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ENCYCLOPÉDIE
D'HISTOIRE NATURELLE
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20 a”
io 3. — Psare abdominale.
Lio, 1. — Anthidie discoïdale. (Mâle.) Fig. 2. — Darnis limacode. 19
{Hymenoptère ) {(Hémiptère.) (Diptère.)
cJ
Fig. 6. — Bythoscope gris.
Fo. 4 — Polydesme. Fig 5.— Criquets ordinaires.
(Hémiptère.
(Myriapode.) (Orthopteère.)
Fig. 9.
Pie. 7. — Carabe de Scheidler. Lig. 8. — Serpule très-contournée. Fig. 10. — Érèse cinabérine
(Colcontère.) (Annélide.) (Arachnide.)
v. 40
GÉNÉRALILÉS SUR LLS ANNÉLÉS
ENCYCLOPÉDIE
D'HISTOIRE NATURELLE
OU
TRAITÉ COMPLET DE CETTE SCIENCE
d'apres
LES TRAVAUX DES NATURALISTES LES PLUS ÉMINENTS DE TOUS LES PAYS ET DE TOUTES LES ÉPOQUES
BUFFON, DAUBENTON, LAGEÉPÈDE
G. GUVIER, F. GUVIER, GEOFFROY SAINT-HILAIRE, LATREILLE, DE JUSSIEU
BRONGNIART, erc., etc.
Ouvrase résumant les Observations des Auteurs anciens et comprenant toutes les Découvertes modernes
jusqu'à nos jours.
ti
PAR LE D CHENU
CHIRURGIEN - MAJOR À L'HÔPITAL MILITAIRE DU VAL =-DE-GRACE, PROFESSEUR D'INISTOIRE NATURELLE, ETC.
ANNELÉS
Avec la vollaboralion de M. Æ. DESMAREST, du Muséum d'Histoire nalurelle,
Secrétaire de la Société Entomologique de France, ele.
Udontoptère admirable. — Page 200.
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(22 D)
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PARIS
MARESCQ ET COMPAGNIE GUSTAVE HAVARD
EDITEURS DE L'ENCYCLOPÉDIE, LIBNAIRE,
D, RUE DU PONT-DE-10D1 (PRÈS LE PONT NEUF). 19, RUE GUÉNÉGAUD (PRÈS LA MONNAIE).
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Devant passer en revue dans ce volume la plupart des ordres de la élasse des Insectes
et les classes particulières des Myriapodes, des Arachnides et des Annélides, nous y avons
ajouté l'indication des caractères principaux des ordres des Coléoptères, auxquels nous
avons consacré trois volumes spéciaux de cette Encyclopédie, et des Lépidoptères, qui y
forment deux volumes, ainsi que ceux des classes des Crustacés, Cirrhipèdes, Rotateurs et
Helminthes, qui entrent dans le même volume que les Mollusques et Zoophytes. De cette
manière nous exposons l’histoire complète de l'embranchement des Ammaux anneLés.
On comprend, d'après l'immense sujet que nous avions à traiter, qu'il ne nous a été
souvent possible que d’effleurer une matière aussi mtéressante. Cependant, grâce surtout
aux cinq cent vingt vignettes que nous donnons dans le texte et dans les planches, nous
croyons avoir fait connaitre suffisamment les espèces véritablement utiles, et, en outre,
nous avons cherché à présenter le tableau de toutes ou à peu près toutes les coupes
génériques admises par les auteurs, renvoyant, pour plus de détails, aux ouvrages spé-
ciaux, où l'on pourra compléter les notions que nous donnons.
D'un côté, les Annelés utiles, comme l’Abeille, qui produit le miel et la cire; la Coche-
mille, qui a fourni pendant longtemps et qui fournit même encore une belle couleur tincto-
riale; certains Ghalcidiens, qui produisent le phénomène de la caprification nécessaire,
dans certains pays, pour hâter la maturité des figues; les Cynips, qui nous donnent la
noix de galle; les Fourmis, si intéressantes par elles-mêmes, qui neutralisent l’action
fâcheuse des Pucerons sur plusieurs de nos arbrisseaux, les Insectes nombreux qui, en
obéissant-à leur instinct carnivore, nous délivrent de beaucoup d’ennemis; la Sungsue, qui
est si avantageusement et si souvent employée en médecine, etc.; et, d’un autre côté, les
Annelés nuisibles, que nous devons connaitre pour empêcher leurs dégâts, comme les
Blattes et les Kakerlacs, qui salissent et dévorent nos provisions; les Courtilières ou Tau-
pes-Grillons, si redoutées des agriculteurs; les Acridiens, désignés vulgairement à tort sous
le nom de Sauterelles, et spécialement l'OEdipode voyageuse, qui, venant par bandes incom-
mensurables, produisent la disctte et la peste; les Termites, qui rongent nos bois; les
Guépes et Frelons, qui nous font de cruelles blessures; les Sirex, qui dévastent les Sapins
et qui sont récemment devenus célèbres par les perforations qu'ils ont faites aux balles de
nos soldats en Crimée; la Punaise des lits, qui nous importune trop souvent; les Cousins,
les Taons et les OEstrides, si redoutables pour l'Homme et les animaux, de même que les
Puces et les Poux; les Araignées, qu'une répugnance invincible fait à tort détruire; la Ta-
rentule et les Scorpions, dont on a exagéré l'action malfaisante; les Acarus, et particulière-
ment l'A. scabiei, qui produit et propage la gale; les Vers de terre, qu’on a regardés comme
redoutables à nos cultures, elc., ont été Les objets principaux de nos études. Mais nous
n'avons pas négligé non plus ces êtres si nombreux, remarquables par leur instinct et par
leurs mœurs, par la beauté de leurs téguments, la bizarrerie de leurs formes, par les
phases si intéressantes de leur développement, elc.; tels sont, parmi beaucoup d’autres
animaux que nous passons en revue, les Perce-oreilles, Mantes, Phasmes, Grillons, vraies
Sauterelles, Éphémères, Perles, Libellules, Fourmilions, Phryganes, Odynères, Crabrons,
Chalcidites, Ichneumons, Tenthrèdes, Ghrysis, Aphidiens, Fulgores, Gigales, Nèpes, Penta-
tomes, Scutellères, Tipules, Asiles, Syrphes, Muscides ou Mouches, Nyctéribies, Podures, Lé-
pismes, lules, Scolopendres, Aranéides, Pinces, Faucheurs, Aphrodites, Térévelles, Serpules,
Arénicoles, etc.
C'est dans l’histoire spéciale de chacune des divisions ‘principales que l’on trouvera l'in-
dication des nombreux ouvrages que nous avons consultés, et ce n’est pas actuellement le
moment de citer le nom des auteurs que nous avons pris pour guides. Ajoutons seulement
que, Secrétaire de la Société entomologique de France depuis vingt ans, nos recherches
personnelles, aussi bien que celles de nos collègues, nous ont souvent servi dans la rédac-
tion de ce volume.
De même que pour les autres parties de cet ouvrage, une table générale et complète de
tous les articles décrits ou indiqués, ainsi que de toutes les figures qui s’y rapportent,
était tout à fait nécessaire pour faciliter les recherches : cette table est actuellement sous
presse et sera bientôt publiée.
E. DESMAREST.
Paris, 1° avril 1859.
AVIS
regard de la page indiquée.
Planches,
2.
O1
10.
{114
ORTHOPTÈRES.
. Blatte javanaise. — Érémiaphile de Gené. —
Acanthops déchirée. — Mante mendiante. . ,
Cyphocrane Goliath. — Phasme de Serville. —
Tétrix pointu. — Perlomorphe de Pelée. . .
Platydactyle de Surinam. — Grillacride à tête
rousse. —Sauterelle verte. — Anostotome de
la Nouvelle-Hollande.. . . . . . . . . . ,
. Truxale à nez. — Érémobie de Jamin. . . .
NÉVROPTÈRES,
Gomphide onguiculée. — Æschne Iren.— Agrion
chinois. —Caloptéryx vierge (mâle'et femelle).
Mégistogastre linéaire. . . . . .
. Libellule indienne.— Némoptère Coa. — Macro-
nème rougeâtre. — Némoptère étendue. —
Fourmilion de Percheron.. . . .
. Termite lucifuge.— Ascalaphe du Brésil. — Hé-
mérobe à grosse têle. — Fourmilion libellu-
loïde.—Panorpe commun.—Éphémèrelimbée.
—Raphidie serpent...
Bittaque tipulaire. — Ascalaphe de Bénin. — Bo-
rée hyémale. — Corydale cornue. . .
HYMÉNOPTÈRES,
. Mélipone anthidioïde. — Bourdon des jardins
(nid). —-Colletes poilue. — Halicte ceint. —
Xylocope violette (femelle). — Psithyre rupes-
tre. — Centris dénudée. — Chalicodome des
murs (Nid de). — Xylocope violette (mâle). :
Cératine à labre blanc. — Osmie de Tunis. —
Anthidie florentine. — Nomade variée. — Mé-
lissode de Latreille. — Crabron poli. — Cœæl-
loxys à queue rouge (mâle et femelle). — Am-
MOLALEMDICOIOE. AR 0e -
Chartergue cartonnière. — Sphex du Cap. —
Apioica de Virginie. — Poliste française
(mâle et neutre). — Chartergue cartonnière
(Nid de). — Macromérys brillant. — Hogardie
LONSSAUTE Re
AU
Pages.
4
47
63
69
116
119
RELIEUR
Les planches tirées hors texte sont au nombre de quarante. Chaque planche doit être placée en
Planches. : ; Pages.
12. Chlorion vert d’airain. — Évanie à appendice,
ventral. — Méthoque ichneumonoïde. — Mé-
13.
14.
15.
16.
17.
18.
49°
20.
21.
gisque annulé. — Fourmi (nid dans l’intérieur
d'un arbre). — Pélécine polycérate. — Joppa
antennée. — Cèphe abdominal. — Cimbex de
Kirby.
HÉMIPTÈRES.
Typhlocyre chouette. — Puceron du rosier. —
Sélénocéphale souillé.— Dorydie lancéolée. —
Bythroscope veiné.— Jasse varié. — Eupélix
allonsé Ne PER
Hétéronote blessé. — Umburnie noire. — Ada
enflée. — Mysidie à élytres blanches. — Aco-
nophore à pattes jaunes. — Némipryque mar-
giné. — Muffonie inclinée. —Isse grylloïde. .
Lippille de l’ajonc. — Calytoprocte lystroïde. —
Élalodiptère à gros yeux. — Lysire pulvéru-
lente. — Lystre moyenne.. . . .
Euchophore de Serville. — Pæciloptère phalé-
noïde. — Aphane aimable. — Eurybrachyde
retournée, — Eurybrachyde basale. . . .
Dilobure corticale. — Eurybrachyde insigne, —
Platypleure chouette. — Fulgore porte-lan-
terne. — Coréthrure varié de brun, . . . .
Pricanie pœciloptéroïde. — Idiocère à élytres ta-
chetées. — Cigale sanate. — Patare blanc. —
CD ECS NT TONER
Patare recherche
Graphosome linéolé. — Agonoderme rayé de
jaune. — Trigonosome de Desfontaines. —
Macrocère grande, — Charicothère nouveau.
— Asope de la Floride, — Ménénote courhé
en croissant. — Méginème à antennes courtes.
Discocéphale marmoré.— Oncoscélide d’Austra-
lasie.— Piézomère à deux dents. — Copius in-
termédiaire. — Apodibye hellénique. — Xéno-
_ phore grise. — Sciodoptère agréable. . . . .
Épirodère marqué. — Euménote obseur.— Vul-
sirée noire et rouge. — Myschore grêle. —
Dinidor maculé. — Storthie livide. — Dysode
lunulé.
178
197
198
200
182
195
202
206
216
Planches.
99, Odontotarse blanc. — Asope lacheté. — Pandure
miniator. — Pétascélide remipède. — Catha-
ran{e incarné. — Harpocère de Burmeister. —
Eulya agréable. . .
DIPTÈRES.
19
O1
. Chrysochlore améthyste. — Coria conopsoide.—
Magistorhynque longirostre. — Ædes cendré.
— Médetère tacheté. . . . . . . . . . .
Blépharide coriace. — Omatie à tache blanche. —
Tanype varié. —Oxyure agréable. — Hoplisto-
mère serripède. .
24.
95, Cochenille du nopal ou Coccus du cactus. ee
rèthre à antennes plumeuses. — Rhaphie à
antennes longues. — Mydas géant. . . .
26. Tipule gigantesque. — Néphrotome dorsal. —
Anophèles maculipenne. . EL Eu:
27. Gnoriste apicale. — Limmobie rivose. — Dorthé-
sie de l’ortie. — Macrocère boueuse. — Bibio
CES AALALIS Ne CE CN CA
28. Exoprosope d'Audouin. — Cténophore jaunâtre.
— Néides élégant. — Laphrie sénomène. . .
29. Chrysote néeligé. — Chorosome du roseau. —
Scénopine fenestral. — Rhipidie tachetée. —
Trichocère brune.— Ancare lisse. — Micropèze
latéral. — Hélophile pendulé. So
30. Dilophe vulgaire. — Subule marginé.— Cténo-
phore flavéolé. — Œdemogène du Renne.—
Cécidomyie bombyforme. . . no Dious
31. Similie ornée. — Scathopse marqué. — Scéno-
buse anal. — Lisse lonocérine. — Némotelle
panthérine. — Diopse un peu tacheté..
52. Cécidomyie leucopèze. —Plicoptère de Gonta-
mine. — Parage à deux couleurs. —-Sphé-
comyie tacheté. — Odontomyre verdâtre. —
Érioptère grise. — Mycétobie annulée.. . .
219
234
251
228
Planches.
MYRIAPODES.
. Jule lucifuge. — Polyxène lagure. — Polydesme
Fontaria) de Virginie. — Scutigère arénoïde.
Gloméris marginé. — Blaniule à gouttelettes.
— Gloméris aplati.— Géophile de Walckenaër.
La
ARACHNIDES.
O1
LD
Phryne rénilorme, — Épeire de Palisot. — Thé-
lyphone géant. — Éripe hétérogastre. — Arai-
gnée domestique. . . . .
55. Faucheur commun. — De de En.
— Mégamère vif. — Hydrahne globuleuse. —
Nymphon à grosses pattes.
ANNÉLIDES,
Hésione splendide.— Aphrodite hispide. — Al-
bione des Squales. — Térébelle méduse. —
Glycimere de Meckel. . . . . . ;
. Cirrhétule de Lamarck. — Serpule ie —
Arénieule commune. — Sylle collier
261
270
288
GÉNÉLALITÉS SUR LES ANNELÉS, ARTICULÉS ET INSECTES,
58. Poliste française (femelle). — Carabe brillant. —
Cimbex variable. — Cigale aiguë. — Platypèze
fascié. — Laryngode d'Australie. — Callicère
bronzée. 20... Hotel tone -
59. Anthidie singulate. — Aneplbphare ee.
— Aphrite changeant. — Typhaée fumeuse. —
Hétrode épineuse (femelle). —Cantao dépa-
reillé. — Prostemme tachetée. — Mygale can-
céride. — Orcheselle ceinte.. .« . . + - .
40. Anthidie discoïdale (mâle). — Darnis limacore.
— Psare abdominale. — Polydesme. — Gril-
lons ordinaires. — Bythoscope gris. — Garabe
de Scheidler. — Serpule très-contournée. —
Ixode du Hérisson. — Érèse cinabérine. Au titre.
16
(1 h
Pig D — Anthidie singulate. (Femelle.
(Hyménoptère.)
Fig. 3. — Aphrite changeant
(Diptère.)
Es. 2 — Anoplophore staulevane.
(Coléoptère.)
lis. #4. — Typhaée fameuse Fig. 5 — Hétrode épineux (Fcmelle.) Fig. 6. — Cantao dépareillé
(Coléoplère.) (Hémiptére.) ({Hémiptère \
À Fis. 9.
Prostemme lachetée. Fig. 8. — Mygale canctride. Orcheselle ceinte.
{Hémiptère.) (Arachnide.) (Myriapode.)
A. GÉNÉRALITÉS SUR LES ANNELÉS. rs 59.
- 4
NX
a
ANNELES.
C'est principalement d'après la disposition particulière affectée par
le système nerveux, qui commande les autres organismes et y occa-
sionne des modifications importantes, que les Animaux ont été sub-
divisés, par G. Cuvier et presque tous les naturalistes, en quatre
embranchements : 4° les Vertébrés, à cerveau et moelle épinière ren-
fermés dans une enveloppe osseuse composée du crâne et des verté-
res, et à ganglions et filets nerveux en sortant pour se distribuer dans les
diverses parties du corps; 2° les Articulés, à système nerveux consistant en
deux longs cordons régnant le long du ventre, renflés d'espace en espace en
nœuds ou ganglions, et, comme dans les deux embranchements qui vont
suivre, n'étant pas compris dans l'intérieur d’une colonne vertébrale; 3° les
Mollusques, à système nerveux distribué dans l'enveloppe molle et contractile
qui forme le corps, composé de plusieurs masses éparses, réunies par des filets nombreux, et dont
les principales placées sur l'œsophage portant le nom de cerveau; 4° les Rayonnés ou Zoophytes,
à système nerveux n'étant souvent pas bien distinct, et se ramifiant dans les diverses portions du
corps, qui ne sont plus placées symétriquement aux deux côtés d'un axe, ainsi que dans les trois
cmbranchements précédents, mais étant disposées comme des rayons autour d'un centre. ,
Dans ce voluine, nous nous proposons de faire connaître spécialement l’'embranchement des Ani-
maux articulés, auquel nous avons préféré, à l'exemple de M. Milne Edwards, appliquer le nom
7 d'Animaux annelés, parce que nous ne le circonscrivons pas de la même manière que le faisait
A. ; 1
=
j
1
9 HISTOIRE NATURELLE.
G. Cuvicr, et que nous lui assignons des limites beaucoup plus larges; en effet, le célèbre auteur
du Règne animal n'y rangeait que les Annélides, les Crustacés, les Arachnides et les Insectes, tan-
dis qu'il en éloignait les Lernées et les Cirrhipèdes, qui se rapportent très-probablement au type
des Crustacés, les Hlelminthes ou Entozoaires et les Rotateurs, qui ne sont pas des Zoophytes, et
qui, d’après les observations récentes, sont évidemment des êtres de la division typique des Arti-
culés. Nous donnerons la caractéristique des sous-embranchements, classes et ordres des Annelés, et
nous entrerons dans de nombreux détails sur les différentes familles, genres et espèces principales
de la plupart d’entre eux. Mais, comme l'étude de plusieurs classes et ordres (tels que ceux des
Crustacés, Cirrhipèdes, Coléoptères et Lépidoptères) ont dû, par leur importance même, être traités
séparément dans des volumes particuliers de notre Encyclopédie, et que nous avons aussi parlé, en
passant en revue les anciens Zoophytes, des groupes des Helminthes et des Rotateurs, nous n’en-
trerons dans quelques développements que pour les Insectes Dermaptères, Orthoptères, Névroptères,
[yménoptères, Rhipiptères, Iémiptères, Diptères, Aphaniptères, Anoploures et Thysanoures, et
pour les Myriapodes, les Arachnides et les Annélides.
Le champ que nous avons à parcourir est encore immense; nous devons donner des notions gé-
nérales sur les Forficules, Blattes, Grillons, Sauterelles, Demoiselles ou Libellules, Éphémères, Ter-
mites, Ichneumons, Fourmis, Guêpes, Abeilles, Punaises, Fulgores, Pucerons, Cocher les Puces,
Cousins, Tipules, Taons, (Estres, Sarcophages, Mouches, Poux, Ricins, Podurelles, Scolopendres,
lules, Araignées, Mygales, Scorpions, Phalangers, Acarus, Néréides, Vers de terre ou Lombries,
Sangsues, etc.; animaux si intéressants à étudier sous le donble point de vue de leurs mœurs et de
leurs particularités organiques, et dont un grand nombre doit être connu de l’homme, soit à cause
des ressources qu'il a su en tirer, soit, au contraire, à cause du mal que ces êtres lui font. Nous
tàcherons de ne donner que les caractères zoologiques et anatomiques indispensables des nombreux
animaux dont nous devons faire l'histoire, et nous consacrerons la- majeure partie de ce volume à
faire connaître leurs habitudes naturelles et à indiquer les applications utiles qu'ils offrent à l'égard
de l'espèce humaine.
Dans l’embranchement des animaux annelés, surtout dans ceux qui, comme les Insectes, les
Crustacés et même lee Annélides, représentent au summum le type articulé, le système nerveux se
compose de nerfs qui se distribuent dans tout le corps et de centres médullaires ou de petits gan-
glions disposés symétriquement et placés par paires de chaque côté de la ligne médiane du corps, ou
confondus en masses impaires occupant cette ligne, et réunis par des cordons médullaires en deux
chaînes étendues dans toute la longueur ou dans une partie seulement du corps, et plus rarement
en une seule chaîne; le cerveau est constitué par une de ces masses nerveuses occupant la tête, et
les autres ganglions sont toujours logés au-dessous du canal alimentaire; ces ganglions épars sont
d'autant moins nombreux que l’animal est plus élevé dans le type, jusqu’à ce point qu’il peut n’y
avoir que deux masses nerveuses : l'une dans la tête et l’autre dans le thorax, tandis que dans les
Annelés inférieurs, au contraire, on peut constater la présence d’une ou de plusieurs paires de
ganglions par chaque segment du corps, alors très-nombreux, ou bien ces masses diparaissent
presque tout à fait. Chez tous les animaux de cet embranchement, le corps est fractionné en seg-
ments et paraît composé d’une suite d’anneaux placés les uns à la suite des autres : dans le plus
grand nombre, la peau est solidifiée, forme une sorte de squelette extérieur et est transformée en
anneaux réunis entre eux, de telle sorte que les mouvements soient possibles; c’est ce qui a surtout
lieu dans les Insectes et les Crustacés : dans quelques-uns, comme les Annélides et les Helminthes,
cette segmentation n'est qu'apparente, et les anneaux sont simplement représentés par des plis
transversaux sillonnant la peau et ceignant le corps. Une uniformité remarquable de structure se
remarque entre les divers anneaux qui composent le corps, et surtout dans les dernières espèces du
type; chacun de ces anneaux peut porter deux paires d’appendices ou de membres : l’un en avant,
et l’autre en arrière, et cela a surtout lieu encore dans les Annelés inférieurs; mais alors ces appen-
dices ne sont pas très-compliqués; le plus habituellement, principalement dans les groupes supé-
rieurs, les appendices de certains anneaux sont seuls apparents; les autres ne se développent point
ou restent à l'état de vestige. Les appendices de larceau dorsal acquièrent particulièrement un
grand développement dans les Annelés supérieurs, tels que les Insectes, et ils constituent les an-
tennes, les organes masticateurs, les nageoires, les pattes, ete. : ces dernières, qui peuvent manquer
{
ANNELÉS. +8
ou être remplacées par de simples.soies, sont en nombre assez variable dans tout le type, car, si l’on
en compte le plus ordinairement trois paires, dans quelques cas il peut y en avoir plusieurs cen-
taines. La binarité longitudinale que nous avons signalée dans le système nerveux et dans la dispo-
sition des segments se remarque également dans la plupart des autres organes.
Nous ne pouvons rien dire actuellement d’une manière générale sur l'habitat et les mœurs des
Annelés; en effet on en rencontre dans toutes les parties du globe, dans le Nord comme dans le
Midi; tous les milieux leur sont bons : ils habitent le sol ou son intérieur, l’eau, l’air, etc.; vivent
aux dépens des végétaux ou des animaux vivants ou morts; leur taille, presque toujours peu con-
sidérable, présente de nombreuses variations, ete. C’est donc dans l'étude des divisions secondaires
que les particularités intéressantes qu'offrent ces animaux trouveront naturellement leur place. Il
en sera de même de l'indication des principaux auteurs qui se sont occupés de ces êtres. Disons seu-
lement actuellement que le rang que les Annelés doivent occuper dans le règne animal a varié selon
les naturalistes qui s’en sont occupés; pour G. Cuvier, ils sont placés entre les Mollusques et les
Zoophytes, et pour la plupart des naturalistes, pour De Blainville principalement, plus élevés dans
la méthode, ils doivent être intermédiaires entre les Vertébrés et les Mollusques : en effet, outre le
rapport assez intime qu'il y a entre les Vertébrés, animaux à squelette intérieur, et les Annelés,
animaux à squelette extérieur, ces derniers animaux, quand on considère la majorité des espèces,
ont une organisation plus complète que celle des Mollusques, et ce n’est que dans les espèces infé-
rieures que cette organisation se simplifie beaucoup. Ajoutons aussi en terminant que, comme nous
l'avons déjà dit, les limites de l'embranchement des Annelés sont loin d’être suffisamment tracées,
et qu'elles diffèrent suivant les zoologistes classificateurs, tels que G. Cuvier, De Blainville, De La-
marck, MM. C. Duméril, Milne Edwards, etc. .
On divise les Annelés en deux sous-embranchements : 1° les Animaux articulés, toujours pourvus
d'un nombre variable de membres articulés; 2° les Vers, qui n’ont plus de membres articulés, et
chez lesquels ces organes sont remplacés par des soies plus ou ou moins fortes où peuvent même
disparaître complétement. à
Lg. 2. — Chlænie à quatre slrics. Fig. 5. — Cléophane à antennes dentées. * Fig. 4. — Plymate fortificale,
{Articulés. Coléoptères.) (Articulés. Lépidoptères.) (Articulés. Hémiptères.)
HISTOIRE NATURELLE.
LS
ap Lreuner Sous- anbraucheneut.
ARTICULÉS.
De tous les animaux annelés, ce sont ceux qui méritent le mieux cette dénomination, en raison
des divisions annulaires de leur corps; ce sont de tous ces êtres ceux dont l’organisation est la plus
complexe et dont les facultés sont les plus parfaites. Ils sont toujours pourvus de membres artieu-
lés, c'est-à-dire de pattes ou de nageoires composées d’une série de leviers, mobiles les uns sur les
autres et placés.bout à bout. f
En général, tout le corps, aussi bien que les appendices, sont recouverts par un squelette tégu-
mentaire formant presque toujours une sorte de cuirasse très-résistante. Ce squelette est garni à
l’intérieur par une membrane composée essentiellement d'une lare plus ou moins épaisse, non
interrompue, formée à son tour par un tissu spécial, presque corné, et dans la substance duquel
se déposent souvent des sels calcaires. Dans divers points, ce tissu se solidifie, tandis que dans d'au-
tres il conserve de la flexibilité; ces mêmes pièces durcies se réunissent parfois entre elles et forment
les anneaux du corps, qui peuvent même se joindre les uns aux autres, mais de manière qu'il soit
presque toujours possible de les distinguer. Ces anneaux varient dans leur nombre et se grou-
pent de telle sorte qu'ils constituent constamment trois parties plus ou moins distinctes : une tête,
un thorax et un abdomen, qui portent chacun des appendices. Ceux de la tête, affectés partieulié-
rement aux sens et à la digestion, sont toujours disposés latéralement et par paires, tels peuvent
être les antennes, les mächoires, les palpes, etc.; ceux du thorax constituent les membres propre-
ment dits ou les pattes ambulatoires, qui, dans quelques cas, quand l'animal est parasite, devien-
nent rudimentaires ou disparaissent même; enfin ceux de l'abdomen affectent des formes toutes
spéciales et font souvent partie de l’appareil de reproduction.
Les organes des sens sont moins complets que chez les Vertébrés, et quelques-uns semblent man-
quer. Le toucher, comme sens fondamental, a dû s’y retrouver et s’y percoit de plusieurs mañières;
on ne connaît pas d’instrument spécial pour l'odorat; si l'appareil auditif existe chez tous, on n’en
a pas découvert l'appareil dans la plupart d'entre eux; la vision, percue par des appareils très-diffé-
rents de ceux des Vertébrés et des Mollusques, offre des particularités très-remarquables que nous
étudierons en traitant des Insectes en général; la gustation doit aussi s’y retrouver, mais a échappé
à nos recherches. Le système nerveux est constamment bien développé et composé d’un nombre va-
riable de ganglions placés par paires de chaque côté de la ligne médiane ou réunis en masses im-
paires sur cette même ligne, et communiquant les uns aux autres par des cordons longitudinaux, de
manière à former un axe ganglionnaire droit et entièrement symétrique; on doit y distinguer une :
portion céphaliqué constituant une sorte de cerveau et une portion ventrale composée de gan-
glions variables par leur nombre et par leur position. L'appareil digestif est essentiellement formé
d’un tube alimentaire occupant toute la longueur du corps, libre et sans adhérence, en général
étendu en ligne droite, ouvert à ses deux extrémités en haut à la bouche et en bas à l'anus, et of-
frant une assez grande complication dans sa structure. Le sang est à peu près incolore et circule
tantôt dans un appareil vasculaire complet, tantôt dans des lacunes qui se trouvent entre les divers
ARTICULÉS. 5
organes, et il est toujours mis en mouvement par un cœur où par un vaisseau contractile placé sur
la ligne médiane du dos. Le mode de respiration diffère suivant les différentes manières de vivre
des Articulés; dans le plus grand nombre de cas, la respiration se fait par des stigmates et des tra-
chées, mais quelquefois elle a lieu par des branchies ou par des poumons plus ou moins fortement
modifiés. La reproduction se fait presque toujours par des œufs, et les sexes sont presque constam-
ment séparés. Les jeunes éprouvent des mues plus ou moins nombreuses; mais, en outre, le plus
grand nombre d'entre eux n’ont pas en naissant tous les organes qu'ils doivent avoir à leur état
complet, c'est-à-dire pendant ce temps où ils jouissent de la faculté de pouvoir reproduire leur
espêce. Ces animaux subissent donc dans le jeune âge des changements notables, souvent même de
véritables métamorphoses : ainsi presque toujours, au sortir de l'œuf, ils se présentent, pendant un
temps plus ou moins long, d’abord sous l’état de larves. c'est-à-dire en quelque sorte pendant leur
vie nutritive proprement dite, puis sous celui de nymphe ou de chrysalide, pendant lequel ils res-
tent en général tout à fait inactifs, et enfin sous celui d'être parfait, temps pendant lequel ils peu-
vent propager leur espèce. : L
On subdivise généralement aujourd’hui les Articulés en cinq elasses distinctes. Dans les uns, la
respiration est aérienne et s'effectue à l’aide de stigmates et de trachées ou de poches pulmonaires,
et les sexes sont constamment distinets ; tantôt ils ont une tête distincte du thorax et garnie d’an-
tennes; tels sont les Insecres, chez lesquels le corps est composé de trois portions distinctes : tête,
thorax et abdomen, et qui ont trois paires de pattes, et en général des ailes, et les Myrrapones, chez
lesquels il n’y a pas de distinction entre le thorax et l'abdomen, vingt-quatre paires ou davantage
de pattés; tantôt, comme dans les Aracunines, il n’y a pas de tête distincte du thorax, pas d'an-
tennes et constamment quatre paires de pattes. Dans les autres, la respiration est aquatique et s’ef-
fectue par des branchies, et il n'y a jamais d’ailes : tels sont les Grusracés, qui ont des sexes sépa-
rés, un appareil locomoteur presque toujours très-développé, persistant, et dans lesquels il y a babi-
tuellement cinq ou sept paires de pattes, et les CrramipèDes qu'on devrait probablement réunir à ces
derniers, qui sont hermaphrodites et n’ont plus d'organes locomoteurs chez les individus adultes.
Fig. 3. — Fulzore de Iorsfeld. HEUGE Épeire diadème.
(Insectes.) (Arachnides )
Fig. 7. — Polydesme. Fig. 8, — Crabe bordé.
(Myriapodes.) (Crustacés.)
6 HISTOIRE NATURELLE,
PREMIÈRE CLASSE.
INSECTES.
Linné indiquait sous le nom d’Insecres (Insecta) tous les animaux dont le corps est formé d’ar-
ticles placés bout à bout, et dont les pattes offrent aussi ce caractère, et ainsi comprise, cette déno-
mination correspond à celle aujourd’hui usitée d'animaux articulés; mais l’on réserve spéciale-
ment ce nom aux Articulés, ayant en général à leur état parfait des antennes, des mächoires,
souvent des ailes et constamment six pattes, ce qui les a fait appeler des Hexapodes par De Blain-
ville. Les animaux des autres classes de la division des Articulés, c'est-à-dire les Myriapodes, les
Arachnides, les Crustacés et les Cirrhipèdes, se distinguent des Insectes, ainsi que nous l'avons déjà
dit, et comme nous le dirons en traitant de l’organisation de ces derniers, par des caractères impor-
tants, et principalement par le nombre de leurs pattes articulées, toujours plus considérable que
trois paires ou bien n’éxistant plus dans les Cirrhipèdes à l’état adulte.
Les Insectes subissent des métamorphoses plus ou moins complètes, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas
en naissant tels qu’ils seront à l’époque où ils pourront se reproduire. Nous allons brièvement indi-
quer ces divers états transitoires, et nous nous étendrons surtout sur l’Insecte arrivé à son état
parfait.
L'œuf des Insectes varie considérablement ne sa forme, dans l’aspect de sa surface et de sa colo-
ration, et dans sa situation au milieu de la nature. Souvent cet œuf peut être ovoïde; mais il est
aussi parfois sphérique, cylindroïde ou lenticulaire. Sa surface est tantôt lisse, tantôt striée, tantôt
relevée par des côtes ou des lignes d’apparences variées. Sa coloration blanche, jaunâtre ou grise
dans le plus grand nombre de cas, est parfois verte, noire,ou bariolée de différentes teintes. Il est
quelquefois transparent, mais plus habituellement opaque. Quant à sa situation, il est, dans des cas
nombreux, déposé sur des feuilles, sur des branches d’arbres, abandonné dans l’eau ou dans son in-
térieur, ou enfoui dans la terre. On voit souvent des anneaux formés autour des branches par des
œufs accolés les uns aux autres, ou des amas d'œufs déposés à la surface des feuilles ou bien qui
sont fixés à la feuille par un long pédicule. Les œufs déposés dans la terre sont tantôt abandonnés à
eux-mêmes dans une fente ane. par la mère, tantôt renfermés dans des loges construites par l’In-
secte et dans lesquelles est déposée la première nourriture qui doit servir à la jeune larve qui en sor-
tira. Ces œufs peuvent être placés parfois assez profondément dans l'intérieur même des tiges dés
végétaux -dans des trous ereusés par les parents. Les œufs qui restent dans l'eau sont laissés à
eux-mêmes, ou placés dans un cocon protecteur ou encore enveloppés d’une espèce de gelée à l'aide
de laquelle ils-sont attachés à la face inférieure des corps submergés. Dans un certain nombre de
cas, beaucoup plus nombreux qu'on ne le supposait jadis, les œufs sont déposés dans le corps d'au-
tres animaux et dans les larves ou les Chenilles des Insectes eux-mêmes, et ces larves ainsi atta-
quées servent à la nourriture de l'ennemi qu'elles renferment et périssent prématurément. Deux
remarques générales doivent être faites au sujet de la manière dont les œufs sont déposés par la fe-
‘melle : la première, c'est qu’habituellement ces œufs sont pondus dans des circonstances qui per-
mettent aux larves qui en sortiront de trouver leur nourriture autour d'elles, et la seconde, c’est
que l'air et la température atmosphérique exercent une action marquée sur l’éclosion de certains
d’entre eux. Des faits intéressants, des détails de mœurs importants, se rattachent à l’histoire des œufs
des Insectes, et nous y reviendrons en traitant de chacun des ordres, et même de quelques-unes des
familles ou groupes principaux.
Fig. 9 — Pachycore de Klug.
(Hémiptères.)
Fig. 42. — Orcheselle jaunâtre.
(Thysanoures.)
Fig. 14. — Pou de l'homme
(Anoploures.)
Fig. 16. — Stratiomys caméléon.
Diptères.)
ANNELÉS. — INSECTES.
Fig. 10. — Gryllotalpa à quatre doigts. Fig. 11. — Gis{Oroghius )à
(Orthoptères.) mandibules. (Coléoptéres.)
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Fig. 15. — Libellule déprimée. Mâle.
(Névroptères.)
Fig. 15. — Forficule de Dufour.
(Dermaptères.)
Fig. 47. — Centinis élytré.
Fig. 18. — Tordeuse congénère
(Hyménoptères.) Femelle. (Lépidoptères.)
8 HISTOIRE NATURELLE.
En sortant de l'œuf, le jeune Insecte se présente sous l’état de larve : ce nom provient du latin,
larva (masque), parce que, sous ce premier état, l’Insecte, dans un très-grand nombre de cas, a sa
forme définitive pour ainsi dire masquée par l’enveloppe primitive, différant beaucoup de l'nsecte
parfait par son corps plus ou moins vermiforme ou lui ressemblant assez, mais étant toujours dé-
pourvus des organes du vol ou des ailes proprement dites, et des organes de reproduction. C'est
ainsi que : 1° parmi les Insectes qui se ressemblent sous les deux-états de larve et d'Insecte parfait,
on peut citer les Poux et les Puces, qui ne diffèrent que par l'absence d'organes génitaux; les Pu-
naises et les Cigales, dont les larves manquent à la fois d’organes.reproducteurs et d'ailes; 2° parmi
les Insectes qui ont une tout autre forme lorsqu'ils sont à l’état de larve que celle qu'ils auront à
l’état d’Insectes parfaits, on peut nommer les Coléoptères (Hanneton, Carabe), les Lépidoptères (Pa-
pillons), les Hyménoptères (Abeilles) et les Diptères (Mouches), qui non-seulement à l'état de larve
sont privés de tout organe reproducteur, mais qui offrent des différences notables tant dans la forrne
générale du corps que dans les parties de leur bouche, qui ont souvent des organes qu'ils perdront
ensuie, comme la filière de la Chenille, à l'aide de laquelle sera filé le cocon soyeux destiné à la
protéger dans ses transformations ultérieures, et chez lesquels les organes digestifs subiront des
changements très-notables pour arriver à l’état définitif qui constitue celui d'Insecte parfait.
En général, l'état de larve est celui sous lequel les Insectes vivent le plus longtemps, car ils ne
semblent, dans un grand nombre de cas, n’arriver à état parfait que pour un seul but, celui de
reproduire leur espèce, et parfois même, chez les Éphémères, par exemple, ils ne vivent alors que
quelques heures, et ne prennent même pas de nourriture. La larve vit un temps toujours plus long :
celle du Hanneton reste sous cet état pendant trois ans; celle de l'Éphémère, deux ans; beaucoup,
une année entière, ete. Mais une innombrable quantité d’Insectes subissent toutes leurs transfor-
mations dans le cours d’un même été, et ne se perpétuent l’année suivante que par l’éclosion des
œufs qu'ils ont déposés. C’est également sous la forme de larves que les Insectes sont le plus voraces,
tout au moins pour ceux qui subissent des métamorphoses complètes; car certains Insectes à méla-
morphoses incomplètes, comme les Sauterelles, les Termites, certaines Fourmis, ete., causent de
grands dégâts à leur état parfait. Le Hanneton lui-même ronge les feuilles à son état parfait, et
continue les dégâts que la larve a déjà causés en attaquant fortement en terre les racines des
arbres. Les Lépidoptères, au contraire, qui à l'état parfait ne prennent que peu ou parfois même
pas de nourriture, font, au contraire, à l’état de larves, plus ordinairement indiquées sous la déno-
mination de chenilles, de grands dommages à nos cultures en dévorant les feuilles des végétaux.
Dans-les larves dont le corps est vermiforme et ne ressemble pas, par conséquent, à celui de l’nsecte
parfait, tantôt il existe des pattes pour la locomotion, tantôt il n’en existe pas; lorsque les pattes
existent, elles sont tantôt au nombre de six, comme cela a lieu constamment à l'état parfait, tantôt
en plus grand nombre; dans le cas où il y a six pattes, ces pattes sont formées de plusieurs pièces,
placées les unes à côté des autres : elles sont dites articulées et représentent les six pattes de l’In-
secte parfait; lorsqu'il y a plus de six pattes, les unes sont articulées, et ce sont les six pattes per-
sistantes ou les vraies pattes, et les autres sont formées d'une seule pièce, ou, pour mieux dire,
sont des prolongements de l'enveloppe externe et des muscles qui s’y attachent à l’intérieur : on
les nomme des fausses pattes, parce qu'elles sont transitoires, et ne se retrouvent plus chez l’Insecte
parfait. Ces larves sont ordinairement divisées en treize articulations ou segments. La première de
ces articulations constitue ordinairement à elle seule la tête, qui porte les organes de préhension des
aliments ou parties buceales, c’est-à-dire les mandibules, les mâchoires, etc. et, en outre, souvent
des antennes et des yeux. Toutes les autres articulations se ressemblent beaucoup dans leur forme et
dans leur développement. Les trois articulations qui suivent la tête portent les pattes vraies, et ces
pattes sont fixées deux à deux à chacune de ces trois articulations. Les articulations qui suivent
peuvent porter de fausses pattes, dont le nombre varie dans les différents ordres d’Insectes. Sur les
côtés du corps de la larve, on voit habituellement des ouvertures appelées stigmates, orifices des
organes respiratoires ou trachées, qui sont destinées à l'entrée ou à la sortie de l'air que respire l'In-
secte. On ne voit pas de stigmates sur la tête,-non plus que sur une des premières et sur les der-
nières arliculations; on en trouve ordinairement sur presque tous les autres segments, et il y en.
a deux pour une seule articulation, c'est-à-dire une de chaque côté : de telle sorte qu'il y a habi-
tuellement soit neuf, soit dix stigmates de chaque côté du corps de la larve; cependant nous devons
ANNELÉS. — INSECTES 9
ajouter que chez certaines Mouches, tantôt il n°y à plus que deux stigmates placés à la partie posté-
rieure du corps, tantôt ces orifices, situés, au contraire, à la partie antérieure, sont mis en contact
avec l'air et hors du liquide dans lequel ils sont plongés par un mouvement prononcé de la larve,
qui est très-allongée.
Fig. 19. — Larve de Tachypore Fig. 20. — Chenille de l’Ennomos Fig. 21. — Chrysalide de la Vanesse
des celliers. (Coléoptères.) dentaire. (Lépidoptères.) grande Tortue. (Lepidoptères.)
L’accroissement des larves se fait en général par des changements de peau, par de véritables
mues, dans lesquelles l’enveloppe extérieure s’ouvre pour laisser passer le corps de l’Insecte. La
mue parait déterminée par le volume trop grand que le corps acquiert, et qui amène alors la rup-
ture des téguments; mais, comme ces téguments nouveaux, tous formés sous les anciens, ne tardent
pas à se solidifier, il en résulte qu’au bout d’un certain temps une nouvelle mue doit se produire,
et ainsi de suite, de sorte que la larve ne croit pas d’une manière insensible, au moins en appa-
rence, et que son accroissement semble se manifester par de brusques transitions. Comme l’acerois-
sement est considérable depuis la sortie de l'œuf jusqu'à la transformation en nymphe, il en résulte
que le nombre des mues doit être assez nombreux; on en compte cinq dans beaucoup d’Insectes,
mais, chez les Lépidoptères, il y en a davantage. Quand la larve est parvenue au moment de subir
ce changement, de même que quand elle doit se transformer pour passer à un autre état, elle reste
pendant plusieurs heures sans mouvement et sans prendre de nourriture; de temps en temps on
remarque seulement quelques brusques contractions dans tout son corps : la peau se dessèche peu
à peu et finit par s'ouvrir sur le dos en commencant par la tête; puis la larve se dégage et finit par
abandonner son ancienne dépouille. Au dernier changement de peau, non-seulement la larve se dé-
barrasse de son ancienne enveloppe, mais encore elle abandonne la membranne interne de son ca-
nal intestinal et même celle des trachées. Lorsque les larves sont parvenes à leur dernière mue,
elles se filent un cocon de soie dans lequel doit s'opérer le changement définitif de leur enveloppe;
certaines larves pénètrent dans la terre, où elles se creusent une loge qu’elles tapissent avec de la
vase ou d’autres matières, il en est qui se filent un cocon qui les soutient par le milieu du corps;
d’autres encore se suspendent la tête en bas, à l’aide de leurs fausses pattes, etc.
Le deuxième état de l'Insecte depuis sa sortie de l’œuf est celui de nymphe. Dans la grande ma-
jorité des cas, chez les Coléoptères et les Lépidoptères, par exemple, les nymphes ou chrysalides
restent immobiles, renfermées dans un cocon plus ou moins simple, dans l'intérieur duquel leur
corps est plus ou moins contracté et transformé : chez elles, le mouvement et la vie extérieure sont
suspendus : c’est en quelque sorte un temps de torpeur, d'engourdissement, pendant lequel il se
passe des phénomènes physiologiques très-remarquables. Quelques autres nymphes, au contraire,
comme celles des Sauterelles, ressemblent à ce qu’elles étaient à l’état de larve et à ce qu’elles se-
ron! à l’état parfait, si ce n'est sous le point de vue des’organes génitaux et des organes du vol, qui
ne présentent encore que des ébauches d'ailes; mais elles vivent, se meuvent et se nourrissent comme
le feront les Insectes parfaits. L'état de nymphe, chez les Insectes à métamorphoses complètes, est
indiqué par un développement relatif des anneaux du corps, qui permet d'y reconnaitre les trois
A. 2
4
10 IHISTOIRE NATURELLE.
régions céphalique, thoracique et abdominale; les antennes et les pattes ont acquis plus de longueur
et en même temps plus de parties qu’elles n’en avaient à l’état de larve; les ailes, jusqu'alors invi-
sibles, se montrent appliquées contre les côtés et la partie inférieure du corps, et recouvertes, de
même que les antennes et les pattes, par une enveloppe commune à tout le corps. Cette enveloppe,
parfois rehaussée de plaques dorées dans les Lépidoptères, a fait donner aux nymphes de ces Insectes
le nom de chrysalide; quant à la dénomination de pupe, quelquefois employée comme synonyme
de celle de nymphe, elle provient du mot latin pupa (maillot), qui rappelle l'enfance dans laquelle
se trouve alors l'Insecte. L'état de nymphe est une période d’abstinence et de repos pour la plupart
des Insectes; quoique cet état soit trés-court et varie seulement de quelques jours à quelques se-
maines chez presque tous les Articulés, c’est, au contraire, le plus long de la vie chez certains Pa-
pillons qui passent plusieurs mois sous cette forme. L'influence de la température est énorme sur le
développement de l’Insecte à l’état de nymphe : c’est pourquoi l’époque de l’année et l'élévation de la
température de l'été occasionnent des différences notables sur la durée de l’état de nymphe, que
l'on prolonge ou que l’on abrége pour ainsi dire à volonté en soumettant les nymphes à une tem-
pérature basse ou élevée. De grands changements se produisent dans les organes de l'Insecte pen-
dant l’état de nymphe, quoique cependant la respiration et la circulation soient pendant longtemps
à peu près suspendues; à l'extérieur, les articulations du corps se dessinent plus exactement; les
pattes et les antennes semblent se détacher, les ailes se développent, et l'abdomen exécute des mou-
vements fréquents; à l’intérieur, il se produit des modifications de forme dans les organes digestifs,
et les organes reproducteurs se développent en même temps que disparaît en très-grande partie la
masse du corps graisseuse qui occupait un très-grand espace dans la larve. Une fois sorti de l’enve-
loppe de nymphe, l'Insecte parfait a besoin de l’action de l'air pour durcir les diverses parties de son
corps, pour permettre à ses ailes de se développer, et pour acquérir la coloration qu'il doit désor-
mais avoir.
L’Insecte parfait est le dernier état des êtres dont nous exquissons l’histoire des métamorphoses,
etc'est surtout sur lui que nous devons nous étendre, car presque tous les caractères primaires et
secondaires sur lesquels sont basées les classifications en sont tirés. Sous cette forme, l’Insecte vit
plus ou moins de temps, depuis quelques heures jusqu'à plusieurs années, ce qui est excessivement
rare, et Dieu semble ne lui avoir donné qu'une mission : celle de se reproduire. Chez l’Insecte par-
fait, la peau, qui remplace le squelette des Vertébrés, devient coriace ou membraneuse par suite du
dépôt continuel dans son intérieur d'une matière particulière qui porte le nom de chitine ou d’ento-
moline, et est toujours d’une consisfance suffisante pour servir de support à tout l'organisme; l’épi-
derme, au lieu d’être externe, se trouve revêtu d’une couche de matière muqueuse étendue comme
du vernis en couches extrêmement minces, qui produit ces teintes brillantes, ces couleurs vives et
variées que l'on admire chez les Coléoptères.
Fig. 22. — Ilétérocrate coracin. Fig. 25. — Chrysotoxe arqué. Fig. 24, — Darnis latéral.
(Coléoptères.) . (Hémiplères.) (Dipléres.)
Le corps des Insectes se divise ordinairement en treize articulations ou segments apparents, et
dans quelques Ilyménoptères, Diptères, ete., on en compte même quatorze : ces articulations sont
groupées en trois parties distinctes : la tête, le thorax et l'abdomen.
La téte, toujours placée à la partie antérieure du corps, est très-variable dans sa forme, qui peut
ANNELÉS. — INSECTES. 11
être arrondie, sphérique, allongée, courte, etc.; elle peut être comme enchässée dans le corselet ou
portée sur un pédicule ou sorte de cou; elle est d'une consistance habituellement plus solide que le
reste du corps, surtout dans les Insectes broyeurs, car elle doit servir de point d'appui à des muscles
puissants, tandis que dans les Insectes suceurs elle n’est pas plus dure que les autres segments tho-
raciques et abdominaux. La tête est composée de diverses parties intimement soudées, ce qui fait
que les entomologistes sont loin d’être d'accord sur leur nombre et même sur les noms qu’on doit
leur appliquer. La partie supérieure, sur la tête vue de face, se nomme le sommet ou vertex; au-
. dessous, entre les yeux, est le front; au-dessous du front, la face; de chaque côté sont les joues; au-
dessus de la bouche est l’épistome ou chaperon; de chaque côté de la tête sont placés les yeux. Ces
derniers organes présentent un aspect rugueux, produit par l'agrégation d’un très-grand nombre de
petites lentilles dont on a pu évaluer le nombre à plus de quinze mille pour un seul œil, et qui af-
fectent le plus souvent une forme d’hexagones. Ces yeux, que l’on appelle des yeux composés, offrent
des variations assez considérables chez divers Insectes : ils sont gros et saillants chez les Carnassiers,
tels que les Cicindèles, les Carabes, les Libellules; petits et déprimés dans les espèces lucifuges,
comme les Termites, les Blaps, ete.; et même s’atrophient complétement dans certains Insectes qui
vivent dans de profondes cavernes ou dans la terre, de même que dans les Anophthalmes, les Lepto-
dères, divers neutres de Fourmis, ete. Certains Insectes, outre les yeux composés, sont pourvus
d'yeux lisses, aussi nommés stemmates ou ocelles, différents des autres en ce qu'ils sont formés
d'une seule facette, qui sont placés entre les yeux ordinaires, et sont au nombre de deux, comme
chez presque tous les Hémiptères, de trois, comme dans les Hyménoptères, ou d’un seulement dans
le genre Phlæobie de l’ordre des Coléoptères. Dans la larve des Œstres, on a parlé d’yeux encore
plus simples que les précédents : ce sont deux points formés par un peu de pigment, et situés au-
dessous d’une portion plus mince des segments. Près des yeux se trouve l'insertion des antennes,
toujours au nombre de deux, dont la forme, la longueur et la disposition sont excessivement variables,
aussi bien que le nombre des articles dont elles sont composées; aussi a-t-on dû trouver de nom-
breux caractères différentiels dans ces organes. Ces organes buccaux, qui sont surtout de la plus
haute importance pour la classification et l'étude des Insectes, se composent, à l'état normal, d’une
lèvre supérieure ou labre, de deux paires d'organes broyeurs : les mandibules et les mächoires, ces
dernières placées au-dessous des premières, et d’une lèvre inférieure qui conserve seule la dénomi-
nation de lèvre : enfin quelques autres parties se trouvent encore dans la bouche, telles sont surtout
la langue, la languette, etc. Nous devons donner quelques détails sur ces organes importants. Les
mandibules sont très-dures, agissent horizontalement l’une contre l’autre, et font en même temps
un léger mouvement de haut en bas; elles sont puissantes, tranchantes et dentées chez les Insectes
carnassiers, s’atrophient et se réduisent en une lame écailleuse dans les Inséctes qui, comme les
Cétoines, vivent de fleurs. Les mdchoires sont plus minces que les mandibules, peuvent s’écarter
davantage, et, quand les mandibules s’atrophient, tendent à les remplacer : elles sont munies d'un
appendice très-important, le palpe maæillaire : ce dernier est composé de un à six articles, de forme
variable, et dont l'extrémité du dernier, paraissant assez molle, est sans doute le siége d’un sens
qui n’a pu être encore bien défini, et qui doit tenir lieu du tact ou de l’odorat; l'extrémité de la
màchoire se termine quelquefois par un onglet crochu, et plus souvent par un faisceau de poils: et
son bord interne se métamorphose, chez quelques Insectes carnassiers, en un second palpe. La lêvre,
impaire comme le labre, ayant comme lui un mouvement de haut en bas, mais moins prononcé,
n’est pas simple, et se compose, outre la lèvre proprement dite, de la languette, habituellement
molle et membraneuse, placée bout à bout, et munie à la base de deux appendices membraneux ap-
pelés paraglosses. En outre, à la jonction de la lèvre et de la languette, est articulée une paire de
palpes appelés palpes labiaux. Telle est la composition assez compliquée de la bouche de la presque
totalité des Insectes broyeurs, tels que les Coléoptères, les Orthoptères, les Névroptères et une partie
des Hyménoptères; il n’en est pas de même chez tous les autres Insectes. Dans les Fouisseurs et les
Mellifères, la lèvre et les mâchoires s’allongent, et ces dernières, devenues tubulaires, servent de
gaine aux premières; la languette, trifide et velue, dépasse de beaucoup la lèvre, et la bouche de-
vient un instrument propre à pomper les sucs liquides. Dans les Hémiptères, le labre s’allonge et
devient conique; les mandibules et les mâchoires se changent en longs filets; la lèvre inférieure
prend un grand développement et forme une espèce de tube fendu ou de gaine qui renferme les
1]
12 HISTOIRE NATURELLE.
quatre filets que nous avons nommés; les palpes manquent. Dans les Lépidoptéres, le labre et les
mandibules sont atrophiés, la lèvre est courte, mais produit deux énormes palpes labiaux, les mâ-
choires prennent un accroissement extraordinaire et se transforment en deux tubes accolés, mem-
braneux, en partie cylindriques, en partie déprimés et formant la trompe. Dans les Diptères enfin,
la lèvre forme une gaîne souvent dilatée et bifide à son extrémité, renfermant le suçoir composé
de deux à six soies, etc.
25
AIT LL
PL
Ë
Fig. 25 à 54. — Diverses parties de la tête des insectes.
Nous donnons quelques figures qui représentent les diverses parties de la tête : Fig. 25, tête de
Phrygane; 26, tête de Mylabre; 27, tête de Cimex nigricorne; 28, lèvre et palpes labiaux,; 29, mà-
choire et palpe maxillaire; 30, mandibule de Culosome sycophante; 31, mandibule; 32 mâchoire et
palpe maxillaire; 35, lèvre d'une Blatte, et 34, tête et trompe de Deilephile celerio.
Le thorax, formé des trois segments qui suivent les articulations céphaliques, suaporte, en avant,
Ja tête; en arrière, l'abdomen, et sert d'appui aux pattes et aux ailes. On peut le subdiviser en trois
régions, souvent bien distinctes, et dont la dernière est quelquefois réunie au premier segment ab-
dominal : 4° l’antérieure, nommée prothorax, et en dessous prosternum, qui porte les deux pattes
antérieures et une paire de stigmates, et qui est généralement connue sous la dénomination de cor-
selet; 2° la médiane, mésothorax, et en dessous mésosternum, portant la seconde paire de pattes et la
première paire d'ailes ou la paire unique d'ailes comme chez les Diptères : c'est une petite partie de
cet organe que l'on voit en dessus chez les Coléoptères, et que l'on nomme l'écusson; 3° la posté-
rieure, métathorax, et en dessous métasternum, qui porte la dernière paire de pattes et la seconde
paire d'ailes quand elle existe. Les pattes se subdivisent en antérieures, médianes et postérieureæ:
chacune d'elles est composée d'une. hanche, d’un trochanter, d’un fémur, d'un tibia et d’un tarse.
La hanche varie beaucoup de forme : elle est ordinairement conique, plus ou moins susceptible de
certains mouvements aux pattes antérieures, enchàssées dans le métasternum, et ne pouvant faire
que de légers mouvements aux pattes postérieures. Le érochanter, petite pièce intermédiaire entre
la hanche et le fémur, est court, triangulaire, parfois allongé. Le fémur, habituellement plat, quel-
quefois renflé, forme dans certains cas avec le tibia un organe de préhension. Le tibia, en général
plus mince que le fémur, vient souvent s'appliquer contre lui, soit côte à côte, soit dans une rai-
nure, et peut s'élargir et présenter des dents comme dans les Bousiers et la Courtilière. Le tarse, qui
manque quelquefois quoique rarement, termine la patte, et est composé de un à cinq articles, dis-
ANNELÉS. — INSECTES. 15
posés bout à bout et armés de crochets à l'extrémité : il peut être cylindrique, plat et cilié, garni
de poils roides et en forme de brosse, élargi et muni de ventouses, etc.; le nombre des articles du
tarse, employé par Latreille pour l’arrangement systématique des Coléoptères, est rejeté aujour-
d'hui comme ne donnant pas des caractères véritablement naturels. Les crochets, ordinairement
simples, sont parfois dentés ou pectinés : en dessous de ces organes, on voit des lobes mous, pourvus
d’un grand nombre de petites papilies à l’aide desquelles les Insectes qui en sont pourvus peuvent
se fixer sur le sol et sur les corps les plus polis. Les ailes sont au nombre de deux (Diptères) ou de
quatre (Colécptères); elles existent chez presque tous les Insectes, et manquent seulement dans les
Parasites et dans quelques groupes de différents ordres : parfois aussi certaines femelles n’en offrent
pas, tandis que leurs mâles en sont pourvus. On définit l'aile une expansion des parties membra-
neuses du corps parcourues par des vaisseaux et des nervures, et composée de deux membranes ap-
pliquées l’une contre l’autre. Les nervures sont des tubes convexes en dessus, concaves en dessous,
parcourus par une trachée et formant un réseau régulier qui, principalement dans les ailes anté-
rieures, à été heureusement employé pour caractériser les genres dans les Diptères, les Hyménop-
tères, et même chez certains Lépidoptères. Dans les Hémiptères, les ailes antérieures sont membra-
neuses vers leur extrémité, deviennent dures et opaques vers leur base, et sont alors désignées sous
le nom de demi-étuis ou plutôt hémiélytres. Ghez les Coléoptères, les ailes antérieures ou supé-
rieures acquièrent une consistance souvent aussi forte que celle du corps, et portent le nom d’ély-
tres : elles ne servent guère que pour protéger l'abdomen, et comme parachute dans l’action du
vol, qui est principalement exercé par les ailes postérieures, et ces dernières même peuvent quelque-
fois manquer, et les deux persistantes se souder entre elles. Chez les Hyménoptères et d’autres In-
sectes, les ailes sont membraneuses, plus ou moins transparentes. Chez les Lépidoptères, elles sont
revêtues d’une poussière farineuse, composée de petites écailles qui leur donnent les belles couleurs
que nous leur connaissons, Enfin chez les Diptères, on ne voit plus que deux ailes membraneuses,
et à la base, un peu plus bas, on remarque deux petites valves blanchâtres qui s’ouvrent pendant le
vol : ce sont les cuillerons; les ailes antérieures ont donc persisté, et les postérieures semblent rem-
placées par les balanciers, qui sont formées d’une petite tige terminée par un bouton.
