A.  Bai  sur.  —  Musiques  d'hier  et  de  demain,   Paris,  Fasquelle, 
1900. 

—  La  Musique  française,  Paris.  Fasquelle,  1901. 

—  Musiques  de  Russie  et  Musiciens  de  France,   P;i ri  =  ,  Fasquelle, 

1903. 
Félix  Clément  et  Pierre  Larousse.  —  Dictionnaire  des  Opéras, 

revu  et  mis  à  jour  avec  supplément  par  A.  Pougjn,  Paris, 

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K.  Destranges.  —  Consommées  et  Dissonances,  Paris,  Fischba- 

cher,  1900. 
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A.  Pougin.  —  Supplément  a  la  Biographie  de  Fétis,  Paris,  Didot, 

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Fernand  Gregh.  — Etude  sur  V.  Hugo,  snicie  de  pages  sur...  Uas- 

seuet,  Paris,  Fasquelle,  1905. 
Georges  Grovk.  —  Grave' s  Dictimiarg  <i[  Music  and  Musicians,  edi- 

tedbyJ.-A.  Fuller  Maitland,  London,  Macmillan,  1904. 
Arthur    Hervey.   —  Masters  of  Trench  llusic,  London,  Osgood, 

Mac  Ilvaine  and  C°,  1894. 
_   Freneh   Music  in   the  Nineleenlh  Cenlunj ,   London,  Grant  Ri- 
chards, 1903. 
H.  Hostein.  —  Historiettes  et  sourenirs  d'un  homme  de   théâtre, 

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—  Musiciens  d'aujourd'hui,  2e  série,  Paris,  1S94. 

—  Musique,  Paris,  1890. 

—  Musique  d'hier  cl  d'aujourd'hui,  Palis,  1910. 

Ch.  Malherbe.  —  Notice  sur  Esctarmonde,  Paris,  Fischbacher, 

1S90. 
Hermann Mbndel. —  Musikulisches  Conrersalions-Leeeikon,  Berlin, 


3"-"  vol.,  Paris,  Fasquelle, 
usicole,  Paris,  Fischba- 


1878. 
Catulle  Mendés.  —  L'Art  a 
V  1900. 

Léonce  Mesnard.  —  Essais  de  criliqiu 
-0        cher,  1892. 

Ed.  Noël  et  Ed.  Stoullig.    —  Les  Annules  du  Théâtre  et  de  la 
Musique,  Paris,  Charpentier,  1875-95,  Paris,  Berger-Le- 
vrault,  1890. 
E.  Reyer.  —  Quarante  «ni  de  musique,  Paris,  C.   Lévy,  1909. 
Louis  de  Romain.  —  Essais  de  critique  musicale,  Paris,  Lemerre, 

1890. 
Louis  Schneider.  —  Massenet,  Paris,  Carteret,  1908. 
Octave  Séré.  —  Musiciens  [ramais  d'aujourd'hui,   Paris,   Mercure 

de  France,  1911. 
G.  Servieres,  —  La  Musique  française  moderne,  Paris,  Bavard, 

1897. 
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Ed.  Stoullig.  —  Les  Annales  du  Théâtre  et  de  la  Musique,  Paris, 

Ollendorff,  depuis  1897. 
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10  mai  1904. 
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—  Cheriihin.  Revue  des  Deux  Mondes,  1  "  juillet  1905. 

—  Ariane.  Revue  des  Deux  Mondes,  1"  décembre  1906. 

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—  Ariane.  Introduction  a  t'opéra  de  Massenet.  Le  Ménestrel,  du 

14  octobre  au  15  décembre  1906, 

—  Dernier  mot  sur  l'Ariane  de  Massenet.  Le   Ménestrel,  2  mars 

1907. 


A.  Bootarel.  —  Bucchus  dans  la  Mythologie  et  dans  Topera  de 
Massenet.  Le  Ménestrel,  du  15  mai  au  7  août  1909. 

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—  Ariane.  Le  Théâtre,  n»  193,  janvier,  I,  1907. 

—  Bucchus.  Le  Théâtre,  n°  254,  juillet,  II,  1909. 

Claude  Debussy.  —  DËie  a  Grisclidis.  La  Revue  Blanche, 
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—  La  Reprise  de  Werther.  Gil  Blas,  27  avril  1903. 

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Ch.  Formentin.  —  Une  Heure  chez  Massenet.  Revue  Illustrée, 
1"  février  1S93. 

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trel, 11  mars  1S94. 

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Pierre  Lalo.  —  Cendrillon.  Le  Temps,  30  mai  et  6  juin  1899. 

—  Grisclidis.  Le  Temps,  30  novembre  1901. 

—  Le  Joui/leur  de  Noire-Dame.  Le  Temps,   25  février   1902  et 

17-mai  1901. 

—  Le  Concerto  pour  piano.  Le  Temps,  3  février  1903. 

—  L'imitation. de  Wagner  et  de  M.  lias émet.  Le  Temps,    21    avril 

1903. 

—  Reprise  de  Werther.  Le  Temps,  28  avril  1903. 

—  Hérodiade  à  ia  Guile.  Le  Temps,  3  novembre  1903. 

—  Chérubin.  Le  Temps,  21  février  et  17  mai  1905. 

—  Marie-Magdeleine.  Le  Temps,  15  mai  1906. 

—  Ariane.  Le  Temps,  27  novembre  1906. 

—  Thérèse.  Le  Temps,  2  mars  1907. 

—  Les  Èrijnnies.  Le  Temps,  13  aoùl  1907. 

—  Bucchus.  Le  Temps,  11  mai  1909. 

—  Don  Quichotte.  Le  Temps,  28  février  1910. 

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—  Le  Jongleur  de  Notre-Dame.  L'Art  du  Théâtre,  n°  44,  1901. 

—  Chèruliin.  L'Art  du  Théâtre,  n»  56',  1905. 

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G.  Servieres.  —  A  propos  du  Poème  du  Souvenir.  Le  Guide  mu- 
sical, 16-23  juin  1907. 

G.Tai.mont.   —   Une  Matinée  chez  Massenet.  Comœd 

1909. 
Le  Théâtre.  —  Numéro  consacre  a  Massenet,  juillet  1899. 
Julien  Torche  r.  —  lue  Lettre  inédite  Je  Ri;  et  a  Massenet.  Le  Guide 

musical,  19-26  mai  1907. 

—  Audition  intime  de  Thaïs  et  la  mort  de  Go  in.nl    l'.omœdia,  ■'•  m  A 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3541 


Jean  d'Udine.  —  Massenet.  Courrier  Musical,  1d  février  11)08. 

B.  VanDYCK.  —  Massenet  par  un  de  ses  interprètes.  Theater  Zei- 
tuns,  Vienne,  16  novembre  1905,  et  GuideMusical,  1 4 dé- 
cembre 1905. 

Ch.-M.  Widob.  —  Thaïs.  Revue  de  Paris,  1"  avril  1S94. 

Méhul. 

Etienne-Nicolas  Méhul  naquit  à  Givet  le  22  juin 
1763.  Un  vieil  organiste  du  couvent  des  Récollets  fut 
son  premier  professeur.  Puis  il  eut  pour  maître  un 
musicien  allemand,  Guillaume  Hanser,  directeur  de 
la  musique  à  l'abbaye  de  Laval-Dieu. 

Tout  jeune  encore,  Méhul,  comme  Gounod,  se  crut 
appelé  à  la  vie  religieuse;  mais  sa  médiocre  santé 
l'obligea  de'  renoncer  à  sa  prétendue  vocation. 

Vers  1778,  il  arrive  à  Paris;  il  se  fait  présenter  à 
Gluck;  il  assiste  à  la  répétition  générale  d'Iphigénie 
en  Tauride:  il  s'enthousiasme;  il  travaille  avec  un 
élève  de  Gluck,  Edelmann;  il  fait  exécuter,  le  17  mars 
•1782,  au  Concert  Spirituel,  une  ode  sacrée,  qui  est 
assez  bien  accueillie  par  le  public;  il  écrit  trois  so- 
nates pour  le  piano  (1783)  et  trois  opéras  qu'il  ne  fait 
pas  jouer  et  qu'il  détruisit  plus  tard.  Enfin,  le  4  sep- 
tembre 1790,  à  la  Comédie  Italienne,  avec  Euphrosine 
ou  le  tyran  corrigé, il  obtient  son  premier  grand  suc- 
cès. Voilà  son  nom  connu,  et  maintenant,  il  n'aura 
point  de  peine  à  faire  accepter  ses  œuvres  par  les 
directeurs  de  théâtre.  La  chute  de  Cora  en  1791  est 
compensée,  dés  1792,  par  la  durable  réussite  de 
Stratonice. 

Bientôt  Méhul  va  devenir  un  des  musiciens  officiels 
de  la  Révolution.  Outre  le  fameux  Chant  du  départ, 
il  composera  des  hymnes  patriotiques  en  l'honneur 
de  la  Raison,  de  l'Eternel,  de  l'Etre  suprême,  en  sou- 
venir du  14  Juillet,  du  t S  Fructidor  et  du  9  Thermidor. 
Le  9  décembre  1795,  il  est  désigné  pour  représenter 
l'art  musical  dans  la  3e  classe  de  l'Institut,  aux  côtés 
de  Gbétry,  Mo.nsigny,  Gossec,  Lesueur,  Cheri'hini  et 
Dalayrac  En  même  temps,  il  est  nommé  inspecteur 
des  éludes  au  Conservatoire,  où,  plus  tard,  il  ensei- 
gnera la  composition. 

Le  1"  mai  1797,  avait  lieu  la  première  représenta- 
tion de  ce  Jeune  Henry  dont  l'ouverture  fut  immé- 
diatement bissée  et  resta  si  longtemps  célèbre.  Pen- 
dant trente  ans,  on  l'intercala  isolément  dans  les 
programmes  de  l'Opéra-Comique. 

Méhul  songeait  à  se  marier.  Il  épousa  la  fille  d'un 
original,  le  docteur  Gastaldy,  et  il  ne  tarda  point  à 
s'en  repentir.  Une  séparation  à  l'amiable  fut  décidée, 
et  Mme  Méhul  vécut  des  lors  sans  aucuns  rapports 
avec  son  mari. 

L'histoire  de  la  vie  de  Méhul  est  surtout  celle  de  ses 
œuvres.  Notons  le  succès  d'Ariodant  en  1799,  l'exé- 
cution du  Temple  de  Mars  (Chapelle  des  Invalides), 
du  beau  Chant  du  2.Ï  messidor  an  VIII  (14  juillet 
1800). 

Causant  un  jour  avec  Méhul,  Napoléon  lui  dit  : 
«  Votre  musique  est  peut-être  plus  savante  et  plus 
harmonieuse;  celle  de  Paisiello  et  de  Cimarosa  a 
pour  moi  plus  de  charmes.  »  En  réponse  à  cette  cri- 
tique, Méhul  écrivit  L'Irato  sous  le  pseudonyme  du 
signor  Fiorelli.  Celte  pièce  en  un  acte,  fine  parodie 
de  la  musique  italienne,  triompha  le  17  février  1801 
devant  un  auditoire  qui  eut  le  bon  esprit  de  redou- 
bler ses  applaudissements  lorsqu'on  vint  lui  nommer 
le  véritable  auteur.  Bonaparte  lui-même  se  déclara 
ravi  :  «  Trompez-moi  souvent  ainsi,  »  aurait-il  dit. 
Le  1er  janvier  1804,  trois  musiciens  furent  nommés 
chevaliers  de  la  Légion  d'honneur,  Gossec,  Grétry 


et  Méhul.  De  plus,  Bonaparte  offrait  à  Méhul  la  place 
de  maître  de  chapelle  laissée  vacante  par  le  retour 
de  Paisiello  en  Italie.  Méhul  refusa  d'accepter  seuL 
ces  fonctions  :  il  aurait  voulu  les  partager  avec  son 
ami  Cherubim  :  elles  furent  alors  attribuées  à  Le- 
sueur. Mais  c'est  à  Méhul  que  fut  commandée,  pour 
le  couronnement  de  Napoléon  Ier  à  Notre-Dame  le 
2  décembre  1804,  une  Messe  solennelle,  qui  d'ailleurs 
n'y  fut  point  exécutée. 

Le  17  mai  1806,  l'Opéra-Comique  donnait  la  pre- 
mière représentation  d'un  curieux  opéra  de  Méhul, 
Uthal,  sur  un  livret  inspiré  d'Ossian,  d'une  singulière 
couleur  romantique.  Les  violons  y  étaient  remplacés 
par  des  altos.  «  Je  donnerais  deux  louis  pour  enten- 
dre une  chanterelle,  »  s'écria  Grétry  en  sortant  du 
spectacle.  La  partition,  un  peu  monotone,  renferme 
des  pages  remarquables. 

Le  17  février  1807,  paraissait  sur  la  scène  de  l'O- 
péra-Comique le  chef-d'œuvre  de  Méhul,  Joseph,  qui 
fut  composé,  parait-il,  en  deux  mois.  La  médiocrité 
du  livret  faillit  porter  préjudice  au  succès  de  la  par- 
tition. La  beauté  de  la  musique  triompha  enfin  des 
hésitations  du  public,  et  l'ouvrage  se  répandit  bien- 
tôt en  province,  puis  à  l'étranger,  surtout  en  Allema- 
gne, où  Weber  el  Richard  Wagner  devaient  en  con- 
sacrer la  réputation  par  leurs  éloges  et  par  leur  zèle 
à  en  organiser  des  représentations  modèles. 

Après  Joseph,  le  déclin  commence.  Les  dernières 
œuvres  de  Méhul  témoignent  d'un  appauvrissement 
de  l'inspiration  qui  allait  avec  une  rapide  décroissance 
des  forces  physiques.  Méhul  était  atteint  de  phtisie. 
Il  devenait  ombrageux  et  sombre.  Les  succès  de  ses 
rivaux  le  rendaient  inquiet.  Quatre  symphonies  dans 
le  style  de  Haydn,  bien  accueillies  au  Conservatoire 
de  1808  à  1810,  ne  le  consolent  pas  du  double  échec 
de  Persée  et  des  Amazones.  «  Je  suis  meurtri,  écrivait- 
il,  je  suis  écrasé,  dégoûté,  découragé!...  Je  veux  vivre 
au  milieu  de  mes  Heurs,  dans  le  silence  et  la  retraite, 
loin  du  monde.  »  A  Pantin,  dans  sou  «  asile  cham- 
pêtre »,  Méhul  cultivait  avec  passion  les  tulipes. 

Au  début  de  1817,  les  médecins  l'envoyèrent  dans 
le  Midi.  Il  ne  se  trouve  pas  mieux  de  son  séjour  à 
Hyères.  «  Seul,  au  bout  du  monde,  dans  une  au- 
berge »,  il  s'attriste.  «  Les  jours  où  il  arrive  des 
voyageurs,  le  monsieur  malade  est  un  peu  oublié!  » 
D'Hyères  il  gagne  Marseille,  et  il  revient  à  Pantin 
au  milieu  de  ses  fleurs.  A  l'automne,  il  faut  bien 
rentrer  à  Paris,  dans  son  logis  de  la  rue  Montholon. 
C'est  là  qu'il  meurt  le  18  octobre  1817,  à  six  heures  du 
matin. 

De  son  temps,  Méhul  passait  pour  un  musicien  sa- 
vant, aux  elfets  d'harmonie  puissants  et  inattendus, 
à  l'orchestration  recherchée.  Un  juge  compétent> 
Saint- Saiïns,  ratifie  pleinement  ce  jugement  des  con. 
temporains  de  Méhul.  Qu'on  relise  seulement  la  pre- 
mière page  de  l'ouverture  d'Ariodant  pour  trois 
violoncelles  divisés  soutenus  par  un  quatrième  vio- 
loncelle et  les  contrebasses.  On  sera  frappé  de  la 
nouveauté  des  combinaisons  inventées  par  ce  compo- 
siteur. 

Comparable  à  Gluck  pour  la  simplicité  et  la  gran- 
deur, Méhul  n'en  a  pas  toujours  la  pureté  ni  la  force. 
Il  est  plus  sensible,  et  chez  lui  se  marquent  déjà  des 
tendances  romantiques  qui  annoncent  Weber  d'une 
part,  et  César  Franck  de  l'autre.  M.  Vincent  dTndy 
a  très  justement  remarqué  la  parenté  de  certaines 
mélodies  de  Ruth  avec  telle  phrase  de  Méhul,  et  no- 
tamment du  duo  de  Ruth  et  de  Booz  avec  le  duo 
de  Jacob  el  de  Benjamin. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Schubert  aimait  particulièrement  les  ouvertures 
de  Méhul.  11  s'est  certainement  souvenu  des  préludes 
dramatiques  de  Timoléon,  d'Adrien  et  du  Jeune 
Henry,  quand  il  voulut  écrire  des  préfaces  musicales 
pour  Rosamonde  et  Fierabras. 

Dans  le  Chant  du  23  messidor,  nous  trouvons  déjà 
l'ébauche  d'une  de  ces  constructions  colossales,  «  ni- 
nivites  »,  dont  rêva  plus  tard  Berlioz.  Trois  orches- 
tres, trois  chœurs,  outre  les  soli  de  basse  et  de  ténor, 
s'y  unissent  ou  s'y  répondent.  De  ces  trois  groupes, 
deux  étaient  disposés  au  centre  de  la  chapelle  des 
Invalides;  le  troisième  était  placé  dans  le  dôme  et 
ne  comprenait  que  des  voix  de  femmes,  deux  harpes 
et  un  cor. 

«  J'aime  la  gloire  avec  fureur,  »  écrivait  Méhul  en 
1793.  «  Son  âme  à  la  fois  tendre  et  forte,  disait  un 
de  ses  contemporains,  était  ouverte  à  toutes  les 
passions,  et  les  combattait  toutes,  hors  celle  de  la 
gloire.  » 

De  taille  moyenne,  l'allure  aisée,  l'œil  clair,  le 
sourire  aimable  et  fin,  Méhul  «  savait  faire  un  mot 
charmant  d'un  simple  bonjour  ».  Il  plaisait  dès  l'a- 
bord, et  ses  amis  s'accordèrent  toujours  à  louer  la 
noblesse  et  la  générosité  de  son  caractère. 


1790.  Euphrosine,  5,  puis  4,  puis  3  actes. 

1791.  Cora,  4  actes. 

1792.  Stralonice,  1  acte. 

1793.  le  Jugement  de  Paris,  ballet  en  3  actes. 

1793.  le  Jeune  Sage  et  le  Vieux  Fou,  1  acte. 

1794.  Horalhis  Codés,  1  acte. 
1794.  le  Congrès  des  Rois,  3  actes,  en  collaboration  avec  i 

autres  musiciens. 
1794.  Mèlidore  et  Phrosine. 

1794.  Timoléon,  tragédie  avec  chœurs,  3  actes. 

1795.  Doriu  ou  lu  Tyrannie  détruite,  3  actes. 
1795.  la  Carême.  3  actes. 
1795.  le  Jeune  Henry,  2  actes. 
1797.  le  Pont  de  lodi,  1  acte. 
1799.  Adrien,  3  actes. 

1799.  Ariodanl,  3  actes. 

1800.  Epicure,  3  actes,  en  collaboration  avec  CHERrmM. 
1800.  La  Dansomanie,  ballet  en  2  actes. 

1800.  Bion,  1  acte. 

1801.  l'iralo,  1  acte. 

1802.  Une  Folie,  3  actes. 
1802.  le  Trésor  supposé,  1  acte. 

1802.  Joanna,  2  actes. 

1803.  Daphnis  et  Pandrose,  ballet  en  2  actes. 
1803.  Ilelèua,  3  actes. 
1803.  le  Baiser  et  la  Quittance,  3  actes,  en  collaboration 

BoÏELDIED,  KREUTZER  et  NlCOLO. 

1803.  L'Heureux  malgré  lui,  2  actes. 

1804.  lesllussites,  drame  en  3  actes. 
1806.  les  deux  arengles  rie  Tolède,  1  acte. 
1806.  Vlhal,  1  acte. 

1806.  Gabriel  ri'Estrées,  3  actes. 

1807.  Joseph,  3  actes. 

1810.  Persée  et  Andromède,  ballet  en  3  actes. 

1811.  les  Amazones  ou  la  fondation  de  Thèbes,  3  actes. 

1813.  le  Prince  Troubadour,  1  acte. 

1814.  L'Oriflamme,    1    acte,    en    collaboration    avec   Berton, 

Krectzer  et  Paer. 
1816.  la  Journée  aux  aventures,  3  actes. 
1S22.   Valentine  de  Milan  (posthume),  3  actes,  œuvre  terminée  par 

Daossoigne. 


17S2.  Philoc/ite  a  Lemnos,  ode  de  J.-B.  Rousseau. 
1794.  le  Chant  du  départ,  paroles  de  M.-J.  Chénier. 
1794.  Hymne  chanté  par  le  peuple  ri  la  [été  de  Bara  et  de  Viola,  pa- 
roles de  d'Avrigny. 
1794.  Hymne  du  Seuf  Thermidor,  paroles  de  M.-J.  Chénier. 

1794.  le  Chant  des  Victoires  ou  Hymne  ii  la  Victoire,  paroles  de 

M.-J.  Chénier. 

1795.  Chant  funèbre  a  la  mémoire  rie  Fèraud,  paroles  de  Baour- 

Lormian. 
1797.  Hymne  à  la  Paix,  paroles  de  C.  Pipelet. 


1797.  le  Chant  du  retour,  paroles  de  M.-J.  Chénier. 

lsnii.   Chant  national  du  l  i  juillet  IS00,  paroles  de  Fontanes. 

1808.  Chant  du  retour  pour  la  Grande  Armée,  paroles  d'Arnault. 

1810.  Cantate  (pour  le  mariage  de   Napoléon  Ier  avec  Marie- 

Louise),  paroles  d'Arnault. 

1811.  Le  Chant  d'Ossitm  (pour  la  naissance  du  Roi   de  Rome), 

paroles  d'Arnault. 
1811.  Chant  lyrique  (pour  l'inauguration  de  la  statue  de  Napo- 
léon), paroles  d'Arnault. 
1797-1810.  Quatre  Symphonies,  à  grand  orchestre. 
Ouverture  pour  instruments  à  vent  (  179  4). 
Ouverture  à  grand  orchestre  (1794). 
Ouverture  burlesque. 

Trois  Sonates  pour  le  clavecin  ou  le  forte-piano. 
ilesse  solennelle  à  quatre  voix. 
Domine  salram  foc  rempublicam,  à  deux  chœurs  et  deux 

orchestres. 
Ode  XIX  d'Anacréon. 
la  Chanson  de  Roland,    hymne  chanté  dans  Guillaume  le 

Conquérant,  drame  d'A.'  Duval  (1803). 
Mélodies. 

Bibliographie. 
Adam  (Ad.).  —Derniers  Soiirenirsri'uu  musicien,  Paris,  1859. 
Arsault.  —  Souvenirs  d'un  sexagénaire. 
Berlioz.  —  Les  Soirées  de  l'Orchestre.  Paris,  1853. 
Brancoor  (René).  —  Méhul,  Paris,    Henri   Laurens,  collection 

des  Musiciens  célèbres. 
Brdneau  (Alfred).  —  la  Musique  française.  Rapport  sur  la  musi- 
que en  France  du  xmc  au  xxe  siècle,  Paris,  1901. 
Cherdbini.  — Notice  iw  Méhul,  publiée  par  A.  Pougin  dans  la 

«  Rivista  musicale  italiana  »,  Turin,  1909. 
CHOOQrET  (fi.).  —  Méhul  dans  «    Grove's  Dictionary  of  music 

and  musicians  »,  London,  1S95. 
Comettant  (O.).  —  Lettres  inédites  de  Haydn,  Cherubini,  Méhul, 

Boieldien. 
Curzon  (H.  de).  —  Musiciens  du  temps  passé,  Paris,  1899. 
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graphie Firmin  Didot  ». 
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1892. 
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Pierre  (Constant).  —  Musique  ries  fêles  cl  cérémonies  rie  la  Révo- 
lution française,  Paris,  1899.  —  Les  Hymnes  et  Chansons  de 
la  Révolution,  Paris,  1001.  — Le  Conserratoire  national  rie 
musique  et  rie  déclamation,  Paris,   1900.  —  Le  Magasin  de 
Musique  à  l'usage  ries  frics  nationales::!  du  Conservatoire,  Pa- 
ris, 1895. 
Poogin  (Arthur).  —  Méhul,  sa  vie,  son  génie,  son  caractère,  Paris, 

1892. 
Qoatrf.mère  de  Quiscy.  —  Notice  sur  Mcliul,  lue  à  l'Académie 

des  beaux-arls(lSlS). 
Sévelinges.  —  Mehut  dans  la  «  Biographie  Michaud  ». 
Soubies  (Albert).  —  les  Membres   de  l'Académie   ries  beaux-arts. 

1"  série,  Paris,  1904. 
Thomas  (Ambroise).  —  Discours  prononcé  au  nom  du  Conserva- 
toire national  de  musique  pour  l'inauguration  de  la  statue 
de  Méhul  à  Givet,  le  2  octobre  1892. 
Tiersot  (Julien).  —  Fêles  et  Chants  de  la  Révolution  française,  Pa- 
ris, 1908.  —  lettres  rie  musiciens   écrites  en   français  du 
quinzième  au  vingtième  siècle,   publiées  dans  la   «  Rivista 
musicale  italiana  »,  1912. 
Vieillard.  —  Méhul,  sa  vie  el  ses  œuvres,  Paris,  1859. 


Monsigny. 

Pierre-Alexandre  Monsigny  naquit  le  17  octobre 
1729  à  Fauquembergues,  petite  ville  du  district  de 
Saint-Omer.  Enrantnaturel,il  futlégitimé  quatre  mois 
après  sa  naissance,  le  jour  même  du  mariage  de  ses 
parents.  Sa  famille  était  originaire  de  Sardaigne  et 
avait  autrefois  connu  l'aisance.  C'est  vers  le  début 
du  xvie  siècle  que  les  ancêtres  de  Monsigny  élaienl 
venus  se  fixer  dans  le  Boulonnais,  mais  peu  à  peu 
l'aisance  avait  disparu,  et  la  situation  de  ses  parents 
venus  de  Desvres  à  Fauquembergues  était  si  précaire 
que,  dans  son  enfance,  le  jeune  Monsigny  fut  obligé 
de  garder  les  troupeaux  :  dans  la  solitude  des  pâtu- 
rages, au  milieu  de  ses  bêtes,  il  sentit  s'éveiller  en 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3543 


lui  l'instinct  musical,  et  un  modeste  violon,  acheté 
par  son  père  à  la  foire  de  Fauquembergues,  servit 
à  ses  premiers  essais. 

Un  hasard  heureux  permit  à  ses  facultés  musicales 
de  se  développer.  Son  père  étant  venu  à  Saint-Omer 
comme  commis  chez  le  fermier  des  droits  perçus  sur 
l'eau-de-vie,  celui-ci,  nommé  Butay,  frappé  des  dis- 
positions de  l'enfant,  associa  le  jeune  Monsigny  aux 
leçons  de  musique  qu'il  faisait  donner  à  ses  fils  par 
le  carillonneur  de  l'abbaye  de  Saint-Rertin,  et  le  fit 
entrer  ensuite  comme  enfant  de  chœur  à  la  paroisse 
Saint-Denis.  A  leur  tour,  les  Jésuites,  l'ayant  remar- 
qué, sechargèrent  deson  éducation,  et  le  P.  Mollien 
lui  aurait,  paraît-il,  appris  le  violon.  La  mort  de  son 
père,  survenue  en  1748,  força  le  jeune  homme  à 
pourvoir  aux  besoins  de  sa  mère,  de  sa  sœur  et  de 
ses  quatre  frères. 

Ici,  les  indications  que  nous  donnent  les  divers 
biographes  deviennent  confuses  et  contradictoires. 
Il  semble  bien  que  Monsigny  soit  parti  pour  Paris 
le  6  ou  le  7  octobre  174!).  Mais  nous  ignorons  tout 
des  commencements  de  son  séjour  dans  la  capitale. 
Certains  nous  disent  qu'aussitôt  arrivé,  il  s'occupa 
de  composition  et  que,  s'inspirant  des  intermèdes 
italiens  joués  à  l'Opéra,  il  écrivit  Les  Aveux  indiscrets. 
En  réalité,  il  s'écoula  dix  ans  entre  l'arrivée  de  Mon- 
signy à  Paris  et  l'apparition  de  sa  première  œuvre 
(1749-1759).  Eu  admettant  même  que  Monsigny  eût 
été  poursuivi  par  le  désir  de  la  composition,  il  lui 
eût  été  bien  diflîcile,  dés  les  premiers  mois  de  son 
séjour  à  Paris,  de  se  livrer  à  son  penchant. 

En  effet,  il  n'avait  encore  aucun  protecteur  pour 
l'aider  à  produire  ses  œuvres  sur  une  scène.  De  plus, 
arrivé  sans  ressources,  il  lui  fallait  songer  d'abord 
à  faire  sa  situation  et  à  assurer  celle  des  siens.  La 
famille  d'un  financier,  Couette  d'Aubonne,  s'inté- 
ressa à  lui  et  lui  procura  un  modeste  emploi  dans 
les  bureaux  de  M.  de  Saint-Jullien,  receveur  général 
du  clergé  de  France;  cette  situation  lui  permit  de 
s'installer  avec  les  siens  rue  du  Cherche-Midi.  Déjà 
il  élargissait  le  cercle  de  ses  relations,  et  parvenait 
à  se  faire  présenter  au  duc  d'Orléans,  petit-fils  du 
Régent,  dans  la  maison  duquel  il  entrait  bientôt.  Nul 
milieu  ne  pouvait  être  plus  favorable  au  développe- 
ment de  son  goût  pour  la  musique  :  les  loisirs  dont 
il  jouissait  lui  permettaient  de  travailler;  le  théâtre 
était  cultivé  avec  passion  chez  le  duc  d'Orléans  ;  enfin 
Monsigny  s'y  rencontrait  avec  ses  futurs  collabora- 
teurs, Collé,  lecteur  du  prince,  et  Carmontelle. 

Cependant,  malgré  son  désir  de  se  produire,  Mon- 
signy se  rendait  compte  de  la  nécessité  de  compléter 
son  éducation  musicale,  que  la  mort  de  son  père 
avait  brusquement  interrompue.  Il  s'adressa  donc  à 
Gianotti,  un  contrebassiste  de  l'Opéra  et  du  Concert 
Spirituel,  avec  lequel  il  Iravaillacinq  mois  seulement, 
àen  croire  le  témoignage  de  Fétis.  Le  peu  de  durée 
de  ses  études  musicales  explique,  semble-t-il,  cer- 
taines lacunes  de  ses  œuvres.  Sans  doute,  pour  re- 
prendre l'expression  de  Grétry,  Monsigny  «  chante 
et  chante  d'instinct  »;  il  a  de  l'imagination,  de  l'é- 
motion, mais  la  science  lui  manque  et  lui  manquera 
jusque  dans  ses  dernières  productions. 

On  s'estétonné  de  l'anonymat  gardé  par  Monsigny 
pour  ses  premières  œuvres,  et  l'on  a  voulu  y  voir  une 
preuve  de  sa  modestie.  En  réalité,  ce  ne  sont  pas  seu- 
lement les  premiers  opéras-comiques,  mais  toutes 
les  partitions  de  Monsigny  qui  ne  portent  qu'une 
initiale  M*".  D'ailleurs,  nul  n'en  ignorait  l'auteur, 
et  les  journaux  de  l'époque,  le  Mercure  et  les  Specta- 


cles de  Paris,  le  désignent  en  toutes  lettres  dans  leurs 
comptes  rendus. 

Les  circonstances  étaient  favorables  pour  Monsi- 
gny; les  nouveaux  directeurs  de  l'Opéra-Comique, 
Monnet  et  Favart,  manquaient  de  compositeurs.  Le 
jeune  musicien  fut  donc  fort  bien  accueilli,  et  sa 
première  œuvre,  Les  Aveux  indiscrets,  sur  un  livret 
de  La  Ribardière,  fut  applaudie  à  la  Foire  Saint- 
Germain  le  7  février  1739.  Le  succès  du  Maître  en 
droit  (livret  de  Lemonnier),  représenté  le  13  février 
1760,'se  prolongea  et,  deux  ans  plus  tard,  la  pièce 
était  jouée  devant  la  cour  (20  octobre  1762)  :à  cette 
occasion,  on  publia  une  édition  spéciale  du  libretto 
et,  pour  corser  le  spectacle,  on  ajouta  quelques  di- 
vertissements dansés. 

Dès  lors,  Monsigny  compte  parmi  les  musiciens 
aimés  du  public.  Dans  Le  Cadi  dupé  (livret  de  Le- 
monnier, Foire  de  Saint-Germain,  4  février  1761), 
on  goûte  fort  certains  airs  faciles  à  retenir;  une 
maladie  fâcheuse  d'une  des  principales  interprètes, 
M"0  Nessel,  survenue  après  la  quatrième  représenta- 
tion, n'interrompt  pas  le  succès;  la  pièce  est  reprise, 
et  Sedaine,  enthousiasmé  par  la  verve  de  certains  airs, 
promet  sa  collaboration  au  musicien.  11  lui  confie 
le  livret  de  On  ne  s'avise  jamais  de  tout,  représenté  le 
17  septembre  1761.  Déjà  la  vogue  de  Monsigny  était 
telle  que  la  cour  voulut  voir  la  pièce.  Deux  repré- 
sentations en  furent  données  à  Versailles  le  2  et 
le  13  décembre,  pour  lesquelles  on  avait  fait  appel 
à  des  artistes  de  l'Opéra,  de  la  Comédie  française  et 
de  la  Comédie  Italienne. 

Et  cependant  Monsigny,  pendant  un  an,  reste  éloi- 
gné du  théâtre.  Ce  silence  peut  paraître  étrange. 
Mais  déjà  les  nouvellistes  racontent  que,  en  colla- 
boration avec  Sedaine,  il  prépare  un  ouvrage  plus 
important  et  d'un  genre  plus  sérieux,  et  l'on  mène 
grand  bruit  autoul  de  l'œuvre  nouvelle.  Et  cependant, 
c'est  avec  quelque  réserve,  avec  froideur  même,  que 
l'on  accueille  le  Roi  et  le  Fermier,  donné  à  la  Comé- 
die Italienne  le  22  novembre  1762.  La  nouveauté  du 
genre  surprend.  Mais  bientôt,  le  public  revient  sur 
son  premier  jugement,  et  le  succès  est  si  durable 
que,  le  23  octobre  1806,  la  pièce  était  reprise  à  l'O- 
péra-Comique. Cette  œuvre  marque  en  effet  un 
progrès  considérable  dans  la  manière  de  Monsigny; 
l'expérience  lui  est  venue;  aussi,  la  forme  est-elle 
plus  ferme.  De  plus,  on  sent  chez  lui  un  effort  pour 
se  hausser  à  la  taille  du  sujet;  c'est  ainsi  que  les 
divers  morceaux  sont  plus  longuement  développés 
que  dans  les  œuvres  précédentes. 

A  ce  moment,  Monsigny  entreprend  avec  Favart  un 
travail  qui  l'empêcha  probablement  de  rien  donner 
en  1763, et  dont  le  résultat  fut  complètement  nul.  Il 
s'agissait  de  remanier  une  pièce  de  Pellegnn,  le 
Nouveau  Monde.  L'œuvre  ne  fut  jamais  jouée,  mais 
peut-être  Monsigny  employa-t-il  la  musique  qu'il 
avait  composée  à  cette  occasion  dans  Aline,  reine  de 
Golconde. 

L'année  1764  fut  marquée  par  l'apparition  à  la  Co- 
médie Italienne  de  Rose  et  Colas  (8  mars),  dont  le  suc- 
cès s'affirma  prodigieux.  De  nouveau,  Monsigny  reste 
silencieux  pendant  deux  ans;  il  visait  plus  haut  et 
voulait  composer  un  opéra.  Ce  fut  Aline,  reine  de 
Golconde,  tirée  par  Sedaine  d'un  conte  du  chevalier 
de  Boufllers  (lo  avril  1766).  Certains  biographes  de 
Monsigny  prétendent  que  ce  fut  un  échec.  L'assertion 
peut  paraître  exagérée,  puisque  la  pièce  atteignit  la 
cinquantième  et  fut  reprise  deux  fois.  Mais  elle  fut 
reçue  sans  enthousiasme.  Monsigny,  en  etfet,nerenou- 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


volait  pus  le  genre  de  L'opéra;  bien  plus,  sans  doule 
à  cause  de  l'insuffisance  de  son  instruction  musicale 
el  de  la  faiblesse  de  ses  moyens  d'exécution,  il  se 
contentait  de  refaire  à  peu  près  à  l'Opéra  ce  qu'il 
avait  déjà  fait  à  la  Comédie  Italienne. 

Monsigny  jouissait  alors  d'une  situation  privilégiée 
dans  la  maison  du  duc  d'Orléans,  qui  le  considérait 
comme  un  véritable  confident,  s'ouvrant  à  lui  de  ses 
ennuisde  famille,  se  servant  deluicommeconciliateur 
dans  les  petits  différends  qui  pouvaient  s'élever  entre 
Mm«  de  Genlis,  Mme  de  Montesson  et  lui-même.  Cette 
situation  l'amena  à  entreprendre,  à  son  corps  défen- 
dant, un  travail  auquel  le  duc  s'intéressait  vivement. 
11  s'agissait  d'écrire  la  musique  pour  un  livret  de 
Collé, L'Ile  Sonnante.  La  pièce,  représentée  à  Villers- 
Coterets  au  début  d'août  1767,  n'eut  pas  de  seconde 
représentation;  elle  ne  fut  pas  plus  heureuse  le 
4  janvier  1768  à  la  Comédie  Italienne.  Collé,  qui 
tenait  son  livret  en  haute  estime,  fit  retomber  sur 
Monsigny  la  faute  de  l'échec,  et  traita  avec  le  plus 
profond  mépris  le  musicien  qui  avait  voulu  satis- 
faire au  désir  du  duc  d'Orléans. 

Le  Déserteur,  dont  la  première  représentation  eut 
lieu  à  la  Comédie  Italienne,  le  6  mars  1760,  fut  d'à. 
bord  froidement  reçu  par  le  public;  c'était,  en  géné- 
ral, ce  qui  se  passait  pour  toutes  les  pièces  de  Sedaine. 
Grimm  n'avait  pas  assez  de  sarcasmes  pour  la  nouvelle 
œuvre,  dont  l'originalité  consistait  dans  l'alliance  du 
comique  avec  une  émotion  qui  allait  dans  certaines 
scènes  jusqu'au  pathétique.  Le  Déserteur  ne  tarda 
pas  à  conquérir  la  faveur  du  public,  au  point  qu'il  fut 
adapté  en  ballet  pour  l'Opéra  par  le  danseur  Gardel. 
Monsigny  d'ailleurs  semble  avoir  eu  conscience  des 
progrès  réalisés  par  lui  dans  cette  partition  :  c'est 
en  effet  la  seule  de  ses  œuvres  qui  'porte  une  dédi- 
cace (à  son  protecteur  le  duc  d'Orléans). 

La  période  qui  suit  semble  moins  féconde  et  sur- 
tout moins  heureuse  pour  la  gloire  de  Monsigny.  Les 
obligations  de  la  charge  de  maître  d'hôtel  de  la 
maison  du  duc  d'Orléans  qu'il  acheta  d'Augeard,  au 
moment  de  sa  retraite,  contribuèrent  ;peut-être  à 
l'éloigner  du  théâtre.  D'autre  part,  les  livrets  pour 
lesquels  il  écrivit  de  la  musique  étaient  si  mauvais 
que  le  musicien  partagea  l'insuccès  des  librettistes. 
Après  avoir  pris  une  part  légère  à  la  composition 
d'un  ouvrage  en  trois  actes  que  Favarl  donna  à  la 
cour  à  Fontainebleau  (25  octobre  1769)  et  (à  la  Co- 
médie Italienne  (14  décembre),  La  Rosière  deSalency, 
Monsigny  accepte  de  Sedaine  Le  Faucon,  qui  échoue 
successivement  à  la  cour  et  à  Paris  (19  mars  1772); 
l'hostilité  du  public  se  manifeste  même  si  vivement 
que  les  auteurs  retirent  leur  pièce.  Un  an  plus  tard, 
La  Belle  Arsène,  sur  un  livret  de  Favarl,  échoue  à  la 
cour  à  Fontainebleau  (6  nov.  1773).  Les  auteurs  es- 
sayent de  refaire  la  pièce,  mais,  devant  la  difficulté 
de  l'entreprise,  l'avart  offre  à  Monsigny  un  autre 
livret,  Zélis.  Celui-ci  refuse  d'y  faire  resservir  la 
musique  de  La  Belle  Arsène,  estimant,  non  sans  rai- 
son, qu'une  situation  dramatique  ne  saurait  s'ac- 
commoder d'une  musique  quelconque.  Cependant 
le  maréchal  de  Richelieu,  qui  avait  juridiction  sur 
la  Comédie  Italienne,  tenait  à  La  Belle  Arsène;  son 
insistance  faisait  presque  une  obligation  aux  auteurs 
de  remanier  leur  pièce;  de  trois  actes  ils  en  tirent 
quatre,  el,  le  14  août  1775,  la  seconde  version  de  La 
Belle  Arsène  était  donnée  à  la  Comédie  Italienne. 
La  première  impression  fut  nettement  défavorable, 
mais,  par  la  suite,  l'œuvre  finit  par  gagner  la  faveur 
des  spectateurs. 


Le  24  novembre  1777,  Monsigny  éprouvait  un  nou- 
vel échec  à  la  Comédie  Italienne  avec  Félix  ou  l'En- 
fant trouvé,  en  collaboration  avec  Sedaine.  Après 
cinq  représentations,  la  pièce  disparaissait  de  l'af- 
fiche. Reprise  deux  ans  plus  tard,  le  20  septembre 
1779,  par  égard  pour  la  situation  des  auteurs,  elle 
n'était  pas  mieux  accueillie.  Ce  ne  fut  qu'à  partir  de 
la  Révolution  que  la  partition  de  Félix  fut  goûtée 
du  public,  sans  qu'il  soit  d'ailleurs  possible  de  dé- 
terminer les  causes  de  ce  brusque  revirement. 

En  1777,  la  carrière  musicale  de  Monsigny  se  ter- 
mine brusquement.  Il  vivra  encore  quarante  ans,  il 
ne  produira  plus  rien.  On  a  proposé  de  ce  brusque 
silence  diverses  explications.  Quatremère  de  Qluncy 
parle  de  fatigue  cérébrale  et  morale;  d'après  lui, 
Monsigny  aurait  été  épuisé  par  la  fièvre  que  lui  cau- 
sait la  production.  PoutFétis,  il  aurait  été  brusque- 
ment privé  de  toute  faculté  imaginative;  l'inspiration 
l'aurait  abandonné  à  tout  jamais.  Mme  Ducrest,  la 
nièce  de  Mme  de  Genlis,  propose  une  autre  explica- 
tion :  Monsigny  aurait  craint  d'être  éclipsé  par  Gré- 
try;  d'autre  part,  la  dévotion  de  sa  femme  l'aurait 
tenu  éloigné  du  théâtre.  Mme  Ducrest  va  même  jus- 
qu'à prétendre  que,  pour  arriver  plus  sûrement  à 
ses  fins,  elle  aurait  brûlé  trois  ouvrages  de  son  mari 
complètement  terminés.  La  véritable  raison  du 
silence  de  Monsigny  nous  est  donnée  dans  les  lettres 
de  sa  fille  :  le  musicien  était  menacé  de  perdre  la 
vue;  seul,  un  repos  absolu  pouvait  lui  conserver  les 
yeux.  Aussi  refusa-t-il  le  livret  de  Richard  Cœur  de 
lion,  que  Sedaine  vint  lut  offrir,  avant  de  le  confier, 
sur  le  conseil  de  Monsigny,  à  Grétry. 

Dès  lors,  Monsigny  va  vivre  de  la  vie  de  famille  :  le 
7  janvier  1784,  il  avait  épousé  une  jeune  fille  de  vingt- 
cinq  ans  plus  jeune  que  lui.  Il  eut  cinq  enfants,  dont 
trois  moururent  en  bas  âge.  Après  la  mort  du  duc 
d'Orléans,  en  1785,  il  obtint  de  son  fils  le  titre  et  les 
fonctions  d'administrateur  de  ses  domaines  et  d'ins- 
pecteur général  des  canaux  d'Orléans,  ce  qui  lui 
permit  de  continuer  à  loger  au  Palais-Royal  dans 
l'aile  parallèle  à  la  rue  de  Richelieu  qui  donne  sur 
la  rue  Saint-Honoré.  Au  théâtre,  on  semblait  même 
avoir  oublié  sa  gloire  passée,  el,  lorsqu'il  essaya  de 
de  faire  paraître  à  l'Opéra  deux  ouvrages  qu'il  avait 
composés  autrefois,  Pagamin  de  Monègueet  Baucis  et 
Philémon  (représenté  à  un  spectacle  chez  le  duc 
d'Orléans),  il  se  heurta  à  un  refus  de  la  direction. 

A  la  Révolution.  Monsigny  perd  toutes  ses  ressour- 
ces, avec  sa  place  dans  la  maison  du  duc  d'Orléans 
et  la  pension  de  2000  livres  que  lui  avait  allouée 
Louis  XV  et  que  lui  avait  continuée  le  roi  Louis  XVI. 
Il  lui  faut  quitter  son  logement  du  Palais-Royal;  il 
s'installe  successivement  rue  Culture-Sainte-Cathe- 
rine, place  Royale,  enfin,  en  1799,  sans  doute  par 
raison  d'économie,  à  Saint-Cloud.  Ce  n'est  qu'en 
1801  que  l'éducation  de  son  fils  le  décide  à  revenir 
à  Paris,  rue  du  Faubourg-Saint-Martin.  Pendant  toute 
cette  période,  Monsigny  semble  avoir  connu  la  gêne; 
il  est  gravement  malade  en  1797;  sa  fortune  (environ 
20.000  livres  de  rentes)  a  disparu  dans  les  désastres 
financiers  de  l'époque;  on  ne  lui  paye  plus  ses  droits 
d'auteur;  et  cependant,  sa  situation  si  précaire  ne 
l'empêche  pas  de  s'intéresser  au  sort  de  la  veuve  de 
Philidor.  Sans  doute,  les  artistes  du  Théâtre  Favart 
ont  décidé  de  [lui  faire  une  pension  de  2.400  livres 
(15  août  1798);  sans  doute,  le  ministère  de  l'intérieur 
lui  alloue  quelques  secours  (27  juin  1799)  ;  mais 
Monsigny  ne  touche  presque  rien  de  ce  qu'on  lui 
promet,  el  sa  situation  est  tellement  désespérée  que, 


TECHXIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3545 


le  18  décembre  1799,  il  écrit  à  Sarrette  pour  lui  de- 
mander si  on  ne  pourrait  pas  «  le  fourrer  quelque 
part  ».  Précisément,  la  mort  de  Piccini  rendait  va- 
cante une  des  places  d'inspecteur  des  études  au  Con- 
servatoire. Monsigny  y  est  nommé  le  21  mai  1800, 
mais  la  moitié  des  5.000  francs  de  traitement  devait 
être  payée  comme  pension  alimentaire  à  la  veuve 
de  Piccini.  Après  vingt-cinq  mois  d'exercice,  Monsi- 
gny quitte  le  Conservatoire,  mais  non  de  son  plein 
gré,  comme  l'ont  affirmé  quelques-uns  de  ses  bio- 
graphes. En  août  1802,  uneréforme  du  Conservatoire 
amenait  la  suppression  de  trente-cinq  postes  de 
professeurs  et  de  trois  places  d'inspecteurs.  Lesueur, 
Martini  et  Monsigny  étaient  les  trois  inspecteurs  sa- 
crifiés. 

Cependant,  la  situation  pécuniaire  de  Monsigny  ne 
tarde  pas  à  s'améliorer;  le  15  août  1802,  le  ministère, 
à  titre  de  compensation,  lui  alloue  une  pension  de 
1.800  francs;  le  31  décembre,  il  louche  une  nouvelle 
pension  de  2.100  fr.,  auxquels  s'ajoutent  2.000  fr.  le 
13  mai  1806.  Enfin  le  14  juin  1810,  un  nouveau  dé- 
cret porte  la  totalité  de  sa  pension  à  6.000  francs. 
En  même  temps,  Monsigny,  depuis  longtemps  presque 
oublié,  retrouvait  la  gloire;  quelques-unes  de  ses 
œuvres  étaient  reprises  et  favorablement  accueillies 
par  le  public.  Enfin,  trente-six  ans  après  l'appari- 
tion de  sa  dernière  œuvre,  Monsigny  connaissait  la 
consécration  officielle  de  son  talent.  A  la  mort  de 
Grétry,  sans  avoir  lui-même  posé  sa  candidature, 
il  était  nommé  à  l'unanimité  membre  de  l'Institut 
(16  octobre  1813).  Il  avait  quatre-vingt-quatre  ans. 
Affaibli  par  une  récente  maladie,  il  ne  prit  jamais 
part  aux  travaux  de  l'Académie,  et  ne  put  assister 
qu'à  une  seule  séance,  celle  dans  laquelle  il  remercia 
ses  nouveaux  collègues. 

Monsigny  n'occupa  pas  longtemps  le  fauteuil  de 
Grétry.  Le  14  janvier  1817,  il  mourait  à  Paris  et  était 
enterré  au  Père-Lachaise. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES   DE  MONSIQNTr 

Les  Aveux  indiscrets,  1  acte,  Opéra-Comique  de  la  Foire,  7  fé- 
vrier 1759. 

Le  Maître  en  droit,  2  actes,  Opéra-Comique  de  la  Foire,  13  lévrier 
1760. 

Le  Cadi  dupé,  1  acle,  Opéra-Comique  de  la  Foire,  4  février  1761. 

On  ne  s'avise  jamais  de  tout,  1  acte,  Opéra-Comique,  4  septem- 
bre 1761. 

Le  Roi  et  le  Fermier,  3  actes,  Comédie  Italienne,  22  novembre 
1762. 

Hoseel  Cotas,  1  acte,  Comédie  Italienne,  S  mars  1761. 

Aline,  reine  de  Golconie,  3  actes,  Opéra,  15  avril  1766. 

L'Ile  sonnante,  3  ectes,  Comédie  Italienne,  4  janvier  1768. 

Le  Déserteur,  3  actes.  Comédie  Italienne,  6  mars  1769. 

La  Rosière  de  Salency,  3  actes,  Comédie  Italienne,  14  décembre 
1769. 

Le  Faucon,  1  aele.  Comédie  Italienne,  19  mars  1772. 

Lu  lielle  Arsène,  4  actes,  Comédie  Italienne,  14  août  1775. 

Félix  ou  t'eufanl  Ironie,  3  actes.  Comédie  Italienne,  24  novembre 
1777. 

Pkitémon  et  Baucis,  non  représenté. 

l'ngumin  de  Monrgtie,  non  représenté. 

Bibliographie 

Adolphe  Adam.  —  Derniers  Sou/cuirs  d'un  musicien. 

A.  Alexandre.   —  Eloge  historique  de  M.  A.   Mnnsiguij    couronné 

par  la  Société  royale  d'Anus  le  -23  août  ISI9  (Mémoires  de 

cette  société,  1819). 
Berlioz.  —  Débats,  1843. 
Biot/rapliie  Didol. 

Carnot  (Mémoires  de),  par  son  fils. 
Castil-Blaze.  —  L'Académie  inijteriute  de  musique. 
Choron  etFAïoLLE.  —  Dicliomnurr  des  musiciens. 
J.  Claretie.  —  Temps,  23  juin  1SS4  fragments  du  Journal   de 


Félix  Clé\ 


Collé.  —  Journal  historique. 

Contant  d'Orville.  —  Histoire  de  l'opéra  hou/l'on.  1768. 

Chcdel.  —  Les  Créateurs  de  l'opéra-comiquc  français,  Alcan,  1914. 

Desboolmiers.  —  Histoire  de  l'opëru-eomiquc.  —  Histoire  du 
théâtre  italien. 

Fétis.  —  Biographie  unirerselle  dc<  musiciens. 

Mmo  de  Gbnlis.  —  Mémoires, 

Grimm.  —  Correspondance. 

P.  Hedouin.  —  Notice  sur  Monsigng  (Mosaïque  Valencienne 
1856). 

Henri  Heine.  —  Lulece. 

Journal  de  Paris,  16  janvier  1SH',. 

La  RBVEiLLÉRE-LEPEArx.  — Mémoires,  Paris,  Pion,  1895. 

Mémoires  secrets  pour  servir  à  l'histoire  de  la  République  des  let- 
tres, 18  novembre  1762. 

F.  de  Menil.  —  Biographie  de  Monsigng. 

A.  Podgin.  —  Monsigny  et  son  temps,  in-8",  Paris,  1903. 

Qcatremère  de  Qoincy.  —  Solice  lue  il  l'Académie  des  beaux-arts 
dans  la  séance  du  S  octobre  ISIS. 

Renie  et  Gazette  Musicale,  décembre  1S47. 

Rente  des  Deux  Mondes.  Le  Déserteur,  1er  janvier  1814. 

Seolecq.  —  Notice  sur  la  rille  de  Famiue'iibergiies. 

Soddies.  —  L'Académie  des  heanx-arts,  \">  série,  Paris,  Flam- 
marion, 1901. 

Les  Spectacles  de  Paris,  1760. 

Onsïow. 

George  'Onslow  naquit  à  Clermont-Ferrand  le 
27  juillet  1784.  Parmi  ses  ancêtres,  il  comptait  un 
président  de  la  Chambre  des  Communes  et  un  chan- 
celier. C'est  au  début  de  1783  que  son  père,  Edward 
Onslow,  avait  quitté  l'Angleterre.  Bien  accueilli  par 
la  supérieure  du  couvent  des  Ursulines  de  Clermont, 
il  avait  épousé  une  des  pensionnaires  de  ce  couvent, 
Marie  de  Bourdeilles,  dont  la  famille  était  apparentée 
aux  Brantôme.  Au  moment  de  la  Révolution,  il  se 
réfugia  en'Anglelerre,  et  c'est  là  que  le  jeune  George 
commença  son  éducation;  la  musique  n'y  figurait 
encore  que  comme  simple  accessoire,  mais  en  pré- 
sence de  ses  dispositions  pour  cet  art,  on  le  confia 
aux  maîtres  les  plus  réputés  de  l'époque,  Hullman- 
del,  Cramer  et  Dlssek. 

En  1798,  Onslow  revenait  en  France;  sa  fortune  le 
dispensait  de  chercher  une  carrière;  il  put  donc  se 
livrer  complètement,  avec  toute  la  fougue  de  la  jeu- 
nesse, aux  éludes  musicales.  Mais  le  seul  attrait  de 
ces  études  n'était  encore  pour  lui  que  dans  le  méca- 
nisme lui-même  et  dans  le  plaisir  de  l'exécution;  la 
musique  ne  produisait  sur  lui  aucune  émotion  pro- 
fonde; Onslow  n'était  alors  qu'un  brillant  virtuose. 

En  1807,  Onslow  partait  pour  l'Allemagne,  séjour- 
nant à  Hambourg  et  à  Altona,  où  il  avait  la  joie  de 
retrouver  Dussek.  Ce  que  n'avaient  pu  les  opéras  de 
Mozart,  une  œuvre  de  Méhul  le  produisit;  l'ouver- 
ture de  Slratonice  excita  dans  son  àme  des  senti- 
ments non  encore  éprouvés.  De  ce  jour,  il  sentit 
vraiment  la  musique,  et  l'instinct  de  la  composition 
s'éveilla  en  lui. 

A  son  retour  d'Allemagne,  il  épouse  unejeune  fille 
de  la  plus  haute  noblesse  de  province,  Delphine  de 
Fontanges  (19: juillet  1808).  Libre  de  tout  souci  ma- 
tériel, dépourvu  d'ambition,  d'un  caractère  bienveil- 
lant et  facile,  il  se  livre  tout  entier  à  son  goût  pour 
la  musique  dans  son  château  de  Chalandrat,  près  de 
Clermont,  apprenant  le  violoncelle,  s'essayant  à  la 
composition.  Un  de  ses  amis,  le  comte  de  Murât,  qui 
avait  travaillé  avec  Catel,  lui  enseigne  ce  qu'il  sait 
d'harmonie.  Comme  exercice,  Onslow  met  en  parti- 
tion les  plus  beaux  morceaux  des  classiques;  il  com- 
pose son  Premier  Trio,  et  bientôt  après  Trois  Quin- 
tettes, qu'il  dédie  à  M.  de  Mirât. 

Mais,  se  rendant  compte  de  tout  ce  qui  lui  man- 
quait au  point  de  vue  de  la  technique,  il  part  pour 
Paris,  et,  à  32  ans,  il  recommence  ses  études  sous  la 


NCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


direction  de  Heic.ha,  le  professeur  le  plus  capable  de 
donner  rapidement  une  instruction  suffisante.  Son 
goilt  va  à  la  musique  de  chambre;  mais  de  nom- 
breuses difficultés  l'arrêtent,  et  ses  lettres  des  années 
1817  et  1818  nous  font  connaître  ses  efforts  et  ses 
découragements. 

Déjà,  outre  des  œuvres  pour  piano,  il  avait  écrit 
douze  Quatuors  et  trois  Quintettes.  Il  se  lie  avec  les 
principaux  musiciens  de  l'époque, et, cédantaux  solli- 
citations de  ses  amis,  il  lente  d'écrire  pour  le  théâtre. 
Un  opéra-comique,  Aléa  île  de  la  Vega,  adapté  d'une 
pièce  de  Calderon,  est  accueilli  très  froidement  le 
10  août  1824. 

Cet  échec  ne  le  décourage  pas;  il  se  remet  au  tra- 
vail, soutenu  par  les  conseils  du  directeur  de  l'O- 
péra-Comique.  Le  Colporteur  ou  l'enfant  du  bûche- 
ron, écrit  sur  un  livret  de  Planard,  ne  remporte,  le 
22  novembre  1827,  qu'un  sérieux  succès  d'estime.  On 
loue  la  science,  la  verve,  la  vigueur  dramatique,  le 
goût  irréprochable  des 'mélodies  et  de  l'orchestra- 
tion; certains  même  félicitent  le  compositeur  de 
réagir  contre  le  rossinisme  très  en  faveur  à  l'époque. 
Mais  Onslow  retourne  à  son  château  de  Chalandrat, 
où  il  mène  une  vie  de  gentilhomme;  il  revient  à  son 
piano,  à  ses  quatuors  et  à  ses  quintettes. 

Blessé  par  un  de  ses  amis  pendant  une  partie  de 
chasse,  après  une  longue  et  grave  maladie,  il  est 
atteint  de  surdité,  ce  qui  lui  valut  le  surnom  de  Bee- 
thoven anglais,  que  certains  admirateurs  trop  zélés 
lui  appliquèrent.  Durant  sa  maladie,  il  continua  à 
travailler  à  son  quinzième  Quintette,  qu'il  appela,  en 
souvenir  de  son  accident,  le  Quintette  de  la  balle 
(1829).  Le  10  avril  1831,  sa  Première  Symphonie  figu- 
rait au  programme  des  concerts  du  Conservatoire. 
Vers  la  même  époque,  sur  un  livret  de  Planard  et 
de  Saint-Georges,  il  travaillait  â  une  œuvre  destinée  à 
l'Opéra,  Guise  ou  les  Etats  de  Blois.  Mais  les  difficul- 
tés qu'il  rencontra,  les  relards  dans  la  mise  à  l'étude 
de  sa  partition  lassèrent  sa  patience.] Il  mutila  son 
œuvre  et  la  transforma  en  un  opéra-comique  qui, 
représenté  au  Théâtre  Feydeau  le  19  septembre  1837, 
fut  mis  en  parallèle  par  le  journal  la  Paix  avec  les 
Huguenots  de  Meyerbeer.  Hector  Berlioz  lui  consacra 
dans  les  Débats  un  article  très  favorable. 

Chevalier  de  la  Légion  d'honneur  depuis  le  2  avril, 
il  était  nommé  en  1842  à  l'Institut  pour  remplacer 
Cherubini.  Une  première  fois  en  1835,  après  avoir 
posé  sa  candidature  au  fauteuil  de  Boïeldieu,  il  s'é- 
tait effacé  devant  Beicha,  son  ancien  professeur. 

Dès  lors,  sa  réputation  semble  solidement  établie. 
Lesueur  lui  recommande  un  jeune  musicien  d'ave- 
nir, Gounod.  Il  protège  à  ses  débuts  le  jeune  Ambroise 
Thomas. 

Cherubini,  après  une  audition  de  sa  Symphonie  en 
ré  mineur,  proclame  «  qu'il  n'y  a  en  Europe  qu'ÛNs- 
low  qui  puisse  faire  aussi  beau  que  cela  ».  Et  la  ré- 
putation d'ONSLOw  s'étend  à  l'étranger  :  pendant  son 
voyage  en  Allemagne,  au  moment  des  fêtes  musi- 
cales de  1846  et  1847,  il  est  accueilli  avec  enthou- 
siasme; Mendelssohn  quitte  son  pupitre  de  directeur 
pour  l'inviter  à  diriger  lui-même  l'ouverlure  du  Col- 
porteur. Une  Symphonie  nouvelle  de  lui  est  exécutée 
au  festival  de  Cologne  (23  mai  18t7);  une  procession 
aux  (lambeaux  va  le  chercher  à  la  gare;  on  donne 
des  soirées  en  son  honneur;  on  le  nomme  membre 
du  Liederlafel. 

La  fin  de  sa  vie  fut  attristée  par  l'altération  de  sa 
santé;  il  perd  presque  complètement  l'usage  [d'un 
œil,  et  meurt  à  Clermont  le  3  octobre  18b3. 


Aujourd'hui,  Onslow  est  bien  oublié  en  France;  à 
peine  signale-t-on  encore  l'utilisation  d'airs  popu- 
laires auvergnats  dans  plusieurs  de  ses  œuvres,  et 
dans  le  dix-septième  Quatuor,  un  développement  assez 
intéressant  sur  le  God  save  the  Queen.  Mais,  de  son 
temps,  il  eut  l'admiration  des  musiciens  les  plus 
illustres,  de  Berlioz,  de  Lesueur,  d'Ambroise  Thomas, 
de  Mendelssohn.  Et  pendant  longtemps,  ses  œuvres 
furent  considérées,  en  Allemagne  et  en  Angleterre, 
comme  des  ouvrages  classiques.  Jamais  cependant, 
Onslow  ne  connut  la  popularité,  et  l'un  des  regrets  de 
sa  vie  a  été  de  ne  pas  s'entendre  jouer  par  un  orgue 
de  barbarie. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  D'ONSLOW 

MUSIQCE    DE    CHAMBRE 

34  Quintettes. 

2  violons  alto,  2  violoncelles,  op.  1,  2,  17,  37,  3S,  51,   r.7,  58, 

59,  61,  67,  68,  72  ;  73,  74,  78,  80,  82. 
2  violons,  2  altos  basse,  op.  18,  19. 
2  violons,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  op.  32,  33,  31,  35,  39, 

40,  43,  44,  45. 
36  Quatuors,  2  violons,  alto,  violoncelle,  op.  4,  S,  9,  21,  39,  44, 

46,  47,  48,   49,  50,  52,  53,  54,  55,  56,  62,  63,  64,  05, 

66,69. 
.;  Symphonies,  op.  41,  42,  la  3°  tirée  de  l'op.  32. 
Trios  pour  piano,  violon,  violoncelle,  op.  3,  14,, 20,  24,  26,  27. 
Sextuor  pour  piano,  2  violons,  alto,  violoncelle,  contrebasse, 

op.  30. 
Duos  pour  piano  et  violon,  op.  il,  15,  21,29,  31. 
Sonates  pourpiano  et  violoncelle,  op.  16. 
Sonates  pour  piano  à  quatre  mains,  op.  7,  22. 
Sonates  pour  piano  seul,  op.  2. 
Thèmes  taries,  toceales,  etc.,  pour  piano  seul. 


l.'Aleaileile  lu  Veija,  opéra,  10  août  1S24. 

Le  Colporteur  oit  l'enfant  tlu  bûcheron,  c  ipéra-Comique,  22  novem- 
bre 1827. 
Guise  ou  les  Étals  de  lllois,  Théâtre  Feydeau,  9  septembre  1837. 

Bibliographie. 

Débats.  —  1827  (article  de  Berlioz). 

Fétis.  —  Bint/raiihie  muret-selle  des  musiciens. 

Grove's.  —  Diclionanj  <>f  mii^w  ami  mii^niinis.  London,    1910. 

F.  Halevy.  —  Notice  historique  sur  la  rie  et  les  traraur  de  G.  Ons- 
low lue  à  la  séance  publique  annuelle  de  l'Académie  des 
beaux-arts,  C  octobre  1855. 

Comte  de  Morat.  —  Notice  sur  G.  Onslnir.  Séance  de  l'Académie 
des  sciences,  belles-lettres  et  arts  de  Clermont,  3  novem- 
bre 1853. 

Nouvelle  Année  littéraire.  25  novembje  1827. 

Hugo  Riemann.  —  Dictionnaire  de  mitsiq'te.  trad.  Hombert,  Pa- 
ris, 1899. 

Soubies.  — Les  Membres  de  l'Académie  des  beaux-arts,  Paris,  1906. 

Teillard. —  lu  grand  homme  eu  province.  —  G.  Onslow,  l'homme 
elle  musicien,  Paris,  lS99,in-S°. 


Paër. 

Ferdinand  Paer  est  né  à  Parme  le  1er  juin  1771. 
C'est  presque  en  se  jouant  qu'il  s'initia  aux  premiers 
éléments  de  la  musique;  un  organiste  et  Ghiretti, 
violoniste  au  service  du  duc  de  Parme,  lui  apprirent 
la  composition.  A  seize  ans, il  composait  sa  première 
œuvre,  un  opéra  boullé,  La  Locanda  de'  vayabondi, 
dont  la  verve  comique  fut  admirée  à  Parme  en  1789. 
I  Pretcndenti  burlati,  qui  date  de  l'année  suivante, 
établit  la  réputation  de  Paer  non  seulement  dans 
sa  ville  natale,  mais  dans  toute  l'Italie;  son  nom  est 
favorablement  connu  à  Venise,  à  Naples  et  à  Rome; 
Paër  n'avait  encore  que  17  ans. 

Très  habilement,  il  exploite  le  succès;  en  moins 
de  dix  ans  (1790-1796),  il  écrit  vingt  opéras  qui  sont 
représentés  dans  les  différentes  villes  de  l'Italie,  â 
Venise,  à  Naples,  â  Parme,  à  Milan,  à  Home,  à  Bologne, 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3547 


à  Padoue.  Partoul  Paër  triomphe  :  à  Venise,  le  suc- 
cès de  Circe,  de  l  Molinari,  de  7  Due  sordi,  de  L'Intrigo 
amoroso,  de  La  Sonnanbula  lui  valent  un  poste  de 
maître  de  chapelle.  Une  pareille  fécondité  peut  sur- 
prendre, surtout  si  l'on  songe  que  Paër  ne  donne  à 
l'art  qu'une  faible  partie  de  son  temps,  qu'il  profite 
de  ses  qualités  d'homme  élégant  et  spirituel,  de  ses 
charmes  de  brillant  causeur,  pour  se  pousser  dans  le 
monde,  qu'il  vit  parmi  toutes  les  dissipations  d'une 
vie  de  plaisirs,  fréquentant  les  femmes  de  théâtre, 
trouvant  dans  ce  milieu  une  cantatrice  fameuse,  la 
signora  Riccardi,  dont  il  fera  sa  femme,  et  qui, 
après  s'être  séparée  de  lui,  se  retirera  à  Bologne. 

En  réalité,  beaucoup  plus  qu'un  véritable  artiste, 
Paër  ne  fut  jamais  qu'un  brillant  improvisateur, 
habile  à  exploiter  le  succès.  Chez  lui,  on  ne  trouve 
pas  une  volonté  tenace  et  persévérante;  il  a  l'instinct 
de  la  musique,  mais  non  le  respect  de  l'art.  Pour  lui, 
l'art  n'est  qu'un  moyen  de  parvenir;  aussi,  ne  com- 
pose-t-il  que  lorsqu'il  le  juge  nécessaire  pour  établir 
ou  pour  maintenir' sa  situation. Tout  cela  explique  les 
bizarreries  de  la  carrière  de  Paër,  dans  laquelle,  à 
des  périodes  d'intense  production,  succèdent  de  lon- 
gues années  de  complète  stérilité.  Tout  cela  explique 
en  même  temps  comment,  de  tant  d'oeuvres,  il  n'a 
survécu  qu'un  acte  du  Maître  de  chapelle* 

Dans  les  premières  années  de  sa  vie,  écrivant  en 
Italie,  il  prend  pour  modèles  Cimarosa,  Paisiello  et 
Guglielmi,  qui  jouissaient  alors  des  faveurs  du  pu- 
blic. La  disposition  générale  de  ses  premières  com- 
positions dramatiques,  le  style  même  de  ses  mélo- 
dies ne  se  différencient  guère  de  ceux  de  ses  modèles; 
et  c'est  à  peine  si  le  génie  personnel  du  compositeur 
se  manifeste  dans  quelques  détails.  Cette  souplesse 
à  s'assimiler  tous  les  genres,  cette  facilité  d'accom- 
modation aux  goûts  du  public,  Paër  les  emploie  lors 
de  son  séjour  en  Autriche  et  en  Allemagne,  où  il 
avait  été  appelé  en  1797. 

L'intluence  de  la  musique  de  Mozart,  qu'il  y  en- 
tend, se  fait  sentir  sur  les  œuvres  de  cette  époque. 
{I  Fuoruscili  di  Firenze,  Camilla,  Ginevra  degli  Al- 
mieri,  Achille,  Il  Sargino),  dont  l'harmonie  est  plus 
rigoureuse  et  l'instrumentation  plus  riche  que  celle 
des  opéras  précédents.  A  cette  seconde  période  se 
rattachent  une  Leonora  ossia l'amore  conjugale,  sujet 
qui  devait  être  plus  tard  illustré  par  Beethoven, 
quelques  opéras  bouffons,  de  grandes  cantates,  plu- 
sieurs oratorios,  qui  sont  exécutés  avec  succès  à 
Vienne,  à  Prague  et  à  Dresde. 

Aussi,  lorsque,  à  la  un  de  1801,  la  mort  de  Naumann 
rendit  vacant  le  poste  de  maître  de  chapelle,  l'élec- 
teur de  Saxe  l'appela  à  Dresde  pour  le  remplacer. 
Pendant  quelques  années,  Paër  semble  se  donner 
plus  complètement  à  l'art,  et  ne  plus  se  contenter  de 
faciles  improvisations;  aussi,  ses  meilleures  œuvres 
datent-elles  de  cette  époque.  Au  début  de  1803,  il 
fait  exécuter  à  Vienne  un  oratorio  dans  un  concert 
au  bénéfice  des  veuves  d'artistes.  En  1804,  il  voyage 
en  Italie,  où  on  lui  réclame  de  nouveaux  opéras. 

1806  marque  un  important  changement  dans  la  vie 
de  Paër.  Dresde  était  occupée  par  les  Français; 
charmé  parla  musique  de  son  nouvel  opéra,  Achille, 
l'empereur  Napoléon  l'emmène  à  Varsovie  et  veut 
l'attacher  à  son  service.  Un  engagement  dans  lequel 
intervient  le  roi  de  Saxe,  un  contrat,  revêtu  de  toutes 
les  formes  diplomatiques,  assure  à  Paër  pour  toute 
sa  vie  la  direction  de  la  musique  impériale;  sans 
compter  divers  avantages,  le  traitement  stipulé  était 
de  50.000  francs  par  an. 


La  situation  de  Paër  était  brillante  et  durable  ;  l'art 
lui  devenait  [inutile.  Et  à  36  ans,  il  ne  produit  plus 
qu'à  de  longs  intervalles;  Paris  n'a  aucune  influence 
sur  l'évolution  de  son  talent,  et  Numa  Pompilio 
(1808),  Cleoputra  (1808),  Didonc  (18101,  I  Baccanli 
(1811)  n'ajoutent  rien  à  sa  renommée.  Son  ambition 
se  réduit  au  désir  de  plaire  à  l'empereur;  il  s'abaisse 
pour  mériter  quelques  faveurs;  il  se  contente  d'être 
l'organisateur  des  représentations  et  des  concerts 
donnés  à  la  cour. 

Etait-ce  manque  d'inspiration,  affaiblissement  de 
son  talent?  Les  faits  prouvent  le  contraire.  C'est  ainsi 
que  lorsque,  en  1811,  au  cours  d'un  voyage  à  Parme, 
on  obtint  de  lui  qu'il  écrivit  un  opéra  pour  une  société 
d'amateurs,  il  composa  une  œuvre,  L'Agnese,  qui 
compte  à  juste  titre  parmi  ses  meilleures.  Après  ce 
triomphe,  Paër  ne  songea  même  pas  à  de  nouvelles 
compositions.  Sauf  L'Eroismo  in  amore,  représenté  à 
Milan  en  1816,  il  faudra  attendre  1824  pour  trouver 
un  nouvel  ouvrage  de  Paër.  Mais  il  collaborera  aux 
ouvrages  de  circonstance  qui  peuvent  le  faire  bien 
voirdes  nouveauxgouvernements  (1814,  L'Oriflamme, 
1831,  La  Marquise  de  Briiirilliers). 

En  1812,  peut-être  à  la  suite  du  succès  d'Agnese, 
peut-être  aussi  grâce  à  la  faveur  impériale  qu'il  en- 
tretenait par  toutes  les  platitudes  de  sa  courtisa- 
nerie,  Paër  était  choisi  pour  succéder  à  Spontini 
comme  directeur  de  la  musique  au  Théâtre  Italien, 
poste  qu'il  occupa  jusqu'en  1814. 

La  Restauration  compromit  la  situation  de  Paër, 
son  protecteur  avait  disparu;  Louis  XVIII  ne  se 
considérait  pas  comme  engagé  par  la  signature  de 
Napoléon.  En  vain,  Paër  réclama  l'intervention  de 
souverains  alliés  alors  à  Paris  pour  l'exécution  de 
l'engagement  contracté  par  des  actes  diplomatiques; 
en  vain,  il  multiplia  ses  gémissements  et  ses  plaintes, 
en  vain,  il  s'abaissa  jusqu'à  aller  remplir  chez  de 
simples  particuliers  le  rôle  qu'il  avait  joué  auprès 
de  l'empereur,  perdant  sou  temps  à  courir  chez  les 
chanteurs  et  les  instrumentistes  pour  organiser  des 
soirées;  il  dut  se  contenter  du  titre  de  compositeur 
de  la  chambre  du  roi  avec  un  traitement  annuel  de 
12.000  francs. 

Cependant,  lorsque  Mmo  Catalani  eut  obtenu  de  la 
maison  du  roi  le  privilège  du  Théâtre  Italien,  elle 
choisit  Paër  comme  directeur  de  la  musique;  dans  ce 
poste  encore,  Paër  sacrifia  les  intérêts  de  l'art  à  son 
propre  intérêt;  il  se  prêta  à  toutes  les  exigences 
de  Mme  Catalani,  réduisant  le  nombre  des  choristes, 
diminuant  l'importance  de  l'orchestre,  se  compro- 
mettant aux  yeux  des  artistes  et  des  amateurs  jus- 
qu'à la  clôture  du  Théâtre  Italien  en  1818. 

En  1816,  les  intrigues  de  Paër  l'avaient  fait  dési- 
gner comme  maître  de  chant  de  la  duchesse  de 
Berry;  quelques  mois  plus  tard,  le  duc  d'Orléans 
faisait  de  lui  le  directeur  de  sa  musique.  En  1819, 
après  la  faillite  de  Mme  Catalani,  lorsque  la  maison 
du  roi  reprit  à  sa  charge  l'entreprise  du  Théâtre  Italien , 
Paër  fut  de  nouveau  nommé  directeur  de  la  musique; 
rendu  plus  prudent  par  son  expérience  précédente, 
il  apporta  tous  ses  soins  à  la  bonne  exécution  des 
œuvres  qui  lui  étaient  confiées.  Et  cependant,  une 
fois  de  plus,  Paër  manifeste  son  indifférence  pour 
l'art  en  usant  de  toute  son  influence  pour  retarder 
autant  qu'il  le  pouvait  l'apparition  à  Paris  des  opé- 
ras de  Rossini.  Bien  plus,  lorsqu'il  fut  chargé  de 
mettre  en  scène  Le  Barbier  de  Séville  pour  le  début 
de  Garcia,  il  s'employa,  par  toute  une  suite  de  ma- 
nœuvres sourdes,  à  nuire  au  succès  de  la  pièce  qu'il 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


était  contraint  de  monter.  Un  pamphlet,  dont  les 
autours  riaient  probablement  Thomas,  Massé  et  An- 
tony  Deschamps,  mit  a  jour  toutes  les  machinations 
de  I'uk.  et  l  rois  ans  plus  lard,  eu  1823, Rossini  deve- 
nait directeur  du  Théâtre  Italien. 

La  situation  de  Paér  était  intenable;  il  donna  sa 
démission  de  directeur  de  la  musique;  mais  elle  ne 
fut  pas  acceptée,  et,  pour  ne  pas  perdre  son  poste 
de  compositeur  de  la  chambre  du  roi,  il  lui  fallut 
rester  attaché  au  Théâtre  Italien,  dans  une  position 
subalterne. 

Paër  sentait  la  nécessité  de  se  relever  dans  l'opi- 
nion publique.  Aussi  songe-t-il  de  nouveau  à  la  com- 
position. On  s'étonnait  que  jamais  il  n'eût  écrit  pour 
une  scène  française.  Paër  parlait  bien,  il  est  vrai, 
d'une  Olinde  et  Sophronic,  qu'on  ne  voulait  pas  met- 
tre en  scène  à  l'Opéra;  en  réalité,  Paër  n'en  avai' 
composé  que  quelques  morceaux.  En  1824,  cédant  à 
des  importunilés  de  salon  et  surtout  au  désir  de 
refaire  sa  popularité  ébranlée  par  le  pamphlet  inti- 
tulé Paër  et  Rossini,  il  écrit  Le  Maître  de  chapelle,  don 
le  premier  acte  est  resté  au  répertoire  de  l'Opéra-Co- 
mique.  Mais  plutôt  qu'un  réveil  de  son  talent  depuis 
longtemps  endormi,  c'est  encore  un  simple  caprice 
d'amateur. 

En  1826,  après  la  retraite  de  Rossini,  la  direction 
du  Théâtre  Italien  est  rendue  à  Paër;  le  théâtre  était 
dans  un  état  lamentable;  il  n'y  avait  plus  de  chan- 
teurs. Le  répertoire  était  usé.  Paër  fut  tenu  res- 
ponsable des  fautes  imputables  à  l'administration 
précédente.  Et  en  août  1827,  le  vicomte  de  La  Roche- 
foucauld, chargé  des  beaux-arts  au  ministère  de  la 
maison  du  roi,  le  destitua  de  sa  charge;  la  mesure 
fut  approuvée  par  la  presse  de  l'époque.  Mais  Paër 
se  disculpa  de  toutes  les  négligences  dont  on  l'accu- 
sait, dans  une  brochure  parue  en  1827. 

Depuis  quelque  temps  déjà  chevalier  de  l'Eperon 
d'or,  Paër  était  nommé  chevalier  de  la  Légion  d'hon- 
neur en  1828;  en  1831,  il  succédait  à  Catel  à  l'Aca- 
démie des  beaux-arts;  en  1832,  Louis-Philippe  le 
choisissait  comme  directeur  de  sa  chapelle.  Paër 
mourut  le  3  mai  1839,  après  une  longue  maladie, 
conséquence  de  la  vie  de  plaisirs  qu'il  avait  menée 
autrefois. 

catalogue  des  œuvres  DE  I'AER 

MUSIQUE    DRAMATIQUE 

1789.  La  Locanda  de'  vagabondi,  Parme. 

1790.  /  Preleudeiiti  Imrluli,  Parme. 

1791.  Circe,  Venise. 

1792.  Saidossia  il  Seruglio,  Venise. 

1793.  IMoliuari,  Venise. 
1793.  VOro  >  liillu.  Milan. 


LuodU 


1794.  //  Tempo  fa  qiusli 


Idomeneo,  Florence. 
Vno  in  hcne  ed  /tan  in  maie,  Rome 
L'Amante  servitore,  Venise. 
En  e  leanûro,  Naples. 
L'Or  fana  riconasciuta,  Florence. 
La  Rnssana,  Milan. 
L'intrigo  amoroso,  Venise. 
La  Testa  riscaldala,  Venise. 
Grisel'la,  Parme. 
Tamerlano,  Milan. 
/  due  Soriti.  V.-iiis.j  . 
Sofonista,  Bologne. 
La  Sunnatnbiila,  Venise. 
//  Suoto  Figaro,  Parme. 
Cinna,  l'adoue. 

Il  Principe  ili  Taranto,  Parme. 
Il  Fanatico  m  berlina,  Vienne. 
i.'.aaiiila.  Vienne. 


1799.  //  Mario  vivo.  Vienne. 

1 800.  La  Donna  camlnatn,  Vienne. 
1800.  /  Fuoruscili  ili  Firen:-e.  Vienne. 
isiii.   C.inevra  degli  Maiieri,  Dresde. 

1803.  //  Sargino,  Dresde. 

1804.  Tulto  il  mate  vien  liai  buco,  Venise. 

1804.  Le  Aslirie  aianrose,  Parme, 
isoi.  /;  Uaniscalco,  Padoue. 

1805.  Leonora  ossia  l'amore  conjugale.  Dresde. 

1806.  Adulte.  Dresde. 

1808.  Numa  Pompilio,  Paris,  théâtre  de  la  Cour. 
isus.  Cleo/mira.  P:iris,  théâtre  de  la  Cour. 

1810.  Diilone.  Paris,  théâtre  de  la  Cour. 

1811.  /  Baceanti,  Paris,  théâtre  de  la  Cour. 
1811.  L'Agnese,  Parme. 

1816.  L'Eroismoin  amore,  Milan. 

1824.  Le  Muilre  île  chapelle,  Paris. 

is:;i.    l'n  Caprice  de  femme,  Paris. 

(Ilmde  cl  Sophriinie,  inachevé. 

31  janvier  iS  14.  L'Oriflamme,  en  collaboration  avec  Bf.kton, 
Kreutzer  et  Méhdl.  Opéra. 

31  octobre  1831.  La  Marquise  de  Brinrilliers,  en  collaboration 
avec  Adber,  Batton,  Berton,  Blangini,  Boïeldieo, 
Caiiaea,  Cherobini  et  Hérold,  Opéra-Comique. 


1803.  /;  San  Sepolcro,  Vienne. 

1804.  Il  Trionfo  délia  cbiesa,  Parme. 
1S10.  Lu  Passione  di  Giesii  Cristo. 


Motel,  3  voix  et  orgue. 
Offertoire,  grand  chœur. 
Are  Regina  eali,  2  voix  et  i 


//  Prometeo.  —  Baeco  ed  Ariana.  —  La  Conrcrsazionc  tmnonica.  — 
Europa  ni  Crrtu.  —  Elu/sa  cd  Abelardo.  —  Diana  ni  Endi- 
mione.  —  L'amor  timido.  —  Deux  Sérénades,  h  trois  et  qua- 
tre voix  avec  harpe  ou  piano,  cor,  violoncelle  et  contre- 
basse. —  LAddio  di  Etlorc.  —  Misse  e  Pénélope.  —  Saffo. 

Six  Duos,  h  deux  voix,  Vienne.  —  Six  petits  Duos  italiens,  Vienne 
et  Paris  (en  deux  suites).  —  42  Arielles  italiennes,  en  di- 
vers recueils.  —  6  Caralines  de  Métastase.  —  12  Romances 
françaises.  —  :>  Recueils  d'exercices  de  chant  pour  soprano 
et  ténor. 

MUSIQUE    INSTRUMENTALE 

Sijmphonie  bacchante  pour  orchestre.  —  l'ire  Henri  IV.  — Grandes 
marches  militaires  pour  harmonie  à  ld  et  17  parties.  —  Six 
Valses  pour  harmonie  à  6  et  10  parties. —  La  Douce  Victoire 
pour  piano,  2  flûtes,  2  cors  et  2  bassons.  —  Trois  Sonates 
pour  piano  et  violon  avec  violoncelle  ad  libitum.  —  Plu- 
sieurs thèmes  canes  pour  piano  seul. 


œuvi 

E  d'apologie  personnelle 

Pair,  ex-directeur  du  Théâtre  Italien,  à  MM.  le 

1S27,  in-S°). 

dileltanli 

(Paris, 

Bibliographie . 

ONYME. 

bé  Beivi 

—  Paer  e 
ini.  —  Di. 

Rossini  (Paris,  1820). 
ionario  slorieo  crilico  degli  ■ 

criltori  di 

nu  sic  a 

Pale 


lSej.ISi-,. 


Choron  et  Fayoli.k.  —  Dictionnaire  des  musiciens, 

Fétis. —  Biographie  itnircrsclle  des  musiciens. 
A.  Pougin.  —  Supplément  a  la  Biographie  universelle. 
Grove's.  —  llictinnanj  of  music  and  musicians,  London,  1910. 
H.  Quittard.  —  Paer,  dans  la  ti  Grande  Encyclopédie  ». 
Hugo  Rikmann.  —    Dictionnaire  de  musique,   trad.  G.  Humbert, 
Paris,  Perrin,  1899. 


Emile  Paladilhe  est  né  le  3  juin  1844,  aux  envi- 
rons de  Montpellier.  Il  eut  pour  premier  maître  son 
père,  docteur  en  médecine,  qui  aimait  la  musique,  et 
Jouait  de  la  flûte.  En  quelques  semaines,  il  parcourut, 
sous  sa  direction,  les  Solfèges  d'Italie  et  leurs  leçons  à 
changements  de  clés.  En  1850,  l'organiste  de  la  cathé- 
drale  de  Montpellier,  Uom  Sébastien  Boixet,  prêtre 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3549 


espagnol,  contraponliste  émérite  et  improvisateur 
remarquable,  s'intéressa  à  l'enfant  si  bien  doué  du 
D1'  Paladilhe  et  le  prit  pour  élève.  Son  enseignement 
était  celui  des  anciennes  maîtrises  d'Espagne.  Pen- 
dant quatre  années,  le  jeune  musicien  fil  des  études 
de  contrepoint  et  de  fugue  libre  ou  d'imitation.  Entre 
temps,  un  vieil  ami  de  la  famille  lui  prêtait  deux 
sonatines  de  Mozart,  les  pièces  d'enfants  de  Schu- 
mann  (peu  connues  en  France  à  cette  époque),  quel- 
ques préludes  de  Stephen  Heller  et  les  préludes  et 
fugues  de  Bach.  Le  petit  Paladilhe  était  encore  un 
très  médiocre  exécutant,  il  jouait  d'instinct;  toutes 
sortes  de  défauts  paralysaient  sa  virtuosité.  Cepen- 
dant, il  parvint  à  apprendre  par  cœur  les  préludes  et 
fugues  de  Bach,  et  même  à  exécuter  en  différentes 
tonalités  ceux  ou  celles  qui  lui  plaisaient'le  plus.  Avec 
quelles  contorsions  de  mains  et  quels  fantaisistes 
doigtés,  on  l'imagine  aisément  de  la  part  d'un  pia- 
niste aussi  peu  expérimenté.  De  temps  à  autre,  l'or- 
ganiste d'une  petite  paroisse  de  la  ville  lui  permettait 
d'aller  «  jouer  les  vêpres  »  à  sa  place.  Il  s'exerçait 
ainsi  à  de  courtes  improvisations.  Ses  premiers  essais 
de  composition  furent  un  cantique  à  deux  voix  et 
un  0  salutaris  pour  trois  voix  d'hommes.  A  la  fin  de 
1854,  la  ville  de  Montpellier  envoyait  le  jeune  Pala- 
dilhe à  Paris  pour  y  suivre,  si  possible,  les  cours  du 
Conservatoire.  Mais  il  arriva  trop  tard  pour  prendre 
part  au  concours  d'entrée  dans  les  clauses  de  piano;  il 
ne  devint  élève  de  MarmOiNtel  que  l'année  suivante. 
Puis  Halévy  le  prit  dans  sa  classe  :  il  dut  recommen- 
cer toutes  ses  études,  après  avoir  parcouru  ses  exer- 
cices de  contrepoint  et  de  fugue  d'après  le  traité  de 
Cherubini.  Plus  tard,  il  travailla  l'orgue  avec  Bemoist 
et  fit  partie  de  la  classe  d'ensemble  instrumental  de 
Baillot.  En  1860,  il  sortait  de  l'Ecole  avec  le  prix  de 
Rome. 

De  janvier  1861  à  octobre  1863,  l'Italie  donnait  à 
Paladilhe  «  les  plus  grandes,  les  plus  vives,  les  plus 
belles  émotions  de  sa  vie  d'artiste  ».  Ce  fut  pour 
lui  un  tel  enchantement  qu'  «  il  songeait  sincère- 
ment à  tenter  le  concours  de  paysage  historique  de 
1866  »!  Ce  concours  n'avait  lieu  que  tous  les  quatre 
ans.  Mais  sa  suppression  radicale  vint  réduire  à  néant 
des  espérances  sans  doute  un  peu  chimériques. 

De  1863  à  1866,  Paladilhe  fut  chef  de  chant  au 
Théâtre  Lyrique  (direction  Carvalho). 

En  1871,  du  Locle,  l'un  des  deux  directeurs  de  l'O- 
péra-Comique,  lui  demanda  un  acte.  Il  donna  Lo 
Passant,  en  collaboration  avec  Coppée. 

Puis  vinrent  l'Amour  africain  (1875),  Suzanne  (1878), 
Diana  (1885). 

En  1880,  Paladilhe  avait  demandé  à  Sardou  l'au- 
torisation de  mettre  en  musique  Patrie.  Mais  Verdi 
l'ayant  déjà  sollicitée  et  obtenue  auparavant,  Pala- 
dilhe dut  attendre  près  d'un  an  le  désistement  du 
célèbre  compositeur  italien.  La  représentation  de  ce 
nouvel  ouvrage  eut  lieu  à  l'Opéra,  en  décembre  1886, 
avec  un  grand  succès.  L'incendie  des  décors  inter- 
rompit le  cours  des  représentations,  qui  furent  repri- 
ses en  190ii. 

Deux  partitions  de  Paladilhe  sont  restées  iné- 
diles, Dalila,  que  Carvalho  mettait  en  répétition  au 
moment  où  il  mourut,  et  Vanina. 

Le  2  juillet  1802,  Paladilhe  était  nommé  membre 
de  l'Académie  des  beaux-arts.  Il  succédait  à  Guiraud 
dans  le  fauteuil  précédemment  occupé  par  Gossec, 
Auber,  Massé  et  Delibi  s. 

Paladilhe  est  mort  à  Paris,  le  7  janvier  1926. 


ÏS   ŒUVRES    DE  E.   PALADILHE 


l.e  Chevalier  Bernard.  1  acte. 

Un  opéra-comique,  2  actes. 

La  Reine  Mathilde,  3  actes. 

Le  Passa»*  (1872),  1  acte. 

L'Amour  africain  (1S75),  2  actes. 

Suzanne  (1S7S),  3  actes. 

Diana  (1885)',  3  actes. 

Pairie  (1886),  5  actes. 

Vanina,  4  actes. 

Dalila,  3  actes. 

Les  Saintes  Maries  de  la  mer,  légende  en  i  parties  (2  parties  ont  été 

exécutées  à  la  Société  des  Concerts  du  Conservatoire). 
3  Messes  solennelles  arec  orchestre  (les  deux  dernières  ont  été  exé- 
cutés à  Saint-  Eustache  par  les  soins  de  l'Association  des 
artistes  musiciens). 
Slabal  Mater,  chœurs, soli  et  orchestre  (Société  des  Concerts). 

Il)  motets. 

0/fertoire  pour  grand  orgue. 

Marche  processionnelle  pour  grand  orgue. 

Symphonie. 

Amiante  et  Scherzo  pour  orchestre. 

Scherzo  en  fa  pour  orchestre. 

Prélude  pour  orchestre. 

Marche  de  fêle  pour  orchestre. 

Canzonelta  pour  violoncelle. 

Invocation  pour  violon. 

Prière  pour  violon. 

Concertino  de  violes  pour  deux  altos  et  violoncelle. 

?  morceaux  de  concours  pour  hautbois. 

Morceaux  ie  lecture  pour  lès  concours  du  Conservatoire. 

:,:'  pièces  /mur piano,  à  2  et  à  1  mains. 

S  chirurs,  sans  accompagnement. 

.'  cantates,  soli,  ch'eurs  el  orchestre. 

Ilo  mélodies  ou  morceaux  de  chant  a  une  ou  deux  voix. 

Bibliographie. 

Gkovk's.  —  Diclionary  of  music  and  musiciens,  London,  1910. 
A.  I'uuoin.  —  Supplément  a  ta  biographie   universelle  îles  aiusiaeus 

de  Fétis. 
Hugo  Rikmann.  —  Dictionnaire  ie  musique,  trad.  G.  Humbert, 

1913. 
Julien  Tiëbsot.   —   Un  Demi-Siècle  de  miisii/ue  française,  Paris, 

Alcan,  1918,  dans  la  collection  des  Maîtres  de  la  musique. 

Henry  Rabaud. 

M.  Henri- Benjamin  Rabaud  naquit  à  Paris  le 
10  novembre  1873.  Sa  famille  comptait  déjà  de 
nombreux  artistes.  Son  grand-père  maternel,  Dorus, 
avait  été  un  flûtiste  de  grand  talent,  sa  grand'tante, 
Mme  Dorus-Gras,  fut  la  première  interprète  de  l'Alice 
de  Robert  le  Diable,  et  chanta  avec  beaucoup  de  suc- 
cès de  nombreux  rôles  de  Meyerbeer  et  cTHalévy. 
Son  père,  violoncelliste  réputé,  enseigna  au  Conser- 
vatoire jusqu'en  1910.  Dans  sa  famille,  M.  Henri  Ra- 
baud put  recevoir  une  solide  instruction  musicale. 
Mais  la  musique  ne  l'empêcha  pas  de  poursuivre  ses 
études  classiques  au  lycée  Condorcet,  et  ce  n'est 
qu'une  fois  bachelier  es  lettres  qu'il  entra  au  Con- 
servatoire. Il  y  travailla  la  composition  sous  la 
direction  de  Massenet  et  de  Gédalge.  En  1894,  à 
vingt  et  un  ans,  il  obtenait  le  premier  grand  prix  de 
Rome  avec  une  cantate  de  Charles  Raffalli,  Daphné. 

M.  Henri  Rabaud  tut  à  la  t'ois  un  compositeur  et  un 
chef  d'orchestre.  Comme  chef  d'orchestre,  il  dirigea 
au  Chàtelet  l'exécution  de  sa  Seconde  Symphonie; 
après  ses  trois  ans  passés  à  la  Villa  Médicis,  il  entre- 
prit avec  son  ami  Max  d'Olon.ne  une  suite  de  con- 
certs à  Rome  et  à  Vienne;  au  programme  figuraient 
surtout  des  œuvres  françaises;  la  Symphonie  en  ut 
mineur  de  Saint-Sakns,  la  Symphonie  de  César  Franck, 
le  Wallenstein  de  V.  d'Indy,  diverses  œuvres  de  Lalo, 
Chabrier,  Bruneau,  Dukas.  Pendant  la  maladie  de 
G.  Cheyillard,  il  conduisit  plusieurs  fois  l'orchestre 


3.-,:,0 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Lamourei'x.  l'.n  1908,  il  entrait  à  l'Opéra,  dont  il  deve- 
nait bientôt  premier  chef  d'orchestre;  il  y  dirigea 
tout  Wagner  et  an  grand  nombre  d'œuvres  du  ré- 
pertoire. Après  la  guerre,  il  dirigea  pendant  la  sai- 
son de  1918-1919  l'orchestre  de  «  Boston  Sym- 
phony  ». 

Comme  compositeur,  M.  Henri  Rabaud  s'est  essayé 
et  a  réussi  dans  les  genres  les  plus  différents.  «  Sans 
se  laisser  influencer  ni  par  le  wagnérisme,  ni  parle 
debussysme,  conservant  entière  sa  robuste  person- 
nalité, fervent  partisan  de  l'art  classique,  tout  en  se 
révélant  comme  un  des  représentants  de  l'art  mo- 
derne »,  M.  Henri  IUbaud  est  aujourd'hui  connu  et 
admiré  du  grand  public,  surtout  depuis  la  représen- 
tation à  l'Opéra-Comiquede  Marouf  (I91i),  dont  on  a 
loué  la  verve  et  la  gaieté  qui  contrastent  avec  l'aus- 
térité et  la  sévérité  des  œuvres  précédentes.  Parmi 
ses  œuvres,  on  peut  citer  deux  Symphonies,  la  pre- 
mière donnée  chez  d'Harcourt,  la  seconde  chez 
Colonne,  et  depuis,  dans  de  nombreuses  sociétés 
de  France  et  de  l'étranger;  La  Procession  nocturne, 
qui  figure  encore  aujourd'hui  au  programme  de 
nombreux  concerts;  une  Eglogue,  poème  virgilien; 
un  Divertissement  sur  des  chansons  russes.  Un  oratorio, 
Job,  un  de  ses  envois  de  Home,  compta  Saint-Sakns 
parmi  ses  plus  fervents  admirateurs.  Outre  un 
Quatuor,  un  Trio,  des  Mélodies,  on  cite  encore  de 
M.  IUbaud  le  Psaume  IV  pour  soli,  chœur,  orchestre 
et  orgue;  la  Fille  de  Roland,  une  tragédie  musicale 
donnée  à  l'Opéra-Comique;  le  Premier  Glaive  écrit 
pour  les  Arènes  de  Béziers;  un  Deuxième  Poème  lyri- 
que sur  le  Livre  de  Job  pour  baryton  et  orchestre, 
exécuté  aux  concerts  Colonne  et  Lamoureux. 

Depuis  la  guerre,  M.  IUbaud  a  écrit  la  musique  de 
scène  pour  le  Marchand  de  Venise  de  Népoty,  d'après 
Shakespeare,  et  pour  Antoine  et  Cléopàtre  du  même 
auteur,  joués  aux  représentations  Gémier  (Théâtre 
Antoine).  Enfin,  il  est  l'auteur  de  V Hymne  à  la  France 
éternelle  sur  le  poème  de  Victor  Hugo,  exécuté  au 
Panthéon  au  cours  de  la  solennité  du  transport  du 
cœur  de  Gambetta  et  du  corps  du  soldat  inconnu. 

Le  28  décembre  1918,  M.  IUbaud  avait  été  élu 
membre  de  l'Académie  des  beaux-arts  ,  eu  rempla- 
cement de  M.  Widor,  devenu  depuis  1914  secrétaire 
perpétuel.  Le  l"  octobre  1920,  il  prenait  la  direction 
du  Conservatoire  de  musique  et  de  déclamation. 

CATALOGUE  DES  ŒUVRES  DE  M.   H.  RABAUD 

ŒUVRES    DE    THÉÂTRE 


Marouf.  i  >prra-Comique. 

Le  Marchand  de  Venise,  musique  de  scène,  théâtre  Antoin 

Antoine  et  Clèopâlre,  musique  Je  scène,  théâtre  Autoine. 


ŒDVRES    D  ORCHESTRE 

Première  Symphonie,  Concerts  d'Harcourt. 

Deuxième  Symphonie,  Colonne. 

Lu  procession  nocturne ,  poème  symphonique  d'aprèsNicolas  1 

Eijloijue,  poème  virgilien. 

Un  crissement  sur  des  chansons  russe*. 


ŒUVRES    DE   CHANT 

Job,  oratorio. 

Psaume  IV,  soli,  chœurs,  orchestre,  orgue. 

Deuxième  Poème  lyrique  sur  le  Livre  de  Joli,  baryton  et  orchestre. 

Hymne  ù  ta  France  éternelle. 

Mélodies. 

MOSIQUE    DE    CHAMBRE 


Bibliographie. 
Monde  musical,  1914. 

Rennes  et  Comœdia,  au  moment  de  la   représentation  de  Marouf 
(1914). 

H.  Reber. 

Napoléon-Henri  Reber  naquit  à  Mulhouse  le  21  oc- 
tobre 1807.  Sa  famille  le  destinait  à  l'industrie,  et 
ses  premières  études  furent  tournées  vers  les  scien- 
ces. De  là,  lui  vinrent  sa  culture  d'esprit  et  cette 
délicatesse  de  goût  qui  le  rendirent  si  difficile  pour 
tout  ce  qu'il  écrivit  plus  tard.  Mais  Reber  se  sentait 
poussé  vers  la  musique  par  une  vocation  irrésistible; 
il  avait  appris  à  jouer  du  piano  et  de  la  flûte,  ins- 
truments sur  lesquels  il  ne  fut  jamais  qu'un  très 
médiocre  virtuose;  il  avait  essayé  de  s'initier  seul 
aux  secrets  de  l'harmonie  et  aux  mystères  de  la 
composition. 

A  vingt  et  un  ans,  il  entra  au  Conservatoire  dans 
la  classe  d'harmonie  de  Reicha,  alors  tenue  par  les 
répétiteurs  Seuriot  et  Jelensperger.  Deux  ans  plus 
tard,  il  devenait  pour  la  composition  élève  de  Le- 
sueur.  L'influence  de  l'enseignement  officiel  semble 
avoir  été  bien  faible  sur  la  formation  de  son  talent; 
Saint-Saëns  constate,  en  effet,  qu'il  est  impossible  de 
retrouver  trace  des  leçons  de  Lesueur  dans  la  ma- 
nière de  Reber.  D'ailleurs,  comme  élève,  sa  carrière 
fut  peu  brillante;  en  1829  et  en  1830,  il  concourut 
sans  succès  pour  le  prix  de  fugue.  Sans  doute  même, 
se  monlra-t-il  fort  négligent,  puisque,  en  1830,  il  était 
rayé  de  la  liste  des  élèves  de  contrepoint  et  de  fugue, 
et  qu'en  1832,  il  quittait  de  la  même  façon  la  classe 
de  composition  et  le  Conservatoire  lui-même.  Il 
devait,  en  1831,  y  rentrer  comme  professeur.  Grâce 
à  ses  relations  et  à  l'éducation  qui  avait  fait  de  lui 
non  seulement  un  homme  du  monde,  mais  même 
un  érudit  et  un  lettré,  il  eut  bien  vite  accès  dans  les 
cercles  les  plus  cuutivés.  Rientôt,  parmi  ses  admira- 
teurs et  ses  amis,  il  compta  Ingres,  la  famille  Bertère, 
le  chanteur  archéologue  Delsarte,  et  Sauzay  qui  se 
fit  le  propagateur  zélé  de  ses  œuvres.  Est-ce  à  l'in- 
fluence de  cette  société,  est-ce  à  ses  solides  croyances 
religieuses  et  à  l'austérité  de  son  protestantisme 
qu'il  faut  attribuer  l'orientation  de  son  talent  vers  la 
musique  instrumentale,  dédaignée  généralement  à 
cette  époque  pour  la  musique  dramatique? 

D'autres  causes  expliquent  le  faible  retentissement 
d'une  œuvre  peu  considérable  malgré  le  long  temps 
pendant  lequel  il  a  écrit.  Ennemi  du  bruit  dans  l'art 
comme  clans  la  vie,  haïssant  l'attirail  du  succès  et 
peut-être  le  succès  lui-même,  Reuer  eut  toujours  le 
tort  de  fuir  la  popularité  avec  autant  de  zèle  que  les 
autres  mettent  à  la  rechercher,  «  Domi  mansit,  mu- 
sicam  fecit.  »  Il  demeura  chez  lui  et  lit  de  la  mu- 
sique, a  dit  de  lui  Blaze  de  Bury  De  plus,  en  pleine 
période  romantique,  il  resta  fidèle  aux  classiques, 
qu'il  prend  pour  modèles;  il  conserva  la  vieille  ma- 
nière française,  et  Sai.nt-Saëns  a  pu  le  comparer  à 
un  Marivaux  de  la  musique,  tandis  que  Hugo  Rie- 
mann  note  les  analogies  de  ses  œuvres  avec  celles 
des  grands  classiques  allemands.  Enfin,  amoureux 
de  la  perfection,  il  redoutait  les  caprices  et  les  infi- 
délités des  exécutants;  une  seule  fois,  il  consentit  à 
donner  une  audition  de  ses  œuvres  au  Conserva- 
toire; et  il  est  vraisemblable  que  ses  deux  premiers 
trios  n'auraient  pas  eu  de  successeurs,  s'il  n'avait 
pas  trouvé  un  groupe  d'artistes  disposés  à  travailler 
sous  sa  direction  avec  une  entière  docilité. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LTNSTITUT  DE  FRANCE    3551 


Cependant,  à  intervalles  assez  éloignés,  sacrifiant 
à  la  mode  de  l'époque,  il  écrivit  pour  le  théâtre.  Le 
-23  septembre  1840,  l'Opéra  jouait  de  lui  un  ballet, 
le  Diable  amoureux,  écrit  en  collaboration  avec  Be- 
noist.  A  quarante  ans  seulement,  il  vit  s'emr'ouvrir 
les  portes  de  l'Opéra-Comique;  la  Nuit  de  Noël,  sur  un 
livret  de  Scribe  qui  ne  présentait  pas  grand  intérêt, 
fut  jouée  en  1848,  en  pleine  révolution,  devant  une 
salle  vide;  et  l'hiver  suivant,  la  direction  ne  trouva 
jamais  l'occasion  de  reprendre  l'œuvre  ainsi  sacrifiée. 
On  devait  une  réparation  à  Reber  ;  elle  lui  fut  donnée 
quatre  ans  plus  tard  par  la  mise  à  l'étude  du  Père 
Gaillard,  «  La  première  représentation,  dit  Saint- 
Saëns,  fut  un  triomphe,  d'autant  plus  étonnant  que 
rien  ne  l'avait  préparé,  et  que  les  amis  de  l'auteur  n'en 
furent  pas  moins  étonnés  que  ses  ennemis.  »  Certains 
airs  de  la  partition  connurent  même  la  gloire  d'être 
adoptés  par  les  orgues  de  Barbarie.  Reber  donna 
encore  les  Papillotes  de  M.  Benoist  à  l'Opéra-Comique 
en  1853,  et  à  l'Opéra  en  1857  les  Dames  capitaines,  qui 
furent  jouées  en  plein  été.  Enfin,  une  dernière  oeuvre 
dramatique,  Naïm,  resta  inédite;  seule  l'ouverture 
en  fut  exécutée. 

Très  vite  d'ailleurs,  Iîeber  semble  avoir  renoncé 
au  théâtre,  où  il  était  peu  apprécié  des  directeurs, 
pour  se  donner  complètement  à  l'enseignement.  Le 
1er  juin  1851,  il  avait  été  nommé  professeur  d'har- 
monie à  la  place  de  Colet.  Membre  de  l'Académie 
des  beaux-arts,  où  il  succéda  à  Onslow  en  1853, 
chevalier  de  la  Légion  d'honneur  en  1854,  il  fut 
choisi  pour  occuper  au  Conservatoire  la  chaire 
d'HALÉvv  pour  la  composition;  un  peu  plus  tard,  il 
devint  inspecteur  des  succursales  de  province  du 
Conservatoire;  Reber  mourut  le  24  novembre  1880. 

CATALOGUE  DES   ŒUVRES  DE  H.  REBEU 

MUSIQUE    DRAMATIQUE 

Le  Diable  amoureux,  ballet,  Opéra,  23  septembre  1840,  en  collabo- 
ration avec  Benoist). 

la  Nuit  de  Noël,  Opéra-Comique,  11  février  184S. 

Le  Père  Caillant,  <  ipéra-Comique,  17  septembre  1S52. 

Les  Papillotes  de  il.  Benoist,  Opéra-Comique,  28  décembre  1853. 

Les  Dames  capitaines,  opéra-Comique,  3  juin  1857. 

Le  Ménétrier  n  lu  cour,  opéra-comique,  non  représenté,  mais  dont 
les  ouvertures  ont  été  gravées. 

Naîm,  opéra,  non  représenté,  mais  dont  les  ouvertures  ont  été 
gravées. 

Roland,  scènes  lyriques  extraites  du  poème  de  Quinault. 

MUSIQUE    INSTRUMENTALE 

4  Symphonies  (3  exécutées  par  la  Société  de  Sainte -Cécile,  la 

dernière  jouée  au  Conservatoire. 
Suite  île  morceaux    pour  orchestre  (arrangement   pour  piano  à 

4  mains). 
Quintette,  pour  2  violons,  2  altos  et  violoncelle,  op.  1. 
./  Quatuors  pour  2  violons,  alto  et  violoncelle. 

5  Trios  pour  piano,  violon  et  violoncelle. 
Valses  pour  piano  et  violon. 

t)  Valses  pour  piano  et  violon  ou  violoncelle. 

Pièces  de  différents  caractères  pour  piano  et  violon  ou  violoncelle 

en  3  suites. 
Pièces  de   différents  caractères  pour  piano  t 

violoncelle  en  3  suites. 
Les  mêmes  pour  piano  à  4  mains. 
Pensée  musicale  pour  piano. 
Variations  sur  un  air  suisse  pour  piano. 

!>  Pièces  de  différents  caractères  en  forme  de  valses  pour  pian. 
6'  Valses  expressives  pour  piano. 

6  Pièces  de  différents  i,.raclères  pour  piano  en  3  suites. 
6  Pièces  pour  piano. 
Pensée  et  Souvenir  pour  piano. 
Bagatelles,  30  petites  pièces  pour  piano. 

MUSIQUE    VOCALE 


ou  flûte  OU 


Collection  de  33  mélodies  pour  chant. 

Vocalises  pour  soprano  ou  ténor. 

Ave  Marin  pour  2  sopranos,  ténor  et  basse  avec  orgue. 

Agnus  Dei  pour  2  sopranos,  ténor  et  basse  avec  orgue. 

Le  Soir,  chœur  à  4  voix  d'homme  et  piano. 

Chœur  des  pirates,  à  3  voix  d'homme  et  piano. 


Traité  d'harmonie,  Paiis,  Colombier,  IS62  in'édilé  plusieurs  fois). 
Bibliographie. 

Th.  Dubois.  —  Notes  el  éludes  d'harmonie  pour  servir  de  supplément 

au  traite  de  M.  Reber. 
Fétis.  —  Biographie  universelle  des  musiciens. 
A.  Pougin.  —  Suppléaient  à  la  Biographie  universelle. 
Grove's.  —  Diclionanj  of  miisic  and  miisicians,  London,  1910. 
H.  Qoittard.  —  Article  dans  la  Grande  Encyclopédie. 
Hugo  Riemann.  —  Dictionnaire  de  la  musique,  trad.  G.  Humbeet, 

Paris,  Perrin,  1899. 
Saint-SaKns. — Notice  sur  M.  Beher,  Paris,  Didot,  1881, in-4°. 
Revue  des  Deux  Mondes.  —  Le  Dialile  amoureux,  1er  octobre  1840. 

Les  Papillotes  de  M.  Benoist,  1"  février  1854. 


Antoine  Reicha. 

Antoine  Reicha  est  né  à  Prague  le  27  février  1770. 
Son  oncle,  Joseph  Reicha,  violoncelliste  et  compo- 
siteur, était  maître  de  concerts  chez  l'électeur  de 
Cologne  à  Bonn  et  chef  d'orcheslre  au  théâtre  de 
cette  ville.  A  neuf  ans,  Antoine  Reicha  entrait  comme 
enfant  de  chœur  à  l'église  de  la  Croix-du-Seigneur, 
où  il  commença  à  apprendre  la  musique  et  les  élé- 
ments du  latin,  avant  de  suivre  les  cours  de  l'Uni- 
versité. A  seize  ans,  il  était  à  Bonn,  chez  son  oncle 
Joseph,  et  il  y  poursuivait  seul  ses  études  musicales, 
avec  le  secours  du  traité  de  la  fugue  de  Marpurg  et 
du  livre  de  Kirnberger  sur  la  composition  pure.  A 
dix-sept  ans,  il  dirigeait  lui-même  l'exéculion  de  sa 
première  Symplionie. 

En  1794,  on  le  trouve  à  Hambourg,  où  il  écrit  la 
musique  d'un  opéra  français,  Godefroid  de  Montfort  : 
Rode,  qui  se  trouvait  alors  à  Hambourg  avec  Garât, 
en  dirigea  les  répétitions,  et  M.  de  Fombrune,  un 
émigré  français,  conseilla  à  l'auteur  défaire  entendre 
son  œuvre  à  Paris.  Pour  se  procurer  les  ressources 
nécessaires  à  un  pareil  voyage,  Reicha  se  mit  à 
donner  des  leçons. 

Au  début  de  1799,  il  arrivait  à  Paris,  où  il  se  fai- 
sait aussitôt  connaître  avec  une  Symphonie  exécutée 
aux  concerts  de  la  rue  de  la  rue  de  Cléry.  Le  succès 
de  cette  œuvre  fut  tel  qu'il  lui  fil  obtenir  le  livret 
d'un  opéra  destiné  au  Théâtre  Feydeau.  Malheureu- 
sement, lorsque  la  partition  fut  prête,  le  Théâtre 
Feydeau  avait  fermé  ses  portes.  Découragé,  déses- 
pérant, en  présence  de  la  faillite  du  Théâtre  Favart, 
de  pouvoir  faire  représenter  son  opéra,  Reicha  quitta 
Paris  pour  Vienne.  Il  s'y  lia  d'amitié  avec  Haydn, 
Albrechtsberger,  Salieri,  Beethoven,  et  y  composa 
avec  plus  de  facilité  que  de  génie  un  grand  nombre 
d'ouvrages  de  tout  genre.  De  cette  époque  aussi, 
date  la  première  de  ses  œuvres  théoriques  :  un  Re- 
cueil  de  36  Fuyues  pour  le  piano,  dans  lequel  il  pré- 
tendait réformer  le  genre;  en  réalité,  et  ce  sera 
l'erreur  ordinaire  de  Reicha,  qui  semble  avoir  ignoré 
tout  ce  qui  s'était  fait  avant  lui,  les  Italiens  du 
xvne  siècle  et  Langlé,  dans  son  Traité  de  la  fugue, 
avaient  composé  des  fugues  dans  lesquelles  la  ré- 
ponse au  sujet  n'était  pas  nécessairement  présentée 
à  la  dominante.  A  en  croire  Heicha  dans  une  notice 
du  Dictionnaire  historique  des  musiciens,  sa  tentative 
aurait  eu  grand  succès.  Comme,  trente-huit  ans 
plus  lard,  on  retrouva  chez  le  successeur  de  Steiner 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


presque  tous  les  exemplaires  gravés  en  1803,  ou  est 
•en  droit  de  supposer  que  les  36  Fugues  de  Rbicha  se 
vendirent  fort  mal,  et  ae  produisirent  pas  autant 
d'impression  que  le  prétend  l'auteur. 

Cependant,  il  menait  à  Vienne  une  existence  heu- 
reuse; la  composition  et  les  leçons  lui  fournissaient 
■des  ressources  suffisantes.  La  guerre  et  l'occupation 
,le  Vienne  par  les  Français  en  1805  compromirent 
cette  situation.  Aussi,  en  1808,  les  craintes  d'une  nou- 
velle guerre  décidèrent  Reicha  à  quitter  Vienne  et  à 
venir,  en  octobre,  se  fixer  à  Paris. 

Les  encouragements  d'amis  qu'il  y  retrouva,  le 
succès  d'une  de  ses  symphonies  à  un  concert  du 
Conservatoire  lui  firent  espérer  de  prendre  place 
parmi  les  compositeurs  dramatiques.  Un  premier 
essai  fut  malheureux;  Cagliostro,  en  collaboration 
avec  Dourlen,  tomba  dès  la  première  représentation 
à  l'Opéra-Comique  en  1810.  D'autres  tentatives  dans 
la  suite  n'obtinrent  pas  un  meilleur  succès  :  Natalie 
en  1816  ne  réussit  pas  mieux  que  Sapho,  qui  échoua 
en  1822;  ce  fut  le  dernier  essai  de  Reicha  dans  la 
musique  dramatique.  Il  se  contenta,  par  la  suite, 
d'écrire  de  la  musique  instrumentale;  ses  Quintettes 
pour  instruments  à  vent  eurent  leur  heure  de  vogue 
vers  1815,  mais  sont  aujourd'hui  tombés  dans  un 
profond  oubli,  d'où  ne  saurait  les  tirer  une  certaine 
habileté  de  facture. 

C'est  plutôt  comme  théoricien  que  Reicha  se 
croyait  quelques  titres  de  gloire;  c'est  ce  qu'il  pro- 
clamera bien  haut  au  moment  de  son  élection  à 
l'Académie  des  beaux-arts.  Malheureusement,  son 
ignorance  absolue  de  l'histoire  de  la  musique,  son 
mépris  pour  toutes  les  études  antérieures,  sa  négli- 
gence à  se  documenter  l'amenèrent  à  commettre  de 
grossières  erreurs.  Dès  1812,  sa  réputation  de  grand 
professeur  était  solidement  établie;  il  avait  trouvé 
■une  méthode  rapide  pour  enseigner  aux  élèves  ce 
qui  pratiquement  leur  était  indispensable.  Cette 
réputation  grandit  en  1814,  après  la  publication 
d'un  Traire  de  la  mélodie,  dans  lequel  il  proclamait 
que  rien  n'avait  encore  été  écrit  sur  la  question, 
ignorant  ou  négligeant  les  ouvrages  de  Duni,  de 
JNichelmann  et  de  Mattheson.  En  1817,  Reicha  fut 
choisi  pour  succéder  à  Méhil  comme  professeur  de 
contrepoint  à  l'Ecole  royale  de  musique.  Il  publia 
alors  son  Cours  de  composition  musicale  ou  Traité 
complet  et  raisonné  d'harmonie  pratique,  suivi,  en 
1S24,  du  Traité  de  haute  composition  musicale,  qui  lui 
attira  une  sévère  critique  de  l'abbé  Baini  dans  son 
ouvrage  sur  Palestrina. 

Plusieurs  fois  Reicha,  qui  s'était  fait  naturaliser 
Français  le  20  mars  1829,  s'était  présenté  à  l'Aca- 
démie. Mais  l'usage  de  la  compagnie  était  de  n'ad- 
mettre que  les  compositeurs  qui  s'étaient  fait  un 
nom  au  théâtre.  En  1831,  après  la  mort  de  Catel, 
Reicha  protesta  contre  cette  coutume.  Dans  une 
Lettre  ouverte  à  MM.  les  Membres  de  l'Académie,  il 
réclama  en  faveur  des  théoriciens;  et  les  allusions 
étaient  si  claires  qu'il  était  facile  de  reconnaître  le 
théoricien  qu'il  glorifiait  aux  dépens  des  composi- 
teurs. «  Un  professeur  d'un  talent  distingué,  écrivait- 
il,  qui  contribua  à  la  gloire  nationale  en  enseignant 
et  en  propageant  les  doctrines  d'une  bonne  école, 
qui  dota  la  France  d'élèves  instruits,  et  publia  en 
même  temps  des  ouvrages  d'une  utilité  générale, ne 
mérite  donc  point  de  siéger  à  l'Académie  des  beaux- 
arts?  »  MM.  les  membres  de  l'Académie  ne  furent 
pas  convaincus  et  choisirent  Pa.br.  Cependant,  en 
octobre  1835,  Reicha  finit  par  être  élu  pour  succéder 


à  RoiELDiEU.  Un  au  plus  tard,  le  26  mai  1836,  il  mou- 
rait à  Paris. 


i:.\TALin;l'K    liKS    (]■!   VI1KS    \>  A.    KKlr.ll  \ 


Éludes  nu  théories  pour  le  piuuo- forte  dirigées  d'une  manière  nourrit,-, 
Imbault,  Paris,  1S00,  in-4°. 

Truite  île  mélodie,  obstruction  fuite  de  ses  rapports  avec  l'harmonie, 
lors/pie  la  première  doit  être  prédominante,  Paris,  181-1,  in- 
40,  B«  édition,  1S32. 

Cours  de  eooiposiliou  musicale  ou  Traite  complet  et  raisonne  d'har- 
monie pratique,  Paris,  s.  d.  (1818),  in~i°. 

Truite  de  haute  composition  musicale,  faisant  suite  nu  Cours  d'har- 
monie pratique  et  au  Traite  de  mélodie,  Paris,  s.  d.  (1S24- 
1826),  in- i"  (traduction  allemande  avec  notes  de  Czerny;. 

Art  du  compositeur  dramatique  ou  Cours  complet  décomposition  vocale, 
divisé  en  quatre  parties  et  accompagné  d'un  volume  de 
planches,  Paris,  1S33,  in-i". 

Petit  Traité  d'harmonie  pratique. 

[rlicles  de  musique  pour  VEueqelopedie  des  gens  du  monde. 

Observations  philosophieo-praliques  pour  les  exemples  pratiques  \Phi- 
losophisrh-prahtische  Anmerl.ungcn,. ..)  ras.  a  la  Bibliothè- 
que du  Conservatoire. 

MUSIQUE    INSTRUMENTALE 

Symphonies,  op.  41-42. 

Ouverture,  op.  24. 

Octuor,  2  violons,  alto,  basse,  hautbois,  clarinette,  cor  et  basson. 

op.  96. 
3  Quintettes,  2  violons,  2  altos,  basse,  op.  92. 
Quatuor,  2  violons,  alto,  violoncelle,  op.  20. 
Trios,  violon,  alto,  violoncelle. 
Duos  pour  deux  violons,  op.  45,  53. 

:','  Quintettes,  pour  flûte,  hautbois,  clarinette,  cor  et  basson. 
Quatuor  pour  4  flûtes. 

ù  Quatuors  pour  flûte,  violon,  alto  et  basse. 
Trios  pour  flûte. 
Duos  pour  2  flûtes. 

Quintette  pour  clarinette,  violon,  2  altos  et  violoncelle. 
0  Livres  de  trios  pour  3  cors. 
Quatuor  pour  piano,  flûte,  violoncelle  et  basson. 
Trios  pour  piano,  violon  et  violoncelle. 
Sonates  pour  piano  et  violon. 
Sonutcs  pour  piano  seul. 
Études  et  Fugues  pour  le  piano. 
Variations  pour  le  piano. 
L'Art  de  varier  ou  57  Variations  sur  un  Ihei 


MUSIQUE    HRAMATIQUK 

179  i.  C.odefraid  de  Mont  fort.  Vienne. 

isii).   Cugliuslrn,  3  actes,  <  ipéra-Comique  (en  collaboration  avec 


Bibliographie. 

Abbé  Baini.  —   ilemorie  slorico-erilichc  delta  rila  e  dd.'e  opère  di 

C.  Pierlingi  da  Pulcstrinu,  t.  II. 
J.-A.  Dei-aire.  —  Notice  sur  Heicha,  musicien  compositeur  et  tkèo- 

rieieu.  1S37. 
Fétis.  —  Biographie  iinirersrllc  des  musiciens. 
A.  Pocgin.  —  Supplément  il  la  Biographie  iniirerselle. 
Grove's.  —  Dicliouiiry  of  iniisie  and  musicians,  London,  l'.'ln. 
Michaod.  —  Biographie. 
II.  Riemann.  —  Dictionnaire  de  musique,   trad.   Humbert,  Paris 

Perrin,  1S99. 
Soubies.  —  Les  Membres  de  I  Académie  des  he.iu.r-iirts. 


Ernest  Reyer. 

Louis-Etienne-Ernest  Rey,  dit  Krnest  Reyer,  est 
né  à  Marseille  le  1"  décembre  1823.  La  vocation 
musicale  se  manifesta  chez  lui  de  bonne  heure,  et 
ses  parents,  pour  le  détourner  d'une  carrière  qu'ils 
jugeaient  trop  périlleuse,  l'exilèrent  auprès  d'un 
oncle  à  Alger.  Leur  intention  était  d'en  faire  un 
comptable.  Reyer  avait  alors  seize  ans.  Le  jeune 
homme  ne  cessa  point  de  composer,  et  fit  même 
exécuter  à  la  cathédrale  d'Alger,  en  18  'il,  une  messe 
solennelle  qui  eut  un  certain   succès.  Et  puis,  un 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3553 


beau  jour,  n'y  tenant  plus,  Reyer  partit  pour  Paris. 
Il  y  trouva  une  excellente  femme,  sa  tante, 
Mme  Louise  Farrenc,  pianiste  et  compositeur  elle- 
même,  qui  lui  donna  les  meilleurs  conseils  et  resta 
toujours  pour  lui  une  amie  sûre  et  dévouée.  11  se 
lia  avec  Méry,  Louis  de  Cormenin,  Maxime  du  Camp, 
Gustave  Flaubert,  et  la  plupart  des  artistes  d'alors. 
La  tante  de  Reyer,  Mme  Farrenc,  fut  son  seul 
maître,  et  il  semble  bien  que  ses  études  techniques 
n'aient  jamais  été  très  poussées.  Dès  le  5  avril  1850, 
il  faisait  exécuter  son  ode-symphonie  du  Sélam,  où 
il  avait  rassemblé  quelques-unes  de  ses  impressions 
d'Algérie.  Son  premier  ouvrage  fut  assez  bien  ac- 
cueilli, et,  le  20  mai  1854,  Maître  Wolfram  remportait 
à  son  tour  au  Théâtre  Lyrique  un  succès  assez  flat- 
teur. Re\er  débutait  en  somme  heureusement,  et 
pouvait  concevoir  les  plus  belles  espérances. 

Le  14  juillet  1858,  Sacountalfi  réussissait  à  l'Opéra, 
et  le  11  avril  1801,  au  Théâtre  Lyrique,  la  Statue 
enthousiasmait  un  public  qui  lui  resta  lidèle  pen- 
dant deux  années.  Désormais,  Reyer  était  désigné  à 
l'attention  des  directeurs,  et  il  put  sans  peine  faire 
jouer  en  1862,  au  théâtre  de  Bade,  son  Erostrate,  qui 
lui  valut  de  nouveaux  applaudissements. 

Alors  commence  pour  Rêver  une  période  d'attente 
qui  se  prolonge  au  delà  de  toute  prévision  et  de 
toute  vraisemblance.  Cet  artiste,  qui  avait  si  brillam- 
ment conquis  la  faveur  des  Parisiens  dès  ses  pre- 
miers essais,  ne  trouve  plus  un  directeur  de  théâtre 
prêt  à  accepter  l'œuvre  de  sa  maturité  :  Sigurd. 
Fièrement,  Reyer  refuse  toute  concession  aux  pré- 
tendues exigences  du  public;  et  s'il  a  fait  un  opéra 
qui  bouscule  les  traditions  et  renouvelle  le  genre, 
c'est  pour  qu'il  soit  représenté  tel  qu'il  l'a  cornu. 
Son  heure  viendra,  il  en  est  sûr. 

Cependant,  ses  fonctions  de  bibliothécaire  de  l'O- 
péra et  de  feuilletoniste  des  Débat»  lui  permettent 
de  vivre.  Aux  Débats,  il  faisait  d'utile  besogne,  met- 
tant généreusement  sa  critique  ardente  au  service 
de  l'art  désintéressé. 

Les  voyages  furent  une  de  ses  consolations  pen- 
dant tant  d'années  où  il  eut  à  souffrir,  comme  ar- 
tiste, de  l'inintelligence  et  de  l'ingratitude  humaines. 
Il  passait  l'été  en  Alsace,  dans  les  Vosges,  dans  la 
Forèt-.Noire,  plus  tard  dans  le  Dauphiné.  Une  mis- 
sion dont  il  fut  chargé  lui  permit  de  visiter  l'Alle- 
magne et  l'Autriche,  le  Tyrol,  la  Lombardie,  Venise. 
Pour  la  première  représentation  d'Aïda  au  Caire,  il 
fut  l'invité  du  Khédive,  et  eut  ainsi  l'occasion  de 
connaître  l'Egypte. 

De  loin  en  loin,  on  jouait  un  fragment  de  Sigurd 
dans  les  concerts.  Et  c'était  un  réconfort  pour  Reyer. 
Le  11  novembre  1870,  Reyer  eut  la  joie  d'être  admis 
à  l'Académie  des  beaux-arts,  où  il  succédait  à  Ber- 
lioz, le  maître  qu'il  avait  toujours  tant  admiré  et 
dont  il  contribua  plus  que  tout  autre  à  imposer  le 
nom  et  les  œuvres. 

Enfin,  le  7  janvier  1884,  eut  lieu  à  Bruxelles  la  pre- 
mière représentation  de  Sigurd,  avec  un  tel  succès 
que  l'Opéra  de  Paris  s'empressait  de  l'olfrir  à  son 
public  le  12  juin  1885.  Salammbô  suivait  de  prés  Si- 
gurd, et  les  mêmes  applaudissements  l'accueillaient 
à  Bruxelles  le  10  février  1890,  et  à  Paris  le  16  mai  1892. 
Puis  ce  fut  tout;  le  maître  avait  près  de  soixante- 
dix  ans  :  il  crut  bon  de  songer  à  la  retraite.  Il  vécut 
encore  jusqu'à  sa  quatre-vingt-sixième  année,  et 
mourut  le  1«  janvier  1909. 

Reyer  était  un  musicien  sincère,  personnel,  sur- 
tout dans  le  charme  et  la  tendresse,  d'une  sensibi- 
Copyrirjht  by  Librairie  Delagrave,  1930. 


lité  délicate  et  vive,  d'une  imagination  très  poétique. 
Bien  Français  comme  Go'ukod,  il  a  contribué  pour  sa 
part  au  relèvement  du  goût  musical  en  France  dans 
le  dernier  tiers  du  xix=  siècle. 

CATALOGUE  DES  PRINCIPALES  ŒUVRES  DE  REYER 

liesse  pour  l'arrivée  du  duc  d'Aumale  à  Alger  (1847). 

Chœur  îles  buveurs,  à  4  vuix  d'hommes. 

Chœur  des  assièges,  i  i  voix  d'hommes. 

10  Chansons  anciennes,  harmonisées. 

Le  Selam.  symphonie  orientale  en  i  parties,  texte  de  Théophile 

Gautier  (1850). 
Maître  Wolfram,  opéra-comique  en  1  acte,  texte  de  Méry  (1851;. 
Sucountala,  hallet-panlomniii?  i'n  2  actes,  scénario  de  Th.  Gau- 
tier (1858). 
La  Statue,  opéra-comique  en  3  actes,  paroles  de  Michel  Carre  et 

J.  Barbier  (1861). 
Chant  des  paysans,  chœur  à  2  voix  d'hommes,  pour  te  drame  de 

Victor  Séjour  :  les  Voient  lire  1861). 

Erostrate,  opéra  en  2  aeles  de  Mér>   .  t  !■:.  r  ,   :,.  !  Isfl2). 
L'Hymne  du  Rhin,  cantate,  p;  mie*  ■  !■■  M-r\     !-.'.. 
La  Madeleine  au  désert,  por-ie  d'Ed.   Iilau,    scène   pour  voix  de 

basse  avec  orcheslre    t  -< T  i  . 
Sigurd,  opéra  en  i  actes,  texte  de  C.  du  Locle  et  A.  Blau  (1884). 
Sulammbi,  opéra  en  5  actes,  texte  de  C.  du  Licle,  d 

bert  (1890). 
Marche  l:-ir/ouc  pour  orclu'slrr. 
W  Mélodies. 
tO  Mélodies. 

Tritteue,  poésie  d'Ed.  Blau  (1864). 
L'Homme,  poésie  de  Georges  Boyer  (1S92). 
G.  .l-i  Locle(1896). 


'."""'■ 


Ci  nzo  .  :  i 


S75). 

ique  (recueil  posthume). 

Bibliographie. 

—  M      ;..'.  de  Russie  et  Musiciens  a 
itl      ue<     i     e  iti  i ,  1903. 
—  i  i  /         ■  ■      Sigurd  dans  l'Edda; 


i  de 
Reyer,  Paris,  i  ischbacher,  1890, 

—  Salammbô,  le  poème  et  l'opéra.  Pans,  l'iscbbaclier,  18'jn. 
Imeeht  (Hugues).  —  Nouveaux  Profils  de  musiciens,  Paris,  Pisch- 

bacher,  1S92. 
Jollies  (Adolphe).  —   Musiciens  d'aujourd'hui.   ir-   et   2-  «('ries, 
Paris,  Librairie  de  l'Art,  1S92  et  1894. 

—  Ernest  Reyer,  Paris,  collection  «  les  Musiciens  célèbres   », 

Laurens,  1910. 


Saint-Saëns. 

Camille  Saint-Saëns  est  né  le  9  octobre  1835, 
d'une  famille  originaire  de  la  Normandie.  Sa  mère, 
qui  était  peintre,  voulut  faire  de  lui  un  musicien,  et 
ce  fut  sa  tante  qui  lui  mit  les  doigts  sur  le  piano. 
Déjà,  il  manifestait  de  rares  dispositions  pour  la  mu- 
sique et  une  sûreté  de  goût  qui  lui  faisait  refuser  de 
jouer  tous  les  morceaux  spécialement  composés  poul- 
ies commençants.  Haydn,  Mozart,  Grétry  furent  les 
premiers  auteurs  qu'il  connut.  Plus  tard,  Rameau  le 
séduit  par  sa  netteté  toute  scientifique,  par  sa  clarté 
et  sa  précision;  déjà  Saint-Saëns  se  sentait  de  la 
même  famille  que  le  grand  musicien  du  xvmé  siècle. 
Dans  tous  le  cours  de  sa  carrière,  ses  idées  ne  va- 
rieront pas;  véritable  classique,  et  classique  à  la 
française,  il  considérera  toujours  la  forme  comme 
l'essentiel  de  l'art,  et  subordonnera  toujours  à  la 
raison  qui  ordonne,  et  construit,  la  sensibilité  dont 
les  entraînemenls  peuvent  être  dangereux  pour  la 
perfection  esthétique  d'une  œuvre.  Aussi,  Beethoven 
l'étonné- t-il  d'abord;  aussi,  ne  comprend-il  pas 
d'abord  là  profondeur  de  sa  sensibilité  et  n'est-il 
sensible  qu'aux  parties  les  plus  lumineuses  de  ses 
compositions.  A  sept  ans,  élève  de  Stamaty,  Saint- 
Saëns  acquérait  rapidement  et  sans  peine  sur  le  piano 
une  prodigieuse  virtuosité,  qui  explique  la  prédilec- 
tion qu'il  conservera  toute  sa  vie  pour  cet  instrument. 
223 


3...V. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Le  2  juin  1846,  il  donnait  à  la  salle  Ple.vcl  son  pre- 
mier concert,  au  programme  duquel  figuraient  le 
Concerto  en  si  bémol  de  Mozaht,  une  l'ugue  et  un  Air 
varié  de  Haenhel,  un  Concerto  de  Bbbthovin» 

Sous  la  direction  de  Maleden,  il  commence  alors 
l'étude  de  l'harmonie  et  du  contrepoint  ;  à  quatorze 
ans,  il  entre  dans  la  classe'  d'orgue  de  Benoist  et  étu- 
die Bach  et  HaéNdbl.  La  majestueuse  architecture  de 
l'art  religieux  plaît  à  sa  raison,  mais  il  reste  peu 
sensible  à  toul  ce  qui  dans  ce  genre  de  musique 
peut  émouvoir  ou  loucher.  Dans  sa  vie,  comme  dans 
sou  art,  la  passion  jouera  un  rôle  très  secondaire; 
le  sentiment  sera  toujours  sacrifié  à  l'ordre,  à  la 
beauté  de  l'expression,  à  tout  ce  qui  est  purement 
intellectuel. 

Les  œuvres  de  Meveubeer,  qu'il  entend  à  l'Opéra, 
n'exercent  pas  sur  lui  une  grande  inlluence,  malgré 
la  vogue  dont  elles  jouissaient  à  cette  époque.  Gluck, 
Mozart  restent  les  modèles  qu'il  se  proposera  au 
théâtre.  Mais  à  cette  époque,  il  ne  songe  pas  encore 
à  l'opéra,  et  sa  première  œuvre  est  une  symphonie 
(1853).  Liszt,  qu'il  connaît  à  la  même  époque,  le 
séduit  par  son  extraordinaire  talent;  avec  Berlioz, 
il  est  pour  le  jeune  compositeur  le  grand  initiateur 
de  l'art  moderne. 

Klëve  pour  la  composition  d'abord  d'HALÉw,  plus 
tard  de  Reber,  enfin  de  Gounod,  Saint-Saêms  tente 
sans  succès  le  concours  pour  le  prix  de  Home.  Cet 
échec  ne  décourage  pas  l'artiste,  qui,  à  vingt-cinq  ans, 
avait  déjà  écrit  une  Ode  à  sainte  Cécile  (1852),  trois 
Symphonies  (1853, 1856,1859),  ['Oratorio  de  ZVoèi(1858), 
un  Quintette  pour  piano  et  instruments  à  cordes 
(1855),  un  Concerto  de  piano  (1858),  un  Concerto  de 
violon  (1859). 

D'ailleurs,  Saint-Saëns  ne  s'était  pas  borné  à  étu- 
dier la  musique.  Véritable  «  honnête  homme  »  dans 
le  sens  du  xvne  siècle,  il  s'intéressait  à  tout,  aux 
lettres,  à  la  philosophie,  aux  sciences  et  particuliè- 
rement à  l'astronomie.  Il  écrivait  des  vers,  lisait 
Auguste  Comte,  Flaubert,  Taine,  se  signalait  comme 
un  des  disciples  les  plus  fervents  de  l'école  positi- 
viste, aimait  la  peinture,  faisait  des  aquarelles. 

En  1800,  un  concert  de  ses  oeuvres  donné  chez 
Erard  faisait  connaître  au  public  son  Quintette,  ses 
Bmûs  pour  piano  et  harmonium,  une  Fantaisie  pour 
clarinette,  un  Concerto  de  violon. 

En  1865,  l'exécution  du  Trio  en  fa  op.  18  marquait 
dans  l'histoire  de  la  musique  de  chambre  française 
une  date  importante  :  grâce,  fraîcheur,  élégance, 
pureté  de  lignes,  sobriété  de  touche,  toutes  les  qua- 
lités de  Saint-Saëns  se  révélaient  dans  ce  merveil- 
leux bijou  musical, peut-être  le  plus  parlait  qu'il  ait 


ciselé. 


Après  les  malheurs  de  1870,  Saint-Saëns  se  donne 
tout  entier  à  la  restauration  et  au  développement  de 
la  musique  française;  il  contribue  à  l'organisation  de 
la  Société  Satinante  de  musique  et  en  devient,  avec 
Bussine,  le  premier  président.  C'est  alors  une  période 
de  production  intense;  en  dix  ans  paraissent  les 
quatre  Poèmes  symphoniques  (1871,  18::;,  1874,  1877), 
la  Sonate  pour  violoncelle  (1872),  le  Quatuor  op.  il 
(1875),  le  Quatrième  Concerto  pour  piano  (1875),  le 
Déluge  '187.')),  Samson  et  Dalila  (1877),  le  Requiem 
(1878),  Etienne  Marcel  (1878),  la  Lyreet  la  Harpe  (1873), 

le  Septuor  (1881). 

Successivement,  paraissent  au  théâtre  la  Princesse 
jaune  (187°  ,/e  Timbre  d'argent  (1877  .  Etienne  Marcel 
(Lyon,  187;»,,  Henry  VIII  (1883),  Proserpine  (1887), 
I     miô  (1890),  Phrynê  (1893). 


Longtemps  discuté,  Saint-Saëns  triomphe  enfin  de 
toutes  les  oppositions,  surtout  après  la  reprise  de 
Samson  et  Dalila  k  l'Opéra  en  1892.  Dès  lors,  il  s'im- 
pose définitivement  non  seulement  en  France,  mais 
en  Angleterre  et  en  Allemagne.  Comblé  de  tous  les 
honneurs  et  de  toutes  les  distinctions  que  peut  rece- 
voir un  musicien,  il  apparaît  aux  étrangers  comme 
le  plus  grand  des  musiciens  français,  comme  le  re- 
présentant officiel  de  la  musique  française.  Son  heu- 
reuse carrière,  à  la  courbe  harmonieuse  et  logique, 
que  troublèrent  seules  quelques  passagères  inquié- 
tudes pour  sa  santé,  se  poursuit  dans  une  auréole 
de  gloire  :  autour  de  lui,  Camille  Saint-Saëns  voyait 
prospérer  cet  art  symphonique  qu'il  avait  tant  con- 
tribué à  créer  en  France.  11  est  mort  à  Alger,  le 
16  décembre  1921. 


CATALOGUE   DES   (Kl/YRES    DE   SAINT-SAENS 


Sir  Huuutetles.  op.  '■'■,  lsr.y,  Taris,  Durand,  1S56. 
ire  Mazurka,  op.  21,  1862  ('?'),  Tari»,  Durand,  1868. 
Carolle.  op.  23,  1S71.  <  irehestréo.  Paris,  Durand,  1872. 
S«  Mazurka,  op.  84,  1871,  Paris,  Durand,  1872. 
Roma/iœ  sans  paroles,  1S71,  Pans,  Joubert,  1872. 
Six  Éludes,  op.  52,  1877,  Paris,  Durand,  1877. 
Menuet  et  Valse,  op.  56,  1878.  Paris,  Durand,  187S. 
.V  Mazurka,  op.  68,  1882,  Paris,  Durand,  1883. 
Album,  op.  72,  1SS6,  Paris,  Durand,  1881. 
Souvenir  d'Italie,  op.  80,   1887,Paris,  Durand.  1887. 
Les  Cloches  ttu  Soir,  op.  85,  1889,  Paris.  Durand,  1SS9. 
Valse  canariole,  op.  88,  1890,  Pans,  Durand,  ÎS'.IU. 
Suite,  op.  90,  1891,  Paris,  Durand,  1892. 
Thème  rarië,  op.  97,  189  i.  Palis,  Durand,  1894. 
Stiureuir  il'lsmalaia,  op.    lue,  1895,  Paris,  Durand,  1S95. 
Valse  mignonne,  op,  104,  1896,  Parte,  Durand,  1896. 
Valse  nonchalante,  op.  110,  1898, 'Paris,  Durand,  1898. 
Sir  retîntes  {■><=  livre!,  op.   111.  1899,  Paris,  Durand,  1899. 
Valse  lanaoïireiise,  op.   120,   19M3,  pans  Durand,  1903. 


PIANO    A    QUATRE    MAINS 

huetihin,  ,,p.  il,  1855,  Pans,  Hamelle,  1861. 

Kaniii  llaml,!  //(/r>,„rM'.ijirr,   a  kiilade  de  Henri  Heine), op. 

ISSO,  Berlin,  Bote  et  Bock,  i  380 
FiuiUel  ifdUtm,  op.  81,   1887,  Paris,  Durand,  1887. 
l'as  redoublé,  op.  si;,  [«87,  Pans.  Durand,  1890, 
Berceuse,  op.  lu:.,  1890,  Pans,  Durand,  1S96. 


Variations  sur  iiatheme  ,le  Iteelhorea.  op.  :i:.,  187  1,  Paris,  Durand, 

1874. 
Polonaise,  op.  77,  1886,  Paria,  Durand.  1886. 
Scherzo,  op.  87,    1889,  Paris,  Durand, 

Ca/inee  arabe,  op.  96.   IS'.'i.   P. m-,    liur.ind,  1891. 
Capnee  lierai, jiie.  op.   106,  1898,  Paris,  Durand,  189s. 

ÎIMIMONUIM 

Trois  Morceaux,  op.  1,  1852,  Paris,  Girod,  1S58. 

Sir  Duos  pour  harmonium  et  pu op.  v  1858,  Pans,  Fromont, 


13,    IS65,  P 


Fantaisie,  lsr.d,  Paris,  Coslallat,  1S75. 

eanliques  brelans,  op.  7,    ls66 

rand,  1866. 
Uelieilietian  niirl',1  e.  ,>  ,.  '.'.    1  'VI.    Pans,   Durand,  1*66. 
Trais  l'relit.les  et  Fugues  (,1«  livr>e,  op.  99,    189  i,  Paris,  Durand, 

1894. 
Fantaisie,  op.  lui,  1S9Ô.   l'un.  Durand.  1895. 
Marche  religieuse,  op.  107,  l897,Paris,  Durand,  1898. 
Trois  t'relmles ,:  .  p.  ne',  1S98,  Paris,  Durand, 

1S9S. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE 


(Juinlette  pour  piano,  2  violons,  alto  et  violoncelle,  op.  1 1,  1,-05. 
Paris,  Hamelle,  1865. 

Sérénade  pour  piano,  orgue,  violon,  alto  (ou  violoncelle),  op.  15, 
1S66,  Paris,  Choudens,  1868. 

Suite  pour  violoncelle  et  piano,  op.  16,  1862,  Paris,  Hamelle.  1866. 

I"  Trio,  en  fa  majeur,  piano,  violon  et  ïioloncc  I  ,cu).  ls.  1863, 
Paris,  Hamelle,  1S67. 

Romance  pour  piano,  orgue  et  violon,  op.  27.  l8os.  Paris,  Du- 
rand, 186S. 

ire  Sonate,  en  ut  mineur,  pour  piano  et  violoncelle,  op.  32,  1872. 
Paris,  Durand.  1S73. 

Berceuse,  piano  et  violon,  op.  3S,  1871,  Paris,  Durand,  187 1. 

Quatuor,  piano,  vi..l..n,  allô  et  violoncelle,  op.    il,    ',  s  7  r, ,    r,.n-. 


Allé 


1S77 


ioloncellè  et  piano  (ou  orchestre),  op.  43 

urand,  1S75. 

iolon  et  piano  (ou  orchestre  ,   1874,  Paris 

violoncelle  et   piano,  op    o),  1877,  Paris 

iloiicelle.  op.  65 


Septuor,  trompette,  piano,  2  violons,  alli 
1SS1,  Paris.  Durand,  1881. 

fe  Sonate,  piano  et  violon,  op.  75,  1SS5,  Pans.  Durand,  IS85. 

WeMma-Cake,  caprice-valse,  pour  piano  et  quatuor  d'archets, 
op.  76,  18S5,  Paris, Durand,  1886. 

Caprice  sur  des  airs  danois  et  russes,  pour  flûte,  hautbois,  clari- 
nette et  piano,  op.  79.  1897,  Paris,  Durand,  1SS7. 

I.e  t'.i/iiae.  mélodie  ;i..iir  m     ...c  ■:!.■  ei   piano.  Extrait  du  Carnaval 
des  animé   r,  1887,  Paris,  Durand,  1887. 

Chant  sapkique,  pour  violon     lie  el   piano,  op.  91,   1S92,  Paris, 
Dur 1.  1892. 

■•'  Trio,  en  mi  mineur, piano,  violon  et  violoncelle,  op.  "2,  1892, 
Paris,  Durand,  1892. 

Morceau  de  concert  peur  cor  >  i  oi.iiio.   >p.  01,  1887,  Paris,  Durand, 
1893. 

:'"  Sonate,  eu  mi  bémol,  pour  piano  el  violon,  op.  102,  1S96,  Paris, 
Durand,  1896. 

Barcarolle,  pour  violon,  violoncell  , harmonium  et  pi, nie, op,  108, 
189  :,  Paris,  Durand,  18  ■-. 

Quatuor  h  cordes,  op',  IIS,   1899,  Paris,  Durand,  1S99. 

:"'  Sonate,  en  (a  majeur,  violoncelle  et  piano,  op.   123,  1905,  Pa- 
ris, Durand,  1905. 

Fantaisie   pour  violon  et  harpe,  op.   124,   1907,  Paris,  Durand, 
1907. 


L-SIQUE 


SIQI  S 


!"-■  Symphonie,  en  m  bem  il,  -  p.  2,  1853,  Paris,  Durand,  1855. 

Symphonie  eu  fa  majeur.  î  --,;.  Non  publiée. 

Tarentelle  pour  flùleet  cl.uineiie  avec  accompagnement  d'orches- 
tre, op.  6,  1857,  Paris.  Durand,  1S57. 

Sijmitli'inie  en /r  majeur,  i-5'>.  Non  publiée. 

Spartacnx,  ouverliire,   ISt,3.  Non  publiée. 

Rapsottie  bretonne,  op.  7  Ms  [sur  les  motifs  de  la  lriJ  el  la  3e  rap- 
sodie  de  l'op.  7,  186        1    91,  Paris,  Durand.  1892. 

Ier  Concerto  pour  piano  el  orclie-lre.  op.  17,  185s,  Paris,  Durand, 
1875. 

(«r  Concerto  pour  violon  et  orchestre,  op.  20,  1859,  Paris,  Ha- 
melle, 1S68. 

:"'  Concerto,  en  sot  mineur,pout  piano  et  orchestre,  op.  22,  1868, 

Introduction  el  fl        i  pour  violoaavec  accon 

d'oroh  ,op.  i       ,  i  aris,  Durand.  1870. 

S»  Concerto  en  wi  bém  I,  pom   piano  et  orchestre,  op.  29,  IS69, 


Le  Rouet  dOmphale,  poème  symphonique,  op.  31,  1871,  Paris, 

Durand,  1S72. 
I1''  Concerto   en  /.;  mineur  pour  violoncelle  et  Orchesti 

1872,  Paris,  Durand,  1-7;:. 
M.ir.i,c  licvh/ae,  op.  31.  1871,1   iris,  Durand,  187  I . 
Romance  en  fa  majeur,   pour  cor   avec  accompagne! 

1874,  Paris,  Durand,  187  1. 
Romance,  en  re  bémol.  :e,  -..  •./.;,-  ,iv,-l  aeeompa2nouieiil  d'oiclies- 

tre.op.  37.  1871     1.  ri      '    .     :.!.  1874. 
Phaélon,  poème  syraph   niqu  1873   Paris,  Du 

LaDanse macabre,  | ne   symphonique,  op.  40,  1874,  Paris,  Du- 

trand,  1875. 
,'  Concerto  en  ut  mineur  pour  piano  et  orchestre,  op.   il,  1-75. 
Paris,  Durand,  1877. 
Suite  i rorchestre  op.  19,  1863,  P  ris,  Durand,  1877, 
l.a  Jeunesse  d'Hercule,  ]».,  me  sv:n  ehoiiejue,  op.  50,  1877,  Paris. 
Durand,  1877. 
»e Symphonie,  enls  mineur,  op.  55,   1-859,  Paris,  Durand,  1S78. 
."■  Concerto  en  ut  majeur,  pour  violon  et  orchestre,  op.  5-,  1858, 
Paris,  Durand,  ls7'i. 
'Suite  algérienne,  op.  60,  188  i,  Paris,  Durand,  1881. 


3°  Concerto  en  .m  mineur  pour  violon  et  orchestre,  op.  61,  18! 

Paris,  Durand.  1881. 
Morceau  de  concert  pour  violon  et  orchestre,  op.  02,  1880,  Pai 


Jurand, 


r  ad  libitum;,  op. 


tSSl,  Pa- 
ît orchestre,  op.  70,  1884,  Paris, 
et  orchestre,  op.  73,  1884,  Paris, 
orgue,  op.  78,  1886,  Paris,  Du- 


Alleoro  appas 

Durand.   1RS* 
Rapsodie  d'Anvii    <t  pom  pi 

.;"  Symphonie  en  nt  mineur, 
rand,  1886. 

le  Carnaval  des  Animaux  (non  publié,  sauf  le  Cygne,  1887,  Paris 
Durand,  1887). 

Havanaise  pour  violon  et  orchestre,  op.  83,  1887,  Paris,  Durand 
1888. 

Africn,  fantaisie  pour  piano   et  orchestre,  op.  89.    1 391,  Paris, 
Durand,  1891. 

Saraliandeet  Rigaudon,  op,  93,  1892,  Paris,  Durand    1892. 

5e  Coticerto  en/7/  majeui  pour  piano  el  oreh  ■'•  -  •  p.  109,  1890, 
Paris,  Duran  I,   l'896, 

Marche  du  Couronnement  d'Edouw ■■« M   I,  op    117,1      !    Paris,  Du- 
rand, 1902. 

,  ei,  i  et  o        ih  e,  op.  1 19 
:  is,  Durand,  1902 

Caprice  andalou,  pnui   M       ii    et   ..ainsiiv,   op.    122     1904,    Paris 

Durand,  190  i. 

La  Musc  et  le  Poète,  pour  violon  et   violoncelle  avec   orchestre, 

op.   132.  1909,  Paris,  Durand.   1910. 
Ouverture  de  Trie,  op    133,  1909,  Pans,  Durand,  1910. 


OB.CH1  STRB 


Orient  el  Oc  e.'.eo',  m  n    lie.  ,,;,.  25,    1S69, 
Hymne fran  P  ois,  Duran 

Sur  les  /e.r./.N  du   \il,   marche  militaire,  op. 


Guitare,  1851 .  Paris,  Ch  >u  tens,  1870. 

Rêrcnc,   1851,  orchestrée,  Palis.  Durand,  1852. 

I.e  l'axd'ar.  /.■  ,2.  orchestrée,  Paris,  Durand, 

l.a  l-'euille  de  peusi  er.  i-33,  Pans,  Durand,  1S51. 

L'Attente.  \ei>  1-55.  Paris,  Durand,  1856. 

La  Cloche,  vers   1855.  Orchestrée,  Paris,  Durand,  1856. 

I.e  I.erer.le, '.  1855,  Pans,  Durand,  1856. 

La  lladonna  col  Bambino,  vers  1855,  Paris,  Durand,  186S. 
Pastorale,  duettino,  1855,  Paris,  Durand,  1856. 
Plainte,  vers  1855.  Paris.  Durand,  1856. 
Le  Sommeil  des-  /leurs,  1855,  Pan-,  Durand,  1-  ■  ;, 
Vieux,  duettino,  vers  1855.  Paris,  Durand,  1850. 
l.a  Mort  d'Ophelie,  vers  1857.  Pari-,  Durand,  l-5s. 
LcSnirdexcruds.irlne--l.ne,   barcarolle  a    2\oi\,    1857,    I 
Durant.  1858. 


.8,.    renoue 
liloile  du 


Te  stesse. 
.1    flloi  Oui. 

Mun/itixe, 


Durand,   Isa». 
O.Paris,  Durand.  J879. 
aris,  Durand,   1869 
nai.d,  1864. 


1866. 


strée.  Paris,  Durand,  I 

;  ter,  1868,  Paris    Choudens,  : 

:     1S96. 
-.  Choudens.  1870. 
,  Durand,  1S77. 
569,  Paris,  Choudens 
is,  ver.-    1869,   Paris,  I 
1870,  Paris,  Durand 
.  1870,  Pan-,  Durai 
71,  Londres,  Auoene;.  1-71. 
;.-.  Durand,  1895. 


),  Paris,  Durand,  1891. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONXAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


91,  Paris,  Durand,  1892. 
Il,  Paris,  Durand,  1891. 
pagnemenl  de  piano  .<  i  m 
lurand,  1x92. 
Pai  s,  Durand,  1892. 


le  Rossignol,  1898,  Paris,  Durand,  1892. 
Fiérebeaulè,  1893,  l'an-.  Durand,  1893. 

Primaient,  {-.'■■.  ru  •-,  Pi.i..ud,  IS93. 

;«  Seréiliie,  1893,  Paris,  Dur I,  L895. 

l'//,'  Paris,  Pire  In  Fronce,  1893,  Paris,  M  irgueritat,  1894. 
La  Libellule,  tM'i.  iiirh.-nv,-.  Paris,  Durand,  1891. 
Peut-être,  1894,  Paris,  Durand,  1894. 
Pourquoi  rester  ieuletle,  1894,  Paris,  Durand,  1895. 
IV««»,  dii.i.  IS'.H!.  Par:'.  Durand,  1X90. 


.4//.I  fllci (.(■•/  7'e 

DuranJ,  1S99. 

Si  je  l'osais,  18 

l 

1,  1S9S. 

Smmet,  1898,  1 

tes  Vendanges,  1 

'  popu 

aire 

1898.  drcheslré. 

Paris, 

Durand 

189S. 

les  Clocha  de  h 

mer 

1900, 

Par, 

,  Durand,  1900. 

Nocturne,  1900, 

Par 

s.  Dui 

ind, 

1900. 

Thème  varié,  Pa 

i-,  l 

191 

Désir  d'amour,  1 

Dur 

ind,  1901. 

E//e,  1901,  Par 

-.  I1 

19  'l 

I.Arlue.    1903, 

d,  1 

)03. 

■s'.mii'  .!««.•.  190 

.  1903. 

L'Étoile,  1907, 

,: 

907.  ' 

U Amour  Ouïe  i, 

rand,  1908. 

Soir  romantique, 

190 

.  Pari 

,  Du 

rand,  190S. 

Violons  dans  te  si 

r,  a 

ce  viol 

mol 

lige,  1908,  Paris 

Duran 

J,  190S 

Sérénade  d'hiver,  4  voix  d'hommes,  sans  accompagnement,  1867, 

Paris,  Durand.  1868. 
/  s  Soldais   le  Gédèon,  double  chœur  à  1  vois  d'hommes,  sans  ac- 

comp  ignement,  op    16,  1876,  P  iris,  Durand,  1876. 
;  i    i  .     roi  d-p(  re,  deux  voix  de  remmes; 

■j.  i  Ire,   baryton  s     i  el  chœur  d'hommes, 

Deiu:  chœurs  :  1.  C«/me  des  naite,  i  voix  mixtes.  —  2.  Les  /leurs 
et  les  arbres,  i  voix  mixtes,  op.  68,  1882,  Pari-.  Durand, 
1SS3. 

Deux  chœurs  :  1.  1rs  Marins  de  Kermor,  4   voix  d'hommes   sans 

ace pagnement  —  2.  /.e.<  fi/sus,  i  voix  d'b m  -     ins 

accompaqnement,  op.  71,  1884,  Paris,  Durand.  1884. 

les  Guerriers,  i  voix  d'hommes  sans  accompagnement,  op.  S4, 
1888,  Paris,  Durand,  1888. 

Madrigal,  ténor,  solo  et  chœur  d'hommes,  1S97,  Paris,  Durand. 


Cha 


Pur 


•une,  quatre  voix  d'hommes  sans  accompagnement, 
3,  189a,  Paris,  Durand,  1S99. 
in  i,  solo  el  chœur  de  femmes,  op.  114,  1900,  Paris, 


Coinanee  /    soir.  4  voix  mixtes  sans  accompagnement,  op.   IIS, 

1002,  paris,  Durand,  1902. 
Ode  d'Horace,  i  voix  d'hommes  sans  accompagnement,    1905, 

Paris,  Durand,  1905. 
Le  Mutin,    i  voix  d'hommes,  op.  I'-"'.  I  "i>  - .  I'  ,  i,s.   Durand.   1909 
La  Cloue.   ,\  131,  I  909,  Paris,  Durand.  1909. 

A  deux,  petit  canon  à  2  voix  pour  enfants  (supplément  a  la  Revui 

musicale,  15  septembre-  1e'  octobre  i 

CANTATES,    ORATORIOS,    SCÈNES    LYRIQUES 

0iie  „  sainti  Cécile,  1852.  Non  publiée. 
Scène  d'Horace,  1860,  op.  10,  Paris,  Durand,  1861. 
Les  Xoeei  de  Pramelliee,  !Sti7,op.  19,  Paris.  Ilauielle,  1--,:. 
ide  Hoche,  SSjuin 


Le  TMm/e.  {s::..  ,,p.  15,  Paris,  Durand,  1x70. 
La  Lyre  et  la  Harpe,  1879,  op.  57,  Paris,  Durand,  1879. 
Suilpersane   d'après  Top.  26),   1891,  op.  26   bis,  Pa 
1892. 

I.o  Fiuneer  du  Timbalier,  1887,  op.  82,  Pari-,  Durand,    ; 
l'a/las   Uhéné,  1891,  op.  98,  Paris,  Durand.  1894 
Lever  de  soleil  sur  le  Nil,  1S9S,  Paris,  Durand.  1898. 

le  Feu  céleste,  1900,  op.   lia,  Paris,  Durand,  il 

Lola,  1900,  op.    1  16,   Paris,  Durand,    1900. 

La  Claire  ,le  Corneille,  1900,  op.   120,  Paris,  Duran  I, 


Messe  solennelle,  à   i  vo 

Tanlitni  tr 

Oratorio  ,le  \'oet,   185.x, 


lUSIODE    RELIGIEUSE 

x,  1856,  op.  i,  Paris,  Dm  and,  i 
56,  op.  5,  Pari-,  Durand,  1868. 
ip.  12,  Paris,  Durand,  1S63. 


O  Salnlaris  (si  bémol),  motel  à  3voix,  1858,  Paris,  Durand.  1866. 

Yen,.  Creator  [ut),  motel  à  i  voix,  1858.  Paris,  Durand,  1S68. 

Are  Maria    si  bémol),  vers  1859.  Paris,  Durand,  1806. 

Ave  Maria  [mi  majeur;,  vers  1859.  Pans,  Durand,  1,800. 

Ave  Maria    la  majeur),  pour  2  voix,  1860'.  Paris,  Durand,  1805. 

Ave  Vernm  [mi  bémol),  4  voix  mixtes,  vers   1860.  Paris.  Durand, 

1865. 
Heureux  qui  du  cœur  de  Marie,  vers  ÎSOO.  Paris,  Durand,  1865. 
i)  Sainl  Autel,  3  voix  égales  et  soli,  vers   1SS0.   Paris,  Durand, 

il  Saluions  [la  majeur),  vers  1S00.  Paris,  Durand,  1805. 

Pour  vous  bénir,  Seigneur,  3  voix  égales  et  soli,  ver-  1860.  Paris, 

Durand,  isoe. 
Reine  iescieux,  vers  1800.  Paris,  Durand,  1866. 
Su  h  tu  uni,  à  2  voix  égales,  vers  lxoo.  paris,  Durand,  1805. 
Tantum  ergo,  à  3  voix  égales,  vers  1S60.  Paris.  Durand,  1S66. 
Ave  Verum    si  min.),  a  2  voix  égales,  vers   1863.  Paris,  Durand, 

Are  Veritni  (ré  maj.)  à  -1  voix  égales  avec  accompagnement  d'or- 
gue et  cor  chromatique  obligé,  s.  d.  Paris,  Durand. 

Aie  Maria  (lu  majeur),  1865.  Paris,  Durand,  1S65. 

Inriolnta,  1865.  Paris,  Durand,  lxo7. 

Psaume  XVIII.  1805.  Paris.  Durand.  1-75. 

O  Salnlaris  (lu  bémol  ,  3  voix  u  ixh  -,  I-  .'.'.  Paris,  Durand,  1*09. 

0 Salnlaris  (mi bémol),  1875.  Paris,  Hamelle,  1-75. 

Messe  ,te  Requiem,  1878,  op.  51.  pu.-.  D-.iaud,  187S. 

O  Saluions  (mi  maj.),  2  voix  égales,  1884.  Paris,  Durand,  1.881. 

0  Salu/aris  'mi  bémol),  4  voix  mixtes,  1884.  Paris,  Durand.  1884. 

Tiens  Abraham,  18S5.  Paris,  Durand.  18x5. 

PieJesu,  1885.  Paris,  Durand,  1885. 

Pauls  Aniielicus,  ténor  avec  accompagnement  rie  quintette  à  cordes 
ou  orgue,  189S.  Paris,  Durand,  1S98. 

Offertoire  pour  la  Toussaint,  4  voix  mixtes,  1904.  Paris,  Durand, 
1904. 


Anliijane,  1893.  Tnéùtre-Franrais,  21  novembre  1-91.  Paris.  Du- 
rand, 1897. 

Andromuque,  Peu-:.  Théâtre  sarah-Bernhardt,  7  février  1903. 
Paris,  Durand,  1902. 

L'Assassinat  du  One  ,le  Cuise,  ions,  vision  d'art  de  la  Salle  Char- 
ras.  Op.  12S,  1908. 

la  Fille  du  tourneur  il'iiaire.   1009.  —Non  publié. 

La  Foi,  1910,  op.  130.  Paris,  Durand,  1910. 


Javolte,  1896.  Gi  ind  rhéàtre  de  Lyon,  3  décembre  1896.  Opéra- 
Comique,  23  octobre  1S99.  Opéra,  5  février  1909.  Paris, 
Durand.   1896. 

OPÉRETTE,    OPÉRAS-l 

Gabriella  di  Vergy,  pocha. i -carémo-carnavalesqu 

Trompi  ne.  Non  publiée. 
la  Princesse  jaune,  IS72.  Opéra-Comique,  12  juin   t 

Paris,  Durand.  1872. 
Phrgné,  1892-1893.  Opéra-Comique,  24 mail         Pa  irand, 


1-e.:. 


MC-loor 


Siiiiisnii    ri    lii.ln  ,.   1X98-1X77.    I 

1877  ;    1  hi'.tie  des  Arts  de  Rouen,  3 

23  novi  n t  -9-.\  ,  ip.  ,:,  i-::.  i  :■  i  .  Durand. 

;     i 

Paris.  Chômions.  1877. 
Etienne   Varce  .  187"   18:  i.   Grand    rhéatre  de  Lyon,    -  février 

t  -; .'.   t  ai  .-.   O)  éi  i   Populaire,  24  octobre   I  i 

Durand,  t-:  S. 
Henry  VIII.   1  n-,  Durand,   1882. 

l'roserpiue,   1--  '-1-S7.    opéra-Comique.    10  mars    18S7.    Paris, 

Durand,  1887. 
Ascanio,  lyx-    i  ipéi  i,  21  mars  I  '■■  I  590, 

Frédègonde,  lais  i    inai  hevé  par  Goiraod,  I 

.    Paris,  S  cl    è  d'  dition,  1895. 
liéjanire.  1898.  irènes  de  Béziers,  28  aofil  1898;  Odéon,  Il  no- 

li     j 
I,!:  lo  i  1901.  Ps 

1901. 

I    ■  .'     '  ..17 t  1902.  Paris.  Durand, 

1902. 

Monte  Carlo,    18  février   1904.   0 

18  janvier  1905.  Paris,  Durand,  l'.oi  1. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3557 


L'Ancêtre,  10":,.  Monlo-Caiio,  2  !  février   1 00'."..  '  ipéra-Comique, 

23  janvier  191 1.  Paris,  Durand,  1906. 
Déjanirt,  1910.  Monte-Carlo,  li  mars  1910.  Opéra,  22 novembre 

1911.  Paris,  Durand,  1911. 


Durand. 


1S89. 
Beblioz.  La  Damnation  de  Faust.  Hymne  de  la  Fëtede  Pâques.  Paris, 
Costallal.  1855. 

—  I.elio.  Paris,  Costallat,  1855. 

G.  Bizet.  —  Les  Pécheurs  de  perles,  scherzo.  Paris,  Choudens, 
1SS6. 

F.  Chopin.  —  Op.  3T..  So'iii/e  en  si  hèmul  mineur  arrangée  pour 
deux  pianos.  Paris,  Durand,  190S. 

H.  DrjpARc.  —  Léonore  (2  pianos).  Paris,  Rouart-Lerolle,  1S75. 

Jacques  Durani..  —  Chniisnii  ,!,■■.  ila >,,-r„tr  piann  .  l'an-,  Du- 
rand, 1884. 

A.  Duvkrnoy.  —  Ilellè,  nocturne    piano).  Paris,  Enoch,  1S97. 

Gluck.  —  Aleesle.  Caprice  sur  les  uns  de  buiiets.  Paris,  Durand, 
1868. 

—  Orphée,  Menuet.  Pans.  Durand,  1874. 

Cii.  Godsod.  —  Faust,  kermesse.  Paris,  Choudens,  1S<32. 

—  Gallia.  London,  Novello,  1871. 

—  Faust,  Valse.  Pans,  Choudens,  1862. 

—  Kermesse  et  Valse.  Paris,  Choudens,  1S87. 

—  Suite  concertante    2  pianos  .  Pai  is    I  educ,  18SS. 

.1.  Haydn.  —  ..(.'"  symphonie,  andanle.  Paris,  Durand,   1869. 
Fr.  Liszt.  —  Beeliwren.  Cantate.  I  eipzig,  C.-F.  Kahnt,  1870. 

—  Orpliec{r,\ano,  violon,  \ioloncellr).  Leipzig,  Breitkoprel  llartel. 


I  -'- 


Lu  l'i 


Itcii.i  I 


!..    Pans, 


lui: 


W.-A.   Mozart.  —  Amiante  d'un  Coneerlo  île  piano  (violon  avec 

orchestre  ou  piano).  Paris,  Durand,  >.  d. 
E.  Pai.aihi.he.  —  La  Haudaliiiiilu .  Paris,  llrugel,   1S09. 
—  Lu  Isleila.  Pans.  Heugel,  1871. 
H.  Reder. —  Quatre  Symphonies    piano  à  i  mains  .  Paris,  Cos- 

lallal,    1859. 

R.  Schomann.  —  Op.  85,  n"    13,  Chant  du    soir  (orchestre  ou 

piano).  Paris,  Durand,  1878. 
R.   Wagner.  —  Lohengrin.    Mari  i  ino,  violon  et 

orgue).  Paris,  Durand,  1SG9. 


—  Le  >i  :  'a:  .s.  i  ulr.ind.  1S9  i. 

i.uck.  —  Annule,  Orphée,  Echo  el  Surfisse.  Pan-,  Durand. 
-Ph.  Rameau.  —  OLurres  enmpleles. 


Sol.  .s  ii        e  ,      ,  .,./  ,  ,s.  Paris,  Bas- 

Rimu  '  :         r      ,'  ris,  b.-Lévy,  1890. 

BiUiograi .....    aie.  Nouvelle  Revue,  1er  nov.  1891. 

Sur  Siederute...  r.    Vie     i'ii"    .■>.■:,:  as/le  ir 

imprimerie  de  Bourges,  i  392. 
La  Crampe  des  reniants,    comédie  en    1    acte.   Théâtre  d'Alger, 

17  mars  1892.  Paris,  Calmann-Lévy,  1892. 
Charles  Gounod  el  le  Don  .luuu  .le  il.. .-..<■'.  l'aiis,  miendonï,  1S93. 
Problème    el  tf  Hères,  Pan-.  FI  immarion,  1894. 
l'reiu..,-      Il  /,'  par  le.  licteur  Félix  Reugnaull. 

PortrailtelS   a     irs.  Paris,  Soc.  d'éd.  artistiques,   1899. 
Réponse  à  ï enquête    u      la  critique  dramatique  ;r,i  .-,/  ■.■     .  R.  vue 

d'Art  ,lr:,:,   .'    ;■,      •_'  :  f\rier  1S99. 
Nouvelle  Canariote.  Nouvelle  Revue,  1er  novembre  1899 
Musique.  Nouvelle  Revue,  îr.  décembre  1899. 
Noël  de  !..  el  A  Miralè  .  Nouvelle  Revue,  15  février  1900. 
Divagations  musicales.  Nouvelle  Revue.  15  août  1900. 
Une  Réponse.  Nouvelle  Revue,  l"janvier  1901. 
I. élire  u   il.   Ciislcllmn    île    l'.euu.rhosles.    Revue   musicale,  juillet 


Lellr 


R.'Mie 


:ale,  9  septembre  1901. 


A  propos  de  Samson  el  Dalila.  Revue  musicale,  S  novembre  1901. 

Kss.it  s.,r  les  lyres  cl  cillmrcs  uiiIi.jiics.  Ac.  des  B.-A.  Didot,   1902. 
1-e  Roi  Apèpi,  comédie.  Théâtre  de  Béziers,  13  août  1903.  Paris, 


L'Arl  il  u  Théâtre,  urefuce  à    :   Les  Annules  du  Ihetilre  cl  île  lu   musi- 

3  I      aai     .  pâl  Ed.  Stoullig.  Pau-,  1904. 
Lu  Ke;'.. nue  ue  ,         ,,         .  fieu3e.  M. uni-  musical,    15   février 

Discours   pour   l'inauguration  du  monument  tic  Ch.  Couno.l.  Monde 

musical,  29  février  1904. 
Réponse  à  a  Confidences  d'hommes  armes  ...  La  Revue,  15  mars 

1904. 
Le  Sifflet  au  concert.  Vannes,  1904  (lettre  de  Saint-Sakks  dans  la 

plaidoirie  de  J.  Bouzon,  S  juin  1904). 
Éptire  en  vers  à  G.  Docquois.  —  Figaro,  1"  décembre  1904. 
préface  u  ..  lltsintre  de  la  musique  t  par  Paul  Viardot.  Paris,  01- 

l:  :  i  l  propos  de  la  millième  de  Carmen  ...  L'Art  du 

i:      ti    ,n«  19,  1905. 
Hélène.  Lu  Ce,,,  te  de  Pauvre.  Figaro,  13  janvier  1905. 

Conférence  sur  le..  l'Item  .tueur  s  Un  Mirage.  Société  astronomique  de 
France,  1905. 

Lettre  u  M.  Sonzogno  sur  In  Renaissance  lutine.  L'Occident,  juin 
1905. 

Préface  à  Pièct  I    P.  Rameau.  Paris,  Durand,  1905. 

La  Parenie  .1rs  piaules  el  des  iniiiii.iiu .  Nouvelle  Revue,  ^'jan- 
vier 1900. 

mile  de  concerts  h  Paris.  Musica,  mars  190ô. 
.■■  i.  iica,  juillet  1906. 

Préface  u  ■<  Les  Grands  iluilres  de  la  Uns, ;,.,  ...  paris,  P.  Laffilte, 
1907. 

Préface  à  o  Le  Plaisir  des  nuits  et  ./.  i  Jours  u  par  G.  Docquois. 

Paris.   Fasquelle.   1907. 

Vn  Contemporain  de  Lully  :  Charpentier.  LeTemps,  il  avril  1907. 

Les  Concertas  ,1e  Beethoeen  a  la  Blhliollte  juc  r. etnlr  de  Berlin.  Mé- 
nestrel, 27  avril  1907. 

Lit  Ourle.  Ménestrel,  :.  octobre   1907. 

Lettre  u  propos  de  la  Clarté.  Comœdia,  1 1  octobre  1907. 

Iitlerrieic  tut  sujet  de  In  disposition  de  l'orchestrai  l'Operu.  Com.edia, 
1 1  octobre  1907. 

.1  propos  d'Orphée.  Figaro,  i  décembre  1907. 

•  :   Fred.  Char- 

pin.  Paris  Mercui       i 

/.'  'ponse  ■  l'enquête  sur  ..  Ce  yue  lioircut  tes  surutils.  les  Ceriruins,  les 
artistes  ...  La  Revue,  1"  janvier  1908. 

le  G  Ci       edia,  18  janvier  19ÛS. 

/  ..  H  i  :  .    ! .   I  es    Lllll.il        !      I:li.|llê-    et  litlé- 

■a.  m  irs  1908. 
La  Musique  de  Gluck.  M.'-nesirel,  23  mai  190S. 
Bolriocèphale,  bouffonnerie  antique  en  ver-,   l'h-àn 
2  septembre  190S. 

I  élire  sur  Surasale.  Revue  musicale,  15  octobre  190S. 

.    '.'  /./  I.e.iemle  dans  le  Drame  lyrique.   Revue  de  Paris, 

13  août  1909. 

Le  lire  it  il.  I)ti;tirdtn-I!eui:ui  !;■  l'..p  aa-  -..iu:.|iie  el  les  ouvre-  r  ■- 
présentées  en  province).  Comœdia,  15  septembre  i 

Lettre  u  prnpt.s  des  .munies  eutjplieunes.  Revue  Musicale,  15  no- 
vembre 1909. 

'.  ..  l'Aicnir  du  Drame  lyriqu, 

l"  décem 

lettre  s..    D  .    -'i  mars  1910. 

Vuriiitiuits  sur  Schiimtiitu.  Courrier  musical,  15  avril  1910. 

Réponse  u  «  l'eiil-itit  retoucher  l'urchesirtilinu  des  Symphonies  de 
Beethoven  ■■.  Mon  le  musical,  30  avril  1910. 

sur  l'œuvre  de  Chopin,   Courrier  musical,   15  mai 
1910. 

i  1/.  Stiint-Sacns  du  l'eslirul  frani.it 

Munich.  Musica,  novembre  1910. 

Préface  »  o  Gounod  u  parJ.-G.  Prod'homme  et  A.  Dandelot.  Pa- 
ris, Delagrave,  1911. 

Lyres  el  Cilltares.  Bulletin  de  la  So-i.He  lYair  ..■-,•  de  Musico- 
logie, avril  1919. 

Bibliographie. 

LIVRES 

Léon   Aubin.  —  Le  Drame  lyrique.  Tours,    190S. 

Emile  Baumann.  —  Camille  Suint-Sains  et  Dèjanire,  Paris,  Du- 
rand, 1900;  Les  yrundes  farines  ,1e  lu  musique,  id.,  Ollen- 
dorff,  1905. 

Camille  Bellaigue.  —  M.  Camille  Suiut-Saêns  Paris,  Durand, 
1889;  l'Année  tiu    cet  i,  id.,  Delagrave,  1 890 ;  l'Année 

musicale  1890,  id.,  1891;  1893;  1894;  Eludes  musicales  et 
nutirelles  silhouettes  de  musiciens,  id.,  1S9S. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MVSIQUE  ET  DICTIOyXAIRE  DU  COYSERVATOfRE 


Hbctob  Berlioz.  —  Lettres  intimes,  p.  304,   Paris,   G.-Lévy, 

18S2. 
Biondbl.   -  Le  Cinquantenaire  artistique  tle  C.  Sa  ni  Saéns,  Paris. 
\i  mu  se  Brunïau.  —  Muiiquei   d'hier  ,  ;   le  demain,  Paris,  Fas- 

1900  :  I  ■•  J  .-    .  , .  .  i  ,   I901  ;  Musiques  de 

Catalogue  généra  el  thématique  des  amrei  de  C.  Sain    Sa  «s.   Paris, 

Durand,  is<n  ;  IB07. 
Feux  Clément  el  P.  Larouss  .  —  Dictiom    in  te  avéras,  avec 

supplément  par  Arthur  Poegin,  Pans,  1904. 
Etienne    Destranges.  —  Une  Partition  méconnue:   Proserpine, 

Paris,  Fischbacher,  i  Î95  :  Samson  il  Do  >  <<,  Paris,  Durand  ; 

Consonance  et  Dissonances,  l'an-,  îusclibaeher,  L906. 
11.  Etmied  no.  Comettant.  -  l.u  Musique  Je  chambre  à  la  salle 

l'ieijcl.  1893-1896,  Paris,  1896. 
Vêtis.  —  llioi/raphie  uuieeese/ie  Jes  musiciens. 
Pougin.  —  S  raphie  universelle. 

Charles  Gocnod.  —   Son    opinion  sur    Henri    Mil,  Paris,   1683; 

,1m  .ni!,',  Paris,  Durand,  1890  ;  Mémoires  J'-iu  artiste,  Pans, 

C.-Lévy,  1898. 
Fbrnand  Gregb.  —  La  Fenêtre  ouverte.  Paris,  Fasquelle,  1901. 
George  Grove.  —  Dictionant  „;'  M:,s,c  niid  Musiciens. 
An  hier    IIhrvey.  —    ilnslers   of  I-'reueh    M.    ic,    London,    1894; 

l-'reueli  Mtisic  in  I lie  Xineleeuth  Cenlurq,  id.,  1903. 
Ed.  Hippeau.  —  Henri  VIII  et  l'opéra  français.  Paris,  1883. 
llia.i  i-.s  Imukrt.  —   l'n>i!h    de    mns-i-iens.   Paris.  Fischbacher, 

1888. 
Vincent    d'Jjïdy.  —  Court    le  composition   musicale.  Deuxième 


Jn.i.n' 


série 


Gua 


-   U  urd  hui,   ["   s   rie.  Pans,  1892; 

id.,  l-'.'i;  ili<:,;;:e.  Paris,  Fisobbac her,  189H;  M>i- 
kieret  d'aujourd'hui,  id.,  191-0. 
Paul  Loanda.  —  Musique  savante;  Sur  la  musi- 
que Je  il.  Sainl-Saeus.  Lille,  1889. 
Albert  Layp.nac.  —  l.a  Musique  et  les  Milicien*.  Paris,  Delà- 
grave,  1896. 
Lindelaco.  —  Le  Jubilé  Je  Saint-Sains. 
Paul  Locard.  —   Les  MaUres  contemporains    ,1e   l'orgue.  Paris, 


Mai 


Fischbacher,  1890; 

s  „iii.    le  pa- 


i  dramatiques.  Paris 


A.  Dur,        t  fils. 

Flammarion,   1897. 

Hek.mann  Mendel. —  Musiliulisclies  Loueers,.',  ns  l.e.iil,,,ii.  Ii.-i- 
lin,  1S7S. 

Otto  Neitzel.  —  Camille  Saint-Sains.  Berlin. 

Edouard  Noël  et  Edmond  Stoullio.  —  Les  Annales  Ju  théâtre 
et  de  la  musique.  Charpentier  et  Berger-Li  vrault. 

Ernest  Reter.  —  Quarante  ans  de  musique.  Paris,  C-Lévy. 

IL  i,o  Riemann.  —  Dirliouiuiire  Je  musique,   traii.  de    Georges 
Hdmbert.  Paris,  Perrin,  1S99. 

Gustave   Robert.   —   l.u   Musique  a    Paris,    1895-4190,  Paris. 
Fischbacher,  1S96. 

Romain  Rolland.   —  Paris  ah  Musikstadt,   Berlin,  1904  ;  Musi- 
ciens d'aujourd'hui.  Paris,  1 1 . i c 1 1 •  ■  1 1  •  ■ .    PJH8. 

Louis  de    Romain.   —    Essais   Je   critique   mu-.ica'e.    Puis,    L,  - 
merre,  1S90. 

GrY  Ropartz.  —  Validions  artistiques.  Paris,  Lem.Tre.  1801. 

Octave   Si  ré.  —  Mi.  -  .  Paris,  Mercure 

de  France,  1911. 

Georges    Servières.   —  l.a   Musique  frau   ::-,-   moderne.    Pans. 
Havard,  1S97. 

—  Les  A  et  de    la   musique. 

Paris,  Ollendorlï,  p i.i.  n   .  .    ■.        ■'.,„..  is'jr. 

Julien  Tibrsot.  —  Notice  dans  la  Gr   ,      Ency    ipéate, 

Jbas  d'Udink.  —  Paraphrases  musicale»  nr  es  grands  concerts  du 
dimanche,  I900-I90S.  Paris,  1901. 

Vapebbau.   —   Dictionnaire  nnirerscl   Jes    Contemporains.    Paris, 
Hachette,  1892. 

Vii.i.y   (Henry   Gauthier-Villars).  —   Lettres 

Voyage  autour  di  -  -  m»  -.  e,  Pai  s.  -,  ,,,,,,„.  iv.iii;/t«,'M  de 
Sons,  Paris,  Simonis-Empis  i  1;  .)/  che  des  Croches, 
Paris.  Fischbacher,  1894;  J  n,  Paris,  Flarn 

ma ,  l.-  '."•:>  •  ....  896  :  Accords  perdus, 

Paris,  sim.iii  --1  .,  ,  I  -  -  .  i  /,-  uu.i  Quintes,  id., 
1899;  Garçon,  l'An  i  ■  ,  id.,  1901;  'a  Ronde  des  Manches, 
Paris,  libr.  Molière,  1901. 

Willy  et  Colette  Willt.  —Claudine  s'en  va. Paris,  Olleiidorff, 


PERIODIQUES 

Adolphe  Aderer.  —  Hcjtiuire.  Le  Théâtre,  sept.   1808. 

Album  illustre  officiel  des   Fêtes  de  Bèsiers   (1898).   —   Déjanire 

:"■  aimée  (1899).         l'un/solis  I"  année  ( P.HI2  .  _  Déjanire 

::<■  milice  et  Pan, sut, s   :"  année  (1903). 
Anonyme.  —  (.'.  Sainl-Snens  et  le  maureaienl  musical  contemporain. 
Le  Guide  musical,  9  janvier  1898. 


(.'.    Saint-Saeus  et    l'opinion   musicale  n    l'étranger. 

Revue  musicale,  octobre  et  novembre  1901. 
L'Art  du  Théâtre,  ll'n",  sur  Les  Barbares,  1901. 
L.  Auge  de  Lassus.  —  L'Ancêtre  ;  genèse  de  />««*.  Revue  musi- 
cale, 15  février  1906. 
Maurice  Barrés.  —  Musique.  Revue    Illustrée,    15  décembre 

1SS5. 
Camille    Bellaigue.  —  Frèdègonde  (Revue  des  Deux    Mondes, 

15  janvier  1896);  Les  Barbares  (id.,  15   novembre  1901); 

Hélène     id.,    p  ■•    f(;.w„,,    i;.05):  L«    Princesse   Jaune   (id.. 

1"  décembre  1900). 
H.  Blaze  de  Bouy.  -llearij  Y III.  La  Symphonie  et  le  Théâtre. 

Revue  des  Deux  Mondes,  ["avril  1883. 
P.  de  Brèyii.i.e.  —  Proserpi  te    M     cure  de  France,  jauv.  1900)  ; 

Portraits  et  Souvenirs    [d t  1900 

Robert  Brussel.  —Les  Barbares    l'Art  dramatique  el  musical, 

octobre    1901);    Le   Soixantième   aumrersuire    musical   Je 

M.  Saini-Saeiis  (Courrier  Musical,  i"  juin  19 
Gaston  Carraod.    —   Mendelssohn   el  M.    SaM-Sains   amateurs 

(Courrier  Musical,   15  février  1907);  M.  Suiiil-Suens  el    sa 

.:-  symphonie  (lia.  Liberté.  22  octobre  1907). 
R.  de  Castera.  —  Les  Variations  de  M.  Sainl-Saèm.  L'occident 

mars  1903. 
•I.  Combariec.    —  Saiul-Saeus .      homme   ,1    le    musicien   (Revue 

musicale,  1"  novembre  1903  . 
J.-L.  Croze.  —  M.  Saint-Sains,  Fantaisies   et  pages  intimes  (La 

Revue  illustrée,  15 mars  1890);  Javolte  a  l'Opéra-Comique 

(le  Théâtre.  n°  28.  février  1900). 
Victor  Debay.   —    Saint -Sac  us.  Courrier  musical,  janv.  1899, 

1"  juin  1903. 
Claude  Debdbbt.  —  De  quelques  superstitions  el  J    a  opéra  (tes 

Barbara     Revue  Blanche,  15  novembre  1901)  ;  Parysatis 
i.      ,i,ie  (Oil  Blas,  16  mars  1803)  ;Uewii  Vlll 

I'.t.  Ii'-st:  w.  -  LtuJe  sur  Henry  VIII.  Courrier  musical,  mars 
1S99. 

Jane  Dieulafoy.  —  D'Atheues  a  llezicrs  (Parysatis).  L'Art  du 
Théâtre,  ip  22,  1902). 

Paul  Duras.  —  Phrijné  (Revue  hebdomadaire,  tome  XL'II, 
novembre  i-1,.-,  ;  C-mc-t-l-'estiral  donne  par  M.  Saiut-Saeus 
Chronique  des  arts,  13  juin  1S96  ;  Les  Barbares  (Revue 
hebdomadaire,  tome  xn,  novembre  1901). 

.1.  Ecorciiemi.i.e.  —  if.  Smnl-Sa,  as  el  le  \\'a,:ii, nsine.  Revue  de 
Paris,  I<t  août  1S99. 

Louis  de  FouacAUD.  —  l.a  Cerner,-  d'-.-.-i  Maire.  Le  Gantois, 
Sjuin  1896. 

Louis  Gallet.  —  Saint-Saéns  et  llrunhilJa    l'redeijou'i,      le  Mé- 
nestrel, 24  février  et  17  mars   1895);  Camilli    S 
(Revu l'art  ancien  el  moderne,  1898). 

Henry  Gaut hieb-Villars.  —  La  Clarté  (Comoedia,  S  octobre 
1907   ;  .1/.  Suint-Sacns  el  la  Clarté  .  i.i..    12  octobre    1997:. 

Adolphe  Jcllien.  —  Le  Wagner  français  el  l'autre  (l'Indépen- 
■I    iraui  iti.pie,   15  mril    1887)  ;  Jurotle  a 
l'Opéra-Comique     te  mbre    1890); 

■    ,     l'Opèra-Comiqt  n     26,    jan- 

vier   p.iOu    :Lcs   Barbares   a    l'Opcnt    (le  Théâtre,    n"    70, 

noveuilir.      I.       !     .    //,■■;,■.  1  II  lire,  n"  1  1  i. 

septembn 

Pierre  Lalo.  —  .1/.  Sainl-Saens  cl  le  quatuor  e  cordes    V  Temps, 


27  a. ad  I" .12  .le./-,.  ',../«,'  le  Tenu-,  lu  février  1903V, 
VneOpi  ...  ■•  J/8  s  ,.  .  i  .,  ....  24  février  1903  ; 
I  .    Henry    I  ///    le  Temps,    2  juin 

1903  ;  Il  i,         i      mai  -    190 1    et    24  janvier 

1905  .  i  :  l,  ne  de  la  Musique  sacrée;  Les  idées  el  les 
contrad  Cl k  M.  Snial-Sacus  le  Temps.  12  et  19  juil- 
let 1904.:  I  iimpos  d'un  aanirersaire  de  M.  Saint-Saint  (le 
Temps.  29  ti  1906  .  La  Jour  le  de  ».  Saint-Saeus; 
V    8  .     '    -  ■/  ele-;   d'orchestre  (le 

Temps,  2:)  ,.,-i  .i.re  1907);  /.  .,  ,  v  fie  Temps, 

12  juin  P.'Oi.   ;  i.  //  /    ■  ■    /.■        ;     n, 

(le  Temps.  22  juin  I9H9);  L'Histoire  dans  Henri,  VIII  et 
dans  l:  •    .  '     I  ■    I  emj.s.  2-   s,vle, nl.re  1909). 

Loris   Laloy.  —  i  '.   8  .,,,./  Su, -us  ,-t  les  Italiens.  Mercure  musical. 

1"  juillet    1905. 

René  Lara.  —  Le  Cinquantenaire  du  premier  concert  Je  M.  Saint- 
Saëns.  Le E  1896. 

Pierre  Laroche.  —Les  Barbares.  Autour  Je  ta  pièce.  Le  Théâtre, 
n°  71,  décembre  1901. 

A.  de  Lai-noy.  —  l'ari,sril,s  a  l!e:iers  l'Art  du  Théàlie.  22"  nu- 
méro, ion.'  ,  le  .„aire  a  llrciers  (l'Art  du  Théâtre,  34e  nu- 
mer.,,  190::). 

Charles  Malherbe.  —  Sailli  Sflftis  lune  par  «n  A- 

Internationale  de  musique.  I°'mai  I89S);  C.  Saitit-Sacns 
(S.I.M.,  a..iil-seplemlire  lu 

A.  Mangeot.  —  Lu  Partition  de  Parysatis.  L'Art  .lu  Théâtre. 
22'  numéro,  1902. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L  INSTITUT  DE  FRANCE    3S5 


Jean   Marnoi.d.    —   l.'of.urre   île  M.    Saint-Sains.    Mercure   de 

France,   16  novembre  1907. 
Padi.  Mimande.  —  Une   Fugue  Se  compositsur.  Revue  Bleue, 

13  mars  1S97. 
le  Momie  Mitxieal.  numéro  spécial  consacré  à  Saint-Sa.:ns,  :tt  oc- 
tobre 1901. 
Musica,   numéro  57,  entièrement  consacré    a   M.    Saint-Saëng 

(juin  1907). 
Henri  Quittard.  —  L'Orieula /i</ne  musical.  Sainl-Saens  orienta- 

lisle.  Revue  Musicale,  I"  mais  l'.iOi;. 
R.  de  Récy.  —  Camille  Saint-Saens.  Revue  Bleue,  2  et  16  février 

1889. 
Pauline  Savari.  —  Le  Musée  Sainl-Saeusa  Dieppe.  Cuide  musical, 

g  novembre  r800. 
Locis  Schneiiier.  —  Lu  l'riuresse.  Jaune.  Le   Théâtre,    n°  191, 

décembre  1906. 
Ch.  Tenroc.  —  If.  C.  Saint-Saêns  nous  parle  île  Déjanire.  Comœ- 

dia,  29  mars  1910.  Cf.  Revue  musicale,   1-15  septembre 


Ji-ut-N  Tiersot.  —   Lu  Sijmpliinne.   en   I  rame,    bulletin    mensuel 

île  la  Société  lutrin. iIh  mile  de  Musique,  juillet  1902). 
Jcan  n'i'niNE.  —  Saint-Sains,  Courrier  Musical,  15  juin  1908. 


Spontini. 

Louis-Gaspard-Pacilique  Spontini,  comte  de  Sant'- 
Andrea,  naquit  le  14  novembre  1674  à  Majolatti,  dans 
les  Etals  romains  (marche  d'Ancône).  Il  était  le 
deuxième  lils  de  cultivateurs  qui  eurent  cinq  enfants; 
trois  de  sis  frères  ftsrent  prêtres,  et  l'aîné  occupa 
pendant  vingt-sept  ans  le  poste  de  curé  à  Majolatti. 
Tout  jeune,  il  fut,  lui  aussi,  destiné  au  sacerdoce,  et 
comme  il  était  de  sanlé  délicate,  ses  parents  le  con- 
fièrent à  un  de  ses  oncles.  Joseph  Spontini,  curé  de 
la  succursale  de  Jesi.  C'est  sous  sa  direction  que,'dès 
l'âge  de  huit  ans,  il  commença  ses  études  littéraires 
peur  entrer  plus  tard  au  séminaire. 

Un  hasard  lui  révéla  sa  véritable  vocation.  Tandis 
qu'il  se  trouvait  chez  son  oncle,  un  facteur  d'orgues, 
Crlideli,  fut  appelé  à  Jesi  pour  y  construire  des  or- 
gues. Logé  chez  le  curé,  il  y  avait  fait  transporter  un 
clavecin,  dont  il  jouait  à  ses  moments  de  loisir.  La 
musique  produisit  sur  le  jeune  Spobtlni  une  impres- 
sion profonde,  et  lui-même  essayait  parfois  d'imiter 
sur  le  clavecin  ce  qu'il  avait  attentivement  écouté. 
Ceu'deli,  frappé  des  dispositions  de  l'enfant,  en  parla 
au  curé;  mais  celui-ci  menaça  son  neveu  de  le  punir 
s'il  abandonnait  la  profession  que  ses  parents  lui 
avaient  choisie.  Pour  éviter  le  châtiment,  Gaspard 
s'enfuit  à  Monte-San-Vito,  un  château  du  district 
cUAncône  où  habitait  un  frère  de  sa  mère.  Celui-ci  le 
recueillit  et  le  mit  sous  la  direction  de  Qointiliani, 
le  maître  de  chapelle  de  l'endroit. 

Après  avoir  passé  là  un  an,  Gaspard  retourna  chez 
son  oncle  Joseph.  Impuissant  à  lutter  contre  une 
pareille  vocation,  renonçant  à  faire  de  son  neveu 
un  prêtre,  l'oncle  Joseph  le  confia  au  chanteur  Ciaf- 
folatti  et  à  l'organiste  Menghini.  Puis  il  le  fit  entrer 
dans  l'école  de  Bartoli,  maître  de  la  chapelle  de  .( esi , 
et  plus  tard  dans  celle  de  Bonanni  de  la  chapelle  de 
Masaccio.  Ln  1791,  Gaspard  était  admis  au  Conser- 
vatoire de  la  Pieta  dei  Turchini  à  Naples  :  Sala  el 
Tritta  y  furent  ses  maîtres  de  contrepoint;  ses  pro- 
grès furent  si  rapides  que  bientôt  il  était  attaché  an 
Conservatoire  avec  le  titre  de  maestrino.  C'est  l'é- 
poque où  Spontini  compose  ses  premières  Cantates  et 
ses  premiers  morceaux  de  musique  religieuse,  qu'il 
fait  exécuter  dans  les  couvents  de  Naples  et  des  en- 
virons. 

En  1796,  Sismondi,  un  des 'directeurs  du  théâtre 
Argentina   à  Home,  ayant  entendu  la  musique   de 


Spontini,  l'engage  à  quitter  en  secret  le  Conserva" 
toire  de  la  Pieta,  à  l'accompagner  à  Iîome  et  à  écriie 
une  partition  pour  son  théâtre.  La  .proposition  pou- 
vait séduire  un  jeune  homme  de  vingt-deux  ans. 
Spontini  l'accepta  et  écrivit  en  peu  de  temps  I  Pun- 
iigli  délie  donne,  qui  remporta  un  brillant  succès  â 
Rome.  Piccinni  s'intéressa  au  jeune  musicien;  grâce 
à  la  protection  du  maestro,  Spontini  obtint,  malgré 
sa  fugue,  de  reprendre  son  poste,' de  maestrino  à  Na- 
pies.  Mais  dès  lors,  il  compose  surtout  pour  le  théâtre  ; 
les  œuvres  se  succèdent  avec  une  rapidité  extraordi- 
naire, favorablement  accueillies  sur  les  principales 
scènes  italiennes.  Ln  1797  c'est  l'Eroismo  ri'liml,,  ., 
Rome;  en  1798,  à  Rome,  Il  Finto  Pittore;  àJFIorence, 
//  Teseo  riconosciuto,  l'Isola  disabitata  el  Chi  pire 
guarda  menvede;  en  1799,  à  Naples,  l'Amore  segrelo, 
la   Fii'i'i  in  mcmhera  et  la  Finta  F-ilosofa. 

Cependant,  les  Iroupes  françaises  avaient  envahi  le 
royaume  de  Naples.  Répondant  à  l'appel  de  la  cour, 
qui  n'avait  pu  décider  Cimarosa,  malade  alors,  à 
quitter  l'Italie,  Spontini  se  rend  ,à  Palerme,  où  il 
compose  /  Quadri  Parlanti,  Sofronia  e  Olindû,  Gli 
Elisi  delusi  en  1800.  Pour  augmenter  ses  'ressources, 
il  donne  des  leçons  de  chant,  mais,  vers  [la  lin  de 
1800,  une  maladie  l'oblige  à  quitter  la  Sicile. 

Kn  1801,  il  est  à  Rome,  où  il  écrit  Gli  Amanti  in 
cimento  ossia  il  Geleso  audace.  Bientôt  appelé  à  Ve- 
nise, il  y  compose  pour  la  cantatrice  [Morichelli,  la 
Principessa  d'Amalfl,  qui  devient  ensuite  [deima 
Senese  et  le  Metamorfo&i  di  Pasquali.  —  De  Venise,  il 
ramène  son  père  à  Jesi,  puis  retourne  â  Naples,  d'o  : 
il  s'embarque  pour  Marseille.  La  période  italienne  de 
sa  vie  était  terminée. 

Jusqu'en  1820,Spontini  va  vivre  en  France.  Pendant 
son  séjour  à  Marseille,  il  fréquente  des  n 
el  des  banquiers,  qui  lui  donnent  des  lettn     de  ] 
commandation  pour  Barillon,  Michel,  Recamiei  el 
autres  financiers  français,  au  moment  de  son  départ 
pour  Paris  en  1803.  Aussi  ses  débuts  y  sont-ils  rela- 
tivement faciles;  dans  le  inonde  des  affaires,  il  trouve 
non  seulement  des  appuis  qui  lui  seront  précieux, 
mais  aussi  de  nombreuses  leçons.   Soucie 
poser  en  musicien  de  théâtre,  il  l'ait  représenter  au 
Théâtre  Italien  la  Fintm  FUosofa,  qui  y  est  !,i>.  irable- 
inent  accueillie. 

Au  témoignage  des  anciens  biographes,  le  premier 
opéra-comique  fiançais  de  Spontini  aurai! 
un  acte  représenté  sans  aucun  succès  en  mars  ISO  t. 
Spontini  aurait  repris  son  œuvre,  en  aurait  corrigé 
la  musique  et  l'aurait  fait  reparaître  le  12  mais  1805 
sous  un  nouveau  titre,  Julie  ou  le  Pot  de  fleurs. 

Cette  assertion  est  erronée;  les  biographes  oui 
confondu  deux  œuvres  différentes  et  onl  attribué  â 
Si'ontim  tm  opéra-eomiqae,  représenté  en  mars  1804, 
dont  la  musique  était  d'un  aulre  composileur.  La 
chronologie  des  œuvres  françaises  de  Spontini  doit 
donc  être  rétablie  ainsi  :  12  mai  1804,  la  Peti 
sur  un  livret  de  Dieulaloy  et  Gersaint;  2" 
1X04,  Mition;  12  mais  1805,  Jvlie  ou  le  " 
Certains  ont  parlé  aussi  d'une  cabale  menée  à  celle 
époque  par  les  professeurs  et  les  élèves  du  Conser- 
vatoire contre  les  compositeurs  italiens  et  la  mu- 
sique italienne,  cabale  qui  aurait  amené  l'échec  de 
certaines  œuvres  de  Spontini;  on  affirme  même  que 
la  Petite  Maison  n'aurait  pas  pu  être  jouée  jusqu'à 
la  fin,  que  la  première  représentation  aurait  été 
troublée  par  des  scènes  tumultueuses.  Rien  n'est 
moins  certain  que  l'existence  de  cette  cabale,  el,  en 
tous  cas,  il  est  actuellement  démontré  que  v      .ir  i 


3.MH' 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  CONSERVATOIRE 


n'a  jamais  donné  d  oratorio  aux  concerls  spirituels 
de  l'Opéra  italien. 

Cependant,  en  présence  d'une  certaine  hostilité 
qui  se  manifestait  plus  ou  moins  ouvertement  contre 
ce  qui  était  italien  et  que  traduisait  Vlrato  de  Méhul, 
Spontini  avait  jugé  prudent  de  s'assurer  une  protec- 
tection  puissante.  Abandonnant  ses  leçons  de  chant, 
H  êtail  parvenu,  grâce  à  ses  relations,  à  obtenir  le 
poste  de  directeur  de  la  musique  de  l'impératrice 
Joséphine.  Dès  lors,  il  ne  néglige  aucune  occasion 
d'attirer  sur  lui  l'attention  de  l'impératrice  et  de 
gagner  ses  faveurs;  après  la  victoire  d'Austerlitz, 
il  demande  à  lîalocchi  le  texte  d'une  cantate  qui  est 
exécutée  au  théâtre  Louvois  le  S  février  1806,  Ec- 
celsii  gai  a. 

Cependant,  la  protection  de  Joséphine  semble,  au 
moment  de  l'affaire  de  la  Vestale,  avoir  été  impuis- 
sante contre  la  mauvaise  volonté  de  l'empereur. 
Depuis  quelques  années  déjà,  Spontini  travaillait 
sur  un  livret  de  Jouy  que  Cherubini  avait  refusé.  Mais 
lorsqu'il  voulut  faire  représenter  sa  nouvelle  œuvre, 
la  Vestale,  il  se  heurta  à  une  violente  opposition  de 
la  part  de  l'administration  de  l'Opéra.  Au  mépris 
des  droits  acquis,  l'empereur  exigea  la  priorité  d'a- 
bord pour  le  Triomphe  de  Trajan,  ensuite  pour  la 
Mort  d'Adam  de  Lesueur.  Mais  lorsqu'on  voulut 
donner  au  copiste  l'œuvre  de  Lesueur,  la  partition 
n'était  pas  prête,  et  Spontini  profita  de  ce  relard 
pour  reconquérir  son  tour.  Cependant,  pendant  les 
répétitions,  le  compositeur  se  heurta  encore  à  de 
nouvelles  préventions.  Les  difficultés  de  sa  partition, 
l'obscurité  de  certaines  pages  provoquèrent  le  mé- 
contentement des  chanteurs  et  des  musiciens  de 
l'orchestre,  et  l'auteur  dut  retoucher  certaines  par- 
ties pour  éviter  des  critiques  trop  violentes. 

Enfin  le  15  décembre  1807,  la  Vestale  était  repré- 
sentée à  l'Opéra.  Le  succès  fut  énorme;  l'enthou- 
siasme du  public  fut  tel  que,  pendant  quelque  temps, 
il  détourna  les  esprits  des  préoccupations  de  la  po- 
litique extérieure.  Cependant  la  critique  ne  désarma 
pas;  elle  s'attacha  à  démontrer  les  imperfections 
matérielles  de  l'ouvrage,  mais  ne  put  modifier  le 
jugement  du  public.  Aussi,  lorsque  vint  l'époque  du 
rapport  de  l'Institut  sur  les  ouvrages  dignes  d'obte- 
nir les  prix  décennaux,  malgré  la  présence  dans  le 
jury  de  nombreux  adversaires  de  Spontini,  il  parut 
impossible  de  ne  pas  donner  la  préférence  à  la  Ves- 
tale sur  les  Bardes  de  Lesueur  qui  dataient  de  18Ô4. 
Tel  fut  l'avis  de  Grétry,  de  Gossec  et  de  Méhi  l,  dont 
le  rapport  parut  au  Moniteur  de  l'Empire. 

La  situation  de  Spontini  semble  alors  solidement 
établie.  Depuis  quelques  années  déjà,  il  est  entré  dans 
la  puissante  famille  des  Erard  par  son  mariage  avec 
la  fille  de  Jean-Baptiste  Erard,  la  nièce  de  Sébastien. 
Le  28  novembre  1809,  Fernand  Cortez  triomphe  à 
l'Opéra;  en  1810,  Spontini  obtient  la  direction  de 
l'Opéra  italien,  qui  venait  d'être  placé  au  théâtre  de 
l'Odéon  et  qui,  réuni  à  la  Comédie  sous  la  direction 
de  Duval,  avait  pris  le  nom  de  Théâtre  de  l'Impé- 
ratrice. Les  débuts  sont  très  brillants  :  Spontini  re- 
crute une  excellente  troupe  de  chanteurs  et  de 
chanteuses;  il  a  l'honneur  de  faire  entendre  pour 
la  première  fois  à  Paris  le  Don  Juan  tel  que  Mozart 
l'avait  écrit;  il  s'attache  à  varier  le  répertoire,  donne 
une  série  de  concerts  fort  bien  accueillis  du  public. 
Malheureusement,  des  dissentiments  s'élèvent  entre 
Spontini  et  Duval,  le  directeur  de  la  Comédie;  le 
musicien  se  plaint  de  voir  toutes  les  recettes  de 
l'Opéra  employées  à  combler  les  déficits  de  la  caisse 


de  la  Comédie  qui  périclite.  La  tension  entre  les 
deux  directeurs  devient  si  aiguë  qu'une  décision 
officielle  intervient  :  en  1812,  M.  de  Itémusal,  surin- 
tendant des  théâtres  impériaux,  enlève  à  Spontini  la 
direction  du  Théâtre  Italien.  Malgré  tous  ses  efforts, 
Spontini  continuait  à  être  mal  vu  du  gouvernement 
impérial. 

La  Restauration  veut  réparer  l'injustice  dont  il 
venait  d'être  victime,  et,  dès  1814,  le  ministre  de  la 
maison  du  roi  lui  accorde  le  privilège  du  Théâtre 
Italien.  Mais  Mm«  Catalani  l'ayant  sollicité  et  PaërIuI 
ayant  promis  sa  collaboration,  Spontini,  pour  des 
raisons  demeurées  inconnues,  se  retire  moyennant 
une  indemnité  payée  par  Mme  Catalani. 

Spontini  restait  sans  emploi;  il  songe  alors  de 
nouveau  au  théâtre,  et  écrit  pour  l'Opéra  Pelage 
ou  le  Roi  de  la  Paix,  qui  réussit  médiocrement,  le 
23  août  1814;  Les  Dieux  rivaux,  un  opéra  ballet 
représenté  le  21  juin  1810  à  l'occasion  du  mariage 
du  duc  de  Berry,  contient  quelques  parties  dues  à 
la  plume  de  Spontini,  mais  dans  la  composition  de 
cette  œuvre  sa  part  est  fort  mince  à  côté  de  celles  de 
Berton  et  de  Kreutzer-  En  1817,  Persuis,  qui  venait 
de  remplacer  Choron  à  la  tète  de  l'Opéra,  fait  appel 
à  Spontini  pour  réparer  les  chutes  d'un  grand  nom- 
bre d'œuvres  pendant  l'année  précédente.  Une  re- 
prise de  Fernand  Cortez,  le  8  mai,  est  bien  accueillie 
du  public;  Spontini  travaille  ensuite  au  rajeunisse- 
ment de  la  partition  des  Danaïdes  de  Salieri;  enfin, 
il  entreprend  deux  œuvres  nouvelles,  la  Colère  d'A- 
chille et  Olympie.  Ce  dernier  opéra,  représenté  le 
15  décembre  1819,  ne  répond  pas  à  l'attente  du  pu- 
blic, et  semble  marquer  une  certaine  décadence  du 
talent  de  Spontini. 

Mais  déjà  depuis  quelques  années,  sur  les  sollici- 
tations du  roi  de  Prusse,  Spontini  songeait  à  quitter 
la  France.  Et  c'est  dans  sa  vie  une  nouvelle  période 
qui  s'ouvre,  la  période  allemande. 

Dès  I  s  1 4,  pour  remercier  le  roi  de  Prusse  de  sa 
bienveillance,  il  avait  écrit  plusieurs  morceaux  pour 
la  musique  de  la  garde  prusienne.  Enthousiasmé  par 
une  représentation  de  Fernand  Cortez,  Frédéric-Guil- 
laume III  résolut,  en  1818,  d'attacher  le  compositeur 
à  son  service.  Les  premières  propositions  furent 
faites  par  le  général  de  Wilzleben,  premier  adjudant 
du  roi,  et  le  contrat  fut  signé  en  août  1810;  Spontini 
devait  partir  aussitôt  après  la  représentation  d'O- 
lympie  qu'il  espérait  donner  fin  octobre.  Mais  les 
lenteurs  de  l'administration  ayant  retardé  jusqu'au 
lo  décembre  l'apparition  du  nouvel  opéra,  la  saison 
d'hiver  se  trouvant  abus  trop  avancée  pour  entre- 
prendre le  voyage  de  Berlin,  Spontini  obtint  de  re- 
tarder son  départ  jusqu'au  printemps  suivant.  Il 
occupa  les  mois  qui  lui  restaient  à  modifier  quelques 
parties  à'Olympie  et  "à  établir  le  plan  d'un  Louis  IX. 
demandé  par  le  ministre  de  la  maison  du  roi  et  qui 
ne  fut  jamais  achevé. 

Spontini  arrivait  à  Berlin,  investi  d'un  pouvoir 
dictatorial  sur  toute  la  musique.  Il  avait  exigé,  en 
effet,  non  pas  le  titre  de  maître  de  la  chapelle  royale 
qu'on  lui  offrait,  mais  celui  de  directeur  général  de  la 
musique  en  tout  ce  qui  tenait  au  service  de  la  cour. 
Cette  fonction  lui  donnait  la  charge  de  compositeur 
de  la  cour  et  lui  conférait  la  direction  générale  de 
toute  la  musique,  opéra,  musique  de  chambre, 
musique  militaire,  musique  religieuse.  Son  traite- 
ment, sans  compter  un  certain  nombre  d'avantages 
secondaires,  était  fixé  à  10  000  écus  de  Puisse,  ce 
qui  représentait  environ  37  500  fr.  Lu  pareil  pou- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3561 


voir  accordé  à  un  étranger  n'était  pas  sans  inquié- 
ter sérieusement  les  artistes  allemands;  aussi,  avant 
môme  l'arrivée  de  Spontini,  une  opposition  s'était 
marquée,  soutenue  de  tout  le  crédit  du  comte  de 
Bruhl,  intendant  du  Théâtre  Royal  et  de  la  chapelle, 
seul  maître  avant  l'arrivée  de  Spontini.  Sous  des 
noms  d'emprunt,  il  avait  rempli  de  ses  doléances 
les  colonnes  de  la  presse  saxonne;  il  se  savait  puis- 
sant, puisque  c'est  lui  qui  disposait  des  faveurs  de 
la  subvention.  Cependant,  tout  ce  qui  dépendait 
immédiatement  du  roi  se  soumit  sans  murmurer, 
et,  dans  les  débuts,  Spontini  ne  se  heurta  pas  à  de 
sérieuses  difficultés. 

Pour  l'anniversaire  de  la  naissance  du  roi,  Spon- 
tini écrit  une  Marche  et  un  ('liant  qu'il  dirigea  lui- 
même  le  3  août  1820,  et  qui  lui  valent  les  félicitations 
de  Frédéric-Guillaume.  La  Vestale  figurait  déjà  au 
répertoire  du  théâtre  de  Berlin.  Spontini  y  avait  fait 
exécuter  Fernand  Cortez  le  28  juin  1820;  il  fait  tra- 
duire en  allemand  parHolfmann  son  opéra  à'Olympie; 
il  y  apporte  quelques  modifications,  refait  sur  un 
plan  nouveau  le  quatrième  acte  et  donne  cet  ouvrage, 
le  14  mai  1821,  avec  un  luxe  inaccoutumé  de  décors 
et  de  costumes.  Pendant  l'hiver  de  la  même  année, 
les  fêtes  de  la  cour  à  l'occasion  de  la  visite  du  grand 
duc  et  de  la  grande  duchesse  Nicolas  lui  sont  une 
occasion  pour  composer,  d'après  un  poème  de  Tho- 
mas Moore,  l'opéra-ballel  de  Lalla  Rookh.  Ecrit  en 
huit  semaines,  il  est  favorablement  accueilli. 

En  1N-J2,  il  profite  de  son  congé  annuel  pour  retour- 
ner en  Italie  et,  de  là,  à  Paris,  où  Jouy  l'engage  à 
reprendre  son  opéra  Les  Athéniennes,  dont  il  n'avait 
encore  écrit  que  quelques  airs.  Mais,  en  dépit  des 
changements  faits  par  Philarète  Chasles.  jamais  le 
livret  ne  le  satisfit,  et,  après  sa  mort,  on  ne  retrouva 
que  quelques  fragments  destinés  à  cet  opéra. 
.  En  janvier  1823,  Spontini  était  de  retour  à  Berlin. 
Dans  le  courant  de  1823,  le  roi  lui  demanda  un  opéra 
pour  le  mariage  du  prince  royal.  La  difficulté  était 
de  trouver  un  livret;  aucun  ouvrage  allemand  ne  sa- 
tisfaisant le  musicien,  on  l'autorisa  à  faire  venir  un 
collaborateur  de  Paris.  Théaulon,  mandé  en  hâte, 
n'avait  rien  de  prêt;  on  finit  par  découvrir  un  ancien 
livret  d'opéra-féerie  de  Hochon  de  Chabannes,  Alci- 
dor.  Mais  les  difficultés  d'un  remaniement  furent  si 
grandes  que  bientôt  il  fut  évident  qu'on  ne  serait  pas 
prêt  pour  la  date  fixée  15  octobre);  il  fallut  donc  se 
contenter  d'une  cantate  suivie  d'un  ballet.  Apres  le  dé- 
part de  Théaulon,  Spontini  relit  lui-même  le  scénario, 
et  Alcidor  fut  joué  sans  grand  succès  le  22  mai  182.'>, 
pour  le  mariage  de  la  princesse  Marie-Louise,  troi- 
sième fille  du  roi.  Interrompue  après  huit  représen- 
tations par  le  départ  d'une  des  interprètes,  Mmc  Mil- 
der,  l'œuvre  fut  reprise  sans  plus  de  succès  en  1829, 
en  1833  et  en  1836. 

Un  Hymne  d>'  fête,  demandé  par  le  roi  de  Prusse  à 
l'occasion  du  couronnement  de  l'empereur  de  Russie, 
fut  exécuté  le  18  janvier  et  le  9  mai  1827.  La  même 
année,  le  jour  de  la  fête  du  roi,  Spontini  donnait  le 
premier  acte  d'un  opéra,  Agnès  de  Hohcnstaufen,  qui 
ne  fut  achevé  que  deux  ans  plus  tard.  En  effet,  à  cette 
époque,  Spontini  était  détourné  de  la  composition  par 
les  soucis  d'une  polémique  violente. 

L'opposition  qui  s'était  manifestée  avant  même 
l'arrivée  de  Spontini  à  Berlin,  n'avait  jamais  complè- 
tement désarmé.  Une  querelle  du  directeur  de  la 
musique  avec  un  journaliste,  Rellstab,  la  réveilla,  plus 
violente  que  par  le  passé.  Rédacteur  à  la  Gazette  de 
Voss,  Rellstab  publie  contre  Spontini  àz  violents  ar- 


ticles, et  fait  paraître  une  brochure  sur  l'adminis- 
tration théâtrale  de  Spontini  ;  il  y  accusait  son  adver- 
saire d'écarter  systématiquement  de  la  scène  les 
ouvrages  des  compositeurs  qui  auraient  pu  lui  porter 
ombrage;  Rellstab  prétendait  que,  lorsqu'il  était 
obligé  d'en  faire  jouer  quelqu'un,  il  négligeait  de 
parti  pris  la  mise  en  scène.  Supprimée  par  la  censure, 
celte  brochure  fut  suivie,  dans  le  quatrième  volume 
de  Çsecilia,  des  Extraits  des  papiers  d'un  jeune  ar- 
tiste, et  dans  le  sixième  volume,  de  Julius,  une  nou- 
velle dans  laquelle  il  n'était  pas  difficile  de  recon- 
naître Spontini.  Enfin,  dans  un  article  de  la  Gazette 
de  Voss  sur  Agnès  de  Hohenstaufen,  Rell=lab  prétend 
que  la  comparaison  de  cet  opéra  avec  les  premières 
œuvres  de  Spontini  démontre  que  jamais  Spontini 
n'a  écrit  lui-même  la  Vestale,  ni  Fernand  Cariez. 
L'affaire  fut  portée  devant  les  tribunaux;  Rellstab 
fut  condamné  à  quelques  mois  de  prison;  mais  la 
publicité  du  procès,  la  condamnation  même  aug- 
menlèrent  l'importance  des  attaques  du  journaliste. 

Bientôt,  il  devint  évident  que  derrière  Rellstab  se 
cachait  tout  un  groupe  d'adversaires  de  Spontini.  Se 
sentant  soutenu,  Rellstab  profite  de  la  publicité  que 
lui  avail  donnée  le  procès  pour  redoubler  ses  atta- 
ques; une  brochure  parait  à  Leip/.ig  :  Sur  mes  rap- 
ports comme  critique  avec  M.  Spontini,  en  sa  qualité 
de  compositeur  et  de  directeur  général  de  la  musique  de 
/;.  rlin. Commencée  en  1826,  la  querelle  agitait  encore 
le  public  en  1830,  date  où  paraissait  une  défense  de 
Spontini,  vraisemblablement  attribuée  à  Dorn;  en 
1833,  Charles-Frédéric  Mùller  résumait  toute  la  ques- 
tion dans  une  brochure  intitulée  Spontini  et  !'<'  llslab. 

Tous  les  torts  n'étaient  pas  du  cùlé  de  Spontini, 
qui  s'élail  activement  employé  à  améliorer  le  sort 
des  artistes  de  Berlin;  il  avait  institué  une  caisse  de 
secours  pour  les  musiciens  du  Théâtre  Royal,  four- 
nissant les  premiers  fonds  pour  son  établissement  et 
consacrant  tous  les  ans  à  cette  œuvre  le  produit  du 
concert  qu'il  pouvait,  comme  maître  de  chapelle, 
donner  à  son  profit.  11  avait  donné  aux  chanteurs  et 
aux  chanteuses  de  précieux  conseils  sur  l'art  de  res- 
pirer et  de  poser  la  voix. 

Le  premier  engagement  contracté  avec  le  roi  pour 
dix  ans  expirait  le  30  mai  1830.  11  lut  renouvelé  pour 
une  nouvelle  période  de  dix  ans. 

En  1838,  Spontini  part  pour  Paris  pour  se  présenter 
à  l'Académie  des  beaux-arts,  la  mort  de  Pu  a  avant 
rendu  vacant  un  des  fauteuils;  sous  la  promesse  de 
revenir  à  Paris  à  l'expiration  de  son  contrat,  il  est 
élu  sans  difficulté.  Au  cours  d'un  voyage  en  Italie. 
il  fait  don  à  la  ville  de  Jesi  de  30  000  francs  pour  le 
rétablissement  du  mont-de-piélé;  au  milieu  de  no- 
vembre, le  cardinal  Ostini,  évêque  de  Jesi,  le  présente 
au  pape,  avec  lequel  il  s'entretient  d'un  projet  de  res- 
tauration de  la  musique  religieuse.  Il  s'occupe  même 
de  publier  une  grande  collection  de  musique  sacrée; 
mais  comme  il  ne  trouve  personne  capable  de  diriger 
une  pareille  entreprise,  il  abandonne  le  projet  qu'il 
avail  formé.  Après  avoir  visité  Naples,  il  retourne  en 
Prusse  en  passant  par  Paris. 

Le  24  juin  1840,  à  l'occasion  de  la  mort  de  Frédéric- 
Guillaume  III,  il  dirigeait  à  Potsdam  l'exécution  du 
De  Profundis  de  Gluck,  du  Requiem  de  Mozart  et  de 
quelques  pages  de  Haendel.  Frédéric-Guillaume  IV 
aurait  souhaité  le  conserver  à  sa  cour;  mais,  fidèle 
à  la  promesse  faite  à  l'Institut  de  France,  las  des 
campagnes  menées  contre  lui,  il  se  retire,  conservant, 
avec  tous  ses  titres,  une  pension  de  16  000  francs. 
Telle  est  la  version  la  plus  favorable  à  Spontini. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Au  témoignage  d'autres  biographes,  Spontini,  abusant 
de  son  autorité,  serait  entré  en  conflit  avec  l'inten- 
dance générale;  après  ses  violences  et  ses  impru- 
dences, il  aurait  même  été  sur  le  point  de  se  faire 
punir  d'arrêts  de  forteresse.  Son  séjour  à  Berlin  se 
sérail  terminé  assez  tragiquement;  le  public,  qui  le 
détestait,  l'aurait  forcé,  pendant  une  représentation 
de  Don  Juan,  à  quitter  son  pupitre  et  à  se  retirer.  Il 
aurail  été  mis  à  la  retraite  en  1841,  perdant  à  la  fois 
titres  et  traitements,  et  serait  revenu  en  France  en 
1-842. 

Le  séjour  de  Spontini  à  Paris  est  marqué  par  de 
nouvelles  difficultés  avec  l'administration  de  l'Opéra. 
Aux  termes  de  son  cahier  des  charges,  Duponchel,  le 
directeur,  était  tenu  de  reprendre  d'anciens  ouvrages. 
En  1841,  le  tour  de  Fernand  Cortez  étant  venu,  Du- 
ponchel refusa- d'accepter  la  nouvelle  version  de  l'o- 
péra; et  Spontini  dut  lui  faire  défense,  par  ministère 
d'huissier,  de  jouer  son  œuvre.  L'affaire  vint  devant 
le  tribunal  de  commerce,  qui  donna  gain  de  cause 
au  musicien;  mais,  en  appel,  Spontini  perdit  son  pro- 
cès, et  Fernand  ('"riez  fut  joué  de  la  manière  la  plus 
pitoyable.  En  1*4.'!,  Duponchel  donna  une  nouvelle 
preuve  de  son  mauvais  vouloir  en  objectant  le  goût 
du  jour  pour  différer  la  reprise  de  la  Vestale. 

La  lin  de  la  vie  de  Spontini  fut  attristée  parla  ma- 
ladie; il  devint  sourd,  il  perdit  la  mémoire.  Espérant 
qu'un  nouveau  voyage  en  Italie  (le  dernier  datait  de 
juillet  1842)  le  rétablirait,  il  partit  pour  Jesi,  puis 
pour  Majolatti.  C'est  là  qu'il  mourut  le  24  janvier 
1851,  des  suites  d'un  refroidissement  pris  à  l'église- 

Jamais  artiste  ne  fut  comblé  de  plus  d'honneurs 
et  de  distinctions  que  Spontini.  Directeur  général 
de  la  musique  de  la  cour  de  Prusse,  docteur  en  phi- 
losophie et  en  art  de  l'Université  de  Halle  (après  un 
festival  dirigé  par  lui),  membre  de  l'Académie  des 
beaux-arts,  membre  associé  de  la  classe  des  beaux- 
arts  de  l'Académie  de  Belgique,  membre  de  la  société 
autrichienne  des  Amis  de  la  musique,  de  l'Académie 
de  Stockholm,  de  l'Académie  de  Sainte-Cécile  de 
Rome,  de  la  Société  de  Hollande  pour  les  progrès  de 
la  musique,  il  avait  été  nommé  par  le  pape  comte  de 
Sanl'Andrea ;  il  était  officier  de  la  Légion  d'honneur, 
décoré  des  ordres  de  Saint-Grégoire-le-Grand,  de 
Léopold  de  Belgique;  il  était  aussi  chevalier  du  Mé- 
rite de  Prusse  et  de  la  troisième  classe  de  l'Aigle 
rouge,  chevalier  de  l'ordre  de  Danebrog,  de  François  I 
de  Naples,  commandant  de  l'ordre  de  Hesse-Darm- 
stadt. 

Et  sans  doute  cette  lis  le  de  ses  dignités  reste-t-eHc 
très  incomplète. 

CATA.LOG1  E    DES   CEI  VRES   DE   SPONTINI 


1707.    /  l'uulu/li  ilelle  ilmiiie.   Hume. 
L'Eruismu  ruliculn.  Rmne. 

1798.  //  flnto  Pittore.  Ro  a 

//  Teste  ricoMseiuto    :   i  rence. 
L'Isola  disabilala,  I  . 
CM  put  gserda  men  i  edi.  Florence. 
L'Amoresegreto.  Naples. 

1799.  La  F,i,,uiu  mtitcher,,.  Naples. 
La  Fait  l      ofa.  Naples. 

1800.  Iquadripai  anti.  Pal  :  ne. 
Sofronia  e  OH  ■  i  i.  Pal  irme. 
G/i  Elis,  ,ici,is,.  l'alerme. 

1801.  eu  Amanti  in  cimento.  Home. 

Lu  l'riucipesstt  il'Amiilli  mi  Atlcliiiu  Seitese.  Venise. 

/.c   Mrlitmiirfnsi  ,li  l'usi/uuli.  Venise. 
12  mai  txe.4.  La  Petite  Maison.  Paris. 
27  novembre  1S01.  bliltim.  Paris. 


12  mars  isir,.  Julie  mt  le  fui  Je  fieurs.  Paris. 

15  décembre  1807.  Lu  Vestale. 

ïs  novembre  l'-O'.i.  Fernuuil  Cartel. 

23  août  1814.  Pelage  o%  le  Roi  et  la  fuir. 

15  décembre  1819.  Olvmpie. 

1881.  Lullii  Rookh.  Cour  de  Berlin. 

85  mai  1885    Atcidor.  Cour  de  Berlin. 

1887.  Agnès  de  Hohenstaufen  (1er  acte;  achevé  2  ans  pi 


rel'.u 


337). 


Autres  opéras  :  Let  Athéniennes;  Surin, thaï  l'it  lu  Fêle  île  l<t  ruse 
île  Cachemire  pour  lequel  il  emploie  quelles  airs  Je  Lalla 
Rookh. 

ŒUVRES    DE    CIRCONSTANCE 

S  février  1  Soc,.   Cantate  après  Austerlilz,  Eeeehn  r/iiru. 

21  juin  1816.  Les  Dieux  rivaux  (en  collaboration  avec  Bekton 

rrzBn). 
IS1  1.   Un  relie,  j.nur  la  musique  .le  la  sar-le  prussienne. 
;i  août  1820.  Marche  ei  chant  (Preussischer  Volksgesang  mit  Volls- 

iiiuJi...  . 
5  octobre  1S2  i.  Cantate  et  ballet. 
1S  janvier  1827.  Ilijninc  ,le  fêle. 

Bibliographie. 

Blaze  de  Bdrï.  —  Musiciens  contemporains.  Paris,  1S56. 

Ciiobon  et  F.ve;  if,  —  l >iei iim H,,: re  historique  ,1e,  musiciens. 

Fetis. —  /;    ■  -  "■     ■  ii,,it,r, elle  îles  musiciens. 

Artiick  Pougi>  .  —  Supplément  à  la  Biographie  universelle  'les  musi- 
ciens. 

Geoffroy. —  l,     Sèbals,   li  mai  1804. 

Grovb's.  —  Dicl;  murij  ,<{  mitsic  and  musiciuns.  Lon.lon.  loin. 

Louis  de  LoMEME.  —  il.  Sptinliui pur  un  humme  île  rien.  Paris, 
1841,  in-12. 

Montasari.  —  El,  gin  ilel  cavalière  t'.it,ptirn  Spuulini.  Ancona. 
1851. 

Alcjbiaee  Moretti. —  YUa  di  Gasparo  Spontini.  Imola,  1875 

Œttingeb  (E  ioi  u.i. -Marie).  —Spontini.   Leipzig.  1843,  in-io. 

A.  Podgin.  —  Chronique  musicale,  octobre  1875.  Les  commence'- 
mais  de  Sponlini  [1774-1  501 

II      QCITTARD.    S 

I lueur, li,  ./.v  e         ,  ■  iienario  di  Sponlini.  Jesi,  in- 1 s . 

Kobert.  —  disparu  Sptwtiui.  Berlin,  lss;\ 

Haoul  Rochettf.  —  Eluqt  prononce  h  l'Académie  îles  nanti -Arts. 

1858. 
Soubibs.  —  /..•<  Membres  de  l'Académie   des  Beaux-Arts.    Pari-, 

Flann:  19  'i.  1906,  1911. 

RieiiARr.  W  i  ,m  ...  —  t  dures  en  prose.   Pau-,   i  e-la_r.,\  e,    un:!. 

I.  V  et  VI. 
Spontini  in  Dettts,  .  and  (appréciation  impartiale  de  ses  procédé! 

peu  i  .  '.   dernières   années   .le    „m   séjour    en    ce 

pa\  -  .  .  ..   i  S30,  in-8". 

/,  La  Vestale,  vril  1851. 


Ambroise  Thomas. 

Charles-Louis-ÀMBHOISB  Thomas  naquit  le  5  avril 
1811  à  Metz.  —  Ses  parents  y  étaient  professeurs 
de  musique:  son  père  était  même  correspondant  de 
l'Ecole  impériale  de  musique  de  Paris.  C'est  sons  sa 
direction  que,  des  l'âge  de  quatre  ans,  Ambroise 
commençai!  ses  études  musicales  et  particulièrement 
l'étude  du  solfège,  qu'il  continua  pendant  sept  ou 
huit  ans;  son  père  le  mit  ensuite  au  violon  et  au 
piano.  En  1828,  il  entrait  au  Conservatoire  dans  la 
(lasse  de  ZlMMBRMANN,  et  dès  l'année  suivante,  à  sou 
premier  concours,  il  remportait  le  premier  prix.  En 
1830,  comme  élève  de  Dourlen,  il  obtenait  le  pre- 
mier prix  d'harmonie  et  d'accompagnement.  Cepen- 
dant, eu  dehors  de  l'enseignement  officiel,  il  avait 
reçu  les  conseils  de  Iïalkbrenner  pour  le  piano  et 
ceux  de  Harrereau  pour  le  contrepoint. 

11  entrait  dans  la  classe  de  composition  de  I.e- 
sueur;  en  1831,  il  obtenait  une  mention  honorable 
au  concours  poor  le  prix  de  Home,  et  en  1832,  le 
premier  grand  prix  avec  la  cantate  Hermanet  Ketty. 
Ile  ses  deux  concurrents,  l'un,  Elwart,  avait  été  mis 
hors  concours  pour  avoir  changé  le  texte  du  mar- 
quis de  Pastoret,  l'autre,  Lv.itw  i  ,  mourut  de  déses- 
poir de  n'avoir  pas  le  prix. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L INSTITUT  DE  FRANCE    3563 


A  la  villa  Médicis,  Ambroise  Thomas  rencontra 
Prévost,  Berlioz  et  Montfort.  Il  y  était  encore  lors- 
que, en  183V,  Ingres  fut  nommé  directeur  de  l'Ecole 
de  Home  ;  on  connaît  le  goût  du  peintre  pour  la  mu- 
sique; aussi,  prit-il  en  affeclion  Ambroise  Thomas, 
«  jeune  homme  excellent,  du  plus  beau  talent  sur 
le  piano  et  qui  a  dans  son  cœur  et  dans  sa  tête  tout  ce 
que  Mozart,  Beethoven,  Weber...  ont  écrit  »,  disait-il 
dans  une  de  ses  lettres. 

Ambroise  Thomas  profita  de  son  séjour  à  Home 
pour  visiter  l'Italie;  on  le  trouve  à  Naples,à  Florence, 
à  Bologne,  à  Venise,  à  Trieste,  d'où  il  pousse  jus- 
qu'à Vienne.  Cependant,  ces  voyages  ne  l'empêchent 
pas  de  travailler  :  il  écrit  beaucoup  pendant  cette 
période  et  fait  exactement  les  envois  réglementai- 
res. En  octobre  1836,  après  son  retour  de  Home, 
on  exécute,  à  une  séance  de  l'Institut,  un  Duo  italien 
de  lui,  dont  Berlioz  l'ait  l'éloge  clans  la  Gazette  mu- 
sicale. A  la  même  époque,  il  publie  un  recueil  de  Sir 
Mélodies  italiennes  avec  traduction  française,  Souve- 
nirs d'Italie  (Nina,  la  Serenala,  Vavia,  Lisa,  Buona 
Hotte,  la  Barchetta);  les  critiques  y  relèvent  d'ingé- 
nieuses recherches  d'harmonie  et  d'accompagne- 
menl. 

Mais,  à  l'exemple  de  presque  tous  les  composi- 
teurs d'alors,  Ambroise  Thomas  songe  au  théâtre, 
comme  au  moyen  le  plus  sur  d'établir  sa  réputation 
auprès  du  grand  public,  plus  sensible  à  la  musique 
dramatique  qu'à  la  musique  de  chambre  ou  de  con- 
cert. Et  dès  sa  première  œuvre,  la  Double  Echelle, 
opéra-comique  en  un  acte  sur  un  livret  de  Planard, 
il  trouve  le  succès  :  la  pièce,  représentée  le  23  août 
1837,  est  jouée  deux  cents  fois,  chiffre  énorme  pour 
l'époque.  L'année  suivante,  le  30  mars  1S3S,  il  donne 
à  l'Opéra-Comique  le  Perruquier  le  la  H  /  ruse,  dont 
Berlioz  fait  l'éloge,  reprochant  seulement  à  l'auteur 
o -de  sacrifier  à  la  mode  en  employant  trop  souvent 
les  trombones  et  la  grosse  caisse  ». 

Dans  les  années  qui  suivent,  Ambroise  Thomas  s'es- 
saye dans  les  genres  les  plus  variés  ;  au  ballet  la 
Gipsy  succèdent  le  Panier  fleuri  h  l'Opéra-Comique 
(6  mai  1839)  el  une  Messe  de  Requiem.  Ambroise  Tho- 
mas cherchait  l'œuvre  dans  laquelle  il  pourrait 
déployer  pleinement  son  originalité.  Aucune  ne 
donnait  encore  la  mesure  exacte  de  son  talent.  La 
Double  Echelle  n'était  qu'un  ingénieux  pastiche  de 
la  musique  du  xvme  siècle.  Découragé  de  n'avoir  pu 
obtenir  depuis  sa  première  pièce  un  succès  franc 
et  décisif,  Ambroise  Thomas  abandonne  le  genre  de 
l'opéra-comique  pour  l'opéra.  Mais  le  Comte  de  Car- 
magnola  (19  avril  1849)  n'est  joué  que  cinq  ou  sis 
fois. Le  Guérillero  (2  juin  1842)  réussit  un  peu  mieux 
et  va  presque  jusqu'à  la  cinquantième. 

Ambroise  Thomas  n'a  pas  encore  trouvé  sa  voie; 
de  nouveau,  il  revient  à  l'opéra-comique  avec  Angé- 
lique et  Médor  (10  mai  1843),  avec  Mina  ou  le  Ménage 
a  trois(lÙ  octobre  1843),  deux  œuvres  très  ternes,  qui 
n'ajoutent  rien  à  sa  gloire;  à  l'Opéra,  le  10  juillet 
1816,  il  donne  un  ballet,  Betty,  dont  la  musique  n'est 
pas  plus  caractéristique. 

Dans  cet  état  d'incertitude  et  de  découragement, 
il  écrit  une  œuvre  dans  laquelle  il  ne  voit  qu'une 
charge  et  qu'une  rapsodie  de  la  musique  italienne. 
Il  écrit  un  chef-d'œuvre  de  verve  et  de  franche  gaieté, 
un  ouvrage  dans  lequel  le  public  reconnaît  des  qua- 
lités bien  françaises. 

Le  3  janvier  1849,  Ambroise  Thomas  tenait  enfin  un 
vrai  succès  avec  le  Caïd. 

Le  Songe  d'une  nuit  d'été,  qui  lui   succède  sur  la 


scène  de  l'Opéra-Comique  (20  avril  1850),  est  joué 
plus  de  cent  fois  à  Paris,  et  le  talent  du  musicien 
reçoit  une  consécration  officielle;  en  1 8r>  1 ,  les  mem- 
bres de  l'Académie  des  beaux-arts  le  préfèrent  à  ses 
concurrents  Berlioz,  Félicien  David,  Clapisson,  Kie- 
dermeyer  et  l'appellent  au  fauteuil  laissé'  libre  par 
la  mort  de  Spontiki. 

Mais  de  nouveau,  après  ce  double  succès,  il  connaît 
une  nouvelle  période  de  tâtonnements  et  de  découra- 
gements. Raymond  ou  le  Secret  de  lu  reine  est  très  froi- 
dement accueilli  à  Paris  (5  juin  1851),  peut-être  à 
cause  de  la  mauvaise  distribution  des  rôles,  puisque 
la  pièce  réussit  en  province.  La  voix  de  M""  L'galde, 
dont  ce  fut  la  dernière  création,  esl  impuissante  à 
compenser  l'obscurité  et  le  vide  du  livret  de  la  Tonelli 
(30  mars  1853).  La  Cour  de  Célimène  (11  avril  1835), 
Psyché  (26  janvier  18571,  qui  devait  être  reprise  avec 
d'importants  changements  le  21  mai  1878,  le  Carna- 
val de  Venise  (9  décembre  1837),  le  Roman  A' l'Ai  ire 
(3  février  1860),  n'obtiennent  que  de  médiocres  ap- 
plaudissements. Entre  temps,  en  1856,  Ambroise 
Thomas  avait  été  nommé  professeur  de  composition 
au  Conservatoire  et  peu  après  inspecteur  des  succur- 
sales de  province.  Pendant  sept  ans,  soit  à  cause 
des  obligations  de  sa  nouvelle  fonction,  soit  par  dé- 
couragement du  peu  de  - 
ouvrages,  Ambroise  Thomas  reste  muet. 

Et  tout  à  coup,  à  quinze  mois  de  dislance,  sur  la 
scène  de  l'Opéra  et  sur  celle  de  l'Opéra-Comique, 
Ambroisi  Thomas  triomphe.  Wignon  17  novembre 
1866)  et  Hamlct  (9  mars  1868;  lui  conquièrent  les 
suffrages  de  la  foule  et  portent  sa  réputation  par 
delà  les  frontières  françaises,  dans  l'Europe  entière. 
Dès  la  première  répétition  d'orchestre,  la  partition 
i'Hamlet,  lue  d'un  bout  à  l'autre  sans  un  accroc, 
était  acclamée  par  les  musiciens. 

Après  ce  triomphe,  la  carrière  d'AMBROiSE  Thomas 
est  pour  ainsi  dire  terminée.  Nommé  directeur  du 
il .'  h  la  morl  d'AuBi  r  en  1871,  il  s'efforce 
d'y  il  vti  le  niveau  des  études  et  entréprend  d'utiles 
réformes.  Comme  compositeur,  il  ne  rencontrera 
plus  |,.  succès  'I'  Mignon  el  d  Hamlet.  I.e  22  avril 
1874,  l'Opéra-Comique  représente  un  acte  de  lui, 
composé  depuis  longtemps  déjà,  '■!  il  le  représente 
contre  son  gré.  Ambroise  Thomas,  en  etlét,  ne  trou- 
vant pas  les  circonstances  favorabl  ss  à  une  œuvre 
dont  la  verve  comique  rappelait  celle  du  Caïd,  se 
refusait  à  laisser  jouer  Gil  .  Mais  l'au- 

teur du  poème,  Thomas  Sauva.-,  ne  comprenant  pas 
les  scrupules  de  son  collaborateur,  pi —  de  voii 
jouer  son  œuvre,  s'adressa  aux  tribunaux,  qui  lui 
donnèrent  gain  de  cause.  Gilles  et  Gillotin  fut  donc 
donne  par  autorité'  de  justice,  mais  sans  aucune 
parlicipaiion  du  musicien,  qui  refusa  de  s'occuper 
de  la  mise  en  scène  et  des  répétitions. 

Le  sujet  de  Françoise  de  Rimini  (Opéra,  1882  I  ni 
peu  théâtral,  le  livret  était  mal  construit.  La  musi- 
que se  ressentit  de  ces  défauts  et  réussit  médio- 
crement. Découragé,  sentant  se  produire  dans  la 
musique  française  une  évolution  à  laquelle  il  était 
demeuré  étranger,  Ambroise  Thomas  n'aborda  plus  la 
scène  qu'une  fois  avec  la  Tempête,  un  ballet  en  trois 
actes  donné  à  l'Opéra,en  1889.  11  vécut  encore  quel- 
ques années,  et  mourut  à  Paris  le  12  février  1896. 

Son  œuvre  a  été  très  sévèrement  jugée  par  cer- 
tains critiques;  Hugo  Riemann  parle  du  «  manque 
de  conscience  et  de  conviction  artistique  dont  les 
œuvres  d'AMBROisE  Thomas  font  preuve  ».  Un  pareil 
jugement  semble  bien  dur.  Sans  doute,  la  musique 


ENCYCLÙPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


du  Caid,  de  Mignone\  à'Hamlet  peut  paraître  démodée 
aujourd'hui.  Sans  doute,  A.MBROISE Thomas  u'a  p  is  en- 
richi l'ail  de  formes  nouvelles.  Mais  si  on  lui  refuse 
du  génie,  au  mpins  osl-il  juste  de  lui  reconnaître 
du  talent. 

CATALOGl  I     M    -   ŒUVRES   D'AMBROISE  THOMAS 


,  1  acte,  i  ipéra  Comique. 
mal  1838.  Le  P  •  la  R  g  n'i  e,  3  actes. 

.'<  janvier  1839.  I  t,  Ci/M  t,  ballot,  3  actes.  Opéra. 


10  ma!  1843.  Angélique  et  Mèior,   1  acte.  Opéra-Comique. 
10  octobre  IM3.  Mina  on  le    Ménage  n  trois,    3    actes,   Opéri 
Comique. 

111  juillet  ISio.  Uett  i.  ]  ■  ;i  1  ].  ■! .  2  actes.  Opéra. 

3  janvier  1842.  Le  CaM,  2  actes.  Opéra-Comique. 

20  avril  1850.  Le  Songe  d'une  mut  d'été,  3  actes.  Opéra-Comiqu 

5  juin  1851.  Raymond  ou  le  Secret  de  la  reine,   3  actes.  Opér 

le  a.o'il  IsV_'.  i.'-i'/.'/i'ir  l'inautjuratinn  île  lu  statue  île  l.coicii 


•  Ipera-Comiqu 


i  juin  1SS9.  La  Tempête,  ballet,  3  actes.  Opéra. 


MUSIQUE    REI  [GIEUSE 

Mes  e  île  Requiem    1;    m  -,  Pai  :-,  Richault. 

22  novembre  lsr.7.  Messe  s, 'tenue/le.  Saint-EustachO. 

■  r,  ii  i  eir.e,  Noire-Dame. 
Trois  Mulets. 

MUSIQUE    INSTRUMENTALE 

Grand  Quintette  (2  violons,  2  altos  et  basse). 
Quatuor  à  cordes,  op.  I.  I.  ipzig,  Hofmeister. 
Trio  ;  i  m-  | ,  viol    .    t  vi  iloncelle.  Paris,  Richault. 


op.  -i. 
Dei(  i  Nocturnes. 

I<  i"  or  ]u  mo  a  qualre  mains. 

MUSIQUE    VOCALE 

Si.i  Romances  italien  e    avec  traduction  frança 
Choeurs  pour  voix  d  : 

Bibliographie. 
A.  Aium.  —  Feuilletons  ,le  l'Assemblée 


P.  Fac 


■  Arlieli-sur  Hum/cl  fon*  la   r.io,, rapine  tic. 

■listes.  Paris,  1868,  in-8". 

-'.'»...  «;•,'««/;  rfi  /'.  f'uasftBi,  \  enise,   mai 


I'KTis.  —  litoarajilae  iinircrscllc  tics  musiciens. 

A.  l'or., in.  —  Supplément  a  la  Biographie  ut 

Grove's.  —  Iktittmanj  ,.;  mnsic  ami  mtmeians,  I.-.n.t-.ii.  loin. 

Hyacinthe  Ktrcii.  —  llamlel...  étude  littéraire  cl  o  ,  i 

1872.  in-18. 
A.  Pouoin.  —Musiciens  du  dix-neuvième  siècle.  Paris,  Fisehbache 


HCGO  RlEM, 

Pari 
Sccdo.  —  <; 

.1.  TlERSOT. 


un-  i/r 


•'■/"«'.    trad.   il.   Hcmuert. 

"•»/,',  ■'  v.,1.  Paris,  1859. 

ufe  Encyclopédie.  Un  Demi-Siè- 

iii  ères.  Alcan,  collée- 


I"'  juin  et  15  novembre  ISJ1  ;  la  Cour  ,le  Ccliiucne. 
1855;  Psyché,  1e»  février  1857;  le  Carnaral  île 
15  décembre  1857;  /e  Songe  d'une  nuit  d'été,  15 
1859;  /c  Bomon  d'Elvire,  15  mars  1860;  Mignon, 
cembre  1866;  Hamlet,    l«  avril    1868;  article  d< 


HuiiY,  15  i 


1882. 


.  Article  deJDL 


îars  ' 


M.  Charles-Marie  Widor  naquit  à  Lyon  le  22  ou  le 
24  février  l84o  (ses  biographes  donnent  les  deux 
dates).  Sa  famille,  d'origine  hongroise,  s'était  fixée 
d'abord  en  Alsace,  où  son  grand-père  était  facteur 
d'orgues,  puis  à  Lyon,  où  son  père  devint  organiste 
à  l'église  Saint-François.  Dès  son  enfance,  la  vocation 
musicale  de  M.  Widor  trouva  dans  sa  famille  une 
atmosphère  propice  pour  se  développer  et  s'épa- 
nouir :  tout  jeune,  parait-il,  formé  par  les  leçons  de 
son  père,  il  improvisait  déjà  avec  une  grande  habi- 
leté sur  l'orgue  de  l'église  Saint-François. 

Mais  son  esprit  était  ouvert  à  toutes  les  manifes- 
tations de  la  beauté;  dans  sa  jeunesse,  il  lit  de  la 
peinture,  et  de  ses  études  classiques  il  conserva  cette 
précision  du  style,  cette  légèreté  de  plume  qu'il  ma- 
nifesta plus  tard  dans  les  articles  qu'il  signait  à  VEs- 
laf'elte  du  pseudonyme  d'Aulélès  ou  de  Tibicen,  dans 
ses  chroniques  du  Piano-Soleil,  et  dans  les  nom- 
breuses éludes  que  ses  fonctions  de  secrétaire  de  l'A- 
cadémie des  beaux-arts  l'amenèrent  à  écrire. 

Son  édution  musicale,  commencée  au  foyer  pa- 
ternel, se  poursuivit  au  Conservatoire  de  liruxelles  : 
Lemmens  fut  son  professeur  d'orgue,  Fétis,  l'auteur  de 
la  Biographie  universelle  des  musiciens,  lui  enseigna 
la  composition. 

Organiste  de  l'église  Saint-François  à  Lyon,  il  s'ac- 
quit rapidement  une  telle  réputation,  qu'il  était  ap- 
pelé comme  expert  pour  présider  aux  inaugurations 
d'orgues  en  France  et  même  à  l'étranger.  En  1*09, 
il  devenait  organiste  de  Saint-Sulpice,  poste  qu'il 
occupe  encore  aujourd'hui.  Directeur  et  chef  d'or- 
chestre de  la  Concordia,  société  chorale  où  fut  exé- 
cutée en  particulier  la  Passion  selon  suint  Mathieu  do 
Bach,  successeur  de  César  Franck  comme  professeur 
d'orgue  au  Conservatoire  en  1891,  nommé  en  1896 
dans  la  chaire  de  composition  en  remplacement  de 
M.  Théodore  Dubois,  M.  Union  était  élu  membre  de 
l'Académie  des  beaux-arls  de  Berlin  en  1906,  membre 
de  l'Académie  de  Bruxelles  en  1 907,  membre  corres- 
pondant de  l'Académie  de  Stockholm  en  1909.  Le 
29  octobre  1910,  il  était  choisi  par  l'institul  pour  occu- 
per le  fauteuil  de  Lenepveu,  el  le  18  juillet  1914,  à 
l'unanimité,  ses  collègues  de  l'Académie  des  beaux- 
arts  le  désignaient  comme  secrétaire  perpétuel  de  la 
Compagnie. 

Très  répandu  dans  le  monde,  agréable  causeur, 
travailleur  acharné,  exécutant  remarquable  non  seu- 
lement à  l'orgue,  mais  aussi  au  piano,  M.  Widob  a 
tout  abordé,  théâtre,  symphonie,  musique  de  cham- 
bre, mélodies. 

Ses  œuvres  de  théâtre  L'ont  fait  connaître  du  grand 
public;  le  ballet  de  la  Korrigane,  en  collaboration 
avec  Coppée,  représenté  à  l'Opéra  en  issiu;  Jeanne 
d'Arc,  une  pantomime  donnée  a  l'ancien  Hippodrome, 
Cttnlc  d'Avril  adapté  par  Dorchain  de  la  Soirtfe  des 
rois  de  Shakespeare,  joué  à  l'Odéon  en  1S85,  con- 
nurent la  meilleure  fortune.  Ma'Ure  Ambros,  sur  un 
livret  de  Coppée  et  de  Dorchain,  étonna  un  peu  le 

public  à  son  apparition  à  l'Opéra-Gomiqi n  1886. 

Enfin,  en  1905,  M.  Wiuou  donnait  sur  la  même  scène 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L  INSTITUT  DE  FRANCE    3565 


les  Pécheurs  de  Saint-Jean.  Un  opéra,  Nerto,  en  colla- 
boration avec  Mistral,  dont  Imbert  annonçait  la  com- 
position, n'a  jamais  été  terminé. 

La  réputation  de  ses  œuvres  d'orchestre  et  de  sa 
musique  de  chambre  franchit  les  frontières;  Liszt 
joua  à  Weimar  la  Sonate  pour  piano  et  violoncelle; 
M.  Widou  lui-même  dirigea  à  Londres  l'exécution  de 
quelques-unes  de  ses  œuvres. 

Mais  dans  l'opinion  commune,  l'organiste  a  éclipsé 
le  compositeur.  Nourri  de  J.-S.  Bac»,  dont  il  a  entre- 
pris une  grande  édition  avec  le  concours  de  Schweit- 
zkr,  du  haut  de  son  buffet  d'orgue  de  Saint-Sulpice, 
M.  Widor  a  vu  se  heurter  les  grands  courants  de  la 
musique;  mais  au-dessus  de  la  mêlée,  sans  nulle  ma- 
nie roulinière,  il  est  resté  fidèle  à  l'esprit  classique, 
au  style  de  contrepoint  où  il  excelle.  Lui-même  a 
expliqué,  dans  une  préface,  la  genèse  de  ses  sym- 
phonies pour  orgue.  «  L'orgue  moderne,  dit-il,  est 
essentiellement  symphonique.  A  l'instrument  nou- 
veau, il  faut  une  langue  nouvelle  et  un  autre  idéal 
que  celui  de  la  polyphonie  scolastique.  »  Toutes  ces 
symphonies  sonl  écrites  pour  son  orgue  à  lui,  pour 
le  cadre  de  son  église,  comme  la  Messe  à  deux  orgues 
ei  a  deux  chœurs  avait  été  composée  pour  les  res- 
sources dont  il  disposait  à  Saint-Sulpice  (les  qua- 
rante exécutants  de  la  maîtrise  et  les  deux  cents 
voix  du  séminaire).  A  travers  l'ampleur  des  dévelop- 
pements, les  quatre  premières  symphonies  conser- 
vent encore  quelque  chose  de  la  simplicité  classique  ; 
les  quatre  suivantes  marquent  une  étape  nouvelle 
el  conduisent  aux  deux  dernières,  la  Gothique  et  la 
Romaine,  qui  commentent  deux  chants  liturgiques, 
V Introït  de  Noël  et  le  Iiaee  dies  de  Pâques. 

CATALOGUE   DES  ŒUVRES   HE  M.   WIDOR 


nrnuune.  ballet  ''il  deux  actes.  Opér 
3  ai  i"-.  '  ipéra-Comique. 


Jeanne  J  Arc,  p  ml ime.  Ancien  Hippodrome. 

1 1  .'■.-.  •  i ,  i  :  ■  r.r    l'JO.V  Les  Pêcheurs  de  Suiul-.tenu .  ("péi 


MUSIQUE    D  ORCUESTIIE 

Trois  Symphonies  :  Symphonia  sacra,  avec  orgue;  Symphonie  an' 
tique,  avec  chœurs  :  La  Vu  '  de  Walpurgi  ,  caprice  sym- 
phonique en  :J  parties. 

Concerto  pour  piano  et  orchestre  (Chàtelet,  19   novembre   i    re, 

Concert  i  pour  piano  et  orchestre. 

Fantaisie  pour  piano  et  orchestre. 

Ouverture  espagnole. 

Chorai  el  variations  pour  harpe  et  orchestre. 

(■..,,,   ■,,■!  s»,  /,•  m  mi  mineur  pour  violoncelle  et  orchestre. 

Le  Chant  séculaire  pour  -"1"  et  chœurs. 

Marche  nuptiale. 

MUSIQUE    DE    CHAMBRE 


S 

5  lise. 
Suite  polonaise. 
Scènes  de  bal,  op.  20. 
Carnaval. 

6  Morceaux  de  salon,  op.  15. 
Air  de  ballet,  op.  i. 
Valses,  op.  11. 

Valses  caracteristie/ues,  op.  26. 

Pages  intimes. 

Prélude,  .\ndaute  ?t  Final,  op.  17. 

Andunie  élégie. 

Seherso  brillant,  op.  5. 

Sérénade,  op.  6. 

L'Orientale,  scherzo,  op.  12. 

I-J  Feuillets  d'album  en  2  livres,  op.  31. 

la  Barque,  fantaisie  italienne. 


19. 


Quatuor. 

:  Quintettes  (avec  piano  ri  mineur,  op.  :  . 

Sérénade     pour    piano,    flule,    violon,   violoncelle,    harmonium, 

op.  10. 
S  Pièces  pour  violoncelle  el  pian..,  op.  21. 
4  Duos  pour  violon  et  violoncelle. 

4  petits  Trios. 
Soirs  d' A/sure. 

5  Huas  pour  piano  et  orgue. 

MUSIQUE    VOCA1  G 

Chœurs  à  quatre  voix,  sans  accompagnement,  op.  25. 

6  Mélodies,  op.  11. 
o'  Mélodies,  op.  22. 

S  Mélodies  pour  baryton,  op.  ls. 

Duos  pour  soprano  et  contralto,  op.  30. 

MUSIQUE    RELIGIEUSE 

Psaume  CXIt  pour  2  choeurs,  2  orgues  et  orchestre. 

Messe  pour  2  chœurs  et  2  oi  gués. 

Motets. 

S  Symphonies  d'orgue. 

La  Gothique,  sympl l'oi  »ue. 

La  Romane,  ';  mp  ton 

ARTICLES    ET     1  1:  I 

Teelinl./iie  de  f orchestre  moderne  (Complément  ;.u    traité   d'orchi  3- 

li  .i  ti. .h  de  Berlioz). 
Articles  dans  rEsiafe/te  'Aulei--:,  le  Piano-Soleil,  le  Correspondant 
Préfaces. 
v  '"■  i  r ■     icn      re  pei  pétuel  de 


s,  !  ond  m.  1910. 


I       .      -  Portraits  et  étude..    1'.,         I 
Paul  Locard.  —  Larousse  mensuel,  novembre  l'J15;  Musiea.   dé- 

'  cembre  1919, 
II.  Riemann.  —   Dictionnaire  de  Mus,,/,,,-,    Ir.i.l.    11     J 

1899. 
Reynaud  (abbé  Hector  .  —  L'Œuvre  de   Ch.  )i .    11 

Girod,  1900. 
Revue  des  tieui  Monde.,  in   Korrigane,    15    .  i     nbre   issu;   La 
Pêcheurs  de  Saint-Jean,  l  :.  janvier  1906. 


L'ACADÉMIE  DE  FRANCE  A   ROME 
4.  —  Ifistoriqne. 

L'Académie  de  France  à  Rome  fut  fondée  en  1666 
grâce  à  l'initiative  de  Golbert.  Ses  commencements 
sont  obscurs,  llien  des  années  s'écoulèrent  avanl  qu  ■ 
fussent  constitués  ses  règlements  définitifs.  11  n'en 
est  pas  moins  vrai  que,  dès  le  début  du  règne  de 
Louis  XIV,  de  jeunes  artistes  ayant  manifesté  des 
dons  remarquables  furent  envoyés  à  liome  pour  y 
étudier  des  modèles  que  l'on  considérait  alors  comme 
les  seuls  dignes  d'être  proposés  à  l'imitation  de  fu- 
turs maîtres. 

Sous  l'ancien  régime,  l'Académie  de  Rome  ne  re- 
çut que  des  peintres,  des  sculpteurs  el 
lectes. 

Elle  fut  supprimée  par  la  Convention  en  août  1793. 
Mais  un  décret  du  Directoire  du  3  brumaire  an  IV 
(25  octobre  179o]  la  rétablit.  Parce  décret,  le  séjour 
des  lauréats  en  Italie  était  lixé  à  cinq  années.  Le 
concours  pour  les  prix  de  peinture,  de  sculpture  el 
d'architecture,  institué  en  179G,  eut  lieu  pour  la  pre- 
mière fois  en  1797.  Le  directeur  de  l'Académie,  Suvée, 
ne  s'installa  à  Rome  qu'en  1801,  et,  quelques  années 
plus  tard,  il  échangeait  l'ancien  palais  de  Nevers  ou 
palais  Mancini  qu'il  avait  d'abord  occupé  conlre  la 


:!.-.r,r. 


ENCYCLOPÉnrE  de  ia  musique  et  dictionnaire  nu  conservatoire 


villa  Médicis,  qui,  depuis  lors,  est  restée  le  siège 
officie]  de  l'Académie  et  la  résidence  des  pension- 
naires. Voici  la  liste  des  directeurs  successifs  de 
L'Académie  : 


{<,',:; 


-  1S28. 


:     schn         [787-1  S70         —  «8*0  et  1852. 

S.  Alauj     i:-      1S6J        —  1846. 

■)    Robert-Fleurv     1797-1890  —  1866. 

!,,'    m  1817-  —  1867  et  1885. 

11.  Lenepveu     1819-1898) -  1873. 

12.  Cab       :    12   1893 -  1879. 

13.  GuUla  une    1822-1905) -  1891. 

14.  CarolusDuran  (1837-1917) —  1904. 

15.  Albert  Besnard  (1849-  ....  —  1913. 

16.  Denys  Puech  (1S55-         )...    .  —  1921. 

Le  prix  de  composition  musicale  ne  fut  institué 
qu'en  1803. 

S.  Règlmicnt  île  l'Académie  de  France 
â  Rome  (1008). 

SOMMAIRE.  —  Chapitre  I.  Personnel  de  l'Académie  à  Rome.  —  1. 
Du  Directeur.  —  2.  Des  pensionnaires.  —  3.  Du  traitement  des 
pensionnaires.  —  Des  voyages.  =  Chapitre  II.  Travaux  des  pen- 
sionnaires. —  1.  Etudes  générales.  —  2.  Etudes  spéciales  for- 
mant les  envois  obligatoires.  —  Envois  :  a)  des  peintres  ;  b)  de: 
sculpteurs ,  c)  des  architectes;  cl)  des  graveurs  en  taille-douce 
e)des  graveurs  en  médailles  et  en  pierres  fines:  f)  des  compo- 
siteurs de  musique.  =  Chapitre  III  De  l'exposition  des  envois 
à  Rome  et  à  Paris.  —  Du  rapport  de  l'Académie  des  beaux-arts 
sur  les  envois.  =  Chapitre  IV.  De  la  retenue.  —  Des  mesures 
que  peut  entrainer  la  non-exécution  des  envois  obligatoires. 
=  Chapitre  V.  Règles  d'ordre  établies  à  l'Académie  de  France  à 
Rome. 

Chapitre  I.  —  Personnel  de  l'Académie  de  France 
a  Rome. 

1.  Du  directeur.  —  Article  premier.  —  L'Académie 
de  France  à  Rome  est  placée  sous  l'autorité  d'un  di- 
recteur, nommé  pour  six  ans,  par  décret  rendu  sur 
la  proposition  du  ministre  et  choisi  sur  une  liste  de 
trois  candidats  établie  par  L'Académie  îles  beaux- 
arts. 

Art.  2.  —  Le  directeur,  indépendamment  de  ses 
fonctions  administratives,  exerce  un  contrôle  sur  les 
travaux  obligatoires  des  pensionnaires.  Llcorre  pond 
avec  l'Académie  pour  tout  ce  qui 
vaux  et  intéresse  l'art  et  les  études.  Il  lient  un  re- 
gistre spécial  snr  lequel  sont  inscrits,  chaque  année, 
Les  sujets  des  envois  avec  l'indication  des 
de  ceux-ci,  ainsi  qu'il  est  dit  à  l'article  22. 

Le    directeur    peut    accorder   aux    pi 
L'autorisation    de   voyager    dans    t'ir  leurs 

études.  II  peut  leur  accorder  des  congi  5.  !1  devra 
aviser  immédiatement  le  ministre  et  l'Académie 
des  beaux-arts  de  toutes  les  autorisations  de  ce 
genre  qu'il  aura  données  aux  pensionnaires. 

2.  Des  pensionnaires.  —  Art.  3.  — 

qui  ont  remporté  les  premiers  Grands  Prix  de  Rome 
sont  pensionnée  par  l'Etal,  à  savoir  les  peintres,  les 
sculpteurs,  les  architectes,  les  -laveurs  en  taille- 
douce  et  les  compositeurs  musiciens  pendant  quatre 
années;  les  graveurs  en  médailles  et  eu 
troi    années  ' , 


Art.  4.  —  Tout  pensionnaire  est  tenu  de  quitter 
Paris  au  plus  tard  le  1er  décembre;  de  justifier  de 
sa  présence  à  Florence  et  de  se  trouver  à  Rome  au 
plus  tard  avant  la  fin  de  janvier.  Faute  par  lui  de 
remplir  ces  obligations,  il  perdra  son  titre  et  ses 
droits  de  pensionnaire,  par  arrêté  ministériel  rendu 
après  avis  de  l'Académie. 

Art.  5.  —  Les  pensionnaires  en  arrivant  à  Rome 
doivent  se  présenter  au  directeur  :  ils  ne  peuvent 
être  reconnus  par  lui  en  qualité  de  pensionnaires 
qu'autant  qu'ils  sont  pourvus  des  documents  officiels 
établissant  leur  qualité  de  Grands  Prix  de  Home.  Ces 
pièces  sont  enregistrées  et  remises  ensuite  aux  titu- 
laires. A  la  suite  de  cet  enregistrement,  le  directeur 
donne  lecture  aux  pensionnaires  du  règlement  qui 
les  concerne  et  leur  en  remet  un  exemplaire. 

Art.  0.  —  Pendant  leur  séjour  à  Home,  les  pen- 
sionnaires sont  tenus  d'habiter  le  palais  de  l'Acadé- 
mie et  d'y  prendre  leurs  repas  à  une  table  commune. 
Art.  7.  —  Les  artistes  mariés  ne  pouvant  être  ad- 
mis au  concours  pour  les  prix  de  Home  ni,  par  con- 
séquent, devenir  pensionnaires,  le  pensionnaire  qui 
se  marierait  pendant  la  durée  de  sa  pension  perdrait 
le  bénéfice  de  eeLte  pension2. 

Art.  8.  —  Tout  pensionnaire  désirant  faire  un 
voyage  d'études,  exécuter  des  envois  ou  compléter 
son  exposition  dans  des  conditions  non  prévues  par 
le  présent  règlement,  devra  en  faire  la  demande  au 
directeur. 

Le  directeur  pourra  lui  donner  toute  autorisation 
à  cet  é^ard,  sans  cependant  lui  accorder  aucune 
indemnité  supplémentaire. 

3.  Du  traitement  des  pensionnaires;  des  voya- 
ges. —  Art.  9.  —  Chaque  pensionnaire,  en  quittant 
Paris  pour  se  rendre  a  Rome,  reçoit  une  somme  de 
600  francs  pour  les  frais  de  son  vo\  âge  ;. 

Art.  10.  —  Il  est  annuellement  alloué  à  chaque 
pensionnaire,  pendant  son  séj  our  à  Home,  une  somme 
totale  de  3.310  francs  qui  se  décompose  de  la  ma- 
nière suivante  : 

i°  Traitement  annuel 2.310  fr. 

Cette  somme  esl  payée  au  pensionnaire  dans  les 

ter -  détermini     ci-api 

2,010  fi  mes  à  raison  de  167  fr.  50  par  mois,  qui 

m  m:  .-il  .-  iiiij-i  .     i.;n  ■  pensionnaire  pour 

-ii!-»'  ai:  .      ■  -i-'-  el  i  son  enti  -  tien  . 

Kl  300  francs  qui  foi  rm-iil  uni.'  retenue  au  fends  de 
réserve  dmil  il  e-l  lenu  rumntè  au  pensiimi 
fin  de  sa  pension,  comme  il  esl  dil  au  chapitre  tv  du 

présent  ivrjlenienl. 

2°  Indemnité  .le  table 1.200  fr. 

Une  somme  de  1,2  -h... m--  pai  tête  poui   indem 
nité  de  table  de  i  lia  ,-  ouée  au 

directeur  qui  en  l  ■  ■  i* r  .  .mpie  nu  p  (.-i-muaire  à  rai- 
son de  100  francs  par  mois. 

Tota) 

En  outre,  les  pensionnnaires  reçoivent  .:i  La  lin  de 
chaque  ani une  indemnité  de  frais  d'études  ré- 
glée dans  les  proportions  suivantes  : 


1.  Nonobstant  le  retr  im  ni  m 

ensionnairea  di   1  \.  adéi li  !  rance  a  Rome  p  u  led 

-  i    lu  lion mue  p  ir  le  décret   lu       novembre  i .-' 

ctuellement  en  vigueur,  l'Académie  ala  contkim  ■     ie  les  dispositic 


des  anciennesorc) tan [ui  i»  ii.  al  p  .urli  -  p  lintre    le 

|.-     .i  elnleetes,    t.-       .-  .i.  i lit.-     loin-      et    les    i  ompOSitl  '"  S    il  ■ 

musiquei   la  durée  île  la    peu-i.  n   .1  eui  |    années  el    "i    ipeitie  .lus  pour 

I,--   peniti-"s  Je    p  "  -•'  -■■-   '  f     '--   ■-'  "  --"i  -  >   >   n.     i  ni 

fines  seront  remises  en  vigueur  lorsque  Les  raisons  d'économie  'tout 

-',-,1  inspiré  te  dernier  .1. I    Ura-li'i I  plu-. 

J.    I  et   .irtieie  u   été    lilie    par   le   iléri-el    il 

stipule  iiuc  les  artistes  mariés   peuvent   c rir  pour  le  prix  de 

Il ■    I  outefois    li"  peu  iuini  lires  ai     i expre 

,lo  Inirer  un  rlelnirs  de  I  i    vilU  Me, II-  i-.    ni  i-    -  eu  1    ur  famille  les  aè- 


de loger  en  dehors  de  1 1  villa  ilédic 

ip  tgnerail  S  Rome. 

,:    Ce  chiffre  a  éU lifi*     en 

au  retour  seul  porli  r.    N.  0.  L.  D.) 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    35CT 


Petofcesfinde  \  lr°  ct  2°      5"  /         Pour  frais 

(S  ^,de  la  copie  peinte. 

Sculpteurs Ire,2c,  3e  50 

_        à=  300 

S.rchilectes  lre  et  2°       50  )Bour  frais  de  fouille 

_        ..'"' 3e  600'.        a  l'occasion 

— 4°  300  I  de  la  restauration. 

.,-,,,  i       Sans  compter 

Graveurs  en  médailles  et    l,c     c     ,  .,,,  /     les  frais  d.achat 

P'erres  "nei I     de  pierres  fines. 

i  1"  30  i  pour  frais  d'achat 


jrs  en  taille-douce. 


Musiciens- Compositeur* 


Pour  frais  de  cop 
de  chaque  envoi 


[La  situation  des  Grands  Prix  de  Rome,  en  1929,  est  la  sui- 
vante. 

Pensions 20  ( francs. 

Frais  d'études  : 

Peintres,     1"  année 2900  francs. 

2=     —       3  500  — 

3=     —       4  000  — 

Sculpteurs,  1"  année 2  900  — 

2»      —      3  500  — 

30     —       4  000  — 

Voyage  en  Grèce 3000  — 

Indemnité  marbre 12  000  — 

—      copie  marbre 2  400  — 

Architectes,  1»  année -'son  — 

2e     —         4  000  — 

3e     _       '  ' 5  000  — 

Voyagi   en  Grèci 5 )  — 

Graveurs  en  médailles, 

iro  année 2  000  — 

ge     —            2  000  — 

3°     —       '. 2  000  — 

Graveurs  en  taille  douce. 

ire  année 1200  — 

2o     —       2  100  - 

3=     — 1  200  — 

Musiciens,      («année 500  — 

■>■      — 500  — 

:;■■     —       570 

N.  I".  L.  D.] 

Art.  11.  —  Chaque  pensionnaire,,  à  l'expiration  de 

sa  pension,  reçoit  une  indemnité  de  retour  en  France 
de  600  lianes.  Cette  somme  lut  est  versée  à  Rome1. 

Art.  1:!.  —  Lorsque  les  pensionnaires  sonl  en 
voyage,  leur  traitement  leur  est  pavé  à  raison  de 
267  fr.  :10  par  mois  par  les  soins  du  directeur  -. 

Art.  13.  —  route  al  --ace  non  autorisée  par  écrit 
par  le  Directeur  pourra  entraîner,  pour  le  pension- 
naire, la  perte  de  sa  pension,  prononcée  par  arrêté 
ministériel,  aptes  avis  de  l'Académie  des  beaux-arts. 
En  tout  cas,  il  n'aura  droit,  pendant  la  durée  de  toute 
absence  non  autorisée,  à  aucun  traitement,  la  somme 
retenue  devant  faire  retour  au  Trésor. 

Nul  pensionnaire  ne  peut  quitter  Rome,  même 
pour  quelques  jours,  sans  l'autorisation  du  direc- 
teur de  l'Académie. 

Nul  pensionnaire  ne  peut  aller  en  Fiance  que  dans 
des  circonstances  exceptionnelles.  Les  autorisations 
de  ce  genre  ne  set  ont  accordées  que  d'après  l'avis 
de  l'Académie  des  beaux-arts  et  sur  le  rapport  favo- 
rable du  directeur. 

Art.  14.  —  Les  autorisations  de  voyager  ne  pour- 
ront être  données  que  dans  des  conditions  de  temps 
telles  que  l'exécution  des  travaux  obligatoires  de- 
meure assurée. 


)>'-■>-  uclueileimni     -:    '     [■    i    1 


Art.  13.  —  lin  ce  qui  concerne  les  musiciens  com- 
positeurs, après  deux  années  passées  à  Rome  et  en 
Italie,  ils  devront  visiter  l'Allemagne,  l'Autriche- 
Hongrie,  et  y  séjourner  au  moins  une  année.  Quant 
à  la  dernière  année  de  leur  pension,  ils  la  passeront 
soit  à  l'Académie  de  France,  soit  dans  le  pays  qu'ils 
auront  ebeisi,  après  en  avoir  fait  part  au  directeur. 

Les  pensionnaires  musiciens,  à  partir  de  l'époque 
où  ils  auront  quitté  Rome,  n'étant  plus  placés  sous 
l'autorité1  immédiate  du  directeur  de  l'Académie  de 
France  à  Rome,  devront  faire  parvenir  les  travaux 
constituant  l'envoi  de  l'année  au  secrétariat  de  l'Ins- 
titut, a  Paris,  le  6  juin,  sous  peine  de  perdre  la  rete- 
nue imposée  à  tous  les  pensionnaires,  comme  ga- 
rantie de  leurs  travaux  et  de  leurs  obligations. 

Après  que  les  pensionnaires  compositeurs  auront 
définitivement  quitté'  Rame,  cette  retenuede  garantie 
sera  renvoyée  par  le  directeur  au  Ministère  et  ne 
sera  restituée  aux  pensionnaires  que  sur  l'avis  de 
l'Académie  des  beaux-arts  constatant  que  ces  pen- 
sionnaires ont  rempli  leurs  obligations. 

Chapitre  II.  —  Travaux  des  pensionnaiuks. 

Art.  16.  —  Les  pensionnaires  exécutent  chaque 
année  des  travaux  dont  le  caractère,  la  nature  et 
l'ordre  sont  déterminés  ci-api  es. 

Art.  17.  —  Les  travaux  des  pensionnaires  consis- 
tent :  1°  en  des  études  générales  propres  ,i  déve- 
lopper l'instruction  et  le  talent;  2°  en  des  études 
spéciales  concernant  chaque  art  et  dont  les  résultats 
constituent  les  envois. 

1.  Etudes  générales.  —  Art.  18.  —  La  bibliothè- 
que de  l'Académie  esJ  ouverte  tous  les  jours  aux 
pensionnaires.  L'entrée  leur  en  est  exclusivement 
réservée,  sauf  les  autorisations  qui  pourraient  être 
accordées  par  le  directeur. 

2.  Etudes  spéciales.  —  Art.  19.  —  Les  études 
dont  le  résultat  constitue  les  envois  et  qui  ont  un 
caractère  rigoureusement  obligatoire  sont  réglées, 
pour  chaque  section  et  pour  chaque  année  de  la  pen- 
sion, de  la  manière  suivante  : 

Art.  20. —  En  principe,  tout  pensionnaire  qui, 
ayant  obtenu  un  deuxième  premier  grand  prix, 
n'aura  a  jouir  que  de  trois  ou  de  deux  années  de  pen- 
sion,  devra,  pour  remplir  ses  obligations,  exécuter 
les  travaux  demandés  par  le  règlement  aux  pension- 
naires, à  partir  de  la  seconde  ou  de  la  troisième 
année  de  leur  pension. 

Les  musiciens,  pendant  leur  séjour  à  l'Académie, 
sont  tenus  de  faire  savoir  au  directeur  quels  sont  les 
sujets  qu'il  se  propose  de  traiter. 

L'acceptation  de  ces  divers  sujets  d'envoi,  de  leur 
développement  et  de  leurs  dimensions,  sera  inscrite 
sur  un  registre  spécial.  l'Ile  sera  contresignée  par 
chaque  pensionnaire  en  ce  qui  le  concerne. 

Si,  dans  le  courant  de  l'année,  un  pensionnaire 
est  amené  à  changer  le  sujet  de  son  envoi,  il  doit  en 
faire  la  déclaration  au  directeur.  Dans  ce  cas  nou- 
veau, il  est  procédé  ainsi  qu'il  a  été  dit  ci-dessus. 

Tous  les  ans,  avant  le  15  janvier,  le  directeur 
adresse  à  l'Académie  un  rapport  indiquant  l'état 
d'avancement  des  travaux  de  tous  les  pensionnaires  : 
à  cet  elTel,  ceux-ci  devront  faciliter  au  Directeur  les 
constatations  qui  lui  seront  m  cessaires... 

Pensionnaires  compositeurs  de  musique.  —  Le 
pensionnaire  musicien  devra  : 

Dans  la  première  année  de  sa  pension  : 

1°  Composer  une  œuvre  importante  de  musique 


'NCYC.I.OPÉniE  OE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIOXNAIRE  OU  CONSERVATOIRE 


de  chambre  à  son  choix,  de  p 
pour  instruments  à  cordes; 


■rence  un  quatuor 


2°  Composer  six  pièces  de  courte  durée  pour  chant 
à  une  ou  plusieurs  voix,  avec  accompagnement  d'or- 
chestre et  réduction  séparée  pour  chant  et  piano. 
Dans  la  seconde  année  : 

1"  Composer  soil  une  symphonie  en  quatre  parties, 
soit  une  œuvre  symphonique,  en  deux  parties  au 
moins,  représentant  la  même  somme  de  travail,  avec 
réduction  de  piano  à  deux  ou  à  quatre  mains  en 
partition  ; 

2°  Composer  soit  une  scène  dramatique  à  un,  deux 
ou  trois  personnages,  sur  des  paroles  françaises  ou 
italiennes  avec  orchestre;  soit  un  molet  également 
avec  orchestre  et  réduction  séparée,  pour  chant  et 
piano  ; 

3°  Chercher  dans  les  bibliothèques,  parmi  les 
œuvres  peu  connues  des  xvie,  xvne  ou  xvm"  siècles, 
vocales  ou  instrumentales,  une  œuvre  intéressante, 
la  copier  ou  la  mettre  en  partition,  en  la  traduisant, 
s'il  y  a  lieu,  en  notation  moderne. 

La  copie  du  pensionnaire  sera  déposée  à  la  Biblio- 
thèque du  Conservatoire. 
Dans  la  3e  année  : 

io  Composer  un  oratorio  sur  des  paroles  fran- 
çaises, italiennes  ou  latines  :  ou  bien,  à  son  choix  : 
soil  une  messe  solennelle,  soit  une  messe  ieRequiem, 
soit  un  Te  Dcum,  soit  un  grand  Psaume;  ou  encore 
une  œuvre  vocale  et  symphonique  avec  soli,  chœurs, 
et  orchestre,  en  deux  parties  au  moins,  sur  un  poème 
nouveau  ou  ancien;  ou  enfin  un  opéra,  soit  tragique, 
soit  comique,  en  deux  actes  au  moins,  sur  un  livret 
nouveau  ou  ancien,  pourvu  que  ce  poème  ou  livret 
ait  été  approuvé,  soit  par  le  directeur  de  L'Académie 
de  France  à  Home,  soit  par  la  section  de  composi- 
tion musicale  de  l'Académie  des  beaux-arts. 

Une  réduction  séparée,  pour  chant  et  piano,  devra 
accompagner  L'œuvre  envoyée; 

2°  Composer  le  morceau  symphonique  destiné  à 
être  exécuté  au  commencement  de  la  séance  publi- 
que annuelle  de  l'Académie,  après  avoir  été  préala- 
blement soumis  au  jugement  de  la  section  de  com- 
position musicale. 

Vnc  réduction  de  ce  morceau  devra  être  faite  pour 
le  piano  à  deux  ou  à  quatre  mains. 
Dans  la  quatrième  année  : 

1"  Même  programme  que  pour  la  première  partie 
des  obligations  qui  incombent  aux  pensionnaires  de 
troisième  année,  en  observant  toutefois  que  le  tra- 
vail devra  porter  sur  un  sujet  d'un  genre  différent; 
2°  Chercher  dans  les  bibliothèques  françaises, 
parmi  les  œuvres  de  l'école  française  des  xvie,  vrii* 
"ou  xvme  siècles,  vocales  ou  instrumentales,  une  œuvre 
intéressante,  la  copier  ou  la  mettre  en  partition,  en 
la  traduisant,  s'il  y  a  lieu,  en  notation  modei  ne. 

La  copie  du  pensionnaire  sera  déposée  à  la  Biblio- 
thèque du  Conservatoire1. 

Lrt.  32.  —  Les  pensionnaires  musiciens  sont  au- 
torisésà  intervertir  l'ordre  de leurs'envois.  Toutefois, 
l'envoi  de  troisième  année  devra  toujours  comporter 
le  morceau  symphonique  destiné  à  être  exécuté  au 
commencement  de  la  séance  publique  annuelle  de 
l'Académie  des  beaux-arts. 

Si  un  pensionnaire  entreprend  un  ouvrage  impor- 


tant :  opéra,  drame  lyrique,  oratorio,  poème  lyrique 
et  symphonique  avec  chœurs,  etc.,  d'au  moins  trois 
parties,  il  est  autorisé  à  en  répartir  les  envois,  par 
moitié  environ,  sur  deux  années  consécutives  de  sa 
pension. 

En  ce  cas,  ce  travail  se  substituera  à  celui  exigé' 
par  les  premiers  de  la  troisième  et  de  la  quatrième 
année. 

Nota.  —  Les  pensionnaires  compositeurs  de  mu- 
sique jouissent  de  leur  entrée  aux  théâtres  lyriques 
nationaux  pendant  le  temps  de  leur  pension  qu'ils 
sont  autorisés  à  passer  à  Paris. 


Chapitre  III. 


Exposition  des 
et  a  Paris. 


1.  Les  p  « 
pliraient  p;»* 
raient  déchu: 
Pioette. 


es  musiciens  sont  avcrlis  que  ceux  q 
ngagemeots  avec  une  scrupuleuse  eia 

.  Jruils  ,i  la  pension  et  au  bénéfice  de  1 


,lr^.  33.  —  Les  travaux  obligatoires  doivent  être 
mis  à  la  disposition  du  directeur  chaque  année,  le 
Ier  mai. 

Art.  34.  —  Il  y  a  tous  les  ans,  au  8  mai  et  pen- 
dant huit  jours,  exposition  publique  à  l'Académie  de 
France  des  travaux  obligatoires  des  pensionnaires 
peintres,  sculpteurs,  architectes,  graveurs  en  laille- 
douce,  graveurs  en  médailles  et  graveurs  en  pierres 
fines. 

Les  travaux  exécutés  par  les  pensionnaires  pein- 
tres, sculpteurs,  graveurs  en  taille-douce,  graveurs 
en  médailles  et  graveurs  en  pierres  fines  de  première 
année,  depuis  leur  arrivée  jusqu'au  mois  de  mai, 
pourront  figurer  à  cette  exposition  avec  l'approba- 
tion du  directeur  de  l'Académie. 

Cette  exposition  est.  [précédée  par  l'exécution  de 
morceaux  de  musique  de  courte  durée  composés  par 
les  musiciens  de  première  et  de  deuxième  année  et 
faisant  partie  de  leurs  envois. 

Les  pensionnaires  musiciens  de  Ire  année  pourront 
présenter  à  cette  exécution  deux  des  pièces  de  courte 
durée,  avec  accompagnement  d'orchestre,  qu'ils  au- 
ront composées  depuis  leur  arrivée. 

.1/7.  3o.  — Les  pensionnaires  musiciens  de  iro  et 
de  -"  année  devront  remettre  leurs  envois  au  direc- 
teur de  l'Académie  à  l'époque  réglementaire,  c'est- 
à-dire  le  L«  mai  de  chaque  année.  Les  pensionnaires 
musiciens  ayant  achevé  leurs  deux  aimées  de  séjour 
,  R  ime,  ne  pourront  quitter  l'Académie  qu'après 
avoir  Livré  au  directeur  leur  travail  de  2e  année. 

Les  pensionnaires  de  Ie  et  L-«  année  sonl  tenus  de 
raii  i  pai  renir  leurs  envois  le  6  juin  au  plus  lard  au 
secrétariat  de  l'ïnslitut. 

Tout  pensionnaire  qui  n'aurail  pas  satisfail  aux 

clauses  du  règlement  perdra  ses  droits  à  l'exécution 

ivres  au  Conservatoire  de  musique. 

i,7.  36.  -  Se  sonl  admis  en  principe  h  L'exposi- 
tion du  8  mai  que  les  travaux  demandés  par  l  :  rè- 
glement. 

Toutefois,  les  pensionnaires  qui  se  seronl  com 
plètement  acquittés  de  leurs  travaux  n  glementaires 
pourront  être  autorisés  par  le  directeur  a  exposer,  en 
même  tempsjque  ces  travaux,  les  travaux  supplémen- 
taires qu'ils  auraient  exécutés. 

Si  ces  travaux  supplémentaires  sonl  soumis  à 
l'examen  de  l'Académie  des  beaux-arts,  ils  pourront 
être  exposés  a  Paris  en  même  temps  que  1rs  envois. 

Les  pensionnaires  de  4e  année  pourront  être  auto- 
risés par  l'Académie  des  beaux-arts  à  exposer  à 
Paris,  en  même  temps  que  leur  dernier  envoi,  leurs 
envois  précédents,  ainsi  que  l'ensemble  de  leurs 
travaux,  études,  compositions,  etc. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    356 


Art.  37.  —  Immédiatement  après  l'exposition  de 
Rome,  les  travaux  des  pensionnaires  seront  expédiés 
à  Paris  pour  être  examinés  par  l'Académie  des  beaux- 
arts,  puis  exposés  pendant  une  semaine  à  l'Ecole 
Nationale  des  beaux-arts.  Cette  exposition  aura  lieu 
dans  la  seconde  quinzaine  du  mois  dejuin. 

Art.  38.  —  Le  rapport  de  l'Académie  des  beaux- 
arts  sur  les  envois  des  pensionnaires  est  adressé  au 
ministre,  qui  le  fait  insérer  au  Journal  officiel.  Copie 
en  est  transmise  au  directeur  de  l'Académie  de  France 
à  Home,  pour  que  chaque  pensionnaire  ait  par  ses 
soins  connaissance  des  parties  de  ce  document  qui 
le  concernent. 

Chapitre  IV.  —  De  la  retenue.  —  Des  mesures  oie 

PEUT     ENTRAÎNER     LA     NON  -EXÉCUTION      DES      TRAVAUX 
OBLIGATOIRES. 

Irt.  39.  —  La  retenue  mensuelle  exercée  sur  les 
traitements  des  pensionnaires  étant  destinée  à  ga- 
rantir l'exécution  de  leurs  travaux,  nul  d'entre  eux 
n'aura  droit  à  toucher  le  montant  de  cette  retenue 
avant  le  terme  de  sa  pension  et  avant  qu'il  ait  rem- 
pli toutes  les  obligations  réglementaires. 

Art.  40.  —  Toutefois,  si  un  pensionnaire  justifie 
auprès  du  directeur  du  besoin  qu'il  a  d'une  partie  de 
sa  retenue  pour  terminer  son  travail  de  dernière 
année,  il  pourra  en  obtenir  une  partie  qui,  en  aucun 
cas,  ne  dépassera  la  moitié  de  la  somme  totale.  Le 
solde  de  la  seconde  moitié'  ne  pourra  être  touché- 
avant  que  le  dernier  envoi  soit  accepte  par  l'Acadé- 
mie des  Beaux-Arts1. 

Art.  il.  —  Tout  pensionnaire  qui  n'aura  pas  exé- 
cuté son  travail  de  dernière  année  ou  ne  l'aura  pas 
livré  au  directeur  de  l'Académie  pour  être  exposé  à 
Home  ne  touchera  pas  sa  retenue. 

Art.  t2.  —  Lorsqu'un  pensionnaire  aura  laisse  s'é- 
couler deux  années  sans  satisfaire  à  ses  obligations, 
sa  retenue,  ou  la  partie  restante  de  sa  retenue,  fera 
retour  au  Trésor. 

Art.  43.  —  Quand  un  pensionnaire  n'aura  pas  rempli 
ses  obligations  pendant  deux  années,  l'Académie  des 
beaux-arts  sera  saisie  du  fait  par  le  directeur.  Elle  en 
fera  l'objet  d'un  rapport  au  ministre  en  demandant 
que  le  pensionnaire  soit  privé  de  sa  pension,  sauf  le 
cas  où  il  pourrait  invoquer  un  cas  de  force  majeure. 


Ch, 


?ITRE    V.    —    RÈGLES    D'ORDRE    ÉTABLIES 

a  l'Académie  de  France  a   H  ime. 


Art.  44.  —  Le  temps  des  pensionnaires  devant  être 
exclusivement  consacré  à  l'étude,  il  leur  est  interdit 
de  se  livrer  a  aucun  travail  de  spéculation. 

Art.  ï'i.  —  La  distribution  des  chambres  et  des 
ateliers  se  fait  par  le  directeur  de  l'Académie,  à  rai- 
son de  la  nature  de  chaque  art,  et  en  tenant  compte 
du  droit  d'ancienneté  de  nomination  des  pension- 
naires. 

Les  pensionnaires  ayant  terminé  leur  pension  de- 
vront rendre  libres  les  locaux  qu'ils  occupent,  aussi- 
lét  apiès  l'exposition  des  envois  de  Rome. 

Un  état  de.-  lieux  est  dressé  à  l'arrivée  de  chaque 
pensionnaire. 

Art.  46.  —  11  est  expressément  interdit  d'emporter 
hors  du  Palais  de  l'Académie  les  livres  et  autres 
objets  appartenant  à  l'établissement. 


Art.  47.  —  Il  est  expressément  défendu  de  trans- 
porter les  plâtres  de  la  galerie  de  sculpture  et  d'ar- 
chitecture hors  du  lieu  où  ils  sont  placés  pour  l'é- 


tude commune,  sans  l'autorisation  du  directeur. 

Art.  48.  —  Chaque  pensionnaire  est  responsable 
pécuniairement  du  mobilier  de  sa  chambre  et  de  son 
atelier;  il  doit,  avant  son  départ  de  Rome,  le  repré- 
senter au  complet  et  en  bon  état  au  directeur  de 
l'Académie. 

Art.  49.  —  Les  pensionnaires  se  réunissent  aux 
heures  indiquées  à  une  table  commune  pour  le 
déjeuner  et  le  dîner.  Les  repas  sont  servis  dans  la 
salle  destinée  à  cet  usage.  Les  pensionnaires  ne  peu- 
vent invitera  leur  table  aucune  personne  étrangère 
à  l'Académie. 

Il  est  interdit  de  prendre  les  repas  dans  les  cham- 
bres, à  moins  d'indisposition  constatée  par  le  service 
médical. 

Art.  50.  —  11  est  interdit  aux  pensionnaires  de 
retenir  pendant  la  nuit  dans  le  Palais  de  l'Ai  adérajé 
de  France  qui  que  ce  soit,  sous  quelque  prétexte  que 
ce  soit. 

Pour  le  maintien  de  l'ordre  et  la  sûreté,  les  portes 
du  Palais  doivent  être  fermées  à  minuit. 

Art.  ai.  —  Les  pensionnaires,  placés  sous  la  pro- 
tection du  gouvernement  de  la  Répub/iqu 
n'oublieront    jamais    que   leur   conduite    doit    être 
irréprochable. 

Art.  52.  — ,  Tout  pensionnaire  qui  aurait  commis 
une  infraction  grave  aux  lois  du  pays  dans  lequel 
il  se  trouvera,  pourra,  sur  le  rapport  du  directeur  de 
l'Académie  adressé  au  ministre,  être  privé  de  sa 
pension. 

:i.  Liste  des  lauréats  des  concours 
au  Grand  Prix  de  Itoiuc. 


i. 'imposition  musicale'.  —  Alcijoae,   scèi.-a 
citoyen  Arnault.  — Grand  Prix  :  A 
Paris,  en  1781,  élève  du  citoyen  Gossec. 


Grand  Prix.  — 

le  8  avril  1780,  élève 

Paul),  né  ;i  bunkerque,  le  3 1 


ihe.  —  Pas  de 
i),  né  àNaples, 

Victor-Cliai'k-s- 
:  de  M.  Gossec. 


1805. 
—  Cupiion  pleurant  Psyché,  par  M.  Arnault. 
'a   Dunker- 
.-.,■. 
i  r80,  ilèved    mm.  Gossec  et  Cvtel. 
1806. 
i 
tor.  —  Grand  Prix 
1788,  élève  ■!"  M.  '  ■    ■     .  —  Second  Pri 

i  -ure. 
1807. 

né  à  Givel   Ardennes 

— 

Iil.OSDE.U-     AU 

de  M.  Mêhcl. 

1808. 

Marie  Stuiirl , 
Prix  :  Bloxdi  ■         ■  . 

élève  de  M.  M:  econd  Prix. 


:         ...  —      ■ 
.  (Joseph),  né  à  Givel 


s.-.-i 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


21  juin  1790,  élève  de  M.  Muni..  —  Seconda  Prix  :  Beaulieu 
(Marie-Désiré-Martin),  né  ii  Paris,  le  il  avril  1791,  élève  de 
M.  Mi  ht-i  ;  Vidal  (Jean-Jacques),  né  à  Sorèze(Tarn),  le  7  mars 
1789,  i  lève  de  M.  Gossec. 

1810. 
Hèro,  cantate,  p  ir  M.  de  Saint- Victor.  —  Grand  Prix  :  Beau- 
.ii  i     Marie- DésiréTMartin),  né  à  Pan»,  le  il  avril  1791,  élève,de 
M.  Meuul. 

1811. 
Ariane,  cantate,  par  M.  de  Saint-Victor.  —  Grand  Prix  :  Che- 
lari.  (Hippolyte-André-Jean-Baptiste),  né  à  Paris,  le  1"  février 
1789,  élève  de  M.  Gosskc.  —  Second  Prix  :  Cazot  (Félix),  né  à 
Orléans,  en  1790,  élève  de  M.  Gossec. 
1812. 
ta  Duchesse  île  La  Vallière,  cantate/par  M.d'Avrignj .  —  Grands 
Prix  :  Hérold  (Louis-Joseph-Ferdinand),  né  à  Paris,  le  29  jan- 
vier  1791,  élève  de  M.   Méhul;  Cazot  (Félix),  né  à  Orléans,  le 
6  avril  1790,  élève  de  M.  Gossec. 
1813. 
Herminie,  scène  lyrique,  par  M.  Vieillard.  — Grand  Prix  :  Pan- 
i       ,     \a.u-io. Mathieu),  né  à  Paris,  le  20  avril  1795,  élève  de 
MM.  GossEcJet  Berton.  —  Second  Prix  :  Roll  (Pierre-Gaspard), 
née  Poitiers,  le  5  octobre  1787,  élève  de  MM.  Reicha  et  Berton. 
1814. 
Atttitt,  cantate,  par  M.  Vieillard.—  Grand  Prix  :  Roll  (Pierre- 
Gaspard),  né  à  Poitiers,  le  5  octobre  1787,  élève  de  MM.  Reicha 
et  Berton. 

1815. 
CEnone,  scène  lyrique,  par  M.  Vieillard.  —  Grand  Prix  :  Be- 
noist  (François),  né  à  Nantes,  le  10  septembre  179-5,  élève  de 
M.  Catel. 

•1816. 
Les  deniers  nuane ,:  ■  '  Ta;  .e,  cantate,  par  M.  de  Jouy.  —  Pas 
de  Grand  Prix.  —  Seconds  Prix  :  Batton  ^Désiré-Alexandre),  né 
a  Paris,  le  2  janvier  1798,  élève  de  M.  Cherubini;  II.vi.évy  (Jac- 
ques-Fromental-Elie),  né  a  Paris,  le  26  mai  1799,  élève  de 
M.  Cherubini. 

1817. 
Mort  d'Adonis,  cantate,  par  M.  Vinaty.  —  Grand  Prix:  Batton 
trhr  ,    né  à  Paris,   le  2  janvier    1798,  élève   de 
M.  Cherubini.  —  Second  Prix   :  Halévï  (Jacques-Fromental- 
Elie  ,  ni  a  Paris,  le  26  mai  1799,  élève  de  M.  Cherubini. 

1818. 

Jeanne  d'Arc,  cantate,  par  M.  Vinaty.  —  Pas  de  Grand  Prix. 
sec  md  Prix  :  Leborne  (Aimé-Ambroise-Simon),  né  à  Bruxelles, 
le  29  décembre  1797,  élève  de  M.  Cherubini. 
1819. 

Ileiiiiinie.  cantate,  par  M.  Vinaty.  —  Grands  Prix  :  Halévt 
(Jacques-Fromental-Elie),  né  à  Paris,  le  26  mai  1799,  élève  de 
M.  Cherubini:  Massin,  'lit  Turina  (Pierre-Jean-Paul-Crépin), 
né  à  Alexandi  ie.le  ;  :  I T ■  ■  T .  élève  de  M.  Reicha.  —  Second 
Prix  :   Poisso       ri   .       nt-René  ,  né   à   Paris,  le  8  juin  1796, 

élève  d  i  M.  l: ■  .  —  Médaille  d'argent  :   Defhange  (Benoît- 

Kmmanuel).  né  à  l'a:       eu  i;:i:,,  ,'■  I .'_■  v .- . I . ■  M.  Reicha. 


1820. 


: 
Victor-Etienne), 
M.  Berton. 


;   . 

(Kd.mar. 


ud  Prix  : 

9  dècem- 

:T(Louis- 


1821. 

M.  Vinaty.—  Grand  Prix  :  Rifact  (Louis- 
à.    Paris,    le    11    janvier    179S,    élève    de 

1822. 

ni.  scène  lyrique,  par  M.  Vinaty.  —  Grand 

t  iseph-  luguste  .  né    •   Vi  rsailles,  en  juin 

rsi  r.i-R.  —  Seconds  prix  :  Barbereaï    (Au 

P  embre  1799, 

Fontmii  m  i   :  Hippulyte-Honoré- 

î(Var),  le  25  juin  1799,  élèvede  M.  Chelard. 


-  Grands  Prix  :  Boilly 
799,  élève  de  MM.  Boïel- 
é  .i  Gand,  le  27  décem- 
ndsPrix  :  Simon  (Maxi- 
eve  de  M.  I.esueur;  La- 
1805,  élève  de  MM.  Boïel- 


li.ion  (Al- 

FÉTIS.  

lillet  1803, 


1825. 
scène  lyrique,  par  M.  V 


et  FÉTI' 

6  mars 
à   Pari- 


—  Grand  Prix  : 
de  MM,  Berton 
rix  :  Paris  (Claude-Joseph),  né  à  Lyon,  le 
M.  Lesuedr  ;  Adami  Adolphe-Charles),  né 
03,  élève  de  MM.   LI.iiei.uied  et  Reicha. 


Herminie,  cantate,  par  M.  Vinaty.  —  Grand  Prix  :  Paris  (Claude- 
Joseph),  né  a  Lyon,  le  6  mars  1901,  élève  de  M.  Lesuecr.  — 
Seconds  Prix  :  GciRAUD(Jean-Baptiste),né  à  Bordeaux,  en  1803, 
élève  de  M.  Lesceur  :  Bienaime  (Paul-Emile:,  né  à  Paris,  le 
7  juillet  1802,  élève  de  MM.  Berton  et  Fétis. 
1827. 


.  Berton.  —  Grand  Prix  :  Guiraud 
aux.  en  1803.  élève  de  MM.  Lescecr 
:  :  Ross-Despréadx  I  Guillaume  .  né  a 
ptemli.e    1801  ,    élève   de 


Orphée,  cantate,  pa: 
(Jean-Baptiste),  néà  Bi 
et  Reicha.  —  seconds 
Clermunt    (Puy-de-Dô 

M.  Berton;  Gilbert  (Alphonse:,  né  à  Paris,  le  29  janvier  1S04 
élève  de  M.  Berton. 

1828. 

Herminie,  cantate, par  M.  Vieillard.  —  Grand  Prix  :  Ross-Des- 
preaux  (Guillaume),  né  a  Clermont  (Puy-de-Dôme),  le  20  sep- 
tembre 1801,  élève  de  M.  Berton.  —  Seconds  Prix  :  Berlioz 
(Louis-Hector),  né  à  la  C.jte-Saint-André  (Isère),  le  11  décembre 
1803,  élève  de  MM.Lesui  i  b  el  Reicha  ;Narseot  (Pierre-Julien  , 
né  à  Paris,  le  8  juillet  1799.  élève  de  MM.  Les.  sur  et  Reicha. 

1829. 
Clèàpûtre,  cantate,  par  M.  Vieillard.  —  Pas  de  Grand  Prix.  — 
Premier  Second  Prix  :  Prévost  (Eugène),  néàParis,  le  23  avril 
1809,  élève  de  M.  Lesuecr.  —  1 xieme  >econd  Prix  :  Mont- 
fort  (Alexandre  .  néà  Pan-,  le  12  mai  1803,  élève  de  MM.  Ber- 
ton, BoTELDIEU  et  FÉTIS. 

1S30. 
Sarianapale,  cantate  par  M.  Gail.  —  Grands  Prix  :  Berlioz 
(Louis-Hector),  né  à  la  Cole-Saint-André  (Isère),  le  11  décem- 
bre 1S03,  élève  de  MM.  Lesuecr  et  Reicha;  Montfort  (Alexan- 
dre), né  à  Paris,  le  12  mai  1803,  élève  de  MM.  Berton,  Boeïl- 
diei  el  Fétis.  — Second  Prix  :  Millault  (Laurent-François- 
Edouard),  né  à  Paris,  le  13  février  1S0S,  élève  de  MM.   Boïel- 

DIEU,   Lescelu  et    FÉTIS. 

1831. 
Bianca  Capello,  cantate  par  m.  le  comte  de  Pastoret.  —  Grand 
Prix:  Prévost    Eugène),  ne.,  Paris,  le  23  avril   I 
M.  Lesie.r.  —  Seconds  Prix  :  Lagrave  (Pierre),  néà  Paris, 
le  10  mai  îSl  l .  i  :  vi         '•:  [.     Iertos  el   Fétis  ;  El wart  (An- 
toine), né  à  Par  s,  1     i  ibi     1808,  i  lèvede  M  \i 
et  Fétis.   —   Mention    honorable    :    Phomas   (Ambi     - 
Metz  (Moselle),  le  5  août  1811,  él.        !     MM.  Lksui 


1S32. 


Hermann  el  h  ! 

-  Grand  Prix  : 

élève  de  MM.  Li 

kan  (Charles-Val 

de    M.    ZlMMERMA 

.m. il  .  le  ;  déc 


■  m.  le  comte  de  Pastoret. 
ne  a  Metz,  le  è  aofil  1811, 
Mentions  h  .  i 

I  813,  .lève 

:   ,  né    ,  M  H 

I.  I.     I  '  I  1. 


I  e  Contrebandie  ■  espa  moi,  s.  eue  i,  rique,   iai   M    de  Pastoret, 
_  Grand  Prix  :   ["hys  (Alphonse  ,  né  àParis,  le  9  m  u  -    1807 . 

élève  de  MM.  B  .;  on  el  Bienaime,  I  Grand  Prix  :  Le- 

Ldolphe-Claii  .  n     i  i 
de  MM.  Lbsubi  e  el  Fi  ris, 

1834. 

/  EnlrUenhttt    par  M.  Gail         G    ind  Prix  :  Elwart  (An- 
toine .  né  e  i  '  VI    Lesoei  u 

el  fi.  u-.  —  Second  Grand  Prix  :  Coli  t  (Hue.  ly  te  Ra; od  , 

né  à  Nîmes  (Gard),  le  5  novembre  1808,  i  ve  I  MM.  Berton 
et  Reicha.  —  Deuxième  Second  Gr.  u  1  !■.■•■  .  l: blot  (Xa- 
vier .  né  a  Mei:l:  'Mot,  le  .:  .!■■,  emle  •  1  s  1 1  élève  d  MM.  Ll  - 
sdei  r.  ei  Fbtis.  —  Mention  :  l'n,  i  i  (lieii  i,  m  i .. ...  - 
(Seine),  le  I  1  octobre  1816,  élevé  de  MM.  Li  sdei  c.  et  Réoipo. 
1835. 

Achille,  scène  lyrique,  par  M.    Paulin.    —   Grand    Prix  :   Bol 
langer  (Ernest-lienri-Ale.v.ii.liv    ,  ne  a  pan-,  le    16   -cptembi, 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3571 


1S15,  élève  de  MM.  Lesueur  et  Halévy.  —  Second  Grand  Prix  : 
Db  Lacour  (Vincent-Conrad-Félix),néà  Paris,  le  25  mars  1808, 
élève  de  MM.  Berton,  Fétis  et  Boily. 

1836. 
Vellédu,  scène  lyrique,  par  M.  Bignon.  —  Grand  Prix  :  Bois- 
selot  (Xavier),  né  à  Montpellier  (Hérault),  le  3  décembre  1S11, 
élève  de  MM.  Lesueur  et  Fétis.  —  Second  Grand  Prix  :  Be- 
sozzi  (Louis-Désiré),  né  à  Versailles,  le  3  avril  1S14,  élève  de 
MM.  Lesueur  et  Bahbereau. 

1837. 
Mttrie-Sluart  et  Rizzio,  scène  lyrique,  par  M.  Léon  Halévy.  — 
Premier  Grand  Prix  :  Besozzi  (Louis-Désiré),  né  a  Versailles, 
le  3  avril  1S14,  élève  de  MM.  Lesueor  et  Barberbau.  —  Pre- 
mier second  Grand  Prix  :  Choli.et  (Louis-François),  né  à  Paris, 
Ie5  juillet  1S15,  élève  de  MM.  Berton  et  Zimmermann  aine.  — 
Deuxième  second  Grand  Prix  :  Gounod  (Charles-François),  né 
à  Paris,  le  17  juin  1818,  élève  de  MM.  Reicha,  Halbvt  et  LE- 
SUEUR. 

1838. 
La  Vendetta,  cantate,  par  M.  le  comte  de  Pastoret.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Bousquet  (Ange-Georges-Jaccfues),  né  i>  Perpi- 
gnan (Pyrénées-Orientales),  le  limais  1*1$,  élevé  île  MM.  Ber- 
ton et  Le  Borne.  —  Second  Grand  Prix  :  Deldevez  (Edme- 
Marie-Ernest),  né  à  Paris,  le  31  mai  1817,  élève  de  MM.  Ber- 
ton et  Hai.evy.  —  Deuxième  second  Grand  Prix  :  Danci.a 
(Charles-Jean-Baptiste),  né  à  Bagnères-de-Bigorre  (Hautes-Py- 
rénées), le  t9  décembre  1  s  17 ,  .  |.  \e   I     MM.  Berton  et  Halévy. 

—  Mention  honorable  :  Rooer  (Alexis-André),  ne  à  Chàteau- 
Gontier,  le  11  juin  1S14,  élève  de  MM.  Lesueur  et  Pair. 

1839. 

Feriiand,  scène  lyrique,  par  M.  le  comte  de  Pastoret.  —  Pre- 
mier Grand  Prix  :  GooNon  (Charles-François),  né  i  lui-,  I. 
17  juin  1818,élèvede  MM.  Lesueur,  Reicha,  Paér  et  Halévy. 

—  Second  Prix  :  Hvzin  (François-Emmanuel-Joseph),  né  à 
Marseille,  le  -1  septembre  1816,  élève  li  MM.  Berton  el  Haléï  i 

1840. 
Uètoïse  de  Uontfort,  cantate,  par  M.  F.  De3Champs.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Bazin  (François-Eminanuol-Joseph),  né  à  Mar- 
teille.le  ^septembre  1816,  élève  de  MM.  B  i  ton  et  Halévy.  — 
Deuxième  Gi  ind  Pris  :  Bâti  li  I     le-Ed  mard),  né  à  Paris, 

le  28  mars  1820,  élève  de  M.  Halévy.   -    Mention  honorable: 

Coreldi  de  Garaudi     Alexis-Al  né  a  Choisy-le- 

Roi  (Seine),  le  27  octobre  1821,  élèvi  de  M.  Paér. 

1841. 

Lionel  h'oaeuri,  cantate,  par  M.  le  marquis  île  Pastoret.  —  Pre- 
mier  Grand    Prix    :    Maillard     [.oui-  ,    né  à    Montpellier,   le 

2  1  mai-  1817,  élève  de  MM.  LeBorne  etBARBEREAU. —  Second 
Grand  Pi  t  :  Mo  i  Dési  é-Théod  ri  ,  né  à  Paris,  le  25  janvier 
i*:-,  le  MM.  B  el  Halévy;  —  Deuxième  Second 
Grand  Prix  :  i  i.reldi  ne  Gui.m  m  Ah-xis-Albcrt-Gauthier),  né  a 
Choisy-le-Roi  (Seine),  le  27  octobi  1821,  élève  de  MM.  Pu  i,  el 
Hai.evy. 

1842. 

Lu  Reine  flore,  ballade  des  rives  du  Mein,  par  le  marquis  di 
Pastoret.  —  Premier  Grand  Prix  :  Roger  Ab\i--Au  lu'  .  ne  .. 
Château-Giron  (Mayenne),  le  17  juin  1814,'  élève  de  MM.  Ha- 
i.evy et  Carafa.  —  Second  Grand  Prix  :  Masse  (Félix-Marie,  dit 
Victor),  né  à  Lorient  (Morbihan  .  I  :  mars  1822,  élève  de 
MM.  Halévy  et  Zimmermann. 

1843 

Le  Chevalier  enchanté,  cantate,  par  M.  le  marquis  de  Pastoret. 
—  Pas  de  Grand  Prix.  —  Second  Gi  m  I  Prix  :  Duvernoy  'Henri 
Louis-Charles),  néà  Paris,  le  16  vetri  :  1820, élève  de  M.  Ha- 
lévy. —  Mention  1 rable     M        . ..     \      las-Alexandre),  né 

a  Bourmont  (Haute-Marne), en  IS19,     ève   leM.  Fetis. 
1844. 

Le  Renégat  de  Tanger,  cantate,  par  le  marquis  de  Pastoret. — 
Premier  Grand  Prix  :  Missi  l-v;.\-Marie.  dit  Victor:,  né  à  Lo- 
rtenl  Morbil le  7  mars  IS22,  llève  de  MM.  Halévy  et  Zim- 
mermann. —  Ii.-iim  m  p  i  Prix  :  Renaud  de  Vil- 
■  ....  i  Montpellier,  le  3  juin  IS29,  élève  de  M.  Halévy.— 
Second    Grand   Prix      Msm     is      lean-Henri),  né   à  Paris,  le 

3  janvier  1819,  élève  de  M.  Calai  i. 

1845. 
Imagine,  cantate,  par  M.  Vieillard.  —   Pas  de   Premier  Grand 
Prix.  —  Second  Grand  Prix  :  Ortolan  (Eugène),  né  à  Paris,  le 
1"  avril  1824,  élève  de  MM.  Berton  el  II  Llévy. 
1846 
Velasquez-,  cantate,  par  M.  C.  Doucet.  —  Premier  Grand  Prix  : 
Gastinel  (Léon-Gustave-Cyprien) ,  né  à  Villiers-les-Pots  (Côte- 
d'Or),  le  13  août  1823,  élève  de  M.  Halévy.  —  Mention  honora- 


Cha 


M.  Ci 


Josepb- 


icy,  le  24  jar 


1-27, 


1847. 

L'Ange  et  Toiie,  cantate,  parM.  Léon  Halévy.  —  PremierGrand 
Prix  :  Deffés  (Pierre-Louis),  né  à  Toulouse",  le  25  juillet  1819 
élève  de  M.  Halévy.  —  Premier  second  GrandPrix  :  Crèvecœur 
(Joseph-Eugène),  né  à  Calais,  le  12  janvier  1819,  élève  de 
M.  Colet.—  Deuxième  Second  Grand  Prix  :  Ch.iri.ot  (Joseph- 
Auguste),  né  à  Nancy,  le  21  janvier  1S27,  élève  de  M.  Carafa. 
1848. 

Vamoclés,  cantate,  par  M.  Paul  Lacroix.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Duprato  (Jules-Laurent),  né  à  Nimes,  le  26  mars  1827, 
élève  de  M.  Le  Borne.  —  Premier  Second  GrandPrix  :  BazillÈ 
(Auguste-Ernest),  néà  Pari-,  le  27  août  1828,  élève  de  M  Ha- 
lévy. —  Deuxième  second  Grand  Prix  :  Mathias  (Geor»es- 
Amédée-Saint-Clair),  né  à  Paris,  le  li  octobre  1826,  élève"  de 

1849. 

Antonio,  cantate,  par  M.  Camille  Doucet.  —  Pas  de  Premier 
Grand  Prix.  —  Premier  Second  Grand  Prix   :    Cahen  (Ernest), 


i  Paris  le  1-  .Hun  1S2S.  élève  de  MM.  AaiMetZiMMKR 
Deuxième  Second  Grand   Prix   :  Johas    ! 


Pan 


le  -i  mais  1827,  élève  de  M.  Ci 

1850. 
Emma  et  Eginhard,  cantate,  par  M.  Bignan.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Charlot  (Joseph-Auguste),  né  à  Nancv,  le    21    janvier 
1S27,  élève  de  MM.  Carafa  et  Zimmermann.  —  Second  Grand 
Prix  :  Morhange-Alkan  (Napoléon),  neà  Paris,  le  2  I 
élève  de  MM.ADAMel  Zimmermann.  —  Deuxième  Second  Grand 

Pl'\     :     HloN  Vltl,       Je  Ml     Polli-     A  I'l  -  1 1. 1- •  .■ ,     Ile     11      Nalilc,     |o     L'O      mal 

1822,  élève  de  M.  Halévy. 

1851. 
Le  Prisonnier,  cantate,  par  M.  Edouard  Monnais.—  Premier 

GrandPrix  :  Delehei.lé  (Jean-Charles-Alfred),  né  a  pans  le 
12|anvier  H2C,  élevé  de  MM.  Adam  et  Colet.  —  Second  Grand 
Prix  :  Galibert  (Pierre-Christophe-Charles>,  né  à  Perpi-nan 
le  8  août  1S2<5,  élève  de  MM.  Halévy  et  Bazin.  —  Deuxième 
Second  Grand  Prix  :  Cohen  (Léonce),  né  a  Paris,  le  12  février 
1829,i     ce  de  M.  Leborne. 


Li  Retour  de  Virginie, cantate,  par  M.  Rollet.  —  Premier  Grand 

Prix  :  Cohen  (Léonce),  né  à  Paris,  le  12  févriei   I    - 
M.  Leborne.  —  second  Grand  Prix  :  Poise  [Jean-Alexandre- 
Ferdinand  ,  né  à  Nîmes,  le  3  juin  1828,  élève  de  MM    Adam  et 
Zimmermann. 

1853. 

Le  Rocher  ,1  Appenzel,  caniate,  pai    M.    Edouard  Monnais.— 

Premier  Grand  Prix  :  G, i  i,       ,     :  ,     ,.       t., -Charles),  né 

a  Pi  iin-1. au.  le  -  août  IS26,  éb  ve  i    MM.  Haï  ...  ,  et  Bazin'.  — 

"  !  Prix  :    Di  n.iNi.     1  m:      .    :.,      ,    ~  ,;n  t-Brieuc,   le 

16  février  1S30,  élève  de  MM.  Halévy  et  Bazin. 

1854. 

/  mcesi  a  de  Ritnini,  cantate,  par  M.  Emile  Bonnaure.  —  Pre- 
mier Grand  Prix  :  Barthe  (Grat-Norbert),  né  à  Bavonne  (Bas- 
ses-Pyrénées), le  7  juin  1828,  élève  de  M.  Leborne.  —  Secon  1 
Grand  Prix  :  Delannoy  (Victor-Alphonse),  né  à  Lille,  le  2  sep- 
tembre 1828,  élève  de  M.  Halévy.  —  Deuxième  Second  Grand 


'  itée,  cantate,  par  M.  Camille  du  Locle.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Conte  (Jean),  né  à  Toulouse,  le  12  mai  1830,  élève 
de  M.  Carafa.  —  Second  GrandPrix  :  Gizos,  dit  Chéri  (Victor1', 
né  a  Auxerre  (Yonne),  le  li  mars  1830,  élève  de  MM.  Adam 
et  Zimmermann. 

1856. 
itate,  par  M.  Gaston  d'Albano   (M"o  Chevallier  de 
-  Pas  de  premier  Grand  Prix.  —  Premier  second 
Grand  Prix:  Bizet    ( Alexandre-César-Léopold ,  dit  Georges), 
né  à  Paris,  le  25  octobre   1S3S, 'élève   de  MM.    Halévy  el  Zim- 
mermann. —  Deuxième  second  Grand  Prix  :  Lachemié  (Eugène), 
né  à  Paris,  le  7  juin  1831.  élève  de  MM.  Halévy  et  Barbereau. 
—  Mention  honorable  :  Faubert  (Pierre.,  né  à   Toulouse,   le 
21  novembre  1S2S,  élève  de  M.  Carafa. 
1857. 
Clovit  el  Clolilde,  cantate  par  M.  Ain.  Burion.  Premier  Grand 
Prix:   Bizet   (Alexandre-César-Léopold,   dit   Georges1,   né    i 
Paris,  le  25  octobre    1S3S,  eleve  de  MM.    Halévy   et  Zimmer- 
mann.   —    Deuxième   Premier   Grand   Prix:    Colin    (Charles- 
Joseph),  né  à  Cherbourg  le  2  juin  1832,  élève  de  MM.Ambroise 
Thomas  et  Ad.  Adam.  —  Second  Grand  Prix  :  Faubert  (Pierre), 
né  a  Toulouse,  le  21  novembre   1S2S,  élève  de  M.   Carafa.  — 


3372 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Menti")i  l...n..raliU-  :  Culro,  yrier  (Edmond-Marie  .  né  .1  Sablé 
(Sarthe),  le  7  février  1831,  élève  de  M.  Leborke. 

1858. 

Jephtt,  cantate,  par  M.  Emile  Cécile.  —  Premier  G  an  I  Prix 

David    Si tel  -   aé  B    Paris,   le    12    novembre    l- 

MM.  HALÉn  el  Bazin.  ■  Second  Grand  Prix:  Chbrouvrieb 
(Edmond-Marie  .  né  il  Sablé  (Sarthe),  le  7  février  1831,  eleve  de 
M.  Lehorxk.  —  M. mlion  honorable:  Pill-evessi  Jules-François), 
,„■.  a  Belleville  (Seine),  le  11  novembre  1S27,  élevé  de  MM.  Ca- 
rafa  et  Rbber. 

1859. 

Bajtnel  el  te  joueur  de  Jlute,  cantate  par  M.  Edouard  Monnais. 
_  iTrinii'i  iiraii.1   Prix  :  Giikacd    Ernest),   né  a   la  Xouvelle- 

Oriéans,  Il   23  juin  1837,  élève  de  NI  M.  IIviiay  ,-t  l'-i »"'■. 

—  Second  Grand   l'ii\:    l'nnois    ■  :i .  •  •  1 1 . 1 1  !  ;  i  .  n ..-  :  -  - 1 S •*■**■•  . 

THOMAsel  Bazin.—  Première  Mention  honorable  :  Palaoilm 

(Emile),  né  à  Montpellier,  le  3  juin  1844,  eleve  de  M.   Halhaa. 

Deuxième  Mention  tionoralile  :  Deslandes  ;'Adolphe-l-.d,,uaid- 

Marie),  né  a  Batignolles-Monceaux,  le  22  janvier  1840,  élève  de 
M.  Leborne. 

1860. 

le  Csar  Ivan  IV.  cantate,  par  M.  Théodore  Anne.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Paladilhe  (Emile),  né  à  Montpellier,  le  3  juin 
1844,  élève  de  M.  Halévy.  —  Second  Gland  Prix  :  Deslandes 
(Adolphe-Edouard-Marie),  né  a  Balignollcs-Moiiceaux.  le  22  jan- 
vier 1840,  élevé  de  M.  I.khop.ne.  —  Mention  honorable  ;  I.koocix 
(Isidore- Edouard),  né  à  Paris,  I"  t«  avril  1834,  élève  de 
MM.  Thomas  et  Reber. 

1861. 

Alttla,  cantate,  par  M.  Victor  Roussy.  —  Premier  Grand  Prix  : 
Dcbois  (Clément-François-Théodore),  né  à  Rosnay  (Marne),  le 
24  août  1S37,  élève  de  MM.  Ambr.  Thomas  et  Bazin.  —  Premier 
Second  Grand  Prix  :  Sai.omk  (Théodore-César),  né  à  Pans.  |„ 
20  janvier  1834,  élève  de  MM.  Thomas  el  Bajih.  —  Deuxième 
Second  Grand  Prix  :  Anthii  ni  Eugène-Jean-Baptiste),  né  à 
Lorienl  (Morbihan),  le  19  mars  1836,  élève  de  MM.  Carafa  et 
Elwart. 

1862. 

Louise  de  Mêsiéres,  par  M.  Edouard  Monnais.  —  Premier 
Grand  Prix:  Bonn,  in.i-1»  en,  dm  aï  !..  on -- AII.-ji  t .,  né  a. Nantes. 
le  2  lévrier  1  -  i 1 1 .  élève  de  M.  Ami, mise  Tii„v„-,  -  st,,:,,] 
Grand  Prix:  Danhatjsbr  (Adolphe-LéopoH  ,  né  à  Paris,  le  26  fé- 

Menlion  honorable  :  Massenet  (Jnle-Kmib:-F rédéric),  né  à 
Monteaul  (Haute-Loire),  le  12  mai  1S42,  élève  de  MM.  Ambroise 
Tbomas  et  Reber. 

1863. 

David  Rizzio,  pal    M.  Gustave  Chouquet.  —   Premier   Grand 

Prix  •  Ma     i  ■    i    -'i,!''-  lin;    -Frédéric),  né  à  Monteant  (Haute- 

l.mre     li'  '       .   '   1-12.  ,'    1-  MM.  Ambr.  Thomas  et  Reber. 

_  secon  !  '  rand  Prix     Constahttn  (Titus- Charles  .  né  b  Mar- 
,i  ,.  r   |s.:-,,  ,.l,-v,'  de  M.  A,nl,r.  Tbomas.  —  Mention 
honorable  :  Uriz    Gustave-Rapha,  1  ,  ne  ;,  \ 
élève  de  M.  Li  borne. 

1864. 
Pendant  huit  années,  de  1864  à  1871  inclusivement,  les  juge- 

ninil-  di  ■  i    ne   m  -    i     r  les  m  ix  de  B  - 

décret  Lnrpéi    il  du  13  1863 

vlémie  p.  -i  ,l-  -I  r  *■     il:   nu,  s  ;',  lin  jui  v    m 

Composition  musicale-  —  fmnhoè,  par  M.  \  ici  r  ftoussy.  — 
Grand  Prix:  Sieg  Charles-Victor),  né  à  Turckheim  (Haut- 
Rhin),  le -s  1  >:■■.:.  élève  ,1e  M.  Ambroise  Tn 

1865. 

Bemnitt  ,/,.,  '      ■,/,-,  par  M.  C.  du  l.ocle.  —  Grand 

Prix  :  Lekepved  (Charles-Ferdinand  ,  m- à  Rou  n,  le    i  octobre 

1810,   élève  de  M.  Ambroise  Thomas. 

1866. 

\]        louard    Vierne.  —  Grand  P 

!•  nu  1, ■  l...in-Fortuné  .  né    à  Montmartre    (Semé),   le    29    mai 

1S43,  elèvo 

1867. 
/,,'  ilrruit'r  des   .[iieiieerimes,  p:n    M.   i:,, nie    Ocile.  —  Pas  de 
prix. 

1868. 
Daniel,  par  M.  Emile 

Rabdteao    Vii     :    i  .  né  à   Pan-,  le  7  jui  il  ie  de 

M.  Ambrois  •   i    i  /«  rilleb  (Eugène 

(Bas- H l,in  .   le  V.'.  déee nibre  1S  i  i,  eleve  ,1e  M.  Ai,  i 

1869. 
'■■  nimini,  par  M.  Georges  Cliazal.  —  Grand   Prix 
■  li  mi  .  né  à  Perpignan    Pyré- 

née^-iMienlab     .  le  -iaoï'it  1846,  élève  de  M.  Reber. 


Le  Jugement  de  Dieu,  par  M.  H.   Dutheil.  —  Grands  prix  :   l. 

Maréchal  (Charles-Henri),  né  à  Paris,  le  22  janvier  1842,  élève 

de  M.  Victor  Massé;  —  2.   Lefebvrb  (Charles-Edouard),  né  à 

Paris,  le  19  juin  IS43,  élève  de  MM.  Ambroise  Thomas  et  Godnod. 

1871. 

Jeanne  d'Are,  par  M.  Jules  Barbier.  —  Grand  Prix  :  Serpette 
(Hcnri-Charles-Anloine-Gastoiij,  né  i  Nantes,  le  1  novembre 
1846,  élève  de  M.  Ambroise  Thomas.  —  Accessit  :  Salyavre 
(Gervais-Bernard),  né  à  Toulouse,  le  24  juin  1847,  élève  de 
M.  Ambroise  Thomas. 

1872. 

Par  décret  du  1  :î  novemb:e  t  >7 1 .  b  -  dispositions  du  décret 
du  13  novembre  1863  -•■m  ■'■•  igées,  el  les  jugements  des  con- 
cours de  Rome  rendus  à  l'Académie  des  beaux-arts. 

:  Vicl  H  -sa.  —  Premier  Grand  Prix  :  Sal- 
vayre  (Gerrais-Bernard),  ne  à  Toulouse,  le  24  juin  1847,  élève 
de  MM.  Ambroise  Thomas  et  Bazin.  —  Second  Grand  Prix  : 
Erhart  (Léon),  né  à  Mulhouse  (Alsace  ,  le  11  mai  1854,  élève 
de  M.  Reber. 

1873. 

Museppa,  cantate  par  M.  de  Lauzières.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Puget  (Paul-Charles-Man,  m  23  juin  1S4S, 

élève  de  M.  Victor  Massé.  —  ■second  Grand  Prix  :  Hii.lemacher 
IPaul-Joseph-Wilhelm),  né  à  Pans  le  23  novembre  1S32,  élève 
de  M.  François  Bazin.  —  Mention  honorable  :  Marmontel 
(Antoine-Emile-Louis),  né  à  Paris,  le  24  novembre  ÎS.'.O,  élève 
de  M.  François  Baztn. 

1S74. 

Acis  et  Galalhèe,  cantate,  par  M.  Adenis.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Erhart  (Léon),  né  à  Mulhouse  (Alsace),  le  11  mai  185i, 
élève  de  M.  Reber.  —  Second  Grand  Prix  :  Véronge  de  la 
Nnx  (Paul),  né  k  Fontainebleau,  le  29  juin  1853,  élève  de 
M.  François  Bazin.  —  Million  honorable  :  Wormser  Amlré- 
Alphonse-Toussaint),  né  à  Paris,  le  lor  novembre  ism.  lève  de 
M.  François  Bazin. 

1875. 

Clylemnestre,  cantate,  par  M.  Roger  Ballu.  —  Grand  Prix: 
Wormser  (André-Alphonse-Toussainl  .  né  à  Paris,  le  Pr  no- 
vembre 1S51,  élève  de  M.  Franco,-  Bazin.  —  Mention  hono- 
rable :  Dctacq  (Amédée-Jean),  né  a  NeuiuVj  (Seine),  le  18  juillet 
[848,  élève  de  M.  Reder. 

1876. 

Judith,  cantate,  par  M.  Paul  Alexandre.  —  Pren 
Trix  :  Hillemacuer  (Panl-.lo-eph-Yï  ilh e|m  ),  né  à  Paris,  le 
25  novembre  1852,  élève  de  m.  Fran.-,.;,  Bazin.  —  Deuxième 
Premier  Grand  Prix  :  Véronge  de  i  a  Nrx  Paul),  né  à  Fontai- 
nebleau, le  29  juin  ls'33,  élève  île  M.  François  Bazin.  —  Pre- 
mier Second  Grand  Prix  :  lu  rv  .,  ',  ■  .!,■.■  I<  an1,  né  à  Neuilly 
(Seine),  le  18  juillet  1848,  élève  de  M.  Reber.  —  Deuxième 
Second   Grand    Prix  :    i  : 

Neuve-Maison  Aisne),  le  11  juin  1853,  eleve  de  M.  François 
Bazin. 

1877. 

Relieccii  ii  lu    .'.iiiine,  ,-uii.iiè.   par   M.  pierre  Barbier.  —  Pas 
de  Premier  Grain!  Prix.  —  Se,.. ml  Grand  l 'rix  :  Blani 
ne  à  Lyon,  le  ïi.l    mai  -    1 

Mention  boi  '  -       né  a   i  irehies 

(Nord),  le  i  niais  1851,  élève  de  M.  Vicl 
1878. 

Lu  Fille  île  Jrpiile,  cantate,  par  M.  I M ird  P.iiiiiand.  —  Pre- 
mier Grand  Prix  :  i:ie.i  iihi  ■-  Nord  . 
i,.  i  mai  1S51,  élève  de  M.  Vicl  ir  M   ssi    —  Denxièmi   Premier 

Grand   Prix  :    R,        îeai      -  '  :.■   a  N eiive-Mais,.n 

(Aisne),  le  il  i 553,  i    re  te  M.  1  i  B 

m  iiiiuii  nom  i,,biè  :  n  :■  ,-  ■  »es  vd.  Iphe),  né  b  Ver 
-ailles,  le  6  mai  1858,  élève  de  M.  Ri  :  a  —  Deuxième  mention 
h rable  :  Dallieb    Hem    I 

1379. 

Hue  (Georges-  \,b,lph,    ,  ,,,■  a  \  ,.,■>,  ,,,.,,   r- 

m     i;.  ai  ■■  Sei 1   Grand    l 'n  -        :  ■  ,  i  .,   ■  ■■ 

Joseph-Edoi  de  m.  Mvs- 

SENET.  —   Melllioll   I" 

Paris,  le  16  mai  1860,  élève  de  M.  M 
1880. 
Fitigal,  cantate,  par  M.   i  lh  irles   Darcourt.     -Pi 

Prix  :    lin  i  '    '  nir.l'.   né    ,     Pans,    le 

10  i.iiiviei   [860,  élève  d  i  M  .  M  c   nd  Grand  Pnx  : 

1 
M.  Massenet. 


TECHMQUE,  ESTIIÈTIQCE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3573 


1881. 

Gtaaiève,  cantate,  par  M.  V..  Guinand.  —  Pas  de  Grand  Prix. 

—  Premier  Second  Grand  Prix  :  Bruseau  (Louis-Charles-Bona- 

venturc-Alfred).  aé  à  Pans,  le  3  mars  1857,  élève  de  M.  Mas- 
sbnet.  —  Deuxième  Sec. nid  Grand  prix  :  Vio.u.(Paul-Antonin), 
né  à  Toulouse,  le  16  juin  1863.  élève  de  M.  Massenet.  — 
Mention  honorable  :  Missv  Ueau-I. nuis-Edmond),  né  à  Reims 
(Marne),  le  12  juin  1861,  élève  de  M.  .Massenet. 
1882. 

Edilh,  cantate,  par  M.  Guinand.  —  Premier  Grand  Prix  : 
Mirtï  (Eugène-Georges),  ne  à  Paris,  le  16  mai  1860.  élève  d" 
M. Massehbt.  — Deuxième  Premier  Grand  Prix  :  Pishné (Henri- 
Constant-Gabriel),  né  à  Melz.le  16  août  ISSU,  .'-l-'\  .■  .le  M.  Mis 
senet. — Mention  honorable  :  Lekui  x  Xavier-Henry-Napoléon), 
né  a  Rome,  le  11  octobre  1863,  élève  de  M.  Massenet. 
1883. 

;..■  Gladiatenr,  cantate,  pai  M.  Emile  Moreau.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Vidai.  Paul-Anlmini),  né  à  Toulouse,  le  16  juin 
Isd:i.  élève  de  M.  MisM.NEr.  -  Premier  Secuiid  Grand  Prix  : 
Debussy  (Achille-Claude),  né  à  Saint-Genn  un-eu-I.aye  ,  le 
22  aoùl  1862,  élève  de  M.  Guiraud.  —  Deuxième  Second  Grand 
Prix  :  René  dit  Bibard  (Charles-olivier  .   né  a   Paris,  le  6  mai 

I  S63,  eleve  de    M.   Léo  DELIEES. 

1384. 

L'Enfant  prodigue,  cantate,  pai  \,    Guinand. —  Premier  Grand 

Prix:  Debussy  (Achille-Claude  .  né  a  Sainl-Gei  main-en-Laye, 

le  22  août  1862,  élève  de  M   Gdiradd.  —  Premii  [  ^e  »nd  Grand 

Prix  :  René  dit  Bibvri.  m..      !      o   i  ai     i   Paris  le  6  mai 

1863,  élève  de  M.  Délires.  —    Deuxième  M'i I   Grand    i  i    ■ 

Leroux  (Xavier-IIemv-Nap. de, n  ,    n  H le    11    octobre 

1863,  élève  de  M.  Massenet. 

1835. 
Endijmion.  cantate,  par  M.  Au.-e  de  Las-us.  —  Pj 
Prix  :  Leroux  (Xavier-Henry-Napoléon  .  né  a  Moine,  le   II   oc- 
tobre 1863.  élève  de  M.  Miss   net.    —    Second    Grand    Prix  : 
Savard    (Marie-Emmanuel-Aïu'iistin',    iv    à    Paris,   le    15    mai 
1861,  élève  de  M.   Massenet. —  Menlion  lioiwr  iMe      ' 
(André),  né  à  Paris,  le  27  décembre  1856,  élève  de  M.  G  tira  éd. 
1886. 
La  Vision  de  Siiiil,  cantate,  par  M.  Eugène  Adenis.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Savard    Marie-Emmanuel-Augustin  ,  né  à  Paris, 
le  lf.  mai   1861,  élève  de  M.    Massenet.  —    Premier    Second 
Grand  Prix  :  Kaiser    Henri-Charles),  né  à  Nancy  (Meurthe-et 
Moselle),  le  11  mai  1861,  élève  d,.    M.   Massenet.  —  Deuxième 
Second  Grand  Prix  :  Gèdalge    i  André),  né  à  Paris,    le  27    dé- 
cembre 1856,  élève  de  M.  Guihaud. 
1887. 
Union,  cantate,  par  M.   Auizé   de    Lassus.   —  Premier  Grand 
Prix  :  Charpentier  (Gustave),   né  le  26  juin    1860,   k    Dieuze 
(Lorraine),  élève  de  M.    Massenet.  —  Premier  Second  Grand 
Prix  :  Bachelet  Georges),  né      Paris,  le  26  février  1861,  élève 

de  M.  Goiraud.  —   li  ai    i     Second  Grand  Prix:   Erlanger 

(Camille),  né  à  Paris,  le  25  mai  IS63,  élève  de  M.  Deubbs. 
1883. 
Yellëda.  cantate,  par  M.  Fernand  Beissier.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Erlanger  (Camille),  né  à  Paris,  le  25   mai   1863,  élève 
de    M.  Léo  Delibes    —  Premier    Second  Grand   Prix  :    DukaS 
(Paul-Abrahami,né  k  Paris,  le  toroci0bre  1865,  élève  de  M.  Gui- 

RACI). 

1889. 

Simêlè,  par  M.  Eugène   Adenis.  —  Pas  de  Grand  Prix,    ni  de 

Premier  Second  Grand  Prix.  —  Deuxième  Second  Grand  Prix  : 

Fournies  (Emile-Eugène-Alix),  né  à  Paris,  le  11  octobre  1864, 

élève  de  M.  Léo  Dei.ibes. 

1890. 
Cléopùlre.  cantate,  par  M.  Fernand  Beissier.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Carraud  (Michel-Gaston),  né  au  Mée  (Seine-et-Marne), 
le  20  juillel  1864,  élève  de  M.  Massenet.  —  Deuxième  Premier 
Grand  Prix  :  Bachelet  (Alfred-Georges),  né  à  Paris,  le  26  fé- 
vrier 1S6S,  élève  de  M.  Goiraud.  —  Premier  Second  Grand 
Prix  :  Lotz  (  Charles-Gustave-Heàry  ) ,  né  à  Biarritz  (Basses- 
Pyrénées),  le  29  mars  186i,  élève  de' M.  Goiraod.  —  Deuxième 
Second  Grand  Prix  :  Silver  (Charles',  né  k  Paris,  le  16  avril 
1868,  élève  de  M.  Massenet. 

1891. 
VliderdU,  cantate,  par  M.  Edouard  Noël.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Silver  (Charles),  né  k  Paris,  le  16  avril  1868,  élève  de 
M.  Massenet.  —  Premier  Second  Grand  Prix  :  Fourxier 
(Emile-Eugène-Alix),  né  k  Paris,  le  11  octobre  1S6S,  élève  de 
M.  Delibes.  —  Mention  honorable  :  Andrès  (François-Joseph- 
Camille),  né  à  Ingersheim  (Alsace),  le  5  mars  1S64,  élève   de 


1892. 

Amadis,  canlate.  par  M.  Edouard  Adenis  —  Pas  de  Premier 
Grand  Prix. —  Premier  Second  Grand  Prix  :  Busser  (Paul- 
Henri),  né  il  Toulouse,  le  16  janvier  1872,  élevé  de  M.  Goiraud. 
—  Deuxi.-ine  sec.ind  Grand  Prix  :  Bloch  (An  Irè  .  né  à  Wissem- 
bourg  (Alsace-Lorraine),  le  18  janvier  1873,   élève   de  M.  Gci- 

1893. 

Anlifjoîh',  cantate,  par  M.  Fernand  Beissier.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Blocu  (André  .  né  a  Wissembourg  (Alsace-Lorraine),  le 
18  janv.  1^73.  eleve  de  MM.  Guiraud  et  Massenet.  —  Deuxième 
premier  Grand  Prix  :  Bosser  (Paul-Henri),  né  à  Toulouse,  le 
16  janvier  1872.  élevé  de  M.  Guiraud.  —  Premier  Second  Grand 
Prix  :  Lia  vue  (Charles-Gaston),  né  à  Paris,  le  3  janvier  1869, 
élève  de  M.  Massenet.  —  Mention  honorable:  Bonval  (Jules- 
Henry),  né  .i  Toulouse,  le  9  juin  1867,  élève  de  M.  Massenet. 
1894. 
Daplmé,  cantate,  par  M.  Charles  Ralïalli.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Rabaud  .Henri-Benjamin  .  né  a  Paris,  le  10  novembre 
1873,  él.-ve  île  M.  Massenet.  —  Premier  Second  Grand  Prix  : 
la  ie,  i  0  i,. ii  .  m  le  i  mai  1S73,  k  Chalon-sur-Saône,  élève 
deM.  Th.  Dubois.  —  Mention  honorable:  Mouquet  Jules- 
Ernest-Georges),  né  à  Paris,  le  1S  juillet  1867,  élève  de  M.  Th. 
Dubois. 

1895. 
me,  cantate,  par  M.  E.  Noël.  —  Pi    ■ 
Prix  :  Letorev  (Orner),  né  à  Chalon-sur-Saône,  le  I 
élève  de  M.  Th.  bcnots.  —  Premier  Second  Grand  Prix  :  D'Ol- 
lone  (M.ixii.iilien-Paul-Marie-Félix),   né  à  Besançon  (Doubs), 
le  13  juin  1875,  élevé  de  M.  Massksbt. 
1896. 
il  M.  F.  Beissier.  —  Premier  Grand  Prix  : 
Mouquet  'Jules-Ernest-Georges),  né  k  Pari-,  le  m  jfuillel  1867, 
élève  de  M.  Th.  Dubois.  —  Premier  Second  Grand  Prix  :  Richard 
dTvrv  (Charles-Frédéric-Marie  de),  né  a   Ivry   (C 
27  octobre  1867.  élève  de  M.  Th.  Dubois.   —  Deuxième  Second 
Grand    Prix  :    Halphen   (Ferdinand-Gustavei.   né  à    Paris,   le 
IS  février  1872,  élève  deM.  Massenet. 
13D7. 
cantate,  par  M.  Charles Morel.  —  Premier  Grand 
E  Maxiniilien-Paul-Marie-Fi'lix  i,  né  à  Besançon, 
le  13  juin  1875,  élève  de  MM.   Massenet  et  Ch.  I.enepveu.  — 
Premier  Second  Grand  Prix  :  Crocb-Spinelli    Bernard- Louis), 
né  à  Paris,  le  18  février  1871.  élève  de  M.    Ch.    Lenepveo.  — 
econd  Grand  Prix  :   Schmitt  (Florent  .  né  à  Bla- 
in  .m     Meurthe-et-Moselle),  le  tt  70,   élève  de 

MM.  Massenet  et  Facré. 

1898. 
par  M.  Paul  Collin.   —  Pas  de  Premier 
Grand  Prix  —  Premier  Second  Grand  Prix  :  Malherbe  (Edmond- 
Paul-Henri  .  aé  a  Pans,  le  21    août  1870,  eleve  de  MM.    Mas- 
senet el  F 

1899. 
Callirh-oé,  cantate,  par  M.  Eug.  Adenis.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Levadé  (Charles-Gaston),  né  à  Paris,  le  3  janvier  1S69, 
élève  de  MM.  Massenet  et  Ch.  Lenepveu.  —  Deuxième  Premier 
Grand  Prix  :  Malherbe  (Edmond-Paul-Henri),  né  a  Paris,  le 
21  a  it  1870,  élève  de  MM.  Mvssenet  et  Fauré.  —  Premier 
Second  Grand  Prix  :  Moreau  (Léon),  né  à  Bresl,  le  13  juillet 
1S70,  élève  de  M.  Ch.  Lenepveu.  — Mention  honorable  :  Bris- 
ait   t.ouis-Henri-Lucien-Camilleï,  né  à  Cnnslantine     AI 

le    25.10.il    1-72.   eleve  de   M.    Cil.    I  .EN  EPV  If  . 

1930. 

Sêmiramis,  cantate,  par  MM.  Lue.  el  Ed.  Adenis.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Schmitt  (Florent),  né  k  Blamont  (Meurthe-et-Mo- 
selle), le  28  septembre  1870,  élève  de  MM.  Massenet  et  G.  Faire. 
—  Premier  Second  Grand  Prix  :  Cunq,  dit  Kun 
Marie-Joseph),  né  à  Toulouse,  le  20  juin  1S77.  élève  de  M.  Ch. 
Lenepveu.  —  Mention  honorable  :  Bertelin  (Albert),  né  k  Paris, 
le  26  juillel  1872,  élève  de  M.  Widor. 
1901. 

Hyrrha,  cantate,  par  M.  Fernand  Beissier,  —  Premier  Grand 
Prix  :  Caplet  (André-Léon),  né  au  Havre,  le  2::  novembre  187s. 
-■levé  de  M.  Ch.  I.enei>veu.  —  Premier  >  éiiel  Grand  Prix: 
Dupont  (Gabriel-Edouard-Xavier),  né  k  Caen,  le  I"  mars  1878, 
élevé  de  M.  Widor.  —  Deuxième  Second  Grand  Prix  :  Ravei. 
(Joseph-Maurice),  né  k  Ciboure  Basses-Pyrénées),  le  7  mars 
1875,  élevé  de  M,  G.  Fauré. 

1902 

Alcyone,  cantate,  par  MM.  Eug.  et  Ed.  Adenis.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Cunq,  dit  Kunc  (Aimé-Marie-Gabriel-Joseph),  né 
k  Toulouse,  le  20  juin  1877,  élève  de  M.  Charles  Lenepveu.  — 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Premier  Second  Grand  Prix  :  Ducasse  (Gabriol-Kdouard-Xavier), 
né  a  Caen.le  1"  mars  1878,  élève  de  M.  Fauré.  —  Deuxième 
Second  Grand  Prix  :  Bertblis  (Albert),  né  a  Paris,  le  26  juillet 
1872,  élève  de  MM.  Th.  Dubois  et  Widor. 
1903. 

Alyssa,  cantate,  par  M««  Marguerite  Confier.  —  Premier 
Grand  Prix:  Laparra  (Raoul-Louis-Félix-Mary),  né  à  Bor- 
deaux,  le  13  mai  1876,  élève  de  M.  Gabriel  Fauré.  —Premier 
Second  Grand  Prix  :  Pbcb  (Raymond-Jean),  né  à  Valenciennes, 
le  4  février  1876,  élève  de  M.  Ch.  Lenepveu.  —  Mention  hono- 
rable :  Pierné  (Paul-Marie-Joseph),  né  à  Metz,  le  30  juin  1S74, 
élève  de  M.  Ch.  Lenepveu. 

1904. 

tlèdora,  cantate,  par  M.  Edouard  Adenis.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Pech1  (Ravmond-Jean),  né  à  Valenciences,  le  4  février 
1S76,  élève  de  M.  Ch.  Lenepveu.  —  Premier  Second  Grand 
Prix  :  Pierné  (Paul-Marie-Joseph),  né  à  Metz,  le  30  juin  1S71, 
élève  de  M.  Ch.  LbnÈpveo.  —  Deuxième  Second  Grand  Prix  : 
M1"  Fleura  (Hélène-Gabrielle),  née  à  Carlepont  (Oise),  le 
21  juin  1S76,  élève  de  M.  Widor. 
1905. 

Mata,  scène  lyrique,  par  M.  Fernand  Beissier.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Gallois  (Victor-Léon),  né  à  Douai  (Nord),  le 
10  mars  1880,  élève  de  M.  Ch.  Lenepveu.  —  Deuxième  Premier 
Grand  Prix:  Rodssbau  (Marcel-Auguste-Louis),  né  à  Paris,  le 
1S  août  1S82,  élève  de  M.  Ch.  Lenepveu.  —  Premier  Second 
Grand  Prix  :  Gauberi  Philippe),  né  h  Cahors  (Lot),  le  5  juillet 
1879,  élève  de  M.  Ch.  Lenepvbu.  —  Deuxième  Second  Grand 
Prix  :  Dumas  (Louis-Charles),  né  à  Paris,  le  24  décembre  1877, 


élèvede  M.  Ch.  Leni 

PVEU. 

1906. 

Isma'U,  cantate,  pa 

Dumas  (Louis -Charle 
de  M.  Ch.  I. 
(André-Charles-Sam 
M.   Charles  Lenepvi 

M.  Eug.  Adenis.  —  Premier  Grand  Prix 
-  .  né  à  Paris,  le  24  décembre  1877,  élèv 

—  Premier  Second  Grand  Prix  :  Gailiivr 
on  .  ii"  à  Paris,  le  29  juin  1885,  élève  d 
r.    —   Deuxième  Second  Grand  Prix  :  L 

Boucher   (Maurice-Georges-Eugène),    né  à    Isigny    (Calvados), 
le  25  mai  1882,  élève  de  MM.  Gabriel  Fauré  et  Widor. 
1907. 
Selmii,  cantate,  par  M.  Georges  Spitzmuller.  —  Premier  Grand 
Prix  :  Le  Boucher  (Maurice-Georges-Eugène),  né  à  Isigny  (Cal- 
vados), le  25  mai  1SS2,  élève  de  MM.  Gabriel  Fâché  et  Widor. 
—  Premier  Second  Grand  Prix  :  Mazki.lier  (Jules-Marius),  né  à 
Toulouse,  le  6  avril  1879,  élève  de  M.   Ch.  Lenepveu.  (Pas  de 
Second  Grand  Prix  ni  de  Mention  honorable.) 
1908. 
Lu  Sirène,  cantate,  par  MM.  Eugène  Adenis  et  Gustave  Des- 
\e.iii\-Yé]  ité.  —Premier  Grand  Prix  :  Gailuard  (Andi ■■■  Charle-- 
Samson),  né  à  Paris,  le  29  juin  18S5,  élève  de  M.  Charles  Le- 
nepveu. —  Pas  de  Premier  Second  Grand  Prix.  —   Deuxième 
Second  Grand  Prix  :  M"'  Boulanger  (Juliette-Nadia),  née  le 
16  septembre  1S87,  élève  de  MM.  Gabriel  Fauré  et  Widor.  — 
Mention  honorable  :  Flament  (Edouard),  né  à  Douai,  le  2:  aoùl 
1880,  élève  de  M.  Charles  Lenepveu. 
1909. 
l,n  Roitssalktt,   canlate.  par  MM.  Eugène  Adenis  et  Fernand 
Beissier.  —  Premier  Grand  Prix  :  Ma-zeli.iek  (Jules -M  irius),  né 
à  Toulouse,  le  26  avril  1879,  élève  de  M.  Ch.  Lenefvbc.  —  Pre- 
mier Second  Grand  Prix  :   Gallon  (Noël-Jean-Charles-André  . 
né  k  Pari-,  le  il  septembre  1891,  élève  de  M.  Gh.  Lenepveu. — 
Deuxième  Second  Grand  Prix  :   Toornier  (Marcel-Lucien  ,  ne 
à  Paris  le  5  juin  1879,  élevé  de  M.  Ch.  Lenepveu. 
1910. 
Acis  et  Galatée,  cantate,  par  MM.  Eugène  Roussel  el   Alfred 
Coupel.  —  Premier  Grand  Prix  :  Gallon  (Noel-Jean-Charles- 
André),  né  à  Paris,  le  11  septembre  1891,  élève  de  M.  Ch.  Lenep- 
veu.  —  Premier  Second  Grand   Prix  :   Paray  [Paul-Charlcs- 
Marie  ,  né  au  Tréport,  le  21  mai  18S6,  élève  de  M.  Ch.  Lenep- 
veu. —  Deuxième  Second  Grand  Prix  :  Delmas  (Marc),  né  à 
Saint-Quentin,  le  28  mars  1885,  élève  de  M.  Ch.  Leni  ivi  r. 
1911. 

Yunitzii,  cantate,  par  M.  Georges  Spilziiinlb'r.  —  F: '.ran.l 

Prix  :  Parav  (Paul-Charles-Marie  .  ué  an  rré]  ■  .  m  d 
1886,  élève  de  MM.  Ch.  Lenepveu  et  Paul  Vidal.—  Premiei  Se- 
cond Grand  Prix  :   Delvincourt  (Claude-Etiei -Ed  mard-Ma- 

rie),  né  à  Paris,  le  12  janvier  18S8,  élève  de  M.  Wid-ir.  — 
Deuxième  Second  Grand  Prix  :  Dick  .Wladimii ",  naturalisé 
Français,  né  à  Odessa,  le  19  mars  1S82,  élève  de  M.  Widor. 


1912. 
Fulvia,  cantate,  par  M.  Paul  Collin.  —  Pas  de  Premier  Grand 
Prix.  —Premier  Sec. .ml  Grand  Prix  :  Mignau  (Edouard-Charles- 
Octave),  né  à  Orléans,  le  17  mars  18S4,  élève  de  M.  Paul  Vidal. 

1913. 

Ftniti  et  Hélène,  épisode  lyrique  d'après  le  Second  Faust  de 
Goethe,  par  M.  Eugène  Adenis.  —  Premier  Grand  Prix  :  M"1'  Bou- 
langer (Marie-Juliette),  née  à  Paris,  le  21  août  1893,  élève  de 
M.  Paul  Vidal.  —  Deuxième  Premier  Grand  Prix  (disponible  de 
1012):  Delvincoi  i  r  Claude-Etienne-Edi l-Marie),néa  Pa- 
ris, le  12  janviei  1888,  »e  le  M.  Wido  .  —  Premier  Second 
Grand  Prix  :  M.  Delmas   Marc-J  an-B  iSaint-Quen- 

tin,  le  2S  mais  1-s:.,  cl  >\  e  ,i..  m.  paul  Vidai,  et,  préi  édemment, 
de  M.  Ch.  Lenepveu. 

1914. 

Psyché,  cantale,  par  MM.  Eug.  Koussel  et  Alfred  Coupel.  — 
Premier  Grand  Prix  :  Dupré  (Marcel-Jean-Jules),  né  à  Rouen, 

le  3  mai  1886,   élève  d     '  :.  Wn    ■  .        Pi   mil  r  S îd  Grand 

Prix  :  de   Pezzer   (Rai  nond-1  nd-1  ien     .  d     à   Niort,  le 

23  juin  1886,  élève  'i'-  M.   W R.  —  Deuxième   Second  Grand 

Prix  :  Laporte  (André-AIbert-Victor-Louis),néàParis,lel9  mai 

1889,  élève  de  M.  Paul  Vidal. 

L'Académie  des  beaux-arts  a  prorogé,  jusqu'à  la  fin  des  hos- 
tilités, ses  concours  pour  le  prix  de  Rome. 
1919. 

I.c  Vmic  cl  In  /Vr.  cantate  par  M""  Juliette  Portron.  —  Premier 
Grand  Prix  :  Delmas  (Marc-Jean-Baptiste),  né  à  Saint-Quentin, 
le  2S  mars  lSs-,,  ,'■  i , ■%-..-  de  M.  Paul  Vidal.  —  Deuxième  Premi  ir 
Grand  Prix  (disponible  par  suite  du  décès  en  1917  de  M11"  Juliette 
Boulanger)  :  Ibert  (Jacques-François-Antoine-Marie),  né  à 
Paris,  le  15  ooùt  1S00,  élève  de  M.  P.  Vidal.  —  Premier  Second 
Grand  Prix  :  M"'  C\nu  (Marie-Marguerite-Denise),  née  à  Tou- 
louse, le 29  janvier  1890,  élèvede  M.  P.  Vidal.  —  Premier  Se- 
cond Grand  Prix  :  Dure  (Jean-Marie),  né  à  Niort,  le  23  juillet 
1886,  élève  de  M.  Widor. 

1920. 

Don  Juan,  scène  dramatique  d'après  Molière,  par  M.  Eugène 
Adenis.  —  Premier  Grand  Prix  :  M"°  Canal  (Marie-Marguerite- 
Denise  .  née  a  Toulouse,  le  29  janvier  1890,  élève  de  M.  P. 
Vidal.  —  Deuxième  Second  Grand  Prix  :  de  la  Presle  (Jac- 
ques), né  à  Versailles,  le  r.  juillet  1SSS,  élève  de  P.  Vidal.  — 
—  Deuxième  Second  Grand  Prix  :  Ddssabt  (Robert),  né  à  Paris, 
le  19  septembre  18  ■•'..  élève  d  i  M.  Widor. 
1921. 

Ilcrmiaiic,  canl.de,  d'après  Racine,  par  MM.  Eugène  Adenis  et 
Desveaux-Venle.  —  Premier  Grand  Prix  :  Jacques  di  i  iI'iumi 
né  a   Ve,-ai!|.-  le  5  juillei    1888,  élève  de  M.   Paul   Vu, m  .    — 

I  Prix ,  B         I    i 
19  septembre  1896,  élève  de  M.   Widor.  —  Deuxième  Seoond 
Grand  Prix  :  Fine  i-  Boi  sqi  i  i.  né  a  Marseille,  le  9  septembre 

1890,  élève  de  M.  Widor. 

1922. 

Le  Prétendant,  par  M.  Jean  Gandrey-Réty.    -  Pas  de  Premiei 
Grand  Prix.  —  Premier  Sec  n  d  Gra  id  Pi  ix,  Fr  mi   - 
ne   ,,   m  trseille,  le  9  scph-nibio   1-  '0,  ■  '   .      d     M.  Wi  >oi  .   - 
Deuxième  Second  Grand  Prix  :   timé  Steck,  i     l  Constanline,  li 

21  novembre   F892,  élève  de   M.   \\'i  ■  i.     Me; ,   n. .nu. mie 

M11-  Jeanne  Lbcli  r.c,  née  a  Saint-Mihiel,  le  29  d 
élève  de  M.  Widor. 

1923. 

BeatrU;  canlate,  par  M.  Jean  Gandrey-Réty.  —  Pi 
Prix  :  M"  Jeanne  Lbleu,  née  à  Saint-Mihiel,  le 
1898,  élève  de  M.  Widor.  —  Deuxième  Premier  Grand  Prix  : 
Francis  |;,irs.,.riîr,  né  a  Mai  .-ille,  !.■  o  -eplembre  lson,  élève  de 
M.  Widor.  —  Deuxième  Second  Grand  Prix  :  \ves  ni  n  Cvsi- 
niere,  né  ;'i  Angers,  le  1 1  février  1893,  élève  de  M110  Nadia  Bou- 
langes et  de  M.  M.  d'i  Ili  one. 


s  Aimn'i  ..'.'    1 /■■■•■  o.  par  MM.  Eugène  Adenis  el    Dcsieanv 
i  ■     .  .d  Prix     Robert  Di  ssadt,  né  a  Pans,  le 

septembre  1896,  élève  de  M.   W r.   —  Prei r  Second 

i,l  Prix  :  Edmond  Gaujac,  né  i  Toulouse,  le  lOféi 
•  de  M.  P.  Vidai  .  —  Mention  honorable  :  Roberl  Guili  on, 
Rennes,  le  ::  ..cl. .lue  1903,  élève  de  M.  Widor. 


I.,i  ilnrl  <f Adonis,  canlate,  par  M.  Marcel  Belviane.  —Grand 
Prix  :  Louis  Fourestier,  ne  à  Montpellier,  le  :',|  mai  1892, 
élève  de  M.  P.  Vidal.  —  Premier  Second  Grand  Prix  :  Yves  de 
la  Casinieue,  né  à  Angers,  le  21  février  1893,  élève  de  MM"  N- 
Boulanger  et  de  M.  M.  d'Oi.i.one.  —  Mention  honorable  :  Mao 
rice  Franck,  né  à  Paris,  le  20  avril  1897,  élève  de  M.  Vidai.. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'INSTITUT  DE  FRANCE    3575 


1926. 
de  Forge.  —  Grand  Prix  :  René  Guillot-, 


ne  a  Rennes,  le  s  octulire  1903.  élevé  Je  M.  Vidor. 

Second  Grand  Prix  :  Maurice  Franck,  né  à  Paris,  le  20  avril 

1897,  élève  de  M.  Vidal. 

1927. 
Cori  ilan,  cantate,  par  M.  Guy  de  Téramond.  —  Grand  Pris  : 
Edmond  Gadjac,  né  à  Toul.ni-.-.  le  in  février  1S95,  élève  de 
M.  Vidal.  —  Premier  Second  Grand  Pris  :  Henri  TomAsi,  né  a 
Marseille,  le  17  avril  1901,  élève  de  MM.  Vidai,  et  Cadssade.  — 
Deuxième  Grand  Pris  :  Raymond  Loucheur,  né  à  Tourcoing,  le 
1"  janvier  1S99,  élève  de  MM.  Vidal  et  d'Ôllonk. 

1928 
Heraklès  h  Delphes,  par  M.  René  Pu  iux.  —Grand  Prix  :  Ray- 


mond Loccurn  r,  ne  à  Tourcoing,  le  !  ■'  janvier  1S99,  élève  de 
MM.  Vidal  el  d'Ollone.  —  Pas  de  Premier  Second  Grand  Prix. 
—  Deuxième  .second  Grand  Pris  :  M"0  Eisa  Barrawe,  née  a 
Paris,  le  I3  février  PU»,  élevé  de  M.  Paul  Iitkvs.  —  Mention 
honorable  :  Marc  Vacboorgocin,  né  à  Bordi  tux-Caudéran,  le 
10  mars  1907.  élève  deMM.  v.  i  D 

1929. 

La  Vierge  guerrière,  cantate,  par  M.  A.  F  .iirher. —  Grand  Prix  : 
Ml'0  Eisa  Barraine,  m 

P.  Doras  et  Bossr.R.  —  Premier  Second  Grand  Prix  :  Tony 
Aubin,  né  à  Paris,  le  8  décerné;      I  .  >I    P.  Duras 

et  X"  I  fi.u.i.'is  —  lie'ixn  h.  Second  Grand  Prix  :  Sylver  Caf- 
i  ot,  né  â  Manti  B,  le  l1  ■'  I  icembi  i  i  103  ■  ■'.  ■  M.  Vidal. 


MODIFICATIONS  A  APPORTER  AU  TEXTE  DES  REGLEMENTS 


l'âge  ::'iM),  colonne  de  gauche.  Chapitre  l",  substi- 
tuer à  la  rédaction  de  l'art.  '■'<,  le  texte  suivant  : 

«  Art.  5.  —  Pour  être  admis  à  prendre  part  aux 
concours  des  Grands  Prix,  il  faut  être  Français  ou 
naturalisé  Français,  n'avoir  pas  dépassé,  au  1er  jan- 
vier de  l'année  où  s'ouvre  le  concours,  27  ans  révo- 
lus, en  ce  qui  concerne  les  artistes  peintres,  sculp- 
teurs, architectes  et  compositeurs  de  musique  ;  30  ans 
révolus  en  ce  qui  concerne  les  graveurs  en  taille- 
douce  et  les  graveurs  en  médailles.  Les  candidats 
peintres,  sculpteurs,  architectes  et  compositeurs  de 
musique  qui,  à  l'inscription,  pourront  justifier  qu'ils 
n'ont  pas  pris  part  à  un  ou  plusieurs  concours,  en 
raison  de  leur  présence  sous  les  drapeaux,  sont  ad- 
mis à  participer  à  un  concours  supplémentaire;  de 
plus,  tout  candidat  doit  être  porteur  d'un  certificat 


délivré  par  son  professeur  ou  par  un  artiste  connu, 
attestant  qu'il  est  capable  de  prendre  pari,  au  con- 
cours. 

«  Les  artistes  mariés  peuvent  concourir.  Toutefois, 
les  pensionnaires  mariés  sont  expressément  tenus 
de  loger  en  dehors  de  la  Villa  Médicis,  au  cas  où 
leur  famille  les  accompagnerait  à  Home.  »  (Décret 
du  20  octobre  1928,  §  i.) 

Mémepage,  même  eolonn  .  ai  '.  8.  Actuellement,  les 
dates  de  l'ouverture  des  premiers  concours  d'essai 
sont  fixées  chaque  année. 

Page  3431,  colonne  de  gauche, 
Les   concours  ne  se  font  plus  à  Compiègne;  ils  ont 
lieu  au  palais  de  Fontainebleau. 

(N.D.L.  D.) 


ADDENDA 


Page  3521,  colonne  de  droite,  lign  32,  ajouter  après  «  commandeur  de  la  Légion  d'honneur  »  :  et,  en 
1920.  à  celui  de  grand  officier. 

Catalogue  des  œuvres  de  Gabriel  Fauré,  ajouter  les  œuvres  suivantes,  composées  de  1913  à  la  mort  de 
l'auteur. 


PIANO    A    DEUX    MAINS 

\  104  (i      l),  1913,  Paris,  Durand. 

-.  op.  10  i    n°  8),   191  3,  Pan-,  Durand. 
1 1' Barcarolle,  op.  105,  1914,  Paris,  Durand. 

.  o  i.  10  i         ;    16,  Paris,  Durand. 
'.'   \  ■■  107,  1916,  Pai  -.  Durand. 

/  it  orchestre,  ip.  111,  1919,  Pai 

I      i:  .      1.-116,  1921,  Paris,  Durand. 

I  I    Noctui  .  ,  ■    i.  119,  1928,  Paris,  Durand. 


le  Jardin  clos  iS  mélodies  .  op.  106,  1915,  Paris,  Dura 
Mirages  (i  mélodies  .  op.  113,  1928,  Péris.  Durand. 

'   .  op.   !  1  i.   1920,  Paris.  Durand. 
i:tlnn:o:i  ,  hh/irriquc,  op.  IIS,   192;;.  Pari-,  Durand. 

Ajouter  a  la  Biblio  le  Gabriel  Facré  ;  L,  Vi 


■   G    DE    CHAMBRE 

je  Sonate,  piano  et  violon,  op.  108,  1917 

:  .  1 15,  1921,  Paiis  Durand. 
;'    Sonate,  piano  el  violonci  Ile    i<i>.  II..':: 
Trio,  op.  120.  1923,  I 

:iarpe 
Une  Châtelaine  en  sa  tour,  op.  110,  1918,  Par:-.  Durand. 
Ml  SIC  : 


G.  Fauré  et  son  < 


.-.  Durand. 


L'ENSEIGNEMENT  DE  LA  MUSIQUE  EN  FRANCE 
ET  LES  CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE 

Par  Edmond  MAURAT 

D1RECTECR    DU    CONSERVATOIRE    NATIONAL    DE    MUSIQUE    DE    SAINT-ETIENNE 


Il  serait  d'un  faible  intérêt  de  dresser  l'état  de  la 
situation  présente  des  Ecoles  de  musique  de  nos 
provinces  si  l'on  ne  déterminait,  par  le  moyen  de 
considérations  historiques  et  sociales,  les  aspects 
préalables  que  les  mœurs,  les  idées  et  l'évolution 
des  formes  de  l'art  donnèrent  conjointement,  et  suc- 
cessivement, à  son  enseignement.  Quel  qu'il  soit,  un 
état  de  choses  est  une  résultante,  une  connexion  de 
forces,  parfois  obscures,  dont  le  sens  est  fait  du  jeu 
de  leurs  réactions.  Celles-ci,  à  l'analyse,  décèlent 
les  modes  d'orientation  et  de  convergence  finale  des 
phénomènes  observas  et, conséquemment,  le  schéma 
de  leur  processus. 

Rien  ne  sera  donc  moins  arbitraire  que  le  plan  de 
ce  travail.  Partant  de  la  confrontation  des  données 
de  l'histoire  avec  les  faits  qui  marquèrent,  en  France, 
les  phases  de  l'enseignement  musical,  puis  considé- 
rant, dans  la  nation,  les  variétés  de  sa  fonction  so- 
ciale, nous  ne  traiterons  qu'en  dernier  ressort  de 
la  constitution  organique,  administrative  et  tech- 
nique de  nos  Ecoles  de  musique.  Enfin,  pour  termi- 
ner, un  bref  résumé,  précédé  d'une  notice  mono- 
graphique, opérera  la  synthèse  des  conclusions  par- 
tielles. 

APERÇUS  SUR  LES  FORMES  DE  L  ENSEIGNEMENT 
MUSICAL  EN  FRANCE.  —  SCHÉMA  DE  SA  PHILO- 
SOPHIE  HISTORIQUE. 

L'enseignement  des  arts  est  intimement  lié  à  l'his- 
toire de  leurs  progrès  techniques  et  aux  fonctions 
variables  que  leur  assigne,  au  cours  des  âges,  l'évo- 
lution des  civilisations.  L'état  social  et  politique  d'un 
peuple  commande  sa  vie  spirituelle. 

Celui  de  la  Gaule,  après  l'occupation  romaine,  était 
essentiellement  primitif.  A  l'écroulement  de  la  puis- 
sance latine  une  profonde  nuit  avait  envahi  le  monde 
d'Occident.  L'Eglise,  dépositaire  de  l'ordre,  de  la  dis- 
cipline, des  principes  et  d'un  corps  de  connaissances 
savantes,  se  trouva  être  le  lieu  de  convergence  des 
traditions  intellectuelles.  C'est  par  elle  que  s'opéra 
la  lente  et  occulte  transfusion  de  l'esprit  gréco-latin, 
et  ce  qui  fut  alors  sauvé  de  l'art  musical  antique 
comme  ce  qu'il  en  advint,  demeura  sensiblement 
son  œuvre.  Ce  faisant,  l'Eglise  n'obéissait  pas  seule- 
ment à  un  besoin  propre  de  sa  vie  extérieure.  En 
s'assimilant  les  formes  originelles  de  l'art  antique, 
elle  accomplissait  encore  sa  fonction  de  suprême 
mainteneuse  et  de  régente  des  spéculations  univer- 
selles de  l'esprit. 

La  première  organisation  delà  musique  religieuse 


fut  l'œuvre,  au  ive  siècle,  à  Milan,  de  saint  Asibroise 
(340-397).  Au  v»  siècle,  le  pape  Léon  Ier  (440-461)  ré- 
glementa un  rite  romain,  né  au  début  du  siècle  pré- 
cédent, à  une  époque  où,  dit  M.  Maurice  Emmanuel, 
«  le  régime  sonore  que  les  nations  avaient  hérité 
des  Grecs  était  encore,  rythmique  exceptée,  à  peu 
près  intact1  ».  Au  vie  siècle,  saint  Grégoire  le  Grand 
(540-604)  corrigea  et  modifia  le  plain-chant  ambro- 
sien  et  fonda  la  célèbre  Schola  Cantorum,  véritable 
Académie  de  musique  sacrée.  Il  est  «  le  grand  maître 
de  chapelle  du  monde  entier.  Il  dirige,  à  Rome,  de 
sa  personne,  la  maîtrise  par  excellence,  et  ses  en- 
voyés vont  par  toute  la  chréLienté  modifier  le  chant 
des  autres  églises  et  le  ramener  à  l'unité2  ». 

Telle  est  l'origine,  en  notre  ère,  de  l'enseignement 
musical  qui,  par  l'Eglise,  nous  vint  d'Italie. 

Ce  plain-chant  romain  était,  en  Gaule,  le  chant 
étranger,  celui  de  la  conquête.  Son  intronisation  et 
sa  substitution  au  vieux  chant  gallican  furent  lentes 
et  difficiles. 

Au  cours  d'un  séjour  que  le  pape  Etienne  II 
(752-757 1  fit  en  France,  Pépin  le  Bref,  frappé  de  la 
beauté  du  chant  grégorien,  décida  de  l'établir  dans 
toutes  les  églises  de  son  royaume.  Sur  sa  demande, 
le  pape  Paul  I1'  (757-767),  frère  et  successeur  d'E- 
tienne II,  lui  adressa  l'un  de  ses  plus  habiles  musi- 
ciens, Siméon,  qui  ouvrit  une  école  de  chant  à  Rouen, 
où  l'évêque  Rémi,  frère  de  Pépin,  plaça  un  grand 
nombre  d'élèves  destinés,  par  la  suite,  à  se  répandre 
dans  les  provinces  pour  y  enseigner. 

Quelque  rude  que  fût  la  volonté  de  Pépin,  les  ha- 
bitudes nationales  et  les  rivalités  des  musiciens 
eurent  tôt  fait  de  corrompre  le  chant  romain  ainsi 
importé.  Charlemagne,  peu  après  le  voyage  qu'il  fit 
à  Rome,  en  787,  reprit  l'œuvre  de  son  père  en  vue 
de  réaliser  l'unification  du  chant  religieux  et  de 
substituer  la  psalmodie  grégorienne  aux  mélodies 
gallo-romaines.  Il  fonda  deux  écoles  musicales  :  à 
Metz  et  à  Soissons,  et  confia  la  direction  de  l'école 
Palatine,  au  palais  impérial,  au  grand  Alclun.  A  Lyon, 
l'évêque  Leydrade  fondait,  en  sa  cathédrale,  une  école 
où  l'on  devait  chanter  de  fort  bon  matin,  puisqu'elle 
reçut  le  nom  de  Manécanterie.  A  Avignon,  à  Tours, 
à  Strasbourg,  et  dans  la  plupart  des  villes  de  l'Em- 
pire, d'aulres  foyers  d'enseignement  ne  tardèrent 
pas  à  s'ouvrir. 

C'est  à  ces  anciennes  institutions,  où  il  faut  voir 


1.  TraitèdeVaccompagnemi'}!  (Janin,6d 

2.  Dupré  et  OTlcndorlf,  Traité  Je  I  adminittratittn  Jes  lieai 
(Duponl,  éd.,  1885). 


TECH.XIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3577 


l'origine  des  maîtrises,  que  sont  dus  les  progrès  de 
l'art  musical  en  ces  temps  lointains. 

Il  ne  semble  pas  douteux  que,  pour  Charlemagne, 
l'easeignement  de  la;musique  n'ait  eu  des  fins  à  la 
fois  religieuses  et  sociales.  L'Ecole  mère  de  Metz, 
comme  celle  de  Soissons,  servait  à  la  formation 
musicale  des  prêtres;  niais  ces  prêtres  étaient  aussi 
les  maîtres  des  écoles  publiques,  et  l'on  sait  que  le 
1,'rand  empereur  considérait  la  musique  comme  une 
partie  intégrante  de  l'instruction  générale. 

Sous  l'influence  de  Charlemagne,  l'enseignement 
musical  avait  pris  un  important  essor,  aux  vine  et 
ix"  siècles,  dont  témoignent  les  traités  des  premiers 
théoriciens  :  Aihélien  de  Réoiiê,  Rèmï  d'Aixerre, 
Kégino  de  Prum,  Odo.n  \oe  Cluny,  et  le  célèbre  llic- 
bald,  qui  fut  successivement  élève  et  directeur  de 
l'école  de  chant  de  Tournai.  La  musique  savante  est 
seulement  religieuse,  et  elle  n'est  que  la  survie,  plus 
ou  moins  amendée,  de  l'art  judéo-grec1. 

L'organisation  politique  de  la  France  n'est  pas 
alors  assez  fortement  constituée  pour  que  se  mani- 
festent les  formes  des  idées  nouvelles  dont  la  gesta- 
tion se  fait  sourdement.  Des  racines  profondes  rat- 
lachent encore  le  moyen  âge  aux  temps  anciens.  Mais, 
en  même  temps  que  s'instaure  le  ferme  pouvoir  des 
Capétiens,  le  corps  social  de  la  nation  opère  une 
sorte  de  repli  sur  lui-même  et  de  concentration  de 
ses  énergies. 

Les  xe  et  xie  siècles  sont  la  période  la  plus  sombre 
de  ces  âges  ;  cependant,  la  monarchie  française  s'em- 
ploie, avec  un  rare  bonheur,  à  ordonner  les  forces 
qui  fermentent  et  annoncent  obscurément  l'avène- 
ment des  temps  modernes. 

L'enseignement  subit  à  ce  moment,  un  temps  d'ar- 
rêt. Sur  la  fin  du  xie  siècle  il  fut  remis  en  honneur. 
C'est  alors  que  Geravold,  chapelain  de  la  reine  Uer- 
trade,  seconde  femme  de  Philippe  Ier  (1052-1 1  ISi, 
fonda  la  célèbre  école  du  monastère  de  Saint-Wan- 
drille,  dont  il  était  abbé.  «  Aux  xii"  et  xme  siècles, 
dit  Lavoix-,  les  écoles  abondaient  où  la  musique 
était  enseignée  avec  soin.  On  en  vit  une  à  Soissons, 
qurrivalisait  avec  Metz,  d'autres  à  Poitiers,  à  Orléans, 
à  Clermont,  àAix,  etc.;  il  n'était  pas  une  cathédrale 
qui  n'eût  sa  maîtrise,  pas  une  abbaye  qui  n'eut  son 
école  de  musique.  Il  ne  faudrait  pas  croire  que  seules 
les  églises  et  les  abbayes  eussent  leur  part  dans  ce 
fructueux  labeur.  A  peine  établies,  les  universités 
avaient  inscrit  la  musique  dans  leurs  programmes.  » 
Ainsi,  de  l'école  de  la  simple  abbaye  à  l'université, 
qu'elle  dirige,  l'Eglise  dispense  un  enseignement 
musical  étendu,  mais  spécial. 

Dans  le  même  temps,  les  patients  travaux  des 
moines  accroissent  les  découvertes  acoustiques  et 
instrumentales.  Les  progrès  réalisés  dans  la  facture 
des  orgues,  notamment,  ont  des  conséquences  im- 
menses. L'instrument  à  clavier  donne  naissance  à  la 
diaphonie.  Un  art  s'élabore  lentement,  qui  n'élève 
pas  encore  des  monuments  dont  la  splendeur  soit 
a  l'image  des  cathédrales  surgissantes,  mais  il  essaye 
ses  forces  et  cherche  ses  règles.  En  attendant,  la 
musique  religieuse  conserve  la  trame  sonore  de  l'art 
antique,  et  les  prières,  parées  de  ses  formes  souples 
et  colorées,  ajoutent  à  la  pompe  du  service  divin. 
Hors  du  temple,  l'Eglise  régente  tout  ce  qui  est 
laïc.  Elle  tend  à  capter  jusqu'aux  manifestations  de 


1.  Cf.  Amédee  Gastodé,  Les  Origii 
i.,  1907). 
i.  Histoire  de  lu  Musique  (Ouantia, 


l'art  {profane  et  à  faire  tourner  à  sa  gloire  même 
la  passion  des  hommes  pour  les  spectacles.  Les  par- 
vis des  églises  sont  le  berceau  du  théâtre  lyrique. 
On  y  représente,  dès  le  xie  siècle,  des  sortes  d'opé- 
ras liturgiques  composés  sur  des  mélodies  du  plain- 
chant,  auxquelles  se  mêlent  des  accents  profanes. 
Dissimulant  leur  robe  sous  des  travestis,  les  prêtres 
montent  sur  des  tréteaux,  et  l'on  voit  jusqu'à  des 
chanoines  incarnerdes  personnages  féminins,  la  tête 
revêtue  de  leuraumusse,  ad  sitirilitwlinem  iniilicntin, 
comme  dit  le  rituel 3. 

Dans  cette  collusion  du  sacré  et  du  profane,  celui- 
ci  devait  nécessairement  absorber  celui-là,  pour  des 
raisons  où  l'enseignement  de  l'histoire  et  celui  de 
l'esthétique  trouvent  également  leur  accord. 

Lorsque,  au  xui*  siècle,  les  trouvères  apportèrent 
à  la  scène  les  histoires  d'amour,  l'Eglise  dut  se  dé- 
tourner des  spectacles  que  son  égide  ne  parvenait 
pas  à  [maintenir  dans  les  limites,  même  étendues, 
Ja  domaine  religieux.  II  était,  alors,  déjà  trop  tard 
pour  qu'elle  pût  contenir  les  élans  de  l'art  .profane, 
qui  faisait  subir  les  plus  graves  altérations  au  style 
de  la  musique  proprement  liturgique.  La  »ogne 
s'étail  répandus,  aux  xive  et  xv<  sièeles,  des  messes 
composées  sur  les  mélodies  des  chansons 
licencieuses,  et,  il  ne  fallut  pas  moins  que  la  parole 
austère  de  Lctber  et  de  Calvin,  anatliémisanl  If  pa- 
ganisme de  la  religion  romaine,  pour  que  les  papes 
missent  ordre  à  cet  état  de  choses.  «Ils  : 
dorénavant  toléré  que  le  plaiu-chant  pur,  écrit  La- 
voix4, si  Palestrina,  dans  la  messe  dite  du  pape 
Marcel,  exécutée  en  1565  devant  le  pape  Pie  IV,  n'eût 
fourni  le  modèle  du  nouvel  art  religieux.  Cette  date 
ferme  1ère  des  messes  musicales  écrites  sur  des 
paroles  profanes.  >>  Elle  ouvrait,  pour  un  siècle,  celle 
de  la  polyphonie  vocale,  qui  marqua  le  terme  de  la 
fructueuse  influence  de  l'Eglise  sur  les  progrès  de 
l'art.  On  peut  dire,  en  effet,  qu'à  partir  du  milieu 
du  xvne  siècle,  la  musique  profane,  instrumentale  et 
vocale  est  définitivement  entrée  eu  possession  do 
gouvernement  des  destinées  musicales.  Des  raisons 
spécifiques  ne  nous  permettent  pas  de  penser  qu'il 
eût  pu  en  être  autrement,  et  nous  tenons  à  nous  en 
expliquer. 

Quoi  qu'ait  pu  en  dire  un  illuminé  et  un  mystique 
tel  que  Tolstoï,  l'art  religieux  ne  représente  qu'un 
aspect  de  l'art,  son  aspect  originel.  Il  se  trouva 
qu'au  moyen  âge  il  en  fut  sensiblement  l'unique  et 
vivante  image;  mais  l'évolution  des  civilisations 
montre  qu'il  en  est  des  arts  comme  des  gouverne- 
ments,dont  les  formes,  originairement  théocratiques, 
passent  par  le  stade  monarchique  avant  de  parvenir 
à  l'état  démocratique.  D'abord  religieux,  l'art  s'é- 
vade peu  à  peu  des  temples;  il  devient  profane  et 
aristocratique;  enfin,  privé  de  discipline  et  d'ordre, 
il  voit  ses  principes  se  dissoudre  au  milieu  des  extra- 
vagances qui  marquent  l'agonie  des  âges,  des  em- 
pires et  des  peuples.  Telle  est  l'image  rythmée  de 
nos  institutions. 

.Nous  allons,  ici,  saisir  sur  le  vif  le  mécanisme  du 
second  de  ces  phénomènes,  comme  nous  discer- 
nerons plus  loin  les  prodromes  du  dernier. 

11  est  au  domaine  sacré  des  bornes  spirituelles.  A 
vouloir  les  étendre  outre  mesure,  l'Eglise  fut  con- 
duite à  des  errements.  L'impropriété  de  frit  des  an- 


S;,7S 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


ciens  régimes  Ihéocratiques  tient  à  leur  incapacité  à 
délimiter  les  frontières  du  sacré  et  du  profane,  au 
fur  et  à  mesure  que,  par  le  recul  des  révélations 
initiales,  la  foi  va  s'alfaihlissant.  La  primauté  de 
l'idée  religieuse  dérive  de  son  sens  éternel  et  sur- 
naturel; sa  nature  et  sa  sauvegarde  ne  souifrent  pas 
qu'elle  soit  indifféremment  mêlée  à  celles  des  choses 
humaines  dont  les  fins  sont  immédiates.  Sans  doute 
l'organisation  et  lu  direction  de  la  société  civile  ne 
peuvent-elles  être  indifférentes  aux  religions.  Mais 
l'Eglise  romaine  n'a  précisément  jamais  tenu  sa 
puissance  temporelle  comme  l'instrument  néces- 
saire, ou  principal,  du  gouvernement  des  âmes.  La 
suprématie  de  son  pouvoir  spirituel  est  la  règle  de 
sa  véritable  action,  et  c'est  pour  cette  raison  que  la 
papauté  considère  sans  prévention  fondamentale  les 
formes  diverses  des  gouvernements.  Telle  est  la  con- 
dition de  l'universalité  et  de  la  pérennité  de  la  doc- 
trine catholique. 

L'histoire  de  la  musique  religieuse  illustre,  sur  un 
plan  secondaire,  ces  essentielles  considérations. 

Lorsque  la  défaveur  des  circonstances  contraignit 
l'Eglise  à  abandonner  la  régence  temporelle  qu'elle 
exerçait,  par  interposition,  sur  la  chrétienté,  elle  se 
limita,  en  son  œuvre,  à  la  sauvegarde  des  fins  stric- 
tement religieuses  qu'il  convenait  de  préserver  des 
atteintes  profanes.  Il  devint  nécessaire  de  fixer,  une 
fois  pour  loutes,  les  caractères  de  l'art  musical  sacré, 
c'est-à-dire  de  l'arrêter,  en  le  soustrayant  aux 
influences  mobiles  de  la  musique  dramatique  et 
instrumentale.  En  effet,  nulle  digue  ne  pouvait  l'isoler 
davantage  que  le  vide  spatial,  chaque  jour  agrandi, 
qui  résulterait  de  sa  stagnation  illimitée  et  de  la 
marche  incessante  de  l'art  profane.  Profondes  vues, 
en  vérité!  qui  accordent  les  objets  particuliers  avec 
les  plus  hautes  et  les  plus  vastes  raisons. 

Plastiquement,  le  chant  liturgique,  une  fois  établi, 
exclut  toute  invention  :  son  expression  est  circons- 
crite à  jamais  par  la  prière;  son  objet  universel 
exige  qu'il  soit  fixé  en  ses  échelles,  et  sa  pratique 
ne  se  concilie  qu'avec  les  formes  de  la  monodie  vo- 
cale. Or,  l'art  n'est  qu'invention. 

Aussi  bien  l'immutabilité  de  la  doctrine  romaine 
exige  de  ses  manifestations  extérieures,  de  son  chanl 
et  de  l'art  qui  l'ordonne,  une  pareille  immutabilité. 
Matériellement,  la  musique  religieuse  estdonc  inapte 
à  assimiler  les  éléments  nouveaux  de  la  langue  mu- 
sicale, qui  relèvent  de  plus  en  plus  de  la  technique 
instrumentale.  Pour  demeurer  soumis  à  son  objet, 
l'art  religieux  devait  rompre  toute  attache  avec  la 
musique  profane.  La  rupture  fut  brusquement  con- 
sommée du  point  de  vue  spéculatif;  elle  ne  devait 
l'être  que  par  degrés,  et  lentement,  dans  ses  effets. 
L'Eglise,  au  sortir  du  moyen  âge,  est  détentrice, 
en  même  temps  que  des  traditions  savantes,  de  toutes 
les  institutions  enseignantes.  Un  immense  réseau 
d'écoles  de  musique  couvre  le  royaume;  ces  écoles, 
ce  sont  les  maîtrises  des  cathédrales,  des  chapitres, 
des  abbayes  et  des  monastères.  Compositeurs,  or- 
ganistes, chanteurs,  professeurs  se  forment  pour  la 
plupart  dans  ces  écoles,  d'où  sortent  de  nombreux 
musiciens  fortement  éduqués.  Les  élèves  y  sont 
entretenus  en  commun  et  y  reçoivent  une  solide 
instruction  générale.  Les  maîtrises  enseignent  la 
composition,  le  contrepoint,  le  chant,  et  aussi  quel- 
ques instruments,  peu  nombreux,  utiles  pour  l'ac- 
compagnement des  voix.  Elles  sont,  en  somme,  les 
véritables  conservatoires  de  nos  artistes.  La  musique 
profane  bénéficie,  non  moins  que  la  musique  reli- 


gieuse, de  cet  enseignement,  et  il  n'est  pas  jusqu'aux 
théâtres  qui  ne  lui  doivent,  en  parlie,  leurs  chanteurs. 
Les  maîtrises  contribuèrent  ainsi  grandement  aux 
progrès  de  l'art  musical  aux  xvic,  xvu°  et  xvmc  siècles- 
Toutefois,  ainsi  qu'on  s'en  rendra  compte,  leur  en- 
seignement très  spécial,  conditionné  par  des  fins 
particulières  de  plus  en  plus  étrangères  aux  formes 
de  la  musique  profane,  cessa  de  satisfaire  aux 
besoins  de  celle-ci,  dès  la  fin  du  xvn"  siècle.  C'est  à 
cette  époque  que  remontent  les  premières  tenta- 
tives d'enseignement  laïque.  L'enseignement  des 
mailrises  justifiait  les  critiques  dont  il  fut,  après 
coup,  l'objet.  Il  en  sera  parlé,  plus  loin,  dans  un 
document  d'un  contemporain1,  dont  nous  extrayons, 
présentement,  le  tableau  ci-contre,  qui  montre  l'im- 
portance qu'avait  cette  antique  institution  sur  la  lin 
du  xvme  siècle. 


I.B.W-    M'PEOXIMAIIF     I>     s    •■;    ;■     NSF.S   RELATIVES 
ES    CORPS    DE    MUSIQUE    DE    LA    CHAPELLE    ET    DE    LA     CHAMBRE 
ET     MAÎTRISES    AVANT     17S9. 


Chapelle  et  Chambre  du  Roi  et  de  la  Reine  . .  .  407.300  fr. 
Cathédrale  de  Paris,  Sainte-Chapelle  ri 

avant  musique  ou  maîtrise 674. 100 

—  de  Chartres 100. S00 

—  d'Amiens 66.100 

—  de  Dijon 70.000 

Sainte-Chapelle  de  Dijon 105.000 

-oiut-Mai-lin  d"    l'ours SI.'. 

Cathédrale  d'Angers 80.000 

—  de  Strasbourg 250.000 

—  deRouen... SI. 900 

—  de  Toulouse  100.000 

—  de  Rennes 80.000 

—  de  Cambrai                           130.000 

—  de  Tournai                         90.000 

—  de  Langres 100.000 

Environ    100  églises  ayan        i      se  i  imposée 

musique,  i  88.500  francs        i  m  !.. 10  380  000 

6.000  •■■-  inisl   s   ndans  l'autre. . .  .  3.600.000 

i  peut  ■  »  iluei  les  1  ; -  de  la  Belgique 

el  des  p  ivs  r  unis  i   i.O 10  de  francs  au 

plus  bas 4.000.000 

Total 20.342.500  fr. 


A  la  veille  de  la  Révolution,  l'Eglise  entretenait, 
en  gros,  plus  de  430  écoles  de  musique;  15000  musi- 
ciens étaient  attachés  aux  cathédrales  et  aux  cha- 
pitres, et  le  budget  affecté  à  l'entretien  des  maîtrises 
dépassait  vingt  millions  de  francs  de  l'époque.  Dut- 
on  faire  la  part  des  prébendes  ecclésiastiques,  il 
n'en  demeure  pas  moins  qu'à  aucun  moment  l'en- 
seignement musical  ne  fut  plus  richement  doté  et 
plus  répandu. 

S'il  ne  paraît  pas  douteux  que  les  passions  anti- 
cléricales eussent  suffi,  après  1780,  à  consommer  la 
ruine  de  l'enseignement  musical  religieux,  il  con- 
vient néanmoins  d'observer,  qu'eu  égard  aux  som- 
mes qui  leur  étaient  affectées,  les  maîtrises  ne  rem- 
plissaient que  très  imparfaitement  l'office  d'écoles 
de  musique.  «  A  mesure  que  le  goût  chang 
Lavoix-,  que  la  musique  progressait, l'enseignement 
un  peu  spécial  donné  dans  les  maîtrises  ne  suffit 
plus;  on  vit  successivement  Lilly,  Hameau  et  Gluck 
être  obligés  de  former  eux-mêmes  les  chanteurs  el 
les  chanteuses  à  leur  nouveau  style.  »  Dès  la  fin  du 
.\viic  siècle,  des  écoles  théâtrales  s'étaient  ouvertes 


Projet  d'orgiuvs'itiKi   :      '  *</!<<?,  soumiaen  l'an  IX 

publique  ,1  .  .  par   Bernard 


J.  La  Musique  française,  loco 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    357 


à  Paris,  annexées  à  l'Opéra;  nous  verrons  ulleneu- 
rement,  qu'avant  même  la  Révolution,  un  ensei- 
gnement officiel  et  profane  s'était  institué  dans  la 
capitale.  Les  événements  de  la  fin  du  wm"  siècle 
hâtèrent  et  brusquèrent  un  dénouement  qui  était,  en 
réalité,  inéluctable.  En  1791,1a  Révolution  lit  rentrer 
les  revenus  des  maîtrises  dans  le  Trésor  public.  Ainsi 
supprimées,  quelques-unes  purent  se  reconstituer 
sous  le  premier  Empire  et  sous  la  Restauration  ;  elles 
jouèrent  un  rôle  amoindri,  mais  encore  sensible, 
jusqu'à  la  fin  du  xixe  siècle.  Nous  les  retrouverons, 
alors,  dans  un  profond  état  de  délabrement  et 
d'abandon,  précurseur  de  leur  prochaine  disparition. 
Préalablement,  il  importe  de  considérer  l'action 
royale  dans  les  effets  qu'elle  eut  sur  le  développe- 
ment de  la  musique  profane,  et  les  répercussions 
qui  en  résultèrent  sur  ses  modes  d'enseignement. 


Les  manifestations  et  les  progrès  de  l'art  furent, 
dès  l'origine,  encouragés  par  la  royauté  française. 
Longtemps,  il  est  vrai,  l'action  royale  se  confondit 
avec  celle  de  l'Eglise.  Lorsque  Clovis  (465-511)  lit 
venir  près  de  lui  le  chanteur  Acoride,  choisi  par 
Boèce,  c'était  afin  qu'il  instruisît  ses  prêtres  et  ses 
chantres.  Comme  lui  Childebert  I"  (-1-558),  Clo- 
laire  II  (584-628)  et  Dagobert  (602-638)  appelèrent  à 
leur  service  des  chanteurs  et  des  instrumentistes, 
qu'ils  attachèrent  à  l'oratoire  royal. Peu  après,  Pépin 
le  Bref  donna  à  ce  corps  une  constitution  spéciale, 
et,  en  750,  la  chapelle  des  rois  de  France  se  trouva 
définitivement  instituée.  Enfin  Charlemagne  réalisa, 
comme  nous  l'avons  vu,  l'organisation  d'un  ensei- 
gnement étendu  delà  musique  religieuse. 

Jusqu'à  la  Révolution,  la  monarchie  favorisa  de 
tout  son  pouvoir  les  entreprises  de  l'Eglise  en  ma- 
tière d'enseignement  musical.  On  peut  même  dire 
qu'elle  lui  abandonna,  sur  ce  terrain,  une  part  im- 
portante de  son  pouvoir  de  gouvernemeul.  Mais  si, 
en  fait,  la  royauté  ne  prit  aucune  part  dans  l'orga- 
nisation de  l'enseignement  de  la  musique,  elle  ne 
fut  pas  cependant  sans  exercer  sur  lui  une  influence 
indirecte  très  sensible.  Cette  influence  s'opéra  par 
l'intermédiaire  de  la  musique  profane, dont  l'avène- 
ment et  les  progrès  furent,  en  parlie,  l'œuvre  de  la 
cour  de  France. 

«  Il  faut,  disait  l'antique  loi  galloise,  à  un  noble 
Gaulois  une  femme  vertueuse,  un  coussin  sur  sa 
chaise  et  une  harpe  bien  accordée.  »  Ainsi  transmise 
par  tradition  domestique,  la  musique  profane  jouis- 
sait de  la  faveur  du  peuple  et,  bien  que  condamnée 
par  les  conciles,  les  rois  l'encourageaient;  mais  l'en- 
seignement, base  de  toute  science,  lui  faisait  entiè- 
rement défaut. 

Les  premiers  ménestrels,  jongleurs,  trouvères  et 
troubadours  étaient  de  pauvres  musiciens-poètes, 
sans  instruction,  ne  possédant  vraisemblablement 
qu'un  certain  don  de  la  mélodie.  Lorsque  les  guer- 
riers des  croisades  revinrent  d'Orient,  ils  rappor- 
tèrent de  leurs  voyages  des  besoins  nouveaux,  où  la 
part  du  luxe  et  des  plaisirs  était  grande.  Le  goût  se 
répandit  des  récits  et  des  aventures  merveilleuses,  et 
les  concerts  des  trouvères  et  des  troubadours,  chan- 
teurs d'amour  et  chanteurs  de  guerre,  remplirent 
les  châteaux  des  seigneurs  et  les  palais  des  rois.  La 
faveur  qu'ils  connurent  à  cette  époque  eut  une  réper- 
cussion considérable  sur  l'évolution  de  la  musique 
profane.  «  Les   trouvères    et   les   ménestrels,   écrit 


Lavoix',  voyageaient  par  les  villes,  s'arrètaunl  en 
temps  de  carême,  à  l'époque  où  tout  chant  joyeux 
devait  cesser,  et  là,  enseignaient  à  qui  voulait  les 
apprendre,  chansons  et  refrains.  Les  plus  grands 
seigneurs  envoyaient  leur  personnel  chantant  et  mu- 
siquant  à  ces  écoles,  dites  de  ménestrandie  ou  scholap 
rn.imor.um,  pour  renouveler  leur  répertoire  et  appren- 
dre de  nouvelles  mélodies.»  Ces  écoles  ambulantes 
et  populaires  se  tenaient  tantôt  à  Bourg-en-Bresse, 
tantôt  à  Lyon,  à  Genève,  à  Cambrai,  à  Arras.  Trou- 
vères et  troubadours  rivalisaient  d'émulation,  ins- 
tituaient des  concours,  appelés  Puys  de  musique, 
et  proclamaient  des  lauréats.  C'est  ainsi  que  la  mu- 
sique profane,  issue  du  peuple,  pénétra  dans  les 
palais  des  rois.  Sur  la  fin  du  moyen  âge,  elle  accom- 
pagnait les  carrousels  et  les  mascarades  et,  en  ces 
milieux  policés,  elle  s'affina  et  se  perfectionna. 

Avec  la  Renaissance,  elle  conquit,  à  la  cour,  son 
autonomie  et  ses  premiers  titres  de  noblesse  lors- 
que, en  1543, François  I"  attacha  spécialement  à  sa 
chambre  un  corps  de  musiciens  indépendants  du 
service  divin,  composé  de  chanteurs  et  de  quelques 
instrumentistes. 

L'état  social  de  la  France  s'est  alors  profondément 
modifié.  Le  théocratisme  féodal  des  siècles  précé- 
dents a  fait  place  au  pouvoir  absolu  de  la  monar- 
chie. En  politique,  comme  en  art,  l'évolution  qui  se 
manifeste  marque  l'avènement  des  temps  modernes. 
Ce  qui  caractérise,  en  effet,  la  Renaissance,  c'est  1  i 
prééminence  de  l'esprit  profane,  sous  des  dehors 
encore  pleins  de  religiosité.  L'antiquité,  remise  en 
honneur,  donne  naissance  à  une  sorte  de  mysti- 
cisme païen  et  de  préromantisme  dévot,  dont  la 
Réforme  est  la  violente  réaction. 

Les  lettres  et  les  arls  sont  en  grand  honneur  à  la 
cour.  En  1570,  Charles  IX  accorda  au  poète  Jean- 
Antoine  de  Baïf  le  privilège  d'une  Académie  de  mu- 
sique et  de  danse,  qui,  malheureusement,  ne  lui 
survécut  pas.  Henri  III  et  Henri  IV,  Louis  XIII  et 
Louis  XIV  réglementèrent  à  nouveau  et  accrurent  les 
corps  de  musiciens  attachés  à  leur  chambre  et  à  leur 
chapelle;  toutefois,  au  milieu  du  xvuc  siècle,  il 
n'existe  pas  encore  d'enseignement  musical  laïque 
organisé. 

L'arl,  c'est-à-dire  la  musique  savante,  est  circons- 
crit aux  milieux  aristocratiques.  Les  grandes 
charges,  mises  au  concours,  sont  tenues  par  des 
Maîtres  que  les  élèves  viennent  solliciter.  L'enseigne- 
ment privé  est  seul  en  laveur  dans  les  familles 
riches,  et  les  maîtrises  sélectionnent  et  instruisent 
ceux  qui  se  destinent  à  la  profession  de  musicien. 

Les  spectacles  somptueux  et  les  concerts  de  la 
musique  profane  nécessitaient  le  concours  de  nom- 
breux artistes  et  d'instrumentistes  qu'il  fallait,  le  plus 
souvent,  aller  chercher  à  l'étranger.  Peu  après  que 
Lilly  eut  été  appelé,  par  la  faveur  du  roi,  à  diriger 
la  bande  de  ses  violons,  des  lettres  patentes  conférées 
à  Pierre  Perrin,  en  1659,  consacrèrent  la  fondation 
de  l'Opéra,  qui,  dans  la  pensée  royale,  ne  devait  pas 
être  un  théâtre,  mais  une  Académie,  titre  qu'il  porte 
encore  aujourd'hui,  c'est-à-dire  une  compagnie  et 
une  école  d'art. 

La  création  de  l'Opéra  est  le  fait  le  plus  important 
dû  à  l'action  royale  qu'il  convient,  ici,  d'enregistrer, 
en  raison  de  ses  conséquences  médiates  sur  l'ensei- 
gnement de  la  musique. 


3580 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Perhin  dut  recruter  ses  sujets  chantants  dans  les 
maîtrises  des  églises;  mais,  outre  que  les  voix  de 
femmes  y  faisaient  défaut,  l'instruction  musicale  de 
ces  sujets  ne  correspondait  nullement  aux  emplois 
auxquels  ils  étaient  destinés,  et  lorsque  Lully  suc- 
céda à  Perrin,  il  fonda  à  l'Opéra,  en  1072,  une  école 
de  chant  et  de  déclamation.  En  1698,  M11"  Marthe  le 
Rochois,  qui  venait  de  se  retirer  du  théâtre,  ouvrit  une 
seconde  école  supplémentaire,  rue  Saint -Honoré- 
Cette  école,  qui  fut  fermée  en  1726, produisit  plusieurs 
Sujets  remarquables  pour  la  scène.  On  ouvrit  ensuite, 
rue  Saint-ISicaise,  dans  les  magasins  de  décors  de 
l'Académie  royale  de  musique,  l'établissement  connu 
sous  le  non  d'Ecole  du  Magasin,  et  qui  portail  offi- 
ciellement le  litre  d'Ecole  de  chant  de  l'Opéra. 
C'est  pour  les  élèves  femmes  de  cette  école,  commu- 
nément appelées  filles  du  Magasin,  et  qui  étaient 
autoritairement  désignées  pour  l'Opéra,  que  le  cor- 
niste Rodolphe  écrivit,  en  1772,  ses  célèbres  leçons 
de  solfège.  Enfin  un  arrêt  du  Conseil  d'Etat  du  roi, 
du  3  janvier  1784,  substitua  à  celte  école  une  école 
royale  de  chant  et  de  déclamation,  qui  fut  ouverte 
le  1er  avril  suivant  dans  l'hôtel  des  Menus-Plaisirs, 
et  dont  Gossec  reçut  la  direction  :  «  le  roi  ayant  re- 
connu que  ce  qui  pourrait  contribuer  le  plus  effica- 
cement à  donner  à  un  spectacle  aussi  intéressant 
pour  le  public  un  nouveau  degré  de  perfection,  ce 
sérail  d'établir  une  Ecole  où  l'on  pût  former  toul  à 
la  fois  des  sujets  utiles  à  l'Académie  royale  de  mu- 
sique de  Sa  Majesté,  etc.,  ordonne...»  Ces  considé- 
rants laissent  fort  bien  voir  la  conception  que  se 
faisait  l'ancien  régime  du  rôle  de  l'enseignement 
musical,  qui  élait  celui  d'un  enseignement  profes- 
sionnel étroitement  restreint;  une  seule  école  étai1 
annexée  à  un  théâtre,  et,  entre  tant  de  matières,  le 
chant  seul  y  élait  professé. 

On  ne  pouvait,  on  en  conviendra,  moins  faire. 
L'Opéra  palliait  au  manque  de  personnel  instrumen- 
tal en  faisant  venir  d'Italie  et  d'Allemagne  les  ins- 
trumentistes à  archet  et  à  vent  qu'on  ne  trouvait  pas 
en  France;  mais  il  va  de  soi  qu'à  une  époque  où  le 
français  était  la  tangue  universellement  prééminente, 
la  seule  décence  imposait  à  l'Académie  royale  d'ins- 
truire des  sujets  chantants.  Le  privilège  de  l'Opéra,  qui 
ne  fut  pas  sans  inconvénients  sur  l'essor  de  la  musi- 
que française,  se  trouva  ainsi  favoriser  la  création, 
à  Paris,  de  l'Ecole  royale  de  chant.  Quant  aux 
soixante- quinze  théâtres  que  l'on  comptait  alors 
dans  les  provinces,  nul  secours  ne  leur  était  apporté. 
L'initiative  très  étroite  et  isolée  qu'encourageait 
la  royauté  ne  devait  avoir  pour  bénéficiaires  que 
l'Opéra  et  le  service  particulier  de  Sa  Majesté. 

Si  l'on  considère,  dans  son  ensemble,  la  situation 
en  laquelle  se  trouvent  la  musique  et  l'enseignement, 
avant  la  Révolution,  on  est  frappé  de  constater  la 
disparité  des  progrès  de  l'une  et  de  l'autre.  Un  siè- 
cle après  Lully,  après  Rameau,  après  Ghucie,  alors 
que  l'art  lyrique  vient  d'être  doté  de  chefs-d'œuvre 
retentissants,  l'enseignement  de  la  musique  est  en- 
core ignoré  des  pouvoirs  publics. 

En  quel  état  précis  se  trouve-t-il  donc? 

L'Eglise  entretient  de  très  nombreuses  écoles  de 
musique.  On  leur  doit  le  seul  enseignement  public 
qui  soit,  alors  dispensé,  et  les  services  qu'elles  ren- 
dent sont  appréciables;  mais  cet  enseignement,  très 
spécial,  est  en  marge  de  l'évolution  de  la  musique 
et  ne  correspond  pas  à  ses  besoins.  L'Eglise,  tournée 
vers  un  objet  sans  contact  avec  l'art  profane,  ignore 
ce  dernier. 


La  royauté  protège  el  encourage  les  arts,  les  spec- 
tacles sont  indispensables  à  l'éclat  des  fêtes;  mais 
l'idée  qu'elle  s'en  fait  ne  va  pas  au  delà  de  cette  notion 
mondaine:  Quelque  insuffisante  que  soit  celle-ci,  la 
compréhension  de  sa  mise  en  œuvre  l'estencore  davan- 
tage. La  musique  profane  est  à  peu  près  exclusive- 
ment lyrique;  composée  pour  une  société  aristocra- 
tique et  brillante,  elle  franchit  à  peine  le  cercle  étroit 
de  la  cour  et  des  salons.  Son  action  limitée  restreint 
ses  besoins.  Aussi,  tandis  que  les  nations  étrangères 
entretiennent  des  conservatoires  prospères,  la  France 
n'a-t-elle  qu'une  modeste  école  de  chant  pour  son 
premier  théâtre. 

L'enseignement  instrumental  est  totalement  inor- 
ganisé. On  ne  peut  citer  que  pour  mémoire  les  écoles 
de  musique  militaire  des  régiments  des  troupes  de 
ligne,  car  ces  écoles  ne  formaient  pas  précisément 
des  musiciens  instruits  et  lecteurs.  Leur  objet  était 
de  faire  exécuter  aux  élèves,  au  bout  de  quelques 
mois,  des  marches  et  des  morceaux  militaires.  Il 
n'existait,  enfin,  aucune  école  pour  l'enseignement 
des  instruments  à  cordes,  el  nulle  direction  n'était 
donnée  aux  talents  dans  les  hautes  matières  de  la 
composition. 

Les  ressources  nationales,  inexploitées  par  l'Etat, 
étaient  livrées  à  elles-mêmes,  et  la  musique,  consi- 
dérée comme  une  spéculation  privilégiée,  en  partie 
inaccessible  au  peuple,  demeurait  une  sorte  de  bien 
réservé. 


11  est  d'un  puissant  intérêt  de  démêler  le  jeu  des 
réactions  intellectuelles  qui  préparèrent  les  événe- 
ment de  1789  et  qui,  ultérieurement,  après  les  suc- 
cès de  l'émeute,  suscitèrent  les  mouvements  d'idées 
auxquels  s'attachent,  aujourd'hui,  les  appellations 
d'esprit  et  de  tradition  révolutionnaires. 

Les  conquêtes  violentes  du  pouvoir  et  les  luttes 
usurpatrices  qui  n'ont  pour  mobile  que  l'ambition, 
la  jalousie  et  les  rivalités  humaines,  ne  sont,  en 
quelque  manière,  que  des  révoltes  de  maires  de 
palais;  elles  affectent  peu,  sur  le  moment,  les  états 
sociaux  des  peuples. 

Toute  autre  est  la  signification  des  renversements 
de  régime  ayant  pour  objet  des  fins  religieuses,  phi- 
losophiques ou  sociales,  et  où  la  révolution  politique, 
encore  que  nécessaire,  a  rang  de  fait  accessoire. 
Tel  fut  le  cas  de  la  Révolution  française,  qui,  la  mo- 
narchie renversée,  bouleversa  un  ordre  de  choses 
plusieurs  fois  centenaire. 