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* Fig. 55 à 46. — Thorax, palles ct nervures des ailes chez les insecles.
Les figures 35 à 46 représentent quelques parties re'atives au thorax; 35, thorax du Bupreste
géant, vu en dessus; 36, patte antérieure d’un Asile; 37, patte postérieure d’une Abeille; 58, patte
postérieure d'un Dytique; 39, patte postérieure d’une Sauterelle; 40, crochet du Hanneton foulon;
M, crochet d’un Asile; 42 et 43, ailes supérieure et inférieure d’un Lépidoptère, avec les ner-
vures; 44, aile d'un Névrontère; 45 et 46, ailes de Diptères (Tétraneure et Lavhnes).
44 HISTOIRE NATURELLE.
L'abdomen ne porte ni ailes ni pattes, renferme dans son intérieur la majeure partie des viscéres,
et les organes de la reproduction, et présente sur ses côtés, parfois à son extrémité, les séigmates qui
donnent passage à l’air, des filets terminaux, des tarières, des épines, un aiguillon, des oviductes,
un appendice saltatoire, comme dans les Podures, ete. Le nombre des segments abdominaux est va-
riable, non-seulement selon les groupes, mais même parfois dans la même espèce, suivant les sexes,
et ils sont d’une dureté d'autant plus grande, que les ailes qui les recouvrent sont moins solides. La
respiration s'opère par un système de érachées qui se répandent dans toutes les parties du corps et
pénètrent tous les organes : c’est de cette particularité qu'est dérivé le nom d’Insectes, du latin, in-
tersectus (entrecoupé). À l’état-parfait, l’Insecte respire presque constamment par des trachées, ce n’est
qu’à celui de larve ou de nymphe que sa respiration peut s’opérer simultanément par des trachées
et des branchies, ou même exclusivement par des branchies. Les trachées ont un éclat argentin
quand elles sont remplies d’air, et c’est en rampant sur les divers organes qu’elles y portent la vie,
puisque les Insectes ne sont pas pourvus d’un appareil où lesang puisse se revivifier au contact de l'air;
elles recoivent l'air directement par des ouvertures appelées stigmates, situées sur les côtés de l’abdo-
men. La place qu’occupent les stigmates est variable, mais en général ils sont situés sur la membrane
qui unit les segments dorsaux aux ventraux. Le sang des Insectes est généralement pâle, parfois ver-
dâtre ou rougeätre, et renferme des corpuscules allongés, un peu aplatis. Y a-t-il chez les Insectes,
comme on l’a dit récemment, une véritable circulation du sang, et le vaisseau dorsal, qui s'étend
de la tête à l'extrémité du corps, serait-il l'analogue du cœur? Ou bien n’y aurait-il que de simples
mouvements oscillatoires du sang? Ce sont là des questions non résolues encore, qui sont bien con-
troversées, et qu'il ne nous est pas permis de traiter dans un résumé aussi restreint que celui que
nous présentons.
L'appareil digestif, quoique moins complexe que chez les Vertébrés, présente cependant encore
une complication assez grande. Le tube digestif, qui naît à la bouche, offre souvent de nom-
breuses circonvolutions maintenues en place par une multitude de trachées excessivement fines;
il commence par un œsophage musculeux, souvent dilaté à la partie postérieure en un jabot et ’
un gésier; à la suite vient l’estomac dans lequel se produit le chyle, et qui se termine au point
où s'insèrent les vaisseaux de Malpighi, destinés à la sécrétion urinaire; la troisième partie du tube
digestif débute par un iléon grêle, court et suivi d’un colon plus gros et plus ou moins allongé; à
l'extrémité antérieure de celui-ci il existe souvent un cæcum, et l'extrémité opposée se termine par
un rectum court, musculeux. Chez les Insectes qui se nourrissent de matière animale, soit qu’ils
la prennent en nature, soit qu'ils se l’assimilent toute préparée, les intestins sont toujours très-
courts; chez les Insectes phytophages, au contraire, ils sont très-longs. Gomme annexes du système
digestif, nous pouvons citer les glandes salivaires et les vaisseaux soyeux situés à la partie anté-
rieure du canal intestinal; le corps graisseux ou le tissu adipeux, assemblage de petites vésieules
remplies de graisse et placées sur la plupart des organes intérieurs, ete. Les sexes sont toujours sépa-
rés chez les Insectes, et dès lors les organes de la reproduction doivent être divisés en organes mûles et
organes femelles, et en outre chaque sorte d’organe se compose de parties externes et de parties inter-
nes; les parties externes sont le pénis et quelques organes moins importants dans le mâle, et l’oviducte
et la tarière ou l’aiguillon dans la femelle; les parties internes sont les testicules dans le mâle et les
ovaires dans la femelle : ces divers organes sont le plus habituellement placés à la partie postérieure de
l'abdomen, mais cela n’est pas constant.
Dans la grande majorité des cas, le produit de la génération se présente sous forme d'œufs que
Ja femelle place dans des conditions favorables à leur développement, et sa tarière lui sert ordinai-
rement pour cela: mais il est quelques cas assez rares dans lesquels les œufs éclosent dans l’ovi-
ducte, de telle sorte que ce sont les larves qui sont pondus, comme cela a lieu chez les Pucerons, ou
bien même, ainsi qu’on le remarque dans la famille des Pupipares, parmi les Diptères, les œufs res-
tent dans le corps de la mère jusqu'à ce qu'ils aient pris leur développement de nymphes. Outre les
deux séxes, qui peuvent quelquefois facilement se reconnaître en ce que les mâles sont souvent plus
petits que les femelles, et que ces dernières ont des couleurs moins brillantes que les premiers, on a
constaté parfois des individus neutres, c'est-à-dire qui ne peuvent servir à la reproduction de l'espèce,
mais qui, dans la plupart des cas, sont employés à l’éducation, si nous osons employer ce mot, des
jeunes individus; c’est ce qui a lieu chez les Abeilles, chez les Termites, chez les Fourmis. ete.
ANNELÉS. — INSECTES. 15
Après avoir ainsi passé en revue les principaux points de l'organisme des Insectes en parlant des
divers organes qui se trouvent dans la tête, le thorax et l'abdomen, il nous reste à dire quelques
mots de certains appareils qui se trouvent à la fois dans ces trois parties essentielles.
4
Ë
Fig. 47. Organes digesli!s de la Cigale de l’orme (Hémiptère phytophage). — Fig. 48. Organes digestils
de la Gicindèle champêtre (Coléoptère carnassier). — Fig. 49. Appareil respiratoire de la Sauterelle
rayée. — Fig. 50. Système nerveux du Lucane Cerf volant.
Les muscles, ou les principaux organes de Ja locomotion, sont nécessairement situés à l’intérieur,
comme dans les Chéloniens parmi les Vertébrés: ces muscles prennent leur insertion sur des crêtes,
des saillies, des téguments et quelquefois sur des pièces particulières qui font en quelque sorte l'of-
fice de tendons; le premier mode d’insertion a lieu dans le corps; le second existe le plus ordinaire-
ment dans les membres, y compris les pièces de la bouche. Le nombre de ces muscles est énorme,
surtout dans la tête pour faire mouvoir les nombreuses parties buccales; dans le thorax, pour pro-
duire la locomotion; dans les pattes et dans les ailes, ete. Et, si ces muscles présentent beaucoup de
complication dans l'Insecte parfait, il en est au moins de même dans les larves, ainsi que Lyonnet
l'a constaté pour la première fois chez plusieurs Chenilles. Les muscles des Insectes sont formés de
fibres plus généralement isolées que ceux des animaux vertébrés; ces fibres ne se réunissent pas,
comme dans ces derniers, pour former des faisceaux, et ne sont pas par conséquent revêtues d'une
enveloppe aponévrotique; les fibres musculaires sont disposées de manière à former des couches ou
des séries de cordons parallèles : tantôt ces couches sont plates et constituent des espèces de rubans,
comme pour les muscles de l'abdomen; tantôt elles sont plus épaisses et forment de véritables fais-
ceaux, comme dans les muscles thoraciques. Nous ne croyons pas devoir nous étendre davantage
sur la myologie, et c’est dans les ouvrages de MM. Straus Durckeim et Newport que l’on pourra trou-
ver des détails plus considérables.
16 HISTOIRE NATURELLE.
Le système nerveux est formé principalement de deux cordons renflés de distance en distance et
placés à la face ventrale du corps, immédiatement au-dessus des muscles longs qui recouvrent cette
face. D'après cela, on voit qu’ils offrent la même disposition générale que dans les autres Articulés.
Les renflements que présentent les cordons sont appelés ganglions; ce sont les masses nerveuses qui
sont mises en rapport les unes avec les autres au moyen des cordons même, et l'on donne à ces
nerfs le nom de connectifs. On s’est assuré dans ces derniers temps que le système nerveux des
Insectes était beaucoup plus compliqué qu'on ne l'avait cru jusque-là; mais nous ne pouvons nous
étendre à ce sujet.
Les organes des sens semblent tous exister chez les [nsectes, mais toutelois on ne peut indiquer
d'une manière positive le siége de chacun d'eux. Le sens de la vue est le seul qui soit localisé d’une
manière certaine, et les yeux, admirablement construits, sont de deux sortes : on s'est même par-
fois demandé sans pouvoir résoudre ce problème pourquoi un seul et même animal était parfois
pourvu de ces deux espèces d’yeux. Le sens de l'ouie a-til, comme on l'a dit, son siége dans les
antennes? c’est ce que l’on peut penser par analogie avec ce qui a lieu chez les Crustacés. Le sens
du toucher paraît avoir pour organes les antennes, les palpes, les pattes et surtout leurs tarses. Où
doit être placé le sens de l’odorat? est-ce, comme on l'a prétendu, dans les antennes, ou bien à l'en-
trée des appareils de la respiration? Enfin le sens du goût a son siége présumé dans la bouche : on
l’a cherché dans l'extrémité membraneuse des palpes ou dans ce qu’on appelle la langue, mais rien
de positif n’a été dit à cet égard.
Divers Insectes possèdent la faculté de produire des sons; mais en général leur chant ne se lie pas
aux mouvements de l’air dans l'appareil de la respiration, comme chez les animaux supérieurs, et
dépend du frottement de certaines parties du corps les unes contre les autres, ou de mouvements
imprimés à des instruments spéciaux par la contraction des muscles. Le bruit produit par la Cigale
résulte de la tension et du relàchement-lternatifs d’une membrane élastique disposée comme la
peau d’un tambour de basque sur la base de l’abdomen. Les sons que font entendre les Criquets
sont produits par certaines parties des ailes qui, par une structure particulière, et en se frottant
l'une contre l'autre, vibrent avec intensité. Le bourdonnement des Mouches semble dépendre de la
sortie rapide de l'air par les stigmates thoraciques pendant les mouvements violents du vol. Enfin
le Sphinx tête-de-mort produit une espèce de eri dont le mode de production, sur lequel on s’est
étendu dans une autre partie de cet ouvrage, n’est pas bien connu.
La plupart des Insectes ne produisent que très-peu de chaleur; mais quelques-uns en dégagent,
dans certaines circonstances, une quantité assez considérable pour élever notablement la tempéra-
ture du milieu qu'iis habitent; c’est ce qui a lieu pour les Abeilles quand elles s’agitent dans leurs
ruches.
Quelques autres phénomènes physiologiques doivent encore être signalés. C’est ainsi que dans
divers Insectes, les Brachins, par exemple, on trouve des réservoirs spéciaux de liquides âcres et
corrosifs destinés à être lancés sur leurs ennemis; que dans diverses espèces on a signalé des vési-
cules de venin destinées à empoisonner des dards, et enfin que divers Insectes, comme le Lampyre
où Ver luisant, divers Taupins américains, etc., produisent une lumière phosphorescente dont la
cause-nous est Inconnue.
Les mœurs si curieuses des Insectes, l’instinet si admirable qui a été donné à plusieurs d’entre
eux, les ruses qu'ils emploient pour se procurer leur nourriture, pour se soustraire à leurs ennemis
e pour en préserver leurs œufs ou leurs larves, l’industrie qu’ils déploient dans leurs travaux, les
règles qui régissent les grandes associations qu'ils forment, leur distribution géographique, leur
harmonie avec le sol, les plantes et les eaux, et tant d’autres points admirables de l’histoire des In-
sectes, devraient peut-être être traités actuellement; mais nous croyons que ces détails, de la plus
haute importance, ne doivent pas être résumés, et qu’ils trouveront beaucoup plus naturellement
leur place dans les articles spéciaux qui vont suivre, et que là seulement ils pourront être étudiés
avec tout Je soin qu'ils comportent. Un autre point, dont nous avons déjà parlé dans le deuxième
volume de l’histoire des Lépidoptères de eette Encyclopédie, et sur lequel nous reviendrons, est re-
latif aux rapports que les Insectes ont avec l’économie agricole et forestière par les dommages qu'ils
peuvent leur causer, et le produit dont quelques espèces peuvent être dans les arts. C’est une partie
des plus importantes de l’entomologie dont on s'occupe beaucoup aujourd'hui, et si l'on n’est pas
Wie. 1. — Poliste française neulre. Fix, 2, — Carabe brillant. iv, 3. — Cimbex variable.
{Hyménoplére.) Coléoplére. Hymenpotère
IT Lit
AR. “y
7
Lis. 4. — Civale aiouë
({émiptère
Fig. 5. — Platypèze fascié. Fig. 6. — Laryngode d'Australie Lis, 7. — Cal icère bronzte
(Diptére.) Hémiptère.) (Diptère.)
A GÉNÉRA:ITÉS SUR LES ANNELÉS 1L. 98
ANNELES. — INSECTES. 17
encore parvenu à trouver des moyens bien efficaces pour détruire les Insectes nuisibles, on semble
au moins être sur la voie de propager des espèces qui pourront être utiles à l'homme. Ces diverses
considérations, qui se rattachent aux mœurs des Insectes et surtout à leur genre de vie, trouveront
place ailleurs, et ne doivent pas nous occuper actuellement.
Devons-nous ajouter que les Insectes sont très-recherchés et qu’on en possède de nombreuses col-
lections? Devons-nous dire que leur valeur, parfois assez grande et toujours proportionnelle à Ja
facilité ou à-la difficulté avec laquelle on peut se les procurer, est toute de convention et par consé-
quent variable? Ajoutons que beaucoup de personnes s’en occupent aujourd’hui, ainsi que le dé-
montre le nombre considérable de membres des Sociétés entomologiques fondées dans tant de
villes, à l'exemple de notre Société entomologique de France, créée en 1832. L'étude de l’entomo-
logie fait chaque jour de notables progrès; le nombre des collections augmente, et, ce qui est heu-
reux pour la science, le simple collectionneur devient naturaliste, ne se bornant plus à aligner des
Insectes à la suite les uns des autres, et 1l cherche à scruter plus profondément le sujet de son étude
favorite. Cependant, nous devons le dire, certains ordres contenant des Insectes plus faciles à conser-
ver, comme les Coléoptères, les Hémiptères et même les Hyménoptères, ou parés de brillantes cou-
leurs, comme les Lépidoptères, sont plus recherchés que les autres, qui, moins brillants à l'œil,
d’une conservation plus difficile, comme les Diptères, les anciens Aptères, ete., sont beaucoup trop
négligés. Nous avons l'espoir qu’un tel état de chose changera, et ce qui s’est passé sous nos yeux
à la Société entomologique de France, dont nous avons l'honneur d’être le secrétaire depuis près de
vingt ans, semble nous le démontrer de plus en plus.
L'histoire de la science qui traite des Insectes, ou plutôt celle de l’entomologie tout entière, peut
être, comme l'a fait Latreille, partagée en cinq périodes distinctes. La première comprend les no-
tions de l'antiquité, qui sont transcrites sur les mopuments et inscrites dans les livres de Moïse :
mais le premier auteur systématique que nous devions citer est Aristote, qui avait sur les Articulés,
qu’il nommait Evrouos, des connaissances beaucoup plus étendues qu’on ne l’a souvent pensé; Athé-
née, Columelle, Nicandre, Aétius, Élien, Galien, Hippocrate, ete., et en dernier lieu Pline, qui a
présenté souvent sans méthode et toujours sans une appréciation nécessaire les travaux de ses de-
vanciers. Après Pline, l’entomologie, comme les autres branches de la zoologie, tomba dans l'ou-
bli, car l'on doit à peine citer relativement aux Insectes les travaux d'’Isidore de Séville et d’AI-
bert le Grand, et il faut parvenir à l'époque de la renaissance des lettres pour arriver au commen
cement de la seconde période entomologique, dans laquelle on ne trouve pas encore des recherches
positives, mais où les efforts tendent de toutes parts à rassembler les matériaux dispersés de la
science et à la reconstituer. Gest alors que les voyageurs, comme Gilles D’Alby, en Orient; Belon,
dans le Levant; Flacourt, à l’île de Madagascar, et plusieurs autres, enrichissent l'entomologie d’In-
sectes recueillis dans les pays lointains; c’est alors que parurent les Entomos d’Aldroyande et le
Theatrum Inseetorum de Mouffet, ou plutôt de Conrad Gesner, dans lequel la gravure vint pour la
première fois accompagner les descriptions. La troisième période est celle des recherches expéri-
mentales; au commencement de cette époque apparurent les travaux des Malpighi, Harvey, Redi,
Swammerdam, Leuwenhock, Goedart, Lister, Vallisnierie, Petiver, Ray, Sachs, Frich, puis plus tard
des Albin, Ladmiral, Blancard, Hœfungel, Lyonnet, Kleeman, mademoiselle De Merian, Boezelvon
Rosenhof, Rœsel, etc., et enfin, à la fin de la même époque, les immortels travaux des Réaumur et
des Degeer. La quatrième période est celle des méthodes, car le nombre des Insectes était déjà de-
venu tel, que les ébauches de classifications existantes ne pouvaient plus suffire pour arriver à leur
détermination. Linné, dans les dernières éditions de son Systema naturæ, caractérise les Entomos
des animaux à plusieurs pieds, munis de stigmates pour la respiration, ce qui en éloigne les Annc-
lides et se trouve peu exact pour les Crustacés, et il les divise ensuite en Ailés et Aptères : les pre-
miers forment six ordres; cinq à quatre ailes : 4° les Coléoptères et Orthoptères; 2 les Hémiptères;
3° les Lépidoptères; 4° les 1lyménoptères; 5° les Névroptères, et un à deux ailes, 6° les Diptéres;
les seconds renferment les Crustacés, les Arachnides, les Myriapodes, et les autres ordre aptères
des Insectes Hexapodes. Après Linné, Scopoli, Geoffroy, Degéer, Olivier, De Lamarek, modifièrent
plus ou moins la classification. Fabricius, un peu plus tard, propose une méthode entièrement fon-
dée sur les organes buccaux, et qui, quoique ayant fait faire de grands progrès à l’entomologie,
pèche en ce qu'elle n’est fondée que sur un caractère unique, et il subdivise les Insectes en treize
22
4 Le)
18 HISTOIRE NATURELLE.
classes, que nous allons indiquer : —— 4° Deux mâchoires, deux antennes, quatre à six palpes :
4% classe, Eleutherates (Goléoptères); 2° classe, Ulonates (Orthoptères); 3° classe, Synistrates (Lé-
pismes, Podures, en grande partie les Névroptères), 4° classe, Piexates (yménoptères); — 2° deux
mâchoires, deux antennes, deux palpes maxillaires; 5° classe, Odonates (Libellulins);, — 3° deux
mâchoires sans palpes, deux antennes; 6° classe, Mitoxates (Scolopendres grêles); — 4° deux mâ-
choires onguiculées, pas d'antennes; 7° classe, Unogtes (Araignées, Faucheurs, Scorpions); —
5° plusieurs mâchoires; 8° classe, Polygonates (Cloportes, Monocles); 9° classe, Kleistagnates (Bra-
chyures); 10° classe, Exogates (Macroures) ; — 6° pas de mâchoires, une langue ou trompe;
41° classe, Glossates (Lépidoptères); 12° classe, Rhyngotes (Hémiptères); 13° classe, Aniliates (Di-
ptéres). C’est alors ou même antérieurement que parurent les faunes ou les monographies célèbres
des Panzer, Illiger, Thunberg, Paykull, Rossi, Engramelle, Cramer, Herbst, Sioll, etc. Latreille, met-
tant à protit lee ouvrages de ses prédécesseurs, s’efforça toujours de créer une classification plutôt
naturelle que systématique; il chercha à rapprochér ce que la nature paraissait rapprocher, adopta
les ordres linnéens, créa des familles et des tribus, profita des observations de Fabricius pour baser
les genres, plaça en tête les animaux les mieux organisés, et, quoique n'employant pas les earac-
tères anatomiques, se rencontra presque toujours avec eux; c'est dans le Précis des caractères des
Insectes, dans le Genera, les Familles natwrelles, et dans les deux éditions du Règne animal,
qu’il indiqua successivement sa classification, que nous devrions exposer actuellement si nous
ne devions pas bientôt la faire connaître, car c’est elle que nous adopterons, tout en y faisant les
modifications proposées par les auteurs modernes. M. G. Duméril, le président honoraire actuel de
la Société entomologique de France, dans sa Zoologie analytique, dans le Dictionnaire des sciences
naturelles, ete., a également cherché à arriver à la méthode naturelle et nous a donné d'excellents
travaux à consülter: Cette quatrième période est riche en matériaux de toutes sortes : voyages,
sciences, monographies de classe, d'ordres, de familles, de genres, descriptions d'espèces, détails
de mœurs, particularités anatomiques et physiologiques, ete., tout y abonde. Enfin la cinquième et
dernière période entomologique est celle où nous vivons et dans laquelle la science a fait d'immenses
progrès, et sous le point de vue anatomique et sous le point de vue zoologique. Elle commence avec
les premiers travaux de G. Cuvier, où plusieurs des innovations adoptées aujourd'hui sont mdiquées
dans son Tableau élémentaire de l'histoire naturelle des animaux et. dans ses Leçons d'analomie
comparée : G. Guvier adopte et définit, parmi les anciens Entomos ou les Articulés, les classes des
Insectes, des Arachnides, des Crustacés et des Annélides, auxquelles nous joindrons, d’après des
remarques récentes dues à Leach, à MM. Martin Saint-Ange, Dujardin et à plusieurs autres, celles
des Myriapodes, Cirrhipèdes, Rotateurs et Helminthes. Nous ne pouvons, dans cette esquisse ra-
pide des progrès de l’entomologie, énumérer tous les travaux importants auxquels les naturalistes
se sont livrés depuis une cinquantaine d'années dans le but de compléter le catalogue deseriptif des
animaux arliculés ou pour en perfectionner l'arrangement méthodique. Cette branebe de l’histoire
naturelle a été l'objet de publications presque innombrables, et parmi les auteurs qui ont rendu de
la sorte les services les plus grands à la science, on doit citer Latreille, Olivier, Jurine, Clairville,
Kirby, Mac-Leay, Schonherr, Gyllenbal, Germar, Klug, Dejean, Perty, Fischer De Waldheim et Fis-
cher De one loi, Perty, Œhsenheimer, Fallen, Meigen, Macquart, Robineau-Desvoidy, Treitschke,
Godart, Duponchel, Doubleday, Audinet Serville, Lepelletier De Saint-Fargeau, A. G. Desmarest,
Erichson, Walckenaër, MM. Th. Lacordaire, Burmeister, Boisduval, Westwood, Guérin-Méneville,
Milne Edwards, De Selys Longchamps, Bigot, Reiche, E. Blanchard, H. Lucas, Laboulbène, L. Fair-
maire, Jacquelin Du Val, Chevrolat, Al. Lefebvre, Bellier De La Chavignerie, Derhn, Schaum, Si-
gnoret, etc., dont les écrits ont beaucoup enrichi diverses branches de l’entomologie descriptive.
L'étude des mœurs des Insectes a aussi été le but d'importants travaux; nous citerons seulement les
ouvrages des Huber père et fils sur les Abeilles et les Fourmis, et les études consciencieuses de
MM. Ed. Perris, L. Dufour, le colonel Goureau, ete. Relativement à l'anatomie des Insectes, on peut
nommer les publications des Hérold, Ramdhor, Tréviranus, Marcel De Serres, Savigny, Dugès, Au-
douin, et surtout celles de MM. Léon Dufour, Newport, E. Blanchard, Rathke, Nordmann, Kol-
iker, Joly, Al. Laboulbène, etc., et enfin l’ouvrage anglais de MM. Spence et Kirby, et l’Introduc-
tion à l'Entomologie de M. Th. Lacordaire. Une nouvelle voie dans laquelle l’entomologie est
aujourd'hui entrée est celle des applications de cette science; beaucoup de travaux, tels que
ANNELÉS. — INSECTES. 19
ceux de MM. Audouin, Kollar, Ratzebourg, Curtis, Guérin-Méneville, et p'usieurs autres, ont pour
but les Insectes nuisibles; d'autres en grand nombre recherchent, au contraire, les espèces qu'il
serait utile d’acclimater. Enfin les Articulés fossilles ont donné lieu à quelques remarques; mais les
Trilobites et les Crustacés seuls ont été principalement étudiés sous ce point de vue par AI. Bron-
gniart et A. G. Desmarest, par Dalhman, Burmeister, ete.; les Insectes ont été beaucoup plus négli-
gés sous ce rapport, et nous ne eiterons que les publications de MM. Brodie et Oswaldheer.
Après ces considérations générales, nous devons faire connaître brièvement la division des Insectes
en ordrres, et nous dirons que la classification que nous adoptons repose principalement sur la con-
sidération de l'appareil buccal, des organes locomoteurs et des métamorphoses. Les Insectes sont
subdivisés en douze ordres : — 1° CoréorrÈres : Insectes broyeurs; quatre ailes, les deux supérieures
solides, portant le nom d’élytres et servant d’étui aux postérieures : celles-ci ployées transversale-
ment pendant le repos; métamorphoses complètes (types, Garabes, Staphylins, Capricornes, Cocci-
nelles). — 2 Srrersiprères ou Rutprerères : Insectes broyeurs, à mandibules styliformes; quatre
ailes, les supérieures rudimentaires et élytroïdes, les inférieures grandes, membraneuses, ployées
en éventail dans le repos; métamorphoses complètes (type Xénos). — 5° DenmarrÈres : Insectes
broyeurs; quatre ailes, les deux supérieures plus solides que les inférieures, qui sont ployées trans-
versalement et en éventail pendant le repos; métamorphoses incomplètes (type, Forficules). —
4° Orrnoprères : Insectes broyeurs; quatre ailes, les deux supérieures plus solides que les inférieu-
res, qui sont ployées longitudinalement en éventail et non en travers pendant le repos; métamor-
phoses incomplètes (types, Blattes, Grillons, Sauterelles), — 5° Névroprères : Insectes broyeurs:
quatre ailes étendues, pareilles, membraneuses, réticulées, à nervures irrégulières; métamorphoses
complètes (types, Labellules, Ephémères, Termites). — 6° Hyménorrères : Insectes tantôt broyeurs
seulement, tantôt broyeurs et suceurs à la fois; quatre ailes bien développées, quoique les inférieures
soient inégales, membraneuses, transparentes, à nervures régulières et constantes; métamorphoses
complètes (types, Tenthrèdes, Ichneumons, Fourmis, Abeilles). — 7° Héurerères : Insectes suceurs,
. à bouche armée d’un bec conique, droit ou soudé; quatre ailes, les supérieures, ou hémiélytres, co-
riaces à la base, membraneuses à l'extrémité, et les inférieures nues, parfois ailes atrophiées; méta-
morphoses incomplètes (types, Punaises, Cigales, Pucerons, Cochenilles). — 8° Léprnoprères : In-
sectes suceurs, à trompe allongée, roulée en spirale; quatre ailes membraneuses, couvertes d’écailles
farineuses; métamorphoses complètes (types, Papillons, Sphinx, Noctuelles). — 9° Diprères : In-
sectes suceurs, à bouche en forme de trompe; deux ailes membraneuses, souvent accompagnées de.
cuillerons et de balanciers, métamorphoses complètes (types, Cousins, Tipules, OEstres, Mouches).
— 10° ApnanrpTères où SIpHoNoprères : Insectes essentiellement suceurs; corps comprimé; pattes
postérieures propres au saut; pas d'ailes; pas de métamorphoses (type, Puces). — 11° Anoproures
ou Parasires : Insectes tantôt broyeurs, tantôt suceurs; yeux remplacés par des ocelles; abdomen
dépourvu d’appendices propres au saut; pas d'ailes; pas de métamorphoses proprement dites (type,
Poux). — 12° Tuysanoures : Insectes broyeurs; abdomen pourvu de fausses pattes ou d'appendices
propres à faire opérer des sauts; pas d'ailes; pas de métamorphoses proprement dites (types, Lépis-
mes, Podures).
Fig. 51. — Xénos des Guêpes.
(Strepsiptère.)
9 HISTOIRE NATURELLE.
PREMIER ORDRLe
COLÉOPTÈRES.
L'ordre des CoréomiÈres (Coleoptera), créé par Linné il y a plus d’un siècle, est le mieux connu
et le plus nombreux de tous ceux qui rentrent dans la classe des Insectes. Les Coléoptères (z0)20,
élui, gaine; rrepev, aile) sont des {nsectes à métamorphoses complètes et à quatre ailes : les supé-
rieures ou antérieures, nommées élytres, plus ou moins dures et coriaces, et servant comme d'étuis
aux inférieures ou postérieures, qui sont minces, transparentes, veinées et repliées en travers.
Leur bouche est conformée pour la mastication, et présente un labre généralement transversal,
deux mandibules en général de consistance cornée, deux müchoires libres, non terminées en galette,
portant chacune un ou deux palpes; une lèvre inférieure également garnie de palpes et portée sur
une plaque transversale appelée menton, et articulée avec la tête par sa base. Le corps, de forme
très-variable, est composé d'une tête, d’un thorax ou poitrine, et d’un abdomen ou ventre. La tête,
toujours distincte, et qui offre surtout les organes buccaux que nous avons signalés, présente aussi
deux antennes plus ou moins allongées et presque toujours composées de onze articles, deux yeux
réticulés et presque jamais d’ocelles.. Le thorax, distinct de la tête et de l’abdomen, est formé de
trois segments, portant chacun une paire de pattes : le premier, que l’on désigne sous les noms de
corselet ou de prothorax, beaucoup plus grand que les autres, ne donne pas insertion à des ailes,
et est à découvert; le second, ou mésothorax, moins développé que les autres, se trouve presque
entièrement caché sous les ailes, qui n’en laissent apercevoir qu'une petite partie de forme triangu-—
laire, occupant le milieu du dos et nommée écusson : les élytres, ailes dures, épaisses, horizontales,
se joignant sur la ligne médiane par une ligne droite, et quelquefois se soudant l'une à l'autre, de
manière à ne plus constituer qu'une sorte de bouclier unique, s’y insérant; le troisième segment ou
métathorax, porte les ailes inférieures, fines, transparentes, trop longues pour se cacher sous les
élytres sans se reployer en travers, et qui peuvent parfois manquer. L'abdomen est sessile, c'est-
à-dire réuni au thorax par sa plus grande largeur, et terminé en pointe, composé de six ou sept
anneaux, plus ou moins membraneux en dessus et moins durs en dessous, et portant constamment
les organes génitaux. Intérieurement ces Insectes offrent des particularités organiques assez diffé-
rentes et souvent basées sur leur genre de vie particulier. Tous proviennent d'œufs et éprouvent
des métamorphoses complètes, de telle sorte que l'animal qui vient de naître est très-loin de ressem-
bler à ce qu’il sera à son état adulte. La larve est assez analogue à un Ver; sa tête est cornée, tandis
que le reste du corps est presque constamment mou; la bouche est à peu près conformée comme
elle le sera dans l’Insecte parfait, et il n'y a pas toujours d’ocelles; les trois anneaux qui suivent la
tête sont presque toujours pourvus chacun d'une paire de pattes, habituellement très-courtes; les
segments abdominaux présentent des poils soyeux qui aident à la locomotion, et dans un grand
nombre de cas on voit une paire de fausses pattes attachée au dernier segment. La nymphe est inac-
tive et ne prend pas de nourriture; elle est recouverte d’une peau membraneuse qui s'applique exac-
tement aux parties situées en dessous et les laisse apercevoir.
Les mœurs des Coléoptères sont excessivement variées, et il en est de même du rôle qu’ils doi-
vent jouer dans la nature. On en trouve en grand nombre dans toutes les parties du globe et dans
tous les milieux. Beaucoup sont excessivement nuisibles en attaquant les végétaux, qu'ils font
souvent périr, où en mangeant les semences de ces végétaux, en hâtant la putréfaction des matières
animales, en détruisant nos étoffes, nos pelleteries ou nos collections d'histoire naturelle; d'autres,
au contraire, malheureusement peu nombreux, sont utiles à Fhomme : tels sont, par exemple, les
Cantharides ou Lytta, employés en médecine comme épispastiques; la Cétoine dorée qui paraît être
un bon spécifique contre l'hydrophobie, et plusieurs autres, qui, carnassiers, nous débarrassent d'ê-
tres qui nous sont nuisibles. L’immense quantité des espèces et des genres de Coléoptères, si re-
Fix. 1. — Epirodère marqué. Li
Fig. 5.—Yulsirée noire et rouge. Fig. 4. — Myschore grèle. Fig. 5. — Dinidor maculé.
Fig. 6, — Storthie livide.
HÉMIPTÈRES.
ANNELÉS. — COLÉOPTÈRES, STREPSIPTÈRES. 21
cherchés aujourd'hui, nous a engagé à consacrer plusieurs volumes de cette Encyclopédie à leur
étude spéciale; aussi ne nous étendrons-nous pas davantage actuellement à ce sujet, et renvoyons-
nous à ce que nous en avons dit; car nous avons voulu nous horner ici à donner la simple caractéris-
tique générale des Coléoptères, afin de ne pas laisser une lacune fâcheuse et de présenter dans un
même volume le tableau de tous les êtres de la grande division des animaux annelés.
Il nous reste à dire quelques mots de l’arrangement systématique des Coléoptères, et à indiquer
les types principaux de cet ordre important. La classification que nous suivrons, d’après les entomo-
logistes modernes, consiste à disposer les nombreux groupes génériques de cet ordre en une assez
grande quantité de petites familles naturelles, correspondant pour la plupart aux grands genres de
Linné, et souvent aux familles ou divisions plus secondaires que Latreille indique dans ses ouvrages.
Une autre méthode, encore suivie parfois aujourd'hui et basée sur le nombre des tarses et sur
quelques autres particularités organiques, est celle de Latreille, et nous nous en servirons en
nommant quelques-unes des divisions typiques. Les Coléoptères y sont partagés en quatre sections :
— 1° PenranÈREs, ayant cinq articles mobiles aux tarses de toutes les pattes, et comprenant six fa-
willes : celles des Carnassiers (genres Cicindèle, Carabe, Bembidie, Dytique, Gyrin), Brachélytes
(genre Staphylin), Serricornes (genres Bupreste, Taupin cu Élater), Clavicornes (genres Nécro-
phore, Silphe, Clairon), Palpicornes (genres Hydrophile, Élmis, Parnus) et Lamellicornes (genres
Hanneton, Scarabée, Géotrupe, Copris). — 2° Hérénomères, qui ont cinq articles aux tarses des pre-
mière et seconde paires de pattes, et quatre seulement aux tarses de la troisième paire; quatre
familles : Mélasomes (genres Pimélie, Axis, Blaps, Ténébrion), Taxicornes (genre Diapère), Sténé-
lytes (genres Ilélops, Cistèle, Œdemère) et Trachélides (genres Lagrie, Méloë, Lÿtta). — 3° Térra-
MÈRES, ayant quatre articles mobiles à tous les tarses; sept familles : Rhyncophores (genres Brente,
Charanson, Calandre), Xylophages (genres Scolyte, Bostriche), Platysomes (genre Gucuje), Longi-
cornes (genres Capricorne, Lamie, Lepture), Eupodes (genres Sagré, Criocère), Cycliques (genres
Casside, Chrysomèle, Galéruques) et Clavipalpes (genre Krotyle). — 4° Trimères, qui n'ont que
trois articles mobiles à tous les tarses ou un nombre moindre; trois familles : Fongicoles (genre
Eumorphe), Aphidiphages (genre Coccinelle) et Psélaphiens (genres Psélaphe et Claviger).
Fig. 52. — Cantharode fangeuse, Fig. 53. Cicindèle princesse. Fig. 5%, — Aphanopneume bilobé.
DEUXIÈME CRDEE
STREPSIPTÈRES où RHIPIPTÈRES.
Kirby, le premier, a indiqué sous le nom de SrrersiprÈres (Strepsiptera) (sreehu, contourne-
ment; #tepey, aile) un ordre très-curieux d’Insectes dont Latreille a changé la dénomination en celle
de Rurmiprères {Rhipiptera) (purue, éventail; 77:00, aile), nom qui a été souvent à tort adopté par la
plupart des entomologistes, surtout en France.
+
29 > HISTOIRE NATURELLE.
Les Strepsiptères ont les ailes antérieures rudimentaires, ressemblant assez aux ptérygodes des
Lépidoptères, étroites, un peu élargies à l'extrémité, et qui, par leur position et par leur structure
coriacée, ont été regardées comme de petites élytres; les ailes postérieures, au contraire, sont très-
grandes, membraneuses, pourvues de nervures formant des rayons dans leur longueur, pou-
vant se plisser longitudinalement en manière d’éventail; et présentant, en outre, insérés sur le
premier anneau abdominal, recouverts à leur base par les élytres proprement dites, situés aux deux
côtés de l'extrémité du trone, près du cou et de la base extérieure des deux premières pattes, une
paire de petits appendices étroits, allongés, crustacés, mobiles, en forme de petites élytres, dilatés
en massue, courbés au bout et se terminanl à la base des ailes. A leur état parfait, les Strepsiptères
sont des Insectes broyeurs: leur bouche est composée de pièces très-peu développées, mais hbres entre
elles; les mandibules ont la forme de petites lames linéaires, pointues, se croisant près de leur ex-
trémité, ressemblant davantage aux lamelles du sucoir des Diptères qu’à de véritables mandibules;
les palpes ne sont composés que de deux articles : d’après Savigny, leur bouche serait plus com-
plexe et se composerait d'un labre, de deux mandibules, de deux mâchoires portant chacune un
très-petit palpe d'un seul article, et d’une lèvre privée de palpes. Les yeux sont saillants, hémisphé-
riques, un peu pédiculés, grenus, avec des facettes peu nombreuses et très-grandes, comparative-
ment à la dimension de l’ensemble de l'organe; il n’y a pas d'yeux lisses. Les deux antennes sont
courtes, rapprochées à leur base sur une élévation commune, filiformes, et composées ordinaire-
ment de trois articles, dont les deux premiers très-courts, et dont le dernier, fort allongé, se divise
depuis son origine en deux branches longues, comprimées, lancéolées et s ‘appliquant l’une contre
l'autre; mais pouvant avoir jusqu’à six articles. Les pattes sont presque membraneuses, compri-
mées, à peu près d'égale longueur : les quatre antérieures très-rapprochées, et les deux autres reje-
iées en arrière : l’espace de la poitrine compris entre ces dernières pattes est très-ample et divisé en
deux par un sillon longitudinal; les côtés de l’arrière-trone, qui servent à l'insertion de la paire de
pattes postérieures, se dilatent fortement en arrière et forment une espèce de bouclier renflé qui
défend la base antérieure et latérale de l'abdomen. Les tarses sont filiformes, composés de deux,
trois ou quatre articles membraneux, comme vésiculeux, et dont le dernier, un peu plus grand
que les autres, n'offre pas de crochets. L'abdomen, à peu près cylindrique, a de huit à dix seg-
ments, et se termine par des pièces assez analogues à celles que l'on voit à l’anus de certains Hémi-
ptères.
L'anatomie des Strepsiptères est peu connue, et l’on n'a quelques notions que sur l'appareil di-
gestif. L’œsophage est grêle; le jabot très-rétréci à son insertion avec le ventricule chylifique :
celui-ci est d’abord droit, mais il se replie sur lui-même vers l’extrémité.
Comme le fait remarquer M. Joly dans un travail récemment présenté à l’Académie des sciences,
M. Van Siébold a fait connaître les singulières métamorphoses des Strepsiptères, qui rappellent ce
que M. Fabre a appelé l'Hypermétamorphose dans les savantes observations qu’il vient de présenter
sur les transformations si curieuses des Méloïdes, dont nous parlerons ailleurs. En effet, d’après
M. Siébold, les mâles seuls des Strepsiptères subissent une métamorphose complète; les femelles, au
contraire, parvenues à leur dernier degré de développement, ressemblent beaucoup à des larves, et
n’ont ni pieds, ni ailes, ni yeux. Ces femelles ne quittent jamais leurs victimes : elles sont vivipares
et donnent naissance à des larves hexapodes, très-agiles et assez semblables, pour l’aspect extérieur,
à la larve des Méloïdes. Une fois éclos, les jeunes Strepsiptères ne tardent pas à pénétrer dans le
corps des larves d'Hyménoptères, dont elles partagent le nid, et dont les sucs doivent leur servir de
pâture; là elles perdent leurs pattes, à la suite d'une mue, pendant laquelle la déhiscence de la
peau s'effectue par la chûte du segment céphalique, et non par une scissure dorsale médiane,
comme chez la plupart des Insectes. Du reste, M. Siébold ne signale aucune différence entre l’orga-
nisation des larves sans pieds et celles des larves hexapodes. Dans les Diptères du genre-Œstre, et
spécialement dans l’'OEstrus equi, étudié par M. Joly, non-seulement la larve acquiert successive-
ment des formes très-différentes, mais sa sructure intérieure change également. En résumé, et
d’une manière générale, on peut dire que le parasitisme impose partout à l’animal la nécessité de
morphoses plus nombreuses que dans les autres êtres, et que ces morphoses, tantôt progressives,
tantôt rétrogrades, sont toujours parfaitement en harmonie avec le but que le parasite doit remplir.
C'est ce que l'on peut constater dans les Insectes que nous avons nommés; c’est ce que l’on peut
È
ANNELÉS. — STREPSIPTÈRES. 23
voir aussi chez certains Myriapodes, Crustacés (particulièrement les Lernées), et encore mieux dans
divers Helminthes.
Les larves, aussi bien celles des mâles que celles des femelles, vivent toujours en parasites sous
les anneaux de l'abdomen de diverses espèces d'Hyménoptères, et l’on en a observé plusieurs dans
des Guêpes, des Polistes, des Andrènes, des lalictes, ete. Ces larves sont de forme ovale-oblongue,
à corps annelé ou plissé, avec l'extrémité antérieure dilatée en forme de tête, et la bouche formée
seulement de trois tubercules d’après M. Peck. Cet observateur dit à tort qu'elles n’ont pas de
pattes; car il est certain, au contraire, que dans certaines de ces larves les pattes sont très-déve-
loppées, ayant surtout des hanches et des cuisses volumineuses et garnies d’épines, des jambes et
des tarses allongés : ces derniers étant, comme dans l'adulte, dépourvus de crochets. D’après La-
treille, les larves des Strepsiptères se métamorphosent en nymphes dans la place même où elles se
trouvent et sous leur propre peau, et, à ce qu’il lui a paru d’après l'examen de la nymphe du Xenos
Rossi, sans changer de forme.
On est peu fixé sur les affinités naturelles de cet ordre d’Insectes dans la série entomologique. En
effet, les Strepsiptères offrent des caractères qui semblent devoir les rapprocher de différents ordres
et en même temps d'autres qui les en éloignent; aussi n'est-ce qu'avec doute que nous les placons
ici. Par leurs ailes antérieures disposées en élytres et par plusieurs autres particularités, ils se lient
aux Goléoptères, auxquels même quelques entomologistes modernes les ont réunis; par leurs ailes
postérieures plissées longitudinalement en éventail dans le repos, ils se rapprochent des Orthoptères
et surtout des Dermavntères, qui ne sont qu’un démembrement de ces derniers; par leur parasitisme
et d’autres caractères, ils sont voisins des Hyménoptères, auxquels Rossi avait réuni la première espèce
connue de cet ordre, le Xenos vesparum, dont il découvritle premier la larve; par la forme du tronc
de l'Inseëte parfait, par sa forme et sa division, ils ont de l’analogie avec les [émiptères; par la pré-
sence de pièces analogues aux ptérygodes, ils ont quelque ressemblance avec les Lépidoptères; enfin
par certains de leur organes buccaux et surtout par leurs mandibules disposées en sortes de suçoirs,
ils se lient aux Diptères, auprès desquels on les a assez généralement rangés. Mais, comme on a pu
s'en rendre compte d’après ce que nous venons de dire, on doit conclure que les Strepsiptères con-
stituent un de ces groupes anomaux que les naturalistes ne savent où placer dans une classification
véritablement naturelle; d'autant plus que lorsque les caractères fournis par l'Insecte parfait ten-
dent à les faire ranger près de tel ou tel groupe, des caractères aussi importants tirés de la larve
tendent, au contraire, à les en éloigner pour les faire réunir à d’autres divisions éloignées des pre-
mières. :
Les Strepsiptères sont des Insectes de taille assez petite, encore imparfaitement connus, dont on a
décrit une quinzaine d’espèces, et dont les larves ont toujours été trouvées sur les Hyÿménoptères.
Ces Insectes ont été étudiés par un assez grand nombre d'auteurs depuis Rossi, qui en découvrit
la première espèce. C’est ainsi que l’on peut citer les travaux de Kirby (Trans. of the Linnean So-
ciety of London, t. IX, 1811), de Jurine (Mém. de l'Acad. de Berlin, t. XXHD), de Latreille (Règne
animal, t. V, 1829), de Savigny, de Siébold, de Peck, de MM. Léon Dufour, Templeton, et surtout
‘es entomologistes anglais, tels que Curtis ({ustr. of British Entom.); Westwood (Trans. of Ent.
Soc. of London, t. 1), Newport (Trans. of the Zool. Soc.), Newman (Ent. Mag.), Leach, Dales, etc.
Quatre genres seulement ont été proposés par les auteurs; ce sont ceux des :
XÉNOS (Xenos) (£:vos, qui n’a pas de pied), Rossi (Faun. et Mant., 1792), dont les tarses ont
quatre articles, et les antennes plus courtes que le thorax, ayant trois articles : le premier très-
court, lè deuxième très-long, et le troisième inséré à la base de celui-ci. L'abdomen est corné, à
l'exception de l’anus, qui est -charnu et rétractile. Ces Insectes, à l’état de larve, vivent sur divers
Hyménoptères, principalement des groupes des Guêpes et des Polystes. C’est le genre le plus nom-
breux de tout l’ordre. L'espèce typique est le Xénos pes Guêres (Xenos vesparum, Rossi), qui est
long d’un peu moins de À centimètre, à corps noir, ainsi que les antennes, à ailes d’un brun noi-
râtre; qui se trouve dans le midi de l'Europe, et dont la larve vit principalement sur la Guêpe ordi-
naire (Vespa gallica). Voyez notre figure 51, page 19. Une espèce vit sur une Guêpe analogue propre
à l'Amérique du Nord, la Polistes fuscata, Fabr. D'autres espèces ont reçu les noms de Xenos Pec-
ki, Kirby; spheridarum, L. Dufour; Westwoodii, Templeton; Rossu, etc.
24 HISTOIRE NATURELLE.
ÉLENQUE (Elenchus, Curtis) (Hlustr. of British. Entomology, 1825), dont les tarses ont deux
articles, les antennes gréles, pubescentes et rugueuses, plus longues que le thorax, divisées après le
premier article en deux lamelles linéaires, comprimées, représentant un second et un troisième
article. La tête offre un prolongement assez petit au milieu du front; les pattes sont longues. Le type
est l'Elenchus Walkeri, Curtis, dont l'E. tenuicornis, Westwood, ne diffère probablement pas, et
dont la larve a été trouvée sur des Andrènes. Une seconde espèce, décrite par M. Westwood sous le
nom d'E. Templetoni, a été rapportée de l'ile Maurice.
STYLOPS (Stylops) (srv%ce, style; ob, aspect), Kirby (Trans. of the Lin. Soc. of London, t. Xf,
4811), dont les tarses ont quatre articles, et les antennes six articles : le premier grand, le deuxième
très-court, et le troisième prolongé au côté interne en un lobe allongé : les suivants allant en s'amin-
cissant et se terminant en pointe assez aiguë, d'où a été tirée la dénomination générique. Abdomen
entièrement mou. L'espèce principale est le Srycops pes AnprÈnes (Séylops melittæ, Kirby); un peu
plus long que notre Xénos typique, très-noir, à ailes plus longues que le corps, à pattes brunes. La
larve est molle, presque cylindrique, blanchâtre, et vit dans l'intérieur du corps de plusieurs espèces
du genre Andrena, d'où elle sort pour se transformer en nymphe, allant se fixer sous le recou-
vrement des lames abdominales; cette espècé a été trouvée en France et en Angleterre. D'autres Séy-
lops sont les aterrimus, observés sur l’'Andrena trimmera; Kirbyi, Leach; Dalei, Gurtis, etc.
HALICTOPHAGE (Halictophagus) (Halictus, Halicte; oxyo, je mange), Dales, Blanchard (Hist. des
Ins., 1845), dont les {arses ont trois articles, et les antennes un nombre égal : le premier et le
deuxième articles presque carrés, et le suivant muni d'un rameau allongé : ces organes excessive-
ment peu développés. La seule espèce de ce groupe est l'Halictophagus Curtisii, Dales, qui est très-
petit, à corps noirâtre, avec les antennes et les pattes d'une teinte plus pèle, et dont la larve a été
trouvée sur l’Halictus æratus, en Angleterre.
TROISIÈME ORDER.
DERMAPTÈRES.
Le nom de Dermaptera (dep, derme, peau; et rrepuv, aile), employé par De Géer pour indiquer
tous les Insectes de l’ordre des Orthoptères d'Olivier et de Latreille, longtemps abandonné par les
entomologistes, a été repris assez récemment par Kirby pour désigner une subdivision de ces der-
niers, comprenant particulièrement les Perce-Oreilles, Forficules, Forficulaires ou Forficuliens,
pouvant former un ordre spécial, intermédiaire entre ceux des Coléoptères et des Orthoptères pro-
prement dits, et que M. Léon Dufour désigne sous la dénomination de Labidoures, employée primi-
tivement par M. C. Duméril pour les Forficules, et M. Westwood sous celle d’'Euplexoptères, chez
lesquels les élytres ont leur suture droite, tandis que les élutres se croisent dans les Orthoptera.
La caractéristique générale des Dermaptères est la suivante : corps ordinairement allongé, plus
ou moins linéaire, déprimé, légèrement convexe en dessus ; tête triangulaire ou orbiculaire, décou-
verte; antennes filiformes ou sétacées, insérées en avant des yeux, plus ou moins longues et variant
beaucoup sous le rapport du nombre des articles dont elles sont composées; yeux de grandeur varia-
ble, quelquefois saillants; pas d’ocelles; labre entier; mandibules bidentées; mâchoires terminées
par une pièce cornée, recouverte d'une galette presque cylindrique, allongée, grêle, arquée; lèvre
fourchue, à peu près membraneuse; languette également fourchue; menton coriacé, à peu près carré;
palpes filiformes : maxillaires plus longs que les autres, de cinq articles, les deux premiers courts
et les suivants allongés : labiaux de trois articles, le premier plus court que les deux suivants;
pas d'écusson, élytres presque crustacées, sans réticulations, horizontales, se joignant à angle droit,
constamment plus courtes que l'abdomen et souvent éronquées à l'extrémité; ailes horizontales, très-
ANNELES. — DERMAPTÈRES. 25
amples quaml elles sont développées, plissées en éventail dans le repos, et se repliant en travers
sous les élytres : ces ailes formées de deux parties : une première basale, coriacée, de consistance
élytroïde, et une seconde terminale, membraneuse, semblable aux ailes ordinaires; abdomen al-
longé, composé de segments transversaux, imbriqués sur les côtés, au nombre de sept dans les fe-
melles et de neuf dans les mâles : le dernier segment toujours terminé par une paire formée de
deux branches cornées, mobiles, opposables : habituellement plus grandes, plus dentées et plus ar-
quées dans les mâles que dans les femelles, et pouvant se mouvoir horizontalement l’une vers l’au-
tre; entre les deux branches de la pince, en dessus et vers l’extrémité du dernier segment, il y à
une petite lame cornée, variable pour la forme et la grandeur, plus inclinée sur l'anus dans les
mâles, et qui a été regardée comme un segment abdominal rudimentaire; pattes de longueur
moyenne, gréles, disposées pour la course; jambes cylindriques, mutiques; tarses velus en dessous,
de trois articles : le second petit, bilobé ou bifide, le éroisième terminé par deux crochets simples,
parfois munis d'une petite pelote spongieuse, plus ou moins oblitérée après la mort.
Outre les caractères zoologiques que nous venons d’énoncer, les Dermaptères ont encore des parti-
cularités anatomiques qui tendent à en faire un ordre distinct. C’est ainsi que M. Léon Dufour y a
découvert deux glandes salivaires consistant chacune en une vésicule située dans le thorax, termi-
née postérieurement par un filet très-fin et antérieurement par une sorte de cou tubuleux, et s’unis-
sant avec la partie correspondante de l’autre glande pour former un conduit commun, s’ouvrant
dans la bouche, et qu'il a vu un tube digestif se composant d’un œæsophage, d'un grand jabot al-
longé, d'un court gésier, d’un estomac, d'un intestin grêle, d’un cœeum et d'un rectum; d’autrcs
particularités ont encore été étudiées, mais, comme elles sont communes aux Dermaptères et aux
Orthoptères, nous aurons bientôt occasion d'y revenir.
Les Dermaptères sont des Insectes de taille moyenne, très-agiles, et employant, selon les espèces,
autant leurs pattes que leurs ailes dans l'acte de la locomotion, au moins dans les espèces européen-
nes, qui sont les seules que l’on ait pu observer sous le point de vue de leurs mœurs. Leurs élytres,
comme nous l'avons dit, sont très-courtes, ne couvrant guère que le quart ou tout au plus le tiers
de l'abdomen : sous ces élytres sont logées des ailes aussi longues que l'abdomen lui-même, mais
qui sont repliées dans Fétat de repos, et ne laissent voir alors qu’une petite saillie coriace, à peu
près de même nature que les élytres. Ces ailes ont une structure assez singulière, et diffèrent, sous
ce rapport, de celles des Orthoptères, avec lesquelles elles n’ont de commun que d’être pliées en forme
d’éventail; elles sont plus longues que larges quand on les considère dans leur état d'expansion, pré-
sentant au bord antérieur, beaucoup plus épais dans sa première moitié et depuis l'extrémité de
ce bord, une partie membraneuse dans laquelle s’irradient de nombreuses nervures et ramifica-
tions nervulaires secondaires qui permettent aux ailes non-seulement de se replier sur elles-mêmes
longitudinalement dans l’état de repos, mais aussi de pouvoir s'arranger en éventail et de se ployer
également de telle sorte qu’elles se cachent entièrement sous les élytres quelque petites qu’elles
soient. L'abdomen, n'étant pas protégé par les ailes, a dû être coriacé en dessus, et cette prévoyance
de la nature peut être constatée également dans d’autres ordres d'insectes, tels que ceux des Or-
thoptères, des Hémiptères, des Hyménoptères, des Diptères, ete., qui, sous ce point de vue, sont à
peu près dans des conditions semblables.
Quelques Dermaptères sont assez communs dans les lieux sombres et humides, se rassemblent
parfois en grand nombre sous les pierres, les vieilles écorces, ete., prenant habituellement une nour-
riture végétale, telle que les fruits ou des détritus, et pouvant même parfois dévorer certaines sub-
stances animales. C’est ainsi que De Géer a vu des Forficules, enfermés dans un flacon et sans
nourriture, manger les corps de ceux d'entre eux qui mouraient. Mais ce fait, observé sur des In-
sectes en domesticité, a-t-il lieu dans la nature? et, à leur état sauvage, ces êtres sont-ils omnivores,
comme l’ont dit certains auteurs? La pince qui termine leur abdomen a fait donner par Linné au
genre primitif, qui renfermait toutes les espèces de cet ordre, le nom latin de Forficula (forficula,
petits ciseaux, petites pinces), et leur a valu en francais la dénomination de Perce-Oreille, par suite
de cette fausse idée, encore admise de nos jours, principalement dans les campagnes, et quoique
toutes les lois anatomiques s’y opposent complétement, que ces Insectes pouvaient s’introduire dans
les oreilles de l'homme et des animaux supérieurs, tels que les Mammifères, pénétrer ensuite dans
le cerveau et les faire périr à la suite d’atroces douleurs. En réalité, cette pince ne peut leur servir
4. 4
26 HISTOIRE NATURELLE.
que comme d’une arme défensive assez peu redoutable, et la femelle‘ne l'emploie jamais, comme
cela a lieu pour certaines parties également abdominales de plusieurs autres Insectes, la tarière, par
exemple, pour percer les matières dans lesquelles elle placerait ses œufs : en effet, cette pince est
trop peu résistante pour cela, et, en outre, les œufs sont simplement déposés sur le sol. Cette pince
varie de forme et de grandeur dans les diverses espèces, et même parfois dans la même espèce,
suivant les sexes.
Lors du rapprochement des sexes, lorsque le mâle et la femelle se.rencontrent, ils se placent sur
une même ligne, après s'être approchés l’un de l’autre à reculons; les pinces, qui leur servent peut-
être dans les préludes de l’accouplement, semblent alors devoir les gêner : celles du mâle s'appli-
quent sur un des côtés du corps de la femelle, tandis que celle-ci place les siennes de l’autre côté du
corps du mâle. Comme la presque unanimité des Insectes, ils sont ovipares; mais on ignorecombien il
faut de temps pour que les œufs puissent éclore, quoiqu'il y ait lieu de croire que ce temps ne soit pas
très-Jong. Il est probable qu'il y a deux générations par an, dans nos elimats au moins : une, bien
constatée, au printemps, et une autre, qui n'a pas été observée d'une manière positive, mais qui
semble probable, en automne. Les œufs sont assez gros, relativement au volume des espèces, blan-
châtres et lisses. Les femelles, après les avoir pondus à terre et mis à l’abri sous quelques pierres ou
détritus végétaux, ne tardent pas à les réunir en tas, et, se tenant dessus presque constamment, sem-
blent en quelque sorte les couver, à peu près de la même manière que le font les Oiseaux : et cela
est très-remarquable, car on ne l’a constaté chez aucuns autres Insectes. Les métamorphoses ne sont
pas complètes, comme dans les Coléoptères, les Lépidoptères, les Diptères, ete.; elles sont incom-
plètes comme dans les Orthoptères, c’est-à-dire que les états intermédiaires qui précèdent celui d’In-
secte parfait ne sont pas aussi différents, aussi tranchés que ceux des Insectes à métamorphoses com-
plètes. La jeune larve, en sortant de l'œuf, est déjà d’une grandeur qui ne répond guère au petit
volume de sa prison primitive, et il s'ensuit que les parties de son corps y sont extrêmement com-
primées; mais, aussitôt qu’il est né, le jeune animal se gonfle en quelque sorte au moyen de l'air qui
pénètre immédiatement dans toutes les parties de son corps, et ne pourrait plus rentrer dans son
œuf. Ainsi que l’a constaté De Géer le premier, et que l'ont revu depuis plusieurs observateurs, les
larves nouvellement nées montrent beaucoup d’attachement pour leur.mère, et réciproquement
celles-ci pour elles. Les petits viennent souvent se réfugier auprès de leur mère; ils se placententre
ses pattes et semblent vouloir ainsi se mettre à l’abri d’un danger. Combien d’autres Insectes, très-
prévoyants d’ailleurs pour leur progéniture, sont inférieurs sous ce rapport aux Dermaptères? La
plupart ne voient même pas leurs œufs éclore; dès qu’ils ont pourvu à ce que les petits qui en sor:
tiront puissent trouver leur nourriture d'eux-mêmes, ils les abandonnent pour toujours, et ne tar-
dent pas eux-mêmes à périr; les Dermaptères, au contraire, survivent longtemps à leur ponte, et
forment avec leurs petits des familles très-nombreuses qui se logent sous les écorces des arbres, sous
les pierres, sous les détritus végétaux répandus à la surface du sol. Les larves ne diffèrent de l’In-
secte parfait que par une consistance moindre dans les divers tégüments qui composent leur corps,
par une taille plus petite, l'état rudimentaire du mésothorax et du métathorax, l'absence complète
d'ailes et d’élytres, un plus petit nombre d'articles aux antennes, et enfin un moindre développe-
ment de la pince qui termine l'abdomen. Dans la nymphe, qui jouit de la faculté de se mouvoir
aussi bien que la larve, on trouve des rudiments d’ailes et d’élytres; l'être s'organise davantage, et,
après sa dernière mue, les élytres, ainsi que les ailes, atteignent tout leur développement, et l’In-
secte arrivé à son état de perfectionnement complet est apte à se reproduire. D'après ce que nous ve-
nons de dire, on voit que les passages successifs que présentent les Dermaptères depuis le commen-
cement de leur état de larve jusqu’à celui d'Insecte parfait sont tellement insensibles et peu faciles
à saisir, que l’on ne peut aisément savoir si un individu que l’on trouve est réellement encore sous
l'état de larve ou de nymphe, ou s’il est parvenu à celui d’Insecte complet, et de là il résulte que
l'on a souvent décrit des larves pour des Insectes parfaits, et que l’on a créé à tort des espèces qui
ne sont que des phases du développement d’une seule et même espèce. Un autre motif d'incerti-
tude existe encore dans certains Dermaptères du groupe des Chélidoures, qui, assure-t-on, n'aurait
pas d'ailes ni d’élytres même à l’âge adulte, c'est-à-dire à celui de reproduction. Et, quand même ce-
fait serait constaté, on peut encore se demander si, dans une seule et même espèce, il ne pourrait
pas à la fois v avoir et des individus privés d’ailes et des individus ailés
: ANNELÉS. — DERMAPTÈRES. 97
Quant à l'histoire de l'ordre des Dermaptères, nous en dirons peu de mots, car elle est mèlée à
celle des Orthoptères, dont nous traiterons bientôt. Linné, le premier, a fondé le genre l'orficula;
Fabricius s’est borné à en faire connaître plusieurs nouvelles espèces; Leach, Palisot Beauvois et
Latreille, les premiers, en ont démembré quelques groupes génériques; Géné a publié une excellente
monographie des Forficules d'Europe, et a montré plus de tendance à réunir les groupes déjà fondés
qu'à en créer de nouveaux; M. Léon Dufour, outre ses recherches anatomiques sur ces animaux,
en à donné un travail à peu près complet; De Géer a étudié les mœurs du Perce-Oreille aurieu-
laire: enfin Audinet-Serville, dans sa Revue méthodique des Orthoptères, publiée dans les Annales
des sciences naturelles, première série, t. XXIT, et surtout dans les Orthoptères des Suites à Buffon,
1839, coordonnant les travaux de ses devanciers, présentant un grand nombre d'observations nou-
velles et créant plusieurs genres exotiques, a donné un tableau complet des Dermaptères qui, pour
lui, constituent les Forficulaires, première famille de la section des Orthoptères coureurs. Depuis
cet ouvrage, très-peu de travaux ont été publiés; cependant on a décrit quelques espèces nouvelles;
_des détails de mœurs et d'organisation ont été donnés, de telle sorte que cet ordre d’Insectes, s’il est
l'un des moins nombreux, car les espèces qui le constituent sont peu recherchées par les voyageurs,
est en même temps l'un des mieux connus.
L'ordre des Dermaptères ne renferme qu’une seule famille, celle des Forr ICULAIRES (Forficula-
ria), dont nous avons déjà indiqué et les mœurs et les caractéresmparticuliers : ces derniers pouvant
surtout se résumer en ce que leur abdomen est terminé par une pince, et que leurs tarses ne sont
composés que de trois articles. On en décrit une soixantaine d'espèces, propres à toutes les parties
du monde, aussi bien sous les zones brûlantes que dans la région des neiges des plus hautes monta-
gnes, et qui sont réparties en une vingtaine de genres, dont onze seulement, adoptés par Audinet-
Serville, devront nous occuper, et dont celui des Perce-OrEILLEs est le principal.
On peut subdiviser cette famille en deux groupes principaux.
Dans le premier, le corps est un peu convexe ou faiblement dépr'imé.
Le genre typique est celui des :
PERGE-OREILLES ou FORFICULES (Forficula, Linné). — Corps un peu convexe, tête cordiforme,
à vertex légèrement convexe; antennes composées de dix à quatorze articles bien distincts, assez
allongés; yeux petits, peu saillants, placés chacun au milieu du bord latéral de la tête; palpes pres-
que filiformes; corselet carré, plan; élytres et ailes souvent parfaites, parfois rudimentaires où
nulles; pattes de longueur moyenne; tarses ayant les premier et troisième articies allongés : quoi-
que ce dernier moins long que le premier, et le second petit, bilobé, plus ou moins dilaté; abdomen
allongé, à deuxième et troisième plaques dorsales charnues, munies d'un tubercule latéral : avant-
dernière plaque dorsale étroite, transversale, coupée droit postérieurement, et avant-dernière pla-
que ventrale demi-circulaire, recouvrant presque complétement la dernière plaque ventrale; pince
abdominale plus ou moins développée. Linné, en créant ce genre, le plaça parmi les Coléoptères, à
la suite des Staphylins, et c'est De Géer, le premier, qui en fit un ordre distinet. On a vu pourquoi
le nom de Perce-Oreille avait été donné à ces animaux, et, par le même motif, des dénominations
analogues ont été employées en Angleterre et en Allemagne; cependant quelques personnes assurent
que leur nom vulgaire ne leur vient pas de la croyance qu'ils pénètrent dans les oreilles, mais bien
parce que la pince dont est armé leur abdomen ressemble à l'instrument dont se servaient autrefois
les bijoutiers pour percer les oreilles auxquelles on voulait attacher des pendants. Les Forficules ont
un aspect qui rappelle assez, parmi les Coléoptères, les Staphyliniens : comme chez ces derniers, le
corps est long et étroit; les élytres extrêmement courtes, et l'abdomen peut se relever d’une manière
menaçante quand on les inquiète. Leurs habitudes sont nocturnes, et on les trouve dans les endroits
cachés. Très-abondants en individus, ils sont loin de l'être en espèces, car Serville n’en décrit qr
vingt et une, propres à toutes les parties du globe, mais plus particulièrement à l'Europe et à l'Amé
rique. Comme espèces typiques, nous citerons seulement, parmi les espèces à élytres et ailes par-
faites : 1° le cran Perce-Oreizze, Geoffroy, ou ForricuLe auricuraire (Forficula auricularis, Linné),
long de 3 à 4 centimètres, la pince mesurant, en outre, un tiers de cette longueur, d’un brun fer-
rugineux, avec les élytres d’un brun clair, bordés latéralement de testacé, qui est très-commun
dans toute l’Europe, sous les pierres et les écorces, sur les fleurs, où il recherche probablement les
28 HISTOIRE NATURELLE,
petits Insectes qui s'y trouvent, dans les fruits gâtés, les bouses de Vache desséchées, ete., qui
exhale, surtout quand on le presse entre les doigts, une odeur très-prononcée d'acide sulfurique,
et qui semble propre à tout l’ancien continent; ® le »erir Perce-Orrirre, Geoffroy, ou Forricure
max (Forficula minor, Linné), de plus de moitié plus petit que le précédent, à élytres tronquées à
l'extrémité, qui estassez commun en France, que l’on trouve sur les fumiers, dans les ordures,
vit en société de certaines petites espèces de Staphylins, et que l’on prend assez souvent au vol dans
les soirées chaudes de l’été; 3° parmi les espèces à élytres parfaites, mais à ailes nulles ou rudimen-
taires, le Fonricuze PéDEsrrE (Forficula pedestris, Bonnelli), qui, découvert en Italie, pendant l'été
et l'automne, sur l’aune, l'orme, l'onoporde, ete., a été repris depuis en Suisse et même aux envi-
rons de Paris par M. le docteur de Rambur; 4° parmi les espèces à élytres et ailes rudimentaires, et
constituant le genre Chelidoura de Latreille, qui comprend quatre espèces découvertes dans le midi
de la France, principalement dans les Pyrénées, et dont la principale est la Forricue aprère (For-
ficula aptera, Toussain Charpentier; F. Pyrenaica, Géné). Le genre Labia, Leach, doit rentrer dans
le même groupe. Nous donnons, dans nos généralités sur les Insectes, la figure (x° 15) de la
Forricuce pe Durour, Serv.; du midi de la France.
Fig. 55 — Forficule auriculaire. Fig. 56. — Pyragre brune. Fig. 57. — Forficésile gigantesque.
Mâle. Femelle, Mâle.
Les autres genres, caractérisés par des particularités tirées de la disposition et de la forme de leur
corps, de leur tête, des antennes, des tarses, ete., sont ceux des : — 1° FORFICÉSILE (Forficesila,
Latr.) ou LABIDURA, Leach : comprennent les anciens Forficules, chez lesquels le ombre des arti-
cles antennaires, toujours au-dessus du nombre de quatorze, varie entre quinse à trente, et surtout
dont la téte est moyenne, convexe en dessus, et le corselet presque carré : dont on connaît une di-
zaine d’espèces propres à Saint-Domingue, à Cayenne, à l'île de France, à Oware (Afrique), à Pon-
dichéry et à diverses parties de l'Europe; parmi ces dernières, nous nommerons la ForricésiLE G1-
CANTESQUE (Forficesila gigantea, Fabr.), la plus grande de nos espèces, commune sur le littoral de
l’Adriatique, de la Méditerranée, etau bord du Pô, du Tésin et de l'Arno; F. meridionalis, Léon
Dufour, de l'Espagne; F. maritima, Bonnelli, abondante à la fin du printemps, le long de la Médi-
terranée, à Gênes, à Nice, en Toscane, et qui a été également prise sur le mont Liban, en Syrie et
en Égypte, ete. — 2° PYGIDICRANE, Serville : une espèce du Brésil (P. nigrum) et une de Java
(P. marmoricrura). — 5° SPONGIPHGRA ou PSALIDOPHORA, Serv. : des espèces de l'Amérique du
Sud. — 4° PYRAGRA, Serv. : une espèce de Cayenne (P. fuscata). — 5° LOBOPHORA, Serv. : type,
L. rufitarsis, de Java. — 6° ECHINOSOMA, Serv. : une espèce (F. afrum, Palisot Beauvois), pro-
venant des royaumes d'Oware et de Bénin, en Afrique. — 7° DIPLATYS, Serv. : ne comprenant
qu'une espèce très-remarquable, la F. macrocephula, Pal. Beauv., trouvée à Bénin.
Dans le second groupe, beaucoup moins nombreux que le précédent, le corps est très sensible-
ment déprimé.
Les-genres de ce groupe, tous créés par Audinet-Serville, ne sont qu’au nombre de trois, et ne
renferment chacun qu'une seule espèce. Ce sont les genres : 4° SPARATTA (S. pelvimetra, du Bré-
ANNÉLÉS. — ORTHOPTÈRES. 99
sil); 29 MECOMERA (A1. brunnea, de Cayenne), 5° APACIIYA (EF. depressa, Pal. Beauv., du royaume
d'Oware), qui se distinguent entre eux par quelques particularités importantes et surtout par la
composition de leur abdomen et le nombre de leurs articles antennaires et Larsiens. |
Parmi les genres de cet ordre que nous n’adopterons pas, nous citerons seulement le genre Psalis,
Serv., abandonné par son auteur lui-même.
QUATRIÈME ORDRE.
ORTHOPTÈRES.
Linné plaçait les Insectes qui composent cet ordre parmi les Hémiptères, et en formait sa division
des Hémiptères à mächoires; Geoffroy en faisait, de son côté, une division particulière des Coléoptéres.
De Géer, le premier, créa avec eux un groupe spécial auquel, comme nous l'avons dit, il assigna la
dénomination de Dermaptères, et qui, pour lui ainsi que pour plusieurs de ses successeurs et même
encore parfois aujourd'hui, comprenaient non-seulement nos Orthoptères actuels, mais encore les
Forficules. Dans Fabricius, ces Insectes sont désignés sous le nom d’Ulonata. Olivier changea le nom
de Dermaptères, qu’il aurait dû conserver, en celui d’Onruoprères (op0os, droit; #+epov, aile), et cette
dénomination, ayant prévalu, a été adoptée généralement, sauf que, d'après Kirby, quelques es-
pèces en ont été distraites pour constituer l’ordre que nous venons d'étudier.
Les Orthoptères sont caractérisés d’une manière générale par leurs ailes antérieures, plus ou
moins allongées, semi-coriaces, croisées l'une sur l'autre; par leurs ailes postérieures membraneu-
ses, très-veinées, pliées longitudinalement en éventail pendant le repos; par leur bouche composée
de pièces libres, de mandibules, de mächoires et de lèvres propres à triturer les corps solides; par
leurs antennes longues, sétacées; par leurs patles propres seulement à la course, et à tarses formés
de cinq articles, et par leur abdomen terminé par des filets articulés.
On voit, d’après cette caractéristique, que les Orthoptères se distinguent facilement des Dermapté-
res, parce que chez les premiers les élytres ne se recouvrent pas, mais se rapprochent exactement
sur la ligné médiane, tandis que chez les seconds ces élytres, ou les ailes antérieures, qui, malgré leur
consistance moindre, portent encore ce nom, se croisent en chevauchant l’une sur l'autre, et sont
constamment plus longues; en outre, dans les Derrnaptères, les ailes postérieures sont, dans le re-
pos, pliées en éventail dans le sens longitudinal, et pliées en deux dans le sens inverse pour se loger
sous les élytres; les tarses sont de trois articles, l'abdomen terminé par une pince, etc., et, dans les
Orthoptères propres, les ailes postérieures sont pliées seulement dans le sens longitudinal, les tarses
de cinq articles, l'abdomen terminé par des filets articulés, etc. Mais leurs organes buccaux sont les
mêmes, composés de pièces libres, et non soudés ensemble pour constituer une sorte de beé ou su-
çoir comme chez les Hémiptères, qui, sous d’autres points de vue, ont encore quelques rapports im-
portants avec eux.
D'après ce que nous venons de dire, on comprend que les Orthoptères constituent un ordre très-
nettement circonscrit, mais néanmoins avoisinant celui des Goléoptères à un degré assez marqué. Chez
les Orthoptères, les élytres n’ont pas en général la consistance de celles des Coléoptères, et leur tex-
ture est semi-coriace; elles se croisent l’une sur l’autre et ne se rapprochent pas exactement sur la
ligne médiane: les ailes postérieures se font remarquer par leurs nervures longitudinales, qui leur
permettent de se plier dans ce sens, et par quelques petites nervures transversales formant un ré-
seau, ce qui n'a pas lieu de la même manière chez les Coléoptéres. La bouche présente presque con-
stamment un développement considérable; les mandibules et les mächoires acquièrent une puis-
sance remarquable, qui explique comment beaucoup d’entre eux broient et dévorent facilement des
tiges et des feuilles assez dures; mais, au reste, la forme générale de ces appendices buccaux est tout
à fait analogue à celle qui existe chez les Coléoptères. Les antennes ont des formes très-variées; tan-
tôt ce sont des filets très-grèles et d’une extrême longueur, composés d’un très-grand nombre d'ar-
50 HISTOIRE NATURELLE.
ticles; tantôt ce sont des appendices ensiformes, aplatis et élargis, se terminant en pointe, ou bien
des filets renflés en massue vers le bout; tantôt encore ce sont des appendices cylindriques ou garnis
de feuillets comme les dents d’un peigne. Les pattes, très-développées, acquièrent souvent une
grande longueur; chez certains, comme dans les Mantes, les pattes antérieures deviennent des or-
ganes de préhension; chez d’autres, comme dans les Taupes-Grillons, ce sont des organes propres à
fouir la terre; enfin dans le plus grand nombre elles conservent leur forme normale; dans divers
Orthoptères, ce sont les pattes postérieures qui prennent un développement particulier et devien-
nent des organes de saut : c'est surtout ce qu’on remarque chez les Sauterelles, les Criquets et les
Grillons. Nous étudierons toutes ces dispositions importantes en passant en revue les divisions pri-
maires des Orthoptères, et c'est alors que nous compléterons ce que nous avons à dire de général
sur Ja zoologie de ces Insectes intéressants.
Fig. 58. — Criquet nomade. Mile.
Plusieurs particularités de l'organisme interne des Orthoptères ont été étudiées. Suivant MM. Mül-
ler et E. Blanchard, leur système nerveux n’acquiert jamais un degré de centralisation comparable
à celui qu'on observe dans divers types parmi les Coléoptères, les Hyménoptères, les Hémiptères et
même les Diptères. Les trois centres médullaires thoraciques restent toujours espacés, et la chaîne
abdominale s'étend constamment presque jusqu'à l'extrémité du corps. La portion stomato-gastri-
que, ce qui est très-remarquable, atteint chez ces Insectes un développement qu'on ne retrouve pas
ailleurs. En outre, dans les Taupes-Grillons, les Sauterelles et dans beaucoup d’autres Orthoptéres,
le système nerveux de l'appareil digestif, au lieu d’être impair comme chez les Coléoptères, est, au
contraire, double; les ganglions gastriques ont aussi un volume plus considérable que dans les au-
tres Insectes. L'appareil alimentaire des Orthoptères occupe un espace très-considérable de la cavité
abdominale, et il présente un développement tout à fait en rapport avec la grande voracité des Blat-
tes, des Criquets, des Sauterelles, etc. Le tube intestinal varie dans son volume selon les groupes,
et il en est de même de chacune de ces parties les unes relativement aux autres; aussi y revien-
drons-nous en étudiant les familles principales de cet ordre. Les vaisseaux biliaires sont très-nom-
breux, comme cela a lieu chez la plupart des Insectes, excepté dans les Coléoptères, où il n’y en a
que quatre ou six. Assez récemment M. Yersin a publié quelques remarques sur l'anatomie des Or-
thoptères; il s’est spécialement occupé des fonctions du système nerveux, et a donné des observa-
tions microscopiques sur le vaisseau dorsal.
Marcel De Serres, dans un mémoire intéressant, compare les fortes dentelures qui terminent les
mandibules des Orthoptères aux véritables dents des Mammifères, et, quoique cette comparaison
soit forcée, elle est cependant assez ingénieuse, et nous croyons devoir en dire quelques mots.
Marcel De Serres nomme dents incisives ces dentelures quand elles sont larges, en forme de
coin, ayant la forme externe convexe et l’interne concave : elles sont évidemment coupantes; d'au-
tres dents, regardées comme canines, sont coniques, très-aiguës, recourbées en crochet; enfin les
molaires, constamment au nombre de deux seulement, sont les plus grandes de toutes, et situées
très-près du point d'appui, une à chaque mandibule, et leur usage est évidemment de broyer les
aliments découpés par les dents qui les précèdent. Ces trois sortes de dents n’existent pas toujours,
et leur présence ou leur absence indique la nature de l'aliment qu’elles doivent préparer; ainsi les
Orthoptères, essentiellement carnassiers, teis que les Mantides, n’ont .que des dents canines : elles
sont plus longues, plus aiguës que dans les autres Orthoptères, et recourbées à l'extrémité en manière
de tenailles à branches croisées, tandis que ceux qui sont herbivores, tels que les Phasmides, les
ANNELES, — ORTIIGPTÈRES. È 51
Locustaires, les Grilloniens et les Acridiens, n’ont que des incisives et des molaires; enfin les omni-
vores, comme les Blattaires et les Forficulaires, que l’auteur que nous citons y réunissait, qui vi-
vent de végétaux, de cadavres ou de proies vivantes, ont des canines comme les espèces carnassières,
mais moins longues et moins recourbées, et des molaires moins larges et moins grandes que celles
des Herbivores, mais à tubercules plus saillants. Toutes ces dents ne sont pas implantées dans les
mandibules; elles font corps avec elles et n’en paraissent nullement distinctes à leur base externe;
cependant à leur base interne elles semblent séparées de la mandibule par une lame coriacée. Afin
de permettre les mouvements de droite à gauche des mandibules qui jouent les unes sur les autres,
ces dénts ne sont pas placées sur le milieu du bord interne de chaque mandibule; sur la gauche,
elles sont plus en dehors de ce bord, et le contraire a lieu sur la droite, de sorte que, lorsque les
mandibules se eroisent, les dents se joignent. Marcel De Serres va même beaucoup plus loin dans
ses comparaisons avec ce qui a lieu chez les Mammifères, et il assure même, ce qui n'est pas exact,
que l’estomac des Orthoptères herbivores offre une complication de parties internes, qu'on dirait
analogue à celle qui rend si remarquables les Ruminants, et il assure même que divers d’entre eux
font revenir leurs aliments à la bouche pour les triturer une seconde fois. Quoi qu'il en soit, il est
démontré que la plupart d’entre eux sont pourvus d'un gésier musculeux dont l’intérieur est armé
de dents ou d'écailles cornées. -
Ces Insectes ne subissent qu’une métamorphose incomplète, c’est-à-dire qu'ils ne sont pas très-
différents dans leur jeune âge de ce qu'ils seront dans leur âge adulte; ils n'éprouvent, dit-on,
qu'une demi-métamorphose, dont les mutations se réduisent à la croissance et au développement
des élytres et des ailes, dont ils sont totalement dépourvus dans le commencement de leur vie, de
même que tous les autres Insectes susceptibles d'acquérir ces organes de vol; mais on doit noter, en
outre, que plusieurs Orthoptères en manquent parfois même à l'état parfait. Ils subissent ordinaire-
ment quatre à cinq mues successives avant d'avoir leurs ailes, et c’est habituellement après la cin-
quième qu’elles commencent à se développer. Dans nos elimats, c’est à la fin de l’été ou au com-
mencement de l'automne qu'apparaissent surtout les Insectes à l’état parfait. Quand les élytres et les
ailes doivent exister, elles ne se montrent d'abord que suus une forme rudimentaire ou comme des
moignons, ce qui constitue alors l’état de nymphe; la larve différant par l'absence complète de ces
parties. À ces différences près, la larve et la nymphe ressemblent tout à fait à l’Insecte parfait, mar-
chent ou sautent comme lui et se nourrissent des mêmes aliments. Les Orthoptères qui paraissent
rester à l’état de nymphe ou de larve pendant toute leur existence, c’est-à-dire qui n’acquièrent
jamais ni ailes ni élytres, même rudimentaires, se perfectionnent cependant, car ils deviennent
aptes à se reproduire. Le plus grand nombre des femelles est pourvu d’une tarière ou oviscapte,
formé de deux lames, servant à déposer les œufs, qui n'offrent rien de particulier, si ce n’est qu’ils
sont souvent recouverts d’une membrane commune. Les œufs sont pondus le plus ordinairement en
masse; la femelle les enferme dans la terre, les fixe sur la tige des plantes, ou les dépose à la surface,
même de la terre, selon les groupes auxqueis elle appartient.
Tous les Orthoptères connus sont terresires, même dans leurs deux premiers états. Quelques-uns
sont carnivores, comme les Mantes, ou omnivores, de même que les Blattes; mais en général ils se
nourrissent de plantes vivantes. Ils atteignent des dimensions plus considérables que la plupart des
autres Insectes, au moins dans leur longueur : c'est ainsi que diverses espèces de Phasmiens ont
jusqu’à 0%,40 de long. Assez peu d’entre eux peuvent être considérés comme petits. Ils sont disper-
sés dans toutes les régions du globe, mais ils sont surtout abondants dans les pays chauds, et plutôt
individueilement que spécifiquement. Les grandes espèces d’Acridiens et de Locustiens habitent par-
ticulièrement l'Amérique méridionale; tandis que les plus grands représentants de la tribu des Phas-
miens proviennent des Moluques et de la Tasmanie. L'Orient et le nord de l'Afrique sont les régions
où quelques Acridiens apparaissent surtout en prodigieuse quantité; enfin dans les parties tempé-
rées ou froides de l’Europe et de l'Amérique, ces Insectes sont de moins en moins nombreux, et
représentés par des espèces de plus petite dimension. Les Orthoptères affectent les formes les plus
bizarres; ce sont des éminences sur la tête, des expansions soit au thorax, soit aux pattes, etc. Cer-
tains Spectres privés d'ailes et très minces par rapport à leur grande longueur ont exactement l'as-
pect de baguettes ou de tiges plus ou moins cylindriques; les Mantes présentent des dispositions
particulières qui leur ont valu les surnoms de Religieuses, Prie-Dieu, ete.; beaucoup d'espèces ont
32 HISTOIRE NATURELEE.
des ailes assez développées dont la coloration et la disposition des nervures leur donnent entière-
ment l'aspect de feuilles, ete. C’est de tous les Insectes l’un des ordres le moins nombreux en es-
pèces; car on n’en a pas décrit plus de huit à neuf cents. Mais les individus de certaines espèces se
rencontrent en abondance extrême et souvent en quantité incalculable : ce qui explique comment
ces animaux occasionnent parfois des ravages si étendus, comme cela arrive trop fréquemment pour
les Blattes, les Criquets, les Sauterelles, ete., ainsi que nous le dirons bientôt.
La forme des pattes postérieures des Orthoptères a fait diviser naturellement ces Insectes en deux
grandes sections : les Coureurs et les Sauteurs, que Latreille admet dans ses ouvrages. Les espèces
sauteuses, les Sauterelles par excellence, ont les cuisses postérieures longues et renflées, pourvues
intérieurement de muscles puissants, au moyen desquels ellés peuvent sauter plus ou moins haut; au
repos, ces cuisses s’élèvent au-dessus de la ligne du corps, et forment, avec la jambe, qui d'ordinaire
est très-longue, un angle plus ou moins aigu : ce qui leur donne un port tout particulier. Beaucoup
d’entre eux font entendre un bruit monotone qu'ils produisent, soit en frottant leurs élvtres l'une
sur l’autre (ce qui, d'après Audinet Serville, serait le fait des mâles exclusivement), soit, ce qui est
plus général, en appliquant leurs cuisses postérieures contre leurs élytres, et agitant tantôt l’une,
tantôt l'autre avec une grande vitesse. Nous reviendrons sur la stridulation des Pinus et nous
nous bornerons à signaler actuellement des remarques à ce sujet de M. Yersin.
Pendant longtemps les Orthoptères ont été moins étudiés que les Insectes des autres ordres; cela,
comme le fait observer Audinet Serville, a tenu peut-être à la difficulté d'en rencontrer de grandes
collections, vu la place considérable qu’il faut leur consacrer, surtout lorsque les organes du vol
sont déployés, ce qui est cependant indispensable pour la connaissance des espèces. Leur grande di-
mension, l'extrême longueur que présentent souvent les antennes et les pattes de derrière, suscep-
tibles par là d’être souvent mutilées, l'embarras que ces Insectes causent aux voyageurs pour les
rapporter intacts des pays lointains, leur fragilité, enfin la malheureuse facilité que la mollesse de
leur corps, même étant desséché, offre aux Insectes destructeurs, qui les choisissent de préférence
comme plus succulents que les autres, ont dû contribuer pendant longtemps à leur rareté dans les
collections. Depuis les travaux généraux, mais incomplets, des Fabricius, Olivier et Latreille, le dé-
faut d'ouvrages embrassant la classification de l’ordre entier et au niveau de la science actuelle a
dû aussi être une cause du peu d’empressement que les entomologistes ont généralement témoigné
pour eux. Cependant on ne peut leur contester qu'ils ont sur les autres ordres d’Insectes l'avantage
de la taille, la singularité des formes, la richesse des couleurs, qui rivalisent parfois avec celles des
Lépidoptères diurnes, et qu'ils sont dignes d'attirer l'attention par les ravages qu'ils nous causent.
Aussi ont-ils enfin attiré l'attention des naturalistes, et les ouvrages d’Audinet Serville, Aug. Brullé
et de Burmeister, publiés presque simultanément, les deux premiers en France et l’autre en Allema-
gne, ont-ils donné ou reproduit les descriptions de presque toutes les espèces et multiplié les gen-
-res, peut-être même au delà du besoin actuel. Les Sociétés entomologiques, en propageant le goût
de l’entomologie en général, ont aussi fait marcher la branche scientifique qui concerne les Ortho-
ptères, et nous indiquerons surtout à ce sujet les travaux de M. I. Lucas sur les espèces algérien-
nes, et ceux de MM. L. Brisont De Barneville et Yersin, sur beaucoup d'espèces propres à l’Europe.
Le nombre des entomologistes qui se sont occupés des Orthoptères est assez considerable; nous
citerons surtout ceux de MM. Ahbrens, Audinet Serville, E. Blanchard, Bose, Brullé, Burmeister,
Brisont De Barneville, Charpentier (Toussaint), Coquebert, Creutzer, Dalman, De Géer, De Tigny
(Madame), Be Villers, Drury, L. Dufour, Fabricius, Fischer De Waldheim, loudras, Géné, Geof-
froy, Germar, Gray, Guérin-Méneville, Hagenbach, Herbst, Kirby, Klug, Latreille, Al. Lefebvre,
Linné, Lucas, Lichtenstein, Mouffet, Newman, Olivier, Palisot Beauvois, Pallas, Panzer, Perty, Pe-
tagna, Philippi, Rambur, Reæsel, Rossi, Salvi, Say, Schæffer, Scopoli, Shaw, Stoll, Salzer, Thun-
berg, Yersin, Zetterstedt, et de plusieurs autres dont nous aurons plus tard occasion de citer les di-
vers travaux. 4
Ayant, ainsi que nous l’avons déjà expliqué, retiré de l’ordre des Orthoptères les Forfculaires ou
Dermaptères, nous y laissons les autres espèces, qui doivent être partagées en deux sections.
La première section comprend les ORTHOPTÈRES COUREURS, qui ont pour caractères : pales pos-
tirieures uniquement propres à la course, ainsi que les quatre autres : les cuisses postérieures très-
rarement renflées; élytres et ailes couchées horizontalement ou presque horizontalement sur le
ANNELÉS. — -ORTIHOPTÈRES. 53
corps; pas d'organes stridulants dans les mâles. On y forme trois familles particulières : — 1° Prar-
TIENS : à élytres croisant ou chevauchant l’une sur l’autre; ailes plissées seulement dans le sens lon-
gitudinal; antennes longues, sétacées; pattes propres seulement à la course; tarses de cinq articles;
abdomen terminé par des filets articulés; — 2° Manrrens : antennes simples ou pectinées; pattes
antérieures ravisseuses; tarses de cinq articles; abdomen terminé par des filets articulés. — 3° Pras-
MIENS : antennes sétacées; pattes seulement propres à la course; tarses de cinq articles; élytres rudi-
mentaires. à
La deuxième section renferme les ORTHOPTÈRES SAUTEURS, qui ont pour caractéristique : pattes
postérieures propres à sauter : les dernières cuisses plus ou moins renflées, canaliculées en dessous
jambes postérieures munies au bout d’épines mobiles pour faciliter le saut; élytres et ailes le plus sou-
vent disposées en toit; mâles produisant une stridulation. Trois familles spéciales : — 1° Gmizcrens :
antennes sétacées, longues et minces; cuisses postérieures renflées, propres au saut; tarses ordinai-
rement de trois articles; abdomen des femelles muni d'une faible tarière; — 2° Locusriens : an-
tennes sétacées, minces et très-longues: cuisses postérieures renflées, propres au saut; tarses de qua-
tre articles; abdomen des femelles muni d’une longue tarière; — 3° Acriniens : antennes courtes,
filiformes ou prismatiques; cuisses postérieures très-renflées, propres au saut; tarses de trois ar-
ticles; abdomen des femelles sans tarière.
PREMIÈRE FAMILLE. — BLATTIENS.
Les Orthoptères, connus vulgairement sous les noms de Blattes et de Kalierlacs, qui consti-
tuaient le genre Blatta de Linné, forment aujourd’hui une famille particulière, à laquelle les au-
teurs spéciaux assignent les caractères suivants : corps flat, plus ou moins dé, rimé en dessus, ordi-
nairement allongé, ovalaire ou subovalaire; téte presque triangulaire, très-inclinée, à face aplatie;
antennes plus ou moins longues, sétacées, insérées dans un sinus interne des yeux, formées d'un
grand nombre d'articles (parlois près de cent) courts, serrés : le premier beaucoup plus gros que
les autres; yeux aplatis, oblongs, un peu en croissant, placés de chaque côté de la tête; deux ocelles
jaunûtres, près de l'insertion des antennes; labre transversal, étroit; mandibules dures, denticulées
intérieurement, larges, comprimées latéralement; mächoires ciliées, terminées en pointe un peu
arquée, et munie chacune d'une galette aussi longue que la mächoire, plate, ovalaire; lèvre presque
membraneuse, aplatie, bifide; palpes maxillaires allongés, de cinq articles : labiaux de trois arti-
cles, égaux; corselet presque-semi-circulaire ou orbiculaire, clypéiforme, s'avançant sur la tête et
la cachant souvent entièrement, aplati, un peu convexe, souvent transversal, à côtés débordant le
corps; élytres horizontales, coriacées, minces, très-grandes, en recouvrement oblique à leur suture,
portant un grand. nombre de nervures; ailes amples, horizontales, membraneuses, pliées longitudi-
nalement en éventail dans le repos, habituellement de la longueur des élytres; pas d'éccusson; abdo-
men ordinairement large, aplati en dessus et convexe en dessous : le plus souvent composé de sept
segments dans les mâles et de six dans les femelles, non compris le segment anal, qui est apparent
chez les mâles et toujours caché chez les femelles : des appendices filiformes à l'extrémité abdomi-
nale; pattes plus ou moins allongées : celles de derrière plus grandes que les autres; hanches gran-
des; cuisses ovales, aplaties; jambes longues, hérissées d'épines fortes et mobiles, légèrement apla-
ties; tarses de cinq articles : le dernier terminé par deux crochets, ayant parfois une pelote dans
leur entre-deux.
Ramdhor, MM. Marcel De Serres et Léon Dufour ont étudié quelques-unes des particularités rela-
tives à l'anatomie de ces Insectes, et principalement ce qui concerne les organes digestifs et repro-
ducteurs dé la Blatte orientale, si commune dans nos cuisines. Le canal alimentaire n’a pas tout à
fait le double de la longueur totale du corps de l'Orthoptère, et présente d'assez nombreuses circon-
volutions dans la cavité abdominale. L'œsophage, assez court et en tube, se dilate insensiblement
vers le mésothorax en un jabot expansible, oblong, glabre à l’extérieur, offrant des stries longitudi-
nales plus ou moins prolongées, et présentant quelques plissures à l’intérieur. Le gésier, très-dis-
De 5
91 HISTOIRE NATURELLE.
tinct du jabot, a une forme conico-ovoïde et des parois d'une certaine épaisseur, très-lisses exté-
rieurement, et il communique avec le ventricule chylifique. Ce dernier organe consiste en un tube
assez long, plus ou moins flexueux, garni à son origine de huit bourses ventriculaires, cylindroi-
des, et à son extrémité ayant un bourrelet autour duquel sont implantés les vaisseaux hépatiques,
au nombre d'une soixantaine, et tous excessivement déliés, capillaires. L’intestin proprement dit,
assez long et cylindrique, forme une circonvolution-sur lui-même, et se termine par un rectum
présentant six bandelettes musculeuses, longitudinales. Dans les mâles, les vésicules séminales sont
nombreuses, très-petites, oblongues ou coniques, et disposées en deux-pelotes arrondies; dans les
femelles, les ovaires se composent seulement de huit gaines multiloculaires, formant un faisceau
conoïde. Un appareil particulier, portant le nom de glande sérifique, et qui consiste en un grand
nombre de vaisseaux tubuleux libres, et flottant par leurs extrémités, confluant à leur base à
des couches rameuses, se trouve chez quelques espèces, et principalement dans les Mantes, et est
destiné à la sécrétion d'une matière qui doit former aux œufs une enveloppe ou coque d’une sub-
stance plus ou moins coriace.
Lorsque la ponte va avoir lieu, on voit sortir de l'abdomen des femelles une sorte de capsule,
semblable pour la forme à une petite fève ou à un haricot; cette capsule, composée de deux pièces
et divisée intérieurement en un certain nombre de loges renfermant chacune un œuf, affecte des
formes diverses selon les espèces, mais est constamment plus ou moins en carré long, avec les angles
émoussés, ayant sur une des arêtes, par où doit se faire l'ouverture, une série de dentelures très-
serrées. Pendant quelque temps la femelle porte sa capsule suspendue à l'extrémité de son abdo-
men, puis elle l’'abandonne au hasard; et, au moment de l’éclosion, les petites larves ramollissent
cette enveloppe commune au moyen d’un liquide qu’elles dégorgent et qui en facilite la déhiscence.
Les femelles diffèrent des mâles par le développement de leur abdomen; dans ces derniers, il est grêle,
formé de huit segments, tandis que dans les femelles il est plus épais, composé de six à septsegments
seulement : en outre, les ailes sont beaucoup plus longues dans les mäles que dans les femelles.
1 #T
Fig. 59. — Blatte américaine.
Les changements de peau ou les mues successives des Blattiens, depuis leur sortie de l'œuf jus-
qu'à l'état d'Insecte parfait, ont été étudiés avec le plus grand soin sur la Blatta Germanica par
M. Mummel, qui à aussi donné quelques détails importants sur les mœurs de cet Insecte, et nous
croyons devoir reproduire ici ce qu’en dit le savant entomologiste. « J'avais déjà, dit-il, depuis plus
d’une semaine, enfermé dans un verre une femelle de la Blatte germanique, portant un œuf à l’ex-
trémité de son abdomen, lorsque le matin du 4° avril on m'apporta un grand œuf tout frais (c'est-
7 ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. 55
à-dire la capsule renfermant les œufs), qui venait apparemment d’être jeté à l'instant même par
quelque autre femelle. Cette coque avait la forme d'un carré long, peu convexe, arrondi par les
deux côtés et les deux bouts, rayé transversalement, et ayant à l'un des côtés une suture relevée,
travaillée en tresse; elle était longue de trois lignes et large de moitié, de couleur jaunâtre, un peu
brune. À peine eus-je introduit cette coque sous le verre, que la Blatte s’en approcha, la tâta et la
retourna en tous sens. Elle la prit entre ses pattes de devant et lui fit une ouverture longitudinale
d'un bout à l’autre. À mesure que cette fente s’élargissait, je vis sortir de la coque de petites larves
blanches, roulées et attachées deux à deux. La femelle présidait à cette opération; elle leur aidait à
se développer en les frappant doucement avec ses antennes et en les touchant avec ses palpes maxil-
laires. Les larves commencèrent à remuer leurs antennes, puis leurs pattes, puis elles se détachè-
rent les unes des autres, et en quelques secondes elles furent en état de marcher. La coque, restée
vide, montrait alors autant de petites cellules séparées par des cloisons blanches et lisses; et le
nombre de ces cellules correspondait en même temps à celui des raies que j'avais vues extérieure-
ment sur la coque.
« Toutes les jeunes Blattes une fois sorties, la femelle ne s'en occupa plus. Je comptai alors trente
larves toutes blanches et transparentes, ayant les yeux noirs et un point foncé sur l'abdomen, qui
indiquait les intestins. Mais en peu d’instants elles prirent une autre couleur; d'abord verdâtre,
bientôt noire, nuancée de gris jaunâtre. Elles se mirent à courir et s'attachèrent aux miettes de
pain qui se trouvaient sous le verre; tout cela fut l'affaire de vingt minutes. Suivant Latreille, les
œufs de la Kakerlac orientale sont renfermés dans une coque ovale, comprimée, d’abord blanche,
ensuite brune, solide, dentelée en scie sur un des côtés.
« La Blatte germanique doit changer six fois de peau avant de parvenir à l’état parfait. La pre-
mière mue a lieu huit jours après la naissance; la larve est de nouveau toute blanche après avoir
quitté la vieille peau, mais elle regagne vite ses véritables couleurs. Elle est déjà plus grande, plus
arrondie par derrière. Dix jours plus tard, j'ai observé la seconde mue. La troisième s’ensuivit pour
la plupart après deux semaines : la larve sortit lentement, mais avec assez de facilité, de sa peau,
après s'être accrochée à quelque chose de fixe et avoir ouvert cette peau sur le corselet. En sortant,
elle était toute mince, fort allongée, et pour ainsi dire cylindrique; mais en quelques minutes elle
avait repris sa forme oblongue et aplatie, et avait plus de volume que la peau qu’elle venait de quit-
ter. Il lui fallut toutefois plus de temps pour reprendre ses couleurs : le bord jaune du corselet se
dessinait maintenant, et on remarquait déjà les deux segments thoraciqués plus larges que l'abdo-
me, et d’où naissent ensuite les élytres et les ailes. Une tache jaune, carrée, se voyait au milieu de
ces seyments. Toutes ces différentes formes, qui indiquent ce que la larve deviendra un jour, sont
encore beaucoup plus apparentes à la suite de la quatrième mue, qui arrive environ un mois après
la troisième.
« Un mois de plus, et ces larves étaient passées à l’état de nymphes. Elles méritent ce nom à
leur cinquième transformation. La nymphe est moins longue que l’Insecte parfait, mais elle est
beaucoup plus plate et presque plus large. Le corselet a déjà la forme qu'il gardera et ses deux
lignes noirâtres. Celles-ci sont continuées sur les deux segments dont j'ai parlé plus haut, et qui
débordent de beaucoup la poitrine. L'abdomen est, en dessus, noirâtre, avec quelques taches rouges
au milieu; en dessous, brun ou tel qu'il restera. Les pattes ont à peu près toute la grandeur et con-
sistance qu’elles doivent recevoir. En cet état, la nymphe vit un mois ou six semaines. Peu à peu
les fourreaux des ailes se séparent et s'étendent; la nymphe perd de sa vivacité; elle mange moins,
elle ne court plus et cherche l'ombre et la solitude; tout à coufelle s'accroche, la peau s'ouvre, et il
en sort une Blatte parfaite, blanche comme la neige, avec les yeux noirs; mais à vue d'œil l’Insecte
reprend ses couleurs naturelles; les antennes et les pattes brunissent les premières, ensuite l’abdo-
men; en trois heures le corselet a ses lignes parallèles; Jes élytres se colorent les dernières, et dans
l'espace de dix à douze heures tout le changement est achevé; c’est la sixième et dernière métamor-
phose. Si une larve ou une nymphe casse ou endommage quelqu'un de ses membres, la nature n’a pas
la force de réparer cette perte entièrement; le membre endommagé sera toujours imparfait. Une
nymphe avait cassé une de ses antennes assez près de la base; à la dernière mue, cette antenne est
sortie trois fois plus longue que le morceau qui était resté, mais toutefois fort tro mpÈtes et de moi-
tié plus courte et plus mince que l’autre.
36 INSTOIRE NATURELLE.
« La Blatte germanique femelle est lourde, elle court vite; mais je ne l'ai jamais vue remuer les
élytres; tandis que le mâle, en tout plus léger, se sert aussi parfois de ses ailes.
« Je n'ai jamais vu la femelle recevoir le mâle avant quinze jours après sa dernière métamor-
phose, et alors l'accouplement a lieu comme dans les Forficulaires, c’est-à-dire que les deux indivi-
dus s’approchent l'un de l’autre à reculons, et que le mâle, étant le moins fort, est souvent traîné
par la femelle et forcé de suivre tous ses mouvements. L’abdomen de la femelle se gonfle en peu de
jours, et, après une semaine, la coque est visible au bout du ventre. C'est, au commencement, un
_corps blanc et difforme; mais il grandit pour ainsi dire à vue d'œil, et, avant la fin de Ja journée, il
a déjà sa forme carrée, sa couleur jaune, et se trouve à moitié sorti de l’abdomen. Une femelle a
déposé Ja sienne le dixième jour; mais elle était petite, incomplète et vide. Une autre femelle, que
J'avais prise le 21 mars, a gardé sa coque vingt et un jours, et il est à croire qu’elle la portait de-
puis quelque temps lorsque je l'ai prise. Cette coque, qu'elle a déchirée elle-même, n’était qu’à
moitié remplie d'une matière blanche, sans forme. D’autres coques, d’où sont sorties des larves, ont
été portées quinze jours. Il paraît que cette Blatte garde sa coque à l'orifice de l'abdomen beaucoup
plus longtemps que la Kakerlac orientale, qui, suivant De Géer, ne porte la sienne que sept à huit
jours.
« La proportion des mâles aux fem 1les m’a paru d'un sur neuf. Les Russes pensent que cette
espèce leur a été importée de la Pr 4se par leur armée à son retour de l'Allemagne, après la
guerre de sept ans. On assure que jusqu’à cette époque elle était inconnue à Saint-Pétersbourg,
où maintenant elle n’est que trop commune. Elle habite les maisons et mange à peu près tout; elle
préfère cependant le pain, et même le pain blanc au pain bis. Elle ne recherche pas la farine et ne
fait pas grand cas de la viande, si elle trouve d’autre nourriture. Je l'ai vue par milliers se fourrer
dans des flacons qui avaient contenu de l’huile, et j’ai également remarqué qu’elle aime beaucoup
le cirage des bottes, qu’elle ronge en pénétrant jusqu’au cuir. Chamisso raconte qu’on a ouvert en
en pleine mer des barriques qui devaient contenir du riz ou du blé, et qu’on les a trouvées remplies
de Ja Blatta Germanica; on lit enfin dans le Magasin d'Illiger que cette espèce fait ses délices de
citrons, d’autres acides végétaux, et qu’elle se nourrit même d’encre. J'ai vu quelquefois les larves
et les nymphes manger la peau qu’une d’entre elles avait quittée, ce que De Géer a également remar-
qué dans des Sauterelles; j'ai observé aussi des larves dévorant la matière intérieure des coques en
état imparfait; mais je n’ai jamais vu les Blattes s’entre-tuer ou l’une manger l’autre. Elles peuvent
longtemps supporter la faim, et on les rencontre souvent en grande quantité dans des endroits où
selon toutes les apparences elles n’ont rien pour se nourrir. »
Comme on vient de le voir, la Blatte germanique est ee domestique dans les climats du Nord
et y pullule en quantité innombrable; il en est de même de la Blatte lapone, qui, ainsi que le fait
remarquer Linné, s’est excessivement multipliée dant les habitations des Lapons; dans les environs
de Paris, ces deux espèces ne se trouvent qu'en médiocre quantité, et on ne les rencontre qu'en
liberté et sur différents arbres. La Kakerlac orientale, connue vulgairement sous le nom de Blatte
des cisines, qui a été apportée en Europe, s’est aussi naturalisée dans nos maisons, où elle se tient
dans les endroits très-chauds et obseurs, tels que les fours, les cheminées de cuisine, etc., et y mul-
tiplie considérablement: La Kakerlac américaine, très-commune en Amérique dans les champs et
dans les habitations, attaquant et rongeant toutes sortes de substances, se trouve maintenant en
Europe, où sans doute elle est venue dans des tonnes de sucre, car on la voit fréquemment dans nos
raffineries, et elle est très-abondante dans nos ports de mer. Ces deux espèces exotiques se sont
donc acclimatées dans l'Europe tempérée en s’y réfugiant dans les maisons, comme les Blattes ger-
manique et lapone sont maintenant devenues domestiques dans le rude climat de Russie et de La-
ponie. Certaines espèces, la Blatta gigantea, par exemple, au raport de Drury, courent sur le
visage de l’homme pendant son sommeil, et lui rongent même l'extrémité des ongles. C'est princi-
palement dans les pays chauds que les Blattiens exercent des ravages immenses; dans les colonies,
dont ils sont le fléau, on assure que les Kakerlacs peuvent, en une seule nuit, percer des malles, des
caisses, et qu'en outre, leur forme aplatie leur donnant Ja facilité de se glisser dans les interstices
les plus petits, ils détruisent les objets qu'on avait cru avoir le mieux mis à l'abri. On les y indique
sous les noms de Kakerlacs, Kakkerlaques, Cancrelats, ete. Dans les moments où elles sont abon-
dantes, les murs, les planchers, les lits, les tables même, tout en est infecté, et l'on a bien de
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES 51
.
la peine à préserver les mets de leur contact repoussant. On a souvent cherché à détruire ces bôtes
incommodes et parfois nuisibles, et si dans quelques cas on y est parvenu en partie, on n’a pu le
faire d'une manière générale. Il y a quelques années, M. le professeur Waga, de Varsovie, a indiqué
la poudre persane comme étant un excellent moyen pour faire périr ces Insectes : cette poudre per-
sane, connue depuis longtemps, et qui est essentiellement composée des fleurs réduites en poudre
de deux espèces de Pyrethrum (Caucasicum et roseum), est actuellement répandue partout, car c’est
elle que, sous des noms différents, on vend comme propre à détruire les Punaises ét autres Insectes.
Les Blattiens ont des ennemis naturels; on prétend que les Oiseaux de basse-cour en sont très-
friands. Aux îles Bourbon et Maurice, on a observé depuis longtemps une espèce de Sphégiens, le
Chlorion compressum, Vabr., qui approvisionne son nid de Blattes; cet Insecte s’introduit dans les
maisons, et, dès qu'il aperçoit ‘ne Blatte, il vole à sa rencontre et parvient à la piquer avec son ai-
guillon et à l'attirer dans son trou; la Blatte ne meurt pas, mais elle demeure dans un état d’en-
gourdissement complet : le Sphex pond ses œufs dans le même trou, et les larves, qui en sortent
bientôt après, trouvent à leur portée un aliment convenable. Certaines espèces d'Evania les atta-
quent également, et plusieurs Chalcidites vivent aux dépens de leurs œufs.
Par la nature même de leur alimentation, on comprend que les Blattiens sont répandus indistine-
tement dans presque toutes les parties du monde; transportés par les navires, ils se perpétuent pres-
que dans tous les lieux où ils sont amenés. C’est ainsi que beaucoup d'espèces portent des noms de
pays qui paraissent être en contradiction avec leur habitat actuel; nous avons cité quelques exem-
ples qui peuvent se rapporter à cette observation, et nous n'y reviendrons pas.
La plupart des espèces sont plates, noires ou brunätres, omnivores, et se trouvent aujourd'hui
plutôt dans les habitations que dans la campagne. Quelques Blattiens cependant, ceux qui consti-
tuent les genres Corydia et Phoraspis, ont une forme plus convexe que les autres, et sont ornés de
vives couleurs : ces derniers ont aussi des mœurs différentes; c'est dans les régions intertropicales
de l'Asie et de l'Amérique qu'ils habitent, et là ils se trouvent blottis entre les feuilles qui-forment
les spathes des maïs, des cannes à sucre et des graminés qui croissent sur la lisière des forêts, se te-
nant, à la manière des grandes espèces de Cassides, immobiles sur les feuilles et se laissant choir ou
s’envolant brusquement dès qu’on touche à la plante sur laquelle ils sont réfugiés.
En résumé, les Blattiens sont des Insectes nocturnes, d'assez grande taille, doués d’une grande
agilité et courant avec une extrême vitesse. Ils exhalent une odeur fétide des plus repoussantes,
odeur qui reste sur tous les objets salis par leur contact. Ils dévorent toutes les substances animales
et végétales dans-quelque état que se trouvent ces substances. Ils s'attaquent aux provisions de bou-
che de toute espèce, aux cuirs, aux vêtements et même au bois, qu'ils parviennent à ramollir au
moyen d’un liquide particulier qu'ils séerêtent en assez grande abondance. Ils se trouvent par-
tout, mais principalement dans les régions méridionales, et l'on en décrit plus de eent espèces.
La larve ne diffère de l'Insecte parfait que par le défaut d'ailes et d’élytres; encore y a-t-il des fe-
melles qui n’acquièrent jamais ces parties complètes. Il est même probable, selon Audinet-Serville,
que, parmi les espèces exotiques, il y en a plusieurs qui restent aptères toute leur vie, et qui ce-
pendant s’accouplent et se reproduisent dans cet état. Il paraît que chaque femelle de Blatte ne
pond ordinairement qu'une seule fois; quand les œufs n’ont pas éclos à une première ponte, la
femelle en opère quelquefois une seconde, mais souvent aussi elle se borne à la première; six
mois environ étant nécessaires pour le développement complet des petites Blattes,-dans nos climats
au moins, il en résulte qu'il y a annuellement deux générations, mais le nombre doit en être plus
considérable dans les pays chauds. °”
Les Blattes ont attiré l'attention des naturalistes depuis les temps les plus reculés, et nous dirons
quelques mots de leur histoire, principalement d'après ce qu'en rapporte M. E. Blanchard dans un
mémoire publié en 1837. Les auteurs grecs, Aristote à leur tête, désignent ces Orthoptères sous le
nom de Sylphes et parfois sous celui de Spondyles; Dioscoride dit qu’ils vivent dans les lieux où
l'on fabrique le pain, et que leurs entrailles, broyés avec de l’huile, sont très-efficaces pour guérir
l’ophthalmie; Aristophane, dans sa comédie de la Paix, indique un Insecte qui court en exbalant
une mauvaise odeur, et qui ne peut être autre chose qu'une Blatte. Chez les Latins, ces Insectes sont
désignés sous le nom de Blatta; Pline connaissait plusieurs Blattes, dont il préconisait la graisse mê-
lée à l'huile comme remède contre plusieurs maladies, et avec lesquelies il a confondu plusieurs au-
38 . HISTOIRE NATURELLE.
tres Insectes; Horace parle des Blattes qui dévorent les vêtements comme le font les Teignes; Virgile les
signale comme des Insectes lucifuges ennemis des Abeilles, s’introdusant dans leurs ruches pour les
dévaster; mais il est probable que le poëte latin s’est trompé dans son observation. Au moyen âge,
quelques auteurs ont appliqué Ja dénomination de Blattes à des Mollusques du genre Pourpre; et ce
n’est guère que Mouffet qui, beaucoup plus tard, au commencement du dix-septième siéele, les fit
assez bien connaître, et donna une figure reconnaissable de la Blatta Orientalis. Linné créa le genre
Blatta et le placa en tête de son ordre des Ilémiptères; mais il n’en connaissait que des espèces som-
bres, de consistance molle, et ayant un corps fortement comprimé; une seule espèce, la Corydia peti-
veriana des auteurs modernes, plus arrondie et plus convexe que les autres, et portant quelques ta-
ches jaunes ou rouges, fut regardée par lui comme un Coléoptère du genre Cassida. Cette erreur de
classification fut plus tard rectifiée, mais dès lors la Petiveriana n'en resta pas moins, pour Fabri-
cius, Olivier et Latreille, dans le genre Blatta, de même que la Picta, que Drury avait décrite à la fin
du dix-huitième siècle. Latreille distingua cependant des Blattes, sous le nom de Kakerlac, les es-
pèces dont les ailes sont courtes ou rudimentaires dans les femelles. Audinet-Serville fut le premier
qui, dans sa Revue méthodique de l'ordre des Orthoptères, sépara la famille des Blattiens en huit
genres, dont deux n'ont été considérés par MM. Brullé et E. Blanchard que comme des subdivisions
sons-cénériques des Blatta; M. Burmeister, dans son Handbuch der Entomology, alla beaucoup plus
loin dans la création de coupes génériques, car il admit vingt genres; enfin Audinet-Serville, en
1839, dans son Histoire naturelle des Orthoptères faisant partie des Suites à Buffom de l'éditeur
Roret, ouvrage qui nous sert de guide dans ce résumé, n'indiqua que dix genres de Blatiaires. Leach
a proposé de retirer ces Insectes de l'ordre des Orthoptères pour faire un ordre distinct auquel il ap-
plique la dénomination de Dicrvoprères, et qu'il distingue particulièrement à cause du mode de
recouvrement des élytres; cet ordre, admis par M. Th. Lacordaire et indiqué par M. Laporte De Cas-
telneau comme division secondaire, a été rejeté par la plupart des auteurs; en effet, les Blattiens
ne doivent pas être éloignés des autres Orthoptères, avec lesquels ils se lient intimement.
Dansles uns, le corps est excessivement plat, plus ou moins grand; la base des élytres présente une
strie arquée qui part de l'angle extérieur et se dirige vers la suture en décrivant un demi-cerecle :
cette strie limitant la troisième région de l'élytre dans les Orthoptères. Ce sont les Blattes par excel-
lence, et surtout le genre linnéen des Blattu.
Le groupe typique de la famille et de la première division est le genre :
BLATTE (Blatta, Linné, Serville), ayant pour caractères : corps allongé, déprimé en dessus,
oblong ou linéaire, glabre ou pubescent; abdomen allongé, à dernier segment (sixième) grand,
transversal, presque ovalaire, un peu convexe, légèrement sinué au bout dans les femelles (sep-
tième), souvent échancré en angle au milieu de son bord postérieur dans les mâles; plaque sous-
anale cachée dans les femelles, apparentes dans les mâles, qui ont aussi des filets sexuels plus ou
moins distincts; antennes glabres ou à peine pubescentes, longues, à articles peu distincts; corselet
ayant son bord postérieur arrondi et sans rebord; pattes de longueur moyenne; cuisses rarement
épineuses; tarses à crochets munis d'une pelote dans leur entre-deux, avec Le quatrième article or-
dinairement hrès-petit et bilobé.
Le genre Blatta, dont le nom a été tiré du mot grec farro (je nuis), par allusion aux ravages
produits par les espèces qui y entrent, comprenait originairement toutes les espèces de la famille
que nous passons en revue; il est plus ou moins étendu suivant divers entomologistes. Tel que nous
l'avons caractérisé, d’après Audinet-Serville, il renferme encore une cinquantaine d'espèces propres
à toutes les parties du globe, et dont quelques unes sont cosmopolites. D’après M. E. Blanchard, ce
genre aurait pour caractères : corps allongé, oblong ou linéaire, plus ou moins déprimé en dessus;
antennes glabres; disque des élytres ayant à sa base une strie arquée très-prononcée; élytres se
recouvrant obliquement à leur suture; palpes à dernier article tronqué dans sa longueur; et on
y formerait les subdivisions des Blaberus, Kakerlac, Panesthia, Blatta : cette dernière, qui cor-
respondrait en grande partie aux Blattes de Serville, serait caractérisée ainsi : tarses ayant leurs
trois premiers articles allant en diminuant de longueur : le quatrième très-petit; corselet court et
Lirge, laissant à découvert le front.