Nous  allons  tenter  de  discerner  les  origines  des 
idées  qui  eurent  sur  la  musique,  et  sur  ses  moyens 
d'enseignement,  une  action  caractéristique. 

En  sa  qualité  de  plus  proche  taéritièFe  de  la  civili- 
sation latine,  l'ancienne  terre  de  Gaule  avail  été  le 
centre  et  le  foyer  d'une  lente  reconstitution  90ciaL  . 
Le  génie  de  la  royauté  française  avait  eu  pour  ron- 
ronnement le  siècle  de  Louis  XIV,  comparable,  en 
notre  ère,  à  ce  qu'avaient  été,  pour  Rome,  le  siècle 
d'Auguste,  et,  pour  la  Grèce,  celui  de  Périclès.  Jean 
Moréas,  oe  grand  poète  français  de  l'Attique,  disait 
que  ce  qui  demeurait  le  plus  suprenant,  en  ce  siecfe, 
c'était  qu'après  les' Grecs,  et  sur  leur  modèle,  il  eût 
produit  quelque  chose  qui  le  cédât  à  peine  aux  chefs- 
d'œuvre  antiques.  Ce  génie  français  n'était  que  le 
génie  grec  renouvelé,  à  nous  transmis  par  Kome. 

Tout  ce  que  cette  culture  gréco-latine  comportait 
d'individualisme  païen  et  de  libéralisme  philosophi- 
que fut  soumis,   un  certain  temps,  à  la  discipline 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3581 


religieuse,  puis  à  l'autorité  royale.  Sur  la  fin  du 
moyeu  âge,  et  même  après  la  lieuaissance,  ces  deux 
forces  étaient  puissamment  établies  en  France1. 

Au  xvju"  siècle,  L'affaiblissement  de  la  foi,  la  dimi- 
nution du  prestige  royal  et  le  relâchement  des 
mceurs  brisèrent  en  partie  cette  autorité  et  cette  dis- 
cipline. Les  écrivains  et  les  philosophes,  héritiers  de 
la  forte  culture  gréco-latine  que  les  hommes  des  xvie 
et  xvne  siècles  avaient  si  merveilleusement  adaptée 
au  christianisme,  revinrent  au  sentiment  païen  el 
matérialiste  de  la  souveraineté  de  la  nature  et,  con- 
séquemment,  de  l'homme,  considéré,  en  son  individu, 
comme  le  maitre  à  l'usage  duquel  elle  a  été  créée. 

Le  matérialisme  de  Voltaire  et  des  Encyclo- 
pédistes engendra,  par  réaction,  le  romantisme 
philosophique,  politique  et  littéraire,  de  Roi  ssi  kl 
Une  sensibilité  exacerbée  à  l'égard  des  droits  de 
l'individu  s'y  manifestait  pour  la  première  fois,  sous 
les  dehors  les  plus  fallacieux,  mais  aussi  les  plus 
séduisants.  La  conjonction  de  ces  états  divers  des 
esprits  était  faite,  pour  une  part,  de  détachement 
religieux,  et,  pour  l'autre,  d'individualisme  païen. 
De  là  l'explosion,  chez  les  hommes  de  la  Révolution, 
d'un  lyrisme  idéologique  et  phraséologique  directe- 
ment inspiré  de  l'antiquité,  de  là  cette  technique  de 
l'art  entièrement  nouvelle,  de  là  cette  dévotion  aux 
abstractions  et  ce  mélange  si  curieux  de  mysticisme 
et  de  réalisme  qui  instaurait,  en  même  temps  que 
la  religion  de  l'Etre  suprême,  un  véritable  culte  de  la 
patrie.  Pour  entretenir  le  feu  ardent  de  tous  ces 
autels  il  n'était  pas  de  ressources  qu'il  ne  convint 
d'exploiter.  L'histoire  des  peuples  anciens  n'ensei- 
gnait-elle  pas  que  les  spectacles  et  les  chants  étaient 
les  grands  sustenteurs  des  énergies'?  Tout  concou- 
rait ainsi  à  faire  tenir  à  la  musique  un  emploi  occa- 
sionnel prééminent,  et  c'est  ainsi,  au  nom  d'exem- 
ples empruntés  à  la  Grèce,  qu'elle  fut  appelée  à  jouer 
un  rôle  social  dans  la  nation,  incorporée  à  la  vie 
civique  et,  partant,  enseignée. À  cette  différence  près 
que  la  technique  de  l'art  est  entièrement  nouvelle, 
l'objet  pour  lequel  l'enseignement  s'instituera  est 
celui-là  même  qui  pourrait  recevoir  le  nom  de  mu- 
sicopédie  platonicienne. 

L'opposition  entre  les  idées  dominantes  sous  la 
fin  du  règne  de  Louis  XVI,  et  celles  qui  se  manifes- 
tèrent au  lendemain  de  l'avènement  de  la  Répu- 
blique, en  matière  d'art  et  d'enseignement  surtout, 
est  fort  nettement  marquée  dans  les  écrits  et  par  les 
faits. 

Lorsque,  en  1 786,  Gossec,  directeurde  l'Ecole  royale 
de  chant  fondée  deux  ans  aupai avant,  sentit  cette 
institution  menacée  par  l'idée  défavorable,  à  son 
endroit,  que  la  mauvaise  foi  tentait  d'accréditer  en 
de  hauts  lieux,  il  écrivit  une  lettre  à  M.  de  la  Ferté, 
intendant  des  Menus-Plaisirs,  pour  justifier  la  néces- 
sité de  conserver  cette  école.  Dans  ce  document  re- 
marquable2, Gossec  ne  fait  état  que  des  arguments 
susceptibles  d'être  pris  en  considération.  Ces  argu- 
ments confondent  les  destinées  de  l'école  et  de 
l'Opéra;  eu  les  rendant  solidaires,  Gossec  laisse  en- 
trevoir que  la  fermeture  de  celle-là  consacrerait  la 
ruine  de  celui-ci  :  «  L'Académie,  dit-il,  quoique  com- 
posée d'hommes  sages  et  gens  à  talent,  ne  voit  donc 
pas  le    malheur  dont  elle  est  menacée?  Comment 


k,  jusque  dan 
:  Je  la  fantaisie  romanesque  et  de  la  pure  iraaginatlot 
u  doniiue  à  tel  i 


î  de  l'ulé  s.-ance  ;i  l'autorité  du  Sou 


une  Académie  peut-elle  être  ainsi  au  jour  le  jour, 
ne  pas  voir  l'avenir  '.'...  Puisque  l'Opéra  prétend 
pouvoir  se  passer  d'une  école,  que n'a-t-il  des  sujets'.' 
Que  n'en  produit-il  ?...  Il  dira  sans  doute  qu'il  n'en 
existe  pas  dans  le  royaume. qu'il  en  a  fait  la  recher- 
che à  prix  énormes;  il  dira  vrai,  Or,  s'il  n'en  existe 
pas,  il  faut  en  forger;  pour  en  forger,  il  faut  une 
école.  » 

Des  intérêts  généraux  de  l'art,  de  l'enseignement 
complémentaire  des  multiples  éléments  nécessaires 
aux  spectacles  musicaux,  de  la  valeur  éducative  de 
l'instruction,  il  n'est  trace  en  ce  long  mémoire.  Visi- 
blement, Gossec  se  contient  et  se  limite  à  l'emploi  de 
la  seule  raison  dont  dépend  le  sort  de  son  école: 
1*1  ipei  a  ne  peut  se  passer  d'une  école,  se  passera-t-on 
de  l'Opéra'? 

L'Académie  ne  voulait  pas  de  l'école  royale  de 
chant,  parce  qu'elle  voyait  une  atteinte  dangereuse 
à  son  privilège,  une  sorte  de  restriction  à  son  mono- 
pole. Telle  était  la  situation,  matérielle  et  morale, 
en  laquelle  se  trouvait  l'enseignement,  au  cœur 
même  du  royaume. 

Survient  la  Révolution. 

Le  capitaine  d'état-major  de  la  garde  nationale 
de  Paris,  Bernard  Sarrette,  ayant  groupé  4o  musi- 
ciens des  gardes  françaises  au  lendemain  du  14  juil- 
let 1789,  la  municipalité  de  Paris  prit  aussitôt  a  sa 
charge  ce  corps  de  musique,  et  un  arrêté,  du  9  juin 
1792,  porta  établissement  de  l'école  gratuite  de 
musique  de  la  garde  nationale  parisienne.  L'école 
devait  instruire  120  élevés  tenus  à  concourir  au  ser- 
vice des  l'êtes  publiques.  Le  18  brumaire  an  II  |8  no- 
vembre 1793),  Sarrette  obtenait  un  décret  de  la  Con- 
vention portant  formation  d'un  Institut  national  de 
musique  qui  devait  être  employé,  sous  le  rapport  de 
l'exécution,  à  la  formation  d'élèves  dans  toutes  les 
parties  de  l'art  musical.  Le  lu'  thermidor  an  III 
(3  août  1795),  la  Convention  rendit  une  loi  supprimant 
la  musique  de  la  garde  nationale  el  l'école  de  chant 
et  de  déclamation,  et  promulgua  le  même  jour  une 
loi  organisant  le  Conservatoire  national  et  le 
destinant  à  enseigner  gratuitement  la  musique  à 
600  élèves  des  deux  sexes,  choisis  proportionnelle- 
ment dans  tous  les  déparlements. 

Tels  sont  les  faits,  et  voici  quant  aux  idées. 

Six  jours  avant  la  promulgation  de  cette  loi,  le 
lu  thermidor  an  III  (29  juillet  1793),  Chénier  avait 
présenté  à  la  séance  de  la  Convention  un  rapport  où, 
au  nom  du  comité  de  l'instruction  publique,  il  for- 
mulai! la  doctrine  et  les  principes  du  nouvel  étal  de 
choses: 

«...  Et  telle  est,  dit-il.  l'emprise  de  cet  art  (la  mu- 
sique!, de  tous  les  arts  le  plus  universellement  senti, 
qu'il  ne  faut  qu'une  âme  et  des  oreilles  pour  en 
jouir.  Malheur  à  l'homme  glac  ■  qui  ne  connaît  pas 
son  charme  irrésistible.  Malheur  au  politique  im- 
prudent, au  législateur  inhabile,  qui,  prenant  les 
hommes  pour  des  abstractions  et  croyant  les  faire 
mouvoir  comme  les  pièces  d'un  échiquier,  ne  sait 
pas  qu'ils  ont  des  sens;  que  ces  sens  forment  des 
passions,  que  la  science  de  conduire  les  hommes 
n'est  aulre    chose  que  la    science   de  dirù  u 

sensibilité;  que  la  base  des  institutions  humaines 
est  dans  les  mœurs  publiques  et  privées,  et  que  les 


esprits  qu  il  est  bénévolement  u  :    constitutif 

ti.'ii  dramatique. 
Cf.  C.  Pieuke     .:      ' 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


beaux-arts  sont  essentiellement  moraux,  puisqu'ils 
rendent  l'individu  qui  les  cultive  meilleur  et  plus 
heureux!...  Ce  bel  art  charme  aussi  l'étude,  et  la 
philosophie  aime  à  lui  sourire.  Socrate,  au  moment 
de  boire  la  ciguë,  le  cultivait  dans  sa  prison.  Pla- 
lon,  qui  connaissait  son  pouvoir  et  sa  moralité,  le 
mêlait  à  toutes  les  institutions  de  sa  République, 
comme  les  ministres  des  différents  cultes  l'ont  intro- 
duit, avant  et  depuis  Platon,  dans  toutes  les  céré- 
monies religieuses...  Si  donc  cet  art  est  utile,  s'il  est 
moral,  si  même  il  est  nécessaire  pour  les  armées, 
pour  les  fêtes  nationales, et,  ce  qui  comprend  tout,  pour 
la  splendeur  de  la  République,  hâtez-vous,  représen- 
tants, de  lui  assurer  un  asile...  Il  sera  glorieux  pour 
vous  de  prouver  à  l'Europe  étonnée  qu'au  milieu 
d'une  guerre  immense,  qui  n'a  élé  pour  la  République 
qu'une  suite  non  interrompue  de  triomphes,  con- 
tenant à  la  l'ois,  dans  l'intérieur,  le  terrorisme  anar- 
chique  et  le  terrorisme  royal,  décrétant  pour  les  siè- 
cles une  constitution  sage  et  républicaine,  vous  savez 
encore  donner  quelques  instants  à  l'encouragement 
d'un  art  qui  a  gagné  des  victoires  et  qui  fera  les 
délices  de  la  paix...  » 

Ce  qui  s'exprime  dans  les  observations  de  Chénier, 
c'est  l'affirmation  que  les  arts,  et  la  musique  en  par- 
ticulier, ont  une  valeur  sociale  éducative,  que  la  né- 
cessité s'impose  au  législateur,  comme  au  politique, 
d'ordonner  cet  enseignement  et  de  le  dispenser  lar- 
gement. L'heure  est  venue,  comme  le  dira  Sarrettf, 
dans  le  haut  sens  du  mot,  de  donner  une  «existence 
politique  »  à  la  musique. 

Cette  existence  avait  pris  corps  avec  le  Conser- 
vatoire le  18  brumaire  de  l'an  II.  Sarrette,  com- 
missaire chargé  de  l'organisation,  en  détermina  les 
fondements  •et  les  modalités  dans  le  discours  qu'il 
prononça  à  l'ouverture  de  l'établissement,  le  1er  bru- 
maire an  V  (22  octobre  1797),  et  dont  il  convient 
de  citer  les  parties  essentielles  : 

«  Citoyens, 

«  L'époque  est  arrivée  où  la  musique,  par  la  réu- 
nion des  hommes  qui  la  professent  avec  le  plus  de 
distinction,  va  se  régénérer,  en  prenant  avec  énergie 
un  essor  digne  de  la  puissance  de  la  République 
française. 

«  Sept  ans  de  travaux  et  de  persévérance  sont  enfin 
couronnés  des  plus  heureux  succès,  puisque  le  Con- 
servatoire de  musique  de  France,  la  plus  vaste  école 
de  ce  genre  qui  ait  élé  créée  en  Europe,  s'ouvre 
aujourd'hui  en  conséquence  d'un  décret  de  la  Con- 
vention nationale,  et  sous  les  auspices  d'un  gouver- 
nement protecteur  des  arts. 

a  En  décrétant  la  formation  du  Conservatoire,  la 
Convention  nationale  a  voulu,  par  ce  grand  établis- 
sement, donner  à  la  musique  l'asile  honorable  et 
l'existence  politique  dont  une  ignorance  barbare 
l'avait  trop  longtemps  privée  ;  elle  a  voulu  créer  un 
foyer  reproducteur  pour  toutes  les  parties  dont  se 
compose  cette  science;  elle  a  voulu  que,  centre  de  l'é- 
tude de  l'art,  il  renfermât  des  moyens  assez  étendus 
et  assez  complets  pour  former  les  artistes  néces- 
saires â  la  solennité  des  fêtes  républicaines,  au  ser- 
vice militaire  des  nombreuses  légions  de  la  patrie, 
et  surtout  au  théâtre,  dont  l'intluence  est  si  impor- 
tante aux  progrès  et  à  la  direction  du  bon  goût; 
enlin  en  établissant  le  Conservatoire  de  musique,  la 
Convention  nationale  a  voulu,  non  seulement,  con- 
server des  talents  dignes  d'illustrer  la  République, 
mais  obtenir  de  leur  rapprochement  des  dissertations, 


utiles  à  l'agrandissement  de  l'art  et  à  la  meilleure 
direction  qu'il  convient  de  donner  à  l'enseignement 
de  ses  parties. 

«  La  Convention  nationale  a  voulu;  mais  sa  vo- 
lonté resterait  inexécutée  si  l'enseignement  ne  devait 
suivre  une  marche  raisonnée,  plus  complète  que  celle 
employée  par  les  anciennes  écoles,  et  dégagée  des 
erreurs  et  de  l'habitude  qui  la  dirigeaient.  Toutefois, 
avant  d'entrer  dans  les  détails  d'un  nouveau  plan 
d'études ,  il  faut  retracer  les  vices  principaux  de 
celui  qui  était  en  pratique  avant  la  Révolution;  ses 
défauts  reconnus  produiront  nécessairement  des 
leçons  utiles  pour  l'avenir. 

«  Le  chant,  cette  partie  si  essentielle  de  la  musi- 
que, a  toujours  été  mal  enseigné  en  France  :  les  maî- 
trises des  cathédrales  étaient  les  seules  écoles  qui 
existassent  pour  cette  partie,  sous  l'ancien  gouver- 
nement, et  il  parait  que  le  but  de  ces  établissements, 
créés  et  entretenus  pour  le  service  du  culte,  dont  le 
besoin  principal  était  de  remplir  par  des  sons  volu- 
mineux un  immense  vaisseau,  faisait  aux  maîtres 
qui  les  dirigeaient  un  devoir  de  ne  montrer  à  chanter 
qu'à  pleine  voix;  méthode  qui  naturellement  devait 
tendre  à  l'exclusion  des  nuances  et  de  l'expression. On 
ne  peut  parler  de  la  ci-devant  Ecole  de  chant  et  de 
déclamation,  ses  bornes  étroites  et  sa  mauvaise  ins- 
titution n'ayant  pu  permettre  aux  habiles  professeurs 
qui  la  composaient  aucune  réforme  sensible  dans  la 
manière  de  chanter. 

«  Les  théâtres,  contraints  de  tirer  leurs  chanteurs 
des  écoles  des  chapitres,  furent  toujours  asservis  au 
genre  adopté  pour  le  culte;  et  ce  ne  fut  qu'avec  un 
travail  opiniâtre,  en  frondant  l'habitude  et  les  mau- 
vais principes,  que  les  grands  maîtres  qui,  depuis 
I rente  ans,  ont  orné  la  scène  lyrique  de  leurs  chefs- 
d'œuvre,  parvinrent  à  les  faire  comprendre  à  ceux 
qui  devaient  les  chanter. 

«  Cependant,  des  artistes  italiens  vinrent  en 
France;  ils  y  firent  entendre,  dans  les  productions 
des  génies  de  l'école  d'Italie,  une  manière  de  chanter 
agréable  et  expressive  :  ce  genre  fit  sensation  parmi 
les  artistes  français  et  les  amis  de  la  mélodie;  il  fut 
admiré,  et  bientôt  des  chanteurs,  ayant  senti  les 
vices  de  l'école  française,  crurent  la  régénérer  en 
cherchant  à  imiter  les  Italiens;  mais  ils  ne  réussirent 
pas,  parce  que  le  sentiment  est  inimitable.  Ils 
avaient  entendu  un  chant  orné,  ils  en  outrèrent  la 
manière;  et  le  chant  français  fut  surchargé  d'agré- 
ments dont  le  bon  goiit  réprouvait  l'abus  et  qui 
n'offraient,  dans  notre  langue,  qu'une  ridicule  cari- 
cature de  la  grâce  du  chant  italien.  A  travers  ces 
écueils  néanmoins,  et  ultérieurement  guidés  par  un 
goût  exquis  et  le  sentiment  du  beau,  des  artistes 
justement  célèbres  ont  su  créer  un  genre  indépen- 
dant et  convenable  à  la  langue  française. 

«  Que  ne  doit-on  pas  espérer  de  l'école  qui  s'éta- 
blit, puisque  le  plus  grand  nombre  de  ces  artistes 
sont  chargés  de  l'enseignement  de  cette  partie  im- 
portante! 

«  Le  chant  ne  fut  pas  seul  négligé  :  les  instruments 
à  vent,  poussés  au  plus  haut  degré  de  perle  'ion  par 
quelques  artistes  distingués,  sont  restés  en  général 
dans  une  médiocrité  qu'on  ne  peut  reprocher  aux 
instruments  à  cordes. 

.,  Il  semble  que  cette  médiocrité  vient  moins  des 
moyens  employés  au  développement  de  leur  méca- 
nisme que  de  la  mauvaise  direction  donnée  à  leur 
étude  :  les  régiments  de  l'ancienne  troupe  de  ligne 
(auxquels  on  doit  en  partie  la  naturalisation  de  ces 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3533 


instruments,  venus  pour  la  plupart  de  l'Allemagne), 
afin  de  hâter  leur  jouissance,  ne  faisaient  parcourir 
aux  élèves  qu'ils  formaient  qu'un  petit  cercle  d'en- 
seignement, proportionné  à  leurs  besoins  :  on  n'exi- 
geait pas,  dans  ces  écoles,  que  les  élèves  fassent 
entièrement  musiciens;  on  les  portait  avec  précipi- 
tation vers  l'exécution  des  marches  et  autres  mor- 
ceaux militaires;  c'était  le  but  auquel  on  les  faisait 
tendre,  et  qu'ils  atteignaient  ordinairement  après 
quelques  mois  de  travail;  ensuite,  ils  pratiquaient 
par  métier.  Si  des  élèves  nés  pour  la  musique  cher- 
chaient à  sortir  de  ces  pépinières  d'ouvriers  (et  il 
en  est  qui  sont  devenus  des  modèles  pour  toutes  les 
Ecoles);  s'ils  cherchaieut  à  s'élever  au  niveau  de 
l'art,  ils  avaient  à  vaincre  les  obstacles  que  leur 
opposait  l'absence  entière  d'ouvrages  élémentaires  et 
de  bonnes  pièces  pour  l'étude  de  leurs  instruments- 
Il  n'en  était  pas  de  même  des  instruments  à  cordes, 
lesquels,  après  avoir  été  guidés  par  d'excellentes  mé- 
thodes, avaient  pour  exercices  les  productions  des 
plus  grands  maîtres,  soit  sonates,  duos,  trios,  qua- 
tuors, etc.  Enfin,  dans  l'emploi  qui  leur  était  assigné 
dans  les  orchestres,  les  iutruments  à  cordes,  chargés 
des  parties  principales  de  l'harmonie,  trouvaient 
dans  la  lecture  entière  des  ouvrages  dramatiques 
le  moyen  de  former  leurs  talents,  pendant  que  les 
instruments  à  vent,  qui,  par  leur  nature,  ne  pou- 
vaient cHre  employés  que  comme  accessoires  bril- 
lants, entraient  dans  l'exécution  et  ne  sortaient  sans 
être  initiés  dans  la  marche  générale  de  l'harmonie, 
et  conséquemment  sans  pouvoir  en  suivre  l'applica- 
tion aux  passions,  ainsi  que  les  instruments  à  cordes, 
(jui  exécutaient  l'ouvrage  dans  son  ensemble. 

«  Mais  les  nouvelles  institutions  du  gouvernement 
républicain  dans  l'instruction  publique  font  un  de- 
voir au  Conservatoire  de  diriger  ses  soins  vers  la 
perfection  et  la  multiplicité  des  instruments  à  vent. 
En  effet,  la  célébration  des  fêtes  nationales,  devant 
se  faire  en  plein  air,  ne  laisse  aucun  doute  sur  l'im- 
portante utilité  de  ces  instruments  :  on  sait  que  leur 
volume  de  son  et  la  résistance  qu'ils  opposent  à 
l'intempérie  de  l'air  ne  permettent  aucune  compa- 
raison avec  ceux  à  cordes.  Chargés  du  service  des 
fêtes  publiques,  les  instruments  à  vent  ont  une  nou- 
velle carrière  à  parcourir;  alors  prenant  la  place  des 
violons  et  des  basses,  soit  dans  la  symphonie,  soit 
dans  l'accompagnement  des  hymnes,  leur  partie 
devient  entièrement  principale.  Ce  nouvel  emploi, 
et  la  nécessité  de  propager  et  d'étendre  les  moyens 
de  ces  instruments  (dont  les  excellents  artistes  que 
renferme  le  Conservatoire  ont  si  souvent  fait  con- 
naître et  admirer  le  charme),  réclament  impérieu- 
sement un  système  d'enseignement  beaucoup  plus 
étendu  que  celui  qui  jusqu'ici  fut  pratiqué  par  les 
Ecoles  de  musique  militaire.  Mais,  quel  que  soit  le 
mode  d'enseignement  adopté  pour  celte  partie,  il  est 
deux  puissants  moyens  qui  doivent  être  employés 
pour  multiplier  les  grands  artistes  que  la  Nation 
possède  dans  ce  genre  :  le  premier,  c'est  de  donner 
aux  instruments  à  vent,  arrivés  à  un  certain  degré 
de  perfection,  la  pratique  d'un  instrumenta  cordes, 
afin  que  l'élève  introduit  dans  l'exécution  des  bons 
ouvrages  consacrés  à  cette  partie,  puisse  y  prendre 
le  sentiment  de  la  bonne  musique,  et  devenir  lecteur 
à  force  d'occasions  de  lire;  le  second,  d'inviter  les 
harmonistes  à  écrire  plus  souvent  qu'ils  ne  l'ont  fait 
pour  cette  utile  portion  de  leur  art.  Après  avoir  jeté 
un  coup  d'œil  rapide  sur  quelques  défauts  remar- 
quables dans  certaines  branches  de  l'exécution,  si 


on  examine  quels  étaient  les  moyens  d'études  à  la 
disposition  des  jeunes  artistes  qui  se  livraient  à  la 
composition,  on  voit  qu'après  avoir  reçu  les  pre- 
miers éléments  de  l'harmonie,  ces  artistes  n'avaient 
aucune  espèce  de  facilité  pour  former  leur  talent 
d'après  la  comparaison  des  modèles  créés  par  le 
génie  des  hommes  qui  ont  ouvert  ou  prolongé  la 
carrière  de  la  science  musicale.  Les  belles  produc- 
tions, si  on  en  excepte  celle  des  contemporains  que 
le  goût  du  public  fixait  alors  au  théâtre  ou  dans  les 
concerts,  leur  étaient  presque  entièrement  incon- 
nues :  non  seulement,  ils  ne  pouvaient  jouir  de.  ces 
ouvrages  par  l'exécution,  mais  ils  n'en  trouvaient 
nulle  part  la  réunion  olferte  à  leurs  méditations;  et 
la  faiblesse  de  leurs  moyens  pécuniaires  a  trop  sou- 
vent été  un  obstacle  à  la  possibilité  de  procurer  la 
portion  qui  en  avait  été  gravée. 

«  Tel  était  l'état  de  la  musique  en  France,  qu'avec 
plus  de  cinq  cents  écoles,  et  environ  dix  millions  de 
revenus  annuels  provenant  de  fondations  laites  pour 
former  et  entretenir  des  musiciens,  cet  art  si  con- 
venable au  goût  et  au  caractère  des  Fiançais  est 
cependant  resté  chez  eux,  dans  quelques  parties  (Si 
on  en  excepte  néanmoins  les  hommes  de  génie  pour 
qui  il  n'est  point  d'entraves),  à  une  très  grande  dis- 
tance de  la  perfection,  et  surtout  de  la  popularité 
qu'il  a  acquise  chez  les  Allemands  et  les  Italiens. 
Les  causes  de  ce  retard  se  trouvent  toutes  dans  la 
coupable  impéritie  que  l'ancien  gouvernement  ap- 
portait à  tout  ce  qui  intéressait  les  progrès  et  la 
gloire  de  cet  art.  En  elfel,  où  sont  les  ouvrages  élé- 
mentaires raisonnes,  première  et  principale  base 
d'un  bon  enseignement.'  Quels  étaient  les  encoura- 
gements otl'erls  aux  savants  qui  auraient  traité  la 
théorie  générale  de  l'art  et  ses  rapports  avec  les 
autres  sciences?  Enfin,  dans  quels  lieux  les  pères  de 
la  musique  se  réunissaient-ils,  comme  ceux  de  la 
poésie,  de  la  peinture  et  de  l'architecture,  pour  fixer 
les  modes  de  l'étude,  désigner  au  public  les  élèves 
qui  se  dislinguaient  dans  les  différentes  parties,  et 
se  communiquer  mutuellement  les  résullats  de  leurs 
travaux  pour  le  reculement  des  bornes  de  l'art?  Rien 
de  ce  qui  pouvait  être  utile  à  la  musique  ou  aux  ar- 
tistes qui  faisaient  admirer  sa  puissance  n'avait  été 
fait  :  la  cour  jouissait  des  délices  de  la  plus  brillante 
exécution  et  accablait  d'un  insolent  mépiis  l'humble 
mais  célèbre  exécutant;  elle  applaudissait  aux  enivres 
savantes  de  la  composition,  et  laissait  l'estimable 
compositeur  végéter  dans  l'indigence,  avec  la  certi- 
tude cruelle  de  mourir  au  besoin.  Enfin,  par  un 
accès  d'ineptie  difficile  à  croire,  la  cour  de  France, 
qui  ne  protégeait  que  par  ton  un  art  spécialement 
honoré  chez  tous  les  peuples  policés,  avait  porté  le 
ridicule  jusqu'à  décorer  du  titre  fastueux  d'Académie 
Royale  de  Musique,  le  premier  spectacle  sans  doute, 
mais  un  spectacle,  quelque  grand  qu'il  lût,  pouvait- 
il  être  une  Académie  dans  l'acception  accordée  a  ce 
mot?  Et  sans  parler  de  cette  inconvenance,  qui,  sentie 
par  tout  le  monde,  provoqua  tant  de  sarcasmes, 
l'Opéra  pouvait-il  jamais  rien  faire  qui  ressemblât 
aux  fonctions  d'une  Académie?  Mais,  cessant  de  s'ap- 
pesantir sur  les  misérables  causes  qui,  en  empêchant 
les  meilleurs  résultats,  tendaient  insensiblement  en 
France  à  l'anéantissement  de  l'art  utile  et  moral  de 
la  musique,  il  faut  s'attacher  aux  moyens  qui  peu- 
vent réparer  le  mal  produit  par  l'ignorance  et  la 
plus  coupable  insouciance  :  ces  moyens  sont  confiés 
au  Conservatoire  de  musique...  » 
Cette  pensée  ferme  et  brusque,  ce  style  précis  et 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


mordant  témoignent  de  la  volonté  sûre,  de  la  foi 
ardente,  non  pas  seulement  d'un  homme,  niais  de 
l'esprit  public  des  révolutionnaires.  Cette  même  foi 
enflammée  inspirait  toutes  les  déclarations  et  tous 
les  actes  de  la  Convention  et  de  ses  commettants. 

Le  député  de  Maine-et-Loire  Leclerc,  dans  le  rap- 
port fait  au  Conseil  des  Cinq-Cents,  à  la  date  du 
7  frimaire  an  VII  (27  novembre  1799),  l'appelle  tout 
d'abord  qu'en  1791  Talleyrand  et  Mirabeau  intro- 
duisirent l'enseignement  de  la  musique,  l'un  dans 
son  Institut,  l'autre  dans  son  lycée  national, 
o  L'entrée  de  la  musique  dans  la  patrie,  poursuit- 
il,  date  précisément  d'une  des  époques  les  plus  bril- 
lantes de  la  dévolution,  celle  des  travaux  au  Champ 
de  Mars.  Les  philosophes  mesurèrent  alors  le  degré 
d'exaltation  que  les  chants  d'allégresse  et  des  con- 
certs populaires  peuvent  donner  aux  mouvements 
de  la  liberté.  Des  fêtes  se  retracèrent  à  leur  imagi- 
nation, et,  dès  ce  moment,  ils  prédirent  le  temps 
où  la  Fiance  républicaine  reproduirait  ces  jours 
d'éclat  et  de  prospérité;  mais  il  n'était  pas  temps 
encore  de  si  hautes  espérances. 

«  Une  seconde  époque,  plus  glorieuse  encore  que 
la  première,  acheva  de  nationaliser  la  musique. 

«  De  nombreux  ennemis  envahirent  le  territoire 
de  la  France;  elle  appelle  des  défenseurs;  l'hymne 
des  Marseillais  crée  en  quelque  sorte  des  bataillons... 
Etonnée  de  son  pouvoir,  et  (1ère  d'une  aussi  belle 
influence,  la  musique  acheva  de  se  dévouer.  Des 
artistes  formèrent  spontanément  des  écoles  gra- 
tuites... L'imagination  des  législateurs  et  des  écri- 
vains, enflammée,  créa  des  projets  sur  l'organisation 
et  le  perfectionnement  des  fêtes  nationales.  Tous 
attestèrent,  sans  détour,  l'importance  de  l'ensei- 
gnement de  la  musique...  Ainsi  sa  consécration, 
sa  régénération  et  sa  propagation  seront  le  but  des 
écoles  spéciales  dont  le  rapporteur  vient  d'exposer 
les  vues  politiques  et  morales.  S'il  en  est  qui  vous 
paraissent  trop  spéculatives,  il  en  est  d'assez  posi- 
tives pour  vous  déterminer. 

«  La  reconnaissance  vous  engage  envers  la  mu- 
sique; la  prévoyance  vous  oblige  à  la  surveiller;  enfin 
l'exécution  de  vos  propres  lois  vous  fait  un  devoir  de 
la  propager...  » 

Le  ton  de  l'opinant  est  celui  de  l'idéologue  jacobin, 
mais  la  pensée  et  la  doctrine  demeurent  les  mêmes. 

Plus  substantielles  et  plus  directes  sont  les  obser- 
vations sur  l'état  de  la  musique  en  Fiance  par  le 
directeur  du  Conservatoire,  lues  à  l'assemblée  géné- 
rale des  membres  du  Conservatoire  le  o  ventôse  an  X 
(23  février  lSOt^.  sarrette,  partant  de  la  critique 
des  anciennes  méthodes  d'enseignement,  établit  une 
série  de  propositions  constructives  où  l'ampleur  et 
la  variété  le  disputent  à  la  justesse  et  à  la  fécondité 
des  vues  : 

«  Le  principe  d'organisation  de  ce  vaste  établisse. 
ment  (le  Conservatoire),  qui  excite  l'acharnement  de 
ses  ennemis,  en  raison  des  succès  qu'il  obtient,  et 
en  raison  des  atteintes  que  ces  mêmes  succès  peu- 
vent  porter  à  leurs  calculs,  exigeait  la  proposition 
de  mesures  absolument  nécessaires  à  son  complé- 
ment; ces  mesures, qui  consistaient  dans  la  création 
lin  nombre  d'Ecoles  préparatoires,  sonl  ren- 
fermées dans  le  projet  d'organisation  qui  a  été  remis 
au  gouvernement.  On  est  fondé  à  croire 
projet  pouvait  être  réalisé,  les  institutions  qu'il 
propose  a  ure  Lient  la  régénération  complète  de 
l'art  musical  en  i  rance, 

«  La  difficulté  de  faire  en  ce  moment  la  dépense  I 


nécessaire  pour  son  exécution  peut  seule  arrêter. 
Mais  il  est  bon  de  remarquer,  en  passant,  qu'au  total, 
cette  dépense  serait  moindre  que  ne  l'était,  dans  la 
seule  ville  de  Paris,  celle  de  l'entretien  des  maitrises 
salariées  pour  la  Cathédrale,  la  Sainte-Chapelle  et 
les  autres  établissements  du  culte.  Enfin,  le  Conser- 
vatoire et  cinquante-cinq  écoles  placées  sur  divers 
points  de  la  République  seraient  défrayés  avec  envi- 
ron o07U00  francs. 

«  Les  résultats  de  ce  nouveau  système  d'enseigne- 
ment seraient  deux  mille  six  cent  cinquante  élèves 
instruits  dans  toutes  les  parties  de  la  musique.  En 
supposant  que,  sur  ce  nombre,  six  cents  seulement 
soient  destinés  par  la  nature  à  devenir  musiciens; 
en  évaluant  la  durée  de  l'éducation  de  chaque  indi- 
vidu à  six  années,  et  opérant  par  terme  moyen,  on 
obtiendrait  chaque  année  cent  élèves  qui  serviraient 
à  entretenir  l'art  dans  la  société,  qui  recruteraient 
les  nombreux  corps  de  musique  militaire,  fourniraient 
les  moyens  d'exécution  pour  les  fêtes  publiques,  et 
alimenteraient  les  théâtres. 

«  Alors  on  réunirait  le  triple  avantage  : 
«  1°  De  remplacer   avec    une    grande    économie  et 
d'une  manière  infiniment  plus  fructueuse  les  moyens 
si   imparfaits  d'instruction   musicale   qui   existaient 
autrefois; 

2°  De  créer,  avec  un  système  d'enseignement  d'au- 
tant préférable  à  celui  des  cathédrales  qu'il  serait 
complet,  une  école  de  chant,  qui  pourrait  par  la 
suite  rivaliser  avec  celles  d'Italie; 

3°  De  nous  rendre  indépendants  des  écoles  alle- 
mandes, où,  jusqu'à  l'époque  de  la  fondation  du 
Conservatoire,  on  a  été  obligé  île  puiser  les  musi- 
ciens instrumentistes  employés  dans  les  régiments 
et  les  spectacles. 

«  Le  Conservatoire  de  musique,  n'ayant  eu  que 
très  peu  de  voix  d'hommes  à  cultiver,  n'a  pu  trouver 
dans  celte  partie,  comme  dans  toutes  les  autres,  la 
bonté  du  système  d'enseignement  qu'il  pratique. Ce- 
pendant, les  talents  qu'il  a  pu  produire  pourraient 
déjà  être  cités  avec  honneur;  les  dispositions  qu'il 
cultive  donnent  beaucoup  d'espérances,  et  il  faut  con- 
venir que  ce  n'est  pas  là  le  seul  but  que  doit  atteindre 
cet  établissement. 

«  Avant  tout,  il  faut  trouver  des  voix.  En  plaçant 
les  Ecoles  dans  les  départements  méridionaux,  ou 
les  organes  sonl  plus  favorablement  disposés  pour 
le  chant,  on  découvrira  sans  doute  des  élèves  pro- 
pres à  recevoir  avec  succès  le  bienfait  des  lionnes 
théories...  Cette  recherche  exige  du  soin  et  de  l'acti- 
vité; mais  pour  réussir  plus  complètement,  il  fau- 
drait placer  sur  les  principaux  points  de  la  popu- 
lation des  examinateurs  dont  la  mission  serait  de 
découvrir  les  voix  propres  à  la  culture. 

«  Les  professeurs  des  écoles  de  musique  seraient 
ces  examinateurs  permanents;  ils  rendraient  compte 
régulièrement  des  dons  de  la  nature,  asse 
ce  genre;  le  Conservatoire  les  recueillerait  el  les 
développerait.  » 

Le  rapport  envisage,  dans  sa  dernière 
produit  commercial  que  la  France  tirera  d 
pagation  de  l'art  musical.  I 
a  cessé   d'être  tributaire  de   l'Angl 
pianos,  de  l'Allemagne  pour  s  à  cordes 

et  à  vent,  et  le   commerce  de  la  mu 
appartient  également. 

laui  de  justes  observations  montrent  l'a 
prodigie  i  esprit  de  Sarbbi  i  i  , 

Son  plan  d'organisation  de  l'enseignemenl  musi- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3585 


cal  dans  les  départements  prévoyait  la  création  de 
55  écoles  de  musique  préparatoires  au  Conservatoire. 
Deux  projets  avaient  été  élaborés  peu  avant  le'sien. 
Le  premier,  émanant  du  citoyen  Daunou,  envisageait 
l'entretien  de  12  écoles  spéciales  de  musique. 

«  Organisation  des  écoles  de  musique.  —  Ecoles  de 
•premier  degré.  —  Il  y  aura  dans  l'étendue  de  la 
République  trente  écoles  de  musique  dites  de  pre- 
mier dei;ré  ;  ces  écoles  seront  placées  dans  les  com- 
munes de  Cologne,  Anvers,  Gand,  Deux-Ponts,  Cam- 
brai, Metz,  Amiens,  Troyes,  Besançon,  Caen,  Alençon, 
Le  Mans,  Brest,  Lorient,  Angers,  Poitiers,  La  Ro- 
chelle, Angoulème,  Bourges,  Chalon,  Périgueux, 
Bazas,  Cabors,  Perpignan,  Rodez,  Le  Puy,  Grenoble, 
Gap,  Avignon,  Aueli. 

«  Chacune  de  ces  écoles  sera  tenue  par  un  profes- 
seur de  solfège  chargé  de  l'enseignement  de  quinze 
élèves. 

«  Ecoles  de  deuxième  degré.  —  Il  y  aura  quinze 
écoles  de  second  degré  placées  dans  les  villes  de 
Lille,  Mayence,  Trêves,  Reims,  Nancy,  Rennes,  Or- 
léans, Tours,  Moulins,  Limoges,  Genève,  Le-Puy-en- 
Velay,  Pau,  Nice. 

«  Chacune  de  ces  écoles  sera  composée  de  quatre 
professeurs  chargés  de  l'enseignement  du  solfège, 
du  chant,  du  violon  et  du  violoncelle. 

«  Quarante  élèves  des  deux  sexes  recevront  l'ins- 
truction dans  chacune  des  écoles  de  second  degré. 

«  L'un  des  quatre  professeurs  remplira,  dans 
chaque  Ecole,  les  fonctions  administratives. 

«  Ecoles  de  troisième  degré.  —  Il  y  aura  dix  écoles 
de  musique  de  troisième  degré;  elles  seront  placées 
dans  les  villes  de  Bruxelles,  Rouen,  Strasbourg, 
Nantes,  Dijon,  Lyon,  Bordeaux,  Toulouse,  Mont- 
pellier, Marseille. 

«  Chaque  école  sera  composée  de  quinze  profes- 
seurs, entre  lesquels  l'enseignement  sera  réparti 
ainsi  qu'il  suit: 


Clrtnt     ' 

Clarinette. 

Compositior 

"a  reporte 

Total 

«  Chaque  école  recevra  cent  vingt  élèves  des  deux 
•sexes.  Il  y  aura  un  inspecteur  de  l'enseignement  et 
un  sous-inspecteur  de  l'enseignement;  le  premier, 
chargé  de  professer  la  composition,  et  le  second, 
l'harmonie.  Les  professeurs  seront  divisés  en  deux 
classes;  il  y  en  aura  six  de  la  première,  et  sept  de  la 
seconde. 

«  Il  y  aura  dans  chaque  école  une  administration 
composée  de  l'inspecteur  de  l'enseignement,  du 
sous-inspecteur  et  de  trois  professeurs  pris  indis- 
tinctement parmi  ceux  de  l'école;  ces  trois  profes- 
seurs seront  nommés  par  leurs  collègues  et  renou- 
velés par  tiers  chaque  année. 

«  Cette  administration  sera  chargée  de  l'exécution 
du  règlement  et  des  actes  des  autorités  constituées 
relatifs  à  l'école.  » 

Suivent  les  dispositions  relatives  au  Conservatoire 
de  musique,  seule  école  de  quatrième  degré,  puis  à  la 
nomination  des  professeurs  et  à  leurs  traitements. 
Entre  ces  deux  parties  sont  insérées  d'intéressantes 
dispositions  générales  : 

«  11  y  aura  unité  d'enseignement  dans  toutes  les 
-écoles  de  musique. 

Copyrigth  by  Librairie  Delagrave,  1930. 


«  Il  sera  annuellement  distribué  des  prix  aux  élèves 
des  écoles  de  musique. 

«  Les  élèves  qui  auront  remporté  des  prix  dans  les 
écoles  de  premier  et  de  deuxième  degré  seront  de 
droit  admis  dans  celles  du  troisième  dej/ré,  et  les 
élèves  de  ces  dernières,  qui  y  remporteront  des  prix, 
seront  de  droit  admis  au  Conservatoire  pour  y 
achever  leurs  études. 

«  L'élève  qui  aura  remporté  le  prix  de  composi- 
tion au  Conservatoire  de  musique  voyagera  pendant 
cinq  années,  aux  frais  de  la  République;  la  quotité 
de  la  pension  qui  lui  sera  allouée  à  cet  effet  sera  égale 
à  celle  accordée,  dans  l'Ecole  de  France  à  Rome,  pour 
les  arts  du  dessin,  aux  pensionnaires  de  la  Répu- 
blique... Chaque  école  de  musique  aura  dans  son  sein 
un  dépôt  renfermant  les  ouvrages  traitant  de  l'art, 
ainsi  que  la  musique  et  les  instruments  nécessaires 
à  l'étude... 

«  Vingt  pensions  annuelles,  de  1000  francs  cha- 
cune, seront  spécialement  affectées  à  des  élèves  des 
deux  sexes  qui  réuniront  les  qualités  propres  à  l'é- 
tude du  chant  et  qui  se  destineront  à  faire  leur  état 
de  cette  partie;  ils  suivront  leurs  études  au  Conser- 
vatoire de  musique.  » 

Le  projet  de  Sarrette  ne  put  être  réalisé.  Les  évé- 
nements politiques  et  militaires  ne  le  permirent  pas 
alors,  et,  depuis,  la  cause  de  l'enseignement  musical 
n'eut  plus,  au  même  degré,  l'oreille  des  Assemblées 
et  des  gouvernements.  Mais  telle  était  la  justesse  des 
idées  de  Sarrette  que  nous  les  verrons  reprendre, 
à  près  d'un  siècle  de  distance,  par  la  commission 
qui  élabora  l'organisation  actuelle  des  écoles  de  mu- 
sique de  province.  Faute  encore  de  pouvoir  réaliser 
ce  projet  primitif,  la  commission  dut  rechercher  un 
mode  d'adaptation  conforme  aux  nécessités,  aux 
circonstances  et  aux  possibilités  matérielles  de 
l'heure,  et  dont  il  sera  parlé. 

Sarrette  ne  put  donc  ouvrir  les  écoles  qu'il  pro- 
jetait d'établir  dans  les  départements.  Mais  ces 
écoles  n'allaient  pas  tarder  a  surgir  d'elles-mêmes, 
isolément,  lentement,  et  à  solliciter  un  rattache- 
ment, fùt-il  même  assez  fictif,  au  Conservatoire. 

Initiatives  privées  et  municipales  vont  se  disputer 
l'honneur  de  suppléer  à  la  carence  de  l'Etat. 


C'est  au  début  duxixe  siècle  qu'eurent  lieu  les 
premières  tentatives  d'institution,  dans  les  dépar- 
lements, d'un  enseignement  musical  laïque. 

Nous  devons  à  la  publication  récente  du  livre  du 
Centenaire  du  Conservatoire  de  Lille1,  de  pouvoir 
montrer,  par  l'exemple  de  la  première  en  date  des 
écoles  de  province,  la  façon  dont  l'enseignement 
musical  s'est  organisé,  en  France,  sous  l'inlluence 
des  idées  nouvelles,  des  besoins  et  de  l'opinion  pu- 
blique. 

Le  7  frimaire  an  XI  (28  novembre  1802),  les  com- 
missaires de  la  Société  du  concert  de  Lille  -  adres- 
saient à  M.  Blarenberghe,  député  de  la  ville  de  Lille  à 
Paris,  une  lettre  où,  après  avoir  rappelé  les  titres  et 
le  lustre  attachés  à  cet  établissement,  le  dépérisse- 
ment dans  lequel  il  était  tombé  et  la  «  consolation  » 


1.  L'Académie  et  le  Conservatoire  Vat    ■  <    de  musique  de   Lille, 

succursale  >hi  Conservatoire  National  </.  Mmvp/>  ,  t  ,!<■  U  <■/,>■■  <>- 
tionde  Paris,  de  tSIôà  I9IS  (Imprimerie  ilu  Progrès  du  Nord,  Lille, 
1923). 

2.  Cette  société  avait  été  créée  le  24  mars  1733. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


à.  lui  rendue  depuis  trois  ans  par  le  gouvernement 
que  préside  le  premier  consul  Bonaparte,  il  s'expri- 
nij il  ainsi  : 

La  société  ne  fournit  pas  seulement  à  la  dépense 
de  ses  plaisirs,  elle  en  l'ait  une  qui  la  rend  bien  re- 
commandable,  c'est  de  faire  instruire  dans  une 
école  gratuite  de  musique  douze  jeunes  demoiselles 
et  douze  jeunes  garçons  dont  elle  fournit  à  la  dé- 
pense et  à  l'entretien,  guidée  seulement  par  la  bien- 
faisante intention  d'étendre  et  de  perfectionner  l'art 
de  la  musique...  Ces  considérations,  Monsieur,  nous 
déterminent  à  vous  prier,  au  nom  de  la  Société,  de 
solliciter  le  brevet  de  Conservatoire  de  musique  de 
la  ville  de  Lille,  secondaire  du  Conservatoire  de 
Paris,  qui  continuera  à  être  régie  et  administrée 
par  cinq  commissaires  pris  dans  le  sein  de  la  Société 
et  choisis  par  elle.  » 

M.  Blarenberghe  et  une  délégation  du  conseil  mu- 
nicipal eurent  audience  du  ministre  de  l'intérieur. 
Le  ministre  regarda  l'effet  de  la  proposition  comme 
une  demi-mesure.  Il  ne  l'accueillit  point,  mais  con- 
seilla de  faire  la  demande  d'une  école  spéciale  de 
musique.  Cette  réponse  s'inspirait  très  certainement 
du  souci  où  l'on  était  de  ne  pas  abandonner  à  une 
institution  privée,  fût-ce  sous  un  patronage  officiel, 
l'organisation  de  l'enseignement  musical. 

Le  16  nivôse  an  XI  (7  janvier  1803).  le  conseil  mu- 
nicipal, faisant  état  de  l'existence  de  l'école  gra- 
tuite de  la  Société,  du  Grand  Concert  et  de  trois 
autres  sociétés  d'amateurs  ou  d'élèves,  et  que,  «  par 
Conséquent,  une  école  spéciale  de  musique  trouve- 
rait à  son  établissement  à  Lille  un  émulation  déjà 
disposée  et  une  reconnaissance  parfaite  de  la  part 
des  habitants  »,  décida  qu'il  serait  adressé  au  mi- 
nistre de  l'intérieur  les  plus  pressantes  sollicita- 
tions pour  l'établissement  d'une  école  de  musique 
en  cette  ville. 

Le  8  prairial  an  XI  (28  mai  1803),  une  société  en 
tontine  fut  constituée  en  vue  d'acquérir  un  terrain 
et  de  faire  construire  une  salle.  En  1808,  le  conseil 
municipal  prit  un  arrêté  établissant  une  école  de 
musique  vocale  et  instrumentale,  lisant  le  nombre 
des  professeurs  à  trois  et  déterminant  leurs  traite- 
ments ;  mais  le  règlement  d'organisation  de  cette 
école  ne  fut  jamais  publié,  et  l'arrêté  ne  reçut  aucune 
exécution. 

En  1811, les  commissaires  de  la  Société  du  Concert 
adressèrent  une  demande  à  l'empereur;  les  préoc- 
cupations politiques  et  les  événements  empêchèrent 
cet  appel  d'être  entendu. 

Enfin  en  1810,  le  24  mars,  le  conseil  municipal 
invita  la  Société  du  Concert  à  présenter  un  plan 
d'organisation  d'une  Académie  de  musique.  Soumis 
le  7  mai  au  conseil  municipal,  ce  plan  fut  adopté  le 
11  du  même  mois.  Sur  autorisation  du  ministre  de 
l'intérieur,  un  arrêté  du  préfet,  daté  du  31  juillet, 
approuva  les  délibérations  du  conseil  municipal,  et 
l'Académie  de  musique  de  Lille  se  trouva  définitive- 
ment instituée,  en  qualité  d'école  municipale.  L'Aca- 
démie pouvait  donner  des  concerts,  des  bals,  et  les 
élèves  y  avaient  des  exercices  de  musique.  Une  com- 
mission de  dix  membres,  sous  la  protection  et  la 
surveillance  du  maire  et  du  préfet,  régissait  l'ins- 
titution. 

Ses  débuis  furent  modestes  :  elle  recevait  une 
somme  de  1800  francs  du  conseil  municipal  et  une 
subvention  de  même  importance  du  ministère  de  l'in- 
térieur. Deux  professeurs  étaient  attachés  à  l'école, 
l'un  pour  enseigner  le  chant,  l'autre  pour  le  solfège. 


Un  jury  d'examen  admit  13  élèves  pour  la  classe  de 
chant  el  40  pour  le  cours  de  solfège.  En  1817,  l'Aca- 
démie de  musique  fut  autorisée  à  prendre  le  titre 
d'Ecole  royale.  La  commission  administrative  reçut 
communication  du  règlement  de  l'Ecole  royale  de 
musique  et  de  déclamation  de  Paris  et  prépara  un 
règlement.  En  août  1818,  M.  Pla.xtade,  professeur 
de  chant  de  l'Ecole  royale  de  Paris,  vint  inspecter  le 
nouvel  établissement.  En  1819,  les  subventions  du 
conseil  municipal  et  de  l'Etat  fuient  augmentées, 
afin  de  favoriser  l'ouverture  d'une  classe  de  violon- 
celle et  d'une  classe  pour  instruments  à  vent. 

Nous  croyons  intéressant  de  reproduire  les  rensei- 
gnements qui  nous  sont  donnés  su i  l'enseignement, 
à  cette  époque,  par  la  précieuse  notice  de  MM.  Paul 
Pannier  et  Emile  Haïe/,  actuellement  vice-président 
de  la  Commission  administrative  et  directeur  du 
Conservatoire  de  Lille. 

En  181',),  l'école  de  Lille  comptait  cinq  classes  : 
l°une  classe  de  vocalisation  et  de  perfectionnement; 
2°  une  ciasse  de  solfège;  3°  une  classe  de  principes 
élémentaires;  4°  une  classe  d'instruments  à  vent; 
o°  une  classe  de  violoncelle. 

40  demoiselles  et  autant  de  garçons  étaient  admis 
dans  les  classes  de  solfège  et  de  chant.  Les  élèves 
n'étaient  admis  dans  la  classe  de  goût  (vocalisation 
et  perfectionnement)  qu'après  avoir  terminé  leurs 
études  de  solfège.  On  ne  s'occupait  dans  la  classe  de 
chant  que  de  la  vocalisation  et  de  l'étude  des  mor- 
ceaux d'ensemble.  L'étude  des  chœurs  et  de  la  par- 
tition se  faisait  dans  la  seconde  classe,  la  première 
heure  de  la  leçon  étant  toujours  consacrée  au  sol- 
fège. Dans  la  troisième  classe,  on  s'occupait  de  l'é- 
tude des  principes  de  la  musique  et  de  celle  des 
premières  leçons  de  solfège. 

Huit  élèves  pouvaient  être  reçus  dans  chacune  des 
classes  d'instruments.  Dans  la  classe  des  instruments 
à  vent,  on  enseignait  la  flûte,  la  clarinette  et  le  bas- 
son. 11  était  défendu  aux  professeurs  de  mettre  à 
L'étude  dans  leur  classe  d'autres  musiques  que  celles 
tirées  des  auteurs  classiques,  lesquelles  étaient  dési- 
gnées tous  les  mois  par  l'administration  et  affi- 
chées dans  chaque  classe.  Le  1er  de  chaque  mois,  il 
y  avait  réunion  générale  de  l'école  pour  exécution 
des  choeurs  ou  autres  parties  d'ensemble,  en  pré- 
sence des  membres  de  l'administration.  En  1821,  le 
nombre  des  élèves  de   l'Académie  fut  fixé  à  cent. 

La  force  d'une  idée,  servie  par  une  volonté  tenace 
des  pouvoirs  locaux,  réalisait  ainsi,  sous  une  loi  nie 
approchée,  le  projet  de  Bernard  Saurk.tte.  Une  école 
s'était  ouverte  dans  une  grande  ville  île  province, 
où  se  donnait  l'enseignemeul  gratuit  de  la  musique 
vocale  et  instrumentale;  relie  école  avait  sollicité 
l'appui  moral  et  financier  du  pouvoir  central,  elle 
portait  le  titre  d'école  royale,  et  un  professeur  de 
l'Ecole  royale  de  Paris  était  venu  l'inspecter.  Il  res- 
tait à  donner  un  statut  légal  à  une  situation  de  fait 
encore  unique,  et  à  consacrer  un  élat  de  choses  qui 
était  la  conséquence  des  conceptions  nouvelles  ap- 
portées par  la  Révolution  sur  le  rôle  et  la  fonction 
de  l'enseignement  musical.  Il  est  piquant  d'observer 
que  le  cours  des  événements  politiques  devait  faire 
du  i.'ouvernementdu  roi  Charles  \  l'exécuteur  de  la 
pensée  des  hommes  de  la  Convention. 

Ce  fut,  en  effet,  une  ordonnance  royale  qui  ins- 
titua la  charte  primitive  des  Ecoles  nationales  de 
musique. 

Un  certain  nombre  de  villeé,  dans  les  vingt-cinq 
premières  années  du  xixe  siècle,  avaient  ouvert  des 


TECHNIQUE,   ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PRO VINCI 


cours  graluits  d'enseignement  musical.  Dès  1806,  la 
municipalité  de  Douai  avait  subventionné  une  pelite 
école;  à  Abbeville,  le  violoniste  Eloy  de  Vicq  avait, 
en  1818,  créé  une  institution  analogue  qui  recul,  en 

1821,  l'appui  de  la  municipalité;  a  Itoubaix,  une 
école  de  musique  s'était  ouverte  en  1820;  celte 
même  année,  le  conseil  municipal  de  Toulouse,  par 
délibération  en  date  du  13  mars,  avait  décidé  de 
l'ouverture  d'une  école  gratuite,  qui  reçut  presque 
aussitôt  une  subvention  de  l'Etat  de  3000  francs. 
L'école  faisait  alors  une  pension  de  1500  francs,  pour 
trois  années,  à  l'élève  qui  donnait  le  plus  d'espé- 
rances;   à   Marseille,   M.  Barsotti    avait   fondé,   en 

1822,  une  institution  particulière  qui  devint  institu- 
tion communale  en  1830,  époque  où  tous  les  frais 
furent  pris  à  charge  par  la  ville. 

C'est  en  de  telles  conditions  que,  sur  le  rapport  du 
duc.de  Doudeauville,  surintendant  des  beaux-arts, 
l'ut  rendue  l'ordonnance,  en  date  du  20  décembre 
1826,  qui  érigea  les  écoles  de  Lille  et  de  Toulouse 
en  succursales  de  l'Ecole  royale  de  musique  et  de 
déclamation  de  Paris,  Voici  en  quels  termes  : 

«  Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roi  de  France  et 
de  Navarre  : 

«  Sur  le  rapport  qui  nous  a  été  fait,  par  notre  aide 
de  camp,  chargé  du  département  des  beaux-arts, 
du  désir  manifesté  par  les  écoles  de  musique  éta- 
blies dans  nos  bonnes  villes  de  Lille  et  de  Toulouse, 
d'obtenir  le  titre  de  succursale  de  l'Ecole  royale  de 
musique  et  de  déclamation  de  Paris,  et  prenant  en 
considération  les  avantages  qui  peuvent  en  résulter 
pour  la  prospérité  des  théâtres  lyriques, 

«  Nous  avons  ordonné  et  ordonnons  ce  qui  suit  : 

«  Article  premier.  —  A  l'avenir,  à  dater  du  1er  jan- 
vier 1827,  l'Académie  royale  de  musique  de  notre 
bonne  ville  de  Lille,  et  l'école  gratuite  de  musique 
de  notre  bonne  ville  de  Toulouse  seront  considérées 
comme  succursales  de' l'Ecole  royale  de  musique  et 
de  déclamation  de  notre  bonne  ville  de  Paris,  et  elles 
seront  autorisées  à  en  prendre  le  titre. 

«  Article  II.  —  Les  directeurs  ou  administrateurs 
de  ces  deux  établissements  corespondronl  avec  le 
directeur  de  l'Ecole  royale,  et  tiendront  à  sa  dispo- 
sition les  élèves  qui,  désirant  se  vouer  à  la  profession 
théâtrale,  lui  paraîtront  susceptibles  d'être  appelés 
à  Paris,  pour  y  perfectionner  leur  éducation  musi- 
cale et  dramatique. 

«  Article  III.  —  Noire  aide  de  camp,  chargé  du 
département  des  beaux-arts,  est  chargé  «le  l'exé- 
cution de  la  présente  ordonnance. 

«  Signé:  Charles. 

«  20  décembre  182G.       Le  duc  de  Docdeauville.  » 

L'enseignement  musical  continuait  à  se  répandre 
en  France  grâce  aux  initiatives  locales,  privées  ou 
municipales.  La  ville  d'Arras  ouvrait  une  école  de 
musique  en  1828,  Boulogne-sur-Mer  en  1830;  à  Metz, 
M.  Desvignes,  compositeur  et  chef  d'orchestre,  obte- 
dait  du  conseil  municipal  l'établissement  d'une 
école,  en  1840  celui-ci  demandait  son  érection  en 
succursale  de  l'Ecole  royale  de  Paris,  et  une  ordon- 
nance du  16  août  1841  lui  donnait  ce  titre  ;  plus 
de  200  élèves  y  recevaient  gratuitement  l'enseigne- 
ment, et  une  centaine  d'autres  élèves  payaient  une 
rétribution  scolaire  peu  élevée;  à  Caen,  la  Société 
philharmonique  du  Calvados  fondail,  en  1835,  une 
école  de  chant,  qu'un  arrêté  du  15  juillet  plaçait 
sous  l'autorité  du  maire;  en  1835,  également,  la  mu- 


nicipalilé  de  Valenciennes  instituait  une  Académie 
de  musique;  à  Saint-Omer,  une  école  s'ouvrait  en 
1836, à  Perpignan  en  1812;  en  1844  c'était, a  Nantes, 
le  sieur  Bivessler  qui  prenait  l'initiative  de  la  fon- 
dation  d'une  école,  que  la  municipalité  subventionna 
et  qu'une  ordonnance  du  l<"  septembre  1846  érigea 
en  succursale  de  l'Ecole  royale  de  Paris:  à  Dijon,  un, 
école  de  musique  était  établie  en  1845;  un  décret  impé- 
rial la  rattacha  au  Conservatoire  de  Paris  en  1868" 
à  Aix-en-Provence,  en  1849,  M.  Lapierre  ouvrait  un 
cours  public  de  musique  vocale,  dans  un  local  fourn 
par  la  municipalité,  qui,  en  même  temps,  accordait 
une  subvention;  en  1856,  des  classes  d'instruments 
à  vent  et  à  archet  étaient  adjointes  au  cours  primitif; 
à  Bordeaux,  en  1852,  la  ville  subventionnait  l'école  de 
musique  fondée  par  la  Société  des  concerts  de  Sainte- 
Cécile;  etc. 

Sous  le  second  Empire,  les  Ecoles  se  multiplièrenl 
assez,  rapidement.  En  1830,  leur  nombre  n'excédail 
pas  une  vingtaine,  eu  y  comprenant  les  cinq  succur- 
sales de  Lille,  Marseille,  Metz,  Nantes  et  Toulouse. 
En  1862,  on  relève  l'existence  de  75  écoles  munici- 
pales. Fondées  par  des  initiatives  privées  ou  par  les 
assemblées  communales,  elles  fonctionnent  sans 
méthode  et  sans  unité.  Mal  logées,  faiblement  sub- 
ventionnées, dépourvues  d'instruments  et  d'oil\  rages 
d'enseignement,  ce  sont  de  médiocres  établissements 
d'instruction  primaire.  La  plupart  implorent  en  vain 
l'assistance  de  l'Etat;  la  dépense  annuelle  portée  au 
budget  de  la  France  pour  l'enseignement  de  la  mu- 
sique eu  province  est  alors  de  Î2.600  francs!  Seules. 
les  écoles  succursales,  quoique  d'importance  diffé- 
rente, donnent  quelques  résultats  méritant  atten- 
tion. 

Les  divers  gouvernements  qui  se  sont  succédé 
depuis  le  premier  Empire  laissèrent  dans  un  état  à 
peu  près  stationnaire  le  maigre  budget  affecté  à 
l'enseignement  musical  par  la  Restauration.  A  dé- 
faut de  subventions,  on  doit  toutefois  au  gouverne- 
ment de  Juillet  et  au  Second  Empire  un  règlement 
pour   les    écoles    succursales,   des   instructions  sur 

l'enseignement  et  un  règle ut  de  police  intérieure. 

Ces  documents1  sont  remarquablement  conçus.  Le 
premier  traite  de  l'administration;  de  l'enseigne- 
ment; des  comités  d'enseignement;  des  correspon- 
dants honoraires;  des  professeurs;  des  classes  et 
de  leur  lenue;  des  élèves,  de  leur  admission  et  de 
leurs  devoirs;  des  examens;  des  concours  et  des  prix; 
des  exercices  et  concerts. 

Le  second  précise  les  directives  à  donner  dans  les 
principales  matières  d'enseignement.  Nous  croyons 
utile  et  intéressant  d'en  reproduire  ici  les  paragra- 
phes strictement  pédagogiques,  dont  la  valeur  est 
demeurée  entière. 

■<  Instructions  sur  l'enseignement.  —  Solfège. 
L'enseignement  élémentaire  de  la  solmisation  simul- 
tanée est  interdit  dans  l'école  spéciale  de  musique; 
de  même,  il  est  interdit  aux  professeurs  de  faire  sol- 
fier les 'élèves  en  changeant  la  tonalité  de  la  leçon 
sans  changer  le  nom  des  notes. 

«  Chaque  professeur  de  solfège  a  deux  séries 
de  classes  :  la  première  série  les  jours  pairs,  la 
seconde  les  jours  impairs...  L'emploi  du  temps  est 
divisé  ainsi  qu'il  suit  : 

«  1°   Etude  des  principes  élémentaires,  récitation. 


>ue  et  de  dëclamauou.  le 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


dictée  des  principes  sur  l'ardoise  ou  le  tableau  et 
composition  notée. 

«  2°  Lecture  du  solfège  séparément.  Les  élèves  qui 
se  destinent  au  chant  doivent  d'abord  apprendre  la 
clef  de  la  nature  de  leur  voix,  en  même  temps  que 
la  clef  de  so/ella  clef  de  fa,  essentielles  toutes  deux 
pour  l'étude  du  piano. 

«  Pour  exciter  l'attention  et  l'émulation  des  élèves 
et  leur  donner  leçon  ensemble  d'une  matière  fruc- 
tueuse, eu  évitant  les  graves  inconvénients  de  la  sol- 
misatiôn  simultanée,  le  professeur  choisit  dans  sa 
classe  un  certain  nombre  d'élèves  à  peu  près  d'égale 
force;  puis,  désignant  chaque  élève  par  un  numéro, 
il  fait  commencer  la  leçon  par  un  numéro,  tandis 
que  les  autres  suivent  mentalement;  lout  à  coup,  il 
interrompt  le  numéro  qui  a  commencé,  et  désigne 
un  numéro  quelconque,  lequel  continue  la  leçon 
sans  altérer  la  mesure,  ni  les  valeurs,  ni  les  intona- 
tions, jusqu'à  ce  qu'une  nouvelle  interruption  sur- 
vienne pour  faire  attaquer  un  autre,  et  ainsi  de 
suite.  De  cette  sorte,  tous  les  élèves  ont  pris  une 
part  active  à  la  leçon.  Le  professeur  a  soin  pour 
cela  de  faire  reprendre  chaque  élève  entre  une 
période  et  une  autre. 

«  Les  élèves  doivent  toujours  solfier  debout,  et  vis- 
à-vis  le  professeur,  qui  doit  veiller  à  ce  qu'ils  pren- 
nent un  bon  maintien  et  ouvrent  convenablement  la 
bouche. 

«  Le  professeur  doit  aussi  s'appliquer  à  surveiller 
la  justesse  des  intonations, particulièrement  les  demi- 
tons,  à  faire  phraser  et  respirer  convenablement.  Il 
doit  éviter  d'accompagner  à  l'unisson  la  mélodie  que 
solfie  l'élève. 

«  Vocalisation  et  chant.  —  Les  professeurs  de  voca- 
lisation et  de  chant  ne  font  travailler  d'airs  et  de 
morceaux  avec  paroles  à  leurs  élèves  que  lorsque 
ceux-ci  ont  la  voix  bien  posée  et  égalisée,  et  qu'ils  ont 
acquis  de  la  flexibilité  dans  les  exercices  gradués  de 
la  vocalisation, ce  qui  sera  au  préalable  constaté  par 
le  comité  d'enseignement  et  à  la  suite  des  examens 
trimestriels.  L'élève,  comme  dans  les  classes  de 
solfège,  sera  toujours  placé  debout,  devant  le  profes- 
seur, afin  que  celui-ci  puisse  rectifier  ce  qu'il  y  a  de 
défectueux  dans  sa  manière  d'ouvrir  la  bouche  et 
dans  son  maintien. 

«  Les  élèves  des  classes  de  vocalisation  et  de  chant 
sont  tenus  de  copier  les  morceaux  que  le  professeur 
indique  pour  l'étude,  afin,  non  seulement  d'avoir 
deux  copies  pour  que  l'élève  puisse  être  placé  comme 
il  a  été  dit  plus  haut,  mais  encore  de  fortifier  l'élève 
dans  ses  études,  en  l'obligeant  à  copier  de  la  mu- 
sique. 

«  Le  nombre  d'élèves  dans  chaque  classe  de  voca- 
lisation et  de  chant  est  fixé  à  six...  Les  élèves  des 
classes  de  chant  doivent  suivre  la  classe  élémentaire 
de  piano,  d'harmonie  et  d'accompagnement. 

«  Etude  élémentaire  du  piano  et  harmonie  pratique. 
—  Le  professeur  d'études  élémentaires  de  piano  et 
d'accompagnement  enseigne  l'étude  du  clavier  afin 
de  mettre  l'élève  en  état  de  plaquer  des  accords, 
d'accompagner  la  basse  chiffrée,  et  quelques  mor- 
ceaux de  chant  et  de  partitions  faciles. 

<(  Cette  classe  est  accordée  préférablement  aux 
élèves  qui  feront  des  progrès  dans  les  classes  de 
chant...  Dès  qu'un  élève  delà  classe  d'accompagne- 
ment sera  reconnu  en  état  d'accompagner  la  basse 
chiffrée  à  l'examen  trimestriel,  le  directeur  pourra 
le  mettre  à  la  disposition  d'un  professeur  de  solfège 
ou  de  vocalisalion  et  de  chant  ou  de  classe  d'en- 


semble pour  continuer  ses  études  et  mettre  à  profit 
les  leçons  qu'il  reçoit  ou  qu'il  a  reçues. 

«  Musique  d'ensemble.  —  Le  professeur  de  musi- 
que d'ensemble  fait  travailler  aux  élèves  des  deux 
sexes,  assez  lecteurs,  les  solfèges  à  deux,  trois  et 
quatre  voix,  des  morceaux  d'ensemble,  des  chœurs, 
de  la  musique  sacrée.  Le  professeur  de  cette  classe 
doit  s'attacher  à  bien  faire  observer  les  mesures 
indiquées...  Tous  les  élèves  des  diverses  classes,  déjà 
lecteurs,  doivent  suivre  assidûment  la  classe  d'en- 
semble. 

«  Cette  classe  doit  avoir  lieu  six  fois  par  semaine 
et  durer  deux  heures. 

«  Le  nombre  des  élèves  n'est  pas  limité. 

«  Nota.  —  Pour  toutes  les  autres  classes  qui  se 
formeront  par  la  suite,  on  donnera  des  instructions 
sommaires  pour  l'enseignement. 

«  Instructions  pour  les  examens  et  les  concours.  — 
A  l'examen  préparatoire  du  concours  et  au  concours 
de  solfège,  chaque  élève  est  tenu  de  lire  à  première 
vue  une  leçon  à  changements  de  clefs,  et  composée 
exprès  par  le  directeur  ou  par  un  des  membres  du 
comité,  et  choisie  par  le  comité  au  moment  même 
de  l'examen  ou  du  concours...  Le  comité  ou  le  jury 
établit  une  série  de  questions  sur  les  principes  élé- 
mentaires, qui  doit  être  adressée  à  chaque  élève. 

«  Pour  le  concours  d'écriture  sous  la  dictée  mu- 
sicale, auquel  tous  les  élèves  des  classes  supérieures 
de  solfège  sont  appelés  à  prendre  part,  le  jury  fait 
choix  d'un  fragment  de  morceaux  inédits  dont  un 
des  membres  donne  l'intonation  et  la  mesure,  soit 
avec  la  voix,  soit  avec  un  instrument. 

«  Le  même  programme  est  imposé  aux  élèves  des 
classes  de  vocalisation  sur  une  leçon  en  forme  de 
vocalise  dite  à  première  vue,  indépendamment  de 
celle  travaillée  avec  le  professeur. 

«  Pour  les  concours  de  chant,  le  professeur,  sur 
l'avis  du  directeur,  doit  faire  choix  d'airs  sur  des 
paroles  françaises  seulement,  renfermant  les  qua- 
lités nécessaires  à  la  vocalisation  et  à  l'expression 
dramatique.  Le  même  morceau  doit  être  exécuté 
par  plusieurs  élèves  lorsque  la  nature  des  voix  le 
permet. 

«  Les  élèves  de  la  classe  élémentaire  de  piano  et 
d'accompagnement  pratique  doivent  accompagner 
une  basse  chiffrée  composée  de  marches  harmoni- 
ques et  faite  exprès  pour  l'examen  ou  le  concours; 
exécuter  un  morceau  élémentaire  de  piano  et  un 
fragment  d'une  partition  facile.  Les  élèves  de  la 
classe  d'ensemble  lisent  à  première  vue  un  solfège 
à  deux  ou  trois  voix  sans  doubler  les  parties.  Un 
morceau  avec  paroles,  de  même  à  deux  ou  trois 
voix,  doit  être  lu  à  première  vue.  » 

Des  arrêtés  ministériels,  en  date  du  10  juin  1852  et 
du  26  avril  1S.S7,  apportèrent  quelques  modifications 
aux  dispositions  administratives  primitives.  La  no- 
mination du  directeur  de  l'école  fut  retirée  au  préfet 
du  département  et  dévolue  au  ministre  d'Etat; 
l'institution  des  commissions  de  patronage  passa, 
en  outre,  du  pouvoir  du  maire  en  celui  du  préfet, 
qui  requiert  l'approbation  ministérielle,  etc. 

Tel  fut  le  régime  sous  lequel  vécurent  les  écoles 
succursales  jusqu'en  1884.  Leur  nombre  était  alors 
de  six,  l'école  de  Marseille,  redevenue  municipale, 
avait  été  remplacée  par  celle  de  Dijon,  et  l'école  de 
Lyon  était  venue  s'adjoindre  au  groupe  des  cinq 
écoles  primitives.  Les  subventions  totales  qu'elles 
recevaient  de  l'Etat  ne  dépassaient  toujours  pis 
22  600  francs. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3589 


C'est  alors  qu'une  commission  fut  nommée  dans 
le  but  de  procéder  à  une  enquête  sur  l'état  de  l'ensei- 
gnement musical  en  province  et  de  soumettre  un 
projet  d'organisation  nationale  plus  étendue.  Cette 
commission,  présidée  par  M.  Kaempfen,  directeur 
des  beaux-arts,  était  composée  de  MM.  Schlœcher, 
sénateur,  vice-président;  Casimir  Fournier,  séna- 
teur; Antonin  Proust,  député;  Logerotte,  député; 
Ambroise  Thomas,  membre  de  l'institut,  directeur 
du  Conservatoire;  Cbarles  Goumod,  membre  de  l'Ins- 
titut; Des  Chapelles,  chef  du  bureau  des  tliéùlres; 
Réty,  chef  du  secrétariat  du  Conservatoire,  et  Henry 
Régnier,  sous-chef  du  bureau  des  théâtres,  secrétaire 
rapporteur. 

Nous  allons  reproduire  les  passages  les  plus 
importants  du  mémoire1  où  sont  consignés  les  ré- 
sultats de  l'enquête  à  laquelle  il  fut  procédé,  d'une 
part,  et,  d'autre  part,  les  propositions  qui  furent 
adoptées  et  soumises  à  l'agrément  du  ministre.  C'est 
aux  travaux  de  cette  commission  que  sont  dus  les 
progrès  qui  furent  réalisés  dans  la  diffusion  de  l'en- 
seignement musical  public,  en  France,  au  cours  de 
ces  quarante  dernières  années. 

S'adressant  au  ministre,  son  rapporteur  écrit  : 

«  Le  premier  soin  de  la  commission  que  vous  avez 
chargée  de  déterminer  l'emploi  le  plus  utile  à  faire 
du  crédit  de  300  000  francs  inscrit  au  budget  de 
1884,  pour  être  affecté  à  l'enseignement  spécial  de  la 
musique,  a  été  de  s'enquérir  de  l'état  actuel  de  cet 
enseignement  et  de  son  organisation. 

«  Cette  organisation,  nous  avons  eu  le  regret  de 
le  constater,  est  bien  loin  de  répondre  aux  besoins 
de  notre  temps. 

«  Ebauchée,  en  effet,  sous  la  première  République, 
qui  avait  senti  la  nécessité  de  classer  la  musique 
au  rang  des  matières  que  l'on  doit  enseigner  à  la 
jeunesse,  mais  à  qui  le  temps  fit  défaut  pour  par- 
faire une  œuvre  dont  le  plan  avait  été  tracé  avec  une 
rare  perspicacité,  elle  est  restée  à  peu  près  station- 
najre  depuis  quatre-vingts  ans... 

«  Pour  être  complet  dans  cette  nomenclature,  et 
ne  pas  présenter  un  tableau  inexact  de  l'enseigne- 
ment musical  en  France,  il  convient  de  mention- 
ner, en  regard  des  Ecoles  du  gouvernement,  deux 
groupes  distincts  d'établissements  indépendants  : 

«  1°  Un  certain  nombre  d'écoles  créées  dans  les 
départements  par  l'initiative  des  municipalités; 

2°  Les  maîtrises  des  cathédrales,  qui  sont  de  véri- 
tables écoles  au  sens  propre  du  mol. 

«  Mettant  à  part  le  Conservatoire  de  Paris,  dont 
il  suffit  de  constater  l'intérêt  à  une  réforme  qui  doit 
lui  donner  son  complément  nécessaire,  nous  nous 
bornerons  à  montrer  les  conditions  d'existence  de 
ces  diverses  écoles,  leur  fonctionnement,  la  nature 
de  l'éducation  qu'elles  donnent,  et  les  services 
qu'elles  rendent.  » 

La  commission  produit  alors  le  tableau  des  cinq 
écoles    succursales,  et   son   rapporteur  poursuit   : 

«  Ces  écoles  sont  placées  tout  à  la  fois  sous  la 
direction  de  l'Etat  et  des  municipalités,  et  adminis- 
trées conformément  à  des  règlements  approuvés  par 
l'administration  supérieure. 

«  Quels  sont  les  résultats  qu'elles  produisent? 

«  Pour  en  donner  exactement  l'indication,  nous 


1.  Rapport  fait  le  13  juin  ISSS  au  nom  de  ta  commission  chargée 
d'organiser  l'enseignement  musical,  par  Henry  Régnier  (ministère 
.le  l'instruction  publique  et  des  beaux-arts,  Imprimera  Nationale, 
1883). 


ne  pouvons  mieux  faire  que  de  consigner  dans  ce 
rapport  les  appréciations  dont  ces  écoles  ont  été 
l'objet,  de  la  part  du  musicien  éminent  à  qui  in- 
combe, chaque  année,  le  soin  de  les  inspecter. 

«  Selon  M.  Ernest  Rêver,  elles  donnent,  à  des 
degrés  divers,  tous  les  résultats  qu'on  peut  attendre, 
de  leur  situation  présente,  et,  de  ce  chef,  elles  ne 
méritent  aucun  reproche. 

«  Est-ce  à  dire  pourtant  qu'il  y  ait  lieu  de  se 
tenir  pour  satisfait?  Sur  ce  point,  il  convient  de  for- 
muler les  réserves  les  plus  expresses. 

«  Il  suffit,  en  effet,  de  signaler  le  défavorable  état 
des  théâtres  lyriques  établis  dans  les  régions  où 
elles  sont  instituées,  pour  montrer  que  ces  écoles 
sont  impuissantes  à  leur  fournir  tout  le  personnel 
vocal,  choral  et  instrumental  indispensable  à  ces 
sortes  d'entreprises. 

«  D'autre  part,  créées  en  vue  de  devenir  les  pépi- 
nières où  le  Conservatoire  national  pourrait  re- 
cruter des  sujets  aptes  à  recevoir  avec  profit  l'en- 
seignement supérieur,  il  est  à  remarquer  qu'elles 
s'acquittent  insuffisamment  de  cette  partie  de  leur 
tâche,  en  n'envoyant  à  Paris  que  des  élèves  dont  le 
mérite  ne  compense  pas  le  petit  nombre... 

«  En  résumé,  la  situation  générale  est  des  plus 
précaires;  sous  peine  de  la  voir  s'aggraver  encore, 
il  est  urgent  de  relever  la  dotation  des  succursales. 

«  Mais  il  faut  ajouter  qu'il  y  aurait  un  grand  inté- 
rêt à  ce  que  le  secours  qui  leur  serait  prêté  vint  de 
l'Etat. 

.<  La  modicité  de  sa  contribution  à  leur  entretien 
nuit  sérieusement  à  la  prépondérance  qu'il  doit  con- 
server dans  leur  direction,  et  devient  souvent  la 
source  de  contlits  1res  préjudiciables  aux  éludes. 

«  Nous  ferons  remarquer  que  c'est  à  la  suite  d'un 
conflit  de  la  nature  de  ceux  dont  nous  venons  d'in- 
diquer la  cause,  que  l'importante  école  de  Marseille 
a  rompu  tous  les  liens  qui  la  rattachaient  au  Con- 
servatoire national,  et,  sans  insister  sur  cette  con- 
sidération, nous  allons  montrer  que  la  situation  de 
l'enseignement  libre  ne  laisse  pas  moins  à  désirer 
que    celle  de  l'enseignement  officiel. 

«  Ecoles  municipales.  —  Ces  écoles,  disséminées 
sur  divers  points  du  territoire,  sont  en  nombre  con- 
sidérable. 

«  On  n'en  compte  pas  moins  de  soixante-quinze; 
le  total  des  ressources  qui  leur  sont  affectées  se 
monte  à  une  somme  d'environ  430  000  francs. 

«  Mais  ce  serait  une  grave  erreur  de  croire  à 
l'identité  de  leur  situation. 

«  Elles  présentent  entre  elles  des  dill'érences  sen- 
sibles au  point  de  vue  de  leur  constitution,  au  poii  t 
de  vue  budgétaire,  enfin  au  point  de  vue  des  résul- 
tats de  leur  enseignement,  dont  la  spécialité  est 
commandée  par  les  dispositions  particulières  des 
populations  au  milieu  desquelles  elles  sont  établies. 

«  C'est  ainsi  que  les  écoles  du  Midi  sont  plus  par- 
ticulièrement adonnées  à  la  culture  des  voix,  tandis 
que  celles  de  l'Est  et  du  Nord  de  la  Erance  font  la 
part  la  plus  large  à  l'étude  des  instruments. 

«  En  somme,  d'importance  très  variable,  s'il  en 
est  dont  la  constitution  présente  de  grandes  ana- 
logies avec  celles  des  succursales  du  Conservatoire, 
comme  les  écoles  de  Caen,  de  Besançon,  de  Nancy, 
de  Saint-Etienne,  etc.,  qui  donnent  l'enseignement 
secondaire,  la  grande  majorité  ne  dépasse  pas  le 
niveau  d'établissements  d'enseignement  primaire. 

«  Quelques-unes  d'entre  elles  comptent  déjà  un 
grand  nombre  d'années  d'existence,  mais  la  plupart 


FM.YCI.OPÈDlE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


son!  de  création  récente,  attestant  ainsi,  sous  la 
forme  la  plus  sérieuse  et  la  plus  significative,  l'in- 
tensité du  mouvement  qui  porte  la  France  vers  les 
études  musicales  sérieuses. 

«  Nous  voudrions  pouvoir  dire  que  tous  les  efforts 
qui  vous  ont  été  signalés  par  l'enquête,  dont  vous 
avez  bien  voulu  nous  communiquer  les  résultats, 
ont  été  couronnés  de  quelque  succès;  nous  sommes 
malheureusement  obligés,  sauf  quelques  exceptions, 
d'en  constater  la  stérilité...  Aucune  de  ces  écoles 
n'est  organisée  de  manière  à  pouvoir  faire  face  aux 
besoins  en  vue  desquels  elle  a  été  créée...  Quelques- 
unes  sollicitent  le  titre  de  succursales  du  Conserva- 
toire, et  les  avantages  qui  y  sont  attachés;  toutes, 
par  l'organe  des  sénateurs,  des  députés  ou  des  pré- 
fets de  leur  département,  implorent  l'assistance  de 
l'Etat. 

«  Il  nous  reste  à  dire  un  mot  des  : 

«  U.//,t/.si's.  —  Elles  ont  été  longtemps  les  seules 
écoles  de  musique  qu'ait  possédées  la  France  :  leur 
Importance  considérable  sous  l'ancien  régime,  qui 
ne  s'était  jamais  préoccupé  de  constituer  un  ensei- 
gnement laïque,  avait  déjà  sensiblement  diminué. 
depuis  la  création  du  Conservatoire  et  de  ses  dépen- 
dances; un  vote  des  Chambres  supprimant,  à  partir 
de  cette  année,  les  crédits  qui  leur  étaient  affectés, 
vient  de  l'annuler  presque  complètement. 

Toutefois,  cette  suppression  est  trop  récente  pour 
que  nous  puissions  nous  dispenser  d'examiner  le 
n'ili'  qu'elles  remplissaient  et  d'en  apprécier  l'u- 
tilité. 

«  Instituées  en  vue  de  fournir  aux  bas  chœurs  des 
cathédrales  les  interprètes  indispensables  à  l'exécu- 
tion des  grandes  compositions  de  la  musique  sacrée, 
elles  étaient  astreintes,  par  obéissance  aux  règle- 
ments du  clergé,  qui  interdisent  l'emploi  des  voix 
de  femmes  dans  les  églises,  à  recruter  leurs  soprani 
parmi  les  jeunes  garçons. 

«  ...  On  s'est  appuyé,  pour  refuser  de  leur  fournir 
désormais  une  subvention,  sur  ce  fait,  que  leur  en- 
seignement, à  raison  de  sa  destination,  était  d'une 
nature  toute  spéciale,  et  trop  limitée  pour  pouvoir 
concourir  au  progrès  des  études  musicales.  Ce  n'était 
exact  que  dans  une  faible  mesure,  et  l'on  pourrait 
s'en  convaincre  aisément  en  consultant  leurs  pro- 
grammes qui  comportaient  l'étude  du  solfège  et 
des  premiers  éléments  de  l'harmonie,  c'est-à-dire  des 
matières  qui  forment  la  base  même  de  l'éducation 
musicale. 

«  Mais  les  maîtrises,  se  fussent-elles  bornées  à  n'en- 
seigner que  le  plain-chant,  avaient  encore  des  litres 
sérieux  à  l'appui  de  l'Etat. 

C'étaient,  en  effet, les  seules  écoles  adonnées  à  cette 
nature  d'enseignement,  et  il  ne  faudrait  pas  croire 
que  la  faculté  de  déchiffrer  une  notation  quia  cessé 
d'être  usuelle  soit  le  seul  bénéfice  qu'il  y  ait  à  retirer 
de  leur  fréquentation. 

Le  grand  mérite  des  maîtrises  n'était  pas  seule- 
ment de  transmettre  la  notion  d'une  graphique 
propre  à  une  certaine  époque,  mais  bien  d'inculquer 
au  musicien  le  sentiment  mélodique  du  texte  même 
du  plain-chant;  de  l'initier,  de  l'accoutumer  à  une 
espèce  particulière  d'harmonisation; de  lui  donner  la 
clef  d'une  langue  que  l'intérêt  bien  compris  de  l'art 
commande  de  ne  pas  laisser  tomber  à  l'état  de 
langue  morte;  de  perpétuer  enfin  les  traditions  pré- 
cieuses dont  elles  sont  demeurées  les  seules  gar- 
diennes, et  de  la  conversation  desquelles  découle, 
comme  élément  essentiel  d'une  éducation  musicale 


sérieuse,  une  instruction  spéciale  et  profonde  des 
principes  mêmes  de  l'art. 

»  Il  es!  manifeste,  par  exemple,  que  l'étude  des 
différents  modes  du  plain-chani  peut  seule  prédis- 
poser l'esprit  et  l'imagination  à  bien  comprendre 
l'art  antique  dont  ils  proviennent  directement. 

«  Le  maintien  des  maîtrises  présente  donc  un  véri- 
table Intérêt  historique  :  hâtons-nous  d'ajouter  que 
ce  n'est  pas  le  seul  qui  soit  en  jeu,  et  qu'il  faut  encore 
envisager  leur  enseignement  sous  un  autre  aspect, 
au  point  de  vue  de  l'action  dont  il  est  succeptible 
sur  les  développements  des  artistes  qui  s'adonnent 
plus  tard  à  la  musique  profane... 

"  Voilà  l'originalité  de  l'enseignement  des  maî- 
trises. 

«  Voilà  les  services  dont  on  lui  est  redevable. 

«Il  n'est  donc  pas  excessif  de  dire  qu'eu  èteignanl 
ce  puissant  foyer  d'inspiration,  la  décision  des  Cham- 
bres, si  elle  était  définitive,  porterait  un  coup  funeste 
à  l'ait  musical.  » 

Cette  revue  de  nos  institutions  terminée,  la  com- 
mission formule  les  principes  auxquels  devrait  être 
subordonnée  la  réforme  a  préparer  :  «  Nous  en 
avons  trouvé  la  définition  dans  un  document  qui 
émane  de  la  première  République,  et  qui  n'est  autre 
que  le  projet  d'organisation  de  l'enseignement  mu- 
sical soumis  en  l'an  IX  au  comité  d'instruction  publi- 
que du  Corps  législatif. 

«  Ce  projet  émane  de  Bernard  Sarrettf.  :  le  nom  du 
fondateur  et  du  premier  directeur  du  Conservatoire 
le  recommandait  à  notre  attention;  un  examen 
attentif  de  ses  dispositions  l'a  imposé  à  notre  con- 
fiance. » 

La  commission  rappelle  les  dispositions  princi- 
pales du  projet  de  Sarrette  :  «  C'est  sur  des  bases 
à  peu  près  identiques  que  nous  avons  fait  reposer 
le  projet  de  réorganisation  que  nous  avons  l'hon- 
neur de  vous  soumettre.  »  En  conséquence,  estimant 
que  la  centralisation  de  l'enseignement  peut  seule 
conduire  à  ta  décentralisation  de  l'art,  la  commis- 
sion pose  le  principe  de  l'unité  de  direction  à  donner 
à  l'éducation  musicale,  et  l'institution  d'un  contrôle 
vigilant  exercé  par  des  inspecteurs  compétents.  Elle 
préconise  la  relation  des  différentes  écoles  avec  le 
Conservatoire,  leur  division  en  établissements  d'en- 
seignement  primaire  et  d'enseignement  secondaire, 
et  la  mise  en  réserve  d'une  partie  des  crédits  pour 
distribuer  des  bourses  d'études.  Elle  propose  de  ré- 
partir les  fonds  entre  les  succursales  du  Conserva- 
vatoire,  les  maîtrises1  et  certaines  écoles  munici- 
pales, au  nombre  de  33,  dont  les  subventions  com- 
munales forment  un  total  de  ^TobiO  francs,  et  que 
fréquentent  plus  de  7  000  élèves. 

La  commission  demande  que  des  conditions  soient 
imposées  aux  maîtrises,  comme  aux  écoles,  aux- 
quelles l'Etat  viendrait  en  aide.  Pour  ces  dernières, 
elle  estime  nécessaire  l'acceptation  d'un  règlement 
élaboré  par  l'administration  des  beaux-arts,  la  con- 
formité de  leur  enseignement  à  un  programme  d'é- 
tudes tracé  par  le  Conseil  supérieur  du  Conserva- 
toire   et  l'acceptation  du   contrôle  des   inspecteurs. 


nombre  de  seize  :  Rouen.  Ail,  Besa 
Nevers,  Carcassonne,  Cambrai,  Lyon, 
Le  Mans,  Montpellier.  Les  subvcnlioi 

seize  maîtrises  s'élevaient  ejnltaleme 

tait  799   élevés.  Les  rensei^  iiemeats     rerueillis 

Irises  alors  existantes  autorisaient  a  les  considé 


UV.   Le, le/,    Alias.    |l||o|l 

lées  jusqu'en  1881  a  ces 
S0  fi  mes,  On   i    comp- 


TEC  US In  UÉ,  ES  T/1ËT1QUE  ET  PÉDAGOGIE 


Elle  fait  enfin  connaître  le  mode  de  répartition  au- 
quel elle  a  cru  devoir  s'arrêter,  et  précise  les  chiffres 
adoptes  par  elle. 

Quelles  furentles  conséquences  de  ce  rapport? 

Voici  ce  que,  sur  l'heure  même,  écrivaient  MM.  Du- 
pré  el  Ollendorff  dans  leur  remarquable  traité  de  l'ad- 
ministration des  beaux-arts,  que  nous  avons  déjà 

«  Au  moment  où  le  budget  des  cultes  perdait  les 
300  000  francs  annuels  qui  lui  étaient  accordés 
pour  subvention  annuelle  aux  maîtrises,  le  ministre 
des  finances  s'engageait  à  demander  aux  Chambres, 
l'année  suivante,  le  report  de  ce  même  crédit  en 
faveur  de  l'administration  des  beaux-arts,  qui  serait 
chargée,  non  plus  de  subventionner  la  musique  reli- 
gieuse, mais  de  la  répartition  des  fonds  accordés  par 
les  Chambres  à  tous  les  organes  d'enseignement 
musical  qui  paraîtraient  mériter  le  patronage  de 
l'Etat  et  qui  consentiraient  à  accepter  son  contrôle... 
«  Trente-quatre  écoles  municipales  et  seize  maî- 
trises avaient  été  désignées  par  la  commission  spé- 
ciale comme  dignes  de  toute  l'attention  de  l'admi- 
nistration supérieure.  La  commission  comptait  alors 
sur  le  maintien  intégral  des  crédits  des  budgets 
antérieurs.  Mais  la  réduction  de  ers  crédits  de 
32i»ooo  à  200  000  francs  força  l'administration  à 
réduire  ses  propositions.  Elle  dut  se  contenter  d'éri- 
ger quatre  des  écoles  municipales  en  succursales  du 
Conservatoire  et  de  nationaliser  les  quinze  autres 
écoles  municipales  et  les  six  maîtrises  que  nous  avons 
énumérées  plus  haut1  ...  Comme  pour  l'enseignement 
du  dessin,  l'étude  exacte  de  la  situation  de  chacune 
des  écoles,  de  l'organisation  de  l'enseignement 
donné-,  des  méthodes  employées,  des  ressources  de 
toute  nature,  de  l'état  matériel  des  classes,  de  l'état 
moral  du  personnel,  des  résultats  obtenus,  des 
besoins  en  instruments,  partitions,  livres,  etc.,  avait 
été  conliée  à  des  inspecteurs  spécialement  désignés 
pour  celte  mission  préliminaire,  et  leur  travail  a 
servi  de  hase  à  la  répartition  des  crédits  entre  les 
différentes  écoles,  proportionnellement  à  leur  im- 
portance el  aux  sacrifices  des  bugets  locaux. 

«  Ce  corps  d'inspection  a  été  non  seulement  con- 
firmé, mais  consolidé  par  un  arrêté  ministériel  du 
28  janvier  1884,  créant  à  titre  définitif,  pour  les 
besoins  du  contrôle  périodique  annuel  de  toutes  les 
écoles  nationales,  un  inspecteur  général  el  six  ins- 
pecteurs-, tous  choisis,  selon  le  vœu  de  la  com- 
mission spéciale,  parmi  des  artistes  musiciens  ex- 
périmentés. Les  trente  établissements,  succursales 
du  Conservatoire  comprises,  sont  inspectés  au  moins 
une  fois  par  an.  C'est  à  la  suite  des  rapports  des 
inspecteurs  que  sont  accordées  les  subventions  éven- 
tuelles en  primes,  bourses,  instruments  et  livres  que 
l'Etat  s'est  réservé  de  donner  comme  encouragement 
au  développement  des  écoles  et  au  succès  de  l'ensei- 
gnement, et  c'est  ainsi  qu'en  1884,  une  somme  supé- 
rieure à  65  000  francs  a  été  consacrée  à  ces  subven- 
tions spéciales  et  particulières  en  matériel  scolaire, 
c'est-à-dire  en  instruments. 

«  Tous  ces  efforts  datent  d'hier,  et  on  peut  déjà 
considérer  l'enseignement  musical  en  France  comme 
sorti  de  la  période  d'incohérence  et  d'oubli.  L'unité 
d'enseignement  est  constituée  en  principe  par  l'unité 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE 


1.  Ce  sont  :  1"  les  écoles  d  Av 
2fl  écoles  d'Aix-en-F'rovence,  Bavt 
béry,  Digue,  Douai,  Le  M 


in,  le  Havre,  Nancy,  et  Rennes 
yonne,  Boulogne-sur-mer,  Caen,  Chara 
,  .Nimes,  Perpignan,    Roubaii,   Saint 


delà  direction  et  de  l'inspection.  La  matière  en- 
seignée varie,  au  contraire,  et,  sauf  une  large  pari 
d  étude  commune,  celle  de  la  science  musicale  elle- 
même,  cette  matière  d'enseignement  doit  varier  avec 
les  régions.  Ici  le  chanl  dominera,  là  les  instru- 
ments; ici  ce  qu'on  appelle  la  musique  profane, 
ailleurs  la  musique  sacrée;  ici  la  musique  drama- 
tique, ailleurs  la  musique  symphonique.  » 

Les  écoles  municipales  qui  avaient  fait  l'objet 
d'une  proposition  de  subvention  et  qui  durent  être 
abandonnées  à  leur  propre  sort,  furent  celle.  ,1  Ure- 
sur-Adour,  Amiens,  Arras,  Cambrai,  Carcassonne, 
Carpentras,  Cette,  Digne,  Nice,  Orléans,  Oran,  Saint- 
Quentin,  Tourcoing  et  Valence.  En  dessous  de  ces 
écoles  se  trouvaient  encore  d'assez  nombreux  établis- 
sements municipaux  sans  valeur  appréciable. 

Depuis  iS84,  l'enseignement  musical  n'a  subi 
aucune  transformation  organique.  L'histoire  de  cet 
enseignement  prendrait  fin  ici,  si  nous  n 
encore  considérer  un  fait  important,  survenu  au 
cours  du  xix°  siècle,  qui  eut  une  influence  particu- 
lière sur  la  formation  et,  ultérieurement,  sur  le 
fonctionnement  des  écoles  de  musique.  ,; 
l'introduction  de  la  musique  au  nombre  des  ma- 
tières d'enseignement  des  écoles  primaires. 

L'article  premier  de  la  loi  du  2S  juin  1833  men- 
tionne, pour  la  première  fois,  l'incorporation  de  la 
musique  dans  les  programmes  de  l'enseignement  pri- 
maire :  «  L'enseignement  primaire  supérieur  com- 
prend... des  notions  de  sciences  physiques  et  natu- 
relles applicables  aux  usages  de  la  vie  :  le  chant, 
etc.»  Peu  après,  l'enseignement  du  chant  fut  rendu 
obligatoire  dans  les  écoles  élémentaires,  mais  relie 
mesure  demeura  sans  doute  inopérante,  car  la  loi 
de  1850  rendit  cet  enseignement  facultatif.  L'n  anété 
du  30  janvier  18Go  le  rendit  à  nouveau  obligatoire 
dans  les  écoles  normales  primaires.  Le  8  févriei  1867, 
un  nouvel  arrêté  institua  un  comité  de  patronage 
chargé  de  développer  dans  les  écoles  l'enseigne- 
ment du  chant.  Enfin,  un  arrêté-  du  23  juillet  1883  fit 
entrer  définitivement  cet  enseignement  dans  toutes 
les  écoles  primaires.  Des  instructions  précisèrent  les 
notions  qui  devaient  être  enseignées  à  tous  les  de- 
grés des  cours. 

Ces  notions  furent-elles  enseignées  ?  Etait-il  même 
possible  qu'elles  le  fussent?  Elles  ne  l'ont  pas  été  et 
elles  ne  pouvaient  pas  l'être.  Il  n'y  eut  que  des  ten- 
tatives isolées.  Les  instituteurs  furent  bien  requis 
d'enseigner  le  chant  à  leurs  élèves,  mais  le  décret 
demeura  inopérant;  la  plupart  des  instituteurs  ne 
connaissaient  pas  la  musique.  On  imposa  alors 
l'enseignement  musical  dans  les  écoles  normales, 
mais,  d'une  part,  tous  les  maîtres  ne  sortaient  pas 
des  écoles  normales,  et,  d'autre  part,  les  programmes 
reposaient  sur  des  données  pédagogiques  très  d 
tueuses,  telles  que  celle  du  galinisme.  Enfin,  l'épreuve 
musicale  imposée  à  l'examen  du  brevet  et  au  cer- 
tificat d'études  primaires  était  non  seulement 
vaine  en  elle-même,  mais  inopérante,  celte  épreuve 
ne  comportant  pas  de  sanction  effective.  C'est  en  cet 
état  d'inorganisation  qu'est  demeuré  l'enseignement 
musical  primaire.  La  loi  n'est  pas  appliquée,  et  elle 
ne  peut  pas  l'être. 
L'enseignement  musical  fut  également  introduit. 


Etienne,  Saint-Omer,  Tours  et    Vaienciennes;   3°  les   maiti 
Langres,  Montpellier,  Moulins,  Nevers,  Reiras  et  Rodez. 
2.  Le  nombre  des  inspecteurs  a  été  réduit  à  cinq,  ulterie-i 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


en  1865,  dans  les  établissements  d'enseignement 
secondaire,  lycées  et  collèges1. 

«  C'est,  disent  Dupré  et  Ollendorff,  un  milieu  où 
l'art  pénètre  encore  difficilement.  La  surcharge  des 
programmes  des  lettres  et  des  sciences  est  l'excuse 
de  cette  espèce  d'ostracisme...  Quant  à  la  musique, 
l'Université  pratique  tout  au  plus  à  son  égard  une 
scepticisme  bienveillant. 

«  Les  maîtres  sont  exclusivement  choisis,  agréés 
et  éliminés8,  le  cas  échéant,  par  les  proviseurs...  Tout 
est  laissé  à  l'intelligence  et  aux  bonnes  volontés 
locales  :  liberté  de  méthodes  et  d'exercices. 

0 nant  aux  lycées  de  jeunes  filles,  «  l'Université 
s'est  bornée  jusqu'à  présent  à  leur  étendre  à  peu 
près  les  dispositions  adoptées  pour  les  lycées  de  gar- 
çons. L'enseignement  du  solfège  et  du  chant  n'y  est 
obligatoire  que  dans  la  première  partie  des  études... 
Enfin,  ni  dans  l'enseignement  primaire,  ni  dans 
l'enseignement  secondaire,  nous  ne  trouvons  encore 
1'inspeclion  des  éludes  musicales  organisée.  » 

Nous  terminerons  ces  observations  adventices  en 
rappelant  que,  depuis  1833  où  Wilhelm  en  prit  l'ini- 
tiative, la  Ville  de  Paris  a  institué  dans  ses  écoles  un 
enseignement  musical  confié  à  des  professeurs  spé- 
ciaux et  soumis  à  une  inspection  technique  perma- 
nente. 


Les  particularités  constitutives  des  écoles  de  mu- 
sique des  départements  résultent  des  causes,  mé- 
diates ou  immédiates,  incluses  dans  les  faits  histo- 
riques que  nous  venons  de  passer  en  revue.  De  leur 
synthèse  critique  se  dégage  une  notion  dont  on  peut 
dire,  métaphoriquement,  qu'elle  est  la  pierre  angu- 
laire de  la  situation  présente  de  l'enseignement  mu- 
sical. 

Des  origines  à  la  Révolution,  cet  enseignement  a 
exclusivement  un  caractère  spécial  et  technique.  Il 
a  pour  objet  la  formation  des  musiciens  profession- 
nels indispensables  aux  manifestations  musicales 
religieuses.  Les  enfants  instruits  dans  les  maîtrises 
les  quittent  jeunes,  à  l'âge  de  la  mue,  et  l'enseigne- 
ment très  particulier  qu'ils  y  reçoivent  a  peu  de 
portée  pratique  pour  ceux  qui  se  destinent  à  exercer 
leurs  talents  dans  le  genre  profane. 

Avec  la  Révolution,  la  musique  se  nationalise;  elle 
tend  à  s'incorporer  à  la  vie  de  la  nation.  Ce  fait  nou- 
veau a  pour  conséquence,  au  milieu  du  xix°  siècle, 
l'introduction  de  la  musique  dans  l'enseignement 
primaire,  à  titre  éducatif.  L'enseignement  musical 
acquiert,  dès  ce  jour,  une  valeur  inconnue  jusque-là, 
qui  est  sociale,  avant  que  d'être  proprement  musicale. 
Cette  valeur  dépasse  son  propre  objet,  et  il  devient 
nécessaire  de  préciser,  à  cette  place,  les  fonctions 
fondamentales  de  l'enseignement  de  la  musique  en 
l'état  actuel  de  la  société. 

FONCTIONS  SOCIALES   DE  L'ENSEIGNEMENT 
MUSICAL 

Tout  enseignement  est  susceptible  d'avoir  deux 
fonctions  sociales  principales,  selon  que  son  carac- 
tère est  exclusivement  spécial  et  technique,  ou  que, 


1.  On  ncp.Mil  manquer  de  rappeler,  à  celle  occasion,  que  lorsque 
Tondorcet  avait  prépose  a  la  I  à.uvention  la  création  île  neuf lvcées 
nationaux,  il  prévoyait  dans  chaque  lycée  un  professeur  qui  aurait 
enseigné  la  théorie  et  1 1  composition  de  la  musique. 

i.  Depuis  d'assez  nombreuses  années,  les  professeurs  de  musique 


conjointement,  il  participe  à  la  formation  générale 
publique  de  la  collectivité,  à  titre  éducatif. 

En  disant  d'un  enseignement  qu'il  est  spécial  et 
technique,  nous  entendons  exprimer  que  son  objet 
est  de  former  un  corps  professionnel.  Un  petit 
nombre  de  centres  universitaires,  sinon  un  seul, 
suffisent,  en  pareil  cas,  à  remplir  cet  office. 

Lorsque,  au  contraire,  l'enseignement  ne  tend,  sous 
la  forme  de  notions  élémentaires,  qu'à  l'éducation 
première  des  masses,  il  s'ensuit,  vers  la  base,  une 
multiplication  considérable  des  foyers  d'instruction. 

La  complexité  des  nécessités  sociales  a  ainsi  en- 
gendré les  ordres  d'enseignement.  De  l'un  à  l'autre 
il  y  a  moins  une  différenciation  de  degré  que  de 
nature,  c'est-à-dire  d'espèce.  L'enseignement  pri- 
maire dispense  les  connaissances  éducatives  stric- 
tement nécessaires  pour  la  satisfaction  des  besoins 
généraux  de  l'individu  moyen;  l'enseignement  se- 
condaire, par  une  gymnastique  intellectuelle  pro- 
longée, a  pour  mission  de  préparer  les  cadres  de 
la  société  ;  enfin  la  tâche  échoit  à  l'enseignement 
supérieur  de  transmettre  et  d'accroître  les  connais- 
sances savantes  et  de  donner  un  cerveau  au  corps 
social. 

Les  trois  ordres  d'enseignement  représentent,  dans 
leur  succession,  les  aspects  gradués  d'une  fonction 
complexe,  dont  les  termes  extrêmes  sont  l'éducation 
générale  publique  et  les  hautes  spécialisations  indi- 
viduelles. 

Si  l'on  considère  les  matières  des  programmes  de 
l'enseignement  primaire,  on  constate  qu'elles  sont, 
depuis  un  siècle  surtout,  en  accroissement  constant. 
Si  limitée  que  soit,  en  définitive,  une  telle  extension, 
celle-ci  s'accuse  encore  sensiblement  de  nos  jours. 
L'accroissement  et  l'évolution  des  besoins  collectifs 
ont  conduit  à  introduire  dans  l'enseignement  pri- 
maire des  matières  qui,  antérieurement,  n'étaient 
pas  appelées  à  joue*  un  rôle  éducatif.  Après  avoir  sa- 
tisfait aux  préoccupations  utilitaires,  il  était  naturel 
qu'une  part  fût  faite  aux  aspirations  de  l'être  intime 
pour  l'agrément,  l'embellissement  et  l'ornement  de 
la  vie.  Lorsqu'il  ne  suffit  plus  que  l'enfant  apprit  à 
lire,  à  écrire  et  à  compter,  des  notions  complémen- 
taires furent  empruntées  à  la  littérature,  à  l'histoire 
et  aux  sciences,  puis  aux  arts  du  dessin  et  de  la  mu- 
sique. Nous  avons  dit  quand  et  comment,  et  aussi 
l'échec  de  cette  tentative. 

Cet  échec  est  le  fait  important  qui  doit  être  re- 
tenu, car  il  a  déterminé  un  véritable  dédoublement 
des  fonctions  sociales  des  écoles  de  musique.  Ecoles 
spéciales  et  techniques,  à  l'origine  et  par  destina- 
tion, elles  ont  dû  devenir,  conjointement,  des  centres 
d'éducation  populaire.  Qui  plus  est,  c'est  en  cette 
qualité  que,  depuis  le  milieu  du  xixf  siècle,  la  plu- 
part de  nos  instituts  musicaux  ont  été  créés  et  que, 
par  un  effort  méritoire,  quelques-uns  se  sont  haussés 
jusqu'au  rang  d'école  d'art. 

En  quelque  sens  qu'on  la  considère,  cette  con- 
trainte est  le  fondement  même  du  problème  que 
pose  l'examen  de  notre  enseignement  musical,  dont 
les  fonctions  sociales  se  sont  modelées  sur  les  idées 
générales  prédominantes  des  trois  grandes  périodes 
de  notre  histoire. 


doivent  être,  autant  que  possible,  tiliduies  du  icrlilicat  d'aptitude  à 
l'enseignement  du  chant.  Leur  nomination  est  soumise,  par  les  chefs 
d'établissements,  à  l'approbation  du  recteur.  L'enseignement  musical, 
par  une  singulière  anomalie,  n'est  d'ailleurs  dc-i que  dans  les  classes 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3593 


Des  origines  à  la  fin  du  moyen  âge,  période  théo- 
cralique,  la  fonction  sociale  de  l'art  est  religieuse; 
de  la  Renaissance  à  la  Révolution  française,  période 
d'absolutisme  monarchique,  elle  est  aristocratique 
et  mondaine  ;  depuis  la  Révolution  et  l'avènement 
de  la  démocratie,  elle  est,  en  outre,  éducative  et  uni- 
verselle. De  ces  observations,  qui  offrent  à  la  critique 
spéculative  un  champ  d'études  étendu,  nous  ne  re- 
tiendrons que  la  notion,  nullement  transcendantale, 
mais  pour  nous  essentielle,  du  double  objectif,  édu- 
catif et  technique,  de  nos  écoles  de  musique. 

LES   RÉGIMES  ADMINISTRATIFS  DES  ÉCOLES 
DE   MUSIQUE 

Les  écoles  de  musique  des  départements  ressortent 
adminislralivemenl  aux  trois  catégories  suivantes  : 
1°  écoles  privées;  2°  écoles  municipales;  3°  écoles 
nationales. 

Nous  allons  examiner,  comparativement,  les  par- 
ticularités de  ces  divers  régimes. 

Écoles  privées. 

On  ne  saurait  reconnaître  la  qualité  d'école  de 
musique  aux  innombrables  cours  instrumentaux  et 
vocaux  disséminés  sur  toute  l'étendue  du  territoire. 
Il  importe  de  définir  ce  qu'il  faut  entendre  par  ce 
terme,  et  de  marquer  le  caractère  distinctif  des 
écoles. 

Un  établissement  d'enseignement  musical  ne  peut 
être  considéré  comme  une  école  qu'autant  :  1"  que 
l'enseignement  est  donné  collectivement;  2°  que 
l'ensemble  des  classes  est  ordonné  et  gradué  de 
façon  à  constituer  un  tout,  plus  ou  moins  complet, 
mais  cohérent  et  harmonieux;  3°  que  les  études 
comportent  des  sanctions  indépendantes  des  intérêts 
particuliers  qui  peuvent  se  trouver  en  jeu. 

Le  nombre  des  établissements  privés  de  cet  ordre 
est  forcément  très  restreint.  Leur  création  exige  une 
mise  de  fonds  dont  le  rapport  est  fort  aléatoire,  en 
raison  du  nombre  limité  des  élèves  pouvant  sup- 
porter les  frais  d'une  rétribution  scolaire  rémuné- 
ratrice. Les  initiatives  privées,  auxquelles  nombre 
d'écoles  sont  redevables  de  leur  existence,  se  trou- 
vent ordinairement  contraintes  de  solliciter,  à  bref 
délai,  une  subvention  municipale,  en  [retour  de  la- 
quelle les  écoles,  tombant  en  partie  sous  le  contrôle 
des  assemblées  communales,  perdent  de  la  sorte 
leur  caractère  primitif. 

En  fait,  une  école  privée  ne  peut  subsister  que  si 
elle  est  patronnée  et  subventionnée  par  une  société 
civile,  ou  une  personnalité,  consentant  tous  les  sacri- 
fices pécuniaires  nécessaires.  En  ce  cas  le  régime  de 
ces  écoles  est  sous  l'entière  dépendance  de  leur  con- 
seil d'administration  :  budget,  personnel  directeur 
et  enseignant,  programme  des  concours  et  toutes 
dispositions  scolaires  sont,  en  dernier  ressort,  réglés 
par  celui-ci,  sinon  par  une  personne  investie  d'un 
rôle  prépondérant,  et  souvent  éphémère,  au  sein  de 
ce  conseil. 

Ce  régime  peut  être  le  meilleur,  ou  le  pire,  qui 
soit.  Il  présente  le  maximum  d'aléas,  tant  par  son 
manque  de  stabilité,  de  continuité,  et,  d'une  ma- 
nière générale,  de  garantie  pour  tous  ceux  qui  lui 
sont  soumis,  que  par  la  primauté  inéluctablement 
accordée  aux  considérations  matérielles  et  finan- 
cières en  opposition  avec  les  intérêts  supérieurs  et 
les  fins  de  l'enseignement. 


Le  régime  des  écoles  privées  est,  en  France,  le 
régime  d'exception.  Il  n'en  est  pas  de  même  dans 
nombre  de  pays  étrangers.  Chez  nous  il  apparaît, 
ordinairement,  comme  un  régime  momentané  et 
transitoire.  Cela  tient  à  nos  mœurs,  au  peu  de  con- 
fiance que  le  Français  accorde  aux  initiatives  privées" 
sinon  à  la  méfiance  qu'inspire  un  enseignement  sans 
contrôle,  sans  caractère  officiel,  et  effectivement  livré 
à  lui-même.  Il  ne  faut  pas  oublier,  en  effet,  que  le 
professorat  de  la  musique  est  libre,  et  qu'on  peut  lui 
appliquer  une  formule  célèbre  en  disant  que  n'im- 
porte qui  peut,  n'importe  où,  et  n'importe  comment, 
enseigner  n'importe  quelle  matière  musicale.  Funeste 
privilège,  dont  les  méfaits,  dans  l'enseignemen 
privé',  sont  considérables. 

Écoles  municipales. 

Les  écoles  municipales  sont,  dans  le  cadre  de 
l'administration  communale,  essentiellement  auto- 
nomes. Toutes,  cependant,  sont  régies  sensiblement 
de  la  même  façon.  Les  différences  qu'elles  présentent 
sont,  en  partie,  étrangères  à  leur  mode  d'adminis- 
tration; leur  importance  et  les  résultats  qui  y  sont 
obtenus  dépendent  étroitement  de  causes  locales,  ou 
personnelles. 

Le  régime  administratif  municipal  se  définit  en 
deux  propositions  :  1°  le  budget  de  l'école,  dépenses 
et  recettes,  est  partie  intégrante  du  budget  com- 
mun;! 1:  2°  aucune  autorité  étrangère,  ou  non  subor- 
donnée à  l'administration  municipale,  n'exerce  de 
droit  de  regard  sur  le  fonctionnement  de  l'école. 

L'école  reçoit  ses  subsides  de  la  ville,  qui  encaisse, 
s'il  y  a  lieu,  la  rétribution  scolaire;  elle  est  logée 
par  ses  soins;  directeur,  professeurs  et  personnel 
de  service  sont  nommés  par  le  maire;  les  uns  et  les 
autres  sont  employés  municipaux,  cornmissionnés 
ou  non,  selon  les  règlements  locaux.  La  gestion  ad- 
ministrative et  financière  est  identique  à  celle  des 
autres  services  municipaux.  L'autorité  du  maire  n'a 
pour  limites  que  celles  incluses  dans  les  lois  géné- 
rales de  l'administration  publique,  et  dans  la  mesure 
seulement  où  son  exercice  ne  dépend  pas  de  l'allo- 
cation d'un  crédit  que  l'assemblée  communale  de- 
meure toujours  maîtresse  d'allouer  ou  de  supprimer. 

Au-dessous  du  maire,  ou  de  son  adjoint  délégué, 
est  institué  un  conseil  d'administration  ou  de  per- 
fectionnement, et,  parfois  aussi,  un  comité  d'ensei- 
gnement, composés,  pour  une  part,  de  conseillers 
municipaux  et,  pour  une  autre  part,  de  personna- 
lités choisies  et  nommées  par  le  maire.  Ces  conseils 
ont  pour  mission  de  contrôler  la  gestion  administra- 
tive et  technique  de  l'école.  Ce  dernier  contrôle  est 
plus  fictif  que  réel,  en  raison  de  l'insuffisante  com- 
pétence du  conseil  à  l'égard  du  directeur  et  des  pro- 
fesseurs. En  quelque  occurrence  que  ce  soit,  conseil 
ou  comité  conservent,  au  surplus,  le  caractère  d'une 
simple  commission  consultative. 

Les  écoles  municipales  de  musique  ont  généra- 
lement pour  statut  un  règlement  administratif 
approuvé  par  un  vote  du  conseil  municipal.  Ce  règle- 
ment, qui  ne  peut,  bien  entendu,  offrir  aucune 
garantie  quant  au  niveau  des  études,  peut  exercer, 
cependant,  s'il  est  bien  fait,  une  influence  sensible 
sur  la  marche  de  l'école.  Il  fixe,  ordinairement,  les 
prérogatives  et  attributions  particulières  du  conseil 
d'administration,  du  directeur  et  des  professeurs,  la 
nature  des  matières  enseignées,  la  composition  des 
classes,  les  devoirs  et  obligations  des  élèves,  la  durée 


ENCVCL0PÉ&1E  DE  LA  MUSIQUE  ET  D1CTI0.X.XAIRI1  DU  CONSERVATOIRE 


de  la  scolarité,  la  fréquence  et  les  programmes  des 
examens  el  des  concours,  les  conditions  d'attribution 
des  récompenses,  etc.  En  un  mot,  il  appartient  à  ce 
règlement  d'ordonner  la  vie  de  l'école,  de  lui  donner 
son  rythme  et  sa  physionomie. 

ence  de  la  carence  de  l'Etat  qui,  en  pro- 
vince, n'assure  nulle  part  l'enseignement  musical,  il 
semble  que  le  régime  administratif  municipal  soit  le 
régime  normal  des  écoles  de  musique.  La  plupart 
d'entre  elles  ont  été  créées  par  l'initiative  des  muni- 
cipalités, et.  sans  les  subventions  allouées  par  ces  der- 
nières, aucune  ne  pourrait  subsister.  Cependant,  le 
nombre  des  écoles  municipales  ne  représente  pas 
sensiblement  plus  du  tiers  du  nombre  total  des  écoles, 
particularité  d'autant  plus  surprenante  que  toutes 
sont,  en  fait,  entretenues  avec  les  crédits  des  budgets 
communaux.  Dans  la  pratique,  il  s'avère,  en  effet, 
que  ce  régime  présente  de  nombreux  inconvénients. 
Deux  graves  critiques  peuvent  être  formulées  à 
son  encontre. 

Administrativemenl,  un  pouvoir  local  et  politique 
ne  jouit  pas  de  l'indépendance  et  de  la  liberté  d'ac- 
tion qui  sont  nécessaires  pour  gérer  souverainement 
un  organisme  délicat  et  complexe,  dont  le  fonction- 
nement dépend  d'nn  petit  nombre  de  valeurs  indivi- 
duelles rivales  et,  pour  tout  dire,  en  état  de  lutte  et 
de  concurrence  incessantes. 

Techniquement,  les  municipalités  n'ont  à  leur  dis- 
position aucun  moyen  de  contrôle  sur  l'enseigne- 
ment, sur  la  valeur  professionnelle  du  personnel  et 
sur  la  qualité  des  résultats  obtenus. 

Sans  doute,  l'autorité  momentanée  d'un  homme, 
en  de  certains  cas,  peut-elle  suppléer  à  cette  double 
carence;  il  n'en  demeure  pas  moins  que  la  valeur 
d'un  régime  ne  peut  être  confondue  avec  l'apprécia- 
tion d'un  cas  particulier.  L'absence  d'un  contrôle 
technique  étranger  à  l'école,  mais  responsable  et 
qualifié,  est  la  cause  principale  des  mécomptes  que 
les  municipalités  éprouvent  du  fait  de  leurs  écoles 
de  musique,  en  dépit  de  leur  bonne  volonté  et  de 
leurs  libéralités.  Ce  défaut  d'autorité  supérieure 
livre  directeur  et  professeurs  à  eux-mêmes,  permet 
aux  intérêts  personnels  de  prendre  le  pas  sur  l'in- 
térêt général,  et  entraine  une  rupture  d'équilibre 
dont  les  répercussions  perturbent  les  cadres  de 
l'école,  l'ordonnancement  des  classes  et  les  pro- 
grammes des  études.  Ainsi  le  niveau  des  cours  s'a- 
baisse au  fur  et  à  mesure  que  croit  le  nombre  des 
récompenses  décernées! 

Si  l'on  ajoute  encore  que  les  écoles  municipales, 
sans  relation  d'aucune  sorte  avec  les  autres  écoles  de 
musique,  vivent  d'une  vie  isolée  dont  l'horizon  est 
étroitement  borné,  on  se  rendra  compte  des  raisons 
pour  lesquelles  ces  écoles  se  trouvent  plus  ou  moins 
ravalées,  dans  les  petites  villes,  à  jouer  le  rôle  de 
simples  pourvoyeuses  de  l'harmonie  municipale. 

Enfin,  il  ne  faut  pas  oublier  que  la  politique  locale 
peut  exercer  une  influence  dangereuse  pour  les 
écoles,  sans  aucun  tempérament  possible;  danger 
d'autant  plus  grand  que,  créées  par  les  municipa- 
lités, mais  dotées  de  ressources  modiques,  les  écoles 
ont  une  vie  précaire  et  fragile. 

11  n'est  pas  rare,  en  de  telles  conditions,  qu'elles 
manquent  à  leur  double  mission,  impuissantes 
qu'elles  sont  à  donner  un  enseignement  technique 
professionnel,  comme  à  remplir  leur  office,  plus 
modeste,  d'éducatrices  publiques.  Qu'arrive-t-il  en 
cette  occurrence?  Certaines  disparaissent,  quelques 
autres,  diversement  improductives,  végètent.  Alors, 


souvent,  et  comme  en  désespoir  de  cause,  les  muni- 
cipalités implorent  le  secours,  l'aide  et  le  patro- 
nage de  l'Etat. 

C'est  ainsi  que  s'est  constitué  lentement  le  grou- 
pement, aujourd'hui  très  important,  des  écoles 
nationales  de  musique,  dont  le  régime,  assez  parti- 
culier, mérite  un  examen  attentif. 

Éeoles  nationales. 

Celte  appellation  d'école  nationale  de  musique  est 
à  la  fois  inexacte  et  malencontreuse  :  inexacte  en 
son  sens  littéral,  les  écoles  nationales  n'apparte- 
nant pas  à  l'Etat,  comme  en  >on  sens  figuré,  car  leur 
action  demeure  locale  ou,  exceptionnellement,  régio- 
nale ;  malencontreuse  en  ce  qu'elle  enlève  nomina- 
lement et  indûment  leur  titre  de  propriété  à  leurs 
véritables  propriétaires,  fait  qui,  avant  toute  appré- 
ciation sur  le  bien  fondé  de  ce  régime  administratif, 
indispose  à  son  égard  les  pouvoirs  publics  intéressés, 
mais  insuffisamment  avertis. 

Les  écoles  nationales  ne  sont,  en  effet,  que  des 
écoles  municipales,  patronnées,  contrôlées  et  généra- 
lement très  faiblement  subventionnées  par  l'Etat.  Il 
serait  équitable  et  judicieux  que  cette  appellation 
fût  modifiée.  Ce  n'est  pas  là  une  vaine  querelle  de 
mots,  les  mots  devant  être  l'expression  exacte  et 
rigoureuse  de  l'objet  qu'ils  représentent;  mais,  néan- 
moins, c'est  cet  objet  qu'il  convient,  ici,  de  consi- 
dérer. 

Le  régime  adminislratif  des  i  coles  nationales  de 
musique  repose  sur  une  convention  type  liant  réci- 
proquement les  villes  à  l'Etat.  Les  observations  que 
nous  aurons  à  consigner  sur  les  effets  de  celte  con- 
vention trouveront  leur  place  naturelle  après  la  lec- 
ture de  son  contexte  : 

Contention  pour  la  transformation  'l'une  école 
de  musique  municipale  en  -rôle  note, mile. 

Entre  le  ministre  de  l'instruction  publique  et 
des  beaux-arts,  agissant  au  nom  de  l'Etal,  d'une 
part,  et  M.  le  maire  de...  agissant  au  nom  de  la  ville, 
spécialement  autorisé,  à  cet  effet,  par  délibération 
du  conseil  municipal,  en  date  du...,  d'autre  part,  il  a 
été  convenu  ce  qui  suit  : 

Article  premier.  La  ville  consenlà  la  transforma- 

mation  de  son  école  municipale  de  musiqi u  i  sole 

nationale. 

Article  II.  Elle  s'engage  à  porter  annuellement  à 
son  budget,  et  à  prélever  sur  ses  ressources  propres 
une  somme  égale  à  celle  inscrite  au  budget  actuel 
de  la  commune,  pour  les  dépenses  de  l'école,  soit 
une  somme  de... 

Cet  engagement  est  pris  sous  la  réserve  expresse 
que  la  ville  ne  pourra  être  tenue  à  augmenter  Dette 
part  contributive  pour  quelque  motif  que  ce  puisse 
être,  et  à  la  condition  que  l'Etat  interviendra  dans 
les  dépenses  annuelles  pour  une  somme  de... 

Articte  III.  Le  budget  de  l'école  de  musique,  com- 
prenant la  rétribution  du  personnel  administratif 
et  enseignant,  ainsi  que  les  divers  frais  de  matériel, 
sera  soumis,  avant  l'ouverture  de  chaque  exercice,  à 
l'approbation  du  ministre. 

Article  IV.  La  ville  s'engage  à  fournir  à  l'école  le 
local  nécessaire. 

Article  V.  L'école  sera  soumise  à  l'observation 
d'un  règlement  et  à  l'application  d'un  programme 
d'études  établis  par  le  ministre  sur  les  bases  d'un 
projet  préparé  par  la  municipalité. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    35 


Ce  règlement  et  ce  programme  d'études,  une  fois 
revêtus  de  l'approbation  du  ministre,  ne  pourront 
plus  être  modifiés  sans  son  consentement;  ils  seront 
annexés  à  la  présente  convention. 

Article  VI.  Le  directeur  sera  nommé  par  le  mi- 
nistre sur  la  présentation  du  préfet,  et  après  avis  du 
maire. 

Les  professeurs  seront  nommés  par  le  préfet,  sur 
la  présentation  du  maire. 

Article  VII.  L'école  sera  soumise  au  contrôle  des 
délégués  du  ministre. 

Article  VIII.  La  municipalité  s'engage  à  adresser, 
tous  les  trois  mois,  au  ministre  un  état  du  personnel 
enseignant  et  des  élèves  et  un  état  de  la  situation 
financière  de  l'école  indiquant  les  dépenses  faites 
sur  le  budget  de  cette  institution  dans  le  cours  du 
trimestre  précédent. 

ArticleXJ.  Le  maire  de...  soumettra  les  termes  de 
la  présente  convention  à  l'approbation  du  conseil 
municipal;  l'extrait  de  la  délibération  dans  laquelle 
aura  été  donnée  la  ratification  dudit  conseil  devra 
être  approuvé  par  le  préfet  de...  et  transmis  par  lui 
au  ministre. 

Fait  en  double  à  Paris  le... 

Le  maire  de... 

Le  ministre  de  l'Instruction  Publique 
et  des  Beaux-Arts... 

Aux  termes  de  l'article  II,  le  contrat  présente,  pour 
les  écoles,  un  avantage  important:  il  les  met  à  l'abri 
d'une  réduction  éventuelle  de  leurs  ressources  bud- 
gétaires. Huant  à  la  participation  de  l'Etat,  en  ma- 
tière financière,  il  est  douloureux,  à  l'heure  actuelle, 
de  devoir  en  faire  mention.  A  l'origine,  elle  attei- 
gnait de  20  à  30  °/0  du  budget  global  des  écoles. 
Depuis  près  de  vingt  ans,  les  réductions  opérées  par 
les  Chambres  sur  les  crédits  affectés  à  l'enseigne- 
ment des  beaux-arls  ont  rendu  absolument  fictive  la 
contribution  de  l'Etat  dans  les  dépenses  des  écoles 
nationales  nouvellement  rattachées.  Le  ministère 
alloue  annuellemeut  a  celles-ci  la  somme  de  cent 
francs. 

L'assentiment  du  ministre,  requis  à  l'article  III, 
pour  tout  changement  dans  le  budget  de  l'école  est 
assimilable  à  un  simple  visa  administratif.  S'ap- 
puyant  sur  l'autorité  technique  des  inspecteurs,  l'in- 
tervention ministérielle  tend  à  éclairer  les  munici- 
palités sur  les  avantages  ou  les  inconvénients  que 
peut  présenter  telle  ou  telle  mesure. 

L'article  IV  n'est  opérant  qu'au  moment  du  pas- 
sage de  la  convention.  Il  contraint  les  communes  à 
ne  pas  laisser  les  écoles  dans  des  locaux  insalubres 
ou  insuffisants. 

L'obligation,  inscrite  à  l'article  V,  de  soumettre 
l'école  à  l'observation  d'un  règlement  et  à  l'appli- 
cation d'un  programme  d'études,  l'un  et  l'autre 
approuvés  par  le  ministre,  est  particulièrement  im- 
portante. Ici  encore,  sur  les  suggestions  des  inspec- 
teurs, le  pouvoir  central  peut  utilement  conseiller  les 
pouvoirs  locaux.  Son  intervention  permet,  en  outre, 
dans  une  certaine  mesure,  d'apporter,  à  défaut  d'une 
unité  réelle  dans  l'enseignement  des  écoles,  certaines 
équivalences  et,  tout  au  moins,  la  continuité  des 
vues  et  la  stabilité  dans  la  gestion  de  chaque  établis- 
sement. 

L'article  VI  stipule  que  la  nomination  du  directeur 
appartient  au  ministre,  et  celle  des  professeurs  au 
préfet.  Il  a  pour  objet  de  soustraire  les  intéressés 
■aux  influences  de  la  politique  locale.  Il  est  au  nombre 


des  plus  importantes  dispositions  de  la  convention, 
et,  si  son  application  ne  laisse  pas  que  d'être  déli- 
cate, elle  apporte  d'assez  sérieuses  garanties  dans  le 
recrutement  du  personnel  dirigeant  et  enseignant. 

Enfin  l'article  VII  sauvegarde  l'ensemble  des  inté- 
rêts les  plus  importants.  Il  soumet  les  écoles  au 
contrôle  des  inspecteurs  de  l'enseignement  musical. 
Ce  contrôle  technique,  permanent  et  responsable, 
est,  en  définitive,  la  clef  du  voûte  du  i  . 
écoles  nationales.  C'est  par  lui  que  sont  assurées 
toutes  les  clauses  du  contrat  ;  il  satisfait  aux  nécessités 
générales  et  spéciales  propres  ù  assurer  leur  pros- 
périté et  la  meilleure  utilisation  des  ressources  de 
chacune. 

Les  autres  dispositions  de  la  convention  ont  un  ca- 
ractère administratif  purement  acci 

A  ne  considérer  que  la  libellé  de  cette  convention, 
on  constate  qu'elle  alfecte  davantage  la  forme  d'un 
contrat  d'assurance  que  celle  d'un  transfert  de  pou- 
voirs d'une  autorité  à  une  autre.  Elle  supi  rpose  •  I 
additionne,  en  quelqne  sorte,  po  ir  les 
tager,  les  responsabilités,  en  donnant  à  celles  de 
l'administration  centrale  un  caractère  préventif  et 
immunisateur.  Elle  laisse  aux  écoles  leur  qualité 
de  fondations  et  d'établissements  municipaux,  mais 
elle  tend  à  les  préserver  des  risques  que  leur  font  cou- 
rir les  insuffisances  et  les  lacunes  inhérentes  i  I  ui 
nature. 

La  seule  analyse  d'une  convention  administrative 
ne  suffit  pas  à  montrer  ce  qu'elle  est  dans  si 
Il  est  intéressant  de  considérer  ceux-ci  de  plus  pris, 
de  les  saisir  sur  le  vif,  c'est-à-dire  dans  leui   réalité 
pratique  et  usuelle.  La  valeur  propre  d'un  - 
n'est  pas  indifférente, mais  la  façon  dont  il  est  appli- 
qué agit  à   la  manière    d'un  coefficient   susceptible 
d'être  affecté  d'une  valeur  positive  ou  négative.  Il 
convient  donc  de  voir  comment  l'administration  des 
beaux-arts   comprend  son  rôle  dans   ses  rapports 
avec  les  pouvoirs  locaux  municipaux,  el    I 
une  sorte  d'état  moral  des  relations  qui  sont  la  par- 
ticularité et  la  pierre  d'achoppement   éventuelle  du 
régime  en  cause. 

L'histoire  des  écoles  de  musique  de  province, 
considéré'-  sous  son  aspect  administratif,  pp'-seiilf 
ordinairement  un  synchronisme  évolutif  très  carac- 
téristique. Fondées  par  les  municipalités, ou  de  fon- 
dations privées  devenues  municipales,  les  écoles  de- 
meurent quelques  années  soumises  à  ce  régime.  Vient 
un  jour  où,  la  détresse  de  leur  situation  s'aggravanl, 
les  municipalités  sollicitent  l'intervention  de  l'Etat, 
seul  moyen  qui  demeure  pour  obvier  à  leur  ferme- 
ture. 

L'intervention  de  l'Etat,  c'est  l'acceptation  de  la 
convention  de  nationalisation,  à  la  manière,  sinon 
d'une  carte  forcée,  du  moins  d'une  contrainte  iné- 
luctable. Cette  acceptation  se  heurte  à  bien  des  ré- 
sistances :  il  y  a,  nous  l'avons  dit,  l'impropriété 
du  terme,  mais  aussi  les  apparences  d'une  forme 
d'abdication  partielle  de  l'autonomie  communale. 
Or,  les  municipalités  ne  sont  pas  seulement  jalouses 
de  leurs  prérogatives,  elles  ne  cessent  encore  de 
réclamer  une  extension  de  leur  indépendance  admi- 
nistrative. Enfin,  par  delà  ces  points  de  vue  où  les 
mots  jouent  un  rôle  fort  grand,  il  est  un  fait  brutal  : 
les  municipalités,  dépossédées  du  droit  de  nomina- 
tion du  directeur  et  des  professeurs,  se  voient  con- 
traintes à  payer  un  personnel  soustrait  à  leur  auto- 
rité directe.  Une  logique  simpliste,  et  telle  est  celle 
des  hommes  insuffisamment  avertis  d'une  question, 


■•!.-,% 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


ne  peut  que  fort  mal  s'accommoder  d'un  tel  ordre  de 
choses. 

Un  bref  examen  montre  cependant  combien  une 
telle  disposition  est  justifiée.  «  Dura  lex,  sed  lex;  •> 
c'est  une  dure  loi,  mais  une  loi  salvatrice.  Les  mu- 
nicipalités sont  des  corps  politiques;  il  leur  appar- 
tient de  disposer  souverainement  des  deniers  com- 
munaux et  de  prendre  toutes  les  décisions  ayant 
trait  à  ce  que  l'on  pourrait  appeler  la  Législation 
communale.  Là  s'arrête  le  pouvoir  politique,  essen- 
tiellement distinct  du  pouvoir  administratif.  De 
l'un  à  l'autre,  il  y  a  une  différence  d'espèce.  Le  pou- 
voir politique  est  le  représentant  ou  le  mandataire 
des  inlérèts  et  de  la  volonté  les  plus  généraux  de  la 
collectivité;  lespouvoirs administratifs  sontles  agents 
techniques  d'exécution  de  ce  corps  politique.  11  n'ap- 
partient pas  aux  parlements  de  gérer  les  services 
publics  créés  par  eux  et  recevant  d'eux  les  crédits 
qui  leur  sont  nécessaires.  Une  assemblée  politique 
exprime  une  volonté  anonyme  et  impersonnelle,  dont 
les  limites  de  la  compétence  demeurent  en  deçà  des 
nécessités  de  réalisation,  qui  sont,  elles,  inséparables 
des  connaissances  techniques.  Plus  particulièrement, 
la  confusion  des  pouvoirs  politique  et  administratif 
est  d'autant  plus  dangereuse  qu'elle  se  produit  dans 
un  cadre  étroit  tel  que  celui  de  l'administration 
communale.  Gomment  cette  dernière  ne  serait-elle 
pas  fort  gênée,  à  tout  moment,  pour  prendre  position 
de  son  propre  chef  dans  le  jeu  de  compétitions  aux- 
quelles elle  ne  peut  être  étrangère,  de  par  les  rela- 
tions personnelles  qui  existent  entre  notables  d'une 
même  ville'?  Si  ces  vérités  ne  sont  pas  toujours 
comprises  à  l'origine,  la  rude  logique  des  faits  con- 
duit, un  jour,  à  les  reconnaître. 

Le  principe  de  la  nomination  du  directeur  et  des 
professeurs  par  une  autorité  extra-municipale  une 
fois  admis,  il  convient  d'observer  que  le  choix  du 
ministre  ou  du  préfet  s'exerce  sur  une  liste  de  pré- 
sentation des  candidats  établie  par  le  maire.  Qui 
plus  est,  l'Etat  accepte  l'insertion,  dans  le  règlement 
des  écoles,  d'une  clause  réservant  aux  maires  la 
faculté  d'instituer  des  concours  pour  l'attribution 
des  emplois  vacants,  auquel  cas  l'intervention  minis- 
térielle ou  préfectorale  se  réduit  à  l'apposition  d'une 
signature  de  légalisation. 

Pour  des  raisons  que  nous  allons  dire,  il  convien- 
drait d'assimiler  la  nomination  des  professeurs  à 
celle  des  directeurs,  c'est-à-dire  de  retirer  celle-là 
au  préfet  pour  la  confier  au  ministre.  L'intervention 
d'une  troisième  autorité,  entre  le  maire  et  le  mi- 
nistTe,  ne  présente  aucun  avantage  et  comporte  des 
inconvénients.  Les  considérations  qui  justifient  l'at- 
tribution de  cerlains  pouvoirs  à  l'autorité  supérieure 
qualifiée  pour  les  exercer  sont  inapplicables,  en  l'es- 
pèce, à  l'égard  d'un  fonctionnaire  n'ayant  aucun 
service  technique  à  sa  disposition  pour  l'éclairer,  et 
de  l'autorité  duquel  les  municipalités  sont  davantage 
incitées  à  se  montrer  jalouses. 

Des  considérations  d'un  autre  ordre,  et  du  plus 
haut  intérêt  pour  l'essor  des  écoles  de  province, 
viennent  encore  s'ajouter  aux  précédentes.  Le  recru- 
tement du  personnel  enseignant  des  écoles  présente 
de  très  grandes  difficultés.  Les  ressources  locales 
sont  toujours  étroitement  limitées,  lorsqu'elles  ne 
font  pas  défaut.  Inversement,  il  y  a,  à  Paris,  plé- 
thore d'artistes  éminenls.  Il  semble  que  s'il  appar- 
tenait au  ministre  de  nommer  les  professeurs  et  de 
faire  connaître  aux  élèves  et  aux  anciens  élèves  du 
Conservatoire  les  situations  offertes  dans  les  écoles 


de  province,  un  grand  service  serait  rendu  à  celles- 
ci  et  à  ceux-là.  Un  plus  juste  équilibre  s'établirait 
dans  l'utilisation  des  valeurs  individuelles,  ici  trop 
peu  nombreuses,  incomplètes  ou  routinières,  et  là, 
réduites,  pour  vivre,  à  l'acceptation  d'emplois  infé- 
rieurs et  indignes  d'elles-mêmes. 

Quoi  qu'il  en  soit,  considérons  le  fonctionnement 
des  écoles  après  leur  nationalisation.  Une  disposi- 
tion administrative  de  la  convention  stipule  qu'elles 
seront  annuellement  inspectées  par  les  délégués  du 
ministre.  Cette  inspection  serait-elle  la  seule  consé- 
quence du  rattachement  qu'elle  suffirait  à  assurer 
la  prée.xcellence  de  ce  régime.  L'inspection  affecte 
intimement  la  vie  des  écoles.  Elle  les  soustrait  à  l'iso- 
lement, à  la  stagnation  et  à  l'affaissement  sur  soi- 
même  ;  à  son  occasion,  directeur  et  professeurs  enten- 
dent une  voix  autorisée,  sont  soumis  à  un  jugement 
et  confrontés  en  leur  œuvre  avec  leurs  collègues  des 
autres  écoles.  Professeurs  et  élèves  ont  le  louable 
désir  de  se  faire  mutuellement  honneur,  d'obtenir 
un  encouragement  d'une  personnalité  éminente,  de 
se  voir  proposés  pour  une  distinction. 

Au  cours  de  leur  visite, les  inspecteurs  mentionnent 
dans  leur  rapport  les  noms  des  élèves  susceptibles 
d'être  présentés  au  Conservatoire  de  Paris,  et  aux- 
quels le  ministre  accorde  ordinairement  une  bourse 
de  voyage.  En  outre,  le  règlement  du  concours 
d'admission  au  Conservatoire  leur  donne  un  droit 
de  priorité,  à  valeur  égale,  sur  les  concurrents  ne 
provenant  pas  d'une  école  nationale. 

L'inspection  fournil  encore  aux  directeurs  l'occa- 
sion de  solliciter  les  avis  et  les  conseils  d'hommes 
qui,  par  leur  situation,  connaissent  ce  qui  se  fait 
d'heureux,  ici  ou  là.  Ainsi  peut  se  trouver  suscitée 
une  sorte  d'émulation  lointaine  et  indirecte  entre  des 
écoles  similaires,  mais  qui  s'ignorent. 

L'inspection  a  des  conséquences  médiates  non 
moins  profondes.  Par  leurs  conversations  avec  les- 
représentants  des  municipalités,  par  les  rapports 
consécutifs  à  leur  visite,  les  inspecteurs  ne  sonl  pas 
seulement  d'indispensables  informateurs  techniques, 
ils  sont  aussi  d'utiles  conseillers,  dont  la  parole 
autorisée  se  fait  heureusement  entendre.  Il  leur  est 
loisible  de  suggérer  et  d'éveiller  des  idées,  de  pro- 
duire des  exemples,  de  documenter,  au  besoin  de 
couvrir  de  leur  autorité  technique  un  acte  admi- 
nistratif en  suspens,  sinon  de  le  provoquer.  Ils  aident 
les  villes  à  doter  leurs  écoles  des  instruments  et  des 
ouvrages  nécessaires,  en  proposant  au  ministre  de 
faire  tel  ou  tel  don  en  nature.  La  direction  des  beaux- 
arts,  sur  l'avis  des  inspecteurs,  répartit  chaque  année 
un  crédit  spécial  entre  les  écoles  qui  méritent  parti- 
culièrement d'être  encouragées.  Ces  dispositions 
suscitent  une  heureuse  émulation,  qui  favorise  dans 
leurs  desseins  les  municipalités  soucieuses  déjà  bonne 
gestion  de  leurs  écoles. 

Sans  doute  la  valeur  intrinsèque  de  l'inspection 
tire-t-elle  un  accroissement  du  fait  que  le  corps  des 
inspecteurs  est  un  corps  d'élite,  composé  d'artistes 
aimant  profondément  la  musique,  désireux  de  la 
voir  propager,  de  la  défendre  contre  l'envahissement 
des  médiocrités  ou  des  imcompétences  et  qui,  con- 
naissant la  valeur  des  services  rendus,  dans  toute  la 
France,  par  tant  d'obscurs  professeurs  de  talent, 
apportent  une  indulgence  bienfaisante  dans  l'accom- 
plissement de  leur  délicate  mission. 

(Juelles  critiques  peut-on  adresser  à  cette  insti- 
tution? On  doit,  ici,  se  placer  à  deux  points  de 
vue,  selon  que  l'on  considère  une  autorité  dans  les 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE   PROVINCE 


effets  dus  autant  à  son  action  qu  à  son  inaction. 
Laissant  de  côté  ce  qui,  étant  exceptionnel,  de- 
meure un  fait  individuel,  nous  annulerons,  dans 
l'un  et  l'autre  sens,  l'élément  «  risque  humain  ». 
Ordinairement  l'inspection  évite  ou  résout  nombre 
de  conflits.  Il  peut  arriver  qu'elle  en  suscite.  L'his- 
toire des  Ecoles  nationales  de  musique  montre  que 
si  leur  nombre  suit  une  progression  ascendante,  il 
en  est,  toutefois,  qui  ont  rompu  le  contrat  les  liant 
à  l'Etat.  Dans  ce  petit  nombre,  la  majorité  a  rede- 
mandé, après  quelques  années,  le  patronage  du 
pouvoir  central,  constataiion  péremptoire  si  l'on 
considère  que  des  deux  seules  Ecoles  dénationali- 
sées sans  retour  une  seule  subsiste,  l'autre  ayant  été 
définitivement  fermée. 

11  est  dans  la  logique  des  choses  que,  dans  un  con- 
flit ayant  pour  origine  le  refus  par  une  municipalité 
de  prendre  une  mesure  demandée  par  l'inspection, 
ou,  fait  plus  fréquent,  le  refus  par  l'autorité  supé- 
rieure d'approuver  une  proposition  municipale  jugée 
contraire  à  l'intérêt  de  l'école,  les  torts  ne  soient  pas 
■du  côté  de  l'autorité  et  de  la  compétence  techniques. 
Il  n'y  a  là,  en  dernière  analyse,  qu'un  de  ces  risques 
inévitables  qui  résultent  du  heurt  de  deux  pouvoirs 
superposés.  En  pareil  cas  l'erreur  du  pouvoir  poli- 
tique est  davantage  à  craindre  que  celle  de  l'auto- 
rité administrative  et  technique.  Mais  ces  conflits 
sont  rares,  et  on  peut  dire  qu'ils  n'affectent  pas  le 
régime  en  cause. 

Si  l'on  prend  eu  considération,  non  plus  les  consé- 
quences administratives  de  l'inspection,  mais  celles 
exclusivement  techniques  et  artistiques,  on  peut 
regretter  la  trop  grande  réserve  du  service  à  l'égard 
de  maints  objets  non  dangereux.  C'est  ainsi  que 
beaucoup  d'écoles  ont  un  règlement  suranné,  in- 
complet, mal  établi,  qu'il  serait  aisé  d'amender.  En 
réalité,  le  service  d'inspection  compte  un  trop  petit 
nombre  d'inspecteurs,  ce  qui  ne  lui  permet  pas  de 
faire  face  à  tous  les  besoins.  Ses  investigations  de- 
meurent, dans  la  pratique,  trop  limitées.  11  convien- 
drait, notamment,  qu'il  pût  s'assurer  de  la  valeur 
des  programmes  des  classes,  des  matières  des  exa- 
mens et  des  concours,  de  la  graduation  de  l'ensei- 
gnement, en  un  mot  de  toutes  les  dispositions  et 
manifestations  qui  donnent  rang  à  une  école.  En 
ces  matières  règne,  trop  souvent,  en  guise  d'ordon- 
nancement, un  empirisme  aveugle  et  facile. 

Les  budgets  des  écoles  nationales  sont  soumis  à 
l'approbation  ministérielle.  L'insignifiante  partici- 
pation de  l'Etat  rend  son  ingérence,  en  cette  matière, 
à  peu  près  impossible.  Les  pouvoirs  municipaux  de- 
meurent justement  souverains.  11  en  résulte  un  état 
très  divers  des  situations  du  personnel.  Cet  état  de 
choses  met  obstacle  à  l'avancement  des  fonction- 
naires par  voie  de  mutation.  Les  directeurs,  bien 
que  nommés  par  le  ministre,  ne  peuvent  être  envoyés 
d'une  ville  dans  une  autre,  non  moins  que  les  pro- 
fesseurs, nommés  par  le  préfet,  sinon  eu  perdant  le 
bénéfice  de  leur  ancienneté  et  des  règlements  locaux, 
et  en  risquant,  par  une  démission  nécessairement 
préalable,  de  perdre  leur  emploi  sans  garantie  de 
compensation. 

La  situation  du  personnel  est  locale  :  les  traite- 
ments sont  sans  péréquation,  les  avantages  divers; 
telle  ville  n'admet  que  le  personnel  administratif 
à  verser  à  la  caisse  municipale  des  retraites,  telle 
autre  assimile  les  professeurs  aux  fonctionnaires 
municipaux,  et  telles  autres  encore,  les  plus  nom- 
breuses, excluent  les  uns  et  les  autres  de  toute  par- 


ticipation. Ce  n'est  pas  sans  un  profond  regret  qu'il 
nous  faut  constater  de  telles  dissemblances,  qui  por- 
tent préjudice  à  de  nombreux  artistes,  fonctionnaires 
peu  rélribués,  au  grand  dam  des  intérêts  généraux 
des  écoles. 

Une  solution  d'ensemble  exigerait  la  prise  à 
charge,  par  l'Etat,  des  écoles  nationales.  On  ne 
saurait  l'envisager.  Par  contre,  certaines  mesures 
palliatives  pourraient,  semble-t-il,  rentrer  dans  le 
cadre  de  la  nationalisation.  Au  nombre  de  celles-ci 
il  y  aurait  lieu  de  faire  figurer  la  fixation  d'un  trai- 
tement de  base  pour  les  directeurs  et  pour  les  pro- 
fesseurs proportionnel  à  l'importance  de  l'école,  et 
le  droit  à  verser  aux  caisses  nationales  de  retraites. 
Ces  dispositions  permettraient  d'effectuer  des  dépla- 
cements de  personnel  en  manière  d'avancement  et 
contraindraient  les  villes  insoucieuses  à  mieux  ré- 
munérer les  fonctionnaires  dont  les  services  sont 
précieux.  Afin  de  les  conserver,  les  villes  pourraient 
adjoindre  une  indemnité  locale  de  résidence  au 
traitement  de  base. 

La  seule  hiérarchie  qui  existe  présentement  entre 
les  écoles  est  purement  nominale.  Elle  réside  dans 
l'attribution  du  titre  de  succursale  du  Conservatoire 
national  de  Paris. 

Lorsqu'une  école  présente  un  ensemble  homogène 
de  cours,  lorsque  le  niveau  des  études  y  est  suffi- 
samment élevé,  le  ministre  de  l'instruction  publique 
et  des  beaux-arts,  s'appuyant  sur  les  propositions 
des  inspecteurs,  soumet  à  la  signature  du  président 
de  la  République  un  décret  érigeant  l'école  natio- 
nale en  succursale  du  Conservatoire.  C'est  pour  cette 
raison  que  l'usage  s'est  établi  de  réserver  la  déno- 
mination de  Conservatoire  aux  écoles  succursales. 

Ce  rattachement  à  l'école  mère  est  malheureuse- 
ment purement  verbal.  Il  y  aurait  intérêt  à  ce  que 
les  rapports  et  les  échanges  fussent  multipliés  entre 
nos  grands  établissements  des  déparlements  et  le 
Conservatoire  de  Paris  ;  à  ce  que  les  directeurs  et  les 
professeurs  fussent  invités  et  astreints  à  venir  pren- 
dre des  instructions;  à  ce  qu'ils  eussent  accès  auprès 
des  Maîtres  qui  y  professent.il  y  aurait  encore 
avantage  à  ce  que  les  inspecteurs  des  beaux-arts 
réunissent  sous  leur  présidence  les  directeurs  des 
écoles  de  province,  à  ce  que  des  sous-comités  soient 
constitués  pour  l'étude  des  questions  administra- 
tives et  pédagogiques,  afin  que  plus  de  discipline 
et  d'ordre  régnent  dans  nos  instituts  officiels  d'ensei- 
gnement musical.  La  réalisation  d'un  tel  vœu  est 
aisément  opérable.  N'existe-l-il  pas  des  congrès  an- 
nuels pour  l'enseignement  du  dessin  ?  Les  frais 
occasionnés  par  les  déplacements  de  personnel 
seraient  volontiers  assumés  par  les  villes  qui,  accou- 
tumées à  déléguer  leurs  agents  techniques  à  de  telles 
réunions,  savent  l'intérêt  qu'elles  ont  à  consentir 
une  faible  dépense  pour  un  tel  objet. 

A  titre  d'indication  sommaire,  nous  nous  conten- 
terons de  compléter  celte  étude  du  régime  adminis- 
tratif des  écoles  nationales  par  l'énoncé  des  titres 
de  chapitres  du  règlement  organique  d'une  école 
succursale  : 

Chapitrb         I.  But  de  l'Ecole. 

—  II.   Organisation. 

—  III.  Conseil  d  administration. 

—  IV.  Direction. 

—  V.  Secrétariat  et  personnel. 

—  VI.  Corps  enseignant. 

—  VII.    Répétiteurs  et  orcnmptignateurs. 

—  VIII.  Dispositions  relntires  a  l'ensenjn:menl. 

—  IX.  Élèves  et  auditeurs. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQIE  ET  DICTIONS' AIRE  DU  CONSERVATOIRE 


x.  I.  wmens  el  concours. 

—  XI.  Bibliothèque  el  matériel. 

—  XII.  Dispositions  diverses. 

V.ÎI1SÎ  -'■  présentent,  dans  leur  examen  critique,  les 
divers  régimes  administratifs  des  écoles  de  musique. 
Il  nous  reste  à  considérer  objectivement  l'enseigne- 
ment qui  y  est  donné. 


DE   L'ENSEIGNEMENT 

L'origine  el  la  constitution  autonomes  des  écoles 
les  rendent  fort  diverses.  On  ne  peut,  en  aucune  ma- 
nière, les  considérer,  dans  leur  ensemble,  à  la  façon 
de  nos  lycées  ou  de  nos  collèges  qui  sont  régis  avec 
une  unité  de  vues  et  d'objet  absolue.  L'enseignement 
musical,  dans  nos  établissements,  présente  au  con- 
traire la  double  particularité  de  n'obéir  à  aucune 
directive  précise,  et  de  n'avoir  aucun  objectif  déter- 
mine [iar  des  sanctions  uniformes,  comparables  à 
ce  que  sont  les  certificats,  brevets,  baccalauréats  et 
autres  examens  des  divers  cycles  d'enseignement. 
S'ensuit-îl  que  nous  nous  trouvions  en  présence 
d'un  état  inorganisé  des  choses,  d'un  régime  où  cha- 
cun l'ait  ce  qu'il  peut,  ou  ce  qu'il  veut?  Il  est  fort 
regrettable  que  l'enseignement,  dans  nos  écoles  spé- 
ciales, se  révèle  sous  de  telles  apparences.  Cepen- 
dant, si  l'on  confronte  les  écoles  entre  elles,  on  ne 
tarde  pas  à  se  rendre  compte  que,  réserve  faite  des 
catégories  de  classement  auxquelles  elle  donnent 
lieu,  l'enseignement  n'y  est  pas  aussi  hétérogène 
qu'on  serait  tenté  de  le  croire.  En  réalité  il  se  plie 
et  se  soumet  à  des  contingences  de  lieu,  de 
milieu  et  de  circonstances  qui  correspondent  à  des 
réalités  sensibles. 

11  est  dilicile,  pour  cette  raison,  de  présenter  une 
vue  synthétique  des  résultats  de  cet  enseignement. 
Il  n'existe  aucune  classification  des  écoles,  et  il  n'en 
peut  guère  exister.  Telle  école  possédera  une  ou  deux 
classes  de  premier  ordre,  mais  isolées,  mal  en- 
cadrées et  insuffisantes  pour  donner  à  l'ensemble 
de  l'établissement  une  qualité  bien  définie.  Inverse- 
ment, une  autre  école  pourra  ne  présenter  aucune 
qualité  exceptionnelle,  mais  avoir  une  valeur  d'en- 
semble supérieure  et  plus  aisément  appréciable,  en 
raison  de  la  cohésion  et  de  l'homogénéité  de  ses 
classes.  Si  l'on  excepte  les  premiers  de  nos  conser- 
vatoires des  départements,  l'enseignement  manque, 
dans  nombre  d'écoles,  de  stabilité;  les  maîtres  qui 
y  exercent  et  s'y  succèdent  sont  très  divers.  Une  hon- 
nête moyenne  demeure  le  lot  et  le  partage  de  ces 
écoles,  et  cette  appréciation,  loin  de  prendre  dans 
notre  pensée  une  acception  péjorative,  laisse  entières 
des  valeurs  qu'il  serait  profondément  injuste  de 
mésestimer.  Certaines  offrent  même,  dans  leur  ensei- 
gnement, des  exemples  assez  remarquables  pour 
qu'on  puisse  les  donner  en  modèles. 

U  est  incontestable  que  les  règlements  et  les 
statuts  élaborés  lors  de  l'institution  des  premières 
succursales  du  Conservatoire,  et  dont  nous  avons  en 
partie  donné  connaissance,  s'inspiraient  de  vues 
pédagogiques  étroitement  coordonnées  et  précises. 
Celte  réglementation,  doul  nous  n'avons  pu  retrouver 
la  date  exacte,  remonte  certainement  à  ia  seconde 
moitié  du  règne  de  Louis-Philippe,  puisqu'il  y  est 
parle:  du  Conservatoire  royal.  Elle  imposait  aux 
succursales  des  provinces  un  Règlement  organique 
et  de  police  intérieure  auquel  étaient  jointes  des 
nslructions  pour  l'enseignement.  Un  arrêté  du  mi- 


nistre d'Etat  du  26  avril  1857  n'y  apporta  que  de 
légères  modifications.  Ces  dispositions,  assez  i Cou- 
reuses, se  heurtèrent-elles  à  des  impossibilités  de 
réalisation  ou  tombèrent-elles  progressivement  en 
désuétude?  Il  est  malaisé  de  le  dire  aujourd'hui. 
Nous  inclinons  à  penser  qu'elles  ne  furent  jamais 
appliquées.  Ce  qui  demeure  certain,  présentement, 
c'est  qu'il  n'existe  pas  de  programme  général  d'en- 
seignement dans  nos  écoles  nationales,  municipales 
ou  privées.  Individuellement,  certains  directeurs  ou 
professeurs  élaborent,  il  est  vrai,  des  plans  d'études; 
mais  aucun  règlement  d'école  n'en  porte  trace. 
Quelques-uns  se  bornent  à  fixer  les  matières  des 
examens  et  des  concours,  sans  jamais  entrer  dans 
des  considérations  proprement  pédagogiques. 

Les  instructions  sur  l'enseignement  de  l'arrêté  pré- 
cité du  ministre  de  l'intérieur  stipulent,  à  l'article  IV 
du  chapitre  11,  que  l'enseignement  est  ordonné  par 
le  directeur  et  le  comité,  qui  se  conformeront  tou- 
tefois 'à  celui  qui  est  adopté  par  le  Conservatoire 
royal  de  Paris.  Cette  disposition,  qui  assimile  les 
succursales  au  Conservatoire  dans  la  hiérarchie  de 
l'enseignement  et  qui,  dans  la  réalité,  ne  correspond 
pas  à  leurs  états  divers,  est  du  moins  rendue  plausible 
par  un  ensemble  de  mesures  accessoires.  L'article  11 
du  litre  I  énonce  que  les  directeurs  doivent  commu- 
niquer directement  avec  le  directeur  du  Conser- 
vatoire de  Paris;  l'article  II  du  chapitre  111  crée  des 
correspondants  honoraires  dans  les  départements  où 
sont  situées  les  écoles;  enfin,  les  instructions  péda- 
gogiques tempèrent  grandement  la  rigueur  de  celte 
assimilation. 

Aujourd'hui,  les  dispositions  pédagogiques  incluses 
dans  la  plupart  des  règlements  des  Ecoles  se  ra- 
mènent exclusivement  à  l'insertion  d'un  article 
ainsi  conçu  :  »  Le  plan  des  études  el  les  programmes 
de  l'enseignement  sont  semblables  à  ceux  du  Con- 
servatoire national  de  Paris. 

Il  conviendrait  de  dire  beaucoup  de  choses  de  ces 
derniers,  mais,  notamment,  que  ce  ne  sont  nulle- 
ment des  instructions  pédagogiques  :  ce  sont  des 
statuts  organiques.  Décréter  que  renseignement  de 
nos  Ecoles  est  établi  sur  le  modèle  de  celui  du  Con- 
servatoire de  Paris,  c'est  éluder  un  difficile  problème 
d'une  manière  aussi  simple,  et  expéditive,  que  bril- 
lante. Le  Conservatoire  de  Paris  reçoit,  du  monde 
entier,  des  sujets  soigneusement  sélectionnés  et 
préparés;  les  écoles  des  provinces  doivent  former 
complètement  une  population  scolaire  restreinte 
et  nécessairement  composée  d'éléments  disparates. 
Leur  tâche  est  autre  que  celle  du  Conservatoire. 

La  confusion  que  l'on  établit  ainsi  est  d'autant  plus 
grande  que  toutes  les  écoles  des  départements  sont 
privées  des  liens  qui  devaient,  à  l'origine,  les  rat- 
tacher au  Conservatoire  et  des  directives  pédago- 
giques jadis  annexées  à  leur  règlement.  C'est  donc 
sur  le  fait  qu'il  convient  de  les  considérer,  en  toute 
justice,  el  pour  leur  plus  grand  avantage,  par  sur- 
croit. 

Organisation  de  l'enseignement. 

L'enseignement  donné  dans  les  écoles  de  musique 
est,  en  France,  gratuit.  Cette  gratuité  caractérise 
très  nettement  le  but  assigné  aux  écoles  par  leurs 
fondateurs.  L'enseignement  y  est  donc,  d'abord, 
éducatif,  c'est-à-dire  primaire;  mais,  par  la  force 
des  choses,  un  enseignement  secondaire  s'est  en 
quelque  sorle  gretïé  sur  cet  enseignement  prnnane. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3599 


Les  écoles  ont  ainsi  pris,  peu  à  peu,  dans  tous  les 
centres  importants,  le  double  caractère  d'établisse- 
ments primaires  et  secondaires. 

Leurs  faibles  ressources  pécuniaires,  la  multipli- 
cité des  offices  qui  leui  incombent,  le  fait  aussi  que 
renseignement  secondaire  musical  ouvre  aux  élèves 
les  portes  de  la  profession  artistique  ont  diversement 
concouru  à  favoriser-  l'établissement  d'une  rétribu- 
tion scolaire.  Celle-ci  est  loin  d'être  générale;  une 
grande  moitié  des  écoles  s'en  passe.  Là  même  où 
elle  est  institué'.',  la  rétribution  scolaire  comporte 
de  nombreux  tempéraments.  Elle  ne  s'applique  or- 
dinairement qu'aux  cours  de  piano,  de  violon,  de 
violoncelle  et  de  chant.  Elle  n'est  jamais  appliquée 
aux  classes  d'instruments  à  vent,  et  très  raremen 
aux  cours  de  solfège.  Le  taux  de  la  rétribution  es 
d'ailleurs  peu  élevé;  il  varie  entre  10  et  50  francs  par 
trimestre.  Des  exonérations  sont  facilement  accor- 
dées aux  familles  qui  en  font  la  demande,  lorsque 
leur  situation  la  justifie.  Pour  ces  différentes  raisons, 
la  rétribution  scolaire  ne  constitue  qu'une  somme 
très  modique  de  ressources  pour  les  écoles.  Elle 
n'excède  ordinairement  pas  un  vingtième  du  budget 
total  et  demeure  le  plus  souvent  fort  en  dessous. 

11  résulte  de  ce  qui  vient  d'être  dit  que  la  clientèle 
scolaire  des  écoles  de  musique  des  départements  est 
Extrêmement  variée.  Toutes  les  classes  de  la  société 
y  sont  représentées,  mais  il  importe,  pour  nous,  de 
voir  à  que!  classement  cet  ensemble  donne  lieu  du 
point  de  vue  pédagogique. 

Il  y  a  lieu  de  discerner  (rois  catégories  d'élèves  : 

n)  élèves  fréquentant  les  établissements  d'instruc- 
tion primaire,  secondaire,  supérieure  ou  technique 
(écoles,  collèges,  lycées,  facultés,  etc.);  6  élèves 
exerçant  une  profession  étrangère  à  la  musique 
(ouvriers,  employé-,  etc.;]  e)  élèves  professionnels 
(c'est-à-dire  se  préparant  à  l'exercice  des  carrières 
artistiques  :  professorat,  théâtre,  etc. i. 

Les  deux  première.-  catégories  représentent,  dans 
l'effectif  total,  une  proportion  très  variable,  mais  qui, 
dans  le  cas  le  plus  favorable,  atteint  pour  le  moins 
les  trois  quarts  de  la  population  scolaire.  Il  en  ré- 
sulte que,  dans  la  majorité  des  écoles,  les  cours  ont 
lieu  entre  16  et  22  heures. 

C'est  à  la  sortie  des  classes,  des  ateliers  et  bureaux 
que  les  élèves  des  divers  enseignements,  les  jeunes 
gens  et  les  jeunes  tilles  adultes,  viennent  dans  les 
écoles  de  musique.  Dans  les  grands  centres,  des 
classes  ont  lieu  aux  autres  heures  de  la  journée, 
mais  elles  ne  sont  accessibles  qu'aux  élèves  libres 
d'occupations  étrangères,  c'est  à-dire  aux  profes- 
sionnels et  aux  amateurs  fortunés.  Ce  n'est  cepen- 
dant que  dans  ces  classes  que  le  niveau  des  études 
peut  atteindre  un  degré  supérieur,  en  raison  de  leur 
composition,  de  la  somme  plus  grande  du  travail 
fourni  par  les  élèves  et  du  meilleur  rendement  de 
1'enseignemenl,  qui  se  trouve  donné  aux  heures  où 
la  latine  des  occupations  journalières  n'est  pas  à 
son  point  culminant.  Ajoutons  encore  que,  dans  ces 
cours,  l'apport  individuel  des  élèves  est  beaucoup 
plus  grand  et  sérieux. 

Les  cours  instrumentaux  et  vocaux  ont  lieu  de 
deux  à  trois  fois  par  semaine;  leur  durée  est  ordi- 
nairement de  deux  heures,  et  le  nombre  des  élèves, 
par  classe,  est  limité  à  dix  ou  douze.  Les  mêmes 
dispositions  s'appliquent  aux  classes  d'harmonie, 
de  solfège,  de  déclamation  lyrique  et  de  déclama- 
tion dramatique.  Les  classes  d'ensemble  vocal,  d'en- 
semble instrumental,  d'orchestre  et  les  cours  d'his- 


toire de  la  musique  sont  hebdomadaires.  Les  classes 
de  solfège  n'ont  souvent  qu'une  durée  d'une  heure 
et  demie;  le  nombre  des  élèves  y  est  beaucoup  plus 
élevé  que  dans  les  autres  classes;  il  est  en  moyenne 
de  20  élèves  dans  les  cours  de  solfège  de!  instrumen- 
tistes, mais  il  atteint  et  dépasse  parfois  le  double 
dans  les  classes  des  adultes,  qui  sont  de  grands 
cours  du  soir,  ainsi  que  dans  les  cours  élémentaires 
d'enfants. 

L'enseignemenf  nu  ■:,  est  aujourd'hui,  partout, 
prédominant.  Seuie  :  et  de  sol- 

fège sont  divisées  en  classes  d'hommes  et  de  femmes. 
Dans  les  classes  de  piano  et  «les  instruments  à  archet, 
la  diversité  de  moyi  L  féminins  exerce 

une  heureuse  influence  réciproque.  Mais  c'est  sur- 
tout l'accroissement  très  sensible  du  nombre  des 
élèves  femmes  et  la  diminution  de  celui  des  élèves 
hommes  qui  rend  nécessaire  la  fusion  des  deux 
groupes. 

La  graduation  des  études  est  dilféremment  réglée 
inde  s  el  les  petites  écoles.  Elle  e 
sairement  fonction  du  nombre  des  élevés.  Les  classes 
uniques  comportent  généralement  une  division  élé- 
mentaire et  une  division  supérieure  :  tel  est  le  cas 
des  cours  d'harmonie,  de  chant,  de  violoncelle,  de 
contrebasse,  de  harpe  et  des  instruments  à  vent. 
Par  contre,  dans  les  écoles  importantes,  l'ens  àgni 
ment  du  sollèye,  du  piano  et  du  violon  est  réparti 
entre  des  classes  distinctes,  à  deux  ou  trois  degrés  : 
élémentaire  lou  préparatoire)  et  supérieur,  ou  élé- 
mentaire, moyen  et  sup  i  I  es  'lasses  distinctes 
sont,  suivant  les  besoins  locaux,  tantôt  doublées, 
tantôt  triplées.  Chacun  de  ces  degrés  devrait  corres- 
pondre, en  dehors  de  toute  question  d'âge  ou  d'an- 
cienneté, à  un  objet  précis  :  celui  du  cours  élémen- 
taire étant  de  donner  à  l'élève  les  principes  et  les 
fondements  de  la  technique;  celui  du  cours  moyen 
ayant  pour  objet  le  développement  des  moyens 
mécaniques,  l'éveil  de  la  sensibilité  artistique  et 
l'ébauche  du  style;  celui  du  cours  supérieur  compor- 
tant um.'  révision  générale,  une  mise  au  point  d'en- 
semble, l'éducation  du  goût  et  la  formation  de  la 
personnalité. 

On  doit  reconnaître  que.  le  plus  souvent,  la  clas- 
sification des  cours  n'exprime  qu'un  degré  différent 
des  études. 

La  durée  des  études,  ou  scolarité,  est  fixée  par 
les  règlements  des  écoles.  Elle  varie  d'une  matière 
à  une  autre.  La  fréquentation  moyenne  de  chaque 
degré  de  l'enseignement  est  de  trois  à  quatre  années, 
auxquelles  il  convient  parfois  d'ajouter  un  ou  deux 
ans  pendant  lesquels  un  aspirant  a  été  admis  à  suivre 
le  cours  en  qualité  d'auditeur.  Toutes  les  écoles  ne 
possèdent  pas  un  auditorat,  et,  là  ou  il  existe,  il 
n'est  pas  toujours  compris  ou  organisé  de  la  même 
façon. 

La  caractéristique  de  l'auditorat  est  un  sélection- 
nement  provisoire,  limité  à  la  durée  de  l'année  sco- 
laire, qui  laisse  l'auditeur  hénéticier  de  la  fréquenta- 
lion  des  cours,  sans  lui  permettre  de  participer  au 
concours  de  fin  d'année.  Ce  régime  od're  de  très 
grands  avantages  lorsque  les  auditeurs  sont,  sous 
le  rapport  du  travail,  assimilés  aux  élèves  titulaires, 
c'est-à-dire  lorsqu'ils  jouent  et  reçoivent  person- 
nellement l'enseignement  du  professeur.  L'auditorat 
constitue  alors  une  sorte  de  pépinière  pour  le  recru- 
tement des  élèves;  il  permet  de  prendre  des  can- 
didats à  l'essai,  sans  risquer  d'introduire  définitive- 
ment dans  les  cours  des  élèves  inaptes.  Il  constitue, 


NCYCL0PËD1E  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


en  outre,  un  mode  précieux  d'émulation  lorsque 
les  règlements  autorisent  les  jurys  des  examens 
d'études  à  promouvoir  élève  titulaire  l'auditeur  qui 
a  suffisamment  progressé.  Si  le  rôle  de  l'auditeur  est 
celui  d'un  assistant  muet,  ne  participant  pas  direc- 
tement au  travail  du  cours,  cette  institution  devient 
à  peo  près  sans  utilité.  Les  Conservatoires  de  pro- 
vince ont  partout  le  plus  grand  intérêt  à  étendre  et  à 
améliorer  le  recrutement  de  leurs  élèves. 

Telles  sont  les  conditions  d'organisation  des  cours 
où  sont  professées  les  nombreuses  matières  d'ensei- 
gnement que  nous  allons  passer  en  revue. 

Solfège.  —  Le  solfège  est  enseigné  dans  toutes  les 
écoles.  La  fréquentation  des  cours  est  obligatoire, 
sauf  les  cas  de  dispense  individuelle.  Là  où  le  nombre 
des  élèves  est  suffisamment  élevé,  il  existe  des  cours 
de  solfège  de  jour,  réservés  aux  élèves  instrumen- 
tistes, et  des  cours  du  soir  fréquentés  par  les  adultes 
et  les  chanteurs.  Les  premiers  sont  d'un  niveau 
supérieur  aux  seconds.  L'enseignement  comporte 
trois  degrés  :  élémentaire,  moyen  et  supérieur. 

Le  solfège  a  pour  objet  l'éducation  de  l'oreille1,  la 
pratique  usuelle  du  chant,  la  connaissance  et  l'in- 
terprétation des  signes  de  l'écriture  et  des  principes 
théoriques  fondamentaux  propres  aux  faits  musi- 
caux. 

Les  principaux  exercices  pratiqués  sont:  la  dictée, 
la  solmisation,  la  lecture,  la  transposition  et  l'étude 
de  la  théorie. 

La  dictée  mélodique,  ou  à  une  voix,  est  partout 
donnée;  la  dictée  rythmique  et  la  dictée  harmonique, 
à  deux,  trois  et  quatre  voix,  ne  sont  pas  en  usage 
dans  toutes  les  écoles.  La  pratique  de  la  dictée  à 
deux  voix  est  fréquente;  quelques  conservatoires  ont 
au  programme  du  concours  de  leurs  classes  supé- 
rieures de  solfège  des  dictées  à  trois  et  quatre  voix. 

La  lecture  de  toutes  les  clefs  est  imposée  dans  la 
majorité  des  écoles.  A  défaut,  l'étude  des  clefs  est 
au,  moins  étendue  à  celle  des  clefs  de  sol  l"  ligne,  fa 
4"  ligne,  et  ut  l'°,  :r  et  i'  lignes. 

La  transposition  vocale,  ou  instrumentale,  est 
moindrement  pratiquée;  elle  ne  figure,  comme  ma- 
tière de  concours,  que  dans  un  petit  nombre  d'écoles. 
Beaucoup  de  professeurs,  il  est  vrai,  l'enseignent 
accidentellement  et  obtiennent  même,  parfois,  des 
résultats  tout  à  fait  remarquables. 

L'enseignement  de  la  théorie  est  demeuré  très 
livresque  et  de  forme  catéchistique  ;  il  s'adresse 
davantage  h  la  mémoire  qu'à  la  raison  et  à  l'intelli- 
gence. Ses  errements  peuvent  prêter  à  de  nombreuses 
critiques. 

Harmonie  Contrepoint.  Fugue.  Composition.  — 
Quoique  très  général,  l'enseignement  de  l'harmonie 
n'est  pas  donné  dans  toutes  les  écoles;  celui  du 
contrepoint,  de  la  fugue  et  de  la  composition  est 
exceptionnel. 

Le  très  grand  nombre  des  élèves  de  piano  qui  se 
destinent  au  professorat  et  qui  ne  peuvent  que  diffi- 
cilement se  passer  de  certaines  connaissances  har- 
moniques pratiques, "permet,  presque  toujours,  l'ou- 
verture d'une  classe  d'harmonie.  Mais  ces  classes 
diffèrent  très  sensiblement,  d'un  établissement  à  un 


1,  Il  ne  nous  cil  pas  possible,  à  ce  sujet,  .le  passer  sous  silence 
l'erreur  initiale  et  générale  qui  réside  dans  le  fait  que  l'étude  des 
signes  et  de  l'écriture  n'est  pas  un  moyen  d'éducation  musicale.  Cette 
étude  doit  être  précédée  d'une  éducation  sensorielle  auditive,  sans 
laquelle  la  connaissance  des  signes  de  l'écriture  musicale  demeure 
sans  relation  avec  le  fait  dont  elle  n'est  que  la  représentation  gra- 
phique, c'est-à-dire  le  symbole. 

Ces  données  du  s  -us  co.nmun  ont  été  mises  en  évidence,  d'une  ma- 


autre.  Suivant  les  cas,  l'enseignement  de  l'harmonie 
ne  va  pas  au  delà  de  la  connaissance  des  accords, 
des  principes  de  leur  enchaînement  et  de  la  réalisa- 
lion  de  la  basse  chiffrée,  ou,  au  contraire,  accuse  un 
développement  complet  impliquant,  pour  les  con- 
cours de  lin  d'année,  la  réalisation  d'une  basse  et 
d'un  chant  donnés,  sur  le  modèle  de  ceux  en  usage 
au  Conservatoire  de  Paris. 

On  trouve,  en  certaines  grandes  écoles,  quelques 
élèves  de  contrepoint  et  de  fugue.  L'étude  de  cette 
matière  ne  s'impose  pas  au  même  titre  que  celle  de 
l'harmonie  pour  l'exercice  du  professorat.  Selon  les 
cas,  le  professeur  d'harmonie  conduit  les  meilleurs 
de  ses  élèves  jusqu'à  la  pratique  des  différentes 
espèces  de  contrepoint  simple,  à  deux,  trois  et  qua- 
tre parties,  à  l'exposé  des  principes  du  contrepoint 
renversable,  double,  triple  et  quadruple  et  du  méca- 
nisme de  l'exposition  de  la  fugue;  plus  rarement,  il 
arrive  que  des  élèves  parviennent  jusqu'à  l'écriture 
de  la  fugue  entière.  Nos  écoles  n'ont  guère,  en  ces 
matières,  de  concours  réguliers,  car  celles-ci  ne 
sont,  en  réalité,  accessibles  qu'aux  élèves  composi- 
teurs. 

L'enseignement  de  la  composition  n'existe  pas  à 
proprement  parler  dans  les  écoles  de  province,  par 
défaut  d'élèves.  Quelques  très  grandes  villes  présen- 
tent bien  des  ressources  restreintes,  mais  ces  rares 
élèves  vont  de  bonne  heure  à  Paris  poursuivre  ces 
études  supérieures.  L'évasion  de  ces  éléments,  peu 
nombreux,  supprime,  pratiquement,  les  possibilités 
de  ce  haut  enseignement,  résultant  de  la  présence 
de  musiciens  et  de  compositeurs  éminents  à  la  tête 
de  nos  meilleurs  conservatoires. 

Chant.  —  Toutes  les  écoles,  à  peu  d'exceptions 
près,  ont  des  classes  de  chant;  certaines  ont,  en  outre, 
une  classe  de  vocalises,  préparatoire  à  la  classe  de 
chant  proprement  dite.  Parmi  les  matières  d'ensei- 
ment  musical,  le  chant  est  certainement  celle  qui 
est  la  moins  ordonnée,  celle  dont  la  pédagogie  est  la 
plus  diverse,  La  plus  hésitante  et  la  plus  défectueuse. 
Autant  de  professeurs,  autant  de  méthodes.  Cela 
lient  à  bien  des  causes,  mais  principalement  à  la 
nature  particulière  de  l'instrument  vocal,  instrument 
individuel  et  caché,  qui  ne  se  façonne  qu'à  l'usage, 
outil  ou  machine  dont  il  faut  se  servir  avant  qu'il  ne 
soit  formé  et  qui,  maintes  fois,  est  brisé  ou  détérioré 
en  ses  éléments  avant  que  d'être.  L'enseignement  du 
chant  est  encore  tributaire  de  contingences  extrinsè- 
ques. Il  est  des  régions  où  les  voix  sont  rares,  les  orga- 
nes rudes,  la  prononciation  défectueuse.  Les  résultats 
que  l'on  constate  sont  très  différents.  Les  régions  du 
midi  de  la  France  bénéficient  des  avantages  de  leur 
climat;  la  qualité  des  voix  y  est  meilleure.  Ce  sont  les 
écoles  de  ces  contrées  qui  apportent  le  plus  fort 
contingent  dans  le  recrutement  des  classes  du  Con- 
servatoire de  Paris  et  des  artistes  de  nos  grandes 
scènes.  On  ne  peut  pas  ne  pas  rappeler  tout  ce  que 
l'art  lyrique  doit  d'illustrations  à  une  école  comme 
celle  de  Toulouse. 

Si,  dans  l'ensemble,  l'objet  des  études  est  uni- 
forme, si  les  concours  imposent  partout  aux  concur- 
renls  l'exécution  d'un  ou  de  plusieurs  airs  et,  par- 
fois aussi,  de  vocalises,  rien  n'est  plus  diversifié  que 


nière  définitive,  dans  l'enseignement  de  la  musique,  par  M.  André 
Gèdalge,  professeur  au  Conservatoire  et  Inspecteur  de  l'enseignement 
musical,  dans  son  remarquable  ouvrage  :  L'Enseignement  île  In  mu- 
sique par  l'éducation  méthodique  de  l'oreille.  La  réalisation  pratique 
de  ces  idées,  dans  plusieurs  Conservatoires  des  départements,  a  con- 
sidérablement modifié  et  agrandi  le  domaine  propre  du  solfège. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3601 


les  moyens  employés  par  les  professeurs  de  chant 
dans  leur  enseignement.  Les  résultats  en  cette  ma- 
tière sont  loin  de  valoir  ceux  que  l'on  obtient  pour 
l'enseignement  instrumental.  Il  n'en  était  pas  de 
même  autrefois.  Y  eut-il  ici  progrès  et  là  décadence? 


Peut-être.  Ms 


pas  surtout  une  erreur  de 


destination  dans  l'emploi  de  la  voix  humaine,  erreu 
qui  a  ruiné  les  anciennes  méthodes  de  l'art  vocal? 
L'évolution  des  formes  musicales  est,  depuis  long- 
temps, instrumentale.  N'a-t-on  pas  dépassé  le  point 
limite  où  la  voix  peut  tenir,  dans  le  concert  instru- 
mental, un  rôle  eu  conformité  avec  sa  nature  et  ses 
moyens,  qui  sont  invariables?  La  musique  survivrait- 
elle  à  la  décadence  ou  à  la  perte  de  l'art  vocal,  qu'y 
aurait-on  gagné,  eu  égard  à  un  tel  désastre?  .Mais 
c'est  là  un  problème  d'art,  plus  encore  que  d'ensei- 
gnement. 

Déclamation  lyrique.  —  Les  classes  de  déclama- 
tion lyrique  sont  très  peu  nombreuses.  Quelques 
Conservatoires  seulement  disposent  des  ressources 
nécessaires  pour  donner  cet  enseignement.  Le  recru- 
tement des  professeurs  est  diflicile,  et  une  lourde 
tâche  leur  incombe.  L'éLude  du  répertoire  comprend 
le  grand  opéra,  le  drame  lyrique,  l'opéra-comique 
■et  l'opérette.  Au  nombre  et  à  la  variété  des  sujets  et 
des  voix  s'ajoute  la  prise  en  considération,  pour  le 
recrutement  de  ces  classes  professionnelles,  des  apti- 
titudes  physiques  et  scéniques,  et  aussi  des  préven- 
tions des  familles. 

En  dehors  des  élèves  qu'elles  fournissent  au  Con- 
servatoire de  Paris,  les  classes  d^  déclamation  lyrique 
tonnent  directement  des  artistes  pour  les  théâtres 
de  province.  Les  scènes  municipales  ne  sont  pas  tou- 
jours, dans  la  mesure  où  il  conviendrait,  les  auxi- 
liaires de  cet  enseignement.  Il  est  fréquent  que,  dans 
une  même  ville,  les  différents  services  des  beaux-arts 
souffrent  mutuellement  d'un  manque  de  coordina- 
tion. Les  théâtres  locaux  doivent  être  le  débouché 
naturel  des  classes  de  théâtre;  cela  correspond  à  un 
intérêt  sensible  et  permanent,  ce  qui  n'implique 
pas  qu'il  soit  entrevu,  ou  satisfait,  là  où  il  le  fau- 
drait. 

Diction.  Déclamation  dramatique.  —  Les  .lasses 
de  diction  et  de  déclamation  dramatique  ont  été 
plus  nombreuses  qu'elles  ne  le  sont  actuellement. 
Pénurie  de  maîtres  qualifiés,  insuffisance  de  l'ins- 
truction et  de  la  formation  première  des  élèves,  mé- 
diocrité des  résultats  :  telles  sont  les  causes  de  leur 
dépérissement.  On  y  étudie  le  draine,  la  comédie 
de  mœurs  ou  de  caractère,  parfois  aussi  la  tragédie. 
Il  semble  qu'à  les  considérer  moins  sous  un  aspect 
scolaire  que  sous  celui  de  petits  théâtres  d'avant- 
garde,  elles  pourraient  permettre,  parfois,  des  réali- 
sations locales  intéressantes. 

Les  concours  de  déclamation  dramatique,  ou 
lyrique,  consistent  en  l'interprétation  d'une  scène 
principale  imposée  et  une  réplique  donnée  aux  autres 
concurrents. 

Piano.  —  L'enseignement  du  piano  occupe,  dans 
toutes  les  écoles,  une  place  prépondérante  par  le 
nombre  et  la  qualité  des  classes.  Nulle  part  les  bons 
professeurs  ne  sont  plus  nombreux.  Cela  tient  à  la 
nature  même  de  cet  incomparable  instrument.  Il 
exige,  pour  être  pratiqué  avec  bonheur,  un  ensemble 
de  connaissances  techniques,  harmoniques  et  orches- 
trales, qui  donnent  à  la  formation  pianistique  une 
valeur  de  premier  ordre. 

Les  cours  de  piano  sont  généralement  de  trois 
degrés  :  élémentaire,  moyen  et  supérieur.  Les  pro- 


grammes sont  riches  et  bien  ordonnés.  La  pédagogie 
pianistique  est  la  plus  précise  et  la  plus  complète.  Le 
répertoire  est  immense,  il  comprend  les  œuvres 
des  clavecinistes,  des  maitres  classiques,  romantiques 
et  modernes.  Instrument  complet,  le  piano  est  Un 
orchestre,  et  la  musique  de  piano  n'est  étrangère  à 
aucun  des  aspects  variés  et  des  formes  nombreuses 
de  l'art  musical. 

Les  études  pianistiques  sont  longues  et  absor- 
bantes; le  prix  de  l'instrument  devient  de  plus  en 
plus  prohibitif.  Le  piano  tend  à  devenir  un  instrument 
aristocratique.  Les  élèves  de  piano  sont  encore  très 
nombreux,  mais  la  composition  des  cours  est  presque 
exclusivement  féminine.  Le  professorat  du  piano 
s'adapte  très  heureusement  aux  aptitudes  et  à  la 
condition  sociale  des  femmes  :  il  est,  en  outre,  ré- 
munérateur. 

Les  élèves  pianistes  sont  au  nombre  de  ceux 
dont  l'éducal  -    et  l'instruction   sont  les 

plus  développées.  Ils  se  recrutent  surtout  dans  les 
classes  moyennes,  là  où  la  culture  de  l'intelligence 
est  presque  une  tradition  domestique.  La  majorité  de 
ces  élèves  vient  chercher  dans  les  écoles  de  musique 
un  enseignement  professionnel.  Les  classes  de  piano 
préparent  principalement  au  professorat,  mais  elles 
font  encore  recevoir  d'assez  nombreux  élèves  au 
Conservatoire  de  Paris,  d'où  sortent  plus  spéciale- 
ment les  virtuoses  c  meertistes. 

Le  niveau  des  classes  supérieures  de  plusieurs  de 
nos  Conservatoires  provinciaux  est  fort  élevé.  Les 
épreuves  des  concours  sont,  en  de  certaines  écoles, 
particulièrement  intéressantes.  Concurremment  avec 
un  morceau  d'exécution  obligé,  plusieurs  autres 
œuvres  sont  imposées,  choisies  dans  des  écoles  diffé- 
rentes, et  dont  partie  est  jouée  par  voie  de  tirage  au 
sort.  Des  dispositions  semblables  sont  appliquées 
aux  concours  des  dusses  supérieures  de  violon,  de 
violoncelle  et  de  chant.  Si  elles  ne  sont  pas  encore 
générales,  elles  s'étendent  néanmoins  à  un  nombre 
croissant  d'établissements.  Une  épreuve  de  lecture  à 
vue  est  de  règle  dans  toutes  les  épreuves  instrumen- 
tales et  parfois  même  dans  les  concours  de  chant, 
sous  la  forme  du  déchiffrage  d'une  leçon  de  solfège 
spéciale.  Dans  les  cours  moyens  et  élémentaires,  il 
n'est  donné  qu'un  morceau  de  concours,  et  un  texte 
facile  à  lire  à  vue. 

Orgue.  —  Peu  d'écoles  possèdent  un  grand  orgue. 
L'enseignement  de  l'orgue,  en  province,  est  sans 
correspondance  avec  celui  donné  au  Conservatoire 
de  Paris,  où  l'élève,  bon  harmoniste,  est  instruit  des 
méthodes  d'accompagnement  du  plain-chant  et 
initié  à  l'improvisation  de  la  fugue  et  d'un  morceau 
libre. 

Les  classes  d'orgue  des  départements  n'ont  guère 
d'autre  objet  que  l'exécution  des  œuvres  écrites 
pour  l'instrument.  Fréquentées  surtout  par  des  élèves 
de  piano,  ceux-ci  s'y  familiarisent  avec  l'emploi  du 
pédalier,  de  la  registration  et  de  quelques  autres 
particularités  techniques.  A  notre  connaissance,  ce 
n'est  que  fortuitement  qu'on  y  peut  aborder  des  ma- 
tières plus  étendues. 

Harpe.  —  Les  classes  de  harpe,  plus  nombreuses 
que  celles  d'orgue,  sont  surtout  féminines  et  reçoi- 
vent un  fort  contingent  d'élèves  de  piano.  L'ensei- 
gement  de  la  harpe  à  pédales  domine,  mais  il  exisi- 
quelques  classes  de  harpe  chromatique.  Cet  élégan! 
instrument,  aux  ressources  restreintes,  estasse 
laissé.  Il  fut  jadis  en  grande  vogue;  on  ne  l'entend 
plus  guère,  aujourd'hui,  en  dehors    de  l'orchestre. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Le  coftt  élevé  de  la  harpe  la  rend  de  moins  en  moins 
accessible  aux  amateurs,  et  l'existence  des  classes  des 
écoles  des  départements  est  assez  précaire. 

Violon.  —  L'enseignement  du  violon  est  compa- 
rable à  celui  du  piano;  classes  nombreuses,  sembla- 
blement  graduées,  sûreté  des  méthodes,  étendue  du 
répertoire,  tout  permet  celte  assimilation.  La  pro- 
portion des  élèves  hommes,  beaucoup  plus  élevée 
que  dans  les  classes  de  piano,  accuse  une  régression 
sensible  depuis  une  quinzaine  d'années;  inversement 
les  jeunes  filles  s'adonnent  de  plus  en  plus  à  ce  bel 
instrument. 

L'élude  du  violon  n'est  pas  beaucoup  moins  longue 
que  celle  du  piano.  Si  les  ressources  de  l'instrument 
sont  moins  variées  et  moins  riches  de  matière  mu- 
sicale, son  enseignement  est  plus  subtil,  malaisé, 
et  fort  ingrat  à  ses  débuts.  La  littérature  violonis- 
tique  a  surtout  une  valeur  technique  ;  la  part  faite 
à  la  virtuosité  y  est  prépondérante.  La  musique  de 
violon  est  impropre  à  éduquer  l'élève.  Les  formes 
musicales  monodiques,  incomplètes,  demeurent  en 
marge  de  la  musique;  mais  la  fréquentation  obligée 
des  classes  d'ensemble  instrumental  et  d'orchestre 
contribue  grandement  à  parfaire  la  formation  des 
instrumentistes  à  archet. 

Si  l'on  considère  le  répertoire  du  violon  d'un  point 
de  vue  purement  pédagogique,  sa  valeur  intrinsèque 
est  inestimable.  Un  cycle  d'œuvres  innombrables 
permet  à  l'élève  d'acquérir  toutes  les  connaissances 
utiles  à  ses  divers  emplois. 

La  modicité  de  son  prix  d'achat  fait  du  violon 
l'instrument  démocratique  par  excellence.  Les  apti- 
tudes qu'il  exige  ne  sont  malheureusement  pas  éga- 
lement données  en  partage.  Cependant,  grâce  à  de 
nombreux  et  excellents  professeurs,  de  bons  instru- 
mentistes sortent,  chaque  année,  des  classes  de  nos 
écoles  de  musique.  Le  Conservatoire  de  Paris  en 
accueille,  la  carrière  professorale  en  retient  un 
nombre  important,  d'autres  trouvent  à  s'employer 
dans  les  orchestres  des  théâtres,  des  cinémas  et  des 
établissements  de  tous  genres. 

Alto.  —  11  y  a  à  peine  un  tiers  de  siècle  qu'une 
classe  d'alto  fut  ouverte  au  Conservatoire  de  Paris. 
Faut-il  s'étonner  que  le  nombre  en  soit  peu  élevé 
encore  dans  nos  écoles'?  A  défaut  d'un  cours  spécial 
d'alto,  un  professeur  de  violon  est  ordinairement 
chargé  de  rendre  familiers,  à  quelques  élèves  de 
violon,  les  doigtés  de  l'instrument  et  la  lecture  de  la 
clef  A'ut  :i"  ligne.  Ce  moyen  de  fortune  permet  de 
compléter  les  pupitres  des  classes  d'ensemble  et 
d'orchestre.  Mais  ce  n'est  là  qu'un  expédient. 

L'alto  n'est  pas  seulement  un  violon  grave.  Il  a 
une  physionomie  propre  et  une  qualité  particulière 
d'expression  qui  ne  s'acquièrent  pas  sans  une  étude 
spéciale  et  suivie,  dont  nul  violoniste,  recevant  une 
solide  formation,  ne  devrait  être  dispensé.  L'alto  est 
encore  injustement  considéré;  il  n'a  cessé  de  faire 
figure  de  «  minus  habens  ».  Cependant,  le  temps 
n'est  plus  où  de  médiocres  violonistes  suffisaient 
pour  tenir  une  partie  d'alto.  Les  compositeurs  lui 
font  jouer  un  rôle  à  l'orchestre,  qui,  par  l'impor- 
tance et  la  difficulté,  n'a  rien  à  envier  à  celui  de  son 
illustre  rival  le  violon.  Le  répertoire  de  l'alto  s'est, 
depuis  peu,  considérablement  augmenté.  Des  com- 
positions et  des  études  spéciales,  jointes  à  d'excel- 
lentes transcriptions,  constituent  un  fonds  important 
d'œuvres  variées. 

Les  classes  d'alto  sont  composées  d'élèves  de  vio- 
lon, en  majeure  partie.  Exceptionnellement,  on  y 


rencontre  quelques  élèves  ne  s'adonnant  qu'à  l'alto. 
Le  concours  de  lin  d'année  comporte  toujours  un 
morceau  d'exécution  imposé  et  un  morceau  de  lec- 
ture à  vue;  parfois,  aussi,  un  choix  de  traits  ou  de 
passages  difficiles  d'œuvres  orchestrales  ou  de  mu- 
sique de  chambre. 

Violoncelle.  —  Toutes  les  écoles  ont  une  classe  de 
violoncelle;  classeunique  et  de  niveau  assez  variable, 
en  raison  du  nombre  restreint  des  élèves  et  du 
manque  d'émulation  qui  en  résulte.  L'étude  du  vio- 
loncelle, bien  que  difficile,  est  fréquemment  écour- 
tée,  soit  que  l'instrument  ait  été  commencé  plus  tard 
que  le  violon,  soit  que  les  violoncellistes  puissent  plus 
aisément  se  passer  de  la  haute  virtuosité  propre  aux 
instruments  suraigus.  La  technique  du  mécanisme 
est,  de  ce  fait,  l'objet  d'un  travail  moins  poussé,  dans 
l'ensemble  des  classes  de  violoncelle,  que  dans  les 
classes  de  violon.  D'autre  pari,  les  élèves  amateurs 
sont  ici  plus  nombreux  que  les  professionnels.  Les 
élèves  femmes  étaient  jadis  rares,  mais  il  n'en  est 
plus  de  même. 

Le  répertoire  violoncellislique  est  infiniment  moins 
riche  que  celui  du  violon.  Les  productions  nouvelles 
sont  très  limitées,  seul  le  choix  des  œuvres  ancien- 
nes est  assez  étendu. 

Les  classes  de  violoncelle  sont  souvent  subdivisées 
en  cours  élémentaire  et  cours  supérieur.  Pour  l'un 
comme  pour  l'autre,  les  programmes  des  concours 
sont  identiques  à  ceux  des  classes  similaires  de 
piano  ou  de  violon. 

Contrebasse.  —  Bien  qu'indispensable,  la  contre- 
basse est,  avec  le  basson,  l'instrument  qui  jouit  de 
la  moindre  faveur.  Les  élèves  contrebassistes  sont 
d'un  recrutement  difficile  et  précaire.  Aussi  ne  trouve- 
l-on  de  classes  de  contrebasse  distinctes  que  dans  les 
écoles  d'une  certaine  importance.  Ailleurs,  c'est  au 
professeur  de  violoncelle  qu'échoit  l'obligation  d'en- 
seigner cet  instrument  aux  rares  élèves  qui  se  pré- 
sentent. Le  niveau  de  ces  cours,  ou  simili-cours, 
laisse,  un  peu  partout,  fort  à  désirer.  L'étude  de 
l'instrument  est  limitée  aux  méthodes  spéciales  et  à 
quelques  morceaux  originaux.  Il  conviendrait  sur- 
tout de  travailler  dans  ces  classes  le  répertoire  si 
important  de  la  musique  d'orchestre,  la  seule  où  la 
contrebasse  prenne  dignement  place. 

Les  programmes  des  concours  sont  identiques  à 
ceux  de  l'alto  :  on  y  retrouve  le  morceau  imposé, 
l'épreuve  de  lecture  à  vue  et,  quelquefois,  un  choix 
de  traits  d'orchestre. 

Flûte.  Hautbois.  Clarinette.  Basson.  —  Les  petits 
instruments  à  vent  sont,  au  même  litre  que  le  violon, 
l'alto  ou  le  violoncelle,  des  instruments  concertants, 
de  musique  de  chambre  et  d'orchestre.  Ni  leur  va- 
riété, ni  la  beauté  de  leur  timbre,  ni  l'originalité  de 
leur  structure  ne  leur  ont  conquis  la  laveur  qu'ils  mé- 
ritent auprès  du  public  des  amateurs  de  musique. 
Pendantlongtemps,  leur  construction  imparfaite  et  un 
mécanisme  insutfisant  les  ont  mis  en  état  d'infério- 
rité par  rapport  aux  instruments  à  cordes  ;  employés 
surtout  à  l'orchestre,  comme  adjuvants,  ils  appor- 
taient des  diversions  aux  sonorités  prépondérantes  du 
quatuor  des  archets.  Les  immenses  progrès  réalisés, 
au  xix°  siècle,  dans  la  facture  instrumentale  de  ces 
voix,  ont  transformé  les  données  primitives  de  l'ins- 
trumentation et  de  l'orchestration.  .Nos  instruments 
actuels  ne  le  cèdent  pas,  en  intérêt,  au  groupe  des 
instruments  à  cordes,  soit  par  la  justesse,  soit  par 
l'étendue,  la  richesse  des  combinaisons  de  leurs 
doigtés  et  la  qualité  de  leur  timbre. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3603 


Peu  à  peu  une  littérature  s'est  formée  à  leur  usage. 
Cependant,  elle  n'est  encore  que  ce  que  serait  celle 
du  violon,  ou  du  violoncelle,  si  cette  dernière  n'eût 
pris  date  que  depuis  moins  d'un  siècle.  L'âge  d'or 
du  solo  instrumental  et  de  la  musique  de  chambre 
était  achevé  lorsque  les  instruments  à  vent  acquirent 
leurs  titres  de  noblesse. 

S'ils  n'avaient  trouvé  leur  emploi  dans  celle  nou- 
velle forme  d'orchestre,  encore  méconnue,  et  née 
précisément  des  progrès  de  la  lutherie,  qu'est  l'or- 
chestre d'harmonie,  il  ne  se  trouverait  sans  doute, 
en  France,  que  bien  peu  de  classes  d'instruments  à 
vent.  Il  en  existe,  fort  heureusement,  un  très  grand 
nombre,  et  souvent  remarquables,  notamment  dans 
les  régions  du  Nord,  où  les  sociétés  instrumentales 
populaires  sont  supérieurement  organisées. 

Tandis  que  les  élèves  des  classes  de  piano,  de  vio- 
lon, de  violoncelle  proviennent,  en  majeure  partie, 
des  milieux  constitués  par  les  professions  libérales, 
les  fonctionnaires  et  le  commerce,  c'est  principale- 
ment dans  les  familles  d'employés  de  toutes  caté- 
gories que  les  cours  des  petits  instruments  à  vent 
puisent  la  plupart  de  leurs  éléments.  Ces  jeunes  gens, 
de  quatorze  à  vingt  ans,  leur  journée  de  travail 
achevée,  viennent  dans  les  écoles  de  musique  ac- 
quérir les  notions  qui  feront  d'eux  tantôt  des  ama- 
teurs, tantôt  encore  des  artistes  de  métier. 

De  telles  classes  ont  une  réelle  valeur  sociale. 
Leur  prospérité  est  intimement  liée  à  celle  des  so- 
ciétés instrumentales,  mais,  réciproquement,  ces 
dernières,  sans  le  secours  de  nos  écoles,  seraient 
privées  de  leurs  meilleurs  éléments.  Plus  encore 
que  pour  les  autres  classes,  le  nombre  et  la  qualité 
des  cours  d'instruments  à  vent  dépendent  du  milieu 
ambiant.  Il  en  résulte,  d'une  école  à  une  autre,  des 
différences  plus  sensibles  que  pour  les  classes  préci- 
tées. Selon  l'importance  des  écoles,  ou  les  habi- 
tudes locales  des  populations,  on  trouve  des  orga- 
nisations scolaires  différemment  adaptées  :  ici  cha- 
que instrument  est  représenté  par  une  classe,  là  un 
seul  cours  reçoit  les  différentes  catégories  d'élèves. 
Dans  l'un  et  l'autre  cas,  les  résultats  de  l'enseigne- 
ment ne  peuvent  être  que  dissemblables. 

Quelque  peine  qu'il  y  prenne,  le  professeur  unique 
ne  peut  obtenir,  en  dehors  de  sa  spécialité,  un  ren- 
dement de  même  qualité.  Dans  la  classe  unique,  le 
très  petit  nombre  des  élèves  de  chaque  catégorie 
d'instruments  rend  instable,  non  pas  seulement  le 
niveau  des  concours,  mais  leur  existence  même. 
Travaillant  et  concourant  sans  émulation,  les  élèves 
se  trouvent  placés  dans  des  conditions  très  désavan- 
tageuses. Seule  une  organisation  logique  et  ration- 
nelle peut  donner  un  rendement  effectif. 

L'entretien  d'un  ensemble  complet  de  classes 
d'instruments  à  vent  est,  pour  une  ville,  assez  oné- 
reux; mais,  sans  ces  dernières,  combien  de  profits 
essentiels  sont  perdus  !  L'art  musical  est  un  art  de 
solidarité.  Il  ne  faut  que  deux  bassons,  ou  un  seul 
harpiste,  dans  un  orchestre  de  soixante  exécutants, 
pour  jouer  une  symphonie  de  Beethoven  ou  un  poème 
symphonique  de  Liszt,  mais,  sans  celui-ci  ou  ceux-là, 
ni  l'un  ni  l'autre  ne  sont  exécutables.  Telle  est  l'é- 
troite relativité  des  composantes  de  ce  tout. 

Les  classes  de  flûte,  de  hautbois,  de  clarinette,  cette 
dernière  étant  souvent  la  plus  nombreuse,  comp- 
tent de  huit  à  douze  élèves  chacune,  en  moyenne; 
la  classe  de  basson  manque  ,  parfois,  aux  côtés 
des  précédentes.  Exisle-t-elle,  il  est  rare  d'y  trouver 
plus  de  trois  ou  quatre  élèves;  l'instrument  est  dur 


à  jouer,  diflicile,  il  ne  trouve  d'emploi  obligé  qu'à 
l'orchestre  symphonique,  et  son  prix  d'achat  est  très 
élevé,  environ  3.500  francs.  On  ne  sauvera  cet  ensei- 
gnement qu'en  prêtant  des  instruments  aux  élèves. 
Mais  combien  d'écoles  peuvent  se  permettre  un  tel 
luxe? 

Toutes  ces  classes  sont  généralement  subdivisées 
en  degrés  élémentaire  et  supérieur;  les  concours 
consistent  en  l'exécution  d'un  morceau  imposé  et 
d'une  pièce  de  lecture  à  vue.  La  fréquentation  des 
cours  oscille  entre  quatre  et  six  ans. 

Cor.  Cornet  à  pistons.  Trompette.  Trombone.  —  La 
famille  des  instruments  en  cuivre  prête  aux  mêmes 
considérations  que  la  précédeute.  Notons  seulement 
que,  le  prix  des  instruments  étant  moindre  et  leur 
étude  moins  longue,  ces  classes  sont  davantage  fré- 
quentées par  les  enfants  des  familles  ouvrières, 
jeunes  gens  de  15  à  20  ans.  Les  élèves  de  trompette 
sont  les  moins  nombreux.  Le  trombone  à  coulisse 
est  à  peu  près  seul  en  usage,  ainsi  qu'il  sied.  La 
subdivision  des  classes  et  les  épreuves  de  fin  d'année 
sont  semblables  à  celles  des  petits  instruments  à 
vent.  Nombre  d'écoles,  par  manque  d'éléments  ou 
de  ressources  budgétaires,  doivent  se  contenter 
d'avoir  une  classe  unique. 

Saxhorns. Saxophones.  —  Ces  instruments  ne  ren- 
trent pas  dans  la  composition  usuelle  de  l'orchestre 
symphonique.  Ils  appartiennent,  en  propre,  à  l'or- 
chestre d'harmonie.  Ils  ne  sont  pas  enseignés  au 
Conservatoire  de  Paris.  En  province,  les  classes  de 
saxhorn  et  de  saxophone  ne  sont  pas  rares;  elles 
sont  surtout  groupées  dans  les  départements  du  nord 
de  la  France.  Leur  répertoire  comprend  peu  d'œuvres 
originales,  mais  il  est  assez  riche  en  transcriptions. 
Les  instruments  de  ces  deux  familles  sont  ceux  qui 
exigent  le  plus  court  temps  d'études. 

La  grande  majorité  des  élèves  d'instruments  à 
vent  du  Conservatoire  de  Paris  proviennent  des 
écoles  de  province.  C'est  dans  les  classes  des  dé- 
partements que  d'habiles  maîtres,  exploitant  les 
aptitudes  spéciales  de  nombre  d'enfants  du  peuple, 
les  éduquent  et  leur  permettent  d'accéder  à  des  car- 
rières qui,  autrement,  leur  seraient  fermées.  Ainsi, 
tandis  que  les  écoles  du  Midi  ont  une  prépondé- 
rance marquée  au  point  de  vue  vocal,  les  écoles  du 
Nord  sont  surtout  instrumentales.  Mais,  ici  et  là, 
toutes  opèrent,  dans  les  couches  profondes  de  la 
nation,  une  sélection  des  capacités. 

Ensemble  instrumental.  Ensemble  vocal.  Orches- 
tre. —  Les  classes  d'ensemble  remplissent  dans 
l'enseignement  un  office  essentiel  :  elles  mettent  les 
élèves  en  contact  avec  les  grandes  formes  de  la  mu- 
sique. Chanteurs  ou  instrumentistes  n'ont,  par  eux- 
mêmes,  qu'une  connaissance  limitée  et),  disons  le 
mot,  assez  fausse  de  l'art  des  sons.  Toute  spéciali- 
sation, sans  relation  avec  le  général,  fait  apparaître 
des  images  étrangement  déformées.  Le  cycle  des 
exercices,  des  études  et  des  concertos,  qui  sont  le 
pain  quotidien  indispensable  des  uns  et  des  autres, 
ne  prépare  pas  à  la  juste  notion,  à  la  connaissance 
et  à  la  compréhension  des  monuments  de  l'art.  C'est 
pour  ces  raisons  que  les  classes  d'ensemble  instru- 
mental, où  se  jouent  les  pièces  de  chambre,  d'en- 
semble vocal,  qui  groupent  les  chœurs  d'hommes  et 
de  femmes,  et  d'orchestre,  où  s'exécutent  ouvertures, 
suites  et  symphonies,  sont  le  couronnement  néces- 
saire de  l'édifice  pédagogique. 

Toutes  les  écoles  ne  possèdent  pas  cet  ensemble 
complet  de  classes  qui  exige   des  éléments  nom- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


breux  et  de  qualité.  La  rareté  des  voix  d'hommes 
rend  souvent  difficile  la  constitution  d'un  ensemble 
vocal.  Les  classes  d'orchestre  sont  assez  nombreuses, 
mais  de  valeur  et  d'importance  très  variables;  par 
contre, toutes  les  écolespourraient  avoir  une  classe 
de  musique  de  chambre.  Ces  divers  cours  n'ont  pas 
seulement  une  valeur  éducative  technique,  ils  ont  le 
mérite  de  mettre  en  évidence  le  caractère  collectif 
et  social  de  la  musique,  seul  art  qui  groupe  et  disci- 
pline des  forces  individuellement  sans  action  sen- 
sible et  qui,  parle  moyen  d'une  solidarité  unanime, 
crée  une  ambiance  émotive  à  nulle  autre  comparable. 

Histoire  de  la  musique.  —  Celte  matière  n'est 
enseignée  que  dans  peu  d'écoles;  sou  utilité  n'est  pas 
négligeable,  cependant.  La  principale  difficulté  ré- 
side dans  le  choix  des  professeurs.  Les  maîtres  plus 
lettrés  que  musiciens,  comme  les  musiciens  sans 
lettres,  sont  également  peu  qualifiés.  Les  vues 
étroites  et  fermées  du  snobisme  et  du  dilettantisme 
mondains  constituent  en  outre  de  réels  dangers.  Le 
défaut  se  fait  ici  sentir  d'un  ouvrage  d'histoire  mu- 
sicale conçu  spécialement  et  qui,  mis  entre  les 
mains  d'un  professeur  qualifié  par  sa  formation 
générale,  [lui  apporterait  la  documentation  néces- 
saire pour  tenir  un  tel  emploi.  Ce  disant,  nous  pen- 
sons aux  collaborateurs  précieux  que  nos  écoles 
pourraient  trouver  parmi  les  professeurs  de  lettres 
des  lycées,  et  aussi  aux  exemples  qui  nous  sont  don- 
nés par  l'enseignement  de  l'histoire  de  l'art  dans  les 
écoles  des  beaux-arts  de  province. 

Exercices  publics.  Concerts.  —  Les  écoles  pro- 
duisent leurs  élèves  dans  des  exercices  publics,  des 
concerts  de  chambre  ou  d'orchestre.  Quelques-unes 
donnent  des  auditions  d'une  haute  tenue,  qui  méri- 
teraient de  jouir  d'une  plus  grande  faveur  auprès  du 
public.  Ce  dernier  a  d'injustes  préventions  à  l'égard 
des  groupements  d'élèves.  Entre  toutes,  la  critique 
parisienne  frappe  d'ostracisme,|à  toute  occasion,  les 
élèves  du  Conservatoire,  et  souvent  fort  à  tort.  Le 
provincial ,  moins  bien  servi ,  craint  en  outre  de 
passer  pour  un  béotien,  et  chacun  sait  que  nul  n'es 
prophète  en  son  pays.  La  solidarité  du  public  e 
des  exécutants  est  la  première  condition  du  pro 
grès  des  groupement  artistiques. 

Bibliothèques.  —  Quelques  vieilles  écoles  ont  de; 
bibliothèques  d'une  richesse  exceptionnelle,  mais 
ordinairement,  les  bibliothèques  ne  sont  composées 
que  des  ouvrages  et  des  partitions  nécessaires  à  l'e 
seignement.  Elles  ne  sont  pas  toujours  ouvertes  au 
public.  Elles  servent  principalement  aux  professeurs 
et  aux  élèves;  encore  convient-il  d'ajouter  que  grande 
est  la  misère  de  beaucoup  d'entre  elles. 

Examens.  Concours.  —  Les  examens  et  concours 
se  répartissent  en  diverses  catégories;  ce  sont  : 
1°  les  examens  d'entrée,  ou  d'admission  provisoire, 
qui  ont  lieu  au  mois  d'octobre;  2°  les  examens  d'é- 
tudes, où  se  confirme  l'admission  provisoire,  qui  ont 
lieu  au  début  du  second  trimestre  de  l'année  sco- 
laire; 3°  les  examens  d'admission  aux  concours  de 
lin  d'année,  qui  ont  lieu  au  mois  de  mai:  4°  les  con- 
cours, qui  ont  pour  objet  l'attribution  des  récom- 
penses et  qui  clôturent  l'année  scolaire. 

Telle  est  l'organisation  du  contrôle  et  des  sanctions 
de  l'enseignement  dans  les  grandes  écoles.  A  leur 
suite,  toute  une  graduation  s'établit,  depuis  celles 
qui  n'ont  d'examens  d'entrée  que  pour  certaines  ma- 
tières, jusqu'à  celles  qui  n'en  ont  pour  aucune,  et 
dont  le  concours  de  lin  d'année  est  le  seul  mode 
de  sélection  et  de  classement» 


Quelle  valeur  représentent,  dans  la  pratique,  ces 
diverses  épreuves?  Les  examens  d'admission  n'exis- 
lent  que  pour  les  classes  instrumentales  et  vocales. 
L'accès  des  cours  élémentaires  de  solfège  ne  peut, 
bien  entendu,  être  subordonné  à  un  examen;  quant 
aux  autres  cours  de  solfège  et  aux  classes  d'ensem- 
ble, les  élèves  des  classes  instrumentales  y  sont 
affectés  d'office. 

L'examen  d'admission  est  de  niveau  variable  selon 
les  matières  d'enseignement,  dans  une  même  école. 
11  n'est  presque  qu'une  simple  formalité,  permettant 
de  s'assurer  que  le  candidat  sait  lire  la  musique, 
pour  les  aspirants  des  classes  de  contrebasse,  de 
basson,  de  cor,  de  trompette  et  de  trombone.  Par 
contre,  un  certain  choix  peut  s'exercer  à  l'égard  des 
llùlistes,  hautboïstes,  clarinettistes  et  des  chanteurs. 

Le  niveau  des  examens  d'entrée  de  piano,  de  violon 
et  de  violoncelle  est,  au  contraire,  nettement  défini, 
pour  chaque  école,  mais  il  demeure  impossible 
de  lui  assigner  une  valeur  absolue.  Selon  l'impor- 
tance des  villes  et  le  nombre  des  candidats,  les  écoles 
font  débuter  les  élèves  dans  toutes  les  parties  de 
l'enseignement,  ou  seulement  dans  quelques-unes, 
ou  encore  ne  les  admettent  qu'autant  qu'ils  ont  at- 
teint un  certain  degré  de  formation.  Le  plus  souvent, 
les  candidats  présentent  au  jury  d'examen  deux 
morceaux  d'exécution  de  leur  choix,  et  subissent 
une  épreuve  de  lecture  à  vue  ou  de  solfège. 

Nulle  part,  pas  même  à  Paris,  on  ne  s'enquiert  de 
l'instruction  générale  des  élèves,  et  c'est,  selon  nous, 
un  tort.  A  l'étranger,  les  élèves  entrent  plus  tardive- 
ment qu'en  France  dans  les  écoles  de  musique;  non 
pas  à  partir  de  sept  ou  huit  ans,  mais  à  partir  de 
treize  ans  environ.  On  exige,  en  Allemagne  notam- 
ment, que  les  élèves  soient  pourvus  de  certains 
diplômes  et,  jusque  dans  les  écoles  de  musique,  les 
programmes  des  cours  font  une  place  à  l'instruction 
générale.  Sans  tomber  dans  les  erreurs  de  la  lourde 
pédagogie  germanique,  comment  ne  pas  déplorer 
qu'un  premier  prix  du  Conservatoire  de  Paris,  exé- 
cutant distingué,  puisse  êlre  démuni  des  connais- 
sances, même  orthographiques,  les  plus  communes 
et  les  plus  usuelles? 

Les  examens  du  second  trimestre  de  l'année  sco- 
laire servent  à  prononcer  l'admission  définitive  des 
élèves  nouveaux  et  à  contrôler  le  travail  effectué 
dans  les  classes.  Le  programme  en  est  arrêté 
par  le  directeur,  sur  les  propositions  des  professeurs, 
et  comporte  un  choix  de  morceaux  et  d'études  diffé- 
rent pour  chaque  élève. 

Les  examens  d'admission  aux  concours  de  fin 
d'année  ont  un  programme  identique  au  précédent. 

Nous  avons  dit,  antérieurement,  quelles  étaient  les 
matières  des  concours  dans  chacune  des  branches 
de  l'enseignement,  nous  n'y  reviendrons  pas. 

Les  examens  et  les  concours  de  solfège,  d'harmonie, 
de  contrepoint  et  de  fugue  ont  lieu  à  huis  clos.  Les 
concours  des  classes  de  chant,  de  déclamation  et 
d'instruments  sont  publics.  Les  récompenses  décer- 
nées sont  de  plusieurs  catégorie-  :  prix,  médailles, 
accessits  et  mentions;  elles  n'ont  qu'une  valeur 
nominale  et,  par  conséquent,  relative.  La  détermi- 
nation d'un  étalon  est  matériellement  impossible, 
mais  il  serait  aisé  de  remédiera  certains  abus.  On 
devrait,  notamment,  éviter  de  donner  la  dénomina- 
tion de  premier  prix  à  la  plus  haute  récompense 
d'un  cours  élémentaire  nu  moyen;  il  en  résulte  un 
discrédit  des  récompenses  des  classes  supérieures, 
qui  porte  préjudice  à  la  réputation  des  écoles. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE 


Certaines  succursales  du  Conservatoire  sont  auto- 
risées, par  le  ministre,  à  délivrer  un  diplôme  dé- 
nommé certificat  d'aptitude  à  l'enseignement  du 
piano,  du  violon,  du  chant,  etc.  ;  ce  diplôme  est  ré- 
servé aux  élèves  ayant  obtenu  un  premier  prix  dans 
un  cours  supérieur  et  qui,  l'année  suivante,  satisfont 
à  un  examen  spécial.  Cet  examen  comprend  ordi- 
nairement une  composition  française  sur  un  sujet 
d'histoire  de  la  musique,  des  épreuves  pédagogiques 
et  d'exécution. 

Le  palmarès  du  Conservatoire  de  Paris  témoigne 
du  nombre  important  des  élèves  qui  proviennent  des 
écoles  nationales.  Le  nom  des  lauréats  de  ces  écoles 
est  toujours  suivi  de  la  mention  :  «  et  précédem- 
ment élève  de  l'école  nationale  de  musique  de...  » 
Enfin,  il  faut  encore  mentionner  les  examens  de 
l'Etat  et  de  la  ville  de  Paris,  auxquels  se  présentent 
les  élèves  de  nos  écoles  qui  postulent  aux  emplois 
de  professeurs  de  musique  dans  les  lycées,  collèges, 
écoles  normales  et  écoles  de  la  ville  de  Paris. 

Jurys.  —  Les  jurys  d'examens  et  de  concours  sont 
composés  conformément  aux  dispositions  des  règle- 
ments des  écoles,  qui,  sur  cp  point,  différent  très 
sensiblement,  en  raison  de  la  diversité  des  ressources 
et  des  situations  locales. 

Les  jurys  peuvent  être  constitués  soit  exclusive- 
ment de  professeurs  de  l'école,  soit  de  professionnels 
qui  lui  sont  étrangers,  soit  de  seuls  amateurs,  soit 
encore  de  la  fusion  de  tout  ou  partie  de  ces  groupes. 
Les  jurys  composés  exclusivement  de  professeurs 
de  l'école  sont  exceptionnels.  Le  manque  d'indépen- 
dance des  professeurs  vis-à-vis  de  leurs  élèves  les 
prive  d'autorité  morale,  et  l'opinion  publique  les  ré- 
prouve. Il  ne  faut  pas  oublier,  en  effet,  que  les  pro- 
fesseurs des  écoles  sont  presque  toujours  les  profes- 
seurs particuliers  des  élèves. 

Les  jurys  de  professeurs  étrangers  à  l'école  ne 
sont  pas  toujours  mieux  qualifiés.  Indirectement,  les 
jurys  apprécient,  par  delà  les  élèves  qu'ils  jugent, 
la  qualité  de  l'enseignement  qu'ils  reçoivent,  qui  est 
celle  des  maîtres.  Il  n'apparaît  pas  qu'il  convienne 
de  faire  juger  les  professeurs  d'une  école  par  des  col- 
lègues concurrents,  et,  qui  plus  est,  ayant  été  leurs 
rivaux  malheureux  dans  l'obtention  des  places  qu'ils 
occupent. 

Les  jurys  d'amateurs  échappent  anx  critiques 
applicables  aux  précédents.  Leur  compétence  tech- 
nique est  moindre,  mais  il  est  juste  de  dire  qu'ils 
ont  une  supériorité  sous  le  rapport  de  la  culture 
générale  et,  partant,  un  sens  moins  étroit  d'apprécia- 
tion des  valeurs.  Psychologiquement,  l'amateur  oscille 
entre  deux  positions  contradictoires  :  ou  il  incline 
a  juger  avec  son  cœur,  paternellement,  ou,  s'il  ré- 
cuse ce  dernier,  il  oppose  dans  son  esprit  l'élève  au 
virtuose  et  condamne  le  premier  au  nom  du  second. 
Un  concours  scolaire  est  autre  chose  qu'une  fête  de 
famille  ou  un  concert.  Il  est  donc  nécessaire  que  les 
jurys  d'amateurs  soient  guidés  et  dirigés;  privés  de 
cette  direction,  ils  ne  sont  pas  sans  danger;  avec  elle, 
ils  peuvent  être  excellents. 

Restent  les  jurys  mixtes.  Ce  sont  les  meilleurs  si, 
par  la  limitation  du  nombre  des  musiciens  profes- 
sionnels, le  corps  enseignant  des  écoles  en  étant 
exclu,  la  constitution  de  coalitions  intéressées  est 
rendue  impossible.  Des  raisons  d'opportunité  déci- 
dent des  méthodes  dont  il  convient,  suivant  le  cas, 
de  s'inspirer. 

La  présidence  des  jurys  appartient  de  droit  au 
directeur   de  l'école;  elle  ne  peut,  sans  dommage 


pour  celle-ci,  être  assumée  par  une  autre  personna- 
lité. Cependant,  il  est  des  cas  où  le  directeur  peut  et 
doit  se  récuser.  Tel  est  celui  qui  résulle  du  cumul 
de  ses  fonctions  avec  le  professorat  particulier, 
situation  en  elle-même  fâcheuse  qu'impose  le  plus 
souvent  l'insuffisance  des  traitements  et  du  personnel. 
Le  directeur  de  l'école  est,  en  effet,  la  seule  per- 
sonne susceptible  de  juger  avec  esprit  de  suite  le 
travail  de  tous  les  élèves,  de  garantir  une  certaine 
équivalence  entre  les  récompenses  de  même  degré, 
d'une  matière  à  une  autre,  ou  d'une  année  à  l'autre; 
d'appliquer  ou  de  faire  prévaloir  les  dispositions 
réglemenlaires  utiles  et  de  sauvegarder,  en  même 
temps  que  les  intérêts  individuels  des  concurrents, 
ceux,  plus  généraux,  de  l'école. 

Les  modes  de  délibération  des  jurys  ne  sont  pas 
réglementés.  Les  récompenses  peuvent'  être  attribuées 
par  l'addilion  des  cotes  des  membres  du  jury.  Ce 
système  comporte  les  aléas  qui  résultent,  tour  à 
tour,  d'une  majorité  de  cotes  hautes  ou  de  cotes 
basses.  Il  est  aisé  de  s'en  rendre  compte  :  deux  con- 
currents sont  unanimement  jugés  comme  devant 
être  différenciés  par  le  degré  de  la  récompense,  une 
majorilé  de  cotes  hautes  peut  cependant  donner  au 
plus  faible  le  quorum  requis  pour  l'obtention  de  la 
plus  haute  récompense;  inversement,  le  plus  fort, 
s'il  y  a  majorité  de  cotes  basses,  peut  ne  pas  attein- 
dre ce  quorum.  Le  dommage  s'exerce  aux  dépens 
des  concurrents. 

Il  est  d'autres  cas.  Le  niveau  d'un  concours  est 
sujet  à  des  fluctuations;  l'épreuve  peut  être  moins 
difficile  une  année  que  celle  qui  la  précédait,  les 
concurrents,  avantagés,  excelleront  ;  il  y  a  toutes 
probabilités  pour  qu'ils  soient  cotés  haut  et  que  des 
récompenses  élevées,  inférieures  aux  précédentes  en 
qualité,  soient  décernées.  Ce  seront  l'enseignement 
et  l'école  qui  seront  lésés. 

Le  système  des  moyennes  des  cotes  est  préférable, 
mais  encore  très  imparfait. 

Le  jury  peut  encore  voter  pour  dire  s'il  y  a  lieu 
de  décerner  telle  récompense,  et  à  qui  elle  doit  être 
décernée.  Cette  manière  de  procéder  est  exemple 
des  inconvénienls  signalés  plus  haut,  mais  il  est 
utile  que  le  vote  soit  précédé  d'un  échange  général 
de  vues  sur  le  concours  et  ses  relations  avec  les 
multiples  intérêts  en  cause. 

Les  concours  donnent  lieu  à  de  nombreux  inci- 
dents et  soulèvent  d'innombrables  récriminations. 
On  parlera  longtemps  encore  de  les  supprimer,  mais 
ils  sont  .fort  utiles.  Il  est  d'usage  d'incriminer  les 
jurys,  et  on  ne  peut  en  effet  s'en  prendre  qu'à  ceux  qui 
assument  des  responsabilités.  L'opinion  publique 
est  chose  anonyme,  et  nul  ne  se  prive  de  parler  en 
son  nom,  ce  qui  n'est  pas  malaisé.  Que  les  jurys 
soient  eux-mêmes  jugés  et  parfois  injustement,  n'est- 
ce  point  l'honneur  d'une  fonction  et  d'un  devoir  qui 
ne  sont  jamais  plus  estimables  qu'en  ces  mo- 
ments-là? 

Personnel  enseignant.  —  Toutes  les  valeurs  se  ren- 
contrent dans  le  corps  des  professeurs  des  écoles  de 
musique.  Il  ne  convient  pas  de  considérer  les  excep- 
tions, ni  dans  le  bien  ni  dans  le  mal;  celles-ci  sont 
regrettables,  celles-là  sont  des  grâces  du  ciel.  La 
grande  généralité  des  professeurs  accomplit  arec 
conscience,  probité  et  intelligence,  un  lourd  et  obscur 
devoir.  Beaucoup  n'en  tirent  qu'un  faible  profil  ma- 
tériel. L'amour  de  l'art  et  de  leur  mélier-vaut  parfois, 
à  quelques-uns,  de  ces  satisfactions  élevées  auxquelles 
aspire  le  cœur  de  tous  ceux  qu'une  flamme  a,  un 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


jour,  touchés.  Qu'à  cet  honneur  soit  jointe  l'expres- 
sion de  la  gratitude  publique,  et  ce  sera  bien  peu 
encore  pour  tant  de  bienfaits  dispensés. 

Sans  eux,  Paris  serait  privé  de  la  moitié  de  ses 
artistes,  compositeurs,  acteurs  et  exécutants;  nos 
théâtres  et  nos  concerts  de  province  n'existeraient 
pas,  et  c'en  serait  fait  de  cet  essor  de  l'art  français 
qui,  parti  de  notre  territoire,  franchit  ses  frontières. 
Les  services  rendus  par  le  corps  enseignant  de  nos 
écoles  ne  peuvent  être  que  très  chers  à  tous  ceux 
qui  aiment  profondément  la  musique,  et  ce  n'est  que 
justice  d'en  dire  le  rare  mérite. 


MONOGRAPHIE   DES  ÉCOLES  DE   MUSIQUE 

Les  écoles  ont  été  classées  par  ordre  alphabétique 
dans  chacune  des  trois  catégories  déterminées  par 
leur  régime  administratif.  En  tète  sont  placées  les 
écoles  succursales  du  Conservatoire  de  Paris,  puis 
les  écoles  nationales  proprement  diles;  en  second 
lieu,  les  écoles  municipales;  enfin  les  établissements 
privés,  peu  nombreux,  qui  sont  effectivement  des 
écoles  de  musique  selon  le  sens  que  nous  avons  re- 
connu à  ce  mot. 

I.  Écoles  nationales  de  musiqne. 

Les  écoles  nationales,  placées  sous  le  contrôle 
du  ministre  de  l'instruction  publique  et  des  beaux- 
arts,  ressortissent  aux  services  de  la  direction  des 
beaux-arls,  bureau  des  théâtres,  conservation  des 
palais  et  du  mobilier  national.  L'autorité  adminis- 
trative supérieure  dont  elles  dépendent  est  ainsi 
constituée  : 


M.  Pierre  Marraud,  ministre  de  l'instruction  publi- 
que et  des  beaux-arts. 

SOUS-SECRÉTARIAT    D'ÉTAT    DES    DEAUX-ARTS 

Sous-secrétaire  d'Elat  :  M.  Eugène  Lautier. 
M.  Paul  Léon,  C.  &,  directeur  des  beaux-arts; 
M.  liené  Gadave,  <$,  ife,  sous-directeur,  adjoint  au 
directeur. 

BUREAU    DES    THÉÂTRES,    CONSERVATION    DES    PALAIS 
ET    DU    MOBILIER    NATIONAL 

M.  René  Gadave,  %,  Q,  chef  de  bureau,  commis- 
saire du  gouvernement  près  les  théâtres  subven- 
tionnés ; 

M.  Caillot,  sous-chef  de  bureau. 

COMMISSION  CONSULTATIVE    DE  L'ENSEIGNEMENT    MUSICAL 

M.  le  minisire  de  l'instruction  publique  et  des 
beaux-arls,  président; 

M.  Paul  Léon,  C.$,  directeur  des  beaux-arts, 
vice-présidenl; 

M.  Henri  Hauaud,  0.%,  membre  de  l'Institut,  direc- 
teur du  Conservatoire. 

Membres  :  M.  René  Gadave,  %-,  chef  du  bureau  des 
théâtres,  commissaire  du  gouvernement  près  les 
théâtres  subventionnés; 

M.  Alfred  Bruneau,  C.  %,  inspecteur  général  de 
l'enseignement  musical; 

MM.  Paul  Duras,  0.*,  Paul  Vidal,  0.*,  André 
Bloch,  &,  Haoul  Laparra,  &,  inspecteurs  de  l'ensei- 
gnement musical. 

M.  Eugène  Berleaux,  %,  sous-chef  du  bureau 
des  théâtres,  secrétaire. 


A.  Succursales  du  Conservatoire  national 
de  musique  et  de  déclamation. 

AMIENS 

Directeur  :  M.  Pierre  Camus. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois,  cla- 
rinette, basson,  saxophone,  cor,  cornet,  trompette, 
trombone. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  373.  Budget  annuel 
(1930)  162.000  francs. 

L'école  remonte  à  1801.  Elle  fut  tout  de  suite 
transformée  en  école  nationale.  Complètement  dé- 
truite pendant  la  guerre,  alors  qu'elle  venait  d'être 
installée  dans  un  immeuble  neuf,  elle  a  rouvert  en 

1919,  et  a  été  érigée  en  succursale  du  Conservatoire 
de  Paris  en  1925.  L'enseignement  est  gratuit. 

BOULOGNE  SUR-MER 

Directeur  :  M.  Charles  Gripois. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  alto, 
violoncelle,  contrebasse,  llùte,  hautbois,  clarinette, 
basson,  cor,  cornet,  trompette,  trombone,  ensemble 
vocal,  ensemble  instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
(1030)  177.000  francs. 

Une  petite  école  de  musique  fut  fondée  en  1830; 
en  1876,  elle  reçut  le  litre  d'Académie  communale 
de  musique.  Transformée  en  école  nationale  en 
1882,  elle  fut  érigée  en  succursale  du  Conservatoire 
de  Paris  en  1908.  La  bibliothèque  compte  environ 
deux  mille  cinq  cents  ouvrages.  Les  locaux  ont  été 
récemment  transformés  et  aménagés.  La  fréquenta- 
tion des  cours  est  gratuite. 

cambrai 

Directeur  :  M.  Albert  Lély. 

Enseignement  :  contrepoint  et  fugue,  harmonie, 
solfège,  chant,  piano,  violon,  alto,  violoncelle  et 
contrebasse,  flûte,  hautbois,  clarinette,  saxophone, 
basson,  instruments  en  cuivre,  orchestre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  400.  Budget  annuel 
(1930)  122.000  francs. 

L'école  fut  créée  en  1821,  nationalisée  en  1 00:>  el 
érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en 

1920.  Incendiée  pendant  la  guerre,  bibliothèque  et 
instruments  détruits,  elle  s'est  rapidement  relevée  de 
sa  ruine  totale.  L'enseignement  est  gratuit 

DIJON 

Directeur  :  M.  Louis  Dumas. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  tlûte,  hautbois, 
clarinette,  basson,  saxophone,  cor,  cornet,  trompette, 
trombone,  harpe,  ensemble  instrumental,  ensemble 
vocal,  orchestre,  déclamation  lyrique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  .'ioO.  Budget  annuel 
(1930)20o.000  francs. 

Créée  en  1845,  l'école  fut  érigée  en  succursale  du 
Conservatoire  de  Paris  en  1868.  Elle  possède  une 
bibliothèque  importante. 


Directeur  :  M.  Victor  Gallois. 

Enseignement  :  contrepoint  et  fugue,  harmonie, 
solfège,  chant,  piano,  violon,  alto,  violoncelle,  con- 
trebasse, flûte,  hautbois,  clarinette,  basson,  saxo- 
phone, cor,  cornet,  trompette,  trombone,  saxhorn, 
ensemble  instrumental,  orchestre,  histoire  de  la 
musique. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3007 


Nombre  moyen  des  élèves  :  500.  Budget  annuel 
(1930)  177.000  francs. 

Fondée  en  1806,  subventionnée  par  la  municipalité, 
l'école  fut  nationalisée  en  1884,  et  érigée  en  succur- 
sale du  Conservatoire  de  Paris  en  1911.  Fermée 
pendant  la  guerre,  réquisitionnée  par  les  Allemands, 
l'école,  lors  de  sa  réouverture,  ne  possédait  plus  ni 
matériel,  ni  musique.  Sa  reconstitution  rapide  lui  a 
rendu  sa  prospérité  d'antan.  Il  n'y  a  pas  de  rétribu- 
tion scolaire. 


Directeur  :  M.  Alfred  Françaix. 

Enseignement:  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  basson  et  saxophone,  cornet,  trompette, 
trombone,  ensemble  instrumental,  orchestre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  250.  Budget  annuel 
(1930)  121.000  francs. 

Fondée,  en  1882,  sur  l'initiative  du  conseil  muni- 
cipal, l'école  a  été  nationalisée  en  1884,  et  érigée  en 
succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en  1920.  L'en- 
seignement est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Emile  Ratez. 

Enseignement  :  contrepoint  et  fugue,  harmonie, 
solfège,  chant,  piano,  orgue,  violon,  alto,  violoncelle, 
contrebasse,  llûte,  hautbois,  clarinette,  basson,  saxo- 
phone, cor,  cornet,  trompette,  trombone,  ensemble 
instrumental,  ensemble  vocal,  orchestre,  déclama- 
tion lyrique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
(1930)  233.000  francs. 

L'origine  de  l'école  remonte  à  1803.  Municipali- 
sée  en  1816,  elle  fut  érigée  en  succursale  du  Con- 
servatoire de  Paris  en  1826.  La  bibliothèque  de 
l'école  est  importante.  Ses  locaux,  anciens,  ont  été 
considérablement  agrandis  et  sont  bien  aménagés. 
L'enseignement  est  gratuit. 

LYON 

Directeur  :  M.  G.-M.  Witrowski. 

Enseignement  :  contrepoint  et  fugue,  harmonie, 
solfège,  chant,  déclamation  lyrique,  piano,  orgue, 
violon,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  basson,  cor,  cornet,  trompette,  trombone, 
harpe,  ensemble  instrumental,  ensemble  vocal,  dé- 
clamation dramatique,  histoire  de  la  musique,  his- 
toire de  la  littérature  dramatique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  530.  Budget  annuel 
(1930)  286.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  par  la  municipalité  en  1872, 
et  érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de  Paris 
en  1874.  Sa  bibliothèque  est  très  complète.  Elle  est 
sise  dans  le  Palais  municipal  des  Beaux-Arts,  qui  fut 
édifié  à  son  intention.  Il  n'y  a  pas  de  rétribution 
scolaire. 


Directeur  :  M.  René  Delaunay. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  haut- 
bois, clarinette,  basson,  cor,  trompette,  trombone, 
ensemble  vocal,  orchestre,  histoire  de  la  musique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
(1930)  2oa. 000  francs. 

L'école,  fondée  en  1832,  a  été  érigée  en  succursale 
du  Conservatoire  de  Paris  en  1841.  Très  florissante 
en  1870,  elle  périclita  sous  la  direction  des  Allemands 


qui  supprimèrent  les  classes  de  solfège  et  d'instru- 
ments à  vent.  Lors  du  retour  de  .Metz  à  la  France,  on 
n'y  enseignait  plus,  depuis  longtemps,  que  le  piano, 
le  violon,  le  violoncelle  et  le  chant.  Entièrement 
reconstituée,  grâce  à  l'initiative  de  la  municipalité, 
dès  1919,  elle  a  repris  son  rang  de  succursale  du 
Conservatoire-de  Paris  en  1922.  L'enseignement  est 
payant. 

MONTPELLIER 

Directeur  :  M.  Maurice  Le  Boucher. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  haut- 
bois, clarinette,  basson,  saxophone,  cor,  cornet, 
trompette,  trombone,  harpe,  déclamation  drama- 
tique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  280.  Budget  annuel 
(1930)  266.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  par  la  municipalité  en  1883, 
et  érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en 
1890.  Elle  occupe  les  locaux  de  l'ancienne  faculté  de 
droit  et  possède  une  bibliothèque  assez  importante. 
Il  n'y  a  pas  de  rétribution  scolaire. 

NANCY 

.    Directeur:  M.  Alfred  Bachelet. 

Enseignement  :  contrepoint  et  fugue,  harmonie, 
solfège,  chant,  piano,  orgue,  alto,  violoncelle,  con- 
trebasse, llûte,  hautbois,  clarinette,  basson,  cor, 
trompette,  trombone,  ensemble  instrumental,  dé- 
clamation dramatique,  histoire  de  la  musique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  450.  Budget  annuel 
(1930)  382.000  francs. 

L'école,  fondée  en  1881,  est,  depuis  1884,  succur- 
sale du  Conservatoire  de  Paris.  Elle  a  une  biblio- 
thèque et  de  bons  locaux.  L'enseignement  est  gratuit. 

NANTES 

Directeur  :  M.  Louis  Brisset. 

Enseignement  :  composition  et  fugue,  harmonie, 
solfège,  chant,  piano,  violon,  alto,  violoncelle,  con- 
trebasse, llûte,  hautbois,  clarinette,  Ibasson,  cor, 
cornet,  trompette,  trombone,  ensemble  instrumental, 
ensemble  vocal,  orchestre,  histoire  de  la  musique, 
déclamation  dramatique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
(1930)  210.000  francs. 

L'école,  fondée  en  184t,  a  été  érigée  en  succursale 
du  Conservatoire  de  Paris  en  18 40.  Elle  es!  installée 
dans  un  hôtel  particulier  et  possède  une  biblio- 
thèque. La  rétribution  scolaire  est  peu  élevée. 

NIMES 

Directeur  :  M.  Lucien  Fontayne. 

Enseiguement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  tlûte,  hautbois, 
clarinette,  basson,  saxophone,  cor,  cornet,  trom- 
pette, trombone,  harpe  chromatique,  ensemble  ins- 
trumental, ensemble  vocal,  orchestre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
(1930)  103.000  francs. 

L'école  a  été  créée,  par  la  municipalité,  en  1863. 
Transformée  en  école  nationale  en  1884,  elle  a  été 
érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en 
1903.  Elle  possède  une  bibliothèque  et  occupe  une 
partie  de  l'ancien  Evèché.  devenu,  depuis  1912,  palais 
des  Beaux-Arts.  L'enseignement  est  gratuit. 

ORLÉANS 

Directeur  :  M.  Antoine  Maiuotte. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQl'E  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


violon,  alto,  violoncelle,  llùte,  clarinette,  basson,  cor, 
trompette,  trombone,  contrebasse,  ensemble  ins- 
trumental et  vocal. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
[1930)  lli. (ton  francs. 

La  municipalité  ouvrit  des  cours  gratuits  de  mu- 
sique en  1868,  une  école  fut  constituée  en  1874.  La 
direction  ayant  été  supprimée  en  1901,  il  ne  sub- 
sista que  des  cours  autonomes  jusqu'en  1920.  C'est 
alors  que  la  municipalité  réinslitua  une  direction 
et  que  l'école  fut  nationalisée.  Elle  a  été  érigée  en 
succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en  1925.  L'en- 
seignement est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Simon  Sine. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  cor,  cornet,  trompette,  trombone. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  200.  Budget  annuel 
(1930)  49.000  francs. 

Fondée  en  1842,  devenue  école  nationale  en  1884, 
l'école  a  été  érigée  en  succursale  du  Conservatoire 
de  Paris  en  1892.  Il  est  perçu  une  très  légère  rétri- 
bution scolaire. 

RENNES 

Directeur  :  M.  Jean-Baptiste  Ganave. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  violoncelle,  contrebasse,  llùte,  hautbois,  cla- 
rinette, basson,  saxophone,  cor,  trompette,  trom- 
bone, saxhorn,  ensemble  instrumental,  ensemble 
vocal,  orchestre,  histoire  de  la  musique,  déclamation 
dramatique. 

Nombre  moven  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
1930)  208.000 'francs. 

La  municipalité  subventionna  de  186b  à  1881  un 
cours  de  musique  vocale  qui  fut  alors  transformé  en 
école  municipale,  elle-même  érigée  en  succursale 
du  Conservatoire  de  Paris  en  1884.  L'Ecole  possède 
une  bibliothèque  d'une  certaine  importance.  L'en- 
seignement est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Francis  Bousquet. 

Enseignement  :  contrepoint  et  fugue,  harmonie, 
solfège,  chant,  piano,  orgue,  violon,  alto,  violoncelle» 
contrebasse,  llùte,  hautbois,  clarinette,  basson,  saxo" 
phone,  cor,  cornet,  trompette,  trombone,  saxhorn, 
ensemble  vocal,  orchestre,  déclamation  dramatique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  700.  Budget  annuel 
(1930)  289.000  francs. 

Ecole  municipale  fondée  en  1820;  transformée  en 
école  nationale  en  1884,  elle  a  été  érigée  en  succur- 
sale du  Conservatoire  de  Paris  en  1902.  Elle  est  ins- 
tallée dans  de  beaux  locaux.  L'enseignement  est 
gratuit. 

SAINT-ETIENNE 

Directeur  :  M.  Edmond  Maurat. 

Enseignement  :  contrepoint  et  fugue,  harmonie, 
analyse,  solfège,  chant,  déclamation  lyrique,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  haut- 
bois, clarinette,  basson,  saxophone,  cor,  cornet, 
trompette,  trombone,  saxhorn,  ensemble  instru- 
mental, ensemble  vocal,  orchestre,  histoire  de  la 
musique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  500.  Budget  annuel 
(1930)  288.000  francs. 

Des  cours  de  musique  vocale  furent  subventionnés 


par  la  ville  dès  1839,  une  école  municipale  de  mu- 
sique fonctionna  de  1867  à  1871.  Rétablis  en  1876,  les 
cours  de  musique  vocale  furent  complétés  par  des 
cours  de  musique  instrumentale  en  1878,  et  érigés 
en  école  en  1881  ;  celle-ci  fut  nationalisée  en  1884  et 
dénationalisée  en  1891.  Ecole  municipale  jusqu'en 
1910,  nationalisée  à  nouveau  à  cette  époque,  elle  a 
été  érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en 
1914.  Bien  installée  dans  de  vastes  locaux,  sa  biblio- 
thèque compte  plus  de  quatre  mille  cinq  cents  ou- 
vrages. L'enseignement  est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Joseph  Grégoire. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  basson,  cor,  trompette,  trombone. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  223.  Budget  annuel 
(1930)  133.000  francs. 

Fondée  par  la  municipalité,  en  1900,  l'école  a  été 
nationalisée  en  1903,  et  érigée  en  succursale  du  Con- 
servatoire de  Paris  en  1923.  L'enseignement  est 
gratuit. 

TOULOUSE 

Directeur  :  M   Aimé  Kunc. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  décla- 
mation lyrique,  piano,  violon,  alto,  violoncelle, 
contrebasse,  flûte,  hautbois,  clarinette,  basson,  cor, 
cornet,  trompette,  trombone,  harpe  à  pédales,  harpe 
chromatique,  déclamation  dramatique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  330.  Budget  annuel 
(1930i  438.000  francs. 

L'école  a  été  créée,  par  la  municipalité,  en  1820,  et 
érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en 
1826.  Elle  est  très  bien  installée,  possède  une  biblio- 
thèque de  dix  mille  ouvrages  et  un  musée  d'instru- 
ments. Il  n'y  a  pas  de  rétribution  scolaire. 

TOURCOING 

Directeur:  M.  Lucien  Niverd. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  basson,  saxophone,  cor,  cornet,  trompette, 
trombone,  saxhorn,  orchestre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  375.  Budget  annuel 
(1930)  223. 000  francs. 

La  création  de  l'Académie  de  musique  remonte  à 
18i2,  mais  les  cours  ne  prirent  une  certaine  extension 
qu'à  partir  de  1882,  date  où  ils  furent  transformés 
en  école  municipale.  Celle-ci  fut  nationalisée  en 
1913,  et  érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de 
Paris  en  1923.  L'enseignement  est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Louis  Gravr\ni). 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  piano,  violon, 
violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois,  clarinette, 
basson,  saxophone,  cor,  cornet,  trompette,  trom- 
bone, saxhorn,  ensemble  instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  200.  Budget  annuel 
\'XMv<  305.500  francs. 

Fondée  par  initiative  privée  en  1S75.  munieipa- 
lisée,  l'école  a  été  nationalisée  en  1886,  et  êrigit  en 
succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en  1923.  L'en- 
seignement est  gratuit. 

valençiennes 
Directeur  :  M.  Fernand  Lamy. 
Enseignement  ;    contrepoint    et  fugue,   harmonie, 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 

solfège,  chant,  piano,  violon,  alto,  violoncelle,  con- 
trebasse, flûte,  hautbois,  clarinette,  basson,  cor, 
cornet,  trompette,  trombone,  ensemble  instru- 
mental, orchestre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  +00.  Budget  annuel 
(1923)  23  4.000  francs. 

L'Académie  de  musique  fondée  en  1835  par  la 
municipalité,  transformée  en  école  nationale  en 
1884,  a  été  érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de 
Paris  en  1921.  L'école  a  une  bibliothèque  importante. 
Elle  est  logée  dans  un  bel  édilice  datant  du  second 
empire.  L'enseignement  est  gratuit. 

B.  Écoles  nationales  de  musique. 


Directeur  :  M.  Edmond  Braut. 

Enseignement  :  solfège,  piano,  violon,  alto,  vio- 
loncelle, contrebasse,  flûte,  hautbois,  clarinette,  ins- 
truments en  cuivre,  ensemble  instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  230.  Budget  annuel 
(1930)  31.000  francs. 

Créée  par  initiative  privée,  en  1818,  subventionnée 
parle  conseil  municipal  en  1821,  l'école  d'Abbeville 
a  été  rattachée  à  l'Etat  en  1809.  Elle  est  sommaire- 
ment installée.  L'enseignement  est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Joseph  Poncf.t. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  violoncelle,  flûte,  hautbois,  clarinette,  basson, 
instruments  en  cuivre,  ensemble  instrumental,  en- 
semble vocal,  histoire  de  la  musique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  350.  Budget  annuel 
(1930)  116.000  francs. 

Eondée  par  initiative  privée  en  1840,  munici- 
palisée  en  1856,  l'école  a  été  nationalisée  en  1884. 
L'enseignement  est  gratuit. 

ANGOILF.UE 

Directeur  :  M.  Georges  Martinet. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  alto, 
violoncelle,  flûte,  hautbois,  clarinette,  cor,  cornet, 
ensemble  vocal,  ensemble  instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  350.  Budget  annuel 
(1930)  25.000  francs. 

Ancien  cours  gratuit  de  musique  vocale  et  instru- 
mentale; fondée,  par  initiative  privée,  en  1882,  puis 
subventionnée  par  la  municipalité,  l'école  a  été  na- 
tionalisée en  1887.  Il  n'y  a  pas  de  rétribution  sco- 
laire. 

AVIGNON 

Directeur  :  M.  Charles  Allô. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège, 'chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  haut- 
bois, clarinette,  instruments  en  cuivre,  ensemble 
instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  350.  Budget  annuel 
(1930)  159.000  francs. 

L'école  est  passée  par  de  nombreuses  vicissitudes. 
Créée  en  1828,  fermée  en  1829  ;  rouverte  en  18.35, 
fermée  en  1836;  rouverte  en  1845,  fermée  en  1848; 
rouverte  en  1853,  fermée  en  1870;  rouverte  en  1871, 
elle  resta  municipale  jusqu'en  18S4;  alors  érigée  en 
succursale  du  Conservatoire  de  Paris,  elle  redevint 
municipale  en  1889  et  le  demeura  jusqu'en  1916. 
Depuis  lors,  elle  est  école  nationale.  Elle  possède  une 
petite  bibliothèque  et  est  installée  dans  l'ancien  Hôtel 
des  Monnaies.  L'enseignement  est  gratuit. 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3G09 

BAYONNE 

Directeur:  M.  Ermend  Bonnal. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  orgue,  vio- 
lon, violoncelle,  contrebasse,  instruments  à  vent 
en  bois,  cornet  et  trompette,  trombone  et  tuba,  en- 
semble vocal, ensemble  instrumental,  histoire  de  la 
musique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  130.  Budget  annuel 
(1930)  33.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  parla  municipalité  en  1876, 
et  rattachée  à  l'Etat  en  1884.  L'enseignement  est 
gratuit. 

BOURGES 

Directeur  :  M.  Henri  Yivet. 

Enseignement:  solfège,  chant,  piano,  violon,  tlùte, 
hautbois,  clarinette,  saxophone,  cornet,  trombone, 
saxhorn. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  100.  Budget  annuel 
(19.10)  54. 000  francs. 

L'école,  créée  en  1900,  a  été  érigée  en  école  natio- 
nale en  1921.  L'enseignement  est  gratuit- 


Directeur  :  Arthur  Rilland. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  piano,  violon, 
violoncelle,  clarinette,  cor,  cornet,  trompette,  trom- 
bone. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  180.  Budget  annuel 
(1931))  41.000  francs. 

L'école  a  été  fondée,  par  la  municipalité,  en  1921, 
et  nationalisée  en  1926.  Il  n'y  a  pas  de  rétribution 
scolaire. 


Directeur  :  M.  Georges  Dequin. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  tlùte,  haut- 
bois, clarinette,  basson,  cor,  cornet,  trompette,  trom- 
bone, saxhorn,  ensemble  instrumental,  ensemble 
vocal,  orchestre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  275.  Budget  annuel 
(1030)  119.000  francs. 

Fondée  par  initiative  privée  en  183:;,  mais  placée 
sous  l'autorité  du  maire,  l'école  demeura  municipale 
jusqu'en  1884.  Ecole  nationale  de  1884  à  1885,  elle 
fut  à  nouveau  municipale  jusqu'en  1909  où  elle  re- 
demanda et  obtint  la  nationalisation.  Elle  occupe  des 
salles  de.  l'hôtel  de  ville.  L'enseignement  est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Emile  Camvs. 

Enseignement:  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  llùle,  haut- 
bois, basson,  clarinette  et  saxophone,  instruments 
en  cuivre,  orchestre,  histoire  de  la  musique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  500.  Budget  annuel 
(1930)  140.000  francs.  L'enseignement  est  gratuit. 

CHAMHÉRV 

Directeur  :  M.  Marins  Bayoud. 

Enseignement:  solfège,  chant,  piano,  violon, 
violoncelle  et  contrebasse,  instruments  à  vent  en 
bois,  instruments  en  cuivre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  150.  Budget  annuel 
(1930)  42.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  en  1865,  par  la  municipalité. 
Elle  a  été  érigée  en  école  nationale    en   1884.  Elle 


;ncyclopêdie  de  la  musique  et  dictionnaire  du  conservatoire 


Possède  une  petite  bibliothèque.  Il  n'y  a  pas  de  ré- 
tribution scolaire. 

CLERMONT-FERRAND 

Directeur  :  M.  Louis  Gémont. 

Enseignement:  harmonie,  solfège,  chant,' piano, 
■violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  haut- 
bois, clarinette,  basson,  instruments  en  cuivre,  en- 
semble instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  250.  Budget  annuel 
(1930)  124.000  francs. 

L'école  a  été  créée,  par  la  municipalité,  en  1909, 
et  rattachée  à  l'Etat  en  1911.  L'enseignement  est 
gratuit. 

HÉrJIN-LIÉTARD 

Directeur  :  M.  Emile  Dufrenne. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vio- 
loncelle, contrebasse,  clarinette,  saxophone,  cornet, 
trompette,  trombone,  saxhorn. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  320.  Budget  annuel 
(1930)  25.000  francs. 

L'école  a  été  créée  en  1925,  par  initiative  munici- 
pale, et  nationalisée  en  1926.  Il  n'y  a  pas  de  rétribu- 
tion scolaire. 

LORIENT 

Directeur  :  M.  Marius  Ghol. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  piano,  violon 
et  alto,  violoncelle,  flûte  et  hautbois,  clarinette,  cor, 
ensemble  instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  250.  Budget  annuel 
(1930)  26.000  francs. 

Créée  en  1905,  par  initiative  privée,  municipalisée, 
l'école  est  devenue  nalionale  en  1912.  L'enseigne- 
ment est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Aristide  Belin. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon  et 
alto,  violoncelle  et  contrebasse,  instruments  à  vent 
en  bois,  instruments  en  cuivre,  ensemble  vocal,  or- 
chestre. 

Nombre  moven  des  élèves  :  250.  Budget  annuel 
(1930)19.000  francs. 

Née  d'une  initiative  privée,  en  1887,  municipalisée 
en  1892,  l'école  a  élé  nationalisée  en  1893.  Il  y  a  une 
légère  rétribution  scolaire. 


Directeur  :  M.  Félix  Cazenave. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  piano,  violon, 
alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois,  clari- 
nette, basson,  cor,  cornet,  trombone,  ensemble  ins- 
trumental. 

Nombre  moven  des  élèves  :  160.  Budget  annuel 
(1930)  54.000  francs. 

Fondée  en  1920,  par  la  municipalité,  l'école  a  élé 
nationalisée  en  1922.  L'enseignement  est  gratuit. 

SAINT-AMAND-LES-EAUX 

Directeur  :  M.  Robert  Garon. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vio- 
loncelle, tinte,  hautbois,  clarinette,  saxophone,  cor, 
cornet,  trompette,  trombone,  saxhorn. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  190.  Budget  annuel 
(1930)  35.500  francs. 

Un  groupement  musical,  dont  l'origine  remonte  à 
l'organisation  des  gardes  nationales,  pendant  la  Ré- 


volution, fut  ultérieurement  transformé  en  société 
philharmonique.  En  1866,  un  arrêté  municipal  réor- 
ganisa la  société  et  institua  un  enseignement  du 
solfège  et  de  divers  instruments.  En  1921,  le  conseil 
municipal  créa  l'école  actuelle,  qui  a  été  nationalisée 
en  1928.  L'enseignement  est  gratuit. 

SAINT-BRIEUC 

Directeur  :  M.  Louis  Foirmer. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  piano,  violon, 
alto,  violoncelle,  contrebasse,  instruments  à  vent 
en  bois,  instruments  en  cuivre,  ensemble  vocal, 
ensemble  instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  150.  Budget  annuel 
(1930)  21.500  francs. 

Instituée  par  délibération  du  conseil  municipal,  en 
1919,  l'école  a  été  nationalisée  eu  1923.  L'enseigne- 
ment est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Henri  Filleul. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  piano,  violon, 
alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois,  clari- 
nette, basson,  instruments  en  cuivre,  ensemble 
vocal,  orchestre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  275.  Budget  annuel 
(1930)  63.000  francs. 

L'école  a  été  érigée  en  école  nationale  en  1884. 
L'enseignement  est  gratuit. 


Directeur:  M.  Sylvain  Torre. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vio- 
loncelle, contrebasse,  flûte,  hautbois,  basson,  clari- 
nette, instruments  en  cuivre,  ensemble  instrumen- 
tal, orchestre,  histoire  de  la  musique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  350.  Budget  annuel 
(1930)  70.000  francs. 

Fondée  par  la  municipalité,  en  1882,  l'école  a  été 
nationalisée  en  188V.  Klle  possède  une  bibliothèque  ; 
ses  locaux,  petits,  sont  bien  aménagés.  L'enseigne- 
ment est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Brard. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vie- 
loncelle,  llûte,  clarinette,  instruments  en  cuivre,  en- 
semble instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  200.  Budget  annuel 
(1930)  42.000  francs. 

Créée  en  1894-,  municipale  jusqu'en  1921,  l'école 
est  nationale  depuis  lors.  L'enseignement  est  gra- 
tuit. 

TROYES 

Directeur  :  M.  Amable  Massis. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
orgue,  violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  tlùte, 
hautbois,  clarinette,  basson,  cor,  trompette,  trom- 
bone, harpe  chromatique,  ensemble  instrumental, 
orchestre,  ensemble  vocal,  histoire  de  la  mu- 
sique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :]  200.  Budget  annuel 
(1930)  113.000  francs. 

L'école,  fondée  en  1920,  par  initiative  privée,  n'a 
reçu  primitivement  qu'une  faible  subvention  de  la 
ville.  Municipalisée  en  1925,  elle  a  été  nationalisée 
la  même  année.  Il  y  a  une  rétribution  scolaire. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3M 


licipnlcs  «le  niusiqnf 


Direcleur  :  M.  Norbert  Canouet. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vio- 
loncelle, tlûte,  instruments  à  anche,  cor,  cornet, 
trompette,  trombone,  ensemble  vocal,  orchestre. 

Nombre  des  élèves  :  300.  Budget  annuel  (1930) 
34.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  en  1919,  avec  le  concours  de 
la  municipalité,  qui,  en  1923,  l'a  prise  à  sa  charge. 
Une  petite  rétribution  scolaire  est  perçue. 


Directeur  :  M.  Jean  Gay. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vio- 
loncelle, contrebasse,  flûte,  clarinette,  basson,  saxo- 
phone, cornet,  trompette,  trombone. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  450.  Budget  annuel 
(1930)  57.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  par  la  municipalité,  en  1890. 
L'enseignement  est  gratuit. 


Directeur  :  M.  Eugène  Leleu. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  tlûte,  haut- 
bois, clarinette,  basson,  saxophone,  cor,  cornet, 
trombone,  saxhorn. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  320.  Budget  annuel 
11930)  58.000  francs. 

Des  cours  de  musique  furent  créés,  vers  1830,  par 
la  Société  symphonique  la  «  Philharmonique  d'Ar- 
ras  ».  Ils  furent  érigés  en  école  municipale  en  1850- 
Leur  fréquentation  est  gratuite. 


Directeur  :  M.  Georges  Naquet. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vio 
loncelle",  flûte,  hautbois,  clarinette,  saxophone,  ins 
truments  en  cuivre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  200.  Budget  annuel 
(1930)  12.500  francs. 

L'école  a  été  ouverte  en  1920.  L'enseignement  est 
gratuit. 

RELFORT 

Directeur  :  M.  Lucien  Ciievaillier. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  violoncelle,  instruments  à  vent  en  bois  et  en 
cuivre,  ensemble  instrumental,  ensemble  vocal. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  230.  Budget  annuel 
(1930)  70.000  francs. 

Fondée  en  1926  par  M.  et  M"1(î  Thiault,  l'école  a  été 
municipalisée  en  1928.  Il  existe  une  rétribution  sco- 
laire. Une  bibliothèque  est  en  voie  de  constitution. 


Directeur  :  M.  Fernand  Datte. 

Enseignement:  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  basson,  saxophone,  cornet,  trompette, 
cor,  trombone,  ensemble  vocal,  ensemble  instru- 
mental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  370.  Budget  annuel 
11930)  92.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  par  la  municipalité  en  1S00. 
L'enseignement  est  payant. 


BORDEAUX 

Directeur  :  M.  Bernard  Crocé-Spinelli. 

Enseignement  :  contrepoint  et  fugue,  harmonie, 
solfège,  chant,  déclamation  lyrique,  piano,  violon, 
alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois,  cla- 
rinette, basson,  cor,  cornel,  trompette,  trombotte, 
harpe,  déclamation  dramatique,  histoire  de  la  mu- 
sique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  320.  Budget  annuel 
(1930)  247.500  francs. 

L'école  a  été  créée,  en  1852,  par  la  Société  des  con- 
certs «  Sainte-Cécile  ». 

Subventionnée  par  la  ville  depuis  longtemps,  elle 
a  été  municipalisée  en  1920. 

BRUAY-EN-ARTOIS 

Directeur  :  M.  André  Gest. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  violoncelle,  clarinette,  saxophone,  instru- 
ments en  cuivre,  ensemble  instrumental,  histoire  de 
la  musique,  diction. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  325.  Budget  annuel 
(1930)52.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  parla  municipalité,  en  1023 
Tous  les  cours  sont  gratuits. 

CONSTANTWE 

Directeur  :  M.  Edouard  Bion. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  basson,  cor,  déclamation. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  200.  Budget  annuel 
(1930)  35.000  francs. 

Fondée  au  début  de  1928  par  l'orphéon  «  les  En- 
fants de  Constantine  »,  l'école  a  été  municipalisée  à 
la  fin  de  la  même  année.  L'enseignement  est  payant. 

DUNKERQUE 

Directeur  :  M.  Alexandre  Rouzeré. 

Enseignement:  harmonie,  solfège,  chant,  violon, 
violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois,  clarinette, 
basson,  saxophone,  cor,  cornel,  trompette,  trom- 
bone, saxhorn,  ensemble  instrumental,  ensemble 
vocal. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  350.  Budget  annuel 
(1930)  61.000  francs. 

L'origine  de  l'école  remonte  à  1862.  L'école  'pos- 
sède une  petite  bibliothèque.  L'enseignement  est 
gratuit. 

LIMOGES 

Directeur  :  M.  Léon  Roby. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vio- 
loncelle, contrebasse,  flûte,  hautbois,  clarinette,  bas- 
son, cor,  trombone,  ensemble  instrumental. 

Nombre  mo\en  des  élèves  :  tOO.  Budget  annuel 
(1930)  01.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  en  1910.  Elle  possède  une 
bibliothèque  et  occupe  les  locaux  de  l'ancien  palais 
de  l'évèché.  Les  cours  sont  payants. 

LONS-LE-SAUNIER 

Directeur  :  M.  Emile  Monot. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  violon,  violoncelle, 
flûte,  hautbois,  clarinette,  instruments  en  cuivre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  200.  Budget  annuel 
(1930)  17.000  francs. 

L'école  a  été  ouverte  en  1921,  sur  l'initiative  de  la 
municipalité.  Les  cours  sont  payants. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Directeur  :  M.  Arthur  Michaud. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant ,  décla- 
mation lyrique,  piano,  violon,  alto,  violoncelle,  con- 
trebasse, llûte,  hautbois,  clarinette,  basson,  'saxo- 
phone, cor,  cornet,  trompette,  trombone,  harpe,  his- 
toirede  la  musique,  diction,  déclamation  dramatique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  750.  Budget  annuel 
(1930)  45:i. 000  francs. 

L'école,  fondée  en  1822,  municipalisée  en  1830, 
érigée  en  succursale  du  Conservatoire  de  Paris  en 
1841,  fut  dénationalisée  sur  la  fin  du  second  Empire. 
Elle  sollicite  présentement  la  nationalisation. 

ORAN 

Directeur  :  M.  Francis  Thtbaud. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  décla- 
mation lyrique,  piano,  violon,  alto,  violoncelle, 
contrebasse,  Mute,  hautbois,  clarinette,  basson,  cor, 
cornet,  trompette,  trombone.  Ensemble  vocal,  en- 
semble instrumental,  orchestre,  histoire  de  la  musi- 
que, diction  et  déclamation  dramatique,  danse  ryth- 
mique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  1.000.  Budget  annuel 
(1930)  120.000  francs. 

Fondée  en  1007,  par  M.  Damaré,  avec  une  subven- 
tion de  la  ville,  l'école  a  été,  par  la  suite,  complète- 
ment prise  en  charge  par  la  municipalité. 

RABAT 

Directeur  :  M.  Louis  Snyers. 

Enseignement  :  solfège,  chant, piano,  violon,  alto, 
violoncelle,  contrebasse,  instruments  en  bois  et  en 
cuivre,  ensemble  instrumental  et  vocal,  orchestre, 
diction. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  400.  Budget  annuel 
(1930)  40.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  par  M.  Snyers  en  1924.  Elle 
est  patronnée  et  subventionnée  par  la  Direction  gé  - 
nérale  de  l'Instruction  publique  et  des  Beaux-Art  s 
de  la  résidence.  L'enseignement  est  payant. 

REIMS 

Directeur  :  M.  Jules  Hansen. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  piano,  violon, 
alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois,  clari- 
nette, basson,  cor,  saxhorn,  cornet,  trompette,  trom- 
bone. 

Nombre  moven  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
(1930)  130.000  francs. 

Fondée  par  la  municipalité,  en  1913,  l'école  a  été 
incendiée  et  complètement  détruite  pendant  la  guerre. 
Rouverte  en  1919  dans  les  locaux  d'une  école  pri- 
maire, elle  possède  une  petite  bibliothèque  et  se  re- 
constitue. 

SAINT-QUENTIN 

Directeur  :  M.  Maurice  Viot. 

Enseignement  :  harmonie,  contrepoint,  solfège, 
piano,  violon,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  haut- 
bois, clarinette,  basson,  cor,  cornet,  trompette, 
trombone,  ensemble  instrumental,  orchestre,  his- 
toire de  la  musique. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  370.  Budget  annuel 
(1990)  70.000  francs. 

L'école  a  été  fondée,  en  1875,  par  la  municipalité. 
Fermée  en  1886,  elle  fut  rouverte  en  1889.  Détruite 
pendant  la  guerre,  elle  se  reconstitua  en  1920.  L'en- 
seignement est  gratuit. 


STRASBOURG 

Directeur  :  M.  Fritz  Munch. 

Enseignement  :  composition,  contrepoint  et  fugue, 
harmonie,  solfège,  chant,  déclamation  lyrique,  piano, 
orgue,  violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte, 
hautbois,  clarinette,  basson,  cor,  trompette,  trom- 
bone, harpe,  ensemble  instrumental,  ensemble 
vocal,  histoire  de  la  musique,  déclamation  drama- 
tique. 

Nombre  moven  des  élèves  :  300.  Budget  annuel 
(19301  563.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  en  18"i5,  par  la  municipalité. 
Elle  possède  une  bibliothèque  et  est  très  bien  ins- 
tallée dans  l'ancien  palais  du  Parlement.  L'ensei- 
gnement  est  payant. 

TUNIS 

Directeur  :  M.  Emile  Pajot. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  vio- 
loncelle, instruments  en  cuivre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  240.  Budget  annuel 
(1930)  60.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  en  1886,  par  la  direclion  de 
l'instruction  publique  et  des  beaux-arts  de  la  Ré- 
gence, sous  la  dépendance  de  laquelle  elle  est  pla- 
cée. Une  rétribution  scolaire  est  perçue. 

VERSAILLES 

Directeur  :  M.  César  Geloso. 

Enseignement  :  harmonie,  contrepoint  et  fugue, 
chant,  piano,  violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse, 
llûte,  hautbois,  clarinette,  basson,  cor,  trompette, 
trombone,  harpe,  déclamation. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  360.  Budget  annuel 
(1930)  136.500  francs. 

L'école  a  été  fondée  en  1878,  par  la  municipalité. 
L'enseignement  est  payant. 

III.  Écoles  priiécs  de  musique. 


Directeur  :  M.  Paul  Freu  w  \. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  hautbois, 
clarinette,  trompette,  cuivres,  diction,  déclamation, 
danse,  ensemble  instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  200.  Budget  annuel 
(1930)  70.000  francs. 

L'école  doit  son  existence  à  l'initiative  de  M.  Geor- 
ges Picard,  professeur  au  lycée  de  Casablanca;  elle 
a  été  fondée  en  1917.  Elle  reçoit  des  subventions  de 
la  municipalité  (25.000  fr.),  du  cabinet  civil  de  la  ré- 
sidence (5.000)  et  de  la  direction  de  L'enseignement 
(10.000).  Les  cours  sont  payants  et  ont  pris,  depuis 
peu,  un  développement  qui  permet  d'augurer  liés 
favorablement  l'avenir  de  cet  établissement. 


Directeur:  M.  Théophile  Gilbert. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon, 
violoncelle,  clarinette,  saxophone,  instruments  en 
cuivre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  130.  Budget  annuel 
(1930)  25.000  fr.  L'école,  fondée  par  son  directeur 
actuel,  en  1921,  reçoit  une  subvention  de  1000  francs 
de  la  municipalité.  Il  est  perçu  une  rétribution  sco- 
laire. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    361 


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ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Directeur  :  M.  J.  M.  Legendre. 

Enseignement  :  solfège,  chant,  piano,  violon,  alto, 
violoncelle,  contrebasse,  instruments  à  vent,  en- 
semble instrumental  et  vocal,  histoire  de  la  musi- 
que, diction. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  250.  Budget  annuel 
(1930)  37.000  francs. 

L'école  a  été  fondée  en  1919  par  M.  Legendre.  Elle 
ne  reçoit  aucune  subvention.  Tous  les  cours  sont 
payants. 

FONTAINEBLEAU  ' 

Directeur  :  M.  Camille  Decreux. 

Enseignement:  composition,  contrepoint  et  fugue, 
harmonie,  solfège,  chant,  déclamation  lyrique, 
piano,  orgue,  violon,  violoncelle,  harpe,  histoire  de 
la  musique,  direction  d'orchestre,  accompagnement 
au  piano,  diction  et  mise  en  scène. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  125.  Budget  annuel 
(1930)  800.000  francs. 

Le  Conservatoire  américain  de  Fontainebleau, 
école  des  hautes  études  musicales  en  France,  a  été 
créé,  en  1921,  dans  le  but  de  contribuer  au  rappro- 
chement spirituel  des  peuples  de  France  et  d'Amé- 
rique, en  attirant  chez  nous  l'élite  des  musiciens 
professionnels  américains,  en  leur  faisant  connaître 
nos  méthodes  d'enseignement,  nos  artistes  et  nos 
productions.  Le  Conservatoire,  ouvert  seulement  du 
25  juin  au  2b  septembre,  possède  une  bibliothèque. 
Les  élèves  payent  une  rétribution  scolaire  de  7.500 
francs. 

GRENOBLE 

Directeur  :  M.  A.  Ccichardon. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  chant,  piano, 
violon,  alto,  violoncelle,  contrebasse,  flûte,  haut- 
bois, clarinette,  saxophone,  cor,  trombone,  trom- 
pette, saxhorn.  Ensemble  instrumental. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  225.  Budget  annuel 
(1930)  50.000  francs. 

L'école  a  été  fondée,  en  1922,  par  l'Association  pour 
l'enseignement  post-scolaire  de  Grenoble.  La  muni- 
cipalité lui  alloue  une  subvention  de  30.000  francs. 
Il  est  perçu  une  rétribution  scolaire. 

MULHOUSE 

Directeur  :  M.  Georges  Frey. 

Enseignement  :  harmonie,  contrepoint,  solfège, 
chant,  piano,  violon,  alto,  violoncelle,  flûte,  ensem- 
ble instrumental,  orchestre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  250.  Budget  annuel 
(1930)  48.500  francs. 

Fondée  en  1916  par  J.  B.  Zaun,  l'école  reçoit  une 
subvention  de  2000  fr.  do  la  ville  et  500  fr.  dû  dépar- 
tement du  Haut-Rhin. 

L'enseignement  est  payant. 

ROANNE 

Administrateur  général  :  M.  Félix  Dieidonné. 

Enseignement  :  harmonie,  solfège,  piano,  violon, 
alto,  violoncelle,  contrebasse,  hautbois,  clarinette, 
basson,  saxophone,  instruments  en  cuivre. 

Nombre  moyen  des  élèves  :  170.  Budget  annuel 
(1930)  25.000  fr. 

L'école  a  été  fondée  en  1927,  par  initiative  privée. 


Nous  mentionnons.  à  litre  documentaire,  !>■  Conservatoire  amé- 
n  i.!c  Fontainelilc  au.  Sa  destination  très  spéciale  le  situe  en  dehors 
objet  de  notre  élude. 


Elle  reçoit  une  subvention  de   1.500  francs  de  la 
ville.  Ses  ressources  sont  restreintes. 


Quelques  écoles  ne  figurent  pas  dans  la  monogra- 
phie et  le  tableau  synoptique  qui  précèdent.  Aussi 
bien  s'agit-il  d'établissements  peu  nombreux  et  fort 
peu  importants,  desquels  nous  n'avons  pu  obtenir 
les  renseignements  sollicités. 

Un  budget  global  de  près  de  20.000.000  de  francs 
et  71  écoles  fréquentées  par  plus  de  22.650  élèves, 
tel  est  le  bilan  de  la  situation  matérielle  de  l'ensei- 
gnement musical  public  en  France  et  dans  les  colo- 
nies riveraines  de  la  Méditerranée. 

Quant  à  la  valeur  de  l'enseignement,  on  ne  peut 
que  constater,  çà  et  là,  les  plus  grandes  fluctuations. 
Un  quart  de  nos  conservatoires  provinciaux  sont  de 
grands  établissements  d'enseignement  secondaire, 
allant  jusqu'à  côtoyer,  en  certaines  parties,  l'ensei- 
gnement supérieur.  En  dessous  d'eux,  et  en  nombre 
sensiblement  égal,  se  classent  les  écoles  de  second 
plan  ou  d'enseignement  primaire  supérieur.  Enfin, 
les  petites  écoles,  de  ressources  très  restreintes,  sont 
autant  d'instituts  d'enseignement  musical  primaire. 

CONCLUSIONS 

Ce  n'est  pas  des  points  de  vue  abstraits  et  irréels 
de  l'idéal  que  nous  apprécierons,  en  définitive,  l'of- 
fice rempli  par  nos  .écoles  de  musique.  Œuvre  ou 
aclion  se  jugent  aux  fruits  qu'elles  portent;  mais 
encore,  ne  convient-il  pas  d'attendre  d'un  sol  bien 
cultivé  les  richesses  qui  veulent  un  autre  climat. 
Ainsi  les  raisons  de  notre  jugement  prennent-elles 
leurs  assises  dans  cet  ensemble  de  faits  généraux  et 
particuliers  ;que  nous  avons  passés  en  revue,  et  qui 
constituent  les  contingences  historiques  et  sociales  de 
la  condition  présente  de  l'enseignement  musical. 
L'étendue  et  la  diversité  des  données  examinées 
peuvent  rendre  utile  une  tentative  de  synthèse  géné- 
rale. Nous  nous  efforcerons  d'y  apporter  la  brièveté 
inséparable  de  la  clarté. 

L'enseignement  de  la  musique  fut,  à  l'origine, 
comme  toutes  les  traditions  savantes,  l'œuvre  de 
l'Eglise.  11  la  demeura  jusqu'en  1789  ei.  si  l'on  ne 
peut  absolument  dire  que  l'art  moderne,  né  sur  la 
fin  du  xvii"  siècle,  en  est  le  fruit,  du  moins  en  reçut- 
il  le  principe  de  vie.  Cependant  que,  sur  la  lin  du 
moyen  âge,  la  musique  liturgique  monodique  n'avait 
plus  que  la  valeur  d'une  langue  morte,  qui  allait  en 
s'altérant  progressivement,  sa  sœur  puînée,  la  mu- 
sique religieuse,  affranebiede  l'asservissement  rituel, 
produisait  avec  la  Renaissance  cet  étonnant  rameau 
que  fut  la  polyphonie  vocale,  dont  ou  peut  dire  qu'il 
servit  de  truchement  entre  l'art  médiéval  et  l'art  pro- 
fane. Cet  art  profane,  privé  d'enseignement  jusqu'a- 
lors et  bridé  en  son  essor,  s'appropria  les  conquîtes 
des  maîtres  de  la  polyphonie  vocale  et  en  étendit  le 
champ.  Ses  progrès  et  ses  succès  créèrent  des  néces- 
sités nouvelles,  spéciales,  et  l'éloignement  se  fit  peu 
à  peu  entre  l'enseignement  très  particulier  donné 
par  l'Eglise  et  les  besoins  nés  de  la  récente  évolu- 
tion de  la  musique  instrumentale  et  dramatique.  Si 
le  monopole  d'enseignement  de  l'Eglise  demeura  en- 
core entier  en  France,  aux  xyh"  et  xvin"  siècles,  ce  fut 
pour  des  raisons  de  fait,  d'habitude,  et  aussi  d'indif- 
férence du  pouvoir.  Quoique  très  richement  doté, 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


CONSERVATOIRES  DE  PROVINCE    3613 


cet  enseignement  était  peu  productif  :  il  restait  cir- 
conscrit à  un  petit  nombre  de  matières  fort  éloignées 
des  fins  présentes  de  la  musique.  Les  quatre  cents 
maîtrises  que  l'on  comptait  dans  le  royaume  avaient 
une  autre  destination  que  la  formation  des  nombreux 
artistes  qu'exigeaient  les  spectacles  et  les  concerts, 
et,  bien  avant  la  Révolution,  des  signes  avant-coureurs 
témoignaient  du  besoin  d'instituer  un  nouvel  ensei- 
gnement. 

Les  événements  politiques  de  1780  provoquèrent 
un  dénouement  brusqué  de  la  sourde  gestation  qui 
se  décelait  alors.  La  Révolution  qui  fut,  psychologi- 
quement, la  manifestation  d'un  individualisme  vio- 
lent et  comme  affamé  par  une  longue  contention, 
exprima,  avec  une  vivacité  particulière,  toutes  les 
réalités  sensibles  et  immédiates.  La  conjonction,  en 
apparence  contradictoire,  d'un  matérialisme  et  d'un 
idéalisme  également  oulranciers,  mais  tels  que  l'his- 
toire en  offre  de  nombreux  exemples,  éleva  un  mo- 
ment la  musique  au  rang  d'une  institution  nationale 
et  la  mêla  à  la  vie  civique.  La  prise  à  charge  par 
l'Etat  de  son  enseignement  fut  la  conséquence  de 
son  utilisation  comme  agent  d'éducation  publique. 
C'est  ainsi  que  la  Convention  fut  amenée  à  créer,  à 
Paris,  un  centre  d'études  supérieures,  le  Conserva- 
toire,  el  à  étudier  l'organisation,  dans  les  déparle- 
ments, d'écoles  spéciales  de  musique,  secondaires  et 
primaires. 

Les  malheurs  des  temps  ne  permirent  pas  de  réa- 
liser ce  dernier  projet,  mais  une  idée  féconde  était 
entrée  en  jeu  dont  le  nouvel  organisme  social  allait 
chercher  les  formes.  Impuissante  à  se  réaliser  durant 
tout  le  premier  Km  pire,  cette  idée  prit  corps  au 
lendemain  de  la  paix  qu'apportaient  les  traités  de 
Vienne.  Sous  la  poussée  de  l'opinion  publique,  les 
pouvoirs  locaux  de  quelques  villes  des  départements 
prirent  l'initiative  d'ouvrir  des  écoles  laïques  de  mu- 
sique. Ces  écoles,  instituées  avec  les  moyens  res- 
treints qui  se  trouvaient  sur  place,  étaient  des  écoles 
d'instruction  professionnelle.  Bien  que  peu  nom- 
breuses encore,  elles  tendaient  à  mettre  l'enseigne- 
ment musical  à  la  portée  des  masses,  elles  consti- 
tuaient un  acheminement  vers  l'instauration  d'un 
enseignement  musical  éducatif,  c'est-à-dire  ressor- 
tissant à  l'école  primaire.  Peu  après  l'établissement 
de  la  monarchie  de  Juillet,  se  produisirent,  en  effet, 
les  premières  tentatives  d'introduction  de  la  musique 
dans  les  écoles  publiques,  mais,  mal  préparées,  ces 
tentatives  échouèrent. 

Cet  échec  agit  à  la  manière  d'un  choc  en  retour 
sur  les  écoles  spéciales  de  musique  des  départements. 
Les  municipalilés,  ou,  à  leur  défaut,  des  initiatives 
privées,  ouvrirent  des  cours  populaires  de  musique 
qui,  bien  accueillis,  s'érigèrent  rapidement  en  écoles 
mi-primaires  et  mi-secondaires.  Sans  unité  de  direc- 
tion et  de  formation,  privées  des  appuis  techniques 
nécessaires  et  de  ressources  suffisantes,  ces  écoles 
se  multiplièrent  sous  le  second  Empire,  mais  elles  ne 
représentaient,  au  point  de  vue  artistique,  qu'une 
très  faible  valeur.  Elles  en  celaient  une,  fort  grande, 
pour  l'avenir  de  l'enseignement  musical,  au  jour  où 
celui-ci  cesserait  d'êlre  négligé  par  les  pouvoirs  pu- 
blics. Ce  fut  la  troisième  République  qui  entreprit, 
en  1883,  de  venir  en  aide  à  ces  écoles  départemen- 
tales, et  qui  permit  à  quelques-unes  d'entre  elles  de 
sorlir  de  l'état  de  marasme  et  d'abandon  en  lequel 
elles  se  trouvaient. 

On  voit  sous  quel  aspect  se  posa  à  ce  moment  le 
problème  de  l'organisation  de  l'enseignement  mu- 


sical dans  les  écoles  spéciales  de  musique.  Un  état  de 
choses  existait,  en  lui-même  très  défectueux,  mais 
l'Etat,  privé  de  moyens  financiers  suffisants,  se  trou- 
vait dans  l'impossibilité  d'assumer  l'entretien  des 
écoles.  Son  intervention  ne  pouvait  que  se  borner 
à  améliorer  leur  fonctionnement  et  leur  rendement, 
en  conservant  à  ces  établissements  leur  destination 
originelle.  C'était  là,  en  quelque  manière,  une  entre- 
prise de  restauration,  délicate  et  périlleuse  et,  pour 
lout  dire,  aléatoire. 

Partant  de  cette  observation  que  c'est  de  l'ensei- 
gnement supérieur  que  dépend  la  valeur  et  la  portée 
de  l'enseignement  primaire,  il  s'agissait  d'adjoindre 
un  cycle  d'études  secondaires  a  toutes  les  écoles  des 
départements  qui  étaient  susceptibles  d'un  tel  essor. 
Les  cinq  écoles  succursales  alors  existantes  laissaient 
entrevoir  la  possibilité  d'obtenir  un  semblable  ré- 
sultai. 

Ce  résultat,  aujourd'hui  acquis,  fut  l'œuvre  du  ré- 
gime de  la  nationalisation. 

Les  écoles  de  musique,  appelées  à  remplir  un 
double  office,  primaire  et  secondaire,  se  trouvèrent 
en  présence  d'une  difficile  et  lourde  lâche.  Pour  ap- 
précier la  façon  dont  celle-ci  fut  accomplie,  il  faut 
se  représenter  en  quelles  conditions,  matérielles  et 
morales,  nos  écoles  de  province  se  trouvaient  pla- 
cées et  le  demeurent  encore  aujourd'hui. 

Matériellement,  la  plupart  de  nos  écoles  sont  mai- 
grement subventionnées.  Le  recrutement  du  corps 
enseignant,  si  l'on  veut  y  apporter  quelques  soins, 
en  est  fort  difficile.  Les  traitements  otferts  sont 
insuffisants,  ce  qui  restreint  à  la  localité  les  possi- 
bilités de  choix  du  personnel,  pour  certaines  caté- 
gories de  classes,  tout  au  moins.  Or,  le  professorat 
musical  étant  libre  et  sans  contrôle,  on  peut  mesu- 
rer jusqu'à  quel  point  le  défaut  de  préparation  pro- 
fessionnelle se  fait  sentir,  en  dehors  des  très  grands 
cenlres,  c'est-à-dire  dans  la  majorité  des  cas. 

Moralement,  les  écoles  de  province,  très  diverses, 
il  est  vrai,  sont  confondues  dans  un  sentiment  de 
mésestime  générale  ou  de  scepticisme  indulgent. 
Beaucoup  de  municipalités  ne  leur  portent  qu'une 
attention  restreinte  et  distraite ,  qui  déprime  les 
meilleures  volontés,  si  fréquentes  et  si  désintéressées 
en  notre  pays.  In  fait  est  incontestable  :  c'est  que  là 
où  la  diligence  des  pouvoirs  publics  ne  se  trouve 
pas  en  défaut,  on  voit  se  réaliser  des  oeuvres  du  plus 
haut  intérêt  et  de  la  meilleure  qualité.  La  notion  que 
se  font  beaucoup  de  Français  de  la  musique  est  celle 
d'un  art  bourgeois  d'agrément.  Sa  grandeur,  en  tant 
que  manifestation  spéculative  du  génie  humain,  et 
sa  puissance  d'action  sociale  dépassent  singulière- 
ment ces  courtes  vues. 

Au  total,  les  écoles  de  musique  des  départements 
n'occupent  pas  le  rang  qui  leur  convient  dans  l'ap- 
préciation morale  et  matérielle  de  leur  fonction  et 
de  leurs  besoins.  Tantôt  elles  sont  victimes  d'une 
indulgence  qui  les  dessert,  tantôt  elles  sont  mé- 
connues ou  mésestimées  injustement. 

Il  -.'avère,  pour  quiconque  y  rétléchit,  que,  sans 
perdre  de  vue  les  hauts  buts  de  l'art,  ce  n'est  pas 
seulement,  ni  même  principalement,  en  y  référant 
que  l'on  doit  juger  les  écoles  de  musique.  L'ne  école 
n'est  pas  une  Académie,  et  nos  écoles  sont,  avant 
tout,  des  centres  d'artisanat.  11  ne  serait  pas 
plus  juste  de  vouloir  juger  au  nom  de  la  science 
pure,  ou  de  la  seule  littérature,  l'enseignement  de 
nos  lycées  et  de  nos  collèges.  L'art  véritable, 
comme  la  science  et  la  littérature,  est  bien  au  delà 


.Mil", 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  CONSERVATOIRE 


de  toutes  les  limites  scolaires,  à  quelque  degré  qu'on 
les  considère.  L'art,  la  science  ou  la  littérature  sont 
œuvre  de  création,  c'est-à  dire  un  fait  personnel  et 
individuel.  L'enseignement  est,  au  contraire,  par 
destination,  un  fait  commun,  et  collectif.  De  l'un  à 
l'autre  le  rapport  qu'il  convient  d'établir  est  celui 
d'un  échange  et  d'une  transfusion,  d'un  aliment  lui- 
même  producteur  d'autres  aliments. 

Nous  n'avons  pas  besoin  de  redire  ce  qu'est  l'ensei- 
gnement de  nos  écoles  de  musique.  11  est,  effective- 
ment, la  sauvegarde  de  toutes  les  manifestations 
de  la  vie  musicale  en  province,  et  si,  d'aventure,  nos 
écoles  venaient  a  disparaître,  il  n'est  pas  jusqu'à 
Paris  qui  ne  mesurerait  l'importance  de  leurs  ser- 
vices perdus.  Objectivement,  nous  ne  pensons  pas  que 
l'enseignement  qui  est  donné  dans  les  meilleures 
d'entre  elles  ne  puisse  soutenir  la  comparaison  avec 
celui  des  organisations  étrangères  les  plus  favori- 
sées. Relativement  aux  crédits  affectés  à  l'entretien 
de  ces  écoles,  les  résultats  qu'elles  donnent  sont  très 
certainement  sans  pareils  en  aucun  pays.  Si  l'ensei- 
gnement musical  accuse,  en  France,  un  retard  sen- 
sible sur  les  modèles  que  l'on  peut  nous  proposer, 
c'est  surtout  du  point  de  vue  éducatif,  c'est-à-dire 
primaire.  Et  il  en  sera  ainsi  tant  que  la  musique 
n'aura  pas  été  incorporée  dans  l'enseignement  gé- 
néral. Cette  situation  met  nos  écoles  spéciales  en 
position  désavantageuse,  on  ne  saurait  le  nier.  Cel- 
les-ci n'en  ont  que  plus  de  mérite  à  opérer  le  re- 
dressement que  leur  impose  une  telle  défaillance. 

Quoi  qu'il  en  soit,  grâce  au  concours  de  valeurs 
individuelles  exceptionnelles,  une  organisation  pres- 
que improvisée  pare,  non  sans  bonheur,  air:  besoins 
essentiels.  Cela  est  assez  dans  une  certaine  manière 


française,  soit!  mais  ce  sont  là  des  félicitations  à 
l'image  d'une  arme  à  deux  tranchants.  Quels  résul- 
tats n'obtiendrait-on  pas  de  ces  mêmes  valeurs  digne- 
ment soutenues  et  encouragées!  Car  nulle  opinion 
n'est  plus  erronée  que  celle  qui  tend  à  accréditer  la 
croyance  en  l'inaptitudedes  Français  à  recevoir  une 
éducation  musicale  el  en  leur  manque  de  goût  pour 
la  pratique  de  la  musique.  Mais  on  n'oeuvre  pas  sans 
labeur  et  sans  effort.  Lorsque  la  monarchie  eut  une 
politique  des  lettres  et  des  beaux-arts,  sous  Charles  V, 
François  1er  ou  Louis  XIV,  on  vit  quels  fruits  l'arbre 
porta.  Bien  que  la  musique  eût,  au  xvin'  siècle,  dé- 
passé la  péi'iode  de  son  adolescence,  l'ancien  régime 
n'avait  pas  de  politique  à  son  égard.  Celle  de  la  Ré- 
volution fut  éphémère.  Mais  la  France  d'aujourd'hui 
se  doit  d'en  avoir  une,  et  cela  s'entend  à  la  façon 
dont  il  convient  que  des  idées  de  prévoyance  pré- 
sident à  l'exploitation  rationnelle  des  ressources 
nationales,  en  dehors  de  toute  velléité  de  gouverne- 
ment sur  les  artistes  et  leurs  créations. 

L'organisation  de  l'enseignement  musical  n'est 
qu'une  face  de  ce  vaste  problème,  qui  est  un  problème 
de  volonté,  d'ordre,  de  méthode  et  de  discipline. 

Qu'il  y  soit  joint,  en  outre,  un  peu  de  cet  enthou- 
siasme sans  lequel,  selon  une  parole  célèbre,  rien  de 
grand,  en  art,  ne  se  fait,  et  la  France  produira  spon- 
tanément des  modèles  achevés.  Puisse  cette  convic- 
tion attirer  à  nos  écoles  des  provinces  d'agissantes 
et  nouvelles  sympathies,  qu'elles  méritent,  pour  tout 
le  bien  qu'on  leur  doit,  et  qui  est  grand. 

Edmond  MAL'RAT, 


L'ÉCOLE  DE  MUSIQUE  CLASSIQUE  NIEDERMEYER 

Par  Gustave  LEFÈVRE 

DIRliCTEl'h    DE    I.'ÉCOI.E    NIEDERMEYER    (1865-1910 

Et   Madame  Veuve  Henri   HEURTEL,  née  LEFÈ  V  RE-NIEDERME  YER 

ADMINISTRATEUR    DE    L'ÉCOLE    NIEDERMEYER 


CREATION   DE    L'ECOLE 

Avant  1789,  la  France  comptait  100  maîtrises,  où 
l'on  enseignait  le  chant,  la  composition,  l'orgue  et 
le  clavecin.  Nos  meilleurs  compositeurs  sont  sortis 
de  ces  établissements;  en  1791,  les  maîtrises  furent 
supprimées,  au  grand  dommage  de  l'art  musical. 

A  la  fin  de  l'Empire  et  sous  la  Instauration,  les 
ministres  des  cultes  tentèrent  de  les  rétablir  et  sub- 
ventionnèrent les  bas  chœurs  des  églises;  Choron 
fonda  une  Ecole  de  musique  afin  de  leur  donner  un 
lien  et  d'en  former  les  maîtres  ;  mais  elles  ne  retrou- 
vèrent jamais  leur  ancienne  splendeur,  et  l'Ecole  de 
Choron  elle-même  sombra. 

La  musique  religieuse  était  en  pleine  décadence; 
elle  avait  perdu  son  caractère  sacré.  Elle  végétait 
encore  ainsi  misérablement  en  18;>3,  quand  le  gou- 
vernement résolut  de  mettre  un  terme  à  cet  état  de 
choses  et  rechercha  les  moyens  de  relever  et  d'amé- 
liorer la  musique  d'église. 

Niedermeyer  avait  formé  le  projet  de  créer  une 
Ecole  spéciale  de  musique  religieuse  en  y  appliquait 
les  réformes  apportées  par  son  Traité  de  plain-chant 
et  les  améliorations  que  lui  inspirèrent  son  vaste 
savoir  et  la  profondeur  de  son  idéal  artistique. 

Il  écrivit  son  projet  à  M.  Fortoul,  ministre  de 
l'instruction  publique  et  des  cultes,  et  il  obtint  l'ap- 
probation de  Mt'r  Sibour,  archevêque  de  Paris,  à 
laquelle  se  joignirent  celles  de  tous  les  évèques.  Son 
ami  le  prince  de  la  Moskowa,  grand  veneur,  solli- 
cita avec  insistance  Napoléon  III  pour  qu'il  s'intéres- 
sât à  l'Ecole  projetée  :  ses  démarches  furent  couron- 
nées de  succès,  et,  par  décret  du  28  novembre  1853, 
l'Ecole  de  musique  religieuse  fut  fondée  et  sub- 
ventionnée par  l'Etat.  A  dater  du  1er  décembre  lS.'J.'î, 
porte  le  décret,  il  sera  accordé  une  allocation  an- 
nuelle de  18  000  francs  pour  l'entretien  d'un  certain 
nombre  de  demi-bourses. 

Niedermeyer  prit  la  direction  de  l'Ecole,  qui  avait 
pour  but  de  former  des  maîtres  de  chapelle  et  des 
organistes  par  une  étude  approfondie  du  plain- 
chant,  base  de  la  musique  religieuse,  et  des  maîtres 
classiques  des  xv°,  xvi»,  xvnB  et  rym1  siècles.  Or 
seul  encore,  Niedermeyer  avait  le  goût  et  la  compé- 
tence voulus  pour  atteindre  un  but  si  élevé.  La  ré- 
forme de  la  musique  religieuse  requérait  une  édu- 
cation tout  à  fait  particulière.  Né  à  Nyon  en  1802, 
Niedermeyer,  élève  de  Moschelès  pour  le  piano  et  de 
Copyright  by  Librairie  Delagrave,  19-V). 


Forster  pour  l'harmonie,  avait  reçu,  pour  le  contre- 
point et  la  composition,  les  conseils  et  les  avis  de 
FiORAVAMi.de  ZiNGARELLi,  tous  deux  maîtres  de  cha- 
pelle de  Saint-Pierre  de  Home,  compositeurs  reli- 
gieux éminents  ;  prés  d'eux,  il  s'était  épris  de  la  belle 
musique  religieuse  italienne,  dans  laquelle  on  re- 
cherchait la  pureté  mélodique,  des  harmonies  clai- 
res; près  de  ces  maîtres  qui  conservaient  le  culte  de 
la  beauté  antique  et  qui,  par  un  scrupule  peut-être 
exagéré,  se  refusaient  à  pratiquer  les  procédés  mo- 
dernes de  la  composition,  il  se  créa  un  idéal  de 
musique  sévère,  grave  et  noble,  donl  il  est  inutile 
de  faire  remarquer  les  convenances  el  les  rapports 
avec  la  musique  sacrée.  Personne  autre  en  France 
ne  possédait  à  ce  degré  une  éducation  aussi  adé- 
quate au  but  poursuivi,  car,  d'une  part,  il  s'agissait 
île  former  des  compositeurs  de  musique  liturgique; 
d'autre  part,  il  fallait,  en  même  temps,  former  des 
maîtres  de  chapelle  appelés  par  leur  fonction  à  diri- 
ger des  chantres,  des  enfants  de  choeur;  il  fallait 
avoir  passé  par  la  forte  discipline  de  l'école  italienne 
pour  pouvoir  réussir  à  transmettre  son  enseigne- 
ment, sa  gymnastique  vocale;  c'était  un  avantage 
inappréciable,  même  une  nécessité,  qui  fit  le  succès 
de  NiEDERMr.ïER  et  de  son  école. 


PROGRAMME   DE  L'ECOLE 

Bien  que  subventionnée  par  l'Etat,  l'Ecole  est  libre, 
et  la  direction  est  indépendante  pour  le  programme 
des  études,  qui,  on  le  verra,  ont  subi  quelques  chan- 
gements; les  cours  ont,  en  ell'et,  été  augmentés  el 
agrandis.  L'Ecole  de  musique  religieuse  ou  Ecole 
Niedermeyer  (du  nom  de  son  fondateur)  est  le  premier 
modèle  (appliqué  à  l'art  musical)  de  ces  écoles  libres 
et  indépendantes  que  l'on  a  vu  éclore  à  la  fin  du 
xixa  siècle,  el  qui  s'appellent  Ecole  des  Hoches,  Col- 
lège de  Normandie,  etc.;  écoles  libérales,  maîtresses 
d'elles-mêmes,  non  assujetties  à  un  programme  uni- 
forme et  rigide,  et  pouvant  s'adapter  facilement  aux 
nécessités  d'une  éducation  et  d'une  instruction  spé- 
ciales. 

Ainsi,  l'Ecole  de  musique  religieuse,  tout  en  don- 
nant l'enseignement  musical  des  conservatoires,  eu 
permettant  aux  élèves  de  faire  «  leurs  humanités 
musicales  »,  leur  fournit  en  même  temps  l'occasion 
de  poursuivre  tel  ou  tel  but  particulier,  selon  leurs 
besoins  ou  leurs  capacités. 


'.NCYCLOPÈDIE  DE  LA  MrSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


L'enseignement  de  L'Ecole  esl  triple  :  religieux, 
général,  musical. 

L'enseignement  général,  confié  à  des  professeurs 
de  l'Université,  comprend  la  langue  et  la  littérature 
françaises,  —  l'histoire  et  la  géographie,  —  les  élé- 
ments des  sciences  et  du  latin. 

L'enseignement  musical  comprend  :  le  solfège,  — 
le  chant,  —  la  musique  d'ensemble,  —  le  plain- 
chant  et  son  accompagnement,  —  le  piano,  —  l'orgue, 
—  l'harmonie,  —  le  contrepoint,  —  la  fugue,  —  la 
composition  musicale,  —  l'harmonie  pratique,  — 
l'accompagnement  de  la  partition,  —  l'improvisa- 
tion, —  l'histoire  de  la  musique. 

Le  succès  de  l'Ecole  fut  très  grand,  le  programme 
rempli,  même  dépassé;  et  le  gouvernement  conti- 
nua de  favoriser  l'institution,  accorda  des  éloges  à 
sou  éminent  directeur,  créa  des  diplômes  d'orga- 
nistes pour  les  élèves  qui  satisfaisaient  aux  examens, 
et, par  un  arrêté  du  1"  juillet  1854, fonda  trois  pre- 
miers prix  pour  la  composition  musicale,  l'orgue  et 
l'accompagnement  du  plain-chant. 

L'histoire  de  l'Ecole  est  l'histoire  de  la  musique 
religieuse  depuis  cinquante  ans.  Niedermeyer  et  l'E- 
cole ont  sauvé  les  traditions  de  la  saine  musique 
religieuse,  sauvé  le  plain-chant,  sauvé  les  vieilles 
tonalités  de  la  musique  polyphonique  du  xvi°  siècle, 
d'abord  en  restaurant  l'étude  de  l'harmonie,  en  pro- 
pageant une  nouvelle  méthode  d'accompagnement 
modal  du  plain-chant,  en  créant  la  Maîtrise,  enfin 
en  publiant  et  en  exécutant  les  œuvres  des  maîtres 
de  la  Renaissance  française,  italienne,  en  envoyant 
dans  les  principales  maîtrises  des  cathédrales  de 
France  des  organistes  habiles  et  instruits. 

Le  choix  des  professeurs  fut  toujours  fait  avec  la 
plus  remarquable  sagacité;  nommons  les  plus  connus 
et  les  plus  célèbres  :  Saint-Sains,  Scumitt,  Dietsch, 

LORET,  DE   BÉRIOT,    GÉDALGE,    VlARDOT,    G.   HOL'DAUD,   DE 

Ménil,  Philipp,  Déco.  Quelques-uns,  Gigout,  Laussel, 
Marlois,  G.  Fauré,  Busser,  Letorey,  Messager,  Flan- 
chet, J.  Stoltz,  Bellenot,  A.  Georges,  Caffol,  Mas- 
suelle,  J.  Froment,  H.  Expert,  Bollaéi\t,  comptent 
narrai  les  anciens  élèves  de  l'Ecole;  mentionnons 
encore  Audran,  V.  Roger,  Vasseur,  Périlhou,  Liita- 
cuer,  Kotzul,  Missa,  Henri  Lutz,  Boellman.n,  Colin. 
Ces  élèves  honorent  par  leur  talent  les  maîtres 
qui  les  ont  formés.  Tous  ont  puisé  à  l'Ecole  les 
moyens  de  se  créer  une  position  honorable,  ou  y  ont 
reçu  de  sages  leçons  et  une  instruction  musicale 
fort  précieuse. 

Parce  qu'un  certain  nombre  d'élèves,  et  surtout 
les  mieux  doués  comme  compositeurs,  se  sont  adon- 
nés au  théâtre,  il  ne  faut  pas  en  tirer  une  consé- 
quence fausse  et  dire  :  l'Ecole  a  manqué  son  but  et 
n'a  pas  rempli  son  programme.  L'Ecole  forme  d'a- 
bord des  musiciens  :  de  ces  musiciens,  elle  fait  en- 
suite des  organistes,  des  maîtres  de  chapelle,  des 
professeurs;  par  là,  elle  a  une  destination  spéciale. 
La  plupart  des  élèves  ont  suivi  cette  dernière  voie 
avec  profit,  avec  honneur.  Les  autres  également  ont 
été  organistes  ou  le  sont  même  encore,  malgré  les 
succès  remportés  au  théâtre.  Or,  loin  de  nuire  à  leur 
vocation  pour  l'art  dramatique,  les  fortes  humanités 
musicales  qu'ils  ont  faites  en  vue  de  la  musique  re- 
ligieuse classique  ont  nourri  d'une  moelle  spécifique 
leur  intelligence  musicale,  elles  lui  ont  donné  une 
saveur  originale  qu'elle  n'aurait  pas  eue  autre- 
ment. Ainsi  dans  les  lettres,  on  a  vu  des  élèves  de 
séminaire,  au  lieu  de  s'engager  dans  l'état  ecclésias- 
tique, rentrer  dans  le  monde  et  y  montrer  comme 


écrivains  des  qualités  supérieures  de  slyle,  d'expo- 
sition,  de  composition,  que  seule  la  forte  discipline 
latine  el  grecque  avait  fait  éclore  :  Renan  en  est  un 
exemple  célèbre.  Donc,  l'Ecole  de  musique  classique 
et  religieuse  ne  faillit  point  à  sa  destinée  pour  ceux 
de  ses  élèves  qui  vivent  en  marge  de  l'église. 


HISTOIRE   DE   L'ECOLE 

Niedermbyer,  l'Ecole  créée  et  organisée,  y  consa- 
cra son  existence.  Toute  sa  sollicitude  était  pour 
les  élèves,  qui  arrivèrent  en  nombre.  Nous  avons 
dit  plus  haut  les  noms  des  plus  célèbres.  Malgré  les 
charges  fort  absorbantes  de  la  direction,  .Nieder- 
meyer s'était  réservé  les  classes  de  plain-chant  el  de 
composition  musicale,  le  cours  supérieur  de  piano. 
Il  apporta  un  soin  minutieux  à  remplir  le  plan  des 
études;  il  l'exposa  aux  maîtres  avec  une  telle  con- 
viction que,  quoique  non  écrit,  son  programme  fut 
appliqué  exactement,  et  son  programme  s'est  con- 
servé jusqu'à  nous  parla  tradition, respectueuse  des 
intentions  du  fondateur. 

Une  bibliothèque  musicale  choisie  qui  renfermait 
les  grands  classiques  du  piano  et  de  l'orgue,  une 
importante  collection  des  chefs-d'œuvre  des  xvr, 
x\iie,  xvinc  et  xixe  siècles,  fut  mise  à  la  disposition 
des  élèves;  mais  tout  livre  de  mauvaise  musique 
était  impitoyablement  proscrit  de  l'Ecole. 

Pour  stimuler  les  élèves  au  travail,  et  en  même 
temps  pour  ne  pas  être  accusé'  de  donner  des 
diplômes  de  complaisance  à  des  élèves  médiocres, 
Niedermeyer  établit  à  la  fin  de  l'année  des  concours 
passés  en  présence  d'un  jury  composé  d'artistes 
étrangers  à  l'école.  Ces  concours  oITraient  des  diffi- 
cultés véritables.  Des  œuvres  de  J.-S.  Bach  devaient 
v  être  exécutées.  Quelques  années  à  peine  d'un  tel 
régime,  et  déjà  d'excellents  maîtres  de  chapelle, 
d'habiles  organistes  étaient  envoyés  dans  les  princi- 
pales églises  de  France. 

La  direction  de  l'Ecole,  le  professorat  ne  suffi- 
saient pas  à  remplir  la  vie  si  active  de  Niedermeyer. 
à  éteindre  son  zèle  pour  la  réforme  de  la  musique 
religieuse,  pour  la  diffusion  du  grand  art  classique; 
il  fonda  et  dirigea  un  journal,  la  Maîtrise.  M.  Joseph 
d'Ortigue  fut  désigné-  comme  rédacteur  en  chef.  Le 
plain-chant,  Palestrina,  Bach  formèrent  la  trinilé 
d'un  programme  grandiose  de  musique 
u  Nous  nous  etlorcerons,  écrivait  Nikdkhyikw-h.  de 
signaler  tout  ce  que  l'on  tente  pour  le  maintien  des 
saines  traditions  liturgiques,  grégoriennes  et  musi- 
cales, et  dans  les  églises  de  Paris,  e1  dans  toutes 
celles  de  France  et  de  l'étranger.  Nous  voudrions 
que  notre  journal  fût  comme  l'écho  fidèle  des  accents 
^ui  s'élèvent  de  tous  les  sanctuaires,  pour  que  tout 
ce  qui  se  fait  de  bien,  de  conforme  à  l'esprit  de  l'E- 
glise, fûl  à  l'instant  connu,  imité-,  répété'  sur  tous  les 
points...  Cette  œuvre  n'est  pas  une  œuvre  de  critique 
et  de  dispute  :  c'est  avant  tout  une  œuvre  de  fonda- 
tion, d'édificatioo  et  Je  propagation.  » 

La  Maîtrise  a  paru  pendant  trois  années  (1837- 
1838,  1858-1839,  1859-1860)  dans  un  grand  format 
in-quarto  avec  huit  pages  de  texte,  trois  morceaux 
de  chant  et  trois  morceaux  d'orgue.  Elle  l 'pandit 
les  théories  i  I  les  idées  «le  IN'iedermeyer  el  de  l'Ecole- 
Elle  fut  le  véhicule  de  la  vraie  musique  religieuse; 
par  les  remarquables  écrits  du  fondateur,  puis  de 
iJOrtigi  i  ,  de  Schmitt,  de  Laurentie,  des  abbés  Vsax, 
Jorvi-,  Stéphen  Morelot,  de  Goussemaker,  de  Sigia- 


TECHNIQUE,  ESTHËTIQLE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ÉCOLE  NIEDERMEYER    3619 


mond  Newkom,  elle  établit  le  code  de  la  musique 
sacrée,  du  jeu  de  l'orgue;  par  les  plus  belles  com- 
positions d'ÛRLANDE  diî  Lassus,  de  Palestrtna,  de 
Vittoria,  de  Giovanni  Croce,  de  Durante,  de  Mar- 
cello, de  Mozart,  de  Haendel,  de  Frescobaldi,  de 
Scarlatti,  de  Rinck,  de  Clérambault,  de  J.-S.  Bach, 
de  Rossini,  d'AuBER,  de  Goungd,  d'Ambroise  Thomas, 
de  Loret,  de  Lefébl-re-Wi  ly.  de  Th.  Dubois,  de  Ge- 
vaert,  etc.,  elle  répandit  dans  le  public  le  goût  d'une 
musique  élevée,  purifia  le  sanctuaire  des  ineptes 
médiocrités  qui  l'infestaient.  Le  répertoire  idéal  de 
la  musique  d'église  était  créé. 

Parla  parole  et  pai  a  ;  lume,  l'art  religieux  était 
restauré.  Il  fallait,  pour  achever  l'œuvre,  sauver  le 
plain-chant  du  dédain  el  du  mépris  qu'il  rencontrait 
partout.  Dès  l'année  1840,  treize  ans  avant  la  fonda- 
tion de  l'Kcole,  Niedermeyer  avait  créé  avec  le  prince 
de  la  Moskowa  la  Société  de  musique  vocale  et  clas- 
sique, dans  le  but  de  faire  connaître  les  maîtres  des 
xvi",  xvii°  siècles  et  les  modes  usités  à  la  Renais- 
sance. Onze  volumes  de  cette  musique  inconnue  ou 
oubliée  parurent;  les  esprits  étaient  préparés  de 
Longue  date,  et  il  devenait  désormais  possible  de  re- 
monter à  la  source  de  ers  anciens,  modes,  au  plain- 
chant  dont  ils  découlaient  tout  naturellement.  NlE- 
di-.rmeyer  se  décida  alors  à  publier  son  Traité  histo- 
rique et  pratique  île  ruer,,mpu:iueuieiU  ..'«  plain-chant, 
tel  qu'il  le  professait  à  l'Kcole,  car  J.  d'Ortigoe  ne 
prêta  son  concours  que  pour  la  rédaction  :  l'idée  et 
les  théories  du  Traite  appartenaient  en  propre  au 
maître.  «C'était  un  véritable  problème  à  résoudre, 
écrit  Saikt-Saëns,  que  c  lui  de  l'accompagnement 
de  ces  chants  si  éloignés  de  nos  habitudes.  Le  plain- 
rhani,  né  dans  un  temps  où  l'harmonie  n'existait 
pas,  est  par  son  essence  même  rebelle  à  tout  accom- 
pagnement... Niedermeyer  imagina...  de  plier  l'har- 
monie moderne  à  la  forme  des  modes  antiques;  con- 
ception léconde  autant  que  hardie,  conservant  au 
plain-chant  son  caractère,  en  ouvrant  à  l'harmonie 
des  voies  nouvelles.  Ce  système  a  été  naturellement 
très  contesté,...  il  n'en  demeure  pas  moins  le  plus 
ingénieux  et  le  plus  rationnel  qu'on  ait  trouvé  pour 
résoudre  une  question  en  apparence  insoluble.  » 

Le  succès  de  l'ouvrage  a  été  universel,  son  influence 
énorme.  Aujourd'hui,  sa  base  fondamentale  demeure 
inébranlable;  les  perfectionnements,  les  modifica- 
tions qu'y  apporteront  des  artistes  supérieurs  comme 
GicouTne  détruisent  en  rien  son  principe  génial.  Le 
plain-chant,  dans  sa  tonalité,  fut  sauvé  d'une  ruine 
inévitable,  sauvé  par  l'harmonie,  harmonie  emprun- 
tée aux  polyphonistes  des  xv°-xvi«  siècles. 

Le  but  de  Niedermeyer  est  atteint  :  l'Ecole  est 
debout,  organisée  dans  son  enseignement,  ses  mé- 
thodes, ses  publications.  Les  résultats  apparaissent 
brillants,  Niedermeyer  pourrait  restreindre  son  zèle 
à  la  diriger.  Non,  cela  ne  suffit  pas,  et  il  écrit 
l'Accompagnement  pour  -  de  l'Eglise, 

2  volumes  in-i°,  il  se  livre  à  la  composition  de  mes- 
ses, de  motets,  il  est  membre  de  la  commission  de 
surveillance  du  chant  dans  les  écoles  de  la  Ville  de 
Paris,  il  s'occupe  des  orphéons,  écrit  à  leur  usage 
des  chœurs  fort  beaux;  pour  lui,  ces  œuvres  suréro- 
gatoires  sont  comme  la  continuation  de  l'Ecole;  le 
chaut  à  l'école  primaire,  le  chant  populaire  sont  les 
annexes  naturelles  de  l'Ecole.  Il  se  dévoue  tout  entier 
à  l'enseignement  de  son  art  favori,  sans  repos,  sans 
relâche,  heureux  d'un  glorieux  passé;  l'avenir  s'an- 
nonce plus  brillant  encore,  quand  une  mort  presque 
subite  vient  le  terrasser  le  ti  mars  1861. 


La  surprise  d'un  événement  si  brusque  paralysa 
pendant  un  moment  les  volontés  et  les  cœurs.  Mais 
sa  fille  aînée,  Ml|e  Eulalie  Niedermeyer,  qui  avait 
aidé  et  soutenu  son  père,  pleine  d'énergie  et  de  foi 
dans  l'œuvre  entreprise  par  lui,  se  ressaisit  et  prit 
la  résolution  de  continuer  son  œuvre  coûte  que 
coûte.  Joints  à  elle,  professeurs  et  élèves  entreprirent 
cette  tàrlie  de  pieuse  reconnaissance  envers  le  no- 
ble aitiste  qui  avait  eu  confiance  dans  l'avenir. 
Dietscb  consentit  à  remplir  les  fonctions  d'ins- 
pecteur des  études,  le  prince  de  la  Moskowa  et  le 
prince  l'oniatowski,  à  présider  le  comité  des  éludes, 
les  professeurs  demeurèrent  à  leur  poste,  Sai.m- 
Saëns  se  joignit  à  eux  pour  le  piano,  et  l'Ecole  pour- 
suivit ainsi  sa  route  avec  ardeur  jusqu'en  1865;  à 
cette  date,  Gustave  Lefèvre,  ayant  épousé  la  fille 
aînée  de  Niedermeyer,  piit  la  direction  de  l'Ecole. 

Lefèvre  avait  alors  trente-quatre  ans.  Ancien 
élève  de  Maleden,  son  éducation  musicale  le  mit  en 
mesure  de  continuer  mieux  que  quiconque  l'œuvre 
de  son  beau-père.  Ce  fut  pour  l'Ecole  la  même  ar- 
deur, la  même  passion;  pour  les  élèves  le  même 
dévouement,  pour  l'art  classique  la  même  admira- 
tion, la  même  estime;  pour  l'enseignement  les 
mêmes  méthodes,  enrichies  encore  de  moyens  pro- 
pres au  nouveau  directeur,  qui  étaient  le  fruit  d'un 
travail  et  d'une  expérience  personnels.  Ces  nouveaux 
moyens,  résultats  d'études  longues  et  approfondies 
sur  les  périodes  musicales,  le  rythme,  l'art  des  mo- 
dulations, donnèrent  aux  élèves  une  compréhension 
encore  plus  nette  de  la  langue  musicale  et  leur 
apprirent  à  la  parler  avec  clarté  et  élégance. 

Comme  l'illustre  fondateur  de  l'Ecole.  Lefèvre 
professait  à  l'égard  des  vieux  maîtres  un  culte  par- 
ticulier; sa  vénération  pour  les  polyphonistes  fla- 
mand-, français  et  italiens  était  réelle  autant  que 
raisonnée  et  éclairée.  Elle  n'était  pas  le  fruit  d'un 
enjouement  passager,  mais  la  conséquence  d'une 
forte  el  saine  culture  musicale. 

Aussi  quand,  par  une  direction  sage  et  active,  l'E- 
cole eut  pris  d'elle-même  une  marche  régulière  et 
eut  quitté,  en  1860,  son  local  primitif  de  la  rue  Neuve- 
Fontaine  aujourd'hui  la  rue  Fromentin  ,  pour  aller 
s'installer  dans  un  endroit  plus  tranquille  et  plus 
vaste  du  passage  de  l'EIysée-des-Beaux-Arts,  nom 
prédestiné,  Lefèvre  songea  à  rétablir  les  concerts 
de  musique  ancienne,  fonda  la  Sociéfé  de  musique 
vocale  classique  sur  le  modèle  des  précédentes  so- 
ciétés créées  par  Choron,  le  prince  de  la  Moskowa  et 
Niedermeyer.  On  était  en  1870;  or,  pendant  douze 
ans,  jusqu'en  1882,  la  Société  lit  entendre  non  seule- 
ment les  œuvres  religieuses  de  Palestrina,  de  Vit- 
toria, d'ÀLLEGBi  et  autres,  mais  encore  les  œuvres 
profanes  des  musiciens  de  la  Renaissance,  la  Bataille 
de  Maiijnan;  elle  révéla  les  clavecinistes  trop  long- 
temps dédaignés  et  cependant  si  curieux,  si  plai- 
sants à  écouter  pour  des  oreilles  françaises  éprises 
de  bon  sens,  de  simplicité  claire;  leur  grâce  char- 
mante, leur  finesse  ailée,  leur  ingénuité  tendre  ob- 
tinrent les  faveurs  d'un  public  distingué  et  d'artistes 
surpris  tout  à  la  fois  et  de  leur  ignorance  et  de  tant 
de  merveilles. 

Chaque  année,  six  concerts  étaient  donnés  soit  à 
l'Ecole,  soit  à  la  salle  Henri  Herz.  Le  lundi  saint,  à 
la  Sainte  Chapelle,  lieu  propice  à  l'évocation  des 
mélodies  religieuses,  la  Société  exécutait  les  célèbres 
offices  delà  Sixtine;  pour  quelques  heures,  la  Rome 
papale  du  xvie  siècle  était  transportée  à  Paris. 
1      Si  la  société  mondaine  ne  pouvait  en  quelques 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


séances  seulement  que  ramasser  les  miettes  d'un 
enseignement  musical  si  fortifiant  et  s'en  trouvait 
réconfortée,  revivifiée  dans  son  goût  pour  le  grand 
art,  on  peut  facilement  s'imaginer  la  valeur,  l'in- 
fluence heureuse,  unique,  de  cet  art  pour  ceux  qui 
en  vivent  journellement  durant  des  années  entières- 

En  1895,  toujours  sous  la  direction  de  Lefèvre, 
l'Ecole  s'agrandit  encore  et  s'installa  à  Boulogne, 
dans  une  magnifique  propriété  (18,  rue  des  Pins, 
9,  boulevard  d'Auteuil),  au  milieu  d'un  jardin  de 
1000  mètres,  en  face  des  pépinières  de  la  Ville  de 
Paris;  si  l'atmosphère  musicale  y  fut  toujours  excel- 
lente, l'atmosphère  du  bois  de  Boulogne,  du  jardin 
et  des  pépinières  ne  fut  pas  moins  propice  à  la  santé 
des  élèves. 

La  situation  physique  de  l'Ecole  est  parfaite,  l'en- 
seignement est  prospère,  les  élèves  toujours  nom- 
breux et  studieux,  s'essaimant,  leurs  études  termi- 
nées, dans  toutes  les  régions  de  la  France,  où  ils 
obtiennent  d'excellents  emplois  de  professeurs,  de 
maîtres  de  chapelle,  d'organisles,  mais  aussi  les 
années  de  directoriat  et  de  professorat  s'appesan- 
tissent de  plus  en  plus  lourdes  sur  Lefèvre.  Il  ne 
songe  pas  à  la  retraite,  au  repos,  mais  il  réunit 
les  notes  de  son  cours  d'harmonie  à  l'Ecole,  et  il 
écrit  son  Traité  d'harmonie. 

Après  la  mort  de  Mmo  Lefèvre,  28  septembre  1897, 
G.  Lefèvre,  tout  en  restant  à  la  tête  de  l'Ecole  tant 
que  sa  santé  le  lui  permit,  concéda  la  propriété  de 
l'Ecole  à  sa  fille  et  à  son  gendre  M.  et  Mme  Henri 
Heurtel.  Le  2  août  1900,  le  ministre  des  beaux-arts 
agréa  M.  Heurtel  comme  administrateur  de  l'Ecole. 
Lefèvre  obtint  une  médaille  d'or  à  l'Exposition  uni- 
verselle pour  son  Traité  d'harmonie. 

Loret  fut  remplacé  comme  professeur  d'orgue  par 
Gigout,  auquel  succéda  plus  tard  H.  Dallier,  puis 
Périlhou.  M.  Gédalge  devint  titulaire  des  classes  de 
fugue  et  de  composition,  qui  avaient  été  faites  jus- 
que-là, depuis  1863,  par  Gustave  Lefèvre. 

Puis,  la  Nouvelle  Maîtrise  est  créée  afin  de  défen- 
dre les  intérêts  de  l'Ecole,  dont  on  atteint  le  cin- 
quantenaire en  mars  1903.  Ce  cinquantenaire  fut 
célébré  en  juin  1902;  on  l'avança  de  quelques  mois 
afin  de  le  faire  coïncider,  par  une  délicate  pensée  de 
pieuse  reconnaissance,  avec  le  centenaire  de  la  nais- 
sance de  NIEDERMEYER. 

La  Nouvelle  Maîtrise  publia  d'excellents  articles  de 
MM.  G.  Lefèvre,  F.  de  Ménil,  G.  Houdard,  Henry 
Expert,  J.-L.  de  Bruneval,  etc. 

L'année  scolaire  1903-1904,  qui,  le  cinquantenaire 
écoulé,  commence  une  nouvelle  période  d'existence 
que  nous  souhaitons  aussi  longue,  aussi  glorieuse 
que  la  première,  a  vu  l'Ecole  élargir  son  programme 
d'études  et  le  cadre  de  son  enseignement.  Elle  a 
ouvert  de  nouveaux  cours  pour  l'étude  du  chant 
neumatique,  pour  le  violon,  elle  s'est  adjoint  un  ex- 
ternat, qui  reçoit  non  seulement  les  jeunes  gens  à 
tous  les  cours,  mais  encore  les  dames,  les  jeunes 
filles  et  les  enfants.  Les  cours  de  chant  et  de  sol- 
fège pour  ces  derniers  ont  été  confiés  à  Mme  André 
Gedalge,  premier  prix  du  Conservatoire;  le  cours 
spécial  de  violon  à  M.  Paul  Viardot;  le  cours  de 
musique  neumatique  à  M.  G.  Houdard.  AI.  Heurtel 
et  G.  Lefèvre,  en  créant  tous  ces  cours  nouveaux, 
répondirent  aux  besoins  d'une  époque  qui  cultive 
de  plus  en  plus  l'art  musical,  et  mirent  à  la  portée 
de  tous  un  enseignement  méthodique  et  élevé. 

Les  tonalités  du  plain-cliant,  auquel  Niedermeyer 
portait  un  intérêt  tellement  grand  qu'il  devint  la 


cause  première  de  la  création  de  l'Ecole,  furent  sau- 
vées d'une  ruine  totale  par  l'harmonisation  d'édi- 
tions simples,  abrégées  et  pratiques.  Mais  son  rythme 
originel  était  demeuré  Inconnu,  parce  que  les  plain- 
chantistes  qui  le  recherchaient  étaient  ignorants  des 
principes  de  la  rythmique  musicale  même  moderne, 
et  s'ingéniaient  naïvement  à  appliquer  à  la  mélodie 
dite  grégorienne  la  carrure  musicale,  de  même  qu'a- 
vant Niedermeyer,  ils  la  recouvraient  des  accords  les 
plus  dissonants,  des  modulations  les  plus  chroma- 
tiques. Un  vrai  musicien,  élève  des  frères  Hillema- 
cher,  de  Massenet,  se  donna  comme  lâche  de  retrou- 
ver le  rythme  des  neumes;  son  système  parait  le 
plus  probable.  C'est  à  ce  musicien  que  Lefèvre  s'a- 
dresse pour  enseigner  le  rythme  de  ces  musiques 
d'origine  orientale. 

En  1908,  l'Ecole  prend  officiellement  le  nom  de 
son  fondateur  :  elle  restera  «  l'Ecole  Nedermeyer  >• 
et  le  40e  anniversaire  de  la  direction  de  G.  Lefèvre 
est  célébré. 

Il  a  la  grande  joie  de  voir  arriver  aux  plus  hauts 
sommets  Gabriel  FAue.É,  nommé  directeur  du  Con- 
servatoire de  Paris,  alors  que  M.  Le  Boucher  obtient 
en  1906  le  premier  Grand  Prix  de  Home. 

Le  17  mars  1910,  Dieu  rappelle  à  Lui  sa  belle  âme; 
il  laisse  à  ceux  qui  l'ont  connu  de  grands  exemples 
et  un  impérissable  souvenir  :  il  avait  dirigé  l'Ecole 
pendant  quarante-cinq  ans. 

Voici  en  quels  termes  M.  G.  Renard,  maître  de 
chapelle  de  Saint-Germain-l'Auxerrois,  précise,  en 
même  temps  que  le  rôle  éminent  de  son  maître 
Gustave  Lefèvre,  la  caractéristique  formelle  de  la 
pédagogie  pratiquée  à  l'Ecole  Niedermeyer  depuis  sa 
fondation  jusqu'à  nos  jours  : 

«  Gustave  Lefèvre,  qui  fut  pendant  quarante-cinq 
ans,  directeur  de  l'Ecole  Niedermeyeii,  doit  être  tenu 
pour  un  esprit  supérieur  dont  l'influence  a  été  con- 
sidérable sur  plusieurs  générations  d'artistes.  L'u- 
nique but  de  sa  vie,  si  longue,  si  laborieuse,  si 
désintéressée,  fut  de  maintenir,  de  développer,  d'exal- 
ter même  dans  certains  cas  l'idéal  du  fondateur  de 
l'Ecole,  Louis  Niedermeyer. 

«  Dès  le  principe,  l'enseignement  du  piano  et  celui 
de  l'orgue  furent  établis  sur  les  œuvres  puremenl 
classiques.  En  ce  domaine,  l'Ecole  peut  revendiquer 
la  gloire  d'avoir  été  la  première  eu  date  et  en  in- 
fluence  à  professer  le  culte  des  œuvres  d'orgue  de 
J.-S.  Bacu. 

«  L'enseignement   théorique,    harmonie,   contre- 
point et  fugue,  dont  G.  Lefèvre  conserva,  presque 
jusqu'à  sa  mort,  l'exclusivité  jalouse,  étail    i 
logique  et  de  clarté. 

ii  Pour  l'harmonie,  G.  Lefèvre  utilisait  une  méthode 
de  chiffrage  imaginée,  pense-t-on,  par  l'abbé  Vo- 
gler  (1749-1814)  et  codifiée  par  Goltfried  Webeb 
(1779-1839).  Pierre  de  Maleden,  disciple  de  ce  der- 
nier, la  transmit  à  ses  deux  remarquables  élèves, 
Camille  Saint-Sabns  el  Guslave  Lefèvre. 

«  Nous  avons  ainsi  la  filiation  naturelle  du  système 
particulier  de  chiffrage  exclusivement  pratiqué  à 
l'Ecole  Niedermeyer.  Gustave  Lefèvre  eut  la  ténacité 
indispensable  pour  implanter  ce  graphisme  supé- 
rieurement évocateur,  mais  non  officiel;  il  eut,  en 
outre,  le  mérite,  au  cours  de  sa  longue  carrière  péda- 
gogique, d'en  découvrir  et  finalement  d'en  signaler, 
dans  son  Traité  d'harmonie,  les  conséquences  et  les 
applications  extrêmes. 

«  A  l'Ecole  Niedermeyer,  la  théorie  du  contrepoint 
fut  toujours  restreinte  aux  formules  des  maîtres  ita- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ÉCOLE  NIEDERMEYER    3621 


liens,  dont  l'idéal  se  trouve  réalisé  dans  les  œuvres 
polyphoniques  de  l'époque  palestinienne.  C'est  dire 
avec  quel  souci  de  pureté  académique  dans  le  des- 
sin, G.  Lefèvre  résista  aux  tentations  offertes  par 
les  œuvres  postérieures;  c'est  expliquer  aussi  pour- 
quoi les  œuvres  d'un  J.-S.  Bach,  qui  étaient  prati- 
quées couramment  à  la  classe  d'orgue,  ne  furent 
jamais  introduites  à  la  classe  d'écriture,  G.  Lefèvre 
estimant  que  leur  liberté  cnntrapontique  ne  pouvait 
être  que  dangereuse  dans  la  période  première  de 
L'éducation  du  compositeur. 

«  Le  résultat  d'une  gymnastique  aussi  rigoureuse 
s'est  fait  sentir  tout  naturellement  dans  les  qualités 
françaises  qui  distinguent  «  l'esprit  »  de  l'Ecole  Nie- 
dermeyer.  Si  on  les  retrouve,  magnifiées,  dans  l'é- 
criture incomparable  d'un  Gigout,  elles  sont  aussi  à 
la  base  de  la  langue  élégante  et  claire  de  tous  les 
compositeurs  sortis  de  l'Ecole  Niedermeyer.  Elles 
n'ont  pas  d'autre  origine  que  la  contrainte  rigou- 
reuse dans  laquelle  ont  été  élevés  de  jeunes  musi- 
ciens devenus  plus  tard  un  Gabriel  Fauré,  un 
Alexandre  Geoiiges,  un  André  Messager,  un  Henri 
Busser,  etc. 

«  Cette  constatation  de  la  variété  de  ces  talents 
divers  est  la  plus  belle  louange  que  l'on  puisse 
adresser  à  une  discipline,  et  à  celui  qui  en  fut  le 
gardien  sévère,  incorruptible,  très  vénéré  et  très 
aimé,  Gustave  Lefèvre1.  » 

fil.  Heurtel  s'adjoignit  comme  directeur  des  élu. 
des  M.  Périlhou,  et  M.  Henri  Mulet  fut  nommé  pro- 
fesseur d'orgue. 

A  la  suite  de  la  séparation  des  Eglises  et  de  l'Etat, 
en  1910,  la  subvention  accordée  sous  forme  de  parts 
de  bourse  aux  élèves,  fut  supprimée  pour  la  fin  de 
l'année,  sous  le  prétexte  que  l'Ecole,  formant  des 
organistes  et  des  maîtres  de  chapelle,  devait  être 
assimilée  aux  maîtrises.  M.  Marcel  Sembat,  député, 
développa  cette  thèse  à  la  Chambre  des  députés 
(13  février  1910);  sa  motion  fut  vot^e,  et  M.  Heurtel 
fut  averti  (in  juillet  que  la  subvention  était  retirée. 

Les  élèves  privés  de  la  part  de  bourse  qui  leur 
permettait  de  profiter  de  l'enseignement  de  l'Ecole 
devaient  donc  la  quitter  fin  décembre  :  la  désolation 
des  familles  était  extrême. 

M.  Heurtel,  profondément  attaché  à  l'Ecole,  ayant 
promis  à  son  beau-père  de  la  soutenir,  et  très  affec- 
tionné à  ses  jeunes  élèves,  n'hésita  pas,  bien  que 
chargé  de  huit  enfants,  à  sacrifier  ses  ressources  pé- 
cuniaires personnelles  pour  continuer  aux  élèves  les 
bourses  qu'ils  avaient  eues. 

Il  s'adressa  à  l'épiscopat.  Les  cardinaux  Amette, 
Luçon,  Charost,  Maurin,  Andrieu,  les  évèques  l'en- 
couragèrent dans  la  voie  qu'il  avait  choisie  :  ne  pas 
laisser  disparaître  un  établissement  qui  rendait  de 
si  grands  services,  et  ils  l'aidèrent  dans  la  mesure 
qui  leur  fut  possible  pendant  deux  ans. 

De  nombreux  députés  et  sénateurs,  de  hautes 
personnalités,  même  étrangères  à  l'Ecole,  protestè- 
rent contre  la  suppression  de  la  subvention.  Toutes 
ces  preuves  de  sympathie  décidèrent  M.  Heurtel  à 
continuer  les  sacrifices  qu'il  avait  si  généreusement 
commencés. 

La  vie  morale  et  intellectuelle  de  l'Ecole,  les  élu- 
des, les  concerts  se  poursuivirent. 


En  1914,  pendant  la  guerre,  l'Ecole  fonctionna 
aussi  normalement  que  le  permirent  les  circonstan- 
ces; nombre  de  ses  élèves  furent  mobilisés,  mais 
l'instruction  musicale  des  jeunes  élèves  fut  assurée 
tant  que  durèrent  les  hostilités. 

En  1913,  M.  Périlhou  fut  remplacé  comme  direc- 
teur des  Etudes  par  M.  Mariciîelle,  professeur  de 
composition,  de  fugue,  de  contrepoint,  auquel  suc- 
céda, en  1919,  l'éminent  compositeur  M.  Henri  Bis- 
ser, premier  prix  de  Rome,  chef  d'orchestre  de  l'O- 
péra, l'un  des  élèves  préférés  de  G.  Lefèvre. 

En  1922,  l'Ecole,  le  15  janvier,  quitta  le  Parc  des 
Princes,  et  s'installa  à  lssy  (Seine),  dans  une  pro- 
priété située  sur  la  hauteur,  jouissant  d'une  très 
belle  vue,  d'un  air  excellent  et  munie  de  tout  le  con- 
fort moderne. 

Les  jeunes  élèves  sortis  de  l'Ecole  se  font  peu  à 
peu  connaître  :  MM.  M.  Le  Boucher,  Henry  Defossf, 
G.  Gloez,  A.  Seutin,  R.  Péneau,  M.  Faure,  P.  Lucas, 

J.     NOYON,     B.     QuiGNARD,     H.     iNlUELLE,    J.    MASUELLE, 

M.  Imrert,  J.  Frome.nt,  etc. 

Les  présidents  successifs  des  études  furent  :  Saint- 
Sains,  Gabriel  Fauré,  André  iMessager. 

M.  Henry  Defosse  est  nommé  professeur  de  com- 
position, fugue,  contrepoint,  harmonie,  M.  Banès, 
l'érudit  bibliothécaire  du  Conservatoire,  fait  aux 
élèves,  sur  l'histoire  de  la  musique,  les  conférences 
les  plus  intéressantes. 

En  1923,  un  groupe  nombreux  d'anciens  élèves  se 
réunit  à  l'Ecole  pour  fêter  le  70°  anniversaire  de  sa 
fondation. 

Des  élèves  d'Algérie,  de  Tunisie,  du  Maroc,  des 
Seychelles,  de  Madagascar  sont  à  l'Ecole,  attestant 
combien  s'est  répandue  sa  réputation. 

Le  i  janvier  1928,  un  externat  annexe  est  fondé  à 
Paris  dans  l'immeuble  de  la  nouvelle  salle  Pleyel, 
et  M.  Henri  Heurtel,  arrière-petit-fils  de  .Niedermeyer, 
élève  de  l'Ecole,  où  il  a  fait  de  brillantes  études,  est 
nommé  sous-directeur  de  l'Ecole. 

Le  28  mai  suivant,  M.  Heurtel  est  enlevé  subite- 
ment par  une  embolie  que  rien  ne  faisait  prévoir, 
laissant  atterrés  sa  famille,  ses  élèves,  ses  amis. 

Administrateur  remarquable,  profondément  bon 
et  juste,  bienveillant  à  la  jeunesse,  il  a  aimé  l'Ecole 
de  toutes  ses  forces  et  jusqu'à  son  dernier  soufile. 

Il  a  su  la  diriger,  dans  la  période  la  plus  critique 
de  son  histoire,  avec  le  plus  noble  désintéressement 
et  la  plus  vive  intelligence  de  ses  besoins.  Sa  veuve, 
film»  Heurtel.  née  Lefèvre-Niedermeyer,  continue  son 
œuvre,  aidée  par  ses  huit  enfants,  tous  élèves  de 
l'Ecole,  dont  cinq  sont  organistes,  et  dont  l'aînée, 
MmeCR0MBÉ,  a  épousé  un  ancien  élève. 

Le  corps  enseignant  se  compose  de  MM.  Henri 
Mulet,  Henry  Defosse,  Henri  Libert,  Henri  Heurtel, 
Dumoulin,  de  l'Opéra,  Narçon,  de  l'Opéra,  M.  Delvin- 
court,  Mllos  Madeleine  Heurtel,  Henriette  Heurtel, 
Sonia  Heurtel,  Simone  Hersent,  R.  Liard. 

Deux  mots  caractérisent  l'historique  de  l'Ecole  : 
tradition  et  progrès  :  on  respecte  le  passé,  on  l'étu- 
dié; on  met  à  profit  toutes  les  découvertes  du  pré- 
sent, on  regarde  avec  confiance  l'avenir. 


Gustave  LEFEVHE. 


1.  Communication 
I.  fieorges  Renard. 


vrlop.nli, 


V"  Henri  HEURTEL, 
née  Lefèvre-Niedermeyer 


LA  SCHOLA  CANTORUM 

Par  Vincent  d'INDY 


HISTORIQUE   ET  ORIGINES  DE   LA  SCHOLA 


Au  mois  d'avril  1892 
sainte,  Charles  Bordes  ' 
pionnier  de  l'art  musical 
du  gr  nul  éducateur  qui 
l'idée   de  grouper   en    se 


'issue  de  la  semaine 
■i909},  cet  infatigable 

des  plus  jeunes  élèves 
10m  César  Fbajmi  s,  eut 

corporative   les  cho- 


ristes qu'il  venait  d'employer  à  une  série  de  grandes 
exécutions  dans  la  \ieille  église  deSainl-Gervais,  dont 
il  était  maître  de  chapelle  depuis  déjà  plusieurs 
années.  Sur  quatre-vingts  chanteurs  sollicités,  vingt- 
quatre  seulement  acceptèrent.  Ce  fut  là  le  noyau  de 
la  célèbre  Association  des  Chanteurs  de  Saint-Gei  1  ais, 
qui  se  donna  pour  mission  première  la  reconstitu- 
tion et  l'exécution  des  chefs-d'œuvre  de  l'art  poly- 
phonique des  xvc  et  xvie  siècles,  œuvres  admirables 
connues  seulement  des  lettrés  et  enfouies  jusqu'a- 
lors dans  des  collections  ou  des  bibliothèques. 

Deux  ans  plus  tard,  Ch.  Bordes,  non  content  d'ins- 
truire et  de  former  ses  Chanteurs  à  l'interprétation 
de  la  véritable  musique  d'église,  tenta  avec  succès 
de  les  produire  au  dehors,  en  augmentant  leur  ré- 
pertoire d'œuvres  religieuses, mais  non  liturgiques,  et, 
pour  la  première  fois  dans  des  concerts  publics  à 
Paris,  furent  exécutées,  en  1804,  trois  cantates  de 
J.-S.  Bach  et  nombres  d'œuvres  de  Schûtz  et  de  Ca- 
rissimi. 

Les  deux  principes  fondamentaux  de  la  future 
Scliola  Cantorum  étaient  trouvés  : 

1°  Education  spéciale  de  musiciens  dépourvus  jus- 
qu'alors de  toute  notion  de  style,  par  le  moyen  du 
contact  journalier  avec  les  belles  manifestations 
d'art  du  passé; 

2"  Présentation  par  ces  mêmes  musiciens,  réunis 
en  concert,  d'œuvres  vraiment  intéressantes  au  poinl 
de  vue  artistique  et  encore  inconnues  du  public. 

A  la  fin  du  printemps  de  celte  même  année  ISO i, 
Ch.  Bordes,  continuant  son  œuvre,  provoqua,  sous  le 
vocable  :  Schola  Cantorum,  un  groupement  de  toutes 
les  bonnes  volontés  s'intéressant  à  la  restauration 
du  chant  religieux,  dans  le  but  de  créer,  par  l'étude 
approfondie  de  celte  musique,  des  centres  d'exécu- 
tion non  seulement  à  Paris,  mais  aussi  et  surtout 
en  province. 

Cette  entreprise  réussit  d'une  façon  si  rapide  que 
des  chanteurs  affluèrent,  venus  de  tous  les  côtés  de 
la  France  pour  s'adjoindre  à  la  Corporation  de  Saint- 
Gervais,  et  que  plusieurs  jeunes  compositeurs  mani- 


festèrent le  désir  de  compléler  leur  éducation  par 
l'étude  de  la  musique  médiévale  et  du  grand  mou- 
vement polyphonique  qui  prit  naissance  en  Flandre 
française  pour  arriver  en  Italie  à  une  complète  et 
triomphale  floraison. 

Une  école  de  composition  et  d'exécution  s'imposait. 

Ch.  Bordes, loutant  jamais  de  son  étoile,  fonda 

cette  école  dans  un  local  composé  de  irois  pièces, 
rue  Stanislas,  en  face  de  l'église  N.-D.  des  Champs. 
Le  loyer  était  d'un  prix  assez  élevé,  et  Ch.  Bordes 
n'avait  alors  en  caisse  que  tr  ntc-sept  francs  cin- 
quante centimes...  Néanmoins,  il  n'hésita  pas,  ayant 
confiance  dans  la  nécessité  de  celle  institution,  el 
l'avenir  lui  donna  raison  pleine  et  entière. 

Pour  l'aider  dans  son  entreprise  hardie,  Ch.  Bordes 
s'était  adjoint  deux  collaborateurs  :  Alexandre  Gim> 
uant,  le  noble  artiste  qui  ne  refusa  jamais  son  con- 
cours à  une  œuvre  généreuse,  et  celui  qui  écrit  ces 
lignes;  l'un  lut  chargé  il"  l'enseignement  de  L'orgue, 
l'autre  de  celui  de  la  composition. 

Et,  le  15  octobre  1890,  l'école  donnait  sa  séance 
d'ouverture. 

L'enseignement,  plus  particulièrement  dirigé  vers 
l'étude  et  l'exécution  de  la  musique  religieuse  d'é- 
glise et  de  concert,  était  divisé  en  : 

Coins  gratuits  :  solfège, chant  grégorien,  étude  du 
clavier  el  ensemble  vocal,  donnés  par  MM.  de  Bois- 
ions, l'abbé  Vii-.oiREL,  A.  Pirro,  Ch.  Bordes,  —  et  : 

Cours  pai/unls  :  histoire  et  paléographie,  orgue, 
harmonie,  contrepoint   el  composition,  donnés  par 

MM.    A.    PlRRO,    A.    GUILMANT,    F.    DE    LA   ÏOMBELLE    et 

Vincent  d'Indy. 

L'école,  qui  s'intitulait  alors  :  Ecole  de  chant  litur- 
gique et  de  musique  religieuse,  ouvrit  avec  du  élèves 
payants;  à  la  lin  de  l'année  1896,  elle  en  comptait 
vingt  et  un. 

Les  cours  gratuits,  chose  assez  difficilement  com- 
préhensible, périclitèrent  bientôt,  tandis  qu'au  con- 
traire le  nombre  des  élèves  payants  augmenl  iil  de 
jour  en  jour,  si  bien  que  les  fondateurs  furent  obli- 
gés de  créer  de  nouveaux  cours  d'orgue  prépara- 
toires, un  cours  de  piano  supérieur,  dont  le  titulaire 
filt  M.  J.  Albéniz,  et  un  cours  spécial  de  contrepoint 
préparatoire  à  la  composition  qui  fut  confié  à  M.  P.  df 
Bréville. 

En  1899,  les  bénéfices  permirent  de  fonder  sept 
bourses  pour  les  élèves  ne  pouvant  payer  leurs  cours. 
L'école  comptait  alors  soixante-cinq  élèves,  dont 
trente -quatre  fréquentaient  les  cours  d'orgue,  et 
trente-neuf  le  cours  de  composition. 

Mais,  malgré  d'ingénieux  arrangements  intérieurs 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SCHOLA  CANTORUM    3623 


pratiqués  par  Charles  Bordes  dans  les  bâtiments  de  la 
Schola,  afin  de  créer  de  nouvelles  classes  de  plus  en 
plus  nécessaires  en  raison  de  t'affluence  des  élèves,  le 
local  de  la  rue  Stanislas  était  devenu  manifestement 
insuffisant.  Aussi,  à  l'issue  d'un  conseil  tenu  par  les 
trois  fondateurs  et  les  principaux  professeurs,  il  fut 
décidé  que  l'enseignement  verrait  son  programme 
considérablement  élargi,  et  que  l'élément  féminin 
serait  admis  dans  le  nouveau  local,  ce  qui  était  im- 
possible à  la  rue  Stanislas. 

Ch.  Bordes  se  mit  donc  en  quête  d'un  bâtiment 
approprié  à  un  pareil  développement  et  eut  la  bonne 
fortune  de  le  rencontrer  rue  Saint-Jacques,  dans  un 
ancien  prieuré  des  Bénédictins  anglais  qui  recueillit, 
au  xvue  siècle,  Jacques  II  exilé,  et  qui,  malgré  la  ré- 
volution, resta  et  est  encore  «  bien  de  mainmorte 
étranger  ».  L'ancienne  chapelle  fut  convertie  en 
salle  de  concert,  et  le  grand  salon  de  réception  du 
prieur,  pièce  de  style  Louis  XIV  d'une  rare  puretéj 
fut  affecté  aux  conférences  et  aux  cours  supérieurs. 

La  Schola  cantorum  ainsi  transformée  prit  le  titre 
d'Ecole  supérieure  île  musique  et,  bien  que  gardant 
comme  base,  aussi  bien  dans  les  cours  de  composi- 
tion  que  dans  ceux  d'exécution,  l'étude  de  l'art  re- 
ligieux médiéval  et  polyphonique,  elle  étendil  son 
enseignement  à  toutes  les  branches  de  l'art  musical, 
sans  en  excepter  aucune. 

Les  ressources  étaient  fournies  par  trente-deux 
amicales  souscriptions,  par  les  versements  des  élèves 
et  aussi  par  le  bénéfice  des  concerts  périodiques 
dont  le  personnel  d'orchestré,  de  chœurs  et  de  so- 
listes se  recrutait  en  grande  partie  parmi  [es  élèves, 
les  professeurs  et  l'Association  des  chantent  s  de  Saint 
Gervais,  toujours  bienveillante  pour  la  jeune  Schola, 
qui  était,  il  est  vrai,  u:,  peu  de  sa  famille. 

L'expansion  des  idées  d'art  émises  par  la  Schola 
fut  telle  que,  très  peu  de  temps  après  la  fondation 
de  l'école  parisienne,  des  associations  se  fondaient, 
toujours  sous  le  titre  de  :  Schola  cantorum,  en 
diverses  villes  de  province,  dans  le  but  de  procéder 
à  des  exécutions  périodiques,  et  de  faire  connaître 
les  belles  œuvres  que  la  Schola  de  Paris  avait  mises 
en  lumière.  Ces  sociétés,  centres  d'exécution  plutôt 
qu'écoles,  correspondent,  tout  en  vivant  de  leur  vie 
propre,  avec  l'aima  mater  parisienne,  dont  elles  tirent 
de  précieux  conseils  et  qui  leur  procure  le  matériel 
nécessaire  à  leurs  concerts. 

Les  plus  florissantes  de  ces  institutions  furent  la 
Schola  d'Avignon,  la  plus  ancienne  en  date,  celles  de 
Saint-Jean-de-Luz,  de  Marseille.de  Nantes, de  Lyon, 
de  Montpellier,  de  Montluçon,  etc. 

Mais  les  charges  de  l'école  croissant  au  fur  et  à 
mesure  de  son  développement,  et  la  santé  du  vail- 
lant fondateur  Ch.  Bordes  ne  lui  permettant  plus  de 
s'occuper  d'une  façon  aussi  active  que  précédem- 
ment à  rassembler  les  ressources  nécessaires,  l'ini- 
tiative de  quelques  amis  de  la  Schola,  auditeurs 
assidus  de  ses  concerts,  permit  de  prendre  une  me- 
sure qui  assure  pour  longtemps  la  vie  de  l'école. 

Au  mois  de  février  1904,  une  société  anonyme  est 
fondée  sous  le  nom  de  :  Société  de  la  Schola  canto- 
rum; le  capital  est  restreint,  mais  suffisant  pour  ga- 
rantir l'équilibre  du  modeste  budget  de  l'école,  et 
cette  fondation  a  eu  cela  de  précieux  qu'elle  permet 
à  l'œuvre  d'enseignement  artistique,  non  seulement 
de  vivre,  mais  de  grandir  et  de  se  développer  sans 
que  des  préoccupations  d'ordre  pécuniaire  viennent 
se  mêler  aux  idées  d'art. 

L'école  proprement  dite  est  confiée  à  M.  Vincent 


d'Indy  qui  prend  le  titre  de  :  Directeur  général  des 
études,  tandis  que  Charles  Bordes,  avec  une  adminis- 
tration tout  à  fait  séparée,  reste  à  la  tète  de  la  pro- 
pagande par  le  concert  en  province  et  à  l'étranger. 

La  Schola  cantorum  comptait,  en  1897  :  21  élèves; 

en  1899  :  611  élèves; 

en  1902  :  157  élèves; 

le  nombre  des  élèves  dans  l'année  1904  a  été  de 
292'. 

L'organisation  de  la  Schola  cantorum  comprend 
trois  catégories  d'élèves  : 

1°  les  élèves  payants; 

2°  les  élèves  bon   ,   i 

3°  lesêlèves  exécutants  de  concert. 

Aux  premiers,  il  n'est  demandé  que  la  contribu- 
tion  jugée  nécessaire  pour  l'équilibre  du  budget. 

Les  militaires  en  activité  de  service  sont  admis 
moyennant  un  tarif  intime. 

Le  désir  des  fondateurs  ayant  toujours  été  d'ac- 
cueillir et  d'encourager  tous  les  jeunes  gens  qui,  par 
leurs  dispositions  naturelles,  semblent  appelés  à 
suivre  la  carrière  artistique,  il  a  été  institué  annuel- 
lement un  certain  nombre  de  box 
bourses,  dans  le  !mt  de  favoriser  les  élèves  méritants 
et  assidus  auxquels  leur  situation  ne  permet  pas  de 
s'acquitter  entièrement  du  prix  des  cours. 

De  plus,  ceux  des  élèves,  instrumentistes  d'or- 
chestre ou  chanteurs,  qui,  après  examen,  ont  été 
reconnus  aptes  à  prendre  part  aux  exécutions  île 
concert,  peuvent,  sur  leur  demande,  être  admis  à 
suivre  les  cours  de  l'école  dans  des  conditions  par- 
ticulières qui  en  facilitent  considérablement  ['accès. 

La  Schola  compte  actuellement  quarante-huit  pro- 
fesseurs; tous  sont,  au  point  de  vue  du  traitement, 
sur  un  pied  d'égalité  parfaite,  et  le  directeur  des 
études  ne  peut  que  porter  un  témoignage  ému  du 
dévouement  avec  lequel  des  artistes  de  talent  ont 
accepté  une  mission  bien  au-dessous  de  leur  mérite, 
si  l'on  ne  considère  que  les  émoluments,  mais  dent 
ils  s'acquittent  avec  un  zèle  et  un  entrain  qu'on  ne 
saurait  trop  louer.  Il  en  est  même  qui,  poussant  le 
désintéressement  à  l'extrême  limite,  ont  refusé  toute 
rétribution,  se  tenant  pour  assez  payés  par  les  pro- 
grès et  l'affection  de  leurs  élèves.  Ces  professeurs  de 
bonne  volonté  sont  au  nombre  de  douze. 


ENSEIGNEMENT 

Le  directeur  des  études,  estimant  que  l'art  n'est 
point  un  métier,  mais  que  la  connaissance  préalable 
du  métier  est  toutefois  indispensable  à  celui  qui 
veut  faire  des  études  artistiques,  a  divisé  l'enseigne- 
ment de  la  Schola  cantorum  en  deux  degrés,  au  moins 
pour  les  cours  les  plus  fréquentés,  laissant  au  pre- 
mier degré  les  cours  de  technique  spéciale,  l'étude 
du  mécanisme  vocal  et  instrumental  pour  les  chan- 
teurs et  les  instrumentistes,  la  mécanique  de  l'écri- 
ture (harmonie,  contrepoint)  pour  lesêlèves  se  des- 
tinant à  la  composition,  le  métier,  en  un  mot,  et 
affectant  aux  cours  du  second  degré  tout  ce  qui  re- 
garde l'interprétation,  la  connaissance  du  style  des 
différentes  époques,  l'étude  chronologique  des  œu- 
vres importantes  écrites  pour  la  voix  et  les  divers 
instruments,  en  résumé,  tout  ce  qui  confine  à  l'art. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Le  Cours  de  composition  musicale  (second  degré) 
comporte  un  mininum  de  cinq  ans  d'études,  non 
comprises  les  études  préalables  du  premier  degré  : 
chant  grégorien,  harmonie,  accompagnement  et 
improvisation,  contrepoint.  L'instruction  y  suit  pas 
à  pas  le  développement  si  logique  des  formes  musi- 
cales, qui  est  démontré  aux  élèves  non  pas  seule- 
ment au  point  de  vue  théorique,  mais  par  la  pré- 
sentation et  l'analyse  des  hautes  manifestafions 
d'art  se  rapportant  à  ces  formes,  qu'il  n'est  point 
permis  à  l'artiste  producteur  d'ignorer. 

C'est  ainsi  que  l'élève  étudie,  dans  la  première  an- 
née de  composition,  les  formes  purement  rythmiques 
et  mélodiques  delà  Monodie  grégorienne  et  du  Chant 
populaire,  puis,  les  formes  polyphoniques  du  Motet 
et  du  Madrigal,  s'arrèlant  au  commencement  du 
wiic  siècle. 

La  deuxième  année  comprend  l'étude  de  la  Fugue, 
qui  est  enseignée  non  point  comme  exercice  d'écri- 
ture, mais  comme  une  des  belles  et  harmonieuses 
formes  de  la  composition  musicale;  puis,  successi- 
vement, l'étude  de  la  Suite  instrumentale,  de  la  Sonate 
dans  sa  triple  manifestation  (ancienne  sonate  ita- 
lienne, sonate  beethovénienne  et  sonate  moderne  de 
forme  cyclique). 

Dans  la  troisième  année,  l'élève  est  instruit  dans 
la  technique  de  l'orchestre  et  de  l'instrumentation, 
et  prend  alors  connaissance  des  formes  du  Concert 
et  du  Concerto,  de  la  Symphonie,  de  la  Musique  de 
chambre,  du  Quatuor  d'archets,  de  la  Variation,  de  la 
Fantaisie,  de  l'Ouverture  et  du  Poème  symphonique. 
Les  deux  dernières  années  sont  consacrées  à  l'é- 
lude du  Drame  musical,  la  quatrième  année  prenant  à 
la  naissance  de  l'Opéra  au  xvne  siècle  et  parcourant 
le  cycle  des  œuvres  dramatiques  italiennes,  fran- 
çaises et  allemandes  jusqu'à  la  lin  du  xvme  siècle,  et 
la  cinquième  année  continuant  cetle  étude  raisonnée 
et  critique  jusqu'aux  plus  récenles  productions  mo- 
dernes. 

De  cette  façon,  l'élève  est  mis  à  même  d'établir 
en  pleine  connaissance  de  cause  motet,  fugue,  suite» 
sonate,  symphonie,  quatuor,  scène  dramatique,  et 
sa  personnalité  s'y  révèle  d'autant  plus  facilement 
qu'il  est  moins  embarrassé  par  la  construction  de 
la  pièce  qu'il  est  appelé  à  écrire,  et  dont  il  a  étudié 
la  forme  en  des  exemples  empruntés  aux  Maîtres  de 
la  musique. 

L'enseignement  vocal  et  instrumental  est,  toutes 
proportions  gardées,  basé  sur  les  errements  que 
nous  venons  d'exposer,  tous  les  professeurs  s'effor- 
çant  de  façonner  non  point  des  virtuoses  infatués 
de  leurs  mérites,  mais  des  artistes  conscients  de 
leur  mission  de  dévouement  absolu  à  l'œuvre  d'art 
qu'ils  ont  l'honneur  d'interpréter,  et  plaçant  au-des- 
sus de  toutes  choses  l'amour  désintéressé  de  la  mu- 
sique. 

La  vanité  est  donc  bannie  de  la  Schola  cantorum, 
et  c'est  pour  sauvegarder  ce  principe  qu'on  n'y  a 
point  introduit  le  système  des  concours.  Par  deux 
fois,  dans  l'année  scolaire,  en  janvier  et  en  juin, 
le  directeur  des  études  fait,  lui-même,  subir  à  tous 
les  élèves  de  l'école  un  examen  approfondi  sur  les 
diverses  madères  qu'ils  ont  étudiées,  et  distribue 
des  notes  d'examen  réglées  au  moyen  de  coeffi- 
cients, ainsi  que  des  mentions  spéciales  à  ceux  qui 
ont  fourni  le  meilleur  travail. 

Lorsqu'un  élevé  a  complètement  terminé  ses  études 
dans  l'un  des  cours  qu'il  fréquente,  le  directeur  lui 
décerne  un   Diplôme  de  sortie  de  classe  constatant 


que  1  élève  n'a  plus  rien  à  apprendre  dans  ce  cours; 
le  diplôme  du  premier  degré  implique  naturelle- 
ment Je  passage  au  cours  du  second  degré  de  même 
nature. 

Les  cours  ont  lieu  deux  fois  par  semaine,  à  l'ex- 
ception des  cours  d'orgue  supérieur  et  d'instruments 
à  vent. 

Ils  sont  distribués  comme  suit  : 

36  Cours  du  premier  degré  :  Solfège  (théorie,  lec- 
ture, dictée,  transposition);  Chant  grégorien  (lec- 
ture, théorie,  accompagnement);  Chant  (pose  de  la 
voix,  mécanisme,  agilité);  Harmonie,  Contrepoint, 
Accompagnement  et  improvisation  (basse  continue, 
choral);  Orgue  (jeu  lié,  études,  pédale);  Piano  (mé- 
canisme, agilité);  Violon,  Alto,  Violoncelle,  Contre- 
basse, Flûte,  Hautbois,  Clarinette,  Basson,  Cor,  Trom- 
pette, Trombone,  Harpe. 

9  Cours  du  second  degré  :  Déclamation  lyrique 
(articulation,  accent,  style,  expression);  Orgue  (exé- 
cution des  œuvres  des  maîtres);  Orgue  supérieur 
(exécution,  registration,  improvisation,  fugue);  Piano 
(style,  accenl,  expression);  Violon,  Violoncelle. 

8  Cours  de  composition. 

3  Cours  d'ensemble  :  Musique  de  chambre,  Ensemble 
vocal,  Ensemble  d'orchestre. 


Ml 


EXECUTIONS   DE   CONCERT 

Nous  avons  exposé  eu  commençant  les  deux  prin- 
cipes générateurs  de  la  Schola;  le  premier  :  «  édu- 
«  cation  spéciale  des  musiciens  au  moyen  du  contact 
«  journalier  avec  les  belles  manifestations  d'art  », 
trouve  son  application  dans  le  programme  d'ensei- 
gnement qui  a  fait  l'objet  du  précédent  chapitre; 
il  nous  reste  à  voir  comment  l'école  est  arrivée  au 
complet  développement  de  son  deuxième  principe  : 
«  présentation  effective  et  respectueuse  d'œuvres 
«  intéressantes  au  point  de  vue  artistique  et  encore 
<c  méconnues  du  public  ». 

L'école  a  atteint  ce  but  par  ses  concerts  périodi- 
ques. 

Les  concerts  de  la  Schola  cantorum  ont  cela  de 
particulier  que  l'orchestre,  les  chœurs  et  les  solistes, 
recrutés,  nous  l'avons  dit,  à  de  rares  exceptions  près, 
dans  le  personnel  des  élèves  et  des  professeurs,  sont 
appelés  à  interpréter  uniquement  de  belles  œuvres 
que  l'on  ne  pourrait  entendre  ailleurs.  Et  pourquoi 
ces  exécutions  de  la  Schola,  si  elles  sont  loin  d'at- 
teindre à  la  perfection  des  grandes  sociétés  de  con- 
cert, sont-elles  cependant  si  expressives,  si  vivantes, 
si  vibrantes,  pourrait-on  dire?  C'est  que  tous  les  élè- 
ves qui  y  participent  sentent  et  aiment  vraiment  ce 
qu'ils  font;  c'est  qu'ils  sont  bien  convaincus  qu'ap- 
pelés à  l'honneur  d'interpréter  une  œuvre  de  génie, 
ils  ne  peuvent  moins  faire  que  d'y  mettre  tout  leur 
cœur,  c'est  que  l'éducation  reçue  à  l'école  leur  a 
donné  l'enthousiasme  et  la  Foi  artistique. 

Mais,  en  outre  de  ce  personnel  exécutant,  il  existe 
un  autre  orchestre,  moins  exercé,  puisqu'il  est  com- 
posé de  tous  les  élèves  instrumentistes  de  première 
année  et  de  ceux  qui  ne  sont  pas  encore  de  force  à 
figurer  dans  les  exécutions  de  concert.  C'est  ce  qu'on 
nomme  le  cours  d'ensemble  d'orchestre,  qui  se  réunit 
chaque  semaine  pour  lire  et  travailler  des  sympho- 
nies classiques,  et  qui  constitue  aussi  un  véritable 
cours  de  direction,  voici  comment  : 

Les  élèves  de  composition  et  ceux  des  autres  cours 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SCHOLA  CANTORUM    362E 


qui  paraissent  aptes  au  métier  de  dirigeant,  sont 
conviés  tour  à  tour,  sous  la  surveillance  du  direc- 
teur des  études,  à  venir  faire  travailler  cet  orchestre 
de  commençants  ;  ils  entreprennent  ainsi  leur  appren- 
tissage de  chef,  de  façon  à  ce  que,  à  défaut  de  l'un 
des  directeurs  attitrés,  un  élève  compositeur  puisse 
prendre  le  bâton  et  conduire  un  concert  de  l'école 
sans  crainte  ni  embarras,  cas  qui  s'est  déjà  fréquem- 
ment présenté. 

IV 

BUT  ET  AVENIR   DE  LA  SCHOLA 

Malgré  la  jeunesse  de  l'école,  les  résultats  de  son 
travail  ne  se  sont  point  fait  attendre.  De  sa  pépi- 
nière de  jeunes  chefs  d'orchestre,  plusieurs  sont 
déjà  sortis  qui  tiennent  un  rang  honorable  dans  le 
monde  musical  militant;  les  instrumentistes  qui  y 
ont  termirié  leurs  études  ont  trouvé  aussitôt,  même 
à  la  suite  de  concours,  des  postes  enviés  dans  les 
orchestres  de  concert  ou  de  théâtre  et  aux  tribunes 
d'orgue  des  églises;  enfin  certains  élèves  de  compo- 
sition se  sont  déjà  fait  un  nom  comme  producteurs. 

L'influence  de  cet  enseignement  d'art  théorique  et 
pratique  n'a  pas  tardé  non  plus  à  se  faire  sentir  un 
peu  partout,  et  maint  chef  de  Société,  maint  direc- 
teur de  théâtre  important,  n'ont  songé  à  monter 
certains  chefs-d'œuvre  inconnus  de  leur  public  ou 
sortis  depuis  de  longues  années  de  leur  répertoire 
qu'après  que  la  Schola  eût  pris  l'initiative  de  remet- 
tre ces  chefs-d'œuvre  au  jour. 

Pour  nous  résumer,  nous  pouvons  dire  que  la 
Schola  cantorum  s'est  donné  pour  but  de  former  des 
artistes  dignes  de  ce  beau  nom,  des  artistes  élevés 
dans  le  mépris  de  l'égoïste  ambition  qui  caractérise 
trop  souvent  les  virtuoses,  et  sachant  mettre  le  culte 
de  leur  art  au-dessus  de  celui  de  leur  propre  per- 
sonnalité, des  artistes  refusant  d'acheter  le  succès 
au  prix  de  sacrifices  faits  au  mauvais  goût  et  au 
faux  style. 

Quel  rôle  notre  école  sera-t-elle  appelée  à  jouer 
dans  l'avenir?  Nous  ne  pouvons  le  présumer.  Elle 
devra  certainement  subir  les  lois  naturelles  de  trans- 
formation qui  régissent  toutes  choses;  il  est  même 
à  souhaiter  qu'elle  ne  s'atrophie  pas  en  de  passa- 
gères formules  d'enseignement  qui,  efficaces  aujour- 
d'hui, peuvent  être  inutiles  et  même  nuisibles  demain" 
Mais  ce  qui,  nous  le  croyons,  constitue  la  véritable 
torce  de  la  Schola  cantorum,  ce  qui  lui  donnera  la 
vie  et  la  durée,  c'est  l'union  cordiale  et  intellec- 
'  tuelle  de  tous  les  élèves,  leur  désir  de  s'entr' aider 
mutuellement  à  bien  faire,  en  suivant  sans  hésita- 
tion la  voie  ascendante  vers  l'étemelle  Beauté,  désir 
et  union  provenant  tout  naturellement  d'un  sys- 
tème d'éducation  qui,  répudiant  les  vanités  stériles 
et  les  honteuses  compromissions,  a  su  éveiller  en 
ces  jeunes  esprits  la  haute  conscience  artistique  et 
le  pur  et  sincère  amour  de  l'Art. 

Vincent  d'INDY. 


Ces  lignes  ayant  été  écrites  en  1904,  il  nous  reste 
à  dire  que  pendant  les  vingt-cinq  années  écoulées 
depuis  lors,  la  Schola  s'est  employée  à  réaliser  le 
programme  de  sa  fondation  et  que,  dans  tous  les 


domaines  de  son  activité,  les  résultats  les  plus  pro- 
bants ont  couronné  ses  efforts. 

De  21,  le  nombre  des  élèves  s'est  élevé  à  600.  Les 
cours  se  sont  multipliés  suivant  les  besoins  du  re- 
crutement :  on  en  compte  maintenant  80.  De  nou- 
velles catégories  de  classes  ont  été  créées  :  des  classes 
intermédiaires,  entre  le  1"  et  le  2e  degré,  en  éten- 
dant la  durée  des  études,  permettent  aux  élèves  d'at- 
teindre un  niveau  technique  plus  haut;  des  classes 
supérieures  sont  réservées  aux  instrumentistes  sor- 
tis des  cours  du  2=  degré  avec  une  note  approchant 
du  maximum,  et  désireux  de  se  perfectionner  encore, 
en  envisageant  d'une  manière  plus  élevée  l'inter- 
prétation musicale  et  en  se  créant  un  vrai  réper- 
toire de  concert.  Nous  ne  voulons  pas  citer  de  noms 
ici,  mais  la  liste  des  artistes  formés  par  la  Schola, 
soit  comme  compositeurs,  soit  comme  exécutants, 
est  édifiante,  et  démontre  surabondamment  que  les 
musiciens  confiés  à  nos  soins  ont  trouvé  rue  Saint- 
Jacques  un  milieu  vraiment  éducateur  et  des  mé- 
thodes propres  à  mettre  en  valeur  leurs  talents. 
En  ce  qui  concerne  les  concerts,  l'élévation  du  niveau 
des  études  nous  a  permis  de  constituer  un  orchestre 
très  amélioré,  par  rapport  aux  premières  ami  es,  et 
de  donner  salle  Gaveau  des  exécutions  remarquables 
d'oeuvres  présentées  en  1|C  audition,  ou  peu  souvent 
entendues,  ou  encore  entendues  par  ailleurs  avec 
une  interprétation  qui  ne  nous  semblait  pas  judi- 
cieuse. Citons  l'Orfeo  et  Le  Couronnement  de  l'oppée 
de  Monte  verdi;  la  fleur  des  opéras  français  anciens 
de  Lulli  à  Gluck,  et  notamment  Orphée  avec  le  rôle 
principal  confié  à  un  ténor;  la  Messe  en  si,  1rs  Pas- 
sions, et  de  nombreux  oratorios  et  cantates  de  Bach; 
la  Messe  en  ré  et  la  Neuvième  Sijmphonie ;l'Euryanthe 
et  le  Frcischiïtz  de  Weber  ;  Le  Roi  Arthus  de  Chaus- 
son, VEtos  vainqueur  de  P.  de  Bkévuxe,  Les  Béati- 
tudes, Le  Chant  de  la  Cloche,  etc. 

Parmi  les  filiales  de  province  dont  il  a  été  ques- 
tion plus  haut,  plusieurs  ne  purent  se  maintenir,  et 
succombèrent  sous  le  coup  des  difficultés  matérielles; 
mais  des  masses  d'autres  foyers  se  créèrent  partout, 
au  fur  et  à  mesure  que  de  bons  ouvriers  de  l'art 
musical  quittaient  l'école  pour  aller  propager  au 
loin  et  mettre  en  action  l'enseignement  reçu  (le 
Havre,  Caen,  Pau,  Bordeaux,  Arles,  Nancy,  Brest, 
Moulins,  Auxerre,  etc.).  Il  en  est  de  même  à  l'étran- 
ger, et  nous  nommerons  particulièrement  la  Rou- 
manie, la  Suisse,  l'Espagne,  les  Etats-Unis,  l'Amé- 
rique du  Sud. 

A  cette  propagande  agissante,  il  faut  ajoulei  i  Ile 
de  l'édition.  Au  point  de  vue  de  la  musique  reli- 
gieuse notamment,  les  éditions  de  la  Schola  canto- 
rum, tant  par  leurs  propres  publications  que  par  les 
fonds  rachetés,  tiennent  une  place  de  tout  premier 
plan.  Leur  programme  n'a  cessé  d'être  celui  que  le 
pape  Pie  X  a  recommandé  dans  le  célèbre  Motu  pro- 
prio  de  1904,  et  que  son  successeur  actuel  Pie  XI  a 
confirmé  dans  une  récente  et  impérative  Constitution 
apostolique. 


Et  c'est  ainsi  que  la  Schola,  tout  doucement,  sans 
se  presser,  n'a  point  cessé  de  gravir  les  pentes 
fécondes  de  la  montagne  artistique.  Elle  est  devenue 
une  florissante  pépinière  d'artistes  experts  en  leur 
métier,  conscients  de  leur  mission  éducatrice  et, 
avant  tout,  respectueux  de  leur  art,  qu'ils  aiment 
et  savent  comprendre. 


L'ÉCOLE  NORMALE  DE  MUSIQUE 


Par  Auguste  MANGEOT 

ÏÏCTEUR    DR    I,'i;COU:     NORMALE    !)[■:    MUSIQUE 


ORGANISATION   GENERALE 

L'Ecole  normale  de  musique  a  été  fondée  en  1919 
par  MM.  Alfred  Cortot  et  Auguste  Mangeot,  avec 
l'approbation  du  ministre  de  l'instruction  publique 
et  des  beaux-arts.  Le  ministère  des  affaires  étran- 
gères lui  a  accordé  en  192s  -un  patronage. 
'  Cette  Ecole  admet  des  élevés  de  toutes  nationa- 
lités, sans  limite  d'âge,  sans  concours  d'admission, 
et  elle  forme  des  professeurs  de  musique,  des  exécu- 
tants et  virtuoses,  des  chanteurs  de  théâtre  et  de 
concert,  des  organistes,  des  compositeurs,  des  chefs 
d'orchestre. 

L'enseignement  de  l'Ecole  normale  de  musique  est 
basé  sur  une  pédagogie  rationnelle.  Cette  pédagogie 
repose  sur  le  principe  physiologique  suivant  :  l'ac- 
tion des  muscles  étant  commandée  par  le  cerveau, 
les  muscles  n'agissent  bien  que  s'ils  sont  bien  com- 
mandés. 

Une  lionne  technique  des  doigts  ou  du  gosier 
dépend  donc  d'une  bonne  technique  intellectuelle, 
c'est-à-dire  d'une  perception  spontanée  de  la  mu- 
sique. 

De  celte  technique  musicale  intellectuelle  dépend 
toute  la  valeur  du  musicien.  Les  génies  musicaux, 
ou  les  prodiges,  la  possèdent  instinctivement.  Les 
autres  peuvent  L'acquérir  progressivement  par  l'é- 
tude du  solfège,  de  l'anahse  harmonique,  de  la 
construction  musicale,  elc. 

Il  convient  donc  de  mettre  à  la  base  de  l'enseigne- 
ment d'un  instrumenl  ou  de  la  voix  et  à  tous  les 
degrés,  un  enseignement  général  de  la  musique,  qui 
dote  les  élèves  d'une  technique  intellectuelle.  Elle 
est  la  Heur  dont  la  technique  manuelle  est  le  fruil. 

L'enseignement  de  l'Ecole  normale  de  musique 
n'en  est  pas  moins  aussi  libéral  et  universel  que 
possible.  Il  respecte  la  personnalité  de  chaque  élève, 
conserve  aux  étrangers  leur  caractère  national,  et 
leur  fournit  le  moyen  de  le  développer  et  de  l'expri- 
mer librement. 

D'autre  part,  l'enseignement  de  VEcole  normale 
est  organisé  de  telle  sorte  qu'il  existe  une  liaison 
permanente  entre  toutes  les  classes  suivies  par  un 
même  élève. 

Les  études  sont  sanctionnées  par  des  diplômes  qui 
correspondent  aux  trois  degrés  d'enseignement  : 

Enseignement  préparatoire  :  brevet  d'aptitude. 

Enseignement  secondaire  :  diplôme  d'enseigne- 
ment et  diplôme  d'exécution. 


Enseignement  supérieur  :  licence  d'enseignement 
et  licence  de  concert. 

Les  diplômes  sont  délivrés  à  la  suite  d'examens 
qui  comportent  les  épreuves  suivantes  : 

Brevet  d'aptitude.  —  Solfège  (théorie,  lecture, 
dictée),  exécution,  lecture  à  vue,  analyse  harmoni- 
que, construction  musicale,  histoire  de  la  musique. 

Diplôme  d'enseignement.  —  Mêmes  épreuves  que 
ci-dessus,  d'un  degré  plus  élevé,  et,  en  outre,  exé- 
cution d'une  œuvre  de  musique  de  chambre  et 
leçons  de  solfège  et  d'instrument  à  donner  a  un 
élève. 

Diplôme  d'exécution.  —  Exécution  de  cinq  mor- 
ceaux difficiles  et  d'une  œuvre  de  musique  de  cham- 
bre; accompagnement  à  première  vue  d'une  œuvre 
vocale  ou  instrumentale.  Analyse  harmonique  et 
construction  musicale  d'une  des  œuvres  exécutées. 

Licence  de  concert.  —  Exécution  d'un  récital  de 
concert,  d'une  œuvre  de  musique  de  chambre,  ana- 
lyse harmonique  et  essai  d'interprétation  d'une  œu- 
vre désignée  une  heure  d'avance. 

Licence  d'enseignement.  —  Exécution  d'œuvres 
île  haute  difficulté.  Lecture  à  vue.  Leçon  à  un  groupe 
d'élèves.  Transposition.  Réalisation  à  vue  au  piano 
d'une  basse  chiffrée  et  harmonisation  à  vue  au  piano 
d'un  chant  donné.  Analyse  d'une  œuvre.  Musique 
d'ensemble  à  vue.  Thèse  sur  un  sujet  d'histoire  ou 
de  pédagogie. 

En  dehors  de  ses  cours  réguliers,  qui  ont  liée  du 
premier  lundi  d'octobre  au  1"  juillet,  VEeo'le  nor- 
male a  créé  des  séries  de  cours  d'interprétation  des- 
tinés aux  élèves  ayant  terminé  leurs  études  dans  un 
Conservatoire  ou  une  grande  Ecole  de  Krance  ou  de 
l'étranger,  et  à  de  jeunes  artistes  qui  désirent  se 
perfectionner  auprès  des  plus  illustres  maîtres.  Ce 
furent  de  1925  â  1928  : 

Piano  :  Alfred  Cortot. 

Violon  :  Jacques  Thiuaud,  E.  Ysaye,  Georges  Enesco. 

Orgue  :  Marcel  Dupré. 

Chant  :  Mm«  Croiza,  Ninon  Vai.i.in. 

Ces  cours  admettent  des  exécutants  et  des  audi- 
teurs faisant  ou  non  partie  de  l'Ecole  normale. 

Présidée  par  M.  Alfred  Cortot,  l'Ecole  est  dirigée 
depuis  sa  fondation  par  M.  A.  Mangeot,  et  elle  est 
pourvue  d'un  conseil  de  professeurs  composé  (en 
1928|  de  13  membres1. 


1.  Composition  du  conseil  en  10:8  :  M.  P.uil  Ucm*   conpOsiMul 
M'1-  Na. lia  li.n  um.i  ii  (harmonie  el  contrepoint),  Alfred  C.mror,  La/un- 

I.IVY,    M"10    (JHIAUD-LaïAUSK   (piailo),    JaCqUOS    TlIlBAI  0,    M.Uiricr    ll\Y"l. 

Jtttes  I [violon),   Pâblo  Casals,  l>.  Iuhm"    vtolonC«8s 

M- II.  i.iiuod,  il.  Ch.  r\N/vi.M,l,.,,,t.,  Uarcal  Bopw    M««o). 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ECOLE  NORMALE  DE  MUSIQUE    3027 


Etahlie  en  1020  rue  Jouffroy,  l'Ecole  est  installée 
depuis  1927  dans  un  vaste  immeuble,  114  bis,  boule- 
vard Malesberbes,  auquel  a  été  adjointe,  en  1929, 
une  salle  de  concerts  de  cinq  cents  places  construite 
sur  les  plan-;  de  M.  Auguste  Perret,  architecte. 


ENSEIGNEMENT 


Enseignement  g( 


l-:!i. 


L  enseignement 
donné  progressioen 
tituepasuncomph 
la  hase  essentiell 
qu'il  doit  précéder 

Solfège.  —Théo 
leurs   de    sons,   de 


st   obligatoire.    Il    est 

les  élèves.  Il  ne  cons- 

des,  mais,  au  contraire, 

enseignement  spécial, 

suivre. 

mis  de  durée,  des  hau- 

es,  des  tonalités,  des 


modes,  des  rythmes,  des  mesures,  etc  Lecture  dans 
toutes  les  clés,  relations  des  clés,  transposition.  Lec- 
ture  mentale. 

Audition.  Développement  de  l'ouïe.  Dictées  mélo- 
diques. Dictées  harmoniques.  Audition  mentale. 

Théorie  du  son.  Formation  du  son.  Vibrations. 
Eléments  d'acoustique. 

Analyse  harmonique.  —  Accords  de  3,  4  et  o  sons 
et  leurs  renversements.  Chiffrage.  Notes  acciden 
telles,  relards,  pédales,  broderies,  appogiatures, 
notes  de  passage,  échappées,  anticipations,  etc. 

Construction  musicale.  —  Etudes  des  formes  : 
Fugue,  Suite  ou  Parfita,  Sonate,  Théine  varié,  etc. 

Histoire  de  la  musique.  —  Histoire  de  la  musique 
de  l'Antiquité  à  nos  jours.  —  Les  grandes  époques 
de  la  musique.  —  La  vie  et  les  œuvres  «1rs  grands 
compositeurs.  —  La  musique  dans  l'histoire  de  la 
civilisation.  —  Conférences  sur  la  musique  moderne 
suivies  d'auditions  d'œuvres  avec  le  concours  des 
auteurs. 

Musique  d'ensemble.  —  Sonates  pour  deux  instru- 
ments. —  Trios,  Quatuors,  etc.  —  Accompagne- 
ment. —  Duos,  Trios  et  Quatuors  vocaux. 

Lecture  à  vue,  déchiffrage,  accompagnement.  — 
Musique  symphonique.  —  Exécution  des  sympho- 
nies classiques,  romantiques  et  modernes  et  des 
poèmes  symphoniques,  à  deux  pianos,  ou  avec  ré- 
duction d'orchestre. 

Musique  chorale.  —  Ensemble  choral.  —  Exécu- 
tion des  chœurs  à  une,  deux,  trois,  et  quatre  voix. 


Enseignement  général  facultatif. 

Gymnastique  rythmique.  —   Langues   française 
et  étrangères.  —  Français  (pour  les  étrant 
glais,  italien,  allemand,  espagnol,  etc. 

Instruction  générale. — Grammaire  frai 
Orthographe.  —  Syntaxe.  —  Rédaction.  —  Arith- 
métique. —  Histoire.  —   Géographie.  —  Sciences 
naturelles. 

(Ce  cours  est  destiné  aux  élèves  qui,  a 
instruction  générale  insuffisante,  ont  besoin  de  la 
compléter.) 

Enseignements  spéciaux. 

Piano,  orgue,  violon,  alto,  violoncelle,  contre- 
basse, harpe,  instruments  à  vent. 

Chant.  —  Technique.  —  Interprétation.  —  Décla- 
mation lyrique.  —  Mise  en  scène.  —  Art  lyrique 
(étude  des  poèmes,  des  personnages,  style,  esthé- 
tique). 

Composition  musicale. —  Harmonie,  contrepoint, 
fugue,  orchestration. 

Cours  d'interprétation  pour  artistes 
et  virtuoses. 

V Ecole   ion  mole   a  adjoint  à   son    ensi 
quotidien  des  séries  de  cours  d'inlerprétal 
nés  aux  élèves  ayant  terminé  leurs  études  dans  un 
Conservatoire  ou  une  grande  Ecole  de  Fian  i    m  de 
I  étrangei ,  el  à  déjeunes  artistes  qui  désin 
fectionner  auprès  des  plus  illustres  maîtres. 

Ces  cours,  dont  le  nombre  varie  de  6  à  12,  ont 
lieu  généralement  au  mois  d'avril,  mai  ou  juin  et 
durent  chacun  de  deux  à  trois  semaines. 

Il  suflit,  pour  indiquer  la  valeur  el  la  rareté  d'un  tel 
enseignement,  de  rappeler  que,  de  1920  à  1922,  ces 
cours  ont  été  faits  à  l'Ecole  normale  de  musique  par  : 

Piano  :  Alfred  Cortot,  Wanda  Landowska,  Margue- 
rite Long,  1.  Philipp,  Blanche  Selva. 

Violon  :  Jacques  Thipai-d. 

Violoncelle  :  Pablo  Casals,  André  IIerkino. 

Orgue  :  Marcel  Dupré. 

Chant  :  Croiza,  Reynaldo  Hahn. 

Ces  cours  admettent  des  exécutants  et  des  audi- 
teurs faisant  partie  ou  non  de  l'Ecole  normale. 

Les  dates  des  cours,  les  programmes,   etc.,  sont 
publiés  chaque   année   au    début   de    la    saison    et 
envoyés  a  toute  personne  qui  en  fait  la  demande. 
A.  Mangeot. 


LES  ÉCOLES  DE  LA  LÉGION  D'HONNEUR 


Par  E.  PESSARD 


MAISONS   NATIONALES  D'ÉDUCATION 
DE    LA  LÉGION   D'HONNEUR 

L'ordre  de  la  Légion  d'honneur  a  été  institué  le 
10  mai  1802  (29  floréal  an  X),  mais  c'est  seulement 
le  3  décembre  1805  qu'on  décida  de  créer  des  mai- 
sons d'éducation  destinées  à  élever  gratuitement  les 
filles  légitimes  des  légionnaires  sans  fortune.  Le 
10  juillet  1806,  un  décret  impérial  ordonna  que  l'an- 
tique demeure  du  connétable  Anne  de  Montmorency, 
le  château  d'Ecouen,  en  Seine-et-Oise,  «  serait  dis- 
posé, sans  délai,  de  manière  à  recevoir  les  filles  des 
membres  de  la  Légion  d'honneur  auxquelles  l'em- 
pereur jugerait  convenable  d'y  accorder  une  place  », 
et  le  5  décembre  1807,  Napoléon  nommait  Mmc  Cam- 
pan  directrice  de  cette  maison.  On  y  admettait  des 
élèves  gratuites  ou  payantes,  selon  l'étal  de  fortune 
des  parents,  mais  le  plus  grand  nombre  étaient  des 
filles  d'officiers.  Le  succès  de  cette  création  fut 
grand  parmi  les  légionnaires,  et  bientôt  le  château 
d'Ecouen  fut  reconnu  insuffisant  :  les  demandes  d'ad- 
mission affluaient  et  le  nombre  des  orphelines  aug- 
mentait sans  cesse,  en  raison  des  guerres  meurtriè- 
res de  cette  époque. 

Un  décret  du  25  mars  1800  décida  que  l'ancienne 
abbaye  de  Saint-Denis  (Seine),  avec  ses  jardins,  parc 
et  dépendances,  moins  l'église  et  les  bâtiments  dits 
du  Trésor,  serait  cédée  à  la  Légion  d'honneur  pour 
y  établir  une  seconde  maison  d'éducation  destinée 
aux  filles  et  orphelines  des  officiers  supérieurs,  et 
que  la  directrice  de  cette  maison,  nommée  par  le 
grand-maitre  de  l'ordre  sur  la  proposition  du  grand 
chancelier,  porterait  dorénavant  le  titre  de  surinten- 
dante. Le  nombre  réglementaire  des  élèves,  tant 
gratuites  que  payantes,  fut  fixé  à  300  dans  chaque 
maison,  mais  le  nombre  des  demandes  d'admission 
dépassa  tellement  ce  maximum  réglementaire  que 
l'empereur  prescrivit  immédiatement  la  création  de 
trois  succursales  pouvant  chacune  contenir  200  or- 
phelines. Il  les  plaça  sous  la  direction  de  la  supé- 
rieure de  la  congrégation  de  la  Mère-de-Dieu,  et  le 
décret  du  15  février  1811  organisa  ces  succursales, 
qui  s'ouvrirent  rue  Barbette  au  Marais  (établisse- 
ment dit  le  Corberon),  près  de  Fontainebleau  (éta- 
blissement dit  tes  Barbeaux),  et  en  pleine  forêt  de 
Saint-Germain  en  Laye  (établissement  dit  les  Loges). 
Il  était  question  de  créer  encore  trois  autres  succur- 
sales, mais  les  événements  ne  le  permirent  pas. 


1    Xous  adrcsson 


Après  la  chute  de  l'Empire,  la  Restauration  res- 
titua à  la  famille  des  Bourbon-Condé  le  château 
d'Ecouen,  dont  les  élèves  furent  jointes  à  celles  de 
Saint-Denis,  et  une  ordonnance  royale  du  31  juil- 
let 1814,  arrachée  par  surprise  à  Louis  XVIII,  sup- 
prima brutalement  les  succursales  réservées  aux 
orphelines  pauvres,  jetant  sur  le  pavé  près  de  six 
cents  jeunes  filles  sans  argent,  sans  pain,  sans  se- 
cours et  sans  foyer.  Eclairé  par  la  supérieure  de  la 
congrégation  de  la  Mère-de-Dieu  qui,  les  larmes  aux 
yeux,  alla  se  jeter  à  ses  pieds,  le  roi,  comprenant 
que  cette  mesure,  prise  en  haine  des  serviteurs  fidè- 
les du  régime  déchu,  allait  frapper  injustement  des 
veuves  et  des  enfants,  rapporta  son  ordonnance, 
supprima  la  succursale  de  Fontainebleau,  mais  main- 
tint les  deux  établissements  de  Paris  et  de  Saint- 
Germain,  dans  lesquels  furent  réparties  les  élèves 
des  Barbeaux. 

Naturellement,  pendant  les  Cent  jours,  Napoléon 
s'empressa  de  réintégrer  les  élèves  à  Ecouen  et  à 
Fontainebleau,  et  naturellement  aussi,  la  seconde 
Restauration  apporta  le  même  empressement  à  les 
en  déloger.  Ce  n'est  qu'en  1830,  qu'un  procès,  sou- 
tenu contre  les  héritiers  du  prince  de  Condé  et  gagné 
par  la  Légion  d'honneur,  lui  assura  enfin  la  posses- 
sion pleine  et  entière  du  château  d'Ecouen  si  long- 
temps disputée.  En  1850,  la  maison  de  la  rue  Bar- 
bette fut  supprimée  et  les  élèves  en  furent  transférées 
â  la  maison  d'Ecouen,  qui  prit  le  litre  de  lre  succur- 
sale, la  maison  des  Loges  prenant  celui  de  2"  succur- 
sale, titres  qu'elles  portent  encore.  En  1881,  le  géné- 
ral Faidherbe,  alors  grand  chancelier,  laïcisa  les 
succursales,  en  enleva  l'administration  à  la  congré- 
gation de  la  Mère-de-Dieu,  et  nomma  pour  les  rem- 
placer un  personnel  enseignant  laïque  dirigé  par- 
deux  intendantes,  placées  elles-mêmes  sous  la 
haute  surveillance  de  la  surintendante  de  Saint- 
Denis.  De  ce  jour,  l'unité  de  renseignement  dans 
les  maisons  d'éducation  de  la  Légion  d'honneur  fut 
établie.  Plus  tard,  en  1890,  le  général  Février,  de- 
venu grand  chancelier,  entreprit  une  réorganisation 
des  maisons,  et  assigna  à  chacune  d'elles  le  rôle 
spécial  quelle  devait  jouer  dans  l'instruction  de  la 
jeune  fille  :  dans  les  trois  maisons,  préparation  au 
brevet  élémentaire  ou  de  2S  ordre  de  l'enseignement 
primaire,  leçons  élémentaires  de  solfège,  de  piano- 
et  de  dessin,  de  coulure,  de  cuisine  et  de  blanchis- 
sage. Aux  Loges,  échéait  l'enseignement  profession- 
nel :  coupe  et  confection  de  robes,  broderies,  lin- 
gerie et  dessin  industriel. 

A  Ecouen,  l'enseignement  commercial  :  comptabi- 
lité et  tenue  des  livres,  élude  spéciale  des  langues 
anglaise  et  allemande,  dactylographie,  sténogra- 
phie, préparation  aux  postes  et  télégraphes,  banques, 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE  ÉCOLES  DE  LA  LÉGION  D'HONNEUR    362 


Crédit  foncier  et   grands  établissements   financiers. 

A  Saint-Denis  :  enseignement  supérieur  du  dessin 
(aquarelle,  peinture  à  l'huile),  de  la  musique  (chant, 
piano,  accompagnement,  harmonie,  étude  des  œu- 
vres classiques,  pédagogie,  etc.),  préparation  au  brevet 
de  1er  ordre  de  l'enseignement  primaire,  au  diplôme 
de  fin  d'études  secondaires  et  au  certificat  d'aptitude 
pour  l'enseignement  des  lettres,  de  la  musique  ou  du 
dessin  dans  les  écoles  normales,  les  lycées  et  les 
écoles  communales  déjeunes  filles. 

Les  filles  des  légionnaires  ayant  au  moins  le  grade 
de  capitaine  en  activité  de  service,  ou  une  position 
civile  correspondante,  pouvaient  seules  entrer  à 
Sainl-Denis.  Ecouen  ne  recevait  que  les  filles  des 
capitaines  en  retraite  et  des  lieutenants  en  activité, 
tandis  que  les  sous-officiers,  marins  et  soldats  ne 
pouvaient  faire  admettre  leurs  filles  qu'aux  Loges, 
mais,  après  cinq  années  de  séjour,  les  élèves  des 
succursales  pourvues  du  brevet  de  2°  ordre  pas- 
saient d'office  à  Saint-Denis,  quel  que  fût  le  grade 
ou  l'emploi  de  leur  père,  pour  s'y  préparer  à  l'ob- 
tention du  brevet  de  î"1'  ordre  ou,  si  on  leur  avait 
reconnu  les  dispositions  nécessaires,  pour  se  perfec- 
tionner dans  l'art  du  dessin  ou  de  la  musique;  de 
même,  les  élèves  de  Saint-Denis,  dépourvues  de  dons 
artistiques  et  qui  ne  pouvaient  pas  pousser  plus 
loin  leurs  études  littéraires,  pouvaient  passer  dans 
une  succursale  pour  y  suivre  les  cours  spéciaux  à 
chacune  de  ces  maisons. 

A  la  fin  de  la  guerre,  le  général  Dubail,  grand 
chancelier,  modifia  ce  règlement  touchant  le  mode 
d'admission  des  élèves,  lesquelles  entrent  toutes 
indistinctement  dans  l'une  des  deux  maisons  succur- 
sales, où  elles  restent  trois  ans,  pour,  de  là,  passer 
un  temps  égal  à  la  maison  de  Saint-Denis,  où  elles 
terminent  leurs  études. 

ENSEIGNEMENT   DE   LA   MUSIQUE 

La  musique  est  enseignée  à  Saint-Denis  par  un 
professeur  d'accompagnement  (externe),  10  dames 
professeurs,  faisant  partie  du  personnel  de  la  maison, 
et  4  jeunes  professeurs  stagiaires,  plus  trois  profes- 
seurs (externes)  de  piano,  choisis  par  le  grand 
chancelier  parmi  les  anciennes  élèves  des  maisons 
de  la  Légion  d'honneur,  et  autorisées  à  donner  des 
leçons  payantes  de  piano  aux  élèves  qui  n'ont  pas 
encore  pu  obtenir  la  faveur  des  leçons  gratuites 
données  par  les  dames  de  la  maison,  où  à  quelques- 
unes  de  celles  auxquelles  celte  faveur  a  été  retirée- 
Les  parents  ont  aussi  la  faculté  de  faire  donner  des 
leçons  payantes  de  violon  pur  le  professeur  d'accom- 
pagnement. 

A  Ecouen,  il  y  a  3  dames  professeurs,  2  stagiaires 
et  trois  professeurs  externes  de  piano. 

Aux  Loges,  il  n'y  a  que  2  dames  professeurs, 
2  stagiaires  et  2  professeurs  externes  de  piano. 

Le  cours  supérieur  de  piano  et  le  cours  supérieur 
de  chant  sont  faits  dans  chaque  succursale  par  les 
professeurs  éminents  qui  le  font  à  Saint-Denis,  et 
cette  petite  armée  de  musiciens  est  placée  sous  les 
ordres  et  la  surveillance  artistique  du  directeur  de 
l'enseignement  musical,  qui,  lui-même,  est  chargé  à 
Saint-Denis  du  cours  supérieur  de  solfège,  d'harmo- 
nie et  de  pédagogie. 

Sans  s'élever  au  niveau  du  Conservatoire,  les  étu- 
des musicales  sont  très  sérieuses  a  Saint-Denis, 
qu'on  considère  à  juste  litre  comme  une  pépinière 
d'agréables  virtuoses  et  d'excellentes  musiciennes 


pouvant,  le  cas  échéant,  trouver  dans  le  professorat 
des  moyens  d'existence  pour  l'avenir. 

Dans  les  trois  maisons,  les  élèves  qui  oui  de  la 
voix  font  partie  de  la  classe  d'ensemble  vocal,  placée 
sous  la  direction  d'une  dame  professeur  (qui  fait 
également  fonctions  de  maître  de  chapelle),  lîien 
n'est  plus  joli,  rien  n'est  plus  frais  que  des  chœurs 
de  jeunes  filles,  mais  la  classe  d'ensemble  de  Saint- 
Denis,  qui  compte  plus  de  cent  chanteuses,  dépasse 
de  beaucoup,  pour  le  charme,  la  finesse  des  nuances, 
l'articulation  et  la  qualité  des  voix,  non  seulement 
ce  qui  se  fait  dans  les  succursales,  mais  ce  qui  se  fait 
partout  ailleurs,  et  les  personnes  assez  favorisées 
pour  avoir  pu  assister  à  un  concerl  ou  à  une  céré- 
monie religieuse,  dans  l'intérieur  de  la  maison  de 
Saint-Denis,  en  gardent  un  souvenir  ineffaçable. 

L'orgue  de  la  chapelle  de  la  Légion  d'honneur  à 
Saint-Denis  est  dû  à  Sébastien  Erard,  le  fondateur 
de  la  célèbre  fabrique  de  pianos  et  de  harpes.  Pen- 
dant un  de  ses  voyages  en  Angleterre,  il  fut  frappé 
de  la  supériorité  des  orgues,  et  voulut  faire  profiter 
son  pays  des  remarques  qu'il  avait  faites  sur  les 
procédés  de  fabrication  employés  chez  nos  voisins 
d'outre-Manche.  Il  ramena  à  Paris  en  182a  un  fac- 
teur habile,  John  Abbey1,  lui  soumit  ses  projet-;  et 
l'installa  dans  son  château  de  la  Muette,  à  Passy. 

C'est  là  que  John  Abbey  construisit  pour  S.  Erard 
un  orgue  qui  figura,  en  1827,  à  l'Exposition  du  Lou- 
vre et  qui  valut  à  son  auteur  la  grande  médaille 
d'or.  Charles  X  voulait  l'acheter  pour  la  chapelle 
des  Tuileries,  mais  le  meuble  dans  lequel  il  était 
placé  était  de  trop  grandes  dimensions.  Le  roi  com- 
manda alors  à  S.  Erard  un  aulre  orgue  approprié 
au  local  qui  devait  le  recevoir.  John  Abbey  en  cons- 
truisit deux,  en  ajoutant  au  troisième  clavier  un 
jeu  d'anches  libres  expressif  au  toucher,  inventé 
par  S.  Erard,  perfectionnement  que  Grétby,  dans 
ses  Essais  sur  la  musique  itome  III),  signalait  avec 
de  grands  éloges.  «  Sans  doute,  disait-il,  le  secret 
est  découvert  pour  un  tuyau  comme  pour  mille  : 
plus  on  enfonce  le  doigt,  plus  le  son  augmente,  et 
il  diminue  quand  on  le  relevé.  » 

L'orgue  des  Tuileries  a  été  détruit  en  1830,  pen- 
dant les  journées  de  Juillet.  Héédilié  en  183 M  dans  la 
chapelle  de  l'Empereur,  il  fut  anéanti  en  1871,  lors 
de  l'incendie  du  palais  des  Tuileries  par  la  Com- 
mune2. L'autre  orgue  muni  du  jeu  d'anches  libres 
expressif  au  toucher  est  dans  la  chapelle  de  la  maison 
de  Saint-Denis.  C'est  l'unique  spécimen  de  celte  in- 
vention, puisque  l'orgue,  construit  en  1827,  et  donné 
par  Mli,e  veuve  Erard  en  1870  au  Conservatoire  de 
musique  de  Paris,  ne  possède  pas  le  jeu  ex 

Comme  nous  l'avons  dit  plus  haut,  ce  jeu  est  placé 
au  troisième  clavier.  11  est  construit  en  bois  et  muni 
d'anches  libres.  Des  rozettes,  comme  dans  les  jeux 
d'anches  ordinaires,  permettent  d'accorder  les 
tuyaux  au  ton  des  autres  jeux  de  l'orgue  (on  sait 
que  les  jeux  d'anches  libres  ne  suivent  pas  les  va- 
riations que  les  dilférences  de  température  font  subir 
aux  autres  jeux  et,]notamment,  aux  jeux  à  bouche.) 

La  sonorité  du  jeu  de  S.  Erard  est  charmante, 
mais  le  système  d'expression  par  le  plus  ou  moins 
d'enfoncement  des  touches  présente  à  l'organiste  de 
grandes  difficultés  d'exécution,  et  l'effet  en  est  peu 
sensible.  Si  on  ajoule  que  ce  système  ne  peut  guère 


I.  A.Iiien  de  la  Fige:  Notice 
Denis;  Félix  Danjod  :  Charles  ■ 
de  Saint-Denis. 

i.  LOnjue  de  la  Chapelle  'les  Tuileries  (Firniin  Dulut.  h. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


l'appliquer  qu'à  un  seul  jeu  et  que  l'emploi  de  tan- 
che libre  s'impose,  on  ne  doit  pas  être  surpris  qu'il 
ne  soi)  pas  entré  dans  La  pratique1  et  que  l'expres- 
sion par  l'emploi  de  la  boite  expressive,  dont  le 
m  h -ne  offre  un  exemple  au  2e  clavier,  ait  pré- 
valu et  pris  l'importance  qui  se  constate  surtout 
dans  les  orgues  les  plus  récentes. 

si  i  ri  Le  tentative  de  S.  Ilrard  pour  doter  l'orgue 
iion  au  toucher  n'a  pas  produit  les  résul- 
tats qu'en  attendait  Grktuy,  il  n'en  est  pas  de  même 
pour  les  autres  systèmes  qu'il  avait  inventés,  adop- 
tés  ou  perfectionnés  dans  la  construction  de  ses 
trois  orgues.  C'est  dans  ces  instruments  qu'on  vit 
paraître  pour  la  première  fois  :  la  boite  expressive; 
la  soufflerie  à  lanterne  avec  pli  renversé  et  pompes 
alternatives;  les  pédales  de  combinaisons  et  d'appel; 
enfin,  un  mécanisme  basé  sur  des  procédés  absolu- 
ment différents  de  ce  qui  s'était  fait  jusqu'alors.  Ces 
innovations  ont  été  le  point  de  départ  de  toute  la 
lacune  moderne.  Aussi,  avons-nous  tenu  à  associer 
au  nom  de  Sébastien  Krard  celui  de  son  ami  et  col- 
laborateur John  Abbey,  qui  s'établit  en  1830  à  Paris, 
et  eut  de  nombreux  travaux  dus  à  l'incontestable 
supériorité  de  ses  instruments  que  tous  les  autres 
facteurs  s'empressèrent  de  prendre  pour  modèles 
(c'est  son  propre  II  1s  qui,  actuellement,  est  chargé 
de  l'entretien  des  orgues  des  maisons  d'éducation  de 
la  Légion  d'honneur). 

L'orgue  de  la  chapelle  de  la  maison  de  Saint- 
Denis  est  donc  un  monument  historique  qui  doit 
être  conservé  précieusement  :  les  lacunes  et  les  bi- 
zarreries qu'on  peut  y  remarquer  sont  caractéristi- 
ques de  l'époque  à  laquelle  il  a  été  construit.  Il  se 
compose  de  : 

1.  :  i.  clavier  île  -•<  touches  i  5  octaves  moins  iJ 
el  deux  touches  en  haut)  de  sot  grave  a  fa. 

i  -      ■,'  uni  rtavi'-r  de  5 S  louches  (dont  :;.}  seul<>uient  sont  mo- 

claviei  de  58  i  niche;    dont  5i  sont  mobiles  du 

2.  Un  petit  pédalier  en  tirasses,  ancien  système,  de  13  tou- 
,  h   •  de    n/  ,i  sol    le  1er  sol  dièse  grave  tire  au  clai 

dièse). 

:..    un  |  |ié  laies  d'appel  et  d'expression. 

-i.   Dou 

Les  pédales  d'appel  et  d'expression  sont  : 


3.   App  -  plus  la  Do 

,     i  ■■       -  l  Récit ,  2'  clavier  { pai 

I  jeu  du  3"  clavier  i  par  inli       in  H"  ■  ilu  '•  '''il;. 

Les  jeux  sont  distribués  sur  les  trois  claviers  de  la 
manière  suivante  : 


Premier  clavier    l'uaa  ! 


i .   Di  ipason 

8    — 

s     _ 

i.   Oulcinm 

•i     — 

.: 

2     — 

<  B 

S     — 

; .  Di  stus  S 

Deuxième  clavier.  Récit  expressil 
...  Finie  s  pieds     du  3«  sol  à  fa 

s     —  — 

11.  PrcstaiU  i     —  — 

nette  s     — 

Troisième  clavier,  jeu  expn 
libres  (pas  de  i 


Il  ,  „,  i       i;  ■  'l'on/ilr,  loue'  III.  |ia    i 

Ki  lin    Ci.émkn'i  aint-Jea 


tii  a,  bulletin  du 


873,  paga 


Les  4  jeux  ou  plutôt  demi-jeux  du  2e  clavier  sont 
enfermés  dans  une  huile  expressive  munie  de  jalou- 
sies mécaniques;  le  jeu  du  troisième  clavier  est  ex- 
pressif seulement  par  l'enfoncement  de  la  touche. 
Enlin,  le  buffet  est  en  chêne,  de  style  pseudo-grec  et 
garni,  sur  la  façade,  de  tuyaux  de  montre  factices  en 
bois  doré. 

SURINTENDANTES  DE   LA    LÉGION    D'HONNEUR 

La  première  maison  d'éducation  de  la  Légion 
d'honneur  a  été  installée  au  château  d'Lcouen,  mais 
le  décret  du  29  mars  1809  ordonnant  qu'une  maison 
semblable  à  celle  d'Ecouen  serait  établie  à  Saint- 
Denis,  décida  aussi  que  la  directrice  de  celte  nou- 
velle maison  porterait  le  titre  de  «  surintendante  ». 
Il  n'y  a  eu  encore  que  sept  surinlendautes  :  La  ba- 
ronne du  Douzet  (1810).  —  La  comtesse  Dnquengo 
(1816).  —  La  baronne  de  Bourgoing  (1820).  —  La 
baronne  Dannery  (  1837).  —  La  baronne  Daumesnil 
11831).  —  L'Amirale  Le  Ray  (1870).  —  M""  Hycke- 
busch  (1888).  —  Mme  Huet  (1913).  —  M"»  Maratuech 
(1919).— Mm°  Porte  (192b). 

Les  surintendantes  portent  à  l'intérieur  de  la  mai- 
son le  grand  cordon  de  la  Légion  d'honneur  en 
sautoir,  mais  Mme  Ryckebusch  est  la  première  des 
surintendantes  qui  ait  été  décorée  de  la  Légion 
d'honneur.  Mesdames  Huet,  Maraluech  et  Porte  ont 
le  grade  de  chevalier. 