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. 59
On peut y former deux sous-genres, les Blat{a proprie dicla et les Phyllodromia, caractérisés
par la forme de leur abdomen et celle des segments qui le composent, ainsi que par la disposition
des plaques sous-anales. j
Parmi les espèces, nous citerons : 1° parmi les Blatta, les Barres De Manère (Blatta Maderæ,
Fabr.), des îles de Madère, de Saint-Dominique, ete.; B. uorrenrore (B. Capensis, Thunb.), du cap
de Bonne-Espérance; B. écyprrenne (B. Ægyptiaca, Linné), type du genre Poryrnaca, Brullé (rave,
beaucoup; vxyo, je mange), qui se trouve en Égypte, en Grèce, en Sicile, en Palmatie, ete., et
dont les larves sont courtes, bombées et presque hémisphériques, tandis qu'elles sont longues et
plates, avec le corps plus étroit en avant, dans les autres espèces; on peut aussi dire d’une manière
générale que res larves présentent des taches rouges ou jaunâtres qui disparaitront dans l’Insecte
parfait; B. ivprenne (B. Indica, Fabr.), des Indes orientales; B. rraxcue (B. nivea, Linné), de
l'Amérique du Sud, ete. — 2° Parmi les Phyllodromia, les B. rive (B. livida, Fabr.), petite, très-
commune aux environs de Paris sur les chênes et autres arbres, ainsi que sous les mousses; B. né-
miprère (B. hemiptera, Fabr.), de nos environs et de Provence; B. sanne (B. Sardea, Géné), de la
Sardaigne; B. cErmaniQuE (B. Germanica, Linné), et B. rarowe (B. Laponica, Linné). Nous devons
encore revenir sur ces deux dernières espèces, dont nous avons exposé avec détail les mœurs dans
nos généralités, et qui, excessivement communes dans le Nord, où elles sont en quelque sorte à l'état
domestique, se retrouvent dans nos environs et presque partout. La Blatte germanique est longue,
les ailes fermées, d’un peu moins de 0,02; sa tête est d’un jaune pâle, avec une bande brune sur
le vertex; les antennes sont longues, brunâtres; le corselet jaune, avec deux petites lignes noires,
longitudinales; les élytres sont lisses, glabres, jaunes, sans aucune tache; les ailes grisâtres, ne dé-
passant pas ou peu l’abdomen; les pattes sont déliées, d'un jaune clair; l'abdomen est de la même
couleur. La Blatte lapone, à peu près de même taille, a la tête noire; les antennes noires, presque
aussi longues que tout le corps; le corselet gris jaunâtre, avec une large bande noire sur son milieu;
les élytres sont de la même couleur que le corselet, avec la strie arquée, noire, et quelques petits
points placés dans le sens de la longueur; les ailes sont pâles, sans taches; les pattes brunes, avec
les trochanters et le premier article des tarses d'un jaune clair; l'abdomen noir, à bord jaune.
Parmi les autres genres, nous citerons les :
1° KAKERLAC (Kakerlac, Latreille, Serville), principalement caractérisés par la plaque sous-anale
des deux sexes, à découvert : celle des femelles grosse, comprimée, saillante, conique, distincte-
ment bivalve : celle des müles transversale, légèrement sinuée au bord postérieur, par les filets
seæuels des mâles très-saillants hors de l'abdomen, et par les ailes généralement moins développées
que dans les Blatta, et d'une manière générale par les tarses ayant le premier article plus long que
les trois suivants réunis; par le corselet-lisse, laissant une partie du front à découvert, et par les
antennes souvent plus longues que la tète. Ce groupe éomprend une dizaine d'espèces surtout pro-
pres à l'Asie et à l'Amérique, et dont deux sont aujourd'hui cosmopolites. Ce sont : 1° le Kagercac:
Où PLATTE AMÉRICAINE (Blatta Americana, Linné), long de 0,05 et quelquefois plus; à tête rousse,
avec le vertex noir; antennes brunâtres, beaucoup plus longues que le corps; yeux noirs; corselet
jaune, mêlé de roux et bordé de noir à sa partie postérieure; élytres longues, étroites, dépassant
l'abdomen, d’un roux foncé plus ou moins obscur; ailes rousses, diaphanes; pattes fauves; abdomen
roux vif, avec le bord et les côtés des anneaux noirätres. Originaire de l'Amérique, cette espèce,
comme nous l'avons dit, est répandue dans tout univers; 2° le KakenLac ou BLarre orteNTALE (Blatta
Orientalis, Fabr.), un peu plus petit que l'espèce précédente; tête brune; antennes très-longues, de
même couleur; corselet étroit, brun roux; élytres n’atteignant guère-que les deux tiers de l'abdo-
men; ailes claires, transparentes; pattes et abdomen brun rougeàtre, comme le corselet et les ély-
tres : la femelle un peu plus petite que le mâle. Originaire d'Orient, ce Kakerlac s’est répandu dans -
l'Europe septentrionale et tempérée : on le trouve dans. nos environs, quoique assez rarement, et
il y porte vulgairement la dénomination de Cafard. Une belle et grande espèce, propre au Brésil,
est la Blatta insignis, Fabr. Nous citerons aussi la KakERLAG THORACIQUE que nous représentons..
20 BLAPÈRE (Blabera, Serville), à tarses dépourvus de pelote entre leurs crochets : les posté-
rieurs ayant les premier et dernier articles plus longs que les trois intermédiaires, qui sont
40 HISTOIRE NATURELLE.
égaux entre eux, et à corselet large, dépassant la tête, en forme de bouclier. Une douzaine d’espè-
ces, exclusivement propres aux régions méridionales de l'Amérique, et dont la plus remarquable est
la Barre G16anresQuE (Blatta gigantea, Linné), qui habite Cayenne et le Brésil, et dont la longueur
dépasse parfois 0,07 et l’envergure 0,18. Les larves des Blabères ressemblent assez bien aux Os-
cabrions parmi les Mollusques, c’est-à-dire que leur forme est ovale-arrondi, très-peu bombé. et leur
corps entouré‘ d’un rebord large et plat, avec le corselet ayant seul la forme qu'il doit présenter dans
l'Insecte parfait. Ce sont des Insectes qui détruisent tout ce qu’ils trouvent, de même que les autres
Blattes; de là leur nom, du mot grec Slx6epos (nuisible).
3° PSEUDOMOPS (Pseudomops, Serville), à corps allongé, déprimé en dessus, linéaire; antennes
lonques, velues de la base jusqu'au milieu (ce qui les fait paraître épaisses dans cette partie), gla-
bres, diminuant ensuite insensiblement de grosseur et finissant en pointe; disque des élytres ayant
une strie arquée. Type, Pseunonors orLoxG (Blatta oblongata, Linné), de Surinam, ayant le faciès
des Téléphores : c’est à cause de cette particularité, qui fait qu’au premier coup d’æil on prendrait
cet Orthoptère pour des Coléoptères, que le nom de Pseudomops (b:vdoua, je suis trompé; wŸ, œil)
lui a été appliqué.
4° PARATROPE (Paratropes, Serville), à corps allongé, déprimé en dessus; à corselet transverse;
à tarses assez épais : le premier article long et les trois suivants diminuant successivement de lon-
queur; à appendices abdominaux très-courts, ete. Une seule espèce, Pararrore LYcoïnE (Paratropes
lycoides, Serville), du Para, dont l'aspect général, comme l'indique son nom spécifique, rappelle
celui des Lycus.
5° PANESTUHIE (Panesthia, Serville), à corps allongé, ailé, déprimé en dessus dans les deux
sexes, ovale oblong, ne se contractant pas; à corselet ayant son bord antérieur échancré au milieu,
s'avançcant à peine sur la tête et ne la cachant pas; à antennes courtes, épaisses; à tarses avec les
quatre premiers articles courts : le cinquième aussi long que les autres réunis, terminé par deux
crochets dépourvus de pelote dans leur entre-deux. Une espèce de Java, la B. æthiops, Stoll.
6° PÉRISPHÈRE (Perisphæra, Serville). Genre imparfaitement connu, ne comprenant que la
P. Armandillo, Serville, de Java, très-remarquable en ce que son corps, très-convexe en dessus,
sans ailes ni élytres dans la femelle, est susceptible de se rouler en boule à la manière des Clo-
portes, et qui ne serdit peut-être qu'à l’état de larve.
Fig. 60. — Prachycole robuste. Fis. 61. — Corydie de Petiver. Fig. 62. — Kakerlac thoracique.
Dans les autres Blattiens, le corps, plus ou moins convexe et d'une dureté assez grande, ressemble:
un peu à celui des Cassides; la base des élytres ne présente pas une strie arquée partant de l'angle
extérieur et se dirigeant vers la suture, de telle sorte que les régions intermédiaire et postérieure
se trouvent confondues. On ne range qu’un assez petit nombre d'espèces dans eette division, et ces
espèces ont un aspect très-différent de celles des autres Blattes.
Lg. Æ, — Mante mendiante.
n ORTHOPTEÈRES PL. 1.
ANNELÉS. — ORTIOPTÈRES. 41
Le groupe typique est le genre :
PHORASPIS (Phoraspis, Serville), ayant pour caractères : corps ovale, très-bombé; antennes séta-
cées, un quart environ moins longues que le corps; corselet convexe; élytres sans stries arquées,
très convees, plus longues que l'abdomen, se rétrécissant à leur extrémité, s'aplatissant vers leur
bord, et ayant en dessous un bourrelet qui borde le thorax et une partie de l'abdomen; jambes ar-
mées de deux rangées d'épines; abdomen plus large que le thorax et se terminant carrément. Le
genre Phoraspis, dont la dénomination vient des deux mots grecs #epo (je porte) et «sms (bouclier),
indiquant assez bien la disposition du corps, renferme une dizaine d'espèces, toutes parées de
brillantes couleurs, et qui, à l'exception de la P. pallens, Scrville, des Indes orientales, provien-
nent toutes de l'Amérique méridionale, principalement du Brésil. M. E. Blanchard en a donné une
monographie en 1857 dans les Annales de la Société entomologique de France. Comme nous l'avons
dit, ces Orthoptères se trouvent généralement blottis entre les feuilles des spathes des graminées.
Comme type, nous citerons la Blatta picta, Drury, commune au Brésil, et remarquable par ses ély-
tres, d'un noir brillant, avec des épaulettes du plus beau rouge s'étendant à peu près jusqu'aux
deux tiers de chaque élytre, etc.
Un genre voisin de celui-ci est celui des :
CORYDIE (Corydia, Serville) (x0p05, casque; 192, forme), dont le corps est court, orbiculaire, pu-
bescent en dessus; les élytres peu convexes, sans strie arquée, dépassant à peine l'extrémité de l'ab-
domen; les antennes courtes, épaisses, moniliformes; les tarses à premier article grand, et à cro-
chets très-petits, avec une pelote. On n’y range qu'une seule espèce, la Cassida petiveriana, Linné,
rapportée par Linné au genre Blatta, et qui se rencontre communément aux Indes orientales et dans
le royaume d'Oware, en Afrique.
On doit peut-être aussi y réunir les :
BRACHYCOLE (Brachycola, Serville) (Bpzxyvs, court; xwhov, membre), à corps court, oblong, orbi-
culaire; à corselet plus ou moins excavé sur le disque, à peu près semi-circulaire, coupé droit posté-
rieuvement dans cette partie; à pattes courtes, fortes, et à tarses à crochets munis d'une pelote dans
leur exutre-deux. Un petit nombre d'espèces, dont les Bracuycour À six racues (Blatta sexnotata,
Thunberg), du Brésil, B. ronusre, B. robustus, Serv., peuvent être prises pour types.
DEUXIÈME FAMILLE. — MANTIENS.
Le singulier genre des Mantes de Linné constitue aujourd'hui la famille des Mantiens ou Man-
tides, qui renferme une vingtaine de groupes génériques et de nombreuses espèces. Ce sont des Or-
thoptères de taille souvent assez grande, et qui ont pour caractères généraux : corps ordinairement
étroit, allongé; tête très-inclinée, découverte, plus ou moins trigone; antennes sétacées, insérées sur
le front, composées d'un grand nombre d'articles cylindriques, surtout dans les femelles, quelques
mâles les ayant pectinées; yeux grands, ronds ou coniques, occupant les angles postérieurs de la tête;
ocelles distincts, au nombre de trois, rapprochés en triangle, placés sur le front; labre entier; man-
dibules cornées, courtes, bidentées à l'extrémité; mächoires frangées à l'intérieur; lèvre quadrifide,
palpes courts, filiformes, cylindriques : maxillaires de cinq articles, plus longs que les labiaux,
qui n’en ont que frois; thorax composé : 1° d'un prothoraæ plus ou moins grand, mais {oujours plus
long qu'aucun des segments suivants, rebordé latéralement, et souvent ayant une carène au milieu;
2° et 5° d'un mésothorax et d'un métathorax très-courts, recouverts par les élytres et les ailes dans
le repos; élytres horizontales, de la longueur de l’abdomen, souvent étroites, peu épaisses, allon-
gées, opaques, demi-transparentes ou hyalines, toujours réticulées, avec une grosse nervure longi-
tudinale pariant de la base et allant jusqu'à l'extrémité; ailes plus ou moins grandes, plissées lon-
gitudinalement en éventail dans le repos, de la même longueur que les élytres, réticulées, arrondies
postérieurement, avec des nervures particulières; pas d’écusson; abdomen allongé, plus ou moins
A. ©
29 - HISTOIRE NATURELLE.
élargi vers l'extrémité, surtout dans les femelles, composé de sept segments dans les mûles et de six
dans les femelles, non compris l'anus, qui est à découvert; un stigmate à chaque segment abdomi-
al, excepté à l'anal, qui porte une plaque différente suivant les sexes; pattes antérieures ravis-
seuses, plus fortes que les autres ; hanches très-grandes, linéaires, comprimcées, angu'euses; cuisses
fortes, comprimées, ovalaires, canaliculées en dessous, épineuses; jambes plus courtes que les euis-
ces, à extrémilé armée d'un fort crochet allongé; pattes intermédiaires et postérieures propres seu-
lement à la marche; hanches anguleuses; cuisses allongées, cylindriques, de la longueur des jambes,
canaliculées en dessous dans toute leur longueur, ee qui n'a pas lieu dans les pattes antérieures;
jambes anguleuses, presque cylindriques, coupées obliquement à leur exhrémité, et munies à cet en-
droit de deux petites épines; tarses de cinq articles distincts (à une exception près), cylindriques
où un peu coniques : le premier le plus grand de tous, et les quatre autres allant en diminuant gra-
duellement de longueur, l'avant-dernier bifide et recevant la base du dernier, qui est terminé par
deux crochets très-petits, égaux, dépourvus de pelotes dans leur entre-deux : tarses des pattes anté-
rieures toujours plus grèles que ceux des autres pattes.
Quelques particularités anatomiques ont été données par M. Léon Dufour : le tube digestif est
court, et ne dépasse pas la longueur du corps; l’œsophage consiste en un long tube grêle; le jabot est
peu renflé, oblong, strié à l’intérieur; le gésier, qui se trouve ensuite, est contourné et contient in-
térieurement un appareil de trituration consistant en six rangées longitudinales de petites lames
d'apparence cornée; à l'extrémité du tube digestif, on voit huit bourses ventriculaires cylindriques;
le ventricule chylifique est oblong; l'intestin grêle, d'abord mince, se renfle en un cœcum ovoïde;
les vaisseaux biliaires sont simples; l'appareil salivaire est développé; les ovaires sont constitués
chacun par une quarantaine de gaines multiloculaires. Le système nerveux, dont M. E. Blan-
chard a dit quelques mots, consiste en une chaîne dont les ganglions sont petits et très-espacés.
Par l'ensemble de leurs caractères, les Mantiens diffèrent, comme nous le dirons, des Spectres
ou Phasmes, que Linné y réunissait dans son genre Mantis, et qui, à juste raison, doivent consti-
tuer une famille particulière à laquelle on a appliqué le nom de Phasmiens.
L'attitude singulière que prennent les Orthoptères de cette famille lorsqu'ils guettent leur proie
leur a valu le nom de Mantis, du grec, pavris (devin). Les Mantes placées sur le sol, leur long cor-
selet élevé en l'air, leurs pattes antérieures en avant, et n’attendant que le moment de saisir leur
victime, restent immobiles, passant plusieurs heures dans cette position; aussi les habitants super-
stitieux des campagnes se sont-ils imaginé qu’elles indiquaient aux passants le chemin qu'ils de-
vaient suivre, ou bien ont-ils encore pensé qu’elles prédisaient l'avenir. Les longues pattes antérieu-
res des Mantes, élevées en forme de bras, en même temps que la tête et le corselet, ont également fait
comparer ces Insectes à des hommes en prières; de là le nom de Prégadion, qu'ils portent dans les
régions méridionales de la France, et les dénominations scientifiques de Religiosa, Precaria, Sancta,
Oratoria, Mendica, Superstitiosa, ete., qui ont été appliquées à plusieurs d’entre elles. Aussi les
Mantes ont-elles été connues depuis longtemps, surtout celles qui habitent les régions méridionales
de l'Europe et les contrées chaudes des deux continents, et, par superstition religieuse, on les res-
pecte presque partout. Selon M. Caillaud, une Mante serait même, en Afrique, l’objet d'un véritable
culte; et, d'après Sparmann, une autre espèce serait adorée par les Hottentots dans l'Afrique australe,
et s’il lui arrive de se poser sur une personne, celle-ci est considérée comme ayant recu une faveur
particulière du ciel, et est regardée comme un saint.
Ce sont les seuls Orthoptères qui vivent exclusivement de proie et de rapine, et ce sont aussi les
plus agiles. Toute leur organisation concourt à remplir ce double but, car ils ont des pattes longues
et grêles qui supportent un corps étroit et allongé; leur corselet est lui-même très-long et très-mo-
bile sur le reste du thorax, afin de pouvoir s’élever ou s’abaisser au gré de l'animal; la tête que sup-
porte ce corselet est dans une position verticale et dégagée par une sorte de cou, ce qui lui permet
des mouvements de rotation très-libres; enfin leurs pattes antérieures, beaucoup plus larges que
les autres, servent aussi à la marche quand l'Insecte veut fuir; mais le plus ordinairement elles ont
pour usage la préhension des aliments.
Lorsqutune Mante veut se procurer sa proie, qui consiste en Mouches ou autres Insectes aussi fai-
Bles que ces Diptères, mais en même temps très-agiles, elle élève le devant de son corps en l'air et
se soutient sur les quatre pattes de derrière, dont deux s’avancent à cet effet; ses pattes de devant
ANNELÉS. — ORTHOFTÈRES, 45
sont en arrêt, la jambe rapprochée de la cuise, et dès qu'un Insecte arrive à sa portée, il est saisi
avec une incroyable rapidité. La Mante se rapproche de sa victime en tapinois, à peu près de la
même manière qu'un Chat qui guette une Souris, et cela avec tant de précaution, qu’on à peine à
s'en apercevoir. Elle parvient presque toujours à s'emparer de sa proie et la tient saisie entre la
cuisse et la jambe de ses pattes de devant, qui lui servent comme de mains pour la présenter à sa
bouche. D'après Ræsel, qui a publié de bonnes observations sur la Mante religieuse, ces Insectes ne
mangeraient pas beaucoup, car il en a nourri pendant quelque temps avec quatre ou cinq Mouches
par jour. Mais l'instinct carnassier de ces Insectes est tel, que, quand on en enferme deux ensem-
ble, ils se livrent des combats violents, se portent des coups avec leurs pattes de devant, et l’un des
combattants finit habituellement par couper la tête de son adversaire et par le dévorer en partie.
Dès leur naissance, les petits s’attaquent entre eux, et lorsque le mâle approche de la femelle, qui
est plus grosse que lui, il est parfois victime de sa voracité. L'accouplement terminé, la femelle se
jette sur le mâle et le tue dans le plus grand nombre des cas, En Chine, comme le rapporte Kirby
d’après les récits de voyageurs, les enfants achètent des Mantes comme on achète dans nos pays
des Hannetons, et les enferment dans de petites cages de bambous, pour se donner le spectacle de
leurs combats.
Les actes qui suivent l'accouplement chez les Mantes nous présentent des particularités curieuses.
Quand une femelle veut déposer ses œufs, elle se place sur la tige d’une plante ou sur quelques-uns
de ses rameaux, et reste là pendant plusieurs heures, sans autre mouvement qu’une progression
lente, à mesure que les œufs tombent de son abdomen. Ces œufs se couvrent, en sortant de l’ovi-
ducte, d'une substance molle et blanchâtre, et forment par leur réunion un corps dont la figure
varie avec les espèces et ressemble assez à une fleur; de blanche et molle qu’elle était d’abord, cette
substance devient bientôt dure et jaune. Dans l'intérieur de cette même substance, les œufs sont
rangés en séries transversales et régulières qui aboutissent à une sorte de bourrelet saillant en de-
hors, et formé par l'extrémité des sillons qui renferment les œufs. Les jeunes larves qui sortent de
l'œuf n’ont qu'à se glisser entre les filets de ce bourrelet, qui s’écartent pour leur livrer passage.
Dans tout le reste de sa surface, la masse totale des œufs est revêtue d’une enveloppe fermée ne
s'appliquant pas toujours hermétiquement sur eux et servant à les protéger. Les œufs sont longs et
étroits, appliqués les uns contre les autres, et leur nombre varie dans chaque enveloppe selon les
espèces auxquelles ils appartiennent. Dans la Mante religieuse, d'après Rœsel, les œufs restent près
d’un an dans leur enveloppe, et, pondus vers le mois de septembre, l’éclosion n’en a lieu qu’au
mois de juin suivant. Les larves en sortent avec la forme qu'elles auront toute leur vie; elles chan-
gent plusieurs fois de peau, mais n’ont ni ailes ni élytres : ces derniers organes apparaissent à l’état
de rudiment dans la nymphe et ne se développent complétement que dans l'Insecte parfait. Tous ces
changements se sont laits en moins de trois mois, et, l’Insecte ne vivant que peu de temps sous son
dernier état, on peut dire que c’est sous l’état d'œuf que les Mantes passent la plus grande partie de
leur existence. Toutefois cette règle n’est pas générale, et dans quelques pays on trouve des Mantes
à l'état parfait bien avant le mois de septembre. Ces Grthoptères fréquentent ordinairement les lieux
exposés au soleil, et semblent surtout agiles quand la température est très-élevée. Dans nos contrées
méridionales, les Mantiens sont beaucoup plus lents dans les mois de novembre que dans les mois
précédents, et se laissent prendre avec moins de difficulté. Il est assez difficile, lorsqu'on saisit ces
Insectes, d'éviter les blessures qu'ils font avec leurs pattes antérieures; les crochets acérés dont ces
pattes sont armées pénètrent dans la peau des doigts et s'en dégagent avec peine : aussi comment
l'Insecte qu’elles ont une fois saisi pourrait-il s'échapper de leurs pattes? Toutefois, suivant les
groupes, ces patte; de devant sont différemment constituées; mais ces organes sont toujours des ar-
mes dangereuses pour leure enrenus. La plupart des Mantiens se font remarquer par leur couleur
verte, et sont ornés souvent de teintes assez belles; quelques-uns varient cependant du gris pâle au
brun : dans les premières, c’est-à-dire les Mantes verdätres, propres à nos climats, les élytres et les
ailes sont toujours aussi longues au moins que l'abdomen; dans les seconds, les Mantes grisâtres,
plus grandes que les autres, et répandues dans l'Asie et dans les déserts brûlants de l'Afrique, les
organes du vol sont très-couris et presque rudimentaires, et elles sont généralement d’un aspect
triste en dessus ct paré:s le plus souvent en dessous de bandes d’un éclat brillant et quelquefois mé-
tallique. La couleur verte parfois assez belle de nos espèces européennes et les teintes brillantes des
_
44 HISTOIRE NATURELLE.
autres espèces ne persistent pas après la mort; ces couleurs s’affaiblissent et passent à la longue au
jaune et même au brun. Aussi ne peut-on, dans les descriptions des espèces de nos collections, se
servir comme caractères spécifiques du système de coloration du corps, des élytres et des ailes.
La famille des Mantiens est assez nombreuse en espèces propres à toutes les parties du monde,
mais presque exelusivement particulières aux contrées méridionales et tempérées; on les rencontre
dans tout le midi de l'Europe, mais ils ne dépassent guère le quarante-deuxième degré de latitude;
cependant deux espèces, les Mantis religiosa et oratoria, ont été trouvées dans la riche forêt de
Fontainebleau. On en rencontre dans toute l'Afrique, dans l'Amérique méridionale, dans la partiesud
de l'Amérique septentrionale, dans la plus grande partie de l’Asie et jusqu’à la Nouvelle-Hollande.
Peu de groupes naturels nous offrent des variations aussi remarquables dans leurs formes générales;
aussi les dix-huit ou vingt genres qu'on y admet aujourd’hui sont-ils assez naturels.
Fig. 65. — Empuse pauvresse,
Rœsel a donné quelques détails sur les habitudes des Mantes proprement dites; M. Alex. Lefebvre
s’est occupé de celles des Éremiaphiles. Quelques auteurs ont publié des descriptions spécifiques
et d’autres particularités relatives à ces Insectes : M. Burmeister et Audinet-Serville ont fait con-
naître le résumé complet de leur histoire, et ce dernier entomologiste en décrit près de cent espèces,
qu'il répartit en quatorze genres. Nous indiquerons ces divers genres ; à l'exemple de M. E. Blan-
chard, nous les subdiviserons en trois goupes principaux, et nous nous étendrons principalement
sur la division des Mantes proprement dites.
Dans les uns, les Érémiarmurres, E. Blanchard, le corps est ramassé, le corselet un peu plus long
que le mésothorax, les élytres et les ailes sont courtes, ne recouvrant pas l'abdomen. Un petit nom-
bre d’espèces propres au désert de l'Afrique et de l'Asie, placées dans deux genres, doni le principal
est celui des :
ÉRÉMIAPHILE (Eremiaphila), Al. Lefebvre (epzutæ, le désert; es, j'aime), qui avec les carac-
tères précédemment indiqués ont la plaque sous-anale munie de deux épines écartées, fines et diri-
-gées vers l'anus dans les femelles, tandis qu’elle est plus large que longue, et mutique dans les
mâles; les élytres, impropres au vol, sont patelliformes, déprimées sur les côtés; les ailes ne pou-
vant également pas servir pour la locomotion, arrondies, à réseau plutôt ramiforme que cellulaire,
partagées longitudinalement, un peu en biais, par un pli très-marqué; pattes longues; cuisses sim-
ples, sans membrane : les quatre postérieures habituellement terminées en dessus par une épine
très-fine, pointue; tarses de cinq articles, à crochets égaux.
Les Érémiaphiles sont de singuliers Orthoptères, de taille moyenne, d'aspect singulier, d’une cou-
leur entièrement grisätre en dessus, à élytres courtes, également d’une coloration terne en dessus,
et offrant en dessous de ces mêmes élytres, dans toutes les espèces, une tache métallique très-bril-
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. 45
lante. Les individus qu’on a étudiés jusqu'ici semblent n'être qu'à l’état de larves ou de nymphes,
car ils sont en partie dépourvus d'ailes, mais peut-être cependant sont-ils réellement à l’état par-
fait. Leur démarche est très-lente, et ils vivent au milieu des déserts de l'Arabie et de l'Égypte; ils
se traînent lentement sur le sable, dont ils ont la couleur, et ce qu'il y a de singulier, c’est qu’ils
vivent dans des endroits privés de végétation et où l'on ne découvre pas d’autres Insectes qui puis-
sent servir à leur nourriture. M. Alex. Lefebvre (Ann. Soc. ent. de Fr., 1855) a donné des détails
sur les mœurs de ces Orthoptères, qu'il a été à même d'étudier dans leur pays natal. « Ce qui me
frappait, dit le savant entomologiste dont nous venons de citer le nom, c'était le changement de co-
loration que j'observais dans ces Insectes, selon le terrain sur lequel je les rencontrais, et avec la
teinte duquel ils offraient la plus parfaite identité. L'Œdicnème, presque le seul Oiseau qui s’aven-
ture dans ces régions désertes aux environs des oasis envahies par les sables, et un petit Saurien,
le Trapelus Ægyptiacus, que je rencontrais parfois avec les Érémiaphiles, me présentaient cette
identité parfaite de coloration avec le sol, dont j'avais bien entendu parler, mais que je n'aurais
jamais crue poussée à un tel point; cette identité était si frappante, que dans certaines régions où
le terrain était brun, Reptiles et Insectes étaient de cette même couleur; et, si cent pas plus loin je
me trouvais;sur des débris de coquilles ou sur des dalles de calcaire éblouissant de blancheur, les
inêmes êtres parlicipaient de cette couleur argentée qui les confondait avec les aspérités du sol.
Quant au motif que la nature aurait eu ici, ne serait-ce pas pour donner plus de facilité aux Érémia-
philes d'échapper à leurs ennemis, d'autant plus à craindre pour elles, qu’elles semblent être dans
ces déserts les seuls Insectes qui puissent servir à leur pâture, qu’elle aurait confondu la robe de
ces Orthoptères avec la couleur du sol, à tel point qu'il soit presque impossible de les apercevoir,
surtout dans leur état d’immobilité? Il est à remarquer que, malgré tous mes soins, toutes mes re-
cherches, je ne pus trouver d'autres Insectes aux lieux qu'habitent les Érémiaphiles. Pourtant il est
hors de doute que, par leur conformation, ces Mantides ne soient carnassières, que le désert parait
être leur véritable patrie, et que le défaut de développement suffisant dans leurs organes du vol
doit les empêcher d’en sortir jamais. Il est plus que probable qu'elles y trouvent une proie à leur
convenance sans être obligées de se dévorer entre elles. »
M. Alex. Lefebvre décrit six espèces de ce genre, mais toutes ne doivent peut-être pas être admi-
ses, car certaines pourraient bien être le jeune âge d'autres. Quoi qu'il en soit, ces espèces sont dé-
signées sous les noms d’Éremiaphila Audouini, qui habite le désert du Caire; Cerysii, du désert de
Louqsor, dans la haute Égypte; Genei, du mont Liban; Zetterstedtii, propre au désert de Suez et
figuré depuis longtemps dans l'Atlas de la célèbre expédition en Egypte; Luxor, de la haute Égypte,
ct Bovei, du désert de Suez.
Un genre voisin de celui des Érémiaphiles, n’en différant ni par les mœurs ni par l'habitat, ct
fondé également par M. Alex. Lefebvre, est celui des :
HÉTÉRONYTARSES (Heteronytarsus) (erepos, qui diffère; ot, ongle), qui se reconnaît facilement
à sa plaque sous-anale, plus longue que large, dépassant la plaque suranale, terminée par deux
pointes aiguës, et surtout par ses tarses antérieurs, composés seulement de quatre articles : les inter-
médiaires et postérieurs de trois, avec les crochets des antérieurs égaux entre eux : ceux des quatre
autres très-inégaux. On n’y range qu’une seule espèce, l’Heteronytarsus Ægyptiacus, dont on ne
connait que la larve et la nymphe.
Dans les autres, c’est-à-dire dans les Mantes vraies ou Mantites, E. Blanch., le corps est plus où
moins élancé; les antennes sont longues et sétacées, et les élytres, ainsi que les ailes, couvrent tota-
lement l'abdomen.
Le type de ce groupe sur lequel nous nous étendrons principalement est le genre :
MANTE (Mantis, Linné) : corps plus ou moins al'ongé, ordinairement lisse; téte large, triangu-
laire, plus ou moins forte; à vertex mutique; à yeux gros, arrondis; à antennes sétacées, multiarti-
culées, capillaires dans les femelles, plus épaisses et beaucoup plus longues dans les mâles; corselet
peu dilaté antérieurement, rebordé sur les bords, étroit dans le reste de son étendue, et plus long ou
aussi long que le reste du thorax; pattes longues, à cuisses simples; élytres ovalaires, le plus sou-
46 HISTOIRE NATURELLE.
vent allongées; abdomen simple à l'extrémité. Ainsi que nous l'avons dit, ce genre renfermait ori-
ginairement toutes les espèces de la famille que nous étudions; aussi est-ce dans les généralités de
cette dernière que l’on trouvera les détails de mœurs applicables à ce groupe, et que nous ne pour-
rions que répéter ici. Les espèces du genre Mante sont encore pour Audinet Serville au nombre de
quarante et une, et nous pourrions y joindre, en outre, quelques espèces nouvellement décrites et
d’autres espèces placées par lui dans des genres qui n’en diffèrent réellement pas. Les Mantes, ces
Orthoptères à corps grêle et cependant encore assez fort, sont répandues dans les parties chaudes de
tous les pays; les mâles, comme dans la plupart des Mantiens, ont le corps plus grêle et plus allongé
que les femelles : leur tête et leurs membres sont moins forts; ils ont en général presque toujours
plus de transparence aux élytres, et les organes du vol sont plus développés. Parmi les espèces de ce
genre, nous décrirons comme type la Manre RELIGIEUSE (Mantis religiosa, Linné), à laquelle s'appli-
quent surtout les no s vulgaires que nous avons déjà cités, dont le mâle est long d'environ 0,10 et
la femelle de 0%,11, avec une envergure d’à peu près 0,17; corps entièrement vert; tête lisse;
corselet plus long que l’abdomen, dentelé à sa partie antérieure et bordé de rose latéralement; ély-
tres vertes, unicolores dans la femelle et bordées dans le mâle par une teinte d'un rose jaunàtre;
ailes vertes, avec l'extrémité d'un jaune rose dans le mâle seulement, pattes antérieures munies à
la base des cuisses d'une grânde tache noire. Répandue dans une grande partie de l’ancien conti-
nent, commune dans le midi de la France, assezabondante auprès d'Orléans, où nousl’avons trouvée,
surtout dans les vignes, et qui a été prise dans la forêt de Fontainebleau. Parmi les autres espèces
propres également à la France méridionale, nous citerons les Manres PrècHEuSse (M. oratoria,
Linné), plus petite que la précédente, et deux espèces incomplétement connues : nécororée (M. de-
color, Tous. Charp), sœur (M. soror, Al. Lefebvre), de Marseille et de Sicile; enfin parmi les au-
tres espèces propres aux pays étrangers, généralement parées de plus brillantes couleurs, et qui
sont plus grandes que la Mante religieuse, nous indiquerons seulement les MANTES SYPERSTITIEUSE
(M. superstitiosa, Fabr.), de Java; À Lance appexnice (M. latistylus, Aud. Serv.), de la Nouvelle-
Hollande; suppcranre (M. precaria, Linné), du Brésil; rricanoïne (M. phryganoides, And. Serv.),
de l'Amérique septentrionale; simuracre (M. simulacrum, Fabr.), du Sénégal; virée (AL vitrata,
Oliv.), nésureuse (M. nebulosa, Aud. Serv.), du cap de Bonne-Espérance; pusruzée (M. pustulata,
Stoll), de l’île de France, et PAuvRESsE (pauperata), que nous figurons.
Quelques genres créés par Audinet Serville peuvent facilement rentrer dans le groupe naturel des
Mantis; tels sont ceux des : — 1° THESTIS, correspondant en partie aux ANGELA, Stoll, à corps
* plus élancé, plus gréle : quelques espèces de l'Amérique méridionale (type, M. brachypera ou T. pur-
purascens, Serv.) et à l'Afrique australe. — 2° CHŒRADODIS, à corselet très-dilaté latéralement en
une grande membrane, plus ou moins large, mutique sur les bords, et occupant toute la longueur
de l'organe : trois espèces américaines, dont le type est la M. cancellata, Fabr., de Cayenne, —
3° EPAPHRODITA, à corselet moins long que l'abdomen, largement dilaté sur les côtés en une mem-
brane arrondie, munie de dentelures épineuses sur les bords, occupant les trois quarts de la lon-
queur : une seule espèce propre à Saint-Domingue, la M. musarum, Palis. Bauv., qui, comme
l'indique son nom. a été trouvé sur un bananier.
Les autres genres, plus distincts de celui des Mantes sont ceux des : — 1° METALLENTICA, West-
wood : yeux arrondis; corselet court, à peine plus long que le mésothorax : quelques espèces propres
aux Indes orientales et à couleurs éclatantes. — 2° SCHIZOCEPHALA, Serv., à corps d'une longueur
extréme et d'une ténuité très-grande, linéaire; à yeux pointus et à cuisses simples : une seule es-
pèce, la S. bicorne, Serv., ou A1. oculata, Fabr., remarquable par sa tête fendue au milieu, ce qui
Jui donne un aspect étrange, et particulière aux Indes orientales. — 3° ACANTHOPS, Serv., à corps
assez court; yeux pointus; élytres très-larges, avec les côtes sinueuses; cuisses simples; abdomen di-
laté latéralement : deux espèces brésiliennes, les À. DÉcurRÉE (À. erosa) et FEUILLE-MoRTE (A. mor-
tuifolia). — 4° OXYPILUS, Serv., à corps court; front cornu; yeux très-pointus; corselet plus court
que le mésothorax; cuisses simples : une seule espèce (A. annulata), du Sénégal. — 5° HARPAX,
Serv., à yeux pointus; corselet plus long que le mésothorax; cuisses foliacées; jambes simples : on
décrit une dizaine d'espèces de ce genre, propres surtout à l’Afrique et à Java, mais dont une j ro-
vient, dit-on, de Cayenne, et Serville les subdivise en deux sous-genres : Ilanpax vrais, type, la
Mantis tricolor, Linné, du cap de Bonne-Espérance, et Créosnorer, type, M. gemmata, Stoll, de
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Fig. 4. — Perlamorphe de Pelée
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Fig. 2. — Phasme de Serville.
ORTIHOPTÈRES
ANNELÉS. — ORTIHOPTÈRES. 41
Java, — 6° IIYMENOPA, Serv., à yeux pointus; corselet plus long que le mésothorax; cuisses et jam-
bes foliacées : une espèce, propre aux îles Moluques, la AZ. coronata, Oliv. — 7° TUXODERA, Serv.,
à yeux coniques, terminés en épine; corselet très-long et courbé; cuis$es foliacées; abdomen ayant à
l'extrémité des quatrième et cinquième segments un appendice foliacé : une belle et grande espèce
propre à l'ile de Java, et remarquable par les expansions assez développées que présentent les pattes.
— 8° VATES, Burmeister, ou THEOCLYTES, Serv., à yeux arrondis; corselet très-long, droit;
cuisses intermédiaires et postérieures ayant un lobe foliacé : ce groupe ne renfermant que quatre
espèces, trois américaines et une du cap de Bonne-Espérance, est partagé en deux sous-genres par
Serville; savoir : les Taéoccyres vraies, type, M. foliata. Lichtenstein, de Cayenne, et les Zooura,
espèce unique, Empusa lobipes, Guérin-Méneville, du Brésil.
Enfin dans les derniers Mantiens, c'est-à-dire les Empusires, E. Blanchard, le corps est élancé; la
tête offre une sorte de corne frontale; les antennes sont courtes, bipeetinées dans les mâles et sétacées
dans les femelles, et les élytres couvrent tout l'abdomen. Quoique peu nombreuse, cette division
présente des espèces de presque toutes les parties du monde. Le type est le genre :
EMPUSE (Empusa, Illiger). — Corps allongé, lisse; tête petite, en triangle allongé, étroit; ver-
tex s'élevant en pyramide; antennes assez courtes, à premier article grand, cylindrique : deuxième,
gros, globuleux, variable suivant les sexes; yeux grands, oblongs, saillants; corselet très-allongé,
ayant la longueur du mésothoraz et du métathorax réunis, gréle, étroit, plus où moins dilaté an-
térieurement sur les côtés, maïs sans expansion à la base; élytres plus ou moins longues; ailes ne
dépassant pas ces dernières; pattes longues, gréles, à hanches des antérieures prolongées inférieu-
rement en une épine, et à cuisses foliacées; abdomen plus ou moins dilaté passé le milieu. Le genre
Empuse, dont Thunberg avait placé quelques espèces dans le groupe des Gongylus, et qui se dis-
tingue facilement par la forme particulière de sa tête et de son vertex, ainsi que par ses hanches
antérieures, élargies à la base et armées à l'extrémité d'une épine très-distincte, renferme une di-
zaine d'espèces de grande taille, et qui paraissent exclusivement propres à l’ancien continent.
Comme type, nous indiquerons l'Euruse appauvrie (Mantis pauperata, Fabr.), qui est assez répan-
due dans tout le midi de l'Europe, ainsi que dans l'Afrique septentrionale, et surtout.en Égypte, où
elle n’est pas rare; longue d'environ 0,07, avec une envergure de plus de 0",08; d’un vert pâle,
jaunissant souvent après la mort de l’Insecte; à pattes jaunâtres, avec des bandes obliques brunes
ou verdâtres, et à élytres vert d’eau : nous la représenfons page 44, sous le nom de Manre pauvresse,
qu’elle porte vulgairement. Parmi les espèces exotiques, nous noramerons seulement l’Empuse cox-
cyroine (M. gongyloides, Linné), espèce des plus remarquables par son aspect général, à peu près de
la taille de la précédente, mais dont l'envergure peut atteindre 0,10, et qui habite les Indes orien-
tales.
Deux autres genres de la même division sont ceux des : — 1° BLEPHARIS, Serville, à corselet de
la longueur du mésothorax et du métathorax réunis, ayant une expansion latérale; cuisses folia-
cées; jambes simples : une seule espèce, la BLépuanine mennranre (Mantis mendica, Fabr.), qui ha-
bite la Nubie, l'Égypte, l'Arabie, les îles Canaries, ete. — 2° PHYLLOCRANIA, Burmeister, à téte
avec une expansion frontale; corselet de la longueur du mésothorax et du métathorax réunis, ayant
une expansion latérale; à cuisses et jambes foliacées : une seule espèce (P. paradoxa), du cap de
Bonne-Espérance.
TROISIÈME FAMILLE. — PHASMIENS.
Quelques anciennes espèces de Mantes, ayant ensuite formé le genre Phasma de Stoll, adopté par
Latreille, auprès duquel sont venues se grouper de nombreuses espèces et coupes génériques, con-
stituent aujourd’hui la famille des Phasmiens où Phasmides, qui offre pour caractères distinctifs :
corps plus ou moins allongé, plus petit dans toutes ses parties dans les mâles que dans les femelles;
téte grosse dans le sexe femelle, bombée en arrière dans le plus grand'nombre des cas, plus petite
durs le sexe mâle; antennes allongées, plus longues que le corps, multiarticulées, sétacées : celles
48 HISTOIRE NATURELLE.
des mûles souvent filiformes, velues, rarement courtes, composées de peu d'articles, dont quelques-
uns moniliformes; yeux petits, arrondis, parfois très-saillants; ocelles au nombre de trois ou non
visibles; labre transversal, plus où moins échancré en avant; mandibules grosses, en coin; mü-
choires peu développées, cachées sous la lèvre; celle-ci ayant une galette s'étendant jusqu'au labre,
et le cachant même dans l'état de vie; cette galette formant avec un organe semblable adhérent à la
mâchoire une sorte de masque appliqué sur la bouche et en fermant la cavité; palpes épais, à arti-
cles anguleux : maxillaires de cinq àrticles, labiaux de trois; thorax variable pour la longueur;
corselet court; mésothorax allongé, ayant trois ou quatre fois la longueur du corselet; élytres cour-
tes, surtout dans les mâles, ne recouvrant ordinairement pas la base des ailes; celles-ci pouvant
manquer dans les deux sexes, et le plus habituellement nulles ou peu développées dans les femelles,
tandis qu'elles sont plus longues dans les mûles; pas d'écusson; abdomen composé de huit segments
pour Serville et de dix pour M. Gray, variable pour la forme, le plus souvent très-allongé, cyli dri-
que, ordinairement grêle dans les mâles; pattes longues : antérieures plus éloignées des intermé-
diaires que celles-ci des postérieures, les premières ordinairement gréles et plus longues que les
autres, presque toujours échancrées au côté interne pour recevoir la tête dans le repos; tarses de
cinq articles : les quatre premiers avec un tubercule membraneux en dessous, et le cinquième por-
tant au bout deux crochets assez forts, ayant dans leur entre-deux une pelote grosse, triangulaire,
spongieuse, semblant susceptible de pouvoir faire le vide.
Comme nous l’avons dit, les anciens auteurs, se basant exclusivement sur la forme générale de
ces êtres, les confondaient avec les Mantes, et cependant il y a de grandes différences entre les Phas-
miens et les Mantiens. Les premiers sont phytophages, et les autres essentiellement carnassiers; les
Mantiens ont un caractère qui leur est exclusivement propre, la forme préhensible de leurs jambes
antérieures : en outre, ils ont des ailes longues, toujours même un peu plus prolongées que les
élytres, et leur abdomen porte constaminent à son extrémité des filets articulés; dans les Phasmiens,
au contraire, toutes les pattes sont ambulatoires; les élytres, chez toutes les espèces ailées, sont très-
petites, considérablement plus courtes que les ailes, et presque en forme de cuillerons : leur ab-
domen ne porte pas d'appendices articulés, mais seulement des folioles inarticulées, ete.
Les formes extraordinaires des Phasmes, leur corps allongé, décharné dans le plus grand nom-
bre, et ressemblant assez à des végétaux frais ou-desséchés, leur ont fait donner tantôt les dénomi-
nations de Spectres, Fantômes, Chevaux-du-Diable, grands Soldats-de-Cayenne; tantôt ceux de
Feuilles-Ambulantes, Bätons-Animés, ete. Leur forme générale justifie assez bien quelques-unes de
ces dénominations; les unes en effet ont le corps excessivement long, mince, presque cylindrique;
des pattes longues et grêles qui s'appliquent sur le corps, ou s'étendent au devant de lui, et elles res-
semblent tellement, assure--on, par leur immobilité et par leur couleur, à de petits brins de bois,
qu’elles échappent facilement à la vue de leurs ennemis; ces espèces sont privées d'ailes ou passent
du moins pour n’en acquérir jamais; d'autres sont pourvues des organes du vol, mais alors ces
derniers s'appliquent sur le corps et ne servent à ces Orthoptères que pour exécuter des mouvements
de déplacement assez rares, parce que généralement ils sont peu agiles; il en est aussi dont les pat-
tes sont garnies de leurs membranes, et qui ont la couleur des feuilles sur lesquelles elles vivent, ec
qui les a fait parfois désigner sous le nom de Phyllies.
Les habitudes des Phasmiens sont peu connues; on sait seulement d'une manière positive que ces
Orthoptères sont exclusivement herbivores, contrairement à ce qui a lieu chez les Mantiens, qui sont
carnassiers par excellence. M. Cuningham a observé dans la Nouvelle-Galles du Sud que ces Insectes
ont des habitudes solitaires et paisibles; qu’ils ne se trouvent jamais qu'au nombre d’un ou de deux
individus seulement, se trainant avec lenteur sur les arbrisseaux et les taillis, où ils paraissent pas-
ser leur existence pendant les mois les plus chauds de l’année, et où ils se nourrissent des jeunes
pousses des arbres résineux. Say, de son côté, a étudié plusieurs espèces de cette famille, vivant,
aux États-Unis, sur les arbres, et dont une (Bacteria buprestoides) laisse sortir, quand on la prend,
par deux ouvertures de son thorax, un fluide laiteux, d’une odeur forte, assez semblable à celui
du Gnapholium commune, et, comme cette plante croit en abondance auprès de l'endroit où l'on
trouve les Phasmiens, il en a conclu qu’elle faisait la base de leur nourriture. Enfin M. Lansdown
Building, en parlant d’une espèce de Bactérie, dit que cet Orthoptère, très-commun dans les brous-
ANNELES. —- ORTIHOPTÈRES. 49
sailles de l'Amérique équinoxiale et des îles voisines, trompe ses ennemis par sa ressemblance avec
une branche morte, qu'il dévore les feuilles avec avidité pendant la nuit, que ses mouvements sont
incertains, et qu'on le rencontre pendant toute l’année. Le même naturaliste rapporte que son ac:
couplement a lieu pendant les mois de mai et de juin, que la femelle pond une vingtaine d'œufs de
septembre à novembre, et que ce n’est qu’au bout de quatre-vingt-dix ou cent jours qu’a lieu l’éclo-
sion de la larve, c’est-à-dire entre le mois de mars et celui d'août. Cette larve est pâle au sortir de
l'œuf, et a les pattes fixées contre le corps; mais, lorsqu'elle a déposé la première enveloppe, elle se
meut avec une grande rapidité. « Les œufs des Phasmiens sont en général, dit M. Aug. Brullé, d'une
grosseur assez remarquable; mais leur forme est surtout curieuse, et les dessins dont ils sont ornés
présentent aussi quelque intérêt. Ces œufs sont de figure ovale, et se terminent à l’une de leurs extré-
mités par un opercule aplati, dont les contours sont parfaitement lisses, et qui s'adapte exactement à
une rainure pratiquée sur le corps même de l’œuf. Le petit qui doit en sortir, n'ayant pas d’organe
capable de percer les parois de sa prison, doit avoir la tête dirigée du côté de son opercule, et dès
lors il lui est facile de se faire jour en le poussant en dehors. Les dessins qui ornent la surface des
œufs varient selon les espèces; tantôt ce sont des sillons qui la parcourent et tantôt des lignes si-
nueuses qui offrent la figure d'une étoile ou d’une sorte de croix. Un grand nombre de ces œufs
sont tout à fait lisses, et tous en général pourraient, au premier aperçu, être pris pour des graines
de végétaux. D'après les remarques de M. Guilding, les œufs sont abandonnés par la femelle et pon-
dus au hasard, après être restés dans l’oviducte tout le temps nécessaire pour acquérir de la soli-
dité. Stoll prétend, au contraire, que les œufs sont pondus dans la terre, comme ceux des Saute-
relles; mais ne sommes-nous pas en droit de croire qu’il n’était pas bien informé? Quoi qu'il en soit,
on trouve presque toujours quelques œufs déjà mürs dans l'oviduete des femelles conservées dans
l'alcool, et l'ouverture de leur abdomen en fait alors découvrir un grand nombre à des états de déve-
loppement très-variés. On peut croire que les petits qui en sortent sont plus grands que l’œuf dans
lequel ils étaient renfermés, et qu’à chacune de leurs mues leur taille augmente d’une manière sen-
sible; autrement il faudrait supposer qu’ils subissent un plus grand nombre de mues que les au-
tres Insectes. En effet, les œufs des plus grandes espèces de Phasmiens ont beaucoup moins de
0,01 de longueur, tandis que l'Insecte parfait n’a quelquefois guère moins de 0®,50. » D'après ce
que nous venons dire, on trouve une graude différence entre les œufs des Mantiens et ceux des
Phasmiens, car tandis qu'il sont, chez ces premiers, renfermés dans une enveloppe commune, dans
les autres ils sont toujours isolés et libres. Suivant les observations de M. Guilding, quand un Phas-
mien ou tout au moins une larve de cette famille perd une patte par violence, cette patte repousse
au prochain changement de peau; mais dans une plus petite dimension, comme cela a lieu si com-
munément chez certains Crustacés : on peut voir dans les collections entomologiques du Muséum
d'Histoire naturelle un individu de l’Eurycantha horrida, qui offre en effet une patte postérieure
infiniment plus petite que la patte correspondante. Cette famille renferme les plus grands Insectes
connus, car, comme nous venons de le dire, il y en a qui ont plus de 0",30 de longueur, ce qui dé-
passe de beaucoup la taille des espèces gigantesques de Scarabées parmi les Coléoptères. Les mâles
sont d'ordinaire plus petits que les femelles, plus grêles dans toutes leurs proportions; ils ont, pour
le plus grand nombre, les deux ou trois dernières plaques ventrales renflées et élargies, ce qui pro-
duit une sorte de massue à l'extrémité de leur abdomen en dessous; enfin leurs ailes ont habi-
tuellement, quand elles existent, plus de développement.
On ne sait que peu de chose sur l'anatomie des Phasmiens, et cela est fâcheux, car il serait cu-
rieux de constater si elle diffère beaucoup de celle des Mantien$. M. E. Blanchard (Dict. univ.
d'Hist. nat., t. IX) rapporte que le tube digestif de plusieurs de ces Insectes est presque droit, avec
l'œsophage très-long et le jabot en général très-dilaté; que les vaisseaux biliaires sont constamment
très-nombreux et capillaires; que les ovaires consistent en plusieurs gaines multiloculaires conte-
nant des œufs placés bout à bout, et qui doivent être pondus isolément; que le système nerveux
consiste en une longue chaîne dont les ganglions thoraciques et abdominaux sont notablement es-
pacés, et enfin que le système nerveux viscéral est très-développé, surtout pour la portion dépen-
dante du canal intestinal.
Les Phasmiens sont propres aux contrées méridionales, et d'autant plus grands et abondants à
mesure qu'on se rapproche de la ligne équinoxiale. Deux espèces seulement, toutes deux aptères,
7
A.
jÙ HISTOIRE NATURELLE.
se rencontrent dans le midi de l'Europe, mais s'étendent moins au nord que les Mantiens. Presque
toutes les espèces habitent l'Afrique et le sud de l'Asie, l'Amérique méridionale et l'Océanie; la
Tasmanie et la Nouvelle-Hollande en renferment principalement un assez grand nombre, et les
espèces de la plus grande dimension, car elles peuvent atteindre de 0,30 à 0w,40, et.en même
temps-celles qui sont parées des plus belles couleurs; et, comme le fait remarquer M. E. Blanchard,
il est singulier que le continent australien l'emporte ici sur l'Amérique du Sud, si riche de végéta-
tion; car c’est le contraire qu’on observe habituellement.
Bien que les différences de forme soient en apparence très-prononcées chez les Phasmiens, bien
que la présence ou l'absence d'ailes semble indiquer une sé£aration facile, tous ces caractères ont
cependant au fond si peu de valeur, car ils peuvent varier suivant l’âge et les sexes, que la circon-
scription des genres est très-difficile dans cette famille, et il est très-probable qu'un assez grand
nombre de groupes devront être plus tard réunis les uns aux autres. Une autre difficulté, et celle-là
est plutôt spécifique que générique, se présente encore : les couleurs du corps changent et brunis-
sent après la mort de l’Insecte, et les nuances varient selon l’époque plus ou moins reculée de a
mort de l'individu.
Les quelques espèces de Phasmiens connues par Linné et Fabricius étaient confondues avec les
Mantis, le nombre des espèces étant venu à augmenter assez considérablement, puisqu'on en connaît
aujourd'hui près de cent, on a dû y créer des coupes génériques. Stoll, le premier, les réunit sous
les noms de Spectre ou de Phasma; Lichtenstein et Latreille y formèrent ensuite deux groupes parti-
culiers; Lepelletier De Saint-Fargeau et Serville, dans l'Encyclopédie méthodique, créèrent aussi quel-
ques nouveaux groupes, et M. le docteur Boisduval en fit aussi connaître un; M. Gray, dans ses Synop-
sis of the Phasmidæ and the Entomologie of Australia et Monograph of the genus Phasma, décrivit
de nombreuses espèces et porta le nombre des genres peut-être trop loin, car il en admit trente-deux;
Audinet-Serville, tout en ne parlant pas de beaucoup de groupes de M. Gray, dont il n’avait pas vu les
types, admit quelques-uns des autres, en fonda plusieurs nouveaux, et en porta lenombre total à vingt-
cinq; M. Aug. Brullé crut devoir restreindre à treize le nombre des genres, ou plutôt de ce qu'il ap-
pelle les sous-genres de Phasma; enfin M. E. Blanchard, dont nous suivrons en partie la classifica-
tion, n’adopta que dix-sept genres. Nous donnerons principalement les caractères principaux de ces
derniers, surtout distingués par l'absence ou la présence des ailes, par quelques modifications dans
les antennes, par diverses expansions du corps ou des membres, etc., et nous nous bornerons à dire
seulement quelques mots des autres, car, parmi ces derniers, plusieurs font double emploi, comme
fondés sur des sexes différents, ou sont très-incomplétement connus. Ces genres sont ceux des :
CYPHOCRANE (Cyphocrana, Serv.) (zvoos, bombé; xpæwios, tête). — Antennes longues, celles des
mäûles filiformes, velues et plus longues que le thorax, et celles des femelles aussi longues que la
tête et le thorax réunis; ocelles situés sur le front; palpes non dilatés à l'extrémité; thorax et abdo-
men cylindriques; filets abdominaux coinprimés, foliacés. Ce genre, comme les deux qui vont sui-
vre, sont les géants de la tribu; plusieurs femelles ont environ 0,35 de longueur. Les espèces ont
le corps presque cylindrique, guère plus épais qu'une tige d'arbre; elles sont pourvues d'ailes
grandes, généralement de couleurs variées, et les mâles sont constamment beaucoup plus petits que
les femelles, encore plus minces proportionneliement, avec leurs ailes plus grandes, et leurs élytres,
au contraire, plus courtes. Les genres Acrophylla, Diura et Acanthoderus (dénomination changée
par Serville en celle de Rhaphiderus) de M. Gray doivent probablement y être réunis. Quelques
espèces des régions intertropicales du globe, et surtout propres à la Nouvelle-Hollande,, à Amboine,
aux Indes orientales, au Brésil et à la côte d'Afrique, dont Serville ne décrit que cinq espèces, qu'il
trouve le moyen de partager en deux sous-genres, Eurycnema et Cyphocrana propre. Le type est
la Cypnocrane GÉaNTE (Gryllus ou Mantis gigas, Linné), qui entrait dans le groupe des Phasma de
Latreille et de Stoll, d'Amboine.
PLATYCRANE (Platycrania, Gray) (rharve, plat; #pæuos, tête), genre différent surtout du précé-
dent en ce qu’il n’a pas d’ocelles, que les ailes sont complètes dans les deux sexes, que les filets
abdominaux sont très-petits, ete. Un petit nombré d'espèces; la mieux connue étant la PLarverawe
MACULÉE (Mantis maculata, Oliv.), d'Amboine.
ANNELÉS. — ORTHPTÈRES. : o1
MONANDROPTÈRE (Monandroptera, Serv.), chez lesquels le métathorax est latéralement bordé
d'épines; les élytres longues dans les males, recouvrant dans le repos le tiers des ailes, et nulles
dans les femelles, et surtout dont les ailes nulles dans les femelles sont à peu près de la longueur
de l'abdomen dans les müles. Une espèce de l'ile France, M. armée (M. inuncans).
PHIBALOSOME (Phibalosoma, Gray), ayant l'abdomen filiforme, à plaque sous-anale globuleuse à
la base, très-prolongée au delà de l'abdomen. Type, P. Lepelletieri, du Brésil.
APLOPE (Aplopus, Gray), dans lequel les ocelles sont distincts, les palpes élargis à l'extrémité,
le thorax cylindrique, et les filets abdominaux très-courts, les pattes courtes, ete. Une seule espèce,
VH. axeuzeux (Phasma angulata, Stoll), propre à Amboine.
DIAPHÉRODE (Diapherodes, Gray). — Thorax cylindrique; ailes courtes et ne couvrant pas l'ab-
domen; celui-ci large, déprimé, plan en dessus : ce genre, à côté duquel vient se ranger celui des
Craspedonia, Westwood, chez lequel il n'y a pas d'organes du vol, et dans lequel il n’y aurait que
quatre articles aux tarses antérieurs, ne comprend qu’une espèce indienne.
PODACANTHE (Podacantha, Gray). — Ocelles distincts; thorax cylindrique; ailes plus longues
que l'abdomen; appendices abdominaux foliacés. Une espèce de la Nouvelle-Hollande, le P. Tvpnon,
Gray, remarquable par sa grandeur et par la belle couleur rosée des ailes.
ECTATOSOME (Ectatosoma, Gray). — Ocelles distincts; thorax cylindrique; ailes plus courtes
que l'abdomen; pattes foliacées. Deux'espèces, les E. Hopei et tiaratum, Gray, particulières à la
Nouvelle-Hollande, assez remarquables par une tête élevée et des expansions foliacées, et qui ne
sont très-probablement que les deux sexes d'une seule et même espèce.
TROPIDODÈRE (Tropidoderus, Gray). — Antennes longues, filiformes; mésothorax déprimé;
pattes foliacées; abdomen déprimé, plan. Une espèce australasienne, le T. Childreni, entre dans
ce groupe. M. Brullé propose d’y réunir provisoirement le genre Xeroderus, Gray.