GRANDS  CHANCELIERS   DE   LA  LEGION   D'HONNEUR 

Il  y  a  eu,  depuis  la  création  par  lionaparte  de 
l'ordre  de  la  Légion  d'honneur,  vingi  grands  chan- 
celiers qui  furent  :  Le  comte  de  Lacépède,  le  célèbre 
naturaliste  (1803).  —  Msr  de  Pradl,  archevêque  de 
Malines  (1814).  —  Le  vicomte  de  Bruges,  lieutenant 
général  (1815).  —  Une  seconde  fois,  le  comte  de 
Lacépède  (1815).  —  Le  maréchal  Macdonald,  duc  de 
Tarente  (1815).  —  Le  maréchal  .Mortier,  duc  de  Tré- 
vise  (1831).  —  Le  maréchal  comte  Gérard  (1836).  — 
Le  maréchal  Oudinot,  duc  de  Reggio  (1839  .  —  Le 
maréchal  Gérard,  pour  la  seconde  fois  (1842'.  —  Le 
général  de  division  baron  Subervie  (1848).  —  Le 
maréchal  comte  Molitor  (1848).  —  Le  maréchal 
comte  Ëxelmans  (1849).  —  Le  général  comte  d'Or- 
nano  (1832).  —  Le  général  de  division  Lebrun,  duc 
,le  Plaisance  (1853).—  Le  maréchal  Pélissier,  duc  de 
Malakolf  (1839'.  -  L'amiral  ftamelin  (1860).  —  Le 
général  de  division  comte  de  Flahaut  (1864).  —  Le 
général  de  division  Vinoy  (1871).  —  Le  général  de 
division  Faidherbe,  membre  de  l'Institut  ^880).  — 
Le  général  de  division  Février  '188'.»  .  —  Le  -  inéral 
de  division  Davout,  duc  d'Auerstaedt  (1895).  —  Le 
général  île  division  Florentin  (1901).  —  Le  général 
Dubail  i  I9l8i. 

Les  portraits  des  grands  chanceliers  de  l'ordre 
sont  conservés  dans  le  salon  dit  •  des  grands  chan- 
celiers »,  au  palais  de  la  Légion  d'honneur,  64  rue 
de  Lille,  et  quai  d'Orsay.  On  se  sonnent  qu'en  1871, 
ce  palais  a  été  incendie  par  la  Commune  el  qu'une 
souscription,  faite  exclusivement  parmi  les  légion- 
naires, sur  l'initiative  du  général  Vinoy  en  1871, 
permit  de  le  réédilîer. 

Un  livre  d'or,  placé  dans  le  salon  des  grands  chan- 
celiers, conserve  le  nom  des  personnes  qui  ont  pris 
part  à  cette  souscription,  qui  fut  une  splendide  ma- 
.  nifestation  patriotique. 

E.  PfiSSABD, 


L'ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE 


Par  Maurice  CHEVAIS 

:.l  MES  1     M      i  u  an  l     UNS    LBS 


DE   L'ANTIQUITÉ   AU    DIX-NEUVIÈME   SIÈCLE 

Eu  France,  la  musique  est  au  nombre  des  ma- 
tières comprises  dans  les  programmes  d'enseigne- 
menl  des  écoles  primaires  élémentaires,  des  écoles 
primaires  supérieures,  des  écoles  normales,  —  des 
classes  primaires  et  élémentaires  des  lycées  et  col- 
lèges. 

Les  maîtres  ont  deux  tâches  à  accomplir  :  ils  doi- 
vent enseigner  des  chants  à  leurs  élèves,  pour  tous 
les  avantages  que  présente  le  chant  à  l'école,  —  et 
ils  doivent  faire  l'éducation  musicale  des  enfants, 
c'est-à-dire  entreprendre  avec  eux  une  culture  vo- 
cale, une  éducation  de  l'oreille,  une  formation  du 
ijoùt,  et,  après  quelque  temps,  une  initiation  à  la 
lecture  de  la  notation  usuelle. 

De  ces  deux  tâches,  la  première  est  lapins  ancien- 
nement et  la  plus  généralement  acceptée.  On  fait 
chanter  dans  la  grande  majorité  des  écoles. 

L'éducation  musicale,  au  contraire,  bien  qu'en 
progrès,  est  encore  très  négligée.  Elle  n'est  entre- 
prise qu'en  un  petit  nombre  d'écoles,  et  plus  rare- 
ment encore  menée  à  bien. 

C'est  cependant  cette  éducation  musicale  qui  fait 
l'objet  de  notre  étude,  et  c'est  elle  d'ailleurs  dont 
l'évolution  présente  le  plus  d'intérêt.  Car  l'évolu- 
tion du  chant  proprement  dit  reste  insignifiante. 
L'étude  des  chants  se  fait  aujourd'hui,  presque  par- 
tout, comme  elle  se  faisait  autrefois,  par  transmis- 
sion orale,  par  audition.  L'enfant  apprend  les  chants 
d'école  en  écoutant  chanter  son  maître,  comme  il 
apprend  les  chansons  populaires  en  écoutant  chan- 
ter ses  proches,  —  et,  d'autre  part,  la  technique  du 
chant,  même  dans  ses  données  les  plus  simples, 
continue  à  être  ignorée  de  presque  tous  les  éduca- 
teurs. 

Nous  reprendrons  d'ailleurs  plus  loin  cette  ques- 
tion du  chant  à  l'école,  et  il  sera  parlé  de  la  situa- 
tion actuelle  de  l'éducation  musicale. 

Mais,  —  puisque  la  cause  de  cette  éducation  n'est 
pas  encore  entendue,  et  que  bien  des  maîtres  justi- 
fient de  bonne  foi  leur  inaction  en  contestant  à  l'art 
musical  toute  influence  heureuse,  sociale  ou  indivi- 
duelle, —  il  nous  arrivera,  dans  cette  étude,  de  nous 
attarder  à  rappeler  les  affirmations  des  plus  grands 
éducateurs  et  des  philosophes  sur  l'importance  de 
la  musique  à  l'école,  sur  la  valeur  morale  et  la  puis- 


sance de  ce  moyen  d'éducation.  Il  nous  arrivera  de 
montrer  ses  lettres  de  noblesse,  émanant  non  pas 
de  musiciens,  nécessairement  épris  de  leur  art, 
mais  de  ceux  qui  ont  étudié  l'enfance,  et  qui  ont 
recherché  les  moyens  les  plus  propres  à  élever  son 
intelligence  et  son  cœur. 

Et,  si  nous  croyons  utile  de  rappeler  que  la  ques- 
tion de  la  musique  à  l'école  a  préoccupé  de  nom- 
breux esprits  parmi  les  plus  grands,  nous  croyons 
plus  utile  encore,  pour  d'autres  raisons,  de  citer  les 
efforts  de  ceux  qui  ont  entrepris  des  réalisations,  de 
faire  connaître  les  méthodes,  les  procédés,  désuets 
ou  non,  des  professeurs  qui  ont  enrichi  le  patri- 
moine pédagogique.  L'examen  des  résultats  qu'ils 
ont  obtenus  permet  de  profiter  de  leur  expérience, 
de  se  prononcer  plus  sûrement  sur  la  valeur  des 
théories,  de  prendre  à  chaque  doctrine  ce  qu'elle  a 
de  meilleur,  d'éviter  de  pousser  trop  loin  des  essais 
infructueux. 

Les  actuels  créateurs  de  systèmes  d'enseignement 
musical,  et  les  créateurs  à  venir,  ont  eux-mêmes 
grand  profit  à  prendre  conseil  de  l'histoire,  à  con- 
naître la  chaîne  continue  qui  les  relie  avec  ceux  qui 
ont  cherché,  avant  eux,  les  solutions  possibles,  puis- 
que aussi  bien,  en  pédagogie,  «  découvrir  »  ne  con- 
siste qu'à  remettre  en  lumière,  à  rajeunir  un  vieux 
mode  d'enseignement,  ou  même  simplement  à  faire 
passer  dans  la  pratique  ce  qui  n'était  pas  encore 
sorti  de  la  théorie. 

On  s'en  rendra  compte  :  les  théories  d'une  épo- 
que ne  correspondent  pas  aux  méthodes  usitées 
alors.  Les  philosophes  devancent  déjà  les  théori- 
ciens. Les  propositions  des  théoriciens  devancent  la 
pratique,  et  peut-être  plus  encore  en  éducation  mu- 
sicale qu'ailleurs.  Aussi,  notre  aperçu  historique  de 
la  pédagogie  musicale  n'est-il  qu'une  présentation, 
dans  un  ordre  chronologique,  des  divers  systèmes 
d'enseignement  élémentaire  de  la  musique,  présen- 
tation toute  théorique  d'abord,  suivie  d'un  exposé 
des  essais  d'application,  des  réalisations  les  plus 
heureuses,  des  premiers  succès. 


Certes,  les  philosophes  grecs  donnaient  au  mot 
musique  une  signification  qui  dépasse  les  limites  de 
cet  art.  Pour  Socrate,  la  philosophie  n'est  que  le 
point  culminant  de  la  musique,  et  Platon  comprend, 
sous  ce  terme,  tous  les  arts  du  rythme.  Il  dit  : 

La  musique  est  La  partie  principale  de  L'éducation,  parce  que 
le  nombre  et  l'harmonie,  «'introduisant  de  bonne    h 
l'âme  du  jeune  homme,  s'en  emparant,  y  font  entrer  a  .    ..    -  .;!■ 


3r.r2 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


la  grâce,  la  beauté,  la  vertu,  et  dès  l'âge  le  plus  tendre,  avant 
que  l'enfant  ne  Boit  éclairé  des  lumières  de  la  raison.  Et  quand 
la  raison  sera  venue,  il  s'attachera  à  elle,  aussitôt,  par  le  rap- 
pel l  secrol  que  cet  art  aura  mis  entre  la  raison  et  lui.  [Rèpuliii- 
que,\.  III.) 

Mus  on  ne  saurait  douter  du  grand  rôle  que  les 
Grecs  attribuaient  à  la  culture  musicale  proprement 
dite  lorsqu'ils  disaient  que  l'harmonie  el  le  rythme 
ont  comme  fin  dernière  de  purifier  l'âme. 

Ahistote  part  des  mêmes  constatations  pour  de- 
mander que  la  musique  prenne  place  dans  les  sys- 
tèmes éducatifs. 

Rien  n'est  plus  puissant  que  le  rythme  et  les  chants  pour  tra- 
duire fidèlement  les  sentiments  de  l'àme.  Il  est  impossible  de  ne 
pas  reconnaître  la  puissance  morale  de  la  musique,  et  puisque 
cette  puissance  est  bien  réelle,  il  faut  nécessairement  faire 
entrer  la  musique  dans  l'éducation  des  enfants.  (l'olilii/ue,  I.  V, 
ch.  v.) 

Tous  les  citoyens  d'Athènes  étaient  tenus  d'ap- 
prendre l'harmonique,  la  rythmique  el  aussi  la  mé- 
trique en  rapports  directs  avec  l'étude  de  la  poésie. 
Au  pédagogium,  les  enfants  apprenaient  même  à 
jouer  d'un  instrument.  «  C'est  à  treize  ans,  dit  Pla- 
ton, que  commence  l'étude  de  la  lyre.  »  Les  jeunes 
filles  —  qui  négligeaient  l'éducation  du  corps  et 
celle  de  l'esprit  —  apprenaient  à  chanter. 

A  Sparte,  la  musique  était  considérée  comme  le 
principal  moyen  d'éducation,  et  comprenait  :  chant, 
musique,  danse.  Il  fallait,  en  raison  des  nécessités 
de  la  vie  puhlique  et  de  la  vie  religieuse,  des  fêtes 
ou  cérémonies  où  le  chant  et  la  danse  se  mêlaient 
intimement,  lui  consacrer  beaucoup  de  temps. 

On  sait  que  l'étude  des  divers  modes  grecs  n'était 
autorisée  qu'autant  que  ces  modes  pouvaient  avoir 
d'heureuses  influences  sur  le  caractère  et  l'esprit. 
L'assurance  avec  laquelle  on  condamnait  certains 
de  ces  modes  était,  certes,  très  puérile.  Mais  nous 
pouvons  trouver  au  moins,  dans  ces  jugements,  un 
témoignage  de  l'importance  qu'on  se  faisait  de  la 
valeur  de  la  musique  comme  moyen  de  conduire  les 
âmes. 

11  y  a  peu  de  pédagogie  romaine,  même  générale. 

Les  enfants  de  la  Hépublique  romaine  sont  ins- 
truits dans  la  famille,  et  surtout  par  le  père.  Ainsi, 
non  seulement  l'exécution  chorale  est  rendue  diffi- 
cile, niais  aussi  toute  éducation  artistique. 

Sous  l'empire,  l'enseignement  s'organise.  Le  chant 
y  tient  peu  de  place,  surtout  dans  l'enseignement 
donné  aux  hommes  libres.  On  connaît  les  paroles  de 
Caton  : 

i  m,  appi  end  au  ;  fils  el  aux  fill  is  des  pati  ioiens  des  arts  tro  n- 
peurs  el  déshonnètes.  Ils  vonl  avec  les  danseurs,  le-  music s 

et  les  chanteur,  dans  les  ,'■, ■,,|e-  de  comédiens;  ils  a]. prennent  il 
Chanter,   Ce    nui,  d'aine,    l'opinion  de   li„i   .ni.-olre    .    , -|  ...--II.  .11  - 


■  .1   peine  âgé  de  douze  ans,  exécutant  une  danse    que 

l'esclave  le  plus  abject  aurait  à  peine  osé  exécuter. 

Le  peuple  juif  aimait  le  chant. 

On  chantait  dans  le  temple  de  Jérusalem. 

Et  l'on  chanta  dans  les  églises  chrétiennes.  La 
musique  lit  partie  du  quadrivium. 

Les  moines  enseignèrent  la  musique  et  lurent  à 
peu  pies  1rs  seuls  à  le  faire  pendant  tout  le  moyen 
âge.  Quelques  écoles  de  musique  religieuse  et  maî- 
trises se  créèrent,  où  se  pratiquaient  l'étude  des 
signes  de  notation,  et  l'étude  du  chant  grégorien. 
Les  plus  grandes  écoles  furent  celles  de  Chartres,  de 
Toulouse,  de  Paris. 


De  tous  les  moyens  pédagogiques  dont  disposait 
le  moyen  âge,  les  plus  connus  sont  ceux  qu'imagina 
Gui  d'Arezzo,  ou  dont  on  lui  attribue  la  paternité. 

Gui  d'Arezzo  est  parti  d'un  désir  de  faciliter  les 
études  musicales,  d'introduire  quelque  esprit  de  mé- 
thode dans  l'enseignement  du  chant  ecclésiastique, 
et  ses  géniales  découvertes  sont  toutes  provoquées 
par  un  souci  d'ordre  pédagogique.  Son  propre  en- 
seignement devait  être  merveilleux  de  clarté,  riche 
de  comparaisons  concrètes.  Un  exemple,  une  phrase 
de  son  antiphonaire,  permet  d'en  juger  : 

«  L'octave,  dit-il,  est  la  répétition  de  la  même 
lettre  de  chaque  côté,  comme  de  B  en  6,  de  C  en  c,  de 
D  en  d,  et  ainsi  de  suite.  Ces  deux  sons  s'indiquent 
par  une  même  lettre  parce  qu'ils  sont  de  même  nature 
et  d'une  similitude  très  grande.  De  même  aussi  les 
sept  jours  de  la  semaine  écoulés,  nous  les  recom- 
mençons, de  telle  sorte  que  nous  appelons  toujours 
du  même  nom  le  premier  et  le  huitième  jour,  ainsi 
nous  figurons  et  nommons  de  la  même  manière  les 
sons  à  l'octave,  parce  que  nous  senlons  qu'ils  sonnent 
entre  eux,  en  vertu  d'une  harmonie  naturelle. 

«  D'où  il  suit  que  le  poète  a  pu  dire,  avec  grande 
raison,  qu'il  y  a  sept  degrés  dans  les  sons,  qui,  alors 
même  qu'ils  semblent  se  multiplier,  ne  constituent 
pas  une  addition,  mais  une  répétition  des  uns  et 
des  autres.  » 

Lorsqu'il  utilise  les  syllabes  :  ut,  ré,  mi,  fa,  sol, 
la,  pour  désigner  les  six  sons  de  l'hexacorde  corres- 
pondant aux  lettres  C,  D,  E,  F,  G,  A,  ce  n'est  pas  pour 
substituer  un  nom  à  un  autre,  mais  pour  une  raison 
d'éducation  d'oreille,  pour  permettre  de  retrouver 
le  son  de  l'une  des  notes  en  recherchant  l'intonation 
correspondante  dans  une  mélodie  connue.  Et  s'il  a 
choisi,  à  ce  dessein,  les  phrases  de  l'hymne  de  Saint- 
Jean,  c'est  que  le  son  initial  de  chaque  phrase,  cor- 
respond aux  six  sons  de  sa  série  musicale.  Ainsi, 
l'exercice  constitue,  pour  Gui  d'Arezzo,  une  excellent 
moyen  mnémonique. 

Il  écrit  en  ellet,  dans  sa  lettre  au  moine  Michel  : 

«Situ  veux  fixer  dans  ta  mémoire  un  son  ou  un 
neume,  de  telle  sorte  qu'en  quelque  endroit  que  tu 
veuilles,  dans  quelque  chant  que  ce  soit,  connu 
ou  étudié  de  loi,  lu  puisses  le  saisir  sur-le-champ 
et  l'articuler  sans  hésiter,  tu  dois  graver  dans  ta  tète 
ce  même  son  ou  ce  même  neume  que  tu  as  entendu 
déjà  dans  une  autre  mélodie.  Et,  pour  chaque  son 
que  lu  veux  retenir,  lu  dois  avoir  en  vue  une  mélo- 
die de  même  sorte,  qui  commence  par  la  même  note 
telle  que  cette  mélodie  dont  j'ai  coutume  de  faire 
usage  pour  l'enseignement  des  enfants,  les  plus 
jeunes  et  les  plus  avancés  :  L't  queant  Iaxis  ltcso- 
nare  libris  Mira,  etc.  » 

Ce  procédé  des  formules,  permettant  de  retrouver 
une  intonation,  a  été  repris  plusieurs  fois  depuis, 
et  nous  le  retrouverons  dans  le  système  du  Belge 
Dessirier. 

C'est  encore  par  désir  de  clarté  que  Gri  d'Arezzo 
utilise  une  portée,  —  car,  pour  lui,  une  notation 
sans  lignes  ni  lettres  (les  lettres  servant  de  clefs) 
ressemble  à  «  un  puits  sans  corde,  donl  l'eau,  même 
abondante,  ne  peut  servir  a  ceux  qui  la  voient  ». 

Il  trace  en  général  une  portée  de  quatre  lignes. 
Pour  éviter  toute  confusion,  il  donne  à  deux  de  ces 
lignes  des  couleurs  différentes  aux  lignes  qui 
indiquent  la  place  des  demi-tons  naturels).  Sur  les 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L ÉCOLE 


deux  autres  lignes  il  place  provisoirement  deux 
lettres,  deux  clefs,  —  jusqu'à  ce  que  l'élève  ne  s'y 
trompe  plus.  Alors  les  couleurs  ne  seront  plus  néces- 
saires, et  l'une  des  deux  clefs  pourra  disparaître 
également.  * 

Ces  lignes,  qui  n'avaient  été  utilisées  jusqu'à  lui 
que  pour  guider  les  copistes,  restent  donc  tracées 
pour  le  chanteur. 

Voici  un  exemple  de  l'une  de  ses  portées  de  quatre 
Lianes  : 


(,rtle 


gne  est  verte,  et  porte  ut). 

lth t  noire,  el  porte  A  - 

gne  est  rouge,  el  porte  : 
çne  est  nuire,  el  porte  D  i 


Sa  portée  de  cinq  lignes,  du  M.nv><<:iii  >/■■  Saini- 
Evroult  (B.  N.),  est  ainsi  courue  : 


(noire,  pour  A,  lu). 
(rouçe,  pour  /'«). 
noire,  :   i 
(verte,  pour  ni  . 


De  cette  introduction  des  couleurs  dans  le  penta- 
gramme,  introduction  qui  semble  bien  due  à  Gui 
d'Arezzo,  il  sera  également  lire  parti  plus  tard,  et 
nous  mentionnerons  plus  loin  des  systèmes  d'ensei- 
gnement qui  s'y  rapportent. 


Nous  n'avons  pas  à  rechercher  ici  si  Gi'i  est  bien 
l'inventeur  du  système  des  muances,  ou  s'il  faut 
attribuer  ce  système  à  Jean  Cotton.  L'hexacorde  de 
Gu:  a  pu  conduire,  en  tout  cas,  au  système  des 
muances.  Rappelons  l'intérêt  pédagogique  du  sys- 
tème : 

Quand  un  chant,  par  son  étendue  sortait  de  l'hexa- 
corde :  ut,  rê,  mi.  fa,  soi,  la,  on  opérait  une  muta- 
tion, ou  muance,  consistant  à  chanter,  sur  un  même 
son,  deux  noms  de  notes  différents,  pour  reprendre 
les  notes  de  l'hexacorde  à  une  autre  hauteur.  De 
même,  on  recourait  à  la  muance  pour  traiter  voca- 
lement  tout  intervalle  d'un  demi-Ion.  Cet  intervalle, 
en  effet,  devait  toujours  être  compris  entre  les  deux 
notes  mi  et  fa,  et  la  muance  permettait  de  l'appeler 
mi-fa,  en  montant,  et  fa-mi  en  descendant. 

Ainsi,  notre  gamme  diatonique  eût  été  chantée  : 

Écriture  : 


Ht,  rê,  mi,  fa,  sol,  la,  mi-fa. 
Pour  faire  exécuter  l'exemple  suivant 


on  aurait  eu  recours  aux  appellations  suivantes  : 
Ht,  rê,  mi,  fa,  sol,  la,        \ 

Si  le  système  des  muances  n'est  resté  en  vigueur 
que  jusqu'au  xvni0  siècle  comme  procédé  de  solmi- 
sation,  il  a,  jusqu'à  nos  jours,  été  l'inspirateur  de 
procédés  pédagogiques  qui,  bien  que  s'appliquant 
non  plus  à  l'hexacorde,  mais  à  la  gamme  complète, 
présentent  avec  lui  une  très  étroite  parenté. 

On  pratiqua,  aux  svueet  xvme  siècles,  a 
de  transposition  déjà  très  voisin,  que  Hollivi-  dé- 
crit dans  sa  Méthode  pour  apprendre  h 
(1780),  et  qui  consiste,  quand  se  présentenl  d«S  mo- 
dulations compliquées,  à  changer  de  clef  et  de  toni- 
que,. Qu'on  ait,  par  exemple,  à  solfier  en  fê  bémol, 
Kollet  place  une  clef  de  sol  2«  ligne  en  bête  de  la 
portée,  et  une  armure  de  cinq  bémols.  Et  aussitôt 
après  cette  armure,  il  écrit  une  clef  d'ut  !'■  ligne,  sans 
armure,  —  et  la  tonique  ré  bémol  est  chantée  d  •.  La 
phrase  sera  chantée  en  ut  majeur,  le  mot  ut  étant 
attribué  au  son  du  ré    . 

La  plupart  des  professeurs  qui  feront  solfier  flans 
toutes  les  clefs  sur  la  portée  muette  (voir  plus  loin) 
pratiqueront  la  substitution  d'une  tonique  à  une 
autre,  d'une  gamme  à  une  autre. 

L'école  galiniste  reprendra  ces  subslitutions,  qui 
s'appelleront  soudures  [latinistes,  et  s'opéreront  à 
l'aide  de  syllabes  de  mutation,  —  de  muance. 

WiLiiE.M,  Mme  II.  Parent,  A.  GédaLge  pratiqueront 
ces  muances  non  plus  en  substituant  un  nom  de  note 
à  l'autre,  mais  un  chiffre  chanté  à  un  autre  chiffre 
chanté,  pour  préparer  la  modulation,  qui  se  chan- 
tera ensuite  avec  les  noms  exacts  des  sons  corres- 
pondants. 

L'exemple  donné  ci-dessus  conduit  aux  écritures 
et  aux  appellations  suivantes,  avec  l'école  galiniste 
et  ses  continuateurs  : 


appellailiioins,  en  chantant 


Antre  ivnlure 


appellations  chantées 


[Syn*be 

rmiUlinii 


Amsique  le  font  remarquer  LicuTENTiiAL(Di-(V,/îan'i)  I  ris,  1882,,  la  gamme  chromatique  se  chante,  avec 
e iBibliografia  delta  musica,  Milan,  1826),  E.  David  et  le  système  des  muances,  sur  deux  noms  de  degrés 
Malhis  Lussy  (Histoire  de  la  notation  musicale,  Pa-  I  seulement,  —  et  les  systèmes  qui  dérivent  de  ces 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


muances  nous  ont  proposé  en  effet,  pour  chanter 
une  gamme  chromatique  (la  gamme  chr.  descen- 
dante ci-après,  par  exemple),  de  dire  : 


Fa      mi  .     fa      mi ,   fa    mi  ,  fa     wvi,  . 

ou  Tiurt     sept  t  huit    Sept ,  huit  sept  .huit  sept, 

■VIII      vil       VI11     VH.Vlll   Vit,  VIII    vu,. 


Une  autre  forme  de  muance  est  celle  que  pratique 
Uollet  (lin  du  xvme  siècle),  et  qui  était  sans  doute 
connue  avant  lui.  Nous  y  revenons  plus  loin. 


Enfin  on  attribue  également  à  Gui  d'Arezzo  l'inven- 
tion du  procédé  de  la  main  musicale.  Or,  là  encore, 
il  se  peut  bien  que  Jean  Cotton  ait  été  le  premier  à 
indiquer  comment  on  pouvait  compter  les  notes  sur 
les  doigts  de  la  main.  Le  procédé  a  été  décrit  bien 
des  fois,  et  il  n'y  a  pas  à  y  revenir.  Il  est  d'ailleurs 
en  harmonie  avec  le  système  de  l'hexacorde  et  des 
muances,  puisque  les  vingt  positions  correspon- 
daient à  : 


(les  muances  ou  mutations  ayant  lieu  sur  les  posi- 
tions 4-7-8  —  li-li-lo). 

La  main  musicale,  main  harmonique,  ou  encore 
main  guidonienne,  a  vécu  aussi  longtemps  que  le 
système  des  muances  qui  lui  est  attaché.  Elle  con- 
nut quelques  modifications  et  complications  avec 
Salomon  (xme  siècle)  et  Engelbert  (xive). 

Puis  elle  devient  la  main  portée.  Le  grand  Rameau, 
en  1760,  opérant  ou  vulgarisant  une  simplification 
pédagogique,  conseille  l'usage  de  la  main  non  plus 
d'après  le  système  ancien,  mais  en  profitant  de  l'a- 
nalogie que  présentent  les  doigts  avec  les  cinq  lignes 
de  la  portée.  On  tiendra  «  la  main  bien  ouverte,  dit- 
il,  et  le  petit  doigt  vers  la  terre  ».  (On  sait  que, 
d'autre  part,  il  propose  une  simplification  dans  l'in- 
dication des  mesures,  simplification  dont  l'enseigne- 
ment élémentaire  aurait  pu  profiter.) 

De  ce  procédé  de  la  main  portée,  bien  des  profes- 
seurs voudront  profiter.  Wilhem  le  recommandera, 
l'étendra  à  l'étude  des  deux  clefs  usuelles.  Toute  son 
école  utilisera  la  main,  sauf  les  adversaires,  assez 
irréfléchis,  des  phonomimies.  Bien  des  traditiona- 
listes n'auront  pas  d'autre  procédé  que  celui-là  pour 
les  exercices  d'intonation  et  de  solmisation.  Des  pro- 
fesseurs réussiront  à  faire  chanter  leurs  élèves  à  deux 
et  trois  voix  en  utilisant  la  main  portée. 

Les  procédés  de  la  portée  muette  et  du  solfège  sans 
clefs,  ou  du  «  solfège  dans  toutes  les  clefs  »,  se  rat- 
tachent encore  aux  découvertes  de  Gui  d'Arezzo,  ou 
des  musiciens  de  son  époque. 

La  portée  de  deux  lignes,  puis  de  trois,  de  quatre 
et  cinq,  connut  aussitôt  les  déplacements  de  clefs 
(lettres).  Nous  avons  dit  que  Gui  plaçait  des  lettres 
au  début  des  lignes  noires.  Les  lettres  D  et  A  se 
trouvaient  posées  sur  les  lignes  1-3  ou  2-4.  Cela  per- 
met donc  de  considérer  que,  dès  l'origine  de  laportée, 
on  l'utilisa,  suivant  les  voix,  sans  attribuer  déplaces 
fixes  aux  notes  de  l'hexacorde. 

Sur  ces  portées,  les  exercices  de  solmisation  se 
(irent  soit  avec  déplacements  des  clefs,  soit  sans  clef, 
par  simple  déplacement  de  la  tonique  ut,  —  ce  qui 
revient  au  même.  —  Sebalde  Heyden  (1337),  par 
exemple,  utilise  la  portée  de  quatre  lignes  sans  clef, 
—  et  aussi  sans  note.  —  Le'  maître  de  chant,  de 
plain-chanl,  touche,  à  l'aide  d'une  baguette,  une 
ligne  ou  un  interligne,  fixant  ainsi  la  place  de  la 
tonique.  Puis,  partant  de  ce  repère,  il  fait  solmiser  à 
la  baguette. 

L'abbé  Le  Bœuf,  auteur  d'un  traité  historique  et 


pratique  du  chant  ecclésiastique  (paru  en  1741),  re- 
prend le  procédé. 

Il  écrit  :  «  Le  maître  touchera  sur  les  lignes  et  sur 
les  intervalles  blancs  (de  la  portée  muettel  tous  les 
chants  qu'il  voudra;  il  faut  enseigner  aux  élèves  à 
descendre  et  à  monter  suivant  le  progrès  d'une  ba- 
guette qui  touche  tantôt  sur  une  ligne  et  tantôt  sur 
une  autre;  il  faudra,  pour  cela,  laisser  beaucoup  de 
blanc  entre  les  quatre  lignes.  » 

Jacob,  en  1769,  reprend  ce  même  procédé,  pour 
faire  solfier  sans  clef,  à  la  baguette. 

Le  procédé  sera  repris  par  Galin  (méloplaste),  par 
Wilhem  (indicateur  vocal),  et  par  leurs  continua- 
teurs. 

Soit  comme  inventeur,  soit  au  moins  comme  ins- 
pirateur, Gui  d'Arezzo  tient  donc  une  première  place 
dans  la  pédagogie  musicale.  On  voit,  en  effet,  que  ce 
réformateur  génial  de  l'enseignement  de  la  mu- 
sique a  contribué  puissamment  à  orienter  bien  des 
créateurs  de  systèmes  vers  des  pédagogies  pratiques. 


L'enseignement  musical  populaire  trouvera  des 
défenseurs  et  ne  sera  jamais  oublié  dans  le  grand 
mouvement  intellectuel  et  artistique  du  xvic  siècle. 

Des  défenseurs,  il  en  aura  parmi  les  partisans  et 
parmi  les  adversaires  de  la  Renaissance;  les  huma- 
nistes, d'un  côté,  Luther,  de  l'autre,  diront  toute 
l'importance  morale  de  la  musique,  toute  la  place 
qui  lui  revient  dans  l'éducation  des  enfants.  Une 
première  introduction  de  l'enseignement  musical 
dans  les  écoles  élémentaires  est  non  seulement  sou- 
haitée, mais  parfois  réalisée.  Le  champ  des  éludes 
s'élargit.  L'époque  de  la  Renaissance  connaît  d'ail- 
leurs les  plus  grands  progrès  dans  l'art  d'écrire  pour 
les  voix. 

Les  poètes  eux-mêmes  favorisent  le  mouvement 
musical,  et  l'un  d'eux,  le  plus  grand,  reprenant  une 
théorie  des  stoïciens,  affirme  avec  une  merveil- 
leuse énergie  que  l'amour  du  beau  —  de  la  musique 
—  se  confond  avec  l'amour  du  bien.  Cette  affirma- 
lion  de  Ronsard  est  bien  connue  : 


Celuy,  —  dit-il  au  roi,  —  celuy  lequel  oyaiit  un  <l   n\   u vurd 
d'instrumens  ou  la  douceur  de  la  v,.yx  naturelle,  ne  s'en  resjouit 
point,  ne  s'en  esmeul  point  et  de  teste  en  pieds  n'e 
point,  comme  doucement  ravy,  et  si  ne  sçay  cornu: 


hors  de  soy, 
pravée,  et  duquel 


tortue,  vicieuse, 
,iut  donner  garde,  comme  de  celuy  qui 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L ÉCOLE 


n  est  point  heureusement  né.  Comment  pourroit-on  accorder 
avec  un  homme  qui  de  son  naturel  hayt  les  accords  '?  Celuy 
n'est  digne  de  voyr  la  douce  lumière  du  soleil,  qui  ne  fait  hon- 
neur à  la  Musique,  comme  petile  partie  de  celle,  qui  si  armo- 
nieusement  (comme  dit  Platon)  agitte  tout  ce  grand  univers. 

Cette  phrase  de  Ronsard,  Shakespeare  la  reprend, 
et  l'on  trouve,  dans  le  Marchand  de  Venise  : 

L'homme  qui  n'a  pas  de  musique  en  lui-même  et  qui  n'est 
pas  ému  par  les  doux  accords  des  sons,  est  fait  pour  les  trahi- 
sons, les  embûches,  et  les  larcins.  Les  mouvements  de  son  âme 
sont  aussi  sombres  que  la  nuit,  et  ses  passions  noires  comme 
l'enfer.  Déliez-vous  d'un  tel  homme. 


Luther,  pour  qui  «  la  musique  gouverne  le  monde  ->, 
écrit  : 

.Si  j'avais  des  enfants,  je  voudrais  qu'ils  apprissent  non  seule- 
ment les  langues  et  l'histoire,  mais  encore  le  chant,  la  musique  et 
les  mathématiques  [Lettre  nui  Conseillers  îles  Etat-:  nllemnnils, 
pour  les  engager  «  fonder  îles  renies  chrétiennes.) 

Il  dit,  ailleurs  : 

Il  faut  absolument  maintenir  la  musique  dans  les  écoles. 
Il^aut  qu'un  maitre  d'école  sache  chanter,  autrement  je  ne  le 
regarde  point.  Après  la  théologie,  j'accorde  volontiers  à  la  mu- 
sique la  première  place  et  le  plus  grand  honneur. 

Il  donne  ses  «  directions  aux  inspecteurs  »  et  or- 
ganise l'instruction  en  Allemagne,  en  laissant  appa- 
raître tout  le  prix  qu'il  attache  à  l'éducation  musi- 
cale. Dans  les  premières  classes  élémentaires  (en- 
fants qui  apprennent  à  lire),  il- demande  qu'on  fasse 
chanter.  Dans  les  deuxièmes  classes  (enfants  qui 
savent  lire),  la  première  heure  de  l'après-midi,  cha- 
que jour,  sera  consacrée  à  la  musique  et  au  chant. 
On  réunira  toutes  les  classes  pour  les  exécutions 
chorales. 

Un  disciple  de  Luther  en  pédagogie,  Valentin 
Friedland,  crée,  à  Trotzendorf,  une  école  secondaire 
où  la  musique  est  au  nombre  des  sept  matières  en- 
seignées (latin,  grec,  dialectique,  rhétorique,  musi- 
que, arithmétique  et  religion!. 

Quelques  professeurs  appliquent  des  systèmes 
d'enseignement  correspondant  à  des  notations  nou- 
velles, ou  à  des  appellations  qui  tentent  de  se  subs- 
tituer à  celles  que  la  pédagogie  de  Gui  d'Arezzo  a  ren- 
dues universelles.  Ils  méritent  d'être  nommés  plu- 
tôt dans  une  histoire  de  la  notation  que  dans  une 
étude  pédagogique.  Rappelons  cependant  les  noms 
de  Hubert  Waklrant,  d'Anvers  (né  en  1317,  mort 
en  1393),  Van  denPutte,  Anselme,  Bianciierini  (1367), 
Kalvitz  (mort  en  1613),  Hitzler  1 1628),  Antoine  Par- 
ran  (1636),  Souhaitty  (1677),  Sauveur,  Roualle  de 
Boisgelou,  Dumas,  Demaux. 

Aux  xvnB  et  xviii»  siècles,  le  nombre  des  auteurs 
de  systèmes  «  simplifiés  »  est  si  grand  que  J.-J.  Rous- 
seau peut  écrire  : 

«  Le  public  est  aujourd'hui  si  indisposé  contre  tout 
ce  qui  s'appelle  nouveauté,  si  rebuté  de  systèmes  et 
de  projets,  surtout  en  fait  de  musique,  qu'il  n'est 
plus  guère  possible  de  lui  rien  offrir  en  ce  genre 
sans  s'exposer  à  l'elïet  de  ses  premiers  mouvements, 
c'est-à-dire  à  se  voir  condamné  sans  être  entendu.  » 

Est-ce  bien  R.  de  Boisgelou  qui  eut  le  premier  l'idée 
de  donner  un  nom  différent  à  chaque  son  de  la 
gamme  chromatique?  Il  est  difficile  de  le  dire.  Ceux 
qui  ont  décrit  les  procédés  ou  qui  en  ont  conseillé 
la  pratique,  n'en  sont  pas  nécessairement  les  inven- 
teurs. D'ailleurs,  la  bocédisation  de  Hubert  Wael- 
rant, la  proposition  de  Hitzler  en  faveur  de  syllabes 


qu  il  jugeait  plus  euphoniques  [la,  be,  ce,  de,  me,  fe, 
ge\  acheminaient  les  novateurs  vers  des  séries  de 
syllabes  se  rapportant  aux  douze  sons  de  la  gamme 
chromatique. 

Boisgelou  proposa  de  chanter  : 

ut  de  ré  ma  mi  fa  fi  sol  be  la  sa  si 

Sa  proposition  eut  moins  de  succès  que  l'idée  elle- 
même,  qui  fut  très  souvent  reprise. 

Les  Allemands,  utilisant  les  appellations  de  l'al- 
phabet pour  la  série  non  altérée,  adoptèrent  les 
terminaisons  is  pour  les  sons  diésés,  es  pour  les  sons 
bémolisés. 

Cis,  dis,  cis,  fis,  gis,  nia,  his  (notes  diésées). 
Ces,  des,  es,  fes,  ges,  as,  B  (notes  bémolisées). 

Les  Anglais  eurent  leurs  terminaisons.  Framery, 
vers  1783  (auteur  d'un  dictionnaire  de  la  musique), 
propose  : 

Ta,  ra,  ma,  fa,  sa,  la,ja...  pour  les  sons  «  dits  » 
naturels. 

Te,  re,  me,  fe,  se,  le,  je...  pour  les  notes  diésées. 

To,  ro,  mo,  fo,  so,  lo,  jo...  pour  les  notes  bémo- 
lisées. 

Miss  Gloveb,  vers  1812,  dans  son  système  de 
Tonic-sol-fa  qui  représente  les  sept  fonctions  de  la 
gamme  majeure  par  les  sept  lettres  initiales  :  d,  r, 
m,  f,  s,  I,  t,  fait  usage  des  mêmes  terminaisons,  en 
modifiant  leur  attribution.  Elle  utilise  : 

de,  re,  me,  fe,  se,  le,  te  pour  les  dièses. 
da,  ra,  ma,  fa,  sa,  la,  ta  pour  les  bémols. 

Galin  utilisera  la  finale  è  pour  les  dièses  (té,  rè, 
mè,...)  eu  pour  les  bémols  (teu,  reu,  meu...),  iè  poul- 
ies doubles  dièses,  ieu  pour  les  doubles  bémols. 

Et  l'idée  sera  reprise  aussi  par  MM.  Menchaca,  Fré- 
mond,  Eïqueh  (méthodes  chromatiques). 

L'année  1742  voit  paraître  le  mémoire  de  J.-J.  Rous- 
seau sur  la  notation  chiffrée,  proposée  pour  faciliter 
l'étude  de  la  musique. 

«  J'en  appelle,  dit  J.-J.,  à  l'expérience  sur  la  peine 
qu'ont  les  écoliers  à  entonner,  par  les  noms  primitifs, 
des  airs  qu'ils  chantent  avec  toute  la  transposition, 
pourvu  toujours  qu'ils  aient  acquis  la  longue  et  né- 
cessaire habitude  de  lire  les  bémols  et  les  dièses  des 
clefs  qui  font, avec  leurs  huit  positions,  quatre-vingts 
combinaisons  inutiles  et  toutes  retranchées  par  ma 
méthode.  » 

En  premier  lieu,  dit-il  pour  bien  marquer  son 
intention  pédagogique,  en  premier  lieu,  la  musique 
sera  du  double  ou  du  triple  plus  facile  a  apprendre. 

Tout  le  monde  excepté  les  artistes,  dit-il  encore, 
ne  cesse  de  se  plaindre  de  l'extrême  longueur 
qu'exige  l'étude  de  la  musique. 

Son  Mémoire  à  l'Académie  des  sciences  établit  donc 
la  nécessité  d'une  réforme  dans  l'écriture  musicale. 

En  1743,  paraissait  sa  Dissertation  sur  la  musique 
moderne  où  il  exposait  son  système.  Enfin,  son  Dic- 
tionnaire de  la  musique  paraissait  en  1767. 

On  y  trouve  un  exposé  succinct,  mais  concis,  de  ce 
système  chiffré.  En  réalité,  l'article  Xotes  a  été  écrit 
bien  avant  1767,  peut-être  même  en  1730,  en  tout 
cas  assez  de  temps  après  la  création  du  svstème  de 
notation  pour  que  Rousseau  en  saisisse  avec  netteté 
les  avantages  et  les  inconvénients. 

Ce  système  a  été  décrit  dans  le  tome  I,  deuxième 
partie  de  Y  Encyclopédie  (pp.  397-398-399-400),  et 
nous  n'y  reviendrons  plus  loin  que  pour  en  souligner 
les  dispositions  pédagogiques  et  le  principe  modal. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Od  sai*  qu'il  n'obtint  aucun  succès  du  vivant  de 
l'auteur.  Jean-Jacques  le  condamna  lui-même,  ou  à 
peu  près,  en  ces  termes  : 

Mais  comme,  au  fond,  tous  ces  systèmes,  en  corrigeant  d'an- 

ririi-  defauLs  iiuvpicU  >>n  e-i  lout  accoutumé,  ne  faisaient  qu'en 
-uii-iiiurr  d'au  tir  <  iluut  i ' 1 1 : i ) ■  i [ 1 1 <  1  ■>  est  nie,  ne  :'i  p rendre,  je  pense 

que    le  public  a    tri'S  SapaiH'llI  l'ail    de   Ial-,..T  les    chu-r-   m, > 

elles  sont,  et  dé  nous  renvoyer,  nous  et  nos  systèmes,  au  pays 
des  vaines  spéculations. 

Cependant,  peu  de  temps  avant  sa  mort,  Jean- 
Jacques  Rousseau  disait  : 


;„>lll 


Nous  arrivons  au  xi.v  siècle. 

L'enseignement  musical  va  recevoir  de  vigoureuses 
impulsions  grâce  à  Wilhem  et  à  son  école,  aux  suc- 
cesseurs de  J.-J.  Rousseau,  —  à  Galin  surtout. 

11  y  a  progrès  dans  l'opinion  des  écrivains.  Au 
xvne  siècle  encore,  un  Fénelon  avait  pu  redouter  les 
effets  de  la  musique  clans  l'éducation  des  filles,  affir- 
mer qu'une  mélodie  «  efféminée  »  est  pernicieuse, 
et  que  «  le  plaisir  qu'elle  procure  est  empoisonné  ». 

C'est  maintenant  l'époque  où  Mme  de  Staël  con- 
teste que  la  musique  puisse  être  malsaine.  <•  La 
langue  musicale,  dit-elle,  a  l'heureuse  impuissance 
d'exprimer  un  sentiment  bas  et  de  mentir.  »  File 
ajoute  :  «  Le  malheur  même,  dans  cette  langue,  est 
sans  irritation  et  sans  amertume.  » 

Bien  sûr,  à  côté  des  réalisations  de  quelques  grands 
apôtres  de  l'éducation  musicale  populaire,  la  plu- 
part des  éducateurs  se  borneront  longtemps  encore 
à  émettre  des  vœux  platoniques,  à  rappeler  la  valeur 
éducative  de  l'art,  sans  aller  jusqu'à  marquer  sa 
place  dans  les  programmes  scolaires.  Et,  parmi  ceux 
des  pédagogues  français  qui  auront  le  plus  grand 
désir  d'aboutir  à  une  réelle  organisation  des  études 
musicales,  parmi  ceux  qui,  s'inspirant  des  pensées 
de  Montaigne,  porteront  leur  attention  non  plus  seu- 
lement sur  la  matière  à  enseigner,  mais  sur  la  ma- 
nière d'enseigner,  parmi  ceux-là,  même,  qui  voudront 
descendre  dans  la  pratique,  il  en  est  fort  peu  qui 
essayeront  de  trouver  une  méthode  propre  aux  en- 
seignements artistiques. 

Cependant,  puisqu'il  s'agit  du  xix=  siècle,  nous  ne 
pourrions  plus  nous  contenter  de  signaler  à  leur 
apparition  les  procédés  d'enseignement,  car  nous 
nous  trouvons,  dès  la  première  moitié  du  siècle,  en 
présence  de  systèmes  complets  d'éducation  musicale, 
groupant  toujours,  autour  de  chaque  théorie,  plu- 
sieurs novateurs  illustres  ou  professeurs  en  renom. 

Et  c'est  pourquoi,  renonçant  à  faire  l'exposé  chro- 
nologique des  étapes  parcourues  dans  l'évolution  de 
l'enseignement  musical,  nous  essayerons  plutôt  de 
mettre  en  lumière,  avec  leurs  caractères  propres,  les 
divers  systèmes  pédagogiques  qui  ont  été  appliqués 
en  France,  et  dont  dérivent  toutes  les  tendances 
actuelles. 

LES   MÉTHODES 

Méthodes  intellectuelles.  —  Wilheui  et  son 
éeole.  —  Les  études  théoriques  et  le  solfège 
dans  tontes  les  ciels. 

L'esprit  de  méthode  et  d'organisation  dont  Wil- 
hem1 et  ses  continuateurs  ont  fait  preuve,  les  grands 


services  qu'ils  ont  rendus  à  la  cause  de  l'enseigne- 
ment musical  populaire,  leur  donnent  hautement 
droit  à  la  gratitude  des  amis  de  la  musique  et  de 
l'enfance.  Et  si  les  pédagogies  modernes  s'éloignent 
de  la  lipie  tracée  par  ces  fondateurs  de  l'enseigne- 
ment musical,  il  est  hors  de  doute  qu'elles  ne  peu- 
vent le  faire  qu'avec  prudence,  en  considérant  tous 
les  progrès  que  la  méthode  Wilhem  a  rendus  possi- 
bles. Il  y  a  évolution,  mais  l'évolution  actuelle  profile 
des  indications  de  cette  école  de  1830,  et,  après  un 
siècle  passé,  il  convient  d'attribuer  à  Wilhem  l'élan 
même  dont  nous  profitons  aujourd'hui. 

Faut-il,  pour  enseigner  la  musique  aux  enfants, 
partir  des  données  théoriques  et  s'appuyer  sans  cesse 
sur  elles,  faire  surtout  appel  à  l'intelligence  et  aux 
facultés  de  raisonnement,  ne  pas  permettre  un  pas 
en  avant  sans  expliquer  et  définir?  Faut-il  conduire 
vers  l'art  musical  par  le  chemin  de  la  science  musi- 
cale, chercher  une  progression  dans  l'enchaînement 
théorique,  rationnel,  des  faits  musicaux?  Et  —  à  con- 
sidérer le  but  à  atteindre  —  doit-on  viser  avant  tout 
à  donner  une  solide  instruction  musicale  théorique 
aux  enfants  des  écoles,  allant  jusqu'à  la  connais- 
sance de  toutes  les  clefs? 

C'est  ce  qu'ont  cru  Wilhem  et  ses  adeptes,  à  une 
époque,  d'ailleurs,  où  tous  les  enseignements  récla- 
maient, dès  le  seuil,  un  volontaire  etfort  d'attention, 
—  où  l'intérêt  était  plus  rarement  sollicité,  —  où 
l'on  considérait  bien  plus  la  matière  à  enseigner  que 
la  façon  de  renseigner,  et  que  l'enfant,  le  sujet  à  qui 
on  devait  l'enseigner. 

Pour  Wiluem,  le  premier  degré  de  l'instruction 
musicale  est  celui  de  l'éducation  de  l'oreille,  et  aussi, 
après  quelque  temps,  celui  de  la  lecture,  donc  de 
l'élude  des  signes  de  notation  et  de  la  théorie  —  et 
aussi  de  l'exécution  vocale  (ou  instrumentale). 

Le  second  degré  comprend  l'étude  des  formes  mé- 
lodiques, rythmiques,  harmoniques  et  l'analyse  du 
discours  musical,  et  le  troisième  degré  l'étude  de  la 
composition.  C'est  donc  là  un  vaste  programme,  qui 
sort  vile  du  cadre  scolaire,  et  qui  souvent  d'ailleurs 
semble  conçu  pour  des  adultes,  pour  ceux  qui  peu- 
vent avoir  profit  à  connaître  et  à  comprendre  l'ex- 
plication théorique  de  tout  ce  qu'ils  font. 

Nous  examinerons  seulement  cette  partie  de  la 
méthode  qui  concerne  l'initiation  musicale,  et  les 
études  préparatoires.  On  y  verra  que  1rs  enseigne- 
ments théoriques  ne  font  pas  oublier  la  nécessité 
première  :  l'éducation  de  l'oreille  des  enfants.  On 
verra  aussi  que,  par  ce  côté,  Wiluem  est  un  moderne, 
poussant  l'audace  jusqu'à  recourir  à  des  procédés 
d'intonation  d'où  sont  exclus  les  signes  de  notation 
usuelle  et  la  portée  de  cinq  lignes, 

Et  l'on  s'apercevra,  à  bien  connaître  Wiluem,  que 
nul  peut-être  n'a  fait  autant  île  recherches  pour  en- 
richir sa  méthode  de  tout  ce  qui  pouvait  la  rendre 
plus  féconde  en  résultats.  Il  alla  même,  lui  qui  eut 
à  rompre  des  lances  avec  Galiw  et  ses  partisans, 
jusqu'à  utiliser  les  chifires,  arabes  el  romains, — 
et  jusqu'à  faire  chanter  les  gammes  sur  les  mots  : 
un,  deux,  trois,  qua.tr',  cinq... 

en  partant  de  n'importe  quel  son  pris  comme  Ioni- 
que. Il  y  trouva  une  Utilisation  plus  logique  du  sys- 
tème de  J.-J.  Rousseau  et  de  Cm. in,  un  moyen  de 
traiter  les  modulations  sans  cesser  d'appeler  In  le 
son  du  diapason.  Il  ne  s'attache  pas  exclusivement 
à  ce  procédé  qui.au  milieu  de  t.itit  d'autres,  rf'esl 
qu'un  relief  de  festin,  et   qui  contraint   à  recourir 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE  ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    3637 


trop  souvent  aux  degrés  conjoints,  mais,  en  em- 
pruntant aux  galinistes  et  à  tous  ses  devanciers,  en 
faisant,  sans  parti  pris,  un  choix  de  procédés,  en 
indiquant  toujours  l'origine  de  ses  emprunts,  il  se 
montre  bien  plus  soucieux  de  l'intérêt  général  que 
de  sa  propre  gloire,  et  bien  digne  de  «  faire  école  ». 
Les  «  Etudes  préparatoires  »  et  celles  du  «  Pre- 
mier Cours  »  comprennent  deux  séries  d'exercices  : 

1°  Exercices  des  préparations  vocales  : 
à  l'aide  a)  de  l'escalier  vocal; 
6)  des  signes  manuels; 
c)  des  échelles  chiffrées,  gamme  et  accord 
parfait. 


2°  Exercices  d'étude  des  signes  de  notation  : 
à  l'aide  d)  de  la  main  musicale; 

e)  des  portées  muettes  avec  ou  sans  clefs; 

/')  de  l'indicateur  vocal; 

g)  des  procédés  d'étude  des  intervalles; 

h)  des  procédés  de  métrique  et  de  rythmique. 

a)  L'escalier  vocal,  échelle  oblique,  remplacée  par- 
fois par  un  simple  mât  où  figurent  des  noues,  se 
trace  au  tableau  noir.  La  baguette  du  maître  se  dé- 
place sur  cette  échelle  oblique,  et  l'élève  solfie,  voca- 
lise, ou  chante  cb's  paroles,  en  même  temps  qu'il 
exécute,  avec  la  main  droite,  des  «  signes  manuels  »  : 


b)  Les  signes  manuels,  dit  Wilhem,  ci  consistent  à 
représenter  ostensiblement  l'intervalle  de  ton,  par 
le  mouvement,  élevé  ou  abaissé,  de  la  main  droite 
entièrement  ouverte  (la  paume  de  la  main  étant 
tournée  vers  la  terre);  le  demi-ton  se  marque  par  la 
main  à  demi  fermée. 

Les  élèves  utilisent  ces  gestes  lorsque  le  maître 
conduit,  à  la  baguette,  avec  l'escalier  vocal,  les  exer- 
cices cités  plus  haut.  Ou  bien  ces  gestes  permettent 
la  solmisation  (sans  secours  d'autre  chose)  sous  la 
direction  d'un  moniteur,  qui  mime  les  sons,  et  que 
les  élèves  imitent. 

(Ce  procédé  de  Phohomimie  naturelle,  ou  phonomi- 
mie  élémentaire, &  été  repris.  M.Cappe  l'indique  dans 
VEcole  nationale,  journal  pédagogique  belge.  Itabd 
et  Seguin  y  auront  recours,  i 

M.Jacques  Dalcroze  utilisera  également  les  signes 
manuels. 

Nous  les  préconisons,  nous  aussi  (voir  Avant  le 
solfège,  chez  Leduc),  car  ce  procédé  très  simple,  qui 
associe  les  hauteurs  de  sons  à  des  gestes  ascendants, 
descendants  ou  stationnaires,  — permet  d'excellents 
exercices  d'intonation,  d'appui  mental,  de  solmisa- 
tion à  une  et  deux  voix,  et  surtout  de  dictée,  —  abou- 
tit à  la  création  d'automatismes  qui  favorisent  la 
justesse  d'émission  et  la  justesse  d'audition,  et  offre 
surtout  au  maître  un  précieux  moyen  de  contrôle 
(par  l'exercice  de  dictée  pratiqué  les  yeux  fermés!. 
Il  a  l'avantage  de  faire  découvrir,  et  de  faire  agir, 
—  et  l'emporte,  en  valeur  pratique  et  en  attrait,  sur 
le  procédé  de  la  Martinière. 

c)  Les  échelles  chiffrées  remplacent  l'escalier  vocal. 
Wilhem  a  recours  à  deux  espèces  de  chiffres,  les 

notes  tonales  étant  indiquées  en  chiffres  romains. 
La  gamme  s'écrit  : 


1     2     3     IV     V     6 


I     iou  VII 


Il  fait  chanter  ces  chiffres,  en  «  changeant  l'éléva- 
tion du  chiffre  I  »  comme  seraient  d'abord  ut,  puis 
fa,  puis  si  h  grave,  etc. 

Ainsi,  dit  Wilhem,  «  quel  que  soit  le  degré  d'élé- 
vation du  premier  son  de  la  gamme  chiffrée,les  deux 
demi-tons  sont  toujours  entre  3-1V  et  7-1  ». 


— ♦-  v 


Chiffres  de 
1  ACCORD 
PARFAIT 


Wilhem  considère  donc  le  chiffre  comme  représen- 
tant un  degré  de  la  gamme  diatonique,  et  non  une 
note  de  la  gamme  d'ut  majeur  par  exempte.  «  Alors, 
dit-il,  le  nom  de  chaque  chiffre  annonce  le  rang  de 
la  note  qu'il  sonne  (dont  il  indique  le  son).  » 

Les  exercices  se  font  à  la  baguette,  ou  par  gestes. 
Les  gestes,  comme  les  chiffres,  se  rapportent  donc 
aux  degrés  de  l'échelle  majeure,  et  non  plus  aux 
notes  du  ton  de  do  majeur. 


de  l'accord  parfait  de  tonique  sont  isolés.  Le  maître 
fait  exécuter  divers  exercices  à  la  baguette  sur  l'ac- 
cord parfait,  et  réaliser  l'accord  par  trois  groupes 
d'élèves  qui,  à  un  signal  donné,  font  des  échanges 
de  notes. 

d)  La  main  musicale  (dont  il  a  été  question  plus 
haut), est  l'un  des  procédés  les  plus  chers  a  Wilhem. 
Ce  n'est  pas  sans  fierté  qu'il  se  dit  être  le  premier  à 
«  établir  les  deux  mains  en  rapport  avec  la  portée 
générale  des  voix  »,  à  «  leur  attribuer  des  places 
diésées  ou  bémolisées,  au  moyen  desquelles  on  peut 
toucher  des  chants  modulés,  analyser  les  diverses 
espèces  d'intervalles  et  composer  les  gammes  dans 
les  deux  modes  »,  «  à  faire  emploi  d'une  clef  d'ut 
mobile  sous  forme  d'anneau,  pour  lire  sur  la  main 
aux  diverses  positions  de  cette  clef,  comme  cela  se 
pratique  avec  les  clefs  mobiles  de  l'Indicateur 
vocal  ». 

La  main-portée  de  Wiluem  permet  donc  : 

ln  la  solmisation  en  clef  de  sol  usuelle  (main 
droite)  ; 

2°  la  solmisation  eu  clef  de  fa  S*  ligne  (main 
gauche)  ; 


;!,;:!. 


XCVCLOPÉDIE  DE  LA  MUStQUE  ET  DICTlOS'NAItlE  DU  COXSERVATOIliE 


3°  la  solmisation,  en  l'une  ou  l'autre  clef,  avec  # 
el  h  (main  cliromatique); 

4°  la  solmisation  dans  toutes  les  clefs  (par  dépla- 
cement de  l'anneau). 

c)  Les  portées  muettes  ont  le  même  usage  que  les 
mains  musicales,  et  l'on  touche  les  notes,  sur  ces 
portées,  à  la  baguette,  comme  on  touche  les  doigts 
de  la  main. 

Là  encore,  les  élèves  s'exercent  à  lire  sans  clef,  ou 
dans  toutes  les  ciels.  Mais  Wilhem  s'attache  surtout  à 


Faire  connaître  les  notes  de  la  portée  de  onze  lignes, 
c'est-à-dire  à  faire  lire  dans  les  deux  clefs  du  piano. 

Son  grand  procédé  mnémonique,  pour  l'étude  des 
notes  est  formulé  ainsi  : 

«  Les  notes  séparées  par  des  intervalles  impairs, 
comme  la  tierce,  la  quinte,  la  septième  (notes  : 
1-3- V-7)  ont  des  positions  analogues  : 

«  elles  sont  de  ligne  en  ligne,  ou  d'interligne  en 
interligne,  comme  de  doigt  en  doigt,  ou  d'entre- 
doigt  en  entre-doigt  »  : 


P  C'est  une  constatation  sur  laquelle  Wilhem  revient 
sans  cesse,  pour  aider  à  lire  dans  toutes  les  clefs, 
par  déplacement  (mental)  de  la  noie  ut. 

Mais,  le  maître,  au  lieu  d'indiquer  la  ligne  qui  doit 
recevoir  ut,  peut  aussi  bien  désigner  une  ligne  qui 
sera  celle  de  sol,  de  mi,  de  la,  de  fa,  et  ce  sont  les 
élèves  qui,  descendant  ou  montant  l'ut,  situent  im- 
médiatement les  cinq  ou  six  repères  : 

fa       la       ut       ml       sol       si 


IV 


f)  L'indicateur  vocal  permet  de  pousser  plus  loin 
encore  les  procédés  de  lecture  dans  toutes  les  clefs, 
de  transposition,  d'étude  des  tonalités.  Cet  indica- 
teur vocal  est  dessiné  sur  une  planche  percée  de 
trous  (trois  séries  de  quinze  trous  représentés  sur  la 
figure  ci-dessous).  Dans  ces  trous  peuvent  se  placer 
des  chevilles  pourvues,  en  leur  extrémité,  de  signes 
représentant  les  degrés  : 

1     2     (ou     9)     3     IV     V     C     -,     VIII 
.'.m  les  clefs  : 

-%  -m-  ^h 

A  l'aide  de  ces  clefs  mobiles,  et  des  notes  égale- 
meui  mobiles,  on  peut  indiquer,  pour  chaque  voix, 
ia  gamme  qu'on  veut  utiliser.  Le  maitre  louche,  à  la 
baguette,  pour  faire  chanter  ses  élèves,  les  li^nrs  on 
interlignes,  dans  l'une  des  trois  cases  (case  aux  notes 
dites  nalurelles,  case  des  dièses,  case  des  bémols). 
(Ces  trois  cases  correspondent  aux  trois  phalanges 
des  doigts,  dans  la  main  chromatique  de  V\  ilhew    : 

(2)  on 


(2.)Noii 


Notts  béniol  isies]  Notes  d  ites  natuc-ellesj  Notes  di_è  i  èes 
OOO 

o      !         o        :      o 

0 

o 

o 

o 

o 

o 

o 

o 

o 

o 

o 

o 

OOO 
OOO 

g)  Procédés  d'étude  des  intervalles.  Sur  la  main 
portée  et  sur  la  portée  muette  du  tableau,  se  fait  l'é- 
tude de  chaque  intervalle  avec  les  noms  de  notes  et 
avec  les  chiffres. 

Soit  à  étudier  la  quinte  juste.  Le  maitre  fait  remar- 
quer que,  pour  la  quinte,  intervalle  impair,  les  notes 
extrêmes  ont  des  positions  semblables  (elles  sont 
sur  deux  lignes  ou  en  deux  interlignes).  On  chante  : 

do,  ré,  mi,  fa,  sol,  —  un,  deux,  trois,  quatr',  cinq, 

ih',  sol,  —  un,  cinq. 

VA  on  chante,  un  degré  plus  haut  : 

ré,  mi.  fa,  sol,  la,  —  un,  deux,  tiois,  quatr'.  cinq,  — 

rt  .  la,  —  un.  cinq. 

El  ainsi  de  suite,  en  partant  de  mi,  de  fa,  de  sol 
el  de  la. 

h)  Les  procédés  de  métrique  et  de  rythmique  occu- 
pent une  grande  place  dans  les  ouvrages  d'enseigne- 
ment de  Wilhem.  11  croit  être  logique  en  faisant 
commencer  sa  métrique  par  l'étude  de  la  mesure  à 
quatre  temps,  sans  doute  parce  que  l'unité  de  valeur 
est  la  ronde  et  que  la  ronde  occupe  entièrement  une 
mesure  à  4  4.  Ce  début  semblera  logique  d'ailleurs, 
après  Wilhem,  à  bien  des  auteurs  de  solfèges.  Le  rai- 
sonnement est  vicieux,  el  la  simplicité  pédagogique 
demande  qu'on  débute  par  la  mesure  la  plus  simple, 
celle  que  nous  donne  la  marche,  la  mesure  à  deux 
temps. 

Wilhem  fait  donc  battre  la  mesure  à  quatre  temps 
en  faisant  dire  :  lion,  on,  on,  onà",  ou  :  hlan-ancli ', 
blan-anch',  ou  :  Voir',  noir',  noir,  noir',  et  repré- 
sente graphiquement  cet  exercice  de  la  façon  sui- 
vante : 


ond  (A-) 


»  anch'  (4) 


•  Noir  (3 


Noir'(l) 


TECII.XIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  LÉCOLE    3r,.",n 
Cette  analyse  rythmique  s'étend  à  loules  les  combinaisons  pour  le  temps  et  ses  multiples  : 

II- 


On  analysera  ainsi  :  flon-on-on-ond'. 

—  JB/an-aneh',  bl  an-an  cl 
Noir',  noir',  noir'  noi 

—  BJon-anch'-point,  noir 


Mais  Wilhem  ne  pousse  pas  plus  loin  son  système, 
et  préfère,  pour  la  division  des  temps,  faire  compter 
ces  divisions. 

Continuant  dans  le  sens  qu'il  a  tracé,  MM.  Drouin, 
Baudot,  ont  utilisé  beaucoup  plus  loin  les  propres 


—  B!an-a.nc)i',  noir',  noir'. 
BZan-anch'-3-4  | 

—  ilon-on-ond',  |  1-2-3-4  | 

—  Noir',  deux,  noir'  quatr'. 

dénominations  des  valeurs,  pour  les  mesures  h  2  4, 
3/4,  4/4,' c'est-à-dire  pour  celles  qui  suffisent  aux. 
jeunes  élèves  pendant  les  premières  années.  Ces 
ainsi  qu'ils  ont  fait  dire  : 


TTliJi  rn-ù 


li-J — i    i  l-J J    J    J     J    I  i    S     i.  J    1  |  i.    tj 

Nqir' cro-che   Noir'  Dou-ble-cro-che   Croche  Tri-o-let     Noir-'  l 


Peut-on  traiter  ainsi  toutes  les  divisions  du  temps'.' 
Non,  sans  doute.  Mais  l'étude  des  doubles  croches  et 
des  triolets  suppose  déjà  des  élèves  capables  de  se 
passer  d'analyser  autrement  qu'en  solfiant,  et  l'on 
verra  que  les  langues  des  durées,  qui  ont  voulu  ré- 
soudre tous  les  cas,  ont  dû  proposer  des  complica- 
tions demandant,  pour  être  étudiées,  bien  plus  de 
temps  qu'il  n'en  faut  pour  traiter  directement  les 
rythmes  qu'on  rencontre  dans  les  solfèges  scolaires. 

La  lecture  rythmique  est  indiquée  également  dans 
les  ouvrages  de  Wilhem.  Les  élèves  nomment  les 
notes  en  mesure  en  leur  donnant  leur  durée. 

Ce  procédé  est  le  moins  intéressant,  et  le  moins 
musical.  Lorsque  les  élèves  ont  déjà  quelque  intona- 
tion, et  lorsque  le  maître  sait  utiliser  des  suites  na- 
turelles de  sons  (celle  des  sons  de  l'accord  parfait, 
celle  des  sons  de  la  gamme)  les  élèves  peuvent,  — 
après  avoir  analysé  rythmiquement,  —  lire  en  asso- 
ciant les  deux  éléments  :  hauteur  et  durée  On  ne 
saurait  reprocher  à  Wilhem  son  grand  souci  d'isoler 
toutes  les  difficultés.  Mais  on  peut  justement  cons- 
tater que  l'exercice  qui  consiste  à  lire  rythmique- 
ment les  notes,  —  c'est-à-dire  à  tenir  compte  à  la 
fois  des  noms  de  notes  et  des  durées,  —  est  déjà  un 
exercice  de  synthèse.  Aussi,  pour  diviser  ces  diffi- 
cultés, il  est  sage  de  s'en  tenir  d'abord  à  la  seule 
analyse  rythmique  qui  ne  porte  que  sur  les  noms 
des  durées  (voir  plus  haut),  —  puis,  sans  passer  par 
la  lecture  rythmique,  'd'en  venir  à  la  solmisation,  à 
la  lecture  chantée. 

Les  lectures  des  mélanges,  par  contre,  offrent  des 
avantages.  Wilhem  écrit,  au  tableau  noir,  les  diver- 
ses combinaisons  possibles  à  deux,  ou  trois,  ou 
quatre  temps.  Il  écrira,  par  exemple,  à  4/4  : 


Il  demande  aux  élèves  d'exécuter  une  gamme,  en 
montant  d'un  degré  à  chaque  mesure.  En  même 
temps,  il  montre,  à  la  baguette,  l'une  des  mesures 
du  tableau.  Les  élèves  chanteront  donc  la  gamme  en 
se  servant  du  rythme  indiqué. 

Si  le  maître,  ou  le  moniteur,  indique  successive- 
ment les  mesures  3,  5,  7,  2,  4,  1...,  les  élèves  chan- 
teront : 


Le  maître  peut  d'ailleurs,  au  lieu  de  demander 
une  gamme,  indiquer  une  suite  de  sons  par  signes 
manuels. 

Wilhem  est  l'un  des  premiers  à  s'occuper  aussi  de 
culture  vocale,  sans  donner  d'ailleurs  d'indications 
vraiment  pratiques  sur  ce  point.  Mais  on  a  pu  voir, 
par  tout  ce  qui  précède,  la  richesse  de  ses  enseigne- 
ments, —  et  il  n'est  pas  étonnant  que  tant  de  créa- 
teurs de  systèmes  n'aient  l'ait  que  rajeunir  le  système 
du  grand  Wilhem.  Ce  système,  il  put  longtemps  le 
mettre  à  l'épreuve,  et  avant  même  de  l'exposer  pu- 
bliquement, il  put  le  compléter,  le  simplifier,  le 
modifier,  l'adapter  à  l'enseignement  mutuel  dont  la 
forme  l'avait  si  vivement  séduit. 

11  obtint  de  tels  résultats  qu'il  fut  nommé  profes- 
seur, puis  directeur  de  l'enseignement  du  chant  dans 
les  écoles  élémentaires  de  Paris  (1826). 

En  1830,  la  musique  était  enseignée  dans  dix  éco- 
les parisiennes. 

En  1833,  création  de  l'orphéon.  Wilhem  rassemble 
périodiquement  des  enfants  des  écoles  élémentaires 
et  les  fait  chanter.  Il  crée  ensuite  des  orphéons  ana- 
logues avec  les  élèves  des  cours  d'apprentis  et  avec 
des  adultes  ouvriers,  puis  avec  les  élèves  de  divers 
départements. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


En  [833,  le  conseil  municipal  de  Paris  nomme 
Wilhem  h  directeur  inspecteur  général  du  chant  », 
cl  lui  demande  d'organiser  son  enseignement  dans 
trente  écoles  nouvelles. 

En  1836,  étaient  créés,  à  Paris,  dans  trois  arron- 
dissements, des  cours  d'adultes  gratuits  de  chant, 
confiés  à  Wilhem  et  à  son  disciple  Hubert.  Le  Conseil 
Iioyal  de  l'instruction  publique  décidait  que  le  chant 
prendrait  place  dans  l'enseignement  universitaire. 

En  1830,  Wilhem  devient  «  délégué  général  pour 
l'inspection  universitaire  du  chant  ».  Il  meurt  en 
1842. 

Son  biographe  dit  : 

Une  foule  considérable  d'enfants  dos  écoles,  Je  jeunes  gens 
îles  cours  d'adultes,  suivait  le  convoi  qui  allait  grossissant  a 
c-'n:o[ue  pas  .|u, ui,l  on  ;i|i|jrenait  que  c'était  celui  du  maître  de 
chant  des  ouvriers.  A  l'entrée  du  cimetière  (Pere-Lachaise),  les 
répétiteurs  des  écoles  demandèrent  comme  un  honneur  de  porter 
le  corps  jusqu'à  la  tombe. 

Si  Wilhem  a  quelque  peu  perdu  de  sa  gloire,  si  ses 
ouvrages  sont  oubliés,  si  sa  méthode  d'enseignement 
a  vieilli,  si  ses  exigences  solfégiques  ne  sont  plus 
les  nôtres,  il  n'en  reste  pas  moins  le  glorieux  «  im- 
portateur »  de  l'enseignement  du  chant  dans  les 
écoles  françaises,  et  le  fondateur  de  l'orphéon. 

Ses  adeptes  et  disciples  furent  Delaporte  (1818- 
1886),  Choron,  Ed.  Jue,  Hubert. 

Alexandre-Etienne  Choron  (1772.-1834)  écrivit  di- 
vers ouvrages  d'enseignement  musical  primaire,  fut 
directeur  de  l'Opéra,  et  renonça  à  ses  fonctions  en 
1817  pour  fonder  une  école  de  chant  choral,  créer 
divers  cours  gratuits  et  diverses  sociétés  orphéoni- 
ques,  et  enseigner  avec  foi. 

Edouard  Jue  passe  plus  souvent  pour  un  disciple 
de  Galin  que  pour  un  adepte  de  Wilhem.  Cependant, 
l'importance  qu'il  accorde  aux  exercices  sur  portée 
muette,  dans  toutes  les  clefs,  ne  le  rattacherait  à 
Galin  que  par  le  méloplaste,  et  non  par  les  autres 
théories  galinistes,  qu'il  a  sans  doute  adorées  d'a- 
bord, brûlées  ensuite.  Il  appliqua  à  la  portée 
muette,  pour  cette  lecture  dans  toutes  les  positions, 
et  pour  la  transposition,  une  notation  transposilive 
qu'il  appela  monogammique,  toutes  les  gammes  se 
trouvant  ramenées  à  une  seule  gamme,  par  ce  sys. 
tème.  C'est  dans  une  histoire  de  la  notation  que  la 
séméiographie  d'Edouard  Jue  pourrait  être  rappelée. 
Disons  qu'elle  n'est,  à  ses  yeux,  qu'un  procédé  péda- 
gogique transitoire,  et  que  Jue  déclare  qu'il  est  né- 
cessaire de  conduire  tous  les  élèves  à  la  connais- 
sance de  la  notation  usuelle.  Il  eut  un  grand  succès 
à  Paris  à  partir  de  1824,  et  un  succès  moins  grand  à 
Londres. 

Hubert  succéda  à  Wilhem  en  1842,  comme  direc- 
teur inspecteur  général.  Il  démissionna  en  1852  et 
fut  remplacé  par  Ch.  Gounod. 

La  prospérité  de  l'orphéon  nécessita,  vers  |xr„i, 
la  constitution  de  deux  groupements,  que  dirigèrent 
François  Bazin  et  Jules  Pasdeloup.  11  y  eut  en  France 
plus  de  trois  mille  sociétés  chorales,  groupant  cent 
quarante  mille  chanteurs.  Le  déclin  de  ces  sociétés 
commença  avec  la  guerre  de  1870.  Par  contre,  le 
nombre  des  sociétés  instrumentales  s'accrut  à  peu 
près  régulièrement.  S'il  n'y  a  pas  à  s'étendre  sur  ces 
divers  points,  il  convenait  au  moins  de  mentionner 
le  bel  élan  que  Wilhem  sut  imprimer  à  l'institution 
qui  lui  est  due. 

Bien  des  professeurs  —  surtout  dans  les  écoles  de 
musique  et  les  conservatoires  —  persistèrent,  long- 
temps après  Wilhem,  à  utiliser  les  procédés   qu'il 


avait  repris  et  vulgarisés,  —  et  notamment  le  pro- 
cédé de  lecture  sur  la  portée  muette,  dans  toutes 
les  clefs,  avec  déplacement  de  la  tonique  sur  le  pen- 
tagramme.  Cependant,  on  y  renonça  peu  à  peu,  et  la 
lecture  dans  toutes  les  clefs  disparut  même  du  pro- 
gramme des  classes  de  solfège  (chanteurs)  des  con- 
servatoires. 

L'école  primaire  renonça  de  bonne  heure  à  ensei- 
gner autre  chose  que  les  positions  en  clef  de  sol 
usuelle,  et  le  procédé  de  la  main  musicale  ne  fut 
retenu  qu'en  faveur  de  son  application  la  plus  sim- 
ple, avec  position  fixe  des  sons  de  la  gamme  d'ut. 

M.  Radiguer  reprit  la  plupart  des  procédés  de 
Wilhem  dans  ses  cours  de  préparation  au  chant 
choral. 

A.  Gédalge  (1836-1026)  ne  s'éloigne  pas  lui-même 
de  cette  méthode.  Par  les  mêmes  moyens,  gammes 
chiffrées  et  chiffres  chantés,  il  conduit  à  la  lecture 
sur  portée,  avec  usage  simultané  de  toutes  les  clefs. 

Dans  son  système,  les  premiers  exercices  se  font 
donc,  non  pas  sur  une  gamme  particulière  comme 
celle  d'ut  majeur,  mais  en  utilisant  une  liguration 
générale,  chiffrée. 

A.  Gédalge  a  recours  non  plus  seulement  aux 
quatre  chiffres  romains  de  Wilhem,  mais  aux  chiffres 
romains  exclusivement  (I,  II,  111.  IV,  V,  VI.  VII, 
VIII),  pour  mieux  marquer  son  intention  de  repré- 
senter l'échelle  garnmale  générale,  et  »  le  rang  > 
des  degrés,  suivant  l'expression  de  Wilhem.  11  l'ail, 
lui  aussi  (et  nous  retrouverons  ce  procédé  dans  le 
système  de  Mme  Parent),  chanter  les  dénominations 
numérales  :  un,  deux... 

Il  accorde  une  grande  place  aux  suites  de  sons 
conjoints,  et  à  la  différenciation  des  tons  si  demi- 
tons.  Ces  sons  conjoints  permettent  d'épeler  les 
intervalles,  en  allant  d'un  degré  numériqu.  à  an 
autre.  L'étude  des  intervalles  se  fait  ensuite  par  un 
procédé  qui  modifie  celui  de  Wilhem.  Alors  que 
Wilhem  fait  chanter,  pour  l'étude  de  l'a  quinte,  les 
noms  des  chiffres  sur  les  sons  : 

do,  sol,  —  ré,  la,  —  mi,  si... 

A.  Gédalge  fait  chanter  ces  noms  (un,  cinq,  —  clèux, 
six,  —  trois,sept,  — ...)  sur  deux  mêmes  son.s  distants 
d'une  quinte  juste  (do,  sol,  par  exemple). 

Les  exercices  avec  sons  conjoints  conduisent  aussi 
aux  modulations  par  un  système  de  muance  et  de 
soudure  (déjà  expliqué,  voir  page  3633),  système 
Consistant  à  substituer  le  nom  d'un  degré  a  un 
autre  nom.  L'exécution  première  se  l'ail  en  i  b  mi, mi 
les  chiffres.  On  chante  ensuite  les  noms  fixes  des 
sons  correspondants  (voir  pages  3633  et  363'*). 

C'est  à  cette  même  théorie  des  muances  qu'a  re- 
cours A.  Gédalge  pour  l'exécution  des  suites  de 
demi-tons.  Le  demi-ton  se  représente  toujours  par 
les  chiffres  (3,  4  ou  7,  8  en  montant,  4,  3  ou  8,  7  en 
descendant).  Pour  exécuter  une  gamme  chromati- 
que, on  chantera  donc  douze  fois  les  intervalles  : 
trois,  quatre,  —  ou  sept,  huit.  (Voir  l'exemple  de 
gamme  chromatique  descendante,  p.  3034.) 

Aux  exercices  préparatoires  de  formation  d'o- 
reille, —  pratiqués  comme  il  a  été  dit  sans  uv.wi- 
rir  à  la  notation  usuelle,  —  succèdent  les  exercices 
de  lecture  sur  la  portée,  sans  clef.  A.  Gédalge  veut, 
aussitôt,  habituer  l'enfant,  par  déplacemenl  de  la 
onique  sur  le  penlagramme,  à  lire  dans  toutes  les 
positions. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    m 


II  reprend  à  cet  effet  la  règle  qu'applique  Galin, 
pour  faire  lire  sur  son  méloplaste,  et  que  Wilhem 
formule  ainsi  : 

«  Les  notes  séparées  par  des  intervalles  impairs, 
de  tierce,  quinte,  septième,  ont  des  positions  ana- 
gues  sui'  la  portée...  »  (Voir  page  3638v) 

Cette  même  constatation  est  parfois  rédigée  sous 
cette  forme  : 

«  Le  son  I  étant  sur  une  ligne,  les  sons  3,  o,  7, 
dans  l'ordre  ascendant,  se  trouvent  également  sur 
des  lignes.  » 

La  réserve  que  nécessite  cette  autre  rédaction, 
•(  dans  l'ordre  ascendant,  »  souligne  son  infériorité 
pratique. 

Les  exercices  sur  portée  ont  lieu  d'abord  avec 
intonations  chiffrées,  ensuite  avec  le  nom  des  notes. 

Ces  exercices  comportent  :  lecture  à  une  voix,  à 
deux  voix  (à  l'aide  de  deux  baguettes),  étude  des 
tonalités,  modulai  ions,  transposition. 

La  progression  établie  par  A.  Gédalge,  en  ce  qui 
concerne  les  hauteurs  de  sons,  n'est  pas  celle  de 
Wilhem,  quoiqu'elle  parte  du  degré  conjoint  et  de 
la  différenciation  des  tons  et  demi-tons.  Elle  aborde 
la  gamme,  puis  l'octave,  la  quinte,  le  ton  et  le 
demi-ton,  la  gamme  chromatique,  les  tierce,  quarte, 
sixte,  septième,  accords,  tonalités,  et  cette  progres- 
sion se  termine  par  l'étude  de  la  gamme  mineure. 

Certes,  aucun  autre  système  ne  retarde  à  ce  point 
l'étude  de  la  modalité,  et  l'on  verra  quelle  place  lui 
est  accordée  par  l'école  galiniste,  école  de  musique 
modale. 

Mais  A.  Gédalge  reste  aussi  longtemps  que  pos- 
sible éloigné  d'un  écueil  que  l'école  galiniste  a  évité. 
Il  base,  en  effet,  l'étude  de  la  tierce  majeure  sur  l'in- 
tonation des  degrés  I,  II,  III.  11  identifie  l'intonation 
de  cette  tierce  a  l'intonation  de  ce  rapport,  intona- 
tion de  I,  III,  qu'il  déclare  constante,  i  l  cependant!,  il 
chiffrera  également  I,  III  la  tierce  mineure  ef  fera 
chanter  sur  «  un,  trois,  cinq  »  les  sons  de  l'accord 
parfait  mineur. 

L'école  galiniste,  au  contraire,  conserve  sur  ce 
point  des  rapports  intangibles.  Eli'  atft  .  sams 
exception,  les  chiffrages  1,  3,  —  \,  6,  —  a,  7,  à  Va 
tierce  majeure,  —  et  les  chiffrages  2,  i,  —  3,  ">,  — 
6,  1,  aux  tierces  mineures. 

9a  gamme  mineure  est  invariablement  chiffrée  : 


6 


Comme  la  méthode  Wilhem,  la  inétijn.ie  A.  Gédalge 
s'appuie  constamment  sur  l'explication  théorique, 
—  plus  encore,  même,  que  la  méïfcode  Wilhem, 
qu'elle  développe  longuement,  jusqu'à  présenter  le 
détail  des  comparaisons. 

C'est  donc  bien  une  méthode  d'intelligence,  qui 
s'attache  h  faire  comprendre  tous  les  faits  musicaux, 
et  à  conduire  aussi  loin  que  possible  l'entraînement 
visuel  ou  solfégique. 

Et  c'est  aussi  une  méthode  intelligente,  en  ce  qui 
concerne  l'éducation  de  l'oreille  par  les  hauteurs  de 
sons.  En  revanche,  elle  reste  inférieure  à  la  méthode 
Wilhem  pour  celte  autre  partie  importante  qui  se 
rapporte  aux  durées  des  sons,  à  la  métrique,  à  la 
rythmique  (où  d'autres  méthodes  modernes  excelle- 
ront à  présenter  des  exercices  de  grande  valeur  édu- 
cative), —  et  elle  ne  s'attarde  pas  à  la  culture  vocale 
proprement  dite,  de  laquelle,  cependant,  dépend  la 
culture  du  goût  musical. 

Les  conseils  et  constatations  pédagogiques  de  va- 


leur sont  nombreux  sous  la  plume  de  A.  Gédalge. 
C'est  d'abord  cette  affirmation  que  tous  les  enfants 
peuvent  profiter  d'un  enseignement,  musical  bien 
ordonné,  que  toutes  les  oreilles  sont  susceptibles 
d'éducation.  C'est  cette  autre  affirmation  que  l'édu- 
cation musicale  gagne  à  être  entreprise,  avec  les 
jeunes  enfants,  sans  recourir  à  la  notation  sur  por- 
tée, qui  exige  trop  d'attention  visuelle,  au  détriment 
de  l'attention  auditive.  C'est  cette  heureuse  remar- 
que en  faveur  de  leçons  très  courtes  (un  quart 
d'heure  ou  vingt  minutes),  mais  fréquentes,  quoti- 
diennes si  possible. 

La  méthode  a  été  expérimentée  dans  les  conser- 
vatoires et  en  quelques  écoles  primaires.  Dans  le- 
quel de  ces  deux  cadres  se  trouverait-elle  vraiment 
à  sa  place?  C'est  ce  que  nous  n'avons  pas  à  indi- 
quer ici. 

Du  reste,  avant  de  s'intéresser  à  une  méthode,  — 
pour  ses  côtés  savants,  ou  originaux  s'il  y  a  lieu,  ou 
même  pratiques,  —  il  convient  toujours  de  bien 
déterminer  le  but  qu'on  se  propose  d'atteindre.  Au- 
trement dit,  le  but  ne  ri  o  i  l  pas  être  défini  en  fonc- 
tion d'une  méthode,  —  qui  conduit  où  elle  peut,  — 
et  c'est  plutôt  la  méthode  d'enseignement  qui  doit 
être  choisie  en  considérai  nui  des  fins  possibles  et 
miles. 

Quelles  sont  ces  fins?  Doit-on,  à  l'école  primaire, 
viser  à  donner  un  maximum  de  connaissances  mu- 
sicales?  Le  peut-on  en  restant  dans  les  conditions 
normales  et  sans  rien  sacrifier?  Esl-il  bon  de  con- 
duire vers  la  lecture  dans  toutes  les  clefs  par  exem- 
ple, et  de  s'attacher  à  l'aire  connaître  les  détails  de 
la  grammaire  musicale?  Ou  bien,  faut-il  songer 
avant  tout  à  former  le  goût,  à  doter  les  enfants  d'un 
répertoire  choral  abondant,  en  se  bornant  d'autre 
pari  :i  leur  enseigner  les  premières  notions  de  sol- 
fège et  l'usage  d'une  seule  clef?  Les  études  de  sol- 
fège constituent-elles  un  but  ou  un  moyen?  Dépasser 
le  but  n'est-ce  point  le  manquer? 

Le  conflit  d'opinions  ne  doit  donc  pas  s'établir 
entre  des  systèmes  particuliers,  des  méthodes,  —  et 
il  y  a  lieu  de  ne  rien  entreprendre  sans  avoir  une 
claire  vision  des  besoins  et  des  possibilités  de  l'en- 
fance. 


La  méthode  de  Mme  Horlense  Parent  dérive  elle- 
même  du  système  W  ilhem,  et  chaque  étape  rappelle 
ses  origines. 

Là  aussi,  quelques  principes  pédagogiques  sem- 
blent d'abord  éloigner  son  enseignement  des  mé- 
thodes intellectuelles.  Mme  Parent  affirme,  en  effet, 
que  l'enfant  doit,  par  l'oreille,  recevoir  des  notions 
musicales  dégagées  des  signes  conventionnels  qui 
servent  à  les  exprimer.  Elle  veut  montrer  la  chose 
avant  le  mat,  le  mot  avant  le  signe  usuel. 

Cependant,  elle  demande  :  «  Pourquoi  ne  pas  faire 
l'éducation  musicale  en  obligeant  le  cerveau  à  com- 
prendre et  à  analyser  ce  que  l'oreille  entend?  »  Et, 
dès  les  premiers  pas,  les  faits  musicaux  sont  traduits 
par  l'image,  réalisés  musicalement  pour  frapper  l'o- 
reille, répétés  par  l'enfant  pour  l'exercice  de  la  voix, 
analysés  avec  le  secours  du  maîlre  pour  développer 
l'intelligence  et  le  raisonnement.  L'élève  voit,  en- 
tend, reproduit,  et  comprend,  —  et  la  théorie  musi- 
cale tout  entière  se  déroule  pour  lui,  avec  méthode, 
pour  le  conduire  jusqu'à  l'étude  de  l'harmonie. 

Méthode  intellectuelle  sans  contredit,  bien  que 
d'ingénieux  tableaux,  représentations  en  noir  ou  en 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


couleurs,  viennent  sans  cesse  concrétiser  la  théorie 
musicale.  Méthode  d'entraînement  solfégique,  qui 
conduit  à  la  lecture  dans  toutes  les  ciels. 

Mme  Parent  fait  comprendre  le  système  tonal  à 
l'aide  d'une  figuration  anonyme,  —  une  échelle  re- 
présentant la  gamme,  —  la  gamme  majeure  d'abord 
(tableaux  1,  2,  3,  4),  puis,  sans  attendre,  la  gamme 
mineure  (tableau  5),  et,  beaucoup  plus  tard, d'échelle 
chromatique  (tableaux  23-24).  Elle  a  parfois  recours 
à  une  autre  figuration,  celle  du  clavier  de  piano. 

Les  exercices  d'intonation  et  de  dictée  orale  ont 
lieu  sur  l'échelle  ou  le  clavier,  et  l'on  chante  en  uti- 
lisant à  toutes  les  hauteurs  les  dénominations  : 
Un,  deux,  trois,  quatr',  cinq,  six,  sept,  huit, 

pour  l'élude  des  gammes,  des  intervalles,  des  mélo- 
dies. Ces  mêmes  exercices  sont  répétés  avec  les  noms 
fixes  des  sons  correspondants,  dans  toutes  les  tona- 
lités, car  Mme  Parent,  comme  Wilhem  et  A.  Gédalge, 
craindrait  de  tomber  dans  une  sorte  d'anarchie  mu- 
sicale en  ne  se  conformant  pas  de  façon  rigoureuse, 
avec  les  enfants,  à  la  théorie  du  son  fixe. 

C'est  en  utilisant  les  chiffres  (les  chiffres  arabes, 
plus  simples  que  les  chiffres  romains)  que  Mmo  Pa- 
rent fait  étudier  les  intervalles,  et  d'après  un  pro- 
cédé rappelant  ceux  de  Wilhem  et  de  Gédalge. 
Comme  ce  dernier,  elle  fera  chanter  «  un-trois  » 
pour  la  tierce  majeure  d'abord,  pour  la  tierce  mi- 
neure ensuite  ! 

Elle  fait  lire  sur  la  portée  dans  toutes  les  clefs,  et 
pour  conduire  à  ce  résultat,  elle  utilise  des  couleurs, 
celles  du  spectre  solaire,  qu'elle  attribue  aux  notes 
de  la  gamme  de  do,  reprenant  ainsi  une  indication 
de  Gui  d'Arezzo,  et  la  comparaison  de  Newton,  que 
Dessirieb  avait  reprise  pour  son  compte  vers  1870). 

Chaque  couleur  représente  une  note  précise  et  non 
plus  un  degré  de  la  gamme  générale,  une  fonction. 
L'enfant  prend  l'habitude  d'associer  la  couleur 
au  nom  de  la  note  (do  rouge,  sol  bleu...),  qu'il  dis- 
tingue aussitôt  des  six  autres  notes.  Il  ne  s'occupe 
que  de  la  couleur  et  non  de  la  clef,  el  peut  donc 
aisément  solfier  dans  toutes  les  clefs,  et  s'habituer, 
presque  inconsciemment,  à  situer  le  du  sur  chaque 
ligni  nu  dans  chaque  interligne  de  la  portée.  Il  se 
prépare  ainsi  à  la  lecture  des  notes  noires,  dans 
toutes  les  clefs,  —  et  à  la  transposition. 

Quelques  autres  méthodes,  reposant  sur  l'explica- 
tion théorique  des  faits  musicaux,  partant  des  séries 
numérales  chantées,  et  aboutissant  à  la  lecture  sans 
clef,  se  sont  fait  connaître  en  Suisse  el  en  divers 
pays.  Elles  sont  issues  soit  de  l'école  galiniste,  soi1 
du  système  Wilhem. 

La  plus  récente  est  celle  qui  est  appliquée  dans  les 
écoles  de  Pologne,  et  qui  est  due  à  Stefan  Wysocki. 

Alors  que  Wilhem  et  ses  continuateurs  prévoient 
tous  d'utiles  études  préparatoires,  faites  musicale- 
ment, en  recourant  à  des  figurations  provisoires 
(escalier  vocal,  main  portée,  échelle  verticale, 
échelle  oblique,  dessin  du  clavier...),  figurations  la 
plupart  du  temps  chiffrées,  qui  permettent  des 
exercices  d'inlonation ,  de  solmisalion,  d'étude 
des  intervalles,  de  modulation,  —  comment  l'école 
traditionaliste  peut- elle  se  recommander  de  ce 
grand  éducateur,  puisqu'elle  renonce  à  ses  premiers 
moyens  pédagogiques,  utilise  la  notation  usuelle  dès 
la  période  d'initiation  musicale,  n'entreprend  la 
formation  de  l'oreille  qu'avec  l'aide  du  livre  de  sol- 
fège? 

On   a  pu  voir  que  Wilhem   accepte  de  recourir, 


pour  l'initiation  musicale  des  enfants,  aux  moyens 
qui  donnent  des  résultats,  et  d'aller  ainsi  de  l'empi- 
rique au  rationnel.  On  a  vu  qu'il  accueille  les  pro- 
cédés qui  font  agir.  En  cela,  il  est  moderne,  peu 
traditionaliste,  moins  loin  de  nous,  même,  que  quel- 
ques-uns de  ses  disciples. 

Aussi,  ne  reste-t-il  qu'à  souhaiter  ardemment  que 
les  continuateurs  et  admirateurs  de  Wilhem  se  dé- 
vouent, avec  une  foi  égale  à  la  sienne,  à  la  cause  de 
l'enseignement  populaire,  —  que  leur  curiosité  pro- 
fessionnelle, toujours  éveillée,  les  amène  à  bien  con- 
naître l'œuvre  du  maître,  depuis  sa  base  logique 
jusqu'à  la  variété  des  moyens  indiqués,  —  et  qu'ils 
sachent,  eux  aussi,  accroître  sans  cesse,  parleurs  re- 
cherches, la  somme  de  ces  moyens  qui  naissent  de  la 
pratique  et  de  l'expérience,  qu'ils  en  découvrent  l'es- 
prit, la  valeur,  et  qu'ils  les  appliquent  dans  leurs 
classes.  Et  s'ils  courent  ainsi  le  risque  de  ne  plus  être 
considérés  comme  des  traditionalistes,  ils  s'en  conso- 
leront en  constatant  la  valeur  des  résultats  obtenus. 


L'enseignement  traditionnel. 

S'ils  se  recommandent  à  tort  de  Wilhem,  à  quelles 
traditions  peuvent  donc  se  rattacher  les  traditiona- 
listes? Ils  restent  fidèles  à  la  vieille  forme  d'ensei- 
gnement général  qui,  s'opposant  à  la  méthode  intui- 
tive, veut  qu'on  parte  des  formules,  lois  et  règles, 
pour  aboutir  à  la  pratique. 

Les  purs  traditionalistes  ■ —  parlons  de  ceux-là 
pour  mieux  marquer  les  conceptions  de  cette  école 

—  définissent,  dès  le  premier  jour,  l'art  et  la  musi- 
que. Ils  aiment  à  «  plaquer  »  des  formules,  ils  s'a- 
dressent à  la  mémoire  des  petits  pour  obtenir  le 
«  sçavoir  par  cœur  ».  Ils  consacrent,  la  craie  en 
main,  beaucoup  de  temps  aux  développements  théo- 
riques, et  voient  dans  les  faits  musicaux  comme 
une  application  des  règles  qu'ils  enseignent. 

Ils  ont  recours,  sans  attendre,  à  la  notation  usuelle; 
ils  présentent  la  portée,  la  clef,  —  les  clefs,  parfois, 

—  les  signes  de  hauteur  des  sons  aussi,  non  d'après 
une  série  musicale  comme  celle  de  l'accord  parfait, 
mais  d'après  la  place  que  ces  signes  de  notation  oc- 
cupent sur  les  cinq  lignes. 

Sans  doute,  ils  ne  méritent  que  rarement  l'apos- 
trophe bien  connue  que  Jean-Jacques  leur  adresse. 
Ils  ne  sauraient  être  accusés  de  confondre  nécessai- 
rement la  musique  avec  la  façon  de  l'écrire.  Mais 
dans  leur  enseignement,  ils  ne  séparent  pas  la  lan- 
gue musicale  de  son  graphique,  el  ils  donnent  à 
croire  que,  s'ils  ne  mènent  pas  isolément  l'étude  de 
ces  deux  ordres  de  faits  :  les  idées  à  exprimer,  les 
signes  qui  les  expriment,  —  c'est  qu'ils  manquent 
de  moyens  pour  le  faire. 

Ils  justifient  parfois  leur  pratique  consistant, 
même  avec  les  jeunes  enfants,  à  ne  pas  séparer 
l'idée  du  signe.  Ils  disent  :  «  L'étude  de  la  notation 
est  longue.  11  faut  donc  l'entreprendre  le  plus  tôt 
possible.  »  Mais,  est-ce  bien  la  conclusion  qu'il  faut 
tirer  de  cette  constatation,  —  et  ne  faut-il  pas  dire  : 
«  L'étude  de  la  notation  est  longue  lorsqu'elle  com- 
porte en  même  temps  la  formation  de  l'oreille.  Il 
convient  donc  d'entreprendre  l'éducation  de  l'o- 
reille, pour  préparer  à  cette  étude  des  signes  et 
pour  la  faciliter.  »  Ils  ajoutent  :  «  La  notation  es! 
compliquée,  et  difficile  à  connaître.  C'est  ce  qui 
exige,  des  enfants,  le  plus  grand  effort  d'attention. 
11  faut  donc  l'enseigner  aux  plus  petits.  »  Cette  sin- 
gulière pédagogie,  qui  réserve  aux  jeunes  enfants  la 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L ÉCOLE    3643 


tâche  la  plus  ardue  et  la  moins  attrayante,  apparaît 
ainsi  avec  toute  sa  cruauté  et  son  absence  de  base 
psychologique.  Un  autre  argument  consiste  à  dire 
que  le  signe  appelle  le  son.  Mais  ce  n'est  vrai  que  si 
la  mémoire  auditive,  préalablement  exercée,  associe 
aisément  les  deux  idées,  et  il  semble  aussi  difficile 
d'apprendre  aux  enfants  la  langue  des  sons  à  l'aide 
d'un  graphique  que  leur  langue  maternelle  à  l'aide 
d'un  alphabet. 

Le  traditionaliste  reconnaît  vite  d'ailleurs  qu'il 
perd  beaucoup  de  temps  à  vouloir  enseigner  en 
même  temps  le  signe  de  notation  et  l'idée  signifiée 
Il  éprouve  alors  le  besoin  de  traiter  séparément  ces 
difficultés,  et,  comme  il  lient  surtout  à  ne  pas  re- 
tarder l'entraînement  visuel,  il  a  recours  à  des  pro- 
cédés où  le  signe  est  seulement  nommé.  L'enfant  lit 
les  notes  à  la  baguette,  sans  chanter,  et  pratique 
la  lecture  rythmique.  On  sait  que  ce  ne  sont  là  que 
de  fausses  simplifications.  En  tout  cas,  ces  exercices 
n'ont  pas  de  valeur  musicale. 

Mais  il  y  a  mieux  :  le  traditionaliste  se  trouve 
souvent  contraint  à  recourir  à  ces  exercices  parlés, 
antimusicaux,  non  seulement  parce  que  l'éducation 
de  l'oreille  n'a  pas  été  faite  au  préalable,  mais  sur- 
tout parce  que  les  séries  de  signes  qu'il  fait  étudier 
en  premier  lieu  |ne  constituent  pas  des  séries  vo- 
cales, musicales.  En  effet,  l'étude  des  signes  porte 
presque  toujours,  avec  le  traditionaliste,  sur  trois 
séries  premières  :  les  notes  placées  sur  les  lignes, 
les  notes  des  interlignes,  les  notes  des  lignes  sup- 
plémentaires. Au  reste,  bien  des  solfèges  partent  de 
ces  trois  séries,  et  l'un  des  défauts  les  plus  graves  du 
professeur  est  justement  de  suivre,  sans  les  adapter, 
les  indications  des  ouvrages  qu'il  trouve  dans  les 
écoles. 

Ainsi,  au  départ,  on  subordonne  l'étude  aux  con- 
ditions d'un  graphique  étranger  à  la  musique.  Dans 
la  suite,  la  progression  se  base  sur  des  données  pu- 
rement théoriques  et  non  pas  encore  sur  des  consi- 
dérations pédagogiques  ou  musicales.  Aussi,  puis- 
qu'il n'est  pas  tenu  compte  des  difficultés  d'acquisi- 
tion pour  établir  cette  progression,  on  ne  peut  s'é- 
tonner du  peu  de  valeur  des  résultats  généraux.  On 
fait  un  grand  abus  des  suites  de  degrés  conjoints, 
suites  qui  ont  pourtant  l'inconvénient  de  créer  une 
routine  de  voix  et  d'oreille.  Lorsque  l'élève  a  solfié 
les  nombreux  exercices  «  de  secondes  »  qui  occupent 
la  première  partie  de  son  livre,  il  apprend  à  solfier 
les  degrés  disjoints,  et  dans  un  ordre  qui  n'a  même 
pas  une  valeur  théorique  :  tierces,  quartes,  quintes, 
sixtes,  septièmes,  octaves,  intervalles  redoublés.  La 
quinte  et  l'octave,  les  intervalles  les  plus  simples, 
les  plus  faciles  à  étudier,  les  premiers  à  connaître, 
ne  sont  donc  présentés  à  l'enfant  qu'à  leur  tour, 
dans  un  ordre  qui  n'est  logique  qu'en  apparence, 
après  les  intervalles  de  seconde,  —  alors  que  la 
différenciation  des  sons  se  serait  trouvée  facilitée  à 
l'origine  par  leur  éloignement. 

En  ce  qui  concerne  l'étude  des  durées,  c'est  en 
général  par  la  [ronde  que  le  traditionaliste  tient  à 
débuter,  —  toujours  pour  des  raisons  théoriques. 
Evidemment,  c'est  en  apprenant  à  connaître  les 
signes  de  durée  que  l'enfant  connaîtra  ces  durées 
elles-mêmes  !  L'idée  n'aura  pas  précédé  le  signe,  là 
non  plus.  Cette  ronde,  le  professeur  la  fera  étudier 
■à  quatre  temps,  et  l'enfant  se  trouvera  donc  aux 
prises  avec  une  mesure  peu  naturelle,  et  qui  n'offre 
pas  les  avantages  de  simplicité,  d'attrait,  de  la  me- 
sure à  deux  temps. 


Le  professeur  n'écarte  même  pas  toujours,  au  dé- 
but, l'idée  si  abstraite  de  relativité  des  signes  de 
notation  (relativité  des  signes  de  hauteur,  dépendant 
des  clefs,  —  et  des  signes  de  durée,  dépendant  des 
chiffres  qui  indiquent  l'unité  de  temps). 

On  doit  donc  se  demander  si  tous  ces  moyens  sont 
bien  les  plus  propres  à  satisfaire  l'enfant,  à  l'atta- 
cher à  l'art  musical,  —  puisqu'ils  ne  se  soucient  ni 
de  cet  art  ni  de  cet  enfant,  et  puisqu'ils  présentent 
si  peu  d'attrait.  On  doit  se  demander  aussi  si  un  tel 
enseignement  profite  à  l'ensemble  des  élèves  ou 
seulement  aux  plus  doués,  (dans  ce  second  cas  ce 
serait  la  condamnation  du  système,  car  le  plus  grave 
reproche  que  l'on  puisse  faire  à  une  méthode  est  de 
ne  pouvoir  s'adresser  qu'à  une  minorité,  surtout 
lorsqu'il  s'agit  d'un  enseignement  artistique  dont 
les  bienfaits  doivent  et  peuvent  s'étendre  à  tous),  — 
si  la  grande  majorité,  ne  s'accommodant  guère  d'un 
enseignement  prématuré  du  solfège,  ne  se  trouve 
pas  réduite  à  l'impuissance  sans  ses  entraîneurs, — 
si,  même  en  ne  songeant  qu'aux  plus  doués,  il  con- 
vient de  donner  la  première  place  à  l' instruction 
musicale,  —  si  une  méthode  digne  de  ce  nom  peut 
comporter  un  même  exercice  (le  solfège)  à  tous  les 
âges,  —  s'il  n'y  a  pas  lieu  de  commencer  par  le  sen- 
sible et  de  «  s'élever  par  degrés  vers  l'intellectuel  »,  — 
si  le  fait  de  mener  de  front  trop  d'études  (signes, 
intonations,  durées,  théories),  de  courir  trop  de 
lièvres,  n'aboutit  pas  à  une  perte  de  temps  pour  la 
généralité. 

El  l'on  peut  même  se  demander  si  la  méthode 
traditionnelle,  abstraction  faite  de  sa  valeur  éduca- 
tive très  contestable,  a  bien  la  valeur  inst)  uetive 
qu'on  lui  croit,  —  si  l'étude  du  solfège,  non  préparée 
par  une  patiente  culture  d'oreille,  est  profitable,  et 
si,  tout  compte  fait,  même  dans  le  domaine  des  con- 
naissances techniques,  les  résultats  qu'obtient  le 
traditionaliste  ne  sont  pas  les  moins  sûrs,  les  moins 
durables. 

On  ne  fait  bien  que  ce  qu'on  aime;  or,  à  l'école 
primaire,  l'étude  d'un  art  est  d'autant  plus  agréable 
qu'elle  fait  plus  souvent  appel  à  l'action,  à  l'émo- 
tion, et  moins  souvent  à  l'effort  intellectuel.  L'en- 
seignement musical  adapté,  varié,  attrayant  dans 
sa  forme,  attrayant  aussi  par  la  valeur  des  exemples 
musicaux,  trouve,  dans  le  plaisir  qu'il  provoque, 
une  nouvelle  source  de  force,  —  et  c'est  une  banalité 
de  dire  que  les  enseignements  théoriques,  les  exer- 
cices sans  valeur  émotive,  n'engendrent  que  séche- 
resse et  ne  peuvent  exciter  à  poursuivre  une  étude 
artistique,  qui  ne  saurait  s'exercer  à  contre-cœur. 
Si  nous  avons  réservé  tant  de  place  au  traditio- 
nalisme, —  bien  qu'il  ne  tienne  aux  méthodes  intel- 
lectuelles que  par  leurs  moins  beaux  côtés,  et  qu'il 
n'apporte,  en  contribution  à  cette  étude,  aucun  pro- 
cédé valable,  —  c'est  qu'il  occupe  lui-même  une 
grande  place  dans  l'enseignement  musical.  Le 
nombre  des  traditionalistes  est  encore  très  élevé, 
ainsi  que  le  nombre  des  livres  de  solfège,  jeunes 
ou  vieux,  qui  leur  sont  dus,  et  qu'on  utilise  dans  les 
écoles.  11  n'y  a  donc  pas  à  cacher  ici  un  danger,  qui 
nous  semble  surtout  redoutable  lorsque  le  traditio- 
naliste a  la  mission  de  former,  dans  une  école  nor- 
male, des  générations  d'instituteurs  professeurs  de 
chant.  Il  peut  leur  donner  le  goût  du  beau,  s'il  est 
artiste.  Mais  s'il  ne  les  dote  pas  d'une  méthode  d'en- 
seignement assez  pratique,  assez  souple  pour  s'a- 
dapter aux  milieux  ruraux,  il  manque  au  meilleur 
de  sa  tâche.  Le  tempérament  d'artiste  ne  peut  sup- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


pléeT  5  tout,  et  s'il  est  des  cas  où,  pour  donner  des 
résultats,  une  méthode  a  moins  besoin  de  valeur 
propre  que  de  professeurs  actifs  ou  enthousiastes, 
s'il  est  de  brillants  traditionalistes,  formant  de  bons 
élèves,  on  peut  toujours  songer  à  ce  que  ces  mêmes 
professeurs  obtiendraient  de  ces  mêmes  élèves  avec 
un  peu  de  pédagogie. 

Méthodes  île  notation  simplifiée. 
I.  —  Méthodes  modales. 

Lorsque  tout  est  enseigné  à  la  fois  dans  les  clas- 
ses élémentaires  des  écoles,  lorsqu'on  commence 
mal  ou  trop  tard,  il  arrive  que  l'enseignement  mu- 
sical, qui  devrait  être  le  plus  joyeux,  le  plus  aimé, 
rebnle  des  classes  entières  d'enfants,  et  ne  conduit 
à  aucun  résultat  pratique  ou  artistique. 

Devant  ces  conséquences,  et  alors  qu'il  faudrait 
s'en  prendre  aux  méthodes,  ou  aux  horaires  insuf- 
fisants, ou  à  l'absence  de  méthode,  on  accuse  l'é- 
criture musicale  de  causer  ce  dégoût,  et  on  accu- 
mule contre  elle  des  critiques  visant  les  clefs,  la 
relativité  des  signes  de  durée,  la  portée  et  ses 
lignes  supplémentaires,  les  armures  de  dièses  ou 
de  bémols..,  complications  qui  ne  sont  pas  toutes 
du  domaine  scolaire. 

Les  enfants  n'ont  besoin,  pour  leur  initiation, 
d'aucune  notation.  Après  quelque  temps,  lorsqu'on 
a  su  former  l'oreille  et  la  voix,  —  par  des  exercices 
méthodiques  d'intonation,  de  reconnaissance  des 
sons,  de  culture  vocale,  —  il  est  facile  d'enseigner 
aux  enfants  les  signes  de  la  seule  notation  usuelle. 
L'important  est  de  faire  connaître,  avec  tout  lie  soin 
et  tout  le  temps  voulus,  les  réalités,  les  idées  sono- 
res avant  leurs  signes  conventionnels. 

Cependant,  ni  le  sentiment  artistique  ni  la  valeur 
éducative  de  la  musique  n'ont  partie  liée  avec  la  no- 
tation usuelle,  et  une  simplification  d'écriture  et  de 
lecture  peut  présenter  un  intérêt  pédagogique,  dans 
une  période  d'initiation,  et  même  pour'  l'élude 
d'oeuvres  chorales.  Il  semble  nécessaire,  en  revanche, 
de  ne  considérer  les  notations  simplifiées  que  comme 
moyens  provisoires  d'enseignement  musical,  et  leurs 
partisans  eux-mêmes,  pour  la  plupart,  admettent 
1  ' u t i lit.-  d'initier  les  enfants  à  la  notation  usuelle,  à 
l'écriture  la  plus  universelle  qui  soit,  à  celle  des 
mailies  de  la  musique,  —  écriture  qui  reprend 
d'ailleurs  bien  des  avantagés,  en  musique  instru- 
mentale surtout,  sur  certaines  notations  simplifiées. 

Des  esprits  ingénieux  ont  donc  entrepris  de  mo- 
difier le  graphique  des  musiciens,  à  l'usage  des  en- 
fants, ou  avec  le  désir  de  faciliter  les  études  musi- 
cales des  adultes. 

Nous  avons  e i I .'■  déjà  les  premiers  d'entre  eux  et, 
dans  l'impossibilité  de  parler  même  rapidement  de 
tous  les  systèmes  proposés,  nous  nous  bornerons  à 
l'étude  des  deux  groupes  les  plus  importants  :  le 
groupe  des  méthodes  modales  (méthodes  qui  utili- 
sent une  seule  langue  et  une  seule  écriture  pour 
chaque  mode)  et  le  groupe  des  méthodes  chromati- 
ques (qui  n'utilisent  qu'une  seule  gamme,  basée  sur 
la  théorie  des  douze  sons). 


Il  existe  deux  méthodes  modales  célèbres,  celle 
de  .l.-.l.  lioi  sse.u-  (méthode  modale  chiffré»)  et  celle 
de  Tonic-Sol-Fa  (en  usage  dans  les  écoles  anglaises 
et  allemandes!. 


Faut-il  avec  Douen1  faire  remonter  la  notation 
chiffrée  au  grammairien  calviniste  Pierre  Devantes, 
mort  en  1361,  ou  admettre  que  Jean-Jacques  en  a 
trouvé  l'idée  première  dans  la  tentative  du  père 
Souhaitty,  ou  dans  celles  de  Parran,  Sauveur,  Du- 
mas, Demaux,  qu'il  cite?  C'est  lui,  en  tout  cas.  qui, 
le  premier,  en  fait  un  véritable  système,  complet. 

Nous  en  avons  signalé  l'apparition  dans  la  pre- 
mière partie  de  cette  étude,  et  il  resle  à  en  indiquer 
l'importance  pédagogique  et  l'évolution. 

L'écriture  de  Housseau  est  la  suivante  pour  cinq 
octaves  : 


1234567 


1214567 


-(Médium) 


On  peut  même,  dit  Rousseau,  se  passer  de  tirer 
aucune  ligne.  Et  il  propose  de  placer  un  point  soit 
au-dessus  des  chiffres  (octave  supérieure),  soit  au- 
dessous,  pour  descendre.  Câlin  reprendra  ce  «  point 
d'octave  ». 

Le  dièse  se  forme  en  traversant  la  note  d'un  trait 
oblique,  montant  de  gauche  à  droite,  —  et  le  bémol 
à  l'aide  d'un  trait  descendant.  Le  bécarre  est  inusité. 

L'indication  des  durées  est  très  simplifiée.  Citons 
Rousseau  : 

Une  noie  seule  entre  deux  barres  remplit  toute  une  mesure. 
Dans  la  mesure  à  deux  Teins,  deux  noies  remplissant  la  mesure, 
forment  chacune  un  Tems.  Trois  noies  font  la  même  chose  dans 
la  mesure  a  trois  Tems.  S'il  y  a  quatre  notes  dans  une  mesure  i 
deux  Tems.  ou  six  dans  une  mesure  à  trois  Tems,  c'est  que  cha- 
que Tems  est  divisé  en  deux  parties  égales...  Poui;  rendre  cette 
distribution  plus  aisée,  on  -  pare  si  l'on  veut  les  Tems  par  des 
virgules. 

Las  divisions  inégales  se  marquent  avec  la  même  facilite.  Ces 
inégalités  ne  sont  jamais  que  des  subdivisions  qu'on  ramène  S 
l'égalité  par  un  trait  dont  on  couvre  deux  ou  pins 
l'ar  exemple,  si  un  Tems  contient  une  croche  et  deux  doubles 
croches,  un  trait  en  ligne  droite  au-dessus  mi  au-dessous  des 
deux  doubles  croches  montrera  qu'elles  ne  font  ensemble  qu'une 

quaillile    égale  II    |.i   prered  Mlle,    el    par  Conséquent   une  croche... 

Il  y  a  dicure  des  subdivisions  d'inégalité  qui  peuvent  exiger 
deux  traits;  comme,  si  une  croche  pointée  était  suivie  de  deux 
triples  craches...  a 

On  aurait  alors  4  .  32    |  t      || 

L'auteur  du    nouveau  système  emploie  aussi  Le  point   (de 
prolongation)...  qui  n'a  d'aulre  valeur  que  cellede  I 
occupe,  s,  i,.  | > .-, i ii t  remplit  un  tems  il  vaut  un  Tems,  s'il  remplit 
une  mesure,  il  vaut  une  mesure... 

T.ms  les  silences  n '.mi  besoin  que  d'un  seul  c  u-aclère.  c'est 


Ce  système  a  été  repris  et  surtout  précisé  par 
Gai.in.  Mais  on  aperçoit  déjà  tout  le  chronomériste 
de  Galin  dans  l'exposé  ci-dessus. 

A  ces  premières  simplifications,  appréciables, 
concernant  les  signes  de  hauteur  et  les  signes  de 
durée,  s'ajoute  la  grande  simplification  pédagogique 
relative  au  principe  modal.  Toutes  les  tonalités  ma- 
jeures et  mineures  se  trouvent  ramenées  à  deux 
langues,  à  deux  modes  : 

le  mode  majeur,  qui  a  pour  gamine  unique  : 

do 


Do 


le  mode  mineur,  q 


fa       sol       la 

4        :;       6      :        i 

i  a  pour  gamme  uuiq  ne  : 
é      mi      fa      soflft)      la 


Ces  deux  gammes  peuvent  se  chanter  a  toutes  les 
auteurs.    ••    Le    seul    mot    ré    mis    en    têle    'di( 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    3«'< 


J.-J.  Rousseau)  avertit  que  la  pièce  est  en  ré  ma- 
jeur, et  comme  alors  le  ré  prend  tous  les  rapports 
qu'avait  l'ut,  il  en  prend  aussi  le  signe  et  le  nom  ; 
il  se  marque  avec  le  chiffre  1.  Le  ré  de  la  marge  lui 
sert  de  clef,  c'est  la  touche  ré  ou  D  du  clavier  na- 
turel. Mais  ce  même  ré  devenu  tonique  sous  le  nom 
d'ut  devient  aussi  la  fondamentale  du  mode.  » 

(Si  le  mot  ré  n'est  pas  souligné,  il  désigne  le  mode 
majeur  de  ré,  le  son  qu'il  faut  appeler  ut.  S'il  est 
souligné,  il  désigne  le  mode  mineur  relatif  :  si  mi- 
neur, dont  ce  ré  est  médiante.) 

La  tonalité  est  indiquée  maintenant  de  trois  fa- 
çons différentes.  Si  le  morceau  doit  être  chanté  en 
sol  majeur,  on  écrit  en  tête  : 

G  =  l  Diapason  2  Ton  =  SoL 

(La  lettre  (1  qui  correspond  à  sol,  est  tonique  et  se 
chiffre  donc  1  (do)  et  le  son  du  diapason  correspond 
alors  au  ré,  qui  se  chiffre  2.)  Si  le  morceau  doit  être 
chanté  en  sol  mineur,  on  écrit  en  tête  : 


Diapason  7 


Ton  =  soZ  mineur. 


(La  lettre  minuscule  g  correspond  à  sol.  Elle  est 
tonique  de  mode  mineur  et  se  chiffre  donc  t>  \lu\.  Le 
diapason  correspond  alors  au  si,  qui  se  chiffre  7.) 

C'est  autour  de  ce  principe  modal  —  principe  es- 
sentiel, fondamental,  de  la  méthode  —  qu'eurent 
lieu  toutes  les  discussions,  souvent  très  âpres,  entre 
partisans  et  adversaires  de  La  réforme. 

Il  y  avait  simplification  incontestable,  mais  a 
quel  prix?  Il  fallait  renoncer  à  la  théorie  du  son 
lise,  à  appeler  la  le  son  du  diapason  :  ne  serait-ce 
par  dérouter  l'oreille  de  l'enfant?  Ne  serait-ce  pas, 
au  moins  pour  celui  qui  solfie,  qui  lit,  —  sinon  pour 
l'auditeur,  —  porter  atteinte  à  la  couleur  tonale? 
N'était-ce  pas  uniformiser  et  banaliser  la  musique? 
On  a  vu  que  Wilhem  —  partisan  de  la  fixité  des 
noms  de  noies  —  avait  trouvé  une  solution  en  fai- 
sant chanter  non  plus  do,  ic,  mi...  à  toutes  les  hau- 
teurs, mais  un,  deux,  trois... 

On  fit  d'autres  reproches,  concernant  d'abord  l'é- 
criture horizontale.  Alors  que,  sur  la  portée,  les  noies 
occupent  des  positions  qui  sont  représentatives  îles 
hauteurs  de  sons,  les  chiffres  s'écrivent  de  façon  »ac- 
tiligne.  Hameau  lut  l'un  des  premiers  à  signaler  re- 
cueil. 11  disait  à  Rousseau  : 

«  Vos  signes  sont  mauvais  en  ce  qu'ils  exigent, 
pour  chaque  intervalle,  une  opération  de  l'esprit,  qui 
ne  peut  suivre  la  rapidité  de  l'exécution.  La  position 
de  nos  notes  se  peint  à  l'œil  sans  le  concours  de 
cette  opération.  Si  deux  notes,  l'une  très  haute, 
l'autre  très  basse,  sont  jointes  par  une  tirade  de 
notes  intermédiaires,  je  vois  du  premier  coup  d'oeil 
que  l'une  est  jointe  à  l'autre  par  degrés  conjoints; 
mais,  pour  m'assurer  chez  vous  de  cette  tirade,  il 
faut  nécessairement  que  j'épelle  tous  vos  chiffres, 
l'un  après  l'autre,  le  coup  d'œil  ne  peut  suppléer  à 
rien.  —  L'objection  me  parut  sans  réplique,  dit 
Rousseau,  et  j'en  convins  à  l'instant.  »  (Confessions.) 
Un  reproche  plus  grave  fut  formulé  par  les  ins- 
trumentistes. Lorsque  le  chanteur  a,  sous  les  yeux, 
un  texte  noté  : 


||      1       3     |      3      .     |      3 
lui  est  facile,  tout  en  disant  : 

I    mi, 


Do, 


1    sol  - 


do    |    sol 


de  chanter  cette  série  en  partant  de  fa,  par  exemple. 
Mais  l'instrumentiste,  le  pianiste,  ne  pourront  pas 


transposer  aussi  aisément.  Ils  liront  donc  en  ut. 
Tout  se  trouvera  «  unitonalisé  »,  et  les  chants  ac- 
compagnés par  ces  instruments  sortiront  des  limites 
de  la  vois  d'enfant.  A  cette  critique,  l'école  galinisle 
répond  en  affirmant  qu'elle  ne  s'intéresse  qu'à 
l'enfant  et  au  chanteur,  que,  d'ailleurs,  elle  a  fait 
construire,  pour  les  écoles,  de  petits  «  guide-chant  » 
à  clavier  transpositeur  qui  permettent  de  loucher 
toujours  le  do  sur  le  même  point  du  clavier,  et  l'on 
verra  plus  loin  qu'une  nouvelle  façon  de  noter,  en 
sol  et  en  fa,  avec  tonique  o  ou  i,  ont  été  proposées 
récemment. 

Les  autres  inconvénients  de  l'écriture  cliitliée  tien- 
nent à  des  détails,  à  la  nécessité  —  dans  le  53  stème 
modifié  —  de  marquer  tous  les  temps,  et  parfois 
même  (dans  les  mesures  à  temps  ternaire)  tous  les 
battements,  —  ce  qui  peut  nuire  au  déchîffrage,  à  la 
rapidité  de  la  lecture,  —  et  obliger  à  utiliser  parfois 
un  plus  grand  nombre  île  signes  qu'avec  la  nota- 
tion usuelle. 

Les  continuateurs  de  Rousseau  —  du  moins  en  ce 
qui  touche  sa  réforme  du  graphique  usuel  —  furent 
Pierre  Câlin  (1786-1822),  dont  nous  aurons  a  parler 
pour  la  part  qu'il  prit  à  l'évolution  de  I  1 
intuitive.  Aimé  Paris  (1798-1866),  de  Cesli.n,  A.  Li - 
uoine,  Emile  Chevé  1804-1864),  M«  Emile  Chevé 
(1800-1868),  Vialay,  Maurice  Calvès,  A.  Tins,  Amand 
Chevé,  Cauen,  J.  Bo.nnet.  Les  uns  perfectionnèrent 
le  système  d'écriture.  Les  autres  adaptèrent  à  la  mé- 
thode des  procédés  pédagogiques  qu'ils  surent 
mettre  au  point.  Les  derniers,  enfin,,  écrivirent  des 
exercices,  canons,  chants  scolaires,  ouvrages  d'en- 
seignement, et  aidèrent  à  la  diffusion  de  la  mé- 
thode. 

Sans  exposer  historiquement  l'évolution  de  la  mé- 
thode, rappelons  quels  sont  les  signes  adoptés  au- 
jourd'hui : 

Les  trois  octaves  majeures  se  représentent  ainsi  : 


12   34567  12345-67        1   2  3  4  5  S  7  I 

Octave  grave  Octave  du  médium  Octave  aiguë 
Les  sons  diésés  et  bémolisés  se  représentent  comme 
le  voulait  Rousseau,  mais  des  dénominations  spé- 
ciales (rappelant  les  dénominations  signalées  déjà 
plus  haut,  p.  3635)  leur  sont  affectées: 

Dièses    *    -2:    -3r    •*    %  &  ? 

tè      ré    mè   fè    je     Lé  se 
Bémols    ■*.     3-     S-     *-    S.  -S-    ?• 
teu  reu  m  eu  feu  jeu  leu  seu 

Le  chronomériste  de  Galin  reste  définitif.  Un  son 
articulé  est  représenté  par  un  chiffre,  une  prolonga- 
tion de  son  par  un  point,  un  silence  par  un  zéro. 
Les  fractions  de  temps  sont  réunies  sous  une  même 
barre  horizontale. 

L'exemple  ci-dessous  précise  ces  dispositions  : 


p    iTâ  il  J  i-l  3. 3 1 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Les  procédés  préconisés  par  les  partisans  du  sys- 
tème de  Rousseau  concernent  soit  les  hauteurs  de 
sons  (système  des  points  d'appui,  soudure  galiniste, 
phonomimie  Cahen,  méloplaste),  soit  les  durées  des 
sons  (langue  des  durées). 

Le  système  des  points  d'appui, procédé  que  nous 
trouvons  indiqué  dans  un  ouvrage  anglais  de  1841, 
rédigé  par  O'Donelly1  (D'  of  Academy  of  elementary 
music)  et  qu'a  repris  plus  lard  Mra8  Chevé  (Nanine), 
est  du  plus  haut  intérêt2. 

Il  consiste  soit  à  intercaler,  entre  deux  degrés  dis- 
joints, les  degrés  conjoints  (qu'on  chantera  d'abord, 
et  qu'on  se  contentera  de  penser  ensuite),  soit  à  uti- 
liser comme  point  d'appui  (mental)  un  seul  son, 
emprunté  à  l'accord  parfait. 

Ainsi,  pour  exécuter  do-si,  intervalle  de  septième 
majeure  1  7,  on  peut  s'appuyer  mentalement  sur  ré- 
mi-fa-sol-la. 

On  chantera  d'abord  : 

12    3    4    5    6    7 
puis  on  chantera  piano  les  petites  notes  (2-3-4- 
5-6), 

puis  on  se  contentera  de  les  penser. 
Enfin,  on  chantera  1  7  sans  le  secours  des  points 
d'appui. 

Et  l'on  pourra  exécuter  le  même  intervalle  d'une 
seconde  façon,  plus  rapide,  en  chantant  d'abord  1, 
puis  en  pensant  le  do,  1  placé  à  l'octave  du  premier, 
et  en  redescendant  sur  si  7. 

(On  trouvera,  dans  l'exposé  de  la  méthode  Jacques 
Dalcrozr,  des  procédés  d'audition  intérieure  pou- 
vant également  habituer  à  penser  les  sons.) 

La  soudure  galiniste  dérive,  comme  il  a  été  dit, 
des  muances. Elle  permet  d'appliquer  la  langue  mo- 
dale même  à  une  modulation,  c'est-à-dire  de  tra- 
duire, en  langue  d'ut  majeur  ou  de  la  mineur,  une 
modulation  assez  longue. 

Si  une  mélodie,  en  ut,  module  en  soi,  le  sol  (5) 
devient  tonique  (1),  et  c'est  ce  qu'on  indique  par 
5  =  1.  On  effectuera,  sur  un  même  son,  cette  muta- 
tion en  disant  SDO  (syllabe  de  mutation).  Pour  mo- 
duler en  fa,  en  quittant  le  son  a,  on  écrira  5=  2,  on 
chantera  SRK.  L'indicateur  o  =  3  correspond  à  une 
modulation  en  mi  bémol,  puisque  le  son  1  serait  une 
tierce  majeure  au-dessous  de  3  (donc  au-dessous  du 
son  sol\. 

A  l'aide  de  1=6  (dla)  on  va  de  do  majeur  à  la 
mineur. 

On  trouvera  dans  le  tome  I  de  l'Encyclopédie 
(lie  parti.'  :  Technique  de  la  musique),  à  la  page  399, 
une  transcription,  en  musique  chiffrée,  du  chœur  des 
Pèlerin*,  avec  indication  de  soudures  nombreuses. 

La  s lure  galiniste,  difficile  à  exécuter  dans  un 

mouven  ent  rapide,  —  difficile  même,  pour  les  demi- 
initiés,  a  déterminer  dans  certains  cas,—  et  absolu- 
ment in, jTaticable  en  musique  instrumentale,  n'est 
que  rai  nient  utilisée.  Les  signes  d'altération  per- 
mettent ie  s'en  passer. 

Phon  uimie  galiniste.  —  C'est  un  procédé  dû  à 
M.  i.  Cahen,  élève  d'Amand  Chevé,  complété  par 
M.  P.  Guilhot.  Il  consiste  à  désigner  les  notes  par  un 
nombre  de  doigts  apparents,  ou  au  moyen  désignes 
conven      miels  des  doigts.  C'est  une  dactylologie. 


Les  cinq  premières  notes  :  l-2-3-4-;>,  qui  s'appel- 
lent toujours,  en  langue  modale,  do-ré-mi-fa-sol,  se 
représentent  par  un,  deux,  trois,  quatre,  cinq  doigts 
visibles. 

Le  la  s'indique  en  repliant  tous  les  doigls  sauf  le 
pouce  et  le  petit  doigt,  et  le  si  en  repliant  tous  les 
doigts  sauf  le  petit. 

Les  signes  des  notes  du  médium  se  font  à  la  hau- 
teur de  l'épaule,  ceux  de. l'octave  aiguë  à  la  hauteur 
de  la  tête,  ceux  de  l'octave  grave  à  la  hauteur  de 
l'estomac. 

Les  notes  non  altérées  se  miment  devant  le  corps. 
Les  notes  altérées,  sur  le  côté,  soit  en  conservant  le 
dos  de  la  main  tourné  vers  les  élèves  (pour  les  bé- 
mols), soit  en  tournant  vers  les  élèves  la  paume  de 
la  main  (pour  les  dièses). 

Les  deux  mains  peuvent  représenter  des  notes, 
simultanément,  pour  les  exercices  à  deux  voix. 

Les  nuances  s'indiquent  en  éloignant  les  mains 
du  corps  (pour  le  forte)  ou  en  les  rapprochant  (pour 
le  piano). 

Si  celte  dactylologie  a  l'inconvénient  de  se  prati- 
quer à  une  même  hauteur  pour  toutes  les  notes  d'une 
même  gamme,  —  conforme  en  cela  d'ailleurs  à  l'é- 
criture chiffrée,  —  et  celui  de  n'être  en  complète 
logique  avec  les  chitfres  que  de  un  à  cinq,  elle  a  l'a- 
vantage de  représenter  visiblement  les  sons  allérés, 
et  de  permettre  les  exécutions  à  deux  voix.  Elle  est 
précieuse  pour  les  partisans  du  chiffre,  car  elle  a 
un  caractère  modal  évident,  le  do,  seule  tonique  ma- 
jeure pour  les  galinistes,  étant  toujours  représenté 
par  un  seul  doigt  (le  pouce).  Elle  a,  pour  le  mode 
mineur,  le  même  illogisme  que  l'écriture  chiffrée 
elle-même.  Le  doigt  isolé  ne  représente  plus  la  toni- 
que, mais  la  médiante  [do)  qui  se  chiffre  1.  Elle  se- 
rait donc  en  désaccord  complet  avec  un  enseigne- 
ment qui  ferait  une  place  à  l'étude  des  tonalités,  puis- 
que le  nombre  des  doigts  ne  rappellerait  plus  l'ordre 
des  degrés.  D'ailleurs,  elle  conduit  à  la  lecture  des 
chiffres  et  non,  comme  la  main-portée,  à  celle  des 
notes  sur  la  portée. 

Le  méloplaste  de  Galin.  —  Galin,  comme  Wilhem, 
trouve  avantage  à  ce  qu'on  n'approfondisse  pas 
particulièrement  l'étude  d'une  clef  spéciale,  même 
usuelle.  Il  veut  que  l'élève  n'attribue  pas  des  noms 
invariables  à  chaque  ligne,  et  qu'il  puisse  lire  sur 
la  portée  en  mesurant  seulement  les  intervalles  suc- 
cessifs : 


1.  L'ou  ',"'  a  été  traduit  en  IS44  par   M.  A.  de  Cm  îsu  a.  Le  SJ 
,,,„,,.  ;m  des  points  d'appui  est  eiposd  page  52S. 

.    i   ,.  1836  que  M™'  Emile  Chkv<  (Nanine)  écrit  :  «  Je  <• 

,l,.~  ir  p,  re  date  dans  la  Réforme  musicale  d'un  moyen  tn 

h  ,       i  u  nmense  puissance,  pour  l'étude  de  l'intonation. 


C'est,  on  le  voit,,  une  reprise  du  vieux  procédé  de 
portée  muette,  sans  clef. 

La  portée  muette  de  Galin  comporte,  outre  les 
cinq  lignes,  quatre  lignes  supplémentaires. 

Avant  l'exercice,  le  professeur  indique  où  se  po- 
sera l'ut,  c'est-à-dire,  en  système  modal,  la  tonique 
de  tous  les  tons  majeurs. 

Le  son  qu'il  convient  d'attribuer  à  cette  tonique 
ut  est  fixé  par  sa  place,  par  rapport  au  2°  interligne. 
lequel  ne  peut  recevoir  que  des  noies  ayant  le  son 
du  diapason  normal.  Donc,  le  chanteur  fera  toujours 
entendre  le  son  la  du  diapason  (mais  en  lui  donnant 
toute  dénomination  possible  :  do,  ou  ré,  ou  mi...) 
chaque  fois  que  le  maître  indiquera,  à  la  baguette, 
le  2e  interligne.  (Par  exemple,  si  l'ut  est  sur  la 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    3647 


lr8  ligne,  le  fa  aura  le  son  du  diapason.  En  consé- 
quence, Vut  aura  le  son  du  mi.) 

L'élève  solde,  en  suivant  la  baguette  du  maître,  et 
peut  aborder  ainsi  l'étude  de  toutes  les  clefs.  «  11  n'y 
a  qu'une  note,  dit  Galin,  mais  elle  est  mobile;  il  n'y 
a  qu'une  clef,  mais  elle  est  mobile  aussi.  »  Ce  qui 
reste  fixe,  c'est  le  son  attribué  à  chaque  ligne  ou 
interligne  de  la  portée,  son  correspondant  à  celui  qui 
est  attribué  lorsqu'on  solfie  en  clef  de  sol  usuelle. 

On  peut,  sur  le  méloplaste,  solfier  en  diverses 
tonalités,  moduler,  pratiquer  la  soudure,  trans- 
poser. 

«  Non,  dit  Galin,  quoi  qu'en  ait  dit  le  célèbre  Jean- 
Jacques,  la  transposition  n'est  point  facile  sur  les 
chiffres.  L'œil  a  une  peine  extrême  à  voir  un  chiffre 
dans  un  autre,  au  lieu  que  sur, les  portées,  à  cause 
de  la  similitude  de  la  position  des  notes  sous  les 
diverses  clefs,  la  transposition  est  aisée  quand  on 
est  accoutumé  à  ne  dénommer  les  barreaux  que 
par  leurs  intervalles   respectifs.   Or,  j'ai  fait  voir, 


par  l'expérience  de  ma  méthode,  qu'il  est  facile  de 
donner  l'habitude  de  toutes  les  clefs  en  très  peu  de 
temps.  » 

La  langue  des  durées,  d'Aimé  Paris,  est  un  pro- 
cédé d'analyse  rythmique,  ayant  pour  but  d'expri- 
mer par  des  syllabes  convenues  les  temps,  leur  divi- 
sion et  leur  subdivision. 

Elle  repose  sur  les  principes  suivants  : 

1°  Tout  son  articulé  est  représenté  par  une  con- 
sonne :  T,  F,  lî,  L,  Z,  M,  N,  suivie  d'une  voyelle  : 
A,  E,  I. 

2°  Un  silence  est  représenté  par  CHU. 

3°  Un  son  ou  un  silence  prolongés  sont  représen- 
tés par  la  même  voyelle  que  s'ils  étaient  articulés, 
mais  ils  perdent  leur  consonne. 

L'unité  des  temps  équivalant  à  la  noire  se  dit  TA. 

En  division  binaire,  les  croches,  ou  moitiés,  se  di- 
sent :  TA,  TÉ. 

En  division  ternaire,  les  croches,  ou  tiers,  se  di- 
sent :  TA,  TÉ,  TI  : 


Dm- 


binaire 


Ta  ta  té    Tae  a  té    Ta  chu  Ta  chu  Tae  Ta  chu. 

Division  ter 


TaéiAtéti    TaeiTaeti    Tatéti  Tachu-u  TaèiAei 


Les  moitiés,  divisées  par  deux,  ou  quarts  (division 
bino-binaire)  donnent  : 


rm 

Ta     fa     té     fè 


Les  moitiés,  divisées  par  trois,  ou  sixièmes  (division 
bino-ternaire)  donnent  : 

JTJ.JT3 

Ta   ra  la  Té  rè  \i 

Les  quarts,  divisés  par  deux  (ou  huitièmes)  don- 
nent :  Taza,  fana,  Tézé,  fêné.  C'est  la  division  bino- 
bino-binaire. 

Les  tiers,  divisés  par  deux  (ou  sixièmes),  donnent  : 
Tàfa,  Téfé,  Tifi.  C'est  la  division  terno-binaire. 

Si  les  tiers  sont  divisés  par  trois  (neuvièmes  ,  ils 
donnent  :  Tarala,  Térélé,  Tirili.  C'est  la  division 
terno-ternaire. 

On  voit  que  cette  langue  des  durées,  qui  peut  ren- 
dre des  services  pour  l'analyse  de  rythmes  simples, 
sort  vite  du  domaine  scolaire,  et  comporte  alors 
des  complications  qui  sont  de  nature  à  faire  perdre 
du  temps. 


Pour  une  modulation  courte ,  l'école  galiniste 
renonça  de  tout  temps  à  pratiquer  la  soudure.  Elle 
acceptait  donc  ainsi,  passagèrement,  une  écriture 
tonale.  L'écriture  tonale  est  maintenant  envisagée 
pour  tout  un  même  chant  (voir  Manuel  général  du 
16  juillet  1927,  page  815)  quand  ce  chant  est  en  sol 
majeur  ou  en  fa  majeur.  Les  trois  tonalités  majeures 
d'ut,  fa,  sol,  suffisent  à  écrire,  pour  les  enfants,  tous 


les  chants  scolaires  de  mode  majeur.  La  tonique  est 
donc  soit  1  ((toi,  soit  4  [fa),  soit  S  {sol).  Les  gali- 
nistes  peuvent,  grâce  à  cet  élargissement,  et  sans 
renoncer  aux  chiffres,  faire  chanter  dans  ces  trois 
tonalités.  Ils  opèrent  même  alors  une  simplification, 
les  indications  relatives  à  la  tonalité  devenant  inu- 
tiles si  le  son  du  diapason  correspond  invariable- 
ment au  la,  au  6,  —  et  les  chiffres  correspondent 
ainsi  directement  aux  notes  de  la  portée.  C'est  —  en 
marge  du  système  modal  —  une  facilité  de  plus. 


La  méthode  modale  a  encore  de  nombreux  parti- 
sans. Elle  doit  son  succès  à  la  valeur  et  à  la  foi  de 
ses  propagateurs,  au  choix  de  procédés  excellents 
qu'elle  a  su  accueillir  et  adapter,  aux  publications 
très  claires  dans  lesquelles  les  maîtres  primaires 
trouvaient  enfin  des  directions,  des  plans,  des  exer- 
cices, des  chants  très  simples,  qu'ils  pouvaient  faire 
exécuter  autrement  qu'en  recourant  à  l'audition, 
plus  peut-être  qu'elle  ne  le  doit  au  principe  modal 
et  à  une  écriture  qu'on  ne  peut  considérer,  à  l'école, 
que  comme  procédé  provisoire. 

Elle  a  connu  son  âge  d'or  pendant  toute  la  durée 
du  professorat  d'Emile  Chevé  d'abord,  d'Amand 
Chevé  ensuite,  fut  défendue  par  d'éminenls  partisans 
comme  Francisque  Sarcey,  Robin,  Jost,  Maurice  Bou- 
chor,  E.  Devinât,  et  attaquée  par  de  nombreux  mu- 
siciens. 

«  Ces  polémiques  ardentes  ont  surtout  embrouillé 
les  choses,  dit  Ume  Pape-Carpentieh,  car  la  vérité  est 
comme  la  flamme,  elle  ne  brille  que  dans  le  calme.  » 

Cependant,  la  lutte  était  menée  aussi  dans  le 
champ  des  applications,  et  incitait  les  partisans  des 
systèmes  divers  à  rivaliser  d'énergie. 

La  méthode  fut  autorisée  dans  les  écoles,  par 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


arrêté  ministériel  du  23  juillet  1883,  et  inscrite  à 
Litre  obligatoire  dans  les  programmes  des  écoles 
normales  par  décret  du  4  aoùl  190a  (art.  119). 

Elle  perdit  de  sa  vogue  dès  le  début  du  siècle,  et 
les  programmes  officiels  de  1922,  ainsi  que  les  ins- 
tructions ministérielles  qui  les  ont  suivis,  n'ont  plus 
fait  allusion  aux  méthodes  modales. 


la  méthode  modale  TONIC-SOL-FA  fut  à  peu  près 
la  seule  en  usage  dans  les  écoles  des  Iles-Britanni- 
ques de  1870  jusqu'à  la  fin  du  siècle  dernier.  Dans 
le  sud  de  l'Angleterre,  elle  est  encore  pratiquée  à 
l'exclusion  de  toute  autre  méthode.  Mais  ce  n'est 
plus  la  méthode  officielle  chez  nos  voisins,  et  l'on  y 
a  renoncé  déjà  dans  un  tiers  des  écoles  du  Royaume- 
Uni.  (Voir  Situation  de  i 'Enseignement  musical  à  l'é- 
tranger.) 

Due  à  Sarah  Glover,  contemporaine  de  Galin,  la 
méthode  s'inspire  du  principe  modal  de  la  méthode 
chiffrée,  et  les  signes  qu'elle  utilise  ne  correspon- 
dent pas  à  des  sons  absolus,  mais  à  des  fonctions. 

Cependant,  les  signes  sont  très  différents  de  ceux 
que  proposent  J.-J.  Rousseau  et  ses  continuateurs, 
aussi  bien  les  signes  de  hauteur  des  sons  que  ceux 
de  durée  et  de  division  du  temps.  La  gamme  ma- 
jeure s'écrit  : 


f  s'  V  t'  pour  l'octave  supérieure, 

/    S    /    t    pour  l'octave  du  médium, 
f,  s,  l,  t,  pour  l'octave  inférieure. 


Les  appellations,  eu  solfège,  sont  celles  des  noms 
des  notes  : 

do,  ré,  mi.  fa,  sol,  la,  ti. 
mais,  lorsque  les  sons  sont  diésés  ou  bémolisés,  la 
consonne  qui  sert  de  signe  est  suivie  de  la  voyelle  e 
pour  les  dièses,  et  a  pour   les  bémols    de,  re,  m<:. 
fe...  (la.  va,  ma,  fa...) 

La  hauteur  de  la  tonique  est  indiquée  par  une 
lettre  empruntée  à  la  série  A  lï  G  D  E  F  G  (la,  si, 
do,  ré,  mi,  fa,  sol)  et  précédée  du  mot  Key  (clavier). 

Le  son  articulé  est  figuré  par  la  lettre  indiquant 
en  même  temps  la  fonction,  et  le  son  prolongé  par 
un  tiret. 

D'ailleurs,  tous  les  temps  se  trouvent  indiqués 
par  des  barres  ou  des  doubles  points  de  séparation. 
Le  temps  fort  esl  précédé  de  la  barre  de  mesure.  Le 
temps  faible  est  précédé  du  double  point  : 


A  quatre  temps,  il  est  fait  usage  du  trait  vertical 
entre  les  second  et  troisième  temps  : 


I    f--\r\ 


Si,  entre  deux  signes  de  séparation  des  temps,  il  ne 
se  trouve  aucune  lettre,  ni  aucun  tiret  de  prolonga- 
tion, il  faut  faire  silence  pendant  ce  temps. 

Si,  entre  deux  signes  de  séparation  des  temps,  il 
se  trouve  deux  lettres,  elles  valent  un  demi-temps 


(division  hinairi 
un  point  : 


plus,  elles  sont  séparées  par 


S  écrit 


La  méthode  Tonic-Sol-Fa  écrit  donc  tous  les  airs 
majeurs  avec  une  seule  «  langue  ».  Elle  écrit  les 
airs  mineurs  avec  uue  autre  «  langue  »,  comportant 
un  se  (sol  dièse).  Elle  est  donc  modale.  Elle  pratique, 
elle  aussi,  la  mutation. 

Elle  présente  plus  de  complications  que  le  sys- 
tème de  Rousseau,  surtout  en  ce  qui  concerne  la 
division  de  la  mesure  en  temps,  et  les  divisions 
binaires  et  ternaires.  Elle  nécessite  plus  de  signes 
que  la  langue  chiffrée.  Obtient-elle  ainsi  plus  de 
clarté? 

Par  contre,  tandis  qu'il  semble  illogique  d'appeler 
do,  ré,  mi...  des  notes  figurées  par  1,  2,  3...  comme  le 
demande  Rousseau,  la  méthode  anglaise  se  sert  des 
lettres  initiales  d  r  m...  que  les  enfants  appelleront 
aisément  do-ré-mi...  Et  cet  avantage  est  si  grand 
qu'il  lui  a  valu  un  bien  plus  grand  nombre  de  par- 
tisans que  le  système  de  Jean-Jacques1. 

Méthodes  de  notation  simplifiée. 
2.  —  Méthodes  chromatiques. 

Dans  le  système  modal  le  nom  des  degrés  ne  cor- 
respond pas  à  un  son  fixe.  Que  ces  degrés  soient 
chantés  sur  do,  ré,  mi...  ou  sur  G,  D,  E...,  ou  sur  11, 
R,  M...,  ou  même  sur  un,  dette,  trois,  ils  ne  repré- 
sentent que  des    owtionx  et  non  des  son-,  absolus. 

Quelques  novateurs  ont  cru  pouvoir  concilier  la 
théorie  du  son  absolu  avec  celle  des  tonalités,  et 
avec  une  représentation  unique.  Ils  ont  proposé  de 
ne  considérer  que  la  succession  des  sons  par  demi- 
tons.  En  conséquence,  ils  ont  établi  une  série  de 
signes  et  de  dénominations  pour  les  douse  anus  d'une 
échelle  chromatique,  allant  d'un  son  à  celui  qui 
compte  un  nombre  double  de  vibrations  (octave). 

Ainsi,  qu'on  parte  de  ut2  pour  aller  à  ut,,  ou  qu'on 
parte  de  fa3  pour  aller  à  fa;,  on  empruntera  une 
suite  de  douze  sons,  avec  des  dénominations  cor- 
respondant à  chaque  série.  Chacun  de  ces  sons  peut 
devenir  une  tonique,  mais  ces  sons  restent  invaria- 
blement dénommés. 

Dans  celte  série  de  douze  sons,  constituant  une 
gamme  chromatique  tempérée,  les  sons  1,3.     ,  ti,  s. 
10,  12,  sont  ceux  d'une  gamme  diafconiqut 
et  les  sons  1,  3,  4,  6,  S,  9,  12  ceux  d'une  gamme 
diatonique  mineure. 

Les  intervalles  majeurs,  mineurs,  justes,  augmen- 
tés, diminués,  n'existent  plus  dans  ces  systèmes,  et 
un  intervalle  se  mesure  au  nombre  de  degrés  ou  de 
demi-tons  qu'il  comporte. 


1.  La  méthode  Tonic-Sol-jP'a  esl  expos* 
l'i  ,■  le  ! , ,  1 1  _'  -ne.'  ■    ;u  elle  obtinl  en  Angleterre,  —  et  non 
mm-   .  I    n.lie   sur    les   procédés   nombreux    il,-    le.  loi-  ■ 
Fonre-Soi  Fa.svx  les  grands  table.iux  rauraui  utilisés  .1 
anglaises   On  obtiendra  des  indications  en  s'adressani  . 

S„/-/-'rl    CvUnif,    Ja.    Ulaoaislairy    S.JUIIr,    laml.in.    \\  .    ('.. 

De  même,  nous  ne  pouvons  parler  'le  la  méthode  Dj 
prunle  »  t.  Tonù  Sol-Fa  -<-  initiales,  il  q  li  fal  |  rati 
gitiuc,  ni  de  la  metlnale  tno.l.i  1--  U  .      _.   >     -;i!     a 

et  qui  rst  utilisrr  encore  a  /m  a  h  ,  ai  de  le  ai  Lhodti 
tenue  en  Allemagne  par  IIi-m.  < ..  .1 ...  IIikm  Lao,  ai    ou 

par  la  plupart   .le-   [a  oh  ■.-,  airs  .1 

nienl,  plus  loin,  ce  qu'elle  doit  ; 


a/la   

si  adopté 


la  méthode  / 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ECOLE    3649 


De  ces  principes  communs  partent  plusieurs  sys- 
tèmes, qui  ne  présentent  plus  que  des  différences  de 
notation.  Les  appellations  des  douze  sons,  les  signes 
qui  représentent  ces  sons,  et  aussi  les  signes  de 
durée  différencient  ces  systèmes. 

Dans  le  Dictionnaire  de  la  musique  de  J.-J.  Rous- 
seau se  trouve  résumé  le  système  de  Roualle  de 
Boisgelou.  Les  noms  proposés  pour  les  douze  touches 
du  clavier  sont  :  ut,  de,  re,  ma,  mi,  fa,  fi,  sol,  be,  la, 

M.  Menchaca  propose  les  dénominations  sui- 
vantes : 

la,  se,  si,  do,  dou,  ré,  ro,  mi,  fa,  fe,  sol,  non. 
M.  Frémond  : 

do,  sa.  ro,  pa,  mo,  fa,  co,  sa,  vo,  la,  bo,  ga. 
M.  Eyquem  : 

do,  di,  ré,  mi,  fa,  fi.sol,  sil,  la,  li,  si. 

Ces  deux  derniers  novateurs  utilisent  un  graphi- 
que qui  rappelle  celui  de  l'écriture  usuelle,  c'est-à- 
dire  qui  reproduit  pour  l'œil  «  la  forme  des  ondula- 
lions  mélodiques  ».  Dans  la  portée  de  deux  lignes 
de  M.  Eyquem,  les  sept  notes  «  qui  correspondent  aux 
touches  blanches  du  clavier  »  sont  écrites  en  initia- 
les majuscules  :  D,  R,  M,  F,  0,  L,  S,  et  les  autres 
en  initiales  majuscules  anglaises  ïï),  SV,  \  '  ,  £.. 
Avec  M.  Frémond,  les  notes  affectent  des  formes  diffé- 
rentes suivant  la  série  d'octave  à  laquelle  elles  ap- 
partiennent, et  s'écrivent  sur  une  portée  de  trois 
lignes. 

M.  Menchaca  offre  des  signes  piriformes,  sans 
trait  vertical  pour  l'octave  centrale,  avec  un  trail 
dirigé  vers  le  haut  pour  l'octave  haute  (et  se  dépla- 
çant pour  l'octave  brillante,  l'octave  aiguë,  l'octave 
swaiguè),  et  avec  un  trait  dirigé  vers  le  bas  pour  l'oc- 
tave tasse  (se  déplaçant  pour  l'octave  grave,  et  les 
octaves  profonde,  et  sous-profonde). 

Nous  ne  pouvons  dire  quelle  est  la  valeur  pratique, 
à  l'école,  de  ces  systèmes,  que  nous  ne  voyons  pas 
utiliser.  Les  simplifications  sont  fort  ingénieuses 
d'ailleurs,  et  parfois  d'une  logique  parfaite. 

Les  critiques  ne  peuvent  donc  porter  que  sur  les 
exposés  de  principes,  et  les  premières  critiques 
formulées  concernent  le  tempérament  sur  lequel  se 
basent  tous  ces  systèmes.  Il  est  fort  difficile  à  un 
musicien  d'admettre  que  le  la  dièse  (qu'il  s'appelle 
bo,  ou  li)  se  substitue  au  si  bémol,  et  inversement 
que  le  si  bémol  (qu'il  s'appelle  se  ou  sa)  se  subs- 
titue au  la  dièse.  Le  fait  que  le  piano  est  un  instru- 
ment à  tempérament  ne  justifie  pas  ces  conceptions 
qui  détruisent  le  sens  tonal,  même  pour  les  pia- 
nistes. 

Enfin,  faute  d'expérimentation  soutenue,  ces  di- 
vers systèmes  n'ont,  jusqu'ici  du  moins,  donné  lieu  à 
aucune  recherche  de  procédés  pratiques. 


Il  est  malaisé  de  porter  un  jugement  d'ensemble 
sur  la  valeur  pédagogique  de  ces  diverses  notations 
simplifiées,  qui  diffèrent  les  unes  des  autres  et  n'ont 
ni  les  mêmes  avantages  ni  les  mêmes  défauts. 

Ce  qu'on  peut  dire,  c'est  que  chaque  auteur  de  sys- 
tème s'est  trouvé  en  présence  des  mêmes  difficultés 
et  des  mêmes  nécessités,  pour  représenter  les  hau- 
teurs des  sons  et  leurs  durées.  Le  minimum  de 
signes  nécessaires  est  à  peu  près  le  même  partout, 
Copyright  ly  Librairie  Delagrave,  1930. 


toutes  simplifications  étant  opérées.  Il  faut  de  nom- 
breux signes  pour  représenter  les  nombreuses  idées 
inéluctables,  pour  figurer  les  sons  naturels,  les  sons 
altérés,  du  grave  à  l'aigu,  les  tonalités  (qu'on  ne 
peut  supprimer  qu'en  apparence),  les  modes,  les 
durées  des  sons,  les  silences,  les  valeurs  très  diver- 
ses, les  rythmes,  les  mesures,  les  accentuations,  les 
ornements. 

En  tout  cas,  les  critiques  formulées  au  nom  de 
l'enfance  contre  les  difficultés  de  la  notation  usuelle 
ne  peuvent  être  accueillies,  nous  le  répétons,  lors- 
qu'elles visent  —  c'est  le  cas  général  —  des  com- 
plications qui  ne  sont  jamais  entrevues  à  l'école. 
D'ailleurs,  les  procédés  ne  manquent  pas  qui  per- 
mettent d'aborder  sans  peine,  à  l'école  primaire, 
l'étude  des  altérations,  des  diverses  tonalités,  et  des 
rythmes,  et  nous  verrons  que  certains  procédés  uti- 
lisés par  les  méthodes  de  notation  simplifiée  peu- 
vent d'ailleurs  être  mis  à  profit. 

La  im-thoilc  directe. 

Delcasso.  Laurent  de  Rill»'-.  A.  Dupaigne. 

•I.  Conibarieii. 

Le  chant  étant,  de  tous  les  exercices  que  com- 
porte l'enseignement  musical,  celui  qui  est  le  plus  tôt 
praticable,  celui  qui  est  le  plus  agréable,  il  peut 
venir  à  l'idée  de  profiter  de  l'étude  des  petits  chants 
d'école  pour  initier  aux  intonations,  aux  tonalités, 
aux  mesures,  aux  rythmes,  et  à  l'écriture  musicale. 
Quelques  pédagogues  ont  pensé  qu'il  était  aisé  d'al- 
ler du  chant  au  solfège.  La  plupart  demandent  que 
les  enfants  chantent  d'abord  les  paroles  des  petits 
chants  scolaires,  puis,  par  cœur,  les  notes  de  ces 
chants,  en  guise  de  dernier  couplet,  —  qu'ils  s'exer- 
cent à  battre  la  mesure  en  chantant,  —  qu'ils  ana- 
lysent, sans  connaître  le  texte  musical,  quelques 
mesures  du  chant  qu'ils  ont  appris,  —  qu'ils  exécu- 
tent la  gamme  du  ton  emprunté,  —  qu'ils  s'exercent 
à  reconnaître  les  sons,  les  intervalles. 

Delcasso,  recteur  honoraire,  fut  l'un  des  pre- 
miers, vers  ISoo,  à  recommander  qu'on  chantât  par 
cœur  les  notes  des  chants  appris  en  classe.  Il  com- 
posa quelques  recueils  de  petits  chants  à  cet  effet 
Hachette  . 

Laurent  de  Rillé,  qui  fut  inspecteur  de  l'enseigne- 
ment musical  dans  les  écoles  de  la  Seine  (moins 
Paris),  et  qui  a  composé  de  nombreuses  pa^es  cho- 
rales pour  les  écoles  et  les  orphéons,  écrivit,  lui 
aussi,  un  petit  recueil  de  chants  scolaires  très  sim- 
ples, gradués,  permettant  l'utilisation  de  la  méthode 
directe,  sur  le  premier  pentacorde  d'ut  majeur,  sur 
les  quatre  dernières  notes  {sol,  la,  si,  do),  puis  sur 
les  notes  de  la  gamme  entière. 

Albert  Dupaigne,  chargé  de  l'inspection  générale 
de  la  musique  dans  les  écoles  normales,  précise 
ainsi  sa  méthode1  : 

Eli»?  commencera  par  le  chant  lui-même,   qui  charme   tout 
d'abord,  el  par  l'application  constante  a  i 
usuels  des  sept  notes,  les  sept  mot-;  de  la  1   ng 
pour  justifier  le  titre  parlant  de  notre  m.-t!     1       '■- 
chant.  Elle  débute  par  donner  à  l'enfant  l'I.  ■!;'  «"iuhbt, 

par  leur  nom.  les  notes  de  tous  ses  chants  noies  qu'il  apprend 
d'abord  par  cœur;  et  elle  aboutit  à  l'aire  reconnaître  à  l'audition, 
et  désigner  aussi  par  leur  nom,  les  notes  des  airs  vocalises  ou 
joués,  qu'il  ne  connaît  pas  encore. 

Les  chants  successivement  appris  porteront  sur 
deux,  trois,  quatre,  cinq  notes. 


Le  Solfège  par  le  chant  (Hachette), 


3I-.5Q ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 

Sur  les  cinq  notes  du  pentacorde,  on  pratiquera  1  horizontale,  et  utilise  le  système  du  chronomériale 
des  exercices  de  solfège,  de  lecture,  en  se  servant     de  Galin  pour  marquer  les  temps,  les  sons  prolon- 
non    pas    de    la.   portée,  mais  du    nom   des   notes,     gés,  les  silences,  les  divisions  binaires  : 
M.  Dupaigne  écrit  les  noms  de  notes  sur  une  ligne  ' 


S'écrit  I    Mi    Sol  |  Sol  Fa  Mi  |.  Ré    . Mi  j  Fa     o  |  Ré  Mi   Fa  Sol  |La  ..(ete) 


L'enfant  lit  évidemment  sans  difficulté  un  exer- 
cice ainsi  représenté,  comme  il  lit  à  la  baguette  sur 
une  échelle  où  figurent  les  noms  des  notes. 

En  même  temps,  se  pratiqueront  des  exercices  de 
dictée  orale.  La  maîtresse  (car  M.  Dupaigne  ne  s'a- 
dresse qu'à  l'élément  féminin)  vocalise  ou  joue  les 
n»tes  sur  un  instrument.  Les  enfants  répondent  en 
chantant  les  notes  avec  leurs  noms. 

L'auteur  insiste,  et  il  ne  saurait  trop  insister,  sur 
l'utilité  des  exercices  de  reconnaissance  des  sons,  ou 
de  dictée.  M.  Dupaigne  dit  : 

11  y  a  deux  sortes  d'exercices  parallèles  et  réciproques  condui- 
„  i:1|  -m  luit,  le  premier  étant  l'introduction  nécessaire  au  second, 
qui  est  le  plus  important.  Ils  sont  la  version  et  le  thème  de  la  lan- 
gue musicale,  et  la  version,  où  l'on  comprend,  mène  au  thème, 
où  l'on  parle.  Dans  le  premier,  l'enfant  chante  de  lui-même  les 
sons  dont  on  lui  indique  le  nom  sans  chanter.  C'est  la  lecture. 
Dans  le  second,  l'enfant  trouve  (et  plus  tard  écrira)  le  nom  des 
mjiis  qu'Ali  lui  fait  entendre  sans  les  nommer.  C'est  la  dictée.  Le 
premier  forme  plutôt  la  voix,  le  second  forme  plutôtl'oreille. 

Ainsi,  l'exercice  d'analyse  ou  de  reconnaissance 
des  sons  (dictée)  apparaît,  avec  M.  Dupaig.ne,  comme 
plus  utile  que  l'exercice  de  synthèse,  ou  d'exécution 
des  sons  et  des  durées. 

Vient  l'accord  parfait.  Puis  on  utilisera  six,  huit, 
neuf,  onze  et  douze  notes.  On  pratiquera  de  nom- 
breux exercices  à  la  baguette  sur  un  tableau  repré- 
sentant la  «  triple  échelle  des  accords  parfaits  ma- 
jeurs »,  do,  mi,  sol,  —  sol,  si,  né,  —  fa.  la,  do.  Les 
trois  échelles,  juxtaposées,  permettent  de  toucher 
soit  les  notes  des  accords  parfaits  (dans  chaque  co- 
lonnel,  soit  les  notes  de  la  gamme,  ou  de  tout  exer- 
cice non  modulant. 

Suivent  des  exercices  sur  les  accords  parfaits  mi- 
neurs, sur  l'accord  de  si,  sur  les  dièses  et  bémols,  sur 
les  modulations  et  tonalités. 

Et  alors  seulement,  Al.  Dupaigne  passe  à  l'étude 
de  la  notation  usuelle.  Jusqu'ici,  l'élève  a  donc  soit 
chanté  des  notes  par  cœur,  soit  trouvé  le  nom  des 
notes  d'un  chant  appris,  soit  appris  une  mélodie  en 
se  servant  des  noms  de  notes. 

De  cinq  à  huit  ans  l'élève  n'a  donc  pratiqué  que 
des  exercices  de  formation  d'oreille  ou  de  voix.  A 
neuf  ans,  il  est  mis  en  présence  de  la  portée  muette, 
du  méloplaste  de  Galin.  La  méthode  est  donc  très 
lente.  M.  Dupaigne  ne  veut  pas  qu'on  embrasse  trop 
de  choses  à  la  fois,  qu'on  aille  trop  vite,  qu'on  vise 
trop  haut.  Il  n'a  pas  le  mépris  de  la  simplicité.  «  Peu, 
niais  bien,  »  est-il  prêt  à  dire  pour  son  compte,  et 
.  plutôt  rien  que  mal  ».  Nous  avons  dit  déjà  que  son 
but  est  un  but  moral,  un  but  d'éducation  bien  plus 
que  d'instruction. 

Un  autre  partisan  de  la  méthode  directe,  et  qui 
la  recommanda  avec  passion,  fut  Iules  Cosiisarieu- 
1;  -il  d'abord  la  cause  des  méthodes  sensorielles 
lorsqu'il  déclare:  «  L'éducation  musicale  devrait  s'a- 
dresser toujours  à  l'oreille  et  ne  jamais  être,  par 
analogie  avec  d'autres  enseignements,  une 
visuelle.  La  pile  erreur  dans  laquelle  puisse  tomber 


un  maître  est  de  laisser  croire  que  les  signes  gra- 
phiques dont  nous  nous  servons  —  portées,  clés, 
notes,  signes  d'altération,  etc.  —  constituent  la 
musique.  Ces  signes  sont  l'accessoire;  laissons-les 
au  second  rang  de  nos  préoccupations. 

J.  Combarieu  obtiendra  que  l'élève  parle  le  lan- 
gage musical  (parler  veut  dire  chanter)  avant  de  le 
lire  et,  plus  tard,  de  l'écrire. 

Les  premiers  modèles  seront  les  chansons  popu- 
laires, et,  le  plus  souvent,  avec  leurs  paroles  origi- 
nales (ou  retouchées  légèrement  pour  les  exigences 
de  l'école). 

Mais  des  chants  spéciaux  ont  été  composés  par 
J.  Combarieu  dans  l'ordre  qu'il  à  établi,  et  à  l'usage 
des  débutants. 

Ces  chants  sont  d'abord  chantés  par  imitation, 
ensuite  avec  le  livre  sous  les  yeux,  pour  que  l'élève 
fasse  connaissance  avec  l'écriture.  Et  cette  méthode 
directe  sera,  l'auteur  le  souhaite,  employée  le  plus 
longtemps  possible. 

Il  admet  donc,  dès  le  début,  une  application  du 
chant  à  la  notation  usuelle,  et  aussi,  d'ailleurs,  une 
part  d'exercices  de  technique  musicale  et  de  solfège, 
mais  de  solfège  très  simplifié. 

Et  il  se  pose  les  questions  suivantes  : 

«  Commencerons-nous  par  une  définition  générale 
de  la  musique  ou  de  la  mélodie?  —  Autant  vaudrait 
commencer  une  leçon  d'escrime  ou  de  natation  par 
un  devoir  écrit. 

«  Commencerons-nous  par  la  lecture  des  notes'/ 
par  la  distinction  de  celles  qui  sont  sur  les  Hgnes  et 
de  celles  qui  sont  dans  les  interlignes?  J'estime  que 
ce  serait  tourner  le  dos  au  bon  sens.  » 

El  cela  nous  rappelle  les  opinions  —  analogues, 
et  formulées  également  avec  énergie  —  de  M.  Marcel 
Prévost.  «  Pas  de  leçon  parlée  puisqu'il  s'agit  de 
chant,  pas  de  leçon  raisonnée  puisqu'il  faut  appren- 
dre à  sentir,  à  goûter,  à  aimer  l'art.  »  (Rapport  sur 
la  valeur  éducative  du  chant. i  El  ailleurs  :  <>  Qu'on 
m'ouvre  la  porte  du  temple,  mais  qu'on  ne  nie 
pousse  pas  dedans  d'un  coup  de  poing  <•■  [L'Art  d'ap- 
prendre1.) 

J.  Combarieu  demande  encore  : 

«  Commencerons-nous  par  une  leçon  sur  la 
gamme?  —  Ce  serait  commencer  par  la  fin.  » 


t.  Et  encore  :  «  Maitre  qui  commences  ton  enseigne t  par  une 

,1,  Bniti barb  itive,  je  n  ai  que  faire  de    ton     n  in 

avec  ta  .luliiution  et  ton  arrogante  l'.uuui.le      .  iM.ua-e!  P 
il  apprendre.) 

„    L'apprentissage  .!■•  l'art  par  l'intellieen,,-,  !,■    livre  qui  eummenee 
par  :  n    La  peinture  est  l'art   de...    ■  —  Née     non,    Cenl  leis    non.  I.'a- 

ninnell.  nient    rel'arlialit  dis    théories    .a   .1rs    i.-l, -s,   an  seuil    il 

science,    ne  ni  inspire  qu'aversion...    mais    ,    ,s|    i 

bien  plus  grave  que  l,irs,|u  II  s  ..-il  ,1,   -eom  que  de  coi :ei 

l'enseigne ni  de  la  j itme  m  .lisaui        la  peintui 

qui...  .•(!».,  Ibid 

.,     \pprendle    l.i    musique    par    I  inlrlliu    née.    ,-n    ,le    loli-ues    le,  .mis 
1,,11111'ees    ,1,'    re-les,  ,le  ,  lélilll  tnnis,  Je    ,|  u..s[  |,  ,nu;ii  ris    M, 
rlllllilétique  musicale,   faire  ut lu, le    pl'einat ,■  ,!    - 

luit  musicale,  voilà  le  plus  -m  moyen  ,1  étouffer  tout  s, ,1,111110111  ariis- 
lique.  »  fin.,   Itnpi'art  sac  la  eu/,  ne  .',/ ace.' ire  du  citant.) 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L  ÉCOLE    3651 


L'enfant  apprendra  d'abord  à  reconnaître  les  ryth- 
mes, à  les  marquer.  Il  le  fera  joyeusement,  car  il 
aura  le  plaisir  de  l'activité.  Il  mettra  une  note  sur 
chaque  temps,  une  note  sur  deux  temps,  deux  notes 
sur  un  temps.  Il  apprendra  à  battre  la  mesure. 

En  intonation,  il  partira  des  trois  sons  :  do,  mi, 
sol.  «  Telle  est  la  base  de  la  musique,  »  rappelle 
J.  Combarieu.  Le  maître  se  conforme  ainsi  à  la  réa- 
lité des  faits,  mais  sans  donner,  de  ces  faits,  aucune 
explication  théorique.  Le  maître  doit  renoncer  à  la 
gamme. 

«  Commencer  par  épeler  do,  ré,  mi,  fa,  sol,  la,  si, 
do,  en  mettant  tout  sur  le  même  plan,  est  un  usage 
que  nous  repoussons,  comme  contraire  à  la  nature 
des  choses  enseignées,  comme  fondé  sur  une  base 
musicalement  inexistante  (la  gamme)  et  comme 
étant,  par  surcroit,  beaucoup  plus  difficile.  Il  faut 
remarquer,  en  elfet,  qu'autant  les  enfants  sont  em- 
barrassés pour  émettre  correctement  les  notes  de  la 
gamme,  autant  ils  émettent  avec  facilité  do,  mi,  sol, 
do.  Pour  débuter  par  là,  nous  avons  deux  raisons, 
également  décisives,  et  dont  l'une  ou  l'autre  serait 
suffisante  :  raison  de  simplification  et  d'agrément 
pour  l'élève;  raison  de  vérité  musicale.  » 

On  peut  admettre,  avec  J.  Combarieu,  qu'il  est  pré- 
férable de  commencer  par  la  quinte  et  l'accord  par- 
fait, par  des  séries  musicales  olfrant  peu  de  combi- 
naisons, pour  que  les  exercices  de  reconnaissance 
des  sons  (dictée)  puissent  porter  sur  des  étapes  très 
simples  au  début.  Les  combinaisons  des  sons  de  la 
gamme  sont  nombreuses,  et  permettent  l'étude  de 
tous  les  intervalles  simples  majeurs,  mineurs  et 
justes.  Il  convient  donc  d'attendre  pour  aborder  l'é- 
tape «  gamme  »,  ce  qui  n'empêchera  pas  d'exécuter 
des  gammes,  de  bonne  heure,  en  degrés  cnnjoints, 
notamment  pour  y  appliquer  certains  procédés  de 
rythmique. 

Dès  qu'il  connaîtra  Jo,  mi,  sol.  et  qu'il  reconnaîtra 
ces  trois  sons,  l'élève  connaîtra  deux  autres  accords 
parfaits  de  l'échelle  diatonique  :  fa,  la,  do,  et  sol, 

»,    jv. 

Ces  premières  études  se  font  sans  qu'on  ail  recours 
à  l'écriture  musicale. 

Puis  s'exercera  l'attention  des  yeux.  Elle  portera 
d'abord  sur  do,  mi,  sol,  puis  sur  fa,  la,  do,  —  sol,  si, 
ré,  et  enfin  sur  une  disposition  de  ces  note-,  basée 
sur  leur  hauteur,  et  qui  constitue  la  gamme. 

L'éducation  musicale  se  poursuivra  toujours  à 
l'aide  de  chants  populaires,  et  de  chants  choisis,  et 
avec  un  minimum  de  solfège.  La  théorie  musicale 
sera  constamment  simplifiée.  (J.  Combarieu,  dans  ses 
ouvrages,  en  donne  l'exemple  jusqu'à  supprimer 
l'armure  d'un  morceau  s'il  ne  contient  pas  de  notes 
affectées  par  les  altérations  constitutives  !i 

Enfin,  les  élèves  exécuteront  surtout  des  œuvres 
chorales  à  trois  et  quatre  voix,  des  chœurs,  des  ca- 
nons, fugues,  chorals. 

Fidèle  à  son  principe  de  ne  tirer  les  lois  et  défini- 
tions que  des  faits,  J.  Combarieu  termine  son  second 
volume  en  nous  apprenant  ce  que  c'est  que  la  musi- 
que. C'est  l'heure,  en  effet,  où  l'élève  —  le  grand 
élève  — est  apte  à  comprendre  cette  définition. 

Plus  encore  que  de  tout  autre  système,  on  peut 
dire  de  la  méthode  directe  qu'à  s'exercer  seule  elle 
apparaît  comme  insuffisante.  Le  procédé  qui  con- 
siste à  aller  du  chant  au  solfège  ne  peut  tenir  lieu 
de  tout,  et  remplacer  tant  d'heureux  moyens  qui 
ajoutent  à  l'enseignement  musical  l'attrait  de  la 
variété.  Les  exercices  divers  de  sotmisation,  de  lec- 


ture ou  d'analyse,  faciles  à  pratiquer  avec  de  jeunes 
enfants,  sont  trop  utiles  pour  qu'on  renonce  à  les 
utiliser. 

Si  l'on  peut,  si  l'on  doit  p.i  i  tir  du  chant,  —  comme 
nul  ne  le  conteste,  —  pour  aller  vers  l'exercice  pu- 
rement musical,  il  y  a  intérêt,  après  quelques 
années,  à  prendre  le  chemin  inverse,  à  donner  le 
chant  comme  une  application  des  éludes  musicales, 
des  exercices  de  solmisation  et,  aussi,  des  études 
de  solfège.  Le  maître  doit  essayer  d'enseigner  les 
chants  autrement  que  par  audition.  Il  le  doit  pour 
gagner  du  temps,  pour  amener  l'enfant  à  se  passer 
d'aide  et  à  produire  un  effort,  pour  montrer  le 
plus  tôt  possible  l'heureuse  utilisation  pratique  des 
études  musicales.  Il  se  trouve  contraint  de  renoncer 
à  la  transmission  orale  pour  faire  étudier,  avec  la 
précision  voulue,  une  œuvre  chorale,  un  chœur  à 
plusieurs  parties.  Et  il  peut,  très  vite,  renoncer  à  ce 
mode  de  transmission,  bien  avant  même  d'ensei- 
gner aux  enfants  à  lire  sur  la  portée,  en  les  habi- 
tuant par  exemple  à  suivre  la  baguette,  à  chanter 
sur  une  représentation  graphique  de  l'accord  par- 
fait, du  pentacorde,  ou  de  la  gamme. 

La  méthode  directe  ferait  la  part  un  peu  trop  belle 
au  serinage,  —  au  psittacisme,  pour  parler  savam- 
ment, —  mais  elle  apportera,  par  instants,  et  sur- 
tout dans  la  période  d'initiation,  quelques  moyens 
de  plus  qui  aideront  à  varier  la  leçon,  —  soit  qu'on 
fasse  chanter  par  cœur,  en  guise  de  dernier  couplet, 
les  notes  d'un  chant  appris  par  audition,  —  soit 
qu'on  pratique,  sur  la  mélodie  de  ce  chant  connu, 
un  exercice  de  dictée  orale,  consistant  à  retrouver 
audilivemenl  les  notes  qui  la  composent.  C'est  alors 
un  exercice  d'analyse  de  premier  ordre. 

Cette  culture  musicale  directe  ne  pourra  se  faire 
qu'avec  des  chants  aidant  à  la  culture  du  goût.  Il 
n'est  pas  inutile  Je  l'affirmer  ici,  car  les  partisans  de 
la  méthode  ont  justement  proposé,  pour  cette  édu- 
cation première,  des  petits  chants  souvent  ridicules, 
qu'ils  ont  écrits  en  s'ingéniant  à  rimer  avec  les  noms 
des  notes,  ou  à  mettre  en  vers  quelques  règles  de 
théorie  musicale.  On  ne  peut  que  s'attrister  en  en- 
tendant chanter  avec  conscience  des  paroles  comme 
celles-ci  :  «  Une  noire  —  c'est  notoire  —  vaut  la 
moitié  —  trala  la  —  de  la  blanche  que  voilà.  » 

La  moindre  mélodie  populaire  ferait  mieux  l'af- 
faire de  la  musique. 

La  méthode  rythmique. 

On  a  pu  constater  déjà  que  les  auteurs  de  sys- 
tèmes d'enseignement  musical  ne  se  sont,  pour  la 
plupart,  intéressés  qu'en  second  lieu  —  ou  pas  du 
tout  —  à  la  culture  vocale.  Ce  n'est  pas  la  seule 
lacune  à  relever.  S'ils  s'attachent  presque  exclusive- 
ment aux  sons  et  à  leur  représentation,  ils  consa- 
crent un  examen  beaucoup  plus  attentif  aux  hau- 
teurs de  sons  qu'à  leurs  durées. 

S'ils  sont  partisans  d'une  éducation  d'oreille  faite 
«  avant  le  signe  »,  ils  semblent  ou  ne  pas  savoir  que 
la  perception  des  valeurs  et  des  rythmes  relève 
également  du  sens  auditif,  et  que  les  exercices  de 
rythmes  contribuent  aussi,  pour  leur  part,  à  la  for- 
mation de  l'oreille,  —  ou  manquer  de  moyens  pour 
entreprendre  une  étude  du  rythme  sans  recourir  à 
quelque  notation. 

Nombreux  sont  ceux,  parmi  les  auteurs  de  ma- 
nuels, qui  ne  savent  conseiller  que  le  pauvre  exercice 
de  lecture  rythmique,  privé  d'intonation  et,  par  con 


".(,:<•: 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


séquent,  de  musicalité,  de;  vie,  d'attrait.  Cet  exercice, 
d'ailleurs,  n'est  possible  que  lorsqu'on  se  trouve 
déjà  en  présence  d'une  portée. 

Les  galinistes  eux-mêmes  ne  peuvent  faire  porter 
leur  procédé  de  langue  des  durées  que  sur  un  exer- 
cice noté,  en  chiffres,  ou  autrement,  malgré  leur 
désir  d'enseigner  l'idée  avant  le  signe. 

Pourquoi  cette  lacune  à  peu  près  générale?  Nous 
avons  fait  connaître  une  première  raison  :  on  man- 
que de  moyens  à  proposer  pour  une  étude  élémen- 
taire du  rythme.  Mais  il  est  aussi  une  erreur  très 
courante  et  qui  se  formule  ainsi  :  «  Les  enfants  n'é- 
prouvent pas  de  difficultés  à  lire  en  mesure,  à  inter- 
préterles  valeurs.  Seule  l'intonation  les  embarrasse.  » 
Enfin,  on  considère  trop  souvent  que  l'étude  des 
rythmes  n'a  pas  de  valeur  éducative,  ni  d'utilité  im- 
médiate. 

11  est  une  expérience  qui  permet  de  constater  que 
les  plus  grands  élèves  des  écoles,  lorsqu'ils  solfient  un 
exercice  à  deux  parties  dyssymétriques,  ont  plus  à 
craindre  de  la  concurrence  rythmique  que  de  la 
diversité  des  sons. 

L'expérience  consiste  à  faire  solfier  un  exercice  à 
deux  parties  symétriques,  composé  seulement  de 
blanches.  On  solfie  avec  assurance,  à  première  vue. 
Puis  le  maître  transforme  le  rythme  de  cette  leçon 
de  solfège  (soit  en  modifiant  l'écriture,  au  tableau, — 
soit  par  simple  convention  verbale).  Par  exemple, 
dans  chaque  partie,  et  dans  chaque  mesure,  il  trans- 
forme la  blanche  en  deux  noires.  On  solfie  encore 
avec  assurance.  A  la  blanche  il  substitue  noire  et 
soupir,  puis  soupir  et  noire.  Enfin  ces  deux  derniers 
rythmes  sont  utilisés  simultanément,  en  deux  par- 
ties dyssymétriques1.  Le  maître  constate  alors  que 
les  élèves  sollienl  sans  précision,  et  que  la  dernière 
combinaison  les  conduit  même  à  chanter  sans  jus- 
tesse une  succession  de  sons  facile,  qu'ils  arrivent  à 
savoir  par  cœur.  11  y  a  sans  doute  à  cela  des  causes 
diverses,  mais,  en  premier  lieu,  l'antagonisme  des 
rythmes. 

Il  a  été  donné  à  chacun  d'entendre  les  enfants  dé- 
former le  rythme  des  chants  au  point  de  faire  perdre 
à  la  mélodie  tout  son  caractère  :  le  ternaire  devient 
binaire,  ou  inversement;  la  Marseillaise  perd  ses 
doubles  croches,  les  valeurs  brèves  s'allongent,  tandis 
que  les  longues  durées  se  contractent  (à  tel  point 
que  le  refrain  :  «  Aux  armes...  »  est  parfois  chanté 
à  trois  temps  au  lieu  de  quatre!).  La  complaisance 
de  ceux  qui  enseignent  y  est  parfois  pour  quelque 
chose,  et  parfois  aussi  leur  propre  impuissance  à 
interpréter  fidèlement  le  rythme  d'un  texte  musical. 


On  le  voit,  il  y  a  des  difficultés  à  vaincre,  et  une 
éducation  rythmique  est  nécessaire  pour  assurer 
l'exactitude  des  exécutions  chorales. 

A  ceux  qui,  d'autre  part,  contestent  l'importance 
éducative  de  cette  étude  il  faut  bien  rappeler  — 
même  si  l'on  ne  peut  éviter  la  banalité  des  redites 
—  de  quelle  valeur  est  cet  élément  premier  en  mu- 
sique, élément  «  vivifiant  et  fécond  »  (V.  d'Indt).  Le 
rythme  facilite  considérablement,  pour  de  jeunes 
enfants,  la  comprétension  de  la  mélodie  et  du  texte 
poétique  (lorsque  l'adaptation  prosodique  est  bonne). 
Il  est  activité,  et,  comme  tel,  il  facilite  énormément 
la  mémoire  des  sons. 

L'un  des  principes  pédagogiques  d'Herbert  Spencer 
invite  à  consulter  la  marche  qu'a  suivie  la  civilisa- 
tion pour  trouver  la  bonne  méthode  d'éducation, 
ou  mieux,  la  progression  la  plus  naturelle.  «  La 
genèse  de  la  science,  chez  l'individu,  doit  suivre  la 
même  marche  que  la  genèse  de  la  science  dans  la 
race.  »  Or,  le  rythme  semble  être  à  la  base  de  la 
musique,  —  il  s'y  trouve  encore  chez  les  peuples  les 
moins  civilisés.  On  peut  donc,  avec  les  primitifs  que 
sont  les  enfants,  commencer  l'éducation  musicale 
par  les  exercices  de  rythme.  Ce  sera  commencer 
par  l'agréable  et  l'actif. 

On  verra,  dans  un  chapitre  suivant,  quel  parti 
Mme  MoNTEssoni  tire,  avec  les  jeunes  enfants,  —  et 
avec  les  anormaux,  — des  premières  perceptions  de 
rythme,  —  et  par  quels  exercices  elle  conduit  celte 
initiation. 

M.  Jaques-Dalcroze  connaît  tous  les  avantages 
d'une  éducation  musicale  basée  sur  l'étude  première 
du  rythme.  C'est  du  geste  rythmé  que,  pour  lui, 
naîtra  la  mélodie.  M.  Jaques-Dalcroze  développe 
les  facultés  de  mouvement  de  l'enfant,  l'amené  \  i te 
à  aimer  —  après  le  rythme  —  les  sonorités,  la 
musique  elle-même,  le  met  en  possession  de  moyens 
nouveaux,  tant  pour  comprendre  la  musique  que 
pour  l'exprimer.  Donc  il  éduque  avant  tout  le  corps, 
mais  pour  affermir  la  volonté,  affiner  la  sensibilité, 
développer  les  facultés  de  perception,  car  le  perfec- 
tionnement des  moyens  physiques  rend  la  perception 
externe  plus  facile,  plus  précise.  Il  s'adresse  ainsi 
bientôt  à  l'oreille,  puis  au  sens  esthétique,  qu'il  cul- 
tive dans  l'action  et  dans  la  joie. 

Toujours  l'action  et  l'émotion  précéderont  l'expli- 
cation. Quant  à  l'étude  de  la  notation,  elle  ne  sera 
entreprise  qu'après  une  suffisante  éducation  de  l'o- 
reille, c'est-à-dire  quand  l'enfant  reconnaîtra  les 
rythmes,  d'abord,  et  les  sonorités,  ensuite. 

Une  première  année  sera  consacrée  aux  seules 
études  du  rythme.  Mais  ce  n'est  là  qu'un  «  départ  », 
et  la  pédagogie  de  Jaques-Dalcroze  forme  un  tout 


EXERCICE  A  TRA-NSFOKTMATTONS 


pÈmhpémkè 


transformation    25  transformation     3- transformation.. 


oliln 


ililicationscn   les  r„mn;in  ! .1.1 1,  m,    en    utilisant  le 
tableau  des  mélangea  (V.  Wilhbm),  ou  la  dactylorylhmie    voir  plus 

li I  » ■  ' -  '  ■  -  rlupiiie.'.   un  .H-,  ne  à   réaliser   des   1  .mbinaisons  de 

temps  à  division  binaire  et  à  division  ternaire,  alternatives  ou  simul- 
tanées. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    3053 

harmonieux  et  complet.  «  De  même,  dit  M,le  Vincelo, 
(La  Nouvelle  Education,  janvier  1920),  que  le  rythme 
seul,  squelette  de  l'anatomie  musicale,  ne  fait  pas 
toute  la  musique,  de  même  le  rythme  seul,  malgré 
son  importance,  ne  fait  pas  toute  la  méthode  d'édu- 
cation physique  qu'est  la  Rythmique  ».  —  Et  nous 
ajoutons  :  surtout  quand  la  Rythmique  se  propose 
de  remplir  un  vaste  programme  d'éducation  artis- 
tique. 

Le  point  de  départ  sera  dans  l'étude  de  la  marche. 
L'enfant  différenciera  les  mesures  en  marquant  les 
temps  forts,  dans  ses  exercices  démarche.  Lesbras, 
eux  aussi,  sont  appelés  à  marquer  les  temps.  On 
réduira  au  minimum  la  dépense  musculaire  —  et 
non  d'énergie,  —  sur  les  temps  faibles. 

Des  commandements  brusques,  inattendus,  qui 
s'expriment  par  des  «  hop!  »,  viennent  arrêter  l'en- 
fant dans  sa  série  de  gestes  rythmés,  ou  bien  au 
contraire  le  font  partir,  ou  bien  encore  modifient  la 
série  des  mouvements,  substituent  un  mouvement  de 
bras  à  un  mouvement  de  pieds,  visent  à  réaliser 
l'obéissance  immédiate  du  corps,  à  développer  l'at- 
tention, à  donner  une  indépendance  aux  membres 
en  détruisant  les  solidarités  gênantes. 

Le  piano  est  indispensable  aux  exercices  de  ryth- 
mique Dalcroze.  C'est  le  piano  qui  commande.  L'en- 
fant le  suit  dans  toutes  ses  exigences  de  rythme  ou 
d'intensité,  traduit  ce  qu'il  entend,  obéit  spontané- 
ment, répond  à  l'appel  du  pianiste  improvisateur 
chaque  fois  que  changent  les  mesures,  les  durées, 
les  nuances.  On  joue  piano  elTenfant  marche  avec 
légèreté  sur  la  pointe  des  pieds.  L'harmonisation  se 
fait  lourde,  et  la  démarche  aussi.  Le  rythme  rebon- 
dit, et  tous  les  enfants  font  comme  lui. 

Ainsi,  il  y  a  une  assimilation,  une  pénétration  du 
rythme  et  de  la  musique  en  chaque  être.  Il  y  a,  chez 
tous,  un  écho  immédiat  de  tout  ce  qui  est  musique- 

Parfois,  les  exercices  sont  dirigés  par  l'un  des 
petits  élèves.  11  bat  la  mesure  à  deux,  trois,  quatre 
temps.  Il  ajoute  des  accents.  Il  indique  des  nuances. 
Et  le  pianiste  ainsi  que  les  autres  enfants  lui  obéis- 
sent. 

Un  autre  exercice  consiste  à  placer  les  élèves  en 
quatre  files,  l'une  devant  être  attentive  aux  mélodies 
composées  seulement  de  blanches  (à  2/4),  l'autre  aux 
mélodies  composées  de  noires,  l'autre,  de  croches,  et 
la  quatrième,  de  sautilles  (croche  pointée  et  double 
croche).  Chaque  groupe  guette  le  retour  du  rythme 
qu'il  est  chargé  d'interpréter.  Il  n'intervient  donc 
pas  sans  être  sollicité  par  la  musique.  C'est  un 
exercice  de  spontanéité,  de  mémoire,  et  surtout 
d'attention. 

L'enfant  apprend  abattre  simultanément  des  me- 
sures différentes,  à  représenter  les  divisions  binaires 
ou  ternaires,  à  interpréter  des  rythmes  irréguliers, 
des  canons  rythmiques.  (Le  piano  donne  des  thèmes 
rythmiques  qui  sont  reproduits  par  l'élève  avec  une 
mesure  de  retard.) 

Les  enfants  s'exercent  également  à  suspendre  la 
marche  pendant  un  certain  nombre  de  temps,  —  les 
silences.  Ils  comptent  mentalement  ces  temps  de 
silence,  et  reparlent  tous,  avec  une  grande  préci- 
sion, quand  les  temps  sont  comptés,  sans  avoir  ni 
pressé  ni  ralenti.  C'est  une  sorte  d'audition  inté- 
rieure, analogue  à  celle  que  M.  Jaques-Dalcroze 
fait  pratiquer  avec  les  sons  des  gammes,  et  qui  per- 
met de  constater  que  chaque  enfant  garde  en  lui  le 
battement  de  la  mesure,  qu'il  réalise  un  certain 
rythme  incarné.  Il  y  a  mieux  :  les  enfants  interprè- 


tent en  marchant  les  mesures  composées  (par  exem- 
ple une  mesure  à  12/8)  en  décomposant  les  temps. 
«  Puis  ils  retirent  une  croche  à  chaque  mesure,  jus- 
qu'à obtenir,  à  la  fin,  une  mesure  composée  d'une 
seule  croche  et  de  11  temps  de  silence.  Il  faut  noter 
que  le  silence  est  réalisé  en  rythmique  par  l'arrêt 
simultané  des  jambes  et  des  bras,  ce  qui  en  com- 
plique l'exécution,  mais  rend  plus  sensible  la  sus- 
pension complète  de  la  musique  qu'il  représente1.  » 

Les  exercices  portent  sur  toutes  les  difficultés  de 
rythme.  L'une  des  grosses  difficultés  est  due  aux 
notes  syncopées.  «  Les  fillettes  sont  groupées  par 
deux,  et  l'une  marche  les  temps  tandis  que  l'autre 
marche  les  notes  syncopées;  elles  parviennent  ainsi, 
sans  effort  apparent,  à  nous  montrer  des  syncopes 
par  anticipation  et  par  retard.  Et  l'image  de  ce 
groupe  se  grave  dans  le  cerveau  de  tous  ;  la  syncope 
se  concrétise  très  exactement  parla  vision  du  temps 
remorquant  après  lui  la  note  ou  étant  entraîné 
par  elle.  »  (Même  article.) 

L'oreille  s'est  développée  en  s'exerçant  à  recon- 
naître les  rythmes,  les  intensités,  les  modifications 
de  mouvement.  Les  rythmiciens  ont  à  leur  disposi- 
tion un  grand  instrument  de  perfection  :  une  atten- 
tion constamment  en  éveil.  Cette  attention,  bien 
fidèle,  sera  mise  à  profit  au  cours  des  études  qui 
suivent,  et  qui  portent  sur  les  sonorités,  les  sons,  les 
intervalles,  les  accords,  les  gammes,  les  tonalités. 

L'exercice  d'audition  intérieure  est  pratiqué  main- 
tenant avec  des  suites  de  sons.  Les  élèves  chantent 
une  mélodie  ou  une  gamme.  Le  maître  lance  un 
<>  hop!  »  bref  et  inopiné.  Les  élèves  cessent  de 
chanter  mais  poursuivent,  en  pensée,  la  série  musi- 
cale. Au  second  «  hop!  »,ils  continuent  vocalement 
la  série. 

Les  gammes,  servant  d'exercices  d'audition  inté- 
rieure et  de  solmisation,  se  chantent  toutes  de  do 
à  do,  ou  de  do  dièse  à  do  dièse.  Ainsi,  la  gamme  de 
soi  majeur,  au  lieu  de  partir  de  sa  tonique  sol,  se 
chantera  sur 

do,  ré,  mi,  fa$,  sol,  la,  si.  do. 

Les  gammes  majeures  constituent  ainsi,  parlant 
de  do,  de  nombreuses  échelles,  nouvelles  en  appa- 
rence. 

M.  Jaques-Dalcroze  s'adresse  de  la  sorte  beaucoup 
plus  à  l'attention  et  à  l'intelligence  des  élèves  qu'à 
leur  sens  musical.  Mais  il  voit,  dans  ce  procédé,  une 
occasion  de  différencier  les  tonalités  et  les  gammes. 
Les  demi-tons  se  déplacent;  l'élève  observe  les  pla- 
ces qu'ils  occupent  et  cherche  la  tonique.  M.  Dal- 
croze  ajoute  que  toutes  les  voix  peuvent  chanter  les 
gammes  partant  de  do,  et  que  cette  pratique  grave 
très  vite  dans  la  mémoire  le  son  de  l'ut  fondamental. 
Ainsi,  l'analyse  tonale  se  trouverait  facilitée;  l'au- 
dition absolue  serait  favorisée;  et  il  y  a  —  ceci  ne 
peut  être  contesté  —  simplification  vocale. 

Des  dictées  orales  sont  faites  fréquemment;  M.  Dal- 
croze donne  une  progression  de  dictées,  dans  ses 
ouvrages. 

L'éducation  musicale  s'est  donc  faite  d'une  part 
par  l'élude  des  rythmes,  d'autre  part  par  l'étude  des 
sonorités.  Ces  deux  séries  vont  se  combiner,  et  des 
exercices  mixtes  permettront  de  poursuivre  simul- 
tanément l'étude  des  sons  et  celle  des  mouvements 
corporels. 


.'Art  à  l'école,  a'  85. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


L'enfant  prouvera  qu'il  reconnaît  la  succession 
ascendante  des  sons  (en  avançant),  ou  la  succession 
descendante  (en  reculant),  ou  l'identité  des  sons  (en 
marquant  le  pas). 

D'ailleurs,  la  phonomimie  élémentaire,  ou  natu- 
relle, est  également  utilisée  (voir  les  signes  manuels 
de  Wiliiem).  La  main  s'élèvera,  de  la  poitrine  jus- 
qu'au front,  avec  la  série  ascendante,  et  pour  con- 
trôler ainsi  le  degré  de  tension  des  cordes  vocales, 
et>  les  diverses  places  où  se  localisent  les  vibrations 
sonores. 

D'autre  pari,  se  pratiqueront  des  associations  de 
mouvements  corporels  continus,  avec  des  sons 
vocaux  soutenus.  Puis  s'introduiront  des  interrup- 
tions. 

Les  rythmes  et  les  sons  s'associeront  autrement 
encore  :  une  gamme  est  exécutée  sur  un  certain 
rythme.  Au  commandement  de  hop!  elle  sera  exé- 
cutée sur  un  rythme  différent  (les  rythmes  pourront 
être  indiqués  au  tableau). 

Puis  viendront  les  exercices  de  dissociation,  soit 
que  l'élève  chante  piano  en  marchant  bruyamment, 
soit  qu'il  marche  à  pas  feutrés  en  chantant  fort.  Il 
pourra  aussi  chanter  deux  notes  en  exécutant  trois 
gestes  (ou  quatre,  ou  cinq),  ou  faire  le  contraire.  II 
chantera  une  mélodie  en  effectuant  un  rythme  qui 
lui  est  étranger. 

M.  .L\niE--DALCROZE  attache  un  grand  prix  à  la 
culture  vocale,  qu'il  entreprend  avec  des  exercices 
divers  de  pose  de  voix,  de  souplesse,  de  respiration, 
de  concordance  entre  l'audition  et  l'émission. 


Une  méthode  d'une  telle  envergure,  qui  comporte 
encore  des  exercices  de  mémorisation,  de  phrasé,  de 
nuancé,  à' accentuation,  de  transposition,  ne  peut  être 
connue  que  si  l'on  assiste  à  des  démonstrations  nom- 
breuses, que  si  l'on  consent  même  à  se  faire  élève, 
que  si  l'on  se  reporte  aux  nombreux  ouvrages  di- 
dactiques de  M.  Jaooes-Dalcroze1. 


La  méthode  Dessihier,  partie  de  Belgique,  n'est  pas 
exclusivement  non  plus  une  méthode  de  rythmique. 
Elle  prévoit  aussi  une  culture  d'oreille  par  les  into- 
nations, et  des  exercices  graphiques  pour  l'étude 
des  signes.  Ce  sont  même  les  procédés  d'intonation 
qui  ont  seuls  survécu  dans  les  écoles  belges,  où  cette 
méthode  a  été  longtemps  appliquée  intégralement. 

Mais,  par  contre,  c'est  la  partie  concernant  le 
rythme  qui  est  quelque  peu  connue  en  France,  où 
d'ailleurs  les  propositions  de  H.  Dessirier  ont  été 
modifiées  dans  un  sens  plus  pratique. 

L'auteur  considère  trois  groupes  de  durées  : 

1"  les  notes  et  les  silences  d'un  temps, 

2°  les  notes  et  les  silences  valant  plus  d'un  temps 
(les  multiples)  ; 

.3°  les  notes  et  les  silences  valant  moins  d'un 
temps  (les  sous-multiples). 

Les  signes  de  durée  de  la  notation  usuelle  ont 
l'inconvénient,  pour  l'enfant,  de  ne  pas  rappeler  les 
valeurs  correspondantes.  Ainsi,  à  l'examen  des 
figures  de  durée,  rien  ne  permet  de  voir  que  la 
blanche  vaut  deux  noires.  Aussi,  à  la  notation  sui- 
vante : 


I  J  J  J  J  |J      J      jj. J+» 

H.  Dessirier  préfère  une  notation  analytique  : 

|  J  J  J  J,JJJJ|JJJ  JlJ^Jj^ 

De  même,  les  sous-multiples  du  temps  seront  notés  sous  leur  forme  analytique,  et  les  valeurs  suivantes 


Cette  écriture  s'accompagne  de  signes  manuels 
rythmiques,  pour  représenter  le  temps  et  ses  sous- 
multiples,  à  l'aide  des  doigts,  réunis  ou  écartés. 

Ce  sont  ces  signes,  pratiques,  qu'on  utilise.  Mais, 
tandis  que  H.  Dessirier  considère  que  la  noire  vaut 
quatre  doubles  croches,  et  qu'elle  doit  se  repré- 
senter à  l'aide  de  quatre  doigts  réunis  (tandis  que 
les  quatre  doigts  écartés  figureront  quatre  doubles 
croches  séparées),  ces  mêmes  signes  manuels  ser- 
vent maintenant  à  figurer  le  temps  (un  doigt)  et  ses 
multiples.  C'est,  en  etfet,  sur  ce  temps  et  sur  les  mul- 
tiples que  portent  seulement  les  premiers  exercices 
élémentaires.  L'écriture  en  doubles  croches  ne  se- 
rait possible  que  si  l'on  recourait  dès  le  début  aux 
mesures  à  2/16,  3/16,  4/16,  que  l'on  ignorera  tou- 
jours à  l'école  primaire. 

La  dactylorythmie  —  système  Dessirier  trans- 
formé —  permet  des  exercices  de  synthèse  et  d'a- 


nalyse, —  soit  que  les  élèves  exécutent  (en  rlmnunl 
une  suite  de  sons  déterminés,  comme  la  gamme)  les 
durées  indiquées  par  les  doigts  du  maître,  —  soil 
que  les  élevés  représentent  eux-mêmes  les  durées 
d'un  chant  qu'ils  exécutent  par  cœur,  ou  des  sons 
que  chante  le  maître. 
La  mimique  se  fait  d'après  les  règles  suivantes  : 

1.  Un  doigt  représente  un  son  d'un  temps. 

2.  Plusieurs  doigts  séparés  représentent  plusieurs 
sons  d'un  temps. 

.!.  Plusieurs  doigts  réunis  représentent  un  son  de 
plusieurs  temps  : 


I,  l,<  Rythmique  [i  roi.)'.  La  l".  u    ,       inim     [I  vol.     pr  iface  al 

lercires),  —  Los  Cammrs  ri  1-s  Innahlrs  , :i  vol.l.  Joliin,  éditeur, 
.uis.uiue,  Suisse).  —  Eu  l'i-ame,  .  lie/  Koiku't  l.erolle,  80,  rue  il'As- 
)ltR,  Paris. 

Les  démonstrations  ont  lieu  a^çez  fréquemment,  à  Genève,  Paris, 
ondres.  Des  cours  réguliers  sont  donnés  dans  ees  villes  (à  Génère, 
i.  rue  Terrassiôre). 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE      ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L  ÉCOLE    3 car. 


nACTYtORYTMIE  A  DEUX  TEMPS 
La  main  du  maître. 


Deux  sons     Un  son  de 
dun   temps    deux  temps 


En  ce  qui  concerne  les  silences,  la  mesure  ayant 
été  indiquée  :  un  doigt  disparaissant  (replié  en  de- 
dans) invite  au  silence  d'un  temps  ;  le  poing  fermé 
figure  le_silence  d'une  mesure  : 


SILENCES  A  DEUX  TEMPS 

La  mainâu  maître  vue  osr  lui  : 


•  vue  parlëlève: 

m'"l    !  1     t         1     t 


Son  d'un  temps  et  Silence 

silence  d'untemps       et   son. 


dune  mesure 


Le  mécanisme  est  toujours  très  simple  et  d'une 
conception  si  naturelle  que,  après  avoir  utilisé  les 
figurations  propres  à  la  mesure  à  deux  temps,  il 
n'y  a  pas  de  nouvelles  conventions  à  prendre  avec 
les  enfants  lorsqu'on  utilise  les  figurations  à  3  et 
4  temps  : 


DACTYL0RYTM1E  A  TROIS  TEMPS 
Lamajn  du  maître,  vucparJui: 


Vu  t  par  J'eJeve 


tl     ft      «     f) 


Trois  sons  Un  son  de  Xongue  Brève  et 

d'un  temps       ."trois  temps  et  brève  longue 

Nous  laissons  de  côté  les  figurations  des  silences,  I  se  fait,  là  encore,  à  la  place  marquée  par  le  doigt 
trois  temps  et  à  quatre  temps,  puisque  le  silence  I  replié  : 


DACTYLORYTHM1E  A  ÇUATRE  TEMPS. 
La  main  du  maître,  vue  par  lui-. 


vue  par  J'élève  -. 


W 


Quatre  sans     Un  son  de      Deux  sons     Longue  et    Deuxbrèves 
d'un  bemp s      quatre  temps   de  2  temps      2  brèves     etunelongue 


(Peu  usité)      (Syncope) 


La  dactylorylhmie  constitue  le  procédé  le  plus 
simple  et  le  plus  concret  permettant  de  connaître 
Vidée  avant  le  mot  et  surtout  avant  le  signe.  Les  en- 
fants exécutent  des  sons  d'un  temps,  de  deux,  trois, 
quatre  temps,  et  des  silences,  sans  savoir  que  ces 
idées  s'appelleront,  à  2/4,  3/4, 4/4,  des  noires,  blan- 
•ches,...  ou  soupirs. 


Les  doigts  se  prêtent  aisément  à  toutes  les  atti- 
tudes, —  avec  l'aide  du  pouce,  au  besoin. 

Recherche  des  intonations.  —  Pour  établir  son 
système  reposant  sur  l'idée  des  tonalités  et  l'appré- 
ciation des  fonctions  tonales,  Dessirier  renonce, 
là  encore,  au  raisonnement,  —  et,  quoique  cette 
partie  de  sa  méthode  n'ait  plus  de  rapports  avec 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


sa   rythmique,   il  n'est  pas  inutile   de  l'examiner. 

Dessirier  traitera  les  difficultés  d'intonation,  dans 
tous  les  tons,  à  l'aide  de  formules  transposables,  — 
reprenant  ainsi,  pour  en  faire  un  système  complet, 
le  procédé  qui  amena  Oui  d'Arezzo  à  utiliser  isolé- 
ment (pour  retrouver  les  hauteurs  de  sons)  les 
phrases  de  l'hymne  de  Saint-Jean. 

Dessirier  —  empruntant  à  Newton  une  compa- 
raison bien  connue  —  rapproche  la  gamme  des 
sons  de  celles  des  couleurs  de  l'arc-en-ciel.  Sept 
sons,  sept  couleurs.  Les  couleurs  I,  III,  V  (rouge, 
jaune,  bleu)  sont  les  plus  saillantes,  —  ainsi  que  les 
sons  I,  III,  V,  sons  primordiaux,  calmes,  fixes,  per- 
mettant un  repos  mélodique,  et  constituant  l'accord 
parfait  de  tonique.  Il  existe  des  couleurs  secondaires 
(II,  IV,  VI,  VII),  comme  il  existe  des  sons  secondaires 
dans  la  gamme,  sons  mobiles,  subissant  l'attraction 
des  notes  de  l'accord  parfait  de  tonique. 

De  ces  comparaisons,  tout  un  système  progressif 
peut    être   tiré  en    faveur    de   l'étude   de   l'accord 


parfait,  et   son  utilisation  comme   appui   mental. 

En  quoi  consistera  la  recherche  de  l'intonation, 
puisque  la  méthode  se  propose  surtout  de  guider 
cette  recherche? 

1°  à  ne  jamais  solfier  une  seule  note  sans  en 
avoir  préalablement  trouvé  le  son  dans  sa  formule 
propre; 

2°  à  ne  jamais  solfier  une  seule  note  sans  en  des- 
siner la  formule. 

Quelles  sont  ces  formules,  figurant  encore  dans 
les  récents  programmes  belges"? 

Ce  sont  sept  groupes  de  notes,  prenant  place  dans 
un  canon  à  trois  voix,  et  constituant  des  moyens 
mnémoniques  pour  retrouver  les  divers  sons. 

Chaque  phrase  du  canon  —  ou  mieux,  chaque 
incise  —  part  de  l'un  des  trois  sons  primordiaux 
I,  III,  V  et  comprend  l'un  des  autres  sons  (secon- 
daires) 2,  4,  6,  7  (nous  chiffrons  à  la  manière  de  Des- 
sirier,  en  romain  pour  les  notes  de  l'accord  parfait, 
en  arabe  pour  les  autres  notes)  : 


1"  pnrasc  du  canon 


Formule  du  son  I 


Formule  du  son  III 


Formule  SasonV 


Les  sons  I,  III,  V  seront  donc  faciles  à  retrouver  si 
l'on  connaît  bien  les  formules.  Partant  du  son  1  (le 
do,  en  ton  d'ut  majeur),  on  sera  conduit  vers  la  se- 
conde incise,  celle  du  son  III,  et  vers  la  troisième, 
celle  du  son  V. 

Les  enfants  sauront  donc  les  formules  par  cœur, 
et  les  appelleront  constamment  à  l'aide. 

Ces  mêmes  incises  permettront  de  retrouver  éga- 
lement le  son  des  notes  2,  4,  6,  7. 

En  effet,  après  avoir  chanté  :  Do,  ré,  do,  do,  ré,  do, 
'enfant  n'aura  qu'à  couper  l'incise,  qu'à  répéter  en 


écho  ré,  do  et  enfin  ré,  pour  avoir  le  son  de  la 
note  2. 

Avec  la  seconde  incise,  il  trouvera  le  son  de  la 
noie  4  eu  chantant  d'abord  :  mi,  fa,  mi,  do,  puis  fa, 
mi,  do. 

La  troisième  lui  donnera  le  son  6,  et  le  son  7.  Car 
de  cette  incise  :  sol,  la,  sol,  si,  do,  on  détachera  la, 
sol,  si,  do  (son  6)  ou  bien  seulement  si,  do  (son  7). 

Ceci  fait  donc,  en  réalité,  sept  formules,  se  notant 
ainsi  : 


Ce  canon  s'apprend  (quelque  peu  modifié)  en  do 
mineur.  Et  ces  deux  types,  l'un  majeur,  l'autre  mi- 
neur, se  transposent  dans  tous  les  tons  et  tous  les 
modes. 

Une  écriture  sténographique,  représentant  seule- 
ment chaque  degré  de  la  gamme,  permet  de  tracer 
la  formule  au  tableau,  en  chantant. 

La  méthode  intuitive  et  sensorielle. 
Coménius,    J.-J.   Rousseau,    Pcstalozzi,    Frœbel. 
Xa'geli,   balin.    Itard,    Seguin,   B»«   Pape-Car- 
penlier.  .Uoiitessori.  —  Pédagogie  moderne. 

A  revoir  les  principes  formulés  avec  insistance 
par  les  partisans  des  méthodes  intuitives  et  senso- 
rielles, on  peut  s'étonner  que  ces  principes  n'aient 
pas  fait  naître  beaucoup  plus  tôt  des  pédagogies  mu- 
sicales pratiques.  Mais  on  a  longtemps  songé  à  faire 
l'éducation  des  sens,  de  l'oreille,  sans  toutefois  re- 
courir à  la  musique.  Cependant,  en  1640,  Coménius 
écrivait  : 

«  Il  n'y  a  rien,  dans  l'intelligence,  qui  n'ait  d'a- 
bord passé  par  les  sens...  Que  l'élève  apprenne  à 


connaître  les  sons,  qu'on  exerce  d'abord  les  sens 
(perception),  puis  la  mémoire,  puis  l'intelligence, 
puis  le  jugement.  Le  savoir  commence  par  l'obser- 
vation. » 

Ou  fera- connaître  et  reconnaître  les  sons  avec 
précision,  ainsi  que  les  phrases  musicales,  et  dès" 
l'école  maternelle,  sans  se  borner  à  enseigner  aux 
meilleurs  élèves,  car  tout  peut  être  appris  à  tous. 
Et  Coménius  introduit  chant  et  musique  dans  un  sys- 
tème d'instruction  primaire  qui  prend  l'enfant  à 
cinq  ans. 

Sa  pédagogie  est  d'actualité,  et  la  méthode  in- 
tuitive d'enseignement  musical  est  toute  en  germe 
dans  ses  ouvrages.  Le  «  faire  agir  »  vient  de  lui,  — 
non  de  nos  contemporains  du  nouveau  continent,  et 
il  dit  fort  bien  :  «  On  apprend  eu  s'exerçant.  L'écri- 
ture s'apprend  en  écrivant,  la  musique  en  exécutant 
des  sons.  » 

J.-J.  Rousseau,  —  dont  il  ne  faut  considérer  ici 
que  les  conceptions  pédagogiques  d'ordre  général, 
el  non  plus  le  projet  de  réforme  de  la  notation,  — 
J.-J.  Rousseau,  l'auteur  de  l'Emile,  reprend  les 
mêmes  idées  avec  passion,  et  affirme  l'importance 


TECH.XIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE 

de  celte  éducation  des  sens  qu'il  a  tant  contribué  à 
faire  prendre  en  considération. 

Il  dit:  «  Un  enfant  est  moins  grand  qu'un  homme: 
il  n'a  ni  sa  force  ni  sa  raison,  mais  il  voit  et  il  entend 
aussi  bien  que  lui  ou  à  peu  près...  Les  premières 
facultés  qui  se  forment  et  se  perfectionnent  en  nous 
sont  les  sens.  Ce  sont  les  premières  qu'il  faudrait 
cultiver  :  ce  sont  les  seules  qu'on  oublie  ou  celles 
qu'on  néglige  le  plus.  »  Et  il  fait  connaître  tout  ce 
qu'on  peut  attendre  de  cette  éducation  sensorielle 
qui  servira  à  former  le  penseur  ou  l'artiste  :  «  Exer- 
cer les  sens  n'est  pas  seulement  en  faire  usage  :  c'est 
apprendre  à  bien  juger  par  eux,  c'est  apprendre 
pour  ainsi  dire  à  sentir  :  car  nous  ne  savons  ni  tou- 
cher, ni  voir,  ni  entendre  que  comme  nous  avons 
appris.  »  Il  demande  qu'on  rende  l'ouïe  fuie,  sen- 
sible au  rythme  et  à  l'harmonie,  —  qu'on  exerce  la 
voix  non  seulement  à  bien  articuler,  à  prononcer 
exactement,  à  se  produire  avec  mesure,  niais  aussi 
à  devenir  musicale,  souple,  égale,  juste.  C'est  bien 
là  l'objet  de  l'enseignement  musical  du  premier  âge  : 
développer  les  deux  organes  du  jeune  chanteur- 
musicien,  en  développant,  en  même  temps,  son  goûl 
artistique. 

Et  Rousseau  s'élève  avec  force  contre  les  profes- 
seurs de  son  temps  pour  qui  la  musique  n'est  plus 
«  la  science  des  sons  »,  mais  la  science  des  blan- 
ches, des  noires  et  des  croches.  11  dit  :  «  Dès  que 
ces  figures  cesseraient  de  frapper  leurs  yeux,  ils  ne 
croiraient  plus  voir  de  la  musique.  D'ailleurs,  ce 
qu'ils  ont  appris  difficilement,  pourquoi  le  ren- 
draient-ils facile  aux  autres  '?  »  (Dictionnaire  de 
musique.) 

Un  autre  avantage  de  la  méthode  sensorielle  c'est 
que,  suivant  le  mot  de  Fénelon,  «  elle  remuera  tous 
les  ressorts  de  l'âme  de  l'enfant».  L'extrême  variété 
sera  possible  ;  l'étude  des  sons  sera  rendue  aimable  ; 
l'enfant  agira;  il  sera  sans  cesse  appelé  à  découvrir, 
à  l'aide  de  moyens  qui  semblent  faire  disparaître  le 
maître,  mais  qui  font  à  coup  sur  disparaître  le  livre. 

Cette  double  indication  de  Rousseau,  sur  l'objet 
de  la  première  éducation  musicale  el  sur  la  méthode, 
lui  donne  bien  plus  droit  à  noire  reconnaissance  que 
le  système  de  nolation  qu'il  a  inventé  ou  repris, 
et  que  toute  sa  musique. 

Dans  le  grand  édifice  pédagogique  bâti  par  Pesta- 
lozzi  (1740-1827),  on  reconnaît  toute  l'empreinte  de 
Rousseau. 

Dès  ses  premiers  écrits,  La  Soirée  d'un  solitaire, 
Léonard  et  Gertrude,  Pestalozzi  donne  une  grande 
place  aux  exercices  de  chant.  L'enfant  n'apprendra 
que  ce  qu'il  doit  savoir  :  le  chant,  le  calcul,  l'écri- 
ture, la  lecture  de  la  Bible. 

Plus  tard,  dans  son  système  d'enseignement,  il 
distinguera  trois  degrés  dans  le  développement  de 
l'esprit  :  la  perception,  la  langue,  la  pensée. 

1°  Les  connaissances  naissent  de  l'exercice  de 
nos  facultés  sur  les  objets  qui  nous  entourent.  «  Les 
yeux  et  les  oreilles,  comme  aussi  l'organe  de  la 
voix,  se  développent  de  bonne  heure  par  l'exercice 
continuel  auquel  on  les  soumet.  Le  dessin  et  le 
chant  sont  particulièrement  propres  à  leur  donner 
un  haut  degré  de  perfection.  »  Les  facultés  de  per- 
ception se  fortifieront  d'autant  plus  vite  (comme  les 
autres  facultés  d'ailleurs)  que  l'exercice  sera  mieux 
adapté  aux  forces,  plus  agréable,  et  qu'il  provo- 
quera davantage  l'enfant  à  l'action.  «  Le  besoin  de 
marcher  diminue  chez  le  petit  enfant  qui  tombe;  » 
un  écolier  se  rebute  et  se  décourage  dans  un  ensei- 


gnement sévère  et  au-dessus  de  ses  forces.  L'exer- 
cice sera  «  approprié  »  aux  forces  et  aux  besoins  de 
l'enfant. 

2°  Mais  la  faculté  de  perception  est  intimement 
liée  à  la  faculté  de  s'exprimer,  au  langage.  Il  faut 
exprimer  au  dehors,  par  des  gestes  et  par  la  voix, 
les  impressions  du  dedans.  Donc,  après  la  faculté  de 
recevoir,  la  [faculté  de  rendre.  L'organe  de  la  voix 
doit  être  exercé,  ainsi  que  la  connaissance  des  noms 
des  choses,  et  la  connaissance  des  signes.  C'est  l'ap- 
pel, —  dans  la  Iecluie  et  dans  le  chant,  —  en  troi- 
sième lieu  seulement,  au  sens  visuel. 

3°  «  La  perception  et  la  langue  éveillent  dans  l'es- 
prit une  autre  faculté  :  la  faculté  de  penser,  »  la 
réflexion.  «  L'homme  observe  et  cherche  à  com- 
prendre les  procédés  de  l'art.  Il  s'applique  ensuite  à 
les  reproduire  par  imitation,  puis  il  passe  de  l'imi- 
tation à  la  liberté,  et  à  l'indépendance  dans  l'ac- 
tion. » 

On  le  voit,  tout  un  programme  d'enseignement 
musical  se  trouverait  ainsi  défini  dans  les  écrits  de 
Pestalozzi,  et  nous  n'aurions  rien  —  ou  presque  — 
à  y  ajouter.  Nous  traduirions  ainsi  :  connaître  d'a- 
bord les  sons  et  les  reconnaître.  Puis  connaître  leurs 
noms.  Puis  connaître  les  signes  qui  les  représentenl, 
puis  les  lois  qui  les  régissent,  et  tout  ce  qui  conduit 
à  la  recherche  de  l'art.  Et  tel  est  bien  le  développe- 
ment normal  des  connaissances  musicales. 

Le  disciple  de  Pestalozzi,  Fbœbbl  (1782-1852), 
psychologue,  pédagogue,  reprend  la  formule  :  «  L'en- 
fant doit  d'abord  exercer  ses  sens.  »  Dès  l'école 
maternelle,  l'enfant  discernera,  au  milieu  de  la  na- 
ture, les  chants  des  oiseaux,  le  bourdonnement  des 
insectes,  les  bruits  divers,  la  chanson  du  vent.  Et  il 
discernera  de  même  les  sons,  sans  que  ne  l'y  aide 
aucun  verbalisme.  Fbœbbl  accompagne  tous  les  jeux 
de  chants  appropriés.  Lui-même  en  a  composé  une 
centaine  (recueil  :  Eundert  Ballieder).  Le  Faucheur, 
le  Paysan,  le  Colombier,  le  Nid,...  sont  les  plus  con- 
nus. Ces  chants  se  miment,  s'exécutent  en  marchant, 
et  surtout  en  jouant  à  la  balle.  Le  chant  el  le  jeu  ne 
se  séparent  pas,  et  l'enfant  apprend  la  joie  dans 
l'action,  dans  l'harmonie,  dans  «  le  bain  moral  a  du 
jeu.  On  sait  toute  la  place  que,  aujourd'hui  encore, 
tient  le  chant  dans  les  jardin*  d'enfants  frœbeliens 
de  Belgique,  d'Allemagne,  de  Suisse,  des  Etats-Unis, 
el,  en  France,  de  Tourcoing  (avec  Mlle  Baudeuf),  de 
Porchefontaine,  de  Thivet. 

Un  autre  grand  disciple  de  Pestalozzi  fui  Njegeli 
(1773-1836),  compositeur  de  musique  et  pédagogue 
éminent,  le  créateur  du  chanl  populaire  dans  la 
Suisse  allemande.  Il  conçoit  trois  stades  dans  l'ins- 
truction musicale  :  1°  l'étude  du  rythme,  2°  l'étude 
des  sons,  3°  celle  de  la  force  des  tons  (dynamique) 
et  des  éléments  primitifs.  Des  chants  gradués  ser- 
vent d'application. 

Il  organise  à  Zurich  (IS0!i)  une  chorale  mixte,  et, 
malgré  les  réacteurs,  il  s'obstine  à  recommander  la 
méthode  de  Pestalozzi  en  Suisse,  en  Allemagne, 
en  France.  Il  compose  pour  les  écoles  et  les  sociétés 
de  chanteurs  zurichois,  des  chœurs  mixtes,  chorals, 
motets. 

Depuis  N.egeli,  la  Suisse  est  la  nation  où  le  chant 
choral  populaire  est  le  plus  en  honneur,  et  où  l'en- 
seignement musical  élémentaire  est  le  mieux  or- 
ganisé. 

Et,  de  même  qu'il  faut  citer  Rousseau  dans  un 
historique  de  la  méthode  intuitive,  de  même  il  faut 
nommer  à  nouveau  le  grand  Pierre  Galin,  qui  a  su, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTION. VA! RE  DU  CONSERVATOIRE 


dans  son  exposé  de  méthode  d'éducation  musicale1, 
appliquer  les  idées  de  Rousseau  bien  mieux  que 
Jean-Jacques  lui-même,  qui  n'avait  entrevu  que  des 
simplifications  d'écriture  et  d'étude. 

Lui-même  autodidacte,  parvenu  par  ses  propres 
moyens  à  découvrir  les  lois  musicales,  Câlin  pro- 
posera, comme  Rousseau,  de  faire  découvrir  par 
l'enfant  tout  ce  qui  concerne  les  successions  de  sons, 
dans  l'ordre  mélodique  et  dans  l'ordre  rythmique. 
On  partira  de  l'observation,  et  non  de  la  règle. 
Grâce  à  la  variété  des  procédés,  on  donnera  à  l'en- 
seignement musical  une  forme  aimable  et  pratique. 
A  ce  sujet,  rappelons  que  Galin  n'a  pas  repris  exclu- 
sivement la  notation  de  Jean-Jacques.  Il  accueille 
toutes  les  écritures,  et  s'il  a  marqué  une  préférence 
pour  les  chiffres,  il  utilisa  en  même  temps  les  notes 
et  les  lettres,  et  fit  ITosage  que  l'on  sait  de  la  portée 
muette.  D'où  que  viennent  les  influences  qui  ont 
agi  sur  lui,  son  œuvre  le  met  au  rang  des  plus  grands 
pédagogues.  Cette  œuvre  mériterait  donc  un  long 
examen,  mais  l'exposé  de  Galin  est  si  clair,  son  style 
est  si  agréable  et  parfois  même  si  plein  de  couleur, 
que  nul  ne  regrettera  d'être  contraint  à  se  reporter 
à  l'ouvrage  même  pour  connaître  la  pédagogie  de 
l'auteur.  Les  erreurs  scientifiques  qu'on  y  relève 
ne  sauraient  être  imputées  à  Galin.  Elles  sont  de  son 
temps. 

Ses  procédés  d'enseignement  étaient  connus  avant 
qu'il  en  fit  lui-même  l'exposé.  Il  dit  d'ailleurs  qu'une 
méthode  nouvelle  n'est  pas  une  somme  d'idées  nou- 
velles, mais  un  nouvel  arrangement  d'idées  connues. 
Mais  il  a  su  compléter  ces  procédés,  les  rendre  prati- 
ques, et  sa  tâche  de  mise  au  point  fut  grande. 

Moins  spécialisés  dans  l'enseignement  musical, 
mais  partisans  déclarés  de  l'éducation  sensorielle, 
furent  Itard,  Seguin  et  Mme  Pape-Carpentier. 

Les  deux  premiers  s'intéressèrent  surtout  aux 
anormaux,  mais  leurs  méthodes  devaient  produire, 
avec  les  normaux,  des  résultats  bien  plus  rapides 
que  ceux  qui  sont  dus  aux  méthodes  traditionalistes. 
«  C'est  la  méthode  unique  de  tout  enseignement,  » 
dira  le  psychologue  Binet,  et  Mme  Montessori,  après 
avoir  complété  cette  méthode  à  l'usage  des  attardés, 
l'utilisera  avec  des  élèves  moyens,  et  constatera, 
elle  aussi,  la  rapidité  et  la  sûreté  des  progrès. 

Itard  (1774-1838),  auteur  du  livre  Des  maladies  de 
ïoreilleet  de  l'audition  (1821), tient  à  isoler  le  sens  à 
éduquer.  Il  annule  l'exercice  d'un  sens  au  profit 
d'un  autre,  et  procède  à  d'excellents  exercices  d'au- 
dition en  plaçant  un  bandeau  sur  les  yeux  de  son 
élève.  Tout  son  système  serait  à  analyser. 

Edouard  Segoin,  qui  part  de  l'éducation  physique, 
indique,  comme  première  compensation,  la  «  gym- 
nastique nerveuse  »  et  l'éducation  des  sens.  Après 
avoir  constaté  qu'on  n'a  pas  su  faire  l'éducation  de 
son  oreille  («  jusqu'à  quatre  ou  six  ans,  dit-il,  nous 
entendions,  nous  n'écoutions  pas  »),  il  indique  les 
procédés  qui  permettront  de  faire  discerner  —  les 
yeux  étant  bandés  —  la  nature  des  bruits,  la  na- 
ture des  sons. 


Phonomimie  élémentaire.  —  L'ingénieux  procédé 
phonomimique,  qui  se  pratique  surtout  les  yeux  fer- 
més, doit  ce  perfectionnement,  ainsi  qu'une  part  de 


I.  Exposition  d'une  mrthode  pour  l\ 
(1Ï18,  Btirclêaur); 


sa  popularité,  aux  deux  professeurs  éminents  que 
nous  venons  de  nommer.  Mais  il  est  déjà  cité  par 
Wilhem  (voir  page  3637  :  «  Signes  manuels  »).  Si  Itard 
et  Seguin  font  fermer  les  yeux  au  cours  des  exer- 
cices de  phonomimie,  c'est  évidemment  pour  arri- 
vera isoler  le  travail  d'un  sens.  Nous  voyons  surtout 
dans  ce  procédé  l'avantage  d'obliger  chaque  enfant 
à  répondre  selon  ce  qu'il  entend,  silencieusement, 
donc  sans  faire  connaître  sa  réponse  à  la  collecti- 
vité qui,  en  retour,  sera  sans  influence  sur  lui.  C'est 
ainsi  le  procédé  permettant  à  chacun  de  donner  le 
maximum  d'elfort,  dans  une  consultation  générale. 


Mm0  Pape-Carpentier  (1813-1878),  qui  fut  inspec- 
trice générale  des  salles  d'asile,  et  qui  écrivit  plu- 
sieurs ouvrages  d'éducation  sensorielle  et  d'ensei- 
gnement musical,  est  l'apôtre  de  la  méthode  natu- 
relle, de  l'observation,  de  la  leçon  de  choses,  et 
aussi  de  l'enseignement  attrayant.  Elle  écrit  : 

«  Généralement,  on  ne  se  préoccupe  pas  d'exercer 
chez  les  enfants  le  sens  de  l'ouïe,  de  le  rendre  ca- 
pable de  reconnaître  les  bruits  extrêmement  variés 
qui  frappent  sans  cesse  nos  oreilles,  et  que  nous 
avons  coutume  de  discerner  moins  par  le  sens  de 
l'ouïe  que  par  l'habitude  de  voir  les  objets  qui  les 
produisent. 

«  Pour  un  enfant  dont  on  exerce  plus  ou  moins 
l'oreille  par  de  bonnes  leçons  de  musique,  combien 
d'autres  sont  entièrement  laissés  sans  culture  audi- 
tive! 

«  ...  De  cette  omission  dans  l'éducation  physique 
résultent  des  inconvénients  de  plus  d'un  genre.  D'a- 
bord, l'enfant  ne  se  trouve  point  préparé  à  apprendre 
la  musique,  et  il  n'est  pas  non  plus  habitué  à  écou- 
ter, qualité  pourtant  précieuse  et  fort  rare.  Il  reste 
ainsi  exposé  à  entendre  mal,  et  à  tirer  de  ses  erreurs 
d'audition  des  conséquences  souvent  fâcheuses.  » 

Elle  trace  ainsi  le  programme  d'enseignement 
musical  dans  les  classes  préparatoires  (six  ans|  : 

«  La  différence  naturelle  des  sons  de  la  voix  hu- 
maine, leur  progression  ascendante  ou  descendante, 
dont  les  intervalles  sont  indiqués  par  les  degrés  de 
la  gamme,  les  rapports  de  ces  intervalles  ou  degrés, 
la  connaissance  au  moins  pratique  de  la  mesure, 
enfin  le  nom  des  signes  ou  caractères  adoptés  pour 
retracer  les  modulations  du  chant,  voilà,  ce  me 
semble,  les  principaux  éléments  que  la  raison  et 
une  sage  sollicitude  permettent  d'enseigner  à  des 
enfants  pour  la  plupart  au-dessous  de  six  ans,  dont 
l'attention  est  déjà  réclamée  par  tant  (Tau très  su- 
jets. » 

Les  premières  leçons  indiquées  par  M""  I'aik- 
Carpentier  portent  sur  l'appréciation  de  la  diffé- 
rence de  hauteur  des  sons  de  la  voix,  sans  aucune 
mention  des  notes. 

«  Vous  annoncerez  à  vos  élèves  ce  nouvel  exer- 
cice comme  un  jeu;  vous  intéresserez  leur  espril  par 
l'appât  d'une  difficulté  à  vaincre,  puis  vous  \m-a  li- 
sent, deux  notes,  d'abord  assez  distantes  l'une  de 
l'autre,  comme  do  et  sol,  ou  même  vous  donnerez 
l'octave,  afin  de  rendre  plus  sensible  la  différence 
des  sons;  puis  vous  demanderez  à  vos  enfants  si  les 
sons  ont  été  plus  aigus  ou  plus  graves,  ce  qu'on 
exprime  par  les  mots  :    montants  ou  descendants-. 

«  Quand  l'oreille  des  enfants  aura  été  bien  i\ct- 
cée,  et  saura  distinguer  sans  hésitation  les  sons  pins 
élevés  des  sons  plus  graves,  vous  chanterez  la  -anime 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    3059 


en  nommant  les  notes,  sans  les  indiquer  nulle  part, 
et  en  vous  adressant  à  l'oreille  seule  de  vos  élèves. 

«  Dès  qu'ils  sauront  solfier  de  mémoire,  vous  leur 
ferez  voir  une  portée  de  grande  dimension'.  » 

Et  Mml!  Pape  préconise  alors  le  procédé  de  la  por- 
tée muette,  et  de  la  solmisation  à  la  baguette,  ainsi 
que  celui  de  la  main-portée.  Elle  conseille  aussi 
l'usage  d'un  petit  instrument  appelé  lepoli/plwne,  ou 
l'auditiculteur,  boîte  contenant  divers  objets  qui 
seront  «  frappés  ou  pinces  ».  Les  enfants  —  qui  ne 
voient  pas  ces  objets  —  doivent  deviner  les  noms 
des  corps  mis  en  vibration.  Ce  procédé  —  qui  part 
de  la  leçon  de  silence  —  conduit  au  discernement 
de  tous  les  bruits  et  à  la  reconnaissance  des  sons. 

On  peut  du  reste  préférer,  avec  Gabriel  Compayré, 
que  ces  exercices  se  fassent  sans  accessoires,  et  ne 
portent  que  sur  les  émissions  naturelles. 

Un  livre  récent,  L'Education  îles  sens  par  l'activité, 
dû  à  la  collaboration  de  Ml,e  Maicouran*t,  directrice 
d'école  normale,  et  de  Mm°  Joly,  directrice  d'école 
maternelle,  donnera  de  précieuses  indications  au 
sujet  de  ces  premières  leçons  portant  sur  la  mesure 
de  l'acuité  auditive,  et  sur  la  distinction  de  la  nature 
des  bruits,  des  sons,  des  rythmes2. 

La  méthode  Di-chesiin-Iîoisjocse,  destinée  aux  écoles 
maternelles,  et  longtemps  utilisée,  exigeait  île  l'en- 
fant une  marche  un  peu  trop  rapide  vers  la  connais- 
sance des  signes.  Cependant,  elle  mérite  de  figurer 
dans  une  étude  de  la  méthode  musicale  sensorielle, 
car  elle  reposait  sur  l'appréciation  des  différences 
de  hauteur  des  sons,  sur  l'étendue  auditive  des  inter- 
valles, et  leur  indication  sur  la  portée,  abstrac- 
tion faite  d'abord  de  la  clef  et  du  nom  des  notes. 

Reprenant  les  idées  chères  à  Mm0  Papk-Carpentier, 
la  doctoresse  Montessoiu  (contemporaine)  en  tirera 
des  applications  du  plus  haut  intérêt.  L'auteur  de  la 
Pédagogie  scientifique3  part  de  l'initiation  senso- 
rielle pure.  Sa  première  leçon  —  la  leçon  de  silence 
—  est  déjà  riche  en  émotions  et  en  révélations.  Ce 
silence  qui  habitue  les  enfants  au  calme,  à  la  bonne 
tenue,  est  plein  d'un  délicieux  mystère  que  la  péda- 
gogue italienne1  fait  goûter.  L'enfant  n'aime  pas  le 
bruit;  il  chérit,  au  contraire,  le  calme  de  la  paix. 
Elle  le  prouve.  Des  exercices  à  voix  basse,  prati- 
qués avec  des  enfants  fermant  les  yeux,  l'observa- 
tion postant  sur  les  bruits  de  la  rue,  le  tic  tac  de 
l'horloge,  les  chocs,  les  froissements,...  puis  l'étude 
des  sons,  les  exercices  de  rythme,  formenl  une  pé- 
dagogie musicale  de  premier  ordre. 

Après  la  leçon  de  silence  viennent  les  exercices 
d'identification  des  sons,  exercices  qui  nécessitent 
l'emploi  d'un  petit  jeu  de  timbres  sonores.  Ce  sont 
des  clochetles,  ou  simplement  de  petites  plaques 
métalliques,  placées  sur  des  réglettes,  et  qui  réson- 
nent lorsqu'elles  sont  frappées  légèrement.  L'élève 
reçoit  une  seconde  série  de  timbres,  qu'il  fait  tinter 
en  les  frappant.  Il  compare  les  sons  et  groupe,  deux 
à  deux,  les  timbres  dont  le  son  est  idenlique.  C'est 
l'exercice  d'appartement. 

Puis  l'élève  classera  ses  timbres  suivant  les  hau- 
teurs des  sons,  du  grave  à  l'aigu.  Tous  les  élèves 
réussissent  à  apparier,  puis  à  classer  les   timbres. 


1.   Enseignement  pratique  dans  les  salles  d'asile,  M""'  Pape-Car 

-.  Nalhan,  éditeur. 

3.  Deux  volumes.  Larousse. 

4.  I.cs  cours  du  Comité  national  Moxtessom  se  font  à  Rome  e: 
dans  quelques  villes  d'Italie.  De  nombreuses  écoles  maternelles  ei 
élémentaires  des  autres  pays  ont  adopté  les  directions  île  M"c  Mo» 


ipparièr  et  à  classer  des 


comme  ils  arriverai 
étoffes  de  couleur. 

Les  élèves  auront  à  reproduire  vocalement  les 
sons  des  clochettes.  Ils  imiteront  ces  sons  légers, 
lout  naturellement  avec  une  voix  douce,  pure.  Par- 
fois, un  seul  élève  frappe  doucement  les  clochettes, 
et  les  autres  enfants  reproduisent  vocalement  les 
sons  qu'ils  entendent. 

On  en  arrive  à  développer  très  sûrement  la  mé- 
moire des  sons,  et  à  tel  point  que  l'enfant  pourra 
donner  le  nom  des  timbres  qu'on  fera  tinter  dans 
un  ordre  quelconque. 

Ainsi,  l'oreille  est  le  premier  organe  à  développer. 
Puis  des  exercices  s'adressent  à  la  fois  à  l'ouïe  et  à 
l'organe  vocal.  Enfin,  on  entreprendra  l'éducation 
visuelle,  l'étude  des  signes  de  notation.  On  n'utili- 
sera aucune  écriture  simplifiée,  et  l'enfant  connaîtra 
la  portée  de  cinq  lignes. 

Mme  Montessori  remet  à  l'enfant  un  carton  où  est 
tracée  une  grosse  portée.  L'enfant  dispose  de  petits 
disques  en  carton,  blancs  d'un  côté,  et  portant  de 
l'autre  un  nom  de  note.  L'enfant  place  ces  disques 
sur  les  lignes  ou  dans  les  interlignes,  suivant  le  nom 
des  notes  de  ces  disques,  mais  en  laissant  visible  la 
seule  face  blanche.  Quand  tous  les  disques  sont  pla- 
cés, l'enfant  les  retourne  sur  place.  Il  peut  alors, 
sans  secours,  voir  s'il  a  bien  placé  tous  les  disques 
de  même  nom  sur  une  même  ligne.  11  rectifie  s'il  y 
a  lieu,  et  la  maîtresse,  d'un  coup  d'œil,  contrôle. 

En  même  temps,  se  praliquent  les  exercices  de 
rythme,  qui  ne  sont  pas  sans  analogie  avec  ceux 
que  préconise  M.  Jaques-Dalcroze.  Les  enfants  mar- 
chent autour  de  la  classe,  au  rythme  d'une  mélodie 
chantée  doucement,  ou  d'un  morceau  exécuté  sur  le 
piano.  Mme  Montessori  demande  aux  maîtres  de  ne 
marquer  en  aucune  façon  les  temps  forts  de  la  mé- 
lodie, mais  de  jouer  avec  autunt  d'exactitude  et  d'art 
que  possible.  La  «  mesure  musicale  »,qui  n'est  donc 
pas  «  la  mesure  mécanique  du  métronome  »,  se  mo- 
difiera au  cours  d'un  même  exercice.  Le  pianiste 
ralentira,  pressera,  suspendra  la  mesure.  Les  enfants 
«  suivront  le  rythme  »  et  marcheront  non  seulement 
en  observant  les  modifications  de  mouvement,  mais 
en  interprétant  les  divers  caractères  des  morceaux. 

Les  élèves  sont  invités  à  constituer  un  »  orches- 
tre >>,  très  simple,  très  original  aussi.  La  maîtresse 
est  au  piano,  les  élèves  sont  près  d'elle;  ils  frappent 
sur  de  petits  tambourins,  des  triangles,  des  timbres, 
pour  marquer  le  rythme,  soit  en  ne  marquant  que 
les  temps  forts,  soit  en  rythmant  tous  les  temps,  soit 
encore  en  divisant  les  temps  en  deux  ou  en  trois 
parties  égales. 

Et  ces  élèves  apprendront  d'eux-mêmes,  par  intui- 
tion, à  battre  la  mesure,  à  deux  temps,  trois  temps, 
quatre  temps.  Ils  devineront  ces  mesures. 

L'enfant  est  pris  par  la  musique.  M'""  Montessori 
cite  de  nombreux  exemples  de  conversions  louchan- 
tes. Elle  cite  ce  cas  :  «  Une  fois,  mon  pire  entra  dans 
une  salle  où  une  petite  Parisienne,  qu'il  aimait  beau- 
coup, marchait  passionnément  au  rythme  d'un  air 
joué  au  piano.  L'enfant  avait  l'habitude  de  courir 
au-devant  de  mon  père.  Or,  ce  jour-là,  lorsqu'elle 
l'aperçut,  elle  cria  à  la  pianiste  :  «  Arrête,  arrête!  » 
Elle  aurait  voulu  saluer  mon  père,  mais  elle  ne  pou- 
vait pas  le  faire,  parce  que  la  musique  continuait  de 
commander  à  son  corps  de  se  mouvoir  selon  le 
rythme.  >>  (T.  II,  p.  403.) 

Enfin,  des  auditions  musicales  contribuent  à  ras- 
sembler dans  l'esprit  des  enfants  toutes  leurs  con_ 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


naissances  de  rythme  et  de  mélodie,  dans  une  sorte 
de  synthèse,  qui  développe  rapidement  l'intelligence 
musicale. 

Il  y  a  bien  là  une  méthode  complète,  de  haute 
valeur  pédagogique,  et  qui  ne  perd  jamais  de  vue  le 
développement  artistique  de  l'enfant.  La  méthode 
fait  appel,  avec  constance,  depuis  les  premières  ini- 
tiations jusqu'aux  grands  jours  des  auditions  musi- 
cales, à  l'émotion  artistique. 


Nous  avions  nommé  Mme  Montessori  en  étudiant 
le  système  de  Jaques-Dalcroze,  et  nous  devons 
maintenant  rappeler  que  le  grand  pédagogue  suisse 
n'a  recours,  lui  aussi,  qu'à  la  méthode  intuitive,  qui 
trouve  une  application  particulière  dans  les  exer- 
cices de  rythmique  et  les  exercices  sensoriels. 


Albert  Dupaigne,  cité  plus  haut,  et  partisan  d'une 
méthode  directe,  faisait  preuve  du  plus  grand  bon 
sens  en  essayant  de  ramener  (1901-1903-1904)  l'en- 
seignement musical  à  son  véritable  objet,  et  en  fai- 
sant partir  cet  enseignement  des  faits  sonores  et  de 
leur  perception. 

«  L'essentiel,  c'est  l'éducation  de  l'oreille  qui  per- 
çoit et  apprécie  les  sons,  et  c'est  l'éducation  de  la 
voix,  productrice  des  sons  la  plus  parfaite  et  la  plus 
naturelle.  L'essentiel,  c'est  de  faire  parler  la  langue 
pour  arriver'  à  la  faire  entendre.  C'est  alors,  seule- 
ment, qu'il  sera  facile  de  la  faire  lire.  » 

M.  Dupaigne,  dans  la  conclusion  de  son  exposé, 
apparaît  comme  l'un  des  apôtres  les  plus  convaincus 
de  cette  éducation  de  l'ouïe.  11  redit  : 

«  Rien  n'est  possible  si  l'enfant  n'a  pas  acquis, 
dans  son  enseignement  enfantin,  la  condition  maî- 
tresse qui  fait  le  musicien  :  entendre  la  langue,  re- 
connaître et  nommer  les  sons.  Le  but  technique  de 
tous  nos  etforts  est  cette  formation  de  l'oreille,  cette 
faculté  qu'ont  tous  les  musiciens  de  reconnaître  les 
sons  par  leur  nom,  et  pour  laquelle  nous  prescri- 
vons l'exercice  de  la  dictée  orale...  Mais  notre  but 
véritable  est  un  but  moral,  c'est  un  but  d'éducation 
bien  plus  que  d'instruction  :  c'est  le  chant,  mais  le 
chant  qui  touche  et  qui  plaît.  » 


En  1909,  la  Grande  Revue  publiait,  sur  la  question 
du  chant  à  l'école,  un  très  remarquable  article  de 
M.  Maurice  Emmanuel.  M.  Emmanuel  sait  apercevoir 
les  causes  de  l'insuccès  de  l'enseignement  musical  en 
France,  où  «  le  solfège  lue  la  musique  »,  parce  que 
le  solfège  est  seulement  l'éducateur  des  yeux  et  que 
le  maître  ne  songe  point  à  former  l'oreille  d'abord. 

«  La  beauté  du  son,  voilà  la  croyance  inébranlable 
qu'il  faut  avant  tout  exposer  à  l'enfant  par  l'exemple- 
II  est  de  nécessité  que  les  premières  leçons  soient 
consacrées  à  délecter  son  oreille.  » 

Et  l'auteur  indique  tout  le  départ  de  l'éducation 
auditive  et  de  la  culture  vocale.  Le  maître  obtien- 
dra l'unisson,  de  tous  ses  élevés,  sur  un  son  du  mé- 
dium [mi  bémol  fa3).  L'enfant  ne  sait  pas  le  nom  du 
son  qu'il  émet.  11  chante  ce  son  sur  A. 

«  L'enfanta  pris  simplement  l'habitude  d'écouter, 
de  percevoir,  d'imiter  un  son  mezza  voce,  de  le  sou- 
tenir un  peu,  de  l'enfler  légèrement,  sans  se  deman- 
der quel  il  est.  Tout  effort  lui  a  été  épargné  en  dehors 
de  l'attention.  On  a  exigé  seulement  de  son  oreille 
qu'elle  s'affine,  de  sa  bouche  qu'elle  se  creuse,  des 


sons  émis  qu'ils  soient  en  place  et  de  qualité  pas- 
sable :  le  maître  en  a  avec  soin  rectifié  la  justesse...  » 
La  méthode  proposée  ne  se  flatte  point  —  on  sait 
ce  qu'une  prétention  de  ce  genre  aurait  de  puéril  — 
de  former  l'oreille  de  tous  les  élèves  d'une  classe  en 
quelques  jours,  et  de  faire  des  musiciens  en  quel- 
ques mois.  II  s'agit  d'un  véritable  enseignement  col- 
lectif, et  de  longues  semaines,  des  mois,  seront 
peut-être  nécessaires  dans  certaines  classes  pour 
qu'on  dislingue  un  son  d'un  autre,  qu'on  apprécie 
les  hauteurs  comparées  des  sons. 

«  Cette  période  de  formation  pour  l'oreille  de  l'en- 
fant doit  être  patiemment  franchie.  » 

M.  Maurice  Emmanuel  demande  que  les  exercices 
de  hauteur  des  sons  portent  d'abord  sur  la  quinte. 
«  En  même  temps,  l'élève  prendra  connaissance  de 
l'accord,  d'où  la  gamme  est  issue.  Il  faut  que  lui 
deviennent  familières  les  formules  de  cadence  qui 
organisent  autour  de  la  tonique  le  cortège  de  ses 
satellites,  mais  par  l'audition  seule,  sans  le  moindre 
exposé  théorique.  » 

Concurremment  on  fera  l'éducation  de  la  voix. 
«  Il  est  bon,  dès  le  début,  de  donner  aux  enfants 
la  certitude  que  leur  bouche  agit  comme  un  réso- 
nateur, et  il  faut  leur  recommander  de  la  creuser 
en  haut  comme  en  bas;  manière  de  dire,  évidemment, 
mais  qui  a  l'avantage  d'exprimer  que  la  cavité  buc- 
cale doit  avoir  du  creux.  Quand  l'élève  a  compris,  et 
que,  en  chantant  A,  il  a  bien  aplati  la  langue,  il  lui 
semble  que  ce  son  soit  un  corps  dont  il  a  plein  la 
bouche;  qu'il  sent  écouler;  qu'il  peut  mouler  comme 
il  veut.  Ce  n'est  pas  illusion  pure.  Sitôt  que  l'enfant 
a  senti  la  réaction  de  ce  moule  sur  le  timbre  vocal, 
il  est  apprenti  chanteur.  » 

Et  l'auteur  recommande  les  exercices  respiratoi- 
res; les  séances  courtes,  mais  quotidiennes,  de  cul- 
ture vocale;  l'utilisation  de  sons  détachés,  toujours 
exécutés  mezza  voce;  l'exécution,  en  sons  tlùtés, 
croissant  de  l'aigu  au  grave,  de  vocalises,  parlant 
du  mi  bémol  4,  et  descendant  en  s'appuyant  sur  les 
degrés  de  la  gamme  de  mi  bémol.  Le  «  passage  » 
devient  alors  à  peu  près  insensible.  L'enfant  prend 
ainsi  l'habitude  de  cette  voix  tlùlée  si  jolie,  et  on  ne 
craindra  plus  que  la  voix  dite  de  poitrine  «  sévisse 
à  l'aigu  ».  Alors,  l'oreille  étant  sûre,  la  voix  étant 
cultivée,  l'introduction  à  l'art  musical  est  accomplie, 
et  les  yeux  sont  appelés  à  l'aide. 

<■  L'enfant,  dont  l'oreille  est  riche  déjà  de  percep- 
tions auditives, saisit  le  lien  qui  unit  le  son  au  signe,  u 
Ainsi,  on  aura  sagement  attendu,  avant  de  «  far- 
cir les  yeux  de  signes  et  la  mémoire  de  règles  ».  Le 
solfège  et  la  théorie  «  n'ont  de  sens  que  si  l'oreille 
est  déjà  eduquée  ». 

Les  leçons  se  poursuivront,  fréquentes,  courtes, 
attrayantes.  L'enfant  chantera  toujours  avec  dou- 
ceur. Sa  voix  sortira  sans  contrainte.  «  L'en  fan  l 
doit  aimer  sa  voix  et  se  plaire  à  la  caresser.  » 

Une  voix  bien  posée,  au  service  d'une  oreille  exer- 
cée, tel  est  le  résultat  d'un  enchaînement  méthodi- 
que, d'un  effort  sagement  mesuré,  objet  d'une  sur- 
veillance constante. 


Dans  un  article  publié  par  la  Société  «  L'Art  à 
l'Ecole  »,  M.  Aug.  Chai  i  i-,  inspecteur  principal  de 
l'enseignement  du  chant  dans  les  écoles  de  la  Ville 
de  Paris,  se  montrait  partisan  d'entreprendre  l'.édu- 
cation  de  l'oreille  avant  d'enseigner  le  solfège.  11 
écrivait  des  livres  de  solfèges  à  deux  vuix,  pour  les 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    3661 


écoles,  en  commençant  par  des  exercices  sur  l'accord 
parfait  do,  mi,  sol. 

La  commission  qui  se  réunissait,  dès  la  fin  de  la 
guerre  au  ministère  de  l'instruction  publique  con- 
cluait à  la  nécessité  de  former  d'abord  l'oreille  sans 
recourir  aux  notations,  et  sans  partir  des  données 
théoriques. 

Un  congrès  de  professeurs  de  musique  des  établis- 
sements de  l'Etat,  organisé  par  l'association  des 
professeurs  de  musique  (A.  P.  M.),  adoptait,  en  1921, 
un  programme  qui,  pour  les  écoles  primaires,  com- 
portait trois  cycles  d'études,  soit  : 

pour  les  cours  élémentaires,  une  lente  et  sure  édu- 
cation de  la  voix  et  de  l'oreille,  sans  recours  aux 
diverses  notations; 

pour  les  cours  moyens,  une  éducation  continuée 
de  l'oreille  et  de  la  voix,  à  laquelle  s'ajoute  l'étude 
des  signes  usuels  de  notation. 

et  pour  le  cours  supérieur,  la  pratique  du  cbant 
choral,  des  lectures  polyphoniques,  s'appuyant  de 
plus  en  plus  sur  l'entraînement  visuel  et  l'étude  de 
la  grammaire  musicale. 

Trois  titres-formules  caractérisent  ces  trois  cycles  : 

1°  Avant  le  solfège;  2°  les  signes;  3°  polyphonie. 


Nous  nous  excusons  de  rappeler  les  conclusions 
d'un  congrès  (celui  de  1921),  dont  nous  étions  le  rap- 
porteur pour  la  question  pédagogique.  Mais,  en  1922, 
le  programme  officiel  d'enseignement  musical  s'ins- 
pirait très  nettement  de  ces  conclusions,  et  les  ins- 
tructions ministérielles  de  192')  s'en  rapprochaient 
plus  encore. 

Ce  programme  et  ces  instructions  sont  publiés 
d'autre  part. 

La  méthode  intuitive  et  sensorielle,  de  précision 
en  précision,  a  donc  quitté  le  domaine  spéculatif 
pour  proposer  des  moyens  pratiques  de  développe- 
ment du  sens  musical.  Basée  sur  l'éducation  de  l'o- 
reille et  de  la  voix,  elle  peut  faire  autre  chose  cepen- 
dant que  de  contribuer  au  perfectionnement  des 
organes.  Elle  peut  prétendre  à  la  formation  du  goût 
artistique,  à  donner  des  habitudes  d'esprit,  à  éveiller 
le  sens  du  beau.  Ainsi,  elle  se  soucie  d'abord  de 
rendre  plus  subtils  les  instruments  de  la  perception. 
Elle  les  utilise  aussitôt  à  des  fins  pratiques,  a  l'ac- 
quisition des  notions  indispensables,  et  présentant 
une  valeur  éducative.  Mais  elle  veut  être  à  la  fois 
réaliste  et  idéaliste,  et  donner  satisfaction  aux  aspi- 
rations les  plus  élevées. 

Pour  arriver  à  ce  double  but,  elle  demande  qu'on 
enseigne  bien.  On  ne  songera  à  la  somme  des  con- 
naissances à  acquérir  que  pour  choisir,  parmi  ces 
connaissances,  celles  qui  peuvent  contribuer  à  la 
culture  esthétique.  Et  l'un  des  préceptes  qu'elle 
met  en  avant  est  le  «  faire  agir  »,  auquel  elle  ajoute 
le  «  faire  sentir  ».  Emotion  et  activité,  telle  pourrait 
être  la  devise  des  partisans  de  cette  méthode,  tou- 
jours perfectible,  mais  dont  les  principes  semblent 
appelés  à  vivre. 

LES  PROGRAMMES 

Écoles  primaires  élémentaires.  Ecoles  primaires 

supérieures.    Ecoles    normales.     L'explication 

des  chefs-d'œuvre  de  l'art  musical  au  lycée. 

Les  programmes  officiels  ont  à  tâche  d'indiquer 
la  progression  à  suivre,  d'apporter  dans  les  écoles 


de  même  ordre  quelque  unité,  de  tracer  le  chemin 
pour  que  le  piétinement  soit  évité,  et  pour  qu'on 
puisse  aller  plus  directement  vers  un  but  déterminé. 

Ils  sont  cependant  assez  souples  et  assez  larges 
pour  que  chaque  maître  puisse  les  adapter  au  milieu 
propre  dans  lequel  il  vit,  à  l'école  où  il  enseigne,  — 
école  à  une  ou  plusieurs  classes,  école  de  garçons, 
déjeunes  filles,  école  mixte,  —  et  au  degré  de  déve- 
loppement intellectuel  des  élèves. 

En  ce  qui  concerne  l'enseignement  musical  dans 
les  écoles  primaires,  le  jalonnement  tracé  par  les 
programmes  prévoit,  comme  nous  venons  de  le  dire, 
trois  grands  cycles  d'études  correspondant  aux  trois 
cours  :  élémentaire,  moyen,  supérieur.  Cependant,  à 
s'en  tenir  à  l'examen  du  programme  pour  le  cours 
élémentaire,  on  pourrait  croire  que  l'étude  de  la 
notation  est  demandée  à  la  fin  de  ce  premier  stade. 
C'est  que,  par  les  mots  :  gamme,  portée,  —  il  faut 
entendre  :  séries  de  sons,  —  série  de  huit  sons 
(gamme),  de  onze  et  douze  sons  (échelle  vocale)  cor- 
respondant aux  signes  de  la  portée,  —  et  les  Ins- 
tructions de  1923,  qui  précisent  les  programmes  de 
1922,  ne  permettent  plus  aucun  doute  sur  ce  point. 
C'est  donc  au  cours  moyen  que  se  fait  l'étude  des 
signes,  l'initiation  au  solfège  (à  supposer,  bien  en- 
tendu, que  les  études  du  premier  cyle  aient  été  faites 
et  bien  laites). 


Les  programmes  des  écoles  primaires  élémen- 
taires sont  les  plus  étudiés.  Ils  avaient  été  souvent 
revisés  avant  la  refonte  de  1922.  Ils  présentent  en- 
core des  imperfections,  puisque  les  trois  cycles  n'y 
apparaissent  pas  avec  netteté.  Mais  ce  sont  les  plus 
simples,  les  plus  pratiques,  les  mieux  adaptés  de 
tous  ceux  qui  ont  été  établis. 

Moins  exigeants  que  les  programmes  de  1887,  dans 
lesquels  toute  la  progression  de  l'enseignement 
théorique  se  trouvait  étalée,  ils  ont  surtout  le  grand 
avantage  de  partir  de  l'éducation  sensorielle,  de 
l'éveil  du  sens  musical,  de  la  culture  du  goût,  de 
l'oreille,  de  la  voix,  et  de  permettre  ainsi  le  recours 
immédiat  aux  procédés  d'action,  et  l'appel  constant 
à  l'émotion  artistique.  Par  souci  de  simplification,  ils 
laissent  même  trop  île  place  au  «  chant  appris  par 
audition  »,  qui  ne  devrait  s'exercer  qu'accidentelle- 
ment au  cours  moyen.  Le  chant  par  audition  offre 
des  avantages,  et  l'on  sait  quelles  ressources  il  pré- 
sente aux  partisans  des  méthodes  directes;  mais  on 
sait  aussi  que  les  moyens  pratiques  ne  manquent 
pas  qui  permettent  d'aller,  dès  le  cours  élémentaire 
même,  —  avant  l'étude  des  signes,  —  de  la  solmi- 
sation  au  chant,  à  l'aide  d'exercices  utiles. 

Le  texte  publié  dans  l' Officiel  du  23  juillet  1922, 
arrêté  ministériel  du  11  juillet  1922,  est  le  suivant  : 


appr.s  [iar 


Section  préparatoire    Je  d  à  7  ans).  Chuu 
mditiun. 
Coure  élémentaire  (de  7  à  9  ans)  : 

1.  Cluinl  scolaire  appris  par  audition. 

2.  Formation  .le  la  roix  el  de  ['oreille.  Etude  .les  sons. 

3.  Elude  de  la  gamme,  des  intervalles  simples,  de  la  portée. 

4.  Elu  le  d—  ,(.;■  .'•  •  i.nd.\  Idanch",  n.e.i  ■  el  -ilences  corres- 


ins) 


solfège  et  chant  à  une  . 


3M-: 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Cours  supérieur  (de  li  à  13  ans)  : 

Kevi-i..n  do-  notions  théoriques  acquises  antérieurement. 

Hâtions  élémentaires  sur  le  rythme.  Mesures  composées,  le 
triolet  Exercices  de  soffage,  chant  scolaire,  chant  choral  à  une 
OU  plusieurs  voix. 

Horaires.  —  Le  temps  consacré  à  l'enseignement 
musical  dans  les  écoles  primaires  élémentaires  est 
de  1  h.  14  par  semaine  en  cours  préparatoire,  et  de 
une  heure  pour  chaque  autre  cours.  Ces  cours  doi- 
vent être  laits  en  plusieurs  séances  (au  moins  deux) 
par  semaine,  les  leçons  courtes,  mais  fréquentes, 
donnant  les  meilleurs  résultats. 


Les  programmes  des  écoles  primaires  supérieu- 
res, établis  par  les  arrêtés  ministériels  du  18  août 
19-20,  sont  peu  favorables  au  développement  de  l'en- 
seignement musical.  Ils  imposent,  en  effet,  une  heure 
de  chant,  mais  rendent  facultatif  l'enseignement  du 
solfège.  En  raison  de  l'encombrement  des  program- 
mes généraux,  l'heure  attribuée  facultativement  aux 
études  musicales  a  disparu  de  presque  tous  les 
emplois  du  temps. 

De  plus,  tandis  que  la  méthode  d'initiation  gali- 
niste  cesse  de  figurer  au  programme  des  écoles  pri- 
maires, elle  subsiste  au  programme  des  E.  P.  S., 
alors  que  les  élèves  de  ces  écoles  sont  recrutés  préci- 
sément dans  les  écoles  primaires  élémentaires.  Il  y  a 
là  une  contradiction. 

Texte  des  programmes  : 

Première  année.  —  I.  Enseignement  obligatoire.  —  Chants  sco" 
laires.  —  Etude  de  chants  scolaires  à  une  ou  deux  voix.  Ces 
chants,  directement  ecnls  ou  préalablement  tr  anspo-és  en  <l,i  ma- 
jeur ou  en  la  mineur,  pourront  être  présentés  à  l'origine  en  nota- 
tion chiffrée. 

II.  Enseignement  facultatif.  — Théorie.  —  Principe  élémen- 
taires de  la  musique  (on  n'étudiera  que  les  gammes  types  de  do 
majeur  et  de  la  mineur,  et  que  les  mesure-  -impie-  . 

Solfège,  dictée  orale  el  écrite.  —  i  tei  :ic  -  -       tea    tans  li 
gammes  types  de  tlo  maj«ur  et  de  la  mineur,     a  évitant   toute 
complication  dans  le  mode  d'écriture  viiot  item  chiffrée  et  nota- 
tion usuelle). 

Deuxième  année.  —  I.  Enseignement  obligatoire'.  — Chants  sco- 
laires. —  Chants  a  une  et  deux  voix. 

II.  Eiisnani-metii  facultatif.  —  Théorie.  —  Continuation  de  l'é- 
iii     de  la  lie''  .rie  musicale  :  on  passera  graduelle- 
ment aux  tons  voisins  de  do  mapeir  ou  de  la  mineur  et  dans  les 

Trai-iic-f  .."Me  —  !.  Eu-ifianeineM  obligatoire.  —  Chants  sco- 

i!.  /  ..  ■.  '  ■  ■.  ..,,.,,■.  -..lié  ,  et  dictée.  —  Exercices 
fa. -des  .m,  différenl  is  tons  ités. 

Théorie.  —  Cas  général  des  gammes  avec  dièses  et  bémols  à 
la  clef.  Commenl  trouver  te  ton  '  Comro  ml  transposer  en  do  ma- 
jeur et  en  ta  mineur.'  Kxeri  aces  d'application. 

Instructions  ministérielles,  relatives  aux  program- 
mes des  E.  P.  S.  (du  18  août  1920)  : 


Un  enseignemenl 

levienl  fec 

ledit  :  c'esl  l'enseignent  ml  de  la 

théorie  music  île.  M 

lui-même  d n  i    iblig  itoire. 

Etle  Conseil  snp  iri 

m  n  ;" i  oir  pratiqué 

par  les  élevé,  de-  ée 

-   ivec  d'autant  plus 

de  plaisir  et  de  goû 

.'    .  -  ...  isés  .l'un  enseignemenl 

théorique   .1.. ni    il-   Il 

[ueles    •  .-tractions,  et  dont  ils 

ne  comprennenl  pas 

i  •  ■  tri  a  ex     ■  i  ons,  Puis  nos 

élèves  peuvent  eh  'Il 

■     imer  le  i  hanl  :  mais  tous  ne 

sont  pas  iiiu-i. a  ms 

il  d    -Me  - 

il    para,!    doue  llill- 

■ 

lemeiil  qui  d.  e.eieerle  la   plupart 

d'entre  en \     1        ; 

rner  beauco 

chant.  C'.  •' 

pandre  celle  pratique  que  le  Con- 

-.    1  snpéri  lur  a  rein 

e  l'étude  de  la  théorie. 

Horaires.  —  Deux  heures  d'enseignement  musical 
par  semaine  dans  chaque  année,  dont  une  heure 
facultative. 


Les  programmes  des  écoles  normales,  fixés  par 
arrêté  ministériel  du  4  août  190:;  et  par  celui  du 
18  août  1920,  maintiennent,  eux  aussi,  l'étude,  eu 
première  année,  de  la  notation  chilfrée. 

En  dehors  des  prescriptions  que  nous  rappelons 
ci-dessous,  les  programmes  comportent  l'exécution 
de  chœurs  communs  aux  trois  années. 

Texte  des  programmes  : 

première  aaaèe.  —  Théorie  élémentaire  de  la  musique  :  Nota- 
tion ordinaire  et  écriture  chiffrée. 
Modalité,  intonation,  mesure. 
Dictées  orales  et  écrites  très  simples. 
Exercices  rythmés  et  chantés  en  clé  de  sol. 
Chants  scolaires  à  l'unisson  et  à  deux  voix. 

Exercices  élémentaires  de  violon  ou  de  piano. 

Iiearicne  année.  —  Continuation  des  exercices  théoriques  et  des 
solfèges  faciles. 

Continuation  des  dictées  orales  et  écrites,  quelques-  unes  avec 
mesures  6/8. 

Continuation  des  lectures  rythmées  et  chantées  en  clé  de  sol. 

Elude  de  la  clé  de  fa. 

Chants  scolaires  à  l'unisson  et  à  deux  voix. 

Chœurs  empruntés  à  divers  maîtres,  à  deux  ou  plus 

Exercices  de  violon  ou  de  piano. 

Tenaient'  année.  — Exercices  rythmés  et  chantés  en  clé  des»/ 
et  en  clé  de  fa. 

Dictées  orales  ou  écrites. 

Chants  scolaires. 

Choeurs  à  plusieurs  voix. 

Direction  des  chants,  des  chœurs  et  des  exercices  .1 

Exercices  de  violon  ou  de  piano. 

Pages  choisies  des  grands  maîtres  delà  musique. 

Horaire.  —  Deux  heures  de  chant  et  musique  par 
semaine  dans  chaque  année. 


Les  programmes  des  classes  primaires  des  lycées, 
collèges  et  cours  secondaires  sont  ceux  des  écoles 
primaires  élémentaires. 

Et  il  n'est  rien  prévu  de  plus,  en  faveur  des  clas- 
ses secondaires,  dans  les  lycées  de  garçons.  L'ensei- 
gnement musical,  naguère  obligatoire  (depuis  1868) 
jusqu'à  la  classe  de  4'',  et  facultatif  au  delà,  n'est 
plus  obligatoire  que  jusqu'en  6e  (exclusivement)  de- 
puis [902.  Iles  chorales,  et  même  des  orchestres,  ont 
été  créés  dans  divers  lycées  de  garçons,  et  il  con- 
vient de  citer  —  car  ils  sont  trop  rares  encore  — 
des  efforts  aussi  louables  que  ceux  qui  ont  été  faits 
dans  les  lycées  de  Bar-le-Duc,  Nancy,  ftocheforë, 
Paris  (Louis-le-Grand,  Charlemagne),  Mais  ces  réa- 
lisations sont  dues  à  la  seule  initiative  dos  provî- 
seurs  et  professeurs  de  chant,  et  il  faut  considérer 
comme  à  peu  près  inopérante  la  circulaire  du  28  no- 
vembre 191 1  relative  à  l'institution  de  chorales. 

La  situation  de  l'enseignement  musical  dans  les 
établissements  secondaires  de  jeunes  filles  est  heu- 
reusement meilleure.  Le  chant  et  la  musique  ont 
leur  place  dans  l'emploi  du  temps  général,  et  les 
chorales  des  lycées  et  collèges  déjeunes  lilles  sonl 
dirigées  par  des  professeurs  diplômés,  rétribués, 
régulièrement  nommés.  Cependant,  l'absence  de 
programmes  d'enseignement,  el  d'enseignemenl 
technique  véritable,  laisse  subsister  encore  ce  que 
l'on  appelle  depuis  longtemps  «  la  lacune  de  l'enset 
gnement  secondaire  ». 

I  ii  arrêté  du  21  février  L922  a  introduit  une 
épreuve  de  musique  dans  le  programme  de  l'es  t- 
nien  du  professorat  dans  les  classes  primaires  des 
lycées. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    S663 


Des  programmes  relatifs  à  l'explication  des  chefs 
d'oeuvre  de  l'art  musical  dans  les  lycées  et  collèges 
ont  été  donnés,  eu  même  temps  qu'on  invitait  les 
chefs  de  ces  établissements  à  organiser  des  cours 
d'art  musical  (Arrêté  du  3  juin  1925;  Instructions  du 
2  septembre  1925). 

Les  cours  s'adressent  aux  élèves  de  seconde  et  de 
première.  On  a  prévu  quatorze  séances,  —  d'envi- 
ron 80  minutes,  —  sept  de  ces  séances  se  rattachant 
au  programme  de  seconde;  sept  au  programme  de 
première.  L'inscription  au  cours  d'art  musical  est 
facultative,  mais  toutes  les  sections  y  sont  admises. 

Programme  du  cours  : 


H» 


1 ;c  p.,ui    lliui.ii;;      l.-mi-s.-ain-.-  pour  II.vusi.kl).  i  el  â.Kn 

Piani  e  :  l'opéra-comi  [ue,  les  opéras  de  Bluok.  6  el  7.  H  v>  dn  et 
Mo       .    an     I  'ii    si  poui   \iw  .••..  une  3l  demie  pour  Mo- 

/,  m.     .  8  et  9.  Beethoven   une  séance  et  de i  et.SCHOBHBJ    une 

demi-séance).  10.  L'influence  de  Gluck  sur  la  musique  Française. 
Méhci.,  Rossihi,  ArBiH,  Metebbee».  11.  Wkbeb,  Beblioz. 
12.  Ku  Allemagne  :  la  symphonie,  la  musique  de  chaniin  >■  <d  !<■ 
lied  après  IIhi'iiiijven  et  après  Scui  iinr.r.  Ki.  Ridhard  \\  iflNBK. 
1  i.  Kn  Italie  après  Rossisi.  En  France,  Gocxod.  Apres  I  ^7U.  M.is- 
senkt,  Bizet,  Saint-Saens.  L'influence  de  César  Franck.,  et 
son  école.  Nouvelles  tendances  :  influence  île  l'ée.d.'  iu-e,  d.- 
nouvelles  écoles  portiques;  effort  pouf  liliérer  des  lv-le-  tradi- 
tionnelles et  des  systèmes  l'expression  de  l'individuel  :  l'art  de 


INSTRUCTIONS  MINISTÉRIELLES 

Le  texte  des  Instructions  du  20  juin  192:!,  relatives 
à  l'enseignement  musical  dans  les  écoles  primaires 
élémentaires  (.annoté  du  23  février  1923),  permet  d'a- 
bord de  savoir  quelle  était  la  situation  de  cet  ensei- 
gnement en  1923,  —  et  aussi  de  mesurer  l'impor- 
tance de  l'évolution  pédagogique  qui  aboutit  à  l'or- 
ganisation d'une  éducation  intuitive  et  sensorielle. 

Voici  le  texte  de  ces  instructions  : 

Trop  souvent,  la  musique  est  négligée  dans  nos 
écoles.  Beaucoup  de  maîtres,  qui  se  croient  incom- 
pétents, ne  donnent  cet  enseignement  qu'à  regret 
ou  ne  le  donnent  pas  du  tout.  D'autres  prennent 
pour  un  enseignement  musical  un  enseignement 
théorique  et  abstrait  qui  ne  tarde  pas  à  enlever  aux 
élèves  la  joie  qu'ils  éprouvaient  à  chanter.  Il  importe 
de  réagir  :  une  méthode  plus  concrète  et  plus  vivante, 
en  même  temps  qu'elle  sera  aisément  appliquée  par 
tous  les  maîtres,  développera  chez  les  élèves  le  goût 
du  chant  et  l'amour  de  la  musique. 

Cette  méthode,  déjà  mise  en  vigueur  par  l'arrêté 
du  -1  juillet  1822,  consiste  à  renverser  l'ordre  trop 
souvent  adopté  dans  les  classes,  et  à  faire  l'éducation 
de  la  voix  et  de  l'oreille  avant  de  commencer  l'étude 
théorique  de  la  musique.  Ce  n'est  qu'une  application 
de  la  méthode  générale  que  nous  recommandons  en 
toute  discipline  et  qui,  depuis  longtemps,  a  fait  ses 
preuves.  Pour  enseigner  la  langue  française,  par 
exemple,  nous  recommandons  de  faire  parler  et  lire 
avant  d'entrer  dans  l'étude  théorique  des  règles 
grammaticales;  ces  règles  doivent  sortir  des  exemples 
au  lieu  de  se  présenter  comme  des  abstractions  sans 
rapport  avec  les  réalités  linguistiques.  De  même, 
c'est  de  la  réalité  musicale  que  doit  sortir  la  règle 
musicale  ;  on  ne  donnera  pas  aux  enfants  de  défini- 
tions abstraites  des  termes  musicaux  avant  de  les 
avoir  fait  abondamment  chanter,  avant  d'avoir  mul- 
tiplié pour  eux  les  expériences  musicales.  Bien  plus, 
on  ne  leur  fera  connaître  les  symboles  graphiques 
de  la  langue  musicale  qu'au  moment  où  ils  auront 
acquis  une  pratique  suffisante  de  cette  langue.  C'est 


seulement  lorsque  l'enfant  a  appris  à  parler  en  en- 
tendant parler  ses  proches  qu'on  songe  à  lui  donner 
connaissance,  par  l'apprentissage  de  la  lecture,  des 
signes  graphiques  qui  représentent  pour  les  yeux  ses 
paroles.  De  même,  l'enfant  doit  avoir  appris  à  chan- 
ter par  audition,  il  doit  se  délecler  dans  ses  chants 
avant  d'être  appelé  à  connaître  les  signes  visuels  des 
réalités  sonores.  Il  faut  qu'il  soit  assez  mûr  pour 
comprendre  que  cette  représentation  visuelle  sera 
pour  lui  un  nouvel  instrument  de  satisfaction  musi- 
cale, et  qu'elle  l'aidera  à  faire  des  progrès  dans  son 
chant.  La  musique  est  comme  une  seconde  langue 
naturelle,  celle  de  1  intonation,  qui  ne  saurait  être 
apprise  en  suivant  une  autre  marche  que  la  pre- 
mière, celle  de  l'articulation. 

Ces  principes,  qui  ont  dicté  notre  réforme  de 
l'enseignement  du  chant,  sont  adoptés  par  les  auto- 
rités les  plus  compétentes.  Ce  sont  ceux  auxquels 
s'est  arrêtée  la  commission  réunie  au  ministère  de 
l'Instruction  publique  pour  examiner  la  situation  de 
l'enseignement  musical. 

Nous  trouvons,  en  effet,  dans  le  rapport  de  cette 
commission,  rédigé  par  M.  André  Ghdalge,  avec  la 
condamnation  des  méthodes  actuelles,  des  prescrip- 
tions identiques  à  celles  que  nous  venons  de  formu- 
ler. Condamnation  des  méthodes  actuelles  :  «  Ce  que 
pas  un  maître,  si  novice  fût-il,  n'aurait  l'idée  de 
faire,  c'est-à-dire  enseigner  la  lecture  à  un  enfant 
qui  ne  saurait  pas  parler,  on  le  fait  journellement 
dans  l'enseignement  de  la  musique.  Et  c'est  de  là 
que  proviennent  toutes  les  difficultés,  tous  les  dé- 
boires, tous  les  insuccès.  Parler  de  musique  à  un 
enfant  dont  l'oreille  n'esl  pas  musicalement  éduquée, 
dont  la  mémoire  musicale  élémentaire  n'est  pas  suf- 
fisamment développée,  c'est  lui  parler  une  langue 
mystérieuse  et  incompréhensible,  comme  les  expé- 
riences journalières  nous  le  démontrent  trop...  » 

Prescriptions  identiques  à  celles  que  nous  venons 
de  formuler:  «  L'instruction  musicale  doit  être  fon- 
dée sur  la  culture  musicale  de  l'oreille  el  de  la  voix... 
La  connaissance  des  sons  musicaux,  qui  est  à  la  base 
de  l'instruction  musicale,  est  elle-même  en  fonction 
de  la  mémoire  musicale  élémentaire,  c'est-à-dire  de 
l'aptitude  à  reconnaître,  à  dilîérencier  et  à  retenir 
les  rapports  de  hauteur  créés  par  la  succession  de 
deux  sons  musicaux,  ou,  à  un  degré  plus  grand  d'en- 
traînement, par  leur  simullanéité,  puis  a  I 
duire  avec  la  voix  et  à  les  associer  vocalemeut  et 
plus  tard  mentalement  aux  symboles  graphiques  qui 
les  représentent.  » 

De  même,  dans  une  remarquable  conférence  faite 
à  la  Société  française  de  pédagogie1,  M.  Maurice 
Ghevais,  inspecteur  de  l'enseignement  du  chant  dans 
les  écoles  de  la  Ville  de  Paris,  s'appuyant  sur  l'auto- 
rité de  M.  Auguste  Cbapuis,  critique  la  méthode 
actuelle  et  préconise  la  méthode  inverse.  Critique 
de  la  méthode  actuelle  :  «  La  plupart  des  leçons 
portent,  ttès  le  début,  et  bien  à  tort,  sur  les  exer- 
cices de  lecture  des  notes.  On  apprend  trop  tôt  où  se 
placent  les  notes  sur  la  portée.  On  lit  trop  tôt.  On 
oublie  l'oreille  et  la  voix...  C'est  l'éducation  visuelle 
qui  précède  l'éducation  de  l'oreille.  Ceci  tourne  le 
dos  au  bon  sens,  à  la  logique,  à  la  musique...  Ces 
mêmes  éducateurs,  pour  compléter  ces  premières 
leçons  de  chant  où  l'on  ne  chante  pas,  donnent  à 
l'enfant  quelques  notions  de  grammaire  musicale. 
L'enfant  ànonne  une  définition  de  l'art,  de  la  mu- 


1.  Publiée  dans 


lullelin  de  cette  société,    a'  a,  dé.a   i     '      i    j   . 


E.XC.VCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


sique;  il  affronte  dès  les  premiers  jours  cette  réfri- 
gérante «  théorie  musicale  »  qui  le  fera  si  souvent 
huilier.  Quand  il  sortira  de  l'école,  il  aura  une  tète 
bien  pleine  de  connaissances  qui  s'envoleront  très 
vite.  Mais  il  n'aura  pas  l'oreille  bien  faite,  et  il  em- 
portera de  l'école  cette  idée  que  la  musique  est 
quelque  chose  de  difficile,  decompliqué,  de  sombre... 
C'est  l'inconvénient,  et  il  esl  grave,  de  l'éducation 
visuelle  et  théorique.  » 

A  l'inverse,  l'auteur  préconise  une  éducation  au- 
ditive et  concrète  qu'il  résume  en  ces  termes  : 
«  C'est  par  le  chant  que  commencera  cette  éduca- 
tion, par  le  chant,  base  et  aboutissant  de  l'enseigne- 
ment musical. 

«  Les  petits  apprendront  des  chants  à  l'unisson 
et  à  deux  voix,  de  belles  mélodies.  Et  quand  ils 
auront  beaucoup  chanté,  ils  apprendront  à  vocaliser 
et  à  chanter  les  sons  de  l'accord  parfait,  de  la  gamme 
et  de  quelques  formules  d'intervalles. 

«  Ils  connaîtront  et  reconnaîtront  les  sons  avant 
de  connaître  les  signes  conventionnels  qui  permet- 
tent de  les  représenter. 

«  Puis  ils  connaîtront  ces  signes.  Lentement,  par 
étapes,  en  allant  du  simple  au  composé,  ils  appren- 
dront à  lire  les  notes,  à  solfier,  et  ils  apprendront 
enfin  quelques  lois  très  élémentaires  de  la  gram- 
maire musicale. 

«  Ils  quitteront  l'école  avec  un  petit  bagage  de 
connaissances,  mais  un  bagage  si  doux  à  porter,  si 
plein  de  richesses,  qu'ils  ne  s'en  sépareront  plus.  » 

Voyons,  dans  le  détail,  comment  celte  méthode 
s'appliquera  aux  différents  cours  de  l'école  primaire. 

École  maternelle. 

La  pratique  du  chant  par  audition  date  du  début 
de  Yécole  maternelle.  Elle  y  tient  une  place  impor- 
tante, car  elle  y  est  une  source  de  joie  et  de  santé 
morale  pour  les  tout  petits. 

Elle  doit  conserver  ce  rôle  au  cours  préparatoire. 
Aussi,  choisira-t-on  de  préférence  des  morceaux 
empreints  de  gaieté  et  d'entrain.  Mais  on  se  mon- 
trera de  plus  en  plus  rigoureux  quant  à  la  justesse, 
au  rythme,  à  l'ensemble.  On  évitera  de  forcer  les 
voix  et  l'on  assouplira  les  organes,  on  développera 
leur  sensibilité.  On  leur  fera  acquérir  de  la  sûreté 
sans  paraître  les  soumettre  à  un  véritable  travail. 
L'enseignement  du  chant,  pour  les  enfants  de  six  à 
sept  ans,  doit  demeurer  un  jeu. 


Au  cours  élémentaire,  le  chant,  toujours  appris  par 
audition,  continue  à  occuper  la  place  prépondé- 
rante. Les  morceaux  doivent  être  simples,  sans  que 
cette  simplicité  dégénère  eu  puérilité  et  exclue  la 
beauté.  On  aura  fréquemment  recours  à  la  chanson 
populaire,  prise,  autant  que  possible,  dans  la  tradi- 
tion locale. 

La  formation  de  la  voix  sera  poursuivie  non  seu- 
lement à  l'aide  du  chant  scolaire,  mais  à  l'aide 
d'exercices  d'intonation.  On  apprendra  aux  enfants 
à  passer  de  la  voix  de  poitrine  à  la  voix  de  tête.  On 
leur  fera  émettre  des  sons  prolongés  et  des  sons 
courts,  des  sons  droits  et  des  sons  filés. 

L'éducation  de  l'oreille  se  composera  d'exercices 
d'intonation  et  de  dictées  musicales  orales.  On  pren- 
dra comme  point  de  départ  l'accord  parfait,  dont 
les  notes  «  forment  une  jolie  succession  mélodique, 


espacée,  très  aisément  perceptible  sans  confusion  » 
et,  «  chantées  simultanément  avec  douceur,  par  trois 
groupes  d'élèves,  forment  un  accord  très  simple, 
1res  pur  »,  susceptible  de  charmer  l'oreille  des  en- 
fants. Sans  renoncer  à  la  méthode  auditive,  le  maître 
peut  «  faire  exécuter  ces  trois  sons  en  plaçant  la 
main  à  trois  hauteurs  différentes.  Lorsqu'il  les  chan- 
tera seul,  les  élèves  placeront  la  main  à  la  hauteur 
convenable,  et  ce  sera  déjà  de  la  dictée  musicale1.» 
Quand  ces  trois  sons  seront  bien  connus,  on  ajou- 
tera le  ré  et  le  fa,  et  l'on  arrivera  progressivement  à 
la  connaissance  de  la  gamme,  puis  à  celle  des  douze 
ou  treize  sons  (du  si  grave  au  sol  aigu)  qui  corres- 
pondent à  la  voix  de  l'enfant. 

Parallèlement,  on  apprendra  aux  élèves  les  inter- 
valles simples.  On  les  habituera  à  chanter  simulta- 
nément en  deux  groupes  les  sons  d'un  intervalle  et, 
de  celte  manière,  on  leur  fera  sentir  ce  qu'on  entend 
par  consonance  et  par  dissonance. 

Tous  ces  exercices  devront  être  multipliés  sans 
répit,  avec  des  revisions  incessantes  et  improvisées, 
si  bien  que  la  classe  entière  finisse  par  ne  plus  hési- 
ter à  reconnaître  à  l'oreille  ou  à  entonner  à  volonté, 
avec  le  secours  du  diapason,  soit  des  sons  isolés, 
soit  des  sons  simultanés,  soit  des  intervalles  simples, 
soit  des  combinaisons  unissant  entre  eux  plusieurs 
de  ces  éléments. 

En  même  temps,  on  développera  d'une  façon  pra- 
tique, chez  les  élèves,  le  sens  du  rythme;  on  leur 
inculquera  empiriquement  la  notion  de  temps  et  on 
les  entraînera  à  battre  des  mesures  à  2  4,  i  i  et  3/4. 

Cours  moyen. 

Au  cours  moyen,  le  chant  occupe  toujours  la  place 
d'honneur.  Mais  il  comporte  une  matière  musicale 
plus  riche  et  il  est  pratiqué  avec  des  nuances  d'exé- 
cution et  d'expression  plus  délicates.  L'éducation 
de  la  voix  reste  l'objet  de  l'attention  la  plus  vigi- 
lante. L'éducation  de  l'oreille,  qui  comporte  l'étude 
des  tonalités  voisines  de  do  majeur  et  celle  de  la 
gamine  mineure,  se  confond  de  plus  en  plus  avec  la 
lecture  musicale,  c'est-à-dire  avec  le  solfège. 

L'initiation  au  solfège  se  fait  à  l'aide  du  tableau 
noir.  On  ne  se  contentera  pas  de  faire  nommer  les 
notes  sur  la  portée  :  chaque  leçon  de  lecture  sera 
en  même  temps  un  exercice  d'intonation.  Quand  les 
élèves  seront  un  peu  familiarisés  avec  ces  notions 
nouvelles,  on  les  initiera  à  la  dictée  musicale  écrite, 
c'est-à-dire  qu'on  leur  demandera  d'indiquer  eux- 
mêmes  sur  la  portée  la  place  de  sons  isolés,  d'inter- 
valles, d'accords  de  deux  sons,  puis  de  très  brèves 
phrases  musicales,  le  tout  exécuté  vocalement. 

Dès  qu'ils  arriveront  à  lire  couramment,  on  met- 
tra entre  leurs  mains  un  livre  pour  qu'ils  en  déchif- 
frent les  leçons  de  solfège,  et  surtout  pour  qu'ils  y 
apprennent  quelques  chants.  Ils  auront  alors  le  sen- 
timent d'avoir  réalisé  une  conquête  décisive  et  seront 
certainement  animés  du  désir  d'accomplir  de  nou- 
veaux progrès. 

(ours  supérieur. 

Aucours  supérieur,  on  abordera  quelques  tonalités 
nouvelles;  on  étudiera  la  mesure  à  6/8,  la  double 
croche,  le  triolet.  On  fera  connaître  l'emploi  de  la 
clef  de  fa.  Mais,  plus  encore  que  ces  notions,  ce  qui 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE 


importe,  à  ce  cours,  c'est  le  chant.  Il  prend  nette- 
ment le  caractère  polyphonique;  les  enfsnts  chante- 
ront, en  chœur,  à  plusieurs  voix,  et  ils  en  éprouve- 
ront une  vive  joie  :  ils  naîtront  vraiment  à  la  mu- 
sique. Les  maitres  devront  veiller  sans  cesse  à  la 
justesse,  donner  la  chasse  aux  intonations  fausses 
et  faire  corriger  immédiatement  tout  flottement. 
Ainsi  sera  atteint  l'objectif  principal  de  l'enseigne- 
ment musical  à  l'école  :  former  des  jeunes  gens  qui 
aient  le  goût  du  chant  et  qui  chantent  avec  goût. 
Ils  ne  perdront  pas,  après  l'école,  ces  bonnes  habi- 
tudes, et  le  chant  choral,  trop  peu  pratiqué  dans 
notre  pays,  s'y  développera,  apportant  aux  popula- 
tions des  villes  et  des  campagnes  les  joies  saines  de 
l'art  musical. 

Le  programme  et  la  méthode  que  nous  venons  de 
décrire  sont  de  nature  à  rassurer  les  instituteurs 
sur  les  difficultés  de  l'enseignement  du  chant.  Avec 
M.  Maurice  Chevais,  nous  leur  dirons  :  «  L'écriture 
musicale  n'est  compliquée  que  pour  les  artistes. 
Pour  nous  elle  demeure  simple. 

«  Toute  la  musique  peut  s'écrire  à  2/4  ou  à  3/4,  car 
il  n'y  a  vraiment  que  deux  rythmes  et  deux  mesures, 
trois  au  plus,  si  l'on  veut  doubler  la  mesure  à  2/4. 

«  Dans  ces  trois  mesures,  la  noire  vaut  toujours 
un  temps,  la  blanche  deux  temps,  etc.  Les  silences 
ont,  eux  aussi,  une  valeur  fixe.  Plus  tard  seulement, 
vous  connaître/,  une  exception,  concernant  la  mesure 
à  6/8.  Pour  vous,  peu  de  valeurs  relatives;  rien  que 
des  valeurs  fixes. 

«  Pour  vous  et  pour  l'école,  il  n'y  a  qu'une  seule 
clef,  la  clef  de  sol  usuelle,  qu'on  iie  déplacera  jamais. 
Les  notes  conserveront  donc  toujours  les  mêmes 
sons  aux  mêmes  places  (sauf  au  cours  supérieur  où 
l'emploi  de  la  clef  de  fa  est  prévu). 

«  Pendant  longtemps  (entendons  au  cours  prépa- 
ratoire et  au  cours  élémentaire),  il  n'y  aura  pour 
vous  qu'une  seule  tonalité,  celle  de  do  majeur,  avec 
son  autre  aspect  de  la  mineur. 

«  Plus  tard,  vous  verrez  quelques  autres  tonalités 
que  vous  aborderez  avec  gTand  plaisir,  curieuse- 
ment, et  sans  difficulté.  » 

Ajoutons  que  l'instituteur  peut  s'aider,  s'il  croit 
«  n'avoir  pas  d'oreille  »,  non  seulement  du  diapa- 
son (qui  est  indispensable),  mais  d'un  instrument  de 
musique.  Beaucoup  d'élèves  maitres  et  d'élèfes  maî- 
tresses jouent  à  l'école  normale  du  violon  ou  du 
piano.  Cette  pratique  doit  devenir  de  plus  en  plus 
générale.  Et  il  existe  un  petit  instrument,  le  «  guide- 
chant  »,  sorte  d'harmonium  portatif  à  deux  octaves, 
qui  devrait  faire  partie  du  matériel  de  toute  école. 
Instrument  à  sons  fixes,  il  rendra  plus  de  services 
que  le  violon  pour  assurer  la  justesse  des  chants. 
Nos  instituteurs  et  institutrices  devraient  demander 
soit  aux  municipalités,  soit  aux  amis  de  nos  écoles, 
de  leur  faire  don  d'un  guide-chant.  Grâce  à  l'aide 
des  instruments,  les  instituteurs  ne  rencontreront 
plus  de  difficultés  sérieuses  dans  l'enseignement, 
rendu  pins  simple  et  plus  concret,  du  chant  et  de  la 
musique.  Ils  y  prendront  eux-mêmes  un  vif  plaisir 
et  sauront  inculquer  à  leurs  élèves  l'enthousiasme 
que  mérite  l'art  délicat  et  noble  qui  embellit,  tout 
en  les  disciplinant,  notre  vie  individuelle  et  notre 
vie  sociale. 

Siyné  :  Léon  Bérard. 
(M.  Paul  Lapie  étant  directeur 
de   l'Enseignement  primaire.) 


DÉVELOPPEMENT  DU   PROGRAMME 

Libelle  d'interprétation  et  «le  méthode.  Les  lests. 
Mesure  de  l'acuité  auditive.  La  progression 
musicale.  Les  formes  de  l'enseignement  mu- 
sical. Les  procédés.  Les  leçons  pratiques, 

Les  programmes  s'appliquent  surtout,  on  l'a  vu,  à 
établir  un  ordre  dans  la  série  des  connaissances  à 
aborder,  et  laissent  la  plus  grande  liberté  dans  le 
choix  des  moyens  propres  à  donner  l'enseignement. 
Il  ne  saurait  en  être  autrement,  et  si  les  pouvoirs 
imposaient  une  méthode  particulière,  s'ils  allaient 
jusqu'à  dire  quelle  forme  il  convient  de  donner  aux 
leçons,  quels  procédés  il  faut  repousser  ou  adopter,  le 
maître,  automatisé,  perdrait,  avec  son  esprit  «l'initia- 
tive, tout  désir  d'enseigner.  Il  nepeutprésenterlesfaits 
sous  des  aspects  souriants  et  tenir  éveillées  l'atten- 
tion et  la  curiosité  des  enfants,  il  ne  peut  donner  de 
la  vie  à  ses  leçons,  adapter  son  enseignement  aux 
âges,  aux  classes,  aux  milieux  divers,  que  s'il  peut 
donner  libre  cours  à  ses  qualités  personnelles  d'édu- 
cateur. 

Imposer  une  méthode  particulière,  codifier',  fer- 
mée, —  c'est  assigner  un  terme  aux  progrè  de  la 
pédagogie.  Le  geste  est  d'ailleurs  encore  plus  inutile 
que  ridicule. 

Au  surplus,  les  méthodes  ne  valent  que  ce  que 
valent  ceux  qui  les  appliquent,  et  la  formule  :  Tant 
vaut  le  professeur,  tant  vaut  sa  méthode,  esl  l'un  des 
plus  beaux  lieux  communs  de  la  pédagogie.  Elle  s'ap- 
plique surtout  à  l'enseignement  musical,  et  il  est 
incontestable  que  la  formalion  du  goût  artistique 
des  enfants  dépend  bien  plus  de  la  valeur  musicale 
des  martres,  et  des  exemples  musicaux  dont  ils  se 
servent  dans  leurs  leçons,  que  de  l'application  des 
méthodes  d'intonation  ou  de  solfège. 

Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  s'il  veut  accroître 
ses  moyens,  faire  un  choix  aussi  libre  qu'éclairé, 
être  en  mesure  d'accueillir  tout  ce  qui  est  d'utilité 
pratique,  —  le  maître  doit  pousser  aussi  loin  que 
possible  les  recherches  documentaires  et  les  expé- 
rimentations. 

Notre  propre  interprétation  n'a  donc  aucune  pré- 
tention au  définitif.  Nous  ne  la  donnons  que  pour 
montrer  combien  il  serait  facile  aux  éducateurs, 
mis  en  présence  de  tous  les  systèmes  anciens,  de 
rassembler,  à  l'appui  d'une  progression  musicale 
raisonnée,  de  nombreux  procédés  constituant  une 
pédagogie  personnelle  ouverte,  souple,  doirt  ils  pour- 
raient faire  profiter  tous  leurs  élèves. 


Les  tests  d'éducation  musicale.  —  Les  tests  col- 
lectifs d'éducation  musicale  ne  tendent  nullement 
—  ce  serait  absurde  —  à  mesurer  le  degré  d'apti- 
tude artistique  de  chaque  enfant.  Mais  ils  rendent 
de  grands  services  au  maître  qui  veut  (et  doit)  con- 
naître ses  élèves  sous  le  rapport  de  l'audition,  de 
l'attention  auditive,  qui  veut  savoir  de  quels  instru- 
ments de  perception  ils  disposent,  quel  est  le  degré 
d'acuité  du  sens  de  l'ouie  et  de  fidélité  de  la  mémoire 
des  sons  et  des  rythmes,  quelle  est  la  complaisance 
de  la  voix  à  reproduire  les  intonations. 

Les   moyens  de  mensuration   ne  manquent  pas. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Nous  en  proposons  une  dizaine  déjà,  et  leur  nombre 
s'accroîtra  sans  doute1. 

Comme  tous  les  lests,  ils  conduisent  plutôt  à  des 
appréciations  qu'à  d'absolues  certitudes,  mais  ces 
premiers  moyens  de  discerner  les  dispositions  natu- 
relles des  enfants  permettent  d'établir  une  convic- 
tion d'autant  plus  sûre  que,  malgré  leur  diversité,  ils 
donnent  presque  toujours,  pour  un  même  enfant,  des 
indications  qui  se  confirment. 

Leur  grand  avantage,  d'ailleurs,  c'est  de  ne  causer 
aucune  perte  de  temps,  car  ils  aident  à  initier  l'en- 
fant à  la  vie  des  sons,  et  ces  moyens  d'investigation 
sont  en  même  temps  des  moyens  d'enseigner. 

Ier  test  :  perception  des  dilférences  de  hauteur  des 
sons;  mécanisme.  Le  maître  chante  cinq  fois  le  même 
son,  en  disant  :  un,  deux,  trois,  quatre,  cinq.  Il  re- 
commence, mais  chante  l'un  des  sons  à  l'octave  (ou 
à  la  5e,  ou  à  la  2e)  le  son  quatre  par  exemple.  Les  en- 
fants (les  yeux  fermés)  doivent  montrer  quatre  doigts. 
Reprise,  en  variant. 

2"  test  :  perception  des  similitudes  de  sons.  Le 
maître  vocalise,  ou  joue,  lentement,  une  suite  de 
sons.  Les  enfants  (les  yeux  fermés)  signalent,  au 
passage,  le  retour  d'un  son  déterminé. 

3e  test  :  perception  de  direction  des  intervalles. 
Le  maître  vocalise  ou  joue  (degrés  disjoints).  Les 
enfants  (les  yeux  fermés)  lèvent  l'index  s'ils  croient 
reconnaître  un  intervalle  ascendant,  —  ou  dirigent 
la  main  vers  le  sol,  —  ou  marquent  l'horizontale 
(pour  des  unissons). 

4e  test  :  reconnaissance  approximative  de  l'étendue 
des  intervalles.  Le  maître  vocalise  (ou  joue).  Si  les 
enfants  reconnaissent  des  sons]rapprochés  (conjoints), 
ils  joignent  leurs  mains.  S'ils  croient  reconnaître  de 
grands  intervalles,  ils  séparent  leurs  mains. 

S'  test  :  examen  du  sens  tonal.  Le  maître  vocalise 
(ou  joue)  une  gamme  majeure.  Puis  il  recommence 
en  altérant  un  degré  (le  fa,  par  ex.,  devient  dièse). 
L'élève  signale  le  son  étranger  à  la  tonalité  en  levant 
la  main. 

6'  test  :  perception  de  la  simultanéité  des  sons.  Le 
maître  joue  des  sons  isolés,  puis  deux  sons  simul- 
tanés, puis  trois.  L'enfant  (les  yeux  fermés)  montre 
un  doigt,  puis  deux,  puis  trois.  Si  un  son  disparait,  il 
montre  un  doigt  de  moins. 

7e  test  :  perception  du  mouvement.  Le  maître  ac- 
célère ou  retarde  en  chantant  un  exercice  à  deux 
temps.  L'enfant  accélère  ou  retarde  les  battements 
de  sa  main. 

S"  test  :  mouvement  conservé.  Le  maître  compte  à 
haute  voix,  très  régulièrement,  de  1  à  10.  Les  enfants, 
mentalement,  les  yeux  fermés,  comptent,  au  même 
rythme,  de  il  à  30.  Sur  30,  ils  lèvent  la  main. 
L'exercice  comporte  plusieurs  modalités.  Utiliser  le 
pendule  (silencieux)  pour  contrôler  la  régularité. 

9e  test  :  reconnaissance  de  la  voix  dite  «  de  tête  »i 
de  la  voix  dite  «  de  poitrine  ».  Le  maître  vocalise, 
empruntant  l'une  des  deux  voix.  L'enfant  marque  ce 
qu'il  entend  en  touchant  poitrine  ou  front.  L'exercice 
a  des  résultats  pratiques  :  il  fait  apprécier  la  voix 
dite  «  de  tête  »,  la  seule  possible  à  l'école. 

/0e  test  :  premières  émissions  vocales.  Les  enfants 
ont  à  exécuter  cinq  sons  identiques  (après  exemple 
donné  par  le  maître}.  On  fait  chanter  sur  le  do3,  en 

1.  Voir  les  nombreux  lests  de  Jaqdes-Dalcrozi:  (Rouart-  l.erolle_ 
—  Jobin,  Lausanne)  ;  Max  Schof.n,  The  Yalidity  of tests  of  musical  tu. 
lent  (J.  of  comp.  Psychologie,  III,  1923);  Seashore,  The  Measurc- 
ment  of  musical  talent  [The  mus.  Quarterly,  1915,  I);  Corrélation  of 
factors  in  mus.  talent  and  trainin-g  [Ps.  Rev.  mon.  ser.,n°  00,  1918). 


utilisant  la  voyelle  il,  quatre  sons  brefs  et  un  son 
long.  On  peut  juger  ainsi  de  l'inertie  auditive  (provi- 
soire) de  cerlains  élèves. 


Mesure  de  l'acuité  auditive.  —  Les  tests  permettent 
déjà  de  connaître  les  enfants  dont  l'oreille  est  atone, 
arythmique,  ou  simplement  paresseuse.  De  plus,  il 
existe  des  appareils  acoumétriques  (dont  nous  ne 
pouvons  entreprendre  la  description),  et  le  maître 
peut  se  faire  auriste  très  aisément  en  recourant  à  l'un 
des  procédés  suivants  : 

La  voix  chuchotée.  —  Le  maître  prononce  des  mots 
à  voix  chuchotée,  et  notamment  des  mots  contenant 
des  sifflantes.  L'enfant,  les  yeux  fermés,  écoute  ces 
mots  et  les  répèle  (examen  individuel).  On  classe  les 
élèves  d'après  le  nombre  des  erreurs  qu'ils  commet- 
tent. 

L'examen  à  la  montre.  —  L'enfant  est  assis.  Il  ferme 
les  yeux.  Le  maître  approche  la  montre,  jusqu'à  ce 
que  le  tic  tac  soit  perçu.  Il  mesure  la  distance  de  l'o- 
reille à  la  montre. 

La  parole  décroissante.  —  Le  maître  répète  plu- 
sieurs fois  le  même  mot,  mais  en  intensité  décrois- 
sante (le  mot  ami  par  exemple).  Puis  il  marque  un 
temps  d'arrêt.  Les  enfants,  les  yeux  fermés,  comp- 
tent mentalement  le  nombre  des  mots  qu'ils  enten- 
dent. Puis  ils  indiquent  ce  nombre  par  écrit.  Com- 
paraison. 

Résultat  :  les  enfants  qui  entendent  mal  seront 
placés  en  avant,  dans  la  classe,  pour  bien  des  raisons, 
et  notamment  pour  qu'ils  voient  mieux  le  maître 
(puisqu'ils  l'entendent  moins  bien),  qu'ils  aient  de- 
vant leurs  yeux  le  moins  possible  de  sujets  de  dis- 
traction, qu'ils  ne  puissent  copier  les  réponses  mi- 
mées de  leurs  camarades,  qu'ils  entendent  mieux 
les  émissions  justes  de  ceux-ci. 


La  progression  musicale.  —  Les  programmes  con- 
cernant le  début  de  l'initiation  musicale  à  l'école  pri- 
maire se  contentent  d'indiquer  :  Etude  des  sons.  Le 
détail  de  cette  progression  et  son  point  de  départ  se 
dégagent  plus  nettement  des  Instructions  île  1923. 

On  procédera  par  petites  séries  avant  d'aborder 
toutes  les  combinaisons  que  permettent  les  sons  de 
la  gamme  et  de  l'échelle  vocale  (voir  plus  haut  l'opi- 
nion de  J.  Combariel),  avec  lesquelles  il  serait  vain 
de  vouloir  pratiquer  les  exercices  nécessaires  de 
reconnaissance  des  sons.  C'est  pour  faciliter  cette 
reconnaissance  des  sons  à  l'audition  (dictée  orale) 
que  la  progression  implique  l'étude  des  degrés  dis- 
joints (quinte  et  tierces)  avant  celle  des  de^ivs  con- 
joints (penlacorde,  gamme,  échelle  vocale),  la  proxi- 
mité des  degrés  nuisant  à  leur  différenciation. 

La  progression  conseillée  est  celle  qui  a  été  préfé- 
rée par  différents  pédagogues  et  musiciens  contem- 
porains, et  dont  les  travaux  .pédagogiques  ont  été 
indiqués  dans  cet  exposé.  Elle  se  décompose  ainsi 
en  ce  qui  concerne  les  hauteurs  des  sons  (hauteurs 
étudiées  antérieurement  à  toute  connaissance  des 
notations,  usuelle  ou  chiffrée). 

1.  Exercices  sur  un  son,  le  do.  La  tonique. 

2.  Exercices  sur  deux  sons  :  ila.  sol.  La  quinte. 

3.  Exercices  sur  trois  sons  :  il,',  mi,  sut.  L'accord  parfait. 

i.  Exercices  sur  cinq  sons  :  do,  ré,  mi,  fa,  sol.  Le  penlacorde. 

5.  Exercices  sur  sept  et  huit  sons.  Lu  awiime. 

6.  Exercices  sur  douze  ri  tieize  S'>ns.  L' échelle  vente. 


les  conseils  de  la  théorie  pure  supposent  à  ceux  de 
la  pédagogie  pratique. 

L'idée  la  plus  simple  est  celle  de  temps.  Les  notions 
qu'il  convient  d'associer  sont  celles  de  pas,  geste, 
temps,  et,  plus  tard,  de  noire  et  de  soupir.  Là  mesure 
qui  se  propose  en  premier  lieu  est  la  mesure  à  deux 
temps,  correspondant  à  un  mètre  naturel  :  la  marche. 

En  métrique,  la  progression  logique  et  pratique 
est  donc  ainsi  réglée  : 

1°  Mesures  à  deux  temps.  2°  Mesures  à  trois  temps. 

Et,  ensuite  seulement,  mesure  à  quatre  temps. 

En  ce  qui  concerne  les  durées,  on  étudiera  d'a- 
bord le  temps,  puis  ses  multiples,  donc  : 

1°  Sons  d'un  temps.  2°  So»^  de  deux  temps.  3°  Sons 
de  trois  et  sons  de  quatre  temps. 

Puis  le  temps  et  ses  sous-multiples  : 

Sons  d'un  temps,  division  binaire  du  temps,  divi- 
sion ternaire  du  temps. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE 

Les  deux  sons  tonique  et  dominante  jouent  les 
premiers  rôles  dans  la  mélodie.  Ils  constituent  l'axe 
tonal,  et  «  c'est  la  quinte  qu'il  s'agira  d'abord  de 
conquérir.  Elle  est.  dans  tous  les  temps  et  dans  tous 
les  pays,  l'étalon  de  justesse,  parce  que,  de  tous  les 
intervalles  musicaux,  elle  est  celui  dont  l'exact  cali- 
bre est  le  plus  aisément  aoprécié  et  obtenu  »  [M.  Em- 
manuel). Les  deux  sons  do,  sol  ne  peuvent  être  con- 
fondus longtemps  à  l'audition. 

Les  sons  de  l'accord  parfait  de  tonique  constituent, 
pour  un  grand  nombre  d'éducateurs,  l'étape  la  plus 
importante. 

On  a  vu  de  quelle  force  sont,  sur  ce  point,  les  argu- 
ments de  J.  Combarieu.  L'école  galiniste  appelle  ces 
trois  noies  les  «  notes  cardinales»,  et  son  procédé  des 
points  d'appui  se  base  sur  l'exacte  connaissance  de 
dc-mi-sol.  M.Maurice  Emmanuel  déplore  qu'en  France, 
l'accord  ne  soit  point  encore  l'objet  d'un  culte,  et  l'on 
sait  de  quelles  heureuses  expressions  il  soutient  cette 
étape  de  la  progression  musicale.  Benvoyons  aussi 
à  ce  que  dit  Dessiïuer,  qui  trouve,  en  ces  sons,  les 
degrés  calmes,  fixes  de  la  gamme,  son  ossature 
solide,  sur  laquelle  on  peut  s'appuyer  pour  émettre 
avec  justesse  les  degrés  intermédiaires.  Le  pédagogue 
anglais  O'Donelly  {The  Academy  ofelementary  music, 
1841)  en  fait  la  base  de  son  système  pour  la  même 
raison,  et  voit,  en  do-mi-sol,  u  les  flambeaux  propres 
à  éclairer  l'élève  à  travers  l'obscurité  de  la  pratique  ». 
Pour  Lucien  Bourguès  et  Al.  Dénéréaz  (Lu  Musique 
et  la  vie  intérieure,  Alcan),  do-7ni-sol  sont  »  les  centres 
psychologiques  de  la  gamme  ».-Ces  trois  notes  don- 
nent le  maximum  de  consonance  et,  pour  l'oreille, 
l'accord  parfait  est  déterminatif  de  la  tonalité  et  du 
mode.  «  L'initiation  musicale  la  plus  sûre,  la  plus 
simple  et  la  plus  attrayante  —  dit  A.  Drouin,  .'mi- 
nent pédagogue  et  inspecteur  de  chant  —  est  sans 
contredit  celle  qui  repose  sur  l'étude  des  notes  de 
l'accord  parfait.  C'est  en  même  temps  la  plus  logi- 
que. »  Comme  le  remarque  aussi  M.  Paul  Lan- 
dormy,  l'identification  de  ces  sons,  vocalises,  se  fait 
aisément.  «  Rien  de  plus  simple,  dit-il,  rien  de  plus 
facilement  perceptible  que  les  rapports  entre  les  sons 
de  l'accord  parfait  do,  mi,  sol.  On  obtiendra  des 
enfants,  dans  la  vocalisation  de  cet  accord,  des  into- 
nations infiniment  plus  justes  (qu'avec  la  gamme)  et 
avec  beaucoup  moins  de  difficulté.  » 

C'est  trop  s'étendre  sur  un  point  où  l'on  ne  ren- 
contrerait jamais  la  contradiction  des  musiciens  ou 
des  pédagogues,  si  ce  n'est  de  ceux  qui  sont  en  même 
temps  auteurs  de  systèmes. 

Entre  la  série  :  accord  parfait  (trois  sons)  et  la 
série  gamme  (huit  sons),  il  y  a  place  pour  une  série 
de  cinq  sons,  ne  comprenant  d'ailleurs  que  deux 
sons  nouveaux  ré  et  fa.  Cette  série  étend  le  champ 
des  combinaisons,  mais  la  connaissance  des  sons 
do-mi-sol,  c'est-à-dire  des  trois  points  de  repère, 
facilitera  les  exercices  de  solmisation  à  une  et  deux 
voix  et  d'analyse,  pratiqués  avec  les  sons  du  penta- 
corde. 

La  gamme  et  l'échelle  vocale  de  douze  ou  treize 
sons  permettront  d'étudier  les  accords  parfaits  ma. 
jeurs  :  sol-si-ré  et  fa-la-do,  et  les  accords  parfaits 
mineurs  construits  sur  les  notes  ré,  mi  et  la. 


La  progression  concernant  les  durées  et  les  mesures 
ne  saurait  partir,  nous  l'avons  dit,  ni  de  la  ronde  n 
de  la  mesure  à  quatre  temps,  et,  sur  ce  point  encore, 


Les  formes  de  l'enseignement  musical.  —  A  rete- 
nir les  moyens  ingénieux  et  pratiques  proposés  par 
les  pédagogies  musicales  que  nous  avons  étudiées, 
nous  pouvons  reconnaître  que  l'enseignement  de  la 
musique  vocale  à  l'école  revêt  dix  grandes  formes, 
s'exerçant  elles-mêmes  à  l'aide  de  procédés  nom- 
breux. 

Les  qualre  premières  concernent  l'éducation  de 
l'oreille  par  des  exercices  portant  sur  la  hauteur  des 
sons.  Ce  sont  : 

1°  la  forme  dictée,  analyse  ou  reconnaissance  des 
sons,  la  plus  importante  dans  les  méthodes  actives 
et  sensorielles.  Il  ne  s'agit  d'abord  que  de  dictée 
orale,  faite  par  phonomimie  lies  yeux  fermés)  ou  sur 
l'échelle  du  tableau.  La  dictée  orale  se  pratique  en- 
suite (2e  cycle)  sur  la  portée  muette  ou  la  main  por- 
tée. La  dictée  se  fait  enfin  par  écrit; 

2°  la  forme  lecture,  —  intonation  et  solmisation  à 
une  ou  plusieurs  voix,  —  exercices  qui  se  pratiquent 
d'abord  sans  notation,  puis  sur  la  portée  muette  et 
la  main  musicale,  et  qui  conduisent  au  solfège; 

3°  la  forme  audition  intérieure,  —  sons  pensés, 
séries  mentales,  points  d'appui,  lecture  mentale, 
reconstitutions  mélodiques  ou  harmoniques; 

4°  la  forme  création  mélodique  et  harmonique,  — 
partant  de  ces  reconstitutions  pour  aller  vers  les 
marches  harmoniques,  la  composition  improvisée, 
la  recherche  des  accords  par  audition,  —  l'orienta- 
tion chorale. 

Les  deux  formes  suivantes  concernent  aussi  l'édu- 
cation de  l'oreille,  mais  à  l'aide  d'exercices  portant 
sur  les  durées.  Ce  sont  : 
5°  la  métrique,  exercices  de  mesure  et  d'analyse; 
6°  la  rythmique,  exercices  portant  sur  le  temps, 
ses  multiples  et  ses  sous-multiples. 

Les  formes  7  et  8  se  rapportent  à  la  culture  vocale  : 
7°  la  culture  vocale  si  négligée  à  l'école  primaire, 
et  cependant  si  nécessaire,  et  qui  comprend  elle- 
même  :  respiration,  attaque  des  consonnes,  articu- 
lation, vocalisation; 
8°  Le  chant. 

Les  dernières  formes  concernent  l'étude  des  signes 
de  notation  et  de  la  grammaire  musicale.  Ce  sont  : 
9°  Exercices  graphiques,  écriture  musicale  et  dictée 
écrite; 
10°  Théorie  musicale. 

Ces  formes  d'enseignement  musical  comprennent 
des  exercices  qui,  classés  non  plus  suivant  leur  mode 


'NCVCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


d'application,  mais  selon  leur  objet,  leur  fonction 
utile,  pourraient  être  répartis  ainsi  : 

1"  Exercices  de  perception  des  sons  :  analyse  el 
reconnaissance  des  hauteurs  et  des  durées. 

2°  Exercices  d'émission  vocale  :  intonation,  culture 
vocale,  chant. 

3°  Exercices  de  mémorisation  :  étude  des  interval- 
les, audition  intérieure,  séries  mentales,  lecture 
mentale,  rappel  vocal. 

4°  Exercices  d'éducation  chorale  :  exercices  poly- 
phoniques d'intonation,  solmisation,  solfège  (à  deux 
et  trois  voix).  Dictée  orale  à  deux  ou  plusieurs  sons 
simultanés.  Recherche  des  accords.  Canons,  marches 
harmoniques,  chorals. 

5°  Exercices  de  création  musicale,  d'imagination 
(et  d'expression  personnelle).  Exercices  de  création 
mélodique  et  harmonique  (voir  plus  haut). 

G°  Exercices  d'entraînement  visuel  et  théorique  : 
lecture  solfiée,  exercices  graphiques,  dictée  écrite, 
théorie  musicale. 

7°  Exercices  de  culture  du  goût  musical  :  expres- 
sion, diction,  —  chant  et  chant  choral, —jugement 
et  appréciation.  —  Exécutions  et  auditions  musicales 
commentées. 


Les  procédés.  Eclectisme.  —  Des  procédés  de 
toutes  provenances,  permettant  de  suivre  la  pro- 
gression musicale,  de  faire  appel  à  l'activité  de  l'en- 
fant, de  cultiver  en  lui  oreille,  voix,  sens  musical, 
de  s'adresser  aux  facultés  diverses,  d'orienter  vers  le 
chant  choral,  de  créer  des  habitudes  et  des  besoins, 
sont  à  la  disposition  des  maîtres. 

Nous  ne  pouvons  songer  à  les  décrire  dans  le  dé- 
tail de  leur  mécanisme,  ni  d'en  donner  les  appli- 
cations si  variées.  Nous  nous  bornons  à  les  énumé- 
rer  et  à  les  présenter  d'un  mot. 

Dès  le  début,  se  proposeront  les  exercices  que  per- 
mettent les  enquêtes  acoumétriques,  les  tests,  les 
leçons  sensorielles  de  la  méthode  Mon'tessori,  et 
notamment  la  «  leçon  de  silence  »,  —  les  exercices 
élémentaires  de  la  rythmique  Jaques-Daixhozk,  et 
ceux  que  permet  la  daetylorythmie  modiliée.  (V. 
Dessirii  h,  p.  3655.) 

Les  idée*  de  durée,  de  métrique  et  de  rythmique 
seront  ainsi  connues  avant  les  signes  de  durée  et  de 
mesure. 

De  même,  on  fera  connaître  les  idées  relatives  à  la 
hauteur  des  sons  par  des  moyens  actifs  et  empiri- 
ques, sans  recourir  d'abord  aux  notes  sur  portée.  La 
phonomimie  naturelle,  ou  élémentaire  (v.  signes  ma- 
nuels de  Wilhem,  Itard,  Seguin),  s'exerçant  avec  les 
précautions  déjà  exposées  (les  yeux  fermés,  nbtam- 
nienll,  prendra  place  dans  chaque  leçon,  avec  les 
avantages  que  l'on  sait.  (V.  notre  ouvra; 
solfège,  p.  17,  Leduc,  édit.)  Ce  sera  le  meilleur  pro- 
cédé de  dictée  orale.  Ou  l'utilisera  aussi  en  solmi- 
sation à  une  ou  deux  voix,  ou  pour  l'étude  des  inter- 
valles (avec  appui  mental),  el  aussi  pour  l'étude  de 
chants-applications. 

Ces  mêmes  idées  de  hauteur,  ce-  mêmes  intona- 
tions seront  reprises  avec  un  autre  procédé  de 
grande  valeur  :  l'exercice  à  une-  ou  deux  baguettes 
sur  l'échelle  tracée  au  tableau,  ou  sur  des  séries  de 
noms  de  notes  (accords  ou  gammes)  écrites  en  co- 
lonnes verticales,  ou  sur  le  mât  qui  a  l'avantage  de 
séparer  les  sons  lixes  :  1,3,  5,  des  sons  2,  i,  6,  ;,  - 
ou  même  sur  le  mât  chiffré  des  galinistes.  Les  ligu- 


rations  verticales  (échelles,  noms  écrits  en  colonnes 
mâts)  se  prêtent  particulièrement  aux  exercices  à 
une  voix,  à  deux  voix,  conduits  à  l'aide  d'une  ou  de 
deux  baguettes,  —  aux  procédés  de  l'appui  mental, 
et  à  la  dictée  (un  élève  étant  au  tableau).  Les  figu- 
rations obliques  sont  moins  pratiques.  Ce  sont  : 
l'escalier  vocal  de  Wilhem,  les  escaliers  de  Duraigne 
et  de  Costesco,  les  séries  obliques  d'initiales  (Eyqi'em) 
les  lignes  obliques  de  Gédalge  et  de  Jacob. 

Les  procédés  d'audition  intérieure  sont,  après 
l'appui  mental  (décrit  plus  haut),  l'exercice  des  séries 
mentales  (séries  de  sons  tour  à  tour  chantés  en  me- 
sure, pensés  en  mesure,  chantés  à  nouveau)  (v.  p.  3653), 
procédé  pratiqué  sur  les  gammes,  sur  les  chants, 
sur  les  exercices  de  solfège  (lecture  mentale)  ou 
encore  à  la  baguette  ou  par  phonomimie,  —  les  re- 
constitutions mélodiques  (l'élève  chante  la  note  oubliée 
par  le  maître  dans  une  série  de  sons  vocalises,  séries 
du  pentacorde  ou  de  la  gamme),  —  les  reconstitu- 
tions harmoniques  (l'enfant  chante  le  son  qui  dispa- 
rait d'un  accord  exécuté  d'abord  complètement),  — 
le  rappel  vocal  (le  maître  indique,  par  phono,  ou 
sur  l'échelle,  ou  sur  la  portée,  une  certaine  suite  de 
sons;  l'élève,  sans  chanter,  enregistre  cette  succes- 
sion dans  sa  mémoire,  et,  au  commandement  du 
maître,  rappelle  ses  souvenirs  et  chante  cette  série). 

Les  procédés  de  création,  qui  plaisent  tant  aux 
enfants,  comprennent  d'abord  les  exercices  simples 
des  marches  mélodiques  et  harmoniques  (marches  ré- 
gulières, commencées  en  chantant,  suivant  les  indi- 
cations de  la  baguette,  et  continuées  par  les  élèves 
sans  indication),  —  la  création  mélodique,  qui  con- 
siste d'abord  à  improviser,  sur  des  paroles  données, 
une  courte  phrase  mélodique,  —  et  qui  comprend 
aussi  l'improvisation  des  paroles  et  de  la  mélodie 
(dialogues  chantés  entre  enfants,  compositions  mu- 
sicales enfantines),  —  la  création  harmonique,  per- 
mettant d'exécuter,  bouche  fermée,  ou  sur  une 
voyelle,  des  accords  de  trois  sons  sous  une  mélodie 
que  chante  un  autre  groupe,  —  et  d'arriver  à  accom- 
pagner ainsi,  empiriquement,  sans  connaissances 
harmoniques,  un  chant  populaire. 

Les  exercices  de  dictée  orale  ne  se  feront  pas  seu- 
lement par  phonomimie,  ou  sur  l'échelle  du  tableau, 
comme  il  vient  d'être  dit,  mais  aussi  avec  le  procédé 
des  formules,  et  aussi  sur  chants  appris.  Le  procédé 
de  la  Wartinière,  avec  les  ardoises,  acheminera  vers 
la  dictée  écrite. 

A  la  métrique  élémentaire  s'ajouteront  les  pro- 
cédés des  mesures  alternantes  [commandés  à  fi  voix 
ou   par   daetylorythmie),    d'analyse   rythmique  (V. 
Wilhem),  les  exercices  corporels  (Jaques-Dalcrozb), 
éatives. 

Les  exercices  de  culture  vocale  comprendront  des 
ces  de  respiration  nasale,  d'attaque  des  con- 
sonnes (sur  séries  descendantes,  partant  île  la  voix 
dite  «  de  tète  »,  voix  laryngée  supérieure),  de  voca- 
lisation, d'articulation.  Ils  conduiront  à  la  pratique 
de  la  voix  dite  ■  de  tête  »,  grâce  aux  s';ri'>s  descen- 
dantes et  au  choix  des  voyelles  surtout  nasales]  et 
des  consonnes  (labiales,  dentales  aidant  à  placei  le 
son  en  avant.  Les  émissions  gutturales  seront  com- 
battues. 

On  ne  manquera  pas  de  profiler  des  ressour 
la  méthode  directe  (Delcasso,  Combamei  ,  Di  paigni  I. 

Lorsqu'on  étudiera  la  place  des  notes  sur  la  por- 
tée, on  utilisera  la  main  portée  et  la  portée  muette. 
Sur  cette  portée  muette,  on  fera  solfier  à  une  ou  deux 
baguettes,   penser  el   analyser  des   sons,  vocaliser. 


TEC UNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE 

reconnaître  les  intervalles,  apprendre  des  chants.  On 
reprendra  les  exercices  à  transformations  (v.  p.  3633) 
pour  l'étude  des  rythmes,  et  la  langue  des  durées 
(Aimé  Paris),  ou  Igunétrique  de  Wilhem,  et  sa  lecture 
des  mélanges  (v.  p.  3638). 

Pour  aider  à  lire  plus  rapidement  et  obliger  les 
yeux  à  précéder  l'émission  vocale  dans  les  ex.  de 
solfège  au  tableau,  on  utilisera  l'écran  (A.  Drouin) 
(qui  cache  la  mesure  qu'on  exécute).  L'orophone  (E. 
Baudot)  permet  des  exercices  à  deux  voix,  et  tous  les 
exercices  pratiqués  avec  la  portée  muette.  (C'est  une 
tige  de  bois,  avec  cinq  baguettes  transversales,  et 
une  6e  baguette  très  courte  figurant  la  ligne  sup- 
plémentaire inférieure.  Le  maître  fait  face  aux  élèves 
en  indiquant  les  notes  [avec  ses  deux  index]  de 
chaque  côté  de  l'orophone.) 

L'Indicateur  vocal  (Wilhem)  et  le  méloplaste  (Galin) 
conduiraient  vers  le  solfège  dans  toutes  les  clefs  si 
l'on  en  avait  le  désir. 

Les  exercices  graphiques  comportent  les  tracés  au 
tableau,  sur  l'ardoise,  et  surtout  la  dictée  écrite,  qu'on 
ne  pratiquera  dans  sa  forme  dernière  et  complète 
qu'après  avoir  parcouru  les  étapes  de  préparation. 

Les  explications  théoriques  partiront  d'exemples 
concrets,  chantés,  et  bénéficieront  de  l'art  de  ques- 
tionner. Elles  n'occuperont  de  place  que  dans  les 
dernières  étapes,  et  qu'une  place  réduite,  si  l'on 
préfère  s'adresser  plus  à  l'activité  et  à  la  sensibilité 
de  l'enfant  qu'aux  facultés  intellectuelles  que  les 
autres  enseignements  ne  manqueront  pas  d'exercer. 

Et,  à  coté  de  tous  ces  moyens  bien  connus,  très 
vieux  pour  la  plupart,  les  maîtres  ingénieux  sauront 
en  utiliser  d'autres.  Ils  associeront  parfois  phono- 
mimie  et  daclylorythmie,  pratiqueront  (s'ils  dispo- 
sent d'un  harmonium)  la  dictée  à  plusieurs  voix  (bien 
plus  accessible  qu'on  ne  pense),  feront  découvrir 
leurs  propres  erreurs  de  solfège,  concrétiseront  bien 
des  explications  théoriques,  imagineront  des  gra- 
phiques de  plus  en  plus  clairs,  feront  aisément  trans- 
poser un  exercice  de  solfège,  ou  transposer  de  mé- 
moire les  notes  d'un  chant  connu,  sauront  rendre 
leur  enseignement  aussi  artistique,  aussi  joyeux  et 
attrayant,  aussi  vivant  et  actif  qu'il  convient,  lors- 
qu'on se  propose  d'amener  les  enfants  à  sentir  plus 
vivement.,  et  à  trouver,  dans  l'art  musical,  un  plaisir 
supérieur. 


Les  leçons  pratiqnes.  —  Les  leçons,  pour  être 
pratiques,  pour  mettre  en  jeu  toutes  les  formes 
d'activité,  tous  les  instruments  d'acquisition  des 
connaissances,  seront  donc  très  variées.  Elles  revê- 
tiront facilement  bien  des  formes  elles-mêmes. 

Elles  feront  toujours  place  à  la  culture  vocale,  à 
l'éducation  de  l'oreille,  à  la  formation  du  goût. 

Elles  seront  courtes,  mais  fréquentes.  Les  métho- 
des actives  permettent  de  tirer  le  plus  grand  profit 
des  leçons  de  vingt  minutes  dans  les  cours  prépara- 
toires et  élémentaires,  d'une  demi-heure  dans  les 
autres  cours.  L'infériorité  des  résultats,  dans  les 
écoles  où  l'heure  de  chant  est  donnée  en  une  seule 
fois,  est  bien  connue  des  observateurs. 

Elles  s'adresseront  à  tous  les  élèves,  particulière- 
ment à  ceux  qui  ont  le  plus  à  travailler  pour  arriver 
à  entendre,  à  différencier  les  sons,  à  chanter.  11  sera 
toujours  nécessaire  de  constituer  au  moins  deux 
divisions  qui  prendront  part  ensemble  à  tous  les 
exercices,  mais  suivant  des  modalités  qui  permet- 


tront d'amener  les  élèves  les  plus  faibles  à  produire 
un  effort  personnel,  à  se  passer  de  l'appui  des  plus 
forts,  et  à  progresser  plus  vite  que  par  imitation. 

LE   CHANT  A   L'ÉCOLE 

Première  culture  vocale.  Répertoire  «les  Écoles. 
Emprunts  aux  maîtres.  Chants  scolaires. 
Chansons  populaires.  Chansons  mimées.  Chan- 
sons-danses. Chants  d'entrée  et  de  sortie,  du 
malin  et  du  soir.  Influence  éducative. 

On  a  pu  croire  qu'il  y  avait  eu  grandeur  et  déca- 
dence du  chant  dans  les  écoles  de  France,  et  l'on 
rappelle  le  temps  où  l'instituteur,  à  peu  près  obligé 
de  tenir  l'orgue  à  l'église,  acquérait  de  ce  fait  une 
plus  grande  habileté  à  faire  chanter  ses  élèves.  Beau- 
coup d'enfants  n'y  gagnaient  rien.  Le  décret  de  1865, 
qui  invitait  à  consacrer  cinq  heures  par  semaine, 
dans  les  écoles  normales,  à  l'étude  du  plain-chant,  ne 
favorisa  guère  la  formation  professionnelle  des  insti- 
tuteurs en  ce  qui  concerne  l'enseignement  musical, 
ou   même  l'enseignement  du  chant  en  particulier. 

L'insuffisance  du  répertoire  des  écoles  n'aurait 
pas  permis,  d'ailleurs,  de  tirer  quelque  profil  artis- 
tique de  l'activité  du  maître. 

Les  programmes  des  écoles  oubliaient  l'enseigne- 
ment du  chant.  On  ne  chanta  guère  que  sous  l'im- 
pulsion de  Wilhem.  L'enseignement  du  chant  n'est 
plus  que  facultatif  en  1830,  et  disparait  complète- 
ment en  1867. 

11  ne  reparaît  qu'en  1883.  C'est  Jules  Ferry  qui,  à 
celte  date,  impose  le  chant  dans  les  écoles. 

Les  programmes  du  23  juillet  1883,  concernant 
l'enseignement  du  chant  et  de  la  musique  dans  les 
écoles  maternelles,  les  écoles  primaires,  les  écoles 
normales,  ont  subi  des  modifications  en  1887,  1893, 
1905,  1909,  1922,  mais  le  caractère  d'obligation  de 
cet  enseignement  n'a  jamais  été  remis  en  question. 

Cependant,  longtemps  encore  après  1883,  on  s'abs- 
tint de  faire  chanter  les  enfants,  dans  la  plupart  de: 
écoles. 

Deux  réformes  contribuèrent  à  la  pratique  du 
chant  à  l'école  : 

1°  une  modification  de  l'examen  du  brevet  élémen- 
taire de  capacité,  contraignant  les  aspirants  el  aspi- 
rantes à  présenter  une  liste  de  cinq  chants  scolaires, 
choisis  avec  soin  pour  les  besoins  de  l'école,  appris 
par  cœur,  el  à  justifier  de  connaissances  musicales 
(arrêté  147;  arrêté  du  3  août  1913;  arrêté  du  18  aoû 
1920); 

2°  l'introduction  d'une  épreuve  de  chant  à  l'exa- 
men du  certificat  d'étio/e<  primaires.  Cette  épreuve 
fut  d'abord  facultative  (instituée  pendant  la  guerre, 
elle  ne  pouvait  êlre  imposée).  Le  Conseil  supérieur 
la  rendit  définitive  (1923).  La  réforme  a  son  plein 
effet  depuis  1924- (arrêté  258,  1er  février  1924). 

Cette  épreuve  oblige  à  faire  chanter  dans  les  écoles 
primaires  (au  moins  dans  la  classe  préparant  à  l'exa- 
men du  C.  E.  P.).  On  chante  de  plus  en  plus.  Chante- 
t-on  de  mieux  en  mieux  ? 

L'instituteur  ne  peut  connaître  l'art  du  chanteur 
professionnel,  mais  il  peut  savoir  quelles  sont  les 
qualités  vocales  essentielles  (justesse,  souplesse,  voix 
placée)  qu'il  peut  obtenir  de  ses  élèves. 

«  Chanter  sans  effort  »,  tel  est  le  précepte  du  bon 
maître.  La  pratique  quotidienne  du  chant  peut  con- 
duire —  grâce  aux  bonnes  habitudes  de  respiration, 
de  tenue  du  corps,  d'émission  —  à  un  rapide  pro- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


grès.  La  condition  est  d'apprendre  à  respirer  (il  en 
a  été  question  plus  haut),  de  ne  chanter  qu'en  voix 
laryngée  supérieure  (voix  dite  «  de  tète  »). 

Si  l'éducateur  a  vite  fait  de  connaître  les  préceptes 
qui,  pour  lui,  se  réduisent  aux  formules  que  nous 
n'avons  pu  que  rappeler,  il  met  plus  de  temps,  en 
général,  à  se  décider  à  les  appliquer.  Il  ne  sent  pas 
que  le  fait  de  crier,  de  chanter  de  la  gorge,  cons- 
titue un  danger  pour  la  voix  d'abord,  et  pour  tout 
l'appareil  respiratoire  aussi,  et  qu'on  ne  peut  en- 
treprendre aucune  culture  musicale,  aucune  éduca- 
tion du  goût  si  l'on  n'a  pas  obtenu  d'abord  une 
voix  musicale.  —  Cette  voix  musicale  s'obtient  dès 
qu'on  veut  l'obtenir. 

Que  les  enfants  émettent,  à  mi-voix,  le  son  du 
mi  4  ou  du  mi  bémol  4  (quatrième  interligne  en  clef 
de  sol).  Qu'ils  descendent,  en  conservant  une  voix 
«  flùtée  »,  jusqu'au  son  placé  à  l'octave,  le  mi  3  ou 
le  mi  bémol  3.  Qu'ils  reprennent  cet  exercice  bouche 
fermée,  ou  sur  u,  i,  ou  même  en  utilisant  voyelle  et 
consonne  (comme  dans  les  syllabes  :  mu,  ni,  vou...)- 
Ils  s'habitueront  aussitôt  aux  résonances  nasopha" 
ryngiennes.  Leur  voix  nasalisée  répugnera  aux  émis" 
sions  gutturales. 

Seule,  la  voix  dite  «  de  tête  »  permettra  aux  en- 
fants de  chanter  sans  fatigue,  sans  «  baisser  »,  sans 
injustesse  (l'articulation  aidant),  et  de  donner  un 
intérêt  artistique  aux  exécutions  chorales. 

Celte  technique  du  chant  à  l'école  peut  sembler 
insuffisante  à  ceux  qui  connaissent  toute  la  com- 
plexité de  la  question.  Mais  nous  croyons  qu'il  con- 
vient de  dire,  sur  ce  point,  des  choses  très  simples- 
pour  qu'on  se  décide  à  tenter  quelque  culture  vocale 
élémentaire.  Il  serait  trop  tôt  de  se  montrer  plus 
exigeant.  , 

Le  répertoire  des  écoles  s'est  considérablement 
accru,  depuis  la  fin  du  siècle  dernier,  et  il  s'est  amé- 
lioré. Quelques  maîtres  de  la  musique  ont  écrit  des 
œuvres  chorales  pour  enfants  des  écoles  (chœurs  à 
voix  égales),  ou  pour  les  écoles  normales,  sociétés 
d'anciens  élèves,  amicales,  chorales  d'adultes  et  uni- 
versités populaires  (chœurs  à  voix  mixtes).  Citons 
Gounod,  Bazin,  Délires,  César  Franck,  Bourgault- 
Ducoudray,  Laurent  de  Rillé,  Henri  Maréchal,  Pes- 
sard,  MM.  Aug.  Chapuis,  Jaql'es-Dalcroze. 

Des  emprunts  directs  aux  œuvres  chorales  classi- 
ques sont  faits  par  les  éducateurs,  qui  trouvent 
parfois,  d'ailleurs,  des  recueils  constitués  pour  les 
écoles.  Aux  recueils  de  Wilhem  ont  succédé  ceux 
de  Delcasso,  Gautier,  Marmontel,  Ranhauser,  Bour- 
gault-Ducoudray  (recueils  de  Fontenay),  A.  Drouin 
et  les  recueils  des  Poèmes  de  la  vie  humaine  dont  les 
paroles,  écrites  sous  des  compositions  classiques, 
sont  dues  à  Maurice  Bouchor. 

Le  chant  scolaire,  par  son  esprit,  sa  facilité  d'exé- 
cution à  l'unisson,  sa  simplicité  de  facture  (plusieurs 
couplets  sur  la  même  mélodie),  est  appelé  à  conser- 
ver la  plus  grande  place  dans  le  répertoire  des  éco- 
les. «  Un  chant  scolaire,  dit  Maurice  Bouchor,  est 
celui  qui  —  sinon  composé  pour  l'école,  du  moins 
parfaitement  adapté  à  ses  fins  —  peut  être  mêlé  à 
sa  vie  de  chaque  jour  et  y  trouver  des  condilions 
d'exécution  n'ayant  rien  d'exceptionnel.  »  Mais  il  est 
trop  souvent,  hélas!  l'œuvre  de  pauvres  en  art.  La 
niaiserie  des  mélodies  se  rencontre  avec  la  banalité 
du  poème  et,  dans  la  plupart  des  chants  édités,  s'é- 
tale une  méconnaissance  complète  des  moindres 
qualités  d'adaptation  prosodique. 


Il  est  donc  à  souhaiter  que  l'éducation  musicale 
des  instituteurs  soit  telle  qu'elle  puisse  les  éclairer 
dans  le  choix  des  chants,  et,  qu'en  tout  cas,  la  vigi- 
lance des  professeurs  des  écoles  normales  soit  telle 
qu'aucune  production  inférieure  ne  pénètre  dans  ce 
milieu  de  futurs  éducateurs,  si  ce  n'est  pour  servir 
à  exercer  le  sens  critique  des  élèves,  sur  des  échan- 
tillons sans  valeur. 

Les  difficultés  à  vaincre  sont-elles  insurmontables? 
Est-il  impossible  d'exiger  qu'un  chant  scolaire  soit 
parfait  sous  le  triple  rapport  de  la  mélodie,  du 
poème  et  de  l'adaptation  prosodique?  Le  grand  et 
légitime  succès  des  chants  de  Maurice  Bouchor  est 
dû  à  trois  facteurs  :  à  la  fraîcheur,  h  la  beauté  des 
mélodies  populaires  qui  en  constituent  la  partie 
musicale,  —  aux  poésies  de  ce  maître,  qui  n'écrivait 
que  lorsqu'il  avait  une  idée  à  exprimer,  —  et  enfin 
à  son  souci  constant  de  donner  au  chant  une  unité 
parfaite.  Pour  réaliser  cette  dernière  condition,  le 
poète  a  demandé  à  la  mélodie  de  lui  dicter  le  sujet 
du  poème,  et  de  lui  dicter  l'accentuation  du  vers. 
Ainsi  la  musique  est  bien  l'accent  du  verbe;  musi- 
que et  poésie  ne  font  plus  qu'un,  par  le  fond,  par 
la  forme,  par  le  rythme. 

Le  fait  de  remplacer  les  paroles  des  chansons  po- 
pulaires par  des  paroles  nouvelles,  plus  descriptives, 
plus  scolaires  surtout,  n'a  pas  été  approuvé  de  tous. 
On  s'est  élevé  contre  ces  «  mutilations  »,  sollicitées 
cependant  par  de  vrais  amis  de  la  chanson  popu- 
laire comme  Bourgault-Ducocdray  et  Julien  Tier- 
sot.  Et  quoique  ces  mutilations  remontent  au  moins 
à  François  Coppée  et  à  Fr.  Bataille,  elles  ont  été  à 
peu  près  uniquement  reprochées  au  poète  Maurice 
Bouchor,  plus  fervent  admirateur  que  tout  autre  de 
la  chanson  populaire. 

En  tout  cas,  le  désir  si  légitime  d'entendre  nos 
écoliers  chanter  les  chansons  de  terroir  sous  leurs 
formes  originales  est  né  en  partie  du  grand  succès 
des  chants  de  Maurice  Bouchor  à  l'école.  Bien  des 
régionalisles,  bien  des  écrivains  comme  G.  de  Ner- 
val, George  Sand,  J.  Richepin,  bien  des  musiciens 
et  folkloristes  ont  contribué,  eux  aussi,  à  cette  re- 
prise des  traditions.  Des  recueils  de  chants  popu- 
laires ont  été  publiés,  notamment  V Anthologie  de 
Maurice  Bouchor  (Delagrave),  et  l'Anthologie  dit  chant 
scolaire  (Heugel).  «  La  simplicité  de  ces  chants,  dit 
M.  Emmanuel,  les  rend  éminemment  propres  à  servir 
les  intérêts  de  chaque  province  et,  dans  toute  école, 
les  intérêts  de  la  musique.  »  Et  il  ajoute  :  «  Le  jour 
OÙ  aux  insipides  solfèges,  imposés  trop  tôt  aux  en- 
fants et  qui  les  rebutent,  on  substituera  de  courtes 
mélodies,  d'allure  aisée  et  de  saisissant  caractère, 
on  aura  gagné  à  la  musique  des  milliers  d'écoliers 
qui  n'y  mordent  pas.  •> 

Il  y  a  bien  longtemps  que  les  trois  moyens  d'ex- 
pression :  parole,  musique,  geste,  se  trouvent  asso- 
ciés. Les  jeux  d'enfant  s'accompagnent  parfois  de 
chants.  En  retour,  les  chants  mimés  sont  considérés 
comme  particulièrement  récréatifs.  C'est  le  jeu  et 
l'action,  et  l'on  va  jusqu'à  dire  que  les  gestes  don- 
nent aux  chants  narratifs  ou  descriptifs  leur  maxi- 
mum de  signification.  Le  chaut  mimé,  si  les  gestes 
sont  discrets  et  de  bon  goût,  peut,  en  effet,  aider  par- 
fois à  l'expression  artistique.  Mais,  là  encore,  H  faut 
savoir  choisir.  L'un  des  dangers  maintes  fois  signa- 
lés consiste  à  faire  exécuter,  eu  chaulant,  des  gestes 
trop  nombreux,  trop  précipités,  trop  importants. 
Le  geste  ne  doit  nuire  ni  à  l'émission  vocale,  ni  à  la 
respiration  (les  deux  choses  se  tiennent),  ni  à  l'arli- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    3671 


culation,  ni,  enfin,  à  l'expression;  ce  qui  revient  à 
dire  qu'on  doit  renoncer  à  faire  exécuter  par  les 
mêmes  élèves  le  chant  et  les  gestes  de  toute  com- 
position réclamant  une  trop  grande  dépense  d'acti- 
vité. 11  est  toujours  possible  de  constituer  un  groupe 
de  chanteurs  —  n'ayant  pas  d'autre  tâche  que  de 
bien  chanter  —  et  un  groupe  d'élèves  chargés  d'in- 
terpréter les  gestes. 

La  chanson  dansée  est  d'origine  populaire,  et  la 
danse  constitue  un  autre  moyen  d'expression,  une 
mimique  ordonnée,  équilibrée  par  le  rythme.  L'é- 
cole peut  toujours  renouer  la  tradition,  utiliser  la 
danse  campagnarde  locale  comme  illustration  de 
ses  fêles  de  chant  ou  d'éducation  physique.  Là  sur- 
tout, il  convient  de  ne  pas  demander  aux  mêmes 
élèves  de  chanter  et  de  danser. 


On  aime,  dans  la  plupart  des  écoles  de  France,  à 
faire  chanter  les  enfants  dès  le  matin,  dans  la  cour 
de  l'école  ou  le  préau,  à  les  conduire  à  leur  classe 
en  chaulant.  Les  exécutions  sont  alors  très  souvent 
défectueuses  (dans  les  escaliers  surtout),  et  il  y  a  de 
telles  précautions  à  prendre  ici  qu'on  ne  peut  guère 
admettre  les  chants  d'entrée  et  de  sortie,  si  ce  n'est 
dans  des  cas  exceptionnels.  liien  préférables  sont 
les  chants  du  matin  et  du  soir,  chantés  dans  la  classe 
ou  le  préau,  sur  place,  avec  soin,  avec  gravité  même, 
soit  pour  commencer  avec  bonheur  et  calme  une 
journée  de  travail,  soit  pour  rassembler  les  voix  et 
les  cœurs  des  enfants  qui  vont  se  quitter1. 

De  tous  les  exercices  musicaux,  le  chant  est  évi- 
demment celui  qui  a  la  plus  grande  influence  édu- 
cative. C'est  le  premier  éducateur  du  goût  musical, 
et  même  du  goût  en  général.  L'enfant,  comme  le 
constate  M.  V.  d'Indy,  peut  apprécier  la  beauté  des 
sons,  des  mélodies,  des  accords  bien  avant  de  recon- 
naître la  beauté  des  lignes,  des  couleurs,  des  formes. 
«  Dès  le  premier  âge,  dit-il,  l'enfant,  indifférent  à  la 
forme  d'un  monument  et  incapable  de  discerner  la 
valeur  des  lignes  d'un  dessin,  tressaille  et  semble 
intéressé  dès  que  son  oreille  perçoit  une  suite  de 
sons  musicaux  chantés  ou  joués  sur  un  instrument- 

«  Plus  tard,  l'enfant  passera  devant  Notre-Dame 
de  Paris  sans  même  lever  la  tête,  il  est  encore  trop 
petit  pour  s'émerveiller  de  cette  immensité,  mais  il 
s'efforcera  de  retrouver  dans  sa  jeune  mémoire  telle 
chanson  qu'il  aura  entendu  chanter. 

«  Nous  sommes  donc  bien  fondés  à  énoncer  cet 
axiome  que  la  musique,  et  la  musique  seule,  pos- 
sède le  pouvoir  d'ouvrir,  chez  l'enfanl,  la  voix  mys- 
térieuse par  laquelle  l'homme  conscient  de  sa  pen- 
sée sera  conduit  plus  lard  à  comprendre  et  à  aimer 
l'œuvre  de  Beauté2.  » 

C'est  une  constatation  qu'il  faut  faire  el  refaire 
sans  cesse  pour  que  les  éducateurs  se  montrent 
beaucoup  plus  difficiles  sur  le  choix  des  chants,  sur 
leur  interprétation  fidèle  el  expressive,  et  sur  la 
qualité  vocale,  puisque  toute  la  culture  esthétique 
en  dépend.  Qu'ils  reprennent  pour  cela,  non  pas 
seulement  la  tradition  des  provinces,  mais  l'habitude 
presque  perdue  du  chant  choral.  C'est  la  polyphonie 
vocale  qui  aidera  le  plus  puissamment  à  la  forma- 
tion artistique  de  l'enfant.  Le  chant  à  une  voix  est 
surtout  récréatif.   Les   arrangements  à  deux  voix 


.  L'Enseignement  m» 
.  //apports  du  Congr 


icàl.  Annexe  (Leduc). 
s  de  l'art  a  l'école  (26,  qu 


i  Béthi 


laissent  beaucoup  à  désirer,  en  général.  Mais  le 
chœur  à  trois  voix  égales  ou  à  quatre  voix  mixtes 
constitue  l'une  des  plus  belles  formes  musicales.  H 
est  poésie,  mélodie,  harmonie,  il  est  architecture 
musicale.  C'est  la  forme  qu'il  faut  populariser  inlas- 
sablement, par  de  belles  exécutions  dans  les  fêtes 
scolaires,  régionales,  nationales  et  civiques.  Il  est 
certainement  possible,  sans  attendre,  de  faire  qu'on 
chante  en  chœur  dans  les  écoles  de  France  et  autour 
de  l'école,  de  faire  qu'on  chante  bien  et  de  belles 
œuvres.  Il  est  possible  de  demander  à  l'enseigne- 
ment musical  bien  plus  qu'il  n'a  donné  jusqu'ici,  et 
de  créer  en  France  «  une  Iradition  chorale  popu 


PERSONNEL   ENSEIGNANT 

Les  Iiisiiiuli'iii's.  Les  Professeurs  spéciaux. 
L'Inspection  des  écoles.  Les  examens  el  sanc- 
tions de  l'enseignement  musical.  L'action.  So- 
ciétés corporatives,  bulletins. 

Bien  des  écoles  normales  essayent  de  mettre  à 
profit  le  temps  (trop  court)  attribué  aux  études 
musicales,  pour  former  des  maîtres  capables  d'en- 
seigner le  chant  et  la  musique.  Mais  les  résultais 
ne  répondent  pas  à  l'elfort  des  maitres,  surtout  dans 
les  écoles  normales  d'instituteurs,  parce  que  l'el- 
fort des  élèves  se  produit  trop  tard.  L'initiation  n'a 
pas  été  faite  en  temps  favorable,  dès  l'école  pri- 
maire. Ces  élèves  deviennent  maîlres  à  leur  tour, 
et  usent  facilement  du  prétexte  d'incompétence  pour 
ne  donner  aucun  enseignement  musical.  Et  leurs 
élèves  seront  donc  très  mal  préparés  à  l'enseigne- 
ment, s'ils  se  destinent  aux  E.  N.  Il  y  a  là  un  cercle 
vicieux. 

Cependant,  l'étude  d'un  instrument  (elle  figure 
au  programme)  et  surtout  d'un  instrument  à  sons 
fixes,  permettrait,  en  trois  années,  de  suppléer  au 
défaut  d'initiation,  et  à  loule  insuffisance  profes- 
sionnelle. C'est  le  remède. 

Les  élèves-maitres  sont  donc  faibles,  à  leur  entrée 
à  l'E.  N'.,  et  il  faudra  consacrer  à  leur  propre  initia- 
tion un  temps  précieux,  qui  pourrait  être  utilisé  à 
leur  donner  une  pédagogie  pratique,  des  moyens  et 
procédés  d'enseignement,  l'habitude  de  diriger  des 
chants  et  des  chœurs,  des  indications  sur  les  voix 
des  enfants,  un  répertoire  choral  abondant,  des  no- 
tions d'harmonie  même. 

Or,  actuellement,  ils  ne  peuvent  acquérir  de  qua- 
lités professionnelles,  une  méthode  d'enseignement 
propre  aux  écoles  primaires,  que  si  le  professeur 
précisément  recours  à  cette  méthode  avec  eux,  et 
s'ils  sont  amenés  à  l'observer,  à  la  pratiquer  parfois, 
dans  un  enseignement  mutuel. 

Ils  peuvent  au  moins,  par  l'exercice,  par  le  chant 
d'ensemble,  cultiver  leur  sentiment  artistique,  être 
amenés  à  ressentir  l'émotion  d'art,  à  aimer  ce  qu'ils 
auront  à  enseigner,  à  vibrer,  pour  pouvoir  un  jour 
faire  ressentir  celte  même  émotion  à  leurs  élèves. 
Donc,  si  l'on  ne  peut  faire  un  artiste  de  chaque  ins- 
tituteur, au  moins  peut-on  en  faire  un  homme  de 
goût,  grâce  aux  auditions  musicales  commentées,  et 
grâce  surtout  à  l'étude  et  à  l'exécution  de  pages 
chorales  judicieusement  choisies. 

D'ailleurs,  si  la  situation  de  l'enseignement  musi- 
cal, dans  les  écoles,  est  loin  d'être  satisfaisante,  on 
ne  saurait  s'en  prendre  seulement  à  la  faible  pré- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


paralion  musicale  des  candidats  aux  écoles  norma- 
les. Les  encouragements,  les  directions,  les  redres- 
sements ne  font-ils  pas  souvent  défaut?  Un  éminent 
inspecteur  général,  membre  du  Conseil  supérieur  de 
I"I:  P.,  M.  Gilles,  écrit  : 

«  Comment  les  résultats  sont-ils  si  médiocres? 
Que  l'école,  et  en  particulier,  dans  l'école,  l'institu- 
teur soient  en  partie  responsables  d'une  situation 
assurément  regrettable,  c'est  une  opinion  assez  ré- 
pandue et  à  laquelle  nous  pouvons  tout  d'abord  être 
tentés  de  nous  associer,  dans  la  mesure  du  reste  où 
elle  ne  met  point  en  cause  l'honnête  professionnelle 
du  maître,  et  où  elle  n'exagère  point  la  puissance  de 
son  action.  L'enfance  se  prête  mieux  que  l'âge  adulte 
à  l'éveil  du  goût  musical,  et  puisque  la  famille  est 
encore  impuissante  à  cette  révélation,  nous  nous 
tournons  vers  l'instituteur  pour  lui  demander, 
comme  d'habitude,  de  se  substituer  aux  parents, 
et,  mandataire  de  la  nation,  de  réaliser  le  progrès 
national  que  nous  avons  conçu.  Et  nous  nous  éton- 
nons. «  L'enfant  chante  naturellement  jusqu'au  m  o- 
ment  où  il  entre  à  l'école  (la  plainte  de  Pécaut  est 
encore  de  saison).  Entre  vos  mains,  hélas!  il  cesse 
de  chanter.  Cette  expression  libre  et  spontanée  de 
la  vie  s'arrête...  »  Ayant  ainsi  situé  le  mal,  —  mais, 
prenons  garde,  y  avons-nous  bien  réussi?  —  nous 
trouverions  vite  le  remède  :  communiquer  aux  ins- 
tituteurs la  foi  qui  fécondera  leur  zèle. 

«  Complexe  est  déjà  le  problème  dont  la  solution 
conduirait  à  ce  premier  résultat  que  nous  devons 
en  effet  poursuivre  avec  persévérance.  La  foi  peut 
se  gagner  par  un  effort  obstiné  de  piété  éclairée  : 
nos  instituteurs  ont-ils  tous  l'instruction  qui  peut 
éclairer  leur  religion?  La  foi  peut  jaillir  d'une  opé- 
ration de  la  grâce  :  ont-ils  tous  rencontré  sur  leur 
route  la  manifestation  capable  de  les  émouvoir  au 
plus  profond  de  leur  être  et  de  leur  faire  croire 
désormais  aux  effets  d'une  puissance  mystérieuse, 
excitatrice  des  forces  vives  de  rame?  Il  est  aussi 
une  contagion  de  la  foi  :  qui  de  nous  n'a  connu  cet 
élan  passionné  qu'accélère  l'entraînement  d'une 
collectivité  communiant  dans  un  même  idéal?  Point 
n'est  besoin  ici  d'évoquer  avec  plus  de  précision  les 
vivifiantes  campagnes  d'apôtres  du  chant  à  l'école  : 
assez  souvent,  j'en  ai  retrouvé,  au  cours  de  mes 
tournées,  des  traces  heureuses  que  le  temps  n'avait 
pas  effacées.  Mais  ces  campagnes  atteignent-elles, 
autant  qu'il  serait  désirable,  les  ignorants,  les  incré- 
dules, les  découragés? 

«  Il  arrive,  au  contraire,  qu'au  manque  de  con- 
fiance en  soi,  aux  hésitations  individuelles  sur  l'inté- 
rêt de  l'activité  sollicitée,  s'ajoute,  dans  l'esprit  des 
instituteurs,  un  doute  bien  plus  grave.  Les  chefs 
eux-mêmes,  les  chefs  ont-ils  tous  la  foi?  Il  en  est  qui 
ferment  complaisamment  les  yeux  sur  des  défail- 
lances évidentes  dans  l'enseignement  et  la  pratique 
du  chant;  et  les  élèves  savent  aussi  bien  que  les 
maîtres  avec  quelle  bienveillance  «  particulière  » 
sont  notées  généralement  dans  les  examens  les 
épreuves  musicales.  » 

Ne  faut-il  pas  reconnaître  aussi  que  le  trouble 
apporté  dans  les  programmes  de  chant  par  l'adop- 
tion de  systèmes  qui,  tour  à  tour,  ont  obtenu  l'appui 
des  pouvoirs  publics,  n'est  pas  étranger  au  désarroi 
dont  soutirent  les  écoles?  Si  les  méthodes  éclecti- 
ques semblent  vouloir  garderie  dernier  mot,  il  n'en 
a  pas  toujours  été  ainsi.  Que  vaudra  l'avenir.' 


L'enseignement  musical  est  confié  à  des  profes- 
seurs spéciaux  dans  la  plupart  des  lycées,  collèges, 
écoles  normales,  écoles  primaires  supérieures.  Ces 
professeurs  d'enseignement  musical,  qu'il  ne  faut 
pas  confondre  avec  les  professeurs  de  musique  ins- 
trumentale, qui  sont  autorisés  à  donner  des  leçons 
particulières  aux  élèves  de  ces  établissements,  sont 
régulièrement  nommés  et  rétribués,  et,  pour  la  plu- 
part, diplômés.  Quelques  professeurs  d'enseigne- 
ment général,  de  sciences  ou  de  lettres,  notamment 
dans  les  écoles  normales  et  dans  les  écoles  pri- 
maires supérieures,  possèdent  le  diplôme  spécial 
et  sont  chargés  du  cours  de  chant.  Le  nombre  des 
professeurs  non  diplômés  diminue  chaque  année. 

Le  certificat  d'aptitude  à  l'enseignement  du  chant 
et  de  la  musique  dans  les  écoles  normales  et  primaires 
supérieures  est  le  même  qu'ont  à  produire  les  candi- 
dats aux  postes  des  lycées  et  collèges. 

Il  comprend  un  degré  élémentaire  et  un  degré  su- 
périeur. 

Les  épreuves  du  degré  élémentaire  sont  :  1.  Ré- 
daction sur  des  questions  d'enseignement  musical 
(mélhodes  et  procédés).  2.  Dictée  musicale  facile. 
3.  Lecture  d'une  leçon  de  solfège,  en  clef  de  sol,  sans 
accompagnement.  4.  Exécution  d'un  chant  scolaire, 
de  mémoire,  désigné  par  la  commission  sur  une 
liste  de  dix  chants  scolaires  présentés  par  le  candi- 
dat. 5.  Exécution  d'un  morceau  de  chant  classique 
(accompagné).  6.  Interrogations  théoriques  élé- 
mentaires. 1.  Leçon  pratique  faite  au  tableau  noir. 
8.  Exécution  à  première  vue,  sur  le  piano  ou  le 
violon,  d'un  accompagnement  simple. 

Les  épreuves  du  degré  supérieur  sont  : 

1°  Une  rédaction  sur  les  questions  d'enseignement, 
ou  d'art  musical,  ou  d'histoire  de  la  musique; 

2°  Une  dictée  musicale,  vocalisée  par  phrases  de 
deux  mesures; 

3°  La  réalisation  à  quatre  parties  vocales  d'une 
basse  donnée  et  chiffrée.  De  plus,  un  chant  étant 
donné,  le  candidat  écrit  sous  ce  chant  une  basse, 
chiffrée  ou  non  chiffrée,  qu'il  peut  réaliser  pour  le 
piano,  ou  mieux  encore  à  quatre  parties  vocales; 

4°  La  lecture  d'une  leçon  de  solfège  écrite  en 
clefs  de  sol  et  de  fa: 

5°  La  lecture  à  première  vue  d'un  chant  scolaire 
inédit  (le  candidat  chante  la  première  partie  avec 
les  paroles,  puis  il  solfie  la  seconde); 

6°  L'exécution,  à  première  vue,  sur  le  piano  ou  sui- 
te violon,  d'un  accompagnement  simple,  —  qu'on 
transpose  ensuite; 

7°  Des  interrogations  sur  la  théorie  musical,.,  les 
éléments  de  l'harmonie  et  l'histoire  de  la  musique  : 
une  liste  des  œuvres  et  des  auteurs  sur  lesquels 
portent  principalement  les  questions  se  rattachant  a 
l'histoire  de  la  musique  est  arrêtée  tous  les  trois  ans; 

8°  Une  leçon  théorique  et  pratique  d'enseignement 
musical. 

Ces  épreuves  sont  notées  suivant  leur  importance. 
La  dernière  (épreuve  pratique)  jouit  d'un  coefficient 
double,  ainsi  que  le  solfège. 

Les  diplômés  ne  sont  pourvus  d'un  poste  qne  sur 
leur  demande  et  si  des  vacances  de  postes  se  pro- 
duisent. Ils  peuvent  se  faire  inscrire  soit  au  minis- 
tère, soit  au  bureau  du  recteur  de  l'académie  dans 
laquelle  ils  désirent  enseigner. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE      sr,: 


La  situation  qui  leur  est  faite  dépend  surtout  du 
nombre  d'heures  d'enseignement  qu'ils  sont  charges 
de  donner. 


Dans  les  écoles  primaires  publiques  de  Paris,  de 
la  plupart  des  villes  de  banlieue  et  de  quelques  villes 
de  province,  les  cours  de  chant  sont  également  confiés 
à  des  professeurs  spéciaux. 

1,'organisation  n'est  vraiment  complète  qu'à  Paris. 
Elle  le  sera  sans  doute  à  bref  délai  dans  tout  le  dé- 
partement de  la  Seine. 

Les  instituteurs  et  institutrices  des  écoles  pari- 
siennes doivent  enseigner  le  chant  et  les  premières 
notions  musicales  dans  les  cours  préparatoires  et  les 
cours  élémentaires,  cours  dans  lesquels  les  profes- 
seurs spéciaux  se  rendent  également  (depuis  octobre 
1030),  mais  pour  un  temps  insuffisant. 

Un  cours  normal  leur  permet  de  compléter  leurs 
études  musicales  et  professionnelles. 

Ils  peuvent  acquérir  le  Certificat  d'aptitude  à  l'en- 
seignement du  chant  dans  les  écoles  communales  de  la 
Ville  de  Paris,  degré  élémentaire,  qui  leur  vaut  une 
allocation  supplémentaire. 

L'enseignement  musical,  dans  les  cours  moyens, 
les  cours  supérieurs  et  complémentaires,  est  confié, 
depuis  1853,  à  des  professeurs  spéciaux  des  deux 
sexes.  Cependant,  des  professeurs  femmes  sont  fré- 
quemment pourvus  de  postes  dans  les  écoles  de  gar- 
çons. 

Ils  doivent  être  en  possession  du  Certificat  d'apti- 
tude «  l'enseignement  du  chant  dans  1rs  écoles  commv.- 
nalesde  la  Ville  de  Paris,  degré  supérieur. 

L'examen  a  lieu  irrégulièrement,  suivant  les  be- 
soins du  service,  pour  les  candidats  ayant  de  18  à 
30  ans  (aucune  dispense  d'âge).  Il  compte  : 

1"  des  épreuves  écrites  :  a)  dictée  musicale,  6)  ré- 
daction sur  un  sujet  de  pédagogie  ou  d'art  musical, 
c)  harmonie  (basse  non  chiffrée,  et  chant,  réalisation 
à  quatre  parties  vocales); 

2°  des  épreuves  orales  :  a)  lecture  à  haute  voix 
d'un  texte  français,  &)  solfège  à  changements  de  ciels, 
c)  chant  d'une  mélodie  (accompagné),  d)  leçon  au 
tableau  hoir,  e)  interprétation  à  vue  d'un  chant  avec 
paroles,  et  transposition  de  la  mélodie; 

3°  des  épreuves  pratiques,  subies  dans  les  écoles, 
après  un  stage  et  des  suppléances. 

En  1022,  1928,  1929,  le  nombre  des  candidats  à 
ad-i.ettre  a  été  limité.  L'examen  est  donc  devenu 
«  concours  ». 

Les  candidats  reçus  aux  épreuves  écrites  et  orales 
sont  admis  à  faire  des  suppléances.  Ils  subissent 
ensuite  les  épreuves  pratiques,  et  sont  pourvus  de 
postes  fixes. 

Leurs  émoluments  dépendent  de  la  durée  du  ser- 
vice hebdomadaire,  et  de  leur  classe  d'ancienneté. 

Il  existe,  à  Paris,  des  cours  municipaux  d'adultes, 
publics,  pour  chaque  sexe.  Ces  cours  sont  confiés 
aux  professeurs  de  la  ville.  Ils  ont  lieu  deux  fois  par 
semaine,  le  soir,  dans  diverses  écoles  parisiennes. 
Les  adultes  y  apprennent  le  chant,  le  chant  choral, 
le  solfège. 


Les  instituteurs  et  institutrices  sont  souvent  invi- 
tés par  MM.  les  inspecteurs  de  l'enseignement  pri- 
maire à  faire  exécuter  un  chant  d'ensemble  au  cours 
des  inspections.  Cet  usage  se  généralise. 

Les  professeurs  spéciaux  de  chant  des  lycées  et 


collèges,  des  écoles  normales  et  écoles  primaires 
supérieures  sont  inspectés  par  MM.  les  inspecteurs 
généraux,  et  d'académie,  qui  se  rendent  dans  ces 
établissements  pour  y  inspecter  d'ailleurs  tous  les 
enseignements.  Il  y  eut,  à  diverses  reprises,  des  ins- 
pecteurs spéciaux  d'enseignement  musical.  Tel  fut 
M.  Dopaigne,  chargé  de  l'inspection  générale  de  la 
musique  dans  les  écoles  normales;  tel  fut  J.  Comra- 
rieu,  inspecteur  d'académie,  chargé  d'une  mission 
d'inspection  générale  du  chant  choral  dans  les  lycées 
et  collèges  de  garçons  et  de  jeunes  filles,  et  tel  est 
aujourd'hui  M.  Ch.  l'Hôpital. 

L'inspection  du  chant  dans  les  écoles  de  la  Ville 
de  Paris  comprend  un  inspecteur  principal  et  trois 
inspecteurs.  Les  inspecteurs  visitent  les  cours  d'a- 
dultes, les  cours  du  jour,  les  deux  cours  municipaux 
d'aveugles  (cours  d'accompagnement  et  cours  d'ac- 
cord des  pianos),  président  les  examens,  les  concours 
des  écoles,  soumettent  les  nominations  et  les  pro- 
motions des  professeurs  à  la  signature  du  préfet. 


Les  sanctions  de  renseignement  musical  ne  sont 
pas  assez  nombreuses  ni  assez  efficaces. 

A  Paris,  depuis  1860,  ont  lieu  des  concours  de 
chant  choral  entre  les  écoles.  Ces  concours  s  étendi  ul 
aux  écoles  de  la  banlieue  parisienne. 

Dans  la  Seine,  les  élevés  exécutent  un  petit  chant 
à  l'unisson,  un  chœur  à  plusieurs  voix,  el  < 
une  leçon  de  solfège. 

11  y  eut  parfois  des  concours  d'honneur  entre  les 
écoles  ayant  eu  les  meilleures  notes  aux  concours 
éliminatoires. 

Ces  épreuves  n'instituent  pas  en  réalité  un  concours 
entre  les  diverses  écoles,  et  le  jury  (inspecteurs  et 
professeurs!  n'est  pas  limité  dans  le  nombre  des  prix 
à  décerner. 

Il  a  été  parlé  de  l'épreuve  de  chant  introduite  en 
1024  à  l'examen  du  certificat  d'études  primaires 
(V.  p.  3669).  Les  élèves  doivent  présenter  une  liste 
d'au  moins  trois  chants  scolaires,  appris  par  cœur. 
Us  ont  à  exécuter  l'un  de  ces  chants,  désigné  par 
l'examinateur  (noté  de  0  à  S).  Dans  la  Seine,  les 
chants  sont  déterminés  par  l'inspection  du  chant, 
qui  en  fait  connaître  le  texte  dès  le  début  de  l'année 
scolaire. 

Les  aspirants  au  brevet  élémentaire  subissent,  eux 
aussi,  une  épreuve  de  chant,  et  ont  |v.  p.  3069)  à 
prouver  quelques  connaissances  musicales.  On  leur 
demande  donc  parfois  de  solfier  les  chants  dont  ils 
apportent  le  texle,  ou  de  solfier  à  vue  un  court  et 
facile  exercice.  Parfois  aussi,  on  se  contente  de  leur 
poser  des  questions  de  pure  théorie,  sans  même  exi- 
ger d'exemples  chantés,  —  ce  qui  ne  permet  nulle- 
ment de  connaître  leur  culture  musicale.  —  Les 
examinateurs  des  jurys  parisiens  ont  été  invités  à 
noter  de  0  à  20,  en  décomposant  ainsi  :  chant,  de 
Oà  8;  choix  des  chants,  0  à  2;  solfège,  Oà  S;  théorie, 
0  à  2. 

Ces  épreuves  sont,  et  depuis  longtemps,  considé- 
rées comme  insuffisantes.  Les  épreuves  des  deux 
premiers  examens  semblent  sanctionner  l'étude  du 
chant  par  audition,  et  il  n'est  que  trop  vrai  qu'on 
peut  en  triompher  après  un  copieux  serinat;e. 

Il  semble  surtout  inadmissible  que  Fépreuve  de 
solfège  ne  soit  pas  obligatoire,  lorsque  l'acquisition 
d'un  brevet  donne  le  droit  d'enseigner. 

L'épreuve    du   brevet    supérieur  ne    permet   pas 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


de  s'assurer  de  la  somme  des  connaissances  musi- 
cales acquises  par  le  candidat.  Elle  permet  encore 
moins  de  reconnaître  sa  valeur  professionnelle,  ses 
aptitudes  à  enseigner  le  chant  et  la  lecture  musicale 
à  ses  futurs  élèves.  Le  but  a  été  perdu  de  vue. 

Il  est  juste  de  dire,  cependant,  que  celle  lacune  a 
été  aperçue,  et  qu'on  a  essayé  d'y  remédier  en  par- 
lie  en  obligeant  les  instituteurs  et  institutrices,  can- 
didats à  l'examen  du  Certificat  d'aptitude  pédago- 
gique, à  faire  une  «  leçon  de  chant  »  à  leurs  élèves, 
en  présence  du  jury  de  cet  examen,  —  et,  d'autre 
part,  en  faisant  subir  une  épreuve  de  musique  plus 
complète  aux  candidats  au  professorat  des  classes  élé- 
mentaires des  lycées  et  collèges. 


Sociétés  corporatives.  —  En  1906,  fut  fondée 
l'A.  P.  M.,  «  Association  Amicale  des  Professeurs  char- 
gés de  l'enseignement  de  la  musique  dans  les  éta- 
blissement d'instruction  publique  »,  association  d'in- 
térêt corporatif  et  pédagogique,  qui  a  son  bulletin, 
sa  bibliothèque,  sa  caisse  de  pensions,  et  qui  a  orga- 
nisé d'utiles  congrès  (1912-1921). 

La  société  française  l'Art  à  l'Ecole,  fondée  en  1907, 
s'attache  à  la  formation  du  goût  par  l'initiation  de 
l'enfant  à  la  beauté  des  lignes,  des  couleurs,  des 
formes,  des  mouvements  et  des  sons.  Elle  a  organisé 
deux  congrès  d'enseignement  musical  (Lyon  1912, 
Paris  1923).  Ce  dernier  congrès  eut  un  grand  reten- 
tissement. Les  rapports  de  MM.  Gilles,  Marcel  Pré- 
vost, Fhossard,  V.  d'Indy,  Aug.  Dorchain,  G.  Parés, 
Boutin,  P.  Làndormy,  M.  Chevais,  Expert,  Paul  Vidal, 
M.  Emmanuel,  M.  Bouchor,  11.  Maréchal,  Hàuchard, 
J.  Tiersot,  Sevrette,  Charles-Brun,  Allard,  Roger- 
Ducasse,  Jaqces-Dalcroze,  Rey-Golliet,  Ohmann 
H.  Régnier,  J.  Teillet,  Aug.  Chapuis  se  trouvent  réu- 
nis en  un  volume. 

Les  professeurs  de  chant  de  la  Ville  de  Paris  créè- 
rent, en  1918,  sous  le  nom  de  «  La  Solidarité  »,  une 
association  amicale  pour  la  défense  de  leurs  intérêts 
auprès  de  la  Ville  de  Paris,  et  qui  se  transforma  en 
syndicat. 

En  1921,  la  Société  française  de  Pédagogie  créa  une 
section  musicale  qui  organise  des  séries  de  confé- 
rences pédagogiques. 

En  1928,  naissait  le  Syndicat  national  des  profes- 
seurs de  chant,  qui  se  propose  d'obtenir  plus  d'unité 
dans  les  fonctions,  traitements,  horaires  des  profes- 
seurs des  diverses  séries  d'établissements,  plus  de 
stabilité  et  de  garanties,  —  et  d'obtenir  enfin  un  sta- 
tut pour  les  professeurs  de  lycées  de  garçons. 

Il  existe  une  Association  galiniste,  pour  la  diffusion 
'  de  la  méthode  Gaux,  Paris,  Ciif.vé. 


Quatre  de  ces  groupements  ont  un  bulletin  : 
l'A.  V.  M.,  l'Art  'i  l'Ecole,  l'Association  galiniste,  la 
Société  de  pédagogie. 

La  Solidarité  et  le  Syndicat  national  utilisent  Le 
mensuel  la  Musique  à  l'Ecole. 

Ce  mensuel  a  été  fondé  en  1912.  Là  Musique  à 
l'Ecole  soutient  l'action  professionnelle  des  amicales 
et  syndicats,  aide  à  la  diffusion  des  méthodes  péda* 
gogiques  pratiques,  des  procédés  d'enseignement. 
Elle  publie  des  études  artistiques,  pédagogiques,  — 
des  documentations  concernant  les  fêtes  scolaires  et 
régionales,  —  des  chants,  répertoires  d'œuvres  cho- 
rales, —  favorise  la  publication  d'ouvrages  d'ensei- 


gnement, de  recueils  de  chants.  Elle  a  un  service  de 
préparation  aux  professorats  de  chant. 

Les  journaux  pédagogiques,  qui  s'adressent  aux 
instituteurs  et  institutrices,  font  paraître  un  chant 
scolaire  par  mois,  pour  la  plupart.  Quelques-uns  ont 
publié  des  indications  propres  à  favoriser  l'applica- 
tion des  programmes  de  1922,  et  des  Instructions 
de  1923. 


Les  progrès  réalisés  dans  l'enregistrement  des 
œuvres  musicales  et  leur  reproduction  par  phono- 
graphe, ainsi  que  les  progrés  de  la  T.  S.  F.,  sont  de 
nature  à  favoriser  grandement,  dans  l'avenir,  la  cul- 
ture musicale  des  enfants.  Le  phonographe  facilite 
l'application  des  programmes  relatifs  à  la  présen- 
tation des  chefs-d'œuvre  de  l'art  musical  dans  les 
lycées  et  collèges,  et  permet  d'espérer  que  l'idée  du 
concert  à  l'école  se  réalisera. 

La  radiodilfusion  a  déjà  permis  de  donner  de 
petits  concerts  pour  les  écoles.  Un  journal  pédago- 
gique a  créé  «  l'heure  radiophonique  ». 

De  nouvelles  utilisations  de  ces  deux  belles  inven- 
tions sont  certaines. 


APPENDICE 

A  L'ÉTRANGER 

Il  y  aurait  certainement  profit  à  connaître  la  situa- 
lion  de  l'enseignement  musical  à  l'étranger,  à  dire 
à  quels  résultats  on  aboutit,  et  par  quels  moyens. 
On  ne  se  trouverait  plus  porté  à  conclure  nécessai- 
rement que  nos  voisins  ont  su  organiser  cet  ensei- 
gnement plus  vile  et  mieux  que  nous-mêmes.  Et 
l'on  s'étonnerait  de  voir  que  l'amour  de  quelques 
peuples  pour  le  chant  choral  n'est  pas  nécessaire- 
ment en  rapport  direct  avec  les  qualités  de  l'ensei- 
gnement donné  dans  leurs  écoles. 

Mais  nous  ne  ferons  qu'un  rappel  sommaire  de 
cette  situation,  et  pour  quelques  pays  seulement 
(ceux  qui  offrent  le  plus  d'intérêt  à  ce  point  de  vue). 

Un  peu  partout,  on  se  trouve  en  présence  des 
mêmes  réalisations  et  des  mêmes  lacunes;  les  écoles 
des  diverses  capitales,  et  aussi  celles  des  plus  grandes 
villes,  sont  les  plus  favorisées;  mais  on  ne  chante 
que  fort  peu  dans  les  écoles  rurales.  D'autre  part, 
la  méthode  du  chant  appris  par  audition  est  celle 
qui  sévit  le  plus  généralement,  même  en  Suisse 
et  en  Allemagne.  De  même,  —  et  quoique  la  péda- 
gogie varie  d'un  pays  à  l'autre,  comme  varient  les 
dispositions  naturelles,  l'instinct,  le  goiU  des  divers 
peuples,  —  l'évolution  pédagogique  est  analogue  en 
Angleterre,  en  Belgique,  en  Allemagne,  en  Suisse,  en 
France.  Partout,  en  effet,  et  depuis  un  demi-siècle, 
on  cherche  vraiment  à  rendre  les  éludes  musicales 
plus  pratiques,  plus  simples,  moins  théoriques.  Il  y 
a  un  effort  d'adaptation.  Presque  partout,  on  a  eu  re- 
cours, naguère,  dans  le  désir  de  simplifier,  à  quelque 
notation  nouvelle.  Mais,  presque  partout,  on  est  revenu 
de  ce  qui  apparaît  de  plus  en  plus  comme  une  erreur, 
et  l'on  a  renoncé  à  ces  divers  systèmes.  Seules, 
l'Angleterre  et  l'Allemagne  restent  allachées  au  sys- 
tème de  «  Tonic  sol-fa  ».  Cependant,  il  faut  constater 
aussi  qu'en  renonçant  aux  notations  simplifiées,  on 
tient  à  conserver  les  principes  pédagogiques  et  les 
procédés  d'enseignement  que  les  auteurs  des  diffé- 
rents  systèmes  ont  su  retrouver  et  attacher  de  près 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE    3675 


à  leurs  méthodes.  On  verra  plus  loin  ce  que  nous 
écrivent  à  ce  sujet  les  inspecteurs  de  l'instruction 
musicale  d'Angleterre  et  de  Suisse.  Ce  sont  les  mé- 
thodes éclectiques  d'instruction,  conduisant  à  l'étude 
de  la  notation  usuelle,  qui  l'emportent  aujourd'hui. 

C'est  en  Belgique  et  en  Hollande  qu'il  faillirait 
chercher  les  meilleurs  résultats.  Il  est  plus  difficile 
d'y  trouver  un  exemple  à  suivre,  car  l'enseignement 
musical  y  est  donné  avec  une  grande  diversité  de 
méthodes,  et  nulle  base  n'attire  particulièrement 
l'attention.  Les  autres  pays  du  Nord  ont  des  aspira- 
lions  qu'il  est  fort  agréable  de  noler,  mais  pas  encore 
de  réelle  organisation  qu'on  puisse  envier.  Il  nous  a 
été  donné  de  faire  visiter  les  écoles  de  Paris  à  des 
professeurs  et  inspecteurs  de  Suède  et  de  Norvège, 
qui  nous  faisaient  part  de  leurs  désirs  d'enregistrer, 
dans  les  grandes  villes  Scandinaves,  des  résultats 
analogues  à  ceux  que  nous  obtenons.  Et  M.  Jaques- 
Dalcroze  a  raison  de  dire  que  le  Danemark  a  cer- 
tainement, plus  que  tout  autre,  besoin  d'une  réforme 
dans  son  enseignement  musical.  Nous  citerons  plu- 
sieurs fois  l'opinion  de  notre  ami  M.  Jaques-Dalcroze, 
qui  ;i  beaucoup  vu,  beaucoup  entendu,  et  dont  les 
recherches  expérimentales  ont  abouti  à  des  remar- 
ques d'une  grande  pénétration;  mais,  avant  d'exami- 
ner  la  situation  de  l'instruction  musicale  chez  nos 
voisins,  nous  pourrions  d'abord  rappeler  le  jugement 
que  JJaques-Dalcroze  porte  sur  notre  propre  situa- 
tion musicale  scolaire,  et  sa  claire  vision  du  bu1 
qu'il  faut  continuer  à  poursuivre. 

"Des  qu'un  Français,  dit-il,  se  manifeste  musicien, 
il  révèle  des  qualités  artistiques  de  premier  ordre, 
une  sensibilité  très  souple,  un  sens  inné  des  pro- 
portions et  de  l'équilibre  et  un  sentiment  raffiné  des 
nuances.  Mais  il  importe  que  la  musique  ne  demeure 
pas  en  ce  pays  l'apanage  d'une  aristocratie,  et  qu'elle 
pénètre  —  grâce  à  une  pédagogie  plus  soucieuse  de 
la  vie  intime  de  l'enfant  —  dans  ces  couches  popu- 
laire? où,  actuellement,  elle  est  encore  considérée 
comme  une  aimable  étrangère.  » 


EN  ANGLETERRE 

L'organisation  anglaise  est  l'une  des  plus  remar- 
quables; précise  et  souple,  elle  laisse  à  chaque  ré- 
gion du  Royaume-Uni,  comme  à  chaque  catégorie 
d'écoles,  une  grande  liberté  d'inlerprélation  pour 
que  l'adaptation  aux  divers  besoins  soit  parlai  le. 

Le  Board  of  Education,  chargé  de  l'établissement 
des  programmes  et  de  tout  ce  qui  concerne  l'ensei- 
gnement en  Angleterre  et  dans  le  Pays  de  Galles,  a 
introduit,  dans  les  écoles  enfantines  (Infant  Schools), 
des  exercices  de  chant  et  de  respiration;  dans  les 
écoles  élémentaires  (écoliers  de  7  à  14  ans),  un  en- 
seignement musical  très  ordonné,  des  exercices  de 
chant  populaire  et  de  chant  choral,  ainsi  que  dans 
les  écoles  secondaires  de  jeunes  filles. 

Depuis  quelques  années,  des  modifications  pro- 
fondes apportée^  dans  tout  le  système  d'instruction 
musicale  ont  produit  des  résultats  qui  prouvent  la 
valeur  des  méthodes  intuitives.  Ces  résultats  sont 
dus  surtout  à  l'introduction  de  ces  méthodes  dans 
les  écoles  normales,  et  à  l'enthousiasme  suscité  dans 
ces  écoles  par  la  constitution  d'un  répertoire  emprun- 
tant aux  traditions  locales,  au  folklore  musical,  aux 
danses  des  diverses  régions.  On  sait  que  l'instigateur 
de  cette  rénovation  est  M.  Cecil  Sharp,  qui,  à  Stattford- 
sur-Avon  d'abord,  à  Londres  ensuite,  organisa  des 


cours  à  l'usage  des  éducateurs,  des  stages  d'une 
vingtaine  de  jours,  permettant  d'étudier  les  danses 
et  les  mélodies  populaires,  et  d'apprendre  à  les  en- 
seigner. 

De  1870  à  1902,  on  a  utilisé  presque  exclusivement, 
dans  les  écoles  normales,  le  système  de  «  Tonie-sol- 
fa  »  (décrit  p.  3648).  Aussi,  s'établit-il  solidement 
dans  les  écoles  primaires.  Depuis  1902,  les  élèves  des 
E.  N.  sont  obligés  d'apprendre  la  notation  usuelle,  et 
le  système  de  Tonic-sol-fa,  sans  être  délaissé,  a  perdu 
des  partisans.  Cette  notation  simplifiée  est  cependant 
la  plus  tenace  de  toutes.  Elle  le  doit  à  la  valeur  des 
quelques  procédés  qu'elle  a  vulgarisés,  et  à  ce  fait 
que  les  signes  qu'elle  utilise  rappellent  aisément 
les  noms  des  noies  de  la  gamme  (ce  sont  les  initiales 
elles-mêmes  de  ces  noms).  De  plus,  les  publications 
musicales  en  Tonic-sol-fa  sont  très  nombreuses  et 
peu  coûteuses.  Le  docteur  Arthur  Someryell,  Princi- 
pal Inspecter  ûfthusic  in  England  and  Scotland,  nous 
dit  d'ailleurs  que,  tout  en  renonçant  à  la  notation 
par  lettres  initiales,  il  a  tenu  à  conserver,  pour  les 
plus  petits  écoliers,  les  meilleures  applications  des 
principes  qui,  dans  la  méthode  de  Tonic-sol-fa,  se 
rapportent  à  la  première  initiation. 

Quelques  extraits  des  «  Instructions  générales  aux 
professeurs  des  écoles  de  toutes  classes  »,  Instruc- 
tions dues  au  ministre  de  l'instruction  publique, 
montreront  ce  qu'est  l'orientation  de  l'enseignement 
musical. 

«  Le  traitement  de  la  musique,  dans  les  premières 
années,  devrait  viser  à  développer  chez  tous  les 
enfants  la  capacité  de  réponse  à  l'expression  artis- 
tique. On  devrait  leur  apprendre  à  écouler,  non  par 
des  explications  verbales,  mais  par  une  méthode 
qui,  lentement,  forme  un  discernement  instinctif. 
Dans  ce  sujet,  peut-être  plus  que  dans'  aucun  autre, 
l'expérience  est  supérieure  au  précepte... 

«  Il  est  généralement  reconnu  que  la  littérature 
des  chansons  traditionnelles  d'une  nation  est  la  fon- 
dation naturelle  sur  laquelle  la  culture  musicale 
devrait  être  basée.  Ces  chansons  sont  les  vrais  clas- 
siques du  peuple,  et  leur  survivance,  dans  quelques 
cas  seulement  par  transmission  orale,  prouve  qu'elles 
plaisent  et  qu'elles  sont  durables...  Pour  les  classes 
de  très  jeunes  enfants,  il  y  a  d'excellentes  chansons 
enfantines  et  des  rondes,  desquelles  les  enfants  peu- 
vent passer  aux  chansons  traditionnelles  les  plus 
faciles,  puis  un  folklore,  dont  ni  la  valeur  ni  le  plaisir 
ne  seront  diminués  par  l'imparfaite  compréhension 
des  paroles... 

«  L'éducation  de  l'oreille  est  de  la  plus  haute  im- 
portance et  devrait  occuper  une  partie  de  chaque 
leçon  de  chant  dans  toutes  les  classes...  Des  classes 
entières  de  jeunes  enfants  (non  choisis  parmi  les 
mieux  doués,  mais  parmi  ceux  qui  le  sont  moyenne- 
ment), auxquels  on  a  enseigné  la  musique  depuis  le 
commencement  de  leur  scolarité,  en  prenant  l'édu- 
cation de  l'oreille  pour  base,  sont  non  seulement 
capables  d'écrire  tous  les  airs  qu'ils  connaissent, 
mais  ils  peuvent  dire  avec  quels  accords  ils  sont 
harmonisés  ou  les  harmoniser  eux-mêmes. 

«  L'enseignement  et  l'examen  qui  ne  s'assurent 
pas  à  chaque  phase  que  l'oreille  est  au  moins  aussi 
avancée  que  les  yeux,  sont  sans  grande  valeur. 

«  Il  est  impossible  de  surestimer  la  valeur  éduca- 
tive d'une  éducation  complète  en  rythme  musical;  et 
comme  toutes  les  perceptions  sont  plus  complètes 
quand  elles  sont  obtenues  de  plusieurs  façons  que 
d'une  seule,  il  est  bon  non  seulement  de  développer 


36:  r. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


le  s.-ns  du  rythme  musical,  depuis  la  plus  tendre 
enfance,  en  battant  correctement  la  mesure  d'un 
morceau  de  musique,  en  en  marquant  le  rythme  et 
par  d'autres  méthodes  strictement  musicales,  mais 
aussi  en  faisant  agir  tout  le  corps,  en  dansant,  en 
marchant  à  l'aide  de  divers  exercices  physiques...  » 

Les  Instructions  signalent  l'écueil  général  :  abus 
des  explications  théoriques.  Trop  souvent,  les  élèves, 
très  renseignés  sur  toute  la  grammaire  musicale, 
sont  incapables  de  lire  une  page  de  solfège.  On  voit 
môme  des  élèves  capables  d'harmoniser  un  exercice, 
mais  incapables  de  reconnaître,  à  l'audition,  ce 
même  exercice  exécuté  au  piano,  —  ou  même  de 
noter  un  air  «  qu'ils  connaissent  depuis  leur  plus 
tendre  enfance  ».  Ces  critiques  si  judicieuses  ont 
porté  leurs  fruits. 

M.  Arthur  Somervell,  mieux  placé  que  quiconque 
en  Angleterre  pour  se  rendre  compte  des  résultats 
obtenus,  constate  l'heureux  développement  de  l'en- 
seignement musical  dans  les  écoles  qu'il  inspecte.  Il 
nous  signale  la  création  de  nombreux  orchestres 
composés  des  élèves  des  lycées,  ou  des  écoles  pri- 
maires, et  des  membres  du  corps  enseignant.  Man- 
chester, Coventry,  ont  des  orchestres  complets  d'é- 
coliers primaires. 

«  Des  concerts  spéciaux  pour  les  enfants  de  la 
classe  ouvrière  sont  donnés  dans  quelques-unes  de 
nos  grandes  villes.  Par  exemple,  à  Liverpool,  cin- 
quante concerts  sont  donnés  dans  l'année,  le  samedi 
matin  (le  seul  jour  de  congé  dans  la  semaine,  outre 
le  dimanche).  La  présence  est  facultative,  et  il  y  a 
parfois  jusqu'à  seize  cents  enfants  présents.  Le  con- 
cert consiste  généralement  en  extraits  de  la  meil- 
leure musique  de  chambre  de  compositeurs  tels  que 
Haydn,  Mozart,  Beethoven.  Un  conférencier  fournit 
des  explications,  et  des  démonstrations  données  par 
le  quatuor  pour  montrer  la  structure  générale  et  les 
thèmes;  ensuite  le  morceau  est  joué. 

Et  M.  Arthur  Somervell  termine  ainsi  le  rapport 
si  étudié  qu'il  a  bien  voulu  nous  envoyer  : 

«  Le  comité  consultatif  du  ministère  de  l'instruction 
publique  a  recommandé  l'élévation  de  la  musique 
au  même  niveau  que  les  langues,  les  sciences  et  les 
mathématiques,  et  comme  sujet  pour  les  examens 
d'entrée  dans  les  universités...  Il  semble  qu'on  com- 
mence à  comprendre  dans  nos  pays  l'importance  de 
l'ait  dans  toute  bonne  éducation,  et  que  la  nation 
se  sente  de  plus  en  plus  attirée  vers  les  arts  et  spé- 
cialement vers  la  musique,  comme  vers  un  antidote 
contre  la  matérialisation  et  l'abaissement  du  niveau 
dans  les  manières  et  la  morale,  qui  sont  les  consé- 
quences inévitables  des  événements  tragiques  par 
lesquels  l'Europe  a  passé  pendant  ces  dernières 
années.  » 

EN  BELGIQUE 


Le  programme  d'instruction  musicale  des  écoles 
primaires  de  Belgique  a  été  modifié  eu  1023.  Avant 
celte  date,  il  existait  deux  programmes,  le  premier  à 
l'usage  des  écoles  où  l'on  utilisait  uniquement  la 
musique  chiffrée,  et  à  l'usage  des  classes  où  l'on 
partait  du  chiffre  pour  aborder  ensuite  la  notation 
usuelle,  l'autre  destiné  aux  écoles  où  l'on  n'utilisait 
que  l'écriture  usuelle.  Le  premier  s'en  tenait  au  sys- 
tème modal  jusqu'au  troisième  degré  (cours  supé- 
rieur). Le  second  abordait  les  tons  voisins  de  do  dès 
le  second  degré  (cours  moyen). 


Le  programme  de  1023  ne  permet  plus  l'exclusivité 
en  faveur  de  l'écriture  chiffrée.  Il  emprunte  au  gali- 
nisme  sa  progression  d'exercices,  qu'il  indique  encore 
en  chiffres,  en  même  temps  qu'en  toutes  lettres.  11 
fait  également  des  emprunts  à  la  méthode  Dessirier, 
et  à  la  méthode  directe. 

Mais  les  instructions  laissent  dans  l'oubli  les  di- 
verses notations. 

Les  exercices  du  premier  degré  (cours  élémentaire) 
se  bornent  à  l'étude  des  chants  par  audition. 

Les  exercices  du  second  degré  ne  portent  que  sur 
le  ton  de  do  majeur,  quoique  la  survivance  du  titre  : 
«  musique  modale  »,  laisse  croire  que  les  deux 
modes  types  sont  étudiés  en  ce  cours  moyen.  Les 
modes  (de  la  d'abord)  et  les  tonalités  (sol  et  fa  ma- 
jeurs) n'apparaissent  d'ailleurs  qu'au  programme  du 
quatrième  degré. 

La  méthode  auditive  est  recommandée,  moins 
d'ailleurs  par  le  programme  et  les  instructions  que 
par  les  chefs  de  service.  Cependant,  le  programme 
recommande  au  moins,  avant  toute  chose,  de  faire 
chanter,  d'apprendre  à  reconnaître  les  sons  des  for- 
mules harmoniques  (sur  l'accord  parfait)  et  des  for- 
mules mélodiques  (sur  le  pentacorde,  puis  sur  la 
gamme  simplifiée  : 

do-ré-mi- fa  sol  la  ||  sol  fa  mi  ré  do  ||  si  do 

puis  enfin  sur  la  gamme  complète). 

La  méthode  directe  prend  place  dans  ce  même 
programme  officiel,  et  nous  lisons  :  «  Notes  de  mor- 
ceaux familiers,  chantées  par  audition,  après  exécu- 
tion du  dernier  couplet.  » 

La  théorie  musicale  est  réduite  au  strict  nécessaire. 
Elle  n'apparaît  vraiment  qu'avec  les  exercices  du 
4"  degré,  et  il  est  dit  :  «  Les  notions  théoriques 
seront  simples  et  enseignées  au  fur  et  à  mesure  des 
besoins.  Elles  tendent  uniquement  (souligné  dans  le 
texte)  à  donner  aux  élèves  ce  qui  est  indispensable 
à  la  compréhension  et  à  l'exécution  convenable  des 
morceaux  de  solfège  chantés.  » 

Les  formules  de  la  méthode  Dessirier  (qui  ont  été 
rappelées  p.  3656)  et  le  système  du  poinl  (l'appui 
(qui  a  été  lui-même  exposé)  sont  également  recom- 
mandés. 

Ces  formules  restent  surtout  en  honneur  à  Gand, 
mais  on  n'utilise  plus  (même  à  Gand)  la  séméiogra- 
phie  Dessirier,  ni,  d'ailleurs,  l'écriture  chilfrée,  qui 
ne  survit  que  dans  quelques  écoles  de  Bruxelles. 

C'est  dans  les  classes  du  3°  degré  surtout  que  l'é- 
lève apprend  à  connaître  la  notation,  portée,  clef  de 
sol,  ligures  de  notes  et  de  silences,  et  qu'il  apprend 
à  solfier  dans  les  manuels. 

Ce  qui  concerne  le  répertoire  est  à  retenir.  «  Le 
répertoire  scolaire  doit  former  une  petite  anthologie 
où  la  musique  et  la  poésie  rivalisent  de  richesse  et 
de  variété,  d'inspiration  et  de  rythme,  de  pureté  et 
de  sentiment.  A  cet  effet,  on  puisera  aux  sources 
vitales  de  l'art  :  airs  anciens  et  mélodies  populaires, 
devenus  justement  célèbres;  chants  appropriés  tirés 
de  l'œuvre  des  grands  maîtres;  spécimens  choisis, 
empruntés  aux  chansonniers  et  aux  auteurs  moder- 
nes les  mieux  inspirés.  »  Les  recueils  français  sont 
très  connus  en  Belgique,  surtout  ceux  de  M.  Bou- 
chor. 

Le  temps  consacré  à  l'enseignement  musical  dans 
les  écoles  primaires  belges  est  d'une  heure  par  se- 
maine. 

Dans  les  écoles  normales,  l'enseignemenl  de  la 
théorie  n'est  fait  également  que  pour  les  besoins  de 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  LÉCOLE    3677 


la  pratique,  et  en  liaison  avec  elle.  On  s'adresse 
constamment  à  l'oreille. 

Les  exercices  portent  sur  le  rythme,  l'intonation, 
le  solfège,  le  chant.  Mais  on  s'y  occupe  surtout  de 
méthodologie,  de  tout  ce  qui  doit  être  utile  à  l'ins- 
tituteur-professeur  de  chant.  Ainsi,  dans  les  deux 
années  de  la  section  préparatoire,  on  dotera  l'élève 
d'un  répertoire  de  chants  scolaires;  on  lui  fera  con- 
naître les  phonomimies,  les  formules  Dessirieb,  les 
principes  du  galinisme,  les  procédés  traditionnels. 
A  l'école  normale  proprement  dite  (trois  années 
d'études),  on  obtiendra  que  l'élève  sache  inventer 
des  phrases  musicales,  improviser  des  formules  avec 
des  gestes  phonomimiques  ou  au  tableau  noir.  On 
l'habituera  à  conduire  des  exécutions  chorales,  et 
l'on  reprendra,  avec  lui,  l'ordre  des  exercices  des 
2«  et  3e  degrés  de  l'école  primaire. 

11  est  consacré  une  heure  par  semaine  à  chaque 
cours  normal  préparatoire,  et  deux  heures  à  cha- 
cune des  trois  années  d'étude  de  l'école  normale 
proprement  dite.  L'une  de  ces  deux  heures  est  con- 
sacrée au  chant  choral,  à  l'ensemble  vocal. 

L'organisation  de  1923  présente  donc  un  grand 
progrès.  Elle  n'a  pas  apporté  de  grand  changement 
effectif  jusqu'ici,  parce  cpue  l'enseignement  donné 
dans  les  écoles  primaires,  et  confié  aux  institutrices, 
fait  une  part  encore  irop  belle  au  chant,  et  trop  ré- 
duite aux  exercices  d'oreille,  de  voix,  de  lecture.  Les 
élèves  arrivent  ainsi  dans  les  classes  du  4e  degré,  où 
ils  reçoivent,  dans  plusieurs  villes,  les  leçons  d'un 
professeur  spécial  qui  a  tout  à-faire  pour  préparer 
ses  élèves  à  l'école  normale.  M.  de  Nobel,  professeur 
à  Gand,  nous  fait  part  de  doléances  justifiées. 


EN   POLOGNE 

L'enseignement  musical  s'organise  en  Pologne.  Les 
programmes,  1res  pratiquement  conçus,  contiennent 
de  légilimes  exigences  au  sujet  des  exercices  vocaux, 
de  la  respiration,  de  l'articulation,  de  la  diction 
même. 

Dans  les  écoles  primaires,  primaires  supérieures, 
secondaires,  il  est  attribué  deux  leçons  de  quarante- 
cinq  minutes  à  l'enseignement  musical  dans  chaque 
classe. 

Dans  les  écoles  normales,  où  les  futurs  éducateurs 
passent  cinq  années,  la  première  et  la  cinquième 
année  reçoivent  deux  leçons  de  quarante-cinq  mi- 
nutes. Les  autres  classes  —  2=,  3%  4e  —  n'ont  qu'une 
seule  leçon  de  quarante-cinq  minutes  par  semaine. 
L'étude  du  violon  est  obligatoire,  dans  ces  E.  .\.,  et 
celle  du  piano  facultative. 

Une  vingtaine  d'écoles  secondaires  de  garçons  et 
quelques  écoles  normales  d'instituteurs  possèdent 
des  orchestres. 

En  ce  qui  concerne  les  méthodes,  je  laisse  la  pa- 
role à  Mme  Julia  Baranowska-Borowy,  inspectrice  de 
l'enseignement  du  chant  : 

«  A  part  les  méthodes  relatives  au  chant  scolaire, 
appuyées  sur  les  méthodes  allemandes  et  françaises, 
à  partie  système  Battre  ou  celui  de  Jaques-Dalcboïe, 
nous  avons  des  méthodes  purement  polonaises  dont 
quelques-unes  très  intéressantes  et  ingénieuses.  Je 
mentionne  celle  de  M.  Stéphane  Wysocki  comme  la 
plus  originale  et  la  plus  complète.  Elle  se  sert  de 
la  phonomimie  et  comporte  une  échelle  de  quatre 
lignes,  représentant  l'accord  parfait,  dont  trois  dis- 
posées à  la  même  dislance  et  la  quatrième  plus  éloi- 


gnée (pour  l'intervalle  de  quarte).  La  disposition 
des  lignes  change  avec  le  renversement  d'accord. 
Cette  méthode  admettant  d'infinies  transpositions 
(chaque  tonique  se  trouve  placée  sur  la  première 
ligne),  elle  ne  demande  pas  de  clefs  ni  d'armatures. 
«  Une  autre  méthode,  qui  n'apporle  pas  de  nou- 
veautés au  système  musical,  mais  qui  est  un  excel- 
lent guide  pour  le  professeur  de  chant  scolaire,  le 
conduisant  par  tous  les  détails  de  l'enseignement, 
et  lui  fournissant  des  quantités  d'exercices  adaptés 
à  ces  détails,  est  celle  de  Mmes  Zapolska  et  YVif.rz- 
binska  (Méthode  de  l'enseignement  du  chant  à  l'école 
primaire). 

«  La  production  de  bons  solfèges  est  à  peine  à  ses 
débuis  (solfèges  de  MM.  P.  Maszynski,  S.  Kaziro, 
F.  Piasek). 

«  Par  contre,  nous  possédons  des  quantités  con- 
sidérables de  recueils  de  chants  scolaires.  La  chan- 
son populaire  —  qui  est  une  richesse  inépuisable  de 
notre  pays,  et  qui  présente  pour  le  musicien  scienti- 
fique un  curieux  objet  d'étude  au  point  de  vue  cons- 
truction, rythme  et  tonalité  —  tient  une  grande 
place  dans  le  répertoire  scolaire.  » 

Ce  ne  sont  donc  ni  les  méthodes  ni  les  chants  de 
valeur  qui  manquent,  mais  bien  les  maîtres  et  pro- 
fesseurs. Un  grand  effort  d'organisation  est  entre- 
pris. Les  professeurs  spéciaux  actuels,  nommés  pro- 
visoirement, ont  un  délai  de  cinq  ans  pour  satisfaire 
aux  conditions  du  professorat. 

Des  cours  de  préparation  aux  examens  du  profes- 
sorat ont  été  créés  officiellement.  Des  bourses  sont 
accordées  aux  candidats.  Des  instructeurs-inspec- 
teurs dirigent  ces  cours. 

On  exige  des  nouveaux  professeurs,  à  côté  d'une 
instruction  musicale  solide,  une  instruction  générale 
et  un  savoir  pédagogique  correspondant  à  ceux  des 
instituteurs  formés  dans  nos  écoles  normales.  L'exa- 
men comprend  des  épreuves  théoriques  (théorie,  har- 
monie, histoire  de  la  musique), pratiques  (exécution 
de  chants,  épreuve  d'accompagnement,  déchili'rage  et 
transposition),  et piila<joniques  (direction  de  chœurs, 
leçon  donnée  à  une  classe  ou  à  un  seul  élève),  selon 
le  grade  auquel  aspire  le  candidat.  Cet  examen  peut 
se  passer  par  étapes  et  partiellement.  On  ne  peut 
enseigner  alors  que  les  matières  pour  lesquelles  on 
est  diplômé. 

«  La  pédagogie  musicale,  dit  M™"  Borowt,  n'existe 
pas  encore  comme  science  (les  Allemands  commen- 
cent à  peine  à  l'envisager  de  la  sorte),  et  jusqu'au 
jour  où  elle  entrera  dans  les  écoles  de  musique, 
comme  objet  d'études  particulières,  nous  aurons 
toujours  beaucoup  de  mauvais  professeurs  qui  per- 
dront leur  temps  à  se  taire  une  méthode  au  détri- 
ment de  leurs  élèves,  au  lieu  d'en  être  munis  à  la 
sortie  de  leur  école.  » 

Et  nous  avons  plaisir  à  citer  cette  conclusion  : 
«  Nous  sommes  un  peu  en  retard,  en  Pologne, 
mais  nous  nous  acheminons  vers  le  but  avec  ardeur. 
L'exemple  de  la  France,  où  j'ai  pu  (en  1923)  cons- 
tater les  résultats  brillants  de  la  pédagogie  musi- 
cale, —  une  musicalité  sure  et  intelligente,  un  vrai 
amour  de  la  musique,  un  goût  artistique  et  distin- 
gué, —  nous  sera  réconfortant! 


EN    ESPAGNE 

L'enseignement  musical  est  encore  facultatif  dans 
les  écoles  primaires  de  l'Espagne  et  dans  les  lycées. 
Partout  où  il  est  donné,  aucun  programme  n'est  im- 


367  8 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


posé,  aucune  méthode  n'est  proposée.  Dans  les  écoles 
normales,  où  cet  enseignement  est  obligatoire,  le 
professeur  conserve,  là  aussi,  toute  liberté  d'initia- 
tive. 

Il  en  résulte  qu'on  se  borne,  dans  la  plupart  des 
écoles,  à  apprendre,  uniquement  par  audition,  quel- 
ques chants  scolaires  et  quelques  mélodies  populaires 
aux  jeunes  écoliers. 

La  Catalogue  est  la  région  la  plus  favorisée,  en  ce 
qui  concerne  le  développement  artistique  en  géné- 
ral, et  musical  en  particulier.  Quelques  orphéons  y 
jouissent  d'une  organisation  parfaite,  notamment 
l'Orpheo  Catala.  La  rythmique  Jaques-Dalcroze  est 
expérimentée  dans  quelques  écoles  de  Barcelone. 

La  méthode  galiniste  est  à  peu  près  inconnue  en 
Espagne.  Mais  un  pédagogue-musicien  de  valeur, 
par  contre,  tente  d'organiser  tout  un  système  pra- 
tique de  culture  musicale,  dans  les  écoles  catalanes. 
Ce  novateur,  M.  Borguno,  directeur  de  l'Athénée  d'I- 
gualada,  secondé  par  M.  Sagrera,  a  bien  voulu  nous 
communiquer  son  programme  d'action. 

Il  divise  les  études  musicales  en  trois  cycles  :  pre- 
mière enfance,  classe  élémentaire,  classe  supérieure. 

Les  jeunes  élèves  apprennent  surtout  à  chanter, 
et  font  quelques  exercices  de  rythme  élémentaire, 
appliqués  à  la  marche. 

La  classe  élémentaire  (dix  ans)  reçoit  deux  heures 
un  quart  d'enseignement  musical  par  semaine,  en 
trois  leçons  de  quarante-cinq  minutes,  se  subdivi- 
sant ainsi  :  exercices  de  respiration  (cinq  minutes), 
émission  vocale  et  éducation  de  l'oreille  (dix  minu- 
tes), chant  (dix  minutes),  rythmique,  étude  des  va- 
leurs, esthétique  (vingt  minutes). 

Les  premiers  exercices  d'intonation  se  font  avec 
quelques  sons  seulement  de  la  gamme  de  do  majeur, 
sous  la  forme  dictée,  et  en  construisant  vocalement 
des  intervalles  demandés,  partant  d'un  son  donné. 

«  Dans  la  période  élémentaire,  nous  préparons 
uniquement  l'écolier  à  l'étude  de  la  musique,  lui 
inculquant  le  sentiment  de  la  tonalité,  du  rythme  et 
exerçant  une  surveillance  rigoureuse  sur  la  voix. 

«  C'est  seulement  lorsque  les  élèves  ont  neuf  ou 
dix  ans  que  nous  commençons  l'éducation  musicale 
par  l'étude  des  signes.  Nous  notons  alors  les  exer- 
cices au  tableau  noir,  et  nous  faisons  également 
apprendre  les  notes  par  le  procédé  des  cinq  doigts 
(main  portée).  » 

Au  cours  supérieur,  on  se  consacre  surtout  à  l'é- 
tude du  solfège,  mais  sans  précipitation,  avec  tout 
le  soin  qu'exigent  les  points  les  plus  difficiles  pour 
l'élève.  En  même  temps,  les  élèves  sont  acheminés 
vers  le  chant  choral,  à  deux,  trois  et  quatre  voix. 

Le  maître,  d'après  cette  discipline,  use  bien  plus 
du  tableau  noir  que  du  livre  d'exercices.  Les  élèves 
prennent  note  de  toutes  les  indications  données  au 
tableau,  et  écrivent  eux-mêmes  leur  livre  de  mu- 
sique. 

«  La  musique  à  l'école  primaire,  dit  M.  Borguno, 
doit  constituer  un  art  et  non  une  science.  Nous  ne 
demandons  une  science  musicale  qu'aux  élèves  spé- 
cialisés dans  la  musique.  Les  maîtres  qui  se  desti- 
nent à  l'enseignement  musical  populaire  ont  eux- 
mêmes  bien  plus  besoin  de  tempérament  pédagogique 
musical  que  de  science.  » 

Les  élèves  du  cours  supérieur  se  réunissent  au 
Conservatoire  les  samedi,  après-midi.  Là,  on  leur 
donne  quelques  notions  d'histoire  de  la  musique; 
puis  ils  chantent  en  chœur  et  exécutent  les  danses 
populaires.  Tous  les  quinze  jours,  les  élèves  assistent 


à  un  concert  d'une  heure  et  demie,  au  cours  duquel 
on  commente  les  œuvres  qui  vont  être  exécutées. 
Les  élèves  sont  ensuite  invités  à  écrire  leurs  impres- 
sions. 


EN  SUISSE 

Chaque  canton  suisse  jouit  d'une  complète  auto- 
nomie en  ce  qui  concerne  l'organisation  scolaire.  Le 
département  de  l'instruction  publique  de  chaque 
canton  nous  a  fait  connaître  les  dispositions  rela- 
tives à  l'enseignement  musical. 

Ecoles  primaires  :  horaires,  méthodes,  pro- 
grammes. 

Il  est  attribué  deux  heures  par  semaine  à  cet  en- 
seignement dans  les  écoles  primaires  des  cantons 
suivants  :  Tessin,  Glaris,  Lucerne,  Appenzell,  Zurich, 
Schalïhouse,  Soleure,  Vaud,  Grisons,  Argovie,  Berne, 
Saint-Gall,  Genève,  —  d'une  heure  à  deux  dans  le 
canton  de  Bàle-Campagne, —  et  une  heure  seulement 
dans  les  autres  cantons. 

Il  est  difficile  de  parler  d'une  façon  générale  des 
méthodes  préconisées,  en  raison  de  leur  variété.  La 
rythmique  Jaques-Dalcroze  est  pratiquée  dans 
quelques  écoles  primaires  de  Genève,  Lucerne, 
Thurgovie,  Zurich  et  à  l'école  normale  de  Weltingen. 
Diverses  méthodes  de  solmisalion  sont  utilisées, 
méthode  Gubler  (en  Thurgovie),  méthodes  Grieder- 
Zchutner  et  Eitz  (Lucerne,  Argovie  et  Oswald),  mé- 
thodes Karl  Weber  et  Kunz  (Zurich),  méthode  KtJ- 
gler  (Schaffhouse),  méthode  Pantillon  (Neuchatel), 
méthode  Schnyder  (Soleure).  Les  notations  simpli- 
fiées n'ont  plus  que  de  rares  adeptes.  On  utilise  la 
notation  neumatique  pour  le  chant  grégorien  dans 
le  canton  de  Fribourg,  la  portée  de  trois  lignes 
dans  quelques  écoles  de  Berne,  les  chiffres  dans  les 
classes  élémentaires  de  Glaris  et  Soleure,  les  notes 
mobiles  et  les  chiffres  dans  le  canton  de  Schwytz. 

Dans  les  écoles  où  aucune  méthode  particulière 
n'est  pratiquée,  l'enseignement  musical  tend  à  de- 
venir de  plus  en  plus  concret  et  sensoriel.  A  titre 
d'exemples,  voici  le  détail  des  programmes  du  can- 
ton de  Vaud  et  du  canton  de  Genève  : 

Canton  de  Vaud.  —  La  marche  de  la  leçon  est  dé- 
terminée par  les  lois  de  la  psychologie  qui  marquent 
une  progression  constante  de  l'esprit  vers  l'acquisi- 
tion de  notions  abstraites  et  générales.  Notre  esprit 
suit  une  marche  instinctive,  parcourt  des  degrés 
naturels;  il  s'élève,  comme  dit  Pestalozzi,  «  des  in- 
tuitions sensibles  aux  conceptions  claires  ».  Toute 
leçon  complète  doit  commencer  par  l'acquisition  de 
notions  concrètes  ou  intuitives.  Débuter  par  le  con- 
cret, par  les  réalités  sensibles,  faire  entendre,  tel  est 
le  premier  pas  à  franchir  dans  l'enseignement  mu- 
sical. 

L'école  primaire  est  nettement  éducative,  et  ne 
peut  considérer  la  communication  du  savoir  comme 
sa  tâche  première.  L'instruction  n'est  qu'une  partie 
de  l'éducation,  partie  essentielle  sans  doute,  mais 
non  partie  unique. 

Le  chant  est  fort  justement  considéré  comme  la 
branche  qui  est  accessible  à  l'enfant  le  plus  tôt  et  le 
plus  facilement.  Le  législateur,  dans  le  canton  de 
Vaud,  souligne  toute  la  valeur  pédagogique,  disci- 
plinaire, esthétique,  moralisatrice  et  hygiénique  du 
chant.  11  fait  reposer  tout  l'enseignement  musical  sur 
la  pratique  du  chant. 

Puis,  il  songe  à  une  minutieuse  formation  de  l'o- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE         ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L ÉCOLE    36: 


reille,  pour  laquelle  il  conseille  au  maitre  l'usage  du 
violon. 

Quand  tous  les  enfants  peuvent  reproduire  les  sons 
qu'ils  entendent,  il  restera  à  les  exercer  sur  les  divers 
intervalles. 

On  utilisera  d'abord  l'accord  parfait  majeur  :  do- 
mi-sol,  puis  le  penlacorde  :  do-ré-mi- fa-sol. 

Ce  n'est  qu'à  la  fin  de  la  deuxième  année  du  degré 
inférieur  que  les  exercices  s'étendront  à  la  gamme 
entière. 

Le  maitre  habituera  les  élèves  à  donner  aux  sons 
leurs  justes  intonations,  sans  autre  secours  que  celui 
des  «  notes  d'appui  ». 

A  partir  du  moment  où  les  élèves  font  des  exer- 
cices de  lecture  sur  la  portée,  ils  doivent  battre  la 
mesure.  On  fera  surtout  lire  des  exercices  bien  gra- 
dués, mélodiques,  et  courts. 

Le  but  est  de  former  l'oreille,  exercer  la  voix,  dé- 
velopper le  sentiment  et  le  goût  du  beau,  cultiver  la 
faculté  esthétique  pure. 

Canton  de  Genève.  —  Les  instructions  données  aux 
instituteurs  sont  précieuses  : 

«  Nous  sommes  persuadés  que  les  méthodes  nou- 
velles, loin  de  faire  perdre  du  temps,  finiront  par 
en  faire  gagner,  de  sorte  que  l'école  active  soldera, 
au  bout  du  compte,  par  un  bénéfice  social,  moral  et 
intellectuel.  En  tout  état  de  cause,  et  s'il  n'y  a  pas 
moyen  de  s'en  tirer  autrement,  que  nos  écoliers 
sachent  moins,  pourvu  qu'ils  sachent  mieux  :  ce 
sera  déjà  un  avantage;  mais  qu'ils  sachent  autant  et 
mieux,  voilà  quel  est  l'idéal.    ■ 

«  Toutes  les  acquisitions  doivent  se  faire  par  le 
moyen  de  l'oreille;  ce  n'est  qu'ensuite  qu'on  s'a- 
dressera à  l'œil  et  au  raisonnement. 

«  Une  leçon  de  chant  comprend  un  assez  grand 
nombre  d'exercices  courts.  Les  exercices  d'intona- 
tion doivent  se  faire  très  lentement,  en  détachant 
toutes  les  notes. 

«  Pour  l'étude  de  la  portée,  on  commence  par  n'u- 
tiliser qu'une  seule  ligne,  puis  on  en  ajoute  une  se- 
conde... et  ainsi  de  suite  jusqu'à  la  portée  complète. 

<c  En  général,  les  notions  théoriques  sont  données 
au  cours  des  différents  exercices,  au  fur  et  à  mesure 
des  besoins. 

«  La  pratique  des  dictées  est  un  des  meilleurs 
moyens  de  faire  progresser  les  élèves  dans  l'étude 
du  solfège.  On  en  retire  aussi  un  grand  avantage 
pour  le  développement  de  l'attention. 

«  Les  solfèges  servent  d'application  aux  exercices 
d'intonation  et  de  mesure;  dans  la  règle,  ils  doivent 
être  présentés  dans  une  leçon  subséquente,  alors  que 
les  notions  de  mesure  et  d'intonation  précédemment 
acquises  ont  été  assimilées. 

«  Enfin,  dans  l'exécution  des  chœurs,  on  s'attache 
à  obtenir  une  justesse  parfaite,  et  l'on  observe  avec 
soin  les  règles  du  phrasé,  du  nuancé,  ainsi  que  la 
diction;  en  un  mot,  on  recherche  une  exécution 
aussi  artistique  que  possible,  tout  en  restant  sim- 
ple. » 

Ajoutons  que,  dans  les  écoles  de  Suisse  comme 
dans  celles  d'Allemagne,  on  exige  la  connaissance  de 
certains  chants. 

La  méthode  du  canton  de  Genève  s'est  inspirée  de 
la  pédagogie  galiniste.  Pendant  de  longues  années, 

on  a  exclusivement  utilisé  le  système  Galin,  Paris, 

Ghevé.  Aujourd'hui,  après  une  période    transitoire 

pendant  laquelle  les  deux  notations  étaient  étudiées, 

la  notation  chiffrée  est  abandonnée.  Mais,  tout  en 

n'enseignant  que  la  notation  sur  portée,  on  s'appuie 


toujours  sur  les   principes  pédagogiques  repris  par 
Galin  et  son  école. 

lre  année.  C'est  ainsi  qu'on  fait  un  emploi  systé- 
matique des  «  notes  d'appui  »  do,  mi,  sol,  pour  l'exé- 
cution du  pentacorde  do,  ré,  mi,  fa,  sol,  et  de  la 
gamme,  avec  les  élèves  qui  étudient  les  sons. 

2e  année.  L'étude  de  do,  mi,  sol  est  reprise.  On  étu- 
die sol,  si,  ré  et  fa,  la,  do,  et  les  combinaisons  de  l'ac- 
cord parfait.  Vocalisation.  Mesures  à  2,  3  et  4  temps. 
Etude  des  signes,  lecture  d'airs  et  de  canons  très 
faciles.  Exercices  de  dictées. 

3e  année.  Etude  des  accords  :  sol,  si,  ré,  fa,  —  ré, 
fa,  la,  do,  —  s»,  ré,  fi.  la.  Vocalisation.  Division 
binaire,  solfège,  dictée.  Chants  à  une  et  deux  voix. 

4e  année.  Etude  des  accords  de  tonique,  dominante 
et  sous-dominante,  ainsi  que  des  accords  de  septième 
les  plus  usités  des  gammes  étudiées.  Vocalisation.  Le 
dièse,  le  bémol,  le  bécarre.  Gammes  de  sol  et  de  fa. 
Division  ternaire.  Dictées,  solfège.  Chants  à  une  et 
deux  voix. 

r;c  année.  En  plus  :  gamme  de  la  mineur.  Mesures 
à  6  8,  9  s,  12  8. 

6e  année.  En  plus  :  gammes  mineures.  Chants  à 
trois  voix. 

7e  année.  En  plus  :  Elude  de  la  clef  de  fa.  Nom- 
breux solfèges,  duos,  trios. 

Ecoles  secondaires.  —  Les  classes  des  établisse- 
ments secondaires  déjeunes  filles  reçoivent  en  géné- 
ral deux  heures  de  cours  de  musique  par  semaine. 
Les  élèves  des  collèges  de  garçons  ne  reçoivent  plus 
d'enseignement  musical. 

L'école  secondaire  et  supérieure  de  jeunes  filles 
de  Genève  possède  un  programme  d'enseignement 
musical  très  complet,  et  de  haute  valeur. 

Les  élèves  de  Vil0  classe  (12  ans)  font  d'utiles  révi- 
sions. Le  programme  primaire  est  repris  et  complété. 
En  VIe  commence  une  véritable  éducation  musicale, 
soit  en  suivant  le  cours  régulier,  soit  en  suivant  le 
cours  de  rythmique  Jaques-Dalcroze. 

Le  cours  régulier  comprend  l'étude  du  phrasé  et 
du  nuancé,  l'improvisation  rythmique  sans  et  avec 
intonations  d'après  les  morceaux  littéraires  connus, 
la  transformation,  la  vocalisation.  A  ces  exercices, 
inspirés  déjà  de  la  méthode  de  rythmique  Jaques- 
Dalcroze,  s'ajoutent  ceux  de  dictée  (en  do  majeur  et 
tons  voisins,  mesures  à  2/4,  3/4,  6/8,  9/8,  12/8),  de 
notation  d'airs  connus,  de  solfège  et  de  chant  (avec 
chœurs  imposés,  en  plusieurs  langues). 

Ce  programme  se  développe  très  méthodiquement 
en  Ve  et  IVe,  en  se  basant,  pour  l'étude  des  intervalles, 
sur  les  séries  des  accords  de  trois  et  quatre  sons.  Il 
aboutit  d'ailleurs  à  une  élude  élémentaire  de  l'har- 
monie. 

Une  chorale  rassemble  les  élèves  des  diverses  sec- 
tions pendant  une  heure  par  semaine.  Le  programme 
du  cours  mérite  d'être  signalé  : 

«  Groupe  choral  :  les  divers  aspects  du  chant  cho- 
ral. Notions  d'émission,  d'articulation,  de  phrasé, 
d'accentuation,  de  nuancé.  Etude  de  divers  styles. 
Exécutions  d'oeuvres  harmoniques  et  polyphoniques 
à  2,  3,  4  parties,  empruntées  aux  meilleurs  auteurs 
de  la  Renaissance,  aux  classiques  allemands  et  fran- 
çais, ainsi  qu'à  la  chanson  populaire  de  la  Suisse  et 
de  l'étranger.  » 

Ecoles  normales.  —  C'est  surtout  dans  les  écoles 

normales   ou  dans  les   sections  pédagogiques  des 

écoles  secondaires  que  se  remarquent  les  plus  grandes 

variations  d'horaires  et  de  méthodes. 

Les  futurs  instituteurs   et  institutrices  reçoivent 


3«;si< 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


6  heures  de  cours  de  musique  dans  le  canton  des 
Grisons,  5  heures  dans  les  cantons  de  Fribourg  et  du 
Valais,  i  ou  ;>  heures  à  Berne,  de  3  à  S  heures  à 
Sohaffhouse,  i  heures  àLucerne,Saint-Gall,  3  heures 
à  Lausanne  (Vaud),  Argovie,  Thurgovie,  Schwytz, 
2  heures  à  Soleure,  F  ri  et  dans  le  Tessin. 

On  y  étudie,  obligatoirement  presque  partout,  le 
violon  ou  le  piano,  —  et  parfois,  simultanément  : 
violon,  piano  et  orgue. 

Dans  toutes  les  écoles  normales  ou  cours  normaux, 
un  véritable  enseignement  professionnel  est  donné 
pendant  toute  la  durée  des  études;  et  il  est  prévu, 
presque  partout,  une  heure  de  chant  d'ensemble. 

La  durée  des  études  est  de  quatre  ans.  Aussi  peut- 
on,  avec  les  plus  grands  élèves,  aborder  la  composi- 
tion et  l'enchaînement  des  accords.  Le  programme 
d'une  classe  de  fin  d'études  (lre  classe)  est  toujours 
intéressant.  Nous  relevons  celui-ci  : 

Ve  classe  :  a)  pratique  :  Exercice  de  respiration, 
d'émission,  de  vocalisation. 

Iîegistration  et  pose  de  la  voix.  Déclamation  ly- 
rique. 
Etude  et  interprétation  de  chœurs. 
Exercices   pratiques   de  direction  et  de  critique. 
Concours  de  chant. 

Etude  approfondie  du  phrasé  et  de  l'expression 
musicale. 

Elude  du  psautier  en  vue  de  la  direction  des  chants 
d'église. 

b)  théorie  :  Le  chant  d'ensemble.  Notes  biogra- 
phiques sur  les  principaux  compositeurs. 

Toutes  ces  indications  relatives  à  la  culture  musi- 
cale dans  les  écoles  de  Suisse  permettent  de  mesurer 
la  valeur  des  efforts  qui  ont  été  faits  depuis  quelques 
années.  Ces  efforts  ne  sont  pas  généraux  cependant- 
M.  Jaques-Dalcroze,  Suisse  lui-même,  écrit  : 

«  Notre  pays  est  de  ceux  dont  les  institutions  sco- 
laires sont  le  plus  unanimement  admirées,  grâce  à 
la  bonne  organisation  qui  les  caractérise,  grâce  à 
l'esprit  d'initiative  et  d'intelligence  de  la  plupart  de 
nos  départements  d'instruction  publique.  Comment 
se  fait-il,  dés  lors,  que  seul  l'enseignement  musical  — 
et  en  général  l'enseignement  artistique  —  y  soit  traité 
en  paria  et  abandonné  à  la  routine?  » 

M.  Jahues-Dalcroze,  cherchant  les  causes  de  cette 
infériorité,  les  trouve  dans  ces  faits,  que  trop  d'ins- 
tituteurs sont  incapables  'd'enseigner  le  chant  et  la 
musique,  et  que  la  plupart  des  méthodes  employées 
gonl  basées  sur  l'analyse  théorique  et  non  sur  l'expé- 
rimentation sensorielle. 
Il  ajoute  : 

«  (  »n  ne  fait  pas  éclore  dans  le  coîut  des  enfants 
un  véritable  amour  pour  la  musique,  si  on  ne  la  leur 
fait  pas  vivre!  C'est  son  côté  extérieur  qu'on  leur 
enseigne  et  non  ses  qualités  émotives  et  vraiment 
éducatrices.  On  ne  leur  apprend  même  pas  à  l'écou- 
ter... Et  comment  parviennent-ils  à  chanter  quelques 
lieds?  Uniquement  par  imitation.  Quand  donc  nos 
autorités  proscriront-elles  des  études  le  système  dit 
«  à  la  perroquet  »'?  Quand  reconnaîtront-elles  l'uti- 
lité d'une  participation  plus  intime  des  exercices  de 
chant  à  la  vie  même  de  l'école?...  » 

Quelle  que  soit  la  situation,  elle  est  supérieure 
encore  à  celle  de  la  plupart  des  Etats  voisins.  Nous 
savons  d'ailleurs  que  bien  des  cantons  suisses  révi- 
sant aujourd'hui  leurs  différents  programmes  sco- 
laires, et  il  n'est  pas  douteux  que,  relisant  ce  qu'ont 
écrit  tant  de  grands  pédagogues  suisses,  dont  la 
pédagogie  est  toujours  d'actualité,  on  ne  comprenne 


la  nécessité  d'une  culture  musicale  d'un  caractère  à 
la  fois  instructif  et  grandement  éducatif.  Les  mé- 
thodes basées  sur  les  faits  sensibles,  sensations  et 
sentiments,  et  faisant  sans  cesse  appel  à  l'activité  de 
l'enfant,  à  son  instinct  musical  et  non  à  son  raison- 
nement, sauront  gagner  les  écoles  de  Suisse  avant 
les  autres. 

EN  ALLEMAGNE 

On  a  raison  de  citer  fréquemment  l'exemple  de 
l'Allemagne  en  ce  qui  concerne  la  place  donnée  au 
chant  choral,  à  l'école  et  dans  les  sociétés  les  plus 
diverses. 

A  l'école,  au  moins  dans  les  villes,  un  enseigne- 
ment musical  régulier  est  donné  par  des  professeurs 
spéciaux,  qui  disposent  d'une  heure  —  et  parfois 
de  deux  heures  —  par  classe.  Dans  les  écoles 
secondaires,  en  plus  des  cours  réguliers,  il  est  sou- 
vent accordé  une  heure  aux  exercices  d'orchestre, 
ou  à  l'histoire  de  la  musique.  Dans  les  écoles  nor- 
males, il  est  donné  à  chaque  classe  trois  ou  quatre 
heures  d'enseignement  musical,  —  vocal  ou  instru- 
mental. L'école  normale  de  Colmar  possédait,  aus- 
sitôt après  la  guerre,  trois  orgues,  un  harmonium, 
plusieurs  pianos.  Les  études  des  élèves  des  écoles 
normales  sont  fréquemment  contrôlées,  sous  le  triple 
rapport  du  chant,  de  l'harmonie,  de  l'étude  d'un 
instrument  (piano,  harmonium,  violon).  C'est  dire 
que  l'enseignement  est  donné,  même  dans  les  écoles 
rurales,  par  des  maîtres  qui  ont  reçu  une  réelle  cul- 
ture musicale  et  une  suffisante  préparation  profes- 
sionnelle. 

Les  méthodes  des  Allemands  s'enrichissent  sans 
cesse  de  nouveaux  procèdes  pédagogiques.  Le  lieich, 
résolument  décidé  à  moderniser,  n'a  point  hésité  à 
prendre  aux  pédagogies  de  diverses  nations,  aux 
méthodes  anglaises  de  Miss  Glover  et  de  Curwk.n 
surtout,  ce  qu'elles  offraient  de  moins  abstrait,  de 
plus  pratique.  Bien  des  idées  qui  sont  «  dans  l'air  », 
en  Angleterre,  en  Allemagne,  en  Suisse,  —  et  que 
nous  soutenons  aussi  en  France,  —  sont  appliquées 
méthodiquement  en  Allemagne,  où  elles  ont  gagné 
l'adhésion  des  professeurs  et  instituteurs  avec  une 
incroyable  rapidité.  L'enthousiasme  provoqué  par 
les  méthodes  actives  est  tel  qu'on  accepte  de  modi- 
fier les  traditions  d'enseignement,  les  habitudes  les 
plus  douces,  et  qu'on  renonce  même  à  la  vieille  no- 
tation alphabétique  et  aux  appellations  courantes. 
In  congrès  de  pédagogie  musicale  —  ou  plutôt 
un  cours  pour  l'étude  et  la  diffusion  des  méthodes 
il  ion  musicale  —  s'est  tenu  à  Berlin  en  1&29. 
J'ai  eu  la  grande  faveur  d'être  désigné  par  la  Nil  le  de 
Paris  pour  assister  à  ce  congrès,  ce  qui  m'a  permis 
de  connaître  toute  la  valeur  de  l'orientation  donni  e, 
dans  I  Allemagne  d'aujourd'hui,  à  un  enseignement 
qui  tient  une  première  place  dans  les  programmes. 
Le  but  envisagé  ne  se  situe  complètemenl  qu'après 
l'école,  dans  la  vie  sociale.  L'école  prépare,  donne 
un  élan,  crée  une  curiosité  musicale,  et,  tout  en 
habituant  les  enfants  à  entendre,  avec  un  sens  qui 
s'affine  sans  cesse,  elle  s'attache  à  former  leur  go Ûl 
par  des  mélodies  et  des  chœurs,  pour  la  plupart 
d'inspiration  populaire. 

Sortis  de  l'école,  Fritz  ou  Michel  ne  pourront  plus 
rompre   avec   leurs    habitudes    les   plus  chères.    Us 
continueront  à  participer  aux  exécutions  mus  i 
à  chanter  en  chœur,  comme  ils  continueront  à  lire 
Leg  œuvres  littéraires.  Ils  sauront  —  pour  les  avoir 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L'ÉCOLE 


ressenties  —  que  les  jouissances  supérieures  se 
demandent  aux  arts.  Ils  trouveront  dans  la  musique 
le  moyen  d'exprimer  joie  ou  tristesse,  de  mieux 
connaître  l'âme  du  pays  natal.  Ils  y  trouveront 
aussi  le  lien  social  qui  les  regroupera,  sous  l'égide 
•de  Tari. 

Donc,  si,  par  surcroît,  le  chant  rend  l'école  aimable 
et  joyeuse,  si  la  pratique  du  chant  a  des  consé- 
quences scolaires  immédiates,  —  de  récréation,  de 
détente,  de  discipline,  de  culture  physique  même,  — 
on  ne  pourra  que  s'en  réjouir  en  passant,  mais  sans 
oublier  qu'il  faut  tendre  vers  le  chant  choral  érigé  en 
institution  sociale. 

Que  doit-on  faire  pour  arriver  jusqu'à  ce  but,  sans 
passer  à  côté,  sans  le  dépasser  non  plus?  Tout  la 
programme,  tout  le  temps  dont  on  dispose,  se  laisse- 
ront accaparer  par  une  patiente  culture  de  la  sensi- 
bilité artistique  et  du  goût,  —  culture  aux  mille 
formes,  —  et  par  une  véritable  éducation  chorale, 
allant  jusqu'aux  exercices  d'harmonisation  popu- 
laire. Cette  culture  et  celte  éducation  peuvent  seules 
créer,  à  l'école,  et  en  prévision  de  l'avenir,  des  habi- 
tudes et  des  besoins. 

Avant  toute  chose,  on  apprend  des  chants  par 
audition.  Mais  l'école  d'aujourd'hui  veut  entreprendre 
une  éducation  musicale  plus  complète,  permettre 
l'exacte  perception  des  sons,  la  reconnaissance  des 
intervalles,  l'émission  des  sons  entendus  ou  pensés, 
et  rendre  possible  l'élude  des  mélodies  et  des  diver- 
ses parties  chorales  par  des  moyens  divers  plus 
rationnels. 

C'est  à  la  formation  de  l'oreille  que  l'on  consacre 
les  premières  années.  L'enfant  apprend  à  distinguer 
et  à  solmiser  do,  sol  et  du,  mi,  sol,  —  ou  plutôt  la 
quinte  et  les  sons  de  l'accord  parfait  majeur,  car  il 
ne  donne  à  ces  sons  qu'une  hauteur  relative,  el  non 
pas  une  hauteur  fixe,  absolue.  On  chantera  par 
exemple  do,  sol  sur  les  sons  ré,  la  ou  mi,  si...  C'est 
là  un  retour  aux  conceptions  de  J.-J.  B.ousseai  et  de 
Gaun.  Le  principe  du  son  absolu,  dit-on  à  Berlin, 
n'intéresse  pas  le  chanteur,  car  la  voix  humaine 
n'est  pas  un  clavier  à  notes  fixes,  c'est  l'instrument 
le  plus  souple,  le  plus  mobile  qui  soit,  le  moins 
assujetti  aux  conventions  du  diapason.  On  ne  peut 
lui  demander,  en  partant  d'un  son,  quel  qu'il  soit, 
que  d'exécuter  des  intervalles  donnés. 

La  méthode  Câlin,  traduite  par  Stahl,  a  d'ailleurs 
connu  autrefois  de  nombreux  partisans  en  Alle- 
magne, et  la  «  Gesellschaîl  der  Zilieristen  »  possède 
toujours  des  adhérents.  Mais  on  a  renoncé  au  méca- 
nisme des  chiffres  et  conservé  seulement  le  principe 
modal,  et  quelques  procédés. 

Ue  nombreux  exercices,  très  variés,  sont  pratiqués 
dans  ce  stade  de  culture  auditive  :  exercices  de  sol- 
misation,  de  dictée  orale,  d'éducation  chorale,  de 
mémorisation,  d'audition  intérieure,  de  modulation 
ou  rnuance,  de  transposition,  de  création  mélodique 
ou  harmonique,  de  métrique,  de  rythmique,  de  dic- 
tion, et,  à  chaque  leçon,  des  [exercices  d'intonation 
pratiqués  soit  à  la  baguette  (sur  des  tableaux  mu- 
raux, sur  des  échelles  d'accords,  sur  les  sept  cou- 
leurs de  la  gamme,  sur  des  graphiques  portant  les 
noms  de  notes  en  colonnes  verticales),  —  soit  à  l'aide 
d'une  phonomimie,  —  à  une  ou  deux  mains,  —  plus 
compliquée  d'ailleurs  que  la  dactylologie  des  gali- 
nistes  et  que  les  phonomimies  françaises. 

En  recourant  à  ces  deux  grands  procédés,  —  ou 
chante  donc  la  quinte  et  l'accord  parfait  majeur  do, 
mi,  sol,  puis  deux  autres  accords  parfaits  majeurs  : 
Copyrigth  by  Librairie  Delagrave,  1930. 


sol,  si,  ré,  —  et  fn,  la,  do,  —  puis  la  gamme  majeure 
avec  toutes  les  combinaisons  de  ses  sons.  On  pratique 
ensuite  la  modulation,  mais  en  conservant  toujoui* 
aux  toniques  successives  le  nom  do,  le  changement  de 
son  de  cette  Ionique  do  étant  annoncé  par  un  "este 
ou  un  graphique  (d'où  le  nom  de  la  «  Méthod°e  — 
tonique  —  do  »  donné  à  ce  système,  voisin  de  la 
«  Méthode—  Tonic  —  sol,  fa  »  des  Anglais). 

On  obtient,  grâce  à  ces  premiers  moyens,  des  exé- 
cutions chorales  intéressantes.  On  aime  surtout  à 
chanter  des  canons  à  deux,  trois,  quatre  voix.  Ou  y 
voit  la  forme  d'harmonisation  la  plus  simple,  puisque 
c'est  alors  la  mélodie  qui  s'accompagne  elle-même, 
qui  est  suivie  de  son  ombre. 

Mais,  lorsque  les  enfants  chantent  un  canon  ou 
suivent  la  baguette  du  maître  qui  indique  des  noms 
de  noies  disposés  en  accords,  ils  ne  font  preuve  que 
d'attention  et  de  mémoire.  Or,  on  veut  obtenir  bien 
plus  de  leur  sens  musical,  éveiller  en  eux  les  forces 
créatrices,  les  doter  de  moyens  d'expression,  les 
amener  à  chanter  et  à  harmoniser  à  leur  guise,  — 
à  créer,  mélodiquement  et  harmoniquement. 

La  création  harmonique  est  l'objet  d'un  soiu  par- 
ticulier. On  s'habitue  à  placer  sous  la  gamme,  puis 
sous  des  mélodies  très  simples,  —  voire  primitives, 
—  deux  ou  trois  voix  constituant  des  parties  d'ac- 
compagnement, et  cela  en  ne  faisant  appel  qu'au 
sentiment  de  justesse,  de  ce  qui  esl  naturel,  conso- 
nant,  agréable,  —  et  sans  la  moindre  théorie  des 
accords. 

La  création  monodique  comprend  trois  séries 
d'exercices  :  d'abord,  l'enfant  essaye  de  placer,  sous 
un  air  connu,  des  phrases  qu'il  construit  lui-ménie. 
Une  fillette  dit  ainsi,  devant  moi,  comment  il  con- 
vient de  traverser  les  rues  de  Berlin,  si  l'on  veut  évi- 
ter les  accidents.  Ce  travail  d'adaptation  est  difficile 
el  l'enfant  s'en  tire  mal.  En  second  lieu,  les  enfants 
chantent,  comme  ils  l'entendent,  tel  petil  poènje 
appris  par  cœur,  ou  telle  phrase  proposée.  Ils  s'en 
tirenl  assezhien.  Enfin,  —  et  il  est  remarquable  que 
ce  soit  le  travail  le  plus  aisé,  —  les  enfants  impro- 
visent paroles  et  musique.  Des  dialogues  chantés, 
—  des  duos,  —  s'établissent  entre  écoliers. 

Parfois  un  enfant  improvise  seul.  Il  chante  la  nuit, 
la  douce  étoile!...  Les  improvisations  de  Minnesin- 
ger  et  des  maîtres  chanteurs,  de  Wolfram  et  de 
Hans  Sachs,  se  retrouvent,  en  germe,  dans  ces 
exercices. 

Les  enfants  sont  toujours  invités  à  apprécier  ces 
improvisations.  Puis  ils  choisissent  l'une  d'elles, 
pour  l'exécuter  à  plusieurs  voix. 

Ces  exercices  de  composition,  —  que  recommande 
eu  France  la  Nouvelle  Education.  —  ont  de  grands 
avantages.  Ils  récréent,  familiarisent  avec  la  langue 
des  sons,  avec  la  musique  qui  devient  «  expression 
de  pensée  »,  et  agit  ainsi  du  dedans  au  dehors,  — 
alors  que  des  éludes  purement  solfégiques  ne  pour- 
raient toul  au  plus  qu'obliger  la  musique  à  agir 
dans  le  sens  contraire.  La  personnalité  musicale  se 
développe,  l'enfant  prend  conliance.  Créer,  c'est, 
pour  lui,  s'élever  au  rang  des  dieux,  et  des  maîtres 
delà  musique.  Il  arrivera  vile  à  penser  en  musique, 
à  posséder  une  imagination  musicale  qui  ne  peut 
qu'élargir  son  moi. 

Bien  des  exercices  sont  conduits  par  les  enfanls 
eux-mêmes,  parfois  des  leçons  entières  (après  pré- 
paration). L'enseignement  mutuel  est  toujours  fort 
prisé  à  Berlin,  et  s'exerce  à  tous  les  âges.  Au  cours 
de  ces  leçons,  les  enfants  ne  sont  plus  seulement 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


appelés  ;i  apprécier  les  exemples  musicaux,  mais  aussi 
à  donner  leur  avis  sur  l'exécution  de  ces  exemples, 
et  sur  la  façon  de  diriger  du  moniteur.  «  Nous  avons 
bien  clianlé,  dit  un  enfant  content  de  lui,  pourtant 
nous  étions  mal  conduits.  » 

Avec  les  élèves  du  cours  moyen,  on  aborde  l'étude 
des  signes  usuels.  On  y  a  été  préparé  par  une  nota- 
tion simplifiée,  qui  utilise,  pour  la  désignation  des 
sons  de  toute  gamme  moyenne,  les  syllabes  :  do,  ré, 
mi,  fa,  so,  la,  ti,  ou  les  initiales  seulement  (méthode 
Curwen),  et,  pour  la  désignation  des  valeurs,  les 
signes  de  Rousseau,  et  du  chronomériste. 

Lorsqu'on  apprend  à  lire  sur  la  portée,  on  accepte 
non  seulement  que  le  do  se  promène  dans  l'échelle 
des  sons,  mais  aussi  que  le  signe  qui  le  représente 
se  déplace  sur  la  portée.  La  clef  indiquant  le  do 
(un  d)  se  placera  sur  toutes  les  lignes  et  dans  tous 
les  interlignes.  On  s'appuiera  sans  cesse  sur  ce  fait 
que  do,  mi,  sol  se  trouvent  en  même  temps  sur  des 
lignes  ou  en  des  interlignes.  C'est  l'un  des  principes 
chers  à  Wjlhem. 

Le  procédé  de  lecture  avec  clef  mobile  —  peu 
pratiqué  du  reste,  et  qui,  dispersant  l'effort,  dépas- 
serait vile  les  besoins  de  l'école  —  dérive  lui-même 
de  l'indicateur  vocal  de  Wilhem  et  du  méloplaste  de 
Galin. 

Le  professeur  de  Berlin  est  aussi  peu  traditiona- 
liste que  possible,  —  je  reviens  sur  ce  point,  —  lors- 
qu'il veut  organiser  un  enseignement  pratique,  et  il 
ne  se  soucie  que  de  conserver  au  peuple  allemand 
les  chants  qu'il  préfère. 

En  Allemagne,  l'étude  du  chant  populaire  prime 
tout.  Quoi  que  vaillent  les  mélodies  de  Wesphalie,  ou 
de  ïhuringe,  ou  de  Souabe,  elles  sont  filles  d'Alle- 
magne, d'une  muse  populaire  un  peu  rude,  mais 
qu'on  aime.  Tout  est  là.  L'enfant  ne  peut  donner 
quelque  sincérité  à  l'expression  du  sentiment  que 
s'il  exécute  ces  chants  de  chez  lui.  Faire  fi  de  cet 
élément  national  à  l'école  serait  l'erreur  de  ceux 
qui  méconnaissent  l'enfant.  Nul  n'y  songe  à  Berlin. 
Le  solfège  (qui,  au  reste,  se  pratique  fort  peu) 
reste  lui-même  étroitement  lié  au  chant  populaire. 
On  ne  solfie  que  des  phrases  qui  ont  été  ou  qui  seront 
chantées  avec  des  paroles.  Un  exercice  de  solfège  — 
sur  les  intervalles,  par  exemple  —  est  escorté  de 
paroles,  et  pourra  sans  doute  s'exécuter  en  canon. 
Les  professeurs  de  Berlin  lèveraient  les  bras  s'ils 
savaient  qu'au  contraire  nous  introduisons  dans  les 
écoles  des  livres  de  solfège  pur,  ne  contenant  pas 
une  ligne  de  chant!  Ils  feraient  observer  que  cela 
constitue  une  sorte  d'impasse,  que  des  exercices  qui 
n'aboutissent  pas  au  chant  n'ont  pas  leur  raison 
d'être  et  que  leur  sécheresse  les  rend  stériles. 

Autre  chose  a  disparu  à  peu  près  du  programme  : 
l'exposé  théorique.  On  aime  fort  à  parler,  on  parle 
trop,  et  l'on  ne  se  décidera  pas  demain  à  prendre 
l'éloquence  pour  lui  tordre  le  cou.  Mais  on  ne  parle 
que  pour  présenter  un  chant  et  le  commenter,  on 
renonce  au  verbiage  abstrait  de  la  théorie.  Les 
esprits  n'ont  pas  à  se  tendre,  et  je  crois  même  que 
la  sagesse  fondamentale  des  affirmations  repose  et 
calme  l'auditoire.  Cependant,  j'ai  entendu  un  élève 
de  cours  supérieur  parler  à  ses  camarades,  et  sur  un 
sujet  précis  :  la  tonalité  d'ut  mineur.  Mais  il  avait 
eu  le  soin  de  faire  jouer,  par  quelques  élèves,  au 
piano,  au  violon,  sur  la  flûte,  quelques  extraits  de 
maîtres,  de  Beethoven  pour  la  plupart,  —  et  per- 
mettant de  comparer  do  mineur  avec  do  majeur,  et 
avec  mi  bémol  majeur.  Le  début  de  la  Symphonie  en 


itt  mineur  fut  joué,  repris,  repris  encore.  On  s'arrê- 
tait à  la  première,  puis  à  la  seconde  modulation. 
Pour  terminer,  un  excellent  phonographe  lit  entendre 
en  entier  l'allégro  célèbre.  Une  leçon  de  ce  genre  est 
bien  plus  d'ordre  esthétique  que  théorique,  et  de 
nature  à  réconcilier  avec  la  théorie. 

On  a  donc  recours,  et  très  naturellement,  à  tout  ce 
qui  peut  faire  aimer  l'art  musical,  d'abord  en  don- 
nant la  première  place  aux  chants,  canons,  chœurs 
populaires  d'Allemagne  et  aux  pages  des  maîtres 
les  plus  aimés,  ensuite  en  parlant  aux  enfants  de  ces 
pages  et  de  ces  maîtres,  aussi  familièrement  que  des 
écrivains  dont  ils  lisent  les  pages  choisies.  Le  masque 
de  Beethoven,  le  buste  de  Schuiiert  et  celui  de  Mo- 
zart se  trouvent  en  bien  des  classes,  et  les  portraits 
des  musiciens  ont  remplacé,  sur  les  murs  des  écoles, 
ceux  des  souverains  et  des  généraux  de  l'empire. 

D'ailleurs,  la  plupart  des  écoles  ont  une  salle  de 
musique,  où  se  trouvent  bibliothèque  musicale, 
phono,  orgue,  —  grandes  orgues  parfois,  —  avec  un 
ou  deux  pianos.  La  grande  salle  du  musée  pédago- 
gique permet  elle-même  des  auditions  avec  orchestre 
et  chœurs.  L'un  des  cours  d'adultes  de  chant  se 
donne  dans  cette  salle.  Sept  cents  élèves  s'y  trouvent 
rassemblés  en  hiver.  J'ai  assisté  à  l'un  de  ces  cours, 
le  soir.  Quatre  ou  cinq  chants  populaires  ont  été 
étudiés,  sans  secours  du  solfège,  puis  exécutés  en 
canons  ou  à  plusieurs  voix.  Orgue,  violons,  flûtes, 
hautbois  préludaient,  ou  se  mêlaient  aux  voix,  — 
jouant  soit  la  mélodie,  soit  des  parties  d'accompa- 
gnement. Les  élèves,  comme  toujours,  étaient  invi- 
tés à  apprécier  les  combinaisons  des  voix  el  des  ins- 
truments. 

Des  Académies  et  séminaires  de  musique  forment 
les  professeurs  de  chant  des  écoles  de  l'Etat.  Les 
candidats  à  ces  écoles  professionnelles  doivent, 
avant  d'être  admis,  acquérir  un  certificat  de  licence 
(de  quelque  enseignement  que  ce  soit).  Ils  passent 
alors  huit  semestres  —  donc  au  moins  quatre  ans 
—  dans  ces  académies,  avant  d'être  jugés  aptes  à 
l'enseignement  de  la  musique.  Ils  font  donc  des 
études  très  complètes  de  chant,  d'instrument,  d'har- 
monie, et,  une  partie  de  la  journée,  ils  enseignent  aux 
enfants  des  classes  annexes.  Ils  subissent,  au  bout 
de  ce  temps,  un  examen  très  complet,  pédagogique 
et  musical,  et  deviennent  professeurs 

Quelques-uns  d'entre  eux,  chargés  de  mission, 
visitent  les  écoles  des  villes  et  des  campagnes,  pour 
répandre  les  chants  populaires,  «  se  mêler  au  chœur 
des  hommes  »,  donner  le  goût  du  chant.  C'esl  là 
une  mission  qui  revêt  un  caractère  évangélique. 

A  Spandau,  une  véritable  cité,  comprenant  trente- 
cinq  grandes  maisons  ayant  toutes  un  préau  et  un 
vaste  dortoir),  favorise  cette  diffusion  du  chant  cho- 
ral. On  reçoit  dans  ces  maisons  trois  catégories 
d'hôtes  :  des  enfants  malades,  qui  trouveront  dans 
le  chant  un  exercice  salutaire,  —  des  enfants  punis 
qui  se  disciplineront  et  aideront  à  leur  relèvement 
moral  par  le  chant,  —  des  grandes  personnes  qui 
viennent  suivre  «  la  semaine  de  musique  ».  Santé 
du  corps,  santé  de  l'esprit,  on  attend  tout  du  chant 
à  l'Evangelische  Schule  fur  Volksmusik. 

D'ailleurs,  à  l'Académie  de  Gharlottenburg  et  à 
l'Ardenbergstrasse,  les  futurs  professeurs  peuvent 
étudier  le  chant  sacré  et,  tout  en  apprenant  la  péda- 
gogie musicale,  apprendre  aussi  le  «  travail  d'église  ». 
Si  des  milliers  d'adultes  fréquentent  les  cours  de 
musique  vocale,  si  l'on  peut  chanter  tanl  de  belles 
œuvres  chorales  dans  les  temples  et  les  églises,  si. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE        ENSEIGNEMENT  MUSICAL  A  L  ÉCOLE    3683 


l'on  exécute  des  chœurs  dans  les  casernes  et  dans 
les  groupes  d'étudiants  ou  d'ouvriers,  et  jusque  dans 
les  loges  maçonniques,  c'est  évidemment  —  entre 
autres  raisons  —  parce  que  l'école  fait  aimer  le 
chant  choral  et  sait  préparer  les  enfants  à  tenir  leur 
place  dans  le  chœur. 

La  préparation,  cependant,  reste  imparfaite.  D'a- 
bord, parce  que  la  lecture  sur  portée,  qui  ne  remplace 
que  très  tard  la  lecture  des  initiales,  de  la  méthode 
Tonique  do,  est  trop  peu  pratiquée.  Je  sais  bien  qu'il 
faut  avant  tout  amener  l'enfant  à  la  chorale,  qui 
fera  le  reste.  Mais  je  crains  (tout  en  déplorant  da- 
vantage encore  l'excès  contraire,  fréquent  en  France) 
qu'on  ne  laisse  passer  un  âge  |  10-11-12  ans)  favorable 
à  l'étude  de  la  notation.  Nous  abordons  trop  tût  l'é- 
tude des  signes  de  notation,  mais  les  Allemands  l'a- 
bordent un  peu  lard. 

Cependant,  la  plus  grave  lacune  est  ailleurs.  On 
fait  chanter  beaucoup,  dans  les  écoles  d'Allemagne, 
mais  sans  se  soucier  assez  de  la  qualité  des  voix. 
La  tendance  générale  des  Allemands  à  chanter  de 
la  gorge  ne  se  trouve  donc  pas  combattue.  Un  peu 
de  souplesse  vocale  est  désirable,  comme  il  est  dési- 
rable que  s'affine  le  goût  choral. 

En  se  laissant  aller,  on  pourrait  trouver  quelques 
autres  lacunes  à  signaler.  Alors  que  le  développe- 
ment de  la  personnalité  artistique  est  l'objet  de  laut 
de  soins,  ainsi  que  la  formation  de  l'oreille,  on 
éprouve  quelque  surprise  à  constater,  par  exemple, 
que  l'un  des  exercices  qui  concourent  le  plus  sûre- 
ment à  cette  formation,  la  dictée  musicale  orale, 
se  pratique  encore  si  peu  et  de  façon  si  imparfaite. 
Cet  exercice  essentiel,  d'analyse  et  de  reconnais- 
sance des  sons,  peut,  grâce  à  quelques  précautions, 
l'emporter  en  valeur  sur  tous  les  autres,  et  s'adres- 
ser vraiment  à  la  collectivité,  en  obligeant  chaque 
enfanta  un  effort  personnel. 

Tout  n'est  donc  pas  à  imiter  dans  la  pédagogie 
musicale  des  Allemands,  et  nous  pouvons  faire  aussi 
bien,  grâce  à  notre  goût  latin,  toujours  facile  à  ('veil- 
ler, grâce  aux  richesses  incomparables  et  si  variées 
de  notre  fonds  populaire  qui  peuvent  constituer  le 
plus  merveilleux  instrument  de  culture  du  goût, 
grâce  enfin  à  notre  vigilance  en  ce  qui  concerne  la 
culture  de  la  voix  et  la  formation  de  l'oreille.  Mais  je 
suis  tout  prêt  à  être  partial,  à  excuser  les  défauts 
du  système  allemand,  parce  que  je  constate  qu'il  ne 


perd  jamais  de  vue  le  but  social,  humain,  postsco- 
laire, et  que  l'école  se  trouve  ainsi  nettement  orien- 
tée vers  les  fins  utiles  de  l'avenir. 

On  s'efforce  de  n'établir  aucune  barrière  entre  le 
travail  scolaire  et  ce  qui  doit  en  être  la  continuation, 
la  résultante,  et  c'est  pourquoi  l'on  se  garde  d'a- 
border des  études  que  l'enfant  trouverait  arides 
et  dont  il  garderait  —  devenu  adulte  —  un  souvenir 
fâcheux,  qui  l'éloignerait  de  la  chorale.  On  lâche 
donc  à  ne  pas  faire  métier  d'enseigneur,  on  renonce 
aux  méthodes  intellectuelles,  à  la  raison  démons- 
trative, à  l'entraînement  solfégique  pur,  détaché  de 
la  seule  réalité  qui  compte  :  le  chant  choral.  Fritz 
ne  sait,  de  solfège,  que  ce  qui  peut  l'aider  à  lire  des 
parties  chorales  très  simples,  mais  il  aime  le  chant, 
il  goûte,  il  sent,  et  il  peut  même  créer!  Le  profes- 
seur souflle  sur  ce  feu  sacré  pour  l'entretenir,  et 
donne  toute  la  place,  dans  les  leçons,  à  ce  qui  est 
musique  vocale,  émotion  musicale,  art  simple  et 
populaire,  expression  du  cœur. 

Il  y  a  «  enveloppement  musical  ».  Une  impulsion 
est  donnée,  irrésistible,  —  un  appétit  de  plus  est 
créé,  aiguisé,  mais  c'est  le  plus  élevé  de  tous.  L'en- 
fant sortira  riche  d'aspirations  supérieures,  et  verra 
que  la  porte  de  l'école  ouvre  sur  la  salle  de  musique, 
qui  l'attendra  toujours. 

Et  c'est  parce  que  la  formation  de  l'écolier  se  mue 
en  une  véritable  orientation,  que  l'instituteur  pro- 
fesseur de  musique  et  le  professeur  spécial  de  chant 
prennent  rang  parmi  les  éducateurs  les  plus  utiles. 
Ils  ne  sont  pas  considérés  comme  chargés  d'ensei- 
gner un  arl  d'agrément,  un  accessoire,  celui  de  tous 
les  bruits  qui  coûte  le  plus  cher.  Là-bas,  le  minus 
habens  s'est  redressé,  et  de  même  que  l'Allemagne 
ajoué  un  premier  rôle  dans  le  mon. le  par  la  puis- 
sance de  rayonnement  de  sa  musique,  de  même  il 
joue  un  premier  rôle  dans  l'Etat,  pour  la  prépara- 
tion morale  du  peuple,  l'ordre  et  la  paix  dans  la  cité, 
la  cohésion,  l'harmonie  sociale. 

Puissions-nous,  en  France,  tenir  un  jour  en  pa- 
reille estime  l'éducation  musicale  populaire  et  ceux 
qui  se  chargent  de  la  dispenser  à  tous,  et  com- 
prendre enfin  lout  ce  qu'on  peut  demander  à  la  mu- 
sique, au  chant  choral,  pour  favoriser  le  développe- 
ment harmonieux  des  facultés  de  l'enfant. 

Maurice  CHEVAIS. 


ERRATA 


Paye  3633.  —  A  la  dernière  ligne  de  la  1"  colonne, 
suivre  à  la  lpe  ligne  de  la  2e  colonne  : 

ut,     ré,     mi,     fa,     ut,     ré,     mi-fa. 

P.  3634.  —  1«  colonne,  ligne  51,  lire  :  «constater 
que  la  portée,  étant  à  l'origine  au  service  des  voix, 
ne  pouvait  réserver  »,  au  lieu  de  :  «  considérer  que, 


dès  l'origine  de  la  portée,  on  l'utilisa  suivant  les 
voix,  sans  attribuer...  » 

P.  3633.  —  2e  colonne,  ligne  24,  lire  :  «  éléments  », 
au  lieu  de  «  fonctions  ». 

P.  3637  et  3646.  —  Lire  :  Jaques-Dalcrûze,  et 
non  :  Jacques  Dalcroze. 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS 
ET  LES  GRANDES  ASSOCIATIONS  SYMPHONIQUES 


Par  Albert  VERNAELDE 


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SOCIETE    DES    CONCEP.TS 


PRINCIPAUX    CONCERTS   ANTÉRIEURS    A    LA    FONDA- 
TION DE  LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS 

Avant  de  retracer  année  par  année,  comme  autant 
d'étapes  glorieuses,  l'histoire  de  la  Société  des  Con- 
certs du  Conservatoire,  avant  de  pénétrer  dans  le 
temple  consacré  au  génie  de  Beethoven,  dans  le 
temple  qui  nous  apparaît  aujourd'hui  comme  le 
Panthéon  de  l'art  musical,  nous  estimons  qu'il  est 
indispensable  de  rappeler,  en  des  lignes  brèves,  les 
concerts  qui  préludèrent  à  la  fondalion  de  l'illustre 
compagnie. 

Les  concerts  d'orchestre,  c'est-à-dire  ceux  dans 
lesquels  la  polyphonie  instrumentale  jouait  un  rôle 
prédominant,  ne  remontent  pas  au  delà  du 
xvme  siècle. 

C'est  en  1725  que  se  donnèrent  les  premiers  con- 
certs, dits  Concerts  Spirituels,  sous  la  direction  de 
Anne  Danican-Philidor. 

Ils  furent  inaugurés  le  dimanche  de  la  Passion 
aux  Tuileries,  dans  la  salle  des  Suisses.  On  y  enten- 
dit plus  tard  les  symphonies  des  Mannheimistes, 
le  Gi  ec  et  d'HAYDN,  dont  la  symphonie  n»  14  fut 
publiée  en  1764,  chez  Venier,  à  Paris. 

Les  Concerts  spirituels  eurent  successivement  pour 
directeurs  : 

1725-1728,  Anne  Danican-Philidor. 

1728-1734,  M.  de  Lannoy,  P.  Simard  et  J.-J.  Moiuet. 

1734-1747,  l'Administralion  de  l'Opéra. 

1748-1755,  Royer. 

1755-1762,  Caperan,  veuve  Royer,  Mondonville. 

1762-1772,  Caperan,  Joliveat,  Dauvergne. 

1772,  l'Administration  de  l'Opéra,  Dauvergne  el 
Berton. 

1773-1777,  idem,  Gaviniès,  Leduc  aîné,  et  Gossec 

1777-1791,  Legros. 

A  Legros  revient  l'honneur  d'avoir  fait  entendre 
pour  la  première  fois  la  symphonie  en  mi  bémol  de 
Mozart. 

Voici  ce  qu'à  ce  sujet,  l'auteur  écrivait  à  son  père, 
Léopold  Mozart,  à  la  date  du  3  juillet  1778  : 

«  J'ai  dû  faire  une  symphonie  pour  l'ouverture 
du  Concert  spirituel;  elle  a  été  exécutée  le  jour  de 
la  Fête-Dieu,  avec  un  applaudissement  général.  D'a- 
près ce  que  j'entends  dire,  il  en  a  été  fait  mention 
dans  le  Courrier  de  l'Europe...  Elle  a  donc  plu 
exceptionnellement.  A  la  répétition,  j'ai  eu  très 
peur,  car,  de  ma  vie,  je  n'ai  rien  entendu  de  plus 
mauvais  :  vous  ne  pouvez  pas  vous  imaginer  com- 


ment ils  ont,  deux  fois  de  suite,  bâclé  et  raclé  à 
fond  la  symphonie...  J'étais  vraiment  très  inquiet... 
Je  l'aurais  bien  fait  répéter  une  fois  de  plus,  mais  on 
a  toujours  tant  de  morceaux  à  répéter  qu'il  n'y  avait 
plus  assez  de  temps.  Et  je  dus  aller  me  coucher  le 
cœur  inquiet  et  l'humeur  mécontente  et  furieuse.  Le 
lendemain,  j'avais  pris  la  résolution  de  ne  pas  aller 
du  tout  au  concert.  Mais  il  fit  beau,  le  soir,  et  je 
finis  par  me  décider,  avec  le  dessein  arrêté,  si  cela 
marchait  aussi  mal  qu'à  la  répétition,  de  pénétrer 
dans  l'orchestre,  de  prendre  le  violon  des  mains  de 
M.  Lahoussaye,  le  premier  violon,  et  de  dirige)  moi- 
même.  Je  priai  Dieu  qu'il  me  fît  la  grâce  que  tout 
marchât  bien,  puisque  tout  est  pour  son  plus  grand 
honneur  et  sa  gloire,  et  ecce...  la  symphonie  com- 
mença. Raaff  était  assis  à  coté  de  moi.  Juste  au 
milieu  du  premier  allegro  était  un  passage  que  je 
savais  bien  devoir  plaire  :  tous  les  auditeurs  en 
furent  transportés...  et  il  y  eut  un  grand  applaudis- 
sement... Comme  je  savais  bien,  quand  je  l'écrivis, 
quelle  sorte  d'effet  il  ferait,  je  l'avais  ramené  une 
seconde  fois,  à  la  lin...  même  accueil  du  capo.  Vali- 
dante plut  aussi,  particulièrement  le  dernier  al  h  gro.«. 
J'avais  entendu  dire  qu'ici  tous  les  derniers  allegro 
commencent,  comme  les  premiers,  avec,  tout  de 
suite,  l'ensemble  des  instruments,  et  généralement 
imisono;  aussi,  commencé-je  avec  les  deux  violons 
seuls,  piano,  et  pendant  8  mesures  seulement... 
puis,  là-dessus,  tout  de  suite,  un  forte...  De 
que  les  auditeurs  (comme  je  m'y  attendais)  firent 
chut,  au  moment  du  piano.  Et  lorsque  soudain  éclata 
le  forte...  entendre  le  forte  et  battre  des  mains  fut 
tout  un.  Dans  ma  joie,  sitôt  la  symphonie  achevée 
je  m'en  allai  au  Palais-Royal...  pris  une  bon: 
dis  le  chapelet  que  j'avais  promis  de  dire...  et  restai 
à  la  maison1.  » 

La  critique  ne  se  montra  pas  toujours  très  tendre 
pour  les  Concerts  Spirituels.  Nous  n'en  voulons  pour 
preuve  que  les  lignes  suivantes  irrites  par  BurnEY 
au  sortir  de  la  séance  qui  eut  lieu  le  14  juin  1770  : 
a  J'allai  au  Concert  Spirituel  :  c'est  le  seul  amu- 
sement qui  soit  permis  dans  les  jours  de  grande  fête. 
Le  premier  morceau  fut  un  motel  de  Lalande,  Do- 
minus  regnavit,  composé  à  grand  chœur  et  exécuté 
avec  plus  de  force  que  d'expression.  Le  style  était 
celui  du  vieil  opéra  français  et  me  parut  fort  en- 
nuyeux, quoiqu'il  fût  couvert  d'applaudissi  menls 
par  l'auditoire.  Il  y  eul  ensuite  un  concerto  de  haut- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS 


bois,  exécuté  par  Besozzi,  neveu  des  célèbres  basson 
et  hautbois  de  ce  nom  à  Turin.  Je  suis  forcé  de  dire, 
pour  l'honneur  des  Français,  que  ce  morceau  fut 
très  applaudi.  C'est  faire  un  pas  vers  la  réforme  que 
de  tolérer  ce  qui  devrait  être  adopté.  Après  que 
Besozzi  eut  achevé  son  morceau,  MUe  Delcambre  cria 
VExaudi  Deus  avec  toute  la  force  de  poumons  dont 
elle  était  capable,  et  elle  fut  aussi  bien  accueillie 
que  si  Besozzi  n'eût  rien  fait.  Vint  ensuite  Traversa, 
Ier  violon  du  priuce  de  Carignan,  qui  joua  fort  bien 
un  concerto  qu'on  goûta  peu.  Mmc  Philidor  chanta 
un  motet  de  la  composition  de  son  mari;  mais  quoi- 
que ce  morceau  fut  d'un  meilleur  genre  pour  le 
chant  et  pour  l'harmonie  que  ceux  qui  avaient  été 
chantés  précédemment,  il  ne  fut  pas  applaudi  avec 
l'enthousiasme  qui  ne  laisse  pas  de  douter  sur  le 
succès.  Le  concert  se  termina  par  un  Ben/us  rir. 
motet  à  grand  choeur  mêlé  de  solos.  Le  chanteur 
qui  récitait  ceux  de  la  haute-contre  beugla  si  fort 
qu'il  aurait  pu  le  faire  si  on  lui  eût  mis  le  couteau 
sous  la  gorge.  Je  n'eus  pas  de  peine  à  m'apercevoir, 
parla  satisfaction  qui  régnait  sur  toutes  les  physio- 
nomies, que  c'était  la  musique  la  plus  convenable 
pour  les  Français  et  celle  qu'ils  sentaient  le  mieux. 
Mais  le  dernier  chœur  mit  le  comble  à  leur  plaisir  : 
de  ma  vie,  je  n'ai  entendu  pareil  charivari!  J'avais 
souvent  trouvé  que  nos  chœurs  sont  trop  fournis 
et  trop  bruyants;  mais,  comparés  à  ceux-ci,  c'est 
une  musique  douce  et  mélodieuse,  telle  qu'il  la  fau- 
drait pour  inviter  au  sommeil  une  héroïne  de  tra- 
gédie. » 

Il  va  sans  dire  que,  comme  le  remarque  Michel 
Brenet,  cette  appréciation  tendancieuse  ne  doit  être 
acceptée  que  sous  toutes  réserves'.  Les  travaux 
entrepris,  depuis  une  vingtaine  d'aimées,  par  les 
musicologues  français,  ont  fait  justice  de  semblables 
jugements  qui  méconnaissent  complètement  les  qua- 
lités de  nos  artistes.  On  remarquera,  en  particulier, 
que  les  chanteurs  si  décriés  par  Burney  devaient 
pourtant,  quatre  ans  plus  tard,  donner  satisfaction 
à  Gluck,  dont  on  connaît  les  sévères  exigences  en 
matière  d'interprétation. 

Le  Concert  Spirituel  disparut  en  1791  dans  la 
tourmente  révolutionnaire. 

Mais  le  succès  avec  lequel  il  avait  été  accueilli  fit 
naître  d'autres  entreprises  musicales.  En  effet,  dès 
1769,  le  baron  de  la  Haye,  fermier  général,  et  le 
baron  d'Ogny  fils  fondèrent  le  Concert  des  amateur*. 
qu'ils  placèrent  sous  la  direction  de  Gossec.  C'est  à 
l'un  de  ces  concerts,  qui  se  donnaient  dans  l'hôtel  de 
Soubise  ou  de  l'.ohan,  rue  de  Paradis  et  rue  Vieille- 
du-Temple,  que  furent  exécutées  pour  la  première 
fois,  en  1779,  plusieurs  symphonies  d'HAYDN  appor- 
tées en  France  par  le  violoniste  polonais  Fontesky. 
Le  Concert  des  amateurs  vécut  onze  années  et  dis- 
parut en  1781.  Aussitôt  après  sa  disparition,  des  di- 
lettantes fondèreut,  en  1789,  sous  les  auspices  de  la 
reine  Marie-Antoinette,  la  société  de  la  Loge  Olym- 
pique. Celte  société,  composée  d'amateurs  éclairés, 
donna  d'abord  ses  séances  au  Palais-Royal,  puis,  en 
1786,  aux  Tuileries,  dans  la  salle  des  Cardes. 

Elle  était  administrée  par  le  comte  d'Ogny  et  par 
le  fermier  général  de  La  Haye.  Ses  chefs  d'orches- 
tre furent  Viotti,  Nayoigille  aîné  et  Bkrthealme. 
Haydn  composa  expressément  pour  elle  six  sym- 


phonies dites  de  la  Loge  Olympique  (1784).  Elle  dis- 
parut en  1789. 

Les  concerts  de  la  rue  de  Cléry  lui  succédèrent  en 
l'an  VII.  Ils  eurent  pour  chef  d'orchestre  Crasset,  qui 
y  fit  entendre,  en  1801,  la  première  symphonie  de 
Rèicha.  Après  avoir  changé  plusieurs  fois  de  local, 
cette  société  fut  dissoute. 

L'année  1805  vit  reparaître  les  Concerts  Spirituels 
au  Théâtre-Italien.  Ils  eurent  lieu,  par  la  suite,  à  la 
salle  Louvois  et  à  l'Odéon,  et  furent  enfin  installés 
définitivement  à  l'Opéra  sous  ladirection  d'IlAiiENECK. 
Ces  concerts  étaient  donnés  les  lundi,  mercredi  et 
vendredi  de  la  semaine  sainte.  On  y  entendit,  no- 
tamment, les  symphonies  en  la  et  en  ré  de  Beetho- 
ven-. Elwart  raconte,  au  sujet  de  cette  dernière, 
qu'H\i'.E\'ECK  ne  put  obtenir  de  la  faire  jouer  par  ses 
musiciens  qu'à  la  condition  de  remplacer  l A  niante 
par  ["Allegretto  de  la  symphonie  en  /,/.  Les  Concerts 
Spirituels  Je  l'Opéra  disparurent  en  1831. 

Reprenant  le  titre  de  Concert  des  amateurs,  une 
nouvelle  association  se  constitua  en  1815.  Les  séan- 
ces, qui  eurent  lieu  au  Tivoli  d'hiver  de  la  rue  de 
Grenelle-Saint-Honoré  et,  par  la  suite,  au  Wauxhall, 
furent  dirigées  par  David,  Iîarbereau,  Sauvage,  Gué- 
néf:,  Vbhgnes  et  Tilmant. 

Les  membres  de  cette  association  se  dispersèrent 
en  1829,  et  tout  de  suite,  le  compositeur  Chelard 
fonda  l'Athénée  Musical,  qu'il  plaça  sous  le  patro- 
nage de  M.  Chabrol  de  Volvic,  préfet  de  la  Seine. 
Grâce  à  cet  appui  officiel,  la  nouvelle  société  obtint 
de  donner  ses  séances  à  l'hôtel  de  ville,  dans  la 
salle  Saint-Jean.  Elle  eut  pour  chefs  d'orchestre  : 
Barrereau,  Vidal  et  Girard.  Elle  fut  dissoute  en  1832. 
Bien  que  ces  différentes  entreprises  musicales, 
éphémères  pour  la  plupart,  mais  cependant  profi- 
tables au  développement  de  l'art,  semblent  avoir 
montré  à  la  Société  des  Concerts  du  Conservatoire  la 
voie  dans  laquelle  elle  devait  s'engager,  nous  esti- 
mons que  la  célèbre  phalange  tire  surtout  son  ori- 
gine des  exercices  publics  des  élèves  du  Conserva- 
toire, exercices  qui  donnèrent  eux-mêmes  naissance 
aux  Concerts  français,  dont  nous  parlerons  par  la 
suite. 

Les  premiers  exercices  publics  d'élèves  semblent 
avoir  été  institués  par  l'Ecole  royale  de  chant,  fondée 
par  un  arrêté  du  Conseil  d'Etat  du  roi,  à  la  date  du 
3  janvier  1784. 

Nous  trouvons,  en  effet,  dans  un  règlement  relatif 
à  l'organisation  de  cette  Ecole,  le  paragraphe  sui- 
vant : 

«  Ils  (les  maîtres)  leur  (les  élèves)  feront  apprendre 
par  cœur  des  opéras  qu'on  leur  fera  déclamer  soit 
entiers,  soit  par  rôles  différents,  séparément  et  en- 
semble; ensuite,  on  leur  fera  répéter  sur  le  théâtre 
de  l'Ecole  en  présence  des  personnes  qui  voudront 
venir  les  entendre,  afin  de  les  accoutumer  à  paraître 
en  public.  » 

L'Ecole  avait  pour  but,  dit  cet  arrêté.  «  de  former 
tout  à  la  fois  des  sujets  utiles  à  l'Académie  royale  de 
musique  et  des  élèves  propres  au  service  particulier 
de  la  musique  de  Sa  Majesté.  » 

Gossec,  qui  fut  appelé  à  la  diriger,  paraît  avoir  été 
l'inspirateur  de  ces  exercices  d'élèves,  si  on  se  re- 
porte au  mémoire  qu'il  rédigea  quelque  temps  avant 
l'ouverture  de  l'Ecole,  et  dans  lequel  il  proposait, 
entre  autres  choses,  d'établir  des  concerts  hebdoma- 
daires publics  et  payants,  où  les  élèves  feraient  en- 
tendre des  morceaux  choisis  et  des  airs  d'opéras. 
Le  premier  exercice  public  d'élèves  eut  lieu    le 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


18  avril   1786,  au  théâtre  des  Menus-Plaisirs,  avec 
Roland  de  Piccini. 

En  voici  la  distribution  : 

Roland  (basse) M.  Dessaules. 

Médor  (ténor) M.  Lefbvrb, 

Angélique M"0  Molot. 

Thémire Wlle  Tuémire. 

Chœurs  :  élèves  hommes  et  femmes. 

Voici  également  un  extrait  du  compte  rendu  que 
Les  Affiches  du  5  avril  1786  consacrèrent  à  cette  exé- 
cution : 

«  C'est  pour  éprouver  les  élèves  et  pour  juger  de 
leurs  progrès  qu'il  a  été  fait  hier  l'exercice  dont  nous 
avons  à  rendre  compte  :  ils  ont  représenté  l'opéra 
Roland  avec  tous  ses  divertissements.  L'assemblée, 
qui  était  aussi  brillante  que  nombreuse,  a  paru  très 
satisfaite  de  l'exécution  de  ce  bel  ouvrage,  dans 
lequel  M""  Mulot,  qui  jouait  le  rôle  d'Angélique,  a 
déployé  une  grande  sensibilité  jointe  à  une  voix 
pure,  flexible,  étendue,  à  une  manière  de  chanter 
facile  et  expressive.  On  a  aussi  trouvé  de  l'âme,  de 
l'intelligence  et  une  belle  qualité  de  voix  à  M.  Des- 
saules qui  a  fait  Roland.  M.  Le  Fèvre  a  rendu  avec 
intérêt  le  rôle  de  Médor.  Chacun  des  autres  élèves  a 
obtenu,  dans  les  dilférents  personnages  de  cet  opéra, 
des  encouragements  mérités.  On  a  singulièrement 
été  frappé  de  la  justesse  avec  laquelle  ils  ont  tous 
exécuté  les  morceauxd'ensemble,  ainsi  quelesballels, 
et  toute  cette  représentation  a  fait  grand  plaisir.  » 

L'Ecole  royale  de  chant  fut  supprimée  en  1795. 

L'Ecole  de  la  musique  de  la  garde  nationale,  fon- 
dée en  1789,  par  Sarrette,  reprit  les  exercices  d'é- 
lèves. Cette  école  se  transforma  successivement  en 
Ecole  de  musique  municipale  (1792),  en  Institut 
national  de  musique  (1793),  pour  prendre,  enfin,  en 
vertu  d'un  décret  rendu  par  la  Convention  à  la  date 
du  3  août  1795  (16  thermidor  an  III),  le  titre  de 
Conservatoire  de  musique. 

L'article  Ier  du  titre  V  du  règlement  du  Conserva- 
toire, adopté  par  le  Directoire,  le  15  messidor  an 
IV  (3  juillet  1796),  édictait  que  «  six  exercices 
auraient  lieu  annuellement  dans  la  grande  salle  du 
Conservatoire,  le  20  de  chacun  des  mois  de  brumaire, 
nivôse,  ventôse,  floréal,  messidor  et  fructidor  ». 
L'art.  111  ajoutait  que  les  cent  quinze  membres  du 
Conservatoire  (c'est-à-dire  les  professeurs)  devaient 
contribuer  à  l'exécution  des  exercices. 

Ils  n'eurent  néanmoins  pas  lieu,  pour  des  raisons 
qu'il  sérail  sans  intérêt  de  relater  ici,  mais  on  décida 
qu'à  partir  de  l'an  VI,  les  lauréats  se  feraient  en- 
tendre tous  les  ans  pendant  la  distribution  des  prix 
du  Conservatoire. 

Cette  décision  reçut  son  application,  pour  la  pre- 
mière fois,  le  24  octobre  1797  (3  brumaire  an  VI). 
Voici  le  programme  de  cette  séance,  qui  fut  donnée 
dans  la  salle  de  l'Odéon  : 

1»  Ouverture  du  Jeune  Henri Méhul. 

Les  professeurs. 
2°  Corisandre  (air) Langlé. 

La  citoyenne  Boely. 
3»  Concerto  de  clarinette Rosetti. 

Létonnb. 
i"  Àlcesle  (air) Gluck. 

La  citoyenne  Moread. 
5°  Concert,i  pour  piano- forte H.  Jadin. 

La  citoyenne  Dumey. 
6°  Symphonie  aouertonte Bréval. 

BOULANGER,    GUBRIN. 

7"  Elica  ou  le  «ont-Bernard  (air) Cherdbini. 

La  citoyenne  Chbvauer. 


8"  Symphonie  concertante Catel. 

Pour  flûte,  cor  et  basson,  Mondru, 
Daoprat,  Dossion. 
9°  Duo  Italien. 

Les  citoyennes  Chevreau  et  Georqeon. 

10°  Sonate  pour  piano-forte Cramer. 

Pkadher. 

1 1°  Symphonie  concertante .      Yiotti. 

Pour  violon,  Saovagkot,  la  citoyenne  Lebrcn. 

12°  Les  Danaides Salieri. 

(Chœur.) 

Deux  exercices  d'élèves  eurent  encore  lieu  par  la 
suite,  le  15  brumaire  an  VIU  (6  novembre  1800)  et  le 
23  nivôse  an  IX  (13  janvier  1801). 

Les  frais  de  ces  exercices  étaient  imputés  au  bud- 
get du  Conservatoire,  qui  s'élevait  à  230.000  francs, 
mais,  ce  budget  ayant  été  considérablement  réduit 
en  l'an  X,  les  exercices  d'élèves  auraient,  faute  de 
ressources  suffisantes,  été  fatalement  supprimés  si 
ceux-ci,  stimulés  par  les  succès  qu'ils  avaient  rem- 
portés et  par  les  encouragements  qui  leur  furent 
prodigués,  n'avaient  eu  l'heureuse  inspiration  de 
continuer  leurs  manifestations  d'art  en  dehors  des 
attaches  officielles  du  Conservatoire. 

Ils  fondèrent  donc  une  société  qui  prit  le  nom  de 
Concerts  français  et  s'installèrent  rue  de  la  Victoire, 
dans  le  foyer  de  la  Salle  Olympique. 

Le  premier  concert  eut  lieu  le  30  brumaire  an  X 
(21  novembre  1801|. 

La  société  des  Concerts  français  donna,  par  la 
suite,  du  21  novembre  1801  au  2  mai  1802,  douze 
concerts  qui  reçurent  les  plus  précieux  encoura- 
gements, aussi  bien  de  la  haute  société  que  de  la 
presse. 

Mais  l'insuffisance  des  ressources  de  la  jeune 
société  la  mit  bientôt  dans  l'obligation  de  solliciter 
son  retour  au  Conservatoire.  Non  seulement,  son 
désir  fut  réalisé,  mais  elle  obtint  de  plus  que  l'ad- 
ministration du  Conservatoire  lui  accordât  son  pa- 
tronage. 

Douze  exercices  d'élèves  furent  donnés  du  30  bru- 
maire au  11  floréal  de  l'an  XI.  Les  concerts  étaient 
dirigés  alternativement  par  Duret  et  Habeneck.  Mal- 
gré l'accueil  chaleureux  qui  lui  fut  fait,  la  société 
des  Concerts  français,  faute  de  ressources  encore,  ne 
put  reprendre  ses  séances  que  le  4  mars  de  l'année 
1804.  Elles  eurent  lieu  ensuite,  la  même  année,  le 
18  mars,  le  8  avril,  le  15  avril  et  le  23  mai. 

Les  deux  années  qui  suivirent  ne  furent  guère  plus 
heureuses,  mais,  de  1807  à  1813,  il  y  eut  douze  à 
treize  concerts  par  année. 

Pendant  celte  dernière  période,  après  avis  mo- 
tivé de  Ciierubini,  Méhul  et  Gos;E3,  inspecteurs  de 
l'enseignement,  la  direction  exclusive  de  l'orchestre 
avait  été  dévolue  à  Habeneck.  Elwart  rapporte  que  ce 
fut  aujeours  d'un  de  ces  exercices,  qu'HABENEi  t  lit 
entendre,  pour  la  première;fois,  la  symphonie  en  ut 
de  BEEBTHOVBN.La  chute  de  l'Empire,  ayant  entraîné 
la  fermeture  du  Conservatoire,  fit  disparaître  du 
même  coup  la  société  des  Concerts  français. 

Les  exercices  d'élèves  reprirent,  mais  d'une  ma- 
nière très  irrégulière,  dès  la  réouverture  de  l'Ecole,  qui 
eut  lieu  le  1er  avril  1816,  sous  le  titre  d'Ecole  royale. 
Mais  ils  furent  supprimés  après  le  concert  du  9  mai 
1824,  par  suite  de  l'impossibilité  absolue  de  couvrir 
les  frais  qu'ils  entraînaient.  Ils  ne  purent  être  rétablis 
que  le  31  octobre  1839. 

Nous  n'avons  mentionné  jusqu'ici  que  les  entre- 
prises symphoniques  vraiment  dignes  de  retenir 
l'attention  Nous  nous  bornerons  donc  à  rappeler 
chronologiquement,  sans  autres   commentaires,  la 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    3687 


plupart  des  associations  qui  ont  précédé  la  fonda- 
tion de  la  Société  des  Concerts. 
,     Académie  de  Baif  (1567-1574). 

Concerts  de  Mauduit  (1S89). 

Société  de  Mélophilètes  (1722). 

Concert  Spirituel  de  Philidor  (17251. 

Concerts  des  harmoniphiles. 

Concerts  de  l'Opéra  (1763). 

Concerts  des  amateurs  à  l'hôtel  Soubise  (1770-1 781). 

Le  Concert  olympique  (1780-1784). 

Concert  du  Waux-hall  (1725). 

Concert  de  l'Opéra  (1781). 

Société  des  enfants  d'Apollon  (1784-90). 

Concert  du  cirque  du  Palais-Royal  (1789-91). 

Waux-hall  (1790). 

Concerts  du  Théâtre  Feydeau  (1791). 

Odéon,  Théâtre  Louvois,  Opéra-comique,  Lycée  des 
arts,  Tivoli. 

Concerts  dans  les  cafés,  Jardin  Idalie,  Tiooli,  Pavil- 
lon de  Hanovre,  Fvascati. 

Concerts  de  la  rue  de  Cléry,  du  Théâtre  Olympique, 
Salle  des  redoutes  (1803). 

I    nci  rts  du  Conservatoire  (1802-1815). 


LA  SOCIÉTÉ   DES  CONCERTS  DU   CONSERVATOIRE 

Suivant  Lassabathie,  auteur  d'une  excellente  his- 
toire du  Conservatoire,  l'idée  première  de  la  Société 
des  Concerts  serait  due  à  Cherubini. 

El  a  art,  au  contraire,  en  attribue  le  mérite  à  11a- 
beneck,  ainsi  qu'en  témoigne  l' anecdote  suivante  que 
nous  extrayons  de  l'ouvrage  qu'il  a  publié  sur  la 
Société  des  Concerts  en  1860  : 

«  Attristé  de  voir  à  quel  degré  d'abandon  les  con- 
certs spirituels  étaient  tombés  et  conservant  l'espoir 
que  le  public  finirait  tôt  ou  tard  par  accorder  son 
attention  aux  chefs-d'œuvre  symphoniques  de  Bee- 
thoven, s'il  pouvait  parvenir  à  les  faire  exécuter  dans 
leur  intégrité  par  un  orchestre  que  les  opéras  de 
M.  Kossini  avaient  en  quelque  sorte  régénéré,  Habe- 
neck aîné,  à  l'occasion  de  la  Sainte-Cécile,  en 
novembre  1826,  invita  à  déjeuner  chez  lui  un  assez 
grand  nombre  de  ses  amis,  la  plupart  attachés  à 
l'orchestre  de  l'Opéra  et  connus  de  lui  pour  aimer 
la  gloire  de  l'Art,  en  les  priant  d'apporter  avec  eux 
leurs  instruments.  Ceux-ci,  croyant  qu'il  s'agissait 
d'une  aubade  à  donner  sans  doute  à  l'aimable  com- 
pagne de  leur  ami  et  chef  d'orchestre,  obtempérèrent 
à  son  désir.  La  Symphonie  héroïque  (sublime  aubade) 
fut  essayée,  mais  avec  tant  d'acharnement,  que 
l'heure  du  déjeuner  se  passa  sans  que  personne  s'en 
aperçût.  Hélait  près  de  quatre  heures  du,  soir  lorsque 
Mn"  Habeneck,  ouvrant  à  deux  battants  la  porte  de 
la  salle  à  manger,  dit  à  ses  convives  :  «  Au  nom  de 
Beethoven  reconnaissant,  vous  êtes  priés  de  vous 
mettre  à  table  pour  diner.  »  Il  était  temps,  car  les 
instruments  à  vent  surtout  étaient  sur  les  dents,  et  la 
contrebasse  commençait  à  pousser  des  cris  de  canni- 
bale. » 

L'essai  de  la  Symphonie  héroïque  causa  d'abord  de 
l'étonnement  parmi  la  petite  phalange  instrumentale 
qui  s'était  [groupée  autour  cTHabeneck;  mais  après 
quelques  séances,  l'étonnement  fit  place  à  l'admira- 
tion ;  d'autres  essais  eurent  lieu  en  1827,  chez  le  fac- 
teur de  pianos  Duport,  rue  Neuve-des-Petits-Champs 
et,  en  dernier  lieu,  dans  les  salons  du  courageux 
chef  d'orchestre,  maison  Siéber,  rue  des  Filles-Saint- 
Thomas. 


Cheiu'bini,  ayant  été  instruit  par  Habeneck  de  ce 
qui  se  passait,  accueillit  avec  un  empressement  qui 
honore  sa  mémoire,  la  proposition  qu'il  lui  fil  d'ob- 
tenir l'autorisation  de  donner  quelques  concerts 
dans  la  grande  salle  ». 

Voici  encore  un  document  inédit  retrouvé  par 
nous  dans  les  archives  de  la  Société  des  Conecrts.  Il 
mérite  de  retenir  l'attention,  car,  bien  qu'il  ne  porte 
ni  le  nom  de  son  auteur  ni  la  date  où  il  a  été  écrit, 
il  est  hors  de  doute  qu'il  émane  d'un  sociétaire  qui 
fut  un  des  artisans  de  la  première  heure. 

Notice  sur  l'origine  de  la  Société  des  Concerts. 
—  «  En  1821  ou  22,  sous  la  direction  de  M.  Habeneck 
à  l'Opéra,  il  eut  l'idée  de  faire  jouer  dans  les  Con- 
certs spirituels  les  symphonies  de  Beethoven  dont  il 
avait  compris  les  beautés.  Il  (it  faire,  à  cet  effet, 
quelques  répétitions,  auxquelles  il  fut  obligé  de  renon- 
cer par  le  mauvais  vouloir  des  musiciens  de  l'or- 
chestre, qui  traitaient  d'absurdes  les  œuvres  que 
depuis  ils  ont  tant  applaudies,  et,  il  faut  le  dire,  par 
le  jugement  que  plusieurs  de  nos  compositeurs  por- 
tèrent sur  ces  symphonies,  qu'ils  traitaient  de  com- 
positions barbares. 

u  M.  Habeneck  fit  cependant  exécuter  la  symphonie 
en  ré  majeur,  dont  le  succès  fut  médiocre,  VAndanle 
delà  symphonie  en  la,  qui  fut  demandé  bis  avec  trans- 
port, et  VOratoriodu  Christ  au  mont  des  Oliviers,  qu'il 
avait  fait  traduire  et  qui  eut  beaucoup  de  succi  - 
Lorsqu'il  cessa  de  diriger  l'Opéra,  ce  qui  eut  lieu  en 
1823,  il  rentra  chef  d'orchestre  et  reprit  parmi  les 
musiciens  la  place  qui  lui  appartenait.  Son  attention 
se  porta  de  nouveau  sur  les  ouvrages  de  Beethoven 
qu'il  étudiait  depuis  longtemps,  et,  dans  la  certitude 
des  beautés  qu'ils  renfermaient,  il  profita  de  l'occa- 
sion de  la  Sainte-Cécile  pour  réunir  chez  lui  une 
trentaine  de  ses  collègues  et  leur  faire  essayer  de 
nouveau  les  morceaux  que  déjà  ils  avaient  repous- 
sés. Soit  le  désir  de  ne  pas  contrarier  dans  sa  con- 
viction Habeneck  qui  répétait  sans  cesse  :  «  C'est 
cependant  bien  beau  »,  soit  que,  moins  nombreux  et 
mieux  placés  dans  un  salon  que  dans  la  salle  de  l'O- 
péra, où  le  travail  pour  les  musiciens  commence 
toujours  par  l'ennui,  on  mit  du  soin  à  exécuter  la 
Symphonie  héroïque  et  la  Symphonie  en  la,el  on  finit 
par  trouver  plusieurs  morceaux  jolis  et  croire  qu'avec 
une  meilleure  exécution  que  celle  que  l'on  peut 
avoir  à  première  vue,  ces  deux  symphonies  pour- 
raient produire  de  l'effet. 

«  M.  Habeneck,  profitant  du  commencement  de 
succès  qu'il  avait  obtenu  sur  ses  collègues,  leur  pro- 
posa une  association  dans  le  but  de  donner  quelques 
matinées  musicales,  dont  les  frais  auraient  été  sup- 
portés par  les  sociétaires  qui  auraient  distribué  un 
certain  nombre  de  billets  gratis  parmi  le  monde 
amateur  de  Paris,  pour  lui  faire  connaître  toutes 
les  symphonies  de  Beethoven,  non  encore  exécutées 
en  France.  Un  amateur  riche  et  ami  de  M.  Habeneck 
s'offrait  pour  supporter  la  plus  forte  partie  des  dé- 
penses, le  surplus  devait  l'être  par  vingt-quatre 
musiciens  choisis  parmi  ceux  à  qui  leur  position  de 
fortune  et  de  bonne  volonté  pour  les  progrès  de  l'Art 
permettaient  ce  sacrifice.  Le  moyen  adopté  de  ne 
faire  supporter  ces  frais  que  par  une  partie  des 
artistes,  ayant  pour  but  de  se  servir  de  la  bourse  de 
ceux  qui  avaient  un  peu  d'argent  et  du  talent  de 
ceux  moins  fortunés,  suscita  des  récriminations  de  la 
part  de  ceux  qui  n'avaient  pas  été  choisis  pour  payer, 
et  ce  projet  fut  encore  abandonné. 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


«  A  cette  époque,  quelques  députés,  lorsqu'on 
venait  discuter  les  différents  budgets,  voulaient  tou- 
jours diminuer  les  dépenses  de  l'Ecole  royale  de 
musique,  sous  le  prétexte  qu'il  n'en  sortait  aucun 
talent  marquant  pour  les  théâtres;  on  avait  été 
même  jusqu'à  parler  de  la  supprimer,  et  ces  diffé- 
rentes discussions  avaient  dû,  nécessairement,  alar- 
mer les  professeurs  et  les  élèves. 

«  Le  directeur  de  l'Ecole  se  rappela  les  anciens 
exercices  du  Conservatoire,  qui  avaient  eu  beaucoup 
de  succès  comme  moyen  de  faire  connaître  au  public 
le  résultat  de  l'établissement;  il  en  causa  avec 
M.  Habeneck  qui  jadis  les  avait  conduits.  Celui-ci, 
qui  rêvait  toujours  symphonie  de  Beethoven,  accueil- 
lit avec  ardeur  les  idées  du  directeur  et,  conjointe- 
ment avec  lui,  il  demanda  à  M.  de  la  Rochefoucauld 
la  permission  de  réorganiser  des  concerts  au  Con- 
servatoire. Cette  demande  fut  accueillie  favorable- 
ment, et  M.  de  la  Rochefoucauld  promit  deux  mille 
francs  pour  supporter  les  premiers  frais;  il  ne 
s'agissait  plus  que  des  moyens  d'exécution.  Or 
MM.  Cherubini  et  Habeneck  comprirent  que  l'Ecole 
royale  était  insuffisante  pour  former  un  orchestre 
assez  nombreux,  il  fut  convenu  d'appeler  comme 
auxiliaires  aux  élèves  déjà  choisis,  les  artistes  qui 
avaient  fait  leurs  études,  soit  au  Conservatoire,  soit 
à  l'Ecole  royale,  et  dont  le  talent  pouvait  être  utile 
pour  le  résultat  désiré. 

«  M.  Habeneck  fit  une  liste  parmi  ceux  dont  le  zèle 
et  le  talent  étaient  connus,  et  on  les  réunit  pour  leur 
faire  connaître  le  désir  de  Reformer  les  concerts  à 
l'inStar  de  ceux  connus  autrefois  sous  le  nom  de 
Concerts  français  ou  Exercices  du  Conservatoire.  Les 
motifs  qui  furent  mis  en  avant  furent  le  besoin  de 
ramener  les  amateurs  à  entendre  la  musique  d'en- 
semble, chose  que  les  soirées  musicales,  alors  en 
grande  faveur  et  dans  lesquelles  les  nocturnes,  les 
romances,  [les  fantaisies  et  variations  paraissaient 
faire  oublier  qu'il  existât  d'autre  musique  d'une  bien 
plus  grande  importance,  ce  que  les  vrais  artistes 
considéraient  comme  la  décadence  de  la  musique. 
Ce  motif  fut  déterminant  pour  la  plupart  d'entre  eux, 
et  chacun  donna  sa  signature.  Seulement,  il  s'établit 
une  discussion  sur  le  mode  d'organisation  des  con- 
certs. Plusieurs  des  artistes  présents,  qui,  d'élèves, 
étaient  devenus,  avec  les  années,  des  professeurs 
distingués,  pensèrent  qu'ils  ne  pouvaient  venir 
comme  auxiliaires  d'élèves  dont  ils  étaient  les  maî- 
tres. M.  Guillou,  alors  professeur  de  flûte  à  l'Ecole 
royale,  proposa  d'élaborer,  sous  le  titre  de  Société 
des  Concerts,  un  projet  d'association  et  de  règlement 
pour  donner  des  concerts  dont  les  bases  furent  à  peu 
près  ainsi  posées  : 

«  Pour  être  sociétaire,  il  fallait  avoir  étudié  au 
Conservatoire;  le  directeur  de  l'Ecole  devait  être 
président  et  adjoindrait  à  La  Société,  à  titre  de  com- 
plément d'étude  musicale,  les  élèves  qu'il  reconnaî- 
trait capables.  Ceux-ci  ne  recevraient  aucune  part 
dans  les  bénéfices;  [on  proposa]  que  la  Société  serait 
administrée  par  des  Commissaires  nommés  par  elle  ; 
que  le  titre  de  commissaire  serait  gratuit;  que 
chaque  sociétaire  recevrai!  un  jeton  de  présence, 
toutes  les  fois  qu'il  serait  appelé,  dont  la  valeur 
serait  déterminée  d'après  la  somme  restant  en  caisse 
après  tous  les  frais  payés;  qu'il  n'y  aurait  que  le 
chef  d'orchestre  et  les  solos  dont  le  droit  de  pré- 
sence serait  compté  double. 

«  Ce  projet  de  règlement  fut  soumis  à  M.  de  la 
Rochefoucauld,  qui  y  donna  son  assentiment,  et  les 


répétitions  commencèrent.  Elles  furent  longues  et 
nombreuses  et,  après  bien  de  la  peine,  le  premier 
concert  fut  affiché,  sans  articles  de  journaux  pour  # 
préparer  le  public  à  ces  nouveaux  concerts,  l'intention 
de  la  Société  étant  de  faire  elle-même  sa  réputa- 
tion. » 

Voici  encore  un  document  tout  à  fait  inédit  que 
nous  avons  également  retrouvé  dans  les  archives  de 
la  Société  des  Concerts  : 

«  La  Société  des  Concerts  n'est  pas  sortie  tout 
armée  du  cerveau  d'un  Jupiter. 

«  Parmi  les  artistes  de  l'orchestre  de  l'Opéra,  se 
trouvait  Amédée,  élève  de  Cherubini,  amoureux  de 
son  art,  heureux  quand  il  pouvait,  à  l'aide  de  son 
ancien  condisciple  Habeneck  dont  il  était  le  Pylade, 
faire  de  bons  quatuors.  Chef  d'orchestre  à  l'Opéra, 
professeur  au  Conservatoire,  Habeneck  était,  avec 
Baillot  et  Vidal,  un  des  trois  exécutants  cités  pour 
ne  rien  refuser  à  première  vue,  parce  que,  avant  de 
devenir  violonistes  habiles,  ils  étaient  musiciens  nés. 
Nous  pouvions  de  temps  en  temps  savourer  les 
chefs-d'œuvre  de  nos  grands  auteurs,  chose  assez 
facile  quand  il  ne  faut  que  la  réunion  de  quatre  ou 
cinq  exécutants.  Amédée,  à  cette  époque,  était,  sinon 
l'unique,  du  moins  l'un  des  rares  possesseurs  d'une 
partition  des  Symphonies  de  Beethoven,  et  parce  qu'il 
les  avait  lues,  grande  était  la  démangeaison  d'en- 
tendre ces  gigantesques  conceptions  de  l'auteur  des 
quatuors  qui  nous  enthousiasmaient.  Grandes  aussi 
étaient  les  difficultés  de  rassembler  un  orchestre, 
même  restreint,  ce  qui  obligeait  à  des  frais  couverts 
par  la  cotisation  des  exécutants  mêmes. 

«  La  suprématie,  le  talent  d'HABENECK,  le  dési- 
gnaient naturellement  comme  chef  d'orchestre.  Dois- 
je  dire  cependant  qu'une  des  grandes  préoccupations 
d'AMÉDÉE  fut  de  le  sortir  d'une  torpeur  dans  laquelle 
sa  position  assez  belle  lui  permettait  de  s'engourdir? 
Il  était  loin  d'entrevoir  alors  l'horizon  qui  allait  le 
grandir  de  cent  coudées.  Enfin,  grâce  à  l'insistance 
persévérante  d'AMÉDÉE,  quelques  essais  eurent  lieu  : 
ce  fut  une  révélation!... 

«  Amédée,  après  avoir  persévéré  en  véritable  pro- 
pagateur du  beau,  a  pu  se  trouver  satisfait  d'avoir 
élevé  un  piédestal  à  l'amitié,  quand  il  aurait  eu  le 
droit  de  dire  :  Exegi  monumentum.  Membre  du  pre- 
mier comité  dirigeant,  il  apportait  dans  ses  fonc- 
tions autant  de  zèle  qu'il  en  mettait  à  l'exécution  da 
sa  partie  de  quinte.  Il  mourut  de  la  maladie  de 
Charles  IX,  pendant  la  plus  belle  période  des  con- 
certs. 

«  Accorder  à  ce  modeste  pionnier,  aujourd'hui 
inconnu,  l'honneur  bien  mérité  de 'l'initiative,  c'est 
établir  une  vérité  qui  ne  diminue  en  rien  la  gloire 
de  relui  . j r i i  lut  chef  en  potentat  d'une  société  dont 
un  artiste  célèbre  (Romberc)  a  pu  dire  :  «  C'est 
«  .comme  la  mer;  si  on  ne  l'a  pas  vue,  on  ne  peut 

s'en  faire  l'idée.  •■ 

«  Un  amateur  de  la  vérité,  membre  fondateur,  ex- 
premier  violoncelle  de  l'Opéra,  ex-professeur  au 
Conservatoire,  dans  sa  00"  année. 

«  20  mai  1883.  »  «  Vasi.in.  » 


Quel  crédit  faut-il  accorder  à  ce  document?  N'y 
doit-on  voir  qu'un  dernier  et  rare  hommage  rendu 
à  l'amitié'.'  Nous  laissons  au  Jecteur  le  soin  de  se 
prononcer. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    9689 


Quel  que  soit  d'ailleurs  le  rôle  exact  cTHaheneck, 
quant  à  la  création  de  la  Société  des  Concerts,  il  est 
incontestable,  nous  le  répétons,  qu'elle  est  issue 
des  Exercices  d'élèves,  et  surtout  de  la  Société  des 
Concerts  français  disparue  en  1824. 

En  effet,  on  trouve  déjà,  en  germe,  dans  cette 
dernière,  l'organisation  de  l'illustre  compagnie.  En 
examinant  de  près  le  règlement  de  la  Société  des 
Concerts,  on  constate  tout  de  suite  qu'il  n'est,  en 
quelque  sorte,  que  l'élargissement,  imposé  par  le 
temps,  du  programme  que  s'était  tracé  la  Société  des 
Concerts  français.  Un  comité  était  élu  qui  avait  pour 
mission  de  diriger  l'entreprise,  aussi  bien  au  point  de 
vue  administratif,  qu'au  point  de  vue  artistique;  le 
système  de  l'abonnement  était  établi  tel  qu'il  existe 
encore  aujourd'hui;  enfin,  et  ce  n'est  pas  son 
moindre  titre,  la  Société  des  Concerts  français  révéla 
au  public  parisien  et  imposa  à  son  admiration 
trois  symphonies  de  Beethoven.  Il  y  a  plus.  En  exa- 
minant attentivement  ses  programmes,  nous  y  trou- 
vons déjà  presque  tous  les  noms  qui,  quelques  années 
plus  tard,  figureront  aux  programmes  de  la  Société 
des  Concerts.  Mais,  tandis  que  sur  les  premiers,  le 
génie  aimable  d'HAYDN  rayonnait  en  chacune  de  ses 
manifestations,  ce  sera  désormais,  avec  la  célèbre 
compagnie,  Beethoven  qui  prendra  place  dans  le 
Temple  dont  il  restera  le  dieu  superbe  et  incontesté. 

Ajoutons  qu'entre  la  disparition  de  la  Société  de 
Concerts  français  et  la  création  de  la  Société  des  Con- 
certs, c'est-à-dire  de  1824  à  1828,  les  symphonies  de 
Beethoven  ne  furent  plus  exécutées  à  Paris. 

Sollicité  par  Cherubini  et  Habeneck,  M.  de  la  Ro- 
chefoucauld, adhérant  à  leur  désir,  avec  un  empres- 
sement qui  honore  sa  mémoire  et  perpétuera  la 
reconnaissance  des  musiciens  français,  prit  l'arrêté 
suivant  qui  instituait  sw:  concerts  par  an  et  accordait 
à  l'entreprise  naissante  une  allocation  de  2<>00  francs  ' , 
afin,  dit  Elwart,  de  ne  pas  accepter  les  avances  que 
les  sociétaires  s'étaient  engagés  sur  l'honneur  à  faire 
de  leurs  propres  deniers. 

«  Paris,  le  la  février  lsjs. 

«  Nous,  aide  de  camp  du  roi,  chargé  du  départe- 
ment des  beaux-arts  de  la  maison  de  Sa  Majesté  : 

«  Sur  la  demande  du  directeur  de  l'Ecole  royale 
de  musique  et  de  déclamation  lyrique,  voulant  rendre 
à  cette  Ecole  la  réputation  qu'elle  avait  acquise  par 
la  perfection  de  ses  exercices  publics,  et  nous  étant 
assuré  que  ces  concerts  sont  un  moyen  puissant 
d'émulation  pour  les  élèves  et  même  pour  les  pro- 
fesseurs, 

«  Avons  arrêté  et  arrêtons  ce  qui  suit  : 

«  Article  premier.  —  Il  y  aura  tous  les  ans  à  l'Ecole 
royale  de  musique  et  de  déclamation  lyrique  six 
concerts  publics  qui  commenceront  au  plus  tard  le 
1er  dimanche  du  mois  de  mars.  Le  directeur  fera  en 
sorte  que  lesdits  concerts  se  succèdent  sans  qu'il  y 
ait  entre  chacun  des  intervalles  qui  puissent  dépas- 
ser quinze  jours,       i 

«  Art.  2.  —  Pourront  être  appelés  pour  concourir 
à  l'exécution  desdits  concerts,  les  anciens  et  les 
nouveaux  élèves  de  l'Ecole.  En  cas  de  besoin  et  pour 
donner  une  bonne  impulsion,  des  professeurs  sont 
invités  à  se  joindre  à  leurs  disciples. 


1.  Il  est  intéres^mt  .].■  laiir  remarquer  .pi  aujourd'hui  encore,  la  loge 
dite  d'honneur  est  louée  2000  fr.  par  la  présidence  de  la  République. 
Ajoutons  que  M.  Alexandre  Miller.-tnd  a  assist.'  régulièrement  à  tous 


«  Art.  3.  —  Aucun  artiste  étranger  à  cet  établis- 
sement ne  pourra  se  faire  entendre  dans  lesdits 
concerts,  quel  que  soit  d'ailleurs  le  talent  qu'il  pos- 
sède. 

«  Art.  4.  —  Les  élèves  qui  sont  encore  dans  les 
classes  de  l'Ecole  royale  seront  obligés  de  concourir 
gratuitement  aux  concerts  lorsqu'ils  seront  désignés 
par  le  directeur.  Ceux  qui  se  refuseraient  à  ce  ser- 
vice ou  manqueraient  seulement  aux  répétitions 
pour  lesquelles  ils  auraient  été  convoqués,  cesse- 
raient dès  lors  de  faire  partie  de  l'Ecole  royale. 

«  Art.  5.  —  Les  anciens  élèves,  c'est-à-dire  ceux 
qui  ne  reçoivent  plus  aucune  leçon  dans  le  sein  de 
l'Ecole,  seront  seuls  indemnisés.  L'indemnité  à  leur 
allouer  sera  fixée  à  la  fin  de  tous  lesconcerts,  à  rai- 
son du  nombre  de  répétitions  et  d'exécutions  aux- 
quelles ils  auront  pris  part. 

«  Les  chefs  de  pupitre  recevront  une  indemnité 
double  de  celle  des  exécutants. 

■■  Art.  6.  —  Les  concerts  auront  lieu  dans  la  grande 
salle  de  l'Ecole  royal.-. 

«  Le  prix  des  places  est  ainsi  fixé  : 


liai. 'lie.  ileiixii-iin ■>  lui;  ■■ 

Parterre 

Amphithéa 


-il...-. -li  ni--.'.'. 


.    Art.   ,.  —  Jouiront  de  leurs  entrées  à   tontes 

places  : 

«  1°  Les  membres  du  comité  d'administration  et 
d'enseignement  de  l'Ecole  royale; 

«  2°  Les  professeurs  titulaires  et  honoraires; 

..  :i"  MM.  les  inspecteurs  du  département  des 
beaux-arts;  MM.  les  directeurs  de  l'Institution  royale 
de  musique  religieuse,  de  ['Académie  royale  de  mu- 
sique, du  théâtre  royal  de  l'Opéra-Comique,  du 
Théâtre-Italien  et  de  l'Odéon. 

«  Les  professeurs  adjoints  jouiront  de  leurs  entrées 
aux  deuxièmes  loges  et  à  celles  du  rez-de-chaussée. 

«  Art.  8.  —  A  la  fin  desdits  exercices,  il  nous  sera 
rendu  compte  des  receltes  et  dépenses  qu'ils  auront 
occasionnées. 

«  Art.  9.  —  Le  directeur  de   l'Ecole  royale  de 
musique  et  de  déclamation  lyrique  est  i 
l'exécution  du  présent  arrêté. 

«  Fait  à  Paris  le  la  février  1828. 

«Signé  :  Le  vicomte  de  La  Rochefoucauld. 

«  Pour  ampliation  : 

«  Le  Chef  île  la  division 

du  département  des  Beauz-Arts, 

«  Signé  :  Le  comte  de  Tillv.  » 

Habeneck  soumit  immédiatement  cet  arrêté  aux 
professeurs  de  l'Ecole  royale,  ainsi  qu'à  un  certain 
nombre  d'anciens  élèves-lauréats  qui  y  adhérèrent 
avec  enthousiasme  et  décidèient,  séance  tenante, 
d'adopter  le  titre  de  :  Société  des  Concerts.  Ce  docu- 
ment démontre  péremptoirement  aussi  qu'elle  est 
bien  la  prolongation  des  exercices  d'élèves,  et  que, 
par  là,  elle  reste  étroitement  liée  au  Conservatoire. 
Son  caractère  officiel  s'affirme  de  plus  par  ceci,  que 
sous  tous  les  régimes,  elle  a  bénéficié  du  privilège 
unique  de  la  salle  des  concerts. 

Le   9  mars  1828,   c'est-à-dire   moins   d'un  mois 


•'Hi'.lo 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


après  la  promulgation  de  l'arrêté  précité,  avait  lieu 
le  premier  concert. 

Voici  le  programme  de  ce  grand  événement  mu- 
sical. 

Société  des  concerts. 


PREMIER  COSCERT 

Le  Dimanche  '.I  mars  1S28,  à  2  heuTes. 
Programme  : 

1.  Symphonie  héroïque  de  L.-V.  Beethoven. 

2.  liaa  de  l'opéra  Sniiirumis  de  M.  Kossini. 
Chanté  par  Mil"  Nélia  et  Caroline  Maillard. 


3.  So 


lar  M.  Meifre 

par  M.  Saoza 


5.    Concerto  noureau  de  union,   pur  R,,i,r 

i\.  Chœur  de  Blanche  de  Provence  de  M. 

7.  Ouverture  îles  Abencerrages  de  M.  Chi  rubini. 

S.   Ki/ne  el  l.7on«  de  la  Messe  du  Sacre,  de  M.  Cherubihi,  exécuté 
à  grand  chœur. 
L'orchestre  sera  dirigé  par  M.  IUhimxk  aine. 

Ajoutons  que  la  recette  s'éleva  à  1017  francs. 
Voici  quelle  était  la  composition  de  l'orchestre  et 
des  chœurs  : 

Artistes  de  l'orchestre. 


Premiers 

violons  : 

Habeneck,  chef  d'orchestre. 

Ccyillon. 

Tilmant  aine,  suppléant. 

COLOT. 

Urhan. 

Girard. 

Battu. 

Seghers. 

Auguste  Tolbecqce. 

Demody. 

Gras. 

de  Rival 

II  ILMA. 

Clément. 

Sauzay. 

Seconds 

violons  : 

Clavel. 

Lepoivre 

Gdérin. 

Straw. 

Saint-Laurent. 

Mis.i  i. 

Claudel. 

Cherblas 

Millault. 

Javaui  t. 

Philippe. 

Dcbrecil 

Lagrave. 

Baptiste  To 


lll  Ml  1 
l'ERRi: 
ROLL. 


Trompettes  : 
Dadverne.  Legros. 


Pavaht  (ophicléide  . 


SCHNKITZHŒFFER. 

Harpe  : 
Edumiul  Lariviéri 


Artistes  du  chant. 


MlKORBT. 

Dl JEAN. 

Hyrthe. 

HlRNE. 

Dabadie. 

Ferrand. 

Dorus. 

Peignât. 

Frémont. 

RoUFLETTE. 

BlBRE. 

Page 

de  la  musique  du  Roi 

DORSAK. 

Lkcoq. 

Seco 

ids  soprauc 

Caroline  Maillard. 

Dœmonet. 

MORI-GOSSELIN 

BOLLARD. 

Beck. 

PEIGNAT. 

Corine  Letelli 

Lebrun. 

Emilie  Mens. 

Horlense  Maillard 

BoUVENNE. 

Pagt 

de  la  musique  du  Roi 

Barbier. 

Foulon. 

ROCOPJ  v-.. 

Fliiry. 

FUCHS. 

Ll  R  il. 

Ténors  : 

Ni  \  1Z. 

IVnchard. 

Adolphe  Nourrit. 

Alexis  Dupont. 

Chevalier. 

Wartel. 

DOINEAU. 

Leborne. 

Trévaux. 

Kl     \  UMI   . 

Ch.  Pi.antad::. 

M issoi . 

Pli    MU. M. 

COURTIN. 

Laty. 

Cornu. 

.1.  Tariot. 

Dabadi    . 

I'Kl  VOST. 

Hurteaux. 

Ferd.  Prevo 

Canaple. 

Baroilhet. 

II  EN  S. 
BnrVENNE. 


Aug.  Panseroï 

RlGAULT. 

Brocard. 


I.i   MON    -Il    11. 

Derivis  tils. 
Alberl  Bons 


On  remarquera  que  ce  lahleau  mentionne  les  noms 
de  la  plupart  des  artistes  de  l'époque  qui  ont  illustré 
la  scène  lyrique  française. 

Examinons  maintenant  comment  les  feuilles  du 
temps  commentèrent  cet  événement  musical,  qui 
devait  avoir  une  si  profonde  influence  sur  l'art  musi- 
cal en  France  : 

Revue  Musicale,  sous  la  signature  de  Fétis  : 

«  Le  9  mars  1828  sera  inscrit  comme  un  beau  jour 
dans  les  fastes  de  la  musique  française  et  comme 
l'époque  de  sa  régénération.  Non  seulement,  l'exécu- 
tion y  a  repris  ce  cachet  de  supériorité  qui  avait 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    ?691 


donné  au  Conservatoire  une  réputation  européenne, 
mais  encore  une  intluence  morale  de  l'ordre  le  plus 
élevé  s'y  est  développée  et  ne  peut  manquer  d'avoir 
les  résultats  les  plus  heureux  dans  toutes  les  bran- 
ches de  l'art  musical... 

«  L'enthousiasme  de  l'auditoire,  égal  à  son  éton- 
nement,  s'est  manifesté  par  des  applaudissements 
bruyants  et  répétés.  On  sort  rarement  satisfait  d'un 
concert;  mais  ici,  c'était  mieux  que  de  la  satisfac- 
tion; il  s'y  mêlait  de  l'orgueil  national,  et  chacun 
répétait  à  l'envi  :  Il  est  impossible  qu'en  aucun  lieu 
de  l'Europe  on  exécute  la  musique  mieux  que  cela. 
Ceux  qui  avaient  entendu  autrefois  les  concerts  du 
Conservatoire  se  félicitaient  de  les  retrouver;  les 
autres  n'y  comprenaient  rien,  et  se  demandaient  avec 
étonnement  d'où  étaient  surgis  tout  à  coup  cette 
masse  de  virtuoses.  » 

Les  Débats  : 

«  Après  un  trop  long  interrègne,  Euterpe  a  res- 
saisi le  sceptre  de  l'harmonie.  Sa  maison  de  plai- 
sance est  toujours  dans  la  rue  Bergère;  c'est  là 
qu'une  troupe  fidèle  de  virtuoses  français  rivalisait 
de  talent  et  de  zèle  pour  déployer  à  notre  oreille  les 
trésors  de  Haydn  et  de  Cimarosa,  de  Mozart  et  de 
Beethoven.  Je  devrais  vous  parler  des  anciens  con- 
certs du  Conservatoire,  faire  connaître  les  causes 
qui  les  firent  cesser  et  l'inconcevable  retard  que  l'on 
a  mis  à  leur  restauration.  Avec  des  moyens  auss' 
puissants,  avec  des  éléments  aussi  précieux,  peut-on 
rester  dans  l'inaction  et  ne  pas  continuer  une  belle 
entreprise  commencée  avec  tant  d'éclat  et  de  bon- 
heur? Il  nous  suffit  de  savoir  que  la  lice  est  ouverte  ; 
la  trompette  a  sonné  et  le  géant  Beethoven  a  donné 
pour  gage  du  combat  une  héroïque  symphonie. 

«  Nous  avons  retrouvé  ces  anciens  conservatoriens 
dont  les  talents  ont  illustré  l'Ecole  française;  leurs 
jeunes  émules  se  sont  montrés  dignes  de  combattre 
à  leurs  côtés.  La  vieille  et  la  jeune  garde  se  sont 
signalées  dans  ce  tournoi  de  gaie  science,  et  s'il  est 
possible  de  remarquer  une  différence  entre  les 
anciens  et  les  nouveaux  concerts  du  Conservatoire, 
elle  est  entièrement  à  l'avantage  de  ceux-ci... 

o  Les  personnes  qui  n'ont  point  assisté  aux  anciens 
concerts  ne  peuvent  se  faire  une  idée  de  l'étonnante 
supériorité  de  l'orchestre  qui  vient  d'exécuter  la  Sym- 
phonie héroïque  de  Beethoven  :  c'est  ravissant,  cela 
tient  du  prodige... 

«  Une  révolution  s'est  opérée  dernièrement  dans 
l'empire  musical  ;  a-t-elle  produit  des  effets  nou- 
veaux, des  tours  d'une  originalité  plus  piquante,  des 
formes  d'un  ordre  plus  relevé  que  ceux  qu'on  re- 
marque dans  l'œuvre  de  Beethoven'?  Et  pourtant, 
cette  Symphonie  héroïque  de  nom  et  de  fait,  languis- 
sait dans  nos  bibliothèques,  et  notre  insouciance  l'a 
condamnée  pendant  vingt  ans  à  un  silence  bien 
funeste  pour  nos  plaisirs. 

«  Je  ne  tenterai  pas  de  décrire  les  transports  d'ad- 
miration et  d'enthousiasme  qui  ont  suivi  les  derniers 
accords  de  chaque  morceau  de  cet  ouvrage  :  sept  ou 
huit  salves  d'applaudissements  ont  servi  d'accom- 
pagnement au  finale... 

«  Ces  deux  morceaux  (le  Gloria  et  le  Kyrie  de  la 
Messe  de  Cherubini)  ont  éleclrisé  l'assemblée;  on 
applaudissait  encore  en  défilant  dans  les  corridors; 
c'est  avec  regret  que  l'on  abandonnait  la  place. 
Lorsque  l'on  congédie  son  monde  de  cette  manière, 
il  ne  faut  pas  douter  de  l'empressement  qu'il  mettra 
à  revenir  au  temple  que  l'on  vient  de  rouvrir  à  l'har- 
monie. » 


Quelques  jours  après  le  premier  concert,  c'est-à- 
dire  le  24  mars  1828,  un  comité  provisoire  réunissait, 
pour  la  première  fois  en  assemblée  générale,  les 
membres  fondateurs  qui  avaient  adhéré  au  projet 

d'H.\BENECK. 

Ce  comité  provisoire  était  composé  de  Cherubini, 
président;  Habeneck, chef  d'orchestre,  vice-président; 
Guillou,  secrétaire;  Dauprat,  Brod,  F.  Halévy,  Kuhn, 
chef  du  chant;  Meifred,  Amédée,  Albert  Bonet,  A.  Du- 
pont, Tajan-Bogé. 

C'est  au  cours  de  cette  séance  mémorable  que  fut 
présenté  et  adopté  le  projet  de  règlement  élaboré 
par  le  comité,  et  auquel  M.  Ta.ian-Hogé  avait  tout 
particulièrement  collaboré. 

Notre  souci  d'être  un  des  historiens  fidèles  de  la 
Société  des  Concerts,  autant  que  notre  profond  désir 
de  payer  un  juste  tribut  de  reconnaissance  à  la  mé- 
moire des  vaillants  artistes  qui  créèrent  et  établirent 
définitivement,  en  apposant  leur  signature  au  bas  de 
ce  règlement,  une  œuvre  si  haute  et  si  durable,  nous 
fait  un  pieux  devoir  de  mentionner  ici  les  noms  de 
ceux  qui  s'étaient,  avec  un  si  généreux  enthousiasme, 
groupés  autour  de  leur  glorieux  chef. 

Ce  sont,  en  dehors  des  membres  du  comité  provi- 
soire : 

Panseron,  Dossion,  Niquet,  Legros,  E.  Biesaimé, 
Henri  Deshays,  Mingal,  Gcinot,  Miciiu,  Blangy,  Rick- 
bans,  Barizel,  Cœlina,  Minoret,  Nermel,  V.  GllAS, 
Chénié,  Rigallt,  H.  Maillard,   Ch.   Halma,   Perrin, 

BOUFFIL,      KlLTAN,      DÉ.IAZET,      HeNS,      MOREAU,      Hl.NHY, 

Schneitzhoeffer,  Charles  Tolbecque,  Claudel,  Seu- 
riot,  Vaslin,  Battu,  Doinkau,  Ch.  Saint-Laurent, 
Guérin,  Leroux,  J.  Tariot,  Ch.  Plantade,  Prévost. 

Règlement  de  la  Société  des  Concerts. 

chapitre  premier 
De  la  formation  de  la  Société. 

Article  premier.  —  Sous  la  protection  de  l'autorité 
supérieure  et  avec  l'assentiment  de  M.  le  directeur 
de  l'Ecole  royale  de  musique,  les  artistes  dont  le 
talent  a  été  formé  dans  cet  établissement,  depuis  sa 
création  jusqu'à  ce  jour,  ont  arrêté  de  fonder  une 
association  pour  donner  des  concerts  publias. 

Art.  2.  —  Cette  société  porte  le  nom  de  Société  des 
Concerts. 

Art.  3.  —  La  Société  est  régie  par  un  comité 
d'administration  choisi  parmi  ses  membres. 

Art.  4.  —  Aucun  artiste  ne  pourra  faire  partie  de 
la  Société  s'il  n'a  appartenu  au  Conservatoire  ou  à 
l'Ecole  royale  de  musique  ;  si  la  présence  d'un  artiste 
étranger  était  reconnue  indispensable,  le  comité 
devra  proposer  son  admission  en  assemblée  géné- 
rale. 

Nul  nepourra  cependant  faire  partie  de  la  Société 
s'il  n'est  Français  ou  naturalisé. 

Art.  o.  —  Les  artistes  qui  pourraient  être  néces- 
saires à  l'exécution  des  concerts  de  la  Société  et  qui 
ne  se  trouveraient  pas  dans  le  cas  prévu  par  l'arti- 
cle 4  seront  choisis  par  le  comité  et  payés  comme 
externes. 

Art.  6.  —  Tous  les  élèves  de  l'Ecole  royale  de  mu- 
sique qui,  aux  termes  de  l'article  constitutif,  seront 
appelés  à  participer  à  l'exécution  des  concerts,  ne 
recevont  aucune  rétribution  et  seront  considérés 
comme  aspirants. 

Art.  7.  —  Le  nombre  des  sociétaires  est  fixé  à 
cent. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Art.  8.  —  Lorsqu'il  y  aura  une  place  vacante  parmi 
les  sociétaires,  elle  sera  donnée,  par  le  comité,  de 
préférence  à  un  aspirant. 

Art.  9.  —  Dans  les  assemblées  générales,  M.  le 
directeur  de  l'Ecole  royale  de  musique  présidera  la 
Société  des  Concerts. 

CHAPITRE    II 

Un  CmiiHr  lïiiiliniiiistration. 

Art.  10.  —  Le  comité  d'administration  sera  com- 
posé de  sept  membres. 

•Savon-  : 

I"  In  chef  d'orchestre; 

2°  Un  secrétaire; 

3°  I  n  commissaire  du  personnel; 

4°  Un  commissaire  du  matériel; 

5°  Un  agent  comptable; 

6e  Un  archiviste-caissier; 

7"  Un  professeur  des  classes  d'ensemble  du  Con- 
servatoire. 

8°  Un  membre  adjoint  au  comité. 

Du  chef  d'orchestre. 

Art.  11.  —  Le  chef  d'orchestre  convoquera  et  pré- 
sidera le  comité. 

«  Il  dirigera  l'exécution  et  aura  seul  le  droit  de 
marquer  la  mesure. 

La  durée  de  ses  fonctions  est  indéterminée. 

Du  secrétaire. 

Art.  12.  —  Le  secrétaire  rédigera  les  décisions 
prises  par  le  comiLé,  et  lorsque,  selon  l'article  6,  elles 
concerneront  les  élèves  de  l'Ecole,  il  en  transmettra 
une  ampliation  à  M.  le  directeur  de  cet  établisse- 
ment. 

«  Dans  les  assemblées  générales,  il  donnera  com- 
munication des  propositions  du  comité  et  du  compte 
annuel.  Il  fera  le  dépouillement  des  scrutins  con- 
jointement avec  l'un  des  membres  du  comité  ;  il 
dressera  procès-yerbal  des  séances  de  l'assemblée 
générale  et  en  donnera  connaissance  à  l'assemblée 
suivante.  Il  contresignera  les  billets  de  faveur. 

La  durée  de  ses  fonctions  est  de  deux  années. 

Du  commissaire  du  personnel. 

Art.  13.  —  Le  commissaire  du  personnel  est 
chargé  de  signer  et  de  faire  parvenir  les  lettres  de 
convocation,  soit  pour  répétition,  exécution,  ou  as- 
semblée,  le  lendemain  du  jour  où  le  comité  les  aura 
arrêtées. 

Il  fera  l'appel  nominal  sur  l'avertissement  du  chef 
d'orchestre,  auquel  il  remettra  immédiatement  la 
feuille  de  présence. 

Sa  présence  étant  indispensable  pendant  la  durée 
des  séances,  il  ne  pourra  s'en  absenter. 

Les  absences  seront  par  lui  constatées  et  affichées 
à  la  séance  suivante,  pour  que  chaque  membre  puisse 
faire  les  observations  convenables  à  ses  intérêts. 

Il  fera  la  distribution  des  billets  de  faveur.  La 
durée  de  ses  fonctions  est  d'une  année. 

Du  commissaire  du  matériel. 
Art.  14.   —  Le  commissaire  du  matériel  doit,  d' 


près  les  ordres  du  comité,  donner  les  ordres  de  copie 

icquisitic 
saires  à  la  Société 


els  néces- 


^  *  i-j  joouluicauu  u'jmiu.,  uuunei    icsuiiiii 

et  faire  l'acquisition  ou  l'emprunt  des  obj 
saires  à  la  Société. 

11  tient  un  registre  de  tout  ce  dont  il  est  déposi- 
taire. C'est  sur  ses  bons  que  seront  fournis  tous  les 


objets  mobiliers  ou  d'exploitation.  Les  fournisseurs, 
employés  ou  gagistes  devront  reproduire  ces  bons 
avec  leurs  mémoires  quittancés,  pour  qu'ils  puissent 
être  visés  et  enregistrés  par  l'agent  comptable  et 
acquittés  ensuite  par  l'archiviste-caissier. 

Il  est  responsable  des  objets  prêtés,  empruntés  ou 
acquis  à  la  Société. 

Il  doit  veiller  à  ce  que  tous  les  objets  nécessaires 
à  l'exécution  soient  en  bon  état  et  placés  régulière- 
ment. 

La  durée  de  ses  fonctions  est  d'une  année. 

De  l'agent  comptable. 

Art.  13.  —  L'agent  comptable  est  chargé  de  l'ad- 
ministration des  recettes  et  dépenses:  il  reconnaît 
les  recettes  de  chaque  concert,  qu'il  dépose  sur  un 
reçu  entre  les  mains  de  l'archivisle-caissier. 

Il  enregistre  et  vise  les  bons  du  commissaire  du 
matériel,  ainsi  que  les  mémoires  quittancés  qui  lui 
sont  remis  par  les  fournisseurs,  employés  ou  gagistes. 
A  la  fin  des  concerts  de  chaque  année,  il  dresse  un 
état  des  recettes  et  des  dépenses,  en  y  joignant  les 
pièces  à  l'appui  ;  cet  état  doit  être  visé  par  le  comité 
avant  d'être  présenté  à  l'assemblée  générale. 

En  l'absence  du  chef  d'orchestre,  l'agent  comp- 
table préside  le  comité. 

La  durée  de  ses  fonctions  est  de  deux  années. 

l)r  l'a  l 

Art.  16.  —  L'archivisle-caissier  aura  le  dépôt  des 
fonds  de  la  Société.  Il  acquittera  les  mémoires  et 
fera  le  payement  des  droits  sur  l'émargement  d'un 
état  qui  restera  aux  archives.  Il  aura,  en  outre,  le 
dépôt  et  tiendra  registre  des  pièces  relatives  aux 
affaires  de  la  Société.  Il  devra  lournir  tous  les  ren- 
seignements que  les  sociétaires  désireraient  se  pro- 
curer. 

11  remettra  au  secrétaire  les  billets  de  laveur, 
après  les  avoir  signés. 

La  durée  de  ses  fonctions  est  de  deux  années. 

Du  professeur  de  la  classe  d'ensemble. 

Art.  17.  —  Le  professeur  de  la  classe  d'ensemble 
est  chargé  des  répétitions  préparatoires  du  chant.  Il 
fait  l'appel  nominal  de>  sociétaires  du  chant  au 
commencement  de  chaque  séance,  et  leur  remet  les 
jetons  de  présence  à  la  lin. 

La  durée  de  ses  fonctions  est  indéterminée. 

Art.  18.  —  Les  membres  du  comiié  sont  nommés 
par  l'assemblée  générale  et  par  la  voie  du  scrutin. 
Ils  ne  pourront  être  réélus  membres  du  comité 
qu'une  année  après  l'expiration  de  leurs  fonctions. 
Cette  dernière  disposition  ne  sera  point  applicable 
à  l'archiviste-caissier. 

Art.  19.  —  Les  membres  du  comité  devront  so 
réunir  au  moins  une  fois  par  mois,  et  pendant  la 
dune  des  concerts,  le  lundi  de  chaque  semaine. 

Art.  20.  —  Les  membres  du  comité,  que  la  nature 
de  leurs  fonctions  rendrait  dépositaires,  sont  res- 
ponsables envers  la  Société  des  objets  qu'elle  leur 
aura  confiés,  le  cas  de  force  majeure  excepté. 

Art.  21.  —  Le  comité  ne  pourra  délibérer  que 
lorsque  le  nombre  de  ses  membres  sera  en  majo- 
rité. En  cas  d'absence  de  l'un  d'eux,  le  membre  ad- 
joint dont  il  est  parlé  à  l'article  27  devra  être  appelé 
en  son  remplacement. 

Art.  22.  —  Le  procès-verbal  des  décisions  du  co- 
mité et  des  assemblées  générales  devra  être  signé 
par  tous  les  membres  du  comité. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    3  693 


Art.  23.  —  Les  fonctions  de  membre  du  comité 
sont  gratuites. 

Art.  24.  —  Si  un  membre  du  comité,  dans  l'exer- 
cice de  ses  fonctions,  employait  ou  mettait  la  Société 
dans  l'obligation  d'employer  une  personne  qu'il 
faudrait  rétribuer,  les  frais  qu'il  aurait  occasionnés 
seraient  à  sa  charge. 

Toutefois,  dans  le  cas  ou  l'archiviste-caissier  serait 
forcé  d'avoir  recours  à  un  employé  salarié,  il  ne 
pourrait  le  faire  qu'après  avoir  obtenu  l'autorisation 
du  comité. 

Art.  25.  —  Tout  membre  du  comité  qui  ne  rem- 
plirait pas  les  fonctions  qui  lui  auraient  été  confiées 
sera  révocable.  Dans  ce  cas,  le  comité  en  fera  la 
proposition  en  assemblée  générale. 

Art.  26.  —  Dans  le  cas  où  le  comité  jugerait  né- 
cessaire d'éloigner  un  membre  de  la  Société,  il  ne 
pourra  le  faire  qu'autant  qu'il  y  aura  au  moins  une 
majorité  de  cinq  voix.  S'il  y  a  réclamation  de  la  part 
du  sociétaire,  le  comité  convoquera  l'assemblée  gé- 
nérale, qui  prononcera  en  dernier  ressort. 

Art.  27.  —  Il  y  aura,  conformément  à  l'article  21, 
un  adjoint  au  comité,  qui  sera  nommé  en  assemblée 
générale  par  la  voie  du  scrutin,  et  qui  devra  mo- 
mentanément remplir  les  fonctions  qui  lui  seront 
indiquées  par  le  comité,  en  l'absence  d'un  de  ses 
membres;  dans  ce  cas,  il  aura  voix  délibérative. 

La  durée  de  ses  fonctions  est  d'une  année,  à  L'ex- 
piration de  laquelle  il  pourra  être  nommé  à  l'une 
des  places  vacantes  du  comité. 

Les  fonctions  de  membre  adjoint  au  comité  ne 
peuvent  être  remplies, deux  années  de  suite  par  le 
même  membre. 

De  l'inspecteur  de  la  salle. 

Art.  28.  —  L'inspecteur  de  la  salle  aura  la  sur- 
veillance de  la  salle  et  inspectera  le  contrôle. 

La  durée  de  ses  fonctions  est  d'une  année. 

Les  fonctions  d'inspecteur  ne  pourront  être  rem- 
plies deux  années  de  suite  par  le  même  membre. 


Des  dépenses. 
Art.  29.  —  Les  dépenses  se  divisent  en  dépenses 
courantes  et  en  dépenses  extraordinaires. 

Des  dépenses  courantes. 

Art.  30.  —  Dans  cette  classe  sont  comprises  les 
dépenses  suivantes,  savoir  :  1°  le  traitement  des 
employés,  les  gages  des  contrôleurs  et  des  gens  des 
portes;  -2"  les  frais  d'impression,  d'affiches  et  de  co- 
pie; 3°  le  port  et  la  location  des  instrument;  4°  le 
payement  des  externes;  o°  les  frais  d'éclairage,  de 
chauffage  et  de  garde;  6°  le  payement  des  droits 
des  pauvres  exigé  par  la  loi  des  finances  de  chaque 
année. 

Art.  31.  —  Toutes  les  dépenses  courantes  seront 
acquittées  de  la  manière  et  dans  la  forme  indiquées 
au  présent  règlement,  sans  qu'il  soit  besoin  d'en 
référer  à  l'assemblée  générale. 

Des  dépenses  extraordinaires. 

Art.  32.  —  Ces  dépenses  sont  toutes  celles  qui 
ne  sont  pas  comprises  dans  l'article  30. 

.1//.  33.  —  Aucune  dépense  ne  pourra  être  faite 
qu'après  avoir  élé  proposée  et  adoptée  en  assemblée 
générale. 


Des  devoirs  des  membres  de  la  société. 

Art.  34.  —  Les  membres  de  la  Société  devront 
se  rendre  à  la  convocation  qui  leur  sera  faite  et  être 
présents  à  l'appel,  de  manière  à  ce  que  les  séances 
puissent  être  commencées  à  l'heure  indiquée. 

Art.  35.  —  Les  décisions  prises  par  voie  de  scru- 
tin en  assemblée  générale  ne  seront  valables  qu'au- 
tant que  le  nombre  des  présents  sera  au  moins  égal 
à  la  moitié  plus  un  des  membres  de  la  Société. 

Art.  36.  —  Les  sociétaires  qui  n'auront  pas  par- 
ticipé aux  répétitions  ne  pourront  assister  au 
concert. 

Art.  37.  —  Tout  sociétaire  qui,  sans  motifs  vala- 
bles et  suffisamment  justifiés,  ne  se  conformerait 
pas  aux  dispositions  des  articles  du  présent  cha- 
pitre, recevra,  pour  la  première  et  la  seconde  fois, 
les  représentations  du  Comité;  à  la  troisième,  il 
sera  considéré  comme  démissionnaire. 

Art.  38.  —  Trois  absences  non  motivées  par  let- 
tres adressées  au  comité  sont  une  démission  tacite. 

Des  amendes. 
Art.  39.  —  Tout  sociétaire  qui  arriverait  après 
l'appel  sera  passible  d'une  amende  d'un  quart  de 
son  droit;  celui  qui  abandonnerait  la  séance  avant 
qu'elle  soit  terminée,  sans  l'assenlimenl  du  chef 
d'orchestre,  perdra  son  jeton  de  présence. 

CHAPITRE    V 

Des  droits  des  sociétaires. 
Billets  de  faveur. 
Art.  40.  —  Les  billets  de  faveur  seront  distribués 
ainsi  qu'il  suit  : 

Au  chef  d'orchestre. i 

A  chacun  des  membres  du  com 

■     tdjoinl 2 

A  l'inspecteur  de  la  salle 2 

A  chaque  solo î 

Les  solos  qui  donnent  lieu  au  double  droil  sont  : 
air,  concerto,  duo,  trio,  quatuor,  etc.,  et  tout  ce  qui 
sera  considéré  par  le  comité  comme  y  donnant 
droit. 

Art.  41.  —  Tout  billeL  de  faveur  devra  être  revêtu 
de  la  signature  du  sociétaire  auquel  il  aura  été 
donné. 

Partage  des  bénéfices. 

Art.  42.  —  Les  bénéfices  se  composent  des 
sommes  en  caisse  après  l'acquit  des  dépenses  men- 
tionnées dans  le  présent  règlement. 

Art.  43.  —  Les  bénéfices  se  divisent  en  droits 
égaux  et  sont  répartis  ainsi  qu'il  suit  : 

FONCTIO     S  .      "'     '  '  ''  RÉPÉTITIONS  CONCERTS 

GENERALE 

Chef  d'orchestre  1  2  4 

Solo  »  2  4 

Sociétaire  1  1  2 

Le  droit  solo  ne  s'obtient  que  lorsqu'il  est  de 
nature  à  être  mis  sur  le  programme. 

Art.  44.  —  Après  chaque  répétition  ou  concert, 
l'agent-comptable  dépouille,  à  l'aide  du  programme 
et  des  feuilles  de  présence,  la  quantité  des  droits  qui 
revient  à  chacun,  et,  à  la  un  des  concerts,  le  nombre 
total  des  droits  sert  à  diviser  le  bénéfice  restant  en 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


caisse.  Le  quotient  de  celte  division  forme  le  droit, 
qui  est  multiplié,  pour  chacun,  selon  les  dispositions 
de  l'art.  43. 

Art.  43.  —  L'archiviste-caissier,  sur  la  remise  de 
l'état  des  distributions  dressé  par  l'agent  comptable 
et  visé  par  les  membres  'du  comité,  fera  les  paye- 
ments dans  la  forme  indiquée  à  l'article  16. 

Art.  46.  —  Avant  le  partage  des  droits,  le  comité 
proposera  une  réserve  de  fonds,  motivée  sur  les 
besoins  présumés  de  l'année  suivante. 

Art.  47.  _  a  cet  effet,  le  payement  des  droits 
ne  sera  fait  qu'après  que  le  compte  rendu  aura  été 
approuvé  par  l'assemblée  générale. 

t,.,.  ,s.  —  Aussitôt  que  les  concerts  d'une  année 
seront  terminés,  le  comité  préparera  le  compte  géné- 
ral, de  manière  à  ce  qu'il  puisse  être  rendu  quinze 
jours  après  le  dernier  concert. 

Art.  49.  —  Dans  le  cas  où  des  circonstances  ma- 
jeures ou  sans  remède  entraîneraient  la  dissolution 
de  la  Société  des  Concerts,  le  partage  de  l'actif  devra 
se  faire,  par  parties  égales,  sans  aucune  distinction, 
dans  le  plus  bref  délai;  à  cet  etfet,  une  assemblée 
générale  sera  immédiatement  convoquée,  dans  la- 
quelle les  membres  du  comité  donneront  connais- 
sance des  motirs  qui  auraient  causé  le  démembre- 
ment de  la  Société,  rendront  compte  de  leur  gestion 
et  annonceront  la  vente  du  mobilier,  dont  le  mode 
sera  adopté  au  scrutin. 

Art.  50.  —  Dans  le  cas  ou  des  modifications  au 
règlement  seraient  proposées,  elles  ne  pourront  l'être 
que  par  dix  membres  au  moins,  qui  feront  parvenir 
leurs  propositions  au  comité,  lequel  en  fera  un  rap- 
port à  la  Société,  qui  décidera  s'il  y  a  lieu  d'y  don- 
ner suite. 

Art.  3i.  _  Tout  ce  qui  n'est  pas  prévu  par  le 
présent  règlement  sera  discuté  en  assemblée  géné- 
rale d'après  la  proposition  du  comité. 

Art.  52.  —  A  la  fin  des  concerts  de  chaque  année, 
lors  de  la  reddition  des  comptes,  il  sera  pourvu  au 
remplacement  des  membres  du  comité  qui,  aux 
termes  du  règlement,  devront  être  réélus. 

Ont  signé  : 

Lrs  membres  de  la  commission  chargée  d  re\  iser  le 
Règlement  : 

Tclou,  Laty,  Al.  Dupont,  Aug.  Seubiot, 
Tajan-Rogé. 

En  regardant  de  près  ce  vénérable  document  et 
en  le  comparant  avec  les  statuts  actuellement  en 
vigueur,  nous  remarquons  que,  si  le  temps  et  l'ex- 
périence ont  nécessité  par  la  suite  des  modifications 
ou  des  additions  au  texte  adopté  en  1828,  l'esprit  et 
le  fond  en  ont  été  maintenus  avec  ce  pieux  respect 
que  la  Société  professe  pour  tout  ce  qui  touche  à  son 
institution. 

Nous  ne  saurions,  pensons-nous,  faire  un  meilleur 
éloge  de  ses  fondateurs  qui  se  sont  montrés,  en  même 
temps  que  des  artistes  d'une  grande  valeur,  des 
administrateurs  prévoyants  et  avertis. 

Voici  comment  fut  définitivement  composé,  au 
cours  de  l'assemblée  générale  du  24  mars  1828,  le 
premier  comité  de  la  Société  des  Concerts  :  prési- 
dent, Cherubini,  directeur  de  l'Ecole  royale  de  mu- 
sique; vice-président,  chef  d'orchestre,  Habeneck 
aîné;  secrétaire,  Meifred;  commissaire  du  person- 
nel, Brod;  agent  comptable,  Dauprat;  archiviste 
caissier,  Bonet  (Albert);  chef  du  chant,  Kuhn;  com- 
missaire du  matériel,  Amédée;  membre  adjoint,  Le 
Borne. 


PRINCIPAUX  TRAITS  DE    L'HISTOIRE    DE    LA    SOCIÉTÉ 
DES  CONCERTS 

On  comprendra  aisément  qu'arrivés  à  ce  point  de 
l'histoire  de  la  Société  des  Concerts,  il  nous  est 
impossible  de  suivre  pas  à  pas,  jusqu'à  nos  jours,  la 
marche  de  cette  institution,  en  toutes  ses  admirables 
manifestations.  D'une  part,  nous  ne  nous  reconnais- 
sons pas  le  droit  d'initier  le  lecteur  à  certains  faits 
qui  appartiennent  à  sa  vie  privée;  d'autre  part, 
parmi  ces  faits,  il  en  est  beaucoup  qui  sont  d'un 
ordre  tout  à  fait  secondaire  et  qui,  au  surplus,  nous 
entraîneraient  à  des  développements  que  cet  ouvrage, 
malgré  son  souci  d'être  renseigné  et  complet,  ne 
comporte  pas. 

Nous  nous  bornerons  donc  à  relever  chronologi- 
quement dans  les  procès-verbaux,  et  en  les  commen- 
tant lorsqu'il  y  aura  lieu,  les  faits  qui  peuvent  pré- 
senter réellement  un  intérêt  et  donner  à  cet  article 
historique  toute  l'impartialité  et  toute  la  fidélité  que 
nous  tenons  à  honneur  d'y  mettre.  Ajoutons  qu'a- 
fin  de  traiter  notre  travail  d'une  manière  plus 
méthodique,  nous  ferons  ensuite  un  retour  en 
arrière  pour  montrer,  par  l'ensemble  des  programmes 
de  la  Société,  l'évolution  qui  s'est  accomplie  au  cours 
Je  i-i'tie  période  de  plus  d'un  siècle. 

Nous  nous  faisons  un  agréable  devoir  de  remer- 
cier ici  le  comité  de  la  Société  des  Concerts  d'avoir 
bien  voulu  mettre  à  notre  disposition,  avec  un  em- 
pressement dont  nous  nous  déclarons  très  flatté,  tous 
les  documents  nécessaires  à  l'accomplissement  de 
noire  tâche. 

14  novembre  1828.  —  Première  séance  du  comité 
de  la  Société  des  Concerts  à  laquelle  assistaient  : 
MM.  Habknrck,  Meifred,  Dupaat,  Amédée,  Albert 
Bonet,  Brod,  Kuhn  et  Le  Borne. 

1er  décembre  1828.  —  M.  Kalkbrenner  ayant 
proposé  à  l'assemblée  générale  de  laisser  au  comité 
d'administration  de  la  société  des  Concerts  la  faculté 
d'accueillir  les  demandes  de  solo  qui  pourraient  être 
faites  par  les  artistes  étrangers  à  la  Société,  M.  Ha- 
beneck combat  cette  motion  en  déchirant  qu'il  sera 
toujours  temps  de  recourir  à  cette  mesure,  c<  le  jour 
où  les  symphonies  de  Beethoven  n'auraient  plus  la 
puissance  d'exciter  l'empressement  du  publie  n  ! 

13  mars  1832.  —  Lettre  de  Chopin  demandant  à 
être  porté  sur  l'un  des  programmes  de  la  session. 

2  mars  1833.  —  L'n  artiste  (M.  Legros)  ayant 
refusé  d'auditionner  devant  le  comité,  celui-ci  pro- 
nonce sa  radiation.  L'assemblée  générale,  à  laquelle 
est  faite  communication  de  cette  décision,  donne 
tort  au  comité  par  i6  voix  contre  26.  M.  Habeneck 
déclare  alors  qu'il  estime  avoir  le  droit,  comme 
chef  d'orchestre,  d'appeler  à  la  Société,  ou  d'en 
éloigner,  dans  l'intérêt  de  sa  représentation,  ceux 
qui  pourraient,  soit  contribuer  à  la  perfection  des 
exécutions,  soit  la  compromettre.  Il  ajoute  que,  ne 
croyant  plus,  à  la  suite  du  scrutin  qui  vient  d'avoir 
lieu,  jouir  de  la  confiance  des  sociétaires,  il  donne 
sa  démission  de  chef  d'orchestre  et  qu'il  ne  conduira 
pas  le  prochain  concert;  les  membres  du  comité 
remettent  également  leur  démission,  à  la  suite  de 
cette  déclaration. 

o  mars  1833.  —  L'assemblée  générale  demande 
à  l'unanimité  que  le  comité  rapporte  l'arrêté  pris  à 
l'égard  de  M.  Legros,  sous  la  condition  que  cet  artiste 
soit  invité  à  se  soumettre  à  une  audition,  soit  devant 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIETE  DES  CONCERTS    3695 


le  comité,  soit  devant  l'assemblée  générale.  M.  Habe- 
neck et  le  comité  retirent  leur  démission. 

7  novembre  1833.  —  A  l'unanimité,  Cherubini  est 
nommé  président  de  la  Société  des  Concerts. 

24  février  1834.  —  Le  comte  de  Montalivet,  inten- 
dant général  de  la  liste  civile,  annonce  que  le  roi 
vient  d'accorder  à  la  Société  une  somme  de  2000  fr. 
pour  l'année  1834. 

Au  cours  de  cette  même  séance,  le  comité  décide 
de  donner  un  concert  le  vendredi  saint,  28  mars. 

2  décembre  1836.  —  Habeneck  remet  sa  démission 
de  vice-président  du  comité,  ses  occupations  ne  lui 
permettant  plus  de  s'occuper  des  travaux  adminis- 
tratifs. A  la  suite  de  celle  déclaration,  le  comité 
donne  également  sa  démission. 

4  décembre  1836.  —  L'assemblée  générale  refuse 
par  un  vote  la  démission  des  membres  du  comité  et 
décide  de  faire  une  démarche  auprès  de  M.  Habeneck 
pour  le  prier  de  revenir  sur  sa  décision. 

Nota.  —  Le  registre  des  procès-verbaux  de  1836 
ne  mentionne  pas  le  résultat  de  cette  démarche, 
mais  nous  voyons  qu'HABENECK  a  repris  sa  place  au 
comité  du  8  décembre  1836. 

Avril  1837.  —  Berlioz  otïre  au  comité  de  tenir  les 
cymbales. 

4  mai  1838.  —  M.  Kilian,  membre  du  comité, 
donne  lecture  d'un  projet  élaboré  en  collaboration 
avec  M.  Meifred,  pour  l'établissement  d'une  caisse 
de  prévoyance  ou  de  secours.  Le  principe  en  esl 
adopté  à  l'unanimité.  Sur  la  proposition  de  M.  Seu- 
riot,  sociétaire,  il  est  décidé  à  l'unanimité  qu'une 
retenue  de  20  francs  sera  faite  sur  la  part  de  chaque 
sociétaire  pour  former  le  fonds  provisoire  de  cette 
caisse  de  prévoyance  et  de  secours. 

5  juin  1838.  —  L'assemblée  générale  décide  à  l'u- 
nanimité que,  chaque  année,  la  recette  brute  d'un 
concert  sera  attribuée  à  la  caisse  de  prévoyance  et 
de  secours. 

4  décembre  1838.  —  Le  gouvernement  propose  de 
charger  la  Société  des  Concerts,  d'une  manière  fixe 
et  régulière,  et  moyennant  une  subvention  annuelle, 
de  toutes  les  exécutions  musicales  qui  ont  lieu  dans 
les  fêtes  et  cérémonies  publiques  officielles. 

28  avril  1841.  —  Le  comité  décide  que  le  portrait 
de  Beethoven  dessiné  spécialement  pour  la  Société 
des  Concerts  par  C.revedon,  sera  considéré  comme 
un  diplôme  de  sociétaire  et  délivré  exclusivement  à 
chaque  membre  de  la  Société. 

l"mai  1842.  —  L'assemblée  générale  nomme  Auber 
président  de  la  Société  des  Concerts. 

28  décembre  1847.  —  La  Société  décide  de  donner 
un  concert  à  la  mémoire  de  Mendelssohn. 

7  septembre  1S48.  —  L'assemblée  générale  décide, 
par  60  voix  sur  63  votants,  que  la  Société  pourra, 
«  comme  témoignage  de  sa  haute  estime  et  de  sa 
considération  »,  accorder  le  titre  de  président  hono- 
raire à  vie,  au  chef  d'orchestre  qui  se  retirera  après 
vingt  ans  de  service  au  moins. 

11  octobre  1848.  —  Habeneck  donne  sa  démission, 
par  suite  d'un  désaccord  survenu  entre  le  comité  et 
lui.  Cette  démission  est  acceptée. 

18  octobre  1848.  —  L'assemblée  procède  au  rem- 
placement d'HABENECK. 

Les  candidats  en  présence  sont  :  Girard,  Tilmant 
et  Valentino.   L'élection  a  lieu    à  la  majorité  des 
deux  tiers  des  voix. 
Votants  :  72;  majorité  :  52. 

Obtiennent  :  Girard,  50  voix,  Tilmant,  23;  Valen- 
tino, 2;  bulletin  nul,  1  ;  bulletins  blancs,  2. 


Aucun  des  candidats  n'ayant  atteint  la  majorité, 
il  est  procédé  à  un  second  tour  de  scrutin. 

Obtiennent  :  Girard,  34  voix;  Tilmant,  21;  bulle- 
tins blancs,  3. 

En  conséquence  M.  Girard  est  élu  chef  d'orchestre. 

A  la  suite  de  ce  vote,  M.  Habeneck  esl  nommé  pré- 
sident honoraire  à  vie. 

Avril  1854.  —  M.  Girard  donne  sa  démission,  mais 
l'assemblée  générale  refuse  de  l'accepter. 

26  mai  1855.  —  La  Société  des  Concerts,  sur  la  de- 
mande de  l'empereur,  donne  un  concert  au  château 
de  Saint-Cloud. 

Mai  1857.  —  L'assemblée  générale,  sur  la  propo- 
sition du  comité,  décide  d'augmenter  les  prix  des 
places  comme  suit  :  premières  et  stalles  de  galerie, 
12  francs;  stalles  d'orchestre,  2CS  loges,  rez-de-chaus- 
sée, 9  fr.;  couloirs,  orchestre,  galerie,  6  fr.,  stalles 
d'amphithéâtre,  3e"  loges,  5  fr.;  parterre,  amphi- 
théâtre, 4  fr.;  couloirs  de  l'amphithéâtre  et  loges 
sur  le  théâtre,  2  fr. 

Décembre  1858.  —  M.  Lassabathie  demande  que 
le  jeune  Sabasate,  violoniste,  se  fasse  entendre  à  l'un 
îles  concerls.  Le  comité  regrette  de  ne  pouvoir  accé- 
der à  ce  désir,  car  il  est  dans  les  habitudes  de  la 
Société  de  n'accepter  dans  ses  programmes  que  des 
artisles  dont  la  réputation  a  été  sanctionnée  parle 
public. 

Décembre  1851).  —  Le  ministre  d'Etal  invite  la 
Société  à  adopler  pour  la  session  prochaine  le  dia- 
pason normal. 

Les  élèves  des  classes  de  composition  sont,  sur  la 
demande  de  M.  Auber,  admis  aux  répétilions  géné- 
rales. 

15  janvier  1860.  —  Mort  de  Girard. 

5  mai  1860.  —  L'assemblée  générale,  par  98  voix 
sur  104  votants,  nomme  Tilmant  chef  d'orchestre. 

Février  1861.  —  M.  Tilmant  transmet  au  comité  le 

désir  formel  que  lui  a  exprimé  M.  Auber  de  n'avoir 

aucun  de  ses  ouvrages  exécuté  aux  concerls  de  la 

Société,  tant  qu'il  sera  directeur  du  Conservatoire. 

Démission  de  Tilmant'. 

21  décembre  1863.  —  Georges  Hainl  est  nommé 
chef  d'orchestre,  après  cinq  tours  de  scrutin.  Les 
voix  se  répartissent  ainsi  : 


Bulletins  blancs  ou  nuls  . 


Février  1864.  —  Le  comité  décide  de  faire  frapper 
une  médaille  à  l'effigie  d'H.ABENECK.  Cette  médaille  sera 
remise  à  chaque  sociétaire. 

L'exécution  en  est  confiée  au  graveur  Borel. 


1.  Voici  la  lellre  par  lt;u  lie  Berlioz  posait  sa  candidature  : 

n  A  Messieurs  les  membres  eu  comité  de  la  Société  des 

Concerts  du  Cotiser! 

a  Veuillez  informer  ta  Société  des  Concerts  du  Conservatoire  que 

je  la  prie  de  me  compter  parmi  les  artistes  qui  sollicitent  ses  suffrages 

pour  la  place  de  chef  d'orchestre  devenue  vacante  parla  retraite  de 

M.  TlLMAMT. 

o  Je  serais  d'autant  plus  heureui  que  votre  illustre  Société  me  fit 
l'honneur  de  me  confier  ces  fonctions  que  je  pourrais  maintenant  m'y 
consacrer  absolument  et  y  donner  tout  mon  temps. 

o  Recevez,  .Messieurs,  l'assumée  de  mon  dévouement  et  de  mes 
sentiments  les  plus  distingués.  „  „  ^^ 

«  19  décembre  1863  ». 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTION  S  AIRE  DU  CONSERVATOIRE 


4  octobre  1871.  —  M.  Ambroise  Thomas  est  nommé 
président  de  la  Société  des  Concerts.  M.  Théodore 
Dubois  est  élu  répétiteur  du  chant. 

25  mai  1872.  —  M.  Deldevez  est  nommé  premier 
chef  d'orchestre  par  94  voix  sur  104  volants. 

M.  Lamourbux  est  nommé  second  chef  d'orchestre. 

M.  Saint-Saëns  s'était  porté  candidat  aux  fonctions 
de  chef  d'orchestre,  mais  sa  lettre  de  candidature 
n'était  parvenue  à  la  Société  qu'à  l'issue  de  la  séance. 

Juin  1873.  —  Le  comité  décide  d'augmenter  chaque 
série  de  deux  concerts,  en  portant  le  nombre  des 
concerts  à  18  au  lieu  de  14. 

Novembre  1874.  —  L'Assistance  publique  ayant 
émis  la  prétention  de  substituer  la  taxe  proportion- 
nelle au  principe  de  l'abonnement,  perçu  depuis  la 
fondation  de  la  Société,  l'assemblée  générale,  convo- 
quée expressément  à  ce  sujet,  décide  d'interrompre 
la  session  commencée  dans  le  cas  où  l'Assistance 
publique  persisterait  dans  sa  résolution. 

Décembre  1876.  —  Le  comité  décide  qu'à  l'occa- 
sion de  la  50e  session  de  la  Société  des  Concerts,  une 
messe  de  Requiem,  composée  par  Deldevi z  à  la  mé- 
moire d'HABENECK,  sera  exécutée  dans  une  des  églises 
de  Paris  et  que  les  concerts  des  4  et  il  février  seront 
donnés  à  ia  mémoire  d'HABENECK. 

20  mai  18S4.  Assemblée  générale.  —  MM.  Gounod 
et  Ambroise  Thomas  font  part  à  la  Société  d'une  pro- 
position de  l'Institut  de  lui  conlier  l'exécution  du 
prix  ltossi.Ni.  Cette  proposition  est  adoptée  à  l'una- 
nimité. 

23  mai  18So.  Assemblée  générale.  —  M.  Deldevez 
annonce  à  l'assemblée  que  l'état  de  sa  santé  le  met 
dans  l'obligation  irrévocable  de  se  démettre  de  ses 
fonctions  de  chef  d'orchestre. 

M.  Deldevez  est  nommé  président  honoraire  à  vie. 

2  juin  1885.  — Après  cinq  tours  de  scrutin,  M.  Gab- 
Cin  est  élu  chef  d'orchestre  par  52  voix  sur  98  vo- 
tants. 

M.  Ci'iraud  obtient  38  voix,  et  M.  Godard  3  voix. 

15  décembre  1888.  Assemblée  générale.  —  L'as- 
semblée, répondant  au  désir  exprimé  par  la  commis- 
sion de  l'Exposition  universelle,  décide  que  la  Société 
prendra  part  à  l'une  des  solennités  qui  auront  lieu. 

27  mai  1 S '. » 2 .  Assemblée  générale.  —  M.  Garcîm, 
parvenu  à  la  limite  d'âge,  fait  connaître  à  la  Société 
son  intention  irrévocable  de  ne  pas  accepter  le  re- 
nouvellement de  son  mandat.  La  Société  le  nomme 
a  l'unanimité  président  honoraire. 

3  juin  1892.  Assemblée  générale.  —  Après  cinq 
tours  de  scrutin,  M.  Taffanel  est  nommé  premier 
chef  d'orchestre  par  48  voix,  contre  37  à  M.  Danbé. 

30  juin  1894.  —  La  Société  est  désignée  par  le 
gouvernement  pour  prêter  son  concours  à  la  céré- 
monie funèbre  du  président  Carnot. 

Février  1896.  —  Mort  d'Ambroise  Thomas.  La  So- 
ciété des  Concerts  exécute  à  ses  obsèques  le  pro- 
gramme suivant  : 


Mfirche  [iuicItc  île  la  Siim/ihnni,-  Ihtuh/ii 
ttiex  ir,v  [Rriiiiicm  cl  l.tirr>i,u. 


R,;,«km  (A:i„us) 

Marche  i'Hamlel 

Andanle  de  la  Symphonie  ilalit'inu'. . 


I'.Erni.ivrx 
MOZART. 

Vlulir.    I'im 


■I        0] 


30  mai  1896.  —  La  Société  décide  qu'à  l'avenir, 
le  directeur  du  Conservatoire  sera  de  plein  droit 
président  de  la  Société  des  Concerts. 

Septembre  1890.  —  Le  conseil  municipal  de  Paris 
convie  la  Société  à  prêter  son  concours  à  l'occasion 
de  la  réception  du  tzar  à  l'hôtel  de  ville. 


Octobre  1890.  —  Mort  de  Garcin,  chef  d'orchestre 
honoraire. 

Juin  1897.  —  A  la  suite  de  l'incendie  du  Bazar  de 
la  Charité,  la  commission  supérieure  des  théâtres 
déclare  qu'en  l'état  actuel,  la  salle  du  Conservatoire 
constitue  un  véritable  danger  pour  la  sécurité  pu- 
blique et  décide,  en  conséquence,  sa  fermeture,  jus- 
qu'à ce  que  des  dégagements  importants  aient  été 
pratiqués.  (Ces  modifications  comportent  la  suppres- 
sion d'une  loge  de  chaque  côté  des  fauteuils  de 
balcon;  trois  rangées  de  fauteuils  d'orchestre;  une 
rangée  au  milieu;  une  rangée  de  chaque  côté.)  A  la 
suite  de  cette  décision,  la  Société  des  Concerts,  se 
basant  sur  un  arrêté  pris  par  le  ministre  des  beaux- 
arts  à  la  date  du  13  octobre  1832  sous  le  titre  «  or- 
ganisation de  la  Société  des  Concerts  du  Conserva- 
toire »,  exprime,  par  la  lettre  suivante,  adressée  à 
M.  Roujon,  directeur  des  beaux-arts,  le  vœu  de  voir 
le  ministre  actuel  prendre  un  arrêté  donnant  provi- 
soirement à  la  Société  des  Concerts,  la  jouissance  de 
la  salle  de  l'Opéra  : 


«  Monsieur  le  directeur  des  beaux-arts, 

«  J'ai  l'honneur  d'appeler  votre  bienveillante  atten- 
tion sur  un  nouvel  état  de  choses  qui  risque  de  com- 
promettre gravement  le  fonctionnement  normal  de 
ii   - '  îles  Concerts  du  Conservatoire. 

«  A  la  suite  Je  la  catastrophe  du  Bazar  de  la  Cha- 
rité, M.  le  préfet  de  police,  justement  préoccupé  des 
mesures  à  prendre  pour  la  sécurité  du  public  dans 
les  lieux  de  réunion,  a  inspecté  la  grande  salle  du 
Conservatoire  ou  se  donnent,  depuis  soixante-dix 
ans,  les  concerts  de  la  Société.  Tout  en  convenant  de 
l'exiguïté  des  dégagements  de  cette  salle,  nous  avions 
espéré  que  sa  longue  existence,  sans  jamais  appa- 
rence d'une  alerte,  sa  réputation  d'acoustique  excep- 
tionnelle, enfin  les  souvenirs  glorieux  qui  s'y  ratta- 
chent, sauraient  plaider  en  sa  faveur,  surtout  si  l'on 
tenait  compte  que  toutes  les  modifications  que  la 
commission  des  théâtres  avait  exigées  pour  la  sécu- 
curité  du  public  en  1882,  avaient  été  strictement 
exécutées.  11  n'en  a  pas  été  ainsi,  et  M.  le  préfet  de 
police  a  conclu  à  la  démolition  complète. 

«  Cette  salle  disparaissant,  il  nous  est  impossible 
de  compter  sur  la  réédilicalion  toute  prochaine  de 
celle  qui  doit  la  remplacer,  sa  reconstruction  étant 
liée  à  celle  du  Conservatoire  lui-même  (question  qui 
est  toujours  pendante). 

<(  Il  en  résulte  un  très  grand  embarras  pour  nos 
concerts.  M.  le  préfet  de  police  a  bien  toi 
verture  provisoire  de  la  salle  actuelle,  sons  condi- 
tion d'importantes  modifications  pour  lesquelles  un 
crédit  est  demandé  en  ce  moment  aux  pouvoirs  pu- 
blics; mais  cas  changements  impliquent  la  suppres- 
sion de  nombreuses  places  (à  peu  près  le  sixième  de 
la  sal le).  Le  nombre  des  abonnés  à  déposséder  s'élè- 
verait à  plus  de  200.  Pour  qui  connaît  le  prix  que  tes 
iboaoés  attachent  à  la  possession  de  leurs  places, 
qu'ils  considèrent  presque  comme  une  propriété,  il 
est  facile  de  se  figurer  dans  quelle  situation  inextri- 
cable se  trouverait  l'administration  de  la  Si 
Concerts. 

i  \  ces  pi ''occupations  s'en  ajoute  une  autre  :  l'o- 
pinion publique  étant  très  éveillée  en  ce  moment 
sur  les  dangers  d'incendie,  et  rien  n'étant  négligé 
pour  la  surexciter,  nous  craignons  que,  au  dernier 
moment,  l'administration,  malgré  sa  bonne  volonté 
à   notre  égard,  ne  se   voie  dans  l'impassibilité  de 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    3697 


nous  laisser  donner  nos  concerts,  malgré  la  pro- 
messe qu'elle  nous  aurait  faite. 

«  J'ai  donc  l'honneur,  Monsieur  le  directeur,  de 
vous  demander  de  vouloir  bien  nous  faire  accorder, 
par  M.  le  ministre  de  l'instruction  publique  et  des 
beaux-arts,  l'autorisation  de  donner  les  séances  de 
la  Société  des  Concerts  dans  la  salle  de  l'Opéra,  en 
attendant  la  reconstruction  de  la  salle  du  Conserva- 
toire. 
«  Veuillez  agréer,  etc. 

«  Le  Directeur  du  Conservatoire, 
■  Président  de  la  Société  des  Concerts, 
«  Th.  Dubois. 
«  Le  vice-président,  chef  d'orchestre, 
«  Paul  Taifanel. 

«  Pniu-  le  comité  : 

«    Le    Secrétaire, 

«  Albert  Vernaelde.  » 

Juillet  1897.  —  La  Société  des  Concerts  est  autorisée 
à  se  transférer  provisoirement  à  l'Opéra  par  arrêté 
du  ministre  des  beaux-arts  en  date  du  31  juillet. 

«  Vu  l'arrêté  du  13  décembre  1832  qui  institue  la 
Société  des  Conci  rts  du  Conservatoire  ; 

«  Vu  la  décision  en  date  du  30  octobre  18a0,  du 
ministre  de  l'intérieur,  qui  alfecte  la  salle  des  con- 
certs du  Conservatoire  national  aux  besoins  de  l'en- 
seignement et  à  la  Société  des  Concerts; 

«  Vu  la  lettre  eu  date  du  14  juillet  1897  du  direc- 
teur du  Conservatoire  national,  président  de  la  So- 
ciété îles  Concerts  ; 

«  Vu  la  lettre  en  date  du  26  juillet  1897  du  direc- 
teur de  l'Opéra; 

«  Vu  l'art.  47  du  cahier  des  charges  du  théâtre 
national  de  l'Opéra; 

«  Arrête  : 

«  La  Société  des  Concerts  du  Conservatoire  est  auto- 
risée à  donner  ses  concerts  au  théâtre  national  de 
l'Opéra,  pendant  la  saison  1897-1898. 

«  Signé  :  A.  Rambaud.  » 

Novembre  1897. —  Mort  de  Deldevez. 

12  décembre  1897.  —  Premier  concert  à  l'Opéra. 

Mars  1898.  —  Le  ministre  des  beaux-arts  informe 
la  Société  qu'il  a  décidé  de  faire  exécuter  des  travaux 
de  dégagement  au  Conservatoire;  que  ce  projet  com- 
porte la  suppression  de  loO  places. 

Juin  1898.  —  La  Société  prend  part,  au  Panthéon, 
à  la  cérémonie  du  centenaire  de  Michelet. 

27  novembre  1898.  —  Réintégration  de  la  Société 
des  Concerts  dans  la  salle  du  Conservatoire. 

Février  1899.  —  Participation  de  la  Société  des 
Concerts  à  la  cérémonie  funèbre  du  président  Félix 
Faure. 

Décembre  1899.  —  La  Société  des  Concerts  est  dési- 
gnée officiellement  par  le  ministre  des  beaux-arts 
pour  participer  aux  auditions  musicales  qui  auront 
lieu  à  l'Exposition  universelle. 

Mai  1901.  —  M.  Paul  Taffanel  donne  sa  démission 
de  chef  d'orchestre.  Celte  démission  est  motivée  par 
des  raisons  de  santé. 

12  juin  1901.  —  Après  cinq  tours  de  scrutin, 
M.  G.  Marty  est  nommé  chef  d'orchestre  de  la  Société 
des  Concerts. 

26  février  1902.  —  La  Société  des  Concerts  prend 
part  à  la  commémoration  du  centenaire  de  Victor 
Hugo  au  Panthéon. 


23  mai  1903.  —  L'assemblée  générale  fixe  à  92  le 
nombre  des  sociétaires. 

30  décembre  1905.  —  L'assemblée  générale  décide 
qu'à  l'avenir  l'orchestre  et  les  chœurs  pourront  se 
produire  séparément  en  France  ou  à  l'étranger. 

25  mars  1907.  —  La  Société  prend  part  officielle- 
ment aux  obsèques  de  Berthelot. 

Avril  1907.  ■ —  Concert  à  Anvers. 

Juin  1908.  —  La  Société  se  fait  entendre  au  Pan- 
théon à  l'occasion  de  la  translation  des  restes  d'E- 
mile Zola. 

11  octobre  1908.  —  Mort  de  Marty. 

26  octobre  1908.  —  M.  André  Messager  est  nommé 
chef  d'orchestre. 

Novembre  1908.  —  Mort  de  Taffanil. 

Novembre  1909.  —  Concert  à  Lille.  Concert  à 
Amiens. 

9  juillet  1909.  —  La  Société  se  fait  entendre  à  l'ex- 
position universelle  de  Bruxelles. 

17  février  1910.  —  Concert  donné  au  Conservatoire 
avec  le  concours  de  Paderewski,  au  profit  des  vic- 
times de  l'inondation. 

5  novembre  1911.  —  La  Société  donne  un  concert 
à  l'Hippodrome  de  Lille.  Elle  retourne  à  Lille  en  1912 
et  1913. 

11  février  1912.  —  Elle  se  fait  entendre  au  Troca- 
déi'o  avec  un  programme  où  on  relève  la  9e  Symphonie 
de  Beethoven,  la  symphonie  de  Saint-Saëns  avec 
orgue  et  Taillefer  de  Richard  Strauss. 

1913.  —  Concert  delà  Société  à  Anvers  et  à  Lyon; 
elle  se  déplace  tous  les  ans  dans  cette  dernière  ville. 


LES  PROGRAMMES 

On  l'a  dit  souvent  et  nous  devons  le  redire  ici  :  la 
Société  des  Concerts  est,  avant  tout,  surtout,  la  maison 
de  Beethoven  et,  par  là,  elle  reste  étroitement,  fidè- 
lement attachée  à  la  pensée  créatrice  et  directrice  de 
son  illustre  chef  Habeneck. 

Dès  sa  fondation,  elle  ouvre,  il  est  vrai,  ses  portes  à 
Haydn  Ie»  concertde  I829)el  à  Mozart  :4e  concert  de 
1828)  (elle  organisera  même  un  concert  à  la  mémoire 
de  chacun  d'eux  ,  mais  Beethoven  est  tout  de  suite, 
nou?  le  répétons,  le  dieu  qui  régnera  dans  le  Temple. 

Le  premier  concert  (9  mars  1828 1  est  placé  sous 
sa  protection,  et  c'est,  avec  la  première  mesure,  sa 
gloire  qu'elle  chante  dans  la  Symphonie  héroïque  ins- 
crite en  tête  du  programme. 

Pour  bien  affirmer  son  culte,  la  Société  consacre 
son  second  concert  (23  mars)  à  la  mémoire  de  l'im- 
mortel svmphoniste.  Voici  le  programme  de  cette 
solennité  d'art  : 

DE.UXIÈMB  CONCERT 

1     :nire  île  L.-V.  Beethoven. 
Le  dimanche  23  mars  1S2S. 
Nota.  Tous  les  morceaux  qui  seront  exécutés  sont  des 
productions  de  ce  compositeur  célèbre. 

1.  Symphonie  héroïque  'aénéralement  redm 

2.  i:  ...      chœurs  et   récits,   chantés    par  Mmt  Cinti- 

Damoreau,  Mle  Nélia  Maillard  et  MM.  Alexis  Dupond  et 

3.  Premier  morceau  du  Concerto  de  piano  en  lit  mineur,  exécuté 

par  Mme  Brod. 
i.  Quatuor  de  l'opéra  V  '•■l'ne  Cinti-Damobeau, 

Mile  Nélia  Maillard  et  MM.  Alcxi-  I"  i'"M>  el  Levasseur. 

5.  Concerto  'te  violon,  exécuté  par  M.  Baillot  (ce  concerto  n'a 

jamais  été  entendu  à  Paris). 

6.  Le  Chris!  nu  mont  des  Oliviers  (oratorio  avec  chœurs).  Les  par- 

ties récitantes   seront  chantées  par  Mme  Cinti-Damori-au 
et  MM.  Adolphe  Nourrit  et  Levasseur. 

232 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


De  4828  à  1832  la  Société  des  Concerta  a  fait  en- 
tendre toutes  les  symphonies  de  Beethoven  aux  dates 
suivantes  : 


Sumphou/e  héroïque .  .  .  . 

—  en  lit  mineur  . 

—  en  lu 

—  Pastorale. 

—  en  si  banni  . . 


elhrurs  ' 


!>  mar<  1828. 
13  avril  182S. 
1"  mars  1S29. 

21  février  1830. 
9  mai         — 
25  avril       — 
27  mars  1831. 
19  février  1S32. 


Nous  ne  pouvons  évidemment  donnerici  in  êtKtenso 
tous  les  programmes  de  la  Société  des  Concert*  de- 
puis sa  fondation  jusqu'à  nos  jours.  Nous  renvoyons 
ceux  de  nos  lecteurs  qui  désireraient  les  consulter, 
aux  trois  ouvrages  suivants  :  Elwart  :  Histoire  de  la 
Société  des  Concerts  (programmes  de  1828  à  1863); 
Deldevez  :  La  Société  des  Concerts  (programmes  de 
1860  à  1885);  A.  Dandelot  :  La  Société  des  Concerts 
(extraits  des  programmes  de  1828  à  1023). 

Nous  nous  bornerons  donc  à  donner  ici  la  date  de 
la  première  audition  des  œuvres  dont  le  temps  a 
définitivement  consacré  les  noms  des  auteurs,  en 
rappelant  que  les  plus  grands  artistes  ont  toujours 
tenu  à  l'honneur  de  se  faire  entendre  à  la  Société  des 
Concerts. 

En  feuilletant  les  programmes,  nous  relevons  les 
noms  de  Mendelssohn  (18  mars  1832  avec  le  Concerto 
en  sol  de  Beethoven),  Leyassel'R,  Cinti-Damoreau, 
Ponchard,  Adolphe  Nourrit,  Kalkrrenner,  Barroil- 
het,  Francbomme,  Henri  Hertz,  Dorus-Gras,  Falcon, 
Dériyis,  Wartel,  Masset,  Listz,  Chopin,  Couderc, 
Nau,  Dancla,  Duprez,  César  Franck,  Vieuxtbmps, 
Viardot-Garcia,  Sivori,  Baillot,  Roger,  Godefroy, 
Alro^i,  Bataille,  Gueymard,  Marie  Sasse,  Balanqué, 
BubsWe,  Lap.orde,  Miolan-Carvalho,  Rosine  Bloch, 
Bonnehée,  Ri'rinstein,  Alard,  Orin,  Belval,  Crosti, 
Michot,  Francis  Planté,  Faure,  Warot,  Diémer,  Sax, 
Joacuim,  Wieniawsky,  Alphonse  Duvernoy,  Gailhard, 
Delarorde,  Wertheimiier,  Krauss,  Nii.sonn,  Bouhy, 
Fidès-Devriès,  Sarasate,  Guilmant,  Lassalle,  Sellier, 
M"e  Richard,  Bobbouresqoh,  Melha,  Villaret,  Esca- 
laïs,  Adèle  Isaac,  Ysaye,  Talazac,  Bosman,  Litvinne, 
Hermann,  Philipp,  Baoul  Pit,no,  Rose  Caron,  Sander- 
son,  Saint-Saëns,  Paderewski,  etc. 


/.   —  Symphonie  en   sol  mineur. 

i.„  Finie  encknntie  ouverture] 
itlon).  —  [dominée  (chœur  el 


3EETH0VEN     — 


mphonie  héroïque. —  5e  Symfèdnie  eu  ut  mineur. 

juverture).  —  Coriolan  (ouverture).  —  Final  du 
Christ.  -  Concerto  [ai  mineur).  —  Concerto  pour  violon.  — 
Romance  pour  violon.  —  Bénédictin,  Le  Christ.  —Gloria. 

—  Agnus  liei. 

Cbbkubini.  —  lis  Aheneerrinies  (ouverture).  —  Manche  de  Pre- 
mier. —  Messe  du  Sacre.  —  Air  et  chœur  des  Abencer- 
rages. 

1829. 

Haydn.  —  Symphonie  (sain  désignation).  —  lu  Tempête  et  le  Calme. 

—  Lrs  Saisons  ilrau-ni'iiU  .  —  l.u  Création  (frai; ni-  - 

Beethoven.  —  Symphonie  eu  lu.       Symphonie  pastorale.  —  Fidelio 

(ouverliii ■ 
Weber.  —  Robin  des  bois  (ouverture). 
1830. 


1.  Dans  la  crainte  i|ue  l'exécution  delà  sympl» 
n'it  trop  fatigante,  on  décida  d'exécuter  les  d 
uiï  au  début  du  concert  et  les  doux  autre  ,t  la 


Beethoven.  —  Symphonie  eu  si  bémol.  —  Symphonie  eu  ré.  —  Sym- 
phonie en  ut  majeur. 

Weber.  —  Euryanlhe  (ouverture).  —  Eunjanlhe  (chœur  des  chas- 
seurs). 

Mbbol.  —  Stratanice  (ouverture).  L'Irnlo  (quatuor).  —  l.r  jeune 
Henri  (ouverture). 

1831. 

Mozart.   —  Don  Juan  (sextuor). 

Bebthovbn.  —  Symphonie  urée  chœurs.  —  Prométhée  (ouverture), 

—  Le  Roi  Etienne  (ouverture).  —  Septuor  (fragment). 
Fidelio  (final). 

Glock.  —  Orphée  (chiviir  des  enfers,.  —  Annide  (duo). 

1832. 

Haydn.  —  Symphonie,  en  si  hémol. 

Beethoven.  —  Symphonie  inédite  en  (n.  —  Cumin  en  sol  pour 
piano,  exécuté  par  Mem.ei.ssohn.  —  Quatuor  [op.  ."..'<). 

—  Quatuor  (op.  IS'J).  —  Kyrie  et  GIOTia  do  la  Messe  en  ré. 
Gluck.  —  Annide  (le  sommeil). 

Chhrobini.  —  Are  Marin. 

1833. 
Beethoven.  —  Ouverture  eu  ut. 
Berlioz.  —  Rob  Rôij  (ouverture). 

1834. 

Beethoven.  —  Linnore  (ouverture).  —  Fidelio  (marche  et  cluBUr). 

1835. 
Mozart.  —  Scène  des  Mystères  d'Isis. 
Bekthoven.  —  Rnniunce  pour  te  riulou.  —  Credo  do  la  Messe  en  re. 

—  Gloria  de  la  Messe  en  ut. 
Chfhobtni.  —  .;■•  Messe. 

Weber.  —  Concerto,  exécuté  par  Liszt. 

1836. 

Gluck.  —  Iphigéuie  eu  Tuuride  (fragment  du  lPr  aelo'i. 
Méhcl.  —  Joseph. 

1837. 
Cherubini.  —  Soilrelle  Messe  des  Morts. 
Gluck.  —  Iphigenie  (ouverture). 

1839. 

Haydn.  —  Symphonie  en  ré  (on.  siH. 
Mozart.  —  5'  Symphonie. 
Gluck.  —  Annule  (ouverture). 
Rossini.  —  Guillaume  Tell  (ouverture). 

1840. 

Bach.  —  Concerto  jteWr  te  vioton.  —  fia  Passion. 
Hàendel.  —  Jndas  Madchdbèe.  —  le  Sonne  d'Alexandre.  —  Le 
[ricie  (trio  des  Parques). 
1841. 

Gluck.  — Armiilc  13"  acte). 

HAENDEL.   —  Sun). on     '. 


Mozart.  —  Symphonie  eu  r.\ 

Mi'-.i.i-i  —il'.  —  /    '  l.ro'le  ,1     I  i  mut  (.uiv.-rluri'' . 

Pergoli.se.  —  S/abat  Mater. 

1843. 

Haydn.  —  Si'  Sumnlio„i: .  —  1.'  ■ 
Mozart.    —  Symphonie   en    ni    (S?).    — 

Spandertte  te  Dens. 
Mendelssohn.  /ro  Symphonie. 

1844. 

Beethoven.  —  Concerto  eu  mi  bémol  (pour  piano).  — 

—  les  Ruines  d'Athènes  (cherur  du  Sacrifice  et  chœur 
dés  Prisonniers). 

Mendelssohn.  —  Symphonie 

Ia7lly.  —  Alceste  -iTih'  Se  Êarvm). 

1S45. 

Haydn.  —  Symphonie  en  s,  '  is1').  —  Messe  ie>  1. 
GRih'RY.  —  les  Heur  Ararr.i  (marche  cl  .'1  ■i.-im" 
Si'iintini.  —  Lu  Vestale. 


fiimphonie  {,-p.  ■  .  .   Les  sept  pu 
Sunrii  et  insi,.  —  In  Clémence  de  Titus  (mil  et  : 
ihn.  —  3°  Symphonie.  —  foulas   i 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    3699 


1847. 

Beethoven.  —  Les  Ruines  d'Athènes  (en  entier). 

1848. 

Haydn.  —  Symphonie  eu  ut  mineur  (op.  2-i). 

Mozart.  — Cosi  fan  tulle. 

Beethoven.  —  Le  Uni  Etienne  (fragments). 

Mendelssohn.  —  Concerto  pour  violon.  —  Paulus  (fragmt 

1849. 

Haydn.  —  Symphonie  en  sol  (op.  51).  —  Symphonie  (op. 
Symphonie  (op.  91).  —  Quatuor  (fragments). 

Berlioz.  —  Faust. 

Félicien  David.  —  Le  Désert.  —  Christophe  Colomb. 

1850. 
Haydn.  —  Symphonie  eu   „./    „p.  SI). 

Mozart.  —  Les  Noces  de  l-'iyara. 

Beethoven.  —  Cantate. 

Grétry.  —  Richard  Cœur  île  lion  ffragin.  du  2e  acte). 

Meyerbeer.  —  /.(•  Prophète  (inédit). 

Rossini.  —  Le  Siège  de  Corinthe  (prière  et  chœur). 

Spontini.  —  FernandCorte    (air 

1851. 
Haydn.  —  Quatuor  (op.  7).  —  Quatuor  (op.  li).  —  Offerloi 

fons  pielulis. 
Mendelssohn.  —  Le  Sonne  d'une  nuit  d'été. 
Chkhuuini.  —  Laudale  Sion. 
Rameau.  —  Castor  et  Pollux  (chœur). 

1852. 
Mozart.  —  Don  Juan  (1er  tableau 
Mendelssohn.  —  ;<-■  Symphonie. 

1853. 
Mozart.  —  ;■'  Symphonie. 
Ctldcic.  —  Iphigènie  en  Aulide  (air  de  danse). 
Rossini.  —  Stabal  ihiler. 

1854. 
Beethoven.  —  Vromcthec  (frajgm.  du  ballet). 

1855. 
Bach.  —  Motel  (double  eh  euer  . 
Beethoven.  —  Eymoiit  (en  entier). 
Gluck.  —  Ipliiycnie  en  Aulide   ouverture). 
Rameau.  —  Les  Fêles  i'HèU  (chœur). 


'  acte). 


Haydn.  —  Laryo  eu  fa  ilicse  majeur.  —  Quatuor. 
Ml  ndelssoh».  —  Psaume    double  chœur).  —  Loreley  (final  du 
1"  acte). 

1857. 


1S59. 

■  Annule  (chœur). 

—  Dur  lanui    trio  ■:  a  Sang 


Haydn.  —  Concerto  pour  rioloucelle. 
Godnod.  — Près  du  fleuve  èlran  ei  [cTrœur 

1861. 
Haydn.  —  Symphonie  de  la  Heine.  —  Symphonie  militaire. 
Mozakt.  —  Concert  <  en    ■    \i  leur.  —  i 
Mendi:lssohn.  — Symplnone-l. , 
Gl   ck.  —  Alctste. 
Herold.  —  Zampa  (ouverture). 

1862. 

Beethoven.  —  Léonorc  (ouverture  u"  I  .  —  Fantaisie  arec  chu 

pour  le  piano. 
H.exdel.  —  Jules  César. 
Rossini.  —  Moïse  (introduction'. 

1863. 

Haydn.  —  U?  Symphonie. 
Berlioz.  —  Béatrice  el  BënedicL 
A.  Thomas.  —  Psyché  (chœur). 
Webeb.  —  Concerto  pour  clarinette. 

1864. 

Haydn.  —  ôi)i  Symphonie.  —  4S"  Symphonie. 

Beethoven.  —  Septuor 


Berlioz.  —  La  Fuit 


1865. 


BbBTBOVENj  —  Concerta  pour  piano     ■/ 

Mendelssohn.  —  Concerto  pour  piano  ;.«    mmeuc' .  —  as"  Psaume. 
Meyerbeer.  —  Le  Pardon  de  PJo&'inel  ouvi  rture  .  —  Les  lluytie- 

nnts  (scène  de  la  bénédiction  des  poignards). 
Orlando  de  Lassos.  —  Salve  Regina. 

1866. 
Meyerbeer.  —  Adieu  aux  jeunes  maries. 
Wagner.  —  Tunuhauser  (marche  et  chœur  de-  pèlerins). 


Haydn.  —  S9°  Symphonie  (en  sol). 
Mendelssohn.  —  Athatie. 
Schumann.  —  Symphonie  en  si  bémol. 

1868. 
Beethoven.  —  I"  Concerto  en  ul  ma:ei 
Mendi  i  —un.  —  ,:'•  Psaume. 
Waoner.  —  Lohcngrin  (marche  religii 


1870. 
Seui  MANN.  —  Hanfred  (ouverture). 

1871 

Goohod.  —  Cuttia. 

1872. 

Bi  bthov]  s.  —  Chant  èlègiaque. 

rhéodore  Dubois.  —  Les  Sept  ftw  _menls). 

Ces  u  Fkahck.  —  Hiith  (fragments). 
Gluck.  —  Orphée  (fragment  symphonique). 
I.enepvki.  —  Reyuiem    fragments). 
Meyerbeer.  —  Struensée  (polonaise). 
Saint-Saens.  —  Fragments  de  i . 
.    -  Hanfred   en  i  ntiej  . 

1873. 
Haydn.  —  44'  Symphonie. 
J.-S.  Bach.  —  * 

Berlioz.  —  Roméo  et  Juliette   3*  partie). 
Max  Bruch.  —  Concerto  de  violon. 
Kmiliii  del  Cavalière. —  Oralon  i. 
H.endel.  —  Concerto  pour  orchestre.  — Chirur  île  Suiil. 
Lully.  — Armide  (chœur,  aird 

.      ■  i 
Saint-Saens.  —  Concerto  de  i 

1874. 
Berlioz.  —  Le  Curuura  ).  —  Les  Francs  Juges 

(ouverture  . 

Il    :  —  C.aiieerlo  pour  orehestr  ••  — 

Schumann.  —  Symphonie  en  rc  < 

1875. 
Mozart.  —  Lu  Finie  enchantée   u < 
Bizet.  —  L'Artésienne. 
J.-S.  Bach.  —  Messe  en 
Berlioz.  —  Lu  Mort  d'tlplcim. 

Schumann.  —  Concerto 

1876. 

Reyer.  —Sigurd  (fragments). 
Saint-Saens.  —  Le  Rouet  d'Omphale. 

Schumann.  —  Symphonie  en  ou 


Haydn.  —  Symphonie  en  ut  majeur    inédite). 
Reyer.  —  Sigurd  (ouverture  . 

Saint-Saens.  —  3e  Concerto  m  mi     im  1  p  mr  1  :  piano. 
Vieuxtemps.  —  Concea 

1878. 

Berlioz.  —  Roméo  et  Juliette   2°  pari   i). 

Lalo.  — Le  Roitt'Vs  (ouverture). 

Massenet.  —  Eve  (fragments). 

Mendelssohn.  —  Elit  (fragments). 

Webee.  —  Obéron  (chœur). 

1879. 

Bbetboven.  —  Les  Ruines  d'Athènes  (avec  le  poème).  —  Le  Christ 
an  mont  des  Oliviers  (introduction).  —  Promcthée  (nou- 
veaux fragments). 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Berlioz.  —  Roméo  et  Juliette  (5"  partie). 

Chopin.  —  /''r  Concerta  tlragment). 
Théodore  Dubois.  —  Ouverture  symphonique. 
H.kmikl.  —  Concerto  de  hautbois.  —  Le  Messie  (air). 
Mendelssohn.  —  Elie  (nouveaux  fragments). 
Schumann.  —  Symphonie  en  Ht. 
Spontini.  —  Fermant  Curiez  (fragments). 
Weber.  —  Eitryanthe  (fragments  du  3°  acte). 

1880. 
J.  Brahms.  —  f  Symphonie  en  ré  majeur. 

Gluck.  —  Iphtycaie  en  Aultde   ..uverture). 

Gounod.  —  liesse  4e  sainte  Cécile  (Sanctus,  Benedictus,  Agn 

Dei). 
Mendelssohn.  —  Elie  (chœur  des  anges,  chœur  gênerai). 
Palestrina.  —  Gloria  Palri  (chœur  sans  accompagnement). 
Saint-Saens.  —  La  Lyre  et  la  Harpe. 


J.  S. 


1881. 

leur  (Credo,  Et  incarnatus 


■  Messe  en  si  mu 
cilixus,  Et  expecto). 
Gounod.  —  Sapho  (fragments). 
Joncieres.  —  La  lier  (ode  symphonique). 
Lalo.  —  Allegro  appassionato. 
Mendelssohn.  —  Hymne  (Ecoute  ma  prière). 
Reyer.  —  Sigurd  (fragm.  du  3'  acte). 
Saint-Saens.  —  4e  Concerto  pour  te  pian». 
Schumann.  —  Geneviève  (ouverture). 

1882. 
Félicien  David.  —  Herculanum  (fragments). 
César  Franck.  —  Les  Béatitudes  (n°  6). 
Mozart.  —  Cosi  fan  tulle  (chœurs). 
Saint-Saens.  —  La  Lyre  et  la  Harpe  (nouveaux  fragments). 

1883. 
Gounod.  —  Poiyeurle  (2' acte).  —  Saplio  (tracte). 
H.endbl.  —  Saut  (fragment  avec  orgue). 
Mendelssohn.  —  Riformation-symphonie. 

1834. 
ELbndel.  —  Israël  en  Egypte. 
Lenepveu.  —  Yelleila  (fragments). 
Meyerbeer.  —  Struen-.ee. 

Vieuxtemps.  — Concerto  en  ré  mineur  pour  le  violon. 
Richard  Wagner.  —  Tannhaûser  (ouverture  . 

1885. 

Havdn.  —  32e  Symphonie. 

Augusta  IIoi.més.  —  Les  Argonautes. 

1886. 

R.  Wagner.  —  l.ohengrin  'marche  et  chœur  des  fiançailles). 
R.   Wuim-'r.  —  Le  Vaisseau  fantôme  (chœur  des  fileuses). 
Saint-Saeks.  —  Danse  macabre. 


Murs  et  Y  lia. 

-    !    Concerto  en  re  mineur  (pour  piano). 
-  S'  Symphonie  (en  ni  ■■ 

1888. 
Hisse  en  ri    intégr  ilemenl  ;  on  n'en  avait  donné 


Saint-Sains.  —  Requiem. 

R.  Wagner.  —  Parsifal  (tableau  du  l«  acte  . 

1893. 

Borodine.  —  Le  Prince  Igor  (danses  polovtsiennes  avec  chœurs). 
Saint-Saens.  —  3'  Concerto  eu  si  mineur  (pour  violon). 
—  Ane  Verum  (chœur  sans  accompagnement  . 
R.  Wagner.  —  Taniihaitser  (3°  acte). 

1894. 
Schumann.  —Le  Paradis  cl  la  Péri   intégralement). 


H.  Berlioz.  —  Benrenuio  Cellan    ouverture). 
Brahms.  —  .'.'■  Si/iuphouie  eu  fa  majeur. 
Mozart.  —  Concerto  eu  la  majeur  (pour  piano). 
R.  Wagner.  —  Le  Vaisseau  fantôme  (ouverture). 

1896. 

J.-S.  Bach.  —  Cantate  pour  tous  les  temps. 
César  Franck.  —  Psaume  CL. 
Vincent  d'Indy.  —  Symphonie  (orchestre  et  piano). 
Liszt.  —  Les  Préludes  (poèmes  symphoniques). 
Saint-Saens.  —  5°  Concerto  (pour  piano). 


1897. 


Beethov 

jusqu'ici  que  des  fragments) 
J.  Massenet.  — Ouverture  de  Phèdre. 
R.  Schuman  s.  —  Le  Paradis  et  la  Péri 


1S90. 


Brahms. —  ;■■  Symphonie    mi  mineur). 

II.eni.kl.  —  Ode  ,i  sonne  Cécile. 

K.  I.ai.o.  —  Symphonie  en  sot  mineur. 

Schumann.  —  Faust  (3e  parle". 

R.  Wagner.  —  Les  Hailres  Chanteurs  (scène  finale  du  3  acte). 


■t. -s.  Bac  ii.    —  Messe  en  w  mineur    intégralement). 
Mozart.  —  Concerto  pour  deux  pianos. 
Saint-Sae  ;s.  —  Le  Déluge. 
R.  Wagner.  -  Tristan  et  Iseull  (prélude  . 


1892 


Bizet.  —  Patrie  (ouverture). 

Théodore  Dubois.  —  Le  Paradis  perdu  (3e  partie). 

César  Franck.  —  Psyché. 

Samuel  Rousseau.  —  Libéra  me.  Domine. 

Saint-Saens.  —  La  Suit  persane. 

Schubert.  —  Symphonie  en  ni. 

1S98. 
H.  Berlioz.  —  Le  Roi  Lear  (ouverture). 
Théodore  Dubois.  —  Concerto  (pour  piano). 
Massenet.  —  Scènes  alsaciennes. 
Rameau.  —  Quant  ditecla. 

1899. 
H.  Berlioz.  —  La  Prise  de  Troie  (1er  acte). 
Brahms.  —  /  ' ''  Symphonie  en  ut  mineur. 
Massenet.  —  La  Vierge  (4°  partie). 
Mozart.  —  Concerto  en  mi  bémol  (piano). 

1900. 
J.  Havdn.  —  ôi°  Symphonie  en  mi  bémol. 
Guy  Ropartz.  —  Psaume  CXXXVI. 
Saint-Saens.  I"  Concerto  (pour  piano). 

—  Marche  héroïque. 

R.  Wagner.  —  Ouverture  pour  Faust. 

1901. 

Gabriel  Fauré.  —  Requiem. 

Gl  i  c  k.  —  Armide  yW  acte). 

Méhi'l.  —  Symphonie  en  sol  mineur. 

Mendei.ssciiis.  —  Rcformalion-Symph.  nie     iiilrur.ilc  meut;  il  n'en 

avail  été  donné  jusqu'alors  que  l'andante  cl  le 
Mozart.  —  tlnrerlure  inédite. 
Gabriel  Pierné.  —  L'An  mil  (poème  symphonique  . 
Suni'-^ai  ns.  —  Premier  Concerto  (pour  *  ■ 

—  Suite  pour  orchestre. 

1902. 
Théodore  Dubois.  —  Ouverture  de  Frit 
César  FRANCK.  —  Rédemption. 
J.  Havdn.  —  Symphonie  en  sol  majeur  (la  Si 
Liszt.  —  I      I 

Palestrina. —  limites  amin  ma    cher.,    ■ 
Hameau.  —    In  conrerleiidn  ;  motet  pour  soli,  ch  c 
orchestre  . 

—  Bippolyte  ci  Aricie  (3'  acte). 

—  Les  In  les  f  liantes   airs  île  ballets). 
Saikt-Sa    ■  -.       0     1er  i  le  tioll. 

Scuçrwc     —  I  i  I 

R.   Wag   br.  —  Parsifal  (prélude,  enchante il  du   vendredi 

1903. 
J.-S.  Bach.  —  La  Passion  scion  saint  Jean 
\  incent  d'Indy.  —  Le  Camp  i 
Liszt.  —  Orphée    poème  symphnuiquM. 
R.  Wagner.  —  le  Vaisseau  fantôme  (chœ 

1904. 
Théodore  Dunois.  —  Fantaisie  pour  harpe  . 
Paul  Duras.  —L'Apprenti  ■ 
Janm  on-.,   -lu  Bataille  de  Vah 


nti    rali al  . 

;   fragments). 


rdie.lre. 


Liszt. 


CAi 


rlie). 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    3701 


Mozart.  — 
Rameau.  - 

Concerto  c  i  ni  V  n  il  m  ijeur  ((jour  violon' . 
Les  Indes  natalités  (fragments). 

1905. 

J.-S.  B\cn.  —  Suite  eu  si  mineur  (intégralement). 

—  Siulc  en  ré  mineur. 

C  Debussy.  —  Prélude  s  l'Après-midi  d'un  faune. 

Théodore  Dubois.  —  Pièce  en  (orme  de  eiuwn  de  Schuman 

Pal.uhi.hk.  —  Stabal  Muter. 

Rimsky-Kobsakoff.  —  Concerta  pour  piano. 

ScHCMANN.  —  Fantaisie  pour  violon. 

H.  Wagser.  —  Tristan  et  heult  (mort  d'Yseult). 

1906. 

J.-S.  Bach.  —  Suite  en  ut  majeur. 
—  Le  Défi  de  Phœbus  et  de  l'an. 
Gabriel  Faubé.  —  Pellèas  et  itèlisande. 
César  Franck.  —  Rèbecea. 

E.  Lalo.  —  Concerto  pour  piano. 
Saint-Saens.  —  Pha.'loil. 

F.  Shouebt.  —  Rosamonde  (entr'acte  et  airs  de  ballets). 
Sohumann.  —  Concerto  pour  violoncelle. 

1907. 

J.-S.  Bach 
Gabriel  Fai- 
Mozabt.  — 
Paul  Vidal 

—  Oratorio  de  Noël. 
bé.  —  Schylock. 

Concerta  en  ré  majeur  (pour  flûte). 

—  La  Vision  de  Jeanne  d'Are. 

Hector  Beblioz.  —  L'Enfance  du  Christ. 
Liszt.  —  Cou  :er/i  ma  enr   pour  piano). 

Rameau.—  Plat  g        ita 

Saint-Saens.  --  La  Jeunesse  d'Hercule. 
Sohumamn.  —  Introduction  pou;-  pin  w. 

1909. 
Gabriel  Faubé.  —  Lu  Xaissauce  de  Venus. 
J.  Haydn.  —  Concerto  en  ut  majeur  (pour  violon). 
Liszt.  —Concerto  en  mi  bémol  (p  lur  piano). 
Mozabt.  —  Symphonie  en  ri  majeur  (n"  35). 

Palestrina. — Sanctus  ri  r.eucduiii-,  de  la  Me  se  d*.  pape  Marcel. 
(chœur  sans  accompagnement). 

RlMSKY-KORSAKOFF.   —  Copie  , 

—  Saiko  (tableau  musical). 

1910. 

Debussy.  —  tu  Damoiselle  élue. 

Paul  Duicas.  —  Symphonie  eu  ut  mineur. 

Liszt.  —  Faust-Symphonie. 

R.  Wagner. —  Les  Maîtres  Chanteurs  suite  du  3'  acte.  —Pré- 
lude. Danses  des  apprentis.  —  Marche  îles  Corpora- 
tions). 

Paul  Duras.  —  Symphonie  en  ut  majeur. 

Liszt.  —  Faust-Symphonie. 

Saint-Saens.  —  La  Suit  (chœur  pour  voix  de  femmes  et  soprano 
solo). 

1911. 

H.endel.  —  Israël  en  Eyyple   intégralement). 

E.  Charrier.  —  La  Sulamite  (scène  lyrique). 

Richard  Strauss.  —  Don  Juan  (poème  svmphonique). 
1912. 

J.-S.  Bach.  —  Cantate  pour  la  fetc  de  saint  Jean-liaptistc. 

Rimsky-Kosakoff.  —  (.'  mtc  fcci-ii/IIC. 

Max  Bbuch.  —  Itoiuauce  pour  alla. 

Ch.  Toubnemibe.  —  l'sanmc  pour  arche il re .  orgue  et  chœurs. 

E.  Chausson.  —  IFienne  i  cdii]ue  (orchestre  et  chœurs). 

Castillon.  —  Paraphrase  du  Psaume  M(soli,  chœurs  et  orchestre). 

1913. 
Ki'.  Liszt.  —  Festklânge. 

R.  Strauss.  —  Mort  e!  Iransfigurattint    \o>'çmo  svmphonique). 
T.  de  Bbéville.  —  Erus  Vaimiucur  (fragments). 


L'impartialité  nous  oblige  à  mentionner  ici  les 
critiques  formulées  pendant  nombre  d'années  contre 
la  monotonie  des  programmes  .le  la  Société  des  Con- 
certs. Il  faut  bien  le  dire,  ces  critiques,  si  nous  nous 
plaçons  au  point  de  vue  de  l'évolulion  de  l'art,  étaient 
parfaitement  justifiées.  En  effet,  en  dehors  des  sym- 
phonies de  Beethoven  exécutées  dans  leur  intégra- 
lité, nous  ne  voyons  pendant  longtemps  sur  ces 
programmes,  que  des  fragments  d'œuvres  revenant 
jOUJour=  désespérément. 


11  faut  arriver  jusqu'au  28  février  1847  pour  trou- 
ver une  œuvre  jouée  en  son  entier  :  Les  Ruines  d'A- 
thènes de  Beethoven. 

C'est  donc  avec  raison  qu'ELWART  pouvait  écrire 
en  1843  :  «  Les  programmes  de  la  Société  des  Con- 
certs sont  tellement  sobres  de  noms  nouveaux,  que 
c'est  une  véritable  satisfaction  qu'on  y  lise  celui  de 
ce  compositeur  (il  s'agissait  d'une  symphonie  de  Sci- 
pion  Rousselot).  » 

En  1857,  le  même  auteur  revenant  sur  ce  sujet 
écrivait  encore  :  «  Plus  la  Société  des  Concerts  s'é- 
loigne de  l'époque  de  sa  fondation,  et  moins  ses  pro- 
grammes sont  variés.  Son  répertoire  est  sans  doute 
bien  riche  en  chefs-d'œuvre;  mais  si,  malgré  elle,  le 
senliment  de  sa  conservation,  autant  que  son  res- 
pect pour  le  public,  lui  impose  une  grande  réserve 
pour  l'adoption  d'œuvres  contemporaines,  ne  pour- 
rait-on pas  désirer  qu'elle  fit  plus  souvent  une 
excursion  dans  le  domaine  des  maîtres  français  de 
toutes  les  époques?  >> 

Après  lui,  Scudo  a  pu  écrire  :  «  Il  est  grand  temps 
que  la  Société  des  Concerts  s'occupe  sérieusement  de 
varier  ses  programmes...  » 

Enfin,  en  1880,  Arthur  Pocgin  écrivait  :  «  La 
Société  des  Concerts  du  Conservatoire,  à  qui  l'on  ne 
peut  reprocher  que  la  grande  uniformité  de  ses  pro- 
grammes, surtout  en  ce  qui  concerne  les  œuvres 
vocales,  dont  le  répertoire  est  vraiment  trop  res- 
treint... » 

En  continuant  l'examen  des  programmes,  on  cons- 
tate, non  sans  un  certain  étonnement,  que  Mendels- 
sohn  n'y  figure  pour  la  première  fois,  en  tant  que 
compositeur,  avec  l'ouverture  de  la  Grotti  de  Fingal, 
que  le  20  février  1842,  c'est-à-dire  seulement  cinq 
ans  avant  sa  mort  et  quatorze  ans  après  la  fonda- 
tion de  la  Société  des  Concerts. 

Le  nom  de  Schubert  n'apparaît,  et  bien  timide- 
ment encore,  avec  son  lied  Marguerite  au  Rouet 
chanté  par  M1"  Falcon,  qu'en  1836. 

Enfin,  il  faut  arriver  jusqu'en  décembre  1867  pour 
trouver  au  programme  le  nom  de  Schubann,  avec  la 
Symphonie  en  si  bémol. 

11  est  assez  curieux  de  noter  que,  malgré  la  réserve 
vraiment  trop  excessive  avec  laquelle  la  célèbre 
Société  consentait  à  élargir  son  répertoire,  Berlioz 
sut,  dès  1833,  forcer  ses  portes  en  faisant  exécuter 
son  ouverture  de  Rob-Roy1,  et  qu'en  1849  elle  donnait 
d'importants  fragments  de  la  Damnation  de  Faust. 

Mais  si,  malgré  les  avertissements  qui  lui  étaient 
adressés  par  la  critique,  la  Société  n'a  pas,  pendant 
longtemps,  tenté  de  varier  et  de  renouveler  son  ré- 
pertoire, il  serait  injuste  de  la  rendre  tout  à  fait 
responsable  de  cet  état  de  choses.  La  Société  com- 
prenait fort  bien  que  les  reproches  formulés  par  la 
critique,  quant  à  la  composition  des  programmes, 
étaient  parfaitement  justifiés,  mais  elle  devait  comp- 
ter avant  tout  avec  ses  abonnés  qui  ne  partageaient 


i  la  lettre  qu'il  écrivit  alors  à  la  Société  : 

«  A  Messieurs  les  membres  du  Con 

de  la  Société  des.  Concerts  du  Conseri 


un  de  vos  brillants  concerta  !  Les  p 
•ie,  Messieurs,  dans  le  cas  ou  votr 
faire  parvenir  le  plus  tôt  possible. 


ENCYCLOPÉDIE  DE'LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


pas,  à  de  très  rares  exceptions  près,  les  opinions 
émises  par  les  journaux.  __ 

11  eûl  été  dangereux  pour  l'avenir  de  la  Société, 
aussi  bien  au  point  de  vue  de  l'art  que  de  ses  inté- 
rêts pécuniaires,  de  vouloir  faire  violence  aux  pré- 
férences de  son  public. 

Ce  public,  eu  effet,  étroitement,  irréductiblement 
attaché  aux  vieux  classiques,  n'admettait  guère 
qu'elle  fit  des  incursions  trop  hardies  dans  le  réper- 
toire des  œuvres  plus  avancées. 

Deldevez,  dans  son  intéressant  et  érudit  ouvrage 
sur  la  SacUU  des  Concert*,  voulant  donner,  suivan1 
son  expression,  «  une  idée  du  public...  conserva- 
teur »  qui  fréquentait  en  1861  la  salle  du  Conser- 
vatoire, a  reproduit  les  observations  qu'un  abonné 
lui  adressait  après  chaque  séance.  Nous  en  déta- 
chons les  réflexions  suivantes  :  «  Pourquoi  de  longs 
morceaux?  Une  perle,  la  plus  petite,  si  elle  est  pure, 
est  toujours  une  perle.  » 

«  Mendelssohn  est,  généralement  parlant,  un  très 
savant  homme,  assommant,  n'en  doutez  pas.  Tout  ce 
qu'il  fait  a  de  l'intérêt  pour  les  savants,  rarement 
pour  le  bon  public.  » 

Nous  arrêtons  là  ces  citations.  Les  impressions 
exprimées  par  ce  dilettante,  peut-être  un  peu  exces- 
sif, ne  doivent  pas  être  considérées  cependant 
comme  étant  des  impressions  isolées  et  absolument 
personnelles.  Nous  savons  qu'elles  reflétaient  très 
exactement  la  manière  de  voir  de  la  plupart  des 
abonnés  d'alors.  Nous  n'en  voulons  pour  preuve,  à 
l'appui  de  ce  que  nous  avançons,  que  les  lignes  sui- 
vantes écrites  par  Klwart  en  1860  :  «  La  Société  des 
Concerts  a  exécuté  la  plupart  des  symphonies  des 
jeunes  maîtres  nos  contemporains,  mais  le  public 
n'a  véritablement  adopté  que  celles  de  Haydn,  de 
Mozart  et  de  Beethoven1.  » 

Ce  n'est  donc  que  peu  à  peu,  avec  une  extrême 
prudence,  que  la  Société  des  Concerts  pouvait  se  per- 
mettre de  modifier  ses  programmes  dans  le  sens  de 
la  modernité. 

Avec  Garcin,  nous  la  voyons  ouvrir  plus  largement 
ses  portes  à  Wagner.  En  etlel,  elle  exécute  en  1886 
le  chœur  des  Vilcuses  du  Vaisseau  fantôme,  en  1890 
la  scène  finale  du  .'ie  acte  des  Maîtres-Chanteurs,  en 
1891  le  Prélude  de  Tristan  et  Yseult.  «appelons,  en 
passant,  que  c'est  à  l'initiative  de  Garcin  que  la 
Société  dut  de  faire  entendre  pour  la  première  fois 
la  Messe  solennelle  en  ré  de  Beethoven  et  la  Messe  en 
si  mineur  de  J.-S.  Bach. 

Taffanel,  à  son  tour,  introduit  au  répertoire  le 
3e  acte  de  Tannliauser,  des  fragments  des  Béatitu- 
des: Prologue,  nos  4,  5  et  8;  le  Psaume  CL  et  Psyché 
de  César  Franck;  la  Symplionie  pour  orchestre  et 
piano  de  M.  Vincent  d'Indy  et  le  Chant  des  Parques 
de  J.  Brahms. 

Mais  c'est  surtout  à  l'audace  toute  vibrante  de 
Georges  Marty  que  nous  devons  de  voir  la  Société 
des  Concerts  accorder  enfin  une  large  et  généreuse 
hospitalité  aux  œuvres  de  la  jeune  école. 

A  .Marty  revient  encore  l'honneur  d'avoir  su  don- 
ner une  ampleur  plus  grande  aux  programmes  dr 
la  Société,  en  même  temps  qu'un  rôle  plus  impor- 
tant aux  chœurs,  en  faisant  entendre,  au  lieu  de 
fragments  souvent  écourtés,  des  ouvrages  de  longue 
haleine. 

On  pourrait  s'étonner  de  voir  le  public  de  la  So- 
ciété des  Concerts  accepter  aujourd'hui  certaines  œu- 
vres qui  eussent  soulevé,  il  y  a  quelques  années  à 
peine,  presque  d'unanimes  réprobations.  Cet  état  de 


choses  repose,  selon  nous,  sur  deux  raisons  princi- 
pales. La  première  est  que  les  œuvres  modernes, 
recevant  de  jour  en  jour  une  place  plus  large  dans 
toutes  les  manifestations  musicales  rendues  de  plus 
en  plus  nombreuses  par  la  multiplication  des  con- 
certs symphoniques,  aussi  bien  que  des  soirées  mon- 
daines, ont  insensiblement  modifié  l'éducation  artis- 
tique du  public,  en  l'amenant  à  une  esthétique  nou- 
velle. La  seconde  raison  réside  dans  ce  fait  que  la 
plupart  des  anciens  abonnés  de  la  Société  des  Con- 
certs, de  ceux-là  qui  étaient  restés  fidèlement,  obs- 
tinément attachés  aux  vieux  classiques,  sont  morts 
en  léguant,  suivant  une  tradition  constante,  leurs 
places  à  leurs  enfants,  plus  accessibles  aux  acquisi- 
tions de  l'art  moderne. 

Enfin,  en  nous  plaçant  au  point  de  vue  adminis- 
tratif de  la  Société  des  Concerts,  disons  encore  qu'ac- 
tuelle ment  les  programmes  sont  élaborés,  au  moins 
dans  leurs  grandes  lignes,  assez  longtemps  avant  le 
premier  concert,  afin  de  profiter  des  répétitions  qui 
précèdent  ce  concert,  pour  procéder  à.  une  première 
étude  des  œuvres  de  longue  haleine  devant  être  donr- 
nées  au  cours  de  la  saison. 

Mais,  souvent  des  modifications  assez  profondes 
s'imposent  par  la  suite.  Parmi  les  causes  qui  les  mo- 
tivent le  plus  fréquemment,  il  faut  mentionner  sur- 
tout les  difficultés  que  la  Société  rencontre  du  côté 
des  chanteurs  solistes.  Oh!  les  chanteurs!  Ils  sont  la 
terreur  des  comités,  l'effroi  des  chefs  d'orchestre! 
Que  de  tribulations  ils  causent  '.  l'n  enrouement  subit, 
l'obligation  qui  leur  est  imposée,  à  la  dernière  heure, 
par  les  grands  théâtres  dont  ils  sont  les  pension- 
naires, de  prendre  part  à  des  répétitions  indispen- 
sables coïncidant  malencontreusement  avec  les  ré- 
pétitions auxquelles  la  Société  des  Concerts  les  a  con- 
viés; le  cachet  alléchant,  parce  que  élevé,  qui  leur 
est  offert  par  ailleurs,  alors  que  la  Société  ne  peut 
attribuer    qu'un    cachet    uniforme    de    cent    francs 
prévu  par  les  statuts!  Bien  d'autres  causes  encore. 
Qu'un  de  ces  cas  vienne  à  se  produire,  et  voilà  ré- 
duit à  néant  tout  un  programme  laborieusement 
élaboré.  Alors  ce  sont,  pour  le  malheureux  secré- 
taire du  comité,  des  courses  folles  à  travers  Paris  et 
la  banlieue,  —  car  beaucoup  d'artistes,  recherchant 
la  tranquillité  après  l'heure    de  l'action,   habitent 
extra  muros;  —  ce  sont  des  étages  à  gravir  pour 
découvrir  le  sauveteur  qui  voudra  bien,  au  dernier 
moment,  assumer  la  lourde  responsabilité  de  rem- 
placer la  ou  le  défaillant.  Nous  en  avons  fait  person- 
nellement la   dure  expérience,  nous  qui  avons  eu 
l'honneur   de   remplir  les   fonctions    de    secrétaire. 
Aussi,  gardons-nous  une  reconnaissance  très  sincère 
à  M.  Gaiehard  d'abord,  et  ensuite  à  MM.  Messa.6EB 
et  Huoi  ss an,  directeurs  de  l'Opéra,  d'avoir,  avec  une 
bonne  grâce  parfaite  et  guidés  par  l'admiration  très 
vive  qu'ils  professent  pour  la  Société  des  Concerts, 
mis  fin  à  celte  véritable  course  à  l'abîme  en  autori- 
sant spontanément  les  meilleurs  de  leurs  pension- 
naires à  lui  apporter  le  concours  de  leur  talent. 


LA  SOCIÉTÉ   DES  CONCERTS  DEPUIS   1914 

Arrivé  à  ce  point  de  l'histoire  de  la  Sotiêiê  des 
Cmeerts  étu  Gmservatoire,  n.uis  nous  disposons  à 
la  livrer  à  l'impression,  lorsque  la  guerre  vint  sus- 
pendre la  publication  de  l'Encyclopédie  de  fa  Musi- 
que. Depuis  lors,  sous  la  pression  des  événements 
économiques  d'une  part,  et  de  l'évolution  rapide  de 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIETE  DES  CONCERTS    37 


l'art  musical  vers  une  esthétique  de  plus  en  plus  com- 
pliquée, d'autre  part,  la  Société  des  Concerts  s'est 
trouvée,  ainsi  qu'on  le  verra  par  la  suite,  dans  l'im- 
périeuse obligation  de  rompre  avec  ses  traditions, 
en  modifiant  assez  profondément  la  ligne  de  con- 
duite dont  elle  ne  s'était  jamais  départie  jusqu'à  ce 
moment. 

Nous  estimons,  néanmoins,  ne  rien  devoir  modifier 
aux  appréciations  que  nous  avons  formulées  anté- 
rieurement. 

Malgré  les  difficultés  de  l'heure,  l'illustre  compa- 
gnie décida  de  poursuivre  ses  manifestations  au 
milieu  de  la  tourmente  qui  a  bouleversé  la  face  de 
l'Europe.  Aussi,  pour  compléter  ses  cadres  profon- 
dément atteinls  par  l'absence  de  ceux  qui  étaient 
partis  d'un  cœur  joyeux  remplir  tout  leur  devoir, 
fit-elle  appel  à  ses  anciens  sociétaires  et  à  des 
externes. 

De  1914  à  1917  (88e,  89e  et  90e  sessions),  elle  prête 
son  concours  au  «  Matinées  nationales  »  données  à 
la  Sorbonne  (auditions  dominicales,  à  raison  d'une 
vingtaine  par  année).  Ces  auditions  étaient  accom- 
pagnées de  conférences  et  de  déclamations.  Parmi 
les  conférenciers  les  plus  éminents,  nous  relevons 
les  noms  de  MM.  Barthou,  Henri  Robert,  Flamma- 
rion, docteur  Doyen,  lleiriot,  Boutroux,  Jean  Kiche- 
pin,  Honnoral,  Edmond  Rostand,  Painlevé,  pasteur 
Wagner,  Antoine,  Klotz,  Hanotaux,  Maurice  Donnay, 
colonel  Housset,  général  Malleterre,  etc. 

Nous  n'aurions  garde  de  négliger  d'ajouter  que 
ces  concerts  furent  dirigés  successivement  par 
M.  André  Messager  et  par  M.  Henri  Rabaud,  qui 
préside  aujourd'hui  avec  une  si  grande  autorité  aux 
destinées  de  notre  admirable  école  du  Conservatoire. 
Mais  là  ne  devaient  pas  se  borner  les  vaillantes 
manifestations  de  la  Société  des  Concerts.  Dès  le 
mois  de  mars,  elle  décida  d'entreprendre  une  active 
propagande  à  l'étranger,  en  faveur  de  la  musique 
française. 

En  mars  et  avril  1917,  elle  se  fait  entendre  en 
Suisse,  dans  les  villes  suivantes  :  Genève,  Lausanne, 
Berne,  Bàle,  Zurich,  Neul'chùtel,  puis  encore  à  Ge- 
nève et  à  Lausanne. 

Ce  n'est  pas  assez  de  dire  que  ces  manifestations 
d'art  furent  un  succès  triomphal.  Quelle  gamme 
d'épithètes!  Superbe,  admirable,  merveilleux,  magni- 
fique, exceptionnel,  imposant,  innui,  inimaginable  et, 
m'écrit  un  vaillant  artiste-musicien  qui  est  en  même 
temps  un  lettré  parfait,  «jusqu'au  «  colossal  »,  mais 
orthographié  à  la  française  ».  Voilà  le  ton  général 
des  appréciations  formulées  par  la  presse  et  les  dilet- 
tantes de  marque. 

Ce  furent  de  belles  et  fructueuses  journées  pour  la 
musique  française,  pour  M.  Messager,  le  chef  d'or- 
chestre, et  pour  les  exécutants  dont  chacun  est  un 
virtuose  dans  la  plus  haute  expression  du  mot. 

Dés  son  retour  en  France  (1917-1918),  la  société 
organise  une  série  de  dix  concerts  qui  sont  donnés 
dans  la  salle  du  Conservatoire.  On  y  entendit,  no- 
tamment, Souvenirs  de  V.  d'Indy  et  Palais  hanté,  de 
Florent  Schmitt. 

Et  cela  ne  manquait  pas  dune  certaine  crànerie 
qu'il  convient  d'admirer,  car,  à  ce  moment-là,  on  ne 
saurait  oublier  que  la  barbarie  allemande  cherchait 
à  frapper  la  France  directement  au  cœur,  en  bom- 
bardant Paris!  Cette  manifestation,  il  faut  bien  le 
dire,  ne  fut  pas  des  plus  fructueuses. 

Une  tournée  en  Espagne  complètement  organisée, 
quant  à  la  préparation  matérielle,  dut  être  ensuite 


contremandée  au  dernier  moment,  vu  la  situation 
extérieure  et  intérieure. 

La  92e  session  (1918-1919)  débute  par  une  nou- 
velle tournée  de  propagande  française,  cette  fois, 
aux  Etats-Unis  et  au  Canada.  La  Société  se  fait  en- 
tendre, sous  la  direction  de  M.  André  Message*,  dans 
les  villes  suivantes  :  New-York  (deux  concerts  au 
Metropolitan-Opera),  Boston,  Springlield  (Massa- 
chussets),  nouveau  concert  à  New-York  (dans  la  salle 
du  Carnegie  Hall),  Philadelphie,  Washington  (deux 
concerts),  Baltimore,  Richmond.  Notons  que  c'est  en 
cette  ville  que  les  membres  de  la  Société  des  Con- 
certs apprirent  que  l'armistice  était  signé.  Cette 
nouvelle  provoqua  chez  le  peuple  américain  une 
joie  qui  confina  au  délire,  nous  rapporte  un  témoin 
oculaire.  Aussi,  la  Société  des  Concerts  fut- elle,  ce 
soir-là,  l'objet  d'une  ovation  triomphale  qui  restera 
parmi  ses  plus  beaux  titres  de  gloire. 

Elle  se  fit  entendre  ensuite  à  Charlotte,  Atlanta, 
Birmingham,  la  Nouvelle-Orléans  (deux  concerts), 
Shrewport,  Sherman,  Fort  Worth,  Dallas,  Wacco, 
San-Antonio  (réception  au  Country-Club),  El  Paso,  sur 
la  frontière  mexicaine,  d'où  les  musiciens  entendent 
la  fusillade  des  partisans  qui  se  battent,  à  quelques 
kilomètres  du  pont  international  de  Juarez,  San 
Diego,  où,  par  suite  d'une  erreur  d'itinéraire,  une 
partie  de  l'orchestre  manque  le  concert  annoncé; 
Los  Angeles,  San-Francisco,  devant  une  salle  renfer- 
mant 8.000  auditeurs;  Sacramento,  d'où  une  terrible 
épidémie  de  grippe  oblige  la  Société  des  Concerts  à 
retourner  vers  l'est,  où  le  mal  est  en  décroissance  et 
permet  aux  théâtres  de  rouvrir  leurs  portes;  Kansas 
City,  Minneapolis,  Saint-Paul,  Milwaukee;  Chicago 
(concert  en  matinée  et  en  soirée),  Indianopolis  qui 
l'ait  une  réception  magistrale  avec  mobilisation  de  la 
police  à  cheval  et  à  pied,  cortèges,  réceptions  au 
Capitule  et  à  l'hôtel  de  ville;  Louisville,  Cincinnati, 
Dayton,  Cleveland,  Youngstown,  Pitlsburg,  Boches- 
ter,  Syracuse,  Montréal  (deux  concerts,  chacun  com- 
mençant à  minuit,  la  salle  étant  occupée  jusqu'à 
celte  heure-là),  Burlington  où  a  lieu     le  t  •  »  î  >■  <  <-i 

Ajoutons  enfin  que,  sur  les  vives  sollicitations 
d'une  grande  firme  américaine,  la  Société  des  Con- 
certs a  consenti  à  consacrer  plusieurs  matinées  pour 
enregistrer  des  disques  qui  sont  conservés  à  l'égal 
de  reliques  particulièrement  précieuses. 

Au  cours  de  ces  concerts,  se  sont  fait  entendre  :  les 
pianistes  Cortot  et  Madeleine  Brard,  le  violoncel- 
liste Paulin  et  M"e  Gills,  cantatrice. 

Partie  de  Brest  sur  le  transport  de  guerre  améri- 
cain, le  Louisville,  la  Société  des  Concerts  rentrait  le 
17  janvier  1919  à  Bordeaux,  sur  l'Espagne.- 

Dès  son  retour,  le  célèbre  orchestre  organisait 
dans  la  salle  qui  fut  son  berceau,  une  nouvelle  série 
de  dix  concerts,  sans  toutefois  y  faire  participer  l'é- 
lément choral,  qu'elle  s'adjoignit  néanmoins  peu 
après,  à  l'occasion  d'une  audition  donnée  au  Troca- 
déro.  Elle  se  fit  également  entendre  à  Bordeaux  en 
mai  1919. 

Pour  sa  93e  session  (1919-1920),  elle  désigna,  par 
un  vote  unanime,  M.  Philippe  Galbeht  pour  remplir 
les  fonctions  de  chef  d'orchestre,  fonctions  qu'il  oc- 
cupe encore  actuellement  (1929).  Tous  ceux  qui  sui- 
vent aujourd'hui  ses  incomparables  auditions  ont 
pu  juger  combien  ce  musicien  parfait,  qui  s'est  avéré 
d'emblée  comme  un  des  premiers  chefs  d'orchestre 
de  ce  temps,  était  vraiment  digne  d'occuper  cette 
haute  situation  si  justement  enviée.  En  outre,  M.  Â 
Tracol  était  élu  2e  chef  d'orchestre. 


3704  ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET 

Au  cours  de  sa  94°  session,  la  Société  des  Concerts, 
se  conformant  à  ses  statuts,  décerna  à  M.  Henri 
Rabaud  le  tilre  de  président,  M.  Gabriel  Fauré  ayant 
résigné  sa  fonction  de  directeur  du  Conservatoire. 
On  sait,  en  effet,  que  la  présidence  de  la  Société  des 
Concerts  est  dévolue  de  plein  droit  au  directeur  en 
activité.  La  Société  donne,  en  mars  1920,  un  concert 
à  Rouen,  puis,  en  mai,  des  concerts  à  Bruxelles.  L'an- 
née suivante,  elle  se  fait  entendre  à  Lyon  (mars)  et 
à  Lille. 

En  avril  1922,  tournée  à  Bordeaux  (2  concerts),  à 
Lyon  et  à  Marseille.  L'assemblée  générale  du  24  mai 
décide  la  suppression  de  la  fonction  de  répétiteur 
des  chœurs. 

Puis,  au  mois  de  juin,  a  lieu  à  la  Sorbonne,  un 
Festival  en  l'honneur  de  G.  Fauré,  avec  le  concours 
de  la  Société  qui  organise  une  saison  de  concerts  au 
théâtre  des  Champs  Elysées.  Cette  saison  se  conti- 
nue en  1923.  A  la  suite  d'un  concours  pour  la  place 
de  2--'  chef,  M.  Eugène  Bigot  est  désigné. 

En  janvier  1924,  la  Société  va  se  faire  entendre  à 
Genève,  Lausanne,  Vevey,  Fribourg;  puis,  c'est  le 
cycle  Beethoven  au  théâtre  des  Champs  Elysées  sous 
la  direction  de  M.  Damrosch,  chef  d'orchestre  de  la 
New  York  Symphony,  au  bénéfice  des  anciens  élèves 
du  Conservatoire,  cycle  de  o  concerts  comprenant 
toutes  les  symphonies  de  Beethoven  et  les  concertos 
de  piano  et  de  violon.  Concerts  à  Barcelone  au  mois 
de  juin. 

L'assemblée  générale  du  30  mai  1925  décide  la 
création  d'une  caisse  d'allocations  de  post-activité. 
M.  Bigot  n'est  pas  réélu  comme  2e  chef  poste  dont, 
en  octobre  1925,  on  décide  la  suppression. 

Le  22  mai  1926,  l'assemblée  générale  apporte  aux 
Statuts  des  modifications  relatives  à  la  suppression 
du  poste  de  2e  chef  et  à  la  non  participation  de  la 
Société  à  des  concerts  donnés  par  des  associations 
similaires.  L'année  1926  voit  la  fondation  de  la 
Société  des  Amis  de  la  Société  des  Concerts  qui 
compte  comme  présidents  d'honneur  MM.  Millerand, 
Barthou  et  Paul  Léon,  puis,  en  décembre,  ce  sont 
des  concerts  à  Rouen  et  à  Anvers. 

Le  22  mars  1927,  la  Société  célébrait  le  centenaire 
de  Beethoven,  par  un  concert  donné  à  la  Sorbonne, 
où  on  entendait  la  5e  symphonie  du  maître,  dirigée 
par  M.  Rabaud  et  la  9e  dirigée  par  M.  Vincent  d'iNDY. 
Elle  célébrait  aussi,  son  propre  centenaire,  avec  un 
programme  composé  comme  il  suit  : 

Symphonie  héroïque  I  "  mouv' Bbi 

(Cette  symphonie  fut  exécutée  au  l"  concert  de  la  société.) 
Allocation  de  M.   II.   Rabaod,   président  de  la 

société. 
Allocution  de  M.  G.  Risler,  président  des  Amis 

de  l,i  Société  des  Concerts. 
I  I      <  errages 0 

(Président  de  la  société  à  sa  fondation). 

te  Rouet  d'Omphale Saint-  Saens. 

Pellèas  et  Métis/mie  (prélude  Pileuse) G.  Fâché. 

Quatrième  Béatitude '. C.  Franck. 

Es    gue H.  Rabaud. 

Prélude  a  l 'après-midi  d'un  Faune C.  Debussy. 

Le  Ciiniural  humain H.  Berlioz. 

En  mai  1927,  elle  ouvrait,  avec  3  concerts  qui 
eurent  un  immense  succès,  l'Exposition  internatio- 
nale de  musique  de  Francfort.  De  même,  lors  de  l'Ex- 
position internationale  de  musique  de  Genève,  tou- 
jours en  1927,  elle  se  produisait  dans  cette  ville  par 
des  concerts  et  participait  à  des  représentations  de 
l'?tlras  et  Mélisande,  et  d'Ariane  et  Barbe -III 'rue  de 


DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Paul  Duras.  Au  mois  d'octobre  1927,  nous  signalerons 
ses  concerts  à  Bilbao  et  à  Saint-Sébastien.  Enlin,  en 
1929,  la  Société  a  fait  une  tournée  à  Saint-Etienne, 
Lyon  et  Marseille  :  Le  2a  février  1929,  elle  se  pro- 
duisait à  un  concert  de  gala  au  théâtre  des  Champs 
Elysées,  au  bénéfice  de  la  caisse  de  secours  de  la 
Société,  avec  le  concours  de  Paderewski.  A  l'occa- 
sion de  la  retraite  de  M.  Guy  Bopartz,  directeur  du 
Conservatoire  de  Strasbourg,  la  Société  des  Concerts 
a  donné,  le  28  avril,  un  concert  à  Strasbourg.  Cette 
audition  suscita  un  enthousiasme  indescriptible  et 
provoqua  l'exécution  de  la  Marseillaise,  que  le  public 
chanta  avec  l'orchestre. 

Ajoutons  que  la  Société  a  pris  part  aux  obsèques 
nationales  de  Saint-Saëns,  de  Gabriel  Fauré,  et  du 
maréchal  Foch. 

LES  PROGRAMMES 
1914-1918,  période  de  guerre. 
1919. 
Paul  Dokas.  —  La  Péri  'poème  ^yrnphonique ' . 
V.  d'Indy. —  Sauge  fleurie  (poème  symphonique). 
Cl.  Debussy.  —  Iberia. 
—  Petite  Suite. 

Gabriel  Dupont.  —  Les  Heures  dolentes. 
Cl.  Debussy.  —  Fantaisie  pour  pian»  et  orchestre. 

F.  Le  Borne.  —  Poème  légendaire  pour  violon. 
Théodore  Dubois.  —  Fanlasietta. 

Georges  Hue.  —  Emotion*. 

1920. 
H.endel.  —  Jules  César  (air  de  Cléopàtre  . 

J.-S.  Bach.  —  Concert  en  /«  (\m1..ii,  tinte,  h  "':».:>.  trompette). 
Guy  Ropartz.  —  Quatre  Odelettes. 

G.  Grovlez.  —  Le  Reposoir  des  amonts  ;poè -ymphonique). 

Roger  Docasse.  —  Suite  française  (en  ré). 

G.  I'ierné.  —  Paysages  franciscains. 

Maurice  Ravel.  —  il  a  More  ÏOyé. 

H.  Rabaud.  —  Symphonie  eu  mi  mineur. 

1921. 

H.  Dupabc.  —  Aux  étoiles. 

Samazeuilh.  —  Le  Sommeil  de  Canapé. 

Vincent  d'Indy.  —  Deuxième  Symphonie. 

Max  d'Olonni:.  —  Le  Ménétrier. 

Sgambati.  —  Concerto  pour  piano 

Maurice  Ravel.  —  Shéhérazade. 

C.  Chevillabd.  —  Le  Chêne  et  le  Roseau  (poème  symphonique1. 

Jongen.  —  Impressions  d'Ardenne. 

Maurice  Emmanuel.  —  Odelettes  anacrconliquc*. 

R.  Laparra.  —  Un  Dimanche  biisyiie. 

Maurice  Ravel.  —  Daphnis  et  Chloc  '2°  suite  . 

F.  Lu  Borne.  —  Symphonie  arec  orgue. 

G.  Dom  r.  —  /  e  Cimeti  ire   \ me  sympn  n 

Maurice  Ravel.  —  Rapsoiiie  espagnole. 
Respighi.  —  Fontaine  de  Rame. 
Stravinsky.  —  l'eu  d'artifice. 

Ane.  ciiapms.  —  Tableaux  flamands. 
!..  Acbert.  —  Habanera. 
FI.  Schmitt.  ha  Tragédie  de  Salomè. 
Th.  Dubois.  —  Symphonie  française. 


1922. 

-Korsakoff.  —  Ouverture  de  la  Grande  l\ 


II.  Rabaud.  —  Uarouf. 

A.  Broneai-.  Six  Chansons  a  danser. 

X.  CiiAPUls.  —  Tableaux  flamands. 

A.  Caplet.  —  Inscriptions  champêtres. 

M.  Ravel.  —  l.a  Vu/se. 

FI.  Schmitt.  —  Etude  pour  le  Palais  haute 

Borodine.  —  tounses  Potorl siennes  du  Prince  hi< 

MorssoRGSiiY.  —  Une  Suit  sur  le  muni  Chaîne. 

Cl.  Dbbdssy.  —  La  iler. 

A.  Roussel.  —  Le  Festin  de  l'Araignée. 

Y.  d'Indy.  —  La  Qucsie  de  Dieu. 

R.  Ducasse.  —  Xocturnc  de  printemps. 

RlMSKY-KoRSAKOFF.  —  Alltlir. 

I.iapoi  now.  —  Concerte  [piano  i 

A.  Caplet.  —  Prières. 

M.  Ravel.  —  Le  Tombeau  de  Couperin. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    370:, 


G.  HtJE.  —  Titania. 

H.  Bcsser.  —  Hercule  au  jardin  des  Hespérides. 

V.  d'Indt.  —  Choral  varié.     . 

P.  Hili.emacher.  —  Suite  dans  le  style  ancien. 


1924. 


Balakirew.  —  Thnmnr  [poèms  symphonique). 

A.  Caplet.  —  Epiphanie  (fresque  pour  violoncelle  et  orchestre). 

F.  Liszt.  —  Les  Préludes. 

A.  Bruneatj.  —  Q  al   ■  P       des  de  l'Ouragan. 

G.  Pierne.  —  B  '     ,v-  ./■■  PaulFort. 
M.  Emmanuel.  —  >,-.  il  mie. 

(iuzors.™-.  —  Stenla  Ru;, ne. 

Ph.  Gadbert.  —  Le  Cortège  a" Amphitrite. 

H.  Ddparc.  — Aux  étoiles. 

V.  d'Indy.  —  Istar. 

Strawinsky.  —  Pelrouchka  (scènes  burlesques). 

Lekeu.  —  Adagio  pour  quatuor  d'orchestre. 

M.  de  Fai.la.  —  Nuits  dans  les  jardins  d'Espagne  (piano  et  or- 

L.  ArBERT.  —  Poèmes  arabes. 

G.  Pierne.  —  l'oeme  sqm/ili., nique  (piano  et  orchestre). 

Cbaosson-.  —  Viviane  (poème  symphonique). 

G.  Faoré.  — Ballade  [piano  et  orchestre). 


Szimanoaysky.  —  Concerto  (violon  et  orchestre). 

Cl.  Debussy.  —  Khamma. 

CaUTBLODBE.  —  Le  Mus. 

Rimsky-Korsakoff.  —  Le  Tsar  Sultan. 

Max  d'ûlonne.  —  Le  Betour. 

S.  Prokoffieff.  —  Sz  Concerto  (piano  el  orchestre). 

F.  Liszt.  —  Danse  macabre  sur  le  Uns  irse  (piano  et  orchestre). 
H.  Rabai-d.  —  /'•'-  suite  anglaisedu  seizième  siècle. 

H.  Bdsser.  —  Les  Noces  corinthiennes. 

G.  PlERNÉ.  —  Rumiiutcho. 

E.  Bloch.  —Schelomo, 

chestre). 
J.  Ibert.  —  Escales. 

H.  Rabacd.  —  La  Procession  nocturne  (poème  symphonique). 
A.  Caplet.  —  La  Croie  douloureuse.  — L'Adieu  en  barque. 
S.  Prokoffieff.  —  L'Amour  des  trois  oranges. 
L.  Voii.lemin.  —  Quuire  Danses  (pour  orchestre). 
Ph.  Gadbert.  —  Fantaisie  (violon  et  orchestre). 
0.  Respighi.  —  Les  Pins  de  Home  (poème  symphonique). 
G.  Samazedilh.  —  Nuit  (poème  symphonique). 

1926. 

A.  Honeguer.  —  Pastorale  d'e/e  (poème  symphonique). 


F.   Ll BORNE.    —  L'A 

R.  Laparra.  —  Tri 
L.  Aubert.  —  Iin/ii 


lique). 
;heslre). 


FI.  Schmitt.  —  Antoine  el  Clèopâtre. 
G.  Migot.  —  Trois  Mélodies. 

D.  Milhacd.  —  Chants  populaires  hébraïques. 

Gr.  Krein.  —  Chant  d'automne. 

Ph.  Gadbert.  —  11  est  d'étranges  sons. 

G.  Pierne.  —  Cijdalise  et  le  chcrrcpied  (poème  symphonique 

H.  Bosser.  —  La  Colombe.  —  Lu  Nymphe  de  lu  Source. 

V.  d'Indy.  —  Diptyque  méditerranéen. 

FI.  Schmitt.  —  Tristesse  au  jardin.  —  Musique  sur  l'eau. 

J.  Pooeigh.  —Je  m'en  ruij  n  l.iruro. 

Ph.  Gaubert.  —  Quatre  Ballades  Françaises. 


1927. 

ne.  —  Rapsoilie  Géorgienne,  pour  violoncelle 
le.  —  Sur  une  tombe .  —  Vue  jeune  fille  porte. 
Le  Miroir  ,1e  Jésus. 


II.  TY.uË 


A.  Ca 

FI.  Schmitt.  —  Chansons  a  quatre  voix. 

M.  Ravel.  —  Introduction  et  Allegro. 

P.  Dokas.  —  Ariane  et  Barbe-Bleue  (I"  acte). 

Max  Brocii.  —  Concerto  en  sol  mineur  (violon  et  orchestre). 

G.  Enesco.  —  Symphonie  eu  mi  bémol. 


M.  Ravel.  —  Daphxis  et  Chloê    2"  suite). 

H.  Rabacd.  —  Divertissement  sur  des  chansons  russes. 

A.  Borchard.  —  Eskual  Herria  (piano  et  orchestre). 

A.  Rodssel.  — Suite. 

Ph.  Gacbert.  —  Danses  de  Nnila. 

1928. 

J.  I'oi-eigii.  — •  /.(•  Meneur  de  l'oircs,  poème  symphonique. 

Cl.  Debussy.  —  Bat/odes. 

A.  Caplet.  —  llijmue  a  la  naissance  du  malin. 

Ch.  Todrnemire.  —  Symphonie  n»  S. 

A.Bertolin.  —  Chant  des  Morts, 

G.  Grovlez.  —  Madrigal  lyrique. 

A.  Rodssel.  —  Padmavâti  i  lr0  suite). 

A.  Honegger.  —  Pacific  231,  mouvement  symphonique. 

H.  Bachelet.  —  Scemo  (prélude  du  i»  acte). 

I.  Straavi.nsky.  —  Chants  plaisants. 

Modssorgsky.  —  Kallisirulc .  —  Chanson  de  Méphistopliêlès.  —  Le 

Roi  Saut.  —  Mil, osic. 
G.  Mioot.  —  Le  Punirait  de  laque  aux  trois  images. 
Canteloube.  —  Clutiils  d'Aiireri/iie. 
J.  Ibert.  —  La  Ballade  de  la  Geôle  de  Readiiuj. 

RlMSKY-IioRSAKOFF.  —  Le  Coq  d'or. 

Cl.  Monteverdi.  —  Orfeo  (deux  airs). 

Ph.  Gadbert.  —  Le  Ciel  est  gai,  c'est  joli  mai. 

M.  Ravel.  —  Paraue  fiour  une  lufanlc  défunte. 

DopÀrc.  —  Invitation  au  voyage.  —  Plnjdilè. 

A.  Brdneau.  —  l'eiilbcsilce. 

S.  Prokoffieff.   —  Concerto  (pour  violon  et  orchestre). 

L.  Voillemin.  — Eu  Kernco,  suite  d'orchestre. 

L.  Adbert.  —  Suite  trêve. 

A.  Brcneaf.  —  L'Ouragan  fragments  du  2°  acte). 

1929. 
J.-S.  Bacb.  —  Lu  Passion  selon  s, nul  Je, ni. 
H.  C.vseli.a.  —  Sciirliillniiin. 
E.  Granados.  — Les  Goijescas. 

II.  Rabacd.  —  L'Appel  de  In  mer. 
V.  d'Indy.  — 

P.  Dokas. —  Vitlanelle   pour  cor  et  orchestre). 

GOPPOLA.  —  Poe, in'  èlègiaque. 

H.  SCHUMANN.  —  Le  Paroi, s  el  la   Perl. 


Ainsi  que  nous  l'avons  noie  précédemment,  la 
Société  des  Concerts,  sous  la  pression  des  exigences 
économiques  de  l'heure  et  en  présence  de  l'évolu- 
tion rapide  de  l'art,  s'est  trouvée  dans  l'obligation 
impérieuse  de  rompre  avec  ses  traditions,  sur  plu- 
sieurs points  importants,  el,  par  là,  de  modifier 
assez  profondément  la  physionomie  sous  laquelle 
nous  l'avions  représentée  jusqu'au  moment  de  la 
guerre. 

D'une  part,  ses  concerts,  qui  comportaient  le 
même  programme  deux  dimanches  successifs,  offrent 
maintenant  à  ses  abonnés  un  programme  nouveau 
à  chacune  de  ses  séances. 

D'autre  part,  les  répétitions  générales  du  samedi, 
qui  jusque-là  n'étaient  accessibles  qu'aux  seuls  élèves 
des  classes  de  composition,  ont  été  rendues  publi- 
ques. Elles  obtiennent,  il  faut  l'ajouter,  un  succès 
considéiable. 

Enfin,  —  et  cette  décision  imposée  par  les  événe- 
ments est  particulièrement  grave,  —  la  Société  s'est 
vue  dans  la  nécessité  de  supprimer,  au  moins  tempo- 
rairement, cet  admirable  élément  choral  qui  consti- 
tuait, avec  l'orchestre,  un  groupement  peut-être  uni- 
que en  Europe.  Ses  admirateurs  fervents  n'ont  pas 
oublié  les  exécutions  incomparables  qu'elle  donna, 
tous  éléments  réunis,  notamment  de  la  Passion  selon 
saint  Jean,  de  la  Messe  et  de  la  Symphonie  avec 
chœurs.  Depuis  le  mois  de  mars  192o,  la  Société  s'est 
assuré  la  collaboration  du  chœur  mixte  de  Paris, 
dirigé  par  MM.  Marc  de  Ranse  et  Jean  Gallard.  Le 
programme  du  concert  du  29  mars  1925,  concert 
auquel  prenait  part  le  chœur  mixte,  comportait  le 
Requiem  de  Fauré  et  la  9'  Symphonie  de  Beethoven. 

Quel  est,  en  présence  de  ces  modifications  pro- 


WQFGLOPÈDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


fondes,  l'avenir  réservé  à  la  Société  des  Concerts? 
Restera-t-elle  la  première  parmi  les  remarquables 
associations  symphoniques  fondées  de  toutes  parts, 
surtout  a  Paris,  la  traductrice  impeccable,  en  su- 
prême beauté,  des  cbefs-d'œuvre  du  passé?  11  serait 
imprudent  de  prononcer  un  jugement  que  le  temps 
se  chargerait  peut  être  d'inlirmer.  Bornons-nous  à 
souhaiter  ici  que  la  Société  des  Concerts  demeure 
par-dessus  tout  fidèle  à  l'esprit  qui  a  présidé  à  ses 
manifestations,  c'est-à-dire  la  gardienne  vigilante  et 
éloquente  des  grands  classiques  que  la  gloire  a  défi- 
nitivement consacrés.  C'est  là,  à  notre  humble  avis, 
son  rôle  et  sa  mission.  Que  les  autres  associations, 
en  leur  généreuse  ardeur,  révèlent  aux.  dilettantes 
les  productions  souvent  intéressantes  de  la  jeune 
Ecole,  rien  de  mieux.  Mais  c'est  à  la  Société  des  Con- 
certs qu'il  appartient  de  transmettre  aux  générations 
successives  le  culte  des  grands  ancêtres  de  tous  les 
temps  et  de  tous  les  pays,  et  non  de  révéler  au  pu- 
blic des  œuvres  souvent  éphémères,  parce  qu'elles  ne 
sont  faites  que  de  talent,  voire  de  trop  de  talent  par- 
fois. 

LES   STATUTS 

Aous  remarquions,  lorsque  nous  avons  reproduit 
les  statuts  élaborés  en  1828  par  les  fondateurs  de  la 
Société  des  Concerts,  que  si  le  temps  et  l'expérience 
ont,  par  la  suite,  nécessité  d'y  introduire  des  modi- 
fications ou  des  additions,  l'esprit  et  le  fond  en  ont 
du  moins  été  respectés.  Aussi,  aliii  d'éviter  des  re- 
dites inutiles,  nous  bornerons-nous  à  donner  seule- 
ment ici  les  extraits  les  plus  importants  des  statuts 
actuellement  en  vigueur.  D'ailleurs,  ces  statuts  cons- 
tituent un  document  d'ordre  privé  qui  nous  impose, 
sur  certains  points,  une  discrétion  que  le  lecteur 
comprendra  facilement. 

Ajoutons  qu'ils  ont  été  déposés  en  1841  en  l'étude 
de  Me  Floreslan-Charles  Bonnaire,  notaire  à  Paris. 

GUA.P1TRE    PREMIER 

formation  de  la  Société. 

Article  premier.  —  Une  association  est  établie  par 
le  présent  acte  entre  tous  les  comparants  et  les  ar- 
tistes qui  seraient  admis  ultérieurement  dans  ladite 
association  après  avoir  adhéré  aux  présents  statuts. 

Art.  2.  —  Cette  association  a  pour  objet  de  don- 
ner des  concerts  publics;  elle  sera  désignée,  comme 
par  le  passé,  sous  le  titre  de  :  Société  des  CtmeePt». 

Art.  3.  —  Tout  artiste,  pour  être  nommé  sociétaire 
actif,  devra  : 

1°  Etre  Français; 

2°  Etre  âgé  au  moins  de  vingt  et  un  ans; 

3°  Etre  libéré  du  service  actif  dans  l'armée,  ou, 
s'il  est  né  de  parents  étrangers,  avoir  accompli  effec- 
tivement son  service  militaire  dans  l'armée  active 
française; 

4°  Appartenir  ou  avoir  appartenu  au  Conserva- 
toire, soit  comme  professeur,  soit  comme  élève. 

L'artiste  qui  ne  remplirait  pas  cette  dernière  nm- 
dition  ne  pourrait  aspirer  qu'au  titre  de  sociétaire 

ail  joint. 

Art.  4.  —  Le  personnel  participant  aux  exécu- 
tions musicales  de  la  Société  se  composera  ainsi 
qu'il  suit  : 

Sociétaires  actifs, 

Sociétaires  adjoints, 

Sociétaires  stagiaires, 

Aspirants, 

Externes. 


aux  délibérations  et  aux  autres  actes  quelconques 
relatifs  à  l'administration  de  la  Société.  Ils  doivent 
être  âgés  de  vingt-et-un  ans. 

Art.  'j  bis.  —  Les  artistes  choisis  par  le  comité 
pour  participer  dans  les  rangs  de  l'orchestre  à  l'exé- 
cution des  concerts,  prennent  le  titre  d'aspirants 
actifs,  lorsque  leur  collaboration  est  permanente,  et 
d'aspirants  en  cas,  s'ils  ne  sont  appelés  qu'à  assurer 
le  service  d'un  titulaire  malade  ou  en  congé. 

-1/7.  G.  —  Les  artistes  appelés  temporairement 
pour  les  besoins  de  l'exécution  prennent  le  litre 
d'externes. 

Art.  7.  —  A  l'exception  du  président,  tout  socié- 
taire qui  atteint  l'âge  de  soixante  ans  cesse  de  faire 
partie  de  la  Société  comme  membre  actif. 

Cependant,  celui  qui  atteint  cet  âge  depuis  le 
Ier  octobre  jusqu'à  l'assemblée  générale  de  la  red- 
dilion  des  comptes,  continue  ses  fonctions  et  reste 
membre  actif  jusqu'à  la  fin  de  ladite  session. 

Le  comité,  dans  le  cas  d'urgence  seulement,  peut 
surseoir  à  la  retraite  du  membre  sortant;  ce  sursis 
n'excédera  pas  une  année,  mais  il  pourra  être  renou- 
velé. 

Art.  8.  —  Tout  sociétaire  qui  compte  au  moins 
dix  années  d'exercice  peut  obtenir  le  titre  de  mem- 
bre honoraire. 

Le  titre  de  membre  honoraire  peut  être  également 
accordé  à  un  artiste  étranger  non  naturalisé  Fran- 
çais. 

CHAPITRE    IV 

Administration  de  la  Soaiété. 

Art.  13.  —  La  Société  des  Concerts  est  adminis- 
trée par  un  comité  composé  de  neuf  membres,  sa- 
voir : 

1°  Un  président; 

2°  Un  premier  chef  d'orchestre; 

3°  Vu  deuxième  chef  d'orchestre1  ; 

4°  Un  secrétaire; 

.'.    in  commissaire  du  personnel; 

0°  Un  commissaire  du  matériel; 

7°  Un  agent  comptable; 

8°  Un  archiviste  caissier; 

9°  Un  commissaire  de  la  publicité. 

.1?-/.  i  i.  —  Il  y  a,  en  outre,  un  membre  adjoinl  au 
comité,  à  l'effet  de  remplacer  momentanément  celui 
des  commissaires  qui  serait  empêché  de  remplir  ses 
fonctions. 

.le/.  15.  —  Tous  les  membres  du  comité  sont 
nommés  en  assemblée  générale,  à  l'exception  du 
président. 

Le  directeur  du  Conservatoire  est  de  plein  droit 
président  de  la  Société  des  Concerts. 

Le  premier  chef  d'orchestre  peut  être  choisi  en 
dehors  de  la  Société,  mais,  par  le  fait  mémo  de  son 
élection,  il  devient  de  plein  droit  sociétaire.  Le  se- 
cond chef  d'orchestre  doit  être  choisi  parmi  les  mem- 
bres actifs  de  la  Société;  il  est  nommé  pour  quatre 
ans  et  est  rééligible. 

Les  deux  chefs  d'orchestre  sont  élus  à  la  majorité 
des  deux  tiers  des  voix  des  membres  présents;  ce- 
pendant, si,  après  quatre  épreuves,  la  majorité  des 
deux  tiers  n'est  point  acquise,  il  sera  procédé  à  un 
scrutin  de  ballottage  entre  les  deux  candidats  qui 
auront  obtenu  le  plus  de  voix.  Si,  après  deux  nou- 
velles épreuves  entre  les  candidats,  la  majorité  des 


Le  poile  de  deuxii'Tiiu  .-li-f  d'e 


TECHNIOI'E,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    9707 


deux  tiers  n'est  point  acquise  encore,  l'élection  se 
fera  à  la  majorité  absolue.  Dans  ce  cas,  si,  après 
quatre  tours,  la  majorité  absolue  n'est  point  acquise, 
l'élection  sera  remise  à  une  date  ultérieure.  Le  pre- 
mier chef  d'orchestre  qui  aura  atteint  l'âge  de  soixante 
ans  sera  rééligible  tous  les  deux  ans. 


Les  autres  membres  du  comité  sont  nommés  à  la 
majorité  absolue  des  suffrages  et  ne  peuvent  être 
choisis  que  parmi  les  sociétaires;  ils  conservent  leurs 
fonctions  deux  années. 

L'archiviste  caissier,  l'agent  comptable  peuvent 
seuls  être  immédiatement  réélus;  les  autres  mem- 
bres ne  sont  rééligibles  qu'après  une  année  d'inter- 
valle. 

CHAPITRE    VI 

Des  asssemblées  générales. 

Art.  42.  —  L'assemblée  générale  se  compose  de 
tous  les  membres  sociétaires;  elle  a  lieu  au  moins 
une  fois  chaque  année,  après  la  session  des  con- 
certs; l'assemblée  générale  peut,  en  outre, être  con- 
voquée toutes  les  fois  que  le  comité  d'administra- 
tion le  juge  nécessaire  dans  l'intérêt  de  la  Société. 

Art.  ; ::.  —  L'assemblée  décide  sur  tous  les  points 
prévus  par  les  présents  statuts  et  sur  toutes  les  pro- 
positions qui  lui  seraient  présentées  par  le  comité. 

Art.  14.  —  La  présence  de  la  moitié  plus  un  des 
membres  sociétaires  est  nécessaire  pour  valider  les 
délibérations. 

Les  décisions  seront  prises  à  la  majorité  absolue 
des  voix,  sauf  les  cas  jugés  graves  par  l'assemblée 
générale,  dans  lesquels  elles  devront  réunir  les  deux 
tiers  des  voix.  En  cas  d'ajournement  faute  d'un 
nombre  suffisant  de  membres  présents,  l'assemblée 
sera  de  droit  convoquée  à  huitaine;  et  les  délibéra- 
tions seront  alors  valables,  quel  que  soit  le  nombre 
des  membres  présents;  toutefois,  l'assemblée  ne 
pourra  délibérer,  dans  ce  cas,  que  sur  les  objets 
indiqués  à  l'ordre  du  jour  delà  précédente  réunion. 

Art.  45.  —  Aucun  membre  ne  peut  prendre  la  pa- 
role en  assemblée  générale  qu'après  l'avoir  obtenue 
du  président. 

Les  délibérations  portant  décision  définitive  auront 
lieu  au  scrutin  secret,  comme  pour  la  nomination 
des  membres  du  comité.  En  cas  de  partage,  la  voix 
du  président  est  prépondérante. 

Si  les  deux  premiers  scrutins  de  nomination  ne 
donnent  aucun  résultat,  il  est  procédé  à  un  scrutin 
de  ballottage  entre  les  deux  membres  qui  ont  obtenu 
le  plus  de  voix. 

Art.  46.  —  Les  membres  honoraires  sont  convo- 
qués aux  assemblées  générales,  où  ils  ont  voix  con- 
sultative. 

Des  membres  hononiireA. 

Art.  62  bis.  —  La  Société,  comme  témoignage  de 
sa  haute  estime  et  de  sa  considération,  peut  accor- 
der le  titre  de  président  honoraire  à  vie  au  chef 
d'orchestre  qui  se  retire  après  vingt  années  de  ser- 
vices au  moins. 

CHAPITRE   XIV 

Modifications  aux  statuts. 
Art.  81.  —  Aucune  modification  ne  pourra  être 
faite  aux  présents  statuts  si  elle  n'est  présentée  par 
le  comité  après  une  délibération  ayant  réuni  la  ma- 
jorité absolue  de  ses  membres,  ou  si  elle  n'est  de- 


mandée par  dix  membres  au  moins,  qui  auront  fait 
parvenir  leurs  propositions  au  comité. 

Tout  projet  de  modilications  devra  être  commu- 
niqué aux  sociétaires  au  moins  huit  jours  avant  la 
discussion.  Cette  communication  comportera  : 

1°  L'article  et  le  paragraphe  visés; 

2°  La  ou  les  modifications  projetées. 

Le  comité  présentera,  dans  le  délai  d'un  mois,  son 
rapport  sur  les  modilications  demandées  et  l'assem- 
blée générale  décidera.  Les  modifications  régulière- 
ment adoptées  en  assemblée  générale  sont  annexées 
aux  présents  statuts. 


LA   SALLE   DES  CONCERTS 

La  salle  des  Concerts  du  Conservatoire  fut  édifiée, 
par  arrêté  en  date  du  3  mars  1806,  d'après  les  plans 
de  l'architecte  Delannois,  sur  un  ancien  marais,  au 
milieu  du  jardin  des  Menus-Plaisirs. 

A  l'origine,  elle  comprenait  1.078  places,  réparties 
entre  ses  trois  étages. 

Ainsi  qu'on  a  pu  le  voir  par  les  extraits  des  pro- 
cès-verbaux que  nous  avons  reproduits  précédem- 
ment, la  salle  subit  d'assez  importantes  modifica- 
tions en  1860.  Rappelons  encore  qu'eu  1807,  au  len- 
demain du  terrible  incendie  du  Bazar  de  la  Charité, 
la  commission  supérieure  des  théâtres,  afin  d'assu- 
rer la  sécurité  du  public,  imposa  à  la  Société  des 
Concerts  la  suppression  de  150  places1. 

Il  est  intéressant  de  remarquer  que  la  disposition 
des  instruments  de  l'orchestre  dans  la  Salle  des  Con- 
certs est,  à  part  quelques  légères  modilications  ap>- 
portées  dans  les  places  assignées  aux  violoncelles 
et  aux  contrebasses,  absolument  semblable  à  celle 
adoptée  dès  le  principe  par  Habeneck. 

Voici  en  quels  termes  Deldevez,  dans  le  remar- 
quable ouvrage  qu'il  a  consacré  à  la  Société  des  Con- 
certs, apprécie  la  salle  du  Conservatoire  : 

«  11  s'est  rencontré  également  que  la  Salle  des 
Concerts,  disposée  d'une  façon  si  heureuse,  a  formé, 
pour  ainsi  dire,  un  instrument  unique,  le  plus  admi- 
rable qu'on  puisse  imaginer  pour  L'interprétation  de 
si  merveilleux  chefs-d'œuvre.  Aussi,  est-il  impossible 
d'aller  au  delà  des  conditions  que  l'exiguïté2  de  la 
salle  impose. 

«  Cette  salle,  si  bien  appropriée  par  sa  construc- 
tion acoustique  à  l'exécution  des  œuvres  musicales 
et  qui,  suivant  une  expression  si  souvent  répétée,  est 
elle-même  un  instrument.  » 
Elwart  écrivait  aussi  en  1860  : 
«  Beaucoup  de  personnes,  privées  de  pouvoir  assis- 
ter aux  concerts  de  la  Société,  expriment  annuelle- 
ment le  désir  que  le  comité  fasse  construire  un 
plus  vaste  local;  mais  l'expérience  qui  a  été  faite 
très  souvent  prouve  surabondamment  que  le  style 
très  délicat  et  très  lleuri  des  symphonies  qui  forment 
le  fond  du  répertoire  fait  une  loi  à  la  Société  de  ne 
pas  abandonner  une  salle  qui,  de  l'avis  des  connais- 
seurs, est  une  espèce  de  Stradivarius,  tant  sa  sono- 


I.  On  Terra  le  plan  de  la  Salle  dos  Concerts  dans  l'article  :  Théâ- 
tres et  Salles  de  concerts  de  l' Encyclopédie. 

î.  L'exiguïté  de  la  Salle  des  Concerts  du  Conservatoire  a,  de  tous 
temps,  obligé  la  Société  à  réduire  au  strict  minimum  le  service  des 
billets  de  faveur.  Encore,  à  de  très  rares  eiceptions  prés,  ces  services 
constituent-ils  plutôt  une  servitude.  Seuls,  parmi  les  membres  de  la 
Société,  ceus  du  comité,  dont  les  fonctions  si  délicates  en  même  temps 
que  ai  lourdes  sont  absolument  gratuites,  bénéficient,  pour  chacun 
des  concerts,  de  deui  places,  très  mauvaises  d'ailleurs.  A  la  presse 
so  nt  attribuées  les  deux  secondes  loges  situées  sur  la  scène. 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


rite  est  parfaite,  et  dont  la  construction  remplit  les 
conditions  acoustiques  les  plus  favorables  pour  l'ob- 
jet auquel  elle  est  destinée.  » 

Nous  ne  pouvons  qu'approuver  les  opinions  émises 
par  ces  deux  maîtres. 


COMITÉ.   —   RÉPÉTITIONS.    —   PERSONNEL   DE 
L'ORCHESTRE   ET  DES  CHŒURS.   —   ABONNÉS. 

!.<■  comité. 

Le  comité  de  la  Société  des  Concerts  est  investi  de 
pouvoirs  très  étendus. 

C'est  lui  qui  arrête  les  dates  des  concerts,  la  com- 
position des  programmes,  la  date  des  assemblées 
générales  annuelles  ou  extraordinaires.  Il  nomme  à 
tous  les  emplois  :  sociétaires,  aspirants,  chefs  de 
pupitres  et  solistes;  il  décerne  le  titre  de  membre 
honoraire  — titre  très  envié  —  sans  que  l'assemblée 
générale  ait  à  intervenir. 

Le  comité  se  réunit  au  Conservatoire  le  mardi  de 
chaque  semaine,  à  neuf  heures  précises  du  matin, 
sans  jamais  se  départir  de  cette  exactitude  qui  est 
un  des  éléments  de  la  force  et  de  la  discipline  de  la 
Société. 

La  salle  de  ses  délibérations  est  située  au  second 
étage,  au-dessus  de  l'ancienne  bibliothèque  du  Con- 
servatoire. C'est  un  local  exigu,  sans  aucun  orne- 
ment :  une  table,  un  piano  et  sur  la  cheminée  un 
buste  en  bronze  de  Beethoven,  car  le  maître  immor- 
tel, depuis  la  fondation  de  la  Société  des  Concerts, 
préside  partout  à  ses  travaux.  Il  est  le  dieu  toujours 
présent  et  toujours  glorifié. 

En  l'absence  du  directeur  du  Conservatoire,  de 
droit  président  de  la  Société,  le  comité  est  présidé 
par  le  chef  d'orchestre  vice  président,  et,  à  son  dé- 
faut, par  le  doyen  d'âge. 

Les  repétitions. 

Les  répétitions  de  la  Société  des  Concerts  onl  lieu 
deux  fois  par  semaine,  à  neuf  heures  du  malin,  des 
premiers  jours  de  novembre  à  fin  avril,  époque  à 
laquelle  la  session  se  termine. 

Le  même  programme  étant  donné  deux  dimanches 
de  suite  (lre  et  2e  série), les  deux  répétitions  qui  pré- 
cèdent la  trc  série  sont  générales,  c'est-àt-dire  que 
l'orchestre  et  les  chœurs  procèdent  à  une  exécution 
d'ensemble.  Néanmoins,  lorsque  le  programme  ne 
comporte  pasd'œuvres  de  longue  haleine,  réclamant 
l'adjonction  de  l'élément  choral,  —  le  cas  est  assez 
fréquent,  —  l'orchestre  et  les  chœurs  travaillent  sé- 
parément jusqu'à  dix  heures  et  demie  environ,  pour 
se  grouper  ensuite. 

Pour  le  deuxième  concert  (2°  série),  il  n'y  a  qu'une 
répétition  générale,  le  samedi,  veille  de  ce  concert. 
Celle  du  vendredi  est  employée  à  préparer  les  œu- 
vres qui  figureront  sur  un  programme  ultérieur. 

Les  répétitions,  nous  l'avons  dit,  commencent  à 
neuf  heures  précises  et  prennent  fin  à  onze  heures, 
lorsqu'elles  sont  partielles,  et  vers  onze  heures  et 
demie  ou  midi  lorsqu'elles  sont  générales. 

L'orchestre  répète  toujours  dans  la  salle  du  Con- 
servatoire. Pour  les  répétitions  partielles,  les  chœurs 
répètent  au  Conservatoire  également,  dans  la  petite 
salle  du  rez-de-chaussée,  affectée  aux  cours  d'opéra, 
d'opéra-comique,  de  tragédie  et  de  comédie. 

A  neuf  heures  sonnantes,  l'appel  des  sociétaires  et 
aspirants  est  fait,  pour  l'orchestre,  par  le  commis- 
saire du  personnel,  pour  les  chœurs  par  un  membre 


du  comité.  Cet  appel  est  suivi  d'un  contre-appel. 
Tout  sociétaire  absent  au  premier  appel  est  passible 
d'une  amende  d'un  quart  de  droit. 

Les  répétitions  commencent  aussitôt  après  l'appel- 

A  l'exception  des  répétitions  générales  du  samedi, 
les  études  se  font  rigoureusement  à  huis  clos.  C'est 
de  règle  absolue.  Seuls,  le  samedi,  les  élèves  des 
classes  de  composition,  de  contrepoint  et  d'orgue 
sont  admis. 

Nous  croyons  être  en  droit  d'affirmer  que  nulle 
part  ailleurs  qu'à  la  Société  des  Concerts,  une  pre- 
mière lecture  n'est  faite  avec  plus  de  correction,  plus 
d'ensemble,  plus  de  nuances,  plus  de  compréhension 
immédiate  du  caractère  de  l'œuvre  mise  à  l'élude. 
Ces  qualités  ont,  de  tout  temps,  toujours  profondé- 
ment émerveillé  les  compositeurs  et  les  artistes 
étrangers  qui  ont  eu  l'occasion  de  les  juger.  A  cetle 
occasion,  il  y  a  lieu  de  faire  remarquer  que  les 
membres  de  l'orchestre  sont  tous  des  lauréats  du 
Conservatoire,  où  ils  ont,  de  plus,  suivi  les  classes 
de  solfège  qui  sont,  par  les  résultats  exceptionnels 
qu'on  obtient  chaque  année,  un  sujet  d'étonnement 
pour  toutes  les  grandes  écoles  musicales  de  l'Eu- 
rope. 

11  serait  injuste  de  ne  pas  faire  ressortir  également 
la  valeur  des  artistes  des  chœurs,  qui,  en  dehors  de 
'a  Société,  sont  pour  la  plupart  des  professeurs  dont 
l'enseignement  est  justement  réputé. 

Les  répétitions  des  chœurs  sont  dirigées  par  un 
artiste  nommé  lous  les  deux  ans  en  assemblée  géné- 
rale. Cet  arlisle  porte  le  titre  de  :  répétiteur  des 
chœurs. 

Un  accompagnateur  lui  est  adjoint  qui  ne  peut,  en 
aucun  cas,  devenir  sociétaire  ni  bénéficier,  par  con- 
séquent, d'aucune  des  prérogatives  attribuées  aux 
membres  exécutants. 

Parmi  les  artistes  qui  ont  occupé  le  poste  de  ré- 
pétiteur du  chant,  citons  MM.  Théodore  Dubois, 
Heybebger,  Paul  Vidal,  Samuel  Mousseau,  Schwartz, 
Jean  Gallon. 

La  génération  actuelle  semble  avoir  peu  retenu 
le  nom  de  Heyberger.  Mais  tous  ceux  qui,  comme 
nous,  ont  eu  le  rare  bonheur  d'apprécier  sa  grande 
maîtrise,  gardent  un  souvenir  ému  de  l'homme 
exquis,  du  maître  compétent  et  averti  dont  le  dé- 
vouement inlassable  pour  la  Société  des  Concerts 
restera  comme  un  noble  et  pur  exemple  de  haute  et 
filiale  conscience  artistique. 

Les  répétitions  des  chœurs  offrent  cette  particula- 
rité très  intéressante  et  bien  digne  d'être  mentionnée 
que,  à  de  très  rares  exceptions  près,  les  œuvres 
même  les  plus  difficiles  sont  exécutées  à  première 
vue  avec  les  paroles  et  le  plus  souvent,  toutes  parties 
réunies.  C'est,  du  reste,  cette  grande  supériorité  des 
chœurs  qui  permet  à  la  Société  des  Concerts  de  met- 
tre au  point  aussi  rapidement  qu'elle  le  fait,  des 
œuvres  de  longue  haleine,  telles  que  l'immense  r<is- 
sion  selon  saint  Jean  de  J.-S.  Bach,  par  exemple. 

Ajoutons  encore  que,  fréquemment,  certains  artis- 
tes des  chœurs  étaient  appelés  à  se  produire  comme 
solistes,  avant  le  régime  actuellement  en  vigueur 
pour  l'emploi  des  chœurs. 

Composition  «lu  comité  actuel  et  tableau  du 
personnel   (orchestre  et  chœurs)  (1989). 

Président,  le  directeur  du  Conservatoire.  II.  Rabatjd. 

Vice-nrésident  et  chef  d'orchestre Ph.  Gaubbri 

Secrétaire A.    In  lcol, 

Commissaire  du  personnel P.  Villain. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 

Commissaire  du  matériel K.  Epinoox. 

Archiviste-caissier E.  Deblatjw 

Agent-comptable R-  Delbos. 

Commissaire  de  la  publicité L.  Skbbi  t. 

Membre  adjoint A.  Le  Mbtai 

Caisse  d'allocations. 

Secrétaire A.  Seitz. 

Trésorier... F-  Loqtiin. 

Agent  comptable L.  Bledzet, 

(Ces  trois  artistes  ne  font  pas  partie  du  comité.) 

Orchestre. 

Artistes  de  l'orchestre. 

,pe  Gaubert. 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    3709 


Chef  d'orchestre  :  M. 


l'rc 


LCQCIN. 

Besnier. 
Candéi.a. 

Debruille. 


Tracol. 
Si  khi  l. 
DONY. 


Hardy. 

I.ESPINE. 

Caeembat. 


ElSELÉ. 
LOVISOLO. 

Besedetti. 


CfirgrE. 

.1.    DUMONT. 

GrBT. 
Gaodichon. 

Contrebasses 

HÉROUARD. 

Freciibville. 

Ladocx. 

Delacourcelle 

Pickett. 
A.  Charom. 

H.    BOCCHER. 

Leduc. 

Brousse. 

Labmée. 

Clarinette-ba; 

J.    LOTERIl 


Fr.  Oubradous.  Ferd.  Ocbra 

Basson  et  conlrcbasson  : 


GUILLOTEAU. 

Cors  : 


M"0  Lautema 


Orgue  : 
G.  Jacob. 

Chœurs  (avant  1!>35). 

Répétiteur  du  chant  :  M.  Jean  Gallon. 

Pianiste-accompagnateur  :  M.  Jean  Verd. 

Premiers  dessus  :  Mme5  Drees-Brun,  Paoletti,  HénaolT, 
Giovanetti,  Cheyrat,  Ddpiré,  Barbaine,  Durai»,  Clamée,  No- 
tick,  bossakiewich. 

Seconds  dessus  :  Mmcs  Lafléche,  Tuiaozat,  Delail,  Goyon- 
Dei.aspre,  Ediat,  Caldier,  Ray,  Laqkeap,  Rkvei.-Gebmaix. 

Premiers  altos  :  Mmos  Muriel,  Nabçon,  Boivent,  I..  Caeiieb, 
Monniot,  Bréqeot. 

Seconds  altos  :  M""*  Dodon,  Nizet,  Glauseb,  Charpentier, 
Bosio,  Docreux,  Roolleau,  Camber,  Cosset,  Coquelet,  Ro- 

l'remiers  ténors  :  MM.  Luciani,  Ci.audin.  Mulot.  Sdjol, 
Bardtel,  Fbéville,  Toraili.e,  Tramasset,  Mai.lkt. 

Seconds  ténors  :  MM.  Mille,  Gelder.  Rodhier,  Labére, 
Briileert,  de  Lacsnay.  Aobéry,  Gautier. 

Premières  basses  :  MM.  Roqobs,  Perrin,  Boussagol,  Ver- 
naei.iie,  Derivis.  Manson,  Vals,  David,  Bersard. 

Secondes  basses  :  Acbert,  Narçon,  Betbéder,  Torniiï,  Rose, 
Besson,  Dklmont,  Marckisio,  Clamer. 

Ainsi  qu'on  l'a  vu  plus  haut',  depuis  1925,  les 
choristes  sont  supprimés  par  extinction.  Ceux  qui 
subsistent  s'adjoignent  aux  artistes  du  choeur  mixte 
de  Paris  pour  les  exécutions  comportant  une  partie 
chorale. 

Les  abonnés. 

Depuis  quelques  années,  la  physionomie  des  habi- 
tués de  la  Société  des  Concerts  s'est  sensiblement 
modifiée.  Nombre  de  vieux  abonnés  qui  furent, 
pour  la  plupart,  les  collaborateurs  de  la  première 
heure,  ont  disparu  successivement  en  léguant  à 
leurs  enfants,  suivant  une  coutume  constante,  les 
places  qu'ils  avaient  si  longtemps  occupées  avec  une 
fidélité  dont  on  ne  saurait  se  souvenir  sans  éprouver 
une  émotion  très  légitime. 

Ceux-là  étaient  restés  les  admirateurs  fervents, 
irréductibles  des  vieux  maîtres.  Haydn,  Mozart, 
Mendelssohn  et  Beethoven  étaient  les  dieux  dont  ils 
voulaient  réentendre  toujours  et  quand  même  les 
immortelles  inspirations. 

Nous  les  revoyons  encore,  têtes  blanches,  comme 
emplies  déjà  de  visions  d'au  delà,  écoutant  les  yeux 
clos,  en  un  recueillement  si  profond  qu'on  eût  pu 
croire,  à  ces  moments-là,  qu'il  se  célébrait  quelque 
divin  mystère.  Malheur  à  l'imprudent  qui  eût,  volon- 
tairement ou  non,  troublé  ou  détourné  l'attention, 
ne  fût-ce  qu'en  développant  trop  brusquement  son 
programme.  Aussitôt,  toules  ces  paupières  closes  se 
soulevaient,  et  on  foudroyait  l'imprudent  de  regards 
courroucés.  Malheur  aussi  au  comité  qui  s'avisait 
d'introduire,  même  timidement,  dans  ses  program- 
mes une  œuvre  un  peu  plus  hardie.  Alors  c'était  une 
pluie  de  réclamations  qui  lui  parvenait,  une  avalan- 
che de  lettres,  les  unes  empreintes  d'un  noble  cour- 
roux, les  autres  épigrammaliques. 

Quel  était  donc  l'imposteur  qui  avait  osé  franchir 


1710 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


les  portes  du  temple  du  dieu  Beethoven,  sans  ôter 
ses  sandales? 

Le  public  actuel  n'a  plus,  il  faut  le  constater  avec 
tristesse,  ce  recueillement  qui  donnait  aux  séances 
de  l'illustre  Société  un  caractère  tout  particulière- 
ment impressionnant. 

Alors  que,  jadis,  les  concerts  commençaient  et  se 
terminaient  au  milieu  d'un  silence  religieux,  aujour- 
d'hui, nombre  d'abonnés  prennent  possession  de 
leurs  places  au  milieu  de  l'exécution  d'une  sympho- 
nie. C'est  là  une  attitude  vraiment  déplorable,  et 
nous  savons  plus  d'un  vieux  sociétaire,  de  ceux-là 
qui  restent,  en  leur  profond  attachement  à  l'illustre 
compagnie,  les  gardiens  vigilants  et  rigides  de  ses 
traditions  et  de  sa  forte  discipline,  qui  se  montre 
profondément  attristé  de  ces  mœurs  nouvelles. 

Nous  ne  saurions  terminer  cette  étude  sur  la  So- 
ciété des  Concerts  sans  nous  incliner  pieusement 
devant  la  mémoire  de  ceux-là  qui,  après  l'avoir  ser- 
vie dévotieusement  comme  une  petite  patrie,  sont 
entrés  dans  la  gloire  éternelle  en  défendant,  à  coups 
d'héroïsme,  cette  grande  patrie  qu'est  la  France.  Ces 
vaillants  avaient  pour  noms  :  Tramasset  (chant)  et 
Leclercq  (hautbois),  sociétaires;  Batlleux  (cor), 
Bineaux  (clarinette),  Girard  (timbale,  clavier),  Jenk 
(violon),  Térisse  (chant),  aspirants.  Leurs  noms  res- 
teront écrits  en  caractères  indélébiles  au  fronton  de 
cette  grande  institution  qu'est  la  Société  des  Concerts 
ihi  Ocmservatfftre. 


CONCERTS   FONDÉS  DEPUIS   1823 

La  plupart  des  entreprises  musicales  qui  s'inspirè- 
rent de  la  Société  des  Concerts  n'eurent  qu'une  durée 
trop  éphémère  pour  que  nous  nous  imposions  d'en 
retracer  l'existence  par  le  détail.  Nous  nous  bornons 
donc  à  mentionner  les  Concerts  Historiques  créés  par 
Fétis  le  8  avril  1832,  et  qui  disparurent  après  leur 
4e  séance,  le  2  avril  1833;  —  le  Gymnase  musical 
fondé  par  Tilmant  aîné  en  1854;  l'Union  musicale 
due  à  l'initiative  de  Manera.  Cette  société,  qui  se 
faisait  entendre  dans  la  salle  du  Casino  Paganini,  fut 
dissoute  en  1854.  Félicien  David,  Berlioz  et  Seghers 
la  dirigèrent  successivement.  Mais,  après  ce  rapide 
souvenir  donné  à  des  initiatives  qui,  pour  n'avoir  pas 
été  des  plus  heureuses,  n'en  méritent  pas  moins  la 
reconnaissance  de  tous  ceux  qui,  de  génération  en 
génération,  se  sont  donné  la  noble  mission  de  révéler 
à  la  foule  le  génie  musical  de  tous  les  lemps,  voici 
qu'une  belle  et  généreuse  figure  apparaît.  Nous 
avons  nommé  Jules  Pasdeloup.  Jules  Pasdeloup  eut 
ce  rare  mérite  de  comprendre  qu'à  côté  de  l'art  en 
quelque  sorte  officiel  personnifié  par  la  Société  des 
Concerts,  mais  réservé,  par  lui-même,  à  trop  peu 
d'élus,  il  y  avait  une  place  très  enviable  pour  une 
institution  pouvant  ouvrir  plus  largement  ses  portes 
et  donner  la  volée  aux  chefs-d'œuvre  jusqu'ici  con- 
finés dans  la  salle  unique,  mais  malheureusement 
trop  exiguë,  du  Conservatoire. 

Né  à  Paris  le  15  septembre  1810,  Pasdeloup  (Jules- 
Etienne  i  lit  de  brillantes  études  au  Conservatoire. 
Après  avoir  remporté  un  premier  prix  de  solfège  et 
un  premier  prix  de  piano,  il  y  fut,  tour  à  tour,  répé- 
titeur d'une  classe  de  solfège,  professeur  de  clavier 
et  professeur  agrégé  de  la  classe  d'ensemble  vocal. 

Mais  ces  fonctions  ne  suffisaient  pas  à  satisfaire 
sa  généreuse  ambition,  son  ardeur  de  prosélytisme, 


son  apostolat  d'art.  Convertissant  son  rêve  en  une 
vibrante  réalité,  il  fonda  en  1851  la  Société  des  jeunes 
artistes  du  Conservatoire.  Dès  la  première  séance,  qui 
fut  donnée  au  mois  de  février  dans  la  salle  Herz,  il 
eut  la  joie  de  constater  qu'il  était  suivi  et  soutenu 
par  toute  une  élite  de  dilleltantes  empressés  à  ap- 
plaudir sa  brillante  phalange  d'artistes,  animée 
d'une  foi  et  d'une  fougue  toutes  juvéniles. 

Bientôt,  la  salle  Herz  ne  suffisant  plus  à  contenir 
ce  public  attentif,  Pasdeloup  loua  le  Cirque  d'Hiver, 
et,  dès  ce  jour,  se  trouvèrent  créés  ces  Concerts  popu- 
laires de  musique  classique  qui  furent  le  point  de 
départ  d'entreprises  similaires,  fondées  depuis  dans 
la  plupart  des  grande  villes  de  France. 

Le  premier  concert  eut  lieu  le  dimanche  27  octo- 
bre 1861. 

Les  prix  des  places  étaient  fixés  à  5  fr.,  2  fr.  50, 
1  fr.  2o  et  0  fr.  75  centimes. 

Le  programme  comportait  : 

1°  Ouverture  d'Obéron  (Weber);  2°  Symphonie  Pas- 
torale (Beethoven);  3°  Concerto  de  violon  (Mendels- 
sohn),  exécuté  par  Alard;  -4°  Hymne  (Haydn);  5°  Ou- 
verture du  Jeune  Henri  (MéiiulI. 

Dès  le  premier  concert,  le  succès  fut  décisif,  et  l'a- 
venir de  l'entreprise  assuré. 

A  côté  des  grands  classiques,  Pasdeloup  eut  le 
souci  de  réserver  une  place  assez  importante  aux 
compositeurs  vivants,  dont  il  contribua  vaillamment 
à  établir  la  notoriété.  C'est  ainsi  qu'après  avoir 
inscrit  sur  ses  programmes  les  noms  de  J.  Raff, 
Rubinstein,  Tsciiaïkowsky.  Grieg,  etc.,  il  y  introduisit 
courageusement  celui  de  Richard  Wagner,  témoi- 
gnant par  là  d'un  éclectisme  qui  n'alla  pas  sans 
avoir  à  soutenir  de  rudes  assauts  contre  ceux  que  le 
nom  du  maitre  allemand  avaiL,  encore  à  cette 
époque-là,  le  don  d'exaspérer. 

Par  sn  noble  et  belle  ardeur,  par  sa  conviction 
inébranlable,  par  sa  foi  artistique.  Pasdeloup  sut 
forcer  l'admiration.  L'art  musical  français  lui  doit, 
à  ce  titre,  une  place  à  part  parmi  ceux  qui  l'ont 
le  plus  fidèlement  servi. 

Kn  1866,  tout  en  continuant  ses  séances  du  Cirque 
d'Hiver,  il  fonda  une  entreprise  de  concerts  qui 
eurent  lieu  trois  fois  par  semaine,  dans  la  salle  de 
l'Athénée,  rue  Scribe.  Mais,  malgré  l'attrait  des 
programmes,  où  voisinaient,  à  côté  des  grands  clas- 
siques, les  noms  de  maitres  tels  que  Gounod, Masse- 
net,  Bizet,  Lalo,  etc.,  il  dut  renoncer  à  cette  nouvelle 
tentative,  qui  fut  marquée,  sans  qu'on  en  puisse 
déterminer  exactement  les  causes,  d'une  certaine 
froideur. 

Enfin,  en  1868,  Pasdeloup  prit  la  direction  du 
Théâtre  Lyrique.  Mais  il  ne  fut  pas  plus  heureux, car 
il  dut,  moins  de  deux  ans  après,  renoncer  à  cette 
fonction. 

Ce  n'est  pas  sans  tristesse  qu'il  nous  faut  mention- 
ner que  l'homme  dont  toute  la  vie,  toute  l'intelli- 
gence, avaient  été  consacrées  au  triomphe  crime 
grande  et  noble  idée,  ne  dut  qu'à  la  généreuse  ini- 
tiative de  Colonne  et  de  Fauré,  qui  organisèrent  un 
concert  à  son  profit,  de  ne  pas  terminer  ses  jours 
dans  le  dénuement  le  plus  complet. 

11  mourut  à  Fontainebleau  le  13  août  1887. 

Association  îles  Concerts 


Lamoureux  (Charles)  est.  né  à  Bordeaux  le  38  sep- 
tembre 1834.  Admis  au  Conservatoire  en   1880,  il  y 

obtint,  en  1854,  le  premier  prix  de  violon.  Peu  après, 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS 


il  entra  à  l'orchestre  de  l'Opéra.  Mais,  ni  ses  nouvelles 
fonctions  ni  les  études  qu'il  poursuivait  sous  la  di- 
rection de  Tolbecque,  de  Lerorne  et  de  Chauvf.t, 
pour  l'harmonie,  la  fugue,  le  contrepoint  et  la  haute 
composition,  ne  suffisaient  à  satisfaire  son  infati- 
gable activité  et  à  lui  imposer  de  rester  dans  le 
rang,  comme  collaborateur  anonyme  de  la  pensée 
des  maîtres. 

En  effet,  bientôt  il  se  signala  à  l'attention  du  monde 
musical  en  fondant  une  société  de  quatuors,  et  sur- 
tout en  organisant  les  célèbres  auditions  de  l'Har- 
monie S'acn^données  au  Cirque  des  Champ<-EI\  sées. 
Il  y  fit  entendre  pour  la  première  fois,  en  1674  Bl 
187:,,  le  Messie,  Judas  Macchabée,  Lu  Passion,  ainsi 
qu'un  grand  nombre  d'œuvres  nouvelles,  notam- 
ment :  Eve  de  Massenet  et  Gallia  de  Gounod. 

Nommé  chef  d'orchestre  de  l'Opéra-Gomique  en 
1875,  il  résigna  ses  fonctions  en  1877  pour  prendre  le 
bâton  de  chef  d'orchestre  de  l'Opéra. 

Ce  fut  en  1881  qu'il  inaugura  les  concerts  qui  pri- 
rent plus  tard,  en  1897.  le  titre  définitif  d'Association 
des  Concerts  Lamoureux. 

Jusque-là,  toutes  les  manifestations  musicales 
qu'il  organisa  et  qu'il  dirigea  furent  donc  dues  exclu- 
sivement à  son  initiative  personnelle.  Il  convient  de 
rappeler,  à  ce  sujet,  qu'il  fut  le  seul  organisateur  des 
représentations  de  Lohengrin  données  en  mai  1887 
à  l'Eden-Théàtre  et  de  Tristan,  en  octobre  1899,  au 
Nouveau-Théâtre. 

L'orchestre  Lamoureux  occupa  successivement, 
depuis  1881,  date  de  son  premier  concert,  les  salles 
suivantes  : 

Théâtre  du  Chàteau-d'Eau,  du  23  octobre  1X81  au 
3  avril  1885; 

Eden-Théàtre,  du  8  novembre  1885  au  8  avril  1887; 

Cirque  des  Champs-Elysées,  du  30  octobre  1887  au 
16  avril  1897; 

Même  loeal  (sous  le  titre  définitif  d'Association  des 
Concerts  Lamoureua  ,  du  14  novembre  1897  au  31  mars 
1899; 

Hetourau  Chàteau-d'Eau,  du  12  novembre  1899  au 
•23  mars  1900; 

Nouveau-Théâtre,  4  novembre  1900  au  13  avril  1900. 

Parmi  les  auditions  qui  eurent  le  plus  de  reten- 
tissement, il  faut  retenir  l'inoubliable  exécution  du 
premier  acte  de  Tristan  (théâtre  du  Chàteau-d'Eau, 
1884),  le  premier  acte  de  la  Walkyrie  (Théâtre  de 
l'Eden,  1886)  et  le  premier  acte  deBriseïs  de  Charrier 
(Cirque  des  Champs-Elysées,  1897). 

Notons  encore  que  Lamoureux  fit  connaître  au 
public  parisien  un  grand  nombre  de  compositeurs 
qui  ont  conquis  depuis  une  réputation  universelle. 
On  lui  doit  d'avoir  entendu  pour  la  première  fois, 
M"1"  Materna  el  Lilli  Lehmann,  ainsi  que  MM.  Va-, 
Dyck  et  Paderëwsky. 

Lamoureux  conduisit  pour  la  dernière  fois  Tristan 
le  16  décembre  1899,  et  son  dernier  concert  le  17.  Il 
mourut  quatre  jours  après. 

Par  son  indomptable  énergie,  par  son  esprit  d'ini- 
tiative, par  sa  profonde  connaissance  de  l'orchestre, 
par  son  sens  très  sûr  de  la  modernité,  Lamouhfi  x  a. 
plus  que  tout  autre  peut-être,  ouvert  libre  et  large 
la  voie  dans  laquelle  la  musique  moderne  s'est  si 
hardiment  engagée.  Ni  les  sarcasmes,  ni  les  outrages 
qu'on  lui  jeta  à  la  face,  ni  les  obstacles  de  toutes 
sortes  qu'on  se  plut  à  semer  sur  sa  route,  ne  le  dé- 
tournèrent un  seul  instant  du  but  qu'il  eut  la  noble 
ambition  d'atteindre.  El  c'est  bien  à  sa  volonté  irré- 
ductible, à  sa  foi  inébranlable,  que  la  France  doit 


d'avoir  compris,  souvent  malgré  elle,  toute  l'immen- 
sité de  ce  génie  qui  a  laissé  au  monde  l'oeuvre  colos- 
sal qui  va  de  Rienzi  a  la  Tétralogie.  Nul  mieux  que 
M.  Camille  Chevillard,  son  gendre,  ne  pouvait  être 
désigné  pour  recueillir  la  lourde  tâche  sous  laquelle 
Lamoureux  ne  faiblit  pas  un  seul  instant.  Déjà,  en 
1897,  Camille  Chevillard  avait  suppléé  Lamoureux, 
alors  que  celui-ci,  remplissant  des  engagements  pris, 
faisait  une  tournée  triomphale  à  l'étranger.  Tout  de 
suite,  il  s'avéra,  par  sa  haute  compréhension  des 
Ecoles  et  des  styles,  par  son  sang-froid,  par  la  soli- 
dité de  son  bras  sûr  et  précis,  comme  un  des  pre- 
miers chefs  d'orchestre  de  notre  époque. 

Respectueux  de  la  pensée  de  celui  dont  il  recueillit 
l'héritage,  il  continua,  en  l'élargissant  encore,  de 
marcher  dans  la  voie  que  Lamoureux  avait  ouverte. 
Nous  lui  devons,  notamment,  d'avoir  initié  le  public 
parisien  à  une  grande  partie  des  œuvres  de  Liszt, 
dont  il  a  fait  jouer  la  Faust-Symphonie  pour  la  pre- 
mière fois  en  1900,  le  Rheingold,  le  3e  acte  de  Sieg- 
fried, le  3"  acte  de  Gotterdammerung ,  plus  de  cent 
cinquante  œuvres  de  compositeurs  français,  et  enfin 
de  nous  avoir,  en  quelque  sorte,  révélé  le  génie  pro- 
fondément musical  et  très  personnel  de  l'Ecole  Busse 
moderne. 

Cette  courte  étude  consacrée  aux  Concerts  Lamou- 
reux ayant  été  écrite  en  1914,  quelques  mois  avant 
la  guerre,  nous  n'avions  pas  cru  devoir  l'élargir  par 
des  notes  biographiques  consacrées  à  Camille  Che- 
villard. Elles  s'imposent  aujourd'hui,  par  suite  de  la 
disparition  de  ce  grand  et  pur  artiste,  survenue  le 
29  mai  1923.  Ajoutons  que,  depuis  1920,  il  s'était 
adjoint  comme  collaborateur,  M.  Paul  Paray,  grand 
prix  de  Home  et  »  chef  d'orchestre  de  premier  ordre  », 
ainsi  que  Camille  Chevillard  avait  tenu  à  le  préciser, 
dans  une  note  qu'il  avait  bien  voulu  m'adresser  quel- 
ques mois  avant  sa  mort. 

Camille  Chevillard  était  né  à  Paris  le  14  octobre 
1839.  Tout  contribua  à  l'heureux  développement  de 
ses  aptitudes  musicales,  son  père,  Alexandre  Chevil- 
lard, virtuose  de  premier  ordre  et  professeur  au 
Conservatoire,  s'étant  institué  le  maître  attentif  de 
cette  jeune  intelligence  si  richement  douée  pour 
l'art.  Au  Conservatoire,  Camille  Chevillard  fut,  pour 
le  piano,  un  des  plus  remarquables  élèves  de  Ma- 
thias.  Ses  œuvres  comprennent  :  Quintette  pour  cordes 
et  piano,  Quatuor  pour  cordes  et  piano,  Quatuor  pour 
cordes,  Trio  pour  violon,  violoncelle  et  piano,  So- 
nate pour  piano  et  violon.  Sonate  pour  piano  et  vio- 
loncelle, et  encore  ditlV-renles  œuvres  pour  piano  et 
violon,  piano  et  violoncelle  :  Thèmes  et  vnridtions, 
Etude  chromatique  pour  piano,  Ballade  si/mphouique, 
Le  chêne  et  le  roseau  (poème  symptamierué), Fantaisie 
sijmphonique,  auxquelles  s'ajoutent  nombre  de  mé- 
lodies pour  chant  et  piano. 

Toutes  ces  œuvres  portent  la  marque  d'un  tempé- 
rament d'autant  plus  personnel,  que  Camille  Chevil- 
lard se  forma  absolument  seul,  échappant,  ainsi, 
à  l'influence  librement  acceptée  ou  subie  d'un  maître. 
Si  Camille  Chevillard  fut  un  chef  d'orchestre  hors 
de  pair,  il  fut  aussi  «  le  chef  »  dans  toute  l'acception 
du  mot.  Très  absolu,  il  entendait,  pour  la  plus  grande 
gloire  de  son  art,  que  ses  conseils  fussent  acceptés 
sans  réplique.  Mais  la  sévérité  avec  laquelle  il  pré- 
sidait aux  répétitions  était  plus  apparente  que  réelle. 
Dès  qu'il  avait  quitté  le  bâton, —  nous  allions  écrire  : 
le  sceptre,  —  il  redevenait  aussitôt  l'artiste  sensible 
et  généreux  dont  le  cœur  s'ouvrait  largement  à 
toutes  les  infortunes.  Nous  nous  faisons  un  pieux 


'.NCYCLOPÊDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


devoir  de  rendre  ce  dernier  homme 
qui  restera  chère  à  tous  ceux  qui  v 
que  l'art  soit  fait  de  probité  et  de 


une  mémoire 
it,  avant  tout, 

rite. 


Association  artistique  «les  Concerts  Colonne. 

La  création  des  Concerts  Colonne  remonte  au 
2  mars  1873. 

Voici  en  quels  termes  s'exprimait  le  distingué  mu- 
sicographe Charles  Maluerbe,  en  une  excellente  no- 
tice publiée  au  mois  de  mars  1903  : 

«  C'était  en  1873.  Un  jeune  éditeur  nommé  Georges 
Hartmann  avait,  peu  d'années  auparavant,  ouvert 
sur  le  boulevard  de  la  Madeleine  un  petit  magasin 
de  musique  qui  ne  devait  pas  tarder  à  s'agrandir  et 
à  prospérer...  Avide  de  formules  nouvelles,  ou  plu- 
tôt las  de  toute  formule,  il  aspirait  à  marcher  de  l'a- 
vant, et  comme  il  possédait  cette  force  mystérieuse, 
faite  de  charme  et  d'autorité,  qui  attire  et  qui  im- 


pose, il  avait  promptement  réussi  à  grouper  autour 
de  lui  presque  tous,  disons  même  tous  les  talents  de 
la  jeune  école. 

«  Un  jour  vint  où  il  ne  suffit  plus  à  ce  hardi  no- 
vateur de  vendre  du  papier  noirci  de  notes.  Il  vou- 
lut produire  au  dehors,  les  œuvres  que  ce  papier  re- 
présentait, donner  la  vie  à  ces  notes,  répandre  enfin 
dans  la  foule  le  nom  de  tant  de  jeunes  compositeurs 
qu'elle  avait  trop  longtemps  ignorés. 

«  Alors  il  loua,  pour  le  dimanche,  la  salle  de  10- 
déon;  il  recruta  nn  orchestre  dont  il  confia  la  direc- 
tion à  Edouard  Colonne,  et,  bravement,  plus  riche 
d'espoir  que  d'argent,  il  ouvrit,  le  2  mars  1873,  le 
Concert  national,  en  donnant  une  première  matinée 
d'orchestre. 

«  Telle  est  l'origine  de  l'Association  artistique.  » 

Nous  croyons  intéressant  de  donner  ici  le  pro- 
gramme de  ce  premier  concert  : 


PREMIERE    ANNEE 


1er  concert  national 

DIMANCHE  2   MARS    1873 

AVEC    LE   CONCOURS    DE 

Mm0  P.  VIARDOT  et  de  M.  C.  SAINT-SAENS 


PROGKAMM E 

1.  Symphonie  Romaine  (Op.  90) MEXDELSSOHN. 

2.  Hêverie SCHUMANN. 

3.  Concerto,  en  sol  mineur C.   SAINT-SAENS. 

Exécuté  par  l'auteur, 
i.  Jeux  d'Enfants,  petite  suite  d'orchestre G.  BIZET. 

A.  Trompe/le  et  Tambour,  marche. 

B.  La  Poupée,  berceuse. 

C.  La  Toupie,  impromptu. 

1).   Petit  mari,  petite  femme,  duo. 
E.  Le  Bal,  galop. 

5.  Le  Roi  des  Aulnes,  ballade F.   SCHUBERT. 

Chantée  par  !!■'  P.  Viardot. 
Accompagnée  par  M.  C.  Saint-Saens. 

6.  Carnaval.  —  N°  4  de  la  suite  d'orchestre E.   GUIRAUB. 

L'orchestre  sera  dirigé  par  M.  E.  Colonne. 


Si  cetle  première  tentative  attira  un  public  nom- 
breux et  enthousiaste,  elle  fut  moins  heureuse  au 
point  de  vue  des  recettes,  la  modicité  du  prix  des 
places  ne  permettant  pas  de  couvrir  les  frais  de  l'en- 
treprise. Colonne  se  vit  contraint  de  cesser  les  ma- 
nifestations du  Concert  national,  après  la  sixième 
audition. 

Les  compositeurs  et  les  dilettantes  eurent  à  le  re- 
gretter, car,  en  ce  laps  de  temps  si  court,  il  avait  fait 
exécuter,  notamment  :  la  Fantaisie  espagnole  de 
Lalo,  les  Scènes  pittoresques  et  Marie  Magdeleine 
(lrc  audition)  de  Massenet  et  Rédemption  de  César 
Franck. 

Mme  Viardot  et  Saint-Saëns  se  firent  entendre  au 
premier  concert. 

Mais  Colonne,  qui  avait  résigné  ses  fondions  de 
chef  d'orchestre  de  l'Opéra  pour  se  donner  tout 
entier  au  Concert  national,  n'était  pas  homme  à 
accepter  ce  premier  échec  sans  faire  appel  à  son 
indomptable  énergie.  Son  tempérament  généreuse- 
ment combatif,  la  conscience  très  nelte  qu'il  avait 


de  sa  valeur,  son  désir  de  servir  la  cause  des  jeunes 
compositeurs,  l'incitèrent  à  poursuivre  la  lâche  com- 
mencée. 

Un  an  après  la  disparition  du  Coniert  national,  i! 
fondait  l'Association  artistique,  qu'il  installa  au  Chà- 
telet  et  qui,  d'année  en  année,  de  victoires  en  vic- 
toires, est  devenue  cette  magnifique  institution  sym- 
phonique  dont  la  renommée  a  conquis  le  monde. 

Il  est  permis  d'avancer  que  plus  d'un  compositeur 
n'aurait  pas  connu  la  notoriété,  s'il  n'avait  reçu  ;i 
l'Association  artistique  l'accueil  le  [dus  large  et  le 
plus  empressé. 

C'est  faire  acte  de  justice  et  de  gratitude  de  saluer 
ici  la  mémoire  d'un  homme  qui  servit  avec  un  zèle 
d'apôtre  la  cause  de  la  musique  française. 

Colonne  (Judas,  dit  Jules,  puis  Kdouard)  est  né  à 
Bordeaux  le  23  juillet  1838. 

Tout  jeune,  il  entra  au  Conservatoire,  où  il  eut 
comme  maîtres  Cirard  et  Saizay  pour  le  violon, 
Elwart  pour  l'harmonie  et  Ambroise  Thomas  poul- 
ie contrepoint.  11  obtenait,  en  1858,  le  premier  prix 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LA  SOCIÉTÉ  DES  CONCERTS    371 


d'harmonie,  el  en  1863  le  premier  prix  de  violon. 
Admis  à  l'orchestre  de  l'Opéra  en  qualité  de  pre- 
mier violon,  il  fut  désigné  par  la  suite  pour  remplir 
la  fonction  de  chef  d'orchestre,  fonction  qu'il  aban- 
donna en  1871,  ainsi  que  nous  l'avons  mentionné 
précédemment. 

Malgré  le  labeur  énorme  que  lui  imposaient  les 
concerts  dominicaux,  Colonne  reprit,  de  1892  à  1893, 
le  bâton  de  chef  d'orchestre  de  l'Opéra.  Il  y  monta 
Salammbô,  Samson  et  Dalila  et  la  Walkyrie. 

En  1897,  il  instituait,  au  Nouveau  Théâtre,  les  mati- 
nées du  jeudi.  II  y  donna  place  sur  ses  programmes 
aux  chefs-d'œuvre  de  tous  les  temps  et  de  toutes  les 
écoles. 

Enfin,  il  fil  encore  une  belle  et  productive  propa- 
gande en  faveur  de  la  musique  française,  en  organi- 
sant, avec  son  orchestre,  de  nombreux  concerts  dans 
les  grandes  villes  de  France  et  de  l'étranger. 

Mais  ce  qu'il  importe  de  retenir,  c'est  le  culte  tout 
particulier  qu'il  avait  voué  à  Berlioz,  dont  il  imposa 
le  génie  avec  un  courage  et  une  ténacité  qui  reçu- 
rent leur  juste  récompense.  On  sait  que  /•/  Damna- 
tion  de  Fawt,  remarquablement  exécutée,  rallie  tou- 
jours au  Chàtelet,  les  admirateurs  fervents  du  maître. 
Colonne,  qui,  depuis  1909,  s'était  vu  contraint,  par 
suite  de  son  état  de  santé,  d'abandonner  le  bâton,  en 
confiant  l'intérimat  à  M.  Gabriel  Pierné,  est  mort  le 
lundi  de  Pâques,  26  mars  1910,  à  six  heures  du  soir. 
Depuis  1910,  M.  Gabriel  Pierné  préside  aux  desti- 
nées de  l'Association  artistique.  Continuateur  respec- 
tueux de  la  pensée  d'Edouard  Colonne,  le  maître, 
dit  une  notice  de  MM.  Charles  Malherbe  el  Km  chi  i 
parue  en  mars  1923,  «  se  montre  accueillant  h  tous 
les  talents  qui  lui  semblent  dignes  du  Chàtelet.  On 
peut  dire,  en  vérité,  que  tous  les  musiciens  notoires 
y  furent  représentés,  et  non  seulement  ceux-là,  mais 
nombre  de  jeunes.  » 

Par  là,  ainsi  qu'Edouard  Colonne,  M.  Gabriel 
Pierné  a  grandement  mérité  la  reconnaissance  de 
Ions  ceux  qui  aspirent  à  voir  l'école  musicale  fran- 
çaise conserver  dans  le  inonde  la  réputation  que 
toutes  les  nations  se  plaisent  à  lui  reconnaître. 

L'Association  artistique  ou,  plus  exactement,  l'As- 
sociation  artistique  des  Concerts  Colonne,  ainsi  que  le 
mentionnent  maintenant  les  affiches  et  les  program- 
mes, est,  à  l'exemple  de  la  Société  des  concerts  du 
Conservatoire,  régie  par  un  comité  composé  de  dix 
membres  dont  le  chef  d'orchestre  est  de  droit  prési- 
dent. 
L'orchestre  est  ainsi  composé  : 


Premiers  violon? 20 

Seconds  violons 17 

Altos 13 

Violoncelles 12 

l'."llllv|M-<r~ 16 

Flûtes 4 

Hautbois 3 

i:l;iiilH'llcs 3 

liaisons 4 

Cors 4 

Trompetle*  . 5 

Trombones i 

Tubas 2 

Batterie 5 

Total 174~ 


Ajoutons  enfin  que,  pour  les  concerts  comportant 
des  œuvres  chorales,  l'Association  artistique  s'adjoint 
environ  cent  dix  chanteurs. 

Nous  ne  saurions  négliger  de  mentionner  ici  les 
Copyright  by  Librairie  Delagrave,  1930. 


concerts  qui  eurent  lieu  à  l'Opéra,  de  189o  à  1897, 
grâce  à  l'heureuse  et  intelligente  initiative  de  ses 
éminents  directeurs,  MM.  Bertrand  et  Gailiiard. 

Déjà,  des  tentatives,  qui  n'eurent  malheureuse- 
ment pas  de  lendemain,  avaient  été  faites  en  1869 
par  Emile  Perrin,  en  1870  par  les  artistes  de  l'Opéra, 
et  en  1880  par  Vaucorbeil. 

Avec  MM.  Bertrand  et  Gailhard,  ces  concerts  ob- 
tinrent tout  de  suite  un  grand  succès.  Le  bâton  de 
chef  d'orchestre,  confié  à  MM.  Paul  Vidal  et  Georges 
Marty,  était  une  garantie  de  la  supériorité  des  exé- 
cutions. Disons  encore  que  nombre  d'auteurs  furent 
appelés  à  diriger  leurs  œuvres,  ce  qui,  évidemment, 
offrait  un  attrait  de  plus  au  public. 

La  place  la  plus  large  fut  tout  de  suite  attribuée 
aux  jeunes  compositeurs,  et  c'est  à  M.  Vincent  d'Indy 
que  fut  réservé  l'honneur  d'inaugurer  le  premier 
concert,  avec  des  fragments  de  Fer\  «ni. 

Parmi  les  œuvres  exécutées  au  cours  de  ces  deux 
années  avec  des  fortunes  diverses,  il  y  a  lieu  de  re- 
tenir : 

•3e  Symphonie,  de  M.  Widor;  Saint  Julien  l'Hospi- 
talier (fragments),  de  M.  Camille  Erlanger;  le  Duc 
de  Ferrure  (fragments),  de  Georges  Marty;  la  Nuit 
de  Voél,  de  Gabriel  Pierné;  VEnvoi  de  Rome,  de 
M.  Henri  Busser;  Sainte  Cécile,  de-M.  Charles  Le- 
i'ebvre;  la  Belle  au  bois  dormant,  de  M.  Georges  Hle; 
la  Rapsodie  cambodgienne,  de  Bourgault-Ducoudray; 
qui  fut,  avec  la  Nuit  de  Noël  de  M.  Gabriel  Pierné,  le 
grand  succès  de  la  saison;  le  Requiem,  de  .M.  Alfred 
Bruneau;  Saint  Georges,  de  M.  Paul  Vidal;  la  Sym- 
phonie,de  M.Paul  Duras;  Vénus  et  Adonis,  de  M.  Xa- 
vier Leroux;  Circé,  de  M.  Théodore  bruois;  la  Mer. 
de  Victorien  Joncières;  les  Lupercales,  de  M.  André 
Wormser. 

Mais,  malgré  la  supériorité  des  exécutions,  le  pu- 
blic se  détourna  peu  à  peu  des  concerts  de  l'Opéra, 
et  force  fut  de  les  supprimer  dès  la  fin  de  1897,  afin 
d'éviter  un  déficit  qui  menaçait  de  devenir,  a-t-on 
prétendu,  une  véritable  catastrophe  financière. 

On  ne  s'explique  guère  autrement  que  par  les  di- 
mensions de  la  salle  de  l'Opéra,  trop  vaste  pour  des 
concerts  purement  symphoniques,  les  raisons  de  cet 
abandon  de  la  part  d'un  public  qui  s'était  montré 
très  empressé  au  début.  On  ne  saurait,  en  tout  cas, 
rendre  responsables  de  cet  état  de  choses  ni  les  an- 
ciens directeurs  de  l'Académie  nationale,  ni  les  chefs 
d'orchestre,  dont  le  talent  fut  toujours  à  la  hauteur 
.le  la  mission  qui  leur  était  confiée. 

Rappelons  encore  les  tentatives  intéressantes  fai- 
tes par  M.  Edouard  Broustet  au  Chàteau-d'Eau  et 
par  Benjamin  Godard  au  Cirque  d'Hiver,  et  accor- 
dons un  souvenir  reconnaissant  à  M.  Eugène  d'Har- 
col'rt  qui,  sous  le  titre  de  Concerts  éclectiques  popu- 
laires, donna,  de  1902  à  1906,  des  séances  fort  inté- 
ressantes et  remarquablement  dirigées. 

Nous  signalerons  également  la  fondation,  avant  la 
guerre,  par  M.  Pierre  Moxtei/x,  de  la  Société  des  Con- 
certs  populaires  de  Paris  (Concerts  Montecx);  cette 
association  produisit,  au  Casino  de  Paris,  de  remar- 
quables œuvres  nouvelles,  notamment  en  1914,  où 
l'on  entendit,  pour  la  première  fois  au  concert,  Pe- 
trouchka  et  le  Sacre  du  Printemps,  d-.'  Strawinsky. 

Concerts  Straram. 

Les  concerts  organisés  par  M.  Wallher  Straram 
commencèrent  à  fonctionner,  en  janvier  1926,  salle 
Gaveau,  où  ils  continuèrent  jusqu'au  19  mai  1927. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATO/RE 


Depuis  cette  date,  les  Concerts  Straram  eurent  lieu 
dans  la  grande  salle  du  théâtre  des  Champs-Elysées, 
où,  actuellement,  ils  participent  au  Cycle  Wagner. 
Au  cours  de  ces  concerts,  M.  Straram  a  abordé, 
non  seulement  le  répertoire  classique,  mais  encore 
le  répertoire  d'avant-garde.  En  môme  temps,  il  fai- 
sait entendre  des  œuvres  peu  connues  ou  délaissées 
des  xvm8  et  xix6  siècles,  dont  plusieurs  étaient  écrites 
pour  orchestre  de  chambre.  Le  programme  du  pre 
mier  concert  Straram,  qui  eut  lieu  le  21  janvier  1926 
comportait  :  l'ouverture  d'Iphigénie  en  Aulide,  de 
Gluck;  la  Symphonie  en  sol  mineur,  n"  40,  de  Mozart 
l'Arche  de  Noé,  de  V.  Rieti  (lre  audition);  Images 
(Mondes  de  printemps,  Gigue,  Iberia),  de  Cl.  De 
bussy.  Le  nombre  des  musiciens  engagés  pour  ces 
séances  est,  en  principe,  de  quatre-vingts  à  quatre 
vingt-cinq  et  quelquefois  davantage,  suivant  l'im 
portance  des  œuvres  interprétées.  Quelquefois  aussi 
il  se  restreint  à  vingt-cinq  ou  quarante,  lorsqu'il  s'a 
git  de  compositions  écrites  pour  orchestre  réduit. 

Depuis  1926,  les  Concerts  Straram  ont  repris,  à 
côté  des  œuvres  du  répertoire  classique,  nombre  de 
compositions  qui  figuraient  rarement  sur  les  pro- 
grammes ou  qui,  même,  n'y  figuraient  pas.  Citons 
des  pièces  de  Monteverdi,  de  Purcell,  des  concertos 
de  Vivaldi,  de  Bach  (Concertos  brandebourg eois), 
d'HAENDEL,  de  Mozart,  de  Boccherini,  des  concerts 
de  Rameau;  dans  le  domaine  de  la  symphonie  pro- 
prement dite,  M.  Walther  Straram  a  fait  exécuter 
nombre  de  compositions  peu  ou  point  jouées,  sym- 
phonies de  Stamitz,  d'HAYDN,de  Mozart,  de  Schubert 
(dont  la  symphonie  n»  4),  de  Schumann  (dont  la  sym- 
phonie rhénane),  de  Liszt,  de  Brahms,  etc.  11  a  donné 
aussi  les  ouvertures  d'Idoménée,  de  Mozart;  d'Eu- 
phrosine,  de  Méhul;  de  Rosemonde,  de  Schubert;  de 
Geneviève,  de  Schomann,  etc. 

Parmi  les  auteurs  appartenant  aux  jeunes  écoles 
contemporaines,  nous  insisterons  surtout  sur  ceux 
dont  les  œuvres  parurent  en  première  audition, 
et  nous  citerons  les  noms  de  :  MM.  A.  Roussel, 
Ferroud,  Hon'egger,  Samazeuilh,  Delvincourt,  R. 
Strauss,  Roland  Manuel,  Ravel,  Malipiero,  Schœn- 

BERG,  A.  DUCASSE,  FI.  ScHMITT,  S.  LAZZARI,  GrOVLEZ, 
liLOCH,     G.     MlGOT,     MlHALOVICI,      Hl.NDEJllTH,     MANGUE, 

Tansban,  Casadesds,  Rieti,  Levidis,  Beck,  Koechlin, 
Jarnach,  Le  Flem,  Larman.iat,  A.  Casella,  II.  Bis- 
ser, Benoist-Méchin,  D.  Lazaris,  Lazar,  J.  Rivier, 
Febvre-Longeray,  Spelman,  A.  Webern,  T.  Harsanyi, 
J.  Rodrigo,  de  Palau,  M.  Dupré,  Prokofieff,  etc. 

Orchestre  syiuplionique  de  Paris. 

L'Orchestre  symphonique  de  Paris  a  été  fondé  en 
mai  1928,  par  un  groupe  de  personnes  désireuses  de 
doter  Paris  d'un  nouvel  orchestre  s'attachant  à  faire 
connaître  à  la  fois  des  ceuvres  anciennes  et  des 
compositions  de  musiciens  modernes.  Comportanl 
un  comité  d'honneur,  un  comité  de  patronage  et  des 
abonnés,  cette  association  est  administrée  par  un  con- 
seil que  préside  M.  H.  Monnet.  Son  comité  de  direc- 
tion artistique   comprenait  à  l'origine,  trois  chefs 


d'orchestre  :  MM.  Ernest  Ansermet,  Alfred  Cortot  et 
Louis  Fourestier.  M.  Pierre  Monteux,  qui  avait  été 
sollicité  de  prendre  la  direction  de  VOrchestre  sym- 
phonique de  Paris  dès  sa  fondation,  fut  empêché  de 
se  rendre  à  cette  invitation  en  raison  d'engagements 
antérieurs,  mais  il  a  accepté  de  conduire  l'orchestre 
pendant  la  saison  de  printemps  de  1929,  le  pro- 
gramme de  l'association  comportant  deux  saisons 
de  concerts,  une  saison  d'hiver  et  une  saison  de  prin- 
temps. MM.  Anseumet  et  Fourestier  ont  assumé  la 
direction  artistique,  avec  M.  Alfred  Cortot,  de  mai 
1928  à  mai  1929.  M.  Cortot,  par  suite  de  ses  obliga- 
tions pianisliques,  ne  pouvant,  comme  il  le  désirait, 
consacrer  tout  son  temps  et  toute  son  activité  à  sa 
tâche  de  chef  d'orchestre,  a  insisté  auprès  de  M.  Pierre 
Monteux  pour  que  celui-ci  prit  la  direction  de  l'or- 
chestre à  partir  d'avril  1929.  Les  séances  ont  lieu 
actuellement  dans  la  grande  salle  Pleyel,  mais  les 
premiers  concerts  furent  donnés  dans  la  salle  du 
Théâtre  des  Champs-Elysées.  Voici  quel  fut  le  pro- 
gramme, divisé  en  deux  parties,  du  concert  d'inau- 
guration (19  octobre  1928)  de  VOrchestre  symphoni- 
que de  Pons  : 

Première  partie  :  s,ms  In  direction  île  M.  L.  Foeresi-ier. 

Ouverture  de  Honore,  i»! Beei 

1"  Symphonie  en  In,  op.  90  (italienne) Mendelssohn. 

Variations  siimphoniques  pour  piano  et  orchestre 

(M.  Co»Tor) G.  Fl'.ANCK. 


Concerto  traniebourgeois  a"  S  en  fa J.-S.  Bach. 

(Cembalo  conducteur,  M.  Cortot.) 

li:n/i>f.   moin  emciil  stiiiijihoniijnc  ineilit A.   Honneger. 

(Sous  la 'direction  de  SI.  n     lu         > 

Iberia,  Images  pour  orchestre,  n"  :' Cl.  Debussy. 

(Sous  la  direction  de  M.  G.  Ansbrmkt.) 

La  caractéristique  de  ce  nouvel  orchestre  consiste 
dans  le  régime  inauguré  pour  les  répétitions;  celles-ci 
ont  lieu,  en  effet,  tous  les  matins,  à  raison  de  six 
par  semaine.  On  obtient,  de  la  sorte,  des  exécutions 
dont  le  fini  et  la  mise  au  point  sont  irréprochables. 
L'association  comprend  quatre-vingt-deux  exécu- 
tants, mais  pas  de  choristes.  Les  concerts  ont  lieu 
deux  fois  par  mois  et  tous  les  dimanches,  dans  la 
grande  salle  Pleyel.  Divisée  en  deux  parties,  ainsi 
que  nous  l'avons  dit,  la  saison  annuelle  des  concerts 
s'étend  d'octobre  à  mai.  Nous  signalerons  particu- 
lièrement, à  l'actif  de  l'association,  les  deux  remar- 
quables concerts  du  gala  Igor  Sthawinsky  donnés 
aux  Champs-Elysées  les  16  et  17  novembre  1928,  où 
l'on  entendit,  en  première  audition  à  Paris,  la  Sym- 
phonie  op.  1  du  maître  russe,  son  Apollon  Musagète, 
son  cimiii  des  bateliers  su,-  h-  Volga,  la  première 
suite  de  l'Oiseau  de  feu  et  une  suite  de  Petrouchka,  le 
tout  sous  la  direction  de  Strawinsky  lui-même1. 
A.  VERNAELDE. 


article,  laissé   inachevé  par   le    regretté    Verimkuh  .  •'  e* 
S  par  les  soins  de  MM.  A    Tracol,  Bret,  Stri 
n0Us  prions  de  vouloir  bien  trouver  ici  l'expression  de  tous 
.,-,  iements.  (N.  D.  L.  D.) 


L'ORPHÉON 

Par  Henri  RADIGUER 

ri. un  nsi  ur  ai:  conservatoib:-: 


Le  mot  orphéon  est  devenu  d'un  usage  courant 
dans  la  langue  française,  au  milieu  du  xi\"  siècle, 
pour  désigner  les  sociétés  chorales,  alors  exclusive- 
ment composées  de  voix  d'hommes,  établies  dans 
un  grand  nombre  de  villes  et  de  bourgs,  pour  l'é- 
tude et  la  propagation  du  chant. 

Par  extension,  le  mot  servit  à  former  les  locutions  : 
mouvement  orphéonique,  monde  orphéonique,  lors- 
que, sous  le  second  Empire,  les  progrés  de  l'édu- 
cation et  les  progrès  de  la  facture  instrumentale  sus- 
citèrent lacréation'de  très  nombreuses  sociétés  popu- 
laires d'orchestres  formés,  soit-d'instruments  à  venl 
en  cuivre  (fanfares),  soit  d'instruments  à  vent  en 
bois  el  en  cuivre  (harmonies). 

Jadis  adopté  avec  ferveur,  en  France  et  hors  de 
France,  le  mot  orphéon  est  aujourd'hui  quelque  peu 
discrédité.  Si  un  reste  de  fidélité  traditionnelle  le 
maintient  encore  en  honneur  parmi  les  adeptes  des 
sociétés  musicales  populaires,  il  n'éveille  que  dé- 
dain ou  indill'érence  parmi  les  artistes  professionnels 
et  les  dilettantes.  La  Ville  de  Paris  elle-même,  dont 
une  institution  scolaire  municipale  fut  l'origine  de 
la  création  du  mot,  l'a  délaissé. 

Cependant,  on  ne  doit  pas  méconnaître  à  ce  point 
l'intérêt  de  celle  partie  de  l'histoire  musicale  fran- 
çaise, qui  se  résume  dans  le  mot  orphéon.  A  cette 
période  se  rattachent  la  reconnaissance  ofticielle  de 
la  musique,  comme  matière  d'enseignement  obliga- 
toire dans  les  programmes  de  l'éducation  primaire, 
secondaire,  supérieure,  et  le  premier  essai,  tenté  avec 
un  succès  complet,  par  un  artiste  musicien  qualifié, 
Wilhem,  pour  développer  l'œuvre  des  maîtres  musi- 
ciens de  la  première  République,  et  pour  réaliser  les 
idées  sociales  des  penseurs  qui,  comme  les  saint- 
simoniens  après  les  philosophes  de  la  Révolution, 
attribuaient  une  large  influence  à  la  culture  musi- 
cale dans  les  moyens  d'assurer  les  progrès  intellec- 
tuels de  la  nation. 

A  la  veille  de  1830,  dans  un  appel  adressé  aux  ar- 
tistes {Du  passé  et  de  l'avenir  des  Beaux-Arts,  Bibl. 
Nat.  L.  190  d,  n°  3),  le  disciple  de  Henri  de  Saint- 
Simon,  Barrault,  proclamait  : 

«  Un  seul  art  garde  un  vrai  pouvoir,  c'est  la  mu- 
sique. L'artiste  le  plus  populaire  de  nos  jours  est 
peut-être  le  musicien.  Mais  ce  pouvoir,  la  musique 
ne  le  doit  pas  à  sa  perfection  tardive,  résultat  né- 
cessaire de  l'introduction  de  l'harmonie,  élément 
ignoré  des  anciens,  qui  s'y  est  élaboré;  elle  le  doit 
à  sa  nature  même.  A  une  époque  où  le  symbole 
extérieur  sous  lequel  se  formulaient  les  sentiments 
et  les  besoins  du  cœur  humain  a  péri,  mais  sans  les 


entraîner  dans  sa  ruine,  cette  langue  vague  el  m^- 
térieuse,  qui  répond  à  toutes  les  âmes,  et  reçoil  de 
leur  situation  personnelle  une  traduction  particulière, 
doil  être  la  seule  langue  commune  entre  tous  les 
hommes.  Dans  un  tel  état  de  choses,  la  poésie 
tout  entière  est  dans  la  musique,  et  les  paroles  de- 
meurent légitimement  suballernisées,  jusqu'à  ce  que 
la  poésie,  revêtant  la  précision,  rétablisse  un  accord 
puissant  entre  les  vers  et  la  musique;  mais  aujour- 
d'hui, comme  la  lyre  d'Ossian,  elle  évoque  autour 
de  nous  des  nuages  fantastiques  que  chacun  peuple 
et  anime  de  ses  regrets  et  de  ses  espérances.  Aussi 
['expression religieuse  pure  et  solennelle  que  Haydn, 
Mozart,  Cherubini  ont  su  lui  donner,  grâce  à  la 
souplesse  de  ce  merveilleux  langage,  est-elle  une 
sorte  d'initiation  aux  pensées  religieuses  de  l'ave- 
nir... Lorsque,  par  des  moyens  scientifiques,  par  des 
calculs  rigoureux,  nous  annonçons  qu'un  nouveau 
monde  est  là,  vers  lequel  il  faut  enfin  se  diriger,  au 
lieu  de  louvoyer  avec  une  éternelle  timidité,  les  ar- 
tistes n'ont-ils  point  de  chants  pour  ranimer  la  lié- 
deur,  pour  enflammer  le  courage,  pour  nous  exci- 
ter enfin  à  déployer  toutes  nos  voiles,  dans  l'espoir 
d'atteindre  ce  but  glorieux.'.,  l'nis  entre  nous 
comme  les  cordes  harmonieuses  d'une  même  lyre, 
commençons  dès  aujourd'hui  ces  hymnes  qu 
répétés  par  la  postérité.  Désormais,  les  beaux-arts 
sont  le  culte,  et  l'artiste  est  le  prêtre.  » 

Quand  ces  paroles  étaient  dites,  celui  qui  devait 
créer  V orphéon  était  en  pleine  maturité  de  talent, 
d'action  et  d'expérience.  Il  allait  atteindre  cinquante 
ans.  Pendant  son  enfance,  alors  qu'il  recevait  les 
leçons  de  GossEcet  était  le  témoin  des  enthousiasmes 
des  grandes  fêtes  civiques,  il  avait  appris  des  musi- 
ciens eux-mêmes  à  réfléchir  sur  son  art,  el  à  en  com- 
prendre la  portée  éducative. 

L'ancêtre  Grétry  écrivait  alors,  dans  son  ouvrage 
De  la  Vérité  (page  237i  : 

«  On  ne  risque  jamais  rien  d'entretenir  la  sensi- 
bilité humaine,  et  la  musique  est  celui  de  tous  les 
arts  qui  la  provoque  et  l'alimente  davantage. 

<c  En  comparant  les  passions  humaines  aux  sons 
qui,  entre  eux,  forment  une  harmonie,  on  trouve  un 
singulier  rapprochement,  qui  faisait  dire  ligurément 
à  Platon  el  à  Pythagore  que  l'univers  physique  et 
moral  était  tout  entier  dans  la  musique. 

«  En  effet,  tous  les  musiciens  savent  qu'on  ne 
peut  changer  de  ton  ou  de  gamme  sans  tempérer 
quelques  sons;  que  toujours  des  quintes  justes  est 
un  excès  harmonique;  que  tel  son,  sans  nul  tempé- 
rament, vous  conduit  aux  tons  qui  lui  sont  relatifs, 


3711 


ïXCt'CLOPÊDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


mais  que  si  vous  sautez  à  une  gamme  éloignée,  le 
même  son  a  besoin  d'être  tempéré,  pour  y  arriver 
sans  effort...  Même  jeu  entre  les  passions  des  hom- 
mes. Les  passions  violentes  ont  besoin  d'êlre  modé- 
rées. C'est  là  le  tempérament  nécessaire  pour  que 
l'harmonie  sociale  ne  soit  point  détruite...  » 

Et  à  l'heure  de  la  jeunesse,  au  moment  de  ses 
vingt  ans,  Wilhem  avait  lu,  comme  beaucoup  de  ses 
contemporains,  car  l'ouvrage  est  cilé  dans  beaucoup 
d'écrits  du  temps,  l'apologie  de  la  musique,  publiée 
en  trois  plaquettes,  parues  en  1798,  1802,  1804,  sous 
un  titre  dont  le  souvenir  devait  s'imposer  lorsque 
viendrait  le  moment  de  donner  un  nom  à  l'œuvre 
qui  couronnait  un  long  effort  d'éducation  musicale, 
et  d'application  artistique.  Il  avait  lu  dans  l'Esprit 
d'Orphée  (Bibl.  Nat.,  R.  45,  380-82),  du  juge  d'appel  à 
Nimes,  Olivier  : 

«  ...  Orphée  adoucit  des  peuples  sauvages  par  le 
charme  de  la  musique  et  l'institution  de  cérémonies 
religieuses;  il  leur  dicta  des  lois  qu'ils  écoutèrent  et 
suivirent  avec  plaisir,  excités  parles  sons  musicaux. 
Chez  les  peuples  civilisés  d'Europe,  le  sentiment 
s'est  presque  éteint,  et  a  été  remplacé  par  l'esprit. 
Aussi,  les  hommes  lettrés  se  sont  attachés  seulement 
à  reconnaître  l'esprit  des  lois,  à  l'exemple  du  célèbre 
mais  non  infaillible  Montesquieu...  N'est-il  donc  pas 
convenable  qu'une  meilleure  philosophie  nous  con- 
duise à  étudier,  au  lieu  de  l'esprit  des  lois,  l'esprit 
de  ces  législateurs  qui  ont  commandé  au  genre 
humain  par  le  sentiment?  Il  m'a  paru  surtout  qu'on 
ne  devait  pas  négliger  d'étudier  l'esprit  ^'Orphée 
législateur...  » 

Le  juge  Olivier,  dans  son  exaltation,  allait  même 
jusqu'à  vouloir  substituer  à  l'étude  du  droit,  celle 
de  la  musique  : 

«  ...  Je  crois  avoir  prouvé  évidemment  (de  la  Ré- 
forme des  lois  civiles)  qu'il  n'y  a  eu  aucune  institu- 
tion plus  superllue  chez  les  nations  civilisées  de 
l'Europe,  que  les  écoles  de  droit.  Si  je  démontre 
maintenant  la  singulière  utilité  dont  seraient  des 
écoles  publiques  de  musique,  ne  faut-il  pas  conclure 
qu'il  importe  de  substituer  des  écoles  de  musique 
aux  écoles  de  droit,  pourvu  toutefois  qu'on  achève 
de  rendre  inutiles  ces  dernières,  en  nous  délivrant 
d'une  jurisprudence  si  horriblement  compliquée, 
qu'elle  semblait  justifier  leur  établissement...  » 

En  formant  le  mot  orphéon,  Wilhem  ne  se  borna 
donc  pas  à  une  évocation  imprécise  du  poète  musi- 
cien de  la  légende.  Dans  ce  mot,  toute  une  doctrine 
artistique  et  sociale  était  contenue. 

L'acte  officiel  qui  le  nationalisa  émane  du  minis- 
tère de  l'instruction  publique.  A  la  date  du  11  dé- 
cembre 1836,  le  ministre  Guizot  transmit  au  préfet 
de  la  Seine  un  extrait  du  registre  des  délibérations 
du  Conseil  royal  de  l'instruction  publique  donnant 
le  procès-verbal  de  la  séance  du  8  mars  1836,  qui 
approuvait,  en  ces  termes,  le  règlement  pour  la 
tenue  de  réunions  de  chant  dites  de  l'Orphéon  : 

«  Informé  des  bons  résultats  obtenus  parles  réu- 
nions de  chant  dites  de  l'Orphéon,  fondées  et  diri- 
gées  gratuitement  depuis  32  mois  (en  octobre  1833) 
par  M.  B.  Wilhem.  directeur  inspecteur  de  rensei- 
gnement du  chant  dans  les  écoles  communales  de 
Paris; 

»  Considérant  que  l'enseignement  du  chant  a  été 
prescrit  par  la  loi  (1833-183:;)  et  introduit  par  la 
Ville  dans  toutes  les  écoles; 

a  Qu'il  a  pour  effet  d'adoucir  les  mœurs,  de  faci- 


liter l'instruction  scolastique,  de  développer  les  deux 
organes  de  l'ouïe  et  de  la  parole,  de  créer  de  nou- 
velles branches  d'industrie  au  profit  des  classes 
laborieuses,  d'alléger  pour  elles  la  fatigue  de  leurs 
travaux,  de  leur  ménager  un  noble  plaisir  à  la  place 
d'amusements  trop  souvent  grossiers  et  ruineux; 

«  Considérant  que  les  exercices  pratiqués  dans  les 
réunions  de  l'Orphéon,  et  consistant  principalement 
en  chants  d'ensemble,  sont  le  complément  naturel 
de  l'enseignement  du  chant,  tel  qu'il  est  pratiqué 
dans  les  écoles,  d'après  la  méthode  de  M  B.  Wilhem, 
et  le  meilleur  moyen  de  faire  produire  à  cet  ensei- 
gnement tous  les  avantages  qu'on  s'en  promet; 

«  Qu'aussi  il  importe  de  soumettre  ces  réunions  à 
un  règlement  général  qui  permette  aux  élèves  les 
plus  avancés  du  chant  de  s'y  rendre  des  différents 
quartiers,  et  qui,  en  sanctionnant  les  règles  établies 
jusqu'ici  par  M.  B.  Wilhem  dans  ces  lieux  d'as- 
semblée, continue  d'y  faire  régner  le  bon  ordre  : 

«  Arrête  ce  qui  suit  : 

«  Article  premier.  —  Les  réunions  de  l'Orphéon 
sont  ou  partielles  ou  générales. 

«  Art.  2.  —  Les  réunions  partielles  ont  lieu  une 
fois  par  mois  dans  l'après-midi  le  jeudi... 

«  Art.  3.  —  Les  réunions  générales  ont  lieu  tous 
les  trois  mois  dans  l'après-midi,  le  dernier  dimanche 
des  mois  de  janvier,  avril,  juillet  et  octobre... 

«  Art.  4.  —  Ne  seront  admissibles  aux  réunions  de 
l'Orphéon  que  : 

«  1°  Les  élèves  du  chant  signalés  comme  sujets  stu- 
dieux et  de  bonne  conduite... 

(i  2°  Les  anciens  élèves  autorisés  par  le  directeur 
général  du  chant... 

«  Art.  9.  —  Les  dames,  anciennes  élèves,  auto- 
risées à  suivre  les  réunions,  entrent  dans  la  salle  au 
fur  et  à  mesure  qu'elles  arrivent... 

•'  Les  jeunes  garçons  attendent  dans  le  préau 
l'heure  d'entrée... 

«  Les  adultes  hommes,  élèves  actuels  ou  anciens, 
prennent  place  sur  les  bancs  du  fond  à  droite  ou  à 
gauche,  de  manière  à  laisser  un  intervalle  entre  eux 
et  les  jeunes  garçons  d'un  côté,  et  les  jeunes  tilles 
et  les  dames  de  l'autre... 

«  Art.  9.  —  Le  chant  commence  à  six  heures  et 
demie,  et  cesse  à  huit  heures  un  quart... 

«  Le  conseiller,  vice-président  :  Villeinain. 
«  Le  conseiller  secrétaire:  V.  Cousin.  » 

Si  retentissant  devait  être  le  succès  de  l'œuvre  de 
Wilhem,  que  le  mot  Orphéon  allait  prendre  une  exten- 
sion considérable,  et  survivre  à  l'effort  initial,  peu  à 
peu  diminué,  puis  délaissé. 

En  retraçant  la  vie  et  l'œuvre  de  Wilhem,  nous 
tenterons  de  faire  revivre  un  glorieux  passé  dont  la 
vertu  d'exemple  n'est  pas  épuisée. 

Puis,  nous  compléterons  ces  documents  de  notre 
histoire  musicale  qui  touche  à  l'orphéon,  en  retra- 
çant la  vie  et  l'œuvre  du  créateur  de  nos  orchestres 
populaires  d'harmonie  et  de  fanfare,  Adolphe  Sax, 
dont  l'œuvre  devait  commencer  à  l'h  >ure  OÙ  Wilhem 
encore  jeune  mourait. 

Lue  fatalité  funeste  empêcha  ces  deux  apôtres  de 
se  connaître,  de  collaborer,  et  peut-être  d'allier  leur 
zèle  et  leur  enthousiasme,  pour  le  plus  grand  bien  de 
la  cause  orphéonique,  dont  ils  auraient  su  préserver 
l'harmonieuse  unité. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LORPHÉON    3717 


LA  VIE  ET  L'ŒUVRE  DE  B.  WILHEM,  CREATEUR  DE 
L'ENSEIGNEMENT  SCOLAIRE  DU  CHANT  EN  FRANCE, 
ET   FONDATEUR   DE   «  L'ORPHÉON   ». 

On  ne  se  souvient  guère  aujourd'hui  du  vaillant 
musicien  qui  a  «  naturalisé  »  en  France  l'enseigne- 
ment populaire  du  cliant  et  créé  l'orphéon.  Il  s'ap- 
pelait Guillaume-Louis  Bocouillon,  et  fit  du  premier 
de  ces  prénoms,  Guillaume,  son  nom  de  musicien  Wjl- 
hem1,  qu'il  dut  prendre  pour  ménager  les  susceptibi- 
lités d'un  père  opposé  avec  entêtement  à  ses  goûts 
artistiques.  On  ne  se  souvient  guère  aujourd'hui  non 
plus  de  Sarrette,  dont  l'énergie  très  active  créa  le 
Conservatoire  de  musique.  Ainsi,  les  deux  hommes 
à  qui  nous  devons  l'effort  le  plus  efficace  qui  ait 
été  tenté  en  France,  et  qui  ait  réussi,  pour  l'éduca- 
tion musicale  des  artistes  et  du  peuple,  sont  victimes 
de  la  même  insouciance,  et  leur  mémoire  est  égale- 
ment dédaignée. 

Cette  ingratitude  envers  eux  apparaît  moins  extra- 
ordinaire quand  on  constate  ce  qui  subsiste  de  leur 
œuvre,  édifiée  avec  la  conviction  de  l'utilité  sociale 
de  la  musique,  continuée  par  des  successeurs  de  plus 
en  plus  étrangers  à  cette  haute  préoccupation. 

Et  puisqu'ils  furent  les  serviteurs  de  la  même  idée, 
aujourd'hui  méconnue,  il  est  naturel  que  cette  ingra- 
titude les  atteigne  aujourd'hui,  tous  les  deux. 

Si,  au  temps  de  la  première  République,  Sarrette 
arrivait  à  grouper  autour  de  lui  les  maîtres  de  la 
musique  et  à  les  associer  aux  tentatives  qui  abouti- 
rent à  la  création  du  Conservatoire,  c'est  parce  qu'il 
savait  la  musique  nécessaire  à  la  célébration  des 
fêtes  nationales,  et  l'éducation  de  nombreux  élèves 
indispensable  à  l'organisation  de  son  utile  enseigne- 
ment dans  le  pays  tout  entier.  Si,  vingt  ans  plus 
tard,  Wilhem  réussit  à  introduire  la  musique  dans 
le  programme  de  nos  écoles,  c'est  parce  qu'il  sut 
mettre  en  évidence  la  haute  vertu  moralisatrice  de 
cet  art,  par  lequel  tous  les  enfants  d'une  même  fille 
peuvent  être  unis  pour  collaborer  à  la  même  œuvre. 
Or,  après  eux,  les  musiciens  héritiers  de  leur  effort 
ne  se  sont  souciés  que  de  résultats  purement  artis- 
tiques, et  ils  ont  été  encouragés  à  rester  dans  ces 
bornes  étroites.  Aujourd'hui,  il  suffit  que  le  Conser- 
vatoire donne  l'instruction  gratuite  à  des  artistes  qui 
se  disputeront  les  bonnes  places  de  la  capilale,  et 
que  le  programme  d'enseignement  de  nos  écoles 
laisse  une  petite  place  à  la  musique.  Peu  à  peu, 
l'élite  intellectuelle  s'est  désintéressée  de  l'art  mu- 
sical,  et  des  mémoires  comme  celles  de  Sarrette 
et  de  Wilhem,  que  la  nation  entière  aurait  dû  pieu- 
sement conserver,  ont  été  abandonnées  à  la  recon- 
naissance des  seuls  musiciens  qui,  indifférents  au 
rôle  social  de  leur  art,  ont  oublié  les  apôtres  de  la 
musique  mise  au  service  du  progrès. 

Wiluem,  en  effet,  ne  compte  pas  beaucoup  plus 
que  Sarrette,  comme  musicien.  Il  fut  trop  absorbé 
par  l'action,  pour  avoir  eu  le  temps  de  composer 
beaucoup.  En  dehors  de  ses  ouvrages  d'éducation, 
dont  on  ne  se  sert  plus,  les  quelques  œuvres  musi- 
cales qu'il  a  laissées  ne  le  distinguent  pas  assez  de 
Sarrette,  qui  n'écrivit  jamais  une  seule  note  de 
musique.  Tous  deux,  venus  de  la  carrière  militaire  à 
la  carrière  artistique,  ont  marqué  leur  place   dans 


l'histoire  musicale  par  le  résultat  fécond  de  leur 
action.  Lorsque  notre  musique  sera  redevenue  agis- 
sante, pleine  justice  leur  viendra. 

On  songera  alors  à  recueillir  le  précieux  ensei- 
gnement de  leur  vie. 

Celle  de  Wilhem  reste  un  bel  exemple  d'énergie  et 
de  dévouement.  Né  à  Paris,  le  18  décembre  1781, 
Wilhem  passa  ses  premières  années  dans  le  ]calme 
d'une  maison  de  commerce  de  parfumerie.  Lorsque 
éclata  la  Révolution,  son  père  se  fit  militaire  et  par- 
vint rapidement  à  un  grade  élevé.  En  1793,  il  était 
chef  de  bataillon.  Envoyé  à  l'armée  du  Nord,  il  vou- 
lut que  son  fils  l'y  suivit. 

WiLHi-.ua  laissé/sous  le  titre  de  :  Souvenirs  puérils 
de  mes  deux  années  de  campagne  à  l'armée  du  Nord, 
de  1793  à  1795,  un  curieux  récit  de  cette  période 
de  son  enfance.  Par  les  extraits  qui  suivent,  on  voira 
qu'il  fut  de  bonne  heure  arraché  aux  douceurs  du 
foyer  familial,  et  que  déjà  la  musique  lui  était  un 
réconfort  : 

«  ...  De  onze  à  treize  ans,  je  fus  à  l'armée  du  Nord, 
fort  ignorant  et  suivante  pied  ou  à  cheval  mou  père, 
qui  me  jeta  un  peu  tôt  dans  la  carrière  des  braves, 
où,  selon  l'instinct  de  mon  ;ige,il  m'arriva  de  me  dis- 
tinguer en  exposant  ma  vie  dans  les  vergers  des 
ennemis  de  la  République... 

«  ...  A  DunUerque,  pour  me  façonner  à  n'être  pas 
douillet,  le  commandant,  mon  père,  qui  logeait  en 
ville,  m'envoyait  coucher  au  camp  sur  une  botte  de 
paille  éparpillée  dans  un  coin  de  sa  tente  :  un  sac  à 
farine  me  servait  de  draps,  comme  aux  soldats;  j'y 
entrais  debout,  je  me  le  montais  jusqu'au  col  et,  dé- 
crivant avec  ma  tète  un  arc  de  V.\  degrés,  je  me 
jetais  à  la  volée  sur  ce  coucher,  où  je  dormais  d'un 
bon  et  insouciant  sommeil  d'enfant,  si  différent  du 
sommeil  tourmenté  des  artistes... 

«  Il  parait  que  j'avais  là  mes  entrées  au  théâtre, 
car  j'allais  souvent  voir  Paul  et  Virginie  ou  Lodoiska, 
opéras  nouveaux,  dont  je  répétais  avec  succès  tous 
les  airs  au  corps  de  garde.  Lodoiska,  dans  sa  tour, 
me  touchait  beaucoup,  mais  j'étais  fou  de  Virginie, 
et  je  me  serais  jeté  à  la  nage  pour  elle,  sans  trop 
m'inquiéter  de  sauver  Paul. 

«  A  Vpres  ou  à  Fumes,  passant  en  tirailleur  à 
rase-mur,  cinq  ou  six  balles  m'auraient  cloué  là  si 
j'avais  été  plus  grand.  A  I.utphcu,  en  Hollande,  après 
une  marche  forcée,  endormi  et  bien  bordé  dans  une 
ornière,  j'allais  être  réveillé  en  sursaut  par  la  pre- 
mière roue  d'un  fourgon,  lorsque  le  conducteur  me 
sauva  la  vie  en  me  jetant  au  loin  à  la  volée. 

«  Etant  à  Amiens,  au  commencement  de  ma  pre- 
mière campagne,  mon  père  fut  injustement  jeté  en 
prison.  J'allai  demander  au  représentant  du  peuple, 
Duquesnoy,  la  permission  de  voir  mon  père;  l'excel- 
lent législateur  me  répondit  brièvement  :  «  Si  tu  en- 
«  1res,  tu  ne  sortiras  pas.  »  Alors  j'entrai.  Toutefois 
les  geôliers,  plus  humains  que  le  représentant,  me 
laissaient  sortir  de  temps  à  autre  pour  rendre  ser- 
vice à  mon  père  et  à  ses  malheureux  compagnons 
d'infortune... 

«  Peu  de  temps  après,  le  commandant  fut  rendu 
à  son  bataillon,  et  moi  aux  quatre  ou  cinq  «  bataves» 
dont  j'étais  le  caporal  et  qui  m'obéissaient  de  con- 
fiance, par  bon  naturel...  » 

Envoyant  son  fils  supporter  aussi  vaillamment  la 
vie  des  camps,  le  père  de  Wilhem  décida  qu'il  em- 
brasserait la  carrière  militaire. 

En  1795,  un  décret  de  la  Convention  avait  créé 
une  école  spéciale  pour  les  fils  d'officiers.  Installée 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


d'abord  dans  l'Oise,  à  Lianeonrt,  puis  à  Compiègne, 
elle  devait  être  transférée  à  Saint-Cyr  avant  de  deve- 
nir le  Prytanée  de  la  Flèche,  qui  nous  est  resté. 

Wilhem,  destiné  par  son  père  à  l'armée,  y  fut 
admis  dès  la  fondation.  Il  avait  alors  treize  ans. 

Lui-même  a  raconté,  en  quelques  pages  écrites 
quarante  ans  plus  tard  pour  les  enfants  des  écoles 
communales,  les  principaux  épisodes  de  son  séjour 
à  cette  école.  Par  ce  récit,  intitulé  l'Elève  de  Lian- 
court,  nous  savons  quelle  éducation  virile  fortifia 
sa  volonté,  et  comment  lui  vint  le  goût  de  la  mu- 
sique : 

<■  Au  temps  de  la  République,  on  transféra,  de 
Paris  dans  le  château  dévasté  de  Lianeonrt,  les 
élevés  du  chevalier  Paulet,  venus  de  la  caserne  de 
Popincourt,  et  ceux  de  Léonard  Bourdon  (les  enfants 
de  la  patrie),  venus  de  l'abbaye  Saint-Martin;  on 
leur  adjoignit  les  élèves  d'une  école  militaire  insti- 
tuée dans  le  village  même  par  le  duc  de  La  Roche- 
foulcauld  (l'un  des  vénérables  fondateurs  des  caisses 
d'épargne  actuelles);  et,  sous  la  direction  du  docte  et 
très  excellent  Pierre  Crouzet,  ce  nouvel  établisse- 
ment prit  le  nom  d'Ecole  nationale  de  Liancourt,  poul- 
ies fils  d'officiers,  défenseurs  de  la  patrie.  A  ce  titre, 
j'y  fus  admis  le  surlendemain  de  l'installation,  an 
mois  de  thermidor  an  III  Ijuillet  I70:.i. 

«  Là,  au  nombre  d'environ  trois  cents,  élevés  et 
entretenus  aux  frais  de  la  République,  nous  man- 
quions à  peu  près  de  tout.  Je  me  souviens  qu'en  une 
certaine  année,  couverts  de  vestes  assez  légères,  nous 
étions  presque  tous  sans  bas  et  sans  souliers  au  mois 
de  nivôse  (janvier);  alors,  nous  n'avions  pas  de  pain 
non  plus  et,  chaque  jour,  on  envoyait  quelques-uns 
de  nous  sur  la  route  de  Paris  pour  voir  s'il  n'arri- 
vait pas  de  farine... 

«  ...  Un  grain  de  musique  vint  frapper  au  front 
l'un  de  ces  petits,  puis  un  autre  grain  lui  tomba  sur 
le  cœur... 

«Le  père  Guette,  tambour  des  vétérans,  était  un 
homme  prodigieux;  il  enseignait  la  clarinette,  le 
basson,  la  grosse  caisse,  le  cor,  les  cymbales  et  la 
Irompette;  il  jouait  du  violon,  de  l'alto,  de  la  basse, 
de  tout  enfin,  excepté  de  la  flûte.  Une  musique  mi- 
litaire fut  donc  assez  promptement  organisée;  et  un 
de  nos  camarades,  qui  avait  été  enfant  de  chœur, 
ayant  une  fort  jolie  voix,  on  nous  fit  entendre  un 
hymne  composé  pour  nous  par  notre  directeur 
chéri,  et  mise  en  musique  par  le  célèbre  Gossr.c. 

«  Tout  à  coup,  à  l'audition  de  ce  chef-d'œuvre  d'ex- 
pression touchante  et  de  simplicité,  le  grain  île  mu- 
sique pousse  un  premier  germe  chez  le  prédestiné» 
et  il  demande  à  s'instruire.  «  Impossible,  »  dit  le  père 
Guette;  «  le  temps  et  les  instruments  me  manquent; 
«  prends  pointant  cette  petite  flûte,  prends  cette 
«  méthode  de  Devienne,  va,  et  souffle.  »  L'enfant  lut  et 
souffla  le  jour  pendant  les  récréations,  et  la  nuit 
pendant  le  sommeil  un  peu  dur  de  ses  camarades. 
Bientôt,  son  pipeau  domina  tous  les  autres  dans  les 
marches  et  au  Temple  de  la  Raison  (à  l'église). 

«  Cependant,  le  nouvel  adepte  se  mit  à  composer  : 
il  notait  les  chants  d'après  les  sons  de  sa  flûte,  et  il 
écrivait  les  accompagnements,  d'après  ses  remarques 
sur  Devienne  et  Gossec;  mais  cela  ne  sonnait  pas 
toujours  aussi  bien  que  dans  les  modèles.  Pourquoi? 
A  qui  le  demander?  Il  fouilla  la  belle  bibliothèque 
échappée  par  miracle  au  vandalisme,  et  puisa  dans 
les  livres  de  l'école  de  Rameau  des  principes  qu'il  dut 
abandonner  ensuite  pour  ceux  des  écoles  d'Alle- 
magne el  d'Italie. 


«  Sur  ces  entrefaites,  Ginguené,  littérateur  fort  dis" 
lingué  el  Von  musicien,  vint  à  Liancourt  pour  ins- 
pecter l'école;  on  exécuta  devant  lui  je  ne  sais  quelle 
ébauche  décomposition  musicale  à  plusieurs  parties, 
et  il  conseilla  d'adresser  l'apprenti  compositeur  à 
Gossec,  pour  le  consulter  sur  l'avenir... 

«  Deux  jours  après,  l'élève  de  Liancourt,  l'âme 
bondissante,  se  mit  en  route  à  quatre  heures  du  ma- 
tin, ayant  environ  cinq  francs  dans  sa  poche,  pour 
faire  à  pied  et  d'une  seule  traite  les  quatorze  lieues 
du  trajet.  A  moitié  chemin,  vers  Champlàtreux,  un 
pauvre,  assis  près  de  la  haie,  s'écria  :  «  La  charité, 
s'il  vous  plait,  mon  bon  jeune  citoyen,  je  prierai 
pour  vous!  —  Tenez,  brave  homme,  et  voilà  cinq 
sousipriez  Dieu  que  je  sois  reçu  au  Conservatoire  de 
musique,  et  je  vous  donnerai  trois  francs  en  repas- 
sant après-demain.  »  Le  pauvre  eut  ses  trois  francs, 
car  l'enfant  avait  été  accueilli  comme  un  fils  par 
Gossec...  » 

C'est  en  1799,  quatre  ans  après  son  entrée  à  Lian- 
court, que  Wilhem  fut  envoyé  vers  Gossec,  sur  le  con- 
seil de  Gimguenk,  qui  s'était  vivement  intéressé  à 
l'audition  du  chœur  avec  accompagnement  de  clari- 
nettes, flûtes,  cors,  trompettes,  bassons  et  caisse, 
Aux  armes,  vaillante  jeunesse,  écrit,  à  l'occasion  de 
l'assassinat  des  plénipotentiaires  de  Rastadt,  par  le 
musicien  de  dix-sept  ans,  devenu  compositeur  sans 
autre  maître  que  lui-même. 

Le  directeur  de  l'école,  Crouzet,  n'avait  jamais  rien 
fait  pour  combattre  l'instinct  artistique  d'un  jeune 
homme  estimé  par  tous  comme  «  un  modèle  d'appli- 
cation, de  sagesse  et  de  bonté  »;  il  s'empressa  de 
faciliter  la  démarche  de  Wiluem  par  une  lettre  enthou- 
siaste, présentant  à  Gossec  son  élève,  <<  déjà  recom- 
mandable  par  d'excellentes  qualités  et  par  sis  pro- 
grès dans  les  sciences,  ayant  pris  un  goût  tout  par- 
ticulier pour  la  musique,  et  parvenu,  sans  conseils 
et  sans  guide,  à  composer  des  morceaux  qui,  tout 
défectueux  qu'ils  peuvent  être,  annoncent  une  voca- 
tion expresse  et  peut-être  l'ascendant  irrésistible  du 
génie  ».  Puis,  après  l'heureux  résultat  de  la  visite,  il 
avait  triomphalement| écrit  au  père,  alors  comman- 
dant de  la  citadelle  de  Perpignan  :  «  J'ai  envoyé 
votre  lils  à  Paris  au  célèbre  Gossec,  qui  l'a  très 
bien  reçu,  lui  a  dit  qu'il  l'adoptait  pour  son  élève, 
qu'il  lui  ferait  passer  ses  leçons  régulièrement  à 
Liancourt...  » 

Crouzet  n'eut  pas  de  compliments.  Le  père  de 
Wilhem  voulait  que  son  fils  fût  un  militaire  glorieux, 
et  la  musique  lui  semblait  un  prétexte  à  escapades 
artistiques  inutiles  et  dangereuses.  Mais  Crouzet 
était  un  éducateur  clairvoyant;  il  continua  à  s'inté- 
resser aux  travaux  de  musique  que  Wilhem  faisait  à 
Liancourt  et  que  Gossec  lui  retournait  annotés. 
Même,  il  deviul  son  collaborateur  en  écrivant  les 
paroles  du  Départ  des  conscrits  de  l'un  VIII,  mis  en 
musique  par  Wilhem,  et  chanté  par  ses  camarades. 

Lorsque,  en  1900,  l'institution  fut  transférée  à 
Compiègne,  Wilhem  avait  gagné  le  grade  de  capi- 
taine dans  l'organisation  militaire  de  l'école.  Cela 
ne  le  détourna  pas  de  la  musique.  Il  écrivit  plusieurs 
œuvres,  entre  autres  un  Hymne  pastoral,  dont  les 
poèmes  lui  étaient  fournis  par  un  camarade  que  le 
goût  de  la  littérature  avait  gagne,  et  qui,  lui  aussi, 
devait  sacrifier  l'armée  à  l'art,  le  futur  poète  Antier. 

Avec  l'appui  de  Crouzet,  Wilhem  obtint,  en  1801, 
un  congé  et  une  pension  annuelle  de  000  francs  du 
ministère  de  l'intérieur,  pour  [venir  suivre  à  Paris 
les  cours  du  Conservatoire.  Soutenu  par  un  zèle  infa 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHEON    371 


tigable  et  l'ardeur  de  la  vingtième  année,  il  fut  élève 
dans  une  classe  de  solfège  et  une  classe  de  piano,  en 
même  temps  qu'il  développait  son  talent  de  flûtiste, 
étudiait  le  chant  et  travaillait  la  composition  avec 
Gossec,  Méhul  et  Peune,  qui,  un  peu  plus  âgé  que 
lui  et  déjà  très  érudit,  le  guidait  avec  un  dévoue- 
ment fraternel.  Les  progrès  de  Wilhem  étaient  rapi- 
des, et  il  songeait  à  se  lancer  dans  la  carrière  artis- 
tique sans  plus  tarder,  quand,  brusquement,  son  rêve 
s'écroula.  La  pension  dont  il  avait  joui  pendant  un 
an  lui  fui  retirée,  el  il  lut  appelé  à  Perpignan  par 
son  père,  qui,  toujours  ennemi  de  la  musique,  n'était 
peut-être  pas  étranger  au  retrait  de  la  pension. 

Pendant  six  mois,  Wilhem  fut  condamné  à  entendre 
maudire  la  musique  et  les  musiciens,  puis  il  fut  au- 
torisé à  venir  retrouver  ses  camarades  de  Liancourt 
et  de  Gompiègne,  maintenant  installés  à  Saint-Cyr. 
Crouzel  était  toujours  leur  directeur.  Il  lit  de  Wilhem 
un  répétiteur  de  mathématiques  et  de  grammaire, 
et  ne  s'étonna  pas  de  voir  bientôt  reparaître  son  ins- 
tinct de  musicien. 

Trois  mois  après  son  arrivée  au  prvtanée  de 
'Saint-Cyr,  à  l'occasion  de  la  distribution  des  prix 
de  l'année  180l',  que  présidait  Rœderer,  un  hymne 
de  Gossec  fut  exéculé  par  un  chœur  d'élèves  sous  la 
direction  du  répétiteur  de  mathématiques  et  de 
grammaire.  Wilhem  avait  réuni  lous  ceux  qui  avaient 
quelques  notions  musicales,  et  avait  préparé  cette 
surprise  au  ministre.  Elle  fut  très  goûtée,  et  eut  pour 
résultat  d'obtenir  à  Wilhem  la  mission  officielle  de 
donner,  dans  leprylanée,  des  leçons  surl'art  musical. 

Désormais,  il  allait  pouvoir  s'adonner  librement 
à  l'étude  assidue  et  quotidienne  de  la  musique, 
achever  son  éducation  artistique  et  acquérir  de  l'ex- 
périence en  professant.  Pendant  quatre  années,  il 
vécut  ainsi  à  Saint-Cyr,  menant  auprès  de  Crou/.et 
une  existence  laborieuse  et  calme,  vouée  toute  entière 
à  la  musique.  Il  composa  des  œuvres  de  circons- 
tance, dont  Crouzet  fit  les  poèmes.  L'une  de  ces 
œuvres,  composée  en  1804  et  dédiée  à  Gossec, 
Hymne  guerrier,  sur  la  descente  en  Angleterre, 
obtint  à  Saint-Cyr  un  succès  si  retentissant  qu'on 
l'exécuta  peu  après  à  Paris,  à  l'Opéra,  puis  au 
théâtre  de  Versailles,  au  lycée  de  Limoges  et  jus- 
qu'à Perpignan,  où  tout  le  monde  ne  méprisait  pas 
la  musique  autant  que  le  commandant  de  la  cita- 
delle, toujours  inflexible  dans  son  désir  de  carrière 
militaire  pour  son  fils,  et  plutôt  irrité  que  content 
de  l'heureux  résultat  de  son  effort  artistique. 

C'est  à  ce  moment,  où  un  peu  de  gloire  venait  à 
son  nom,  que  Wilhem  dut  prendre  son  pseudonyme 
pour  signer  l'œuvre  dont  on  lui  demandait  la  publi- 
cation. Bien  désormais  ne  pouvait  plus  l'arracher 
à  l'art.  S'il  ressentit  vivement  la  douleur  d'être  in- 
compris par  les  siens,  il  ne  se  laissa  plus  détourner 
de  sa  route,  et  dans  une  lettre  émouvante  adressée 
en  1806  à  ses  parents,  il  affirma  sa  décision  irrévo- 
cable : 

«  ...  Je  vois  avec  de  la  peine,  mes  chers  parents, 
que  vous  ne  vous  habituez  pas  à  ne  voir  dans  votre 
fils  qu'un  artiste.  Il  est  bien  douloureux  pour  moi  de 
penser  que  mon  père  rougit  de  son  fils.  Le  sort  en 
est  jeté  cependant,  et  il  est  plus  que  probable  qu'ar- 
rivé à  vingt-cinq  ans  où  j'en  suis,  je  ne  changerai 
plus  guère  de  direction,  ou  ce  serait  vouloir  me 
perdre,  parce  qu'il  est  trop  tard  pour  prendre  un 
autre  parti.  Les  états,  je  crois,  ne  sont  que  ce  qu'on 
les  fait;  tel  grand  est  méprisé  et  tel  artiste  est 
honoré. 


«  Je  ne  désire  rien  tant  que  de  vous  voir  revenir 
sur  mon  compte  et  de  ne  pas  vous  savoir  les  seuls, 
peut-être,  qui,  malgré  votre  cœur,  cherchiez  à  me 
rendre  plus  petit  que  je  ne  le  suis ... 

Quelques  semaines  plus  tard,  sa  grand'mère,  puis 
son  père  mouraient.  Lorsqu'il  revint  de  Perpignan, 
il  apprit  la  décision  qui  transférait  le  prvtanée  de 
Saint-Cyr  à  la  Flèche.  Il  donna  alors  sa  démission, 
pour  ne  pas  s'éloigner  de  Paris,  et,  à  la  fin  de  l'an- 
née 1806,  il  vint  s'y  installer. 

Libre  de  se  fixer  à  Paris  et  d'y  être  musicien,  Wil 
hem  ne  se  laissa  pas  entraîner  à  n'attendre  les  res- 
sources nécessaires  à  sou  existence  que  de  la  pra- 
tique de  son  art.  Il  savait  le  succès  difficile,  et  était 
trop  consciencieux  pour  vouloir  le  demander  à  l'in- 
trigue, ou  pour  compromettre  son  talent  dans  la 
production  d'œuvres  indignes. 

Aussi,  des  qu'il  fut  installé  avec  sa  mère  dans  la 
capitale,  il  se  préoccupa  de  rechercher  un  emploi. 
Ce  fut  dans  les  bureaux  de  la  commission  chargée 
delà  rédaction  du  grand  ouvrage  publié  sur  l'Egypte 
qu'il  le  trouva.  Il  y  cumul  l'érudit  musicographe 
Vn.LOTEAf,  qu'on  avait  envoyé  étudier  l'art  musical 
égyptien,  et  qui  l'initia  aux  résultats  de  ses  très 
curieuses  recherches  historiques;  puis,  il  se  lia  avec 
le  directeur  des  travaux  de  la  commission,  Jomard, 
dont  l'autorité  devait  plus  tard  soutenir  ardemment 
son  effort  pédagogique. 

Un  moment,  Wilhem  songea  à  se  produire  au 
théâtre.  Pendant  son  séjour  au  prytanée  de  Saint- 
Cyr,  il  avait  ébauché  quelques  essais  de  musique 
dramatique,  et,  pour  triompher  sur  la  scène,  il  ne 
lui  restait  qu'à  se  fortifier  par  l'expérience.  Mais 
bientôt,  sans  même  avoir  tente  une  épreuve,  il  fut 
pour  toujours  détourné  du  théâtre. 

Il  avait  retrouvé  à  Paris  son  meilleur  camarade 
de  l'Ecole  nationale  de  Liancourt,  II.  Antier,  devenu 
poète.  Par  lui,  il  connu  Parny  et  Béranger.  Immé- 
diatement, il  devint  1.-  musicien  favori  de  ces 
membres  les  plus  fameux  du  Caveau,  et  d'autres 
moins  célèbres,  comme  Ch.  Malo,  Derosoy. 

Le  temps  qu'il  pouvait  consacrer  à  la  composition 
fut  réservé  aux  romances  et  chansons  de  ses  amis. 
De  Parny,  il  mit  en  musique  plusieurs  romances,  dont 
l'une,  Angéliae,  devint  une  mélodie  populaire.  Tout 
le  monde  chanta  aussi  celles  dont  il  écrivit  l'air  sur 
des  vers  de  B.  Antier  :  l'Adieu  de  ma  bien-année, 
Amour,  Silence  el  surtout  le  Retour  île  Barcelone, 
en  l'honneur  du  docteur  Bally  qui,  vaillamment, 
était  allé  en  Espagne  au  moment  de  l'épidémie  de 
fièvre  jaune  pour  étudier  le  remède  au  fléau. 

Avec  Béranger,  sa  collaboration  fut  très  active.  Le 
poète  avait  l'habitude  de  composer  ses  chansons  sur 
des  airs  qui  chantaient  dans  sa  mémoire,  et  lorsque 
Wilhem  jugeait  mal  adapté  aux  vers  le  timbre  choisi, 
il  écrivait  un  air  nouveau.  Parmi  les  chansons  dont 
il  composa  la  musique,  on  connaît  les  Adieux  de 
Charles  VII,  dont  la  mélodie  fut  accaparée  par  tous 
les  orgues  à  cylindre,  qui  ne  s'appelaient  pas  encore 
orgues  de  barbarie,  parce  qu'on  était  indulgent  à 
la  nouveauté  de  leur  invention,  les  Adieux  de  Marie 
Stuart,  Parny  n'est  plus,  Beaucoup  d'amour,  le  Bren- 
nus,  Si  j'étais  petit  oiseau,  duo  de  soprano  et  ténor, 
le  Bonheur,  la  Bonne  Vieille.  En  outre,  l'air  de  la 
romance  composée  par  Wilhem  sur  des  vers  de 
Parny,  Angêline,  devint  celui  de  trois  chansons  :  le 
Suicide,  le  Tailleur  et  la  Fée,  Adieu  chansons. 

Pour  se  graver  dans  la  mémoire  les  airs  de  Wil- 
hem, Béranger,   qui  ignorait  tout  de  la  musique, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


devait  faire  de  grands  efforts.  Mais  la  musique 
ainsi  apprise  lui  devenait  précieuse;  il  aimait  à  la 
redire,  et,  parfois,  c'est  elle  qu'il  entendait  lors- 
qu'il songeait  à  de  nouvelles  chansons.  L'air  de 
Wilhem  écrit  pour  la  Bonne  Vieille  lui  servit  pour  la 
Lettre  à  Sophie  et  l'Alchimiste. 

Cette  collaboration  devait  créer  entre  le  poète  et 
le  musicien  des  liens  d'affection  fraternelle  qui  ne 
s'affirmèrent  pas  seulement  dans  la  spirituelle  chan- 
son du  Célibataire,  inspirée  à  Béranger  par  le  ma- 
riage de  Wilhem  : 


lui  c-'li!i:il  fidèle  appui, 

Je  vois  avec  colère 
I. 'Amour  essuyer  aujourd'hui 

Les  larmes  de  son  père. 

Grâce,  talents,  vertus 
Ont  droit  à  mille  tributs  ; 

Mais  un  célibataire 
Ne  peut  chanter  des  nœuds  si  dous 

On  n'aura  rien  a  faire 

Chez  de  pareils  époux  ! 


Un  jour  devait  venir  où  la  gloire  influente  de  Bé- 
ranger allait  permettre  à  Wilhem  d'accomplir  sa 
destinée. 

En  même  temps  qu'il  donnait  ses  loisirs  à  la 
composition,  Wilhem  professait.  Non  seulement,  il 
ajoutait  ainsi  à  ses  ressources,  mais  il  se  préparait  à 
l'accomplissement  de  sa  mission  future.  Il  enseigna 
la  flûte  et  publia  une  édition  améliorée  de  la  mé- 
thode de  Devienne;  puis  il  enseigna  le  piano  au 
lycée  Napoléon,  le  chant  dans  une  pension  de  jeunes 
filles,  dirigée  par  une  de  ses  parentes,  Mme  Dela- 
porte,  et  l'harmonie  à  de  nombreux  élèves.  Peu  à 
peu,  la  passion  de  l'enseignement  le  gagna;  ses  re- 
cherches, pour  simplifier  l'étude  de  la  musique  et  la 
mettre  à  la  portée  de  tous,  commencèrent. 

Bientôt,  il  dut  renoncer  à  être  employé  en  même 
temps  que  musicien.  En  1812,  après  y  avoir  été 
attaché  pendant  six  années,  il  abandonna  le  bureau 
dirigé  par  Jomard,  qui  ne  se  sépara  pas  de  Wilhem 
sans  regrets,  car  son  activité  était  précieuse.  Evo- 
quant plus  tard  le  temps  lointain  de  cette  collabora- 
tion, Jomard  la  rappelait  ainsi  : 

«  Il  composait  comme  s'il  n'avait  pas  eu  d'autre 
affaire,  et  il  s'occupait  des  écritures  du  bureau 
comme  s'il  avait  été  étranger  à  la  musique;  on  eût 
dit  deux  hommes  en  un  seul.  » 

Les  débats  dp  l'enseignement  scolaire 
de  la  musique  en  France. 

Lorsque  Wilhem  le  quitta,  le  moment  n'était  plus 
éloigné  où  tout  son  dévouement  et  toute  son  énergie 
allaient  être  nécessaires  à  un  effort  unique  :  la  natu- 
ralisation du  chant  en  France. 

Dès  les  premiers  temps  de  la  fondation  du  Conser- 
vatoire, Sarrette  et  ses  collaborateurs  avaient  sou- 
mis au  gouvernement  un  projet  d'organisation 
d'écoles  de  musique  dans  les  départements.  Ils  sa- 
vaient l'adoption  de  ce  projet  nécessaire  pour  assu- 
rer la  régénération  complète  de  l'art  musical  en 
France  et  développer  l'éducation  artistique  de  la 
nation;  mais  le  Directoire,  le  Consulat,  l'Empire 
passèrent  sans  avoir  soutenu  leur  effort. 

Quand  vint  la  Restauration,  on  les  chassa  de 
l'institution  qu'ils  avaient  créée,  et  le  Conservatoire, 
devenu  Ecole  royale  de  musique,  n'eut  plus  d'autre 
but  que  d'assurer  aux  théâtres  et  concerts  de  la 
capitale,  amusement  favori  de  l'aristocratie,  les  ar- 


tistes nécessaires  à  la  scène  et  à  l'orchestre.  Il  ne  s'y 
trouva  plus  personne  pour  se  soucier  de  l'éducation 
populaire.   Désormais,  l'oeuvre   de   Sarrette  et  de 
Gossec  était  compromise. 
Elle  fut  reprise  par  Wilhem. 

Pendant  son  court  ministère,  du  20  mars  au 
22  juin  1815,  Carnot,  jadis  organisateur  de  la  vic- 
toire, avait  appliqué  toute  son  activité  aux  questions 
intéressant  l'instruction  élémentaire.  Il  s'était  par- 
ticulièrement intéressé  aux  travaux  pédagogiques  du 
musicien  Alexandre  Choron,  Méthode  d'instruction 
primaire  pour  apprendre  à  lire  et  à  écrire;  et,  tout 
naturellement,  ses  relations  avec  l'artiste  l'avaient 
conduit  à  ne  pas  considérer  la  musique  comme  un 
accessoire  indifférent  de  l'éducation.  Après  sa  chute, 
le  mouvement  en  faveur  de  l'instruction  élémen- 
taire ne  tomba  pas.  Son  œuvre  de  progrès  inspira 
des  dévouements,  qui  se  groupèrent  dans  la  «  Société 
pour  l'instruction  élémentaire  ».  L'un  des  membres 
les  plus  actifs,  Jomard,  ancien  directeur  du  bureau 
où  Wilhem  avait  été  employé,  alla  étudier  en  Angle- 
terre le  fonctionnement  des  écoles  qu'on  appelait 
«  écoles  sans  maîtres  »,  et  il  en  revint  avec  la  convie-' 
tion,  bientôt  partagée  par  tous  ses  collègues,  que, 
dans  les  circonstances  actuelles,  aucun  mode  d'édu- 
cation n'était  préférable  à  celui  dont  il  avait  cons- 
taté les  féconds  résultats.  La  Société  ouvrit  alors  des 
écoles  d'enseignement  mutuel,  où  fut  adopté  le 
mode  d'éducation  qui  permet  à  un  seul  maître, 
secondé  par  des  moniteurs,  d'instruire  une  foule 
d'élèves;  qui  remplace  les  livres  coûteux  par  des 
tableaux  dont  l'usage  est  commun;  qui  réunit  dans 
une  même  salle  des  enfants  ne  sachant  rien  et  sa- 
chant déjà  quelque  chose;  et  qui  fait  servir  à  l'édu- 
cation des  plus  jeunes  l'instruction  acquise  par  les 
plus  âgés.  L'enseignement  mutuel  devait  triompher 
en  France  jusqu'au  jour  où  il  y  eut  assez  de  profes- 
seurs, assez  de  locaux,  et  assez  de  ressources  pour 
adopter  une  autre  méthode  pédagogique. 

La  Société  pour  l'instruction  élémentaire  avait 
trouvé  dans  la  méthode  du  musicien  Choron  pour 
apprendre  à  lire  et  à  écrire  la  base  de  l'enseignement 
adopté.  Et  comme  elle  avait  recueilli  toutes  les 
préoccupationsde  Carnot,  elle  n'hésita  pas  longtemps 
à  ajouter  la  musique  au  programme  des  études. 

C'est  le  23  juin  1819,  que  la  Société,  après  avoir 
entendu  un  rapport  du  baron  de  Gérando,  conseiller 
d'Etat,  décida  que  l'enseignement  élémentaire  du 
chant  serait  donné  dans  ses  écoles.  On  a  de  plus 
en  plus  oublié  les  arguments  invoqués  ce  jour-là 
pour  déterminer  le  succès  de  la  proposition,  qui 
allait  donner  à  la  musique  droit  de  cité  à  l'école. 

Ces  paroles  du  baron  de  Gérando,  prononcées  en 
1819,  ont  conservé  toute  leur  force  convaincante  : 

«  ...  S'il  est  reconnu  qu'on  peut  enseigner  à  lire 
et  à  écrire  sans  faire  de  tous  les  enfants  des  savants 
et  des  gens  de  lettres,  on  concevra  qu'il  soit  possi- 
ble de  laisser  exercer  les  enfants  au  chant  et  à  la 
musique  sans  en  faire  pour  cela  des  artistes  et  des 
virtuoses... 

«  Sans  remonter  au  souvenir  de  la  Grèce,  à  la 
puissance  qu'exerçait  la  musique  chez  les  anciens, 
je  me  borne  à  indiquer  des  faits  actuels  el  fami- 
liers. La  musique  qui,  aux  yeux  de  quelques-uns, 
n'est  que  le  délassement  du  riche,  est  un  utile  auxi- 
liaire pour  les  efforts  d'une  vie  laborieuse;  non  seu- 
lement, elle  soutient  et  délasse,  mais  elle  règle  les 
mouvements  en  les  rendant  plus  harmonieux,  elle 
les  rend  plus  faciles.  Il  est  un  grand  nombre  d'arts 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PEDAGOGIE 


L'ORPHÉON 


dans  lesquels  les  mouvements  de  l'ouvrier  ont 
besoin  d'une  grande  régularité;  dans  les  arts,  ils 
sont  d'autant  moins  fatigants  qu'ils  sont  mieux  ca- 
dencés. Vous  avez  sagement  introduit  dans  les  éco- 
les le  dessin  linéaire,  comme  un  exercice  utile  pour 
donner  de  la  précision  à  l'œil  et  à  la  main.  Ne 
serait-il  pas  permis  de  penser  qu'un  peu  de  chant 
en  serait  le  complément  naturel  et  concourrait  au 
même  but'?... 

«  L'harmonie  est  une  sorte  de  lien  entre  l'ordre 
moral  et  la  vie  animale.  Elle  est  un  langage  qui 
enseigne  les  sentiments  doux  et  bienveillants;  elle 
porte  la  sérénité  dans  l'esprit;  elle  accoutume  à 
goù  ter  tout  ce  qui  est  ordonné  ;  ainsi  l'arrangement, 
la  propreté,  l'économie  semblent  en  quelque  sorte 
marcher  à  sa  suile...  » 

Au  moment  où  la  Société  pour  l'instruction  élé- 
mentaire décidait  de  mettre  la  musique  au  pro- 
gramme de  ses  écoles,  une  méthode  propre  à  l'en- 
seignement mutuel  n'existait  pas  encore.  Wilhem, 
tenu  à  l'écart  par  son  caractère  très  modeste,  obte- 
nait, avec  ses  élèves  du  Lycée  Henri  IV,  l'ancien  lycée 
Napoléon,  et  de  diverses  institutions,  des  résultats 
extraordinaires  dont  il  ne  songeait  pas  à  tirer  vanité. 
Les  méthodes  sur  lesquelles  leurs  inventeurs,  Gabriel 
Nézot,  Massimino,  Galix,  cherchaient  à  attirer  l'at- 
tention, ne  répondaient  pas  aux  nécessités.  Tout  le 
monde  s'intéressait  à  l'Ecole  normale  de  musique 
où  Choron,  après  avoir  dirigé  pendant  dix-sept  mois 
l'Opéra,  mettait  en  pratique  une  Méthode  concertante 
de  musique  à  quatre  parties,  destinée  «  au  perfec- 
tionnement du  chant  national  par  l'enseignement 
universel  de  la  musique  élémentaire,  à  la  propaga- 
tion du  chant  choral,  à  l'instruction  de  jeunes  pro- 
fesseurs ».  Mais  lui-même  avait  déclaré  sa  méthode 
inapplicable  à  l'enseignement  mutuel,  et  même 
condamné  la  pratique  de  ce  système  ponr  la  musi- 
que. Cette  opinion  du  musicien,  auteur  de  laméthode 
adoptée  pour  apprendre  à  lire  et  à  écrire  dans  les 
écoles  d'enseignement  mutuel,  ne  devait  pas  cepen- 
dant empêcher  les  membres  de  la  Société  pour  l'ins- 
truction élémentaire  de  faire  aboutir  la  proposition 
qu'ils  avaient  adoptée. 

Rencontrant  Béranger,  quelque  temps  après  le 
2S  juin  1819,  le  baron  de  Gérando  lui  avait  annoncé 
la  décision  d'introduire  le  chant  dans  les  écoles  de 
la  Société,  et  parlé  de  la  difficulté  d'adapter  la 
musique  à  l'enseignement  mutuel. 

«  J'ai  votre  homme,  avait  répondu  immédiatement 
Béranger  :  c'est  Wilhem.  » 

Intimement  lié  avec  le  musicien,  qui  n'était  pas 
seulement  le  collaborateur  de  ses  chansons,  mais 
le  fidèle  compagnon  de  sa  vie,  son  partenaire  pré- 
féré, avec  B.  Antier,  dans  les  comédies  de  société, 
où  il  trouvait  un  passe-temps  favori,  Béranger 
n'ignorait  rien  des  aptitudes  de  Wilhem  et  de  ses 
travaux.  Il  le  savait  venu  à  la  musique  comme 
Choron  et  Galin,  après  s'être  longtemps  appliqué 
aux  mathématiques,  poussé  comme  eux  vers  l'ensei- 
gnement par  l'instinct,  et,  en  outre,  mieux  préparé 
que  personne  à  résoudre  le  problème  de  l'éduca- 
tion musicale  mutuelle,  parce  que  lui-même,  à 
l'Ecole  nationale  de  Liancourt,  avait  été  élevé  sui- 
vant une  méthode  empruntée  au  chevalier  Paulet, 
presque  analogue  à  celle  usitée  dans  les  écoles  sans 
maîtres.  D'ailleurs,  les  obligations  de  l'enseigne- 
ment de  la  musique  pratiqué  à  Saint-Cyr,  puis  à 
Paris,  avaient  suscité  ses  recherches,  et  Béranger 
connaissait  quelques-uns  de  ses  procédés  d'éduca- 


tion, étonnants  par  leur  simplicité  et  leur  clarté. 
Il  s'empressa  d'informer  Wilhem  de  ce  qu'on 
attendait  de  lui.  Le  lendemain  même,  après  une 
nuit  de  réflexion,  Wilhfm  affirmait  la  certitude  du 
succès,  et  jetait  sur  le  papier  le  plan  de  la  méthode 
qui  allait  réussir  à  naturaliser  le  chant  en  France. 

La  n  naturalisation  »  <ln  chant  en  France 
par  la  méthode  Wilhem. 

Les  quelques  semaines  écoulées  entre  le  23  juin 
elle  17  août  1810  ont  vu  naître  une  tentative  dont 
personne  alors  ne  pouvait  soupçonner  l'énorme 
influence. 

Le  23  juin,  la  Société  pour  l'instruction  élémen- 
taire avait  accueilli  la  proposition,  formulée  parle 
baron  de  Gérando,  d'introduire  le  chant  au  pro- 
gramme d'enseignement  mutuel.  Wilhem,  désigné 
par  Béranger,  répondait  par  une  adhésion  immé- 
diate à  la  demande  qui  lui  était  faite  de  créer  l'en- 
seignement populaire  de  la  musique,  suivant  le 
mode  d'éducation  mutuelle.  Il  soumettait  à  Jomard, 
secrétaire  de  la  Société,  le  résultat  de  ses  premières 
réflexions,  acceptait  de  se  soumettre  a  une  expé- 
rience, réunissait  une  quarantaine  d'élèves  chez  un 
instituteur  de  file  Saint-Louis,  M.  de  La  Haye,  et 
convoquait,  le  12  août,  les  principaux  membres  de 
la  Société  pour  l'instruction  élémentaire  à  venir  le 
juger. 

Le  17  août,  Jomard,  dans  un  rapport  présenté  au 
conseil  d'administration  de  la  Société,  constatait 
que  «  les  conditions  de  l'enseignement  mutuel  et  de 
l'arrangement  spécial  des  études  étaient  remplies 
par  le  plan  de  M.  B.  Wilhem  »;  et  il  invitait  le  con- 
seil à  faire  des  essais  dans  l'une  des  écoles  de  la 
Société,  puis  à  engager  le  préfet  de  la  Seine  à  intro- 
duire le  chant  dans  les  écoles  élémentaires  entrete- 
nues aux  frais  de  la  Ville  de  Paris. 

L'adoption  des  conclusions  du  rapporteur  devait 
donner  à  Wilhem  l'occasion  de  révéler  complètement 
son  génie  pédagogique  et  d'exercer  l'apostolat  pour 
lequel  il  était  né,  en  créant  à  la  fois  l'enseignement 
scolaire  du  chant,  qui  mettait  l'étude  de  la  musique 
à  la  portée  de  tous,  et  les  manifestations  chorales 
populaires,  qui  faisaient  du  peuple  le  collaborateur 
des  artistes. 

Si  cet  enseignement  scolaire  du  chant  et  ces  ma- 
nifestations chorales  populaires,  qui,  à  l'origine, 
servirent  puisamment  le  progrès  de  la  musique 
française,  ne  sont  plus  aujourd'hui  un  appui  pour 
l'art,  les  musiciens  n'ont  pas  à  le  reprocher  à  d'au- 
tres qu'à  eux-mêmes.  Jamais  ils  n'auraient  dû  en 
venir  à  l'ignorance  dédaigneuse  où  ils  sont  de  Wilhem 
et  de  son  œuvre. 

Il  a  fallu  plus  de  quinze  années  de  labeur  opiniâ- 
tre et  d'abnégation  a  Wilhem  pour  édifier  son  admi- 
rable système  d'éducation,  et  pour  mettre  au  point 
le  Manuel  de  lecture  musicale  et  de  chant  élémentaire, 
qui  résume  la  méthode,  dont  les  étonnants  résul- 
tats ont  émerveillé  l'Europe  entière  et,  comme  on 
l'a  dit,  «  naturalisé  »  le  chant  en  France. 

Les  nécecessités  de  l'enseignement  mutuel  :  rem- 
placement des  livres  par  des  tableaux,  éducation 
simultanée  de  différentes  classes  d'élèves,  usage  de 
signes  manuels,  emploi  de  moniteurs,  etc.,  l'obligè- 
rent à  résoudre  des  difficultés  proclamées  insur- 
montables par  des  pédagogues  contemporains  aussi 
informés  que  Choro.n.  On  le  vit  assis,  des  journées 
entières,  sur  les  bancs  des  écoles,  se  pénétrant  de 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


tout  ce  qui  constitue  les  procédés  île  ce  mode  d'édu- 
cation, observant,  notant,  et  concevant  peu  à  peu 
des  moyens  simples  et  ingénieux  d'arriver  à  l'intel- 
ligence en  frappant  les  yeux.  Mais  ce  n'est  pas  à  cet 
effort,  devenu  moins  utile  depuis  l'abandon  de  l'en- 
seignement mutuel,  que  se  borne  son  œuvre. 

Lui-même,  publiant  le  Guide  de  sa  méthode,  a 
montré  qu'elle  offrait  «  pour  tous  les  modes  d'ensei- 
gnement une  suite  de  leçons  graduées  avec  soin, 
pour  la  lecture  musicale,  le  chant  élémentaire, 
l'exécution  vocale  ».  Et,  en  effet,  ses  procédés  de 
l'escalier  i  ocal,  pour  rendre  sensible  à  la  vue  les  cinq 
tons  et  les  deux  demi-tons  de  la  gamme;  des  signes 
manuels,  pour  rappeler  par  des  gestes  distincts  la 
place  fixe  des  deux  demi-tons  dans  la  gamme;  de  la 
main  chromatique,  où  les  cinq  doigts  correspondent 
à  la  portée,  pour  rendre  facile  lia  lecture  de  la 
musique  et  fixer  par  la  mémoire  locale  les  diverses 
intonations;  de  Yindicateiir  vocal,  pour  expliquer 
avec  clarté  et  promptitude  ce  qui  est  relatif  à  la 
constitution  des  tons  et  des  modes,  sont  restés  les 
plus  ingénieux  moyens  d'éducation  musicale,  comme 
les  solfèges  et  chants  de  la  méthode,  composés  pour 
l'étude  de  chaque  intervalle,  et  qui  se  combinent  à 
deux,  trois  et  quatre  parties,  demeurent  la  prépa- 
ration la  plus  efficace  à  la  musique  chorale. 

Procédés  pédagogiques  de  la  méthode  Wilhem1. 

Les  principaux  procédés  pédagogiques  de  l'ensei- 
gnement créé  par  Wilhem  ont  donné  lieu  à  des  figu- 
res dont  plusieurs  sont  reproduites  dans  la  présente 
Encyclopédie.;  nous  renvoyons  le  lecteur  à  ces  fi- 
gures : 

L'échelle  diatonique,  pour  figurer  la  division  de  la 
gamme  en  o  tons  et  2  demi-tons  ;  les  échelons  I,  IV,  V, 
désignés  en  chiffres  romains  pour  marquer  les  notes 
tonales  (voir  page  3637); 

La  main,  dout  les  cinq  doigts  assimilés  aux  cinq 
lignes  de  la  portée  étaient  touchés  par  les  élèves  au 
début  des  études,  en  même  temps  que  les  notes 
ainsi  localisées  étaient  solfiées; 

La  portée  générale  de  onze  lignes,  donnant  l'étendue 
des  voix  humaines,  génératrice  de  différentes  clefs 
attribuées  aux  diverses  voix,  et  établissant  le  rapport 
entre  elles  des  clefs  de  sol,  d'ut  et  de  fa; 

L'indicateur  vocal,  composé  d'une  portée  avec 
lignes  supplémentaires,  divisée  en  trois  comparti- 
ments :  pour  les  notes  naturelles  au  milieu,  poul- 
ies mites  diésées  à  droite,  pour  les  notes  bémolisées 
à  gauche,  suivant  la  disposition  adoptée  pour  les 
doigts  de  la  main  (voir  page  3038). 

Chaque  ligne  de  la  portée  de  l'indicateur  recevait, 
dans  les  trous  pratiqués  à  cet  effet,  des  chevilles 
désignées  suivant  les  indications  reproduites  au  bas 
de  la  ligure.  —  A  l'aide  de  ces  chevilles,  on  pouvait 
analyser  les  divers  intervalles  majeurs,  mineurs,  ele; 
composer  les  différentes  gammes  dont  les  armures 
apparaissaient  ainsi  avec  une  clarté  qui  forçait 
l'attention  des  élèves  les  plus  étourdis;  enfin  rendre 
«  sensible  a  la  vue,  appréciable  à  l'esprit,  facilement 
transmissible  du  maître  aux  élèves,  et  des  élèves 
mêmes  à  leur  entourage,  l'enseignement  de  ce  qui 
est  relatif  à  la  constitution  des  tons  et  des  modes,  à 
la  transposition,  etc.  » 

Cependant,  ce  ne  sont  pas  les  seules  raisons  que 
les  musiciens  aient  de  se  souvenir. 


de  chant  chora/,  Palais  t 


Personne  avant  Wilhem  n'avait  songé  à  formuler 
de  divisions  rationnelles  de  l'enseignement  musi- 
cal, en  les  rapportant  aux  trois  degrés  d'instruction 
de  l'étude  des  langues:  la  lecture,  exécution  vocale 
ou  instrumentale  des  signes;  la  grammaire,  cons- 
truction mélodique  et  harmonique  de  la  phrase, 
règles  de  la  succession  logique  des  accords;  la  rhé- 
torique, applications  de  la  science  harmonique  aux 
éludes  du  contrepoint  el  de  la  fugue,  composition. 
Dans  un  temps  où  les  questions  d'éducation  préoc- 
cupaient l'élite,  c'était  rendre  la  musique  sympa- 
thique, même  à  ceux  qui  n'en  ressentaient  pas  les 
effets,  que  d'assimiler  son  enseignement  à  celui  des 
autres  études,  et  de  l'organiser  suivant  les  habitudes 
scolaires. 

Au  moment  où  la  décision  était  prise  de  mettre  la 
musique  au  programme  de  l'éducation  élémentaire, 
des  réformateurs  animés  de  bonnes  intentions  pro- 
posèrent, souvent  avec  éclat,  de  simplifier  la  pra- 
tique de  l'art  musical.  Les  uns,  comme  Câlin,  subs- 
tituaient aux  notes  des  chiffres,  d'autres  présen- 
taient des  signes  nouveaux,  déclaraient  nécessaire 
la  suppression  radicale  des  clefs,  ou  prétendaient 
n'user  que  de  notes  naturelles,  sans  recourir  aux 
dièses  et  aux  bémols.  Wilhem  sauvegarda  l'avenir 
en  restant  fidèle  à  la  notation  usuelle,  «langue  de 
tant  de  cbefs-d'œuvre,  dont  la  transcription  générale 
est  impossible  »,  et  en  prouvant,  par  les  résultats 
de  sa  méthode,  que  les  difficultés  de  la  lecture  musi- 
cale résultaient  «  bien  plus  de  la  mauvaise  classifi- 
cation des  matières  que  de  la  défectuosité  originelle 
des  signes  ». 

En  outre,  guidé  par  son  instinct  de  musicien-né, 
Wilhem  avait  compris  que  toutes  les  tentatives  faites 
contre  la  notation  musicale  usuelle  allaient  contre 
l'évolution  progressive  de  l'art  musical,  dont  l'écri- 
ture universellement  adoptée,  et  peu  à  peu  fixée  de- 
puis le  moyen  âge,  a  rendu  possible  une  traduction 
clairement  figurative  des  combinaisons  de  sonorités 
mélodiques  ou  harmoniques,  et  de  rythmes,  les  plus 
variées. 

Le  plan  d'enseignement  musical  adopté  par  Wilhem 
pouvait  seul  préparer  le  succès  définitif,  car  il  sut 
faire  servir  la  musique  au  but  général  de  l'éducation, 
en  composant  les  chants  de  la  méthode  sur  des  poèmes 
de  Morel  de  Vmdé,  qui  étaient  des  leçons  de  morale  ; 
et  il  voulut  que  ses  élèves  apprissent  en  même  temps 
à  connaître  la  musique  et  à  l'aimer,  en  ne  renfer- 
mant pas  la  méthode  dans  les  limites  établies  ordi- 
nairement entre  les  leçons  de  solfège  et  les  leçons 
de  chant,  en  appliquant,  dès  le  début  de  l'instruction, 
les  préceptes  fondamentaux  d'une  bonne  exécution 
vocale,  de  façon  que  les  plus  simples  morceaux  pro- 
duisissent sur  les  auditeurs  «  l'effet  d'une  lecture  dont 
les  élèves  comprennent  le  sens,  et  non  pas  celui  d'un 
assemblage  de  mots  débités  sans  intelligence  ». 

Enfin,  adonné  tout  entier  à  l'idée  de  populariser  la 
musique,  de  la  naturaliser  en  France,  par  l'introduc- 
tion du  chant  élémentaire  dans  les  écoles,  Wilhem 
n'eut  pendant  vingt-trois  ans,  de  181'J  à  1842,  pas 
d'autre  but  ni  d'autre  pensée.  Les  multiples  étapes 
qu'il  franchit  avant  de  parvenir  au  triomphe  absolu 
marquent  autant  de  victoires  pour  la  cause  dont  il 
s'était  fait  l'apôtre. 

Au  mois  d'octobre  1819,  après  l'adoption  du  rap- 
port lu  par  Jomard  à  la  Société  pour  l'instruction 
élémentaire  sur  la  première  tentative,  Wilhem  ouvre 
un  cours  dans  l'école  de  la  rue  Saint-Jean-de-l»  mv.iw. 
dépendant  de  la  Société,  pour  un  nouvel  essai  de  sa 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LORPHEON    3723 


méthode.  Le  29  mars  1820,  une  commission  formée 
du  baron  de  Gérando,  de  Jomard,  Maine  de  Biran, 
Lasteyrie,  Francœur,  Le  Bœuf,  Morel,  rend  compte 
à  la  Société  de  cet  essai. 

Pendant  (ont  un  mois,  la  maladie  avait  forcé  Wil- 
hem d'interrompre  ses  leçons.  Cependant,  les  com- 
missaires constatent  avoir  vu  : 

«  Les  enTants  du  peuple,  qui  étaient  dans  l'ignorance 
la  plus  complète  des  principes  de  l'art  musical, 
écrire  sous  la  dictée  des  phrases  musicales  simples, 
les  chanter  en  chœur  et  servir  à  leur  tour  de  guides 
et  de  soutiens  aux  voix  de  la  classe  entière,  après 
deux  à  trois  mois  de  travail  pendant  quatre  à  cinq 
heures  par  semaine.  » 

Ce  résultai  décide  la  Société  à  adopter  la  méthode 
Wilhem  pour  l'enseignement  de  la  musique  dans  les 
écoles  mutuelles.  Wilhem  reçoit  un  traitement  de 
1.500  francs  à  l'effet  de  continuer  ses  soins  et  en 
reconnaissance  de  ses  services. 

La  même  année,  le  ministre  de  l'intérieur  et  le 
préfet  de  la  Seine  visitent  l'école  où  Wilhem  enseigne, 
et  c'est  un  enfant  de  dix  ans,  Joseph  Hubert,  son 
meilleur  élève,  qui  dirige  l'exécution. 

Choron  se  hâte  de  reconnaître  qu'il  s'est  trompé 
en  déclarant  l'enseignement  de  la  musique  impos- 
sible dans  l'éducation  mutuelle.  Pour  couronner 
cette  première  étape,  Wilhem  est  accusé  de  plagiat 
par  des  professeurs  auteurs  de  méthodes  rivales.  Il 
sedéfend  dans  un  article  publié  par  le  Journal  d'é  lu- 
cation  de  1820,  où  il  confesse  sa  seule  ambition  : 
((  être  compté  parmi  ceux  dont  le  zèle  aura  contri- 
bué à  amener  l'époque  désirée  de  la  naturalisation 
de  la  musique  en  France  »... 

En  1821,  la  Société  pour  l'instruction  élémentaire 
lui  décerne  une  médaille  d'argent.  La  première  édi- 
tion de  la  mélhode  en  tableaux  parait.  Wilhem  en 
prépare  immédiatement  une  autre  et,  pendant  dix 
années,  ne  cesse  de  la  remanier  pour  la  rendre  plus 
parfaite.  Tout  son  temps  est  pris  par  la  composition 
des  exercices  de  sa  méthode,  par  l'enseignement  dans 
les  écoles,  dont  le  nombre  s'accroît  toujours,  par  des 
travaux  d'érudition  comme  la  notice  sur  les  recher- 
ches historiques  de  Perne,  qui  paraît  dans  le  Diction- 
naire des  Découvertes,  par  une  édition  de  sa  méthode 
•sous  une  forme  nouvelle  :  Douze  Leçons  hebdoma- 
daires de  musique  vocale,  que  lui  demande  le  consis- 
toire de  l'Eglise  réformée  pour  un  cours  à  l'usage  de 
jeunes  élèves  et  adultes,  et  qui  sera  plus  tard  adoptée 
parle  Gymnase  musical  militaire. 

A  partir  de  1826,  il  dirige  les  études  dans  dix 
écoles,  et  son  élève  Joseph  Hi'isert  est  appelé  à  le 
seconder.  Les  distributions  de  prix  sont  pour  lui 
une  occasion  de  mettre  la  musique  à  l'honneur  :  ses 
élèves  se  réunissent  pour  y  chanter  des  chœurs.  Des 
cours  du  soir  sont  fondés  pour  les  adultes.  L'effort 
de  chaque  année  rend  plus  fortes  les  sympathies 
acquises  et  en  suscite  de  nouvelles.  Il  suût  de  voir 
une  fois  Wilhem  pour  èlre  attiré  à  lui  par  sa  bonté, 
par  son  enthousiasme,  par  la  foi  qui  le  soutient  : 
«  l'espoir  d'un  noble  succès,  conscience  et  persévé- 
rance pour  le  mériter  ».  On  admire  sa  vaillance. 
Personne  ne  songe  à  sourire  de  ses  bizarreries,  dont 
Trélat,  dans  la  Revue  du  Progrès  de  1842  rapporte  cet 
exemple  :  «  Pendant  de  longues  années,  il  eut  l'ha- 
bitude de  donner  des  leçons  avant  le  jour  en  hiver, 
et  pour  ne  point  perdre  entièrement  le  temps  qu'il 
employait  à  courir,  il  s'était  fait  construire  une 
petite  lampe  suspendue  à  son  chapeau  et  qui  l'ai- 
dait à  lire  en  marchant...  » 


En  1835,  la  victoire  tant  cherchée  lui  vient.  Dans  la 
séance  du  6  mars,  Boulay  de  la  Meurthe  présente  au 
conseil  municipal  de  Paris  un  rapport  demandant 
l'organisation  de  l'enseignement  du  chant  dans 
toutes  les  écoles  primaires,  et  proposant  de  confier 
la  direction  de  ce  nouveau  service  à  celui  qui  en 
démontra  l'utilité  et  la  rendit  possible.  11  conclut 
par  l'affirmation  que  le  traitement  annuel  de 
G. 000  francs,  fixé  par  la  commission  spéciale  en 
faveur  de  Wilhem,  est  le  payement  d'une  dette  na- 
tionale : 

«  ...  Apres  plus  de  quinze  ans  de  travaux  difficiles 
et  continus,  M.  Wilhem  a  amené  la  méthode  qui 
porte  son  nom  à  ce  point  de  perfection  qu'elle  est 
préférée  à  toutes  les  autres,  même  à  celles  usitées 
en  Allemagne,  et  qu'elle  a  été  adoptée  par  l'Univer- 
sité pour  toutes  les  écoles  normales  primaire?.  lia 
compris  qu'il  importait  à  la  cause  du  chant  qu'il  fût 
enseigné  dans  le  véritable  espnt  de  sa  méthode  à 
Paris,  d'où  ses  élèves  le  propageront  ensuite  en  tous 
lieux.  Il  a  ainsi  sacrifié  à  un  modeste  enseignement 
populaire  sa  vie,  sa  fortune,  et  nous  allions  presque 
dire  sa  gloire,  celle  que  lui  promettait  son  génie 
appliqué  à  des  travaux  d'un  autre  ordre,  si  la  gloire 
ne  devait  être  aussi  la  récompense  des  bienfaits  de 
l'humanité.  M.  Wilhem  aura  doté  son  pays  d'un 
nouveau  penchant,  d'un  eoùt  général  pour  un  art 
utile  et  agréable.  Son  nom  restera  éternellement 
attache  à  l'œuvre  du  chant  populaire,  au  souvenir 
d'une  grande  amélioration  dans  l'éducation  natio- 
nale. C'est  cet  homme  de  bien,  si  laborieux,  sidésin- 
téressé,  si  plein  de  dévouement  et  de  modestie,  doué 
d'un  talent  si  élevé,  envers  lequel  il  convient  que 
Paris  acquitte  aujourd'hui  une  dette  contractée  par 
Paris  et  par  la  France...  » 

Désormais,  la  gloire  est  venue  à  Wilhem.  11  a  été 
fait  chevalier  de  la  Légion  d'honneur,  et  bientôt, 
triomphant  auprès  de  l'Etat  comme  il  a  triomphé 
auprès  de  la  Ville  de  Paris,  il  voit  sa  méthode 
approuvée  par  l'Institut,  par  l'Université,  et  l'ensei- 
gnement du  chant  inscrit  aux  programmes  univer- 
sitaires. A  son  titre  de  directeur-inspecteur  général 
de  l'enseignement  du  chant  dans  les  écoles  de  la 
ville  de  Paris,  s'ajoute  celui  de  délégué  général  pour 
l'inspection  de  l'enseignement  universitaire duchanL 

Cependant,  son  activité  ne  faiblit  pas  :  il  surveille 
par  lui-même  le  travail  accompli  dans  soixante- 
quinze  écoles,  et  il  se  prépare  de  nouveaux  devoirs. 
Depuis  quinze  ans  qu'il  sème,  il  veut  récolter.  Alors 
naît  l'Orphéon,  floraison  du  chant  «  naturalisé  »  en 
Fiance. 

Le  mot  etla  chose  sont  restés. 

La  création  «!«■  «  l'Orphéon  ». 
Moi-t  de   Wilheui. 

Dès  le  début  de  son  œuvre,  Wilhem  se  préoccupa 
d'assigner  un  but  pratique  aux  études  scolaires  du 
chant.  De  1820  à  1833,  dans  chacune  des  écoles  où 
l'enseignement  était  donné  par  sa  méthode,  on  en- 
tendit des  chœurs  d'enfants,  aux  jours  solennels. 

Pour  la  premiè/e  fois,  en  1833,  au  mois  d'octobre, 
il  réunit  à  l'école  du  passage  Pecquel  les  meilleurs 
élèves  des  onze  écoles  où  il  professait  alors,  et  il 
décida  ensuite  de  renouveler  cet  essai  tous  les  mois. 
A  celte  occasion,  il  avait  fait  paraître  la  première 
livraison  d'un  recueil  périodique  de  musique  vocale 
sans  accompagnement,  correspondant  à  ceux  édités 
depuis  longtemps  en  Allemagne,  en  Suisse,  en  Hol- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


3724 

lande,  mais  dont  il  n'y  avait  pas  encore  d'exemple 
en  France.  Cette  publication  eut  pour  litre  :  l'Orphéon. 
Elle  devait  comprendre  près  de  trois  cents  chœurs, 
en  huit  volumes. 

Les  inconvénients  d'une  organisation  qui  obligeait 
à  un  trop  long  trajet  certains  enfants  étant  apparus 
à  Wilhem,  il  groupa  les  élèves  d'arrondissements 
voisins,  et  les  réunit  tour  à  tour,  chaque  mois,  un 
jeudi  après-midi,  dans  les  écoles  les  plus  centrales. 
Bientôt,  on  prit  l'habitude  d'appeler  orphéonistes  les 
élèves  d'élite  qui  participaient  à  ces  réunions,  et 
orphéon  l'ensemble  de  ces  élèves.  Après  un  an,  en 
1831-,  Wilhem  put  écrire,  dans  une  lettre  adressée 
au  conseiller  municipal  Boulay  de  laMeurthe:  «  Ces 
exercices  fournissent  le  spécimen  d'un  noble  chant 
populaire,  sans  luxe  et  sans  trivialité.  Que  ce  pre- 
mier essai,  pur  produit  de  la  méthode,  devienne  le 
germe  fécond  de  mille  et  mille  concerts  aux  cent 
voix!  » 

Par  cette  innovation,  Wilhem  assurait  à  son  effort 
les  sympathies  unanimes  de  la  Ville  et  de  l'Etat. 
Lorsqu'il  eut  adjoint  aux  voix  des  enfants  celles  des 
hommes  et  des  femmes,  formés  aux  cours  du  soir 
pour  adultes,  que  son  fervent  disciple  Joseph  Hubert 
avait  ouverts  en  février  1835,  il  ne  lui  resta  plus 
aucune  preuve  à  fournir  de  l'excellence  de  sa  mé- 
thode et  de  l'utilité  de  l'enseignement  scolaire  du 
chant.  Le  premier  résultat  fut  sa  nomination  de 
directeur-inspecteur  général,  et  de  chevalier  de  la 
Légion  d'honneur,  le  second  l'approbation  par  Gui- 
zot,  en  1836,  sur  le  rapport  du  Conseil  royal  de  l'ins- 
truction publique,  du  règlement  des  réunions  de  l'Or- 
phéon, puis  la  constitution,  en  1837,  de  la  Société  de 
l'Orphéon,  approuvée  par  le  ministre  de  l'intérieur, 
dont  Orfila  fut  le  président,  et  Berton  le  vice-prési- 
dent. 

La  première  réunion  officielle  de  l'Orphéon  eut 
lieu  en  1836,  à  la  salle  Saint-Jean,  dans  l'ancien 
Hôtel  de  Ville.  Les  Spartiates  et  la  Bonne  Petite 
Infanterie,  dans  ce  «  concert  donné  par  les  pauvres 
aux  riches  »,  comme  disait  Wilhem,  tirent  merveille, 
el  le  succès  fut  immense. 

L'admirable  fête  se  renouvela  fréquemment,  car 
l'enthousiasme  de  Wilhem  suscitait  des  convictions 
assez  énergiques  pour  l'application  stricle  du  règle- 
ment :  des  réunions  partielles  un  jeudi  de  chaque 
mois,  des  réunions  générales  un  dimanche  de  cha- 
que trimestre.  Et  son  activité  incessante,  consacrée 
à  la  cause  dont  il  était  l'apôtre,  offrait  à  tous  un 
exemple.  L'éducation  de  plus  de  six  mille  enfants  a 
surveiller  dans  quatre-vingts  écoles,  vingt-deux  répé- 
titions mensuelles  à  diriger,  l'organisation  des  séan- 
ces périodiques  de  l'Orphéon,  ne  suflisaient  pas 
à  remplir  sa  vie.  Il  composait  des  chœurs,  surveil- 
lait les  nouvelles  éditions  de  sa  méthode,  où,  repro- 
duisant le  rapport  de  Boulay  de  la  Meurthe  comme 
préface,  ils  substituait  au  mot  «  génie  »  qui  le  qua- 
lifiait, le  mot  aptitude,  et  il  lui  fallait  encore  orga- 
niser des  réunions  pour  expliquer  son  système 
d'enseignement,  dont  beaucoup  s'émerveillaient, 
avec  la  curiosité  des  jeunes  enfants  qui,  «  lorsqu'ils 
entendent  sonner  une  horloge  pour  la  première  fois, 
voudraient  pouvoir  la  démonter  afin  de  connaître  le 
mécanisme  employé  pour  la  faire  parler  ».  (Lettre 
de  Berton  à  Wilhem,  février  1839,  au  lendemain 
d'une  conférence.) 

Mais  aucun  effort  ne  le  rebutait.  La  dignité  avec 
laquelle  il  accomplissait  sa  mission  et  comprenait 
ses  devoirs  ajoutait  encore  à  l'heureuse  influence  de 


sa  vaillance.  N'estimant  la  musique  que  comme  un 
instrument  de  culture  morale,  il  était  insensible 
aux  flatteries,  et  savait  répondre  avec  fermeté  à  ceux 
qui  ne  voyaient  dans  ses  élèves,  ou  dans  l'Orphéon 
que  des  curiosités  musicales.  A  des  demandes  d'au- 
ditions qu'il  jugeait  inutiles,  il  déclarait  :  «  L'Orphéon 
ne  va  point  en  ville;  »  et  au  roi  lui-même,  qui  aurait 
été  heureux  d'un  concert  de  ses  élèves  sous  les  fenê- 
tres des  appartements  royaux,  il  fil  dire  :  «  Mes  élè- 
ves ne  m'appartiennent  pas,  je  n'ai  d'autorité  sur  eux 
que  dans  la  classe;  c'est  là  que  le  roi  pourra  les  en- 
tendre s'il  veut  bien  nous  honorer  de  sa  visite.  » 

L'œuvre  de  Wilhem  devait  aussi  conquérir  la 
grande  presse.  Tous  les  journaux  prêtèrent  attention 
à  l'Orphéon,  après  le  premier  hommage  rendu  par 
Mme  Emile  de  Girardin,  en  phrases  généreuses, 
spontanées,  dans  l'une  de  ses  «  Lettres  parisiennes  » 
publiées  en  1839  par  la  Presse. 

«  ...  Nous  qui  sommes  à  la  recherche  de  toutes  les 
bonnes  et  nobles  pensées,  nous-même  nous  n'avions 
aucune  idée  d'une  des  institutions  les  plus  admira- 
bles de  notre  époque.  Depuis  deux  ans,  on  nous 
parlait  bien  de  la  méthode  Wilhem  et  des  concerts 
populaires  de  la  Sorbonne,  mais  on  en  parlait 
vaguement.  Aujourd'hui,  le  succès  est  éclatant...  Un 
chœur  de  quatre  cents  ouvriers  de  tous  les  âges, 
depuis  dix  ans  jusqu'à  cinquante  ans!  comprenez- 
vous  cet  effet  de  voix?  ce  mélange  de  voix  enfanti- 
nes, de  voix  adolescentes,  de  voix  brillantes  et  jeu- 
nes, de  voix  puissantes  et  graves,  qui,  par  le  plus 
merveilleux  ensemble,  ne  forment  qu'une  seule  voix! 
quatre  cents  personnes  enlïn  qui  chantent  à  l'unani- 
mité... Nous  avons  entendu,  en  Allemagne,  ces 
fameux  chœurs  si  vantés...  et  nous  déclarons  que 
l'impression  vive  et  profonde  que  laissent  ces  mélo- 
dieuses solennités  a  été  pour  nous  complètement 
dépassée  par  la  puissante  émotion  que  nous  a  causée, 
an  dernier  concert  de  la  Sorbonne,  le  chant  de  ces 
ouvriers...  Il  nous  semblait  entendre  les  célestes 
symphonies,  le  chœur  fraternel  des  anges  et  des 
chérubins.  Seulement,  les  anges  étaient  des  menui- 
siers, des  imprimeurs  et  des  orfèvres;  el,  parmi  les 
chérubins,  nous  apercevions  çà  et  là  quelque  nègre 
bouffi  qui  battait  la  mesure  avec,  ses  doigts  d'ébène 
aux  ongles  blancs!  La  vision  séraphique  disparais- 
sait, niais  l'admiration  philanthropique  nous  restait 
tout  entière,  lui  vérité,  c'est  une  belle  chose  que  la 
résolution  de  ce  problème  :  la  moralisation  du  peu- 
ple par  les  arts.  Grâce  à  la  méthode  Wilhem,  avant 
dix  ans,  les  chefs-d'œuvre  de  Mozart  et  Uossini  seront 
populaires...  » 

Ainsi  soutenu,  et  aux  mains  d'un  homme  comme 
Wilhem,  l'enseignement  du  chant  dans  les  écoles  de 
Paris,  et  les  manifestations  de  l'Orphéon  ne  pou- 
vaient que  prendre  chaque  année  plus  de  développe- 
ment. Son  nom  et  son  œuvre  devinrent  populaires. 
Au  lendemain  de  l'audition  donnée  par  l'Orphéon, 
en  juin  1841,  Béranger  se  fit  l'interprète  de  la  pensée 
commune  et,  encore  lenu  par  l'émotion,  il  écrivit  à 
Wilhem  : 


Mon  vieil  ami,  t:i  d- ■:■ 
Grâce  a  tes  merveilleux  efforts, 
Des  travailleurs  la  voix  s'amende 
Et  se  plie  aux  savants  accords. 
D'une  fée  as-tu  la  baguette, 
r..ui-  i  .11,1  ri-  ainsi  l'ail  familier? 
Il  purifiera  la  guinguette, 
H  sanctifiera  l'atelier. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHEON    3725 


VA'ilhem,  toi  «  1  r ■  qui  |;i  jeunesse 
Rêva  (irétry,  Gluck  et  Mozart, 
Courage!  A  la  foule  en  détresse 
Ouvre  tous  les  trésors  de  l'art. 
Communiquer  à  des  sens  vides 
Les  plus  nobles  émotions, 
C'est  faire  en  des  grabats  humides 
Du  soleil  entrer  les  rayons. 

La  musique,  source  féconde, 
Epandant  ses  flols  jusqu'en  lias. 
Nous  vernm-  ivres  de  -  a  onde 
Artisans,  laboureurs,  g  ddats. 
Ce  concert,  puis>r>-lu  lYt  uulre 
A  tout  un  monde  divisé! 
Les  cœurs  sont  bien  près  de  s'entendre, 
Quand  les  voix  ont  fraternisé... 

D'une  œuvre  et  si  longue  et  si  rude 

Auras-tu  le  prix  mérité? 

Va,  ne  crains  pas  L'ingratitude 


Ceiu  d  ml  lu  i  harmes  les  douleurs 

Offriront  un  jour  à  la  gloire 

Des  chants,  des  larmes  et  des  fleurs. 

La  prédiction  de  Béranger  ne  devait  pas  larder 
à  être  réalisée.  L'année  suivante,  le  26  avril  1842, 
Wilhem,  âgé  de  soixante  et  un  ans,  mourait  d'une 
lluxion  de  poitrine,  après  une  semaine  de  souffran- 
ces qui  ne  parvinrent  pas  à  distraire  son  esprit  de 
la  composition  d'un  Requiem,  qu'il  voulait  écrire  en 
mémoire  de  Cherubini,  décédé  deux  mois  avant,  et 
faire  exécuter  à  la  prochaine  réunion  de  l'Orphéon. 
Dès  que  sa  mort  fut  connue,  oii  s'apprêta  à  offrir  à 
la  gloire  de  Wilhem  «  des  chants,  des  larmes  et  des 
Heurs  ». 

L'Institut,  l'Université,  le  Conseil  municipal,  les 
Ecoles,  la  Société  pour  l'instruction  élémentaire 
décidèrent  des  obsèques  solennelles.  Elles  furent 
fixées  au  2  mai,  et  le  corps  Tut  embaumé. 

On  avait  choisi  l'église  Saint-Sulpice.  Une  foule 
immense  s'y  trouva  réunie  le  2  mai.  L'Orphéon,  sous 
la  direction  de  Joseph  Hurert,  interpréta  une  messe 
de  Perne,  gravée  et  apprise  entre  le  lendemain  de 
la  mort  et  le  jour  des  obsèques.  Tous  ceux  qui  par- 
ticipèrent à  cette  exécution  étaient  des  élèves  de 
Wilhem,  reconnaissants  envers  celui  qui  les  avait 
initiés  à  l'art,  et  l'aimant  avec  piété  filiale.  Ils 
avaient  rêvé,  pour  suprême  hommage  à  leur  maître, 
une  grandiose  solennité  musicale;  mais  l'archevêque 
de  Paris  la  diminua,  en  s'opposant  à  ce  que  les  jeu- 
nes filles  prissent  part  à  l'exécution.  Après  la  messe, 
le  cortège  se  mit  en  marche  vers  le  cimetière  du 
Père-Lacttaise,  entre  une  double  ligne  de  soldats,  et 
ayant  à  sa  tète  des  jeunes  filles  des  écoles  de  la  Ville 
de  Paris  vêtues  de  blanc. 

Ce  fut,  à  travers  Paris,  une  procession  émouvante. 
Le  souvenir  nous  en  a  été  conservé  par  le  docteur 
Trélat  dans  la  Revue  du  Pivgrès  : 

«  Le  corps  était  porté  sur  un  char  très  simple, 
suivi  de  M.  Wilhem  fils;  les  coins  du  drap  funéraire 
étaient  tenus  tour  à  tour  par  Béranger,  par  MM.  Jo- 
mard,  de  l'Institut;  Lebrun,  membre  de  l'Académie 
française  et  de  la  Chambre  des  pairs;  Boulay  de  la 
Meurlhe  et  Périer,  président  et  membre  de  la  Société 
pour  l'instruction  élémentaire;  Rousselle,  inspec- 
teur général  de  l'Université  et  membre  de  l'Acadé- 
mie française. 

«  Plusieurs  maires  de  la  Ville  de  Paris,  des  savants, 
des  artistes,  un  grand  nombre  d'institutrices  ut  de 
mères  de  famille,  des  soldats,  de  jeunes  enfants  de 
troupe  avaient  été  conduits  à  cette  cérémonie  impo- 


sante, par  un  sentiment  profond    d'affection  ou  de 
reconnaissance... 

«  Dans  le  quartier  populeux  du  faubourg  Saint- 
Antoine,  les  fenêtres  étaient  garnies  de  spectateurs, 
et  on  entendit  sortir  de  chaque  bouche  :  «  C'est 
M.  Wilhem,  c'est  le  maître  de  chant  des  ouvriers!  » 
Le  cortège  se  grossit  alors  de  tout  le  peuple  qui  se 
trouvait  sur  la  voie  publique. 

«  Jusque-là,  les  convois  politiques  seuls  avaient 
amené  la  foule.  Celui  de  Wilhem  est  le  premier  où 
elle  se  soit  portée  sans  passion,  sans  esprit  de  parti. 
Elle  vint  honorer  le  créateur  du  chant  populaire  en 
France,  elle  vint  aux  funérailles  de  l'homme  ver- 
tueux. 

m  A  l'entrée  du  cimetière,  les  répétiteurs  des 
écoles  demandèrent  le  corps,  et  le  portèrent  jusqu'à 
la  tombe  entre  ses  maîtres  et  ses  amis,  Méhul,  Gré- 
try,  Lesueur,  Gossec,  Boîeldieu,  Pakr,  Hérold,  Cheru- 
bini,  glorieuse  famille  réunie  comme  en  un  nouvel 
Elysée...  » 

Sur  la  tombe,  Périer,  au  nom  du  Comité  central 
de  l'Instruction  publique,  Demoyencourl,  au  nom  de 
la  Société  pour  l'instruction  élémentaire,  louèrent  la 
vie  glorieuse  de  Wilhem,  et  montrèrent  aux  autorités 
administratives  et  scolaires  le  devoir  qui  leur  était 
laissé  :  «  conserver  intacte  la  méthode  de  Wilhem, 
l'œuvre  de  son  génie  ». 