PRISOPE (Prisopus, Saint-Fargeau et Serv.), qui, d'une manière très-générale, ne diffère du
groupe qui précède que par son abdomen cylindrique, mais qui offre aussi quelques particularités
différentielles, surtout dans la forme des pattes. Deux espèces : l’une de Cayenne (Wantis sacrata,
Oliv.), et une de l’ile de France (P. Marchali, Serv.). Le genre Platytelus, Gray, doit peut-être y
être réuni.
PHYLLIE (Phyllium, Iliger) (gu20v, feuille). — Antennes moniliformes, très-courtes; mésothorax
déprimé; pattes foliacées; abdomen très-large. Ce genre renferme trois espèces propres aux iles Sé-
chelles (P. brevicorne, Latr., ou Phasma siccifolia, Stoll), une aux Indes orientales (P. crusifolium,
Serv.) et une à l’île de dava (P. pulchrifolium, Serv.), qui, comme l'indique son nom, ressemble à
une branche d’arbre portant des feuilles sèches. Thunberg a appliqué à ce genre le nom de Ste-
Topus.
BACILLE (Bacillus, Latreille) (bacillus, baguette). — Corps allongé, presque cylindrique; tête
simple, petite; antennes courtes, moniliformes, composées d'une vingtaine d'articles dans les mâles
et de treize seulement dans les femelles : premier large, dernier terminé en pointe et presque aussi
long que les trois ou quatre qui précèdent; pas d'ailes; pattes assez courtes; abdomen filiforme, ter-
miné en pointe, sans appendices terminaux prolongés, à plaque sous-anale ne dépassant pas son
extrémité. Ge genre, qui se distingue surtout de ceux qui précèdent par la gracilité de son corps,
est le seul représentant en Europe de la famille des Phasmiens : deux espèces se trouvent dans cette
partie du monde, ce sont les Bacize pe Rossi (Phasma Rossia, Fabr.), qui habite l'Europe méridio-
pale et le nord de l'Afrique, etéranuzé (B. granulatus, Brullé), de Morée ; en outre, une espèce étran-
gère à l'Europe et bien connue, est le B. pu Car (B. Capensis, Serv.), du cap de Bonne-Espérance.
52 ; HISTOIRE NATURELLE.
Le Bacille de Rossi, que nous prendrons pour type, est long de 0,01 environ; son corps est d’un
jaune verdâtre; son corselet lisse; son métathorax et son mésothorax un peu granuleux; les cuisses
armées de quelques épines; l'abdomen, un peu renflé dans son milieu, est verdàtre, sans aucune
tache. Le genre Pachymorpha, Gray (type et espèce unique P. squalida, d'Australasie), qui se dis-
tingue par ses formes un peu plus épaisses, doit probablement être réuni aux Bacillus; il est ap-
tère dans les deux sexes, ce qui fait penser à M. Brullé qu’on n'a observé que des larves. Il en est
probablement de même du genre Linocerus, Gray,
Fig. 64. — Bacille de Rossi.
BACTÉRIE (Bacteria, Latr.) (Baxrspux, bâton). — Corps très-allongé, cylindrique; antennes très-
longues, multiarticulées, filiformes ; pas d'ailes dans les deux sexes; pattes lonques, égales, sim-
ples. Ce groupe, auquel on doit probablement joindre les genres Prisomera, Cladomorphus, Gray,
et au moins provisoirement ceux des Diapheromera, Lonchodes et Heteronemia, Gray, renferme
quelques espèces propres à l'Amérique méridionale et aux Indes orientales. Le type est la Bacrérre
BATON (Phasma arumatia, Stoll; P. ferula, Fabr.; Mantis baculus, Oliv.), magnifique espèce, lon-
gue de plus de 0",40, qui habite Cayenne. Le genre PTERINOXYLUS, Serv. (type, P. difformipes,
de l'Amérique méridionale), se distingue des Bactéries surtout par ses ailes très-lonques, et la dis-
position de ses pattes antérieures, dilatées et foliacées. Le genre CEROYS, Serv., fondé avec le
Cladomorphus perfoliatus, Gray, et qui comprend aussi une autre espèce également brésilienne
(C. multispinosus, Serv.), doit en être rapproché, et s’en distingue surtout par les plaques anales
des femelles non prolongés.
EURYCANTHE (Eurycantha, Boisduval). — Corps large, plan, robuste, couvert d'épines; anten-
nes filiformes; ailes nulles dans les deux sexes; cuisses postérieures renflées, épineuses. Une seule
et grande espèce (E. horrida) compose ce genre, et offre un aspect tout particulier par suite des
épines nombreuses et assez fortes qui couvrent tout son corps et une partie de ses membres. Il est
probable qu’on doit aussi y joindre le genre Heteropteryx, Gray (type, Phasma dilatatum).
ANISOMORPHE (Anisomorpha, Gray). — Corps assez large, plan; antennes filiformes; pas d'ailes
dans les deux sexes; cuisses postérieures fortes, non épineuses. Ge genre, exclusivement propre au
sud de l’Amérique, se distingue surtout des 2TANennnes en ce que son corps et ses membres ne
sont pas hérissés d'épines.
CLADOXÈRE (Cladoxerus, Serv.) — Corps gréle, très-long; tête presque triangulaire, rétrécie
en arrière; antennes très-lonques; ailes courtes, entièrement transparentes, ne recouvrant guère
que la moitié de l'abdomen. Une seule espèce, propre au Brésil, le C. 6rËze (C. gracilis, Lepel.
et Serv.
PHASME (Phasma, Stoll.). — Corps allongé, assez gréle; tête petite; antennes gréles, extréme-
ment longues dans les deux sexes, et plus que le corps, multiarticulées, sétacées; trois ocelles dis-
tincts, rapprochés en triangle sur le front; ailes très-amples, atteignant l'extrémité de l'abdomen
dans les deux sexes, à bord antérieur opaque, ordinairement de la couleur des élytres; celles-ci
ANNELÉS. — ORTHPTÈRES. 55
courtes, souvent très-petites. Ce genre, créé par Stoll, d’abord sous le nom de Fanrôue, dont il
changea bientôt la dénomination en celle de Puaswa (oxouos, fantôme), a été adopté par tous les au-
teurs, qui y comprenaient originairement toutes les espèces de la famille, puis il a été successive-
ment démembré; de telle sorte que, pour Serville, il ne renferme plus qu’une douzaine d’espèces,
toutes particulières à l'Amérique méridionale. On peut indiquer comme type le Paasme NécypaLoïpe
(Gryllus | Mantis] necydaloides, Linné), espèce de taille moyenne, à corps brunâtre; tête chagrinée;
élytres cendrées en dessus et d’un noir velouté latéralement, avec une ligne jaunâtre séparant ces
deux teintes; à ailes obscures, transparentes; à antennes brunâtres ou jaunätres. Commune à Suri-
. nam et au Brésil. Le genre Xerosoma, Serv., peut-être synonyme de celui des Dinelytron, Gray, ne
s'en distingue guère qu’en ce que la seule femelle qu'on en a étudiée (X. canaliculatum, du Brésil)
n'offre pas d'ocelles. On doit peut-être y joindre quelques groupes de M. Gray, tels que ceux des
Anisomorpha, Heteronemia, Ctenomorpha, ete.; mais nous n'indiquerons ce rapprochement qu'avec
beaucoup de doute.
NÉCROSCIE (Necroscia, Serv.) (vexpos, mort; x, ombre). — Corps gréle, surtout dans les mà-
les; thorax à peu près cylindrique, allongé; antennes très-lonques; ailes fort amples dans les deux
sexes, de la longueur de l'abdomen, à bord antérieur opaque, ordinairement de la couleur des
élytres; celles-ci petites; pattes sans épines, simples; abdomen très-allongé, cylindrique, terminé de
chaque côté par un appendice très-court. Ge groupe, qui participe à la fois des caractères des Platy-
cranes de Gray et des Phasma, diffère cependant des uns et des autres, et renferme sept espèces,
toutes propres à Java et décrites pour la première fois par Serville : le type est la N. enrunée (N: fu-
mata).
PYGIRAYNQUE (Pygirhynchus, Serv.). — Thorax long, cylindrique, un peu dilaté, rugueux;
abdomen sans appendices terminaux prolongés, à plaques anales des femelles prolongées en forme
de bec de Canard, ete. Deux espèces du Brésil, P. coronaltus et subfoliatus, de l'Amérique méridio-
nale.
CREOXYLE (Creoxylus, Serv.), surtout earactérisé par ses pattes, de longueur moyenne, anté-
rieures sans dilatation, et cuisses non membraneuses : les quatre autres munies de folioles. Une
espèce, G. cornue (C. corniger), dont on ne connaît pas la patrie.
PERLAMORPHE (Perlamorpha, Gray). — Corps allongé, légèrement pubescent; antennes longues,
pubescentes dans les deux sexes; ailes amples, recouvrant une grande partie de l'abdomen; élytres
à peine visibles ou nulles dans les deux sexes; pattes simples. On n’en connaît que deux espèces,
propres à l’île de Java; les P. miéroczyemique (P. hieroglyphica) et rezés (P. peleus), décrites par
Gray.
QUATRIÈME FAMILLE. — GRILLONIENS.
Le groupe naturel des Grillons ou le groupe linnéen des Gryllus, devenu trop nombreux en
espèces, constitue aujourd'hui une famille particulière partagée en une quinzaine de coupes géné-
riques, et ayant pour caractères particuliers : corps assez gros, court; tête forte, ovalaire ou globu-
leuse, presque constamment à découvert; antennes très-longues, fines, sétacées, composées d'un
grand. nombre d'articles peu distincts; yeux ovalaires ou arrondis, souvent saillants; ocelles ordi-
nairement distincts, placés en ligne à peu près transversale au-dessus de l'insertion des antennes;
labre entier, arrondi au bout; mandibules fortes, dentées à l'intérieur; mächoire à une seule dent
intérieurement, et à galette linéaire; lèvre quadrifide; palpes longs, maæillaires de cinq articles,
et plus grands que les labiauæ, qui n’en ont que trois : article terminal un peu tronqué au bout,
vésiculeux à l'extrémité; thorax souvent court, quadrilatère, plus rarement allongé, ovalaire;
élytres couchées horizontalement sur l'abdomen, rabattues de chaque côté ou en une carène latérale
o4 [HISTOIRE NATURELLE.
assez prononcée, et offrant des nervures; ailes dépassant souvent les élytres, en forme de laniére
dans le repos, amples, transparentes, incolores, réticulées; pas d'écusson; abdomen développé,
formé de sept segments dans les femelles et de huit dans les males, muni vers son extrémité de cha-
que côté d'un appendice souvent très-grand, sétacé, flexible, pubescent ou velu; ovisvapte des fe-
melles saillant, très-long, composé de deux valves; pattes antérieures et intermédiaires variables
dans la forme et la longueur : postérieures plus longues, conformées pour le saui; les deux dernières
cuisses renflées; extrémité des jambes pourvue d'épines mobiles favorisant le saut : jambes posté-
rieures portant habituellement des épines sur leurs carènes supérieures; turses souvent formés de
trois articles, mais pouvant en avoir un plus grand nombre : le premier article des postérieurs
très-grand, chargé d’aspérités, et muni à son extrémité, de chaque côté, d'une véritable épine.
Les Grilloniens, aussi nommés Grilliens et Grillides, constituent la première famille de la sec-
tion des Orthoptères sauteurs, c’est-à-dire de ceux de ces Insectes qui ne se déplacent pas par la
marche seulement, mais qui progressent toujours par une suite de sauts plus ou moins élevés et
rapidement répétés; ces animaux diffèrent de ceux de deux familles qui vont suivre par la confor-
mation de leurs élytres, qui sont appliquées horizontalement sur l'abdomen, dont elles embrassent
les côtés, en se repliant sur eux, de manière que dans l’état de repos les élytres offrent habituelle-
ment une carène de chaque côté; ces bords repliés ont leurs nervures longitudinales obliques, ce
qui rapproche les Grilloniens des Orthoptères coureurs, que nous avons precédemment étudiés, et
les sépare nettement des Locustiens et des Acridiens, qu’il nous reste à passer en revue, qui por-
tent leurs élytres en toit dans le repos. Les Grilloniens ont aussi une conformation d’ailes qui leur
est particulière : quand ces dernières, ce qui arrive habituellement, dépassent les élytres, c’est tou-
jours horizontalement et en forme de lanières étendues, droites ou roulées en spirale; chez les Lo-
custiens, les ailes sont également plus longues que les élytres, mais, placées verticalement sous ces
dernières, elles les débordent de toute art et non en lanière; enfin dans les Acridiens, aucune es-
pèce n’a, dans le repos, les ailes saillantes au delà des élytres. L’oviscapte ou tarière des femelles,
saillant comme celui des Locustiens, est plus grêle et présente des valves très-étroites. L'ahdomen
a sa plaque sous-anale toujours plus petite dans les mâles que dans les femelles, et porte vers son
extrémité deux appendices ou filets longs, épais à leur base, coniques, d’une seule pièce, plus
grands que ceux qu'offrent ceux des deux familles qui vont suivre, et égalant quelquefois même
l'abdomen en longueur. Les mâles font entendre une stridulation produite par le frottement alter-
natif des élytres l’une contre l’autre, et ceux des Grillons, chez lesquels cette sorte de chant est très-
fort, ont toute la partie dorsale des élytres ridée ou comme chiffonnée, assez transparente, et à ner-
vures irrégulières. Les Grilloniens sautent tous, mais ils sont loin de le faire ni avec la même faci-
lité, ni à la même hauteur; les Courtilières sont mal partagées sous ce rapport : leurs cuisses
postérieures à peine renflées, et leurs jambes de derrière, très-courtes, ne peuvent pas facilement
soutenir leur gros corps pendant le saut; les Grillons, comme tout le monde a pu le constater, sau-
tent avec beaucoup plus de facilité; les Tridacnes, enfin s’élancent à une hauteur surprenante pour
leur petite taille. Chez quelques-uns, les Taupes-Grillons, les pattes antérieures sont constituées de
elle sorte, qu’elles leur offrent un moyen de creuser facilement la terre et de se dérober pgpmpte-
ment à la vue de leurs ennemis. Leur nourriture esi encore pour ainsi dire un problème; regardés
par la plupart des auteurs comme vivant exclusivement de matières végétales; on sait cependant
que notre Grillon domestique est omnivore, et Latreille leur attribue des habitudes carnassières, qui
semblent appartenir exclusivement aux Taupes-Grillons et aux Grillons.
Les Grilloniens forment une des familles les moins nombreuses de l’ordre des Orthoptères, et néan-
moins ils offrent dans leur structure et dans leurs habitudes beaucoup plus de diversité que l'on
n’en observe dans les autres familles. Dès lors de grandes généralités seraient impossibles à présen-
ter, surtout si l'on veut éviter les redites; c’est ce qui nous engage, comme la plupart de nos devan-
ciers,.à rejeter la plupart des faits concernant les mœurs et l'anatomie de ces Insectes à chacune des
subdivisions principales que nous admettons dans cette famille.
Ces Orthoptères sont répandus dans toutes les parties du monde; mais, si les individus sont par--
fois très-abondants, les espèces ne semblent pas être très-nombreuses dans aucune région, quoique
les parties chaudes du globe soient un peu plus riches sous ce rapport que les pays froids et même
ANNELÉS, —— ORTHOPTÈRES. 55
tempérés. Le rang assigné par les auteurs à cette famille a quelquefois varié; souvent on les place
intermédiairement entre les Locustiensetles Acridiens; pour nous, à l'exemple d'Audinet-Serville, il
nous semble que l'on ne doit pas placer une division particulière entre les deux dernières familles
que nous venons de nommer, et qu'en outre les Grilloniens, offrant quelques rapports avec les Or-
thopières coureurs, doivent être classés à la suite de cette dernière et commencer la section des
Orihoptères sautsurs, dont is n’ont pas encore les caractères au plus haut degré.
Le genre Gryllus, d’abord subdivisé en trois groupes principaux, ceux des Grizrons (Gryllus),
Cournières (Gryllotalpa) et Trinacivre (Tridactyla), qui sont devenus des subdivisions plus éle-
vées pour MM. Aug. Bruilé et E. Blanchard, et que nous adopterons comme tribus, constitue au-
jourd'hui la famille des Grilloniens qu’Audinet-Serville divise en quinze genres particuliers.
La première tribu, ou celle des Grizpes, particulièrement caractérisée par ses pattes antérieures
simples, renferme surtout les Grillons ou ces Insectes qui sont vulgairement désignés sous le nom
de Cri-Cri, en raison du bruit qu’ils produisent : c’est cette stridulation monotone que l’on entend
souvent dans les champs pendant l'été, et parfois aussi dans les maisons et principalement dans
les boulangeries et dans les cuisines de campagne. Les Grillides mâles sont seuls aptes à produire
cette stridulation, et, comme chez les Locustiens, c'est par le frottement de leurs élytres l’une contre
l’autre; mais chez ces derniers un espace trés-limité est affecté pour cet objet, et, au contraire, chez
les Grillides, c’est presque la totalité de l’élytre. Ces Insectes ne sautent pas tous avec la même fa-
cilité, ce qui dépend du plus ou moins de renflement de leurs cuisses postérieures et de la brièveté
des jambes de certains d’entre eux, qui leur permettent plus ou moins facilement de lancer leur
corps dans l'air, mais jamais autant que dans d’autres Grilloniens.
L'anatomie de ces Insectes présente quelques particularités qui doivent être notées. Leur canal
alimentaire n’a pas tout à fait deux fois la longueur du corps; leur œsophage est droit dans toute la
longueur du thorax, et, à la base de la cavité abdominale, se renfle en un gésier de forme ellipsoïde :
ce gésier est lisse extérieurement et garni intérieurement de pièces cornées, mobiles, propres à triturer
les matières alimentaires, et formant six rangées; un ventricule chylifique, offrant antérieurement
deux grandes poches latérales, et se continuant ensuite sous la forme d’un tube musculo-membra-
neux, suit le gésier, et est suivi à son tour par un intestin d’abord grêle, et, vers son extrémité,
renflé en un rectum plus ou moins gros; les glandes salivaires sont composées de deux grappes
de petites bourses ovalaires qui s’entremêlent vers leur partie moyenne.
Fig. 65. — Grillon domestique. Fig. 66. — Œcanthe pellucide.
Les Insectes de cette tribu, et l’on pourrait même dire ceux de toute la famille, ont un genre de
vie assez différent de celui des autres Orthoptères. On ne les rencontre qu’au milieu des herbes ou
sur les arbustes, sautant d’espace en espace, et ils vivent en général solitaires. Chaque individu se
creuse un terrier assez profond relativement à sa grandeur, et il y demeure habituellement pen-
dant toute la journée; ce n’est ordinairement que le soir, ou même la nuit, qu'ils sortent de cette
retraite, et que les mâles vont rechercher les femelles, et souvent on les voit au bord de leurs trous,
où les mâles font entendre leur chant pour appeler les femelles. Comme nous l'avons dit, on ne
‘
56 HISTOIRE NATURELLE,
sait pas parfaitement quelle est leur nourriture habituelle; évidemment ils mangent des matières
végétales, mais n'y joignent-ils pas aussi des substances animales? Cela est probable, mais n’est pas
démontré; car, si l’on a observé des Grillons se dévorant entre eux quand on les réunit dans une même
boîte, 1l ne faut pas en déduire leur carnivorité, car des Insectes évidemment phytophages, placées
dans des circonstances semblables, se sont parfois, en domesticité, mangés les uns les autres. On
assure qu'ils redoutent le froid; Degéer rapporte que des individus qu’il exposa au dehors pendant
e mois de novembre ne tardèrent pas à périr; aussi paraissent-ils rechercher surtout beaucoup de
chaleur et établissent-ils leurs terriers dans des expositions méridionales. Ils sont d’une extrême ti-
midité, au moindre bruit, ils cessent de produire leur vibrante stridulation, et, quand ils sont
sur le bord de leurs trous, ils y rentrent précipitamment dès qu’on s'approche d'eux. Les femelles
des Grillides sont très-fécondes : chacune pond environ trois cents œufs au milieu de l'été. Les lar-
ves qui en sortent bientôt se creusent où elles se trouvent de petits trous dans la terre; elles y pas-
sent l'hiver, en sortent au printemps pour rechercher une exposition convenable, et alors, dans un
court espace de temps, on Îles voit se transformer successivement en nymphes, puis en Insectes par-
faits. Au rapport de Mouffet, les Grillides sont, dans certaines parties de l’Afrique, un-objet de com-
merce; on les élève dans de petites cages et on les vend aux habitants, qui se plaisent à entendre
leur chant, cependant si peu agréable, et qui invite au sommeil; il semble même, dit-on, que
l’homme s’en nourrit parfois. Chez nous, ces Insectes sont assez recherchés comme appäts pour la
pêche, et, dans nos ménageries, on s'en sert souvent pour nourrir quelques petits Reptiles.
M. Em. Blanchard forme dans cette tribu cinq groupes spéciaux qui sont représentés par les genres
Schixodactyle, Phalangopse, OEcanthe, Grillon et Sphérie, qui eux-mêmes peuvent être subdivisés
en quelques coupes particulières.
SCHIZODACTYLE (Schizodactylus, Brullé) (cite, je sens; dœurudoc, doigt), ayant surtout des
élytres très-grandes et beaucoup plus longues que l'abdomen, chargées de très-nombreuses nervures
longitudinales obliques, ainsi que de nervules transversales, et surtout dont la partie qui dépasse
l'abdomen roulée en spirale dans le repos; tarses de quatre articles : le terminal presque cylindri-
que, muni en dessous d'une lame mince, comprimée : les quatre tarses antérieurs à premier article
long, épais, à peu près égaux : les deux intermédiaires très-courts, le premier simple, mutique, et
les second et troisième émettant chacun latéralement un appendice étroit, aplati, lancéolé, élargi
et arrondi au bout. Par la conformation de ses tarses, ce groupe semble être voisin des Locustiens,
mais l'ensemble de ces caractères le rapproche davantage des Grilloniens. On n’y range qu'une
seule espèce (Gryllus monstruosus, Drury), qui habite les Indes orientales.
PHALANGOPSE (Phalangopsis, Serv.) (oa)æyt, oyyos, sorte d'Araignée; ou, aspect). — Pattes
ionques et gréles, surtout les postérieures, qui sont beaucoup plus développées que les autres; tarses
très-allongés, de trois urticles : premier extrêmement long, plus grand que les deux autres réunis,
terminé par deux épines; second très-petit; troisième notablement plus court que le premier, renflé
à l'extrémité où il porte deux crochets; élytres courtes ; ailes nulles ou rudimentaires ; oviscapte
très-long, recourbé. — Quatre espèces, toutes décrites par Serville : deux de l'Amérique méridio-
nale (P. longipes et fascicornis), une de Port-au-Prince (annulipes) et une du Sénégal (tesselata).
Ce genre, qui se rapproche assez des Locustiens par la longueur de ses pattes, offre un peu l'aspect
général des Faucheurs parmi les Arachnides; il en est de même de deux autres genres que, pour ce
motif, on réunit parfois dans un groupe des Phalangopsites; ce sont les : PLATYDACTYLUS, Brullé,
à tarses ayant leur deuxième article très-petit; les premier et troisième articles des tarses inter-
médiaires et postérieurs égaux entre eux; tarrière assez longue, couchée. — Quatre espèces de l’A-
mérique, de Java et de la Nouvelle-Hollande, dont le type est le Gryllus surinamensis, Dégeer, eom-
mun au Brésil, et PRODOCIRTUS Serville, à tarses ayant leur deuxième article assez grand; ovis-
capte court, droit; une seule espèce, propré à Madagascar, le Prodocireus crocinus, Serville.
ŒCANTHE (0Ecanthus, Serv.). — Corps étroit, allongé; corselet allongé, presque conique, plus
étroit en avant qu'en arrière; élytres plus lonques que l'abdomen; ailes dépassant les élytres;
paites longues, surtout les postérieures; tarses antérieures et intermédiaires de huit articles :
ANNELES. -- ORTiOPTÈRES. 57
postérieures de quatre articles bien distincts. Les Œcanthes ont un faciès tout particulier qui les
lait distinguer facilement, et une livrée uniforme composée entièrement d’une couleur pâle. Ce sont
des Grylliens d’une délicatesse extrême, à élytres minces, plus larges dans les mâles que dans les
femelles, à ailes bien développées, sans ocelles, et qui, comme M. Aug. Brullé l’a fait remarquer le
premier, sont hétéromères relativement aux articles de leurs tarses. Ils ont, suivant Latreille, des
habitudes qui leur sont propres; ils fréquentent les plantes et se plaisent surtout sur les fleurs ;
ce qui leur a valu leur nom générique (de oxc0, j'habite; 400, fleur). L'espèce typique est l'Œcanrne
TRANSPARENTE (Gryllus pellucens, Scopoli), longue d'environ un centimètre, d’un blanc jaunûtre,
qui habite l'Italie et le midi de la France; M. L. Salvi a publié une note sur les mœurs de cette
espèce. D’après cet entomologiste, la femelle perce au moyen de son oviscapte les fibres les plus
tendres ou les sarments encore verts de certains végétaux, et s'y ouvre un chemin jesqu'à la
moelle, où elle dépose ses œufs; ceux ci sont cylindriques : la femelle, le premier nid une fois fait,
recommence la même manœuvre un peu plus loin. Les nids ne contiennent ordinairement que
deux œufs chacun, qui sont placés dans la longueur de la tige et parallèles entre eux. Ces œufs n’é-
closent que vers le solstice d'été; après l’éclosion, les jeunes larves se retirent dans des lieux très-
fourrés, parmi les plantes, où elles se cachent; elles changent plusieurs fois de peau avant de paraître
sous leur dernière forme, ce qui a lieu au mois d'août. Les mâles stridulent alors jusqu’à l’équi-
noxe d'automne, depuis le crépuscule jusqu'aux premiers rayons du soleil. (Voy. fig. 66, page 55.)
Deux autres espèces du même genre sont les D. nivens, Degéer, de l'Amérique du Sud, et rufescens,
Serv., de Bombay.
GRILLON (Gryllus, Geoffroy, Olivier, Latreille) (ypvX0s, nom d'un animal chez les Grecs). — Corps
assez gros, allongé; tête forte, très-bombée; antennes très-lonques, distantes, sétacées, à premier ar -
ticle gros, court; yeux gros; ocelles frontaux; labre grand; mandibules très-fortes; palpes maxillaires
très-longs, à dernier article, un peu plus long que le précédent, tronqué obliquement à l'extrémité;
corselet carré; élytres atteignant ordinairement l'extrémité de l'abdomen; ailes dépassant les ély-
tres, en lanières, parfois rudimentaires ou pouvant méme manquer ; abdomen à plaque sous-anale,
plus grande dans les mâles que dans les femelles; oviscapte long. droit, dépassant beaucoup l'ex-
trémité des élytres; pattes robustes, glabres; les quatre premières jambes terminées par deux épines
très-visibles, étroites, épaisses, pointues; tarses de trois articles : les postérieurs à premier article
aplati, glabre, plus grand que les deux autres réunis, muni d'épines en dessus, et terminé de cha-
que côté par une épine forte, glabre.
La première application du nom de Gryllus n'avait pas été faite à ce genre d’Insectes; Linné, qui
l’a établi, y renfermait, comme de simples divisions, le plus grand nombre des Orthoptères, et, pour
les espèces comprises dans le groupe que nous étudions, c’étaient ses Acheta. nom que leur conserva
Fabricius; mais, Geoffroy ayant fait avant ce dernier l'application de la dénomination de Gryllus à
la division des Achètes de Linné, la plupart des zoologistes adoptèrent la manière de voir du célèbre
entomologiste français. Les Grillons sont connus de tout le monde, et cela depuis un temps immé-
morial ; les enfants les recherchent surtout et se plaisent à introduire dans leurs trous, pour les
attirer sur le sol, un brin d’herbe ou de paille, auxquels ils attachent, assure-t-on, une Fourmi, et
cette expérience vulgaire semble démontrer leur carnivorité, quoiqu'ils puissent aussi se nourrir de
matières végétales et même de toute sorte de substances, comme le démontre l’espèce qui vit dans
nos maisons. Le son souvent répété de eri-cri que produisent ces Insectes sert souvent à les dési-
gner, et l’on a, principalement autrefois, attaché à ce bruit monotone un préjugé de mauvais au-
gure pour la maison dans laquelle on entend les Grillons chanter. La prédilection marquée de ces
Insectes pour les endroits les plus chauds, surtout dans l'intérieur des fours des boulangers ou der-
rière les plaques de nos cheminées, a sans doute donné lieu à l'opinion manifestée par Spence et
Kirby, que les Grillons sont toujours altérés; on les trouve souvent noyés, disent ces auteurs, dans
les vases qui renferment un liquide quelconque; tout ce qui est humide est de leur goût, rapporte
Gray : c'est pourquoi ils font parfois des trous aux vêtements humides que l’on suspend auprès du
feu, et pourquoi aussi ils habitent de préférence dans les maisons récemment construites, car le
mortier, encore tendre, leur permet d'y creuser plus facilement leurs demeures. Les Grillons sont
des Insectes nocturnes, et leur chant se fait entendre plutôt pendant les ténèbres que pendant le
A. 8 ]
58 HISTOIRE NATURELLE.
jour; c'est également pendant la nuit qu’ils se livrent à la recherche de leur nourriture, qu'ils
s’aventurent loin de leurs retraites, et c’est cette particularité qui explique pourquoi ils ont si peu
d'agilité quand on les expose à la lumière du jour. Lorsque le màle veut se faire entendre de sa
femelle, il soulève ses élytres de manière à leur faire décrire un angle aigu avec l’abdomen, et les
frotte vivement l’une contre l'autre. Les habitudes des Grillons sont peu sociables, au moins pour
l'espèce champêtre, car l'on ne peut en dire de même de l'espèce de nos maisons, dont les mœurs,
comme cela a lieu pour beaucoup d'animaux, ont dû être changées par la domestication. Chaque
individu du Grillon champêtre habite un trou séparé. Les femelles sont très-fécondes; les petits qui
sortent des œufs ne parviennent à l’état parfait que dans le courant de l’année suivante; le déve-
loppement a lieu comme celui des Sauterelles et de presque tous les Orthoptères ; les organes du vol
ne se montrent pas dès la première mue, et ce n’est qu’à l’avant-dernière qu'apparaissent les four-
reaux des ailes et des élytres, d’où celles-ci ne se dégagent qu'à l'époque du dernier changement
de peau, qui constitue l'état parfait. Quelques individus, en petit nombre, arrivés à ce dernier état,
passent sous terre tout le temps de la mauvaise saison, lorsque l'hiver est doux; mais, dans le cas
contraire, on n’en trouve au printemps que des jeunes. Ces derniers supportent les froids dans un
état d’engourdissement complet : les premiers rayons de soleil les raniment à l'époque du prin-
temps, et dès lors ils continuent à se développer jusque dans le milieu de l'été, où ils deviennent
aptes à reproduire leur espèce. Le Grillon domestique semble se propager pendant toute l’année,
n'est pas assujetti, comme celui des champs, à s'engourdir pendant l'hiver, et partage ainsi,
comme tous les êtres qui vivent sous le patronage de l'homme, le privilége de se dérober à l'influence
des saisons. Plusieurs entomologistes ont publié de nombreux détails sur les habitudes et le chant
des Grillons; l’espace restreint qui nous est accordé ne nous permet pas de nous étendre davantage
à ce sujet, et nous nous bornons à renvoyer à l'excellent travail que M. le colonel Gremeau a publié
en 4836 dans les Annales de la Société entomologique de France, dans son Essai sur la stridula-
tion des Insectes, en ce qui a rapport spécialement au Grillon champêtre.
Serville ne range qu’une vingtaine d'espèces dans ce genre, et, pour lui, plusieurs autres forment
des groupes particuliers, que nous citerons bientôt. Deux espèces sont surtout très-répandues en
Europe; ce sont : 1° Le GRizLon pomesrique (Gryllus domesticus, Linné), long de 0,02 environ,
nuancé de jaune et de brun, cette dernière teinte formant des bandes transversales sur la tête, le
corselet et l'abdomen, et une bande longitudinale de chaque côté du corselet; élytres ayant surtout
du brun le long de leur nervure principale; ailes offrant aussi une ou deux bandes obscures dans
le sens de leur longueur. Très-répandu dans toute l’Europe, mais ne se trouvant que dans les mai-
sons, où il n'habite que les lieux les plus chauds, sortant parfois, vers la brune, des habitations pen-
dant les fortes chaleurs de l'été, ce qui a fait supposer qu'il est originaire des pays chauds: il mul-
tiplie considérablement, et importune beaucoup les boulangers et les gens de cuisine; il mange
fort bien la farine, et sans doute aussi des Insectes et des substances animales; le mâle fait entendre
presque continuellement un bruit aigu et monotone, semblable à celui du Grillon champêtre,
mais plus faible, l'Insecte étant beaucoup plus petit. (Fig. 65, page 55.) 2° Le GRILLON CHAMPÊTRE
(Gryllus campestris, Fabr.). Beaucoup plus grand que le précédent, car il peut atteindre 0",04, d’un
noir luisant, avec le côté interne des cuisses de derrière rougeàtre : cette dernière nuance s'étendant
plus ou moins sur les cuisses et gagnant parfois celles de devant; élytres d’un brun plus ou moins
foncé, toujours plus obscur dans les femelles que dans les mâles; ailes transparentes, offrant deux
bandes brunes, dont la seconde n’est visible que sur leur dernière moitié: élytres ornées à la
base d’une bande jaunâtre, qui se réduit parfois à un point. Il vit de préférence dans les cam-
pagnes, mais on le trouve aussi quelquefois dans nos maisons ; on le rencontre dans tout l’ancien
continent et dans quelques parties du nouveau monde. Parmi les autres espèces européennes, nous
nommeronsles Gryllus melas, Charp., de Dalmatie et des Pyrénées; tristis, Serv., de Sardaigne; Bur-
digalensis, Latr., des environs de Bordeaux et de Saint-Sever; geminus, Serv., de Sardaigne ; pi-
piens, Dufour, d'Espagne, et Capensis, Oliv., très-répandu au cap de Bonne-Espérance, aux Indes,
et que l’on a retrouvé en [ongrie et en Corse. Les autres espèces sont propres à la Chine, à la Nou-
velle-Hollande, à Cayenne, à l'Amérique du Nord, à Java, au Bengale, à l'Égypte, ete.
Parmi les groupes génériques formés aux dépens des Gryllus, nous citerons : 4° les NEMOBIUS,
Serv., qui se distinguent seulement par le second article des tarses très-court, comprimé, par le
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. D9
dernier article des palpes maæillaires près du double plus long que l'avant-dernier et tronqué
un peu obliquement au haut, et par les ailes nulles ou rudimentaires; ils paraissent se plaire à vivre
réunis : du moins il est avéré que l’on rencontre toujours, principalement dans les bois, un grand
nombre d'individus des deux sexes et en divers états, dans un même lieu, et cela au grand jour,
souvent en plein soleil; les femelles déposent leurs œufs dans la terre; mais ces Insectes sautillent par-
tout à la surface du sol, et ne se cachent pas, au moins pendant le jour, dans des terriers. Le type est
le GRILLON FORESTIER (Gryllus sylvestris, Bosc); espèce, de petite taille, très-commune dans les bois
de toute l'Europe, surtout à la fin de l'été, et se tenant principalement dans les lieux ombragés,
parmi les feuilles mortes; une autre espèce (Gryllus lineolatus, Brullé), provient des Pyrénées et
des environs de Saint-Sever. 2° TRIGONIDIUM, Serv., à second article des tarses très-court, presque
globuleux; à palpes maxillaires, avec l'article terminal en cône très-élargi, plus grand que l'avant-
dernier, tronqué, droit à son extrémité, ce qui figure un triangle, et à a court, à peu près
de la longueur des appendices, en forme de sabre, recourbé en dessus; le type est l’Alamia palu-
diola, De Géer, qui a un peu l'aspect d’un Cicindèle, et se tient dans les ee humides en Sardaigne;
d'autres espèces sont propres à Java et à l’île de France. 3° PLATYBLEMMUS, Serv., à face anté-
rieure de la tête aplatie, à antennes ayant le premier article grand, aplati, et renfermant cinq es-
pêces, deux propres à l'Espagne et au Portugal, les P. Ramburi., Serv., et Lusitanicus, Serv.;
une plus connue, (G. ambraculatus, Linné), habite le midi de l'Europe et le nord de l’Afrique; une
dont la patrie est inconnue (P. velatus, Serv.), et une espèce du Bengale (P. delectus), auprès de
laquelle Serville range son groupe peu connu des Mocopzistes. 4° BRACHYTRUPES, à tarses à pre-
mier article des postérieurs chargé d’épines en dessus et de poils en dessous, avec une frange de
soies intérieurement; à palpes maxillaires très-grands, avec l'article terminal ayant presque le
double de la longueur de l'avant-dernier, tronqué au bout; à oviscapte très-court, atteignant à peine
l'extrémité des élytres; à jambes terminées par quatre épines larges, minces, pointues, formant un
double éperon. Le type est le Gryllus megacephalus, AI. Lefebvre, dont De Géer connaissait la nym-
phe, et qui est propre à la Sicile. Se trouve dans les contrées sablonneuses les plus exposées au so-
leil; ne se cache pas pendant le jour et est beaucoup moins eraintif que notre Cri-Cri; 11 est très-
vorace et se laisse prendre assez aisément; une autre espèse habite Java.
Un genre plus distinet des Grillons que les précédents, est le groupe des SPHÉRIE (Sphæriwm,
Charp.) (coaioæ, sphère). Corps presque orbiculaire ; tête cachée sous le corselet; palpes maxillaires
beaucoup plus gros que les labiaux; pas d'ailes ni d'élytres dans les deux sexes; abdomen à filets
terminaux larges, plats, coniques, d'une grosseur considérable; oviscapte de la longueur de ces
filets. Ce genre singulier ne renferme qu'une seule espèce, le Sphærium acervorum, Charp., de pe-
tite taille, qui se trouve, mais assez rarement, en France et en Allemagne, vivant exclusivement dans
les fourmilières, ce qui explique le nom générique de Myrmecophila que lui applique Latreille.
Cet Insecte ressemble assez à une Blatte, ce qui montre pourquoi Panzer le rangeait dans ce groupe;
mais il s'en distingue facilement parce qu'il a les cuisses postérieures renflées et les tarses composés
de trois articles seulement. Nous figurons ce genre page suivante, fig. 68.
La deuxième tribu, ou celle des Gnyzrorarrines, ne renferme que le genre CourrinÈèRE et un groupe
quis’en rapproche assez, celui des CYLINDRODES, Gray, remarquable par son corps cylindrique comme
un tube très-long, par ses ailes et ses élytres presque rudimentaires, par ses tarses de deux articles
seulement, sans crochets, et ne renfermant qu’une espèce propre à la Nouvelle-Hollande (C. Camp-
belli). D'une manière générale les Gryllotalpides peuvent être ainsi caractérisés : jambes intérieures
élargies, terminées par une palette dentée en forme de main; jambes postérieures pourvues d'un
tarse. Les particularités curieuses relatives à l’organisation et surtout aux mœurs de ces Ürthop-
tères seront donnés en faisant connaître le genre typique, celui des :
. :
COURTILIÈRES ou TAUPES-GRILLONS (Gryllotalpa, Latreille.) — Corps allongé, velouté, surtout
en dessous ; tête assez petite, ovalaire, avancée; yeux arrondis, saillants; deux ocelles distincts,
frontaux; antennes longues, multiarticulées, pubescentes, peu distantes à leur base; labre arrondi
au bout; mandibules fortes ; palpes inégaux : maxillaires très-longs : labiaux assex courts ; corselet
grand, ovoide, tronqué en avant, embrassant les côtés du corps et ressemblant grossièrement à une
60 HISTOIRE NATURELLE.
carapace d'Écrevisse; presternum et mésosternum courts; mélasternum grand, large; élytres
courtes, ovalaires, arrondies en arrière, sans rebord latéral ni carène distincte, chargées de ner-
vures; ailes amples, repliées en éventail dans le repos, dépassant les élytres en forme de lanières;
pattes velues : antérieures propres à fouir, à hanches très-larges, aussi longues que les cuisses, avec
un trochanter saillant; à cuisses courtes et fortes; à jambes très-larges, courtes, imitant une sorte
de main terminée par des dents fortes, acérées, immobiles ; intermédiaires et postérieures à han-
ches à peu près triangulaires; à cuisses comprimées sur les deux faces, canaliculées en dessous;
postérieures plus fortes et plus longues que les autres, mais peu propres au saut, à quatre dernières
jambes assex courtes, terminées par plusieurs épines; tarses de trois articles, le second court, le
premier et le troisième longs, et ce dernier muni de deux petits crochets : antérieures ayant les
deux premiers articles dilatés latéralement et une dent à peu près semblable à celle des jambes.
Fig. 67. — Courtilière commune. Fig. C8. — Sphérie des monceaux.
Les Insectes de ce genre sont connus depuis Ja plus haute antiquité, à cause du tort qu'ils font à
l'agriculture; ils ont recu les noms de Taupe-Grillon, Grillon-Taupe, Avant-Taupe, ete., d'après leur
manière de vivre et la ressemblance de leurs pattes antérieures avec celles des Taupes, et qui, comme
celles-ci, servent également à creuser des galeries souterraines. Le nom de Courtilière, qui leur a
été appliqué aussi très-anciennement, est tiré du vieux mot francais courtille qui signifie jardin,
et il indique l’habitat ordinaire de ces Orthoptères. Réunis par les anciens auteurs aux Grillons,
avec lesquels ils ont de très-grands rapports, sous la dénomination générale de Gryllus, Fabricius
les en a distingués sous celle d’Acheta, nom qui devrait être employé scientifiquement, si celui de
Gryllotalpa, que leur a donné Latreille, n'avait pas été généralement adopté.
Les Courtilières, par la structure de leurs pattes antérieures, ne ressemblent à aucun autre [n-
secte; les jambes sont très-élargies, de manière à représenter une pelle ou une sorte de main, ce qui
leur était indispensable pour ereuser le sol et former avec la terre qu’elles en retirent les petits
monticules qu’elles élèvent parfois avec une assez grande rapidité. Leur aspect est tout particulier
par suite de leur gros corps. Le corselet enveloppe presque tout le sternum, offrant assez la figure
d’une carapace d'Écrevisse, et ce grand développement semble avoir pour but de donner aux pattes
de devant une insertion plus solide qui leur permet de faire des efforts considérables pour creuser la
terre. Les pattes de derrière sont courtes et peu renflées, ce qui explique pourquoi les Courtilières
n'ont pas la faculté de sauter, et cela d'autant plus que leur abdornen volumineux s’y opposerait.
Les élytres des mâles ont à leur base les nervures plus écartées que chez les femelles, et également
plus fortes, ce qui leur permet de produire une sorte de stridulation, mais qui est bien loin d’être
aussi pénétrante que celle des Grillons. Ces Insectes ont une assez grande ressemblance avec les
Gryllus; leur caractéristique, que nous avons longuement détaillée, montre aussi les différences
importantes qui les en distinguent. Quant aux organes intérieurs, ils sont à peu de chose près sem-
blables : nous dirons seulement que les femelles sont pourvues d’une tarière destinée à déposer les
œufs dans le sol, et que rien de semblable ne se remarque chez les Grillons ni même chez les Saute-
relles. Les sexes se distinguent surtout par la disposition de l'abdomen; dans les mâles, cet organe
se compose de sept plaques ventrales presque égales en longueur et d’une plaque sous-anale assez
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. (OI
grande; dans les femelles, il n’y a plus que six plaques ventrales bien distinctes, la septième étant
excessivement petite, et la plaque sous-anale est petite, étroite.
Les écrits des anciens naturalistes et surtout un grand nombre de vieux ouvrages d'agriculture
donnent beaucoup de détails sur les Courtilières; mais plusieurs des faits rapportés sont erronés et
pleins de ce merveilleux qu’on se plait trop souvent à admettre. C’est ainsi que Goedart prête aux
femelles les qualités les plus belles; il dit qu'elles creusent un fossé autour du nid qui renferme
leurs petits, s’y placent en sentinelles, élevant dans les ten ps secs la masse de terre qui les ren-
ferme, afin que la chaleur du soleil ne puisse arriver jusqu’à eux, et qu’elles approvisionnent ce nid
pour la saison d'hiver : prévoyance qui serait bien inutile, car, pendant cette époque, les Courti-
lières, de même que les Grillons, sont dans un état complet d'engourdissement et n’ont plus besoin
de prendre de nourriture. D’autres faits plus ou moins fabuleux sont encore rapportés, nous n'en
parlerons pas et nous nous bornerons à consigner les observations les plus récentes et les mieux
avérées faites principalement sur l'espèce commune; nous copierons presque complétement à ce
sujet ce que dit M. Aug. Brullé dans son Histoire naturelle des Insectes Orthoptères.
Les Courtilières se tiennent de préférence dans les jardins potagers, dans les pépinières, dans
les champs de blé, et passent l’hiver dans un trou pratiqué sous terre, à une profondeur qui varie
selon la qualité du terrain et la rigueur du froid; cette cavité communique avec la surface du sol
par une galerie habituellement verticale, mais qui devient inclinée lorsqu'un obstacle l'empêche de
se continuer en ligne droite. À partir dé la surface, l'insecte se creuse de nouvelles galeries dans
toutes les directions: ces galeries, plus ou moins profondes, suivant l'élévation ou l’ Aaissement de la
température, descendent jusqu’à 0,04 ou 0,206 environ; elles se prolongent ou s'arrêtent suivant
que la nourriture est plus ou moins abondante; plusieurs d'entre elles sont en pente et aboutissent
de différents côtés au trou vertical, qui est situé parfois à 0,55 de profondeur. Cette disposition
permet à la Courtilière, quand elle est poursuivie, de se réfugier plus facilement dans son trou au
moyen d'une de ces galeries. On comprend facilement que de semblables travaux, exécutés par des
Insectes d’une fécondité prodigieuse, causent de très-grands ravages dans les endroits où ils se
trouvent : aussi sont-ils un des ennemis les plus redoutables de l’agriculture. Que les végétaux ser-
vent ou non à la nourriture du Taupe-Grillon, ils n’en sont pas moins entièrement détruits quand
ils se trouvent sur son passage; il passe indistinetement à côté des plantes ou au travers de leurs
racines, et ne les détruit que lorsqu'elles sont tendres et plus faciles à entamer que la terre qui les
environne, et ces habitudes ont fait, pendant longtemps, regarder à tort ces Insectes comme exclusi-
vement herbivores, car ils semblent, au contraire, à peu près exclusivement carnassiers, comme le
démontre péremptoirement l'organisation de leur bouche. Si l'on place du fumier et surtout du fu-
mier de vache auprès d’un terrain qui renferme des Courtilières, elles s'y transportent, bien que
cependant il ne présente pas un brin d'herbe; on a dit qu'elles s'y rendaient pour pondre leurs œuls,
qui, soumis à une Chaleur plus forte, doivent se développer plus promptement; mais il faut remar-
quer qu’elles choisissent pour construire leur nid un terrain d’une certaine dureté, et c’est
donc uniquement, conclut M. Féburier (Nouveau Cours d'Agriculture), dans l'espoir d'y trouver
plus d'Insectes, qu’elles abandonnent leur gite pour se rendre dans le fumier. D'un autre côté, des
observations consignées dans la Revue agricole démontrent que la nourriture des Courtilières se
compose aussi bien de substances végétales que de substances animales, ou du moins que les unes
peuvent suppléer les autres ; des romaines, des dahlias et d'autres plantes sont attaqués à la racine,
et non-seulement endommagés de manière à livrer passage à l'Insecte, mais entamés dans une grande
partie de leur longueur et quelquefois entièrement coupés. Turpin a également donné quelques
remarques à ce sujet; ayant renfermé trois Courtilières dans une boîte, il plaça sur la terre que
renfermait cette boite une feuille de romaine; les Insectes se tinrent cachés pendant le jour; mais, la
boîte ayant été ouverte pendant la nuit, on les trouva hors de terre, mangeant avidement la
feuille ; le même fait se reproduisit deux autres nuits de suite; mais à la quatrième la plus grosse
Courtilière dévora les deux autres qu’elle avait tuées. D'âprès cela, il est donc hors de doute que cet
Insecte se nourrit à la fois et de plantes et de substances animales. Vers le mois d'avril, les Cour-
tilières mâles se transportent à l'entrée de leurs galeries et se font entendre des femelles par une
faible stridulation. L’accouplement a lieu pendant la nuit, et, peu de temps après, la femelle s'oc-
eupe de construire le nid qui doit recevoir ses œufs. Elle choisit pour cela une terre assez ferme
62 HISTOIRE NATURELLE.
pour résister à l’action des pluies ; après avoir tracé une galerie circulaire, elle se creuse une nou-
velle retraite à quelques centimètres de celle-ci, établit son nid au centre de la galerie cireulaire, à
une profondeur variable suivant la saison, et y dépose, vers le milieu ou vers la fin du printemps,
ses œufs dont le nombre s'élève de deux à trois cents, -et dont l'éclosion n’a lieu habituellement
qu'au bout d’un mois. Ses œufs sont allongés, d’un blane jaunâtre luisant; les petits qui en sortent
sont blancs, et ce n’est qu’au printemps suivant qu'ils passent à l’état de nymphe, c’est-à-dire que
les organes du vol ne commencent à se manifester qu'après la quatrième ou peut-être la cinquième
mue. Dès la première mue, suivant Rœsel, les jeunes larves se dispersent; elles font l’essai de leurs
forces et se construisent un nid auquel aboutissent des galeries environnantes; d’après M. Féburier,
les Taupes-Grillons ne seraient en état de se reproduire que dans la troisième année, ce qui indi-
querait chez ces Orthoptères une longévité remarquable. Tous les auteurs sont d'accord pour dire
que la Courtilière a les plus grands soins de ses petits, et qu’elle va pour eux à la recherche de leur
nourriture.
On reconnaît à la couleur de la végétation, qui est jaune et flétrie, les lieux infectés par les Cour-
tilières; la terre qu’elles retirent de leurs galeries est amoncelée au-dessus de l'ouverture principale
de leur retraite, et forme de petits monticules comparables en miniature à ceux de la Taupe. Parmi
les moyens proposés pour détruire ces Insectes, il n’en est pas un seul dont l’exécution soit possible sur
une grande étendue de terrain et aucun qui ne soit suffisamment bon; ces moyens consistent soit à
rechercher les nids pour y verser de l’eau, de l'huile ou quelque autre liquide, soit à placer en
terre des vases remplis d’eau dans lesquels les Courtilières viennent se noyer. ° |
Les Courtilières se trouvent sur toute la surface du globe; mais on a, pendant longtemps, très-
mal distingué les espèces, qui sont en petit nombre, car Serville n’en décrit que huit, et qui se re-
connaissent surtout aux dentelures de leurs jambes de devant et à la forme du trochanter de cette
même paire de pattes. La Courrinière ou TauPe-Grizron proprement dit (Gryllus gryllotalpa, Linné;
Gryllotalpa vulgaris, Latr.), d'un roux foncé comme ses congénères, ayant quatre dentelures aux
jambes antérieures, semble exclusivement propre à l'Europe; l'Amérique, tant méridionale (G. hexa-
dactyla, Perty, oxydactyla, Perty, didactyla, Latr., et parvipennis, Serv.) que septentrionale (G.
brevipennis, Serv.), en fournit plusieurs, et le continent africain en nourrit une espèce qui se re-
trouve aussi dans les îles et sur le continent de l'Asie (G. Africana, Palis.); enfin la Nouvelle-Hollande
en à une en propre (G. nilidula, Serv.). Nous donnons (fig. 10, p. 7) la figure d'une espèce remar-
quable, le G. à quatre doigts.
Enfin la troisième tribu, ou celle des Tripacryzipes, ne comprend qu’un très-petit nombre d'es-
pèces propres au midi de l'Europe et au sud de l'Amérique, avant pour caractères principaux :
jambes antérieures élargies, plus ou moins digitées; pattes postérieures dépourvues de tarses ;
jambes terminées par des appendices mobiles, digitées, et dont le type est le genre :
TRIDACTYLE (Tridactylus, Olivier) (spas, trois; dxzrukos doigt). — Tête arrondie; antennes
courtes, de dix articles, écartées, filiformes; yeux assez grands; mandibules dentées à l'extrémité ;
corselet plus long que large; élytres courtes, coriaces; ailes étroites, linéaires, plus lonques que les
élytres ; pattes d'inégale longueur, propres à fouir ; tarses antérieur et intermédiaire de trois arti-
cles, postérieurs nuls et remplacés par de simples appendices. Les Tridaetyles sont de très-petits Or-
thoptères; leurs pattes antérieures, quoique propres à fouir la terre, sont assez différentes de celles
des Courtilières; mais ces Insectes, se creusant des galeries souterraines au bord des eaux, et n'ayant
à fouiller que dans un sable fin, n'avaient pas besoin que leurs pattes de devant, qui servent de bê-
ches, fussent d’une conformation aussi compliquées que celles des Taupes-Grillons, destinées à tra-
vailler une terre beaucoup plus compacte. M. Foudras a donné des détails sur l'espèce de Tridaetyle
propre au midi de la France. C'est toujours au bord des rivières, des lacs, ete., qu'habite cet Insecte,
pourvu qu’il y trouve un sable très-fin, et il y pullule en grande quantité, le sillonne dans tous les
sens el s’y pratique une retraite semblable à celle des Courtilières. Il semble que les Tridactyles
creusent pour trouver leur nourriture, qui paraît, au premier abord, ne consister qu'en grains de
sable, mais qui renferme aussi de petits Infusoires et des débris de végétaux qu'ils dévorent proba-
blement. Dès les premiers jours du printemps, on rencontre un grand nombre d'individus dans les
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Fig. 2. — Grillacris à têle rousse.
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Fig. 5. — Sauterelle verte
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— Anostostome de la Nouvelle-lollande
ORTHOPTERES La
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. 63
endroits exposés au soleil, contre l'habitude des Courtilières, qui sont nocturnes, et ces individus
sont bien plus souvent en état de larve ou de nymphe qu'à l'état parfait. On les voit de routes parts
s'élever avec autant de vigueur que d’agilité, et même très-haut pour leur taille. Les femelles pon-
dent au fond de leur trou une quarantaine d'œufs arrondis, d’un jaune transparent; c’est toujours
la tête la première que ces Insectes entrent dans leur nid, dont ils ne sortent qu'à reculons. Ce
genre, ainsi que celui des RHIPIPTÉRYX, Newman, le seul qui entre dans la même tribu, ef qui
en diffère principalement par ses antennes un peu plus lonques et composées de dix articles cylin-
driques. un jeu comprimés, et par les tarses antérieur et intermédiaire composés de deux articles :
les postérieurseemplacés par cinq appendices étroits (espèces : Rhipipteryx marginatus, Newm.,
Fulley, Serv., du Brésil, et atra, Serv.), diffèrent des autres Grilloniens par plusieurs caractères
tranchés, tels que les pattes intermédiaires très-grandes et un faciès particulier. Leur petite taille et
leur extrême agilité sont des traits de ressemblance qui les rapprochent de certains Acridiens, sur-
tout des petites espèces de Tetriæ. Mais il n’est pas douteux que, par leur organisation et par leurs
mœurs, ils n’appartiennent aux Grilloniens, et que leur véritable place sériale ne soit auprès des
Courtilières. — On n'y place que deux espèces : le type est le TriIDACIYLE VARIÉ où PANACHÉ (Tridac-
tylus variegatus, Latr.), à peine long de 0",01, d’un noir luisant, mêlé de brun fauve et offrant
quelques taches d'un blanc jaunâtre : habite le midi de la France et les parties méridionales de
lltalie et de l'Espagne; l'autre espèce, propre à la Guinée, est le T°. paradoxus. Latr.
\
CINQUIÈME FAMILLE. — LOCUSTIENS.
*
Le genre SaurereLLE, où Locusta, forme aujourd'hui la famille particulière des Locustiens, ayant
pour caractères : corps plus ou moins allongé; tête assez forte, allongée, ovalaire; antennes lon-
ques, capillaires, sétacées, multiarticulées, glabres: yeux ronds ou oblongs; ocelles peu distincts, au
nombre de trois ou nuls; labre très grand, corné, formé de deux pièces; mandibules fortes, très-
robustes, dentées à l'extrémité; mâchotres grèles, acérées, à galette allongée, un peu trigone ; lèvre
quadrifide; palpes allongés : maxillares de cinq articles plus longs que les labiaux, qui n’en ont que
trois; corselet variable pour la forme et la grundeur, souvent tétragone ; élytres souvent grandes,
allongées, ressemblant parfois à des feuilles, rarement rudimentaires ou nulles; ailes ordinaire-
ment amples, repliées longitudinalement en éventail, réticulées, de la longueur des élytres, rare-
ment nulles; pas d'écusson; pattes : antérieures etintermédiaires plus ou moins longues et épineuses;
postérieures très-longues, conformées pour le saut, à jambes munies d'épines; tarses invariablement
de quatre articles : les trois premiers aplatis, triangulaires, garnis de poils en dessous, et le der-
nier long, cylindrique, glabre, armé de deux crochets et d'une pelote dans l'entre-deux; abdomen
grand, allongé, de neuf articles, non compris le segment anal, et munis, vers l'extrémité, d'un ap-
pendice sétacé, flexible, inarticulé; oviscapte toujours saillant, très-long, en forme d'épée ou de sabre.
De nombreuses observations anatomiques ont été données, principalement par M. Léon Dufour,
sur les Locustiens et en particulier sur les Locusta viridissima el ephippigera. L'appareil digestif
est très-complexe; le tube intestinal a une longueur qui excède d'environ une fois celle du corps;
l’œsophage se renfle en un jabot oblong; le gésier, qui le suit, est d’une texture très-résistante e
garni à l'intérieur de six rangées longitudinales de pièces triturantes; le ventricule chilifique, qui
a l'apparence d’un vaste estomac, se continue en un tube grêle, terminé par un bourrelet, autour
duquel viennent s’insérer les canaux biliaires, qui sont grêles, en nombre considérable; l'intestin
proprement dit est droit et se renfle à son extrémité en un rectum ovoïde. Les glandes salivaires
sont grandes et formées de beaucoup d'utricules agglomérées par petits paquets. L'appareil respira-
toire a un grand développement ; les stigmates se voient sur les côtés du corselet et de l'abdomen ;
les trachées, presque toutes tubuleuses, sont en nombre extrèmement considérable et ont une lé-
gère coloration jaune roussâtre. Le vaisseau dorsal est garni, dans sa partie abdominale, de fibres
musculaires qui le maintiennent solidement fixé à la paroi supérieure. Les organes reproducteurs
ont un développement considérable; ceux des mâles sont volumineux, réniformes; les ovaires des
64 HISTOIRE NATURELLE.
femelles ont l'apparence de deux faisceaux conoïdes, occupant une grande portion de la cavité ab-
dominale, et composés d’une quarantaine de gaines ovigères, multiloculaires. Le système nerveux
est très-peu centralisé, et celui de la vie organique est très-distinet; le cerveau et les ganglions céré-
braux sont d un médiocre volume ; le ganglion Sous-æsophagien et les centres nerveux thoraciques
sont presque également espacés, enfin les ganglions abdominaux sont très-petits.
Fig. 69. — Copiphore cornue. (Femelle.)
Linné considérait les Sauterelles comme une simple division de son grand genre Gryllus; mais il
appliqua spécialement à tous les représentants de cette division le nom particulier de Tettigomra.