Joseph  Hubert,  chancelant  d'émotion,  vint  après 
eux  proclamer  que  la  continuation  de  son  œuvre 
devait  survivre  à  Wilhem;  et  les  voix  des  répétiteurs 
s'unirent  à  la  sienne  pour  la  promesse  solennelle  de 
rester  unis  et  fidèles.  Puis,  lentement,  la  foule  redes- 
cendit vers  Paris. 

Les  disciples  de  Wilhem  ont  tenu  leur  parole. 
Groupés  autour  de  Joseph  Hubert,  nommé  successeur 
île  Wilhem  malgré  les  compétitions  immédiatement 
suscitées,  ils  ont  pendant  dix  ans  continué  l'œuvre 
sans  faiblesse.  Ils  se  souvenaient. 

En  18o2,  Charles  Gouxod  succéda  à  Hubert.  Depuis 
ce  temps,  la  pensée  de  Wilhem  ne  vivifie  plus  l'ensei- 
gnement scolaire  du  chant.  Son  nom  est  ignoré;  on 
enseigne  la  musique,  on  n'apprend  plus  à  l'aimer, 
et  surtout  on  a  commis  l'imprévoyance  d'abandonner 
la  méthode  d'enseignement  si  minutieusement  éla- 
borée par  Wilhem,  et  sur  la  diffusion  de  laquelle  re- 
posait tout  le  succès. 

L'enseignement  de  la  lecture  musicale  et  du  chant 
élémentaire  qui  avait  été  établi,  et  perfectionné  par 
plus  de  vingt  années  d'expérience,  était  si  clair,  si 
transmissibie,  qu'il  pouvait  être  donné  par  les  meil- 
leurs élèves  choisis  comme  moniteurs.  Une  telle  mé- 
thode ne  pouvait  qu'être  d'usage  pratique  pour  des 
instituteurs  et  des  institutrices  initiés  dans  leurs 
écoles  normales  à  une  pédagogie  conçue  pour  le 
jeune  dévouement  de  simples  élèves-moniteurs. 

Il  avait  été  nécessaire  de  combiner  les  études  pour 
pouvoir  faire  travailler  ensemble  des  élèves  de  forces 
différentes.  Avecjle  perfectionnementde  l'organisation 
scolaire,  cette  nécessité  devait  disparaître.  Mais  il 
restait  de  l'heureuse  conception  du  début,  que  les 
exercices  et  chants  —  d'abord  appliqués  à  une  étude 
particulière  de  la  science  musicale  ou  de  l'art  du 
chant,  ensuite  réunis  systématiquement  pour  former 
les  différentes  parties  d'un  chœur  —  étaient  un 
moyen  certain  de  susciter  le  goût  instructif  du  chant 
choral,  et  comme  un  besoin  de  polyphonie. 

Les  successeurs  directs  de  Wilhem,  formés  par  des 
moyens  d'éducation  strictement  individuels,  ne  surent 
pas  comprendre  que  les  anciens  élèves  de  Wilhem  et 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


de  ses  collaborateurs  se  groupaient 


îrell 


ment,  devenus  adultes,  dans  des  réunions  du  soir 
pour   former,  à  l'exemple  de  l'Orphéon,  ces   nom- 
breuses sociétés  chorales  longtemps  florissantes 
le  plaisir  du  chant  choral  n'avait  pas 


être  stimulé, 
parce  qu'il  était  le  fruit  de  l'enseignement  favorable 


reçu,  et  le  résultat  d'une  fraternité  artistique  pré- 
parée sur  les  bancs  de  l'école. 


L'ORPHÉON  APRÈS  WILHEM 

Comme  institution  municipale  de  la  Ville  de  Paris, 
l'Orphéon  devait  poursuivre  avec  une  scrupuleuse 
fidélité  la  tradition  de  son  fondateur  pendant  une 
période  de  dis  années,  —1842-1 882,  —  sous  la  direc- 
tion du  meilleur  élève  de  Wilhem,  Joseph  Hubert- 
Les  trois  cents  orphéonistes  du  début,  en  1836,  pas- 
sés à  t50  en  1838,  à  600  en  1841,  à  1.000  en  1845,  à 
1.600  en  1846,  puis  à  2.000,  seraient  devenus  encore 
beaucoup  plus  nombreux,  si  la  dimension  des  locaux 
de  réunion  n'avait  obligé  à  restreindre  le  nombre  des 
adhérents.  Chaque  aimée  apportait  régulièrement 
un  contingent  d'aneiens  élèves.  Une  première  erreur 
fut  commise  par  cette  imprévoyance  d'une  grande 
salle  d'audition  devenue  indispensable.  L'autre  er- 
reur, la  plus  funeste  pour  l'avenir,  fut  l'incompré- 
hension, puis  l'abandon  de  la  méthode  d'enseigne- 
ment si  laborieusement  édifiée  par  Wilhem.  En  succé- 
dant à  Joseph  Hubert,  en  1852',  Charles  Gounod 
trouva  une  armée  de  2.000  orphéonistes,  garçons  et 
fillettes,  adultes  hommes  et  femmes,  dont  l'ardeur 
le  conquit.  11  apporta  tout  son  jeune  enthousiasme 
pour  animer  les  répétitions  et  préparer  de  grandioses 
exécutions.  Mais,  n'ayant  pas  eu,  comme  Wilhem, 
sous  l'influence  des  spécialistes  de  la  Sociélé  pour 
l'instruction  élémentaire,  à  méditer  sur  les  nécessités 
pédagogiques,  il  ne  sut  pas  continuer  l'œuvre  d'édu- 
cation initiale.  Il  laissa  détruire  la  féconde  unité 
d'un  enseignement  intelligemment  adapté,  et  se  ré- 
pandre de  nouvelles  méthodes,  publiées  par  Halévy, 
Marmontel,  Daniiauser,  etc.  Sous  prétexte  de  sim- 
plification, leurs  auteurs  négligeaient  les  utiles  pro- 
cédés de  la  méthode  Wilhem;  ils  sacrifiaient  tota- 
lement les  exercices  de  culture  vocale,  abandonnai 
ainsi  l'entraînement  favorable  au  développement  du 
goût  pour  le  chant  choral,  et  brisant  entre  les  élèves 
anciens  et  nouveaux,  entre  les  entants  et  les  adultes, 
le  lien  d'une  même  éducation,  attrayante  pour  tous 
les  âges,  qui  avait  réussi  à  s'imposer  dans  tous  les 
ordres  de  l'enseignement  officiel,  dans  l'enseigne- 
ment libre,  et  même  dans  l'armée. 

Après  Charles  Gounod,  l'institution  eut  comme 
directeurs  :  en  1863,  Bazin,  pour  la  rive  gauche,  et 
Pasdeloup  pour  la  rive  droite  :  en  1873,  Bazin,  avec 
le  titre  d'inspecteur  principal  et  l'assistance  de 
deux  inspecteurs  chargés  de  la  surveillance  de  l'en- 
seignement (dès  1865,  cette  organisation  avait  été 
adoptée  par  le  département,  de  la  Seine  et  confiée  à 
Laurent  de  Hillé);  en  1878,  Daniiauser;  enfin,  M.  Au- 
guste Chapuis,  en  1894,  pour  une  période  de  plus 
de  trente  années,  pendant  lesquelles,  après  un 
essai  de  rénovation,  l'institution  municipale  pari- 
sienne d'éducation  musicale  scolaire  et  post-sco- 
laire, ayant  perdu  toute  fidélité  à  la  tradition, 
cessa  d'être  désignée  sous  le  nom  à'Qrpkêon. 

Discrédité  auprès  des  musiciens,  jugé  indigne  de 
la  dignité  administrative,  le  mot  reste  cependant 
d'usage  courant.  Car,  du  temps  de  Wilhem  lui-même 


et  malgré  le  veto  de  l'administration  d'alors,  le 
nom  d'Orphéon,  adopté  parles  premiers  groupements 
populaires  de  chant  choral  ayant  quelque  organisa- 
tion, n'a  pas  cessé  d'être  en  faveur  auprès  de  ceux 
d'aujourd'hui,  accrus  de  tous  les  groupements  popu- 
laires de  musique  instrumentale. 

L'histoire  de  ces  groupements  n'est  pas  indigne 
d'attention,  si  l'on  considère  que  les  progrès  les 
plus  favorables  au  développement  de  l'art  musical 
en  France,  de  la  fin  du  xvine  siècle  aux  avant-der- 
nières années  du  xixe  siècle,  —  tels  la  création  du 
Conservatoire  national  avec  ses  succursales,  et  celles 
des  grands  concerts  du  dimanche,  — se  rattachent  à 
des  initiatives  ou  à  des  influences  d'origine  popu- 
laire. 

Les  documents  historiques  rappelés  dans  cet  ou- 
vrage même,  dans  la  partie  qui  traite  de  notre  his- 
toire musicale  de  1789  à  1800,  l'établissent  en  ce 
qui  concerne  le  Conservatoire,  né  de  la  nécessité  de 
former  des  exécutants  pour  la  célébration  des  fêtes 
civiques.  Les  premiers  grands  concerts  du  diman- 
che, où  la  foule  est  appelée,  ont  été  institués  par 
Pasdeloup,  qui  s'était  formé  comme  chef  d'orchestre 
pendant  la  direction  de  l'orphéon  municipal  de  la 
Ville  de  Paris  avant  1870,  et  qui  avait  pu  alors  se  ren- 
dre compte  des  possibilités  offertes  par  les  heureux 
résultats  d'une  éducation  musicale  généralisée.  Son 
émule,  Edouard  Colonne,  devait,  lui  aussi,  être  en- 
couragé à  se  lancer  dans  une  entreprise  de  grands 
concerts,  sous  la  même  influence  :  il  avait  été  initié 
à  la  musique  dans  l'évangile  de  l'Orphéon,  la  mé- 
thode Wilhem,  dont,  aux  toutes  dernières  années  de 
sa  vie.  il  chantonnait  les  premiers  chants,  avec  un 
souvenir  reconnaissant,  et  l'émotion  des  jeunes 
souvenirs,  évoquant  le  temps  où  tout  le  monde 
allait  devenir  musicien. 

En  outre,  il  ne  peut  pas  être  indifférent  de  savoir 
que,  pendant  un  long  moment,  le  chant  choral  a  été 
dans  notre  goût,  et  qu'il  a  été  près  d'entrer  défi- 
nitivement dans  nos  moeurs. 

Avant  Wilhem,  on  ne  connaissait  en  France  que 
les  chœurs  d'opéras  ou  de  maîtrises.  A  ce  moment, 
l'Allemagne  était  couverte  de  sociétés  chantantes, 
alimentées  par  la  musique  de  Beethoven,  de  Schu- 
bert, de  Mendelssohn,  de  Webbr,  composée  sur  les 
poèmes  de  Gœlhe  et  de  Schiller.  Dans  un  discours  de 
réception  à  l'Académie  des  sciences,  belles-lettres  et 
arts  de  Lyon,  en  1870,  un  zélateur  de  l'Orphéon, 
Emile  Guimet,  —  le  fondateur  du  Musée,  grand 
voyageur  qui  était  aussi  grand  industriel  et  musicien 
de  valeur,  —  a  marqué  avec  précision  cette  dif- 
férence.: 

«  Faut-il  conclure  de  ce  fait  que  nous  sommes 
moins  bien  organisés  que  les  Allemands  du  Nord 
pour  la  musique  d'ensemble.  On  me  permettra  de 
n'être  pas  de  cet  avis.  Pour  comparer  les  dispositions 
harmoniques  des  deux  peuples,  il  faudrait  les  placer 
d'abord  dans  des  conditions  identiques  de  milieu 
et  d'éducation. 

«  Or  voilà  trois  siècles  que  les  protestants  ont 
renoncé  au  plain-chant,  et  quand  nous  aurons 
comme  eux,  pendant  plusieurs  générations,  entendu 
et  exécuté  de  la  musique  harmonisée  et  rythmée,  il 
sera  temps  alors  de  constater  qui  aura  fait  le  plus 
de  progrès  dans  l'usage  de  la  vraie  musique. 

«  Car,  il  faut  bien  l'avouer,  avec  tout  le  respect 
que  l'on  doit  à  une  musique  imposante  et  sacrée,  le 
plain-chant,  qu'on  apprend  plus  ou  moins  bien  aux 
enfants  français,  est   une  musique   incomplète,  qui 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHEON    3727 


n'a  ni  l'étendue,  ni  la  tonalilé,  ni  le  rythme,  ni 
l'harmonie,  et  si  rarement  la  mélodie  qu'il  en  faut 
à  peine  parler...  Par  surcroît  de  désastre  artistique, 
dans  le  plus  grand  nombre  des  communes  de  France, 
on  laisse  chanter  faux  au  lutrin.  Voilà  [ce  qui  nous 
retarde.  Certes,  on  ne  peut  refuser  à  des  psaumes  la 
grandeur  et  le  caractère  qui  eu  font  des  inspirations 
typiques,  transmises  par  les  âges  comme  un  reflet 
de  la  foi  chrétienne  à  ses  débuts  éclatants.  Il  ne  faut 
pas  non  plus  méconnaître  la  saveur  archéologique 
qu'on  trouve  à  écouter  un  beau  motet  dans  une 
vieille  église.  Mais  au  point  de  vue  purement  musical, 
on  doit  admettre  que  le  plain-chant  ne  peut  satis- 
faire l'artiste  musicien.  Entretenir  dans  les  oreilles 
ces  tonalités  incomplètes  et  ces  mélodies  indécises, 
équivaut  à  montrer  aux  élèves  de  peinture  des 
tableaux  de  primitifs,  à  de  futurs  sculpteurs  les  ébau- 
ches des  Pélasges,  et  à  des  aspirants  poètes  les 
essais  des  littérateurs  malgaches...  » 

Un  document  publié  par  Henry-Abel  Simon  ,  dans 
son  ouvrage  sur  l'Institution  orphéonique  française, 
publié  en  1909  chez  l'éditeur  Marguerital,  montre 
qu'avant  Wiliikm,  les  premières  sociétés  chorales, 
nées  de  l'enthousiasme  populaire  après  les  «  Trois 
Jours  »  de  1830,  n'étaient  pas  seulement  entravées 
par  le  manque  d'éducation  et  de  répertoire.  C'est  une 
lettre,  adressée  en  1860,  de  Londres,  où  il  s'étail 
exilé,  parle  fondateur  de  la  première  en  date  des 
sociétés  de  1830,  l'ouvrier  monteur  en  bronze 
Charles  Sellier.  Il  y  évoque  le  souvenir  de  démêlés 
avec  la  police,  à  propos  de  son  activité  chorale.  Sa 
société  avait  pris  pour  nom  :  les  Cêeiliens,  et  elle 
avait  suscité  une  émulation  qui  réunit  d'autres  ou- 
vriers dans  différents  quartiers  ,  pour  animer  les 
rues  et  les  carrefours  par  l'exécution  de  chœurs 
patriotiques,  ou  de  simples  chansons  agrémentées 
de  quelque  harmonie  au  refrain.  L'n  samedi  soir  de 
1830,  place  Royale,  —  devenue  place  des  Vosges,  — 
les  cinq  cents  chanteurs  de  ces  divers  groupes 
avaient  été  conviés  par  Charles  Sellier  à  réunir 
leurs  voix.  C'est  à  cette  réunion,  qui  fut  sensation- 
nelle, que  fait  allusion  la  lettre  de  18GO  : 

«  ...  Qui  se  souvient  encore  de  notre  belle  réunion 
de  la  place  Royale?  Qui  se  rapelle  les  vains  efforts 
du  pauvre  chanteur  des  Cêciliens?...  Nous  nous  réu- 
nissions aussi  extraordinairement  le  dimanche  pour 
faire  la  conduite  à  ceux  d'entre  nous  pris  par  la 
conscription.  Nous  étions  alors  deux  ou  trois  so- 
ciétés, et  nous  traversions  Paris  en  chantant  des 
marches,  mais  le  plus  promptement  possible,  pour 
gagner  la  banlieue  où  nous  pouvions  chanter  plus 
librement,  car  la  police  parisienne  nous  chagrinait 
fort,  et  plus  d'un  d'entre  nous  a  souvent  payé  pai 
la  prison  le  crime  irrémissible  d'avoir  chanté  dans 
le  silence  de  la  nuit!  Les  juges  de  la  police  correc- 
tionnelle appelaient  cela  du  tapage  nocturne... 

«  Avant  de  terminer,  je  me  joins  à  vous  pour 
affirmer  que  les  ouvriers  français  ne  sont  pas  moins 
sensibles  à  la  musique  que  leurs  frères  des  autres 
nations,  et  je  pourrais  citer,  parmi  le  petit  nombre 
quej'ai  fréquenté  alors,  non  pas  un,  mais  plus  de 
vingt  jeunes  gens  qui,  sans  instruction  d'aucune 
sorte,  ne  sachant  même  pas  lire,  accompagnaient 
juste  et  en  mesure,  après  deux  ou  trois  répétitions. 
Si  la  France  était  restée  en  arrière  de  l'Allemagne  et 
d'autres  pays,  c'est  qu'au  lieu  d'exciter,  de  provo- 
quer le  progrès  du  chant,  on  n'avait  jamais  cessé  chez 
nous  de  l'entraver!...  » 

On   retrouve    dans    l'un  des  feuilletons  d'Hector 


Berlioz,  au  Journal  des  Débats  de  1836,  une  protes- 
tation contre  les  tracasseries  policières,  qui  est  à 
la  fois  le  signe  d'une  vigilance  informée,  et  la  mar- 
que de  l'intérêt  éveillé  parmi  les  musiciens  par  le 
mouvement  artistique  populaire  naissant  : 

«  Quand  le  gouvernement  aura  senti  que,  de  tous 
les  moyens  de  civilisation,  l'étude  de  la  musique  est, 
pour  le  peuple,  un  des  plus  sûrs,  un  des  plus 
prompts  et  des  moins  dangereux,  quand  cette  idée, 
qu'on  envisage  encore  aujourd'hui  fort  lég 
sera  devenue  nn  conviction  sérieuse,  oh!  alors  on 
verra  s'opérer  dans  les  mœurs  une  belle  et  grande 
révolution  dont  nous  admirons  d'avance  les  mer- 
veilles, et  dont  les  résultats  pour  l'art  sont  incalcu- 
lables... » 

Par  l'organisation  d'un  enseignement  favorable  , 
par  la  constitution  d'un  répertoire  choral  pour  voix 
mixtes,  et  pour  voix  égales,  par  l'apaisement  donné 
à  la  police  dans  l'exemple  de  haute  tenue  des  réu- 
nions de  l'Orphéon,  par  un  succès  retentissant, 
Wilhem  avait  rendu  faciles  les  tentatives  d'imitation, 
suscitées  naturellement  par  l'ardeur  d'orphéonistes 
capables  d'initiative,  et  par  un  besoin  de  manifesta- 
tions plus  fréquentes.  De  son  vivant,  il  avait  vu  suc- 
céder aux  premières  Sociétés  indépendantes  :  les 
Cêciliens,  1rs  Cm  -tùrini/irus .  h  s  Voiitni/itarils ,  les 
Philistins,  des  groupements  plus  importants,  comme 
la  Société  Wilhêmienne,  l'Union  Wilhémienne,  réu- 
nies en  181-8  pour  former  l'Union  Chorale,  qui  vécut 
une  dizaine  d'années,  et  les  Enfants  d  Paris,  de 
l'ouvrier  ciseleur  sur  métaux,  moniteur  de  l'Orphéon, 
Philii'pes,  qui  existaient  encore  en  1914.  .Mais,  si  la 
tradition  de  Wilhem  était  fidèlement  suivie  a/'/  nion 
Chorale,  où  s'unissaient  les  voix  mixtes,  elle  ne  l'était 
plus  aux  Enfilais  de  Paris,  qui  étaient  composés  de 
voix  d'hommes  seulement.  C'est  sous  cette  forme 
restreinte,  qu'à  l'exemple  de  ce  groupement,  allait 
se  propager  dans  tout  le  pays  l'œuvre  de  l'Orphéon, 
à  laquelle  était  venue,  du  temps  de  Wilhem,  la  sym- 
pathie de  tous  les  musiciens,  et  qui  allait  recevoir 
une  impulsion  propice  du  mouvement  p  ipulaire 
d'enthousiasme  et  d'émancipation  de  la  période 
de  1848. 

Pour  compléter  cette  esquisse  des  premiers  temps 
de  la  vie  orphéonique,  il  reste  à  signaler  l'apostolat 
en  province  d'un  tilleul  de  Grétry,  Alfred-Hector 
Rolland,  issu  d'une  famille  de  la  haute  bourgeoisie, 
que  des  raisons  de  santé  avaient  envoyé  dans  le 
Midi,  à  Ragnères-de-Bigorre,  où  son  zèle  d'art  et  de 
bienfaisance  devait  réaliser  un  grand  exemple  de  ce 
qui  peut  être  obtenu  de  la  bonne  volonté  artistique 
populaire.  A  la  tète  de  ses  Quarante  Chanteurs  \Ion- 
tinjnarils  lièarnais,  recrutés,  à  partir  de  1833,  dans 
la  jeunesse  villageoise  et  exécutant  les  chœurs  spé- 
ciaux composés  par  lui,  Rolland  acquit  d'abord  une 
renommée  toulousaine,  puis  parisienne,  enfin  euro- 
péenne et  mondiale.  Avec  ses  chanteurs  monta- 
gnards, il  parcourut  pendant  dix-sept  années,  de 
1838  à  18oo,  l'Europe,  l'Afrique,  l'Asie,  l'Amérique, 
propageant,  dans  un  but  de  bienfaisance,  la  bonne 
humeur  artistique  et  l'exemple  de  bonne  camara- 
derie de  l'art  choral  populaire.  Sur  les  2.336.000  fr. 
recueillis  au  cours  des  pérégrinations,  la  moitié  — 
exactement  i.  163. 400  francs  —  eut  une  destination 
charitable,  et  c'est  dans  la  pauvreté  que  Rolland 
devait  mourir  à  Grenoble,  en  1875,  âgé  de  près  de 
quatre-vingts  ans. 

Pour  s'étendre  dans  tous  le  pays,  l'œuvre  de  Wil- 
hem  devait  trouver  un  animateur  convaincu.  Ce  fut 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Eugène  Delaporte.  Parisien,  né  en  1819,  il  avait  été 
au  Conservaloire  élève  de  la  classe  de  piano  réputée 
de  Zimuermann.  Puis  il  était  devenu,  en  1843,  orga- 
niste et  professeur  à  Sens.  Bientôt,  il  s'élait  lassé 
du  calme  autère  de  la  vieille  cathédrale,  en  son- 
geant au  rôle  social  que  l'application  généralisée  de 
l'œuvre  de  Wiliiem  pouvait  donner  à  la  musique.  En- 
couragé par  le  baron  Taylor  et  par  certains  de  ses 
collaborateurs,  comme  F.-J.  Simon,  qui  devait  fonder 
avec  lui  le  journal  Orphéon,  Eugène  Delaporte  avait 
décidé  d'entreprendre  une  tournée  générale  en 
France,  et  il  avait  réussi  à  se  faire  accréditer  auprès 
des  préfets  par  des  appuis  officiels,  tels  que  celui-ci  : 

MINISTÈRE  DE  L'INTÉRIEUR 

DIRECTION    DES    BEAUX-ARTS 


r.iinv 


l'ivre 


Le  citoyen  Delaporte,  professeur  de  musique,  désirerait 
établir  un  vaste  syslème  <l"''«.Uicati(ni  musicale  par  l'application 
de  la  méthode  Wiliiem  et  organiser  en  province,  sur  une  grande 
échelle,  des  réunions  analogues  à  celles  de  l'Orphéon  à  Paris. 

Ce  projet  me  paraissant  mériter  dV'ttv  sérieusement  encouragé, 
je  vous  prierai  de  vouloir  bien  donner  au  citoyen  Delaporte 
toutes  les  facilités  nécessaires  pour  qu'il  puisse  le  mettre  à  exé- 
cution dans  le  ressort  de  votre  département. 

Salut  et  fraternité. 

Le  Ministre  île  l'Intérieur, 
Senard. 

Pendant  vingt  années,  jusqu'en  1868,  —  et  avant 
de  mourir  pauvre,  lui  aussi,  à  l'hospice  de  Saint- 
Mandé  en  1886,  —  Eugène  Delaporte  fut  commis-voya- 
geur en  enthousiasme,  et  suscita  une  vitalité  or- 
phéonique,  dont  la  génération  actuelle  n'a  aucune 
idée. 

Ce  furent  : 

En  1849,  à  Troyes,  à  Sens,  à  Auxerre,  des  festivals 
d'ensemble  des  orphéons  libres  déparlementaux. 

En  1850,  une  fête  internationale  au  parc  du  châ- 
teau d'Asnières,  qui  réunissait  les  sociétés  chorales 
de  Paris,  Caen ,  Itouen,  Troyes,  Auxerre,  Reauvais, 
Saint-Florentin,  Orléans,  Melun,  Monlargis,  Sens, 
Tonnerre,  Arcis-si-r-Aube,  et  aussi  celles  de  Gand, 
Bruxelles,  Mons,  Liège. 

Puis,  la  même  année,  ce  furent  d'autres  festivals  à 
Fontainebleau,  à  Strasbourg  et,  sous  l'intluence  des 
progrès  orphéoniques,  la  création  au  Conservatoire 
de  Paris,  sous  la  direction  de  Edouard  Batiste,  d'une 
classe  populaire  de  chant  d'ensemble,  constituée  en 
orphéon  sous  le  titre  d'Union  Chorale  des  Elèves  du 
Conservatoire ,  qui  subsista  jusqu'à  la  guerre  de  1870. 

En  1851,  à  Troyes,  était  organisé  le  premier 
concours  orphéonique  de  musique  populaire,  dont 
l'institution  avait  été  imaginée  par  Eugène  Delaporte 
pour  aider  le  recrutement,  et  créer  l'émulation 
nécessaire  au  succès  artistique  des  festivals. 

De  1852  à  1855,  les  orphéons  ne  cessent  de  se  mul- 
tiplier, et  le  monde  orphéonique  accueille  les  pre- 
mières sociétés  instrumentales  populaires.  Les  con- 
cours sont  l'occasion  de  réunir  lés  sociétés  étran- 
gères aux  sociétés  françaises.  Pour  le  concours  de 
Lyon,  le  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  Hignard 
fait  graver  sur  les  médailles  commémoratives  : 
Pax  sequilur  Musas.  Populos  lijra  fœdere  jungit. 

En  1855,  la  première  en  date  des  associations 
chorales  départementales,  dont  Eugène  Delaporte 
voulait  l'organisation  généralisée,  celle  de  Seine-et- 
Marne,  recevait  la  consécration  officielle  par  un 
arrêté  préfectoral  pris  après  délibération  du  conseil 


général.  Cet  arrêté  créait  une  commission  départe- 
mentale de  direction  et  de  patronage,  sous  la  prési- 
dence d'honneur  du  préfet,  et  fixait  les  organisations 
locales  dans  ces  articles  : 

a  ...  Art.  S.—  Lorsque,  dans  une  localité,  le  maire 
aura  reconnu  les  éléments  d'un  orphéon,  il  proposera 
à  la  nomination  du  sous-préfet  une  commission  de 
lia  5  membres  chargée  de  s'occuper,  sous  sa  direction, 
de  l'organisation  et  de  la  surveillance  de  l'orphéon. 

«  Art.  9.  —  L'instituteur  public  sera  de  droit  direc- 
teur de  l'orphéon  de  chaque  commune  rurale,  à 
moins  qu'une  nomination  spéciale  n'ait  été  faite. 

«  Art.  10.  —  Le  directeur  de  l'orphéon  devra  faire 
au  moins  deux  leçons  de  chant  par  semaine,  et  d'une 
demi-heure  chacune,  aux  élèves  de  l'école  commu- 
nale. Indépendamment  de  ces  leçons,  un  second 
cours  sera  organisé  pour  les  adultes,  et  devra  avoir 
lieu  deux  fois  par  semaine,  le  soir... 

«  Art.  17.  —  Lorsque  l'enseignement  musical  sera 
régulièrement  organisé,  il  y  aura,  au  moins  tous  les 
deux  mois,  une  réunion  générale,  à  laquelle  pren- 
dront part  les  adultes  et  les  élèves  les  plus  avancés 
de  l'école  communale...  Ceux  des  élèves  qui  ne 
pourraient  y  prendre  part  comme  exécutants,  devront 
néanmoins  y  assister  comme  auditeurs...  » 

Dès  la  fin  de  1855,  160  communes  de  Seine-et- 
Marne  avaient  un  cours  dans  les  écoles,  cours  pro- 
fessé par  les  instituteurs,  sauf  dans  o  localités  seu- 
lement; 00  de  ces  cours  comprenaient  des  sections 
d'adultes  constituées  en  orphéon,  de  même  que 
7  cours  du  soir.  Le  nombre  des  adultes  s'élevait  à 
près  de  1.000.  Cette  association  chorale  de  Seine-et- 
Marne  avait  encore  quelque  vitalité  en  1889,  à  la 
mort  de  son  président  fondateur,  Pierre  Torchet, 
ardent  disciple  d'Eugène  Delaporte.  Le  succès  de  ses 
débuts  fut  un  encouragement  pour  d'autres  dépar- 
lements. 

Dans  sa  lettre  d'envoi  d'un  arrêté  d'organisation, 
le  préfet  de  l'Aube  écrivait  aux  sous-préfets  et 
maires  : 

«  Dans  un  département  voisin  du  nôtre,  la  propa- 
gation de  l'orphéon  et  les  encouragements  donnés 
à  son  organisation  ainsi  qu'à  celle  des  associations 
chorales  et  instrumentales,  ont  produit  de  bons  ré- 
sultats. Le  goût  des  études  musicales  est  devenu  plus 
populaire,  et,  dans  toutes  les  conditions,  on  a  pu 
prendre  sa  part  d'une  distraction  qui  est  à  la  fois 
morale  et  instructive.  Le  gouvernement,  dans  sa  sol- 
licitude pour  les  œuvres  d'utilité  générale,  favorise 
les  institutions  de  musique  et  de  chant,  qui,  parlant, 
sont  placées  sous  la  protection  de  l'autorité.  » 

Et  le  15  janvier  1856,  le  préfet  de  Seine-et-Oise 
procédait,  sur  les  conseils  d'Eugène  Delaporte,  à  une 
enquête  auprès  des  sous-préfets  et  maires  de  son 
ressort  : 

«  Plusieurs  communes  du  département  ont  déjà 
compris  tout  le  parti  qu'on  pouvait  tirer  de  la  mu- 
sique en  organisant  des  sociétés  d'orphéons;  c'est 
une  utile  récréation,  elle  polit  les  mœurs  et  favorise 
les  perfectionnements  moraux...  .h-  vous  prie  de 
faire  parvenir  une  notice  contenant  les  renseigne- 
ments suivants  :  Un  cours  de  chant  est-il  prati- 
qué à  l'école  communale'  Est-il  fait  par  l'institu- 
teur  ou  par  un  professeur  spécial?  Combien  de 
temps  y  est-il  consacré?  Combien  d'élèves  j  pren- 
nent part?  Ya-t-il  un  cours  organisé  pour  les  adultes 
et  par  qui  est-il  fait?  Si  ce  cours  n'existe  pas,  serait- 
il  possible  de  créer  un  orphéon?  L'instituteur  serait- 
il  en  mesure  de  le  diriger?...  » 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHÉON    372;i 


Le  mouvement,  largement  répandu  dans  le  Nord 
et  le  Centre,  atteignit  aussi  le  Midi  à  la  suite  d'une 
tournée  de  propagande  entreprise  par  Eugène  Dela- 
porte  dans  les  derniers  mois  de  1836.  Ce  nouveau 
succès  lui  fit  confier  par  le  ministère  de  l'instruction 
publique  l'inspection  générale  de  l'enseignement  du 
chant  dans  les  écoles  normales  de  France. 

Son  apostolat  triomphant  devait  avoir  sa  floraison 
en  1859,  où  eut  lieu  à  Paris,  les  17,  19,  20  et  22  mars, 
au  Palais  de  l'Industrie,  la  première  réunion  gên&i  ah 
des  orphéonistes  de  France.  Les  insignes  des  exécu- 
tants portaient  cette  inscription,  tissée  dans  les 
rubans  de  couleurs  diverses,  suivant  les  différentes 
parties  vocales,  avec  les  armes  de  la  Ville  de  Paris. 
Des  œuvres  spéciales  avaient  été  mises  au  concours  : 
un  Yrin  Creator,  glorificalion  de  la  muse  sacrée, 
musique  du  grand  prix  de  Rome  Besozzi,  une  Marthe 
des  Orphéons,  sur  un  texte  d'un  écrivain  dévoué  à 
l.'Orplir.n,  Vaudin,  musique  de  M110  Nicolo,  fille  de 
l'auteur  de  Joeonttr,  les  tiéni-s  >!••  la  terre,  musique 
du  grand  prix  de  Rome  Samuel  David,  le  Salui  aux 
Chanteurs,  musique  d'Ambroise  Thomas.  I 
Tentons,  musique  de  Louis  Lacombe,  Retraite,  de 
Laurent  de  Bille.  Le  programme  comprenait  en 
outre  :  un  fragment  du  XIXe  Psaume  de  Marcello;  un 
chœur  de  la  Vlûte  enchantée,  de  Mozart;  unchoïui  de 
M8SBEL3SOHN,  /'■  1 1. 'part  tics  Chasseurs:  un  chœur  de 
kt'r.KEN,  avec  des  paroles  françaises  du  chanteur  Ro- 
ger, le  Chant  -les  Mmitaijiiarih  ;  en  lin  Meyi  ki:i  ki:  a  va  il 

traroserit  un  accompagnement  de   fanfare   j ■   le 

Septuor  îles  llmiuenots.  La  soirée  du  I"  mais  Fui 
réservée  pour  une  répétition  générale  avec  6.000  exé- 
cutants, groupes  dans  204  sociétés,  venus  de  tous  les 
coins  de  France,  dont  la  statistique  montre  le  vigou- 
reux essor  de  ['Orphéon  français  après  dix  années 
d'efforts  méthodiques  : 

«  A  cette  première  réunion  générale  dos  orphéo- 
nistes de  France  à  Paris,  en  mars  1859,  prirent  part: 

1  société  de  l'Ain,  1  société  de  l'Aisne,  3  sociétés  de 
l'Aube,  2  sociétés  de  l'Aude,  10  sociétés  des  Bouches- 
du-Rhône,  5  sociétés  du  Calvados,  3  sociétés  de  la 
Charente.  I  société  de  la  Charente-Inférieure,  6  so- 
ciétés de  la  Côle-d'Ùr,  2  sociétés  du  Doubs,  1  société 
d'Eure-et-Loir,  i  sociétés  de  la  Haute-Garonne, 
12  sociétés  de  la  Gironde.  3  sociétés  de  l'Hérault, 

2  sociétés  d'Indre -et- Loire,  3  sociétés  du  Jura, 
2  sociétés  de  Loir-et-Cher,  2  sociétés  de  la  Loire, 
1  société  de  la  Haute-Loire  1  société  de  la  Loire- 
Inférieure,  2  sociétés  du  Loiret,  3  sociétés  de  Lot-et- 
Garonne,  1  société  de  la  Manche,  3  sociétés  de  la 
Marne,  I  sociélé  de  la  Meurthe,  2  sociétés  Û  ■  ta 
Moselle,  9  sociétés  du  Nord,  1  société  de  l'Oise,  3  so- 

ciétésdu  Pas-de-Calais,  1  société  des  Hautes-Pyréi s. 

7  sociétés  du  Rhône,  3  sociétés  de  Saône-et-Loire, 
1  société  de  la  Sarthe,  6  sociétés  de  la  Seine- 
Inférieure,  19  sociétés  de  Seine-et-Marne,  il  sociétés 
de  Seine-et-Oise,  1  société  des  Deux-Sèvres,  1  société 
de  Tarn-et-Garonne,  1  société  du  Var,  1  société  de 
la  Vienne,  1  société  de  l'Yonne,  13  sociétés  du  lias- 
Rhin,  17  sociétés  du  Haut-Rhin,  a  sociétés  de  la 
Seine  et  26  sociétés  de  Paris. 

«  La  plus  nombreuse  de  ces  sociétés  comprenait 
70  membres,  la  moins  nombreuse  8  membres;  la 
moyenne  s'établissait  entre  25  et  4o  membres.» 

L'exécution,  sous  la  direction  de  Eugène  Delapou te, 
souleva  l'enthousiasme.  Mêlé  aux  40.000  auditeurs, 
témoin  de  la  déception  des  20.000  Parisiens  réduits, 
ne  pouvant  entrer,   à   saluer   d'acclamations   l'im- 


mense cortège  des   orphéonistes,  le  journaliste  Au- 
guste Luchet  écrivit  dans  le  journal   le  Siècle  : 

»...  Ces  six  mille  jeunesses  humaines  suspendues 
pantelantes  au  geste  magnétique  de  Dflaporte,  et 
exhalant  leurs  âmes  avec  leurs  chants,  répandaient 
dans  l'espace  des  torrents  de  fluide  dont  les  assistants 
d'en  haut  étaient  aussitôt  enveloppés.  Je  n'ai  jamais 
connu  d'émotion  ayant  cette  douceur  troublante.  On 
se  trouvait  comme  soulevé,  comme  emporté  hors" 
de  soi...  et  pourtant  on  sentait  et  on  vivait  immen- 
sément... Voilà  une  des  puissances  de  l'agglomé- 
ralion  chorale!  Plusieurs  en  ont  été  malades,  le 
soir  ou  le  lendemain,  mais  personne  n'a  regretté  sa 
souffrance  :  c'était  une  «indigestion  de  sympathie  », 
comme  eût  dit  Saint-Simon...  » 

Eugène  DBlapohtb,  qu'un  décret  du  6  avril  1859 
avait  fait  chevalier  de  la  Légion  d'honneur,  voulut 
une  consécration  encore  plus  complète.  Après  la 
solidarité  nationale  établie  à  Paris  entre  les  orphéo- 
nistes liançais,  il  rêva  de  solidarité  internationale. 
Dès  le  mois  d'octobre  1859,  il  étudiait  le  projet 
d'une  série  de  festivals  à  Londres.  Son  inlassable 
énergie,  sa  foi  devaient  triompher  de  tous  les  obs- 
tacles. Le  23  juin  1860,  dix  corvettes  partaient  de 
Dieppe,  Boulogne  et  Calais,  conduisant  ei 
terre  3.000  orphéonistes,  délégués  par  131 
que  les  chemins  de  fer  de  l'Ouest  et  du  Nord  avaient 
.H-repie  de  transporter  gratuitement.  Deux  nou- 
velles   vres  chorales  avaient  été  composées  par 

IIaléw  :  La  Nouvelle  Alliance,  et  par  Ambroise  Tho- 
mas :    France:  France!  sur  des  poèmes  de  Vaudin. 

Dans  son    Histoire   de    l'instituti  t 
Henry  Abel-Simon,  qui   était   L'un  des  exécutants,  a 
évoqué  cet  émouvant  souvenir  de  jeunesse  : 

«  ...  Le  jour  du  premier  festival  se  leva  au  milieu 
mu  surmenage  général  courageu- 
sement supportés...  Je  vois  encore  ces  groupes  épars, 
exténués,  sans  interprètes  et  sans  guides,  cherchant 
en  habits  de  fêtes,  sous  une  pluis  battante,  le  che- 
min du  Crystal-Palace...  A  trois  heures,  on  était  au 
complet  devant,  un  public  considérable,  respectueux 
et  recueilli.  La  masse  orphéonique  salua  d'abord 
son  infatigable  directeur  en  une  formidable  et  con- 
solante ovation,  et  attaqua  enfin,  dans  un  magistral 
ensemble,  l'hymne  national  de  la  Grande-Bi 
Sous  l'immense  voûte  de  cristal  les  estrades  de  chan- 
teurs s'élevaient  en  colossal  amphithéâtre  devant 
une  assemblée  innombrable  et  attentive,  qui  se  re- 
nouvela quatre  jours  de  suite  et  vit  défiler  tout 
Londres...  Ce  fut  au  milieu  des  ovations  fraternelles 
et  chaleureuses  de  la  population  que  les  3.000  dé- 
putés de  la  France  chorale  traversèrent,  bannières 
déployées,  les  immensités  urbaines  de  Londres,  se 
dirigeant  vers  les  chemins  de  fer  qui  devaient  les 
conduire  à  leurs  points  d'embarquement  respectifs... 
Avant  le  départ,  l'ambassadeur  de  France,  comte 
de  Persigny,  qui  avait  encouragé  et  soutenu  Eugène 
!l:ï.\['ORTE.'piH  .lire  aux  orphéonistes  en  les  remer- 
ciant :  «  Vous  avez  fait  en  huit  jours  pour  l'alliance 
anglo-française  plus  que  toute  la  diplomatie  des 
deux  pays  n'en  a  fait  en  deux  ans,  et  vous  avez  puis- 
samment contribué  à  rendre  forte  et  sincère  une 
union  qui  peut  seule  assurer  au  monde  les  bienfaits 
de  la  civilisation.  » 

Ce  qu'il  faut  retenir  de  ces  fêles  orphéoniques 
françaises  à  Londres  en  1860,  c'est  le  mouvement 
d'enthousiasme  populaire  créé  en  Angleterre,  qui  ne 
se  manifesta  pas  seulement  parle  touchant  emballe- 
ment dans  la  souscription  ouverte  par  la    presse 


:v,.w 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


pour  offrir  un  banquet  avant  le  dépari,  dont  le  total 
produisit  25.000  francs  en  une  demi-journée,  mais 
qui  fut  l'origine  d'un  éveil  aux  aptitudes  musicales, 
d'une  musical  agitation. 

Les  historiens  de  la  classe  ouvrière  ont  pu  noter 
aussi  que  cette  rencontre  des  ouvriers  français  avec 
les  ouvriers  anglais  et  avec  leurs  compatriotes  réfu- 
giés à  Londres,  ne  fut  pas  étrangère  aux  premières 
activités  de  l'Association  Internationale  des  Travail- 
leurs. 

Après  1860,  l'étoile  de  Eugène  Delaporte  pâlit.  Il 
était  revenu  d'Angleterre  endetté  de  30.000  francs, 
dont  le  prêteur,  dans  un  sentiment  de  pitié  géné- 
reuse, devait  le  libérer  huit  années  plus  tard. 

Devant  le  reproche  de  «  n'avoir  point  apporté  de 
bénéfices  »,  il  donna  sa  démission  de  président  de 
l'Association  orphéonique  parisienne.  On  lui  repro- 
chait aussi,  par  de  sourdes  manigances,  l'innovation 
qu'il  avait  réalisée,  en  février  1860,  en  suscitant  la 
création  d'un  «  Comité  général  de  patronage  des 
orphéons  et  sociétés  chorales  de  France  »,  dont  la 
première  réunion  plénière,  le  28  mars,  avait  désigné 
les  membres  : 

«  Président  :  Larabit,  sénateur;  vice-présidents  : 
prince  Poniatowski,  sénateur;  général  Mellinet;  Au- 
per,  directeur  du  Conservatoire;  Halévy,  membre 
de  l'Institut;  secrétaire  :  J.-F.  Vaudin;  membres  : 
Cuvier,  conseiller  d'Etal;  Belmont,  Garreau,  Javal, 
députés  au  Corps  législatif;  VictorFoucher,  conseiller 
général  de  la  Seine;  Ambroise  Thomas,  Carafa,  Ber- 
lioz, Kastner,  Claimsson,  membres  de  l'Institut; 
Rodrigues,  vice-président  de  la  Commission  du  chant 
de  la  Ville  de  Paris;  Ed.  Monnais,  commissaire  gé- 
néral près  les  théâtres  et  le  Conservatoire;  baron 
Doyen,  sous-gouverneur  de  la  Banque  de  France; 
Varcollier,  conseiller  de  préfecture  de  la  Seine; 
Niedermeyer,  directeur  de  l'Ecole  de  musique  reli- 
gieuse; Besozzi,  grand  prix  de  Home;  Eugène  Dela- 
porte, C.  de  Vos,  Delsarte,  Dietsch,  Elwart,  Ermel, 
de   la    Page,   Ch.   Gounod,  Laurent   de  Rillé,  Lim- 

MANDER.  » 

Cet  aréopage  devait  impressionner  défavorable- 
ment la  timidité  des  dirigeants  orphéonistes  moins 
clairvoyants  que  Eugène  Delaporte.  Il  avait  compris 
la  nécessité  d'apporter  à  l'effort  d'éducation  et  de 
propagande  l'auréole  d'un  comité  formé  de  person- 
nalités pouvant  faire  bénéficier  la  cause  orphéonique 
de  l'autorité  de  situations  officielles  prépondérantes. 
Des  inquiétudes  de  domination  se  manifestèrent, 
dont  Eugène  Delaporte  devait  être  victime.  Ces 
inquiétudes  n'étaient  certes  pas  sans  quelque  fon- 
dement. Aux  tentatives  d'embrigadement  gouverne- 
mental, secrètement  poursuivies  dans  certaines  asso- 
ciations départementales  patronnées  par  le  préfet, 
s'ajoutaient  parfois  l'hostilité  de  préfets  qui,  comme 
M.  de  Tanlay  dans  le  Pas-de-Calais,  avec  un  dédain 
blessant,  opposaient  la  force  d'inertie  au  vote  des  sub- 
ventions, ou  à  la  demande  de  salles  d'école  pour  les 
répétitions,  afin  de  mater  l'esprit  d'indépendance. 
Mais  c'était  injustice  de  s'en  prendre  à  Eugène  Dela- 
porte, qui  n'avait  jamais  songé,  par  la  création  du 
«  Comité  général  »,  à  une  possibilité  de  soumettre 
l'Orphéon  à  quelque  influence,  politique,  adminis- 
trative ou  religieuse.  Un  malentendu  était  désormais 
établi  dans  la  famille  orphéonique.  Le  Comité  général 
de  patronage,  paralysé  par  de  sourdes  compétitions, 
se  sépara  en  1864. 

Toutefois,  Eugène  Delaporte  ne  renonçait  pas  à 


son  activité.  Un  second  festival  à  Londres  fui  projeté 
pour  le  mois  de  juin  1861.  Hector  Berlioz  avait  écrit, 
pour  la  circonstance,  sur  un  poème  de  Vaudin,  un 
double  chœur,  mi-parlie  anglais,  mi-partie  français, 
le  Temple  universel,  où  chaque  groupe  devait  chan- 
ter dans  sa  langue  nationale.  L'impossibilité  de  ré- 
gler favorablement  les  questions  d'inlérêt  fit  ajour- 
ner le  projet,  et  Eugène  Delaporte  se  donna  à 
l'organisation  d'une  deuxième  <■  Réunion  générale 
des  orphéonistes  de  France  »,  qui  eut  lieu  à  Paris 
les  18,20,21  et  22  octobre  1861,  au  Palais  de  l'Indus- 
trie, réunissant  8.000  chanteurs  de  248  sociétés, 
dont  la  statistique  montre,  avec  celle  de  la  première 
réunion  de  1839,  les  différences  suivantes  : 

4  sociétés  en  moins  :  celles  de  la  Charenle-Infé- 
rieure,  de  la  Manche,  du  Pas-de-Calais,  des  Hautes- 
Pyrénées;  18  sociétés  en  plus  venues  des  départe- 
ments ci-après  :  Cher,  Corrèze,  Dordogne,  Drôme, 
.Eure,  Gard,  Indre,  Maine-et-Loire,  Haule-Marne, 
Mayenne,  Meuse,  Pyrénées-Orientales,  Haute-Saône, 
Savoie,  Somme,  Tarn,  Vaucluse,  Haute-Vienne. 

Richard  Wagner  était  alors  à  Paris,  où  la  repré- 
sentation du  Tannhauser,  à  l'Opéra,  allait  déchaîner 
un  scandale  dans  la  haute  société.  Les  musiciens 
populaires  avaient  mis  à  leur  programme  le  Chœur 
des  Matelots  du  Vaisseau  Fantôme.  Richard  Wagner 
tint  à  diriger  lui-même  les  répétitions,  et  il  eut  sa 
part  dans  l'immense  succès  qui  accueillit  toutes  les 
œuvres  du  festival  dirigé  par  Eugène  Delaporte. 
Avec  le  chœur  de  Richard  Wagner,  le  programme 
comprenait  :  Pater  noster,  de  Besozzi;  l'Appel  aux 
Armes  du  Prophète,  de  Meyerbeer;  le  Chant  du 
bivouac,  de  Kucken  ;  Chœur  des  soldats  de  Faust,  de 
Gounod;  le  Chant  des  Bannières,  de  Laurent  de  Rillé; 
les  Enfants  de  Paris,  d'Adolphe  Adam  ;  Hymne  à  la 
Nuit,  de  Schwahal;  France!  France!  d'Ambreise 
Thomas. 

La  presse  se  fit  l'écho  des  acclamations  des  innom- 
brables auditeurs.  Le  journaliste-poète  Barthélémy 
signala  l'absence  de  l'empereur  et  du  monde  officiel, 
où  l'on  commençait  à  être  en  défiance  contre  l'es- 
prit d'indépendance  de  l'Orphéon  : 

«  ...  L'àme  vibrante  de  ces  huit  mille  voix  de  tra- 
vailleurs a  électrisé  le  vaste  auditoire,  où  les  grands 
du  jour  brillaient  parleur  absence;  mais,  en  revan- 
che, tous  les  enfants  de  Paris,  les  persévérants  tra- 
vailleurs quotidiens  de  la  plume,  du  compas,  de  la 
pioche,  de  la  truelle,  du  marteau,  du  burin,  de  la 
lime,  de  la  scie  et  du  rabot  étaient  là,  tous  debout, 
tous  enthousiastes  !  C'était  le  jour  de  fête  de  notre 
liberté...  Nous  faisions  épanouir  nos  applaudisse- 
ments devant  cette  inoubliable  expression  de  l'àme 
humaine  en  ce  langage  universel  qu'est  la  mu- 
sique. » 

Pour  l'année  1862,  Eugène  Delaporte  avail  formé 
un  nouveau  projet  de  propagande  à  l'étranger,  un 
pèlerinage  en  terre  classique  du  chant,  en  Italie. 
180  sociétés  avaient  répondu  à  son  appel.  L'organi- 
sation prévoyait  deux  festivals  à  Turin,  les  16  et 
18  septembre,  deux  à  Milan,  le  20  à  la  Scala,  et  le 
21  aux  Arènes.  La  gratuité  des  chemins  de  fer  en 
France  et  en  Italie  avait  été  accordée.  Tout  près  de 
la  date  de  départ,  fixée  au  14  septembre,  parvint  la 
nouvelle  de  la  bataille  d'Aspromonte,  et  de  la  mar- 
che de  Garibaldi  sur  Rome.  11  fallut  abandonner. 

L'année  1863  fut  marquée  par  deux  festivals  de 
charité  organisés  par  Eugène  Delaporte.  La  guerre 
américaine  de  Sécession,  en  privant  de  matière  pre- 
mière  l'industrie  colonnière,  avait    réduit  au  rhô- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LORPHÉON    3731 


mage  et  à  la  misère  300.000  ouvriers.  19  sociétés  de 
Paris  et  21  sociétés  de  province,  réunissant  plus  de 
1.000  exécutants,  avaient  répondu  à  l'appel  du  jour- 
nal FOrphêon.  Le  23  janvier  à  Rouen,  et  le  2">  mars 
à  Paris,  ce  furent,  sous  la  direction  d'Eugène  Dela- 
porte,  deux  fêtes  musicales  populaires,  dont  le  suc- 
cès artistique  éclatant  donna  l'exemple  de  l'émula- 
tion à  toutes  les  sociétés  orphéoniques  de  France 
qui,  par  des  concerts  et  des  quêtes,  apportèrent  à 
la  souscription  nationale  un  total  de  près  de 
120.000  francs. 

Animé  d'esprit  fraternel,  l'Orphéon  avait  aussi  le 
culte  du  souvenir.  A  l'heure  où  triomphait  l'idée  de 
Wilheu,  ses  anciens  élèves,  maintenant  groupés  dans 
diverses  sociétés  parisiennes,  voulurent  rendre  à  sa 
mémoire  un  hommage  solennel,  en  lui  dédiant  une 
grande  fête  orphéonique,  au  profit  des  pauvres  du 
Ve  arrondissement  où,  en  1820,  Wilhem  avait  inau- 
guré son  enseignement.  Autour  des  Céciliens  se 
groupèrent  les  nombreuses  délégations  des  autres 
sociétés  parisiennes,  et  le  H  mai  1863,  au  cours  du 
festival  donné  salle  Barthélémy,  devant  le  buste 
couronné  de  Wilhem,  un  orphéoniste,  directeur  de 
l'une  des  sociétés,  déclama  un  poème  de  F.-J.  Simon, 
vibrant  de  sincérité  : 

Dans  le  travail  bumain,  Wilhem  !  ton  œuvre  est  sainte. 

Au  bruit  du  grand  labeur  se  mêlait  une  plainte, 

La  raison  exerçait  ses  droits  longtemps  ravis, 

Mais  les  besoins  du  cœur  restaient  inassouvi.-. 

Tu  compris  qu'il  manquait  au  peuple  unr  cnnqueie. 

Que  ses  vœux,  ses  élans,  n'avaient  pas  d'interprète. 

Qu'il  fallait  dans  son  ombre  allumer  un  tlambeau, 

L'initier  en  masse  au  culte  du  vrai  Beau, 

Lui  donner,  pour  chanter,  une  langue  choisie, 

Le  polir  par  les  Arts  et  par  la  Poésie, 

Confondre  tous  ses  cœurs  dans  un  commun  transport, 

Unir  toutes  ses  voix  dans  un  immense  accord!... 


En  cette  même  année  1863,  les  orphéonistes  du 
Nord  s'étaient  unis,  eux  aussi,  pour  un  hommage  à 
une  gloire  populaire  de  la  musique  :  8  chorales 
1 4  harmonies,  4  fanfares  célébrèrent  à  Givet,  le  21  juin, 
le  centenaire  de  la  naissance  de  Méhul. 

Pendant  l'année  1864,  Eugène  Delaporte  s'efforça 
de  constiluer  deux  organisations,  par  lesquelles  il 
voulait  assurer  l'avenir  de  l'Orphéon  :  une  fondation 
débourses  en  faveur  des  orphelins  de  familles  d'or- 
phéonistes, les  Pupilles  de  l'Orphéon;  et  une  fonda- 
tion complémentaire  en  faveur  de  la  vieillesse,  les 
lnvatid.es  de  l'Orphéon.  L'existence  de  ces  institutions 
devait  être  courte,  et  le  festival  projeté  à  leur  béné- 
fice n'eut  pas  lieu. 

La  grande  époque  de  l'Orphéon  allait  prendre 
tin.  Désormais,  on  allait  vivre  sur  l'élan  acquis.  Eu- 
gène Delaporte  restait  actif,  mais  un  autre  anima- 
teur commençait  à  imposer  sa  popularité  dans  le 
milieu  orphéonique.  Plus  souple  que  Delaporte,  il 
devait  bénéficier  en  haut  lieu  des  sympathies  qui 
étaient  devenues  défiantes  devant  les  conceptions 
de  grande  envergure.  A  la  mobilisation  des  festivals, 
on  préférait  l'ordre  dispersé  des  concours.  L'anima- 
teur d'alors  fut  le  compositeur  Laurent  deRillé.  Les 
musiciens  d'aujourd'hui  n'ont  que  dédain  pour  sa 
musique.  11  faut  cependant  penser  à  ce  qu'était  à 
cette  époque  la  musique  en  faveur  dans  les  théâtres 
et  dans  les  salons,  et  ne  pas  méconnaître  l'œuvre  de 
prosélytisme  accomplie  par  Laurent  de  Rillé,  qui 
continua  sans  lassitude,  lorsque  les  curiosités  éveil- 
lées par  l'Orphéon  s'émoussèrenl,  et  lorsque  l'on  se 
lassa  du  contact  populaire. 
François-Anatole-Laurent    de  Rillé    était    né    à 


Orléans  eu  1828.  Elève  au  collège  de  Tours,  et  déjà 
entraîné  par  ses  dispositions  vers  la  musique,  il 
reçut  les  premières  notions  de  la  science  harmoni- 
que d'un  vieux  maître,  Comoglio,  qui  avait  été,  en 
même  temps  que  Rossmi.le  disciple  du  célèbre  père 
Mattei,  de  Bologne.  Soutenu  par  sa  jeune  ardeur,  il 
consacra  les  loisirs  laissés  par  les  travaux  littérai- 
res à  la  composition  d'oeuvres  pour  orchestre  et 
chœurs,  qu'il  faisait  exécuter  par  ses  camarades  de 
collège  réunis,  pour  les  besoins  de  la  cause,  en 
société  philharmonique.  Aucun  instrument  n'était 
dédaigné,  même  pas  le  flageolet,  dont  jouait  Jules 
Baric,  qui  a  continué  en  se  faisant  un  nom  dans  la 
caricature.  Ce  fut  l'occasion  de  ses  premiers  succès. 

Venu  à  Paris,  en  1848,  pour  ses  études  de  droit, 
il  entra  au  Conservatoire  dans  la  classe  d'harmonie 
professée  par  Elwart.  C'est  à  cette  époque  que  se 
dessina  l'orientation  de  sa  carrière  :  passant  un 
soir  rue  de  Bellefons,  il  ressentit  une  telle  impres- 
sion en  entendant  chanter  en  chœur,  sans  accompa- 
gnement, un  groupe  d'ouvriers  formant  la  société 
chorale  les  Montagnards  tyroliens  île  Montmartre, 
qu'obéissant  à  la  séduction  exercée  sur  lui  par  la 
chaude  harmonie  des  voix  humaines,  et  aussi  à 
l'émotion  éprouvée  devant  le  spectacle  d'hommes 
se  reposant  du  travail  par  l'art,  il  se  mil  à  écrire  — 
paroles  et  musique  —  des  chœurs  à  quatre  voix  qui 
furent  bientôt  populaires,  et  dont  plusieurs  obtinrent 
des  médailles  d'or  dans  les  concours;  puis,  en  1856, 
une  plaquette  sur  le  Chant  choral,  pour  renseigner 
sur  l'organisation  matérielle  et  les  études  utiles  aux 
groupes  de  chanteurs;  des  chœurs  à  trois  voix  pour 
les  écoles  du  département  de  la  Seine;  des  chœurs 
avec  accompagnement  d'orchestre,  d'harmonie  ou 
de  fanfare;  des  solfèges  et  des  morceaux  de  chant  à 
une  ou  plusieurs  voix,  spécialement  écrits  pour  les 
écoles,  collèges  et  lycées;  des  solfèges  pour  les  con- 
cours de  lecture  à  vue. 

Sa  renommée  ne  tarda  pas  à  devenir  populaire. 
Dès  1840,  il  fut  chargé  d'aller  faire  des  recherches 
dans  les  bibliothèques  musicales  de  l'Espagne.  Le 
ministère  de  l'instruction  publique  eut  souvent 
recours  à  sa  compétence,  particulièrement  lors  des 
réunions  du  Comité  des  bibliothèques  scolaires  et, 
en  1865,  du  Comité  pour  la  réorganisation  de  l'en- 
seignement delà  mtsique;  il  fut  nommé,  en  1866, 
inspecteur  général  de  l'enseignement  musical  dans 
les  lycées  et  écoles  normales  de  France,  lorsque  fut 
mis  en  application  le  décret  de  1865,  rendant  obli- 
gatoire l'enseignement  du  chant  dans  les  lycées  et 
écoles  normales,  et  portant  à  cinq  heures  par 
semaine  le  temps  réservé  a  cet  enseignement. 

Secrétaire  du  comité  chargé  de  l'organisation  des 
concours  et  des  festivals  orphéoniques  à  l'Exposition 
universelle  de  1867,  il  fut  appelé  à  présider  des 
comités  semblables  pendant  les  Expositions  univer- 
selles de  1878  à  1889.  Son  activité  infatigable  con- 
tribua beaucoup  au  succès  des  belles  exécutions 
dirigées  par  Pailcs  en  1867,  par  Edouard  CoLO.NNEen 
1878,  par  Vianesi  en  1889.  Pendant  vingt-deux  ans, 
de  1866  à  1898,  il  fut  chargé  d'un  cours  d'histoire 
de  la  musique  à  la  Sorbonne.  En  1889  et  en  1895, 
il  fut ,  dans  la  salle  du  Trocadéro  ,  le  chef  d'or- 
chestre très  applaudi  des  deux  festivals  où  chantè- 
rent mille  enfants  des  écoles  du  département  de  la 
Seine.  Pendant  une  cinquantaine  d'années,  beau- 
coup de  jurys,  en  France,  en  Algérie,  en  Suisse,  en 
Espagne,  en  Italie,  en  Belgique,  en  Hollande,  tin- 
rent à  honneur  de  l'avoir  comme  président.  Officier 


3732 


ESCYCLOPÉDIË  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


de  la  Légion  d'honneur,  officier  de  l'Instruction  pu- 
blique, chevalier  des  Saints  Maurice  et  Lazare,  offi- 
cier de  la  Couronne  d'Italie,  commandeur  de 
Charles  III,  grand-olïicier  d'Isabelle  la  Catholique, 
il  devait  survivre  à  son  grand  renom  pendant  les 
longues  années  d'une  vigoureuse  et  souriante  vieil- 
lesse, qui  s'éteignit  doucement,  pendant  les  graves 
préoccupations  de  la  guerre  de  1914. 

A  partir  de  1864,  les  fêtes  orphéoniques  furent 
données  sous  la  forme  de  concours.  Celte  année-là, 
il  y  en  eut  55.  Il  y  en  eut  encore  davantage  dans 
les  années  suivantes.  La  vitalité  orphéonique  était 
ainsi  entretenue.  On  en  eut  la  preuve  pendant  l'Ex- 
position universelle  de  1867,  où  S. 000  chanteurs, 
appartenant  à  272  sociétés,  se  trouvèrent  encore 
une  fois  réunis  sous  la  direction  d'Eugène  Dela- 
porte.  Les  exécutants  de  plus  de  cinquante  autres 
sociétés,  qui  avaient  envoyé  leur  adhésion,  durent 
s'abstenir  parce  que  la  réduction  escomptée  de 
75  °/o  sur  le  prix  de  Irausport  fut  fixée  à  50  °/0  par 
les  compagnies  de  chemins  de  fer.  L'heureux  lemps, 
si  favorable  aux  déplacements  orphéoniques,  n'était 
plus  où  la  nécessité  de  répandre  le  goût  des  voyages, 
et  d'apaiser  la  peur  du  nouveau  moyen  de  transport, 
incitait  les  compagnies  à  favoriser,  jusqu'à  la  gra- 
tuité, les  exodes  orphéoniques. 

Les  concours  de  musique  sont  restés  très  en 
faveur  dans  les  milieux  orphéoniques.  Ils  sont  une 
occasion  de  se  manifester  pour  des  gens  simples, 
qui  n'osent  pas  concevoir  une  haute  destination  pour 
leur  art,  el  une  occasion  de  s'évader  de  la  tranquil- 
lité quotidienne  par  un  voyage  en  groupe.  Les  musi- 
ciens estiment  que  cela  n'intéresse  guère  la  vie  ar- 
tistique, el  ils  y  sont  aujourd'hui  indifférents,  ayant 
perdu  tout  souvenir  du  passé,  cependant  encore 
récent,  où  monde  professionnel  el  inonde  artistique 
avaient  quelque  parenté!  Les  maitres  de  l'avant- 
dernière  génération  étaient  en  fidèles  relations  avec 
l'Orphéon.  Ils  y  apportaient  bonne  humeur  et  con- 
fiance. Ambroise  Thomas,  rappelant  de  jeunes  souve- 
nirs, ne  manquait  pas  de  raconter  certains  épisodes 
typiques  de  sa  vie  de  président  de  jurys  d'orphéon, 
tels  que  la  réponse  donnée  par  le  directeur  d'une 
société  chorale  a  un  concours  de  Marly-le-Roi  : 

«  Comment  se  fait-il  que  nous  n'entendons  pas 
du  tout  vos  premiers  ténors?  »  Et  le  directeur  de  ré- 
pondre simplement  à  Ambroise  Thomas  :  «  Monsieur 
le  président,  nous  n'en  avons  pas  dans  le  pays. 
'Alors  je  fais  chanter  à  tous  les  ténors  la  partie  de 
second...  » 

Mais  ces  maîtres  avaient  vu  naître  et  se  déve- 
lopper l'Orphéon.  Ils  savaient  sur  quelle  base  solide 
Wilhem  l'avait  établi,  et  les  prodigieuses  réussites 
de  l'apostolat  d'Eugène  Delapobte  les  avairnl  con- 
quis. Ils  ne  doutaient  pas  de  l'avenir  de  l'institution. 
Leur  erreur  fut  de  ne  pas  veiller  à  la  continuité 
nécessaire  de  l'effort  initial,  dans  l'œuvre  d'éduca- 
tion, qui  ne  séparait  pas  les  voix  féminines  des 
voix  masculines,  et  qui  favorisait  le  recrutement 
potscolaire,  en  mêlant  à  l'étude  du  solfège  celle  de 
la  culture  vocale. 

Us  ne  soupçonnèrent  pas  non  plus  la  crise  qu'al- 
lait déterminer  dans  l'orphéon  vocal  la  création  de 
l'orphéon  instrumental. 

Les  orphéonistes  bons  lecteurs,  mais  chanteurs 
médiocres,  furent  incités  à  l'étude  des  instruments 
à  vent,  si  ingénieusement  conçus  parla  facilité  de 
leur  jeu,  et  l'organisation  en  «  famille  »,  où  l'échelle 
des  dillérentes  voix  humaines  était  reproduite.  En 


outre,  en  devenant  instrumentiste,  on  reprenait  une 
individualité,  dont  l'effacement,  dans  le  chœur,  était 
pénible  à  certains  tempéraments.  Itapidement,  l'or- 
phéon instrumental,  sous  la  forme  de  fanfare  ou 
d'harmonie,  prit  de  l'extension,  el  c'est  en  lui  que 
reste  aujourd'hui  la  plus  grande  activité  orphéo- 
nique. 

A  côté  des  noms  de  Wilhem  et  d'Eugène  Delà- 
poète,  il  faut  placer  celui  d'Adolphe  Sas,  créateur 
des  orchestres  populaires  modernes. 


LA  VIE   ET  L'ŒUVRE   D'ADOLPHE   SAX 

En  1842,  l'année  où  mourait  Wilhem,  fondateur 
de  l'enseignement  populaire  du  chant  en  France,  et 
créateur  de  l'Orphéon,  arrivait  à  Paris  un  Belge, 
bientôt  devenu  Français,  Adolphe  Sax,  dont  les  mul- 
tiples inventions  et  l'audacieuse  activité  devaient 
révolutionner  l'harmonie,  puis  la  fanfare,  et  rendre 
possible,  dans  le  pays  toul  entier,  l'organisation 
des  orchestres  populaires. 

Ainsi,  presque  dans  le  même  temps,  au  milieu 
du  xixe  siècle,  les  moyens  de  développer  considé- 
rablement leur  art  furent  donnés  aux  musiciens,  par 
deux  activités  françaises. 

Cependant,  quatre-vingts  ans  ont  passé,  et  la  mu- 
sique française  n'a  pas  encore  recueilli  le  bienfait 
de  l'œuvre  accomplie  par  Wilhem  et  Adolphe  Sax. 
Les  sociétés  vocales  et  instrumentales  ne  manquent 
pas  ;  mais  elles  demeurent  étrangères  à  la  vie  artis- 
tique, et  les  artistes  restent  insouciants  de  leur  colla- 
boration. A  aucun  la  pensée  n'est  venue  que  l'effort 
d'Adolphe  Sax  s'ajoute  à  celui  de  Wilhem,  et  le  com- 
plète. On  s'est  contenté  de  se  montrer  également 
injuste  pour  leurs  mémoires,  alors  qu'ils  devraient 
être  également  honorés.  On  ignore  Wilhem  comme 
on  ignore  Adolphe  Sax. 

Nous  sommes  donc  naturellement  amenés  à 
parler  du  second,  après  avoir  parlé  du  premier,  et 
à  faire  suite  aux  documents  qui  conservent  le  sou- 
venir du  créateur  de  la  musique  d'ensemble  popu- 
laire vocale,  par  ceux  qui  conservent  le  souvenir  du 
créateur  de  la  musique  d'ensemble  populaire  intru- 
mentale. 

Adolphe  Sax  est  né  à  Dinan,  petite  vill<-  d 
que,  en  1814,  aîné  de  onze  enfants,  dont  huit  mou- 
rurent jeunes.  Son  père  était  fabricant  d'instruments, 
très  habile  et  1res  réputé. 

Doué  de  dispositions  exceptionnelles  pour  la  mu- 
sique, Adolphe  Sax  apprit  de  son  père  le  métier  de 
facteur,  et  suivit  les  cours  du  Conservatoire  de 
Br»xelles;  il  se  prépara  ainsi  à  devenir  en  même 
lemps  ouvrier  très  expert,  et  artiste  1res  cultivé. 
Comme  en  lui  la  volonté  fut  cxtraordmaii  emenl 
forte,  et  incapable  de  défaillance,  rien  ne  lui  man- 
qua pour  réaliser  l'œuvre  à  laquelle  il  était  destiné. 
el  léguera  l'avenir  la  gloire  d'une  vie  qui,  poor  ses 
contemporains,  s'éleva  à  la  hauteur  d'un  événement 
social»  par  les  services  rendus  à  l'art  musical,  par 
les  luttes  soutenues  pour  mettre  à  jour  ses  déi -ou- 
vertes et  les  défendre  de  la  spoliation,  par  les  tron1- 
lirais  que  lui  décernèrent  loutes  les  nations  indus- 
trielles, i  \llistoirc  tl'ini  inventeur  au  dix-i 
iircle,  par  Oscar  €omettant,  Paris,  1860.) 

.Mais  Adolphe  Sax  expia  la  gloire  de  son  génie  par 
une  existence  incessamment  agitée. 

La  vie  lui  fut  funeste  dès  l'enfance  :  il  m  arc  liai  I  à 
peine,  que  la  chute  d'un  baquet  placé  sur  une  marche 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LORPHÉON    8381 


d'escalier  l'entraînait  au  bas  de  trois  étages;  peu 
après,  il  avalait  une  épingle,  se  brûlait  le  côté  en 
tombant  sur  un  poêle  en  fonte,  et  buvaii,  trompé 
par  l'apparence  laiteuse,  un  bol  de  vitriol  étendu 
d'eau;  un  peu  plus  tard,  il  était  brûlé  et  lancé  au 
loin  par  une  explosion  de  poudre,  arraché  à  des 
empoisonnements  dus  au  blanc  de  plomb,  à  l'oxyde 
de  cuivre,  à  l'arsenic,  puis  trouvé  un  matin  à  demi 
asphyxié  par  l'odeur  d'objets  récemment  veruis 
oubliés  dans  sa  chambre.  Déjà  on  ne  le  nommait 
plus,  à  Dinan.que  «  le  petit  Sax,  le  revenant  »,  lors- 
que, à  peine  remis  de  la  blessure  causée  par  le  choc 
d'un  pavé,  et  dont  il  conserva  toujours  la  cicatrice 
profonde,  il  était  précipité  dans  un  tourbillon  par 
d'autres  enfants  qui  jouaient  avec  lui  sur  le  bord 
d'une  rivière,  et  allait  être  noyé  sans  le  dévouement 
d'un  passant  courageux. 

Il  ne  devait  tant  de  fois  vaincre  la  mort  que  pour 
justifier  pendant  une  longue  existence  la  doulou- 
reuse prédiction  de  sa  mère  au  lendemain  d'un  acci- 
dent :  n  Mon  enfant  est  voué  au  malheur.  » 

Dès  l'âge  de  six  ans,  Adolphe  Sax  commença  à 
travailler  dans  l'atelier  de  son  père.  A  douze  ans,  il 
savait  déjà  tourner  les  pièces,  mouler  les  clefs,  les 
fondre,  les  polir,  les  ajuster;  à  seize  ans,  il  présen- 
tait à  l'Exposition  de  Bruxelles  des  tîntes  et  des  cla- 
rinettes en  ivoire  entièrement  fabriquées  par  lui;  à 
vingt  ans,  il  méritait,  à  l'Exposition  de  l'industrie 
belge,  une  mention  honorable  pour  une  nouvelle 
clarinette  à  vingt-quatre  clefs  de  son  invention,  et 
se  signalait  à  l'attention  des  artistes  en  jouant  lui- 
même  avec  virtuosité  ;  à  vingt-trois  ans,  il  inventait 
une  clarinette-basse,  où  les  défauts  des  essais  tentés 
jusqu'alors  étaient  corrigés,  et  il  réalisait  bientôt 
après  un  nouveau  progrès  en  construisant  une  cla- 
rinette-contrebasse. Dès  ce  moment,  Adolphe  Sax 
fut  connu. 

Ses  derniers  travaux  avaient  sollicité  l'attention  du 
plus  fameux  des  musicographes,  Kétis,  alors  direc- 
teur du  Conservatoire  de  Bruxelles,  qui  écrivit  l'his- 
toire de  la  clarinette,  «  notant  les  perfectionnements 
depuis  la  création  en  1690,  nommant  les  plus  célèbres 
luthiers,  et  plaçant  Adolphe  Sax  au-dessus  d'eux 
tous.  »  Et  au  cours  d'un  voyage  fait  à  Paris  pour 
visiter  l'Exposition  de  1839,  le  jeune  artiste  facteur 
recueillit  les  compliments  du  chef  d'orchestre  de 
l'Opéra,  Habsneck,  des  compositeurs  Mkyerbeer  et 
Halévy. 

Encouragé  par  le  succès,  Aldolphe  Sax  poursuivit 
ses  recherches.  A  l'exposition  belge  de  1841,  il  pré- 
senta neuf  instruments.  On  le  jugea  digne  de  la  pre- 
mière médaille;  mais  elle  ne  lui  fut  pas  décernée, 
sous  prétexte  «  qu'il  était  trop  jeune  et  qu'on  n'au- 
rait plus  rien  à  lui  offrir  ».  Adolphe  Sax  sut  alors 
que  sa  jeune  renommée  était  gênante  pour  quel- 
ques-uns de  ses  compatriotes. 

Au  même  moment,  le  malheur  s'abattait  sur  sa 
maison.  Un  frère  et  une  sœur  succombaient  à  quel- 
ques mois  d'intervalle,  puis  d'autres  deuils  se  suc- 
cédaient, rendant  plus  triste  chaque  jour  l'atelier 
où,  jadis,  le  travail  était  si  joyeux. 

Paris,  Londres,  Saint-Pétersbourg  l'appelaient  à 
la  fois,  promettant  la  victoire  à  son  talent  de  virtuose 
et  de  facteur.  Il  hésita  quelque  temps  entre  les  pro- 
messes du  gouvernement  russe,  les  offres  des  capi- 
talistes anglais,  et  les  sollicitations  que  lui  firent 
parvenir  de  Paris,  par  l'entremise  du  marquis  de 
Rumigny,  ambassadeur  en  Belgique,  le  général  de 
Rumigny  son  père,  et  des  musiciens  comme  Sayart 


et  HABENECii.  Mais  c'est  Paris  qu'il  choisit,  lorsque 
cette  lettre  du  compositeur  Halévy  vint  lui  prouver 
que  les  altistes  l'y  attendaient  : 

«  Je  profite  du  séjour  de  M.  Vibuxtgwps  à  Paris  et 
de  son  départ  pour  Bruxelles  pour  vous  demander 
des  nouvelles  des  instruments  que  vous  avez  bien 
voulu  me  faire  entendre,  et  que  vous  vous  occupez 
maintenant  à  perfectionner;  j'espère  que  vous 
atteindrez  le  but  que  vous  vous  êtes  proposé,  et, 
par  vos  efforts,  dignes  de  l'intérêt  de  tous  les  com- 
positeurs, vous  agrandirez  le  nombre  et  la  puissance 
des  elfets  d'orchestre,  grâce  à  vos  nouvelles  et  excel- 
lentes combinaisons  de  sonorité;  nous  avons  déjà  eu 
l'occasion  de  les  approuver  au  Conservatoire.  Ce 
n'étaient  encore  que  des  essais,  et  je  ne  doute  pas 
que  vos  travaux  et  vos  recherches  n'augmentent 
encore  l'espoir  des  amis  de  l'art,  et  ne  répondent  à 
leur  attente.  Hâtez-vous  donc  de  terminer  votre  nou- 
velle famille  d'instruments,  et  venez  en  aide  aux 
pauvres  compositeurs,  qui  cherchent  du  nouveau, 
et  au  public,  qui  eu  demande,  n'en  fût-il  plus  au 
monde. 


Mille  compliments. 


IlALfA 


Lorsque,  en  1842,  Adolphe  Sax,  âgé  de  wiii'l-huii. 
ans,  vint  de  Belgique,  après  un  rapide  voyage  d'études 
en  Allemagne,  se  fixer  à  Paris,  où  les  plus  hautes 
personnalités  artistiques  l'appelaient,  il  avait  prouvé 
son  génie  d'inventeur  par  ses  travaux  sur  les  clari- 
nettes soprano,  alto  et  basse,  sut  la  llùle,  le  basson, 
et  par  diverses  créations  ingénieuses,  telles  qu'une 
vis  sans  fin  pour  l'accord  simultané  de  toutes  les 
cordes  du  piano,  une  caisse  sonore  pour  les  violon- 
cellistes, un  réflecteur  acoustique  pour  les  instru- 
ments à  veut,  de  nouveaux  systèmes  de  cylindres  et 
de  clefs. 

Il  était  particulièrement  réputé  pour  son  inven- 
tion de  la  nouvelle  clarinette-basse,  devenue  son  ins- 
trument de  virtuose,  et  qui  surpassait  tous  les  essais 
tentés  jusque-là,  même  le  plus  récent,  celui  de  l'ar- 
tiste français,  soliste  de  l'Opéra  de  Paris,  Dacosta. 
On  en  retrouve  la  preuve,  sous  une  forme  imprévue, 
dans  un  journal  du  temps,  qui  rapporte  la  visite 
faite,  lors  de  son  premier  séjour  en  France,  au  mo- 
ment de  l'Exposition  de  1839,  par  Adolphe  Sax  à  son 
confrère  Dacosta,  dont  la  femme  était  présente,  et 
qu'on  n'éloigna  point  au  moment  où  les  deux  clari- 
nettes-basses furent  comparées.  Elle  jugea  celle 
d'Adolphe  Sax  tellement  supérieure  à  celle  de  son 
mari,  qu'elle  ne  put  s'empêcher  de  déclarer  :  «  Mon 
ami,  je  suis  fâchée  de  te  le  dire,  mais  depuis  que 
Monsieur  a  joué,  ton  instrument  me  fait  l'elfet  d'un 
mirliton!  »  [Le  Patriote  beli/e,  23  septembre  18-i:!.; 
Appliquant  ses  recherches  à  l'amélioration  des 
instruments  les  plus  divers,  Adolphe  Sax  se  distin- 
guait déjà  de  ses  émules  contemporains  les  plus 
fameux  :  Ivan  MCller,  connu  pour  le  perfectionne- 
ment de  la  clarinette;  Th.  Boehu,  pour  celui  du  nou- 
veau système  de  flûte.  En  outre,  il  avait  marqué 
encore  plus  vivement  l'exceptionnelle  puissance  de 
ses  facultés  par  la  création  d'un  instrument  nouveau, 
basé,  suivant  l'expression  de  (iEvaert,  dans  son  Trait'} 
d'instrumentation,  «  sur  un  principe  dont  on  ne 
connaît  pas  d'application  certaine  dans  les  nombreux 
appareils  sonores  que  les  siècles  passés  ouïes  peuples 
étrangers  ont  transmis  à  l'Europe  moderne,  la  mise 
en  vibration  d'une  colonne  d'air  contenue  dans  un 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


tuyau  conique,  au  moyen  d'une  anche  battante  sem- 
blable à  celle  de  la  clarinette  ». 

Cet  instrument  nouveau  devait  donner  naissance 
à  la  famille  des  saxophones.  Avant  même  qu'on  le 
connût,  il  fut  pour  Adolphe  Sax  l'occasion  d'ap- 
prendre jusqu'où  peut  aller  l'animosité  de  concur- 
rents jaloux  :  «  Apporté  sous  une  enveloppe  de  toile 
pour  être  montré  au  jury  de  l'Exposition  belge 
de  1841,  il  fut  envoyé  au  loin  d'un  violent  coup  de 
pied  que  lui  porta,  dans  un  moment  où  l'inventeur 
s'était  absenté,  une  personne  restée  inconnue.  »  (Le 
Patriote  belge  el  Manuel  général  de  musique  militaire, 
par  Kastner.  ; 

Ainsi,  quand  il  s'intalla  en  France,  Adolphe  Sax, 
déjà  vanté  et  jalousé,  n'ignorait  pas  que  le  génie  sus- 
cite la  haine.  Il  lui  restait  à  éprouver  que  l'activité 
novatrice  peut  déchaîner  jusqu'à  la  férocité  les  plus 
calmes  égoïsmes. 

Dès  son  arrivée  à  Paris,  Adolphe  Sax  rendait  visite 
à  Hector  Berlioz,  qui,  dans  son  feuilleton  du  Journal 
des  Débats,  le  12  juin  1842,  écrivait  avec  enthou- 
siasme : 

«  ...  La  fabrication  des  instruments  à  vent  était  à 
peu  près  demeurée  dans  l'enfance,  elle  est  aujour- 
d'hui sur  une  voie  qui  ne  peut  manquer  de  la  con- 
duire à  de  magnifiques  résultats.  M.  Adolphe  Sax, 
dont  nous  venons  d'examiner  les  travaux,  aura  sans 
doute  puissamment  contribué  à  la  révolution  qui  se 
prépare.  C'est  un  homme  d'un  esprit  pénétrant, 
lucide,  obstiné,  d'une  persévérance  à  toute  épreuve, 
d'une  grande  adresse,  toujours  prêt  à  remplacer- 
dans  leur  spécialité  les  ouvriers  incapables  de  com- 
prendre et  de  réaliser  ses  plans  ;  à  la  fois  calculateur, 
acousticien  et,  au  besoin,  fondeur,  tourneur  et  cise- 
leur. Il  sait  penser  et  agir;  il  invente  et  il  exécute... 
Le  saxophone  est  le  chef  d'une  nouvelle  famille,  celle 
des  instruments  de  cuivre  à  anche...  Sa  sonorité  est 
de  telle  nature  que  je  ne  connais  pas  un  instrument 
grave  actuellement  en  usage  qui  puisse,  sous  ce  rap- 
port, lui  être  comparé.  C'est  plein,  moelleux,  vibrant, 
d'une  force  énorme  et  susceptible  d'être  adouci... 
Les  compositeurs  devront  beaucoup  à  M.  Sax,  quand 
ses  nouveaux  instruments  seront  devenus  d'un  usage 
général.  Qu'il  persévère,  les  encouragements  des 
amis  des  arts  ne  lui  manqueront  pas.  » 

L'article  d'Hector  Berlioz  eut  un  grand  retentisse- 
ment. Il  s'y  ajouta  bientôt  le  succès  remporté  par 
Adolphe  Sax  au  Conservatoire,  où,  sur  le  conseil 
de  Haheneck,  il  avait  fait  entendre  ses  instruments 
devant  Auber,  Halévv,  Dorus,  Ed.  Monnais.  Alors, 
la  sympathie  des  musiciens,  et  de  ceux  qui  vivaient 
de  la  musique,  lui  vint;  car  on  sentait  qu'il  était 
une  force.  En  même  temps  qu'il  recevait  les  encou- 
ragements des  artistes  désintéressés,  il  connut  les 
tlatteries  des  gens  préoccupés  de  gagner  sa  con- 
fiance. L'unanimité  dura  peu. 

Venu  à  Paris  sans  ressources,  Adolphe  Sax  avait 
reçu  d'un  ami,  qu'Oscar  Comettant  a  seulement 
désigné  par  l'initiale  D...,  une  première  somme  de 
4.000  francs;  puis,  cet  exemple  avait  été  suivi  par 
d'autres  amis,  qui  réunirent  une  deuxième  somme 
de  7.000  francs.  Cet  argent  avait  permis  la  location 
d'une  sorte  de  remise,  rue  Saint-Georges,  où  Adol- 
phe Sax  s'était  installé  avec  quelques  ouvriers,  et  le 
matériel  nécessaire  à  la  fabrication.  On  vint  le  voir 
à  l'œuvre. 

«  ...  Plongé  dans  ses  travaux,  il  ne  songeait  pas 
encore  à  prendre  de  brevets  ni  à  barricader  sa  porte 
contre  les  envieux,  les  plagiaires  et  les  contrefac- 


teurs. Ses  modèles,  crayonnés  par  des  mains  indis 
crêtes,  couraient  les  ateliers  et  les  rues;  ses  instru- 
ments, en  jouait  chez  lui  qui  voulait...  »  (J.  Arago, 
Visite  à  Versailles.) 

«...  Certains,  prévoyant  de  quel  immense  avan- 
tage serait  pour  eux  l'acquisition  d'un  tel  homme, 
destiné  par  ses  lumières  à  jeter  tant  d'éclat  sur 
leur  industrie,  cherchèrent  à  se  l'attacher,  pour 
tirer  parti  de  ses  labeurs,  ne  se  faisant  point  faute 
d'ailleurs  de  jouer  la  bonne  foi,  en  lui  promettant 
une  grosse  part  dans  les  bénéfices.  Ils  ne  connais- 
saient point  Adolphe  Sax;  il  ne  savaient  pas  qu'un 
véritable  artiste  songe  à  la  gloire  avant  de  consulter 
l'intérêt;  aussi,  se  virent-ils  complètement  déçus 
dans  leur  attente.  Adolphe  Sax  repoussa  toutes  les 
propositions.»  (Kastneb,  Manuel  gênerai  de  musique 
militaire.) 

«  ...  Contrairement  aux  usages  établis  à  Paris, 
Adolphe  Sax  voulut  que  les  instruments  fussent  con- 
fectionnés en  entier  sous  ses  yeux.  On  débitait  le 
bois,  on  le  perçait,  on  le  tournait  dans  l'atelier  de 
l'artiste,  qui  lui-même  travaillait  aux  pièces  difficiles, 
donnant  ainsi  à  ses  ouvriers  le  double  exemple  de 
la  science  et  du  travail.  De  plus,  les  garnitures  et 
les  clefs  se  faisaient  et  se  montaient  chez  le  facteur. 
II  en  était  de  même  des  instruments  en  cuivre,  dont 
on  soudait  les  tubes,  dont  on  fabriquait  les  pavillons, 
les  pistons,  les  cylindres,  et  de  tous  les  ouvrages  de 
tour,  tels  qu'embouchures,  etc.  Par  ce  moyen,  le 
jeune  facteur  était  assuré  de  ne  livrer  au  public  que 
d'excellents  instruments...  Mais  aussi,  en  agissant 
de  cette  façon,  il  brusquait  les  habitudes  établies,  el 
mettait  contre  lui  toutes  les  maisons  spéciales  qui 
fabriquaient  les  diverses  pièces...  C'était  toute  une 
révolution  que  venait  opérer  à  Paris  un  homme 
étranger,  et  dans  le  plus  chétif  atelier...  »  (0.  Comet- 
tant, Histoire  d'un  inventeur  au  dix-neuvième  siècle.) 

Et  c'est  ainsi  que,  peu  à  peu,  les  sympathies  qui 
n'étaient  pas  désintéressées  se  détournèrent  d'A- 
dolphe Sax.  La  lutte  commença.  D'abord,  on  ne  put 
soupçonner  l'intensité  qu'elle  devait  prendre,  parce 
que  les  attaques  se  bornèrent  à  la  moquerie.  Les 
travaux  d'Adolphe  Sax  furent  jugés  insignifiants,  ses 
recherches  inutiles.  Le  saxophone  fut  ridiculisé. 
Mais  quand  on  vit  les  sourires  impuissants  contre 
une  énergie  toujours  plus  vaillante,  et  l'œuvre  de 
progrès  s'affirmer  par  la  prise,  en  1843,  d'un  brevet 
pour  un  nouveau  système  d'instruments  d'harmonie, 
alors  les  égoïsmes  impuissants  commencèrent  à  se 
liguer,  et,  désormais,  Adolphe  Sax  fut  entraîné  à  la 
guerre  impitoyable  que,  pendant  plus  de  cinquante 
ans,  les  facteurs  d'instruments  coalisés  secrètement 
lui  livrèrent. 

Les  étonnantes  péripéties  de  cette  lutte  demeuren 
une  inépuisable  source  d'intérêt  et  d'émotion  pour 
les  amis  de  l'art  musical  susceptibles  de  reconnais- 
sance envers  le  talent  vainqueur  de  la  routine,  poul- 
ies amateurs  de  romans  capables  d'être  empoignés 
aussi  vivement  par  la  réalité  que  par  la  fiction,  pour 
les  [juristes  préoccupés  de  rendre  la  loi  plus  souve- 
rainement protectrice  des  droits  de  la  pensée  créa- 
trice, pour  les  moralistes  soucieux  de  vivifier  la 
théorie  par  un  grand  exemple  d'énergie,  d'abnéga- 
tion et  de  persévérance  inlassables. 

Premiers  travaux.  Première*  luttes. 

Adolphe  Sax  n'était  pas  installé  à  Paris  depuis  un 
an,  que  la  lutte  commença  violente  contre  lui.  Elle 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHEON    3735 


fut  décidée  après  qu'il  eut  affirmé  sa  volonté  de 
rompre  avec  la  routine  en  prenant,  les  17  et  21  juin 
1843,  ses  deux  premiers  brevets  français.  L'un  con- 
cernait les  instruments  à  vent  en  cuivre,  l'autre  les 
instruments  à  vent  en  bois;  tous  deux  remédiaient 
àjdes  [défauts  de  justesse  et  de  sonorité.  Celui  du 
17  juin  indiquait  trois  modèles  de  bulles  à  cylindre, 
deux  de  trompettes  chromatiques,  deux  de  contre- 
basses d'harmonie,  en  mi  bémol  à  [trois  cylindres, 
en  fa  à  six  cylindres,  où  les  angles  et  courbes,  trop 
heurtés,  et  dénaturant  le  son,  étaient  supprimés,  et 
avec  une  adaptation  de  coulisse  aux  cylindres  pour 
obtenir  la  justesse.  Celui  du  21  juin  supprimait,  dans 
les  instruments  tels  que  la  clarinette,  les  cavités  pro- 
duites par  l'épaisseur  du  bois  au-dessous  des  clefs 
bouchant  les  trous  ouverts  sur  le  tube. 

Ce  n'était  qu'un  début  à  des  travaux  beaucoup  plus 
révolutionnaires.  Il  suffit  cependant  à  créer  contre 
Adolphe  Sax  des  hostilités  qui  ne  pouvaient  alors 
être  connues  de  beaucoup,  mais  dont  le  scandale 
parvint  jusqu'à  Hector  Berlioz.  Il  voyageait  à  ce 
moment  en  Allemagne,  où  l'occasion  ne  lui  man- 
quait pas  d'éprouver  l'utilité  des  perfectionnements 
dus  à  Adolphe  Sax.  Dans  une  lettre  publiée  par  le 
Journal  des  Débats,  le  8  octobre  1813,  il  s'abandonne 
à  une  indignation  véhémente  : 

«  ...  Nous  n'avons  point  encore  en  France  de  trom- 
pettes chromatiques  (ou  à  cylindres)  :  la  popularité 
incroyable  du  cornet  à  pistons  leur  a  fait  une  concur- 
rence victorieuse  jusqu'à  ce  jour,  mais  injuste,  à  mon 
avis,  le  timbre  du  cornet  étant  fort  loin  d'avoir  la 
noblesse  et  le  brillant  de  celui  de  la  trompette... 

«  Nos  bandes  de  musique  militaire  n'ont  point  en- 
core de  trompette  à  cylindres,  ni  de  basse-tuba,  le 
plus  beau  des  intruments  graves... 

<c  Ce  ne  sont  pas,  en  tout  cas,  les  instruments  qui 
nous  manquent;  Adolphe  Sax  fait,  à  celte  heure,  des 
trompettes  à  cylindre,  grandes  et  petites,  dans  tous 
les  tons  possibles,  usités  et  inusités,  dont  l'excellente 
sonorité  et  la  perfection  sont  incontestables... 

«  Croirait-on  que  ce  jeune  et  ingénieux  artiste  a 
mille  peines  à  se  faire  jour,  et  à  se  maintenir  à 
Paris?  On  renouvelle  contre  lui  des  persécutions 
dignes  du  moyen  âge,  et  qui  rappellent  exactement 
les  faits  et  gestes  des  ennemis  de  Benvenuto,  le  cise- 
leur florentin.  On  lui  enlève  ses  ouvriers,  on  lui  dé- 
robe ses  plans,  on  l'accuse  de  folie,  on  lui  intente 
des  procès  ;  avec  un  peu  d'audace,  on  l'assassinerait.  » 
Quelques  semaines  après,  la  Revue  et  Gazette  des 
théâtres  dévoilait  une  conspiration  organisée  contre 
Adolphe  Sax  par  les  artistes  de  l'orchestre  de 
l'Opéra,  «  auxiliaires  fidèles  de  ses  rivaux  ». 

Emerveillé  de  sa  clarinette-basse  et  de  ses  instru- 
ments en  cuivre,  le  compositeur  Dors'izETTi  s'était 
empressé  d'utiliser  ces  «  nouveaux  prestiges  harmo- 
niques »  dans  sa  partition  de  Dom  Sébastien,  destinée 
à  l'Opéra.  Au  cours  des|  répétitions,  certains  artistes 
avaient  forcé,  petit  à  petit,  sous  prétexte  d'impossi- 
bilité, le  compositeur  à  couper  les  passages  écrits 
pour  les  nouveaux  instruments,  et  ils  avaient  obtenu 
du  chef  d'orchestre  Habeneck,  trop  faible,  qu'on  jouât 
l'ancienne  clarinette-basse  simultanément  avec  la 
nouvelle,  de  façon  à  «  amoindrir  l'effet  ». 

La  révélation  de  ces  manœuvres,  «  menaçant  à  la 
fois  l'intérêt  de  l'art,  celui  de  la  partition  nouvelle 
et  celui  d'un  jeune  facteur,  auteur  de  plusieurs  in- 
ventions importantes  »  {Revue  et  Gazette  des  théâtres, 
0  novembre  18*3),  suscita  des  articles  dans  tous  les 
journaux.  Le  rédacteur  de  la  France  musicale,  Escu- 


dier,  dans  le  numéro  du  12  novembre  1843,  exprima 
les  sentiments  de  blâme  qui  étaient  unanimement 
ressentis,  en  écrivant  : 

«  ...  L'art  est  donc  devenu  une  chimère,  et  tout  ce 
qu'on  pourrait  faire  à  l'avenir,  dans  le  but  d'amé- 
liorer les  instruments,  courrait  le  risque  d'être  pros- 
crit sous  un  prétexte  d'intérêt  personnel?...  Que 
M.  Sax  ne  se  décourage  pas;  il  a  devant  lui  le  plus 
bel  avenir;  plus  il  excitera  de  jalousies,  plus  son 
succès  sera  éclatant.  11  n'est  rien  comme  les  passions 
envieuses  pour  donner  raison  au  talent  et  au  génie.  » 
Le  rédacteur  du  Monde  msical,  dans  le  numéro 
paru  le  30  novembre  1843,  dénonça  l'état  arriéré  de 
la  facture  instrumentale,  laissant  ainsi  à  l'avenir 
une  preuve  irrécusable  de  son  infériorité  au  moment 
où  parut  Adolphe  Sax  : 

«  ...  Cornets  faux,  trombones  faux,  cors  faux,  cla- 
rinettes fausses,  flûtes  qui  baissent  ont  jeté  les  hauts 
cris.  Ils  ont  soutenu  que  leurs  instruments  étaient 
délicieux!  Insensés!  si  vos  instruments  sont  bons, 
que  doit-on  penser  de  vous?...  L'orchestre  de  l'Opéra 
est  un  bon  orchestre,  mais  grâce  aux  instruments  à 
cordes.  Les  instruments  de  cuivre  sont  mauvais.  En 
Allemagne  et  en  Belgique,  on  ne  voudrait  pas  les 
entendre  cinq  minutes  sans  les  siffler...  » 

En  dehors  des  musiciens,  on  se  préoccupa  de  l'in- 
trigue dont  Adolphe  Sax  était  victime,  car  ceux  qui 
l'avaient  machinée  ne  prirent  pas  soin  de  la  borner 
au  petit  cercle  artistique  intéressé,  et  la  victime  sut 
se  défendre  vaillamment.  Pour  se  dégager  du  blâme 
encouru,  l'un  des  artistes  coupables,  le  clarinettiste 
Buteux,  avait  adressé  à  la  Revue  et  Gazette  des 
théâtres  une  lettre  où  la  clarinette-basse  nouvelle 
était  durement  critiquée.  La  réponse  d'Adolphe  Sax 
parut  dans  le  même  journal,  le  3  décembre  1843. 
Elle  était  nette  : 

«  ...  Que  M.  Buteux  trouve  mon  instrument  mau- 
vais, c'est  son  droit;  mais  je  dois  lui  rappeler  que 
cette  opinion,  il  ne  l'a  pas  eue  toujours,  car  chez 
moi,  et  devant  plus  de  cinquante  personnes,  en 
faisant  lui-même,  à  plusieurs  reprises,  la  compa- 
raison de  l'instrument  qu'il  joue  aujourd'hui  avec  le 
mien,  il  a  trouvé  ce  dernier  beaucoup  supérieur  à 
l'ancien.  Puisqu'il  est  si  facile  de  nier  aujourd'hui  ce 
qui  s'est  passé  en  petit  comité,  j'offre  à  M.  Buteux 
de  faire  décider  sur  notre  question  le  grand  juge,  le 
public!  Après  cela,  tout  sera  dit  de  part  et  d'autre. 
«  Je  propose  donc  à  M.  Buteux,  première  clarinette 
de  l'Opéra,  de  choisir  tel  morceau  qu'il  lui  plaira,  et 
lui  sur  son  instrument,  et  moi  sur  le  mien,  nous  le 
jouerons  en  public.  Si  la  comparaison  qui  pourra 
être  faite  entre  mon  instrument  et  le  sien  n'est  pas 
à  mon  avantage,  je  me  déclare  battu.  J'offre  ensuite 
d'exécuter  sur  ma  clarinette-basse  un  morceau  que 
je  défie  M.  Buteux,  première  clarinette  de  l'Académie 
royale  de  musique,  de  jouer  sur  la  sienne.  —  Adol- 
phe Sax.  » 

Le  virtuose  Buteux  jugea  prudent  de  ne  pas 
relever  le  défi.  Et  le  public,  mêlé  à  l'affaire,  main- 
tenant séduit  par  l'attitude  crâne  de  celui  qu'on  atta- 
quait sans  loyauté,  commença  désormais  à  s'inté- 
resser à  ses  faits  et  gestes,  et  à  préparer  la  popula- 
rité de  son  nom. 

Quant  aux  artistes,  tous  ceux  qui  comptaient  parmi 
les  plus  illustres  affirmèrent,  à  l'occasion  de  cette 
indigne  querelle,  leur  reconnaissante  sympathie  pour 
le  novateur.  Le  numéro  de  la  Revue  et  gazette  des 
théâtres  où  la  réponse  d'Adolphe  Sax  était  publiée 
inséra  ces  témoignages  : 


:i73r. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


«  Adolphe  Sax  a  t'ait  faire  de  grands  progrès  non 
seulement  à  la  fabrication  des  instruments  à  vent, 
mais  encore  à  l'art  de  l'instrumentation  même,  en 
perfectionnant  les  instruments  anciens,  et  en  en 
créant  de  nouveaux.  Il  est  digne  de  la  reconnaissance 
des  compositeurs  et  de  tous  les  encouragements  des 
protecteurs  de  la  musique.  »  (Hector  Berlioz.) 

«  ...  Personne  mieux  que  M.  Sax  ne  mérite  d'être 
encouragé  et  soutenu  dans  les  travaux  qu'il  a  en- 
trepris. »  (Haléw.) 

«  ...  Les  perfectionnements  apportés  par  M.  Adol- 
phe Sax  à  la  clarinette-basse,  ainsi  qu'au  bugle,  à  la 
trompette  et  généralement  à  tout  le  système  des 
instruments  à  vent,  comme  aussi  à  l'invention  de 
plusieurs  instruments  nouveaux  du  plus  bel  effet, 
notamment  le  saxophone,  me  paraissent  d'une  incon- 
testable utilité  et  infiniment  favorables  au  progrès 
de  l'art  musical...  »  (Kastner.) 

«...  J'aiététrès  étonné  etplusque  satisfait,  à  cause 
des  bons  résultats  que  de  tels  instruments  doivent 
opérer  dans  l'art.»  (K. Ricci.) 

«  Je  ne  connais  des  nouveaux  instruments  qu'a 
inventés  M.  Sax  que  l'instrument  qu'il  appelle  le 
saxophone.  Cet  instrument  m'a  paru  d'un  bel  et 
puissant  effet  et  pouvant  être  avantageusement  em- 
ployé dans  les  orchestres  et  les  musiques  militaires.» 
(Meye'rbeer.) 

«  Les  perfectionnements  de  M.  Sax  me  semblent 
de  véritables  créations.  Les  compositeurs  lui  doivent 
beaucoup,  parce  que,  grâce  à  lui,  s'agrandira  le  do- 
maine de  l'instrumentation.»  (Ad. Adam.) 

«...  La  basse  d'harmonie  appelée  saxophone  el  la 
clarinette-basse  sont  on  ne  peut  plus  remarquables 
par  la  puissance  de  leurs  notes  graves.  Ces  deux  ins- 
truments seront  appelés,  je  le  crois,  à  prendre  place 
dans  les  orchestres.  Les  bugles  et  les  trompettes  à 
cylindre  ont  aussi  une  supériorité  incontestable  par 
l'égalité  des  sons  et  surtout  par  la  justesse.  Ces 
résultats  obtenus  seront,  je  n'en  doute  pas,  d'une 
grande  utilité  pour  les  artistes  exécutants,  ainsi  que 
pour  les  compositeurs,  qui  verront  par  là  s'éten- 
dre encore  les  ressources  de  l'instrumentation.  » 
(A.Thomas.) 

La  clarinette-basse  est  tout  à  fait  nouvelle; 

elle  est  appelée  à  jouer  un  grand  rôle  dans  l'or- 
chestre; ses  sons,  remarquablement  beaux  et  mâles, 
ont  une  grande  puissance  et  une  parfaite  égalité.  » 
(Cahafa.) 

N'ayant  pu  réussir  à  intimider  Adolphe  Sax,  à 
désorganiser  son  atelier  et  à  discréditer  les  premiers 
résultats  de  son  effort,  ses  rivaux  en  vinrent  à  autre 
chose.  On  commença  à  dresser  des  pièges  qui,  fata- 
lement, devaient  enlacer  un  homme  trop  loyal  pour 
ne  pas  être  confiant. 

Dans  son  volume  Histoire  d'un  inventeur  au  dix- 
neuvième  siècle,  chapitres  v  et  vi,  Oscar  Comf.ttant 
a  raconté  comment  un  commis,  puis  un  caissier, 
agents  secrets  de  ceux  qu'inquiétait  cette  activité 
novatrice,  furent  introduits  chez  Adolphe  Sax;  com- 
ment son  crédit  fut  combattu  chez  les  banquiers, 
comment  il  se  trouva  acculé  h  des  transactions  si 
ruineuses  qu'il  dut  accepter  1.400  francs  nécessaires 
à  des  payements  urgents,  pour  une  valeur  souscrite 
à  trois  mois  de  7.800  francs,  comment  il  échappa 
à  la  chute,  grâce  à  l'esprit  de  justice  de  celui  qui 
avait  régulièrement  escompté  les  7.800  francs,  et  qui 
tint  à  protester  contre  les  scandaleuses  manœuvres 
d'usure  employées  contre  son  débiteur,  en  fixant  le 
remboursement  par  mensualités  de  230  francs;  com- 


ment enfin  les  traîtres  se  démasquèrent  eux-mêmes 
par  leur  audace  imprévoyante. 

Au  moment  où  s'accentuait  ainsi  la  lutte,  Adolphe 
Sax  travaillait  sans  relâche,  et  vivait  misérablement. 
Après  l'active  journée  de  l'atelier,  il  passait  une 
partie  de  la  nuit  à  ébaucher  des  plans  el  des  modèles, 
dans  une  petite  chambre,  meublée  seulement  d'un 
établi  et  d'un  lit,  au-dessus  duquel  s'ouvrait  une 
tabatière  fermant  si  mal  que  la  pluie  et  la  neige 
passaient  au  travers,  comme  la  lumière  du  jour. 
Afin  de  se  protéger  contre  le  mauvais  temps,  Adol- 
phe Sax  assujettissait  au-dessus  de  sa  tête  un  vieux 
parapluie  ouvert,  l'argent  dont  il  pouvait  disposer 
étant  trop  utile  aux  travaux  de  la  fabrique  pour  en 
pouvoir  consacrer  un  peu  à  l'amélioration  de  son 
intérieur.  Il  y  reçut  un  jour  la  visite  de  l'écrivain 
Edouard  Monnais  : 

II  pleuvait,  Sax  était  assis  sur  son  lit  mal  garanti 
par  son  parapluie  et  dessinait  un  plan  sur  un  établi. 
«  Pourquoi,    lui  dit  Edouard  Monnais,  ne  faites- 
vous  pas  arranger  la  fenêtre  de  votre  chambre?  l'eau  y 
pénètre;  vous  vous  tuerez  ici. 

—  Plus  tard,  répondit  l'artiste  en  souriant,  quand 
je  serai  riche.  » 

...  Edouard  Monnais  sortit  le  cœur  navré  de  chez 
le  pauvre  inventeur.  Venant  à  rencontrer  l'historien 
et  compositeur  Georges  Kastner,  il  lui  dit  :  «  Je  viens 
d'être  cruellement  surpris;  je  viens  de  voir  Sax  chez 
lui,  c'est-à-dire  dans  un  trou  sombre,  humide,  en- 
vahi par  la  moisissure.  J'ai  vu  comment  cet  esti- 
mable artiste  passe  les  nuits;  c'est  affreux.  Ah  !  les 
gens  qui  attaquent  cet  homme  sont  bien  coupables.  » 
(Oscar  Cohettant,  ouvrage  cité.)  Ces  gens-là  devaient 
être  sans  pitié.  Pour  eux,  Adolphe  Sax  n'était  encore 
que  le  Belge.  Et  cette  appellation  ne  marquait  que 
du  mépris.  L'heure  approchait  où  ils  allaient  expri- 
mer leur  haine  eu  l'appelant  l'étranger. 

Réorganisation  des  musiques  militaires. 

Si  la  force  ne  manqua  pas  à  Adolphe  Sax,  au  début 
de  sa  carrière,  pour  échapper  au  découragement  et 
même  au  désir  de  suicide  qui  le  tint  à  l'heure  des 
premiers  embarras  d'argent,  c'est  parce  qu'un  zèle 
d'apôtre  l'animait. 

En  lui,  génie  de  l'invention,  force  de  la  science, 
audace  de  l'activité,  énergie  de  la  volonté,  tout  coa- 
coirrait  au  même  but  :  arracher  à  la  routine  la  fabri- 
cation des  instruments  à  vent  en  bois  el  en  cuivre, 
et  l'organisation  de  l'orchestre  où  s'unissaient  ces 
divers  instruments,  borné  en  ce  temps-là  aux  musi- 
ques militaires.  Décidé  à  accomplir.ee  double  effort, 
il  n'avait  pas  longtemps  hésité  à  écouter  la  voix  de 
de  son  compatriote  belge  Jobard,  directeur  du 
Musée  de  l'Industrie,  qui  lui  rappelait  le  proverbe  : 
<i  Nul  n'i'sl  prophète  en  son  pays.»  11  était  alors 
venu  en  Erance,  attiré  non  pas  tant  par  la  renommée 
de  Paris  et  les  encouragements  de  musiciens  illus- 
tres, que  parla  certitude  de  la  sympathie  de  l'aide  de 
camp  de  Louis-Philippe,  le  général  de  lîumigny,  qui 
se  préoccupait  activement  du  probes  des  musiques 
militaires,  et  par  l'espoir  de  parvenir  au  succès  de 
ses  tentatives  dans  un  pays  <>n  ta  création  du  Gym- 
nase musical  avait  marqué  le  souci  de  donner  à 
l'armée  des  musiciens  capables. 

Là,  en  butte  à  la  moquerie,  puis  à  la  haine,  dès 
ses  premières  attaques  contre  la  routine  de  la  fabri- 
cation, il  eût  faibli  sans  sa  volonté  de  combattre 
aussi  la  routine  de  l'organisation.   Mais  la  nécessité 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHÉON    373: 


et  la  beauté  de  l'œuvre  à  accomplir  le  soutinrent.  Il 
savait  désormais  qu'il  serait  compris  seulement  par 
l'élite  des  artistes,  et  que  l'égoïsme  troublé  de  tous 
ceux  qui  ne  touchaient  à  la  musique  que  pour  l'ex- 
ploiter se  dresserait  furieusement  contre  lui.  Cepen- 
dant, il  ne  voulut  pas  reculer.  Sans  larder,  et  en 
même  temps  qu'il  poursuivait  ses  recherches  de 
perfectionnement  et  d'invention,  il  commença  à  pré- 
parer la  réforme  d'organisation,  en  créant  un  mou- 
vement parmi  les  musiciens,  la  presse,  le  public, 
dont  le  triomphe  —  où  ses  rivaux  ne  virent  qu'un 
succès  de  réclame  —  atteste  qu'Adolphe  Sax  ne  fut 
pas  moins  grand  dans  l'action  que  dans  l'invention. 

Dans  la  dernière  semaine  de  décembre  1843,  quel- 
ques semaines  après  la  représentation  de  Dom  Si  bas- 
tien,  de  Do.MiziiTTi,  à  l'Opéra,  où  on  s'était  ligué 
contre  les  nouveaux  instruments  employés  par  le 
compositeur,  Adolphe  Sax  organisait  une  audition 
publique  dans  son  atelier,  rue  Saint-Georges.  Les 
compositeurs  les  plus  célèbres,  les  journalistes  les 
plus  distingués  y  assistèrent;  pour  la  première  fois 
en  France,  un  concert  d'instruments  à  vent  en  bois 
et  en  cuivre  retint  l'attention  des  dilettanti.  (Le  Mé- 
nestrel, 31  décembre  1843.  La  France  Musicale, 
7  janvier  1844.) 

Le  résultat  de  ce  premier  essai  prouva  a  Adolphe 
Sax  que  ce  moyen  de  propagande  était  bon.  Bientôt, 
les  auditions  de  la  rue  Saint-Georges  furent  men- 
suelles, et  les  personnalités  les  plus  marquantes  de 
la  musique,  de  la  littérature,  de  la  science,  de  l'armée 
et  du  monde  politique  s'y  rencontrèrent.  Peu  à  peu, 
la  curiosité  du  public  s'éveillant,  des  artistes  dévoués 
à  Adolphe  Sax,  comme  Duprez,  le  frère  du  célèbre 
chanteur,  et  Arban,  qui  avaient  adopté  l'un  la  clari- 
nette-basse, l'autre  le  bugle  Sax.  comme  on  disait 
alors,  se  firent  applaudira  la  salle  Herz  et  aux  con- 
certs Vivienne  (Le  Ménestrel,  14  janvier  1M  i  . 

Pour  une  audition  de  ses  œuvres,  organisée  par 
lui  à  la  salle  Herz,  le  3  février  181-4,  Hector  Berlioz, 
«  voulant  offrir  à  Adolphe  Sax  l'occasion  de  pro- 
duire ses  instruments  nouveaux  »,  écrivit  un  Hymne, 
d'après  une  de  ses  mélodies,  dont  l'interprétation 
était  confiée  à  ce  sextuor  instrumental  :  petite  trom- 
pette à  cylindres  en  mi  }>,  petit  bugle,  clarinette- 
basse  et  saxophone,  joué  par  Adolphe  Sax  lui-même, 
car  le  mécanisme  n'était  pas  encore  fixé.  Cette  exécu- 
tion laissa  aux  auditeurs  une  impressiou  profonde. 
Dans  la  Preste  du  '.i  février,  Théophile  Gautier  signala 
«  l'effet  de  la  grande  et  belle  sonorité  ».  D'Ortiguk, 
dans  la  France  Musicale,  parla  du  «  beau  résultat 
obtenu  par  M.  Sax  avec  ses  six  instruments  qui  ont 
porté  jusqu'à  l'illusion  l'imitation  de  l'orgue  le  plus 
sonore  ».  Maurice  Bourges,  dans  la  Revue  et  Gazette 
musicale,  constata  que  «  l'opinion  publique  ratifiait, 
par  ses  suffrages,  les  tentatives  de  M.  Adolphe  Sax  ». 
Ed.  Thierry,  dans  son  feuilleton  du  Message)'  (0  fé- 
vrier), fut  particulièrement  enthousiaste  : 

«  ...  La  musique  a  distrait  des  instruments,  comme 
les  instruments  ont  distrait  de  la  musique.  Je  ne 
parlerai  donc  que  de  l'effet  général,  qui  a  été  noble 
et  saisissant.  Une  haute  et  sévère  inspiration,  poussée 
vers  le  ciel  par  des  instruments  éclatants,  inconnus. 
des  sons  semblables  à  ceux  que  donneraient  des  con- 
trebasses fantastiques,  ou  la  chanterelle  riche,  pure, 
vibrante  de  quelque  merveilleux  violon  d'airain, 
voilà  le  souvenir  qui  m'est  resté,  vo  ilà  ce  qui  a  sou- 
levé les  applaudissements  de  l'assemblée  entière. 
Que  Berlioz  et  Sax  y  prennent  chacun  sa  part,  per- 
sonne ne  saurait  la  leur  faire.  » 


Après  ce  concert  de  Berlioz,  la  preuve  était  faite 
qu'un  groupement  d'instruments  à  vent  pouvait 
constituer  un  ensemble  parfait.  Ce  succès  contras- 
tait avec  l'échec  éprouvé,  quelques  jours  auparavant, 
aux  concerts  Vivienne,  par  une  famille  d'artistes 
anglais,  composée  du  père  et  des  quatre  fils,  les 
DiSTiN,  qui  étaient  venus  chercher  à  Paris  la  consé- 
cration de  leur  talent  sur  la  trompette,  le  cornet, 
le  trombone,  le  cor  et  le  bugle  à  clefs,  mais  dont  la 
première  tentative  avait  été  trop  malheureuse  pour 
être  renouvelée.  Le  lendemain  du  concert  où  Adol- 
phe Sax  avait  triomphé,  ils  vinrent  lui  rendre  visite 
et  sollicitèrent  son  appui.  Tout  entier  à  sa  préoccu- 
pation de  propagande,  il  décida  immédiatement  de 
les  faire  collaborer  à  son  effort.  Les  instruments 
étaient  défectueux,  l'ensemble  hétérogène,  les  artis- 
tes, sauf  le  père,  sans  talent.  Adolphe  Sax  leur  con- 
seilla d'abandonner  leurs  instruments,  d'étudier 
sous  sa  direction  et  de  constituer  un  ensemble  avec 
ses  bugles  soprano,  alto,  baryton,  basse  et  contre- 
basse. Ils  acceptèrent,  furent  des  disciples  zélés  et, 
après  quelques  semaines  d'étude,  reparurent  devant 
le  public.  On  les  acclama,  et  alors,  de  toutes  parts, 
ils  furent  conviés  à  figurer  sur  le  programme  des 
réunions  musicales,  à  côté  des  cantatrices  et  des 
violonistes  les  plus  réputés.  Lorsque,  le  6  avril  1844, 
Hector  Berlioz  organisa,  à  l'Opéra-Comique,  une 
nouvelle  audition  de  ses  œuvres,  il  invita  la  famille 
Distin-  à  se  fane  entendre,  et  encore  une  fois,  dans 
une  circonstance  solennelle,  l'attention  du  public 
fut  attirée  sur  l'œuvre  d'Adolphe  .sax.  La  Revue  et 
Gazette  musicale  du  14  avril  parla  longuement  de 
cette  audition  : 

ci  ...  MM.  Distin  ont  exécuté,  sur  cinq  instruments 
nouvellement  inventés  par  M.  Sax,  une  fantaisie  sur 
Robert  le  Diable.  Le  succès  des  instruments  et  celui 
des  exécutants  a  été  tel  que  le  public  a  redemandé 
avec  enthousiasme  le  morceau...  L  ne  chose  assez 
remarquable,  c'est  que  MM.  Distin.  qui  font  aujour- 
d'hui fureur  dans  tous  les  concerts,  n'avaient  pu 
parvenir  à  se  faire  entendre  aux  Concerts  Vivienne, 
alors  qu'ils  jouaient  des  quintetti  a\ec  les  anciens 
instruments.  Grâce  aux  instruments  de  M.  Sax.  ces 
habiles  artistes  sont  maintenant  admirés  comme  ils 
méritent  de  l'être.  Avec  le  temps,  les  bonnes  choses 
finissent  toujours  par  triompher  des  entraves  de 
toutes  sortes  que  leur  opposent  la  routine  et  la  mal- 
veillance. M.  Adolphe  Sax  méritait  de  réussir.  Il  a 
réussi...  » 

Ensuite,  la  famille  Distin  fut  appelée  par  toutes 
les  grandes  villes  de  province  et  de  l'étranger. 

D'autres  succès  venaient  aussi  à  Adolphe  Sax. 
Hossini  faisait  adopter  ses  instruments  au  Conserva- 
toire de  Bologne,  après  avoir  déclaré  sa  clarinette- 
basse  «  le  plus  riche  et  le  plus  parfait  des  instru- 
ments à  vent»,  et  prononcé,  àproposdu  saxophone, 
cette  parole,  que  rapporte  Oscar  Comettant  :  «C'est 
la  plus  belle  pâte  de  son  que  je  connaisse.  » 

Georges  Kastner  les  mêlait  aux  instruments  habi- 
tuels de  l'orchestre  sympbonique  dans  son  oratorio  te 
Dernier  Roi  de  iudée,  donl  l'audition  allait  être  faite 
au  Conservatoire,  le  1er  décembre  1844.  Hector  Ber- 
lioz les  étudiait  dans  son  Traite  d'instrumentation, 
qui  parut  au  milieu  de  l'année  18-14.  Enfin,  ils  triom- 
phaient à  l'Exposition  de  l'Industrie  Nationale,  dont 
le  jury  décerna  la  médaille  d'argent  à  Sax,  après 
avoir  reconnu  le  premier  rang  a  sa  fabrication,  et  où 
il  eut  l'occasion  d'un  succès  décisif  en  improvisant, 
avec  les  ûistis,  lors  d'une  visite  de  la  famille  royale, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


un  concert  qui  intéressa  si  vivement  l'auguste  audi- 
toire, que  les  Disti.n  et  l'inventeur  furent  invités  à  le 
répéter  aux  soirées  du  château  de  Neuilly. 

Après  l'Exposition  de  1844,  la  réputation  de  la 
famille  d'inslruments  qu'il  désignait  sous  le  nom 
de  bugles-Sax  à  cylindre,  obligea  l'inventeur  à  créer 
le  nom  Sax-horn.  On  devait  lui  en  faire  grief;  aussi, 
n'est-il  pas  inutile  de  montrer,  par  un  document 
contemporain,  le  Manuel  ycneral  de  musique  militaire 
de  Kastner,  l'origine  de  cette  appellation  : 

«  ...  Tous  ceux  qui  avaient  l'occasion  d'apprécier 
ces  magnifiques  instruments,  la  famille  des  bugles, 
si  défectueuse  et  si  incomplète  aufrefois,  ne  les  dési- 
gnaient plus  que  sous  le  nom  de  bugles-SAx:  et 
bientôt  cette  dénomination  n'ayant  point  paru  suf- 
fisante pour  les  distinguer  des  mauvais  instruments 
livrés  dans  le  commerce  sous  le  nom  de  bugles,  on 
conseilla  à  l'inventeur  d'en  rechercher  une  qui  pût 
indiquer  et  faire  reconnaître  sur-le-champ  les  ins- 
truments sortant  de  sa  fabrique  et  perfectionnés 
d'après  son  système.  Alors  M.  Adolphe  Sax  imagina 
le  nom  de  Sax-horn,  qui  lui  valut  de  la  part  de  ses 
ennemis  une  accusation  nouvelle,  celle  d'usurpation 
et  de  plagiat.  Il  suffit  de  quelques  observations  pour 
démontrer  combien  elle  était  absurde...  N'a-t-on 
pas  dit,  par  exemple,  en  désignant  le  cor  perfec- 
tionné par  Meikbed,  la  flûte  perfectionnée  par  Boehm, 
la  clarinette  perfectionnée  par  Klosé,  le  cor-Meifred, 
la  flùle-Boehm,  la  clarinette-Klosêl  Qui  se  serait 
jamais  imaginé  qu'on  voulût  entendre  par  là  que 
Meifred  a  inventé  le  cor,  Boehm  la  flûte,  Klosé  la 
clarinette?...  Le  mot  horn  voulant  dire  cor,  la  tra- 
duction littérale  de  Sax-horn  est  donc  cor  de  Sax...  » 

En  1844,  les  rivaux  d'Adolphe  Sax  ne  songeaient 
pas  encore  à  trouver  là  matière  à  chicane;  ils  en 
étaient  encore  aux  manœuvres  sournoises. 

Un  incendie  éclata  dans  l'atelier  de  la  rue  Saint- 
Georges,  sans  qu'on  pût  en  retrouver  la  cause;  mais 
les  outils,  brisés  sans  avoir  été  atteints  par  les  flam- 
mes, attestèrent  la  malveillance.  On  entraîna  Adolphe 
Sax  à  une  débâcle  financière,  en  faisant  offrir,  le  jour 
même  de  l'émission,  à  cinquante  pour  cent  au- 
dessous  de  leur  valeur,  des  actions  de  la  société 
qu'il  avait  formée  pour  développer  sa  fabrication; 
et  les  jours  suivants,  un  journal  qui  devait  rallier  la 
meute  de  ses  ennemis,  l'Europe  musicale  et  dramati- 
que, inséra  cette  étrange  annonce  : 

ACTIONS   A    VENDRE 
DE    I.A    SOCIÉTÉ    SAX    ET    C1». 

Le  vendeur  est  prêt  à  faire  îles  sacrifices. 

Le  coup  réussit;  l'émission  échoua,  et  Adolphe  Sax 
eut  20.000  francs  de  dettes. 

Alors  qu'on  croyait  avoir  assez  fait  pour  l'abattre, 
et  préserver  la  routine  de  la  fabrication,  il  répondit 
en  attaquant  la  routine  de  l'organisation.  Spontini, 
qui  avait  dirigé  avec  éclat  les  musiques  militaires 
de  Prusse,  était  à  Paris.  Adolphe  Sax  lui  soumit  ses 
travaux,  que  le  compositeur  déclara  susceptibles 
«d'introduire  dans  l'art  des  sonorités  nouvelles,  et 
d'offrir  de  grandes  ressources  aux  habiles  instru- 
mentistes, et  plus  encore  pour  les  musiques  militai- 
taires,  qu'on  ne  saurait  assez  considérer,  enrichir 
et  perfectionner  comme  en  Allemagne,  et  en  pre- 
mier lieu  en  Prusse  ». 

La  question  était  désormais  posée,  avec  l'appui 
d'une  autorité  particulièrement  compétente.  Au  cours 


de  l'année  1844,  Adolphe  Sax  avait  réussi  à  rendre 
déplus  en  plus  vive  la  sympathie  du  public  pour  la 
cause  dont  il  était  l'apôtre.  Il  ne  laissa  pas  s'ache- 
ver l'année  sans  adresser  au  ministre  de  la  guerre 
un  mémoire  très  complet  sur  la  réorganisation  des 
musiques   militaires  qui  décida  la  réforme  de  1845. 

La  réorganisation  des  musiques  militaires  en 
1845.  —  Création  des  orchestres  d'harmonie 
et  de  fanfares  modernes  sur  l'initiative  et  avec 
les  instruments  nouveaux  d'Adolphe  Sax. 

L'année  1843  marque  dans  l'histoire  des  progrès 
de  l'orchestre. 

Avant  184"),  les  compositeurs  ne  disposaient  que 
de  l'orchestre  symphonique,  dont  le  développement 
avait  suivi  les  progrès  accomplis  dans  l'art  musical 
depuis  la  fin  du  xviii"  siècle.  En  dehors  de  la  musi- 
que militaire,  dont  ils  ne  pouvaient  se  servir  comme 
au  temps  de  la  première  République,  il  n'existait  que 
très  peu  d'organismes  groupant  des  instruments  à 
vent.  Si  même,  à  ce  moment,  cette  forme  populaire 
de  l'orchestre  était  sortie  de  l'armée,  il  ne  leur  eût 
pas  été  possible  de  l'utiliser  pour  l'interprétation  de 
leurs  œuvres,  car  en  ajoutant  aux  petites  flûtes, 
hautbois,  clarinettes,  bassons,  serpents,  cors,  trom- 
pettes et  trombones,  des  petites  clarinettes,  cornets 
à  pistons  et  opbicléïdes,  on  n'aurait  pas  beaucoup 
augmenté  les  ressources,  et  la  disproportion  entre 
les  sonorités  de  l'aigu,  du  médium  et  du  grave  aurait 
était  sensiblement  accentuée. 

Après  18  45,  tout  fut  préparé  par  un  perfectionne- 
ment si  complet  et  si  favorable  des  orchestres  d'har- 
monie et  de  fanfare,  qu'aujourd'hui  encore,  après 
plus  de  quatre-vingts  ans,  les  résultats  artistiques 
qu'on  peut  en  attendre  ne  sont  pas  encore  épuisés. 

C'est  à  Adolphe  Sax,  à  son  enthousiasme  d'ar- 
tiste et  à  son  génie  d'inventeur,  qu'est  dû  ce  bien- 
fait, dont  il  n'a  pas  eu  d'autre  récompense  qu'une 
vie  incessamment  bouleversée. 

Au  début  de  l'année  1845,  les  musiciens  les  plus 
célèbres,  les  journalistes  les  plus  réputés,  le  public 
lui-même,  étaient  acquis  au  mouvement  en  faveur 
de  la  réorganisation  des  orchestres  d'instruments  à 
vent,  qu'Adolphe  Sax  avait  provoquée  par  ses  deux 
premières  années  de  travaux  et  d'activité  à  Paris. 
Mais  rien  n'aurait  pu  être  fait,  si  des  concours  in- 
fluents ne  s'étaient  rencontrés  dans  l'armée,  car  la 
question  n'intéressait  alors  que  les  musiques  mili- 
taires. Comme  tous  les  hommes  nécessaires,  qu'un 
mystérieux  hasard  semble  servir,  et  qui  n'ont  en 
réalité  d'autre  appui  que  leur  foi  et  leur  énergie, 
Adolphe  Sax  venait  à  l'heure  favorable.  11  trouva, 
pour  sa  tentative,  de  hauts  protecteurs  dans  l'en- 
tourage immédiat  du  roi,  avec  le  général  de  Uumi- 
gny,  aide  de  camp,  et  dans  la  personne  du  ministre 
de  la  guerre,  avec  le  général  Moline  de  Saint-Yon, 
directeur  du  personnel. 

Le  général  de  Rumigy,  musicien  cultivé,  avait 
connu  Adolphe  Sax  à  Bruxelles,  et,  séduit  autant  par 
ses  travaux  que  par  ses  projets  d'application,  il  s'était 
empressé  de  se  joindre  à  ceux  qui  lui  conseillaient 
de  venir  se  fixer  à  Paris.  Fameux  par  sa  bravoure, 
qui,  un  jour  de  bataille,  avait  arraché  au  maréchal 
Ney  cette  exclamation  :  «  Ce  jeune  colonel  se  croit 
donc  immortel!  »,  il  était  connu  aussi  dans  le  monde 
militaire  par  des  écrits  ne  valant  pas  seulement  par 
leur  utilité  technique  ou  aiAninstrative,  mais  aussi 
par  la  constante  préoccupation  de  moraliser  l'armée. 
Dans    son    Manuel    général    de   musique    militaire, 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHÉON    37 


Georges  Kastner  a  pu  citer  l'un  de  ses  ouvrages, 
consacré  à  un  projet  de  règlement  sur  la  table  des 
officiers,  pour  montrer  qu'en  soutenant  l'œuvre  d'A- 
dolphe Sax,  le  général  de  Rumigny  obéissait  à  un 
mobile  beaucoup  plus  élevé  que  le  seul  dillettan- 
tisme. 

«  ...  Ce  que  veut  le  général  de  Rumigny,  c'est  que 
tous  les  officiers  de  nos  armées  soient  dignes  de  re- 
présenter la  nation  française,  non  seulement  pour 
ce  qui  est  de  la  valeur,  mais  encore  pour  ce  qui  re- 
garde l'excellence  des  manières  et  des  qualités  du 
cœur  et  de  l'esprit.  Il  croit  fermement  que  l'idée  du 
repas  pris  en  commun,  réunissant  soir  et  matin,  à  la 
même  table,  les  officiers  d'un  régiment,  serait  le 
meilleur  moyen  d'arriver  à  ce  but,  parce  que  ces 
réunions  auraient  pour  résultat  de  soumettre  à  l'in- 
fluence des  gens  d'éducation  lous  ceux  qui,  moins 
heureusement  doués  sous  ce  rapport,  ont  besoin 
d'acquérir  le  ton  de  la  bonne  société  dans  laquelle 
leur  grade  et  leur  avancement  futur  les  appellent  à 
prendre  place.  Ce  n'est  point  là  un  avantage  qui 
s'acquiert  dans  les  cafés  et  les  estaminets,  où  tout 
encourage,  au  contraire,  les  allures  sans  façon  et  le 
laisser-aller  des  habitudes  de  caserne... 

«  Le  général,  qui  a  recherché  avec  tant  de  sollici- 
tude les  moyens  à  mettre  en  œuvre  pour  la  morali- 
sation  de  l'armée,  ne  pouvait  manquer  de  reconnailre 
que  la  musique  en  est  un  des  plus  puissants  et  des 
plus  efficaces...  » 

Le  général  Moline  de  Saint-Yon  n'avait  pas  appris 
la  musique  en  l'étudiant;  mais,  rejeté  de  l'armée 
depuis  181o  jusqu'à  la  Révolution  de  Juillet,  il  s'était 
tourné  vers  la  littérature,  puis  associé  à  des  musi- 
ciens par  des  livrets  d'opéra-comique  et  d'opéra. 
En  tête  du  livret  de  l'opéra  Ipsiboi;  mis  en  musique 
par  Kreutzer,  et  représenté  à  l'Opéra  en  1824,  dans 
une  préface  qui  reste  un  document  intéressant  de 
l'histoire  de  la  musique  dramatique,  il  avait  déclaré 
rompre  avec  la  marche  méthodique  et  solennelle  de 
la  tragédie  lyrique  classique,  pour  inaugurer  le 
drame  lyrique  historique,  «  s'accordant  mieux  avec 
la  chaleur,  la  richesse  de  détails  et  la  variété  de  tons 
qu'exigent  les  morceaux  de  facture  nouvelle,  en- 
sembles, finales...  utilisant  les  ressources  presque 
magiques  d'un  théâtre  fait  pour  parler  aux  yeux 
autant  qu'à  l'imagination  »...  11  ne  pouvait  pas  ne 
point  se  souvenir  que  lui  aussi  avait  été  un  novateur, 
lorsqu'il  s'agit  d'aider  Adolphe  Sax. 

Dans  l'armée  aussi  devait  se  former  peu  à  peu  un 
mouvement  de  sympathie  envers  l'œuvre  de  réforme 
et  son  promoteur.  Il  était  alors  des  officiers  sincè- 
rement épris  de  musique,  tel  le  colonel  Gudin,  élève 
très  distingué  du  violoniste  Baillot.  En  outre,  dans 
le  mémoire  adressé  au  ministre  de  la  guerre,  à  la 
fin  de  l'année  1844,  Adolphe  Sax  ne  s'était  pas  borné 
à  traiter  la  question  au  point  de  vue  artistique.  Lui, 
l'étranger,  comme  disait  la  haine  de  ses  rivaux,  il 
avait  hautement  réclamé  justice  pour  les  chefs  de 
musique,  inférieurs  au  tambour-major,  et  pour  les 
musiciens,  à  peine  simples  soldats  : 

«  Je  veux  parler  du  rang  subalterne  qu'occupent 
les  exécutants  dans  les  musiques  militaires  :  obligés 
de  faire  des  études  spéciales,  jouissant  d'une  certaine 
considération  dans  le  monde  bourgeois,  ces  hommes 
ne  sont  plus  rien  dans  l'armée.  IS'est-ce  point  là  la 
cause  du  dégoût  que  la  plupart  témoignent  pour 
leur  position,  et  de  l'empressement  avec  lequel  ils 
recherchent  l'occasion  de  s'y  soustraire  dès  qu'ils  ont 
■quelque    talent?  Il  me  semble  qu'un  grade  quel- 


conque les  relèverait  à  leurs  propres  yeux  et  leur 
donnerait  de  l'importance  auprès  de  leurs  cama- 
rades. Une  observation  du  même  genre  serait  appli- 
cable au  chef  de  musique,  qui  n'occupe  pas  un  rang 
convenable,  puisqu'il  est  inférieur  au  tambour- 
major...  » 

Pour  la  première  fois,  depuis  le  temps  où  les  mu- 
siques militaires  ne  se  recrutaient  plus  parmi  les 
artistes  civils,  mais  dans  le  personnel  même  des 
régiments,  une  voix  courageuse  s'élevait  contre  une 
situation  irrégulière  véritablement  inique.  Elle  émut 
beaucoup  de  cœurs  dans  l'armée  française. 

Le  succès  de  la  cause  que  soutenait  Adolphe  Sax 
était  donc  devenu  possible,  lorsque  le  moment  vint 
de  donner  une  sanction  au  mémoire  soumis  au  ma- 
réchal Soult.  A  une  première  épreuve  faite,  au  mi- 
nistère de  la  guene  même,  entre  un  petit  orchestre 
de  neuf  musiciens  composé  par  Adolphe  Sax  et  un 
orchestre  de  trente-deux  musiciens  organisé  suivant 
la  coutume  par  le  directeur  du  Gymnase  musical 
militaire,  Carai'a,  la  réunion  d'une  commission  d'é- 
tudes fut  décidée.  Elle  comprenait  : 

Pour  la  partie  musicale,  Spontini,  et  les  cinq 
membres  de  la  section  de  l'Institut,  Aiiher,  Halévy, 
Adam,  Onslow  et  Carafa  ;  pour  la  partie  mécanique, 
le  baron  Séguier;  pour  la  partie  accoustique,  le  co- 
lonel du  génie  Savart;  pour  la  partie  militaire,  les 
colonels  Gudin  et  Riban;  pour  président  et  secré- 
taire rapporteur,  le  général  de  Rumigny  et  le  musi- 
cien très  étudit  Georges  Kastner. 

Ses  travaux  commencèrent  le  2o  février  1845.  Tous 
les  facteurs  ou  inventeurs  furent  conviés  à  soumettre 
leurs  propositions,  car,  si  Adolphe  Sax  avait  été  l'i- 
nitiateur du  mouvement,  il  ne  lui  appartenait  pas 
de  diriger  l'œuvre  de  la  commission,  et  d'ailleurs,  il 
était  trop  insouciant  de  ses  intérêts,  que,  toute  sa 
vie,  il  sacrifia  à  l'art,  pour  songer,  même  un  instant, 
à  tenter  d'exclure  les  rivaux  dans  la  lutte  entreprise 
contre  la  routine  de  fabrication  et  d'organisation. 
Mais  les  rivaux  étaient  sans  génie  et  sans  enthou- 
siasme. Leur  médiocrité  les  éloigna  orgueilleuse- 
ment de  la  commission.  Ils  ne  voulurent  pas  servir 
la  musique  dont  ils  vivaient;  plutôt  que  de  collabo- 
rer à  un  projet  artistique  utile  au  développement  de 
leur  industrie,  ils  préférèrent  s'en  prendre  à  celui 
qui  le  réalisait,  et  n'eurent  devaient  que  pour  édifier 
contre  lui  procès  sur  procès.  Le  témoignage  du  rap- 
porteur de  la  commission  reste  pour  établir  la  res- 
ponsabilité des  disputes  de  boutique  qui  devaient 
suivre  : 

«  D'abord  la  commission  commence  par  décider 
qu'on  ferait  appel  à  tous  les  principaux  facteurs  de 
la  capitale...  Quelques-uns,  se  rendant  à  cet  appel, 
se  présentèrent  et  soumirent  divers  instruments  sor- 
tant de  leur  fabrique.  — Ils  se  réduisent  aux  suivants  : 
un  Uùgel-horn  et  un  bombardon  de  modèle  autri- 
chien, un  embolyclave  pour  remplacer  l'ophicléide, 
tous  de  mécanisme  imparfait.  —  Mais,  soit  que  la 
présence  de  M.  Adolphe  Sax  au  milieu  d'eux  leur 
portât  ombrage,  en  raison  des  précédents  succès  de 
cet  habile  facteur,  qui  cependant  avait  été  convoqué 
au  même  titre  que  les  autres;  soit  qu'ils  eussent 
redouté  d'exposer  les  produits  de  leur  industrie  aux 
conséquences  d'un  examen  sérieux,  confié  à  des 
juges  aussi  compétents,  toujours  esl-il  que,  dans 
l'intervalle  de  deux  séances,  lous  les  facteurs,  un 
seul  excepté,  même  ceux  qui  s'étaient  d'abord  ren- 
dus à  l'invitation  de  la  commission  et  lui  avaient 
présenté   quelques   instruments,    même    ceux    qui 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


avaient  demandé  un  délai  pour  lui  en  soumettre  de 
nouveaux,  prirent  subitement  la  résolution  de  s'abs- 
tenir... »  iKastnkr,  Manuel  de  musique  militaire.) 

Pour  aboutir,  il  suffit  à  la  commission  de  faire 
siennes  les  idées  exposées  par  Adolphe  Sas  dans  son 
mémoire  sur  la  rénovation  de  l'orchestre  d'harmonie 
des  musiques  d'infanterie,  et  de  l'orchestre  de  fan- 
fare des  musiques  de  cavalerie. 

Outre  une  étude  très  approfondie  de  l'acoustique 
appliquée  aux  instruments  à  vent,  il  apportait  la 
manière  d'agglomérer  ces  instruments  en  un  en- 
semble rationnel,  et  appuyait  d'une  remarque  très 
judicieuse,  qui  est  restée  féconde  en  applications, 
ses  critiques  contre  l'ancienne  organisation  où  tout 
manquait  à  la  fois,  enchaînement,  proportion,  ana- 
logie : 

«  Quelle  disposition  l'homme  doit-il  prendre  pour 
modèle  d'une  musique  quelconque,  militaire  ou 
autre,  si  ce  n'est  celle  fournie  par  la  nature  elle- 
même,  et  si  merveilleusement  réalisée  par  la  divi- 
sion des  voix  en  soprano,  alto,  ténor  et  basse,  ou  so- 
prano, ténor,  baryton  et  basse? 

«  Dans  les  orchestres  ordinaires  dits  de  symphonie, 
n'est-ce  point  elle  qui  a  servi  de  guide,  et  a  donné 
naissance  à  la  combinaison  d'instruments  à  cordes 
appelée  quatuor  :'  Pourquoi  donc  rien  de  semblable  ne 
se  renconlre-t-il  dans  l'organisation  des  musiques 
militaires?... 

«  J'ai  refondu  L'ancien  orchestre  militaire  et  lui  ai 
donné  une  organisation  complètement  nouvelle.  11 
n'y  avait  aucun  lien  entre  les  diverses  parties  de  ce 
grand  corps;  avec  son  armée  de  clarinettes  à  l'aigu, 
avec  ses  trombones  et  ses  ophicléïdes  au  grave,  il 
manquait  presque  entièrement  de  médium.  Je  suis 
allé  demander  à  une  famille  de  cuivres  homogène 
et  complète,  celle  des  saxhorns,  embrassant  l'échelle 
dans  toute  son  étendue,  le  noyau  autour  duquel  de- 
vaient venir  se  grouper  les  divers  timbres;  suivant 
en  cela  l'exemple  adopté  par  le  quatuor  dans  les 
orchestres  de  symphonie,  et  fourni  dans  la  nature  par 
le  quatuor  vocal.  » 

Et,  comme  conclusion,  Adolphe  Sax  donnait  un 
plan  d'organisation  d'orchestres  de  fanfare  et  d'har- 
monie formés  suivant  le  nombre  d'exécutants  alors 
réglementaire  :  22  pour  la  cavalerie,  45  pour  l'infan- 
terie. 

Préoccupé  de  mettre  en  évidence  la  sincérité  de 
ses  travaux,  la  commission  arrêta  qu'une  expérience 
publique  serait  faite  au  Champ  de  Mars,  entre  deux 
orchestres  de  45  exécutants,  formés  chacun,  l'un  par 
Carafa,  partisan  de  l'ancienne  organisation,  et  l'autre 
par  Adolphe  Sax.  Les  deux  concurrents  se  prépa- 
rèrent, et  le  concours  eut  lieu,  avec  solennité,  le 
22  avril  1SV5.  Aussi  bien  pour  son  organisation  de 
l'orchestre  de  fanfare  que  pour  celle  de  l'orchestre 
d'harmonie,  Adolphe  Sa\  recueillit  les  suffrages  des 
musiciens,  des  journalistes  et  du  public,  qui  encom- 
braient le  Champ  de  Mars.  Les  jours  suivants,  on  ne 
parla  que  de  cet  événement,  dont  tous  les  chroni- 
queurs s'emparèrent,  certains  avec  esprit,  comme  le 
rédacteur  du  Charivari,  qui  publia  le  u  bulletin  de 
la  rencontre  entre  les  Saxons  et  les  Carafons  »,  et 
beaucoup  avec  enthousiasme  pour  le  vainqueur  du 
concours,  qui  avait  triomphé  sans  conteste,  malgré 
les  manœuvres  de  ses  rivaux,  parvenus  à  lui  arra- 
cher, au  dernier  moment,  sept  des  exécutauts  de 
son  orchestre. 

Il  ne  restait  plus  à  la  commission  qu'à  conclure. 
Elle  remit  sou  rapport  au  ministre  de  la  guerre,  qui 


fit  connaître  sa  décision  au  mois  d'août.  Le  ministre 
ne  modifiait  en  rien  l'organisation  proposée  pour  les 
fanfares,  et  retranchait  seulement  des  harmonies 
deux  hautbois  et  deux  bassons,  pour  ne  pas  dépas- 
ser le  chiffre  de  50  exécutants.  Le  10  septembre  1845, 
le  Moniteur  de  l'Armée  publia  la  décision  officielle, 
qui  fixait  ainsi  la  composition  instrumentale  des 
musiques  d'infanterie  et  de  cavalerie  : 

Musique  d'infanterie.  —  t  petite  flûte,  1  petite  clarinette,  14 
grandes  clarinettes,  2  clarinettes-basses,  2  saxophones,  2  cor- 
nets, 2  trompettes,  4  cors,  1  saxhorn  soprano,  2  saxhorns  con- 
traltos, 2  saxhorns  altos,  3  saxhorns  baryton  et  basses,  4  sax- 
horns contrebasses,  3  trombones,  2  ophicléïdes,  5  instruments 
pour  la  batterie. 

Musique  de  cavaterie.  —  6  trompettes,  2  saxhorns  sopranos, 
7  contraltos,  4  altos  en  la  et  en  mi  (->,  2  saxolrombas,  3  saxhorns 
barytons,  3  basses,  3  contrebasses,  2  cornets,  1  trombones  (36  exé- 
cutants). 

Les  travaux  d'Adolphe  Sax  qui  suivirent  et  l'inces- 
sante activité  de  son  effort  devaient  parfaire  cette 
œuvre.  Neuf  ans  plus  tard,  il  allait  décider  une  réor- 
ganisation plus  complète,  et  parvenir  au  résultat 
moral  en  même  temps  qu'au  résultat  artistique,  eu 
obtenant  le  grade  d'officier  pour  le  chef  de  musique, 
—  promu  adjudant  en  1845  —  et  une  amélioration 
totale  de  la  situation  des  musiciens  par  l'établisse- 
ment de  trois  classes.  Mais,  dès  cette  année  1845,  il 
était  parvenu  à  arracher  pour  toujours  les  orchestres 
d'instruments  à  vent  à  l'organisation  routinière  qui 
les  rendait  impropres  au  service  artistique.  Désor- 
mais, leur  développement,  eu  dehors  des  musiques 
militaires,  fui  possible. 

La  routine  contre  le  progrès. 

La  vie  d'Adolphe  Sax  ne  devrait  pas  être  étudiée 
seulement  par  les  musiciens,  car  elle  olfre  des  ren- 
seignements utiles  à  tous. 

S'il  n'avait  été  qu'un  inventeur  de  génie,  jamais  le 
succès  ne  serait  venu  à  l'œuvre  de  réorganisation 
des  orchestres  d'instruments  à  vent  accomplie  en 
1845.  Car,  pour  la  rendre  impossible  à  celui  qui  l'a- 
vait voulue,  et  pénible  aux  hommes  chargés  de  la 
réaliser,  assez  d'égoïsmes  furieux,  d'impuissances 
jalouses,  de  routines  alarmées  se  dressèrent  contre 
elle. 

Dès  le  début,  comme  il  était  né  en  Belgique,  et 
qu'il  s'agissait  des  musiques  militaires,  on  ne  man- 
qua pas  d'attaquer  Adolphe  Sax  au  nom  du  patrio- 
tisme. Contre  ceux  qui  dénonçaient  l'étranger  et  fai- 
saient sonner  les  grands  mots,  le  rédacteur  de  la 
Revue  et  Gasette  musicoie  put  écrire  : 

<■  En  vérité,  il  faut  «'avoir  que  de  bien  pauvres 
raisons  à  donner,  pour  reprocher  à  M.  Sax  sa  qua- 
lité d'étranger...  Est-on  bienvenu  d'ailleurs  à  le 
repousser  comme  étranger,  lorsqu'on  sait  que  la 
plupart  des  instruments  de  cuivre  employés  aujour- 
d'hui dans  l'armée  sont  tout  bonnement  des  imita- 
tions serviles  de  l'industrie  allemande'.'  Le  mobile 
peu  respectable  de  ces  rumeurs  ne  se  devine  que 
trop  aisément...  La  commission  a  mieux  à  faire  qu'à 
se  laisser  intimider  par'  des  conspirations  d'arrière- 
boutique.  »  (23  mars  1845.) 

Les  rivaux,  ainsi  démasqués,  furent  forcés  à  plus 
de  franchise;  cependant,  ils  surent  encore  voiler 
leurs  pensées  sous  des  dehors  de  générosité.  Dans 
la  pétition  qu'ils  adressèrent  au  ministre  de  la 
guerre,  après  s'être  unis  en  une  sorte  de  syndicat, 
ils  se  montrèrent  préoccupés,  eux  aussi,  de  l'amélio- 
ration des  musiques  militaires  et  de  la  situai lou  des 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHÉON    3711 


musiciens  militaires  qui,  pourtant,  les  avaient  lais- 
sés jusque-là  tout  à  fait  insouciants.  Puis  ils  s'ému- 
rent à  la  pensée  que,  par  l'adoption  des  instruments 
nouveaux  d'Adolphe  Sax,  c<  dix  mille  maîtres,  con- 
tremaîtres, ouvriers,  femmes  et  enfants  seront  ré- 
duits à  la  misère  ». 

Hector  Berlioz,  dans  son  feuilleton  du  Juin  nul  îles 
Débats,  leur  répondit  : 

«  ...  On  n'a  promis  le  monopole  des  bugles,  des 
trombones,  des  trompettes  et  des  tubas  à  personne; 
on  examinera  les  nouveaux  instruments.  Si  ceux  de 
Sax  sont  les  meilleurs,  ils  seront  adoptés;  mais  s'il 
arrive,  au  contraire,  que  ses  émules  l'emportent  sur 
lui,  c'est  à  eux  qu'on  s'adressera,  rien  n'est  plus 
évident.  D'ailleurs,  cette  question  est  tout  à  fait 
secondaire;  il  ne  s'agit  pas  des  intérêts  des  facteurs, 
mais  bien  de  ceux  de  l'art  et  de  l'armée.  L'agitation 
des  chefs  d'atelier  se  conçoit,  mais  elle  ne  doit  ni  ne 
peut  avoir  plus  d'intluence  sur  la  décision  à  prendre 
par  la  commission,  que  n'en  aura  sans  doute  la  joie 
des  marchands  de  cuivre,  assurés,  si  la  réorganisa- 
tion s'opère,  d'un  subit  accroissement  de  leurs  béné- 
fices. Avec  des  considérations  pareilles,  nous  arrive- 
rions, en  suivant  la  chaîne  des  intérêts,  jusqu'aux 
ouvriers  mineurs  qui  extraient  le  minerai.  » 

Habilement,  ils  ne  se  bornèrent  pas  à  des  ma- 
nœuvres contre  la  personne  et  les  travaux  d'A- 
dolphe Sax.  La  commission  elle-même  ne  fut.  pas 
épargnée.  On  reprocha  l'incompétence  aux  musiciens 
membres  de  l'Institut,  et  la  partialité  au  général 
président.  Pour  répandre,  sans  lassitude  et  sans 
honte,  le  mensonge  et  la  calomnie,  il  se  trouva  un 
journaliste  disposé  à  ce  rôle  misérable  par  son  am- 
bition déçue.  Schiltz,  ancien  chef  de  musique, 
devenu  directeur  de  l'Europe  musicale  et  dramatique, 
avait  espéré  faire  partie  de  la  commission.  Sa  ran- 
cune fut  violente,  et  elle  se  mit  au  service  des  mé- 
contents. A  peine  la  commission  avait-elle  com- 
mencé ses  travaux,  qu'il  publia  un  premier  article, 
dans  lequel  l'ardeur  de  ses  déceptions  apparaît  clai- 
rement : 

«  A  coup  sur,  les  noms  de  M.  Ai/iier,  de  M.  Haléyy 
et  des  deux  autres  membres  de  l'Académie  des 
beaux-arts  qui  font  partie  de  la  commission  sont 
imposants  (sic);  ce  sout  des  compositeurs  éminents 
dont  la  renommée  a  de  l'éclat;  mais  cela  n'empêche 
pas  qu'il  n'y  ait  un  vice  radical  que,  dans  l'intérêt 
de  l'art,  ,|e  n'hésite  pas  un  seul  instant  à  signaler  : 
c'est  que  je  ne  vois  dans  son  sein  aucun  homme  qui 
puisse  apporter,  dans  la  question,  l'expérience  et 
l'autorité  que  donnent  des  connaissances  spéciales; 
c'est  que  je  n'y  vois  aucun  des  compositeurs  de  mu- 
sique militaire  qui  ont  vieilli  dans  l'armée  avec  le 
grade  de  chef  de  musique  ou  de  trompette-major, 
qui  sout,  sans  contredit,  plus  compétents  que  per- 
sonne en  cette  matière,  et  dont  les  lumières  seraient 
si  précieuses... 

«  Avant  été  longtemps  chef  de  musique  d'infan- 
terie et  de  cavalerie,  j'ai  dû  présenter  les  rétlexions 
que  m'a  suggérées  mon  expérience  en  cette  ma- 
tière... » 

Et  dans  ce  même  article,  sans  attendre  plus  long- 
temps pour  se  venger  de  n'avoir  point  été  appelé  à 
siéger  dans  la  commission,  il  se  fit  l'écho  du  men- 
songe contre  Adolphe  Sax  et  de  la  calomnie  contre 
le  lieutenant  général  de  Rumigny,  qui  présidait.  En 
prétendant  qu'Adolphe  Sax  avait  proposé  de  pros- 
crire tous  les  instruments  à  vent  en  bois  pour  faire 
place  à  la  seule  famille  des  saxhorns,  il  donnait  la 


publicité  aux  racontars  des  facteurs  intéressés  à  créer 
la  légende  d'un  monopole  de  fournitures  aux  mu- 
siques militaires.  Lue  telle  ignorance  de  la  question 
ne  pouvait  que  faire  sourire  les  gens  informés;  mais 
il  en  resta  un  encouragement  pour  les  rivaux  à  pour- 
suivre des  tentatives  déloyales.  (Juant  à  la  calomnie 
dirigée  contre  le  général  de  Rumigny,  il  lui  fallut 
répondre,  et  ce  lui  fut  l'occasion  de  se  manifester 
complètement. 

11  avait  écrit  : 

«  Le  lieutenant  général  de  Rumigny  a  donné  un 
libre  cours  à  ses  sympathies  en  faveur  de  M.  Sax, 
et  il  faut  lui  rendre  cette  justice  qu'il  a  mis,  dans 
la  manifestation  d'une  si  étrange  préférence,  une 
entière  franchise.  » 

Devant  les  récriminations  soulevées  par  cette 
attaque  très  précise,  et  parce  qu'il  se  souvint  de  la 
haute  influence  du  général,  il  se  réfugia  dans  l'hy- 
pocrisie, et  prélendit,  dans  le  numéro  suivant  de 
son  journal,  qu'on  s'était  «  étrangement  trompé  »  : 

«  Ce  que  nous  avons  dit  renfermait  une  critique 
non  contre  le  président  de  la  commission,  mais 
contre  le  facteur  d'instruments  qui  a  la  lég  I 

maladresse  de  dire  du  plus  gros  de  sa  voix,  à  tout 
propos  et  partout,  que  la  protection  puissante  de 
M.  le  lieutenant  général  de  Rumigny  doit  faire  des 
prodiges  en  sa  faveur.  » 

Ainsi,  vaniteux,  ignorant,  sans  scrupule,  un  tel 
homme  était  bien  fait  pour  servir  une  mauvaise 
cause.  Certes,  il  ne  fut  pas  le  seul,  mais  il  brilla  à 
Pavant-garde,  où  sa  place  marque  bien  l'indignité 
de  ceux  qui  marchaient  derrière  lui. 

Lorsque,  en  dépit  du  mensonge  et  de  la  calomnie, 
la  commission  eut  décidé  l'épreuve  du  Cbamp-de- 
Mars  et  transmis  au  ministre  de  la  guerre  le  résultat 
favorable  à  Adolphe  Sax,  la  tactique  changea.  Les 
membres  de  la  commission  cessèrent,  pour  un  mo- 
ment, d'être  inquiétés,  et  c'est  vers  le  ministre  de 
la  guerre  lui-même  que  fut  dirigé  l'effort,  afin  d'ar- 
rêter à  ses  bureaux  les  effets  du  succès  obtenu  par 
Vétranger.  On  ne  peut  mieux  suivre  le  développement 
de  cette  nouvelle  manœuvre  que  dans  Le  journal  de 
Sc.ini.T7..  Elle  se  dessine  dès  le  compte  rendu  de  l'é- 
preuve : 

«  Avec  les  instruments  de  M.  Sax,  les  musiciens 
seraient  bientôt  sur  les  dents,  et  une  partie  serait 
constamment  à  l'hôpital.  Il  ne  faut  pas  que  l'instru- 
ment aille  au  delà  des  forces  humaines.  Mais  M.  Sax 
est-il  bien  l'inventeur  des  instruments  qu'il  a  fait 
fabriquer  et  dont  il  veut  se  faire  honneur.'  N'a-t-il 
pas  importé  d'Allemagne  des  procédés  et  de  préten- 
dus perfectionnements  qui  ont  été  expérimenti  3  n 
France,  il  y  a  bien  vingt  années?...  » 

Instruments  homicides,  instruments  contrefaits; 
après  ces  attaques,  l'ironie  devait  venu  :  - 
inventa  le  «  messie  facteur  ayant  nom  liax,  Fax  ou 
Rax  »,  créateur  du  Btag-korn.  Mais  un  événement 
imprévu  montra  que  le  meilleur  argument  était  celui 
de  la  contrefaçon. 

Le  directeur  général  de  la  musique  de  l'armée  de 
Prusse,  Wiepreght,  inventeur  lui  aussi  d'instruments 
de  cuivre,  ayant  lu,  dans  la  Gazetti  illustrée,  un 
éloge  des  travaux  accomplis  par  Adolphe  Sax,  et 
n'ignorant  pas  les  bruits  de  contrefaçon  répandus, 
s'était  déclaré  victime  et  avait  annoncé  son  intention 
de  venir  à  Paris  défendre  ses  droits.  A  ce  moment, 
d'admirables  fêtes  musicales  étaient  célébrées  eu 
Allemagne  eu  l'honneur  de  Beethoven,  dont  on  éri- 
geait la  statue  à  Bonn.  Adolphe  Sax  en  profita  pour 


3742 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


aller  lui-même  en  Allemagne,  et  se  rencontrer  avec 
Wieprkoht.  Ils  eurent,  à  Coblentz,  une  entrevue  à 
laquelle  assistaient  Listz,  Jules  Janin,  Arban  et  un 
chroniqueur  du  Constitutionnel,  Florentino,  qui,  dans 
le  numéro  du  23  août  1845,  publia  un  premier  récit, 
mentionnant  simplement  les  échanges  de  politesse 
entre  les  deux  inventeurs,  lorsque  la  preuve  fut  faite 
que  «  la  querelle  était  la  suite  d'un  malentendu  ». 
Plus  tard,  le  journaliste  devait  rappeler  ses  souve- 
nirs avec  une  précision  complète,  lorsque  l'attitude 
des  facteurs  français  encouragea  Wieprecht  à  renou- 
veler ses  attaques  contre  Adolphe  Sax  : 

«  ...  Après  deux  ou  trois  essais  également  mal- 
heureux, M.  Wieprecht  dut  se  rendre  à  l'évidence.  Il 
ne  connaissait  pas  la  clarinette,  n'entendait  rien  aux 
saxhorns,  le  saxophone  était  un  mythe  pour  lui.  Il 
s'exécuta  de  bonne  grâce,  avoua  franchement  son 
erreur  et  se  confondit  en  excuses  et  en  compli- 
ments... 

«  —  Eh  bien!  dis-je  à  Listz,  que  me  disiez-vous 
donc  que  MM.  Sax  et  Wieprecht  étaient  en  délica- 
tesse! Ils  me  semblent  les  meilleurs  amis  du  monde. 

u  —  Hum!  répondit  Listz,  ils  ne  seront  pas  long- 
temps d'accord.  » 

Cette  intervention  de  Wieprecht,  en  1845,  fut  pour 
les  ennemis  de  Sax  une  aubaine  qu'ils  ne  pouvaient 
manquer  d'exploiter.  Oublieux  des  belles  fureurs 
patriotiques,  ils  n'eurent  pas  assez  de  Heurs  pour 
celui  qui,  plus  que  le  Belge  devenu  Français,  était 
un  étranger,  et  la  plume  venimeuse  de  leur  acolyte 
Schiltz  fil  merveille.  Dans  son  Europe  musicale  et 
dramatique,  il  donna  une  série  d'articles  véritable- 
ment stupéfiants  d'impudence  et  de  fausseté,  dont 
il  faut  au  moins  connaître  certains  passages  pour 
comprendre  l'ardeur  implacable  de  la  lutte  qui  allait 
s'engager  quelques  mois  plus  tard  : 

«  La  Prusse  possède  un  homme  d'un  vrai  talent,  un 
homme  spécial  qui  a  su  introduire  de  notables  per- 
fectionnements dans  les  instruments  de  cuivre  :  c'est 
M.  Wilhelm  Wieprecht... 

«  Nous  avons  dit,  nous  avons  prouvé,  en  rendant 
compte  du  fameux  concours  du  Champ-de-Mars,  que 
M.  Sax  n'est  pas  inventeur  des  instruments  auxquels 
il  a  bravement  donné  son  nom.  Ces  instruments  sont 
connus  et  employés  depuis  plus  de  vingt  ans  en 
Allemagne  et  en  Prusse;  conséquemment,  ils  sont 
du  domaine  public...  Et  ce  que  nous  avançons  ici, 
nous  sommes  à  même  d'en  produire  la  preuve...  » 
(15  septembre  1845.) 

«  ...  Nous  l'avons  dit,  nous  l'avons  prouvé  dans 
notre  dernier  numéro,  la  plupart  des  instruments 
auxquels  M.  Sax  a  donné  son  nom  sont  connus  de- 
puis longtemps,  même  en  France,  et  ils  sont  du 
domaine  public...  »  (22  septembre  1845.) 

«  ...  Nous  avons  dit  et  prouvé  plusieurs  fois  que 
les  instruments  de  M.  Sax  étaient  dans  le  domaine 
public  et  que  tous  les  facteurs  avaient  le  droit  d'en 
fabriquer  d'après  le  même  système... 

«  Nous  devions  commencer  l'examen  critique  des 
instruments  que  M.  Sax  a  fabriqués  d'après  des 
modèles  connus,  et  depuis  longtemps  en  usage  dans 
toute  l'Allemagne,  et  môme  en  France.  Les  éléments 
nécessaires  à  notre  travail  ne  sont  pas  encore  com- 
plètement à  notre  disposition.  »  (28  septembre  1846.) 

«  ...  M.  Sax  veut  absolument  me  faire  un  procès. 

«  Pourquoi? 

«  Parce  que  j'ai  prouvé,  pièces  en  main,  que  M.  Sax 
n'a  jamais  rien  inventé  en  fait  d'instruments...  » 
(5  octobre  1815.) 


A  ces  attaques,  fidèlement  périodiques,  Adolphe 
Sax  avait  en  effet  songé  à  répondre  par  un  procès. 
Mais,  déjà  aux  prises  judiciaires  avec  un  fabricant 
de  cylindres,  auquel  il  avait  concédé  le  droit  d'ex- 
ploitation de  son  système,  et  la  menace  ayant  suffi, 
il  s'en  tint  là.  Cette  indulgence  fut  une  faute,  dont 
les  résultats  allaient  poursuivre  Adolphe  Sax  pendant 
sa  vie  entière,  en  rendant  possible  la  formidable 
coalition  acharnée  contre  lui  sans  relâche,  et  dont  le 
souvenir  n'est  pas  encore  effacé  dans  le  monde  de  la 
facture  instrumentale.  Car  si,  au  moment,  le  jour- 
liste  Schiltz  en  profita  pour  esquiver  une  discussion 
devenue  embarrassante,  et  échapper  à  la  condam- 
nation qui  l'aurait  aussi  justement  atteint  que  le 
fabricant  de  cylindres  avec  lequel  Adolphe  Sax  était 
en  procès,  les  facteurs  rivaux  devenus  presque  una- 
nimement contrefacteurs  s'empressèrent,  quelques 
mois  après,  de  prendre  les  devants,  à  la  place  de  l'in- 
venteur calomnié  et  spolié,  et  de  se  servir  ingénieu- 
sement des  défauts  de  la  loi  récente  sur  la  propriété 
industrielle,  promulguée  en  1844,  pour  mettre  en  dis- 
cussion judiciaire  la  validité  de  ses  brevets. 

Mais,  à  ce  moment-là,  Adolphe  Sax  ne  pouvait  être 
à  des  pensées  de  colère  et  de  défiance.  La  décision 
ministérielle  approuvant  les  conclusions  de  la  com- 
mission venait  de  paraître  au  Moniteur  de  l'armée  : 
l'usage  de  ses  instruments  et  son  plan  d'organisation 
étaient  adoptés  pour  les  musiques  militaires;  son 
effort  de  progrès  en  faveur  de  l'orchestre  d'instru- 
ments à  vent  triomphait  complètement. 

Ainsi  donc,  au  ministère  de  la  guerre  comme  à  la 
commission,  les  intrigues  de  ses  rivaux  avaient  été 
impuissantes.  Itien  n'avait  été  épargné  pour  épuiser 
la  vaillance  d'Adolphe  Sax,  pour  tromper  le  public, 
pour  semer  le  trouble,  la  division,  la  crainte  parmi 
les  membres  de  la  commission  afin  d'intimider  le 
ministre;  et  cependant,  ni  l'homme  qui  proposait, 
ni  ceux  qui  disposaient  n'avaient  faibli.  Ceux-là  pour- 
raient s'étonner  du  succès  obtenu  malgré  tant  de 
luttes,  qui  ne  verraient  en  Adolphe  Sax  qu'un  inven- 
teur de  génie,  n'ayant  pour  force  que  la  valeur  de 
son  œuvre.  Il  portait  en  lui  l'invincible  influence  de 
l'homme  prédestiné,  nécessaire  à  l'accomplissement 
d'un  progrés.  Alors  que  ses  rivaux,  ne  pouvant  con- 
cevoir un  émule  différent  d'eux-mêmes,  l'emprison- 
naient derrière  un  comptoir  et  prenaient  ombrage 
de  son  activité,  il  possédait  une  science  ignorée  d'eux 
tous;  les  plus  célèbres  musiciens  ne  s'étonnaient 
pas  moins  de  ses  capacités  de  facteur  que  de  son 
talent  de  virtuose  et  de  sa  compétence  artistique  ; 
l'élite  intellectuelle  accueillait  parmi  elle  un  esprit 
supérieur.  Près  de  lui,  les  hommes  devenaient  forts; 
volonté  opiniâtre,  il  suscitait  la  fermeté  des  carac- 
tères; intelligence  lumineuse,  il  entraînait  les  con- 
victions; apôtre  de  progrès,  il  répandait  l'enthou- 
siasme. 

C'est  ainsi  qu'Adolphe  Sax  put  parvenir  à  régéné- 
rer la  facture  des  instruments  et  à  ouvrir  l'avenir  à 
la  musique  d'ensemble  instrumentale  populaire. 

I.'œnvre  d'A.  Sax. 

Le  16  juin  1845,  Ad.  Adam  écrivait  à  Adolphe  Sax  : 
»  Je  trouve  que  vous  n'attachez  pas  assez  d'impor- 
tance à  l'une  de  vos  plus  belles  inventions,  le  saxo- 
phone... Je  me  suis  amusé  à  brocher  un  petit  mor- 
ceau pour  les  clarinettes  en  mil-,  si'!.,  la  clarinette 
basse  et  le  saxophone.  Je  ne  sais  l'effet  que  produira 
ce  quintette,  n'ayant  aucune  expérience  des  inslru- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHÉON    3743 


menls  nouveaux;  je  pense  néanmoins  que  vous  feriez 
bien  de  le  faire  essayer.  S'il  n'est  pas  trop  mauvais, 
je  vous  en  écrirai  encore  deux  ou  trois,  de  manière 
à  ce  que,  dans  vos  séances,  vous  puissiez  entremêler 
ces  morceaux  avec  ceux  plus  brillants  de  musique 
de  cuivre. 

«  Ce  petit  essai,  que  je  vous  envoie,  vous  paraîtra 
peut-être  un  peu  sévère  :  c'est  que  je  l'ai  composé 
pour  moi,  et  non  en  vue  de  l'exécution  en  public; 
mais  si  vous  le  trouvez  bien  écrit  pour  les  instru- 
ments, je  pourrai  vous  en  faire  d'autres  plus  à  la 
portée  du  public...  » 

Ce  qu'il  faut  surtout  retenir  de  cette  curieuse 
lettre,  c'est  que  les  musiciens  les  plus  célèbres  ont 
été  intéressés  par  l'effort  d'Adolphe  Sax,  et  ont  tenu 
à  s'y  associer.  Or,  en  184a,  Adolphe  Sax  était  seule- 
ment au  début  de  sa  carrière.  11  avait  trente  et  un 
ans,  il  lui  restait  quarante-neuf  ans  à  vivre.  Quels 
immenses  progrès  n'aurait-il  pas  réalisés,  quelles 
découvertes  imprévues  n'aurait-il  pas  apportées,  s'il 
avait  pu  consacrer  tout  ce  temps  à  son  génie  d'in- 
venteur et  d'organisateur,  continuer  librement  l'œu- 
vre commencée,  désormais  certaine  du  concours 
actif  des  maîtres  de  la  musique,  et  conquérir  leur 
sympathie  à  la  musique  inslrumentale  populaire! 
Mais  ses  concurrents,  aveuglés  par  l'égoïsme,  et 
devenus  les  dociles  serviteurs  de  la  fatalité  ennemie 
du  génie,  firent  que  ces  quarante-neuf  années  furent 
un  demi-siècle  d'effort  douloureux,  de  tracasseries 
ininterrompues,  de  démarches  vaines  et  épuisantes. 
Les  luttes  judicaires  commencées  contre  Adolphe 
Sax  en  1846,  traînaient  encore  en  1888,  après  qua- 
rante-deux années. 

Cependant,  si  grandes  étaient  l'activité  et  l'énergie 
de  celui  que  Meyerbeer  a  appelé  le  génie  du  cuivre  et 
de  l'airain  sonore,  qu'il  eut  la  force  de  poursuivre, 
sans  découragement,  les  travaux  d'invention  et  de 
perfectionnement  résumés  ci-dessous,  et  qui  concer- 
nent seulement  l'orchestre  d'instruments  à  vent;  car 
il  ne  se  borna  pas  à  cela  : 

Flûte.  —  Outre  des  travaux  sur  la  flûte,  perfectionnements  ap- 
plicables à  la  flûte  de  Pan  et  instruments  analogues. 

Hautbois.  —  Le  seul  instrument,  avec  les  cymbales,  dont  il  ne 
se  soit  pas  spécialement  occupé. 

Clarinettes.  —  Réforme  totale  de  la  clarinette  basse  en  IS38, 
instrument  très  défectueux  avant  lui.  Création  de  la  clarinette 
■Contrebasse,  pour  compléter  la  famille  des  clarinettes.  Nombreux 
perfectionnements,  dont  les  derniers,  en  1880,  donnent  à  la  cla- 
rinette soprano  en  si  |,  des  ressources  nouvelles,  et  unejplus  grande 
étendue  permettant  de  descendre  jusqu'à  \'ut  de  l'alto  à  cordes, 
«  pour  le  suppléer  là  où  les  altistes  manquent.  »  Clarinettes  en 
métal. 

Basson.  —  Perfectionnements  commencés  en  1S40,  complétés 
en  1851  et  utilisés  par  Boehm  et  Tiuéukrt  en  1855.  Invention 
du  basson  en  métal.  Module  de  bec  à  anche  simple  ne  dénaturant 
pas  le  son,  et  diverses  améliorations  aux  bassons  habituels  en 
1SS0.  Boehm  ayant  prétendu  avoir  établi,  lui  aussi, un  basson  en 
métal,  Adolphe'SAX  cessa  d'en  construire,  et  attendit  la  preuve 
de  ii m,  qui  ne  vint  jamais. 

Dès  1843,  divers  perfectionnements  pour  la  ju-tesse  et  la  sono- 
rité, applicables  à  tous  ces  intruments. 

Timbales.  —  Timbales  sans  chaudron.  Moyen  de  soustraire  à 
l'influence  des  variations  de  température  la  peau  des  timbales  et 
autres  instruments  à  percussion. 

Tamliour,  grosse  caisse.  —  Tambour  et  grosse  caisse  à  une  seule 
peau.  Grosse  caisse  à  une  seule  peau  avec  renforçateur. 

Cloches.  —  Recherches,  pour  les  représentations  de  Patrie,  de 
Paladilhe,  sur  la  résonance  des  cloches.  Invention  de  la  «  cloche 
symphonique  »,  simple  feuille  de  laiton  disposée  en  forme  de 
cloche  à  section  parabolique,  et  donnant  le  son  très  grave  d'une 
cloche  volumineuse.  En  1881,  perfectionnement  de  cette  cloche  : 
des  ondulations  annulaires,  de  hauteur  variable,  permettent 
d'obtenir,  avec  une  même  cloche,  des  sons  de  hauteurs  diffé- 

hiosques  pour  les  concerts  en  plein  air.  —  Modèle  exposé  à  l'Ex- 
position de  1867,  en  même  temps  que  celui  d'une  salle  de  théâtre 


et  de  concert.  La  construction  est  basée  sur  les  propriétés  acous- 
tiques de  la  parabole. 

Chefs  île  musique  et  musiciens  militaires.  —  Par  ses  écrits,  par 
ses  travaux,  par  son  influence,  Adolphe  Sax  est  l'un  de  ceux  qui 
ont  le  plus  fait  pour  décider  les  réformes  qui  ont  donné  le  grade 
d'officier  aux  chefs  de  musique,  et  il  était  parvenu,  sous  l'Em- 
pire, à  améliorer  considérablement  la  situation  des  musiciens 
militaires,  par  l'institution  du  classement,  qui  n'existe  plu-  au- 
jourd'hui qu'à  la  musique  de  la  garde  républicaine  et  aux  équi- 
pages de  la  flotte. 

Harmonies  et  fanfares  ciriles.  —  Elles  sont  devenues  possibles 
depuis  les  inventions  d'Adolphe  Sax,  et  se  sont  rapidement  dé- 
veloppées, par  l'impulsion  qu'il  donna  aux  musiques  militaires, 
par  l'émulation  qu'il  fit  naitre  en  instituant  des  concours,  par 


d  harmonie  de  s\  m  plions-  do  V.\  i  i  u..\  r\.  H  i\n\,  Mozart. 

Le  premier  brevet  pris  en  France  par  Adolphe  Sax, 
en  1843,  a  donné  un  nouveau  système  do  cylindres, 
et  de  disposition  applicable  à  tous  les  instruments 
de  cuivre. 

La  découverte,  en  18ô2,  du  système  à  six  pistons 
indépendants,  applicable  à  tous  les  instruments  de 
cuivre,  marque  un  progrès  délinitif  dans  la  facture. 
Il  est  retardé  aujourd'hui  encore  par  la  routine, 
après  avoir  été  cependant  expérimenté  avec  un  suc- 
res complet  à  l'Opéra  et  à  la  garde  républicaine  du 
vivant  d'Adolphe  Sax.  Le  système  à  six  pistons  n'est 
plus  en  usage  en  France  qu'à  la  fanfare  de  l'Opéra. 
En  Belgique,  il  est  employé  plus  généralement. 

L'avenir  lui  appartient,  car  il  assure  des  sons 
d'une  égale  justesse  sur  tous  les  degrés  de  l'échelle 
chromatique;  et,  pour  le  timbre,  un  instrument  à 
six  pistons  indépendants  peut  être  assimilé  à  un  ins- 
trument naturel  pourvu  de  sept  tons  de  rechange. 

Trompettes.  —  Construction  des  premières  trompettes  à  cylindre 
dans  tous  les  tons,  avant  1S45.  Trompettes  égyptiennes  pour  la 
marche  i'Aida. 

Coi  «et  S  pistons.  —  Invention  du  compensateur  pour  lier  les  sons. 

Cors.  —  Divers  perfectionnements. 

Clair, m.  —  Invention  du  clairon  chromatique,  ou  systèmes  de 
coulisses  et  pistons  s'adaptant  aux  clairons  ordinaires  [tour  for- 
mer une  fanfare  complète. 

Trombones.  —  Nouveaux  perfectionnements,  entre  autres:  trom- 
bone basse  à  double  coulisse,  trombone  à  coulisse  et  à  pistons, 
trombone  à  coulisse  et  à  cylindre  d'un  ton  et  demi. 

Saxhorns.  —  Famille  d'instruments  née  de  l'ancien  bugle. 
Mettant  en  application  la  découverte  fondamentale  qu'il  avait 
faite  au  début  de  ses  travaux  :  leslproportùms  font  le  timbre,  il 
modifia  les  proportions  du  bugle  à  clefs  venu  d'Angleterre,  créa 
un  instrument  corrigeant  lesdéfauls  de  sonorité  et  de  justesse  de 
l'ancien,  et  établit,  sur  les  proportions  nouvelles,  déterminées 
par  lui,  la  famille  d'instruments  qu'il  proposa,  en  1845,  pour 
être,  dans  l'orchestre  d'harmonie,  ce  que  le  quatuor  à  cordes  est 
dans  l'orchestre  de  symphonie  :  un  centre  autour  duquel  se  grou- 
pent les  autres  sonorités.  La  famille  des  saxhorns,  comprenant 
le  soprano  suraigu  en  si  ?,  le  soprano  en  mi  p,  le  contralto,  l'alto, 
le  baryton,  la  basse,  l.i  emil rebasse  en  mi  \>,  et  la  contrebasse  en 
si\),  a  donné  à  l'orchestre  d'instruments  à.vent  la  base  et  l'ho- 
mogénéité qui  manquaient  totalement  avant  Adolphe  Sax.  En 
outre,  l'inventeur  en  rendit  l'usage  très  pratique  en  instituant  pour 
tons  une  uotahon  et  un  doigté  identiques. 

Pour  faire  adapter  les  saxhorns  contrebasses,  dont  le  volume 
effrayait,  il  construisit  toute  une  famille  de  saxhorns  immenses, 
—  chef-d'œuvre  inimitable  de  facteur,  —  résonnant  à  l'octave 
inférieure  des  saxhorns  habituels  et  dont  on  pouvait  facilement 
jouer.  La  collection  en  a  été  offerte  par  son  fils  au  musée  de  l'O- 
péra de  Paris. 

Saxolrombas  (inutilisés  actuellement).  —  Famille  d'instru- 
ments nouveaux  créés  en  18 15,  comportant  des  perfectionnements 
divers  applicables  aux  saxhorns  et  constitués  comme  eux.  «  En 
imaginant  le  quatuor  des  tuben ,  Richard  Wagner  a  été  guidé 
par  l'idée  qui  a  donné  naissance  à  la  famille  des  saxolrombas  : 
enrichir  l'ensemble  des  cuivres  d'un  timbre  apparenté  au  cor, 
mais  plus  intense,  et  mieux  fait  pour  s'unir  au  chœur  éclatant 
des  trompettes  et  trombones.  »  (Gevakrt.)  Par  le  caractère  du 
timbre,  le  saxotromba  tient  le  milieu  entre  le  cor  et  le  saxhorn. 

Sous  l'Empire,  les  musiques  militaires  ont  fait  usage  des  saxo- 
lrombas alto  et  baryton.  Ils  ont  des  proportions  moins  larges 
que  les  saxhorns. 


37'.'* 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUS1QCE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Saxtubas  (inutilisés  actuellement).  -  Famille  d'instruments 
nouveaux  créée  en  IS52,  à  l'occasion  .lu  Juif  Errant,  d'il  \u;\  v, 
■I  i-nii-liiuée  coinmi'  relie  des  saxhorns.  Le  timbre  est  plus  écla- 
l.  ml  i|ui-  celui  des  tnuiipeltcs  et  des  trombones,  s'ils  u'out  jamais 
été  employés  dans  les  musiques  militaires,  ils  ont  du  moins  servi 
i  leur  amélioration,  car  o'es»  en  les  entendant  à  un  festival  pour 
la  distribution  des  drapeaux,  iliriRé  par  Adolplie  Adam  en  1852, 
,i. ■■\a-  .!.•  ii  ||]  .1  •!•■  I  .  .i  ■•.■alisaiion  du  réformes  bienfaisantes 
détruil  -    prèalagn    ;    de  1870. 

Saxophones. —  Invention  basée  sur  les  propriétés  acoustiques 

de   la   parabole,  cuuiplelemellt  llicuiliues  avant  Adolphe   Sxx.    1." 

but  recherché  et  atteint  a  été  de  créer  un  instrument  à  vent  se 
rapprochant,  par  le  caractère  de  sa  voix,  des  instruments  à  cordes, 
mais  possédant  plus  de  force  et  d'intensité.  On  croit  généralement, 
mémo  parmi  les  musiciens,  que  l'invention  du  saxophone  n'esl 
que  l'idée  ingénieuse  d'adapter  un  bec  à  anche  simple,  comme 
celui  de  la  clarinette,  à  un  tube  conique  comme  celui  du  hautbois 
mi  <lii  ba-sun,  mais  en  métal.  C'est  une  erreur.  I. 'anche  du  lui- 


ligne  droite  intérieure  du 
i  vibrations  sont  renvoyées 
comme  un  entrecroisement 


Mi  on  ■    laim.  o    ;  '  -    ,    :  m    :,     .  qoi  e<  no  prend   le  sopranino,   le 
Bopran  i,  l'alto,  le  ténor,  le  baryton  et  la  basse. 

Ad  h. 3  lx  a  pris  un  brevet  pour  l'adaptation  de  pistons  au 

saxophone.  En  iv>o,  il  appmi.i  divers  perfectionnements  Irrrpor- 

:anl-    ■    il. mua  un  modèle  de  saxophone  alto  descendant  jusqu'à 
Y  ni  de  l'allo  à  cordes,  pour  le  suppléer,  là  où    les 
qu.ml,     il   pnui'vu   d'une   membrane  sur   le   tube  pour  obtenir 
divers  effets  de  sonorité. 

Le  saxophone  a  élé  professé  au  Conservatoire  par  Adolphe  s  v\, 
en  même  temps  qu'Ain  a  \  pruie.sail  le  saxhorn.  Ces  classes, 
réservées  aux  élèves  militaires,  ont  été  supprimées  en  1870. 

Adolphe  Sax  ne  s'est  pas  occupé  seulement  des 
inslrumenls  de  musique  à  vent  en  bois  et  en  cuivre- 
Il  a  proposé  l'organisation  plus  logique  et  plus  riche 
du  quinletle  des  instruments  à  cordes;  montré,  avant 
quelîicliard  Wagner  ne  donnât  l'exemple,  les  ressour- 
ces olfertes  dans  l'orchestre  symphonique  par  les 
familles  diverses  d'instruments  qui  le  composent, 
et  étudié  la  construction  des  salles  de  théâtre  et  de 
concert.  En  ce  qui  concerne  ces  recherches  spéciales, 
il  a  laissé  de  curieux  documents,  brevetés  en  1866, 
exposés  en  1867,  et  qu'utilisera  l'avenir:  les  plans 
de  salles  de  théâtre,  de  concert  et  d'orchestre  en 
plein  air,  donl  la  construction  est  basée  sur  les 
propriétés  acoustiques  de  la  parabole.  Les  réso- 
nances par  écho  sont  impossibles  dans  une  salle  ou 
sur  une  scène  établies  suivant  ce  système  nouveau, 
car  toutes  les  sonorités  sont  réfléchies  en  lignes  pa- 
rallèles. 

Adolphe  Sax  s'est  aussi  appliqué  à  des travaul 
d'acoustique  intéressant  moins  les  musiciens,  tel  le 
perfectionnement  du  sifflet  des  chemins  de  fer  en 
1849,  et  à  des  études  n'intéressant  que  les  rail  liciens 
les  plus  érudits,  comme  le  montre  cette  lettre  de 
Victor  Massé  : 

«  Paris,  le  23  décembre  1880. 
«  Mon  cher  Sax, 
«Je  me  rappelle  que,  il  y  a  douze  ou  (reize  ans, 
arrivant  un  soir  chez  Gf.vakhï.  vous  étiez  avec  lui 
au  piano  à  lui  expliquer,  par  le  chant  et  le  raison- 
nement, le  rôle  mélodique  de  certains  intervalles, 
que  vous  disiez  être  semblables  à  ceux  employés 
par  les  Grecs.  Gevaert  me  dit  à  mon  entrée:  «  Viens 
«  donc   entendre  ce  que  Sax  me  démontre  ;   il   est 


c<  positif  que  les  intervalles  employés  par  les  Grecs 
t'étaient  (els  qu'il  le  dit.  »  Et  vous recommençâtes 
la  démonstration,  qui  nous  convainquit  complète- 
ment. Voilà,  mon  cher  Sas,  ce  que  je  tenais  à  rap- 
peler et  à  constater  par  écrit. 

«  Veuillez  agréer,  cher  et  illustre  ami,  l'expression 
de  mes  sentiments  affectueux  et  dévoués. 

«  Victor  Massé.  » 

Il  avait  tant  fait,  que  les  musiciens  dans  l'em- 
barras n'hésitaient  pas  à  recourir  à  lui,  parfois  pour 
des  sollicitations  bien  imprévues.  Une  carte  de  visite 
du  corniste  Eugène  Vivier,  aussi  fameux  par  sa  vir- 
tuosité que  par  ses  bouffonneries,  porte  ce  texte  : 

«  Sax!  donne-moi  de  les  nouvelles,  et  de  celles 
des  tiens.  Je  ne  t'en  demande,  du  reste,  que  pour 
te  prier  de  me  rendre  un  service...  Connais-tu  un 
ingrédient  procurant  de  la  force  aux  lèvres?..  Ou 
bien,  dis-moi  que,  lorsqu'on  est  trop  vieux,  il  est 
inutile  d'en  chercher.  Trois  lignes  à  ton  ami  sur  ce 
sujet,  et  surtout  sur  celui  de  tes  nouvelles,  car  j'y 
tiens  encore  plus  qu'à  l'embouchure  de  la  trom- 
pette. » 

Enfin,  en  1862,  il  eut  l'occasion  de  prouver  que 
son  génie  d'inventeur  n'était  pas  impuissant  en 
dehors  de  la  musique.  Atteint  d'une  alfection  pul- 
monaire, les  médecins  lui  avaient  ordonné  le  séjour 
dans  une  forêt  de  pins.  Ne  voulant  pas  abandonner 
ses  ateliers,  il  chercha  un  moyen  d'avoir  à  Paris,  et 
chez  lui,  la  forêt  de  pins.  Sous  le  nom  de  goudron- 
mire  Sax,  il  établit  un  appareil  permettant  d'im- 
prégner de  goudron,  créosote  ou  autre  antiseptique, 
l'air  respiré  dans  un  appartement.  Cela  ne  fut  pas 
une  invention  vaine  ou  impraticable.  Ifeaucoup  de 
médecins  en  tirèrent  parti  ;  elle  fut  récompensée  â 
des  expositions  d'hygiène,  et  on  verra,  par  la  lettre 
inédite  reproduite  ici,  que  Pasteur  lui-même  y  ptil 
intérêt: 

«  Alais  (Gard),  0  février  1SG6. 


«  Vous  devez  être  surpris  du  retard  que  j'ai  mis  à 
vous  remercier  d'un  envoi  que  vous  avez  eu  l'obli- 
geance de  m'adresser  à  Paris,  se  composant  d'une 
boite  à  goudron  pour  fumigations  et  d'un  prospectus 
indiquant  son  emploi.  11  n'a  pas  été  inutile;  du 
moins  j'ai  eu,  peu  de  jours  après  l'avoir  reçu-,  l1  - 
.  i-i.iii  d'en  faire  don  à  M.  D...,  directeur  au  minis- 
tère de  la  guerre,  avec  qui  je  me  suis  rencontré  à 
dîner,  au  moment  où,  pour  le  soin  de  sa  propre 
santé,  mi  médecin  ■'•minent  venait  de  lui  en  con- 
seiller l'ui 

ii  Bref,  je  viens  aujourd'hui,  Monsieur,  voua  prier 
de  viuibiir  bien  m'adresser  deux  de  vos  loiiles,  dont 
je  désire  Paire  usage  pour  certaines  étndi 
boites  vides.  J'y  placerai  moi-même  les  substances 
dont  je  veux  me  servir.  Ayez  la  bonté  de  me  faire 
Ci  I  envoi  à  Mais,  où  je  me  trouve  en  ce  m 
de  faire  suivre  en  remboursement.  La  taille  sera 
celle  de  la  boîte  que  vous  m'avez  adressée  à  Paris. 
Grande  vitesse. 

«  Agréez,  etc.  „  p.,»,,,,. 


Les  autres  ont  profité  du  Renie  el  de  l'acl 
dolphe  Sax.  Lui  et  les  siens  en  oui  seulement  souf- 
fert- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LORPHÉON    3745 


Sans  entrer  dans  le  détail  des  luttes  judiciaires 
qu'il  eut  à  soutenir  de  i846  à  1888,  il  suffît  de  rap- 
peler qu'en  1846,  ses  concurrents,  liés  par  un  pacte 
secret,  se  coalisèrent  contre  lui.  Ils  choisirent  un 
président,  un  secrétaire,  un  trésorier,  eurent  des 
réunions  à  jours  fixes  et,  par  une  manœuvre  auda- 
cieusement  déloyale,  attaquèrent  Adolphe  Sax  en 
déchéance  de  ses  brevets,  prétendant  que  ses  ins- 
truments étaient  depuis  longtemps  fabriqués  par 
des  facteurs  allemands  et  italiens,  qu'ils  avaient,  eux 
aussi,  le  droit  de  les  fabriquer  et  que  le  soi-disant 
inventeur  n'était  qu'un  habile  intrigant.  La  multi- 
tude de  procès  qui  en  résulta  devait  aboutir  après 
quatorze  ans,  en  1860,  à  la  reconnaissance  solennelle 
de  tous  les  droits  d'Adolphe  Sax,  avec  flétrissure 
par  l'avocat  général  et  par  les  juges  de  «  l'indue 
vexation»  créée  par  les  concurrents  contrefacteurs 
contre  un  «  inventeur  plein  de  mérite,  que  le  gou- 
vernement a  été  chercher  en  Belgiqne,  pour  doter 
la  musique  française  d'une  amélioration  puissante, 
incontestable  ». 

Mais  les  frais  de  ces  procès,  les  lenteurs  de  la  pro- 
cédure acculèrent,  en  1852,  Adolphe  Sax  à  la  faillite. 
Il  ne  se  releva  de  cette  catastrophe,  en  désintéres- 
sant jusqu'au  dernier  centime  ses  créanciers,  que 
pour  être  obligé  de  déposer  de  nouveau  son  bilan 
en  1873,  poursuivi  par  la  haine  de  ses  concurrents, 
rendue  encore  plus  acharnée  après  la  formation  par 
Adolphe  Sax  de  son  Harmonie  nouvelle,  qui  devint  la 
fameuse  musique  des  Guides,  sous  la  direction  très 
experte  du  célèbre  chef  Mohr;  après  la  réorganisa- 
tion des  musiques,  faite  suivant  les  indications  d'A- 
dolphe Sax;  après  les  éclatants  triomphes  de  l'Expo- 
sition de  Londres  en  1851,  de  l'Exposition  de  Paris 
en  1855,  où  il  obtint  la  grande  médaille  d'honneur, 
de  l'Exposition  universelle  de  1869,  qui  lui  valut  la 
plus  haute  récompense  accordée  jusque-là  à  son 
industrie,  le  grand-prix;  après  enfin  l'hommage  na- 
tional que  le  gouvernement  français  lui  décerna  en 
lui  accordant  la  grande  naturalisation. 

La  fatalité,  elle  aussi,  poursuivait  Adolphe  Sax 
et  devint  l'auxiliaire  de  l'œuvre  néfaste  entreprise 
par  ses  ennemis.  Pendant  cinq  ans,  il  souffrit  d'un 
cancer  mélanique  à  la  lèvre,  dont  la  guérison  obte- 
nue par  le  docteur  Vriès,  surnommé  le  «  docteur 
noir  »,  à  l'aide  d'une  plante  de  l'Inde,  reste  un 
exemple  unique  dans  les  annales  de  la  médecine.  Un 
appel  au  public,  qu'il  publia  en  1887,  apprit  au  monde 
stupéfié  «  qu'après  vingt-six  ans  d'attente,  le  rapport 
des  experts  concluant  aux  indemnités  dues  par  ses 
adversaires  n'était  pas  encore  déposé  »,  et  que, 
«  par  un  fait  qui,  d'après  l'expression  du  président 
du  tribunal  de  commerce,  ne  s'est  point  produit  en 
cent  ans  »,  l'arrêt  de  sa  réhabilitation  n'avait  pas 
été  transcrit  au  registre  du  greffe. 

Au  seuil  de  la  mort,  alors  qu'il  avait  quitté  la 
direction  de  la  musique  de  scène  de  l'Opéra  depuis 
quatre  ans  et  vivait  pauvrement  d'une  pension  accor- 
dée par  le  directeur  des  Beaux-Arts,  Henry  Roujon, 
sur  la  demande  du  compositeur  Lacôme,  la  haine  de 
ses  concurrents  s'efforçait  encore  contre  Adolphe  Sax. 
Dans  un  ouvrage  paru  en  1893,  Les  Facteurs  d'ins- 
truments de  musique,  l'auteur,  renouvelant  les 
attaques  commencées  en  1889  dans  son  volume  sur 
la  facture  instrumentale  à  l'Exposition  de  1889,  ne 
craignit  pas  de  partir  en  guerre  contre  l'œuvre  d'A- 
dolphe Sax,  et  de  servir  des  rancunes  de  boutique 
avec  une  naïveté  véritablement  surprenante  chez  un 
homme  habitué  à  manier  le  document  historique. 
Copyright  by  Librairie  Delagrave.  1930. 


Le  4  février  1894,  la  mort  délivra  Ado  plie  Sax.  Il 
partit,  n'ayant  pu  obtenir  ce  qu'il  regrettait  dans  son 
appel  au  public  de  1887,  de  ne  pouvoir  atteindre 
«  quelques  heures  de  paix  dans  une  vie  dévorée  de 
soucis  ».  Il  léguait  à  l'avenir  son  œuvre  prodigieux, 
conçu  et  achevé  dans  une  existence  douloureuse  et 
agitée  sans  trêve,  ayant  réalisé,  comme  l'a  dit  Fétis 
dans  sa  Biographie  des  musiciens,  «  un  phénomène 
qui  ne  s'est  pas  rencontré  non  seulement  dans  l'his- 
toire de  l'invention  des  instruments,  mais  en  quelque 
art  que  ce  soit  ».  Sans  les  luttes  acharnées  auxquelles 
il  dut  faire  face,  et  qui  accaparèrent  une  si  grande 
part  de  son  activité,  Adolphe  Sax  aurait  pu  se  don- 
ner au  développement,  en  dehors  des  musiques 
militaires,  des  orchestres  populaires  d'harmonie  et 
de  fanfare.  Et  nous  aurions  reçu  de  lui  une  tradition 
orphéonique  instrumentale,  digne  de  la  tradition 
orphéonique  chorale  léguée  par  Wiliibm  et  Eugène 
Delaiorte. 


L'AVENIR   DE   L'ORPHEON 

Dix  années  avant  la  guerre  de  1914,  la  famille 
orphéonique  française  comprenait  près  de  neuf  mille 
sociétés  populaires  chorales  et  instrumentales.  Quinze 
ans  après,  le  nombre  en  est  beaucoup  diminué,  sur- 
tout dans  le  groupe  choral.  Déjà,  avant  même  la 
guerre  de  1870,  les  quatre  cinquièmes  des  groupe- 
ments étaient  composés  des  harmonies  pour  un  tiers, 
et  des  fanfares  pour  deux  tiers.  11  avait  fallu  vingt 
années  pour  établir  ce  progrès  du  groupe  instru- 
mental. 

Aux  concours  de  musique,  les  groupes  d'harmo- 
nies ou  de  fanfares  les  plus  nombreux  étaient  de  9, 
en  1851,  à  Troyes;  de  28,  en  1855,  à  Vanves;  de  67, 
en  1856,  à  Fontainebleau;  de  87  à  Melun;  de  43  à 
Caen,  de  63  à  Dijon,  en  1857;  de  110  à  Saint  Etienne, 
de  130  à  Bordeaux,  en  1862;  de  150  à  Lyon,  en  1854. 
A  partir  de  1862,  les  groupes  d'harmonies  ou  de  fan- 
fares comptent  pour  la  moitié  au  moins. 

Au  concours  de  Lille,  en  1883,  il  n'y  avait  que 
67  orphéons,  dont  19  étrangers,  sur  65  harmonies, 
dont  22  étrangères,  et  134  fanfares,  dont  57  étran- 
gères. Les  plus  récents  concours,  quoique  réunissant 
un  nombre  de  groupements  beaucoup  moindre,  accu- 
sent une  proportion  encore  moins  favorable  au  chant 
choral.  La  génération  contemporaine  est  donc  natu- 
rellement portée  à  voir  surtout  dans  le  mouvement 
orphéonique  la  prépondérance  de  la  musique  instru- 
mentale, et  à  exprimer,  dans  son  dédain  du  mot  Or- 
phéon,  son  indifférence  pour  les  formes  populaires 
de  l'orchestre. 

Le  beau  passé  de  l'Orphéon  appartient  au  chant 
choral.  L'histoire  de  nos  harmonies  et  fanfares  n'offre 
pas  de  hauts  faits  comme  les  festivals  grandioses  de 
1859  et  de  1861,  comme  le  voyage  triomphal  en  An- 
gleterre de  1860.  Mais  c'est  une  funeste  injustice  de 
méconnaître  le  bel  effort  artistique  populaire,  com- 
mencé sous  la  première  République,  avec  des  instru- 
ments imparfaits,  auxquels  la  plupart  des  tonalités 
de  notre  système  musical  étaient  interdites;  effort 
sympathique  aux  progrès  de  la  facture  instrumentale 
accomplis  par  Adolphe  Sax,  lorsque  les  profession- 
nels y  demeuraient  hostiles;  favorable  à  l'idée  nou- 
velle d'adjoindre  à  l'orphéon  choral,  soit  un  quin- 
tette ou  quatuor  de  saxhorns,  de  saxophones,  soit 
une  fanfare,  soit  une  harmonie,  comme  on  le  vit 
en  plusieurs  circonstances,  entre  1863  et  1870;  cons- 


3746 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


tient  de  son  action  féconde  lorsqu'il  maintenait  par 
l'exemple  la  nécessité  de  ne  pas  amoindrir  les  facul- 
tés artistiques  populaires,  dans  un  moment  où,  sous 
le  patronage  intéressé  politiquement  du  duc  de 
Morny,  on  tentait  de  substituer,  à  l'usage  du  peuple, 
la  notation  chiffrée  à  la  notation  usuelle;  si  utile 
enlin  par  la  popularité,  répandue  jusque  dans  nos 
campagnes,  des  œuvres  lyriques,  et  par  l'animation 
apportée  aux  jours  de  joie  ou  de  deuil,  dans  la  ville 
comme  au  plus  petit  village. 

Le  niveau  artistique  des  orchestres  populaires 
n'aurait  pas  cessé  d'être  élevé,  si  le  maintien  d'un 
système  parfait  d'éducation  avait  continué  de  leur 
assurer  un  recrutement  favorable,  comme  aux  pre- 
miers temps  de  l'Orphéon.  L'étude  d'un  instrument, 
autre  que  le  piano,  ne  devrait  pas  être  commencée 
avant  la  connaissance  préalable  de  l'intonation,  que 
le  chant  choral  donne  un  moyen  certain,  rapide  et 
attrayant  d'acquérir.  Le  succès  et  la  valeur  des  pre- 
mières fanfares  n'eurent  pas  d'autres  causes.  La  sym- 
pathie était  alors  générale  pour  l'orphéon,  choral 
ou  instrumental.  On  en  trouve  l'écho  dans  les  écrits 
des  sociologues  les  plus  novateurs.  Dans  son  livre 
Du  Principe  de  L'Art,  publié  en  1863,  Proudhon  pou- 
vait écrire  : 

«  Il  s'en  faut,  j'aime  à  le  penser,  que  la  musique 
ait  trouvé  de  nos  jours  tout  son  emploi  dans  la  so- 
ciélé  moderne;  elle  est  appelée,  si  j'ose  ainsi  dire, 
à  un  service  plus  sérieux  et  plus  général;  mais  il 
n'en  est  pas  moins  vrai  que,  dan-  la  rétrogradation 
actuelle,  elle  soutient  presque  seule  la  retraite,  et 
qu'au  moment  ou  j'écris,  le  dédain  de  l'art,  surtout 
de  la  peinture  et  de  la  statuaire,  serait  bien  autre- 
ment profond,  si  les  esprits  n'étaient  retenus  sur 
cette  pente  par  le  goût  universel,  bien  que  fort  mal 
entendu,  de  la  musique.  » 

Proudhon  avait  eu  l'occasion  d'éprouver  par  lui- 
même  la  vertu  du  chant  choral,  de  sentir  la  douceur 
du  lien  de  fraternité  qu'il  peut  créer.  Dans  le  même 
ouvrage,  il  a  raconté  cet  épisode  de  sa.  captivité,  à 
Sainte-Pélagie,  en  1849,  avec  quatre-vingts  autres 
prisonniers  politiques  : 

«  ...  Tous  les  soirs,  une  demi-heure  avant  la  fer- 
meture des  cellules,  les  détenus  se  groupaient  dans 
la  cour,  et  chantaient  la  prière;  c'était  un  hymne  à 
la  liberté,  attribué  à  Armand  Marrast.  Une  seule 
voix  disait  la  strophe,  et  tous  les  prisonnier  repre- 
naient le  refrain. ..Plus  tard,  ces  chants  furent  inter- 
dits, et  ce  fut  pour  les.  prisonniers  une  aggravation 
de  peine...  » 

A  aucun  de  nos  dirigeants,  même  pour  une  cause 
aussi  honorable  que  la  défense  de  la  liberté,  il  ne 
faut  souhaiter  pareille  épreuve  d'euGOUEaigemenfc 
Aujourd'hui,  la  sincérité  démocratique  devrait  suf- 
fira) stimulée  par  le  devoir  d'égaler  une  génération 
précédente,  et  par  la  généralisation  du  goût  musi- 
cal, de  plus  en  plus  étendue  avec  les  belles  repro- 
ductions de  la  musique  mécanique,  et  les  diffusions 
par  T.  S.  F.  de  nos  grands  concerts.  On  aura  beau- 
coup fait  lorsqu'on  se  s-era  décidé  à  organiser  un  en- 
seignement scolaire  aussi  largement  étendu,  aussi 
généralement  méthodique,  aussi  Iransmissible  que 
celui  qui,  un  moment,  rendit  la  France  musicieane; 
lorsqu'on  cessera  de  croire  à  l'enseignemeni  difficile 
de  li  première  science  musicale,  à  la  vertu  éducative 
dBS  chœurs  serinés,  et  à  la  possibilité  de  développer 
(e  goût  artistique  en  alimentant  l'enfance  avec  des 
miettes  de  musique,  si  sucrées  qu'elles  puissent  èhe 
dans  les  chansons  les  plus  charmantes.  On  aura  fait 


bien  plus  encore  lorsqu'on  aura  réussi  à  intéresser 
les  élèves-maîtres  de  toutes  nos  écoles  normales  à 
l'enseignement  d'un  art  qui  peut  le  mieux  les  mettre 
en  union  avec  leurs  élèves,  et  dont  les  procédés  pé- 
dagogiques de  l'instruction  élémentaire  peuvent  être 
acquis  si  facilement,  qu'on  les  a  vu  appliqués  avec 
succès  par  les  simples  moniteurs  du  temps  de  l'en- 
seignement mutuel.  Sans  une  telle  organisation,  les 
professeurs  spéciaux  de  la  musique  scolaire,  surtout 
s'ils  ont  quelque  vocation  d'éducateurs,  sont  comme 
des  professeurs  de  gymnastique  auxquels  aurait  été 
confié  le  soin  de  faire  apprendre  les  premiers  pas 
de  la  marche  enfantine.  Ils  sont  amoindris  :  leur 
culture  est  gaspillée,  et  leur  ardeur  artistique 
émoussée.  Ils  ne  sont  pas  incités  à  donner  l'encou- 
ragement de  leur  collaboration  à  des  groupements 
dont  ils  sont  enclins  à  prévoir  la  faiblesse  artistique, 
et  leurs  élèves  particuliers  en  sont  aussi  détournés, 
autant  par  cet  exemple  d'abstention  que  par  un  na- 
turel entraînement  à  des  sentiments  de  vanité. 

Le  glorieux  Orphéon  de  1835  a  été  édifié  sur  une 
œuvre  d'instruction,  sur  une  organisation  d'ensei- 
gnement, sur  une  foi  sans  défaillance  dans  la  frater- 
nité nationale.  Cela  reste  une  indication  formelle. 
Son  développement  fut  favorisé  par  les  circonstances  : 
la  liberté  d'association  n'existait  pas  alors,  et  les 
réunions  musicales  tolérées  étaient  comme  un  centre 
d'attraction  pour  les  citoyens,  de  plus  en  plus  domi- 
nés par  le  besoin  d'association,  et  que  ne  retenait 
aucun  préjugé  de  situation  sociale.  La  musique  po- 
pulaire n'a  pas  perdu  la  faveur  de  pouvoir  être  un 
lien  civique;  mais,  aujourd'hui,  le  groupement  mu- 
sical semble  devoir  s'offrir  avec  attrait,  plut ôL  aux 
bonnes  volontés  déjà  groupées  dans  des  associations 
d'anciens  élèves,  coopératives  ou  syndicats,  qu'à  des 
citoyens  disséminés,  et  «  tenus  épars  »  comme  au- 
trefois. 

A  l'œuvre  nécessaire  de  l'éducation  initiale  sco- 
laire et  poslscolaire,  il  faut  souhaiter  que  l'Etal  et 
les  municipalités  ajoutent  des  encouragements  favo- 
rables à  la  formation  et  à  la  vitalité  des  sociétés  mu- 
sicales, en  dehors  desquelles  il  n'y  a  plus  de  raisons 
de  tenir  les  femmes  éloignées,  puisque  les  habitudes 
religieuses  sont  plus  accommodantes,  et  les  préju- 
gés de  convenances  moins  tyranuiques. 

Dans  un  rapport  sur  l'enseignement  du  chant, 
présenté  en  1880  au  ministre  de  l'instrucliou  pu- 
blique, et  publié  en  1898  à  Vannes,  le  compositeur 

liOURGAULT-DlJCOUDRAY  a  Spécifié,  avec  SOU  cxpél ïellc'e 

avertie,  que  ces  encouragements  devaient  être  géné- 
raux, pour  n'entraver  en  aucune  manière  l'indé- 
pendance des  sociétés  : 

«  Le  rôle  de  l'Etal  devrait  être  d'encourager  de 
toutes  ses  forces  les  sociétés  eu  leur  facilitant  l'achat 
de  la  musique,  en  leur  assurant  gratuitement  des 
salles  de  réunion,  peut-être  eu  accordant  à  leurs 
membres,  après  un  certain  temps  de  service,  des 
privilèges  et  des  immunités...  Ce  que  pourrait  encore 
l'Etat,  ce  serait  de  multiplier  les  occasions  où  ces 
sociétés  se  produiraient  en  allumant,  pour  la  plus 
grande  j, ne  de  la  vie  commune,  l'intensité  des  sen- 
timents collectifs. 

«...  Les  occasions  ne  manquent  pas;  il  s'agit  d'en 
profiter  et  d'organiser  de  la  musique  pour  lés  itttHe 
lions  »  de  la  vie  civile,  connue  l'Eglise,  »  au  dehul 
de  son  histoire,  le  fit  avec  tant  de  bonheur  pour  les 
solennités  de  la  vie  religieux...  » 

Le  compositeur  Hoi  hoaili-Dl  coidray  avait  conuu 
l'Orphéon  dans  le  dernier  éclat  de  ses  glorieux  de- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LORPHÉON 


buts.  Parmi  les  maîtres  de  la  génération  précédente, 
il  en  fut  l'ami  le  plus  zélé,  n'ayant  jamais  douté  de 
l'avenir,  lui  dédiant  de  nombreuses  œuvres,  inspi- 
rées par  un  sentiment  de  pleine  fidélité  à  la  tradition 
de  l'origine;  des  chœurs  pour  voix  d'hommes,  des 
chœurs  pour  voix  mixtes,  des  cantates  chorales  avec 
accompagnement  d'harmonie  ou  de  fanfare.  De  la 
même  génération,  et  animée  par  la  même  foi,  Au- 
gusla  Houiès  parvint  à  réveiller  le  souvenir  des 
fastes  orphéoniques,  en  réunissant  tous  1rs  orphéons 
de  Paris  et  de  la  Seine,  sous  la  direction  d'Edouard 
Colonne,  pour  les  grandioses  exécutions,  au  Palais 
de  l'Industrie,  pendant  l'Exposition  universelle,  de 
son  Ode  triomphale  pour  le  Centenaire  de  1789. 

Parmi  les  glorieux  maîtres  vivants  de  la  généra- 
tion contemporaine,  le  compositeur  Gustave  Char- 
i'bntier  maintient  la  bienfaisante  continuité  de  la 
grande  tradition  orphéonique,  soil  avec  des  œuvres, 
comme  le  Couronnement  de  la  Mme  du  peuple,  ou  le 
l'haut  i l'apothéose,  dont  l'interprétation  mobilise 
toutes  les  ressources  vocales  et  instrumentales  d'une 
ville;  soit  en  assumant  les  responsabilités  d'organi- 
sation d'un  important  festival  orphéonique,  comme 
«  l'hommage  populaire  à  Beethoven  »,  qui  eut  lieu 
à  l'occasion  du  centenaire,  en  juillet  1027,  au  monu- 
ment du  bois  de  Yincennes,  soit  encore  en  plaidant 
dans  la  presse  la  cause  de  l'art  populaire,  en  termes 
auxquels  ajoute  la  haute  autorité  artistique  de  l'au- 
teur de  Louise  : 

«  ...  Il  faut  bien  comprendre  pourtant  que  la  vie 
artistique  d'une  nation  ne  réside  pas  seulement 
dans  les  manifestations  et  productions  des  artistes... 
Populariser  l'art  est  l'un  des  premiers  devoirs  d'une 
démocratie...  Si,  de  la  masse  du  peuple  initié,  s'é- 
lève un  jour  une  exception,  quelque  génie  créateur 
d'idées,  ce  qui  serait  plus  glorieux,  plus  beau  que 
le  chef-d'œuvre  lui-même,  ne  serait-ce  pas  la  com- 
préhension de  ce  chef-d'œuvre  par  le  peuple  entier, 
chacun  y  sentant  vivre  la  réalisation  de  son  propre 
désir  de  beauté,  chacun  pouvant  affirmer  :  Voilà  ce 
que  je  rêvais  d'accomplir,  en  sorte  que  chacun  arrive- 
rait à  se  persuader  d'y  avoir  collaboré...  Populaire, 
fraternel,  national,  cet  art  est  bienfaisant  aux  ar- 
tistes, dont  l'idéal  et  le  métier  s'ennoblissent  dans 
l'amour  sacré  d'un  but  sublime.  Ce  n'est  plus  l'art 
fermé,  spécialisé,  réservé  aune  élite,  à  une  chapelle 
de  fidèles,  ni  l'ait  égoïste  et  stérile,  objet  de  luxe 
mièvre  el   inutile.   El  pourtant,  bien  qu'il  participe 


d'un  élan  spontané  qui  est  sa  condition,  l'art  popu- 
laire n'en  est  pas  moins  épris  d'idéal  et  de  perfec- 
tion, recherchant  une  réalisation  qui  n'ait  rien  à 
envier  à  l'art  des  cénacles...  ,<  [Le  Nouveau  SU  cte. 

Avec  les  maîtres,  d'autres  musiciens  sont  fidèles. 
En  1904,  l'Ecole  de  chant  choral  a  été  fondée  avec 
un  enseignement  basé  sur  la  méthode  Wilheji. 
(Juelques  années  plus  tard,  après  une  série  de  mani- 
festations continuant  la  tradition,  a  éïé  constituée 
l'Association  pour  le  développement  du  chant  choral, 
reconnue  d'utilité  publique,  qui  offre  désormais,  à 
son  siège  social,  au  Palais  du  Trocadéro,  un  centre 
de  documentation  et  de  renseignements  pour  l'ensei- 
gnement, le  répertoire,  l'organisation  des  groupe- 
ments de  musique  populaire. 

.Nos  jeunes  musiciens  n'ont  pas  à  renouer  un  fil 
de  tradition  interrompu.  Ils  subissent  l'influence 
d'aînés,  qui,  dans  leur  passion  de  recherche  de  sono- 
rités rares,  négligent  la  voix  humaine,  et  de  dilet- 
tantes qui,  ne  chantant  pas  eux-mêmes,  proclament, 
l'incapacité'  vocale  de  notre  nation.  Qu'ils  se  tournent 
vers  le  peuple  avec  l'esprit  de  justice  que,  dans  un 
ouvrage  déjà  cité,  souhaitait  le  musicien,  grand 
industriel,  Emile  Guimet  : 

Unhomme,  vivant  constamment  au  milieu  des 

ouvriers,  a  quelques  droits,  se  trouve  même  dans 
l'obligation  de  déclarer  ce  qu'il  voit  et  ce  qu'il 
pense...  C'est  une  remarque  à  faire  :  les  classes 
riches  et  éclairées  ne  touchent  à  la  classe  ouvrière 
que  par  les  côtés  douloureux  el  irritants...  On  re- 
cherche les  vices  pour  les  détruire,  les  misères  pour 
les  soulager,  les  souffrances  pour  les  guérir;  mais  il 
est  à  craindre  qu'on  oublie  cette  masse  énorme  qui 
vit  heureuse  et  modeste  sans  réclamer  ni  secours, 
ni  consolations...  » 

Ils  trouveront  la  permanence  de  la  bonne  volonté 
artistique  populaire.  Us  connaîtront  ces  sociétés 
i-ncore  nombreuses,  dont  le  plus  grand  souci  est  la 
crainte  de  ne  pouvoir  conserver  leur  valeur'  artis- 
tique et  l'existence  même,  lorsque  seront  disparu- 
leurs  directeurs  qu'anime  encore  la  foi  orphéo- 
nique. Ils  voudront  que  renaisse  l'heureux  temps  de 
la  France  musicienne  dont  l'étonnant  passé  est  une 
révélation  pour  trop  de  musiciens  d'aujourd'hui,  et 
apparaît  h  tous  comme  un  récit  merveilleux. 

Puissent  ces  pages  consacrées  à  l'harmonieuse 
légende  retenir  l'attention,  et  éveiller  des  sym- 
pathies agissantes. 

Henri  RADIGI  I  11. 


LES  THÉÂTRES  MUSICAUX  SUBVENTIONNÉS 


Par  A.  PEYTEL 


LE  THEATRE  AVANT  LOUIS  XIV 


LES  PREMIERS  SPECTACLES 

La  civilisation  romaine,  imposée  aux  Gaules  par 
ta  force,  avait  apporté  avec  ses  légions  l'éblouissant 
cortège  de  ses  plaisirs  profanes.  Les  races  de  la  Nar- 
bonnaise,  mieux  préparées  que  les  populations  rudes 
du  Nord  aux  élégances  latines,  s'émerveillèrent  du 
faste  dont  les  conquérants  agrémentaient  leur  vie. 
La  vallée  du  Rhône  applaudit  bientôt  aux  jeux  du 
cirque  et  s'amusa  des  masques  de  la  comédie.  Non 
loin  des  Arènes  de  Nimes,  se  dressaient  le  théâtre 
d'Arles  et  le  théâtre  d'Orange. 

L'invasion  des  barbares,  qui  ravagea  le  vieux 
monde,  ruina  jusqu'en  ses  bases  l'édifice  à  peine 
achevé  de  la  civilisation  gallo-romaine,  qui  ne  fut 
bientôt  plus  qu'un  souvenir  :  la  domination  de  l'em- 
pire avait  été  une  trop  courte  initiation  à  la  vie  la 
plus  raffinée  que  le  monde  eût  encore  connue.  La 
fureur  des  dévastations  germaniques  ramena  en 
Gaule  le  chaos  des  premiers  âges,  ce  ne  fut  qu'après 
plusieurs  siècles  d'une  barbarie  nouvelle  et  bien 
après  la  conquête  franque,  qu'une  renaissance 
intellectuelle  lleurit  parmi  les  ruines  de  l'Empire 
romain. 

Le  mélange  de  tant  de  races,  destinées  à  vivre 
désormais  confondues,  donna  naissance  à  une  civili- 
sation nouvelle  qui  s'établit  lentement  par  une  foi 
commune  et  par  l'échange  des  dialectes.  La  diver- 
sité des  idiomes  provoqua  l'essor  d'une  langue 
étrange,  faite  d'harmonie  latine  et  de  rythme  germa- 
nique, dont  la  richesse  fut  merveilleuse.  Brunetto 
Latini,  le  maître  du  Dante,  reconnaissait  en  elle 
•.  la  parleure  la  plus  délilable,  et  commune  à  toutes 
gens  ». 

Ces  âges  héroïques  inspirèrent  les  chants  de  nos 
premiers  trouvères.  Les  «  gestes  »  de  Garin  de  Lohe- 
rain,  le  poème  de  Roland  —  dont  le  jongleur  Taille- 
fer  clamait  encore  les  stances  à  la  bataille  d'Has- 
tings  —  et  les  exploits  d'Ogier  de  Danemarche, 
répétés  tant  de  fois  à  la  lueur  des  torches,  le  soir, 
dans  les  donjons,  remuaient  profondément  l'âme  de 
ces  hommes  dont  les  loisirs  de  guerre  se  passaient 
dans  les  récits  de  combats. 

Mais  les  chevaliers,  dont  les  bardes  exaltaient  les 
prouesses,  montraient  assurément  trop  de  vaillance 
pour  que  le  succès  ne  vînt  pas  couronner  toutes 
leurs  entreprises,  y  compris  celles  de  galanterie.  La 
reine  Genièvre,  la  blonde  Yseult,  héroïnes  de  Chres- 


tien  de  Tro.yes,  et  la  reine  Sébile,  chantée  par  Jean 
lîodel,  ont  des  grâces  un  peu  complaisantes  pour  de 
si  haultes  dames!  Certaine  Sénéchale,  en  le  lai  d'E- 
quitan  de  Marie  de  France,  met  au  service  de  ses 
aimables  caprices  une  subtilité  dont  s'inspireraient 
encore  avec  profit  les  auteurs  du  Palais-Royal! 

Ainsi,  dès  l'époque  lointaine  des  épopées  carlovin- 
giennes,  en  le  temps  joyeux  où  les  hostelleries,  pla- 
cées sous  le  complaisant  patronage  de  saint  Julien, 
offraient  un  si  large  accueil  aux  clercs  et  aux  pala- 
dins, la  corde  dramatique  et  la  corde  comique  réson- 
naient déjà  sous  les  doigts  des  ménestrels. 

Pourtant,  la  véritable  origine  du  théâtre  français 
ne  devait  venir  ni  des  poèmes  épiques  ni  des  chan- 
sons de  gestes,  mais  des  scènes  de  l'histoire  religieuse 
ou  de  la  légende  sacrée.  L'éducation  littéraire  de  la 
Grèce  se  renouvelait  dans  les  Gaules.  C'est  sur  les 
marbres  sacrés  des  temples  de  la  Grèce  que  s'était 
formé-  le  drame  primitif.  C'est  du  chœur  dithyram- 
bique, enlaçant  de  ses  danses  les  degrés  des  autels, 
et  glorifiant  de  ses  chants  la  légende  de  Racchus, 
que  ïhespis  détacha,  un  jour  l'Jro/.p^y,;.  Le  chœur 
s'arrêtait,  puis  repartait  en  cadence,  tandis  que  le 
personnage  isolé  de  la  ronde  commençait  un  récit 
et  provoquait  ensuite  les  autres  à  répondre.  —  C'est 
la  légende  du  Christ  et  des  Apôtres  qui  fournil  la 
trame  des  premiers  «jeux  ». 

Depuis  longtemps,  les  voûtes  des  cathédrales  go- 
thiques s'offraient,  comme  décor,  à  des  solennités 
étranges.  L'Eglise,  a  dit  Michelet,  était  au  moyen 
âge  «  le  domicile  du  peuple.  La  maison  de  l'homme, 
cette  misérable  masure  où  il  revenait  le  soir,  n'était 
qu'un  abri  momentané.  Il  n'y  avait  qu'une  maison,  à 
vrai  dire,  la  maison  de  Dieu1.  »  Et  c'est  laque  nos 
aïeux  vinrent  prendre  le  goût  des  spectacles  et  des 
jeux.  On  a  trouvé  un  vieux  «  jeu  »  en  trois  parties 
donnant  l'épisode  des  enfants  dans  la  fournaise,  avec 
toutes  les  indications  nécessaires  à  la  mise  en  scène; 
ce  drame  est  en  latin  et  a  dû  être  écrit  au  \i'  siè- 
cle. Le  premier  drame  liturgique  en  langue  vul- 
gaire qui  soit  connu  est  un  Ailam  en  trois  parties  : 
la  chute  de  l'homme,  Cain  et  Abel  et  le  défilé  <U'^ 
prophètes  annonçant  la  réparation.  Il  est  du  xii"  siè- 
cle comme  le  jeu  de  saint  Nicolas  de  Jean  Hodel,  qui 
fut  joué  à  Arras. 

Dès  le  vie  siècle,  on  célébrait  dans  le  temple  la 
fête  des  Fous,  depuis  le  Ier  janvier  jusqu'au  juin 
des  Rois;  la  fête  des  Diacres  Soûls,  dont  le  but 
était  l'élection  de  l'évèque  des  Tous:   celle  des  Cor- 


lil  ,,, 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3749 


nards;  celle  de  l'Ane.  Ces  réjouissances,  dans  les- 
quelles le  clergé  s'associait  avec  la  foule,  sous  des 
accoutrements  et  des;masques  bizarres,  pour  mener 
de  burlesques  processions  et  les  interrompre  des 
scènes  les  plus  extravagantes,  des  orgies  les  plus 
scandaleuses,  ont  fait  l'objet  de  trop  nombreux 
récits  pour  que  nous  insistions  sur  leur  caractère. 

«  Les  conciles  de  Mayence,  de  Tours,  de  Rheims 
et  de  Chalon-sur-Saône,  qui  furent  tenus  l'an  813, 
défendirent  aux  évêques,  aux  prêtres  et  aux  autres 
ecclésiastiques  d'assister  à  aucun  de  ces  spectacles, 
à  peine  de  suspension,  et  d'être  mis  en  pénitence1.  » 

En  1108,  la  célébration  de  la  fête  des  Fous  fut 
interdite  dans  le  diocèse  de  Paris  par  le  légat  Pierre 
Je  Capoue.  Klle  n'en  subsista  pas  moins  jusqu'au 
xve  siècle. 

Hors  de  l'église,  les  Parisiens  avaient  la  distraction 
de  spectacles  ambulants  que  leur  donnaient  des 
baladins,  gens  fort  habiles  en  tours  d'adresse,  mais 
fort  mal  vus  de  la  police,  d'abord  parce  qu'ils  n'a- 
vaient ni  feu  ni  lieu,  puis  parce  qu'on  les  soupçon- 
nait d'être  entachés  de  magie.  On  les  appelait 
indifféremment  basteleurs,  farceurs,  jongleurs  et 
joueurs.  Ce  qui  distinguait  pourtant  ces  derniers, 
.'est  qu'ils  dressaient  des  singes. 

Une  ordonnance  de  Charlemagne,  de  l'an  789, 
«  les  mit  au  nombre  des  personnes  infâmes  aux- 
quelles il  n'étail  pas  permis  de  former  aucune  accu- 
sation en  justice2  ».  Philippe-Auguste  les  chassa 
purement  et  simplement  de  ses  états  dès  la  pre- 
mière année  de  son  règne.  Mais  ils  bénéficièrent 
d'un  sort  meilleur  sous  le  règne  de  saint  Louis. 

a  Nous  en  avons  la  preuve,  dit  Delamare,  dans  un 
tarif  qui  fut  fait  par  saint  Louis  pour  régler  les 
droits  de  péage,  qui  se  payoient  à  l'entrée  de  Paris 
sous  le  Petit-Châlelet  ;  l'un  des  articles  porte  que  le 
marchand  qui  apporteroit  un  singe  pour  le  vendre, 
payeroit  4  deniers;  que,  si  le  singe  appartenoit  à 
un  homme  qui  l'eût  acheté  pour  son  plaisir,  il  ne 
donneroit  rien;  que,  s'il  étoit  un  joueur,  il  en  joiie- 
roit  devant  le  péager,  et  que,  par  ce  jeu,  il  seroil 
quitte  du  péage,  tant  du  singe  que  de  tout  ce  qu'il 
auroil  acheté  pour  sou  usage.  C'est  de  là  vraisem- 
blablement que  vient  cet  ancien  proverbe  populaire, 
payer  en  monnoye  de  singe,  en  gambades.  Un  autre 
article  porte  qu'à  l'égard  des  jongleurs  ils  seroient 
aussi  quittes  de  tous  péages,  en  faisant  le  récit  d'un 
couplet  de  chanson  devant  le  péager  !.  » 

En  1313,  pendantes  grandes  fêtes  de  la  Pentecôte, 
lorsque  Philippe  le  Bel  arma  ses  trois  fils  chevaliers, 
en  présence  d'Edouard  11  et  d'Isabeau  de  France, 
devenue  reine  d'Angleterre,  ce  furent  des  jongleurs 
qui  guidèrent  les  cortèges,  au  son  des  buisines  et  des 
taborins. 

Vers  l'an  1330,  sous  le  règne  de  Philippe  VI,  les 
jongleurs  et  les  jongleresses  de  Paris,  qui  tous 
s'étaient  parqués  dans  une  rue  portant  leur  nom,  — 
la  rue  des  Jongleurs,  devenue  par  la  suite  et  restée 
bien  longtemps  la  rue  des  Ménétriers,  —  parvinrent 
à  ériger  une  confrérie  sous  les  noms  de  saint  Julien 
et  de  saint  Genest.  Lettres  en  furent  passées  et 
scellées  au  Chàtelet,  le  23  novembre  1331.  Cette  cor- 
poration, comme  toutes  celles  d'alors,  était  gouver- 
née par  un  roi,  le  roy  des  Ménestriers. 


1.  Traité  de  la  Police,  de  Deliniaiv,  conseillei-comm 
Di  au  Chàtelet  île  Paris,  t.  I,  liv.  III,  lit.  III,  chap.  n. 

1.  Ibid.,  chap.  n  (d'après  Cap.  It,;h  Fr.,  t.  I,  col.  229,  ; 

3.  Ibid.  (d'après  Livre  Blanc  du  C/iàt.  de  Paris,  ou 
fétiers,  î°  part.,  fol.  lis  et  suiv.j. 


Pour  se  concilier  la  bienveillance  des  pouvoirs 
publics,  les  Ménestriers  avaient  fondé  auprès  d'eux, 
sur  un  terrain  acquis  de  l'abbesse  de  Montmartre,  une 
église  et  un  hôpital.  La  fondation  de  l'hôpital,  atte- 
nant à  l'église,  explique  le  patronage  de  saint  Julien . 
Cet  hôpital  n'eut  pas  une  longue  existence,  car  les 
bâtiments  en  furent  bientôt  accaparés  par  les  chape- 
lains. Mais  l'église,  Saint-Julien-des-Ménétriers,  de- 
meura jusqu'à  la  Révolution,  et  les  jongleurs  en 
entretenaient  les  prêtres  au  moyen  de  dons  annuels. 

Leur  «  cohue  »,  désignée  couramment  sous  le  nom 
de  ménestrandie,  exécutait  des  tours  de  gibecière, 
dressait  des  singes  et  autres  bêtes,  et  se  recomman- 
dait de  saint  Genest,  son  patron,  qui  fut  bateleur 
aussi,  païen  d'abord,  puis  converti  et  martyrisé  en 
303  sous  les  yeux  de  Dioclétien. 

Ils  jouaient  de  tous  les  instruments,  tant  haute 
comme  bas,  —  de  la  vielle,  de  la  harpe,  de  l'épinette, 
du  rebec,  —  et  ceux-là  seuls  qui  faisaient  partie  de 
l'association  pouvaient  faire  entendre  leur  musique 
aux  fêtes  et  réunions  de  plaisir  données  en  la  ville, 
vicomte  et  diocèse  de  Paris. 

Les  statuts  qui  les  régissaient  étaient  très  rigou- 
reux. Mais  l'obligation  de  s'y  soumettre  était  absolue, 
et  les  lettres  patentes  confirmalives  du  24  avril  1407 
disposent  que  :  «  Se  aucun  ménestrel  estrangierveul 
jouer  desdiz  instrumens  en  la  ville  de  Paris  ou 
ailleurs  es  lieux  dessusdiz,  poursoy  allouer  et  gain- 
gnier  argent,  ycelluy  roi  des  ménestrels  ou  ses  dé- 
putez lui  pevent  deffendre  ladite  science,  jusques  â 
ce  qu'il  ait  juré  par  la  foy  et  serement  de  son  corps, 
à  tenir  et  garder  l'ordonnance  dessusdicte,  surpaine 
d'estre  banni  de  ladicte  science  par  an  et  jour,  et  de 
l'amende  dessusdicte  (20  sols  parisisl,  se  ce  n'est  à 
la  voulenlé  desdiz  roy  ou  députez4.  » 

Une  ordonnance  du  prévôt  de  Paris,  du  quator- 
zième septembre  139;>,  leur  avait  défendu  «  de  ne 
rien  dire,  représenter,  ou  chanter  dans  les  places 
publiques  ou  ailleurs,  qui  put  causer  quelque  scan- 
dale, à  peine  d'amende  arbitraire  et  de  deux  mois  de 
prison  au  pain  et  à  l'eau 

Le  goût  des  spectacles  s'était  grandement  déve- 
loppé, à  la  suite  des  fêtes  ecclésiastiques  dont  nous 
avons  parlé.  Celles  de  l'Université,  qui  avait  chaque 
année  son  évêque  des  Fous,  et  les  processions  que 
l'on  multipliait  pour  éblouir  le  populaire,  excitaient 
de  plus  en  plus  sa  curiosité. 

En  1313,  aux  fêtes  de  la  Pentecôte,  Philippe  le  Bel 
lit  représenter,  sous  des  courtines,  à  l'abbaye  de 
Saint-Germain  des  Prés,  le  paradis  et  l'enfer,  avec 
une  figuration  magnifique  de  personnages  et  d'ani- 
maux. 

Le  jour  de  Pâques  1300,  des  chapelains  et  des 
clercs  de  la  Sainte-Chapelle  otirirent  à  Charles  VI 
le  spectacle  de  la  résurrection  de  Jésus-Christ.  Le 
roi,  en  manière  de  satisfaction,  leur  lit  remettre 
40  francs". 

Des  cérémonies  semblables  avaient  lieu  assez  sou- 
vent dans  les  monastères,  à  l'occasion  de  leurs  fêtes, 
et  dans  certains  collèges.  On  y  montrait  des  épiso- 
des de  la  vie  des  martyrs  et  les  miracles  des  saints. 
Parmi  les  plus  remarquables,  se  trouve  le  Miracle  de 
Théophile  de  Rutebeu.1  et  les  quarante-deux  Miracles 
de  Notre-Dame,  qui  montrent  un  mélange  singulier 


.  Ordonnances  du  Louvre 
.  Delamare,  t.  I,  liv.  III. 
ien,  f.  123V 
.  Hichelet,  Hist.  de  Fia 


III,   chap.  n  (d'après  itère  Soug 


ViXCYCLOPEMIi  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


■te  foi  c&nàMe  el  de  trivialité  populaire  qui  nous 
semblent  inconciliables. 

(  les  di\  ers  spectacles  s'inspiraient  d'une  correction 
variable.  La  nudité  des  hommes,  et  surtout  des 
femmes,  y  etaitchosc  accoutumée. 

Ce  M'était  pas  une  innovation  :  à  Home,  les  mimes 
se  dévêtaient  généralement.  On  raconte  qu'un  jour, 
aux  Florales,  la  présence  de  Caton  gênait  fort  les 
jeunes  femmes,  qui  n'osaient  faire  glisser  leurs 
robes.  Galon  se  retira,  sur  l'avertissement  d'un  ami, 
et  le  peuple  battit  des  mains  pour  qu'elles  se  mon- 
trassent nues. 

Au  moyen  âge,  on  peut  dire  qu'il  n'y  avait  point  de 
fête  de  quelque  éclat  sans  que  l'un  et  l'autre  sexe 
dépouillassent  toute  parure.  En  l'an  i:tlci,  dans  les 
processions  qui  défilèrent  le  long  des  rues  de  la 
Cité,  au  moment  où  l'on  redoutait  la  famine,  tous 
les  liguranls,  sauf  les  femmes  mariées,  étaient  entiè- 
rement nus1.  «  Le  peuple  estoit  tellemenl  esehaurïé 
et  enragé  (s'il  faut  parler  ainsi)  après  ces  belles  dé- 
voilons processionnaires,  qu'ils  se  levoient  bien  sou- 
vent de  nuict  de  leurs  lits,  pour  aller  quérir  les 
curés  et  prostrés  de  leurs  paroisses  pour  les  mener 
en  procession;  comme  ils  lirenl  en  ces  jours  au  curé 
de  Saint-Eustache,  que  quelques-uns  de  ses  parois- 
siens furent  quérirla  nuit,  el  le  contraignirent  se  re- 
lever pour  les  y  mener  proumener,  auxquels  pensant 
en  faire  quelque  remonslraiice,  ils  l'appellerent  poli- 
tique et  hérétique,  et  fust  contraint  enfin  de  leur  en 
faire  passer  leur  envie.  El  à  la  vérité  ce  bon  curé, 
avec  deux  ou  trois  autres  de  la  ville  de  Paris  (et 
non  plus)  condamnoienl  ces  processions  nocturnes, 
pource  que  pour  en  parler  franchement,  tout  y  esloit 
de  quaresmeprenant,  et  que  hommes  el  femmes, 
filles  et  garsons  marchoient  pesle  mesle  ensemble 
tout  nuds  et  engendroient  des  fruits  autres  que  ceux 
pour  la  lin  desquels  elles  avoient  esté  instituées2.  » 

Jean  de  Troyes,  greffier  de  l'Hôtel  de  Ville,  nous 
apprend  dans  sa  chronique  qu'à  l'entrée  de  Louis  \1 
à  Paris,  à  la  fontaine  du  Ponceau,  trois  belles  filles 
toutes  nues  figuraient  en  manière  de  sirènes.  Il  en 
fut  de  même  à  Lille,  en  1468,  lors  de  l'entrée  de 
Charles  le  Téméraire;  on  y  représenta  le  .Ingénient 
de  Paris,  et  les  trois  déesses  se  montrèrent  sans 
»oile. 

La  licence  du  langage  accompagnant,  d'ordinaire, 
le  relâchement  de  la  tenue  el  des  mœurs,  on  com- 
prendra sans  doute  plus  aisément  les  hardiesses 
d'expression  de  nos  premiers  dramaturges. 

Comment  expliquer  que,  au  xe  siècle,  dans  un 
couvent  de  Saie,  le  couvent  de  Candersheim,  une  re- 
ligieuse, du  nom  de  Hrotswita,  ait  pu  faire  jouer  de 
véritables  pièces,  dont  le  sujet  était,  pour  presque 
toutes,  il  est  vrai,  tiré  des  légendes  pieuses,  mais 
dont  les  situations,  très  adroitement  conduites,  s'ins- 
■piraienl  cerlainement  des  auteurs  antiques?  Com- 
ment expliquer  celle  résurrection  spontanée  de  l'art 
du  théâtre  au  milieu  de  l'ignorance  de  ce  temps,  et 
cette  tentative  isolée  de  rénovation  scénique'.' 

Hrotswita  fit  jouer  par  les  nonnes  de  liandersheim 
des  drames  d'amour  extrêmement  hardis.  Callimwjue, 
l'.iphniue  et  Thaif.  sont  l'œuvre  d'une  conception 
dont  l'habileté  est  réellement  déconoertanle.  Mélanl 
la  naïveté  d>une  foi  touchante  au  probable  désir 
d'édifier  les  novices  sur  les  erreurs  de  ce  monde, 
Hrotswita  multiplia  les  scènes  les  plus  scabreuses; 


îba   même  fli 


Iml- 


II  est  curieux  de  remarquer  qu'elle  usa  souvent  de 
la  personnification  d'êtres  allégoriques  portant  les 
noms  de  Sapience,  Foi,  Charité,  etc.,  —  procédé 
dont,  trois  siècles  plus  tard,  devaient  se  servir 
Guillaume  de  Lorris  dans  son  Roman  de  la  dos*,  et 
les  Enfans  sans  Souci  sur  leurs  tréteaux. 


DE   1402   A   1548 

Les  prédicateurs  du  moyen  âge,  connaissant  ce 
besoin  inné  chez  les  foules  de  toujours  esquisser  une 
forme  à  l'idée  et  de  préciser  leur  rêve  au  milieu  des 
élans  les  plus  hardis  de  l'imagination,  avaient  pris 
coutume  de  raconter,  comme  s'ils  en  avaient  été  les 
témoins,  l'histoire  de  Jésus-Christ  et  le  drame  de  la 
Passion,  inventant  des  détails  grâce  auxquels  leur 
éloquence,  jointe  à  la  bonhomie  de  leur  récit,  trou- 
vait le  moyen  d'arracher  des  larmes. 

Citons  seulement  ce  passage  tiré  des  sermonnaires 
du  franciscain  Michel  Ménot,  où  il  peint  la  douleur 
de  la  Vierge  après  le  Colgotha  : 

«  Monsieur  Sainct  Jehan  va  mesner  la  benoiste 
dame  en  la  maison  de  sa  mère  pour  ce  qu'il  esloit 
lard.  Et  là  eussiez  veu  les  gens  par  troppeaulx  parmy 
les  rues  de  Hierusalem,  devisans  de  ceste  aTaire.  Et 
en  voyant  passer  la  bonne  dame,  ils  disoient  :  Hélas! 
vêla  la  mère  de  ce  povre  exécuté.  Ron  soir,  Madame. 
Aulcunes  femmes  pleines  de  compassion  la  con- 
diment jusques  à  son  logis  en  plouront.  Quand  la 
bonne  dame  parvint  à  l'huys  de  son  logis,  se  va 
retourner  vers  la  compaignie,  en  leur  donnant  grâces 
et  le  bon  soir::.  u 

De  cette  intimité  du  récit  au  dialogue,  le  chemin 
n'était  pas  long  et  fut  bientôt  franchi. 

Pour  les  spectacles  dont  nous  avons  parlé  plus 
haut,  qui  se  donnaient  en  de  rares  occasions  dans 
les  monastères  et  dans  les  collèges,  on  se  servait 
toujours  de  la  langue  laline.  Il  n'y  avait  pas  encore, 
à  la  fin  du  xive siècle,  de  théâtre  à  proprement  parler, 
c'est-à-dire  d'édifice  spécialement  destiné  à  des 
actions  dramatiques,  à  des  représentations  popu- 
laires et  suivies,  en  langue  française.  C'est  aux  Con- 
frères de  la  Passion  que  revient  l'honneur  de  l'avoii 
créé. 

Los  Confrères  de  la  Passiou. 

Vers  l'an  1398,  quelques  bourgeois  de  Paris. 
afin  d'y  consacrer  leurs  loisirs,  établirent  un  théâtre 
à  Saint-Maur-des-Fossés  et  voulurent  représenter 
le  drame  de  la  Passion. 

Un  tel  spectacle  n'offrait  rien  de  nouveau,  et  l'on 
conçoit  mal  l'émotion  qu'il  causa  an  prévôt  de  Paris. 
Ce  magistrat  crut  devoir  rendre,  le  3  juin  1398,  une 
ordonnance  aux  ternies  de  laquelle  il  défendait  à 
quiconque  soumis  à  sa  juridiction  «  de  représenter 
jeux  de  personnaiges,  soit  de  vie  de  saincts  ou 
aultrement,  sans  le  congié  du  Roy,  sous  peine  d'en- 
courir son  indignation  et  de   forfaire  envers  luy  ». 

Lesdits  bourgeois,  pour  mieux  affirmer  la  réso- 
lution de  leur  entreprise,  formèrent  entre  eux  une 
association  et  s'intitulèrent  «  Confrères  de  la  Pas- 
sion de  Notre-Seigneur  ».  Puis  ils  s'adressèrent  au 
roi  pour  requérir  son  autorisation. 


t.  MirM  Hémft,  Ptissit 
Cité  par  Gérusez. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3751 


Charles  VI,  de  sa  nalure  grand  amateur  de  fêtes 
et  de  spectacles,  cherchant,  de  plus,  en  toute  occa- 
sion, l'oubli  de  son  mal,  sentit  sa  curiosité  s'éveiller 
au  souvenir  des  quelques  mystères  déjà  représentés 
devant  lui  par  des  ecclésiastiques  et  des  clercs.  Il 
voulut  que  les  Confrères  bourgeois  fissent  en  sa  pré- 
sence montre  de  leurs  talents.  11  en  lui,  à  la  suite, 
si  enthousiaste,  qu'il  leur  signa,  le  ï  décembre  1 102, 
les  lettres  patentes  que  voici  : 

«  Charles  par  la  grâce  de  Dieu  Roy  de  France,  sça- 
voir  faisons,  à  tous  presens  et  avenir. 

«  Nous  avons  reçu  l'humble  supplication  de  nos 
bien-amez  les  Maistres,  Gouverneurs  et  Confrères  de 
la  Confrérie  de  la  Passion  et  Résurrection  de  Nostre- 
Seîgneur,  fondée  en  l'Eglise  de  la  Trinité  à  Paris  : 
contenant  que  comme  pour  le  fait  d'aucuns  Mys- 
tère de Saincts,  de  Sainctes  et  mesmement  du  Mystère 
de  la  Passion,  qu'ils  ont  commencé  dernièrement,  et 
sont  prests  de  faire  encore  devant  Nous,  comme 
autrefois  avoient  fait,  et  lesquelz  ils  n'ont  pu  bonne- 
ment continuer,  parce  que  Nous  n'y  avons  pas  pu 
estre  lors  presens,  on  quel  fait  et  Mystère  ladite 
Confrairie  a  moult  frayé  et  dépensé  du  sien,  et  aussi 
ont  l'ail  les  Confrères  chacun  d'eux  proportionnable- 
ment  ;  disant  en  outre  que  s'ils  joùoient  publiquement 
et  en  commun,  que  ce  seroit  le  proufit  de  ladite  Con- 
frairie; ce  que  faire  ils  ne  pouvoient  bonnement  sans 
noslre  congié  et  licence;  requerans  sur  ce  nostre 
gracieuse  Provision  :  Nous  qui- voulons  et  desirons 
le  bien,  proufit  et  utilité  de  ladite  Confrairie,  et  les 
droits  et  revenus  d'icelle  estre  par  Nous  accrus  et 
augmentez  de  grâce  et  privilèges,  afin  qu'un  chacun 
par  dévotion  se  puisse  adjoindre  et  mettre  en  leur 
compagnie;  à  ieeux  Maistres,  Gouverneurs  et  Con- 
frères d'icelle  Confrairie  de  la  Passion  de  Notredit- 
Seigneur,  avons  donné  et  octroyé  de  grâce  spéciale, 
pleine  puissance  et  autorité  Royale,  celte  fois 
pour  toutes,  et  à  toujours  perpétuellement,  par  la 
teneur  de  ces  présentes  Lettres,  'autorité,  congié  et 
licence  de  faire  jouer  quelque  Mystère  que  ce  soit, 
soit  de  la  Passion  et  Résurrection,  ou  autre  quelcon- 
que, tant  de  Saincts  comme  de  Sainctes  qu'ils  vou- 
dront élire  et  mettre  sus  toutes  etquantes  fois  qu'il 
leur  plaira,  soit  devant  Nous,  nostre  commun  ou 
ailleurs,  tant  en  recors  qu'autrement,  et  d'eux  con- 
voquer, communiquer,  et  assembler  en  quelconque 
lieu  et  place  licite  à  ce  faire,  qu'ils  pourront  trou- 
ver en  nostre  Ville  de  Paris,  comme  en  la  Prevosté 
et  vicomte  ou  Banlieue  d'icelle,  presens  à  ce  trois, 
deux  ou  un  de  nos  Officiers  qu'ils  voudront  eslire, 
sans  pour  ce  commetlre  offense  aucune  envers  Nous 
et  Justice;  et  lesquels  Maistres,  Gouverneurs  et  Con- 
frères dessus  dits,  et  un  chacun  deux,  durant  les 
jours  esquels  ledit  Mystère  qu'ils  joueront  se  fera, 
soit  devant  Nous,  ou  ailleurs,  tant  en  recors  qu'autre- 
ment, ainsi  et  par  la  manière  que  dit  est,  puissent 
aller  et  venir,  passer  et  repasser  paisiblement,  ves- 
tus,  habillez  et  ordonnez  un  chacun  d'eux,  en  tel 
estât  ainsi  que  le  cas  désirera,  et  comme  il  appar- 
tiendra, selon  l'ordonnance  dudil  Mystère,  sans  dé- 
tourber  ou  empêcher  :  et  en  pleine  confirmation  et 
seureté,  Nous  iceux  Confrères,  Gouverneurs  et  Mais- 
tres, de  nostre  plus  abondante  grâce,  avons  mis  en 
nostre  protection  et  sauve-garde,  durant  le  recors 
d'iceux  jeux,  et  tant  comme  ils  joueront  seulement, 
sans  pour  ce  leur  méfaire,  ou  à  aucuns  d'eux  à  cette 
occasion,  ne  autrement. 

«  Si  donnons  en  mandement  au  Prévost  de  Paris  I 


et  à  tous  nos  autres  Justiciers  et  Officiers  presens  et 
à  venir,  ou  à  leurs  lieutenans,  et  à  chacun  d'eux,  si 
comme  à  luy  appartiendra,  que  lesdits  Maistres, 
Gouverneurs  et  Confrères,  et  à  chacun  d'eux  fassent, 
souffrent  et  laissent  jouir  pleinement  et  paisiblement 
de  nostre  présente  grâce,  congié,  licence,  don  et 
octroy  dessus  dits,  sans  les  molester,  ne  souffrir  et 
empêcher,  oies  el  pour  le  temps  à  venir;  et  pour 
que  ce  soit  chose  ferme  et  stable  à  toujours,  Nous 
avons  fait  mettre  noslre  scel  à  ces  Lettres,  sauf  en 
autres  choses  nostre  droit  et  l'autrui  en  toutes. 

«  Ce  fut  fait  et  donné  à  Paris  en  nostre  Ilostel  lès 
Saint  Pol,  etc.1. 

Les  bourgeois  tragédiens  s'établirent  à  Paris,  dans 
l'hôpital  de  la  Trinité,  où  ils  avaient  déjà  organisé 
le  service  de  leur  confrérie.  Ils  louèrent  aux  Prémon- 
Irés  la  grande  salle  de  cet  hôpital  -,  et  prirent  le  nom 
de  «  Maîtres  Gouverneurs  et  Confrères  de  la  Passion 
et  Résurrection  de  Notre-Seigneur  ».  Leur  entreprise 
eut  un  succès  énorme.  Comme  leurs  représentations 
avaient  lieu  tous  les  dimanches  et  les  jours  de  fêtes, 
de  une  heure  à  cinq  heures  après  midi,  les  curés 
avancèrent  les  vêpres  pour  permettre  à  leurs  parois- 
siens d'y  assister,  et  sans  doute  pour  en  avoir  eux- 
mêmes  la  liberté. 

Le  répertoire  des  Confrères  se  composait  d'abord 
de  la  trilogie  Passion,  puis  des  mystères  de  Saint- 
Martin,[de  Saint-Crépin,  de  Sainte-Barbe,  et  des  Actes 
des  \p "1res.  Ils  choisirent  même  leurs  sujets  dan; 
l'Ancien  Testament  et  dans  la  Bible. 

On  peut  caractériser  leur  tentative  en  disant  qu'ils 
mêlaient  la  dernière  grossièreté  aux  plus  émouvantes 
impressions.  A  côté  des  dialogues  les  plus  simples  et 
les  plus  touchants,  on  entendait  des  anges  interpel- 
ler Dieu  dans  le  langage  que  voici  : 

Père  éternel,  vous  avez  tort 
Et  devriez  avoir  i   i 

Votre  liU  bieii-aimé  est  mort, 

Et  vous  dormez  comme  un  ivrogne  ! 

Si  l'on  s'était  borné  àcela!...  — On  reste  confondu 
à  la  lecture  de  certaines  scènes  vraiment  scanda- 
leuses, el  l'on  en  conçoit  une  étrange  idée  de  l'esprit 
français  au  xve  siècle!  C'était  ce  qui  plaisait  alors, 
c'était  là  le  drame  de  l'époque,  et  le  drame  hiéra- 
tique ! 

De  telles  représentations  faisaient  véritablement 
fureur,  et  il  faut  avouer  que  les  Confrères  ne  négli- 
geaient rien  pour  retenir  le  public  devant  eux.  Dès 
l'obtention  de  leurs  lettres  patentes,  ils  essayèrent 
de  la  satire,  et  trouvèrent  dans  la  Bible  l'inspiration 
de  plus  d'un  trait.  La  foule,  voyant  Hérode  aban- 
donner sa  femme  pour  Hérodiade,  celle  de  son  frère, 
comprenait  l'allusion  aux  amours  du  duc  d'Orléans 
et  de  la  reine  Isabeau. 

Le  gouvernement  tolérait  ces  audaces. 

Quelquefois,  les  Confrères  donnaient  leurs  specta- 
cles hors  de  l'hôpital  de  la  Trinité.  En  li22,  le  roi 
et  la  reine  d'Angleterre  leur  firent  jouer  à  l'hôtel  de 
Nesle,  au  faubourg  Saint-Germain,  le  mystère  de  la 
Passion  de  Saint-Georges. 

Les  clercs  de  la  liazocke. 

Ils  eurent  bientôt  pour  rivale  la  Bazoche.  Les  clercs 

occupés  parles  procureurs  de  Paris  au  Parlement  et 


1.  Registrées  au  Cliàtelet,  vol.  -  île-  /îannirrrs,  fol.  77;  —  et  rap- 
portées dans  Delamare.  t.  I.  liv.  III,  tit.  III,  etarp.  ni. 

2.  Cette  salle  avait  il  toises  de  longmetir,  sur  6  toises  de  largeur. 


3752 


ENCYCLOPÉDIE  HE  LA   MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


au  Ghàtelet '  formaient  entre  eux  une  association, 
selon  le  mode  du  temps,  et  cette  associaiiou  avait  été 
légalement  reconnue  par  Philippe  le  Bel.  La  Ba/.oche 
avait  son  roi,  qui  portait,  sous  la  protection  des  or- 
donnances, une  toque  pareille  à  celle  du  roi  <ie  France. 
Elle  avait  aussi  sa  monnaie  et  ses  armes  :  trois 
escriptoyres  d'or  en  champ  d'azur!  Et  son  organisa- 
tion comprenait  un  grand  nombre  de  magistratures  : 
elle  avait  un  chancelier,  des  maîtres  des  requêtes, 
un  avocat,  un  procureur  général,  un  grand  référen- 
daire, un  rapporteur  en  chancellerie,  un  grand  au- 
diencier,  etc. 

Les  clercs  célébraient,  à  de  certains  jours,  des  fêles 
magnifiques.  La  fortune  des  Confrères  excita  leur 
émulation,  et  ils  voulurent  donner,  eux  aussi,  des 
spectacles.  Comme  ils  ne  pouvaient,  en  raison  du 
privilège  des  Confrères,  empiéter  sur  leur  répertoire, 
ils  imaginèrent  un  genre  nouveau  et  jouèrent  des 
farces  et  moralités.  Il  les  jouaient  au  Parlement,  dans 
la  grande  salle,  qui  s'appelait  alors  salle  des  Pro- 
cureurs, couverte  seulement  en  charpente,  mais 
ornée  des  effigies  des  rois  de  France,  et  à  l'une  des 
extrémités  de  laquelle  se  dressait  la  légendaire  Table 
de  Marbre2. 

Celle  table  leur  servait  de  scène. 

Les  clercs  du  Chàtelet  dressaient  un  échafaud  sur 
la  place  qui  s'étendait  au-devant  du  monument. 

Les  pièces  de  la  Bazoche  avaient  pour  objet  la  déri- 
sion de  toutes  choses.  Le  roi,  la  cour,  l'église,  la  jus- 
tice, la  noblesse,  l'armée,  rien  n'échappait  à  la  verve 
des  clercs.  Et  l'on  ne  comprend  que  trop  aisément 
les  difficultés  auxquelles  ils  se  trouvèrent  en  butte  de 
tous  côtés. 

Le  Parlement,  dans  les  attributions  duquel  rentrait 
la  police  générale  du  royaume,  leur  défendit  d'abord 
de  jouer  sans  une  autorisation  expresse.  Et,  en  1422, 
des  clercs  qui  avaient  enfreint  le  règlement  furent 
emprisonnés. 

Louis  XI  pensa  qu'en  accordant  sa  protection  aux 
clercs  de  la  Bazoche  il  tournerait  leurs  armes  contre 
ses  propres  ennemis,  ce  qui  vaudrait  mieux  que  de 
les  leur  arracher.  Le  calcul  fut  heureux.  Le  prévôt 
ne  refusa  pas  sa  bonne  grâce  aux  protégés  du  roi,  et 
la  Bazoche  reçut  des  subventions!  En  1475,  le  prévôt 
lui  donnait  10  livres  parisis  pour  concourir  aux  frais 
d'une  représentation. 

Mais,  une  fois  Louis  XI  retiré  à  Plessis-les-Tours, 
le  Parlement  ne  garda  plus  aucuns  ménagements. 
Un  arrêt  du  15  mai  1  470  défend  «  à  tous  clercs  et 
serviteurs,  tant  du  Palais  que  du  Chastelet  de  Paris, 
de  quelque  estât  qu'ils  soient,  de  doresnavant  jouer 
publiequementaudiel  Palais,  ou  Chastelet,  ni  ailleurs 
en  lieux  publics,  farces,  sotties,  moralités,  ni  aultres 
jeux  à  convocation  de  peuple,  sous  peine  de  bannis- 
sement du  royaume  et  deconfiscation  deleurs  biens  ». 


ipalo    juridi. 


1.  La  juridiction  du  Cbàtelcl  61a 

la  juridiclinn  -lu  r n  huit  .pi.'  cutulr  de  Par 

lion  d'appel  du  Parlement  était  celle  du  roi  en  tant  que  souverain    I  .■ 
comte  de  t'aris,  plus  tard  devenu  duc  il--  France,  puis  no     I  légu 
l'exercice  .le  sa  juridiction  à  un  vicomte,  .pu  lut  Lient.  .1  app.l,  pi.-vût, 
et  garda  ce  litre  même  après  la  création  des  bailliages,  encore  qu'il 
fut  bailli  de  Paris. 

2.  Le  palais  de  la  Cité,  concurren ut  au  Louvre,  servit  de  rési- 
dence à  plusieurs  de  nus  rois.  C'est  dans  cette  grande  salle  qu'ils  re- 
cevaient l'hnuiuia-e  des  vassaux  de  la  couronne  et  les  amh  i.hideurs  ; 
et  c'est  sur  celte  table  de  marbre  (ju'on  servait  les  festins  royaux. 

Le  palais  fut,  à  dater. lu  rèene  de  Cbarles  VII,  complètement  aban- 
donné au  Parlement.  Il  lut,  d'ailleurs,  incendié  en  1618,  et  la  grande 
salle  entièrement  consumée. 

3.  On  voyait  fonctionner  à  Paris,  à  côté  de  la  juridiction  du  Tarie. 
ment  et  de  celle  .lu  IMi.itelel  ,1..  juridiction  do  corps  ni  un  i.-i  ...il .  issu 


Il  va  jusqu'à  leur  interdire  de  solliciter  du  roi  son 
autorisation. 

L'année  suivante,  les  Bazochiens,  espérant  sans 
doute  que  le  Parlement,  pour  avoir  rendu  tant  d'ar- 
rêts dans  l'intervalle,  avait  mis  en  oubli  celui  qui  les 
menaçait,  s'apprêtèrent  à  faire  une  rentrée  solen- 
nelle. Le  Parlement  leur  prouva  qu'ils  s'abusaient. 
Le  19  juillet,  il  leur  interdit  toute  représentation 
«  jusqu'à  ce  que  par  ladicte  Cour  en  soit  ordonné, 
sous  peine,  par  les  contrevenants,  d'être  battus  de 
verges  parles  carrefours  de  Paris,  et  bannis  du 
royaume  ».  Cette  perspective  terrorisa  les  organisa- 
teurs de  la  fête. 

Sous  le  règne  de  Charles  VIII,  la  Bazoche  recom- 
mença ses  exploits.  Le  l"  mai  1486,  les  acteurs 
émaillerent  leur  dialogue  de  traits  assez  piquants  à 
l'enconlre  du  roi  et  de  son  gouvernement.  Par  lettres 
patentes  du  8  mai,  Charles  VIII  ordonna  l'emprison- 
nement de  cinq  d'entre  eux.  Mais  ils  furent  immé- 
diatement réclamés  par  l'évêque  de  Paris,  lequel 
prétendit  à  juste  titre  que  les  coupables,  en  leur 
qualité  de  clercs,  devaient  être  traduits  devant  sa 
juridiction3.  Ils  furent  relâchés. 

Sous  Louis  XII,  la  Bazoche  bénéficia  d'une  liberté 
presque  sans  réserve.  Une  seule  fois,  le  roi  manifesta 
sa  colère.  Ce  fut  à  la  suite  d'une  entrée  solennelle 
d'Anne  de  Bretagne  à  Pari-;,  en  1504.  Elle  avait 
assisté  à  une  représentation  de  la  Bazoche  et  y  avait 
entendu  conter  V histoire  d'un  maréchal  ijui  avoit 
voulu  ferrer  un  due,  cl  en  avoit  reçu  un  si  grand  coup 
de  pied  qu'il  s'vtoit  vu  jeter  hors  de  la  cour. 

Trop  directe  était  l'allusion  à  son  ennemi  Pierre 
Rohan,  maréchal  de  Gié,  alors  en  prison.  Le  roi  lit 
fouetter  quelques  acteurs,  mais  ne  montra,  par  la 
suite,  aucune  sévérité. 

«  Lui  estant  rapporté  un  jour,  dit  Brantôme'',  que 
les  clercs  de  la  Bazoche  du  Palais  et  les  écoliers  aussi 
avoient  joué  des  jeux  où  ils  parloient  du  roi  et  de  sa 
Cour  et  de  tous  les  grands,  il  n'en  fit  autre  semblant, 
sinon  de  dire  qu'il  falloit  qu'ils  passassent  leur  rire, 
et  qu'il  permettoit  qu'ils  parlassent  de  lui  et  de  sa 
Cour,  mais  non  pourtant  dérèglement,  et  surtout 
qu'ils  ne  parlassent  de  la  reine  sa  femme,  en  façon 
quelconque,  autrement  qu'il  les  feroit  tous  pendre.  » 

Les  clercs,  si  malicieux  fussent-ils,  ne  trouvèrent 
à  railler  que  l'avarice  légendaire  de  ce  roi  père  du 
peuple.  Pour  si  peu,  ils  ne  furent  point  inquiétés. 

Les  Enfants  sans  Son 

Une  autre  association  ég 
ce  vivant  xv"  siècle  :  les  Enfar 

C'étaient  des  jeunes  gens, 
la  plupart,  et  qui  menaient  la    vie  joyeuse.  — Le 
royaume  de  la  Sottise,  qui  avail  puni    étendue  l'u- 
nivers, était  soi-disant  gouverné  par  le  chef  de  cette 


igaya  aussi  de  ses  saillies 

nfans-sans-Souci. 

sns,  de  bonne  famille  poui 


tribunaux. 

La  juridiction  eo  clesia  s  ti,|  no    lait  ti    >  ■  u  i.i.rin  m  ni.i.o    .    .■   .  .  : ■ 

des  garanties  de  bonne  justice  qu  elle  ..lirait.  Les  jupes  étaient  plus 
instruits,  la  procédure  était  pin.  r.. In. miellé.  Le.  jusl ieiables  devin- 
rent très  nombreux,  car  d  sut  lis  ul  ,1','tre  clerc  ;  or,  pour  être  clerc,  il 
n'était  aucune. ncu  néi  --..'.  (Tel  e  ord •  ;  il  sufli-ait  île  1.-  deman- 
der el  d'être  tonsuré,  lut-on  m  .1  lé 

h.   nrant,',,,,,.,  //,,,-„„>■,  |..,  A  „,„■  ,1,    I:  ■  •.. 


TECIIMol'E,  ESTHÉTIQUE  ET  PÈDAGOC.IE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    375'. 


bande  des  Knfants-sans-Souci,  lequel  prenait  le 
titre  de  Prince  des  Sots.  C'est  lui  qui  présidait  aux 
représentations  des  soties. 

Dès  le  règne  de  Charles  VI,  elles  avaient  lieu  aux 
Halles;  comme  elles  atteignaient  la  dernière  liberté 
de  langage  et  la  plus  étourdissante  fantaisie,  la  vo- 
gue eu  fut  considérable. 

Les  Enfants-sans-Souci  fraternisèrent  cordialement 
avec  les  clercs  de  la  Bazoche  et  partagèrent  leur 
sort,  en  tant  qu'ils  furent  applaudis  par  la  foule  et 
tourmentés  par  la  justice.  Les  soties  n'étaient  pres- 
que jamais  représentées  seules;  elles  étaient  géné- 
ralement jointes  à  une  farce  et  à  une  moralité,  avec 
un  cri  ou  prologue,  qui  les  précédait  toutes. 

Les  événements  de  l'époque  servirent  de  thème 
aux  boutades  de  cette  nouvelle  troupe.  Tantôt  Dame 
Pragmatique  disputait  contre  le  Légat;  tantôt  le  Peu- 
ple Italique  gémissait  sous  la  tyrannie  de  Mère  Sotte, 
figurant  en  robe  d'église. 

Les  personnages  étaient  ordinairement  allégo- 
riques, ce  qui  donnait  plus  d'aisance  à  la  conception 
des  pièces.  Ils  portaient  jusqu'aux  noms  de  Limon- 
de-la-Terre,  Sang-d'Abel,  Lasoif,  Lagoutte,  Espé- 
rance-de-longue-vie, Honle-de-dire-ses-péchés,  Pu- 
gnicion-divine,  etc. 

L'Eglise  surtout  était  en  butte  aux  plus  amères  plai- 
santeries. En  l'an  1511,  le  mardi  gras,  fut  jouée  une 
trilogie  du  poète  Gringoire,  Elle  comprenait  le  Jeu 
du  Prince  dés  Sols  et  Mère  Sotte,  suivi  de  la  moralité 
de  ['Homme  obstine',  qui  était  dirigée  contre  le  pape 
Jules  II,  et  d'une  farce  intitulée  Paire  et  Dire. 

Le  Saint-Père  s'écriait  : 

Vin  de  Candie  et  vin  ha*!ard 
Je  trouve  friand  et  gaillard 
A  mon  lever,  à  mon  coucher  ! 

Un  autre  spectacle  s'offrait,  dans  le  même  temps, 
aux  Parisiens; — spectacle  qui  nous  venait  de  l'Al- 
lemagne et  de  la  Suisse,  mais  qui  obtint  en  France 
beaucoup  moins  de  succès.  Nous  voulons  parler  de 
la  Danse  Macabre  ou  Danse  des  Morts. 

La  Mort,  qui  jouait  le  rôle  principal  et  apparais- 
sait en  squelette,  venait  surprendre  sur  la  scène, 
au  milieu  des  vanités  de  ce  monde,  princes,  prélats, 
bourgeois,  manants,  bien  obligés  de  lui  faire  cortège. 

C'était  d'une  philosophie  trop  sombre!  On  voyait 
cela,  dès  le  règne  de  Charles  VI,  vers  la  rue  de  la 
Charonnerie,  près  des  charniers  des  Innocents. 

A  la  Bazoche  et  aux  Enfants-sans-Souci,  venaient 
chaque  jour  s'adjoindre  de  nouvelles  troupes:  cel- 
les de  l'Empereur  de  Galilée1,  du  Roi  de  l'Epinette, 
du  Prince  des  Nouveaux  Mariés,  du  Recteur  des 
Fous,  de  l'Abbé  de  l'Escache,  du  Prince  de  l'Etrille, 
etc.  Et  leurs  pièces  burlesques,  d'instinct,  paro- 
diant la  vie  contemporaine,  se  modelaient  sur  la 
comédie  athénienne  et  les  Alellanes  romaines. 

Le  goût  du  théâtre  s'étendait  de  jour  en  jour,  et 
les  écoliers  eux-mêmes  donnaient  fréquemment. 
dans  leurs  collèges,  des  pièces  imitées  des  inventions 
de  leurs  aines.  —  «  D'ancienneté,  dit  Guy  Coquille2, 
pour  l'exercice  de  la  jeunesse  étoit  en  usage  dans 
les  collèges,  qu'en  certaines  saisons  de  l'année  les 
régents  faisoient  représenter  comédies  et  dialogues 
en  latin  par  leurs  écoliers...  Aucuns  régents  ont 
introduit,  aux   collèges,  et  comédies  et  farces   en 


i.   Le  h:. ut  et  souier.iin  empire  de  Clalilée  avai 
association  des  clerrs  de  la  Chambre  des  Compte 


françois.  »  Ainsi  l'on  se  préparait  à  l'accès  des  confré 
ries  qui  guettaient  l'adolescence,  et  l'on  se  familia- 
risait peu  à  peu  avec  leur  témérité. 

Les  interdictions  <lu  Parlement. 

Mais  Louis  XII  emporta  avec  lui  la  liberté  de  ses 
sujets.  Dès  sa  mort,  survenue  le  1er  janvier  1515,  le 
Parlement  saisit  le  prétexte  de  son  deuil  pour  inter- 
dire les  jeux  que  préparait  la  Bazoche  en  vue  de  la 
fête  des  Rois.  Puis,  le  2  janvier  1510,  il  fit  «  défense 
aux  bazoehiens  et  aux  écoliers  des  collèges  de  jouer 
farces  ou  comédies  dans  lesquelles  il  seroit  mention 
de  princes  et  princesses  de  la  Cour  ». 

Et  un  arrêt  du  5  janvier  leur  recommanda  expres- 
sément «  de  ne  jouer  aucunes  farces,  solyesou  aul- 
tresjeux  contre  l'onneur  du  roy,  de  la  royne,  de 
Madame  la  duchesse  d'Angoulesme,  mère  dudicl 
seigneur,  des  seigneurs  du  Sang,  ne  aultres  person- 
nages estans  autour  de  la  personne  dudict  seigneur, 
sur  peine  de  punicion  contre  ceux  qui  feront  le  con- 
traire, telle  que  la  Cour  verra  estre  à  faite  ». 

Ces  dispositions  furent  longtemps  observées.  Mais 
on  se  lasse  de  l'obéissance,  si  ce  n'est  qu'on  oublie 
la  loi.  En  1533,  au  collège  de  Navarre,  les  écoliers 
représentèrent  une  pièce  dans  laquelle  figurait  Mar- 
guerite de  Valois,  sous  les  traits  d'une  Furie!  Le  roi 
fit,  sans  autre  forme  de  procès,  emprisonner  au- 
teurs et  acteurs. 

Il  parait  que  les  clercs  de  la  Bazoche  cherchèrent, 
par  des  moyens  détournés,  à  dépenser  leur  verve 
tout  en  se  maintenant  à  l'abri  d'un  pareil  sort,  car 
un  arrêt  du  20  mai  1536  déclare  que:  «  Ce  jour,  la 
Cour  a  mandé  les  chanceliers  et  receveurs  ;  et  le 
chancelier  avec  un  desdicts  receveurs  venus,  leur  a 
fait  défenses  de  ne  jouer,  à  la  montre  de  la  Bazoche, 
aucuns  jeux,  ne  faire  monstration  de  spectacles,  ne 
escriteaux  taxans  ou  notans  quelques  personnes  que 
ce  soit,  sous  peine  de  s'en  prendre  à  eux,  et  de  pri- 
son et  bannissement  perpétuellement  ;  et,  s'il  y  a 
quelques-uns  qui  s'ellorcent  de  faire  le  contraire, 
les  escrivent  et  baillent  par  escrit  leurs  noms  à  la- 
dite Cour,  pour  en  faire  les  punitions  telles  qu'il 
appartiendra3.  » 

Le  Parlement  alla  plus  loin  encore.  Pour  s'as- 
surer qu'on  ne  pût,  en  aucune  façon,  enfreindre  la 
règle  tracée,  il  ordonna,  le  mercredi  23 janvier  1538, 
que  toutes  pièces  fussent,  au  moins  quinze  jours  avant 
chaque  représentation,  soumises  à  son  examen: 

c<  Après  avoir  vu  par  la  Cour  le  jeu  présenté  à 
icelle  par  les  receveurs  de  la  Bazoche  pour  jouer 
jeudi  prochain,  ladite  Cour  a  permis  auxdits  rece- 
veurs icelui  jeu  faire  jouer  à  la  manière  accou- 
tumée, ainsi  qu'il  est  à  présent,  hormis  les  choses 
rayées;  leur  a  fait  défenses,  sous  peine  de  prison  et 
de  punition  corporelle,  de  faire  jouer  autre  chose 
que  ce  qui  est,  hormis  lesdictes  choses  rayées;  et 
pour  l'advenir  à  ce  que  lesdicts  receveurs  ou  leurs 
successeurs  ne  se  mettent  en  frais  frustraloirement, 
ladicte  Cour  leur  a  inhibé  et  défendu  faire  laire  au- 
cun cry  ni  jeu,  que  premièrement  ils  n'aient  la  per- 
mission de  ce  faire  de  ladite  Cour,  et  à  cette  fin 
baillé  quinze  jours  auparavant  leurs  requêtes  en  ladite 
Cour4.  » 

La  censure  préalable  faisait  ainsi  sa  première  ap- 
parition. 


:-.-.-■ 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  CONSEItVATOIRE 


Le  7  mai  l.">40,  le  Parlement  renouvela  ces  dispo- 
sitions à  l'égard  des  clercs,  admettant  toutefois 
«  qu'ils  se  réjouissent  honnestement  et  sans  scan- 
dale ». 

Le  15  octobre,  mêmes  mesures  en  ce  qui  concerne 
les  Knfants-sans-Souci,  à  l'occasion  d'une  autori- 
sation qu'ils  venaient  de  requérir: 

«  ...Et  quant  a  la  Farce  et  Sermon,  attendu  la 
grande  difficulté  par  eux  alléguée  de  les  monstrer 
à  ladite  Cour',  ayant  égard  à  leurs  remonstrances, 
pour  cette  fois,  et  sans  tirer  à  conséquence,  ladite 
Cour  leur  a  permis  et  permet  de  jouer  ladite  Farce 
et  Sermon  sans  les  monstrer  à  ladite  Cour  ;  cepen- 
dant avec  défense  de  taxer  ou  scandaliser  particu- 
lièrement aucune  personne,  soit  par  noms  ou  sur- 
noms, ou  ciiconstance  d'estoc,  ou  lieu  particulier  de 
demourance  et  autres  notables  circonstances  parlés- 
quelles  on  peut  désigner  ou  connoitre  les  personnes.  » 

Le  Parlement,  dont  la  sévérité  croissait  sous  le 
règne  du  bon  plaisir,  allait  bientôt  porter  l'inter- 
diction jusque  dans  le  répertoire  des  Confrères. 

Par  des  lettres  patentes  de  janvier  1518,  enregis- 
trées au  Chàtelet  le  1er  mars,  François  1er  avait  con- 
tinué leur  privilège.  En  1540,  ils  quittèrent  la  salle 
qu'ils  occupaient  dans  l'hôpital  de  la  Trinité.  <•  La 
maison  de  la  Trinité,  dit  Delamare,  fut  de  nouveau 
destinée  à  un  hôpital,  suivant  l'esprit  de  sa  fonda- 
tion ;  le  Parlement,  par  un  arrêt  du  30  juillet  1547, 
ordonna  que  les  pauvres  enfans  qui  auroient  père 
et  mère  y  seroient  charitablement  reçus,  nourris  et 
instruits  dans  la  religion  et  dans  les  arts;  de  même 
que  les  orphelins  l'étoient  en  l'hôpital  du  Saint- 
Esprit2.  » 

Les  Confrères  louèrent  alors  une  partie  de  l'hô- 
tel de  Flandre,  situé  entre  les  rues  de  la  Plastrrère, 
Coq-Héron,  des  Vieux-Auguslins  et  Coquillière.  Et, 
en  décembre  1541,  ils  sollicitèrent  l'autorisation  de 
représenter,  selon  l'usage,  un  mystère  pour  la 
fête  des  Rois. 

Le  procureur  général  an  Parlement  plaida  dure- 
ment contre  la  requête  qu'ils  présentaient,  flétrissant 
de  son  indignation  «  ces  gens  nonletlrez  ni  enlenduz 
en  telles  atfaires,  de  condition  infime,  comme  un 
menuisier,  un  sergent  à  verge,  un  tapissier,  un  ven- 
deur de  poisson,  qui  ont  fait  jouer  les  Actes  des 
Apôtres,  et,  entremettant  à  la  fin  ou  au  commence- 
ment, du  jeu  farces  lascives  et  momeries,  ont  fait 
durer  leur  jeu  l'espace  de  six  à  sept  mois;  d'où  sont 
advenus  et  adviennent  cessation  de  service  divin, 
refroidissement  de  charitez  et  d'aumosnes,  adul- 
tères et  fornications  infinies,  schandales,  dérisions 
et  mocqueries...  » 

Il  ajoutait  que  «  le  plus  souvent  les  prêtres  des 
paroisses,  pour  avoir  leur  passe  temps  d'aller  esdietz 
jeux,  ont  délaissé  dire  vespres  les  jours  de  testes,  ou 
les  ont  dietz  tout  seuls  dès  l'heure  de  midy,  heure 
non  accoustumée;  et  même  les  chantres  ou  chape- 
lains de  la  Sainte-Chapelle  de  ce  Palais,  tant  que 
lesdietz  jeux  ont  duré,  ont  dit  vespres  les  jours  de 
fesles  à  l'heure  de  midy,  et  encore  les  disoyent  en 
poste  et  à  la  légère  pour  aller  esdietz  jeux  ». 

Le  Parlement,  impressionné  par  de  si  graves  dé- 
sordres, tint  compte  des  remontrances  qu'ils  suggé- 
raient à  cet  austère  magistrat.  Voici  ce  que  porte 
l'arrêt  du  12  décembre  1541,  sur  lequel  nous  aurons 
plus  tard  l'occasion  de  revenir  : 


ci  Kt  quant  à  la  seconde  requeste  dudit  procureur 
général  tendant  à  ce  que  défenses  fussent  laides  aux 
nouveaulx  maistres  entrepreneurs  du  mystère  de 
l'Ancien  Testament,  ladite  court  a  faict  et  faict  inhi- 
bicions  et  défenses  auxdits  nouveaulx  niaislres  de 
procéder  à  l'exercice  de  leur  entreprise  jusqu'à  ce 
qu'elle  ayt  sur  ce  le  bon  plaisir  et  vouloir  du  roy, 
pour  icelluy  ou  leur  faire  telle  permission  qu'il  plaira 
audit  seigneur  ordonner.  ■ 
Le  roi  leva  l'interdiction. 

Ces  mystères,  qui  provoquaient  à  Paris  tant  d'en- 
thousiasme, avaient  aussi  gagné  la  province.  On  les 
représentait  dans  un  grand  nombre  de  villes  avec  un 
égal  succès. 

La  Chronique  de  Metz  mentionne  que  le  mystère 
de  la  Passion  y  fut  joué  en  1437.  n  Et  l'ut  ,Dieu  un 
sire  appelé  seigneur  Nicolle  Don  Neufchastel,  en 
Lorraine,  lequel  étoit  curé  de  Saincl-Victour  de  Metz, 
lequel  fut  presque  mort  en  la  croix,  s'il  n'avoit  esté 
secouru,  et  convient  que  un  autre  prestre  fut  mis  en 
la  croix  pour  parfaire  le  personnage  du  crucifiement 
pour  ce  jour;  et  le  lendemain,  ledit  curé  de  Saint- 
Vie  tour  parfit  la  résurrection  et  lit  très  haultement 
son  personnage  et  dura  ledit  jeu.  Et  un  autre  pres- 
tre, qui  s'appeloit  messire  Jean  de  Nieey,  qui  estoit 
chapelain  de  Métrange,  fut  Judas,  lequel  fut  presque 
mort  en  pendant,  car  le  cuer  luy  faillit,  et  lut  bien 
hastivement  despendu  et  porté  en  voye3...  » 

itutreinan,  prévôt  de  Valcuciennes,  raconte  que 
les  bourgeois  de  cette  ville,  en  1547,  y  donnèrent  le 
même  speclacle,  qui  dura  vingt-cinq  journées  et 
procura  une  recette  de  4.680  livres! 

Le  ligueur  Rubis  nous  apprend  également  qu'il 
existait  un  théâtre  à  Lyon,  en  1540.  <•  El  là,  par 
l'espace  de  trois  ou  quatre  ans,  les  jours  de  diman- 
che et  les  fêtes  après  diner,  furent  représentées  la 
plupart  des  histoires  du  Vieil  et  du  Nouveau  Testa- 
ment, avec  la  farce  au  bout  pour  récréer  les  assis- 
tants1. » 

Dès  l'année  1543,  François  1er  avait  ordonné  la 
démolition  de  quelques  hôtels,  dans  Paris,  parmi 
lesquels  celui  de  Flandres.  Henri  II  ayant  renouvelé 
cette  décision  par  lettres  patentes  du  20  septembre 
1547,  les  Confrères  se  trouvèrent  dans  l'obligation 
d'émigrer.  Estimant  qu'une  nouvelle  location  laisse- 
rait encore  peser  sur  eux  l'éventualité  d'un  déplace- 
ment coûteux,  ils  voulurent  cette  fois  se  rendre  pro- 
priétaires, et  achetèrent  une  partie  de  l'ancien  hôtel 
des  ducs  de  Bourgogne,  avec  issues  dans  la  rue  Neuve- 
Saint-François  et  dans  la  rue  Mauconseil  l'ai  con- 
trat passé  Te  30  avril  1548,  ils  s'engagèrent  à  fournir 
à  Jean  Rouvel,  leur  vendeur,  à  ses  héritiers  ou  ayants 
cause,  une  rente  de  225 livres  rachetable  moyennant 
une  somme  de  4.500  livres  en  quatre  payements 
égaux.  Ledit  Jean  Rouvel  stipula,  en  outre,  l'acquitte- 
ment par  eux  de  16  livres  de  cens  et  rentes  par  an. 
dont  il  était  débiteur  envers  le  roi,  plus  l'obligation 
de  lui  réserver  une  loge  sa  vie  durant. 

Le  bâtiment  où  les  Confrères  ouvrirent  leur  théâtre 
avait  une  étendue  de  17  toises  de  longueur  sur  16  de 
largeur.  La  façade  qui  se  dressait  sur  la  rue  Mau- 
conseil, où  était  percée  l'entrée  principale,  fut,  par 
leurs  soins,  ornée  d'un  écusson  que  soutenaient  deux 
anges.  L'écusson  présentait  une  croix,  avec  les  ins- 
truments de  la  Passion. 


S.  Histoire  <in  thiStrt  frci'h  an.  |iar  !.■-.   Iri-res  P.trUrit,  't.  'Il, 
i.   Histoire  véritable  île  In  ville  it  Lyon,  publiée  on  1604. 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PEDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNES    37S5 


Mystères,  jenx  el  solies. 

C'esl  au  xv«  siècle  que  le  théâtre  français  fut  en- 
tièrement formé  et  qu'il  trouva  le  chemin  de  la  tra- 
gédie et  de  la  comédie. 

Les  mystères,  qu'on  devrait  écrire  mistères,  étaient 
de  longues  histoires  faites  d'interminables  dialogues  : 
leurs  sujets  étaient  tirés  de  la  Bible ,  du  Nouveau  Tes- 
tament et  de  la  Légende  dorée.  Le  mistère  du  Vieux 
Testament  de  Simon  et  Arnoul  Gréban  n'a  pas  moins 
de  50.000  vers.  La  Passion  de  Gréban  et  la  Vie  de 
Monseigneur  saint  Didier  de  G.  Flamant  ne  sont  pas 
moins  longues.  Inlassablement,  ils  utilisaient  le  sens 
du  merveilleux,  les  changements  de  lieux  et  le  con- 
traste des  scènes  gaies  et  tristes.  Dans  ces  longs 
spectacles  qui  duraient  durant  des  jours,  on  inter- 
calait des  intermèdes,  des  récits  propres  à  égayer 
les  spectateurs,  on  résumait  au  début  de  chaque  ac- 
tion ce  qui  s'était  passé  et  ce  qui  allait  suivre,  sans 
chercher  à  intriguer  le  spectateur  par  des  situations 
imprévues.  On  usait  du  prologue  et  de  l'épilogue 
alin  de  tirer  une  moralité  de  la  pièce. 

Tous  ces  drames  étaient  bourrés  d'anachronismes. 
de  scènes  burlesques,  et  on  intercalait  souvent,  entre 
les  parties  du  mistère,  une  farce  comme  on  l'avait 
fait  en  Grèce  du  temps  où  le  drame  lyrique  se  jouait 
après  la  trilogie  tragique. 

La  plupart  des  mistères  sont  écrits  en  vers  de  huit 
pieds  avec  des  chutes  en  vers  de  quatre  syllabes,  avec 
des  triolets,  des  doubles  triolets  et  des  ballades. 

Eustache  Mercadé,  Jacques  Millet,  Arnoul  et  Simon 
Gréban,  Guillaume  Flamant,  Guillaume  le  Doyen, 
Gringore  sont  les  noms  des  auteurs  de  ces  mistères 
que  la  tradition  nous  a  transmis. 

Tout  n'était  pas  drame  dans  le  théâtre  du  moyen 
âge,  la  comédie  était  connue  au  xiv"  el  au  x\"  siècle  : 
le  Jeu  de  la  Feuillée  d'Adam  de  la  Halle,  dit  le  Bossu 
d'Arras,  te  Jeu  de  Robin  et  Marion,  ou  la  bergère  dé- 
daigne le  seigneur  pour  aimer  le  berger,  la  Dispute 
du  ribaud  et  de  la  ribattde  sont  parmi  les  plus  cé- 
lèbres. 

Au  xive  siècle,  ce  sont  les  Clercs  de  la  Basoche  qui 
mettent  en  vogue  les  Fatrulx  farcitm,  les  pièces  far- 
cies de  français  et  de  latin.  Ces  «  farces  »  visaient  les 
Tidicules  du  Palais  et  de  la  bourgeoisie.  Les  petites 
farces  s'appelaient  :  débats,  disputes,  monologues, 
sermons  joyeux  et  confessions.  Le  Cuvier,  le  Nouveau 
Marié,  les  Femme*  qui  veulent  refondre  leur*  maris, 
sont  autant  de  railleries  du  mariage.  La  Farce  du 
frire  GviUebert,  la  Farce  des  Unis,  la  Farce  du  par- 
Sonneur  se  moquent  des  gens  d'Eglise.  Le  Franc 
Archer  de  Bagnolet,  les  Trois  galants  el  Phi'lippot  ont 
trait  aux  gens  de  guerre. 

Guillaume  Coquillart,  en  1480,  écrit  le  Plaidoyer 
de  la  Simple  e)  de  la  Rusée,  et  un  auteur  inconnu, 
qu'on  a  supposé  être  Villon,  écrfl  /  \i  ocat  Puthelin  ;, 
la  même  époque. 

La  farce,  où  l'on  trouve  l'ébauche  de  Tartuffe  et 
de  Sganarelle,  vise  le  milieu,  les  corporations  ;  la 
sotie,  elle,  a  toujours  un  caractère  politique,  et  elle 
emprunte  à  la  comédie  italienne  les  personnages 
types  qui  réapparaissent  dans  chaque  œuvre  :  dans  le 
Jeu  et  sotie  du  Prince  des  Sors  de  Pierre 'Gringore,  écrit 
en  1511,  la  noblesse,  le  clergé,  le  tiers  état,  le  pape 
et  le  roi  sont  tour  à  tour  bafoués;  il  en  est  de  même 
pour  'la  Sotie  du  nouveau  monde  sur  la  Pragmatique. 

Enfin,  la  dernière  forme  que  prit  l'ait  dramatique 
fut  la  Moralité,  sorte  de  drame  bourgeois  et  allégo- 


rique. (In  y  trouve  la  Moralité  de  la  mire  et  de  la  fille. 
la  Moralité  d'un  empereur  el  de  son  neveu  :  ces  pièces 
ont  un  but  moralisateur  en  montrant  l'amour  filial 
ou  le  culte  de  l'honneur  sauvant  le  personnage  qui 
devait  être  pendu.  Science  et  Ancrgc  montrait  l'igno- 
rance couvrant  le  monde;  L'Homme  obstiné  repré- 
sentait le  pape  Jules  II;  Métier  el  Marchandise 
mettent  à  la  scène  les  doléances  des  bourgeois  de 
Paris. 


Il 


DE   1548   A   LOUIS  XIV 

Au  cours  de  ce  siècle,  le  théâtre  prit  une  direction 
nouvelle,  en  même  temps  que  la  poésie  évoluait  avee 
Ronsard  et  la  Pléiade  C'est  à  cette  époque  que  parut 
la  tragédie,  calquée  sur  la  tragédie  grecque  et  sur 
les  œuvres  de  Sénèque.  Le  premier  essai  de  tragédie 
est  celui  de  Théodore  de  Bèze,  l'  Vbraham  sacrifiant, 
joué  en  154-7.  Cinq  ans  plus  tard,  Jodelle  faisait 
jouer  Cléopâtre  et  Didon,  puis  La  Péruse  écrivait 
Mêd&e,  Jacques  Grévin  traduisait  en  français  Julius 
César  de  Muret,  Jean  de  la  Taille  donnent  les  Gabao- 
nites  et  Sa»/  furieux. 

M.  Faguet  considère  que  le  vrai  fondateur  de  la  tra- 
gédie française  est  Robert  Garnier  avec  Pori  ie,  Coi  >> 
lie,  Hippoiyte,  La  Troade,  Antigone  et  lira  lamanU  . 
et  après  lui,  il  place  Montchrétien  qui  écnvil   Sophi 
nisbe,  Le*  Lacènes,  Hector  el  L'Ecossaise,  qui  est  l'his- 
toire de  Marie  Stuarl. 

La  comédie  ne  se  modifia  point  de  la  même  façon, 
et  la  Trésorière  et  les  Esbahis  de  Jacques  Grévin,  Eu- 
gène- de  Jodelle  sont  des  farces.  Seul,  Baïf  chercha 
un  sujet  dans  Téreoce  pour  l'Eunuque. 

ApVès  ces  essais  de  retour  à  la  littérature  classique, 
le  théâtre  fut  partagé  entre  ces  traditions  et  les  ten- 
dances désordonnées  d'un  romantisme  libertaire.  En 
1608,  Jean  de  Schelandre  écrivait  à  la  manière  de 
Shakespeare  Tyr  et  Sydon  qui  durait  deux  journées, 
afin  de  protester  contre  la  règle  des  trois  unités. 
Hardy,  suivant  ces  idées  fantaisistes,  empruntait  à 
l'Espagne  d'innombrables  sujets  traités  rapidement 
et  sans  principes  rigoureux,  avec  une  désinvolture 
telle  qu'il  mêlait  les  scènes  tragiques  aux  épisodes 
grossiers  sans  se  préoccuper  de  la  composition  de 
la  pièce  ni  de  sa  correction.  Dans  la  centaine  de 
pièces  qu'il  fit,  on  peut  citer  Marianne,  jouée  en  1610, 
Didon,  Akesteel  la  Belle  Egyptienne. 

Théophile  de  Viau,  à  la  même  époque,  écrivait 
Pyrame  et  Thisbé.  dont  on  connaît  surtout  deux  vers  : 


Cette  célébrité  un  peu  ridicule  n'est  pas  entière- 
ment méritée  par  Théophile  de  Viau,  qui  sut  écrire 
des  vers  agréables,  bien  qu'ils  soient  toujours  em- 
preints d'un  romantisme  excessif.  IJT'rfé  faisait  alors 
représenter  Déjanire,  La  Calprenède  la  Mort  de 
Mithridate,  et  Bradamante,  tirée  de  l'Arioste,  en 
même  temps  que  Scudéry  produisait  avec  fécondité 
de  nombreuses  tragédies. 

Ce  n'est  qu'en  1630  qu'on  abandonna  la  fantaisie 
elles  désordres  de  l'imagination  pour  rentrer  dans 
la  règle  :  l'honneur  en  revient  à  Jean  de  Mairel,  qui, 
suivant  les  principes  tracés  par  Aristote  dans  sa  Poé- 
tique et  par  Horace,  écrivit  Sophonisbe  selon  les 
tègles.  Depuis  lors,  bien  qu'ils  soient  d'inspiration 
romantique,  Tristan  I'Hermite,  Tyran©  de  Rergerac 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQVE  BTDlCTlONNAtRH  DU  CONSERVATOIHE 


el  Motion  ne  tenteront  plus  d'échapper  à  la  disposi- 
tion et  aux  formes  d'un  art  enchaîné  dans  des  prin- 
cipes étroits. 

Les  Confrères  «le  la  Passion. 

Les  Confrères,  installés  dans  l'hôtel  des  ducs  de 
Rourgogne  en  IM8,  demandèrent  au  Parlement 
l'autorisation  de  continuer  leurs  spectacles.  C'est 
alors  que  fut  rendu  un  arrêt  dont  l'importance  est 
capitale  et  dont  voici  la  teneur  : 

«  Du  samedi  17  novembre  1548  :  Vu  par  la  Cour 
la  Requête  à  elle  présentée  de  la  part  des  Doyen, 
Maistres  et  Confrères  de  la  Confrérie  de  la  Passion 
et  Résurrection  de  Noire-Sauveur  J.-C,  fondée  en 
l'église  de  la  Trinité,  grande  rue  Sainl-Denis,  par 
laquelle,  attendu  que  par  temps  immémorial  et 
par  privilèges  octroyés  et  confirmés  par  les  Rois  de 
France,  il  leur  était  loisible  de  faire  jouer  et  repré- 
senter plusieurs  beaux  mystères  à  l'édification  et 
joie  du  commun  populaire,  sans  offense  générale  ni 
particulière,  dont  ils  avoient  ci-devant  joui  toujours  : 
ils  requéroient  d'autant  que  depuis  trois  ans  la  Salle 
de  la  Passion  avoit  été,  par  l'Ordonnance  de  ladite 
Cour,  prise,  occupée  et  employée  à  l'hébergement 
des  pauvres,  et  que  depuis  lesdits  Supplians  avoient 
recouvert  Salle  pour  y  cuiitinuer,  suivant  lesdits  pri- 
vilèges, la  représentation  desdits  mystères,  du  pro- 
fit desquels  étoit  entretenu  le  service  divin  dans  la 
Chapelle  de  ladite  Confrérie;  qu'il  leur  fût  permis 
faire  jouer  dans  ladite  Salle  nouvelle,  ainsi  qu'ils 
avoient  accoutumé  faire  dans  celle  de  la  Passion,  et 
défenses  fussent  faites  à  tous  dorénavant,  tant  en 
ladite  Ville  que  fauxbourg  et  banlieue  de  cette  Ville, 
sinon  que  ce  soit  sous  le  litre  de  ladite  Confrérie  et 
au  profit  d'icelle  : 

«  Sur  ce,  ouï  le  procureur  général  du  Roi  consen- 
tant, la  Cour  a  inhibé  et  défendu,  inhibe  et  défend 
auxdits  suppliants  de  jouer  le  mystère  de  la  Passion 
de  Notre  Seigneur,  ni  autre  mystère  sacré  sous  peine 
d'amende  arbitraire;  leur  permettant,  néanmoins, 
de  pouvoir  jouer  autres  mystères  profanes,  honnêtes 
et  licites  sans  offenser  ne  injurier  autres  personnes, 
et  défend  ladite  Cour  a  tous  autres  de  jouer  ou  de 
représenter  aucuns  jeux  ou  mystères  tant  en  la  ville, 
fauxbourgs  que  banlieue  de  Paris  sinon  sous  le 
nom  et  au  profit  de  ladite  Confrérie.  » 

Pour  justifier  un  tel  arrêt,  qui  opérait  une  véri- 
table révolution  dans  le  domaine  théâtral  de  l'é- 
poque, il  faut  se  rendre  compte  de  ce  qu'étaient  de- 
venues les  représentations  des  Confrères.  Tout  au 
début,  il  est  vrai,  des  scènes  grossières  s'élaienl 
trouvées  mêlées  au  drame  purement  religieux. 
Mais  ces  indécences,  qui  attiraient  le  gros  de  la 
foule,  avaient  perdu  peu  à  peu  leur  caractère  pri- 
mitivement accessoire,  pour  envahir  la  majeure 
partie  du  spectacle.  Les  ecclésiastiques,  avec  la  foi 
enthousiaste  de  jadis,  ne  montaient  plus  sur  les  tré- 
teaux. Les  Confrères  étaient  maintenant  des  indus- 
triels animés  par  l'appât  du  gain,  désireux  de  nuire 
à  la  concurrence  redoutable  que  leur  faisaient,  dans 
les  licences  de  la  Farce,  la  Bazoche  et  les  sociétés 
rivales. 

Emu  de  ces  faits,  le  Concile  de  Trente,  qui  venait 
de  se  réunir,  avait  défendu  de  prendre  dans  l'Ecri- 
ture des  sujets  d'amusement  public,  et  avait  enjoint 
aux  évêques  de  sévir  contre  ceux  qui  violeraient 
cette  interdiction. 

Le  Parlement  était  naturellement  tout  disposé  à 


apporter  sa  propre  sanction  aux  décrets  du  Concile. 
Déjà,  en  1541,  à  la  suite  du  réquisitoire  de  son  pro- 
cureur général,  il  s'était  opposé  aux  représentations 
de  l'Hôtel  de  Bourgogne,  «  sauf  le  bon  plaisir  du 
roy  ».  Celui-ci  aurait  pu,  dès  ce  moment,  anéantir 
l'etfet  de  l'ordonnance  de  1402,  et  briser  le  droit 
perpétuel  conféré  par  Charles  VI  aux  Confrères. 
Mais,  en  ces  temps  encore,  la  tradition  pesait  d'un 
poids  considérable  sur  les  résolutions  du  gouverne- 
ment. 

Le  progrès  du  grand  mouvement  littéraire  de  la 
Renaissance  permit  une  solution  qui  respectait  les 
droits  acquis  et  répondait,  en  même  temps,  au  vœu 
de  tous  les  gens  sensés.  Les  Confrères  conservèrent, 
à  l'exclusion  de  tous  autres,  le  privilège  de  jouer 
des  mystères,  mais  les  sujets  religieux  durent  êlre 
abandonnés;  il  fallut  jouer  les  œuvres  profanes  que 
les  lettrés  commençaient  à  composer  dans  le  goût  de 
la  tragédie  antique. 

On  trouvait  ainsi  un  accord  entre  la  volonlé  des 
pères  du  Concile  et  le  souci  manifesté  par  la  Cour 
de  sauvegarder  l'autorité  des  ordonnances  anciennes. 

Les  Confrères  dits  «  de  la  Passion  »  gardèrent  ce 
titre,  encore  bien  qu'ils  eussent  cessé  leurs  spec- 
lacles  hiératiques.  Diverses  lettres  patentes,  rendues 
par  la  suite,  les  désignent  ainsi,  comme  si  leur  scène 
ne  se  fût  point  transformée,  maintenant  expressé- 
ment leur  privilège. 

t  Amboiso,  mars  1559. 

»  François,  etc.  Nous  avons  reçu  l'humble  sup- 
plication nos  bien-amez  les  maistres  et  gouverneurs 
de  la  Confrairie  de  la  Passion  et  Résurrection  de 
Notre-Seigneur  J.-C,  fondée  eu  l'église  de  la  Trinité 
à  Paris,  contenant  que  par  [nos  prédécesseurs  roys 
leur  ont  été  donnez,  concédez  et  confirmez  plusieurs 
beaux  privilèges,  franchises,  libertés  et  exemptions; 
mesmement  feu  nostre  très  amé  cousin,  le  feu  roy 
Charles  VI,  en  l'an  1402,  leur  auroit  donné  à  tous- 
jours  par  privilège,  auctorilé  et  licence  de  faire  et 
jouer  quelque  mystère  que  ce  soit  de  la  passion  et 
résurrection  de  Noire-Seigneur,  ou  autres  quel- 
conques, tant  de  saiucls  comme  de  sainctes  que  ils 
voudront  eslire  et  mettre  sus,  toutes  et  qualités  l'ois 
qu'il  leur  plaira;  el  depuis  auroient  en  l'an  1354 esté 

confi s  par  feu  nostre  très  honoré  seigneur   el 

père  que  Dieu  absolve,  comme  plus  à  plain  appert 
par  la  copie  de  leurs  lettres  et  Chartres  dûment 
allouées  aux  originaux  cy-attachez  sous  le  conlrescel 
de  nostre  chancellerie,  lesquels  privilèges  de  tout 
lems  ils  ont  jouy  el  ils  jouyssent  et  usent  encore  de 
présent;  mais  ils  doubtent  que  s'ils  n'estoienl  par 
nous  confirmez  que  en  la  joyssance  d'iceulx  leur  fust 
au  temps  advenir  donné  empeschemenl,  requerans 
sur  ce  leur  pouvoir  de  nostre  grâce  el  de  remède 
convenable; 

«  Nous,  à  ces  causes,  voulons  iceulv  suppliants 
entretenir  et  garder  en  leurs  privilèges,  franchises 
et  lihertez;  el  iceulx  avons  de  nostre  grâce  spéciale, 
plaine  puissance  et  auctorilé  royale,  continué,  con- 
firmé et  ratifié,  et  par  la  teneur  de  ces  présentes, 
continuons,  confirmons,  ratifions  et  approuvons  tous 
et  chacun  les  privilèges,  libériez  el  exemptions  à 
eulx  donnez  et  octroiez  par  nos  prédécesseurs  roys 
ci-attachez,  comme  dict  est,  pour  par  lesdicls  sup- 
plians en  joyr  et  user  d'oresnavant,  ainsi  et  par  la 
forme  et  manière  qu'ils  en  onl  deument  et  juste- 
ment joy  et  usé  par  cy  devant,  joyssent  et  usent  de 
présent.  » 

ci  Si  donnons  en  mandement1,      etc. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS 


Charles  IX,  en  novembre  IjOU,  signa  de  nouvelles 
lettres  conçues  daus  les  mêmes  termes.  En  janvier 
1366,  il  avait  fait  abandon  à  lu  Confrérie  de  ses  droits 
seigneuriaux  exigibles  par  suite  de  l'acquisition  de 
l'hôtel  de  Bourgogne  : 

«  Charles,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roi  de  France,  à 
tous  présens  et  à  venir,  Salut  :  Savoir  faisons  nous 
avoir  reçu  l'humble  supplication  de  nos  chers  et 
bien  amés  les  Doyen,  Maîtres  el  Gouverneurs  de  la 
Confrérie  de  la  Passion  de  Noire-Seigneur,  conte- 
nant que  feu,  de  bonne  et  louable  mémoire,  le  Roy 
Charles  VI  notre  prédécesseur,  que  Dieu  absolve, 
pour  cerlaines  bonnes  causes  à  ce  le  mouvantes, 
créa  el  institua  dès  l'an  1402  ladite  confrérie,  à 
laquelle  il  donna  et  concéda  plusieurs  beaux  pri- 
vilèges, franchises  et  libertés  à  plein  contenus  el 
déclarés  dans  les  lettres  de  charte  de  notre  prédé- 
cesseur, qui  leur  auroient  successivement  par  nos 
prédécesseurs  Rois  été  duement  confirmés  et  conti- 
nués, même  par  le  feu  lloi  Henri,  notre  très-honoré 
père,  que  Dieu  absolve,  du  vivant  duquel,  et  dès  le 
30  août  1S48,  lesdits  Supplians  auroient,  pour  le 
bien  el  augmentation  d'icelle  Confrérie,  acquis  d'un 
nommé  Jean  Rouvet,  marchand,  demeurant  en 
notre  dite  ville  de  Paris,  une  belle  masure  et 
place  assise  en  icelle  ville  en  l'Hôtel  de  Bourgogne, 
contenant  dix-sept  toises  de  long  sur  seize  de  large, 
tenue  et  mouvante  de  nous,  à  la  charge  do  payer  par 
chacun  an  à  notre  recepte  ordinaire  la  somme  de 
16  livres  parisis  de  rente,  ainsi  qu'il  est  déclaré  par 
le  contrat,  pour  raison  de  laquelle  vente  et  acquisi- 
tion, et  des  lods  et  ventes  qui  nous  sont  dus  à  cause 
d'icelle,  notre  Substitut  de  notre  Procureur-Général 
de  la  Chambre  de  noire  Trésor  les  aurait  mis  en 
procès  en  ladite  Chambre...  Pour  ce  est-il  que  nous 
desirons  le  bien  et  augmentation  d'icelle  Confrérie, 
et  autres  bonnes  considérations  à  ce  nous  mou- 
vantes, avons  permis,  accordé  et  octroyé,  permet- 
tons, accordons  et  octroyons,  voulons  et  nous  plaît, 
de  grâce  spéciale,  pleine  puissance  et  autorité  royale, 
par  ces  présentes,  que  lesdicls  supplians  et  leurs 
successeurs,  Doyen,  Maîtres  et  Gouverneurs  de  ladite 
Confrérie  puissent  en  leur  loi  se  tenir  et  posséder 
perpétuellement  et  à  toujours  ladite  masure,  en- 
semble les  bâtiments  et  édifices  susdicts  jouir  et 
posséder  par  iceux  Supplians  et  leursdicts  succes- 
seurs, à  quelque  valeur  et  estimation  que  le  tout  se 
puisse  monter,  comme  choses  admorties  et  indem- 
nées,  lesquelles  nous  admortissons  et  indemnons 
dès-à-présent,  à  toujours,  et  icelles  dédions  à  ladite 
Confrérie;  et  laquelle  finance  et  indemnité  pour  le 
regard  d'icelui  admortissement,  ensemble  tous  et 
chacun  les  droits  de  relief,  lods  et  venles,  et  autres 
droits  seigneuriaux  qui  nous  peuvent  ou  pourroient 
être  dus,  tant  pour  raison  dudit  admortissement  que 
de  ladite  acquisition,  à  quelque  somme,  valeur  et 
estimation  que  le  tout  se  puisse  monter  et  revenir, 
nous  avons  auxdicts  supplians.  en  faveur  que  dessus, 
donné,  quitté,  remis,  donnons  et  quittons  par  ces 
présentes,  à  la  charge  de  nous  payer  la  susdite 
somme  de  16  liv.  parisis  de  cens  et  rente  seulement. 
Si  donnons  en  mandement,  etc. 

«  Donné  à  Moulins  au  mois  de  janvier  l'an  de 
grâce  mil  cinq  cent  soixante-six. 

«  Signé  :  Charles.  » 

Et  sur  le  repli  :  «  Par  le  Roi,  de  Laubespine2.  » 

1.  Isambert,  Recueil  .les  anciennes  luis  françaises,  I.  \IV.  p.  _"i. 
—  Oclamare  attribue  ces  lettres  patentes  à  Henri  II. 

2.  Des  Essarta,  Les  Tmis  Théâtres  ,le  paris,  v.  ■-'!,  note. 


Le  théâtre  entrait  donc  dans  une  voie  nouvelle. 
La  tragédie  allait  naître;  et,  à  côté  de  la  farce,  la 
raillerie,  changeant  de  ton,  moins  agressive  et  plus 
alerte,  allait  faire  éclore  la  comédie.  «  Trois  cents 
ans  de  plaisanterie  sur  le  pape,  les  mœurs  des 
moines,  la  gouvernanle  du  curé,  c'est  de  quoi  lasser 
à  la  fin...  On  discutait  sur  l'abus,  sur  le  principe 
jamais.  Telle  avait  été  la  France,  d'autant  moins 
révolutionnaire  qu'elle  était  badine  et  rieuse3.  » 

Jodelle  le  premier,  d'une  plainte  hardie, 
FrançoisomeiiL  chanta  la  grecque  tragédie. 

C'est  en  1552,  pendant  le  carnaval,  que  fut  jouée 
la  Cléopâtre  de  Jodelle,  ainsi  que  sa  comédie  la  Ren- 
contre. 

«  La  Rencontre  et  la  Cléopâtre,  dit  Pasquier,  furent 
représentées  devant  le  roy  Henri  à  Paris  en  l'hostel 
de  Reims,  avec  un  grand  applaudissement  de  toute 
la  compagnie  :  et  depuis  encore  au  collège  de  Bon- 
court,  où  toutes  les  fenestres  estoient  tapissées  d'une 
infinité  de  personnages  d'honneur,  et  la  Cour  si 
pleine  d'escoliers  que  les  portes  du  collège  en  regor- 
geoient.  Je  le  dis  comme  celui  qui  y  étois  présent, 
avec  le  grand  Tornebus  en  une  mesme  chambre.  Et 
les  entreparleurs  estoient  tous  hommes  de  nom  : 
Car  mesme  Remy  Belleau,  et  Jean  de  la  Péruse, 
joiioient  les  principaux  roullets4.  » 

Cette  représentation  solennelle  fui  l'événemein 
théâtral  du  siècle.  On  se  souvient  de  l'enthousiasme 
de  la  Pléiade  à  la  journée  d'Arcueil! 

Tandis  que  les  poètes  de  cette  Pléiade  cherchaien! 
uniquement  à  ressusciter  l'antiquité  littéraire, 
d'autres  puisaient  aux  sources  fécondes  des  romans 
de  chevalerie.  En  1557,  on  joua,  à  l'hôtel  de  Bour- 
gogne, une  [lièce  intitulée  linon  ,le  Bordeaux. 

Le  règne  d'Henri  III  vint  élargir  encore  l'horizon 
théâtral.  Ce  roi  aimait  et  protégea  les  spectacles. 
comme  le  déclare,  avec  amertume,  le  Journut  de 
Lestoile  :  «  Les  farceurs,  bouffons,  p...  et  mignons 
avoient  tous  crédit  auprès  du  roi.» 

Dès  1570,  un  Italien,  Albert  Ganasse,  était  venu 
ouvrir  à  Paris  un  théâtre  que  le  Parlement,  dont 
l'autorisation  n'avait  point  été  requise,  avait  fait 
immédiatement  fermer.  Ganasse,  après  avoir  obtenu, 
grâce  à  la  faveur  de  Catherine  de  Médicis,  des  lettres 
patentes  de  Henri  II,  échoua  piteusement  dans  sa 
tentative,  le  public  ne  répondant  pas  à  son  appel. 

En  1576,  apparut  une  nouvelle  troupe  italienne, 
que  frappa  un  nouvel  arrêt. 

Mais,  en  février  K>77,  Henri  III  fit  venir  à  Blois 
Gli  Gelosi. 

«  En  ce  mois,  dit  Lestoile,  la  compagnie  des 
comœdians  italiens  surnommés  I  Gelosi,  que  le  Roy 
avoit  fait  venir  de  Venise  exprès  pour  se  donner  du 
passe-temps,  et  desquels  il  avoit  paie  la  ransson, 
aians  esté  pris  et  dévalizés  par  les  huguenos  environ 
les  festes  de  Noël  précédent,  commencèrent  leurs 
coraœdies  dans  la  salle  des  Eslats  à  Mois,  et  leur 
permist  le  lioy  de  prendre  demi  teston  de  tous  ceux 
qui  les  voudroient  voir  jouer5.  » 

De  Blois,  celte  troupe  se  rendit  à  Paris  et  s'ins- 
talla, sur  l'ordre  du  roi,  à  l'hôtel  du  Petil-Bourbon, 
contigu  au  Louvre.  Lestoile  nous  apprend  qu'ils  y 
eurent  grand  succès  : 

«  Le  dimanche  10  may,  les  comœdians  italiens, 
surnommés  I  Gelosi,  commencèrent  à  jouer  leurs 


3.  Michelet,  Histoire  de  F, 

4.  Pasquier,  Recherches,  I 
'.  Lestoile,  février  1577, 


T5S 


KfcnyCLQPÉME  HE  I.A  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DV  COHUE ftVATOiRB 


cunicedies  italiennes  en  la  salle  de  l'Iiostel  de  Bour- 
bon, à  Paris.  Ils  prenoient  de  salaire  quatre  sols 
pan  leste  de  tous  les  François  qui  les  vouloient  aller 
voir, jouer,  où  il  y  avoit  tel  concours  et  aflluence  de 
peuple,  que  les  quatre  meilleurs  prédicateurs  de 
Paris  n'eu  avoient  pas  trestous  ensemble  autant 
quand  ils  preschoieut1.  » 

Le  22  juin,  le  Parlement  interdit  le  spectacle. 
Henri  III  signa  alors  des  lettres  patentes,  qu'il  refusa 
d'enregistrer.  Le  roi  donna  l'ordre  exprès  à  la  troupe 
de  poursuivre  ses  représentations. 

Le  Parlement  prit  peu  après  sa  revanche  contre 
une  troupe  française  qui,  après  avoir  parcouru  la 
province  en  jouant  les  pièces  de  Jodelle  et  d'autres 
poètes  rivaux,  était  venue  s'établir  à  l'hôtel  de 
Clugni,  [Cluny]  rue  des  Mathurins.  Jaloux  de  leurs 
privilèges,  les  Confrères  avaient  protesté;  L'arrêt 
qu'ils  sollicitaient  intervint  en  ces  termes  : 

.<  Du  samedi  6  octobre  1384.  Ce  jour,  ouï  le  Pro- 
cureur-Général du  Koi  en  ses  conclusions  et  remon- 
trances, a  été  arrêté  et  ordonné  que  présentement 
tous  les  Huissiers  d'icelle  se  transporteront  aux  lo^-es 
des  Comédiens  et  du  Concierge  de  l'hôtel  de  Cluny, 
près  les  Mathurins,  auxquels  seront  faites  défenses, 
par  Ordonnance  de  la  Chambre  des  Vacations,  de 
jouer  leurs  Comédies,  ou  faire  assemblées  en  quelque 
lieu  de  celte  Ville  ou  Fauxbourgs  que  ce  soit,  et  au 
Concierge  de  Cluny  de  les  recevoir,  à  peine  de  mille 
écus  d'amende;  et  à  l'instant  a  été  enjoint  à  L'Huis- 
sier Bujol  d'aller  leur  faire  ladite  signification*.  » 

Les  Confrères,  que  le  Parlement  mettait  ainsi 
maintenant  sous  sa  protection,  ne  se  bornaient  pour- 
tant pas  à  un  genre  élevé.  A.  coté  des  Uagédies  de 
Robert  Garnier,  à  côté  de  farces  charmantes,  comme 
celle  du  Cuvier,  comme  celle  de  Maître  l'athelin,  et 
comme  l'Archer  de  Bagnolet  de  Villon,  on  jouait  à 
l'hôtel  de  Bourgogne  de  pitoyables  insanités  :  Farce 
nouvelle  et  récréative  du  médecin  qui  guarist  toutes 
sortes  de  maladies;  aussi  fait  le  nez  à  l'enfant  d'un,' 
grosse,  et  apprend  à  deviner;  —  Farce  nom  •  dit ■  du 
i,h, ii  d'un  jeune  moine  ri  d'un  vieil  gendarme,  par 
devant  le  dieu  Cupidon,  pour  une  fille;  —  Farce  nmi- 
uelle  et  fort  joyeuse  de&  femmes  gui  font  esewer  levais 
ahauldrons  ri  défendent  qu'on  mette  lapièce  auprèadv 
trou,  ù  trois  personnages  :  c'est  assavoir  la  première 
femme,  la  seconde,  cl  le  maigen. 

En  1588,  un  bourgeois  ayant  composé  à  l'adresse 
de  Henri  III  des  «  Remontrances  »  sur  les  désordres 
du  royaume,  parlait  de  la  façon  suivante  du  théâtre 
des  Confrères  :  «  Il  y  a  encore  un  autre  grand  mal 
qui  se  commet  et  tolère  en  nostre  bonne  ville  de 
Paris  aux  jours  de  dimanches  et  de  testes.  Ce  sont 
les  jeux  et  spectacles  publics  qui  se  font  lesdits 
jours  de  festes  et  dimanches,  tant  par  des  François, 
etpar-dessuz  tout,  ceux  qui  se  font  en  unecloaqueet 
maison  de  Salhan  nommée  l'hôtel  de  Bourgogne, 
dont  les  acteurs  se  disent  abusivement  Confrères  de 
la  Passion  de  Jésus-Christ.  En  ce  lieu  se  donnent 
mille  assignations  scandaleuses  au  préjudice  de 
l'honnêteté  et  de  la  pudicité  des  femmes  et  la  ruine 
des  familles  des  pauvres  artisans,  desquels  la  salle 
basse  est  toute  pleine,  et  lesquels,  plus  de  deux 
heures  avant  le  jeu,  passent  leur  temps  en  devis 
impudiques,  jeux  de  cartes  et  de  dés,  en  gournian- 


Des  Essurts    /.,  .  Troix  Tln'atrrs  de  Paris,  p.  39. 
Remontrances  lres-//umbles  au  roi  de  Franee  ri  de  Pologn 
■■   nom,  par  ««  sien  officier  et  subject,  sur  l, 

,lu  royaume ,  1.'>*N. 


dises  et  ivrogneries  tout  publiquement,  d'où  viennent 
plusieurs  querelles  et  batteries.  Sur  l'échafaud,  l'on 
dresse  des  autels  chargés  de  croix  et  d'ornements 
ecclésiastiques;  l'on  y  représente  des  piètres  revêtus 
de  surplis,  même  aux  farces  impudique-  pour  faire 
mariages  de  risées.  L'on  y  lit  le  texte  de  l'Evangile  eu 
chants  ecclésiastiques  pour,  par  occasion,  y  ren- 
contrer un  mot  à  plaisir  qui  sert  au  jeu;  et,  au  sur- 
plus, il  n'y  a  farce  qui  ne  soit  orde,  sale  et  vilaine, 
au  scandale  de  la  jeunesse  qui  y  assiste.  Telle  im- 
piété est  entretenue  des  deniers  d'une  confrérie  qui 
devroientêtre  employ  es  à  la  nourriture  des  pauvres  ^  » 
Ces  remontrances  ne  nommaient  point  la  Bazoche 
ni  les  Enfants-sans-Souci,  parce  que,  à  cette  époque, 
et  depuis  quelques  années  déjà,  leurs  Iréteaux  res- 
taient silencieux.  Nous  avons  dit  que,  à  côté  de  ces 
deux  troupes,  s'en  étaient  formées  d'autres  exploi- 
tant le  même  genre.  Celles-ci  el  celles-là  menaient 
ensemble  tant  de  scandale  que  les  Etats  de  1560  s'en 
étaient  alarmés,  et  que  le  gouvernement  avait  dû  y 
mettre  bon  ordre  : 

Ordonnance  générale  rendue  sur  les  plaintes, 

doléances   et  remontrances 

des  états  assemblés  à  Orléans'. 

Art.  24.  —  Défendons  à  tous  joueurs  de  farce, 
basteleurs,  et  autres  semblables,  jouer  esdits  jours 
de  dimanches  et  festes,  aux  heures  du  service  divin, 
se  vestir  d'habits  ecclésiastiques,  jouer  choses  dis- 
solues et  de  mauvois  exemple,  à  peine  de  prison  et 
punition  corporelle,  et  à  tous  jui;es  leur  bailler  per- 
mission de  jouer  durant  les  dites  heures*.  » 

Le  8  janvier  1561,  les  clercs  de  la  Bazoche  avaient 
obtenu  l'autorisation  déjouer.  Ils  l'obtinrent  encore 
en  1382.  A  partir  de  ce  moment,  on  ne  voit  plus 
trace  de  leur  spectacle. 

En  1588,  deux  troupes  nouvelles,  une  française, 
l'autre  italienne,  essayent  de  s'établir  à  Paris.  L'u 
arrêt,  rendu  le  10  décembre,  fait  alors  «  défense  à 
tous  comédiens,  tant  italiens  que  franeois,  de  jouer 
des  comédies,  ou  de  faire  des  tours  et  subtilité/.,  soit 
aux  jours  de  fêtes  ou  aux  jours  ouvrables,  à  peine 
d'amende  arbitraire  et  de  punition  corporelle"  ». 

Il  ne  resta  donc  plus  à  Paris  d'autre  théâtre  que 
celui  des  Confrères,  armés  de  leur  privilège.  Or, 
vers  cette  même  année  1588,  ils  cédèrent  ce  privilège 
à  l'association  des  Ënfants-sans-Souci,  et  leur  louè- 
rent l'hôtel  de  Bourgogne,  s'y  réservant  seulement 
deux  loges,  les  plus  proches  de  la  scène,  dit-on,  dis- 
tinguées par  des  barreaux,  et  qu'on  désigna  sous  le 
nom  de  loges  des  Maîtres. 

le  règue  d'Henri  IV  commençait.  Le  bon  roi  n'eût 
certes  pas  permis  qu'on  tyrannisât  les  comédiens, 
lui  dont  le  gouvernement  demeura  si  paternel  et  qui 
goûtait  si  fort  l'esprit  de  ses  sujets! 

Messieurs  de  la  Cour  des  Aydes,  s'étant  crus  ou- 
tragés  par  une  pièce  de  l'hôtel  de  Bourgogne  dans 
laquelle  trois  diables  s'emparaient,  au  nom  de  la 
justice,  d'un  conseiller,  d'un  commissaire  el  de 
quelques  sergents  en  quête  de  contributions,  avaienl 
fait  emprisonner  les  acteurs.  Le  roi  les  rendit  im- 
médiatement à  la  liberté  el  traita  do  «  sots  »  les 
magistrats.  Voici  comment  Lestoile  conte  ces  faits  : 

«  Le  vendredi  26  de  ce  mois,  fut  jouée  a  l'hôtel  de 
Bourgogne,  h  Paris,  une  plaisante  farce  à  laquelle 
assistèrent  le  Roy,  la  Reine,  et  laplûpart  des  princes, 


i.  Orléans  .  jam  ier  i 

:>.  lsamberl,  Recueil  dei  a 
6,  Delamare,  t.  I,  liv.  111. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3759 


seigneurs  et  dames  de  la  Cour.  C'étoient  un  mari  et 
une  femme  qui  querelloienl  ensemble  :  la  femme 
crioit  après  son  mari  de  ce  qu'il  ne  bougeoit  tout  le 
jour  de  la  taverne,  et  cependant  qu'on  les  exécutoil 
tous  les  jours  pour  la  taille  qu'il  falloit  payer  au  Boy, 
qui  prenoit  tout  ce  qu'ils  avoient;  et  qu'aussitôt 
qu'ils  avoient  gagné  quelque  chose  c'éloit  pour  lui, 
et  non  pas  pour  eux.  «  C'est  pourquoi,  disoit  le  mari 
se  défendant,  il  en  faut  faire  meilleure  clière  :  cal- 
que diable  nous  serviroit  tout  le  bien  que  nous  pour- 
rions amasser,  puisqu'aussi  bien  ce  ne  seroit  pas 
pour  nous,  mais  pour  ce  beau  Boy?  Cela  fera  que 
j'en  boirai  encore  davantage,  et  du  meilleur;  j'uvois 
accoutumé  de  n'eu  boire  qu'à  trois  sols,  mais  par 
Dieu  j'en  boirai  doresnavant  à  sL\  pour  le  moins. 
Monsieur  le  lioy  n'en  croquera  pas  de  celui-là  :  va 
m'en  quérir  tout  à  cette  heure,  et  marche.  —  Ali! 
malheureux,  répliqua  cette  femme,  et  à  belles  injures  ; 
merci  Dieu,  vilain,  me  veux-tu  ruiner  avec  tes  eu- 
fans?  Ah!  foi  de  moi,  il  n'en  ira  pas  ici.  »  Sur  ces 
entrefaites  voici  arriver  un  conseiller  de  la  Cour  des 
Aydes,  un  commissaire  et  un  sergent,  qui  viennent 
demander  la  taille  à  ces  pauvres  gens,  et  à  faute  de 
payer  veulent  exécuter.  La  femme  commence  à  crier 
après  :  aussi  fait  le  mari,  qui  leur  demande  qui  ils 
sont.  «  .Nous  sommes  gens  de  justice,  disent-ils.  — 
Comment  de  justice,  dit  le  mari!  Ceux  qui  sont  de 
justice  doivent  taire  ceci,  doivenL  faire  cela;  et  vous 
laites  ceci  et  cela  (décrivant  naïvement  en  son  patois 
toute  la  corruption  de  la  justice  du  temps  [présent). 
Je  ne  pense  point  que  vous  soyez  ce  que  vous  dites; 
montrez-moi  votre  commission.  —  Voici  un  arrêt,  » 
dit  le  conseiller. 

«  Sur  ces  disputes,  la  femme,  qui  s'étoit  saisie  sub- 
tilement d'un  coffret  sur  lequel  elle  se  tenoit  assise, 
le  commissaire  l'ayant  avisée,  lui  fait  comruandenieu! 
de  se  lever  de  par  le  Hoy,  et  leur  en  faire  l'ouverLure. 
Après  plusieurs  altercations  la  femme  ayant  été  con- 
trainte de  se  lever,  on  ouvre  ce  coffre,  duquel  sortent 
à  l'instant  trois  diables,  qui  emportent  et  troussent 
eu  malle  M.  le  conseiller,  le  commissaire  et  le  ser- 
gent, chaque  diable  s'étant  chargé  du  sien.  Ce  fut  la 
lin  de  la  farce  de  ces  beaux  jeux,  mais  non  de  ceux 
qui  voulurent  jouer  après  les  conseillers  des  aydes, 
commissaires  et  sergens,  lesquels  se  pretendans 
injuriés,  se  joignirent  ensemble  et  envoyèrent  en  pri- 
son messieurs  les  joueurs.  Mais  ils  furent  mis  dehors 
le  jour  même,  par  expiés  commandement  du  lioy, 
qui  les  appela  sots  :  disans  Sa  Majesté  que  s'il  falloit 
parler  d'intérêt,  qu'il  en  avoit  reçu  plus  qu'eux  tou*; 
mais  qu'il  leur  avoit  pardonné  et  paxdonnoit  de  bon 
cœur,  d'autant  qu'ils  l'avoient  fait  rire,  voire  jusques 
aux  larmes.  Chacun  disoit  que  de  long-temps  on 
n 'avoit  vu  à  Paris  |farce  plus  plaisante,  mieux  jouée, 
ni  d'une  plus  gentille  invention,  mèmement  à  l'hôtel 
de  Bourgogne  où  ils  sont  assez  bons  coustumiers  de 
ne  jouer  chose  qui  vaille1.  » 

L'arrêt  du  10  décembre  1588,  que  nous  avons  cité 
tout  à  l'heure,  mettait  rigoureusement  obstacle  à 
l'exploitation  dans  Paris  de  quelque  théâtre  que  ce 
fût,  hors  celui  des  Confrères.  Une  troupe  de  comé- 
diens parvint  cependant  à  tourner  cette  prohibition. 
En  1595,  elle  dressa  ses  tréteaux  dans  l'enclos  de  la 
foire  Saint-Germain2.  Nous  empruntons  à  Delamare 
le  récit  de  ce  qu'il  en  advint  : 

i.  Lestoilc,  vendredi  26  janvier  1607. 

2.  Cette  foire,  qui.  depuis  des  temps  très  anciens,  se  tenait  chaque 
année  au  profit  de*  religieux  de  Saint-Germain  des  Très,  availété  sup- 
primée à  la  fln  du  xtii«  siècle.  Louis  XI,  par  des  lettres  patentes  de 
mars  1482,  la  rétablit  au  profit  des  mêmes  religieux,  avec  droit  de 


«  Les  foires  ont  une  prérogative  de  franchise  que 
nos  rois  leur  ont  accordée  en  faveur  du  commerce, 
et  qui  fait  cesser  pour  un  temps  et  eu  certains  lieux 
tous  les  privilèges  des  Corps  ou  Commuuautez.  Sur 
ce  fondement,  quelques  comédiens  de  Province  éle- 
vèrent un  théâtre  à  Paris  dans  les  lieux  et  dans  lea 
temps  de  la  Foire  Saint-Germain.  Les  propriétaires  de 
lïlôtel  de  Bourgogne  s'en  plaignirent  au  Lieutenant 
Civil,  et  firent  assigner  devant  luy  les  Provinciaux; 
ils  cessèrent  aussi-tôt  leurs  représentations,  en  atten- 
dant que  ce  Magistrat  eût  levé  cet  obstacle.  Mais 
pendant  l'instance,  le  Peuple  toujours  impatient  et 
amateur  de  nouveauté/.,  entreprist  de  s'en  venger 
sur  l'Hôtel  de  Bourgogne,  et  il  s'y  lit  des  attroupe- 
ments et  des  insolences  aux  jours  ordinaires  de  Co- 
médie. L'affaire  discutée  en  peu  de  jours  fut  enfin 
jugée  par  Sentence  du  5  février  1596.  Ce  Magistrat 
n'estima  pas  que  le  privilège  exclusif  accordé  aux 
Maîtres  de  l'Hôtel  de  Bourgogne,  fût  plus  fort  que 
les  Statuts  des  six  Corps  des  Marchands  et  des  Arts 
et  Métiers  de  Paris,  dont  l'effet  est  suspendu  en  faveur 
des  Forains  pendant  la  Foire.  Ainsi  appliquant  ce 
motif  au  sujet  qui  se  présentait,  et  voulant  aussi 
calmer  le  Peuple  et  maintenir  la  tranquillité  des 
spectales,  il  permit  par  sentence  à  ces  Comédiens 
Forains  «  déjouer  pendant  la  Foire  Saint-Germain 
seulement,  et  sans  tirer  à  conséquence;  à  la  charge 
de  ne  représenter  que  des  sujets  licites  et  honuêtes, 
qui  n'oll'ençasseut  personne;  comme  aussi  à  condi- 
tion de  payer  par  chacune  année  qu'ils  joueroieut 
deux  écus  aux  Administrateurs  de  la  Confrairie  de  la 
Passion,  Maîtres  de  l'Hôtel  de  Bourgogne.  »  El,  par 
la  même  Sentence,  faisant  droit  sur  les  conclusions 
du  Procureur  du  Roy,  il  fit  «  défenses  à  toutes  per- 
sonnes de  quelque  couditiou  qu'elles  fussent,  de  faire 
aucune  insolence  en  l'Hôtel  de  Bourgogne  lors  que 
l'un  jj  ivpreseuteroit  quelques  jeux,  d'y  jeter  des 
pierres,  de  la  poudre,  ou  autres  choses  qui  pussent 
émouvoir  le  Peuple  à  sédition,  à  peine  de  punition 
corporelle3.  » 

En  1600,  une  troupe  du  province  put  se  fixer  à  l'Hô- 
tel d'Argent,  près  de  la  Grève,  dans  la  rue  de  la 
Poterie,  située  entre  celles  de  la  Tixeranderie  et  de 
la  Verrerie,  sous  l'obligation  de  paver,  pour  chaque 
représentation,  un  écu  tournois  aux  Comédiens  de 
l'hôtel  de  Bourgogne.  Cette  troupe  obtint  un  grand 
succès,  et  le  roi  la  prit  à  sa  solde.  Elle  désertait  fré- 
quemment l'hôtel  d'Argent  pour  aller  jouer  à  l'Arse- 
nal, que  Sully  habitait,  on  devant  la  Cour.  En  1608, 
elle  alla  jouer  à  Fontainebleau. 

Le  30  janvier  1613,  fut  encore  confirmé  le  privilège 
des  Comédiens  de  l'hôtel  de  Bourgogne,  qui  prirent, 
a  dater  de  cette  époque,  le  nom  de  Troupe  royale 
des  Comédiens.  La  faveur  qu'on  leur  accordait  les 
encouragea  à  adresser  au  roi  une  requête  assez 
curieuse  en  ses  termes,  et  tendant  à  ce  qu'ils  fussent 
désormais  déchargés  de  l'obligation  d'acquitter  entre 
les  mains  des  Confrères  le  loyer  de  leur  salle.  Voici 
cemment  elle  était  conçue  : 

Remonstrances  au  roi  et  à  NN.  SS.  de  son  conseil, 
pour  l'abrogation  de  la  confrérie  ne  la  Passion,  en 
faveur  de  la  troupe  royale  des  comédiens. 

«  ...  Vos  Comédiens,  Sire,  qui  par  leurs  bonnes 
qualités  ont  acquis  des  amis  assez  puissans  pour  leur 

pleine  franchise.  Elle  durait  du  3  lévrier  jusqu'au  dimanche  des  Ra- 
meaux et  avait  tieusur  des  terrain-  lie-  va  -les,  dont  le  centre  était  l'em- 
placement de  l'ancien  holel  de  Navarre,  ou  se  trouve  aujourd'hui  le 
marché  Saint-Germain.  Elle  se  tint  régulièrement  jusqu'en  1789. 
S.  Delamare,  t.  I,  liv.  III,  til.  III,  chap.  Vf. 


3760 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


faciliter  l'entrée  Je  votre  Cabinet,  et  assez  zélés  en 
leur  intérêt  pour  les  favoriser  de  votre  présence, 
s'adressent  de  plein  vol  à  Votre  Majesté  sans  aucune 
recommandation  ni  assistance  que  leur  bon  droit, 
dans  lequel  ils  ent  établi  l'espérance  de  la  victoire. 
Pourquoi  les  Comédiens  supplient  humblement 
Votre  Majesté  qu'il  lui  plaise  abroger  la  Confrérie  de 
la  Passion  comme  inutile,  préjudiciable  à  l'Etat,  à 
la  Religion  et  aux  particuliers;  avec  défense  aux  soi- 
disans  Confrères  de  la  continuer,  à  peine  d'être  con- 
vaincus de  I.èze-Majesté;  et  en  conséquence  ordonner 
que  les  biens  et  revenus  de  ladite  Confrérie  seront 
unis  et  incorporés  au  Domaine  de  l'Hôtel-Dieu  ou 
des  Petites-Maisons  de  Paris,  à  la  réserve  néanmoins 
de  l'Hôtel  de  Bourgogne,  lequel  demeurera  perpé- 
tuellement affecté  à  la  Troupe  de  vos  Comédiens,  en 
payant  par  eux  annuellement  toutes  les  réparations, 
rentes  et  charges  foncières  dont  ils  demeureront 
chargés,  la  somme  de  cinq  cents  livres,  ou  telle 
autre  que  Votre  Majesté  arbitrera,  es  mains  du  Re- 
ceveur à  ce  commis,  de  quartier  en  quartier,  et  à  la 
charge  de  bailler  par  eux  et  leurs  successeurs  bonne 
et  sûre  caution  pour  assurance  desdits  paiemens  et 
charges.  Il  est  vrai  que  d'abord  celte  Requête  paroî- 
tra  aucunement  étrange;  mais  Votre  Majesté  qui 
pèse  les  intérêts  communs  d'autre  sorte  que  ne  font 
les  particuliers,  qui  ne  s'attachent  jamais  à  l'utilité 
publique,  sinon  en  tant  que  la  leur  s'y  trouve  mêlée, 
jugera  que  cette  demande  est  raisonnable  et  juste, 
puisque  l'exécution  d'icelle  est  utile  et  nécessaire  : 
juste,  d'autant  qu'elle  est  fondée  sur  tant  de  saintes 
ordonnances  et  de  si  bons  exemples;  utile,  d'autant 
que  les  pauvres  en  tireront  un  profit  qui  leur  est 
beaucoup  mieux  deub  qu'à  une  foule  de  libertins; 
nécessaire,  parce  que  c'est  le  vrai  moyen  de  retirer 
de  la  débauche  tant  de  malheureux  Artisans,  qui, 
ayant  souvent  mis  femmes  et  enfans  en  chemise 
pour  parvenir  à  ces  maîtrises  où  leur  vie  semble 
assurée,  négligent  tout  à  fait  le  soin  de  leurs  pauvres 
familles. 

«  ...  Cette  confrérie  n'a  jamais  reçu  ni  produit 
que  des  Artisans,  comme  on  le  voit  par  son  institu- 
tion et  dans  le  contrat  d'acquisition  de  l'Hôtel  de 
Bourgogne,  quelque  vanité  qu'ils  s'y  donnent,  en  se 
qualifiant  de  gros  Bourgeois,  honorés  des  charges 
de  leur  Paroisse  et  du  quartier  :  aussi  tels  honneurs 
répugnent-ils  à  leur  profession,  qui  les  oblige  la 
plupart  de  mendier  leur  vie  du  ministère  de  leur 
main,  en  quoi  ils  ne  peuvent  avoir  beaucoup  d'hon- 
neur et  de  civilité,  comme  dit  Aristote;  par  consé- 
quent sont  incapables  des  honneurs  et  des  charges 
publiques,  et  indignes  du  titre  de  Bourgeois,  |>ar  là 
raison  des  Anciens  qui  faisoient  marcher  les  esclaves 
de  pair  avec  les  Artisans1.  » 

Le  privilège  conféré  à  perpétuité  par  Charles  V[ 
aux  Confrères  avait  déjà  traversé  deux  siècles.  Il 
devait,  en  dépit  de  ces  tentatives  prématurées,  s'en 
écouler  un  encore  avant  qu'il  ne  fût  aboli.  Les  suc- 
cesseurs des  Confrères  n'obtinrent  qu'une  partie  de 
ce  qu'ils  demandaient  :  la  jouissance  assurée  de  leur 
salle.  Ils  durent  payer  à  la  Confrérie,  dont  les  droits 
demeuraient  respectés,  trois  livres  tournois  par  jour 
de  représentation. 

Pour  le  moment,  c'était  la  Farce  qui  dominait  au 
programme  de   l'hôtel  de  Bourgogne,  quoiqu'on    y 

1.  Des  Essarts,  Les  Trois  Théâtres  de  Paris.  p.  i:i. 

2.  Félibien,  Histoire  de  Paris,  Preuves,  1.  Il,  [j.  7J7. 

3.  Mondory  apportait  une  telle  ardeur  dans  son  jeu  que,  dans  le 
r61e  d'Ilérode  de  la  Hfariamne  de  Tristan,  il  eut  une  attaque  d'apo- 


mit  assez  souvent  en  scène  les  divinités  de  la  mytho- 
logie.—Trois  garçons  boulangers  du  faubourg  Saint- 
Laurent  :  Henri  Legrand,  dit  Belleville,  et  beaucoup 
plus  connu  sous  le  nom  de  Turlupin,  —  Hugues 
Guéru,  dit  Fléchelles  pour  les  rôles  graves  et  Gau- 
thier-Garguille  pour  la  bouffonnerie,  —  enfin  Robert 
Guérin,  dit  Latleur  dans  le  haut  répertoire  et  Gros- 
Guillaume  dans  les  paillardises,  étaient  les  acteurs 
préférés  du  public.  Turlupin  figurait  ordinairement 
les  valets,  Gauthier-Garguille  les  maîtres  d'école  et 
les  savants,  Gros-Guillaume  les  prud'hommes.  Ils 
s'étaient  d'abord  associés  pour  jouer,  les  dimanches, 
entre  messe  et  vêpres,  auprès  de  l'Estrapade,  sur 
quelques  planches  entourées  de  toiles  grossières. 
Bien  souvent,  ils  avaient  eu  maille  à  partir  avec  la 
police,  que  l'hôtel  de  Bourgogne  dépêchait  contre 
eux;  mais  la  fortune  voulut  que  Richelieu,  piqué  de 
curiosité  sur  ce  qu'on  répétait  de  leur  talent,  les  fît 
venir  au  Palais-Cardinal.  Il  eut  tant  d'agrément  de 
leur  [spectacle  qu'il  les  fit  entrer  dans  la  Troupe 
royale.  Ils  remportèrent  là  d'énormes  succès,  jus- 
qu'au jour  où  Gros-Guillaume  eut  la  malencontreuse 
fantaisie  de  s'approprier  un  tic  familier  à  quelque 
haut  magistrat  et  fut,  dès  sa  première  imitation, 
enfermé  à  la  Conciergerie,  où  il  mourut.  Gauthier- 
Garguille  et  Turlupin,  qui  avaient  cru  prudent  de 
prendre  la  fuite,  moururent  dans  la  même  semaine 
que  leur  inséparable  compagnon. 

Bertrand  Haudrin,  jouant  les  médecins  ridicules, 
continua  leurjoyeuse  tradition,  ainsi  que  Dulaurier, 
dit  Bruscambille,  qui  succéda  à  Gauthier-Garguille 
dans  l'art  de  débiter  le  prologue,  Jean  Farine,  puis 
Julien  de  l'Kspi,  portant  le  sobriquet  de  Jodelet,  l'in- 
terprète attitré  des  pièces  de  Scarron. 

En  1632,  un  comédien  du  nom  de  Jacques  Avenet 
installe  un  théâtre  sur  le  jeu  de  paume  de  la  Fon- 
taine, rue  Michel-le-Comte.  Le  Parlement  reçoit 
aussitôt  la  plainte  des  habitants  du  quartier,  lesquels 
exposent  que  la  rue  Michel-le-Comte  est  «  composée 
de  vingt-quatre  maisons  à  portes  cochères,  habitées 
par  des  personnes  de  qualité  et  officiers  des  cours 
souveraines,  qui  doivent  le  service  de  leurs  charges 
et  n'ont  pas  la  liberté  d'aller  et  venir  à  cause  de 
l'embarras  de  carrosses  et  de  chevaux  qu'attire,  dans 
cette  rue  et  dans  les  environs,  la  comédie  ». 

Un  arrêt  du  22  mars  1633  interdit  les  représenta- 
tions2. 

En  163b,  nous  retrouvons  cette  troupe  dans  un  jeu 
de  paume  de  la  rue  Vieille-du-Temple.  Ce  sont  les 
débuts  du  théâtre  du  Marais,  sous  la  direction  de 
Mondory3,  que  Richelieu  estimait  d'une  façon  toute 
particulière,  et  à  qui  il  confia  l'Aveugle  île  Smyrne. 
Là  furent  représentées  les  premières  œuvres  de  Cor- 
neille, puis  les  pièces  de  Mayret,  de  Scarron,  de 
Quinault  plus  lard,  et  de  l'abbé  Boyer.  M1"  de 
Champmeslé  y  commença  sa  fortune. 

Pendant  cette  première  moitié  du  xvu*  siècle,  fut 
ouverl,  à  Paris,  un  troisième  grand  théâtre,  celui 
du  Palais-Cardinal.  Richelieu  avait  l'ait  construire, 
au  Palais-Cardinal,  deux  salles  de  spectacles.  L'une, 
assez  exiguë,  servait  à  de  certaines  représenta- 
tions de  gala.  L'autre,  beaucoup  plus  vaste,  était 
destinée  au  public  et  se  trouvait  située  du  côté  de  la 
me  des  Bons-Enfants,  à  l'extrémité  d'une  ruelle 
nommée  Court-Orry;  elle  avait  été  édifiée  pour  qu'on 
y  donnât  Mirame.  On  n'y  jouait  que  des  tragédies  ou 


r  du  théâtre,  malade  et  paralyse,  il  n' 


plexie.  Ayant  du  se  retirer  uu  meairc,  inaïaue  ei  paraiysc,  u  n  y  re- 
parut que  sur  l'ordre  exprès  du  Cardinal,  pour  jouer  l'Aveiojle  de 
Smyrne.  M  ne  put,  d'ailleurs,  achever  la  pièce. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3701 


des  tragi-comédies  de  Corneille,  de  Rolrou,  de  l'Es- 
toile,  de  Desmarets,  etc.  Zacharie  Jacob,  dit  Mont- 
lleuri1,  en  était  le  grand  acteur. 

Nous  ne  pouvons  maintenant  passer  sous  silence, 
étant  donnée  la  vogue  dont  il  jouissait,  le  spectacle 
offert  par  Tabarin  et  le  charlatan  Montdor  sur  la 
place  du  Pont-Neuf.  Ce  Montdor,  très  avisé  vendeur 
de  baume,  avait  associé  à  ses  bénéfices  le  bouffon 
Tabarin,  qui,  pour  attirer  le  public  autour  des  dro- 
gues et  des  onguents,  le  visage  masqué,  sous  l'habit 
d'Arlequin,  posait  au  savant  homme  les  questions 
les  plus  plaisantes  et  échangeait  avec  lui  un  dialogue 
animé,  lequel  se  terminait  invariablement  par  l'éloge 
du  flacon  magique. 

Ils  avaient  eu  pour  prédécesseurs,  dans  ce  genre 
d'industrie,  il  signor  Hieronimo  et  son  valet  Gali- 
nette  la  Câline,  qui  débitaient  leurs  panacées  dans 
la  cour  du  Palais,  mais  qui  n'avaient  réussi  qu'à 
faire  fortune,  sans  atteindre  à  la  même  célébrité. 

Quelquefois,  Tabarin  et  Montdor  représentaient 
des  farces.  Les  habitants  du  quartier  s'étant,  en  1634, 
adressés  au  Parlement  pour  signaler  leur  indécence, 
le  lieutenant  civil,  dans  une  ordonnance  sur  la  police 
générale  de  Paris,  en  date  du  30  mars  1635,  fit  dé- 
fenses «  à  tous  vendeurs  de  thériaque,  arracheurs  de 
dents,  joueurs  de  tourniquets,  marionetles,  et  chan- 
teurs de  chansons,  de  s'arrester  en  aucun  lieu  et 
faire  assemblée  du  peuple  »,  sous  peine  de  prison  et 
de  fouet2. 

Les  pouvoirs  publics  veillaient  -toujours  très  atten- 
tivement au  bon  ordre  des  théâtres. 

Le  12  novembre  1609,  le  lieutenant  civil  avait  rendu 
une  ordonnance  ainsi  conçue  : 

Ordonnance  de  police  touchant  la  discipline 
qui  doit  être  observée  par  les  comédiens. 

«  Sur  la  plainte  faite  par  le  Procureur  du  Roy,  que 
les  Comédiens  de  l'Hôtel  de  Bourgogne  et  de  l'Hôtel 
d'Argent  finissent  leurs  Comédies  à  heures  indues  et 
incommodes  pour  la  saison  de  l'Hyver,  et  que  sans 
permission  ils  exigent  du  Peuple  sommes  excessives; 
étant  nécessaire  d'y  pourvoir  et  leur  faire  taxe  mo- 
dérée. Nous  avons  fait  et  faisons  tres-expresses  inhi- 
bitions et  défenses  ausdits  Comédiens,  depuis  le  jour 
de  la  Saint-Martin  jusqu'au  quinzième  lévrier,  de 
jouer  passé  quatre  heures  et  demie  au  plus  tard  ; 
ausquels  pour  cet  effet  enjoignons  de  commencer 
précisément  avec  telles  personnes  qu'il  y  aura  à  deux 
heures  après  midi,  et  linir  à  ladite  heure;  que  la 
porte  soit  ouverte  à  une  heure  précise,  pour  éviter 
la  confusion  qui  se  fait  dedans  ce  temps,  au  dom- 
mage de  tous  les  Habitans  voisins. 

«  Faisons  défenses  aux  Comédiens  de  prendre  plus 
grande  somme  des  habitans  et  autres  personnes, 
que  cinq  sous  au  Parterre,  et  dix  sous  aux  Loges  et 
Calleries;  et  en  cas  qu'ils  y  ayent  quelques  Actes  à 
représenter  où  il  conviendra  plus  de  frais,  il  y  sera 
par  Nous  pourvu  sur  leur  Requête  préalablement 
communiquée  au  Procureur  du  Uoy. 

«  Leur  défendons  de  représenter  aucunes  Comédies 
ou  Farces,  qu'ils  ne  les  ayent  communiquées  au  Pro- 
cureur du  Uoy,  et  que  leur  Rôle  ou  Registre  ne  soit 
de  nous  signé. 

«  Seront  tenus  lesdits  Comédiens  avoir  de  la 
lumière  en  lanterne  ou  autrement,  tant  au  parterre, 
montée  et   galleries,  que  dessous   les   portes  à    la 


1.  Lui  aussi  outrait  dans  la  peau  de  ses  rôles.  Il  mourut,  parail 
•de  trop  grands  efforts  qu'il  fit  en  jouant  le  rôle  d'Oreste! 

j.  i,iniU"t.  Recueil  des  anciennes  lois  françaises,  t.  XVI,  p.  I 


sortie,  le  tout  à  peine  de  cent  livres  d'amende  et  de 
punition  exemplaire.  Mandons  au  Commissaire  du 
quartier  d'y  tenir  la  main,  et  de  Nous  faire  rapport 
des  contraventions  à  la  Police;  et  sera  le  présent  Rè- 
glement lu  et  publié  devant  lesdits  Hôtels,  le  peuple 
assemblé,  et  affiché  contre  les  principales  sorties. 

«  Fait  et  donné  au  Châlelet  de  Paris,  le  douzième 
jour  de  novembre  mil  six  cens  dix-neuf. 

«  Signé:  Le  Jay,  et  Charles  Leroy.  » 

On  voit  que  la  censure  préalable  continuait  de 
s'exercer  rigoureusement. 

Le  16  avril  1641,  fui  promulguée  par  Louis  XIII 
une  déclaration  qu'il  nous  faut  également  citer  : 

«  Louis,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roi  de  France  et  de 
.Navarre,  à  tous  ceux  qui  ces  présentes  Lettres  ver- 
ront, Salut.  Les  continuelles  bénédiclions  qu'il  plaît 
à  Dieu  de  répandre  sur  notre  règne,  nous  obligeant 
de  plus  en  plus  à  faire  tout  ce  qui  dépend  de  nous 
pour  retrancher  tous  les  déréglemens  par  lesquels 
il  peut  être  offensé;  la  crainte  que  nous  avons  que 
les  Comédies  qui  se  représentent  utilement  pour  le 
divertissement  des  peuples,  ne  soient  quelquefois 
accompagnées  de  représentations  peu  honnêtes,  qui 
laissent  de  mauvaises  impressions  sur  les  esprits,  fait 
que  nous  sommes  résolus  de  donner  les  ordres  requis 
pour  éviter  tels  inconvéniens. 

«  A  ces'.causes,  nous  avons  et  faisons  très-expresses 
inhibitions  et  défenses,  par  ces  Présentes  signées  de 
notre  main,  à  tous  Comédiens  de  représenter  au- 
cunes actions  malhonnêtes,  ni  d'user  d'aucunes  pa- 
roles lascives  ou  à  double  entente,  qui  puissent 
blesser  l'honnêteté  publique,  sur  peine  d'être  dé- 
clarés infâmes,  et  autres  peines  qu'il  Ocheoira  :  en- 
joignons à  nos  Juges,  chacun  dans  son  district,  de 
tenir  la  main  à  ce  que  notre  volonté  soit  religieuse- 
ment exécutée;  et  en  cas  que  lesdits  Comédiens  con- 
treviennent à  notre  présente  Déclaration,  nous  vou- 
lons et  entendons  que  nosdits  Juges  leur  interdisent 
le  Théâtre  et  procèdent  contre  eux,  selon  la  qualité 
de  l'action,  par  telles  voies  qu'ils  jugeront  à  propos, 
sans  néanmoins  pouvoir  ordonner  plus  grande  peine 
que  l'amende  ou  le  bannissement;  et  en  casque  les- 
dits Comédiens  règlent  tellement  les  actions  du 
Théâtre,  qu'elles  soient  du  tout  exemptes  d'impu- 
reté, nous  voulons  que  leur  exercice,  qui  peut  inno- 
cemment divertir  nos  peuples  de  diverses  occupa- 
lions  mauvaises,  ne  puisse  leur  être  imputé  â  blâme, 
ni  préjudicier  à  leur  réputation  dans  le  commerce 
public  :  ce  que  nous  faisons,  alin  que  le  désir  qu'ils 
auront  d'éviter  le  reproche  qu'on  leur  a  fait  jus- 
qu'ici leur  donne  autant  de  sujet  de  se  contenir  dans 
le  terme  de  leur  devoir,  que  la  crainte  des  peines 
qui  leur  seroient  inévitables,  s'ils  contrevenoient  à  la 
présente  Déclaration. 

«  Si  donnons  en  mandement  à  nos  amés  et  féaux- 
Conseillers,  les  gens  lenans  notre  Cour  du  Parle- 
ment â  Paris,  que  ces  Présentes  ils  aient  à  faire 
vérifier  et  enregistrer,  et  du  contenu  en  icelles  faire 
jouir  et  user  lesdits  Comédiens,  sans  permettre  qu'il 
y  soit  contrevenu  en  aucune  sorte  et  manière  que  ce 
soit,  car  tel  est  noire  plaisir. 

«  Donné  à  Saint-Germain-eu-Laye,  le  16e  jour 
d'avril,  l'an  de  grâce  1641.  de  notre  règne  le  trente- 
unième.  0.      .    . 

«  Su/ne  :  Louis.  » 

F.l  sur  le  repli  :  «  Par  le  Roi,  de  Lomr'n;e.  » 


ENCl  CLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


II  semble  que  le  vœu  de  Louis  XIII  se  soit  réalisé.  I  tôt  pour  la  protection  des  troupes  privilégiées  que- 
Aux  temps  où  nous  arrivons,  ta  rigueur  des  pouvoirs     contre  la  licence  des  autres. 
publics  à  l'égard  des  Comédiens  s'exercera  bien  plu-  I 


LE  THEATRE  DE  MUSIQUE  SOUS  LOUIS  XIV 


ORIGINE   DE   L'OPÉRA 

On  a  vu  dans  un  article  précédent  (Le  Théâtre  Mu- 
sical) que  le  genre  complexe  qu'est  l'opéra  se  cons- 
titua, dans  ses  divers  éléments,  par  les  apports 
successifs  de  différents  spectacles.  A  l'époque  de  la 
Renaissance,  le  madrigal  dramatique  s'oriente  vers 
l'individualisation  du  sentiment,  et,  en  créant  la 
musique  mesurée  à  l'antique,  Baïf  plie  la  polyphonie 
vocale  à  la  discipline  du  rythme  poétique.  Le  mou- 
vement des  idées  alors  régnantes  conduira  à  l'air  à 
voix  seule,  et  l'humanisme  déterminera  une  poussée 
vers  l'association  de  la  poésie,  de  la  musique  et  de 
la  d'anse.  Aussi,  l'orientation  du  Ballet  de  cour  sous 
l'action  de  Baltazah,  dit  Beaujoyeux,  s'avère-t-elle 
nettement  dramatique.  Le  ballet  met  à  contribution 
les  acquisitions  faites  par  l'école  florentine,  substi- 
tue des  récits  chantés  aux  récits  déclamés,  et  ne 
cesse  de  tailler  une  place  toujours  plus  large  à  la 
musique  vocale  et  instrumentale. 

Mais  le  rôle  joué  par  L'Italie  présente  une  impor- 
tance capitale  à  l'égard  de  la  constitution  «lu  genre 
opéra.  Sous  Henri  IV,  les  deux  protagonistes  de  ta 
réforme  florentine,  Riwuccini  et  Gaccini,  viennent  à 
Paris.  En  1603,  Giambattista  Axdrmni,  hanté  par 
l'idée  du  mélodrame,  se  rend  en  France  et  stimule 
l'activité  de  nos  musiciens.  Son  Adamo  (1613),  dédié 
à  la  reine  Marie  de  Médicis,  est  déjà  une  pièce  à  ma- 
chines et  à  intermèdes  musicaux.  Il  compose  ensuite 
deux  pièces  de  caractères  très  différents, la  Centaura 
et  la  Fei  inda,  mais  qui  contiennent  lous  les  éléments 
de  l'opéra  à  grand  spectacle.  L'art  ultramonlain, 
très  en  avance  sur  le  nôtre  en  ce  qui  concerne  le 
drame  lyrique,  s'infiltre  dans  le  public  cultivé.  En 
1633,  Pierre  de  Nyert  va  assister,  à  Home,  aux  spec- 
tacles donnés  parles  Barberini;.Bacilt.y  et  Lambert, 
férus  des  doctrines  italiennes,  travaillent  à  former 
le  style  récitatif  français.  D'après  Bacilly,  notre 
retard  en  la  matière  provienl  de  l'humeur  de  notre 
nation  qui  s'est  imaginé  jusqu'à  présent  que  le 
génie  de  nos  compositeurs  n'était  pas  propre  pour 
les  pièces  de  longue  haleine  comme  sont  les  pasto- 
rales et  autres  pièces  de  théâtre,  parce  qu'elle  n  \ 
est  pas  accoutumée  ».  Telle  est  aussi  l'opinion  du 
violiste  Maugaus,  à  la  suite  de  son  séjour  en  Italie. 

L'influence  des  papes  et  particulièrement  de  Clé- 
ment IX,  qui  ne  dédaignait  pas  de  rimer  des  livrets 
d'opéra,  avait  donné  un  essor  particulier  à  la  musi- 
que italienne. 

Il  est  à  noter  que  le  fastueux  Urbain  VIII  envoya 
à  Louis  XIII  le  nonce  Ailessandro  Bichi,  qui  s'em- 
ploya à  montrer  qu'il  était  possible  de  représenter 
en  France  des  opéras. 

Le  milieu  littéraire  et  musical  français,  pénétré 
de  tendances  novatrices  qui  rencontraient  toutefois 


quelques  résistances,  parut  à  Mazarin  susceptible 
d'accueillir  l'importation  de  l'opéra  italien.  Mazarin 
avait  pu.  auprès  du  cardinal  Barberini,  étudier  la  ré- 
forme mélodramatique;  après  la  mort  de  Louis  XIII, 
il  appela  en  France  le  compositeur  Marazzoli,  la 
chanteuse  Léonora  Baroni,  ainsi  que  les  deux  Melam, 
et,  dès  le  carnaval  de  1643,  l'art  ultramontaiu  ap- 
paraissait, au  Palais-Royal,  avec  une  petite  pièce 
qui,  d'après  M.  Prunières,  serait  Nicandro  e  Filent 
(mars  1045). 

Le  14  décembre  1645,  Mazarin  faisait  représenter 
devant  la  reine  mère  la  Festra  théâtrale  délia  Finta 
Paz2a,[poème  de  Giulio  Strozzi,  musique  de  Sacrati. 
Les  personnages  y  parlaient,  chantaient,  dansaient, 
et  des  intermèdes  représentaient  des  ballets  de  sin- 
ges et  d'ours,  des  danses  d'autruches  et  des  entrées 
de  perroquets. 

L'année  suivante  (février  1646),  l'abbé  Mailm  don- 
nait chez  Monseigneur  Bichi,  dont  il  était  le  maître 
de  chapelle,  Akebar,  roi  du  Mogol,  Iragedie  lyrique, 
au  palais  épiscopal  de  Carpentras;  Akebar  constitue 
la  première  tentative  d'opéra  français.  Puis,  en  at- 
tendant l'opéra  commande  par  Mazarin  à  Luigi  Bossi, 
Orfeo  c  Euridice,  on  appelait  à  Paris  une  troupe  qui 
joua  au  Palais  Royal  l'Egisto,  pastorale  de  Cavalli 
(février  1646).  Le  cardinal  Antonio  Barberini  assis- 
tait à  cette  représentation. 

Le  mardi  gras  1046,  on  montait  à  Paris  une  co- 
médie en  musique  dont  les  historiens  n'ont  pas  con- 
servé le  nom,  puis,  le  2  mars  1647,  Orfeo  e  Euridice. 
drame  lyrique  en  3  actes  de  l'abbé  Buti  et  de  Strozzi, 
et,  le  14  avril  1654,  les  Vfozze  di  Peleo  e  ' 
opéra-ballet  en  3  actes  de  Carlo  Cabroli.  Devant  le 
succès  des  œuvres  italiennes,  Louis  XIV  résolut  de 
favoriser  les  musiciens  français  et  de  les  encourager 
à  écrire  des  drames  musicaux. 

On  remarquera  d'ailleurs  que,  déjà,  les  théâtres 
de  France  introduisaient,  dans  leurs  spectacles,  des 
intermèdes  de  musique,  et  cela,  sans  doute,  sous 
l'inlluence  italienne.  C'est  ainsi  qu'au  Théâtre  du 
Marais,  Ulysse  dans  Vile  de  Cir<  ou  Euryloeke  fou- 
droyé, de  l'abbé  Boyer,  comportai! tre  les  ingé- 
nieuses machines  de  Torelli,  des  parties  mises  en 
musique.  De   même.    \iidrmne<l\  tragédie  de  Pierre 

i teille  '  1650),  était  coupée  de  chœurs  dus  à  Das- 

soucy.  Bien  ne  saurait  rendre  une  idée  plus  exacte 
de  ces  sortes  de  représentations  que  le  passage  de 
la  préface  de  Corneille  pour  Andromède,  cité  dans 
l'article  Le  Théâtre  musical  de  la  présente  Encyclo- 
pédie (voir  p.  3218). 

De  Carpentras,  l'opéra  vint  camper  au  village 
d'issy,  dans  l'hôtel  d'un  riche  amateur,  nommé  de 
la  Haye,  où  Perrin,  successeur  de  Voiture  dans  la 
charge  d'introduire  des  ambassadeurs  auprès  de 
Caston  d'Orléans,  el  Cambert,  surintendant  de  la 
musique  de  la  reine  mère,  firent  l'essai  d'un  accom- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3763 


paiement  musical  sui-  des  paroles  françaises,  dans 
une  Pastorale  représentée  en  1659. 

Les  auteurs  s'étaient  réfugiés  dans  ce  village  pour 
échapper  «  à  la  foule  du  peuple  qui  n'eût  pas  man- 
qué d'envahir  le  théâtre  si  ce  divertissement  avait 
été  donné  au  milieu  de  Paris  ».  Le  chemin  de  Paris 
à  Issy  n'en  fut  pas  moins  couvert  de  carrosses; 
beaucoup  de  gens,  qui  n'étaient  pas  invités,  se  con- 
tentèrent de  se  promener  autour  du  château.  La  Pas- 
torale en  musique  fut  connue  sous  le  nom  d'Opéra 
d'Issij.  Le  succès  immense  de  cette  œuvre,  qui  avait 
été  exécutée  par  des  amateurs,  à  la  lumière  du  jour, 
sans  ballets  el  sans  machines,  détermina  l'établisse- 
ment de  l'Académie  Royale  de  musique. 

Le  30  avril  1059,  Perrin  faisait  part  du  triomphe 
de  la  Pastorale,  représentée  huit  fois  et  toujours 
acclamée,  à  l'abbé  de  la  Hovére,  qui  devait  l'aider  de 
toule  sa  puissance. 

A  Paris,  Mazarin,  fidèle  à  l'opéra  italien,  faisait 
encore  représenter  le  22  novembre  1660,  dans  la 
galerie  du  Louvre,  un  opéra  déjà  célèbre  de  Cavalli, 
Sersc.  ou  Xersc.  Il  mourut  le  9  mars  1661  sans  voir 
l'achèvement  de  la  salle  des  Tuileries.  C'est  dans 
cette  salle  que  passa  le  nouvel  opéra  de  Cavalli, 
Ercole  amante,  avec  des  intermèdes  de  ballet,  où 
figuraient  Louis  XIV  et  la  jeune  reine.  Mais  c'étaienl 
des  opéras  français  qu'on  voulait  alors.  Ainsi,  on 
répétait  Ariane  de  Cambert,  et  on  allait  la  jouer  dans 
la  salle  que  le  cardinal  de  Richelieu  s'élait  l'ait  bâtir 
et  décorer  au  Palais-Royal  pour  la  mise  en  scène  de 
Mira/ne,  quand  Mazarin  mourut. 

Perrin,  dirigé  par  l'abbé  de  La  Rovère,  demande 
des  chanteurs  aux  cathédrales,  fait  élever  le  parterre 
au  niveau  de  la  scène  par  un  moine  augustin  et 
obtient,  le  28  juin  1669,  des  lettres  patentes  donnant 
permission  ou,  pour  mieux  dire,  le  monopole  «  d'é- 
tablir dans  la  ville  de  Paris,  et  autres  du  Royaume, 
des  Académies  de  Musique,  pour  chanter  en  public 
des  pièces  de  Théâtre,  comme  il  se  pratique  en  Ita- 
lie, en  Allemagne  et  en  Angleterre,  pendant  l'espace 
de  douze  années,  avec  liberté  de  prendre  du  Public 
telles  sommes  qu'il  aviseroit,  et  défenses  à  toutes 
personnes  de  faire  chanter  de  pareils  Opéras  ou  re- 
présentations en  Musique  et  en  vers  françois  sans 
son  consentement.  » 

Ces  lettres  portent,  en  outre,  que  ces  opéras  étant 
«  des  ouvrages  de  Musique  totalement  différents 
des  Comédies  récitées,  le  Roi  les  érige  sur  fe  pied 
des  Académies  d'Italie;  que  les  Gentilshommes  et 
Demoiselles  pourront  chanter  audit  Opéra,  sans  que 
pour  ce  ils  dérogent  au  titre  de  noblesse  ni  à  leurs 
privilèges,  charges,  droits,  immunité,  etc.1  ». 

Perrin,  pour  l'exploitation  de  son  privilège,  s'as- 
socia à  Cambert,  au  marquis  de  Sourdéac  et  au 
financier  Champeron.  Ils  mirent  en  répétition,  à 
l'hôtel  de  Nevers,  l'opéra  de  Pomone,  dont  les  paroles 
avaient  été  écrites  par  Perrin  et  la  musique  par  Cam- 
bert, et  qu'ils  tirent  jouer,  le  3  mars  1671,  rue 
Mazarine,  au  jeu  de  paume  de  Bel-Air,  où  devait 
s'installer,  deux  ans  plus  tard,  à  la  mort  de  Molière, 
la  troupe  du  Palais-Royal.  Les  représentations  de 
Pomone,  continuées  pendant  huit  mois,  obtinrent  un 
énorme  succès  et  valurent  des  profits  dont  la  répar- 
tition provoqua  discorde  et  procès  au  sein  de  l'as- 
sociation. 

Le  marquis  de  Sourdéac,  prétexta  des  avances 
qu'il  avait  faites  pour  réclamer,  pour  sa  part  dans 


les  bénéfices,  une  somme  supérieurejaux  30.000  livres 
que  recevait  Perrin.  Les  discussions  déterminèrent  le 
départ  du  marquis,  et  ce  fut  Gilbert  qui  écrivit  une 
autre  pastorale,  les  Peines  et  les  Plaisirs  de J' Amour, 
dont  Cambert  fit  encore  la  musique. 

Le  style  pitoyable  et  les  équivoques  grossières 
auxquelles  se  plaisait  l'amoureux  de  Pomone, 
Priape,  ne  se  retrouvaient  plus  dans  cette  œuvre, 
qui  était  galante,  et  polie.  M11"  Biugogne,  qui  jouait 
Climène  vit  porter  ses  «  gages  »  à  1  200  livres  par 
au,  et  conserva  le  nom  de  «  petite  Climène  ». 

Pendant  ce  temps,  Lulli,  surintendant  de  la  mu- 
sique de  la  chambre  du  roi,  surveillait  ces  discordes 
afin  d'en  profiter.  Venu  de  Florence,  il  avait  su,  à 
foroe  de  tlatteries,  gagner  la  confiance  du  roi; 
voyant  que  ses  attaques  et  ses  anathémes  contre 
Cambert  et  Perrin  n'avaient  pas  entravé  leur  succès, 
il  changea  bientôt  de  procédé,  et  si  les  associés 
avaient  gagné  120  000  livres  dans  leur  exploitation, 
une  telle  fortune  n'eut  pour  effet  que  de  changer  les 
sarcasmes  de  Lllli  en  une  envie  de  s'emparer  sour- 
dement de  l'Opéra. 

Protégé  par  M"'e  de  Monlespan,  Lclli  se  hâta, 
tandis  qu'on  répétait  Arienie  de  Cambert  à  l'Opéra, 
de  coudre  à  la  hâte  des  morceaux,  qu'il  avait  com- 
posés pour  la  chapelle  du  roi,  en  une  seule  pièce, 
intitulée  FiHes  de  l'Amour  et  de  Baeclnts.  Ce  fut  (Jui- 
nault,  que  Lulli  s'était  attaché  comme  librettiste  en 
lui  proposant  l'octroi  d'une  pension  de  4000  livres, 
à  charge  par  lui  d'écrire  chaque  année  un  livret 
nouveau,  qui  mit  au  point  les  Frlesde  l'Amour  et  de 
Bacchus. 

Cet  opéra  terminé,  les  répétitions  d'Ariane  furent 
arrêtées  pour  des  raisons  mal  définies. 

Cambert,  frustré  de  ses  plus  chères  espérances,  em- 
porta son  Ariane  à  Londres  et  la  fit  représenter  avec 
un  grand  succès  devant  le  roi  Charles  II,  qui  lui 
donna  la  surintendance  de  sa  musique;  mais  le 
coup  avait  été  trop  dur  pour  le  malheureux  musi- 
cien, qui  mourut  en  1677,  à  l'âge  de  49  ans. 

L'origine  de  Lilli  n'était  pas  glorieuse.  Né  d'un 
meunier  à  Florence  en  1632,  il  vint  en  France  chez 
Mlle  de  Montpensier.  Reçu  dans  le  salon  de  la  prin- 
cesse à  cause  de  son  talent  de  violoniste,  il  divertis- 
sait tout  le  monde  avec  ses  bouffonneries  et  son 
talent  de  baladin.  11  quitta  Mademoiselle  à  la  fin  de 
1  r>  :  ;  2 ,  ne  voulant  pas  habiter  la  campagne;  mais  son 
insolence  et  ses  manières  furent  bien  pour  quelque 
chose  dans  ce  départ.  Elève  de  Métru,  Roberday  et 
Gigault,  avec  lesquels  il  avait  étudié  l'harmonie,  il 
se  fit  naturaliser  en  1601.  Surintendant  de  la  musi- 
que de  la  chambre  du  roi,  habile,  peu  scrupuleux, 
et  madré,  il  obtint,  le  13  mars  1672,  des  lettres  pa- 
tentes qui  le  substituaient  dans  le  privilège  de  Perrin 
pour  l'opéra  : 

(c  Ayant  été  informé,  disent  ces  lettres,  que  les 
peines  et  les  soins  que  le  Sieur  Perrin  a  pris  pour 
cet  établissement  n'ont  pu  seconder  pleinement  notre 
intention  et  élever  la  musique  au  point  que  nous 
nous  l'étions  promis,  nous  avons  cru,  pour  y  mieux 
réussir,  qu'il  étoit  à  propos  d'en  donner  la  conduite 
à  une  personne  dont  l'expérience  et  la  capacité  nous 
fussent  connues...  A  ces  causes,  bien  informé  de 
l'intelligence  et  grande  connoissance  que  s'est 
acquis  notre  cher  et  bien-aimé  Jean-Baptiste  Lulli 
au  fait  de  la  musique,  nous  avons  audit  sieur  Lulli 
permis  et  accordé,  permettons  et  accordons  par  ces 
présentes  signées  de  notre  main,  d'établir  une  Aca- 
démie Royale  de  musique  dans  notre  bonne  ville  de 


:.;■'. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Paris...  pour  y  faire  des  représentations  devant  nous, 
quand  il  nous  plaira,  des  pièces  de  musique  qui  se- 
ront composées  tant  en  vers  francois  qu'autres  lan- 
gues étrangères...,  pour  en  jouir  sa  vie  durant,  et 
après  lui  celui  de  ses  enfants  qui  sera  pourvu  de 
ladite  charge  de  surinlendant  de  la  musique  de  notre 
Chambre. 

«  Et,  pour  le  dédommager  des  grands  frais  qu'il 
conviendra  faire  pour  lesdiles  représentations,  tant 
à  cause  des  théâtres,  machines,  décorations,  habits, 
qu'autres  choses  nécessaires,  nous  lui  permettons 
de  donner  au  public  toutes  les  pièces  qu'il  aura 
composées,  même  celles  qui  auront  été  représentées 
devant  nous...,  faisant  Irès-expresses  inhibitions  et 
défenses  à  toutes  personnes,  de  quelque  qualité  et 
condition  qu'elles  soient,  même  aux  officiers  de 
notre  maison,  d'y  entrer  sans  payer.  Comme  aussi 
de  faire  chanlenaucune  pièce  écrite  en  musique,  soil 
en  vers  francois  ou  autres  langues,  sans  la  permis- 
sion par  écrit  dudit  sieur  Lulli,  à  peine  de  dix  mille 
livres  d'amende  et  confiscation  des  théâtres,  ma- 
chines, décorations,  habits  et  autres  choses...  Et, 
d'autant  que  nous  l'érigeons  sur  le  pied  de  celles 
des  académies  d'Italie  où  les  gentilshommes  chan- 
tent publiquement  en  musique  sans  déroger,  vou- 
lons et  nous  plaisl  que  tous  gentilshommes  et 
damoiselles  puissent  chanter  auxdites  pièces  et  re- 
présentations de  notre  dite  Académie  Koyale,  sans 
que  pour  ce  ils  soient  censés  déroger  audit  litre  de 
noblesse  et  à  leurs  privilèges... 

«  Révoquons,  cassons  et  annulons  par  ces  dites 
présentes  toutes  permissions  et  privilèges  que  nous 
pourrions  avoir  cy-devant  donnés  et  accordés,  même 
celui  dudit  Sieur  Perrin,  pour  raison  desdites  pièces 
de  théâtre  en  musique,  sous  quelques  noms,  quali- 
tés, conditions  et  prétextes  que  ce  puisse  être...  » 

Le  privilège  de  Lulli  fut  encore  accru  en  1684.  A 
cette  époque,  de  nouvelles  lettres  patentes  défen- 
dirent de  représenter,  dans  toute  l'étendue  du 
royaume,  aucun  opéra  sans  son  autorisation.  Et, 
pour  éviter  de  la  part  des  autres  théâtres  la  moin- 
dre concurrence,  une  ordonnance  du  30  avril  1673 
avait  interdit  aux  comédiens,  qui  chantaient  des 
couplets  au  cours  de  certaines  pièces,  d'avoir  plus 
de  deux  voix  et  six  joueurs  d'instruments. 

«  Sa  Majesté  ayant  été  informée  que  la  permission 
qu'elle  avoit  donnée  aux  comédiens,  de  se  servir 
dans  leurs  représentations  de  musiciens  jusqu'au 
nombre  de  six,  et  de  violons  ou  joueurs  d'instru- 
mens  jusqu'au  nombre  de  douze,  pouvoit  apporter  un 
préjudice  considérable  à  l'exéculion  des  ouvrages  de 
musique  pour  le  théâtre  du  Sieur  Baptiste  Lully, 
surintendant  de  la  musique  de  la  Chambre  de  S.  M., 
dont  le  Public  a  déjà  reçu  beaucoup  de  satisfaction, 
et  voulant  qu'elle  ait  toute  la  perfection  qu'elle  en 
doit  espérer,  Sa  Majesté  a  révoqué  la  permission 
qu'elle  avoit  donnée  auxdits  comédiens  de  se  servir 
sur  leur  théâtre  de  musiciens  et  de  douze  violons  ou 
joueurs  d'inslrumens,  et  leur  permet  seulement 
d'avoir  deux  voix  et  six  violons  ou  joueurs  d'intru- 
mens  ;  fait  Sa  Majeslé  très  expresses  défenses  à  toutes 
les  troupes  des  comédiens  francois  et  étrangers, 
établies  ou  qui  s'établiront  ci-après  dans  sa  bonne 
ville  de  Paris,  de  se  servir  d'autres  musiciens  ex- 
ternes, et  de  plus  grand  nombre  de  violons  pour 
les  Enlr'actes,  même  d'avoir  aucun  Orquestre,  ni 
pareillement  de  se  servir  d'aucuns  Danseurs,  le  tout 
à  peine  de  désobéissance;  veut  Sa  Majesté  que  la 
présente  Ordonnance  soit  signifiée  aux  Chefs  desdites 


troupes,  à  la  diligence  dudit  Lully,  à  ce  qu'ils  n'en 
ignorent,  lui  enjoignant  S.  M.  de  l'informer  des 
contraventions  à  la  présente  Ordonnance. 

«  Fait  à  Saint-Germain  en  Laye  le  trentième  jour  d'avril  1673. 
«  Signé  :  Louis. 
«  Et  plus  bas  :  Colbert.  Et  scellé.  » 

Les  dispositions  de  cette  ordonnance  ayant  ét« 
violées,  elles  furent  renouvelées  le  21  mars  1675  et 
le  27  juillet  1682. 

"  Sa  Majesté  ayant  été  informée  qu'au  préjudice  de 
son  Ordonnance  du  trentième  jour  d'avril  mil  six  cens 
soixante-treize,  qui  fait  défenses  à  tous  Comédiens 
de  se  servir  de  Musiciens  externes,  quelques-uns 
ne  laissent  pas  de  faire  chanter  sur  leur  théâtre 
des  Musiciens,  qu'ils  prétendent  n'être  pas  externes, 
sous  prétexte  qu'ils  sont  à  leurs  gages,  et  empê- 
chent par  ce  moyen  que  les  ouvrages  de  musique 
pour  le  théâtre  du  Sieur  Lully.  Surintendant  de  la 
Musique  de  la  Chambre  de  Sa  Majeslé,  ne  puissent 
avoir  tout  le  succès  qu'on  en  doit  attendre;  à  quoy 
voulant  pourvoir,  sa  Majesté  a  ordonné  et  ordonne, 
veut  et  enlend  que  ladite  Ordonnance  du  trentième 
jour  d'avril  mil  six  cens  soixante-treize  soit  exécu- 
tée selon  sa  forme  et  teneur;  ce  faisant,  permet 
ausdils  Comédiens  de  se  servir  de  deux  Comédiens 
de  leur  troupe  seulement  pour  chanter  sur  le  théâ- 
tre, et  leur  fait  tres-expresses  défenses  de  se  servir 
d'aucuns  Musiciens  externes,  ou  qui  soient  à  leurs 
gages,  à  peine  de  désobéissance.  Enjoint  Sadile 
Majesté  au  Lieutenant  de  Police  de  tenir  la  main 
à  l'exécution  de  la  présente  Ordonnance.  » 

«  Fait  h  Sjmt-Germain-en-Laye  le  21  mars  1675. 
«  Siyii^  :  Louis. 
«  Et  plus  bas  :  Colbert.  » 

«  Sa  Majesté  étant  informée  qu'au  préjudice  des 
défenses  qui  ont  été  ci-devant  faites  aux  Troupes  de 
ses  Comédiens  François  et  Italiens,  d'avoir  dans  la 
représentation  de  toutes  sortes  de  pièces  de  théâtre 
plus  de  deux  voix  qui  doivent  être  de  leur  Troupe, 
el  six  violons  sans  aucuns  Danseurs,  lesdits  Comé- 
diens ne  laissent  pas  de  contrevenir  aux  Ordonnan- 
ces qui  ont  été  rendues  à  cet  elTel,  en  se  servant  de 
voix  externes,  en  mettant  un  plus  grand  nombre  de 
violons,  et  même  faisant  faire  des  entrées  de  Balets, 
el  autres  Danses  :  A  quoy  Sa  Majesté  voulant  pour- 
voir, Sa  Majeslé  en  confirmant  ses  Ordonnances  des 
trente  avril  1073  el  21  mars  1675,  a  fait  Irès-expres- 
ses inhibitions  et  défenses  auxdits  Comédiens  Fran- 
çois et  Italiens,  de  se  servir  d'aucunes  voix  externes, 
pour  chanter  dans  leurs  représentations,  ni  de  plus 
de  deux  voix  d'entr'eux;  comme  aussi  d'avoir  un  plus 
grand  nombre  de  violons  que  six.  ni  de  se  servir 
d'aucuns  Danseurs  dans  lesdites  représentations, 
sous  quelque  prétexte  que  ce  soit;  à  peine  de  cinq 
cens  livres  d'amende  pour  chaque  contravention,  au 
profit  de  l'Hôpital  General  de  ladite  Ville  de  Paris; 
enjoint  Sa  Majesté  au  Sieur  de  La  Keynie,  Lieute- 
nant General  de  Police,  de  tenir  la  main  à  l'exécu- 
tion de  la  présente  Ordonnance,  qui  sera  à  cet  effet 
publiée  et  affichée  par-lout  où  besoin  sera. 

«  Fait  ;'i  Versailles,  le  vingt-septième  juillet  1682. 
«  Signé  :  Louis. 
«  Et  plus  bas  :  Colberl.  » 

Après  son  traité  avec  Quinault,  cité  plus  haut, 
Lulli  fit  construire  un  théâtre  dans  le  jeu  de  paume 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3765 


de  Bel-Air,  rue  de  Vaugirard.  L'ouverture  en  eut  heu 
le  lo  novembre  1672,  avec  Les  Fêtes  de  l'Amour  et 
de  Baechus;  plusieurs  seigneurs  de  la  Cour,  selon 
le  vœu  du  roi,  dansèrent  dans  les  ballets. 

Après  avoir  congédié  le  marquis  de  Sourdéac  et 
Gilbert,  Lulli  fit  représenter  successivement  Cadmus 
et  Alceste,  sur  des  livrets  écrits  par  Quinault  dans 
la  façon  des  opéras  italiens,  c'est-à-dire  avec  des 
scènes  comiques  se  mêlant  à  l'action  du  drame. 

C'est  ainsi  que,  dans  Alceste,  Straton  et  Lycas  sont 
des  personnages  boulions. 

Le  17  février  1673,  à  la  mort  de  Molière,  Lulli  se 
lit  accorder  par  le  roi  la  salle  du  Palais-Royal,  où 
l'Opéra  devait  rester  jusqu'en  1781. 

11  y  fit  son  entrée  le  15  juin  1673,  après  être  passé 
par  le  jeu  de  paume  de  la  Bouteille.  C'est  là  qu'il 
forma  peu  à  peu  un  orchestre  de  musiciens  et  parti- 
culièrement de  violonistes  habiles.  En  1681,  à  la  re- 
présentation du  Triomphe  de  l'Amour,  de  Benserade 
et  Quinault  pour  les  paroles,  et  de  Lulli  pour  la  mu- 
sique, apparurent  pour  la  première  fois  sur  la  scène, 
des  danseuses  qui  remplirent  les  rôles  de  femmes. 

M110  de  Lafontaine  y  fut  proclamée  la  reine  de  la 
danse.  Le  directeur  n'était  pas  seulement  un  habile 
courtisan,  il  s'entendait  à  merveille  à  régler  tous  les 
éléments  d'une  organisation  lyrique,  mais  son  inté- 
rêt personnel  lui  fit  ignorer  les  autres  musiciens,  et 
pendant  quatorze  ans,  il  ne  fit  entendre  que  ses 
propres  œuvres.  La  mise  en  scène  tenait  alors  une 
place  considérable  à  l'Opéra,  car  ce  genre  de  specta- 
cle était  moins  composé  en  vue  de  la  musique  qu'en 
raison  des  machines  qui  devaient  servir  au  faste 
de  la  pièce.  On  parlait  de  la  décoration,  du  costume, 
du  talent  des  acteurs,  qu'on  n'appelait  jamais  chan- 
teurs. C'était  la  comédie  des  machines  qu'on  applau- 
dissait et  la  musique  semblait  secondaire  au  public 
français. 

Les  Fêtes  de  l'Amour  et  de  Baechus,  Cadmus,  Alceste, 
Thésée,  Alys,  appelé  l'opéra  du  roi,  Isis,  Psyché, 
Bellérophon,  Proserpine,  Le  Triomphe  de  l'Amour,  Ver- 
sée, Phaéton,  Amiidia  de  Gaule,  Roland,  Armide,  dil 
l'opéra  des  dames,  furent  joués  successivement  «le 
1672  jusqu'à  la  mortde  Lulli,  qui  survint  le  22  mars 
1687.  Son  dernier  ouvrage,  Acis  et  Galathêe,  ne  fut 
représenté  que  six  mois  après  sa  mort.  Atys  était 
considéré  comme  le  chef-d'œuvre  de  Lulli. 

Le  roi  venait  fréquemment  au  théâtre  et  s'entrete- 
nait volontiers  avec  les  chanteurs,  s'amusant  des 
outrecuidances  du  ténor  Gave,  et  excusant  l'ivresse 
légendaire  du  baryton  Thévenard,  qui,  sans  souci  du 
mouvement  ni  du  rythme,  hâtait  son  débit,  pour 
la  grande  joie  du  public,  qui  venait  entendre  des 
comédiens  chanter  d»s  pièces  à  machines  plutôt 
qu'une  musique  qu'il  ne  comprenait  guère. 

La  troupe  de  l'Opéra  était  alors  des  plus  brillantes. 
Rossignol,  Bëaumavielle,  Hardouin  et  Laforèt  s'y 
distinguaient.  Le  cuisinier  Dumesnil  y  débuta  dans 
Isis,  et  partagea  l'emploi  de  ténor  avec  Clédière 
qu'il  devait  éclipser,  lljlui  fallait  six  bouteilles  de 
Champagne  à  chaque  représentation.  Mais  le  virtuose 
favori  de  Louis  XIV  était  le  ténor  aigu  Boutelou  qui 
ne  parvint  jamais  au  premier  rôle,  à  cause  de  sa  fai- 
blesse de  comédien,  tant  il  est  vrai  que  l'exécution 
musicale  comptait  peu. 

MUe  de  Cartilly,  qui  avait  créé  Pomone,  ne  put 
résister  à  l'assaut  des  «  actrices  chantantes  »  qui 
vinrent  à  sa  suite  :  Mu"  Brigogne,  Aubry,  La  Garde, 
Bony,  Caillot,  Rebel,  Verdier,  qui  débuta  à  quinze 
ans  dans  Ati/s;  M""  de  Saint-Christophe,  qui  chanta 


pendant  un  demi-siècle,  après  avoir  été  femme  de 
chambre  d'Henriette  d'Angleterre,  duchesse  d'Or- 
léans. 

Mrae  Piesche,  titulaire  du  rôle  de  Vénus,  Mlle  Loui- 
son  Moreau,  connue  dans  Proserpine,  et  sa  sœur 
Fancho.n,  lancée  par  Phaéton.  Enfin,  la  virtuose  par 
exellence,  Marthe  Le  Rochois,  l'élève  préférée  de  Lulli, 
qui  remplit  le  rôle  d'Aréthuse  de  Proserpine,  en  1680. 
Tragédienne  et  cantatrice,  elle  vit  son  maître  com- 
poser pour  elle  l'opéra  d Armide,  et  comme  elle  avait 
les  bras  fort  maigres,  et  la  peau  bise,  elle  s'habilla 
avec  des  manches  longues  à  la  persienne,  qui  prirent 
le  nom  d'Amadis,  à  cause  de  l'opéra,  qu'elle  avait 
créé  en  1684.  Lorqu'elle  prit  sa  retraite  en  1698,  elle 
eut  mille  livres  de  rente  à  l'Opéra.  La  danse  avait  eu 
sa  place  à  l'Opéra,  dès  son  ouverture,  dans  Orfeo  et 
Pomone,  mais  elle  n'avait  qu'un  rôle  secondaire.  On 
avait  trouvé  des  virtuoses  dans  les  cathédrales,  des 
choristes  dans  les  églises,  mais  pour  le  ballet,  des 
difficultés  surgissaient.  On  avait  eu  recours  aux 
maîtres  à  danser,  parmi  lesquels  ne  se  trouvait 
aucune  femme,  si  bien  que  c'était  de  jeunes  gar- 
çons qui  figuraient  en  costume  féminin.  Pour  rendre 
plus  vraisemblables  ces  travestis,  les  nymphes  et  les 
bergères  étaient  masquées.  Ce  ne  fut  que  dix  ans 
plus  tard,  que  les  danseuses  apparurent,  avec  Ma- 
dame la  Dauphine,  la  Princesse  de  Conli  et  Made- 
moiselle de  Nantes,  dans  le  Triomphe  de  l'Amour. 
Le  personnel  de  l'école  de  danse  se  composait  de 
quatre  demoiselles,  MII|!S  Roland,  Lepeintre,  et  Fer- 
non,  et  nous  avons  dit  le  succès  de  M1|c  de  Lafon- 
taine.  Des  Italiennes  vinrent  ensuite,  Mlle  Bigot- 
rim,  ainsi  que  M"05  Taglioni,  Cerrito  et  Rosati. 

Les  danseurs  étaient  également  remarquables  — 
Beauchamps,  Saint-André,  Favier,  Lapierre,  puis  Pé- 
court,  furent  premiers  danseurs  à  l'Opéra.  Lulli  ré- 
glait les  danses,  il  animait  ses  artistes,  exigeait  des 
allures  vives  et  joyeuses,  et  montrait  lui-même  les 
pas  qu'il  fallait  faire. 

On  dil  que  sa  mort  (22  mars  1687)  fut  la  consé- 
quence d'un  mouvement  de  colère;  eu  voulant  mar- 
quer trop  fortement  le  rythme  d'une  danse  avec  sa 
canne,  il  se  serait  frappé  au  pied,  et  la  gangrène 
aurait  rendu  celte  blessure  morlelle  :  il  avait  gagné 
800  000  livres  eu  dix-neuf  ans. 

Aussitôt  après  la  mort  de  Lulli,  les  musiciens 
français,  qui  avaient  été  éloignés  de  la  scène  depuis 
1672,  réclamèrent  sa  succession.  Ce  fut  le  gendre  de 
Lulli,  Francini,  lequel  se  fit  appeler  Monsieur  de  Fran- 
cine,  qui  triompha,  le  27  juin,  mais  il  se  contenta 
d'administrer  son  théâtre  jusqu'en  1728.  Ses  beaux- 
frères,  Louis  et  Jean-Louis  Lulli,  se  bornèrent  à  la 
composition  d'un  Orphée,  en  1690,  et  à'Aleide,  com- 
posé en  collaboration  avec  Marais,  en  1693. 

Sous  la  régie  de  Francine,  auquel  on  avait  adjoint 
Dumont  en  1698,  fut  établi  le  règlement  très  impor- 
tant du  11  janvier  1713,  qui  forme  comme  la  base  de 
l'organisation  administralive  de  l'Opéra,  et  que  vint 
compléter  et  modifier  quelque  peu  celui  du  19  ne 
vembre  1714'. 

En  mettant  à  part  les  dispositions  touchant  la  dis- 
cipline intérieure,  édictées  à  charge  d'amendes  pour 
les  contrevenants,  nous  devons  signaler  dans  ces 
règlements  : 

La  création  d'une  Ecole  de  Musique,  d'une  Ecole 
de  Danse,  et  d'une  autre  d'Instruments,  toutes  trois, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  CONSERVATOIRE 


gratuites,  ayant  pour  but  de  préparer  des  artistes  au 
recrutement  de  l'Académie; 

L'institution  d'un  fonds  de  réserve  de  15  000  livres 
devant,  être  distribué  sous  forme  de  gratifications 
aux  acteurs  et  actrices  de  musique  et  de  danse,  aux 
hommes  et  filles  des  chœurs,  et  aux  symphonistes 
de  l'orchestre  qui  se  distingueraient  plus  particu- 
lièrement par  leur  capacité  et  par  leurs  services; 

L'institution  d'un  fonds  de  réserve  de  10  000  livres, 
affecté  aux  pensions  des  acteurs,  actrices  et  autres 
gens  dé  musique  et  de  danse,  des  symphonistes  de  l'or- 
chestre, etc.,  qui,  après  être  restés  pendant  quinze 
ans  à  la  disposition  de  l'Académie,  seraient,  par  leur 
âge  et  leurs  infirmités,  hors  d'étal  de  continuer  leurs 
services;  lesdits  sujets  devant  être  reçus  immédia- 
tement à  la  pension,  comme  dispensés  de  la  règle 
des  quinze  ans,  s'ils  venaient  à  être  estropiés  au 
service  de  l'Académie;  la  pension  devant  s'élever  à 
mille  I  ivres  au  profit  de  ceux  d'entre  eux  qui  auraient 
perçu  des  appointements  de  quinze  cents  livres,  et 
demeurant  fixée,  pour  les  autres,  à  la  moitié  de 
leurs  appointements;  enfin,  ce  fonds  de  réserve  de 
dix  mille  livres  ne  pouvant  en  aucun  cas  être  aug- 
menté, de  telle  sorte  que,  en  supposant  qu'il  fût 
rempli,  les  postulants  devaient  attendre  qu'il  se  pro- 
duisit une  vacance  parmi  le  nombre  des  pensions 
déjà  fournies. 

Suivant  états  dressés  d'autre  part,  la  composition 
du  personnel  et  le  chiffre  des  appointements  alloués 
se  trouvaient  établis  de  manière  à  ne  pouvoir  souf- 
frir aucune  modification  qu'en  vertu  d'une  ordon- 
nance royale. 

Les  droits  d'auteur,  aussi  bien  pour  le  poète  que 
pour  le  compositeur,  étaient  arrêtés  à  100  livres 
par  chacune  des  dix  premières  représentations,  de 
leur  ouvrage,  et  à  oO  livres  par  chacune  des  vingt  re- 
présentations suivantes,  sans  que  l'un  ou  l'autre  put 
prétendre  à  une  allocation  supplémentaire,  quelque 
durable  que  fût  le  succès.  Pareillement,  les  auteurs 
des  ballets  et,  îles  pièces  en  trois  actes  devaient  tou- 
cher 00  livres  par  chacune  des  dix  premières  reprér 
sentations,  et  30  livres  par  chacune  des  vingt  sui- 
vantes. 

D'après  le  règlement  de  1711,  l'arrangement  des 
pièces  devait  être  fait  six  mois  avant  la  première 
représentation  de  l'hiver,  et  six  mois  avant  la  pre- 
mière représentation  de  l'été,  en  sorte  que  le  plan 
d'hiver  fût  toujours  arrêté  dans  la  semaine  de 
Pâques,  et  le  plan  d'été  dans  le  cours  de  novembre. 
La  saison  d'hiver  devait  s'ouvrir  le  24  octobre  au 
plus  tard,  par  une  nouvelle  tragédie.  Dès  que  celle-ci 
cesserait  de  produire  suffisamment  deux  semaines 
de  suite,  elle  serait  remplacée  par  un  ancien  opéra 
de  Lulli.  Si  elle  pouvait  être  poussée  jusqu'au 
Carême,  on  jouerait  une  troisième  pièce,  au  lieu  de 
recourir  aux  œuvres  de  Lulli. 

De  même,  pour  les  représentations  d'été,  si  la 
dernière  pièce  ne  pouvait  être  conduite  au  delà  de 
Pâques,  on  commencerait  toujours  le  lendemain 
de  Quasimodo  par  une  tragédie  nouvelle  ou  par  un 
opéra  de  Lulli,  et  l'on  tiendrait  prête  une  troisième 
pièce  pour  le  cas  où  les  autres  ne  pourraient  pour- 
suivre une  assez  longue  carrière. 

Quant  à  l'administration  de  l'Académie,  elle  était 
confiée  à  une  direction  agissant  sous  le  contrôle 
incessant  d'un  inspecteur  général.  Ce  dernier  devait 
donner  son  approbation  pour  le  choix  des  artistes 
et  pour  la  distribution  des  rôles;  tenir  la  main  à  ce 
que  toutes  les  dispositions  concernant  la  police  inté- 


rieure fussent  observées;  concourir  d'une  façon 
générale  à  toutes  les  décisions  que  pourrait  prendre 
la  direction  et  y  mettre  son  visa;  rendre  compte  au 
roi  des  contraventions  commises  à  rencontre  des 
règlements,  de  l'opportunité  des  gratifications,  de  la 
vacance  des  pensions,  etc.,  etc. 

Il  faut  reconnaître  que  ces  règlements  s'inspirent 
d'une  précision  remarquable.  I  ne  expérience  de 
vingt  années  déjà  commandait,  sans  doute,  des  ré- 
formes d'organisation,  et  une  prévoyance  plus  avisée 
devant  des  difficultés  appelées  à  se  renouveler.  Le 
préambule  du  règlement  de  1713  fait  ressortir  que 
l'Académie  était  surchargée  de  dettes  considérables, 
et  certaines  révélations  laissent  à  entendre  que  le 
public  était  en  droit  de  se  plaindre  de  l'indécision  et 
des  lenteurs  des  régies  précédentes.  Mais  la  substi- 
tution de  ces  prescriptions  souveraines  à  l'initiative 
directoriale  désormais  étouffée  pouvait-elle  préser- 
ver l'avenir  des  passifs,  et  profiter  à  l'Art  lui-même'.' 
Que  penser  de  ce  contrôle  de  l'inspecteur  général, 
déguisant  une  gestion  commune  et  présageant  d'iné- 
vitables conflits?  De  ces  plans  d'hiver  et  d'été  arrê- 
tés pour  ne  point  varier?  De  la  fixation  arbitraire 
et  injuste  des  droits  d'auteur  que  la  trentième 
représentation  faisait  à  jamais  cesser,  quel  que  lut 
le  succès  de  l'ouvrage?  Lutin,  de  ce  fonds  bien  insuf- 
fisant de  10.000  livres  mis  en  réserve  pour  les  pen- 
sions, et  qui,  une  fois  employé,  ne  laissait  aux  anciens 
artistes  que  l'espoir  d'une  vacance? 

Au  point  de  vue  de  l'exploitation  théâtrale,  et  en 
dehors  du  point  de  vue  administratif,  la  direction 
de  M.  de  Franchie  fut  déplorable,  et  elle  se  solda 
par  un  déficit  de  380.000  livres.  Les  représentations 
données  par  les  lîls  de  Lulli,  dont  les  œuvres  n'é- 
chappèrent au  sifflet  que  par  la  protection  de  la 
police,  furent  le  prétexte  d'épigramraes  incessantes 
contre  la  nouvelle  direction. 

Colassr,  qui  se  livrait  à  l'alchimie  et  qui  en  mou- 
rut en  1699,  alors  qu'il  avait  pris  la  direction  de  l'O- 
péra de  Lille,  lit  représenter  Achille  et  Polyxène, 
Thétis  et  Pelée  et  Canente.  Mais  ces  opéras  subirent 
les  critiques  les  plus  graves,  car  on  reprochait  à 
Colasse  d'emprunter  de  trop  près  les  mélodies  de 
Lulli. Il  écrivit  Aslrée  sur  des  paroles  de  La  Fontaine 
en  1691.  Le  librettiste  lui-même  renonça  à  assister  à 
la  fin  de  la  première  représentation,  tant  le  premier 
acte  l'avait  prodigieusement  ennuyé. 

Un  Florentin,  Teobaldo  di  Gatti,  basse  de  viole  à 
l'Opéra,  lit  à  son  tour  représenter  Coronis  en  1691  et 
a  i7oi. 

Un  violiste  fameux,  Marin  Marais,  écrivit  Ariane, 
Alcyone  et  Sémélé,  de  1696  à  1709;  le  surintendant 
de  la  musique  de  Philippe  V,  roi  d'Espagne,  Des- 
marets,  donna  Didon,  Circè,  Thêagéne  et  Charictie. 

D'autres  ouvrages  encore,  écrits  par  un  élève  de 
Carissimi,  M.  A.  Charpentier,  tels  que  ttédée  (1693), 
n'eurent  pas  plus  de  succès,  malgré  la  voix  de 
M"e  Desmatins,  ancienne  laveuse  d'écuelles  à  l'au- 
berge du  Plat  d'Etain,  qui  mourut  en  1705  pour 
«  s'être  fait  enlever  neuf  livres  de  graisse  qui  la 
gênaient  pour  la  scène'.  » 

Le  succès  parut  revenir  à  l'Opéra  en  1697,  avec 
l'Europe  galante  de  Campra,  sur  un  livret  de  La  Motte, 
dans  laquelle  Marthe  Le  Uocuois,  créa  le  rôle  de 
Roxane,  et  avec  un  autre  opéra  du  même  composî- 
teur,  Tancrùde,  où  triompha  M"e  Maupin.  Cette  chan- 
teuse, qui  eut  les  plus  grands  succès,  était  une  ama- 


1.  Custil-Buze,  L'Aeaiti'mir  /,iipf>riiileilemuti'iue.lome  l.pagi- li-'. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    37 


zone  redoutable  et  une  guerrière  audacieuse.  Elle 
avait  failli  être  brûlée  vive  à  Avignon,  pour  avoir 
incendié  un  couvent  dont  elle  voulait  enlever  une 
jeune  recluse.  Son  talent  et  sa  beauté  lui  assurèrent 
le  saint,  et  le  roi  lui-même  vint  assister  à  ses  pre- 
mières représentations. 

Campra  lit  représenter  dix-neuf  opéras;  le  Carnaval 
de  Venise,  les  Fêtes  Vénitiennes,  le  Ballet  des  <;</es. 
Hésione,  Alcine,  Télèphe,  Camille,  Tancréde,  ïphigénie 
en  Tauride  réussirent  particulièrement.  Mais  la  dis- 
cipline de  l'orchestre  n'était  plus  la  même,  et  chaque 
soir  lis  musiciens  étaient  apostrophés  par  le  par- 
terre ;  c'est  à  ces  siftlets  persistants  qu'est  due 
l'origine  du  mot  brioche,  dans  le  sons  de  bévue  mu- 
sicale. 

Les  symphonistes  résolurent  de  s'infliger  des 
amendes  de  six  sols  pour  chaque  faute  commise  pen- 
dant les  représentations.  A  la  lin  du  mois,  on  achetait 
avec  le  total  de  ces  amendes  une  immense  brioche, 
en  «  ayant  soin  de  l'arroser  convenablement  »,etles 
coupables,  tous  ceux  qui  avaient  eu  a  paver  quelque 
amende,  porlaient  à  leur  boutonnière  une  petite 
brioche  en  carton. 

Un  autre  compositeur  d'opéras.  Destouches,  mous- 
quetaire, eut  la  chance  que  son  Usé,  représentée  en 
1697,  plut  au  roi,  et  dès  lors,  il  musiqua  quelques 
livrets  que  la  faveur  du  roi  imposa. 

La  duchesse  du  Maine  eut  !  idée  do  ballet  panto- 
mime, et  lit  mettre  le  quatrième  acte  d'Horace  de 
Corneille  en  musique  par  Mouret;  I'.alon  et  M'  "  Pré- 
vost, danseurs  de  l'Opéra,  mimèrent  cet  acte  à  Sceaux. 
Cel  essai,  fait  en  1708,  devint  un  des  intermèdes  des 
Nuits  de  Sceaux  et  détermina  l'apparition  de  Pyg- 
malion  et  d'Ariane,  dus  à  M"0  Salle. 


Francine  et  Dumont,  toujours  à  court  d'argent  de- 
puis 1687,  avaient  à  plusieurs  reprise-,  cédé  leur  pri- 
vilège, d'abord  à  Pceourt  et  Belleville,  qu'ils  dépos- 
sédèrent bientôt,  puis  à  Guyenet,  payeur  de  rentes, 
en  1704,  afin  de  pouvoir  liquider  les  deltes  qui  s'é- 
levaient à  380780  livres,  et  toucher  des  pensions 
fixées  pour  Franchie  à  15  000  livres  et  pour  Dumont 
à  6  000.  lîuiné.  Guyenet  mourul  de  chagrin  en  1712, 
au  Palais-Royal,  où  il  s'étail  réfugié  pour  échapper 
aux  poursuites  de  ses  créanciers.  Il  avait  pourtant 
essayé  de  combler  son  passif  en  cédant  le  privilège 
déjouer  des  opéras  à  des  théâtres  secondaires  ou 
même  à  des  forains1. 

A  la  mort  de  Guyenet,  Francine  et  Dumont,  qui 
n'avaient  pas  abandonné  leur  privilège,  mais  l'a- 
vaient cédé  provisoirement,  reprirent  l'exploitation 
du  théâtre  pour  la  rejeter  bientôt  entre  les  mains 
des  syndics  de  la  liquidation  Guyenet. 

Le  2  décembre  1715,  le  duc  d'Antin  fut  investi  de 
la  haute  régie  de  l'Opéra,  par  lettres  patentes  don- 
nées à  Vincennes,  et  la  dilapidation  continua.  Fran- 
cine garda  son  privilège  jusqu'en  1728,  date  à 
laquelle  il  fut  remplacé  par  Destouches.  La  fin  du 
règne  de  Louis  XIV  et  le  début  de  la  Régence 
furent  marqués  par  une  innovation  destinée  à  ap- 
porter quelque  argent  dans  la  caisse  du  théâtre. 

Le  chevalier  de  Bouillon  avait  imaginé  des  diver- 
tissements masqués,  qui  devaient  faire  grand  bruit 
et  que  le  scandale  devait  tuer.  Son  projet  lui  valut 
une  pension  de  6000,  livres,  et  il  inventa  une  ma- 


1.  Voir  le  chapitre  relatif  ; 


chine  destinée  à  amener  le  parterre  aujniveau  de  la 
scène.  Bès  le  premier  bal,  le  Régent  vint,  accompagné 

du  duc  de  Noailles,  et  ne  fui  point  choqué  des  orgies 
qui  s'y  déroulaient.  Le  conseiller  d'Etat  Rouillé  y 
était  ivre  et  le  duc  de  Noailles  lui-même  suivit  son 
exemple.  Par  ordonnance  du  31  décembre  1715,  le 
Régent  établit  les  bals  masqués  qui  avaient  lieu, 
trois  fois  par  semaine,  à  dater  de  la  Saint-Martin 
jusqu'au  carnaval.  La  salle  fui  ornée  de  lustres, 
deux  orchestres  y  jouaient,  les  danseurs  de  l'Opéra 
exécutaient  des  mascarades  plaisantes,  deux  contre- 
danses nouvelles,  les  Calotins  et  la  Farandoule.  dé- 
chaînèrent l'enthousiasme,  ainsi  que  les  ftats,ieanni 
qui  saute.  Liron-Liretlc,  le  Poivre  et  la  Monaco. 

Le  Régent  était,  plus  que  tous  autres,  engoué  de 
ces  bals;  c'est  ainsi  qu'un  jour,  alors  qu'on  venait 
lui  annoncer  la  conjuration  d'Espagne  menée  par 
d'Albéroni  et  la  duchesse  do  Maine,  à  l'heure  du 
bal,  il  remit  au  lendemain  les  affaires  de  l'Etat  pour 
le  souper  qui  l'attendait.  Cette  négligence  du 
prince  est.  incompréhensibh  mon  dans 

-es  1/.  moires. 


LA  COMÉDIE   ITALIENNE   ET  LES   PETITS  THÉÂTRES 

L'hôtel  de  Bourgogne,  que  les  événements  avaient, 
laissé  désert,  fui  uns  à  la  disposilion  des  Italiens  qui 
jouaient  naguère  à  l'hôtel  Guénégaud,  alternative* 
ment  avec  la  Troupe  du  Hoi.  Ils  louchèrent  800  livres 
de  pension  des  Comédiens  Français,  à  dater  de  1680, 
en  vertu  d'un  ordre  du  duc  .le  Créqui,  à  raison  de 
ce  que  leur  loyer,  à  l'hôtel  de  Bourgogne,  était  plue 
élevé  que  celui  qu'ils  payaient  à  l'hôli  I  Gué  tégaiïd?. 
—  Richelieu  n'avait  pas  menti.-  grand  goût  pour 
les  bouffonneries  ultramonNin.es.  Mais  Ma/arin  s'é- 
tait prêté  à  leur  envahissement.  Au  Marais,  au  Petlt- 
liourbon.  au  Palais-Royal,  à  l'hôtel  Guénégaud,  par- 
tout avaient  trouvé  place  Pantalon,  Arlequin,  le 
Mezzetin  et  Colombine,  pour  leurs  parades  improvi- 
sées. Nous  savons,  par  Angelo  Constantin!3,  qu'une 
de  ces  troupes  italiennes  recevait  de  S  i  .Majesté  une 
subvention  de  13  000  livres.  Ni  la  Troupe  du  Roi,  ni  la 
lyale  n'avaient  bénéficié  d'une  aussi  large 
faveur  ! 

L'escroc  Tiberio  Fiorelli,  dit  Scaramouche,  Tri- 
velin,  Dominique,  Constantini  étaient  tenus  fort  en 
honneur  et  venaient  souvent  jouer  à  la  Cour. 

Non  contents  de  jouer  en  italien,  ils  s'étaient  mis 
aussi  à  jouer  en  français,  liberté  qui  portait  atteinte 
aux  droits  des  Comédiens  nationaux.  On  plaida  de- 
vant le  roi,  Baron  pour  les  Comédiens  français, 
Dominique  pour  les  italiens.  Le  moment  venu,  pour 
Dominique,  de  s'expliquer  :  «  Sire,  demanda-t-il, 
comment  parlerai-je'.'  —  Parle  comme  tu  voudras,  >> 
répondit  le  roi.  Sur  quoi  l'astucieux  péninsulaire  s'é- 
cria qu'il  ne  voulait  rien  de  plus,  et  qu'il  avait 
gagné  sa  cause.  Louis  XIV  sourit  et  ne  s'en  dédit 
point. 

Racine,  dans  la  préface  des  Plaideurs,  déclare 
qu'il  avait  eu  un  instant  l'idée  d'écrire  une  pièce 
pour  le  talent  de  Scaramouche. 

Les  Italiens  gardèrent  l'hôtel  de  Bourgogne  jus- 
qu'en 1697.  A  cette  époque,  ils  représentèrent  une 
comédie  intitulée  la  Fausse  Prude.  Mme  de  Maintenon 
s'y  trouvait  quelque  peu  en  cause,  et  cette  fantaisie 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


coûta  cher.  Le  théâtre  fut  fermé  et  la  troupe  exilée. 
Voici  ce  que  Saint-Simon  raconte  à  ce  sujet  :  «  Le 
roi  chassa  fort  précipitamment  toute  la  troupe  des 
comédiens  italiens,  et  n'en  voulut  plus  d'autre.  Tant 
qu'ils  n'avoient  fait  que  se  déhorder  en  ordures  sur 
leur  théâtre,  et  quelquefois  en  impiétés,  on  n'avoit 
fait  qu'en  rire;  mais  ils  s'avisèrent  de  jouer  une 
pièce  qui  s'appeloit  la  Fausse  Prude,  où  Mme  de  Main- 
tenon  fut  aisément  reconnue.  Tout  le  monde  y  cou- 
rut, mais  après  trois  ou  quatre  représentations,  qu'ils 
donnèrent  de  suite,  parce  que  le  gain  les  y  engagea, 
ils  eurent  ordre  de  fermer  leur  théâtre,  et  de  vider 
le  royaume  en  un  mois.  Cela  fit  grand  bruit,  et,  si 
ces  comédiens  y  perdirent  leur  établissement  par 
leur  hardiesse  et  leur  folie,  celle  qui  les  fit  chasser 
n'y  gagna  pas,  par  la  licence  avec  laquelle  ce  ridicule 
événement  donna  lieu  d'en  parler1.  » 

Nous  n'avons  pas  à  examiner  ici  l'influence  que 
purent  exercer  l'une  sur  l'autre  notre  comédie  et  la 
comédie  italienne  vivant  en  un  si  étroit  contact. 
Rappelons  seulement  que,  jusqu'à  l'apparition  des 
troupes  italiennes  en  France,  les  rôles  de  femmes, 
sur  nos  théâtres,  étaient  tenus  par  déjeunes  hommes  ; 
ce  qui,  d'ailleurs,  atténue  grandement  l'idée  qu'on 
pourrait  concevoir  de  l'immoralité  des  farces  de 
jadis.  Ce  furent  les  Isabelles  et  les  Colombines  qui 
donnèrent  à  nos  comédiennes  le  premier  exemple- 
A  la  fin  du  xvne  siècle,  il  n'y  avait  plus  à  Paris  que 
les  rôles  de  vieilles  femmes  qui  fussent  tenus  par 
des  acteurs. 

Signalons  le  court  passage  d'une  troupe  espagnole 
qui,  en  1660,  après  le  mariage  du  roi  et  de  l'infante, 
donna  quelques  représentations  au  Petit-Bourbon, 
mais  sans  aucun  succès.  Elle  parut  ensuite  à  l'hôtel 
de  Bourgogne;  et  comme  les  spectateurs,  n'entendant 
pas  leur  langage,  continuaient  de  s'éloigner,  la  reine 
prit  ses  compatriotes  sous  sa  protection  pour  qu'ils 
vinssent  à  la  Cour.  En  1663,  ils  reçurent  une  pen- 
sion de  32000  livres  et  offrirent,  parait-il,  soixante- 
treize  spectacles. 

En  1661,  M,le  de  Monlpensier  patronna  une  troupe 
française  qui  joua  pendant  quelques  mois  rue  des 
Quatre-Vents,  au  Faubourg  Saint-Germain. 

Au  Collège  de  Clermont2,  les  Jésuites  faisaient 
jouer  fréquemment,  par  leurs  écoliers,  des  tragé- 
dies que  le  public  pouvait  voir,  en  louant  des  places, 
aussi  bien  qu'aux  théâtres  réguliers. 

N'oublions  pas  les  marionnettes  que  Brioché,  leur 
inventeur,  dit-on,  articula  au  Château-Gaillard3, 
vers  1650.  Ni  la  troupe  royale  des  Pygmées,  des 
marionnettes  aussi,  «  qui  n'étoient  pas  seulement 
d'une  grandeur  extraordinaire,  mais  mesme  repré- 
sentant des  comédiens  avec  des  décorations  et  des 
machines  imitant  parfaitement  la  danse  et  faisant 
la  voix  humaine4  ».  Dominique  de  Mormandin,  sieur 
de  la  Grille,  qui  les  faisait  mouvoir,  avait  obtenu  un 
privilège  pour  vingt  années.  Mais  des  poupées  dan- 
sant et  chantant  nuisaient,  parait-il,  au  monopole 
de  Lulli,  qui  les  fit  supprimer.  Nous  croyons  que  ce 
minuscule  théâtre  n'est  autre  que  celui  connu  sous 

i.  Mémoires,  1. 1,  chap,  ixiai,  in  fine. 

î.  Les  Jésuites,  introduits  en  Franco  après  le  concile  de  Trente 
par  Guillaume  Duprat,  évoque  de  Clermont.  avaient  été  autorisés,  en 
1*61,  i  s'établir  à  Paris.  Ils  achetèrent,  grâce  à  certains  legs  en  leur 
faveur  dudit  éveque,  un  terrain  sis  rue  Saint-Jacques  et  qu'on  appe- 
lai! la  Cour  de  Langrcs.  C'est  là  qu'ils  fondèrent  leur  Collège,  eu  1564. 
'■t.  Le  Château-Gaillard,  où  avaient  été  enfermées  Marguerite  et 
Blanche  de  Bourgogne,  et, où  la  première  avait  été  étranglée  en  1315, 
dressait  sa  tour  ronde  sirr*  la  riic  gauche  de  la  Seine,  vers  l'citrèmité 
du  Pont-Neuf.  Il  fut  démoli  sous  Louis  XIV. 


le  nom  de  Théâtre  des  Bamboches,  installé  au  Ma- 
rais en  1677. 

Citons  encore  la  Troupe  royale  du  Grand  Scot  Ro- 
main, qui  était  venue  s'établir  dans  la  rue  Mazarine, 
tout  près  des  Comédiens  ordinaires  du  roi.  Jouiliani 
Scotto,  non  content  de  mettre  en  lumière  ses  mer- 
veilleux talents  de  prestidigitateur,  donnait  aussi, 
sous  le  nom  de  farces,  des  pièces  imitées  des  Ita- 
liens de  l'hôtel  de  Bourgogne.  Les  Comédiens  Fran- 
çais, impuissants  contre  ceux-ci,  s'en  prennent  du 
moins  à  leur  parodie.  En  1681,  en  vertu  d'une  sen- 
tence de  police  du  13  mars,  ils  réduisent  le  Grand 
Scot  à  ses  tours  d'escamotage. 

Enfin,  il  y  avait  grande  quantité  de  loges  à  la  foire 
Saint-Germain  et  à  la  foire  Saint-Laurent b.  La  lutte 
des  Comédiens  Français  contre  la  pauvre  concur- 
rence des  spectacles  forains  fut  une  guerre  longue, 
incessante  et  sans  merci6. 

En  1662,  un  organiste  de  Troyes,  Raisin  n'osant 
réunir  de  véritables  acteurs,  dont  les  efforts  eussent 
pu  porter  ombrage  aux  troupes  officielles,  avait  fait 
jouer  de  petites  pièces  par  ses  quatre  enfants  au 
Faubourg  Saint-Germain.  Il  avait  même  obtenu  pour 
eux  le  titre  de  Troupe  du  Dauphin.  En  1664,  sa  veuve 
avait  continué  le  spéciale,  et  le  succès  en  était  de- 
venu tel,  grâce  au  jeune  Baron,  que  Molière  avait 
fait  ordonner  par  le  roi  audit  Baron  de  se  joindre  à 
sa  troupe  du  Palais-Boyal  ;  à  la  suite  de  quoi  l'en- 
treprise avait  périclité. 

En  1681,  un  certain  Languicher,  s'inlilulant  «  seul 
danseur  de  corde  des  Roys  de  France  et  d'Angle- 
terre »,  monte  à  la  même  foire  une  comédie,  L'Ane 
de  Lucien  ou  le  Voyageur  ridicule,  entremêlée  de 
gymnastique  périlleuse.  Les  Comédiens  Français 
lui  font  cesser  ses  représentations,  étant  donné  qu'il 
doit  se  borner  aux  «  saults  »,  avec  seulement  un 
Gille  pour  en  faire  remarquer  l'originalité. 

En  1689,  à  la  foire  Saint-Laurent,  Alexandre  Ber- 
trand organise  des  spectacles  où  figurent  en  même 
temps  des  marionnettes  et  des  jeunes  gens.  Les  Co- 
médiens Français  l'avertissent.  L'année  suivante,  à 
la  foire  Saint-Germain,  ils  font  démolir  son  estrade. 
Cetle  lulte  des  Comédiens  Français  pour  la  défense 
de  leur  monopole,  qui  commence  ainsi  par  des  escar- 
mouches, devait  durer  jusqu'à  la  lin  de  l'ancien  ré- 
gime, et  c'est  au  xvin"  siècle  qu'elle  s'est  manifestéee 
avec  le  plus  de  violence". 

On  ne  sait  pas  grand'chose  sur  les  troupes  qui 
parcouraient  la  province  à  celte  époque.  Scarron, 
dans  son  Roman  comique,  a  l'ait  une  peinture  inté- 
ressante de  leurs  mœurs;  mais  celle  de  Molière  el 
celle  de  Filandre  seules  ont  laissé  derrière  elles  la 
Irace  de  leurs  succès. 

Quant  à  leur  organisation,  elle  fait  encore  l'objet 
de  recherches  patientes.  11  paraît  à  peu  près  certain 
que  ces  troupes  ambulantes  venaient  chaque  année 
dans  la  capilale,  aux  environs  de  Pâques,  pour  se 
recruter  et  passer  leurs  contrats.  Certains  de  ces 
contrais  ont  pu  être  retrouvés,  el  leurs  dispositions, 
assez  simples,  renferment  l'obligation,  pour  chacun 

4.  Voy.  Molière,  m  oie  et  Kl  a  uvres,  par  Jules  Claretie,  p.  18S, 

o.  Celle-ci  était  située  près  de  la  rue  S.nnt-l.aurent,  entre  les  rues 
du  l'auhourg-Saint-Denis  et  du  Faubourg-Saint-Marlin.  Klle  datait  de 
Louis  le  Gros,  qui  avait  accordé  le  droit  de  foire  aux  religieux  de 
Saint-Lazare,  lin  octobre  1061,  les  Prêtres  de  la  Mission,  qui  avaient 
suciédéaux  religieux  de  Sainl-l.:iz;tre.  se  liront  roulirmer  dans  leurs 
droits  et  privilèges.  Cette  foire  durait  du   t"  juillet  au  30  septembre. 

6.  Voy.  M.  Jules  ïi"N.\Assns.  /.->,>  Spectacles  forains  et  la  Comé- 
die-Française. 

7.  Voy.  plus  loin,  De  Louis  XIV  a  la  Révolution. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3  TfiO 


des  associés,  d'assurer  un  concours  assidu  ù  l'entre- 
prise, sous  peine  d'amende  ;  le  partage  des  bénéfices 
s'y  Irouve  aussi  réglé  selon  une  répartition  égale  ou 
inégale1. 

D'après  les  dispositions  de  l'édit  de  1700,  art.  XX, 
qui  conférait  aux  lieutenants  généraux  de  police  la 
juridiction  sur  les  spectacles,  aucune  troupe  ne  pou- 
vait s'établir  en  province  sans  l'autorisation  de  ces 
magistrats.  Ceux  qui  contrevenaient  à  cette  règle 
s'exposaient  à  une  amende  de  500  livres,  ainsi  qu'il 
fut  jugé  par  un  arrêt  du  Conseil  du  20  août  1708, 
rendu  sur  la  requête  du  lieutenant  ee  police  de  Gre- 


POLICE,   CENSURE   ET   DROIT   DES  PAUVRES 


Le  public,  concurremment  avec  le  Parlement,  le 
Grand-Conseil  et  le  Conseil-Privé,  ne  laissait  point 
de  manifester  son  propre  sentiment  au  milieu  de 
ces  interminables  démêlés.  Toujours  ennemie  du 
monopole,  alors  surtout  que  son  divertissement 
entre  en  cause,  la  foule  prenait,  cela  va  sans  dire, 
le  parti  des  forains.  Toute  tyrannie  nouvelle  exer- 
cée contre  ces  malbeureux  provoquait  de  sa  part 
des  huées,  des  violences  même,  à  l'adresse  des  pri- 
vilégiés. Elle  s'indignait  contre  l'Opéra  qui  interdi- 
sait la  danse  aux  marionnettes,  et  contre  les  Ro- 
mains, autrement  dit  les  comédiens  tragiques. 

Les  ordonnances  de  police  se  succédaient  vaine- 
ment et  restaient  impuissantes  à  arrêter  les  troubles 
qui  se  renouvelaient  sans  cesse  aux  représentations. 
Nous  ne  pouvons  citer  in  extenso  toutes  ces  ordon- 
nances; nous  nous  contenterons  d'indiquer  leurs 
dates  :  11  décembre  1672;  9  janvier  1673;  22  janvier 
1674;  12  janvier  1685;  16  novembre  1691;  19  jan- 
vier 1701 3. 

Elles  nous  apprennent  que  des  audacieux  ne  crai- 
gnaient point  de  pénétrer,  à  force  ouverte,  armés 
de  mousquetons,  de  pistolets  et  d'épées,  dans  l'hô- 
tel de  Bourgogne  et  qu'ils  cherchaient  à  y  mettre  le 
feu,  après  avoir  fort  brutalement  maltraité  les  spec- 
tateurs, sans  aucune  considération  pour  leur  qua- 
lité. 

Et  le  roi  répète  continuellement  sa  défense,  sous 
peine  de  la  vie,  de  faire  effort  pour  entrer  à  l'Aca- 
démie de  Musique  ou  aux  Comédies  Française  et 
Italienne,  d'y  paraître  avec  des  armes  à  feu,  d'y  tirer 
l'épée  et  d'y  exciter  du  tumulte. 

Nous  ne  voyons  point  mention  de  tels  désordres 
aux  spectacles  de  la  foire. 


Il  n'est  pas  nidifièrent  de  remarquer  que,  dans 
l'ordonnance  de  police  du  9  janvier  1673,  parmi  les 
considérations  sur  lesquelles  l'autorité  s'appuie  pour 
prescrire  le  respect  des  spectacles  à  l'hôtel  de  Bour- 
gogne, celle-ci  est  mise  en  relief,  à  savoir  qu'il  faut 
par  tous  les  moyens  encourager  les  spectaieurs  à 
s'y  rendre,  maintenant  que  «  tout  ce  qui  pourroit 
blesser  l'honnêteté  publique  doit  être  heureusement 
retranché  ». 

La  censure  s'appliqua-t-elle  d'une  façon  vraiment 
rigoureuse  sous  Louis  XIV? 

L'ordonnance  de  1609  eu  avait,  on  le  sait,  remis 


i.  Voy.    51.  Ku'Joiv  SuiiIh-,  Hcchcrclies  sur  Muiicre.  —  11.  Jule 
ioBXASsiES,  BUt.  Ad,,,.  Com.-Fr.,  p.  11. 

2.  Voy.  des  Essarts,  Les  Trois  Théâtres  de  Paris,  p.  I  VI. 

3.  Delamare.  Traite  ,1,-  l„  fut,,;:,  I.  I,    l,v     III.  ht.    111.   i-liap.    iv 


l'exeicice  entre  les  mains  du  procureur  du  roi.  Une 
lettre  de  Ponlchartrain  à  d'Argenson,  du  31  mars 
1701,  le  lui  confia,  en  sa  qualité  de  lieutenant  de 
police  :  «  Il  est  revenu  au  Roy  que  les  comédiens  se 
dérangent  beaucoup,  que  les  expressions  et  les  pos- 
tures indécentes  commencent  à  reprendre  vigueur 
dans  leurs  représentations,  et  qu'en  un  mot  ils  s'é- 
cartent de  la  pureté  où  le  théâtre  estoit  parvenu.  Sa 
Majesté  m'ordonne  de  vous  escrire  de  les  faire  venir 
et  de  leur  expliquer  de  sa  part  que,  s'ils  ne  se  corri- 
gent, sur  la  moindre  plainte  qui  lui  parviendra,  Sa 
Majesté  prendra  contre  eux  des  résolutions  qui  ne 
leur  seront  pas  agréables.  —  Sa  Majesté  veut  aussi 
que  vous  les  avertissiez  qu'elle  ne  veut  pas  qu'ils 
représentent  aucune  pièce  nouvelle,  qu'ils  ne  vous 
l'ayent  auparavant  communiquée,  son  intention 
estant  qu'ils  n'en  puissent  représenter  aucune  qui 
ne  soit  dans  la  dernière  pureté4.  » 

Un  an  après,  en  1702,  le  roi  fait  adresser  quel- 
ques reproches  à  ses  Comédiens  au  sujet  d'une 
pièce  de  Boindin,  un  peu  osée,  le  Bal  d'Auteuil.  Un 
en  arrête  aussitôt  les  représentations.  Louis  XIV  ne 
voulait  point  de  libertés  choquantes  sur  une  scène 
que  son  gouvernement  subventionnait;  il  ne  voulait 
point  non  plus  qu'on  y  plaisantât  aucunement  sur 
la  fausse  pruderie  de  Mme  de  Mainlenon,  et  les  Ita- 
liens eurent  à  se  repentir  de  l'avoir  imprudemment 
tenté. 

Nous  ne  voyons  rien  là  que  de  très  louable  et  de 
très  naturel.  Il  faut  se  souvenir  que,  malgré  les 
cabales,  Molière  put  faire  jouer  Tartufe,  et  que,  de 
par  la  volonté  souveraine,  le  Parlement  dut  en- 
tendre les  Plaideurs. 

Dans  une  visite  à  la  cour,  les  Italiens  avaient  re- 
présenté le  Scaramouchc  Ermite.  —  «  Je  voudrais 
bien  savoir,  demanda  le  roi  au  prince  de  Condé , 
pourquoi  les  gens  qui  se  scandalisent  si  fort  de  la 
comédie  de  Molière  ne  disent  mot  de  celle  de  Sca- 
ramouche.  »  Et  le  prince  de  Condé  de  répondre  : 
«  La  raison  de  cela,  c'est  que  la  comédie  de  Scara- 
niouche  joue  le  ciel  et  la  religion,  dont  ces  mes- 
sieurs-là ne  se  soucient  point;  mais  celle  de  Mo- 
lière les  joue  eux-mêmes  :  c'est  ce  qu'ils  ne  peuvent 
souffrir5.  » 

11  est  assez  précieux  de  retenir  que,  sous  Louis  XIV 
et  en  sa  présence  même,  on  pouvait  jouer  le  ciel  et 
la  religion. 

A  dater  des  représentations  du  bal  d'Auteuil,  les 
ouvrages  dramatiques  furent  soumis  à  l'approbation 
préalable  de  personnages  spéciaux".  Le  règlement 
pour  l'Opéra  du  11  janvier  1713  porte,  dans  son 
article  XVII,  que  :  «  Aucune  nouvelle  pièce  ne  sera 
reçue  ni  représentée,  qu'elle  n'ait  été  préalable- 
ment vue  et  approuvée  de  ceux  qui  seront  chargés 
de  cet  examen,  et  on  ne  pourra  pareillement  mettre 
aucune  pièce  en  état  d'être  représentée  de  nouveau, 
sans  qu'au  préalable  l'inspecteur  général  en  ail 
rendu  compte.  » 

Établissement  du  Droit  îles  Pauvres. 
Le  moment  est  venu  de  parler  d'un  impôt  sur  les 
spectacles,  que  Louis  XIV  n'a  pas  positivement  créé, 
mais  pour  lequel  il  a  institué  le  mode  de  percep- 
tion dont  s'inspire  la  législation  moderne  :  c'est  le 
Droit  des  Pauvres. 
La  première  ordonnance  qui  témoigne  du  désir 


.  hepping,  Corresp.  adm-,  t.  II,  p.  729. 
.  Préface  du  Tartufe. 

.   Jules  KoNNAS-ir-..  Hut.  Adm.  d'IaCom. 


ENCYCLOPÉDIE  HE  LA  MUSIOVE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


de  l'aire  bénéficier  les  pauvres  des  réjouissances 
publiques,  date  de  1407.  Cette  ordonnance;  régle- 
mentant l'association  îles  Ménétriers,  porte  que  : 
•  Pour  ce  qne  ledit  hospital  Saint-Julien  qui  est 
Fondé  desdiz  menestrelz,  et  n'a  autres  rentes  sinon 
des  aumosnes  des  bonnes  gens,  yceulx  ménestrel/, 
sont  et  seront  tenu/,  de  demander  et  cueillir  l'au- 
mosne  Saint-Julien  aux  nopces  où  ilz  seront  louez, 
et  par  dons  acoustumez.  » 

Or,  en  1339, la  charité  publique  n'ayant  peut-être 
pas  donné  les  résultats  qu'on  espérait  d'elle,  un 
arrêt  du  Parlement,  rendu  le  1er  septembre,  impose 
aux  Confrères  de  la  Passion  l'obligation  d'un  prêt  au 
trésorier  des  pauvres  : 

«  La  Court  deuement  avertye  que  au  moïen  du 
jeu  de  la  Passion  les  aulmosnes  des  pauvres  de  ceste 
ville  de  Paris  ont  esté  disconlinuees  et  que  les 
maistres  dudit  jeu  ont  receu  grans  sommes  de 
deniers  au  moïen  d'icelluy,  a  ordonné  et  ordonne 
ausdiz  maistres  présens  et  pour  ce  mandez  en  icelle 
court,  mettre  dedans  demain  es  mains  du  trésorier 
-iesdiz  pauvres  la  somme  de  buit  cens  livres  parisis 
par  forme  de  prest,  en  attendant  que  lesdiz  maistres 
ayent  veu  leur  compte  et  regardé  quelle  somme  ilz 
pourront  bailler  et  aulmosner  ausdiz  pauvres,  la- 
quelle somme  de  huit  cens  livres  leur  sera  rendue 
sur  les  premiers  deniers  que  ledit  trésorier  recou- 
vrera de  sa  receple,  dont  leur  sera  baillé  seureté  sur 
deux  cens  livres  de  rente  que  doit  Rrigalier,  mar- 
chand bourgeoys  demeurant  à  Paris,  de  laquelle 
rente  les  lettres  de  constitution  seront  mises  es 
mains  desdiz  maistres  pour  la  seureté  de  leur  deu, 
et  sera  ce  présent  arrest  exécuté  sur  l'extraict.  » 

On  puisait  donc  dans  la  caisse  des  Confrères  en 
considération  de  leur  succès.  Comme  ils  jouaient  les 
dimanches  et  les  jours  de  fêtes  dans  l'après-midi,  les 
offices  étaient  abandonnés  pour  leur  spectacle,  ce 
qui  ne  faisait  point  l'affaire  des  prêtres,  encore 
qu'ils  y  suivissent  eux-mêmes  la  foule!  Les  quêtes 
étaient  moins  fructueuses,  celles  pour  les  pauvres  et 
celles  pour  le  chapitre.  La  querelle  des  curés  et  des 
comédiens  commençait.  Un  prêt,  c'était  peu  de 
chose,  moyennant  des  garanties.  Un  peu  plus  d'un 
an  après,  c'est  une  contribution  qu'on  exige.  Un 
arrêt  du  27  janvier  1541  dispose  que  : 

«  Sur  lettres  patentes  portant  permission  à  Charles 
le  Rover  et  consorts,  maistres  et  entrepreneurs  de 
jeu  et  mystère  de  l'Ancien  Testament,  faire  jouer  et 
représenter  à  l'année  prochainement  ledit  jeu  et 
mystère,  suivant  lesdites  lettres,  leur  a  été  permis 
par  la  Cour  à  la  charge  d'en  user  bien  et  duement 
sans  y  user  d'aulcunes  frauldes,  ny  interposer  choses 
profanes,  lascives  ou  ridicules;  que  pour  l'entrée  du 
théâtre  ils  ne  prendront  que  deux  sols  d'entrée  de 
chacune  personne,  pour  le  louage  de  chascune  loge 
durant  ledit  mystère  que  trente  escus;  n'y  sera  pro- 
cédé qu'à  jours  de  festes  non  solennelles;  commen- 
ceront à  une  heure  après  midy,  finiront  à  cinq, feront 
en  sorte  qu'il  n'en  suive  scandalle  ou  tumulte;  et  à 
cause  que  le  peuple  sera  distraict  du  service  divin 
et  que  cela  diminuera  les  aulmosnes,  il  bailleront 
aux  pauvres  la  somme  de  mil  livres  sauf  à  ordonner 
plus  grandes  sommes.  » 

Ce  n'est  là  encore  qu'une  somme  fixe.  Mais  l'idée 


1.  Bonaventurc  des  Périers  raconte,  à  ce  sujet,  une  plaisante  anec- 
dote. Jean  du  Ponlalais,  un  des  plus  fameui  comédiens  des  moralités 
d'alors,  avait  accoutumé  d'annoncer  son  spectacle  au  son  du  tambour 


première    s'élargit;    bientôt  on   va    transformer   la 
contribution  actuelle  en  redevance. 

Hené  Benoit,  curé  de  Sainl-lùistache,  vivait  en  aussi 
mauvaise  intelligence  que  possible  avec  ses  voisins 
de  l'hôtel  de  Bourgogne1.  11  s'était  adressé  au  Par- 
lement pour  obtenir  que  ceux-ci  ne  pussent  jouer 
qu'une  fois  les  offices  terminés.  Oe  leur  côté,  les 
comédiens  exposaient  le  grand  préjudice  qui  en 
résulterait,  les  jours  d'hiver  étant  courts,  et  leurs 
bénéfices  déjà  grevés  de  tant  de  charges.  L'arrêt  du 
6  novembre  1574  leur  donna  gain  de  cause,  faisant 
état,  dans  ses  motifs,  de  «  la  somme  de  cent  écus  de 
rente  qu'ilz  payent  à  la  recepte  du  roy  pour  le  logis, 
et  de  celle  de  trois  cents  livres  de  rente  qu'il/,  baille- 
ront aulx  enfants  de  la  Trinité  tant  pour  le  service 
divin  que  entretennement  des  pauvres  ». 

En  1577,  le  même  curé  de  Saint-Eustache  de- 
mande la  fermeture  de  leur  théâtre,  l'n  nouvel 
arrêt,  le  20  septembre,  est  rendu  à  leur  profit.  Us 
avaient  fait  valoir,  pour  défense,  qu'ils  payaient 
«  trois  cents  livres  tournois  aux  enfants  de  la  Trinité 
pour  le  service  divin,  principalement  pour  l'entre- 
tient des  pauvres  ». 

Est-ce  uniquement  par  vertu,  est-ce  encore  par 
calcul  et  pour  briser  la  haine  des  congrégations  à 
leur  égard,  —  les  comédiens  s'imposèrent  volontai- 
rement bien  d'autres  charges  par  la  suite.  En  lf>7:i. 
Chappuzeau  écrivait  :  a  La  charité  est  fort  en  usage 
entre  les  comédiens,  ils  en  donnent  des  marques 
assez  visibles;  ils  font  des  aumosnes  et  particulières 
et  générales,  et  les  troupes  de  Paris  prennent  de 
leur  mouvement  des  boistes  de  plusieurs  bospilaux 
et  maisons  religieuses  qu'on  leur  ouvre  tous  les  mois, 
l'ai  veu  même  des  troupes  de  campagne,  qui  ne 
font  pas  de  grans  gains,  dévouer  aux  hospitaux  des 
lieux  où  elles  se  trouvent  la  recette  entière  d'une 
représentation,  choisissant  pour  ce  jour-là  leur  plus 
belle  pièce  pour  attirer  plus  de  monde.  » 

A  la  fin  du  xvn"  siècle,  les  registres  de  la  Comédie 
font  foi  de  dons  mensuels  qu'elle  accordait  à  la  plu- 
part .les  couvents  :  Récollets,  Carmes-Dé 
Grands-Auguslins,  :  livres  Chaque  dimanche,  l8sols 
pour  les  chandelles  des  religieux;  cette  mention  vise 
les  Capucins,  qui  faisaient  alors  l'office  de  pompiers. 
Depuis  I69.'i,  2.;0  livres  annuellement  à  l'abbé  de 
Saint  Germain  des  Prés.  A  l'assemblée  du  7  dé- 
cembre 1693,  on  iécide  que  «  sui  l'avis  qu'il  a  esté 
arreslé.  à  la  Police  générale  tenue  au  Parlement. 
pour  le  soulagement  des  pauvres  ,  que  tous  les 
particuliers  y  contribuent  volontairement,  la  Com- 
pagnie donnera  400  liv.  au  Prévôt  des  marchands». 

En  1696,  les  Comédiens  reçoivent  la  requête  sui- 
vante : 

«  Messieurs, 

»  Les  Pères  Cordeliers  vous  supplient  très-hum- 
Meiueiit  d'avoir  la  bonté  de  les  mettre  au  nombre 
des  pauvres  religieux  à  qui  vous  faites  la  charité.  11 
n'y  a  pas  de  communauté  à  Paris  qui  en  ait  plus  de 
besoin,  eu  égard  à  leur  grand  nombre  et  à  l'extrême 
pauvreté  de  leur  maison,  qui  souvent  manque  de 
pain;  l'honneur  qu'ils  ont  d'être  vos  voisins  leur  fait 
espérer  qne  vous   leur    accorderez    l'effet   de  leurs 


patienté  de  son  tapage,  se  précipita  pour  lui  .tut  .  Oui  muis  i 
Tait  si  hardi  de  jouer  pendant  que  je  prêche  .'  ■  Pontalais  repondit  : 
.  Hé,  qui  vous  a  fait  si  hardi  de  prêcher  pe.i.lant  .jue  je  Inho 
rine'.'  ,  Furieux,  le  curé  creva  le  tambour,  l'.uit.il.u»  reurul  après  lui 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3771 


prières,  qu'ils  redoubleront  envers  le  Seign'enr  pour 
la  prospérité  de  votre  chère  Compagnie.  » 

Le  11  juin,  l'assemblée  inscrit  les  Cordeliers  pour 
3  livres  par  mois. 

En  1700,  même  requête  émanant  des  Petits-Augus- 
tins  : 

K  A  Messieurs  de  l'illustre  Compagnie 
de  la  Comédie  du  Roi. 
«  Les  religieux  Augustins  réformés  du  faubourg 
Saint-Germain  vous  supplient  très-humblement  de 
leur  faire  part  des  aumônes  et  charités  que  vous 
distribuez  aux  pauvres  maisons  religieuses  de  cette 
ville  de  Paris,  dont  ils  sont  du  nombre,  et  ils  prie- 
ront Dieu  pour  vous. 

«  F. -A  Mâché,  prieur. 
«  F.  Joseph  Richard,  procureur.  » 

Réponse  identique. 

Nous  ne  pouvons  mentionner  tous  les  elfets  de  la 
générosité  des  différentes  troupes;  ils  sont  innom- 
brables. 

Or,  le  25  février  1609,  Louis  XIV  rendit  une  ordon- 
nance capitale,  publiée  le  23  mars  par  d'Argenson. 
tlonl  le  texte  est  ainsi  conçu  : 

«  Sa  Majesté  voulant,  autant  qu'il  est  possible, 
contribuer  au  soulagement  des  pauvres,  dont  l'hôpi- 
tal général  est  chargé,  et  ayant  pour  cet  effet  em- 
ployé jusqu'à  présent  tous  les  moyens  que  sa  charité 
lui  a  suggérés,  elle  a  cru  devoir  encore  leur  donner 
quelque  pari  aux  profits  considérables  qui  revien- 
nent des  opéras  de  musique  et  des  comédies  qui  se 
jouent  à  Paris  par  sa  permission. 

«  C'est  pourquoi  Sa  Majesté  a  ordonné  et  ordonne 
qu'à  l'avenir,  à  commencer  du  premier  mars  pro- 
chain, il  sera  levé  et  reçu  au  profit  dudit  hôpital 
général  un  sixième  en  sus  des  sommes  qu'on  reçoit 
à  présent,  et  que  l'on  recevra  à  l'avenir  pour  l'entrée 
auxdits  opéras  et  comédies;  lequel  sixième  sera  remis 
au  receveur  dudit  hôpital,  pour  servir  à  la  subsis- 
tance des  pauvres1.  » 

Que  de  discussions  se  sont  élevées  au  sujet  de  cette 
ordonnance!  On  a  voulu  y  reconnaître,  de  la  pari 
du  souverain  vieillissant  devenu  la  proie  des  Jésuites, 
la  volonlé  de  nuire  au  théâtre.  «  Cette  intention,  dil 
M.  Cros-Mayrevieille  dans  un  ouvrage  1res  intéres- 
sant2, ne  nous  parait  ;pas  ressortir  clairement  de 
l'acte  royal;  elle  eût  d'ailleurs  manqué  son  but, 
puisque  l'impôt  frappait  directement  le  spectateur.  » 

Dire,  toutefois,  sous  ce  prétexte,  qu'une  pareille 
intention  eût  manqué  son  but,  cela  nous  semble 
téméraire;  car,  somme  toute,  plus  le  plaisir  se  fait 
coûteux,  moins  il  attire.  C'est  évident.  Et,  conformé- 
ment aux  prescriptions  ordonnées,  îles  comédiens 
français  et  les  directeurs  de  [l'Opéra  élevèrent  dans 
une  proportion  assez  considérable  le  prix  des  places. 
En  1718,  dans  des  mémoires  adressés  au  Régent  à 
l'occasion  d'un  débat  entre  la  Comédie  et  l'Opéra, 
on  voit,  à  côté  de  protestations  contre  l'impôt  nou- 
veau, que  l'Opéra  est  grandement  obéré  (la  faillite 
de  Guyenet  ayant  laissé  800000  livres  de  passif),  et 
que  la  Comédie  est  arriérée  de  300  000  livres!  Le 
public  était  peut-être  moins  assidu. 

Sans  rechercher  si,  par  ailleurs,  à  la  fin  de  son 
règne,  Louis  XIV  a  témoigné  quelque  malveillance  à 
l'égard  des  comédiens,  nous  voyons  seulement  que 


Rapportée  dans  le  Code  de  l'Hôpital  l.inéral,  public  en  1780. 
Le  Droit  des  Pauvres  sur  les  Spectacles  en  Europe. 


les  charges  de  l'Hôpital  Général  croissaient  d'année 
en  année,  et  qu'il  fallait  trouver  des  ressources.  Le 
droit  des  Pauvres  allait  en  procurer.  «  La  [régulari- 
sation de  cet  impôt,  dit  encore  M.  Cros-Mayrevieille, 
était  justifiée  par  la  nécessité  de  mettre  un  terme  au 
débordement  du  paupérisme,  celte  plaie  ,lu  xvue  siè- 
cle, et  était  presque  une  mesure  de  sécurité.  »  Nous 
nous  permettons  de  dire  qu'il  y  a,  dans  ce  raisonne- 
ment, une  pétition  de  principe.  Que  la  nécessité  de 
combattre  le  paupérisme  soit  apparue  impérieuse  à 
Louis  XIV,  c'est  fort  à  sa  louange.  Mais  en  conclure 
que  cette  nécessité  puisse  justifier  l'ordonnance  de 
1099,  telle  est  précisément  la  question.  Le  gouver- 
nement d'alors  aurait  pu,  sans  aucun  doute,  en 
tempérant  son  gaspillage  effréné  de  la  fortune 
publique,  et  avec  l'énorme  produit  des  impôts  déjà 
levés  de  tous  côtés,  doter  très  largement  l'Hôpital 
Général.  Rien  ne  pouvait  provoquer  une  taxe  nou- 
velle, sinon  la  pénurie  du  Trésor  causée  par  une 
gestion,  criminelle  des  finances.  La  légitimité  d'un 
impôt  sur  l'Art  demanderait  à  être  mieux  soutenue! 

Juste  un  mois  avant  que  ne  fût  rendue  l'ordon- 
nance, Pontchartrain  écrivait  au  président  de  Har- 
lay,  administrateur  de  l'hôpital  :  «  J'ai  lu  au  roi  le 
mémoire  que  vous  m'avez  envoyé  de  ce  que  vous 
croyez  qu'on  peut  prendre  sur  l'Opéra  et  sur  la 
Comédie  en  faveur  de  l'Hôpital  Général,  el  des  offres 
qui  sont  faites  en  conséquence.  Sur  quoi,  S.  M. 
m'ordonne  de  vous  dire  qu'il  lui  paraît  qu'il  sérail 
bien  plus  commode  pour  l'Hôpital  même,  pour  Fran- 
cine3,  et  pour  tout  le  monde,  que  ce  fût  Franchie 
même  pour  l'Opéra  et  les  comédiens  pour  la  Comé- 
die, qui  s'abonnassent  à  une  certaine  somme,  plutôt 
que  d'y  mettre  ou  un  receveur  particulier  ou  un 
contrôleur,  ce  qui  serait  sujet  à  mille  et  mille  incon- 
vénients; et  dans  cette  pensée,  Sa  Majesté  a  permis 
à  Franchie  d'aller  vous  représenter  se-  raisons  el 
discuter  avec  ceux  que  vous  chargerez  de  ce  soin  la 
somme  qu'ils  devraient  raisonnablemenl  payer''.  » 

Cette  idée  de  l'abonnement  fut-elle  mise  en  pra- 
tique? 

L'abbé  de  La  Tour  dit  que  la  Comédie  accepta 
une  charge  de  40  000  livres.  D'autre  part,  M.  Edouard 
Fournier  déclare  avoir  trouvé  dans  les  archives  de 
l'Assistance  publique,  consumées  en  1871,  des  dc-cu- 
cuments  établissant  que  l'abonnement  fut  fixé  à 
40  000  livres  pour  l'Opéra,  et  à  25  000  livres  pour  la 
Comédie. 

Il  est  cependant  dès  maintenant  certain,  d'après  les 
registres  de  la  Comédie  examinés  avec  son  attention 
habituelle  par  M.  .Iules  Bonnassibs,  que,  du  5  mars 
1099  au  4  janvier  1700,  le  sixième  en  sus  fut  acquitté 
normalement.  Quant  à  l'Opéra,  les  registres  du 
xvne  siècle  manquent  à  ses  archives. 

D'ailleurs,  une  nouvelle  ordonnance  du  30  août 
1701,  publiée  le  1er  septembre  par  d'Argenson,  nous 
semble  bien  prouver  que  la  proposition  de  Pontchar- 
train n'avait  pas  été  suivie  d'effet.  Elle  donne  à  en- 
tendre que  la  Comédie  et  l'Opéra,  interprétant  à 
leur  moindre  dommage  le  texte  qui  les  frappait, 
prétendaient  ne  faire  peser  la  taxe  que  sur  les  béné- 
fices : 

«  Sa  Majesté  s'étant  fait  représenter  son  Ordon- 
nance du  vingt-cinquième  février  1699,  par  laquelle 
Sa  Majesté  avoit  ordonné  qu'il  seroil  levé  au  profit 


3.  Directeur  de  l'Opéra. 

4.  Corresp.  adm.  de  Louis  XIV,  t.  II,  p. 

5.  Réflexions  sur  le  théâtre,  p.  308. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


de  l'Hôpital  General,  un  sixième  en  sus  îles  sommes 
qu'on  payoit  alors  pour  l'entrée  aux  opéra  et  comé- 
dies, pour  être  ledit  sixième  employé  à  la  subsis- 
tance des  Pauvres;  et  voulant  Sa  Majesté  prévenir 
toutes  difficulté/  à  cause  des  prix  differens  qui  pour- 
roient  être  mis  dorénavant  aux  places  desdits  opéra 
et  comédies,  et  conserver  audit  Hôpital  le  bien  que  Sa 
Majesté  a  entendu  lui  procurer;  Sa  Majesté  a  ordonné 
et  ordonne  que  dorénavant  il  sera  payé  au  lteceveur 
dudit  Hôpital  le  sixième  de  toutes  les  sommes  qui 
seront  reçues,  tant  par  ceux  qui  ont  le  privilège  de 
l'Opéra,  que  par  les  comédiens  de  Sa  Majesté;  lequel 
sixième  sera  pris  sur  le  produit  des  places  desdils 
Opéra  et  Comédies,  sans  aucune  diminution  ni  retran- 
chement, sous  prétexte  de  frais  ou  autrement  : 

»  Enjoint  Sa  Majesté  au  Lieutenant  General  de 
Police  de  sa  bonne  Ville  de  Paris  de  tenir  la  main  à 
l'exécution  de  la  présente  Ordonnance,  qui  sera 
publiée  et  affichée  partout  où  besoin  sera. 

«  Fait  à  Versailles,  le  30  août  1701. 

«  Signé  :  Louis. 
«  Et  plus  bas  :  Phelyppaux.  » 

«  Il  est  enjoint  à  Marc-Antoine  Pasquierjuré-crieur 
ordinaire  du  Roy,  de  publier  et  afficher  à  son  de 
trompe  et  cry  public  aux  portes  de  l'Opéra  et  de  la 


Comédie,  même  dans  les  autres  places  et  lieux 
publics  et  accoutumez  de  cette  ville  de  Paris,  l'Or- 
donnance cy-dessus,  à  ce  que  nul  n'en  prétende  cause 
d'ignorance.  Ce  fut  fait  et  donné  par  Messire  Marc- 
René  de  Voyer  de  Paulmy,  chevalier  marquis  d'Aï  - 
genson,  conseiller  du  Roy  en  ses  conseils,  maislre 
des  requêtes  ordinaires  de  son  hostel,  Lieutenant 
General  de  Police  de  la  Ville,  Prevosté  et  Vicomte  de 
Paris,  le  premier  jour  de  septembre  mil  sept  cens  un . 
«  Signé  :  De  Voyer  d'Argenson.  » 

Ainsi,  c'est  sur  la  recelte  brute  que  devait  être  ac- 
quitté le  sixième. 

Cette  prescription  fut  renouvelée  par  les  lettres 
patentes  du  7  octobre  1704,  autorisant  le  transport, 
fait  par  Franchie  et  Duniont  à  Guyenet,  du  privilège 
de  l'Opéra;  et  par  celles  du  8  janvier  1713,  lors  de  la 
résiliation  de  ce  précédent  traité  à  la  suite  du  décès 
de  Guyenet,  et  d'une  nouvelle  cession  par  Franchie 
et  Duniont  au  profit  de  Mathieu,  Besnier  et  con- 
sorts. 

Enfin,  une  ordonnance  rendue  le  30  janvier  1713 
étendit  la  perception  du  sixième  aux  spectacles  po- 
pulaires des  foires  Saint-Germain  / et  Saint-Laurent. 

Le  règne  suivant  devait  encore  accroître  cet  impôt 
déjà  si  lourd! 


LE  THÉÂTRE  DE  MUSIQUE  DE  LOUIS  XIV  À  LA  RÉVOLUTION 


L'OPÉRA 

Nous  avons  vu  dans  quel  état  déplorable  Franchie 
avait  laissé  l'Opéra,  en  1728,  pour  en  transmettre  la 
direction  à  Destouches,  auquel  devait  succéder  le 
sieur  Gruer,  en  1730. 

Celui-ci  prit  possession  du  théâtre  en  1730,  en 
vertu  d'un  privilège  nouveau,  qui  devait  durer  trente 
années,  mais  qu'un  arrêt  du  conseil  d'Etat  révoqua 
le  30  novembre  suivant. 

Eugène  de  Thurel,  capitaine  au  régiment  de 
Picardie,  obtint  la  jouissance  des  vingt-neuf  années 
qui  restaient  à  courir,  mais  il  ne  fut  pas  plus  heu- 
reux que  son  prédécesseur.  Gruer,  eu  effet,  avait 
acheté  la  direction  300  000,  livres  afin  d'acquitter  les 
dettes  de  l'Opéra,  mais  on  ne  sait  où  cet  argent  put 
passer;  quelques  auteurs  se  demandent  s'il  ne  fut 
pas  dilapidé  par  le  prince  de  Carignan,  qui  avait 
obtenu  de  Louis  XV,  en  1731,  le  titre  d'inspecteur 
général  de  l'Académie  de  musique.  On  dit  aussi  que 
ce  sont  les  associés  de  Gruer,  le  comte  de  Saint-Gilles 
et  le  président  Lebeuf,  qui  dénoncèrent  un  diner  or- 
ganisé par  Gruer,  le  15  juin  1731,  à  l'hôtel  de  l'Aca- 
démie, et  au  cours  duquel  le  directeur  avait  fait 
danser  ses  artistes  dans  le  costume  le  plus  léger. 
Toujours  est-il  qu'on  se  servit  du  scandale  causé  par 
ces  révélations  pour  déposséder  Gruer  de  son  pri- 
vilège, mais  sans  nul  profit  pour  l'Opéra. 

En  dépit  de  la  protection  royale,  les  entreprises 
qui  obtenaientTtour  à  tour  la  direction  de  l'Opéra 
ne  parvenaient  pas  à  relever  sa  situation  financière, 
encore  que  toutes  les  ressources  fussent  mises  à  pro- 


fit dans  le  but  d'alimenter  le  budget.  Tandis  que  ,1a 
Comédie -Française,  voulant  briser  toute  concur- 
rence, jusqu'à  celle  des  marionnettes,  demeurait 
acharnée  à  la  guerre  qu'elle  menait  contre  les  spec- 
tacles des  foires,  l'Opéra,  de  son  côté,  se  prétendait 
fondé,  en  vertu  des  ordonnances  et  des  lettres  pa- 
tentes signées  en  sa  faveur,  à  autoriser  les  petites 
pièces  à  musique,  moyennant  redevance.  Un  arrêt 
du  Conseil,  du  17  avril  1709,  avait  déclaré  abusive 
cette  interprétation  des  textes;  mais  un  arrêt  ulté- 
rieur, du  23  décembre  1715,  adoptait  une  manière 
de  voir  différente,  et  celui  du  26  novembre  1716  con- 
férait expressémeul  à  l'Opéra  la  faeulté  d'adjuger 
aux  enchères  le  droit  de  chanter  sur  les  scènes  fo- 
raines. 

Depuis  lors,  les  concessionnaires  de  l'Opéra  firent 
toujours  marché  du  droit  de  chanter  et  de  danser, 
soit  en  vertu  d'autorisations  tacites  du  gouverne- 
ment, soit  en  vertu  de  lettres  ministérielles. 

Le  droit  de  donner  des  concerts  aux  Tuileries., 
pendant  la  quinzaine  de  Pâques,  interdisait  les 
spectacles  et  les  fêles,  dont  la  célébration  avait  été 
accordée  au  musicien  Philidor,  à  condition  qu'il  ne 
donnât  que  des  concerts  spirituels;  mais  comme 
ces  concerts  dépendaient  de  l'Opéra,  il  dut  payer 
6  000  livres  par  an.  D'ailleurs,  la  moindre  musique 
sur  une  scène  devenait  le  prétexte  de  procès.  La  Co- 
médie française  et  la  Comédie  italienne  furent  con- 
damnées à  des  amendes  de  10,  20  et  30000  francs, 
pour  avoir  mis  plus  de  six  violons  dans  leur  or- 
chestre ! 

Un  âne  parut  un  jour  à  la  Comédie  italienne  et  se 
mit  à  braire. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÈUA00G1E 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3773 


«Taisez-vous,  insolent,  lui  dil  Arlequin,  la  musi- 
que vous  est  défendue.  » 

Ces  procès  eux-mêmes  montraient  combien  les 
directeurs  se  trouvaient  dans  l'embarras,  puisqu'ils 
avaient  recours  à  de  pareils  moyens  pour  se  pro- 
curer des  ressources. 

La  lutte  se  continua  pendant  tout  le  xviii"  siècle. 

Des  lettres  patentes  de  juin  1769  défendaient 
à  quiconque  de  «  faire  chanter  et  exécuter  avec 
théâtre  et  décorations,  ou  autrement,  aucunes  pièces 
de  musique  ou  de  danse,  de  faire  aucun  concert  de 
musique  vocale  ou  instrumentale  dans  quelque  lan- 
gue que  ce  soit,  ni  de  donner  aucuns  bals,  pour 
l'entrée  desquels  concerts  ou  représentations  de 
pièces  de  musique  on  prenne  ou  reçoive  de  l'arpent, 
même  de  faire  aucune  association  pour  raison  des- 
dits objets,  et  ce  sans  la  permission  expresse  et  par 
écrit  des  concessionnaires  actuels  de  ladite  Acadé- 
mie royale  de  Musique,  ou  des  personnes  qui  pour- 
ront leur  succéder,  à  peine  de  10  000  livres  d'amende, 
applicable  un  tiers  à  l'Hôpital  Général,  et  les  deux 
autres  tiers  au  profil  des  concessionnaires  actuels 
de  ladite  Académie  royale  de  Musique,  et  de  confis- 
cation des  théâtres,  machines,  décorations,  musique, 
instruments  et  autres  choses  quelconques  qui  auraient 
servi  auxdiles  représentations,  concerts  et  bals  ». 

Un  arrêt  du  Conseil  du  11  juillet  1784,  plus  favo- 
rable encore,  donna  à  l'Opéra  le  privilège  de  tous 
les  spectacles  des  foires  et  remparts  avec  faculté  de 
cession. 


Au  cours  du  xvni"  siècle,  l'administration  de  l'O- 
péra fait  également  l'objet  de  règlements  que  nous 
allons  analyser. 

Un  certain  nombre  de  règlements  concernant  les 
divers  détails  de  l'administration,  les  pouvoirs  des 
directeurs  et  des  inspecteurs,  le  nombre  des  sujets 
pour  le  chant  et  la  danse,  et  leurs  appointements  et 
pensions,  les  rapports  avec  les  auteurs,  les  entrées, 
la  police  intérieure,  etc.,  furent  arrêtés  au  Conseil 
du  roi.  Nous  signalerons  les  plus  importants  de 
ceux-ci. 

L'arrêt  du  30  mars  1776  divise  tous  les  sujets  en 
deux  classes,  celle  des  appointés  et  celle  des  surnu- 
méraires, ces  derniers  ne  pouvant  espérer  d'avance- 
ment qu'au  choix.  Il  institue  les  feux,  en  outre  des 
appointements.  Les  sujets  du  chant  et  ceux  de  la 
danse  sont  divisés  en  trois  classes,  sous  la  dénomi- 
nation de  premiers  sujets,  premiers  remplacements, 
premiers  doubles.  Les  premiers  sujets  du  chant  reçoi- 
vent un  feu  de  bOO  livres  après  dix  représentions, 
et  pareille  somme  consécutivement  de  dix  en  dix;  les 
premiers  remplacements  et  les  premiers  doubles,  en 
pareil  cas,  400  et  200  livres.  Les  sujets  de  la  danse 
reçoivent,  dans  les  mêmes  conditions,  un  feu  de  200, 
de  120  el  de  60  livres. 

Les  honoraires  des  auteurs,  soit  du  poème,  soit 
delà  musique, lorsque  leurs  ouvrages  remplissent  la 
durée  du  spectacle,  sont  élevés  à  200  livres  pour 
chacune  des  vingt  premières  représentations,  à 
lbO  livres  pour  chacune  des  dix  suivantes,  à  lOo  livres 
pour  chacune  des  autres,  jusques  et  compris  la  qua- 
rantième. Dans  le  cas  où  le  nombre  des  représenta- 
tions excédera  sans  interruption  celui  de  quarante, 
chacun  des  auteurs  recevra  une  gratification  de 
500  livres.  Pour  les  ouvrages  en  un  acte,  les  hono- 
raires, acquittés  dans  les  mêmes  conditions,  s'élè- 
vent à  80,  00  el  S0  livres. 


Les  gens  de  lettres  et  les  compositeurs  ayant  fourni 
trois  grands  ouvrages  «  dont  le  succès  aura  été  assez 
décidé  pour  les  faire  rester  au  théâtre  »  doivent  jouir, 
leur  vie  durant,  d'une  pension  de  1  000  livres,  aug- 
mentée de  500  livres  pour  chacun  des  deux  ouvrages 
suivants,  et  de  1  000  livres  pour  le  sixième. 

Les  dispositions  des  règlements  de  1713  el  de  1714, 
touchant  les  pensions,  sont  maintenues.  Toutefois, 
au  bout  de  vingt-cinq  ans  pour  les  hommes,  et  de 
vingt  ans  pour  les  femmes,  ceux  qui  auront,  dès  leur 
entrée  à  l'Académie,  exercé  en  chef  un  premier  em- 
ploi et  n'auront  jamais  passé  par  le  rang  des  doubles, 
pourront  recevoir  une  pension  de  2  000  livres. 

Des  écoles  de  chant  et  de  danse  devront  être  éta- 
blies le  plus  tôt  possible. 

L'arrêt  du  3  janvier  178*  présente  aussi  une  très 
giande  importance.  Revenant  sur  la  nécessité  de 
former  des  élèves  pour  l'Académie,  il  décide  la  créa- 
tion d'une  «  école  tenue  par  d'habiles  mailres  de 
musique,  de  clavecin,  de  déclamation,  de  langue 
française  et  autres,  chargés  d'y  enseigner  la  mu- 
sique, la  composition,  et,  en  général,  tout  ce  qui 
peut  servir  à  perfectionner  les  différents  talents  pro- 
pres à  la  musique  du  roi  et  à  l'Opéra  ».  C'est  là  l'ori- 
gine de  notre  Conservatoire  de  Musique. 

Afin  d'encourager  les  écrivains  à  se  livrer  à  la 
composition  des  poèmes  lyriques,  un  certain  nombre 
de  prix  sont  créés  pour  être  attribués  aux  plus  mé- 
ritants. 

Les  feux  sont  supprimés,  mais  les  règlements  con- 
cernant les  appointements  et  les  pensions  sont  rema- 
niés, de  façon  à  procurer  aux  artistes  de  plus  grands 
avantages.  Les  9.000  livres  auxquelles  s'élèvent  les 
appointements  des  premiers  sujets  sont  désormais 
passibles  d'une  retenue  de  1500  livres,  mises  en 
séquestre  pour  fournir  un  fonds  de  22  500  livres,  que 
recevra  chaque  sujet  après  quinze  années  de  ser- 
vice. A  cette  époque,  si  ledit  sujet  se  trouve  hors 
d'élal  de  continuer  ses  services,  il  lui  sera  payé  an- 
nuellement 75  livres  d'intérêt  pour  chacune  des  re- 
tenues de  1500  livres  subies,  et  ainsi,  d'année  en 
année,  jusqu'à  extinction  du  fonds  de  réserve.  Si,  au 
contraire,  il  est  jugé  en  état  de  demeurer  à  l'Acadé- 
mie, le  fonds  de  22  500  livres  lui  sera  intégralement 
remboursé.  Au  bout  d'un  nouveau  stage  de  cinq 
années,  il  aura  droit,   en   outre,  à  une  pension  de 

2  000  livres,  plus  500   livres  encore  pour  les    cinq 
années  suivantes. 

Les  remplaçants  ayant  droit  à  7  000  livres  d'ap- 
pointemenls  subiront  aussi  annuellement  une  re- 
tenue de  1000  livres,  pour  former  un  fonds  de 
15  000  livres  remboursables  après  quinze  ans  de  ser- 
vice, dans  les  mêmes  conditions. 

Les    appointements    des    doubles    sonl    fixés    à 

3  000  livres  sans  retenue. 

Les  appointements  du  maître  des  ballets,  des  pre- 
miers danseurs  et  danseuses,  élevés  à  7  000  livres, 
subiront  une  retenue  de  1  000  livres,  et  ceux  des 
danseurs  et  danseuses  en  remplacement,  élevés  à 
S. 000  livres,  une  retenue  de  1  000  livres  également, 
aux  mêmes  effets  que  nous  avons  exposés. 

Les  sujets  qui  viendraienl  à  quitter  l'Académie 
sans  cause  légitime  et  bien  prouvée  perdraient  leurs 
droits  sur  les  fonds  mis  en  séquestre. 

Chaque  semaine,  à  jour  fixe,  une  assemblée  géné- 
rale des  co-partageants  arrêtera,  sauf  modifications 
de  la  part  du  représentant  du  Secrétaire  d'État  au 
département  de  Paris,  le  répertoire  et  la  distribu- 
tion des  rôles. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSKJUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  CONSERVATOIRE 


lu  arrêt  du  Conseil,  du  13  mars  suivant,  modilie 
complètement  l'organisation  antérieure  de  l'Aca- 
démie. 

Un  comité  composé  d'un  premier  sujet  du  chant, 
d'un  premier  danseur,  de  deux  maîtres  du  théâtre, 
du  maître  des  ballets  et  du  maître  de  l'orchestre, 
sous  la  présidence  du  représentant  du  Secrétaire  d'E- 
tat, tiendra  séance  chaque  semaine.  Assisteront  éga- 
lement aux  réunions  un  inspecteur  général  de  l'Aca- 
démie nommé  par  le  Secrétaire  d'État,  et  le  secré- 
taire de  l'Académie. 

Chacun  des  six  membres  du  comité  remplira 
alternativement  les  fonctions  de  semainier. 

Les  semainiers  en  exercice  et  le  comité  rendront 
compte  par  écrit  au  représentant  du  Secrétaire  d'E- 
tat de  tout  ce  qui  concerne  la  police  intérieure  de 
l'Académie,  de  tout  ce  qui  peut  intervertir  le  bon 
ordre  et  nuire  au  bien  du  service. 

Les  ordres  provisoires  du  représentant  du  Secré- 
taire d'Etat  seront  exécutés  comme  s'ils  émanaient 
du  Secrétaire  d'Elat  en  personne. 

Le  comité  décidera  provisoirement,  à  la  pluralité 
des  voix,  sur  tous  objets  qui  lui  seront  proposés,  et 
ses  décisions  motivées  seront  transcrites  par  le  secré- 
taire de  l'Académie,  puis  visées  par  l'inspecteur 
général  qui  les  remettra  au  représentant  du  Secré- 
taire d'Etat,  alin  qu'il  y  soit  donné  la  sanction  né- 
cessaire. 

Le  comité  arrêtera,  dans  l'assemblée  du  lundi,  le 
répertoire  des  représentations,  ainsi  que  les  répéti- 
tions qui  devront  avoir  lieu  dans  la  quinzaine.  11  dis- 
tribuera les  rôles  et  réglera  les  entrées  de  danse.  Il 
proposera  le  choix  des  ouvrages  nouveaux  qui  lui 
auront  été  présentés,  avec  son  avis,  pour  que  le  Se- 
crétaire d'Etal  puisse  en  faire  l'examen  conformé- 
ment aux  articles  13,  14  et  13  du  règlement  de  1714. 
Il  arrêtera  toutes  dépenses,  dont  l'état  sera  visé  par 
l'inspecteur  général  et  approuvé  par  le  représentant 
du  Secrétaire  d'Etat,  et,  conjointement  avec  l'inspec- 
teur général  et  le  secrétaire  de  l'Académie,  signera 
tous  mandats  de  payement  et  états  d'appointements. 
Il  jugera,  enfin,  du  talent  de  quiconque  se  présentera 
pour  entrer  à  l'Académie,  de  façon  qu'il  soit  donné 
tel  ordre  qu'il  appartiendra  à  fin  de  début. 

Les  instructions  du  comité  seront  exécutées  sur-le- 
champ,  sans  que,  sous  aucun  prétexte,  les  sujets  ou 
préposés  puissent  se  dispenser  d'y  obéir,  à  peine 
d'une  amende  de  24  livres  pour  la  première  fois, 
d'une  amende  plus  forte  en  cas  de  récidive,  et  de 
renvoi  si  les  actes  de  désobéissance  se  multipliaient. 

Pour  accorder  aux  sujets  un  intérêt  dans  les  béné- 
fices résultant  de  leurs  efforts  et  de  leur  économie, 
il  sera  tenu,  le  10  de  chaque  mois,  une  assemblée 
générale  de  tous  les  sujets  co-partageants,  où  le 
comité  fera  connaître  la  nature  des  recettes  et  dé- 
penses. L'assemblée  pourra  formuler  ses  observa- 
tions, dont  il  sera  tenu  registre  par  le  secrétaire  de 
l'Académie,  afin  que  le  comité  y  puisse  répondre 
dans  l'assemblée  générale  suivante. 

Les  droits  des  auteurs  sont  maintenus  tels  que  les 
avait  fixés  l'arrêt  du  30  mars  1776.  En  outre,  si  les 
représentations  ininterrompues  d'un  ouvrage  excè- 
dent le  nombre  de  quarante,  il  sera  payé  au  poète  et 
au  compositeur  500  livres  de  gratification.  Leurs 
honoraires,  pour  les  ouvrages  en  un  acle,  s'élèveront 
à  80  livres  par  chacune  des  vingt  premières  représen- 
tations, à  60  livres  par  chacune  des  vingt  suivantes, 
à  50  livres  pour  les  autres. 

Sa  Majesté  confirme  la  décision  du  10  avril  1781, 


par  laquelle  elle  accordait  aux  auteurs  des  grands 
ouvrages  une  rétribution  de  60  livres  perçue,  leur 
vie  durant,  à  toutes  les  représentations  données 
après  la  quarantième,  et  une  rétribution  de  20  livres 
aux  auteurs  d'ouvrages  en  un  acte. 

Sont  confirmés  aussi  l'article  20  de  l'arrêt  du 
30  mars  1776  et  l'article  38  de  l'arrêt  du  27  février 
1778,  aux  termes  desquels  les  poètes  et  les  composi- 
teurs qui  auraient  donné  trois  grands  ouvrages, 
dont  le  succès  aurait  été  assez  incontesté  pour  qu'ils 
fussent  gardés  au  théâtre, jouiraient, leur  vie  durant, 
d'une  pension  de  1  000  livres,  augmentée  de  300  livres 
par  chacun  des  deux  ouvrages  suivants  et  de  1  000  li- 
vres pour  le  sixième. 

Un  arrêt  du  Conseil  du  28  mars  1789  rétablit  l'u- 
sage des  feux.  11  réduit  le  chilfre  des  appointements 
des  premiers  sujets  du  chant  à  3  000  livres,  et  alloue 
50  livres  de  feux  par  représentation;  les  appointe- 
ments des  premiers  sujets  de  la  danse  sont  fixés  à 
4  400  livres,  leurs  feux  à  32  livres  10  sols. 

Les  appointements  des  remplaçants  et  des  doubles 
restent  établis  comme  par  le  passé. 

Les  retenues  prescrites  par  l'arrêt  du  3  janvier 
1784  sont  maintenues  pour  former  le  fonds  de  re- 
traite, et  s'exerceront  sur  les  gratifications  annuelles- 
La  salle  du  Palais-Royal  ayant  été  incendiée  le 
6  avril  1763,  l'Académie  se  transporta  provisoire- 
ment aux  Tuileries,  dans  la  salle  des  Machines.  La 
salle  du  Palais-Royal  fut  rouverte  le  26  janvier  177U; 
mais  un  nouvel  incendie  l'ayant  encore  dévastée  le 
8  juin  1781,  la  construction  d'un  autre  théâtre  fut 
décidée.  Il  fut  édifié  en  quatre-vingt-dix  jours,  à  la 
Porte  Saint-Martin,  et  inauguré  le  27  octobre.  L'o- 
péra y  demeura  jusqu'en  1794. 


Au  cours  du  xvuie  siècle,  une  grande  époque  mar- 
qua le  relèvement  de  l'Opéra,  au  point  de  vue  de 
l'exploitation  musicale;  ce  fut  la  venue  de  Rameau 
qui  fut  la  cause  des  succès  que  l'Académie  n'avait 
connus,  jusqu'alors,  qu'avec  I.li.li. 

C'est  en  1733,  le  Ier  octobre,  que  Rameau  fit  repré- 
senter, pour  la  première  l'ois,  Hippolyte  et  Aricie,  qui 
souleva  de  violentes  oppositions  de  la  part  de  tous 
ceux  qui  étaient  demeurés  fidèles  à  Lulli.  Néanmoins, 
le  succès  s'affirma  en  quelques  jours  et  s'imposa 
bientôt. 

Né  à  Dijon,  le  25  septembre  1683,  déjà  célèbre 
comme  organiste)  et  connu  comme  théoricien,  Ra- 
meau avait  obtenu  de  l'abbé  Pellegrin  le  poème  d'Hip- 
polyte  cl  Aricie,  en  échange  d'une  reconnaissance  de 
500  livres  tournois,  qu'il  ne  devait  d'ailleurs  jamais 
payer,  car  après  l'audition  du  premier  acte,  l'abbé 
Pellegrin  déchira  le  billet  en  s'écriant  qu'un  pareil 
musicien  n'avait  pas  besoin  de  caution.  En  vain  re- 
mit-on en  scène  plusieurs  opéras  de  Lulli,  qu'on  lit 
chanter  par  Chassé, Tribou  et  M1"  Eel,  en  vaindonna- 
t- on,  en  1733,  Achille  cl  Deidamie  de  Caui'HA,  les 
Grâces  de  Mouket,  pour  faire  échec  à  la  musique 
nouvelle.  Rameau  triompha,  quelques  mois  après. 
avec  les  Indes  galantes.  Cette  seconde  victoire  aug- 
menta le  crédit  de  Hameau,  qui  devint  le  maître 
absolu  de  la  scène  de  l'Opéra,  avec  Castor  et  Pûllux, 
en  1737,  situation  qu'il  conserva  jusqu'en  1764,  date 
de  sa  mort.  Les  Fêtes  d'Hébê,  Dardanus,  les  Fêtes  de 
Polymnie,  les  Fêtes  de  l'Hymen  et  de  l'Amour,  Nais  et 
Zoroustrc  se  succédèrent  sans  que  la  fortune  de 
Rameai    déchût  un  instant.  Ce  compositeur  reçut  de 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 

Louis  XV  des  lettres  de  noblesse,  il  fui  exempté  d'im- 
pôts dans  sa  ville,  et  reconnu  comme  indispensable 
par  ses  rivaux  eux-mêmes.  Rebel  et  Francœur,  qui 
avaient  fait  représenter  Scanderberg  en  173b,  et  Zélin. 
dor,  roi  des  Sylphes,  en  1745,  remplacèrent  Berger, 
qui  lui-même  avait  succédé  à  Thuret,  en  1744,  comme 
directeur  de  l'Opéra. 

A  signaler  à  la  même  époque,  en  1742,  le  grand 
succès  de  Mocret,  l'auteur  des  Sens  et  des  Amours  de 
llagonde. 

La  troupe  de  l'Opéra  s'était  entièrement  modiliée. 
Trois  femmes  remarquablement  belles  en  faisaient 
partie.  Mlle  Defresne,  M"e  Cartou,  «  la  Hhodope 
moderne  »,  et  M"e  Clairon,  dite  Frétillon.  Le  rôle  de 
Castor  avait  révélé  le  ténor  Jélyotte,  et  les  princi- 
paux rôles  de  Hameau  avaient  été  créés  par  Mlles  Pé- 
lissier,  Chevalier,  Fel,  qui  créa,  en  1753,  te  Devin  du 
village  de  J.-J.  Rousseau,  et  surtout  par  Sophie  Ar- 
noult,  qui,  ayant  débuté  en  17138,  avait  interprété  les 
rôles  de  Télaïre  et  d'Iphise. 

A  côté  d'elle,  on  trouvait  les  demoiselles  Le  Duc, 
d'AziNcouRT,  Rabo.n,  Pbtitpas,  Poulette  et  sa  sœur 
Mariette,  Saint-Germain-. 

Dans  Armide,  M"0  Chevalier  et  Mlle  Metz  s'étaient 
signalées. 

Enfin,  la  danse  avait  trouvé  une  nouvelle  étoile,  la 
Gui.nard,  et  un  danseur,  Gaétan  Vestris,  élève  de  Du- 
i>ré,  qui  surpassa  bientôt  son  maître  et  fut  lui-même 
dépassé  par  Auguste  Vestris  son  fils.  Parmi  les  autres 
danseuses,  il  faut  citer  les  demoiselles  La.nï,  Allard, 
Heinel  et  parmi  les  hommes  Gardel,  Dauuerv  al,  Laval, 
Lyonnois  et  Lanï.  Les  directeurs  s'étaient  succédé 
rapidement.  La  Ville,  qui  en  1749,  avait  donné  le 
théâtre  en  gérance  à  Rebel  et  Francœur,  les  avait 
remplacés  eu  1753  par  Royeh,  qui  mourut  en  1755. 
Bon  temps  et  Levasseur  reprirent  alors  la  gestion,  qu'ils 
gardèrent  jusqu'au  1er  avril  1757. 

A  cette  époque,  un  privilège  de  30  ans  fut  accordé 
à  Rebel  et  Francœur,  et  les  12  000  livres  de  dettes 
furent  payées  par  la  ville. 

L'activité  de  Rebel,  les  succès  de  Rameau,  avaient 
permis  à  l'Opéra  de  lutter  contre  la  Comédie  italienne 
et  l'Opéra-Comique,  quand,  le  6  avril  1763,  le  feu  prit 
à  l'Opéra  à  8  heures  du  matin,  et  en  quelques  heures 
tout  le  théâtre  était  détruit.  Cette  salle  avait  été 
construite  par  Lemercier  en  1637,  sur  les  ordres  de 
Richelieu.  File  avait  été  prêtée  successivement  à 
Molière  et  à  Lulli. 

L'Opéra  dut  émigrer  le  24  janvier  1704  aux  Tuile- 
ries, dans  la  salle  des  Machines  construite  en  1659 
et  puissamment  aménagée  par  Soufllot.  Les  derniers 
chefs-d'œuvre  de  Rameau,  qui  donnait  les  Paladins 
a  78  ans  et  mourut  le  25  août  1764,  ainsi  que  les 
premiers  opéras  de  Gluck  y  furent  donnés  dans  ce 
véritable  hangar,  en  attendant  la  nouvelle  salle  cons- 
truite au  Palais-Royal  et  qui  ne  fut  prête  que  le 
26  janvier  1770.  Après  dix  ans  de  direction,  en  1767, 
Rebel  et  Francœur  cédèrent  la  direction  de  l'Opéra  à 
Trial  et  Berton,  qui  tentèrent  de  remettre  à  la  mode 
les  opéras  de  Lulli;  puis,  les  directeurs  se  suivirent 
et  se  croisèrent  jusqu'à  la  Révolution,  soit  à  la  suite 
du  règlement  de  la  ville  de  Paris  comme  en  1776, 
soit  par  des  modifications  de  régime  comme  en  1778, 
quand  de  Vismes  devint  entrepreneur  général  de 
l'Opéra  avec  un  privilège  de  10  ans  et  une  subvention 
de  80000  livres,  la  première  que  l'Opéra  ait  reçue1. 
C'est  au  cœur  de   cette  période   tourmentée  que 


chronologique 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    8775 

naquit  la  tragédie  lyrique  avec  les  œuvres  du  cheva- 
lier Gluck.  Alors  qu'à  l'Opéra-Comique,  Monsigny, 
Grétry  et  Philidor  représentaient  des  œuvres  réunis- 
sant le  charme  de  la  mélodie  au  sentiment  de  la 
gaieté,  l'Opéra,  dès  le  19  avril  1774,  avait  adopté  le 
genre  tragique  et  grave  avec  Iphigénie  en  Aulide.  Au 
lendemain  de  la  mort  de  Louis  XV,  le  10  mai  1774, 
et  de  l'exil  de  Mme  du  Barry,  qui  faisait  opposition 
à  la  musique  nouvelle  de  Gluck,  le  triomphe  de 
celui-ci  éclipsa  tous  ses  rivaux;  il  avait  été  soutenu, 
dès  sa  première  représentation,  par  Marie-Antoi- 
nette, le  Dauphin  et  le  comte  de  Provence.  11  était 
arrivé  à  Paris,  après  avoir  obtenu  tous  les  succès 
sur  les  théâtres  d'Italie  et  d'Allemagne,  envoyé  par- 
le bailli  du  Rollet,  attaché  à  l'ambassade  de  Frauce 
à  Vienne,  et  pour  obtenir  les  grâces  de  la  Dauphine, 
Marie-Antoinette,  il  lui  avait  donné  des  leçons  di 
chant.  Trois  mois  après  Iphigt'nie  en  Aulide,  le  2  août 
1774,  il  donnait  Orphée,  dont  le  2e  acte  était  porté 
aux  nues.  Le  ténor  Legros  chantait  le  rôle  d'Orphée. 
I. arrivée,  M"os  Duplant,  Arnould  et  Rosalie  Levas- 
seur avaient  rempli  les  autres  rôles. 

Cependant,  la  faveur  de  Marie-Antoinette  et  de  la 
cour  avait  suscité  de  nombreuses  jalousies.  '»i 
Barry,  de  concert  avec  le  marquis  CaraccioJi,  am- 
bassadeur de  .\aples,  fit  venir,  par  l'intermédiaire  dr 
M.  de  Breteuil,  en  lui  assurant  une  gratification 
annuelle  de  2  000  écus,  le  musicien  italien  Piccimi, 
qui  devait  faire  entendre  sa  musique  à  Paris. 

Dès  lors,  la  lutte  commença  entre  les  gluckistes 
et  les  piccinistes.  Les  représentations  d'Orphée,  pour 
lesquelles  on  remplaça  le  clavecin  par  la  harpe, 
furenl  le  prétexte  de  discussions  violentes.  L'abbé 
Galiani,  auquel  quelqu'un  se  plaignait  que  la  salle 
de  l'Opéra  fût  sourde,  répondit  :  «  Elle  a  bien  de  la 
chance!  » 

Les  Italiens  reprochèrent  à  Gluck  d'avoir  pris  chez 
eux  des  modèles  qu'il  avait  trop  peu  modifiés,  et  on 
se  plaignait  du  peu  d'importance  des  ballets  dans 
lesquels  paraissaient  Vestris,  Gardel  et  M"e  Heinel. 
Les  partisans  de  Gluck,  de  leur  côté,  s'extasiaient 
sur  cette  musique,  u  Puisqu'on  peut  avoir  un  si 
grand  plaisirjpendant  deux  heures,  disait  J.-J.  Rous- 
seau, je  conçois  que  la  vie  soit  bonne  à  quelque 
chose.  »  El  l'abbé  Arnaud  répétait  après  le  premier 
acte  :  «  Avec  cet  air  on  fonderai!  une  religion  »,  en 
faisant  allusion  au  premier  chant  d'Agamemnon. 
Le 23  avril  1776.  Alceste  était  représentée;  le  3e  acle 
fut  discuté,  mais  Ml,e  Arnould,  qui  avait  réussi 
dans  Iphigénie  et  Orphée,  avait  été  remplacée  par 
M1'5  Levasseur,  protégée  par  le  comte  Mercy-Argen- 
teau,  le  bienfaiteur  de  Gluck.  D'où  des  difficultés 
nouvelles  pour  l'auteur,  au  cours  des  répétitions. 
M"''  Levasseub  fut  remplacée  avec  avantage,  le 
17  mai  1776,  par  M'|e  Laguerre,  qui  imposa  Alceste 
au  public. 

Piccini  commençait  à  écrire  un  opéra  sur  le 
Roland  de  Marmontel,  alors  que  Gluck  préparait  le 
même  sujet.  Ce  fut  le  prétexte  de  nouveaux  libelles 
et  d'épigrammes  dans  lesquelles  Suard,  Arnaud, 
Coquéau,  du  Rollet  dirigeaient  les  gluckistes,  tandis 
que  les  piccinistes  avaient  à  leur  tète  Marmontel,  La 
Harpe  et  d'Alembert. 

En  1777,  lorsque  Armide  parut  sur  la  scène,  un 
troisième  groupe  de  musiciens  entrèrent  dans  la  lice  : 
c'étaient  les  partisans  de  Lulli,  qui  réclamaient 
qu'on  reprit  les  œuvres  du  musicien  italien.  A  cause 
d'eux,  les  premières  représentations  eurent  un  suc- 
cès  douteux.    Les   lullistes    avaient   organisé    une 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


cabale  pour  la  seconde  représentation,  et  (iH'ck  ne 
put  y  parer  qu'en  obtenant  de  la  reine  Marie-An- 
loinette  qu'elle  vint  elle-même  au  spectacle. 

A  quelque  temps  de  là,  le  27  janvier  1778,  Piccini 
donna  Roland;  la  reine  y  vint  également,  s'abstint 
d'applaudir;  mais,  malgré  elle,  les  auditeurs  accueil- 
lirent cette  œuvre  avec  une  grande  faveur  et  rame- 
nèrent Piccini  en  triomphe  chez  lui.  L'exécution  était 
pourtant  très  défectueuse.  M»"  Levasseur  chantait 
faux,  Lbgros  et  Larrivée  se  montraient  très  impar- 
faits, néanmoins,  les  douze  premières  représenta- 
tions rapportèrent  61920  livres,  alors  qa'Iphigtme 
n'avait  rapporté  que  61  833  livres. 

Cependant,  Gluck  n'avait  pas  été  ému  plus  que  de 
raison  par  ce  succès  ;  à  chaque  reprise  d'Armirie,  le  pu- 
blic semblait  mieux  comprendre.  Il  s'attacha  au  con- 
traire avec  plus  de  soins  à  son  Iphigênie  en  Taurlde, 
qui,  le  18  mai  1779,  obtinL  tout  les  suffrages.  11  avait 
pris  soin,  en  même  temps,  de  se  concilier  le  parti 
des  lullistes,  en  respectant  le  texte  à'Armide  que  Qui- 
nault  avait  écrit  pour  Lulli.  Le  nouveau  directeur  de 
l'Opéra,  entrepreneur  à  ses  risques  et  périls  depuis 
1778,  Devismes,  voulut  profiter  de  ces  succès  pour 
faire  jouer  ses  artistes  tous  les  jours.  Il  arriva 
même  à  donner  cinq  opéras  par  semaine.  Il  entre- 
mêlait ces  spectacles  d'opéras  bouffons  d'ANFOssi  et 
de  Paisiello,  et  lit  écrire  par  Grétry  les  Trois  Ages 
de  l'Opéra,  dans  lesquels,  après  Lulli,  Rameau  et 
Gluck,  Piccini  était  oublié.  Il  avait  mis  tous  ses 
soins  dans  la  mise  en  scène  et  les  costumes,  et  son 
activité  réussissait  à  donner  de  la  vie  à  l'Acadé- 
mie de  musique;  le  public  accourait,  les  recettes 
étaient  abondantes,  néanmoins,  elles  ne  couvraient 
pas  le  chiffre  des  dépenses.  Il  offrit  la  résiliation  de 
son  bail  pour  ne  pas  être  ruiné,  mais  il  fut  éconduit. 
Pendant  ce  temps,  lieaumarchais  lui  suscitait  des 
tracas  de  tous  genres.  Le  directeur  ayant  pris  une 
mesure  de  police  pour  interdire  l'entrée  de  l'amphi- 
théâtre aux  femmes  qui  portaient  des  coiffures  colos- 
sales, cette  innovation  ne  fut  que  la  cause  d'une 
nouvelle  difficulté.  M'"  Saint-Quentin  lança  la  coif- 
fure à  la  Devismes;  en  même  temps,  les  chefs  des 
ballets  et  des  chœurs  voulurent  s'emparer  du  pou- 
voir. Ils  se  réunirent  chez  M"e  Guimard,  dans  son 
palais  de  la  Chaussée  d'Antin,  et  Auguste  Vestrh 
mena  la  révolte. 

Bref,  les  tracasseries  des  artistes  devinrent  si 
graves  qu'il  fallut  signifier  des  lettres  de  cachet  à 
Auguste  Vestris  et  à  Dauberval,  qui  refusaient  de 
danser  dans  Armide.  La  révolte  de  l'Opéra  fut  ter- 
minée par  le  prévôt  des  marchands,  qui,  au  mois  de 
mars  1779  reprit  l'administration  de  l'Opéra.  La  ville 
de  Paris  résilia  le  bail  et  conserva  Devismes  comme 
directeur  gérant;  elle  lui  donna  100 C00  livres  et  une 
pension  de  9  000  livres;  le  marché  réussit  par  l'inter- 
médiaire de  Campan,  le  valet  de  chambre  de  la  reine. 
La  guerre  musicale  continuait  dans  toute  sa  force, 
quand  Berton,  directeur  de  la  musique,  essaya  de 
réconcilier  les  parlis.  Gluck  et  Piccini  s'embrassèrent 
et  se  firent  mutuellement  les  éloges  les  plus  pom- 
peux. Au  dessert,  Gluck  fit  à  son  nouvel  ami  des 
confidences  sur  les  Français  :  «  Bonnes  gens  qui  le 
faisaient  rire;  ils  veulent  qu'on  leur  fasse  du  chant, 
mais  ils  ne  savent  pas  chanter.  »  Cette  réconciliation 
n'eut  pas  de  lendemain. 

Deux  livrets  portant  le  titre  d' Iphigênie  en  Tauride, 
donnés  par  Devismes  à  Gluck  et  à  Piccini,  qui  tous 
deux  devaient  écrire  de  la  musique  sur  le  même 
sujet,  déterminèrent  la  reprise  de  la  lutte. 


Nous  avons  vu  le  succès  de  l'œuvre  de  Gluck,  en 

1779,  et  Piccini  garda  provisoirement  son  œuvre,  qui 
ne  fut  exécutée  que  deux  ans  plus  tard,  à  un  moment 
où  les  disputes  s'étaient  apaisées. 

Gluck  reçut  12  000  livres,  plus  une  gratification  de 
4000  livres,  et  il  en  obtint  10  000  pour  sa  partition 
d'Echo  et  Narcisse,  qui  fut  représentée  la  même 
année.  Cet  opéra  ne  réussit  qu'à  demi,  fut  suivi  de 
VEcot  mal  payé,  parodie  jouée  à  la  Comédie  italienne, 
et  Gluck,  affecté  de  cet  échec,  quitta  Paris  pour 
Vienne,  où  il  mourut  d'une  attaque  d'apoplexie, 
laissant  un  héritage  de  60  0000  livres. 

C'est  à  la  répétition  générale  d' Iphigênie  qu'on 
découvrit  un  jeune  homme  qui  s'était  glissé  dans 
une  loge  obscure,  et  qui  y  avait  passé  la  nuit  pour 
assister  à  la  première  représentation.  C'était  Méhul, 
qui,  présenté  à  Gluck,  devait  donner  dix  ans  plus 
lard  Euphrosine  et  Coradin. 

Délivré  de  sou  rival,  Piccini  fit  alors  représenter 
Atys,  le  22  février  1780,  sur  le  livret  de  Quinault, 
arrangé  par  Marmontel,  dont  les  représentations 
ne  furent  arrêtées  que  par  l'incendie  du  Palais-Royal, 
le  8  juin  1781. 

Le  privilège  de  l'Opéra  avait  été  retiré  le  17  mars 

1780,  à  la  ville  de  Paris,  qui  dut  payer  200  000  livres 
de  dettes.  Necker  régla  les  dépenses  comme  direc- 
teur des  finances,  et  mit  Berton  à  la  tète  de  l'Acadé- 
mie, sous  les  ordres  de  l'intendant  des  Menus  Plai- 
sirs, La  Ferté.  Le  roi  augmente  alors  la  subvention 
de  l'Opéra  et  la  porte  à  150000  livres;  il  lui  donne 
les  costumes  et  décorations  des  Menus-Plaisirs,  éva- 
lués à  1500  000  livres,  à  la  condition  que  l'Opéra 
joue  douze  fois  par  an  à  Versailles  et  à  Fontaine- 
bleau. 

Dans  la  salle  des  Menus-Plaisirs,  où  l'Opéra  s'ins- 
lalle  en  1781,  on  reprend  le  Devin  du  Village,  Echo 
et  Narcisse,  pendant  que  s'élève  la  salle  de  la  Porte 
Saint-Martin  qui  devait  être  prête  le  27  octobre  de 
la  même  année.  C'est  là  que  furent  représentées  les 
œuvres  de  Grétry,  Colinette  a  la  Cour,  1782,  la  Cara- 
vane du  Caire,  Panurge,  les  opéras  de  Sacchi.ni,  (  Edipe 
à  Colone,  1787,  le  Déniophon  de  Cherubini,  la  Didon 
de  Piccini,  Démophon  de  Vogel,  les  Puritains  de  Bel- 
uni  et  le  Pré  aux  Clercs  d'HÉROLD. 

Sous  la  direction  de  Dauvergne,  qui  avait  été 
nommé  en  1789,  les  nouveaux  auteurs  obtinrent 
d'être  représentés  quelle  que  fût  leur  école.  Le  direc- 
teur itail  assisté  d'un  comité  composé  de  Gossec, 
Legros,  Durand,  Laine/.,  Gardel,  Noverre,  Dauber- 
val, qui  s'occupaient  particulièrement  du  matériel. 
Il  avait  engagé  M"'c  Saint-Huberti,  qui  reprit  Roland, 
M"0  Dozon  qui  avait  triomphé  dans  Didon,  ainsi  que 
les  deux  Vestris,  qui  avaient  dansé  un  ballet  en 
vogue,  le  Déserteur,  de  Maximilien  Gardel,  le  10  oc- 
tobre 1784. 

La  fin  de  l'ancien  régime  l'ut  marquée  par  la 
représentation  d'Antigone  de  Zingarelli,  arrêtée  <ie- 
la  troisième  représentation,  le  30  avril  1790.  La  ville 
de  Paris  reprit  alors  la  direction  de  ['Académie 
royale  de  musique,  qu'elle  administra  par  des  com- 
missaires. Le  comité  de  Salut  public  prohiba,  le 
Il  février  1790,  les  mascarades  et  les  déguisements, 
supprimant  ainsi  les  bals  de  l'Opéra. 

Une  représentation  invraisemblable  termine  la 
période  royale,  c'est  La  Prise  de  la  Bastille,  hiéro- 
drame  tiré  des  livres  saints  par  Désaugiers  et  exé- 
cuté par  les  artistes  de  l'Opéra,  dans  l'église  Notre- 
Dame,  le  13  juillet  1790.  Un  Te  Deum  termine  la 
représentation. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  RAPPORTS  DE  LA  COMÉDIE   FRANÇAISE 
ET  DE  L'OPÉRA 

Les  Comédiens  Français  défendaient  àprement 
leur  monopole,  et  les  concessionnaires  de  l'Opéra 
faisaient  marché  du  droit  de  chauler,  de  danser,  à 
l'aide  de  cessions  arbitraires,  en  vertu  d'autorisa- 
tions tacites,  ou  même  de  lettres  ministérielles,  qui 
leur  permettaient  d'améliorer  leur  situation  obérée, 
en  trafiquant  de  leur  privilège. 

L'Opéra,  qui  avait  été  en  butte  aux  poursuites 
des  Comédiens-Français,  en  raison  des  aulorisa- 
tions  données  à  des  entrepreneurs  de  spectacles, 
ainsi  que  nous  le  venons  au  chapitre  des  forains, 
avait  à  cœur  de  reprendre  sa  revanche  contre  la 
Comédie-Française,  à  propos  des  musiciens  ou  des 
chanteurs  qui  y  étaient  employés1. 

Il  y  avait,  en  effet,  dans  le  répertoire  de  la  Comé- 
die-Française, de  nombreuses  pièces  qui  exigeaient 
de  la  musique.  Ainsi  l'Andromède  de  Corneille  était 
accompagnée  des  chœurs  de  Dassoccy,  les  pièces  de 
Molière  se  coupaient  de  divertissements  et  de  bal- 
lets ;  c'est  d'ailleurs  sous  le  nom  de  comédies-ballets, 
qu'elles  étaient  jouées  à  la  cour. 

Les  six  violons  qui  composaient  alors  l'orchestre 
du  Palais-Royal  avaient  d'abord  été  placés  der- 
rière le  théâtre,  puis  dans  une  des  loges  du  fond. 
Ce  n'est  qu'en  1675  qu'ils  vinrent  entre  le  théâtre 
et  le  parterre,  pour  la  première  représentation  de 
l'Inconnu. 

L'ordonnance  du  12  août  1672,  rendue  après  l'ar- 
rivée de  Lulli  à  l'Opéra  et  sur  sa  demande,  consolida 
le  privilège  de  celui-ci  en  interdisant  aux  comédiens 
d'avoir  plus  de  six  voix  et  de  douze  violons,  et  encore 
cetfe  tolérance  ne  fut-elle  admise  qu'en  considéra- 
tion des  œuvres  de  Molière,  dont  les  représentions 
exigeaient  ce  minimum  d'orchestre.  Obligé  d'aban- 
donner les  comédies-opéras,  Molière  se  sépara  de 
Lulli,  avec  lequel  il  avait  collaboré  jusqu'alors,  et 
se  rejeta  sur  la  danse,  qui  n'était  pas  encore  inter- 
dite. Le  Malade  imaginaire  ainsi  que  le  Bourgeois 
gentilhomme  étaient  montés  avec  des  intermèdes 
et  des  cérémonies.  M'i"  Molière  et  Lagra.nge  y  chan- 
taient encore  des  couplets  et  des  airs  composés  par 
Charpemtier,  qui  avait  succédé  à  Lulli,  dans  la  con- 
fiance de  Molière.  On  sait  qu'à  la  troisième  repré- 
sentation du  Malade  Imaginaire,  Molière  mourait,  el 
Lulli  profita  de  cette  disparition  pour  faire  réduire 
encore  les  orchestres  de  la  Comédie.  Le  30  avril 
1673,  il  provoqua  une  nouvelle  ordonnance  limitant 
le  nombre  des  violons  à  six  et  le  nombre  des  voix  à 
deux.  Comme  les  anciens  amis  de  Molière  n'avaient 
pas  tenu  compte  de  cette  ordonnance,  qui  ne  pou- 
vait atteindre,  pensaient-ils,  les  œuvres  de  leur 
maître,  le  directeur  de  l'Opéra  leur  fit  rappeler  les 
termes  de  l'ordonnance  de  1673,  en  y  ajoutant  l'in- 
terdiction d'avoir  des  musiciens  à  gages. 

Les  comédiens  en  furent  réduits  à  se  servir  de 
machines,  à  monter  des  ballets  qui  remplaçaient 
tant  bien  que  mal  les  chanteurs  interdits;  mais, 
comme  ils  étaient  arrivés,  malgré  la  rigueur  des 
ordonnances,  à  rivaliser  de  pompe  avec  l'Opéra, 
Lulli  obtint  qu'on  leur  interdit  les  danseurs.  C'est 
ainsi  que  les  représentations  de  Circé,  de  Thomas 


I.  Ed.  de  Cliauvcron,  les  Grands  Procès  de  la  Comêdie-Fran 
page  00. 

Copyright  by  Librairie  Delagrave,  1930. 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3777 

Corneille  et  de  Visé,  dont  la  musique  avait  été 
écrite  par  Charpentier,  durent  être  suspendues. 
Quand,  en  1716,  les  comédiens  reprirent  A t Italie,  et 
en  1721  Esther,  qui  avaient  été  représentées  par  les 
demoiselles  de  Saint-Cyr,  avec  la  musique  de  Moreau, 
en  1689  et  1691,  ils  durent  supprimer  la  plus  grande 
partie  des  chœurs,  car,  à  cette  époque,  des  ordon- 
nances sans  nombre,  provoquées  par  les  infractions 
de  la  Comédie,  et  des  lettres  patentes  de  1715  les 
avaient  contraints  à  respecter  le  privilège  de  l'O- 
péra. 

Depuis  lors,  quand,  dans  les  pièces  du  Théâtre- 
Français,  se  trouvaient  des  «  vaudevilles  »  et  des 
couplets,  on  se  garda  d'enfreindre  les  règlements  et 
on  limita  le  nombre  des  chanteurs  à  celui  qui  était 
accordé.  Quelques  infractions  furent  aussitôt  suivies 
de  sanctions;  les  Comédiens  furent  comdamnés  à 
500  livres  d'amende,  le  20  juin  1716,  pour  une 
représentation  du  Malade  imaginaire,  entremêlée  de 
danses  et  de  chants  avec  plus  de  violons  que  les  or- 
donnances ne  l'autorisaient. 

Le  17  décembre  1717,  une  contravention  est 
dressée,  à  la  demande  de  l'Opéra,  pour  la  représen- 
tation de  Métempsycose  des  Amours  ou  les  Dieux  Co- 
médiens, qui  comptait  neuf  violons  ou  hautbois.  Les 
Comédiens  réclament,  ils  prétendent  que  l'Opéra  qui 
les  poursuit  ferme  les  yeux  sur  les  abus  de  la  Co- 
médie italienne  et  des  Forains.  Ils  n'obtiennent  rien, 
les  interdictions  sont  renouvelées  dans  l'arrêt  du' 
1er  juin  1730,  rendu  au  profit  de  Gruer,  au  moment 
où  il  prenait  la  direction  de  l'Opéra,  et  dans  un 
autre  arrêt  du  11  novembre  1741,  qui  prononce  par 
avance  10000  livres  d'amende  contre  tous  ceux  qui 
enfreindront  le  privilège  de  l'Opéra. 

En  1746,  nouvelle  poursuite  à  propos  du  Nouveau 
Monde  el  de  l'Inconnu;  et  comme  les  Comédiens  n'a- 
vaient tenu  aucun  compte  des  interdictions  de  Ber- 
ger, directeur  de  l'Opéra,  qui  avail  protesté  contre 
les  ballets  exécutés  par  les  danseurs,  et  les  scènes 
de  musique,  ils  furent  condamnés,  le  30  octobre  de 
la  même  année,  à  payer  30000  livres  de  dommages- 
intérêts,  avec  défense  de  récidiver. 

L'obéissance  aux  règlements  qui  avaient  prévalu 
au  début  du  xvuie  siècle,  et  qui  n'avaient  eu  pour 
résultat  que  d'aggraver  les  prétentions  de  l'Opéra, 
entraîna  la  révolte  des  Comédiens.  En  1751,  ils  por- 
tèrent leur  orchestre  à  huit  instruments,  et  deux  ans 
après,  la  Comédie  compte  un  maître  de  ballet,  treize 
danseurs  et  danseuses,  un  couple  de  danseurs  ita- 
liens, huit  violons  et  une  flûte.  Ces  ballets,  un  ins- 
tant interdits,  furent  autorisés  par  le  roi  après  que 
les  Comédiens,  ayant  fermé  leur  théâtre,  eurent  porté 
leurs  doléances  par  remontrances.  Le  règlement  de 
1757,  qui  modifia,  nous  l'avons  vu,  1'organisalion  de 
la  Comédie,  attribua  au  second  semainier  l'inspec- 
tion de  il'orchestre,  qui  compte  douze  musiciens, 
et  des  ballets,  qui  comptent  un  maître  de  musi- 
que, un  maître  de  danse,  des  danseurs  et  des  figu- 
rants. 

Peu]  à  peu,  la  Comédie  augmenta  son  personnel 
musical.  En  1759,  le  duc  d'Aumont  admit  les  trois 
violoncelles,  puis  on  y  adjoignit  un  cor  de  chasse, 
un  timbalier,  si  bien  qu'à  la  veille  de  la  Révolution, 
la  Comédie  comptait  trente  musiciens  et  trente-six 
personnes  pour  les  ballets. 

La  musique  était  alors  si  bien  admise,  qu'on  put 
représenter  le  Barbier  de  Sêville,  que  Beaumarchais 
avait  d'abord  destiné  à  la  Comédie-Italienne;  l'Opéra 
ne  songea  même  pas  à  user,_de_ représailles. 


BlfCrCLOPÉnTE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


LES  FORAINS 

Au  xvii"  siècle,  les  grandes  foires  qui  se  tenaient 
dans  toute  la  France  étaient  le  prétexte  de  représen- 
tations IhéàLrales.  Les  petites  villes  n'avaient  pas  de 
théâtre,  aucune  tournée  n'y  venait  jamais,  et  ce  n'est 
qu'à  l'occasion  des  fêtes  qu'on  rencontrait,  sur  les 
places  publiques,  des  forains  qui  entremêlaient  leurs 
jeux  de  scènes  amusantes.  A  Paris,  la  foire  de  Saint- 
Germain  se  tenait  sur  les  domaines  de  l'abbaye  de 
Saint-Germain  des  Prés. 

La  foire  Saint-Laarent,  ainsi  nommée  parce  qu'elle 
s'ouvrait  la  veille  de  la  fête  de  saint  Laurent,  était 
lixée  entre  les  fausses  portes  Saint-Laurent  et  Saint- 
Martin;  après  n'avoir  duré  qu'un  jour,  elle  réussit, 
en  1740,  à  obtenir  une  autorisation  qui  lui  permit  de 
rester  ouverte  pendant  deux  mois.  Ces  foires  étaient 
fort  courues.  Toutes  les  personnes  de  qualité  s'y  ren- 
daient le  soir,  et  les  frères  Parfaict  assurent  que 
«  ce  lieu  est  moins  une  foire  qu'un  palais  enchanté 
où  tout  le  monde  se  trouve  assemblé  comme  à  un 
rendez-vous1.  » 

Il  fallait  que  ces  forains  fussent  des  concurrents 
sérieux,  pour  que  la  Comédie-Française  les  poursui- 
vit avec  l'opiniâtreté  qu'elle  montra  pendant  de 
longues  années. 

Tant  que  les  forains  s'étaient  contentés  de  marion- 
nettes, d'animaux  sauvages,  de  géants,  de  chiens  et 
de  singes  savants,  d'équilibristes  et  de  danseurs  de 
corde,  les  Comédiens  n'avaient  eu  à  se  plaindre 
d'aucune  rivalité. 

Mais  les  forains  ne  tardèrent  pas  à  joindre  des 
comédiens  à  leur  programme,  à  représenter  des  bal- 
lets, qui  éveillèrent  l'attention  de  ceux  qui  jouis- 
saient d'un  privilège. 

Tout  d'abord,  les  forains  se  crurent  protégés  par 
les  franchises  qui  suspendaient,  pendant  la  durée  des 
foires,  le  privilège  des  corporations;  mais  ils  durent, 
sous  peine  d'une  amende,  demander  L'autorisation 
des  comédiens  pour  chaque  représentation  ou  obte- 
nir du  roi  une  licence,  comme  l'organiste  Raisin,  qui 
faisait  joner  une  épinette,  à  la  foire  Saint-Germain. 

A  la  lin  du  xvu=  siècle,  des  enfants  connus  sous  le 
nom  de  Bamboches,  des  sauteurs  dirigés  par  Maurice 
von  der  Beck  et  Alard,  jouèrent  de  véritables  pièces, 
avec  l'autorisation  de  Sa  Majesté,  «  d'accompagner 
leurs  sauts  de  quelques  discours  ».  Cependant,  ces 
exemples  et  les  succès  que  les  Bamboches  obtenaient 
entraînèrent  trop  d'imitateurs.  Le  lieutenant  généra) 
de  police  reçut,  en  1698,  la  plainte  des  Comédiens 
Français,  qui  protestaient  contre  les  salies  de  spec- 
1  ; i , •  t , ■  s  montées  dans  les  foires  où  des  acteurs  de  pro- 
vince jouaient,  de  véritables  pièces. 

Le  làeutemajit  générai  de  police,  d'Argenson,  con- 
vaincu que  ces  représentations  portaient  atteinte 
au  privilège  exclusif  accordé  par  le  roi,  en  faveur 
de  ces  comédiens,  rendit  deux  sentences,  les  20  et 
27  février  1699,  par  lesquelles  les  comédiens  de  la 
faire  Saint-Germain  étaient  menacés  de  1500  livres 
de  dommages-intérêts  s'ils  représentaieal  quelque 
comédie  on  farce.  Le  Parlement  fut  saisi  d'un  appel 
par  les  forains,  Alard,  la  veuve  Maurice  et  Bertrand, 
et  comme  l'affaire  traînait,  et  que  le  Parlement  n'a- 
vait pas  rendu  son  arrêt,  les  forains  représentèrent 

1.  Ednrond  de'Chauveron,  le/  GraflSa  Procti 
,aise,  page  3  . 


les  pièces  de  la  Comédie  Italienne  qui  venait  de 
partir.  Ce  n'est  qui-  le  26  juin  1703  que  le  Parlement 
confirma  les  sentences  du  lieutenant  de  police.  Au 
mois  d'août  suivant,  à  la  foire  Saint-Laurent,  les 
forains  usèrent  d'un  expédient,  ne  jouèrent  que  des 
fragments  arrangés,  et  ils  réussirent  parfaitement 
auprès  du  public. 

Ce  succès  exaspéra  les  Comédiens,  qui  obtinrent 
du  lieutenant  général  de  police,  le  15  janvier  1704, 
une  nouvelle  ordonnance,  par  laquelle  les  scènes 
détachées  étaient  interdites. 

Un  nouvel  appel  des  forains  suspendit  encore 
l'exécution  de  ces  sentences.  Bertrand  développa 
ses  spectacles  à  l'aide  d'une  troupe  de  province, 
donna  des  spectacles  comiques,  abaissa  le  prix  des 
places,  et  obtint  du  public  l'accueil  le  plus  favorable. 

En  1706,  pendant  la  foire  Saint- Germain,  deux 
sentences  frappèrent  les  forains.  Il  était  interdit  à  la 
veuve  Maurice,  à  Bertrand,  Selles  et  Tiquet  et  autres 
«  farceurs  »  de  représenter  aucun  spectacle  avec 
dialogue,  sous  la  sanction  de  300  livres  de  dommages- 
intérêts  envers  les  Comédiens  et  de  30  livres  d'amende. 

Cette  fois-ci,  ce  fut  le  receveur  des  revenus  de 
l'abbaye  de  Saint-Germain  qui  porta  l'affaire  eu 
appel,  au  nom  du  cardinal  d'Estrées,  abbé  de  Saint- 
Germain  des  Prés,  propriétaire  du  terrain  de  foire, 
au  nom  des  libertés  et  des  franchises  de  cette  foire. 
Le  -22  février  1707,  un  arrêt  de  la  Cour  donna  raison 
aux  Comédiens  Fiançais  et  maintint  les  sentences 
du  lieutenant  de  police. 

Les  dialogues  étant  interdits,  les  forains  eurent 
recours  aux  monologues.  Un  seul  acteur  parlait.  Les 
autres  faisaient  des  signes;  c'est  ainsi  qu'ils  jouèrent 
Arlequin  écolier  ignorant,  et  Scaramouche  pêduni  seru- 
/.uleii.r,  pièces  en  trois  actes. 

Des  forains,  Dolet,  La  Place  et  Bertrand,  lurent 
mis  en  cause  par  les  Comédiens,  qui  prétendaient 
caractériser  le  dialogue  par  les  gestes  des  acteurs, 
qui  parfois  paraissaient  répéter  tout  bas  ce  que  leur 
camarade  avait  dit. 

La  Comédie  en  avait  fait  dresser  des  procès-ver- 
baux. Le  30  août  1707,  un  commissaire  déclarait  : 
«  Ayant  pris  place  dans  une  loge,  nous  avons  observé 
qu'après  que  les  marionnettes  ont  été  jouées  sur  le 
théâtre,  il  a  puni  un  Snirumoucheel  plusieurs  acteurs, 
au  nombre  de  sept,  qui  ont  représenté  une  comédie 
en  trois  actes,  ayant  pour  titre  :  Scaramouche  pédant 
scrupuleux  :  que,  presque  à  toutes  les  scènes,  l'acteur 
qui  avoit  parlé  se  retiroit  dans  la  coulisse  ci  revtt- 
noit  dans  l'instant  sur  le  théâtre,  où  l'acteur  qui 
l'ioii  resté  parlai!  à  son  tour  et  formai!  pai  la  une 
espèce  de  dialogue;  que  les  mêmes  acteurs  se  nar- 
loienlel  répondoienl  dans  les  coulisses,  et  que,  d'au- 
tres fois,  l'acteur  répétait  tout  haut  ce  que  son  cama- 
rade lui  avoit  dit  tout  bas'.  » 

Le  lieutenant  d'Argenson  condamna  les  forains 
à  300  livres  de  dommages-intérêts,  et  permit  aux  Co- 
médiens de  faire  abattre  les  théâtres  de  foire,  eu  cas 
de  récidive.  Bolet,  La  Place  et  Bertrand  firent  appel 
an  Parlement  de  cette  sentence,  et  les  Comédiens 
firent  appel  de  leur  coté,  parce  qu'ils  n'avaient  pas 
été  autorisés  à  démolir  immédiatement  les  théâtres. 
Eu  vain,  l'avocat  îles  forains  essaya-t-il  d'apitoyer 
le  Parlement  suris  triste  situation  de  ses  clients;  un 
arn't  du  2  janvier  nos  confirma  les  sentences  de 
d'Argenson,  menaçant  les  forains  dé  l  000  livres  d'a- 


.lnl.'s  i;u\nas:,ie-,  /...,  ï/t,  ,-t-u-  Va  /'orams  et  la  Corn. 
i.p.  18. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDACQGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    377-j 


metule  el  do  la  démolition  de  leur  théâtre,  en  cas 
de  nouvelles  contraventions. 

Deux  forains,  Rochepart  et  Tiquet,  reprirent  les 
marionnettes  et  s'en  furent  jouer  en  province. 

I.a  veuve  Maurice  et  Alard,  qui  n'avaient  pas  été 
ittquiétés  dans  les  dernières  poursuites,  obtinrent 
les  arrangements  du  directeur  de  l'Opéra  Guyenet, 
qui  leur  permit  de  faire  usage  de  décorations,  de 
chanteurs  et  de  danseurs. 

Seuls  Dolet,  La  Place  et  Selles  reprirent  leur  spec- 
tacle, mais,  les  Comédiens  leur  envoyèrent  deux 
huissiers  qui  dressèrent  procès-verbal,  et,  malgré 
l'offre  faite  par  les  forains  de  verser  un  sixième  pour 
les  pauvres,  le  Parlement  jugea  que  les  gestes  des 
acteurs,  les  paroles  prononcées  à  voix  basse,  cons- 
tituaient un  dialogue,  et  il  condamnait  les  forains  à 
3  000  livres  de  dommages-intérêts. 

Il  ne  restait  aux  forains  qu'à  se  remettre  aux  ma- 
rionnettes ou  à  trouver  un  dernier  expédient. 

Ils  imaginèrent  de  vendre  fictivement  Leurs  théâtres 
à  Holtz  et  Godard,  Suisses  de  la  garde  de  feu  le  duc 
d'Orléans,  qui  pouvaient  se  prévaloir  de  privilèges 
qui  leur  permettaient,  en  tant  que  Suisses,  de  faire 
valoir  leurs  industries  dans  plusieurs  professions. 

Le  subterfuge  ne  réussit,  pas  :  le  jour  de  l'ouver- 
ture de  la  foire  Saint-Germain,  d'Argeuson  leur 
interdit  de  représenter  des  spectacles  qui  ne  seraient 
pas  conformes  à  l'arrêt  du  Parlement.  Sur  appel  des 
Suisses,  le  Parlement  confirma  la  sentence  du  lieu- 
tenant, de  police,  etquelques  jours  après,  le  20 février 
1709,  les  théâtres  de  Holtz  et  de  Godard  étaient  abat- 
tus en  partie  par  ordre  des  Comédiens  Français  el 
en  application  de  l'arrêt  de  1708. 

A  peine  les  démolisseurs  s'étaient-ils  retirés,  que 
les  forains  tirent  rétablir  leur  théâtre  et  purentjouer 
le  lendemain. 

Le  succès  qui  répondit  à  cet  effort  frappa  de  stu- 
péfaction les  Comédiens  Français,  qui,  le  lundi  sui- 
vant, renvoyèrent  «  aux  jeux  »  de  Holtz  le  même 
huissier,  lequel  lit  démolir  dans  la  «  loge  «  tout  ce  qui 
pouvait  servir  aux  représentations  théâtrales.  Le 
Grand  Conseil,  saisi  des  plaintes  formées  par  les 
Suisses,  condamna  le  14  mars  les  Comédiens  à  6000 
livres  de  dommages-intérêts  envers  Holtz  et  Godard, 
qui  reprirent  leurs  représentations. 

De  nouvelles  procédures  ayant  retardé  la  solut i< ni 
définitive  de  celte  affaire,  le  Parlement  n'en  fut  saisi 
qu'en  1710.  11  condamna  les  Suisses  à  restituer  les 
dommages -intérêts,  annula  les  ventes  des  deux 
loges,  et  résilia  les  engagements  des  artistes.  Te] 
est  le  dernier  terme  de  la  lutte  entre  la  Comédie- 
Française  et  les  forains,  qui  abandonnèrent  Paris, 
s'inclinant  ainsi  devant  le  privilège  de  la  Comédie. 


L'OPERA-COMIQUE 

La  guerre  impitoyable  menée  par  la  Comédie- 
Française  contre  les  forains  provoqua  l'apparition 
d'un  nouveau  genre  de  spectacle  :  l'Opéra-Comique. 
Nous  avons  exposé  plus  haut  que  l'Opéra,  pour  se 
créer  des  ressources,  prétendait  puiser,  dans  ses 
lettres  patentes  et  dans  ses  ordonnances,  la  faculté 
de  concéder  à  de  moindres  entreprises  le  droit  au 
Aant  et  à  la  danse.  De  là  l'interminable  conflit  qui 
s'éleva  entre  i'Opéra  et  la  Comédie-Française,  avec 
accompagnement  de  mémoires  et  de  sentences,  d'ar- 
rêts du  Parlement  et  d'arrêts  du  Conseil,  de  permis- 
sions et  d'interdictions  royales,  et  provenant    des 


efforts  incessants  des  forains  à  user  du  dialogue  sous 
le  couvert  du  vaudeville. 

Le  directeur  de  l'Opéra,  qui  se  trouvait,  après  la 
mort  de  Lulli,  dans  une  situation  précaire,  en  raison 
des  frais  considérables  qu'exigeaient  ses  représen- 
tations, devait  recourir  à  une  foule  d'expédients 
pour  combler  son  déficit.  Nous  avons  vu  que  les  fo- 
rains avaient  profité  de  la  nécessité  où  se  trouvait 
Guyenet  de  faire  argent  de  son  privilège,  pour  conti- 
nuer leurs  représentations,  malgré  la  Comédie- 
Française. 

La  veuve  Maurice  et  Alard  avaient  pris,  en  1707, 
des  arrangements  qui  leur  permettaient,  moyennant 
redevance,  l'usage  des  chanfeurs  et  des  danseurs,  et 
le  droit  au  changement  de  décorations. 

La  Comédie-Française,  qui  venait  d'être  délivrée 
des  forains,  s'arma  aussitôt,  et  elle  obtint  un  arrêt 
du  Conseil,  du  17  avril  1709,  défendant  à  Guyenet 
«  de  donner  la  permission  de  chanter  des  pièces  de 
musique  entières,  ni  autrement,  aux  danseurs  de 
corde  et  autres  gens  publics  dans  Paris  ».  La  veuve 
Maurice  et  Alard,  qui  s'étaient  crus  inexpugnables 
sur  un  tel  terrain,  en  furent  encore  pour  leurs  frais. 
Les  directeurs  de  l'Opéra  ne  tinrent  pas  compte 
de  ces  défenses,  la  veuve  Maurice  el  Alard  continuè- 
rent leurs  représentations  jusqu'en  1710,  date  a 
laquelle  Guyenet  se  décida  à  retirer  son  autorisation 
à  Alard,  qui  imagina  de  jouer  des  pièces  à  la  muette. 
Le  public  se  plaignit,  et  il  dut  abandonner  ce  procédé 
pour  jouer  en  êcriteaux,  c'est-à-dire  avec  des  cartons 
sur  lesquels  était  écrit  en  gros  caractères  ce  que  les 
acteurs  auraient  dû  dire.  Chaque  personnage  avait 
des  rouleaux  dans  sa  poche  droite,  et  il  les  tirait, 
les  déroulait  et  les  montrait  aux  spectateurs,  puis  il 
les  remettait  dans  sa  poche  gauche. 

En  1712,  à  la  foire  Saint-Germain,  les  représenta- 
tions en  êcriteaux,  qui  avaient  fait  rire  à  leur  début, 
furent,  remplacées  par  îles  représentations  au  cours 
desquelles  les  cartons  descendaient  du  cintre,  sou- 
tenus par  deux  enfants  habillés  en  Amours. 

L'orchestre  attaquait  les  couplets,  et  des  compères 
les  entonnaient.  C'est  ainsi  qu'on  joua  des  pièces  de 
Lesage,  de  Fuzelier  et  de  Dorneval,  l'Arlequin  la 
Guinguette  de  Pellegrin  et  la  Femme  juge  ri  parti,. 
qui  déchaîna  de  nouveau  les  Comédiens  Fiançais. 

Le  mot  opéra-comique  avait  été  introduit  pour  la 
première  fois  chez  Maurice  el  Alard  en  1678,  pour  la 
représentation  des  Forces  de  V  imour  >■>  de  lu  Magie. 
Il  avait  été  choisi  pour  indiquer  que  la  comédie 
était  mêlée  à  la  musique,  avec  des  couplets  en  vau- 
devilles. 

En  1713,  la  fille  de  la  veuve  Maurice,  Catherine  Von 
der  Beck,  veuve  elle-même  de  l'acteur  Etienne  Baron, 
avait  acheté  le  théâtre  de  sa  mère  à  Jean  Levêque, 
sieur  de  Bellegarde,  el  à  Eustache  Des  Guerrois.  Elle 
s'adjoignit  un  autre  forain,  Nivellon,  et  s'associa 
avec  Saint-Edme,  pour  exploiter  les  concessions 
faites  à  sa  mère  par  Guyenet  en  1709.  Elle  adminis- 
trait le  nouvel  Opéra-Comique  de  Baxter  et  Saurin, 
et  Saint-Edme  dirigeait  le  nouvel  Opéra-Comique  de 
Dominique;  ces  théâtres  étaienl  ainsi  nommés  en 
raison  des  artistes  qui  y  étaient  connus;  les  époux 
de  Saint-Edme  traitent  encore  avec  les  syndics  de  la 
faillite  Guyenet  qui  se  sont  fait  d'ailleurs  autoriser 
par  une  lettre  de  Ponlchartrain  à  d'Argeuson  du 
4  juillet,  et,  de  concert  avec  leur  associée,  la  veuve 
Baron  devenue  l'épouse  de  Charretier  de  Baune, 
prennent  pour  leur  double  exploitation  le  nom  d'O-. 
péra-Comique  à  la  foire  Saint-Germain  de  1713.  La 


3:  su 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  nnvSMWATOfRB 


Comédie  proteste,  mais  un  arrêt  du  23  décembre, 
revenant  sur  les  dispositions  de  celui  de  1709,  la 
déboule. 

Des  procès  surviennent  entre  les  entrepreneurs 
associés,  chacun  cherchant  à  obtenir  une  cession  à 
son  unique  profit  des  avantages  accordés  par  les 
syndics.  Ceux-ci  ayant  fait  reconnaître  expressément, 
par  un  arrêt  du  26  novembre  1716,  leur  droit  de 
concéder  des  privilèges  aux  forains,  traitent  le 
28  novembre  avec  la  dame  de  Baune,  et  un  arrêt 
du  Conseil  du  15  février  1717  sanctionne  le  contrat 
qui  stipule,  pour  une  période  devant  courir  du 
Ie'  janvier  1717  à  lin  février  1732,  une  redevance 
annuelle  de  35  000  livres.  Mais  la  dame  de  Haune 
tombe  en  déconfiture,  et  son  traité  est  résilié. 

En  1721,  Lalauze  est  autorisé  à  jouer  des  pièces 
chaulées  pendant  la  durée  de  la  foire  Sainl-Laurent. 
La  même  année,  le  privilège  est  donné  à  Francisque 
pour  neuf  années.  Par  malheur,  le  Parlement,  saisi 
des  contestations  entre  les  Comédies  Française  et 
Italienne  et  ledit  Francisque,  ordonne  la  fermeture 
de  son  spectacle. 

Les  forains  profitent  de  ces  occasions  pour  repré- 
senter leurs  propres  procès  avec  les  théâtres  privi- 
légiés, l'Opéra  est  le  «  cousin  »  de  la  foire  et  se  dis- 
pute avec  les  Comédiens-Français,  à  la  grande  joie 
des  assislants. 

Lesage  écrit  à  ce  propos  un  prologue  inlilulé  la 
Querelle  'les  Théâtres,  pleine  de  bons  mots  et  de  plai- 
santeries sur  les  prétentions  des  Comédiens;  il  avait 
.lonné  en  1715  une  parodie  de  Télémaque  mise  en 
musique  par  Gillier,  violoniste  à  la  Comédie-Fran- 
çaise; l'orchestre  se  compose  de  huit  violons,  une 
contrebasse,  une  flûte,  un  hautbois,  un  basson  et 
deux  cors. 

A  la  foire  Saint-Germain  en  1722,  Francisque,  qui 
avait  obtenu  le  privilège  de  l'Opéra-Comique,  le 
30  avril  1721,  mais  qui  n'avait  pu  se  maintenir  contre 
la  coalition  des  autres  forains,  se  borna  aux  danses 
de  corde,  sauts  et  divertissements,  et  il  n'interrompt 
ses  tours  que  pour  des  pièces  de  Piron  écrites  sous 
forme  de  monologues. 

En  même  temps,  Lesage,  Dorneval  el  Fuzelier 
achètent  des  marionnettes,  s'installent  dans  une  pe- 
tite loge  de  la  foire  Saint-Germain,  connue  sous  le 
nom  de  Marionnettes  Etrangères  de  la  Foire,  el  ils 
représentent  des  satires  qui  font  accourir  tout  Paris. 

La  foire  est  seule  contre  tous  les  théâtres;  l'Opéra 
lui  refuse  le  chant,  la  Comédie-Française  interdit  la 
parole,  et  la  Comédie-Italienne  prétend  au  privilège 
de  la  pantomime. 

lui  1721,  une  lettre  de  M.  de  Maurepas  à  Francine, 
du  23  mars,  et  une  autorisation  directe  du  roi,  du 
25  mai,  permettent  de  nouveau  à  l'Opéra  de  consen- 
tir une  entreprise  d'opéra-comique.  Un  sieur  Honoré 
bénéficie  de  cette  faveur,  que  lui-même  abandonne, 
le  3  août  1727,  pour  quatre  ans  et  demi  à  Boizard 
de  Pontau. 

Le  18  août  1731,  Lecomle,  qui  a  succédé  à  Des- 
touches, résilie  le  privilège  de  Pontau,  el  le  concède 
à  de  Vienne.  Le  20  juin  1734,  de  Thuret,  successeur 
de  Lecomle,  traite  avec  ce  même  Pontau,  pour 
15  000  livres  par  an. 

Depuis  1728,  il  n'y  avait  plus  que  l' Opéra-Comique 
qui,  dans  les  foires,  représentait  de  véritables  pièces; 
les  autres  forains  se  cantonnent  dans  les  danses,  les 
marionnettes,  et  ne  cherchent  plus  à  imiter  les 
I  roupes  de  comédiens. 

Pontau,  qui  avait  réussi  à  prendre  à  son  compte 


le  privilège  d'exploitation,  monte  Achmel  et  Almiur 
zinc,  de  Lesage,  Fuzelier  et  Dorneval,  les  Jumelle*. 
de  Favart,  le  22  mars  1734,  et  le  20  février  1741,  la 
Chercheuse  d'esprit.  Les  intrigues  suivent  encore  le 
succès  de  ces  pièces.  Monnet,  qui  s'était  fait  affer- 
mer le  privilège  de  Pontau  en  1743,  moyennant 
15  000  livres,  empiète  de  plus  en  plus  sur  le  privilège 
de  la  Comédie;  le  vaudeville  ne  lui  suffit  pas,  il  fait 
déclamer  des  dialogues  en  vers  et  en  prose;  le 
18  mars  1741,  il  donne  Acajou,  de  Favart,  dans 
laquelle,  au  cours  d'une  longue  scène  de  déclama- 
tion, les  arlistes  parodient  les  Comédiens  Français. 

Ceux-ci  se  plaignent,  obtiennent  une  lettre  de 
Maurepas  rappelant  l'Opéra-Comique  à  l'ordre  et  lui 
interdisant  d'autres  scènes  que  le  vaudeville  chanté; 
mais  on  chante  la  parodie  des  comédiens  au  lieu  de 
la  déclamer,  et  la  lutte  se  perpétue. 

En  1744,  C'est  Berger  qui  dirige  l'Opéra.  Il  fait 
rendre,  le  1er  juin,  un  arrêt  du  Conseil  qui  met  un 
terme  à  l'exploitation  de  Monnet.  Il  préfère  exploiter 
lui-même,  et  sa  tentative  personnelle  rencontre  un 
tel  succès,  que  la  Comédie  s'en  alarme  el  demande 
au  Conseil  qu'on  supprime  l'Opéra-Comique;  mais 
elle  n'en  obtient  que  la  suspension. 

Berger  avait  en  elfel  fait  «  valoir  que  le  théâtre 
qui  a  le  mieux  mérité  du  public  par  ses  succès  ne 
doit  pas  être  supprimé  »,  et  il  ajoutait  que  l'Opéra- 
Comique  ne  peut  nuire  sérieusement  à  la  Comédie- 
Française,  tandis  que  le  privilège  de  l'Opéra  fort 
onéreux  en  soi,  l'autorise  à  affermer  l'Opéra-Comi- 
que »,  conformément  aux  arrêts  de  1731  el  de  17H. 
L'Opéra-Comique  reste  suspendu  jusqu'en  1752.  A 
cette  époque,  la  ville  de  Paris,  ayant  la  gestion  de 
l'Académie,  demande  l'autorisation  d'affermer  l'O- 
péra-Comique. Une  lettre  d'Argenson  au  prévôt  des 
marchands,  du  29  décembre  1751,  la  lui  accorde.  En 
conséquence  de  quoi,  Monnet  passe  une  convention 
avec  la  ville  pour  six  années,  commençant  à  courir 
du  1er  janvier  1732,  moyennant  12000  livres  pour 
chacune  des  trois  premières,  15  000  livres  pour  cha- 
cune des  autres. 

Monnet  reprend  la  salle  du  Faubourg  Saint-Ger- 
main, qui  avait  été  saisie  par  les  eréanciers  de 
Pontau,  dix-huit  ans  auparavant;  il  fait  reconstruire 
la  salle  de  la  foire  Saint-Laurent,  et  il  l'exploite 
jusqu'au  3  décembre  1737. 

Les  librettistes  Favart,  Vadé,  Anseaume  et  Sedaine, 
les  compositeurs  Dauvergne,  Duni,  Piiilidoh,  puis 
Monsiuni  contribuent  au  succès  de  l'entreprise. 

L'orchestre  compte  18  instruments,  et  un  «  bat- 
teur »  de  mesure;  parmi  les  artistes,  on  reconnaît 
Laruette,  et  le  célèbre  maître  de  ballet  Noverre,  qui 
donne  au\  ballets  un  éclat  jusqu'alors  inconnu. 

Les  Troqueurs  de  Dauvergne  amenèrent  encore  le 
succès, 

D'habiles  danseurs  italiens,  refusés  par  l'Opéra, 
avaient  été  engagés  par  la  Comédie-Française,  el  3 
figuraient  avec  le  plus  grand  succès  dans  les  diverl  is 
semenls. 

L'Académie  de  musique  intima  à  la  Comédie  l'or- 
dre de  faire  cesser  ces  danses. 

Mm°  de  Pompadour  intervint  pour  permettre  aux 
Comédiens  de  conserver  la  cabriole,  donl  ils  avaient 
besoin,  disaient-ils,  pour  soutenir  les  pièces  mo- 
dernes si  mauvaises  ».  La  Comédie, qui  avait  fermé 
son  théâtre  le  7  août  1753,  le  rouvrait  le  13,  quand 
les  ballets  lui  furent  rendus:  mais  l'enseignement  de 
cet  incident  fut  profitable  à  Dauvergne,  qui  eut  l'idée 
d'écrire  un  ouvrage  dans  le  genre  de  ceux  qui  Iriom 


TECHMQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 

pliaient  aux  Français;  c'est  ainsi  qu'il  imagina  les 
Troqueurs,  dont  le  livret  était  de  Vadé,  et  il  desti- 
nait cet  opéra  bouffon  à  l'Académie  de  musique. 

La  dignité  de  ce  théâtre  s'émut  de  la  légèreté  de 
la  pièce,  et  les  Troqueurs  furent  donnés  à  l'Opéra- 
Comique.  Le  30  juillet  1753,  la  foire  à  laquelle  on 
interdisait  et  la  musique  et  la  parole  avait  recours 
aux  refrains  populaires  et  au  mélange  osé  des  cou- 
plets, des  chansons,  et  des  paroles.  Le  Mariage  par 
escalade  de  Favart  (M  septembre  1756)  et  le  Peintre 
amoureux  de  son  modèle  (26  juillet  1757)  d'Anseaume 
et  de  Duni  procurèrent  à  Monnet  une  exploitation 
fructueuse. 

Monnet  «  agrémente  »  les  deux  foires  jusqu'au  3  dé- 
cembre 1757;  il  vend  alors  ses  droits  à  Corby,  pour 
84000  livres,  lequel,  s'associant  le  5  janvier  1758 
avec  Favart,  Moétte  et  Dehesse,  après  avoir  sollicité 
une  prolongation  du  traité  auprès  de  Iîehel  et  Fran- 
cœur,  se  maintient  jusqu'en  1762. 

Pendant  celle  période,  Duni  donna  Nina  et  Lindor, 
le  9  septembre  1758,  Vile  des  Fous,  le  27  septembre 
1760.  Monsiow  fit  représenter  Ips  A  veux  indiscrets\e 
7  février  1759,  On  ne  s'avise  jamais  de  tout  le  17  sep- 
tembre 1761,  et  Philidor  composa  Blni.se  le  savetier 
(9  mars  1759),  le  Soldai  magicien  (14  août  1760),  le 
Maréchal  Ferrant  (22  août  1761),  le  Jardinier  et  son 
seigneur  (18  février  1761). 

Un  événement  imprévu  décida  du  sort  de  l'Opéra- 
Comique,  ce  fut  sa  réunion  à  la  Comédie-Italienne; 
qui  se  fit  en  1762.  Les  Italiens,  brusquement  chassés 
en  1697  par  le  roi,  avaient  réapparu  sous  la  Régence. 
qui  leur  avait  permis  de  représenter  leurs  œuvres 
au  Palais-Royal,  puis  à  l'Hôtel  de|lîourgogne,  et,  forts 
de  leurs  privilèges,  ils  avaient  lutté  contre  l'Opéra- 
Comique,  ainsi  que  nous  l'avons  vu. 

Depuis  la  Serva  Padrona  de  Pbrgolèsè,  la  Comédie- 
Ilalienne  avait  imposé  un  genre  nouveau,  et  l'arrivée 
des  Bouffons-Italiens  en  17.'>2,  leurs  démêlés  que 
nous  avons  rappelés,  avaient  encore  accentué  le 
mouvement  de  l'opinion  en  leur  faveur. 

Nous  avons  vu  que  DAUvF.Rf.NE  avait  cherché  à  les 
imit.  r  en  écrivant  les  Troqueurs,  et  cette  concur- 
rence entre  l'Opéra-Comique  et  la  Comédie-Italienne 
était  le  sujet  de  toutes  les  discussions.  On  sait  que 
Jean-Jacques  Rousseau  lui-même  se  mêla  à  la  lutte 
en  faveur  des  Italiens,  dont  la  langue,  disait-il,  se 
plie  aux  harmonies,  tandis  que  «  les  Français  n'ont 
point  de  musique,  n'en  peuvent  avoir,  ou  si  jamais 
ils  en  ont,  ce  sera  tant  pis  pour  eux  ». 

Les  deux  genres  tendirent  à  se  fondre  de  plus  en 
plus,  et  une  ordonnance  du  roi  réunit  les  deux  théâ- 
tres sous  le  nom  de  Comédie-Italienne.  La  cession 
faite  par  Corby  à  la  Comédie  Italienne  fut  réglée 
par  un  acle  du  21  février  1762. 

L'Opéra -Comique  était  délinitivement  créé  et 
s'installait  peu  après  dans  la  salle  de  l'Hôtel  de 
Bourgogne. 


LA  COMÉDIE    ITALIENNE 

Les  premiers  Comédiens  Italiens  qui  apparurent 
en  France,  sous  le  nom  de  Gli  Gelosi,  avaient  été  ap- 
pelés par  Catherine  de  Médicis  en  1577,  sous  le  rè- 
gne de  Henri  III. 

D'abord  à  Blois,  pendant  la  durée  des  Etals  géné- 
raux, puis  au  théâtre  du  Petit-Bourbon,  ils  repré- 
sentèrent leurs  pièces  devant  la  Cour. 

Suspendues  par  le  Parlement,  leurs  représenta- 
tions furent  imposées  parle  roi;  mais  les  troubles  de 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3781 

la  Ligue  les  obligèrent  à  fuir,  et  ils  ne  revinrent  en 
France  que  par  intervalles. 

Sous  Louis  XIV,  ils  obtinrent  d'être  reçus  à  l'Hô- 
tel de  Bourgogne  et  de  jouer  alternativement  avec 
les  Comédiens  Francais.au  théâtre  du  Petit-Bourbon 
et  au  Palais-Royal.  ' 

En  J080,  ils  se  trouvèrent  seuls  possesseurs  de 
l'Hôtel  de  Bourgogne,  à  la  suite  de  la  réunion  des 
deux  troupes  de  Comédiens-Français.  Ils  commen- 
cèrent alors  à  intercaler  des  phrases  françaises  dans 
leurs  pièces,  puis  les  phrases  italiennes  furent  l'ex- 
ception. On  cite  VArlequin  Mercure  Galant,  de 
Cherardi,  joué  le  22  janvier  1682,  qui  est  une  pièce 
presque  entièrement  écrite  en  français.  Malgré  les 
protestations  de  la  Comédie-Française,  les  Italiens 
obtinrent  le  droit  de  continuer  leurs  représentations 
dans  leur  langue. 

Le  roi  avait  convoqué  Baron,  qui  représentait  la 
Comédie- Française,  et  Arlequin,  qui  défendait  les 
droits  des  Italiens,  afin  de  trancher  le  différend.  Ba- 
ron plaida  longuement;  puis  quand  Arlequin  dut  lui 
répondre,  il  demanda  au  roi  en  quelle  langue  il  de- 
vait parler.  «  Parle  comme  tu  voudras,  »  répondit 
le  roi.  Et  Arlequin  de  répondre  :  «  Mon  procès  est 
gagné,  Votre  Majesté  m'a  donné'  la  liberté  de  parler 
comme  je  le  voudrais.  »  Dès  lors,  les  Comédiens 
Italiens  ne  jouèrent  plus  que  des  pièces  françaises. 
Le  lieutenant  de  police  d'Argenson,  dont  nous 
avons  vu  les  sentences  relatives  aux  forains,  prit  en 
1697  la  défense  de  la  Comédie-Française,  et  il  apposa 
les  scellés  sur  les  portes  de  l'Hôtel  de  Bourgogne,  en 
même  temps  qu'il  faisait  défense  aux  Italiens  de 
continuer  leurs  représentations. 

Cette  défense  subsista  pendant  dix-neuf  ans.  En 
1716,  Riccoboni,  dont  la  réputation  s'était  faite  grande 
dans  la  Péninsule,  fut  appelé  à  Paris  par  le  Régenl, 
avec  quelques-uns  de  ses  compatriotes.  En  vertu 
d'une  ordonnance  du  8  mai,  la  troupe  put  s'installer 
dans  les  bâtiments  de  l'hôtel  de  Bourgogne. 

Riccoboni  avait  adressé  au  duc  de  Parme  une  re- 
quête assez  curieuse,  que  rapporte  Des  Essarts1  :  «  La 
Troupe  unie  supplie  Irès-humblement  Votre  Altesse 
Sérénissime  de  lui  faire  accorder  la  grâce  dont  ont 
joui  ses  prédécesseurs,  qu'aucune  Troupe  italienne 
soit  reçue  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit,  même 
si  tous  les  acteurs  parloient  françois;  et  qu'il  soit 
généralement  défendu  à  tous  autres  de  faire  usage 
des  habits  des  acteurs  masqués  de  la  comédie  ita- 
lienne, c'est-à-dire  de  l'Arlequin,  du  Scaramouche, 
du  Pantalon,  du  Docteur  et  du  Scapin,  et  même  du 
Pierrot  qui,  quoique  François,  est  né  du  théâtre 
ilalien. 

«  Les  Comédiens,  souhaitant  de  servir  Sa  Majesté  en 
paix  et  en  bonne  réputation,  demandent  qu'en  tout 
temps  il  n'en  soit  jamais  reçu  dans  la  Troupe  de  la 
famille  des  Constantin,  de  laquelle,  du  commun 
consentement  de  tout  le  monde,  sont  provenus  les 
malheurs  et  la  disgrâce  de  la  Cour  aux  Comédiens 
italiens  leurs  prédécesseurs. 

«  Ils  demandent  très-humblement  qu'il  leur  soit 
accordé  des  Danses  et  de  la  Musique  dans  les  diver- 
tissemens  de  leurs  comédies,  suivant  que  leurs  pré- 
décesseurs en  jouissoient. 

«  S'il  arrivoit  que  quelqu'un  des  acteurs  eût  le  mal- 
heur de  ne  point  plaire  à  la  Cour  et  à  la  Ville,  qu'il 
soit  permis  à  la  Troupe  de  le  renvoyer  avec  un  pré- 
sent et  d'en  faire  venir  un  autre  à  sa  place. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  COSSEHVATOIRB 


«  La  Troupe  supplie  très-humblement  Son  Altesse 
Sérénissime  de  faire  de  fortes  instances  à  la  Cour, 
pour  qu'il  leur  soit  accordé  le  libre  usage  des  Saints 
Sacremens,  comme  ils  l'ont  en  Italie;  d'autant  que 
cette  Troupe  ne  donnera  point  une  Comédie  scan- 
daleuse, et  que  Kiccoboni  s'engage  à  donner  le  ca- 
nevas des  Pièces  à  L'examen  du  Ministre,  et  même 
d'un  Ecclésiastique,  pour  qu'elles  soient  approu- 
vées. » 

Hiccoboni  prenail  ainsi  ses  précautions  afin  d'é- 
cbapper  aux  difficultés  qu'avaient  éprouvées  ses  pré- 
décesseurs. Sa  troupe  prenait  le  nom  de  «  Comédiens 
de  S.  A.  R.  M.  le  duc  d'Orléans,  hégent.  »  Après  la 
mort  de  ce  prince,  elle  prit  le  titre  de  Comédiens 
Italiens  ordinaires  du  roi. 

L'organisation  de  la  Comédie-Italienne  se  modela 
sur  celle  de  la  Comédie-Française.  Les  actes  de  so- 
ciété des  27  octobre  1719,  7  avril  1741,  3  mars  1742, 
29  avril  1754,  qui  définissent  la  quotité  des  parts, 
fixent  le  montant  des  pensions,  etc.,  présentent  une 
analogie  presque  complète  avec  les  actes  de  société 
des  Comédiens  ordinaires  du  lioi.  Les  règlements 
intérieurs,  soumis  pour  l'une  et  l'autre  troupe  à  l'a- 
grément des  gentilshommes  de  la  Chambre,  reflètent 
une  inspiration  commune  guidant  une  administra- 
tion parallèle.  Les  fonctions  des  semainiers,  celles  du 
comité,  les  prescriptions  touchant  la  discipline  sont 
identiques,  à  quelques  détails  près. 

La  Comédie-Italienne,  qui,  à  son  arrivée  en  France, 
n'avait  réussi  que  difficilement,  avait  tenté  de  s'éta- 
blir à  la  foire  pendant  quelques  mois.  Puis  elle 
avait  repris  son  répertoire  français,  avec  les  Jeux  île 
l'Amour  et  du  Hasard. 

En  février  1762,  ainsi  que  nous  l'avons  dit  plus 
haut,  la  Comédie- Italienne  et  l'Opéra-Comique 
furent  réunis.  La  nouvelle  exploitation  dut  traiter 
avec  l'Opéra,  pour  obtenir  que  le  privilège  des  ou- 
vrages de  musique  lui  fût  continué.  Le  29  janvier 
1766,  une  convention  fut  signée  pour  une  période  de 
dix-huit  années.  En  octobre  1779,  une  prorogation 
fut  accordée  pour  trente  années,  à  courir  de  1780, 
moyennant  une  redevance  de  30000  livres  pour  cha- 
cune des  cinq  premières  années,  et  de  40  000  livres 
pour  chacune  des  suivantes. 

Lariette,  Clairval,  Audinot,  Mme  Favart  et  la 
Dugazon  illustrèrent  cette  scène  vraiment  bien  natio- 
nale, malgré  le  nom  de  Comédie-Italienne  qu'elle 
avait  conservé. 

En  1783,  la  troupe  quitta  l'hôtel  de  Bourgogne, 
dont  l'édifice  tombait  en  ruine.  Elle  fil  bâtir  une 
salle  sur  les  terrains  de  l'hôtel  de  Choiseul,  mais  ne 
voulut  point,  en  manière  de  mépris  pour  les  petits 
théâtres  qui  s'élevaient  tout  le  long  de  cette  prome- 
nade, que  l'entrée  en  fût  ouverte  sur  le  boulevard. 
On  la  plaça  donc  à  l'opposite. 

Les  gentilshommes  de  la  Chambre  donnèrent,  en 
1774,  un  règlement  concernant  les  rapports  de  la 
Comédie-Italienne  avec  les  auteurs;  nous  voulons 
signaler  quelques-unes  de  ses  dispositions,  en  raison 
<iu  rapprochement  qu'on  en  peut  faire  avec  la  légis- 
lation moderne  sur  la  matière. 

Lorsqu'une  pièce  avait  été  reçue  à  corrections, 
l'auteur  pouvait  exiger  une  seconde  lecture,  une  fois 
les  changements  effectués. 

Les  comédiens,  après  avoir  reçu  une  pièce  défini- 
tivement, ne  pouvaient  refuser-  de  la  jouer,  ni  en  re- 
tarder la  représentation,  si  ce  n'est  pour  des  cau- 
ses graves  dont  les  gentilshommes  de  la  Chambre  se 
réservaient  l'appréciation.  Et  un  registre  devait  être 


tenu,  qui  portait  inscription  des  pièces  nouvelles  re- 
çues, atin  que  chacune  fût  jouée  suivant  sou  rang. 

Les  auteurs  ne  pouvaient  plus  retirer  une  pièce 
après  sa  troisième  représentation;  de  leur  côté,  les 
comédiens  étaient  tenus  de  n'eu  pas  interrompre  la 
carrière,  tant  qu'elle  obtenait  du  succès. 

La  distribution  des  rôles  appartenait  aux  auteurs, 
et  les  comédiens  ne  pouvaient  refuser  ceux  qui  leur 
étaient  confiés. 

Les  auteurs  des  pièces  en  trois  actes  et  plus  de- 
vaient toucher  un  neuvième  de  la  recette  faite  à  la 
porte,  après  déduction  du  droit  des  pauvres,  ledit 
neuvième  partageable  entre  le  parolier  et  le  mu- 
sicien. Les  auteurs  des  pièces  en  deux  actes  tou- 
chaient un  douzième;  ceux  des  pièces  en  un  acte,  un 
dix-huitième.  Ils  ne  touchaient  rien  lorsque  la  re- 
cette s'élevait  à  moins  de  600  livres  en  été  (du 
15  mai  au  25  novembre),  et  à  moins  de  I  000  livres 
en  hiver.  Et  la  perception  de  ces  droits  cessait  au 
décès  des  auteurs,  excepté  lorsque,  à  ce  moment,  la 
pièce  n'avait  pas  encore  eu  50  représentations,  au- 
quel cas  les  héritiers  en  bénéficiaient  jusqu'à  ce  que 
ce  nombre  fût  atteint. 

Les  auteurs  d'une  pièce  en  trois  actes  avaient  leurs 
entrées  pendant,  trois  ans;  ceux  d'une  pièce  en  un 
ou  deux  actes,  pendant  un  an.  Ils  jouissaient  aussi 
d'un  certain  nombre  de  billets  de  faveur. 


LES   PETITS  THEATRES 

11  faudrait  de  bien  longues  pages  pour  écrire  l'his- 
toire de  tous  les  petits  théâtres  dont  s'amusa  le 
xvn i-  siècle,  avant  la  dévolution.  Les  scènes  privi- 
légiées étaient  loin  de  suffire  au  mouvement  qui  en- 
traînait le  public  vers  les  divertissements,  quels 
qu'ils  fussent,  et  à  son  besoin  d'inconnu.  Les  foire< 
attiraient  la  foule  bien  davantage  que  ne  faisaient 
l'Opéra  et  la  Comédie.  Lorsqu'on  en  chassait  l'Opéra- 
Comique,  elle  redemandait  Polichinelle  et  son  sifflet 
pratique.  En  1722,  aux  Marionnettes  Etrangères  <'»' 
la  Poire,  ses  deux  bosses  faisaient  vivre  l'auteur  de 
Gil-Blas! 

Vers  la  lin  du  règne  de  Louis  XV,  l'autorité  aban- 
donne beaucoup  de  sa  rigueur.  Sous  l'effort  du  sou- 
hait général,  elle  ne  laisse  plus  au  monopole  qu'une 
apparence  de  protection.  Peut-être,  y  trouve-t-elie 
son  intérêt,  celui  d'apaiser,  dans  la  griserie  mo- 
mentanée des  plaisirs,  la  lièvre  qui  travaille  Paris 
Les  spectacles  sont  faits  d'illusion,  c'est-à-dire 
d'oubli. 

La  ville  s'étend  de  toutes  parts.  Les  vieilles  portes 
ont  été  franchies.  Va-t-on  éloigner,  jusqu'au  delà 
des  faubourgs,  les  bateleurs  et  leurs  préaux  '  On  n"> 
songe  pas.  Hien  plutôt,  alors  qu'autrefois  ils  n'oc- 
cupaient leurs  loges  que  pendant  la  durée  des 
foires,  on  tolère  qu'ils  prennent  possession  des  bou- 
levards. Voici  venir  les  beaux  jours  du  boulevard  du 
Temple! 

Déjà,  en  1741,  le  lieutenant  de  police  avait  permis 
à  un  sieur  Hardax  de  montrer  hors  des  foires 
nous  ne  savons  pas  où  —  un  spectacle  dont   il  était 
l'inventeur  :  Le  Jugement  universel*.  Ce  ne  fut  qu'un 
essai,  bientôt  suivi  d'innombrables  imitateurs. 

Le  boulevard  du  Temple,  qui  continuait  h'  cours 
partant  de  la  porte  Saint-Antoine,  pool  aboutir  à  la 
rue  des  Filles-du-Calvaire,   puis  pour  se  prolonger 


l.  Voy.MKbératii 
17.11.  Rep.  110. 


TECHNIQUE,  ESTHETIQUE  ET  PÉDAGOGIE LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS 


jusqu'à  la  porte  Saint-Martin,  était  une  avenue 
plantée  d'arbres,  où  les  Parisiens  avaient  pris  l'ha- 
bitude de  se  réunir.  Les  saltimbanques,  attirés  par 
la  foule  qui  s'y  pressait,  établirent  bientôt  des  bara- 
ques de  bateleurs,  de  danseurs  et  de  marionnettes. 
Tout  d'abord  titulaire  des  emplois  d'Arlequins 
chez  le  forain  Gaudon,  Nicolet  père  avait  été  des 
premiers  à  connaître  la  vogue  du  boulevard  du 
Temple.  Son  fils,  qui  était  pitre  et  acrobate,  ne  se 
contenta  pas  de  demeurer  chez  un  forain,  mais  il 
imagina  de  diriger  lui-même  un  jeu  d'exercices 
funambulesques. 

«  De  plus  fort  en  plus  fort,  »  tel  était  la  devise  de 
.Nicolet,  qui  devint  bientôt  un  proverbe  et  contribua 
à  sa  renommée1.  En  1756,  il  était  installé  dans  les 
foires,  comme  joueur  de  marionnettes,  mais  bientôt 
il  adjoignit  à  ses  pantins  de  petites  pièces,  puis  des 
pantomimes. 

En  )  760,  il  résolut  de  se  transporter  dans  l'intervalle 
des  foires  de  Saint-Germain,  de  Saint-Ovide  et  de 
Saint- Laurent,  sur  le  rempart  du  Temple,  et  il  s'ins- 
talla dans  la  salle  que  Fourré  avait  fait  construire 
pour  la  représentation  de  pièces  à  machines. 

La  Salle  des  Grands  Danseurs,  construite  sur  un 
terrain  voisin,  attirait  tout  Paris,  tant  en  raison  des 
petites  pièces  comiques  composées  par  Tacomiet 
qu'à  cause  d'un  singe  qui  contrefaisait  l'acteur  Mole, 
de  la  Comédie-Française. 

Nicolet  jouait  des  comédies,  et  à  ce  litie,  il  fut  pris 
à  partie  par  les  Comédiens-Français,  qui  lui  interdi- 
rent la  parole  pour  le  cantonner  dans  la  pantomime. 
L'année  suivante,  en  1768,  la  Comédie-Italienne  se 
joignait  à  la  Comédie-Française  pour  faire  défense  à 
.Nicolet  d'user  du  chant  et  de  la  danse. 

Cependant,  les  ordonnances  de  l'autorité  n'étaient 
pas  suivies  d'exécution.  Lu  ministre  répondait  aux 
Comédiens  :  «  Il  faut  des  speclacles  pour  le  peuple, 
le  système  de  Louis  XIV  est  changé  »  Tant  il  est  vrai 
qu'à  cette  époque,  les  idées  s'étaient  modifiées,  et 
un  courant  nouveau  entraînait  les  pouvoirs,  non 
plus  à  supprimer  les  forains,  mais  simplement  à 
restreindre  les  bornes  de  leur  activité. 

En  1767,  le  duc  de  La  Vrillière  prescrit  au  lieute- 
nant de  police  d'interdire  aux  forains  «  aucunes 
pièces  ou  scènes  des  théâtres  Français  ou  Italien,  ou 
aucune  pièce  qu'ils  pourraient  faire  composer,  soit 
en  dialogue,  soit  en  vaudevilles,  quand  bien  même 
elles  seraient  jouées  par  des  marionnettes,  à  peine 
de  3000  livres  d'amende  envers  l'une  ou  l'autre 
Comédie,  et  de  démolition  de  leurs  théâtres  ». 

Une  ordonnance  de  police,  du  14  avril  1768,  défend 
«  à  tous  sauteurs,  bateleurs  et  danseurs  de  corde, 
ele.,  de  faire  représenter  sur  leurs  théâtres,  soit  aux 
foires  Saint-Germain,  Saint-Laurent  ou  Saint-Ovide, 
sur  les  boulevards,  ou  dans  quelqu'autre  endroit  que 
ce  soit,  aucunes  pièces  appartenantes  aux  Comédiens 
Italiens  ou  François,  sous  leur  véritable  titre,  ou  sous 
des  titres  supposés,  même  aucunes  scènes  détachées 
desdites  pièces  ».  Elle  leur  défend  aussi  déjouer  sur 
leurs  théâtres  d'autres  pièces  que  des  boutfonneries 
ou  parades,  sans  en  avoir  requis  l'autorisation 
expresse,  même  celles  qu'il  est  d'habitude  déjouer 
sur  canevas. 

Ces  dispositions  sont  déjà  plus  modérées.  L'amende 
est  réduite  à  1000  livres.  Mais  le  prix  des  diverses 
places  ne  pourra  excéder  3  livres,  24  sols,  et  12  sols. 
Les  privilégiés  espèrent  que,  grâce  à  la  modicité  de 

I.  Manne  et  Mm.  trier,  La  Troupe  de  Mcolet,  page  2. 


3783 

ces  tarifs,  ces  baraques  seront  envahies  par  le  menu 
peuple,  ce  qui  en  éloignera,  à  leur  profit  personnel, 
la  bourgeoisie. 

.Nicolet  se  met  à  jouer  de  grandes  pièces  à  figura- 
tions nombreuses,  des  pièces  à  machines  et  à  chan- 
gements de  décors.  Dans  les  intermèdes,  il  produit 
des  équilibristes,  des  escamoteurs,  des  Hercules,  et 
son  singe!  Le  23  avril  1772,  il  emmène  sa  troupe  à 
Gboisy,  devant  Louis  XV  et  Mm8  du  Barry.  Il  revient 
avec  l'autorisation  de  nommer  ses  pensionnaires 
Grands  Danseurs  du  Roi. 

Il  représentait  alors  la  Mort  du  Du  uf  Gras,  le  Pro- 
cès du  Chat,  les  Ecossaises  de  lu  llullede  Taconnet,  et 
l'Ecolier  devenu  maître,  de  Quêtant.  Les  entr'actes 
étaient  occupés  par  des  acrobates,  des  équilibristes 
et  des  pitres1. 

Il  avait  trente  acteurs,  soixante  danseurs  et  vingt 
instruments.  Cet  orchestre,  qui  fut  encore  augmenté, 
entraîna  .Nicolet  dans  un  nouveau  procès  contre 
l'Opéra.  11  dut  transiger  et  consentit  à  payer  à  l'Aca- 
démie de  Musique  2000  livres  par  mois,  qui  furent 
versées  jusqu'en  1790.  Ces  charges  nouvelles,  ainsi 
que  le  droit  des  pauvres,  mirent  bientôt  Nicolet  dans 
une  situation  moins  assurée  ;  les  Grands  Danseurs  du 
Roi  avaient  perdu  de  leur  vogue,  au  profit  de  l' Am- 
bigu-Comique et  des  Variétés  Amusantes. 

La  Révolution  vint  à  temps  pour  le  libérer  de  ces 
obligations  ;  il  avait  alors  renoncé  à  jouer  lui-même, 
niais  il  faisait  jouer  les  œuvres  de  Beaunair  par 
Mayeur,  Ribière  et  Mlu  l'orest.  Il  traversa  ainsi  la 
Révolution,  en  ajoutant  à  ses  farces  des  comédies 
et  quelques  tragédies,  et  il  mourut  le  27  décembre 
1790,  après  avoir  vendu  son  théâtre  à  Ribié. 

Parmi  les  concurrents  directs  de  Nicolet,  citons 
Audinot,  ancien  acteur  de  1  Opéra-Comique,  à  la 
foire,  et  de  la  Comédie  Italienne,  où  il  doublait 
Caillât. 

Le  9  juillet  1769,  Audinot,  alors  joueur  de  marion- 
nettes de  la  foire  Saint-Germain,  apporte  ses  Comé- 
diens de  Bois  sur  ce  même  boulevard  du  Temple 
dans  l'ancienne  salle  de  Nicolet.  Peu  de  mois  après, 
renonçant  aux  marionnettes,  il  fait  chanter  et  danser 
des  enfants  dans  le  Testament  de  Polichinelle,  la  Guin- 
guetti  .1  le  Chat  Botté.  Il  appelle  alors  son  théâtre 
Ambigu-Comique.  Un  arrêt  du  Conseil,  rendu  sur  les 
remontrances  de  l'Opéra,  en  1771,  lui  interdit  le 
chant,  les  danses,  et  plus  de  qualre  instruments. 
Mais  l'Opéra  se  ravise  et  exige  seulement  une  con- 
tribution de  12  00U  livres  par  an.  La  petite  troupe 
grandit!  Le  9  avril  1772,  Audinot  précède  Nicolet  à 
Choisy,  et  prend  comme  genre  la  pantomime. 

En  1769  encore,  Gaudon  ouvre  une  salle  dans  la 
rue  Saint-Nicaise,  pour  y  faire  jouer  la  Farce.  Et  les 
frères  Ruggieri,  quittant  les  Porcherons,  transpor- 
tent sur  le  boulevard  leurs  spectacles  pyrrbiques. 

Le  3  avril  1770,  on  inaugure  un  Waux-Hall  à  la 
foire  Saint-Germain.  Là,  se  dansent  des  ballets.  Il 
existait  déjà  un  établissement  de  ce  genre  sur  le 
boulevard  Saint-Martin  depuis  1764,  celui  de  l'ar- 
tificier Torre.  Ce  dernier  prend  alors  le  nom  de 
Waux-Hall  d'Été,  l'autre  le  nom  de  Waux-Hall 
d'Hiver. 

En  1778,  Lenoir,  lieutenant  de  police,  permet  à  un 
petit  théâtre,  celui  des  Associés,  fondé  par  le  bate- 
leur Devienne,  dit  Beauvisage,  qui  avait  amusé  la 
foule  avec  un  acteur  dit  le  Grimacier,  de  revenir  sur 
le  boulevard,  d'où  il  avait  été  expulsé  en  1768.  On  y 


Georges  C*ta» 


Théâtres  de  Ports-, 


;i:s 


ENCYGLOPÈME  HE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


voit  d'abord  des  marionnettes,  puis  bientôt  des  tra- 
gédies comiques. 

L'année  suivante,  Lécluze  fonde  sur  le  boulevard 
Saint-Martin,  à  côté  de  Torre,  les  Variétés-Amusantes. 
Et  Tessier,  sur  le  boulevard  du  Temple,  la  salle  des 
Élèves  de  l'Opéra.  Le  titre  est  bien  trompeur  :  on 
aulorise  les  Elèves  à  parler,  mais  on  leur  défend  le 
chant! 

En  1783,  un  Anglais,  Astley,  fonde  un  cirque  sous 
le  nom  d'Amphithéâtre  Anglois. 

Voilà  qu'en  1784,  comme  nous  l'avons  dit,  l'Opéra 
obtient  le  privilège  de  tous  les  spectacles  des  foires 
et  remparts,  avec  faculté  de  cession.  Nicolet  conclut 
un  arrangement  pour  24000  livres.  Audinot  offre 
seulement  un  dixième  de  ses  recettes,  déduction 
faite  du  droit  des  pauvres.  Ses  propositions  sont 
rejetées,  et  l'Opéra  adjuge  l'Ambigu  et  les  Variétés  à 
Gaillard  et  Dorfeuille  moyennant  30000  livres  par  an 
pour  chaque  scène.  Les  deux  directeurs  essayent  de 
traiter  avec  Audinot  pour  l'acquisition  de  son  théâtre 
et  du  matériel,  mais  il  émet  de  telles  prétentions 
qu'ils  installent  l'Ambigu  dans  la  salle  des  Variétés 
et  transportent  cette  dernière  entreprise  au  Palais- 
Royal,  où  elle  ouvre,  en  1785,  sous  le  nom  de  Va- 
riélés-Palais-Koyal.  Leurs  charges,  toutefois,  sont 
trop  lourdes.  Ils  se  résignent  à  rétrocéder  leur  bail 
pour  l'Ambigu  à  Arnould,  dont  la  personnalité  mas- 
que celle  d'Audinot.  L'Ambigu  retourne  dans  son 
ancien  bâtiment,  restauré,  dont  l'ouverture  a  lieu  le 
30  septembre  178R.  Les  Variétés,  restant  dans  les 
dépendances  du  Palais-Royal,  vont  occuper,  le  15  mai 
1790,  une  vaste  salle  que  le  duc  d'Orléans  avait  fait 
construire  entre  ledit  palais  et  la  rue  de  Richelieu, 
dans  l'espoir,  dit-on,  d'y  voir  s'installer  l'Opéra. 
Elles  prennent  alors  le  nom  de  Théâtre  du  Palais- 
Royal. 

A  peine  le  privilège  dont  nous  avons  parlé  est-il 
concédé  à  l'Opéra,  qu'il  se  trouve  à  la  merci  de  nou- 
velles complaisances  du  lieutenant  de  police.  Le 
24  octobre  1784,  les  Petits  Comédiens  de  Mx'  le  comte 
de  Beaujolois  s'installent  aussi  au  Palais-Royal ,  à 
l'extrémité  nord  de  la  rue  de  Montpensier.  Il  est  vrai 
que  ce  ne  sont  que  des  marionnettes  et  des  enfants, 
et  qu'on  les  oblige  à  élever  une  gaze  entre  le  public 
et  eux.  En  1785,  au  faubourg  Saint-Antoine,  les  sieurs 
Mareux  donnent,  quatre  fois  la  semaine,  la  comédie 
et  l'opéra-comique;  ils  allèguent  que  leur  théâtre 
est  purement  privé.  On  ne  le  fait  fermer  qu'en   1787. 

Cette  même  année,  Plancher,  dit  Valcour,  fonde 
les  Délassements  Comiques  au  boulevard  du  Temple. 
Lenoir  permet  la  pantomime,  avec  trois  acteurs  en 
scène,  et  impose  encore  la  nécessité  d'une  gaze;  mais 
la  Révolution  survint,  ce  qui  lit  dire  à  Duchesne,  dans 
['Âimanach  des  spectacles,  que  «  le  Voile  de  gaze  fut 
déchiré  par  les  mainsde  la  Liberté  ».  A  côté  des  Délas- 
sements Comiques,  M"e  Malaga  installe  ses  tréteaux; 
c'est  une  danseuse  de  corde  qui,  très  décolletée,  voit 
fourmiller  dans  sa  baraque  de  nombreux  admira- 
teurs. 

En  1789,  une  troupe  italienne,  se  plaçant  sous  le 
patronage  de  Monsieur,  comte  de  Provence,  obtient 
un  brevet  l'autorisant  à  représenter  des  opéras  en 
italien  et  des  comédies.  Les  Comédiens-Français  font 
décider  qu'elle  ne  pourra  jouer  qu'un  ou  deux  actes 
au  plus.  Elle  s'installe  d'abord  aux  Tuileries;  puis, 
éloignée  par  le  retour  de  Louis  XVI,  elle  fait  bâtir  le 
théâtre  de  la  rue  Feydeau. 

Nous  sommes  à  la  veille  de  l'émancipation  légale 
du  théâtre.  Anticipant  sur  les  événements  qui  se  pré- 


parent et  s'octroyant  â  l'avance  des  libertés  qui  vont 
être  proclamées,  les  entrepreneurs  de  spectacle  ne 
se  soucient  plus  des  privilèges  et  des  interdictions. 
Le  12  avril  1790,  M1'0  Montansier,  qui  vient  de  traiter 
avec  l'administration  des  Beaujolais,  prend  posses- 
sion de  leur  salle,  qu'elle  va  exploiter  plus  hardiment. 
Le  21  juin,  Clément  de  Lornaison  et  Desnoyers  fon- 
dent le  Théâtre-Français  comique  et  lyrique  sur  l'em- 
placement de  l'ancienne  salle  des  Variétés,  boulevard 
Saint-Martin. 


POLICE,  CENSURE  ET  DROIT  DES  PAUVRES 
Police. 

Diverses  ordonnances  de  police  furent  rendues 
sous  les  règnes  de  Louis  XV  et  de  Louis  XVI. 

Citons  celle  du  10  avril  1720  qui  renouvelle,  sous 
prétexte  qu'elles  sont  méconnues,  les  défenses  si  sou- 
vent faites  d'entrer  à  l'Opéra  et  à  la  Comédie  sans 
payer,  d'y  commettre  aucun  désordre  et  d'inter- 
rompre les  acteurs,  â  peine  de  désobéissance; 

Celle  du  18  janvier  1745,  pour  l'arrangement  des 
carrosses  aux  entrées  et  sorties  des  spectacles; 

Celle  du  24  décembre  1769  et  celle  du  2  avril  1780, 
qui  interdisent  «  de  crier  ou  de  faire  du  bruit  avant 
que  le  spectacle  commence,  et,  dans  les  entractes, 
de  sifller,  faire  des  huées,  avoir  le  chapeau  sur  la 
tète  et  interrompre  les  acteurs  pendant  les  représen- 
tations, de  quelque  manière  et  sous  quelque  prétexte 
que  ce  puisse  être,  sous  peine  de  désobéissance  ». 

Il  y  en  a  bien  d'autres.  Mais  toutes  renferment  les 
mêmes  prescriptions,  en  termes  à  peu  près  iden- 
tiques. 

Censure. 

La  censure,  jusqu'à  la  Pin  de  l'ancien  régime,  con- 
tinua d'appartenir  au  lieutenant  général  de  la  police, 
dans  les  attributions  duquel  Louis  XIV  l'avait  placée. 
Mais  ce  magistrat,  auquel  revenait,  en  définitive, 
l'appréciation  des  ouvrages  dramatiques,  quant  à 
l'opportunité  de  leur  représentation,  eut  toujours 
près  de  lui  un  fonctionnaire  spécial  chargé  de  lire  les 
manuscrits  et  de  lui  en  rendre  compte. 

Les  lieutenants  de  police,  en  province,  exerçaient 
la  même  autorité. 

Les  censeurs  ont  tué  la  censure,  »  a-t-on  dit1.  Il 
n'est  pas  douteux  que  l'on  songeait  en  particulier 
aux  censeurs  du  xvm"  siècle.  Nous  répondrons  que 
la  censure  s'est  bien  vengée! 

L'abbé  Chérier,  «  ce  hongreur  littéraire,  »  comme 
on  l'a  appelé2,  n'admettait  pas  qu'on  pût  éerire  des 
phrases  comme  celle-ci  :  c<  J'irai  moi-même  au  pre- 
mier jour  présenter  requête  au  ministre  dont  je  suis 
connu.»  Il  annotait  en  marge  :  «  qu'on  pourrait  voir 
l,i  une  allusion  au  cardinal  Fleury,  et  que  ce  prélat 
ministre  ne  saurait  être  décemment  cité  dans  ces 
«  gueuseriesde  théâtrel...  »  Il  ne  tolérait  pas  davan- 
tage ces  expressions  :  «  A  sa  rotondité,  on  le  pren- 
drait pour  un  président.  »  Certains  membres  de  la 
magistrature,  selon  lui,  eussent  été  en  droit  de  se 
froisser! 

Crébillon,  qui  lui  succéda,  avait  un  parti  pris  assez 

original   :  il  refusait   invariablement   son    visa  aux 

œuvres  de  Voltaire.  Le  lieutenant  de  police  intervint 

en  personne  pour  autoriser  la  tragédie  de  Muhotnet. 

Marin,  qui  vint  ensuite,  fut  d'abord  assez  débon- 


TBCI1.VIQUE,  ESTHÈTIQVE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    378 


naire.  Le  gouvernement,  d'ailleurs,  trouva  qu'il  l'était 
trop  et  l'envoya  à  la  Bastille  pour  avoir  laissé  jouer 
ihêagine  et  Chariclée,  Je  Dorai,  pièce  contenant  quel- 
ques réflexions  sur  les  rois  fainéants  !  Sorti  de  la  Bas- 
tille, il  crut  prudent  de  lire  à  l'avenir  même  entre 
les  lignes,  et  sa  circonspection  lui  fit  perdre  tout 
crédit  auprès  des  auteurs  contemporains,  cela  va  sans 
dire.  Beaumarchais  ne  l'estimait  guère!  Les  Guèbres 
el  les  Lois  de  Minos,  de  Voltaire  ;  la  Partie  de  chasse  de 
Henri  IV,  de  Collé;  Bameveld,  de  Lemièrre;  Maillard 
ou  Paris  sauvé  et  le  Philosophe  sans  U  savoir,  de  Se- 
maine, furent  impitoyablement  interdits. 

Crébillon  le  jeune,  Sauvigny,  Suard  continuèrent 
la  tradition. 

Il  faut  reconnaître  toutefois  que,  sous  le  règne  de 
Louis  XVI,  on  se  départit  beaucoup  des  rigueurs 
jadis  accoutumées.  Inertie,  insouciance,  curiosité... 
—  instinct  qui  guide  les  frivolités  vers  le  souflle  qui 
les  emportera...  —  la  reine  et  la  cour  voulurent  et 
obtinrent  du  roi,  malgré  sa  résistance,  qu'on  jouât 
le  Barbier  de  Séville  et  le  Mariage  de  Figaro. 

Suard,  lorsque  Ghénier  lui  présenta  Charles  IX, 
prononça  d'abord  son  veto.  La  pièce  fut  jouée  le 
4  novembre  1789. 

Il  est  vrai  que  déjà  la  monarchie  ne  s'appartenait 
plus. 

Droit  des  pauvres. 

Ainsi  que  nous  l'avons  annoncé  plus  haut,  les 
charges  pesant  sur  les  théâtres,  du  fait  du  droit  des 
Pauvres,  furent  encore  accrues,  et  cela  dès  la  Régence. 
Le  o  février  1716,  une  ordonnance  établit  une  nou- 
velle taxe  d'un  neuvième  en  sus  du  prix  d'entrée, 
pour  être  employée  à  l'agrandissement  des  bâtiments 
de  l'Hôtel-Dieu.  Ce  neuvième  en  sus,  joint  au  sixième 
que  l'on  percevait  pour  l'Hôpital  Général,  aboutissait 
à  faire  prélever  à  peu  près  le  quart  de  la  recette. 
L'expression  :  Quart  des  Pauvres  devint  alors  cou- 
rante. 

Certains  auteurs  ont  prétendu  que  la  nécessité  de 
procurer  des  fonds  au  sieur  de  La  Mare,  en  vue  de 
l'achèvement  de  son  magistral  ouvrage,  leTraité  de 
la  Police,  avait  été  la  cause  déterminante  de  cette 
augmentation  de  l'impôt.  Cela  est  loin  de  nous 
paraître  certain1.  Mais,  toute  contestation  écartée 
sur  ce  point,  il  reste  vrai  que  le  commissaire  de  La 
Mare  eut  une  très  large  part  des  bénéfices.  Voici,  en 
effet,  ce  que  déclare  Le  Cler-du-Brillet,  continuateur 
de  ses  travaux,  dans  la  tome  IV  de  l'ouvrage: 

«  Le  malheureux  accident  qui  lui  arriva  le  20  mars 
1713,  de  se  casser  la  cuisse  droite,  et  l'affreuse  situa- 
tion où  il  se  trouvoit.  tirent  beaucoup  appréhender 
pour  ses  jours;  la  famille  profila  de  ce  contre-temps 
pour  agir.  On  vit  aussitôt  ces  grands  Magistrats,  M. 
le  Premier  Président  de  Mesme,  et  M.  Dauuessau, 
Procureur-Général,  à  présent  Chancelier  de  France, 
accorder  ouvertement  leur  protection,  agir  sans 
relâche,  parler,  écrire  et  déterminer  le  lioi  à 
consentir  eu  faveur  de  M.  de  La  Mare,  à  une  aug- 
mentation d'un  neuvième  sur  les  entrées  aux  spec- 
tacles :  l'Ordonnance  alloit  être  portée  à  la  signa- 
ture, lorsque  Louis  XIV  tomba  malade  et  mourut. 
Cet  événement  ne  lit  que  suspendre  l'exécution  de 
la  chose;  M.  le  Premier  Président  et  M.  le  Procureur- 
Général  recommencèrent  leurs  sollicitations,  et  pri- 
rent la  peine  d'aller  demander  la  même  grâce  à 


s,  Les  Spécifies  /'<>, 


In  Comédie- Fran 


Msr  le  duc  d'Orléans,  Régent  du  Boyaume  ;  ce  prince, 
aussi  juste  que  généreux,  écouta  favorablement  la 
proposition  et  l'agréa,  ajoutant  :  Qu'il  connaissoil 
le  commissaire  de  La  Mare  et  qu'il  vouloit  lui  faire 
autant  de  bien  que  Louis  XIV  avoit  eu  dessein  de 
lui  en  procurer.  Pour  assurer  le  recouvrement  de 
la  nouvelle  augmentation  sur  les  entrées  aux  spec- 
tacles, les  Magistrats  avoient  trouvé  bon  qu'elle  ne 
parût  point  sous  le  nom  de  M.  de  La  Mare,  et  ils  lui 
avoient  laissé  la  liberté  de  choisir  un  des  hôpitaux 
de  Paris  :  sa  prédilection  pour  l'Hôtel- Dieu,  dont 
Madame  sa  sreur  était  Prieure,  et  en  grande  recom- 
mandation pour  sa  haute  vertu,  lui  fit  préférer  cette 
sainte  Maison  :  la  conjoncture  se  trouvoit  d'autant 
plus  heureuse,  que  l'Hôtel-Dieu  venait  d'entreprendre 
le  bâtiment  d'une  salle  neuve  pour  le  soulagement 
des  pauvres  malades. 

«  De  là  vient  qu'il  n'est  parlé  que  de  l'Hôtel-Dieu 
dans  l'Ordonnance  du  Roi  du  11  février  1716,  qui  a 
augmenté  d'un  neuvième  les  entrées  aux  spectacles; 
mais  Sa  Majesté  ne  lui  en  fit  don  qu'à  cette  condi- 
tion expresse,  d'en  rendre  une  somme  convenable  à 
M.  de  La  Mare  pour  récompense  de  ses  longs  ser- 
vices, pour  le  dédommager  des  avances  qu'il  avoit 
faites  pour  la  composition  et  l'impression  de  son 
Traité  de  la  Police,  et  pour  le  mettre  en  état  d'achever 
un  ouvrage  si  utile  au  public.  Ce  sont  les  mêmes 
termes  dont  S.  A.  R  se  servit,  et  qui  ont  été  conservés 
mot  pour  mot  tant  dans  la  délibération  du  Bureau  de 
l'Hôtel-Dieu  du  même  jour  o  février  1710,  que  dans 
le  traité  qu'il  fit  avec  M.  de  La  Mare  pour  sa  part 
qui  devoit  lui  revenir  dans  ce  don;  elle  fut  convenue 
à  trois  cent  mille  livres,  par  acte  passé  par  devant 
notaires  le  dix-neuf  du  même  mois  de  février.  » 

Le  Clerc-du-Brillet,  pour  nous  donner  d'autres 
témoignages  éclatants  de  la  grande  laveur  dont 
jouissait  son  prédécesseur  sous  le  règne  antérieur, 
nous  apprend  que  Louis  XIV,  «  faisant  la  Maison  de 
M.  le  comte  de  Vermandois,  eu  donna  l'intendance 
à  M.  de  La  Mare;  ce  qui  n'eut  point  de  suite,  parce 
que  le  Prince  partit  presque  aussi-tôt  pour  l'armée, 
et  mourut  au  commencement  de  la  campagne.  Cette 
récompense  perdue,  le  Roi  fit  mettre  M.  de  La  Mare 
sur  l'Etat  en  1084  pour  1  000  livres  de  pension,  qui 
fut  augmentée  d'autres  1000  livres  l'année  sui- 
vante. » 

C'étaitdéjà  beaucoup  qu'une  pension  de  2  000  livres, 
pour  l'époque.  En  ce  qui  touche  le  neuvième,  l'exa- 
gération du  récit  est  manifeste.  Car  il  n'était  point 
indifférent  pour  le  succès  du  Traité  que  l'auteur 
eût  bénéficié  d'une  protection  aussi  officielle!  Et, 
d'autre  part,  si  le  Régent  avait  eu  pour  but  unique 
de  doter  celte  compilation  ;de  300  000  livres,  il  n'au- 
rait assurément  pas  grevé  d'une  manière  définitive 
les  théâtres,  dont  l'agrément  lui  tenait  fort  au  cœur, 
d'un  surcroît  de  dificultés  matérielles.  Sa  munificence 
eût  découvert  d'autres  subsides,  à  moins  qu'elle 
n'eût  renoncé  à  les  chercher. 

Les  directeurs  de  théâtres  renouvelèrent,  quant 
au  neuvième,  les  prétentions  qu'ils  avaient  émises 
jadis  pour  alléger  leur  budget.  Ils  essayèrent  de 
défalquer  leurs  frais  avant  la  perception.  Une  ordon- 
nance du  4  mars  1719  les  arrêta  encore  dans  cette 
voie  : 

«  Sa  Majesté,  étant  informée  qu'au  préjudice  des- 
dites lettres-patentes  et  ordonnances  dont  les  dispo- 
sitions sont  si  précises,  les  directeurs  de  l'Opéra  et 
les  Comédiens  François  et  Italiens  ont,  depuis  quel- 
ques mois,  prétendu  que  le  sixième  et  le  neuvième 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


ci-devant  atlribués  à  Hôpital-Général  et  à  l'Hôlel- 
Dieu  ne  doivent  être  perçus  qu'après  avoir  prélevé 
les  frais  de  représentation,  ce  qui  est  manifestement 
contraire  aux  termes  desdiles  lettres- patentes  et 
ordonnances,  et  ne  peut  d'ailleurs  avoir  aucune  ap- 
parence de  justice;  d'autant  que  le  sixième  et  le 
neuvième  étant  perçus  par  augmentation,  les  direc- 
teurs de  l'Opéra  et  les  comédiens  reçoivent  pour  leur 
compte  les  sommes  qu'ils  faisoient  précédemment, 
sans  aucune  diminution,  et  sur  lesquelles  ils  étoient 
obligés  de  payer  les  mêmes  frais  auxquels  les  spec- 
tacles sont  nécessairement  assujettis;  Sa  Majesté,  de 
l'avis  de  M.  le  duc  d'Orléans,  Régent,  désirant  faire 
cesser  tout  prétexte  de  difficulté  à  cet  égard,  alin 
que  lesdits  Hôpital-Général  et  Hôtel-Dieu  jouissent, 
pour  la  subsistance  et  le  soulagement  des  pauvres, 
d'un  secours  sans  lequel  ils  ne  pourroient  se  sou- 
tenir, a  ordonné  et  ordonne  que,  conformément 
auxdites  lettres-patentes  des  2.ï  février  1690,  30  août 
1701,  7  octobre  1704,  8  janvier  1715  et  à  son  ordon- 
nance du  5  février  1716,  le  sixième  et  le  neuvième 
continueront  à  être  perçus  au  profit  dudit  Hôtel- 
Dieu  et  de  l'Hôpital-Général,  par  augmentation  des 
sommes  qu'on  recevoit,  avant  lesdites  lettres-patentes 
et  ordonnances,  pour  les  places  et  les  entrées  aux 
Opéra,  Comédies  et  autres  spectacles  publics  qui  se 
jouent  à  Paris  par  permission  de  Sa  Majesté,  même 
aux  spectacles  des  foires,  sans  aucune  diminution  ni 
retranchement,  sous  prétexte  de  frais  ou  autre- 
ment. » 

C'est  donc  toujours  le  même  argument  qu'on  fait 
valoir.  Sous  prétexte  que,  l'impôt  venant  en  sus, 
les  théâtres  peuvent  élever  le  prix  des  places,  et 
que  le  public  paye  davantage,  on  allègue  que  la 
charge  est  nulle!  Par  malheur,  les  événements  dé- 
mentent de  jour  en  jour  plus  nettement  cette  solu- 
tion donnée  aux  débats.  Pour  ne  pas  voir  tomber 
l'Académie  de  Musique,  on  l'autorise,  le  10  avril 
1721,  à  prélever,  une  fois  le  sixième  acquitté, 
600  livres  chaque  jour  pour  les  frais.  Le  neuvième 
ne  frappe  plus  que  le  reste. 

Le  21  juillet,  même  mesure  pour  l'Opéra-Comique, 
qui  peut  prélever  150  livres. 

Le  14  octobre  1736  seulement,  la  Comédie-Fran- 
çaise fait  rendre  une  ordonnance  qui  étend  en  sa 
faveur  l'application  de  ce  procédé.  Et  elle  prélève 
300  livres,  de  même  que  la  Comédie-Italienne1.  Un 
arrêt  du  Conseil,  du  18  juin  1725,  renouvelle  ces 
dispositions. 

Mais  comment  perçoit-on  les  taxes?  —  Une  déli- 
bération des  administrateurs  de  l'Hôtel-Dieu,  du 
22  juin  1725,  commet  le  sieur  de  la  Rivière  pour 
faire  la  recette  du  neuvième  aux  foires  Saint-Ger- 
main et  Saint-Laurent,  et  lui  abandonne  un  sol  par 
livre  pour  son  contrôle.  Une  nouvelle  délibération 
du  6  mars  1731  le  commet  également  pour  l'Opéra, 
la  Comédie-Française  et  la  Comédie-Italienne,  avec 
mission  d'assister  au  compte  de  chaque  représenta- 
tion. Un  ordre  de  M.  de  Maurepas,  du  12  mai,  auto- 
rise cette  remise  de  pouvoirs  tant  pour  L'Hôpital 
Général  que  pour  l'Hôtel-Dieu;  et,  comme  L'ingérence 
de  La  Rivière  souffre  de  la  part  des  intéressés  quel- 
ques difficultés,  une  ordonnance  de  Hérault,  lieute- 
nant de  police,  du  17  mai  1732,  en  prescrit  le  libre 
exercice.  Sur  quoi,  une  délibération  de  la  compagnie 
de  l'Hôtel-Dieu,  du  12  mai  L733,  arrête  que  son 
commissaire  «  se  transportera  à  l'Opéra  à  chaque 


représentation,  assistera  au  compte,  fera  La  vérifies. 
tion  de  tous  les  billets  qui  auront  élé  délivrés  pour 
les  premières,  secondes  et  troisièmes  loges,  le  par- 
terre, l'amphithéâtre,  les  balcons,  coulisses-  et 
théâtre,  et  pour  toutes  les  autres  places;  après  la- 
quelle vérification,  il  signera  la  feuille  de  produit 
conjointement  avec  les  directeurs  dudit  Opéra,  de  la- 
quelle feuille  il  remettra  copie  par  luy  certifiée  tous 
les  mois  à  M.  le  Receveur  général,  avec  la  part 
revenante  à  l'Hôtel-Dieu  dans  le  produit  y  contenu, 
dans  lequel  contenu  sera  compris  celuy  des  abonne- 
mens  des  loges  et  autres  places;  le  dit  sieur  de  La 
Rivière  fera  les  mêmes  opérations  aux  Comédies 
françoise  et  italienne,  et  le  produit  de  la  Comédie 
françoise  appartenant  à  l'Kôtel-Dieu  luy  sera  remis 
par  le  sieur  Romancau,  auquel  le  dit  sieur  de  La 
Rivière  continuera  de  payer  soixante-quinze  livres 
par  année,  à  commencer  du  premier  janvier  mil 
sept  cent  trentre-trois...  Et  pour  l'exécution  du  con- 
tenu cy-dessus,  dont  le  sieur  de  La  Rivière  donnera 
sa  soumission,  la  Compagnie  est  convenue  et  luy 
accorde  pour  appointemens  et  frais  quinze  deniers 
pour  livre  de  la  recette  nette  et  effective  dudit  neu- 
vième appartenant  à  l'Hôtel-Dieu  sur  les  spectacles 
de  l'Opéra,  des  Comédies  françoise  et  italienne  et 
des  foires  de  Saint-Germain  et  de  Saint-Laurent,  à 
commencer  du  premier  janvier  mil  sept  cent  trente- 
trois,  sans  pouvoir  employer  dans  ses  comptes  en 
dépence  aucuns  frais  de  eontrolleurs  et  commis  à 
tous  les  spectacles,  dont  il  se  charge,  ainsy  que  des 
soixante-quinze  livres  cv-dessus  accordées  par  année 
au  sieur  Romancau,  sans  pouvoir  en  rien  répéter 
contre  l'Hôtel-Dieu3.  » 

En  1737,  le  neuvième  sur  les  comédies  est  réduit 
au  dixième.  Un  peu  plus  tard,  la  même  concession 
est  faite  à  l'Opéra. 

Puis  on  en  vient,  à  la  suite  de  contestations  sans 
nombre,  et  de  procès  entre  les  administrateurs  des 
hôpitaux  et  les  directeurs  de  théâtre,  à  l'idée  de 
l'abonnement,  laquelle,  d'ailleurs,  n'est  pas  nou- 
velle. En  conséquence,  le  28  mai  1762,  un  traité  est 
passé  devant  Dulartre,  notaire,  entre  les  hôpitaux  et 
les  deux  comédies.  (On  sait  que,  depuis  le  mois  de 
janvier,  l'Opéra-Comique  est  réuni  à  la  Comédie- 
Italienne.)  L'abonnement  est  conclu  pour  neuf  ans. 
La  Comédie-Française  versera  pour  chaque  exercice 
60000  livres,  la  Comédie-Italienne  41)  105  livres,  et 
l'Opéra-Comique  14  895  livres.  Une  convention  dans 
le  même  sens  est  signée  avec  Reiikl  et  Francœur, 
qui  tiennent  l'Opéra,  pour  70000  livres.  M.  Honnassies 
lui  donne  pour  date  le  1er  avril. 

En  1771,  l'abonnement  de  l'Opéra  fut  renouvelé 
pour  72  000  livres.  Les  hôpitaux  refusèrent  de  renou- 
veler celui  des  comédies.  Au  cours  d'un  ('change  de 
mémoires  et  de  requêtes  adressés  au  Conseil,  un 
arrêt  du  22  mars  1771  statue  que  l'abonnement  sera 
continué  par  provision. 

Les  spectacles  secondaires  avaient,  pour  la  plu- 
part aussi,  contracté  des  abonnements.  Les  .laies 
originaires  sont  inconnues.  Mais  nous  rayons  que,  en 
1783,  le  sieur  Astley,  qui  vient  de  fonder  un  Cirque, 
l'Amphithéâtre  Anglois,  s'arrange  pour  600  livres. 
En  1784,  les  Petits  Comédiens  de  S.  A.  S.  le  comte 
de  Beaujolais  pour  400  livres;  Lasalle,  entrepreneur 


installé  des  places  .lans  les  coulis 


TECHNIQUE,  ESTIIÉT1QVE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    37s: 


dn  Waux-llall  d'Hiver,  qui  jusqu'alors  a  été  excepté 
du  droit  des  pauvres,  pour  1200  livres.  L'abonne- 
ment d'Astley  est  élevé  à  4  200  livres  '. 

En  178.S,  Dorléuille  et  Gaillard,  pour  les  Variétés, 
S'engagent  à  une  redevance  .le  60 000  livres  pendant 
deux  ans2. 

Pour  deux  ans  également,  à  compter  du  2  jan- 
vier 1786,  Arnould  et  Atulinot,  qui  ont  repris  l'Am- 


l.ii:ii-i.i 


Pi.hr 


■  quai  I  que 
1  000  livres 


sur  une  somme  indistinctement  I 
pour  chaque  représentation3. 

Kt  en  1789,  Léonard,  Auher  et  consorts,  entre- 
preneurs du  Théâtre  de  Monsieur  obtiennent  que  le 
dit  quart  ne  sera  pris  que  sur  les  recettes  des  dix- 
premiers  jours  de  chaque  mois'. 


LE  THÉÂTRE  PENDANT  LÀ  PÉRIODE  RÉVOLUTIONNAIRE 

DE  17! H)  A   L806 


LA   LIBERTÉ   DES  SPECTACLES 

La  loi  des  16-24  août  1790,  sur  l'organisation  judi- 
ciaire, disposa,  dans  son  litre  XI,  art,  4  :  «  Les 
spectacles  publics  ne  pourront  être  permis  et  auto- 
risés que  par  les  ofliciers  municipaux.  Ceux  des  en- 
trepreneurs et  directeurs  actuels  qui  ont  obtenu  des 
autorisations,  soit  des  gouverneurs  des  anciennes 
provinces,  soit  de  toute  autre  manière,  se  pourvoi- 
ront devant  les  officiers  municipaux,  qui  conlirme- 
ront  leur  jouissance  pour  le  temps  qui  en  reste  à 
courir,à  charged'une  redevance  envers  les  pauvres.  » 

Cette  mesure  provisoire,  qui  déjà  faisait  évanouir 
le  peu  qui  subsistait  alors  de  l'idée  de  monopole, 
fut  suivie  de  la  fameuse  loi  des  13-19  janvier  1791  : 
«  Tout  citoyen,  disait  l'article  Ier,  pourra  élever  un 
théâtre  public  pour  y  faire  représenter  les  pièces  de 
tous  genres,  en  faisant  préalablement  à  l'établisse- 
ment de  son  théâtre  sa  déclaration  à  la  municipalité 
des  lieux.  » 

Cette  liberté,  loyalement  proclamée  avec  tant 
d'autres,  était  destinée,  comme  elles,  à  demeurer 
dans  le  domaine  des  principes.  Si  les  théâtres  pou- 
vaient s'ouvrir  sans  requéiir  le  privilège  de  jadis, 
du  moins  combien  furent  fermés  sur  l'ordre  de  l'au- 
torité!  El  à  quelles  conditions  leur  laissait-un  le 
droit  de  vivre  ! 

Des  spectacles  nouveaux  s'élevèrent  de  tous  cotés  : 
—  Le  1er  septembre  1791,  le  Théâtre  du  Marais,  rue 
Culture-Sainte-Catherine;  —  le  12  janvier  1792,  le 
Théâtre  du  Vaudeville  ;  —  le  20  octobre  1792,  le 
Théâtre  du  Palais,  qui  pr.md,  en  1793,  le  nom  de 
Théâtre  de  la  Cité,  et  plus  tard  celui  de  Cité- 
Variétés;  —  en  1792  encore,  rue  Saint-Martin,  le 
'théâtre  de  Molière,  qu'on  appelle  presque  aussitôt 
Théâtre  .National  de  Molière,  puis  Théâtre  des  Sans- 
Culottes  en  1793.  Il  reprendra  son  nom  de  Théâtre 
de  Molière  après  la  Terreur,  et  s'appellera,  en  1800, 
Variétés  nationales  et  étrangères;  —  le  1"  juillet 
1793,1e  Théâtre  de  Louvbis,  rue  de  Louvois. 

La  même  année,  Mlle  Montansier  fonde  le  Théâtre- 
National,  rue  de  Richelieu,  en  face  de  la  Biblio- 
thèque. 

On  voit  apparaître  aussi  le  Théâtre  de  Marat,  rue 
de  l'Estrapade;  —  le  Boudoir  des  Muses,  appelé,  par 


clih.,  Hotel-Pi. 


TSi.  !;,■ 


la  suite,  Théâtre  de  la  Vieille  rue  du  Temple;  —  le 
l'héâtre  de  la  rue  du  Chaume;  —  le  Théâtre  de  la 
rue  du  lîae,  dit  plus  lard  Théâtre  de  la  Victoire;  — 
puis,  sur  le  boulevard  du  Temple,  le-;  Elèves  de 
l'halie,  les  Petits-Comédiens-Français,  le  Théâtre 
Minerve;  —  le  Théâtre  de  la  Liberté,  à  la  foire 
Saint-Germain;  —  en  1799,  en  1800,  le  Théâtre  des 
Troubadours,  qui  s'établit  d'abord  dans  la  salle 
Molière,  ensuite  dans  la  salle  Louvois,  et  le  Théâtre 
des  Jeunes  Elèves,  rue  Dauphine,  etc.,  etc. 

Quant  aux  scènes  anciennes,  la  plupart  changent 
de  nom,  et,  plus  souvent  de  direction.  Le  Théâtre  du 
Palais-Royal  s'appelle,  en  avril  1791,  Théâtre-Fran- 
çais de  la  rue  de  Richelieu,  et,  après  le  10  août, 
Théâtre  de  la  Liberté  et  de  L'Egalité,  puis  Théâtre 
de  la  République.  Les  Elèves  de  l'Opéra  lui  prennent 
son  ancien  nom  de  Variétés-Amusantes.  La  Caité, 
en  1795,  s'appelle  pour  quelque  temps  Théâtre 
d'Émulation.  Le  théâtre  Montansier,  au  Palais- 
Royal,  devient  le  Théâtre  de  la  Montagne  en  1793, 
et  le  Théâtre  des  Variétés  en  1795.  Celui  des  Asso- 
cies devient  le  Théâtre  Patriotique. 

Franconi,  qui  succède  à  Astley,  fonde  le  Cirque 
Olympique. 

POLICE 

La  loi  des  16-24  août  1790,  titre  XI,  article  3,  avait 
confié  à  la  vigilance  et  à  l'autorité  des  corps  muni- 
cipaux le  maintien  du  bon  ordre  dans  les  spectacles. 

La  loi  des  13-19  janvier  1791  s'exprima  elle-même 
en  ces  termes  : 

«  Art.  6.  —  Les  entrepreneurs  et  les  membres  de;- 
différents  théâtres  seront,  à  raison  de  leur  état, 
sous  l'inspection  des  municipalités;  ils  ne  recevront 
des  ordres  que  des  officiers  municipaux...  qui  ne 
pourront  rien  enjoindre  aux  comédiens  que  confor- 
mément aux  lois  et  règlements  de  police  ;  règlements 
sur  lesquels  le  Comité  de  Constitution  dressera 
incessamment  un  projet  d'instruction.  Provisoire- 
ment, les  anciens  règlements  seront  exécutés.  » 

C'est  à  la  municipalité  de  Paris  que  le  décret  du 
2  août  1893  confiait  le  soin  de  faire  exécuter  ses  dis- 
positions. Le  décret  du  14  août  autorisait  les  con- 
seils des  communes  à  diriger  les  spectacles.  L'ar- 
ticle 3  de  la  loi  du  1er  septembre  répétait  :  «  La 
police  des  spectacles  continuera  d'appartenir  exclu- 


3  788 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  1)11  CONSERVATOIRE 


sivement  aux  municipalités.  »  L'arrêté  du  25  plu- 
viôse an  IV  chargeait  les  officiers  municipaux  de 
veiller  à  ce  que  ses  prescriptions  fussent  respectées. 
Un  autre  arrêté  du  1er  germinal  an  VII  leur  en- 
joignait de  prendre  certaines  mesures  pour  prévenir 
les  dangers  d'incendie. 

Mais  ce  système,  qui  faisait  dépendre  des  muni- 
cipalités la  police  de  la  scène,  la  police  de  la  salle 
et  la  police  extérieure,  fut  bientôt  et  définitivement 
abandonné  pour  Paris.  Tandis  que  l'article  13  de  la 
loi  du  28  pluviôse  an  VIII  confiait  encore  la  police 
des  théâtres,  dans  les  départements,  aux  maires,  et, 
à  leur  défaut,  aux  adjoints,  l'article  16  de  la  même 
loi  faisait  passer  ces  attributions,  dans  la  capitale, 
entre  les  mains  du  préfet  de  police.  Et  l'article  12 
de  l'arrêté  du  12  messidor  suivanl,  qui  déterminait 
les  fonctions  de  ce  magistrat,  disposait:  «  11  aura 
la  police  des  théâtres  en  ce  qui  touche  la  sùrelé  des 
personnes,  les  précautions  à  prendre  pour  prévenir 
les  accidents,  et  assurer  le  maintien  de  la  tranquil- 
lité et  du  bon  ordre  tant  au  dedans  qu'au  dehors.  » 

Un  arrêté  du  3  brumaire  an  IX  étendit  l'autorité 
du  préfet  de  police  sur  tout  le  département  de  la 
Seine,  et  sur  les  communes  de  Saint-Cloud,  Meudon 
et  Sèvres. 

A  dalerd'un  arrêté  du  :i  brumaire  an  IX,  les  mu- 
nicipalités l'urenl  dépouillées  pour  quelques  années 
de  leur  aulorité  sur  les  spectacles.  Ledit  arrêté,  qui 
précisait  les  attributions  des  commissaires  généraux 
de  police  dans  les  départements,  rééditait  à  leur 
profit  et  dans  les  même  termes  les  dispositions  rie 
l'article  12  de  l'arrêté  du  12  messidor  an  VIII.  Ces 
fonctionnaires  étaient,  d'ailleurs,  placés  sous  la 
dépendance  des  préfets. 

Le  décret  du  17  frimaire  an  XIV  (8  décembre  1805) 
revint,  en  ce  qui  concerne  les  départements,  a  In 
législation  antérieure,  en  continuant  d'utiliser  toute- 
fois, dans  une  certaine  mesure,  le  concours  des  com- 
missaires généraux  de  police.  Il  était  ainsi  conçu  : 
"  Ail.  1.  Les  commissaires  généraux  rie  police  sont 
chargés  de  la  police  des  théâtres,  seulement  en 
ce  qui  concerne  les  ouvrages  qui  y  sont  représentés. 
—  Art.  IL  Lesmairessont  chargés,  sous  tous  les  autres 
rapports,  de  la  police  et  du  maintien  de  l'ordre  et 
de  la  sûreté.  » 


LA   CENSURE   SOUS  LA   RÉVOLUTION 

La  loi  des  13-10  janvier-  1791,  qui  proclamait  la 
liberté  des  ihéàtres,  abolit  aussi  la  censure.  L'ar- 
ticle 6  disposa  : 

«  Les  entrepreneurs  et  les  membres  des  différents 
théâtres  seront,  à  raison  de  leur  état,  sous  l'inspec- 
tion des  municipalités;  ils  ne  recevront  des  ordres 
que  des  officiers  municipaux,  qui  ne  pourront  arrêter 
ni  défendre  la  représentation  d'une  pièce,  sauf  la 
responsabilité  des  auteurs  et  des  comédiens,  et 
qui  ne  pourront  rien  enjoindre  aux  comédiens  que 
conformément  aux  règlements  de  police.  » 

Sauf  la  responsabilité  îles  <mt<  urs  et  des  comédiens, 
—  voilà  un  avertissement  qui  laissait  fort  à  entendre... 
On  sait  quelle  était  alors  la  nature  ries  griefs  el  la 
forme  des  procès!  Les  auteurs  n'avaient  guère  le 
choix  des  sujets,  ni  les  comédiens  la  liberté  d'ac- 
cepter- tous  les  rôles.  Il  fallait  se  soumettre,  ou  s'abs- 
tenir. ISeaucoup  par  conviction,  beaucoup  d'autres 
par  nécessité,  dirigèrent  le  courant  ou  se  résignèrent 
à  le  suivre. 


Dès  le  i  janvier  1791,  â  la  Comédie-Française, 
devenu  le  Théâtre  de  la  Nation,  on  joue  la  Liberté 
conquise  ou  le  Despotisme  renversé;  le  25  février,  le 
Mari  directeur  ou  le  Déménagement  du  Couvent  ;  le 
28  mars,  les  Victimes  cloîtrées.  En  1792,  en  1793,  on 
affiche  à  l'Ambigu  la  Journée  de  Varennes  ou  le 
Maître  de  poste  de  Saint e-Menehould;  au  Théâtre- 
National,  les  Calilinas  modernes,  glorification  tou- 
chante de  Marat!  Au  Vaudeville,  laNourrice  républi- 
caine, avec  la  Carmagnole  arrangée  en  berceuse  pour 
la  circonstance;  au  Théâtre  de  la  République,  le 
18  octobre  1793,  le  Jugement  dernier  des  rois:  au 
Tbéàtre-Feydeau,  le  26  janvier,  la  Papesse  Jeanne  : 
au  Théâtre  Louvois,  le  18  août,  Une  Journée  au  Vati- 
can ou  le  Souper  du  Pape;  au  Théâtre  de  le  Cité,  les 
Moines  gourmands,  les  Dragons  et  les  Bénédictines,  A 
bas  la  Calotte,  l'Esprit  des  Prêtres:  etc.,  etc. 

A  l'Opéra  même,  on  donne  la  Journée  du  10  Août 
ou  la  Chute  du  dernier  Ti/rau  :  la  Montagne  ou  la  Fon- 
dation du  Temple  de  la  liberté.  A  l'Opéra-Comique- 
National,  Marat  dans  le  souterrain  des  Cordeliers  ou 
la  Journée  du  10  Août. 

Par  contre,  on  interdit  les  pièces  libertaires,  mais 
pacificatrices,  de  BetTroy  de  Ueigny.  On  emprisonne 
Radet  et  Desfontaines,  auteurs  d'une  pièce  sans 
intention  politique  aucune,  la  Chaste  Suzanne,  repré- 
sentée au  Vaudeville  le  5  janvier  1793;  on  avait  sur- 
pris celle  phrase  dans  le  dialogue  : 

«  Vous  êtes  ses  accusateur  s,  vous  ne  pouvez  être 
ses  juses!  » 

Le  Théâtre  de  la  Nation  était  taxé  de  réaction.  Il 
avait  pointant  donné,  on  vient  d'en  juger,  la  preuve 
d'un  certain  civisme.  Il  est  vrai  que  son  répertoire 
demeurait  assez  varié,  et  qu'en  1792.  on  y  jouait 
encore  la  Partie  de  Chasse  </<•  Henri  IV!  H  aurait 
peut-être  fallu  lui  garder  quelque  reconnaissance, 
en  outre  de  ses  services  actuels  voués  à  la  cause 
révolutionnaire,  d'avoir  donné  accès  jadis  au  Mariage 
deFigaro,  et  d'avoir,  le  premier,  mis  en  scène  Char- 
les IX  ou  l'Ecole  des  Rois. 

A  la  suite  de  dissensions  intestines  —  provoquées 
par  l'ambition  un  peu  fiévreuse  de  Talma  —  et 
aussi  de  troubles  graves  dans  la  salle,  les  représen- 
tations de  Cliarles  IX  avaient  été  interrompues  par 
le  comité  le  26  septembre  1790.  Le  lendemain,  le 
Conseil  de  Ville  ordonnait  la  clôture  jusqu'à  la 
reprise  de  la  pièce.  Le  comité  avait  dû  céder. 

Le  3  janvier  1793,  on  jouail  V  imi  des.  Lois,  de 
Laya,  une  œuvre  vraiment  hardie  par  ces  temps 
difficiles,  et  dans  laquelle  Robespierre  et  Marat, 
désignés  sans  détour,  ne  trouvaient  pas  précisément 
une  apologie  de  leur  vie  publique.  Le  12  janvier,  un 
arrêté  de  la  Commune  interdit  la  représentation. 
Tandis  que  le  public,  accouru  malgré  la  défense, 
emplit  la  salle  et  réclame  le  spectacle,  Laya  se 
rend  à  la  Convention  et  proteste  contre  l'arrêté. 
L'assemblée  se  prononce  aussitôl  : 

«  La  Convention  Nationale,  sur  la  lecture  donnée 
d'une  lettre  da  maire  de  Paris,  qui  annonce  qu'il  y 
a  un  rassemblement  autour  du  Théâtre  de  la  Nation, 
qui  demande  que  la  Convention  Nationale  prenne  en 
considération  une  députation  dont  le  peuple  attend 
l'effet  avec  impatience,  et  dont  l'objet  est  d'obtenir 
une  décision  favorable,  afin  que  la  pièce  {'Ami  des 
Lois  soit  représentée  nonobstant  l'arrêté  du  Corps 
municipal  de  Paris  qui  en  défend  la  représentation, 
passe  à  l'ordre  du  jour,  motivé  sur  ce  qu'il  n'y  a 
point  de  loi  qui  autorise  les  corps  municipaux  à 
censurer  les  spectacles.  » 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAtiOClE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3789 


En  conséquence  de  ce  décret,  le  Conseil  Exécutif 
prit,  le  14  janvier,  un  arrêté  dont  la  teneur  suit  : 

«  Le  Conseil  Exécutif  provisoire,  en  exécution  du 
décret  de  la  Convention  Nationale  de  ce  jour,  délibé- 
rant sur  l'arrêté  du  Conseil  général  de  la  Commune 
de  Paris,  en  date  du  même  jour,  par  lequel  il  est 
ordonné  que  les  spectacles  seront  fermés  aujour- 
d'hui; considérant  que  les  circonstances  ne  néces- 
sitent pas  cette  mesure  extraordinaire,  arrête  que 
les  spectacles  continueront  d'être  ouverts.  Enjoint 
néanmoins,  au  nomdelapaix  publique,  aux  directeurs 
des  différents  théâtres,  d'éviter  la  représentation  des 
pièces  qui,  jusqu'à  ce  jour,  ont  occasionné  quelque 
double  et  qui  pourraient  le  renouveler  dans  le  mo- 
ment présent  ;  charge  le  maire  et  la  municipalité  de 
Paris  de  prendre  les  mesures  nécessaires  pour  l'exécu- 
tion du  présent  arrêté.  » 

Mais  la  Convention,  devant  laquelle  cette  décision 
elle-même  avait  été  attaquée,  la  mit  à  néant  le 
16  janvier  : 

«  La  Convention  Nationale  casse  l'arrêté  du  Con- 
seil Exécutif  provisoire,  en  ce  que  l'injonction  faite 
aux  directeurs  des  différents  théâtres,  étant  vague 
et  indéterminée,  blesse  les  principes,  donnerait  lieu 
à  l'arbitraire,  et  est  contraire  à  l'article  6  de  la  loi 
du  13  janvier  1791,  qui  porte  que  :  Les  entrepreneurs 
ne  recevront  des  ordres  qne  des  officiers  municipaux, 
qui  ne  pourront  arrêter  ni  défendre  la  représentation 
d'une  pièce,  sauf  la  responsabilité  des  auteurs  et  des 
comédiens,  que  conformément  aux  lois  et  aux  règle- 
ments de  police.  » 

Hélas!  les  temps  marchaient  vite!  Que  l'on  rap- 
proche de  ces  proclamations  le  procès-verbal  de  la 
séance  du  31  mais.  Moins  de  Irois  mois  seulement 
s'étaient  écoulés  : 

ii  Cenessieu.  — Je  demande  la  parole  pour  un  objet 
qui  intéresse  la  tranquilité  publique.  Dernièrement, 
je  me  trouvais  au  Théâtre  Montansier;  on  y  jouait 
Mérope,  tragédie  très  connue  de  Voltaire.  Tous  les 
patriotes  qui  s'y  trouvèrent  furent  indignés  de  voir 
que,  dans  les  circonstances  où  nous  nous  trouvons, 
on  jouât  une  pièce  dans  laquelle  une  reine  en  deuil 
pleure  son  mari  et  désire  ardemment  le  retour  de 
deux  frères  absents.  Le  trouble  que  causa  cette  re- 
présentation lit  croire  qu'elle  ne  serait  plus  jouée, 
mais  elle  est  affichée  aujourd'hui  sur  un  théâtre 
qui  prend  le  faux  nom  de  patriote.  Je  demande  que, 
par  décret,  l'Assemblée  défende  celte  représenta- 
tion. 

«  M.  Boissy-d'Anglas.  —  Je  propose  cetle  ré- 
daction :  La  Convention  Nationale  charge  son 
comité  d'instruction  publique  de  lui  présenter 
une  loi  sur  la  surveillance  des  spectacles,  et,  quant 
au  fait  dénoncé  par  l'un  de  ses  membres,  que  la 
tragédie  de  Mérope  est  affichée  pour  être  représentée 
sur  l'un  des  théâtres  de  Paris,  charge  le  maire  de 
prendre  les  mesures  nécessaires  pour  empêcher  la 
représentation  de  cette  pièce.  » 
Cette  rédaction  est  adoptée. 
Bien  mieux.  Le  2  août,  la  Convention  rend  un 
décret  en  ces  termes  : 

«  Article  premier.  —  A  compter  du  i  de  ce  mois 
et  jusqu'au  1er  septembre  prochain,  seront  repré- 
sentées trois  fois  la  semaine,  sur  les  Ihéàtres  de 
Paris  qui  seront  désignés  par  la  municipalité,  les 
tragédies  de  Brutus,  Guillaume  Tell,  Caius  Gracchus 
et  autres  pièces  dramatiques  qui  retracent  les  glo- 
rieux événements  de  la  Révolution  et  les  vertus  des 
défenseurs  de  la  liberté.  Une  de  ces  représentations 


sera  donnée  chaque  semaine  aux  frais  de  la  Répu- 
blique1. 

Art.  2.  —Tout  théâtre  sur  lequel  seraient  repré- 
sentées des  pièces  tendant  à  dépraver  l'esprit  pu- 
blic et  à  réveiller  la  honteuse  superstition  de  la 
royauté  sera  fermé,  et  les  directeurs  punis  selon  la 
rigueur  des  lois. 

«  La  municipalité  de  Paris  est  chargée  de  l'exécu- 
tion du  présent  décret2.  » 

Le  Théâtre  de  la  Nation,  entre  tous,  fut  le  plus 
cruellement  frappé.  Les  hommes  qui,  à  cette  époque, 
avaient  substitué  le  lyrannisme  à  la  monarchie,  au 
nom  de  la  liberté  ;  la  poignée  de  sectaires  qui  oppri- 
maient la  France  courbée  sous  leur  audace  et  leur 
effronterie;  les  aventuriers  sans  scrupule,  les  cheva- 
liers de  politique,  dont  la  célébrité,  née  delà  veille, 
allait  être  flétrie  le  lendemain,  ne  pardonnaient  pas 
;'i  la  vieille  Comédie  ses  origines,  ni  son  long  et  glo- 
rieux passé.  Us  lui  tenaient  rigueur  de  ne  s'être 
point  prosternée  devant  les  clubs,  de  n'avoir  cédé 
qu'à  contre-cœur  à  la  pression  des  circonstances  en 
jouant  quelques  ouvrages  ridicules  et  indignes  d'elle, 
et  d'avoir  cherché  courageusement  à  sauver,  au 
milieu  du  désordre  de  toutes  choses  élevées,  son 
aristocratie  littéraire  et  la  renommée  universelle  de 
sa  distinction.  On  guettait  un  prétexte  pour  abattre 
les  murailles  de  ce  dernier  temple  voué  aux  Arts  et 
au  bon  goût,  et,  faute  de  le  trouver,  on  s'arma  d'une 
mauvaise  querelle. 

Paméla,  une  pièce  dépourvue  d'aucune  allusion 
aux  événements  qui  passionnaient  Paris,  —  ce  qui 
déjà  était  presque  un  crime,  —  écrite  en  assez  belle 
langue  par  François  de  Neufchàteau,  pleine  de  sen- 
timents magnanimes  et  généreux,  avait  été  repré- 
senté pour  la  première  fois  le  l«  août  1793.  On  y 
avait  remarqué  certaine  scène  au  cours  de  laquelle 
un  personnage  se  reprochait  son  zèle  contre  les 
réformés,  s'accusait  de  persécution  et  prétendait 
s'affermir  désormais  dans  la  tolérance. 

Les  Jacobins  n'admettaient  point  que  la  persécu- 
tion fût  condamnable,  puisqu'ils  vivaient  d'elle.  Le 
2'J  août,  on  allait  commencer  la  neuvième  représen- 
tation de  cette  pièce,  lorsqu'une  interdiction  survint 
de  la  Commune.  L'auteur,  d'accord  avec  ses  inter- 
prètes, ayant  supprimé  quelques  passages  qu'il 
croyait  spécialement  visés  par  celte  décision,  V, imita 
reparut  le  2  septembre  sur  l'affiche,  et  celle-ci  por- 
tail la  mention  accoutumée  en  pareil  cas  :  «  .ivre  des 
changements  ...  La  soirée  n'alla  point  sans  quelques 
clameurs  de  commande,  et  la  dénonciation  fit  son 
infâme  office. 

Le  3  septembre,  le  Comité  de  Salut  Public  rendit 
un  arrêté  en  cette  forme  : 

«  Le  Comité  de  Salut  Public,  considérant  que  des 
troubles  se  sont  élevés  dans  la  dernière  représenta- 
tion du  Théâtre-Français,  où  les  patriotes  ont  été 
insultés;  que  les  acteurs  et  actrices  de  ce  théâtre 
ont  donné  des  preuves  soutenues  d'un  incivisme 
caractérisé  depuis  la  Révolution  et  représente  des 
pièces  antipatriotiques, 

«  Arrête  : 

«  1°  Que  le  Théâtre-Français  sera  fermé; 

m  2°  Que  les  comédiens  du  Théâtre-Français  et 


1.  I H  décret  du  3  pluviôse  an  II  (32  ja 
objet  un  crédit  de  100  000  francs. 

~.  LaloiduHdu  uiémc  mois  chargea  les  consei 
communes  .le  diriger  les  spectacles,  et  d'y  faire  repré 
les  plus  propres  à  former  l'esprit  public  et  à  déve 
républicaine. 


94)  alloua  poi 


-.pper  l'énergie 


ENCYCLOPEDIE  DE  I.A  Mt'SIOCE  ET  DICTIOX  XAIHE  DU  CnXSEKVATOIRE 


l'auteur  de  Paméla,  l'rançois  (de  Neufchâteau) 
seront  mis  en  état  d'arrestation  dans  une  maison 
de  sûreté  et  les  scellés  apposés  sur  leurs  papiers. 

«  Ordonne  à  la  police  de  Paris  de  tenir  plus  sévè- 
rement la  main  à  l'exécution  de  la  loi  du  2  août 
dernier,  relativement  aux  spectacles.  » 

La  Convention,  dominée  par  l'épouvante  de  la 
suspicion,  s'empressa  de  décréter  des  conclusions 
conformes,  le  jour  même  : 

«  La  Convention  Nationale  approuve  l'arrêté  pris 
le  2  septembre  par  le  Comité  de  Salut  Public,  et 
renvoie  au  Comité  de  Sûreté  Générale  pour  l'examen 
des  papiers  qui  seront  trouvés  sous  les  scellés.  » 

Bien  que  légalement,  le  régime  répressif  dût  seul 
être  appliqué,  le  Conseil  général  de  la  Commune 
exerçait  en  fait  la  censure.  Un  rapport  d'un  admi- 
nistrateur de  la  police,  du  24  ventôse  an  II,  nous 
apprend  que  la  question  de  savoir  si  les  pièces  con- 
tinueraient d'être  examinées  avant  leur  représen- 
tation avait  été  posée  au  Conseil  général,  et  que  ce 
dernier  était  passé  à  l'ordre  du  jour  motivé  sur  ce 
que  la  loi  lui  conliail  la  surveillance  des  spectacles. 

Toutes  les  pièces  nouvelles  étaient  examinées  avec 
un  soin  jaloux.  Quant  au  répertoire  ancien,  il  se 
trouva  soumis  à  des  mutilations  sans  nombre,  à 
des  remaniements  inspirés  d'une  puérilité  déconcer- 
tante, résolus  avec  une  irrévérence  scandaleuse  en- 
vers la  mémoire  des  génies  nationaux.  Toutes  les 
œuvres  de  Molière,  de  Corneille,  de  Racine,  de  Vol- 
taire étaient  défigurées  sans  le  moindre  scrupule. 
Depuis  longtemps  déjà,  les  acteurs  paraissaient  avec 
la  cocarde,  dans  les  rôles  antiques  comme  dans  les 
rôles  modernes.  On  en  arriva  à  supprimer  non  seu- 
lement les  titres  nobiliaires,  mais  jusqu'aux  expres- 
sions de  «  monsieur  »,  «  madame  ».  On  s'appela 
«  citoyen  » ,  dans  Phèdre  et  dans  le  Misanthrope!... 
Dans  la  partie  d'échecs  du  Bourru  bienfaisant,  c'est  : 
«  Échec  au  tyran I  »  qu'il  fallut  dire,  au  lieu  de  : 
«  Échec  au  roi1  !  » 

La  réaction  thermidorienne  fut  aussi  violente  au 
théâtre  que  partout  ailleurs.  On  ne  se  contenta  pas 
de  reprendre  toutes  les  pièces  naguère  proscrites, 
on  créa  un  répertoire  destiné  à  recueillir  des  applau- 
dissements plus  chaleureux  en  l'honneur  de  la  déli- 
vrance et  à  provoquer  des  manisfestations  plus 
éloquentes  contre  la  faction  du  crime  à  présent 
impuissante.  Les  orchestres  accompagnent  mainte- 
nant le  Réveil  du  Peuple,  au  lieu  de  la  Carmagnole. 
La  peur  a  disparu  avec  le  danger,  et  la  haine  s'exhale 
avec  d'aulaut  plus  de  violence  qu'elle  fut  plus  long- 
temps comprimée.  Au  Théâtre  de  la  Cité  lui-même, 
on  joue  l Intérieur  des  Comités  révolutionnaires  ou 
les  Aristide*  modernes;  au  Théâtre  .Molière,  le  s  upt  l 
des  Jacobins;  etc. 

Toutefois,  parmi  les  douze  commissions  instituées 
par  le  décret  des  12-1.1  germinal  an  II,  celle  de  l'Ins- 
truction publique,  ayant  la  surveillance  des  spec- 
tacles, rétablit  formellement  la  censure  par  un  arrêté 
du  25  floréal  an  III. 

Le  18  nivôse  an  IV,  le  Directoire,  ému  des  mouve- 
ments divers  de  l'opinion  et  de  l'ardeur  de  la  réac- 
tion, prit  un  arrêté  dont  voici  les  termes  : 

«  Tous  les  directeurs,  entrepreneurs  et  proprié- 
taires des  spectacles  de  Paris  sont  tenus,  sous  leur 
responsabilité  individuelle,  de  faire  jouer  chaque 
jour  par  leur  orchestre,  avant  la  levée  île  la  toile, 
les  airs  chéris  des  républicains,  tels  que  la   Marseil- 


laise, Ça  ira.',  Veillons  au  Salut  de  l'Empire  et  le 
Chant  du  départ.  —  Dana  l'intervalle  des  deux  pièces, 
on  chantera  toujours  l'hymne  des  Marseillais  ou 
quelque  autre  chanson  patriotique.  Le  Théâtre  des 
Arts  donnera,  chaque  jour  de  spectacle,  une  repré- 
sentation de  l'Offrande  à  la  Liberté,  avec  ses  chœurs 
et  accompagnement,  ou  quelque  autre  pièce  républi- 
caine. —  Il  est  expressément  défendu  de  chanter, 
laisser  ou  faire  chanter  l'air  homicide  dit  le  Réveil 
du  Peu/île.  —  Le  Ministre  de  la  Police  générale  don- 
nera les  ordres  les  plus  précis  pour  faire  arrêter 
tous  ceux  qui,  dans  les  spectacles,  appelleraient  par 
leurs  discours  le  retour  de  la  royauté,  provoqueraient 
l'anéantissement  du  Corps  législatif  ou  du  Pouvoir 
exécutif,  exciteraient  le  peuple  à  la  révolte,  trouble- 
raient l'ordre  et  la  tranquillité  publique,  et  attente- 
raient aux  bonnes  mœurs.  » 

Un  arrêté  du  27  nivôse  étendit  l'application  de  ces 
prescriptions  à  toutes  les  provinces  du  territoire. 

A  son  tour,  l'arrêté  du  25  pluviôse  an  IV  disposa  : 

<•  Article  premier.  —  En  exécution  des  lois  qui 
attribuent  aux  officiers  municipaux  des  communes 
la  police  et  la  direction  des  spectacles,  le  bureau 
central  de  police,  dans  les  cantons  où  il  en  est 
établi,  et  les  administrations  municipales,  dans  les 
autres  cantons  de  la  République,  tiendront  sévère- 
ment la  main  à  l'exécution  des  lois  et  règlements  de 
police  sur  le  fait  des  spectacles,  notamment  des  lois 
rendues  les  16-24  août  1790,  2  et  14  août  1703;  en 
conséquence,  ils  veilleront  à  ce  qu'il  ne  soit  repré- 
senté sur  les  théâtres  établis  dans  les  communes 
de  leur  arrondissement  aucune  pièce  dont  le  con- 
tenu puisse  servir  de  prétexte  à  la  malveillance 
et  occasionner  du  désordre,  et  ils  arrêteront  la 
représentation  de  toutes  celles  par  lesquelles  l'ordre 
public  aurait  été  troublé  d'une  manière  quelconque. 

"  Art.  -2.  — Conformément  à  l'article  2  de  la  loi  du 
2  août  précitée,  le  bureau  central  de  police  et  les  ad- 
ministrations municipales  feront  fermer  les  théâtres 
sur  lesquels  seraient  i  .-présentées  des  pièces  tendant 
à  dépraver  l'esprit  public  et  à  reveiller  la  honteuse 
superstition  de  la  royauté,  et  ils  feront  arrêter  et 
traduire  devant  les  officiers  de  police  judiciaire 
compétents  les  directeurs  desdifs  théâtres,  poui 
être  punis  suivant  la  rigueur  des  lois.  » 

On  sait  que  la  politique  du  Directoire  consista  en 
une  oscillation  constante  entre  tous  les  partis.  Les 
Jacobins  dressaient  encore  parfois  ta  tête.  A  la 
veille  du  18  fructidor,  ils  firent  interdire  une  pièce 
de  Martainville,  les  Assemblées  primitives  ou  les  Elec- 
tions, dans  laquelle  ils  se  trouvaient  passablement 
malmenés. 

Sous  le  Consulat,  l'exercice  de  la  censure  fut  des 
plus  rigoureux.  Bonaparte,  assez  puissant  déjà  pour 
que  le  souci  de  la  légalité  ne  l'embarrassât  point,  se 
contenta  de  donner  des  instructions,  et  les  ministres 
s'empressèrent  d'agir  au  delà  même  de  ses  souhaits. 

Voici  le  texte  d'une  circulaire  du  ministre  de  l'in- 
térieur adressée  aux  préfets,  le  22  germinal  an  V1I1  : 
il  y  aurait  là  matière  à  bien  des  rellexions! 

.<  Les  spectacles  ont  attiré  la  sollicitude  du  gou- 
vernement. C'est  témoigner  au  peuple  intérêt  et 
respect  que  d'éloigner  de  ses  yeux  tout  ce  qui  n'esl 
pas  digne  de  sou  estime,  et  tout  ce  qui  pourrait 
blesser  ses  opinions  ou  corrompre  ses  mœurs. 

»  Convaincu  de  celle  vérité,  le  Gouvernemenl  m'a 
chargé  4e  l'honorable  soin  de  surveiller  les  théâtres. 
Vous  m'aiderez  à  justifier  sa  confiance. 

«  Désormais,  les  seuls  .ouvrages  dont  j'aurai  auto- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 

risé  la  représentation  à  Paris  pourront  être  joués 
dans  les  départements.  Vous  recevrez  incessamment 
la  liste  des  pièces,  tant  ancien-nés  que  modernes, 
qui  pourront  être  mises  ou  remises  au  théâtre,  et 
vous  veillerez  à  ce  qu'aucune  antre  ne  soit  placée 
sur  le  répertoire  des  directeurs  de  spectacles, 

«  Si  quelques-uns  de  ces  directeurs  désiraient 
mettre  au  théâtre  des  ouvrages  qui  ne  fussent  point 
sur  la  liste,  vous  m'en  adresserez  les  manuscrits 
avec  votre  avis,  pour  que  je  puisse  prononcer.  » 

l'ne  nouvelle  circulaire  du  7  messidor  an  X  , 
adressée  par  le  conseiller  d'Etat  chargé  de  l'instruc- 
tion publique  aux  préfets,  leur  prescrit  de  faire 
représenter,  le  plus  qu'ils  pourront,  les  ouvrages 
anciens  et  modernes  joués  sur  le  Théâtre-Français, 
d'écarter  de  tout  leur  pouvoir  les  rapsodies  des 
petits  théâtres  de  Paris,  et  de  ne  permettre  que 
comme  accessoires  les  pièces  de  l'Opéra-Comique  et 
du  Vaudeville. 

Enfin,  une  autre  circulaire,  du  même  personnage 
aux  mêmes  fonctionnaires,  leur  enjoint  d'exiger  par 
avance  des  directeurs  le  répertoire  de  chaque  tri- 
mestre, et  de  le  lui  adresser  pour  le  mettre  à  même 
de  l'arrêter,  le  Gouvernement  ne  voulant  point 
qu'aucune  pièce  fût  jouée  sur  aucun  théâtre  sans 
l'approbation  de  l'autorité  supérieure. 

I, 'article  14  du  décret  du  8  juin  1806  disposait 
qu'aucune  pièce  ne  pourrait  être  jouée  sans  l'auto- 
risation du  ministre  de  la  police  générale. 

Nous  n'apprécierons  pas  la  façon  dont  fut  exercée 
la  censure  sous  le  premier  Empire.  On  sait,  du  reste, 
que  le  gouvernement  de  Bonaparte  ne  péchait  point 
par  excès  de  tolérance  ! 


LE  DROIT  DES    PAUVRES  SOUS  LA  RÉVOLUTION 

La  loi  des  4,  3,  6  août  1790  supprima,  on  le  sait, 
toutes  les  dîmes  et  redevances  dont  jouissaient  les 
gens  de  mainmorte.  Le  droit  des  pauvres  eût,  dès 
lors,  disparu  si  cette  loi,  ne  se  bornant  pas  à  une  dé- 
claration de  principe,  avait  immédiatement  pourvu 
aux  mesures  pratiques  qu'elle  se  contentait  d'an- 
noncer en  vue  de  secourir  l'indigence. 

Quelques  jours  après,  la  loi  des  16-24  août,  qui 
plaçait  les  spectacles  publics  sous  l'autorité  des  ofli- 
ciers  municipaux,  enjoignit  à  ceux-ci  de  ne  con- 
firmer les  droils  préexistants  des  entrepreneurs  qu'à 
charge  d'une  redevance  envers  1rs  pauvres. 

Lorsque  intervint  la  loi  des  13-19  janvier  1791  sur 
la  liberté  des  théâtres,  ceux-ci  refusèrent  catégori- 
quement d'acquitter  aucun  impôt  de  ce  genre,  sous 
le  prétexte  que  leur  émancipation  entraînait,  par 
voie  de  conséquence,  l'abolition  de  toute  charge1. 

Ln  arrêté  du  11  nivôse  an  IV  fit  cesser  cette 
interprétation,  en  prescrivant  à  tous  les  théâtres  de 
Paris  el  de  la  province  de  donner  chaque  mois  une 
représentation  au  profil  des  pauvres  ;  pour  ces  repré- 
sentations, ils  étaient  autorisés  à  tiercer  le  prix  des 
places  «  et  à  recevoir  les  rétributions  volontaires  de 
tous  ceux  qui  désireraient  concourir  à  cette  bonne 
ceuvre».  Le  relevé  des  encaissements  devait  être  fait, 
à  Paris,  par  une  commission  déléguée  du  ministre  de 
l'intérieur,  et,  dans  les  départements,  par  les  agents 
municipaux. 

Enfin  la  loi  du  7  frimaire  an  V,  qui  créa  l'assis- 
tance publique  des  bureaux  de  bienfaisance,  reprit 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    37H1 

l'ancien  système  de  la  monarchie  et  disposa  en  ces 
termes  : 

"  Article  premier.  —  Il  sera  perçu  un  décime  par 
franc  (deux  sous  pour  livre)  en  sus  du  prix  de  chaque 
billet  d'entrée,  pendant  six  mois,  dans  tous  les  spec- 
tacles où  se  donnent  des  pièces  de  théâtre,  des  bals, 
des  feux  d'artifice,  des  concerts,  des  courses,  et  des 
exercices  de  chevaux,  pour  lesquels  les  spectateurs 
payent.  La  même  perception  aura  lieu  sur  le  prix 
des  places  louées  pour  un  temps  déterminé. 

u  Art.  2.  —  Le  produit  de  la  recelte  sera  employé 
à  secourir  les  indigents  qui  ne  sont  pas  dans  les 
hospices. 

«  Art.  3.  —  Lesdites  administrations  (bureau  de 
bienfaisance)  détermineront  les  mesures  qu'elles 
croiront  convenables  pour  assurer  le  recouvrement 
du  droil  ordonné  par  l'article  I'1.  n 

On  voit  toutefois  que  le  taux  de  l'impôt  se  trou- 
vait considérablement  abaissé.  Ce  n'était  plus  le 
quart  que  l'on  percevait,  mais  le  dixième,  c'est-à- 
dire  ce  qui  revenait  jadis  au  seul  Hôtel-Dieu,  dans 
les  dernières  années  de  l'ancien  régime. 

On  a  cru  devoir  faire  ressortir  une  innovation 
dans  le  caractère  de  la  nouvelle  taxe,  en  ce  qu'elle 
frappait  tous  les  génies  de  spectacles,  et  non  plus 
uniquement  les  théâtres '.—.Mais  nous  avens  signalé, 
dans  un  précédent  chapitre,  qu'on  n'avait  point 
négligé  d'imposer  les  waux-halls  et  les  cirques 
avant  1789. 

La  véritable  innovation  consistait  dans  ce  fait  que 
les  hospices  voyaient  échapper  un  énorme  revenu, 
sans  qu'on  le  remplaçât  d'autre  part. 

Le  29  frimaire,  un  arrêté  du  Directoire  confia  aux 
entrepreneurs  de  spectacles  eux-mêmes  le  soin  de 
la  perception,  an  nom  de  l'Assistance  publique. 

La  loi  n'avait  statué  que  pour  une  période  de  six 
mois.  Ce  délai  fut  renouvelé  par  les  lois  du  2  floréal, 
puis  du  8  thermidor.  Cette  dernière,  modifiant  sen- 
siblement les  précédentes,  en  revint  à  l'exigence  du 
quart  de  la  recette  brute,  pour  tous  les  spectacles 
autres  que  les  théâtres  proprement  dits;  de  plus,  ce 
quart  dut  profiter  aux  hospices  comme  aux  bureaux 
de  bienfaisance  : 

«  Article  premier.  —  Le  droit  d'un  décime  par 
franc,  établi  par  la  loi  du  7  frimaire  an  V  et  prorogé 
par  celle  du  2  floréal  dernier,  continuera  â  être 
perçujusqu'au  7  frimaire  de  l'an  VI,  en  sus  du  prix 
de  chaque  billet  d'entrée  et  d'abonnement  dans  tous 
les  spectacles  où   se  donnent  des  pièces  de  théâtre. 

«  Art.  2.  —  Le  même  droil  'd'un  décime  par  franc, 
établi  et  prorogé  par  les  mêmes  lois  à  l'entrée  des 
bals,  feux  d'artifice,  des  concerts,  des  courses  el 
exercices  de  chevaux  et  autres  fêtes  où  on  est  admis 
en  pavant,  est  porté  au  quart  de  la  recette  jusqu'au 
7  frimaire  prochain. 

o  Art.  3.  —  Le  produit  des  droits  perçus  en  vertu 
des  articles  précédents  sera  consacré  uniquement 
aux  besoins  des  hospices  et  aux  secours  à  domicile, 
dans  les  proportions  qui  seront  déterminées  par  le 
bureau  central  dans  les  communes  où  il  y  a  plusieurs 
municipalités  el  par  l'administration  municipale 
dans  les  autres,  conformément  à  l'article  7  de  la  loi 
du  7  frimaire.  » 

De  nouvelles  prorogations  furent  apportées  par 
les  loi  du  2  frimaire  el  du  19  fructidor  an  VI,  et  par 
celle  du  6e  jour  complémentaire  an  VII. 

A  la  suite  de  la  réorganisation  administrative  d'où 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


résultait  la  réduction  du  nombre  des  administra- 
teurs municipaux  chargés  jusqu'alors  de  la  consta- 
tation des  recettes  par  le  bureau  central,  un  arrêté 
du  préfet  de  police  du  23  ventôse  de  l'an  VIII  en 
remit  désormais  le  soin  aux  comités  de  bienfaisance. 

Le  7  fructidor  de  la  même  année,  un  arrêté  consu- 
laire prorogea  encore  cet  impôt.  On  en  a  contesté 
la  légalité  à  .juste  titre1,  puisque  le  pouvoir  exécutif 
usurpait  ici  l'autorité  du  pouvoir  législatif.  Une  cir- 
culaire ministérielle  du  24  chargea  les  préfets  et 
sous-préfets  d'établir  le  mode  de  recouvrement.  Les 
préfets  devaient  aussi  pourvoir  à  la  répartition  du 
produit  entre  les  hospices  et  les  bureaux  de  bien- 
faisance. 

Nouvelle  prorogation  par  un  nouvel  arrêté  consu- 
laire du  9  fructidor  en  IX.  Notons  que,  en  brumaire 
an  X,  la  perception  fut  affermée  aux  enchères. 

Prorogation  le  18  thermidor.  Et  une  circulaire 
ministérielle  du  26  fructidor  ordonna  que  la  taxe 
serait  levée  même  dans  les  établissements  où,  sans 
que  l'on  eût  à  payer  dès  l'entrée,  les  industriels 
parvenaient,  de  diverses  façons,  à  tirer  de  l'argent 
du  public;  elle  ordonnait,  en  outre,  que  la  réparti- 
tion fût  faite  soit  en  entier  dans  la  caisse  des  hôpi- 
taux, soit  en  entier  dans  celle  de  l'Assistance  pu- 
blique, selon  les  nécessités,  mais  de  préférence  au 
profil  de  cette  dernière.  Eu  cas  de  représentation  à 
bénéfice,  l'augmentation  accidentelle  du  prix  des 
places  ne  devait  aucunement  influer  sur  la  taxe, 
laquelle  continuerait  de  porter  sur  le  prix  ordinaire. 

Prorogation  le  10  thermidor  an  XI.  Et,  d'après 
l'article^  de  l'arrêté,  les  contestations  qui  pouvaient 
s'élever  dans  son  exécution  ou  son  interprétation 
devaient  être  tranchées  par  les  préfets,  en  conseil  de 
préfecture,  sur  l'avis  motivé  des  comités  consulta- 
tifs établis  en  exécution  de  l'arrêté  du  7  messidor 
an  IX,  dans  chaque  arrondissement  communal,  pour 
le  contentieux  de  l'administration  des  pauvres  et 
des  hospices,  sauf,  en  cas  de  réclamation,  le  recours 
au  gouvernement. 

Prorogation  par  les  décrets  du  30  thermidor  an 
XII  et  du  8  fructidor  an  XIII.  Celui-ci,  en  ce  qui 
concerne  les  poursuites  éventuelles  tendant  au  re- 
couvrement du  droit,  donne  compétence,  non  plus 
aux  prélets,  mais  aux  conseils  de  préfecture,  par 
assimilation  au  régime  des  contributions  directes  et 
indirectes,  et  ordonne  l'exécution  provisoire,  non- 
obstant le  recours. 

Prorogation  par  décret  du  21  août  1800.  Le  17  dé- 
cembre, l'administration  des  hospices,  par  un  arrêté 
approuvé  le  17  janvier  1807,  établit  une  régie  inté- 
ressée en  vue  de  la  perception. 

Prorogation  par  décrets  du  2  novembre  1807  el  «lu 
26  novembre  1808. 

Enfin,  le  décret  du  9  décembre  1809  donna  au 
droit  des  pauvres  le  caractère  de  permanence  : 

«  Article  premier.  —  Les  droits  qui  ont  été  perçus 
jusqu'à  ce  jour  en  faveur  des  pauvres  ou  des  hospices, 
en  sus  de  chaque  billet  d'entrée  et  d'abonnement 
dans  les  spectacles  et  sur  la  recette  brute  des  bals, 
concerts,  danses  et  fêtes  publiques,  continueront  à 
être  indéfiniment  perçus  ainsi  qu'ils  l'ont  été  pen- 
dant le  cours  de  cette  année  et  des  années  anté- 
rieures, sous  la  responsabilité  des  receveurs  et  con- 
trôleurs de  ces  établissements. 

ci  Art.  i.  —  La  perception  de  ces  droits  continuera, 


pour  Paris,  d'être  mise  en  ferme  ou  régie  intéressée, 
d'après  les  formes,  clauses,  charges  et  conditions 
qui  en  seront  approuvées  par  notre  ministre  de  l'in- 
térieur. En  cas  de  régie  intéressée,  le  receveur  comp- 
table de  ces  établissements  el  le  contrôleur  des 
recettes  et  dépenses  seront  spécialement  chargés  du 
contrôle  de  la  régie,  sous  l'autorité  de  la  commis- 
sion executive  des  hospices  et  sous  la  surveillance 
du  préfet  de  la  Seine. 

«  Art.  3.  —  Dans  le  cas  où  la  régie  intéressée 
jugerait  utile  de  souscrire  des  abonnements,  ils  ne 
pourront  avoir  lieu  qu'avec  notre  approbation  en 
Conseil  d'Etat,  comme  pour  les  biens  des  hospices 
à  mettre  en  régie,  et  cette  approbation  ne  sera 
donnée  que  sur  l'avis  du  préfet  de  la  Seine,  qui  con- 
sultera la  commission  executive  el  le  conseil  des 
hospices. 

«  Art.  4.  —  Les  représentations  gratuites  et  à  béné- 
fice seront,  au  surplus,  exemptes  des  droits  men- 
tionnés aux  articles  qui  précèdent,  sur  l'augmenta- 
tion mise  au  prix  ordinaire  des  billets.  » 

M.  Bonnassies  a  fait  remarquer  que  ce  décret, 
dont  l'importance  est  considérable,  ne  figure  ni  au 
Bulletin  des  lois,  ni  au  Moniteur,  non  plus,  du  reste, 
que  ceux  du  2  novembre  1S07  et  du  24  novembre 
1808.  «  C'est,  dit-il,  plus  lard  seulement,  le  13  février 
1812,  dans  un  décret  relatif  à  l'introduction  de 
l'impôt  dans  les  déparlements  de  Rome  et  de  Tra- 
simène,  que  nous  apprenons  l'existence  des  deux 
premiers  etque  nousvoyons  reproduit  le  troisième.  » 

En  1817,  la  loi  de  finances  du  25  mars,  dans  l'ar- 
ticle 131,  assimila  le  droit  des  pauvres  aux  contri- 
butions publiques.  Depuis  cette  époque,  chaque 
année,  il  a  été  volé  dans  les  lois  budgétaires. 

Bien  des  débats  parlementaires  se  sont  fait  en- 
tendre, au  long  de  ce  xixe  siècle,  sur  la  question  du 
droit  des  pauvres.  Ils  n'ont  abouti,  jusqu'à  présent, 
qu'à  deux  modifications  spéciales  de  quotité.  La  loi 
du  budget  du  16  juillet  1840  plaça  les  concerts  quo- 
tidiens sur  le  même  pied  que  les  théâtres.  Elle 
abaissa  le  droit  auquel  ils  étaient  soumis  du  quart 
au  dixième.  Puis  la  loi  du  3  août  1875,  établissant 
le  budget  de  1876,  abaissa  ce  même  droit,  pour  les 
concerts  non  quotidiens,  du  même  quart  à  cinq  pour 
cent  delà  recette  brute.  Encore  cette  disposition  ne 
s'applique-t-elle  qu'aux  concerts  «  donnés  par  les 
artistes  ou  les  associations  d'arlistes.  »,  ce  qui  exclut 
les  cafés-concerts  et  leurs  dérivés. 


L'OPÉRA 

La  dévolution,  qui  avait,  par  la  loi  du  13-19  janvier 
1791,  proclamé  la  liberté  du  théâtre,  avait,  de  ce  fait 
supprimé  tout  privilège  et  tous  monopoles,  si  bien 
que  tout  citoyen  pouvait  élever  un  théâtre  publiée! 
y  représenter  des  pièces  de  tous  genres,  en  faisant 
préalablement  une  déclaration    à   la    municipalité. 

Le  2  mars  de  la  même  année,  les  privilèges  de 
profession  étaient  également  supprimés.  El  pourtant 
l'Opéra,  portant  toujours  le  nom  d'Académie  royale 
de  musique,  continuait  à  jouer  Castor  et  Pollux,  re- 
touché par  Candeille,  Adélaïde  et  Ladislas,  et  M"9  Ro- 
landeau  reprenait,  le  10  avril,  Œdipe  à  Colone. 

Le  refrain  ordinaire  Ça  ira  interrompait  souvenl 
les  représentations. 

Quand  Louis  XVI  el  sa  famille  eurent  été  arrêtés 
à  Varennes,  le  25  juin  1791,  le  Théâtre  Lyrique 
changea  de  nom  et  prit  le  titre  d'Opéra,  sans  rien  de 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUB VENTIONNÉS 


royal.  En  même  temps,  l'affiche  porta  les  noms  des 
artistes  qui  devaient  jouer,  ainsi  que  les  titres  des 
pièces  et  les  noms  des  auteurs. 

Le  but  était  d'empêcher  les  spectacles  anonymes 
empreints  de  modérantisme,  en  assurant  l'impunité 
des  auteurs  qui  auraient  réussi  à  se  cacher.  Telle 
est  l'origine  de  l'affiche  théâtrale.  Au  xvme  siècle, 
elle  n'existait  point,  et  c'est  pour  ce  motif  que  les 
vendredis  de  l'Opéra  avaient,  sous  la  Régence,  pris  un 
caractère  de  gala,  parce  que,  ces  jours-là,  on  savait 
que  c'étaient  les  chefs  d'emploi  qui  tenaient  leurs 
rôles. 

Un  arrêté  du  Comité  de  salut  public  décida,  le 
10  septembre,  au  moment  où  le  roi  venait  de  signer 
la  Constitution,  que  l'Opéra  reprendrait  le  titre 
d'Académie  royale  de  musique. 

Le  18,  Louis  XVI  offrait  une  grande  fête  aux  Tui- 
leries, et  le  2(1  il  venait  pour  la  dernière  fois  à  l'Opéra. 
On  y  représenta  Castor  et  Pollux,  et  la  recelte  fut  de 
6036  livres.  Le  lendemain,  la  famille  royale,  encou- 
ragée par  le  bon  accueil  qu'elle  avait  reçu  à  l'Opéra, 
voulut  se  rendre  à  l'Opéra-Comique,  mais  une  ba- 
garre fut  déterminée  par  la  présence  de  la  reine, 
qui  dut  s'échapper  de  la  salle. 

Le  18  octobre,  l'Académie  prenait  le  titre  d'Opéra 
national. 

Deux  citoyens,  Francœur  et  Cellerier,  prirent,  en 
1792,  la  direction  du  théâtre.  Le  22  janvier  1793,  le 
lendemain  de  la  mort  de  Louis  XVI,  il  donnèrent 
Roland,  qui  ne  lit  que  702  livres. 

On  jouait  alors  un  opéra  de  Gossec  et  Gardel,  inti- 
tulé l'Offrande  à  la  Liberté  (2  octobre  1792).  M"«  Mail- 
lard chantait  la  Marseillaise,  coiffée  d'un  bonnet 
phrygien.  Le  répertoire  se  composait  encore  de  deux 
ballets-pantomimes  de  Pierre  Gardel,  Télémaque  et 
Psyché,  dans  lesquels  M",e  Gardel  tenait  les  princi- 
paux rôles.  C'était,  disait  Noverre,  la  Vénus  de" 
Médicis  de  la  danse.  Mllc  Chameroy,  qui  s'était  fa  il 
remarquer  dans  Tvlèmaque,  obtint  de  Gardel  le  rôle 
de  Cupidon  dans  le  Jugement  de  Paris. 

La  ville  de  Paris  exerçait  un  pouvoir  absolu  sur 
l'Opéra.  Cliaumette,  procureur  syndic,  Leroux,  Hen- 
riot  et  Hébert,  membres  de  la  Commune,  étaient 
spécialemenl  chargés  de  la  surveillance  du  théâtre 
Ils  n'admettaient  aucune  [excuse,  et  portaient  sur  la 
liste  des  suspects  les  artistes  qui  refusaient  déjouer. 

Un  ténor  de  second  ordre,  Lefèvrk,  faisait  la  loi  à 
l'Opéra.  Il  enleva  leurs  rôles  à  Laine/.,  Rousseai  . 
Renaud,  Saint-Léon  et  Dillois,  en  les  menaçant  d'une 
dénonciation  et  de  la  guillotine.  Il  ne  réussit  qu'à 
être  siftlé  par  le  public. 

Hébert  rédigea  une  liste  de  vingt-deux  noms  de 
chanteurs  et  de  danseurs  destinés  à  la  guillotine,  et  il 
la  montrait  volontiers,  si  bien  que  le  danseur  comique 
Beaupré  réussit  à  la  lui  enlever. 

Les  massacres  de  septembre  n'arrêtèrent  pas  les 
représentations  dramatiques.  Le  Triomphe  de  la  Ré- 
publique de  M.-J.Chénier,  musique  de  Gossec, réussit 
pleinement,  le  27  janvier  179.'!.  La  Patrie  reconnais- 
sante de  Lebœuf  et  Candeille  fut  au  contraire  siftlé.' 
huit  jours  après. 

Le  6  mars  179:!,  le  Jugement  de  Paris,  de  Gardel, 
musique  de  Haydn,  Plbtel  et  Méhul,  avec  Auguste 
Vestris,  M11"  Saulnier,  Aubry,  Coulon,  Duchemin, 
Clotilde,  Delisle,  Chevigny,  l'ait  fureur.  Quant  aux 
anciens  opéras  du  répertoire,  ils  sont  tous  proscrits, 
sauf  ceux  de  Gluck,  «  comme  propres  à  blesser  les 
oreilles  et  les  yeux  des  républicains  qui  fréquentent 
maintenant  les  spectacles  ». 


Le  Mariage  de  Figaro  de  Mozart,  mal  traduit  par 
Notans,  n'est  point  compris  et  n'est  joué  que  cinq 

Après  la  défection  du  général  Dumouriez,  la  com- 
mune devint  plus  sévère  encore.  Le  Journal  des  spec- 
tacles indique  chaque  jour  le  nom  des  acteurs  et 
leurs  rôles,  et  on  impose  à  Francœur  et  Cellerier  le 
Siège  de  Thionville,  opéra  de  Louis  Jadin,  qui  avait 
ete  refuse  par  eux.  L'arrêté  qui  annonce  le  spectacle 
pour  le  2juinl793  est  curieux  : 

«  Considérant  que  depuis  longtemps  l'aristocratie 
s  est  réfugiée  chez  les  administrateurs  des  différents 
spectacles; 

«  Considérant  que  ces  messieurs  corrompent  l'es- 
prit public  par  les  pièces  qu'ils  représentent; 

«  Considérant  qu'ils  influent  dune  manière' funeste 
sur  la  Révolution; 

«Arrête  que  le  S%e  de  Thionville  sera  représenté 
gratis  et  uniquement  pour  l'amusement  des  sans- 
culottes,  qui,  jusqu'à  ce  moment,  ont  été  les  vrais 
défenseurs  de  la  liberté  et  les  soutiens  de  la  démo- 
cratie. » 

Malgré  l'obéissance  des  directeurs,  et  malgré  leur 
bonne  volonté  pour  l'aire  représenter  la  Fête  de  la 
Raison  ou  la  Rosière  républicaine,  de  Grétry,  et  l'Apo- 
théose de  Marat,  la  Commune  décida,  le  16  sep- 
tembre 1793,  que  Francœur  et  Cellerier  seraient  mis 
en  prison  comme  suspects. 

C'est  un  comité  choisi  parmi  les  artistes  du  théâtre 
les  plus  exaltés,  tels  que  Lays,  Rey,  Rochefort  et 
La  Suze,  qui  fut  délégué  par  la  Commune  pour  re- 
prendre l'Opéra  à  son  compte,  (in  joua  Fabius,  opéra 
de  .1.  Martin,  musique  deMÉREAux,  la  Montagne  ou  la 
Fondation  du  temple  de  la  Liberté  de  Milcent  et  Fonte- 
NELLB,Ie  26  octobre  1793;  Toute  la  Grèce  ouCe>quepeut 
la  liberté,  tableau  patriotique  de  Le  Moyne,  le  5  janvier 
1794; Horatius  Codés,  acle  lyrique  de  Médit,  18  février 
1794;  Toulon  soumis,  impromptu  républicain,  de 
Fabre  d'Olivet,  musique  par  Rochefort,  4  mars  1791  ; 
la  Réunion  du  10  Août  ou  l'Inauguration  de  la  Répu- 
blique française,  sans-culottide  en  S  actes,  de  Bou 
quier,  musique  de  Porta,  3  avril  1794. 

Le  7  août,  l'Opéras'établitdans  une  salle  construite 
sur  l'emplacement  de  l'hôtel  de  Louvois,  rue  de 
Richelieu,  et  prit  le  titre  de  Théâtre  des  Arl.s.  Enfin  le 
29  septembre  1794,  après  une  représentation  d'Iphi- 
génie  en  Tauride ,  on  chante  à  |l'Opéra  le  Chant  du 
départ  de  Méhul,  qui  est  donné  à  chaque  représen- 
tation. 

Dans  le  personnel  de  l'Opéra,  se  trouvaient,  à  la 
fin  de  la  l'erreur,  Perne  et  Villoleau,  qui  chantaient 
dans  les  chœurs,  et  comme  aide-machiniste  le  mar- 
quis de  Louvois. 

La  situation  administrative  de  l'Opéra  était  réglée 
par  un  décret  du  5  messidor  an    III,  qui   déclai  lil 
la  nation  propriétaire  du   théâtre,  moyennanl   une. 
indemnité  de  8  millions  d'assignats. 

Le  27  vendémiaire  an  III,  la  Convention  avait  ar- 
rêté, à  l'égard  de  l'Opéra,  les  dispositions  suivantes  : 
«  La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu  le 
rapport  de  ses  comités  d'Instruction  publique  et  îles 
Finances  réunis  : 

..  Considérant,  que  le  Théâtre  des  Arts  étant  plan'' 
sons  la  surveillance  et  sous  la  direction  spéciale  de 
la  République,  il  est  instant  d'établir  l'ordre  et  l'éco- 
nomie dans  cette    administration,  décrète   ce  qui 

«  Article  premier.  —  L'année  théâtrale  sera  comp- 
tée à  l'avenir  comme  l'année  civile. 


3711-'i 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


■•  i//.  i.  —  Les  comités  d Instruction  publique 
el  des  Finances  réunis  feront  un  règlement  sur  le 
nombre,  le  traitement  des  altistes  et  préposés,  leur 
discipline  intérieure,  l'administration  et  la  compta- 
bilité du  Théâtre  des  Arts. 

Iri  3.  —  Les  artistes  et  préposés  garantiront 
Une  recette  de  688000  livres..  S'il  existait  un  déficit 
à  cet  égard,  il  sérail  pris  au  marc  la  livre  sur  leur 
traitement. 

..  Ce  qui  excédera  en  outre  la  somme  ci-dessus 
tixée  sera  divisé  en  deux  parties  :  la  première  sera 
versée  au  Trésor  public;  la  deuxième  sera  répartie 
entre  les  artistes  et  préposés,  conformément  au  règle- 
ment qui  sera  fait  par  les  comités  réunis. 

((  Art.  i.  —  Les  deux  comités  réunis  présenteront 
un  projet  de  décret  sur  les  retraites  des  artistes  et 
préposés. 

\il.  5.  —  La  commission  d'Instruction  publique 
est  autorisée  à  ordonnancer,  sur  les  fonds  mis  à  sa 
disposition,  jusqu'à  concurrence  de  30  000  francs  par 
mois  pour  les  dépenses  variables,  et  d'une  somme  de 
100  0011  francs,  une  fois  payée,  pour  être  employée 
aux  changements  à  taire  dans  la  salle,  et  en  paye- 
ment des  parties  les  plus  pressées  de  l'arriéré. 

.  irt.  6.  —  Les  deux  comités  présenteront  pareil- 
lement leurs  vues  sur  la  liquidation  des  sommes  dues 
aux  propriétaires  et  créanciers  de  la  nouvelle  salle, 
et  sur  l'ancienne  administration  du  Théâtre  des  Arts.  » 

Le  système  adopté  par  la  Convention  ne  manquait 
point  d'une  certaine  originalité,  il  faut  en  convenir. 
Réglementer  l'administration  d'un  théâtre  sans 
laisser  aux  artistes  la  moindre  initiative;  obliger 
cependant  lesdits  artistes  à  garantir  le  montant  des 
frais  sur  leur  traitement,  tout  en  bornant,  d'autre 
part,  leur  répertoire  aux  pièces  jugées  patriotiques 
par  les  hommes  du  moment1  ;  et  créer,  en  définitive, 
une  si  l 'te  de  société  en  participation  à  commencer 
de  la  réalisation  des  profits,  dont  l'Etat  prélèverait 
moitié,  voilà  qui  est  sans  doute  ingénieux,  mais 
d'une  générosité   douteuse. 

Toujours  est-il  que,  par  un  arrêté  du  II  thermidor 
an  VI,  le  Conseil  des  Cinq-Cents  décidait  qu'un  mes- 
sage serai!  adressé  au  Directoire  pour  l'inviter  à  re- 
chercher les  causes  de  la  décadence  de  l'Opéra. 

Cependant,  l'heure  n'était  pas  enc proci 

cette  institution  nationale  devait  retrouver  tout  sqii 
éclat. 

Après  la  chute  de  Robespierre,  l'Opéra  recouvra  son 
ancienne  liberté,  et  les  artistes  qui  avaient  pris  une 
part  trop  active  à  la  Révolution  lurent  à  leur  tour 
molestés.  Les  nouveaux  directeurs,  Cellerier  et  Fon- 
taine, commencèrent  par  briser  les  bustes  de  Maiat 


depuis  ta  Rév 


et  de  Pelletier,  qui  avaient  fait  emprisonner  l'un  d'eux. 
Laïs,  le  ténor  sans-culotte,  ne  put  chanter  ÛEdtpe  à 
Colone,  devant  le  tumulte  effroyable  qui  l'accueillit. 
On  lui  demanda  de  chanter  le  Réveil  du  peuple,  mais 
il  en  fut  incapable,  et  ce  fut  Laine/,  qui  le  remplaça.' 

Pendant  plus  de  seize  mois,  les  ailleurs,  longtemps 
terrorisés  et  ne  sachant  comment  les  affaires  publi- 
ques tourneraient,  s'abstinrent  de  donner  des  pièces 
nouvelles.  C'est  GbÉIRY  qui,  le  premier,  revenant  à 
la  mythologie,  donna  Anacréon,  dans  lequel  on  re- 
marqua un  solo  de  clarinette  .joué  par  Lefèvre. 

Le  14  pluviôse  an  IV  (2  février  1797),  l'Opéra  chan- 
gea encore  de  titre  pour  s'appeler  Théâtre  de  la  Ré- 
publique et  des  Arts.  En  même  temps,  des  adminis- 
trateurs sont  nommés  :  MM.  La  Chabeaussière,  Ma- 
zade,  d'Avèze,  Caillot,  et  de  Parny.  Le  citoyen  Mir- 
beck  est  nommé  commissaire  du  ministre,  auprès  du 
théâtre  et  remplacé,  six  mois  après,  par  Francœuh, 
Denesle  et  Baco. 

La  salle  est  en  même  temps  restaurée,  embellie;, 
les  appointements  des  premiers  sujets  sont  portés  à 
12  000  francs. 

On  applaudit  Mlle  Chevalier  dans  le  rôle  d'Anti- 
gone,  le  26  décembre  1798,  Gaétan  Vestris  dans 
Aimetteet  Lubin,  ballet  de  MovERns.le  16  janvier  I  799; 
Carat,  Rode,  Frédéric  Duvernoy,  Ml|p  Henri  font  des 
recettes  colossales,  et,  le  i  juin  1799,  on  représente 
Adrien,  opéra  en  3  actes,  paroles  d'Hoffmann  et  mu- 
sique de  Méhil.  La  Taglioni  débutait  quelques  mois 
après,  le  16septembre,  dans  la  Caravane,  avec  Armand 
Vestris,  le  troisième  du  nom. 

L'ancien  directeur  de  Vismes  du  Valgay,  qui  s'ap- 
pelait maintenant  Devismes,  el  Bonet  .le  Treiches 
prirent  alors  la  direction  de  l'Opéra  avec  Cellerier. 
Ils  rétablirent  les  bals  masqués,  (îrent  représenter 
la  Dansomanie,  de  Gardel  et  Méiiul,  Praxitèle,  de 
Mllle  Devismes,  Sémiramis,  île  Catel,  les  Horaces,  de 
Porta,  le  18  vendémiaire  an IX  ,  au  coursde  la  repré- 
sentation desquels  Bonaparte,  premier  Consul,  lit 
arrêter  les  conjurés  qui  voulaient  le  faire  assassiner, 
au  moment  où  ils  allumaient  des  boites  phosphori- 
ques,  pour  détourner  l'attention  des  spectateurs. 

Le  3  nivôse  an  IX,  une  «  machine  infernale  »  fait 
explosion  rue  Saint-.Nieaise  sur  le  passage  de  Bona- 
parte, qui  se  rendait  aune  représentation  de  la  Créa- 
tion d'HAYDN. 

Devismes  ne  garda  pas  longtemps  la  direction  du 
théâtre,  il  fui  remplacé  par  B( t  de  Treiches,  au- 
quel succéda  Cellerier.  Puis,  le  l'aéàtre  de  la  Répu- 
blique el  des  Arts  est  mis  sous  la  surveillance  du 
préfet  du  palais.  Morel  en  devint  directeur,  el  Bonel 
de  Treiches,  administrateur  comptable. 

Le  théâtre  de  l'Opéra  devait  d'ailleurs  prendre,  le 
29  juin  1804,  le  titre  d'Académie  impériale  oh»  mu- 
sique. 


TECHNHWE.  ESTIIETKiUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3795 


LE  THÉÂTRE  DEPUIS  1806 


RETOUR   AU    RÉGIME   DU    PRIVILEGE 

Au  commencement  du  Premier  Km  pire,  les  divers 
théâtres  traversaient  une  crise  difficile,  et  l'fflrt  dra- 
matique avait  besoin  d'un  secours  qui  lui  fut  immé- 
diatement prêté.  Nous  sommes  assez  l'ennemi  du 
privilège  et  du  monopole  pour  nous  permettre  de 
déclarer  que  leur  rétablissement  par  Napoléon,  dans 
les  circonstances  exceptionnelles  où  il  eut  lieu,  fut 
accidentellement  un  bienfait.  Malheureusement,  par 
la  suite,  on  ne  revint  pas  assez  tôt  au  régime  de  la 
liberté,  lorsqu'on  eut  pu  le  faire  non  seulement  sans 
danger,  mais  encore  avec  prniit. 

Le  8  juin  1800  fut  rendu  un  décret  ainsi  on.  u  : 

Titre  I  :  Des  Théâtres  de  la  capitale. 

■  ■  \iikle  premier.  —  Aucun  théâtre  ne  pourra  s'éta- 
blir dans  la  capitale  sans  notre  autorisation  spéciale, 
sur  le  rapport  qui  nous  sera  fait  par  notre  Ministre 
de  l'Intérieur. 

<i  Art.  2.  —  Tout  entrepreneur  qui  voudra  obtenir 
celte  autorisation  sera  tenu  de  faire  la  déclaration 
prescrit*  par  la  loi,  et  de  justitier,  devant  notre 
Ministre  de  l'Intérieur,  des  moyens  qu'il  aura  pour 
assurer  l'exécution  de  ses  engagements. 

e<  Art.  3.  —  Le  Théâtre  de  l'Impératrice  sera 
placé  à  l'Odéon,  aussitôt  que  les  réparations  seront 
achevées. 

«  Les  entrepreneurs  du  Théâtre  Moulansier,  d'ici 
au  1er  janvier  1807,  établiront  leur  théâtre  dans  un 
autre  local. 

«  Art.  i.  —  Les  répertoires  de  l'Opéra,  de  la 
Comédie-Française  et  de  l'Opéra-Comique  seront 
ari'ètés  par  le  Ministre  de  l'Intérieur;  et  nul  autre 
théâtre  ne  pourra  représenter  à  Paris  des  pièces 
comprises  dans  les  répertoires  de  ces  trois  grands 
théâtres  sans  leur  autorisation,  et  sans  leur  payer  une 
rétribution  qui  sera  réglée  de  gré  à  gré,  et  avec 
l'autorisation  du  Ministre. 

«  Art.  S.  —  Le  Ministre  de  l'Intérieur  pourra  as- 
signer à  chaque  théâtre  un  genre  de  spectacle  dans 
lequel  il  sera  tenu  de  se  renfermer. 

<•  Art.  6'.  —  L'Opéra  pourra  seul  donner  des  ballets 
ayant  les  caractères  qui  sont  propres  à  ce  théâtre, 
et  qui  seront  déterminés  par  le  Ministre  de  l'Inté- 
rieur. 

«  Il  sera  le  seul  théâtre  qui  pourra  donner  des 
bals  masqués. 

Titre  II  .-  Théâtres  des  départements. 

«  Art.  7.  —  Dans  les  grandes  villes  de  l' Km  pire 
les  théâtres  seront  réduits  au  nombre  de  deux.  Dans 
les  autres  villes,  il  n'en  pourra  subsister  qu'un.  Tous 
devront  être  munis  de  l'autorisation  du  préfet,  qui 
rendra  compte  de  leur  situation  au  Ministre  de  l'In- 
térieur. 

«  Art.  S.  —  Aucune  troupe  ambulante  ne  pourra 


subsister  sans  l'autorisation  des  Ministres  de  l'Inté- 
rieur et  de  la  Police.  Le  Ministre  de  l'Intérieur  dési- 
gnera les  arrondissements  qui  leur  seront  destinés 
et  en  préviendra  les  préfets. 

«  Art.  9.  —  Dans  chaque  chef-lieu  de  département, 
le  théâtre  principal  jouira  seul  du  droit  de  donner 
des  bals  masqués. 


Dispositions  générales. 

•■  Ail.  /.;.  —  Tout  entrepreneur  qui  aura  fait  fail- 
lite ne  pourra  plus  rouvrir  de  théâtres. 

\ri.  /•').  —  Les  spectacles  de  curiosités  seront 
soumis  à  des  règlements  particuliers  et  ne  porte- 
ront plus  le  titre  de  théâtres.  » 

Comme  complément  aux  dispositions  de  ci 
un  arrêté  fut  pris  par  le  ministre  de  l'intérieur,   le 
•25  avril  1807. 

Les  théâtres  de  Paris  s'y  trouvaient  divises  en 
ijxindi  théâtres  et  théâtres  secondaires. 

Les  premiers,  qui  devaient  jouir  des  prérogatives 
indiquées  dans  l'article  i  du  décret,  étaient  : 

l°Le  Théâtre-Français  (Théâtre  de  S.  M.  l'Empe- 
reur). Son  répertoire  se  composait,  d'une  part,  de 
toutes  les  pièces  (tragédies,  comédies  et  drames) 
jouées  sur  l'ancien  théâtre  de  l'hôtel  de  Bourgogne, 
sur  celui  que  dirigeait  Molière,  et  sur  le  théâtre 
formé  de  la  réunion  de  ces  deux  établissements;  — 
d'autre  part,  «  des  comédies  jouées  sur  les  théâtres 
dits    Italiens,  jusqu'à    l'établissement  de   l'Opéra- 

C.oniique      . 

Le  Théâtre  de  l'Impératrice  était  considéré  comme 
une  annexe  du  Théâtre-Français,  pour  la  comédie 
seulement.  Son  répertoire  contenait  les  comédies 
et  drames  spécialement  composés  pour  ce  théâtre, 
et  les  comédies  jouées  sur  les  théâtres  dits  Italiens 
jusqu'à  l'établissement  de  l'Opéra-Comique,  ces  der- 
nières pièces  pouvant  être  représentées  concurrem- 
ment sur  ledit  Théâtre  de  l'Impératrice  et  sur  le 
Théâtre-Français. 

2°  Le  théâtre  de  l'Opéra  (Académie  impériale  de 
musique),  ayant  pour  répertoire  tous  les  ouvrages, 
tant  opéras  que  ballets,  parus  depuis  son  établis- 
sement «  en  1646  ».  11  pouvait  seul  représenter  les 
pièces  écrites  entièrement  en  musique,  et  les  ballets 
«  du  genre  noble  et  gracieux  »  : 

«  Tels  sont,  disait  l'arrêté,  tous  ceux  dont  les  sujets 
ont  été  puisés  dans  la  mythologie  et  dans  l'histoire, 
et  dont  les  principaux  personnages  sont  des  dieux, 
des  rois  ou  des  héros.  »  Il  pouvait  aussi  donner,  mais 
non  exclusivement  à  tout  autre  théâtre,  «  des  ballets 
représentant  des  scènes  champêtres,  ou  des  actions 
ordinaires  de  la  vie  ». 

3°  Le  Théâtre  de  l'Opéra-Comique  (Théâtre  de  S. 
M.  l'Empereuri,  «  spécialement  destiné  à  la  repré- 
sentation de  toute  espèce  de  comédies  ou  drames 
mêlés  de  couplets,  d'ariettes  et  de  morceaux  d'en- 
semble ».  —  «  Son  répertoire  est  composé,  spécifiait 
l'arrêté,  de  toutes  les  piècesjouées  sur  le  Théâtre  de 
l'Opéra-Comique,  avant  et  après  sa  réunion  à  la 


NCVCLOPÉDIE  HE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  1)11  CONSERVATOIRE 


Comédie-Italienne,  pourvu  que  le  dialogue  de  ces 
pièces  soit  coupé  par  du  chant.  » 

L'Opéra-BulFa  devait  être  considéré  comme  une 
annexe  du  précédent,  et  ne  pouvait  représenter  que 
des  pièces  écrites  en  italien. 

Les  théâtres  secondaires  étaient  : 
1°  Le  Théâtre  du  Vaudeville  :  son   répertoire    ne 
devait  contenir  que  «  de  petites  pièces  mêlées   de 
couplets,  sur  des  airs  connus,  et  des  parodies  »  ; 

2°  Le  Théâtre  des  Variétés,  boulevard  Montmar- 
tre' :  11  devait  représenter  «  de  petites  pièces  dans 
le  genre  grivois,  poissard  ou  villageois,  quelquefois 
mêlées  de  couplets  également  sur  des  airs  connus  »; 
3"  Le  Théâtre  de  la  Porte-Saint-Martin,  «  spéciale- 
ment destiné  au  genre  appelé  mélodrame,  aux  pièces 
à  grand  spectacle  ».  On  n'y  pouvait  employer,  pour 
les  morceaux  de  chant,  que  des  airs  connus,  comme 
dans  les  autres  théâtres  secondaires; 

4°  Le  Théâtre  de  la  Gaîté,  «  spécialement  destiné 
aux  pantomimes  de  tout  genre,  mais  sans  ballets; 
aux  arlequinades  et  autres  farces  dans  le  goût  de 
celles  données  autrefois  parNieolet  sur  ce  théâtre;  » 
3°  Le  théâtre  des  Variétés-Etrangères,  qui  ne  pou- 
vait jouer  que  des  pièces  traduites  des  théâtres 
étrangers.  Les  autres  théâtres  existant  alors  à  Paris 
étaient  considérés  comme  «  annexes  ou  doubles  des 
théâtres  secondaires  ».  Ils  étaient  tenus  de  choisir 
un  des  genres  appartenant  à  ceux-ci. 

L'arrêté  prenait  des  dispositions  tout  aussi  pré- 
cises en  ce  qui  concernait  les  théâtres  de  province. 
Conformément  aux  articles  7  et  8  du  décret  de  1800, 
il  désignait  les  villes  autorisées  à  avoir  deux  ou  un 
théâtres  permanents,  puis  formait  vingt-cinq  arron- 
dissements des  villes  qui  ne  pouvaient  avoir  de  spec. 
tacleque  pendant  une  partie  de  l'année,  et  qui  de- 
vaient être  parcourues  par  des  troupes  ambulantes. 
Les  entrepreneurs  postulant  un  arrondissement  ne 
pouvaient  obtenir  d'autorisation  que  pour  trois  an- 
nées. Ils  étaient  tenus,  avant  le  Ier  août,  et,  dans  les 
années  suivantes,  toujours  avant  la  même  époque, 
de  désigner  le  nombre  de  sujets  dont  ils  se  propo- 
saient de  composer  leur  troupe  et  d'indiquer  à 
quelle  époque  ils  se  rendraient  dans  telle  ou  telle 
ville,  puis  combien  de  temps  ils  s'engageaient  à  y 
séjourner. 

Les  troupes  ambulantes  étaient  admises  à  jouer, 
soit  le  répertoire  des  grands  théâtres,  soit  celui  des 
théâtres  secondaires  et  de  leurs  doubles.  Il  en  était 
de  même  pour  les  troupes  sédentaires,  dans  les  villes 
qui  ne  possédaient  qu'un  théâtre. 

Dans  les  villes  où  il  y  avait  deux  théâtres,  le  prin- 
cipal théâtre  jouissait  spécialement  du  droit  au 
répertoire  des  grands  théâtres;  il  pouvait,  en  outre, 

être  autorisé  par  le  préfet  à  jouer  quelques  | ;es 

des  théâtres  secondaires.  Quant  au  second  théâtre,  le 
répertoire  des  théâtres  secondaires  lui  était  spéciale- 
ment dévolu;  il  pouvait,  toutefois,  solliciter  du  préfel 
l'autorisation  de  représenter  des  pièces  des  grands 
répertoires,  et  celte  autorisation  cessait  d'être 
nécessaire  :  1°  en  cas  de  conventions  intervenues 
avec  les  auteurs;  2°  si  le  principal  théâtre  n'avait 
point  fait  usage  de  ses  prérogatives  dans  le  délai 
d'un  an,  à  dater  de  la  première  représentation  â 
Paris. 

Toute  concession  était  révocable  pour  inexécution 
des   engagements   pris  et  des  conditions  imposées. 

1.  En  exécution  de  l'article  3  du  décret  .le  1806,  le  théâtre  des 
Cité  et  était  venu  s'cl  iblir  sur  te 
pu  le  Jî  1 1 > ■  r •  1807. 


Les  contrevenants  se  rendaient  passibles,  en  outre, 
d'une  indemnité  dont  devait  bénéficier  la  caisse  des 
pauvres. 

A  peine  les  théâtres  avaient-ils  commencé  â  se 
plier  au  régime  du  décret  de  1806  et  de  l'arrêté  du 
25  avril  1807,  que  ceux  de  Paris  se  virent,  tout  d'un 
coup,  réduits  au  nombre  de  huit,  de  plus  de  trente 
qu'ils  étaient! 

En  effet,  un  décret  du  20  juillet  1807  disposa  : 


«  Art.  3.  —  Aucune  nouvelle  salle  de  spectacle 
ne  pourra  être  construite,  aucun  déplacement  d'une 
troupe,  d'une  salle  dans  une  autre,  ne  pourra  avoir 
lieu  dans  notre  bonne  ville  de  Paris,  sans  autorisa- 
tion donnée  par  nous,  sur  le  rapport  du  Ministre  de 
l'Intérieur. 

«  Art.  i.  —  Le  maximum  du  nombre  des  théâtres 
de  notre  bonne  ville  de  Paris  est  fixé  à  huit;  en  con- 
séquence, sont  seuls  autorisés  à  ouvrir-,  afficher  et 
représenter,  indépendamment  des  quatre  grands 
théâtres  mentionnés  en  l'article  l01'  du  règlement  de 
notre  Ministre  de  l'Intérieur,  en  date  du  25  avril 
dernier,  les  entrepreneurs  ou  administrateurs  des 
quatre  théâtres  suivants  : 

«  1°  Le  Théâtre  de  la  Gaité,  établi  en  1700,-  celui 
de  l'Ambigu-Comique,  établi  en  1772,  boulevard  du 
Temple,  lesquels  joueront  concurremment  des  pièces 
du  même  genre  désignées  aux  paragraphes  3  et  i  de 
l'article  3  du  règlement  de  notre  Ministre  de  l'Inté- 
rieur'2. 

i.  2°  Le  Théâtre  des  Variétés,  boulevard  Mont- 
martre, établi  en  1777;  et  le  Théâtre  du  Vaudeville, 
établi  en  1702,  lesquels joueronteoucurremment des 
pièces  du  même  genre,  désignées  aux  paragraphes  3 
et  4  du  règlement  de  notre  Ministre  de  l'Intérieur. 

«  Art.  4.  —  Tous  les  théâtres  non  autorisés  par 
l'article  précédent  seront  fermés  avant  le  la  août. 

u  En  conséquence,  on  ne  pourra  représenter  au- 
cune pièce  sur  d'autres  théâtres  dans  notre  bonne 
ville  de  Paris,  que  ceux  ci-dessus  désignés,  sous 
aucun  prétexte,  ni  y  admettre  le  public,  même  gra- 
tuitement; faire  aucune  affiche,  distribuer  aucun 
billet  imprimé  ou  à  la  main,  sons  les  peines  portées 
par  les  lois  et  règlements  de  police. 

«  Art.  6.  —  Le  règlement  susdaté,  fait  par  notre 
Ministre  de  l'Intérieur,  est  approuvé,  pour  être  exé- 
cuté dans  toutes  les  dispositions  auxquelles  il  n'est 
pas  dérogé  par  le  présent  décret.  » 

S'il  ne  peut  être  nié  que  l'extension  toujours  crois- 
sante du  nombre  des  théâtres  provoque  entre  eux 
une  lutte  de  concurrence,  dont  la  lin  véritable  est 
d'exploiter  la  curiosité  humaine,  bien  plutôt  que 
d'atteindre  à  la  perfection  morale  et  artistique,  il 
n'est  pas  douteux  que  le  décret  de  1807  exerça  uni' 
influence  heureuse  dans  sa  sphère  d'application.  Il 
n'est  pas  douteux  non  plus  que  la  délimitation  des 
genres  et  celle  des  répertoires  garantissait  la  pros- 
périté des  quelques  entreprises  échappées  au  trail 
de  plume  de  l'empereur,  alors  que  la  débâcle  et  la 
faillite,  jusque-là,  semblaient  le  dénouement  fatal 
de  tous  les  essais  dramatiques. 

Il  faut  avouer',  toutefois,  que  le  gouvernement 
témoignait  une  singulière  indifférence  à  l'égard  îles 
intérêts  privés.  Dans  un  délai  de  deux  semaines, 
vingt-cinq  théâtres  et  plus  devaient  licencier  leur 
personnel  et  fermer  leurs  guichets!  Aucune  indem- 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    37 


nité  n'était  allouée  aux  capitu listes;  les  acteurs  avec 
leurs  garde-robes,  les  auteur?  avec  leurs  manuscrits, 
et  un  personnel  considérable-,  allaient  devenir  la 
proie  du  hasard  et  de  la  misère...  L'n  acte  aussi  des- 
potique du  pouvoir,  envisagé  dans  cette  partie  de  ses 
conséquences,  demeure  vraiment  inqualifiable! 

Deux  scènes  seulement  reçurent  de  nouveaux  pri- 
vilèges sous  le  Premier  Empire  :  le  Cirque  Olympi- 
que, autorisé  le  28  décembre  1807  à  représenter  des 
mimodrames,  et  la  Porte-Saint-Martin,  rouverte  le 
l"  janvier  1810  sous  le  nom  de  Jeux  Gymniques. 

Ces  deux  autorisations  furent  données  sans  amener 
de  protestations  de  la  part  des  Comédiens  Français; 
mais  quand,  le  i"  juin  1820,  un  arrêté  ministériel 
autorisa  l'ouverture  du  Gymnase  dramatique,  ainsi 
que  nous  le  verrons,  le  Conseil  d'Etat  Tut  saisi  d'un 
mémoire  par  lequel  la  Comédie-Française  prolestait 
contre  la  violation  du  décrel  de  1807.  Il  s'agissail 
de  savoir  si  la  loi  de  1701  sur  la  liberté  des  [liéâlri  s 
avait  pu  être  abrogée  par  un  simple  décrel  donl  on 
suspectait  la  légalité.  Le  Conseil  d'Etat  considéra  que 
l'avènement  de  l'Empire  avait  abrogé,  par  son  seul 
l'ait,  la  loi  révolutionnaire. 

Un  décret  du  13  août  1811,  rendu  en  laveur  de 
l'Opéra,  replaça  ce  dernier  dans  la  situation  tout 
exceptionnelle  où  il  se  trouvait  pendant  les  derniè- 
res années  de  l'ancienne  monarchie.  En  voici  les 
dispositions  principales: 

u  Article  premier.  —  L'obligation  à  laquelle  étaient 
assujettis  tous  les  théâtres  du  second  ordre,  les  pe- 
tits théâtres,  tous  les  cabinets  de  curiosités,  machi- 
nes, figures,  animaux,  toutes  les  joutes  et  jeux,  et,  en 
général,  lous  les  spectacles  de  quelque  genre  qu'ils 
fussent,  tous  ceux  qui  donnaient  des  bals  masqués 
ou  des  concerts  dans  notre  bonne  ville  de  Paris,  de 
payer  une  redevance  à  notre  Académie  impériale  de 
Musique,  est  rétablie,  à  compter  du  1"  septembre 
prochain. 

«■  Les  panoramas,  cosmoramas,  Tivoli  et  autre- 
établissements  nouveaux,  y  sont  de  même  assujettis, 
ainsi  que  le  Cirque  Oh  mpique,  comme  théâtre  où 
l'on  joue  des  pantomimes. 

•<  Nos  Théâtres  Français,  de  l'Opéra-Comique  et  de 
l'Odéon  sont  exceptés  de  la  disposition  concernant 
les  théâtres. 

o  Art.  -'.  —  Ne  sonl  pas  compris  dans  l'obligation 
imposée  à  ceux  qui  donnent  des  bals,  tous  les  bals 
et  danses  qui  ont  lieu  hors  des  murs  d'enceinte,  ou 
dans  les  guinguettes  des  faubourgs,  même  dans 
l'enceinte  des  murs. 

.1//.  •')'.  — Cette  redevance  sera,  pour  les  bals, 
concerts,  t'êtes  champêtres  de  Tivoli  et  autres  du 
même  génie,  du  cinquième  brut  de  la  recette,  déduc- 
tion laite  du  droit  des  pauvres  ;  et,  pour  les  théâtres 
et  tous  les  autres  spectacles  ou  établissements,  du 
vingtième  de  la  recette,  sous  la  même  déduction. 

«  Art.  II.  —  Aucun  concert  ne  sera  donné  sans 
que  le  jour  ait  été  fixé  par  le  Surintendant  de  nos 
théâtres,  après  avoir  pi  is  l'avis  du  directeur  de  notre 
Académie  impériale  de  Musique. 

u  Art.  12-  —Toute  contravention  au  présent  décret 
en  ce  qui  louchera  l'ouverture  d'un  théâtre  ou  spec- 
tacle sans  déclaration  ou  permission,  sera  poursui- 
vie devant  nos  cours  et  tribunaux  par  voie  de  police 
correctionnelle,  et  punie  des  peines  portées  à  l'ar- 
ticle 410,  Code  pénal,  S  1er.  » 

Le  règlement  du  18  mai  181b,  qui  rappela  les  dis- 
positions de  l'arrêté  du  2o  avril  1807  et  précisa  cer- 


tains détails  de  l'organisation  des  troupes  déparle 
mentales,  édicta,  dans  son  article  21  : 

«  Les  directeurs  des  troupes  stalionnaires  dans 
les  lieux  où  ils  sont  établis  et  les  directeurs  des  trou- 
pes ambulantes  dans  les  lieux  où  ils  se  trouvent 
exercer,  eux  ou  leurs  régisseurs  régulièrement  re- 
connus, ont  le  droit  de  percevoir  un  cinquième  sur 
la  recette  brute  des  spectacles  de  curiosités,  de  quel- 
que genre  et  sous  quelque  dénomination  qu'ils  soient, 
défalcation  faite  toutefois  du  droit  des  pauvres.  » 

Celte  obligation,  pour  certains  spectacles  de  pro- 
vince, d'acquitler  une  redevance  au  profil  des  trou- 
pes privilégiées,  rappelée  par  l'ordonnance  de  1824 
sur  l'organisation  des  théâtres  dans  les  départe- 
ments, subsista  jusqu'en  1864.  Après  la  Révolution 
de  1848,  quelques  directeurs  cherchèrent  à  soutenir 
que  le  prélèvement  du  cinquième  avait  le  caractère 
d'un  impôt  nécessitant,  pour  être  légal,  l'interven- 
tion du  pouvoir  législatif.  La  jurisprudence  décida 
que  ce  n'était  là  qu'une  condition  essentielle  à  l'éta- 
blissement des  spectacles  de  curiosités,  et  qu'une 
lelle  perception  devait  être  maintenue,  sous  l'em- 
pire de  la  nouvelle  Constitution,  tant  qu'une  loi 
n'aurait  pas  abrogé  le  privilège  auquel  elle  se  ratta- 
chait (C.  Melz,  du  23  mai  1849;  D.  P.,  50,  2,  lot  . 

A  Paris,  au  contraire,  les  diverses  entreprises  qui 
payaient  tribut  à  l'Opéra  se  virent  affranchies  pat- 
une  ordonnance  du  24  août  1831. 

L'ordonnance  du  8  décembre  1824,  que  nous  venons 
■  le  mentionner,  remania  quelque  peu  l'organisation 
Mes  théâtres  île  province,  etclassa  les  troupesdépar- 
tementales  en  trois  catégories  :  comédiens  séden- 
taires, comédiens  d'arrondissement,  comédiens  ambu- 
lants. 

Ces  troupes  ne  pouvaient  se  former  que  sous  la 
conduite  de  directeurs  nommés  pour  trois  ans  par 
le  Ministre  de  l'Intérieur.  Enumération  était  faite 
des  villes  où  demeureraient  les  troupes  sédentaires  ; 
et  faculté  était  réservée  au  ministre  d'autoriser  la 
formation  de  troupes  semblables  dans  les  autres 
ailles  qui,  désirant  avoir  un  spectacle  permanent, 
assureraient  aux  directeurs  les  moyens  de  s'y  main- 
tenir en  leur  accordant  la  jouissance  gratuite  de  la 
salle  et,  au  besoin,  une  allocation  annuelle. 

Les  troupes  d'arrondissement  élaient  désormais 
autorisées  au  nombre  de  dix-huit.  Chaque  directeur 
devait,  en  recevant  son  brevet,  désigner  au  ministre 
el  aux  préfets  des  départemenls  compris  dans  son 
arrondissement  celles  des  villes  dont  il  se  chargeait 
d'exploiter  le  théâtre,  et  indiquer  les  époques  de  ses 
représentations.  Il  devait  visiter  lesdites  villes  au 
moins  une  fois  tous  les  six  mois,  et  y  donner  au 
moins  quinze  représentations  à  chaque  voyage. 

Les  troupes  ambulantes  devaient  exploiter  :  l°les 
théâtres  des  villes  qui  ne  faisaient  partie  d'aucun 
arrondissement;  2"  les  théâtres  des  villes  non  com- 
prises dans  la  désignation  imposée  aux  directeurs 
des  troupes  d'arrondissemenl  ;  '■'•■<  les  théâtres  des 
villes  dans  lesquelles  les  directeurs  îles  troupes  d'ar- 
rondissement auraient  été  plus  île  -i\  mois  sans  don- 
ner quinze  représentations,  bien  que  ces  villes  eus- 
sent été  comprises  dans  la  désignation  susmen- 
tionnée. Les  troupes  ambulantes  pouvaient  encore, 
sur  la  demande  des  autorités,  remplacer  les  trou- 
pes d'arrondissement,  après  que  celles-ci  auraient 
donné  les  représentations  fixées  par  leur  itinéraire. 

La  loi  du  9  septembre  I8:i:i,  survenant  ensuite, 
disposa,  dans  son  article  21  :  «  Il  ne  pourra  être  éta- 
bli soit  à  Paris,  soit  dans  les   déparlements,   aucun 


ENCYCLOPÉDIE  HE  LA  MUSlnl'E  ET  D1C I IWfNAttUt  UV  CuMàEKVATtMÊUi 


sans  l'autorisation  du  Ministre  de  rinténwr  îi  Parts, 
.•l  des  préfets  dans  Fes  départements. 

«  Toute  contravention  au  préserti  arfiele  sera  punie 
parles  tribunaux  correctionnels  d'un  emprrsonneTneial 
d'un  mois  à  un  an,  et  (Tune  amende  de  4000  à  5000 
francs...  » 

Cette  loi  ayant  été  abrogée  purement  et  simple- 
ment par  un  décret  du  gouvernement  provisoire  du 
6  mars  1848,  la  législation  antérieure  se  retrouva 
en  vigueur. 

Ainsi  donc,  en  vertu  des  décrets  des  8  juin  1800 
et  29  juillet  1807,  aucune  exploitation  théâtrale  ne 
pouvait  être  ouverte  à  Paris  sans  l'autorisation  du 
Ministre  de  l'Intérieur. 

Depuis  l'ordonnance  de  1824,  le  Ministre  de  l'In- 
térieur nommait  les  directeurs  des  théâtres  dépar- 
tementaux. 

C'est  assurément  par  un  abus  d'interprétation  des 
textes  que  le  gouvernement  s'arrogeait  le  droit  de 
nommer  les  directeurs  de  tous  les  théâtres  de  Paris, 
grands  et  petits.  Les  entreprises,  une  fois  autorisées, 
auraient  dû  pouvoir  choisir  leurs  directeurs.  Signa- 
lons seulement,  qu'en  fait  il  n'en  était  rien. 

Au  surplus,  un  décret  des  23-30  juin  1834  plaça 
dans  les  attributions  du  Ministre  d'Etat  et  de  la 
Maison  impériale  les  services  des  théâtres  de  Paris 
non  subventionnés  et  des  théâtres  des  départements. 
C'est  à  lui  désormais  qu'échut  le  droit  d'autori- 
sation. 

D'après  la  jurisprudence  du  Conseil  d'Etat,  les  ar- 
rêtés ministériels  portant  autorisation  d'exploiter  un 
théâtre  ou  révocation  de  celte  autorisation  étaient 
des  actes  de  pure  administration  dont  l'annulation  ne 
pouvait  être  demandée  par  la  voie  contentieuse  (Arr. 
Cons.  d'Et.  du  3  mars  1852;  D.  P.,  52,  3,  31). 

Depuis  le  Premier  Empire,  un  certain  nombre 
d'entreprises  avaient  obtenu  de  nouveaux  privilèges 
et  avaient  pu  ouvrir  des  théâtres  à  Paris.  Le  Gymnase 
dramatique,  autorisé  par  un  arrêté  ministériel  du 
1er  février  1820,  fut  inauguré  sur  le  boulevard,  le 
23  décembre  de  la  même  année.  Le  Panorama  dra- 
matique fit  une  courte  apparition  au  boulevard  du 
Temple,  du  14  avril  1821  au  21  juillet  1823.  Le 
théâtre  des  Nouveautés,  élevé  sur  la  place  de  la 
Bourse,  y  demeura  du  1er  mars  1827  jusqu'en  1832. 
Les  Folies-Dramatiques  et  le  théâtre  du  Palais-Royal 
s'ouvrirent,  les  premières,  le  22  janvier,  le  second, 
le  0  juin  1831,  etc.,  etc. 

Aux  termes  de  l'article  15du  décret  du  8  juin  1806, 
les  spectacles  de  curiosités  devaient  être  soumis  à 
des  règlements  particuliers  et  ne  pouvaient  plus 
porter  le  titre  de  théâtres. 

Ils  étaient  autorisés  à  Paris  par  le  préfet  de  police, 
et,  dans  les  communes,  par  les  maires  '  en  vertu  de 
leurs  pouvoirs  respectifs  de  police. 

Quant  aux  cafés-concerts,  un  arrêté  du  Ministre  d'' 
l'Intérieur  du  12  novembre  1807  déclarait  :  «  ...  Les 
propriétaires  de  cafés,  guinguettes  et  autres  lieux 


publics,  dans  lesquels  on  était  eu  usage  de  faire 
chanter  un  ou  deux  personnages  dans  un  orchestre, 
et  d'introduire  un  mime  qui  jouait,  seul  ou  avec  un 
interlocuteur  de  plus,  de  petites  scènes  séparées, 
sont  autorisés  à  continuer  de  donner  ce  genre  de 
spectacle,  qui  ne  peut  être,  d'ailleurs,  annoncé  sur 
aucune  affiche,  pas  même  dans  l'intérieur  de  l'éta- 
blissement. D 

Une  ordonnance  du  préfet  de  police  du  17  no- 
vembre 1849  interdit  aux  propriétaires  de  cales,  esta- 
minets et  autres  établissements  publics  situés  dans 
son  ressort  d'avoir  des  chanteurs,  bateleurs  et  mu- 
siciens, et  de  faire  exécuter  des  chants,  déclama- 
lions,  parades  et  concerts,  sans  son  autorisation. 

Les  cafés-concerts  étaient,  d'ailleurs,  soumis  à  la 
législation  régissant  les  débits  de  boissons.  Le  décret 
du  29  décembre  1851  formula  que  les  cafés,  cabarets, 
etc.,  ne  pouvaient  être  ouverts  qu'avec  l'autorisa- 
tion du  préfet  de  police  à  Paris,  et  du  préfet  dans 
les  départements. 

POLICE 

Dans  les  départements,  la  police  des  spectacles 
continuait  d'appartenir  aux  municipalités.  La  loi  du 
18  juillet  1837,  dans  ses  articles  9  et  suivants,  renou- 
vela les  prescriptions  antérieures  en  faveur  des 
maires  et,  à  leur  défaut,  des  adjoints.  La  même  loi 
disposait,  en  outre,  que  les  préfets,  après  avoir  re.- 
quis  en  vain  les  maires  de  prendre  telles  mesures 
nécessaires,  pourraient  procéder  d'office  par  eux- 
mêmes  ou  par  délégués  spéciaux. 

Aux  termes  de  l'article  19  de  l'arrêté  du  25  avril 
1807,  les  maires  avaient  même  mission  de  statuer 
provisoirement  sur  toutes  contestations,  soit  enlre 
directeurs  et  acteurs,  soit  entre  directeurs  et  auteurs, 
qui  tendraient  à  interrompre  le  cours  ordinaire  des 
représentations;  leurs  décisions  était  exécutoires 
nonobstant  le  recours  devant  les  juges  du  fond. 

A  Paris,  la  surveillance  des  théâtres  restait  confiée 
au  préfet  de  police.  La  loi  des  10-15  juin  1853,  à 
l'exemple  de  l'arrêté  du  3  brumaire  an  I\,  étendit 
son  autorité  sur  tout  le  déparlement  de  la  Seine  et 
sur  les  communes  de  Saint-Cloud,  Meudon  et  Sèvres. 

Parmi  les  divers  documents  administratifs  éma- 
nant de  la  préfecture  de  police  en  ce  qui  louche  les 
spectacles,  citons  l'ordonnance  du  31  janvier  1829 
sur  les  théâtres  non  autorisés;  l'ordonnance  du  9  juin 
de  lamême  année  sur  les  mesures  de  sûreté  publique 
et  les  dispositions  à  observer  dans  la  construction 
des  salles;  les  ordonnances  du  15  janvier  1834  el 
du  3  octobre  1837  concernant  l'heure  de  clôture  des 
représentations;  l'ordonnance  du  15  mai  1838  pres- 
crivant l'établissement  de  décorations  en  toiles  et 
papiers  ininflammables;  l'arrêté  du  10  décembre  18*1 
fixant  le  montant  des  rétributions  exigibles,  pour  le 
dépôt  des  cannes  et  autres  objets  dans  les  théâtres 
et  les  salles  de  bals  et  concerts;  l'ordonnance  du 
30  mars  1844  sur  la  police  intérieure  des  théâtres; 
celle  du  8  mars  1832  concernant  les  affiches  des 
théâtres,  spectacles,  concerts  et  bals;  celle  du  16  mars 
1  s:;t  sur  la  police  intérieure  el  extérieure  des  théâtres. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    37; 


LE  THÉÂTRE  DEPUIS  1864 


OUVERTURE   DES   SALLES   DE   SPECTACLE 

Le  décret  du  6  janvier  1864,  actuellement  encore 
en  vigueur,  lequel  substitua  au  régime  du  privilège 
une  législation  qui  faisait  l'objet  de  vœux  unanimes, 
«n  proclamant  la  liberté  de  l'industrie  théâtrale,  est 
ainsi  conçu  : 

i  Article  premier.  —  Ton!  individu  peut  faire  cons- 
truire et  exploiter  un  théâtre,  à  la  charge  de  faire 
une  déclaration  au  Ministère  dp  notre  Maison  des 
Beaux-Arts,  et  à  la  prélecture  de  police  pour  Paris; 
à  la  préfecture,  dans  les  départements.  Les  théâtres 
qui  paraîtront  plus  particulièrement  dignes  d'en- 
couragement pourront  être  subventionnés,  soit  par 
'Etat,  soit  par  les  communes. 

«  Art.  2.  —  Les  entrepreneurs  de  théâtres  devront 
se  conformer  aux  ordonnances,  décrets  et  règlements 
pour  tout  ce  qui  concerne  l'ordre,  la  sécurité  et  la 
salubrité  publies. 


«  Art.  i.  —  Les  ouvrages  dramatiques  de  lous  les 
genres,  y  compris  les  pièces  entrées  dans  le  domaine 
public,  pourront  être  représentés  sur  Ions  les  théâtres. 

i<  Art.  .«.  —  Les  théâtres  d'acteurs-enfants  conti- 
nuenl  d'être  interdits. 

i'  Art.  6.  —  Les  spectacles  de  curiosités,  de  marion- 
nettes, les  cafés,  dits  eaffs-chotitnnls,  cafés-concerts, 
et  autres  établissements  du  même  genre,  restent 
soumis  aux  règlements  présentement  en  vigueur. 
Toutefois,  ces  divers  établissements  seront  désor- 
mais affranchis  de  la  redevance  établie  par  l'article  1 1 
de  l'ordonnance  du  8  décembre  1824  en  faveur  des 
directeurs  des  départements,  et  ils  n'auront  à  sup- 
porter aucun  prélèvement  autre  que  la  redevance  au 
profit  des  pauvres  ou  des  hospices. 

«  Art.  7.  —  Les  directeurs  actuels  des  théâtres, 
autres  que  les  théâtres  subventionnés,  sont  et  demeu- 
rent affranchis  envers  l'Administration  de  toutes  les 
clauses  et  conditions  de  leurs  cahiers  des  charges, 
en  tant  qu'elles  sont,  contraires  au  présent  décret.  » 

A  présent,  par  conséquent,  chacun  est  libre  d'ou- 
vrir un  théâtre  et  n'a  plus,  comme  jadis,  à  solliciter 
d'autorisation,  tlne  simple  déclaration  suffit. 

De  même,  l'obligation  pour  tel  ou  tel  directeur 
de  se  renfermer  dans  les  limites  d'un  genre  parti- 
culier de  spectacle  a  disparu,  et  l'Art,  sous  ses 
diverses  formes  dramatiques  et  lyriques,  ne  peut 
plus  faire  l'objet  d'un  domaine  réservé. 

L'honneur  d'une  semblable  réforme  dans  nos  lois 
n'est  pas  à  discuter,  et  son  opportunité  ne  saurait 
être  niée,  en  dépit  de  quelques  catastrophes  finan- 
cières qui  la  suivirent  de  près,  et  dont  on  rejeta  sur 
elle  l'origine.  La  possibilité  de  la  concurrence  tentera 
toujours  des  imprudents,  mais  la  liberté  de  l'indus- 
trie est  chose  qui  plane  au-dessus  des  dissertations, 
et  l'expérience  prouve  invariablement  qu'on  pouvait 
espérer  ses  fruits. 


LA   POLICE   DES  SALLES  DE  SPECTACLE 

A  Paris,  la  police  des  spectacles  continue  d'appar- 
tenir au  préfet  de  police,  en  vertu  de  la  loi  du  28  plu- 
viôse et  de  l'arrêté  du  12  messidor  an  VIII.  Rappe- 
lons que  les  pouvoirs  de  ce  fonctionnaire,  selon  les 
dispositions  de  l'arrêté  du  3  brumaire  an  IX  et  de 
la  loi  des  10-15  juin  I8.J3,  s'étendent  sur  tout  le  dé- 
partement de  la  Seine  et  les  communes  de  Saint- 
Clond,  Meudon  et  Sèvres. 

Dans  les  départements,  les  même  attributions  sont 
toujours  exercées  par  les  maires,  sous  la  surveil- 
lance de  l'administration  supérieure  (art.  01  et  S"7  de 
la  loi  du  5  avril  1884), 

L'article  5  de  la  loi  du  7  décembre  1871  prescrit 
spécialement  aux  maires  d'interdire  toutes  représen- 
tations aux  individus  pratiquant  les  professions  d'acro- 
bates, saltimbanques,  charlatans,  montreurs  d'ani- 
maux ou  directeurs  de  cirque,  lesquels  seraient  dans 
l'impossibilté  de  justilier,  par  des  extraits  d'actes  de 
naissance,  que  les  enfants  employés  par  eux  à  des 
tours  de  force  périlleux  ou  à  des  exercices  de  dislo- 
cation ont  plus  de  douze  ans,  s'ils  en  sont  les  père 
ou  mère,  plus  de  seize  ans  dans  le  cas  contraire;  et, 
s'ils  ne  peuvent  justifier  de  l'identité  de  ces  infants 
par  la  production  de  livrets  ou  de  passeports,  faute 
de  quoi  avis  immédiat  devra  être  donné  au  Parquet. 
L'article  2  du  décret  du  6  janvier  1801  déclarait  : 
ci  Continueront  d'être  exécutées  les  lois  existantes 
sur  la  police  et  la  fermeture  des  théâtres.  » 

Sans  doute,  l'ouverture  des  salles  de  spectacle 
est  libre,  mais  encore  faut-il  que  les  entrepreneurs 
se  conforment  aux  mesures  prescrites  par  l'Adminis- 
tration en  vue  de  la  sécurité  publique,  du  maintien 
du  bon  ordre  et  de  la  salubrité. 

Le  préfet  de  police  et  les  maires  peuvent  donc  ar- 
rêter toutes  les  dispositions  qu'ils  jugent  convenables 
en  ce  qui  concerne  la  solidité  des  édifices,  les  pré- 
cautions à  prendre  contre  les  dangers  d'incendie,  la 
tranquillité  des  représentations,  les  heures  d'ouver- 
ture et  de  clôture  des  salles,  la  libre  circulation  aux 
bords  de  celles-ci,  etc.  Leur  droit  absolu  est  d'in- 
terdire l'ouverture  d'un  théâtre,  si  sa  construction 
est  reconnue  vicieuse  et  contraire  aux  règlements  en 
vigueur;  comme  aussi  d'en  ordonner  la  fermeture  en 
cas  d'inobservation  de  leurs  divers  arrêtés. 
Pour  assurer  la  tranquillité  des  représentations, 
s  peuvent,  par  des  dispositions  particulières  desdits 
arrêtés,  enjoindre  aux  spectateurs  de  garder  le  silence 
pendant  tout  le  temps  que  la  toile  sera  levée,  de  ne 
point  troubler  le  spectacle  par  des  sifflets  et  mani- 
festations quelconques.  Il  faut  toutefois  reconnaître 
que  l'usage  immémorial  des  applaudissements  et 
des  sifflets  a  acquis  lui-même  une  sorte  d'autorité 
dont  il  faut  tenir  compte.  La  jurisprudence  estime 
sagement  que  l'expression  du  sentiment  public  ne 
constitue  point  une  contravention  au  regard  de  textes 
semblables,  lorsqu'elle  n'excède  pas  une  juste  mesure 
et  ne  dégénère  pas  en  désordre  (Cass.  du  6  juin  188'i; 


3M1IP 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Gaz.  du  Pal.,  86,   I  ;  Suppl.,  17;  —  Cass.  du  16  dé- 
cembre 1887;  D.  P.,  88,  1,  287). 

Jugé  que  l'arrêté  fixant  l'heure  à  laquelle  les  spéc- 
iales doivent  être  terminés  est  légal  et  obligatoire, 
et  que  la  contravention  ne  saurait  être  excusée  que 
par  empêchement  de  force  majeure  (Cass.  du  6  juin 
1856;  D.  P.,  56,  1,  310). 


LA  CENSURE 

Lors  du  retour  des  Bourbons,  on  essaya  d'invo- 
quer l'article  8  de  la  Charte  de  1814,  pour  soutenir 
que  la  censure  dramatique  se  trouvait  abolie.  Le 
gouvernement  n'adopta  pas,  d'ailleurs,  cette  manière 
de  voir  qui  n'avait  que  le  faible  mérite  de  reposer 
sur  un  semblant  d'équivoque.  L'article  12  de  l'or- 
donnance du  1  o  mai  1815  exigeait  que  tout  directeur 
de  troupe  stationnaire  ou  ambulante  des  départe- 
ments soumit,  chaque  année,  sou  répertoire  général 
au  Ministre  de  l'Intérieur,  et  défendait  qu'aucune 
pièce  fût  portée  par  un  directeur  sur  son  répertoire 
sans  l'autorisation  du  Ministre  de  la  Police.  L'article  8 
de  l'ordonnance  des  8-11  décembre  1 8 2 i  déclarait 
que  les  pièces  nouvelles  et  celles  qui  étaient  repré- 
sentées à  Paris  ne  pourraient  être  jouées  dans  les 
départements  que  d'après  manuscrit  ou  exemplaire 
visé  au  ministère  de  l'Intérieur. 

Les  mêmes  prétentions  furent  mises  en  avant  sous 
le  Gouvernement  de  Juillet,  après  que  l'article  7  de 
la  Charte  de  1830,  proclamant  aussi  la  liberté  de 
publier  et  d'imprimer,  eut  déclaré  que  la  censure 
ne  pourrait  jamais  être  rétablie.  Ou  alléguait  qu'au- 
cune distinction  n'était  faite  entre  la  censure  dra- 
matique el  la  censure  littéraire. 

La  loi  de  1835,  de  manière  qu'aucun  doute  ne 
demeurât  désormais  possible,  imposa  en  termes 
exprès  la  nécessité  de  l'autorisation  préalable,  et  les 
peines  lixées  pour  le  cas  de  contraventions  témoi- 
gnaient d'une  assez  grande  ligueur,  inspirée  par  la 
témérité  des  théâtres  d'alors  :  emprisonnement  d'un 
mois  à  un  an  et  amende  de  1000  à  5  000  francs, 
sans  préjudice  des  poursuites  auxquelles  pourraient 
donner  lieu  les  pièces  représentées.  Les  représenta- 
tions d'une  pièce  pouvaient,  en  outre,  être  suspen- 
dues, et  tout  théâtre  fermé  pour  cause  d'ordre 
public. 

En  1848,  un  décret  du  Gouvernement  provisoire, 
du  6  mars,  vint  arroger  la  loi  de  1835. 

Au  début  de  cette  ère  nouvelle,  on  acclama  la 
République  sur  toutes  les  scènes  parisiennes,  et  l'on 
abîma  le  régime  qui  venait  de  disparaître.  Cela  était 
dans  les  traditions  théâtrales,  et  sans  aucun  rapport 
avec  la  suppression  de  l'examen  préalable,  bien  en- 
tendu. Mais  la  réaction,  ensuite,  sut  saisir  l'occasion 
d'user  de  la  liberté.  Les  revues  de  fin  d'année,  les 
vaudevilles  s'émaillèrent  des  plaisanteries  les  plus 
agressives  contre  les  institutions  récentes  et  leur 
fonctionnement,  des  épigrammes  les  plus  hardies  sur 
les  hommes  du  jour,  en  même  temps  que  les  cou- 
plets tournaient  en  dérision  toutes  les  théories  de 
l'époque.  Le  gouvernement  s'était  déjà  ému  du 
succès  de  Louis  XVIetMariè-  Antoinette,  à  l'Ambigu. 
Il  lit  interrompre  les  représentations  de  /(.<»!>■  â  la 
Porte-Saint-Martin,  la  pièce  provoquant  des  mani- 
festations trop  peu  équivoques  à  l'égard  de  l'expé- 
dition. Si  l'on  joint  à  cela  que  la  plupart  des  auteurs 
et  des  critiques,  qui  avaient  été  les  premiers  à 
réclamer  la  liberté  absolue,  s'indignaient  à  présent 


contre  la  licence,  contre  les  exhibitions  scandaleuses 
envahissant  tous  les  spectacles,  on  ne  saurait  s'é- 
tonner que  la  censure  ait  été  bientôt  rétablie. 

Le  30  juillet  1850,  l'Assemblée  nalionale  adopta 
d'urgence  la  loi  dont  la  leneur  suit  : 

«  Article  premier.  —  Jusqu'à  ce  qu'une  loi  géné- 
rale, qui  devra  être  présentée  dans  le  délai  d'une 
année,  ait  définitivement  slatué  sur  la  police  des 
théâtres,  aucun  ouvrage  dramatique  ne  pourra  être 
représenté  sans  l'autorisation  préalable  du  Minisire 
de  l'intérieur,  à  Paris,  et  du  préfel  dans  les  dépar- 
tements. 

«  Cette  autorisation  pourra  toujours  être  retirée 
pour  des  motifs  d'ordre  public. 

«  Art.  2.  —  Toute  contravention  aux  dispositions 
qui  précèdent  est  punie,  par  les  tribunaux  correc- 
tionnels, d'une  amende  de  cent  francs  à  mille  francs, 
sans  préjudice  des  poursuiles  auxquelles  pourraient 
donner  lieu  les  pièces  représentées.  » 

Cette  loi,  purement  provisoire,  fut  prorogée,  par 
celle  du  30  juillet  1851,  jusqu'au  31  décembre  1852. 

Enfin,  le  30  décembre  185J,  fut  rendu  un  décret 
ainsi  conçu  : 

a  Napoléon,  par  la  grâce  de  Dieu  et  la  volonté 
nationale,  Empereur  des  français,  à  tous  présents 
et  à  venir.  Salut. 

«  Sur  le  rapport  de  notre  Ministre  secrétaire  d'E- 
tat au  département  de  l'Intérieur,  de  l'Agriculture  et 
du  Commerce; 

«  Vu  le  décret  du  8  juin  1806,  les  lois  des  30  juil- 
let 1850  et  30  juillet  1851  ; 

«  Vu  l'article  6  de  la  Constitution; 

«  Considérant  que  l'ordre  public  est  intéressé  à  ce 
que  les  ouvrages  dramatiques  ne  puissent  être  re- 
présentés sans  l'autorisation  préalable  .du  Gouver- 
nement; 

•<  Avons  décrété  et  décrétons  ce  qui  suit  : 

»  Article  premier.  —  Les  ouvrages  dramatiques  con- 
tinueront à  èlre  soumis,  avant  leur  représentation, 
à  l'autorisaloin  de  notre  Ministre  de  l'Intérieur,  à 
Paris,  et  (des  préfets  dans  les  départements. 

«  An.  2.  —  Celle  autorisation  pourra  toujours  être 
relirée  pour  des  motifs  d'ordre  public. 

n  Art.  3.  —  .Notre  Ministre  secrétaire  d'Etal  au  dé- 
parlement de  l'Intérieur;  de  l'Agriculture  et  du 
Commerce  est  chargé  de  l'exécution  du  présentdécret. 

(,  Fail  au  palais  .h'-  Tuileries,  le  30  décembre  1858. 
«  Signé  :  Napoléon 
Par  l'empereur  : 
«  Le  Ministre  secrétaire  d'Etat 
•  m  département  de  VIntériew  .  de  /'  igi  i>  ulture 
•  i  iln  Commera  . 
Signé  :  F.  de  Persigny.  » 


Notons  que,  par  décret  des  23-30  juin  18:.i,  la 
censure  fut  distraite  des  attributions  du  Ministre  de 
l'Intérieur,  pour  être  placée  dans  celles  du  Ministre 
de  la  Maison  Impériale;  el  reproduisons  l'article  3 
du  fameux  décret  du  d  janvier  1864  : 

«  Toute  œuvre  dramatique,  avant  d'élre  représen- 
tée, devra,  aux  termes  du  décret  du  30  décembre 
1852,  être  examinée  et  autorisée  par  le  Ministre  de 
notre  Maison  el  des  Beaux-Arts,  pour  les  théâtres  de 
Paris;  par  les  préfets,  pour  les  théâtres  des  départe- 
ments. Cette  autorisation  pourra  toujours  èlre  retirée 
pour  des  motifs  d'ordre  public. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBYENTIONNÉS    3801 


Un  décret  du  gouvernement  de  la  Défense  Natio- 
nale, du  30  septembre  1870,  supprima  la  commission 
d'examen  des  ouvrages  dramatiques.  En  1871,  toute- 
fois, au  retour  de  Versailles,  le  gouverneur  militaire 
de  Parisjexerra  la  censure  en  vertu  de  l'état  de  siège. 
Au  surplus,  la  commission  d'examen  fut  rétablie  par 
un  décret  du  1er  février  1874.  Quelques-uns  ont 
cherché  à  soulever,  à  ce  sujet,  une  question  de  léga- 
lité, mais  il  suffit  de  leur  faire  remarquer  que  l'As- 
semblée Nationale,  par  une  loi  du  24  juin  1874, 
ouvrit  au  Ministre  de  l'Instruction  publique,  des 
Cultes  et  des  Beaux-Arts  le  crédit  qu'il  sollicitait  à 
raison  de  celte  mesure.  Ladite  Assemblée  donna 
donc  son  approbation  pleine  et  entière. 

L'autorisation  préalable  est  nécessaire  pour  tout 
ce  qui  peut  être  dit,  chanté  ou  mimé,  en  un  mot 
pour  tout  ce  qui  peut  être  «  produit  »  sur  la  scène. 

A  Paris,  l'examen  de  tout  ouvrage  ancien  ou  nou- 
veau, avant  sa  représentation,  est  confié  à  une  com- 
mission dépendant  de  la  Direction  des  Beaux-Arts. 
Le  ministre,  juge  en  dernier  ressort,  est  naturelle- 
ment libre  de  ratifier  ou  de  rejeter  les  conclusions  de 
cette  commission. 

Un  certain  nombre  île  circulaires  ministérielles, 
adressées  aux  directeurs  de  théâtre,  leur  ont  indiqué 
les  règles  auxquelles  ils  devaient  se  soumettre  dans 
leurs  rapports  avec  la  commission.  Nous  croyons 
utile,  en  citant  celles  des  3  aoûl  1850,  2i-  avril  1858, 
16  et  30  décembre  1861,  28  février  1868,  de  repro- 
duire celle  du  10  février  187'.»  qui  rappelle  et  résume 
leurs  dispositions. 

Circulaire  aux  directeurs  des  théâtres  de  Paris 
sur  l'inspection  des  théâtres. 


«  Monsieur  le  Directeur, 

«  J'ai  l'honneur  de  vous  faire  savoir  que,  par  un 
arrêté  ministériel  en  date  du  15  février  courant,  l'ins- 
pection des  théâtres  vient  d'être  réorganisée. 

«  Je  vous  invite  à  prendre  les  mesures  nécessaires 
pour  que  les  fonctionnaires  qui  la  composent  soient 
admis  dans  le  théâtre  que  vous  dirigez,  de  manière 
à  ce  qu'ils  puissent  s'acquitter,  sans  aucune  difficulté, 
de  la  mission  qui  leur  est  confiée. 

«  Je  profite  de  cette  circonstance,  Monsieur  le  Di- 
recteur, pour  vous  rappeler  les  principales  disposi- 
tions réglementaires  auxquelles  les  théâtres  de  Paris 
sont  soumis,  dans  leurs  rapports  avec  l'Administra- 
tion, par  les  lois,  décrets  et  arrêtés  qui  règlenl  la 
matière. 

•i  Toute  œuvre  dramatique,  avant  d'être  représen- 
tée, doit  être  autorisée  par  l'Administration,  et  cette 
autorisation  peut  toujours  être  retirée  pour  un  motif 
d'ordre  public. 

o  Pour  obtenir  l'autorisation  de  faire  représenter 
un  onvrai;i'  dramatique  ancien  et  nouveau,  vous 
devrez  déposer  au  bureau  des  théâtres,  3,  rue  de 
Valois  (Palais-Royal),  quinze  jours  au  moins  avant 
la  représentation  projetée,  deux  exemplaires  ma- 
nuscrits, parfaitement  lisibles,  ou  deux  imprimés  de 
l'ouvrage,  quel  qu'il  soit,  pièce,  scène  détachée,  can- 
tate, romance,  chanson  ou  chansonnette.  Ce  dépôt 
sera  constaté  par  un  numéro  d'ordre  inscrit  sur  l'ou- 
vrage et  sur  un  registre  ouvert  à  cet  effet,  ainsi  que 
par  un  récépissé  qui  vous  sera  remis  au  moment  du 
dépôt. 


«  Après  l'examen  de  l'ouvrage,  si  la  représenta- 
tion en  est  autorisée,  et  après  une  répétition  géné- 
rale devant  les  inspecteurs,  un  des  exemplaires  dépo- 
sés, revêtu  du  visa,  est  rendu  au  directeur  qui  peut, 
dès  lors,  faire  jouer  la  pièce. 

«  Le  second  exemplaire  reste  aux  archives,  au  bu- 
reau des  théâtres. 

«  L'exemplaire  revêtu  de  l'autorisation  doit  'Ire, 
à  toute  réquisition,  présenté  au  commissaire  de 
police  chargé  de  la  surveillance  de  votre  théâtre. 

«  L'ouvrage  nouveau  ou  repris  ne  peut  être  an- 
noncé sur  vos  affiches  qu'après  le  dépôt  des  deux 
exemplaires  au  bureau  des  théâtres. 

»  Une  autorisation  spéciale  d'afficher  pourra  vous 
être  donnée  à  cet  ellét  et  aucune  addition  ne  pourra 
être  faite  au  titre  approuvé. 

«  Quant  aux  ouvrages  qui,  par  leur  nature,  exigent 
de  nombreuses  répétitions  et  de  grands  frais  de  mise 
en  scène,  vous  ne  devrez,  dans  votre  intérêt,  les 
mettre  à  l'étude  qu'après  avoir  obtenu  l'autorisation 
de  les  faire  représenter.  Il  est  arrivé  fréquemment 
que,  pour  obtenir  mainlevée  d'une  interdiction  né- 
cessaire, les  administrations  théâtrales  faisaient 
valoir  le  temps  déjà  consacré  à  l'étude  d'un  ouvrage 
et  les  dépenses  considérables  déjà  faites  pour  les 
décors  el  les  costumes;  l'autorisation  préalable 
offrant  aux  entreprises  théâtrales  un  moyen  sûr 
d'échapper  à  un  tel  risque,  les  considérations  de  ce 
genre  De  pnurrontdonc  exercer  aucune  influence  sur 
les  décisions  administratives. 

«  Je  vous  rappelle  aussi,  Monsieur  le  Directeur,  que 
la  répétition  à  laquelle  vous  convoquez  l'inspection 
des  théâtres  doit  avoir  lieu  avec  les  décors,  les  cos- 
tumes, les  accessoires,  l'éclairage  complet  de  la 
s.  ène  il  de  façon,  en  un  mot,  à  ne  dissimuler  aucun 
des  effets  de  la  représentation. 

<c  Nulle  personne  étrangère  au  service  du  théâtre 
ne  doit  être  admise  à  cette  répétition  spécialement 
consacrée  à  MM.  les  inspecteurs. 

'<  Dans  le  cas  où  l'ouvrage  nouveau  devrait  subir 
quelques  modifications  importantes,  l'Administration 
pourra  vous  demander  une  seconde  répétition  par- 
tielle ou  générale. 

<'  Les  répétitions  de  jour  ne  devront  pas  durer 
plus  de  six  heures;  celles  du  soir  devront  être,  au- 
tant que  possible,  terminées  à  minuit. 

■  Les  inspecteurs  des  théâtres  devront  être  con- 
voqués trois  jours  à  l'avance  pour  la  répétition 
générale. 

«  Enfin,  .Monsieur  le  Directeur,  vous  aurez  à  vous 
entendre  avec  le  service  de  l'affichage  pour  que, 
chaque  jour,  un  exemplaire  de  votre  affiche  soit  dé- 
posé au  bureau  des  théâtres. 

«  Je  vous  serai  obligé  de  vouloir  bien  m'accuser 
réception  de  cette  circulaire. 

«  Recevez,  Monsieur  le  Directeur,  l'assurance  de 
ma  considération  la  plus  distinguée. 

"  Le  Sous-Secrétaire  d'Etal  des  Beaux-Arts, 
Signé  :  Edmond  Turquet.  » 


Dans  les  départements,  se  sont  les  préfets  qui 
exercent  la  censure.  Diverses  circulaires  ministé- 
rielles leur  ont  prescrit  certaines  règles  auxquelles 
ils  devaient  s'attacher;  ce  sont  les  circulaires 
des  3  aoûl  et  20  octobre  1850,  28  avril  1864,  24  jan- 
vier 1880,  9  novembre  1887. 

Le  texte  de  cette  dernière  est  le  seul  qu'il  importe 
de  reproduire  : 


BNCrCLOPEDIB  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIOVNAIHE    DU  CONSEHVAlulnE 


Circulaire  aux  préfets  sur  l'examen 
t  l'autorisation  des  pièces  de  théâtre. 


«  Monsieur  le  Préfet., 

"  .Mon  collègue,  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur,  vient 
d'appeler  d'une  façon  tout  à  fait  particulière  mon 
attention  sur  l'inobservation  assez  fréquente  des  ins- 
tructions ministérielles  relatives  à  la  police  des 
théâtres  et  qui  ont  fait  l'objet  d'une  circulaire  de 
l'un  de  mes  prédécesseurs,  en  dale  du  24  janvier  1880. 

«  J'ai  l'honneur  de  vous  confirmer  les  termes  de 
cette  circulaire  qui,  visant  la  réglementation  rétablie 
par  la  loi  ilu  30  juillet  1X50,  maintenue  par  le  décret 
du  6  janvier  1864,  et  expliquée  par  la  circulaire 
ministérielle  du  28  avril  suivant,  rappelai!  aux  pré- 
fets des  divers  départements  : 

«  1"  Qu'il  leur  appartient  d'examiner  et  d'autori- 
ser, sous  leur  responsabilité,  les  pièces  nouvelles 
destinées  à  être  représentées  pour  la  première  fois 
sur  un  des  théâtres  de  leur  département,  sauf  à  en 
référer  au  Ministre  des  Beaux-Arts,  s'ils  le  jugent 
utile; 

ii  2°  Que  si,  parmi  les  pièces  autorisées  à  Paris,  il 
s'en  trouve  qu'ils  jugent  ne  pouvoir  être  jouées  sans 
inconvénients  dans  leur  département,  ils  ont  toujours 
le  droit  d'en  interdire  la  ri-présentation,  en  donnant 
avis  de  cette  décision  à  l'Administration  supérieure; 

ii  3°  One  les  ouv  rages  interdits  à  Paiis,  le  sont,  par 
cela  même,  pour  toute  la  France. 

«  Pour  assurer  l'exécution  de  celte  dernière  dispo- 
sition, MM.  les  préfets  étaient  invités  i  transmettre 
chaque  année,  à  la  Direction  des  Beaux-Arts,  les 
répertoires  que  les  directeurs  des  théâtres  de  leur 
ressort  sont  tenus  de  soumetlre'à  leur  approbation, 
au  commencement  de  chaque  campagne  théâtrale; 
ces  répertoires  devant  leur  être  retournés,  courrier 


par  courrier,  avec  le  visu  de  l'inspection  des  théâtres 
et  toutes  les  indications  propres  â  les  éclairer  sur 
les  mesures  à  prendre. 

ii  Je  n'ai  rien  à  changer,  Monsieur  le  Préfet,  à  ces 
instructions  qui  n'ont  jamais  cessé  d'être  en  vigueur 
et  que  je  vous  serai  obligé  de  faire  ponctuellement 
observer  par  votre  administration. 

h  le  vous  prie  de  m'accuser  réception  de  la  pré- 
sente circulaire,  dès  qu'elle  vous  sera  parvenue. 

«  Becevez,  Monsieur  le  Préfet,  l'assurance  de  ma 
considération  très  distinguée. 

«  Le  Ministre  de  l'Instruction  Publique, 
«  des  Cultes  et  Beaux-Arts, 
«  Signé  :  E.  Spuller.  » 

Si  l'on  peut  former  un  recours  devant  le  ministre 
contre  les  décisions  des  préfets,  du  moins  la  décision 
ministérielle  esl  à  l'abri  de  tout  appel.  Le  Conseil 
d'Etat  et  les  tribunaux  de  droit  commun  n'ont 
aucune  qualité  pous  discuter  une  mesure  prise  par 
le  gouvernement,  en  vertu  d'un  pouvoir  d'apprécia- 
tion qui  lui  est  spécialement  attribué  par  la  loi,  à 
raison  de  l'ordre  public. 

Mous  avons  dit  que  les  lois  du  30  juillet  1850  et 
du  30  juillet  1851  n'étaient  que  provisoires.  Leurs 
dispositions  cessèrent  d'être  applicables  lorsque  fut 
rendu  le  décret  du  30  décembre  1852. 

Depuis  cette  époque,  de  nombreuses  critiques  et 
de  violentes  attaques  furent  portées  tant  dans  la 
presse  qu'au  parlement  contre  la  censure,  si  bien 
que  la  Chambre  des  députés  profita  de  la  loi  de 
finances  de  1900  pour  refuser  les  crédits  relatifs  aux 
censeurs  et  pour  supprimer  ainsi  la  censure,  sans 
voter  une  loi  spéciale  d'abrogation.  Ainsi,  la  censure 
subsiste  en  droit,  mais,  en  fait,  elle  n'est  pas  exercée, 
faute  de  fonds  pour  subvenir  aux  frais  qu'elle  néces- 
site. 


LES  THEATRES  SUBVENTIONNÉS 


Nous  avons  parcouru  jusqu'à  présent  l'histoire  de 
l'Opéra  depuis  son  origine,  â  travers  les  diverses 
périodes  qui  marquèrent  son  exploitation  théâtrale; 
Lulli  sous  Louis  XIV,  Bajieau  sous  Louis  XV,  et 
Gluck  à  la  lin  du  xvme  siècle  avec  Picciw.  Cette 
histoire  de  la  musique  à  l'Opéra  y  est  mêlée  de  si 
près  à  la  vie  administrative,  et  aux  changements 
incessants  de  direction,  que  nous  avons  été  con- 
traint, pour  la  clarté  de  notre  exposé-,  de  mêler  la 
vie  intérieure  de  l'Opéra  à  son  existence  adminis- 
trative. Les  intrigues  de  la  cour  se  joignaient  aux  dis- 
putes musicales  pour  ruiner  les  directeurs,  les  révo- 
quer ou  les  remplacer  sans  raison  apparente. 

Après  la  tourmente  révolutionnaire,  la  tyrannie 
de  la  Terreur  et  les  réglementations  de  la  Convention, 
l'Opéra  avait  commencé  à  se  relever,  sous  le  ".ouver- 
nemenl  consulaire. 


Aux  termes  des  arrêtés  du  6  frimaire  e(  du  20  ni- 
vôse an  XI,  la  surveillance  et  la  direction  principale 
du  Théâtre  des  Arts  furent  confiées  aux  préfets  du 
palais,  du  moins  â  l'un  d'eux,  désigné  par  le  Pre- 
mier Consul. 

Le  Premier  Consul  nommait  aussi  le  directeur  et 
un  administrateur-comptable,  l'un  et  l'autre  placés 
sous  l'autorité  du  préfet  du  palais.  El  son  approba- 
tion était  nécessaire  pour  la  fixation  du  traitement 
des  artistes  et  employés,  pour  celle  des  gratifica- 
tions allouées  sous  le  nom  de  feux,  ainsi  que   p 

l'engagement  de  toute  dépense  qu'occasionnerait  la 
représentation  d'ouvrages  nouveaux.  Le  préfet  du 
palais  n'avait  la  charge  d'aucune  comptabilité;  celle- 
ci  ressortissait  au  Ministre  de  l'Intérieur,  lequel 
était  autorisé  à  ordonnancer  50000  lianes  par  mois 
au  profit  du  Théâtre  des  Arts. 

L'Empire  s'attacha  plus  attentivement  encore  à 
favoriser  l'exploitation  de  l'Opéra,  devenu  l'Acadé- 
mie impériale  de  Musique,  et  à  resserrer  ses  liens 
avec  l'Etat. 


TJÙCHN1UUE,  ESTHETIQUE  ET  PEDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS 


I  ii  déciet  du  20  ventôse  au  XIII  eurdonna  l'inscrip- 
tion au  registre  des  pensions  à  la  charge  du  Trésor 
public,  d'un  fonds  de  83500  francs. 

Enfin  le  décret  du  8. juin  1800,  qui  abolit  la  liberté 
îles  khéàtFes  et  rétablit  le  régime  du  privilège,  ainsi 
que  nous  l'avons  vu  ailleurs1,  conféra  à  l'Académie 
impériale  de  Musique  la  propriété  exclusive  de  son 
L'enre  de  spectacle  et  de  son  répertoire,  comme  aussi 
le  droit  exclusif  de  donner  des  bals  masqués.  L'ar- 
rêté du  Ministre  de  l'Intérieur,  du  25  avril  1807,  pris 
en  conséquence  du  décret  précité,  contenait  les  dis- 
position suivantes  à  l'égard  de  l'Académie  : 
'  «  Ce  théâtre  est  spécialement  consacré  au  chant 
el  à  la  danse;  son  répertoire  est  composé  de  tous  les 
ouvrages,  lant  opéras  que  ballets,  qui  ont  paru 
depuis  son  établissement  en  1046.  —  1°  11  peut  seul 
représenter  les  pièces  qui  sont  entièrement  en  mu- 
sique, et  les  ballets  du  genre  noble  et  gracieux  :  tels 
sont  tous  ceux  dont  les  sujets  ont  été  puisés  dans  la 
mythologie  et  dans  l'histoire,  et  dont  les  principaux 
personnages  sont  des  dieux,  des  rois  ou  des  héros. 
—  2°  Il  pourra  aussi  donner  (mais  non  exclusive- 
ment à  tout  autre  théâtre)  des  ballets  représentant 
des  scènes  champêtres  ou  des  actions  ordinaires  de 
la  vie.  » 

Quelques  mois  après,  le  décret  du  1"  novembre, 
qui  institua  la  charge  de  Surintendant  des  spectacles 
pour  les  quatre  grands  théâtres  de  la  capitale,  fixa 
définitivement  le  régime  sous  lequel  l'Académie 
devait  vivre  jusqu'au  gouvernement  de  Juillet.  Nous 
croyons  devoir  reproduire  le  texte  de  cet  importanl 
décret  ; 

v  Art.  16.  —  L'administration  de  l'Académie  de 
musique  sera  composée  d'un  directeur,  d'un  admi- 
nistrateur-comptable el  d'un  inspecteur  nommés  par 
nous;  il  y  aura  un  secrétaire  général  également 
nommé  par  nous. 

o  Ils  prêteront,  entre  les  mains  de  noire  Ministre 
de  l'Intérieur,  le  serment  de  remplir  avec  fidélité 
leurs  fonctions. 

u  Art.  17.  —  Le  directeur  sera  chargé,  en  chef,  de 
tout  ce  qui  concerne  l'administration  etla  direction. 
Il  est  le  principal  responsable  et  le  supérieur  immé- 
diat de  tous  les  artistes;  il  nomme  à  tous  emplois, 
et  il  ilonne  les  mandats  pour  tous  les  payements. 

u  Ali.  18.  —  L'administrateur-comptable  sera 
subordonné  au  directeur  pour  tout  ce  qui  concerne 
l'exercice  de  ses  fonctions,  à  l'exception  néanmoins 
de  ce  qui  regarde  le  budget  dont  il  est  le  gardien,  et 
dont  il  ne  peut  dépasser  les  articles  sans  compromet- 
tre sa  responsabilité  personnelle.  Hors  ce  cas,  il  ne 
peut  s'opposer  à  aucun  payement,  sauf  à  faire  insé- 
rer ses  observations  au  procès-verbal  du  conseil 
d'administration  dont  il  est  parlé  ci-après. 

«  Art.  19.  — Il  y  aura  un  conseil  d'administration 
présidé  par  le  directeur  et  composé  de  l'administra- 
teur-complable,  de  l'inspecteur  et  de  trois  sujets  de' 
notre  Académie  de  Musique,  les  plus  méritants  par 
leur  probité,  leurs  talents  et  leur  esprit  de  concilia- 
tion, et  désignés  chaque  année  par  le  Surintendant. 

«  Le  secrétaire  général  de  l'administration  tiendra 
la  plume.  Ce  conseil  se  réunira  au  moins  une  fois 
par  semaine;  le  directeur  pourra  le  convoquer  lors- 
qu'il le  jugera  convenable. 

<«  Art.  20.  —  Les  membres  de  ce  conseil  n'auront 
que  voix  consultative,  la  décision  appartenant  dans 
tous   les   cas   au  directeur;  mais   chaque   membre 


pourra  faire  ses  observations  soit  sur  la  police  du 
théâtre,  soit  sur  le  choix  des  pièces,  soit  sur  les  abus 
qu'il  croirait  apercevoir  dans  la  manutention  des 
magasins  ou  dans  la  dépense,  soit  sur  les  moyens 
d'accroître  les  recettes  et  d'ajouter  à  l'éclat  du  spec- 
tacle. 

«  Le  secrétaire  général  sera  tenu  d'insérer  ces 
observations  au  procès-verbal,  qui  sera  remis  par 
le  directeur  au  Surintendant  :  le  directeur  pourra  y 
joindre  ses  observations  particulières. 

«  Art.  21.  — Le  budget  des  dépenses  de  chaque 
année  et  les  états  à  l'appui  seront  rédigés  au  conseil 
d'administration  et  présentés  au  Surintendant  avant 
le  1"  décembre,  avec  les  observations  soit  des  mem- 
bres du  conseil,  soit  du  directeur. 

«  Art.  22.  —  Tous  les  marchés  seront  portés  à  la 
connaissance  du  conseil  d'administration. 

«  Art.  23.  —  Le  répertoire  sera  arrêté  au  conseil 
d'administration,  les  14  et  30  de  chaque  mois,  pour 
la  quinzaine  suivante. 

«  S'il  résulte  du  procès-verbal,  qui  sera  adressé  au 
Surintendant,  des  différences  d'opinion  sur  la  com- 
position du  répertoire,  le  Surintendant  pourra  sta- 
tuer définitivement. 

«  Art.  24.  —  Lorsque  les  pièces  el  ballets  nouveaux 
auront  était  admis  par  le  jury,  le  devis  de  la  dépense 
sera  arrêté  au  conseil  d'administration  et  présenté 
à  notre  approbation  par  le  Surintendant;  il  en  sera 
de  même  pour  les  ouvrages  qui  seront  remis  au 
théâtre. 

«  Le  machiniste- sera  admis  à  la  séance  du  conseil 
et,  interpellé  de  déclarer,  sur  sa  responsabilité,  si 
les  décorations  existantes  eu  magasin  peuvent  ou 
ne  peuvent  point  être  employées,  ou  ne  peuvent  ser- 
vir qu'en  tel  nombre  pour  la  pièce  nouvelle  ou  re- 
mise. 

»  Art.  25.  — 11  sera  nommé  tous  les  ans  une  com- 
mission de  notre  Conseil  d'Etat  pour  recevoir  les 
comptes  de  l'Opéra,  et  s'assurer  que  les  budgets,  de- 
vis et  règlements  ont  été  exécutés. 

<(  Cette  commission  se  fera  remettre,  tous  les  six 
mois,  les  états  de  recettes  el  de  dépenses,  et  fera 
l'inspection  de  toutes  les  parties  du  service.  » 

En  1811,  deux  décrets  furent  encore  rendus  : 

L'n,  le  20  janvier,  qui  régla  le  système  des  pensions 
des  artistes  et  employés  sur  le  principe  de  retenues 
pratiquées  sur  leurs  appointements,  et  institua  pa- 
reillement des  pensions  au  profit  des  auteurs  et 
compositeurs  sur  le  même  principe  de  retenues  pra- 
tiquées sur  leurs  honoraires  ;  le  fonds  de  8:!  500  lianes, 
créé  par  le  décret  de  ventôse  au  Xlll,  devait  demeu- 
rer affecté  à  cette  destination  pendant  six  années,  à 
dater  du  1er  février  1811. 

Un  autre,  le  13  août,  qui  assujettissait  à  payer  une 
redevance  à  l'Académie  les  théâtres  de  second  ordre, 
les  petits  théâtres,  les  cabinets  de  curiosités,  ma- 
chines, figures,  animaux,  toutes  les  joutes  et  tous 
les  jeux,  et,  en  général,  tous  les  spectacles  de  quel- 
que genre  qu'ils  fussent,  tous  ceux  qui  donnaient  des 
liais  masqués  ou  des  concerts  dans  Taris;  de  même 
que  les  panoramas,  cosmoramas,  Tivoli  el  les  autres 
établissements  nouveaux,  et  le  Cirque  olympique  en 
tant  que  théâtre  où  l'on  jouait  des  pantomimes.  La 
quotité  de  la  redevance  était  du  cinquième  brut  de 
la  recette,  déduction  faite  du  droit,  des  pauvres,  pour 
les  bals,  concerts,  fêtes  champêtres  de  Tivoli  el 
autres  du  même  genre;  du  vingtième  de  la  recette, 
sous  la  même  déduction,  pour  tous  les  théâtres  et 
tous  les  autres  spectacles  et  établissements. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


.Napoléon,  qui  avait  ainsi  montré  sa  sollicitude 
pour  l'administration  théâtrale  de  l'Opéra,  y  apporta 
sa  contribution  personnelle  pour  assurer  l'éclat  des 
représentations. 

Le  10  juillet  1804,  il  venait  lui-même  à  l'Opéra 
afin  d'assister  à  la  première  représentation  des  Liantes 
de  Le  Sueur,  et  après  le  3e  acte,  il  faisait  chercher 
l'auteur  par  le  maréchal  Bessières,  pour  lui  témoi- 
gner toute  la  satisfaction  que  cette  œuvre  lui  avait 
l'ait  éprouver.  Il  le  retint  dans  sa  loge  en  disant  : 
«  llestez  là,  jouissez  de  votre  triomphe  jusqu'à  la 
lin.  ». 

Il  décora  Le  Sueur  de  la  croix  de  la  Légion  d'hon- 
neur et  lui  envoya  quelques  jours  après  une  taba- 
lière  d'or  qui  contenait  6  000  francs,  avec  ces  mots 
gravés  :  l'Empereur  des  Français,  à  l'auteur  des 
Bardes. 

Cette  pièce  avait  été  chantée  par  Lainez,  Chéron, 
Lays  et  Mllc  Armand. 

Peu  après,  on  reprenait  Dardanus  et  Télémaque  le 
9  octobre  1804,  dans  lesquels  débutait  M""  Victoire 
Saulnier,  élève  de  Gardkl. 

L'Opéra  représentait  encore  une  traduction  du  Don 
Juan,  de  Mozart,  chanté  par  Iîoland,  Huby,  Dkrivis, 
Bertin  et  Mllcs  Armand,  Ferrière  et  I'ei.ei,  l'Amour  ci 
Cythére,  de  Gaveaux;  Nephtali,  de  Blangini;  Paul  et 
Virginie,  ballet  de  GARDELef  Kreutzer,  le  25  juin  1806, 
avec  Mlle  ISigottini  et  Duport;  le  Triomphe  de  Trajan, 
d'Esraenard,  Lesueur  et  Pbrsuis,  Fer?iand  Gortès  de 
Spontini,  compositeur  protégé  par  l'impératrice  José- 
phine, et  les  Abencérages  de  Cherubini. 

En  1807,  Picard  fut  nommé  à  la  tête  de  l'Opéra,  el 
son  premier  succès  fut  la  Vestale,  de  Spontini,  qui 
fut  chantée  par  Lainez,  Lays,  Dkrivis,  M""  Branchu, 
M""  Maillard.  C'est  cette  pièce  qui  devail  être  re- 
présenléele  IlOjuin  1815  devant  l'empereur  Alexandre 
et  le  roi  de  Prusse. 

Sous  la  Restauration,  l'Opéra  reprit  son  titre  pri- 
mitif et  redevint  l'Académie  royale  de  musique;  mais 
les  règlements  ne  furent  pas  modifiés,  on  lui  laissa 
950000  francs  de  subvention.  Louis  XVIII  vint  le 
18  mai  1814  à  la  représentation  d'QEdipe  «  Colon*  ,  i  i 
d'un  divertissement  de  Gardel  el  Persi  us,  ayant  pour 
titre  le  Retour  des  Lys. 

Quelques  ordonnances  furent  toutefois  rendues, 
louchant  des  questions  d'ordre  particulier.  Mention- 
nons celle  du  1er  novembre  1814,  qui  remania  le  dé- 
cret du  20  janvier  1811  sur  les  pensions  de  retraites, 
en  maintenant  néanmoins  le  fonds  de  83  500  francs, 
et  qui  établit  des  pensions  de  réforme;  —  celle  du 
16  novembre  181.1,  sur  les  représentations  à  béné- 
fice; —  celle  du  18  janvier  1816,  fixant  les  hono- 
raires des  auteurset  compositeurs,  leurs  divers  droits 
et  leurs  obligations;  —  la  décision  du  6  mars  1817, 
concernant  les  retenues  au  profit  de  la  caisse  de  vé- 
térance;  —  l'ordonnance  du  12  mars  1822,  égale- 
ment au  sujet  des  pensions;  —  celle  du  29  no 
vembre  1825,  qui  interdit  le  cumul  des  pensions  sur 
la  caisse  de  vétérance  aux  artistes  attachés  à  la  fois 
à  l'Académie  et  au  Conservatoire  ;  et  la  décision  du 
28  mai  1826,  qui  apporte  une  exception  à  la  dispo- 
sition précédente  en  faveur  des  professeurs  au  Con- 
servatoire. 

Les  œuvres  d'un  intérêt  secondaire  qui  avaient  été 
données  depuis  dix  ans  ne  tenaient  pas  l'affiche,  et 
c'est  encore  la  Vestale  qu'on  dut  reprendre  pendant 
les  Cent-Jours  devant  Napoléon,  en  même  temps 
qu'on  reprenail  Castor  et  Pollux  le  14  décembre  1814. 
Après  le  retour  de  Louis  XVIII,  Picard  abandonna  la 


direction  entre  les  mains  de  Papillon  de  la  Ferté, 
aidé  par  Choron  et  Persuis.  Ils  y  firent  jouer  en  1816 
un  ballet  de  ce  dernier,  en  collaboration  avec  Kreut- 
zer, intitulé  le  Carnaval  de  Venise;  ils  firent  repren- 
dre Iphigênie  en  Aulide,  Renaud  de  Sacchini,  avec 
Mme  Branchu. 

La  même  année  mourait  M"<;  Guimard,  à  73  ans; 
elle  avait  épousé,  en  1700,  Despréaux. 

Le  22  décembre  1810,  Persuis  mourait,  le  jour 
même  de  la  première  représentation  d'Olympie  de 
Spontini.  Il  fut  remplacé  par  le  violoniste  Viotti. 
C'est  sous  la  direction  de  ce  dernier  que  l'Opéra  dut 
quitter  la  place  Louvois,  après  l'assassinat  du  din- 
de Berry.  C'était  le  13  février  1820.  On  jouait  le  Car- 
natal  (te  Venise,  les  Noces  de  Gamache  et  le  Rossi- 
tjnol.  A  11  heures,  le  duc  quitta  le  spectacle,  pour 
accompagner  la  duchesse  qui  se  retirait,  cl  au  mo- 
ment où  elle  montait  en  voiture,  un  individu  s'ap- 
procha du  duc  et  le  frappa  d'un  coup  de  stylet. 

Le  duc  de  Berry  mourait  le  lendemain,  mais  il 
n'avait  pu  obtenir  les  sacrements  de  l'Eglise  que  sous 
la  promesse  faite  à  l'archevêque  de  Quelen,  que  la 
salle  de  l'Opéra  serait  démolie. 

C'est  à  la  salle  Favart  que  l'Opéra  se  réfugia  pen- 
dant qu'on  construisait  une  nouvelle  salle  dans  la 
rue  Le  Peletier,  sur  l'emplacement  de  l'hôtel  de 
Choiseul.  L'Opéra  devait  demeurer  dans  cette  salle, 
qui  avait  coûté  800000  francs,  jusqu'en  1873,  date 
de  son  incendie. 

Le  16  aoûl  1821,  on  inaugurait  le  théâtre  Le  Pele- 
tier, avec  les  variations  de  Pakr  sur  Vive  Henri  IV. 
les  Boyadères  de  Catel,  et  un  ballet,  le  Retour  de  '/.e- 
phire.  Le  1er  novembre  suivant,  IIareneck  remplaçait 
Viotti  à  la  direction  de  l'Opéra  et  faisait  jouer  Ala- 
din  ou  la  Lampe  merveilleuse  de  Nicolo  et  de  Benin- 
cori  ,  avec  M"es  Bigottini  ,  Jawurek  et  Grassari, 
MM.  Nourrit,  Dérivis.  Dabadie  (1822) 

L'année  suivante,  en  1823,  Hérold  et  Aurer  com- 
mencèrent à  se  faire  connaître  avec  Lasthënie  et 
Vendôme  en  Espagne.  En  1826,  IIossini  fit  représenter 
le  Siège  de  Corlnlhe,  puis  en  1828,  le  Comte  Ory,  el 
en  1829,  Guillaume  Tell.  Entre  temps,  le  29  févriei 
1828,  Auber  avait  fait  représenter  la  Muette  de  Por- 
lici,  avec  Nourrit,  Dupont,  Dabadie,  Mme  Damoreai 
et  Mlle  Noblet. 

Le  gouvernement  de  Louis-Philippe  modifia  com- 
plètement le  régime  de  l'Opéra.  Lue  ordonnance  des 
25  janvier-15  mars  1831  plaça  dans  les  attributions 
du  Ministre  de  l'Intérieur  les  théâtres  royaux.  Le 
ministre  nomma  désormais  un  directeur-cnl repre- 
neur, qui  exploitait  pour  son  propre  coin  (île.  SOUS 
certaines  conditions  et  charges  à  lui  imposées,  et  qui 
recevait  nue  subvention  du  budget  de  l'Etat.  Cette 
subvention,  dès  l'année  1831,  fui  réduite  à  800000 
francs.  Par  arrêté  du  28  février,  le  ministre  institua 
une  commission  spéciale  à  l'effet  de  surveiller  l'exé- 
cution des  clauses  du  cahier  des  cha  i  ges. 

Du  moment  que  l'Opéra  prenait  le  caractère  d'une 
entreprise  commerciale  ordinaire,  l'assurance  des 
pensions  par  l'Etal  perdait  toute  raison  de  subsister. 
Il  fut  donc  déclaré  qu'à  dater  de  l'origine  de  la  nou- 
velle direction,  c'est-à-dire  du  1"'  juin  1831,  les  ar- 
tistes et  les  employés  avec  lesquels  des  engagements 
seraient  contractés  toucheraient  l'intégralité  de  leurs 
appointements,  sans  qu'ils  puissent  rien  exiger  lors 
de  leur  retraite.  Pour  ceux  qui  étaient  en  mesure 
d'invoquer  des  droits  acquis,  on  décida  qu'ils  pour- 
raient demander  le  maintien  de  leurs  avantages  en 
continuant  de  subir  les  retenues  antérieures,  s'ils  ne 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS 


préféraient  renoncer  auxdils  avantages  et  percevoir 
à  l'avenir  leurs  appointements  entiers.  Situation 
identique  était  faite  aux  auteurs  et  compositeurs. 

Au  surplus,  en  vertu  d'un  arrêté  ministériel  du 
21  juin  18:^2,  les  tributaires  de  la  caisse  des  retraites 
ne  pouvaient  être  mis  à  la  réforme  sans  l'approbation 
de  la  commission  de  surveillance  dont  nous  avons 
parlé  plus  haut. 

L'entrepreneur  de  l'Opéra  vit  disparaître,  en  même 
temps,  le  privilège  exclusif  des  bals  masqués;  et 
l'ordonnance  des  24  août-22  octobre  1831  abolit  les 
redevances  établies  à  la  charge  des  théâtres  secon- 
daires et  autres  spectacles  divers  par  le  décret 
de  1811. 

lue  ordonnance  du  31  août  1837,  généralisant  les 
dispositions  de  l'arrêté  du  28  février  1831,  institua 
une  commission  de  surveillance  des  théâtres  royaux, 
dont  les  attributions  consistaient  encore  à  assurer 
l'exécution  des  cahiers  des  charges.  Cette  commis- 
sion devint  plus  tard  permanente,  en  vertu  d'un 
arrêté  pris  par  le  Président  du  Conseil  des  Ministres 
chargé  du  pouvoir  exécutif,  le  20  octobre  1848;  et 
un  décret  du  2  janvier  1850,  la  maintenant  perma- 
nente auprès  du  Ministre  de  l'Intérieur,  lui  affecta 
un  caractère  consultatif. 

Notons  de  suile  que,  à  dater  du  décret  des  14- 
26  février  1853,  les  services  des  Beaux-Arts  furent 
distraits  du  Ministère  de  l'Intérieur  pour  être  placés 
entre  les  mains  du  Ministre  d'Etat,  et  de  la  Maison 
impériale. 

Unan  plus  tard,  en  vertu  d'un  décret  du  29  juin  1854, 
l'Opéra  fit  partie  de  la  liste  civile;  et  un  nouveau 
décret  des  24  novembre-1 1  décembre  1860  couda  son 
administration  supérieure  au  Ministre  d'Etat,  sans 
que  la  liste  civile  cessât  d'être  responsable  de  sa 
gestion. 

Un  habile  directeur,  M.  Véron,  docteur  en  méde- 
cine, avait  été  mis  à  l'Opéra  le  2  mars  1831.  Sa 
direction  fut  fructueuse.  Il  monla  le  Philtre  et  le 
Serment  d'AuBER,  dans  lequel  débuta  M11'  Darus.  Le 
21  novembre  1831,  il  représenta  Robert  le  Diable  de 
Meyerbeer,  avec  Nourrit,  Levasseur,  Lafont,  Mes- 
dames Damoreau  et  Dorus,  et  lorsqu'il  reprit  cet 
opéra,  le  20  juillet  1832,  M11*  Dorus  céda  son  rôle  à 
M"e  Cornélie  Falcon  qui  avait  alors  dix-huit  ans. 

Le  nouveau  directeur  entremêlait  ses  spectacles'de 
ballets  comme  la  Sylphide,  le  12  mars  1832,  dansé  par 
M"e  Taglioni,  la  Tempête  on  l'Ile  des  Génies",  avec 
Duvernoy,  Fanny  Elssler,  le  la  septembre  1834. 

Le  23  février  1835,  on  représentait  la  Juin1,  paroles 
de  Scribe  et  musique  d'HALÉvy,  dans  laquelle 
jVImes  Falcon  et  Dorus  brillaient  au  premier  rang. 
La  mise  en  scène  avait  coûté  150  000  francs. 

Un  architecte,  M.  Duponchel,  succédait  en  août 
1835  à  Véron,  et  continuait  son  succès  avec  les  Hu- 
guenots de  Meyerbeer  '29  février  1836  ,dana  lesquels 
Gilbert  Duprez  remplaça  bientôt  Nourrii  el  qui  ser- 
vail  de  début  à  Mmc  Stoltz  en  1838.  On  représenta 
successivement  B'envenuto  Cellinide  Berlioz,  le  3  sep- 
tembre 1838,  le  Lac  des  Fées,  d'AuBER,  avec  Mllos  Nau 
et  Elian'  Barthélémy. 

Le  Drapier,  d'HALÉw,  parut  le  6  janvier  1840,  et 
les  Martyrs,  de  Donizetti,  le  10  avril  de  la  même 
année.  Pour  les  débuts  dans  la  direction  de  M.  Léon 
Pillet,  nommé  le  1er  juin  1840,  avec  Duponchel,  Do- 
nizetti donne  la  Favorite,  avec  Mme  Stoltz,  Levas- 
seur, Duprez  et  Barroilhet,  le  2  décembre  1840. 

Trois  mois  après,  on  donnait  une  reprise  solen- 
nelle   de  Don  Juan,    puis  le  Freischùtz  de   Weber, 


Gisèle,  un  ballet  d'Anwi,  avec  M"«  Carlotla  Grisi,  le 
28  juin  1841;  et  la  même  année,  Halévv  triomphait 
encore  avec  la  Reine  de  Chypre,  et  en  1843,  avec 
Charles  VI,  tous  deux  chantés  par  Mmc  Stoltz  et 
Barroilhet. 

Les  dernières  années  de  la  direction  Pillet  furent 
moins  prospères  ;  beaucoup  d'artistes  s'étaient  retirés 
et  sauf  Lucy  de  Lamermoor,  de  Donizetti,  Othello  de 
Bossini  et  Dont  Sébastien,  les  succès  devinrent  rares. 
Ouand  Pillet  se  retira,  il  laissait  400  000  francs  de 
dettes  à  Duponchel  el  Boqueplan,  qui  lui  succédaient. 
Le  premier  succès  des  nouveaux  directeurs  fut  Jéru- 
salem de  Verdi,  que  chantaient  Duprez  et  Mmo  Julian 
Van  Gelder,  le  26  novembre  1847.  La  révolution  de 
1848  interrompant  Grisétidis,  le  ballet  d'ADA.u,  fit  re- 
prendre à  l'Opéra  le  titre  de  Théâtre  de  la  Nation. 

Après  la  Vivandière  dePuoNi,  el  Jeanne  la  Folle  de 
Clapisson,  il  faut  attendre  le  Prophète  de  Meyerbeer 
(16  avril  1849),  avec  Boger,  M°>«  Viardot  et  Castel- 
lan,  pour  compter  un  succès.  Le  rôle  fut  bientôt  re- 
pris par  M""  Alboni.  Mme  Viardot  continua  à  triom- 
pher, sous  la  direction  de  Hoqueplan  seul,  dans  la 
Sapho  de  Gounod,  l'Enfant  prodigue  d'AuBER; 
Mmo  Tedesco  dans  le  Juif  errant  d'HALÉvy,  et  M™  Al- 
boni dans  la  Corbeille  d'oranges  d'AuBER.  Après  une 
reprise  de  la  Vestale,  avec  Mlne  Crovelli,  Poinsot  et 
le  ténor  Boger,  Roqueplan,  n'ayant  que  620  000  francs 
de  subvention,  succombait  sous  le  poids  d'un  passif 
de  900000  francs,  le  30  juin  1854. 

L'Opéra,  qui  reprenait  le  titre  de  Théâtre  impérial, 
cessait  d'être  une  entreprise  particulière.  A  partir 
du  1er  juillet  de  la  même  année,  il  était  régi  pour  le 
compte  de  la  liste  civile  par  .Nestor  Boqueplan, 
nommé  directeur,  sous  le  contrôle  du  Ministre  de  la 
Maison  de  l'Empereur.  Il  était  remplacé  dans  ce 
poste,  le  11  novembre  1854,  par  M.  Crosnier,  admi- 
nistrateur général,  qui  obtenait  le  retour  de 
Mmo  Stoltz,  engageait  deux  danseuses,  Mme  Bosati,  qui 
débutait  dans  La  Fonti,  et  Mlle  Peretta,  qui  faisait 
son  entrée,  le  22  février  1855,  dans  le  Diable  à  quatre. 
Sous  le  Second  Empire,  Verdi  donnait  les  Vêpres 
siciliennes  et  le  ballet  à'Orfa,  Niedermeyer  la  Fronde, 
et  Félicien  David,  Herculanum. 

On  sait  les  discussions  que  souleva  la  première 
représentation  de  Tannhauser  de  Wagner  en  1861,  et 
l'approbation  que  reçut  la  Réîne  de  Saba,de  Gounod, 
avant  la  direction  de  Perrin,  qui  fut  nommé  en  dé- 
cembre 1862. 

Léo  Délires  se  révéla  avec  la  Source  en  1866.  Am- 
broise  Thomas  donna  Hamlet  deux  ans  après,  et  le 
Faust  de  Gounod  apparut  en  1869. 

On  verra,  dans  la  liste  des  premières  représenta- 
tions de  l'Opéra,  les  œuvres  représentées  depuis 
1870;  il  ne  nous  reste  qu'à  analyser  brièvement  l'ex- 
ploitation de  ces  dernières  années. 

M.  Halanzier,  au  1er  novembre  1871,  dirigea  l'O- 
péra, et  c'est  lui  qui  engagea  M"e  Rosita  Mauri  en 
1877,  pour  le  divertissement  de  Polyeucte.  La  même 
année,  il  faisait  jouer  l'œuvre  d'un  jeune  composi- 
teur, Jules  Massenet,  Le  Roi  de  Lahore  (le  27  avril), 
avec  MM.  Salomon,  Lassalle,  Auguez,  M"":  de  Beské 
et  Fouquet.  Une  cabale  accueillit,  en  1878,  le  ballet 
d'Olivier  Métra  Yedda,  mais  les  frères  Mérante, 
Mllc  liita  Sangalli,  Louis  Marques,  Righetti,  impo- 
sèrent le  succès.  D'ailleurs,  l'Opéra  possédait  alors 
une  troupe  remarquable.  Mme  Franck  Duvernoy  dé- 
butait dans  les  Huguenots,  et  Edmond  About  décou- 
vrait Sellier,  qui  débutait  dans  Guillaume  Tell. 

Aida,  l'opéra  de  Verdi,  fut  représenté  le  22  mars 


:{Ni)ii 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIOVE  ET  UICTIONNAUŒ  DU  CONSERVATOIRE 


L880,avec  MmM  Kbauss  el  Rosine  Bloch,  MM.  Sellier, 
Morel,  Boudoorbsqob  ei  Sapin. 

La  direction  de  Vaucorbeil,  qui  dura  de  18T9  à 
1884,  vit  le  succès  de  la  Korrigane,  du  Tribut  de  '/.<<- 
mora,  de  Gounod,  el  de  Namouna,  de  Lai.o.  M""^  Krauss 
et  Richard,  MM.  Lassai. le,  Dereims,  Boudouiiesquï  et 
Loiirain  chantèrent  Heur»  VIII  de  Smm-Sains,  et 
Mme  Rosita  Mauri  dansa  la  Farandole  de  Théodore 
Dubois. 

Plusieurs  débuts  célèbres  :  M.  Escaiaïs  dans  Guil- 
laume Tell,  M11"  Adèle  IsAAcdans  Hamlet  et  M.  Edouard 
de  Reské  dans  Méphislophélès  de  Faust. 

M.  Gailhard  fut  le  directeur  de  l'Opéra  en  1884, 
en  association  avec  M.  Ritt.  Il  lit  jouer  la  Sapho  de 
Gounod,  avec  Mmes  Krauss  et  Richard,  Mblciussédec, 
Plahçon;  lui-même  chantait  Pytheas. 

Higoletto  de  Verdi  ,  d'abord  chanté  par  Mes- 
dames Krauss  et  Richard,  fut  repris  en  1889  par 
M™e  Jeanne  Raunay;  dans  Sigurd  de  Reyer,  on  remar- 
quait Mn,es  Rose  Caron,  Bosman,  Richard  el  MM.  Sel- 
lier, Gresse  et  Bérardi.  LeSaint-Bricedes  Huguenots 
servit  de  début  à  M.  Delmas. 

Massemet  confia  les  principaux  rôles  du  i'id  à 
famé  Fidès  Devriés  et  aux  frères  de  Reské.  Paladilhe 
choisit  pour  Patrie  Mme  Krauss,  MM.  Lassalle  et 
Doc.  Enfin  La  Patti  et  Mme  Agissol,  les  frères  de 
Reské  et  Melchissédec  occupèrent  l'affiche  en  188s  et 
1889  avec  ïkoméo  et  Juliette,  de  Gounod. 

Le  dernier  acte  de  la  direction  Ritt  et  Gailhard  fut  la 
représentation  deLolwugrin,  de  Richard  Wagner,  avec 
Mme  Rose  Caron  dans  le  rôle  d'Eisa  et  M.  Van  Dyi  k. 
Mrae  Cosima  Wagnej  avait  elle-même  désigné  les 
altistes.  D'abord  donné  par  Lamoureux,  Lohengrin 
avait  été  représenté  avec  une  barbe  blonde,  mais 
à  l'Opéra,  il  respecta  la  tradition  et  parut  le  visage 
imberbe.  Cet  opéra  n'avait  d'ailleurs  pu  être  repré- 
senté à  l'Eden,  tant  les  spectateurs  affichaient  de  vio- 
lence dans  l'expression  de  leurs  critiques  ou  de  leurs 
admirations.  La  troupe,  en  1885,  comptait  Mmes  Felia 
Litvine,  et  Mklba,  le  ténor  Aifiu,  Vaguet  et  le  bary- 
ton Renaud,  qui  avait  débuté  dans  ['Africaine.  Eu 
1892,  Bertrand,  en  prenant  la  direction,  monta  Sa- 
lammbô  de  Reyer,  avec  Mme  Rose  Caron,  MM.  Saléza, 
Vergnet,  Renaud,  Delmas  et  Beyle,  puis  Samson  et 
Dalila  de  Sainï-Saëns,  avec  M"10  Deschamps-Jehin, 
MM.  Vergnet,  Lassalle,  Fournets  et  Chambon,  et  en 
1894  il  prenait  M.  Colonne  comme  chef  d'orchestre. 
Le  12  mars  1893,  il  montait  le  Walkyrie  de  Richard 
Wagner,  avec  Mme  Rose  Caron  et  Mme  Bréval,  qui 
venait  de  débuter  dans  l'Africaine,  Mm°  Deschamps- 
Jehin,  MM.  Van  Dyck,  Delmas  et  Gresse. 

Bertrand  montait  encore  Thaïs  de  Massbnkt  el 
Otello  de  Verdi.  Il  avaitengagé  M.  Aevarez,  qui  avait 
débuté  le  14  mars  1893  dans  Faust,  en  même  temps 
que  Mlle  Marcy,  M"8  Passama,  qui  avait  débuté  en 
1893  dans  Dalila,  Mlle  Alba  Chrétien,  qui  avait 
débuté  le  31  juillet  1893.  dans  Robert  le  Diable. 
L'Opéra  comptait  encore  Mm8s  Berthet,  Sibyl  San- 
derson,  Héglon,  Beauyais,  MM.  Vaguet,  Morel,  Lau- 
rent et  Delpoi'i.et. 

En  1896GA1LHAJD  fut  adjoint  à  Bertrand,  et  en  1901, 
Gailhard  resta  seul  à  la  lête  du  théàlre. 

A  noter  le  Messidor  de  Rruneau,  les  Maîtres  Chan- 
teurs de  Nuremberg  de  Richard  Wagner,  joués  le 
10  novembre  1897  par  M,U8S  Bré\  al,  Grand.iean,  MM. 
Alvarez,  Delmas,  Renai  d,  Vaguet,  Gresse  et  Bartet, 
Joseph  de  Méhul,  avec  Mme  Ackté,  la  Prise  de  Troie  de 
Berlioz  avec  Mmes  Delna,  Reauvais  et  Flahaot. 

Gailhard  s'adjoignit  Capoul,  et  fit  chanter  pour  la 


première  fois,  le  3. janvier  l'.t03,  Siegfried  de  Richard 
Wagner,  avec  M"""  Grand.iean,  Hkglon,  Bessy  Aroit, 
MM.  Jean  de  Reské,  Delmas,  Laitue,  Noté. 

L'ensemble  de  la  tétralogie  de  Wagner  ne  devait 
être  représenté  qu'en  1911. 

Citons  encore  Payasse  de  Léoncayallo,  l'Etran- 
ger de  Vincent  d'Inby,  chanté  par  Bréval,  l'Enlèvement 
au  Sérail,  de  Mozart,  pour  les  débuts  de  M"es  Lind- 
say  et  Verlet,  avec  MM.  Affre,  Laffite  et  Gresse. 
Enfin  en  1904,  Tristan  et  Yseult,  avec  Mm6B  Grand- 
.iean, Rose  Féart,  MM.  Alvahi.z,  Gresse  et  Dllmas. 

L'année  suivante,  Gailhard  se  séparait  de  Capoul 
et  conservait  la  direction  jusqu'en  1908. 

A  signaler  une  reprise  d'Annulé  de  Gluck,  avec 
MM.  Affre,  qui  devait  êlre  remplacé  par  Muratore,^ 
Delmas,  M™*8  Bréval,  Féart,  Lindsay,  Demougeot 
et  Vix. 

Pour  la  danse,  l'Opéra  comptait  alors  M"es  Zam- 
belli,  Sandrini,  Hirsch,  Reauvais,  Barbier  et  Mante, 
Gailhard  reprenait  le  Freischutz,  engageait  Ml,e  Che- 
nal, M.  Rousselière,  et  montait  Ariane  de  Massenet. 
avec  Muratore,  M"10"  Bréval  et  Arbell. 

En  1908,  MM.  Messager  et  Broussan  furent  nommés 
directeurs,  et  conservèrent  comme  chef  d'orchestre 
M.  Vidal,  qui  devait  passer  en  1914,  comme  chef  de 
musique,  à  l'Opéra-Comique. 

Les  autres  chefs  d'orchestre  étaient  MM.  Busser, 
Rabaud  et  Bachelet. 

Les  nouveaux  directeurs  montèrent  le  Crépuscule 
des  Dieux  de  Wagner,  avec  Van  Dyck,  Delmas,  Gilly, 
jyjiues  (;Randjean  et  Rose  Féart. 

Ils  reprirent  Hippolyte  et  Aricie  de  Rameau,  avec 
Plamondon,  Delmas,  Gresse,  M"185  Bréval,  Hatto,  puis 
Mérentié,  et  pour  la  danse  M"'  Aida  Boni. 

Les  représentations  russes  de  Boris  Godounov,  de 
Moussorgsry,  avec  Chaliapine,  une  reprise  de  Thaïs, 
avec  Mllcs  Garden  et  Renaud,  l'engagement  de  M.  Franz 
précédèrenl  la  première'représentation  à  l'Opéra  de 
l'Or  dm  Rhin,  le  17  novembre  1909,  avec  MM.  Van 
Dyck,  Delmas,  Duclos,  Gresse,  Journet  et  Fabbrt, 
Mmes  Demougeot,  Cami'redon.  L'année  suivante,  les 
directeurs  montaient  la  Salomé  de  Richard  Strauss, 
avec  Mme  Mary  Garde.n  et  M.  Muratore,  la  Damnation 
de  Faust,  de  Berlioz,  adaptée  pour  la  scène,  avec 
MM.  Renaud,  Franz  el  M11"  Grandjean. 

Les  dernières  années  de  la  direction  Messager- 
Bruussan  virent  encore  le  Miracle  de  Georges  II  e,  le 
30  décembre  1910,  avec  MM.  Muratore,  Ghessi  ,  Fa- 
bbrt, M1"6  Chenal,  et  pour  la  danse  Mlle  Aida  Boni. 
En  1911,  Déjanire  de  Saint-Sakns,  le  22  novembre, 
avec  MM.  Muratore,  Dangès,  M0"8  Litvine,  Gall  et 
Gharny. 

Les  ballets  russes,  représentés  hors  série,  et  avec 
lesquels  l'Opéra  atteint  la  recette  de  40754  francs.se 
composaient  du  Carnaval,  des  Sylphides,  du  Spectre 
:le  la  Rose,  de  Srhéhérazade,  et  des  danses  du  Prince 
Igor. 

En  mars  1912,  l'Opéra  reprenait  les  Deux  Pigeons 
de  Messager,  avec  MM.  aveline,  Rourdeli.e,  Ray- 
mond, M™"  Zambklli,  Aida  Boni,  Meunier,  Piron. 
Enfin,  le  Ier  janvier  1914,  l'arsifal,  de  Wagner,  étant 
tombé  dans  le  domaine  public,  était  représenté  par 
M.  Franz  et  Mm  Bréval,  remplacée  quelques  jours 
après  par  Mme  Demougeot,  remplacement  qui  susci- 
tait aussitôt  un  procès. 

Pour  1914,  on  annonçait  Antnr.  de  Gabriel  Dupont, 
sur  le  livret  de  Chekri-Ganem1. 


TECIINlnl  E.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3* 


Le  régime  d'un  Administrateur  général,  ayant  la 
gestion  de  l'Opéra  pour  le  compte  de  l'Etat,  l'ut  aban- 
donné en  1866  par  le  Second  Empire;  le  gouverne- 
ment impérial  revint  au  système  adopté  par  la 
monarchie  de  juillet,  et,  «  considérant  qu'à  la  ges- 
tion d'un  théâtre,  même  de  l'ordre  le  plus  élevé,  se 
rattachent  nu  très  grand  nombre  de  questions  pré- 
sentant un  caractère  industriel  et  commercial,  et 
dont  le  règlement  est  en  conséquence  peu  compa- 
tible avec  les  habitudes  et  la  dignité  d'une  adminis- 
tration publique  »,  décréta,  le  22  mars,  que  la  gestion 
de  l'Opéra  serait  désormais  conliée  à  un  direcleur- 
cnlrepreneur  administrant  à  ses  risques  et  périls, 
avec  le  bénéfice  d'une  subvention  de  la  liste  civile, 
en  outre  de  celle  que  lui  allouait  l'Etat,  el  moyen- 
nant les  clauses  et  conditions  d'un  cahier  des  charges 
dressé  par  le  Ministre  d'Etat. 

Penin  quitta  bientôt  l'Opéra  pour  le  Théâtre-Fran- 
çais et  fut  remplacé,  en  1871,  par  Halanzier.  C'est 
sous  la  direction  de  celui-ci  que  la  salle  de  la  rue 
Le  Peletier  devait  brûler  deux  ans  plus  lard,  le 
28  octobre  1873,  au  cours  des  répétitions  de  la 
Jeanne  d'Are  de  Mermet.  L'Opéra,  qui  avait  cherché 
un  asile  provisoire  dans  la  salle  Ventadour,  inaugu- 
rait, le  15 janvier  1875,  le  monument  actuel,  construit 
par  Charles  Garnier. 

La  Troisième  République  a  laissé  l'Opéra  aux  mains 
de  l'entreprise  privée,  en  continuant  de  le  doter  de 
subventions  annuelles,  suivantles  errements  du  décret 
de  1866.  Nous  nous  déclarons  partisan  du  maintien 
de  l'état  de  choses  actuel.  L'exploitation  par  l'Etat 
grève  invariablement  le  budget  de  frais  inconnus 
air;  entreprises,  et  subordonne  toutes  les  initiatives 
à  trop  d'influences  diverses  pour  produire  des  résul- 
tats heureux. 

Les  Chambres  votent,  chaque  année,  un  crédit  des- 
tiné à  la  subvention  de  l'Opéra1.  Il  est  évident  que, 
si  ce  crédit  venait  à  être  supprimé,  les  entrepreneurs 
se  trouveraient  eux-mêmes  dégagés  de  leurs  obliga- 
tions. 

Le  ou  les  directeurs  sont  nommés  par  décret  du 
chef  de  l'Etat  sur  présentation  du  ministre  des  Beaux- 
Arts.  Ils  sont  liés  par  les  clauses  d'un  cahier  des 
charges  qui  réglementent  le  théâtre  et  son  exploita- 
tion. 

En  dehors  de  la  subvention,  l'Etat  fournit  la  jouis- 
sance gratuite  de  l'immeuble  de  l'Opéra  el  de  ses 
dépendances  suivant  un  état  des  lieux,  la  jouissance 
de  tout  le  matériel  de  l'exploitation  (mobilier  de  la 
salle  et  de  la  scène,  costumes,  partitions,  décora- 
tions, machines). 

Enfin,  l'entrepreneur  a  le  privilège  d'engager,  avec 
l'autorisation  du  ministre,  et  par  préférence,  les 
élèves  du  Conservatoire. 

De  son  côté,  l'entrepreneur  s'oblige,  par  le  cahier 
des  charges,  à  conserver  personnellement  la  direction 
de  l'Opéra,  et  il  ne  peut  ni  la  vendre,  ni  la  donner,  et 
ses  héritiers  n'y  ont  aucun  droit.  Pour  les  fonds 
nécessaires  à  l'exploitation  du  théâtre,  l'entrepre- 
neur ne  peut  se  les  procurer  que  par  la  voie  d'une 
commandite  simple,  et  il  s'interdit  de  constituer 
aucune  société  en  actions.  Il  doit,  de  plus,  justifier 
d'un  certain  apport,  sur  lequel  est  prélevé  le  caution- 
nement alfecté  à  la  garantie  du  payement  des  droits 


1.  La  loi  de  tinauees  porte 
redit  de  80U  000  francs  en  l'a 
ar  ta  môme  loi,  un  crédit  d 

caisse  des  retraites,  et  un  c 
lëqiie  publique. 


■  atiui-i'.  à  titre  (I.-  subvention, 

de  l'Opéra.  11  est  alloué,  en  out 

mil  francs  destine  à  la  .lolation 


d'auteur,  des  traitements  des  artistes,  du  droit  des- 
pauvres  et  des  indemnités  que  l'Etat  pourrait  ré- 
clamer. 

L'entrepreneur  ne  peut  enfin  conclure  aucun  traité 
dépassant  la  durée  de  sa  concession.  Il  est  tenu  de 
jouer  chaque  année  un  certain  nombre  d'oeuvres 
nouvelles  et  de  justifier  d'un  minimum  de  représen- 
tations. Chaque  mois,  il  doit  remettre  au  ministre  un 
état  constatant  l'exécution  de  ces  obligations,  faute 
de  quoi,  il  est  passible  d'amende. 

Aujourd'hui,  le  système  du  directeur-entrepreneur 
parait  définitivement  consolidé,  et  les  budgets  de 
chaque  année  consacrent,  sans  en  discuter  le  prin- 
cipe, l'attribution  des  800 000  francs  donnés  en  sub- 
vention <à  l'Opéra.  Le  genre  du  drame  musical,  qui 
était  entièrement  réservé  à  l'Opéra  par  les  législations 
favorables  au  privilège,  échappe  actuellement  en 
partie  à  ce  théâtre.  Toutes  les  pièces  de  musique 
tendent  à  se  fondre  dans  un  moule  semblable.  Les 
anciennes  et  traditionnelles  distinctions  entre  l'opéra- 
comique,  qui  ne  consistait,  en  définitive,  qu'en  pièces 
dialoguées,  coupées  de  couplets,  et  le  drame  musical 
entièrement  chanté,  disparaissaient  d'une  manière 
absolue.  Il  semble  cependant  qui'  les  œuvres  d'une 
tendance  très  moderne  comme  celles  de  Claude 
Debussy  ou  de  Duras  soient  dans  un  cadre  plus  appro- 
prié à  leur  tendance  ou  à  leur  esprit,  rue  Kavart. 
De  telle  sorte  que  les  œuvres  d'une  sentimentalité 
inquiète  ou  d'une  légèreté  séditieuse  resteraient  à 
l'Opéra-Comique,  tandis  que  l'Opéra  serait  le  théâtre 
îles  causes  héroïques  ou  légendaires,  le  théâtre  dt- 
Wagner,  dont  la  tétralogie  y  a  été  jouée  pour  la 
première  fois,  eu  juillet  1011,  d'une  façon  complète 
et  suivie.  Et  si  on  peut  se  permettre  une  telle  com- 
paraison; l'Opéra-Comique  garderait  les  délicates 
dentelles  de  la  Sainte-Chapelle,  tandis  qu'à  l'Opéra 
s'épanouirait  la  majesté  grandiose  de  .Notre-Dame. 


CAISSE   DES  RETRAITES  DE   L'OPÉRA 

La  Caisse  de  Pensions  de  Retraite  pour  le  person- 
nel de  l'Opéra,  supprimée  eu  1831,  lui  rétablie  en  is;;, 
par  décret  du  H  mai.  Créée  à  partirdu  Ier juillet  1856, 

elle  devait  être  gérée  par  l'administration  de  la  Caisse 
des  Dépôts  et  Consignations,  sous  l'autorité  et  la 
surveillance  du  Ministre  d'Etat. 

Cette  Caisse  de  Retraite  était  alimentée  par  une 
relenue  obligatoire  de  o  p.  100  sur  tous  traitements, 
appointements,  feux  assurés  ou  éventuels  n'excédant 
pas  40  000  francs  par  an,  et  gages  payés  à  quelque 
titre  que  ce  fût  au  personnel  de  l'Opéra;  parles  rele- 
nues  faites  aux  artistes,  dans  des  conditions  déter- 
minées, pour  les  absences  autorisées  et  congés;  pai 
le  produit  des  amendes  et  retenues  disciplinaires; 
par  le  montant  des  délits  et  condamnations  judi- 
ciaires prononcées  au  profit  de  l'administration  du 
théâtre;  par  le  produit  de  deux  représentations 
extraordinaires  ou  d'une  représentation  et  d'un  bal 
donnés  tous  les  ans  par  l'Opéra  au  profit  de  la  Caisse, 
soit  une  somme  de  :i0  000  francs  au  moins;  par  les 
arrérages  de  rentes  appartenant  à  la  Caisse;  par 
des  donations  et  legs;  enfin  par  un  fonds  annuel  de 
20  000  francs  accordé  par  la  liste  civile,  et  imputable 
sur  la  subvention  allouée  par  le  budget  de  l'Etal. 

Les  fonds  provenant  de  ces  diverses  ressources 
étaient  versés  à  la  Caisse  des  Dépôts  et  Consignations, 
qui  demeurait  exclusivement  chargée  du  placement 
en  rentes  sur  l'Etat  et  du  payement  des  pensions. 


KSCYCL0PÈD1K  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Avait  droit  à  une  pension  de  retraite  toute  personne 
attachée  à  un  titre  quelconque  à  l'Opéra,  après  une 
durée  de  services  variant  de  vingt  à  trente  ans  sui- 
vant la  nature  de  ses  fonctions,  lesquelles,  pour 
quelques-unes  de  ces  personnes,  devaient  èlre  exer- 
cées jusqu'à  l'âge  de  cinquante  et.  soixante  ans. 

La  pension  de  retraite  ainsi  acquise  se  trouvait 
basée  sur  le  traitement  moyen  des  six  dernières  an- 
nées, et  réglée  à  raison  d'un  soixantième  de  ce  trai- 
tement moyen  pour  chaque  année  de  service,  sans 
que  celte  pension  pût  être  jamais  inférieure  à  100  fr., 
ni  supérieure  à  6.000  francs. 

Kn  outre,  des  pensions  dites  de  réforme  étaient 
accordées,  avec  liquidation  immédiate  et  dans  des 
conditions  déterminées,  à  toute  personne  attachée 
à  l'Opéra  qui  avait  été  blessée  au  cours  de  son  ser- 
vice et  se  trouvait  dans  l'impossibilité  de  le  conti- 
nuer; ainsi  qu'aux  arliites  faisant  partie  du  person- 
nel du  chant,  de  la  danse  et  de  l'orchestre,  qui,  par 
suite  de  l'affaiblissement  de  leurs  facultés  artisti- 
ques, ne  pouvaient  plus  remplir  convenablement 
leur  emploi,  et  qui  justifiaient  des  trois  quarts  du 
temps  exigé  ordinairement  pour  l'établissement  du 
droit  à  la  pension. 

De  plus,  les  veuves  d'artistes,  employés  ou  agents 
attachés  à  l'Opéra  bénéficiaient,  sous  certaines  con- 
ditions, à  la  mort  de  leur  mari,  de  partie  de  la  pen- 
sion accordée  à  ce  dernier  soit  à  titre  de  pension 
ordinaire,  soit  à  titre  de  pension  de  réforme.  Pa- 
reille pension  partielle  était  également  concédée 
aux  enfants  mineurs  de  dix-huit  ans  et  fils  d'artis- 
tes ou  employés  ne  laissant  pas  de  veuves  survi- 
vantes. 

Perdait  naturellement  ses  droits  à  une  pension  de 
retraite,  tout  artiste  dont  l'engagement  avait  été  rési- 
lié pour  manquement  au  service  ou  pour  autre  fait 
grave  ;  lout  employé  ou  agent  démissionnaire,  des- 
titué ou  lévoqué  d'emploi. 

Tout  artiste  du  chant,  de  la  danse  et  de  l'orches- 
tre, titulaire  d'une  pension  sur  la  Caisse  de  Retraite, 
ne  pouvait  jouer  sur  aucun  théâtre  à  Paris,  si  ce 
n'est  pour  des  représentations  à  bénéfice  ou  pour 
une  œuvre  de  charité  quelconque,  et  après  avoir 
obtenu  l'autorisation  du  ministre.  Il  pouvail  égale- 
ment être  autorisé  parle  ministre  à  donner  des  repré- 
sentations sur  les  théâtres  des  déparlements  et  de 
l'étranger,  en  renonçant  au  payement  de  sa  pension 
pendant  la  durée  de  son  engagement.  En  cas  de  con- 
travention, la  pension  était  supprimée. 

Le  décret  du  22  mars  1866,  qui  revenait,  au  sys- 
tème adopté  par  la  Monarchie  de  juillet  et  rendait 
l'Opéra  à  l'entreprise  privée,  modifia  naturellement 
les  dispositions  du  décret  précité  du  li  mai  1856, 
en  prescrivant  que  toute  mesure  ayant  pour  objet 
même  de  changer  la  condition  des  artistes,  employés 
ou  agents  tributaires  de  la  Caisse  des  Retraites,  ne 
pourrait  être  prise  qu'après  autorisation  ministé- 
rielle. De  plus,  point,  très  important,  et  qui  n'était 
qu'une  conséquence  de  ce  que  l'administration  de  ['(  >- 
péra  cessait  d'appartenir  à  l'Etat  pour  revenir  à  un 
particulier:  le  régime  des  pensions  ne  devait  plus 
subsister  qu'au  prolit  des  artistes,  employés  ou 
agents  qui  se  trouvaient  tributaires  à  la  date  du 
22  mars  1866,  ou  de  leurs  ayants  droit. 

Le  21  novembre  1866  intervint  un  nouveau  décret 
modifiant  les  dispositions  du  précédent  en  ce  qui 
touche  l'autorisation  pouvant  être  donnée  aux  artis- 
tes de  jouer  sur  un  théâtre  autre  que  l'Opéra,  sans 
la  privation  de  leurs  droits.  Ce  nouveau  décret  décida 


que  tout  artiste  du  chant,  de  la  danse  et  de  l'orches- 
tre, titulaire  d'une  pension  sur  la  Caisse  des  Retrai- 
tes, pourrait,  sur  sa  demande,  être  autorisé  par  le 
ministre  à  jouer  sur  les  théâtres  de  Paris,  des  dépar- 
lements et  de  l'étranger  en  renonçant  au  payement 
de  sa  pension  pendant  la  durée  de  son  engagement; 
mais  qu'en  cas  de  contravention,  la  pension  pourrait 
être  supprimée. 

Le  décret  du  lo  octobre  1879  va  faire  cesser  une 
inégalité  choquante  existant  à  cette  époque  entre 
les  différents  artistes,  suivant  la  date  de  leur  entrée 
à  l'Opéra,  en  modifiant  les  dispositions  du  décret  du 
22  mars  1866,  qui  avait  créé  parmi  le  personnel  deux 
catégories  bien  distinctes:  celle  des  artistes  déjà 
titulaires  d'une  pension  au  22  mars  1866,  lesquels 
avaient  seuls  droit  à  la  retraite,  et.  celles  des  artis- 
tes non  titulaires  de  pensions  à  cette  date,  lesquels 
ne  pouvaient  jamais  prétendre  droit  à  aucune  re- 
traite. 

Deux  systèmes  se  trouvaient  en  présence,  qui  per- 
mettaient également  de  mettre  fin  à  cette  situation 
anormale  :  ou  bien  créer  une  seconde  Caisse  de  Re- 
traite coexistant  avec  celle  qui  fonctionnait  déjà, 
ou  bien  admettre  comme  tributaires  delà  première 
les  artistes,  employés  et  agents  qui  n'étaient  pas 
habiles  à  l'être,  si  l'adjonction  de  ces  nouveaux  par- 
ticipants ne  venait  pas  nuire  aux  intérêts  des  an- 
ciens et  léser  les  droits  qu'ils  avaient  acquis.  Or, 
cette  éventualité  ne  paraissait  pas  à  craindre,  car 
la  Caisse  de  l'Opéra,  qui  possédait  120  000  francs  de 
rentes  5  0/0  sur  l'Etat,  n'avait  alors  à  pourvoir  qu'au 
service  de  130  pensions  ne  dépassant  pas  une  dé- 
pense de  101  080  francs.  De  plus,  son  actif  se  com- 
posait du  montant  annuel  des  retenues  versées  par 
les  tributaires  d'alors,  au  nombre  de  191,  et  s'éle- 
vant  à  31  983  francs,  et  de  diverses  ressources  don- 
nant lieu,  par  année,  à  une  recette  de  40  000  francs 
environ.  Entre  les  recettes  et  les  dépenses  semblait 
donc  exister  une  marge  suffisante  pour  faire  fa.ee  aux 
charges  futures,  et,  par  l'adoption  de  ce  second  sys- 
tème, les  intérêts  des  artistes  déjà  tributaires  de 
pensions  ne  devaient  pas,  croyait-on,  êlre  lésés  par 
l'adjonction  de  nouveaux  tributaires.  Aussi,  est-ce 
ce  système  qui  prévalut  et  qui  fut  adopté  par  le  dé- 
cret du  15  octobre  1879. 

Ce  décret  décide,  en  effet,  que  le  fonctionnement 
de  la  Caisse  spéciale  des  Pensions  de  Retraite  pour  le 
théâtre  national  de  l'Opéra  est  rétabli  tel  qu'il  avait 
été  constitué  par  le  décret  du  14  mai  1856,  avec 
quelques  modifications  suggérées  par  l'expérience  et 
plus  compatibles  avec  le  système  de  l'entreprise 
privée. 

Comme  conséquence,  el  a  partir  du  1er  novembre 
1879,  étaient  applicables  les  dispositions  dudil  di  ci 
à  tous  artistes,  employés  et  agents  dont  les  traite- 
ments n'excédaieni  pas  12  000  francs.  Toutefois,  les 
artistes  alors  attachés  à  l'Opéra  en  vertu  d'enga- 
gements et  non  encore  tributaires  de  la  Caisse  ne 
devaient  le  devenir  que  de  leur  consentement.  Ils 
étaient  tenus  de  faire  connaître  leur  option  dans 
un  délai  de  quatre  mois. 

Pouvaient  également,  sur  leur  demande,  el  avec 
autorisation  du  ministre,  devenir  tributaires  de  la 
Caisse  les  artistes  qui  jouissaient  de  traitements  su- 
périeurs à  12000  francs,  quel  qu'eu  lût  le  chiffre.  La 
demande  devait  être  formée,  pour  ceux  qui  étaient 
alors  engagés,  dans  un  délai  de  quatre  mois  à  partir 
du  1er  novembre  1879;  et,  dans  un  délai  de  deux 
mois,  pour  ceux  qui  seraient  engagés  a  l'avenir. 


TECHNIQVE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3809 


Les  nouveaux  tributaires  étaient,  de  plus,  admis 
à  verser  des  retenues  rétroactives  pour  leurs  services 
antérieurs  au  ior  novembre  1879. 

La  Caisse  des  Retraites  se  trouvait  alimentée  par  : 
1"  Le  produit  de  la  retenue  de  5  p.  100  sur  tous 
traitements,  appointements,  feux  assurés  ou  éven- 
tuels des  tributaires  ; 

2°  Le  produit  de  toutes  les  amendes  et  retenues  dis- 
ciplinaires ; 

3°  Un  fonds  annuel  de  20000  francs,  imputable 
sur  la  subvention  annuelle  de  l'Opéra,  allouée  par 
le  budget  de  l'Etat  ; 

4°  Un  fonds  annuel  de  20  000  francs,  versé  par  le 
directeur  de  l'Opéra,  soit  à  l'aide  de  représentations 
spéciales  organisées  par  lui,  soit  de  ses  propies  de- 
niers ; 
5°  Les  arrérages  de  rentes  appartenant  à  la  Caisse  ; 
6°  Les  donations  et  legs  qui  pourraient  être  faits 
à  ladite  Caisse,  et  dont  l'acceptation  ne  pourrait  avoir 
lieu  que  dans  les  formes  déterminées  par  l'article  910 
du  Co'ie  civil. 

L'admission  à  la  retraite  des  tributaires  de  la 
Caisse  devait  être  prononcée  dorénavant  par  arrêté 
du  ministre. 

Les  pensions  à  liquider,  en  vertu  du  décret  du 
14  mai  1856,  ne  devaient  être  servies  et  payées  qu'a- 
près une  période  de  dix  années  écoulées,  et  sans 
rappel  d'arrérages  antérieurs  au  1"  novembre  1 87'.». 
Tout  artiste  du  chant,  de  la  danse  et  de  l'orches- 
tre, titulaire  d'une  pension  de  retraite  dont  le  chiffre 
n'excédait  pas  3 000  francs,  pouvait  jouer  sur  les 
théâtres  de  Paris  et  des  départements  sans  l'auto- 
risation du  ministre,  sauf  le  cas  où  il  viendrait  à 
reprendre  du  service  à  l'Opéra. 

Le  26  mars  1887  fut  signé  le  décret  ordonnant  la 
liquidation  de  la  Caisse  de  Retraite  de  l'Opéra  et 
abolissant,  par  suite,  les  dispositions  des  décrets  ci- 
dessus  relatés  du  14  mai  1856,  qui  avait  créé  celte 
caisse,  et  du  15  octobre  1879  qui  en  avait  rétabli  le 
fonctionnement  avec  certaines  modifications. 

Avant  d'indiquer  les  dispositions  contenues  dans 
ce  décret  et  pour  les  bien  comprendre,  il  importe 
tout  d'abord  de  montrer  dans  quelles  conditions,  et 
pour  quels  motifs  généraux  et  des  plus  sérieux,  le 
gouvernement  fut  amené  à  détruire  d'un  coup  l'œu- 
vre de  ses  prédécesseurs  et  à  supprimer,  en  respec- 
tant seulement  les  droits  acquis,  cette  Caisse  de 
Retraite  qu'ils  avaient  créée.  Il  importera  ensuite 
d'indiquer  l'esprit  qui  dut  présider  à  la  rédaction 
du  nouveau  décret,  d'examiner  brièvement  avec 
quelles  difficultés  se  trouvèrent  aux  prises  ceux  qui 
furent  chargés  de  son  exécution,  de  citer  ensuite 
les  décrets  et  arrêlés  qui  suivirent  et  furent,  pour 
ainsi  dire,  comme  le  corollaire  forcé  du  décret  du 
26  mars  1887. 

Sans  parler  des  critiques  dont  l'administration 
des  Beaux-Arts  avait  été  l'objet  dans  les  dernières 
années  qui  précédèrent  1887,  et  en  dégageant  de 
suite  la  responsabilité  de  cette  administration  au 
sujet  de  la  situation  précaire  de  la  Caisse,  dont  elle 
ne  pouvait,  à  aucun  litre,  être  déclarée  responsable, 
car  sa  gestion  fut  toujours  irréprochable,  il  est  bon 
de  signaler,  cependant,  les  plaintes  nombreuses  et 
chaque  jour  plus  fréquentes  qui  se  manifestèrent 
pour  les  retards  apportés  à  la  liquidation  d'un  cer- 
tain nombre  de  pensions. 

La  situation  de  la  Caisse  devenait,  en  effet,  chaque 
année  moins  prospère,  mais,  répétons-le,  la  faute 
n'en   incombait  nullement   à  l'administration   des 
Copyrif/hl  by  Librairie  Delaqrave,  1930. 


Beaux-Arts;  le  mal  venait  en  grande  partie  de  l'éta- 
blissement de  la  Caisse,  tel  qu'il  avait  eu  lieu  en 
1879;  c'est  à  celte  époque  que  le  gouvernement  ne 
s'était  pas  suffisamment  rendu  compte  de  la  dépense 
dont  il  grevait  l'avenir.  En  admettant  le  personnel 
à  racheter  ses  services  passés  au  moyen  de  retenues 
rétroactives,  on  rétablissait  dans  leur  intégralité  à 
peu  près  complète  les  charges  que  la  Caisse  aurait 
eu  à  supporter  si  elle  n'avait  pas  cessé  de  fonction- 
ner régulièrement  depuis  1850.  Or,  pendant  la  pé- 
riode d'interruption,  elle  n'avait  pas  bénéficié  de  la 
capitalisation  des  intérêts  sur  le  montant  des  rete- 
nues, elle  n'avait  pas  couru  les  chances  de  démission, 
de  révocation  ou  de  mortalité  du  personnel,  et  enfin 
elle  avait  perdu  peudant  neuf  ans  la  subvention  de 
30  000  francs  mise  à  la  charge  du  directeur.  De  plus, 
en  réduisant  cette  subvention  à  20  000  francs,  et  en 
abaissant  de  40000  francs  à  12000  francs  la  limite 
au-dessus  de  laquelle  les  traitements  étaient  affran- 
chis de  la  retenue,  le  décret  de  1879  privait  la  Caisse 
de  deux  ressources  importantes  et  accentuait  le 
déraut  d'équilibre  entre  les  dépenses  et  les  recettes. 
Or,  cet  équilibre  nécessaire  entre  les  recettes  et 
les  dépenses  devenait  chaque  jour  plus  difficile  à 
établir  à  raison  de  la  diminution  du  taux  des  rentes 
sur  l'Etat,  qui  avaient  été  achetées  avec  le  montant 
des  sommes  déposées  à  la  Caisse  des  Consignations 
et  provenant  des  retenues  opérées  sur  les  appointe- 
ments des  artistes,  agents  et  employés  tributaires. 

Mais  le  vice  fondamental  résidait  surtout  dans  la 
détermination  faite  à  l'avance  des  charges  de  la 
Caisse,  d'une  manière  invariable,  et  sans  aucune 
relation  nécessaire  avec  ses  revenus.  En  1850,  d'au- 
tre part,  on  n'avait  pu  prévenir  ni  l'augmentation  du 
personnel,  ni  la  progression  toujours  croissante  des 
traitements.  Enfin,  l'expérience  a  démontré  que  les 
caisses  spéciales  de  retraite  ne  peuvent  faire  face  à 
leurs  charges  que  si  elles  reçoivent,  à  l'origine,  un 
riche  fonds  de  dotation. 

La  liquidation  une  fois  décidée,  restait  à  savoir 
dans  quelles  conditions  elle  aurait  lieu.  Il  fallait, 
avant  toul,  respecter  les  droits  acquis  par  les  titu- 
laires, lesquels  avaient  compté,  ajuste  titre,  que  les 
retenues  pratiquées  sur  leurs  traitements  leur  pro- 
fiteraient un  jour  dans  les  conditions  prévues. 

Deux  moyens  principaux  s'offraient  :  rembourser 
aux  titulaires  le  montant  des  retenues  opérées,  eu 
tenant  compte,  dans  la  mesure  du  possible,  de  la 
bonification  des  intérêts  ;  continuer  pour  l'avenir  et 
dans  des  conditions  nouvelles,  en  sauvegardant  lis 
intérêts  pécuniaires  de  l'administration  sans  porter 
aucune  atteinte  aux  pensions  servies,  le  versement 
des  pensions  auxquelles  Ips  titulaires  avaient  droit 
à  l'époque  de  leur  retraite.  C'est  de  ce  double  prin- 
cipe qu'on  s'inspira,  en  s'efforçant  d'arriver  dans  un 
temps  rapide  au  remboursement  de  toutes  les  pen- 
sions, qui  permettrait  d'opérer  une  liquidation  défi- 
nitive. 

De  l'enquête  conduite  tant  auprès  du  directeur  de 
l'Opéra  qu'auprès  des  chefs  des  différents  services, 
résulta  tout  d'abord  cette  constatation  :  le  régime 
des  pensions  ne  rencontrait  de  réelle  faveur  que 
dans  le  personnel  artistique.  Les  employés  et  ouvriers, 
tailleurs,  couturières,  machinistes  et  autres,  n'arri- 
vaient en  effet  que  difficilement  à  réunir  les  condi- 
tions d'âge  et  de  services  requises  pour  la  retraite, 
les  uns  à  raison  de  l'âge  auquel  ils  étaient  entrés  à 
l'Opéra,  les  autres  à  raison  de  l'épuisement  préma- 
turé auquel  les  condamnait  presque  fatalement  le 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE    MI  CONSERVATOIRE 


service  de  la  nouvelle  scène.  D'autre  part,  dans  les 
ealégBtïeS  de  l'administration  et  du  contrôle,  les  ap- 
pointements, très  peu  élevés  en  général,  ne  donnaient 
aux  titulaires  qu'un  chiffre  de  pension  insignifiant. 
Il  était,  par  suite,  évident  que  les  employés  de  ces 
divers  services  pouvaient  être  aisément  remplacés, 
et  qu'il  n'y  avait  pas  d'intérêt  marqué  à  les  attacher 
à  l'Opéra  par  l'appât  d'une  pension  de  retraite. 

Il  n'en  était  pas  de  même  pour  les  catégories  qui 
concouraient  à  l'interprétation  des  œuvres  lyriques. 
Ce  personnel,  peu  prévoyant  de  sa  nature,  voyait 
un  précieux  avantage  dans  les  dispositions  qui  lui 
garantissaient  la  sécurité  de  ses  vieux  jours.  La  pers- 
pective de  la  pension  devait  resserrer  le  lien  qui 
attachait  l'artiste  à  la  maison,  l'associer  en  quelque 
sorte  à  sa  prospérité  et  l'intéresser  à  son  avenir. 

C'est  en  s'inspirant  de  ces  considérations  que  les 
membres  de  la  commission  chargée  d'élaborer  les 
principes  du  décret  relatif  à  la  liquidation  de  la 
Caisse  des  Retraites  décidèrent  que  si,  pour  des  rai- 
sons d'ordre  pécuniaire,  cette  liquidation  devait 
être  ordonnée,  il  était  urgent  de  continuer  le  ser- 
vice des  pensions  pour  les  artistes  déjà  titulaires, 
afin  de  ne  point  priver  de  leur  concours  notre  Aca- 
démie nationale  de  musique,  alin  aussi  de  les  faire 
bénéficier  des  avantages  auxquels  leurs  très  utiles 
services  leur  donnaient  droit. 

Ces  principaux  motifs  une  fois  indiqués,  voici 
quelles  sont  les  dispositions  du  décret  du  26  mars 
1887,  puis  des  décrets  et  arrêtés  du  28  mars  1887, 
du  1«  septembre  1887,  du  31  juillet  1888,  du  20  dé- 
cembre 1888,  du  22  juin  1880,  qui  vinrent  ensuite 
le  compléter  : 

Décret  relatif  à  la  liquidation  de  la  Caisse  de 
Retraite  instituée  au  profit  des  artistes  et  em- 
ployés de  l'Opéra. 

«  Le  Président  de  la  République  Française, 
«  Vu  le  décret  du  14  mai  18 j0  portant  création 
d'une  Caisse  spéciale  de  Pensions  de  Retraite  pour 
le  théâtre  national  de  l'Opéra; 

«  Vu  le  décret  du  22  mars  1860,  qui,  en  rendant  à 
l'entreprise  privée  la  gestion  de  ce  théâtre,  n'a  main- 
tenu le  régime  des  pensions  qu'au  profit  des  artistes, 
employés  et  agents  qui  se  trouvaient,  à  cette  date, 
tributaires  de  la  Caisse  ou  à  leurs  ayants  droit; 

«  Vu  le  décret  du  15  octobre  1879,  portant  réta- 
blissement du  régime  des  pensions-, 

«  Sur  le  rapport  du  Ministre  de  l'Instruction  publi- 
que et  des  Beaux-Arts, 
i<  Décrète  : 
a  Article  premier.  —  Il  sera  procédé  à  la  liquida- 
tion de  la  Caisse  de  Retraite  instituée  au  profit  des 
artistes  et  employés  de  l'Opéra. 

«  En  conséquence,  les  dispositions  des  décrets  du 
14  mai  1850  et  du  15  octobre  1879  cesseront  d'être 
appliquées  aux  artistes  et  employés  admis  à  partir 
du  1"  avril  prochain. 

«  Art.  2.  —  Les  tributaires  de  la  Caisse  qui  auront 
interrompu  leur  service  pendant  plus  d'une  année, 
pour  tout  autre  motif  que  le  service  militaire  ou 
une  maladie  régulièrement  constatée,  seront  consi- 
dérés comme  démissionnaires. 

«  S'ils  sont  de  nouveau  admis  à  l'Opéra,  ils  ne 
pourront  participer  aux  avantages  de  la  Caisse  des 
Retraites. 

«  Art.  3.  — Ceux  des  employés  et  agents  apparte- 
nant actuellement  aux  services  de  l'administration, 


de  la  scène,  du  contrôle,  des  bâtiments,  des  décora- 
tions, des  costumes  et  de  la  figuration,  qui  ont  été 
assujettis  au  payement  de  la  retenue  de  5  p.  lot»,  er, 
vertu  du  décret  du  15  octobre  1879,  pourront,  dans 
un  délai  de  six  mois  à  dater  de  ce  jour,  réclamer  le 
remboursement  des  versements  effectués  par  eux. 

«  Il  sera  bonifié  sur  le  montant  des  retenues  an- 
nuelles un  intérêt  simple  de  4  0/0,  calculé  à  la  date 
du  remboursement. 

«  Les  dispositions  des  deux  paragraphes  précédents 
pourront  être  étendues  aux  tributaires  des  autres 
services  de  l'Opéra  par  un  arrêté  ministériel  rendu 
dans  le  cours  de  la  présente  année.  Le  délai  de  six 
mois  courra  de  la  date  de  cet  arrêté. 

«  Art;  4.  — Il  ne  sera  plus  accordé  de  pensions  de 
réforme,  dans  les  conditions  prévues  â  l'article  17 
du  décret  du  14  mai  1856,  aux  tributaires  des  services 
de  l'administration,  de  la  scène,  du  contrôle,  des 
bâtiments,  des  décorations,  des  costumes  et  de  la 
liguration  admis  depuis  1879. 

«  Ceux  qui  justifieront  être  dans  les  conditions 
prévues  audit  article  pourront,  après  avis  conforme 
de  la  commission,  dont  il  sera  parlé  à  l'article  sui- 
vant, obtenir  le  remboursement  de  leurs  retenues 
avec  intérêts  simples  de  i  0  0. 

«  Les  mêmes  mesures  seront  appliquées  aux  ar- 
tistes du  chant,  des  chœurs,  de  la  danse,  du  ballet 
et  de  l'orchestre,  si  un  arrêté  ministériel,  rendu  en 
conformité  de  l'article  précédent,  autorise  le  rem- 
boursement des  retenues  aux  tributaires  de  ces 
différents  services. 

«  Art.  5.  —  La  liquidation  sera  opérée  par  les  soins 
d'une  commission  composée  de  la  manière  suivante  : 
«  Un  conseiller  d'Etat,  président; 
«   Deux  représentants  de  l'administration  des  Fi- 
nances; 

«  Deux  représentants  de  l'administration  des  Beaux- 
Arts; 

«  Un  représentant  de  la  Caisse  des  Dépôts  et  Con- 
signations; 
«  Le  directeur  de  l'Opéra; 

«  Deux  artistes  ou  employés  de  l'Opéra,  tributai- 
res de  la  Caisse  des  Retraites,  dont  un  au  moins 
admis  depuis  1879. 

«  Les  membres  de  la  commission  seront  nommés 
par   un  décret,    sur  la  proposition  du   Ministre  de 
l'Instruction  publique  et  des  Beaux-Arts. 
«  La  commission  élira  son  vice-président. 
«  Le  secrétaire  et  le  secrétaire  adjointseront  nom- 
més par  arrêté  ministériel. 

«  Art.  6.  —  La  commission  déterminera  annuelle- 
ment, d'après  les  ressources  de  la  Caisse,  le  chiffre 
que  l'ensemble  des  liquidations  ne  pourra  pas  dé- 
passer pendant  l'année;  elle  statuera  sur  les  achats, 
ventes  ou  conversions  de  valeurs;  elle  donnera  son 
avis  sur  toutes  les  autres  questions  intéressant  la 
Caisse. 

«  Art.  '.  —  Les  fonds  de  la  Caisse  pourront  être 
placés  soit  en  rentes  sur  l'Etat,  soit  en  obligations 
de  chemins  de  fer  français,  de  la  Ville  de  Paris,  ou 
du  Crédit  foncier  de  France. 

«  Les  titres  resteront  déposés  à  la  Caisse  des  Dépôts 
et  Consignations,  qui  demeure  chargée  de  la  gestion 
de  la  Caisse. 

«  Art.  8.  —  Les  dispositions  de  détail  relatives  au 
remboursement  des  retenues  seront  réglées  par  déci- 
sion ministérielle. 

«  Art.  9.  —  Sont  abrogées  les  dispositions  des  dé- 
crets du  14  mai  1856,  du  22  mars  1806,  du  iS  octobre 


TECHNIQUE,  ESTHETIQUE  ET  PEDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3811 


■1879,  contraires  aux  prescriptions  du  présent  décret. 
«  Art.  10.  —  Le  Ministre  de  l'Instruction  publique 
et  des  |Beaux-Arts  est  chargé  de  l'exécution  du  pré- 
sent décret  qui  sera  publié  au  Journal  officiel  et 
inséré  au  Bulletin  des  Lois. 
«  Fait  à  Paris,  le  26  mars  1887. 

n  Signé  :  Jules  Grévy. 
ii  Par  le  Président  de  la  KépubHque  : 
ii  Le  ilinislre  tic  l'Instruction  publique  el  des  Beaux-Arts, 
«  Signé  :  Berthelol.  >> 

Arrêté  relatif  à  l'exécution  du  décret 
du  26  mars  1887. 

«  Le  Ministre  de  l'Instruction  publique,  des  Cultes 
et  des  Beaux-Arts, 

«  Vu  l'arrêté  en  date  du  17  novembre  1886  ayant 
constitué  une  commission  d'examen  et  de  réforme  de 
laCaissedelietraitedutliéàtrenationaldel'Opéracréée 
par  les  décrets  des  14  mai  1856  et  13  octobre  1879; 

«  Vu  le  décret  du  26  mars  1887  réglant  le   mode 
de  liquidation  de  la  Caisse  de  retraite  de  ce  tbéàtre, 
«  Arrête  : 

«  Article  premier.  —  Les  dispositions  des  décrets 
des  14  mai  1856  et  la  octobre  1879  cesseront  d'être 
appliquées  aux  arlistes,  employés  et  agents  admis  au 
théâtre  national  de  l'Opéra  à  partir  du  1er  avril  i*S7. 

«  En  conséquence,  les  traitements  de  ces  agents 
ne  seront  pas  soumis  à  une  retenue  de  5  p.  100  au 
profit  de  la  Caisse  de  Retraite  de  ce  théâtre. 

«  Art.  2.  —  Sont  admis  à  Ja  faveur  de  l'option 
entre  la  continuation  de  leurs  versements  à  la  Caisse 
de  Retraite  au  théâtre  national  de  l'Opéra,  modifiée 
par  les  décrets  des  26  mars  et  7  avril  18871,  et  le 
remboursement  de  leurs  retenues  avec  intérêt  de 
4  0/0  l'an,  ceux  des  tributaires  admis  en  vertu  du 
décret  du  15  octobre  1879  appartenant  aux  services 
suivants  : 

Administration;  Costumes;  Scène. 

Bâtiments;  Décoration; 

Contrôle,-  Figuration; 

«  Art.  3.  —  Le  délai  d'option  pour  ces  tributaires 
est  de  six  mois,  à  partir  du  1er  avril  1887.  L'intérêt 
pour  les  retenues  de  chaque  année  sera  compté  de- 
puis le  1er  janvier  de  l'année  suivante  jusqu'au 
30  septembre  1887. 

«  Les  tributaires  qui  auront  fait  connaître  leur 
renonciation  à  la  Caisse  avant  le  1er  septembre  pro- 
chain recevront  les  sommes  qui  leur  sont  dues  dans 
la  première  quinzaine  d'octobre  1887.  Ceux  des  tri- 
butaires qui  auront  opté  pour  le  remboursement 
dans  le  courant  de  septembre  seront  remboursés 
dans  la  première  quinzaine  de  novembre  1887. 

«  Art.  4.  —  Tout  tributaire  appartenant  aux  ser- 
vices désignés  dans  l'article  2,  et  qui  n'aura  pas 
réclamé  dans  le  délai  de  six  mois  le  remboursement, 
sera  tenu  de  continuer  ses  versements  de  S  p.  100  a 
la  Caisse  de  Retraite. 

ci  La  demande  de  remboursement  ne  peut  être 
admise  qu'autant  qu'elle  a  été  produite  par  un  tri- 
butaire actuellement  en  fonctions  à  la  date  de  sa 
demande. 

«  Art.  a.  —  Le  directeur  des  Beaux-Arts  et  le  chef 
du  service  du  bureau  des  théâtres  sont  chargés  de 
l'exécution  du  présent  arrêté. 
i<  Pans,  le  2S  mars  1887. 

«  Sii/tté  :  E.  Spolier.  » 

t.  Le  décret  du  7  avril  1SS7  pourvoit  a  la  nomination  des  membres 
rie  la  commission  de  liquidation  i  ostïtuêe  confoi  mentent  à  l'article  5  du 
décret  du  26  mars  ISS". 


Arrêté  complétant  les  dispositions 
de  l'arrêté  précédent. 
«  Le  Ministre  de  l'Instruction  publique,  des  Cultes 
et  des  Beaux-Arts, 

«  Vu  l'arrêté  en  date  du  17  novembre  1886  ayant 

constitue  une  commission  d'examen  et  de  réforme 

de  la  Caisse  de  Retraite  du  théâtre  national  de  l'Opéra 

créée  par  les  décrets  des  14  mai  1856  et  15  octobre  1879  • 

«  Vu  le  décret  du  26   mars  1887  réglant  le  mode 

de  liquidation  de  la  Caisse  de  Retraite  de  ce  théâtre, 

«  Arrête  : 

'Article  premier.  -  Sont  admis  à  la  faveur  de 

option  entre  la  continuation  de  leurs  versements  à 

la  Caisse  de  Retraite  du  théâtre  national  de  l'Opéra 

modiuee  par  les  décrets  des  26  mars  et  7  avril  1887 

et  le  remboursement  de  leurs  retenues  avec  intérêt 

de  *  0/0  I  an,  ceux  des  tributaires  admis  en  vertu  du 

décret  du  15  octobre  1879  appartenant  aux  services 

suivants  : 

Chant;  Danse;  Orchestre. 

Chœurs;  ballet; 

«  Art.  2.  —  Le  délai  d'option  pour  ces  tributaires 
est  de  six  mois,  à  partir  du  l«r  septembre  1887 
L  intérêt  pour  les  retenues  de  chaque  année  sera 

féTieMSsV"  JanVi6r  ^  lannée  SUiVa"le  JUSqU'à  fi" 
«  Les  tributaires  qui  auront  fait  connaître  leur 
renonciation  â  la  Caisse  avant  le  le.-  février  prochain 
recevront  les  sommes  qui  leur  sont  dues  dans  la  pre- 
mière quinzaine  de  mars  1888.  Ceux  des  tributaires 
qui  auront  reclamé  le  remboursement  dans  le  cou- 
rant de  février  seront  remboursés  dans  la  première 
quinzaine  d'avril  1888. 

.  "  Art\  ?'  ~  Tout  tributaire  appartenant  aux  ser- 
vices désignes  dans  l'article  1",  et  qui  n'aura  pas 
reclamé  le  remboursement  dans  le  délai  de  six  mois 
sera  tenu  de  continuer  ses  versements  de  a  p.  100  à 
la  Caisse  de  Retraite. 

«  La  demande  de  remboursement  ne  peut  être  ad- 
mise qu  autant  qu'elle  a  été  produite  par  un  tributaire 
en  activité  de  service  à  la  date  de  sa  demande 

Art.  4.  —  Le  directeur  des  Beaux-Arts  et  le  chef 
du  service  du  bureau  des  théâtres  sont  chargés  de 
1  exécution  du  présent  arrêté. 

«  Paris,  le  1"  septembre  1887. 

«  Signé  :  E.  Spuller.  .1 
Décret  concernant  les  mineurs  tributaires 
de  la  Caisse  de  Retraite. 
i<  Le  Président  de  la  République  Française, 
«  Sur  le  rapport  du  Ministre  de  l'Instruction  pu- 
blique et  des  Beaux-Arts; 

«  Vu  le  décret  du  26  mars  1887  relatif  à  la  liqui- 
dation de  la  Caissejde  Retraite  instituée  au  profit  des 
artistes  el  employés  de  l'Opéra; 

«  Vu  l'avis  de  la  commission  de  liquidation,  en  date 
du  9  juillet  1888, 
«  Décrète  : 
«  Artick  premier.  -  Les  artistes  de  l'Opéra  qui  ont 
déclare,  dans  les  délais  fixés  par  le  décret  susvisé, 
renoncer  au  bénéfice  de  la  Caisse  de  Retraite  et  dont 
la  déclaration  n'a  pu  être  reconnue  valable  en  raison 
de  leur  âge,  pourront,  dans  les  trois  mois  qui  sui- 
vront leur  majorité,  s'ils  appartiennent  encore  à 
cette  époque  au  personnel  de  l'Opéra,  renouveler  leur 
option  et  recevoir  le  remboursement  des  retenues 
versées  par  eux  avec  bonification  des  intérêts  simples 
à  4  0/0  calculés  jusqu'à  la  date  du  remboursement. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


«  Art.  2.  —  Le  Ministre  de  l'Instruction  publique 
et  des  Beaux-Arts  est  chargé  de  l'exécution  du  pré- 
sent décret,  qui  sera  inséré  au  Journal  officiel  et  publié 
au  Bulletin  des  Lois. 

,<  Fait  à  Paris,  le  31  juillet  1888.       „  signé  .  Carnot_ 

.i  Piir  le  préaident  de  la  République  : 
t.e  Ministre  de  l'Instruction  publique  et  îles  Beaux-Arts. 
Signe  :  Ed.  Lockroy.  » 

Décret  modifiant  l'article  5,  §  7,  du  décret 

du  25  mars  1887. 
«  Le  Président  de  la  République  Française, 
»  Sur  le  rapport  du  Ministre  de  l'Instruction  pu- 
blique et  des  Beaux-Arts, 

.i  Vu  l'article  5  du  décret  du  26  mars  1887; 
»  Vu  la  lettre,  en  date  du  7   décembre  1888,  de 
M.  le  Conseiller  d'Etat,  président  de  la  commission 
de  liquidation  de  la  Caisse  de  Retraite  du  théâtre 
national  de  l'Opéra; 
«  Décrète  : 
h  Article  premier.  —  Le  paragraphe  7  de  l'article  ;i 
du  décret  du  26  mars  1887  ainsi  conçu  : 

«  Deux  artistes  ou  employés  de  l'Opéra,  tributaires 
de  la  Caisse  des  Retraites,  dont  un  au  moins  admis  de- 
puis IS79,  »  est  et  demeure  ainsi  modifié  : 

((  Deux  artistes  ou  employés  de  l'Opéra,  tributaires 
ou  pensionnés  de  la  Caisse  des  Retraites,  dont  un  au 
moins  admis  depuis  1879. 

«  Art.  2.  —  Le  Ministre  de  l'Instruction  publique 
et  des  Beaux-Arts  est  chargé  de  l'exécution  du  pré- 
sent décret. 

«  Fait  ;i  Paris,  le  20  décembre  1S88.     (|  S/(/H(.  .  Carnot_ 
«  Par  le  Président  de  la  République  : 
h  Le  Ministre  île  l'iiislriictinn  publique  et  i/o  Ileuu.l-Arh, 
Signé  :  E.  Lockroy.  » 

Décret  complétant  l'article  6  du  décret 
du  14  mai  1856. 

u  Le  Président  de  la  République  Française, 
n  Sur  le  rapport  du  Ministre  de  l'Instruction  pu- 
blique et  des  Beaux-Arls, 

o  Vu  l'article  6  du  décret  du  14  mai  18:i6  instituant 
une  Caisse  spéciale  de  Pensions  de  Retraite  pour  le 
personnel  du  théâtre  de  l'Opéra; 

«  Vu  le  décret  du  26  mars  1887,  relatif  à  la  liquida- 
tion de  ladite  Caisse  de  Retraite; 

«  Considérant  que,  par  suite  de  la  mise  en  liqui- 
dation de  la  Caisse  des  Retraites  de  l'Opéra,  il  n'est 
plus  possible  de  faire  supporter  par  le  budget  des 
Beaux-Arts  les  frais  d'impression  nécessités  pour  le 
service  de  cette  Caisse; 
«  Décrète  : 
«  Article  premier.  —  L'arlicle  6du  décrel  du  14  mai 
1856  est  complété  par  la  disposition  suivante  : 

«  Toutefois,  les  dépenses  d'impression  nécessitées 
pour  le  service  de  la  Caisse  des  Retraites  (Brevets  de 
pension,  Rapports  de  la  commission  de  liquidation, 
etc.)  seront  payées  sur  les  ressources  de  la  Caisse. 

«  Les  états  de  dépenses  seront  arrêtés  par  la  com- 
mission de  liquidation. 

«  Art.  2.  —  Le  Ministre  de  l'Instruction  publique 
et  des  Beaux-Arts  est  chargé  de  l'exécution  du  pré- 
sent décret,  qui  sera  inséré  au  Bulletin  des  Lois. 
••  Fait  à  Paris,  le  82  juin  1889.         «  Sig»è  :  Cwnot. 
«  Parle  président  de  la  République  : 
«  Le  Ministre  ie  l'Instruction  publique  et  des  Beaux-Arts, 
«  Signé  :  A.  Fallières.  « 


Nous  croyons  devoir  maintenant  rapporter  un  cer- 
tain nombre  de  décisions  émanant  de  la  commission 
de  liquidation  de  la  Caisse  des  Retraites1,  qui  présen- 
tent une  importance  considérable  et  font  jurispru- 
dence à  l'égard  des  intéressés  : 

Amendes  et  retenues  disciplinaires 
de  traitement. 
«  L'Administration  de  l'Opéra  devra  produire 
chaque  mois  devant  la  commission  un  étal  spécial 
des  retenues  disciplinaires  infligées  au  personnel 
de  l'Opéra,  lequel  état  sera  signé  par  chaque  artiste 
ou  employé  auquel  une  amende  aura  été  infligée.  » 
[Séance  du  7  mars  1888.) 

«  Toutes  les  amendes  et  retenues  disciplinaires 
de  traitement  infligées  au  personnel  de  l'Opéra  doi- 
vent être  versées  à  la  Caisse  des  Retraites. 

«  Ne  sont  pas  comprises  parmi  les  retenues  disci- 
plinaires, les  retenues  de  cachets  pour  représenta- 
tions manquées.  »  (Séance  du  18  mai  1888.) 