Peu de temps après, Geoffroy en forma un genre particulier, celui des Saureneces, en latin Locusta,
dénomination empruntée aux anciens, mais sous laquelle étaient confondues autrefois les espèces
beaucoup plus nombreuses appartenant à un autre type de l’ordre des Orthoptères, celui des Acri-
diens, qui renferme surtout ces Insectes voyageurs si nombreux qui dévastent parfois toute une
contrée, et que le vulgaire nomme souvent aussi Sauterelles. Quoi qu'il en soit, le nom imposé par
Geoffroy aux véritables Sauterelles fut généralement admis; De Géer, Fabricius, Olivier, de Lamarck,
Latreille, l’adoptèrent sans restriction dans leurs outrages : Latreille, dans le Genera Crustaceorum
et Insectorum, sans en modifier les limites, en fit sa famille des Locustariæ, et commenca à y indi-
quer des divisions appuyées sur quelques caractères tirés de la proportion des élytres et de la forme
du corselet, qui furent l’origine des genres que les entomologistes établirent plus tard aux dépens des
Locusta, et lui-même, dans le Règne animal, fonda le genre Ephippiger pour les espèces dont les
organes du vol sont rudimentaires et le corselet en forme de selle. Toussaint Charpentier créa le
genre Barbista avec plusieurs espèces voisines des Éphippigers; Thunberg, celui des Phyllophora,
voisin des Sauterelles proprement dites, ete.; mais ce fut surtout Audinet Serville qui entreprit
la subdivision de l'ancien genre Locusta, car, dans sa Revue méthodique des Orthoptères, il y
admit vingt-huit coupes génériques et il en porta le nombre à quarante-quatre dans son Histoire
naturelle des Orthoptères, et plusieurs de ces genres furent dus à MM. Brullé, Burmeister, Fischer
de Waldheim, Gray, Guérin-Méneville, etc. MM. Brullé et E. Blanchard appliquèrent à ces Insectes
le nom de Locustiens, ils cherchèrent à y restreindre le nombre des genres, et le dernier entomolo-
giste que nous venons de nommer lés subdivisa en cinq tribus, celles des Prochilites, Ptérochro-
aites, Locustites, Bradyporites et Gryllacrites, sur lesquelles nous reviendrons en exposant le ta- :
bleau des genres.
Les Locustiens forment l’un des groupes entomologiques les plus naturels et les plus faciles à
distinguer; l’inégalité de leurs pattes et le développement des membres postérieurs qui les rendent
propres au saut les différencient facilement des Orthoptères coureurs; la longueur et la ténuité de
leurs antennes les séparent aisément des Acridiens, chez qui ces organes ont toujours une grande
brièveté et une épaisseur assez considérable; ce n’est donc qu'avec les Grylliens qu’ils ont plus de
rapport; mais, comme on peut le voir dans la caractéristique générale de ces deux familles, ils se
distinguent les uns des autres par des caractères assez tranchés. |
Ces Orthoptères sont essentiellement sauteurs; de là le nom de Sauterelles, qui leur est appliqué
en général. La grande disproportion de leurs pattes postérieures avec celles de devant et du milieu
leur permet assez difficilement de marcher : ce n'est donc que par des sauts réitérés qu’ils peuvent
avancer, el dans cet acte ils s’aident de leurs ailes, qui sont très-développées ; les cuisses des pattes
ANNELES. —_ ORTIIOITÈRES. 65
de derrière sont renflées à la base, et, renfermant des muscles très-puissants, communiquent aussi
leur action aux jambes, qui sont très-longues et qui, s’appuyant seulement sur les épines par la con-
traction des muscles des cuisses, donnent aux pattes un mouvement élastique qui porte le corps en
l'air. Tous, comme nous l'avons dit, ont des pattes plus ou moins garnies d’épines, un corps allongé
quoique assez épais, des antennes longues et d’une extrême ténuité, et, ce que l'on doit principale-
ment remarquer, les femelles sont pourvues d'une tarière un peu recourbée, que l’on a comparée à
un sabre, qui consiste en deux lames cornées, rapprochées l’une de l’autre pendant le repos, s'é-
cartant lors de l'émission des œufs, et cette tarière sert à entamer la terre dans laquelle la femelle
doit déposer ses œufs. Les mâles seuls ont la faculté de produire un chant particulier ou plutôt une
sorte de stridulation, qui paraît avoir pour but d'appeler les femelles. Ce chant est connu de tout le
monde, et c'est même à cause de lui que le nom de Cigale est vulgairement appliqué à notre grande
Sauterelle verte : il est même très-probable que c’est cette même espèce que la Fontaine a eu en vue
en la mettant en scène avec la Fourmi, et en lui appliquant populairement le nom de Cigale : du
moins, comme le fait remarquer Serville, est-il avéré que toutes les figures qui ornent les anciennes
éditions des fables de cet immortel auteur représentent un Locustien et non une de ces véritables
Cigales si communes dans nos départements méridionaux, qu'on ne trouve pas à Paris et qui se rap-
porte à l'ordre des Hémiptères. C'est au moyen de la base de leurs élytres que les Locustiens mâles
font entendre leur stridulation ; il existe à cet endroit une membrane transparente à laquelle on a
donné le nom de miroir : ce miroir est traversé et entouré par quelques nervures très-saillantes et
très-dures, de manière que l'Insecte, venant à frotter ses élytres l’une contre l’autre, produit un
son aigu qui varie un peu suivant les espèces, mais qui est toujours assez fort pour être perçu de
loin. Au moindre bruit, au moindre mouvement, cette stridulation cesse, et l’Insecte ne commence
à se faire entendre de nouveau que quand il croit le danger passé. D’après ce que nous venons de
dire, on voit que le procédé employé par ces Orthoptères pour produire la stridulation diffère de
celui usité par les Acridiens; en effet, chez ces derniers il est produit par le frottement des pattes
postérieures contre les élytres. Cependant il paraîtrait que quelques femelles de Locutiens pourraient
produire une stridulation à peu près semblable à celle des Acridiens. Une dernière particularité que
nous devons signaler, parce qu'elle a servi à la distinction des genres, se trouve dans le sternum :
cet organe est composé de trois pièces distinctes qui ont une forme foliacée, sont ordinairement
échancrées au milieu et offrent souvent deux épines.
Les habitudes des Locustiens sont à peu près les mêmes que celles des autres Orthoptères herbi-
vores. Ils vivent dans les prairies, dans les champs, quelquefois sur les arbres, dévorant les feuilles
et les tiges des végétaux herbacés; ils doivent causer ainsi des ravages assez considérables ; mais,
comme dans tous les pays ils sont peu nombreux, comparativement aux Acridiens qui vivent de la
même manière, leurs ravages ont presque toujours passé inapercus. On en trouve dans toutes les
parties du globe; ils sont surtout abondants dans l'Amérique du Sud, qui en renferme près des
trois quarts des espèces connues, et, au contraire, l'Europe en renferme un nombre excessivement
restreint. Ces dernières se montrent à l'état parfait dès le mois de juillet et ne disparaissent qu'aux.
premiers froids. Vers la fin de l'été et pendant toute l'automne, surtout pendant les soirées les plus
chaudes, leur chant se fait entendre dans les campagnes, à une assez grande distance: et les femelles,
ainsi appelées par les mâles, ne tardent pas à s'accoupler. Bientôt après, elles cherchent un endroit
convenable pour déposer leurs œufs; ce qu'elles font au moyen de leur tarière dans l'intérieur du
sol. Les œufs passent l’hiver, et les jeunes larves n’en sortent qu’au printemps suivant. Dès leur
naissance, ces petites larves ressemblent tellement à l'Insecte parfait, sauf le manque d'ailes, que
déjà on peut reconnaître l'espèce à laquelle elles appartiennent. Ces larves grossissent et subissent
successivement trois mues; à la quatrième mue, ellés passent à l’état de nymphes, et les rudiments
d'ailes apparaissent, et enfin, après une cinquième mue, les élytres et les ailes, dépouillées de leurs
membranes, s'étendent, et l’Insecte, devenu apte à se reproduire, est arrivé au terme de son dévelop-
pement. Les Locustiens émigrent dans certaines circonstances, comme le font les Acridiens; mais,
d’après leur rareté comparative, ces émigrations semblent peu considérables; cependant il paraît
que, dans les localités ravagées par les Orthoptères sauteurs, les Locustiens se réunissent assez ha-
bituellement aux Acridiens pour émigrer vers des contrées où la végétation n’a pas encore été
détruite. : Ê
A: 9
66 HISTOIRE NATURELLE.
Les Locustiens peuvent être subdivisés de la manière suivante en tribus et en genres; mais leur
arrangement sérial est difficile à établir.
La première tribu, celle des Procmiures, ne renferme que le genre PROCHILUS, Brullé, qui lui-
même ne comprend qu'une espèce unique, le Prochilus Australis, de la Nouvelle-Hollande, surtout
remarquable par son corps grêle, ayant l'aspect de celui des Phasmes; sa tête un peu avancée en
museau; ses antennes pubescentes ; son labre très-grand ; ses ailes très-étroites, et ses cuisses exté-
rieures plus épaisses à l'extrémité qu'à La base.
La deuxième tribu, celle des GriLLaciTEs, caractérisée par ses antennes insérées au sommet du
front et par ses palpes matillaires très-grands, qui a assez de ressemblance avec les Grylloniens
et ne renferme que quatre genres, ceux des : 1° GRILLACRIS, Serv., à antennes trois fois au moins
plus longues que le corps; à sternum mutique; élytres en toit très-écrasé; pattes robustes; une dizaine
d'espèces propres à l'ile de Java, et dont le G. maculicollis, Serv., ou Gryllus signifera, Stoll, peut
être pris pour type. 2° LISTROSCELIS, Serv., à antennes un peu moins longues; Sternum égulement
mutique; élytres en toit aigu; pattes gréles, avec les épines des jambes internes et intermédiaires
‘très-longues, arquées, aiguës et ressemblant à un double râteau; un petit nombre d'espèces propres
aux Molluques et au Brésil, type le, Cerborodon viridis, Perty, de ce dernier pays. 3° RIAT IHIDO-
PHORUS, Serv., à quatre premières cuisses armées au bout de deux épines emboîtant la jambe; une
espèce de Java (R. picea). 4° ANOSTOSTOMA, Gray, à tête moyenne; mandibules très-grandes, ar-
quées, dentées au bout, sternwmn bidenté; pas d'ailes, au moins dans les espèces connues, en petit
ngmbre, propres à la Nouvelle-Hollande, et dont le type est le Locusta monstruosa, Herbst.
La troisième tribu, celle des PrérocunozirTrs, caractérisée par sa féte ayant son sommet conique,
“et par ses antennes insérées sur le front, ne renferme qu’un nombre assez restreint d'espèces,
toutes étrangères à l'Europe, et qui, pour Serville, constituent à peu près autant de genres que
d’espêces. Les groupes génériques principaux sont ceux des : 4° PTÉROCHROZA, Serv., à antennes
très-épaisses; prosternum étroit, rétréci antérieurement, tantôt bidenté dans les Ptérochrozes vraies,
et mutique dans les Typophyllum, Serv., qui, en outre, ont les élytres arrondies au lieu d’être
appointées à l'extrémité; une dizaine d'espèces de l'Amérique méridionale, types Gryllus ocellatus,
Linné, et ne aurantifolia, Serv., Stoll., et Typophyllum erosum, Serv., Stoll. 2° PLATY-
PHYLLUM, Serv., à téte tuberculée ; à antennes gréles; sternum médiocrement large; prosternum
bidenté; élytres élargies ; quelques espèces américaines; type le G. coriaceus, Linné, de la Martini-
que. 5° ACANTHODIS, Serv., à tête tuberculée; antennes gréles, une fois plus longues que le corps;
sternum large; prosternum bidenté; une dizaine d'espèces de l'Amérique du Sud et des Indes orien-
tales, dont le type est le Gryllus coronatus, Linné, de Cayenne. 4° PSEUDOPHYLLUM, Serv., à an-
tennes assez gréles; à corselet court, arqué, prolongé et en pointe en arrière; sternum très-large;
prosternum multique; une douzaine d'espèces de Java et des Indes orientales, dont la principale est
le G. nertifolium, Stoll. — Des genres établis par Serville ne renfermant qu'un assez petit nombre
d'espèces, pour la plupart propres à l'Amérique méridionale, dont GREurs unes sont cependant
asiatiques, sont ceux des TaisoscéLie, Méroncinie, APrION, etc.
La quatrième tribu, celle des Locusrires, ayant pour caractères : antennes insérées au sommet du
front; palpes peu allongés, est beaucoup plus étendue que les précédentes. Cette tribu est répandue
sur tout le globe, comprend la plupart de nos espèces européennes, et renferme de nombreuses es-
pèces et beaucoup de genres que l'on pourrait probablement restreindre considérablement; aussi
n'en indiquerons- nous que treize, avec M. E. Blanchard, et chercherons-nous à y rattacher diverses
coupes génériques de Serville.
1° MECOPODA, Sérv., à sternum étroit, biépineux; élytres étroites, une fois plus longues que le
corps; une espèce des Indes orientales (M. virens, Brullé, ou Gryllus ferrugineus, Stoll), à côté de
laquelle on doit ranger le Polyancistrus serrulatus de Saint-Domingue, placé dans le genre Locusta
par Palisot Bauvois.
. e ; « Le
2° PHYLLOPHORA, Thunberg, à sternum mutique; corselet, prolongé en pointe postérieurement
couvrant une parte du corps; élytres très-larges, sans miroir dans les mâles; une seule espèce
*
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. 67
(P. speciosa) très-remarquable par son faciès, qui se trouve aux Molluques et dans les îles de
l'Océanie.
3° ASPINOTUS, Brullé, à prosternum ayant deux épines très-rapprochées; mésosternum ayant
de chaque côté une épine surmontée de deux feuillets; corselet couvrant tout le corps. Une seule
“espèce (4. spinosus), de Madagascar. À côté de ce genre se rangent les HYPEROMALA, Serv. (H.
virescens, Boisduval), qui s'en distinguent surtout par son prosternum mulique, au lieu d'être bi-
denté, et par ses antennes très-écartées entre elles à leur insertion, au lieu d’être rapprochées.
4° PHANEROPTERA, Serv., à antennes gréles; sternum mutique, très-creusé au milieu; corselet
nullement prolongé; ailes plus longues que les élytres; offrant la même solidité que ces dernières,
dans la partie où elles ne sont pas recouvertes, très-membraneuses et diaphanes dansle reste de leur
étendue. Les Phanéroptères sont des Locustiens d’un vert tendre; assez nombreux en espèces, habi-
tant principalement l'Amérique méridionale et l'Europe, dont quelques-unes proviennent des Indes
orientales ainsi que de l'Australie, et dont une est africaine. Il est possible de former dans ce groupe
quelques petites divisions secondaires que divers auteurs regardent comme des genres et auxquelles
ils ont donné les noms de Srerronon (type G. citrifolium, Lin.), Payccoprera (G. laurifolium, Lin.),
Pycxoparpa (Locusta bicordata, Encyel.), Lerroneres (L. ornalipennis, Serv.), AncyrEecua (À. lunu-
_ digera, Serv.), Puaneroprera (P. Dalmatica, Serv., de Dalmatie, L. falcata, Charp., du midi de la
France, L. lilifolia, Fabr., d'Italie, P. margineguttata, Sexv., d'Italie, ete.); Ernippiryrua (P. ino-
cata et xebrata, Serv.). : toutes ces divisions créées par Serville et peut-être celle des GymNocera,
Brullé (G. Lefeburei). à
Fig. 70. — Phanéroptère zébrée.
5° SCAPHURA, Serv., à antennes ayant leurs premiers articles très-épais, souvent velues; ster-
num mutique; ailes dépassant les élytres; deux espèces.(S. ferruginea, Perty, et Vigorsii) propres
à l'Amérique méridionale.
6° XIPHID'ON, Serv., à sternum mutique; ailes dépassant un peu les élytres; cuisses mutiques en
dessous; ayant pour type la Locusta fusca, Fabr., petite espèce d'Allemagne, de France et parfois
même des environs de Paris.
7° COPIPHORA, Serv., surtout caractérisé par sa fête présentant un prolongement conique. Deux
espèces américaines, dont le type est la L. cornuta, de Géer.
8° CONOCEPHALUS, Thunb., à front avancé en pointe conique entre les antennes; à sternum étroit,
bidenté. Une dizaine d'espèces de l'Amérique, des Indes orientales, de Madagascar, et dont une (Lo-
custa tuberculata, Rossi), du midi de l'Europe, a été prise auprès de Grenoble. On doit en rappro-
cher, sinon y réunir, les Pseunruyncuus, Serv., qui renferment quelques espèces de Java.
9° SAUTERELLE, Locusta, Geoffroy, Linné, Serv., ayant pour caractères principaux : front tuber-
culé entre les antennes; sternum mutique; élytres plus longues que les ailes. Ce genre, qui, comme
nous l'avons dit dans nos généralités des Locustiens, renfermait originairement toutes les espèces de
Ja famille, ne comprend plus aujourd’hui, selon Serville, que quatre espèces, deux européennes : la
SAUTERELLE VERTE, Locusta viridissima, Fabr., longue d'environ 0,03, non compris la tarière, gé-
néralement d’un vert pâle, avec une ligne longitudinale brune sur l'abdomen, et la tarière longue,
verte et brune au bout; très-commune en France et dans nos environs, dans les champs et les prai-
68 HISTOIRE NATURELLE.
ries, et S. ne Gavernie, L. Gaverniensis, Rambur, des Pyrénées; une des {ndes orientales, Hexa-
canthus unicolor, Serv., et une de la Nouvelle-Hollande, L. vigentissima, Serv.
Nous en rapprocherons, provisoirement au moins, un certain nombre de genres créés par Serville,
et qui, n'étant pas suffisamment connus, peuvent, sans grave inconvénient, n'être pas étudiés iso-
lément; tels sont les Exocepnara, une espèce (L. bisulca, Encvcl.), de Cayenne; Orcurcimum, trois à
espèces du nord de l'Amérique; Acræcra, une espèce (4. punctata, Serv.), du Brésil; PoLvancisrns,
une espèce de Saint-Domingue (L. serrulata, Palis.-Bauv.), ete. Peut-être même aurions-nous dû
y comprendre plusieurs groupes que nous avons déjà fait connaître.
Fig. 71. — Dectique verrucivore.
10° DECTICUS, Serv., à tête large, sans aucune éninence; prosternum mutique; élytres un peu
plus longues que les ailes, avec un large miroir dans les mâles. Les Dectiques, dont on décrit une
douzaine d'espèces, sont tous européens; ils sont de taille moyenne, offrent, en général, des teintes
grises mélangées et une tête très-large; tel est, entre autres, le Decrique verrucivore (L. verrucivora,
Linné), dont les élytres sont roussâtres, avec trois séries longitudinales de taches brunes; la tête
rosée, avec son sommet verdâtre, et les pattes également d'un rose tendre pendant la vie, car, après
la mort, ces couleurs perdent toute leur vivacité; il n’est pas rare auprès de Paris et se trouve,
comme ses congénères, à la fin de l'été et pendant l'automne, surtout dans les prairies-un peu
humides.
On doit en rapprocher les Prerozeris, Rambur, caractérisés par leurs ailes nulles ou oblitérées,
qui comprennent un petit nombre d'espèces européennes, dont la Locusta aptera, Fabr., commune
dans nos environs, peut être prise pour type; Tuvrronorus, Serv., deux espèces, une du cap de
Bonne-Espérance et l’autre d'Europe, le Pterolepis Corsicus, Rambur, etc.
11° MECONEMA, Serv., à tête ayant une épine entre les antennes; prosternum mutique; élytres
étroites, sans miroir dans les mûles; qui ne comprend qu'une seule espèce : la SAUTERELLE VARIÉE
(Locusta vuria, Linné); petite, d'un vert jaunâtre; commune auprès de Paris et dans presque toute
l'Europe.
12° ACRIPEZA, Guérin-Méneville; à téte sans aucune éminence; sternum mutique; élytres et ailes
longues dans les mâles, avec un miroir; élytres courtes, larges, bombées, enveloppant l'abdomen-
dans les femelles. Ce genre singulier ne comprend qu’une seule espèce (4. reticulata), assez com-
mune en Tasmanie, dont les deux-sexes doivent avoir des mœurs très-différentes, puisque les mâles
peuvent voler et que les femelles ne peuvent le faire; ce qui rappelle ce qui a licu chez les Lampyres
et les Driles parmi les Coléoptères.
13° BARBITISTES, Charp., à téle un peu prolongée en pointe; sternum mutique;. ailes rudimen-
taires dans les deux sexes. On ne connaît que peu d'espèces de ce genre, qui sont toujours de pe-
tite taille et que l'on réunit parfois aux Ephippigera : ce sont les B. denticauda, Serv., de Hongrie,
de Suisse, des Alpes et des Pyrénées; L. serricauda, Fabr., de Grèce et d'Italie; L. punctatissima,
Bose, du midi de l'Europe, mais qu'on a pris à Paris, et Pyrenea, Rambur, de Bagnères et de
Sardaigne.
La cinquième tribu, celle des Branyronires de M. Blanchard, à laquelle nous pourrions, à plus
juste titre, donner la dénomination. d’Épnippiérires, qui rappellerait le genre le plus ancien et le
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Fig. 2. — Rrémobie de Jamin.
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ORTHOPEERES:
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. 69
mieux connu qui y entre, ne renferme qu'un petit nombre d'espèces répandues presque partout, et
ayant pour caractères communs : antennes insérées au milieu du front, sous les yeux. On y distin-
gue surtout cinq genres particuliers dont le principal est celui des :
EPHIPPIGERA, Latreille, ayant le corselet en forme de selle; pas d'élytres; les ailes rudimentaires
se présentant sous forme d’écailles. Les Éphippigères sont des Locustiens très-singuliers, surtout par
le peu de développement de leurs organes du vol; chez eux les élytres n’existent plus, et les ailes
sont réduites à de simples écailles voutées qui, frottant l’une contre l’autre, peuvent produire, aussi
bien dans les femelles que dans les mâles, contrairement à ce qui a lieu dans les autres Locustiens,
une stridulation assez forte. On n’en connaît qu'un nombre assez restreint d'espèces, qui habitent
presque exclusivement les parties méridionales de PEurope. Le type est l'ÉvuipriGère DE LA VIGxE
(Ephippigera vitium, Serv.), verdâtre, avec quatre lignes brunätres sur la tête, le corselet rugueux,
et qui, comme l'indique son nom, se trouve surtout dans les vignes.
Les autres genres de la même tribu sont ceux des : 1° HÉTRODES, Fischer de Valdheim; à corps
épais; corselet très-épineux; élytres et ailes nulles dans les deux sexes. Quelques espèces africaines
avec l’une desquelles Serville forme sa division des Eugaster; 2° BRADYPORA, Charp., à corselet
large, plan; él ytres très-pelites dans les mâles, nulles dans les femelles; pattes épaisses ; cuisses
postérieures à peine renflées. Ce groupe, peu nombreux et dont le B. dasypus, Illiger, commun
dans tout l'Orient, est le type, est peu agile et court avec difficulté, par suite de la disposition de
ses membres; 3° MEGALODON, Brullé, à mandibules énormes; thorax large; prosternum et méso-
sternim munis l'un et l'autre de deux longues épines; élytres aussi grandes que l'abdomen; ce genre
des plus remarquables, et propre aux Indes orientales, ne renferme que le M. ensifer, Brullé; et
4° SAGA, Charp., à corps éluncé; prosternum bidenté; élytres étroites et rudimentaires; pattes lon-
ques; cuisses très-peu renflées. Ces Locustiens, quoique ressemblant un peu plus aux vraies Saute-
relles que les groupes précédents, ne peuvent cependant sauter que difficilement; on n’en connaît
que trois espèces : le Gryllus azureus, Stoll, du cap de Bonne-Espérance; la Saga Natoliæ, Serv., des
-environs de Smyrne, ct S. serrata, Charp. :
SIXIÈME FAMILLE. — ACRIDIENS.
Le genre Criquer ou Acridium, Linné, comprenant ces Qrthoptères qui portent le nom vulgaire
de Sauterelles et qui sont si nuisibles parfois pour l’agriculture, ayant été partagé en un assez grand
nombre de coupes génériques; est devenu pour les entomologistes modernes une famille particulière
portant les dénominations d'Acridiens ou d’Acridites et ayant pour caractères distinetifs : corps
assez épais; tête ordinairement forte, élevée ou pyramidale, à face antérieure verticale et offrant
souvent quatre carènes longitudinales; antennes constamment plus courtes que le corps, composées
d'articles parfois peu distincts, filiformes ou sétacés; yeux latéraux, arrondis ou oblonds; ocelles
plus ou moins distincts, au nombre de trois, disposés en triangle; labre grand, souvent échancré
au bout; mandibules fortes, mulhidentées; lèvre souvent bifide; palpes courts, filiformes : maxillaires
de cinq articles : labiaux de trois; corselet variable pour la forme et la grandeur, à disque plan et
côtés rabattus; élytres souvent de la même longueur que l'abdomen, rabattues en toit aigu de chaque
côté du corps, parfois rudimentaires ou nulles; ailes habituellement aussi grandes que les élytres,
pouvant ne pas exister ou n'être qu'à l'état de vestiges; pas d'écusson; pattes antérieures et inter -
médiaires courtes, à cuisses simples, peu. épaisses, rarement dilatées, à jambes souvent épineuses
en dessous : postérieures robustes, à cuisses mutiques, plus ou moins renflées, à jambes habituelle- .
ment cylindriques, terminées par des épines fortes, mobiles; tarses de trois articles : le terminal
avec deux crochets au bout et souvent avec une pelotte en dessous; abdomen grand, épais, comprimé,
composé de sept segments dans les femelles et de huit dans les mâles; pas d'oviscapte ou de tarière
dans les femelles : cet organe étant remplacé par quatre pièces terminales anguleuses ou coniques.
L'anatomie de ces Orthoptères, commencée par les anciens naturalistes, a surtout été donnée avec
soin par M. Léon Dufour, principalement en ce qui concerne le Criquet ordinaire. Is ont un canal
70 HISTOIRE NATURELLE.
intestinal droit, n’excédant pas la longueur de leur corps; offrant un œsophage peu dilaté et ensuite
un jabot de forme conoïde, terminé par une valvule pylorique, qui le sépare du ventricule chylifi-
que, ce dernier suivi immédiatement par l'intestin. Les vaisseaux biliaires sont nombreux, simples,
implantés par un bout autour du bourrelet terminant le ventricule chylifique et flottant librement
par l’autre bout. Leur appareil respiratoire très-développé et consistant en vaisseaux aériens ou tra-
chées, très-ramifiés, les rend assez légers pour parcourir de vastes espaces sans tomber à terre; il ya
dix-huit stigmates, deux sur le mésothorax, deux sur la peau membraneuse qui attache le corselet
à la poitrine, et quatorze (sept de chaque côté) sur l'abdomen proprement dit. Leurs ovaires sont
réunis en une seule masse de forme ellipsoïde; il faut enlever le tissu adipeux qui en masque la na-
ture pour reconnaître distinctement ces organes accolés les uns aux autres et composés de gaînes
multiloculaires, en nombre assez variable selon les espèces. Comme chez tous les Orthoptères, leur
système nerveux est peu centralisé, les trois ganglions thoraciques sont très-notablement espacés.
le ganglion céphalique est presque divisé en deux hémisphères, et les ganglions abdominaux, au
nombre de cinq, sont assez petits.
La famille des Acridiens, qui termine la section des Sauteurs et l’ordre entier des Orthoptères, est,
comme on a pu le voir, très-distincte des précédentes. Un corps plus épais, des pattes postérieures
plus robustes en général, le plus grand intervalle qui existe entre l'insertion des quatre pattes de
derrière, et qui est dû à la largeur des deux dernières pièces du sternum, servent encore à la carac-
tériser. Ces Insectes sautent plus promptement et plus haut que les Locustiens, au moyen de leurs
fortes pattes postérieures. La cuisse et la jambe, qui sont fléchies à l’articulation qui les joint en-
semble, s'étendent brusquement, et ce mouvement est si vif, que tout le corps, posant alors sur les
tarses et sur les épines des jambes, se trouve élancé très-haut en l'air. Dès lors il fallait une force
considérable pour exécuter un si grand mouvement d'extension, et les pattes ont dû être garnies
de muscles puissants que renferment les cuisses. Mais cette organisation, faisant des Acridiens
des Insectes essentiellement sauteurs, ne les favorise pas sous le rapport de la marche; celle-ci est
pénible, embarrassée et lourde, ce qui est le propre de tous les animaux qui ont les pattes de der-
rière beaucoup plus longues que celles de devant. Les femelles n’ont plus cet oviscapte ou tarière
qui, dans les Grylloniens et les Locustiens, est habituellement très-apparent et très-prolongé; cet
organe est remplacé par quatre pièces terminales qui servent probablement à l’Insecte pour intro-
duire ses œufs dans l’intérieur du sol. Comme nous l'avons dit, les mâles des Grylloniens et des Lo-
custiens ont l'organe de la stridulation placé à la base des élytres; il n’en est plus de même dans les
Acridiens, et le son qu'ils font entendre est produit par le frottement des cuisses postérieures contre
les élytres. L'Orthoptère approche alors la jambe contre la cuisse, ils les tient appliquées l’une à
côté de l’autre; ensuite il donne un mouvement très-prompt à la cuisse, de côté et d'autre, en la
frottant contre l’élytre; ce n’est jamais qu’une cuisse à la fois que J’Insecte frotte contre l'élytre :
tantôt il se sert de la cuisse gauche, tantôt de la droite, jamais des deux à la fois. Mais ce qui pro-
duit l'organe musical des Acridiens et ce qui contribue beaucoup à relever le son que l’Insecte fait
entendre, et à en augmenter la résonnance, c’est une caisse remplie d’air et fermée aux deux bouts
par une membrane, et qui est placée de chaque côté du premier anneau du ventre. « Tous les Acr:-
diens, et sans distinction de sexe, dit Latreille, ont cet organe double. Il est situé presque immédiate-
ment au-dessus des hanches des deux pieds postérieurs, plus en arrière qu’en avant, et sur les côtés
du segment qui unit l'abdomen au thorax, segment qui, dans beaucoup d’Insectes, semble dépen-
dre de cette dernière partie : c’est celui qui a été nommé médian. Une cavité, que l’on prendrait au
premier coup d'œil pour un grand stigmate, de figure presque semilunaire ou demi-ovale, et fermée
un peu au-dessous de son ouverture par une lame transverse ou une sorte de volet, fait reconnaître
de suite la place ou la portion extérieure de ce tambour. Les bords sont en partie relevés, et leur
courbure regarde l'extrémité postérieure du corps, mais en se rapprochant un peu du dos. Âu côté
interne du bord intérieur ou diamétral, presqu’à fleur d'ouverture, est adossée une petite pièce, de
forme presque triangulaire, un peu inégale, de la consistance des téguments ou assez solide, percée
vers son milieu d’un trou, donnant dans une cavité à parois membraneuses, infundibuliforme, et
servant de conduit au fluide aérien. » En outre, ce qui fait que la stridulation est plus ou moins pé-
nétrante, c’est que les élytres présentent des nervures très-saillantes et très-épaisses, et que les pattes
ou côté interne sont munies de dentelures et de carènes très-rudes et très-serrées, qui, venant à pas-
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. 71
ser contre les élytres, produisent un son assez fort; c'est même, selon M. le colonel Goureau, leurs
seuls organes de stridulation. Dans un genre exotique cependant, celui des Pneumora, on trouve
des mâles qui ont également la faculté de faire entendre un chant particulier; mais chez eux les
élytres, étant de très-faible consistance, ne peuvent être soumises à aucun frottement; aussi l'organe
dont nous avons parlé, et qui est rudimentaire dans nos espèces indigènes, est-il disposé pour les
remplacer avantageusement : l'abdomen est vésiculeux et offre intérieurement l’aspect d’un tam-
bour, qui fait retentir davantage le son et le rend plus perçant; ses côtés sont munis de petites pla-
ques de stries élevées, contre lesquelles frottent les pattes, que l’on peut comparer à l’archet d'un
violon. Le chant des Acridiens se fait surtout entendre vers la fin de l’été et pendant les beaux jours
de l'automne; on l'entend presque seul dans les plaines et dans les champs, car ces Insectes sont
si communs, que leur stridulation domine le bruit produit par tous les autres. |:
Les Acridiens sont répandus dans toutes les parties du monde; ils ne sont pas excessivement nom-
breux en espèces, mais très-abondants en individus. Certaines espèces, comme nous allons le dire,
se multiplient quelquefois en si prodigieuse quantité, qu’elles ravagent de vastes champs et rédui-
sent ainsi des campagnes entières à la dernière misère, surtout. dans les parties méridionales du |
globe. Ils attaquent de préférence les Légumineuses, et font parfois beaucoup de tort aux luzernes.
Quelques Insectes de cette famille, propres aux contrées équatoriales, ont de très-grandes dimen-
sions; mais les espèces qui $e rencontrent en Europe, principalement vers le Nord, sont presque
toutes de taille moyenne ou même assez petites. Les Acridiens ne parviennent à leur état parfait que
vers l'automne; au printemps et pendant l'été, on les trouve à l’état de larve ou de nymphe, c’est-
à-dire dépourvues d'ailes ou n’en ayant que des rudiments; mais, à la fin de la belle saison, ils su-
bissent leur dernière mue et deviennent aptes à la reproduction. On les voit alors voler dans les
campagnes, s’élevant ou se posant à terre à des intervalles très-rapprochés. Confondus avec les Sau-
terelles par les anciens auteurs et rangés dans le genre Locusta de Linné, les Insectes qui nous occu-
pent ont formé pour Fabricius le genre spécial des Acridium ou Criquets; plus tard ils constituèrent
une famille distincte que DoeUe (Familles naturelles du Règne animal) partagea en cinq genres
et autant de sous-genres, dont Audinet-Serville, dans sa Revue méthodique des Orthoptères, porta le
nombre à vingt-trois; M. Aug. Brullé (Histoire des Insectes) réduisit ce nombre à onze seulement, à
peu près comme le fit, de son côté, M. E. Blanchard; mais, dans deux ouvrages récents, on admit
plus de coupes génériques : Burmeister (Handburch der Entomologis) en fit connaître dix-huit, et
Audinet-Serville, dans son Histoire naturelle des Orthoptères des Suites à Buffon de l'éditeur Roret,
en décrivit trente.
C’est aux Acridiens que s'appliquent surtout les passages des voyageurs et des historiens, au sujet
des ravages occasionnés, à différentes époques, par les incommensurables bandes de ces Orthoptères
destructeurs. Sans être mieux organisés que les Sauterelles proprement dites, leurs cuisses de der-
rière et principalement leurs ailes plus développées leur permettent d'entreprendre des courses sou-
vent lointaines, dans lesquelles on ne peut douter qu'ils ne soient aidés par l’action du vent. Une
espèce, connue depuis longtemps sous le nom de SaureriLe ou Criquer DE-PassaGe (Acridium migra-
torium), quelques autres espèces qui en sont voisines, et même, dit-on, certains Locust'ens, sont les
auteurs de ces ravages. Quelques espèces multipliées outre mesure, dans certaines contrées d'Orient,
* par suite de circonstances favorables à leur développement, détruisent d’abord la végétation des
pays où elles ont pris naissance, et, n’y trouvant plus de nourriture, se répandent alors dans d’au-
tres pays, jusqu’à ce que les vents qui les poussent dans la mer en délivrent l'espèce humaine : ce
sont essentiellement les Sauterelles voyageuses; d'autres, comme celles de la France méridionale,
sont constamment sédentaires dans le même lieu, et deviennent plus ou moins abondantes suivant
les variations du chaud ou du froid, de la sécheresse ou de l'humidité, et qui aident ou empêchent
leur propagation. Aucune partie de l’histoire de l’entomologie n’offre, comme celle des Acridiens,
de détails aussi effrayants des maux qu'ils causent à l'espèce humaine; leur présence dans une con-
trée fertile la change tout à coup en un désert aride; leur passage réduit souvent des régions en-
tières à la disette la plus affreuse; leur mort même n’est pas un bienfait, car leurs corps, amonce-
lés et échauffés par le soleil, ne tardent pas à entrer en putréfaction, et leur exhalaison occasionne
parfois des maladies contagieuses qui achèvent de détruire une population que la famine avait
épargnée.
72 HISTOIRE NATURELLE.
On comprend qu'un tel fléau a dû passer dans le domaine de l'histoire, et que les différentes épo-
ques de l'apparition des Acridiens soient consignées dans les annales des peuples. Ces Insectes sont
parfois si nombreux dans certaines localités, qu'ils dévastent très-promptement toute la végétation;
c’est alors que, ne trouvant plus de quoi satisfaire leur appétit vorace, ils émigrent tous ensemble
comme à un signal donné, et vont s’abattre sur des points encore épargnés. Pendant ces émigra-
tions, les Criquets volent tous si rapprochés les uns des autres, qu’ils produisent de loin l'effet d’un
gros nuage et interceptent réellement les rayons du soleil. On comprend bien que d'aussi grands
malheurs ne sont pas à déplorer chaque année; c’est seulement à des intervalles éloignés qu'ont
lieu des ravages aussi épouvantables. Le plus habituellement, l’année qui suit celle où les Acridiens
se sont montrés en quantité prodigieuse, leurs dégâts sont peu à redouter, car il arrive fréquem-
ment qu'après avoir tout ravagé ils viennent à périr de faim avant le moment de la ponte des œufs,
ou, pendant l'hiver, certaines circonstances climatériques détruisent ces œufs eux-mêmes. Les ra-
vages occasionnés par les Acridiens sont des plus redoutables, car la multiplication de ces Insectes
est très-grande : chaque femelle pond environ quatre-vingt-dix œufs. Ces œufs sont enfouis dans le
sol et se trouvent ainsi à l'abri des atteintes de beaucoup d'animaux qui en feraient leur nourriture.
Les femelles enveloppent, en outre, ces œufs par une sécrétion de matière agglutinante, en font une
masse en forme de cocon, et déposent cette masse dans des trous creusés en terre et renfermés par
une matière particulière. Les petits qui en naissent se nourrissant de tous les végétaux quand le
besoin l'exige et-périssent rarement faute de subsistance. Dans le nord et même dans le centre de
l'Europe, ces Orthoptères ne sont jamais un fléau redoutable, quoique les champs de luzerne aient
parfois à souffrir de leurs ravages; toutefois nous devons dire que cette année même la Société en-
tomologique de France, lors de son congrès de Grenoble, a pu constater les immenses dévastations
produites par l’Acrydium migratorium dans les Hautes-Alpes; dans les contrées tempérées, leur taille
est beaucoup moindre et leur multiplication paraît être moins considérable, Mais l'Europe mé-
ridionale, l'Afrique, l'Asie, principalement l'Orient, sont les parties du monde où, d'intervalle en
intervalle, on a à déplorer les malheurs causés par ces apparitions d’Acridiens.
Fig. 12. — Ommèxoque d'Audouin. è Fig. 75. — Textrix subulé.
La Bible, chapitre X de l’Exode, rapporte que, pour la septième plaie d'Égypte, Dieu, par l'en-
tremise de Moïse, fit venir des Sauterelles sur tout le pays d'Égypte, qu'elles couvrirent entièrement
par leur nombre ce même pays où elles avaient été amenées par un vent d’orient, et d'où elles
furent enlevées par un vent d'occident, lorsque le Pharaon qui régnait alors eut promis de laisser
partir le peuple israélite. Ce fait fut regardé comme un miracle attribué à la puissance divine par
les saintes Écritures. Le nom d’Arbeth était celui sous lequel les Hébreux désignaient ces Insectes.
Au rapport de Pline, il existait, dans quelques contrées de la Grèce, une loi qui enjoignait aux ha-
bitants de détruire ces Insectes, sous les trois états d'œuf, de larve et d’insecte parfait. Dans l’île de
Lemnos en particulier, chaque citoyen devait fournir dans l'année une certaine quantité de Criquets.
Et si la Grèce, où ils portaient le nom d’æxpux, eut anciennement à souffrir des ravages de ces In-
sectes, des faits semblables ont encore été observés tout récemment. On parle de légions romaines
ANNELES. — ORTHOPTÈRES. 73
employées à la destruction des Sauterelles, qui, chez les Latins, portaient le nom de Locusta, dans le
nord de l'Afrique : le nord de l'Afrique et l'Orient semblent avoir été de tout temps les deux pays les
plus exposés aux attaques de ces ennemis de l'espèce humaine; et Orétius nous apprend qu’en 800
tout vestige de végétation disparut de la surface de la terre par leur présence; les auteurs de cette
destruction furent ensuite entraînés dans la mer, et leurs corps, rejetés sur les côtes, répandirent une
odeur aussi infecte qu’auraient pu le faire les cadavres d’une nombreuse armée. On prétend même,
sur le rapport de saint Augustin, qu'une peste, occasionnée par une semblable cause, détruisit dans
le royaume de Numidie et dans les parties voisines une population de huit cent mille hommes. Mais
l'Afrique ne fut pas la seule partie du globe que désolèrent les Acridiens; l'Europe eut également
son tour. L'an 170 avant l'ère chrétienne, d'innombrables masses de ces Orthoptères auraient dé-
vasté tous les champs. des environs de Capoue. Tout le nord de l'Italie et le midi de la Gaule l'au-
raient été également l'an 181 de notre ère. On cite une apparition de ces Insectes qui eut lieu en
Italie, dans l’année 591 après Jésus-Christ, et l'odeur qu'exhalèrent les corps amoncelés enleva, dit
Mouffet, un nombre prodigieux d'hommes et de bestiaux dans le territoire de Venise, envahi par ces
Insectes; il se déclara aussi une famine qui fit périr, dit-on, trente mille hommes. En 1600, ce fut le
tour de la Russie méridionale, de la Pologne et de la Lithuanie; la Moldavie, la Valachie, la Transyl-
vanie, la Hongrie et de nouveau la Pologne furent inondés, pendant les années 1747 et 1748, par de
semblables bandes de Criquets. L'année suivante, 1749, ils pénétrèrent jusqu’en Suède, et l'on ra-
conte que Charles XIT, étant en Bessarabie, se crut assailli par un ouragan accompagné d'une grêle
effrayante, lorsqu'une nuée de Sauterelles s’abattit brusquement sur son armée, couvrant à la fois
hommes et chevaux, et l’arrêta dans sa marche; telle fut, dans cette invasion, la prodigieuse quan-
tité de Criquets, qu'on les a comparés à la chute de la neige ou bien à un nuage de fumée qui se
déployait rapidement, et tout, dans les pays où ils se montrèrent, eut bientôt l'aspect de la plus
affreuse désolation. Après avoir détruit les herbes et les plantes les plus tendres, ilss’attaquèrent aux
feuilles des arbres et jusqu’à leur écorce. La Transylvanie fut de nouveau dévastée en 1780, et,
quoique l'on employät quinze cents personnes à recueillir les œufs des Sauterelles et que chacune
d'elles en remplit un sac, on ne remarqua cependant point de diminution dans leur nombre l’an-
née suivante. En 1780, le royaume de Maroc éprouva les ravages terribles de ces Criquets, qui y
occasionnèrent une famine affreuse; les pauvres erraient, dit-on, par la contrée pour déterrer les
racines des plantes, et cherchaient même dans la fiente des chameaux les grains d'orge qui n'avaient
pas fermenté pour s’en nourrir; les chemins et les rues des villes étaient jonchés de cadavres. Bar-
row et Levaillant, chacun de leur côté, dans leurs voyages dans le sud de l'Afrique, parlent de sem:
blables calamités arrivées de temps en temps, de 1784 à 1797. D'après Jackson, en 1799 les Cri-
quets voyageurs couvrirent toute la surface de la terre de Mogador à Tanger; toute la région qui
confine au Sahara fut ravagée, tandis que de l’autre côté de la rivière el Kos on ne vit aucun de ces
Insectes; quand le vent vint à souffler, ils furent poussés dans la mer, puis rejetés à la côte, et occa-
sionnèrent par leur infection une peste qui désola une grande partie de la Barbarie. Quand ce fléau
eut cessé, les ravages des Criquets furent suivis d'une abondante récolte.
Les Indes et surtout la Chine sont souvent la proie de ces ennemis dévastateurs, et en 1835, dans
ce dernier pays, non-seulement les récoltes sur pied auraient été détruites, mais encore les magasins
de céréales auraient aussi été détruits. Depuis le commencement du dix-neuvième siéele on a bien
signalé aussi des apparitions désastreuses de Sauterelles, de temps à autre et dans des pays diffé-
rents; mais il semble que les dégâts qu’ils occasionnèrent furent beaucoup moins généraux et moins
terribles que ceux que nous avons déjà indiqués, aussi n’en parlerons-nous pas. Un trait seulement
qui offre une preuve incontestable de l'action des vents comme auxiliaires de la marche des Acri-
diens est cité par Kirby dans un journal américain, et nous croyons devoir le faire connaître en
transerivant la traduction qfen a donnée M. Aug. Brullé. « Un. vaisseau fut retenu, en 1811, par
un calme complet, à deux cents milles des îles Canaries, qui étaient la terre la plus voisine, et se
trouva enveloppé par une nuée de Criquets. Il s’éleva un léger vent du nord-est, eten même temps
il tomba des nues une quantité innombrable de grosses Sauterelles qui couvrirent le pont, les hunes
et, en un mot, toutes les parties du bâtiment sur lesquelles elles purent se poser. Loin d’être épui-
sées, comme on aurait pu le croire, elles s’élançaient en l'air au moment où l’on pensait n'avoir
qu’à les prendre : le vent fut très-faible durant une heure entière, et les Insectes ne cessèrent, pen-
A. 10
74 HISTOIRE NATURELLE
dant ce temps, de tomber sur le navire. Une quantité considérable se noya dans la mer, où on les
voyait flotter de toutes parts. »
La mulüplication des Acridiens est tellement prodigieuse, que, dans les pays où ils se montrent
ainsi par bandes, on remplit en peu de temps plusieurs sacs ou plusieurs barils de leurs œufs; seul
moyen que l’on ait trouvé jusqu'ici, sinon pour les détruire, au moins pour en empêcher un trop
grand accroissement. Dans le midi de la France, où quelques espèces d’Acridiens (tels que les Dec-
ticus albifrons, verrucivorus et griseus; Ephippigera vitium, Locusta viridissima, Acridium li-
neola, Calliptamus ITtalicus, OEdipoda stridula, flava et cærulescens, Podisma pedestris, ete.) se
montrent parfois en quantité immense, et y occasionnent d'affreux dégâts, des fonds sont alloués
par les communes pour la chasse de ces Insectes dévastateurs et principalement de leurs œufs. Solier
a donné à ce sujet d'importants détails, dans le deuxième volume (1853) des Annales de la Société
Entomologique de France, et nous en extrayerons quelques faits. C’est principalement pendant les
années 1613, 14805, 1820, 1899, 1824, 1825, 1832 et 1834, que les apparitions de Criquets furent
surtout redoutables. Chaque kilogramme d'œufs était payé cinquante centimes, et celui de l'Insecte
parfait la moitié seulement de ce prix. A la première époque que nous venons de signaler, la ville de
Marseille dépensa vingt mille francs, et la petite ville d’Arles une somme de vingt-cinq mille pour effec-
tuer cette chasse; en 1822 on ne dépensa que deux mille deux cent vingt-sept francs; deux mille huit
cent quarante-deux francs en 1823; cinq mille huit cent quarante-deux francs en 1824, et six mille
deux cents francs en 1825. D'après cela, on voit que les pertes récentes ne peuvent être comparées
à celles de 1613, année pendant laquelle les Acridiens épuisèrent, pour leur nourriture, quinze
cents acres de blé. Les œufs recueillis sont généralement brûlés. Quelques autres moyens ont aussi
été essayés; on a fait passer des rouleaux en matière pesante dans les lieux qui en étaient infectés;
afin de les écraser; on a cherché à les chasser en faisant marcher des troupes et en tirant le ca-
non, etc.; et, comme dans toutes les circonstances où l'intelligence humaine ne peut arriver à un
culte La, on s’est adressé à Dieu : chez les anciens, on a fait des sacrifices, et chez les
modernes des prières pour éloigner ces terribles ennemis.
Comme nous l'avons déjà dit, ces Insectes ne causent que peu de ravages dans les pays septentrio-
naux,; cependant on a signalé des apparitions fâächeuses en Angleterre; l’année 1746 est spéciale-
ment indiquée; en 1742 on en vit beaucoup aux environs de Bristol, et la principauté de Galles fut
plusieurs fois dévastée par eux.
Quelques peuples de l'Arabie font des Aeridiens un objet de nourriture et de commerce; ils les
ramassent en grand nombre, les font sécher et servir à former une espèce de pain destiné à suppléer
aux récoltes peu abondantes, et ces denrées figurent dans les marchés de quelques villes d'Orient.
Suivant quelques voyageurs, on fait rôlir ces Criquets sur des charbons ardents, après leur avoir
enlevé les pattes, les ailes et, dit-on, les intestins. Dans plusieurs parties de l’Arabie, les en-
fants et les femmes les enfilent en chapelets pour les vendre; enfin il en est d’autres, rapporte-t-on,
qui les assaisonnent et qui les font bouillir. Quelle que soit la manière dont aient lieu ces apprêts de
cuisine, il est certain que les Sauterelles servent à la nourriture de quelques peuplades sauvages
auxquelles on a donné, pour cette raison, le nom d’Acridophages. L'opinion des voyageurs, qui
tous attestent ce fait, varie sur le plus ou moins de saveur et de goût que leur a présenté ce mets :
Forskall dit qu'il n’est pas savoureux, et la plupart des Européens qui en ont fait usage semblent
partager cette manière de voir. On a même prétendu que l'usage journalier de cet aliment occa-
sionnait plusieurs maladies; mais les observations recueilhes à ce sujet sont trop peu nombreuses
pour qu'on puisse arriver à un résultat définitif, et quelques voyageurs, loin de dire que ces Insectes
peuvent faire mal, assurent que leur usage engraisse l'homme. L’Arabie n’est pas le seul pays où
on les mange, car les [lottentots et d’autres peuples les aiment également beaucoup.
L'ancienne médecine, qui a épuisé toutes les combinaisons possibles et souvent les plus bizarres
dans l'emploi des aliments comme moyens curatifs, n'a pas manqué d'y comprendre les Acridiens.
Dioscoride dit que les cuisses de Sauterelles, mises*en poudre et mêlées avec du sang de Bouc, gué-
rissent de la lèpre; que, mêlées avec du vin, e’est un spécifique contre la piqüre des Scorpions; que,
du reste, les Sauterelles mangées peu salées sont aphrodisiaques, etc. Enfin on les a considérées
généralement comme une bonne nourriture pour les bestiaux et les volailles.
Les Acridiens peuvent être partagés en cinq familles particulières : celles des Proscopides, Truxa-
ANNELÉS. —. ORTHOPTÈRES. 75
lides, Pneumorites, Acridutes et Tétricites, qui correspondent aux genres typiques, et dans les-
quelles entrent un assez grand nombre de coupes génériques, surtout créées dans ces vingt dernières
années, et que nous chercherons à indiquer toutes.
Dans les Proscorines, le corps est aptère dans les deux sexes; la face inclinée et les antennes sont
très-courtes, de six à sept articles. On n’y range qu'un seul genre très-singulier et qui, avec l'aspect
général des Phasmes, a cependant les caractères fondamentaux des Acridiens, comme la disposition
des tarses et le renflement de leurs cuisses postérieures : c’est le groupe des :
PROSCOPIES (Proscopia, Klug.), dont le corps est élancé, long parfois de 0,15 à 0,16; la téte
pyramidale, insérée obliquement, sur le corselet, avec la bouche tout à fait à sa base; le corselet
excessivement long, tandis que les mésothorax et métathorax sont très-courts; pattes longues,
gréles; cuisses de derrière renflées; pas d'élytres ni d'ailes; abdomen très-long. Klug a donné une
monographie de ces Orthoptères et en a fait connaître quinze espèces, dont plusieurs ne sont peut-
être que nominales, et qui toutes sont propres à l'Amérique méridionale ou semblent y représenter
les Truxales, propres à l’ancien continent. Serville les partage en Proscopia proprie dicta, et en
Cephalocæma. Le type est la Proscopre scagre (Proscopia scabra, Klug), qui se rapporte peut-être à
la Phasma heteropoda, figurée par Stoll; comme ses congénères, cette espèce n’est pas parée de vives
couleurs, et affecte des nuances sombres et ternes, telles que le jaune testacé et le brunâtre qui de-
viennent habituellement plus foncées par la dessiccation : habite principalement Cayenne et le
Brésil.
Dans les Truxanines, le corps est encore très-allongé, la face inclinée, le front plus cu moins
avancé, et les antennes, plus ou moins acuminées, sont plus longues que la téte et Le corselet réunis.
On forme une vingtaine de genres dans cette division, et tous ne renferment qu’un nombre assez
restreint d'espèces, de grande taille, et qui semblent dispersées sur toute la surface du globe, quoi-
que plus particulièrement dans les régions méridionales. Le groupe principal, sur lequel nous de-
vons surtout insister, est le genre :
TRUXALE (Truæalis, Fabr.). — Tôte élevée en spirale horizontale; yeux ovales, peu proéminents,
placés très-haut près des antennes ; celles-cv plus ou moins longues, à articles triangulaires ; pro-
sternum mutique; corselet plus court que la tête; élytres de la longueur de la tête, étroites, lancéo-
lées; ailes un peu plus courtes que les élytres, amples; abdomen étroit, légèrement comprimé; pattes
grèles. Les Truxales ne renferment actuellement qu'un nombre assez restreint d’espèces, qui habi-
tent les contrées chaudes de l’ancien continent. Trois espèces ont été trouvées en Europe : la TRuxALE
A Nez (Truæalis nasutus, Fabr.), très-commune, du cap de Bonne-Espérance, et que l’on a aussi
rencontrée au Sénégal, en Égypte, aux Indes et en Sicile; T. varrapce (T. variabilis, Klug), de la
Morée et de l’Europe méridionale, qui toutes deux font partie des Truxalis propres de Serville, et
T. rose (T. rosea, Charp.), de la France méridionale, de l'Espagne et du Portugal : type des Pyrgo-
morpha, Serville.
Parmi les autres genres assez nombreux de la même tribu, nous citerons les : 4° MESOPS, Ser-
ville, à yeux peu saillants, placés assez loin des antennes et du corselet, occupant à peu près le
milieu du bord latéral de la tête. Une espèce africaine, la T. abbreviatus, Pal.-Bauv.; 2° OPSUMALA,
_ Serville, à yeux grands, plus ou moins saillants, placés obliquement vers l'extrémité de la tête, près
des antennes. Une quinzaine d'espèces propres à l'Amérique du Sud, à Java, à l’Australasie, ete., et
dont une, l'O. sicula, Serv., a été recueillie dans l’île de Sardaigne par M. Géné; 3° DYCTIOFHORUS,
Thunb., ou PŒKILOCERUS, Serv., à yeux gros; à antennes épaisses, de longueur médiocre, fili-
formes; à tête peu inclinée. Une dizaine d’espèces rangées par Klug dans le genre Decticus, et dont
Serville a distingué plusieurs des groupes que nous faisons connaître; propres à diverses contrées afri-
caines, aux Indes, etc., et parées de couleurs vives, variées : le type est l’Acrydium sanguinolentum,
de Géer, du Sénégal; 4° AKICERA, Serv., surtout caractérisés par la disposition des quinze articles de
ses antennes. Deux espèces (Gryllus (Bulla) carinatus, Lin., et A. grisea, Serv.), du cap de Bonne-
Espérance; 5° PAMPHAGUS, Thunb., à antennes manudliformes à l'extrémité; corselet relevé en
crête au milieu, avec les bords aigus; corps ailé dans le mûle, à peu près optère dans la femelle;
76 HISTOIRE NATURELLE.
habitant l'ancien continent et surtout l'Afrique, et comprenant des espèces avec lesquelles Serville
a formé plusieurs genres; 6° PORTHETIS, Serv., téte forte; face antérieure verticale et continue ou
presque continue. Trois espèces dont le type est le Gryllus elephas, Linné, propre à la Sicile, au
midi de l'Europe, et avec lequel l’Acrydium dentitum, de Géer, du Cap, a été souvent confondu;
7° XIPHICERA, Latr., dans lesquels surtout les jambes ont en dessus deux rangées d'épines : l'interne
à épines fortes, grandes, pointues, et celles de la rangée externe beaucoup plus petites; tête moins
pyramidale que dans les Truxalis. Six espèces, toutes de l'Amérique méridionale, à l'exception de
l'X. axureipennis, Serv., propre à Java; 8° SYSTELLA, Westwood; téte très-pyramidale; antennes
à articles très élargis, aplatis après le deuxième, et les derniers plus gréles; corselet plat en dessus;
élytres larges, foliiformes. Deux espèces propres à l'Asie australe; 9° TROPINOTUS, Serv., yeux
ovales, peu saillants; corselet cymbiforme, c’est-à-dire en forme de nacelle renversée, ete. Quelques
espèces propres au Brésil, au Cap et à la Nouvelle-Hollande, et dont le type est le Gryllus serratus,
Lin., de l'Amérique méridionale; 10° ROMALEA, Serv., antennes longues, un peu aplaties; corselet
plan, avec une ligue médiane élevée. Deux espèces : Acrydium micropterum, Pal.-Bauv., de l’Amé-
rique septentrionale, et R. Marci, Serv., de la Caroline du Sud; 11° PHYMATEUS, Thunb., dans
lesquels les antennes sont longues, composées de dix-sept ou dix-huit articles courts, cylindriques.
Quelques espèces du Cap, dont le Gryllus morbillosus, Lin., est le type; et 12° PETASIA, Serv., à tété
forte; front séparé du reste de la tête par une ligne enfoncée, semi-circulaire; antennes longues, de
treixe articles seulement; pointe sternale consistant en une lame mince, triangulaire. Une seule
espèce du Cap, la P. cruentata, Serv. -
Dans les Parumorines, les antennes sont filiformes; le corselet, de même que dans les Acridides,
n'est pas prolongé sur l'abdomen, mais il est très-grand, scutelliforme; les pattes sont presque im-
propres au saut, car les cuisses postérieures sont à peine renflées; l'abdomen est vésiculeux dans les
mûles. : ;
Fig. 74. Pneumvure variolé. (Mäle.)
Le seul genre qui entre dans cette tribu est celui des PNEUMORA, Thunb., si remarquable par ses
pattes de derrière plus courtes que le corps, assez semblables aux précédentes et guère plus longues
qu'elles, et par l'abdomen des mâles très-gonflé, ressemblant à une vessie remplie d’air, et surtout
à la gousse du baguenaudier, tandis que, dans les femelles, cet organe est de forme ordinaire, légè-
rement conique. En outre, les élytres et les ailes sont très-courtes ou même tout à fait rudimentaires
dans les femelles; dans les mâles elles sont, au contraire, très-développées, quoique d’une faible
consistance et ne pouvant pas servir à la stridulation, comme chez tous les autres Acridiens. Cepen-
dant les Pneumores ont aussi la faculté de faire entendre un chant très-sonore, et un autre appareil
existe à cet effet. On remarque de chaque côté de l'abdomen une rangée de petits tubercules très-
serrés; les cuisses postérieures venant à frotter contre ces crénelures produisent des sons d'autant
plus pénétrants, qu'ils résonnent sur un abdomen vésiculeux, tendu comme la peau d’un tambour.
ANNELÉS. —— ORTHOPTÈRES. 77
Serville décrit quatre espèces de ce groupe, provenant exclusivement des environs du cap de Bonne-
Espérance, qu'il range dans deux sous-genres (Cystocælia et Pneumora propre), et qui, de taille
moyenne, sont ordinairement parées de couleurs variées et de taches brillantes, parfois métalliques.