Choristes  remplaçants. 
«  Les  choristes  remplaçants  entrés  à  l'Opéra  anté- 
rieurement à  la  liquidation  de  la  Caisse  des  Retraites 
ne  subissant  pas  la  retenue  de  j  p.  100  sur  leur  trai- 
tement ne  peuvent,  bien  que  pourvus  d'engagements 
avec  l'administration  de  l'Opéra,  être  considérés 
comme  tributaires  de  cette  Caisse.  »  (Séances  des 
9  juillet  1888  et  7  décembre  ISS9.) 

Pensions. 

ii  Aucune  demande  de  pension  ne  pourra  être  sou- 
mise à  la  commission  sans  être  accompagnée  d'un 
dossier  régulièrement  établi  et  comprenant  : 

«  L'acte  de  naissance  de  l'intéressé  ; 

o  Les  certilicals  nécessaires  délivrés  soit  par  le 
chef  de  service  compétent,  soit  par  un  médecin  as- 
sermenté de  l'Opéra; 

«  Un  état  signé  par  le  tributaire,  contenant  l'énu- 
mération  de  tous  les  services  qu'il  juge  propres  à  lui 
constituer  un  droit  à  pension.  »  {Séance  du!)  mai  1887. 

«  Le  directeur  de  l'Opéra  devra  présenter  à  la 
commission,  avant  le  1er  octobre  de  chaque  année, 
ses  propositions  de  pensions  pour  l'année  suivante.  » 
[Séance  du  19  janvier  1888. 

ii  La  commission  fixera,  avant  le  30  juin  de  chaque 
année,  le  crédit  à  ouvrir  pour  l'inscription  des  pen- 
sions de  l'année  suivante.  »  (Séance  du  I9janv.  1S88.) 

n  Si  le  total  des  pensions  d'ancienneté  concédées 
pendant  l'année  n'atteint  pas  le  cbilfre  du  crédit  ins- 
crit pour  cet  exercice,  le  reliquat  ne  peut  s'ajouterait 
crédit  de  l'année  suivante.  »  (Séancedu  10  mars  1890.' 

Provisions  d'arrérages  de  pensions. 

«  Des  provisions  d'arrérages  de  pensions  pourront 
être  accordées  aux  artistes  et  employés  en  instance 
pour  obtenir  la  liquidation  de  leur  retraite. 

«  En  procédant  à  l'examen  des  dossiers  de  pen- 
sions, la  commission  décidera  s'il  y  a  lieu  d'autoriser 
le  payement  des  arrérages  par  provision. 

«  Seront  applicables  aux  provisions  d'arrérages 
les  articles  30  §  2,  33,  34,  35  et  36  du  décret  du  1  i  mai 
1856. 

«  L'état  des  provisions  à  servir  pour  chaque  (ri- 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PEDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3813 


mestresera  soumis  à  l'approbation  de  la  commission, 
qui  pourra,  sans  avoir  à. justifier  de  ses  motifs,  sus- 
pendra le  payement  d'une  provision. 

«  Les  mandats  individuels  de  provision  seront  or- 
donnancés par  le  Ministre  des  Beaux-Arts  ou  par 
son  délégué. 

«  Sur  les  formules  de  mandats  sera  libellée  une 
clause  par  laquelle  le  tributaire  donnera  à  l'admi- 
nistration de  la  Caisse  des  Dépôts  et  Consignations 
quittance  subrogalive  des  trimestres  d'arrérages 
touchés  par  provision  et  s'engagera,  en  outre,  à  in- 
demniser la  Caisse  dans  le  double  cas  où  la  pension 
serait  rejetée  par  le  Conseil  d'Etat  et  où  il  viendrait 
à  reprendre  du  service. 

«  Le  remboursement  des  sommes  indûment  avan- 
cées par  la  Caisse  sera  poursuivi  par  toutes  les  voies 
de  droit.  »  {Délibération  de  la  commission  du  1  mai 
18S8,  approuvée  par  lettre  du  Ministre  de  l'Instruc- 
tion publique  et  des  Beaux-Arts  du  31  mai  188S.) 

«  La  provision  ne  sera  accordée  qu'après  enquête 
sur  la  situation  de  fortune  du  demandeur  et  s'il  est 
démontré  qu'il  en  a  réellement  besoin.  »  (Séance  du 
20  décembre  1888.) 

«  Le  Président  de  la  commission  peut,  sans  réunir 
la  commission,  accorder  des  provisions  aux  ayants 
droit  à  une  pension  de  réversion  qui  en  feront  la 
demande.  »  (Séance  du  1  décembre  IS89.) 

«  La  quotité  de  la  provision  à  accorder  est  des  deux 
tiers  de  la  pension,  payables  à  termes  mensuels 
échus.  »  (Séance  dul  décembre  1889.) 

Remboursements  de  retenues. 

«  Les  artistes  du  sexe  féminin  qui  seront  admises 
au  remboursement  des  retenues  versées  par  elles  à 
la  Caisse  des  Uetraites  devront,  préalablement  à  la 
mise  en  possession  des  sommes  qui  leur  sont  dues, 
déclarer  par  écrit  qu'elles  ne  sont  pas  en  puissance 
de  mari.  »  (Séance  du  7  mars  1888.) 

«  La  déclaration  de  non-mariage  prescrite  ci-des- 
sus sera  faite  à  la  direction  des  beaux-arts  (Bureau 
des  Théâtres),  préalablement  à  la  remise  des  mandats 
aux  intéressées,  au  lieu  d'être  faite  à  la  Caisse  des 
Dépôts  et  Consignations  avant  le  payement  de  ces 
mandats.  »  [Séance  du  9  mars  IS8S.) 

«  Les  artistes  mineurs  qui  ont  opté  pour  le  rem- 
boursement des  retenues  prélevées  sur  leur  traite- 
ment et  qui  n'ont  pu  produire  les  pièces  nécessaires 
à  la  validation  de  leur  option  seront  réinscrits  sur 
la  liste  des  tributaires  de  la  Caisse  des  Retraites,  avec 
i  appel  des  retenues  rétroactives  dues  par  eux  depuis 
leur  renonciation  au  bénéfice  de  cette  Caisse.  »  (Séance 
du  9  juillet  1888.  Avis  D»«  Robin,  Ricotti,  elc.) 

«  Ces  mêmes  artistes  pourront  obtenir  le  rembour- 
sement de  leurs  retenues  s'ils  renouvellent  leur  option 
dans  les  trois  mois  qui  suivront  leur  majorité.  » 
(Décret  du  31  juillet  IS88.) 

«  Cette  disposition  n'est  pas  applicable  aux  artistes 
qui  ne  feraient  plus  partie  du  personnel  de  l'Opéra 
à  l'époque  de  leur  majorité.  »  (Séancedu  18  mai  1S89.) 

«  Les  nouveaux  comptes  de  remboursement  aux 
artistes  réinscrits  sur  la  liste  des  tributaires,  qui 
renouvelleront  leur  demande  d'option  dans  les  trois 


mois  de  leur  majorité,  devront  être  soumis  à  l'exa- 
men de  la  commission  de  liquidation.  »  (Séance  du 

29  juin  1889.) 

L  OPÉRA-COMIQUE 

Nous  avons  laissé  l'Opéra-Comique  en  1702,  à 
l'époque  de  sa  réunion  avec  la  Comédie-Italienne, 
après  avoir  étudié  l'origine  de  l'un  et  de  l'autre  de 
ces  théâtres.  Nous  avons  vu  les  succès  de  Dauvehgne, 
de  Favart,  de  Monsigny  et  de  Philidor,  et  les  succès 
des  Comédiens-Ilaliens,  qui,  organisés  comme  la 
Comédie-Française,  avaient  su  donner  à  leur  théâtre 
uu  caractère  officiel.  L'Opéra-Comique,  né  sur  les 
foires,  dans  des  baraques  de  bois,  avait  conserve, 
même  sous  la  direction  de  Monnet,  un  caractère 
provisoire. 

Les  représentations  avaient  continué,  malgré  le 
succès  à  la  foire  Saint-Laurent,  au  boulevard  du 
Nord  et  à  la  foire  Saint-tiermain;  il  fallut  attendre 
la  réunion  avec  la  Comédie-Italienne  pour  trouver 
un  local  fhe  qui  ne  fût  pas  soumis  aux  change- 
ments continuels  et  aux  relâches  forcées. 

C'est  sous  le  nom  de  Comédie-Italienne  qu'il 
s'installa  à  l'Hôtel  de  Bourgogne  en  1762,  sans  cesser 
d'ailleurs  d'être  tributaire  de  l'Opéra,  comme  les 
forains  l'avaient  été,  et  il  dut,  le  29  janvier  1766, 
signer  avec  l'Académie  de  musique  un  traité  par 
lequel   il    s'engageait   à   payer   une   redevance   de 

30  000  livres  pendant  o  ans,  et  de  40  000  livres  pen- 
dant les  13  années  suivantes.  En  1779,  ce  traité  fut 
prorogé  pour  30  ans. 

Le  théâtre  composé  de  l'Opéra-Comique,  d'une 
part,  et  de  la  Comédie-Italienne  d'autre  part,  qui 
dans  cette  première  réunion  avait  conservé  la  per- 
sonnalité de  chacune  des  troupes,  fut  régi  par  une 
Société  formée  entre  les  artistes.  Carlin,  Dehesse, 
Iîociiard,  Caillot,  M'"'  Favart,  Pkxinelli,  Villettf, 
représentaient  l'ancien  Théâtre-Italien  ;  cinq  artistes 
seulement  appartenant  à  l'Opéra-Comique,  étaient 
entrés  dans  l'association,  Clairval,  Laruette,  Ol- 
dinot,  Mlles  N'EssELet  Deschami-s  ;  puis  vinrent  Trial, 
Chenard,  Nainvid.e,  Narronne,  M""s  Laruette,  Trial, 
Desglands  et  Dugazon. 

La  première  représentation  eut  lieu  le  3  février 
1762,  avec  un  à-propos  intitulé  :  la  Nouvelle  Troupe, 
et  deux  pièces  déjà  connues,  Biaise  le  Savetier,  de 
Sedaine  et  Philidor,  qui  avait  eu  un  brillant  succès 
à  la  foire  Saint-Laurent  le  9  mars  1759,  et  On  nes'avise 
jamais  de  tout,  de  Sedaine  et  Monsigny.  Ce  dernier 
auteur  avait  été,  par  son  succès  même,  une  des 
causes  qui  avaient  excité  la  jalousie  de  la  Comédie- 
Italienne  contre  le  Théâtre  de  la  Foire,  et  qui 
avaient  déterminé  la  réunion  des  deux  genres.  A 
celte  époque  encore,  on  s'occupait  plus  du  livret  que 
de  la  musique,  et  l'on  considérait  l'Opéra-Comique 
plutôt  comme  un  théâtre  de  vaudevilles  que  comme 
un  théâtre  lyrique.  L'orchestre  n'avait  pas  été  mo- 
difié, et  cependant,  on  commençait  déjà  à  se  soucier 
davantage  de  donner  une  valeur  spéciale  à  l'expres- 
sion scénique  de  la  musique;  les  pièces  italiennes  et 
les  comédies  à  ariettes  qui  avaient  peu  à  peu  pris 
le  pas  sur  le  vaudeville  proprement  dit,  né  à  la 
Comédie-Italienne,  c'est-à-dire  sur  la  comédie  avec 
couplets,  se  trouvaient  modifiées  par  les  ensembles 
et  les  chœurs  qui  se  mêlaient  à  la  pièce,  au  lieu 
de  n'être  qu'un  divertissement  et  un  accessoire. 

Pendant  quinze  ans,  Monsigny  triompha  à  l'Opéra- 
Comique;  il  donna  :  le  Roi  et  le  Fermier,  le  22  no- 


::sr 


Excrci.ori-niE  pe  la  musique  et  DicTiONNAmE  hn  (:<>.vsei<vat<)(he 


vembre  1762;  R^se  et  Colas,  le  S  mars  1764;  Mine, 
reine  de  Golconde,  15  avril  1766;  le  Déserteur,  6  mars 
[769;  Félix  ou  l'enfant  trouvé,  le  24  novembre  1777, 
et  encore  l'Ile  sonnante,  le  Faucon,  la  Belle  Arsène, 
le  Rendez-vous  bien  employé.  Depuis  1777,  Monsigny 
cessa  d'écrire;  il  semblait  que  sa  sensibitilé  fût 
t'puisée,  et  en  1800  il  remplaça  Pkccni  comme  ins- 
pecteur de  l'enseignement,  au  Conservatoire. 

Duni,  compositeur  napolitain,  avait  déjà  donné 
Nina  et  Lindor,  à  la  foire  en  1758,  ainsi  que  la  Fille 
mal  gardée,  et  /7/e  des  fous;  après  la  réunion,  il  fil 
représenter.  le  21  juillet  1703,  les  Deux  Chasseurs  et 
!o  Laitière,  sur  un  livre  d'Anseaume,  la  Fée  Urgèle. 
en  176.r>;  la  Clochette,  en  1766;  les  Moissonneurs,  en 
1768,  et  Thémite,  en  1770. 

Philidob  lit  représenter  le  Sorcier,  le  2  janvier 
1764,  Tom  Jones,  le  27  févier  1765,  et  il  n'abandonna 
le  théâtre  que  pour  se  livrer  entièrement  au  jeu  d'é- 
checs sur  lequel  il  avait  écrit  un  ouvrase.  Enfin,  vint 
r.RÉTRv  qui  devait  éclipser  tous  ses  prédécesseurs; 
après  avoir  étudié  le  contrepoint  en  rtalieavec  Casai. i. 
il  revint  en  France  pour  donner  le  Huron,  le  20  août 
1768,  sur  des  paroles  de  Marmontel.  A  cet  ouvrage 
succédèrent  Lucile,  le  5  janvier  1769,  le  Tableau  par- 
lant, 1769,  les  Deux  Avares,  1770,  '/.rotin'  et  Azor,  en 
1771,  /c  Magnifique,  le  4  mars  1773,  et  la  Fausse 
Mojie.  le  l"  février  177:;. 

Toutes  ces  œuvres  contribuèrent  à  modifier  la 
destinée  du  théâtre  de  l'Opéra-Comique.  On  avait 
prévu  et  répété  que  la  Comédie-Italienne,  plus  apte 
aux  formes  musicales,  jouissant  d'un  passé  qui 
remontait  jusqu'au  grand  Roi,  et  qui  venait  de 
triompher  avec  les  Bouffons,  et  les  danseurs,  absor- 
berait l'Opéra-Comique.  11  n'en  fut  rien,  et,  grâce 
aux  productions  incessantes  des  musiciens  en  vogue 
que  nous  venons  de  citer,  ce  fut  l'Opéra-Comique 
qui  l'emporta. 

La  musique  eut  une  part  de  plus  en  plus  grande, 
dans  ce  théâtre,  depuis  1769,  les  comédiens  disparu- 
rent de  la  scène  pour  faire  place  à  une  troupe  de 
chanteurs,  alors  qu'autrefois  ceux-ci  constituaient 
l'exception,  et  le  31  mars  1780,  des  lettres  patentes 
substituèrent,  comme  titre  du  théâtre,  l'Opéra-Comi- 
que à  celui  de  Comédie-Italienne;  néanmoins,  l'ha- 
bitude fut  plus  forte  que  les  décisions  officielles  et 
l'usage  persista  de  désigner  le  théâtre  sous  son 
ancienne  dénomination. 

A  la  même  époque,  l'Hôtel  de  Bourgogne  tombait 
en  ruines,  et  la  Comédie-Italienne  fit  bâtir  une  nou- 
velle salle  plus  grande  et  mieux  aménagée  sur  les 
terrains  de  l'Hôtel  de  Choiseul,  où  on  l'a  reconstruite 
aujourd'hui.  Les  artisles,  qui  témoignaient  d'un  cer. 
tain  mépris  pour  leur  origine  foraine,  ne  voulurent 
pas  que  l'entrée  de  leur  théâtre  s'ouvrît  sur  le  bou- 
levard, comme  l'étaient  autrefois  les  baraques  du 
Faubourg.  Ils  préférèrent  tourner  le  dos  au  boule- 
vard qui  avait  été  l'origine  de  leur  fortune.  Le  mo- 
nument fut  construit  par  Heurtier,  entre  la  rue 
Favart  et  la  rue  Marivaux,  d'où  le  nom  du  théâtre, 
qui  fut  appelé  Théâtre  de  la  rue  Favart  jusqu'en 
1794,  où  il  prit  le  titre  de  Théâtre  de  l'Opéra-Comi- 
que   National. 

L'orchestre  de  cette  nouvelle  salle  plus  spacieuse, 
put  être  composé  de  seize  violons,  deux  altos,  six  vio- 
loncelles, deux  contrebasses,  trois  flûtes,  un  haut, 
bois,  deux  bassons  et  deux  cors. 

De  l'ancienne  troupe,  il  restait  Clairval,  Thoius- 
mn,  Triai.,  Lauttette,  Favart,  Narronnf.,  CnF.NARn  et 


Mme  Dugazon.  On  engagea  de  plus  Michu,  Solier, 
lUnsoNMLLE,  Philippe,  Dufres.noy,  Minier,  Mmos  Des- 
forges, Gonthier,  Desiirosses.  Ayant  abandonné  l'Hô- 
tel de  Bourgogne,  le  4  avril,  ces  artistes  inaugurè- 
rent la  nouvelle  salle,  le  28  avril  1783,  et  eurent  la 
chance  de  monter  en  1784  deux  pièces  de  Grétrv, 
qui  réussirent  :  l'Epreuve  villageoise,  et  Richard  Gasur 
de  lion. 

L'Opéra-Comique  était  alors  régi  par  un  règle- 
ment établi  par  les  gentilshommes  de  la  chambre 
en  1774,  qui  déterminait  les  rapports  de  l'associa- 
tion avec  les  auteurs.  Lorsqu'une  pièce  avait  été 
reçue  à  correction,  l'auteur  pouvait  exiger  une  se- 
conde lecture  à  la  suite  des  remaniements  effectués. 
Si  la  pièce  avait  été  reçue  à  titre  définitif,  les  comé- 
diens ne  pouvaient  refuser  de  la  jouer,  ni  en  retar- 
der les  représentations,  à  moins  de  causes  graves, 
dont  l'appréciation  appartenait  aux  gentilshommes. 
Chaque  pièce  devait  être  jouée  à  son  rang  de  récep- 
tion, et  elle  ne  pouvait  être  interrompue  tant  que  le 
succès  durait;  les  auteurs  fixaient  la  distribution 
des  rôles,  ils  avaient  droit  à  un  neuvième  de  la  re- 
cette, pour  les  pièces  en  :>  actes;  le  droit  d'auteur 
était  d'un  douzième  pour  les  pièces  en  2  actes  et 
d'un  dix-huitième  pour  celles  en  1  acte.  Aucun  droit 
n'était  perçu  si  la  recette  était  inférieure  à  1  700  livres 
en  été  et  mille  livres  en  hiver. 

Au  décès  des  auteurs,  la  perception  des  droits  ces- 
sait, sauf  lorsque  la  pièce  n'avait  pas  encore  atteint 
la  cinquantième  représentation. 

Les  pouvoirs  publics,  qui  avaient  si  longtemps  pro- 
tégé jalousement  le  monopole  des  théâtres,  com- 
mençaient à  devenir  plus  tolérants,  et  adaptaient  le 
principe  du  privilège  aux  circonstances  avec  une 
aménité  d'autant  plus  grande  que  les  Parisiens  se 
rendaient  en  foule  sur  les  petites  scènes  du  boule- 
vard du  Temple,  et  exigeaient  des  spectacles. 

Non  seulement  les  forains,  avec  Nicolet  et  Audinot, 
montaient  de  petites  scènes,  ainsi  que  nous  l'avons 
vu  plus  haut,  mais  l'Ambigu-Comique  et  les  Variélés 
Amusantes  obtenaient  de  l'Opéra  des  cessions  de 
privilège  pour  les  représentations  musicales.  Un 
coifîeur  de  la  reine  Marie-Antoinette,  Léonard 
Autié,  obtint  un  nouveau  privilège  d'opéra  italien. 
II  s'associa  avec  le  violoniste  Viorri,  qui  confia  la 
partie  musicale  à  Cherdbini,  et  organisa  une  troupe 
remarquable.  Fort  du  patronage  du  comte  de  Pro- 
vence, Léonard  Autié  installa  aux  Tuileries  le  théâ- 
tre de  Monsieur,  qu'il  n'abandonna  qu'en  1791.  pour 
la  salle  Feydeau,  dont  1p  théâtre  prit  le  nom. 

A  la  salle  des  Tuileries,  le  nouveau  théâtre,  qui 
devait  exploiter  l'opéra-comique  français,  le  vau- 
deville, la  comédie  et  l'opéra-italien,  abandonna 
vite  ces  trois  derniers  genres,  pour  concurrencer  le 
théâtre  de  la  rue  Favarl,  allant  même  jusqu'à  faire 
composer  une  nouvelle  musique  sur  les  mêmes 
livrets. 

Cependant,  le  succès  de  Favart  se  maintenait  par 
la  tradition  de  ses  ouvrages  légers;  il  montait  les 
lirouillerics  de  BERTON.en  1790,  Camille  de  Dalavra... 
en  1791,  Cécile  et  Julien  de  Triai.,  en  1792,  Ambroise 
on  Voilà  ma  journée  de  Dalavrac,  en  1793,  Melnlo,  ri 
Phrosine  de  Méhul,  en  1794,  la  Famille  aoo'ricaine  de 
Dalavrac,  en  1796,  Lisbeth  de  «Jrétry,  en  1797,  Mon- 
tano  et  Stéphanie  de  Berton,  en  1799. 

Aiusi,  toute  la  Révolution  se.  passe  sans  que  l'O- 
péra-Comique ait  abandonné  son  genre;  et  s'il  * 
souffert  comme  les  autres  théâtres  de  la  tourmente 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3»1( 


révolutionnaire,  il  parait  néanmoins  avoir  conservé 
pendant  tout  ce  temps  son  activité. 

Constatons  simplement,  que  la  loi  des  13-10  janvier 
1791,  qui  avait  permis  à  tout  citoyen  d'élever  un 
théâtre  et  d'y  faire  représenter  les  pièces  de  tous 
genres  sur  une  simple  déclaration  faite  à  la  muni- 
cipalité, établit  le  système  de  la  concurrence  dont 
la  faiblesse  royale  n'avait  pas  su  protéger  l'Opéra- 
Comique;  le  théâtre  de  Monsieur,  transféré  à  la  rue 
Feydeau,  put  sans  danger  ni  contrôle  suivre  la  même 
voie  que  la  Comédie-Jtalienne  et  donner  des  opéras- 
comiques  qui,  plus  sérieux  et  plus  hardis  que  ceux 
de  la  Comédie-Italienne,  se  rapprochaient  déjà  de 
l'Opéra.  On  donne  ainsi  à  la  salle  Feydeau  Lodoïska 
deCHERUBiNi.en  1701 ,  Stratonice  de  Méiux.  en  1798,  la 
Caverne  de  Lesueur,  en  1703,  Télémaque  du  même 
auteur,  en  1706,  Uédée  de  Cherubini,  en  1797  et  Ario- 
ilant  île  MÉHULen  1799. 

En  1800,  Cherubini  donnait  encore  les  Deua  Jour- 
nées, et  en  1801  Boïeldieu  faisait  représenter  le 
Calife  de  Bagdad. 

La  concurrence  de  deux  théâtres  jouissant  d'un 
égal  succès,  qui  avait  entraîné  en  1762  la  réunion  de 
la  Comédie-Italienne  à  l'Opéra-Comique,  produisit 
en  1801  le  même  effet.  Les  deux  théâtres  se  réunis- 
sent le  27  juillet  1801,  et  constituent  ensemble  une 
société  sous  le  nom  d'Opéra-Comique. 
Les  associés  sont  Martin,  Elleviou,  Chenard,  Ga- 

VAUDAN,     SOLIÉ,    DAUZINVILLE,    PHILIPPE,    SAINT-  A 1  l'.IN , 

Caveaux,  Mmcs  Dugazon,  Cavaudan,  Scio,  Caveaux, 
Auvray,  Desbrosses,  Saint-Aubin. 

L'ouverture  se  fait  au  théâtre  Feydeau,  le  16  sep- 
tembre 1801,  avec  la  Stratonice  de  Méhul,  puis  One 
Faite  du  même  auteur,  le  4  avril  1802,  et,  après  un 
court  passage  à  la  salle  Favart,  l'Opéra-Comique  se 
fixe  à  Feydeau. 

Le  13  janvier  1803,  on  donna  Ma  Tante  Aurore  de 
Boïeldieu,  et  le  2  septembre  1803,  Aline,  ràne  de 
Golcondc  de  Berton.  Mme  Dugazon  crée  son  dernier 
rôle  dans  le  Médecin  turc,  de  Nicolo. 

La  liberté  de  la  Révolution  s'atténue  déjà  avec  le 
Consulat,  au  cours  duquel  l'Upéra-Comique  retrouve 
un  privilège.  En  même  temps,  il  est  soumis  lui-même 
au  contrôle  d'un  surintendant  qui  est  M.  Fontaine 
de  Cramayel,  puis  Auguste  de  Talleyrand. 

Le  23  juillet  1804,  le  théâtre  passe  à  la  salle  Fa- 
vart, ou  il  représente,  le  27  novembre,  Milton  de 
Spontini.  Avec  l'Empire,  on  revient  au  système  de 
l'autorisation;  un  décret  du  8  juin  1806  décide  qu'au- 
cun théâtre  ne  pourra  s'ouvrir  sans  l'agrément  spé- 
cial de  l'Empereur.  L'Opéra-Comique  devient  un 
théâtre  officiel  dont  le  répertoire  est  arrêté  par  le 
Ministre  de  l'Intérieur,  et  «  nul  autre  théâtre  ne  peut 
représenter  à  Paris  des  pièces  comprises  dans  les 
répertoires  de  ces  trois  grands  théâtres  sans  leur 
autorisation  et  sans  leur  payer  une  rétribution  qui 
sera  réglée  de  gré  à  gré  et  avec  l'autorisation  du 
ministre  »  (article  4). 

Par  arrêté  do  2b  avril  1807,  le  Ministre  de  l'Inté- 
rieur précisait  le  genre  auquel  chaque  théâtre  devait 
désormais  ae  boruer.  H  portait  que  le  théâtre  de 
l'Opéra-Comique,  désormais  théâtre  de  Sa  Majesté 
PEmpereur,  serait  spécialement  destiné  à  la  repré- 
sentation de  «  toute  pièce  de  comédies  ou  drames 
mêlés  de  couplets,  d'ariettes  et  de  morceaux  d'en- 
semble »,  et  que  son  répertoire  serait  composé  de 
toutes  le»  pièces  jouées  sur  le  théâtre  de  l'Opéra- 
■Comique,  avant  et  après  sa  réunion  avec  la  Comédie- 


Italienne,  pourvu  que  le  dialogue  de  ces  pièces  fù, 
coupé  par  du  chant. 

L'Opéra-Butïa,  considéré  comme  annexe,  ne  pou- 
vait représenter  que  des  pièces  écrites  en  italien. 

Théâtre  officiel,  l'Opéra-Comique  abandonna  l;i 
pompe  des  spectacles  révolutionnaires  et  les  allé- 
gories mythologiques  pour  revenir  à  une  simplicité 
qui  avait  fait  ses  succès  au  xvme  siècle. 

Ce  sont  d'ailleurs  les  œuvres  de  Grétry,  de  Mon- 
signy,  de  Philidor  et  de  Duni  qui  constituèrent  les 
reprises  les  plus  fructueuses. 

Un  nouveau  compositeur,  Nicolo,  qui  avait  fait 
jouer  le  Tonnelier  en  1790,  donna  les  Rendez-roi^ 
bourgeois,  le  9  mai  1807,  en  même  temps  que  Méhi  i 
faisait  représenter  Joseph;  puis,  Nicolo  apporta  Cen- 
i/rillon,  le  22  février  1810,  le  Billet  de  Loterie  en  181.1, 
Joconde  eu  1814,  Jeannot  et  Colin  dans  la  même  an- 
née. Mais  à  côté  de  Nicolo,  grandit  un  concurrent 
qui  doit  bientôt  le  dépasser,  c'est  Boïeldieu,  qui 
donna  Jean  de  Paris,  le  4  avril  1812,  le  Nouveau  Sei- 
gneur du  village,  le  29  juin  isi:t,  lu  Fête  du  village 
voisin,  le  ,ï  mars  1816,  le  Petit  Chu/, eron  rouge, 
30  juin  1818,  et  les  Voitur  -  iwsees,le  29  avril  1820. 
Pendant  ses  dernières  années,  Boïeldieu  avait 
protégé  les  débuts  (I'IIéhold,  en  écrivant  avec'lui 
l'opéra  Charles  de  France  (1816).  Le  jeune  composi- 
teur profite  de  ces  conseils  pour  faire  une  musique 
nouvelle  sur  le*  Truqueurs,  qui  avaient  été  le  succès 
de  Dauvergni:  en  1753. 

Enfin,  à  la  même  époque,  apparut  Aurer,  qui 
débuta  par  le  Séjour  militaire,  le  27  février  1813,  le 
Testament  ou  les  Billets  deux  en  1819,  et  commence 
une  série  ininterrompue  de  succès  avec  la  Bergère 
Châtelaine  en  1820,  et  Léocadie  en  1824. 

L'Opéra-Comique,  qui  jusqu'alors  avait  constitué 
une  association  se  dirigeant  elle-même,  dut  renoncer 
à  cette  forme  d'administration  qui  donnait  des  résul- 
tats déplorables. 
Parmi  les  sociétaires  se  trouvaient  alors  Martin, 

POUCBARD,    IlUET,     DaZANCOURT,     VlZENTINi;     1.EUON1ER, 
Jlmes   pRADHERi   Rjgaut,    ÛESBROSSES,   BeLMONT,    LEMON- 

nier,  Paul  et  Boulanger. 

Surveillés,  contrôlés  et  réprimandés  par  les  gen- 
tilshommes du  roi,  les  comédiens  ne  purent  suppor- 
ter plus  longtemps  les  charges  du  théâtre;  et  comme 
leurs  affaires  périclitaient,  ils  s'en  remirent  au  mi- 
nistère qui  nomma  un  directeur,  le  duc  d'Aumont, 
lequel  ne  dirigea  pas  lui-même,  mais  lit  gérer  le 
théâtre  par  un  auteur,  Cuilbert  de  Pixérécourt,  par 
acte  du  30  mars  1824.  Les  recettes  montèrent  aussi- 
tôt, non  seulement  en  raison  d'une  administration 
plus  serrée,  mais  aussi  grâce  à  trois  chefs-d'œuvre, 
le  Maçon  d'AuBER,  3  mai  1823,  la  Dame  blanche  de 
Boïeldieu,  le  10  décembre  1825,  que  l'auteur  s'était 
laissé  arracher  non  sans  protestations ,  car  il  en 
redoutait  les  représentations.  L'année  suivante,  le 
12  août,  Hérold  qui  n'avait  eu  qu'un  demi-succès 
avec  l'Auteur  mort  et  vivant  en  1820,  et  qui  s'était  vu 
rendre  justice  avec  le  Muletier  en  1823,  l'Asthénie  et 
Vendôme  en  Espagne,  donnait  Marie,  qui  eut  une 
vogue  durable. 

Pendant  ce  temps,  et  malgré  les  recettes  impor- 
tantes du  théâtre,  les  bénéfices  étaient  minces.  Pixé- 
récourt, convaincu  d'avoir  trop  largement  donné  aux 
personnes  influentes  qui  pouvaient  l'aider,  ou  aux 
artistes  qu'il  désirait  s'attacher,  dut  quitter  la  direc- 
tion en  1827. 

Le  colonel  Ducis  lui  succéda,  mais,  cette  fois 
encore,  le  directeur  ne  fut  pas  heureux  dans  son 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


administration;  il  se  t routait  eatre  les  mains  de 
Boursault,  son  banquier,  qui  exigeait  des  intérêts 
considérables  pour  fournir  des  fonds  minimes;  cette 
commandite  déplorable  conduisit  Ducis  à  la  faillite; 
le  théâtre  Feydeau  ferma  le  12  avril  1829;  et  comme 
la  salle  menaçait  ruine,  elle  fut  bientôt  démolie. 

Une  nouvelle  société  se  forma  bientôt  entre  les 
artistes  de  l'Opéra-Comique  qui  durent  se  trans- 
porter au  théâtre  Venladour,  que  l'administration 
leur  avait  donné,  car  ils  n'avaient  pu  reprendre  la 
salle  Favart  qui  était  alors  occupée  par  une  troupe 
italienne. 

L'ouverture  du  nouvel  Opéra-Comique  eut  lieu  le 
20  avril  1829,  avec  la  Fiancée,  d'AuBEB.  Cependant, 
la  salle  trop  exiguë,  mal  placée,  ne  put  entraîner  le 
public  à  s'y  rendre,  malgré  les  représentations  de 
Fra  Diavolo  d'AiriER,  le  28  janvier  1830  et  de  Zampa 

d'HÉROLD. 

La  révolution  de  juillet  1830  entraîna  une  ferme- 
ture provisoire  du  théâtre,  que  Singier  essaya  d'ad- 
ministrer et  qu'il  dut  abandonner  au  mois  d'août,  en 
raison  des  nombreuses  réparations  qu'il  devait  faire 
pour  aménager  la  salle. 

Lubbert,  qui  le  remplaça  le  8  octobre  1831,  n'eut 
pas  plus  de  succès;  quant  à  son  successeur  Lau- 
rent, qui  avait  pris  la  direction  en  janvier  1832,  il 
dut  abandonner  la  direction  eu  raison  du  choléra  qui 
l'obligea  à  la  fermeture. 

C'est  au  Théâtre  des  Nouveautés,  le  futur  Vaude- 
ville, place  de  la  Bourse,  que  les  comédiens  trouvè- 
rent asile,  après  s'être  reconstitués  en  société  el 
avoir  pris  comme  gérant  Paul  Dutreich.  Le  22  sep- 
tembre 1832,  on  ouvrit  avec  le  Maçon  el  les  Voitures 
versées,  et  il  fallut  attendre  jusqu'au  15  décembre 
pour  avoir  enfin  un  succès  sérieux  avec  le  Pré  aux 
Clercs.  Deux  ans  plus  tard,  la  fortune  étant  revenue, 
la  Société  Dutreich  fut  dissoute  el  Crosnier  prit  la 
direction  du  théâtre.  La  tâche  du  nouveau  directeur 
fut  facilitée  par  les  auteurs  qui  lui  donnaient  de 
nombreuses  pièces  à  succès.  Citons  :  Lestocq,  en 
1834;  le  Chalet,  d'ÂDAM,  représenté  le  25  septembre 
1834;  le  Cheval  de  bronze,  d'Aui'.ER,  le  29  mars  1835; 
l'Eclair,  le  30  décembre  1835,  le  Postillon  de  Long- 
jumeau,  d'ADAM,  le  13  octobre  183»'. ;  l'Ambassadrice, 
le  21  décembre  1830;  le  Domino  noir,  le  2  décembre 
1837,  tous  deux  d'AuBER  ;  le  lirasseur  de  Preston,  d'A- 
DAM, le  31  octobre  1838. 

Parmi  les  interprètes  d'alors,  il  faut  ciler  :  Ciial- 
let,  Roger,  FérÊOl,  M"""  Casimir,  Da.morkau,  Pré- 
vost et  Lavoye.  Les  Italiens,  qui  occupaient  la  salle 
Favart  et  qui  venaient  d'y  faire  représenter  la  Fille 
du  régiment,  de  Donizetti,  furent  chassés  le  13  jan- 
vier 1838  de  leur  salle  par  un  incendie  qui  se  déclara 
à  la  fin  d'une  représentation  de  Don  Giovanni.  Cros- 
nier réussit  aussitôt  à  prendre  possession  de  l'em- 
placement et  à  faire  reconstruire  un  théâtre  plus 
spacieux  que  celui  des  Nouveautés,  dans  lequel  sa 
troupe  était  à  l'étroit.  C'est  par  une  représentation 
du  Pré  aux  Clercs  qu'il  inaugura  la  nouvelle  salle,  le 
16  mai  1840.  En  cinq  ans,  il  représenta  six  œuvres 
d'AuBER  :  Zanetta,  le  18  mai  1840;  les  Diamants  de  la 
couronne,  le  6  mars  1841  ;  le  Duc  d'Olonne,  le  4  février 
1842;  la  Part  du  diable,\e  16 janvier  1843;  laSirène. 
le  26  mars  1844,  et  La  Barcarolle,  le  22  avril  1845. 

Il  céda  alors  son  privilège  à  Basset,  commandité 
par  le  marquis  de  Raigecourt  et  le  comte  de  Saint- 
Maurice.  Le  nouveau  directeur  eut  la  chance  de 
monter  les  Mousquetaires  de  la  reine,  d'HALÉw,  le 
3  février  1846,  et  Ne  touchez  pa<  n  In  Reine,  de  Bois- 


selot,  le  16  janvier  1847.  Il  donna  aussi  Haydée, 
d'AuBER,  le  28  décembre  1847,  mais  il  manqua  d'ar- 
gent au  moment  où  la  révolution  de  1848  causait  un 
désastre  général  dans  les  théâtres.  Il  dut  être  rem- 
placé par  Emile  Perrin.que  Ledru-Rollin  avait  arra- 
ché à  la  peinture  pour  le  mettre  à  la  tête  d'une 
scène  lyrique.  Pendant  la  direction  de  Perrin,  qui 
dura  neuf  ans,  l'Opéra-Comique  compta  de  nom- 
breux succès. 

HALÉvvdonna/e  Val  d'Andorre,  le  11  novembre  1848, 
el  Ambroise  Thomas,  qui  avait  .eu  le  prix  de  Rome  en 
1832  et  qui  avait  déjà  donné  à  l'Opéra-Comique  la 
Double  Echelle  en  1837,  obtint  tous  les  suffrages  avec 
le  Caïd,  bouffonnerie  en  deux  actes,  le  3  janvier  1849, 
et  le  Songe  d'une  nuit  d'été,  le  20  avril  1850. 

Après  le  Toréador,  d'ADAM,  le  18  mai  1849,  et  la 
Fée  aux  roses,  d'HALÉw,  le  1er  octobre  de  la  même, 
année,  un  compositeur  né  à  Anvers  en  1808,  Albert 
Grisar, se  fit  applaudir  avec  les  Por citerons ,  le  12  jan- 
vier 1850.  Grisar  avait  élé  connu  par  une  romance, 
la  Folle,  qui  avait  été  chantée  par  tout  Paris,  puis  il 
avait  donné  le  Mariage  impossible,  k  Bruxelles  en 
1833,  et,  revenu  à  Paris,  il  avait  paru  se  cantonner 
dans  la  chanson.  Ses  succès  à  la  Renaissance  avec 
Lady  Mervil  et  les  Travestissements  l'avaient  conduit 
nécessairement  vers  l'Opéra-Comique,  dont  il  forçait 
les  portes.  A  la  même  époque,  Perrin  donnait  Giralda. 
d'ADAM,  le  20  juillet  1850,  la  Chanteuse  voilée,  de 
Victor  Massé,  élève  d'HALÉw,  le  26  novembre  1850, 
sur  un  livret  de  Scribe.  La  pièce  eut  un  grand  suc- 
cès; elle  était  chantée  par  M110  Lefervre,  MM.  Audran 
el  Bi'ssine. 

Grisar  donnait  encore,  le  15  février  1851,  Bonsoir 
monsieur  Pantalon,  puis  vinrent  (ialatée,  de  Victor 
Massé, le  14  avril  1 852  ;  les  Noces  de  Jeannette,  de  Victor 
Massé,  le  4  février  1853;  l'Etoile  du  Nord,  de  Meyer- 
beer  le  16  février  1854;  le  Chien  du  jardinier,  de  Gri- 
sar, le  15  mars  1855;  les  Saisons,  de  Victor  Massé,  le 
22  décembre  de  la  même  année;  Manon  Lescaut, 
d'AmiER,  le  23  février  185G;  Maitre  Pathelin,  de  Bazin, 
le  12  décembre  1856,  el  Psyché,  d' Ambroise  Thomas, 
le  26  janvier  1857.  Perrin  avait  engagé  une  troupe 
remarquable  :  le  ténor  Roger,  Audran,  Joirdan  et 
Mocker,  Hkrman,  Léon,  Sainte-Foy,  Bataille.  Bissine, 

COUDERC,    RlQUIER,    I'ONCUARD,    IaI/RE;     Mmea    l)ARCIER, 

Révii.lv,  Ugalde,  Lemercieh,  Miolan,  LiïFEBVnK,  Caro- 
line Duprez,  Vi  ai 'iii'.imer  et  Marie  Cauel. 

En  1857,  Nestor  Roqueplan,  qui  venait  de  quitter 
la  direction  de  l'Opéra,  prit  celle  de  l'Opéra-Comique 
et  ne  trouva  à  représenter  en  deux  ans  de  direction 
que  le  Pardon  de  Plorrmel,  de  Meverbeer,  le  4  avril 
1859.  Son  successeur  Beaumont,  qui  garda  la  direc- 
tion en  1860  et  la  conserva  jusqu'au  26  janvier  1862, 
dut  se  retirer  ruiné  par  sa  mauvaise  exploitation. 

On  fit  de  nouveau  appel  à  Emile  Perrin,  qui  passa 
à  l'Opéra  au  mois  de  décembre  de  la  même  année, 
après  avoir  monté  Lalla  Roukh,  de  Félicien  David, 
le  12  mai  1862. 

De  Leuven  dirigea  l'Opéra-Comique  depuis  le  20  dé- 
cembre de  cette  année,  jusqu'en  187»,  d'abord  avec 
Rilt  comme  associé,  puis  avec  du  Locle.  Maillart  fit 
représenter,  le  21  mars  1864,  Lara,  et  Gevaert,  le 
Capitaine  Henriot, 

Citons  les  principaux  opéras-comiques  de  cette 
époque  :  le  Voyage  en  Chine,  de  Bazin,  représenté 
le  9  décembre  1865;  Mignon,  d'Ambroise  Thomas,  le 
17  novembre  1866;  deux  œuvres  d'AuBE»,  le  Premier 
Jour  de  bonheur  et  Rêve  d'amour,  représenlé  en  1868 
et  1869;  VOmbre,  de  Flotow,  le  7  juillet  1870,  et  le 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3817 


Kobold,  d'Ernest  Guiraud,  .joué  quinze  jours  après. 
Après  la  guerre  de  187(1,  ie  Théâtre-Lyrique  ayant 
brûlé,  les  compositeurs  qui  s'y  faisaient  jouer  s'a- 
dressèrent à  l'Opéra -Comique.  C'est  ainsi  que  le 
genre  de  l'opéra-comique  devint  plus  grave  et  les 
œuvres  plus  dramatiques. 

Du  Locle  reprit  en  1872  les  Noces  de  Figaro  et  Ro- 
méo et  Juliette  qui  avaient  élé  données  au  Théâtre- 
Lyrique,  ainsi  que  les  Dragons  de  Villars,  reçut  le 
Passant,  de  Paladilhe;  Djamileh,  de  Iîizkt;  la  Prin- 
cesse jaune,  de  Saint-Sakns;  Don  César  de  Bazan,  de 
Massenet,  pendant  la  >eule  année  187:2.  Et  l'année 
suivante,  il  montait  le  Roi  l'a  dit,  de  Léo  Delibes,  et 
en  1874,  le  Florentin,  de  Lenepveu;  le  3  mars  187.1, 
Carmen,  de  Bizet,  et  le  il  avril  1876,  Picciolino,  de 

CuiRAUD. 

Le  30  septembre  1876,  Du  Locle  cédait  la  direction 
de  l'Opéra-Comiqiie  à  Carvalho,  qui  avait  épousé 
Mme  Miolan.  Le  nouveau  directeur  accusa  plus  net- 
tement encore  la  tendance  qu'on  avait  à  abandon- 
ner le  véritable  genre  de  l'opéra-comique,  qui  se 
composai!  encore  de  scènes  parlées  mêlées  aux 
chants,  pour  protéger  les  ouvrages  qui  se  rappro- 
chaient singulièrement  de  l'opéra. 

Son  premier  acte  fut  d'appeler  Charles  Lamoureux 
comme  chef  d'orchestre,  et  il  monta  Cinq-Mars,  de 
Gounod,  le  3  avril  1877;  Suzanne,  de  Paladilhe,  le 
.10  décembre  1878;  Jean  de  Nivelle,  de  Léo  Délires, 
le  8  mars  1880;  les  Contes  d'Hoffmann,  d'OFFENBACH, 
le  10  février  1881;  Attendez-moi  sous  l'orme,  de  Vin- 
cent d'Indy,  le  18  juin  de  la  même  année;  Lakmé, 
de  Léo  Delibes,  le  1 1  avril  1883;  Manon,  de  Massenet, 
le  19  janvier  1881;  le  Chevalier  Jean,  de  Victorin 
JoNciÈREs.le  H  mars  1883;  Une  Nuit  de  Cléopâtre,  de 
Victor  Massé,  le -25  avril  18811;  Proserpine,  de  Saint- 
Saëns, le  16  mars  1887,  et  le  Roi  malgré  lui,  de  Cha- 
rrier, le  18  mai  1887. 

Une  troupe,  dont  tous  les  noms  sont  aujourd'hui 
célèbres,  avait  aidé  au  succès  de  l'Opéra-Comique. 
Il  faut  citer  :  MM.  Monï  aubry,  Achard,  Capoul,  Gail- 
iiard,  Crosti,  Lheric,  Thoy,  Gourdin;  Mmes  Cico,  Be- 
lia,  Girard,  Galli-Marié,  Marie-Boze;  puis  MM.  Du- 
chesne,  Nicot,  Ismaël  Bouhy,  Melchissédec,  Fugêbe, 
Talazac,  Bouvet,  Tasquin;  Mmes  Miolan-Carvalho, 
Dalti,  Chapuis,  Ducasse,  Brunet-Lafleur,  Bilbaut- 
Vauchelet,  Isaac,  Van  /.andt,  Heilbronn,  Salla. 

Au  cours  d'une  représentation  de  Mignon,  le 
23  mai  1887,  la  salle  Favarl  brûla  complètement, 
et  l'Opéra-Comique,  dont  Jules  Barbier  avait  pris  la 
direction,  occupa  une  salle  place  du  Châtelet,  au- 
jourd'huiThéâtre  Sarah-Bernhardt.  C'est  là  que  furent 
représentés  :  le  Roi  d'Ys,  de  Lalo,  en  1888;  Esclar- 
monde,  de  Massenet,  en  1889;  Mireille,  de  Gounod,  en 
1890,  et  la  Basoche,  de  Messager,  en  1891.  Carvalho 
reprit  alors  la  direction  du  théâtre  et  fit  représenter 
le  Rêve,  de  Bruneau;  Caraliera-Rusticana,  de  Mas- 
cagni;  les  Troyens,de  Berlioz,  en  1892;  Phryné,  île 
Saint-Saëns;  l'Attaque  du  moulin,  de  Bruneau;  Wer- 
ther,  de  Massenet, en  1893 ;Falstaff, de  Verdi, en  1894; 
la  Vivandière,  de  Benjamin  Godard,  en  1895;  Le 
Vaisseau  fantôme,  de  Wagner, et  Sapho,de  Massenet, 
en  1897. 

La  salle  de  la  rue  Favarl  reconstruite  fut  ouverte 
par  M.  Albert  Carré,  qui  avait  pris  la  direction  en 
1908;  il  y  donna  Louise, de  Charpentier, en  1900, avec 
M"e  Riatton;  le  Juif  Polonais,  d'ERLANGER,  et  Han- 
sel  et  Gretel,  d'HuMPERDiNCK,  en  1900.  En  1901,  Grisë- 
lidis,  de  Massenet,  et  l'Ouragan,  de  Bruneau,  et  en 
1902,  Pelléas  et  Mélisande,  de  Claude  Debussy,  avec 


Mary  Garden  et  Jean  Périer.  En  1903,  la  Tosca,  de 
PrcciNi.avec  Beyle,  Dufrane,  Mlle  Friche. 

La  troupe  de  l'Opéra-Comique  comptait  alors  : 
MM.  Allard,  Belhomme,  Bertin,  Beyle,  Carbonne, 
Cazeneuve,  Clément,  Cossira  ,  Delvoye,  Dufrane, 
Dutilloy,  Fugère,  Gbesse.'Grivot,  Huberdeau,  Imbert, 
Maréchal,  Minvielle,  Muratore,  Jean  Périer,  Van 
Dyck,  Vieulle;  MmB"  Rose  Caron,  Marguerite  Carré, 
Cesbron,  de  Chaponne,  Friche,  Garcia,  Mary  Garden, 
Grill,  Huchet-Housselière,  Marié  de  Lisle,  Mostrat, 
de  Nuovina,Passama,  Perny,  Perret,  Pierron,  Jeanne 
Raunay,  Sauvaget,  Tdiery,  Tiphaine,  Vauthrin,  Char- 
lotte Wyns. 

M.  Albert  Carré,  au  cours  de  sa  direction,  monta 
en  1904  le  Jongleur  de  Notre-Dame,  de  Massenet,  et 
Alccste,  de  Gluck,  avec  MM.  Beyle  et  Dufrane,  et 
Mme  Litvinne.  En  1903,  la  Cabrera,  de  Gabriel  Du- 
pont, et  Chérubin,  de  Massenet.  En  1906,  Marie-Mag- 
deleine,  de  Massenet;  Madame  Butterfly,  de  Puccini; 
Aphrodite,  d'ERLANGER.  En  1907,  Ariane  et  Barbe- 
Bleue,  de  Dukas,  avec  Mmc  Georgetle  Leblanc, 
MM.  Vieulle  et  Azéma,  et  le  Chemineau,  de  Xavier 
Leroux,  avec  Jean  Périer  et  M1"  Friche.  La  même 
année,  il  montait  Iphigénie  en  Aulidc.de  Gluck,  avec 

Mmes  BrÉVAL  et   BrOLHI. 

En  1908,  le  Clown,  de  J.  de  Camondo,  avec  MM.  Fu- 
gère, Solignac  et  Périer.  En  1910,  le  Mariage  de 
Têlémaquc,  de  Cl.  Terrasse;  l'Heure  espagnole,  de  Ra- 
vel, et  Bérénice,  de  Magnard,  avec  Mm"  Mérentié.  l'.n 
1911,  la  Lépreuse,  de  Sylvio  Lazzari,  avec  Mm's  Mar- 
guerite Carré,  Dëlna  et  Brolhi,  et  la  Sorcière,  d'ER- 
LANGER. 

Le  1er  janvier  1914,  M.  Albert  Carré  était  nommé 
directeur  du  Théâtre-Français,  et  il  était  remplacé  à 
la  tête  de  l'Opéra-Comique,  le  1"' janvier  1911,  par 
MM.  Gheusi  et  les  frères  Isola.  La  nouvelle  direction 
lit  jouer,  le  2o  février  1914,  la  Marchande  d'allumet- 
tes, de  T.  Richepin;  le  13  mai,  Marouf,  de  M.  Rabaud. 

Le  16  octobre  1918,  M.  Albert  Carré  s'associait 
aux  frères  Isola  et  devint  directeur  honoraire  en 
octobre  1923;  le  théâtre  a  présentement  pour  direc- 
teurs MM.  Louis  Masson  et  Georges  Ricou. 

LISTE  DES   PREMIÈRES  REPRESENTATIONS 
A  L'OPÉRA-COMIQUE  DE   1915  A    1920. 

1915.  Avril.  —  Scènes  Anciennes,  Massenet,  adapt.  un  ballet- 
pant.,  paroles  Archimbaud,  limier,  Mariquita. 
Mai.   —  Sur  le  front  :  La  Française,   Saint-Siens,  épi- 
sode patriotique,  de  Zamacoïs. 
I91G.  Janvier.  —  Le  Tambour,  scène,  A.  Brcneat,  par.  Saint- 
Georges  de  Bouhélier. 
Avril.  —  Lumière  et  papillons,  I'ui.ei.,  ballet. 
Juin.   —  Madame  Sans-Gêne,   Giordano,   Simoni,   adapt. 

Milliet. 
Décembre.   —  Les  Quatre  Journées,  Bkuneai  . 
1917.  Janvier.  —  Elvya,  idylle  mimée,  Picheran,  par  Ricou  et 
Mariquita. 
Novembre.  —  Béatrice,  Messager,  par.  de  Elers  et  Cail- 
lavet. 
I91S.  Janvier.  —  Piua-Sin,  Maréchal,  par.  Gallet. 

Au  beau  jardin  de  Fraace,  Fr.  Casadesos,  par  Guillot  de 
Saix. 

1919.  Janvier.  —  Pénélope,  Facrb,  par.  R.  Fauchois. 
Juin.  —  La  Fille  de  Madame  Annal,  Lecocq. 
Octobre.  —  Gismonda,  Février,  par.  Cain  et  Payen. 

1920.  Janvier.  —  La  Rôtisserie  de  la   Heine  Pédauqne,   Levahk. 

par.  Docquois. 
Mars.  —  Masques  et  lien/amasques,  Faire,  par.  Fauchois. 
Avril.  —  Le  Sauleriot,  i.azzari,  par.  Rocher  et  Ferrier. 
Mai.  —  Lorenzaceio,  Moret. 
Juin.  —  Cosi  fan  lutte,  Mozart. 
Décembre.  — Le  Uni  Candaule,  Bruneau,  par.  M.  Donnay. 

1921.  Février.  —  Forfaiture,  Erlanger,  par.  Milliet  et  de  Lorde. 
Octobre.  —  Orphée  (ténor),  Gluck. 

Camille,  M.  Delmas,  par.  Spart. 


ENCrGLWÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


hr,,, ni, iv.  —  iiima  routine  de  la  cathédrale,  Hue,  par.  Fer 

rare. 
Dame  Libellule,  Hok,  Lemierre  et  Blavrï'a'trcbikd. 

1922.  Mai.  —  /.,■«    Vum  Corinthiennes,  lirssEH,   par.   A.   France. 

Novembre.  —  Les  Vas  «  las  «Ultras,   M.  d'Omn,  par. 

Verlaine. 
(.)««»,/   /„  cloche  tonnera,    Bachelet,   d'Hanswick  et   de 

Wattync. 
Ciauni  Sclucrlii.  IV.nvi,  par.  Fnrsano. 
Décembre.  —  Le  Fetlin  de  l'araignée,  A.  Roi 
Poti/phcme,  <a,\*.  par.  Samain. 

1923.  Mars.  —  le  Huila,  Marcel  Roùssead,  par.  Divoire. 

juin.  —  Vatuicaa,  Il  mi.,  par.  Fauchois. 
Pépita  Jimene:.  Albusiz,  adapt.  Marliavo. 
Novemln'i'.  -    Sainte  Odile,  Bertband,  par.  Lignereux. 
La  Griffe,  Foubdbaiîi,  par.  Sartène. 
Décembre.   —    La  Brebis  égarée,  D.   Milhaud,   par.   Fr. 
lammes. 

1924.  Janvier.    —    La   plus    forte,    Leroux,   par.    Richepin    el 

Cbanday. 
Février.  —  Le  Petit  Elfe  ferme  l'œil,  Tlokext  Scbmitt, 

bàWet. 
Avril.  —  L'  Ippel  de  la  mer,  Rabaud. 
Mai.  —  tes  Bavards,  Offenbach. 
Juin.  —  Fr»  Angelico,  Hillemacher,  par.  Vaucaire. 
La  Farci  lilene,  Aubert,  par.  Chennevièré. 
1H25.  Avril.  —  Qraziella,  Mazellier,  par.  Gain  et  Gastambide. 
Mai.  —  /,a  Poème  >lt  unr,  Chkyaii.licr,  par.  Normandin. 
La  Cm ne,  lun  /.  ballet. 


Novembre.  —  La  Visseue  d'orties,  Doret,  par.  Morax. 
Décembre.  —  Le  t'.lollrc.  Lew,  par.  Verhaeren. 

1927.  Février.  —  Le  Poirier  de  Misère,  Di  i  snnoy,  par.  l.imo/i, 

ei  la  Tourxaase. 
Sophie  Amould,  Pu  km;,  par.  Nigond. 
Mai.  —  Résurrection,  Alfano. 
Novembre.  —  /.,■  bon  roi  llaaobeii.  M.  Roi-sskac.  par.  A. 

Rivoire. 
Décembre.    —    l.e    pauvre   Matelot,    D.    Milhadd,    par. 

Cocteau. 
Evolution,  Li-Ni-VNT,  ballet. 

1928.  Janvier.  —  Aiigelo,  Brdneau,  par.  V.  Bogo  et  Méré. 

Mars.  —  L'Amour  sorcier,  Fali.a,  ballet. 

El  Belablo  de  Maese  Pedro,  F  au  i,  se.  mimée. 

Mai.  —  Simili  le  terrible,  Hnnsonnr,  par.  Vignaud. 

Octobre.   —   La    Fiancée    rendue,    smetam,   adapt.   pai 

Brunel. 
Décembre.  —  Bninel  a  la  houpe,  Hue,  par.  Gaslainliide. 

1929.  Mars.  —  ].„  Femme  et  le  Pantin,  Zandonaï,  pu    \  aucaire, 

Avril.  —  La  l'eau  de  Chagrin,  Levadb.  par.  Decounselle  ''I 

Carré. 
Mai.  —  Pirana,  Ai  hemz,  ballet-pant. 
Sonatiua,  de  Halii-ter,  ballet-pant. 

Novembre.  —  Le  Bai  maigre  lui.  Chabriiîb,  adapt.  Carré. 
La  l'ie  lorgne,  Bossue,  par.  Benjamin. 


LES  SALLES  DE   L'OPERA 

L'Académie  royale  de  musique  s'ouvre  le  10  mars 
1671,  rue  Mazarine,  dans  une  salle  dressée  par  les 
soins  de  Perrin  au  Jeu  de  Paume  de  la  Bouteille. 
Lulli,  après  avoir  dépossédé  Perrin  de  la  direction 
de  l'Académie  de  musique,  fait  élever  une  autre 
salle  sur  l'emplacement  du  Jeu  de  Paume  du  Bel- 
Air,  rue  de  Vaugirard,  où  il  reste  jusqu'à  la  mort  de 
Molière  (1673),  date  à  laquelle  il  prend  possession  du 
Palais-Royal. 

Du  17  juin  167H  au  6  avril  1763,  l'Académie  de 
musique  demeure  dans  cette  belle  salle  spacieuse, 
pouvant  contenir  3  000  spectateurs;  malheureuse- 
ment, un  incendie  la  chasse,  le  6  avril  1763,  et  elle 
trouve  un  refuge  momentané  aux  Tuileries  en  176V. 
Cette  nouvelle  salle,  construite  par  Soufflot  avec 
beaucoup  de  rapidité,  mais  saus  grand  succès,  est 
utilisée  jusqu'à  la  réouverture  du  Palais-Koyal  en 
1770. 

En  juin  1781,  un  nouvel  incendie  détruit  la  salle, 
reconstruite  sur  de  nouveaux  plans  par  Moreau,  et 


l'Opéra  doit  se  contenter  de  la  salle  des  Menus-Plai- 
sirs jusqu'au  21  octobre  de  la  même  année. 

A  l'occasion  de  la  naissance  du  Dauphin,  on  inau- 
gure la  salle  de  la  Porte  Saint-Martin.  Le  spectacle 
étant  gratuit,  il  y  a  une  telle  al'lluence  que  la  salle, 
construite  trop  rapidement,  menace  de  s'écrouler. 

L'Opéra  est  forcé  de  quitter  la  Porte  Saint-Martin 
et  de  s'installer  au  Théâtre  National,  me  de  Riche- 
lieu, place  Louvois.  Sous  le  nom  de  théâtre  des  Arls, 
il  y  commence  ses  premières  représentations  le 
7  août  1794. 

Le  13  février  1820,  le  duc  de  Berry  y  est  assassiné 
par  Louvel,  et  le  théâtre  est  démoli  :  l'Académie 
royale  de  musique  élit  domicile  salle  Favart  jus- 
qu'en 1821. 

Apres  plusieurs  représentations  au  théâtre  Lou- 
vois, elle  s'installe  dans  une  salle  construite  rue 
Le  Peletier,  et  elle-même  incendiée  le  29  octobre 
1873.  Pendaut  plus  d'un  an,  les  représentations  sont 
données  salle  Ventadour,  en  attendant  la  construc- 
tion de  la  nouvelle  salle  édifiée  par  Charles  Garnier 
et  inaugurée  le  5  janvier  1N~:;. 

Depuis  son  origine,  l'Académie  de  musique  el  de 
danse  a  souvent  changé  de  nom. 

A  la  fin. du  règne  de  Louis  XVI,  elle  s'appela 
Théâtre  de  l'Opéra.  Le  13  décembre  1791,  «  Acadé- 
démie  royale  de  musique  »,  puis  elle  s'appela,  au 
gré  des  événements,  «  Opéra  national  »,  en  1794, 
«  Théâtre  des  Arts  »,  et  en  1797  «  Théâtre  de  la  Ré- 
publique et  des  Arts  ». 

En  1803,  on  raye,  dans  les  documents  officiels,  le 
mot  de  «  République  ».  Sous  l'Empire,  on  l'intitule 
«  Académie  Impériale  de  musique  ».  En  1814,  la 
Restauration  l'oblige  à  se  déclarer  «  Royale,  »  puis, 
durant  les  Cent  Jours,  elle  redevient  «  Impériale  ». 
Elle  reste  «  Académie  royale  de  musique  »  de  1815 
à  1848,  puis  «  Théâtre  de  la  Nation  »,  sous  la  seconde 
République  et  redevient  «  Impériale  »  sous  le  règne 
de  Napoléon  III  :  depuis  1870.  elle  a  reçu  et  conservé 
le  nom  de  «  Théâtre  National  de  l'Opéra  «  ou  «  Aca- 
démie nationale  de  musique  ». 


LES   DIRECTEURS 


hais. 


,1e:;,. 


par  Pierre 


10  novemb 

fonder  une  Académie  de  musique. 
28  juin  1G69.  —  Direction  de  l'Académie  de  musique  par  Pierre 

Perrin. 
30  mars  1672.  —Révocation  du  privilège  de  Tierre  l'erriu  au 

profit  de  Lulli. 
27  juin  1687.  —  Mauvaise  administration  de  Francine,  gendre 

et  successeur  de  Lulli. 
30  décembre  lii'.is.   _  Nouveau  privilège  accordé  à  Francine, 

;i  la  condition  de  s'adjoindre  Hyacinthe  do  ('.aurraull, 

sieur  de  Uumout. 

7  octobre  1701.  —  Franchie  el  Du bï  cèdenl  leur  privilège  à 

pierre  G'uyenet,  payeur  de  rente». 

12  dé, ,bre  1712.  '—  Exploitation  requise  par  Francine  et  Du- 

mont  après  la  taillite  ,1e  Guveiiet. 

S  janvier  1713. —  Nouvelles  lotir,*  patent, s  i,c.ir.,yoe  s  à  Frali- 
einr  et  Dniiiont.  Résiliai,, ,u  d,,  marché  des  syndics  d,- 
la   faillite  liuxenel,  moyennant  une  dette  nouvelle  de 

73  114  livres 'ajout mx    1O0  000   livres  dues  par  le 

malheureux  directeur.  Désaccord  entre  les  directeur* 
et  les  syndics  qui  restent  peu  après  maîtres  de  la  direc- 
tion des  affaires  de  l'opéra. 

2  décembre  1715.  —  Des  hauts  personnages  de  la  Cour  sonl  nu- 
successivoraenl  .',  la  1,-le  de  la  direction,  entre  autre. 
!e  duc  d'Antin,  mais  Francine,  devant  l'incapacité  >U- 
direclenrs,  continu, ■  à  diriger  sent  l'Académie  de  un, 
siqne  el  de  dame. 

8  février  1728.  —  Destoi  eues  obtient  le  pri»ilège.  Fruucine. 
l'-r  juin  1730.  —    Révocation  de  tou«  privilèges  antérieurs  et 

lettres  patentes  accordées  au  sienr  Oruer  pour  un,- du- 
rée de  10  années.  Associai i,,n  .innw,  lidneuf  et  baole 
de  saint  Cille*.  I u  imnoialioii  de  ce  rirntiftr,  qui  iwrtil 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    881» 


1  hok'l  de  1  Académie  de  mnsîqne  le  15  juin  1731. 

août  1731.  —  Nouveau  privilège  accordé  à  I-ecomle  ;  il  s'as- 
socie a  Lebœuf. 

mai  1733.  —  Eugène  de  Thuret.  ancien  capitaine  .lu  rêgimenl 
'le  Picardie,  succède  à  Lecomte  révoque.  Mauvaise 
administration,  qui  conduit  à  la  ruin>-  le  directeur  au 
bout  de  onze  années. 

mars  1744.  —  Privilège  accordé  à  François  Berger,  ancien 
r veur  général  'les  linances,  qui  augmente  .1.-    ion i 


refoii 


te  une  nouvelle 

d*ë  M.iilly. 
ris  la  direction 
et    Prancœdb 


dette  de  250  000  livres.  Il  s'él  

La  Feuillade,  Bougenier  el  le  c 

-'7  août  1749.  —Arrêt  accordant  à  la  ville 
île  l'Académie  de  musique.  Ri 
(1749-1753). 

28  novembre  1753.  —  Rbbel  et  Francœor,  nommés  directeurs 
pour  le  coin  |i  te  de  la  ville  île  Paris,  ne  ta  rite  ni  pas  a  dé- 
missionner. 

17r,4.  —  Le  niailie  ,1e  musique  'les  enfants  de  France,  H"-,  ru, 
est  nommé  inspecteur  général  de  l'Opéra;  il  menrl  au 
bout  d'un  an. 

9  avril  1755.  Bontemps  et  Levasseur  succèdent  à  Rover. 

fi  février  1767.  —  Berton  el  Triai.,  nommés  directeurs  privi- 
légiés de   l'Académie  de  musique,  administrent  mal  "I 

Dnevembrel"  i     rille  de  Paris  nommée  à  -nouveau  direc- 

trice Fail  gérei  l'Opéra  par  Berton,  Trial,  Dacvergnb 
et  Jolivi  m.  Déficil  de  500000  livres. 

'  "''..  —  Arrêt  du  Conseil  nommanlcommissaires  du  Roi 
pour  gouverner  l'Académie  île  musique  les  intendants 
des  Menus-Plaisirs  :  papillon  de  la  Ferté,  Mareschaux, 
des  Entelles,  .le  la  Touche.  Bourboulon,  Héberl  i  Bul 
fault. 

Au  boul  d'un  an,  Berton  el  Buffanlt  restenl  seuls  . 
la  tête  de  l'Opéra. 

18  octobre  1777.  —  Privilège  accordé  pour  P.»  ans  à  de  Vismes 

du  Valgay,  moyennant  un  cautionnement  de  ' 

livres,  on  lui  accorde  une  subvention  ,h-  snono  livres 
etil  fait  preuve  de  beaucoup  .l'activité  dans  son  admi- 
nistration. 

19  février  1770.  —  Arrêt  ordonnant  que  l'Opéra  soit  régi  par  de 

Vismes  pour  la  ville  de  Paris. 
17  mars  1780.  —  Berton  nommé  directeur  général  après  un 

nouvel  arrêt  retirant  à  la  ville  de  Pai  is  !..  direi  li I. 

l'opéra. 

D Auvergne  et  Gossec  lui  succèdent  après  sa  mort 
survenue  au  bout  de  deux  mois  de  direction.  La  Ferté 
nommé  commissaire  royal. 


malien  en  jaim. 

r  1 791 

1792.  — Francœu 

de  Paris  lentrep 

Mais,  trouvés 

suspec 

Rey,  Rochefort 

t.  La  S 

ministratif. 

Puis,  leur  succèdent  La  Chaheaussière,  Maza.lo,  Cail- 
lot, do  Parny  et  Mirl.eck. 

Enfin.  Franco  i  r,  Denesle  .1  lia.-..  s,,Mi  nommés  ad- 
ministrateurs provisoires. 
12  septembre  1799.  —  Devismes,  Bonet  de  Treiches  nommés 
administrateurs  par  le  Directoire  :  Cellerier,  agent  comp- 
table. 

28  décembre  1SO0.  —  Devismes,  resté  seul  directeur,  accusé  de 

gestion  malhonnête,  est  remplacé  par  Bonel. 

22  décembre  1801.  —  Cellerier  nommé  directeur. 

26  novembre  1S02.  —  Morel  nommé  administrateur  et  Bonet 
administrateur  comptable  sous  la  surveillance  du  pré- 
fet du  Palais. 

Septembre  1803.  —  Bonet,  directeur,  suspendu  le  1<"  mars  1807, 
rétabli  le  22  avril. 

29  juillet    1S07.  —  Décret  impérial   supprimant  la   liberté  des 

théâtres  el  réduisant  a  s  le  nombre  de  scènes  lyriques 
et  dramatiques  de  la  ville  de  Paris. 
1er  novembre  1S07.  —  Création  de  la  surintendance  des  grands 
théâtres. 

Picard  nommé  directeur  de  l'Académie  impériale  de 
musique. 
IS  janvier  1SI0.  — Papillon  de  la  Ferté  nommé  directeur;  Cho- 
ron régisseur. 

Perscis  lui  succède.  —  Courtin  administrateur. 

30  octobre  1819.  —  Viotti,  le  violoniste  célèbre,  nommé  direc- 

teur. Courtin  administrateur. 
rl«  novembre  1821.   —  Habeneck,  autre  violoniste,  prend   la 
direction. 


26  novembre  1824.        Duplantys  nomme  directeur  par  décision 

royale. 

12  juillet  1S27.  —  Lubberl  nommé  directeur.  Toujours  sous  la 
surveillance  du  surintendant  des  théâtres,  il  n'est,  pas 
plus  que  ses  prédécesseurs,  responsable  de  la  mauvaise 
gestion  de  l'Opéra. 

2  mars  1831.  —  A  ses  risques  et  périls,  le  dooteur  Véron  se 
charge  .l'administrer  l'Opéra.  Il  reçoit  une  subvention 
du  ministre  de  l'intérieur  de  s  10  000  francs,  puis  de 
760  000  francs,  puis  de  710  000  francs.  Associé  avec 
Duponchel  (1835). 

15  août  1S35.  —  L'architecte  Duponchel  succède  au  docteur 
Véron  qui  a  fait  fortune  en  4  ans. 

15  novembre  1839.  —  Monnais  adjoint  a  Duponchel. 

!•'  juin  tsio.  —  Société  formée  entre  Duponchel  et  Léon  Pillet, 
auquel  succède  Monnais  en  qualité  de  commissaire 
royal. 

31  juillet  1847.  —  Direction  Duponchel  et  Nestor  Roqueplan. 

21  novembre  1s  io.  —  Nestor  Roqueplan  seul  directeur. 

11  novembre  isr,  i.  —  Crosnier,  député,  nommé  par  décret  admi- 
nistrateur général  de  l'opéra. 

1"  juillet  1Sr,6.  —  Alphonse  Rover  successeur  .le  Crosnier. 

20  décembre   IS62.  —  Emile  Perrin  directeur  de  l  .  .,,.,;. 

I  I  ai  n!  1866.  —  Proclamation  de  la  lîberl  des  théâtres  el  no- 
mination d'Emile  Perrin  comme  directeur  responsable, 
moyennant  un  caul n  »e  mes.  Il  ob- 

tient un--  subvention  de    <■>•  i  nu  I  empereur 

lui  accord  t  l m  lr.    u  ulière. 

6  septembre  1S70.  —  Démission  d'I'inile  l'en   n.  qo 
fois  administrateur  provisoire  de  I' i  a. 

Avril-mai  1S71.  —  Garnier. 

ter  juillel  1871.  —  Halanzier-Dufresnoy  nommé 
provisoire. 

1"  novembre  Isît.  —  Halanzier  nommé  directeui 
di    '  ipéra. 

i  .  pullei  t-7'.i  — Vaucorbeil,  directeur-entrepreneur,  adminis- 
trateur de  tout  premier  ordre. 

4  novembre  tsSi.  —  Direction  des  beaux-arts  :  des  Chapelles. 

!■ r  décembre  1884.  —  Ritt  et  Gaillard  directeurs. 

1892.  —  Bei  ii-  .ii.l  el  Ed.  Coi  o  <si  directeurs. 

1S96.  —  Bertrand  et  Gailhard  de 

IS99.  —  Gailhard  directeur. 

1900.  —  Gailhard  et  Capoul  directeur-. 

1905.  —  Gailhard  directeur. 

1908.  —  Messager  et  Broussan  directeurs. 

191  [-1930.  —  Rouché. 


Les  chefs  il'orchestre. 


,677;  _  coi.vssc.  '  i Sous  rœil  de  Lcllï  Ieur mait,-e- 

l.'.sT.  —  Marin  Marais. 

1703.  —  Marais. 

1710.  —  Lacoste. 

171  i.  —  Mocret. 

1718.  —  Rebel  (Jean-Fery). 

17TÎ    —  !  R'!BEt- (François).  (         narlaee 

1,3J-        '  Francœcr  (François).       ]    en  partage. 

1714.  —  Xiel,  Acbert. 

1749.  —  Chéron,  Aobert. 

1750.  — Chéron,  La  Garde,  Acbert. 

1751.  —  Dacvergne. 

1755.  —  Chéron,  Lv  Garde,  Aobert. 

1759.  —  Berton  (Pierre-Montau),  Adbert. 

1767.  — Berton,  Francœdr  (Louis). 

17S1.  —  Rey  (Jean-Baptiste). 

1810.  —  Perscis,  Rochefort. 

1816.  —  Perseis,  Kredtzer  (Rodolphe). 

1824.  -  ;  v'^EENTiNKo!Franf0iS)'    I    ™P^>-"- 

1S31.  —  Habeneck  (seul). 

1846.  —  Girard. 

1860.  — L.-Ph.  Dietsch,  Dei.devez,  Millatii.t. 

1863. —  Georges  Hainl. 

1872.  —  Deldeyez,  Altès,  Garcin. 

1877.  —  Ch.  Lamoprecx. 

1892.  —  Ed.  Colonne. 

1894.  —  Taffanel. 

1906.  —  Paul  Vidai.. 

1911.  —  H.  Rabacd,  "Bcsser,  Bachelet. 

1915.  —  C.Chevillard,  Bcsser,  Rabaud,Grovlez,Rohl 

1920.  —  Bcsser,  Gadbert,  Grovl-kz. 


1923.  —   Gacbert, 


Gcovi.ez     Robxmann,   Defosse. 


ENCYCLOPÉDIE  DR  LA  MUSIQUE  ET  DfCTIOy.VAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


LISTE  CHRONOLOGIQUE   DES  ŒUVRES   REPRÉSENTÉES   A   L  OPÉRA   DEPUIS  L'ORIGINE 


Date 

Je  la  1"  reprrsentalion 

MUSICIENS 

1  l><> 

19  mars  1671. 

Camb 

BT. 

Perrin. 

3  novembre  1671. 

S  ABU 

iRES. 

Guichard 

s  avril  1672. 

Cam» 

RT. 

Gilbert. 

16nov.  1672. 

Luli.i 

Molière,  I 

Avril  1673. 

— 

Quinault 

Janvier  1674. 

— 

— 

11  janvier  1675. 

— 

— ; 

Époque  île  I.ulli  (1671-469?) 


31   janvier    1679. 
3  février  1680. 
6  mai  1681. 

17  avril  1682. 
27  avril  1683. 

18  janvier   1684. 
8  mars  1685. 
1685. 


Molière,  Benserade,  Quinault. 

Quinault. 

Thomas  Corneille. 

Thomas  Corneille  et  Fontenelle 

Quinault. 

Quinault 

Quinault. 


7  novembre  1687. 

Lulli  et  Coi.asse. 

— 

22  mars  16S8. 

j  Louis     et    Jean- 
\      Louis  Lulli. 

)  Du  Boullav. 

1 

1 1  janvier  1689. 

Colasse. 

Fontenelle. 

8  avril  1690. 

Louis  Lulli. 

Du  Boullav. 

Novembre  1690. 

COLASSE. 

Fontenelle. 

23  mars  1691. 

(  Théobai.i.o     di 

)  Chappuzeau  de  Beangé. 

Novembre  1691. 

j     <;atti. 

COLASSE. 

La  Fontaine. 

Ier  sept.  1692. 

COLASSE. 

Banzi. 

3  février  1693. 

(  Louis     Lulli     et 
|      Marais. 

)  Campistron. 

11  sept.  1693. 

Desmarets. 

Mme  Gillotde  Sainclonge 

Décembre"  1693. 

Charpentier. 

Thomas  Corneille. 

15  mars  1694. 

1M="        DE        LA- 
/         GUERRE. 

j  Duché. 

1"  octobre  1695. 

Desmarets. 

Mm0  Gillol  de  Sainclonge 

3  février  1695. 

Desmarets. 

Duché. 

25  mai  1695. 

— 

— 

18  octobre  1695. 

Lulli  et  Colasse. 

L'abbé  Pic. 

6  janvier  1696. 

Coi.asse. 

J.-B.  Rousseau. 

Février  1696. 

Marais. 

Saint-Jean. 

1er  maj  1696. 

Colasse. 

L'abbé  Pic. 

13  janvier   1697. 

CtERVAIS. 

L'abbé  Boyer. 

17  mars  1697. 

Geryais. 

J.-B.  Rousseau. 

9  juin  1697. 

La  Coste. 

L'abbé  Pic. 

Les  Amours  i!c  liiauc  el  il'liiihiiiuon. 

Les  Peines  et  les  Plaisirs  de  l'Amour. 

les  Fêtes  île  l'Amour  el  île  Bacchus. 

Cadmus  el  llermione. 

Alcesle. 

Thésée. 

le  Carnaval. 


Opéra. 
Pastorale. 
Tragédie   lyrique. 


Isis. 

Psyché. 

Bellérophon. 

Proserpine. 

le  Triomphe  tle  l'Amour. 

Persée. 

Phaéton. 

Roland. 

VIdylle  sur  la  Paix. 
l.'Ei/logiie  île  Versailles, 
le  Temple  de  la  Paix. 

Armide. 

Aeis  et  Galalliëe. 

Achille  el  Volixcne. 
Zëphire  el  Flore. 


(  Mascarade  -  pas- 
(      tiche. 
Tragédie   lyrique. 


Orphée. 
Ence  el  Lariu 
Corouis. 


Pastorale. 

Divertissement. 

Opéra-ballet. 

Tragédie  lyrique. 
\  Pastorale  héroï- 
|      que. 

Tragédie   lyrique. 

Opéra-ballet. 

I  Tragédie  en   mu- 
I      sique. 
Tragédie  lyrique. 

i  Pastorale  -  héroï- 
i      que. 

Aslrèe.  Tragédie  lyrique. 

Le  Bnllel  île  Vil/eneure-Sainl-Gcorges.    Ballet. 

Alcide. 

Tragédie  lyrique. 

Bidon.  — 

Vidée.  — 

Céphale  et  Procris.  — 


Ciné. 

Thèagène  ci  Chariclée. 

Les  Amours  de  Momut. 

les  Saisons. 

Jason  ou  La  Toison  d'Or. 

Ariailne  el  Bacchus. 

La  Naissance  de  Vénus. 

Méduse. 

Venus  cl  Adonis. 


Ballet-opéra. 

Opéra-ballet. 
Tragédie  lyrique. 
Tragédie   lyrique. 
Opéra. 
Tragédie  lyrique. 

Opéra-ballet. 


Époque  de  Campra  (1  697-1739) 


24  octobre  1697. 

Campra. 

La  Motte. 

17  décembre  1697. 

Destouche*. 

— 

10  mai  1698. 

Desmarets. 

Duché. 

28  février  1699. 

Campra. 

Regnard. 

27  mars  1699. 

Destodches. 

La  Motte. 

29  novembre  1699. 

Destouches. 

— 

16  mai  1700. 

(Michel    de    L 
(      Barre. 

i 

4  novembre  1700. 

Colasse. 

21  décembre  1700. 

Campra. 

Danchet. 

14  juillet  1701. 

— 

— 

16  sept.  1701. 

t  Théoiiai  do 

1         GATT!. 

i  )  Duché. 

lOnov.  1701. 

Destodches. 

La  Motte. 

23  juillet  1702. 

Bouvard. 

La  Grange-Chancel . 

10  sept.  1702. 

Lulli. 

7  novembre  1702. 

C\MrRA. 

Danchet. 

21  janvier  1703. 

Rerf.l. 

Guichard. 

2S   octobre    1703. 

Campra. 

Danchet. 

3  janvier  1704. 

Destouches. 

La  Motte. 

6  mai  1704. 

(Desmarets    et)  Duché  de  Vancy  et  Danch 

les  l'aies  Galantes. 

Le  Carnaval  de  Venise. 

Ainudis  de  Grèce. 

Harthésie,  Reine  des  Amazones. 

Le  Triomphe  des  Arts. 

Cantate. 

Ilêsitine. 

Arélhusc  nu  la  Vemieance  il  l'An 

Scijlla. 

Omphale. 

Mitas,  Roi  des  Uédes. 

Les  Fragments  de  Lulli. 

Tancrcile. 

Vinsse. 

tes  Muses. 

le  Carnaval  cl  la  Folie. 

Iphnimie  ni  Tanride. 


Ballet. 
Ballet-opéra. 

Tragédie  lyrique. 

Opéra-ballet. 
Tragédie    Uriqii". 

Opéra-ballet. 

Tragédie    lyrique. 


Tragédie    lyrique. 
Tragédie  lyrique. 
Opéra-ballet. 
Omédic-ballel. 
Tragédie    lyrique, 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS 


11  nov.  170-1. 

Campra. 

Danchet. 

Télimaque. 

Tragédie. 

15  janvier  17U5. 

— 

— 

Akine. 

Tragédie  lyrique. 

26  mai  1705. 

La  Barre. 

La  Motte. 

Lu  Vénitienne. 

Comédie-ballet. 

20  octobre  1705. 

La  Goste. 

Roy. 

tkiloméle. 

Tragédie    lyrique. 

18  février  1700. 

Marais. 

La  Motte. 

Alcyone. 

22  juin  1700. 

(  Bouvard,   Bertin 
i       DE  LA  Dooé. 

|  La  Grange-Chancel. 

Cassamlrt'. 

- 

21   octobre   1700. 

'  COLASSE. 

La  Serre. 

Polyiene  el  Pyrrhus, 



2  mai  1707. 

t. A    COSTK. 

Roy. 

Bradamaule. 



6  mars  170S. 

Campra. 

Roy. 

Ilippodamie. 
Simili. 

— 

9  avril  1709. 

Marais. 

La  Motte. 

Tragédie. 

24  mai  1709. 

,  Batistin   dit 

(                      Stock. 

1   BlîHTIN. 

!  Jolly. 

Miliagre, 

Tragédie  lyrique. 

28  avril  1710. 

La  Serre,  sieur  .le  I 

'Anglade. 

Diométte. 

_ 

17  juin  1710. 

Campra. 

Danchet. 

Les  Files  Vénitiennes. 
Mnnlo  la  Fie. 

Opéra-ballet. 

29janvierl711. 

(  Batistin  dit 

|  Menesson. 

opéra. 

(                     Stuck. 

1 

12  janvier  1712. 

Campra. 

Danchet. 

Creuse,  l  Ukiniettne. 

Tragédie  lyrique. 

5  avril  1712. 

La  Coste. 

Roy. 

Tragédie    lyrique. 

6  septembre  1712. 

Campra. 

Danchet. 

Les  Amours  de  Mars  el  Ue  Vénus. 

Opéra-ballet. 

27  décembre  1712. 

Destooches. 

Roy. 

Caltirhoé. 

Tragédie    lyrique. 

24  avril  17  13. 

Salomon. 

L'abbé  Pellegrin   de  I 

a  Roque). 

Hiilée  et  Jason. 

— 

22  août  1713. 

BouRGKOIS. 

Fuzelier. 

Lfs  Amours  dèourses. 

Ballet  lyrique. 

28novembrel713. 

Campra. 

Danchet. 

Tèlèphe. 

Arion. 

Les  Festes  de  Tlialie. 

Tilémaqve, 

Tragédie  lyrique. 

10  avril  1714. 

14  août  171  î. 

Matho. 
Mocret. 

Fuzelier. 
Lafont. 

Opéra-ballet. 

29  novembre  17 11. 

1)1  STOUOHES. 

L'abbé  Pellegrin." 

Tragédie    lyrique. 

29  avril  1715. 

Bocroeois. 

Menesson. 

Ias  Plaisirs  de  la  Paix. 

Ballet. 

3  décembre  1715. 

Salomon. 

L'abbé  Pellegrin. 

Theonoé. 

Tragédie    lyrique. 

20  avril  1716. 

Bertin. 

Menesson. 

12juin  1716. 

MONTECLAIR. 

L'abbé  Pellegrin  (M"e 

Barbier.) 

Les  Festes  de  l'Eté. 

Ballet. 

3  novembre  1716. 

Gervais. 

Lafont. 

Hypermneslre. 

Tragédie   lyrique. 

6  avril  1717. 

Mmorlt. 

La  Grange-Cbancel  et  Roy. 

Ariane. 

— 

9  novembre  1717. 

Campra. 

Danchet. 

Camille,  Reine  des  Volsques. 

— 

14  juin  1718. 

Bertin. 

L'abbé  Pellegrin  (M"« 

Barbier.) 

Le  Jugement  de  Pâtis, 

(  Pastorale     héroï- 

9  octobre  1718. 

Campra. 

Fuzelier. 

Les  Ages, 

(      que. 
Ballet. 

i  décembre  1718. 

Destooches. 

Roy. 

Sèmiramis. 

Tragédie  lyrique. 

10  août  1719. 

Bertin. 

L'abbé  Pellegrin  (M» 

Barbier). 

Les  Plaisirs  de  la  Campagne. 

Ballet. 

15  février  1720. 

(  Batistin  dit 

|  L'abbé  Pellegrin,  et  La  Serre. 

Potydore. 

Tragédie  lyrique. 

16  mai  1720. 

'  Gervais. 

Lafont. 

Les  Amours  de  Protèe. 

Opéra-Ballet. 

5  mars  1722. 

Desmarets. 

1  L'abbé  Pellegrin  sous 
!       son  frère. 

le  nom  ,1,- 

j  Renaud  au  la  suite  d'Armide. 

Tragédie  lyrique. 

Octobre  1722. 

Lcli.i. 

Molière. 

Poureeaagnac. 

j  Divertissement 
(                     italien. 

26  janvier  1723. 

Mooret. 

Seguineau  (La  Serre) 

Pirithofis, 

Tragédie  lyrique. 

13  juillet  1723. 

Colin  de  Blamont. 

Fuzelier. 

l'êtes  Crecuues  el  Hautaine*. 

Ballet  héroïque. 

10  avril  1725. 

Jacques    Acbert. 

Fuzelier. 

La  Heine  des  Péris. 

Comédie   persane. 

29  mai  1725. 

Lalande   et  Des- 
tooches. 

Roy. 

Les  Eléments. 

Ballet. 

6  novembre  1725. 

La  Coste. 

L'abbé  Pellegrin. 

Tiligone. 

l'ragédie  lyrique. 

28  mars  1726. 

Destooches. 

Roy. 

1  es  Strutui/eutes  de  l'Amour. 

Ballet. 

17  octobre  1720. 

(  Rebel    et    Fran- 

i  La  Serre. 

Pyrame  el  Thisliè. 

Tragédie   lyrique. 

14  sept.  1727. 

Mouret. 

Fuzelier. 

Les  Amours  des  Dieia. 

Ballet. 

17  février  1728. 

La  Coste. 

Lafont  et  l'abbé  Pelle 

>rin. 

Or  ion. 

Tragédie   lyrique. 

20  juillet  172s. 

Villeneuve. 

L'abbé  Pellegrin. 

La  Princesse  i'Elide. 

Ballet  héroïque. 

19  octobre  17J8S. 

1   R.EBEL     el       FraX- 

)  La  Serre. 

Tarsis  et  Zilie. 

Tragédie   lyrique. 

7  juin  1729. 

S.iDI  OU    Ai -LE1TA. 

1 

Romagnesi  et  Dominic 

ue. 

i  Bajoeeo  e  Serpilla  ou  Le  Hari  Joui  10 
'      el  la  Femme  bigote. 

j  Intermède    comi- 
(      que. 

9  août  1720. 

J.-B.       Ql  INAULT. 

Fuzelier. 

Les  Amours  des  Déesses. 

Ballet  héroïque. 

povembrc  ou  dé- 

i Différents  auteurs 

t  Abbé  Pellegrin  el  Coli 

i  de  Bla- 

\  Le  Parnasse. 

Ballet. 

cembre  1729. 

/ 

i       mont. 

i 

31  janvier  1730. 

Rebel. 

La  Serre. 

Pastorale  Héroïque. 

— 

8  octobre  1730. 

Colin  de  Blamost. 

Fuzelier. 

j  tes  Caprices   i'Eralo, 

j      lires  de  la  Musique. 

)  Divertissemenl. 

20  octobre  1730. 

Royer. 

Fermelhuis. 

Pyrrhus. 

Tragédie   lyrique. 

18  janvier  1731. 

Campra. 

Danchet. 

Le  Jaloux  Trompé. 

Intermède. 

17  mai  1731. 

Colin  de  Blamont. 

Fontenelle. 

Endymion, 

i  Pastor  - 

20  février  1732. 

Monteclair. 

L'abbé  Pellegrin. 

Jephlé. 

que. 
Tragédie   lyrique. 

5  juin  1732. 

Mocret. 

Roy. 

Les  Sens. 

ballet. 

6  novembre  17'.12. 

La  Costi  . 

Fleury. 

Btltlis. 

Tragédie   lyrique. 

14  avril  1733. 

1  Marquis  de  Br.as- 

j  Paradis  de  Moncrif. 

L'Empire  de  l'Amour. 

Ballet  héroïque. 

Époque  <lo  Rîiuiean  (I733-1'S'Î41) 


1"  octobre  1733. 

Rameao. 

L'abbé  Pellegrin 

llippoltjle  el  Aricie. 

22  juillet  1734. 

Doplessis  (cadet) 

Massip. 

Les  Fêtes  nouvelles. 

2i  février  1735. 

Campra. 

Danchet. 

Achille  el  Déidamie. 

5  mai  1735. 

Mooret. 

Roy. 

Les  Grâces. 

23  août  1735. 

Rameao. 

Fuzelier. 

Les  Indes  Galantes. 

27oelobre  1735. 

(  Rebel    et    Frax- 

La  Motte  et  La  g 

erre. 

Scander  lier  g. 

Tragédie  lyrique. 
Ballet. 

Tragédie  lyrique. 
Ballet  héroïque. 
Ballet  héroïque. 
Tragédie    lyrique. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQIE  ET  DICTION. \ AIRE  DU  CONSERVATOIRE 


3  mai  l73r,. 

23  t  L736. 

IS  octobre  1736. 


BOISMORTIKR. 
NlBL. 

Mllc  DnvAi.. 
Grenet. 
Rameai  . 
Colin  deJBlamo 


Fra 


Fuzelier. 

Le  Clerc  de  La  Bruére. 

Fleury. 

Lefranc  de  Pompignan. 

Gentil-Bernard. 
(  Ferrand,  Tannevot.  l'ab 
(      legrin. 


linï 


21  mai  1739. 

3  septembre  1739. 

19  IlOV.  1730. 

1 1  avril  1741. 

I  i  octobre  1741. 
30  janvier  1742. 

10  avril  1742. 

12  février  1743. 
23  avril  1743. 

20  août  1743. 

II  juin  1744. 

14  nov.  1744.  | 

17  mars  1745. 
12  octobre  1745. 
7  décembre  1745. 
1  octobre  1746. 

11  avril  1747. 

28  sept.  1747. 

29  lévrier  1748. 
27  août  1748. 

5  nov.  1748. 

4  février  1749. 

22  avril  1749. 


23  sept.  1749.  Mokdokv 

5  décembre  1749.     Rameau. 
5  mai  1750.  (  Marquis 

j         SAC. 
ROYER. 

|  Rebel   e 
I      ra.nn. 


Mios. 

MoURET. 

MoURET. 
MoNUONVlLLE. 

BOISMORTIER. 


RAMEAt 

Rameai 
Le  Cla 
Mion. 
Boismoi 

RAMEAt 

Rameai 


28  août  1750. 
28  août  1750. 

18  février  1751. 

18  février  1751. 

21  sept.  1751. 

19  nov.  1751. 

îor  août  1752. 

22  août  1752. 
19  sept.  1752. 


9  novembre  1752.  Daoverhne. 

30  novembre  1752.  Latilla. 

29déeembre  1 7  r.  2 .  RinaldodiGapo 

',i  janvier  1733.  Moudonvilli  . 

1"  mars  1753.  BtaveT. 

l°r  mars  1753.  J.-.i    Roi  sseai  . 

23  mars  1753.  Gioccino    Cocohi 

1"  mai  1753.  Pergolese. 
19  juin  17"  " 


20  sept.  1753. 
23  sept.  1753. 
9  novembre  1753. 
12  lévrier   1754. 
19  janvier  1755. 

30  sept.  1755. 

31  mai  1757. 
12  juillet  1757. 
12  juillet  1757. 

14  février  175S. 

9  mai  1758. 
'j  mai  1758. 


•vrier  17110.  Ramea 

epl.  1760.        (  Rebei. 

I        OŒOl 


Rinai.dodiCapea 

G:\ETANO  LaTII.I.A 

Nicolas   Jojjelxi 


(  Gib  m  met  Mon 

(      ,:„„. 


île   Miilido 


L'abbé  La  Marre. 
Le  Clerc  de  laBruère. 
La  Serre. 
Bellis  et  Roy. 
Néricault-Destouches. 
La  Rivière. 

Favart. 

Lefebvre  de  Saint-Marc. 

Duclos. 

Fuzelier. 


Moncrif. 

Cahusac. 

Voltaire. 

D'Albarel. 

Roy 

Laujon. 

Cahusac. 

La  Motte  et  Ballot  de  Sovot 

Cahusac. 

Aulreau  et  Ballot  de  Sovot. 

Cahusac. 

Fuzelier. 
Cahusac. 
Lefranc  de  Pompignan. 


La  Motte  et  l'abbé  La  Ma 


Gentil  Bernard. 
Marmontel. 


Les  Génies. 

te  Triomphe  de  l'Harmonie. 

Castor  et  Pollux. 

Les  Caractères  de  l'Amour. 

Le  Ballet  de  Ai  Pair. 

Les  Fesles  d'Ilehe  ou  les    Tû 


i.aiiel  her.uque. 

Ballet. 

Ballet  héroïque. 

Ballet. 

Ballet  héroïque. 

Tragédie    lyrique 

Ballet  héroïque. 

Ballet. 


/.unie,  Heine  de  Grenade. 

Ballet  héroïque. 

Dardanm. 

Tragédie    lyrique. 

Sitelis. 



Le  Temple  de  GniHe. 

Pastorale. 

Les  Amours  de  Rngoiide. 

Comédie    lyrique. 

Me. 

)  Pastorale     héroï- 

(      que. 

Don  Quichotte  riiez-  lu  Duchesse. 

Ballet  comique. 

Le  Fournir  de  l'Amour. 

Ballet  héroïque. 

Les  Caractères  de  lu  Folie. 

Ballet. 

1.  E<  «le  des  Amonls. 

Ballet. 

Les  Auuiislules. 

Divertissement. 

'/.elindiir.  roi  des  Sylphes. 

Ballet. 

Lei  Files  de  tvlymnie. 

Ballet  héroïque . 

Le  Temple  de  lu  Gloire. 

Fête. 

Seul  lu  el  Gluiieus. 

Tragédie  lyrique. 

L'Année  Gnlilnte. 

Opéra-ballet. 

Daphnis  el  Chine. 

Pastorale. 

Sait. 

Ballet  héroïque. 

PygmaHon. 

Entrée  de  ballet. 

Les  Fêles  de  fliiimeii  et  de  l  Amour. 

Ballet  héroïque. 

Plu  lue. 

Ballet  bouffon. 

Suis. 

(  opéra     (pour     la 

'      Paix). 

Le  Carnaval  du  Parnasse. 

Ballet 'héroïque. 

'/.ortiosire. 

Tragédie    lyrique. 

Lèandre  et  Iléro. 

Trag.  lyrique. 

Almasis. 

Ballet. 

Isineue. 

j  Pastorale     héroï- 

l     i"1*- 

Tilon  II  l'Aurore. 

opéra-ballei. 

Fuie. 

Ballet  héroiqm  . 

La  Guirlande  »»  les  Fleurs  eiieltanlées. 

npéra-ballet. 

Acanthe  et  CépMse  ou  ta  Sympathie. 

|  Pastorale     héroi- 

La  Serra  Puilrona  (la  servante  mai- 

1  iniermezzo. 

tivsse  j . 

//  Giocatore  (le  joueur). 

— 

//   Mufsiro  di   Musica   (le    maitre   de 

— 

musique). 

Les  Amours  de  Tempe. 

Ballot  héroïque. 

La  Finta  Cameritra. 

Intermezzo. 

Lu  li'iiiea  Superha. 

— 

Tilon  el  l'Aurore. 

(  pastorale     hér  i 

Le  Jaloux  corrigé. 

|     que. 
Opéra-bouffe. 

Le  Devin  du  Village. 

Intermède. 

Lu  Seuliru  governatriee. 

i  péra  bouffe. 

Tracollo 

li  Cinete  rimpatriuto. 

Divertimento. 

La  /.ingara. 

Intermezzo. 

i:ii  Irtigiani  Arrichili. 

— 

Il  Paratajo 

Bcrloldo  m  Corle. 

— 

1  Vwggialori. 

— 

Daphnis  el  Aleimatture. 

p  i  torale  langui-- 

Deuetiliott  el  Pgrrha. 

/.<•«  Surprises  de  l'Amour. 

Le»  Surprises  de  l'Amour  (Aiiaerem,  . 

Les  Surprises  de  i  Amour  (Les  Syba- 


Fine  et  Lnniiie. 
les  Fêles  de  Paphos. 
i  Us  Fêles  de  Paphos 

(Moncrif,    Danchet,    Favart   et  '  les  Files  d'Bvtcrpc. 


Ballet. 
Ballet. 
Ballet. 

Tragédie   lyrique 
Ballet  héroïque. 


Fragments 

ques. 
Opéra-balle 

opéra-balle 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3823 


m  juillet  1762. 
t«  octobre  1762. 
11  janvier  1763. 


I  octobre  1767. 
lnovembrel767. 
mai  1768. 
mai  1769. 
i  décembre  IT70. 
S  juin  1771. 
S  août  1771. 
»  octobre   1771. 
i  novembre  1771. 
ir.déc.  1772. 


Birton  et  Tb 


La  Motte. 

Marmontel. 

Duclos. 

Gauthier  de  Mondorge 

Joliveau. 

Sedaine. 

Bonneval. 

Moncrif. 

Cahusac. 

Laujon. 

Poinsinel. 

Thomas. 

Poinsinel. 

La  Motte. 

La  Motte. 

Laujon. 

Razins  de  Saint-Marc. 

Desfontaines. 

Joliveau. 

Quinault. 

Razins  de  Saint-Marc. 

Fuuelier. 
Le  Monnier. 
Chabanon  de  Maugris. 


I  |ic.i|iic  do  <• 


Cimente. 

Tragédie. 

lïereute  i/iuurunl. 

Tragédie  lyrique. 

Il  filas  el  ZèKe. 

Fragment. 

L'Opéra  de  Société . 

Comédie-ballet. 

Poivrent. 

Tragédie  lyrique. 

Aime,  Reine  de  Golconéc. 

Ballet  héroïque. 

Les  Fêtes  Lyriques  \  Lindor  et  Ism 

«H-;.     Ballet  héroïque. 

Les  Files  lyriques    Erosim   . 

— 

Su/rie. 

— 

Thèonis  ou  te  Toucha  . 

(  Pastorale     héroï- 

1      que. 

Amphhn. 

— 

Eriietiiule,  Princesse  de  Norwège. 

i  ragédie. 

Lu  Vénitienne. 

Comédie-ballet. 

Ùmphate, 

Tragédie    lyrique. 

Ismine  el  ftmémos. 

Tragédie. 

Lu  Fête  de  Flore. 

Pastorale. 

La  Ciiitiiiuiilaine. 

Pastorale. 

Le  Prix  du  la  râleur. 

Ballet  héroïque. 

ImadU  tte  Gaule. 

Tragédie   lyrique. 

Adèle  de  Punlliteii. 

— 

Ilride  et  Julie. 

Ballet. 

I  l 'nion  de  l'Amour  et  des  iris. 

Ballet  héroïque. 

SuHnas. 

Tragédie   lyrique. 

4-1  SOT). 

19  avril  1771. 

Glci  k. 

Bailli  du  Roullet  d'après  Racine. 

Iphigènie  eu  Aulide. 

.    . 

2  août  1774. 

— 

Moline  (d'après  Calzabigi). 

Orphée  ei  Kuridice. 

Drame    héroïqne. 

22  novembre  17  71. 

Floqobt. 

l.e  Monnier. 

A:uiuu  uu  le  Serment  indisi  rei . 

Ballet  héroïque. 

l'-r  aoûl  177Ô. 

I  .  I  [  1  K . 

Favart. 

l'.ulttere  assiégée. 

Ballet. 

■.t.  sept.  177:.. 

I.ossi  .  . 

Chabanon  'le  Mauui-i-. 

.Mens  tl  llu/ihue. 

/  feutrée  des  !rag- 
'       veaux. 

2fi  sepl    i  775. 

_ 

— 

l'iiiieiiiiiu  ei  Bawis. 

2- 

86  janvier  1776. 

NOVKRRK. 

'('..ild.'l  .    Vestris    ellule-raph.^   . 

\lr,l,  t  el  Jason. 

Ballet. 

23  avril  1776. 

Gluck. 

Calzabigi  el  du  Roullet. 

Aieente. 

Tragédie-opéra. 

30  juillet  1776. 

C\MII1NI. 

Bonneval. 

Les  Romans. 

Ballet  héroïque. 

30  sept.  1776. 

Noverre  (chorégraphe). 

Les  Caprices  de  Salatkie. 

Ballet. 

I"  octobre  1776. 

DÉSORM]  UN  . 

Boutellier. 

Enthyme  et  Lyris. 

Ballet  héroïque. 

10  janvier  1777. 

Pol  ri  ai  . 

— 

Alain  et  Rouelle. 

Intermède. 

21  janvier  1777. 

Starzi  b. 

Noverre  [chorégraphe  . 

les  Htraces. 

Ballet  héroïque. 

23  sept.  1777. 

Quinault. 

Tragédie. 

2  décembre  1777. 

DÉSORMKR\ . 

S  Bocquetde  Liancourt  et  Boutel- 
(      lier. 
Quinault. 

Uyrtil  et  Lueur i-. 

17  janvier  177s. 

PlCCISNI. 

Rnluud. 

Tragédie  lyrique. 

1«  mars  1778. 

Max.  Garde)    i'n  nV^i  l  ;  >  1 1  ■  -  . 

l.u  Chercheuse  d'esprit. 

Ballet- pantomime 

26  mai  1778. 

Gosskc. 

Desfontaines. 

Lu  File  du  Village. 

Intermède. 

i  juin  1778. 

1  LALASDE    et     DBS- 

Roy. 

Yertiiuiiie  et  Pomone. 

Fragment. 

1 1  juin  I77s. 

MOZART. 

Noverre  (chorégraphe). 

l.e,  Petits  Riens. 

Ballet-  pant"!iiiu  .■ 

Il  juin  1778. 

Pu  i  i\si 

Noverre  [chorégraphe  . 

Le  Finie  Gemelle. 

ipéra  bouffon. 

'.i  juillet  1778. 

Grasier. 

— 

Aiiuelle  el  Lu/nu. 

Ballet- pantomime 

'.i  juillet  177S. 

Paisibllo. 

Le  Due  Cuulesse. 

i  ipéra  bouffon. 

13  août 177S. 

Pa*OUALi:  A.N1  "--1 

Il  Cnrioso  Indiscrelo. 

Opéra  bouffon. 

18  août  177S. 

Ciampi. 

Garde)  aîné. 

Muette  ii  la  Cour. 

Ballet- pantomime 

10  sept.  177S. 

PlCCISNI. 

l.u  l'riiseulaiia. 

1  ipéra-bouffon. 

20  octobre  177S. 

PlCCISSI. 

lu  Sposa  collerica. 

t  intermède    bouf- 

1        fou . 

Entrée. 

S  novembre  177 S. 

Candbillb. 

Lafont. 

La  Provençale. 

12  nov.  177S. 

Anfossi. 

La  Finta  Giardiniera. 

i  Ipéra  bouffon. 

7  décembre  177*. 

Piccissi. 

Goldoni. 

La  Buona  Fii/liuola  (La  bonne  fille  . 

— 

5  janvier  1779. 

Floooet. 

Le  Monnier. 

Ilelle. 

Tragédie    lyrique. 

1 S  janvier  1779. 

Anfossi. 

Il  Geluso  m  cimento. 

Opéra  bouffon. 

15  avril  1779. 

Piccissi. 

Goldoni! 

\  l.u  Buona  FigHuola  maritata  (La  bonne 
!      fille  mariée). 

j  <  >pi'ia  italien. 

16  mai  1779. 

PlCl   INM. 

Anonvme. 

//  Vago  :lispre::-alv. 

Opéra  italien. 

18  mai  1779. 

CtLDCK. 

Guillard. 

Iphigènie  eu  Taurule . 

Tragédie  lyrique. 

10  juin  1779 

(  PaiSIELI."  >'      1  ai; 

(       très. 
Sacchim. 

Lorenii. 

Vldolo  Cinese. 

Opéra  bouffon. 

S  juillet  1779. 

L'Amure  Soldat 0. 

Intermède. 

5  août  1779, 

TommasoTr.  m  i  i 

Il  Cavalière  errante. 

opéra  italien. 

22  sept.  1779. 

Gluck. 

Baron  Tschudy. 

Eehu  ut  Narcisse. 

i  ipera. 

30  sept.  1779. 

Anfossi. 

Il  Uatnmtiuio  per  Inganno. 

Intermède. 

18  nov.  1779. 

Gardel  (chorégraphe). 

Slir:a. 

Ballet. 

14  déc.  1779. 

Chrétien  Bach. 

Quinault  de  Vismes. 

Amollis  de  Gaule. 

Tragédie-opéra. 

30  janvier  1780. 

RoilOLPHE. 

Noverre  (chorégraphe). 

ilèdée  et  Jason. 

(  Ballet  tragi-pan- 

22  février  1780. 

Piccissi. 

Marmontel. 

Altjs. 

'  Tragédie   lyrique. 

6  juin  1780. 

Grbtrt. 

Racine,  arrang1  par  Pitra. 

Anirtmàqut. 

— 

2  juillet  17S0. 

Candeille. 

,  Moline. 

1  Ballet  d'Auberval. 

Laure  et  Pétrarque. 

|  Pastorale      héroï- 

(     que. 

24  sept.  1780. 

DÉ3ÀUGIBRS. 

(  L'abbé  de  Voisenon  (œuvre  pos- 

|      thume). 

(  Quinault,     arrangé     par    Mar- 

Erixéne  ou  l'Amour  aluni. 

Pastorale. 

27  octobre  1780. 

l'HILIDOR. 

Persce. 

Tragédie    lyrique. 

ENCYCLOPÉDIE  DE  la  musique  et  dictionnaire  du  conservatoire 

l  Le  Seigneur  bienfaisant.  °pé 


BS  janvier  1781. 

15  février  17S1. 
3  mai  1781. 


2  juillet  1782. 
24  sept.  1782. 

24  sept.  17S2. 

26  nov.  1782. 
88  février  17  s::. 

27  mai  1783. 

29  juill 

26  aoù 


(         flHEFORT. 
1V.CINM. 

Grétry. 


Kl>l  l.MA 

Grétry, 
Sacciiin 


1783. 


déc  I7s:i. 


15  janvier  1784. 


26  juillet  1785. 

9  décembre  1785 

23  mai  17S6. 
li  juillet  1786. 

5  septembre  1786 
31  octobre  1786. 
21  nov.  1786. 
7  iléc.   1786. 


iRi>Ei.  I  aine. 


Ko-  1  Farmain  de  Rozoy. 
I 

Razins  de  Saint-Marc. 
(  Lourdet  de  Santerre. 
(  Ballet  de  Garde!  et  d'Auberval. 

Quinault,  arrangé  par  Morel. 

Guillard. 

Koy. 

Moline. 

Lourdet  de  Santerre. 
i  Le   Bœuf,  d'après  l'abbé  Pelle- 
(      grin. 
I  Billadon  de  Sauvigny. 
j  Ballet  Gardel   a  nié  . 

Gardel  aine  (chorégraphe). 
Me-  (  Morel  de  Chedeville. 
|  Ballet  de  Max  Gardel. 
'  Marmontel. 

M.     le     Comte     de     Provence 
j      (Louis  XVIII)  et  Morel. 
i  Ballet  réglé  par  Gardel. 

Guillard  d'après  Corneille. 

.       [  r.allet  réglé  par  Gardel. 

Du  Roullet  et  baron  de  Tschudy. 

Chevalier  de  Liroux. 
i  La  Bruère. 

J  Divertissement  réglé  par  Gardel 
)       cadet  et  Vestris. 
!  Morel  de  Chedeville  et  Mïr  le  C'e 
)      de  Provence. 
(  Ballet  réglé  par  Gardel  (l'aîné). 

Duplessis. 
vres     Gardel  (chorégraphe). 

(  Marmontel. 

(  Ballet  réglé  par  Gardel  lamé. 

Morel. 
!  Gersin. 
,  Ballet  réglé  par  Gardel   frères). 

Desriaux. 

<  i :i  i-ili-l  Irèn-s  (cliorégraphe-). 

Hoffmann. 

Guillard  d'après  Corneille. 
I  Guillard. 
|  Ballet  réglé  par  Gardel  (l'aillé). 

Gardel  l'aîné  (chorégraphe). 
,  Rochon  de  Chabannes. 
•  Ballel  réglé  par  Gardi  I    c  id  il 

Beaumarchais 
I  Ballet  réglé  par  Gardel  (cadet). 
1  Gardel  l'aîné  (chorégraphe). 

Moline   Iradui  teui  . 


tphigênie  en  Tauriile. 
Le  l'esté  tli  ttirza. 
Apollon  et  Coronis. 

L'Inconnue  persécutée. 

Aile  le  ,le  Pontkieu. 
I  La  Douille  épreuve  ou  Colinette   il  la 
!       Cour. 

Thésée. 

Electre. 
(  Le  Feu,  lro  entrée  des  fragments  de 
j        1782. 

Arituie  dans  llsle  de  Siuos. 

L'Embarras  îles  richesses. 


i  ragédie  lyrique. 
Ballet-pantomime 
Opéra. 


Tragédie  lyrique. 
Comédie    lyrique. 

l 'ragédie  lyrique. 
1  ragédie  lyrique. 
Ballet  héroïque. 

Drame  lyrique. 
Comédie  lyrique. 

Tragédie  lyrique. 
Opéra. 


Les  Danaides. 

Diane  el  Endumion. 
Dardanus. 


Pharre  ou  la  Conquête  tu  l'emu. 
(  Le  Premier  Navigateur  ou  le  Pour 
I       île  l'Amour. 

Pénélope. 


La  Toison  d'Or. 

Les  Sauvages  oit  le  Pouvoir  ie  la  Danse. 

Phèdre. 

Les  Horaces. 

Œdipe  d  Colone. 


Tragédie    lyrique 
Opéra. 

Tragédie    lyrique 


Comédie  lyriqur 


tragédie    lyrique. 

Tragédie    lyrique. 
Opéra. 

l'i-agédie    lyrique. 
Divertissement. 

Tragédie    lyrique. 


Ballet  comique 


Divertisse!  icnl 
(  opéra  héroï-co 
i     que. 


16  janvier  1788. 

Mimer. 

[  Gardel  l'aîné    chorégraphe  oeu  - 
i      vie  posthume  . 

Le  Déserteur. 

29  avril  1788. 

\  Sacchini,    ache\ 

(       par  J.-B.  Ki:i 

i    Guillard. 

Arvire  ed  Evelina. 

15  juillet  1788. 

Grétry. 

Sedaine  d'après  .Molière. 

[mphytrion. 

5  décembre  1788. 

Chiîrdbini. 

i  Marmontel  d'api  -s  M.Tisl.i 
!  Ballet  de  Gardel. 

Dèmophon. 

17  mars  1789. 

Grétry . 

(  Morel  de  Chedeville. 
(  Ballet  réglé  par  Gardel. 

Aspasie. 

2  juin  1789. 

Le  Moy.ne. 

Rochon  de  Chabannes. 

les  Prétendus. 

22  sept.  1789. 

VOGEL. 

1  Desriaux. 

1  Ballet  réglé  par  Gardel. 

Dèmophon. 

15  déc.  1789. 

Le  Mo  y  ni:. 

Hoffmann. 

Sephtè. 

22  janvier  1791). 

Le  Moyne. 

Forgeot. 

Les  Pommiers  et  le  Moulin. 

23  février  1790. 

Miller. 

i  lardel   chorégraphe). 

Tèlèmaque  duos  l'Ile  île  Calypso 

30  avril  1790. 

ZlNGARELLl. 

Mar Iitel. 

Antigone. 

15  juin  1790. 

Le  Moyne. 

-.inhalai  et  Andrieux. 

Louis  IX  en  Egypte. 

22  octobre  1790. 

Ckampein. 

Sàulnier. 

le  portrait  ou  la  D 

11  déc.  1790. 

Miller. 

Pierre  Gardel. 

Psyché. 

15  février  1791. 

MÉHI'L. 

Valadier. 

Corn. 

S  mars  (79 1 . 

Lanulé. 

Le  Baiily  el  de  Linières. 

Corisandre. 

li  juin  1791. 

Cakdeille. 

;  Gentil-Bernard. 

)  Ballets  réglés  par  Gardel  el  Lau- 

l      „n„i 

Castor  el  l'ollux. 

13  sept.  1791. 

Louis  .Iai.iv 

|       îenl. 
Sàulnier. 

L'Heureux  stratagème. 

il  déc.  1791. 

RoCHEFORT. 

Gallet   cliorégraphe  . 

BaechlIS  et  Ariane. 

lyrique. 
i   imédie  lyrique. 
Ballel  héroïque. 
i  ipéra  lyrique. 
Opéra. 

Comédie    lyrique. 
Ballet-pantomime 
i ipéra. 
Comédie    -  i 
Opéra. 


TKC.H  NIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    382 


27   janvier   an  II 

(1793). 
;i  février  1793. 


20  mars  1793. 

2  juin  1793. 
9  août  1793. 

3  novembre  1793. 
16   nivôse    an   II 

^5  janv.  1794). 
30  pluviôse  an  II 

(18  fév.  1794). 
I  i  ventôse  au   II 

(1  mars  1791). 
lti  germinal  an  II 

(3  avril  1794). 


Le  Froi 

REACX. 

'<  Citoyen  Gossec. 

René   Candeille. 

Haydn,    Plesvel 
(sic)   et  citoyen 
!      Mkhol. 

MOZART. 

Citoyen  Jadin. 

ILe  Froid  de  Me- 
REAOX. 

Le  Moyke. 

I  Le  Moïse. 

i  MÉHUL. 


Me-  1  C"  Duprat  de  la  Touloubre. 

!  J.-M.  Chénier. 
Ballet,  citoyen  Gardel. 
Citoyen  Lebœuf. 

I  Citoyen  Gardel  (chorégraphe). 


Notaris. 

Citoyens  Saulnier  et  Dutilh. 

Citoyen  J.-M.  Barouillet. 

Guillard. 
Beffroy  de  Reilly. 

Arnault. 

Fabre  d'Olivet. 

Citoyens  Moline  et  Bouquie 


Œdipe  à  Thèbt 


Tragédie   lyrique. 


Citoyen  Lefkbvre. 


8  fructidor  an   II  )  Citoyen  Grétuy 
(23  août  1794).  j 

1 1   nlïôse    an    II  1  — 

(31  déc.  1794).  j 
28    nivôse    an    V  i  — 

(17  Janv.  1797).  j 
25  messidor  an  VI  j  Ei.er. 


(18  déc.  1798).  ( 
lo  prairial  an  VII  )  Citoyen  Mbhcl. 

(«juin  1799).  j 
20  prairial  an  VII  )  Gossec. 

li  juin  1799).  j 
28    thermidor    an  j  Citoyens  PERsnis, 

VII  (15     aoi'it  \  Gresmck, 
1799).  ) 

13    frimaire 

VIII  (4 
17991.  J 

13  floréal  an  VIII  i  Fostbnflle. 

(5  mai  1800).  { 
25  prairial  an  VIII  i  méucl. 

(14  juin  1800).  j 
5     thermidor     an  j  M™  Dévisses. 

VIII  (24  juillet 
1800).  I 

2  fructidor  an  VIII  (  Arrangé    par   Le- 

(20  août  1800).  I       rEBVRK. 
18  vendémiaire  an  \  Porta. 

IX  (10  octobre  j 
1800).  ' 

9    nivôse    an    IX  f  .1.     Haydn  ,     arr. 

(24  déc.   1800).  (       par  Steidelt. 
2«  nivôse   an   IX  (  Citoyen   Lefeb- 

18  janv.  1801).  |       yrb. 
S   ventôse    an    IX  i  Citoyen  Kreutzer 

(27  fév.   1801).  '         et       Nicolo 


Citoyen  J.-H.  Guy. 

Demoustier. 

Guillard  d'après  Voltaire. 

Citoyen  Hoffmann. 

Anonyme. 

Ciloyen  Guilbert  Pixérécourt. 

Citoyen  Milon  (chorégraphe). 

Milcent. 

P.  Gardel  (chorégraphe.) 

Citoyen  Milcent. 

Milon  v  chorégraphe). 
Guillard. 

Van  Swielen,  de  Ségur. 
Milon  (chorégraphe). 


Le  Triomphe  île  la  République  ou  Le  l  Divertissement 
Camp  île  Grand  Pré.  (  lyriqui 

La  Patrie  Reconnaissante  ou  t'Apo~  i  Opéra  héroïque, 
theose  de  Beaurepuire.  } 

Le  Jugement  de  PAri*.  Ballet-pantomimi 


Le  Mariage  de  Figaro. 
Le  Siège  de  Thiomillc. 
Fabius. 

Comédio   lyrique. 
Drame  lyrique. 
Tragédie  lyrique 

UiUiade  à  Marathon. 
Toute    la    Grèce  ou  ce  qu 

Liberté. 
Uoralius  Coclès. 

e    peut    la 

Opéra. 
\  Tableau  patrioli- 
f      que. 

Acte  lyrique. 

Toulon  soumis  (fait  historiq 

ue). 

Opéra. 

La  Réunion  du  10  août  ou  l'Inaugura- 
tion de  la  République  française. 

.  Sansculoltidedra- 
\      matique ,  mêlée 
J      de  déclamalion, 
1      chants,  danse», 
f      évolutions  mili- 

Denis  le  Tyran'  maitre  d'école  à  Co- 
rinthe. 

l  Opéra. 

la  Rosière  Républicaine  ou 

la  Raison. 
Anncréon  chez  Polijcrale. 

la  Fête  de 

1  Opéra. 
Opéra. 

Appelle  et  Campuspe. 

Opéra. 

Ohjmpie. 

Opéra. 

Adrien. 

Opéra. 

La  Nouvelle  au\Camp  ou  le  ( 
geance. 

Léoiiidas  ou  les  Spartiates. 

>i  de  Ven- 

j  Scène  lyrique. 
Opéra. 

Ilèro  et  Lèandre. 

Ballet-pantomime. 

Hécube. 

Praxitèleou  la  Ceinture. 

Tragédie    lyrique. 
Folie-  pantomime. 
Opéra. 

Pygmalion. 

Les  Horaces. 

Ballet-pantomime. 
Tragédie    lyrique. 

n  i 

22  germinal  an  IX  j  Kr 

(12  avril  1801).  j 
2  fructidor  an  IX 

20  août   1801). 
16  brumaire  an  X  [  Citoven 

(7  nov.  1801). 


Mozart      arrangé  , 
par     Lachnith.  ] 


12  ventôse  an   X  j  Steibelt. 

(3  mars  1801).  j 
lf    floréal    an    X  j  Catei~ 

(4  mai  1802).     j 
27  fructidor  an  X     Wihtbk. 

(14  sept.   1802).  ( 
24  nivôse   an  XI  j  Citoyen  Mehul. 

(14  janv.  1S03).  j 
26  pluviôse  an  XI  )  Gretry. 

(15  fév.  1803).    j 
8  germinal  an  XI J  Paisiello. 

(29  mars  1803).  j 
16  germinal  an  XI  i  Arrangé  parKALK- 

(6  avril  1803).    J      brenner     et 
/      Lachnitb. 


Feu  Dujaure. 

Citoyen  Morel,  ci-devant  de  Ché- 

deville. 
Citoyen  Guillard. 
Ballets  réglés    par   le    citoyen 

Gardel. 

Citoyen  Gardel. 

Desriaux  d'après  Voltaire. 
Ballet  du  citoyen  Gardel. 
Citoyen  Morel,  ci-devant  de  Ché- 

deville. 
Pierre  Gardel. 

G.-H.  Guy. 

Guillard  d'après  Quinault. 


La  Création  du  monde. 

Les  Xoces  de  Gamaclie. 

I  Flaminius  à  Corinlhe. 
] 

Asti/ann.i. 

)  Les  Mystères  d'Isis. 

|  Le  Casque  et  les  Colombe 

Le  Retour  de  lèphire. 

Sèmiramk. 

Tainerlan. 


SDaphnis  et  Pandrose  oit 
de  l'Amour. 
Delphis  et  Mopsa. 

Proserpine. 

}  Saiil. 


Vengeait 


Kjll.t-pantomime. 

Folie. 
Opéra. 


Opéra. 
Opéra. 
Opéra-ballet. 

Divertissement. 

Ballet. 

Opéra. 

'  j  BaUet-pantomlm». 

Comédie  lyrique. 

Tragédie   lyrique. 

(  Oratorio  mis    en 
\      action. 


ENCYCLOFËDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


(13  juin  1803  .    i 

21    fin-i  iimlnr    an  I  Louis  Jadi 

XI  (9       août 
I186S).  ) 

1 1  vendémiaire  an  J  Chbrdbini. 

XII  (4   octobre  J 
1803  .  ) 

20  pluviÔBeanXIl  i  Porta. 
is  (av.  1S04).      ! 

30  germinal  an  XII  )  Dalayrac. 
(20  avril  1804).  ( 

21  messidoranXII  j  Lu  Si  eor. 
(lOjuilletlSOi).  ) 


Milon  (<• 


:i:i]ilir\ 


j  Mahomet  H. 

i 

|  Anacrèon  ou  l'Amour  fi 

j 

|  /.f  Connétable  de  Clisso 
l( 

el,  Després  et  Deschamps.      S  Le  Paril/on  du  Calife 
\     Zobèide. 
I  Ossian  ou  les  Kurdes. 


Dercy  et  Deschamps. 
Ballets  réglés  par   les  citoy 

Gardel  et  Milon. 
P:  Gardei  tehorégraphe). 


1"    brumaire    an   i 

XIII    (23  octo-  ! 

bre  1804).  I 

27     frimaire     an  ,  Cherubini. 

XIII    (18    déc.  ( 

1804).  ) 

21     germinal    an  \  Arrangé        ] 

XIII    (11    avril         Kalkbrens 

1805).  )      et  Lacbnitb 

20  floréal  an  XIII  j  DarondeaocH 

(10  mai  1805).    \      neli.a. 
30     fructidor     an  ,  Mozart    arr.    par  )  Thuring  et  Baillot. 
•XIII    (17   sept.        Kalkbri 


P.  Garde)  (chorégraphe). 

j  Morel,  Deschamps  et  Després. 
/  Duport  (chorégraphe). 


i  Un  ■  hemi-lleure  de  capric 
!      Zènar. 

Achille  «  Sevras. 
La  Prise  de  Jéricho. 


Ballel. 

Tragédie    lyrique. 

Opéra-ballet. 

Opéra. 

et)  Opéra. 
Opéra. 

el  )  Divertissement. 
I 
Ballet-pantomime. 


7  brumaire  an  XIV  i  C„ 

(29  oct.  1805).  s 
15  avril  1806.  Bi 


l'El.sris. 

Persdis 

Suetjr 


j  Ballet  réglé  par  Gardel. 

Henry  (chorégraphe). 

\  Aignan. 

|  Ballet  réglé  par  Gardel. 

Duport  et  Blache  (chorégraphes 

Gardel  (chorégraphe). 

Duport  (chorégraphe). 
(  Gentil-Bernard,  arrangé  par  Mo 
}      rel  de  Chédeville. 
ei.-  \  Baour-Lormian. 
I  Ballets  par  Gardel. 

Milon  (chorégraphe). 
Le  t  Esménard. 

I  Ballets  réglés  par  Gardel. 


Aeis  et  Galalhee. 

BMlel-pantomime 

1  Dou  Juun. 

Drame  lyrique. 

L'Amour  ii  Cythére. 

Ballet-pantomime 

i  Sephluli  ou  les  Ammonites. 

Opéra. 

Figaro. 

Paul  el  Virginie. 

L'Uijnieii  île  Zeplure  nu  le  Volmie  fur. 
i  Castor  et  Pollia: 

Ballet-pantomime 

Divertissement. 
Opéra. 

\  L'inauguration  du  Temple  de   lu    Vie 

J  Intermède. 

I.e  Retour  f  Ulysse. 

l  1  t  Triomphe  de  Tnijim. 

Ballet  héroïque. 
Tragédie  lyrique. 

I  |k ■  de  Sponlini  (180?  à  1826). 


15  décembre  1807. 

Spostini. 

8  mars  1808. 

Kreutzer 

24  mai  1808. 

4  octobre  1S0>. 

Lefebyre 

20  déc.  1808. 

Gatel. 

24  mars  1809. 

Le  Si-ecr 

27  mars-1811 
18  avril  1811 


45  sept.  1812. 

5  février  1S13. 

6  avril  1813. 


Mi.in  i. 
C  M  I  1  . 


Jouy. 

Aumer  (chorégraphe). 
Giraud  et  Leclerc. 
Gardel  (chorégraphe). 

(  Guillard. 

<  Ballets  réglés  par  Milon  el  G; 
(      del. 
Esménard  et  de  Jouy. 

Gardel  (chorégraphe). 

Gardel    '■il";  i 

Hoffmann. 

Gardel  (chorégraphe). 

!  De  Jouy. 
Ballets,  réglés    pai     Gardel 
Milon. 

^  Dupaly. 

)  Ballet  réglé  par  Gard»!. 

S  Morel. 
Ballets   réglés    pai     Gsirdel 
Milon. 
Milon  (chorégi  aph 
De  Jouy. 


K  A  I.  K  B  H  E  N  N  E  R 

(œuvre  posthu- 
me achevée  par 
son  fils). 

Persdis.  j  Baour-Lormiai 

I  Ballets  réglé» par  GardeL 

Plusieurs  compo-  (  Morel. 
siteurs.  \ 

l'.HiaiiiuNi.  Jouy. 


Lu  Vestale. 

Les  Amours  d'Antoine  el  Cleopalre . 

Arfslippe. 

Venus  el  Adonis. 

Alexandre  chez  Apelles. 

Lu  Murl  d  Adam  et  s, m  apothéose. 


L'eriitmil    Corte: 
Mexique. 

I  n  Fête  de  Murs 


et  Amiante. 
Vertiimue  el  l'enroue. 
Ahel. 

biérwnèdc. 
I  Les  BayaOres. 


t. 'Knleremeul  des  Siil'ine-. 
\  Les    Amazones    ou     la    l'on 
I     Thèite. 

I.  Enfant  prodifiue. 


rrawdie   lyrique 

Ballel  héroïque. 

Comédie  lviique. 

Ballet. 

Ballet  héroïque. 

Tragédie  lyrique. 


i    Opéra. 

\  Diverlis9emeQj 
/  pantomime. 

Opéra. 

l;  lli>i-|>.uilomime. 
Tia-.ii.'    lyrique. 

Ballel  pantooumtt. 
Opéra. 


/.■  lier-  \  Opéra-twih  L 


lîallet  ii.iulomii 
de)  Opéra. 


Jérusalem  délurée.  •  ipeia. 

Le  Laboureur  Chinois.  Optra» 

Los  éàmaevages  nu  r  Etendard  de  de-  /  opér». 


TECHNIQUE,  ESTHETIQUE  ET  PEDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3827 


I        Km  i  CZER.      .      1 
PlCCINI.  \  ClIV 


)  Alcibiade 
i  Pelage  ou 


l;,n  ,/,■  / 


ardel. 

[  Persois      d'après  (  Milon     (chorégraphe)     d'après  j  /  / 

j      Grétry.  (      Deforge.  j 

Kreutzer.  Vigée.  laPriuces  <    eBa   iloi 

Arrangé  par  Per-  ^  Milon  el  Gardel  (chorégraphes).     L'Heureux  Retour. 


12  dec.  1815. 
22  lévrier  1810. 


SUIS.  BKRTn 
Kre 


teni'  \ 


Didelot  (chorégraphe). 
-  |  Milon  (chorégraphe). 


•  /.,■,,),; 


S  PEBsnisetKa 

j         ZER. 

Le  Bros.  Etienne. 

I  Si'Ontini  ,     Per-  \  Dieulafoy  et  Briffant 
1      sois,  Bertun  et 


Opéra. 

i  ipéra. 

Ballet-pantomime. 

Opéra. 
Ballet. 

\  Ballet  anacréonti- 
I      que. 
i  stance  <  Ballet-pantomime. 

I 
Opéra. 
de  Cy-  )  Opéra-ballet. 


'      Kreutzer. 

<      

30  juillet  1816. 

Reicua. 

Guy. 

Katalie  ou  la  Famille  liasse. 

1  Ip'IM. 

4  mars  1817. 

Bertok. 

ùu>. 

Ilni/er  de  S ;,  ..,•  nu  le  Uni  Irniihllllliur. 



17  sept.  1817. 

Dcsazos. 

Gardel    el     Milnii  ,  <■  i  M  im-l-  T':i  1 1  il"  -   . 

,  Les   Fiancés  ie  Caserte  ou  l'Echangé 
des  rose  . 

i  Ballet. 

19  janvier  1818. 

Le  Bron.                 ! 

i 

Etienne. 

Ballel    réglés  par  Milon. 

Veinule  ou  les  rieurs  enchantées. 

Opéra. 

18  fëvriei  1818. 

SCBNEITZUa  FIT.]:  . 

Gardel  (chorégraphe). 

Proserpine. 

Ballet-pantomime. 

3  juin  1818. 

~ 

Decomhe  (id.). 

i  Le  Séducteur  au  village  ou   Claire  el 

j       Meetul. 

(  Ballel-pantorniiiie. 

2'.'  juin  1818. 

CaTEL. 

Jouy  et  K.  Lefebvre. 

i  Ztrpltile  e>  l'ieur  île  nnjele  e     < 
lu  Servante  justifiée. 

j  Opéra-féerie. 

30  sept.  1818. 

Kreotzer. 

i  (ardel    i  bsorégraphe). 

Ballet  villageois. 

la  nov.  18IS. 

AlMON. 

J.-N.  Bouilly. 

Les  Jeu*  , 

i  tpêra. 

22  dée.  1818. 

SpoNTINI. 

Dieulafoy  et  Briffault. 

Ballet*  (dirigés  par  Gardel. 

Olympie. 

Tragédie    lyrique. 

19  juin  1S20. 

Kreotzer. 

Milon  chorégraphe). 

Clari  ou  tu  Promesse  de  mariage. 

Ballet-p  ml 

17  juillet    1820. 

ImsM.iKSE. 

1  Viennet. 

'  Ballet    règles  par  Gardel. 

l  «■           Périclés. 

<  Ipéxa. 

lS.ict.  1S20. 

GlROWETZ. 

Aumer  (chorégraphe). 

1  es  Pages  du  duc  de  Vendôme. 

Ballet. 

7  février  1821. 

Manuel  Garcia. 

4  Cuvelier  et  J.  Hélitas  (de  Mun). 
'  Ballets  réglés  par  Milon. 

Lu  Mort  il 

■ 

30  mars  1821. 

Mbbdl. 

Hoffmann. 

Simienne. 

Opéra  h> 

3  mai  1881. 

i  Berton,      Boïei  - 

j         DIEO  ,       CUERO- 

j       BiNi,  Kreotzer 
(      et  Paer. 

\  Théaulon  et  de  Rancé. 

,  planche  de  Provence   ou   la   i 

! 

.Opéra. 

ir,  jiiiJi'lSS  1 . 

Girowetz. 

Aumer  (chorégraphe). 

La  Fêle  ho 

Divertisse] 

0  février  1822. 

Nu  01    1   i 

•  Etienne. 

Aladin  ou  la  Lampe  merveilleuse. 

Opéra-féerie. 

26  juin  1822. 

'  Garcia. 

Delrieu. 

Flnresluu  mi  le  Conseil  îles  Die. 

Opéra. 

18  sept.  1828. 

\V.  Robert,  comte 
'       de  Gai.lenuerg 
1      et  G.  Dugazon. 

.  Aumer  (chorégraphe). 

Alfred  le  Cl     < 

Ballet-pantomime. 

16déc.  1822. 

Reicua. 

Empis  et  Cournol. 

Saphû. 

Tragédie   lyrique, 

3  mars  1S23. 

Ferdinand  Son. 

Decombe  (chorégraphe). 

Cendrillon. 

Ballet-féerie. 

11  juiu  1823. 

Berton. 

hiVaugiers  l'aîné. 

Virginie. 

Tragédie    lyrique. 

«  sept.  1S23. 

HÉROLD. 

Chaillou. 

Lasthènie. 

Opéra. 

l«oct.  1823. 

)  D'après  Berton  et 

'           '1 M. 

1  Aumer  (chorégraphe). 

Mme  renie  de  Gotcoildc. 

Ballet-pantomime. 

5déc.  1823. 

Ari'l  K 

S  Mennechet  el 

1  Ballets  réglés  pai  i  i 

Espagne. 

Draine  lyu  :n.  . 

1Sdéc.  1S23. 

,  Arraii. 

j  Aumer   (chorégraphe)    d'après 

te  P              .       . 

/  Ballet  anacrjonli- 

1         BENECK. 

(       Dauberval. 

que. 

:tl  mars  1824. 

K        rzER. 

*  Moline  de  Saint-Yon. 

'  Ballel  -  réglés  par  Gardel. 

IpsUioé. 

'  Opéra. 

12  juillet  1821. 

Daossoigne. 

j  Paulin  de  l'Espinasse. 
(  Ballel  règle  par  Gardel. 

Les  Heu  i   • 

Opéra-féerie. 

20  oot.  1824. 

SCHNl  1  : 

Beshaves. 

/.mine  el  Azor. 

Ballet-féerie. 

2  mars  1825. 

Carafa. 

Planard. 

1  ,i  Belle  au  Bois  dormant. 

i  ipéra-fi     .  . 

10  juin  1825. 

[    BOÏELDIl 

\        TON    cl    liRl   DT- 

i  Ancelot,  Guiraud  et  Sov/met. 

Pharamond. 

'  'liera. 

29  mai  1826. 

(         ZER. 

SCHS-EITZHŒFIF.R. 

\ 
Blache  père  (chorégraphe.) 

Mai  i  el  i  émis  o    les  Filets  de  Vulcuiu. 

Ballet. 

ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  D1CT10.\.\AIHE  OU  CO.SSEllVATOUŒ 


de  Hosshii  et  Mejeibeer  (1"  période  1SSÎB-1S49). 


9  oct.  1826. 
29  janvier  1827, 

26  mars  1827. 
11  juin  1827. 

29jnin  1827. 

19  sept.  1827. 

29  février  1828. 


17 


Ùt  1828. 
iV.  1S28. 


27  avril  1829. 

3  août  182'J. 
15  mars  1830. 


S  avril  1831. 
20  juin  1831. 
18  juillet  1S31. 


27  février  1833. 

22  juillet  1833. 

4  déc.  1833. 
10  mars  IS3'i. 
15  sept.  1831. 

23  février  1S35. 
8  avril  1835. 
12  août  1835. 

29  février  18  36. 

1er  juin  1830. 

21  sept.  1836. 
Unov.  1836. 
3  mars  1837. 

5  mars  1838. 

5  mai  1S3S. 

10  sept.  1838. 

28  janvier  1839. 

1"  avril  1839. 

24  juin  1839. 

11  sept.  1839. 
28  oct.  1839. 

6  janvier  ISiO. 
10  avril  1840. 
23  sept.  1S40. 

2  déc.  1840. 
19  avril  1811. 


\  Pp. s 
j      NE 


Soumet  et  Balocchi. 
Aumer  (chorégraphe). 

Balocchi  et  Jouy. 
i  Anatole  Petit  (chorégraphe). 

S 

t  Rouget  de  l'isle  et  Hix. 
'  Ballets  réglés  par  Garde!. 
Auiner  (chorégraphe). 

|  Scribe  et  Delavigne. 

(  Divertissement  réglé  par  Aumei 

Scribe  et  Delestre-Poirson. 
S  Dauberval  et  Aumer  (chorégra 
)      phes;. 
)  Scribe. 
'  Aumer  (chorégraphe). 

Bis  et  Jouy. 
1  Moline  de  Saint- Yon  et  Fouge 


de  Vestris. 

Scribe  et  Aumer  (chorégraphe). 
\  Scribe. 
i  Divertissement  de  Taglioni. 

Castil-Blaze. 

Scribe, 
j  Scribe    et   Corralli    (chorégra- 
!      phe). 

Scribe. 
J  Nourrit  et  Taglioni    (chorégra- 
phe). 
S  Cave  et  Duponchel. 
(  Coralli  (chorégraphe). 

Scribe  et  Mazières. 
I  Taglioni  (chorégraphe). 


Le  Siège  de  Corinthe. 

)  Astolpbe  et   Joconde 
I      d'aventures. 

Moïse. 


\  Lu  Somnambule  ou  l'arr 

)      veau  seigneur, 

I  Lu  Muette  de  Porlici. 

I.e  Comte  Orij. 

j  la  Fille  mal  gardée. 

\  La  Belle  au  bois  dormant. 

Guillaume  Tell. 
)  François  Ier  à  Chambord. 


Robert  le  Ditibl 
La  Sylphide. 


ACBËR. 

Cherubini. 

Labarre. 
Mozart, 
schheitzhœfi 


Comte  de  Gallen 

BERG. 

Carlini  et  C.Gide 


\  Scribe. 

(  Ballet  de  Taglioni. 
\  Scribe  et  Mélesville. 
I  Ballets  de  Coralli. 

Taglioni  (chorégraphe). 

Deschamps  et  Castil-Blaze. 
.  i  Nourrit. 
|  Coralli  [chorégraphe). 
i  Scribe. 

)  Divertissement  de  Taglioni. 
j  Taglioni  (chorégraphe). 

i  Nourrit   et  Bonnachon    (choré 
j     graphe). 

i  Scribe. 

(  Ballet  de  Taglioni. 

\  Burat  de  Burgy  et  Nourrit. 

(  Coralli  (chorégraphe). 

Taglioni  chorégraphe). 

Victor  Hugo. 
1  Deschamps  et  E.  Pacini. 
'  Divertissement  de  Coralli. 


Gustare  III  < 

Ah  Baba  ou 


le  Bal  masqué. 
i  quarante  voleu 
Sérail. 


la  Révolte 
Don  Juan. 

La  Tempête  ou  l'Ile  des  G 


Les  Huguenots. 

Le  Diable  boiteux. 

La  Fille  du  Danube. 
La  Esmeralda. 

Strailella. 


■il,... 


M' 


Csm ■  Gide. 

il.  de  Ki olz. 
Makuahi. 

IIaI.ÉVY. 

DONIZETTI. 

BENOlSTCtRl! 


Scribe    et 
graphe) 
De  Waillj  et  Aug.  Barbier 
De  Saint-Georges. 
Maziliev  (chorégraphe  . 

Scribe  .-l  Mélesville. 

Ballet  de  Coralli. 

Scribe. 

Coralli  (chorégraphe  . 

Pillet  et  Vannois. 

Scribe. 

Scribe. 

A.  Nourrit  et  Scribe. 

De  Saint-Georges. 

Mazilier  (chorégraphe). 

Royeret  Van  Niewenhuy 

Scribe. 

Pacini  .i  Berlioz. 


Elsslei    [choré-  t  ta  Volière  ou  les  Oisea 


i  Peste  de  Flo 
r  de  Boeeaee. 


juin  1811. 
déc.  1841. 


DONIZETTI. 

Ambr.  Thomas. 

j  Weber,    récitatifs 
!      de  Berlioz. 

Ad.  Adam.  1  Th.  Gaulieret  de  Sain 

i  Coralli  (chorégraphe). 

Il  m  i.,  ï.  De  Saint-Georges. 


j  Benvenuto'Cellini. 
I  La  Gipsy. 

s 

I  Le  Lue  des  fies. 
j  |  ,i  Tarentule. 

La  Vendetta. 

La  Xaearilla. 
Le  Drapier. 
Les  Martyrs. 
i  le  Diable  amoureux. 

La  Favorite. 

Le  Comte  de  Carmagnola. 

Le  Freijsebul;. 

Cisèle  ou  les  Willis, 
La  Reine  de  Chypre. 


Ballet-pantomime. 
Tragédie. 

Ballet-pantomime. 

Opéra. 

opéra. 

Ballet-pantomime. 

Ballet-féerie. 

Opéra. 

Opéra. 


r.allrl-pantomime. 
Opéra. 

Opéra. 
Opéra. 
Ballet-pantomime. 


Opéra   historique. 

Opéra. 

Ballet-féerie. 

Opéra. 

Ballet-féerie. 

Opéra. 

Ballet. 

Ballet-pantomime. 

Opéra. 

Ballet-pantomime 

Ballet-pantomime. 

Opéra . 

Opéra. 

)  Opéra. 

Ballet-pantomime. 

Ballet-pantomime. 

Opéra. 
Ballet-pantomime. 

Opéra. 


opéra  r.ui<aiilic|ue. 
Ballet  fantastique. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS    3829 


22  juin  1842. 

Ambr.  Thomas. 

Théodore  Anne. 

La  Guérillero. 

Opéra. 

22  juin  1842. 

Adam. 

\  De  Saint-Georges. 

)  Alb.  Decombe  (chorégraphe). 

1  La  Julie  Fille  .1-  lin,:,/. 

Ballet-pantomime 

9nov.  1842. 

Diestch. 

Paul  Foucher. 

Le  Vaisseun-Fanlome. 

15  mars  1843. 

Halévv. 

Casimir  et  Germain  Delavigne. 

Charles  VI. 

opéra. 

17  juillet  1843. 

BORGMtlLLER. 

Théophile  Gautier. 

La  l'en. 

Ballet  fantastique. 

13  nov.  1843. 

DONIZETTI. 

Scribe. 

Don  Sébastien  Roi  du  fort 

igal. 

Opéra. 

1er  février  1841. 

-  Flotow  ,     Borg 

1  De  Saint-Georges. 

.  Lmhl  Henriette  nu  la  Serra 

nte  te  f.reen- 

j  Ballet-pantomime. 

!      mUller  et  Del 

j  Mazilier  (chorégraphe). 

i       "'"•»■ 

S 

29  mars  1844. 

llAl.BVY. 

De  Saint-Georges. 

\  Le  Lazsarone  ou  le  lien 
Eucharis. 

lient  en  dor- 

\  Opéra. 

7  août  1844. 

Deldevez. 

J.  Coralli  (chorégraphe). 

i 

Ballet-pantmnime. 

2  sept.  1844. 

Traduit  par  Rover  et  G.  Vaëz. 

Othello. 

opéra. 

7  oct.  1844. 

Ad.  Adam. 

Paul  Foucher. 

Richard  en  Palestine. 

— 

6  déc.  1844. 

Niedermever. 

Théodore  Anne. 

Marie  Stuart. 

— 

11  août  1845. 

Ad.  Adam. 

|  Ad.  de  Leuven. 

'  Mazilier  (chorégraphe). 

1  Le  Diable  à  quatre. 

Ballet-pantomime 

17  déc.  1845. 

Balfe. 

Ilippolyte  Lucas. 

L'Etoile  île  Sêville. 

opéra. 

20  février  1846. 

DONIZETTI. 

Traduit  par  A.  Royer  et  Vaëz. 

Lucie  te  Lammemôor. 

opéra. 

21  mars  1846. 

Félicien  David. 

Gollin  et  Sylvain  Saint-Etienne. 

Moise  au  Sinat. 

(  iratorio. 

1"  avril  1846. 

DEL DEVEZ. 

)  Paul  Foucher. 

1  Mazilier  (chorégraphe). 

1  Paqnila. 

Ballet-pantomime 

9  juin  1846. 

Mermet 

Scribe  et  Mallelille. 

David. 

Opéra. 

29  juin  1846. 

Flotow. 

De  Saint-Georges. 

L'Ame  eu  peine. 

•alletfantastique. 

10  juillet  1846. 

Ambr.  Thomas. 

Mazilier  (chorégraphe). 

Bettij. 

Ballet-pantomime 

30  déc.  18(6. 

Rossini. 

Royer  et  Vaëz. 

Robert  Bruce. 

Opéra. 

26  avril  1847. 

Gide. 

Coralli  (chorégaphe). 

Ozaî. 

Ballet-pantomime 

31  mai  1847. 

Ad.  ADAM. 

Hippolyle  Lucas. 

La  Bouquetière. 

Opéra. 

20  octobre  1847. 

PCGNI. 

Saint-Léon  (chorégraphe). 

La  Fille  te  marbre. 

Ballet-pantomime 

26  nov.  1847. 

Verdi. 

Royer  et  Vaëz. 

Jérusalem. 

opéra. 

16  février  1848. 

Ad.  Adam. 

\  Dumanoir. 

I  Grisèlitis  ou  tes  cinq  sens 

Ballet-pantomime 

21  août  1848. 

25  août  1848. 
20  oct.  1848. 
6  nov.  1848 
9  janvier  1849. 


F.  Dav 
Pogni. 


Ballet  de  Mazilier. 

Germain  Delavigne. 

Deligny. 

Aug.  Mabille  (chorégraphe). 

Méry. 

Saint-Léon  (chorégraphe). 

Scribe. 

Saint-Léon  (chorégraphe). 


LEten. 

La  Vivandière. 

Jeanne  la  folle. 

Le  Violon  du  Diable. 


époque  de  Rossini  et  de  Heyerbeer*(S°  période  1849-1 8"S«). 


Mystère. 

Ballet-pantomime. 

Opéra. 

Ballet  fantastique. 


16  avril  1849. 

Mëyerijeer. 

Scribe. 

Le  Prophète. 

Opéra. 

8  oct.  1849. 

1         LIEN. 

,  De  Saint-Georges. 
>  Perrot  (chorégraphe). 

,  La  Filleule  tes  fées. 

Ballet-féerie. 

24  déc.  1849. 

Ad.  Adam. 

De  Saint-Georges. 

I.e  Fanal. 

Opéra. 

22  février  4850. 

PUGNi. 

Saint-Léon  (chorégraphe). 

Stella  ou  les  Contrebandiers. 

Ballet-pantomime 

6  déc.  1850. 

AUBER. 

Scribe. 

L'Enfant  prodigue. 

Opéra. 

15  janvier  1851. 

Benoist. 

/  Th.  Gautier  et  Saint-Léon  (cho-  *  Pâquerette. 

Ballet-pantomime 

17  mars  1851. 

RoSENHAIN. 

Bavard  et  E.  Arago. 

Le  Démon  te  la  mut. 

Opéra. 

16  avril  1851. 

GODNOD. 

Augier. 

Sapho. 

— 

16  mai  1851. 

ACBER. 

Scribe. 

Zerline  ou  lu  Corbeille  d'oranges. 

Opéra. 

6  août  1851. 

Adam. 

\  Théodore  de  Banville. 

'  Ballets  réglés  par  Saint-Léon. 

1  Les  Nations. 

i  Ode  mêlée  de  dan- 
1      ses. 

2inov.  1851. 

»    DELDEVKZel  TOL- 

\  Leuven. 

*  Mazilier  (chorégraphe). 

\  Vert-Vert. 

Ballet-pantomime 

23  avril  1852. 

'   llALÉVY. 

Scribe  et  Saint-Georges. 

Le  Juif  Errant. 

Opéra. 

29  déc.  1852. 

ADAM. 

)  Henri  Trianon. 

\  Mazilier  (chorégraphe). 

\  Orfa. 

] 

Ballet-pantomime 

2  février  1853. 

Verdi. 

Alafl're  et  Pacini. 

Louise  Miller. 

Opéra. 

2  mai  1853. 

Niedermever. 

J.  Lacroix  et  Aug.  Maquel. 

La  Fronde. 

Opéra. 

21  sept.  1853. 

Henri  Potier. 

Mazilier  (chorégraphe). 

Aelia  et  Hysis  ou  l'Alellane. 

Ballet-pantomime 

17  oct.  1853. 

Limnasder. 

Henri  Trianon. 

Le  Maître  chanteur. 

Opéra . 

11  nov.  1853. 

Th.  Labarre. 

Mazilier  (chorégraphe. 

Jorita  ou  les  Boucaniers. 

Ballet-pantomime 

27  déc.  1853. 

DONIZETTI. 

Traduit  par  Hj  Lucas. 

Beltly. 

Opéra. 

31  mai  1851. 

Comte  Gabrielli 

\  Th.  Gautier. J 

(  Ballet  de  Mme  cerrito  Saint-Léon 

i  Gemma. 

Ballet. 

18  oct.  1854. 

Goi'NOD. 

Scribe  et  Delavigne. 

La  Sonne  sanglante. 

Opéra. 

S  janvier  1855. 

Th.  Labarre. 

Mazilier  (chorégraphe). 

La  Fonti. 

Ballet. 

13  juin  1855. 

Verdi. 

Scribe  et  Duveyrier. 

Les  Vêpres  Siciliennes. 

Opéra. 

2Sdéc.  1855. 

Th.  Labarre. 

Henri  Trianon! 

Pantagruel. 

Opéra  bouffe. 

23  janvier  1856. 

Ad.  Adam. 

\  Saint-Georges. 

I  Mazilier  (chorégraphe).* 

i  Le  Corsaire. 

Ballet-pantomime. 

11  août  1856. 

C'o  Gabrielli. 

S  Saint-Georges. 

(  Mazilier  (chorégraphe). 

1  Les  Elfes. 

Ballet-pantomime. 

10  nov.  1856. 

Billetta. 

De  Saint-Georges. 

La  Rose  de  Floreaee. 

Opéra. 

12  janv.  1857. 

Vemm. 

Pacini  (traducteur). 

Le  Trouvère  (Il  Troialore). 

Opéra. 

1«  avril  1857. 

Aober. 

Mazilier  (chorégraphe). 

Marco  Spada  ou  la  Fille  dit  bandit. 

Ballet. 

20  avril  1857. 

Ed.  Membrée. 

Got. 

François  Villon. 

Opéra. 

21  sept.  1857. 

Aober. 

Scribe. 

Le  Cheral  de  brome. 

Opéra-ballet. 

17  mars  1858. 

Halévy. 

De  Saint-Georges. 

La  Magicienne. 

Opéra. 

14  juillet  1858. 

Reyer. 

i,  Th.  Gautier. 

)  L.  Pelipa  (chorégraphe). 

\  SacountaU. 

Ballet-pantomime. 

4  mars  1859. 

F.  David. 

Mérv  et  Hadot. 

Ilereula/ium. 

Opéra. 

7  sept.  1859. 

Hem. ini. 

Traduct.  C.  Nuitler. 

Roméo  et  Juliette. 

Opéra. 

9  mai'»  1860. 

P.     POXIATOWSKY. 

De  Saint-Georges  ei  Pacini. 

Pierre  de  Mèdicis. 

opéra. 

ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


9  jutllel  1860, 

Rossini. 

Méry. 

Sémiranns. 

Opéra. 

88  nov.  1860. 

i  Jacques  Offe-n- 

\  de  Saint-G 'ges. 

/  Marie  Taglioni  (chorégraphe). 

i  Le  Papillon. 

S 

Ballet-pantomime 

13  mars  1861. 

h.  Wagner. 

Traduit  par  C.  Nuitter. 

Taan/umser. 

Opéra. 

25  mars  1861. 

Th.Labarre. 

j  Derley. 

i  Petipa  (ehoréj  raphi 

1  tiroziosu. 

Ballet-pantomime 

:  ■  mai  1861. 

PuGM. 

Petipa  —  ). 

Le  Marche  îles  Innocent-!. 

Ballet  fantastique. 

80nov.  [861. 

G  "  i'.  miKiei.m. 

i  Foucher. 
Barri    régi  aptie  , 

,  L'Etoile  ie  Messine. 

1 

Ballet-pantomtaie 

1861. 

C.  Alarv. 

Mélesville. 

La  Voix  humaine. 

Opéra. 

2S  lévrier  1868. 

Cil.  Gounod. 

J.  Barbier  el  Michel  Carré. 

Lu  Heme  il  Sa&a. 

— 

i  m  ira  1863. 

Victor  Massé. 

Dumanoir. 

le  Wule  de  Pedro. 

— 

8  juillet  1863. 

PrjGNI. 

Saint-Léon  (chorégraphe). 

Diavolina. 

Ballet-pantomime 

19  février  J  se.  i . 

GlORZA. 

j  Saint-Georges. 

1  Rota  (chorégraphe  . 

1  Lu  Mascheea  ou  les  Nuits  île  Ven. 

te        Ballet-panl ime 

9  mars  1864. 

E.  Boulanger. 

E.  Cormon  et  M.  Carré. 

Le  Docteur  Magnus. 

Opéra. 

1  i  juillet  186-a. 

MlNKOUS. 

j  Meilhao  etllalévy. 

;  Saint-Léon  (chorégraphe). 

i  tiéméa  ou  i  Amour 

Ballet-pantomime. 

3  oct.  1864. 

Mermet. 

Mp.rmet. 

Roland  o  Hoiicerinti  . 

Opéra. 

28  avril  :     i 

Meyerbebr. 

Scribe. 

i  Africaine. 

— 

88  déc.  1865. 

Th.  Labarrb. 

,  P.  de  Massa. 

)  Petipa  (chorégraphe). 

i  Le  Roi  A'Yvetot. 

Ballet-pantomime. 

12  nov.  1866. 

(  Delibks  et    Mi  n- 
|      rocs. 

1  Nuitter. 

j  Saint-Léon  (chorégraphe  . 

1  la  Source. 

Ballet. 

11  mar-  1 

Verdi. 

Méry  et  C.  du  Locle. 

Don  Carlos. 

i  ipéra. 

21  00t.  1887. 

Doprato. 

Camille  du  Loch'. 

La  Fiancée  de  Gorintke. 

— 

9  mars  1868. 

Amb.  Thomas. 

Carré  et  J.  Barbier. 

Itiimlel. 

— 

!  mars   i  869. 

Ch.  Gounod. 

— 

Lu  lit. 

— 

2'i  mai  1870. 

Léo  Dblibes. 

1  Ch.  Nuitter. 

j  Saint-Léon  (chorégraphe). 

ht  Fille  aux  genx  f 

mail    Ballet. 

16  oi  tobre  1871. 

E.  Reyer. 

Méry  et  C.  Pacini. 

Erostrate. 

■  ipéra. 

10  janvier  1873. 

E.  Diaz. 

L.  (iallet  et  E.  Blau. 

e    lilllle. 

— 

5  mars  1S73. 

E.  GriRAri.. 

,  Ch.  Nuitter. 

,  I,.  Mirante  (chorégraphe). 

Ballet-pantomime 

17  juillet  1874. 

E.  Membre». 

C.  Foussier  et  Got. 

l'Esclave. 

*  ipéra . 

5  avril  1876. 

Mermet. 

Mermet. 

i  . . 

M  juin  1S76. 

L.  Dfi.ihi-s. 

^  J.  Barbier. 
Mérante  (chorégraphe). 

Sylvia  o  i  i  i  Vym;  ' 

Époque  «le  Oounod,  Massenel,  Wagner. 

27  avril  1877. 

.1.    MASS8SEI. 

Louis  uallet. 

i  ahore. 

1     ^77. 

S.  Salvayrf. 

.Meilhac  et  Halévy. 

Le  Fandango. 

Ballet-pantomime 

7  oot.  1878. 

Ch.  Gounod. 

J.  Barbier  et  M.  Cane. 

Polyeucte. 

i  ipéra. 

V.   JONCIERFS. 

Jules  Barbier. 

Berthe. 

— 

17  janvier  1879. 

i  ilivier  Mbtra. 

>  P.  Gilleet  A.  Mortier. 
'  Mérante  (chorégraphe). 

(  )eil,lo. 

Ballet. 

22  mars  i   su. 

Verdi. 

Nuitter  et  du  Locle. 

i  ipéra. 
Légende  sacrée. 

22  m'ai  1880.. 

.1.  Massenet. 

Grandmougin. 

1     i 

icrdéc.  1SS0. 

Ch.  WlDOR. 

*  François  Coppée. 

'  L.  Mérante  (chorégraphe). 

i  Lu  Km  n 

Ballet 

1"- avril  1881. 

Ch.  Go 

A.  d'Ennerj  el  Brésil. 

Le  Tribut  dé 

■  ipéra. 

6  mars  1SS2. 

E.  Lalo. 

.  Nuitter. 
Petipa   cho  êgraphe  . 

\ 

Ballet. 

1  i  avril  1888. 

Amb.  Thomas. 

J.  liarhier  et  M.  Carré. 

Lraieai-,    | 

(ipéra. 

5  mars  1883. 

■    C.    Saint  -Sai  <!S 

Léonce  Détroyal  el  A.  Silvestre 

Henri  VIII. 

_ 

H  déc.  1883. 

Th.  Dubois. 

I  P.  «Mlle  el  A.  Mortier. 
1  L.  Méianie  (chorégraphe). 

i  La  Fai 

Ballet. 

18  avril  1851  être 

1  Ch.  Goi 

Emile  Augier. 

Sll/illo. 

( ipéra. 

pris2avi  U  1884 

1 

12  janvier  1S85. 

Pessard. 

Paul  Ferrier. 

Iilharin. 

— 

27  février  1885. 

Verdi. 

Traduction  de  Ed.  Duprez. 

Rigole tto. 

— 

12  juin  1885. 

Reyer. 

Du  Locle  et  Ed.  Blau. 

- 

— 

30  nov.  1885. 

Masse 

A.  d'Ennery,  Gallet  et  Blau. 

Le  Cii. 

— ■ 

26  janvier  1886. 

De  Lajai 

Nuitter  d'après  Florian. 
'  L.  Mérante  (chorégraphe). 

i  Les  Jitmenii.i  ,ie  lieronme . 
\ 

l'.allet-Arlequi 
natte. 

18  oct.  ISSU. 

André    \i        igei 

.  \  Henri  Régnier  (d'après  La  Fon 
j       (aine). 
'  L.  Mérante  (chorégraphe). 

)  Les  lien.r  Pigeons. 

Ballet 

20  déc.  1886. 

E.  Paladii.iu:. 

V.  SardouetL.  Gallet. 

Paine. 

30  janvier  1888. 

G.  Salvayre. 

Aug.  Maquet  d'après  A.[Durnas 

La  Dame  de  Monsoreau. 

— 

28  nov.  1888. 

Ch.  Goonod. 

J.  Barbier  et  M.  Carré. 

Bornéo  et  Juliette. 

— 

26  juin  18SÎI. 

A.  Thomas. 

i  J.  Barbier. 

'  Hansen  (chorégraphe). 

J  La  Temp/tt. 

Ballet 

21  mars  1890. 

C.    Saint  -Saens 

.     Louis  Gallet. 

Ascauia. 

(ipéra. 

28  mai  1890. 

j  Véronge    de    i. 
I       Nox. 

a  )  E.  Blau  et  L.  Besson    d'aprè 

'      Voltaire. 

'  Zaïre. 

— 

9  juin  1890. 

Léon  Gastinel. 

(  E.  Blau. 
m.mi  en  [chorégraphe). 

,  Le  Hère. 

Ballet 

16  mars   1  Î31. 

•i.  Massbnet. 

Jean  Iliihepili. 

1     lia 

Opéra. 

16sept.  1891. 

R.  "Wagner. 

H.  Wagner. 

1 

— 

28  déc.  1891. 

i  Bourg iult   Dl 

1        COUDBAY. 

Louis  Gallet. 

Thamtira. 

— 

16  mai  1892. 

E.  Reyer. 

C.  du   I.orle  'l'apte.    Flaubert. 

— 

17  mai  1892. 

G.  ClIAREENriKK. 

KTIER. 

>  Poêle. 

Symphonie-drain 

23  nov.  1892. 

Sai    i-Saens. 

Ferdinand  1 

• 

opéra. 

9  déc.  1892. 

FODRNIER-Al  1  IX. 

i   mis  Gallet. 

Stratonice. 

— 

2i  février  1893. 

Paul  Vu. ai,. 

Pi  irre  Gailhard. 

La  Holadelta. 

Ballet. 

TECHNIQUE,  ESTHETIQUE  ET  PEDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS 


12  mai  1893. 

R.  Wagni  R. 

H.  Ww.mr. 

La  Walkyrie. 

Opéra. 

15  sept.  1893. 

H.  Maréchal. 

Ed.  Noël. 

Dêidande. 

— 

27  déc.  1893. 

E.  ClIAIlRIl  R. 

Catulle  Mendès. 

Gnendoline. 



16  mars  1894. 

.1.  Massenet. 

!..  Galle!  d'après  A.  France. 

Thaïs. 

Comédie  lyrique. 

25  mai  1894. 

G.  Lbfebvre. 

Charles  Lomon. 

Djelmn. 

'  ipéra. 

12  oct.    1S94. 

<;.  Verdi. 

Arrigo  Boilo. 

Otello. 

— 

8  février  1895. 

Auguste  U.iLMi:  s. 

Augusla  Houri  s. 

Suire. 

Dr  nue  lyrique. 

îr,  déc.  1895. 

JE.  Gdiraud    et 
1       Saint-Saens. 

Louis  Gallet. 

Frêdégonde. 

Drame  lyrique. 

24  avril  1896. 

Duvernoy. 

Du  Locle  et  C.  Nuitter. 

Ilellé. 

(  ipi  i.i. 

19  février  18*97. 

BRENEAU. 

E.  Zola. 

Messidor. 

Drame  lvrique. 

31  mai  1897. 

WORMSER. 

\  A.  Aderer  el  Roddaz. 
Hansen  (chorégraphe). 

L'Etoile. 

Ballet. 

10  nov.  1897. 

R.  Wagner. 

R.    \V»,,i  ::. 

Les  Maîtres  Chanteurs  it  Nuremberg 

Opéra. 

8  juin  1893. 

Samuel  Roosseac 

R.  Montorgueil  et  Gheusi. 

La  (Hache  du  Rhin. 

Drame  lyrique. 

23  déc.  1898. 

Paul  Vidal. 

E.  Bergerat  et  de  Sainte-Croix. 

/,</  Bitrgonde. 

Opéra. 

5  mai  1899. 

E.  Chabrier. 

17.  Mikael  et  C.  Mendès. 

Bràiis. 

Drame  lyrique. 

29  mai  1899. 

/  Méhul  avec  réci- 
J       Utils  de  B.-Do- 

! 

'         COCDRAY. 

A.  Duvalat  A.  Sylvi 

opéra. 

15  dot.  1899. 

II.  Bkrlr  /. 

La  Prise  de  Troie. 

Poème  lyrique. 

7  février  1900. 

,  V.  JoNCiÉRES. 

L.  Gallel  -t  E.  Blau. 

Lancelot. 

Drame  1;  i  ique. 

15  février  1901. 

Xavier  Lerodx. 

Louis  de  Grammont. 

Aslartê. 

86  avril  1901. 

Georges  lin. 

Henry  Bouchut. 

Le  Roi  de  Paris. 

— 

-'.'.  oct.  1901. 

C.  Saint-Saisns. 

Gheusi  el  Sardou. 

Les  llar hures. 

1  ragédie  lyrique. 

3  janvier  1902. 

R.Wag:  i  a. 

R.  Wagner. 

Ij  i  ique. 

21  mai  1902. 

i  Paul  et  Lucien 

,  Gheusi. 

1          HlI.LEMAClIER. 

Orsola. 

— 

26  nov.  U>n2. 

Al.  DUVEBNOY. 

i..  Ilarlmanii  d'après  Mermet. 

Bacchtts. 

1"  déc.    1902. 

LÉONCAVALLO. 

Leoncavali.o. 

P 

Drame  lyi 

27  février  1903. 

E.  Reyer. 

M.  Carré  et  J.  Barbier. 

La  Statue. 

1 

Vincent  d'Indy. 

Vincenl  dïhdy. 

■ 

■  ■'  i 

1  déc.  1903 

/  Mozart  i  i;  cits  de 
J      J.  Benedicts, 
1      a  rrangé;s  pa  i 
1      Paul  Vidal, 

nie.ii-.'s  de   Rufl'eralh 
|      el  L.  Solvay. 

1 

1  L'Enlévemt  ni  au  Sérail. 

i  ipéi  i  b  u 

80  avril  1904. 

G.  Eklangeb. 

Ciilulle  M 

1 

14  déc.  1904. 

H.    WAGNER. 

R.    W.VGKER. 

! 

Drame  lyrique. 

82  déc.  1905. 

H.  Bdsser. 

C.  Lomon.  J.  Hansen 

5/i  . 

Ba  i.i . 

31  ocl    1906. 

.Massenet. 

Catulle  \i 

Ariane. 

24  mai  1907. 

F.  Le  Borne. 

P.  Ferrier  el  L.  Tiercclin. 

1 

lu. (lin 

25  nov.  1907. 

H.  Mai.: 

II.  Maréchal  et  Vanara. 

BaJlet-t. 

2.:  oct.  1908. 

R.  Wagner. 

R.  Wagner. 

Le  Crépuscule  det  Di 

Drame  lyi  [que. 

13  janvier  1909. 

II.     Kl    VRIER. 

M.  Maeterlinck. 

Monna  Vanna. 

— 

5  février  1909. 

G.  Sain  c-Sai     i. 

i     i     ( 

Javolte. 

Ballet. 

5  mai  1909. 

Massenet. 

Catulle  Mendès. 

//./c ■/■'«.. 

' ipéra. 

17  nov.  1909. 

R.  Wagner. 

i  0r  du  r, 

Drame  lyrique. 

16  février  1910. 

Savabb. 

I.c.i  ni  i  ailbade. 

Lu  Forêt. 

musicale. 

16  février  1910. 

Reynu.i..-H  ,  :     ,-. 

Catulle  Mendès. 

La  Fête  che 

Ballet. 

6  mai  1910. 

H.  Strauss. 

1  '-.'..:    \\    '.t.-    i  ■    -ion   fran.  Mi-.-. 
deMarliave  et  P.  Gailhard 

.Soi 

Drame  musical.  — 

30  déc.  1910. 

G.  Hue. 

Gheusi  et  Mécane. 

Le  Mirm-le. 

Drame  lvrique. 

3  mai  1911. 

E.  Chabrier. 

Jeanne  Catulle-.Mendès  et  Staats. 

EspaùB. 

Ballet. 

9  juin  1911. 

Giordano. 

P.  Mllllet. 

Siberia. 

Drame  lyrique. 

22  nov.   1911. 

Saint-Saens. 

Gallet  et  Saint-Saens. 

Ilejuiiire. 

— 

S  déc.  1911. 

L.  Lambert. 

H.  Le  Roux,  de  Dubor,  Clustine, 

Ballet. 

30  mars  1912. 

Mm"  Ferrari. 

Milliet  el  M»'«  Vacaresco. 

LeCnhz-ur. 

(  ipéra. 

24  avril  1912. 

.1.  Massenet. 

Henri  Cain  d'après  Parodi. 

Roma. 

— 

30  oct.  1912. 

A.  Brcneac-. 

Naqnet,    Bboneatj    et    Clustine 
d'après  Euripide. 

Ballet. 

l.|u>i|iii-  eonleuipoi-aine. 


S  janvier  1913. 
29  janvier  1913. 
23  juin  1913. 


12  sept.  1913. 
i  juin  1914. 


Il  mai  1914. 
■î\  mai  191  i. 

26  mat  191  i. 

2  juin  1911. 

28  juin  1914. 
11  mars  1915. 
16  déc.  1915. 


V.  d'Indy. 

V.  d'Indy. 

Fervaal. 

Action  musicale. 

A.  Gailhard. 

m.  Magre. 

Le  Sortilège. 

Conte. 

D'après  Chopin, or- 

\ 

Suite  de  danset 

chestration  de 

H.  Gailhard  et 

P.  Vidal. 

) 

Ballet. 

Volf-Ferrari. 

Wulf- Ferrari  ,    adaptation   de 

Les  Joyau.r  de  tu  Madone. 

M.  Lara. 

opéra. 

R.  Wagner. 

R.   Wagner,   version  française 
d'A.  Ernst. 

Parafai. 

Festival  sacré. 

Ph.  Gauhert. 

G.  Bernard. 

Phiiotis. 

Ballet. 

A.  Bachelet. 

Ch.  Méré. 

Scesto. 

Drame  lyrique. 

R.  Strauss. 

La  Légende  de  Joseph. 

Ballet. 

Rimsk.y-Ki.il  -  \  - 

Le  Coq  d'or. 

Opéra  populaire. 

I.  Stravinsky. 

D'après  Andersen  adapt.  de  B. 
Sanine. 

Le  Rossignol. 

Ballet. 

M.  Steinberg. 

L.  Bakst. 

Mutas. 

j  Comédie  mylholo- 
)      gique. 

Noël  et  J.  Gallon 

H.  Cain  et  Adenis. 

Uuiisli  le  Rassit 

Ballet. 

M.  Ravel. 

L.  I.aloy. 

Les  Contes  de  n 

i  Mèrel'Oye 

Ballet-pantomime. 

Lully  ,  Charpen- 

H. Prunières. 

K«e  de  Nantes. 

v  Concert   du    xvnv8 

tier,  Cesti,  etc. 

j      siècle. 

M.  Delmas. 

Stellu.-. 

.  luvertae. 

ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


13  janvier  1910. 
17  février  1916. 
a  mars  1916. 


TciIAIKOWSKY. 
MoNTEVERDI,   L. 

Rossi,  Fr.  Ca- 

valli,  elc. 
V.d'Indy. 
A.  Brcnead. 
Max  d'Ollone. 

AUBER,     BeI.LINI, 

Berlioz  ,   Ciierc  - 


Max  d  Ollone. 


H.  Caïn  el  Gastumbide. 


orchestrés  ,  F_  Funck.Brentano. 


Le  Chaut  de  la  Cloche  (2«  tableau). 

L'Ouragan  (3"  acte). 

Les  Amants  de  Rimini  (1er  acte). 


Les  Girondins  {Ie  acte). 

Le  Roi  Artus  (3e  acte). 

Myriale  (5"  acte). 

Graziella  (2°  acte,  2e  tableau). 


Carême-prenant. 


10  janvier  1917. 
8  février  1917. 
22  mars  1917. 
17  mai  1917. 
21  nov.  1917. 
25  mai  1918. 
1er  aTrii  1919. 
G  juin  1919. 
20  juin  1919. 
2  juill.-t  1919. 
14  juillet  1919. 
17  déc.  1919. 
25  janvier  1920. 
4  mai  1920. 


8  juin  1920. 
14  juin  1920. 
10  juillet  1920. 
14  mars  1921. 
20  avril  1921. 
10  juin  1921. 
20  juin  1921. 

5  déc.  1921. 


M.  Ravel. 

DoNIZETTI. 

G.  Fadré. 
R.  Rose. 
C.  Franck. 
FI.  Schmitt. 

M.   1, 'OLLONE. 

A.  Mariotte. 
R.  Hahn. 
Granados. 
M.  DE  Falla. 

i  Divers,  1830,  ar- 
rangés  par  A. 
Bases. 
!Cimarosa,  orches- 
tré   par  Res- 

V.  d'Indy. 
FI.  Schmitt. 
Fr.  Malipiero. 
G.  Dupont. 
G.  Grovlez. 
H.  Berlioz. 
M.  Ravel. 
P.  Duras. 
M.  Ravel. 

.1.  Massbket. 


M.  d  Ollone. 

C.  Saint-Saens. 

O.  Wilde. 

Saint-Georges  de  Bouhélier. 

F.  Périquet,  L.  l.aloy. 

M.  Sievra. 


V.  d'Indy. 

A.   Gide,  d'après   Shakespeare 

Fr.  Malipiero,  H.  Pruniéres. 

Chékrl-Ganem. 

A.Gérard. 

H.  Berlioz. 


Une  Fêle  chez-  La  Pouplii 


Les  Abeilles. 

Adélaïde  ou  le  Langage  des  Fleur 

Maria  di  Rohan. 

Proinelhee. 

Jeanne  d'Arc. 

Rébecca. 

La  Tragédie  de  Sa/orné. 

Le  Retour. 

Hélène. 

Salami. 

Fêle  triomphale. 

Goyescas. 

Le  Tricorne. 

Tuglioni  chez  Musette. 


Fokine  (chorégraphe). 


Astii;ie  féminité. 


La  Légende  de  saint  Christophe. 

Antoine  et  Cliopâtre. 

Sept  chansons. 

Antar. 

Maîmouna. 

Les  Troyens. 

Daphnis  et  Chloè. 

La  Péri. 

L'Heure  espagnole. 


P.  Milliet  et  H.  Grémont.  Ilerodiade. 

H.   Caïn  et   E.    Adenis   d'après  I  La  ilègère  apprivoisée. 
P.  Delair  et  Shakespeare. 


24  mars  1922. 

l  Ch.  Dbbussy.  or- 

J      chestré   par   H. 
1      Busser. 

Petite  Suite. 

1  avril  1922. 

Verdi. 

A.  Boïto  et  P.  Solanges  d'à 
Shakespeare. 

près 

Falstaf. 

2S  avril  1922. 

P.  PARAT. 

L.  Bakst. 

Artèmis  troublée. 

1er  mai  1922. 

J.    POCEIGII. 

P.  Hortola. 

Frivolant. 

18  mai  1922. 

TCHAÏKOVSKY. 

M.  Petipa. 

\  Le  Mariage  de  la   Relie 

2  juin  1922. 

STRAVINSKY. 

B.  Kochno  d'après   Pouchkine. 

Matra. 

17  juin  1922. 

Ch.  Debussy. 

G.  d'Annunzio. 

Le  Martyre  de  saint  Sèba 

27  oct.  1922. 

H.Rabadd. 

S  II.  Rabacd  d'après  H.  de 

Bor- 

)  La  Fille  de  Roland. 

29  nov.  1922. 

J.  Massenet. 

A.  Silvestre  et  E.  Morand. 

C.risèlidis. 

22  déc.  1922 

Mozart. 

j  E.  Schikanederet  Giesecke,  trad 

1  La  Flûte  enchantée. 

1      Prod'homme  el  Kienlin. 

\ 

15  janvier  1923. 

G.  PlERNÉ. 

Caillavet  et  R.  de  Fiers. 

Cydalist  et  Chêrre-pied. 

13  avril  1923. 

M.  Mocssorhski. 

M.  Moussorgski  et  d'Haicourl 

La  Khorantchina. 

l"juin  1923. 

A.  Roussel. 

L.  Laloy. 

l'admarâti. 

7  juin  1923. 

Pizzetti. 

i  G.  d'Annunzio,  trad.  de  A 
1      deret. 

Do 

1  Ph&dre. 

31  oct.  1923. 

A.  Brcneac. 

Caillavet  el  R.  de  Fiers. 

Les  Jardins  au  Paradis . 

12  nov.  1923. 

Ph.  Gaubert. 

Fresques. 

,  Chopin,  orchestré 
J      par  L.  Aohert, 
j      ad  a  p  t.  p  a  r  E. 
(      Vcillermoz. 

i  L.  Bakst. 

La  \uii  ensorcelée. 

24  déc.  1923. 

J.  Massenet. 

!..  de  Gramont. 

Esclarmonie, 

Concert  1830. 
Scène   drama- 
tique. 
Drame  lyrique. 

i  Poème  normand 
en  4  actes  et  5 
tableaux. 
Concert  du  xvu* 
siècle,  musique 
recueillie  par 
MM.  Laloy  el  H. 
Quiltard. 
Ballet. 


Opéra. 

Tragédie   lyriqu 
Drame  lyrique. 
Drame  sacré. 
Ballet. 

Drame  lyrique. 
Poème  lyrique. 
Drame  lyrique. 


Drame  lyrique. 
Tragédie   lyrique. 

Conte  héroïque. 

Fantaisie-ballet. 

Poème  lyrique. 

Ballet. 

Poème  dansé. 
^  Comé'die  musi- 
,      cale. 


Opéra. 
Comédie  lyriij 


Comédie  lyriqi; 
Ballet. 


i  opéra-comique. 
Mystère. 
Tragédie  lyrique. 

Conte  lyrique. 
Opéra. 

Ballet, 

Drame  musical. 
Opéra-ballet. 

Tragédie    lyrique. 

Ballet. 

Divertissement. 
Ballet. 


Opéra  romanesque 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LES  THÉÂTRES  SUBVENTIONNÉS 


19  mars  1924. 

Ch.   Tofrnemire. 

E.  Berteaux. 

Les  Dieux  sont  morts. 

Drame  lyrique. 
Ballet-pantomime. 

— 

G.  Hue. 

P.  Jobbé-Duval. 

Siang-Sin. 

10  juillet  1924. 

V.  d'Indy. 

V.  d'Indy. 

Poème  dansé. 

27  octobre  1924. 

Ch.-M.  Widob. 

M.  Lena. 

Nerto. 

Drame  lyrique. 
Film  historique. 

13nov.l924. 

H.  Rabaod. 

H.  Dupuy-Mazuel. 

Le  Miracle  des  Loups. 

24  déc.  1924. 

M.  d'Ollone. 

J.  Sarment. 

L'Arlequin. 

Comédie  lyrique. 
Drame  lyrique. 

16  janvier  1925. 

Al.  Geoboes. 

J.  Richepin. 

Miarka. 

1"  mai  1925. 

A.  Mariotte. 

A.  Dumas  et  S.  Ch.  Leconte. 

Eslher  princesse  d'Israël. 

Tragédie  lyri  q  ue. 
Conte  antique. 

1"  juillet  1925. 

A.  Roussel. 

Th.  Reinach. 

La  Saissance  de  la  Lyre. 

— 

J  L.   Delibes  ,  arr. 
!      par  M.  Bcsser. 

i  Staats. 
( 

Soir  de  Fcle. 

Ballet. 

23  nov.  1925. 

A.  Bloch. 

F.  Gregh. 

Brocéliande. 

Prélude   féerique. 

— 

H.  FÉVRIER. 

E.  Schuré. 

L'Ile  désenchantée. 

Drame  musical. 

— 

J.  Ibert. 

Mm"  Nijinska. 

Les  Rencontres. 

Ballet. 

11  juin  1926. 

R.  Ducasse. 

Orphée. 

1  Mimodrame    lyri- 

17  dée.  1926. 

P.  Ladmibault. 

A.  Juhellé,  G.  Cleret. 

La  Prêtresse  de  Konjdwen. 

}      que. 
Ballet. 

24  déc.  1926. 

G.  Vebdi. 

Piave,  trad.  E.  Duprez. 

La  Trariala. 

Opéra. 

11  février  1927. 

R.  Strauss. 

(  H.  von  llofmannthal(trad 
/      J.  Chantavoine). 

fr.de 

j  Le  Cheratier  à  la  Rose. 

Comédie  musicale. 

18  février  1927. 

A.  HONEGGER. 

Saint-Georges  de  Bouhél 

er. 

L'Impératrice  aux  Rochers. 

Mystère. 

8  avril  1927. 

Ph.  Gadbert. 

M.  I.éna. 

Naila. 

Conte  lyrique. 

— 

G.  Pierné. 

G.  Pierné. 

Impressions  de  Music-Hall. 

Ballet. 

16  mai  1927. 

)  RlMSKY-KoRSA- 
'         KOW. 

j  Pouchkine  et  A.    Bielki 
1      Calvocoressi). 

(trad. 

(  Le  Coq  d'or. 

Conte-fable-opéra. 

3  juin  1927. 

E.  Inghelbrecht. 

Ed.  Poë. 

Le  IHalile  dans  le  he/froi. 

Ballet. 

16  déc.  1927. 

J.  Mazklier. 

R.  Gastambide. 

Les  Matines  d'amour. 

Fabliau-miracle. 

— 

M.  Dei.ixes. 

A.  Boucheron,  P.  de  Choudens. 

Cyrca. 

,  Action    chorégra- 

|       phique  et  sym- 

|      phonique. 

16  janvier  192S. 

Svlv.  Lazzari. 

Sylv.  Lazzari. 

La  Tour  de  feu. 

Drame  lyrique. 

2  avril  1928. 

S  G.  Pdcciki  et  F. 
(      Alfano. 
H.  Rauauo. 

;  G.  Adami  et  R.  Simoni. 

Turandot. 

Drame  lyrique. 

22  juin  192S. 

L.  Népoty. 

Marouf,  savetier  du  Caire. 

Opéra. 

4  mars  1929. 

/  Ravel,  Ferroud, 
[       Ibert,Poulenc, 

1        ROUSSEL,    MA- 
\        NCEL,  DELAU- 

!        NAY.MlLHAOD, 

F       Auric.Schmitt, 

s 

L'Eventail  de  Jeanne  d'Arc. 

Ballet. 

3  avril  1929. 

J.  Cantelodbe. 

J.  Cantelodbe. 

Le  Mus. 

Pièce  lyrique. 

15  mai  1929. 

J. Ibert. 

M.  Nino. 

Persèe  et  Andromède. 

Opéra. 

— 

R.  Manuel. 

Dresa. 

L'Ecran  des  jeunes  filles. 

Ballet. 

19  juin  1929. 

M.  Emmanuel. 

Th.  Reinach. 

Salamine. 

Tragédie   lvrique. 

30  déc.  1929. 

Beethoven. 

Se.  reconstituée  par  J.  Chanta- 

Les Créatures  de  Promèthèe. 

Ballet. 

voine  et  Lena. 

: 

A.  PEYTEL. 

à  H.  Ho, in  de  I 


tous  nos  renie 


Comique.  (N.  D.  L.  D.] 


les  renseignements  qu 


L'ÉDITION  MUSICALE 

Par  Jacques  DURAND 


HISTORIQUE 

Editer  (du  latin  edere,  faire  sortir,  mettre  dehors) 
exprime  l'action  d'imprimer  et  de  publier  un  ou- 
vrage. 

L'histoire  de  l'édition  musicale  se  confond,  à  son 
origine,  avec  l'édition  du  livre.  Les  premiers  éditeurs 
de  musique  sont  en  même  temps  imprimeurs  et 
quelquefois  graveurs  et  fondeurs  de  caractères. 

En  France,  le  privilège  royal  accordé  à  certains 
imprimeurs  leur  donna  l'investiture  éditoriale  en 
quelque  sorte.  C'est  après  le  décret  de  la  Convention 
de  1793,  instituant  la  reconnaissance  du  droit  d'au- 
teur, que  l'édition  proprement  dite  prend  son  essor, 
aidée  en  cela  par  les  moyens  de  production  toujours 
améliorés. 

On  cite,  dès  le  xvi°  siècle,  à  Venise,  Petrucui 
comme  éditeur-imprimeur;  il  fut  l'inventeur  de  la 
typographie  musicale  en  caractères  mobiles,  et  hi 
paraître  sa  première  publication  en  1501. 

Pierre  Hautin,  fondeur  de  caractères,  à  Paris, 
améliore  en  1526  ce  mode  d'impression  musicale; 
Pierre  Attaingnant  se  sert  des  caractères  de  Hautin 
en  1527,  et  fait  progresser  l'édition  musicale.  Le 
15  février  1552,  Henri  II  octroie  à  Robert  Ballard, 
conjointement  avec  son  beau-frère  Le  Roy,  le  privi- 
lège de  seul  imprimeur  de  la  musique  de  la  Chambre. 
Chapelle  et  Menus  Plaisirs  du  Roi.  Pendant  près  de 
deux  siècles,  la  famille  Ballard  aura,  en  quelque 
sorte,  le  monopole  d'impression  de  la  musique  en 
France. 

En  1556,  Jean  Laet  à  Anvers,  puis,  à  partir  de  1561), 
Pierre  Phalèse  à  Louvain  impriment  des  œuvres  de 
Roland  de  Lassjs.  A  Venise,  en  1565,  Antonio  Gar- 
dano,  puis  postérieurement  à  1567,  Adam  Berg,  à 
Munich,  et  en  1583,  Catherine  Gerlacu  à  Nuremberg 
font  également  paraître  des  œuvres  de  Roland  de 
Lassus.  Vers  la  même  époque,  William  Hvrd  obtient 
à  Londres,  avec  ïallis,  la  patente  de  seul  impri- 
meur et  marchand  de  musique  1575).  En  1502,  Ric- 
cardo  Amadino,  qui,  de  1583  à  1586,  s'était  associé  à 
Giacomo  Vincenti,  éditait  à  Venise  des  madrigaux 
de  Monteverdi  et  continuait  à  publier  des  œnvres  de 
ce  musicien,  dont  Orfeo  (1609). 

On  cite  encore,  au  xvne  siècle,  comme  éditeurs 
de  musique,  Moreti  à  Bologne,  Zannetti  à  Rome, 
Ti.ni  à  Milan,  Richter  à  Francfort,  Kauffmann  a  Nu- 
remberg, Hering  à  Dresde,  Playford  à  Londres. 

Au  xviiic  siècle,  nous  relèverons  les  noms  sui- 
vants :  à  Londres,  Walsh  et  Hare,  éditeurs  de 
Haendel,  qui  réalisèrent,  vers  1730,  d'importants  pro- 


grès dans  la  gravure  musicale;  Roger  à  Amsterdam; 
à  Paris,  Uaillelx,  La  Cheyardière,  Boivin,  et  Leclerc, 
chez  lesquels  sont  déposées  les  œuvres  de  J.-Ph. 
Rameau.  A  Nuremberg,  Ballhasar  Schmidt;  à  Leip- 
zig, Breitkopf,  qui  publie  Bach;  puis  à  Vienne,  à  la 
tin  du  xviir  siècle,  Artaria.  qui  édite  les  œuvres  de 
Mozart,  Haydn,  Beethoven.  En  1774,  André  fonde,  à 
Offenbach,  une  imprimerie  qui  prit  une  extension 
considérable.  Pour  la  période  moderne,  on  peut 
citer,  au  début  du  xix°  siècle,  à  Paris,  Richault,  qui 
fonda  sa  maison  en  1805,  grava  et  publia  un  nombre 
considérable  d'oeuvres  tant  symphoniques  que  dra- 
maliques  de  Beethoven,  Mozart,  Bacb,  Haendel, 
Meyerbeer,  Cherubini,  Adam,  Donizetti,  Boïeldieu, 
etc.;  Brandcs,  éditeur  de  Meyerbeer;  Choudens,  édi- 
teur de  Gounod,  Bizet;  Heugel,  éditeur  d'Ambroise 
Thomas,  Massenet;  Dlrand,  éditeur  de  Saint-Saëns, 
Faire,  Debussy,  Ravel,  des  œuvres  complètes  de 
Hameau;  Hamellk,  éditeur  de  Franck;  Lemoine,  édi- 
teur d'ouvraues  d'enseignement.  A  Leipzig,  Bheii- 
kopf  et  Haehtel,  Peters,  Hofueister,  Kistner;  à  Ber- 
lin, Botj  et  Bock,  Simrock,  éditeur'  des  œuvres  de 
Brahms;  à  Mayence,  Schott  qui  édite  des  œuvres  de 
Wagner;  à  Brunswick,  Litolff;  à  Milan,  Bic.ordi;  à 
Londres,  Novello;  à  Pétrograd, Bessel; à  New-York, 
Sciurmer. 

Avant  la  guerre  de  1914,  les  éditions  classiques 
allemandes  jouissaient  d'une  faveur  privilégiée  sur 
le  marché  mondial.  Les  événements  ont  donné  l'es- 
sor aux  éditions  classiques  françaises,  améliorées  ou 
nouvelles;  elles  commencent  leur  vie  expansive,  et 
des  résultats  très  importants  sont  déjà  obtenus. 


TECHNIQUE 

Pour  étudier  la  technique  de  l'édition  musicale,  il 
faut  remonter  au  xve  siècle.  Avant  cette  époque,  se 
situe  la  période  xylographique  (du  grec  |ûXov,  bois, 
et  ypaçelv,  écrirei,  c'est-à-dire  la  période  des  signes 
musicaux  gravés  sur  bois.  On  cite  des  missels  dont 
les  portées  seules  étaient  imprimées  en  rouge,  la 
notation  étant  mise  ensuite  à  la  main. 

L'invention  des  caractères  métalliques  mobiles,  au 
xV  siècle,  fut  appliquée  à  l'édition  musicale  des  1476, 
à  Home,  et  permit  de  produire  des  missels  où  la 
notation  était  entièrement  composée  typographi- 
quement  au  moyen  du  double  tirage,  les  lignes  de 
portée  d'abord,  les  notes  ensuite.  C'est  à  la  France 
que  revient  l'honneur  d'avoir  inauguré  l'impression 
musicale  à  tirage  unique,  au  moyen  de  caractères  de 
notes  et  de  fragments  de  lignes  formant  la  portée 
(en  1525).  Un  peu  plus  lard,  on  essaya  d'introduire, 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ORPHÉON    3535 


dans  l'impression,  des  caractères  de  noies  arrondies; 
les  notes,  en  forme  de  losange  se  maintinrent,  néan- 
moins, dans  la  typographie  musicale,  jusque  vers  la 
moitié  du  xvnie  siècle. 

L'écriture  musicale  se  compliquant,  on  fut  amené 
à  chercher  un  procédé  plus  commode  pour  l'agen- 
cement des  notes  que  l'emploi  des  caractères  mobi- 
les, el  c'est,  sans  doute,  à  la  fin  du  xvi°  siècle,  que 
la  gravure  sur  cuivre,  au  moyen  d'un  burin,  se 
généralisa  (vers  1  : i 8 6 ) .  La  gravure  de  musique  et  la 
typographie  musicale  se  sont  développées  ensuite 
avec  des  l'ortunes  diverses,  la  gravure  arrivant, 
néanmoins,  bonne  première.  La  typographie  musi- 
cale peut  rendre,  toutefois,  des  services  dans  des 
cas  spéciaux  où  le  texte  musical  se  trouve  incorporé 
au  texte  littéraire,  comme  dans  les  méthodes,  par 
exemple.  Ce  procédé  ne  s'est  pas  beaucoup  répandu, 
sauf  en  Angleterre,  pour  certaines  éditions  populai- 
res. L'effet  n'en  est  pas  heureux  au  point  de  vue  de 
la  présentation. 

C'est  seulement  au  xvin0  siècle  que  l'on  eut  l'idée 
d'adjoindre  au  burin  des  poinçons  représentant  cer- 
tains signes  musicaux  (clefs,  notes,  etc.),  frappés  sur 
la  planche  à  l'aide  d'un  maillet,  la  finition 
sure  étant  confiée  au  burin. 

Vers  1730,  pour  faciliter  la  frappe,  la  planche  de 
cuivre  a  été  remplacée  par  la  planche  d'étaii.  allié 
au  plomb.  La  planche,  gravée  en  négatif,  était  tirée, 
naguère,  en  taille-douce,  comme  l'on  tire  une  es- 
lampe.  C'est-à-dire  que  la  planche,  préalablement 
encrée  an  tampon,  était  placée  sur  la  presse,  recou- 
verte de  papier,  puis,  après  un  serrage  convenable, 
venait  l'épreuve  imprimée. 

En  1702,  naquit  à  Munich  la  lithographie  qui,  peu 
à  peu,  modifia  la  manière  d'imprimer  la  musique. 
Ce  procédé,  connu  d'abord  sous  le  nom  à'impression 
chimique,  fut  introduit,  en  France,  aux  environs  de 
1802.  Il  s'y  implanta  vers  1815,  mais  servit  d'abord 
à  populariser  les  dessins  de  l'époque  romantique. 
Ce  n'est  que  vers  la  deuxième  moitié  du  xix°  siècle, 
que  ce  procédé,  appliqué  à  l'édition  musicale,  lui 
donna  un  essor  considérable  au  moyen  du  report. 

Le  tirage  en  taille-douce  a  le  grand  inconvénient 
de  fatiguer  la  planche;  avec  la  lithographie,  cet 
inconvénient  disparaît.  La  planche  sert  de  matrice; 
une  épreuve,  prise  directement  sur  la  planche  au 
moyen  d'un  papier  spécial,  appelé  chine,  est  ensuite 


décalquée  sur  une  pierre  lithographique  (calcaire 
compact  du  terrain  jurassique).  Cette  opération  s'ap- 
pelle report. 

La  pierre  ainsi  préparée,  placée  sur  une  machine 
à  imprimer,  où  elle  est  encrée  automatiquement, 
pourra  tirer  quelques  milliers  d'exemplaires  de  la 
planche.à  reproduire.  Le  tirage  terminé,  la  pierre  est 
nettoyée  et  prête  à  servir  pour  un  nouveau  report. 

Actuellement,  on  tend  à  faire  les  reports  par  des 
procédés  photographiques,  les  pierres  étant  rempla- 
cées par  des  zincs  disposés  ensuite  sur  machines 
rotatives  à  grand  rendement.  On  cherche  aussi  à 
mettre  au  point  une  machine  à  écrire  la  musique 
pour  remplacer  la  gravure  en  usage,  ou,  tout  au 
moins,  pour  la  concurrencer. 

Les  formats  habituels  dans  l'édition  musicale  sont  : 

['in-quarto  Jésus,  correspondant  cà  une  feuille  de 
54  centimètres  sur  70  centimètres,  pliée  en  qualre; 

Yin-quarto  raisin,  correspondant  à  uni'  feuille  de 
papier  50x65  pliée  en  quatre; 

l'in-octavo  colombier,  correspondant  à  une  feuille 
de  papier  61  x90  pliée  en  huit; 

Vin-octavo  grand  Jésus,  correspondant  aune  feuille 
de  papier  56X76  on  51       ?8  pliée  en  huit; 

Vin-16  Jésus  ou  colombier,  correspondant  à  une 
feuille  de  papier  56X76  ou  61X00  pliée  en  seize. 

Le  papier,  employé  généralement  pour  imprimei 
la  musique,  et  qui  donne  les  meilleurs  résaltats,  est 
celui  que  l'on  fabrique  avec  de  Valfa,  plante  de 
l'espèce  des  graminées  poussant  communément  en 
Algérie.  Suivant  un  terme  de  métier,  le  papier  d'alfa 
est  amoureux  de  l'encre  lithographique  et  typogra- 
phique. Avant  lùli,  l'Angleterre  était  grande  pro- 
ductrice de  ce  papier.  Elle  importait  l'alfa  comme 
fret  de  retour,  à  des  conditions  déliant  toute  concur- 
rence. Maintenant,  le  marché  français  tend  à  se 
libérer  en  ce  qui  concerne  le  papier  en  général.  Des 
fabriques  se  fondent  en  Algérie  même  pour  traiter 
l'alfa,  et  les  résultats  obtenus  sont  des  plus  encou- 
rageants. 

Les  éditions  musicales  se  présentent  soit  sous 
forme  de  fascicules  non  cousus,  avec  un  titre  cou- 
verture en  papier  de  couleur,  soit  sous  forme  de 
volumes  brochés,  comme  les  partitions  d'opéra.  Cer- 
taines œuvres  d'enseignement  sont  cartonnées. 

Jacqx-es  DURAND. 


NOTATION  MUSICALE  A  L'USAGE  DES  AVEUGLES 
D'APRÈS  LE  PROCÉDÉ  LOUIS  RRAILLE 


Par  Albert  MAHAUT 


Certainement,  je  puis  jouer  les  fugues  de  Sébastien 
Bach;  je  puis  jouer  du  Widor,  du  Saint-Saëns,  du 
Franck,  et  tout  ce  que  vous  voudrez... 

Donnez-moi,  je  vous  prie,  mais  pointée  en  Braille, 
la  dernière  œuvre  parue,  et  je  me  fais  fort  de  suivre 
de  bien  près  les  plus  avides  de  nouveautés. 

Voulez-vous  voir  plutôt?  J'ouvre  mon  livre;  j'en 
tourne  les  feuillets  perforés  de  toutes  parts.  Mon 
doigt  court  sur  cette  foule  de  points;  ces  points, 
diversement  combinés,  me  donnent  le  sens  des  notes, 
des  valeurs,  des  silence*,  de  tous  les  signes  musico- 
graphiques  possibles.  Non,  sans  doute,  je  ne  puis 
exécuter  et  lire  simultanément;  cela  même  pour- 
tant me  serait  facile,  ne  s'agit-il  que  d'une  partie  à 
vocaliser,  d'une  pièce  de  plain-chant  à  accompagner 


à  l'orgue,  la  basse  aux  pieds,  l'harmonie  à  la  main 
droite,  tandis  que  la  main  gauche  suivrait  le  chant 
sur  le  cahier.  Mais  nous  sommes  en  présence  d'un 
ensemble,  d'un  morceau  de  piano  ou  d'orgue;  pour 
l'exécuter,  il  me  faut  l'apprendre  par  cœur  :  j'ai  une 
bonne  mémoire,  ce  ne  sera  pas  long1. 

Je  vais  donc  m'y  mettre  tout  de  bon;  assis  au 
piano,  mon  livre  sur  les  genoux,  je  cherche  la  pre- 
mière page,  je  passe  sur  le  titre,  je  lis  rapidement 
les  indications  générales  de  mouvement,  d'expres- 
sion, etc.  A  la  fin  de  la  ligne  dans  un  même  groupe 
de  signes,  j'ai  l'armure  de  la  chef  et  la  mesure, 
l'une  et  l'autre  données  une  fois  pour  toutes  en  tête 
du  morceau, 


•  •  •     ••  • 

•  •            • 

•  •            • 

• 

•     ••     •  • 

•     • ••     •  •• 

•     •     •        • 

•     •     • 

F    0     C    0 

L 

E    N    T    0      . 

#    #     # 

Va 


et,  sans  perdre  de  temps,  j'arrive  au  texte  propre- 
ment dit...  Ne  cherchez  pas  à  vous  y  reconnaître  :  vos 
notions  habituelles  vont  être  renversées.  Ici,  rien 
n'est  superposé,  tout  est  aligné  successivement.  Mon 
doigt  suit  la  ligne,  inflexiblement  de  gauche  adroite, 
passe  à  la  ligne  suivante  qu'il  suit  de  même,  et 
ainsi  de  suite,  distinguant  l'un  après  l'autre  chacun 
des  signes,  très  vite,  toujours  courant  (les  lettres 
M.  D.  m'indiquent  une  phrase  de  main  droite)  : 


M  .     D  . 

Je  parcours  cette  première  phrase;  elle  est  courte 
et  peut  être  retenue  à  première  ou  à  seconde  lecture. 
Je  poursuis,  et  je  trouve  immédiatement  la  phrase 
de  main  gauche  correspondante  (annoncée  par  les 
lettres  M.  G.)  : 


J'assemble  les  deux;  j'exécute  le  passage;  j'ap- 
prends le  fragment  suivant  que  j'unis  au  premier;  je 
continue  cette  opération  familière  jusqu'à  la  cadence 
finale;  je  joue  le  tout,  et  si,  après  cela,  j'ai  besoin  de 
respirer,  je  vais  tout  simplement  faire  un  tour  de 
jardin. 

Mais  bientôt  je  rentre,  et  non  sans  espoir  de 
vous  intéresser  par  de  nouveaux  détails,  fût-ce 
même  quelques  détails  techniques,  courts  d'ailleurs, 
je  n'ai  nullement  le  but  de  donner  l'exposé  com- 
plet du  système,  mais  simplement  d'en  tracer  l'es- 
quisse, avec  des  explications  et  des  exemples  suffi- 
sants pour  rendre  déchiffrables  à  qui  le  désirerait 
un  texte  musical  de  difficulté  moyenne  noté  en 
Braille. 

Donc,  je  le  répète,  plus  de  portée,  plus  rien  de 
commun  avec  les  dispositions  usuelles.  Sept  signes 
différents  formés  de  deux,  trois,  ou  quatre  points, 
représentent  les  sept  notes  de  la  gamme  :  ce  sont 
les  cioches  : 


*mes  signes,  transformés  par  l'addition  d'un  |  point  en  bas  à  droite,  d'un  point  en  bas  à  gauche, 

ou  des  deux  points  réunis,  deviennent,  tour  à  tour, 

noire  se  développe  si npiilièrcm^iit  .lie/  les  aveugles,  '  des  noires,  des  blanches,  des  rondes  : 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTATION  MUSICALE    3837 


do 


fa 


La  double  croche  s'exprime  comme  la  ronde;  la 
triple,  comme  la  blanche;  la  quadruple,  comme  la 
noire,  sans  confusion  possible  :  l'examen  de  la 
mesure  fixe  instantanément  sur  le  véritable  sens  du 
signe  s'appliquant  tantôt  à  une  valeur  longue,  tan- 


sol 


tôt  à  une  valeur  brève.  Ainsi,  la  ronde  se  trouvant 
entre  deux  barres  de  mesure  ne  pourrait  être  con- 
fondue avec  la  double  croche,  qui  serait  nécessaire- 
ment entourée  de  plusieurs  autres  valeurs  : 


•:  r 


D'autres  signes  représentent  les  silences  :  il  y  en  a 
quatre.  Comme  pour  les  valeurs,  le  même  signe  a 
unejdouble  signification  se  rapportant,  selon  le  cas, 
à  un  silence  de  longue  durée  ou  à  un  silence  de  courte 


.(- 


durée;  la  pause  est  semblable  au  quart  de  soupir, 
la  demi-pause,  au  huitième  de  soupir,  le^soupir,  au 
au  seizième  de  soupir  : 


La  position  des  notes  sur  l'échelle  musicale  est 
déterminée  par  sept  clefs  différentes  appelées  clefs 
d'octave1.  Chacune  des  sept  octaves  formant  l'éten- 
due du  clavier  a  donc  sa  clef  spéciale  :  clef  de  pre- 


mièrejoctave  pour  les  notes  les  plus  graves  du  cla» 
vier;  clef  de  septième  octave  pour  les  notes  les  plus 
aiguës  :  le  la  du  diapason  serait  déterminé  par  la 
clef  de  quatrième  octave  : 


La  clef  s'écrit  immédiatement  avant  la  note  dont 
elle  détermine  l'octave. 

La  première  note  d'un  morceau  ou  d'une  de  ses 
divisions  doit  toujours  être  fixée  par  sa  clef  d'octave. 

Lorsqu'une  note  forme  avec  celle  qui  la  précède 
un  intervalle  de  seconde  ou  de  tierce,  la  clef  n'est 
jamais  répétée  : 


Au   contraire,  elle    l'est   toujours,  lorsque    cette 
note  forme  un  intervalle  qui  atteint  et  dépasse  la 

sixte  : 


Lorsqu'une  note  forme  avec  la  précédente  un 
intervalle  de  quarte  ou  de  quinte,  la  clef  d'octave 
n'est  marquée  de  nouveau  que  s'il  y  a  changement 
d'octave  : 


ENCi  CLul'EDIE  DE  LA  MU.iKiLU  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Ces  trois  règles  assurent  la  clarté  pour  tous  les 
cas  possibles. 


Et  les  accords.'  Nous  lisons  les  accords  comme  le 
reste,  en  signes  alignés  et  non  superposés.  Une  note 
seulement  est  écrite  :  celle  de  la  partie  haute  pour 
la  main  droite,  celle  de  la  basse  pour  la  main  gau- 
che ;  suivent  des  signes  d'intervalles,  seconde,  lierce, 
ctc.,selonles  intervalles  formés  entre  la  note  extrême, 
la  seule  effectivement,  écrite,  et  les  autres  notes  de 
l'accord  : 


seconds  tierce  quarte  quinte  sixte  septième  octave 

Toutes  les  notes  de  l'accord  sont  plaquées  ensemble  et  ont  la  même  durée  que  la  note  initiale 


S'agit-il  de  parties  simultanées,  parties  doubles 
ou  triples,  avec  des  rythmes  différents'.'  Mous  écri- 
vons alors  chaque  partie  intégralement  et  toujours 
successivement;  chacune  d'elles  doit  former  une 
mesure  complète,  d'où  parfois  l'obligation  d'intro- 


duire des  silences  qui  n'existent  pas  en  réalité  sur 
le  texte  des  voyants.  Un  signe  nommé  copule  (du 
latin  copala,  lien)  est  placé  entre  les  parties  qui  doi- 
vent être  exécutées  ensemble,  et  en  indique  la  simul- 
tanéité : 


La  barre  de  mesure  (un  espace  laissé  en  blanc": 
n'apparaîtra  qu'après  la  dernière  partie  écrite. 

Telle  est  notre  manière  de  disposer;  telles  sont 
les  grandes  lignes  de  notre  procédé  Braille. 

Les  autres  signes  en  usage  dans  la  notation  ordi- 
naire tiouvent  leurs  correspondants  dans  la  nôtre  : 
doigté,  liaison,  signes  d'articulation,  etc.,  etc.  D'a- 
près des  conventions  très  déterminées,  certain».xle 
ces  signes  se  placent  avant  la  note,  d'autres  se 
placent  après.  Tout  est  prévu,  tout  est  ordonné  pour 
assurer  la  clarté  et  le  plus  de  rapidité. 

Tableau  des  signes  qui  peuvent  accompagner  une 
note,  dans  l'ordre  de  leur  proximité  par  rapport  à 
cette  note. 

Avant  la  note  :  clef  d'octave,  altérations,  petite 
note,  gruppetto,  mordente,  trille,  piqué. 

Après  la  note  :  point,  double  point,  doigté,  liaison, 
signe  d'intervalle,  double  barre. 

Grâce  donc  à  celte  méthode  claire  et  rapide1,  j'ap- 
prends et  j'interprète.  Grâce  à  elle,  j'écris  et  j'ensei- 


gne. Grâce  à  elle,  pour  tout  dire,  j'existe...  Qu'il 
s'agisse  d'art,  ou  de  métier,  je  suis  armé.  Et  j'ai 
autour  de  moi  tout  un  groupe  de  collègues  ou  d'élè- 
ves, qui  vivent  ou  qui  vivront  par  celte  méthode. 

Braille,  l'aveugle  français  qui  imagina  cette  mer- 
veille d'ingéniosité,  transforma  le  sort  de  ses  fils 
dont  nous  sommes.  Mai  y,  notre  premier  initiateur, 
avait  lancé  l'idée  de  l'aveugle  musicien;  Braille  l'a 
rendue  féconde  en  mettant  à  son  service  ce  procédé 
sur,  pratique,  parfaitement  approprié  aux  besoins  et 
aux  aptkudes  de  ceux  qu'il  devait  relever. 

L'histoire  des  aveugles  n'est  pas  vieille  :  avant 
Haï  y,  rien  n'avait  été  tenté.  La  charité  s'ingéniait  à 
adoucir  leur  sort  matériel,  mais  nul  n'avait  songe  à 
instruire  et  à  utiliser  ces  êtres  plongés  dans  la  nuit. 
Valent'm  H  Ai  y,  né  en  1745,  mort  en  1822,  le  premier, 
eut  la  révélation  de  ce  que  pouvait  donner  l'aveu- 
gle. Le  doigl  pouvait  se  substituer  à  l'œil,  il  le  comprit. 
Passionnément,  il  s'attacha  à  cette  cause  si  nouvelle. 
Il  réunit  quelques  enfants  aveugles,  imagina  pour 
eux  des  caractères  tangibles  el  ses  élèves  lurent.,, 
Ses  essais  firent  grand  bruit,  même  à  la  cour.  Son 
œuvre,  emportée  dans  la  tempête  révolutionnaire,  se 
reconstitua  sous  le  premier  Empire.  Une  institution 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTATION  MUSICALE    3839 


fut  officiellement  ouverte  à  Paris  pour  élever  les 
aveugles  et  mettre  entre  leurs  mains  une  profession. 
Tout  de  suite,  la  musique  apparut  comme  le  domaine 
le  plus  propice  à  leur  activité.  Cependant,  les  pro- 
grès étaient  lents  et  sans  résultats  bien  positifs.  On 
avait  repris  les  caractères  d'HAÛY,  caractères  linéai- 
res, semblables  aux  lettres  des  voyants,  mais  aucune 
notation  n'existait,  et  les  efforts  étaient  en  grande 
partie  stériles.  Vainement  Haut  traçait-il  des  por- 
tées revêtues  de  signes  en  relief;  cela  ne  donnait 
rien  de  pratique.  Pour  la  musique,  comme  pour  les 
lettres  d'ailleurs,  il  fallait  renoncer  aux  dessins 
linéaires  difficilement  saisissables  au  doigt  Le  mode 
de  perception  étant  différent,  il  fallait  des  signes 
différents.  On  eut  l'idée  du  point,  perçu  instantané- 
ment, tandis  que  la  ligne,  qu'il  faut  contourner,  est 
perçue  lentement. 

C'est  de  l'idée  du  point  que  Braille,  né  en  1809, 
mort  en  1852,  s'empara;  tout  jeune  professeur  à 
l'Institution  nationale  des  Jeunes  Aveugles,  où  il 
avait  été  élevé,  il  appliqua  son  esprit  vif  et  sagace, 
essentiellement  méthodique,  à  l'élaboration  de  son 
système  basé  sur  l'emploi  du  point  en  relief.  Il  le 
publia  en  1829.  Propre  également  aux  manuscrits  et 
à  l'impression,  aux  lettres,  aux  chiflres,  enfin  et 
surtout  à  la  musique,  le  procédé  nouveau  résolvait 
le  grand  et  difficile  problème  posé  par  HaCy.  En- 
thousiasmés, les  professeurs  aveugles  accueillirent 
la  notation  pointée  et  l'enseignèrent  à  leurs  élèves. 
Toutefois,  pendant  plus  de  vingt  ans,  et  jusqu'à  la 
mort  de  l'inventeur,  le  système"  Braille  ne  fut  qu'of- 
ficieusement enseigné  à  l'Institution.  Les  directeurs 
voyants  acceptaient  mal  l'idée  d'un  système  conven- 
tionnel, si  totalement  différent  du  système  ordi- 
naire. Mais  les  points  de  Braille  seuls  réussissaient; 
les  expériences  des  intéressés,  les  meilleurs  juges, 
devenaient  de  plus  en  plus  concluantes;  en  1854, 
deux  ans  après  la  mort  de  Braille,  son  système  fut 
adopté  officiellement,  et  servit  à  l'impression  de  la 
musique  et  des  livres  scolaires. 

De  Paris,  et  bien  vite,  le  Braille  se  répandit  dans 
les  écoles  de  la  province  et  de  toutes  les  nations 
européennes;  partout,  il  fut  acclamé  et  adopté.  En 
Angleterre  surtout,  comme  en  France,  l'enseigne- 
ment musical  prospéra;  les  écoles  d'aveugles  devin- 
rent de  sérieuses  écoles  de  musique.  Les  imprimeries 
se  multiplièrent;  les  bureaux  de  copie  s'ouvrirent; 
de  riches  bibliothèques  répandent  leurs  manuscrits, 


lettres  et  musique,  dans  la  foule  des  lecteurs  aveu- 
gles; un  grand  obstacle  est  brisé;  la  nuit  est  vaincue. 

Oue  dire  maintenant  des  résultats?  Ne  suffit-il 
pas  de  rappeler  vos  souvenirs  ?  Qui  donc  n'a  entendu 
un  organiste  aveugle?  Je  cite  l'orgue  comme  étant 
notre  instrument  de  prédilection;  mais  combien 
d'instrumentistes,  en  tous  genres,  consciencieux, 
sinon  tous  virtuoses,  sont  sortis  de  ces  nouvelles 
écoles!  D'ailleurs,  le  Conservatoire  est  un  lieu  bien 
connu  des  fils  de  Braille  et  d'HAuv  :  de  1850  à  1903, 
30  aveugles  ont  passé  par  les  classes  du  Conserva- 
toire, et  2t  ont  été  couronnés.  Les  classes  d'har- 
monie, de  fugue,  d'orgue,  sont  particulièrement 
suivies  par  les  étudiants  aveugles.  A  la  classe  d'or- 
gue seulement,  depuis  1886,  alors  qu'un  aveugle, 
actuellement  organiste  à  Saint-François-Xavier, 
M.  Adolphe  M\rty,  ouvrit  le  feu,  huit  anciens  élè- 
ves de  l'Institution  nationale  concoururent;  sur 
ces  huit,  quatre  quittèrent  la  classe  avec  le  Ie''  prix, 
M.  Marty  en  tète,  et  deux  avec  le  l,r  accessit.  Une 
femme  aveugle,  MH«  Joséphine  Boulay,  professeur  à 
l'Institution  nationale,  est  trois  fois  lauréat  :  Ie'  prix 
d'orgue,  1"  prix  de  fugue,  et  2e  prix  d'harmonie. 
Pour  l'exercice  1903-1904,  deux  aveugles  sont  admis 
à  In  classe  d'orgue,  un  à  la  classe  d'harmonie  et  un 
à  la  classe  de  fugue. 

Mais  en  dehors  de  ceux-là,  combien  d'autres, 
honnêtes  musiciens,  trouvent  dans  leur  art,  en  même 
temps  que  le  meilleur  de  leurs  joies,  un  utile  emploi 
de    leur  vie!    Plusieurs    centaines   de  paroisses,   à 


Paris   et 


en   province,    sont  pourvues   d'organistes 


aveugles;  ils  sont  appréciés,  recherchés  par  les 
familles,  par  les  pensionnats,  pour  l'éducation  musi- 
cale de  la  jeunesse;  et  qu'ils  abordent  les  hautes 
études  ou  qu'ils  gagnent  modestement  leur  vie,  dans 
tous  les  détails  rie  leur  carrière,  cette  musicographie 
pointée  leur  donne  son  concours  indispensable,  et 
toujours  efficace,  résolvant  toujours  d'une  manière 
pratique  les  difficultés  qui  proviennent  de  leurcécité. 
La  notation  Braille  est  donc  plus  qu'une  intéres- 
sante nouveauté,  c'est  un  bienfait  pour  toute  une 
classe  d'êtres  longtemps  délaissés,  aujourd'hui  éman- 
cipés, qui  ont  pris  rang  dans  le  monde  intellectuel 
et  artistique,  dans  le  monde  des  laborieux  et  des 
vaillants. 

Albert  MAHAL'T. 


3840  ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Table  générale  des  signes. 


OCTAVES  LE 
L'ÉCHELLE 
MUSICALE 


•  •  •                    ••  ••  •  •  •  P°u    f 

•  •                •  ••  ••  •  •  •               L 

•  •                   •  •  •  •  •  '            - 

••  •                                     ••  ••  •  •  •  0   ,,V        0 

•  •          •  ••  ••  •  •  •  r      u 

•  •            •            •            •  •  •  |       g 


SILENCES   ET 
ALTÉRATIONS 


*f    .    *f      rf  yf  i|  >     ■  «  Il 

••  •  *  ••  •  •  ••  •     < 

•  •  • 

•  ••  ••  ••  •  •  •  •< 

ade  3c6  vte  5U  àU  7me  8ve  | 


DOIGTERS 

paroles       d 

TRÉMOLO  .•     ffff 


SIGNES 
DIVERS 


•        ••    •  •• 


•  •  •  < 


r 
•  •• 


•       •  • 


reprendre         sur  2m  a, 

î  mesures      reprendre  lin.  '* 

•  •  ••  ••  •••         •< 


Substitution 
•  •      •• 


n  : 

Marche  .  péri 

dant  la 

nesure 

•  •       • 

•  •  • 

•       • 

•                 • 

• 
•  •              • 

• 
• 
•  • 

• 
•           • 

un 

lm. 

Zm? 

10  m 

NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE  EN  FRANCE' 


Par  Arthur  POUGIN 


Quoique  le  premier  essai  d'une  publication  pério- 
dique relative  à  la  musique  remonte,  en  France,  à 
plus  d'un  siècle  et  demi  (1756),  comme  on  le  verra 
plus  loin,  la  presse  musicale  n'existe  réellement  chez 
nous  que  depuis  1827,  c'est-à-dire  depuis  l'appari- 
tion de  la  Revue  musicale  fondée  par  Fétis.  Mais  ce 
n'est  pas  à  dire  que,  dès  le  xvne  siècle,  les  questions 
musicales  ne  trouvent  pas  d'écho  dans  nos  premiers 
périodiques,  la  Gazelle  de  Itenaudot,  à  partir  de 
1631,  celle  de  Loret  à  partir  de  1650,  et  le  Mercure 
(jalant  à  partir  de  1672.  Nous  voyons,  en  elFet,  la 
Gazette  de  Henaudot  enregistrer,  en  1645,  les  impres- 
sions produites  par  les  représentations  en  musique 
données  à  Paris  sous  l'action  de  Mazarin;  elle  sou- 
ligne notamment  l'admiration  que  suscit.i  la  Finta 
Pazza  de  Strozzi.  Plus  tard,  en  "1647,  elle  consacre  à 
VOrfeo  de  Luigi  Rossi  d'intéressantes  et  pittoresques 
remarques,  tout  en  mettant  diplomatiquement  en 
balance  le  goût  français  et  le  goût  italien.  A  propos 
de  l'Ercole  amante  de  Cavalli  (1662),  la  Gazette  el  la 
Muze  historique  de  Loret  marquent  bien  la  persis- 
tance du  goût  français  pour  le  ballet  de  cour  tradi- 
tionnel, car  toutes  deux  tiennent  simplement  la  pièce 
de  Cavalli  pour  un  ballet  comportant  des  intermè- 
des dramatiques. 

Pendant  la  période  Lullyste,  nos  trois  périodiques 
publient  des  articles  sur  les  œuvres  du  Florentin. 
.Nous  citerons  en  particulier  les  «  conversations  sur 
l'opéra  »  insérées  dans  le  Mercure  de  1073.  La  presse 
ne  manque  pas  non  plus  de  signaler  les  réunions 
musicales  de  tout  ordre  qui  ont  lieu  durant  la  se- 
conde moitié  du  xvue  siècle,  et  qui  vont  se  multiplier 
au  début  du  xvnie.  C'est  ainsi  qu'en  mai  1688.  le  Mer- 
cure déclarait  que  rien  n'était  plus  à  la  mode  que  la 
musique,  alors  qu'il  écrivait,  en  novembre  1713,  qu'à 
Paris,  sonates  et  cantates,  naissaient  sous  les  pas.  A 
telles  enseignes  qu'on  peut  dire  que,  si  la  France  ne 
possède  pas,  avant  1756,  de  presse  musicale,  au  sens 
strict  de  presse  spécialisée,  toute  la  presse,  de  par  le 
large  accueil  qu'elle  ménage  aux  choses  de  la  mu- 
sique, peut  être  tenue  pour  une  presse  musicalisée. 
Depuis  l'institution  du  Concert  spirituel  (1725),  le 
Mercure  fait  paraître  régulièrement  des  comptes 
rendus  des  séances  de  ce  concert,  comptes  rendus 
qui  constituent  une  source  précieuse  d'informations. 
Officiel  et  conciliant,  selon  l'heureuse  expression  de 
M.  Paul-Marie  Masson,  il  note  par  le  détail  les  im- 
pressions ressenties  par  les  auditeurs,  notation  d'au- 
tant plus  intéressante  qu'au  xvuie  siècle,  il  y  a  cons- 
tamment échange  de  vues  entre   les  auteurs  et  le 


t.  Cel  article  a  été  révisé 
DÙ9  prions  de  vouloir  bien 


public,  les  premiers  se  préoccupant  avant  tout  de 
donner  satisfaction  au  goût  du  second-.  En  outre,  le 
Mercure  présente  une  copieuse  rubrique  Spectacles, 
ainsi  que  des  annonces  de  publications  musicales 
qui  permettent  de  préciser  les  dates  d'apparition 
de  celles-ci.  Enfin  et  surtout,  il  enregistre  les  tumul- 
tueuses querelles  musicales  que  le  siècle  vit  naître, 
ainsi  que  les  innombrables  polémiques,  si  riches  en 
indications  sur  le  goût  national  et  auxquelles  prend 
part  toute  la  société  française,  tant  est  grand  son 
engouement  pour  la  musique.  C'est,  à  partir  de  1733, 
la  lutte  entre  Lullysles  et  lîamistes,  lutte  assez 
complexe  qui  résulte  de  facteurs  multiples  :  opposi- 
tion du  goût  français  et  du  goût  italien,  caractère 
populaire  de  la  musique  de  Iai.i.y  en  présence  du 
faciès  aristocratique  de  l'art  de  Rameau,  résistance 
du  goût  français  à  la  musique  pure  qui,  pourtant, 
se  développe  rapidement  dans  le  premier  tiers  du 
xvine  siècle. 

Rameau,  comme  plus  tard  Gluck,  a  écrit  à  plusieurs 
reprises  dans  le  Mercure,  lequel  rapporte  soigneuse- 
ment les  apparitions  successives  des  Boudons  de 
1729  à  1752,  et  expose  les  divers  aspects  de  la  guerre 
qu'ils  provoquèrent.  De  même,  lorsque  Gluck  vient 
en  France,  les  polémiques  esthétiques  que  déclan- 
chent  ses  œuvres,  et  la  querelle  des  Gluckistes  et 
des  Piccinnisles  emplissent  le  Mercure. 

11  convient  de  signaler  aussi  les  Affiche.-:  de  Paris 
ii  partir  de  1745,  puis  les  Annonces,  affiches  et  av-is 
divers  el  l'Avant-Coureur,  qui  ouvrent  leurs  colonnes 
aux  comptes  rendus  musicaux  ainsi  qu'aux  publica- 
tions de  compositions  musicales. 

Lorsque  Fétis  entreprit  la  publication  de  sa  Revue 
musicale,  qui  n'était  point  parfaite  sans  doute,  mais 
qui  était  singulièrement  intéressante  et  remarqua- 
blement variée,  grâce  aux  vastes  connaissances  de 
son  directeur,  l'Allemagne  nous  avait  montré  la  voie 
depuis  un  siècle,  et  se  trouvait  en  possession  d'une 
presse  spéciale  qui  rendait  les  plus  grands  services, 
en  répandant  dans  le  public  non  une  instruction 
technique  qui  ne  peut  être  utile  qu'aux  artistes,  aux 
professionnels,  mais  une  somme  de  principes  géné- 
raux qui  lui  permettent  d'asseoir  ses  jugements  sur 
une  base  solide,  de  les  formuler  d'une  façon  raison- 
née  et  en  connaissance  de  cause.  Cet  ensemble  de 
principes  bien  compris  n'enlève  rien  au  tempéra- 
ment individuel,  n'empêche  point  que,  selon  le  goût 
de  chacun,  telle  manifestation  artistique  plaise  ou 
déplaise,  mais  il  donne  la  faculté  d'analyser  les  sen- 
salions,  les  impressions  reçues,  et  de  dire  pourquoi, 
en  ell'el,  telle  œuvre  ou  tel  artiste  touche  notre  sén- 


ats. [N.  D.  L.  D.] 
Copyrigth  by  Librairie  Dela^rave,  1930. 


i;,£*7ui<a'  J'ene  fiistutrr  du  goût  musiral  en  France 
>sidc!e,  1012,  p.  ls. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


timent  de  telle  et  telle  façon  et  provoque  en  nous  le 
plaisir  ou  le  déplaisir,  justifie  notre  blâme  ou  légi- 
time noire  enthousiasme.  C'est  là  le  rôle  de  la  presse 
musicale,  et  il  est  assez  noble,  assez  élevé,  pour  que 
l'on  puisse  constater  sa  très  réelle  utilité. 

Le  premier  écrit  périodique  musical  publié  en 
Allemagne  fut  la  Critiea  Musicu,  que  Mattheson,  déjà 
fameux  alors  non  seulement  par  ses  œuvres  et  par 
ses  écrits,  mais  par  son  duel  avec  Haendel,  fit  pa- 
raître à  Hambourg,  en  1722.  C'est  aussi  à  Hambourg 
que  le  compositeur  Scheibe,  futur  maîlre  de  cha- 
pelle du  roi  de  Danemark,  donna  pendant  quelques 
années  (1737-1740)  son  Critischer  Musicus,  «  le  Mu- 
sicien critique  »,  lequel  fut  assez  vivement  pris  à 
partie  par  le  théoricien  Laurenl  Mi  tzi.eh,  qui,  de  son 
côté,  publiait  à  Leipzig  un  périodique  intitulé  Musi- 
kaiische Bibliothek,  «  Bibliothèque  musicale  »  (1736- 
1734),  et  un  autre,  auquel  il  donna  le  titre  singulier 
de  Musikalischer  Staarstecher,  <•  l'Oculiste  musical  » 
(1740).  Dans  le  même  temps,  paraissait  à  Brunswick 
un  journal  anonyme,  Der  Musikaiische  Patriot,  «  le 
Musicien  patriote  »  (1741-1742).  On  vit  ensuite  le 
célèbre  théoricien  Maritrg  publier  successivement  à 
Berlin  Der  Critischer  Musicus  an  der  Spree,«  le  Musi- 
cien critique  de  la  Sprée  »  (1750),  Historich  Kritische 
Beitriige  zur  Aufnahme  der  Musik,  «  Essais  historico- 
critiques  sur  les  progrès  de  la  musique  »  (1754-4778), 
el  Kritùehe  Briefe  ûber  die  Tonkunst,  «  Lettres  cri- 
tiques sur  la  musique  »  (1759-1764).  Puis,  ce  fut  le 
compositeur  et  musicographe  Jean-Adam  Hilleu, 
qui  donna  à  Leipzig  ses  Wœchenlliehe  Nuchrichten 
und  Anmerkungen  die  Musik  belreffend,  «  Notices 
hebdomadaires  et  observations  concernant  la  mu- 
sique »  (1766-1770),  que  l'on  considère  comme  la 
première  véritable  revue  musicale  ;  le  fameux  abbé 
Vogler,  le  futur  maître  de  Carl-Maria  de  Weber  et 
de  Mevi.rbeer,  qui  publia  ses  Betrachlungen  der 
Mannheimer  Tonschule,  ■<  Journal  de  l'Ecole  de  mu- 
sique de  Mannheim  »  (1778-1781);  l'historien  Forkel, 
qui  fit  paraître  sa  Musikalisch-K.ritische  Bibliothek 
(1778-1779),  et  le  célèbre  critique  Reichardt,  à  qui 
l'on  doit  non  seulement  le  Musikalisches  Kunstmatja- 
zin,  «  Magasin  de  l'art  musical  »  (1782-1791),  mais 
tussi  le  Musikalisches  Wochenblatt,  «  Feuille  hebdo- 
madaire de  musique  »  (1792),  el  la  Berlinisohe  Musi- 
kaiische Zeitung,  ^Gazette  musicale  de  Berlin  »  (1805- 
1806).  A  signaler  ensuite  le  Magazin  der  Musik  de 
Cramer  (Hambourg,  1783-1786);  la  Musikaiische  Real- 
zeitung,  «  Gazette  musicale»  de  Bossler  (Spire,  1788- 
1790),  et  la  Musikaiische  Correspondent  (1791-1792), 
du  même;  la  Berlinische  Musikaiische  Zeitung,  de 
Spazier  (1793);  le  Journal  der  Tonkunst,  «  Journal  de 
musique  »  de  Koch  (1795);  et  enfin  la  célèbre  Allge- 


1.   fille  n'en  eut  pas  motus  [..irl'ois  des  reproches  à  se  faire,  particu- 
lièrement en  ce  qui  concerne  l'opinion  exprimée  sur  quelques  iruvres 

de  Bi m  n.  C'est  ainsi  qu'en  1805,  la  Gazette  analysait  en  ces  termes 

l'admirable  Sonate  à  Kreutser  :  «  Il  faut  cire  saisi  .l'une  sorte  de 
terrorisme  musical  ou  entiché  de  Bkithoven  jusqu'à  l'aveuglement  pour 
ne  pas  voir  ici  la  preuve  que,  depuis  quelque  temps,  le  caprice  de  BEk- 
rHnvKsest,  a  vint  toutes  choses,  d'être  .mire  que  les  autres  gens.  Cette 
sonate  est  écrile  pour  deux  virtuoses  qui  ne  rencontrent  plus  de  dif- 
ficultés, el  qui  on  même  temps  possèdent  assez  d'esprit  et  de  savoir 
musical  pour,  en  \  joignant  l'exercice,  pvai'otr  au  besoin  composer  Las 
riiéoir*  irm-rrs.  lin  firesto  plein  d'cfl'et,  un  audai<te  original  et  beau 
■  vec  des  variations  on  ne  peut  plus  bizarres,  puis  encore  un'presto, 
la  composition  la  plus  étrange,  qui  doit  être  exécutée  dans  un  moment 

....  l'on  veut  goûter  de  t te  qu'il  y  a  de  plus  grotesque.  »  L'année 

suivante,  ayant  ;i  parler  de  Fnlelio,  la  Gazette  ne  craignait  pas  de 
.lire  : Le  tour  ne  brille  ni  par  l'invention  ni  par  le  style.  L'ouver- 
ture se  compose  d  un  long  toi  agio  qui  s'égare  dans  tous  les  tons,  auquel 
succède  un  allegro  en  ut,  qui  n'a  rien  de  bien  remarquable  et  qui,  par 
exemple,  ne  soutien!  pas  la  comparaison  a\ec  l'ouverture  du  ballet  de 


meine  Musikaiische  Zeitung,  <■  Gazette  générale  de  la 
musique  »  publiée  à  Leipzig  par  la  puissante  maison 
Breitkopf  et  Hartel,  dirigée  d'abord  par  Hochlitz,. 
plus  tard  par  Finck,  à  qui  succéda  Selma  Bagge,  qui 
compta  au  nombre  de  ses  rédacteurs  Gottfried  We- 
ber, Ignace  Seyfried  et  le  fameux  humoriste  Hoff- 
mann, et  dont  l'existence  brillante  se  prolongea 
durant  tout  un  demi-Siècle,  depuis  le  3  octobre  1798 
jusqu'à  la  fin  de  184-8,  pour  être  reprise  un  peu  plus 
tard,  pendant  deux  années,  mais  sans  retrouver  son 
éclatante  notoriété.  On  peut  dire  de  la  Gazette  géné- 
rale île  ht  ntiisi'/iie  qu'elle  fut  certainement,  en  son 
temps  et  pour  sa  spécialité,  le  modèle  des  journaux 
allemands.  Sa  renommée  ne  fut  surpassée  par  au- 
cun autre  journal,  el  l'intluence  énorme  qu'elle 
exerça  pendant  nombre  d'années,  tout  à  lit  l'ois  sur 
le  public  et  sur  les  artistes,  se  répandit  et  rayonna 
sur  tous  les  pays  de  langue  allemande1.  Et  j'allais 
oublier  l'excellent  recueil  intitulé  Cœcilia,  que  les 
frères  Schott  publièrent  à  Mayence,  à  partir  de  1821. 
el  qui,  dirigé  alors  par  Gottfried  Weber,  passa  en- 
suite, à  la  mort  de  celui-ci,  aux  mains  de  Dehn,  qui 
ne  le  laissa  pas  déchoir.  La  publication  de  Ca  ■';<  - 
poursuivit  jusqu'en  1848. 

Tel  était  l'état  de  la  presse  musicale  en  Allemagne- 
lorsque  Fétis  eut  l'idée  de  fonder  en  France  sa  Revue 
musicale.  L'entreprise  était  courageuse,  on  pourrait 
presque  dire  audacieuse,  en  présence  du  peu  de  suc- 
cès  obtenu  par  celles  qui  l'avaient  précédée.  Le  pre- 
mier essai  tenté  en  ce  sens  datait  déjà  de  soixante- 
dix  ans.  En  effet,  c'est  au  mois  de  mars  1756  que 
paraissait,  à  Paris,  le  premier  cahier  d'une  publica- 
tion dont  le  titre,  peut-être  un  peu  développé,  était 
du  moins  suffisamment  expressif  :  Sentiment  il'itu 
Imrmoniphile  sur  dif/'erens  "«r/u./et  de  luusiijite-.  Ce 
premier  numéro  formait  un  fascicule  de  84  pages 
in-12,  accompagné  de  trois  grandes  planches  de  mu- 
sique, avec,  en  téie,  l'épigraphe  célèbre  :  Amiens 
Sacrâtes,  et  amicus  Plato,  magis  atniea  oeritas.  Qui  était 
l'auteur,  ou  quels  étaient  les  auteurs  de  cette  publi- 
cation dont  l'existence  fut  si  courte,  malgré  le  réel 
intérêl  qu'elle  offrait, —car  ce  premier  numéro  ne  fut 
suivi  que  d'un  second,  et  le  recueil  en  resta  là'.'  Fétis 
a  cru  pouvoir  affirmer  que  l'abbé  Laigieu  était  le 
seul  rédacteur  du  Sentiment  d'un  harmoniphile,  tan- 
dis que  Quérard  cite  Leris  et  Morambert  au  nombre 
de  ses  collaborateurs.  J'ai  des  raisons  de  croire  que 
Quérard  est  dans  la  vérité,  et  je  supposerais  volon- 
tiers que  Laugier  et  Morambert  (et  peut-être  quelque 
autre  encore)  furent  les  vrais  auteurs  de  la  publica- 
tion, qui  était  sans  doute  dirigée  par  de  Léris. 
L'abbé  Laugier,  qui  était  né  à  Manosque  le  25  juil- 


l'ruatethee.  Les  morceaux  de  .1.  a  ni  n  ont  aucun  motif  neuf;  les  chœurs 
sonl  sans  effet,  et  celui  qui  indique  la  joie  des  prisonniers  en  respi- 
rant le  grand  air  est  évidemment  manqué.  >.  Plus  titrd  encore,  la  Ga- 
zelte  caractérisait  ainsi  le  beau  quatuor  en  011  \,  op.  74,  dédié  an 
prince  Lobkoxxil/  :  «  Plus  grave  que  gai,  plus  profond  et  plus  plein 
d'arl  qu'agréable  et  plaisant.  Il  n'est  pas  désirable  que  la  musique  ins 
Irntnentale  s'égare  dans  cette  manière.  Le  quatuor  n'a  pas  pour  objet 
de  célébrer  la  mort,  de  peindre  les  sentiments  du  désespoir,  tuais 
d'égarer  1  ame  par  un  jeu  doux  et  bienfaisant  de  l'imaginalion.  .. 

a.  Avec  la  rubrique  ordinaire  i  A  lizwterdam.  Et  se  trouve  à  Pa- 
ris, elie/  Jouberl,  imprimeur-libraire  du  lioi,  rue  Dauphine  ;  Uuchcsiic, 
eue  Saint-Jacques,  auprès  de  la  Fontaine  Saint-Benoit,  au  leinplcdu 
Goût;  Lambert,  rue  et  à  coté  de  la  t'.nnie.lio-l-'rançaisc,  el  aux  adresses. 
Ordinaires  pour  la  musique.  ••  —  Il  esl  a  peine  besoin  de  .lire  que  les 
deux   seuls   numéros  parus  du  Sentiment  d'un   Itarmoniphile   sont 

qourd'hui  rarissismes,  pour  ne  pas  dire  introuvables.  J'ai  la  chance 


pourtant  de  posséder  le  premier  dans  r 
maigre  toutes  mes  recherche 


i  nombreuse  l 


bliolhèque.mais, 
i  pu  parvenir  à  rencontrer 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    3843 


let  171:),  et  qui  mourut  le  8  avril  1769',  s'occupa 
toute  sa  vie  de  musique  avec  aclivité  et  d'une  façon 
sérieuse.  Lors  de  la  grande  querelle  des  Rouffons, 
ouverle  par  la  Lettre  sur  la  musique  française  de  Jean- 
Jacques  Rousseau,  il  prit  part  à  la  polémique  avec 
une  brochure  intitulée  Apologie  de  la  musique  fran- 
çaise eontre  M.  Rousseau,  qui  est  certainement  l'un 
des  écrits  les  plus  intéressants  de  la  série  et  l'une  des 
meilleures  réponses  qui  aient  été  faites  à  l'auteur  du 
Ih'iin  du  village.  L'abbé  Lchisot  de  Moramhert  était, 
lui,  musicien  de  profession.  Né  à  Paris  en  1721,  il 
s'y  fit  une  situation  comme  professeur  de  musique 
et  de  chant.  Quant  a  Antoine  de  Léris,  premierhuis- 
sier  de  la  Chambre  des  comptes  de  |Paris,  qui  était 
né  :i  Mont-Louis  (Houssillon)  le  21  février  1723,  et  qui 
mourut  à  Paris  en  179"»,  c'était  un  amateur  très  actif 
et  très  distingué  de  théâtre  et  de  musique,  à  qui 
l'on  doit  un  livre  excellent  en  son  genre,  le  Diction- 
naire portatif,  historique  et  littéraire  des  théâtres, 
dont  la  première  édition,  anonyme,  parut  en  1754, 
et  dont  la  seconde,  portant  son  nom,  fut  publiée  en 
1763,  avec  un  supplément  important2.  Ce  livre  est 
un  catalogue  analytique  bien  fait  de  toutes  les  pièces 
jouées  ou  seulement  imprimées  en  France,  depuis 
les  origines  du  théâtre,  donnant  la  date  précise  de 
leur  apparition,  avec  un  résumé  historique  de  ces 
origines,  une  chronologie  des  auteurs,  une  table 
chronologique  des  opéras,  et  un  dictionnaire  biogra- 
phique des  auteurs,  musiciens  et  acteurs. 

Ces  trois  hommes,  Lalt.ier,  Morambert  et  de 
Léris,  étaient  donc  bien  préparés  à  entreprendre  et 
à  soutenir  une  publication  comme  celle  qu'ils  entre- 
prenaient, et  qui  pourtant  succomba  sous  l'indiffé- 
rence du  public.  Dans  1'  «  avant-propos  »,  placé  en 
tête  du  premier  numéro  du  Sentiment  d'un  harmoni- 
phile,  le  rédacteur  s'exprime  en  ces  termes  : 

«  La  musique  est  de  toutes  les  sciences  celle  qui 
me  tlatte  le  plus.  Dès  ma  tendre  jeunesse,  j'ai  eu  pour 
elle  un  penchant  décidé,  et  je  préfère  aux  plaisirs 
les  plus  vifs  ceux  que  procure  l'harmonie. 

«  Comme  je  ne  me  suis  point  contenté  de  sçavoir  la 
musique  superficiellement,  mais  que  je  me  suis  tou. 
jours  appliqué  à  l'approfondir,  j'ai  beaucoup  réflé- 
chi non  seulement  sur  les  ouvrages  de  théorie  que 
j'ai  lus,  mais  encore  sur  tous  les  ouvrages  de  pure 
pratique  que  j'ai  entendu  exécuter,  et  j'ai  mis  par 
écrit  quantité  de  réllexions  qui  peuvent  avoir  leur 
utilité,  principalement  dans  ce  siècle,  où  la  musique 
est  devenue  tellement  à  la  mode  qu'il  n'y  a  presque 
point  de  maison  dont  elle  ne  fasse  un  des  principaux 
amusemens.  Elle  tient,  sans  contredit,  un  des  pre- 
miers rangs  dans  l'éducation,  et  comme  c'est  même 
une  espèce  de  honte  que  de  ne  la  point  sçavoir,  nous 
voyons  tous  les  jours,  à  l'exemple  de  Socrate,  qui 
l'apprit  à  soixante  ans,  plusieurs  personnes  d'un 
âge  avancé  ne  point  rougir  de  prendre  des  maîtres. 

«  ...  J'espère  que  personne  ne  se  formalisera  de  la 
liberté  que  je  prends  de  dire  nettement  ma  pensée 
sur  les  ouvrages  dont  je  parle.  J'avertis  les  auteurs 
de  musique  que  je  mets  bas  tout  esprit  de  parti,  et 
que  j'agirai  avec  cette  franchise  et  cette  intégrité  qui 
sont  le  caractère  de  l'honnête  homme.  Dans  les  mor- 
ceaux de  critique,  je  conserverai  toujours  les  égards 
que  l'on  doit  au  mérite  et  à  la  célébrité  des  auteurs, 
sans  sacrifier  ceux  qui  sont  dus  à  la  vérité  ». 


1.  C'est  la  date  que  donne  une  notice  eontempori 

crologe  des  hommes  célèbresde  Fronce,  tandis  que 
du  7  avril  1769.  1 


La  critique  du  Sentiment  d'un  hurmoniphile  est,  en 
ell'ei,  celle  d'un  écrivain  courtois  et  soucieux  de  la 
dignité  de  sa  plume,  en  même  temps  qu'elle  est  di- 
rigée par  le  goût  et  par  le  savoir.  Exempte  d'emphase 
et  de  pédantisme,  elle  se  fait  remarquer  par  la  jus- 
tesse des  appréciations.  Elle  montre  parfois  une  sé- 
vérité qui  peut  paraître  excessive,  mais  qui  est  basée 
sur  une  discussion  très  sérieuse. 

Le  premier  numéro  du  Sentiment  d'un  Imrmoni- 
p/iile  est  ainsi  composé  :  I.  Te  Deam  de  Philidor 
(dont  l'analyse  est  particulièrement  sévère);  II.  Te 
Deum  de  Calvière,  avec  des  «  Particularités  de  la  vie 
de  Calvière3  »  ;  III.  Service  de  Royf.r  (pour  l'anniver- 
saire de  sa  mort)  et  compte  rendu  de  la  Messe  de 
Cilles,  exécutée  à  cette  occasion  sous  la  direction  de 
Mohdon ville;  IV.  Analyse  de  l'Art*  du  chant,  de  Ré- 
rard;  V.  Réflexions  sur  l'opéra  de  Castor  et  Pollux  (de 
Hameau);  VI.  L'Europe  galante  (de  Campra,  à  propos 
d'une  récente  reprise  de  cet  ouvrage),  avec  des 
«  Particularités  de  la  vie  de  Campra  »  et  le  catalogue 
de  ses  œuvres;  VII.  Sur  l'opéra  (dissertation  sur  le 
genre  de  l'opéra);  VIII.  Concerts  (compte  rendu 
des  conceitsi;  IX.  Académie  de  musique  érigée  à 
Aix-en-Provence.  —  Les  quatre  feuillets  de  musique 
(fort  bien  gravée)  qui  se  trouvent  à  la  fin  du  numéro 
contiennent:  n°  1.  Epitaphe  de  Calvière,  à  trois 
voix,  paroles  et  musique  de  Morambert;  n°  ■>.  Air  : 
«  Tristes  apprêts,  pâles  ilambeaux  »,  de  Castor  et 
Pollux;  il-  :t.  Autre  fragment  du  même  ouvrage. 

A  propos  de  Castor  et  Polluai,  il  est  assez  curieux 
de  voir,  â  un  siècle  et  demi  de  distance,  l'auteur  faire 
aux  chœurs  de  l'Opéra  le  reproche  qu'on  leur  adresse 
encore  aujourd'hui,  ce  qui  prouve  que  l'écrivain  avait 
le  sens  vrai  de  l'illusion  théâtrale  et  de  ses  exigences. 
Le  morceau  est  intéressant,  datant  de  17j0,  et  mérite 
d'être  cité  : 

«  Il  serait  à  souhaiter  que  toutes  les  parties  d'un 
opéra  fussent  également  bien  rendues  et  concou- 
russent à  maintenir  l'illusion.  Si  celui  dont  nous 
parlons  [Castor)  a  reçu  tout  le  lustre  qu'il  pouvait 
attendre  du  jeu  de  M.  de  Chassé,  du  chant  de  M.  Jé- 
liotte  et  des  charmes  de  la  danse,  il  n'en  est  pas  de 
même  des  parties  qu'on  peut  appeller  l'ensemble  et 
l'illusion  du  théâtre.  Soit  défaut  d'intelligence  de  la 
part  de  la  troupe  oisive  qui  chante  les  chœurs,  soit 
défaut  de  soins  et  de  moyens  propres  à  l'encourager, 
delà  part  de  ceux  qui  sont  préposés  pour  la  conduire, 
il  est  constant  que  ce  concours  de  tiens  qui  ne  pren- 
nent aucun  intérêt  à  ce  qui  se  passe  refroidit  l'ac- 
tion, et  que  la  conduite  qu'il  tient  dans  bien  des  cas 
détruit  totalement  l'illusion. 

«  Ceux  qui  sont  chargés  de  disposer  tout  ce  qui 
est  nécessaire  à  l'effet  vraisemblable  du  théâtre  ont 
fait  une  faute,  dans  le  premier  acte  de  Castor,  de  ne 
pas  offrir  aux  spectateurs,  à  travers  un  portique,  le 
combat  qui  se  donne  aux  portes  du  palais.  La  mu- 
sique le  peint  si  parfaitement  â  l'oreille  qu'il  ne 
manque  que  de  l'offrir  aux  yeux,  et  cela  se  devroit 
d'autant  mieux  que  le  théâtre  semble  vuide,  quoique 
Télaïre  y  reste,  parce  que  cette  princesse  n'y  dit 
rien,  et  qu'elle  n'est  occupée  que  de  ce  qui  se  passe 
dehors. 

•«  Quant  à  l'illusion  que  détruit  le  défaut  d'action 
dans  les  chœurs,  il  est  sensible  dans  l'acte  des 
Enfers,  pendant  le  chœur  :  Brisons  tous  nos  fers.  II 


2.  Paris,  Jouberl,  1  vol.  in-12  de  plus  de  700  pages. 

3.  Ces  deui  Te  Deum  venaient  d'être  exécutés  pour  célébrer 
reuse  délivrance  de  la  Dauphine. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


faudrait  que  le  chœur  formât  des  Ilots  presque  con- 
tinuels de  gens  qui  poussent  et  qui  sont  repousses, 
et  que  leur  attitude  fût  celle  d'une  troupe  qui  s'op- 
pose de  toute  sa  force  à  l'entreprise  d'un  héros 
qu'elle  ne  peut  intimider,  et  non  pas  offrir  pour  dé- 
fendre l'entrée  des  Enfers  un  las  de  gens  inanimés 
qui  viennent,  les  deux  bras  croisés,  former  un  con- 
traste choquant  avec  la  pétulance  de  Pollux.  » 

On  voit  que  la  critique  de  1'  «  harmoniphile  «  était 
basée  sur  le  raisonnement  et  sur  le  vrai  sentiment  de 
l'art. 

La  seconde  livraison  du  recueil  ne  nous  est  con- 
nue que  par  une  analyse  qu'en  donna  Fbéron  dans 
V Année  littéraire  d'octobre  !7o6,  et  par  laquelle  nous 
apprenons  qu'elle  contenait  une  nouvelle  méthode 
de  chiffrer  la  basse  continue  pour  l'accompagnement 
au  clavecin.  La  publication  de  cette  méthode  amena 
même,  dans  le  Mercure  de  France,  une  polémique 
très  vive  entre  l'abbé  Houssier  et  Moramrert,  qui 
n'était  pas  moins  abbé  que  lui.  Houssier  affirmait 
que  ce  système  lui  appartenait  comme  ayant  été 
inventé  par  lui,  qu'il  l'avait  communiqué  à  Laugier 
(troisième  abbé),  que  celui-ci  devait  être  l'auteur  de 
l'article,  et  par  conséquent  coupable  d'un  effronté 
plagiat.  Morambert  répondit  que  Laugikr  n'y  était 
pour  rien  et  que  l'article  était  de  lui,  mais  Houssier 
n'en  voulut  pas  démordre,  et  cette  dispute  entre 
gens  d'église  sur  une  question  de  chiffres  finit  par 
n'avoir  point  de  conclusion. 

Malgré  tout  ce  bruit  fait  autour  de  lui,  les  jours 
étaient  comptés  du  pauvre  Sentiment  d'un  harmoni- 
phile, et,  en  dépit  de  ses  bonnes  intentions,  il  s'étei- 
gnit obscurément  et  prématurément,  avec  le  second 
numéro  de  son  âge.  Il  était  trop  en  avance  sur  son 
temps,  et  l'on  peut,  sans  le  flatter,  constater -qu'il 
méritait  un  meilleur  sort. 

Quelques  années  s'écoulèrent  avant  que  l'on  vit  se 
produire  une  nouvelle  tentative,  et  c'est  seulement 
au  mois  de  janvier  1770,  que  parut  le  premier  nu- 
méro du  Journal  de  musique  historique,  théorique  et 
pratique  sur  la  musique  ancienne  et  moderne,  les 
musiciens  et  les  instruments  de  musique,  publié 
sous  la  direction  de  M.  A***  de  B*".  Le  développement 
inusité  de  ce  titre  semblait  promettre  beaucoup  plus 
de  cboses  que  le  nouveau  recueil  n'en  devait  faire 
connaître.  Mais  avant  de  le  faire  connaître  lui-même, 
il  est  bon  de  remarquer  que  Fétis  s'est  trompé  assez 
gravement  au  sujet  de  ce  Journal,  dont  il  parle  inci- 
demment aux  noms  de  divers  personnages,  dans  la 
Biographie  universelle  des  musiciens,  notamment  à 
ceux  de  Mathon  de  la  Cour  et  de  Framicourt.  En 
parlant  de  Mathon  de  la  Cour,  il  avance  que  celui-ci 
«  a  travaillé  au  Journal  de  musique  publié  à  Paris 
depuis  le  mois  de  juillet  1764  jusqu'au  mois  d'août 
1768  »,  et  il  ajoute  que  «  ce  recueil  fut  ensuite  con- 
tinué par  Framicourt,  puis  par  Framery  ».  El  au  nom 
de  Framicourt,  il  dit  encore1  :  «  Dans  sa  jeunesse,  il 
avail  fait  un  voyage  à  Berlin  et  y  avait  connu  Mau- 
i'Urg,  qui  lui  avait  suggéré  l'idée  de  faire  paraître  en 
France  un  recueil  périodique  sur  la  musique;  Ma- 
thon de  la  Cour  en  publiait  un  à  des  époques  indé- 
terminées, depuis  1764.  Il  en  abandonna  la  rédaction 
au  mois  d'août  1768,  et  M.  de  Framicourt  fit  repa- 
raître ce  journal  en  1769.  Il  cessa  d'y  travailler  après 

1.  Framicouht,  amateur  de  musique  assez,  instruit,  parait-il,  était 
conseiller  au  prcsidial  d'Angers. 

'2.  tin  musicographe  belge  très  prolilïque,  l.dnu.ud  (in a  Gra- 
vement emboîté  le  pasde  f\ns  dans  des  llrrlirrchrs  /li.ifnriqucx  con- 
cernant les  journaux  de  musique  depuis  les  temps  les  /<'»>  reculés  (.'; 


le  numéro  d'avril  1771.  Framery  s'en  chargea  alors 
et  le  continua  jusqu'en  1778.  i 

Malgré  la  précision  et  l'abondance  des  détails,  il  y 
a  pas  mal  de  confusions  el  beaucoup  d'erreurs  dans 
ces  quelques  lignes,  dont  la  première  et  la  plus 
importante  est  celle-ci.  qu'il  ne  parut  aucun  Journal 
de  musique  en  1764,  et  que  c'est  en  1770  seulement 
qu'on  vit  naître  celui  dont  je  veux  ici  parler2.  Je 
crois  bien  qu'à  ce  moment,  Mathon  de  la  Cour  n'y 
élait  encore  pour  rien,  et  l'on  a  vu  qu'il  était  placé 
sous  la  direction  [d'un  sieur  A*"  de  B"\  Qu'était-ce 
que  ce  directeur  à  peu  près  anonyme?  A  cette  ques- 
tion, il  m'est  impossible  de  répondre.  Mais  ce  que  je 
puis  constater,  c'est  que  le  Journal  de  musique  n'of- 
frait vraiment  que  peu  d'intérêt,  et  que,  d'autre  pari, 
sa  publication  élait  un  peu  trop  capricieuse,  les  nu- 
méros paraissant  sans  aucune  régularité.  Pour  ces 
différentes  raisons,  le  succès  fut  si  médiocre  qu'a- 
près la  quatrième  livraison,  celle  du  mois  d'avril 
(chacune  était  de  80  pages  in-octavo),  le  Journal  allait 
disparaître,  lorsque  Framery  s'en  chargea  et  eu  prit 
la  direction.  Tout  jeune  encore,  puisqu'il  était  né  en 
174,'i,  Framery,  qui  cherchait  sans  doute  à  se  faire 
connaître,  élait  dans  de  bonnes  conditions  pour  diri- 
ger une  publication  de  ce  genre.  Auteur  et  composi- 
teur dramatique,  il  connaissait  son  sujet,  savait  ce 
dont  il  parlait,  et  pouvait  rendre  des  services.  De 
fait,  le  Journal  de  musique  devint,  sous  son  impul- 
sion, beaucoup  plus  intéressant,  et  la  rédaction  en 
fut  beaucoup  meilleure.  Framery  eut  même  une  idée 
assez  ingénieuse  :  n'ayant  point  à  sa  disposition,  pour 
faire  des  citalions  musicales,  de  caractères  propres 
de  musique,  il  imagina  de  se  servir  à  cet  effet  de  la 
notation  en  chiffres  de  J.-J.  Rousseau,  en  y  introdui- 
sant quelques  modifications  qu'il  expliquait.  Cepen- 
dant, malgré  ses  efforts,  il  ne  put  parvenir  à  se  créer 
un  public,  et,  découragé  sans  doute,  au  bout  d'une 
année,  il  cessa  la  publication3. 

Celle-ci  fut  reprise  en  1773  avec  le  même  privilège 
(on  sait  qu'à  cette  époque  il  fallait  un  privilège  pour 
toute  espèce  de  publication),  et  un  nouveau  recueil 
parut  sous  ce  titre  :  Journal  de  musique,  par  une  so- 
ciété d'amateurs.  Je  crois  bien  que  c'est  alors  que, 
sous  le  couvert  de  cette  «  société  d'amateurs,  »  Ma- 
thon de  la  Cour  en  prit  la  direction.  File  ne  fut  heu- 
reuse ni  sous  le  rapport  de  la  rédaction,  ni  sous  le 
rapport  de  l'administration.  Le  journal  était  fait  un 
peu  à  la  diable,  sans  ordre,  sans  plan  arrêté,  sans 
aucune  espèce  d'idées  d'ensemble;  d'autre  part,  les 
numéros  paraissaient  quand  ils  pouvaient,  et  avec 
une  irrégularité  par  trop  fantaisiste.  Alors  qu'il  de- 
vait en  être  donné  douze  chaque  année,  il  n'en  parut 
que  six  pour  1773  et  un  seul  en  1774,  puis...  plus 
rien.  Après  un  long  intervalle,  la  publication  fut 
reprise  de  nouveau  en  1777,  mais  d'une  façon  tou- 
jours aussi  capricieuse,  si  bien  qu'à  des  intervalles 
indéterminés  il  parut  encore  cinq  numéros,  dont  le 
dernier  au  commencement  de  1778,  et  ce  fut  tout. 
Celle  fois,  le  Journal  de  musique  avait  vécu. 

Un  long  temps  s'écoula  avant  que  l'on  vît  se  pro- 
duire une  nouvelle  tentative,  et  ce  n'est  que  le 
37  avril  1802  que  parut  le  premier  numéro  d'un  jour- 
nal hebdomadaire  ainsi  intitulé  :  Vori'espondance  des 


jusqu'à  nos  jours,  brochure  ,1e  71  pages  (Anvers,  1872,  in-8»),  sur 
renseignements  de  laquelle  j'appelle  la  lilétianee  la  plus  complète. 
3.  La  première  période  de  l'existence  du  Journal  de  musique  ci 
prend  quatre  numéros,  de  janvier  à  avril  1770;  la  seconde,  sou! 
direction  de  FnAMSUY,  en  comprend  douje,  de  mai  1770  à  avril  17 
Au  total,  seize  numéros. 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    384 


amateurs  7nusicicns,  rédigée  par  le  citoyen  Cocatrix. 
N'ayant  pu  découvrir  sur  ledit  <■  citoyen  »  d'autres 
renseignements  que  ceux  donnés  à  son  sujet  par 
Fétis,  je  suis  obligé  de  me  borner  a  reproduire  la 
courte  notice  que  celui-ci  lui  a  consacrée  : 

o  Cocatrix  (...),  amateur  de  musique,  né  à  la  Ro- 
chelle vers  1770,  se  rendit  à  Paris  en  1797,  et  y  fut 
employé  dans  les  bureaux  de  la  marine,  puis  réformé 
en  1800.  Assez  bon  musicien,  il  s'était  lié  avec  le 
fournisseur  Armand  Séguin,  amateur  comme  lui, 
qui  lui  suggéra  le  dessein  d'écrire  un  journal  concer- 
nant la  musique.  Ce  journal  parut  en  1803,  sous  le 
titre  de  Correspondance  des  professeurs  et  amateurs  de 
musique,  rédigée  par  le  citoyen  Cocatrix.  11  en  parais- 
sait une  feuille  in-4°  chaque  semaine.  Celte  publica- 
tion ne  se  soutint  qu'environ  dix-huit  mois.  La  rédac- 
tion en  était  faible,  et  manquait  d'intérêt  et  de 
variété.  Le  rédacteur  n'avait  pas  d'ailleurs  le  savon 
nécessaire  pour  une  telle  entreprise,  et  ses  opinions 
étaient  entachées  de  beaucoup  de  préjugés  de  son 
temps.  Vers  la  fin  de  1804,  Cocatrix  s'est  éloigné  de 
Paris;  on  ignore  ce  qu'il  est  devenu  '.  » 

Cocatrix  ne  s'en  faisait  pas  accroire,  puisque,  sim- 
plement, il  se  qualifiait  lui-même  d'amateur.  Mais, 
quoi  qu'en  dise  Fétis,  cet  amateur  n'était  pas  dénué 
d'un  cerlain  sens  artistique,  et  son  journal  n'était 
pas  aussi  dépourvu  d'intérêt,  et  surtout  de  variété, 
que  l'affirme  son  biographe.  .Même,  si  l'on  veut  être 
informé  du  mouvement  musical  pendant  les  trois 
années  que  parut  la  Correspondance,  on  ne  sera  pas 
malavisé  d'y  avoir  recours.  Il  est  juste  de  recon- 
naitre  toutefois  qu'elle  est  beaucoup  plus  intéres- 
sante au  point  de  vue  des  faits  proprement  dits  qu'en 
ce  qui  concerne  la  critique.  De  celle-ci,  on  peut  dire 
qu'elle  était  à  peu  près  nulle,  par  suite  du  manque 
de  savoir  et  de  connaissances  justement  signalé  par 
Fétis  chez  ses  rédacteurs.  On  trouve  bien,  dans  la 
Correspondance,  un  cerlain  nombre  d'articles  signés 
du  nom  de  Cartier,  l'excellent  violoniste,  qui  y  don- 
nait de  temps  à  autre  des  notices  biographiques 
intéressantes  sur  des  violonistes  fameux,  et  aussi 
quelques  articles  du  compositeur  Cambini,  qui  ne 
manquaient  ni  de  fond  ni  de  solidité.  Mais  la  critique 
courante  n'existait  vraiment  pas,  en  dépit  de  cer- 
taines communications  burlesques  de  Woldemar,  le 
violoniste  toqué,  et  de  divers  articles  portant  pour 
signature  tel  ou  tel  pseudonyme  d'amateur.  Je  le 
répèle  pourtant,  la  colleclion  de  la  Correspondance 
est  loin  d'être  inutile  à  consulter,  et  l'on  y  peut 
trouver  profit.  En  réalité,  le  seul  dépouillement  des 
107  numéros,  qui  forment  la  collection  complète, 
otfre  un  très  vif  intérêt,  et  il  n'est  pas  un  travailleur 
sérieux  qui  n'y  puisse  trouver  d'utiles  et  précieux 
renseignements. 

La  Correspondance  des  amateurs  musiciens  existait 
encore  lorsqu'on  vit  paraître,  le  22  janvier  1804,  le 
premier  numéro  d'une  nouvelle  feuille  musicale,  le 
Journal  de  musique  et  des  théâtres  de  tous  les  pays, 
par  une  société  de  musiciens  et  de  gens  de  lettres  . 
Ici,  l'hésitation  serait  permise  jusqu'à  un  certain 
point  en  ce  qui  touche  la  personnalité  des  rédac- 
teurs de  ce  journal.    Il  me  semble   pourtant  que 


1.  Reclilions  quelques  erreurs  dans  ces  quelques  ligne».  D'abord, 
ce  n'esl  pas  en  1803,  mais,  comme  il  est  dit  plus  haut,  le  27  avril  1802, 
que  le  journal  fit  son  apparition.  Ensuite,  il  ne  vécut  pas  seulement 
dix-huit  mois,  mais  treis  années  pleines,  soit  jusqu'au  20  ayril  180a. 
Lniin,  il  ne  parut  pas  d'abord  in-4°,  mais  in-8B,  et  il  ne  prit  le  titre 
indiqué  que  précisément  lorsqu'il  changea  son  format  et  devint  bi- 
hebdomadaire; son  titre  primitif  Mail  celui  que  j'ai  reproduit  plus 
haut.  Au  reste,  voici  sa  hiblio^r.iptii  ■  c-cicfe  :  !'•  année  (du  27  avril 


celui-ci  ne  fait  qu'un  avec  celui  dont  Fétis  entreprit 
à  cette  époque  la  publication,  et  qu'il  signale  ainsi 
dans  sa  propre  jnotice  de  la  Biographie  universelle 
des  musiciens  :  «  Lié  d'amitié  avec  Roquefort  et 
Delaulnaye,  il  (Fétis)  conçut,  avec  ces  littérateurs 
musiciens,  le  projet  d'un  journal  de  musique  dont  il 
parut  quelques  feuilles  in-4°à  la  fin  de  l'année  1804; 
mais  la  littérature  et  la  critique  musicale  n'exci- 
taient alors  qu'un  médiocre  intérêt,  et  il  fallut 
renoncer  à  cette  entreprise.  «  Ht  dans  sa  notice  sur 
Roquefort,  il  dit  encore  :  «  Ln  1804,  nous  com- 
mençâmes ensemble  la  publication  d'un  journal  de 
musique,  dont  il  ne  parut  que  quelques  numéros.  » 
Selon  Fétis,  son  journal  parut  à  la  fin  de  1804, 
tandis  que  la  publication  de  celui  que  je  mentionne 
ici  est,  comme  on  l'a  vu,  du  commencement  de  cette 
année,  le  22  janvier;  mais  il  se  peut  très  bien  qu'à 
cinquante  ans  de  dislance,  et  pour  un  fait  auquel 
il  attachait  peu  d'importance,  il  se  soit  trompé  sur 
une  date  qu'il  donnait  d'ailleurs  sans  précision. 
D'autre  part,  si  l'on  prend  note  de  la  présence  au- 
près de  lui,  dans  son  Journal,  de  ses  amis  Roquefort 
et  Dblal'lnaye,  et  si  l'on  remarque,  dans  celui  dont 
je  parle,  un  article  signé  de  sa  propre  initiale  F..., 
un  autre  qui  porte  la  signature  de  Frotoquer,  qui 
forme  l'anagramme  du  nom  de  Uoquf.fort,  un  tra- 
vail anonyme  sur  la  Danse  armée  des  Grecs,  qui 
semble  bien  pouvoir  être  attribué  à  Delaulnaye,  le- 
quel s'occupait  beaucoup  de  la  saltation-,  on  sera 
sans  doute  amené  à  supposer,  comme  je  le  fais,  que 
le  Journal  de  musique  publié  par  une  société  de  mu- 
siciens et  de  gens  de  lettres  n'était  autre  que  celui 
de  Fétis,  Roquefort  et  Delaulnaye. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  Journal  de  musique,  j tl n s 
sérieux  sans  doute  que  la  Correspondance  des  ama- 
teurs musiciens,  était  aussi  moins  agréable,  et  sur- 
tout moins  varié.  Un  peu  lourd,  un  peu  épais,  tran- 
chons le  mol,  un  peu  pédant,  il  manquait  essenliel- 
lement  d'allure  et  de  mouvement,  se  désintéressait 
un  peu  trop  des  faits  d'actualité  et  était  loin  de  se 
conformer  au  précepte  antique  :  utile  dulci.  Ce  qui 
paraît  certain,  c'est  qu'il  trouva  peu  de  lecteurs, 
puisque  sa  publication  cessa  avec  le  huitième  nu- 
méro. Fétis  devait  prendre  sa  revanche  plus  tard. 

Quelques  années  s'écoulent,  et  il  faut  attendre  jus- 
qu'au mois  de  janvier  1810  pourvoir  paraître,  sous  ce 
titre  mythologique  et  quijpeint  bien  l'époque  :  les  Ta- 
blettes de  Polymnie,  un  nouvel  organe  musical.  Mais 
celui-ci,  qui  était  dirigé  par  le  chanteur  et  composi- 
teur, Alexis  de  Garaudé,  artiste  d'ailleurs  fort  dis- 
tingué, prenait  plutôt  l'allure  et  le  ton  d'un  pamphlet 
que  d'une  publication  impartiale  et  sérieuse.  Ga- 
raudé  n'était  certainement  pas  le  seul  rédacteur  des 
Tablettes  de  Polymnie,  qui  paraissaient  mensuelle- 
ment, sous  forme  de  revue,  et  l'on  ne  connaît  pas 
beaucoup  les  autres,  les  articles  ne  portant  généra- 
lement pas  de  signature.  On  sait  cependant  perti- 
nemment que  l'un  des  plus  actifs  était  le  composi- 
teur Cambini,  que  nous  avons  trouvé  déjà  dans  la 
Correspondance  de  Cocatrix.  Musicien  italien,  depuis 
longtemps  fixé  en  France,  Camrini,  absolument  dé- 
pourvu du  génie  de  l'invention,  sinon  d'une  certaine 


fso2  au  3  décembre  1803),  53 
29  décembre  1804),  98  numéros; 
1805).  16  numéros. 

2.  Deuclnave  a  publié  un  écrit  ainsi  intitulé  :  De  la  Saltation  théâ- 
trale ou  Recherches  sur  l'origine,  les  progrès  et  les  effets  de  ta  pan- 
tomime chez  les  ancien*,  écrit  qui  fut  couronné  par  Y  Académie  des 
inscriptions  (1790). 


ENCYCLOPEDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DiCTlUNiVAlHE  OU  CUNSEttlATUlHE 


habileté  de  forme,  élait  doué  d'une  fâcheuse  facilité 
d'écrire.  Cette  facilité  lui  avait  permis  d'écrire 
soixante  symphonies,  cent  quarante-quatre  quatuors 
pour  instruments  à  cordes,  un  nombre  invraisem- 
blable d'autres  compositions  de  divers  genres,  et 
enfin,  avec  quelques  oratorios  exécutés  au  Concert 
spirituel,  une  douzaine  d'opéras  et  de  ballets  repré- 
sentés tant  à  la  Comédie-Italienne  qu'au  théâtre 
l.ouvois  et  au  petit  théâtre  des  Beaujolais.  Malheu- 
reusement, cette  immense  quantité  d'ouvrages  n'avait 
obtenu  qu'un  succès  négatif;  et  Cambini,  de  sa  na- 
ture envieux  et  jaloux,  en  avait  conçu  une  vive  irri- 
tation contre  les  artistes  mieux  doués  et  plus  heu- 
reux que  lui  vis-à-vis  du  public.  Il  crut  trouver  le 
moyen  de  s'en  venger  lorsque  Garaudé,  qui  eut  le 
tort  de  le  laisser  faire,  lui  eut  confié  une  part  de 
rédaction  dans  son  journal,  et  il  ne  songea  qu'à 
déverser  sa  bile  sur  des  œuvres  et  des  artistes  qu'en- 
touraient le  respect  et  l'admiration  de  tous.  On  peut 
croire^  an  surplus,  qu'il  n'était  pas  le  seul  dans  cet 
état  d'esprit,  car  la  critique  des  Tablettes  de  Polymnie 
se  faisait  remarquer  non  seulement  par  sa  flagrante 
injustice,  mais  par  son  pédantisme,  et  surtout  par 
un  ton  acerbe  exclusif  de  toute  espèce  de  courtoisie. 
Parmi  les  artistes  en  vue,  les  Tablettes  s'achar- 
naient particulièrement  contre  Spontini,  et  plus 
encore  contre  Méhul.  Si,  en  parlant  de  SpoNTinr,  elles 
n'hésitaient  pas  à  dire  que  la  Vestale  u  était  irnpu- 
remenl  écrite  et  que  l'examen  de  la  partition  faisait 
de  la  peine  »,  il  faut  voir  de  quelle  façon  elles  trai- 
taient l'admirable  artiste  qu'était  Méhul,  et  comment, 
elles  appréciaient  le  plus  accompli  de  ses  chefs- 
d'œuvre,  Joseph.  Dans  le  numéro  de  juillet  1810,  les 
Tablettes  donnaient  précisément  une  analyse  de  cette 
partition  de  Joseph  qui  est  un  acte  de  la  plus  insigne 
mauvaise  foi  et  qui  aurait  dû  faire  rougir  son  au- 
teur. On  ne  saurait  reproduire  ici  dans  son  entier 
cette  diatribe  vraiment  curieuse,  qne  l'on  attribua  à 
Cambini  et  qui  amena,  comme  on  va  le  voir,  la  pro- 
testation  indignée  d'un  noble  et  grand  artiste;  mais, 
comme  échantillon,  on  peut  faire  connaître  la  façon 
dont  l'écrivain  appréciait  le  délicieux'second  acte  du 
chef-d'œuvre  : 

«  Le  second  acte,  dit-il,  n'a  rien  de  bien  remar- 
quable; le  chant  des  couplets  de  Benjamin,  malgré 
le  manque  de  couleur  locale,  serait  passable  pour 
nos  oreilles  corrompues,  si  une  imitation  obstinée 
des  basses  qui  l'accompagnent  n'en  intervertissait  la 
mélodie  et  ne  la  couvrait  presque  entièrement;  mais 
le  moyen  de  ne  pas  paraître  savant!  Les  maîtres  ita- 
liens (les  orthodoxes,  j'entends)  se  seraient  contentés 
de  fondre  cette  partie  de  basses  dans  les  violons,  en 
les  faisant  jouer  très  doux,  et  auraient  mis  aux 
basses  des  notes  simples  :  le  chant  eût  alors  ressorti 
et  repris  sa  place,  et  rien  n'aurait  pu  nuire  à  son 
elfet;  car  ces  maîtres  ont  la  bonhomie  de  croire  que 
l'effel  ne  s'obtient  qu'en  laissant  la  mélodie  à  son 
aise. 

<  Le  réveil  de  Jacob,  fondu  dans  un  trio,  n'a  ni  la 
majesté,  ni  l'expression  qu'on  espérait  y  trouver;  un 
chant  commun,  une  recherche  servile  dans  le  choix 
des  intonations,  fatiguent  et  dépilent  l'auditeur,  et 
sans  les  dix  dernières  mesures  qui  terminent  ce  trio 
et  qui  ont  quelque  lueur  de  sensibilité,  il  serait  par- 
faitement ennuyeux.  Suit  un  trio  entre  Jacob  et 
Benjamin,  sans  caractère,  sans  couleur,  et  dont  la 
facture  est  même  très  médiocre;  puis  de  petits  bouts 
d'hymnes  qui  ne  sont  qu'un  placage  d'accords,  et  un 
final  dont  les  détails  ne  sont  dus  qu'au  poète,  et  qui 


finit  par  un  chu'ur  à  grand  bruit  :  voilà  ce  qui  cons- 
titue la  musique  du  second  acte.  » 

Tout  l'article,  très  long  et  très  développé,  élait 
écrit  sur  ce  ton.  Il  est  probable  qu'il  produisit  dans 
le  monde  artistique  une  sorte  de  scandale,  l'admira- 
tion étant  grande  pour  Mkhul  et  pour  ses  ouvrages. 
Ce  qui  est  certain,  c'est  qu'il  amena  un  résultat  que 
l'auteur  n'avait  sans  doule  pas  prévu.  Ce  résultat, 
ce  fut  une  rude  apostrophe  d'un  des  patriarches  de 
la  musique  française,  du  vieux  Gossec,  alors  âgé  de 
soixante-dix-sept  ans,  et  qui  était,  avec  Méhul  et 
Cherubini,  l'un  des  trois  inspecteurs  du  Conserva- 
toire. Indigné  de  la  petite  infamie  dont  le  journal 
se  rendait  coupable,  Gossec  ne  put  se  retenir  et  lui 
adressa  la  lettre  suivante,  écrite  de  la  bonne  encre, 
comme  on  peut  le  voir  : 

«  A  Messieurs  les  propriétaires  des  Tablettes 
de  Polymnie. 


«  Messieurs, 

«  Depuis  le  6  mai  dernier,  époque  de  mon  abonne- 
ment à  vos  Tablettes  de  Polymnie,  j'ai  reçu  trois  nu- 
méros de  cette  feuille  (mai,  juin  et  juillet).  Je  vous 
renvoie  ceux  de  mai  et  de  juin,  el  je  garde  celui  de 
juillet  comme  un  monument  curieux  d'injustice  ou 
d'impéritie,  ou  de  délire... 

«  Je  me  suis  inscrit  avec  plaisir  sur  la  liste  de  vos 
abonnés,  dans  l'espoir  de  ne  trouver  dans  ces  feuilles 
que  des  choses  instructives  dictées  par  la  justice  et 
l'impartialité.  Aujourd'hui,  j'y  rencontre  des  articles 
dilfamans,  dirigés  contre  des  ouvrages  admirés  de 
foule  l'Europe,  et  déprisés  ici  pas  quelques  miséra- 
bles pigmées  en  fait  de  musique;  des  articles,  dis-je, 
enfantés  sans  doule  par  l'ignorance,  ou  par  mi  esprit 
de  parti,  et  peut-être  par  un  motif  plus  puissant  que 
je  n'ose  interpréter. 

«  Je  vous  prie,  messieurs,  de  faire  disparaître  mon 
nom  de  la  liste  de  vos  abonnés,  et  de  vous  dispenser 
de  m'envoyer  vos  Tablette*,  que  je  ne  veux  plus  rece- 
voir. Disposez  en  faveur  de  quelque  malheureux,  ou 
comme  il  vous  plaira,  du  reste  de  l'argent  de  mon 
abonnement;  j'en  fais  absolument  l'abandon. 
«  Je  suis  votre  serviteur. 

«  Gossec. 
«  L'un  des  inspecteurs  du  Conservatoire.  » 

Malgré  tout,  et  en  dépit  de  la  façou  dont  on  y  en- 
tendait la  critique,  les  Tablettes  de  Polymnie  ne  sont 
pas  inutiles  à  consulter,  et  si  le  recueil  était  peu 
estimable  en  raison  de  l'inconvenance  de  sa  polé- 
mique et  de  son  véritable  manque  de  probité  artis- 
tique, il  reste  une  source  de  renseignements  qu'on 
aurait  peine  à  trouver  ailleurs.  Malheureusement, 
son  existence  fut  courte,  peut-être  à  cause  de  sa 
conduite,  qui  n'élait  pas  pour  lui  attirer  de  nom- 
breuses sympathies,  et  au  mois  d'octobre  1811,  il  se 
vit  obligé  de  cesser  sa  publication. 

On  ne  voit  guère  à  signaler  ensuite  qu'un  journal 
éphémère,  qui  parul  deux  fois  par  semaine  pendant 
les  trois  mois  de  juillet,  août  el  septembre  IN  lu,  sous 
le  litre  de  l'Indicateur  munirai  frcmçais  et  étranger,  et. 
sous  la  direction  d'un  amateur  de  musique  minime 
César  Gardeton.  Je  n'ai  pas  eu  sous  les  yeux  ce  jour- 
nal, dont,  sans  doute,  on  aurait  peine  aujourd'hui  à 
rencontrer  un  exemplaire;  mais  si  j'en  juge  par  les 
autres  publications  de  son  propriétaire,  il  devait  être 


TECII.\1{)UE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    3m 


fait  sans  plan,  sans  ordre  et  sans  méthode,  et  présen- 
ter un  médiocre  intérêl.  Gardeton  publia,  en  effet, 
deux  années  d'un  almanach  spécial  intitulé  Annales 
■le  hi  musique  (pour  1810  el  1820,  et  une  prétendue 
Bibliographie  musicale  de  la  France  (1822),  qui  sont 
bien  les  compilations  les  plus  maladroites  qu'on 
puisse  imaginer,  outre  qu'elles  fourmillent  des 
■erreurs  les  plus  grossières. 

Par  tout  ce  qui  précède,  on  peut  voir  ce  que  fut 
la  presse  musicale  en  France  pendant  plus  d'un 
demi-siècle,  c'est-à-dire  à  partir  de  la  première 
tentative  faite  en  1756  par  les  rédacteurs  du  Sentiment 
d'un  harmonipltile  :  elle  se  réduit  à  plusieurs  essais, 
les  uns  intéressants,  mais  insuffisants,  comme  le 
fournit de  musique  el  la  Corr,<  sj  ondancedes  amateurs 
musiciens,  d'autres  plus  sérieux  sans  doute  el  plus 
dignes  d'attention,  mais  entachés  d'un  vice  originel, 
comme  les  Tablettes  de  Volymnîe*  Les  défauts  des 
uns  et  des  autres,  joints  à  l'indifférence  complète 
dont  le  public  donnait  la  preuve  alors  à  l'égard  de 
l'étude  des  questions  musicales,  tirent  que  ces  essais 
demeurèrent  inutiles  et  ne  produisirent  pas  les 
résultats  qu'on  en  eut  pu  espérer.  Nous  approchons 
cependant  du  moment  où  un  artiste  instruit,  à  l'in- 
telligence vigoureuse,  joignant  a  une  ferme  volonté 
un  esprit  de  vulgarisation  remarquable,  allait  forcer 
ce  public  à  l'écouter  en  se  taisant  comprendre  de 
lui,  et  en  donnant  de  l'intérêt  à  des  discussions  que 
nul  encore  n'avait  su  lui  rendre  familières  et  profi- 
tables. Cet  homme,  resté  unique  en  son  genre  par 
la  généralité  de  ses  connaissances,  par  son  savoir 
immense,  par  l'habileté  avec  laquelle  il  savait 
mettre  ses  explications  à  la  portée  de  ceux-là  mêmes 
qui  n'étaient  point  des  professionnels,  et  communi- 
quer à  tous  l'amour  de  l'art  qu'il  chérissait,  c'était 
Fétis,  qui  allait  enfin,  avec  sa  Ueoue  musicule,  opé- 
rer en  France  une  sorte-  de  révolution,  fonder  en  ci- 
pays  la  véritable  presse  musicale,  et  par  son  exemple 
encourager  la  création  d'un  grand  nombre  de  publi- 
cations qui,  à  sa  suite,  ont  rendu  et  rendent  chaque 
jour  les  plus  grands  et  les  plus  signalés  services. 

Fétis  a  donné  lui-même,  dans  sa  notice  de  la  Bio- 
graphie universelle  des  musiciens,  des  détails  circons- 
tanciés, qu'il  n'est  pas  inutile  de  reproduire,  sur  la 
création  du  journal  fondé  par  lui  : 

«  Vers  la  iîn  de  1826,  engagé  dans  de  grands  tra- 
vaux de  différents  genres,  il  [Fétis]  conçut  un  projet 
que  plusieurs  de  ses  amis  condamnèrent  comme 
téméraire,  et  dont  ils  considérèrent  la  réalisation 
comme  impossible  :  ce  projet  était  celui  d'un  .jour- 
nal uniquement  consacré  à  la  musique.  Jamais 
publication  de  ce  genre  n'avait  pu  subsister  en 
France,  car  personne  (les  musiciens  pas  plus  que 
d'autres)  ne  lisait  ce  qui  concerne  la  musique,  et 
l'on  ne  croyait  pas  qu'il  fût  possible  de  former  une 
classe  ilt-  lecteurs  pour  un  écrit  spécialement  consa- 
cré à  cet  art.  Dans  le  premier  projet  de  Fétis,  Castil- 
Blaze  devait  s'associer  à  lui,  et  se  charger  de  rendre 
compte  des  représentations  d'opéras  et  des  concerts. 
Mais  des  engagements  antérieurs  ne  permirent  pas  à 
ce  critique  de  prendre  part  à  la  nouvelle  entreprise 
projetée,  el  Fétis  prit  dès  lors  la  résolution  de  faire 


1.  Je  a'ai  pas  parle,  et  pour  cause,  de  diverses  publications  qui 
pourraient  amener  une  confusion  et  qui  Iteurirent  surtout  à  l'époque 
de  la  Révolution,  telles  que  le  Journal  hebdomadaire  de  musique,  le 
Journal  d'Euterpe,  le  Journal  des  Troubadours,  etc.  Maigre  leurs 
titres,  ce  n'étaient  point  là  de  véritables  journaux,  mais  simplement 
des  publications  [n  Tindu|ue-  de  iiiiisn|iif  pin.-,  -oit  pour  le  chant,  s«it 
pour  la  liaipe,  le   piano,  la  guitare,  elc. 


seul  ce  journal,  convaincu  qu'il  y  aurait,  dans 
l'unité  de  doctrine  et  de  vues  d'un  tel  écrit,  avan- 
tage pour  le  public  et  pour  l'art.  C'est  contre  ce 
projet  gigantesque  que  s'élevèrent  les  amis  de  Fétis, 
persuadés  que  les  forces  d'un  seul  homme  ne  pour- 
raient y  suflire.  Cependant,  ils  ne  purent  ébranler  sa 
résolution,  et  la  Revue  musicale  parut,  pour  la  pre- 
mière fois,  au  commencement  du  mois  de  février 
1827-,  et  fut  continuée  sans  interruption  jusqu'à  la 
fin  de  la  huitième  année,  au  mois  de  novembre 
18353  A  l'exception  de  dix  ou  douze  articles,  Fétis 
rédigea  seul  les  cinq  premières  années,  dont  l'en- 
semble forme  environ  la  valeur  de  huit  mille  pages 
in-8°  ordinaire.  Pendant  les  trois  premières  années,  il 
donna  chaque  semaine  vingt-quatre  pages  d'impres- 
sion, d'un  caractère  petit  et  serré,  et  la  quatrième 
année,  trente-deux  pages  d'un  plus  grand  format. 
Pendant  ce  temps,  il  lui  fallut  assister  à  toutes  les 
représentations  d'opéras  nouveaux,  aux  reprises  des 
anciens,  aux  débuts  des  chanteurs,  aux  concerts  de 
toul  genre,  visiter  les  écoles  de  musique,  s'enquérit- 
des  nouveaux  systèmes  d'enseignement,  visiter  les 
ateliers  des  facteurs  d'instruments  pour  rendre 
compte  des  nouvelles  inventions  ou  des  perfection- 
nements, analyser  ce  qui  paraissait  de  plus  impor- 
tant  dans   la    musique    ivelte,    lire  ce  qui   était 

publié,  en  France  ou  dans  les  pays  étrangers,  sur  la 
théorie,  la  didactique  ou  l'histoire  de  la  musique, 
prendre  connaissance  des  journaux  relatifs  à  ces  arts 
publiés  en  Allemagne,  en  [latte  et  en  Angleterre, 
et  même  consulter  un  grand  nombre  de  revues  scien- 
tifiques, pour  les  faits  négligés  par  ces  journaux,  et 
tout  cela,  sans  négliger  les  devoirs  de  professeur  de 
composition  au  Conservatoire,  el  sans  interrompre 
d'autres  travaux  sérieux...  Il  était  peut  être  impos- 
sible qu'au  milieu  de  tant  d'activité  et  dans  une 
rédaction  si  rapide,  il  ne  se  ulissùi  point  des  erreurs 
défaits,  et,  sans  doute,  on  peul  en  signaler  plusieurs  ; 
mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  souvent  les  articles 
étaient  improvisés  dans  l'imprimerie,  lorsque  la  copie 
manquait  pour  remplir  le  journal,  ou  lorsque  quel- 
que circonstance  obligeait  a  changer  inopinément, 
et  au  moment  de  mettre  sous  presse,  la  disposition 
primitivement  adoptée.  lh-s  négligences  de  style  se 
font  aussi  remarquer  dans  la  rédaction  de  la  Revue 
musicale;  les  mêmes  considérations  peuvent  peut- 
être  leur  servir  d'excuse...  Ce  journal  a  d'ailleurs 
produit  un  grand  bien  en  France  :  il  y  a  augmenté 
le  nombre  des  amateurs  de  musique,  a  échauffé 
leur  zèle,  fait  fonder  en  beaucoup  de  lieux  des  éco- 
les et  des  concerts  publics;  il  a  formé  des  lecteurs  à 
la  littérature  musicale  et  des  critiques  pour  les 
journaux;  l'érudition  en  musique  a  même  fait  tant 
de  progrès  parmi  les  Français,  depuis  la  publication 
de  la  Revue,  que  les  livres  qui  y  sont  relatifs,  et  qui 
étaient  autrefois  dédaignés,  se  vendent  maintenant 
à  des  prix  très  élevés.  » 

Nous  voyons,  par  ce  récit  de  Fétis,  dans  quelles 
conditions  il  se  trouvait  pour  fonder  sa  Revue  musi- 
cale, dont  il  ne  tarda  pas  à  réaliser  le  projet.  En 
lançant,  au  mois  de  janvier  1827,  le  numéro-pros- 
pectus du  nouveau  recueil,  il  s'exprimait  comme  on 
va  le  voir  dans  l'appel  qu'il  adressait  au  public  en 
tète  de  ce  numéro.  Il   ne  me  semble  pas  non  plus 


î.  Comme  on  le  verra  plus  loin,  le  nu 
e  janvier. 
?,.  Fétis  se  trompe  :  c'est  à  la  lin  ,1e 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MVSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


inutile  de  reproduire  en  entier  ce  morceau,  qui 
appartient  de  droit  à  l'histoire  de  la  presse  musi- 
cale1 : 

Utilité  d'un  journal  de  musique 
et  plan  de  celui-ci. 

«  Le  besoin  de  savoir  agite  le  monde  entier  :  la 
civilisation  s'avance  à  pas  de  géant  et  renverse  tout 
oe  qui  lui  est  opposé.  Parvenue  au  point  où  elle 
est,  elle  inspire  à  chacun  le  désir  d'être  instruit  de 
tout  ce  qui  le  touche  soit  dans  ses  droits,  ses  devoirs 
ou  ses  plaisirs.  Il  n'est  point  d'homme  bien  élevé 
qui,  de  nos  jours,  reste  volontairement  étranger  aux 
questions  qui  se  traitent  devant  lui.  Le  langage  des 
arts,  celui  des  sciences  même  deviennent  chaque 
jour  plus  populaires.  Le  temps  des  secrets  est  passé 
pour  toute  chose,  et  celui  qui  viendrait  aujourd'hui 
parler  des  mystères  de  son  art  se  ferait  siffler. 

«  Mais  par  cela  même  qu'on  veut  savoir  beaucoup, 
on  est  forcé  d'apprendre  vite.  Or,  rien  n'est  plus 
propre  à  communiquer  promptement  les  notions 
dont  on  a  besoin  dans  le  monde  que  les  journaux, 
soit  quotidiens,  soit  périodiques.  A  mesure  qu'on 
avance  dans  la  civilisation,  les  besoins  se  spéciali- 
sent et  demandent  de  nouveau  organes.  Les  feuilles 
politiques,  destinées  à  éclairer  la  société  sur  ses 
intérêts  les  plus  chers,  ne  peuvent  accorder  que  peu 
d'espace  à  des  objets  qui  ne  sont  pour  elles  que  se- 
condaires, tels  que  les  découvertes  et  les  inventions 
qui  se  font  chaque  jour  dans  les  sciences,  les  arts  et 
l'industrie.  Leurs  rapides  revues,  leurs  analyses 
légères  ne  peuvent  donc  être  considérées  que  comme 
une  sorte  d'invitation  d'examiner  les  faits  qu'elles 
énoncent  ou  les  opinions  qu'elles  émettent.  De  là, 
l'utilité  des  journaux  littéraires,  scientifiques,  de 
théâtre  et  autres,  qui  se  subdivisent  encore  en  une 
foule  d'objets  particuliers.  Quoique  moins  avancée 
sous  ce  rapport  que  d'autres  pays  voisins,  la  France 
possède  cependant  un  nombre  considérable  d'écrits 
périodiques  en  tous  genres  ;  la  musique  seule,  moins 
favorisée  que  les  autres  productions  du  génie  de 
l'homme,  n'y  a  point  eu  jusqu'ici  d'organe  qui  ne 
parlât  que  son  langage,  tandis  que  l'Allemagne  pos- 
sède cinq  journaux  ou  revues  sur  cet  objet,  l'Angle- 
terre quatre,  et  plusieurs  autres  pays  du  Nord  au 
moins  un. 

«  J'ai  dit  que  la  France  n'a  point  eu  jusqu'à  ce 
moment  de  journal  consacré  à  la  musique  :  cela 
n'est  point  exact.  En  1770,  Fraueuy  essaya  d'en  éta- 
blir un  qui  paraissait  une  fois  par  mois,  mais  qui 
n'eut  qu'une  courte  existence11.  L'année  1802  vit 
éclore  une  Correspondance  des  amateurs,  et  plus  tard, 
on  eut  les  Tableurs  de  l'olymnie.  Mais  le  temps 
n'était  pas  venu  pour  ces  sortes  de  publications  :  de 
pareils  écrits  ne  s'adressaient  alors  qu'aux  musi- 
ciens de  profession,  et  le  nombre  de  ceux  qui  s'in- 
téressaient aux  progrès  de  leur  art  n'était  point 
assez  considérable  pour  alimenter  un  journal  qui 
leur  fût  spécialement  destiné. 

.  La  position  est  changée  :  ce  qui  le  prouve,  ce 
sout  les  demandes  qui  nous  sont  adressées  de  toutes 


l.  Voici  le  litre  roraplct  de  ce  numéro  -pc.  imen  :  Revue  m 
cale,  rédigée  par  une  société  de  musiciens,  compositeurs,  artist 
théoriciens,  et  publiée  par  .tf.  Féti$,  professeur  de  composait 
ffcole  royale  de  musique  et  bibliothmirc  de  cet  établissement. 

i.  Nous  avons  vu  plu»  tiaul  que  ce   n'est  pas  Framer»  qui  U 


JOU1 


,1,1. 


*tait  agonisant. 


parts,  et  auxquelles  nous  ne  faisons  que  céder  en 
jetant  cet  écrit  dans  la  circulation.  Nous  ne  ferons 
point  de  promesses,  point  de  pompeux  prospectus. 
Nous  ne  vanterons  point  d'avance  notre  impartia- 
lité, notre  zèle,  notre  conscience  ;  à  quoi  tout  cela 
servirait-il?  On  verra  bien.  A  l'égard  de  notre  plan, 
le  voici. 

«  Nous  examinerons  toutes  les  questions  qui  se 
rattachent  à  la  musique,  sous  les  rapports  histori- 
ques, de  théorie  ou  de  pratique;  nous  analyserons 
les  ouvrages  nouveaux  relatifs  à  cet  art,  les  compo- 
sitions nouvelles  de  quelque  genre  que  ce  soit,  elles 
perfectionnements  de  méthode  qui  seront  publiés 
soit  en  France,  soit  dans  les  pays  étrangers.  Nous 
rendrons  compte  des  représentations  d'opéras  nou- 
veaux, des  concerts,  des  cours,  des  inventions  ou 
des  perfectionnements  d'instruments.  Nous  donne- 
rons des  notices  sur  les  artistes  les  plus  célèbres; 
enfin,  nous  annoncerons  toute  la  musique  aussitôt 
qu'elle  sera  publiée.  Il  nous  a  paru  qu'il  serait  utile 
de  joindre  à  des  analyses  des  exemples  notés  pour 
en  éclairer  le  sens,  et  nous  avons  pris  des  mesures 
pour  remplir  cet  objet  d'une  manière  satisfaisante. 
Nos  souscripteurs  recevront  chaque  trimestre  un 
portrait  lithographie  d'un  compositeur,  d'un  chan- 
teur ou  d'un  instrumentiste  célèbre. 

«  Le  succès  de  notre  journal  est  assuré  si  nous  lui 
donnons  le  degré  d'intérêt  dont  il  est  susceptible; 
sinon  ce  ne  sera  pas  la  faute  du  public,  et  nous  ne 
nous  plaindrons  pas.  Nous  montrons  dans  ce  pros- 
pectus et  spécimen  ce  que  nous  voulons  faire;  mais 
comme  il  est  dans  la  nature  des  choses  qu'on  s'ins- 
truit par  l'expérience,  nous  espérons  faire  mieux  à 
mesure  que  nous  avancerons.  » 

Fétis,  qui  n'était  pas  la  modestie  en  personne, 
s'exprimait  pourtant  ici  avec  une  réserve  et  une 
retenue  parfaites.  Lorsqu'il  fonda  la  Revue  musicale. 
il  avait  quarante-cinq  ans,  c'est-à-dire  qu'il  était 
dans  toute  la  force  et  la  vigueur  de  l'âge.  Il  avait 
bien  réfléchi  à  son  entreprise,  s'était  rendu  compte 
des  défauts  de  celles  qui  l'avaient  précédée,  de 
manière  à  les  éviter,  et  l'on  peut  croire  qu'il  s'était 
soigneusement  outillé  pour  être  sûr  de  la  mener  à 
bien  et  grouper  toutes  les  chances  en  faveur  du 
succès.  Compositeur,  théoricien  et  professeur,  écri- 
vain déjà  exercé,  il  réunissait  d'ailleurs  toutes  les 
conditions  qui  semblaient  devoir  assurer  ce  succès. 
Il  ne  faisait,  comme  il  le  disait,  aucune  promesse, 
mais  il  comptait  sur  son  savoir,  sur  son  intelligence, 
sur  son  activité,  pour  tenir  celles  qu'il  s'était  faites 
à  lui-même,  et  il  eut  raison.  En  fait,  on  peut  dire 
que  du  premier  coup,  et  dans  les  conditions  où  se 
trouvaient  alors  tout  à  la  fois  la  presse  périodique 
et  la  musique,  il  lit  un  recueil  excellent.  Et  comme, 
on  peut  le  dire  aussi,  il  le  faisait  à  peu  près  à  lui 
seul,  et  que  ce  recueil  paraissait  toutes  les  semai- 
nes, sous  forme  de  revue,  par  cahiers  de  2't,  puis  de 
32  pages  in-8°,  il  est  presque  permis  de  qualifier  son 
entreprise  de  colossale,  d'autant  plus  que  l'homme 
qui  ne  craignait  pas  d'en  endosser  la  responsabilité 
avait  déjà  la  charge  d'une  classe  de  composition  au 
Conservatoire  et  de  la  direction  de  la  bibliothèque 
de  cette  institution.  En  réalité,  on  ne  saurait  lui 
savoir  trop  de  gré  de  son  courage,  de  son  effort, 
et  du  talent  qu'il  sut  déployer  en  cette  occurrence. 
Quant  à  l'immense  service  qu'alors  il  rendit  à  l'art,  il 
est  incontestable. 

Si  l'on  feuillette  la  première  année  de  la  Revue 
musicale,  on  est  vraiment  frappé  du  rôle  utile  et  du 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    3849 


caractère  sérieux  et  instructif  donnés  à  la  publica- 
tion, en  même  temps  que  de  la  variété  que  l'auteura 
su  y  introduire.  Etudes  historiques  sur  les  sujets  les 
plus  divers,  biographies  d'arlistes  célèbres,  traduc- 
tions intéressantes  de  journaux  étrangers,  discus- 
sions esthétiques,  tout  y  trouve  sa  place,  sans  négli- 
ger aucunement  l'actualité,  et  en  tenant  un  compte 
exact  et  complet  de  tout  ce  qui  touche  le  mouve- 
ment musical  contemporain. 

Au  point  de  vue  historique,  il  faut  signaler  une 
longue  étude  sur  l'Etat  actuel  de  la  musique  en  Italie, 
en  Allemagne,  en  Angleterre  et  en  France,  une  autre 
sur  les  Manuscrits  relatifs  à  la  musique  qui  se  trou- 
vent dans  les  principales  bibliothèques  de  l'Europe, 
d'autres  sur  l'Authenticité  du  Requiem  de  Mozart, 
sur  un  Manuscrit  du  treizième  siècle  de  Jérôme  de 
Moravie,  sur  la  Collection  manuscrite  d'ancienne 
musique  française  de  Michel  Danican-Philidor,  sur  les 
Journaux  de  musique  publiés  dans  les  divers  pays  de 
l'Europe;  puis,  des  articles  sur  le  Roi  des  violons,  les 
Révolutions  de  l'orchestre,  l'Expression  musicale,  1rs 
Instruments  nationaux,  la  Contrebasse  et  son  archet, 
l'Ancienne  Musique  des  Irlandais,  le  Récitatif,  les 
Chants  populaire  de  la  Grèce  moderne,  le  Diapason, 
le  Concerto,  le  Travail  de  Yillotcau  sur  la  musique  des 
peuples  orientaux,  le  Chant  et  les  chanteurs,  la  Solmi- 
sation  et  lesolfège,  l'Exécution  musicale,  un  Manuscrit 
autographe  de  Doni,  les  Derniers  Moments  el  la  moi  I  de 
Beethoven,  le  Métronome  de  Maelzel,  la  Harpe  ii  double 
mouvement  d'Erard,  etc.  On  voit  combien  tout  cela 
est  substantiel  et  intéressant ',  en  y  joignant  des 
notices  biographiques  sur  de  grands  artistes,  les 
compositeurs    Josquin    Desprès,    Gregorio    Allegki, 

VlADANA,  SCARLATTI,  ClMAROSA.  BEETHOVEN,  D'ALAYRAC, 

Della  Maria,  Co.nti,  le  théoricien  Ceroxe,  le  virtuose 
Dragonetti,  le  musicographe  Charles  Birney,  les 
cantatrices  Elisabeth  Billington,  Caterina  Gaurielli... 
L'actualité,  je  l'ai  dit,  n'est  pas  traitée  avec  moins 
de  soin.  Avec  les  analyses  des  ouvrages  repré- 
sentés à  l'Opéra,  à  l'Opéra-Comique,  au  Théâtre- 
Italien,  même  à  l'Odéon  el  aux  Nouveautés,  où  alors 
on  s'occupait  de  musique,  on  trouve  des  comptes- 
rendus  des  séances  de  l'Académie  des  beaux-arts, 
de  tous  les  concerts  importants,  des  concours  et  des 
exercices  du  Conservatoire  et  de  l'Ecole  de  musique 
religieuse  de  Choron,  de  l'Exposition  des  produits 
de  l'industrie  en  ce  qui  concerne  les  instruments, 
des  critiques  raisonnées  de  tous  les  livres,  traités 
théoriques,  méthodes  d'enseignement,  etc.,  qui  pa- 
raissaient en  France  où  à  l'étranger.  Enfin,  des  nou- 
velles étrangères  abondantes,  des  communications 
de  province,  des  notices  nécrologiques,  des  anec- 
dotes, complétaient  l'ensemble  d'une  publication 
excellente  et  telle  qu'on  n'en  connaissait  pas  jusqu'a- 
lors. En  résumé,  tout  artiste,  tout  amateur  qui 
voulait  se  tenir  au  courant  de  l'ensemble  du  mouve- 
ment musical  non  seulement  en  France,  mais  à  l'é- 
tranger, dans  quelque  ordre  d'idées  que  ce  lût, 
pouvait,  pour  la  première  fois,  grâce  à  la  Revue 
musicale,  être  exactement  et  complètement  rensei- 
gné sur  tous  les  faits  de  nature  à  solliciter  et  à  rete- 
nir son  attention. 

Fétis  continua  ainsi  jusqu'au  moment  où,  à  la 
suite  de  la  révolution  de  1830,  qui  séparait  la  Belgi- 
que de  la  Hollande  en  établissant  son  indépendance, 
il  ifut  appelé  par  le  roi  Léopold  à  la  direction  du 
Conservatoire  de  Bruxelles  et  à  celle  de  la  chapelle 
du  souverain.  Celte  situation  nouvelle  l'obligeait 
naturellement  à  s'éloigner  de  Paris,  et  vers  le  milieu 


de  l'année  1832,  il  dut  aller  se  fixer  définitivement  à 
Bruxelles.  Dans  ces  conditions,  qu'allait  devenir  la 
Revue  musicale,  objet  de  tant  de  soins  et  d'affection 
de  la  part  de  son  fondateur?  Fétis  en  confia  la  direc- 
tion à  son  fils  Edouard,  qui,  sous  l'impulsion  que 
lui-même  ne  cessait  de  lui  donner  malgré  son  éloi- 
gnement,  en  continua  la  publication  pendant  trois 
années,  c'est-à-dire  jusqu'à  sa  fusion  avec  la  Gazette 
musicale,  récemment  créée,  comme  nous  allons  le 
voir. 

C'est  le  b  janvier  1834  que  parut  le  premier 
numéro  de  la  Gazette  musicale  de  Paris,  fondée  et 
dirigée  par  Maurice  Schlesinger,  éditeur  de  musique, 
fils  d'Adolphe  Schlesinger,  lui-même  l'un  des  plus 
importants  éditeurs  de  musique  de  Berlin,  celui  que 
Beethoven,  dans  ses  lettres,  appelait  «  l'éditeur 
juif  ».  Maurice  Schlesinger,  qui  fut  l'éditeur  des 
œuvres  de  Meyerbeer,  était  établi  depuis  plusieurs 
années  à  Paris,  lorsque  lui  vint  l'idée  de  créer  un 
nouveau  journal  de  musique.  Il  réunit  un  corps  de 
rédaction  qu'on  pourrait  qualifier  de  franco-alle- 
mand, car,  à  côté  des  noms  de  Castil-Blaze,  de 
Berlioz,  d'IlALÉvv,  d'Adolphe  Adam,  de  J.  d'OmicuE, 
que  je  n'ai  pas  à  faire  connaître,  on  y  trouvait  ceux 
de  Joseph  Mainzer,  de  François  Stoepel,  de  Marx, 
de  Seyfried,  d'ANDERS,  de  Duesberg,  etc,,  sur  les- 
quels quelques  renseignements  ne  seront  sans  doute 
pas  inutiles. 

Tous  étaient  Prussien0,  comme  Schlesinger,  à 
l'exception  de  Seyfried,  qui  était  chef  d'orchestre  à 
Vienne,  où  il  était  né.  Joseph  Mainzer,  dont  l'exis- 
tence fut  singulièrement  agitée,  avait  vu  le  jour  à 
Trêves,  où  il  fut  ordonné  prêtre  en  182S,  à  peine  âgé 
de  dix-neuf  ans.  Il  avait  fait  de  bonnes  études  mu- 
sicales, et  consacra  presque  toute  sa  vie  à  l'enseigne- 
ment du  chant  populaire,  ouvrant  des  écoles  et  pu- 
bliant une  foule  de  traités  et  de  manuels  pour  cet 
enseignement,  d'abord  en  Allemagne,  puis  en  France, 
et  enfin  en  Angleterre,  où  il  se  fixa  définitivement.  Il 
venait  de  s'établir  à  Paris,  lorsque  parut  la  Gazette 
musicale,  dont  il  fut  bientôt  l'un  des  collaborateurs 
les  plus  actifs,  en  même  temps  que  du  Monde  drama- 
tique et  du  National.  Il  donna  à  la  Gazette  plusieurs 
séries  d'articles  sur  divers  sujets  :  La  Chapelle  Sixtine 
à  Rome,  Sur  Vinstrumentalion,  Ile  la  Musique  cl  de  lu 
poésie  nationales,  Vienne  et  la  synagogue  juive...  11  fil 
représenter  au  théâtre  de  la  Renaissance  un  grand 
opéra  en  quatre  actes,  la  Jacquerie (1839),  avec  succès; 
mais  le  plus  singulier,  c'est  qu'après  avoir  été  pen- 
dent plusieurs  années  le  collaborateur  de  Berlioz, 
il  publia  en  1838  le  premier  numéro  (et  uniquei 
d'une  revue  intitulée  Chronique  musicale,  qui  n'était, 
en  une  centaine  de  pages  in-octavo,  qu'un  long  pam- 
phlet exclusivement  consacré  à  Berlioz  et  à  ses 
œuvres1. 

Mainzer  était  un  musicien  instruit  et  de  talent. 
François  Stœpel  était  un  ambitieux  dont  l'éducation 
musicale  resta  incomplète,  qui  ne  manquait  point 
d'intelligence,  mais  dont  les  connaissances  s'avé- 
raient trop  superficielles.  Ne  trouvant  pas  à  se  faire 
en  Allemagne  la  situation  qu'il  avait  rêvée,  bien 
qu'il  y  eût  publié  divers  écrits,  fondé  un  journal  dont 
le  succès  fut  nul  el  fait  paraître  quelques  composi- 
tions, il  vint  à  Paris,  créa  une  école  de  musique  qui 
ne  réussit  pas,  et  devint  l'un  des  rédacteurs  les 
plus  laborieux  de  la  Gazrtle  musicale.  Dans  le  seul 
cours  de  la  première  année,  il  y  donna,  entre  autres, 


h.\C)  CLurEblE  UE  LA  MtlïluVE  ET  UtCTlOiX  XA1RE  OU  COSSERV ATOME 


les  travaux  suivants  :  Georges  &nshm,  esquisse  bio- 
graphique, compte  rendll  de  Seuf  mélodies  il'lli'cloi 
Bertioz,  Sfur  les  quintes  et  les  octaves  eachév»,  Ferdi- 
nand Hitler,  notice  biographique.  De  SpontiM  et  dit 
caractère  'le  ses  productions  dramatiques,  Essai  sur  la 
poétique  île  la  musique  instrumentâtes... 

Je  n'ai  pas  à  parler  longuement  d'Adolphe-Ber- 
nard  Maux,  suffisamment  connu  par  les  nombreux  et 
importants  travaux  théoriques  et  historiques  qui  lui 
ont  valu  une  si  grande  renommée.  Directeur  de  la 
Gazette  musicale  de  Berlin,  fondée  par  Schlesinger 
père,  collaborateur  de  la  C-ecilia  et  du  Lexique  uni- 
versel île  musique  de  Schilling,  directeur  de  musique 
à  l'Université  de  Berlin,  il  n'avait  sans  doute  que 
peu  de  temps  à  accorder  à  la  Gazette  musicale  de 
Paris,  où  l'on  ne  trouve  de  lui,  pour  la  première 
année,  qu'une  Esquisse  biographique  île  Beethoven*: 

Gottfried-Engelbert  Anders  était  un  être  mysté- 
rieux et  assez  singulier.  Après  avoir  fait  de  bonnes 
études  musicales  à  Bonn,  sa  ville  natale,  il  vint  se 
fixer  à  Paris  en  1829,  et  quelques  années  plus  tant, 
en  is:c,  il  était  chargé,  à  la  Bibliothèque  royale,  d*e 
la  conservation  du  dépôt  de  la  musique.  C'est  là  que 
j  eus  l'occasion  de  le  connaître,  lors  de  la  publica- 
tion de  nies  premiers  essais  dans  la  presse,  et  je 
trouvai  en  lui  un  homme  de  bon  conseil,  de  savoir 
réel  et  de  grande  obligeance,  en  dépit  de  son  état 
valétudinaire  el  de  son  infirmité  (il  boitait  d'une 
jambe).  Dès  la  fondation  de  la  Gazette  musicale,  il  fit 
paitie  ,1e  sa  rédaction,  et  donna  tout  d'abord  une 
longue  série  d'articles  bien  faits  sur  la  partie  instru- 
mentale de  l'Exposition  des  produits  de  l'industrie. 
Bientôt,  il  s'occupa  assez  activement  de  ce  qu'on 
appeMe  «  la  cuisine  u  du  journal,  et  surtout,  c'est  lui 
qui  dressa,  presque  jusqu'à  sa  mort,  les  excellentes 
tables  de  la  Gazette,  dont  on  peut  dire  que  l'utilité 
est  inappréciable.  A.ndf.rs,  a-t-on  dit,  travaillait 
beaucoup,  et,  pendant  longtemps,  prépara  des  ma- 
tériaux pour  deux  grands  ouvrages,  une  littérature 
générale  de  la  musique  el  un  grand  Dictionnaire 
théorique,  historique  et  biographique  de  l'art,  dont 
il  n'eut  pourtant  jamais  la  force  ou  le  courage  d'en- 
treprendre la  rédaction.  La  vérité,  c'est  qu'ANDERS, 
qui  avait  su  réunir  une  bibliothèque  musicale  su- 
perbe et  d'une  richesse  rare,  passait  uniquement  sa 
vie  à  lire  et  à  prendre  des  notes,  sans  jamais  écrire 
nue  ligne.  Et  le  malheur,  c'est  qu'il  avait  l'étrange 
manie  de  tracer  ces  unies  en  signes  hiéroglyphiques, 
que  lui  seul  pouvait  comprendre,  de  telle  soi  te  qu'à 
sa  mort,  cet  unique  fruit  de  ses  recherches  est  resté 
stérile  et  inutile.  Andehs  n'a  publié  que  deux  écrits 
de  peu  d'étendue  :  Sicolo  Pagani)ii,sa  vie,  sa  personne. 
et  quel, pies  mots  sur  son  secret  (1831),  et  Détails  bio- 
graphiques sur  Beethoven  (1839)3. 

I.  Duesberg,  écrivain  resté  obscur,  avait,  lui  aussi, 
quitté  l'Allemagne  pour  venir  se  (aire  une  situation 
à  Paris,  où  il  devint  le  correspondant  de  divers  jour- 
naux de  son  pays.  Il  entra  à  la  Gazette  musicale  peu 
de  temps  après  sa  fondation,  mais  n'y  donna  jamais 
de  travaux  orginanx.  Il  ne  s'y  rendit  pas  moins  toi  I 
utile  en  lui  fournissant,  jusqu'à  sa  mort,  de  nom- 
breuses traductions  ou  analyses  de  livres  et  de  tra- 
vaux allemands.  C'est  aussi  Duesberg  qui  lut  chargé 
de  «  mettre  sur  pied  »  et  de  rendre  lisibles  les  articles 
que  Richard  Wagner  (qui,  nul  ne  l'ignore,  ne  sut 
jamais  écrire  correctement  le  français)  fournil,  à  la 


(■•Lut  n.'\  m  ÎT'.U,  .i  i  llicrbelderungen  ; 
langueur,  i  Paris,  en  1R3G. 
nllt-en  I7'.i5j  Maux  mourut  ù  Berlin  en 


Gazette  mus, r„lc  au  cours  des  années  1840,  1841  et 
IN4-J  :  Visite  n  Beethoven,  La  Musique  allemande.  Du 
Métier  île  i  irtuoseel  de  l'indépendance  des  compositeurs 
1 1840),  De  VOuvertwe,  Un  Musicien  étranger  à  Paris, 
Caprins  esthétiques,  le  Freischiitz,  Une  Soii  ce  heureuse 
(1841),  lu  Reine  de  Chypre  (1842).  Duesberg  traduisit 
particulièrement  divers  fragments  intéressants  des 
écrits  de  Charles-Marie  de  Weiier4. 

Quant  à  Seyfried,  pas  plus  que  Maux,  il  ne  montra 
de  fécondité  à  la  Gazette  musicale.  On  ne  trouve  de 
lui,  dans  la  première  année  de  ce  journal,  que  deux 
articles  peu  importants:  l'un  sur  l'Origine  de  l'orgue, 
l'autre  sur  la  Musique  en  (lune.  SeïfrIED  est  trop 
connu  comme  compositem  el  comme  chef  d'or- 
chestre pour  qu'il  y  ait  lieu  d'en  parler  longue- 
ment ici". 

On  vuit  ce  qu'était  la  rédaction  de  la  Gazette  musi- 
cale du  côté  allemand;  plus  active  peut-être  que  du 
côté  français,  si  toutefois  on  excepte  Berlioz.  Dès  les 
premiers  jours,  en  effet,  celui-ci,  qui,  il  n'est  pas 
besoin  de  le  dire,  se  rendait  compte  de  l'utilité  que 
pouvait  avoir  pour  lui  un  journal  à  sa  dévotion  (et 
qui  sut  s'en  servir  .  y  avait  pris  une  place  prépon- 
dérante. En  dehors  de  certains  articles  d'actualité, 
de  quelques  fantaisies  musicales  qu'on  devait  retrou- 
ver plus  tard  dans  les  Soirées  ,1c  l'orchestre,  telles 
que  Rubini  à  Calais  et  le  Suicide  par  enthousiasme, 
il  publia,  la  première  année,  plusieurs  études  impor- 
tantes sur  Gluck,  sur  son  Ijiltigénic  en  Taurideel  sur 
le  Guillaume  Tell  de  Rossim.  Halévy,  de  son  coté, 
donnait  divers  articles  intéressants  :  Ali-Baba  et 
sainte  Cécile,  les  Canons  de  M.  Chsrubini  et  une 
grande  notice  sur  Boïfldieu,  qui  venait  de  mourir. 
Quant  à  la  collaboration  d'Adolphe  Adam,  elle  est 
presque  nulle  pour  cette  première  année,  et  celle  de 
Cas  i.L-Bi.A/.fc.  et  de  D'uni  u., n.  se  borne  a  deux  ou  trois 
articles,  d'ailleurs  assez  importants. 

La  Gazette  musicale  suivait  donc  tranquillement 
son  chemin,  concurremment  avec  la  Reçue  musicale. 
moins  doctrinaire  que  celle-ci,  faisant  preuve  de 
moins  d'idées  générales,  et  se  laissant  aller  un  peu 
au  hasard,  niais,  en  somme,  assez  jeune  et  assez 
vivace.  Toutes  deux,  sans  doute,  eussent  pu  conti- 
nuer de  vivre  côte  à  côte.  Mais  il  est  permis  de  croire 
que  Fétis  pouvait  être  désireux  de  se  soustraire  à 
l'obligation  de  s'occuper,  à  soixante-quinze  lieues 
de  Paris,  d'un  journal  paraissant  en  celte  ville, 
d'autant  que  l'importance  et  la  responsabilité  de  la 
haute  situation  qui  lui  était  faite  à  Bruxelles  ne  lui 
permettaient  pas  d'accorder  à  ce  journal  toute  l'at- 
tention possible.  Qu'elle  vint  de  lui  ou  de  Schlesimgbb, 
il  est  à  peu  près  certain  que  l'idée  d'une  fusion  en 
une  seule  feuille  de  la  Revue  musicale  et  de  la  Gazette 
musicale  se  lit  jour  d'un  côté,  et  qu'elle  lut  bien 
accueillie  de  l'autre.  En  l'ait,  des  arrangements 
furent  pris  en  ce  sens,  un  traité  intervint,  et  au  mois 
de  novembre  In:Jo,  la  Revue  musicale  disparaissait, 
tandis  que  son  litre  s  ajoutait  a  celui  ■lu  journal  de 
SCHLESIHGBR,  qui  prenait  alors  celui  ,1e  Heine  et  Ga- 
zette musicale  de  Paris,  Fétis  s'y.  réservant  d'ailleurs 
une  placé  et  en  restant  le  collaborateur. 

La  situation  de  la  Revue  et  Gazette  musicale  deve- 
nait, par  ce  fait,  particulièrement  importante,  el  peu 
à  peu,  on  voit  sa  rédaction  se  corser  et  s'enrichir  de 
noms  nouveaux.  Au  premier  rang,  brille  celui  de 
Liszt,  qui  ne  laisse  pas  que  de  monlrer  une  certaine 


.  est  mort  ù  Pai 


•'I    il    « r  en   I" 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    3 8. il 


activité,  et  qui,  entre  autres,  publie  sous  ce  titre  : 
Lettres  d'un  bachelier  es  musique,  une  longue  série 
d'articles  laquelle  se  poursuit  pendant  plusieurs  an- 
nées, ce  qui  ne  l'empêche  pas  de  donner  aussi  des 
études  analytiques  sur  les  compositions  des  pianisles 
ses  confrères,  Thalrerg,  Charles-Valentin  Alkan, 
Schumann,  Chopin,  etc.  L'excellent  Slephen  Heller  se 
montre  aussi  de  lemps  à  autre,  en  des  articles  cri- 
tiques pleins  de  savoir  et  d'élégance.  Puis,  on  voit 
paraître  tour  à  tour  le  vénérable  Berton,  l'auteur  de 
Montnno  et  Stéphanie,  Bottée  de  Touluon,  le  successeur 
de  Fétis  à  la  Bibliothèque  du  Conservatoire,  X.  Bois- 
selot,  Auguste  Morel,  Germanus  Le  Pic,  Elwart,  Stk- 
phen  de  La  Madeleine,  F.  D anjou,  Adrien  de  La  Face, 
dont  les  recherches  historiques  étaient  dignes  d'in- 
térêt, A.  de  Pontécoulant,  le  violoniste  et  chanteur 
Henri  Panofka;  mais  surtout  viennent  prendre  une 
grande  place  Henri  Blanchard,  l'ancien  chef  d'or- 
chestre des  Variétés,  qui  fut  aussi  dramaturge  à  ses 
heures,  Georges  Kastner,  Maurice  Bourges,  Edouard 
Mo.nnais,  qui  prend  bientôt  l'habitude  de  signer  ses 
articles  du  pseudonyme  de  Paul  Smith,  Louis  Rbias- 
tar,  qui  envoie  de  Berlin  des  correspondances  inté- 
ressantes, sans  compter  quelques  simples  dilettantes 
tels  que  Charles  Mkrruau,  le  futur  secrétaire  de  la 
préfecture  de  la  Seine,  Adolphe  Guéroult,  le  futur 
directeur  de  l'Opinion  nationale,  Victor  Schœlchek, 
Ernest  Legouvé,  llippolyte  Prévost,  P.  Richard,  de  la 
Bibliothèque  royale...  De  la  rédaction  primitive, 
Berlioz  reste  le  plus  actif.  A  un  moment  même,  il  se 
multiplie  avec  une  sorte  de  rage.  Tout  lui  est  bon  : 
critique  de  théâtres,  comptes  rendus  de  concerts, 
analyses  de  publications  nouvelles,  biographies,  jus- 
qu'à des  questions  d'acoustique,  il  touche  à  tout,  et 
l'on  voit  parfois  jusqu'à  trois  articles  signés  de  son 
nom  dans  le  même  numéro.  C'est  à  cette  époque 
qu'il  publie  ses  belles  études  sur  les  symphonies  de 
Beethoven  et  divers  fragments  de  son  Voyage  en 
lilernagne,  ainsi  que  la  série  d'articles  d'où  devait 
sortir  le  Traité  d'instrumentation1. 

A  mesure  que  les  années  s'écoulaient,  certains  col- 
laborateurs disparaissaient,  dont  d'autres  venaient 
prendre  la  place.  La  liste  en  est  longue,  car  on  peut 
dire  que,  pendant  près  d'un  demi-siècle,  il  n'est  guère 
d'écrivain  s'occupant  de  choses  musicales  dont  le 
nom  n'ait  tiguré  dans  les  colonnes  de  la  Revue  et  Ga- 
lette. A  ceux  de  Léon  Kreutzer,  J.-B.  Laurens,  Amé- 
dée  Méreaux,  l'excellent  pianiste  qui  était  feuilleto- 
niste musical  du  Journal  :1e  Rouen,  Meifred.  Martin 
(d'Angers),  qu'il  faut  signaler  maintenant,  viennent 
se  joindre  bientôt  ceux  de  Georges  Bousquet,  Oscar 
Comhtta.nt,  Gustave  Héqcei  qui  si-ne  surtout  du 
pseudonymede  Léon  Durocher),  D.-A.-D.  Saint-Yves, 
puis  Adolp'he  Botte,  Paul  Bernard,  Arthur  I'oumn, 
Maurice  Cristal  (de  son  vrai  nom  Maurice  Germa), 
Mathieu  db  Monter,  et  plus  tard  encore  A.  Thuhner, 
Charles  Bannelier,  Elias  de  Hau/.e  (pseudonyme  d'A- 
chille de  Lauzières),  Edmond  .Neukomm,  Charles 
Beaouuier,  qui  n'était  pas  encore  député,  II.  Lajvûix 
fils,  Octave  Eolque,  Ad.  Jollien,  Ernest  David,  P.  La- 
come...  Parmi  ces  derniers,  plusieurs  ramenèrent  ie 
journal  dans  la  voie  des  sérieuses  études  historiques, 


grande  élude  de  I.esi 
^ée    par  suite  de  la  n 


Lu, 


lit,,-; 


1838,  deux  longues  «  Lettres  confidentielles  »  de  Henri  H,,m  ;  en 
lS4i.  plusieurs  articles  de  Bkrlioz  sur  Ram  nu  et  sur  Castor  et  !',,!!  us  ; 
en  1843,  une  nouvelle  de  GBOltGG  Sanu,  Cari,  accompagnée  de  deux 
morceaux  d'HAi.EïY;  sans  compter  de  nombreuses  séries  d'articles  de 
Fktis  sur  dirers  sujets  In-t, triques  on  , l'actualité. 


qui  avaient  été  un  peu  négligées  pendant  quelques 
années.  A  mentionner,  sous  ce  rapport,  une  série 
d'études  sur  les  musiciens  du  xvin»  siècle  (Campra, 
Duni,  Philidor,  Mondonvii.le,  Mouret,  Floquet,  Grbs- 
nick,  Martini,  Dezèdes,  Devienne,  Della  Maria),  par 
Arthur  Pougin,  ainsi  qu'un  long  travail  sur  Rossini 
et  un  autre  sur  la  Jeunesse  d'Hérold;  d'Edmond 
.Neukomm,  Moschelès,  sa  vie  et  ses  œuvres,  Grimrn  et  la 
musique  de  son  temps,  une  biographie  de  Werer; 
d'Ernest  David,  Hassé  et  ses  contemporains,  Claudio 
Monteverde,  Adrien  Willaert  et  l'école  vénitienne;  de 
Mathieu  de  Monter,  une  longue  élude  sur  Berlioz; 
d'Ad.  .lui. lien,  Gœthe  et  la  musique,  la  Saint-Huberty, 
la  Uusique  et  les  Philosophes  au  dix-huitième  siècle; 
d'il.  I.avoix  lils,  Les  Traducteurs  de  Shakespeare  en 
musique,  la  Musique  et  l'imagerie;  d'Octave  Fouque, 
la  Salle  Ventiidoar,  etc. 

Après  une  existence  brillante  de  près  d'un  demi- 
siècle,  pendant  laquelle  elle  avait  vu  son  autorité 
et  sa  renommée  s'établir  non  seulement  en  France, 
mais  à  l'étranger,  de  la  façon  la  plus  solide  et  la 
plus  honorable,  la  Revue  et  Gazette  musicale  était 
parvenue,  on  peut  le  dire,  à  l'apogée  de  sa  fortune. 
C'est  à  ce  moment  qu'elle  disparut  tout  à  coup, 
d'une  façon  qu'on  pouvait  qualifier  de  bizarre,  si  ce 
fait  singulier  n'avait  pas  pour  cause  première  une 
situation  qui  allait  devenir  dramatique.  En  1846, 
Maurice  Schli-singer  avait  cédé  son  fonds  d'édition 
musicale  à  Gemmy  Brandis,  qui,  par  ce  fait,  était 
devenu  en  même  temps  propriétaire  et  directeur  dfl 
journal  fondé  par  lui.  Celui-ci,  étant  mort  en  1873, 
eut  pour  successeur  son  frère  Louis  Brandis,  qui 
continua,  comme  il  l'avait  l'ail  lui-même,  la  publi- 
,  al i< m  de  l'a  Revue  et  Gazette  musicale.  Le  journal 
parut  ainsi  jusqu'à  la  lin  île  l'année  1880,  et  c'est 
alors  que,  à  la  surprise  générale,  sa  publication  cessa 
subitement,  sans  avis  préalable,  et  sans  que  rien  eût 
pu  faire  prévoir  cette  disparition.  Quelques  années 
plus  tard  1881  ,  Louis  Brandis  qui,  tout  en  aban- 
donnant le  journal,  avait  continué  de  gérer  la  mai- 
son, se  brûlait  la  cervelle  d'un  coup  de  pistolet... 

Le  succès  de  lah>» me  musicale  de  I-'f.tis  avait  donné 
l'idée  de  quelques  publications  de  ce  genre.  Presque 
en  même  temps  que  la  Gazelle  musicale  (dont  nous 
avons  du  confondre  l'histoire  avec  celle  de  la  Revue, 
qu'elle  continuait),  et  même  un  peu  auparavant, 
quelques  essais  furent  tentés.  Le  mois  de  novembre 
1833  voyait  naitre  simultanément  deux  recueils  con- 
sacres à  la  musique  :  le  Pianiste  et  ['Encyclopédie 
pittoresque  de  la  musique,  dont  l'existence  ne  devait 
pas  se  prolonger  longtemps.  Le  Pianiste,  spécialité 
dans  une  spécialité,  était,  comme  l'indique  son  titre, 
particulièrement  et  uniquement  destiné  à  s'occuper 
du  piano.  Ce  journal  paraissait  une  fois  par  mois, 
fondé  et  dirigé  par  Charles  Chaulieu,  ancien  élève  de 
Louis  Adam  et  de  Catel  au  Conservatoire,  où  il  avait 
obtenu  les  premiers  prix  de  piano  et  d'harmonie. 
Dans  sa  notice  sur  Chaulieu,  Fétis  dit  fort  justement 
que  a  ses  articles  sont  remarquables  par  l'ingénuité 
des  observations  et  parla  naïveté  du  style  „. J'ajoute 
que  Chaulieu  ne  se  doutait  pas  de  ce  que  doit  être 
un  journal  et  de  la  façon  dont  il  peut  intéresser  le 
lecteur.  Le  sien  contenait  des  notices  absolument 
nulles  sur  les  pianistes  célèbres  du  passé  ou  du  pré- 
sent, de  nombreuses  analyses  de  méthodes  et  de 
morceaux  de  piano,  certaines  remarques  frivoles  sur 
la  facture  des  instruments,  et  des  nouvelles  diverses> 
le  tout  dans  une  langue  enfantine  et  en  des  condi- 
tions absolument  superficielles.  Ce  que  le  Pianiste 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  l)V  CONSERVATOIRE 


me  parait  avoir  offert  de  plus  intéressant,  ce  sont 
les  portraits  lithographies  d'artistes  qu'il  donnai I 
dans  chacun  de  ses  numéros.  La  première  année 
contient  ainsi  ceux  de  Muzio  Ci.ementi,  Hummel,  Kalk- 
brenner,  J.-B.  Cramer,  Henri  Bbrtini,  Steibelt,  Henri 
Herz,  Louis  Adam,  J.-li.  Pixis,  Ddssek,  Jean-Sébas- 
tien Bach  et  Haendel.  La  publication  du  Pianiste, 
dont  les  numéros  ne  portaient  point  de  date,  ne 
dura  que  deux  années. 

L'Encyclopédie  pittoresque  <-!■•■  la  musique,  «  conte- 
nant l'histoire  de  la  musique  ancienne  et  moderne, 
la  biographie,  elc,  »  était  une  publication  pério- 
dique, mais  non  un  journal  proprement  dit.  Les 
pages,  en  effet,  se  suivaient  couramment,  comme 
celles  d'un  livre,  et  les  numéros  (ou  les  livraisons) 
ne  portaient  ni  titre  ni  date.  Abondante  en  illustra- 
tions de  valeur  d'ailleurs  médiocre,  cette  publica- 
tion bizarre,  dont  les  articles  n'étaient  point  signé?, 
n'offrait  aucun  intérêt  réel  et  pas  davantage  d'uti- 
lité. On  voyait  qu'aucun  principe,  aucune  idée  pre- 
mière et  d'ensemble  ne  présidait  à  la  confection  de 
ce  recueil,  où  tout  était  fait  sans  ordre  et  allait 
au  hasard.  Les  deux  directeurs  étaient  le  guitariste 
Adolphe  Ledhcy  et  l'excellent  pianiste  Henri  Bertini, 
qui  auraient  pu  mieux  employer  leurs  loisirs.  Leur 
Encyclopédie  n'eut  du  reste  qu'une  année  d'existence. 
Cette  année  terminée,  les  souscripteurs  reçurent., 
pour  la  réunion  en  volume,  une  feuille  de  titre  qui 
porte  la  date  de  183:i.  Mais,  comme  nous  l'avons  dit, 
le  premier  numéro  parut  en  novembre  1833.  et  le 
dernier,  par  conséquent,  en  octobre  1834. 

Presque  en  même  temps  que  le  Pianiste  et  l'Ency- 
clopédie pittoresque  de  l'a  musique,  c'est-à-dire  le  3  dé- 
cembre 1833,  paraissait  le  premier  numéro  d'un 
journal  qui,  au  contraire  de  ceux-ci,  dont  l'existence 
fut  courte,  était  destiné  à  une  longue  carrière, 
puisque,  sa  publication  se  poursuivant  encore  à 
l'heure  présente,  elle  en  est  à  sa  quatre-vingt-dix- 
septième  année.  Ce  journal,  c'est  le  Ménestrel,  qui 
non  seulement  représente  le  doyen  des  journaux  de 
musique  français,  mais  qui  a  atteint  une  longévité 
unique  dans  l'histoire  de  la  presse  musicale  euro- 
péenne. 

Fondé  par  deux  éditeurs  de  musique  associés, 
Antoine  Meissonnier  et  Jacques-Léopold  Heugel,  le 
Ménestrel  n'offrait  d'abord  qu'un  médiocre  intérêt 
littéraire,  la  place  réservée  à  la  rédaction  étant  par 
trop  restreinte.  En  effet,  des  qualre  pages  que  com- 
portait chaque  numéro,  la  deuxième  et  la  troisième 
se  trouvantrégulièrement  occupées  par  un  morceau  de 
musique,  la  première  et  la  quatrième  étaient  seules 
consacrées  au  texte;  et  comme  une  moitié  de  la  pre- 
mière était  prise  par  le  titre  et  par  une  vignette 
d'en-tète,  celui-ci  n'avait  réellement  à  sa  disposi- 
tion qu'une  page  et  demie.  On  comprend  que,  dans 
ces  conditions,  toute  critique  sérieuse  était  impos- 
sible, et  que  le  journal  devait  se  borner,  ou  à  peu 
près,  à  offrir  à  ses  lecteurs  le  simple  ensemble  des 
nouvelles  artistiques  de  la  semaine.  Au  bout  de 
quelques  années,  et  lorsque  Léopold  Heugel  fut  resté 
seul  à  la  tète  de  la  maison,  il  fit  subir  au  journal 
une  première  transformation.  La  musique  étant 
donnée  à  part  et  en  supplément,  les  qualre  pages 
qui  formaient  le  numéro  furent  entièrement  consa- 
crées au  texte,  et  déjà  l'espace  permettait  la  publi- 
cation d'articles  d'une  certaine  importance,  donnant 
les  comptes  rendus  des  œuvres  nouvelles  représen- 
tés sur  les  différents  théâtres,  et  même  quelquefois 
certaines  variétés  sur  divers  sujets.  Les  rédacteurs 


étaient  alors  Jules  Lovv,  Edmond  Viel,  Elwart,  etc. 
Mais,  aux  environs  de  1860,  une  seconde  transforma- 
tion permit  au  Ménestrel  de  prendre  toute  l'ampleur 
et  d'acquérir  toute  l'autorité  qu'il  n'a  cessé  d'exercer 
depuis  lors.  Le  changement  de  format  et  la  publica- 
tion régulière  par  huit  pages,  en  lui  donnant  tout 
l'espace  nécessaire,  lui  permirent  d'aborder  toutes 
les  questions  intéressant  la  musique,  dans  tous  les 
ordres  d'idées,  et  aussi  de  publier  les  nombreux  et 
sérieux  travaux  historiques  ou  biographiques  qui 
ont  consacré  et  justifié  sa  très  haute  réputation. 
Pour  ces  travaux,  il  lit  appel  aux  écrivains  spéciaux 
les  plus  en  renom,  et  la  liste  serait  longue  à  établir 
des  ouvrages  importants  qui  virent  ainsi  le  jour 
dans  ses  colonnes,  et  qui,  sans  lui,  n'auraient  peut- 
être  pas  enrichi  la  littérature  musicale  de  tant  d'é- 
tudes intéressantes  et  substantielles,  dont  le  nombre 
et  la  valeur  n'ont  rien  à  envier  à  ce  qui  se  fait  en 
Allemagne.  On  peut  dire  que,  sous  ce  rapport,  le 
Ménestrel  a  rendu  un  immense  service  en  encoura- 
geant les  travaux  historiques  relatifs  à  la  musique, 
en  les  faisant  naître  et  en  leur  donnant  la  possibi- 
lité de  se  produire.  Ce  que  ce  journal  a  publié  sous 
ce  rapport  depuis  près  d'un  demi-siècle  est  incalcu- 
lable, et  l'on  ne  peut  que  signaler  ici  quelques-uns 
des  ouvrages,  biographiques  ou  autres,  qui  ont  reçu 
l'hospitalité  de  ses  colonnes  avant  de  paraître  en 
librairie  :  Boîeldieu,  par  Gustave  Héquet;  Richard 
Wagner,  par  A.  deGasperini;  Rossini,  Félicien  David. 
par  Alexis  Azevedo;  Weber,  Gluck,  Chopin,  Beethoven. 
F.  Schubert,  Félix  Mendelssohn,  par  H.  Barbedktte; 
Histoire  de  l'Opéra-Comique,  la  seconde  salle  Favarl, 
par  Albert  Souries  et  Charles  Malherbe;  Hérold,  Au- 
ber,  par  B.  Jouvin;  Albert  lirisar,  Adolphe  Adam. 
Hameau,  Figures  d'o/» ira-comique,  Cherubird,  Mèhul. 
.1.-1.  Rousseau  musicien,  Les  Vrais  Créateurs  de  l'opéra 
français.  Verdi,  Pierre  Jélyotte,  L'Opéra -Comique 
pendant  la  Révolution,  par  Arthur  Pol'Gin;  Mozart. 
Beethoven,  par  Victor  Wilder;  Traité  de  l'expression 
musicale,  par  Matins  Lussï;  Michel  île  Glinka,  par 
Octave  Fouque;  F.  Halévy,  par  Léon  Halévy;  Meyer- 
beer,  par  Henri  Blaze  de  Blry...;  sans  compter  de 
nombreux  travaux  de  divers  genres  de  MM.  Paul  Ber- 
nard, Weckerlin,  Edmond  Neukomh,  Paul  d'Estrée, 
Oscar  Comettant,  Denne-Baron,  P.  Lacome,  Ernest 
David,  Amédée  Boutarel,  Michel  Brenet,  Julien  Tier- 
sot,  Camille  Benoit,  Jules  Carlez,  Paul-Emile  Che- 
valier, J.  Jemin,  Camille  Le  Senne,  Raymond  Boi'yer, 
Gustave  Ciiouijuet,  Gustave  Bertrand,  Geoiges  dk 
Massougnes,  Mme  Marie  Jaki.l,  etc.,  auxquels  il  faut 
ajouter  d'intéressantes  correspondances  résumant 
le  mouvement  musical  à  l'étranger,  entre  autres  de 
Londres  (MM.  Johnston,  Francis  Hukfer),  de  Vienne 
(M.  Oscar  BERGf.MF.N),de  Saint-Pétersbourg  (MM.  Man- 
geant, Albert  Vizentini,  César  Cui),  de  Bruxelles 
(M.  Lucien  Solvay)...  Le  Ménestrel,  dirigé  depuis  la 
mort  de  Léopold  Heugel  par  son  lils  M.  Henri  Heugei  . 
a  conservé  toute  son  importance,  toute  son  influence, 
toute  son  activité, et  s'efforce, jusque  dans  les  moin- 
dres détails  d'actualité,  d'être  surtout  un  journal 
historique,  un  recueil  de  faits  de  toute  sorte,  dont  la 
collection  constitue  une  mine  de  renseignements  et 
de  documents  précieux  résumant  le  mouvement 
musical  des  diverses  parties  de  l'Europe.  Il  sera, 
pour  les  historiens  de  l'avenir,  une  source  indispen- 
sable à  consulter. 

Quel  était  le  directeur,  quels  étaient  les  rédac- 
teurs de  la  Romance,  «  journal  de  musique  »,  dont  le 
premier  numéro  paraissait   le  i  janvier  1834,  juste 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    3853 


un  mois  après  celui  du  Ménestrel1!  Je  serais  bien  en 
peine  de  le  dire,  les  articles,  pour  la  plupart  courts 
et  d'ailleurs  sans  consistance,  restant  anonymes  ou 
parfois  signés  d'initiales  (A.  G.,  J.  ».,  S.  T.,  L.  C), 
et  le  seul  renseignement,  insuflîsanl,  consistant  en 
cette  note  :  «  On  s'abonne  à  Paris,  rue  du  Coq-Saint- 
Honoré,  n°  4,  aux  bureaux  de  l'Artiste.  »  Ce  journal 
était  hebdomadaire  et  paraissait  par  quatre  pages 
de  texte  qu'accompagnait  chaque  fois  une  romance. 
Littérature  très  superficielle,  critique  sans  portée  et 
d'un  intérêt  absolument  nul,  ne  reposant  sur  aucun 
principe  général.  Je  crois  que  la  Romance  n'eut  que 
deux  années  d'existence2. 

Voici  venir  un  journal  qui,  par  ses  allures  batail- 
leuses, par  son  caractère  agressif,  par  son  mépris  à 
peu  près  complet  des  moindres  convenances  et  des 
intérêts  d'autrui,  fit  en  un  temps  beaucoup  parler 
de  lui,  causa  quelque  scandale  el  s'attira  de  nom- 
breux et  retentissants  procès.  Je  veux  parler  de  la 
France  musicale,  fondée  par  les  deux  frères  Marie  et 
Léon  Escudier,  qui  en  commencèrent  la  publication 
au  mois  de  décembre  1837.  Chefs  d'une  maison  d'é- 
dition musicale  où  ils  s'étaient  fait  une  spécialité 
de  la  publication  d'opéras  italiens,  notamment  des 
œuvres  de  Donizk.tti  et  de  Verdi,  les  trères  Escudier 
donnèrent  naturellement  une  couleur  toute  particu- 
lière à  leur  journal  et  l'orientèrent  de  ce  côté.  Per- 
sonne n'y  eût  pu  trouver  à  redire  s'ils  ne  s'étaient 
pas  elforcés  et  n'avaient  en  quelque  sorte  pris  à 
tâche  de  rabaisser  toute  autre  musique  que  celle 
qu'ils  publiaient,  et  s'ils  n'avaient  employé  des  pro- 
cédés de  critique  contraires  à  toute  bienséance  pour 
déverser  le  mépris  sur  des  œuvres  et  des  artistes 
dont  le  seul  défaut  était  de  ne  point  appartenir  à 
leur  maison  de  commerce.  La  France  musicale,  avec 
sa  polémique  ardente,  personnelle,  et  trop  souvent 
excessive  et  discourtoise,  était  d'ailleurs,  surtout  dans 
les  premières  années  de  sa  carrière,  un  journal 
vivace,  alerte,  et  sinon  bien  fait  et  bien  entendu,  du 
moins  presque  toujours  intéressant.  On  y  vit  se  suc- 
céder un  grand  nombre  de  rédacteurs  :  Castil-Bla/.e, 
Jules  Maurel,  A.   Elwart,  Charles  Villagre,  Oscar 

COMETTANT,    Po.NTÉCOULANT,    A.    FaRRENC,    SeXliuS   IH  - 

hanij,  et  plus  lard  A.  Malliot,  Giacomelli,  Gustave 
Chouquet,  A.  de  Bury,  Théodore  de  Lajarte,  Arlhur 
Pougin,  E.  i'I'hoinan,  A.  Thirner,  Edouard  Gregoir, 
Jules  Carlëz,  A.  Lomon,  M.  A.  Gromier,  Henri  Yvert, 
■A.  des  Appiers,  etc.  C'est  dans7a  France  musicale  que 
parut  tout  d'abord,  sous  forme  d'articles,  le  livre 
fameux  de  Liszt  sur  Chopin.  Parmi  certains  travaux 
importants  qui  trouvèrent  place  dans  ses  colonnes, 
on  peut  citer  :  Haendel  et  son  temps,  par  Victor 
Schœlcher;  Des  Livres  rares  et  de  leur  destinée,  par 
A.  Farrenc;  Adolphe  Sax,  ses  ouvrages  et  ses  luttes, 
par  Oscar  Comettant;  L'Opéra-Comique  et  ses  trans- 
formations, par  A.  Thurner;  William-Vincent  Wal- 
lacc,  par  Arlhur  Pougin;  Troubadours  et  trouvères, 
par  Escudier;  Instruments  Sac  et  fanfares  civiles,  par 
Théodore  de  Lajarte;  Le  Nouveau  Régime  des  théâtres 
dans  les  départements,  par  A.  .Malliot;  Institut  Boïel- 


dieu,  création  d'un  Conservatoire  de  musique  à  Rouen 
par  le  même,  etc. 

Par  une  singulière  fantaisie,  les  directeurs  de  la 
France  musicale  changèrent,  en  1849,  le  titre  de  ce 
journal,  qu'ils  intitulèrent  la  Musique,  gazette  de  la 
France  musicale;  mais  dés  l'année  suivante,  ils  lui 
rendirent  son  titre  primitif.  En  1860,  une  discussion 
d'intérêt  s'étant  élevée  entre  eux,  les  deux  frères  se 
séparèrent,  et  l'aîné,  Marie  Escudier,  demeura  seul 
à  la  tête  de  la  France  musicale,  à  laquelle  Léon  ne 
larda  pas  à  créer  une  concurrence  en  fondant  l'Art 
musical,  comme  on  le  verra  plus  loin.  Les  événe- 
ments de  1870  firent  suspendre,  comme  tant  d'autres, 
la  publication  de  la  France  musicale;  elle  ne  fut 
jamais  reprise.  En  rappelant  son  souvenir,  il  est  juste 
de  constater  que  ce  journal  tint  pendant  longtemps 
une  place  importante  dans  la  presse  musicale. 

En  1838,  le  compositeur  Joseph  Mainzer  faisait 
paraître  le  premier  numéro  d'une  revue  qui  portait 
le  titre  de  Chronique  musicale.  Ce  premier  numéro, 
qui  ne  fut  suivi  d'aucun  autre,  formait  une  forte 
brochure  de  %  pages,  uniquement  consacrée  à  un 
éreintemenl  en  règle  de  Berlioz,  dont  pourtant/chose 
assez  singulière,  Mai.nzer  avait  été  le  collaborateur 
à  la  Gazette  musicale. 

Kn  lsi-1,  Marie  Champein,  de  retour  de  Belgique, 
où  il  venait  de  passer  plusieurs  années,  fondait  coup 
sur  coup  à  Paris  deux  journaux  de  musique  qui 
n'eurent  l'un  et  l'autre  qu'une  existence  éphémère. 
Il  avait  donné  au  premier  le  titre  de  celui  des  opéras 
de  son  père  que  l'on  considère  comme  son  chef- 
d'œuvre  :  la  Mélomanie; l'autre  était  intitulé  le  Musi- 
cien. Le  seul  souvenir  qui  subsiste  de  ces  deux  jour- 
naux se  trouve  dans  ces  lignes  de  la  notice  que  Fétjs 
a  consacrée  à  Champein  :  «  Il  entreprit  en  1841  la 
publication  d'un  journal  hebdomadaire  intitulé  la 
Mélomanie,  qui  n'eut  qu'une  existence  de  quelques 
mois.  L'année  suivante,  il  fil  paraître  le  Musicien, 
autre  feuille  du  même  genre.  Un  article  de  ce  jour- 
nal, dirigé  contre  Mme  Stoltz,  ayant  été  déclaré  ca- 
lomnieux, M.  Champein  fui  condamné  en  police  cor- 
rectionnelle et  passa  en  Angleterre  pour  se  soustraire 
aux  conséquences  de  ce  jugement3.  » 

En  1842,  l'éditeur  Troupenas  faisait  paraître  un 
journal  intitulé  la  Mélodie,  dont  il  ne  parut  guère 
qu'une  année,  et  c'est  vers  le  même  temps  qu'un 
autre  édileur,  de  burlesque  mémoire,  le  fantaisiste 
Bernard  Lattf,  qui  eut  cependant  une  période  de 
succès,  commença  la  publication  d'un  autre  journal, 
le  Monde  musical,  qui  dura  un  peu  plus  longtemps, 
pour  se  fondre  ensuite  dans  le  Ménestrel.  A  signaler 
encore,  en  1844,  l'Europe  musicale  et  dramatique;  en 
IS4.'i,  l'Album  de  Sainte-Cécile,  publié  par  l'éditeur 
Pacini,  qui  passe,  au  bout  de  quelques  mois,  chez 
l'éditeur  Bonoloi,  successeur  de  ce  dernier,  lequel 
change  son  litre  el  en  fait  la  Presse  musicale,  sans 
que  ce  changement  lui  assure  le  succès. 

L'année  184o  voit  naître  la  Revue  de  la  musique  re- 
ligieuse, populaire  et  classit/iie,  excellent  recueil  dans 
sa  spécialité,  dirigé  par  le  savant  Félix  DANJOu.avec 


1.  Les  numéros  des  sis  premiers  mois  portaient  seulement  la  date 
du  jour  et  du  mois,  non  eelle  de  l'année  ;  ce  n'est  qu'à  partir  de  celui 
du  12  juillet,  que  le  journal  porle  régulièrement  en  tète  :  «  Première 
année.  1834.  » 

i.  le  ne  mentionne  ici  que  pour  mémoire  un  journal  dirige  par  un 
Français,  mais  publie  a  l'étranger,  en  Belgique,  à  partir  de  1834  jus- 
qu'en  1839.  Ce  journal  était  le  Franc-Juge,  a  revue  de  la  littérature 
de  la  musique  et  des  beaui-arts  »,  fondé  à  Bruxelles  par  Marie-Fran- 
çois-Stanislas  Ciumpein,   fils  du   compositeur  Chxmphn,  aujourd'hui 


liien  oublié  maigre  les  vingt  et  quelques  0|m-i.is  qu'il  lit  represent, 
et  qui  cependant  obtint  à  la  Comédie-Italienne  deux  succès  relent 
sants  avec  les  Dettes  et  la  Mrloma>n>\  Nous  retrouverons  un  p 
plus  loin  Chami-ein  avec  deux  antres  journaux,  cette  fois  publiés 
Paris. 

3.  Le  10  avril  1821,  le  théâtre  du  Gymnase-Dramatique  represent, 
un  opéra-comique  en  un   acte  intitulé  Une  FrUnçaise,  musique 


EHcyci.oi>i:nih:  de  la  musique  et  dictxovnmre  ou  cossEnvATomu 


la  c.illuhnration  de  Feus,  de  l'abbé  Stéphen  Morelot, 
ancien  élève  de  l'Ecole  des  Chartes,  l'abbé  Petit, 
J.-H.  Laurens,  C.  Cal,  etc.  La  Reuuc  de  la  musique 
religieuse,  qui  paraissait  chaque  mois  par  livraisons 
de  trois  ou  quatre  feuilles,  était  un  périodique  subs- 
tantiel et  fort  intéressant,  fertile  en  travaux  solides 
et  dignes  de  la  plus  grande  attention.  Elle  semblait 
avoir  conquis  le  succès  qu'elle  méritait  à  tous  égards, 
lorsque  la  révolution. de  1848  vint  lui  porter  un  coup 
fatal  et  amena  sa  disparition.  Gomme  on  le  verra 
plus  loin,  elle  a  été  remplacée  par  la  Maîtrise,  puis  par 
la  Tribune  de  Saint-Gervais.  La  collection,  très  pré- 
cieuse, en  est  aujourd'hui  fort  rare. 

Celle  même  révolution  dj  1848  porta  aussi  un  coup 
mortel  à  une  autre  publication,  la  Critique  musicale, 
journal  hebdomadaire  qui  avait  fait  son  apparition 
le  Ier  novembre  1840,  et  qui  était  dirigé  par  un  an- 
cien Il  Titiste  devenu  homme  de  bourse,  nommé  Alexis 
Azbvbdo,  lequel  acquit,  une  douzaine  d'années  plus 
tard,  un  semblant  de  notoriété,  lorsqu'il  occupa  le 
feuilleton  musical  d'un  grand  journal  politique  très 
répandu  sous  l'Empire,  l'Opinion  nationale.  Azevedo, 
qui  avait  donné  quelques  articles  à  La  France  musicale 
et  à  la  Mélomanie,  n'avait  l'étoffe  ni  d'un  critique  ni 
d'un  directeur  de  journal.  Pourvu  d'une  instruction 
musicale  très  insuffisante,  il  remplaçait  le  savoir  par 
la  violence  et  traitait  de  Turc  à  More  quiconque  se 
permettait  de  penser  autrement  que  lui.  Passionné  à 
l'excès,  il  ne  prisait  qu'un  genre  de  musique,  la 
musique  italienne,  et,  dans  cette  musique,  celle  de 
Rossmi,  dont  il  estimait  les  pochades  de  jeunesse  à 
l'égal  de  Guillaume  Tell  et  du  Barbier;  pendant  le 
cours  de  sa  carrière  de  critique,  il  ne  cessa  de  déver- 
ser l'injure  sur  de  grands  artistes  tels  que  Meyerbeer, 
Berlioz,  Halévy,  Godnod,  préférant  à  leurs  œuvres 
n'importe  quelle  platitude  signée  d'un  nom  ultra- 
montain.  D'autre  part,  partisan  acharné  du  système 
Chevé,  il  s'escrimait  avec  fureur  contre  ceux  qui 
osaient  soutenir  que  le  procédé  du  chiffre  est  à  la 
notation  musicale  ce  que  le  dessin  linéaire  est  à  la 
peinture.  Enfin,  néologiste  forcené,  il  croyait  avoir 
tout  dit  quand  il  avait  parlé  de  «  l'école  du  civet 
sans  lièvre  »  (la  musique  sans  mélodie),  du  cassero- 
lage  i l'abus  de  l'orchestration),  de  la  braillardocratie 
(les  chanteurs  qui  crient),  etc.  ,Son  journal  la  Cri- 
tique musicale,  où  il  comptait  pour  collaborateurs 
J.  Meifred,  professeur  décor  au  Conservatoire,  H.  .loi  - 
\  in,  futur  critique  musical  du  Figaro,  Johannes  \\i- 
her',  futur  critique  musical  du  Temps,  Fiorentino, 
futur  critique  musical  du  Moniteur  universel,  Biche- 
Latour,  futur  directeur  du  Grand  Théâtre  de  Bor- 
deaux, Cyprien  de  Lespar,  Charles  Pellecart,  etc., 
n'offrait  qu'un  intérêt  médiocre  et  n'apportait  aucun 
élément  dans  la  pratique  du  journalisme  musical'. 

A  mentionner  simplement,  dans  les  années  qui 
suivirent,  la  naissance,  je  n'ose  dire  l'existence,  de 
quelques  journaux  éphémères  et  qui  n'ont  laissé 
aucune  trace  de  leur  passage  :  La  Musique.  «  gazette 
universelle  des  artistes  et  amateurs  »,  dont  le  pre- 
mier numéro  paraît  le  1  janvier  1849;  la  Chronique 
musicale  (5  avril  1850),  journal  mensuel,  dirigé  par 
P.  Villeblanche,  «  professeur  à  l'Athénée  national  n  ; 
le  Moniteur  musical  (23  avriH851),  dirigé  par  Charles 
Soullier,  qui  devait  fonder  dix  ans   plus  tard  un 


1.  A  partir  de  son  M"  num 
n  titre  pour  prendre  relui 
nlondrcavec  uu  autre  Uni 


journal  orphéonique,  l'Union  chorale  de  Paris,  et 
fut  ensuite  collaborateur  de  l'Art  musical  ainsi  que 
d'une  autre  Chronique  musicale,  et  à  qui  l'on  doit  un 
Annuaire  musical  pour  1855,  et  un  Nouveau  Diction- 
naire de  musique  illustré,  élémentaire,  théorique,  pro- 
fessionnel et  complet,  tout  cela  de  mince  valeur;  en- 
lin,  l'Avenir  musical  (novembre  1852)2. 

Et  nous  arrivons  à  une  entreprise  plus  sérieuse,. 
l'Univers  musical,  journal  hebdomadaire  fondé,  à  la 
fin  de  1853,  par  l'éditeur  de  musique  Benoît  et  qui 
passa  ensuite  aux  mains  de  l'éditeur  Ledentu.  Ce 
journal  eut  successivement  pour  rédacteurs  en  chef 
Philippe  Martin,  Stéphen  de  la  Madeleine  et  Louis 
IIoger,  et  pour  collaborateurs  A.  Elwart,  Charles 
Poisot,  Léon  Gâtâtes,  Martin  (d'Angers),  M.  Parhen- 
riEti,  etc.  L'Univers  musical,  dont  l'existence  s'est 
prolongée  pendant  une  quinzaine  d'années  environ, 
a  publié  un  certain  nombre  de  travaux  qui  n'étaient 
pas  sans  intérêt  :  De  la  Nature  du  son  et  de  ses  effets, 
par  Stéphen  de  la  Madeleine;  Etude  sur  l'appareil 
respiratoire,  par  le  même;  Esthétique  et  mécanisme 
des  traits,  par  le  même;  Histoire  de  la  musique  en 
France,  par  Charles  Poisot  (publiée  plus  lard  en 
volume  :  Dentu,  éditeur,  1860);  une  traduction 
abrégée  de  l'Histoire  de  la  musique  do  P.  Martini,  par 
le  même;  des  Lettres  sur  les  orphéons,  par  A.  Elwart. 
etc.  Il  faut  constaler  cependant  que,  malgré  les  soins 
qui  étaient  apportés  à  sa  rédaclion,  l'Univers  musi- 
cal ne  put  jamais  acquérir  d'intluence  ou  d'autorité, 
et  ne  sut  parvenir  à  atteindre  l'oreille  du  public;  le 
journal  manquait  de  chaleur,  de  vie  et  de  mouve- 
ment, et  finit  par  mourir  de  consomption. 

Nous  trouvons  ensuite  un  recueil  d'un  autre  genre, 
la  Revue  de  musique  sacrée  ancienne  et  moderne, 
fondée  en  18.Ï6  par  l'abbé  Normand,  de  batailleuse 
mémoire,  sous  son  pseudonyme  ordinaire  de  Théo- 
dore Nisard,  et  publiée  à  Rennes,  à  la  librairie  Vatar. 
Malgré  son  titre  et  sa  qualité  de  prèlre,  l'abbé  Nor- 
mand .était  un  polémiste  enragé,  |qui  avait  eu  plus 
d'une  fois  maille  à  partir  avec  d'autres  écrivains  spé- 
ciaux, notamment  avec  Fétis,  Danjou  et  Félix  Clé- 
ment. Il  s'assagit  et  s'apaisa  pourtant  en  publiant 
sa  Revue,  recueil  sérieux,  intéressant  et  bien  fait, 
pour  lequel  il  s'entoura  d'«*cellents  collaborateurs 
tels  que  J.  d'Ortigue,  l'abbé  Jouve,  Alexandre  Le- 
clercq,  Adrien  de  la  Fage,  Aristide  Farrenc,  R.-J. 
Pottier,  Castil-Blaze,  A.-J.-H.  Vincent,  Bëaulieo, 


Avy,  etc.,  et  qui  méritait  mieux  que 


inditlerence 


du  public.  Entre  autres  travaux  intéressants,  Nisard. 
y  publia  une  solide  étude  sur  Francou  de  Coloqne,  son 
siècle,  ses  travaux  et  son  influence  sur  la  musique  me- 
surée du  moyen  âge.  11  faut  croire  cependant  que  la 
Revue  de  musique  sacrée,  malgré  ses  consciencieux 
efforts,  n'obtint  qu'un  succès  médiocre,  puisqu'elle 
dut  disparaître  après  une  seule  année  de  publica- 
tion. La  collection  des  numéros  de  cette  seule  année 
est  aujourd'hui  fort  rare,  et  elle  demeure  précieuse- 
en  raison  de  la  valeur  des  écrits  qu'elle  renferme. 

Cette  même  année  1856  vit  naître  une  feuille  d'une 
nature.toute  particulière,  la  Réforme  musicale,  «  jour- 
nal des  doctrines  de  l'école  Galin-Paris,  Chevé  », 
c'est-à-dire  consacré  à  la  propagation  de  la  notation 
chiffrée.  Avec  des  rédacteurs  comme  Aimé  Paris, 
Alexis  Azevedo,  Emile  Cantrel,    dirigés  par   Louis 

2.  Le  seul  souvenir  peut-être  qui  reste  de  ces  journaux  est  dans  la 
mention  qu'on  en  trouve  dans  le  petit  livre  Intitulé  hi  l'resse  pari- 
sienne, statistique  de  tous  les  journaux  nés,  morts,  ressuseités  ou  mé- 
tamorphosas a  Paris  depuis  le  11  février  1815  jusqu'à  l'Empire,  par 
Henry  Izaubard  (Paris,  Krabbe,  1853,  in-ISl. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÈDAdOtilE 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    S*65 


Rouer  connue  rédacteur  en  chef,  il  n'est  pas  besoin 
de  dire  si  ce  journal  recherchait  avec  ardeur  les 
occasions  de  lutte  et  de  polémique.  A  part  la  dis- 
cussion des  questions  relatives  à  la  prétendue  préé- 
minence de  la  notation  chiffrée  sur  la  notation 
usuelle,  il  n'offrait  qu'un  intérêt  très  relatif.  Il  vécut 
cependant,  tant  bien  que  mal,  pendant  une  dizaine 
d'années. 

C'est  encore  un  organe  d'un  autre  genre  que  nous 
trouvons,  toujours  en  cette  année  I806  :  Le  Luth 
français,  «  journal  de  la  facture  instrumentale  ». 
Le  titre  était  joli,  quoiqu'il  pût  paraître  un  peu 
démodé  et  nous  reporter  an  genre  troubadour.  Le 
fondateur  de  ce  journal  était  un  certain  Giacqmelli, 
Italien  de  naissance,  comme  l'indiquait  son  nom, 
petit  bossu  très  intelligent,  très  malin,  peu  scrupu- 
leux, directeur  d'une  agence  de  concerts  doublée 
d'un  journal,  la  Preste  théâtrale  et  musicale,  à  l'aide 
desquels  il  savait  faire  reconnaître  généreusement 
les  services  qu'il  pouvait  rendre  aux  artistes  qui 
avaient  affaire  à  lui-  Son  Luth  français  n'eut  qu'une 
courte  existence,  car  le  premier  numéro  punit  le 
a  juin  1856,  et  celui  du  20  février  1857  fut  le  dernier 
de  la  série.  Il  comptait  parmi  ses  collaborateurs 
Adrien  de  La  Fage,  Oscar  Comettant,  Ed.  Renaudin, 
II.  Hoche  et  Alexandre  Maliishan,  violoniste  qui  n'avait 
de  commun  que  le  nom  avec  l'illustre  cantatrice.  Un 
différend  s'éleva  dès  les  premiers  jours  entre  celui- 
ci  et  Giacomblli,  si  bien  que  ledit  Malihran  s'en  alla 
de  son  côté  fonder  une  succursale,  c'est-à-dire  une 
concurrence,  sous  le  titre  de  l'Union  instrumentale, 
«  journal  de  la  fabrication  universelle  des  instru- 
ments de  musique  »,  dont  il  lit  paraître  le  premier 
numéro  le  25  juillet  1856,  mais  dont  la  carrière 
fut  encore  plus  éphémère  que  celle  du  Luth  fran- 
çais. 

Le  15  avril  1857  voyait  paraître  le  premier  numéro 
d'un  recueil  fort  important  qui  a  laisse  des  traces 
sérieuses  de  son  passage,  la  Maîtrise,  journal  de 
musique  religieuse,  publié  par  les  éditeurs  du  Ménes- 
trel, avec,  pour  directeur,  Loris  Niedermeyer,  fonda- 
teur de  l'excellente  Ecole  de  musique  religieuse,  et 
pour  rédacteur  en  chef  Joseph  d'OariGUE,  l'auteur  du 
Dictionnaire  de  plain-chant  et  de  musique  d'église, 
avec  la  collaboration  des  abbés  Jouve,  Arnaud 
et  Si.'i'hen  Morklot,  de  Victor  Pelletier,  Edouard 
Bertrand,  P.  A.  Schubiger,  Vaucorbeil  et  Morel  de 
Yolkine.  Toutefois,  et  bien  que  le  texte  de  2a  Maîtrise 
fût  loin  d'être  sans  valeur  (il  en  faut  surtout  signaler 
une  solide  étude  d'Edouard  Bertrand  sur  l'histoire 
de  l'orgue),  le  grand  intérêt  offert  par  ce  recueil 
superbe  consistait  dans  son  excellente  et  abondante 
publication  d'oeuvres  de  musique  religieuse,  soit  pour 
chant,  soit  pour  orgue  (chaque  numéro  mensuel  ne 
contenait  pas  moins  de  six  morceaux).  Dans  cette 
publication  vraiment  remarquable,  les  noms  des 
artistes  modernes  s'avoisinaient  aux  noms  glorieux 
des  grands  classiques.  Pour  ceux-ci,  c'était  Pales- 
trina,  Roland  de  Lassu>,  Jean-Sébastien  Bach  et  son 
fils  Philippe-Emmanuel,  Haendel,  Vittoria,  Cléram- 

BAILT,  FrESCOBALDI,  SCARLATII,  MARCELLO,  le  P.  MARTINI, 

Haydn,  Mozart,  Le  Bègue,  Durante,  Albrechtsberger, 
Eberlin,  et  pour  les  modernes  Ciierubini,  Lesueur, 
Boely,  Auber,  Benoist,  Rossini,  Gharles-Valentin 
Alkan,  Niedermeyer,  Ambroise Thomas,  Gounod,  Lem- 
mens,  Rembt,  Rinck,  Lefébure-Wély,  César  Franck, 
Chauvet,  prince  de  la  Moskowa,  Gevaert,  Clément 
Loret,  etc.  Cette  collection  de  la  MaUrise  est  assu- 
rément l'une  des  plus  précieuses  qu'on  puisse  ima- 


giner.   La   carrière    du  journal    comprend    quatre 
années  pleines. 

Elle  avait  à  peine  terminé  son  existence  qu'on 
voyait  surgir  un  autre  organe  de  musique  religieuse, 
le  Plain-C liant,  «  revue  mensuelle  de  musique 
sacrée  »,  qui  paraissait  au  mois  de  janvier  1860, 
sous  la  direction  de  Théodore  Nisard,  auquel,  peu 
après,  succédait  Adrien  de  La  Fage  comme  rédac- 
teur en  chef.  Dans  le  même  temps  paraissait  encore 
un  journal  intitulé  la  Paroisse,  qui,  en  1802,  fusionna 
avec  celui-ci,  de  telle  sorte  que  le  Plain-Chant,  réuni 
à  la  Paroisse,  jugea  bon  d'abandonner  son  titre  pour 
prendre  celui  de  Revue  de  musique  sacrée,  ancienne 
el  moderne,  qui  semblait  faire  revivre  le  recueil  de 
ce  nom  que  Théodore  Nisard  avait  dirigé  pendant 
une  année.  Au  nom  lire  de  ses  rédacteurs  se  trou- 
vaient Georges  Schmitt,  organiste  du  grand  orgue 
de  Saint-Sulpice,  Louis  Roger,  l'abbé  Jouve,  L.  C. 
I.auhens  et  quelques  autres.  Cette  nom  elle  Revue  de 
musique  sacrée  poursuivit  sa  publication  jusqu'en  1870. 

Lors  de  la  rupture  survenue  entre  les  deux  frères 
lïso :r,  rupture  que  nous  avons  signalée  en  par- 
lant de  la  France  musical-',  il  fut  convenu,  à  la 
suite  d'arrangements  pris  entre  eux,  que  l'aîné, 
.Marie,  conserverait  la  propriété  du  journal,  tandis 
que  Léon  resterait  à  la  tête  de  la  maison  d'édition 
musicale.  Mais  quelques  mois  s'étaient  à  peine  écou- 
lés que  Léon,  qui,  mieux  que  personne,  pouvait  ap- 
précier l'importance  et  l'utilité  d'un  journal  attaché 
à  une  maison  de  ce  genre,  songea  à  en  fonder  un 
nouveau  qui  remplacerait  pour  lui  la  France  musi- 
cale. Le  6  décembre  1860,  il  lançait  donc  le  premier 
numéro  de  l'Art  musical,  qu'il  dirigeait  person- 
nellement, ayant  pour  premiers  collaborateurs  Oscar 
('.omettant,  Franz  de  Villars,  Jules  Maurel,  P.  La- 
cohb,  Edmond  Neukomm,  de  Lauzières-Thémines,  aux- 
quels se  joignirent  par  la  suite  E.  Tïioinan,  Albert 
m  Lasallr,  Arthur  Pon.ix  et  P.  Scudo.  Ce  dernier, 
qui  riait  alors  critique  musical  à  la  Rfil  ue  des  Deux- 
Hondes,  n'était  pas  tendre,  dans  ce  recueil  célèbre  et 
fort  lu,  pour  les  œuvres  de  Verdi,  alors  dans  tout 
leur  éolal  au  Théâtre-Italien,  et,  malgré  sa  qualité 
.le  compatriote  du  maître,  ne  laissait  pas  que  de  le 
maltraiter  sans  ménagements.  Or,  Léon  Escudier 
était  précisément  le  propriétaire  et  l'éditeur  en 
France  des  œuvres  de  Verdi,  et  l'on  conçoit  que  les 
attaques  de  Scudo  contre  ces  œuvres  ne  devaient 
pas  lui  plaire.  Que  fit-il?  A  l'aide  d'un  gros  sacri- 
fice d'argent,  il  réussit  à  museler  le  critique  de  la 
Hevne  des  Deux  Mondes  en  l'attachant  à  l'Art  musi- 
cal, et  la  Revue  devint  moins  âpre  dans  ses  appré- 
ciations sur  Verdi  et  sa  musique.  Il  arriva  seulement 
que  la.  Revue,  peu  flattée  de  voir  le  nom  de  son  col- 
laborateur s'étaler  dans  les  colonnes  d'un  simple 
journal  de  musique,  ce  qui  paraissait  déshonorant 
sans  doute  aux  yeux  de  ses  lecteurs,  lui  fit  défense 
de  prostituer  ainsi  sa  signature.  Celui-ci  se  décida 
donc  à  la  couper  en  deux,  et  tandis  que  ces  articles 
de  la  Revue  portaient  le  nom  de  P.  Scudo,  ceux  de 
l'Art  musical  étaient  simplement  signés  P.  Se...  Et 
ainsi,  l'honneur  se  trouvait  sauf. 

L'Art  musical  publia  un  certain  nombre  de  tra- 
vaux intéressants.  Des  études  sur  les  deux  lphigénie 
de  Gluck,  sur  la  Serva  padrona  de  Pergolèse,  par  F. 
de  Villars;  des  souvenirs  de  P.  Scudo  sur  les  chan- 
teurs italiens  célèbres;  les  biographies  de  Bellini  et 
de  Boïeldieu,  une  étude  sur  F.  Halévy  écrivain,  des 
notices  sur  Mercadante,  Pedrotti,  Cagnoni,  par 
Arthur  Pougin;  le  Mémorial  du  Théâtre  Lyrique,  par 


ix;,i; 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Albert  de  Lasalle;  des  notices  sur  le  violiste  Mac- 
gars  et  sur  le  compositeur  Jean  Ockkgiieh  par  E. 
Thoinan;  une  biographie  de  Donizetti,  par  de  Lau- 
zières-Tiiêmines,  etc.  Comme  tanl  d'autres,  l'Art 
musical  dut  interrompre  sa  publication  pendant  les 
événements  de  1870-71;  il  la  reprit  lorsque  Paris 
fut  délivré  de  la  guerre  étrangère  et  de  la  guerre 
civile,  puis,  quand  mourut  son  fondateur,  il  passa 
aux  mains  de  l'éditeur  Alphonse  Leduc,  qui  en 
réduisit  le  format.  Il  vécut  encore  ainsi  quelques 
années,  et  finalement  disparut  aux  environs  de  1880. 

En  186:1,  parurent  les  premiers  Bulletins  de  la 
Société  des  compositeurs  de  musique,  qui  venait  de  se 
fonder  en  1862.  Bien  que  ces  Bulletins  ne  fussent 
pas  destinés  à  pénétrer  jusqu'au  grand  public  (ils 
étaient  tirés  à  cent  exemplaires  réservés  aux  seuls 
membres  de  la  Société,  aussi  sont-ils  aujourd'hui 
absolument  introuvables),  il  n'en  appartiennent  pas 
moins  à  l'histoire  de  la  presse  musicale.  Ils  se  pu- 
bliaient par  les  soins  de  M.  Weckerlin,  bibliothécaire 
de  la  Société,  et  leur  existence  se  prolongea  jus- 
qu'en 1868.  iNon  seulement,  ils  rendaient  compte  des 
Iravaux  de  la  compagnie  en  publiant  les  procès- 
verbaux  de  ses  séances  et  les  rapports  lus  annuelle- 
ment en  Assemblée  générale,  en  donnant  des  notices 
nécrologiques  sur  ceux  de  ses  membres  qui  étaient 
frappés  par  la  mort,  mais  ils  reproduisaient  le  texte 
des  lectures  et  conférences  faites  dans  les  séances 
extraordinaires.  On  y  trouve  ainsi  des  notes  fort 
intéressantes  sur  les  sujets  suivants  :  Histoire  de  la 
chanson,  par  M.  Weckerlin;  Résumé  du  mouvement 
musical  contemporain  en  Allemagne,  par  le  même; 
.Sur  la  musique  des  Arabes,  par  le  même;  Origines 
comparées  dn  chant  et  du  langage,  par  le  même; 
Compositeurs  et.  éditeurs,  par  le  même;  Histoire  de 
l'impression  de  la  musique,  principalement  en  France, 
par  le  même;  Elude  sur  l'origine  et  la  format  i'Oi  de 
l'air,  par  M.  Gevaert;  Expériences  sur  l'étude  optique 
des  sons,  par  M.  Lissajous;  Recherches  des  physiciens 
sur  le  timbre  des  sons  musicaux,  par  le  même;  Confé- 
rence historique  sur  l'art  musical,  par  M.  l'Eus;  les 
Chants  du  Pérou,  par  M.  Oscar  Comettant;  Etude  sur 
la  formation  du  genre  de  musique  religieuse  auquel 
appartiennent  les  séquences,  par  M.  Félix  Clément; 
De  l'accompagnement  du  plain-chant,  par  le  même; 
Considérations  morales  et  historiques  sur  renseigne- 
ment populaire  de  la  musique  en  France,  par  le  même; 
Ethnographie  et  géographie  musicales  :  l'Espagne,  par 
M.  P.  Lacome;  La  Musique  au.r  onzième,  douzième, 
treizième  siècles,  par  M.  Gevaert;  Observations  sur 
le  mode  mineur,  par  M.  Charles  Poisot;  Considéra- 
tions sur  le  professorat  musical  abandonné  à  la  volonté 
individuelle,  par  M.  Poi-ulus.  11  est  regrettable  que 
la  Société  des  compositeurs  ail  renoncé  à  la  publi- 
cation de  ces  Bulletins,  qui  formeraient  aujourd'hui 
un  recueil  de  documents  originaux  et  précieux. 

A  enregistrer  ensuite  la  Semaine  musicale,  fondée 
en  186a  par  un  compositeur  amateur,  Banault  de 
Saint-Andréa  (qui  publia  quelques  mélodies  sous  le 
pseudonyme  d'Andréas  Balken),  avec  Louis  Uoger 
comme  rédacteur  en  chef,  journal  d'une  valeur 
médiocre,  et  dont  l'existence  se  prolongea  obscuré- 
ment pendant  environ  trois  années.  Dans  le  même 
temps,  c'est-à-dire  au»si  en  186.:j,  paraissait  la  Chro- 
nique musicale,  «  résumé  des  faits  et  nouvelles  de 
l'art,  paraissant  le  1er  et  le  16  de  chaque  mois  », 
sous  la  direction  de  J.-P.  Moschelès  (pseudonyme 
d'Adolphe  Papin).  Excellent  petit  journal,  aussi  bien 
fait  qu'il  affichait  peu  de  prétentions,  qui  se  publiait 


d'abord  dans  le  format  in-folio,  et  à  partir  de  1868 
sous  la  forme  d'une  brochure  in-octavo.  11  vécut  jus- 
qu'en 1870. 

A  citer  encore,  pour  mémoire,  le  Courrier  musical , 
qui  parut  pour  la  première  fois  le  21  mars  1867,  et 
dont  la  courte  existence  se  termina  avec  son  cin- 
quième numéro.  Il  était  dirigé  cependant  par  un 
musicien  instruit,  M.  Félix  Grenier,  à  qui  l'on  dut, 
par  la  suite,  de  bonnes  traductions  annotées  du  livre 
de  FoRKEi,  sur  Jean-Sébastien  Bach,  de  celui  de  Fer- 
dinand Hiller  sur  Félix  Mendelssohn-Bartholdy  etc. 

Une  publication  assez  singulière,  parce  qu'elle 
était  irrégulière  et  intermittente,  était  le  Bibliogra- 
phe musical,  publié  par  Pothier  de  Lalaine,  avec  le 
concours  de  MM.  Gustave  Bertrand,  Weckerlin, 
Arthur  Pougin,  Tr.  Thoinan,  H.  Lavoix  fils,  Charles 
Poisot,  Gustave  Choiquet,  Populus,  Charles  Nuitter. 
Ce  petit  recueil  paraissait  par  cahiers  petit  in-8°.  Il 
y  en  eut  une  vingtaine,  puis  il  disparut  discrète- 
ment. 

Tout  autre  était  la  Chronique  musicale,  deuxième 
du  nom,  fondée  en  1873  (1er  juillet)  et  dirigée  par 
M.  Arthur  Heilhard.  Celle-ci  se  présentait  comme 
une  publication  sérieuse  et  somptueuse,  richement 
illustrée,  paraissant  tous  les  quinze  jours  sous  forme 
de  revue,  et  dont  la  collection  reste  précieuse  à 
consulter.  En  dehors  de  la  critique  courante,  qui  y 
était  traitée  avec  largeur,  ou  y  trouve  nombre  de 
travaux  historiques  et  biographiques  d'un  vif  intérêt 
et  d'une  incontestable  valeur,  accompagnés  de  docu- 
ments graphiques  et  de  reproductions  musicales  qui 
en  doublent  l'importance.  Ces  travaux  portaient  la 
signature  des  écrivains  musicaux  les  plus  connus  et 
les  plus  autorisés,  comme  on  peut  le  voir  par  cette 
liste  de  quelques-uns  d'entre  eux  :  La  presse  musicale 
en  France,  Louis  Constantin  roi  des  violons,  par  E. 
Thoinan;  Les  fondateurs  de  l'opéra  fiançais,  par  P. 
Lacome;  Les  origine*  de  V opéra-comique,  La  salle  de 
spectacle  des  Tuileries,  Deux  opéras  révolutionnaires 
de  Grétry,  Les  décors  et  les  machines  de  l'Opéra,  par 
Charles  N.uitteh  ;  André  Philidor,  Le  Cousin-Jacques, 
Le  thê(ttre  de  l'Athénée,  Lully,  Les  théâtres  à  Paris 
pendant  la  Révolution,  Partant  pour  la  Syrie,  par 
Arthur  Pougin  ;  Un  peu  de  musique  russe.  Une  visite  au 
Conservatoire  de  Bruxelles,  par  Gustave  Bertrand; 
L'histoire  en  chansons,  par  J.-B.  Weckerlin;  Laum 
Rossi,  La  veuve  et  la  sonir  de  Mozart,  J.-C.-H.  Rinck, 
par  Ernest  David;  JeanMonnet,  par  Arthur IIeclhahd; 
Le  théâtre  de  madame  de  Pompadour,  Les  spectateurs 
sur  le  théâtre,  Les  costumes  de  théâtre.  Les  commen- 
cements de  Spontini,  par  Adolphe  Jullien;  Quinault, 
par  Daniel  Bernard;  les  Noêls  de  Nicolas  Saboly,  Cas- 
til-Blaze,  par  Charles  Soullier;  Hygiène  de  la  voix, 
par  le  D'Mandl;  Michel  Haydn,  Le  chevalier  Sigis- 
mond  Neukomm,  par  Edmond  Neukoum;  Des  condi- 
tions économiques  de  la  musique  et  du  théâtre  en 
France,  par  J.  de  Filippi;  Les  traités  de  contrepoint 
et  de  fugue  an  dix-neuvième  siècle,  Lays,  par  Henri 
Cohen;  Les  cantatrices  draina  tiques,  par  Paul  Fou- 
chbr  ;  La  musique  à  la  Comédie- Française,  par  Jules 
Bonnassies;  Naissance  et  développement  des  chants 
populaires,  De  la  musique  dramatique,  Rossini,  Beetho- 
ven et  l'école  italienne  contemporaine,  par  Louis 
Lacohbe;  La  musique  en  Suède.  L'école  de  l'orchestre, 
par  Maurice  Cristal;  La  musique  dans  l'imagerie  du 
moyen  âge,  par  H.  L.woix  fils;  Les  airs  a  danser  de 
l'ancienne  école  française,  Les  archives  et  la  bibliothè- 
que de  l'Opéra,  par  Théodore  de  Lviarte;  Les  soupirs 
d'une  flûte,  par  A.  Tiiihner;  Le  mécanisme  vocal  et 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  BT  PÉDAGOGIE 

léchant,  par  Mme  Andrée  Lacombk;  Les  instruments  à 
archet  à  l'Exposition  de  Vienne  de  1873,  par  .1.  Gal- 
lay,  etc.,  etc.  L'existence  de  ce  recueil  superbe,  qui 
fut  un  modèle  en  sou  genre  et  sous  tous  les  rap- 
ports, fut  malheureusement  trop  courte  ;  par  suite 
d'incidents  divers,  elle  n'alla  guère  au  delà  de  sa 
troisième  année. 

Il  n'y  a  vraiment  rien  à  dire  d'une  sorte  de  petit 
pamphlet  musical  bimensuel  intitule  les  Doubles 
Croches  malades,  «  mélanges  de  critique  musicale  », 
qu'Alexis  Azbvedo  essaya  de  faire  paraître  dans  les 
premiers  mois  de  1874,  sous  forme  de  petites  bro- 
chures in-18  semblables  à  la  Lanterne  de  Rochefort. 
Cela  n'avait  aucune  valeur,  et  l'auteur,  devant  la 
complète  indifférence  du  public,  eut  bientôt  fait  de 
renoncer  à  une  entreprise  qui  fût  devenue  ruineuse. 
Le  premier  numéro  des  Doubles  Croches  malades  por- 
tail la  date  du  4  avril  1874,  le  dernier  celle  du  20  dé- 
cembre de  la  même  année. 

Deux  ans  plus  tard,  le  3  juin  1876,  paraissait  le 
Journal  de  musique,  publication  hebdomadaire  dont 
l'éditeur  était  Paul  Dalloz,  directeur  du  Moniteur 
universel,  et  le  rédacteur  à  peu  près  unique  Armand 
Gouzien,  commissaire  du  gouvernement  près  du  Théâ- 
tre-Lyrique, que  ses  fonctions  mêmes  obligeaient 
à  masquer  sa  personnalité.  Sans  conséquence  et 
peu  intéressant,  ce  journal  n'était  guère  autre  chose 
qu'une  sorte  de  recueil  anecdotique  sur  la  musique 
et  les  musiciens,  dont,  à  coups  de  ciseaux,  il  puisait 
les  éléments  à  droite  et  à  gauche,  dans  les  journaux 
et  dans  les  livres,  en  y  joignant  les  nouvelles  et  les 
cancans  du  jour.  La  lecture  dece./ouriid/  de  musique 
ne  pouvait  rien  apprendre  à  personne,  et  c'est  en 
vain  qu'on  aurait  cherché  dans  ses  colonnes  quelque 
travail  utile,  sérieux  et  intéressant  sur  un  sujet  quel- 
conque de  l'histoire  de  l'art. 

Puis  vint,  sous  la  direction  de  M.  Arthur  Pougin, 
la  Revue  de  la  musique  (21  octohre  1876),  dont,  par 
suite  de  circonstances  particulières,  l'existence  ne 
dépassa  pas  la  moitié  d'une  année,  bien  que  la 
publication  fût  très  soignée  au  point  de  vue  artis- 
tique et  très  élégante  au  point  de  vue  matériel.  Ce 
journal  parut  d'abord  sous  le  titre  de  la  Musique; 
mais  il  dut  changer  de  titre  dès  son  deuxième  nu- 
méro, pour  obéir  à  certaines  revendications,  et  pour 
éviter  certaines  difficultés  qui  nuisirent  à  son  expan- 
sion, en  dépit  de  son  caractère  neuf  et  du  bon  ac- 
cueil qu'il  avait  reçu  du  publia. 

Dans  un  autre  genre,  on  vit  naître,  le  16  novem- 
bre 1878,  la  Revue  du  monde  musical  et  dramatique, 
recueil  un  peu  frivole,  non  dénué  de  quelque  inté- 
rêt, mais  fait  un  peu  à  la  diable,  sans  plan  rationnel 
et  sans  idées  générales,  qui  vécut  environ  deux  an- 
nées. Il  avait  pour  directeur  Armand  Roux,  époux 
d'une  aimable  cantatrice,  Mme  Brunet-Lafleur  (plus 
tard  Mmi!  Lamoureux),  et  comptait  dans  sa  rédaction 
MM.  Armand  Silvestre,  Georges  Duval,  Arthur 
Pougin,  Léon  Kerst,  H.  Lavoix  fils,  Jacques  Hermann 
(Mmc  Madeleine  Pidoux),  Théodore  de  Lajarte,  Ed- 
mond Stoullig,  Alfred  Le  Roy,  etc. 

Un  journal,  qui  s'était  annoncé  avec  quelque  fra- 
cas comme  devant  le  défenseur  et  le  porte-drapeau 
de  la  jeune  école  française,  et  dont  le  litre,  la  Re- 
naissance musicale,  semblait  indiquer  les  tendances, 
lançait  son  premier  numéro  le  6  mars  1881,  sous  la 
direction  de  M.  Kdmond  Hippeau,  un  écrivain  qui, 
depuis,  entra  dans  la  carrière  diplomatique  après 
avoir  publié  deux  livres  consacrés  à  Berlioz  (Berlioz 
intime,  Berlioz  et  son  temps).  Mais,  du  premier  coup, 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    3857 

ce  journal  prenait  position  comme  organe  surtout 
et  particulièrement  wagnérien,  ce  qui  lui  attirait 
aussitôt  de  la  part  de  Saint-Saens,  dont  il  avait  sol- 
licité la  collaboration,  la  lettre  caractéristique  que 
voici  : 


«  Monsieur  et  cher  confrère, 

«  Lorsque  vous  m'avez  demandé,  il  y  a  quelque 
temps,  ma  collaboration  pour  la  Renaissance  musi- 
cale, je  vous  l'ai  donnée  à  la  condition  que  votre 
journal  serait  franchement  et  sans  arrière-pen- 
sée l'organe  de  la  jeune  école  française,  et  que 
les  questions  concernant  les  écoles  étrangères  n'y 
seraient  traitées  qu'au  second  plan  et  à  titre  de  ren- 
seignements, vous  avertissant  de  mon  intention  de 
me  séparer  de  vous  avec  éclat,  si  je  m'apercevais 
qu'il  en  fût  autrement. 

«  Je  reçois  votre  programme,  et  je  me  vois  forcé 
de  me  séparer  de  vous  dès  le  premier  numéro.  A 
la  cinquième  ligne,  je  lis  le  nom  de  Wagner,  et  c'est 
en  vain  que  j'y  cherche  celui  de  Gounod  :  il  n'y 
brille  que  par  son  absence.  Vous  inscrive/,  en  lettres 
d'or,  en  haut  de  votre  drapeau,  Tannhàuser  à  côté 
des  Troyens,  et  vous  n'ayez  pas  une  place  pour  Faust. 
Nul  n'ignore  que  l'auteur  du  Tannhàuser  a  été  blessé 
au  plus  haut  point  de  l'accueil  que  l'Allemagne  a  fait 
à  Faust,  et  que  ses  fidèles  affectent  pour  cette  œuvre 
un  souverain  mépris.  Il  y  a  là  une  fâcheuse  coïnci- 
dence. 

«  Un  journal  de  musique  dévoué  à  la  jeune  école 
française  ne  saurait  oublier  les  services  que  M.  Gou- 
nod a  rendus  à  cette  école,  la  lutte  si  longue,  et  à  la 
fin  victorieuse,  que  celte  belle  partition  de  Faust 
a  soutenue  en  France  et  dans  le  monde  entier. 
L'oublier,  c'est  être  ingrat  et  trahir  la  cause  qu'on 
prétend  servir.  Y  avez-vous  songé?  Je  ne  le  pense 
pas,  et  c'est  pourquoi  je  crois  devoir  vous  en  avertir 
et  refuser  de  m'engager  avec  vous  dans  une  voie  où 
nous  marcherions  ensemble,  j'en  suis  convaincu, 
mais  où  nous  ne  marcherions  pas  du  même  pas. 

«  Ah  !  il  fui  un  temps,  qui  n'est  pas  encore  bien 
éloigné  de  nous,  où  il  était  beau  d'être  wagnérien. 
Richard  Wagner  était  méconnu  en  Allemagne  plus 
encore  que  partout  ailleurs;  son  nom  signifiait  pro- 
grès, audace,  bataille  livrée  à  la  routine.  Sa  cause 
était  celle  de  tous  ceux  qui  pensent,  qui  voient  et 
qui  espèrent.  Sa  musique  était  la  musique  de  l'avenir. 

«  La  situation  est  bien  changée.  L'Allemagne  a 
adopté  les  œuvres  de  Wagner,  elle  les  exécute  con- 
tinuellement et  les  répand  dans  le  monde  entier. 
De  tous  les  points  du  globe,  on  est  venu  à  Bayreuth 
assister  aux  représentations  de  la  Tétralogie,  Partout 
où  il  y  a  des  Allemands,  fût-ce  au  bout  du  monde, 
on  organise  des  comités  Wagner  qui  donnent  des 
concerts,  réunissent  des  fonds  pour  l'œuvre  de  Bay- 
reuth, opèrent  une  pression  pour  faire  monter  dans 
les  théâtres  l'œuvre  du  maître.  La  musique  de  l'ave- 
nir sera  bientôt,  si  cela  continuera  musique  dupasse. 
Or,  Richard  Wagner  a  conquis  le  monde,  mais  il 
n'a  pas  conquis  la  France;  il  ne  s'en  console  pas, 
ce  que  je  comprends,  et  les  Allemands  intelligents 
feront  tout  au  monde  pour  travailler  à  cette  con- 
quête. Qu'ils  y  travaillent,  soit;  mais  qu'ils  cherchent 
d'autres  que  moi  pour  les  y  aider. 

«  Je  serai,  tant  qu'on  voudra,  pour  Wagner  contre 
Brahms,  pour  Wagner  contre  Verdi  ;  pour  l'Allemagne 
contre  la  France,  jamais.  Mes  prédilections  musi- 
cales ne  me  feront  jamais  oublier  que  si  l'art  n'a  pas 
341 


3»*>N 


EKCYC.LOh-ÈDIE  DE  LA  MUSIQUE  ETfDICTIOMNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


de  patrie,  les  artistes  pu  oui  une,  et  qu'il  ne  eomneat 
pas  à  l'école  française  de  s'abriter  en'Krance  sous 
la  protection  d'uci  étranger. 

«  Veuillez  itgréer,  Monsieur  et  cher  confrère,  l'as- 
surance de  mou  entière,  sympathie. 

«  C.  Saist-Saëns.  » 


Malgré  le  bruit  qu'elle  s'elforcait  de  l'aire  autour 
d'elle,  ïtTheniinisftncè  mvcmeale  ne  vécut  giiere__au 

delà  de  deux  années. 

Six  mois  après'  là  lienaissance  musicale,  le  20  oc- 
tobre 1881,  paraissait,  sous  la  direction  de  M.  Arthur 
Pol'gin,  un  lourual  qui  se  présentait  dans  des.,  con- 
ditions nouvelles  et  particulières,  la  Musique  popu- 
laire, journal  méritant  son  titre  el  par  lajfaçon  dont 
il  était  compris  et  par  le  prix  auquel  il  était  offert 
au  public.  La  Musique,  populaire  paraissait  par  huit 
pages  de  texte  illustrées  el  huit  pages  de  musique, 
au  prix  de  13  centimes  le  numéro.  La  rédaction  s 'ef- 
forçait de  répondr  ■  à  son  titre  en  popularisant,  dans 
le  bon  sens  du  mot,  les  connaissances  relatives  à 
l'histoire  de  l'art  et  des  artistes,  en  variant  les  sujets 
autant  qu'il  était  possible,  et  en  tenant  le  lecteur  au 
courant  de  tous  les  faits  qui  pouvaient  l'intéresser. 
Quant  à  la  partie  musicale  proprement  dite,  elle 
comprenait  des  morceaux  de  chant,  ou  de  piano,  ou 
de  violon,  d'auteurs  contemporains,  souvent  inédits, 
auxquels  se  joignaient  (el  c'était  là  le  coté  neuf)  des 
fragments  d'opéras  classiques  dont  il  n'existait  point 
de  partitions  au  piano,  qui,  par  conséquent,  étaient 
inconnus  de  la  masse  du  public;  ces  fragments, 
choisis  avec  le  plus  grand  soin  dans  les  œuvres  de 
Campra,  de  Puiudor,  de  Sacchini,  de  Piccinni,  de 
Dezèdes,  de  d'Alayrac,  de  Méiiul,  de  Beuton,  de 
Solié,  etc.,  se  présentaient  avec  un  accompagnement 
de  piano  dont  la  réduction  était  faite  expressément 
pour  ce  journal.  Le  succès  ne  pouvait  manquer  d'ac- 
cueillir une  publication  de  ce  genre.  Aussi,  dés  1rs 
premiers  jours,  son  tirage  effectif  s'élevait  à  plus  de 
quinze  mille  exemplaires.  Malheureusement,  au 
bout  d'une  année  environ,  de  nouveaux  éditeurs 
voulurent  imposer  à  celte  publication  des  conditions 
nouvelles  qui  en  changeaient  complètement  la  na- 
ture et  qui  amenèrent  la  retraite  du  rédacteur  en 
chef.  A  celui-ci  succédèrent  MM.  Alphonse  B\rai.lf, 
Bailly,  etc.;  le  journal  perdit  sa  raison  d'être, 
échangea  son  titre  contre  celui  de  la  Musique  des 
jauni  s  .  périelita  peu  à  peu  et  finit  par  disparaître. 
En  1889,  un  facteur  de  pianos,  Edouard  Manceot, 
fonda  le  Monde  musieal,  journal  destiné  particuliè- 
rement, dans  sa  pensée,  à  être  l'organe  de  la  fac- 
ture instrumentale,  mais  qui,  peu  à  peu,  lit  une 
large  place  aux  comptes  rendus  des  concerts.  Au- 
jourd'hui dirigé  par  le  fils  de  son  fondateur,  I"  Won&e 
musical  insère  également  des  articles  d'esthétique 
musicale. 

Le  Courrier  musical  a  été  fondé  en  1898  par 
M.  Albert  Diot,  puis  eut  pour  direcleur  M.  René 
Doirf.  C'est,  une  revue  mensuelle,  abondamment 
iHuslrée,  dont  le  programme  se  rapproche  de  celui 
du  Monde  musical,  sous  cette  réserve  qu'une  plus 
grande  place  y  est  réservée  à  l'esthétique  ainsi  qu'à 
l'histoire  de  la  musique. 

La  Tribune  de  Saint-Gervais,  foudre  en  189S  par 
GharîfiS  Bordes,  est  l'organe  trimestriel  de  la  Schola 
tientoficm.  tes  Tablettes  de  la  Sekola  en  sont  le  sup- 
plément mensuel,  qui  contient  les  communications 
relatives  à  l'enseignement  de  l'école  et  de  ses  suc- 


cursales, ainsi  qu'à  leurs  manifestations  artistiques, 
accompagnées  de  brefs  articles  de  critique  ou  d'es- 
thétique. La  Tribune  de  Saint-Gervais  se  consacre 
spécialement  à  la  musique  liturgique,  telle  que  l'ont 
définie  les  décrets  pontificaux  de  190î  :  chant  gré- 
gorien et  polyphonie  vocale  a  ëapeMa. 

En  1001,  après  le  Congrès  d'histoire  delà  musique 
tenu  l'année  précédente  à  l'Exposition,  Jules  Comba- 
rieu  fonda  la  Revête  musicale,  dont  il  fnt  le  directeur, 
M.  Louis  Laloy  assumant,  sans  le  tilre,  les  fonctions 
de  rédacteur  en  chef.  Cette  revue  mensuelle  avait 
pour  objet,  sans  se  désintéresser  de  l'aclualité, 
d'offrir  l'espace  qui  leur  était  nécessaire  aux  travaux 
historiques  des  savants  français  et  étrangers.  Elle  a 
duré  jusqu'à  la  mort  de  M.  Coihiariei-,  survenue 
en  1907. 

En  1905,  M.  Laloy  se  sépara  de  M.  Comrarieu  pour 
fonder,  avec  la  collaboration  de  M.  Jean  Marnold  et 
l'assistance  d'un  comité  de  rédaction  composé  de 
MM.  Pierre  Al-rry,  Henry  Cu-tiuer-Villars,  Lionel 
de  la  Laurencie,  Romain  Rolland,  le  Mercure  musical, 
qui,  en  1907,  vint  s'associer  à  la  revue  S.  7.  M.,  pu- 
blication française  de  la  Société  internationale  de 
musique,  dont  avait  pris  l'initiative  M.  Jules  Ecor- 
chevtlle.  Le  programme  de  l'une  et  l'autre  revue 
était  celui  de  leur  aînée,  avec  un  goût  plus  décidé 
pour  la  musique  nouvelle.  En  1911,  le  Courrier  nm- 
sical  entrait  à  sou  tour  dans  l'association.  Mais  la 
guerre,  où  Jules  Ecorcheville  fut  tué  en  février  1916, 
mit  fin  à  l'existence  de  S.  /.  .If.  Le  Courrier  musical 
a  aujourd'hui  repris  son  indépendance,  el  deux  re- 
vues ont  succédé  à  S.  I.  M.  :  d'abord,  la  Revue  de 
Musicologie,  ancien  Bulletin  de  la  Société  française  de 
Musicologie,  fondé  en  1917  par  M.  Lionel  de  la  l..u- 
rencie,  revue  trimestrielle  qui  se  consacre  exclusive- 
ment à  la  musique  ancienne,  puis  la  Revue  musiatie, 
fondée  en  1920  el  dirigée  par  M.  Henry  Priwiéres. 
C'est  une  puhlication  mensuelle,  et  illustrée.  Citons 
encore  l'Année  musicale,  due  à  la  collaboration  de 
Michel  Brenet,  Jean  Chant.woine,  Louis  Laloy  et 
Lionel  de  la  Lai'reniïpe,  qui,  de  1911  à  1914,  donna 
d'importants  articles  d'histoire  et  de  critique  musi- 
cales. 

La  Revue  Pleyel,  devenue  la  revue  Musique,  et  au- 
jourd'hui disparue,  insérait,  comme  la  Renie  musi- 
cale, des  articles  d'histoire  et  de  critique,  également 
illustrés,  et  paraissait  chaque  mois,  avec  M.  Marc 
Pincherle  pour  rédacteur  en  chef. 

le  Ménestrel,  dont  il  a  été  question  plus  haut,  a 
aujourd'hui  pour  directeur  M.  Jacques  IIf.ucel  et 
parait  chaque  semaine,  avec  un  ou  deux  articles 
d'histoire  ou  d'esthétique,  et  des  comptes  rendus 
variée. 

Dans  les  principaux  journaux  quotidiens,  la  cri- 
tique musicale  est  exercée  de  la  façon  suivante: 

Cunaiia  :  Pierre  Lu...  Paul  la   Flbm. 
Journal  iet  Débats  :  Henri  du  Çqbzon. 
Echo  ie  Paris  :  Adolphe  Bosch'ot. 
Ere  novttlle     Louis  Laloy. 
Exeelsior  .  Emile  Voim**mo2. 
fïjwo  .-  p.-B.  ioua-m. 
Information  .  Louis  Schneider. 
[nlransigeanl  :  G.  Brict. 
Lit-crti  :  R.  Kbmp. 
(Mutrv  :  R.  Brossbi.. 
Çaris-Uidt  :  André  Ccsi  roy. 

Pi ■ 

Temps  :  Henry  Mm.iikrhe. 

Parmi  lescritiques  des  revues, on  peut  filer  MM.  Ca- 
mille BELLMOTBà  la  Revue  des  J)e«.r  Mondes.  Maurice 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTES  SUR  LA  PRESSE  MUSICALE    3859 


Brillant  au  Correspondant,  Raymond  Bouyer  à  la 
Revue  bleue,  FI.  Schsiitt  à  la  Revue  de  Franc?,  G.  Au- 
ric  aux  Annales,  A.  George  aux  Nourelles  littéraires. 

Le  mouvement  contemporain  de  la  presse  musi- 
cale à  Paris  se  complète  avec  la  Bibliographie  musi- 
cale française,  «  publiée  par  la  chambre  syndicale; 
des  éditeurs  de  musique  »,  et  qui  est,  au  point  de 
vue  spécial,  l'analogue  de  la  Bibliographie  de  la 
France,  et  avec  le  Petit  Poucet,  «  journal  des  concerts 
militaires  »,  gentille  petite  revue  fondée  en  1893  par 
M.  Henri  Radiguer,  faite  en  son  genre  avec  beau- 
coup de  goût  et  qui,  depuis  1905,  a  échangé  sou 
titre  contre  celui  de  l'Art  musiml  populaire,  «  organe 
de  l'Ecole  de  chant  choral  et  de  l'Harmonie  des  an- 
musiciens  de  l'armée  ».  On  ne  peut,  ensuite,  que 
mentionner  les  titres  de  quelques  journaux  peu 
importants,  fondés  en  ces  dernières  années  et  dont 
l'existence  a  été  éphémère  :  la  Presse  musicale  (1901), 
la  Vie  musicale  (1902),  Paris  musical  (1904),  l'Echo 
musical  (1904),  l'Echo  des  orchestras,  etc. 

Pour  être  complet,  il  faudrait  signaler  aussi  les 
nombreux  journaux  orphéoniques  qui,  depuis  un 
demi-siècle,  se  sont  efforcés  de  suivre  ou  de  guider 
le  mouvement  des  sociétés  musicales,  soit  vocales, 
soit  instrumentales,  qui  couvrent,  la  surlace  du  ter- 
ritoire. La  plupart  sont  des  organes  d'éditeurs  ou  de 
facteurs  d'instruments,  et  il  en  est  peu  qui  cherchent 
à  engager  l'Orphéon  dans  une  voie  véritablement 
artistique  par  la  régénération  et  l'élévation  de  son 
répertoire.  Il  serait  impossible'de  dr  isser  la  liste  de 
tous  les  journaux  de  ce  genre  qui  ont  vu  le  jour 
depuis  une  cinquantaine  d'années  et  dont  certains 
n'ont  l'ait  que  naître  et  mourir.  Nous  nous  bornerons 
à  rappeler  les  titres  de  quelques-uns  d'entre  eux  ; 
l'Orphéon,  fondé  par  Eugène  Delaporte  vers  1854; 
le  Journal  <les  sociétés  musicales  (1854);  l'Echo  des 
Orphéons,  dirigé  par  i.khauer  (1860);  lu  Franc-  cho- 
rale (1862),  avec  J.-F.  Vai  dix  pour  directeur,  et  pour 
collaborateurs  Camille  de  Vos,  Charles  Coligv,  ,  etc.  ; 
l'Union  chorale  de  Fui  is.  de  Charles  Soi  llieis  (1862); 
l'Orphéon  illusirê  (18631;  le  Moniteur  de  l'Orphéon, 
d'Alfred  Le  Roy  (1866);  le  Monde  orphéonique,  etc. 

La  province  a  voulu  parfois,  elle  aussi,  prerMre  sa 
part  du  mouvement  de  la  presse  musicale;  mais, 
pour  diverses  raisons  qu'il  serait  peut-être  difficile 
d'apprécier,  elle  n'a  jamais  réussi  à  faire  viv;e   un 


journal  sérieux.  On  comprend  que,  sous  ce  rapport, 
les  renseignements  seraient  malaisés  à  réunir,  et 
que  nous  ne  saurions  avoir  la  prétention  d'être 
complet.  Nous  nous  bornerons  donc  à  grouper  ici 
les  titres  de  quelques  feuilles  musicales  parues  en 
province  et  qui  sont  venues  à  notre  connaissance. 
La  plus  ancienne,  dont  nous  puissions  faire  mention, 
est  le  Troubadour  Provençal,  fondé  en  1833  à  Avignon 
par  Charles  Soullier,  et  dont  l'existence  ne  dépassa 
pas  une  année.  En  1838,  un  marchand  de  musique 
de  Lyon,  Renacci,  fit  paraître  un  journal  intitulé  le 
Trouiùrc,  qui  reproduisait  à  peu  près  exactement 
l'aspect  et  la  physionomie  de  la  France  musicale.  En 
1862,  on  vit  à  Strasbourg  l'Écho  du  Rhin,  «  journal 
de  l'Association  des  sociétés  chorales  d'Alsace  »,  et 
en  1860,  un  prêtre,  l'abbé  Bressieux,  publiait,  à  Avi- 
gnon, le  Moniteur  des  chantres.  Puis  ce  fut,  à  Mar- 
seille, en  1876,  un  très  intéressant  Journal  musical, 
qui  vécut  trois  années  et  qui  avait  pour  collabora- 
teurs MM.  Alexis  Rostand,  Auguste  Morel,  Cari  Cis- 
ve.n.n  (Charles  VincensI,  Félix  Grenier,  L.  Daithjn, 
Charles  Domergue,  H.  de  Varlène,  Ernest  Redon, 
J.  Desaix,  A.  Dethou  et  Marcel  Glim  En  1877,  Anatole 
Loquin,  qui  rédigeait  le  feuilleton  musical  de  la 
Gironde  sous  le  pseudonyme  de  Paul  Lavigne,  publia 
à  Bordeaux,  sous  le  titre  de  la  Musique  a  Bordeaux, 
une  revue  très  substantielle,  qu'il  dut  abandonner 
après  de»x  années  d'efforts.  Peu  après,  paraissait  à 
Angers  le  Bulletin  officiel  de  I  \s-ocialinn  artistn/uc 
des  concerts  populaires  d'Angers,  dirigé  par  Jules 
Bordier,  fondateur  de  cette  association.  (Après  la 
mort  de  Jules  Bohdier  et  la  dislocation  des  Concerts 
populaires,  ceux-ci  furent  réorganisés  par  son  ami 
KL  le  comte  Louis  de  Romain,  qui  a  repris  aussi  la 
publication  du  journal  sous  le  nouveau  titre  d'  In- 
gers  artiste.)  On  vit  paraître  ensuite,  à  Rennes,  le  Son- 
neur de  Bretagne,  dirigé  par  M.  Charles  Collin,  à 
Lille,  la  Semaine  musicale,  fondée  par  M.  François, 
éditeur  de  musique,  à  Valenciennes,  le  Bulletin  mu- 
sical (1888),  à  Reims,  Sainte-Cécile,  fondée  par 
M.  Mennesson,  éditeur  de  musique  (1801).  Tous  ces 
journaux  ont  bieutùt  disparu.  Le  dernier  en  date, 
la  Revue  musicale  de  Lyon,  fondée  en  1903  et  dirigée 
par  M.  Léon  Vallas,  a  duré  jusqu'à  la  guerre. 

Arthur  POTJGIN. 


THÉÂTRES  ET  SALLES  DE  CONCERT 


Par  Victor  BLAVETTE 


"Il  MU        I.KS     I.VIIM'     •  1-. 


L'élude  des  monuraeuts  antiques  et  des  vestiges 
des  civilisations  anciennes  antérieures  à  l'époque 
hellénique  n'a  pas,  jusqu'à  présent,  révélé  l'existence 
de  constructions  spécialement  disposées  pour  des 
auditions  musicales.  Les  nombreuses  recherches 
exécutées  en  Egypte  depuis  plus  d'un  demi-siècle  et, 
plus  récemment,  en  Chaldée,  n'ont  rien  fait  con- 
naître à  ce  sujet;  celles,  plus  récentes  encore,  entre- 
prises sur  l'emplacement  des  cités  assyriennes  n'ont 
amené  la  découverte  d'aucun  vestige  de  dispositions 
architecturales  spécialement  conçues  en  vue  de  re- 
présentations théâtrales  ou  d'auditions  musicales. 
Bien  ne  permet  de  prévoir  ce  que  l'avenir  et  les  dé- 
couvertes futures  réservent  à  ce  sujet. 

Les  récits  déclamés  et  chantés  furent  probablement 
l'un  des  premiers  procédés  d'instruction  des  masses 
imaginés,  dès  que  les  agglomérations  se  formèrent, 
et  ces  récits  vrais  ou,  plus  souvent,  fabuleux  furent 
l'un  des  principaux  moyens  mis  en  action  pour  créer 
le  patriotisme,  exaller  les  prouesses  des  chefs,  exci- 
ter à  la  haine  des  ennemis  et  provoquer,  plus  que 
l'attrait  du  butin  et  des  terres  à  conquérir,  ces  expé- 
ditions lointaines  dont  le  souvenir  compose  presque 
exclusivement  la  primitive  histoire. 

Il  est  bien  rare,  qu'à  défaut  de  constructions,  les 
dispositions  naturelles  du  terrain  n'aient  pas  pré- 
senté, sauf  peut-être  sur  les  bords  immédiats  des 
grands  tleuves  et  dans  les  basses  vallées,  des  sortes 
de  conques  ou  d'amphithéâtres  naturels  permettant 
au  peuple  de  se  grouper  autour  des  premiers  bardes 
dépositaires  des  souvenirs  lointains.  C'est  dans  les 
dispositions  naturelles  du  terrain,  indiquées  par 
l'expérience  et  d'accord  avec  les  besoins  de  la  vue 
et  de  l'accoustique,  qu'il  faut  rechercher  l'origine 
des  premiers  théâtres  connus. 

Les  premiers  auditeurs  se  contentèrent  de  la  pente 
naturelle  du  terrain  et  conservèrent  ses  irrégulari- 
tés; d'autres,  plus  raffinés,  taillèrent  des  gradins  sur 
cette  pente  et  dressèrent  la  partie  du  sol  destinée  aux 
rôcitateurs  et  aux  chanteurs;  d'autres  encore,  plus 
laborieux  ou  plus  exigeants,  firent  appel  à  la  géomé- 
trie pour  corriger  ce  que  la  nature  avait  laissé  d'ir- 
régulier  et,  plus  tard,  à  l'architecture  pour  compléter 
le  tout  par  des  constructions. 

Ces  sortes  de  conques  commençant  au  bas  des 
coteaux  se  présentent  presque  toujours  de  manière 
à  offrir  à  ceux  qui  les  occupent  une  vue  étendue  soit 
sur  la  plaine  qui  leur  fait  suite,  soit  sur  la  mer,  lors- 
qu'elles ne  sont  qu'à  quelque  distance  du  rivage. 

Ce  premier  décor,  complément  naturel  des  récits 
déclamés  ou  chantés,  pouvait  permettre,  avec,  en 
quelque   sorte,   ligure    à   l'appui,  l'invocation  des 


plaines  tantôt  couvertes  de  riches  moissons,  tantôt 
foulées  par  les  aimées,  des  sombres  forêls,  des  loin- 
taines montagnes  ou  de  la  mer  propice  aux  péril- 
leuses courses  vers  les  rivages  inconnus. 

L'énumération  serait  longue  des  théâtres  auxquels 
la  nature,  avec  ses  perpétuelles  transformations,  a 
fourni  les  plus  somptueux  et  les  plus  variés  des  dé- 
cors. Citons  seulement  :  celui  d'Argos,avec  sa  plaine 
et  le  port;  celui  d'Epidaure,  avec  le  sanctuaire  d'Es- 
culape  au  premier  plan  et  les  montagnes  au  fond; 
celui  d'Athènes,  avec  aussi  la  plaine  et  la  mer;  celui 
de  Taormina,  peut-être  le  plus  splendidement  situé 
et  d'où  la  vue  embrasse,  à  la  fois,  une  grande  éten- 
due de  mer  et  la  masse  imposante  de  l'Etna;  celui 
d'Orange,  avec  la  belle  vallée  du  Rhône,  etc. 

Ce  n'est  que  tard  qu'on  construisit  les  hauts  murs 
enveloppant  les  scènes  et  qu'on  sacrifia  ainsi  aux 
premières  recherches  d'effets  scéniques  et  aux  be- 
soins de  l'acoustique  et,  encore,  ce  sacrifice  ne  fut- 
il  pas  partout  complet  :  à  Taormina,  le  fond  de  la 
scène  est  percé  de  larges  arcades  laissant  apercevoir 
le  plus  merveilleux  des  paysages. 

Si  les  premiers  auditeurs  recherchaient,  pour 
écouter  à  l'aise  les  conteurs  d'aventures  et  leschantres 
des  exploits  héroïques,  des  emplacements  favorables 
pour  la  vue  et  la  contemplation  de  la  nature,  ils  se 
préoccupaient  aussi  de  se  défendre  contre  les  ardeurs 
du  soleil;  les  coteaux  élevés,  à  la  base  desquels  ils 
établissaient  leurs  théâtres,  avaient  encore  l'avantage 
de  leur  offrir,  vers  la  lin  du  jour,  une  ombre  propice. 

Le  nombre  des  théâtres  grecs  est  élevé;  celui  des 
théâtres  romains  est  considérable;  chaque  ville  de 
quelque  importance  en  possédait,  au  moins,  un. 

Les  dimensions  de  ces  ouvrages  sont  considé- 
rables :  le  théâtre  d'Argos,  presque  entièrement  pra- 
tiqué dans  le  rocher,  et  dont  la  forme  naturelle  n'a 
pas  été  complétée  par  l'adjonction  de  constructions 
qui  auraient  pu  lui  donner,  en  plan,  la  forme  tradi- 
tionnelle d'un  demi-cercle,  est,  malgré  cela,  large  de 
près  de  90  mètres  et  comporte  70  rangées  de  gradins; 
il  n'y  reste  pas  de  vestiges  de  la  scène. 

Le  théâtre  d'Epidaure  mesure  1 16  mètres  de  largeur 
et  comporte  oo  rangées  de  gradins. 

Sa  forme  est  celle  d'un  demi-cercle  outrepassé. 
Presque  tous  ses  gradins  reposent  directement  sur 
le  rocher  entaillé  pour  les  recevoir.  La  partie  cen- 
trale horizontale,  l'orchestre,  est  assez  vaste  pour 
qu'on  puisse  y  inscrire  un  cercle  de  20  mètres  de 
diamètre.  Le  bâtiment  encadrant  la  scène  présente 
un  front  n'atteignant  qu'environ  le  tiers  de  la  masse 
des  gradins.  Il  résulte  de  cetle  disposition  que,  quelle 
qu'ait  été  la  hauteur  de  cette  construction,  elle  ne 


rhi'.ilro  d'Epi'Inun.'.  d'après  Dofr.iJse. 


3862 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


pouvait  totalement  masquer,  à  la  plupart  des  spec- 
tateurs, la  vue  de  la  campagne  et  celle  des  sanctuaires 
voisins.  Douze  mille  personnes  pouvaient  se  ranger 
sur  les  gradins. 

Le  théàtrejde^Dionvsos,[ adossé  au  rocher  de  l'A- 
cropole d'AthènesJet  reconstruit  au  ive  siècle  avant 
J.-C,  présentait'des  dispositions  analogues. 

Ces  théâtres,  établis  à  flanc  de  coteau,  n'offraient 
pas  d'abri  aux  spectateurs  contre  les  intempéries; 
l'ombre  produite  par  les  collines  auxquelles  ils  étaient 
adossés  pouvait  seule,  vers  le  soir,  les  préserver  du 
soleil.  Ils  étaient  généralement  dépourvus  de  circu- 
lations couvertes.  L'accès  des  gradins  se  faisait  par 
des  passages  ménagés  entre  ces  gradins  et  la  scène, 
et  par  des  chemins  ou  sentiers  tracés  aussi  à  flanc 
de  coteau  et  conduisant  aux  diverses  entrées  ména- 
gées dans  un  mur  d'enceinte  peu  élevé  ou  pratiquées 
à  travers  un  dernier  dossier  de  gradin  assez  haut 
pour  former  clôture. 

Il  est  à  présumer  que  la  partie  de  la  population 
qui  n'avait  pas  accès  aux  gradins,  ou  qui  n'avait  pu 
y  trouver  place,  pouvait  cependant  jouir  du  spectacle 
en  montant  sur  les  parties  plus  élevées  et  non  amé- 
nagées du  tertre. 

Bien  que  les  chœurs  et  les  danses  aient  été  l'ac- 
compagnement des  représentations,  et  qu'il  semble 
que  la  partie  centrale  horizontale  des  théâtres  qui  a 
conservé  le  nom  d'orchestre  ait  toujours  été  réservée 
aux  évolutions  des  choristes  et  aux  exercices  des 
danseurs,  les  anciens,  trouvant  probablement  celte 
adaptation  peu  commode  pour  la  musique  seule, 
construisirent,  à  une  époque  postérieure  à  celle  de 
l'aménagement  des  premiers  théâtres,  des  édifices 
plus  petits  que  ceux-ci  et  spécialement  destinés  aux 
auditions  musicales. 


La  disposition  de  ces  édifices  semble  avoir1  été,  ;t 
l'origine,  nettement  différente  de  celle  des  théâtres; 
Us  paraissent  avoir  été  construits  sur  plans  ellip- 
tiques ou  circulaires.  Celui  attribué  à  Périclès,  et 
dont  l'emplacement  reste  inconnu,  était  couvert;  sa 
charpente  aurait  été  faite  avec  les  mâts  de  la  flotte 
deXerxès.  L'Odéon.  qu'il érode  A  tticus  construisit  bien 
plus  tard,  vers  la  fin  du  11e  siècle  après  J.-C,  en 
souvenir  de  sa  femme  Regilla,  se  situait  au  pied  de 
l'Acropole  d'Athènes,  à  quelque  distance  du  théâtre 
de  Dionysos  et  adossé,  comme  lui,  au  liane  du  rocher; 
son  plan  relevé  à  la  suite  de  fouilles  relativement 
récentes  est  cependant  celui  d'un  théâtre.  Au  dire 
de  Pausanias,  son  plafond  était  en  bois  et  superbe. 


Odéon  d'Hérode  Atticus. 

11  pouvait  contenir  de  cinq  à  six  mille  auditeurs, 
tandis  que  le  théâtre  de  Dionysos,  son  voisin,  eu 
pouvait  contenir  quatre  ou  cinq  fois  autanl. 

L'énumération  des  théâtres  romains  connus,  cons- 
truits à  Rome  même  ou  dans  tout  l'empire,  serait 
trop  longue  et  sans  intérêt. 


Scala  de  Milan. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Si  plusieurs  de  ces  théâtres,  celui  d'Orange,  par 
exemple,  ont  été,  comme  les  théâtres  grecs,  cons- 
truits à  liane  de  coteau,  beaucoup  d'aulres,  élevés 
dans  les  agglomérations  mêmes,  reposent  sur  ter- 
rain plat.  Ils  comportaient  alors,  pour  soutenir  les 
gradins,  d'énormes  constructions  utilisées  comme 
galeries  d'abri,  circulations  et  escaliers. 

Les  théâtres  de  Pompée  et  de  Marcellus  à  Rome 
et  celui  d'Arles,  en  Provence,  sont  des  exemples 
remarquables  de  cette  disposition. 

L'examen  des  parties  conservées  de  quelques-uns 
de  ces  édifices  a  permis  de  reconnaître  que  la  scène 
était  couverte  par  une  toiture  fixe  supportée  par  une 
charpente  en  bois,  et  que  l'ensemble  de  l'amphi- 
théàtre  s'abritail  par  un  vélum  amarré  à  des  po- 
teaux implantés  conlre  le  mur  de  pourtour  ou  au- 
dessus  d'un  portique  doublant  ce  mur. 

L'étude  des  parties  conservées  du  théâtre  d'Arles, 
faite  avec  le  plus  grand  soin,  a  permis  de  préciser 
quelques-unes  des  dispositions  imaginées  pour  la 
manœuvre  d'un  rideau  s'élevant  du  sol,  et  pour  celle 
de  décorations  très  sommaires  destinées  simplement 
à  situer  les  scènes  représentées  sans  masquer  bipar- 
tie haute  de  la  riche  décoration  architecturale  lixe. 

Au  iv"  siècle  de  notre  ère,  la  proclamation  du 
christianisme  comme  religion  d'Etat  et  les  invasions 
des  barbares  éloignèrent,  en  Occident  lout  au  moins, 
les  populations  des  représentations  théâtrales  et 
provoquèrent  l'abandon  et  le  commencement  de  la 
destruction  des  théâtres.  Certains,  comme  celui  de 
Marcellus  à  Rome,  furent  transformés  eu  châteaux 
forts;  d'autres,  comme  celui  de  Pompée,  également 
à  Rome,  disparurent  sous  des  habitations  particu- 
lières ne  laissant  souvent,  comme  trace  apparente, 
qu'une  petite  place  à  l'endroit  de  l'orchestre,  et  une 
rue  dont  le  tracé  rappelait  la  forme  extérieure  de  la 
construction  supportant  les  gradins.  D'autres  furent 
presque  complètemenl  rasés  et  leurs  matériaux  em- 
ployés à  la  construction  d'édifices  répondant  mieux 
qu'eux  aux  besoins  de  l'époque 

Pendant  tout  le  moyen  âge,  les  églises  furent  le 
principal  et  presque  l'unique  refuge  de  l'art  musical 
et  dramatique.  Les  troubadours  dans  le  midi  de  la 
France  et  dans  les  pays  voisins,  les  trouvères  dans 
les  province  du  Centre  ri  du  Nord,  chanteurs  et  dé- 
clatnateurs  errants,  ri  peut-être  poètes,  sollicitant  ou 
acceptant  l'hospitalité  de  la  noblesse,  maintinrent 
le  goût  des  récils  ('-piques  et  du  gai  savoir.  Les  hauts 
faits  des  chevaliers  furent  un  de  leurs  thèmes  favo- 
ris. Les  grandes  salles  d'armes  des  châteaux  ou  1rs 
appartements  privés  des  seigneurs  leur  servirent  de 
salles  d'audition. 

Quelques  «  mystères  »  représentés  dans  les  églises 
ou  dans  leurs  dépendances  par  les  membres  des 
confréries  religieuses,  et  les  «  moralités  »  représentées 
dans  les  salles  de  justice  par  les  clercs  de  la  basoche 
maintinrent,  dans  les  masses,  le  goût  du  spectacle 
et  préparèrent  la  renaissance  des  grandes  représen- 
tations scéniques. 

Il  faut  arriver  jusqu'au  xviu1'  siècle  pour  trouver, 
dans  les  palais  royaux,  des  salles  de  spectacle  ré- 
servées aux  hôtes  privilégiés  de  ces  palais,  et,  dans 
les  dépendances  des  habitations  seigneuriales,  des 
théâtres  accessibles  au  public. 

Ces  théâtres  servirent  indistinctement  à  la  comé- 
die, à  la  tragédie  et  à  l'opéra.  Les  premières  salles 
spécialement  aménagées  pour  les  auditions  musicales 
ou  salles  de  concert  furent  construites  au  commen- 
cement du'xixe  siècle. 


Parmi  les  théâtres  plus  spécialement  affectés  aux 
représentations  lyriques,  il  faut  citer  :  en  Italie  :  le 
théâtre  San  Carlo  â  .Naple*,  construit  en  1737,  incen- 
dié en  1910  et  restauré  ensuite  sur  le  même  plan; 
l'Apollo  de  Rome,  la  Scala  de  Milan,  l'Opéra  et  10- 
péra-Comique  à  Paris.  l'Opéra  de  Berlin,  l'Opéra  de 
Vienne,  le  théâtre  du  Prince  Régent  à  Munich,  etc. 

Les  salles  des  théâtres  italiens  un  peu  anciens  dif- 
fèrent, comme  disposition,  de  celles  des  théâtres 
français  :  les  balcons  franchement  en  saillie  en  avant 
des  loges  n'y  existent  pas;  il  n'y  a  qu'un  parterre 
divisé  en  places  de  différentes  catégories,  afin  de  va- 
rier les  prix  à  percevoir  et  plusieurs  rangs  super- 
posés et  semblables  de  loges. 

Cette  disposition  peut  offrir  aux  spectateurs  autres 
que  ceux  du  parterre  plus  d'intimité  et  plus  de 
liberté,  mais  elle  est  loin  de  donner  à  l'ensemble  cet 
air  de  fête  et  de  réunion  de  bonne  compagnie  qu'on 
a  plaisir  à  trouver  dans  nos  salles,  et  dans  celles 
construites  sur  des  plans  analogues,  lorsque  leurs 
loges  très  ouvertes  et  leurs  larges  balcons  sont  occu- 
pés par  une  société  élégante  et  richement  parée. 

Les  salles  sans  balcons  paraissent  vides,  même  si 
toutes  les  loges  sont  occupées;  il  s'y  produit  plus 
difficilement  cette  communion  d'émotions  si  chère 
aux  artistes  de  la  scène  et  si  nécessaire  pour  déve- 
lopper et  soutenir  leurs  efforts. 

Souvent,  les  salles  italiennes  se  développent  en  lon- 
gueur, de  sorte  que  la  plus  grande  partie  des  loges 
se  trouve  être  de  côté,  et  que  les  occupants  de  ces 
loges,  sauf  ceux  du  premier  rang,  sont  presque  tota- 
lement privés  de  la  vue  de  la  scène. 

Malgré  le  vide  considérable  de  leur  milieu  et  mal- 
gré leur  hauteur,  l'acoustique  des  salles  de  théâtre 
italiennes  est.  généralement  bonne.  Cela  semble 
tenir  à  l'emploi  en  grand  du  bois  et  des  matériaux 
légers  dans  leur  construction. 

Parmi  les  théâtres  modernes  spécialement  édifiés 
pour  des  représentations  lyriques,  l'Opéra  de  Paris 
tient  la  première  place  par  l'ampleur  de  sa  concep- 
tion monumentale  et  la  richesse  de  sa  décoration, 
richesse  qu'on  peut  même  trouver  excessive  sur  cer- 
tains points.  Le  volume  de  la  salle  semble  approcher 
du  maximum  de  ce  que  peut  animer  la  voix  humaine 
en  solo.  Le  magnificence  de  l'escalier  principal  et 
l'heureuse  disposition  des  escaliers  latéraux,  si  com- 
modes et  si  pratiques,  ne  sauraient  être  Irop  i  emar- 
quées. 

Les  salles  des  Opéras  de  Berlin,  Vienne,  Dresde, 
etc.,  et  d'antres  théâtres  lyriques  allemands  de  cons- 
truction déjà  ancienne,  ne  différent  pas  sensible- 
ment, comme  disposition,  de  celles  des  théâtres 
français. 

Celle  Me  notre  récent  Opéra-Comique  rappelle 
aussi  nos  salles  les  plus  appréciées. 

En  Angleterre,  par  un  besoin  de  conforl  inhérenl 
à  la  race,  les  dispositions  habituelles  des  salles  àe 
théâtre,  réminiscences  plus  ou  moins  éloignées  des 
théâtres  antiques,  ont  été  abandonnées  dans  la  cons- 
truction des  salles  les  plus  récentes.  Sauf  quelques 
loges  dites  d'avant-scène,  conseï  vées  sans  doute  pour 
ne  pas  rompre  trop  brusquement  avec  la  tradition, 
toutes  les  loges  de  côté  ont  été  supprimées,  et  les 
fauteuils  ou  banquettes  des  spectateurs  sont  amé- 
nagés sur  de  profonds  amphithéâtres  fortement 
inclinés  vers  la  scène.  C'est  certainement  l'abandon 
de  l'harmonie  du  vaisseau  et  des  vis-à-vis  gracieux; 
mais  c'est  la  commodité  retrouvée  pour  tous,  et  la 
possibilité  de  voir  de  toutes  les   places  ce   qui  se 


TECHNIQUE,  ESTIIÉTinUE  ET  PÉDAGOGIE 


TH  .ATRES  ET  SALLES  DE  CONCERT    3867 


passe  snv  la  scène  et  d'entendre  ce  qui  s'y  dit  ou  ce 
qui  s'y  chante. 

La  disposition  des  salles  de  l'orme  variant,  en  plan, 
entre  le  demi-cercle  et  le  cercle  presque  complet, 
présente  le  grave  inconvénient  d'obliger  à  placer  de 
coté,  soit  sur  les  galeries,  soit  dans  les  loges,  une 
grande  partie  des  spectateurs;  celle  des  salles  rec- 
tangulaires, sans  loges  sur  les  côtés  et  avec  leurs 
seuls  amphithéâtres  superposés  à  l'opposé  de  la 
scène,  a  l'inconvénient  d'obliger,  pour  trouver  un 
nombre  de  places  suffisant,  à  multiplier  ces  amphi- 
théâtres ou  à  leur  donner  une  profondeur  excessive. 

La  forme  en  éventail  avec  gradins  tracés  suivant 
des  arcs  de  cercle  concentriques,  dont  le  centre  se 
trouve  vers  le  milieu  de  la  scène,  présente,  sur  celle 
rectangulaire, l'avantage  d'augmenter,  par  l'allonge- 
ment progressif  des  gradins,  le  nombre  des  places  si, 
sur  celle  circulaire,  l'sva»*a#e  de  supprimer  totale- 
ment les  places  de  enté. 


Deux  constructions  de  théâtres  avec  application 
très  nette  de  la  salle  en  éventail  ont  été  réalisées  en 
Bavière  vers  la  fin  du  dernier  siècle  :  le  théâtre  des 
Fêtes  de  Bayreutli,  édifié  d'après  les  idées  de  Wagner, 
et  tout  spécialement  ponr  la  représentation  de  ses 
œuvres,  et  le  théâtre  du  Prince-Régent,  élevé  dans  un 
nouveau  quartier  de  Munich,  et  servant  aussi  presque 
inclusivement  aux  représentations  des  oeHvres  du 
maître  allemand. 

La  conception  de  ces  deux  lédilices  est  la  même; 
ils  diffèrent  seulement  par  les  accessoires  et  par  les 
matériaux  mis  en  œuvre.  Le  théâtre  de  Iîayreuth. 
édifice  en  quelque  sorte  provisoire,  exécuté  avec  de^- 
moyens  restreints,  est  presque  totalement  conSlmflil 
en  bois;  celui  du  Prince-Hégent  à  Munich,  édifiée 
principal  et  unique  d'un  quartier  neuf  dont  il  est, 
jusqu'à  présent,  le  principal  attrait,  est  construil  en 
matériaux  durables,  el  accompagné  rie  vjisMics  id  peu- 
dauces  telles  que  café,  brasserie,  jardin1,  etc. 


-Kéut'iil  j  Munich. 


ENCYCLOPEDIE  Uli  LA  MUSIQUE  ET  DICT10SSA1RE  DU  CONSERVATOIRE 


Dans  les  deux  salles,  une  rangée  de  loges  est  éta- 
blie eu  arriére  du  dernier  gradin.  A.  Bayreuth,  elles 
ne  forment  qu'une  sorte  de  portique  adossé  à  la 
paroi  courbe  du  fond;  à  Munich,  ces  loges,  dont 
deux  sont  aménagées  pour  la  cour  et  une  centrale 
pour  le  roi,  sont  doublées  d'une  circulation  les  des- 
servant commodément. 

Toutes  les  places  de  ces  vastes  amphithéâtres  en 
éventail  sont  facilement  accessibles  par  des  portes 
ouvertes  dans  les  murs  rayonnants  et  ne  desservant 
chacune  que  quatre  ou  cinq  gradins  au  plus. 

Malgré  leurs  grandes  dimensions,  ces  salles  sans 
superposition  de  balcons  ne  peuvent  contenir  qu'un 
nombre  restreint  de  places  :  1 3.'>0  environ  à  Bay- 
reuth  et  1140  à  Munich. 

Dans  ces  deux  théâtres,  l'orchestre  des  musiciens, 
établi  en  contre-bas  des  gradins  des  spectateurs  et 
logé  en  grande  partie  sous  la  scène,  est  invisible 
pour  ceux-ci.  Les  instrumentistes  se  sont,  jusqu'à 
présent,  accommodés  de  cette  disposition;  il  semble 
que  le  public  y  trouve  un  réel  avantage. 

Les  parois  rayonnantes  des  deux  salles,  percées  de 
portes  dans  leur  partie  basse  seulement,  sont  déco- 
rées de  niches  ou  alvéoles  formant  une  succession  de 
surfaces  diverses,  comme  forme  et  comme  direction, 
et  destinées  à  briser  les  ondes  sonores.  Les  plafonds 
sont  sensiblement  plans  comme  ensemble;  celui  de 
Munich  est  coupé  de  nervures  concentriques  en  plan 
avec  les  gradins  et  destinées,  peut-être,  comme  les 
décorations  des  parois  verticales  rayonnantes,  à 
briser  les  ondes  sonores. 

Des  odéons  anciens,  il  faut  arriver  jusqu'au  com- 
mencement du  xixe  siècle  pour  trouver  des  salles 
spécialement  étudiées  et  aménagées  pour  l'audition 
d'oeuvres  musicales  sans  elfets  scéniques.  Ces  salles, 
maintenant  nombreuses,  peuvent  être  rangées  en 
deux  catégories  :  celles  annexes  des  conservatoires 
de  musique,  réservées  presque  exclusivement  aux 
élèves  de  ces  établissements,  et  celles  publiques,  sou- 
vent très  vastes,  accessibles  à  tous  soit  par  abonne- 
ment, soit  en  payant  le  prix  des  places  pour  chaque 
audition. 

Parmi  les  premières,  il  faut  citer,  bien  qu'elle  ait 
été  aménagée  pour  servir  aussi  de  théâtre  d'études, 
la  salle  de  l'ancien  Conservatoire  de  Paris,  celles  des 
Conservatoires  de  Bruxelles,  de  Genève,  de  Berlin, 
de  Leipzig,  de  Francfort,  etc.  Parmi  les  secondes  : 
la  salle  de  l'Odéon  de  Munich,  la  grande  salle  du 
Conservatoire  de  Vienne,  la  salle  du  Budolphinum  à 


Prague,  les  deux  salles  du  Neties  Gewandhaus  à 
Leipzig,  les  trois  salles  de  la  Philharmonie  à  Berlin, 
les  deux  salles  du  Tonhall  à  Zurich,  la  salle  du  nou- 
veau casino  à  Berne,  le  Victoria-Hall  à  Genève,  la 
salle  Victor-Poirel  à  Nancy,  la  salle  Hameau  à  Lyon, 
les  salles  Krard,  Pleybl,  Gaveau  à  Paris,  etc. 

La  salle  du  Conservatoire  de  Paris,  seule  partie 
conservée  de  l'ancien  établissement,  a  été  inaugurée 
en  1811.  Elle  fut  d'abord  destinée  à  servir  aux  études 
et  répétitions  des  artistes  de  l'Opéra  et  aux  élèves 
du  Conservatoire. 

Elle  consiste  en  un  petit  théâtre  de  forme  allon- 
gée dont  la  scène  était  pourvue  de  dessous,  d'un 
gril  et  d'une  machinerie  rudimentaire.  Depuis  long- 
temps, cette  machinerie  a  été,  en  partie,  démontée, 
et  la  décoration  répétant,  en  plan,  le  fond  circulaire 
de  la  salle  reste  fixe.  La  décoration  picturale,  grise 
avec  tentures  vertes,  critiquée  dès  l'origine,  comme 
nuisant  à  la  beauté  des  femmes,  a  été  complètement 
remplacée,  vers  la  moitié  du  siècle  dernier,  par  la 
décoration  pompéienne  existant  encore. 

Sauf  les  gros  murs  extérieurs,  la  construction  de 
cette  salle  est  entièrement  en  bois  revêtu  de  plâtre 
et,  parfois,  simplement  de  toile  marouflée;  l'empla- 
cement de  l'orchestre,  limité  par  le  décor  de  concert 
construit  en  bois  et  toile,  est  couvert  par  un  plafond 
aussi  en  bois  et  toile  suspendu  sous  l'ancien  gril. 

Cette  construction  en  matériaux  peu  consistants 
empêche  toute  résonance,  tandis  que  les  dimensions 
réduites  du  vaisseau  rendent  impossible  la  percep- 
tion de  tout  écho.  L'acoustique  de  cette  salle  est 
parfaite. 

La  salle  du  Conservatoire  de  Bruxelles  répète,  en 
plan,  mais  avec  des  dimensions  plus  grandes,  celle 
du  Conservatoire  de  Paris. 

La  salle  du  Conservatoire  de  Genève  rappelle  aussi, 
comme  forme,  celle  du  Conservatoire  de  Paris.  C'est 
un  rectangle  allongé  terminé,  à  chaque  extrémité, 
par  une  abside  demi-circulaire  dont  le  diamètre  est 
presque  égal  au  petit  coté  de  ce  rectangle;  l'abside 
abritant  une  partie  de  l'orchestre  est  à  paroi  pleine; 
celle  opposée  est  divisée,  dans  la  hauteur  du  premier 
étage,  en  cinq  travées  par  des  colonnes,  entre  les- 
quelles sont  installés  deux  rangs  superposés  de  loges. 
Une  tribune  passant  devant  ces  loges  règne  tout  au- 
tour de  la  salle,  sauf  au  devant  de  l'orchestre.  Le 
plafond  plan  se  décore  de  caissons;  l'éclairage  est 
assuré  par  dix  fenêtres.  L'acoustique  de  cette  salle 
est  bonne. 


Conservatoire  de  Paris 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDA  GOGIE  THÉ  A  TRES  ET  SALLES  DE  CONCERT    386<« 


Les  conservatoires  des  grandes  villes  allemandes, 
installés  dans  des  bâtiments  spécialement  conçus 
pour  leur  destination,  possèdent,  en  général,  des 
salles  d'exercice  el  de  concert  bien  appropriées. 

Celui  de  Berlin,  qui  occupe  une  aile  des  nouveaux 
bâtiments  de  l'école  des  Iteaux-Aris,  possède  une 
petite  salle  de  théâtre  et  une  salle  de  concert  pou- 
vant recevoir  environ  750  auditeurs.  En  plan,  cette 
salle  est  un  rectangle  d'environ  31  m.  50  sur  17  m.  50, 
non  compris,  à  l'une  de  ses  extrémités,  une  alvéole 
de  14  m.  50  sur  13,  dans  laquelle  sont  installés  les 
gradins  de  l'orchestre  et,  au  fond,  un  orgue.  Une 
tribune  d'honneur  occupe,  en  partie,  l'extrémité  op- 
posée à  cette  alvéole.  Les  longs  côtés  du  rectangle 
sont,  à  l'étage,  garnis  de  tribunes  sous  lesquelles 
sont  ménagées  les  circulations  desservant  le  par- 
terre. Il  n'y  a  pas  de  tribune  en  avant  de  ,1a  loge 
d'honneur.  L'éclairage  diurne  est  obtenu  'par  qua- 
torze ouvertures  latérales  en  forme  de  demi-cercle 
outrepassé,  formant  autant  de  pénétrations  dans  la 
voussure  du  plafond  el,  au-dessus  de  l'orchestre, 
par  un  plafond  vitré  décoré  d'une  grisaille. 

La  salle  de  concert  du  Conservatoire  de  Leipzig  se 
compose  aussi  d'un  vaisseau  central  rectangulaire 
avec  amortissements  courbes  dans  les  angles,  et  me- 
surant environ  24  mètres  sur  H,  non  compris  les 
galeries  latérales  formant  tribunes  à  la  hauteur  du 
premier  étage,  une  grande  alvéole  pour  l'orchestre  à 
l'une  des  extrémités  et  une  Iribune  d'honneur  à 
l'autre. 

La  salle  du  Conservatoire  de  Francfort  est  un  rec- 
tangle avec  orchestre  à  l'une  de  ses  extrémités  et 
tribune  à  l'autre.  L'ensemble,  tout  compris,  mesure 
environ  24  mètres  de  longueur  sur  9  m.  60  de  largeur 
el  7  m.  50  de  hauteur.  Le  plafond  est  plan  avec  vous- 
sures de  raccordement. 

La  salle  de  L'Odéon  de  Munich  constitue  une  sorte 
de  basilique  dont  trois  côlés  sont  droits  et  le  qua- 
trième demi-circulaire.  Les  trois  côlés  droits  sont 
doublés  de  portiques;  l'orchestre,  disposé  pour  réu- 
nir de  100  à  300  exécutants  ou  choristes,  occupe 
l'abside.  Au  premier  étage,  un  second  portique  en- 
toure l'ensemble;  des  sièges  sont  installés  entre  les 
colonnes  de  ce  second  portique  et  en  arrière  de 
celles-ci.  L'orgue  occupe  la  partie  milieu  du  fond  de 
l'abside.  Le  nombre  des  places  est  de  144.;.  Cette 
salle  ne  se  recommande  ni  par  sa  disposition  archi- 
tecturale ni  par  son  acoustique. 

La  grande  salle  du  Conservatoire  de  Vienne  sert 
aussi  à  donner  un  certain  nombre  de  concerts  pu- 
blics. C'est  un  rectangle  de  40  mètres  de  longueur 
sur  près  de  14  de  largeur,  avec,  en  plus,  deux  étages 
de  galeries  sur  trois  côtés.  L'orgue  est  adossé  au 
petit  côté  dépourvu  de  galerie.  La  galerie  supé- 
rieure du  fond  opposé,  plus  large  que  celles  laté- 
rales, se  divise  en  deux  étages  formant  deux  amphi- 
théâtres superposés.  La  hauteur  du  vide  central  est 
d'environ  17  mètres.  L'orchestre  est  aménagé  pour 
80  exécutants;  la  salle  peut  recevoir  1500  auditeurs, 
dont  200  debout  dans  la  galerie  du  fond  sous  les 
amphithéâtres;  l'acoustique  est  1res  appréciée. 

La  salle  du  Rudolphinum  à  Prague  sert  aux  exer- 
cices des  élèves  du  Conservatoire  et  à  donner  des 
concerts  publics.  La  partie  centrale  de  cette  salle  a 
environ  21  mètres  de  longueur  sur  autant  de  largeur, 
non  compris  les  galeries  qui  l'entourent  sur  trois 
côtés,  et  qui  servent  de  circulation  au  rez-de-chaus- 
sée, et  de  tribunes  divisées  en  loges  au  premier  étage. 
La  galerie  du  fond  opposée  à  l'orchestre  est  légère- 


ment incurvée  en  plan;  les  gradins  de  l'orchestre, 
avee  l'orgue  au  fond,  sont  aménagés  dans  une  pro- 
fonde alvéole  presque  de  même  largeur  que  le  vide 
de  la  salle.  Le  plafond,  supporté  par  les  hautes  co- 
lonnes corinthiennes  des  galeries,  se  décore  de  cais- 
sons fortement  accentués  au-dessus  de  galeries,  el  de 
vigoureux  encadrements  sur  la  partie  centrale.  L'é- 
clairage de  jour  est  assuré  par  de  grandes  fenêtres 
ouvertes  dans  la  paroi  du  fond  des  galeries;  celui 
de  nuit  par  un  lustre  central  et  par  des  lustres  secon- 
daires suspendus  dans  les  entre-colonnements,  ainsi 
que  sous  le  linteau  séparant  la  partie  centrale  de 
l'orchestre. 

La  trop  grande  distance  verticale  entre  le  sol  du 
parterre  et  celui  des  galeries  n'est  que  faiblement 
corrigée  par  la  forte  inclinaison  de  l'ensemble  des 
gradins  de  ce  parterre.  La  hauteur  totale  de  la  salle, 
qui  atteint  près  de  20  mètres,  semble  exagérée.  Le 
nombre  des  places  est  d'envir»n  1400. 

Dans  le  but  de  corriger  l'acoustique  défectueuse, 
des  draperies  descendant  jusque  sur  les  gradins  du 
parterre  ont  été  suspendues  sous  le  balcon  établi  en 
avant  des  colonnes  des  galeries. 


.\eue>  Grwjndhuu3  de  Leipz 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


Le  Neues  Cenandhaus  de  Leipzig,  achevé  en  1881, 
apparaît,  jusqu'à  présent,  comme  la  plus  complète 
conception  architecturale  réalisée  pour  l'audition 
des  œuvres  musicales  non  destinées  au  théâtre  L'é- 
difice, situé  dans  le  nouveau  quartier,  à  proximité 
du  Conservatoire  et- d'antres  prainds  édifices  moder- 
nes, est  complètement  isolé.  Largement  desservi  par 
deux  entrées  principales,  tout  le  rez-de-chaussée 
abrite  les  services  accessoires  :  bureaux,  bibliothè- 
que, vestiaires,  etc. 

Du  vestiaire  du  public  qui,  dans  ce  rez-de-chaus- 
sée, occupe  toute  la  partie  centrale  de  l'édifice, 
deux  larges  escaliers  latéraux  donnent  directement 
accès  au  parterre  de  la  salle  principale  et  à  des  pas- 
sages se  raccordant  avec  les  dégagements  d'une 
autre  salle  de  moindre  importance.  Celle  dernière 
est, en  oulre,  desservie  par  deux  escaliers  secondaires 
partant  du  vestibule  arrière.  Quatre  .mires  escaliers 
conduisent  des  paliers  des  deux  escaliers  principaux 
aux  tribunes  de  la  grande  salle  et  aux  loges  de  la 
petite. 

En  plan,  la  salle  principale  formé  un  rectangle  de 
38  mètres  de  longueur  sur  19  de  largeur,  à  angles 
arrondis.  La  petite  salle,  sensiblement  de  même 
forme,  mesure  seulement  24  mètres  sur  12.  Il  con- 
vient de  remarquer  que,  dans  ces  deux  salles,  la  lar- 
geur est  égale  à  la  moitié  de  la  longueur.  La  hau- 
teur de  la  grande  salle  atteint  14  mètres  environ; 
celle  de  la  petite  n'est  que  de  8  mètres.  L'éclairage 
diurne  de  la  grande  salle  s'obtient  par  14  fenêtres* 
en  demi-cercle  outrepassé  ouvrant  directement  sur 
le  dehors  et  formant  pénétrations  dans  la  voussure 
du  plafond;  celui  de  la  petite,  par  trois  grandes  ou- 
vertures ménagées  dans  le  plafond  et  ne  donnant 
qu'une  lumière  de  second  joui-.  L'éclairage  artificiel 
de  la  grande  salle  est  obtenu  par  trois  grands  lustres 
suspendus  au  plafond  et  par  des  appliques  apposées 
contre  les  pilastres  décorant  les  parois;  celui  de  la 
petite  salle,  par  un  certain  nombre  de  plafonniers 
et  par  des  appliques  aussi  apposées  contre  les  pi- 
lastres. 

Le  sol  des  deux  salles  est  horizontal,  à  l'exception 
de  quelques  gradins  établis  au  fond  de  la  grande, 
dans  le  petit  espace  la  séparant  du  foyer,  et  de  trois 
gradins  établis  sous  une  étroite  galerie  régnant 
autour  de  cette  grande  salle.  Cette  galerie,  élevée 
de  :!  à  4  mètres  seulement  au-dessus  du  parquet,  ne 
reçoit  que  trois  rangs  de  fauteuils;  elle  est  divisée 
en  loges  séparées  par  de  simples  accotoirs  à  hauteur 
d'appui  et  ne  pouvant  gêner  la  vue. 

L'orchestre,  disposé  au  fond  entre  la  galerie  et  le 
parquet,  comprend  une  partie  plane  pouvant  être 
agrandie  de  2  à  3  mètres  et  des  gradins.  Le  chef  d'or- 
chestre monte  sur  une  estrade  élevée  de  0  m.  70  envi- 
ron au-dessus  de  la  partie  plane,  ce  qui  lui  permet  de 
diriger  les  chœurs  massés  sur  la  partie  de  la  galerie 
adossée  au  fond  de  la  salle.  L'orgue  est  installé  dans 
une  grande  niche  eu  arrière  fie  cette  galerie.  A  l'ex- 
trémité de  la  salle  opposée  à  l'orchestre  et  aussi  en 
arrière  de  la  galerie  sont  établies  une  grande  loge 
d'honneur  et  deux  loges  secondaires. 

Le  nombre  des  sièges  est  d'environ  1650;  il  n'y  a 
pas  de  places  debout. 

Les  parties  basses  des  murs  sont  revêtues  de  lam- 
bris en  sapin  sans  grandes  saillies  et  isolés  de  la 
maçonnerie  par  un  vide  d'un  décimètre  environ. 
Sous  les  panneaux  de  simili-tapisserie  décorant  les 
parties  hautes  de  ces  murs,  entre  le  dessus  des  lam- 
bris et  le  dessous  de  la  corniche  sur  laquelle  repose 


la  voussure,  les  lambris  d'isolement  sont  constitués 
par  un  lé^er  galandai;e  en  roseaux  et  mortier.  La 
voussure  et  la  partie  centrale  du  plafond  sont  en 
construction  légère  suspendue  à  la  charpente  du 
comble. 

La  petite  salle  est  dépourvue  de  galerie;  quelques 
loges  seulement  s'établissent  entre  les  pilastres: 
l'orchestre  sans  gradins  est  entouré  d'un  seul  rang 
de  fauteuils. 

La  construction  de  cette  salle  est.  la  même  que 
celle  de  la  grande.  Un  foyer,  vaste  pièce  de  32 mètres 
de  long  sur  12  de  large,  non  compris  la  loggia  au- 
dessus  de  l'avant-vestibule  du  rez-de-chaussée,  est 
disposé  pour  servir  de  promenoir  aux  auditeurs  de 
la  grande  salle  pendant  les  entr'actes. 

La  construction  de  cet  édifice,  exécutée  aux   frais 

d'j société  privée,  a   coûté,  sans   le   terrain,  deux 

m t liions  de  marks,  soit  deux  millions  et  demi  de 
francs  en  1884.  Il  est  bien  et  largement  conçu;  sa 
décoration  intérieure,  un  peu  chargée,  vise  a  la 
somptuosité.  L'acoustique  des  deux  salles  est  réputée 
excellente 

Des  trois  salles  de  la  Philharmonie  de  Berlin, 
celle  carrée  qu'on  rencontre  eu  premier,  au  rez-de- 
chaussée,  sorte  de  hall  central  de  l'établissement, 
ne  paraît  pas  avoir  été  spécialement  étudiée  pour 
servir  de  salle  de  concert,  et  présente  une  acousti- 
que défectueuse.  La  grande  salle  qui  lui  fait  suite, 
aussi  au  rez-de-chaussée,  est  un  rectangle  a  angles 
arrondis  d'environ  32  mètre-  de  longueur  sur  20  de 
largeur,  non  compris  remplacement  de  l'orchestre. 
Sa  hauteur  est  d'environ  19  mètres.  Des  lo!_res  sont 
installées  entre  les  points  d'appui  au  rez-de-chaussée 
et  sur  un  balcon.  L'-extivinile  opposée  a  l'orchestre 
s'ouvre  sur  une  salle  de  restaurant  de  laquelle  on 
peut  entendre  le  concert.  L'orchestre,  aménagé  p*u* 
une  centaine  d'exécutants,  peut  être  agrandi  vers  la 
salle;  un  orgue  dissimulé  derrière  un  grillage  doublé 
d'étoffe  en  occupe  le  fond;  le  parquet  est  horizontal. 
Cette  salle  servant  aussi  pour  -les  banquets  et  des 
bals,  tous  les  sièges  du  rez-de-chaussée,  à  l'excep- 
tion de  ceux  des  loges,  sont  mobiles. 

Une  troisième  -aile,  dite  «  salle  Beethoven  »,  située 
au  premier  étage,  est  exclusivement  aménagée  en 
salle  de  concert.  Elle  consiste  en  un  rectangle  'le 
21-  mètres  de  Ion;:  sur  20  de  large,  non  compris  rem- 
placement pour  l'orchestre  et,  à  l'autre  extrémité, 
un  emplacement  égal  garni  de  sièges.  Un  balcon 
s'étend  sur  tout  le  périmètre,  a  l'exception  iln  côté 
occupé  par  l'orchestre  ;  l'ensemble  peut  recevoir' 
1100  auditeurs. 

I..'  lonhall  de  Zurich,  vaste  établissement  en  vue 
du  lac,  possède  une  grande  et  une  petite  salle  de 
concert.  La  grande  est  un  rectangle  à  coins  arrondis 
d'environ  30  mètres  sur  19,  y  compris  remplace- 
ment de  l'orchestre,  avec  balcon  et  tribunes  au  pre- 
mier étage.  Cette  salle  servanl  aussi  pour'  des  ban- 
quets el  .les  bals,  son  parquet  esl  horizontal,  et  les 
sièges  le  garnissant  sont  mobiles.  La  partie  basse 
île  i  orchestre  peul  ''ire  agrandie  en  avançant  le  po- 
dium. L'orgue  occupe  une  grande  niche  en  arrière 
de  L'orchestre;  la  partie  du  balcon  passant  entre 
celle  niche  et  le  dernier  -radin  de  l'orchestre  est 
uenéralemeiil  réservée  aux  chœurs.  Le  nombre  des 
places  s'élève  à  environ  1  ooo. 

L'éclairage  diurne  est  obtenu  par  six  baies  demi- 
circulaires  formant  pénétrations  dans  la  voussure 
du  plafond  au-dessus  des  tribunes  latérales.  Trois 
grands    lustres,    suspendus    au    plafond   central    et 


TEClINIQtJEs  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE THÉÂTRES  ET  SALLES  DE  CONCERT    3871 


d'autres  plus  petits  suspendus  au  plafond  des  tri- 
bunes, assurent  l'éclairage  de  nuit.  La  décoration  est 
blanc  et  or,  et  l'acoustique  satisfaisante. 

La  petite  salle  située  au  premier  étage,  derrière  la 
tribune  milieu  de  la  grande  et  au-dessus  du  vestibule 
la  desservant,  est  réservée  à  la  musique  de  chambre. 

Le  nouveau  Casino  de  Berne,  édifice  monumental 
récemment  construit,  possède  aussi  deux  salles  de 
concert,  toutes  deux  établies  au  premier  étage.  La 
plus  grande  forme  un  rectangle  de  35  m.  de  longueur 
sur  16  de  largeur,  terminé,  sur  l'un  de  ses  petits 
côtés,  par  une  niche  très  plate  au  fond  de  laquelle 
est  installé  un  orgue  dissimulé  par  des  pilastres  et 
des  grillages  métalliques.  Trois  tribunes  avec  gradins, 
dont  le  plus  bas  est  à  environ  3  m.  30  au-dessus  du 
parquet,  garnissent  les  longs  cotés  et  celui  opposé 
à  l'orchestre;  les  tribunes  latérales  sont  séparées 
du  vide  central  par  des  colonnes  jumelées;  celle  du 
fond  est  comprise  dans  ce  vide.  Une  voûte  très  apla- 
tie construite  en  matériaux  légers  recouvre  la  partie 
milieu;  les  tribunes  latérales  sont  couvertes  par  un 
plafond.  L'éclairage  diurne  est  assuré  par  dix  baies 
demi-circulaires  s 'ouvrant  au-dessus  de  la  coi  niche 
couronnant  l'ordre  des  tribunes;  celui  du  soie  s'ob- 
tient au  moyen  de  lustres  suspendus  à  la  voûte  e* 
aux  plafonds.  La  hauteur  de  la  partie  centrale  e&t 
d'environ  li  mètres;  le  nombre  des  pi 
atteindre  1  400;  l'acoustique  est  satisfaisante  La 
petite  salle  située  contre  le  fond  de  la  grande  opposé 
à  l'orchestre  sert  de  foyer,  de  salle  de  bal  et,  à  l'oc- 
casion, de  salle  de  concert. 

Le  Victoria-Hall  à  Genève,  construit  de  1891  à!893, 
esl,  comme  le  Gewandhaus  de  Leipzig,  un  édifice 
Spécialement  destiné  aux  auditions  musicales.  La 
salle  est  un  rectangle  d'environ  32  mètres  sur  li,o0, 
dont  les  angles  sont  abattus  par  des  pans  coupés. 
Des  tribunes  latérales  portent  la  largeur  à  près  de 
19  mètres,  et  de  profondes  alvéoles  établies  aux 
extrémités  et  destinées,  l'une  à  l'orchestre,  et  l'autre 
à  des  amphithéâtres  superposés,  portent  la  longueur 
totale  â  environ  50  mètres.  L'orchestre  avec  ses 
10  rangées  de  gradins  pour  les  choristes  occupe,  à 
lui  seul,  une  longueur  de  près  de  17  mètres.  L'orgue 
installé  au  fond  est  séparé  des  gradins  par  un  balcon 
portant  une  rangée  de  fauteuils  dits  «  fauteuils 
d'orgue  ». 

Les  1  850  places  sont  réparties  entre  :  un  parterre 
avec  loges  découvertes  et  amphithéâtre,  le  grand 
balcon,  le  balcon  de  l'orgue, les  corbeilles  des  angles, 
l'amphithéâtre  du  premier  étage,  les  tribunes  el 
l'amphithéâtre  du  deuxième  étage. 

Le  plafond  est  plan  avec  parties  inclinées  sur  les 
côtés  et  formant  voussures,  celles-ci  percées  de  dix 
œils-de-bœuf.  La  superposition  des  étages  a  conduit 
à  donner  à  cette  salle  la  grande  hauteur  qui  nuit  à 
son  acoustique.  Sa  décoration,  rehaussée  par  une 
coloration  accentuée,  est  très  chargée. 

La  Salle  Hameau  à  Lyon,  inaugurée  en  1908,  a  été 
édifiée  par  une  société  particulière  avec  le  concours 
de  la  ville.  Située  au-dessus  d'une  autre  grande 
salle  destinée  à  des  réunions  diverses,  elle  peut  re- 
cevoir 1  600  auditeurs.  L'ensemble,  mesurant  environ 
32  mètres  sur  18,  comprend  un  parterre  horizontal, 
une  galerie  avec  loges  découvertes  sur  les  longs  côtés 
el  amphithéâtre  au  fond,  et  un  second  amphithéâtre 
au-dessus  du  premier.  La  partie  opposée  â  ces  am- 
phithéâtres est  sensiblement  demi-circulaire;  elle 
abrite  l'orchestre  et,  en  arrière,  en  partie  au-dessus 
de  l'orchestre,  l'estrade  des  choristes. 


Cette  disposition  de  l'espace  réservé  aux  choristes, 
analogue  à  celles  précédemment  adoptées  dans  les 
salles  du  Rudolpbinum  â  Prague,  du  Gewandhaus  à 
Leipzig,  au  Casino  de  IJerne.au  Victoria-Hall  de  Ge- 
nève, etc.,  a  le  grand  a v,* otage  d 'empêcher  les  chœurs 
d'étouffer  la  sonorité  des  instruments  à  cordes  et 
d'éviter  l'encombrement  de  la  partie  basse  de  l'or- 
chestre. 

Des  ouvertures  pratiquées  dans  la  partie  haute 
des  murs  latéraux  et  un  plafond  vitré  assurent  un 
abondant  éclairage  diurne. 

Malgré  sa  construction  en  matériaux  rigides  :  ma- 
çonnerie et  ciment  armé,  et  malgré  l'absence  de  ten- 
tures, l'acoustique  de  cette  salle  est  bonne. 

La  salie  Victor-Poirel  à  Nancy,  disposée  pour  ser- 
vir de  théâtre  et  de  salle  de  concert,  présente  un  vaste 
amphithéâtre  demi-circulaire  prolongé  vers  la  scène 
par  des  parties  droites;  la  partie  centrale  garnie  de 
gradias  lies  inclinés  est  séparée  de  la  galerie  l'en- 
tourant par  un  rang  de  colonnes  supportant  des 
arcades.  Les  gradins  de  cette  galerie,  disposés  paral- 
lèlement à  la  courbe,  sont  aussi  très  inclinés.  L'éclai- 
rage de  jour  s'assure  par  des  ouvertures  Jan,  le  mur 
de  fond  de  la  galerie  et  par  un  plafond  vitre.  Des 
draperies  ont  été  disposées  dans  les  parties  hautes 
des  arcatures  pour  améliorer  l'acoustique. 

La  salle  du  Trocadéro  a  Paris,  construite  en  vue 
des  solennités  de  l'Exposition  universelle  de  1878, 
est  un  immense  amphithéâtre  en  forme  de  fer  à  che- 
val contenant  près  de  6000  places.  Une  grande  niche 
avec,  au  fond,  un  orgue  colossal  de  Cavaillé-Coll, 
peut  servir  à  abriter  les  autorités  en  cas  de  solenni- 
tés, ou  l'orchestre  et  les  chœurs  en  cas  de  concert. 
De  larges  baies  sont  ouvertes  dans  le  mur  circulaire 
de  l'amphithéâtre. 

Malgré  l'application  des  données  scientifiques  con- 
nues au  moment  de  la  construction,  et  malgré  les 
essais  faits  au  moyen  de  la  lumière  sur  modèles  en 
petit  pour  assurer  une  bonne  acoustique,  le  résultat 
obtenu  n'a  pas  répondu  aux  espérances  des  archi- 
tectes :  une  sonorité  excessive  s'est  révélée,  el  des 
échos  se  produisent.  De  nombreux  essais  ont  été 
tentés,  par  la  suite,  pour  remédier  aux  inconvénients 
reconnus;  filets  tendus  contre  les  verrières,  modifi- 
cation de  la  conque  de  l'orchestre  au  moyen  de  ten- 
tures et  de  cloisonnements  légers,  matelassage  des 
parois  verticales  de  l'amphithéâtre,  etc.  Les  récents 
travaux  exécutés  ont  donné  des  résultats  appré- 
ciables; mais  les  dispositions  adoptées  pour  modi- 
fier la  forme  de  grande  niche  enveloppant  l'orchestre 
nuisent  à  la  disposition  architecturale  de  l'ensemble 

Les  salles  Erard,  Gaveau  et  la  nouvelle  salle  Pleyel, 
à  Paris,  sont  des  compléments  des  magasins  de  vente 
de  ces  établissements  industriels.  Celle  de  la  maison 
Gaveau  peut  recevoir  I  060  auditeurs  assis;  son  par- 
terre légèrement  incliné  correspond  sensiblement, 
comme  niveau,  avec  le  premier  étage  de  l'immeuble. 
Presque  tout  le  rez-de-chaussée,  sous  ce  parterre, 
est  occupé  par  un  vestiaire  très  commodément  ins- 
tallé. La  salle  rectangulaire,  en  plan,  mesure  20  mètres 
de  largeur  sur  près  de  23  mètres  de  longueur,  non 
compris  la  grande  niche  abritant,  au  fond,  les  gra- 
dins des  choristes  et  l'orgue.  L'estrade  de  l'orchestre 
est  en  avant  de  cette  niche.  Le  parterre  s'entoure 
de  loges  au  fond  desquelles  passent  les  légers  points 
d'appui  supportant  la  première  galerie.  Les  sols  de 
cette  première  galerie  et  de  celle  supérieure  corres- 
pondent avec  les  deuxième  et  troisième  étages  de 
l'immeuble.  La  disposition  de  ces  galeries  fait  pa. 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


rai  tre  la  salle  plus  longue  qu'elle  n'est  réellement.  L'un 
de  ses  côtés  et  le  fond  étant  adossés  à  des  construc- 
tions voisines,  elle  ne  reçoit  de  jour  direct  que  par  des 
fenêtres  ouvertes  en  arrière  de  la  galerie  sur  les  deux 
autres  côtés.  L'éclairage  de  nuit  est  assuré  par  des 
cordons  d'ampoules  électriques  courant  sous  les  deux 
galeries  et  dans  la  mouluration  du  plafond.  La  hau- 
teur, sous  la  partie  centrale  de  ce  plafond,  est  d'envi- 
ron 13  m.  SO.  La  décoration  en  relief,  assez  vigou- 
reuse sous  le  balcon  de  la  première  galerie,  va  en 
s'afflnant  vers  le  haut  pour  laisser  lisse  la  partie 
milieu  du  plafond. 

La  salle  Pleybl,  récemment  construite,  fait  partie 
d'un  vaste  établissement  abritant  des  salons  d'expo- 
sition, des  studios  isolés  mis  à  la  disposition  des 
artistes,  deux  petites  salles  d'auditions,  l'une  de 
oOO  places,  l'autre  de  200,  et  de  nombreux  services. 

Etablie  au  premier  étage,  elle  est  accessible  par 
plusieurs  escaliers  débouchant  dans  un  spacieux 
vestibule  et  des  galeries  sur  lesquelles  s'ouvrent  de 
nombreux  vestiaires  commodément  disposés. 

En  outre  du  large  accès  sur  le  faubourg  Sainl- 
Honoré,  une  sortie  de  secours  a  été  ménagée  vers 
la  rue  Daru. 

De  forme  trapézoïdale  et  mesurant  environ  b0  mè- 
tres suivant  son  grand  axe  et  30  mètres  suivant  la 
grande  base  du  trapèze,  cette  salle  comporte,  contre 
la  petite  base,  une  grande  estrade  pouvant  recevoir 
jusqu'à  600  exécutants  et  choristes.  En  avant  de  celte 
estrade,  un  parterre  horizontal  précède  une  rangée 
de  loges  découvertes,  en  arrière  desquelles  s'étend, 
jusqu'au  fond,  une  partie  légèrement  inclinée.  En 


élévation,  contre  la  paroi  du  fond  opposée  à  l'estrade 
des  exécutants,  sont  disposés  deux  larges  amphi- 
théâtres desservis  par  des  escaliers  spéciaux. 

L'ensemble  abrite  environ  3  000  places,  toutes  de 
face. 

Les  parois  latérales  sont  légèrement  inclinées  vers 
l'intérieur. 

La  voûte  comporte  des  parties  planes  inclinées  au- 
dessus  de  l'orchestre,  et,  sur  le  restant,  une  grande 
surface  cylindrique  ascendante  dont  les  génératrices 
se  raccordent  avec  ces  parties  planes. 

L'éclairage,  entièrement  artificiel,  est  obtenu  au 
moyen  de  foyers  lumineux  dissimulés.  Il  n'existe 
aucune  saillie  décorative. 

La  décoration  picturale,  détruite  par  l'incendie 
survenu  le  19  juillet  1928,  peu  de  temps  après  l'i- 
nauguration, n'a  pas  été  reproduite;  elle  a  simple- 
ment été  remplacée  par  une  haute  partie  gris  foncé 
formant  soubassement  et  par  un  ton  pierre  sur  tout 
le  restant.  Celte  nudité  s'accorde  avec  la  simplicité 
voulue  de  la  décoration  des  autres  parties  de  l'édi- 
fice, et  par  son  austérité,  fait  supposer  que  cet  état 
n'est  que  provisoire. 

La  forme  inattendue  de  la  voûte  est  le  résultat  de 
la  mise  en  application  des  théories  actuelles  de  la 
science  de  l'acoustique.  11  convient  de  se  demander, 
en  présence  de  ce  résultat  si  nettement  accusé,  si 
cette  science  a  bien  dit  son  dernier  mot,  et  si  ses 
données  ne  comportent  pas  quelques  accommode- 
ments. 

V.   BLAVEÏTE. 


SONORITÉ  DES  SALLES 


Par  M.  Gustave  LYON 


Le  problème  de  la  bonne  acoustique  dans  une 
salle  de  concerts  a  été  étudié  et  réalisé  d'une  façon 
très  satisfaisante  en  1028,  lors  de  l'édification  de  la 
Salle  Plkyel,  252,  rue  du  Faubourg-Saiut-Honoré,  à 
Paris  (8«i. 

Cette  réalisation  a  été  la  conséquence  des  lois 
formulées  par  M.  Gustave  Lyon  à  la  suite  de  nom- 
breuses recberches  entreprises  par  lui  pour  remplir 
la  mission  que  lui  confia  en  1904  le  ministre  de  l'Ins- 
truction publique  delà  République  française,  d'amé- 
liorer l'acoustique  du  Trocadéro;  à  l'époque,  il  était 
absolument  impossible  dans  cette  vaste  salle  d'en- 
tendre distinctement,  même  de  comprendre  la  moin- 
dre pbrase  d'un  conférencier  quel  qu'il  fût.  —  Les 
défauts  ont  pu  être  corrigés  pour  la  plupart.  —Ceux 
qui  subsistent  eussent  pu  «Hre  supprimés,  mais  au 
prix  de  dépenses  exagérées,  el  d'ailleurs  au  détri- 
ment de  l'acoustique  de  certaines  régions  de  cet 
énorme  vaisseau. 

Depuis  1904,  on  a  entendu  de  presque  toutes  les 
places  du  palais  du  Trocadéro  les  conférences  ou 
les  représentations  théâtrales  populaires  qu'y  orga- 
nise si  parfaitement  M.  Gémier,  tant  que  les  collec- 
tions réalisées  par  M.  Gustave  Lyon  ont  été  mainte- 
nues en  place  et  en  bon  état  de  conservation.  — 
Les  lois  qui  ont  déterminé  ces  corrections  s.-  résu- 
ment ainsi  : 

La  perception  d'un  son  par  un  auditeur  est  le 
résultat,  l'intégration,  peut-on  dire,  d'une  séi  ie  de 
pressions  successives  frappant  son  tympan  par  suite 
de  l'arrivée  au  contact  de  celui-ci  : 

1°  de  l'onde  directe, 

2°  d'une  série  successive  d'arrivées  très  rappro- 
chées d'ondes  rélléchies  sur  les  divers  obstacles 
(murs,  plafonds,  etc.)  que  rencontre  l'onde  directe 
dans  sa  propagation. 

Première  loi.  —  L'onde  directe,  si  elle  était  seule 
perçue,  cesse  d'être  entendue  à  partir  d'une  distance 
de  11  mètres  environ  séparant  l'auditeur  de  la  source 
sonore. 

Deuxième  loi.  —  Un  auditeur  qui  reçoit  deux 
ondes  sonores  successives  ne  peut  les  séparer  à  l'au- 
dition que  si  l'arrivée  de  la  plus  tardive  est  posté- 
rieure de  plus  de  1/15  de  seconde  au  moment  de 
l'arrivée  de  la  première,  ce  qui  exige  que  le  parcours 
de  la  plus  longue  dépasse  celui  de  la  plus  courte  de 
22  mètres  au  plus. 

Ceci  pour  des  sons  secs  et  brefs  (claquette  de  bois). 
—  Pour  des  sons  moins  courts  de  production  (voix 
humaine,  chant,  instruments  de  musique  à  vent, 
etc.),  la  limite  est  de  1/10  de  seconde  ou  34  mètres 
d'écart  entre  les  deux  chemins  parcourus. 

Conclusion.  —  11  est  nécessaire  d'envoyer  aux 
Copyright  by  Librairie  Detagrave,  1930. 


auditeurs  le  plus  grand  nombre  possible  d'ondes 
réfléchies  sur  les  obstacles  intérieurs  que  l'onde 
directe  rencontre,  mais  en  se  limitant  aux  ondes 
réfléchies  qui  auront,  pour  arriver  de  la  source 
sonore  à  l'auditeur,  un  chemin  à  parcourir  au  plus 
égal  à  la  distance  de  l'auditeur  à  la  source  sonore, 
augmentée  de  22  mètres,  pour  les  sons  secs,  et  de 
34  mètres  pour  les  sons  musicaux  non  percutés,  — 
22  et  34  mètres  étant  les  espaces  parcourus  par  le 
son  en  1/15  de  seconde  et  en  I   10  de  seconde. 

Comme,  d'autre  part,  tout  le  monde  est  d'accord 
sur  le  fait  que  dans  les  théâtres  antiques  (Orange, 
Nîmes,  Arles,  Béziers,  Piezzolo,  etc.),  l'audition 
pour  toutes  les  places  de  front  est  très  bonne,  il  a 
paru  opportun  d'appliquer  les  principes  des  anciens 
(Comédie-Française,  orchestres  symphoniques  Co- 
lo.wi:  et  autres). 

Les  caractéristiques  des  théâtres  anciens  sont  les 
suivantes  : 

Une  estrade, 

I  n  mur  vertical  de  scène, 

Des  fauteuils  en  gradins, 

l'as  de  plafond  horizontal. 

Estrade.  —  Pour  qu'un  auditeur  placé  en  A  sur  le 
prolongement  de  la  diagonale  de  l'estrade  croie  en- 
tendre en  même  temps  le  triangle  I  et  le  xylophone 
X  frappés  au  même  moment,  il  faut  que  la  ligne  T.\ 
soit      22  mètres. 

Pour  qu'un  auditeur  pla£é  en  Ç  croie  entendre  en 
même  temps  l'onde  directe  du  violoniste  V  et  l'onde 
réfléchie  par  le  mur  de  scène  .M,  il  faut  que  : 

•  2  VU  =  22  m.  ou  VI!      Il  mètres. 

Ceci  pour  les  sons  secs  pi  oduits  par  percussion  ou 
staccato. 


M- 


TV 


7+ 


^-^   T 


»A 


Dès  qu'on  envisage  d'autres  sonorités  instruments 
à  vent,  voix  humaine,  —  à  cordes  frappées  ou  pin- 
cées, etc.),  l'émission  n'étant  pas  instantanée,  on 
peut  passer,  comme  on  l'a  déjà  dit,  de  la  limite 
22  mètres  à  la  limite  34  mètres. 

Mur  d'estrade.  —  Ce  mur,  au  lieu  d'être  plan  et 
vertical,  comme  chez  les  anciens,  devra  avoir  une 
base  cintrée,  comme  enveloppant  l'estrade,  et  être 
également  cintré  en  altitude,  c'est-à-dire  concave, 

243 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


véritable  conque  sonore  établie  pour  renvoyer  vers 
le  centre  de  la  masse  des  auditeurs  toutes  les  ondes 
ou  les  rayons  sonores  réfléchis. 

Pour  éviter  le  trouble  que  ressentiraient  les  audi- 
teurs près  de  l'estrade,  il  faut  limiter  aux  environs 
de  7  mètres  la  hauteur  de  cette  surrace  rélléchissante 
de  scène. 

Dans  la  Salle  Pleyel,  on  a  suivi  ces  indications. 
—  Un  premier  théâtre  antique  a  été  construit  : 

Estrade,  2ï-  mètres  de  long,  —  13  mètres  de  pro- 
fondeur. —  Mur  de  scène  cintré  sur  le  sol,  cintré  en 
hauteur  limitée  à  7  mètres  au-dessus  de  l'estrade. 

Profitant  de  l'estrade  déjà  construite,  un  second 
théâtre  antique  a  été  établi,  les  fauteuils  en  gradins 
partant  du  niveau  +7  mètres;  le  mur  de  scène,  qui 
n'est  ni  plan  ni  vertical,  constitue  un  véritable  ré- 
llecteur  sonore  renvoyant  la  portion  des  ondes  qui 
s'y  réfléchissent  sur  les  auditeurs  de  ce  premier  bal- 
con ;  c'est  une  conque  sonore  plus  large  que  celle 
du  bas,  plus  inclinée  et  n'ayant  pas  plus  de  7  mètres 
de  hauteur  en  verticale. 

Dès  lors,  au  niveau  +14,  on  a  établi  encore  des 
fauteuils  en  gradins,  disposés  de  façon  à  ce  que  de 
chacun  d'eux  on  vit  toute  l'estrade.  —  Le  mur  de 
scène  de  ce  troisième  théâtre  antique  est  encore  une 
conque  sonore  plus  étendue  que  les  deux  premières, 
plus  inclinée  aussi  et  venant  à  la  suite  de  la  deuxième 
conque  qu'elle  semble  prolonger. 

Cette  deuxième  conque  termine  le  toit  de  l'ensem- 
ble qui,  dès  lors,  est  à  l'abri  du  vent,  de  la  pluie, 
tsrèle,  poussière,  etc.,  et  n'a  pas  de  plafond  hori- 
zontal. 

Le  résultat  a  répondu  en  tous  points  aux  espé- 
rances. —  Après  l'incendie  du  10  juillet  1928,  on 
reconstruisit  la  salle  identiquement  pareille  comme 
forme  et  parois  à  la  première,  et  le  30  novem- 
bre 1928-,  eut  lieu  la  reprise  dans  la  Salle  des  con- 
certs d'abonnement  de  l'Orchestre  Symphonique  de 
Paris. 

Dans  les  théâtres  antiques,  rien  n'existe  au-dessus 
et  derrière  les  spectateurs  des  derniers  gradins.  — 
Les  parties  des  ondes  sonores  venant  de  l'estrade 
qui  passent  au-dessus  de  ces  derniers  rangs  d'audi- 
teurs continuent  donc  leur  course  à  travers  l'espace, 
sans  revenir  jamais  en  arrière. 

Dans  la  Salle  Pleyel,  il  a  bien  fallu  fermer  la  salle 
derrière  les  auditeurs,  pour  séparer  de  la  salle  les 
magasins  Pleyel  mitoyens. 

Le  double  rideau  de  molleton  orthophonique  qui 


absorbait  les  ondes  sur  les  murs  verticaux  de  clô- 
ture, ne  pouvait  plus  être  admis  à  cause  même  du 
danger  d'incendie;  on  obtint  alors  des  sons  de 
retour  sensibles  sur  l'estrade  lorsque  ces  sons  étaient 
secs  et  percutants  :  castagnettes  ou  coups  de  talons 
sur  l'estrade,  coups  de  langue  staccato  pour  les  ins- 
truments puissants  (trombones,  pistons,  etc.).  On 
a  supprimé  ces  retours  à  l'aide  de  matelassage  eu 
produits  ignifugés  mous(feutres  spéciauxaméricains, 
poils  et  amiante),  ou  de  modification  des  formes  ou 
des  matériaux  des  bandeaux,  main  courante  des  bal- 
cons ^premier  et  second),  gaines  d'aération,  etc/ 

L'incendie  de  juillet  1028  permit  aussi  de  réaliser 
l'aération  de  la  salle  par  le  procédé  inventé  par 
M.  G.  Lyon  en  1911,  et  que  des  architectes  améri- 
cains appliquèrent  avec  le  plus  grand  succès  (santé, 
économie)  aux  écoles  de  Saint-Louis  en  1020,  sous 
le  nom  d'aération  en  circuit  fermé. 

Dans  la  Salle  Pleyel,  sous  chaque  siège,  est  ména- 
gée une  arrivée  continue  d'air  biologiquement  et 
chimiquement  pur,  à  raison  de  83  litres  par  minute. 

—  Cet  air,  à  18°,  enlève  les  100  calories  horaires  de 
chaque  assistant,  continue  à  s'échauffer  en  arrivant 
à  la  hauteur  de  la  respiration  de  chacun  (en  moyenne 
22  aspirations  par  minute,  de  chacune  un  demi- 
litre,  suivies  de  22  expirations  d'air  chaud  à  37°  en- 
viron, bouche  ouverte  et  chargé  d'acide  carbonique 
et  de  poisons  biologiques).  Il  monte  ainsi  vers  le 
plafond,  roule  le  lon^  du  toit  incliné  vers  l'arrière 
où  il  est  repris  par  un  aspirateurde  même  puissance 
que  celle  du  ventilateur  de  cave.  —  Repris  à  raison 
de  15  000  m3  par  heure,  l'air  est  renvoyé  : 

1»  Dans  une  chambre  de  dépoussiérage; 

2°  Dans  une  chambre  d'ozonisation; 

3°  De  là,  dans  une  chambre  à  giclagc  d'eau  basi- 
que pouvant  être  portée,  par  serpentins  vapeur,  à 
+  80°  £n  hiver,  et  par  serpentins  ammoniaque;   à 

—  10°  en  été.  Cet  air  purifié,  humidifié,  revient  ainsi 
au  ventilateur  qui  le  renvoie  à  nouveau  dans  la 
salle  par  les  gaines  horizontales  passant  sous  cha- 
que rangée  de  fauteuils.  Il  arrive  à  18°  et  sans  qu'on 
en  perçoive  le  mouvement,  à  cause  des  détentes 
obtenues  par  quatre  variations  successives  des  sec- 
tions d'arrivée. 

L'ancien  procédé,  renouvellement  cinq  fois  par 
heure  de  l'air  de  la  salle,  exigerait  pour  un  résultat 
moins  bon  (air  impur,  courants  d'air,  etc.)  la  circu- 
lation horaire  de  165  000  m3,  soit  1 1  fois  plus,  environ 
de  frais  d'installation  et  d'exploitation. 

G.  LYON. 


JURISPRUDENCE 
LE  THEATRE  ET  LES  AUTEURS 


Par  Adrien  PEYTEL 


LE   DROIT  DES  AUTEURS  DRAMATIQUES  ET  LYRIQUES 
ET  DES  COMPOSITEURS    DE   MUSIQUE 

I.  La  Li-gislalion. 

Le  langage  usuel  et  même  le  vocabulaire  juridique 
donnent  souvent  aux  droits  des  auteurs  et  des  com- 
positeurs le  nom  de  propriété  littéraire.  Et  pourtant, 
rien  n'est  plus  éloigné  du  sens  exact  du  mot  «  pro- 
priété »,  tel  que  ie  définit  le  Code  civil,  que  le  mono- 
pole assuré  par  les  lois  aux  auteurs  ou  à  leurs  ayants 
cause  sur  les  œuvres  dramatiques  ou  musicales.  Ce 
n'est  en  réalité  que  le  privilège  exclusif  d'une  exploi- 
tation temporaire  :  un  monopole  régi  par  la  loi 
française  et  par  des  conventions  internationales 
comme  les  brevets  d'invention,  les  modèles,  les  mar- 
ques de  fabrique,  pour  lesquels  on  a  créé  cette  locu- 
tion également  inexacte  de  «  propriété  industrielle  »  '. 
L'auteur  n'est  pas  le  propriétaire  de  son  œuvre 
comme  on  l'est  d'un  meuble,  d'un  immeuble;  il  n'a 
qu'un  privilège,  qui  lui  vient  de  la  loi,  celui  de  l'ex- 
ploiter pendant  un  temps  déterminé,  après  lequel  la 
protection  cesse;  l'ouvrage  tombe  alors  dans  le 
domaine  public  et  peut  être  livré  à  la  publicité  sans 
que  l'auteur,  qui  ne  peut  plus  s'opposer  à  cette  pu- 
blication, en  lire  le  moindre  avantage. 

Il  faut  remonter  à  la  Révolution  de  1 789  pour  trou- 
ver l'origine  du  droit  des  auteurs.  Auparavant,  bien 
que  quelques  arrêts  du  Conseil  du  Roi  aient  contraint 
les  libraires  à  obtenir  des  lettres  scellées  pour  l'édi- 
tion des  livres  nouveaux,  on  ne  parait  pas  s'être 
occupé  de  la  représentation.  L'auteur  vendait  sa 
pièce  ou  recevait  une  part  de  la  recette,  suivant  des 
conventions  particulières  qui  inclinaient  parfois  les 
comédiens,  pourvus  de  privilèges,  à  ne  pas  recher- 
cher dans  leur  comptabilité  d'expression  exacte  de 
la  vérité. 

Soulevée  par  Beaumarchais,  soutenue  par  Sedaine, 
Ducis  et  Fabre  d'Eglantine,  la  question  du  droit  des 
auteurs  fui  portée  à  la  Constituante,  qui,  par  son 
décret  du  13  janvier  1791,  complété  le  12  juillet, 
décida  que  les  œuvres  des  auteurs  seraient  ou  pour- 
raient être  représentées  sans  leur  consentement  écrit, 
et  que  les  héritiers  ou  les  cessionnaires  des  auteurs 
seraient  propriétaires  des  ouvrages  pendant  cinq  ans. 
Ce  décret  distinguait  fort  heureusement  le  droit 
de  représentation  du  droit  de  publication,  celui-ci 
n'entraînant  pas  celui-là.  Mais  l'année  suivante,  le 
30  août,  un  autre   décret  décidait  que  les    pièces 


Cassation,  Î5  juillet  1887.  D.  P.,  88,  1,  5. 


imprimées  avant  le  13  janvier  1791  pourraient  être 
jouées  sans  rétribution  pour  les  auteurs  et  que,  désor- 
mais, le  droit  de  représentation  ne  serait  réservé 
pour  dix  ans  qu'aux  auteurs  qui,  lors  de  la  publica- 
tion de  l'ouvrage,  auraient  fait  une  réserve  formelle, 
imprimée  en  tête  de  la  pièce  :  ce  décret  fut  rapporté 
par  la  loi  du  1er  septembre  1793. 

Sous  l'Empire,  le  droit  des  auteurs  fut  élargi,  il 
était  garanti  à  l'auteur  et  sa  veuve  pendant  leur  vie, 
et  à  leurs  enfants  pendant  vingt  ans,  par  le  décret 
du  o  février  1810.  Mais  ce  règlement  ne  visait  que  la 
librairie  et  l'imprimerie,  si  bien  que  le  Conseil  d'Etat 
put  décider  que  le  droit  des  auteurs  dramatiques 
n'élail  pas  modifié  en  ce  qui  concerne  les  représen- 
tations et  devait  être  limité  à  dix  ans. 

La  trop  courte  durée  de  ce  délai  apparut  bientôt 
quand  on  vit  que  des  œuvres  musicales  en  plein  suc- 
cès allaient  tomber  dans  le  domaine  public,  et  une 
loi  hâtivement  faite  et  promulguée  le  3  août  1844 
assimila  les  veuves  aux  enfants,  et  prorogea  pour 
tous  la  durée  du  droit  à  vingt  ans.  La  loi  des  8- 
19  août  1854  élargit  encore  le  droit  des  veuves,  qu 
fut  accordé  pour  la  vie,  et  donna  aux  enfanls  la 
jouissance  des  droits  de  leur  auteur  pour  trente  ans 
à  partir,  soit  du  décès  de  l'auteur,  soit  de  l'extinc- 
tion du  droit  de  la  veuve. 

Enfin,  la  loi  du  14  juillet  1866  unifia  tous  ces  sys- 
tèmes sans  établir,  comme  on  l'avait  fait  espérer  en 
1854,  une  réforme  générale  basée  sur  des  principes 
nouveaux;  on  en  est  resté  au  monopole  et  à  la  pro- 
tection temporaire. 

L'article  premier  de  cette  loi  fixe  la  durée  du 
droit  des  auteurs  et  de  leurs  ayants  cause  à  cin- 
quante ans  à  partir  du  décès  de  l'auteur.  Cette  loi, 
qui  est  encore  en  vigueur,  est  ainsi  libellée  : 

«  Article  premier.  —  La  durée  des  droits  accordés 
par  les  lois  antérieures  aux  héritiers,  successeurs 
irréguliers,  donataires  ou  légatairesdes  auteurs,  com- 
positeurs ou  artistes,  est  portée  à  cinquante  ans,  à 
partir  du  décès  de  l'auteur. 

«  Pendant  cette  période  de  cinquante  ans,  le  con- 
joint survivant,  quel  que  soit  le  régime  matrimonial, 
et  indépendamment  des  droits  qui  peuvent  résulter 
en  faveur  de  ce  conjoint  du  régime  de  la  commu- 
nauté, a  la  simple  jouissance  des  droits  dont  l'auteur 
prédécédé  n'a  pas  disposé  par  actes  entre  vifs  ou  par 
testament.  —  Toutefois,  si  l'auteur  laisse  des  héri- 
tiers à  réserve,  cette  jouissance  est  réduite,  au  pro- 
fit de  ces  héritiers,  suivant  les  proportions  et  dis- 
tinctions établies  par  les  articles  913  et  915  du  Code 
Napoléon.  —  Cette  jouissance  n'a  pas  lieu  lorsqu'il 
existe,  au  moment  du  décès,  une  séparation  de  corps 
I  prononcée  contre  ce  conjoint;  elle  cesse  au  cas  où 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


le  conjoint  contracte  un  nouveau  mariage.  —  Les 
droits  des  héritiers  ou  successeurs,  pendant  cette 
période  de  cinquante  ans,  restent  d'ailleurs  réglés 
conformément  aux  prescriptions  du  Code  Napoléon- 
—  Lorsque  la  succession  est  dévolue  à  l'Etat,  le 
droit  exclusif  s'éteint  sans  préjudice  des  droits  des 
créanciers  et  de  l'exécution  des  traités  de  cession  qui 
ont  pu  être  consentis  par  l'auteur  ou  par  ses  repré- 
sentants. 

«  Art.  2.  —  Toutes  les  dispositions  des  lois  anté- 
rieures contraires  à  celles  de  la  loi  nouvelle  sont  et 
demeurent  abrogées.  » 

Cette  loi  a  eu  l'avantage  de  simplifier  une  situa- 
tion jusque-là  singulièrement  complexe,  en  suppri- 
mant les  distinctions  faites  parles  lois  antérieures 
entre  les  catégories  d'héritiers.  Déplus,  elle  a  fixé  le 
cas  des  successions  en  déshérence  en  décidant  que 
les  œuvres  tombaient  dans  le  domaine  public  sous 
réserve  des  droits  des  créanciers  et  des  cessionnai- 
res,  dont  les  droits  sont  garantis  jusqu'à  l'extinction 
des  dettes  ou  jusqu'à  l'expiration  des  contrats. 

11.  Les  ouvrages  posthumes. 

Le  décret  du  1er  germinal  an  XIII  donne  aux  pro- 
priétaires d'un  ouvrage  posthume  les  mêmes  droits 
qu'à  l'auteur,  à  la  charge  d'imprimerséparément  les 
œuvres  posthumes  et  sans  les  joindre  à  une  nouvelle 
édition  des  ouvrages  déjà  publiés  et  devenus  pro- 
priété publique.  Ce  texte,  confirmé  par  le  décret  du 
Î8  juin  1800,  qui  l'applique  aux  ouvragesdramatiques. 
n'a  trait  qu'à  la  publication,  et  les  formalités  qu'il 
exige  sont  inutiles  pour  la  représentation,  dont  le 
droit  est  réservé  sans  condition1. 

On  estime,  en  général,  qu'il  tant  entendre  par  œu- 
vres posthumes  celles  qui  n'ont  pas  été  publiées 
du  vivant  de  l'auteur,  même  si  elles  ont  été  repré- 
sentées. Dans  le  cas  contraire,  une  œuvre  publiée 
mais  non  représentée  du  vivant  de  l'auteur  n'est 
pas  une  oeuvre  posthume,  puisqu'elle  n'entre  pas 
dans  la  définition  stricte  admise  par  les  auteurs. 

Cette  distinction  a  un  intérêt  pratique  depuis  que 
la  Cour  de  cassation  a  estimé  que  «  le  droit  privatif 
de  publication  d'une  œuvre  posthume  ne  dure,  au  pro- 
fit de  ses  successeurs,  que  dix  ans  après  sa  mort2.  » 

III.  Preuve  du  droit  de  propriété. 

Le  droit  de  propriété  littéraire,  pour  employer  le 
langage  courant,  n'est  soumis  à  aucun  mode  légal  et 
spécial  de  preuve,  ni  à  aucune  formalité  destinée  à 
la  constater. 

C'est  à  l'auteur  qu'il  appartient  de  prouver  son 
droit  par  tous  les  moyens,  eu  établissant  que  l'œuvre 
discutée  est  originale,  que  c'est  lui  qui  l'a  créée  et 
qu'il  peut  la  prétendre  sienne. 

La  revendication  de  ce  droit  n'est  pas  soumise  à 
la  formalité  du  dépôt,  qui  est  impossible  tant  que 
L'œuvre  n'est  pas  publiée,  de  telle  sorte  qu'on  ne 
peut  opposera  l'auteur  qui  prétend  établir  ses  droits 
sur  une  pièce,  le  défaut  de  dépôt3. 

La  nécessité  de  cette  preuve  s'impose  toutes  les 
fois  qu'un  auteur  ou  un  compositeur  entend  se  pré- 

1.  Pouillet.  Traité  de  la  Propriété  littéraire  et  artistique,  p.  179. 
—  Georges  Bureau,  Le  Théâtre  et  sa  Législation,  p.  388. 
i.  Cass.,  28  décembre  1880,  D.  P.,  1881,  I,   162. 
3.  Cass.,  7  janvier  I    12,  Siray,  1852,  I,  465. 
1.  Cass.,  22  novembre  1867,  Annales,  67,  p.  330. 
5.  Trib.  corr.  Rouen,  12  novembre  1875.  —  Ami.,  1877,  p.  211 
0.  Cour  Paris,  Il  avril  185-2.  —  D.  P.,  52,  2,  130. 


valoir  des  droits  que  lui  donne  la  loi  :  depuis  le 
décret  du  19  juillet  1791,  les  ouvrages  destinés  aux 
spectacles  publics,  imprimés  ou  non,  ne  peuvent  être 
représentés  sans  le  consentement  de  l'auteur  ou  de 
ses  ayants  droit;  celui  qui  s'oppose  à  une  repré- 
sentation ou  qui  réclame  le  bénéfice  de  son  autori- 
sation est  obligé  d'établir  la  qualité  qui  justifie  son 
intervention. 

Il  en  est  de  même  quand  l'auteur  agit  devant  les 
tribunaux  correctionnels  en  vertu  des  articles  425  à 
429  du  Code  pénal.  Ces  textes  établissent  qu'il  y  a 
contrefaçon  toutes  les  fois  qu'une  édition  est  impri- 
mée au  mépris  des  lois  et  règlements  relatifs  à  la 
propriété  des  auteurs.  La  contrefaçon  est  un  délit 
(article  425!.  Le  contrefacteur  ou  celui  qui  introduit 
en  France  des  ouvrages  contrefaits  à  l'étranger  sont 
punissables  d'une  amende  de  100  à  2  000  francs  et 
le  débitant  encourt  une  amende  de  25  à  500  francs; 
de  plus,  l'édition  contrefaite  doit  être  confisquée 
(article  427). 

L'article  429  est  spécial  aux  directeurs  ou  entre- 
preneurs de  spectacles  et  aux  associations  d'artistes, 
qui  font  représenter  sur  leurs  théâtres  des  ouvrages 
dramatiques  au  mépris  des  lois  et  règlements  relatifs 
à  la  propriété  des  auteurs.  La  peine  édictée  en  ce  cas 
est  de  50  francs  au  moins  et  de  500  francs  au  plus, 
ainsi  que  la  confiscation  des  recettes  au  profit  de 


IV.  Objet  du  droit  de  propriété. 

La  protection  de  la  loi  s'applique  à  toutes  les  œu- 
vres qui  constituent  une  création  originale  issue  de 
l'effort  intellectuel  et  personnel  de  l'auteur. 

Savoir  si  un  ouvrage  est  on  non  protégé  par  la  loi 
est  une  question  de  fait  qui  dépend  du  pouvoir  d'ap- 
préciation des  tribunaux  et  qui  échappe,  de  oe  fait, 
au  contrôle  de  la  Cour  de  cassation1.  Toutefois,  les 
juges  n'ont  pas  à  se  préoccuper  de  la  valeur  artisti- 
que de  l'œuvre,  et  son  importance,  son  étendue  ne 
sont  pas  des  facteurs  d'appréciation.  L'ouvrage  pro- 
tégé peut  être  une  tragédie,  une  comédie,  un  ballet, 
un  opéra  aussi  bien  qu'une  pantomime5  ou  une 
chanson". 

Il  n'est  même  pas  nécessaire  que  l'œuvre  soit  une 
création  personnelle  de  l'imagination  de  l'auteur, 
elle  peut  être  une  adaptation  :  le  seul  fait  de  l'ar- 
rangement nouveau  crée  un  droit. 

Si  l'auteur  a  adapté  ou  présenté  de  façon  originale 
une  œuvre  tombée  dans  le  domaine  public,  on  estime 
qu'il  a  acquis  un  droit  privatif  sur  son  ouvrage,  mais 
il  n'en  résulte  en  aucune  façon  qu'il  se  soit  appro- 
prié ainsi  un  privilège  quelconque  sur  l'œuvre  dont 
d  s'est  servi7.  Ainsi,  celui  qui  publie  des  chants  po- 
pulaires ne  puise  dans  cette  publication  le  principe 
d'aucun  droit  exclusif  sur  ces  chants8,  mais  il  a  une 
action  contre  ceux  qui  reproduiraient  la  disposition 
qu'il  a  donnée  au  texte,  le  choix  de  ses  extraits  ou 
l'orchestration  qui  accompagne  les  divers  motifs". 

Un  pas  de  ballet,  emprunté  ,j  des  danses  nationales 
qui  sont  évidemment  du  domaine  publie,  peut  être 
protégé  s'il  comporte  un  travail  personnel  d'adapta- 
tion sur  la  musique"1.  Il  en  est  de  même  pour  une 


Cass.,  27  novembre  1869,  D.  P..  70,  I,  183. 

Cour  Paris,  9  deeenibr.'  |s, .    —    I      .,  66,  p,  189. 

T,il..  Seine,  0  décembre  1864.  —  Ann.,  M,  p.  l 
uillet  1862.  -  H.  P.,  6::.  1,  204, 

i.  Trib.  .i».  Seine,   il  juillel  1862.  —  Ann.,  63,  p.  234. —  Trib. 
Seui,.,  m  r.-v. i.-i  mu.  —  /;„.-.  /■.<'.,  i"ii,  i,  193. 


Cass.. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PEDAGOGIE 


JURISPRUDENCE 


pièce  tirée  d'un  thème  ancien,  dont  les  personnages 
ont  été  modifiés  el  dont  un  ordre  nouveau  des  scènes 
fait  une  œuvre  originale',  ou  pour  un  livret  d'opéra, 
tiré  d'une  comédie  dont  l'intrigue  est  simplifiée  et 
dont  les  situations  sont  arrangées  en  vue  de  l'effet 
musical. 

Quand  l'œuvre  primitive  est  du  domaine  privé,  il 
ne  suffit  pas  que  l'auteur  de  l'adaptation  ou  de  l'ar- 
rangement établisse  son  travail  et  sa  part  de  création, 
il  faut  encore  qu'il  justifie  de  l'autorisation  de  celui 
auquel  appartient  l'ouvrage  dont  il  s'est  inspiré.  Il 
en  est  ainsi  pour  le  musicien  qui  écrit  des  motifs  de 
danse  sur  les  thèmes  d'un  opéra  :  son  ouvrage  n'est 
protégé  que  s'il  a  l'autorisation  de  l'auteur  de  l'o- 
péra -'. 

Ce  n'est  pas  seulement  l'œuvre  en  soi  qui  est  pro- 
tégée, mais  aussi  le  litre  sous  lequel  elle  est  connue, 
qui  constitue  en  quelque  sorte  «  l'enseigne  que  l'au- 
teur a  donnée  à  son  œuvre  et  sous  laquelle  il  l'a  fait 
connaître  ». 

C'est  ainsi  que  les  tribunaux  oui  estimé  qu'un 
Decourcelie  est  propriétaire  du  litre  Les  Deu  i  Gosses, 
et  qu'un  Paul  Féval  peut  s'opposer  à  ce  qu'un  film 
cinématographique  ait  pour  titre  Le  Bossu,  alors 
même  qu'il  u\  a  aucune  contrefaçon3. 

Toutefois,  si  le  titre  est  d'une  banalité  telle  qu'ie 
constitue  une  locution  courante,  et  en  qui 
nécessaire  en  tête  d'une  pièce,  il  ne  peut  faire  l'objee 
d'un  droit,  exclusif;  il  en  est  de  même  ' 
titre  seul  existe  et  qu'il  n'esfaccompagné  d'aucune 
œuvre  :  ce  n'est  qu'au  jour  de  la  publication  de  l'ou- 
vrage el  non  au  jour  de  l'annonce  qui  eu  a  été  faite 
qu'on  doit  se  placer  pour  juger  de  la  priorité  du 
droit1. 


LA  COLLABORATION 

Le  mot  «  collaboration  »  a  pris  dans  le  langage 
usuel  une  telle  extension  qu'il  ne  correspond  plus  à 
la  véritable  signification  qu'il  doit  conserver  du  point 
de  vue  juridique.  Pour  qu'il  y  ait  vraiment  collabo- 
ration, il  faut  une  oeuvre  commune  et  l'intention  de 
parlager  les  efforts  comme  les  bénéfices  :  c'est  une 
convention  tacite  souvent  qui  ne  peut  s'établir  que 
par  le  concours  de  plusieurs  volontés  et  non  par 
suite  de  circonstances  de  l'ait. 

Deux  ou  plusieurs  auteurs  collaborent  quand  ils  se 
prêtent  un  mutuel  concours  soit  dans  la  conception, 
soit  dans  l'exécution  du  plan,  soit  dans  l'ensemble 
des  travaux  nécessaires  pour  mener  à  fin  un  ouvrage 
projeté5.  Telle  est  la  définition  qui  ressort  de  la 
jurisprudence,  puisque  nos  lois  sont  muettes  sur  ce 
point. 

I.  Conditions  pour  qu'il  y  ail  collaboration. 

La  collaboration  est  un  fait  insaisissable;  il  peut 
résulter  des  interventions  les  plus  diverses,  soit  que 
les  auteurs  se  partagent  le  travail,  soit  que  l'un  ap- 
porte l'idée  et  que  l'autre  écrive,  soit  qu'un  autre 
apporte  un   dénouement,    une    nouvelle    scène,    un 


1.  Cour  Paris,  27  juin  1862.  —  Ann.,  66 

2.  Cour  Paris,  12  juillet  1855.  —  Ann.,  ; 
Cour  Paris,  20  novembre  1857,  —  Ann.,  57,  p.  453. 

3.  Trib.  civ.  Seine,  5  novembre  1910.  -  Ga:.  Trib., 4  j»n< 
i  novembre  1005.  —  Gaz.  Trib..  20  décembre 


56,  p.  74.  —  Trib.  < 


4.  Trib.  Corr. 


esprit  spécial.  Tout  ce  qui  contribue  au  succès  de 
l'œuvre  implique,  pour  celui  qui  l'apporte,  un  droit 
de  collaboration''.  Il  suffit,  pour  constituer  un  fait 
de  collaboration,  d'une  addition  de  personnages, 
d'une  modification  dans  le  plan  ou  dans  une  partie 
du  dialogue7.  Il  suffit  même  d'avoir  approprié  le 
texte  au  théâtre  où  il  doit  être  joué,  en  faisant  des 
coupures,  en  surveillant  les  répétitions  et  la  mise  en 
scène8. 

Dans  les  féeries,  l'importance  des  machines  et  des 
trucs  est  considérable,  le  dialogue  n'étant  que  le 
moyen  de  mettre  en  valeur  des  inventions  sensation- 
nelles. L'auteur  de  ces  trucs  est  donc  un  collabora- 
teur, bien  qu'il  n'ait  pas  écrit  une  ligne  de  texte9. 
Dans  les  ballets  d'action,  qui  sont  de  véritables  pièces, 
l'importance  du  maître  de  ballet  est  considérable;  il 
doit,  pour  régler  les  danses,  les  mimes  el  les  entrées, 
diriger  les  mouvements  de  l'orchestre  et  parfois  faire 
modifier  la  partition  :  le  ballet  est,  en  effet,  «  une 
œuvre  d'arl  donl  le  mérite  revienl  en  grande  partie 
m:  chorégraphe  »,  dit  un  jugement  du  tribunal  de  la 
Seine  à  propos  de  La  Fête  chez  Thérèse  pour  laquelle 
M.  Stichel  réclamait  de  M.  Reynaldo  Hahn  et  de 
M.  Meudès  le  droit  d'être  coi  ne  collabo- 

raleui  el  d'avoir  son  nom  sur  l'affiche l0. 

La  jurisprudence  n'e  l  pas  allée  plu  loin,  et  pour- 
tant, il  semblerait  qu'il  faille  encore  élargir  la  nature 
juridique  de  la  collaboration  :  elle  a  décidé  que  le 
peintre  des  décors  d'une  pièce  n'est  pas  un  collabo- 
ra i'  mi  i" .  S;;  us  doute,  dans  l'espèce,  cette  décision  se 
justifiait  par  cet  argument  que  le  décorateur  aurait 
des  droits  ui  la  reprisi  de  la  pièce  faite  sans  ses 
décoTS.  Mais  il  nie  paraît  impossible  de  poser  aussi 
brutalement  le  principe  de  la  non-collaboration  dans 
cette  hypothèse.  On  peut  très  bien  concevoir  des 
pièi  ,  el  ces  dernières  années  nous  ont  montré  un 
ballet  au  rhéàtre  Michel,  dont  le  succès  était  dû 
en  grande  partie  à  celui  qui  avait  habillé  la  pièce  et 
en  avail  brossé  le  décor.  Dans  ce  cas,  sans  aller  jus- 
qu'à dire  que  l'auteur  du  ballet  était  M.  Poiret,  on 
doit  admettre  qu'il  avait  droit  au  titre  et  aux  avan- 
:  la  collaboration. 
Dans  les  cas  douteux,  il  semble  que  les  tribunaux 
pourraient  tenir  compte  du  travail  commun  et  de 
l'intention  des  parties  qui  se  sont  accordé  une  con- 
fiance réciproque  pour  aboutir  au  succès,  tjuand 
l'intention  de  collaborer  n'existe  pas,  il  n'y  a  pas  de 
collaboration.  Ainsi,  le  régisseur  du  théâtre  qui  donne 
des  conseils  et  des  indications  n'est  pas  collabora- 
teur; le  vaudevilliste  qui  indique  en  têtedes  couplets 
les  airs  sur  lesquels  ils  doivent  être  chantés,  n'ac- 
cepte pas  par  ce  seul  fait  la  collaboration  du  musi- 
cien, auteur  de  ces  airs  :  il  n'y  a  aucune  indivisibi- 
lité entre  les  deux  œuvres  et  le  vaudeville  peut  être 
représenté  sur  la  seule  autorisation  de  l'écrivain12. 
S'il  en  était  autrement,  on  imagine  quel  nombre  de 
collaborateurs  aurait  un  revuiste! 

L'élément  intentionnel  a,  dans  l'appréciation  de 
ces  questions,  une  importance  capitale.  L'auteur 
d'un  roman,  d'une  nouvelle,  dont  on  tire  une  pièce, 
a  sans  doute  droit  à  une  indemnité,  mais  il  n'est  pas 
le  collaborateur  de  l'auteur  dramatique,  puisqu'il  n'a 


6.  Trib.  civ.  Seine.  22  juin  1887.  —  Ann.,  89,  p.  127. 

7.  Trib.  civ.  Seine,  18  novembre  1868.  —  Ann.,  60,  p.  43. 

8.  Cour  Paris,  4  mars  1S3G.  —  Ann.  56,  p.  74. 

9.  Cour  Paris,  28  juin  1860.  —  Ann.,  60,  p.  66. 

10.  Trib.  civ.  Seine,  10  février  1911.  —  Gaz.  Palais.  1911,  1,  34. 

11.  Trib.  civ.de  la  Seine,  16  juillet  1881.  —  La  Loi,  17  juillet. 

12.  Cassation^  février  1881.—  Ann.,  81,  p.  240;Sirey,81,  1,49- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  OU  CONSERVATOIRE 


eu  aucune  part  active  dans  [la  mise  en  scène  du 
roman  '. 

Sans  doute,  la  Société  des  gens  de  lettres  a-t-elle 
décidé  que  ses  membres  renonceraient  à  poursuivre 
pour  contrefaçon  les  auteurs  qui  tireraient,  sans 
autorisation,  des  pièces  d'œuvres  littéraires,  à  condi- 
tion que  les  écrivains  lussent  considérés  comme  col- 
laborateurs, mais  cette  décision  et  ce  choix  ne  cons- 
tituent que  des  arrangements  personnels  non  oppo- 
sables aux  tiers.  L'écrivain  peut  être,  pour  les 
commodités  personnelles  des  parties,  considéré 
comme  collaborateur  et  loucher  une  part  de  la  re- 
cette, mais  cet  arrangement  ne  fait  pas  de  l'œuvre 
adaptée  un  tout  indivisible,  si  bien  que  d'autres 
adaptations  sont  possibles  dès  que  l'une  ou  l'aulre 
des  deux  œuvres  n'est  plus  protégée  par  la  loi. 

Cette  conséquence  n'est  vraie  que  si  l'écrivain  n'a 
donné  à  l'auteur  que  l'autorisation  d'adapter;  si,  au 
contraire,  il  a  pris  une  part  active  à  la  mise  en  scène 
de  son  œuvre,  il  y  a  collaboration.  S'il  y  a  accord 
préalable  et  intention  de  collaborer,  l'auteur  n'a  pas 
besoin,  pour  établir  son  droit,  d'établir  qu'il  a  intro- 
duit des  éléments  nouveaux  ou  qu'il  a  créé  person- 
nellement une  inlrigue,  la  convention  suffît  à  justi- 
fier son  droit-. 

Le  traducteur  d'une  œuvre  ne  devient  pas,  par  le 
seul  fait  de  son  travail,  le  collaborateur  de  l'auteur; 
il  a  un  droit  de  propriété  sur  sa  traduction,  mais  i| 
n'a  pas  de  droits  exclusifs  sur  l'ouvrage  original, 
puisque,  sans  collaboration,  il  n'existe  pas  d'indivi- 
sibilité entre  les  deux  œuvres.  C'est  ce  qui  a  été  jugé 
sur  la  réclamation  de  M.  Wilder,  qui  s'opposait  aux 
représentations  en  France  des  œuvres  de  Wagner  sur 
d'autres  livrets  que  ceux  qu'il  avait  traduits.  Dans 
cette  espèce,  il  n'y  avait  pas  de  doute,  Wagner,  mort 
le  13  février  1883,  ne  pouvait  avoir  collaboré  avec 
Wildeu  qui  n'avait  traduit  les  opéras  qu'en  I88.'i;:. 

Quand  le  traducteur  est  simplement  rémunéré  pour 
son  travail,  il  n'a  pas  le  droit  de  propriété  littéraire 
sur  la  pièce,  car  l'intention  des  parties  était  de  faire 
un  contrat  de  louage  de  services  et  non  une  conven- 
tion de  collaboration;  son  nom  ne  doit  donc  pas  pa- 
raître sur  l'affiche  à  côté  de  celui  de  l'auteur. 

Le  traducteur  ne  paraît  donc  avoir  qualité  de  col- 
laborateur qu'à  l'égard  de  l'auteur  et  non  à  l'égard 
du  tiers;  l'œuvre  originale  et  l'œuvre  traduite  ne  for- 
mant jamais  un  tout  indivisible. 

Enfin,  il  est,  dit-on,  certains  directeurs  qui  ne  re- 
çoivent de  pièces  que  sous  la  condition  d'imposer  des 
collaborateurs  de  leur  choix;  certains  vont  même 
jusqu'à  prétendre  que  c'est  un  moyen  de  s'assurer 
une  bonne  presse.  Si  le  directeur  impose  cette  con- 
dition après  la  réception  officielle  de  la  pièce,  il  com- 
met une  faute  entraînant  la  résiliation  du  contrat  de 
réception  à  ses  torts4;  s'il  a  l'habileté  de  faire  ce 
marché  avant  toute  réception,  l'auteur  ne  peut  se 
plaindre  que  de  sa  propre  faiblesse. 

Si  aucun  élément  de  violence  ou  de  dol  ne  vicie  le 
consentement  de  l'auteur,  la  convention  de  collabo- 
ration demeure  valable  quel  que  soit  le  motif  de  cet 
acquiescement.  Cet  abandon  de  part  des  bénéfices 

ivier  1840.  -  1).  P.,  40,  2,  85  :  Lefranc  ••! 


1.  Cour  de  Paris.  27  janvie 
Labicbec.  P.  .1"  Mussel 

2.  Cour  Paris,  14jailleU879.  —  Ann./18   p.  102    Klein  c 

3.  Trib.  civ.  Seine,  S  août.  —  Cbosson,  fe  Droit  de  '  auti 

matiqnr,  p.  64. 

4.  André  Hem.  Code  pratique  >'«  Théâtre,  p.  32  et  suiv. 

5.  Trib.  ciï.  Seine,  5  mai  1886.  —  Chosson,  op.  cil.,  p    3! 

6.  Trib.  eiv.  Seine,  ::o  avril  Isa;).  —  Ci;.  Palais.  1"  m.ii. 


peul  être  la  rémunération  de  démarches,  de  mises 
en  relations,  de  concours  financiers  qui  n'ont  rien 
de  littéraire  :  de  semblables  conventions  sont  pour- 
suit licites,  avec  cette  restriction  pourtant  que  si 
l'auteur  véritable  signe  seul  son  œuvre,  le  tiers,  qui 
jouit  d'une  part  des  bénéfices,  n'a  pas  de  droit  de 
propriété  littéraire  sur  l'œuvre,  mais  une  simple 
créance  sur  l'auteur.  Il  a  été  jugé  que  l'intermédiaire 
qui  réunit  deux  auteurs  à  la  condition  de  toucher 
une  part  des  droits  sur  la  pièce  pour  laquelle  le  col- 
laborateur a  été  procuré  par  lui,  n'a  rien  à  prétendre 
sur  les  autres  pièces  qu'écrivent  les  auteurs  par  lui 
réunis,  même  si  la  première  pièce  n'est  jamaisfaite'. 

II.  L'autorisation  de  jouer. 

Tous  les  collaborateurs,  ayant  un  droit  égal  et  indi- 
viduel sur  toute  l'œuvre  qui  leur  est  commune,  doi- 
vent consentira  la  représentation,  et,  en  principe,  le 
directeur  agit  régulièrement  en  s'assurant  du  senti- 
ment de  tous.  Cependant,  si  un  seul  des  collabora- 
teurs apporte  la  pièce,  il  est  censé  agir  comme  le 
mandataire  des  autres,  et  les  représentations  ne 
deviennent  illicites  que  du  jour  où  un  autre  collabo- 
rateur signifie  l'opposition  à  la  continuation  des 
représentations1'. 

Si,  au  contraire,  celui  qui  a  agi  a  réservé  comme 
condition  expresse  du  contrat  le  consentement  de  ses 
collaborateurs,  le  directeur  ne  peul  s'en  dispenser7; 
mais  quand  tous  les  collaborateurs  ont  consenti  aux 
représentations,  l'un  d'eux  ne  peut  postérieurement 
revenir  sur  son  adhésion  pour  s'opposer  à  l'exécution 
du  contrat  passé  avec  le  directeur8. 

Dans  tous  ces  cas,  la  réserve  du  droit  des  auteurs 
ne  doit  s'entendre  que  s'il  s'agit  des  collaborateurs 
eux-mêmes  :  les  cessionnaires  ou  les  héritiers  des 
auteurs  ne  peuvent  avoir  que  des  droits  matériels  sur 
les  bénéfices  et  non  des  prérogatives  leur  permettant 
d'autoriser  des  représentations9. 

III.  Indivisibilité  de  l'œuvre. 

C'est  le  principe  de  l'indivisibilité  de  l'œuvre  écrite 
en  collaboration  qui  doit  servir  à  trancher  les  dissen- 
timents entre  collaborateurs.  On  ne  peut  séparer 
l'une  de  l'autre  les  diverses  parties  dont  est  faite 
l'œuvre  commune,  ni  les  modifier  sans  l'assentiment 
de  tous  les  collaborateurs,  même  s'il  est  facile  de 
reconnaître  le  travail  de  chacun10;  même  s'il  s'agil 
d'un  opéra"  dont  le  poème  et  la  musique  ne  consti- 
tuent pas  deux  œuvres  séparées  et  indépendautei  '  . 
Cette  iudivisibilité  entre  les  paroles  et  la  musique 
ne  peut  être  admise  pourtant  qu'à  la  condition  que 
l'œuvre  soit  nouvelle  dans  toutes  ses  parties,  et  elle 
cède  si,  sur  des  parties  tombées  dans  le  domaine 
public,  il  a  été  fait  une  musique  nouvelle,  ou  si,  sur 
une  partition  tombée  dans  le  domaine  public,  on 
adapte  an  nouveau  livret  :  c'est  ce  qui  a  été  jugé  à 
propos  de  Lu  Veuve  Joyeuse  de  M.  Franz.  Lehar13. 

De  ce  principe,  il  résulte  qu'on  ne  peut  représenter 


7.  Trib.  riv.  Seine,  10  mai  1861.        I    il     !  i,  p.  308 

8.  Cour  Paris,  21  lévrier  1872.  —  Ann., 73,  p.  153  ;  Saotagi  e.   In 
roise  Thomas 

9.  Cour  Paris,  3  décembre  1801.   -  Ann.,  iud.  92.   p.  111. 

10    i  .un  Paris,  13  mai  1884.       Ann.  B5,  p.30;Cass.,  SI  fi».  187! 
ircy,  73,  1,  213. 

11.  Cour  Paris,  10  décembre  1878.  -  H.  P.  80;  2,  62. 

12.  Cmr  Paris,  3  décembre  190  i.  --  Oat   Palais,  U  février  1906. 
i  :.  Cour  Paris,  14  mais  1012.  -  Cbossoo,  op.  cit.,  p.  63. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


JURISPRUDENCE    3879 


une  partie  de  l'œuvre  sans  l'àulre,  el  que  chacun  des 
collaborateurs  peut  s'opposer  à  la  représentation 
non  seulement  du  tout,  mais  aussi  de  l'œuvre  de 
l'autre.  C'est  ainsi  que  le  librettiste  a  le  droit  d'in- 
terdire l'exécution  des  motifs  d'un  opéra  adaptés  pour 
la  danse,  et  l'exécution  de  l'ouverture,  bien  qu'il 
s'agisse  d'une  partie  purement  musicale,  parce  que 
c'est  une  partie  intégrante  de  l'ouvrage  qui  est  le 
retlet  des  situations  principales  de  l'opéra  par  la  re- 
production des  motifs  les  plus  saillants  de  l'œuvre'. 
Dans  la  pantomime,  il  semblerait  qu'il  doit  en  être 
de  même,  puisque  la  musique  et  le  livret  fonl  un  tout 
comme  dans  l'opéra.  Pourtant,  les  tribunaux  ont  jugé 
que,  dans  ce  genre  de  spectacle,  le  jeu  de  l'acteur 
demeure  l'essentiel,  si  bien  que  la  musique,  qui  ce- 
pendant le  met  en  valeur,  n'est  qu'un  accessoire 
divisible,  dont  on  peut  se  passer  et  qu'on  peut  rem- 
placer sans  que  le  compositeur  ait  le  droit  de  se 
plaindre2. 

I\  .  Désaccord  entre  collaborateurs. 

L'œuvre  écrite  en  collaboration  étant  indivisible 
et  chacun  des  collaborateurs  ayant  sur  toute  la  pièce 
un  droit  personnel,  il  en  résulte  nécessairement  que 
l'un  de  ceux-ci  peut  s'opposer  à  la  représentation 
de  l'œuvre  commune  alors  que  les  autres  y  consen- 
tent 

Dans  cette  hypothèse,  l'œuvre  ne  sera  jamais  jouée 
el  le  droit  de  l'un  paralyse  indéfiniment  les  droits 
des  autres.  Cette  prérogative  n'effraye  pas  certains 
auteurs1,  qui  n'admettent  pas  que  les  tribunaux 
puissent  apprécier  les  motifs  personnels  que  peut 
avoir  l'auteur  à  refuser  un  consentement  indispen- 
sable, puisqu'il  est  le  propriétaire  d'une  part  indi- 
visible de  l'œuvre4. 

Une  semblable  solution  paraît  néanmoins  exces- 
sive :  il  est  certain  que  les  collaborateurs  n'ont  tra- 
vaillé a  l'œuvre  commune  qu'en  vue  de  la  représen- 
tation, l'intention  de  faire  représenter  la  pièce  doit 
donc  être  présumée;  si,  de  plus,  le  collaborateur 
opposant  n'a  pas  de  motifs  légitimes  et  sérieux  pour 
refuser  son  consentement,  il  semble  que  les  tribu- 
naux puissent  l'obligera  céder,  afin  qu'une  mauvaise 
volonté  injustifiée  ne  vienne  pas  paralyser  les  droils 
des  autres  collaborateurs5. 

11  faut  reconnaître  que  la  jurisprudence  reste  sur 
ce  point  très  divisée,  et  le  principe  reconnu  par  la 
Cour  de  Paris  est  que  la  propriété  de  chacun  des 
collaborateurs  résidant  sur  la  totalité  de  l'œuvre,  il 
suffisait  du  refus  d'un  seul  pour  empêcher  la  repré- 
sentation6. 

L'exemple  du  tribunal  obligeant  M.  Maeterlinck  à 
laisser  jouer  Monna  Vanna  dont  la  musique  était  de 
M.  Février,  n'emporte  pas  ;de  décision  de  principe, 
puisque  les  motifs  du  jugement  sont  fondés  sur  l'in- 
terprétation d'un  contrat  de  cession  à  une  maison 
d'édition7. 

V.  Décès  d'an  collaborateur. 

Du  principe  de  l'indivisibilité,  on  tire  nécessaire- 
ment cette  conséquence  que  c'est  à  la  date  de  mort 

i.  Cour  Paris,  12  juillet  1855.—  Sirev,  55,  2,  595  ;  D.  P.,  55,  2,256. 
2.  Tril).  civ.  Seine,  17  juin  1893.  -  Le  Droit,  22  juin,  Galipaui  c- 


M,    Georges  Hur-'au,  op.  cit.,  p.  394. 

4.  Trib.  civ.  Seine,  19  août  1872.  —  Sirey,  72 


Trib.  civ.  Seine,  2  janvTer  1879.  —  Cbosson.  op.  ci 
Cour  Paris,  18  décembre  1878.  —  Sirey,  79,  2,  213 


49;  D.  P.,  ' 
p.  43. 


du  dernier  survivant  des  collaborateurs  qu'il  faut  se 
placer  pour  faire  partir  le  délai  de  protection  de 
l'œuvre  faite  en  collaboration8.  Reste  à  savoir  com- 
ment les  bénéfices  seront  partagés  entre  le  survivant 
et  les  héritiers  de  l'auteur  prédécédé,  quand  les  droils 
de  ce  dernier  seront  légalement  éteints. 

La  jurisprudence,  après  quelques  hésitations,  s'est 
fixée  en  ce  sens  que  les  héritiers  de  l'auteur  prédé- 
cédé ne  voient  pas  leurs  droits  tomber  dans  le  do- 
maine public  avant  que  soient  éteints  les  droits 
appartenant  à  l'autre  collaborateur  ou  à  ses  repré- 
sentants9. Quant  aux  auteurs,  ils  demeurent  parta- 
gés sur  cette  question,  les  uns  admettant  le  maintien 
des  droits  des  héritiers  du  prédécédé,  les  autres  assi- 
milant les  droits  de  ceux-ci  à  un  usufruit,  qui  ne 
cesse  que  pour  accroître  la  part  du  survivant. 


SANCTION   DU   DROIT   DE   PROPRIÉTÉ 
I.  Peines  prévues  par  la  loi. 

L'article  428  du  Code  pénal  punit  d'une  amende 
de  50  à  500  francs  et  à  la  confiscation  des  recelles, 
tout  entrepreneur  de  spectacle,  toute  association 
d'artistes,  qui  aura  fait  représenter  sur  son  théâtre 
des  ouvrages  dramatiques  sans  l'autorisation  de 
l'auteur  ou  de  ses  ayants  cause. 

L'article  429  du  Code  pénal  et  la  loi  des  13-19  jan- 
vier 1791  décident  que  les  recettes  ainsi  conlisquées 
devront  être  remises  à  l'auteur  à  titre  d'indemnité 
pour  le  préjudice  subi. 

C'est  aux  tribunaux  qu'il  appartient  de  décider  s'il 
y  a  lieu  à  une  indemnité  supplémentaire,  ou  bien  de 
lixer  l'indemnité  si  la  saisie  des  recettes  n'a  pas  pu 
avoir  lieu. 

La  Cour  de  cassation  a  jugé  que,  lorsque  le  prévenu 
est  poursuivi  devant  la  juridiction  répressive  en  ré- 
paration du  préjudice  causé,  et  quand  il  fait  des 
offres,  le  Tribunal  a  le  droit  d'arbitrer  que  la  somme 
offerte  est  suffisante.  Toutefois,  ces  offres  ne  peuvent 
être  considérées  comme  libératoires  au  sens  de  l'ar- 
ticle 1258  du  Code  civil,  puisque  la  question  de  vali- 
dité des  offres  échappe  à  la  compétence  des  tribunaux 
correctionnels.  Déplus,  le  Code  civil  exige  que,  pour 
êlre  valables,  les  offres  réelles  doivent  représenter 
la  totalité  des  sommes  exigibles  et  liquides.  Or,  l'é- 
valuation de  la  réparation  du  préjudice  subi  dépen- 
dant entièrement  du  droit  d'appréciation  souveraine 
des  juges,  les  conditions  de  nécessité  de  la  validité 
des  offres  ne  peuvent  se  rencontrer10. 

Mi  le  Code  pénal,  ni  la  loi  de  1791  ne  précisent  la 
procédure  qui  doit  être  suivie  pour  la  saisie  des  re- 
celtes, mais  la  netteté  de  l'article  3  de  la  loi  du 
19  juillet  1793  détermine  aisément  la  manière  dont 
on  doit  opérer.  Cet  article  déclare,  en  effet,  que  les 
officiers  de  paix  seront  tenus  de  faire  confisquer,  à 
la  réquisition  et  au  profit  des  auteurs-compositeurs, 
tous  exemplaires  des  éditions  imprimées  ou  gravées 
sans  la  permission  formelle  et  par  écrit  des  auteurs. 
Or,  la  loi  du  1er  septembre  1703  déclarant  que  la  loi 
du  19  juillet,  qui  ne  s'appliquât  qu'au  droit  de  pu- 


irey,  1900,2,  65.  —  Trib.  cor 
!  Palais,  25  décembre  1909. 
es  de  la  propriéti    littérain 


.issu 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONXAIHE  DU  t'.O.VSERVATOIRE 


hlicution,  dispose  également  pour  le  droit  de  repré- 
sentation,  il  suffit  d'appliquer  l'article  3  que  nous 
venons  de  citer  aux  représentations,  pour  détermi- 
ner la  procédure  de  la  saisie 

Le  tribunaljde  la  Seine  a  jugé  le*6  décembre  1876  ' 
que  la  saisie  des  recettes  est  nulle  quand  elle  a  été 
opérée  par  l'huissier  en  vertu  d'une  ordonnance  du 
président  du  tribunal.  Toutefois,  quelques  années 
après,  le  3  avril  1878-,  le  même  tribunal  jugeait  que 
la  disposition  de  la  loi  du  19  juillet  1793  ne  pouvait 
s'appliquer  qu'à  la  confiscalion  des  éditions  publiées, 
et  que,  même  si  une  loi  spéciale  avait  investi  les 
commissaires  de  police  de  la  mission  de  saisir  les 
recettes,  il  rend  ait  néanmoins,  en  cas  d'urgence,  dans 
les  attributions  du  président,  du  tribunal,  d'autoriser 
la  saisie,  le  décret  du  3  mars  1808  permettant  à  ce 
magistral  de  répondre  à  toute  requête  à  fins  d'arrêt 
ou  de  revendications,  ou  toute  autre  mesure  d'ur- 
gence. Si  bien,  que  si,  en  principe,  les  recettes  doivent 
être  saisies  par  le  commissaire  de  police  ou  les  juges 
de  paix,  on  considère  qu'aucun  obstacle  n'interdit 
au  président  du  tribunal  d'autoriser  l'huissier  à  saisir 
en  vertu  de  ses  pouvoirs  généraux. 

II.  Le  délit  de  représentation  illicite. 

L'article  328  du  Code  pénal  parait  n'autoriser  les 
tribunaux  à  prononcer  l'amende  et  la  confiscation 
que  lorsqu'il  y  a  représentation  d'ouvrages  drama- 
tiques. Mais  il  est  évident  que  la  loi  n'a  pas  voulu 
restreindre  son  application  à  ces  étroites  limites, 
car  les  décrets  des  13  janvier  et  19  juillet  1791,  qui 
sont  à  la  base  de  cette  matière,  ne  distinguent  nul- 
lement les  ouvrages  littéraires  ou  artistiques  quels 
qu'ils  soient.  D'ailleurs,  les  tribunaux  ont  toujours 
fait  rentrer  dans  les  cadres  de  l'article  428  l'exécution 
des  œuvres  musicales  de  toute  nature. 

Une  question  se  pose  pourtant.  Est-il  nécessaire 
que  les  auteurs  aient  donné  au  préalable  leur  auto- 
risation par  écrit,  comme  semblait  l'exiger  le  décret 
de  1791?  Ce  formalisme  parait  aujourd'hui  complè- 
tement abandonné.  Il  suffit  que  le  consentement  des 
auteurs  ne  puisse  être  douteux.  Autrement,  il  fau- 
drait aller  jusqu'à  soutenir  que  l'auteur  peut  en 
même  temps  reconnaître  qu'il  a  donné  une  permis- 
sion verbale,  et  obtenir  cependant  une  condamna- 
tion contre  celui  qui  se  serait  contenté  de  cette  auto- 
risation non  écrite. 

La  Cour  de  Nîmes  a  décidé,  en  effet,  que  l'article  428, 
visant  un  délit  et  non  une  contravention,  il  suffit  au 
prévenu  d'établir  sa  bonne  foi  pour  que  l'action  cor- 
rectionnelle soit  sans  objet3. 

Au  point  de  vue  civil,  la  jurisprudence  estime  qu'il 
n'est  pas  nécessaire  qu'une  œuvre  ait  été  représentée 
ou  exécutée  dans  son  entier  pour  que  le  défaut 
d'autorisation  préalable  entraine  l'application  de  la 
loi.  Il  suffit  que  des  fragments  détachés  d'un  ouvrage, 
des  motifs  d'opéra,  des  phrases  musicales  séparées 
de  l'ensemble  aient  été  représentés,  pour  qu'il  y  ait 
lieu  à  réparation  ;  celui  qui  a  organisé  ces  représen- 
tations partielles  n'ayant  pu  le  faire  sans  le  consen- 
tement préalable  de  l'auteur  ou  de  son  représen- 
tant'-. 

D'autre  part,  il  est  incontestable  que  l'auteur  a 
toujours  le  droit  d'empêcher  la  représentation  pu- 

1.  Annales,  92,  p.  229. 

J.  Ann.,  92,  p.  233. 

3.  Cour  de  Nîmes,  5  aoûl  1881.  —  Atn,..  83,  p.  174. 

',.  i  our  de  Paris,  li  juillet  18  15.  —  Ann.,  56,  p.  89. 


blique  de  ses  œuvres,  quel  que  soit  le  préjudice  qui 
puisse  résulter  de  celle  interdiction.  Et  même,  si  les 
délinquants  expriment  leur  intention  d'acquitter 
ultérieurement  les  droits  dus  aux  auteurs,  cette 
intention  ne  peut  suppléer  au  défaut  de  consente- 
ment exigé|par  la  loi  ". 

Publicité. 

Lorsque  la  loi  prohibe  la  représentation  ou  l'exé- 
cution d'ouvrages  sur  un  théâtre,  alors  que  les  orga- 
nisateurs n'ont  pas  été  autorisés  à  donner  ces  repré- 
sentations, elle  vise  évidemment  tous  lieux  où  le 
public  peut  assister  au  spectacle,  sans  qu'il  soit  né- 
cessaire que  ces  représentations  aient  lieu  dans  un 
véritable  théâtre. 

C'est  ainsi  que  les  tribunaux  ont  condamné  les 
entrepreneurs  de  fêtes  musicales  ou  dansantes  sui- 
des places  publiques,  sur  des  promenades  ou  dans 
des  jardins  publics6. 

La  Cour  de  Paris,  le  12  juillet  1855,  a  jugé  que  les 
organisateurs  d'un  concert  dans  un  cercle  sont  res- 
ponsables en  cas  de  défaut  d'autorisation  préalable. 
Et  la  même  jurisprudence  s'est  affirmée  pour  les 
représentations  données  dans  un  café,  dans  une  salle 
d'asile  et  dans  le  foyer  d'un  théâtre.  Le  forain  qui 
fait  exécuter  des  morceaux  de  musique  par  son 
orchestre  à  l'extérieur  de  son  théâtre  est  également 
soumis  à  la  nécessité  de  l'autorisation.  Il  en  est  de 
même  du  propriétaire  du  manège  de  chevaux  de  bois 
qui  fait  exécuter  des  morceaux  de  musique  à  l'aide 
d'un  orgue  mécanique7. 

Dans  d'autres  cas,  l'appréciation  du  caractère  pu- 
blic d'une  représentation  présente  des  difficultés. 
Ainsi,  quand,  dans  un  cercle,  on  organise  un  concert 
auquel  peuvent  seuls  assister  les  membres  du  cercle, 
le  défaut  de  publicité  est  évident.  Mais,  si  les  membres 
du  cercle  peuvent  amener  des  étrangers,  ou  si  le 
cercle  se  trouve  ouvert  ce  jour-là,  la  représentation 
devient  publique.  S'il  en  était  autrement,  déclare  la 
Cour  de  cassation,  ce  serait  méconnaître  l'esprit  de 
la  loi  de  1791  et  abandonner  la  propriété  littéraire 
ou  artistique  à  la  merci  des  nombreuses  socii  tés  qui, 
sous  le  nom  de  cercle,  s'établiraient  sur  tous  les  points 
du  territoire8. 

Enfin,  il  importe  peu  que  les  représentations  soient 
ou  non  payantes,  et  la  loi  n'a  pas  restreint  1rs  droits 
des  auteurs  et  compositeurs  au  seul  cas  où  les  orga- 
nisateurs du  spectacle  cherchent  un  but  de  spécula- 
tion. La  perception  d'un  prix  d'entrée  n'est  donc  pas 
une  condition  nécessaire  à  l'existence  du  délit. 

Quand  les  représentations  sont  gratuites,  la  seule 
conséquence  au  point  de  vue  des  poursuites  peut  être 
de  diminuer  l'indemnité  à  allouer  aux  auteurs.  Les 
tribunaux  estiment  que  cette  indemnité  doit  être 
proportionnelle  aux  avantages  qui  oui  été  retirés  de 
la  représentation  illicite". 

III.  Droit  de  poursuivre. 

La  loi  accorde  le  droit  de  poursuite,  non  seule- 
ment aux  auteurs  et  aux  compositeurs,  ainsi  qu'à 
leurs  ayants  cause,  mais  aussi  au  ministère  public 


I    .iSS.lthUl.    I  \ 


7.  Cour  de  Rouen,  -I  février  issu.  —  An».,   30,  p.  1 
lion,  21  juillet  ISSl.  -  Ann.,  81,  p.  235. 

8.  Cassation,  is  janvier  1881.        Ann.,  8t.  p.  228. 

9.  Cassation  28  janvier  ISSl     —  Ann.,  8t,  p.  SÎ8 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


JURISPRUDENCE    3881 


qui,  en  dehors  de  toute  plainte  et  sur  sa  propre  ini- 
tiative, peut  entamer  l'action. 

Un  directeur  de  théâtre,  qui  posséderait  un  droit 
exclusif  de  représentation  pendant  un  certain  temps 
sur  un  ouvrage  déterminé,  devrait  être  considéré 
comme  un  ayant  cause  de  l'auteur,  il  aurait  donc 
une  action  directe  contre  le  directeur  d'un  autre 
théâtre  qui,  sans  autorisation,  jouerait  la  même  pièce. 
11  a  même  été  jugé  par  la  Cour  de  Rouen,  le  9  mars 
1866,  que  ce  directeur  aurait  le  droit  de  poursuivre 
l'autre  directeur  devant  les  tribunaux  répressifs.  De 
même,  il  a  été  jugé  par  la  Conr  de  Hennés,  le  20  dé- 
cembre 18671,  que  la  Société  des  auteurs  et  compo- 
siteurs dramatiques,  quand  elle  agit,  dans  le  but  de 
protéger  les  œuvres  des  auteurs,  doit  le  faire,  non 
pas  en  son  propre  nom,  mais  au  nom  des  auteurs 
eux-mêmes,  car,  à  la  différence  du  directeur  dont 
nous  venons  de  parler  et  qui  est  un  ayant  cause  de 
l'auteur,  cette  Société  ne  tient  pas  des  droits  person- 
nels des  auteurs,  mais  elle  est  simplement  chargée 
de  défendre  leurs  intérêts. 

IV.  Objet  «le  la  poursuite. 

La  poursuite  doit  être  dirigée  contre  les  organisa- 
teurs de  la  représentation  illicite,  car  c'est  à  eux 
qu'incombe  l'obligation  de  demander  l'autorisation 
préalable. 

Les  tribunaux  oui  les  pouvoirs  les  plus  étendus 
d'appréciation  pour  vérilier  et'décider  quels  sont, 
en  dehors  des  directeurs  apparents,  les  véritables 
organisateurs  de  la  représentation. 

Supposons  que  les  auteurs  du  délit  viennent  à  le 
commettre  dans  une  salle  dont  ils  ont  obtenu  la 
disposition.  Quelle  sera  la  responsabilité  du  proprié- 
taire de  cette  salle? 

Peu  importe,  tout  d'abord,  que  ladite  salle  ail  été 
mise  à  la  disposition  des  délinquants  d'une  façon 
permanente  ou  seulement  accidentelle;  qu'elle  leur 
ait  été  louée  ou  livrée  gratuitement;  qu'un  prix 
d'entrée  ait  été  perçu  pour  la  représentation,  et  que 
le  propriétaire  de  rétablissement  ait  louché  sa  part 
de  la  recette.  Ce  qu'il  faut  simplement  considérer, 
c'est  si  le  propriétaire  dont  s'agit  a  coopéré,  'le 
quelque  manière  que  ce  soit,  à  l'organisation  de  la 
représentation,  s'il  s'est  immiscé  dans  les  détails 
de  la  préparation  du  divertissement,  s'il  a  concouru 
à  l'élaboration  du  programme,  auquel  cas  il  sera 
coauteur;  ou  bien  s'il  a  sciemment  et  volontairement 
«  participé  au  délit  par  des  faits  détermines  qui  n'en 
constituent  pas  l'exécution,  mais  à  raison  desquels 
la  perpétration  de  l'acte  ou  une  adhésion  à  l'acte 
peut  lui  être  imputée  »,  auquel  cas  il  sera  complice. 

La  jurisprudence  nous  semble  errer  quelque  peu 
dans  l'application  de  ces  principes. 

Il  a  été  fort  bien  jugé  que  le  maire  d'une  ville, 
mettant  â  la  disposition  d'un  individu  qui  vient  à 
commettre  le  délit,  la  salle  du  Casino  de  cette  ville, 
n'encourt  aucune  responsabilité  s'il  reste  complète-, 
ment  étranger  à  l'organisation  du  divertissement 
incriminé'-. 

Qu'un  cafetier,  prêtant  son  établissement  à  des 
chanteurs  ambulants,  dans  les  mêmes  conditions, 
devrait  être  écarté  de  toute  poursuite3. 

11  a  été  jugé,  par  contre,  qu'un  cafetier,  en  rece- 


1.  Annale,,  69,  p.  «4. 

2.  Cass.  du  14  novembre  1*73  ;  Ann 

,  74,  p.  47 

3.  C.Paris,  du  2  février  1866  :  Ann. 

«6,  p. 104 

vrierl881  :  Ann.,  81,  p.  232. 

vant  dans  son  établissement  une  troupe  d'artistes 
ambulants,  s'exposait  à  une  poursuite  éventuelle  en 
qualité  de  complice,  de  ce  fait  «  qu'il  connaissait  la 
composition  du  concert,  puisque  le  programme  était 
resté  déposé  sur  le  comptoir)!).  Et  qu'il  devait  être 
d'autant  plus  déclaré  responsable,  que  la  Société  des 
auteurs  et  compositeurs  l'avait,  un  mois  auparavant, 
averti  par  une  sommation  extra-judiciaire  d'avoir  à 
s'abstenir,  désormais,  de  semblables  représenta- 
tions ».  La  complicité  reposait  ainsi  sur  cette  cir- 
constance que  le  cafetier  dont  s'agit  avait  fourni  les 
moyens  de  commettre  le  délit,  sachant,  par  les  aver- 
tissements à  lui  adressés,  qu'il  se  prêtait  à  sa  per- 
pétration \ 

Enfin,  la  Cour  de  Paris  (du  2  mars  1876;  Ann., 76, 
p.  109)  a  considéré  qu'une  circulaire,  émanant  de  la 
Société  des  compositeurs  de  musique  et  adressée  â 
tous  les  propriétaires  de  salles  publiques  treize  mois 
avant  un  concert  incriminé,  «  ne  pouvait  avoir  pour 
conséquence  d'imposer  les  conditions  de  location 
des  salles  de  concert  et  de  rendre  les  propriétaires 
de  ces  salles  à  tout  jamais  responsables  des  infrac- 
lions  qui  s'y  commettraient,  même  à  leur  insu  ». 


ACCEPTATION   DES  OUVRAGES 

L'acceptation  d'une  pièce  par  un  directeur  peut, 
en  principe,  résulter  de  tous  les  faits  quels  qu'ils 
soient  qui  apportent  au  juge  chargé  de  décider  s'il 
y  a  ou  non  acceptation,  la  preuve  de  cette  accepta- 
lion.  Mais  â  défaut  d'un  acte  écrit,  il  est  indispen- 
sable qu'on  établisse  qu'il  y  a  réellement  accepta- 
tion; et.il  a  été  jugé,  particulièrement,  que  le  seulfait 
par  le  directeur  de  faire  des  compliments  sur  une 
pièce  et  de  la  déclarer  satisfaisante  ne  suflit  pas  pour 
faire  présumer  que  cette  pièce  a  été  acceptée. 

D'autre  part,  la  Société  des  auteurs  passe  avec  les 
directeurs  des  traité-  d'après  lesquels  la  délivrance 
d'un  récépissé  et  l'inscription  d'un  numéro  d'ordre 
doivent  accompagner  toute  acceptation  de  manus- 
crits. Dans  les  quaranle  .jouis  qui  suivent  celte  re- 
mise du  manuscrit,  la  réception  devient  définitive  ; 
ou  bien  certaines  réserves  peuvent  être  notifiées; 
de  telle  sorte  que,  si  la  restitution  du  manuscrit  est 
tardive  et  occasionne  à  l'auteur  un  préjudice,  les 
tribunaux  peuvent,  en  se  fondant  sur  l'obligation 
consentie  par  le  directeur  envers  la  Société  des 
auteurs,  condamner  ce  directeur  à  des  dommagi  - 
intérêts. 

Pour  contrôler  cette  acceptation  et  le  respect  du 
délai  imposé,  les  directeurs  doivent  adresser  chaque 
mois  à  la  Société  le  relevé  des  pièces  reçues,  avec 
leur  numéro  d'ordre  et  la  date  de  réception. 

Une  pièce  peut  être  acceptée  purement  et  simple- 
ment, ou  bien  elle  peut  n'être  admise  qu'à  correc- 
tions. Dans  ce  cas,  l'acceptation  ne  devient  définitive 
qu'après  les  corrections  faites  par  l'auteur  et  agréées 
par  le  directeur.  Si,  par  la  suite,  l'ouvrage  n'est  pas 
représente,  l'auteur  est  admis  parles  tribunaux  à 
réclamer  des  dommages-intérêts  pour  les  frais  dé- 
boursés en  raison  de  cette  acceptation  provisoire  et 
de  la  perte  de  temps  causée  par  le  fait  du  directeur, 
toutes  les  fois  qu'une  faute  peut  être  établie  à  sa 
charge s. 


i.  Cass.  du  22  janvier  1869;  Ann.,  69,  p.  408  ;  —  C.  Toulo 

uin  1869;  Ann,,  69,  p.  408. 

i.  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine,  30  avril  1867.  —  Ga 


NCYCLOPÉOIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICT10SSA1HE  DU  CONSERVATOIRE 


LES   DROITS   ET   LES   OBLIGATIONS  DE    L'AUTEUR 
ET   DU    DIRECTEUR 

La  Société  des  auteurs,  dans  les  traités  qu'elle 
passe  avec  les  directeurs,  leur  impose,  en  général,  le 
maintien  des  conventions  intervenues  avec  les  en- 
treprises de  spectacle  précédentes,  car,  à  défaut  de 
cette  clause,  le  directeur  d'un  théâtre  ne  se  trouve- 
rait pas  tenu  des  obligations  de  son  prédécesseur.  11 
en  résulte  une  présomption  à  la  charge  du  directeur, 
l'empêchant  de  déclarer  qu'il  ignorait  les  conven- 
tions antérieures  et  qu'il  n'a  pas  à  les  exécuter. 

Cependant,  si  l'acte  de  vente  du  théâtre  ne  fait 
pas  mention  de  ces  obligations  antérieures,  le  direc- 
teur qui  s'y  trouve  tenu  alors  qu'il  les  avait  ignorées, 
peut  réclamer  des  dommages-intérêts  à  son  ven- 
deur1. 

Quand,  au  lieu  d'une  vente,  il  s'agit  d'une  faillite, 
le  syndic  qui  continue  l'entreprise  demeure  lié,  à 
l'égard  des  auteurs,  des  obligations  du  failli. 

I.  Droit  ilt-  représentation. 

La  pièce  une  fois  acceptée,  il  en  résulle  pour  le 
directeur  l'obligation  de  la  représenter,  et  pour  l'au- 
teur l'obligation  de  ne  mettre  aucun  obstacle  aux 
représentations. 

Si  la  pièce  est  faite  en  collaboration,  l'obligation 
devient  indivisible  entre  chacun  des  co-slipulants.  Il 
en  résulte  que  l'un  des  auteurs  de  l'ouvrage  a  le 
droit  de  réclamer  la  représentation,  alors  même  que 
son  collaborateur  s'en  désintéresserait,  ou  même  s'y 
opposerait-. 

Il  est  évident  que  toutes  ces  conventions  sont  su- 
bordonnées à  cette  force  majeure  que  l'autorité 
administrative  ne  s'oppose  pas  à  la  représentation. 
Dans  ce  cas,  les  parties  se  trouvent  déliées  de  leurs 
obligations  jusqu'à  ce  que  les  tribunaux  administra- 
tifs aient  slatué  sur  la  validité  de  l'interdiction  de 
l'administration. 

En  livrant  la  pièce  au  directeur,  l'auteur  perd  les 
droils  de  représentation  qu'il  avait  sur  elle,  en  ce 
sens  qu'il  ne  peut  faire  jouer  cette  pièce  sur  un 
autre  théâtre  de  la  même  ville.  Mais,  dans  la  plupart 
des  cas,  l'auteur  peut  fort  bien  conserver  son  droit 
de  faire  représenter  la  même  pièce,  soit  en  tournée 
dans  les  départements,  soit  sur  des  théâtres  de 
province. 

La  Société  des  auteurs  et  compositeurs  dramati- 
ques a  même  décidé,  le  28  mai  1868,  que  la  clause 
suivante  figurerait  dans  ses  traités  à  venir  :  Les 
ouvrages  appartenant  à  un  théâtre  de  Paris  pourront, 
sans  avoir  cessé  de  faire  parlie  de  son  répertoire, 
être  représentés  sur  les  théâtres  placés,  avant  et 
depuis  l'annexion,  dans  le  rayon  de  l'ancienne  ban- 
lieue, sauf  aux  directeurs  à  se  conformer  aux  délais 
d'usage  et  obtenir  le  consentement  des  ailleurs.  » 

Les  théâtres  de  banlieue  sont  ceux  de  Halignolles, 
Mont  maître,  Hcllevi  lie ,  Montparnasse,  Grenelle,  Saint 
Marcel  et  l'assy,  Adamville,  Aubervilliers,  Asnières, 
Bellevue,  Boulogne,  Billancourt,  Charenton,  Clamait. 
Chaville,  Courbevoie,  Gentilly,  drand-Monlrouge,  La 
Villette,   Le  ltaincy,    Levallois,    Meudon,  Nanlerre, 


Cour  de  Paris,  33  décembre  1887.  —  li.illoz,  89,  2, 
Cour  de  Paris,  21  février  1872.  -  Annales,  73,  p. 
Trih.  civ.  Seine,  6  juin  1844.  Un:,  dm  trib.  du  7  ju 
Trib.,  «n.  Seino,  23  juin  [868.  —Ànn..6i,  p.  1 


Puteaux,  Komainville,  Saint-Mandé,  Saint-Cloud, 
Saint-Denis,  Sceaux,  Sèvres,  Virotlay,  Ville-d'Avray', 
Argenleuil,  Auteuil,  Chàtillon,  Créteil,  Kontenay- 
sous-Bois,  Joinville-le-Pont,  Montreuil,  Vitry,  Vanves. 
Sauf  conventions  contraires,  c'est  le  directeur  qui 
fixe  la  date  de  la  première  représentation,  mais 
tout  arbitraire  est  exclu  de  ce  fait  que  chaque  pièce 
doit  être  jouée  à  son  tour  de  réception.  Ne  sont 
exceptées  de  cette  règle  que  les  pièces  de  circons- 
tance, les  pièces  d'actualité  qui  ne  sont  susceptibles 
de  vogue  que  d'une  façon  toute  passagère. 

Lorsque,  en  vertu  du  traité  intervenu,  un  délai  a 
été  fixé  pour  la  représentation  de  l'ouvrage,  si  le 
directeur  laisse  expirer  ce  délai  sans  chercher  à 
s'acquitter  de  l'obligation  ainsi  contractée,  il  peut 
être  condamné  à  la  restitution  du  manuscrit  et  à  des 
dommages-intérêts. 

Le  directeur  ne  peut  accroître  le  délai  fixé  du 
temps  de  clôture  de  son  théâtre3. 

11  ne  peut  non  plus  prétendre  que  l'auteur  a  aban- 
donné son  droit,  sous  le  prétexte  que  d'autres  pièces 
de  lui  auraient  été  jouées  sur  le  même  théâtre  depuis 
le  traité  invoqué1. 

Toutefois,  si  l'auteur  y  consenl,  ou  s'il  exige  l'exé- 
cution du  traité,  les  tribunaux  peuvent  imparlir  un 
nouveau  délai  au  directeur,  en  le  condamnant  à  des 
dommages-intérêts  pour  le  relard5. 

Evidemment,  lorsque,  en  vertu  de  conventions  pos- 
lérieuresau  traité,  les  auteurs  ont  promis  d'apporter 
certaines  modifications  à  l'ouvrage,  ils  ont  renoncé 
par  cela  même  à  se  prévaloir  du  délai  primitivement 
i\%é;  ils  ne  peuvent  arguer  de  son  expiration  puiir 
demander  la  remise  du  manuscrit  et  une  condam- 
nation à  des  dommages-intérêts  contre  le  directeur, 
celui-ci  élant  fondé  à  repousser  leurs  prétentions, 
en  excipant  de  ce  qu'il  attend  les  remaniements  pro- 
jetés6. 

Le  directeur  n'esl  pas  non  plus  en  faute,  et  il  peul 
lui  être  accordé  un  sursis,  lorsque  les  répétitions 
ont  été  interrompues  par  la  maladie  d'un  acteur,  sur- 
tout si  l'auteur  n'a  pas  agréé  le  nouvel  interprète  qui 
lui  était  proposé7. 

Les  traités  passés  entre  la  Société  des  ailleurs  et 
les  directeurs  contiennent  toujours  une  clause  aux 
termes  de  laquelle  ces  derniers  s'engagent  à  repré- 
senter les  ouvrages  acceptés  dans  un  délai  déterminé, 
sous  peine  de  reirait  du  manuscrit  et  d'une  indem- 
nité fixée  d'avance,  la  résolution  du  contrat  el  la 
réparation  du  dommage  devant  être  acquises  à  l'au- 
teur de  plein  droit  et  sans  mise  en  demeure.  Cette 
stipulation  est  de  rigueur  et  exclut  l'application  d» 
l'article  1230  du  Code  civil8. 

Si  l'auteur,  dans  un  traité  particulier,  a  stipulé 
un  délai  plus  court  que  celui  imparti  par  le  traité 
général,  le  directeur  ne  sera  pas  fondé  â  opposer  ce 
traité  général  au  traité  particulier. 

L'usage  veut  que  l'auteur  puisse  retirer  sa  pièce 
du  répertoire  d'un  théâtre,  lorsqu'elle  n'a  pas  été 
représentée  dans  l'espace  d'un  an.  Il  a  été  jugé 
qu'une  seule  représentation,  ou  un  petit  nombre  de 
représentations,  pendant  ce  délai,  ne  sufflsaienl  pas 
à  conserver  au  directeur  ses  droits  sur  l'ouvrage. 
Mais   l'auteur  doit  mettre  le  directeur  en  demeure 


,;.  Cour  Paris  du  12  décembre  1837.  —  Gaz. des  Mb.,         I  " 
6-13   .Ire ibre. 

6.  Trib.  civ.  Seine,  27  juillet  1806.  —  Gaz.  (tes  trib.  du  28  juillet. 

7.  Trib.  civ.  Seine.   I  s  octobre  1S07.  —  Ann.,  67.  p.    .17. 
s.  C.  Paris,  du  '26  août  1ms;   Ann.,  58,  p.  393. 

....    Trib.  connu.  Seine.  30  avril  1867  ;  llaz.  des  trib..  .In  19  mai 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


JURISPRUDENCE    3883 


et  demander  la  résiliation  des  conventions  interve- 
nues. Le  délai  de  365  jours  court  à  dater  de  la  som- 
mation1. 

Mais,  lorsque  l'auteur  a  laissé  son  ouvrage  au 
répertoire,  le  directeur  qui  voudrait,  à  un  moment 
quelconque,  le  faire  représenter  à  nouveau  n'aurait 
point  à  requérir  de  consentement  préalable.  L'auteur, 
aans  de  telles  circonstances,  ne  saurait  prétendre  à 
d'autre  droit  que  celui  de  diriger  les  répétitions2. 

II.  Durée  des  représentations. 

D'une  façon  générale,  le  directeur  et  l'auteur  ont 
le  droit  d'arrêter  les  représentations  lorsque  l'in- 
succès de  l'ouvrage  ne  peut  faire  de  doute,  ou  lors- 
que l'ouvrage  cesse  d'avoir  un  succès  suffisant  pour 
justifier  la  continuation  des  représentations.  Il  ne 
peut  y  avoir  de  droit  précis  à  cet  égard,  car  ce  sont 
des  questions  de  fait  et  d'appréciation  qui  échappent 
aux  principes  de  droit. 

Pourtant,  il  est  évident  que  le  seul  fait  de  l'insuc- 
cès aux  premières  représentations  ne  peut  suffire 
pour  justifier  l'arrêt  de  la  pièce,  car  il  arrive  souvent 
que  les  critiques  de  la  pièce  se  trouvent  démenties 
par  l'accueil  que  le  public  fait  à  la  pièce.  Il  ne  suf- 
firait donc  pas  d'une  répétition  générale  déplorable 
pour  justifier  le  directeur  qui  retirerait  aussitôt  la 
pièce  de  l'affiche. 

C'est  sur  l'appréciation  des  faits  et  des  circons- 
tances que  les  tribunaux  peuvent  se  régler  pour 
décider  si  l'arrêt  de  la  pièce  est  justifié,  sans  qu'il 
soit  possible  de  formuler  une  règle  à  cet  égard.  Il  a 
d'ailleurs  été  jugé  que  les  tribunaux  ne  doivent  pas 
tenir  un  compte  excessif  des  applaudissements  ou 
des  sifflets,  dont  on  a  établi  à  diverses  reprises  qu'ils 
avaient  été  provoqués,  et  la  jurisprudence  a  flétri 
bien  souvent  de  semblables  procédés1. 

III.  Distribution  îles  rôles. 

Les  auteurs  ont  en  partie  le  droit  de  choisir  leurs 
interprètes;  mais,  sauf  conventions  contraires,  ils 
doivent  les  choisir  dans  la  troupe  du  théâtre  et  ne 
peuvent  exiger  l'engagement  d'autres  artistes. 

Les  traités  passés  entre  la  Société  des  auteurs  et 
les  directeurs  contiennent  les  dispositions  conformes 
aux  usages  du  théâtre. 

L'auteur  a  le  droit  de  retirer  sa  pièce  si  la  distri- 
bution des  premiers  rôles  et  des  doubles,  qu'il  a 
décidée,  n'est  pas  respectée  par  le  directeur.  Une 
copie,  faite  en  double,  de  la  liste  des  interprètes  et 
signée  par  les  parties,  doit  être  échangée  au  début 
des  répétitions.  S'il  n'y  a  eu  qu'un  accord  verbal, 
l'auteur  se  trouve  sans  preuve,  et  c'est  pourquoi  la 
Cour  de  Paris,  le  21  janvier  1863,  a  admis  que,  dans 
ce  cas,  il  pouvait  déférer  le  serment  au  directeur  sur 
l'accord  intervenu  pour  la  distribution  de  sa  pièce. 

Si  l'auteur  a  le  droit  de  faire  respecter  la  distri- 
bution, il  est  tenu  lui-même  de  s'y  tenir;  et  comme 
le  directeur  se  trouve  responsable  du  dédit  de  l'ar- 
tiste, s'il  s'est  cru  obligé  de  se  soumettre  aux  fantai- 
sies de  l'auteur,  il  pourrait  se  retourner  eontre  cet 
auteur,  qui  serait,  en  définitive,  responsable  à  cet 
égard  de  la  perle  subie  par  son  refus  injustifié  de 


laisser  la  pièce  dans  sa  première  distribution. 
Quand  l'auteur  n'use  pas  de  son  droit  de  distribu- 
tion, le  choix  des  interprètes  appartient  au  directeur, 
et  ce  droit  de  choisir  les  interprètesdevient  une  obli- 
gation si  nette  que  le  directeur  ne  pourrait  repous- 
ser les  représentations  d'une  pièce  en  excipant  de  la 
négligence  de  l'auteur  qui  n'aurait  pas  décidé  la 
distribution'1. 

IV.  Répétitions. 

La  pièce  une  fois  acceptée,  les  rôles  distribués, 
il  importe  de  la  répéter,  et  le  directeur  est  dans 
l'obligation  de  prescrire  le  nombre  des  répétitions 
nécessaires  à  la  bonne  mise  en  valeur  de  la  pièce. 

Tant  que  l'auteur  estime  que  la  mise  au  point  est 
insuffisante  et  le  travail  de  mise  en  scène  incomplet, 
il  a  le  droit  de  s'opposer  aux  représentations  de  son 
ouvrage.  La  faute  du  directeur  dépend  alors  de  la 
preuve  qu'on  peut  apporter  contre  lui,  et  c'est  encore 
là  une  question  de  fait  qui  dépend  de  l'appréciation 
des  juges. 

L'auteur,  et  chaque  collaborateur  s'il  y  en  a,  doit 
recevoir  un  bulletin  fixant  les  jours  et  les  heures  de 
répétition.  Il  a  le  droit  de  contrôler  le  travail,  de  le 
diriger  soit  par  lui-même,  soit  par  un  mandataire. 
Toutefois,  les  conseils  donnés  par  l'auteur  ne  sont 
obligatoires  pour  les  artistes  que  tant  qu'ils  ne  sont 
pas  contredits  par  le  directeur  dont  les  artistes 
dépendent.  De  telle  sorte  qu'il  pourrait  y  avoir  lieu 
.'i  dommages-intérêts  si,  de  parti  pris  et  abusive- 
ment, le  directeur  contredisait  les  indications  de 
l'auteur. 

Enfin,  il  a  été  jugé  que  si  l'auteur  peut  diriger  les 
répétitions,  ce  n'est  pas  pour  lui  une  obligation,  ce 
travail  devant  être  fait  par  le  directeur,  et  l'auteur 
n'ayant  qu'un  droit  et  non  pas  une  obligation  de 
contrôle. 

V.  Première  représentation. 

C'est,  le  directeur  qui  fixe  en  principe  la  date  de 
la  première  représentation  et  qui  en  arrête  le  pro- 
gramme. 

C'esl  encore  une  question  de  bonne  foi  qui  se 
pose  pour  savoir  si  l'auteur  a  le  droit  de  s'opposer 
au  choix  de  certains  jours.  Il  y  a  des  usages  au  théâ- 
tre qui  dépendent  des  pièces,  des  théâtres  et  des 
publics.  En  dehors  d'une  intention  malveillante  de 
lapait  du  directeur,  il  semble  qu'on  ne  pourrait  ad- 
mettre l'opposition  faite  par  l'auteur  au  jour  choisi 
par  la  direction;  d'autant  plus  que  les  intérêts  des 
uns  et  des  autres  sont  solidaires,  et  qu'il  leur  im- 
porte de  présenter  la  nouvelle  pièce,  pour  laquelle 
des  frais  ont  été  engagés,  dans  les  meilleures  condi- 
tions possibles  de  succès. 

On  admet  que  l'auteur  a  le  droit  de  se  tenir  der- 
rière la  scène  pour  donner  des  conseils  utiles  à  la 
troupe,  et  aussi  pour  l'aire  baisser  le  rideau  en  cas 
d'insuccès  trop  manifeste. 

On  admet  également  que  l'annonce  de  son  nom 
dépend  de  sou  unique  appréciation.  Enfin,  après  la 
première  représentation,  l'auteur  peut  exiger  une 
nouvelle  répétition,  en  cas  de  défaillance  trop 
visible. 


1879.  h-  Droit.  4 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


VI.  Affiches. 

Il  esl  d'usage  que  le  noua  de  l'auteur  ne  ligure  pas 
sur  la  première  affiché.  Mais,  sauf  conventions  con- 
traires, le  directeur  ne  peut  pas  plus  se  dispenser  de 
mentionner  sur  1rs  affiches  apposées  par  la  suite  le 
nom  de  l'auteur,  que  celui-ci  ne  peut  s'y  opposer; 
d'une  pari,  en  ell'et,  il  Tant  présumer  que  l'auteur,  en 
faisant  recevoir  sa  pièce,  souhaitait,  entre  autres 
avantages,  celui  de  la  notoriété;  d'autre  part,  les 
directeurs,  le  plus  souvent,  spéculent  sur  la  célébrité 
des  auteurs  plutôt  que  sur  leur  talent. 

Le  directeur  ne  pourrait  taire  figurer  sur  l'affiche 
une  autre  nom  que  celui  de  l'auteur,  non  plus  qu'in- 
tervertir l'ordre  qui  lui  a  été  indiqué,  au  cas  de  col- 
laboration. 

11  ne  saurait  davantage  causer  impunément  un 
préjudice  a  l'auteur,  eu  annonçant  sur  l'affiche  que 
la  pièce  n'est  représentée  qu'en  vertu  d'une  décision 
judiciaire1. 

Vil.  Droits  d'autenr. 

«  Les'auteurs  et  les  entrepreneurs,  disait  l'article  10 
du  décret  du  8  juin  1806,  seront  libres  de  déterminer 
entre  eux,  par  des  convention  mutuelles,  les  rétribu- 
butions  dues  aux  premiers  par  somme  fixe  ou  autre- 
ment ». 

Le  mode  de  rémunération  qui  consiste  dans  le 
payement  d'une  somme  fixe,  déterminée  à  l'avance, 
n'est  point  celui  qu'on  préfère  dans  la  pratique.  Ce 
qui  est  habituellement  stipulé,  c'est  le  prélèvement 
d'une  somme  proportionnelle  sur  le  montant  de  la 
recette,  puis  la  jouissance  d'entrées  personnelles  et 
d'un  certain  nombre  de  billets  île  faveur. 

Le  prélèvement  du  tant  pour  cent,  qui  forme  la 
part  de  l'auteur,  s'exerce,  sauf  conventions  contraires, 
sur  la  recette  nette;  c'est-à-dire  que  l'on  commence 
par  déduire  du  chiffre  total  produit  par  la  venir  nu 
bureau,  par  la  location,  par  les  abonnements,  etc., 
1rs  frais  journaliers  et  le  droit  des  pauvres.  Souvent, 
les  frais  journaliers  sont  évalués  à  forfait;  mais  l'au- 
teur pourrait,  à  défaut  de  cette  évaluation,  exiger 
que  toutes  dépenses  alléguées  lui  fussent  justifiées, 
de  même  qu'il  pourrait  contrôler  le  compte  établis- 
sanl  le  montant  de  la  recette  brute. 

Il  ne  saurait  toutefois,  en  principe,  incriminer  le 
directeur  du  fait  de  la  distribution  des  billets  gra- 
tuits. 

Il  a  été  fort  bien  jugé  que,  si  le  prix  des  places  a 
été  accidentellement  augmenté  à  l'occasion  d'une 
représentation  extraordinaire,  donnée  à  bénéfice,  la 
part  de  l'auteur  doit  se  trouver  accrue  en  proportion, 
el  non  pas  se  restreindre  selon  le  produit  des  repré- 
sentations habituelles2. 

Il  a  été  jugé  fort  équilablement  aussi  que,  lorsque, 
dans  une  représentation  à  bénéfice,  des  auteurs  lais- 
sent jouer  sur  un  théâtre  certains  ouvrages  appar- 
tenant à  une  autre  entreprise,  sans  fixer  une  rétri- 
bution spéciale,  ils  ne  peuvent  exiger  que  leurs 
droits  soient  réglés  d'après  les  conventions  interve- 
nues entre  eux  et  l'entreprise  du  répertoire  de  laquelle 
ces  ouvrages  dépendent,  mais  bien  d'après  les  usages 
accoutumés  au  théâtre  où  cette  représentation  ex- 
traordinaire est  donnée3. 


10  septembre  IS3S  ;  Voy.  />.,  /tè/i.,   The 


Dans  le  cas  de  collaboration,  l'expiration  de  la 
jouissance  légale  des  héritiers  de  l'un  des  collabora- 
teurs fait  tomber  leur  part  dans  le  domaine  public. 
Le  fait  de  la  survivance  de  l'autre  ne  saurait  légiti- 
mer leurs  exigences  relativement  aux  prolits  des 
représentations1. 

Le  règlement  des  droits  d'auteur  s'effectue,  pour 
chaque  représentation,  d'après  le  nombre  d'actes  des 
pièces  qui  composent  le  spectacle.  Lorsque  ces  pièces 
émanent  d'auteurs  différents,  certains  d'entre  eux 
pourraient  subir  un  sérieux  préjudice  de  ce  fait  que 
les  autres  auraient  eu  la  fantaisie  de  donner  le  nom 
d'actes  à  telles  ou  telles  parties  de  leur  ouvrage,  qui 
ne  seraient  à  proprement  parler  que  des  scènes,  si 
cette  division  arbitraire  leur  élait  opposable.  Les 
tribunaux  peuvent  évidemment  intervenir,  si  des 
contestations  s'élèvent,  et  régler  la  répartition  des 
profits  sur  des  bases  plus  équitables". 

Le  décret  des  19  juillet-6  août  1791,  article  2,  porte  : 
«  ...  La  rétribution  des  auteurs,  convenue  entre  eux 
ou  leurs  ayants  cause  et  les  entrepreneurs  de  spec- 
tacles, ne  pourra  être  ni  saisie  ni  arrêtée  par  les 
créanciers  des  entrepreneurs  du  spectacle.  »  C'est  là 
un  privilège  tout  aussi  favorable  aux  directeurs  obé- 
rés qu'aux  auteurs.  S'il  n'existait  pas,  en  effet,  les 
directeurs  verraient  probablement  disparaître  tout 
espoir  de  revenir  à  meilleure  fortune  en  montant 
des  pièces  nouvelles,  étant  donné  que  les  auteurs, 
sachant  la  perception  quotidienne  de  leurs  droits  à 
peu  près  impossible,  en  pratique,  garderaient  leurs 
manuscrits  pour  des  entreprises  plus  prospères. 

Notons  que  la  saisie-arrèt  demeure  toujours  pos- 
sible pour  les  créanciers  des  auteurs. 

Aujourd'hui,  la  plupart  des  auteurs  dramatiques 
font  partie  de  la  Société  des  Auteurs  et  Cou,/  ositevn 
dramatiques.  Il  a  été  jugé  que  cette  Société  consti- 
tuait un  être  moral,  et  que.  lorsqu'elle  poursuivait 
le  recouvrement  des  droits  revenant  à  l'un  de  ses 
membres  auprès  d'un  directeur  avec  qui  elle  avait 
conclu  un  traité,  celui-ci  ne  pouvait  lui  opposer,  à 
titre  de  compensation,  la  créance  qu'il  aurait  contre 
taire. 

Il  faudrait  certainemenl  adopter  la  même  solution 
s'il  s'agissail  de  la  Suris/é  des  Auteurs,  Compositeurs 
et  éditeurs  de  Musique. 

L'usage,  est  qu'une  partie  de  la  rétribution  due 
aux  ailleurs  soit  représentée  par  un  certain  nombre 
de  billets  de  faveur.  Ce  nombre  esl  déterminé  soif 
par  le  traité  intervenu,  soit  par  les  règlements  du 
théâtre. 

Les  billets  de  faveur  ainsi  délivrés  peuvenl  être 
vendus,  et  leurs  détenteurs  ont  le  droit  de  revendi- 
quer la  place  qui  s'y  trouve  assignée0. 


DOMAINE   PUBLIC 

Les  ouvrages  tombés  dans  le  domaine  public  peu- 
vent être  représentés  par  lous,  et  chaque  directeur 
a  le  droit  d'y  puiser  sans  avoir  aucune  autorisation 
à  requérir. 

Il  en  résulte,  évidemment,  que  les  droits  d'auteurs 
disparaissent  du  même  coup.  Cependant,  ce  principe 
n'est  pas  exact,  en  raison  des  décisions  de  la  Société 
des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques  qui,  pour 


C.  Pacis.  du  -M  juin  1858;  S.,  59,  -',  LI3. 
Trib.  civ.  Seine,  LS  mai  1858.  —  Aiin.,58,  ]..  J4 
Trib.  civ.  Seine,  s  décembre  1852    le  Droit,  du 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


JURISPRUDENCE    3885 


protéger  les  auteurs  vivants  contre  l'abus  de  l'ancien 
répertoire,  qui  leur  faisait  une  concurrence  d'autant 
plus  violente  que  les  directeurs  préféraient  ces 
pièces  sur  lesquelles  ils  n'avaient  à  payer  aucun 
droit,  prit  des  décisions  qu'elle  opposa  aux  direc- 
recteurs.  Elle  conclut,  d'accord  avec  le  directeur  de 
l'Opéra-Comique,  M.  Crosnier,  une  convention  aux 
termes  de  laquelle  il  s'engageait  à  acquitter  certains 
droits  au  profit  des  héritiers  des  auteurs  dont  les 
œuvres  étaient  tombées  dans  le  domaine  public,  et, 
à  leur  défaul,  au  prolit  de  la  caisse  de  secours  de 
l'Association.  Elle  conclut  ensuite  un  traité  analogue 
avec  Perrin,  puis  avec  ses  successeurs  pour  le  Théâ- 
tre-Lyrique, puis  avec  Carvalho. 

Enlin,  elle  prit,  le  29  janvier  1838,  une  délibéra- 
tion dans  les  termes  suivants  : 

«  La  commission  des  Auteurs  et  Compositeurs 
dramatiques  :  —  Considérant  qu'il  est  du  devoir 
rigoureux  de  la  commission  d'assurer,  par  tous  les 
moyens  possibles,  la  perpétuité  de  la  propriété  litté- 
raire aux  héritiers  des  auteurs  dramatiques  et  de  ne 
pas  souffrir  que  leurs  œuvres  soient,  même  a  défaut 
d'héritiers,  une  proie  abandonnée  à  titre  gratuit  au 
premier  occupant;  —  Considérant  que,  lors  même 
que  la  ligne  des  héritiers  au  nom  de  la  loi  est  éteinte, 
elle  ne  saurait  être  mieux  réprésentée  que  par  les 
descendants  de  ceux  qui  ont  travaillé  avant  nous,  et 
qui,  faute  d'être  protégés  dans  leurs  productions, 
n'ont  laissé  à  leur  famille  qu'un  nom  donl  h'  public 
se  souvient  et  une  misère  qui  l'indigne;  —  Considé- 
rant que  la  caisse  de  secours  créée  par  les  auteurs 
et  compositeurs  dramatiques  est  la  tutrice  de  imitas 
les  infortunes,  tutrice  à  laquelle  on  peut  s'adresser 
sans  humiliation,  puisqu'elle  ne  fait  que  répartir  les 
épargnes  recueillies  sur  notre  travail  ou  la  part 
qu'on  restitue  aux  travaux  de  nos  devanciers,  dont 
l'Association  a  commencé  par  adopter  les  descen- 
dants; —  Considérant  que  tout  auteur  qui  va  spon- 
tanément demander  à  l'ancien  répertoire  une  pièce 
acceptée  depuis  longtemps,  un  titre  consacré,  les 
chances  plus  assurées  d'un  succès,  ne  peut  évaluer 
le  secours  qui  lui  est  ainsi  apporlé  au-dessous  de  la 
part  d'un  collaborateur; 

«  Décide  :  1°  pour  toute  pièce  notoirement  em- 
pruntée à  l'ancien  répertoire,  la  part  faite  à  l'auteur 
primitif,  part  qui  sera  attribuée  aux  héritiers  de  cet 
auteur  ou,  à  défaut  d'héritiers,  à  la  caisse  de  secours 
qui  les  représente,  sera  égale  à  la  moitié  des  droits 
revenant  à  la  pièce  partout  où  elle  sera  jouée;  — 
il  est  bien  entendu  que,  si  une  pièce  de  l'ancien  ré- 
pertoire est  transformée  en  pièce  lyrique,  le  droit 
du  musicien  restera  entier;  —  3°  si  un  ouvrage  lyri- 
que du  domaine  public  est  soumis  à  une  révision,  à 
un  travail  d'appropriation,  à  un  remaniement  de 
musique,  l'auteur  de  ce  travail  abandonnera  à  la 
caisse  de  secours  la  moitié  des  droits  attribués  à  la 
musique.  La  commission  se  réserve  le  droit  d'appré- 
ciation sur  toute  réclamation  et  en  toutes  circons- 
tances. » 

Ensuite,  la  Société  généralisa,  dans  tous  ses  traités 
avec  les  directions  théâtrales,  le  système  qu'elle 
n'avait  jusque  là  mis  en  pratique  qu'avec  timidité. 
Elle  stipula  que  ses  agents  percevraient  désormais, 
pour  les  ouvrages  du  domaine  public,  les  mêmes 
droits  que  pour  les  autres  ouvrages.  Les  sommes 
ainsi  recouvrées  sont  remises  par  elle  aux  héritiers 
directs,  et,  à  leur  défaut,  profitent  à  sa  caisse  de 
secours. 

Presque  tous  les   théâtres,  aujourd'hui,  sont  liés 


par  des  traités  avec  la  Société  des  auteurs,  et  l'on 
peut  dire  que  celle-ci  fait,  dans  la  plus  large  mesure, 
commerce  du  domaine  public. 

Elle  est  parfaitement  fondée  à  alléguer,  lorsqu'elle 
stipule  en  faveur  des  héritiers  des  auteurs  disparus, 
que  telle  est  la  condition  de  la  stipulation  qu'elle 
fait  pour  soi-même;  en  effet,  elle  ne  consent  certains 
avantages  aux  directeurs  pour  la  représentation  des 
ouvrages  modernes  qu'en  considération  de  ce  qu'ils 
admettent  un  prélèvement  sur  les  recettes  fournies 
par  l'ancien  répertoire;  l'article  1121  du  Code  civij 
autorise,  dans  des  conditions  semblables,  la  stipula- 
tion pour  autrui. 


DROITS   ETRANGERS 

Le  décret  du  28  mars  1852  considérait  comme  un 
délit  la  contrefaçon  sur  le  territoire  français  d'ou- 
vrages publiés  à  l'étranger  et  mentionnée  à  l'art.  425 
du  Code  pénal,  mais  il  ne  s'appliquait  pas  au  droit 
de  représentation;  il  ne  visait  ni  la  loi  de  1791,  ni 
l'art.  428  du  Code  pénal,  et  le  mot  «  publié  »  employé 
au  décret  ne  pouvait  s'appliquer  évidemment  aux 
représentations  théâtrales. 

La  Convention  de  Berne,  le  9  septembre  1880,  mo- 
difia cet  état  de  choses  entre  les  nations  qui  y  ont 
adhéré  :  l'Allemagne,  la  Belgique,  l'Italie,  la  France, 
la  Grande-Bretagne,  la  Suisse,  lu  Tunisie,  Haïti,  le 
Luxembourg  et  Monaco. 

L'article  18  de  cette  convention  permettait  aux 
autres  nations  d'entrer  dans  l'Union  à  leur  simple 
demande,  et  l'art.  15  prévoyait  que  îles  traités  par- 
ticuliers d'Etat  à  Etat  pouvaient  s'établir  au  prolit 
respectif  des  nationaux  de  chacun  d'eux,  en  leur 
accordant  des  avantages  plus  étendus  que  ceux  con- 
férés d'une  façon  générale  par  la  convention. 

L'art.  2  de  cette  convention  déclare  que  les  droits 
garantis  aux  étrangers  sont  ceux  «  que  les  lois  res- 
pectives accordent  actuellement  ou  accorderont  par 
la  suite  aux  nationaux  ».  Il  se  peut,  par  conséquent, 
que  les  nationaux  de  certains  pays  unionistes  béné- 
ficient hors  de  chez  eux  d'avantages  que  leur  propre 
législation  ne  leur  offre  pas.  Il  est  bon  de  noter,  à 
ce  propos,  que  la  législation  française  est  particuliè- 
rement généreuse. 

Le  droit  de  représentation  fait  l'objet  de  l'article  9. 
Il  y  est  spécifié  en  termes  formels  que  les  œuvres 
théâtrales,  qu'elles  aient  été  publiées  ou  non,  ne  peu- 
vent être  représentées  sans  l'autorisation  de  l'auteur. 

Le  droit  de  représentation  de  la  traduction  est 
également  déterminé  par  l'article  9.  Dès  qu'une 
œuvre  théâtrale  est  publiée  ou  représentée,  court  un 
délai  de  dix  ans  pendant  lequel  on  n'en  peut  repré- 
senter aucune  traduction  sans  le  consentement  de 
l'auteur.  Notons  que  le  traducteur,  lorsque  sa  tra- 
duction a  été  autorisée,  devient  nécessairement  pro- 
priétaire de  son  travail  personnel.  Au  surplus,  en 
vertu  des  dispositions  de  l'article  2,  ainsi  que  nous 
l'avons  déjà  fait  remarquer,  certains  étrangers  ont 
la  faculté  de  s'opposer  à  la  représentation  d'une  tra- 
duction de  leur  œuvre  en  France,  aussi  longtemps 
qu'ils  pourraient  s'opposer  à  la  représentation  de  l'o- 
riginal, puisque  la  législation  française  n'établit  au- 
cune différence  entre  le  droit  sur  la  traduction  et  le 
droit  sur  l'original;  les  Français  ne  rencontreraient 
pas  forcément  la  même  protection  chez  les  autres 
Unionistes. 

Le  droit  d'exécution,  pour  les  œuvres  musicales 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


publiées,  ne  fait  l'objet  d'une  propriété  exclusive  pour 
les  compositeurs  qu'autant  que,  sur  le  titre  ou  en 
tète  desdites  œuvres,  toutes  réserves  sont  faites  à  cet 
égard. 

En  ce  qui  concerne  les  adaptations  et  arrange- 
ments, la  convention  s'est  prononcée  de  la  façon 
suivante  :  «  Sont  spécialement  comprises  parmi  les 
reproductions  illicites,  auxquelles  s'applique  la  pré- 
sente convention,  les  appropriations  indirectes  non 
autorisées  d'un  ouvrage  littéraire  ou  artistique,  dé- 
signées sous  des  noms  divers,  tels  que  :  adaptations, 
arrangements  de  musique,  etc.,  lorsqu'elles  ne  sont 
que  la  reproduction  d'un  tel  ouvrage,  dans  la  même 
forme  ou  sous  une  autre  forme,  avec  des  change- 
ments, additions  ou  retranchements  non  essentiels, 
sans  présenter  d'ailleurs  le  caractère  d'une  nouvelle 
œuvre  originale.  Il  est  entendu  que,  dans  l'applica- 
tion du  présent  article,  les  tribunaux  des  divers  pays 
de  l'Union  tiendront  compte,  s'il  y  a  lieu,  des  réserves 
de  leurs  lois  respectives.  » 

Mentionnons  encore  un  point.  La  Conférence  de 
Berne,  dit  M.  Pouillet,  a  décidé  que  «  ceux  des  pays 
de  l'Union  dont  la  législation  comprend  implicite- 
ment, parmi  les   œuvres  dramatico-musicales,  les 


œuvres  chorégraphiques,  admettraient  ces  œuvres 
au  bénéfice  des  dispositions  de  la  convention  ». 

Enfin  la  convention,  voulant  étendre  ses  bienfaits 
jusqu'aux  auteurs  appartenant  à  des  nations  non 
unionistes,  a  décidé  que,  lorsqu'ils  auraient  publié 
une  œuvre  dans  un  pays  de  l'Union,  chez  un  éditeur 
national  ou  non  d'un  pays  de  l'Union,  ladite  œuvre 
aurait,  pour  ainsi  dire,  droit  de  cité,  qu'elle  serait 
protégée,  et  que  l'éditeur  représenterait  l'auteur  en 
possédant  ses  droits.  Le  mot  «  éditeur  »,  d'ailleurs, 
doit  être  pris  ici  dans  une  acception  assez  large  pour 
que  l'entrepreneur  du  spectacle  lui  soit  assimilé, 
ainsi  qu'il  ressort  des  discussions  de  la  Conférence. 

Certains  traités,  intervenus  entre  la  France  et  quel- 
ques pays  non  unionistes,  établissent  les  droits  de 
leurs  nationaux  quant  à  la  matière  qui  nous  occupe. 
Signalons  ceux  passés  avec  les  Pays-Bas  le  29  mars 
1835  et  le  27  avril  1860,  et  la  déclaration  ultérieure 
du  19  avril  188S;  avec  le  Portugal,  le  11  juillet  1866  ; 
avec  le  Norvège,  le  15  février  1884;  avec  le  Mexique, 
le  27  novembre  1886;  avec  la  Bolivie,  le  8  septembre 
1887. 

A.  PEYTEL. 


APPENDICE 


LE  PHONOGRAPHE 


Par  A.  MACHABEY 


AVANT-PROPOS 

On  s'explique  que  le  phonographe  n'ait  Irouvé 
dans  celle  publication  qu'une  place  tardive  et  res- 
treinte. A  l'époque  où  fut  conçu  le  plan  de  l'Encyclo- 
pédie, la  machine  parlante  n'était  qu'un  jouet  désa- 
gréable, dont  les  musiciens  se  détournaient  avec 
horreur;  et  c'était  justice. 

Aujourd'hui  tout  est  changé  :  le  principe,  à  la 
fois  si  simple  et  si  merveilleux,  découvert  par  Charles 
Cros,  réalisé  par  Edison,  perfectionné  pendant  cin- 
quante ans,  secondé  par  des  inventions  modernes 
comme  celle  de  l'amplification,  aboutit  enlin  au 
phonographe  de  1029,  aussi  susceptible  de  figurera 
côté  des  instruments  de  musique,  que  le  piano  méca- 
nique dont  on  a  parlé  dans  un  tome  précédent. 

Nous  donnerons  successivement  dans  cette  étude, 
aussi  concise  que  possible,  quelques  renseignements 
sur  ce  qu'on  peut  appeler  la  préhistoire  du  phono- 
graphe, la  genèse  des  travaux  acoustiques  qui  con- 
duisent à  la  découverte  de  Charles  Cros,  —  l'inven- 
tion d'K.DisoN  et  son  développement,  —  l'histoire  suc- 
cincte du  rouleau  et  du  disque,  —  celle  de  l'enregis- 
trement, —  quelques  considérations  sur  les  ressources 
oll'ertes  par  le  phonographe,  —  enfin  quelques 
notes  sur  les  machines  dérivées  du  phonographe. 

On  comprendra  mieux  ainsi  l'aide  que  cette 
machine  apporte  à  la  musique  et  comment  se  jus- 
tifie sa  présence  dans  l'Encyclopédie. 

PRÉHISTOIRE    DU  PHONOGRAPHE 

La  préhistoire  du  phonographe  n'appartient  pas 
à  la  préhistoire  de  l'humanité,  mais  au  contraire  à 
des  stades  déjà  avancés  des  civilisations  qui  nous 
ont  précédés.  Malgré  cela,  nous  n'avons  aucun  ves- 
tige de  machine  parlante,  nous  ne  connaissons 
aucun  monument  figuré  qui  puisse  être  rattaché  à 
l'histoire  du  phonographe. 

Seuls,  quelques  textes  nous  renseignent  à  ce 
sujet,  mais  beaucoup  plus  sur  le  désir  de  conserver 
et  reproduire  la  parole  ou  la  musique  que  sur  la 
réalisation  pratique  de  ce  désir. 

Sir  Robert  Hart  rapporte  le  fait  suivant  :  il  y  a  en- 
viron trois  mille  ans,  le  gouvernement  d'une  province 
chinoise  correspondait  avec  l'empereur,  éloigné  de 
4  000  milles,  au  moyen  d'un  coffret  dont  le  bois  pré- 
paré d'une  certaine  façon  restituait  avec  le  timbre  de 


qu. 


la  voix  humaine  les  paroles  qu'on  lui  avait  confiées1. 

Le  docteur  Lothar,  s'appuyant  sur  une  relation  du 
même  auteur,  cite  encore  un  appareil  chinois,  vieux 
de  deux  mille  ans,  dans  lequel  un  cylindre,  conju- 
gué ou  non  avec  un  plateau,  pouvait  reproduire  la 
voix  et  toute  sorte  de  bruits.  (Nous  avons  entre  les 
mains  l'ouvrage  de  Sir  liait  sur  la  Chine, 
fait  aucune  allusion  à  cet  appareil.) 

MM.  Chapuis  et  Gélis  rappellent  que  Ta-tch'ouan, 
fils  d'un  roi  chinois,  avait  contruit  un  automate  en 
bois,  si  parfait,  qu'il  l'avait  fait  passer  pour  son 
propre  fils  :  cet  automate  était  donc  doué  de  la 
parole. 

Les  civilisations  méditerranéennes  et  du  proche 
Orientont  été  aussi  préoccupées  du  problèmede  la  ma- 
chine parlante  :  on  connaît  le  texte  d'Anaxagore  sur 
les  statues  musicales  d'Egypte;  l'explication  météo- 
rologique des  savants  du  xvin»  siècle  est  encore  plus 
compliquée  que  l'hypothèse  d'une  musique  mécani- 
que; enfin,  il  faut  faire  la  part  de  l'imagination. 

Le  D--  Lothar  cite  encore  un  passage  de  Xénophon 
relatif  à  une  machine  qui  parlait  avec  une  voix 
caverneuse;  Maspéro  décrit  les  slalues  parlantes 
des  Chaldéens,  des  Assyriens  et  des  Hébreux. 

D'après  les  Commentarios  sobre  el  Exodo  de  Forlat 
(Encyclopedia  universal  ilustrada,  «  Automates  »), 
Albert  le  Grand  avait  construit  un  automate  capa- 
ble d'ouvrir  la  porte  aux  visiteurs  et  de  leur  sou- 
haiter la  bienvenue.  Thomas  d'Aquin  aurait  détruit 
cet  automate  dans  un  moment  de  frayeur. 

A  la  même  époque  (xin<=  siècle),  le  grand  philo- 
sophe scientifique  Grosseteste,  maître  de  lioger 
Bacon,  avait  construit,  en  airain,  une  tête  «  pour  lui 
faire  raconter  les  choses  qui  se  passaient  ». 

D'autres  attribuent  cette  construction  à  lioger 
Bacon  lui-même  (Thom's  Early  English  Prose,  1.  III). 

Nous  passerons  sur  les  automates  de  tous  ordres 
qui  furent  la  dislraction  des  mécaniciens  du  xvB  et 
surtout  du  xvi0  siècle,  pour  nous  arrêter  seulement 
à  ce  qui  touche  directement  notre  sujet. 

On  sait  que  Kepler  souhaitait  et  considérait 
comme  possible  la  reproduction  de  la  parole. 

Le  physicien  Porta  publiait  en  1389  un  traité  de 
physique,  Magia  Naturalti,  et  prétendait  «  retenir  les 
paroles  dans  des  tubes  de  plomb  et  les  faire  enten- 
dre à  volonté,  en  ouvrant  l'une  de  leurs  extrémi- 
tés ».  Est-ce  une  naïveté  ou  l'indice  d'une  décou- 
verte ?  Porta  avait  déjà  remarqué  que  la  voix  se  ré- 


:tsss 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


fléchit  sur  les  surfaces  planes  et  se  propage  à  de 
longues  distances  dans  des  tubes  de  cuivre  (Op.  cit., 
pp.  232,  257,  296). 

Le  i\  ii"  siècle  nous  offre  la  plus  curieuse  fantaisie 
scientifique  à  l'endroit  de  la  machine  parlante.  Siry 
(vers  19001  et  A.  Cœuroy  (1020)  en  rapportent  quel- 
ques  échantillons  :  c'est  le  capitaine  hollandais  Was- 
l  n  loch  rencontrant,  dans  sou  voyage  à  Magellan,  îles 
éponges  qui  retiennent  les  paroles  humaines,  comme 
les  nôtres  retiennent  l'eau...  »  [Courrier  véritable, 
1632.)  Dans  la  Magie  mathématique  de  1618,  Wal- 
chius  prétend  qu'il  est  possible  de  conserver  entiè- 
rement les  sons  vocaux,  c'est-à-dire  toute  parole 
articulée  de  la  voix,  soit  dans  une  caisse,  soit  dans 
un  tube,  et  que  cette  caisse  ou  ce  tube  étant  ouverts, 
les  mots  en  sortiraient  sûrement  dans  l'ordre  où  ils 
auraient  été  prononcés... 

Vers  1650,  Cyrano  de  Bergerac,  que  Tallemant 
traitait  de  fou,  écrivit  son  Histoire  comique  de  la 
Lune.  On  y  trouve  (éd.  Garnier,  p.  178)  la  descrip- 
tion d'une  boîte  contenant  un  mouvement  «  pres- 
que semblable  à  nos  horloges  ».  C'est  un  livre  mira-, 
culeux  :  quand  on  le  fait  fonctionner,  «  il  en  sort 
comme  de  la  bouche  d'un  homme  ou  d'un  instru- 
ment de  musique,  tous  les  sons  distincts...  »  qui 
servent  à  l'expression  du  langage.  Cyrano  n'était 
pas  qu'un  fou  :  c'était  un  physicien  el  un  disciple 
de  Gassendi;  que  se  passait-il  dans  les  laboratoires 
des  alchimistes  à  l'époque  où  l'on  inventait  l'ascen- 
seur, la  machine  à  calculer,  où  Iles,  tries  lui-même 
construisait  un  automate? 

En  1682,  le  physicien  allemand  J.-J.  Bêcher,  dans 
son  Nàrrische  Weisheit  (la  folle  sagesse  et  la  folie 
sage1),  décrivant  le  «  Stentrophonicon  »  et  quel- 
ques appareils,  ancêtres  du  téléphone,  ajoute  que 
l'opticien  nurembourgeois  Franz  Grùnder,  chez  qui 
il  avait  vu  de  tels  instruments,  avait  eu  l'idée  d'en- 
fermer quelques  mots  dans  une  bouteille  au  moyen 
d'une  ligne  spirale,  de  telle  sorte  qu'on  pouvait  les 
.  emporter  à  travers  le  pays,  et,  plus  d'une  heure 
après,  les  entendre  en  ouvrant  la  bouteille.  Bêcher 
dit  qu'il  n'a  pas  vu  la  réalisation  de  cette  idée  et 
qu'il  la  croit  impossible. 

Avec  le  xvnie  siècle,  commence  l'ère  des  construc- 
tions mécaniques.  Déjà,  Kircher  avait  projeté  de 
construire  une  tête  parlante  pour  la  distraction  de 
la  reine  Christine  de  Suède. 

En  170b,  les  gazelles  du  temps  rapportent  qu'un 
recteur  de  collège  de  Dresde,  ValentinMerbitz,  a  mis 
cinq  ans  à  faire  une  tête  parlante. 

En  1770,  Friedrich  von  Knauss  construit  une  tête 
parlante  qu'il  offre  au  duc  de  Toscane;  antérieure- 
ment, il  en  avait  construit  dois  autres. 

Mais  la  palme  revient  sans  aucun  doule  à  l'abbé 
Mical.Ce  mécanicien,  qui  avait  pri<  La  soutane,  con- 
sacra plusieurs  années  à  la  reproduction  artificielle 
de  la  parole  humaine  el  parvint  à  son  but.  Antérieu- 
rement à  1780,  il  avail  déjà  construit  puis  détruit 
deux  personnages  automatiques  et  une  tête  parlante 
cités  par  les  gazettes  de  l'époque  et  les  Mémoires 
secrets.  Le  1er  juillet  1783,  il  écrivit  à  l'Académie 
des  sciences  pour  l'informer  qu'il  soumettait  à  son 
examen  deux  tètes  parlantes.  Le  .')  septembre  sui- 
vant, une  commission  de  savants  comprenant  entre 
autres  Lavoisier  et  La  Place,  décida  que  ces  tètes 
méritaient  l'approbation  de  l'Académie;  le  rapport 


rédigé  par  Vicq  d'Azir  était  extrêmement  favorable; 
Mical  fut  présenté  à  Louis  XVI;  le  public  fut  admis 
à  défiler  devant  les  deux  tètes  mélalliques  qui  pro- 
nonçaient quelques  paroles  en  l'honneur  du  roi.  Le 
constructeur,  alors  âgé  de  cinquante-trois  ans,  pou- 
vait espérer  la  juste  récompense  de  ses  travaux. 
Cependant.  Mical  mourut  besogneux  en  1789  ou  00, 
après  avoir  peut-être  détruit  les  deux  têtes. 

Son  invention  consistait  à  s'approcher  le  plus  près 
possible  du  dispositif  organique  qui  permet  la  parole 
humaine.  (Pour  la  description,  voir  Rivarol,  Bachau- 
mont,  et  les  pièces  de  l'Académie  des  Sciences. 

Presque  à  la  même  époque,  les  Allemands  Krat- 
zenstein,  Anton  Felkel  (de  Vienne)  et  Kempelen 
réussissaient,  d'ailleurs  moins  bien  que  Mical.  à 
faire  parler  la  mécanique.  Kempelen  a  publié  un 
ouvrage  théorique  et  pratique  où  se  trouve  décrite 
son  invention. 

En  1796,  Robertson  présente  en  Angleterre  une 
tête  parlante  et  un  joueur  de  trompette;  en  lSoT, 
Posch  de  Berlin  réalise  encore  le  même  problème. 
En  1828,  l'Anglais  Robert  Willis  présente  une  ma- 
chine destinée  à  prononcer  les  voyelles.  En  183b, 
Faber,  de  Vienne,  construisit  le  plus  remarquable 
des  automates  parlants,  qui  fut  promené  dans  toute 
l'Europe  et  en  Amérique;  son  fils  en  construisit  un 
autre  à  peu  prés  identique,  qui  fut  exhibé  au  Grand 
Hôtel  vers  1877  et  fit  courir  tout  Paris.  En  1882, 
cette  machine  parlante  se  trouvait,  selon  Du  Moncel, 
à  l'Ecole  de  Médecine. 

Toutes  ces  tentatives  ne  résolvaient  qu'une  moitié 
du  problème  :  la  reproduction  de  la  parole.  On  avail 
fi  n i  par  perdre  de  vue  l'enregistrement 

Cependant,    le  rêve  de   Porta,    Cyrano,  Grùnder 

el  autres   allait    se  trouver  réalisé  par   une    toute 

autre  voie,  et  bien  plus  simplement,  par  Ch.  Chos  el 

Edison,  en  celte  même  année  1877,  qui  vil  la  lin  des 

parlants  et  le  déhul  'lu  phonographe. 


PERIODE   HISTORIQUE 

La  période  historique  du  phonographe  comprend 
les  travaux  qui  sonl  fondés,  non  plus  sur-  le  principe 
île  la  machine  parlante,  mais  sur  celui  de  l'enregis- 
trement des  vibrations  sonores. 

Le  premier1  en  daie  qui  para:!  avoir  tenté  l'inscrip 
tion  vibratoire  esl  un  savanl  oraloi  ien  français,  Jean- 
Baptiste  Di  iiamel,  donl  I--  travaux  sur  L'acoustique 
physique  datent  de  1700.  M  fallul  attendre  ensuite 
les  travaux  du  musicien  physicien  allemand  Chladrj 
qui,  à  parlir  de  17.N7,  lit  de  nombreuses  expériences 
sur-  les  plaques  vibrantes.  Le  germe  était  lancé. 
En  1807,  Thomas  Yi  vibrations  sono- 

res sur  une  surface  revêtue  de  noir  de  fumée  et  se 
déplaçanl  devant  une  pointe  vibrante,  ëd  is^i, 
Whratstone  i  eprei  -m  les  plaques 

vibrantes  dont  le  malhémal  i  n  Lagrange  avail 
donné  l'équation  générale. 

En  1842,  Wertheim  modifie  el  perfectionne  le  dis- 
positif de  Thomas  ¥oi  ite  fois,  un  diapason 
fixé  horizontalement,  et  poil  inl  une  pointe  flexible, 

est  mis  eu   vibration;   de\  ml    la   pointe,   un  cylindre 

recouvert  de  noir-  de  fa  m sf  animé  d'un  double 

mouveinenl  de  rotation  el  de  translation.  Les  vibra- 
tions s'}  inscrïvenl  de  telle  sorte  qu'on  peut  les 
compter  et  étudier  leur  foi  nie  ;  c'esl  le  seul  pro- 
blème qu'on  se  proposait  alors  de  résoudre,  en  »ue 
d'établir  les  équations  générales   de    l'acoustique. 


TECHNIQUE.  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LE  PHONOGRAPHE     :«> 


On  ne  parait  pasj_avoir  pressenti,  à_,cette  époque, 
que  les  inscriptions  pouvaient  restituer  un  son  iden- 
tique au  son  original. 

Un  important  progrès  allait  être  réalisé  dans  cette 
voie  par  Edouard-Léon  Scott.  D'origine  irlandaise, 
sa  famille  était  lixéeen  France  depuis  lexvne  siècle. 
Né  à  Paris  le  24  avril  1817,  Scott  entra  dans  nne 
imprimerie  à  l'âge  de  dix-sept  ans,  |  soit  vers  1834; 
ce  n'est  que  vingt-trois  ans  plus  tard,  après  de 
patientes  études,  qu'il  déposa,  le  26  janvier  1857,  sur 
le  bureau  de  l'Académie  des  sciences,  son  pli  cacheté 
relatil'au  phonautographe.  Cet  appareil  est  décrit  et 
représenté  dans  tous  les  traités  de  physique  (voir 
aussi  dans  l'Kncyclopédie,  2e  partie,  I,  p.  429);  nous 
nous  bornerons  donc  à  signaler  sa  ressemblance  avec 
le  phonographe  à  rouleau,  qui  devait  surgir  vingt  ans 
plus  tard. 

Ce  que  nous  devons  retenir,  c'est  la  prescience 
que  Scott  eut  du  phonographe  :  <  Pourra-t-on,  dit-il 
dans  son  rapport,  entre  deux  hommes  réunis  dans 
un  cabinel  silencieux,  faire  intervenir  un  sténogra- 
phe automatique  qui  conserve  l'entretien  Mans  ses 
plus  minutieux  détails,  tout  en  s'accommodant  de  la 
vitesse  de  la  conversation?  Pourra-t-on  conserver  à 
la  génération  futureîquelques  traits  de  la  diction 
d'un  de  ces  éminents,  de  ces  grands  artistes  qui 
meurent  sans  laisser  après  eux  la  plus  faible  trace 
de  leur  génie?...  Je  le  crois.  Le  principe  est  trouvé.  » 
En  réalité,  Scott  avait  inventé  ce  qui  concerne  l'en- 
registrement :  la  forme  du  cornet,  la  membrane 
vibrante,  le  style  pour  lequel  il  avait  pris  un  brevet, 
le  cylindre  entraîné  par  une  vis  hélicoïdale.  Il  n'a 
pas  formulé  le  principe  de  la  réversibilité.  Scott  vit 
son  appareil  adopté  dans  les  laboratoires,  où  il  n'a 
cessé  de  rendre  des  services;  il  fut  (perfectionné 
légèrement  par  Kœnig,  qui  pendant  de  longues 
années,  de  1862  à  1872,  s'attacha  à  l'étude  des  flam- 
mes vibrantes,  mais  sansenTrieu  tirer  pour  ia  repro- 
duction de  la  parole. 

En  1874,  Barlow  construit  unl'Jogographe,  dérivé 
du  phonautographe  de  Scott,  et  dans  lequel  le  style 
inscripteur  est  amélioré.  Enfin,  en  1877,  Charles  Cros 
énonce  le  principe  de  réversibilité  sur  lequel  est 
fende  le  phonographe.  Nous  croyons  que  le  texte 
intégral  du  pli  cacheté  déposé  par  le  poète  physicien, 
le  30  avril  1877,  sur  le  bureau  de  l'Académie  'des 
sciences,  doit  trouver  sa  place  dans  un  ouvrage  en- 
cyclopédique; nous  le  donnons  d'après  les  «  Comptes 
rendus  de  l'Académie  des  sciences  »,  1877,  t.LXXXV, 
page  1082.  (Il  s'agit  de  la  séance  du  3  décembre  1877, 
au  cours  de  laquelle  fut  donnée,  par  Dr  Mo.ncel, 
lecture  du  pli  du  30  avril  1877.) 

M.  Ch.  Cnos  demande  l'ouverture  d'un  pli  cacheté  déposé  par 
lui  le  30  avril  1877  et  portant  pour  litre  :  «  Procédé  d'enregistre- 
ment  cl  de  reproduction  des  plién'Unciies  perru,  par  ruine.  »  Ce 

pli,  ouvert  en  séance  par  M.  I crétaire  perpétuel,  contientla 

note  suivante  :  «  En  général,  mon  procédé  inii'i-t-  i    >btenir  le 

tracé  do  va-et-vient  d'une  memlir. \  ihr.mle  ■■!  a  se  servir  de  ce 

tracé  pour  reproduire  le  même  va-et-vient  avec  ses  vibrations 
intrinsèques  de  durées  et  d'intensités  sur  la  même  membrane  ou 
sur  une  autre  appropriée  a  rendre  les  sons  et  les  bruits  qui  ré- 
sultent de  cetle  série  de  mouvements. 

«  II  s'agit  donc  de  transformer  un  tracé  exti  imemenl  délicat  tel 
que  celui  qu'on  obtient  avec  ces  index  légers  frôlant  île,  sur- 
faces noircies  a  la  flamme,  de  transi  m- : ,   ;.-    >■.  r.  -  tracé,  eu 

reliefs  ou  creux  résistants  capables  de  conduire  un  mobile  qui 
transmettra  les  mouvements  à  la  membrane  s  more,  l'n  index 
léger  est  solidaire  du  centre  de  figure  d'une  membrane  vibrante  ; 
il  je  termine  par  une  pointe  (fil  métallique,  barbe  de  plume)  qui 
repose  sur  une  surfaee  noircie  à  la  flamme.  Celle  -n:  fa,'c  lait  corps 
avec  un  disque  animé  d'un  double  mouvement  de  rotation  et  de 
progression  rectiligne.  Si  la  membrane  est  en  repos,  la  pointe 


-impie;  si  la  membrane  vibre,  la  spirale  sera 
ondulée,  et  les  ondulations  représenteront  exactement  tous  les  va- 
et-vient  de  la  membrane  en  leurs  temps  et  en  leurs  intensités. 

«  On  traduit,  au  moyen  de  procédés  photographiques  actuelle- 
ment bien  connus,  cette  spirale  ondulée  et  tracée  en  transpa- 
rence, par  une  ligne  de  semblable  dimension  tracée  en  creux  ou 
en  relief  dans  une  matière  résistante  (acier  trempé,  par  exemple). 

«  Cela  fait,  on  met  cette  surface  résistante  dans  un  appareil 
moteur  qui  la  fait  tourner  et  progresser  dune  vitesse  et  d'un  mou- 
vement pareils  à  ceux  dont  avait  élé  animée  la  surface  d'enregis- 
trement. Une  pointe  métallique,  si  le  tracé  est  en  creux  (ou  un 
doigt  à  encoche  s'il  est  en  relief),  et  tenue  par  un  ressort  sur  ce 
tracé,  et  d'autre  part  l'index  qui  supporte  cette  poin 
dérjilu  cenlreil  ■  iiirure  de  la  membrane  propre  à  produire  des 
-on*,  l'an-  r  -  e  ,;i  hti, m,,  i  elle  membrane  sera  animée  non  plus 
par  1  air  vibrant,  mais  par  le  tracé  commandant  l'index  à  pointe, 

d'impulsion     ixa   l   menl  pareill n  durées  et  en  intensités,  à 

celles  que  la mbrane  d'enregistrement  avait  subies. 

l-e  lia.  ■■  spiral  représeuie  des  temps  successifs  égaux  par  des 
longueurs  croissantes  ou  décroissantes;  cela  n'a  pas  d'inconvé- 
nients si  l'on  n'utilise  que  ta  portion  périphérique  du  cercle 
tournant,  les  tours  de  spire  étant  1res  rapprochés;  mais  alors 
on  perd  la  surface  centrale. 

«  Dans  tous  les  cas,  le  tracé  en  hélice  sur  un  cylindre  est  très 
piéférable,  ,■!  je  m'occupe  actuellement  d'en  trouver  la  réalisation 
pratique.  » 


On  remarquera  plusieurs  choses  dans  ce  mémoire  : 
c'est  d'abord  la  filiation  directe  du  phonautographe 
cl  du  phonographe;  ensuite, l'indication  et  la  réver- 
sibilité de  l'enregistrement  vibratoire  (§  5);  enfin,  l'u- 
tilisation possible  et  de  la  surface  horizontale  (disque , 
et  de  la  surface  cylindrique,  pour  les  enregistrements. 

Cros  avait  prévu  que,  sur  le  disque,  des  temps  se- 
raient représentés  par  des  espaces  inégaux;  il  en 
redoutait  des  inconvénients  qui  ne  se  sont  pas  pro- 
duits à  la  réalisation  :  un  disque  est  utilisable  sur  la 
majeure  partie  de  sa  surface. 

Entre  les  deux  dates  du  30  avril  et  du  3  décembre, 
la  Semaine  du  Clergé,  du  10  octobre  1877,  avait  pu- 
blié, par  la  plume  de  l'abbé  Leblanc,  un  article  où 
Ion  décrivait  le  phonographe  de  Charles  Cros;  on 
en  prévoyait  la  réalisation  pratique  pour  l'Exposition 
de  1878;  la  construction  de  l'appareil  avait  été  pro- 
posée à  Bréguet.  II  n'y  a  donc  aucun  doute  que  le 
principe  ait  été  officiellement  et  publiquementénoncé 
antérieurement  à  la  communication  iI'Edison. 

Vers  la  même  époque,  fin  de  1877,  un  autre  phy- 
sicien, Marcel  Deorez,  auquel  on  doit  d'intéressants 
dispositifs  de  laboratoire,  ayant  observé  minutieu- 
sement les  phénomènes  vibratoires  d'un  téléphone  à 
ficelle,  déclarait  eu  substance  que  la  voix  peut  sur- 
vivre, se  conserver  et  se  reproduire.  Il  imagina  un 
phonographe  qui  eût  été  sans  doute  assez  semblable 
à  celui  d'fiDisotv.et  tenta  de  le  réaliser  avec  la  colla- 
boration d'un  certain  Napoli.  Les  essais  furent  infruc- 
tueux, et  les  deux  constructeurs  crurent  même  le 
problème  insoluble;  en  revanche,  ils  annoncèrent 
plus  tard  un  appareil  supérieur  à  celui  d'EDiso.\  et 
qu'on  ne  vit  jamais. 

Leur  principe,  qui  consistait  à  graver  les  sillons  à 
l'eau-forte,  fut  repris  quelques  années  après  sans 
succès  dans  l'industrie  du  disque. 

Quant  à  l'invention  d'EDisoN,  elle  fut  connue  offi- 
ciellement en  France  le  11  mars  1878;  mais  le  brevet 
avait  été  pris  en  France  le  18  décembre  1877,  c'est- 
à-dire  sept  mois  et  demi  après  le  pli  cacheté  de 
Charles  Cros,  et  deux  mois  après  l'article  de  la  Se- 
maine du  Clergé.  On  a  voulu  réclamer,  en  faveur 
d'EDisoN,son  brevet  du  31  juillet  1877;mais  Du  Mo.n- 
cel, absolument  impartial  en  la  question,  rappelle 
que  ce  brevet  était  relatif  au  télégraphe  Morse  :  l'in- 
venteur américain  songeait  alors  à  reproduire  la  dé- 
pèche transmise  au  moyen  des  vibrations  inscrites- 


;n'.ni 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


,1  avait  aussi  remarqué  que  la  transmission  extrê- 
mement rapide  par  le  Morse  donnait  naissance  à  un 
son  musical.  Ce  n'est  que  plus  tard  qu'il  songea  à 
utiliser  ces  circonstances  pour  tenter  de  reproduire 
la  parole. 

Ce  qui  reste  indubitablement  à  son  actif,  c  est 
d'avoir  réalisé  pratiquement  la  première  machine 
parlante.  Le  témoignage  le  plus  irréfutable  vient  de 
Charles  Cbos  lui-même.  En  effet,  M.  Emile  Picard  a 
bien  voulu  nous  faire  connaître  le  texte  d'une  note 
de  notre  poète,  adressée  à  l'Académie  le  18  mars  1878, 
huit  jours  après  la  présentation  du  phonographe 
d'EmsoN.  11  rappelle  son  projet  «  d'un  appareil  ayant 
même  but  et  à  peu  près  mêmes  moyens  que  le  phono- 
graphe ».  H  ajoute  :  «  M.  Edison  a  pu  construire  son 
appareil.  Il  est  le  premier  qui  ait  reproduit  la  voix 
humaine,  il  a  fait  une  œuvre  admirable.  » 

Voilà  qui  clôt  le  débat  et  rend  à  chacun  ce  qui  lui 
est  dû.  Charles  Cros  a  fait  preuve  d'une  grande 
loyauté  et  d'un  bel  esprit  scientifique.  Il  n'en  a  pas 
été  de  même  de  Léon  Scott,  qui  prit  la  plume  et 
s'éleva  de  façon  véhémente  et  injustifiée  contre  Edi- 
son, réclamant  pour  lui-même  l'antériorité  de  l'inven- 
tion de  la  machine  parlante  ;  on  sait  cependant  que 
le  phonautographe  n'est  demeuré  qu'un  appareil  en- 
registreur et  que  son  inventeur  ne  l'a  jamais  perfec- 
tionné. 

Quant  aux  étrangers  qui  retracent  l'histoire  du 
phonographe,  s'ils  parlent  de  Young  et  de  Scott,  ils 
oublient  systématiquement  Crûs. 

Celui-ci  mourut  d'ailleurs  à  peu  près  oublié  en 
1888;  il  n'avait  que  quarante-six  ans. 


LE   PHONOGRAPHE   D'EDISON 

La  première  machine  de  laboratoire  d'EDisoN  était 
rudimentaire;  elle  se  composait  : 

1°  d'un  plateau  horizontal,  sur  lequel  était  fixé  le 
bâti  métallique  de  la  machine; 

2°  d'un  cylindre  métallique,  sillonné  d'une  hélice 
creuse  et  entraîné  par  une  manivelle; 

3"  d'une  feuille  d'étain  enveloppant  ce  cylindre; 

4°  d'un  tambour  horizontal  :  sur  la  face  extérieure 
était  tendue  une  membrane  de  parchemin;  elle  rece- 
vait les  vibrations  sonores  et  les  transmettait  à  une 
pointe  en  contact  avec  la  feuille  d'étain  qui  recou- 
vrait le  cylindre  et  ses  sillons.  Ceux-ci  guidaient  la 
pointe. 

L'appareil  présenté  à  l'Académie  des  sciences 
était  pluscompb't  :  à  l'extrémité  opposée  à  la  mani- 
velle, l'axe  prolongé  du  cylindre  portait  un  assez  lourd 
vidant  qui  régularisait  la  rotation.  La  membrane 
vibrante  pouvait  être  rendue  solidaire  d'un  cornet 
qui  amplifiait  et  dirigeait  les  ondes  sonores  restituées 
par  la  feuille  d'étain. 

Edison  demeura  plusieurs  années  sans  perfection- 
ner son  appareil;  il  parait  qu'il  n'avait  pas  confiance, 
lui-même,  dans  le  développement  industriel  de  son 
invention.  Cependant,  l'idée  était  lancée  :  une  so- 
ciété  qui  comprenait  entre  autres  Bell  et  Tainter  se 
mit  en  devoir,  des  1881,  d'exploiter  les  brevets  d'E- 
dison.  Celui-ci,  d'ailleurs,  reprit  ses  travaux  phono- 
graphiques  après  1887. 

La  conception  pratique  de  la  machine  parlante  à 
rouleau  fut  bientôt  la  suivante  : 

Le  cylindre  n'était  plus  animé  que  du  mouvement 
de  rotation. 

Le  diaphragme, avec  son  cornet,  devenait  mobile  : 


une  charnière  le  reliait  à  une  monture  métallique 
coulissant  sur  une  tige  horizontale  qui  servait  de 
guide;  l'autre  extrémité  de  cette  pièce  portail  un 
demi-écrou,dont  les  filets  reposaient  sur  ceux  d'une 
vis  hélicoïdale  horizontale  parallèle  à  la  tige-guide. 
Un  moteur  d'horlogerie  animait  d'un  mouvement 
de  rotation  le  cylindre  et  la  tige  ifiletée  :  celle-ci  en- 
traînait l'écrou  guidé  qui  portait  le  diaphragme;  la 
pointe  de  celui-ci  reposait  sur  le  cylindre  métallique. 
Lors  de  l'enregistrement,  ce  dernier  était  recou- 
vert d'un  autre  cylindre  creux,  de  cire1  ou  de  cellu- 
loïd (voir  plus  loin)  ;  la  pointe  du  diaphragme  laissait 
donc  sur  la  matière  tendre  un  sillon  hélicoïdal  (pho- 
nogramme). 

Pour  la  reproduction,  on  ramenait  le  train  du 
diaphragme  à  son  point  de  départ,  on  plaçait  la 
pointe  au  début  du  sillon  et,  grâce  à  une  certaine 
liberté  de  l'articulation  de  ce  diaphrame,  l'entraî- 
nement se  réalisait  par  la  vis  sans  fin,  sans  que  la 
pointe  sortît  des  sillons  primitivement  tracés. 

Le  diaphragme  s'est  toujours  souvenu  de  sa  forme 
primitive  :  c'est  généralement  une  boite  circulaire 
plate;  l'une  des  faces  est  métallique  et  porte  les 
accessoires  :  rainures,  goujon,  vis,  etc.,  nécessaires 
à  sa  fixation;  l'autre  est  la  membrane  vibrante.  Elle 
a  été  constituée  de  plusieurs  substances  :  parchemin, 
cristal,  mica,  métal;  aujourd'hui,  ces  deux  dernières 
matières  se  divisent  le  marché  :  le  mica  est  encore 
très  apprécié;  quant  au  métal,  aluminium  ou  alliages 
divers  réduits  en  feuilles  extra-minces,  son  emploi 
se  généralise.  Il  est  plus  facile  à  travailler  et  se 
prête  davantage  au  perfectionnement.  On  tend,  en 
effet,  à  abandonner  la  surface  plane  pour  des  profils 
compliqués  de  renflements  et  de  stries  qui  ('tendent 
la  sensibilité  du  microphone  acoustique. 

On  vient  de  comprendre  que  le  phonographe  à 
rouleau  pouvait  successivement  enregistrer  et  repro- 
duire. A  chacune  de  ces  opérations  correspondait 
un  diaphragme  spécial,  différant  par  le  poids,  et  sur- 
tout par  la  taille  de  la  pointe  de  saphir  destinée,  dans 
le  premier  cas,  à  graver,  dans  le  deuxième,  au  con- 
traire, à  être  seulement  animée  et  guidée  par  le 
sillon. 

On  construisit  aussi  des  diaphragmes  susceptibles 
de  prendre  plusieurs  positions,  et  conséquemment 
de  reproduire  des  timbres  et  des  intensités  diverses 
selon  le  genre  de  rouleau  —  et,  plus  tard,  de  disqui 
—  placé  sur  le  phonographe. 

Enfin,  lapointe  de  saphir,  destinée  à  un  usage  pro- 
longé et  iixéc  au  centre  de  la  membrane  vibrante,  lit 
place,  petit  à  petit,  à  l'aiguille  métallique. 

Celle-ci  est  l'ixée  au  moyen  d'une  vis  de  serrage 
dans  un  petit  tube  qui  termine  un  levier  solidaire 
de  la  monture  circulaire  du  diaphragme.  Ce  levier 
se  prolonge  jusqu'au  centre  de  la  membrane  auquel 
il  est  rattaché  par  une  vis  ou  un  rivet. 

Ainsi,  toutes  les  oscillations  imprimées  par  les  sil- 
lons à  l'aiguille  se  transmettent  au  bras  de  levier  et, 
de  là,  .i  la  membrane  vibrante  :  un  cornet  recueille 
ces  \  ibrations,  les  amplifie  et  les  apporte  à  l'oreille. 
De  nombreuses  variantes  ont  été  apportées  à  ce 
dispositif  schématique,  qui  reste  fondamental. 

Quant  au  cornet,  il  est  remplacé  souvent,  surtout 
dans  les  appareils  automatiques,  par  un  tube  de 
caoutchouc  terminé  par  deux  écouteurs  susceptibles 
de  pénétrer  dans  les  oreilles;  parfois  même,  un  seul 
appareil  recueille  les  sons  de  la  membrane  dans  une 


<|ui  eut  tldôo  de  r 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LE  PHONOGRAPHE 


sorte  de  galerie  horizontale  qui  porte  plusieurs  de 
ces  tubes  acoustiques. 

Le  phonographe  à  rouleau  s'est  prolongé  jusque 
vers  1910;  depuis  cette  époque,  il  a  à  peu  près  disparu 
des  fabrications  pour  faire  place  à  l'appareil  à 
disques. 

L'appareil  à  disque  comprend  les  mêmes  éléments 
que  le  précédent,  mais  la  vis  sans  fin  devient  inutile  : 
en  effet,  l'entraînement  du  diaphragme  se  fait  par 
les  sillons  du  disque  dans  lesquels  l'aiguille  est  en- 
gagée. 

Progressivement  aussi,  le  cornet  avec  pavillon 
extérieur  disparait  :  il  est  placé  dans  le  coffret  de 
l'appareil  et  reçoit  une  forme  et  une  longueur  appro- 
priées à  son  meilleur  rendement.  Celui-ci  s'est 
beaucoup  élevé  :  dans  les  meilleurs  appareils  «  Co- 
lumbia  »,  fondés  sur  les  brevets  primitifs  Edison, 
Bell,  Tainter  et  Macdonald  et  construits  il  y  a 
trente  ou  quarante  ans,  le  son  reproduit  était  envi- 
ron 1/1G  du  son  original.  Actuellement,  leurs  inten- 
sités, sans  être  égales,  sont  beaucoup  plus  voisines 
(70  à  80  o/o  pour  les  meilleures  marques). 

L'appareil  à  disques  préconisé  par  Berliner  ne 
peut  pas  servir  à  enregistrer  :  on  en  comprendra 
plus  loin  la  raison.  Malgré  cela,  il  jouit  de  la  faveur 
uuiverselle. 

La  construction  du  phonographe  est  du  ressort  de 
la  technique  métallurgique,  et  n'a  nécessité  aucune 
innovation;  nous  n'avons  donc  rien  à  en  dire. 

Il  n'en  est  pas  de  même  de  là  fabrication  des  rou- 
leaux et  surtout  du  disque,  que  nous  décrirons  plus 
loin  avec  quelques  détails. 

Disons  seulement  que  le  phonographe  enregis- 
treur à  rouleau  a  survécu  sous  la  forme  du  «  Dicta- 
phone  »  ou  appareils  similaires;  l'entraînement  du 
cylindre  de  cire  et  de  la  pointe  traceuse  se  fait 
généralement  par  un  moteur  électrique;  le  cornet 
est  remplacé  par  un  tube  souple  à  embouchure.  Les 
lettres  ou  les  ordres  dictés  et  gravés  sur  la  cire 
sont  reproduits  à  volonté  par  un  appareil  identique, 
mais  muni  d'un  casque  à  écouteurs. 


LE  ROULEAU   ET  LE   DISQUE 

L'organe  reproducteur  du  phonographe  —  disque 
ou  rouleau  —  était  une  chose  nouvelle  dans  la 
science  et  dans  l'industrie.  Il  a  donné  lieu  pendant 
au  moins  vingt  ans  à  des  essais,  des  hésitations,  des 
recherches,  des  échecs  qui  auraient  sans  doute  dé- 
couragé et  ruiné  des  inventeurs  isolés.  Mais  la  puis- 
sance des  industries  qui,  dès  le  début,  comprirent  et 
exploitèrent  le  phonographe,  permit  la  continuité  des 
efforts  financiers  et  scientifiques  qui  devaient  abou- 
tir un  jour  au  disque  de  matière  plastique  dont  nous 
décrirons  plus  loin  la  fabrication. 

Edison  s'était  servi,  pour  inscrire  les  vibrations, 
d'une  feuille  d'étain;  une  difficulté  presque  insur- 
montable surgit  du  fait  qu'on  ne  pouvait  éviter,  à 
la  soudure,  un  bourrelet  formé  selon  une  généra- 
trice du  cylindre. 

Bell  surmonta  la  difficulté  en  remplaçant  l'élain 
par  de  la  cire,  pour  l'empreinte  originale  :  on  y 
trouva,  en  outre,  l'avantage  d'obtenir  des  sillons 
continus  et  non  plus  des  séries  de  points  en  creux 
comme  sur  l'étain. 

Les  répliques  de  l'original  destinées  au  commerce 
furent  d'abord  tantôt  en  cire,  tantôt  en  celluloïd. 

On  lirait  du  cylindre-cire  initial,  rendu  conduc- 


teur par  une  pellicule  d'or,  un  galvano  cuivre  épais 
d'environ  5  millimètres  et  qui  portait,  sur  sa  face  cy- 
lindrique intérieure,  les  sillons  en  relief.  On  plaçait 
dans  ce  cylindre  un  mandrin  concentrique  légère- 
ment conique,  mais  de  diamètre  plus  faible,  et  dans 
la  partie  libre,  entre  les  sillons  et  le  mandrin,  on 
coulait  de  la  cire  chaude. 

Après  refroidissement  et  durcissement  de  celle-ci, 
on  pouvait  démouler  avec  assez  de  facilité,  en  raison 
de  la  différence  du  retrait  entre  le  cuivre  et  la  cire. 

Si  l'on  se  servait  de  celluloïd,  celui-ci,  sous  forme 
de  feuille  appliquée  contre  les  sillons  intérieurs  du 
galvano,  était  amolli  et  dilaté  par  de  l'eau  chaude 
ou  de  la  vapeur  sous  pression  ;  après  refroidissement, 
on  démoulait.  Les  résultats  n'ont  jamais  été  satis- 
faisants :  l'adhérence,  la  pénétration,  beaucoup  moins 
complètes  qu'avec  la  cire,  laissaient  subsister  des 
lacunes,  des  bulles  d'air  qui  firent  abandonner  ra- 
pidement le  celluloïd. 

Le  rouleau  de  cire  du  commerce  régna  jusque 
vers  1910;  on  le  reproduisait  aussi  mécaniquement 
au  moyen  de  «  machines  à  reproduire  »,  fondées  sur 
le  même  principe  que  celles  dont  on  se  sert  en  mé- 
tallurgie. 

Il  y  eut  des  «  doubleuses  »  à  main,  à  pied  et  à 
moteur  électrique  :  les  premières  fournissaient  70  à 
80  exemplaires  par  jour;  les  dernières  180  à  200. 
Les  résultats,  au  point  de  vue  auditif,  étaient  satis- 
faisants. 

On  ne  citera  que  pour  mémoire  les  essais  tentés 
en  faveur  de  rouleaux  enregistreurs  en  plomb,  ou 
en  alliage  malléable  à  base  de  plomb,  ou  l'emploi 
de  bandes  sans  fin  se  déroulant  devant  la  pointe 
vibrante. 

Disque. 

Nous  avons  vu  que,  dès  le  début  du  phonographe, 
deux  tendances  se  manifestent  :  l'une  vers  le  rou- 
leau, l'autre  vers  le  plateau. 

Edison  avait  déjà  songé  à  remplacer  le  cylindre 
par  le  plateau,  pour  éviter  le  raccordement.  Mais 
c'est  surtout  Berliner  qui,  en  1887,  donna  toute  son 
impulsion  au  disque. 

Il  imagina  un  plateau  circulaire  horizontal  dont 
la  rotation,  provoquée  par  un  volant  à  main,  engen- 
drait à  son  tour  le  déplacement  transversal. 

Le  centre  se  rapprochait  ainsi  de  la  pointe  fixe 
enregistreuse  qui  traçait  alors  une  spirale  sur  la 
surface  libre. 

Le  disque  lui-même  était  de  zinc,  on  le  plongeait 
dans  une  solution  cire-benzine:  séché,  il  se  trouvait 
recouvert  d'une  légère  couche  de  cire  dans  laquelle 
la  pointe  laissait  un  sillon  continu,  atteignant  le  zinc 
lui-même  à  la  manière  d'un  burin.  On  traitait  en- 
suite par  l'acide,  comme  s'il  s'agissait  d'une  planche 
à  graver1;  on  dissolvait  la  cire,  et  le  disque  était 
propre  à  reproduire  ou  à  donner  des  galvanos  en 
relief  pour  le  tirage  des  exemplaires  du  commerce 
(les  sillons  avaient  environ  1  dixième  de  millimètre 
de  profondeur). 

Toutes  les  matières  «  thermoplastiques  »  furent 
tour  à  tour  essayées  pour  le  pressage  des  disques  : 
cire,  celluloïd,  caoutchouc  durci,  etc.;  en  1S97, 
Berliner  adopta  une  matière  plastique  isolante, 
mais  il  n'avait  pas  réussi  à  éliminer  les  bruits  para- 
sitaires extrêmement  gênants  —  grattements  et  cla- 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQUE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


quemenls  —  qui  entravèrent  longtemps  la  progres- 
sion du  disque,  au  profit  du  rouleau. 

En  1897  aussi,  un  autre  Américain,  Jones,  eut  l'i- 
dée très  simple  de  remplacer  le  zinc  initial  par  de 
la  cire;  les  bruits  parasitaires  diminuèrent  considé- 
rablement et  le  disque  commença  à  se  multiplier  au 
détriment  du  rouleau. 

Il  avait  fallu  dix-neuf  ans  d'efforts  pour  obtenir 
ce  résultat.  Dès  lors,  il  ne  restait  qu'à  perfectionner, 
en  ce  qui  concerne  le  disque  du  commerce,  la  ma- 
tière plastique  et  les  moyens  de  produclion,  pour 
atteindre,  après  25  à  30  nouvelles  années  de  travail, 
la  méthode  de  fabrication  que  nous  allons  décrire 
avec  quelques  détails. 


LA   FABRICATION   DES   DISQUES1 

Le  disque  phonographique  est  d'une  apparence  si 
simple  qu'on  imagine  difficilement  le  nombre,  la 
complexité  et  la  délicatesse  des  opérations  par  les- 
quelles il  passe,  avant  de  revêtir  l'aspect  que  nous 
lui  connaissons. 

Nous  avons  pensé  qu'on  s'intéresserait  à  l'histoire 
rapide  et  d'ailleurs  simplifiée  d'un  disque. 


La  forme  première  du  disque  est  la  «  cire  »  :  c'est 
un  plateau  de  35  centimètres  environ  de  diamètre 
sur  25  milimètres  d'épaisseur;  composé  de  deux  cires 
naturelles  intimement  mélangées,  saponifiées,  puis 
moulées,  ce  plateau  est  passé  au  tour  sur  sa  face 
inférieure,  puis  soigneusement  surface  et  poli  sur  sa 
face  supérieure  au  moyen  d'un  tour  vertical  dont  le 
train  porte  deux  outils  :  l'un  en  acier  pour  dégros- 
sir, le  second  en  saphir  pour  finir  et  polir;  les  co- 
peaux disparaissent  dans  un  aspirateur  électrique 
contigu  à  l'outil. 

La  face  ainsi  travaillée  présente  alors  l'aspect  d'un 
miroir  blond  prêt  à  recevoir  les  sillons  musicaux. 

Une  précaution  essentielle  est  d'éviter  toute  vibra- 
tion des  machines  :  leurs  socles  sont  puissants,  les 
courroies  sont  collées  et  non  cousues;  la  tempéra- 
ture est  maintenue  uniforme  afin  d'éviter  le  léger 
jeu  qui  peut  provenir  des  différences  de  dilatation. 
On  comprend  que  la  plus  faible  oscillation  systéma- 
tique entraînera  un  gauchissement  ou  une  dépres- 
sion de  la  surface  à  graver,  et,  par  conséquent,  une 
fluctuation  périodique  dans  l'audition  musicale. 

La  «  cire  »  est  ensuite  envoyée,  dans  une  boite 
solide,  au  laboratoire  du  studio  où  se  réalise  l'enre- 
gistrement ;  nous  décrirons  celui-ci  plus  loin,  dési- 
rant nous  borner  ici  aux  seules  opérations  d'usinage, 
et  nous  reprendrons  la  cire  au  moment  où,  sillon- 
née d'une  spirale  très  serrée,  — empreinte  matérielle 
des  vibrations  musicales  captées  par  le  microphone, 
—  elle  est  replacée  avec  précaution  dans  sa  boite  et 
"envoyée  à  l'usine. 

On  la  marque  alors  d'un  numéro  qui  suivra  la  face 
du  disque  dans  toutes  ses  pérégrinations. 

Galvanoplastie. 

La  cire,  trop  peu  résistante,  est  impropre  au  mou- 
lage direct  des   disques.  Il  en  faut  donc  tirer  des 

renseignements  aux  usines..  Cotumbiai, 
visiter  méthodiquement  sous  ta  conduite 
ui  maisons  françaises,  auiqucllcs  nous 


nous  avons  été  a*in 


empreintes  métalliques.  On  y  parvient  par  une  série 
d'opérations  galvanoplastiques  qui  constituent  l\> 
partie  essentielle  et  la  plus  délicate  de  la  fabrication. 
Pour  obtenir  un  galvano  à  partir  de  la  cire,  il  faut 
rendre  celle-ci  conductrice  du  courant;  pour  ce,  on 
l'enduit,  au  moyen  d'un  coton,  d'une  poudre  extrê- 
mement fine  de  graphite  qui  pénètre  dans  les  plus 
petits  recoins  des  sillons.  Un  pinceau  souple  enlève 
les  aspérités  ou  les  accumulations  de  graphite  qui 
pourraient  subsister,  et,  par  un  lavage  à  l'alcool  mé- 
langé d'eau,  on  fait  disparaître  les  bulles  d'air  qui 
auraient  pu  se  former  entre  la  cire  et  le  graphite, 
surtout  dans  les  sillons.  La  cire  est  ensuite  fixée  au 
moyen  d'un  fil  de  cuivre  qui  la  ceinture,  sur  une 
règle  plate  de  bois,  munie  d'une  armure  métallique 
par  laquelle  on  suspend  ce  balancier  improvisé  à  un 
arbre  horizontal  oscillant  au-dessus  du  bain  galva- 
noplastique.  La  cire  ainsi  immergée,  animée  d'un 
mouvement  pendulaire,  se  recouvre  pendant  15 
heures,  sur  la  surface  sillonnée  et  sur  une  portion 
de  la  partie  cylindrique,  d'une  couche  de  cuivre  qui 
atteint  progressivement  l'épaisseur  moyenne  d'un 
millimètre. 

On  détache  cette  sorte  de  calotte,  et  on  la  passe  au 
tour  pour  n'en  conserver  que  la  partie  circulaire 
plane  qui  porte  les  sillons  et  une  marge  d'environ  2 
à  3  centimètres  sur  le  bord  extérieur. 

Les  sillons  sont  alors  en  relief  et  ne  pourraient 
servir  à  la  reproduction  sonore  sur  un  phonographe, 
En  revanche,  cette  première  épreuve  pourrait  ser- 
vir de  cliché  pour  imprimer  les  disques  définitifs; 
mais  il  faudrait  craindre  l'usure,  par  le  pressage 
répété,  de  cet  «  original  »;  et  comme  la  cire,  d'autre 
part,  est  devenue  inutilisable,  l'enregistrement  n'au- 
rait donné  lieu  qu'à  un  nombre  insuffisant  d'exem- 
plaires. 

Il  convient  donc  de  tirer  de  cet  »  original  »  non  des 
disques,  mais  des  épreuves  métalliques  qui  serviront 
à  les  imprimer. 

A  cet  effet,  le  cuivre  original,  lavé,  décapé,  poli, 
reçoit,  par  un  procédé  chimique  très  simple,  une 
mince  couche  d'argent  qu'on  oxyde  par  immersion 
dans  un  bain  de  teinture  d'iode;  on  lave,  on  accouple 
dos  à  dos  deux  originaux  identiquement  préparés  et 
fixés  dans  une  couronne  de  bois  munie  d'un  manche  ; 
ce  nouveau  balancier  est  à  son  tour  plongé  dans  le 
sulfate  de  cuivre,  et  relié  à  l'arbre  oscillant  par  une 
armature  conductrice.  Au  bout  de  15  à  10  heures,  on 
décolle  de  l'original,  facilement,  grâce  à  la  pellicule 
d'oxyde  d'argent,  une  empreinte  d'environ  1  milli- 
mètre d'épaisseur  dont  les  sillons,  en  creux,  peuvent 
être  joués  sur  un  phonographe,  mais  ne  pourraient 
imprimer  les  disques.  A  son  tour,  cette  deuxième 
épreuve  cuivre,  appelée  «  mère  »,  devra  fournir  un 
cliché  en  relief  qui  servira  enfin  au  pressage. 

Dans  ce  dessein,  la  «  mère  »,  ébarbée,  tournée, 
décapée,  polie,  lavée,  est  légèrement  oxydée  par  im- 
mersion dans  le  bichromate  de  potasse,  —  opération 
qui  permettra  ultérieurement  le  décollement  de  la 
«  mère  »  et  de  l'empreinte  qu'on  en  tirera  —  puis 
plongée  dans  un  bain  galvanoplastique  de  sulfate 
double  de  nickel.  Aprèsune  demi-heured'électrolyse, 
une  mince  couche  de  nickel  recouvre  la  «  mère  »  : 
cette  pellicule  suffira  à  proléger  la  matrice  défini- 
tive contre  une  usure  trop  rapide  au  pressage. 
On  retire  la  «  mère  »  du  bain  de  nickel,  on  la 


i  ftu.iiN  .i. ][<>-.*.'  .hn*  I 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LE  PHONOGRAPHE  I3S93 


passe  rapidement  au  sulfate  de  cuivre  pour  empêcher 
cette  fois  l'oxydation,  et  on  la  plonge  —  une  dernière 
fois  —  dans  un  bain  de  sulfate  de  cuivre,  où  elle 
oscillera  pendant  quatre  heures. 

A  ce  moment,  on  décolle  l'empreinte  :  on  a  d'une 
part  la  «  mère-cuivre  »  qui  peut  servir  indéfiniment, 
et  d'autre  part  un  galvano  de  3/10  de  millimètre 
environ  d'épaisseur,  dont  la  face  sillonnée  en  relief 
est  nickelée.  C'est  le  «  shell  »,  partie  essentielle  de 
la  matrice  définitive. 

Le  dos  du  shell  est  meule,  ainsi  qu'un  côté  du 
cuivre,  préalablement  plané;  les  deux  surfaces  à 
souder  sont  étamées,  les  sillons  extérieurs  du  shell 
élant  protégés  par  une  pâte  de  blanc  de  Meudon; 
puis,  shell  et  cuivre  accouplés  sont  placés  dans  un 
moule  à  400°  et  sous  une  presse  d'environ  150  kilos 
par  centimètre  carré.  Un  simple  papier  buvard  assez 
épais  suffit  à  proléger  les  sillons  contre  l'écrasement, 

La  matrice  n'est  pas  encore  terminée  :  elle  doit 
être  exactement  centrée,  faute  de  quoi,  les  disques 
imprimeraient  au  diaphragme  un  mouvement  de 
va-et-vient  préjudiciable  à  l'audition  musicale. 

Le  centrage  est  obtenu  au  moyen  même  des  sil- 
lons. La  matrice  élanl  placée  horizontalement  sous 
une  perceuse  et  animée  d'un  mouvement  de  rotation, 
un  levier  armé  d'une  pointe  est  entraîné  à  la  ma- 
nière d'un  bras  de  diaphragme,  mais  du  centre  vers 
l'extérieur,  par  la  spirale  en  relief;  ce  levier  agit 
indirectement  sur  une  aiguille  se  déplaçanl  devant 
un  cadran  :  le  centrage  est.  obtenu  quand  cette 
aiguille  parcourt  le  cadran  régulièrement,  dans  le 
même  sens,  sans  à-coups  ni  retours  en  arrière.  On 
perce  à  ce  moment  un  premier  trou  central  :  on  l'a- 
lèse, on  le  rectifie,  puis,  après  un  nouveau  centrage, 
on  pratique  le  trou  définitif  qui  servira  à  fixer  la 
matrice  dans  le  moule  (environ  2  cm.  5  de  diamètre). 
La  matrice,  ébarbée,  nettoyée,  polie,  est  prête  pour 
le  pressage. 

Nous  avons  observé  jusqu'ici  quatre  états  du 
disque  :  1°  cire,  sillons  en  creux;  —  2°  original- 
cuivre,  sillons  en  relief;  —  3°  mère-cuivre,  sillons 
en  creux;  —  t°  matrice,  nickel-cuivre,  sillons  en  re- 
lief. Le  cinquième  et  dernier  état  est  le  disque  du 
commerce  :  avant  d'en  aborder  le  pressage,  ouvrons 
une  parenthèse  pour  parler  des  matières  dont  il  est, 
constitué. 

matières  plastiques. 

Jadis  (et  même  fréquemment  aujourd'hui),  le  dis- 
que était  constitué  d'une  seule  épaisseur  de  matière 
plastique  imprimée  sur  ses  deux  faces.  Le  disque 
Columbia  doit  une  partie  de  sa  supériorité  aux  dispo- 
sitions suivantes  : 

Il  comporte  une  couche  médiane  de  1  millimètre 
à  1  mm.  S  matière  plastique  très  fine,  niais  non  sen- 
sible, étant  convenu  que  nous  donnerons  à  cet  ad- 
jectif le  sens  de  «  susceptible  de  recevoir  les  sillons 
définitifs  »;  sur  chaque  face  de  ce  «  support  c'esl 
son  nom),  adhère  un  cercle  de  papier  qui  présente 
extérieurement  une  couche  de  matière  sensible  des- 
tinée à  recevoir  les  sillons. 

1  "  Matière  du  «  support  ».  —  Elle  comprend  es- 
sentiellement de  l'ardoise,  des  débris  de  disques,  du 
mica  et  un  agglomérant  :  les  copeaux  qui  provien- 
nent du  tournage  des  «  cires  ».  Ces  différents  subs- 
tances sont  concassées,  pulvérisées,  mélangées, 
réduites  en  pâle,  laquelle,  laminée  entre  rouleaux  et 
divisée  en  rectangles  d'un  décimètre  carré  environ, 
est  envoyée,  refroidie,  à  l'atelier  de  pressage. 


2°  Matière  de  la  couche  extérieure.  —  Elle  est 
à  base  de  gomme-laque  à  laquelle  on  mélange  une 
terre  rare  destinée  à  lui  donner  de  la  résistance. 
Travaillée  comme  ci-dessus,  elle  est  réduile  finale- 
ment en  une  poudre  impalpable  et  envoyée  sur  des 
tamis,  au-dessous  desquels  circulent  des  disques  de 
papier  noir.  Préalablement,  ces  disques,  happés  par 
des  rouleaux.y  sont  enduits  sur  leur  face  extérieure 
d'une  solution  de  gomme-laque  dans  l'alcool. 

A  leur  passage  sous  le  tamis,  ils  fixent  donc  une 
couche  de  matière  sensible  pulvérulente.  Ils  passent 
ensuite  entre  des  rouleaux  chauds  qui  assurent 
l'adhérence  papier-gomme-laque,  et  donnent  à  celle- 
ci  une  surface  homogène;  entraînés  par  un  chemin 
mobile,  ils  passent  entre  des  rouleaux  froids  et 
achèvent  de  se  refroidir  en  circulant  à  l'air.  Ils  vont 
alors  dans  l'atelier  de  pressage,  où  ils  rejoignent  les 
rectangles  de  «  support  »  et  aussi  les  étiquettes,  pro- 
venant d'une  machine  qui  les  imprime  sur  du  papier 
coloré  à  raison  de  60  à  la  minute. 

Pressage. 

On  a  souvent  comparé,  d'une  façon  assez  justifiée, 
le  moule  à  disques  au  moule  à  gaufres.  Qu'on  se 
figure  un  coffret  de  fer  s'ouvrant  au  moyen  d'une 
poignée,  face  à  l'ouvrier.  Sur  le  fond  horizontal  est 
fixée  une  matrice;  sur  le  fond  du  couvercle,  une 
autre  matrice  ;  quand  on  referme  le  moule,  les  deux 
matrices  coïncident  exactement. 

Mais  avant  de  refermer,  il  faut  introduire  les  élé- 
ments du  disque,  et  ce,  dans  un  ordre  qu'il  est  facile 
de  prévoir  :  une  étiquette  (face  imprimée  contre  la 
matrice  horizontale),  —  un  papier  sensible  (gomme- 
laque  contre  matrice  horizontale),  —  un  rectangle  . 
de  matière-support;  —  un  papier  sensible,  —  une 
étiquette,  ces  deux  derniers  tournés  vers  la  matrice 
du  couvercle.  Le  tout  est  centré  par  un  pivot  qui 
trou  du  disque  et  qui  obéit  à  une  pédale. 
Pendant  toute  cette  opération,  le  moule  est  parcouru 
par  une  circulation  de  vapeur  sous  pression  à   160°' 

On  ferme  le  coffret  de  fer,  on  le  pousse  sur  ses 
rails  jusque  sous  la  presse  (40  à  50  centimètres  de 
course  environ). 

Un  dispositif  automatique  déclanche  une  pression 
de  ISO  kilos  environ  par  centimètre  carré  et,  en  même 
temps,  remplace  la  vapeur  par  une  circulation  d'eau 
à  température  ordinaire. 

La  matière-support  s'écrase  entre  les  deux  papiers, 
les  sillons  s'impriment  dans  la  gomme-laque  qui 
fixe  en  même  temps  les  étiquettes;  au  bout  de 
30  secondes,  on  retire  le  moule,  on  l'ouvre  :  le  disque 
apparaît  sous  son  aspect  presque  définitif. 

Il  suffit  de  l'envoyer  au  finissage  :  il  y  est  ébarbé, 
poli  sur  les  bords,  brossé  sur  les  sillons,  puis  mis  en 
enveloppe,  en  boites  et  livré  au  commerce. 

Quant  au  moule,  il  est  maintenant  de  nouveau 
parcouru  par  la  vapeur  à  160°;  il  reçoit  une  autre 
charge,  glisse  sous  la  presse,  et  ainsi  de  suite  :  il  four- 
nira de  550  à  650  disques  par  jour. 

Chaque  disque  est  suivi  à  travers  l'usine  par  une 
fiche  de  fabrication;  les  opérations  sont  contrôlées 
régulièrement  :  un  exemplaire  sur  25  passe  au  mi- 
croscope, où  ses  sillons  sont  examinés,  et  au  phono- 
graphe, où  des  oreilles  attentives  relèvent  le  moindre 
grattement. 

On  peut  dire  sans  exagération  que  le  disque  a  con- 
quis le  monde;  la  seule  firme  Columbia  en  répand 
quotidiennement,  sur  la  surface  du  globe,  350  000, 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUSIQI'E  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


soit  pins  de  100  millions  paran.que  le  public  achè 
pour  une  somme  dépassant  2  milliards  et  demi. 


L'ENREGISTREMENT 

L'enregistrement  a  toujours  été  la  partie  la  plus 

délicate  de  l'industrie  du  disque.  Malgré  les  progrès 
considérables  réalisés  au  cours  de  ces  dernières 
années,  il  semble  qu'on  puisse  encore  améliorer  lar- 
gement les  dispositifs  adoptés  jusqu'à  ce  jour. 

Dans  la  première  machine  d'EDisorr,  il  était  indis- 
pensable de  placer  la  bouche  presque  au  contact  de 
la  membrane  vibrante  pour  obtenir  un  tracé  sur  la 
feuille  d'étain. 

Le  remplacement  du  métal-élain,  plomb,  etc.,  par 
une  matière  plus  vulnérable  :  cire,  celluloïd,  per- 
mit un  dispositif  plus  pratique. 

Il  consistait,  en  principe,  en  un  cornet  conique 
Usé  sur  la  boite  sonore  du  phonographe  enregistreur. 
L'extrémité  évasée  était  tournée  du  côté  de  l'exécu- 
tant; l'autre  aboutissait  à  la  membrane  vibrante; 
celle-ci  était  armée  d'une  pointe,  oscillant,  sous  l'in- 
fluence des  ondes  sonores  acheminées  dans  le  cornet, 
et  laissant  sur  le  cylindre  ou  sur  le  disque  les  sillons 
originaux,  dont  l'action  réversible]  pouvait,  à  son 
tour,  reproduire  les  sons  primitifs. 

Pendant  quarante-cinq  ans  environ,  ce  procédé  fut 
en  usage  avec  quelques  variantes. 

Des  gravures  antérieures  à  1900  nous  montrent  un 
sujet  parlant  devant  une  embouchure  reliée  à  un 
tube  acoustique  aboutissant  à  l'enregistreur;  d'au- 
tres représentent  une  cantatrice  en  face  d'un  vaste 
cornet  monté  sur  le  train  mobile  de  la  machine. 

Dans  d'autres  cas,  on  pouvait  fixer  jusqu'à  cinq 
cornets  orientés  de  telle  sorte  qu'un  quatuor,  un  quin- 
tette ou  un  pelit  croupe  d'instruments  pouvaient 
donner  lieu  à  un  enregistrement  à  peu  près  équilibré. 
Ensuite,  on  sépara  la  machine  proprement  dite  de 
l'exécutant.  Deux  salles  contiguès  étaient  séparées 
par  une  mince  cloison;  dans  l'une,  se  trouvait  le 
phonographe  enregistreur:  dans  l'autre,  le  cornet, 
pénétranf  par  sa  partie  eiroite  dans  un  orifice  de  la 
cloison  et  relié  ainsi  à  la  machine.  Caruso  s'est  des- 
siné lui-même  face  à  un  cornet  rectangulaire,  dont 
la  pointe  disparaît  dans  la  paroi  de  la  cabine.  On  a 
tenté  aussi  de  donner  à  la  pièce  où  se  tenaient  les 
exécutants  la  forme  d'un  vaste  cornet  conique;  mais 
la  surface  réfléchissante  provoqua  de  la  confusion. 
On  a  imaginé  encore  de  dédoubler  le  cornet  à 
partir  du  pavillon;  les  deux  tubes  se  dirigeaient 
ensuite  chacun  vers  un  enregistreur,  et  on  obtenait 
tleux  matrices  pour  une  seule  exécution. 

La.  nécessité  de  reproduire  les  ensembles,  qui 
avait  engendré  les  dispositifs  à  plusieurs  cornets, 
orienta  les  recherches  vers  la  solution  électrique  : 
un  microphone  était  adapté  à  chaque  pupitre;  les 
courants  modifiés  par  chaque  instrument  étaient 
centralisés,  et  leur  faisceau  agissait  par  un  électro- 
aimant  sur  une  membrane  téléphonique;  celle-ci 
portait  une  pointe  traceuse.  Cette  solution  n'a  donné 
aucun  résultat  appréciable,  le  son  perdant,  à  travers 
ces  diverses  transformations,  la  plupart  de  ses  qua- 
lités; mais  elle  contenait  en  germe  le  dispositif  de 
l'enregistrement  électrique. 

L'enregistrement  acoustique  avait  une  technique 
propre,  aujourd'hui  périmée. 

L'orchestre  devait  être  réduit  à  environ  10  musi- 
ciens :  seules,  les  clarinettes  pouvaient  être  doublées, 


les  cordes  jamais  :  leur  reproduction  était  d'ailleurs 
mauvaise,  ainsi  que  celle  du  piano. 

Les  meilleurs  instruments  à  enregistrer  étaient  les 
cuivres,  puis  les  llùtes,  —  surtout  la  petite,  —  la 
clarinette;  le  hautbois  était  médiocre.  La  fanfare  re- 
présentait le  meilleur  groupement. 

Les  techniciens  allemands  et  français  sont  à  peu 
près  d'accord  pour  préconiser-  le  groupement  sui- 
vant :  1  petite  flûte,  1  petite  clarinette,  deux  ou  trois 
clarinettes,  deux  cornets  à  pistons,  un  trombone,  un 
saxhorn-basse  ou  baryton,  une  contrebasse.  Les 
clarinettes  devaient  être  placées  au  premier  rang, 
avec  les  flûtes,  à  un  mètre  environ  du  pavillon,  en- 
suite les  cornets,  ensuite  les  trombone  et  saxhorn; 
le  tout,  si  possible,  en  amphithéâtre.  En  cas  de  pré- 
sence d'un  piano,  celui-ci  devait  être  sur  une  estrade 
derrière  les  instruments,  qu'il  dominait  d'environ  60 
à  80  centimètres. 

Il  était  naturellement  nécessaire  d'arranger  les 
morceaux  pour  réduire  les  partitions  originales  au 
groupement  optimum;  il  fallait  éviter  l'accumulation 
des  sons  aigus,  ainsi  que  les  accords  tenus  dans  l'ac- 
compagnement. 

On  comprend  que,  dans  de  telles  conditions  et 
malgré  les  perfectionnements  incessants  apportés  à 
la  machine  parlante,  au  diaphragme,  au  disque,  les 
amateurs  de  musique  se  soient  désintéressés  du  pho- 
nographe. 

L'enregistrement  électrique,  fondé  sur  le  principe 
de  l'amplification  du  courant,  devait  abolir  en  1925 
ces  méthodes  rudimentaires. 

Ce  mode  d'enregistrement  nécessite  deux  salles  : 
un  studio  et  un  laboratoire. 

Studio.  —  C'est  généralement  un  vaste  hall  pou- 
vant contenir  un  orchestre  complet,  des  choeurs,  des 
solistes,  des  pianos,  etc. 

On  en  supprime  l'écho  en  revêtant  de  tentures  el 
de  tapis  le  sol,  les  murs  et  le  plafond. 

Un  microphone  spécial,  intentionnellement  peu 
sensible,  ne  contenant  ni  charbon,  ni  aucune  articu- 
tion  susceptible  de  produire  des  bruits  parasites, 
peut  être  placé  et  déplacé  à  volonté.  Un  fil  le  relie 
au  laboratoire. 
Laboratoire.  —  i>n  y  rencontre  : 
I"  tin  dispositif  d'amplification  analogue  à  celui 
qu'on  emploie  en  radiotéléphonie. 

2°  La  machine  à  enregistrer.  Elle  se  corn 
sentiellement  :  d'un  plateau  horizontal  tournant 
autour  de  son  axe  sons  l'action  d'un  contrepoids; 
d'un  bras  portant  à  son  extrémité  un  dispositif  de 
haut-parleur  terminé  par  une  pointe  de  saphir;  enfin, 
fréquemment,  d'un  second  bras  porteur  d'un  léger 

pick-up. 

3°  D'un  dispositif  phonographique  se  rnppio,  h;ml 
autant  que  possible  d'un  appareil  ordinaire. 

4°  D'un  tableau  avec  lampes  et  cadrans,  relié  à  ce 
dispositif. 

Le  fonctionnement  schématique  de  cet  ensemble 
est  le  suivanl  : 

Le  courant  du  microphone  arrive  du  studio  dans 
l'amplificateur  à  lampes;  il  en  ressort,  avec  la  puis- 
sance d'environ  1  watt,  et  est  envoyé  dans  le  haut- 
par  leur  à  pointe  de  saphir;  celle-ci  repose  sur  la  cire 
vierge  entraînée  sur  le  plateau  tournant,  animée 
d'un  mouvement  de  translation  et  sur  laquelle  s'ins- 
crit ainsi  an  limaçon;  les  copeaux  de  cire  disparais- 
sent dans  un  aspirateur  électrique  dont  l'ouverture 
aboutit  près  de  la  pointe  du  saphir. 

Une   pailie   du  courant   est  dérivée,    modulée  et 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


LE  PHONOGRAPHE 


dirigée  sur  le  simili-phonographe  qui  fait  entendre 
l'œuvre  au  fur  et  à  mesure  qu'elle  s'enregistre,  et  à 
peu  près  sous  l'aspect  qu'elle  aura  finalement  sur  le 
disque  commercial. 

On  a  ainsi  un  contrôle  acoustique  de  ce  qui  se 
passe  sur  la  cire,  sans  préjudice  du  contrôle  optique 
fourni  par  les  cadrans  de  l'amplificateur,  et  qui  per- 
mettent non  seulement  de  connaître  l'intensité'  géné- 
rale d'un  enregistrement,  mais  encore  d'apporter  en 
cours  d'exécution  des  modifications  d'amplification 
appropriées,  et  destinées  à  corriger  certains  excès 
sonores  venus  du  studio.  Il  y  a  là  une  technique  de 
filtrage  qui  est  le  propre  des  ingénieurs  spécialisés 
dans  l'enregistrement. 

Il  est  parfois  nécessaire  d'entendre  une  cire  :  on 
se  sert  alors  du  pick-up  extrêmement  léger  dont 
nous  avons  parlé.  La  cire  ainsi  entendue  devient  inu- 
tilisable. 

On  conçoit  qu'il  est  possible,  avec  ce  procédé, 
d'enregistrer  partout  :  il  suffit  de  transporter  les  ma- 
chines sur  place  :  église,  salle  de  théâtre,  de  concert, 
propriété  privée.  On  peut  même  registrer  à  distance, 
sous  réserve  de  relier  le  laboratoire  avec  le  lieu  de 
l'enregistrement. 

Bien  des  variantes  ont  été  déjà  apportées  à  l'enre- 
gistrement électrique,  et  il  Faut  s'attendre  à  des  per- 
fectionnements presque  quotidiens  dont  on  trouve 
l'écho  dans  les  revues  spéciales.  Nous  ne  pouvons  en 
tenir  compte  ici,  non  plus  que  des  concurrents  pré- 
sents et  futurs  du  disque  :  film  sonoi'e,  il l  d'acier 
enregistreur,  etc.  L'intervention  de  la  lumière  dans 
le  domaine  des  sons  est  de  nature  à  transformer 
prochainement  l'industrie  de   la  machine  parlante. 


CONCLUSION 

Aumomentoù  nous  écrivons  ces  lignes  (1929),  l'in- 
dustrie du  phonographe  a  reçu  une  impulsion  nou- 
velle du  fait  de  l'enregistrement  dit  électrique  (1925)  ; 
non  seulement,  le  disque  a  fait  un  bond  prodigieux 
en  avant  par  suite  de  l'inscription  intégrale  de  n'im- 
porte quel  timbre  et  de  n'importe  quel  ensemble;  mais 
cette  amélioration  a  permis,  provoqué,  nécessité  le 
perfectionnement  des  appareils  eux-mêmes.  Ceux-ci 
sont  capables  de  restituer  presque  toute  l'étendue  de 
l'échelle  musicale;  les  timbres  instrumentaux  sont 
toujours  reconnaissantes,  et  l'équilibre  orchestral 
exactement  réalisé 

Le  disque.devient,  de  ce  fait,  un  instrument  d'édu- 
cation de  premier  ordre  au  point  de  vue  musical  : 
son  répertoire  s'est  d'ailleurs  accru  au  cours  de  ces 
dernières  années  d'un  nombre  considérable  d'œuvres 
de  grande  classe,  dont  certaines,  rarement  exécutées 
dans  les  concerts,  deviennent  familières  grâce  au 
phonographe. 

On  peut  souhaiter  quelques  prochaines  améliora- 
tions :  le  disque  courant  de  30  centimètres  vendu  au 
public  de  25  à  48  francs,  ne  dure  guère  que  quatre 
minutes  par  face.  Il  est  sans  doute  possible  d'aug- 
menter cette  durée,  ce  qui  éviterait  certaines  cou- 
pures parfois  malheureuses. 


On  peut  espérer  que  le  rendement  de  l'intensité 
("73  °/0  environ)  s'élèvera,  et  que  s'atténuera  le  coeffi- 
cient qui  affecte  les  timbres;  ceux-ci  se  rapprochent 
déjà  de  la  réalité. 

Déjà  aussi,  on  utilise  certains  dérivés  du  phono- 
graphe :  l'électrophone,  qui  exploite  le  disque  au 
moyen  d'un  microphone  magnétique  et  d'un  dispositif 
d'amplification;  le  film  parlant  ou  sonore,  fondé  sur 
l'application  de  variations  lumineuses  résultant  de 
vibrations  sonores;  le  lil  d'acier  parlant,  plus  simple 
encore  et  seulement  réalisé  au  laboratoire,  etc. 

Chaque  jour,  la  fusion  de  la  musique  et  de  la 
mécanique  devient  plus  étroite;  de  même  qu'on  écrit 
de  la  musique  pour  le  cinématographe,  on  com- 
mence à  en  composer  pour  le  phonographe;  il  n'y  a 
pas  de  doute  qu'on  s'oriente  vers  de  nouvelles  tech- 
niques, et  il  serait  absurde  de  s'y  opposer.  D'ailleurs, 
les  préventions  tombent  peu  à  peu;  le  nombre  con- 
sidérable d'appareils  et  de  disques  absorbés  chaque 
jour  par  la  clientèle  mondiale  prouve  surabondam- 
ment et  de  façon  concrète  son  besoin  croissant  d'au- 
dition musicale, et  révèle,  par  l'exigence  des  acheteurs, 
une  élévation  progressive  du  niveau  artistique. 


Buaolt.  —  //-  '    "'■■•   Le   Phonographe..,   l'avis, 

1S90. 
Do  Mohobl.  —  Le  Microphone...  Le  Phonographe.  Pari   ,1882 
<  :  i ;  v >. _  —  Le  Phonographe  et  le  téléphone.  Marseille,  1S82. 
l,i.-,NEKErx.  —  Edison  et  le  Phonographe.  Paris.  1S82. 
Villon.  —  l.e  Phonographe  et  ses  app/iriilious.  l'avis,   I Si»  î. 
Niaodet.  —  Téléphone  et  phonographe.  Paris,  s.  il. 
Caen.  —  Le  Phonographe  dans  -es  rapports  ,iree  te:,  deuils  d'auteur. 

Paris,  1910. 
Sàïitex.  —  Ein  Schallsschreiber  mit  sehr  kteiner  Seifenmemhrant. 

Leipzig,  1915. 
Marchand.  —  L'Enseignement  des  /moine: 

SlRY.  —  L'Art  ■'      e.ii.h    i     i;  p'i„uogc.  //'';.■.    I  'a  I  i  -,  l'MHI. 

_  Le  l'hn ,  .  ■      /.'■      ».  Paris,  vers  1900. 

r  \y,    i  i.-Mi  in  iim  m  n.  —  llle  ilmlerneu  Sprali  ainsi  hiiicn .  Leipzig,' 

Dr  R.  Lotuar.  —  Die  Sprcchmaschiiic.  Leipzig,  1925(7). 

Kappelmayer.  —  Funkiunsil,  and  Sehnl/p'ntleiimnsil,.  Berlin,  192S. 

Charles  R.  Sibson.  —  Téléphone.,  end  Gramophtmes.  London,  1925. 

Chapcis  et  Gélis.  —  Le  Monde  des  automates,  2  vol.,  192S. 

Encvclopedies  diverses  frain-aises  ti!  étrangères. 

Articles  divers  (Revues  de  vulgarisation  scientifique.  Revues  pho- 
nographiques, radiophoniquis,  etc.  . 

Kempelen.  —  Le  Mécanisme  de  la  parole,  suivi  de  la  description 
d'une  machine  parlante  et  enrichi  de  .'.  planches.  Vienne, 
1791. 

Monti-cla.  —  Histoire  des  Mathématiques.  (Kratzenstein,  Muai'. 

Poggendorf's  Anna/en,  vol.  LVIII  et  autres,  1843  et  suiv.  Fa- 
ber,  K.ienig.  etc.). 

Magasin  Pittoresque  (Faber  Bis),  fév.  1882. 

Période  historique  de  Yoong  à  Babxow.  V.  références  îbNiacdf.t, 

Rivarol.  —  Discours  sut-  l'Unirersiililc  de  la  langue  française  (Mi- 
cal).  T.  II. 

Meuiaircs  secrets,  t,  XXVI,  XI,  XIII  (Mical). 

Porta.  —  Vagin  Saturalis.  —  Naples,  158  1. 

J.-J.  Bêcher.  —  Narrische  Weischeil,  1682. 

Michaod.  —  Biographie  universelle  (Albert  le  Grand,  Kempelen, 
Mical,  etc.). 

Cyrano  le  Bergerac  —  Histoire  comique  de  la  Lune. 

A.  Cœuroy  et  G.  Clarence.  —  Le  Phonographe  (1929). 

Communications  et  enquêtes  personnelles. 

A.  MACIIABEY. 


L'ÉLECTRICITÉ  AU  SERVICE  DE  LA  MUSIQUE 


Par  M.  Maurice  MARTENOT 


g:  Quand  on  entreprend  de  quitter  les  chemins  batlus 
pour  se  lancer  dans  le  vaste  inconnu  des  recherches 
nouvelles,  il  ne  manque  jamais  d'esprits  conserva- 
teurs, ou  par  trop  enclins  à  la  routine,  pour  refré- 
ner notre  enthousiasme  et  s'écrier  :  «  Des  instru- 
ments nouveaux!  à  quoi  bon?  N'avons-nous  pas 
toute  une  pléiade  d'instruments  ayant  déjà  l'ait  leurs 
preuves?  » 

Oui,  certes,  il  ne  s'agit  pas  de  contester  la  valeur 
artistique  et  Futilité  de  nos  instruments  tradition- 
nels, et  il  s'agit  encore  moins  d'envisager  leur 
prompt  remplacement  par  des  instruments  non  veaux. 
Quand  Christophe  Colomb  s'élança  à  la  recherche 
d'un  nouveau  continent,  ce  ne  lut  jamais  avec  l'in- 
tention d'abandonner  l'Ancien  .Monde,  mais  au  con- 
traire en  vue  de  l'enrichir. 

Pourquoi  ne  pas  admettre  qu'une  évolution  de  la 
facture  instrumentale  est  chose  possible;  disons 
même  plus  :  inévitable.  Aussi  conservateur  que  soit 
l'esprit,  l'évolution  scientilique  en  a  toujours  raison. 

Qui  donc  se  refuserait  de  nos  jouis  à  prendre  les 
confortables  trains  rapides  pour  monter  en  dili- 
gence? Qui  donc  accepterait  de  s'éclairer  à  l'huile 
ou  de  moucher  une  chandelle  quand  l'électricité  est 
si  facilement  à  notre  portée?  Et  pourtant,  depuis  cet 
âge,  qui  dans  l'esprit  de  nos  petits-enfants  se  con- 
fondra peut-être  avec  la  préhistoire,  quel  progrès  a- 
t-on  fait  dans  le  domaine  instrumental?  A  peu  près 
rien;  le  piano  et  l'orgue  se  sont  perfectionnés  et 
l'on  a  légèrement  amélioré  la  fabrication  des  instru- 
ments à  vent. 

On  ne  peut  cependant  nier  l'influence  du  matériel 
instrumental  sur  l'évolution  de  la  musique.  De  nou- 
veaux moyens  d'expression  permettent  la  conception 
de  formes  musicales  nouvelles,  et  l'apparition  d'ins- 
truments aux  sonorités  neuves,  aux  possibilités  plus 
étendues,  ne  peut  que  stimuler  la  pensée  des  com- 
positeurs en  leur  ouvrant  des  voies  jusque-là 
insoupçonnées. 

C'est  ainsi  que  la  Science  et  l'Art  poursuivent 
leur  marche,  la  science  donnant  à  l'artiste  des 
moyens  nouveaux  et  plus  complets  pour  l'aider  à 
transmettre  ses  émotions. 

La  belle  période  de  romantisme,  qui  a  valu  les 
pages  de  Mendelssohn,  Chopin,  Schumann,  etc.,  n'a- 
t-elle  pas  coïncidé  avec  l'avènement  du  piano!  On  se 
représente  d'ailleurs  difficilement  comment  le  clave- 
cin eût  été  capable  d'inciter  l'artiste  à  élaborer  de 
telles  œuvres. 

Rien  de  plus  normal  qu'en  notre  siècle,  où  l'élec- 
tricité tient  une  telle  place  dans  le  progrès  scienti- 
fique, ce  soit  elle  qui  ouvre  de  nouveaux  horizons  à 
la  musique.  L'extrême  rapidité  de  son  courant,  la 
facilité  avec  laquelle  on  peut  faire  varier  la  forme, 


la  fréquence  ou  l'amplitude  de  sa  vibration  en  font 
un  élément  souple  et  fidèle  répondant  instantané- 
ment aux  impulsions  qu'on  lui  communique. 

Sans  entrer  dans  des  détails  par  trop  techniques, 
nous  nous  efforcerons  de  faire  saisir  les  divers 
principes  qui  ont  été  appliqués  dans  la  création  de 
nouveaux  instruments  de  musique,  en  commençant 
tout  d'abord  par  ceux  utilisant  les  lampes  radio- 
électriques  comme  source  de  vibrations. 

Pour  tous  ceux  qui  ne  sont  pas  initiés  aux  soi- 
disant  mystères  de  la  radio,  il  semble  vraiment 
étrange  que  l'on  puisse  produire  des  sons  à  l'aide 
de  lampes.  Pour  comprendre  le  rôle  joué  par  la 
lampe  à  trois  électrodes,  il  est  possible  d'emprunter 
quelques  comparaisons  à  l'acoustique.  On  sait  que, 
dans  la  plupart  des  instruments  à  vent  (l'orgue  en 
particulier),  la  vibration  est  produite  par  une  anche, 
sorte  de  petite  languette  de  bois  ou  de  métal  qui  se 
met  à  vibrer  sous  l'impulsion  d'un  courant  d'air. 

Dans  l'orgue,  chaque  anche  donne  une  vibration 
déterminée,  il  en  faut  donc  une  par  note.  Dans  la 
clarinette,  par  exemple,  la  même  anche  serl  poui 
toutes  les  notes. 

Or,  dans  l'instrument  radio-électrique,  le  rôle  de 
la  lampe  a  trois  électrodes  associée  à  des  montages 
électriques,  dits  «  circuits  oscillants  »,  est  absolu- 
ment le  même  que  celui  de  ranch'1  dans  l'instru- 
menta vent.  Au  lieu  d'être  mise  en  jeu  par  le  souf- 
lle  de  l'exécutant  ou  par  la  soufflerie  de  l'orgue, 
celte  anche  d'un  nouveau  genre  est  mise  en  action 
par  un  courant  électrique  provenant  d'une  source 
quelconque  :  piles,  accumulateurs  ou  courant  du 
secteur.  Parmi  les  innombrables  particularités  de 
cette  nouvelle  source  de  vibrations,  nous  citerons 
tout  d'abord  celle  qui  la  différencie  le  plus  de  uns 
instruments  traditionnels. 

La  vibration  créée  par  la  lampe  est  absolument 
inaudible  :  non  pas  qu'elle  soit  trop  faible  pour  être 
perçue  par  nos  oreilles,  niais  simplement  parce 
qu'elle  se  produit  dans  un  domaine  inaccessible  à 
nos  sens,  ou  du  moins  à  l'ouïe  et  à  la  vue.  (On  pour- 
rait, à  la  rigueur,  la  percevoir  par  le  toucher.)  Il  en 
est  ainsi  comme  de  la  vibration  électrique  qui,  le 
long  des  fils  téléphoniques,  porte  noire  voix  à  dis- 
tance. Charmante  illusion  des  enfants  écoutant  à  la 
campagne  la  chanson  du  vent  près  des  poteaux  télé- 
graphiques, et  croyant  percevoir  des  bribes  de  con- 
versation. Non,  les  fils  sont  muets,  et  la  vibration 
électrique  reste  par  elle-même  imperceptible. 

Quelle  chose  étrange,  un  instrument  qui  produit 
une  musique  que  l'on  n'entend  pas!  Une  lampe  qui 
chante...  silencieusement... 

Cette  vibration  électrique,  on  peut  la  transformer 
en  vibration  acoustique,  ce  qui  revient  à  transposer 


TECHX1QUE,  ESTHÉTIQUE   ET  PÉDAGOGIE 


L  ÉLECTRICITÉ  A  LA  MUSIQUE    3897 


une  force  électrique  en  force  mécanique.  En  ell'et, 
laissons  ce  courant  vibré  traverser  un  électro- 
aimant,  il  modifiera  périodiquement  l'intensité  du 
champ  magnétique,  et  si  nous  plaçons  devant  les 
pôles  de  cet  aimant,  par  exemple,  une  plaque  métal- 
lique, celle-ci  sera  animée  d'un  mouvement  vibra- 
toire dont  la  vitesse  correspondra  exactement  à  celle 
de  l'oscillation  électrique.  Les  vibrations  de  la  pla- 
que ébranleront  naturellement  les  molécules  de  l'air 
et  enfin  notre  tympan.  Cette  transposition  électro- 
acoustique  n'est  d'ailleurs  pas  nouvelle,  puisque  le 
téléphone  l'a  toujours  utilisée. 

Nous  résumerons  donc  les  éléments  essentiels 
d'un  instrument  radio-électrique  comme  suit  :  la 
lampe  et  son  circuit  oscillant,  sorte  d'anche  silen- 
cieuse, les  piles  ou  accumulateurs  fournissant  l'éner- 
gie nécessaire  à  la  vibration  et  remplaçant  le  souflle. 
Enfin,  l'écouteur  téléphonique  ou  ses  dérivés  :  haut 
parleur  et  diffuseur  qui  transforment  la  vibration 
électrique  silencieuse  en  vibration  sonore.  Un  tel 
ensemble  est  doue  capable  de  fournir  par  lui-même 
«  du  son  »,  si  j'ose  m'exprimer  ainsi;  j'enlends  qu'il 
produit  en  quelque  sorte  une  matière  première  qui 
n'attend  qu'à  être  modelée  par  le  jeu  de  l'exécutant 
pour  devenir  musique. 

Nous  rencontrons  alors  la  partie  la  plus  impor- 
tante de  cette  nouvelle  facture  instrumentale,  car 
c'est  ici  que  nous  devons  adjoindre  au  problème 
scientifique  toutes  les  questions  d'ordre  artistique. 
En  elfet,  suivant  les  moyens  employés,  ou  bien 
l'exécutant  aura  sous  la  main  un  instrument  ruili- 
mentaire,  dont  le  maniement  sera  incompatible  avec 
les  nécessités  physiologiques  et  musicales,  ou  bien  il 
disposera  d'un  instrument  sensible,  capable  d'être 
joué  avec  le  minimum  d'effort  et  susceptible  de;répon- 
dre  avec  fidélité  aux  impulsions  les  plus  subtiles. 

On  sait  que  les  éléments  expressifs  de  la  musique 
se  résument  en  trois  po'nts  essentiels  :  variations 
de  hauteur,  d'intensité  et  de  timbre  du  son.  Sans 
entrer  dans  des  détails  techniques,  nous  examinerons 
donc  les  différentes  solutions  apportées  jusqu'à  ce 
jour  pour  résoudre  chacun  de  ces  points. 

La  hauteur  du  son  dépend  de  la  rapidité  avec 
laquelle  les  vibrations  se  succèdent  dans  le  circuit 
oscillant.  Pour  reprendre  notre  première  comparai- 
son ,  si  la  lamelle  vibrante  de  l'anche  est  petite  et 
légère,  les  vibrations  seront  rapides,  et  l'on  obtien- 
dra des  sons  aigus;  si  au  contraire  elle  est  longue 
et  relativement  lourde,  l'inertie  s'opposera  à  une 
vibration  rapide,  les  sons  seront  plus  graves.  Trans- 
posé dans  le  domaine  électrique,  le  phénomène  est 
identique.  En  modifiant  la  valeur  des  éléments  qui 
composent  le  circuit  oscillant,  à  savoir  :  self,  capa- 
cité, ou  résistance,  on  modifie  la  fréquence  des 
oscillations  et  par  conséquent  la  hauteur  des  sons. 
Naturellement,  on  a  tout  de  suite  pensé  à  se  servir 
de  touches  analogues  à  celles  du  piano,  lesquelles, 
en  établissant  des  contacts  électriques,  permettaient 
de  mettre  en  jeu  ou  de  retrancher  certains  éléments 
des  circuits  oscillants.  Deux  dispositifs  ont  alors  été 
imaginés:  l'un  ne  disposantque  d'une  source  unique 
de  vibrations  et  ne  donnant  ainsi  qu'un  son  à  la  fois 
(davier  monodique),  l'autre  permettant  de  jouer 
les  accords  en  utilisant  autant  de  sources  de  vibra- 
tions que  de  notes  (clavier  harmonique). 

Seulement,  on  se  heurta  à  certaines  difficultés 
de  réalisation,  et  jusqu'ici,  les  instruments  basés  sur 
ces  principes  n'ont  pas  apporté  de  ressources  artis- 
tiques assez  probantes  pour  que  l'on  s'y  intéresse. 


Au  lieu  de  s'attacher  à  créer  des  instruments  à 
louches  et  par  conséquent  à  sons  fixes,  d'autres 
chercheurs  se  sont  appliqués  à  trouver  des  instru- 
ments assez  sensibles  pour  pouvoir,  comme  la  voix 
et  les  instruments  à  cordes,  glisser  d'un  son  à  l'au- 
tre ou  rendre  celui-ci  plus  expressif  par  le  vibrato. 
C'est  ainsi  que  divers  instruments  ont  fait  leur 
apparition,  tout  d'abord  l'instrument  à  antenne  qui, 
bien  que  ne  produisant  qu'un  son  à  la  fois,  dispose 
de  deux  sources  de  vibrations,  «  Méthode  d'inter- 
férences »,  dont  la  particularité  est  de  permettre  de 
grandes  variations  de  hauteur  des  sons  en  modi- 
fiant seulement  de  façon  infime  les  constantes  d'un 
circuit  oscillant.  En  ce  cas,  l'instrument  est  à  tel 
point  sensible  qu'il  devient  possible  de  le  jouer  sans 
contact  direct,  mais  simplement  en  approchant  ou 
en  éloignant  la  main  d'une  antenne,  ou  plus  exacte- 
ment d'une  tige  métallique,  d'environ  cinquante 
centimètres  de  haut,  reliée  en  un  point  convenable 
(grille  ou  plaque)  du  circuit  oscillant.  Pour  tous 
ceux  qui  sont  familiarisés  avec  les  appareils  de  radio 
et  en  particulier  avec  les  ondes  courtes,  ce  procédé 
n'a  rien  de  mystérieux. 

Celte  réalisation,  qui  offre  pour  l'exécutant  l'avan- 
tage d'une  extrême  liberté  de  geste,  demande  par 
contre  une  sensibilité  musculaire  et  auditive  telle 
qu'il  esl  extrêmement  difficile,  sinon  impossible, 
de  jouer  juste.  La  main  doit,  en  elfet,  se  déplacer 
rapidement  d'une  note  à  l'autre  et  sans  au 
de  repère,  situer  dans  l'espace  sa  position  à  un  mil- 
limètre près! 

D'autres  inventeurs  ont  trouvé  des  solutions  plus 
simples  en  fixant  à  un  condensateur  de  type  courant 
nue  manette  de  commande  qui,  en  décrivant  un  aie 
de  cercle,  se  déplace  sur  des  points  de  repère  indi- 
quant la  position  de  chaque  note. 

Mes  recherches  m'ont  amené  à  étudier  un  instru- 
ment répondant  aux  exigences  artistiques  de  l'exécu- 
tion, sans  rien  sacrifier  des  qualités  sonores  appor- 
tées par  l'électricité.  Pour  arriver  à  ce  résultat,  il 
fallut  tout  d'abord  obtenir  un  instrument  dont  la 
variation  île  hauteur  des  sons  suivit  une  loi  rigou- 
reusement constante,  de  façon  que,  pour  un  111-111' 
déplacement  de  la  main,  on  obtint  un  même  inter- 
valle musical,  et  ceci  sur  toute  l'étendue  de  l'échelle 
sonore.  Le  problème  a  été  résolu  en  se  servant 
d'une  source  de  vibration  constituée  par  deux  sys- 
tèmes oscillants  de  hautes  fréquences  (environ 
400.000  périodes  à  la  seconde',  dont  on  faitjinterférer 
les  oscillations.  Comme,  en  ce  cas,  il  suffit  d'une 
très  faible  variation  de  capacité  pour  faire  varier  la 
fréquence  dans  de  larges  proportions,  il  a  été  pos- 
sible d'employer  un  condensateur  de  forme  tout  à 
fait  particulière  dont  l'extrême  légèreté  permet  la 
reproduction  parfaite  des  gestes  les  plus  rapides. 
L'armature  mobile  de  ce  nouveau  condensateur  est 
constituée  par  un  tîl  mi-isolant,  mi-conducteur,  se 
déplaçant  devant  une  série  de  vis  formant  l'autre 
armature. 

L'exécutant  a  la  faculté  de  jouer  cet  instrument 
de  deux  façons  différentes.  —  Se  tenant  debout  à 
une  certaine  distance  de  l'instrument,  qui  affecte  la 
forme  d'un  petit  clavicorde,  il  maintient  dans  la 
main  droite  le  fil  formant  condensateur;  avec  une 
grande  aisance,  les  moindres  gestes  de  la  main  se 
transmettent  au  fil  et  se  traduisent  instantanément 
en  variations  de  hauteur  du  son.  C'est  ainsi  que  l'on 
a  l'impression  de  modeler  dans  l'espace  les  plus  fins 
contours  d'une   ligne  mélodique   en  imprimant  au 


ENCYCLOPÉDIE  DE  LA  MUS10VE  ET  DICTIONNAIRE  DU  CONSERVATOIRE 


son  le  vibrato  et  les  indexions  les  plus  personnelles. 
D'autre  part,  pour  faciliter  l'exécution,  ce  fil  est 
relié  à  un  index  se  déplaçant  au-dessus  d'un  clavier 
fictif  de  7  octaves  et  indiquant  avec  précision  la 
position  de  la  main.  —  L'autre  forme  de  jeu,  peut- 
être  moins  esthétique,  mais  en  tous  cas  plus  ration- 
nelle, consiste  à  jouer  directement  au  clavier.  Après 
s'être  assis  devant  l'instrument  et  après  avoir  placé 
l'index  de  la  main  droite  dans  une  bague  reliée  au 
fil,  il  suffit  de  poser  ce  doigl  sur  une  note  quelcon- 
que pour  obtenir  le  son  désiré.  Comme  dans  l'autre 
cas,  le  vibrato  reste  essentiellement  personnel  ainsi 
que  les  «  glissandos  »,  qui  peuvent  être  exécutés  avec 
les  variétés  expressives  les  plus  diverses. 

Etant  donné  la  continuité  absolue  de  la  courbe 
sonore  sur  l'échelle  totale,  les  plus  fines  fluctuations 
au  quart,  huitième  ou  seizième  de  ton  sont  parfai- 
tement réalisables. 

La  faculté  de  nuancer  le  son  est  obtenue  à  l'aide 
d'un  petit  levier  mis  en  jeu  par  l'index  de  la  main 
gauche;  il  actionne  une  résistance  spéciale,  qui, 
intercalée  dans  le  circuit  du  haut  parleur,  permet 
d'obtenir  une  graduation  des  sons  en  rapport  direct 
avec  la  pression  exercée  par  le  doigt.  Le  geste  et 
l'effort  étant  réduits  au  strict  minimum,  on  peut, 
avec  une  extrême  facilité,  passer  du  son  le  plus 
délicat  au  «  forte  »  le  plus  puissant.  Mais  là  ne 
s'arrêtent  pas  les  possibilités  mises  instantanément 
à  la  portée  de  l'exécutant  :  ce  même  levier  permet 
toutes  les  variétés  dans  le  caractère  d'émission  des 
sons  (différents  genres  de  détachés,  de  staccato, 
de  legato  avec  ou  sans  ports  de  voix,  de  percussions 
et  même  de  sons  rappelant  les  cordes  frappées). 

Enfin,  l'interprète  peut  à  son  gré  modifier  le  tim- 
bre du  son  à  l'aide  de  boulons  agissant  comme  des 
registres  d'orgue,  ces  commutateurs  mettant  en 
jeu  des  circuits  qui  absorbent  plus  ou  moins  les 
harmoniques  du  son  fondamental1. 

!l  existe  aussi  une  autre  catégorie  d'instraments 
électriques,  dont  la  source  de  vibration  n'est  pas 
constituée  par  des  lampes  à  trois  électrodes  el  leurs 
circuits  oscillants,  niais  par  des  moyens  mécaniques. 
On  peut,  en  ellet,  produire  une  vibration  électrique 
à  l'aide  d'alternateurs.  De  multiples  formes  de  rén- 
lisation  ont  été  envisagées.  <  m  construisit  même  à 
New-York,  vers  1900,  un  orgue  électrique  basé  sur 
ee  principe  ;  mais,  comme  à  cette  époque  les  procédés 
d'amplification  par  lampes  étaient  inconnus,  les 
alternateurs  employés  furent  des  plus  encombrants, 
et  l'énorme  machinerie  mise  en  jeu  n'était  évidem- 
ment pas  en  rapport  avec  le  résultat  artistique. 
Cette  courageuse  entreprise  n'eut,  pas  de  lendemain, 
et  c'est  seulement  une  vingtaine  d'années  plus  tard 
que  de  nouveaux  essais  devaient  être  tentés. 

La  forme  la  plus  simple  des  alternateurs  employés 
par  quelques  inventeurs,  consiste  en  une  roue  den- 
tée tournant  devant  un  électro-aimant.  Chaque  fois 
qu'une  dent  se  présente  dans  le  champ  de  l'électro- 
aimant,  elle  produit  une  variation  du  courant  induit; 
on  conçoit  aisément  que  la  fréquence  du  courant 
électrique,  et  par  cela  même  la  hauteur  du  son,  soit 
relative  au  nombre  de  dents  et  à  la  vitesse  impri- 
mée à  la  roue. 

De  toute  façon,  l'orgue  électrique  basé  sur  les 
alternateurs  constitue  on  ensemble  mécanique  assez 
encombrant,   puisqu'il  est  nécessaire  d'avoir  à  peu 


près  autant  d'alternateurs  que  de  notes.  Actuelle- 
ment, cette  solution  ne  semble  pas  devoir  apporter 
des  ressources  artistiques  suffisantes  pour  lui  per- 
mettre de  rivaliser  avec  l'orgue  classique. 

D'autres  moyens  ont  été  encore  appliqués  à  la 
production  du  son  par  l'électricité.  Leur  originalité 
vaut  la  oeine  que  nous  en  décrivions  le  principe.  Non 
contents  de  chercher  à  produire  les  sons  par  des 
moyens  électro-mécaniques,  certains  chercheurs  y 
ont  adjoint  un  autre  élément  :  la  lumière. 

On  sait  que  le  sélénium  ou,  mieux  encore,  les 
cellules  photo-électriques  sont  sensibles  aux  rayons 
lumineux  et  que  cette  sensibilité  se  manifeste  par 
une  plus  ou  moins  grande  conductibilité  au  passage 
du  courant  électrique. 

Par  exemple,  une  cellule  photo-électrique,  inter- 
calée dans  un  circuit  approprié,  s'opposera  au  pas- 
sage du  courant  si  elle  est  dans  l'obscurité,  au  con- 
traire, elle  le  favorisera  si  un  rayon  de  lumière  vient 
à  l'éclairer.  Imaginons  maintenant  qu'un  disque 
perce  de  trous  soit  intercalé  entre  une  source  lumi- 
neuse quelconque  et  la  cellule  photo-électrique;  en 
faisant  tourner  ce  disque,  la  cellule  passera  alterna- 
tivement par  des  périodes  d'éclairement  et  d'ombre, 
et  ceci  avec  une  fréquence  qui  dépendra  de  la  vitesse 
de  rotation  du  disque  et  du  nombre  de  trous.  Encore 
une  fois,  nous  aurons  fait  naître  des  vibrations  élec- 
triques qu'il  suffira  d'amplifier,  puis  de  rendre 
acoustiques  à  l'aide  d'un  diffuseur.  L'application  de 
ce  principe  est  évidemment  beaucoup  plus  compli- 
quée qu'on  ne  se  l'imagine,  d'autant  plus  qu'elle  se 
prête  à  des  combinaisons  mécaniques  optiques  et 
électriques  extrêmement  variées.  Jusqu'à  preuve  du 
contraire,  il  semble  que  la  complexité  de  cette  for- 
mule soit  une  sérieuse  entrave  à  sa  réalisation  vrai- 
ment artistique,  mais,  dans  cette  voie  comme  dans 
les  précédentes,  on  ne  peut  augurer  de  l'avenir,  et 
c'est  i :isément  ce  qui  passionne  les  chercheurs. 

Pour  terminer  cet  aperçu  sur  les  nouveaux  ins- 
truments, il  convient  de  citer  un  autre|procédé  dans 
lequel  l'électricité  ne  joue  qu'un  rôle  secondaire. 
Contrairement  à  ce  qui  a  été  décrit  jusqu'ici,  la 
vibration  est  produite  par  des  moyens  usuels. 

Une  corde  tendue  est  mise  en  vibration  par  un 
archet  sans  fin,  par  exemple  par  un  disque  tournant 
enduit  de  colophane.  Au  lieu  d'être,  comme  sur  le 
violon  ou  sur  le  violoncelle,  transmise  à  une  caisse  de 
résonance,  la  vibration  est  transformée  en  vibration 
électrique  à  l'aide  d'un  pick-up  analogue  a  ceux 
utilisés  dans  le  phonographe  électrique,  puis,  après 
amplification,  elle  redevient  acoustique  par  l'inter- 
médiaire du  diffuseur;  les  différentes  hauteurs  de 
sons  s'obtiennent  en  raccourcissant  la  corde  à  l'aide 
de  doigts  artificiels  commandés  par  des  touches. 

Il  existe  évidemment  beaucoup  d'autres  tentatives; 
mais  étant  donné  leur  rapport  plus  ou  moins  direct 
avec  les  instruments  précédemment  décrits,  nous 
avons  pensé  que  cet  aperçu  suffirait  pour  donner  au 
lecteur  une  idée  exacte  de  la  constitution  de  cette 
nouvelle  famille  d'instruments. 

Au  point  de  vue  artistique,  les  éléments  expressifs 
nouveaux  apportés  par  ces  instruments  sont  déjà 
du  plus  haut  intérêt  el  semblent  augurer  d'un  avenir 
plus  riche  encore.  Dans  cet  exposé  déjà  Irop  étendu, 
nous  ne  pouvons  décrire  en  détail  toutes  les  parti- 
cularités el  avantages  artistiques  obtenus  jusqu'à 
ce  jour;  nous  nous  contenterons  donc  de  mettre  en 
valeur  quelques  considérations  essentielles  concer- 
nant l'avenir  de  ces  instruments. 


TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


L'ÉLECTRICITÉ  A  LA  MUSIQUE    3899 


Pour  mener  à  bien  l'évolution  des  instruments  de 
musique  électriques,  il  importe  que  tous  ceux  qui 
travaillent  dans  cette  voie  ne  s'en  tiennent  pas  aux 
•seules  connaissances  scientifiques  touchant  leur 
partie,  mais  qu'au  contraire,  ils  se  pénètrent  profon- 
dément de  toutes  les  connaissances  que  notre  siècle 
a  mises  en  lumière  en  ce  qui  concerne  la  physiologie, 
la  psychologie,  le  rôle  du  geste  dans  l'expression 
musicale. 

Il  faut  s'appliquer  à  réduire  les  moyens  mis  en 
œuvre,  car  tout  ce  qui  s'interpose  entre  la  pensée 
de  l'exécutant  et  le  résultai  sonore  masque  et  entrave 
la  personualité  de  l'interprète.  Nous  estimons  que 
tout  instrument  nécessitant  pour  être  joué  un  grand 
effort  de  la  part  de  l'exécutant,  nuit  à  la  libre  expres- 
sion de  sa  pensée,  et  qu'au  contraire  la  réduction  de 
l'effort  physique  et  la  simplicité  des  moyens  techni- 
ques permettent  une  interprétation  infiniment  supé- 
rieure. En  outre,  puisqu'il  est  possible  de  créer  la 
vibration  électrique  indépendamment  de  tout  effort 
de  la  part  de  l'exécutant;  on  arrive  à  une  simplifica- 
tion considérable  de  la  technique  instrumentale. 
C'est .  d'ailleurs,  ce  qui  a  guidé  mes  recherches,  et 
l'instrument  que  j'ai  pu  réaliser  en  esl  une  image 
concrète.  Il  olfre,  en  effet ,  la  particularité  de  se  jouer 
avec  une  extrême  facilité,  le  résultat  artistique  de 
trois  mois  d'étude  étant  en  général  supéi  iei 
que  l'on  aurait  péniblement  acquis  eu  trois  ou 
quatre  ans  avec  le  violon,  le  violoncelle,  la  flûte,  etc. 

On  objectera  peut-être  que  cela  importe  peu,  puis- 
que la  science  nous  a  déjà  dotés  d'appareils  repro- 
duisant   la   musique    avec   des   qualités   artistiques 
indéniables.  Certes,  mais  quelle  différenc 
satisfaction  que  l'on  a  d'écouter  la  musique  et   celle 


que  l'on  éprouve  à  pouvoir  en  faire  soi-même!  Sup- 
posez qu'il  soit  possible,  en  un  vaste  référendum,  de 
poser  la  question  suivante  à  la  plupart  des  person- 
nes musiciennes  de  nature,  mais  n'ayant,  pas  le 
temps  de  cultiver  la  technique  d'un  instrument  : 

«  Auriez  vous  plus  de  satisfaction  à  écouler  une 
œuvre  importante  interprétée  de  façon  impeccable 
qu'à  jouer  vous-même  et  sans  doute  moins  bien  une 
œuvre  de  moindre  importance  ! 

A  mon  sens,  et  puisqu'il  m'a  été  permis  de  poser 
cette  question  un  certain  nombre  de  fois,  les  répon- 
ses sont  catégoriques.  Même  si  l'on  se  rend  compte 
de  ses  imperfections,  on  aime  mieux  jouer  soi-même 
une  courte  mélodie  que  d'entendre  passivement  une 
belle  symphonie. 

Pratiquement,  cette  question  ne  se  pose  pas,  puis- 
que heureusement  l'un  n'exclul  pas  l'autre.  En  tous 
cas,  nous  devons  reconnaître  que,  si  ces  nouveaux- 
instruments  apportent  à  l'art  des  possibilités  nouvel- 
les incontestables,  qui  à  elles  seules  justifient  la 
place  qu'ils  tendent  à  prendre  à  côté  des  instruments 
traditionnels,  ils  apporlenl  aussi  des  qualités  d'or- 
dre pratique  inflnimenl  pré»  ieuses  à  notre  époque. 
lu  diminuant  lesheures  de  travail  technique,  digital 
et  musculaire,  on  permi  l  à  l'artiste  de  cultiver  et.  de 
perfectionner  ses  connaissances  -■'■m'i  aies,  et  c'est 
autant  de  gagné  au  profit  d'un  travail  purement 
artistique. 

En  ces  jouis  où  l'homme  tendàfournir  une  somme 
de  travail  de  [dus  en  plus  considérable,  il  est  conso- 
lant de  reconnaître  qne  la  Science  peut,  même  dans 
i  intribution  àl'éco- 
iffort. 

Maurice  MARTENOT. 


LA  NOTATION  MUSICALE  AUTONOME 
DE  JEAN  HAUTSTONT 


On  a  vu  dans  l'article  :  Originel  de  la  Notation 
musicale  moderne  (2e  Partie  de  V Encyclopédie,  l.  I, 
p.  404)  que  divers  systèmes  de  notation  avaient  été 
imaginés  à  l'effet  de  restreindre  le  nombre  des  signes 
employés  et  de  faciliter  ainsi  l'écriture  et  la  lecture 
de  la  musique. 

C'est  à  ce  but  que  tend  la  Xotation  musicale  auto- 
nome de  Jean  Hautstont,  qui  fut  publiée  à  Paris  en 
1907'.  Voici  en  quels  termes  l'auteur  expose  l'utilité 
de  son  système  : 

«  Une  recherche  constante  de  l'esprit  vers  une 
conception  précise  du  graphique  des  sons  se  remar- 
que dès  les  origines  les  plus  lointaines. 

o  Celte  tendance,  guidée  inconsciemment  par  le 
principe  de  l'économie  des  forces,  n'a  jamais  pro- 
duit cependant  une  forme  graphique  durable,  et  les 
différents  essais  qui  ont  surjii,  uniquement  dans  le 
but  de  la  simplification,  ont  vécu  comme  vivent  les 
tonnes  biologiques  non  adaptables  au  milieu. 

«  L'histoire  de  la  notation  prouve  que  les  diffé- 
rentes écritures  musicales,  qui  ont  eu  une  durée 
historique,  ont  été  déterminées  par  le  développe- 
ment de  l'art  lui-même  :  c'est  la  nécessité  qui  a  fait 
naître  l'organe. 

«  Cependant  l'art  et  la  notation  n'ont  pas  toujours 
évolué  parallèlement. 

«  Parfois  l'évolution  de  la  musique  devança  de 
plusieurs  siècles  le  graphique  propre  à  la  repré  ien- 
ter,d'où  l'origine  de^  périodes  de  critique,  de  rec  h  d'- 
elles et  enfin  de  transformations2. 


«  Nous  sommes  à  une  semblable  période  résultant 
du  même  phénomène  :  l'idée  musicale,  allant  au  delà 
des  limites  du  système  des  tonalités,  ne  trouve  plus  sa 
/'orme  graphigue  adéquate.  La  musique  contempo- 
raine est  par  conséquent,  dans  sa  plus  haute  expres- 
sion, de  moins  en  moins  susceptible  d'être  écrite 
conformément  à  l'orthographe  de  la  notation  diato- 
nique. 

«  Cette  évolution  actuelle  du  sens  esthétique  des 
sons  répond  au  mouvement  de  la  pensée  et  de  la 
science,  par  la  négation  de  l'esprit  systématique. 

«  C'est  le  développement  cérébral  pressentant  la 
synthèse.  » 

Il  conclut  en  disant  que  la  Notation  autonome  se 
conforme  à  l'évolution  du  graphique  des  sons, 
comme  à  elle  de  l'art.  Basée  uniquement  sur  la 
classification  des  sons  d'après  le  nombre  de  leurs 
vibrations,  elle  repose  sur  les  principes  suivants  : 

1°  La  lecture  musicale  doit  être  une  opération 
visuelle  et  non  une  opération  mentale; 

2°  La  lecture  musicale  doit  être  assez  simple  pour 
être  rapidement  comprise  par  toutes  les  intelligences 
et  n'exiger,  pour  être  apprise,  qu'un  minimum  d'ef- 
forts; 

3°  La  notation  doit  être  en  rapport  avec  le  déve- 
loppement de  l'art  musical. 

Complètement  indépendante  «lu  système  tonal, 
cette  notation  admet  le  mécanisme  indiqué  dans  le 
tableau  ci-après  : 


réalité     , 

(     do 

ré 

i        fa 

sol                  1 

3                      S 

i       do 

'!,'!•'  ur-      ' 

'bJJ^Jfl 

'  1   ' 

'.  !  '. 

i 

H 

'            )' 

NOTATION     AQT0N0.Ï1E 

12  positions   rie    notes   représi 
•'■'•-•  désignés  par  12  noms. 
•    '  positions  ,lc  notes  reslonl 

t  P'M-mrtlei. 


riables 
s»ns  mus 

l>ii>iiisons 


On  voit  que  l'octave,  divisée  chromatiquement  et 
selon  le  tempérament  égal,  comprend  12  sons  diffé- 


1.  Notation  musii 
municipale  Estiennc 

<p].'li]ue*  lignes  et  .1 


— » • ™ iiiutivomontpar  J. 

Bien,  «rsm0(< 

uier  bien  (em/i.'iv 

rents  dont  chacun  reçoil  un  signe  spécial  qui  reste 

invariable  quelle  que  soit  l'octave.  Oc  plus,  les  clefs 

J.  I.'eicès  du  nonilirr  .1    signes  et  celui  «1rs  tiilïicultrs  i|im  semblent 


TECHNIQUE,  ESTHETIQUE  ET  PÉDAGOGIE 


NOTATION  MUSICALE  AUTONOME    3901 


sont  supprimées  ainsi  que  tous  les  signes  d'altéra- 
ration,  dièses  et  bémols.  L'ensemble  des  sons  se  ré- 
partit en  une  série  de  8  octaves,  chaque  série  étant 


désignée  su 
manière  sui 


Position  des  Indices 


la  portée  par  un  chiffre  indice,  de  la 


k  y  k 


CliiiTres  qui  indiquent  la  haute 
chaque  octave 


Le  chiffre    romain    V  marque   l'octave  des  sons  I  opposition  à  celui  de  la  portée  tonale,  il  se  conforme 
moyens.  Quant  au  dispositif  adopté  parla  portée  par  |  au  tableau  que  nous  donnons  ici  : 


Notation  diatonique. 

La  portée  tonale,  complète  en  onze  lignes,  esl 

basée  sur  les  trois  sons  fondamentaux  du  sys- 
tème diatonique;  elle  indique  seulement  le  rnp 
norl  des  unités  entre  elles. 


I  •>  1 


Cidle  disposition  des  ligues,  conforme  à  l'échelle 
des  son-  en  usage  depuis  la  dernière  partie  du 
moyen  âge  Jusqu'à  J.-S.  Bach  (avec  en  plus 
deux  lignes  additionnelles  en  bas  et  deux  en 
haut),  ne  permet  plus  d'écrire  régulièrement 
toute  l'échelle  eonlempoiano'. 


Notation  autonome. 

La  portée  atonale,  complète  eu  six  Hunes,  est  ba- 
sée sur  les  douze  sons  fondamentaux  de  l'ordre 
chromatique  ;  elle  indique  le  rapport  des  unités 
entre  elles  au  moyen  des  Irois  lignes,  et  le  rap- 
port des  séries  de  douze  sons  entre  elles  au 
moyen  de  douze  sons. 


Celle  disposition  des 
blement  toute  l'étei 
contemporaine. 


Aux  lignes  additionnelles  non  méthodiques  de  la  I  la  place  des  notes  et  enlèvent  toute  incertitude  à  la 
notation  ordinaire,  la  notation  autonome  substitue  lecture, cequi  n'est  pas  lecas  avec  la  disposition  uni- 
des  lignes  additionnelles  méthodiques  qui  précisent  |  forme  des  lignes  additionnelles  dans  la  portée  tonale  : 


LIGNES   ADDITIONNELLES 


LIGNES    ADDITIONNELLES 

MÉTHODIQUES 


Les  figures  des  notes  et  des  silences  sont  ainsi  représentées  : 

Figures  de  notes  et  de  pauses  (silences) 

Noms    Quadruple      Double       _  Unité 

7 


Noies 

Pauses      o 

Valeurs     4  2  1  i 

Suivies  dunpoint  les  notes  et  lespauses     „ 


Demi  Quart 

1  \ 

y        7 


Huitiëm 

•v 

1 


représentent  J 


en  plus  de  leur  valeur 


:lniOU^.=  7yr 


alors  que  les  indications  de  mesure  et  les  signes  relatifs  à  l'intensité  du  son  se  conforment  aux  dispo- 
sitions qui  suivent  : 

Indications  de  mesure 
2-  3-  4. 2-  3- 


t^ 


2  temps.   5  temps 


£  temps.       3  temps. 


Signes  indiquant  l'intensité  du  son 


J  intensité  neutre 


f>  faille      P  très  faible     $  excessivement  faiblr 
S  fort         j£  tré%  fort       xf  excessivementfort 


ENCFCLOPÉ&IE  DE  LA  MfSHjUE  ET  DICTIONNAIRE  l>V  CONSEHVATOIRE 


Nous  donnons  enlin  un  exemple  de  transcription  i    moderne,  que  nous  empruntons  à  la  Notice  Msto 
en  notation  autonome  d'un  fragment  de  musique  I  rique  publiée  à  Bruxelles1. 


I.  La  Notation  musieah  autonome,  Notù 

de  texte  et  deux  lnlil.-.ui 


■,!■■  Iluv-I cl,,  l;ru\elle<.  .'c  l"1"'ll:'    "°"s  i-nipruiitun 


DEUXIÈME  PARTIE 
TECHNIQUE,  ESTHÉTIQUE,  PÉDAGOGIE 


TABLE   DES  MATIERES 


VOLUME  I 

TENDANCES  DE  LA  MUSIQUE 

Les  tendances  de  la  Musique  en  Allemagne  et 
en  Autriche   depuis  la  mort  de  Wagner, 

par  \V.  Ritteb I 

Introduction 1 

A.  Bruckner 5 

.1.  Brahms 10 

R.  Strauss 14 

G.  Mailler 18 

II.  Wolf 20 

M.  Reger 21 

II.  Pfitzner ". 24 

M.  Schillings 26 

U.Zilcher 26 

B.  Szekles 26 

W.  Braunfels 26 

E.  Bœhe 26 

R.  Louis 26 

(1.  von  RheinliiTi:er 20 

J.-J.  Ralî 26 

S.  von  Hausseger 26 

M.  Ileuberger 27 

W.Kienzl 27 

B.  Humperdink 27 

Ig.  Brull 27 

B.  Wallbrunn *7 

E.  d'Albert 27 

S.  Wagner 27 

Le  P.  Hartmann 27 

A.  Schœnberg 27 

A.  Berg 29 

A.  von  Webern 29 

B.  Bartok 29 

P.  von  Klenau 29 

F.  von  Weingartner 30 

Fr.  Schreker 30 

P.  Graener 31 

J.  Bittner 32 

J.  Marx 32 

Fr.  Schmidt 32 

II.  Noetzel 32 

R.  Siegel 32 

II.  Gai 32 

Al.  von  Zrmlinsky 32 

E.  W.  Komgold. 32 

Les  tendances  de  la  Musique   en    Tchécoslo- 
vaquie depuis  la  mort  de   Smetana,  par 

W.  RlTTER 33 

Introduction 33 

Dvorak 34 

Z.Fibich 35 

J.-B.  Foerster 25 

V.  Novak 35 

V.  Stepan 39 

J.  Suk 39 


Piges 

V.  Blodek 42 

.1.  B.  Rozkosnv 42 

K.  Kovarovic 42 

O.  Ostrcil. 42 

E.  M.  Rutte 42 

L  Janacek — 43 

Prochazka 46 

Marsik 46 

O.  Zich 46 

.1.  Krieka 47 

B.  Vomacka 47 

;..  Vycpalek. 47 

V.  Petrzelka 47 

K.  B.  Jirak 47 

La  Musique  anglaise  d'Aujourd'hui,  par  M.  I>. 

Cm  vocoressi 51 

Introduction 51 

Ch.  II.  il.  Parry 52 

Ch.  V.  Stanford 52 

Fr.  II.  Gowen  . 52 

Al.  C.  Mackenzie 52 

Ed.  W.  Elgar 52 

i  ir.  Bantock 53 

W.  Wallace 53 

Et.  M.  Sinylh  53 

IV    Deltas 53 

.1.  III.  Me.  Ewen 53 

G.  Hols! 53 

II.  V.Williams 54 

\.  Bax 54 

.1.  Ireland 54 

Fr.  Bridge 54 

Cyr.  Scotl 54 

.1.  Holbrooke 54 

B.  i  lardiner 54 

bton 54 

Y.  Bowen  54 

B.  J.  Dale 54 

N.  O'Neill 54 

E.  I  loossens 54 

Lord  Berners 50 

Ar.  Bliss 55 

Les  tendances  de  la  Musique  moderne  fran- 
çaise, par  Ch.  Kœchlin 56 

Avant-propos 56 

es  et  évolution  de  la  musique  nouvelle..  57 

I.  Harmonies 71 

Lenormand.  d'Indy,  Faun 

1)  Quintes  sucessives 72 

Gounod,   L.   Delibes,  Lalo,   Bruneau,  Cha- 
brier,  Kœchlin. 

2)  Divers  enchaînements  parallèles 78 

Gounod,  Debussy,  Kœchlin,Franck,( 
Ravel,  E.  Satie,  Fauré,  L.  Moréau,  Saint-Saëns. 

3).  Accords  ou  procèdes  Debussystes 86 

Debussy.  Bizet,  Kœchlin,  L.  Delibes,  d'Indy, 
E.  Chausson,  Guy  Ropartz,  Erlanger. 


H  LE   DES  M  ATI  EUE 


\  Modes  grecs 

Gounod,  Saint-Saëns,  Debussy,  Kœchiin.J. 
Huré,  Fauré. Ravel,  Darius  Milhaud,  Chabrîer, 
Massenet,  Duparc,  E.  Chausson. 

51  Exotisme 

F.  David,  A.  Messager,  Bourgault-Ducou- 
dray,  M.  '•!  M""  d'Harcourt,  Gounod,  Bizet, 
Saint-Saëns,  Fauré,  Rabaud,  Ravel,  Chabrier, 
Lenormand,  Max  d'Ollone,  H.  Manuel,  Kœch- 
lin. 

6)  Accords  sur  tonique  H  li;irmoniessur  pédales. 

Gounod,  L.  Delibes,  Debussy,  Bruneau,  E. 
Chausson,  Kœchlin,  Darius  Milhaud. 

7)  Résolutions  exceptionnelles,  harmonies  diver- 


•I-,  F. 


Del 
8)Déi 


Chabrier,  Chausson, 
,  P.  Dukas. 


iaëns.  Fauré.  Koehlin,  Bizet, 
Ravel,  Lalo,  Debussy,  Cha- 


133 


9)  Nouvelles  formation,  d'accords 1" 

Gounod, Ravel,  Kœchlin,  L.  Delibes,  Fauré, 
F.  Berthet'  V.  d'Indy,  Lili  Boulanger,  Bruneau, 
1). Milhaud,  Honegger.  Auric, Poulenc, Franck, 
Debussy,  Ravel. 

II.  Contrepoint 12° 

Fauré,  d'Indy,  Ravel,  Gédalge.  Babaud.  D. 
Milhaud. 

III.  Modulations 121 

Franck,  Fauré,  Debussy. 

IV.  Rythmes i21 

V.  d'Indy,  E.  Salie. 

V.  Développement 121 

Gédalge,  Franck,  Debuss;  .  Salie,  Ravi  1. 

Les  genres 122 

1).  Le  théâtre 1  — 

V.  d'Indy,  M.  d'Ollone,  Rabaud,  Debussy, 
Bizet,  Delibes,  Chabrier,  Bruneau,  Charpentier, 
X.  Leroux,  Marly,  1'.  Vidal,  G.  Pierné,  Rey- 
naldo  Hahn,  Levadé,  H.  Février,  S.  Rousseau, 
Erlanger,  P.  et  L.  Hillemacher,  Le  Borne, 
A.  Savard,  G.  Hue,  G.  Dupont,  A.  Bachelet, 
L.  Aubert,  Guy  Ropartz,  Dukas,  D.  de  Séverac, 

C.  Franck.P.de  Bréville, E. Chausson,  Ravel, 
Fauré,  Saint-Saëns,  D.  Milhaud. 

2).  La  symphonie 127 

C.  Franck.  Saint-Saëns.  A.  Roussel,  Kcechlin, 
V.  d'Indy,  Rabaud,  A.  Magnard,  Gédalge,  E. 
Chausson,  Guy  Ropartz,  Witkowski,  M.  Labey, 
Ladmirault,  P.  de  Bréville,  G.  Pierné,  Debussy, 
Ravel,  Fauré,  M.  Emmanuel.  Le  Flem,  Florent 
Schmitt,  Roger  Ducasse,  Kœchlin,  A.  Caplet, 
.1.  Huré,  Roland  Manuel,  Honegger,  D.  Mil- 
haud, G.  Migot;  F.  Poulenc. 

3).  Poèmes  symphoniques 129 

Duparc,  V.  d'Indy,  A.  Magnard,  Rabaud, 
Debussy,  Ravel,  FI.  Schmitt. 

4).  Ballets  symphoniques 12'.' 

Ravel,' FI.  Schmitt,  A,  Roussel.  Inghelhi'ecbl. 

D.  Milhaud,  P.  Martineau,  Ch.  K hlin,  Bru- 
neau, Debussy,  Pierné,  A.  Magnard,  E.  P.oyer. 
M.  Delage,  Fr.  Poulenc. 

5  .  i  Euvres  de  piano 131 

P.  Dukas,  V.  d'Indy,  D.  Milhaud,  Ravel,  J. 
Duré,  P.  Martineau,  Ch.  Kœchlin,  Roussel, 
D.  de  Séverac,  Debussy,  Poulenc,  Honegger, 
Fr.  Berthet,  G.  Fauré. 

<>).  Les  mélodies 131 

Gounod,  C.  Franck,  A.  de  Caslillon,  Ma- 
gnard, Chausson,  Chabrier,  Debussy,  n.  Du- 
parc, A.  Roussel,  Ravel, Fr.  Berthet,  G.  Fauré, 
Debussv,  D.  Milhaud,  Saint-Saëns,  E.  Salie. 


Bourgault-Ducoudray,  V.  d'Indy,  Ch.  Bor- 
des,  Ravel,  Ladmirault,  Kœchlin,  Moullé,  Pé- 
rilhou.Huré,  Le  Fleui.E.  Yuillermoz,  M.  Em- 
manuel, P.  Martineau,  G.  Pjerné.ïnghelbrecht, 
J.  Tiersol,  Lalo,  Paladilhe,  Bizel,  Bruneau,  F. 
Casadesus,  Magnard,  P.  Dupin. 

S).  Art  religieux 135 

M"e  c.  Boulay,  ïournemire.  Guy  Ropartz; 
Ch.  Bordes,  C.  Benoit,  J.  Huré,  Fr.  Berthet.  Lili 
Boulanger,  Max  d'Ollone.  V.  d'Indy,  Fauré, 
Magnard.  Debussy,  FI.  Schmitt,  Babaud. 

9).  La  musique  comique 135 

Auber,  Adam,  V.  Massé,  Bizel,  Olîenbach, 
R.  Pugno,  A.  Messager,  Ch.  Lecocq,  L.  Ganne, 
G.  Pierné,  11.  Rabaud,  Berlioz,  Chabrier,  Ra- 
vel, E.  Satie,  Debussy,  D.  Milhaud,  G.  Char- 
pentier. 

10).  Musique  chorale  138 

Fl.Schmilt,A.Roussel,Tourhemire,J.Huré, 
B.  Ducasse,  G.  Fauré,  Ch.  Kœchlin,  Debussy, 
M.  Ravel.  Inghelbrecht,  R.  Manuel,  Lili  Bou- 
langer, Ladmirault. 

Conclusion 139 

Quelques  caractéristiques  de  la  Musique  ita- 
lienne contemporaine,  par  Guido  M.  Gatti.  14tl 

Considérations  générales 1*6 

lldebrando  Pizzetti.  G.  Fr.  Malipiero 151-157 

Fr.  Alfano 151-157 

F.  Busoni 155 

R.  Zandonai 156 

V.  de  Sabala,  D.  Alaleona.  VVolf- Ferrari.  Et. 
Montemezzi,  B.    Pick-Mangiagalli,    M.    Cas- 

telnuovo-Tedesco,  Ot   Respighi 156-157 

L.  Torchi,  O.  Chilesolti, F.  Torrefranca,  G.  Bas- 
liauelli,  L.  Parigi,  G.  Barini,  A.  Bonavenlura, 
A.  Camelli,  A.  "délia  Corte,  G.  Cesari,  G.  Ra- 

diciotli,  Fr.  Vatielli,  L.  Torri,  Al.  Toni 157 

V.  Tommasini 157 

V.  Davico 157 

Al.  Casella 157 

L.  Perrachio. . 157 

F.  Liulzi 158 

V.  Gui,  A.  Gas  :o,  1'   C  ipp  il  i,  Fr.  Santoliquido, 

A.  Zanella,  M.  Agostini,  R.  Bossi 158 

Les  courants  de  la  musique  russe  contempo- 
raine, par  André  Schaeffner    et  Bonis  de 

SCHLŒSER    159 

Considérations  générales 159 

Igor  Slrawinsky 161 

Alex.  Scriabine 167 

Serge  Prokofiefî 171 

Nie.  Oboukhoff 171 

Appendice.  César  Franck  (1822-1890),  par  Pierre 

de  Bréville 176 

Principes  de  la  musique  (Enti^etiens  théoriques 

développés),  par  Paul  Rougnon 183 

Avant-propos '83 

1"'  Entretien  théorique.  Noiious  pivinninaives. 
Le  son. —  Sons  musicaux.  —  La  musique.  —  L'é- 
chelle musicale.  -  La  théorie  musicale    183 

2   Entretien  théorique. 

L'intonation.  —  Signes  d'écriture.  —  Notation 
musicale.  —  La  portée.  —  Les  notes.  — 
Gamme.  —  Degrés 186 

3'  Entretien  théorique. 

Clés.  -  Voix 189 

4'  Entretien  théorique. 

Signes  de  durée «6 

5-  Entretien  théorique. 

Le  rythme.  -  La  mesure.  -  Le  triolet.  -  Le 
sextolel.  -  Le  quarlolet.  -  Le  contretemps. .      2.U 


TABLE  DES  MATIÈRES 


6"  Entretien  théorique. 

Gamme  diatonique,  liamme  chromatique.  — 
Signes  d'altération.  —  Enharmonie.  —  Jus- 
tesse absolue  et  tempérament.  —  Genres  

7-  Entretien  théorique. 

Intervalles  (1) • 

8l  Entretien  théorique. 

La  tonalité 

9  Entretien  théorique. 

Le  mode.  —  Caractère  particulier  à  chaque  ton 

et  à  chaque  mode 

10°  Entretien  théorique. 

Tons  \oisins.  —  Tons  éloignés.  —  Tons  homo- 


v  IIII-- 


11'  Entretien  théorique 


12e  Entretien  théorique. 

Intervalles  (Il  .  —  Position  de-,  inten ailes  dans 
les  deux  modes.  —  Origine  naturelle  et  forma- 
tion des  intervalles.  —  Fonction  des  intervalles 
dans  la  gamme.  —  Caractères  et  propriétés  es- 
thétiques appartenant  à  chaque  intervalle 

13e  Entretien  théorique. 

Affinité  des  sons  et  des  tons.  —  Gamme  chroma- 
tique tonale 

14e  Entretien  théorique 

La  transposition 

15"  Entretien  théorique 

La  composition  musicale  ri   l'exécution.  —  Le 
caractère.'—  La  couleur.  —  Le  style.  —  Mou- 
vements. —  Nuances.  —  Aceënluation.. .. .. . 

16'  Entretien  théorique. 

Ornements  mélodiques 

17'-  Entretien  théorique. 

Abréviations.  —  Reprises.  —  Divers  signes  uti- 
lisés dans  l'écriture  musicale 

18<-'  Entretien  théorique. 

Phraséologie.  —  Analogie  entre  le  langage  parlé 
et  le  langage  chanté 

19  Entretien  théorique. 

Divisions  de  la  musique 

20  Entretien  théorique. 

Solfège.  —  Diclée  musicale.   

21  Entretien  théorique. 

Synthèse.  -  Epilogue 

Origines  de  la  notation  musicale  moderne 
(Etude  historique),  par  P.  Rougnon 

Con.-idéralions  préliminaires 

Notations  alphabétique,  grégorienne 364 

Notation  neumatique 

Notation  noire  ou  carrée 

Notation  blanche 

Silences 

Mesure 

Portée  et  clés 

Signes  d'alléralioji 

Origine  du  mot  gammi  el  du  nom  des  noies. 
Muances,  solmisation  

Main  harmonique 

Notation  par  lettres.  Tablature 

Notation  par  chiffres ■ 

Acoustique  musicale,  par  le  professeur  Gariel  .... 

I.  Elude  de  la  sensation  sonore 

II.  De*  vibrations 

III.  Propagation  du  mouvement  vibratoire 

IV.  Relation  entre  les  vibrations  et  les  sensa- 
tions sonores •. .  ■ 

V.  Les  inslrumenls  de  musique 

VI.  Réllexion  du  -on  el  salles 

Vil.  Transmission  du  son  a  distance. Téléphone. 

phonographe  


Les  Théories  harmoniques,  par  L.  Chevaillier. 


I  nlroduclion 519- 

I.  L'harmonie  avant  Rameau 520 

1)  Le  moyen  âge 526 

Avant  Hucbald,  Ilucbald,  G.  de  Ghalis 520,  521 

Fraucon,  J.  de  Garlande,  M.  de  Padoue 522 

Ouatorzième^et  quinzième  siècles 523,  527 

Tinctoris '    527 

Gafori 527 

2)  La  Renaissance 528 

L'Ecole  française,  Monteverde,  Marenzio 529 

3)  La  théorie 530 

Fogliani,  Zarlino,  Mersenne 531 

4)  Le  basso  continuo 533 

Viadana ■  '■  '"  ' 

Agazzari,  G.  Sabbatini,  Gruger,  N.  F.  Erhardt, 

Ileinichen,  Mattheson 534 

Delair,  Saint-Lambert,  Campion,  Boyvin,  Mas- 
son  534r535 

II.  Rameau 535 

1)  Les  dissonances 537 

2)  Accords 538 

III.  Rameau  et  le  dix-huitième  siècle 540 

1)  Théories  de  la  résonance 541 

DAlembert 547 

Serre 5''8 

Tarlini 549 

Blainville 551 

Béthisy ['51 

Bemetzrieder 552 

2)  Théories  arithmétiques 553 

Euler :,:':  ; 

Sorge 554 

Ballière 555 

Jamard,  Mercadier  de  Balesta,  Wogier .  556 

3)  Théories  empiriques 556 

Levens J50 

Roussier M' 

Lauglé 558 

Marpurg,  Daube ''■IÎ' 

Schroeter,  Kirnberger,  Vallotti,  Sabaltini 560 

Fenaroli "  '  ' 

G.  Keller,  Pepusch,  J.   F.  Lampe,  Geminiani, 

Kollmann 561 

IV.  L'harmonie  dans  la  première  partie  du  dix- 

neuvième  siècle 562 

1)  Théories  de  la  résonance •  562 

Catel 562 

De  Momigny.  More] • .  •  •  564 

Derode 565 

1  )e  Blein 566 

2)  Le  dogmatisme  el  les  écoles  d'Italie 566 

Choron 566 

Asioli.  Reicha 568 

2  /ils)  Ecole  française 568 

Musard ' 56S 

Dauvillier.  Poisson,  Colet,  Concone 569 

3)  Les  théories  mélodiques 570 

Chrétien,  Geslin,  Chevé 570 

V.  L'harmonie  dans  la  deuxième  moitié  du  dix- 
neuvième  siècle 572 

1)  Harmonie  scolaslique 572 

Boely,  Guilaui 572 

A.  Savard 573 

Bazin,  Relier,  Th.  Dubois,  Barbereau,  E.  Du- 
rand, Bienaimé 574 

Eslava,  HaulT,  Jadassohn,  Hamilton,  Ilugonnenc, 
Clouzel,  Lefèvre,  Girard,  Viallon,  Rimsky- 
Korsakoiï,  Ratez.  Wachs,  Quilichini,  Batt- 
iiiann.  Vallet ,  Valin  .  Delaporle ,  Petit-Jean, 
Périneau,  Adrien,  Bourguignon,  Potiron,  Phi- 
lipol,  Messerer,  A.   Lavignac,   P.  Rougnon, 

.1.  Durand 575 

2)  Systèmes  basés  sur  une  série  esthétique 575 

a)  Séries  mélodiques 576 

Deldevez,  Baudrimont,  deBertha,  Helssengren.  576 

245 


TAULE  DES  MATIÈRE." 


Ii)  Séries  harmoniques 577 

Durutte,  (luyot,  Gevaerl 577 

A.  Vinée 579 

c)  Séries  d'accords 581 

(  îarbet 581 

Van  der  Helpen,  E.  Carie],  Villermin 582 

:>)  Systèmes  basés  sur  l'observation   psycholo- 
gique   582 

a)  Théories  de  l'attraction 583 

A.  Basevi 583 

Loquin,  Vivier 585 

Le  Dain,  Reymond 586 

h)  Théories  de  la  tonalité 586 

Fétis 586 

Barbereau 587 

A.  Marchand,  Lassimone,  Thielemans,  B.  Rahn, 

D.  Fleuret 588 

c)  Théories  de  la   tonalité   opérant  sur  la  série 

des  harmoniques 588 

H.  Riemann,  Helmholtz,  von  Ottingen,  M.  Ilanpt- 

mann,  K.  Stumpf,  V.  d'Indy 589 

Conclusion 589 

Evolution   de  l'harmonie.   Période  contempo- 
raine, par  Ch.  Kœchun 591 

Considérations  générales 591 

I.  Accords  parfaits 592 

Les  modes  grecs 595 

II.  Accords  de  septièmes  :  nouvelles  façons  de 

les  employer 602 

III.  Accords    de    neuvièmes,   de   onzièmes,   de 

treizièmes,  etc 612 

IV.  Altérations,    Chromatisme,    Appogiatnres, 

Harmonies  diverses.  Accords  sur  pédales, 

Gammes  diverses 619 

V.  Licences  diverses 631 

VI.  L'écriture  contrapunctique  moderne 646 

VII.  Nouvelles  conceptions  au  sujet  des  modu- 

lations et.  des  cadences 659 

VIII.  Nouvelles  formations  d'aï rds.  Evolutions 

diverses   d'accords   un    de   moyens   déjè 

connus 680 

IX.  Nouvelles  conceptions  au  sujel  de  la  disso- 

nance   688 

X.  PolytonaKté,  Atonalité 696 

XI.  L'avenir 758 


VOLUME 


Physiologie  de  la  voix,  ses  applications,  par 

Irc  Partie  Introduction  à  l'étude  physiologique 
des  organes  de  la  voix,  appliquée  à  l'art  de 
la  parole  et  du  chant  Tt il 

2,  licin.in.     -  -  ,i   les  illusti  liions  de  ce  travail. 

3)  Définition  de  la  phonologie,  divisible,  peur 
l'étude  de  l'ail  vocal,  en  philologie  el  en  phy- 
siologie vocales 764 

1)  Conception  el  divisi la  physiologie  vo- 
cale        764 

5)  Conception  phy-ioloj  ,  de  i  phonétique 
expérimentale 765 

6)  Notions  d'acoustique  appliquée  à  l'arl  vocal..      766 
;.  Difficultés  de  t'étude  physiologiq le  la  voix 

parole  et  chant)  ;  causes  de  la  discordance  des 

sur  les  théories  de  la  voix 770 

II'  Partie.  Les  organes  de  la  voix  en  mouve- 
ment. Attitudes  vocales  externes  ou  in- 
ternes de  ces  organes.  Physiologie  du  vi 
sage  ou  étude  de  la  physionomie  animée 
parla  parole  et  le  chant 77 1      Histoire  du  Chant,  \ 


Chap.  I.  La  forinaliiin  verbale  et  le  limbre 771 

Appareil  de  la  formation  verbale,  de  la  réso- 
nance et  du  limbre.  Vue  d'ensemble  sur  les 
voies  aériennes 771 

Anatomiedes  organe-  de  la  formation  verbale  . . .  773 

a)  Etude  aualomo-pliysiologique  de  la  physio- 
nomie    77:! 

b)  Organes  de  la  nasalisation 775 

c)  Organes  de  la  buccalisation 781 

Médecine  expérimentale.  Buées  vocales 787 

Le  timbre  vocal 792 

Chap.  II.  Innervation  des  organes  delà  forma- 
tion vocale  et  du  larynx.  —  Les  centres  fonc- 
tionnels cortico-bulbaires  d'impression  el  d'ex- 
pression verbale.  —  Le  faisceau  géhiculé. ...       798 

Chap.  III.  Les  attitudes  organiques  essentielles. 
—  Formation  verbale  externe  et  interne  dans 
la  parole  et  dans  le  chaut 801 

IIIe  Partie.  L'influence  réciproque  fonctionnelle. 

Anatomie,  le  larynx 807 

1)  L'examen  laryngoscopique  latéral 807 

2)  Examen  laryngoscopique  médian  pendant  la 
respiration  et  pendant  la  phonation 810 

l\"  Partie.  L'influence  fonctionnelle  réciproque 
de  la  respiration  vocale.  Anatomie  et  phy- 
siologie vocale  appliquée  de  l'appareil  res- 
piratoire   822 

a)  Anatomie,  poumons,  trachée,  bronches 822 

h    Analomie  du  diaphragme 82  i 

i  i  v-.i  ipiion  de  la  cage  thoracique  el  des  mus- 
cles de  la  respiration 826 

d    Respiration  vocale 82s 

De  la  respiration  dans  la  parole  et  dans  léchant.  830 

Exercices  de  la  respiration 832 

Gymnastique  rythmique,  respiratoire  el  vocale  .  833 

Ve  Partie 

Chap.  I.  La   voix   solidienne.  —  Les  vibrations 
solidiennes  de  la  voix  ou  vibrations  du  sque 
lette  de  la  tète  el  de  la  poitrine  durant  l'i 
sion  de  la  voix 834 

Chap.  11.  Classement  physiologique  visuel  des 
voix  sur  le  limbre  établi  à  l'aide  des  buées  vo- 
cales nasales  el  buccales,  eu  se  hasanl  sur  la 
fonction  vocale  du  voile  du  palais .       836 

Chap.  III.  Caractéristiques  artistiques  de- voix. 
Répertoire  de  chaque  voix 810 

Chap.  IV.  De  l'émission  de  la  voix 842 

<  lliap.  V.  Esthétique  générale  et  appliquée ^17 

VI0  Partie.  L'audition  dans   ses  rapports  avec 

l'art  vocal  et  instrumental 851 

a)  Degré  d'intensité   nécess  tii  :  du  pour  la 

perception  auditive 855 

b)  L'onde  nerveuse  acoustique 856 

c)  Conditions  de  la  sensation  auditive  .. 856 

d)  Eveil  des  centre-  auditifs  chez  les  sourds  el 
les  sourds-muets 856 

Oreille  externe 851 

Oreille  moyenne S58 

Oreille  interne 859 

Nerfauditif 863 

VII'  Partie.  Aperçu  d'anatoniie  et  de  physiologie 
du  membre  supérieur  dans  leurs  rap- 
ports avec  l'étude  des  instruments  à  cordes       864 


lenti  le  à  i 


Maladie-  |>rotes-iounelles 

Praïtei les  mal  idi 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Antiquité,  Moyen  âge 8?1 

Renaissance 872 

Du  dix-septième  au  dix-huitième  siècle 875 

Ecoles  du  chant,  italienne,  française,  allemande.  879 

Les  principaux  chanteurs  du  dix-huitième  siècle.  SS1 

Suite  du  xviiic  siècle  et  commencement  du  m  V. 

—  Chanteurs  français  et  italiens 888 

Chanteurs  contemporains 895 

De  quelques  particularités  dans  le  chant  ancien. 

—  Chant  sur  le  livre 903 

Traité  de  Chant,  par  A.  de  Martini 905 

Chap.  I.  —  Notions  préliminaires.  Voixparlée  et 

voix  chantée 905 

i  ;iiap.  11.  —  La  voix 906 

Chapj  III.  —  Physiologie  de  la  voix 907 

i  ;hap.  IV.  —  Le  choix  d'une  méthode 908 

i  :hap.  V.  —  Emission 910 

Ghap.  VI.  -  Pose  de  !..  voix 913 

Chap.  VII.  —  De  certains  vices  de  la  voix 915 

Ghap.  VIII.  -Registres 916 

Ghap.    IX.    —    Classement   et    description    des 

voix 919 

Ghap.  X.  —  Emplois  au  théâtre 921 

Ghap.    XI.   —    Etude    des  principales  formules 

musicales 922 

Chap.  XII.  —  Différents  caractères  et  détails  de 

l'interprétation 925 

Ghap.  XIII.  —  Formes  classiques  des  eotnposi- 

tions  vocales 927 

Quelques  expressions  de  l'étude  du  chant 928 

Du  chant  suivanl  les  cadres 929 

Gymnastique  pi^évocale.  Culture  physiologique 

de  l'appareil  vocal,  par  R.  Duhamel  .....  930 

Introduction 930 

Directives  pour  l'éducation  respiratoire  du  cl 

leur.  —  Rôle  de  la  poitrine.  Soufflerie  et  caisse 

respiratoire 936 

Gomment  faut-il  respirer.' 939 

1).  La  respiration  complète 939 

2).  Contrôle  de  la  respiration 942 

Correction  des  respirations  défei   ueuse         ....  915 
1).  Suppression  des  ohslacles  à  la  respiration  nor- 
male.   '.'-i:> 

2).  Correction  de  la  respiration  claviculaire  . . . .  946 

3).  Correction  de  la  respiration  abdominale 946 

Gymnastique  du  thorax  et  de  l'abdomen  (exer- 
cices respiratoires '.'46 

Exercices    préliminaires.    —   Mouvements   des 

jambes  et  des  bras 947 

Gymnastique  du  larynx 959 

Gymnastique  du  pharynx,  de  la  bouche  e!  du 

nez ' 9W 

Gymnastique  des  lèvres  et  de  la  mâchoire  infé- 
rieure   . .  961 

Gymnastique  de  la  langue 9ô~ 

l  iymnaslique  du  nez 963 

(  lymnastique  et  massage  de  l'oreille 964 

Conclusion 965 

Evolution  de  la  technique  vocale  depuis  l'ère 

chrétienne,  par  .1."  Arger 966 

Notre  but 966 

Le  rôle  de  la  voix  humaine  dans  la  musique  de- 
puis l'ère  chrétienne 967 

Les  théoriciens  et  les  écoles  du  moyen  âge 969 

Les  théoriciens 969 

Les  écoles 970 

Les  théoriciens  et  les  écoles  aux  quinzième  et 

seizième  siècles 973 

Les  théoriciens 973 

Les  écoles 985 

Les  théoriciens  et  les  écoles  aux  dix-septième  et 

dix-huitième  siècles 977 


Les  théoriciens.. 977 

Les  écoles 985 

Les  théoriciens  et  les  écoles  aux  dix-neuvième 

et  vingtième  siècles 989 

Théoriciens  français 989 

Théoriciens  italiens 992 

Théoriciens  allemands 994 

Théoriciens  anglais 995 

Théoriciens  américains 995 

Russie 096 

Les  écoles 996 

France ' 996 

Allemagne  et  Autriche 999 

Amérique 999 

Angleterre •  1000 

Belgique 1000 

Danemark 1000 

Espagne 1000 

Hollande 1000 

Italie 1001 

Pologne 1001 

Russie 1001 

II>  Partie. 

La  technique  vocale.  —  Choix  d'un  professeur. .  1002 
Choix  des  moyens  propres  à  la  connaissan.       1. 

la  voix 1003 

Les  propriétés  de  la  voix  humaine 1004 

L'intensité.  —  La  respiration .  1005 

Hauteur  du  son.  Justesse .  1008 

Letimbre 1009 

Les  registres 1015 

La  demi-teinte 1022 

Evolution  de  la  voix 1022 

Lamue 1024 

Etendue  des  voix 1025 

Classification  des  voix  adultes 1026 

Entraînement  vocal  pratique 1033 

Tableau     général    des    attitudes    propres    aux 

es    W38 

Tableau  général  des  articulations  fpropres  aus 

consonnes 1040 

Les  exercices  d'entraînement  vocal 1(,42 

Exercices  pour  l'articulation  des  cons  innés. ....  1043 

ition ...  -    .  ■  •  1043 

Les  différents  aenres  de  vocalise .  1045 

Le  rire  et  le  sanglot 1047 

Les  nuances 

L'hygiène  du  chanteur 1049 

Conclusion 1049 

L'orgue,  par  Ch.  Mutin 1050 

Etude  historique 1050 

Origines  de  l'orgue 1051 

1  lu  vm0  au  ix"  siècle 1052 

Liste   des  orgues  célèbres  du   v 

nosjours 1053 

Dixième  et  onzième  siècles 1053 

Douzième  et  treizième  siècles 1654 

Quatorzième  et  quinzième  siècles. . ...  1055 

Seizième  siècle 1058 

Dix-septième  siècle 1061 

Développement  des  différentes  parties  de  l'orgue.  1064 

Dix-huitième  siècle 1067 

Dix-neuvième  siècle.. 1074 

Vingtième  siècle 1084 

L'orgue  moderne 108 1 

I">  Partie.  Mécanique 1085 

Sommiers 1085 

Soufflerie  et  réservoirs 1091 

La  charpente 1097 

Boîtes  expressives 1091 

Claviers  et  registres 1098 

Mouvements  de  transmission .     ...  1101 

IP  Partie.  Tuyauterie 1102 

Etude  des  diapasons 1102 


.V.IMN 


TAULE  DES  MATIÈREi 


Fabrication  des  luvaux 1104 

Jeux : U06 

Tracé  sur  les  faux  sommiers.  —   Ajustage  des 

jeux 1116 

Embouchage  el  langueyage 1116 

Mise  en  harmonie.  —  Accord 1117 

Partie  décorative 1 120 

La  musique  'd'orgue.  Les  formes,  l'exécution, 

l'improvisation  par  Al.  Guilmant 1125 

Les  formes 1125 

T.  La  variation  ou  partita 1134 

2  .La  toccata 1134 

3  .  Le  prélude 1137 

4  .  La  canzone  1138 

5).  Le  ricercare 1140 

6).  La  fantaisie  et  le  caprice 1142 

7i.  La  fugue 1142 

8  .  La  passacaille,  la  cliaconne 1145 

9).  U  sonate 1146 

Autre  pièces 1146 

L'exécution • .  1 148 

1).  Doigtés 1149 

8).  Attaque  du  clavier 1 157 

3).  Pédales 1158 

4).  Valeurs  des  notes 1161 

5).  Ornements 1162 

6).  Mouvements 1170 

7  .  Registralion 1172 

S;.  Jeux  de  mutation 1174 

9:.  Jeux  d'anches 1176 

10).  Clavier  de  pédale 1178 

11).  Accompagnement  des  voix 1179 

L'improvisation 1179 

L'Art  des  oiganistes,  par  A.  Pikro  U8i 

Fr.  Landino,  A.  Squarcialupi,  C.  Paumann. 
A.    Schlick,    Bernard  l'Allemand,  P.  de   Es- 

trada 1181  el  sun 

E.  de  la  Chapelle,  Vincent,  D.  Mémo,  J.  Kotter, 
L.  Kleber,  C.  de  Spire,  II.  Buchner,  G. 
Se  liirpf,     Oth.    tLuscinius,     P.     Ilofheimer, 

H.  Isaac 1183  el  suiv. 


ignant . 


P.  Al 

M.  A.  de  Bologna,  G.  Segni  da  Modena.  G.  Pa- 
rabosco,  Cavazzoni,  A.  Valente,  Sper'in  Dio 
Bertoldo,  A.  Gabrieli,  G.  Gabrieli,  CI.  Merulo, 
Luzzaschi,  G.  Guammi,  Malvezio,  Mortaro, 
P.  (Juagliati,  A.  Romanini,  G.  Fatorini,  G. 
liinila.A.  Banchieri.O.  Vernizzo,  V.  Vulfangh, 
C.  \ntegnati 1187  et  : 


G.  M.Traba 


.  Bermudo,  D luan,  Villada,  Vila,  Solo.  Pa- 

lero,  Cabezon,  L.  Venegas,  T.  de  Sancta-Ma- 
iia,  L.Villalba,Fr.Peraza,Gr.Silveslre,  les  oi 
ganiers  Brebos,  les  organistes  S.  Aguilera,  B. 
Clavijo 1198  et  sur 


M.-R.  Coelho 


Fr.  Correa  de  Arauxo. 


1209  el  Mii 


J.  Cabanillas,  L.  de  Aranda,  E.  Marondo,  .1.  de 
Torrès,.A.  Lorente,  P.  Nasarre,  .1.  Elias,  J.  Ne- 
bra,  M.  Blasco  de  Nebra,  J.  Vila,  A.  Soler, 
.1.  et  B.  Sessi,  Carrera  y  Lanchares,  Asiain, 
J.  Lindon 1218  à  1221 

E.-N.  Ammerbach,  B.  Scbmid  el  son  fils,  Jacob 


Pages. 

Paix.Gr.  Aichinger,Chr.Ehrbach,H.-L.  Hass- 

ler,  J.  Hassler,  .1.  Wollz,  M.  Frank,  L.  Daser, 
S.  Lohet,  Walliscr,  .1.  Gallus,  A.  Steigle- 
der 1321  et  suiv. 

II.-L.  Ilassler,  J.  Hassler,  C.  Hassler,  Chr.  Ehr- 
bacb,  J.Klemme,  J.  U.  Steigleder,  A.  Holtzner, 
S.  Mareschall 1230  et  suiv. 

J.  Sheplianl,  Th.  Tallis,  II.  Abyndon,  R.  Pair- 
fax,  11.  Aslon,  .1.  Marbek,  .).  Taverner,  J.  Red- 
ford,  R.  Alwood,  R.  Fanant,  W.  Blitheman. 
Shelbyc.  W.  Byrd,  Th.  Byrd,  J.  Bull,  les 
facteurs  Lawes,  Betton,  Mercator,  Tresaror, 
Th.  Dallam,  —  O.  Gibbons,  Th.  Tomkins,  les 
facteursR.Dallam,Th.Harris,B.  Smith.     1236etsuiy. 

Ch.  Gibbons,  M.  Locke,  J.  Blow,  H.  Pnrcell, 
W.  Croft,  les  facteurs  A.  Jordan,  Schwar- 
brook,  —  les  organistes  J.  Travers,  J.  Keeble, 
M.  Greene,J.  Kehvay,Th.  Roseingrave,  J.  Na- 
res,  B.  Cooke,  Ilaendel  et  ses  concertos  pour 
orgue  et  orchestre 1245  à  1248 

Imitateurs  des  concerlos  d'Haendel  :  W.  Felton, 
Ch.  Avison,  Tb.-A.  Arne,  .1.  Stanley,  W. 
Boyce.  J.  Bennetl,  Th.  Sanders  Dupuis . 
W.'  Walond,  J.  Battishill.  S.  Wesley.Th.  Att- 
wood,  W.  Russel.  W.  Crotch.  Th.  Adams, 
S.-S.  Wesley,  Th.  Walmisley.  H.-J.  Gaunt- 
lett 1248-49 

J.  P.  Sweelincli 1249-50 

Girolamo  Frescobaldi 1250  el  suiv. 

Fantaisies,  Jacques  Cellier,  E.  du  Caurroy,  Clau- 
din  le  Jeune.  Ch.  I  îuillet,  V.  Gonel . . .     1263  et  suiv. 

J.  Tilelouse L267 

Racquet 1268 

Mersenne 1268 

L.  Couperin,  II.  Dumont 1271  et  suiv. 

Fr.  Roberday 1271 

G.  Diiben,  P.  Siefert,  S.  Scheidt,  M.  Scbildt, 

J.  Prœtorius,  11.  Scheidemann 1275  et  suiv. 

Fr.  Tunder 1287 

D.  Slnmrk 1289 

M.  Weckmann,  J.-A.  Reincken 1293  et  suiv. 

Chr.  Flor.  P.  Morhardl 130;:  et  suiv. 

A.  Kniller,  J.  N.  Ilanfi,  G.  Bahm 1309  et  suiv. 

Proberger L321 

Al.  Poglielli.J.  K.  Ker] 1321  et  suiv. 

Pacbelbel 1323  etsuiv. 

F. -T.  Ricbter,  ti.  Reulter,  C.  Muffat,  J.  Speth. 
S.  A.  Scherer,  Fr.  Provinlz 1325  et  suiv. 

tt.  Buxtehude  1327  et  suiv. 

Ses  élèves  :  D.  Erich,  G.  D.  Leiding,  V.  Liibeck, 
N.  Bruhns 1329  et  suii  . 

Elèves  d.-  Pachelbel  :  \.  N.  Velter,  J.  U.  Butt- 
sledt,  A.  Armsflorf,  .1.  r.raiT,  G.Fr.  Kauffmann, 
G.  Kirchhoff,  .1.  ch.  Bach,  J.  M.  Bach, 
J.B.  Bach,  G.  Walther 1330  et  suiv. 

i,.  B.  Fàsolo,  M.  Rossi,  c.  C.  Aresti,  Ziani,  Pol- 
laroli,  G.  P.  Colonna.N.N.  diRoma.N.  N.  di 
Piacenza,  n.  Monari,  M.  Giustiniani,  Chiava 

,li  Lu. -.m.  >;.  B.  Bassani,  I!.  Aresti....      1335  el  -un. 


TA  II  LE  DES  MATIERES 


G.  Casini,   D.    Zipoli,     B.  Azzolino     délia  Ciaja, 
G.B.  Martini 1336  et  suiv. 

G.  G.  Nivers,  N.  Lebègue,  N.  de  Grigny,  d'Agin- 
court,  N.  Gigaull,  G.  Jullien,  J.  N.  Geoffroy, 
A.  Raison,  J.  Boyvin,  G.  Corretle,  L.  Mar- 
chand, Guilain,  Du  Mage,  L.  M.  Clérambault, 
A.  Dornel,  J.  Fr.  Dandrieu,  L.  Cl.  Daquin, 
P.  Dandrieu 1337  et  suiv- 

J.  S.  Bach 1350-1355 

Les  (ils  de  Bach  1356-1357 

Elèves  de  Bach  :  Vogler,  H.  N.  Gerber,  J.  L. 

Krebs,  J.  Ph.  Kirnberger,  Chr.  Kitlel 1357 

A.  Sorge,  G.  H.  Reichardt,  Fr.  Suppig,  G.  Ph. 

Telemann,  J.  P.  Kellner 1357-1359 

K.  Kolb.H.  Konigsberger,  F.  Gass.J.  N.  Torner, 

A.  Vallade 1359-60 

Ouvrages  sur  la  regislration  :  A.  Werckmeisler, 
J.  Mattheson,  .1.  J.  Adluns,  G.  Silbermann, 
F.  W.  Marpurg,  Séb.  Erard,  Grétry,  G.  J.  Vo- 
gler      1360-61 

J.-E.  Rembt,  J.-G.  Vierling,  M.-G.  Fischer, 
C.-G.  Umbreit,  J.-W.  Hiissler,  J.-l.  Millier, 
M.  Slecher 1361-62 

Evolution  de  la  musique  d'orgue.;  M.  Corrette, 
P.  Février,  Philidor.  Balbastre,  Beauyarlet  — 
Charpentier,  Méreaux,  Desprez,  Séjan 1363-64 

Leclerc,  G.  Lasceux,  E.-N.-M.  Miroir,  Nie.  Sé- 
jan, J.-Chr.  Bach,  P.  Ricci 1364-65 

J.-P.-E.  Martini,  Knecht,  Boély,  ViaUon,  J.-L. 
Baltmann,  A.Fessy,  A.  Miné,  Danjou,  Dielsch, 
M.  Gueit,  F.  Benoist,  Carrière,  J.  d'Ortigue, 
1  .-C.-L.  de  Calonne.Rieder,  Rinck,  Ad.  Hesse, 
L.  Niedermeyer,  Batiste,  Renault  de  Vilbac, 
Vogt,  Loew,  Haering 1365-67 

i  Irages  et  tempêtes  d'orgue 1368 

Fr.  Liszt 1368-1370 

Lefébure-Wély,  J.-Ch.-H.  Rinck,  R.  Schumann, 

F.  Mendelssohn,  Ad.  Hesse,  J.  Rheinberger 

1370-1373 

C.  Franck,  A.  Guilmant,  Ch.-M.  Widor...     1373-1374 
L'Orgue-Harmonium,  par  A.  Mustel 1375 

I.  Définition.. 1375 

II.  Caractère  musical 1375 

III.  Histoire  de  l'orgue-harmonium 1376 

Grenié,  Moreau,  Schroeter,  Stein,  Séb.  Erard, 

Girard,  Kratzenstein,  Rachnitz 1376-1377 

L'anche  libre,  la  régale 1378 

F.     Testa,    Eschenbach,     Schlimbach,    Voigt, 

Ilaeckel  et  le  physharmonica 1378 

Cavaillé-Coll  et  le  polkilorgue,  J.-N.  Fourneaux.     1379 

A.  Fr.  Debain 1379-1380 

V.  Mustel 1380  et  suiv. 

IV.  Structure  de  l'orgue-harmonium  1382 

La  souflierie 1382 

La  laye  ou  chambre  aux  anches 1386 

Le  elavier  et  les  mécanismes  qui  en  dépendent .     1388 

V.  Emploi  musical 1391 

1.  Des  jeux 1391 

2.  Des  registres 1393 

3.  L'orgue  à  double  expression 1396 


VOLUME  111 

Des  instruments  à  vent  et  de  leur  principe,  par 

M. -A.  Soyer 1401 

Généralités 1401 

Flûtes i,|23 

Hautbois.... 1431 

Basson 1435 

Clarinette 143g 

Saxophone 1440 

Sarrusophones 1441 

Cornemuse 1441 

Musette 1442 

Trompette 1443 

Cor 1447 

Trombone 1449 

Cornet  à  pistons 1452 

Saxhorn 1453 

Sudropbone. 1460 

Duplex 146I 

Des  instruments  à  percussion 1462 

De  la  construction  des  instruments  de  musique.  1474 

Instruments  en  bois 1474 

Instruments  en  cuivre 1473 

La  Flûte,  par  P.  Taffanel  et  L.  Fi.eury 1483 

Avant-propos us;; 

La  flûte  à  bec 1454 

La  flûte  traversière 14s*', 

Généralités |  ;>■,• 

Les  transformations  de  la  flûte 1  ;ss 

Ilotteterre  dit  le  Romain,  S.  Virdung,  Agricola, 
Praetorius,  Mersenne,  R.-S.  Rockstro,  Delusse' 
Quantz,  Devienne,  Riboch.  Tremlitz,  Laurent, 
Tulou,  Cappeller,  Nolan,  Miller.  Nicholson, 
Pollgiesser,  Rebsomen,  Gordon,  Th.  Bœhm, 

Coche,  Briccialdi,  Lot 1 193-1503 

La  flûte  actuelle  (système  Bœhm) 1503 

Différents  types  usités  aujourd'hui 1504 

Boehm,  Rudall,  Rockstro 1504-1506 

Les  défauts  de  la  flûte  actuelle 1506 

Emploi  de  la  flûte 1507 

Seizième  siècle 1507 

Cavalli,  Cambert,  Lully,  Marais,  Campra,  Haen- 
del,  Rameau,  Gluck,  Haydn,  Mozart,  Beetho- 
ven, Lebrun,  Bishop,  Donizelti,  Rossini.  Men- 
delssohn, Schumann,  Meyerheer,  Berlioz, 
Wagner,  Saint-Saëns,  Lalo,  Bizet,  Debussy, 
Rimsky-Korsakoff,  G.  Hue,  C.  Scott,  A.  Rous- 
sel, Caplet,  Roland,  Manuel,  Ibert 1508-1513 

La  petile  flûte  dans  l'orchestration 1513 

Gluck,   Méhul,    Beethoven,    Berlioz,    Wagner, 

Rimsky-Korsakoff,  Stravinsky,  Ravel 1513-1514 

La  flûte  dans  la  musique  de  chambre 1514 

La  Barre,  Lavaux,  Boismortier,  Naudot,  Lœil- 
let,  Blavet,  Schickard,  Quantz,  Frédéric  le 
Grand,  J.-S.  Bach,  Haendel,  Marcello,  Mar- 
tucci,  Leclair  l'aîné,  Rameau,  Mozart,  Haydn, 
Gossec,  Beethoven,  Nicholson,  Kulhau,  Tulou, 
Schubert,  Hummel,  Reinecke,  Weber..     1514-1516 

Les  grands  virtuoses  de  la  flûte 1516 

Période  ancienne 1517 

Ecole  française.  Philbert,  Descosteaux,  P.  Gaul- 
tier, les  Hotteterre,  M.  La  Barre,  Naudot, 
J.-B.  Lœillet,  Buffardin,  Boismortier,  M.  Bla- 
vet, Devienne,  etc 1517-18 

Ecole  allemande.  C.  Van  Roose,  Luther,  Denner, 
Quantz,   Tremlitz,    Liebeskind,    Frédéric    lé 

Grand,  Dulon,  Schickard 1518-19- 

Autres  écoles  :  Florio,  Goldsmith,  Reid  . .' 1519 

Dix-neuvième  siècle \     151& 

Ecole  française  :  Berbiguier,  Tulou,  Nonon. 
Drouet,  Walckiers,  Demerssemann,  Farrenc, 


3910 


TAULE  DES  M  ATI  EH  ES 


Guillou,   Remusat,    Brunot,   Camus,   Coche, 

L.  Dorus,  II.  Allés,  etc 1519-21 

Ecole  allemande.  Saust,  Muller,  Michel,  Bayr, 
Dressler,  E>.  Kuhlau,  A.  B.  Fiirstenau , 
Th.  Bo'lun,  Soussmann,  les  frères  Doppler, 

J.  Andersen 1521-22 

Ecole  italienne.  Morizani,  Sola,  Briccialdi 1522 

Ecole  anglaise.  Miller,  Ashe,  Gunn,  Rudall, 
Nicholson,  Carte,  Richardson,  Pratten,  Rock- 

slro 1522 

Epoque"  actuelle 1522 

Principaux  virtuoses 1522 

L'art  du  flûtiste 1523 

La  bibliothèque  du  flûtiste  (bibliographie  de  la 

dûte; 1525 

Paul  Taffanel 1520 

Le  Hautbois,  par  M.  Bleuzet 1527 

Origine  et  histoire  du  hautbois 1527 

Instruments  orientaux 1530 

Famille  du  hautbois 1532 

Transformations  du  hautbois 1535 

Sallantin,  Vogt,  Sellner,  Koch,  Delusse,  Brod, 
Trieberl,  Boehm,  Barret,  Gillet,  Lorée,  Ro- 
bert       1535-38 

Emploi  du  hautbois 1538 

Lully,  Rameau,  Ilaendel,  Bach,  Gluck,  Haydn, 
Mozart,  Beethoven,  Wagner,  R.  Strauss,  Ka- 

lidowa,  Guiraud,  Ropartz   1538-1540 

Répertoire  classique  du  hautbois 1540 

Principaux  virtuoses  du  hautbois 1541 

IMiilidor,  Descosteaux,llotleterre,Barth,  Lebrun, 
Fisher,  Sallantin,  Vogt,  Verroust,  Trieberl, 
Berthélemy,  Colin,  les  Besozzi,  Sellner,  Brod, 

Guidé,  Gillet 154 1  - io 

Musette 1542 

Hautbois  d'amour 1542 

Cor  anglais 1542 

J.  Perlendès,  Trieberl,  Brod,  J.  S.  Bach,  Gluck, 
Catel,  R.  Schumann,  Berlioz,  C.  Franck,  Wa- 
gner, Lorée 1543 

Hautbois-baryton 1513 

Bizev,  Brod,  Triebert,   Lorée,    Heckel.   —   R. 

Strauss 154.3-44 

La  clarinette,  par  M.  Mimart 1545 

Origine  et  évolution  de  l'instrument .      1545 

Denner,  Barthold,  J.  Béer 1546 

Faber,  Rameau,  d'Herbain,  Francœur,  Gaspard 
et  Sadler,  Gluck,  Mozart,  Lcl'ebvre,  I.  Muller, 
Genlelet,  Baermann,  F.  Béer,  Simiot,  F,  Le- 
febvre,  Romero,  Blancou,  Gyssens,  Bœbm, 
Lot,    Dumas,    Wieprocht,    Fontaine-Bessou, 

Evette  et  Sclueffer    154"    18 

Jeu  de  la  clarinette.  —  Principaux  virtuoses 1548 

X.  Lefebvre,  Fr.  Béer,  Fr.  Dacosta,  II  Klosé,  11. 
Leroy,  J.  Béer,  J.  Baermann,  11.  Bender,  F. 
Vanderhagen,    Gambaro,    Garulli,    Bimboni, 

Liverani,  Cavallini,  Spina  1548  i9 

Le  son  de  la  clarinette 15 19 

Clarinette  en  si  >,  s       :me  Bœhm 1552 

Conseils  d'exécution 1555 

Le  Basson,  par  Lbteluer  el  Ed.  Flament  .......    1556 

Historique  du  basson.  Les  origines  de  l'instru- 
ment      1556 

Perfectionnement  du  basson  en  France 1557 

Le-  1  lotteterre,  Philidqr  Rau  ele  ,  i;  iset,  Lot, 
les  Dèiusse,  Tbiénot,  Porlhaux,  les  Savary, 
Galender,  Simiot,  G.  Tri  V-dler, 

W'ii h.  G.  Schubert,   B  ichma  n,  A. 

.    .i  mcoui't,  Buffet,  Crampon,  Fr,    friebert, 

;,   i>.  r,  mmas,  Evette.et  Scoaeffer,  Le- 

Lec  .'nie  et  C'c,  Seliner,  Robert,  C  »ues- 

i 1d57-58 


La  fabrication  du  basson  à  l'étranger 155'.» 

Résumé  rétrospectif 155'.' 

Etendue  de  l'instrument  de  son  invention  a  nos 

.jours 1559 

L'instrument  actuel 1559 

L'anche 1560 

Le  contrehasson 1561 

Stamby.  Sehuster,  Raumann,  Adler,  Trieberl, 
A.  Marzoli,  Evette  et  Schœtier,  Selmer,  Cer- 
veny,  Morton,  Hasenius,  Besson,  Heckel.     1561-1562 

Emploi  du  basson 1562 

1).  Emploi  du  basson  à  l'orchestre . .  1562 

Wagner,  Reyer 1563 

2).  Le  contrebasson  à  l'orchestre  et  son  histoire.  1563 
Ilaendel.  Haydn,  Mozart,  Beethoven,   Weber, 
Reyer,   Mendelssohn,   Strauss,    A.    Thomas, 
Verdi,  Salnt-Saëns,   Massenet,  Vidal,  Erlan- 
ger. Dukas 1563-64 

3).  Emploi  du  basson  en  concertiste 1564 

4).  De  la  respiration 1565 

5).  Les  intervalles 1566 

6).  Le  détaché ,    1566 

7).  Les  arpèges 1567 

8).  Le  trille 1567 

'J  .  Les  notes  à  double  doigté 156s 

10).  Le  coup  de  langue 1568 

11).  Les  nuances  inexécutables 1569 

12).  La  sonorité 1569 

Le  basson  à  l'orchestre 1570 

Cambert,  Lully,  Gluck,  Haydn,  Mozart,  Beetho- 
ven,    Mendelssohn.    Schumann,     Schubert, 

Verdi,  Meyerbeer,  Wagner.  —  Catel,  Lesueur.  157(  > 

1).  Le  basson  dans  les  œuvres  de  Haydn 1571 

2).  Le  basson  dans  les  symphonies  de  Beethoven.  1572 

3).  Mendelssohn 157'.' 

4).  Berlioz 15S0 

5).  A.  Thomas 1581 

6).  Bizet 1581 

7).  Liszt 1582 

8).  Rimsky-Korsakoff 1582 

9     Trliaikowsky 1583 

10).  Saint-Saëns 1583 

11).  It.  Strauss.... L584 

12).  V.  d'Indy 1585 

13).  Charpentier 1585 

14).  Dukas 1585 

Le  basson  et  la  musique  de  chambre 1585 

Œuvres  de  musique  de  chambre  comportant  le 

basson 1587 

Les  virtuoses  du  basson 15s; 

Ozi,  Rogat,  Layer.  Devienne,  Courtin,  Dossion, 
Fougas,  Savarv,  Barizel.Melchior,  Reickmans, 
Rethaler,  Bauinan,  Cokken,  Divoir,  Wfflent- 
B  ir  logn  Violet,  J  inc  i  irt,  Espaignet,  Linof, 
Verr  mst,  G  i  itier  di  Savignac,  VUlai 
Lalande,  Bourdean,  Letellier,  Flamant  ...     1587-92 

Principaux  solistes  actuels 1592 

Enseiqnement  du  basson 1572 

Le  basson  au  Conservatoire  de  Paris 1592 

Répertoire  du  \  irtuose  bassoniste 1594 

Conclusion 1595 


La  trompette  et  le  cornet,  pat                         —  1596 

Origine  de  la  trompette.  Son  usage  dans  l'anti- 
quité   1597 

Em|)loi  de  la  trompette  dans  les  orchestres  ....  1599 

Bach  el  tlae'odel 1599 

Les  représentants  du  genre  trompette  et  leur 

emploi 1606 

l).  Trompette  simple. 16in'> 

2),  Trompette  à  coulisse 1607 

:  .  fr  impetti    i  cle.fs         (L607 

tous 

5).  Trompette  a  pistons L608 


TA  Il  LE  DES  MATIÈRES 


3!)  Il 


6).  La  trompette  en  ut  moderne 1610 

7  .  Nouvelle  trompette  en  ut  à  5  pistons 1613 

8).  Tons  a  employer  de  préférence 1614 

!l).  Traité  d'orchestration  de  Berlioz. 1615 

10).  Trompettes  en  ré  aigu  et  au-dessus 1619 

11).  Trompettes  antiques 1619 

12).  Registre  de  chaque   trompette  spéciale  en 

notes  écrites 1620 

13).  Pistons 1621 

14).  Tableau  des  tonalités  de  la  plupart  des  ins- 
truments de  cuivre 1622 

15).  Tableau  explicatif  de  l'écriture  pour  les  trom- 
pettes..    1083 

Le  cornet 1621 

Cornet  à  pistons 1625 

Technique  de  la  trompette  et  du  cornet 1628 

1).  Coulisses 1628 

2).  Coulisse  d'accord 1629 

3).  Tonalités 1629 

A).  Perce 1630 

5).  Embouchure 1630 

6).  Les  bords 1633 

7).  Bassin 1633 

S).  Grain 1633 

9).  Placement  de  l'embouchure  sur  les  lèvres.. .  1634 

10).  Lèvres 1634 

H  .  Intonation 1634 

(2).  Emis-ion.  Doigté 1635 

13).  Couac 1635 

14).  Coup  de  langue 1636 

15).  Respiration 1636 

16).  Armure 1636 

17).  Difficultés ' 1637 

Le  cor.  par  .1.  Pénable 1038 

Le  cor  dans  l'antiquité 1638 

Le  cor  de  chasse  ou  trompe 1640 

Le  cor  simple  naturel  ou  cor  d'harmonie 1641 

Le  cor  à  pistons  1642 

Emploi  du  cor  1643 

Praîtorius,  Fux,  Hampl 1643 

.1.  .1.  Rousseau,  Méhul,  Bach,  Haendel,  Gluck, 
Weber,  Beethoven,  Salieri,  Bellini,  Weber, 
Mendelssohn,    Wagner,    Meyerbeer,   Reyer, 

Berlioz 1643-47 

Les  cornistes  célèbres 16 17 

Rodolphe.  Mares.  Lebrun,  Duvernoy,  Punto,  Zi- 
ring,  Spandau,  Neumann,  Lielzeb,  Schon. 
Amon,  les  Belloli,  Artot,  etc  1647-48 

Le  trombone,  par  G.  Flandbin 1649 

Avant-propos 1649 

Origine  et  historique  du  trombone 1649 

La  famille  des  Inniilioiirs 1651 

Trombone  contrebasse 1651 

Halary,  Fournier,  Maquarre 1652 

Trombone  l>:i-se (652 

Tuba 1653 

Labbaye,  D.  Jahn.  Ad.  Sax 1653-1654 

Trombone  ténor 1654 

Trombone  a  6  pistons [655 

Trombone  allô ir,:>:> 

Bach,  Gluck,  Mozart,  Beethoven,  W  eber,  13er 

lioz,  Wagner 1656 

i.ne  soprano . .  (656 

I  !ach,  I  iluck 1656 

Trombone  piccolo 1657 

Enseignement  et  emploi  du  trombone 1657 

Cherubini,  Vobaron,  Dieppo ; 1657 

Berlioz.   Halévy,   A.   Thomas,    Delisse,   Allard, 

Couillaud 1657-58 

Bacli,  Haendel,  Gluck,  Mozart,  Beethoven, 
Weber,  Schubert,  Mendelssohij,  Schumann, 
Berlioz  C.  1'"  ranci..  Saint-Saéns.  d'Indv. ... 


Le  saxophone,  par  V.  Thibls 1660 

Historique  et  description  du  saxophone  .  1660 

Ad.  Sax '"'  I660 

Famille  des  saxophones  1660-1662 

La  voix  du  saxopl e ig§2 

Gevaerl,  Berlioz,  Rossini,  Meyerbeer.!...'.'."  L662-63 
Emploi  et  enseignement  du  saxophone  .   .  |r,6'; 
Bizet,  Massenel.  Paladilhe,  A.  Thomas.  Char- 
pentier,  Erlanger,  11.  Strauss,  d'Indv     Mes- 
sager, Vidal ' „;,,;; 

Auber,  Ad.  Sax j ,. ;, ;  • 

Le  sarrusophone,  par  R.  Leruste 1665 

Origine  et  description  de  l'instrument 1665 

Gautrot,  Sarrus [ggg 

Famille  de  9  types jggg 

Emploi  du  sarrusophone 1668 

Gounod,  Saint-Saens,  Massenet,  liste  des  n-uvres 
où  le  sarrusophone  est  employé L668-1673 

Le  tuba,  par  J.  Brousse ;,,;, 

Historique  du  tuba 167', 

Famille  des  tubas 1674 

Emploi  du  tuba (g-;,, 

Wagner,    L.-do.    Reyer.     Vidal,    Balakirew, 

H-  Strauss.-:. 1676-79 

Jeu  et  enseignement  du  tuba 1679-1680 

Notes  sur  le  serpent  et  lophicléide,  par  P.  Gar- 

NAULT jl|S| 

Le  serpent \  [g,q 

L'ophicléide \  ),-,<:; 

Bibliographie | , ,s  : 

Les  timbales,  le  tambour  et  les  instruments  à 

pei'cussion  par  J.  Baggers 1684 

Origine  et  historique  de  la  timbale h,s, 

Description  et  emploi  de  la  timbale [688 

Lully,  Haydn,  Mozart,  Beethoven,  Reicha,  Ber- 
lioz, Meyerbeer 1689-1691 

Modèles  et  fabrication  des  timbales 1691 

Dimensions  de    divers    modèles    de  timbales    à 

cercle  dépendant  ou  indépendant 1693 

Compositeurs  et  chefs  d'orchestre  ayant  été  tim- 
baliers   i,9, 

SrliurilzhoHlér.  Il.'rold.  Berlioz,  Adam.  Seine!. 
Pasdelonp,  Guiraud,  Paladilhe.  Massenet,  de 
Groot.E.  Pessard,  J.  Weber,  Chabrier,  Thi- 
baut, Varney,  d'Indv.  p.  Hillemacher, 
G.  Marie.  L.  Lambert,  Demarquelte 16 

Le  tambour igo-, 

Origine  et  historique  du  tambour [695 

Différents  modèles   de    tambours  ay Hé  en 

usage  dans  l'armée. ld97 

Description  du  tambour M'.is 

Manière  dejouerdu  tambour. 

Le  tambour-major 1701 

Instruments  de  fantaisie  introduits  dans  les  or- 
chestres        .    ... [702 

Tambourin [702 

Tambour  de  i.  isi [703 

Tabourka i;o:i 

Grosse  caisse 1711:; 

Crotales 1704 

Petites  cymba          1              [704 

Tam-tam [704 

Cloches 1 711.; 

Agiosymandrum .  [704 


TAULE  PES  MATIERES 


Cloehettes  et  jeux  d<timbros 1704 

Grelots 1705 

Chapeau  chinois 1705 

Triangle 1705 

Sistre 17°â 

Castagnettes 1705 

Fouet 1705 

Xylophone. .   1705 

Claque-bois 1706 

Lithophone 1706 

Rossignol 1  "*> 

Caille 1706 

Coucou 1706 

Canonnière 1706 

Glockènspiel  celesta 1706 

Verre-harmonica 1706 

artifices  de  théâtre  emplovés  dans  les  coulisses.  1707 

Ven1 1707 

Pluie !707 

Grêle 1707 

Tonnerre •  •  ■  '707 

Chemin  de  fer 1 707 

Fusillade 1707 

La    facture    des    instruments    à    archet,   par 

L.  Grbilsamer 1708 

Première  apparition  du  violon  et  de  sa  famille. .  1708 

Supériorité  de  la  lutherie  italienne  . .  : 1709 

Les  principaux  luthiers 1710 

1)  Italie  ipar  centres  de  lutherie) 1710 

Brescia,  Crémone,  Florence  Gênes,  Livourne, 

Milan,   Mantoue,   Naples,    Padoue,   Pesaro, 
Rome,  Saluzzo.  Trévise,  Turin,  Venise.     1710-1720 
ïieffenbrucker 1720-21 

2)  France 1721 

Tille     Lvon,  Mirecourt,  Nancv,   Paris,  Stras- 

,     '  1721-22 

bourg 1 1  * 

31  Allemagne •  •  •  •  • -  •••  '  '  — 

Absam,  Berlin,  Bozen,  Dresde,  Eisenach,  Fus- 
sen.'lnnsbruck,  Iéna,  Langenfeld,  Leipzig, 
May'ence,    Mitlenwald,   Munich,  Nurenberg, 

Prague,  Vienne 1722-24 

1    Angleterre 1724 

Brampton,  Edimbourg,  Londres  Salisbury..     1724-25 

-,    Belgique,  et  Hollande 1725 

Amsterdam,  Anvers,  Bruxelles,  La  Haye,  Tour- 

nay I|? 

6)  Espagne  et  Portugal l«5> 

Barcelone,  Lisbonne,  Madrid I  725 

La  construction  ........... .... ...............  1725 

De  cription  du  violon,  de  I  allô,  du  violoncelle 

.rdemçontrebasse........... .............  1725 

Lesoutns.. ..:'.'::: g» 

Les  modèles Jfj>* 

Les  moules  et  leur  montage 11M 

La  talde  d'harmonie,  les  ouïes,  la  barre 1735 

Procèdes-modernes  pour  voûter  et  creuser  les 

labiés J735 

Démoulage  et  lablage 17* 

Le  manche,  la  poignée 7* 

Latouche «6 

L'âme  et  sa  pose 1  £» 

Lechevalet "j" 

Lescordes ™8 

La  mentonnière,  le  piquet,  la  sourdine 1740 

Laréparalion [740 

Réparations  de  la  table 1740 

Réparations  du  fond 1742 

Rénaralions  aux  eelisses l  M~ 

Réparations  du  chevalier  el  de  la  tète 1742 

I .,.  recoupage  et  l'agrandissement 1743 

Mesures  principales 1744 

L'archet 1744 


La  fabrication 1747 

Poids  et  mesures  de  l'archet 1748 

La  colophane 1748 

Les  archetiers 1748 

La  viole  d'amour,  le  baryton,  la  pochette  1749 

La  viole  d'amour 1749 

Le  baryton 1750 

La  pochette 1751 

Index  bibliographique 1752 

Les  violes,  par  P.  Garnault 1753 

Origine  des  instruments  du  quatuor  d'archets..  1753 

Préliminaires.  Origine  de  l'archet 1753 

L'archet  et  le  crouth 1754 

Lyra,  rubèbe,  rebec,  gigue,  vièle  d'archet 1756 

La  vièle  d'archet  el  la  ménestrandie 1757 

La  trompette  marine 1757 

Violes  et  violettes 1760 

L'archet 1766 

Les  violes  et  le  violon 1767 

La  technique,  les  violistes 1768 

Le  baryton 1779 

La  viole  d'amour 1781 

Violetta  marina.  —  Pardessus  de  viole 1790 

ijuiiiton  et  viola  pomposa  1791 

Viole  d'Orphée 1791 

Heptacorde  de  Raoul  et  Vuillaume 1792 

Arpeggione  ou  guitare  d'amour    1792 

Acolipolyka 1792 

Baryton  rie  Battancbon 1792 

Piccolo  violino  Stelzner  el  Léo  Sir 1793 

Le  violon,  par  A.  Lefoht  et  M.  Pincherle 1794 

I)  Origines  du  violon 1794 

II)  Emplois  du  violon 1797 

III)  Technique  et  pédagogie 1800 

Tenue  et  accord  du  violon 1801 

Technique  de  la  main  gauche 1804 

L'archet 1811 

Ornementation,  trille,  vibrato 1821 

Double  corde 1823 

Arpège 182'.' 

Harmoniques 1831 

Pizzicato 1832 

Les  virtuoses  du  violon  (classés  par  écoles) 1835 

L'enseignement  du   violon  au  Conservatoire  de 

Paris 1837 

Lalto.  i>ar  Tu.  Laforge 1838 

L'archet 1839 

Le  violoncelle  par  G.  Ai.au  1 L84Q 

La  question  des  origines 1810 

1  iaraetère  et  technique  du  violoncelle 1844 

Emploi  du  violoncelle 1849 

Le  violoncelle  à  l'orchestre 1849 

Haydn,  Mozart,  Beethoven,  Weber,  Mendels- 
sohn,  Schumann,  Berlioz,  Wagner,  (Franck, 

Lalo,  Brahms,  Saint-Saëns 1849-60 

Le  violoncelle  dans  la  musique  de  chambre 1860 

Boccherini,   Bach,  Ilavdn.  Mozart,  Beethoven, 
Schumann,  Schubert,  Mendelssohn,  Brahms, 
Lalo,  Saint-Saëns,  Bernard,  Boellmann.    1860-1879 
Le  violoncelle  dans  le  solo  —  Les  violoncellistes 

célèbres 1879 

Battistini,  Boccherini,  Duporl  l'ainé,  J.-L.  Du- 
port,  Homberg,  Dotzaûer,  Servais,  Fran- 
chomme,  Jacquard,  Delsart,  Davidofî,  Popper, 
Plalli. 
Concertos  de  Schumann,  Lalo,  Saint-Saëns, 
Brahms 1879-82 


TA  II  LE  DES  UATlt'Uti 


3013 


Ouelques  observations  sur  l'élude  du  violon- 
celle      1882-85 

La  contrebasse,  par  Ad.  Soyer 1886 

Origine  et  évolution  de  la  contrebasse 1886 

Octobasse 1889 

L'archet 1889 

Emploi  de  la  contrebasse 1890 

Enseignement  et  virtuoses  de  la  contrebasse  . . .  1890 

Chénier,  Lami,  Schapft,  Labro.  Verrimst;  Vi- 
seur, Charpentier,  Nanni 1890 

J.  Kaemfer,  Dragonetti,  Boltesini 1891 

La  harpe.  —  Des  origines  au  commencement 

du  dix-septième  siècle  par  M.  Pincherle.  .  1898 

Avant-propos 1892 

La  harpe  dans  l'antiquité  orientale 1893 

Egypte -. 1893 

Chaldée,  Assyrie 1898 

Orient  et  Extrême-Orient 1900 

Grèce  et  Rome 1902 

Haut  moyen  âge 190i 

Légendes 1901 

Prémoven  âge 190r, 

Irlande 1906 

Anglo-Saxons  et  Angleterre  propre 1909 

Pays  de  Galles L909 

Ecosse 1910 

Nord  primitif ; 1911) 

Germains 1911 

i  laule.  France  primitive 1912 

Moyen  âge 1912 

Irlande 1912 

Pays  de  Galles.  Angleterre,  Ecosse 191  i 

Pays  germaniques 1917 

France  et  Flandres 1918 

Tenue  et  technique  primitives 1920 

Symbolisme  delà  harpe 1922 

Renaissance 1923 

Iles-Britanniques 1923 

France 1924 

Pays  germaniques 1925 

Italie 1925 

Espagne  et  Portugal 1927 

La  musique  de  harpe  à  la  lin  de  l;i  I  ; .-n   :--  m.  ,-.  lvj; 

La  harpe  et  sa  facture,  par  A.  Blondei 1928 

Origine  de  la  harpe 192s 

Le  corps  sonore 193;> 

La  console 1932 

Lacolonne 1932 

La  cuvette 1932 

La  mécanique 1932 

De  l'accord  de  la    harpe  à  double  mouvement 

d'Erard 1933 

Ues  bémols 1933 

Des  dièses 1933 

La  harpe  et  sa  technique,  par  A.  Hasselmans...  .  1935 

Evolution  et  technique  de  l'instrument 1935 

Exemples  de  combinaison- 1939 

Enseignement  et  virtuoses  de  la  harpe 1939 

Naderman,  A.   Premier  .Labarre,  C.  Prumier, 

A.  Hasselmans,  M.  Tournier 1939 

Ch.  Bochsa,  Dizi,  Th.  Labarre,  les  frères  Gode- 
froid,  Parish-Alvars,  d'Alvimare.  Gatayes, 
Désargues ,     1939-41 


La  harpe  chromatique  et  sa  facture,  par  G.  Lyon.    1942 


La  harpe  chromatique  suis  pédales  Pleyel    sys- 
tème G.  Lyon) 1942 

Origine I942 

Principe 1940 

Tirage  des  cordes 1945 

Accord  tempéré  de  la  harpe 1954 

Création  de  l'enseignement  de  la  harpe  chro- 
matique sans  pédales.  —  Résultats  artis- 
tiques acquis 1955 

Possibilités  d'exécution  et  de  composition 1956 

Avantages  artistiques  et  pratiques 1956 

(  Iriliques  de  la  harpe  chromatique 1957 

Technique  de  l'écriture  pour  harpe  chromatique 

sans  pédales 195s 

Facilité  des  études 1965 

Ouvrages  didactiques 1965 

La  harpe-luth 1965 

La  harpe  intégrale 19137 

La    harpe    chromatique    et   sa   technique,  par 

Mme  R.  Lenars 1968 

La  harpe  chromatique  sans  pédales 1968 

Description  de  l'instrument 1968 

Ecriture  et  technique  de  l'instrument 1968-71 

Le  luth,  par  M,uc  A.  Mairv  et  par  L.  de  la   Lau- 

Rencie 1972 

I.  Le  problème  des  origines  du  luth.  Evolution 

de  l'instrument 1972 

II.  Emploi  du  luth.  Les  principaux  luthistes 1978 

Ecole  italienne 1980 

Ecoles  allemande  et  autrichienne 1980 

Ecole  française igsi 

Ecole  des  Pays-Bas 19S2 

Ecole  anglaise 1982 

Ecole  polonaise 1983 

III.  Technique  et  pédagogie 19*3 

Accord  du  luth 1985 

Notation 1986 

Tenue  de  l'instrument.  Position  des  mains 1989 

La  mandoline,  par  S.  Ranieri 1991 

Origine  et  description  de  la  mandoline 1991 

Emploi  de  la  mandoline  dans  la  musique 1992 

Orchestre  à  plectre 1993 

Technigv  et  pédagogie 1995 

La  guitare  par  E.  Pujol 1997 

Aperçu  historique  et  critique  des  origines  et  de 

l'évolution  de  l'instrument 1997 

Guitare  et  vihuela 2000 

Dix-septième  siècle 2C00 

Dix-huitième  siècle 2010 

Dix-neuvième  siècle 2012 

La  guitare  actuelle 2015 

Les  hommes  célèbres  et  la  guitare 2016 

Les  facteurs 2018 

Les  transcriptions 2018 

Considérations  générales 2019 

Exposé  de  la  technique  de  l'instrument 2019 

Nomenclature  des  parties  de  l'instrument 2019 

Les  cordes 2020 

Accord 2020 

Etendue  et  ressources  de  l'instrument 2021 

Position  de  la  guitare 2022 

Main  droite 2022 

Main  gauche 2022 

Production  du  son 2023 

Disposition  des  notes 2023 


TABLE  DES  MATIÈRES 


.allrhr. 


Technique  de  la  main  gauche 

Doigté  de  la  main  gauche 

Notes  coulées 

Trilles 

Glissés 

Portamenlo 

Notes  données  exclusivement  parla  mi 

Le  barré 

Vibrato 

Technique  de  la  main  droite 

Doigté  île  la  main  droite 

Arpèges ' 

Trémolo 

Pizzicato 

Sonorités  spéciales 

Sons  harmoniques 

Harmoniques  à  l'octave 

Différentes  qualités  du  son  sur  une  même  corde. 

Campanelas 

Tambora 

Effet  de  roulement  de  tambour 

Effets  lointains 

Rasgueado 

Quelques  conseils  aux  débutants 


2029 
2029 
2029 

2030 
M31 

2031 
2031 
2031 

2031 
2032 
2032 
2032 
2032 
2033 
2033 
2033 
2033 
2034 
2034 
2034 
2034 
2(335 
2034 
2034 
2035 


Le  clavecin,  par  A.  Schaeffneh. 2036 

Facture 2037 

Instruments  à  cordes  pincées 2037 

Instruments  à  cordes  frappées 2048 

Instruments  combinés 2053 

Rôle  de  ces  instruments  et  pédagogie 2056-2060 


Le  piano  et  sa  facture, 
Avant-propos. ...... 

Des  ancêtres  du  piano. 
Le  clavicorde 

Le  clavecin 


2nC.| 


20iij 
2062 


Les  débuts  du  piano. 
Le  piano  droil 


2063 

2006 

des  cordes 2069 

Le  châssis  de  1er 2061'1 

Construction  du  piano 2069 

De  l'accord  des  pianos 2071 

Corn nt  on  arc, ni.'  un  piano 2071 

Observations  importantes 2072 

Le  piano  et  sa  technique,  par  L.   E.  Gratia  et. 

Alph.  n.vFnxnv 2073 

Evol  iti le  l'instrument 2073 

i  Irigine  du  piano 207:1 

Le  rôle  du  piano 2083 

Technique  et  pédagogie 2084 


\lé 


Compositeurs  et  virtuoses. 
Littérature  du  piano 


Les  instruments  automatiqr   ,-.  par  I,.  i. 

Définitions  et  origines 

Dispositions  générales  des  appareils  automati- 
ques   

Le  pis automatique   reprodu 

pianistiques 

Les  notes 

Le  mouvement 

Les  nuances 

Les  accessoires 

Solutions  électriques 

Transcriptions  spéciales 

L'orgue  automatique 


Le  violon  automatique 2127 

L'orchestre  automatique 2127 

Errata  et  addenda 2127 

VOLUME  IV 

ORCHESTRATION.  —  MUSIQUE  LITURGIQUE 
DES  DIFFÉRENTS  CULTES 

L'art  de  diriger,  par  P.  Taffajjel 212'.' 

Considérations  générales 212'.' 

Les  gestes  du  chef  d'orchestre 2133 

De  l'orchestration  militaire  et  de  son  histoire, 

par  A.  Soyer 2135 

Avant-propos 2135 

lrc  période.   De  l'antiquité  à  la  fin  du  dix  hui- 
tième siècle 21 35 

2   périods.  De  la  fin  du  dix  huitième  à  la  fin  du 

dix-neuvième  siècle 2li'i 

Petite  fanrare 2157 

Moyenne  fanfare 2158 

Grande  fanfare 215s 

Petite  harmonie 2160 

Moyenne  harmonie 2161 

Grande  harmonie 2162 

3'  période.  L'orchestration  moderne 2162 

Flûtes 2165 

I  (autbi  ds 2166 

Bassons 2168 

Sarrusophones 216* 

Clarinettes 2172 

Saxophones 2176 

Cornets 21 71» 

Trombones  à  pistons 2182 

Trombones  à  coulisse 2183 

Cors 2186 

Cornophones 218  • 

Saxhorns 2188 

Batterie 2UH 

Histoire  de  l'orchestration,  par  G.  PlERNÊ  el  II. 

W'iiiii.i.i'.tt 22l.i 

Première  partie    —  L'orchestre  en  France  et  en 

Italie  des  origines  au  dix-septième  siècle.  2215 

\\\\\\\\\\\'.'.'.'.'.'.'.'.'.\'.'.    '■ 

L'orchestre  en  France  de  Lulli  à  Gluck 222  i 

Cambert,  Lulli,  Charpentier,  Marais.. 2224 

R; :au.   .. 

Philidor 2235 

L'orchestre  en  Allemagne  avant  Gluck 

Bach  el  Raendel ••■ 2211 

L'orchestre  de  Gluck 2256 

Les  successenrs  de  Gluck  et  l'aube  de  l'opéra 

comique. . , 22, s 

La  liturgie  israélite,  par  J.  Francj 

Offices 



Chants  traditionnels 2288 

Musique  liturgique  et  religieuse  catholique 

Musique  liturgique 2315 

Mu-iquc  ivligii'li-e 2325 

Français 2326 

Fli ids  el  Néerland  lis 2326 

i .  pagnol  !  etP ah ■ 

Allemands 


TABLE  UHH  MATIERES 


Italiens 2327 

Annexe  : 2327 

Les  Noëls  el  les  Cantiques 2329 

La  forme  musicale  de  la  messe  par  E.  Borrel  . .  2331 


L'art  du  maître  de  chapelle,  par  D.  C.  Pianchet  . .  -'337 

La  formation  des  voix 2338 

Le  chant  liturgique 2339 

L'accompagnement  du  plaiu-chant 2340 

Les  modes 2341 

Les  accords 2345 

Le  contrepoint 2346 

La  musique 2340 

Du  texte 2349 

De  la  forme  extérieure 2349 

Les  offices 2351 

La  messe 2351 

Les  vêpres 2352 

Saluts 2353 

Les    chants    religieux    de    l'Eglise  orthodoxe 

russe,  par  G.  Bourdeau 2355 

L'antiquité  et  les  instruments 2355 

Plain-chant  autrement  dil   chant  m<''lodi<)ue   ou 
chant  à  l'unisson 

Le  chant  religieux  de  l'Eglise  orthodoxe 2350 

Chant  d'église  à  plusieurs  parties 2301 

Des  principaux  compositeurs  de  musique  reli- 
gieuse en  Russie  2364 

Bérézowski 2364 

Bortniansky 2366 

Vinogradow 2370 

Tourtchaninow 2374 

Lvoff 2377 

Glinka 236 

Bachmetiew 2387 

Kotchenowsky 2391 

Arensky 2395 

Opinions  de  plusieurs  archéologues  sur  le  chanl 

ecclésiastique  en  Russie 2396 

La  musique  dans  le  culte  protestant,  par  I.  Pi- 
card    2399 

Avant-propos 2399 

Eglise  luthérienne  2399 

J.Eccard 2404 

L.  Hassler 2405 

J.  Criiger   2406 

J.  S.  Bach 2 107 

Eglise  anglicane 2413 

J.  Slainer 2410 

Eglise  réformée 2419 

Histoire  de  Torchestration,  par  G.  Pierné  et  II. 

W'i  n.i.ETT.  —  2e  partie 2445 

L'orchestre  symphonique  avant  Haydn 2445 

Les  ci intra pu n listes  des  v,    et  wi=  siècles 2415 

■■  ■       . 

Le-  symphonistes 2153 

Haydn  et  Mozart 2460 

Havdn 2460 

Moz  n: 2465 

Beethoven 2470 

La  symphonie  après  Beethoven '2488 

Mendelssohn ......... 2489 

Schumann 2494 


Spobr  

L'époque  rossinienne 

Boïeldieu 

Rossini 

Meyerlieer 

Halévv 

Uber .........'..'. 

Ilonizetli 

Weber ' 

Berlioz 

L'Ecole  moderne  française  de  F.  David  à  J.  Mas- 


senet  . ... 
F.  David  ... 
A.Thomas.. 
Ch.  Gounod  . 


E.  Rêver.  E.  Lalo,  L.  Delibea 
E.  Chabiïer 


Richard  Wagner 

L'orchestre  moderne  en  Allemagne 


Job.  Brahms    

Ant.  Bruckner 

G.  Mahler 

M.  Reger  et  R.  Sliam 

L'Ecole  russe 

M.  Balakirew  . 

Tschaikowsky 

\    I  lorodine 

jjsky 

Rimsky  Korsakow  .    . 
i  ilaïoun  i 
Stravinskv 


Ecoles  étrangères  modernes    suite  .  -  Italie 

Espanne 

Angleterre  et  Scandinavie 

Tchécoslovaquie 

Belgique 

L'Ecole  frauçaise  contemporaine    

Saëns 

Vincent  d'Indy 

P.  Dukas  . . . ." 

Cl.  Debussy.. 

Panelli  

M.  Ravel 

Erlanger,  I      I 

\.  1  ii uneau,  M.  Sclimitt,  A.  Rou  - 
sel 


25U5 
2506 
2511 
252(1 
2531 
2532 
2535 
2540 

2551 
2551 
2553 
2554 
2555 
2562 
2564 
2567 
2570 
2598 
2602 
2605 
2607 
2609 
2019 
2035 

2637 
2641 

2042 
2012 
2647 
2650 
2053 
2657 


2601 
2666 


27i  »i 
2701 


Appendice 

Dernière  évoluli 


VOLUME  V 

ESTHÉTIQUE.    —    CHORÉGRAPHIE 

Le  contrepoint,  par  E.  Cools 2711.1 

Le  contrepoint 2719 

Deux  met!  loint..  2720 

Le  contrepoint  rigoureux 2721 

donné 2721 

La  forme  mélodique  du  contrepoint 2722 

du  contrepoint  rigoureux 2723 

Le  contrepoint  simple 2723 

point  h  2  parties 3723 

ce.  Note  contre  note 2723 

■  e.  Deux  noies  contre  une 724 

notes  contre  une 2720 

Syncopes  2727 

:,   espèce.  Contrepoint  fleuri 2729 

Contrepoint  à  3  et  a  i  parties 2730 


nu 


TAULE  DES  MATIERES 


Règles  couimuni's  aux  contrepoints  à  3  et  4  par- 
lies 2734 

Du  redoublement  des  voix 2735 

Des  rencontres  de  notes ''736 

Contrepoint  à  6,  7  et  8  parties ' 2739 

Du  contrepoint  double  ou  renversable  à  2  par- 
ties   2740 

Du  contrepoint  triple  et  quadruple 2742 

Du  contrepoint  en  imitation.  Le  canon 2742 

Imitation  par  mouvement  direct  ou  semblable  . .  2743 

Imitation  par  mouvement  contraire 2744 

Imitation  par  augmentation  et  par  diminution . . .  2745 

Le  canon  2746 

Conclusion 2749 

La  fugue,  par  A.  Séhieyx 2751 

Monodie  et  lied,  par  Th.  Gerold  2757 

Les  formes  de  la  musique  vocale  de  l'antiquité.  2757 

Les  chants  de  l'Eglise  romaine 2761 

Les  hymnes 2761 

Les  proses  ou  séquences 2763 

La  psalmodie 2763 

La  monodie  profane  au  moyen  âge 2769 

Les  compositions  de  caractère  épique 2769 

Les  lais 2770 

Les  compositions  musicales  des  troubadours  et 

trouvères 2773 

L'accompagnement  instrumental  des  pièces  vo- 
cales    2790 

Les  innovations  introduites  au  xiV  siècle 2792 

Les  chan  sons  dites  populaires 2797 

Les  chants  religieux   protestants   du   seizième 

siècle 2807 

Influence  de  la  Pléiade  sur  la  mélodie  française.  2810 
Le  Lied  à  plusieurs  voix  au  seizième  siècle  ...  2812 
Le   renouveau   de   la  mélodie   lyrique   au  dix- 
septième  siècle 2816 

Le  dix-huitième  siècle 2830 

L'école  romantique 2844 

De  Schubert  à  Schumann 2844 

L'époque  romantique  en  France 2853 

Le  Lied  en  Allemagne  après  Schumann 2856 

Les  écoles  françaises  de  la  fin  du  xix°  siècle 2863 

La  chanson,  populaire  par  J.  Tiersot 2866 

La  chanson  populaire,  art  primitif  et  spontané. .  2866 

Caractère  traditionnel  de  la  chanson  populaire. 

L'art  des  illettrés 2867 

Formes  musicales.  —  Tons.  —  Modes.  —  Cou- 
pes. —  Caractères  généraux 2868 

La  chanson  populaire  en  Europe 2870 

France. 2870 

Italie 2895 

Corse 2903 

Espagne 2904 

Portugal 2914 

Iles-Britanniques  2916 

Belgique  et  Pays-lias 2925 

Allemagne. 2029 

Suisse  et  Tyrol 2934 

Pays  Scandinaves 2938 

Russie 2945 

Pologne 2953 

Lusace 2955 

Tchécoslovaquie 2956 

Hongrie.  —  Les  Tziganes 2967 

Serbie.  —  Les  Slaves  du  Sud 2970 

Grèce 2984 

De  la  mer  Egée  à  la  mer  Noire 2989 

Roumanie 2989 

Au  Caucase.  —  L'Arménie  2996 

Hors  d'Europe 3000 

Conclusion 3001 

Bibliographie 3002 


La  chanson  populaire  française 3002 

Anciens  recueils  de  chansons 3002 

Recueils  au  xixc  et  au  xx"  siècle 3004 

Chansons  semi-populaires.  —  Vaudevilles.  — 

Noëls  3007 

Ouvrages  et  études  sur  la  chanson   populaire 

française 3008 

Périodiques 3008 

La  chanson  populaire  hors  de  France 3008 

Italie 3009 

Corse 3009 

Espagne 3009 

Portugal 3010 

Grande-Bretagne 3010 

Belgique  et  Pays-Bas 3010 

Suisse 3010 

Allemagne   3011 

Autriche 3011 

Pays  Scandinaves 301 1 

Lithuanie 3012 

Russie 3012 

Pologne 3012 

Lusace 3012 

Tchécoslovaquie 3012 

Hongrie 3012 

Iougoslavie 3013 

Bulgarie. 3013 

Grèce 3013 

Turquie 3013 

Roumanie 3013 

Arménie 3013 

Hors  d'Europe 3013 

Le  Motet,  par  A.  Gastoué 3015 

I.  Diverses  acceptions  du  terme  motet.  —  Sa  défi- 
nition. —  Matériel  littéraire  et  musical.  — 
Origines  el  emploi  du  motet 3015 

II.  Le  lenor  dans  l'ancien  motet.  —  Ce  qu'est  le 
ténor.  —  Son  rôle  et  son  importance 3019 

III.  Le  motet  à  une  voix 3025 

IV.  Le  motet  à  deux  et  trois  voix 3029 

V.  Le  motet  et  l'imitation.  —  Le  motel  à  quatre 

voix  et  plus 3034 

VI.  Les  grandes  formes  du  motel.  —  Le  motet 
à  deux  parties  et  le  répons.  —  Le  psaume.  — 
La  prose.  —  Le  motet  à  plusieurs  chœurs.  — 
L'anthem.  —  Le  motet  à  grand  chœur 3039 

VII.  Conclusions.  —  Fin  de  l'évolution  du  mo- 
tel. —  Son  renouveau  moderne 3nii 

Le  Madrigal,  par  Ch.  Van  den  Borriîn 3046 

Origine  (quatorzième  siècle) 3046 

La  rrottola 3047 

Les  madrigaux  du  seizième  siècle 3047 

A.  Willaert,  Ph.  Verdelot,  A.  Barré,  J.  Gero  ..  3049 

Arcadelt,  C.  di  Rore 3050 

Le  chromatisme 3052 

Les  trois  étapes  du  madrigal  au  seizième  siècle.  3055 

O.  de  Lassos 3055 

Palestrina,  Ph.  de  Monte 3058 

RulVo,  Corteccia,  D.  da  Nola,  Waélrant,  Turn- 
hout,  Faignent,  Castro,  Cornet,  Pevernage, 

Verdonck,  .le  Werl 3060 

B.  Donalo,  P.  Vinci,  Al.  Slriggio,  Cl.  Merulo, 
C.  Porta,  G.  Animuccia,  A.  Padovano,  A.  Rota, 

G.  M.  Nanini 3061 

Epanouissement  du  madrigal  à  la  fin  du  seizième 

siècle 3062 

Luca  Marenzio 3063 

A.  Gabriel! 3065 

G.  Gabrieli 3068 

O.  Vecchi 3069 

V.  Bell'Haver,  M.  Asola,  G.  Gastoldi,  B.  Palla- 

vicino,  A.  Falcone,  R.  Giovanelli,  L.  Leoni . .  3069 

C.  Gesualdo 3069 

Cl.  Monteverdi 3072 


TABLE  DES  MATIERES 


Pages 

Le  madrigal  dramatique    3076 

Le  madrigal  hors  d'Italie  et  de  Belgique  ... 3078 

Cl.  le  Jeune,  H.  L.  Ilassler,  Sweelinck 3079 

W.  Byrd,  Th.  Morlev,  Th.  Weelkes,  .1.  Wilbye, 

Th.  Tomkins " 3080 

Les  airs  de  danse,  par  Th.  Gbrold 3ÙS2 

La  musique  de  danse  au  moyen  âge 3082 

La  basse-danse 3088 

Les  danses  stylisées 3101 

La  suite 3101 

L'apogée  de  la  suite 3104 

Le  menuet  dans  les  sonates  et  symphonies 3111 

Compositions  isolées 3111 

Les  airs  de  danse  comme  morceaux  séparés  ....  - î 1 14 

Autres  danses  étrangères 3115 

Les  airs  de  danse  dans  la  musique  dramatique. .  3116 

Les  (ormes  de  la   musique  instrumentale,  par 

Ch.  Lefebvre 3121 

La  sonate 3121 

Sonates  à  plusieurs  instruments  et   dérivé.»  de  la 

sonate' 3122 

Historique  de  la  sonate 3123 

Sonata  da  caméra 3123 

Sonata  da  chiesa 3123 

Concerto  da  caméra 3124 

Les  autres  morceaux  de  la  sonate  3125 

Largo,  Adagio,  Andantiuo .il»"' 

Le  thème  ou  air  varié 3125 

Le  troisième  morceau  :  menuet,  scherzo. ......  3126 

Final  ou  Rondo 3126 

Variante-  de  formes  dans  fe  soin >l   si  -  ili 


Les  derniers  quatuor- de  lîeell,  ...  „ :!li7 

Note  sur  la  tonne  cyclique 3127 

Autres  formes  instrumentales :il27 

La  suite 3128 

Le  poème  symphonique 3128 

Ouverture.  Prélude 3129 

Sonate  et  symphonie,  paru,  m    Sum-Fuix 3130 

Les  origines / 3130 

Italie 3132 

Allemagne 3137 

France 3140 

Bibliographie 3142 

La  musique  de  chambre,  [iiy  M.  \'\ t  is-Bu.onet.  3144 

Considérations  générales 3144 

Définition 3144 

Esthétique  3144 

Composition 3146 

Forme 3146 

Style 3146 

Les  œuvres 3147 

Musique  instrumentale 3147 

Solos 3148 

Duos 3148 

rrios 3149 

Quatuors 3150 

Quintettes 3156 

Sextuors '. 3157 

Septuor- 3157 

Octuors. 3157 

Nohetlos,  dixluors 3158 

Instruments  accompagnés 3158 

Cassations,  divertissement»,  de.  ers 315S 

Musique  vocale 3159 

Adaptation  musicale 3161 

Mélange  des  voix  et  des  instruments 3161 

Arrangements 3162 

Catalogues 3162 

Les  compositeurs 3163 

Les  instruments 3168 

Les  parties : j 1 7 1 1 


Pages. 

Editions  moderne» 3170 

Editions  anciennes.  Manuscrits 3170 

Partitions 3171 

Editeurs 3171 

Musique  vocale .     .  3172 

Les  exécutant.» 3172 

Musique  instrumentale 3172 

Musique  vocale 3173 

Développement  de  la  musique  de  chambre 3173 

Bibliographie 3178 

La    musique   à  programme,  par  M.   U.   Calvo- 

coressi 3179 

Définitions  préliminaires 4179 

Esquisse  historique.  Les  primitifs 3180 

L'époque  moderne 318:! 

Théorie  et  esthétique  3185 

Note  bibliographique 3190 

Du  Théâtre  musical,  par  Ch.  Malherbe 3191 

Le  théâtre  en  Grèce 3191 

Le  théâtre  latin 3197 

Moyen  âge 3201 

Théâtre  religieux 3202 

1  (rames  liturgiques 3203 

!  iran n  -  -rmi-liiurgiques 32U3 

Théâtre  laïque 3205 

Troubadours 3205 


Le  théâtre  et  la    musique    du  quatorzième   au 

quinzième  siècle 3208 

Le  seizième  siècle 3213 

l.e  dix-septième  siècle 3217 

Création  de  l'opéra  français 3220 

Lnllv 3222 

Le  dix-huitième  siècle :;-»"' 

De  Lullv  a  Rameau ;;'-'»"> 

Hameau 3226 

Glucl 3229 

1 1  •■  i  ilmk  à  Sponlini  3232 

Le  dix-neuvième  siècle  3234 

Sponlini 3234 

3235 

Auber,  Meyerbeer 3235 

Berlioz 3236 

i  lourïbd  et  Amb.  Thomas  • 3237 

Les  formes  dramatiques  de  Lully  à   Wagner, 


par 


Lully 3239 

Campra.  Deslouche-,  li in  . . 3249 

Purcell.  Haendel ::-78 

Gluck 3286 

Piccinni.  Sacchini,  Salieri 3296 

Méhul 3302 

Gossec,  Cherubini,  Sponlini.  Lesueur,  Sleibell.  3306 
l'.rélrv,  Mondonville,  Philidor,  Monsigny,  Da- 

layrac,  Nicolo,  Boïcldieu 3317 

Pergolèse,  Paesiello,  Cimarosa,  Bossini,  Bellini, 

Donizelti •  -  ■  3326 

Auber,  Hérold,  Meyerbeer.  1  lalévy,  Verdi 3337 

Mozart.  Beethoven,  W'eber 3347 

Berlioz,  <  rounod,  Wagner 3356 

La  musique  de  scène  et  l'adaptation  musicale, 

par  L.  Brémont :;373 

La  musique  de  scène 3373 

Le  mélodrame. 3377 

L'adaptation  musicale 3379 

Les  formes  de  l'oratorio,  par  E.  Borrei 3385 

L'oratorio  italien 33S~> 

L'oratorio  allemand 338ii 

I. 'oratorio  français  3387 

La  Cantate  italienne  à  voix  seule  au  dix-sep- 
tième siècle  nar  II.  Prunières 3390 


:!9ls 


TABLE  DES  MATIERES 


Préliminaires 

Origines  de  la  forme  cantate 

Apparition  du  mot  eantata  chez  Grandi  (1620 
Caractère  de  la  cantate  à  son  début 

Monteverdi 

Hovellii,  Sancès,  Ferrari,  Milanuzzi 

Caractère  de  la  cantate  vers  1635 

D.  Mazocchi 

L.  ftossi 


3390 
3890 
3395 
3397 

33^7 
3401 
3401 
3402 
3404 
2407 


Ai,. 


\\, 


berli,  Bernabei,  Masini,  Tenaglia,  dell'Arpa, 

Melani,  Farina,  Boccalini 3407 

Carissimi ...   .  3407 

Al.  Stradella 340s 

Bassani,  Scarlatti,  Bononcini 3409 

C 'lu, km 3410 

La  Danse,  par  M">«  Bernay 3411 

Introduction.  Les  origines  de  la  danse 3411 

I.  Danses  chinoises,  égyptiennes,  hébraïques  et 

hindoues 3411 

Danses  égyptiennes 3112 

Danses  hébraïques 3413 

Danses  hindoues 3414 

II.  Danses  grecques,  romaines  et  byzantines     . .  3416 

Danses  romaines 342(1 

Danses  byzantines  3421 

III.  Danses  japonaises,  persanes  et  espagnoles.  3121 

Danses  persanes 3422 

Danses  espagnoles 3423 

IV.  Danses  gauloises   du  moyen  âge.   Ambula 

toires  et  macabres 3423 

Danses  du  moyen  âge 3424 

Danses  portugaises  ambulatoires 3424 

Danses  ambulatoires  en  F. le 3424 

V.  Danses  Renaissance,  Louis  XIII,  Louis  XIV, 

Louis  XV 3425 

Les  bals 3428 

La  danse  sous  Louis  XV 3429 

VI.  Danses  sous  la  Révolution,  le  Directoire, 

l'Empire  et  la  Restauration 3430 

ius  le  Directoire 3431 

Danses  sous  l'Empire  el  la  Restauration 3431 

Les  bals  publics 3131 

locales,  élraugrres  et   r 1 1 , ,<!< -ru - -~.    I 

russes  et  hongroises 3431 

Danses  anglaises,  écossaises,  hollandaises     3132 

Danses  mondaine- 3432 

VII.  L'art  delà  danse  à  l'Opéra  au  dix-huitième 

siècle • 3433 

La  Danse  à  l'Opéra,  danse    pusses  el  il  ilii 

L'art  chorégraphique 3435 

Les.  mimes  et  pantomimes 1435 

Conclusion 3436 


VOLUME  VI 

PÉDAGOGIE.  —  PRIX  DE  ROME.  —  ÉCOLES.  —  CON 
CERTS.  —  THÉÂTRES  —  PRESSE  MUSICALE.  — 
ARCHITECTURE  ET  SONORITÉ  DES  SALLES.  — 
JURISPRUDENCE. 

L'enseignement  musical,  par  Th.  Dubois 3437 


L'enseignement  musical  au  cours  des  âges 3437 

Temps  primitifs.  —  Antiquité 344(1 

3443 

Quatorzième,  quinzième,  dix-septième  siècles..  3441 

Temps  i tenir, 3445 

l.i'  <  IniKii'i  almiv.        Ses  vicissitudes 3'iiil 

i  nercices  publics 31  is 

L'enseignement  musical  actuel  en  France  .. ...  8451 


<  conservatoire  national 

Succursales.  Ecoles  nationales. 
Ecoles  libres  et  diverses 


L'enseignement  musical  à  l'étranger 

Allemagne.  —  Autriche 

Italie 

Milan 

Turin.     Venise,    Bologne,    Florence,    Parme, 


Naples,  Pesaro,  Palerme. 

Mexique 

Bruxelles 

Liège 

i  iand 

Anvers,  Malines 

Suisse 

lienève . . . 


3451 
3452 
3453 
3453 

3454 
3456 


3457 

3457 
3458 
3458 
3459 
3460 
3461 
3462 
3462 


Ancien  régime 3463 

Moscou 3465 

Saint  Pétersbourg 3465 

Régime  actuel 3466 

Conservatoires 3466 

Autres  établissements 3467 

Angleterre  et  Amérique 3467 

Londres 3467 

Boston 3467 


lionservaloir 


L'enseignement  dramatique,  par  .1.  Ci.aretik  el 

.1 .  Trufpier 

i  ion-idéralions  générales 

I  le  la  science  du  théâtre 

L'enseignement  dramatique  actuel 

Opinions  sur  l'enseignement  dramatique 

Conclusion.    Programme      t'enseignemenl    dra- 
matique   

L'Institut  de  France  et  le  prix  de  Rome,  par 
P.  Landormy  el  .).  Loiski 

L'institut  de  France  et  l'Académie  des  Beaux- 
Arts 

La  section  de  musique  de  l'Académie  des  Beaux- 
Arts  


3472 
3472 
3474 
3475 
3476 


.les  Beaux-Arts 

-  ,i  l'Académie 

p  iur  les  c 


3481 
3481 
3481 
3484 


.lire  ,|e-  i 


3490 
1491 


adémie  des  Beaux 
de  l'Acatl 


Ile 


Liste  lie-  a-snriés  élramjei  -  des  Beau  x- Art  s.  . . . 

Liste  des  cire-),  mdanl  s.  libres  de  I'  \ 

des  Beaux-  \n  ..  <  position  musicale 

Liste  des  correspondais  libres  de  i  v 

Etat  de  l'Académie  des  Be  ius    u        ection  de 

Biographies  des    membres   de   l'Académie    des 
Beaux-Arts  (section  de  musique)  par  ordre 

alphatique 

\<lam 


lia 


3»a 

3493 

3494 
3494 


149 

3499 

I 

3504 
351  â 
350 


tauli:  oi:s  matii:i;i: 


Pages. 

G.  Charpentier 3508 

Cherubini 3509 

Llapisson 3512 

Fél.  David 3513 

LéoDelibes 3514 

Th.  Dubois 3516 

G.  Fauré 3519 

Gossec 3522 

Gounod 3524 

Graridménil 3526 

Grétry 3527 

E.  Gniraud 3528 

I.  Halévy 3529 

Ch.  Lenepve.i 3531 

Lesueur 3533 

Victor  Massé 3535 

Massenet 3536 

Méhul ..: 3541 

Monsigny 3542 

'Inslow ...  3545 

Paër 3546 

Paladilhe 3548 

II.  Rabaud. 35 19 

II.  Reber 3550 

A.  Reicha 3551 

Er i  Reyer 3552 

Saint-Saéns 3553 

Spontini 3559 

Ambroise  Thomas 3562 

Widor 3564 

L'Académie  de  France  à  Rome 3565 

1.  Historique 3565 

2.  Règlement  nV  l'Académie  dr  Kraui'e  a  lionn' 
(1908) 3566 

Chap.  1.  Personnel  de  l'Académie  de  Franci   à 

Rome 356(1 

Chap.  II.  Travaux  des  pensionnaires 3567 

Chap.  III.  Exposition   «les  envois  à  Rome  el  à 

Func  3568 

Chap  IV.  De  laretenue.  Des  mesures  que  peut 
entraîner  la  non-exécution  des  travaux  obliga- 
loires 

Chap.  V.  —  Règles  d'ordre  •  ' I .i 1 1 1  i . ■  -  à  l'Académie 

inceà  Rome 3569 

3.  Liste  des  lauréats  des  concours  aux  Grands 
Prix  de  Ki, me  de  1803  à  1929    

Modifications  à  apporterai!  tes  edes  règlements.  3575 

Addenda  (œuvres  de  G.  Fauré) 3575 

L'enseignement  de  la  musique  en  France  et  les 
Conservatoires  de  Province,  par  Ed.  Mau- 

Aperçus  sur  les  formes  de  l'enseignement  musi- 
cal en  France... £576 

Schéma  de  sa  philosophie  historique 3576 

Fnur!ion-  sociales  ,1e  l'enseig iiemei'il  mu-iea 

Les  régimes  administratifs  des  écoles  de  musi- 
que   3593 

Ecoles  privées 359:; 

Ecoles  municipales 3593 

Ecoles  nationales 3594 

De  l'enseignement !598 

i  Irganisation  de  l'enseignemenl    3598 

Monographie  des  écoles  de  musique 3606 

L  Ecoles  nationales  de  sique.. 1606 

a  .  Succursales  du  Conseï  •■  i      'e  nation  il,  1606 

;-  ■  Ecoles  nati les  de  musique 3609 

II.  Ec  des  municipales  de  musique 3611 

III.  Ecoles  d(   m   sic.  u   prii  ies         3612 


des 


vatoires  el  E 
Conclusions 


-"!'"' 


JllOlllMUllb OU  1    I 

'Ecole  de  musique  classique  Niedermeyer  par 

G.  LefèvrepI  M""-  Veuve  II.  Heurtei 3617 


Création  de  l'Ecole. 3617 

Programme  de  l'Ecole 3617 

Histoire  de  l'Ecole 3618 

La  Schola  cantorum,  par  Vincent  d'Indy. 3622 

I.  Historique  et  origines  de  la  Schola 362'-' 

II.  Enseignement 362:'. 

III.  Exécutions  di icerl 362 i 

I  \  .  But  et  avenir  de  la  Schola 362Ô 

Conclusions 3625 


M- 


L'Ecole  normale  de  musique, 

i  organisation  générale 

Enseignement 

Enseignement  général 

Enseignement  général  lacultali! 

Enseignements  spéciaux  

Cours  d'interprétation  pour  artistes  el  virtuose-.. 

Les  Ecoles  de  la  Légion  d'honneur,  par  E.  Pes- 
sabd 

Maisons  nationales  d'éducation  de  la  Légion 
d'honneur 

Enseigne nt  de  la  musique 

Surintendantes  de  la  Légion  d'honneur 

Grands  Chanceliers  de  la  Légion  d'honneur  . . . 

L'enseignement  musical  A  l'école  par  M.  Chk- 


lle 


Les  méthodes 

Méthode-  intellectuelle-.  -  -  Wilhe :  son  i  cole 

-   Les  études  théorique 

OUti 

.  en-ei.  nenlei   !    Ir.nlil  m.   '.,'.. 

Méthode    de  notation  simplifiée 

]   ,  Mi    h  ode,  modales 

.'  .  Méthodes  chromatiques 

La  i,"  i      ' 

A    Dupaigne,  J.  Combarieu 

La  méthode  i-vtlimique 


3626 

3627 


3630 
3630 


16  ii 
3642 
3642 
3644 
3646 

3649 


Dactv 


luilive  et  -.  ■  m -,  ■  :  i  il  I  .■ .  Loi, 
.1.  Rousseau.  Pestalozzi,   Frœbel,  Naegeli,  Ga- 
\l"«|    i'ape-Carpentier,  Mon- 

lesspri.  —  Pédaga  

Les  programmes 

|-;,-o|i-  in'i  i  f  t.i  ,  '■     •  '-     primaires 


-iiprr 


Ecoles  normale 


:;i,ii| 


des  eliel's-.i  i,  ai  re  'i  i'1  irl  music  il  an,  1; 

Instruction-  m 

Ecole  maternelle .366 1 



Cours  moyen 

Cours  supérieu  r  

Développemeni    i     ;,.    ...n Liherté  d'inter- 
prétation et  de  méthode.  Les  textes.  M ■ 

l'acuité  auditive.  La  progression  musicale.  Les 

l'ormes  de  l'enseignement  musical.  L 

dés.  Les  leçons  pratiques 166 


Le  chant 

Preinii 


danses.  Chant. 

et  du  soir.  Influi eéduc  itive 3669 

Personnel  enseignant • 

Les  instituteurs.  Les  professeurs  spéciaux.  L'in- 
peclion  des  écoles.  Les  examens  et  sanctions 
de  l'enseignemenl  musical.  L'action.  Sociétés 

:  irporatives,    m   e 3671 

Appendice.  A  l'étranger 3674 

En  Angleterre >675 

En  Belgique 3676 


3920 


TA  III. E  DES  MAI  II  Itlî' 


En  Espagne 3677 

En  Suisse 3678 

En  Allemagne 3680 

La  Société  des  Concerts  et  les  gi'andes  associa- 
tions symphoniques,  par  A.  Vernaelde  . . .  :!684 
Principaux   concerts  antérieurs  à  la  rondalion 

de  la  Sociélé  des  Concerts 3684 

La  Société  des  Concerts  du  Conservatoire 3687 

Règlement  de  la  Sociélé  des  Concerts 3691 

Principaux  traits  de  l'histoire  de  la  Société  des 

Concerts 3r>94 

'  Les  programmes  de  1828  à  L913   :'.6'.>7 

La  Société  des  Concerts  depuis  1914 3702 

Les  programmes  (de  1919  a  19» 3704 

Les  statuts 3706 

La  salle  des  Concerts 3707 

Comité.  Répétitions.  Personnel  .le  l'orchestre  et 

des  choeurs.  —  Abonnés 3708 

Concerts  fondés  depuis  1828 3710 

Association  des  Concerts  Lamourcux 3710 

Association  artistique  des  Concerts  Colonne  .  . .  3712 

Concerts  Siraram 3713 

i  Irchestre  symphonique  de  Paris ■ . .  3714 

LOrphéon  par  11.  Radiguer 3715 

La   vie  et  l'oeuvre  de  B.  Wilhem,  créateur  de 
l'enseignement  scolaire  du  chant  en  France 

et  fondateur  de  l'Orphéon :ï717 

Les  débuts  de  l'enseignement  scolaire  de  la  mu- 
sique en  France 372i  > 

La  "  naturalisation  •■  du  ebant  en  France  parla 

méthode  Wilhem 3721 

Procédés  pédagogiques  de  la  méthode  Wilhem.  3722 

La  création  de  1'  «  Orphéon  ».  Mort  de  Wilhem.  3726 

L'orphéon  après  Wilhem  3726 

La  vie  et  l'œuvre  d'Adolphe  Sax 3732 

Premiers  travaux 3734 

Réorganisation  des  musiques  militaires 3736 

La  réorganisation  des  musiques  militaires  en 
1845.  —  Création  des  orchestres  d'harmonie  et 
de  fanfares  modernes  sur  l'initiative  et  avec 

les  instruments  nouveaux  d'Adolphe  Sax 3738 

La  routine  contre  le  progrès 3740 

L'œuvre  d'A.  Sax 374'? 

L  avenir  de  l'Orphéon :;715 

Les  théâtres  musicaux  subventionnés,  par  A. 

Le  théâtre  avant  Louis  XIV :',74s 

I.  Les  premiers  spectacles 374s 

II.  De  1402  à  1548 3750 

Les  Confrères  de  la  Passion 3750 

Les  Clercs  de  la  Bazocbe :!751 

Les  Entants  sans  Souci 3752 

Les  interdictions  du  Parlement . .  :;7r,:; 

Mylères,  jeux  et  soties 3755 

III.  De  1548  à  Louis  XIV :!755 

Les  Confrères  de  la  Passion 3756 

Le  théâtre  de  musique  sous  Louis  XIV 3762 

Origine  de  l'Opéra 3762 


La  Comédie  italienne  elles  petits  Ihéàtres :-i7G7 

Police,  censure  et  droit  des  pauvres 3769 

Le  Théâtre  de  musiqne  de  Louis  XIV  à  la  Révo- 
lution   

L'Opéra 3772 

Les  rapports  de  la  Comédie  française  et  de  l'Opéra  3777 

Les  forains 3778 

L'Opéra-Comique 3779 

La  Comédie  italienne 3781 

Les  petits  théâtres 3782 

Police,  censure  et  droit  des  pauvres 3784 

Le  théâtre  pendant  la  période  révolutionnaire, 

de  1790  à  1806 3787 

La  liberté  des  spectacles 37*7 

Police 3787 

La  censure  sous  la  Révolution 37S(S 

Le  droit  des  pauvres  sous  la  Révolution 3791 

L'Opéra 3792 

Le  théâtre  depuis  1806 

Retour  au  régime  du  privilège 3795 

Police 379* 

Le  théâtre  depuis  1864   37'.".' 

Ouverture  des  salles  de  spectacle 3799 

La  police  des  salles  de  spectacle 3799 

La  censure 3800 

Les  théâtres  subventionnés  3802 

L'Opéra 3803 

i  laisse  des  retraites  de  l'Opéra 3807 

L'(  Ipéra-Comique 3813 

Liste  des  premières  représentations  à  l'Opéra- 

Comique  de  1915  à  1929 :is' '' 

Les  salles  de  l'Opéra   3818 

Les  directeurs 3818 

Les  chefs  d'orchestre 3819 

Liste  chronologique  des  œuvres  représentées  à 

l'Opéra  depuis  l'origine 3820 

L'édition  musicale,  par  .1.  Durand 

Historique ■  3834 

Technique 3834 

Notation  musicale  à  l'usage  des  aveugles  d'a- 
près le  procédé  Louis  Braille,  par  A.  Ma- 

HAUT 3836 

Table  générale  îles  signes 3840 

Notes  sur  la  presse  musicale  en  France,  par  A. 

IV,     ,:x      3S4J 

Théâtres  et  salles  de  concert,  par  V.  Blavei  ;"' '"' 

Sonorité  des  salles,  par  G.  Lyon  3873 

Le  théâtre  et  les  auteurs,  par  A.  Peytei 3875 

APPENDICE 

Le  phonographe,  par  A.  Machabey  388Î 

L'électricité  au  service  de  la  musique,  par  M. 

Maivtenot 3896 

La  notation  musicale  autonome  de  Jean  Haut- 

stont :!'"  "  ' 


ADULMJIM.  —  Vol.  I,  p.  497,  2«  colonne,  il  faut  avant  :  Réflexion  du  son.  Erho  :  Chap.  VI.  Réflexion 


du  son  et  Salles,  en  capitales  et  en  capitales  antiques 

ERRATUM.  —  Tome  III,  p.  1793,  3e  ligne,  colonne  de  droite  :  su 


ppri 


Même  paye,  note  I,  substituer  à  :  «  27  octobre  1921,  par  l'auteur,  André 
«  L!  décembre  1913,  sous  les  auspices  de  M.  E.  H  yard,  puis  le  27  octobre 


itr.Nr  dit  ». 

.\r  »>,  le  texte  ci-après 

ar  Léo  Sib  lui-même.