Le type est le Pneumora scutellaris, Latr., dont le P. sex-guttata, Thunb., est peut-être le sexe
mèle; une autre espèce est le P. variolosus que nous figurons.
Dans les Acrynines, les antennes sont filiformes ou renflées en massue; le corselet n’est pas pro-
longé sur l'abdomen; les paltes postérieures sont très-renflées, et l'abdomen n’est nullement vésicu-
leux ni dans les femelles ni dans les mâles. On connait un assez grand nombre de genres et d'espèces
de cette tribu; ils appartiennent à toutes les parties du monde, et c'est parmi eux surtout que se
trouvent nos Criquets dont quelques espèces, comme nous l'avons dit, sont malheureusement
célèbres.
Les premiers genres étrangers à l'Europe et se rattachant par quelques caractères aux groupes
précédents sont les : 4° TRYBLIOPHORUS, Serv., surtout caractérisés par la forme des palpes maxil-
laires qui ont leurs deux derniers articles très-dilatés, et le terminal large, arrondi, spatuliforme.
Une espèce (T. octomaculatus, Serv.) de Cayenne; 2° TERATODES, Brullé, mandibules dentées:
prosternum muni d'un tubercule; corselet relevé en crête très-élevée; cuisses postérieures renflées,
dentées. Une espèce (Gryllus monticollis, Gray) des Indes orientales; 3° MONACIHIDIUM, Serv.,
mandibules également dentées; prosternum muni d'un tubercule; corselet relevé en crête assex éle-
vée; cuisses postérieures minces, inermes. Quelques espèces de l'Amérique méridionale, dont le
Gryllus Lunus, Linné, ou Monachidium lunuwm et flavipes. Serv., est le type; 4° DERICORYS, Serv.,
prosternum muni au milieu d'une palette avancée, mince, linéaire, échancrée au bout; élytres
longues, étroites, allant en se retrécissant vers l'extrémité qui est arrondie. Une seule espèce (C.
albidula, Serv.) propre à l'Égypte et au mont Liban.
Le groupe typique est le genre :
CRIQUET (Acrydium, Geoffroy). — Tête quelquefois forte, rarement plus large que la partie an-
térieure du corselet; antennes filiformes ou sétacées, plus ou moins longues; yeux assez grands,
ovalaires; palpes à articles cylindriques; mandibules dentées; prosternum muni d'un tubercule;
corselet ayant une simple ligne élevée au mulieu et pas de carène proprement dite; élytres de gran-
deur variable, égalant ordinairement l'abdomen en longueur, très-rarement avortées et rudimen-
taires; ailes souvent amples, de la grandeur des élytres, parfois nulles; pattes de derrière plus ou
moins fortes, plus longues que les autres, glabres; euisses toujours allongées, amincies, prolongées
après la partie renflée, inermes.
201) ))
y
Fig. 75. — Criquet (Callptame) d'Italie.
Ce genre, quoique très-considérablement restreint dans ces derniers temps, et dans lequel on a
78 HISTOIRE NATURELLE.
encore proposé de former les subdivisions des Oxya,. Serv., Podisma, Latr., est encore très-nom-
breux en espèces, car Serville en décrit cinquante, qui se trouvent répandues dans toutes les régions
du globe, aussi bien dans l'ancien que dans le nouveau continent. Les mœurs de ces Insectes sont
très-intéressantes à étudier, comme nous l'avons dit dans nos généralités sur les Acridiens, et c'est
parmi elles, ou dans les groupes qui en ont été démembrés, que l’on trouve ces espèces voyageuses
qui viennent porter la désolation partout où elles se montrent, en détruisant toutes les cultures.— Les
espèces habitant l’Europe ou ne s’y trouvant que de passage sont les suivantes : Acrydium lineola,
Oliv., du midi de l'Europe et très-répandue dans le Levant; pedestre, Olhiv., du nord de l'Europe et
surtout de la France et de l'Allemagne; giorna, Rossi, de la Sardaigne; plorans, Charp., d'Italie, etc.;
de grandes espèces sont les À. dux, Fabr., et cristatum, Stoll., du Brésil, et beaucoup d’autres.
Parmi les groupes formés aux dépens des Criquets et qui pourraient peut-être y rentrer, nous
citerons les : 4° CALLIPTAMUS, Serv., à prosternum muni au milieu d'une pointe assez grosse, un
peu élargie, très-obtuse au bout, etc. Ces Orthoptères ont un faciès particulier dû à leurs grosses et
courtes cuisses postérieures et à leur corps épais et trapu; Serville en déerit onze espèces propres à
l'Afrique ou aux parties méridionales de l'Europe. Une espèce (C. carbonarius, Serv.) est signalée
comme de la Nouvelle-Hollande; deux espèces sont européennes et font souvent de grands dégâts par
leur quantité innombrable, principalement en Italie et dans le midi de la France, car elles ont été
signalées à Château-Gombert par Solier, ce sont les Calliptamus marginellus, Serv., et Itali-
cus (Acrydium), Oliv.; 2 ŒDIPODA, Latr., ou GOMPHOCERUS, Latr.-Olim., à mandibules non
dentées; à antennes filiformes, longues, multiarticulées; à prosternum mutique, et corselet ayant
une simple ligne élevée au milieu. Une trentaine d’espèces propres à toutes les parties du monde,
surtout à l'Europe, à l'Afrique, à l'Amérique et à l’Australasie, et qui ont été partagées en deux
sous-genres (OEdipoda et Arcyptera) par Serville. Les espèces européennes sont les OEdipoda flava
(Locusta), Lin., de l'Afrique et de l'Europe méridionale; Germanica, Latr., commune en Europeet
se trouvant aux environs de Paris, surtout à la fin de l'été; insubrica, Scopoli, de l'Italie et du midi
de la France; stridula, Latr., des lieux secs et montagneux de toute l'Europe, surtout dans le nord;
Hispanica, Rambur, d'Espagne; cærulescens, Serv., très-commune dans toute l'Europe; cærulans,
Oliv., abondante dans toutes les régions méridionales de l'Europe; bisignata, Charp., de la France
méridionale; parapleura, Hagenb., de Suisse et de Hongrie; thalassina, Fabr., du midi de la France;
grossa, Oliv., commune dans toute l’Europe et dans nos environs, etc.; biguttata, Oliv., encore plus
commune partout, principalement auprès de Paris ; cothurnata, Creutz., des Pyrénées; parallela,
Letterstedt, très-abondante en France, et surtout migratoria (Acrydium), de Géer, originaire de la
Tartarie et de l'Orient, qui n’est que trop connue depuis longtemps par ses ravages, car c’est elle que
l’on désigne sous le nom de Sauterelle de passage, et qui entreprend de grandes migrations en tra-
versant surtout les mers; on la trouve en Afrique, à l’ile Maurice, etc., et dans une très-grande partie
de l'Europe, notamment dans le Midi; elle n’est pas commune aux environs de Paris, et les indivi-
dus que l’on y rencontre sont constamment plus petits que ceux des pays chauds; elle est longue
d'environ 0®,08, et son envergure a prés de 0,20; son corps est verdâtre; sa tête verte avec la
face jaunûtre; le corselet d’un jaune verdätre, sans rugosités; les élytres transparentes, d’un gris
sale, avec une grande quantité de petites taches brunes répandues dans toute leur étendue; les ailes
sont blanchätres, légèrement lamées de jaune à leur base et tachetées de brun à leur extrémité; les
cuisses sont un peu tachetées de brun et les jambes roses; 3° GOMPHOCERUS, Thunb., à antennes
longues, multiarticulées, insérées chacune dans une profonde cavité, filiformes dans leurs trois
premiers quarts, et à articles se dilatant ensuite et formant une massue comprimée, moins larges
dans les femelles que dans les mäûles, et finissant en pointe obtuse ou aiguë. Les Gomphocères, qui
se distinguent surtout par leurs antennes, ressemblant assez à celles des Hespéries parmi les Lépi-
doptères diurnes, ne renferment que trois espèces qui sont propres à l'Europe : ce sont les G. Sibi-
ricus, Oliv., qui habitent les hautes montagnes, telles que celles de la Suisse et de l'Allemagne, ct
qui à été aussi trouvé dans les Alpes; rufus, Oliv., et biguttatus, Charp., communs presque partout
dans les champs et dans les prairies; 4° PHLOCERUS, Fischer de Waldeim, à antennes comprimées,
en forme de feuille lancéolée, très-courtes, terminées en pointe obtuse, de dix-huit ou vingt articles.
Une seule espèce (P. Menetriesii, Wald.), trouvée au Schadach, à l'est du Caucase, à une hauteur
de plus de 3,000 mètres, vers les régions des neiges éternelles.
ANNELÉS. — ORTHOPTÈRES. 19
Les autres genres qui s'éloignent davantage des Criquets sont ceux des 4° OMMEXECHA, Serv ,
tête forte, verticale, de même largeur partout, presque carrée, à vertex creusé au milieu; yeux
élevés, très-saillants et globuleux; corselet très-élargi, rugueux, à bords latéraux tuberculeux'; ély-
tres et ailes assez courtes. Quelques espèces, qui vivent en troupes, marchant plutôt qu’elles ne sau-
tent, rongeant les feuilles de diverses plantes et habitant l'Amérique méridionale : type O. virens,
Serv., de Buénos-Ayres; 2° CIIROTOGONUS, Serv., téte allant en diminuant de largeur de la base
au sommet, rétrécie dans cette dernière partie; antennes courtes, filiformes, rapprochées l’une de
l'autre à leur insertion : à articles peu distincts, cylindriques; prosternum ayant un rebord saillant
s’avançant sur la bouche et la couvrant un peu; élytres moins longues que l'abdomen, allant en se
rétrécissant vers le bout. Une seule espèce propre à la haute Égypte, l'Ommexecha Lugubri is, Blan-
chard; 5° EREMOBIA, Serv., téte d’égale largeur partout; antennes assez distinctes l'une de l'autre
à leur insertion, à articles plus où moins déprimés; corselet rugueux, séparé au milieu par un
sillon transversal; prosternum mutique, sans rebord prononcé; élytres au moins de la longueur de
l'abdomen; pattes anguleuses, avec les cuisses postérieures courtes, dilatées, et les jambes de der-
rière peu allongées, poilues. Quelques espèces, dont le Gryllus cisti, Fabr., d'Égypte est le type, et
qui habitent surtout les lieux déserts et àrénacés en Orient et en Afrique: 4° MASTAX, Perty; tête
très-grosse, élevée, dégagée du corselet; antennes courtes, renflées vers l'extrémité; presternum
.mutique; corselet court, plan; pattes longues, très-gréles, à tarses mmces, très-allongé, surtout
ceux de derrière. Deux espèces : l’une du Brésil, M. tenuis, Perty, et l’autre de Colombie, M. mu-
hlata, Serv.; 5° CHROROTYPUS, Serv.; corps très-comprimé; corselet grand, extrémement com-
primé, presque de la même manière que celui des Membracis, très-élevé, en côte arrondie et aiguë
supérieurement; antennes courtes, filiformes; tête longue; élytres allongées; ailes grandes; cuisses
antérieures membraneuses. Ce groupe, tout à fait anomal, ne renferme qu'une seule espèce, le
C. fenestratus, Serv., habitant le Bengale.
Dans les Térricines enfin, le corselet est très-prolongé en arrière et son extrémilé atteint ou dé-
passe même celle de l'abdomen; les antennes n’ont qu’un petit nombre d'articles; les palpes sont
anguleux ; l'extrémité antérieure du presternum, disposé en forme de mentionnière, reçoit une
partie de la bouche; les élytres sont rejetées sur les côtés du corps, rudimentaires, en forme d'’écailles
ovales, etc., et, outre tous ces caractères, ils se distinguent surtout des tribus précédentes en ce
qu'ils n’ont pas de pelotes entre les crochets des tarses, tandis que dans les autres cette pelote est
toujours plus ou moins distincte; leur bouche est couverte entièrement ou presque tout à fait dé-
couverte, et les féguments du corps sont généralement fermes. Aucun auteur ne fait mention de
leur stridulation, ce qui porterait à croire que cette faculté leur manque; mais, en revanche, ils
jouissent éminemment de celle de sauter, les épines terminales des jambes de derrière, longues et
légèrement recourbées, contribuant puissamment à la vivacité de cette action. On n'en décrit
qu’une douzaine d'espèces, propres à toutes les parties du monde, et que Serville répartit en trois
genres. Le groupe générique typique est celui des :
TÉTRIX (Tetrix, Latr.). — Tête petite; yeux globuleux, saillants; palpes courts, filiformes; an-
tennes fines, filiformes, de treixe à quatorze articles; corselet grand, scutelliforme, prolongé jusqu'à
l'extrémité du corps, et recouvrant les organes du vol; presternum mutique, avancé de manière à
entourer la bouche; ailes à écailles larges, carrées, assex grandes ou plus courtes que le corselet;
abdomen comprimé, presque triangulaire; pattes moyennes, de forme ordinaire, à tarses dépour-
vus de pelote entre les crochets du dernier article. Le genre Tétrix, démembré à juste raison de
celui des Criquets, ne renferme, selon Serville, que dix espèces qui fabitent l'Europe, le nord de
l'Afrique, l'île de Madagascar, Java et Bombay. Par quelques particularités que présentent leurs
jambes et leurs ailes, on pourrait les subdiviser en Tetrix propres, Scelimena et Batrachidea. Ce
sont de petits Orthoptères parés de brillantes couleurs, se trouvant sur les feuilles des plantes basses
et échappant facilement à la main qui veut les saisir. Les espèces européennes sont les : Térrix
SUBULÉ OU CRIQUET À cORSELET ALLONGÉ, Geoffroy (Tetrix subulata, Latr.), à corps brunâtre; antennes
jaunes; tête brune; corselet à carène brun jaunâtre; pattes jaunes tachetées de brun; il varie consi-
dérablement, et M. Zetterstedt a cru devoir y distinguer sept à huit espèces; se trouve abondamment
dans toute l'Europe et est surtout très-commun au printemps dans les environs de Paris; et Térnix
80 HISTOIRE NATURELLE.
A DEUX POINTS Où CriQuer À caPucHoN, Geoffroy (Tetrix bipunctata, Latr.), à corps brun grisâtre; tête
grise; corselet de même couleur marqué de deux points blanchâtres; pattes grisâtres, tachetées de
brun; habite les mêmes lieux et aussi communément que le précédent, particulièrement au prin-
temps, dans les bois et les champs arides et secs.
Les deux autres genres de la même tribu, ne comprenant qu’une seule espèce chacun, sont :
4° CHORIPHYLLUM, Serv.; corps entièrement caché par une expansion membraneuse, élevée, folia-
cée, extrêmement comprimée, dépassant la tête en devant et l'extrémité de l'abdomen en arrière.
Une espèce (C. Sagrai, Serv.), de l’île de Cuba; et 2° AMORPHOPUS, Serv.; cuisses très-étroites à la
base, minces, se dilatant brusquement ensuite en forme de folioles, dentelées sur les bords. Une
espèce (A. notabilis, Serv.), de Cayenne.
Fig. 76. — Grillon verrucivore (2/3 de naturc). (Femelle poudant ses œufs )
CINQUIÈME ORDRE.
NÉVROPTÈRES.
“
Les Insectes qui constituent cet ordre sont caractérisés ainsi d’une manière générale : quatre ailes
nues où transparentes, réticulées, couvertes d'un très-grand nombre de nervures et ordinairement
de la même grandeur; bouche offrant des mandibules, des mâchoires et deux lèvres propres à la
mastication; pas d'aiquillons à l'anus; femelles rarement pourvues d'un oviscapte ou d'une tarière;
tarses à articles entiers et variables pour le nombre, ete. En dehors de ces caractères généraux, la
définition des, Ürthoptères est difficile à donner, parce que chacun des groupes principaux qui for-
ment cette grande division diffère essentiellement des autres par son organisation, par ses mœurs et
par ses métamorphoses; aussi c’est en étudiant les familles que nous nous étendrons principalement
sur cesujet.
C’est Linné qui a créé l’ordre des Névrorrères, dont il a tiré la dénomination des deux mots grecs
veuper, nervure, et rrepov, aile, et cet ordre, quoique moins naturel peut-être que les autres, a
néanmoins été adopté par Latreille, ainsi que par la plupart des entomologistes modernes. Fabricius
formait avec les Névroptères deux ordres particuliers, ou plutôt, d’après sa méthode, deux classes
parmi les Inseëtes : les Ononares, comprenant les genres Libellule ou Demoiselle et Agrion, et les Sx-
NISTRATES, renfermant tous les autres genres, ainsi que les Lépismes et Podures, qui constituent au-
jourd’hui l'ordre des Thysanoures. Kirby retirait les Phryganes des Névroptères pour en constituer
.
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 81
un ordre particulier sous la dénomination de Tricuorrères (rp1y#, en trois parties; #r:pov, aile), qui
n’a généralement pas été adopté. Enfin Clairville a proposé de changer en Dicryoprères (dueruoy, ré-
seau; rr:pov, aile), le nom de Névroptères, qui n’exprime pas d'une manière convenable la disposi-
tion des nervures sur des ailes membraneuses : nervures disposées en réseau et se rétrécissant
comme dans les cellules de quelques Hyménoptères; mais ce changement n’a pas été heureusement
adopté, car il nous semble plus convenable de conserver un nom admis généralement et connu de
tout le monde, quand bien même il n'indiquerait pas complétement le caractère qu’il veut exprimer,
plutôt que d'employer une dénomination nouvelle, plus exacte peut-être, mais à laquelle il faut
s’habituer, et qui vient encore augmenter les difficultés déjà si grandes de la synonymie.
Fig. 77. — Ashne (Gomphus) à tenailles. (Mâle.}
Latreille, d’après la conformation des ailes des Névroptères, plaçait ces Insectes immédiatement
après les Hémiptères; mais M. Laporte de Castelnau, prenant en considération leurs organes de
manducat'on, qui sont composés de pièces libres comme dans les Orthoptères, les a rangés immédia-
tement à la suite de ces derniers, en mettant après eux les ordres renfermant des Insectes pourvus
d’une bouche composée de pièces soudées entre elles; et, à l'exemple de M. Émile Blanchard; nous
avons cru devoir adopter cette manière de voir. Mais, si les Névroptères se rapprochent assez des
Orthoptères et des Hémiptères, qui ont les ailes supérieures ou élytres d'une consistance différente
des ailes inférieures ou ailes proprement dites, ils en diffèrent notablement en ce que les quatre ailes
sont semblables sous ce point de vue et entièrement membraneuses. Les Hyménoptères en sont sépa-
rés par leurs mâchoires, qui sont ordinairement très-allongées et qui ne servent plus à broyer les
aliments, mais seulement à sucer. Les Lépidoptères, d’un autre côté, ne pourront être confondus
avec eux, à cause de leurs ailes couvertes d’écailles. Les diptères en sont très-nettement séparés par
leurs deux ailes, ainsi que par les différents organes de la bouche. Enfin est-il nécessaire de dire
qu'ils se distinguent au premier aspect des Coléoptères, parce que ces derniers ont constamment les
ailes supérieures cornées.
Chez les Névroptères, la tête est plus ou moins grosse, avec des antennes placées à la partie an-
térieure, filiformes ou sétacées, qui, dans les Myrméléons, sont terminées en massue allongée, tan-
dis que, chez les Ascalaphes, elles sont très-longues, grêles et finissant par un petit bouton à peu
près comme cela a lieu dans les Lépidoptères diurnes. La bouche est composée ordinairement de
deux lèvres, de deux mandibules, de deux mâchoires; ces derniers organes sont très-aigus et très-
forts dans les Libellules, qui sont destinées à faire leur proie d’Insectes, tandis qu'ils sont très-petits
et presque rudimentaires dans les Éphémères, dont la vie est très-courte, et qui, à l'état parfait,
semblent ne pas prendre de nourriture. Les palpes, quelquefois très-courts (Libellules), sont au
contraire trés-longs dans les Myrméléons. Les yeux sont à réseaux et placés sur les côtés de la tête;
on voit habituellement entre eux trois petits ocelles ou yeux lisses, qui cependant peuvent
A. 11
82 HISTOIRE NATURELLE.
manquer dans beaucoup de cas. Le corselet est renflé, comprimé et tronqué le plus habituellement;
il donne attache à quatre ailes presque toujours nues, réticulées, claires, transparentes et présentant
souvent des reflets très-vifs et des taches de différentes couleurs. Toutes ces aïles servent à l’actioy
du vol, et ce vol est rapide, saccadé; elles sont quelquefois placées en toit sur l'abdomen; souvent
elles sont écartées du corps et étendues horizontalement, et, dans d’autres cas, elles sont rapprochées
verticalement l’une à rôté de l'autre. Ces ailes diffèrent quelquefois de grandeur entre elles, comme
cela se voit dans les Némoptères; quelquefois les inférieures n'existent plus ou sont tellement obli-
térées, qu’on a de la peine à découvrir leurs traces, ainsi que cela peut se remarquer chez les Éphé-
mères. Les pattes sont composées de quatre pièces, la hanche, la cuisse, la jambe et le tarse; nous
reviendrons plus tard sur ces diverses parties et nous nous bornerons à dire actuellement que le
tarse varie pour le nombre des articles dont il est composé, ear souvent il n’y en a que trois; mais
on à pu en compter quelquefois quatre et même cinq.
L'organisation intérieure de ces êtres a été étudiée par plusieurs anatomistes, mais plus particu-
lièrement par M. Léon Dufour; mais, comme cette organisation diffère assez considérablement sui-
vant les diverses familles qui constituent cet ordre, nous ne pouvons pas en parler d’une manière
générale, et nous ne nous en occuperons qu’en faisant connaître les divers groupes naturels.
Les métamorphoses d’un assez grand nombre d’espèces de Névroptères sont connues. On peut dire
d’une manière générale que les larves et les nymphes se rapprochent assez, par leur forme, de l'In-
secte parvenu à son état parfait, contrairement à ce qui a lieu dans plusieurs autres ordres. Les
larves, presque toutes carnassières et toujours pourvues de six pieds, sont terrestres ou aquatiques :
celles qui vivent sur la terre se cachent sous les écorces des arbres et se nourrissent habituellement
de Pucerons, ou bien elles font leur nid dans le sable, et y forment une espèce d'entonnoir, piége
ingénieusement disposé pour attraper les petits Insectes dont elles font leur proie : c'est ce qui a
lieu pour le Fourmilion, l'Ascalaphe, etc.; les larves aquatiques se tiennent au fond des fossés, des
mares, des étangs, des rivières et autres masses d’eau plus ou moins tranquille; elles respirent au
moyen d'organes qui semblent au premier aspect assez semblables aux ouïes des Poissons, mais qui
ne sont cependant que des appendices extérieurs ou sortes de trachées qui portent habituellement
le nom de fausses branchies; quelques-unes se construisent des fourreaux avec de petites pierres, des
débris de coquilles ou de petits morceaux de bois qu'elles assemblent au moyen d'une espèce de
soie. Les nymphes, dans plusieurs familles, et de même que cela se voit dans la majorité des In-
sectes, restent inertes pendant toute leur existence et ne grandissent pas; mais, dans d’autres fa-
milles, comme dans les Libellules, par exemple, elles sont au contraire agiles, se nourrissent et
grossissent sous cette forme. Les œufs sont assez petits, blanchätres, et la femelle prend diverses
précautions pour les placer dans les conditions les plus convenables à leur développement. La durée
des métamorphoses varie suivant les groupes; mais c’est habituellement pendant cette PERS que
ces Insectes passent l'hiver,
Les Névroptères sont des Insectes, en général, très-élégants et très-légers par leur port; ils volent
avec beaucoup de facilité, et sont parfois ornés de couleurs très-variées et assez agréables. On ne
forme dans cet ordre qu'assez peu de genres, il est même peu nombreux en espèces, si l'on en ex-
ceptetoutefois les Libellules, Æshnes et Gomphines, qui, au contraire, sont très-répandues. Leur taille,
généralement petite, est rarement moyenne. Leur habitat est très-varié; non-seulement on en trouve
dans toutes les parties du monde et surtout en Europe, mais encore tous les climats leur semblent
bons, quoiqu’on en prenne davantage dans les régions chaudes que dans les contrées tempérées ou
froides. En outre, on en rencontre dans les endroits secs et arides, aussi bien que dans les lieux
humides et au bord des rivières. Quelques-uns, de même que leurs larves, sont très-carnassiers, et
emploient leur force, leur agilité et leur instinct à saisir les Insectes dont ils veulent faire leur
proie, et à leur dresser des embûches : telles sont, par exemple, les Libellules; d’autres, au con-
traire, comme les Éphémères, les Phryganes; et les Perles, ne prennent pas, ou presque pas de
nourriture, quand elles sont parvenues à leur dernier développement, et la durée de leur vie à ce
dernier état, où elles ne semblent parvenues que pour s’accoupler et reproduire leur espèce, n'ex-
cèdent parfois pas quelques heures ou un jour au plus. Le plus grand nombre des Névroptères vi-
vent solitaires sous leurs trois états; il n’en est pas de même dans la famille naturelle des Termi-
tes, car ces Insectes, au contraire, restent, à toutes les époques de leur vie, en société innombrable,
ANNELÉS. —- NÉVROPTÈRES. 89
composée de trois ou quatre sortes d'individus : des mâles, des femelles et des neutres, qui, comme
chez les Abeilles et les Fourmis, servent à l'éducation des jeunes individus. Ces Termites, qui,
dans certaines parties de l'Afrique, forment avec de la terre ces énormes demeures dans lesquelles
elles logent, se trouvent aussi en Europe, et ce sont eux qui, aux environs de la Rochelle, font
beaucoup de mal aux constructions en se logeant dans les bois de charpentes et en les minant pres-
que complétement, à l'exception de la couche ligneuse extérieure qu'ils conservent pour s’en faire
un abri. Outre ces ennemis, l’homme a encore à redouter quelques autres Névroptères; en compen-
sation, quelques-uns d’entre eux lui sont utiles en détruisant un grand nombre d’Insectes, et, dans
quelques pays, on a su utiliser ces masses énormes d'Éphémères qui apparaissent comme des nues
dans certaines circonstances, et qui couvrent le Sol de plusieurs centimètres de leurs débris; en effet
on les rassemble et on s’en sert comme engrais pour améliorer le sol.
D'après ce que nous venons de dire relativement aux différences remarquables que présentent
l’organisation et les mœurs des Névroptères, on comprend qu'il est assez difficile d'établir une mé-
thode classificative bien régulière parmi ces Insectes; car il arrive que, dans toutes les combinai-
sons possibles, quelque point particulier vient toujours contrarier la méthode, et c’est ce qui est
constamment arrivé à presque tous les auteurs qui se sont occupés de cet ordre. Nous allons voir la
confirmation de ce fait en passant en revue les principales classifications proposées par divers
zoologistes.
Linné, ainsi que nous l'avons déjà dit, subdivisait les Orthoptères en Odonates et Synistrates, et
y réunissait quelques genres qui en ont été éloignés depuis. Les deux subdivisions du célèbre au-
teur du Systema naturæ, quoique encore adoptées aujourd'hui par quelques entomologistes, ne
nous semblent pas nécessaires, et nous ne les admettrons pas.
Latreille (Familles naturelles du Règne animal, et 2° édit. du Règne animal) partage les
Névroptères en trois familles : 1° les Suguciconnes, caractérisés par leurs antennes en forme d’alêne,
guère plus longues que la tête, de sept articles au plus : le dernier ayant la forme d’une simple soie,
et par ses mandibules, ainsi que ses mächoires ergièrement couvertes par le labre et la lèvre, et
correspondant aux Odonates et Ephemera de Fabricius, et comprenant les grands genres des Libel-
lules, Æschnes et Éphémères: 2° PLaniPennes, qui présentent des antennes toujours composées d’un
grand nombre d'articles, plus longues que-la tête, des mandibules très-distinctes, et des ailes infé-
rieures égalant presque les su périeures en grandeur, correspondant aux Synistrates de Fabricius, et
renfermant les groupes génériques des Panorpes, Myrméléon, Ascalaphes, Hémérobes, Semblis, Ter-
mites, Psoques et Perles; et 3° Prices, qui ont les ailes inférieures ordinairement plus larges
que les supérieures, plissées dans leur longueur, n’offrant plus de mandibules, et qui comprennent
presque exclusivement le genre Phryganes et les divers groupes qui en ont été démembrés.
M. Aug. Brullé, dans la partie entomologique de l'Expédition scientifique en Morée, modifie
très-profondément la classification de Latreille. Il subdivise les Névroptères en quatre sections aux-
quelles il donne le nom d'ordres : 1° les DicrvorrÈres correspondant à la famille des Subulicornes,
et, en outre, au genre Perla; 2° les Isoprères, renfermant les Termes; 3° les Tricuoprères, analo-
gues à la famille des Plicifennes; 4° les NévroPrères, comprenant tous les autres genres de l’ancien
ordre de ce nom. Cette méthode, qui avait le désavantage de multiplier outre mesure les divisions
de premier ordre, n’a pas été adoptée.
M. Pictet (Annales des Sciences naturelles et Introduction à une Histoire naturelle générale ei
particulière des Névroptères) a proposé quelques changements qui semblent rendre plus naturelle
la classification des Insectes de cet ordre; pour lui, les Névroptères sont partagés en six grandes
familles : Termiens, Perliens, Libelluliens, Myrméléoniens, Panorpiens (division CAE élevée .
au rang de famille) et Phryganiens.
M. Burmeister (Handbuch der Entomologie, t. HI) a fait beaucoup plus de modifications, comme
nous aurons occasion de le monter, à la méthode de Latreille, et il subdivise les Névroptères en
cinq familles, celles des Corredentia, Subulicorna, Pleéoptera#Trichoptera et Plani, ennia.
Dans son Histoire naturelle des Névroptères faisant partie des Suites à Buffon, de l'éditeur Roret
(Paris, 1842), M. le docteur Rambur indique une nouvelle disposition des Insectes qui nous occu-
pent, disposition ayant quelque rapport avec celles précédemment exposées, mais en différant aussi
sous quelques points de vue. Get auteur partage les Névroptères en huit tribus et dix-huit familles,
84 HISTOIRE NATURELLE.
de la manière suivante : 4° tribu, Cornopanrs, divisés en deux familles : Termitides et Embides;
2° tribu, Psccines; familles : Conoptérygides et Psocides; 3° tribu, Onoxares (en partie les Subuli-
cornes); familles : Libellulides, Æschnides, Gomphides, Agrionides; 4° tribu, AcarHes (une partie
des Subulicornes), famille : Éphémérides; 5° tribu, Prampenxes, familles : Panorpides, Némopté-
rides, Myrméléonides, Nymphides, Hémérobides et Mantispides; 6° tribu, Semweuines, famille :
Semblides; T° tribu, Perupes, famille : Perlides; et 8° tribu, Tricuoprères, famille : Phryganides.
Enfin M. Émile Blanchard, qui, dans son Histoire des Insectes de Duménil, suivait la méthode
de M. Pictet, profitant plus tard des travaux des entomologistes modernes, a donné une elassifica-
tion nouvelle, en 1845, dans l'Histoire des Insectes, publiée par Didot. Dans cette méthode, les Né-
vroptères sont divisés en deux sections : Hyazoprènes, à ailes larges, membraneuses, parcourues
par des nervures transversales (huit tribus : Termiens, Embiens, Psociens, Perliens, Éphémé-
riens, Libelluliens, Myrméléoniens et Raphidiens), et TricnoprÈres, à ailes membraneuses : anté-
rieures poilues, offrant des nervures branchues, sans réticulations transversales; à bouche impropre
à la mastication, et à mandibules très-rudimentaires (tribu unique, Phryganiens). Nous adopte-
rons presque complétement cette classification; seulement nous indiquerons sous le nom de familles
les diverses tribus de M. E. Blanchard; nous ne les caractériserons pas actuellement, devant les
faire connaître bientôt complétement.
CT 1m
(En,
LIEU,
— —
Fig. 78. — Libellule métallique. Fig. 79. — Agrion brun. Fig. 80. — Hémérobe de Palisot.
(Larve.) (Femelle.) (Mâle.)
+
Le nombre des genres n’est pas très-considérable, et beaucoup des groupes créés récemment peu-
vent rentrer comme sous-genres dans les divisions typiques anciennes. Quant à la distinction des
espèces, elle est plus avancée que celles des groupes supérieurs; cependant cette branche de l’Ento-
mologie réclame encore des travaux monographiques semblables à ceux que M. Pictet a donnés sur
les Phryganes et les Éphémères, à celui de M. Ed. de Selys-Longchamps sur les Libellules d'Europe,
à ceux de ce dernier auteur et de M. Hagen sur les Gomphines, etc. Quoi qu'il en soit, un grand
noibre d'espèces, tant européennes qu’exotiques, ont été décrites dans les ouvrages de Fabricius,
de Latreille, de MM. Brullé, Burmeister, Blanchard, Rambur, de Selys, etc., que nous avons cités
en parlant des classifications; en outre, M. C. Duméril, dans sa Zoologie analytique et dans le Dic-
lionnaire des Sciences naturelles; Stephens, dans le British Entomologie; M. Guérin-Méneville,
dans l’Iconographie du Règne animal, et beaucoup d’autres entomologistes, tels que MM. Boisdu-
val, Toussaint Charpentier, Coquebert, Curtis, Dale, Donovan, Drury, Fischer de Waldheim, Boyer
de Fonscolombe, Guilding, Harris, Klug, Kirby, Leach, Al. Lefebvre, Olivier, Palisot-Beauvois,
Perty, Rossi, Stoll, Schæffer, Schranck, Vander-Linden, Wesmaël, Westwood, ete., en ont fait con-
naître dans diverses publications. L'étude des mœurs et des métamorphoses, commencée par les de
Géer, Geoffroy, Swammerdam, etc., n’a pas élé négligée dans ces derniers temps, et M. Léon Dufour,
ainsi que quelques autres zoologistes, a donné quelques détails anatomiques importants.
ANNELÉS. —— NÉVROPTÈRES. 85
PREMIÈRE FAMILLE. — TERMIENS.
Cetté division ne renferme que le seul genre TERMITES ou TERMÉS (Termes, Linné), qui présente
des particularités de mœurs très-curieuses, et elle a pour caractéristique : téte grosse, arrondie, por-
tant trois yeux lisses sur le front; mandibules fortes, cornées, trigones, déprimées, ayant leur ex-
trémité terminée en pointe aiguë, et leur côté interne armé de deux outrois dents pointues; palpes
fiiformes : maæillaires assez longs, de cinq articles presque cylindriques : les deux premiers très-
courts et le dernier le plus long de tous : labiaux plus courts que les autres, de trois articles seule-
ment; labre «llongé, quadrifide; antennes filiformes, de la longueur du corselet, insérées devani les
yeux, d'environ dix-huit articles : le premier grand, et les deuxième, quatrième et cinquième plus
courts que les suivants; corselet presque carré ou en forme de demi-cercie; ailes à peu près égales,
couchées horizontalement sur le corps, très-longues et presque diaphanes, n'ayant que très-peu de
nervures qui ne forment pas un réseau distinct; pattes courtes: jambes cylindriques, allongées,
gréles, avec deux ou trois épines à leur extrémité; abdomen en carré long, terminé par deux petites
pointes coniques, composée de deux articles; outre des müles et des femelles, des individus impro-
pres à la reproduction.
Les Termites, vulgairement désignés sous les dénominations de Fourmis blanches, Poux de bois,
Vagvagues, Carias, ete., forment, par leur genre de vie, une anomalie parmi les espèces de l'ordre
des Névroptères, et en même temps présentent, par leurs mœurs et leurs habitudes, quelque chose
d’assez semblable à ce qui a lieu chez les Abeilles et surtout chez les Fourmis, parmi les Hymérop-
tères. En effet, comme les derniers Insectes que nous venons de nommer, ils vivent en réunions
très-nombreuses et se construisent des demeures parfois fort étendues.
D'une manière générale, les Termites ont, au moins à l’état parfait, le corps oblong et assez dé-
primé; les yeux sont situés sur les parties latérales de la tête et assez globuleux; les antennes sont
courtes et légèrement moniliformes. La couleur blanche de ces Insectes et leurs réunions nombreuses
leur ont valu le nom de Fourmis blanches ainsi que nous venons de le dire. On a observé cinq no-
mifications de l'espèce chez les Termites; ce sont ce:les : 1° des mäles, 2° des femelles, 3° des soldats
ou neutres, 4° des ouurières, que l’on regarde parfois comme des larves, et 5° des nymphes.
Le mäle est allongé, déprimé, et, si ce n'est qu’il est d'un blanc jaunâtre et comme étiolé, il a
quelques rapports avec celui des Perles et des Semblides; sa tête est à peu près arrondie, avec le
museau ou la bouche saillant, porté presque verticalement; les antennes sont légèrement en soie;
jes yeux latéraux, globuleux, saillants; trois stemmates ou yeux lisses, disposés en triangle, se
voient sur le front; les pattes sont assez longues; les ailes ont trois fois plus de longueur que l’abdo-
men qu’elles recouvrent et au-dessus duquel elles forment une sorte de toit plan, et se recouvrant
elles-mêmes, et, quand elles sont étendues, se développant et prennant la forme d’un ovale al-
longé : ces ailes semblent très-peu adhérentes, et, comme chez certaines Fourmis, se détachent
très-facilement; on prétend même, ce qui est peu probable, que, dans le danger, ces Insectes s’en
débarrassent et les arrachent, afin de pouvoir se soustraire plus facilement par la fuite : leurs ner-
_vures sont petites, peu ramifées, et les longitudinales sont peu marquées; l'abdomen est appliqué
contre le corselet, arrondi à sa pointe.
La femelle, qui ressemble beaucoup au mâle et qui est également pourvue d'ailes avant l’accou-
plement, perd généralement ces organes quand elle est fécondée, soit qu’ils tombent naturelle- ‘
ment, soit plutôt que les ouvrières les leur arrachent; alors son ventre devient énorme, au point
qu'il acquiert, rapporte Sparrman, quinze cents fois et même deux mille fois le volume du reste de
son corps; ce ventre ressemble à une vessie blanche avec des taches brunes en travers et des bords
inégaux, ondulés. À l’époque de la ponte, elle produit sans interruption ses œufs avec une telle
rapidité, qu’on suppose qu’elle en pond un par chaque seconde, et Sparrman prétend qu'il est cer-
taines femelles qui peuvent donner plus de quatre-vingt mille œufs par vingt-quatre heures. Gette
énorme multiplication est probablement exagérée; cependant il est certain que les Termites se pro-
pagent en très-grand nombre.
86 HISTOIRE NATURELLE,
Les neutres ou soldats, comme les appellent tous les voyageurs, diffèrent beaucoup des mäles et
des fenelles. Leur tête est énorme et souvent plus grande que le reste du corps; leur bouche est ar-
mée de deux fortes mandibules croisant l'une sur l’autre; leur corps est beaucoup plus épais et
plus robuste que celui des Insectes reproducteurs, et ils sont constamment munis d’ailes; selon
M. Rambur, ils n’offriraient pas traces d’yeux : ce qui est remarquable, car c'est à eux qu'est con-
fiée la garde spéciale de la demeure commune. Ils veillent en sentinelles, repousseut les agressions
des animaux étrangers, ce qu'ils peuvent faire plus facilement que les autres, en raison de leurs
grandes mandibules qui sont des armes redoutables; en outre, ils excitent les ouvrières au
travail.
Ces dernières, qui pour Latreille, Kirby et la plupart des entomologistes, sont regardées comme
les larves; ressemblent plus aux mâles et aux femelles que les soldats par leur conformation géné-
rale, quoique cependant elles manquent entièrement d'ailes; elles sont aussi beaucoup plus petites,
leur corps est plus mou, leur tête est assez large et arrondie, portée verticalement, avec de courtes
mandibules, et les yeux, de même que les ocelles, paraissent manquer. Ces ouvrières sont les archi- :
tectes des termitières (pour employer, avec M. C. Duméril, une expression qui corresponde à celle
de fourmilière); elles vont à la recherche de la nourriture, prennent soin des œufs et des jeunes;
en un mot, elles remplissent toutes les fonctions des neutres ou ouvrières chez les Fourmis. Elles
constituent la partie la plus nombreuse de l'habitation, dans certains nids on trouve la proportion
de cent larves contre un neutre; dans quelques races elles n'atteignent que quelques millimètres
de longueur, et vingt-cinq individus pèseraient à peine un grain, tandis que les neutres ont six à
huit lignes de longueur.
Les nymphes, enfin, ressemblent extrêmement aux larves ou ouvrières, dont elles ne différent
guère que par la présence de quatre rudiments d’ailes tuberculiformes. On ne sait si ces nymphes
partagent les travaux des larves; mais elles doivent rester assez longtemps sous ce dernier état. En
effet, on suppose que les métamorphoses, pour être complètes, exigent deux années d'existence, car
on peut observer en même temps dans une termitière des individus ailés, des individus avec des
rudiments d'ailes et de e jeunes larves.
Peu de temps après qu'on a remarqué des nymphes dans les nids de Termites, on voil paraître
les mâles en grande abondance. Ils s'envolent le soir ou pendant la nuit, et c’est alors que s'effectue
l'accouplement. Les ailes de ces Névroptères étant séchées par l’action de la chaleur des rayons du
soleil levant, ces organes se détachent, dit-on, des corps, et les mâles ainsi que les femelles tombent
à terre, et, au rapport de plusieurs voyageurs, les couples sont recueillis par les ouvrières, qui les
enferment dans une loge séparée; mais, selon Latreïlle, ce qui semble beaucoup plus probable, les
femelles sont seules l'objet de ce soin. La femelle, placée dans une cellule dont l'orifice est assez ré-
trécie pour qu'elle n'en puisse plus sortir, est nourrie régulièrement par les ouvrières, et là elle
pond les œufs innombrables dont sortira bientôt une nombreuse progéniture dont on prend le plus
grand soin.
Toutes ces remarques sont principalement dues à de savants voyageurs, tels que Smeathman et
Sparrman, et à des observateurs consciencieux, comme Konig et de Géer; mais, dans ces derniers
temps, quelques naturalistes, et surtout M. Guérin-Méneville, ont élevé des doutes sur la nature des
diverses sortes d'individus qui composent les sociétés des Termites. On a regardé comme très-peu
probable que des larves soient appelées à travailler et à prendre soin d'individus plus vieux qu'elles,
car c’est en opposition avec tout ce qui a été vu chez les Hyménoptères. On a supposé qu’il pourrait
exister deux modifications parmi les individus neutres; ceux que l’on désigne sous ce nom dans la
plupart des ouvrages, ou sous celui de soldats, seraient, dans cette hypothèse, des mâles improprés
à la reproduction, et ce que l’on regarde comme des larves seraient des individus femelles encore
vierges ou plutôt également impropres à la reproduction, de même que les neutres ou ouvrières
chez les Fourmis, les Abeilles, ete. Mais ceci n’est qu'une simple conjecture, qui n'est fondée ni sur
l'observation directe ni sur l'anatomie, et qui, selon M. Émile Blanchard, est évidemment con-
traire à la vérité, car, dit l’auteur que nous venons de citer, à l'automne on apercoit des individus
très-semblables à ces larves, et qui présentent des rudiments d'ailes. Assez récemment, M. le doc-
teur Lespès a présenté à l’Académie des Sciences quelques observations qu’il a été à même de re-
cueillir aux environs de Bordeaux sur les mœurs de nos Termites qu'il a pu étudier dans leur ré-
+
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 87
publique même: nous renvoyons le lecteur à ce travail, qui offre quelques faits nouveaux et qui
éclaireit la question dont nous venons de parler.
Les Termites, habitant seulement les régions chaudes du globe et particulièrement entre les tro-
piques, ont été assez peu observées, et la difficulté que l’on a pour se procurer dans l'alcool les dif-
férentes sortes d'individus en assez grande quantité et dans un état satisfaisant de conservation,
n’ont pas permis encore de faire des recherches anatomiques complètes sur ces Insectes. Ils sont
surtout communs dans les parties australes de l'Afrique, principalement aux environs du cap de
Bonne-Espérance et au Sénégal; on en trouve également à l’île de France, dans plusieurs parties de
l’Amérique méridionale, et diverses espèces, toutes de petite taille, sont assez répandues dans les
parties méridionales de l'Europe et dans certaines contrées du bord de la mer.
Ces Insectes constituent, comme nous l’avons dit, des sociétés immenses, et ils forment des nids
d'une dimension colossale, comparativement à leur taille; mais la forme et l'architecture de ces de-
meures varient beaucoup selon les espèces. L'intérieur de ces nids est divisé en une foule de loges
séparées entre elles par des cloisons et communiquant par des galeries. Toutes ces loges ne sont
pas de la même grandeur, car il semble y en avoir de particulières, selon chaque sorte d'individus.
Ce qu'il y a surtout de trés-remarqueble, c’est que jamais les Termites ne travaillent à découvert;
les uns établissent leurs demeures dans la terre, dans les arbres, souvent dans les poutres et les
boiseries des habitations de l’homme; les autres ont des nids extérieurs, mais toujours sans Issue
apparente. Ces habitations sont parfois très-élevées au-dessus du sol et ont la forme, soit de pyra-
mides, soit de tourelles recouvertes par une toiture solide; et ces monticules, ordinairement réunis
en grand nombre dans les pays peu habités, ont l'aspect de huttes de sauvages et ressemblent à un
petit village. Les nids que quelques espèces construisent sur les branches d'arbres ont une forme
globuleuse et sont souvent assez grands. Toutes les fois que les ouvrières ont besoin d’atteindre un
endroit plus ou moins élevé de leur nid, elles construisent aussitôt une galerie communiquant d’un
point à l’autre, et par ce moyen elles ne se montrent pas au dehors. Ce fait, qui a été rapporté par
plusieurs voyageurs, a été vérifié de nouveau à la Rochelle par M. E. Blanchard; il a vu que des
tubes formés par l’agrégation de divers matériaux agglutinés étaient suspendus aux poutres des
caves de la Préfecture, étaient destinés à établir des communications avec le sol et servaient de che-
mins couverts aux Termès. Les neutres ou-soldats sont habituellement postés contre les parois in-
ternes de la surface extérieure, de manière à paraître les premiers, dès qu'on fait une brèche à leur
demeure, et à la défendre contre les agresseurs au moyen de leurs puissantes mandibules.
Konig rapporte que les nègres sont très-friands de Termites, qu'ils les préparent de différentes
manières pour l'alimentation, et qu'ils savent les conserver comme provisions d'hiver. Mais, à côté
de ce faible avantage que l'homme peut en tirer, à côté aussi de l'utilité qu'ils peuvent avoir en dé-
truisant un grand nombre d’Insectes dont ils font leur proie, les Termiens sont excessivement nui-
sibles. C’est ainsi qu'ils détruisent un grand nombre d’arbres vivants, et surtout que, venant établir
leurs demeures dans les bois faconnés, ils les minent de telle sorte, qu'à un moment donné les con-
structions qu'ils soutiennent viennent à crouler. Une espèce, le Termite lucifuge, qui se trouve
depuis longtemps dans l'Europe méridionale, et qui s’est assez communément propagé en Gascogne,
et s'est aussi tellement multiplié à Rochefort, dans les ateliers et les magasins de la Marine, qu'on
ne peut réussir à la détruire, et qu'elle y fait de très-grands ravages. Elle n'est pas moins abon-
dante à la Rochelle, et Audouin a présenté un tableau effrayant du mal qu'elle fait et des craintes
qu’elle doit inspirer pour l'avenir. Des maisons, des bâtiments entiers, sont minés jusque dans leurs
fondations, et il n’est pas rare que des planchers s’écroulent, que des rez-de-chaussée s'enfoncent
dans les caves, lorsque les Termites ont ruiné toute Ja charpente. Ce qu’il y a de terrible dans les
ravages de ces Insectes, c’est que jamais on ne s’en aperçoit à l'extérieur : ils ménagent toujours la
superficie, et c’est seulement quand tout l'intérieur est rongé et sillonné de galeries en tout sens
que le bois se rompt. Audouin a rapporté au Muséum, et on peut voir dans les galeries de grandes
colonnes qui étaient dans une salle à manger, à Tonnay-Charente; elles sont taraudées de toutes
parts; mais la couche extérieure du boisest épargnée, ainsi que la peinture qui la recouvre. Du linge,
placé dans des armoires, a été souvent mâchuré par les Termites. A la Rochelle, l'hôtel de la Pré-
fecture est envahi par ces animaux; une partie des archives a été totalement détruite, et aujourd'hui
on est obligé de les conserzer dans des boîtes de zinc. Nous pourrions citer des ravages semblables
88 HISTOIRE NATURELLE.
produits dans d’autres pays et principalement dans les parties méridionales de l'Europe, en Afri-
que, ete. Nous ajouterons seulement qu'une espèce nuit beaucoup aux oliviers, surtout en Espagne :
c’est le Termite à cou Jaune (Termes flavicollis, Fabr.).
On a beaucoup cherché les moyens que l’on pourrait employer pour détruire ces Névroptères si
nuisibles, ou tout au moins pour en diminuer le nombre; mais nous devons avouer qu’on n’est ar-
rivé à rien de bien satisfaisant, quant à la destruction directe des Termites. On a proposé quelques
procédés qui pourraient diminuer le mal, et qui consisteraient à faire subir aux bois de charpente
des préparations qui empècheraient les Termites de les attaquer : la dépense, dans ce cas, ne dépas-
serait-elle pas la perte? Faut-il laisser à la nature seule la faculté de limiter le nombre de ces êtres
nuisibles? C’est une question qui a été posée par quelques naturalistes, et ce que nous voyons au-
jourd’hui semble en partie leur donner raison. En effet, les Termès, si communs et dès lors si nui-
sibles à la Rochelle, Rochefort, etc., il y a une quinzaine d’années, sont beaucoup moins abondants
actuellement et font également beaucoup moins de ravages.
Fig. 81. — Termite belliqueux. Fig. 82. — Termite belliqueux. Fig. 83. — Termite obscur.
(Mäle.) (Neutre.) (Femelle avant l’accouplement.)
Nous avons dit que les Termiens ne renfermaient que le seul genre Terwrre ou TERNÈS, qui à
recu de Linné la dénomination latine de Termes, et que les entomologistes modernes n’ont pas
cherché à subdiviser ce groupe, probablement faute de matériaux suffisants. Tout ce que nous avons
dit des Termiens, caractéristique et histoire des mœurs, se rapportant dès lors aux Termites pro-
prement dits, nous n’aurons plus que quelques mots à dire sur ces Insectes.
On connaît vingt-cinq à trente espèces de Termites; mais il est certain que le nombre des
cspèces existantes est infiniment plus considérable. Nous ne citerons pour preuve que ce que
nous voyons dans l’histoire des Névroptères de M. Rambur. Cet auteur, recherchant les espèces des
collections de Paris seulement, a pu en faire connaître plus de dix nouvelles. Mais la distinction spé-
cifique est difficile, ce que l’on comprend facilement, puisque, dans une seule et même espèce, il y
a cinq types de forme différente, et il doit en résulter que plusieurs des espèces admises par les au
teurs sont purement que nominales. .
Le type, le Termire BELLIQUEUXx (Termes bellicosus, Smeathman), probablement le T. fatale de
Linné, est surtout remarquable par ses nids, qui n'ont quelquefois pas moins de 3 mètres à 3%,50
de hauteur. Ces demeures sont de forme conique, ayant sur les côtés de nombreuses tourelles égale-
ment coniques; elles sont construites avec une sorte d'argile et se trouvent bientôt recouvertes
d'herbes; leur dureté est telle que les taureaux sauvages peuvent monter dessus sans les ébranler,
et Smeathman rapporte qu'il est monté une fois à l'extrémité de l’une d'elles avec quatre de ses
compagnons, pour voir si queique navire ne pourrait être aperçu. C’est en Afrique et particulière-
ment auprès de la ville du Cap que l’on trouve le Termite belliqueux.
Les Termes atrox et mordax de Smeathman auraient des nids consistant en piliers cylindri-
ques. Une autre espèce africaine, propre à l'Égypte, est le T. ochraceus, Burmeister.
Les T. pallidus, mancicianus, Ramb., sont de l’île de France; les T. dirus, Klug, dubius, cepha-
lotes, Rambur, de l'Amérique du Sud, etc.
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 89
Enfin on en décrit deux espèces européennes. Tel est surtout le Tenwire Luciruce (Termes luci-
fugus, Rossi), dont nous avons déjà parlé et qui est petit, d’un noir brillant, au moins le mâle,
avec les deux derniers articles des antennes d’un roux pâle, les ailes brunâtres, un peu transpa-
rentes, ayant le côté marginal noirâtre, les cuisses noires, les jambes roussâtres et les tarses d’un
roux clair. L'autre espèce est le Termire À cou sauxe (Termes flavicollis, Fabr.), long de 0,012 à
0%,0145, d’un brun foncé, avec la bouche et les antennes jaunâtres, ainsi que le corselet et les pattes:
habite le midi de l'Europe, vit sur les plantes et nuit à la vigne. Il semble, au reste, comme le fait
remarquer le docteur Lespès, que ces deux espèces ne sont pas les seules propres à l'Europe, et
qu'il faudrait les étudier de nouveau. Une espèce que nous figurons est le T. orscur.
\
DEUXIÈME FAMILLE. — EMBIENS.
Le genre Embia, et deux autres groupes qui ne doivent peut-être pas en être distingués, tout
en offrant quelque rapport avec les Termites, est devenu pour MM. Burmeister, Ém. Blanchard, le
docteur Rambur, etc., sous les dénominations d'Embidæ, Embides et Embiens, une famille ou
tribu distincte de Névroptères, ayant pour caractères : corps plus gréle que celui des Termiens;
téte assez large, presque ovale, beaucoup plus longue que celle des Termites, et ressemblant un peu
à celle des Raphidiens; yeux médiocrement grands, à réseaux granuleux; antennes non amincies à
l'extrémité, filiformes, médiocrement longues, à articles assez longs et en nombre variable; labre
arrondi; mandibules fortes, courtes, dentées; mâchoires à peu près membraneuses, gréles, bifides
et aiguës à leur extrémité; palpes : maxillaires de cinq articles, les quatre premiers coniques, le
dernier ovalaire : labiaux de trois articles seulement; lèvre bilobée; corselet beaucoup plus étroit que
la tête; ailes persistantes, une fois aussi longues que l'abdomen, à nervures plus saillantes que celles
des Termites; abdomen étroit, linéaire, terminé par deux petits appendices composés de dix arti-
cles; pattes assez longues, à cuisses et jambes très-élargies et comme creusées extérieurement, sur-
tout les antérieures; tarses de trois articles : antérieurs à premier article extrêmement dilaté, en
forme de cuiller, et les deux autres gréles : intermédiaires et postérieurs à articles tous gréles et
linéaires. ‘
Les Embiens, peu nombreux en espèces encore incomplétement connues, sont de singuliers Né-
vroptères, offrant de grandes dissemblances avec les autres Insectes du même ordre, mais ayant un
peu l'aspect général de petits Termiens, dont ils diffèrent cependant par leur tête beaucoup plus
large que le corselet, par leurs pattes dilatées et leurs filets abdominaux, qui leur donnent un as-
pect assez différent. Leurs larves ressemblent beaucoup aux Insectes parfaits, malgré l’absence
d’ailes qui les en distingue. Ils ne forment pas d'associations, vivent isolés, et il n’y a chez eux que
des mâles et des femelles, et pas de neutres comme dans les Termites. C’est seulement dans ces der-
niers temps qu'on en a fait connaître quelques espèces, car jusqu'alors aucun auteur ne les avait
décrites. Une seule espèce, représentée dans le grand ouvrage d'Égypte, et qui est devenue typique,
demeura longtemps sans description, car, si Latreille en fit son genre Embia, il ne la caractérisa
cependant pas.
Le groupe principal est celui des EMBIA, Latr., qui doit être caractérisé de la même manière que
la famille tout entière, et qui ne comprend que quatre ‘espèces. suivant M. Rambur; savoir : les
Embia Solieri, Ramb., découverts aux environs de Marseille; Ægyptiaca, Blanch., d'Égypte; La-
treillii, Ramb., de Bombay, de l'île Maurice et de Madagascar, et Klugi, Ramb., du Brésil. Le type,
le seul dont nous voulions parler, est l'Eure »'Écypre (Embia Ægyptiaca, Blanch.; E. Savignyi,
Westw.), figurée.par Savigny dans la Description de l'Égypte, Névroptères, pl. 2, fig.9 et 10, long
de 0,015 à 0,020, les ailes fermées, et d’une envergure de près du double; corps d'un roux fer-
rugineux; tête de cette dernière couleur et très-déprimée; antennes velues, plus foncées à leur ex-
trémité; corselet ayant sur les côtés d'assez longs poils grisâtres; ailes d’un gris bleuâtre sombre,
un peu transparentes, ayant le bord de leurs nervures plus ombré que la partie centrale, de manière
à former des nervures alternativement plus colorées et plus päles; pattes roussâtres, velues, ayant
les bords des cuisses antérieures d’un brun noirâtre; habite l'Égypte.
A. 12
90 HISTOIRE NATURELLE,
Deux genres que l’on regarde comme n'étant que des subdivisions des Embies, s'ils n’en consti-
tuent même pas seulement de simples espèces, sont les OLYNTHA, Gray, qui auraient rente articles
aux antennes, et les OLIGOTOMA, Westwood, qui n’en auraient que.onxe, tandis que les véritables
Embia en auraient dix-sept. Mais, comme le fait remarquer M. Ém. Blanchard, et quoique ces In-
sectes soient très-rares dans les collections, on connaît quelques faits qui tendent à montrer que le
nombre des articles des antennes est trés-variable chez les Embiens, et que cette particularité ne
doit servir que comme caractère spécifique.
TROISIÈME FAMILLE. — PSOCIENS.
x
Le genre Psoque de Fabricius, et quelques groupes qui en ont été démembrés ou qui s’en rappro-
chent, constituent aujourd’hui la famille des Psocexs, composée de Névroptères de petite taille,
principalement remarquables par leur téte très-grande comparativement à la petite dimension de
leur corps; par leurs antennes très-longues, sétacées, formées le plus souvent de dix à treize arti-
cles et quelquefois d’un plus grand nombre; par leurs pattes longues, gréles, d'une ténuité extrême;
leurs tarses très-petits, de deux ou trois articles, et par leurs ailes en toit dans le repos, très-peu
réticulées ou seulement veinées, souvent courtes ou même tout à fait rudimentaires.
Fig. 84, — Psoque biponctué. -
Ces Insectes habitent sur les troncs des arbres, les vieux murs et les pierres couvertes de mousses
ou de lichens; ils sont extrêmement agiles et courent avec la plus grande vivacité. Ils semblent, en
général, fuir la lumière, et plusieurs d’entre eux, les aptères principalement, vivent dans des re-
traites plus ou moins profondes, dans les caves, sous les débris de végétaux et jusque dans les
chambres habitées, au fond des armoires, dans les papiers, les livres, ete. On ne sait pas positive.
ment quelle est leur nourriture; mais il est probable qu'ils vivent de petits fragments de végétaux
plus ou moins en décomposition, et qu'ils recherchent aussi les animalcules qu'ils rencontrent dans
la terre. Les larves et les nymphes ne diffèrent des Insectes parfaits que parce que les premières
manquent complétement d'ailes, et que les secondes en ont des rudiments; on les rencontre, du
reste, dans les mêmes conditions d'existence, et il n’est pas rare de trouver une même espèce à la
fois sous ses trois états de développement, surtout vers la fin de l’été ou au commencement de l’au-
tomne.
Cette femille est d’une très-petite étendue, et les espèces de chaque genre sont peu nombreuses;
à l'exception de deux ou trois espèces américaines, on n’en a encore signalé qu’en Europe. Mais il
est probable qu’il en existe beaucoup dans les pays étrangers, et que plusieurs espèces indigènes ont
échappé aux recherches des observateurs. Les quelques groupes de Psociens ont été partagés en deux
divisions qui diffèrent beaucoup entre elles et que quelques auteurs regardent même comme des
familles particulières. à
Dans les uns, les Coniopréryeines, Burm., la lèvre est entière, les palpes labiaux sont de trois ar-
ticles sécuriformes ou conoïdes, les maxillarres de cinq articles : le dernier gréle et très-long; les
antennes sont presque filiformes, à articles nombreux, très-serrés; les yeux sont arrondis, finement
ANNELES. — NÉVROPTÈRES. 91
réticulés; 1 n'y a pus d'ocelles; les pattes ont des tibias larges, les tarses sont composés de cinq ar-
ticles, ete. On ne range dans cette subdivision que le genre CONIOPTÉRYX, Haliday, renfermant des
espèces qui, par l'aspect général de leur corps, ressemblent un peu aux Phryganes, et qui, en même
temps, ont, à beaucoup d’égards, des affinités évidentes avec les Psoques, et qui ont été placées,
tantôt avec les Phryganes, tantôt avec les Hémérobes. Ce sont de petits Insectes habitant sur les buis-
sons et sur les arbres, ayant les ailes et le corps couverts d’une poussière blanche; leur tête est très-
molle, et la dessiccation produit sur elle des excavations. M. Burmeister en décrit-trois espèces, dont
le type est le Coniopteryx tineiformis, Curtis, long d'environ 0",003, avec les ailes à peu près de la
même longueur; il se trouve assez communément, pendant tout l'été, dans diverses parties de l’Eu.
rope et surtout en Allemagne, en Angleterre et en France, où il n’est pas rare. Il vole pendant la
plus grande chaleur et quand le soleil est le plus brülant, et se repose fréquemment sur les troncs
d'arbres; sa larve est d'un rose rougeâtre, avec une tache noire sur le dos. M. Haliday pense qu’elle
mange les feuilles des végétaux; mais M. Burmeister, se basant sur la petitesse de ses mâchoires,
regarde cela comme douteux.
Dans les autres, les Psocines, Burm., on range trois ou quatre genres qui se distinguent particu-
lièrement par leur corps très-muu, difficile à saisir, leur téte assez grosse, plus ou moins bossue
sur le front, rappelant un peu celle de certains Orthoptères; palpes : labiaux très-gréles ou même
avortés : mazxillaires assex épais, cylindriques, de cinq articles, le dernier et le troisième les plus
longs; le labre grand; les antennes longues, composées d’un petit nombre d'articles, le premier et
le second courts, les autres longs; le corselet devenant presque insensible en dessus; les pattes lon-
ques, surtout les tibias postérieurs, ce qui leur donne plus ou moins la faculté de sauter; tarses de
deux ou trois articles, ayant le premier deux ou trois fois plus long que le dernier, onglets simples,
n'ayant pas de pelotes sensibles; ailes assex larges, n'offrant que trois nervures basilaires bien
marquées; abdomen court, épais, mou, s'atrophiant presque complétement par la dessiceation. En-
core très-petits, ces Insectes, dont quelques-uns sont connus depuis longtemps, n’ont été signalés
qu'en Europe.
Le genre principal est celui des PSOQUES (Psocus, Fabricius) :-téle épaisse, à front bossu; yeux
petits; antennes longues, gréles; palpes maxillaires, à dernier article obtus, plus épais et plus long
que le précédent; tarses n'ayant que deux articles distincts : le premier à peu près du double de
longueur que le second. Les Psoques se trouvent sous les écorces, sur les troncs d'arbres, sur les
vieilles murailles, etc. On en connaît une vingtaine d'espèces, toutes européennes; mais il est pro-
bable que beaucoup d’entre elles ont échappé aux observateurs par leur petitesse et parce qu’elles
sont difficiles à saisir. La différence qui existe entre les nervures des ailes permet de grouper les
espèces dans plusieurs divisions sous-génériques, mais non pas d’en former des genres, ainsi que
l'a pensé M. Curtis en établissant le groupe des Cœaxius, qui n’a généralement pas été adopté. Le
type est le Psoque B1poNGTuÉ ou Psyice pes PiERRES, Geoffroy (Psocus bipunctatus, Latr.), que Linné
rangeait dans le genre Hemerobius : il est long de 0",00% à 0",005, varié de noir et de jaune, avec
les ailes transparentes, pourvues d’une petite tache vers le bord marginal et d’une autre vers le
bord opposé : l’une et l’autre noirâtres, ainsi que le stigma; en outre, on voit quelques nébuleuses
noires dans leur étendue; se trouve communément dans toute l’Europe. Parmi les autres espèces
qui ont été rangées successivement dans les genres Hemerobius, Termes, Psylla, Pediculus et Phry-
ganea, nous citerons les Psocus longicornis et quadripunctatus, Fabr., lineatus. Latr., trouvés en
été dans les bois de nos environs; pedicularius, Villers, qui se rencontre habituellement dans les
maisons, et plusieurs espèces décrites par M. Rambur, tels que les infuscatus, uffinis, naso, bino-
latus, ete. ; M PR
"Des genres voisins des Psocus sont les deux suivants : 1° TIIYRSOPHORUS, Burmeister, dont les
antennes sont renflées, poilues dans leur milieu; les tarses de deux articles : le premier deux fois plus
long que le suivant. On en décrit quelques espèces propres à l'Amérique méridionale; on peut indi-
quer comme type le T. Spinolæ, Ramb., qui habite Cayenne; 2° ATROPOS, Leach., ou TROCTES,
Burmeister, dans lequel les tarses sont de trois artic'es, et qui n'offrent pas d'ailes. La seule espèce
de ce genre est l’Arnopus rrarpeur (Psocus pulsatorius, Fabr.), petit Insecte long de 0*,002, d’un
gris jaunâtre tacheté de roux ou de brun, principalement sur l'abdomen. Ce Psocide, connu vul-
gairement sous le nom de Pou, se trouve en abondance dans les’collections d'histoire naturelle,
92 HISTOIRE NATURELLE.
Ê
dans les bibliothèques, les vieux papiers, ete. Il ronge les matières qu'il trouve à sa portée et sur-
tout le papier qu'il détériore beaucoup. On a cru qu'il produisait un petit bruit à peu près analogue
au battement d'une montre, comme les espèces d’Anobium ou de Vrillette, ee qui lui fait appliquer
également le nom d’Horloge de la mort, et donner scientifiquement la dénomination spécifique de
pulsatorius.
QUATRIÈME FAMILLE. — PERLIENS,
Les Perles, Némoures et quelques autres groupes constituent la famille des Perliens, Perlides ou
Perlaires, qui a été quelquefois placée interniédiairement entre les Semblis et les Phryganes, mais
qui semble devoir plus naturellement être rangée auprès des Éphémériens et après les premiers
groupes de l’ordre des Névroptères. Chez ces Insectes, la féte est plus ou moins aplatie et présente
des mandibules et des mâchoires, ainsi que quatre palpes et des antennes sétiformes; les ailes ont
des nervures peu réticulées; elles sont pliées autour du corps et croisées de manière à donner à l'In-
secte une forme linéaire, déprimée; tarses de trois articles; crochets tursiens ayant entre eux une
pelote bilobée.
Fig. 85. — Perle à deux queues. Fig. 86 — Perle maranée.
(Insecte parfait.) (Insecte parfait.)
La forme déprimée ou linéaire des Perliens, leurs ailes pliées et roulées à peu près comme eelles
des Botys, parmi les Lépidoptères, les fait reconnaître de suite; ils se distinguent facilement des
Phryganes par la disposition des ailes, et le nombre des articles des tarses les sépare nettement des
Semblis, avec lesquels ils ont certains rapports. Quelques particularités tendent à les rapprocher
des Ephemera, et enfin, par leurs organes buccaux, ils doivent être rangés vers le commencement
de la série des Névroptères pour être disposés près des Orthoptères, avec lesquels, sous ce point de
vue, ils ont quelque analogie. En effet, les pièces de la bouche sont très-développées et de con-
sistance solide; leurs Achotee comme celles des Orthoptères, sont bilobées, caractères que l'on ne
retrouve pas chez les autres Névroptères. Le corps est aplati et d’égale largeur dans toute son éten-
due. La tête est tantôt très-déprimée, comme dans les Perla, tantôt courte et un peu arrondie,
comme chez les Nemoura. Les palpes sont longs, grêles, composés de cinq articles dans les maxil-
laires et de trois dans les labiaux. Les antennes sont longues, sétacées. Enfin les ailes sont d'iné-
gale grandeur : les antérieures oblongues, petites, et les postérieures, au contraire, larges et plissées
à leur base. L'abdomen est terminé, ‘Chez plusieurs, par deux longs filets articulés, comme dans les
Éphémères. Ces Névroptères habitent les endroits marécageux, le bord des eaux, se tenant sur les
pierres, sur les bois, sur les plantes, etc. Ce sont d’assez petits Insectes, presque toujours observés en
Europe, qui ne font en général que peu usage de leurs ailes, si ce n’est le soir. Les femelles portent
leurs œufs, qui sont brillants et de couleur noire, assez nombreux, dans une sorte de petit sac sus-
pendu à l'extrémité de leur abdomen.
Pendant longtemps, d'après une erreur de Réaumur, on a cru que les Perliens, dont l’aspect gé-
néral, comme la couleur, rappelle un peu celui des Phryganiens, subissaient, de même que ces
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 95
derniers, des métamorphoses complètes, et que leurs larves vivaient dans l’intérieur de fourreaux;
mais assez récemment M. Pictet (Annales des Sciences naturelles et Histoire des Névroptères) à fait
connaitre la vérité en ce qui concerne les métamorphoses des Perliens. Les larves vivent dans l'eau,
et paraissent préférer les eaux courantes aux eaux dormantes. On les rencontre le plus habituelle-
ment dans les rivières, particulièrement dans les endroits où le courant est le plus rapide et où l’eau
se brise contre les pierres. Elles ne nagent pas et marchent même assez lentement, en laissant trai-
ner leur ventre sur le sol ou sur la vase. Très-souvent on les voit se fixer sur des pierres à l’aide de
leurs pattes, surtout au moyen de leurs pelotes tarsiennes qui font ventouses, et y demeurent long-
temps en se balançant, sans que l'on connaisse le but de ce mouvement. Ces larves sont petites, blan-
châtres; elles sont carnassières et peuvent être privées de nourriture pendant plusieurs jours sans
périr. Elles passent tout l’hiver au fond de l’eau; c’est seulement au printemps ou même au com-
mencement de l'été qu'elles acquièrent des rudiments d'ailes et qu’elles passent ainsi à l’état de
nymphes, qui n’en diffèrent réellement que sous ce point de vue. Ces nymphes, peu de temps après,
quittent leur retraite aquatique pour aller se fixer, soit sur une pierre, soit sur une plante du rivage.
Leur peau ne tarde pas à se dessécher sous l'influence de la chaleur; cette peau se fend en dessus, et
alors l'Insecte parfait, après quelques efforts, peut se débarrasser de son enveloppe, abandonne tout
à fait cette enveloppe et prend son essor. Quelques larves offrent trois paires d'organes respiratoires
externes, mais d’autres en sont dépourvues. Toutes ont des mâchoires et des mandibules acérées,
des antennes sétacées, des tarses de deux articles, peu distincts, terminés par deux crochets, et un
corps se rétrécissant vers l'extrémité postérieure.
Ces Insectes, d’après M. Léon Dufour, présentent des particularités organiques remarquables qui
les séparent de tous les autres types du même ordre. Leur canal digestif est tout à fait droit et
n'excède pas, par conséquent, la Jongueur du corps. L'œsophage s’élargit bientôt en arrière de la
tête en une portion ovoïide correspondant au jabot et au gésier, mais toutes ces parlies ne sont in-
diquées par aucun rétrécissement. Le ventricule chylifique est garni de huit bourses gastriques, dont
deux plus grandes que les autres. L’intestin qui suit le ventricule s’élargit notablement en arrière.
Les vaisseaux biliaires sont au nombre de plus de cinquante. Les glandes salivaires sont très-déve-
loppées et constituent deux groupes de chaque côté de l’œsophage. Les organes de la génération
affectent aussi une disposition particulière; les testicules, de même que les ovaires, où cela est
même mieux marqué, se réunissent par leur porlion supérieure.
La famille des Perliens est très-limitée, au moins dans l’état de nos eonnaissances actuelles, et elle
est loin d’être aussi bien connue que diverses autres divisions du même ordre d’Insectes. Les deux
genres les plus anciennement fondés sont ceux des Perla et des Nemoura : le premier créé par
Geoffroy et le second par Fabricius; quelques groupes en ont été démembrés par MM. Newman,
Rambur, ete., et pourraient y être rapportés. M. Westwood a fait connaître un genre beaucoup plus
distinct, propre à l’Australasie. Enfin le travail le plus complet et le plus important sur les Perliens
est la monographie de ces Insectes, par laquelle M. Pictet a commencé son Histoire naturelle géné-
rale et particulière des Névroptères, ouvrage qui n'a malheureusement pas été continué.
Le genre typique de cette famille est celui des PERLES (Perla, Geoffroy), caractérisé par des
mandibules et des mächoires membraneuses, un labre court et un abdomen terminé par deux longs
filets. Ce genre est le plus nombreux en espèces de la division entière que nous étudions, on en à
décrit une cinquantaine d'espèces, qui sont européennes pour la plupart, et dont quelques-unes, très-
abondantes partout, sont faciles à distinguer. Parmi les petites différences qui existent entre elles
dans quelques points de leur organisme externe, on n’a pas manqué de trouver des caractères pro-
pres à faire de nouveaux genres; mais leur importance très-secondaire nous ehgage, de même que
M. Émile Blanchard, à ne pas les adopter et à les regarder seulement comme propres à servir à des
divisions sous-génériques. Parmi ces groupes, nous citerons seulement ceux des Isogenus, Chloro-
pterus et Pteronarcys, Newman, sur le dernier desquels nous reviendrons bientôt. Chez les Perles,
la différence qui existe entre les deux sexes est quelquefois très-considérable; les mâles de plusieurs
sont beaucoup plus grêles que les femelles, et leurs ailes sont très-courtes.
L'une des Perles les plus répandues dans notre pays est la Perce pornée (Perla marginata, Pan-
ar), longue d'environ 0,095, d'un gris fauve, avec la tête d’un fauve rougeàtre, bordée de brun
et les ailes transparentes, d'un jaune brunâtre, ayant des nervures noires. La larve vit sous les pier-
94 HISTOIRE NATURELLE.
res, dans les rivières; elle est d'un jaune-citron tacheté de noir; le eorselet offre trois lignes longitu-
dinales et une bordure de cette dernière couleur. On rencontre aussi abondamment auprès de Pa-
ris la Pere À peux queues (Phrygana bicaudata, Linné; Parisina, Ramb.;) dispar, Ramb., ete. Les
autres espèces sont propres au midi de la France, à l'Espagne, à la Suisse, à l'Allemagne, etc. Une
provient de l'Amérique, c'est la Perla Pensylvanica, Rambur.
Le genre PTÉRONARCYS, Newman, se distingue par ses palpes courts : maæillaires sétiformes, à
premier article court et les trois autres dilatés; mandibules très-gréles; mächoires courtes; ailes
très-réticulées. Une seule espèce (P. protæus) de l'Amérique du Nord. — Un genre, LEPTOMERES,
Rambur, très-voisin des Perta, dont il ne diffère que par l’avant-dernier article des palpes maæil-
laires très-long et le dernier presque nul, très-gréle, renfermerait quatre espèces, toutes propres
aux environs de Paris, créées par M. Rambur, mais qui probablement se rapportent à des espèces de
Perles déjà depuis longtemps décrites.
M. Westwood a également fait connaitre un genre étranger intermédiaire entre les Perles et les
Nemoures; c'est le genre EUSTHENTIA, dans lequel les mandibules sont cornées et dentées, et dont
l'abdomen est terminé par deux longs filets. Une seule espèce fort élégamment coloriée et propre à
la Nouvelle-Hollande, ME. spectabilis. ;
Enfin le genre le plus connu, après celui des Perla, est le genre NEMOURE (Nemoura, Latr.),
ayant pour caractéristique : palpes maxillaires et labiaux courts; filiformes : le dernier article
ovoide, arrondi et d'un diamètre au moins égal à celui qui précède; mandibules et mäâchoires cor-
nées; labre très-apparent; abdomen dépourvu de filet ou à filets rudimentaires. Le genre Nemoura.
dont la dénomination a été tirée de deux mots grecs : vauc, fil; ovox, queue, a été créé en 1797 par
Latreille, dans ses Précis des caractères des Insectes, aux dépens des Phryganea, Linné, des Perla,
Geoffroy, et des Semblis, Fabricius, adopté par tous les entomologistes et partagé en plusieurs
groupes par quelques auteurs. Le nom générique a été changé en celui de Nematura par M. Bur-
meister, et en celui de Nemura par M. Rambur. Ces Insectes ont la tête plus petite, plus ronde et
moins aplatie que les Perles; leurs antennes sont longues et fortes; leurs mandibules grosses, pres-
que aussi larges que longues et terminées par trois à six dents courtes; leur labre est moins large et
moins linéaire que celui des Perles; leurs mâchoires, assez fortes et dures, sont terminées par des
dents ou par des soies très-roides, recouvertes en dehors d'une galette qui les dépasse souvent; leur
lèvre inférieure est large et partagée à son extrémité en quatre lanières : dont les deux médianes
sont parfois réunies. D'une taille un peu plus forte que les Perles, plus grèles et plus délicates
qu'elles; leurs ailes ont une tendance à s’enrouler; leur couleur générale est d’un gris plus ou moins
ferrugineux ou brunâtre; celle du corps est noire, mêlée parfois de noir et de brun. Ils’se trouvent
dans les endroits humides et les bois ombragés; ils ne paraissent qu’au printemps ou au commence-
ment de l'été, et il est rare d’en voir en automne. Leurs larves, qui ressemblent assez à celles des
Éphémères, vivent dans l’eau, marchent sur les pierres ou se tiennent attachées aux herbes aqua-
tiques; quelques-unes n’ont pas d'organes respiratoires extérieurs, et d'autres, au contraire, en sont
pourvus. La forme de ces larves rappelle celle des Perles : comme elles, elles ont deux soies cau-
dales, mais ces organes restent attachés à la dépouille de la nymphe et ne paraissent plus sur l'In-
secte parfait.
On connaît une trentaine d'espèces de Nemoures, à peu près toutes européennes, et M. Pictet les
subdivise en trois sous-genres qui ont été regardés comme des genres par quelques auteurs. Ce sont:
4° Tæœnrorreryx, Pictet, à articles des tarses égaux, à abdomen terminé par des soies longitudinales
triarticulées. Quelques espèces d'Europe, dont la plus connue est la Nemoure nésuceuse (N. nebu-
losu, Linné), qui esf d'un brun noirûtre, avec les ailes antérieures d’un gris cendré, traversées par
des bandes blanches; ailes du màle très-courtes, tandis que celles de la femelle sont une fois plus
longues que le corps. Commune dans toute l’Europe et surtout dans nos environs et même sur les
quais de Paris. 2° Leccrra, Stephens, à deutième article des tarses très-court; pas de soie du tout;
nervure du parastigma ne formant pas XX; ailes allongées, en cylindre; type N. cylindrica, de
Géer, d'Europe. On en décrit une espèce américaine. Et 5° Nemoura, Latr., à deuxième article des
tarses très-court; pas de soie; nervures du parastigma formant un X; ailes médiocres, aplaties. Une
dizaine d'espéces, toutes européennes et dont la N: variegata, Oliv., est le type.
ANNELÉS. — NEVROPTÈRES. 95
CINQUIÈME FAMILLE. — ÉPHÉMÉRIENS.
L'ancien genre Ephemera de Linné, qui pour Latreille était une des divisions de sa famille des
Subulicornes, forme, pour MM. Burmeister, Blanchard, Pictet et Rambur, une famille distincte qui
porte les dénominations d'Éphémériens, Éphémérines, Ephémérides, ete. Ces Insectes, de petite
taille, dont la vie à l’état parfait est de très-courte durée, se reconnaissent facilement à leurs an-
tennes courtes, de trois articles, dont le dernier est une soie mince; à leur bouche imparfaite et
dépourvue de véritables organes de manducation; à leurs ailes délicates, dont les postérieures sont
toujours très-petites, et à leur abdomen constamment terminé par deux ou trois longues soies ar-
ticulées.
Les Éphémériens ont quelque analogie avec les Termiens, les Psociens et les Perliens, et en même
temps avec les Libelluliens, qu’ils tendent à lier les uns avec les autres; ils ont le corps allongé,
d’une consistance très-molle; la tête est souvent plus large que longue, portant sur ses côtés des
yeux réticulés, assez gros; les ocelles sont au nombre de trois; les antennes sont assez petites, insé-
rées en avant des yeux, sur la face antérieure de la tête; les organes qui constituent la bouche
sont atrophiés, dépourvus de parties écailleuses ou dures : celles-ci restent dans les dépouilles de la
nymphe. Le corselet est court, transversal; le mésothorax, grand et développé, est d’une forme
ovoide, allongée; le métathorax est petit. Les ailes sont plates, non plissées, plus ou moins triangu-
laires : les antérieures grandes, très-minces, à nervures longitudinales, nombreuses : les postérieures,
de même nature que les antérieures, sont beaucoup plus petites et manquent même quelquefois
complétement. Les pattes sont grêles, les cuisses longues, les jambes très-courtes: les tarses allon-
gés, de quatre articles, auxquels s’en ajoute parfois un autre, petit, basilaire; deux crochets mem-
braneux, inégaux, terminent ces larses. L’abdomen est conique, allongé, terminé par deux ou trois
longues soies, formées d'un grand nombre d'articles, et aussi dans les mâles par des appendices
composés d’anneaux distincts.
Les métamorphoses sont incomplètes chez ces Insectes, de même que chez presque tous les Né-
vroptères. Les larves ont la forme de l’Insecte parfait, sauf qu’elles manquent d'ailes, qu’elles sont
beaucoup plus fortes, que leur bouche est beaucoup mieux armée, qu’elles ont toujours trois soies
caudales, et que leur abdomen est muni sur les côtés d'organes respiratoires externes, dont elles
avaient besoin, parce qu'elles habitent constamment l’eau, tandis que l’Insecte parfait est compléte-
ment aérien. Ces larves vivent généralement en famille et présentent des différences remarquables
da 1s leurs formes et leurs habitudes. Les unes, longues et cylindriques, armées de pattes fortes et
tranchantes, se creusent des galeries dans la terre, auprès des eaux dormantes qu’elles recherchent
bientôt, et se construisent des retraites qui consistent dans des trous tubulaires droits ou légèrement
arqués et percés dans la vase; elles nagent avec beaucoup de facilité. On pense que ces larves vivent
deux ou trois ans avant de se métamorphoser; on ne sait pas au juste quelle est leur nourriture :
Swammerdam dit avoir trouvé uniquement de la terre glaise dans leur estomac, mais M. Pictet
assure y avoir également vu des débris organiques : ce qui nous semble plus probable, car les divers
éléments dont leur bouche se compose, beaucoup mieux constitués que ceux de l'Insecte parfait,
peut leur permettre de se nourrir de matières animales. Les nymphes, qui ne différent des larves
qu en ce qu'elles portent des ailes déjà assez développées, mais beaucoup moins que dans l’Insecte
parfait, ont le même genre de vie que les larves : c’est ce qui a lieu principalement dans les genres
Éphémère et Palingénie. D'autres larves sont aplaties, ne peuvent fouir la terre et vivent à découvert
appliquées contre les pierres, surtout dans les ruisseaux plus ou moins rapides : celles-ci, qui con-
stituent le genre Bætis, sont évidemment carnassières. Quelques larves sont minces, délicates, ar-
mées dans leur queue cilicée d’un puissant instrument-de natation : ce sont celles des Cloes qui se
cachent parfois dans les herbes et qui se nourrissent de matières animales. Enfin il en existe, celles
des Potamanthes, qui, plus faibles encore que les autres et ne pouvant plus nager, campent dans la
vase et ne saisissent leur proie que par ruse. Le passage de l’état de nymphe à celui d’Insecte parfait
se fait rapidement, tantôt sur le rivage ou sur les plantes aquatiques, tantôt à la surface même de
96 HISTOIRE NATURELLE.
l’eau. Quand l’Insecte a éprouvé cette transformation, il n’est pas encore dégagé de toutes ces enve-
loppes, et il lui reste une peau demi-opaque qui altère ses couleurs, gène ses mouvements, et dont
il faut qu'il se débarrasse. On a donné les noms de subimago et de pseudimago à cet état intermé-
diaire par lequel l’Insecte passe après qu’il s’est dépouillé de son enveloppe de nymphe, et celui
d’imago a été appliqué à l’Insecte ailé.
Fig. 87. — Éphémère vulgaire. Fig. 88. — Éphémére vulgaire.
(Nymphe.), (Insecte parfait.)
Les Éphémériens, à l’état parfait, sont des êtres tout à fait aériens; leur vol est généralement ver-
tical; ils sont attirés par l’éclat de la lumière dans l'obscurité et viennent bientôt se brûler à la
flamme. Swammerdam rapporte que le mâle féconde les œufs à la manière des Poissons, c’est-à-dire
qu’il s’en approche, les couvre d’une sorte de laitance et les abandonne ensuite dans l’eau; mais,
d’après les observations de plusieurs zoologistes et surtout d’après celles de M. Pictet, il est bien dé-
montré aujourd’hui que l’accouplement a lieu comme dans les autres Insectes, et que cet acte im-
portant de la viese fait dans l’air même. L'abdomen du mâle est terminé par deux crochets recour-
bés avec lesquels il saisit le corps de la femelle; l’accouplement est ordinairement très-court; car les
deux sexes ne restent unis qu'un instant, mais d’autres fois cependant ils volent accouplés pendant
assez longtemps. La femelle fécondée voltige au-dessus des eaux et y laisse tomber un ou deux pe-
tits paquets d'œufs qui, complétement abandonnés au hasard, s'imbibent d’eau et vont au fond des
ruisseaux. Réaumur évalue à huit cents environ le nombre des œufs qu’une femelle peut pondre.
Dès que l’acte de la reproduction est accompli, les deux sexes ne tardent pas à mourir; certaines
Éphémères ne vivent pas trois jours, et le plus grand nombre un jour au plus; néanmoins, en re-
tardant l’accouplement, de Géer est parvenu à faire vivre ces Insectes pendant plusieurs jours. Les
Éphémériens naissent surtout le matin et le soir, quelques heures avant le lever du soleil ou après
son coucher; peu d’entre eux sortent de l’eau dans le milieu du jour; ils apparaissent plus nombreux
quand la chaleur se fait fortement sentir et semble annoncer un orage. Dans quelques pays et sur-
tout en Iollande, le ciel s'obscurceit quelquefois tout d'un coup, comme s’il était couvert de nuages,
et celte apparence est due à une énorme quantité de ces Insectes qui paraissent tous à la fois et qui,
après leur mort, couvrent les rivages en formant une couche parfois de plusieurs centimètres d’é-
paisseur. En France, une Éphémère, l'Ephæmera virgo, est parfois assez abondante au bord des
ruisseaux pour présenter, comme le dit Latreille, l'apparence d’une neige épaisse et tombant par
gros flocons. En Carniole, rapporte Scopoli, lorsqu'ont lieu des apparitions nombreuses de ces Né-
vroptères, les paysans les recueillent et s’en servent comme d'engrais. Les Éphémériens, surtout à
l’état de larves, servent de nourriture aux Poissons, aux Salamandres et aux autres animaux et lar-
ves qui vivent en grand nombre dans les eaux; ils sont aussi quelquefois employés comme appt par
les pêcheurs. Il faut réellement, comme nous l'avons dit, que le nombre de leurs œufs soit prodi-
gieux pour qu'il puisse en arriver une aussi grande quantité à l’état parfait, tant leurs ennemis
sont multipliés. Leur poids est excessivement peu considérable, et M. C. Duméril fait observer que,
si l'on pouvait en peser un millier et enlever les œufs dont les femelles sont chargées, à peine si la
masse totale ferait équilibre avec une demi-once.
ANNELÉS, —+NÉVROPTÈRES. 97
L'anatomie des Éphémeriens a été étudiée par Swammerdam, Réaumur, de Géer et plus récem-
ment par MM. Léon Dufour, Pictet, etc. Leurs téguments, surtout dans l'Insecte parfait, sont très.
minces et peu résistants, ce qui fait qu’on peut difficilement les saisir sans les gâter. La tête de l’In-
secte ailé diffère beaucoup de celle de la larve; les yeux ont presque toujours la même forme dans
les femelles, mais ils différent assez notablement d’un genre à un autre dans les mâles. L'un des
ocelles, l’antérieur, qui est situé entre les antennes, est souvent porté par un petit prolongement
conique. Les antennes des larves sont plus longues que celles des Insectes parfaits. L'abdomen varie
suivant la forme des larves; il s’allonge et s’'amincit dans l’Insecte parfait; les soies caudales, qui
sont beaucoup plus longues dans la larve que dans l’Insecte ailé, servent, dans un grand nombre de
cas, pour la distinction des espèces. Les pattes, courtes et simples dans les larves, s’allongent lors
de la transformation en Insectes parfaits, en même temps que le nombre des articulations des tarses
devient plus considérable. Les ailes sont au nombre de quatre, mais les postérieures,- toujours plus
petites que les antérieures, disparaissent quelquefois complétement. Leur système de nervation est
remarquable et diffère suivant les diverses phases du développement. Les diverses parties qui con-
stituent la bouche sont presque complétement atrophiées dans l’Insecte parfait, tandis que la larve
offre très-distinctement un labre, des mandibules et des mâchoires. Le canal alimentaire est droit
et rappelle par sa forme celui des Libellules; l'œsophage est court, plissé en travers; le jabot pré-
sente trois renflements plus distincts par leur texture que par des étranglements réels; l'intestin
proprement dit est mince et va déboucher dans un rectum élargi. Les vaisseaux urino-biliaires sont,
d’après M. Léon Dufour, diaphanes, au nombre d’une trentaine, et diffèrent de formes suivant les
espèces. A l'état d'Insecte parfait, les Éphémériens reçoivent l'air dans leur système trachéen au
moyen de stigmates; mais à l’état de larves des prolongements externes des organes respiratoires
ont pour fonction de séparer l'air qui est contenu dans l'eau. Le système nerveux offre à peu près
les mêmes caractères que celui des autres Névroptères; la longueur de la chaîne nerveuse et l'égalité
ganglionnaire montrent que ces Insectes s’éloïgnent peu, sous ce rapport, du type normal; la Ho
épinière présente onze ganglions de forme ovale, éloignés à peu près également les uns des autres :
le premier nœud tient lieu de cerveau et donne naissance aux nerfs optiques, et les dix autres four-
nissent les différents nerfs qui vont se rendre dans toutes les parties du corps. On connaît assez bien
les organes de la génération; des sortes d’appendices internes abdominaux se remarquent dans les
deux sexes, et dans les femelles, où ils sont très-développés, ils servent probablement, pendant la
ponte, à assujettir les grappes d'œufs qu’elles tiennent suspendues à l'extrémité de leur abdomen,
pendant qu'elles voltigent au-dessus des eaux, jusqu'au moment où elles les laissent tomber.
Un grand nombre de naturalistes se sont occupés des Éphémères. Aristote donne quelques détails
sur ces Insectes : c’est à eux, en effet, que doit s'appliquer le passage suivant de son Traité des
Animaux : « Près du fleuve Hipanis, qui se jette dans le Bosphore, on voit, pendant le solstice, des
follicules plus grands qu'un grain de raisin, qui, en se rompant, donnent naissance à un animal .
muni de quatre ailes et de quatre pattes; ces êtres vivent et volent jusqu’au soir, s’affaiblissent
lorsque le soleil s’incline vers l'occident et meurent quand il se couche, leur vie n'ayant duré qu'un
jour : de là on les nomme ewnuzpoy . » Ælien, qui les désigne sous le nom de puvnuepov, et Pline, ne
font que rapporter ce qu’en dit Aristote. Au moyen âge, Scaliger rapporte que les Éphémères sont
communes le soir au bord de la Garonne, et qu’elles sont vulgairement nommées Manne, parce
qu’elles fournissent une abondante pâture aux Poissons; le même fait est rapporté par Delechamps,
qui dit que ces Insectes se trouvent fréquemment sur les bords de la Seine et du Rhône. Moufet, le
premier, figure des Éphémères auxquelles il applique la dénomination de Sirrorpryus. Ce n’est que
beaucoup plus tard, à partir de 1634, que commenca l'étude des métamorphoses, des mœurs et de
l’organisation de ces Névroptères. Clusius traite de l’ Insecte nommé Hémérobe ou Éphémère, figure
et décrit en outre la larve d’une espèce propre à la Hollande, et fait connaître les trous qu’elle se
creuse dans la terre argileuse. Swammerdam publie son Traité de l'Éphémère, ouvrage qui est la
base de nos connaissances actuelles sur la.naissance et le développement de l'Ephemera longicau-
data, et dans lequel il décrit les formes, les mœurs et l’organisation de la larve de cette espèce.
Réaumur donne, en 1749, un Mémoire très-important sur les Éphémères, décrit avec soin les or-
ganes respiratoires et les habitudes des larves fouisseuses, surtout de l'E. virgo. De Géer, en 1755,
ajoute quelques faits nouveaux à l’histoire des mœurs, principalement à l' EE de l accouple-
A. 53
98 HISTOIRE NATURELLE.
ment, et décrit les métamorphoses de l'E. vulgata. Plus récemment, Demey, Nicolas de Blegny,
Targioni, Collinson, Rœsel, Scopoli, Othon Fabricius, Swenpfer, Müller, et parmi les modernes
MM. Kirby, George Gray, Davis, Siebold, Léon Dufour, Burmeister, Pictet, ete., viennent ajouter
des connaissances nouvelles et positives à celles déjà acquises sur les mœurs, les transformations et
l’organisation des Éphémères. Enfin la dernière phase de l’histoire de ces Insectes, comprenant leur
classification et la description des espèces, commence il y a un siècle à peu près et se continue en-
core aujourd’hui. Linné erée le genre Ephemera, le place parmi ses Névroptères et en décrit onze es-
pèces, dontsept alorsnouvelles. Fabricius met le genre Éphémères parmi ses Synistrata et en fait con-
naître dix-huit espèces. Geoffroy, Schæffer, Sulzer, Devillers, Zschuschi, Olivier, Panzer, Schranck,
décrivent quelques nouvelles espèces. G. Cuvier, dans son Tableau élémentaire d'histoire naturelle,
4798, et M. C. Duméril, dans sa Zoologie analytique, 1806, réunissent les Éphémères aux Phryganes,
sous le nom d’Agnathes. Latreille, dans son Histoire naturelle des Crustacés, des Arachnides et des
Insectes, 1805, maintient cette réunion; mais plus tard, dans son Genera, 1807, dans ses Familles
naturelles, 1825, et dans la 2 édition du Règne animal, 1829, forme des Ephémères et des Libel-
lules une famille à laquelle il donne le nom de Subulicornes, et en sépare les Phryganes. Leach
crée deux genres (Bætis et Cloe) aux dépens du genre typique; Curtis propose les genres Cœnis et
Brachycerus, qui semblent n’en pas différer. M. Burmeister, dans son Handbuch der Entomologie,
fonde le genre Palingenia, ainsi que celui des Oxycypha, qui n’est pas adopté, et assez récemment
M. Pictet, ceux des Potamanthus et Oligoneuria. En outre, d’autres naturalistes, comme MM. Ste-
phens, Guérin Méneville, E. Blanchard, Burmeister, Pictet, Rambur et Zetterstedt font connaître
des espèces nouvelles. Mais c'est surtout dans la Monographie des Éphémères, faisant partie de l’His-
toire naturelle générale et particulière des Névroptères de M. Pictet, que l’on trouve le plus de ren-'
seignements sur les Insectes que nous étudions.
Jusqu': à présent les espèces indigènes sont presque les seules qui aient été recueillies, et ce n’est
pas à dire pour cela qu’il n’en existe pas dans les autres parties du globe, où l’on en a très-peu ob-
servé, On voit entre elles des différences quelquefois assez grandes, mais très-peu constantes, et sur
lesquelles néanmoins se sont appuyés les naturalistes pour en forxer des genres; la position des
ocelles, qui parait très-variable, a surtout été prise en considération ainsi que la structure des ailes,
et, comme on l’a vu, le genre de vie des larves. Une autre difficulté qui nuit à la bonne earactéris-
tique des genres et des espèces, c’est que ces Insectes se conservent mal dans les collections; la mol-
lesse de leur corps est telle, que par la dessiccation ils perdent leur forme, et la fragilité de leurs
membres est si grande, qu'ils se brisent au moindre choc. Néanmoins nous subdiviserons, comme
M. Pictet, les Éphémériens en sept genres particuliers.
Le groupe typique est celui des ÉPHÉMÈRES (Ephemera, Linné, Pictet), ayant pour caractères :
yeux simples et écartés dans les deux sexes; pattes bien développées; ailes, au nombre de quatre,
à nervures transversales nombreuses : sostérieures égalant à peu près le quart des antérieures,
ayant leur nervation complète et le bord costal anguleux; tarses de cinq articles : le premier très-
court; crochets abdominaux des mâles médiocres; trois soies caudales, égales dans le sexe mâle.
Les Éphémères proprement dites ont un faciès commun qui les a fait confondre en une seule espèce;
on n'en distingue, au reste, qu'un petit nombre; M. Burmeister n’en déerit que deux, et M. Pictet
quatre; toutes sont européennes. La principale est l'Épnéuère vorcaire (Ephemera vulgata, Linné);
elle est brunâtre, tachetée de jaune, avec les quatre ailes transparentes, réticulées par des nervures
brunes et ornées de quelques taches de cette même couleur; l'abdomen est terminé par trois filets
d’un brun foncé. Cette espèce se trouve communément en France, en Suisse, en Allemagne, et s’é-
tend au Nord jusqu'en Laponie; d’un autre côté, on l’a prise au Midi : en Piémont et en Italie.
Les autres genres sont ceux des : 1° PALINGENIA, Burmeister, qui diffèrent des Éphémères parce
que l’ocelle médian manque, et que la soie caudale des mâles est rudimentaire; on y range un assez
grand nombre d’espèces dont le type est l’ÉPnémère à LoNGuE queue (Ephemera longicaudata, Swam.,
E. Swammerdamiana, Latr.), longue d'environ 0,03, d'un blanc jaunâtre, avec la partie dorsale
et les ailes un peu enfuwées; filets abdominaux grands, au nombre de deux seulement. La larve a la
tête prolongée en forme de corne : le premier anneau de l'abdomen dépourvu d’appendices propres
à ia respiration, et les jambes courtes et épaisses, avec lesquelles elle creuse dans la vase. Se trouve
très-abondamment en Belgique, en Hollande et en Allemagne, principalement dans les grandes ri-
Fig, 2,
Fig. 1. — Gomphide onguiculée Æschne Iren. Fig. 5.— Agrion chinois.
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Fig. 4. — Caloptéryx vierge. (Mâle.
fig. 6. — Mégistogastre linéaire
à NÉVROPTERES. PL. D.
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 99
vières, comme la Meuse, le Rhin, le Leck, l’Ysel, ete. Une autre espèce, très-commune auprès de
Paris et qui pénètre quelquefois en été, le soir, dans nos maisons, est l'E. albipennis, Latr.
20 COENIS, Curtis; yeux semblables dans les deux sexes; ailes offrant peu de nervures transver-
sales : postérieures manquant souvent; un petit nombre d'espèces démembrées des Éphémères,
M. Pictet regarde, comme n'en différamt pas les Bracuycecus, Curtis, et Oxycypua, Burm. 3° BAE-
TIS, Leach; ocelles rapprochés sur un tubercule frontal, surtout dans les mâles; deux soies cau-
dales. Quelques espèces dont le type est l'E. lutra, Linné, très-commune dans toute l'Europe, le
long desrivières. 4° POTAMANTHIUS, Pictet; yeux doubles dans les mâles; trois soies caudales. Groupe
assez peu connu. 5° CLOE, Leach; ayant pour caractères : yeux des miles divisés en deux parties,
dont l’interne est lenticulaire et la plus grande; ailes n'ayant que très-peu de nervures transverses :
les postérieures très-petrtes ou nulles; deux soies caudales. Ce groupe renferme une dizaine d'espèces,
parmi elles sont les Ephemera hordria, Lin., deSuède. pumila ethalterata, Fabr., de presque toute
l’Europe, et plusieurs espèces décrites par M. Rambur. 6° OLIGONEURIA, Pictet, qui se distinguent
surtout par leurs ailes à nervures longitudinales très-peu nombreuses, à pattes déformées et à tar-
ses filiformes; un petit nombre d'espèces.
SIXIÈME FAMILLE. — LIBELLULIENS.
Le genre Linnéen des Libellula, vulgairement désigné sous la dénomination de DemorsezLes, qui
originairement ne comprenait qu'un nombre très-restreint d'espèces, étant devenu plus tard très-
nombreux en espèces, a dû être partagé en beaucoup de genres et de sous-genres, et est devenu une
division primaire, soit famille, soit tribu, qui a recu les dénominations d'Oponares (Odonata, Fa-
bricius), de Liseuuuiens, Blanchard, et que Latreille laissait avec les Éphémères dans sa tribu des
Subulicornes. Ces Insectes ont en général pour caractères : {éte très-grosse dont les yeux occupent
la majeure partie, s'articulant sur une saillie antérieure du corselet, s'avancant profondément dans
la cavité de sa face postérieure et s'appuyant latéralement sur deux sortes de condyles sur lesquels
elle glisse : ce qui lui donne une grande mobilité; mandibules et mâchoires très-développées et très-
souvent cachées, au moins en grande partie, par les lèvres et les palpes labiaux; ceux-ci aplatis et
fortement dilatés, tandis que les palpes maxillaires sont tout à fait nuls; antennes courtes, styli-
formes; trois ocelles ou yeux lisses; thorax de forme variable, plus ou moins carré, très-déprimé en
avant; corselet rétréci et gréle añtérieurement, se trouvant en partie caché dans l'excavation pos-
térieure de la tête; ailes grandes, à peu près d'égale grandeur en haut comme en bas, ayant presque
toujours une partie plus ou moins opaque et colorée, formant une tache vers le bord antérieur du
sommet, allongées et fortement réticulées; abdomen très-long, gréle, très-souvent renflé à la base,
triangulaire ou cylindrique, composé de dix segments : les mâles ayant les parties génitales ex-
ternes sous le deuxième segment abdominal, et l'extrémité anale munie de trois à quatre appen-
dices plus ou moins développés; pailes assez longues, gréles; tarses composés constamment de trois
articles dont le dernier est muni d'onglets très-forts, ayant une dentelure avant leur sommet; lar ves,
toujours aquatiques, ne subissant que des demi-métamorphoses.
La grande taille de ces Insectes, leur extrême agilité, l’admirable élégance de leurs formes si
sveltes et si délicates, la variété et l'éclat de leurs Con à l'étroitesse de leur corps, l'abondance
des espèces et des individus dans le voisinage des eaux, pendant les belles journées de l'été, ont
rendu leur connaissance vulgaire; tout le monde les connaît sous le nom de Demoïselles, et Linné,
qui savait si bien appliquer des noms significatifs à toutes les chosés, a nommé LiBELLULE VIERGE
(Libellula virgo) l'une des plus belles espèces de notre pays, et il a appelé une autre plus grêle,
mais au moins aussi jolie que la précédente, LisecuLe dgcne rirre (Libellula puella). Les Libellu-
liens ont un corps très-allongé dont les téguments sont assez solides. La tête est fort grosse; les yeux
sont énormes, composés d’une foule de facettes ou plutôt de milliers d'yeux simples réunis pour
constituer un organe composé; et ces facettes sont assez distinctes pour être souvent aperçues comme
un réseau à l'œil nu ou avec l’aide d’un très-faible grossissenfent; ces yeux, pendant la vie de l’Ir-
secte, sont d’une belle couleur brillante, le plus habituellement verdûtre, parfois bleuâtre ou dorés,
100 HISTOIRE NATURELLE.
et présentant diverses nuances, selon le degré d'intensité de la lumière. Ces Névroptères, déjà si
bien partagés sous le rapport de leurs yeux composés, ont en outre trois ocelles ou petits yeux lisses
placés en triangle sur le sommet de la tête. Les antennes, insérées sur le front, derrière une éléva-
tion vésiculeuse, sont très-petites; avec le dernier article tout à fait styliforme, ressemblant à une
petite soie. C’est ce caractère qui avait engagé Latreille à donner aux Libellules le nom de Subuli-
cornes, et à y réunir sous la même dénomination les Éphémères, dont le dernier article antennaire
est également sétiforme; mais, comme les Ephemera et genres voisins diffèrent beaucoup des Li-
bellula par l’ensemble de leur organisation et surtout par la forme et la réticulation des ailes, par
l'état rudimentaire des pièces de leur bouche, par leurs appendices abdominaux très-développés et
par le nombre des articles des tarses, on a dû faire de ces Névroptères deux familles particulières.
La bouche des Libelluliens est munie de pièces robustes et armée de dents ainsi que de crochets
très-redoutables pour les autres [nsectes; leur lèvre supérieure est très-large; leurs mandibules sont
très-grandes et pourvues de dents acérées; leurs mächoires le sont également, et le palpe labial
qu'elles supportent consiste uniquement en un seul article; leur lèvre inférieure est très-grande,
vient clore exactement la bouche et porte des palpes maxillaires rudimentaires ou nuls. Les ailes
sont très-développées, réticulées de toutes parts, entre les nervures longitudinales, par de petites
nervures transversales extrêmement nombreuses; ces ailes délicates, toujours parfaitement lisses et
brillantes, sont souvent parées de belles couleurs; parfois, au contraire, ces membranes sont tout à
fait transparentes et deviennent agréablement irisées sous l'influence de la lumière. Souvent les
màles et les femelles offrent de grandes différences dans le système de coloration des ailes. Les pattes
sont très-grêles et néanmoins assez longues; mais elles ne servent à ces Insectes que pour se poser
et non pour marcher, car leur unique mode de locomotion réside dans leurs ailes, qui leur per-
mettent de se transporter rapidement d'un lieu à un autre. L'abdomen est terminé par de petits
appendiees ou des folioles dont la forme et la dimension étant très-variables, quoique toujours moin-
dres que ceux des Éphémériens, ont servi à divers entomologistes pour caractériser plusieurs divi-
sions génériques.
«
Fig. 89 — Libellule à quatre laches.
Quelques points de l'organisation intérieure des Libelluliens ont été étudiés, principalement par
M. Léon Dufour; leur canal intestinal est assez court, de même que dans les autres animaux car-
nassiers. Les ovaires chez les-femelles et les organes génitaux dans les mâles occupent toute la lon-
gueur de l'abdomen; et, chez ces derniers, on voit, à la partie inférieure du second anneau, une
petite ouverture qui a été considérée, par certains observateurs, comme l’orifice des organes repro-
ducteurs, et par d’autres, comme un simple organe excitateur. Le système nerveux consiste en une
longue chaîne de petits ganglions, dont le nombre toutefois n'a pas été bien détreminé.
Les Libelluliens sont très-nombreux en espèces; et l’on en connaît aujourd'hui près d’un mil-
lier. Ils sont dispersés dans toutes les régions du globe, aussi bien dans les contrées chaudes
que dans les régions froides où tempérées. Pendant tout l'été, ondes rencontre sur les bords des
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 101
mares, des étangs, des rivières, surtout dans les endroits où eroissent les jones et, en général, beau-
coup d’autres plantes aquatiques. Ils volent avec une extrême rapidité; par intervalles ils rasent
le liquide et très-fréquemment ils planent pendant longtemps dans les airs. Ils échappent très-
facilement à la main qui veut les saisir, et, lorsqu'ils sont posés sur quelques plantes ou ailleurs,
ils s’envolent brusquement et instantanément dès qu’on en approche. Ces Névroptères sont extrême-
ment carnassiers, et ils se jettent sur les Insectes qu'ils veulent saisir avec une promptitude sembla-
ble à celle que les oiseaux de proie mettent à se précipiter sur les animaux dont ils font leur nour-
riture. La rapidité de leur vol et l'extrême agilité de leurs mouvements les rendent très-propres à ce
genre de chasse, et ces habitudes voraces leur ont fait appliquer le nom vulgaire de Mouches-Dra-
gons, en Anglais Dragon-Flies. Les Libelluliens semblent avoir une vie assez longue à leur état par-
fait; en effet, depuis le commencement de l’été jusqu'à la fin de l'automne, on ne cesse de rencon-
trer les mêmes espèces, ce que l’on ne remarque pas pour les Insectes qui ne vivent que peu de
temps à leur état de développement complet. Néanmoins il faut remarquer que tous les individus
ne vivent pas l’espace entier de la belle saison, et qu'il est très-probable qu'ils éclosent à des inter-
valles plus ou moins éloignés. À certaines époques, on peut observer les mâles voltigeant autour des
femelles, les poursuivant sans relàche et enfin les saisissant entre la tête et le corselet à l’aide des
pinces qui terminent leur abdomen. Le mâle entraîne ainsi sa femelle captive, jusqu’à ce qu’elle se
prête à ses désirs en venant recourber son abdomen et en placer l'extrémité à la base du sien, exac-
tement sur l’orifice placé au deuxième anneau. C’est ce manége, qu’il est facile de voir dans les en-
droits où l’on rencontre habituellement les Libelluliens, qui avait fait croire que l’accouplement
s'opérait ainsi; mais, d’après plusieurs observateurs, ce serait là seulement un prélude du rappro-
chement des sexes, et l’accouplement aurait lieu ensuite comme chez les autres Insectes.
C’est dans l’eau que les femelles pondent leurs œufs; tantôt elles les font tomber au fond de l’eau,
quand elles volent en planant au-dessus des mares et des étangs, tantôt, ce qui a lieu le plus habi-
tuellement, elles les déposent sur les plantes immergées. On assure que les larves ne tardent pas à
sortir des œufs et qu’elles vivent pendant près d’un an dans l’eau. En effet, ces larves sont essen-
tiellement aquatiques, et, si elles ressemblent un peu aux Insectes parfaits par la saillie de leurs
yeux, qui même sont moins grands et plus écartés, elles sont loin de leur ressembler sous le rapport
de la beauté des couleurs et de leur légèreté. Les larves des Libelluliens, marchant habituellement
dans la vase, sont presque constamment couvertes de limon, lorsqu'on les retire de l’eau. En géné-
ral, leur corps est assez ramassé, mais il n’en est pas toujours de même, et il y a, à cet égard, d’as-
sez grandes variations, suivant les groupes et suivant les espèces. Comme dans la plupart des Névro-
ptères, lesnymphes ne différent des larves que parla-présence d'ailes rudimentaires et par leur corps,
qui est plus allongé. Du reste, larves et nymphes ont le même genre de vie et sont aussi actives les
unes que les autres, contrairement à ce qui a lieu dans la plupart des Insectes chez lesquels les
nymphes sont presque sans mouvement de locomotion; les uns et les autres marchent lentement,
se trainent avec peine dans la vase du fond ou des bords des étangs ou bien sur les plantes aquati-
ques. Pendant leur premier état, ces Névroptères sont au moins aussi carnassiers que sous leur état
parfait; ils s’attaquent à divers insectes, aux petits Mollusques et même à de très-petits Poissons. Con-
trairement à ce qui a lieu chez les autres animaux essentiellement carnassiers, le manque d’agilité
et la lenteur de la marche des larves et des nymphes de Libelluliens, semblent, au premier aspect,
devoir leur nuire beaucoup pour s'emparer de leur proie; mais il n’en est rien, car la nature à
suppléé à ce qui leur manquait, sous ce rapport, en donnant à un organe particulier des usages
qui ne lui sont pas dévolus chez les autres êtres de la même classe. Ces larves et ces nymphes sont
pourvues d’une lèvre inférieure qui acquiert un énorme développement; cette lèvre articulée sur le
menton, qui lui-même a une grande longueur, forme un coude et se rabat sous le corselet; de la
sorte, cette lèvre, de forme ordinaire, terminée par une paire de palpes triangulaires dentée en scie
et remplissant l'usage d'une pince, vient clore exactement la bouche pendant l'état de repos; mais,
à la volonté de l'animal, elle peut s’étendre brusquement: sa longueur égale alors presque celle du
corps; avec ces palpes, il saisit et retient sa proie, et, en repliant sa lèvre, il la porte naturellement
à la bouche. Quand ces larves, si lentes, et qui ne peuvent atteindre leur proie à la course, veulent
s'emparer de leur nourriture, elles restent stationnaires, peuvent se tenir à une assez grande dis-
tance des animaux dont elles veulent s'emparer sans les effrayer, et cependant elles sont assez rap-
102 HISTOIRE NATURELLE.
prochées pour pouvoir les saisir en étendant rapidement leur lèvre, dont la mobilité est extrême. Les
antennes des larves et des nymphes-sont extrêmement courtes; leur abdomen offre habituellement
des épines, et son extrémité est terminée par cinq appendices, dont les intermédiaires sont plus
grands que les externes. Leur coloration est en général d’un gris brunâtre ou bien verdätre; mais
la vase qui recouvre presque toujours leurs téguments les fait paraître très-sales. Dans quelques-uns
la peau est assez mince et assez transparente pour laisser distinguer au travers le mouvement circu-
latoire, et, sous un grossissement même peu considérable, on aperçoit les globules du sang sortir du
vaisseau dorsal par les ouvertures antérieures et y rentrer, portés dans un liquide sanguin par les
ouvertures postérieures. Ces larves ne pouvant respirer l’air en nature, puisqu'elles n’ont pas d’ap-
pareil natatoire propre à leur permettre de venir de temps à autre à la surface de l’eau : un autre
organe a dû leur être donné; en effet, l'extrémité de l'abdomen présente deux ouvertures placées
entre les appendices terminaux : à la volonté de l'animal, ces appendices peuvent s’écarter ou se
rapprocher, et, lorsqu'il les écarte, une certaine quantité d’eau entre par ces ouvertures, et bientôt
après le liquide est rejeté au dehors; mais l'air que contenait l’eau s’est trouvé absorbé au moyen
d'organes qui communiquent avec les trachées.
Quand les nymphes doivent se transformer en Insecte parfait, elles quittent la vase, grimpent sur
les plantes aquatiques en dehors de l’eau, et s’y fixent assez fortement à l’aide des crochets de leurs
pattes. Sous l’action des rayons solaires, leur peau se durcit, se dessèche complétement, puis ne
tarde pas à se fendre longitudinalement sur le dos de l'animal. Cette ouverture donne passage à
l'Insecte parfait, qui se dégage peu à peu et parvient à se débarrasser tout à fait et en peu de temps
de cette enveloppe. L'Insecte est d’abord très-mou; ses ailes, encore imprégnées de matières liquides,
ne peuvent se soutenir et retombent sur le corps; mais bientôt tous les téguments, par la chaleur
d’un beau jour d'été, prennent plus de consistance, et, au bout de quelques heures, le Névroptère
peut prendre son essor et commencer sa vie purement aérienne.
On connaît aujourd’hui plus de mille espèces de Libelluliens, et elles sont réparties sur toute la
surlace du globe, mais c’est surtout en Europe qu'on les a plus spécialement étudiées. Quelques es-
pèces, qui ne se trouvent plus actuellement qu’à l’état fossile, ont été également signalées. Malgré
ce grand nombre d'espèces, ces Insectes n’ont été pendant très-longtemps compris que dans une
petite quantité de genres, et ce n’est qu'assez récemment qu’on y a formé des groupes génériques
Ou sous-génériques nombreux. Toutes les espèces étaient placées par Linné dans le seul genre
Libellula. Plus tard Fabricius en proposa deux autres, ceux des Æschna et Agrion. Leach y forma
de son côté les groupes génériques des Gomphus, Petalura et Calopteryx, fondés sur la disposition
des appendices abdominaux et sur les réticulations des ailes. M. Burmeister indiqua aussi quelques
divisions malheureusement assez mal ou plutôt trop courtement caractérisées. M. le docteur Rambur,
dans les Névroptères des Suites à Buffon, de l'éditeur Roret, admit dans cette famille quatre subdi-
visions primaires : Libellulides, Gomphides, Æschnides et Agrionides, et trente-trois genres basés
en général sur des modifications souvent difficiles à saisir, tant elles sont peu tranchées. Antérieu-
rement, en même temps et postérieurement au travail de M. le docteur Rambur, Toussaint Char-
pentier, Vander-Linden et MM. Edme de Selys-Longchamps et Hagen, ont publié plusieurs excel-
lents ouvrages sur les Libelluliens, tant européens qu’exotiques, et ont fait connaître un grand
nombre de genres, sous-genres et espèces nouvelles; nous citerons surtout les Monographies des
Libellules d'Europe, publiées chacune séparément et malheureusement à la même époque par
MM. Vander-Linden et Toussaint Charpentier d'un côté, et M. de Selys-Longehamps du sien; les tra-
vaux sur les mêmes Insectes de Toussaint Charpentier et de M. Rambur, la Revue des Odonates ou
Libellules d'Europe (1850), les Monographies des Caloptérygines (1854) et des Gomphines (1858)
de MM. de Selys-Longchamps et Hagen, ete. Outre ces divers ouvrages que l’on doit considérer
comme classiques sur cette matière, nous pourrions encore indiquer un grand nombre de travaux
importants, et nous nous bornerons à dire que leurs auteurs sont MM. Eversmann, Pictet, Schnei-
der, Brodie, Kolenati, H. Lucas, Heer, etc.
Dans le court résumé que nous avons à présenter de l’histoire des Libelluliens, on comprendra
qu'il ne nous est pas possible de faire connaître tous les groupes qui y ont été formés, d'autant plus
que leur caractéristique est difficile et aurait besoin d'un assez grand développement; nous ne cite-
rons que les principaux, et, pour ne pas trop augmenter les subdivisions primaires, nous nous bor-
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 103
nerons à les ranger dans les quatre tribus des Libellulidés, Gomphidés, Æschnidés et Agrionidés,
admises par M. le docteur Rambur. z
4e tribu, Lsezzurinés. L'ancien genre Libellula de Fabricius et de Latreille est devenu, dans ces
derniers temps, la tribu particulière des Libellulidés, ayant pour caractères : corps assez épais; tête
ayant des yeux toujours contigus, excepté dans le genre Diastatops, se touchant dans une étendue:
très-variable; occiput triangulaire, épais; vertex assez élevé, cunéiforme, portant un stemmate sur
chacun de ses côtés et un troisième au milieu; bouche à peu près complétement fermée par le second
article des palpes maæillaires, qui forme une pièce très-large, presque carrée, venant tomber sur le
milieu de la bouche; palpes labiaux de deux articles; lèvre inférieure très-petite; mâchoïres larges à
la base, ayant six longues dents, dont une terminale; pattes présentant des épines médiocrement
longues; abdomen offrant cinq arêtes longitudinales : une sur le dos et quatre en dessous; ailes : su-
périeures ayant des nervures formant un triangle à peu près rectangle : postérieures présentant
aussi un triangle plus petit, assex différent; nervures antécubitales prolongées directement jusqu'à
la troisième nervure ou médiane : second espace cubital n'étant pas traversé par des nervules dès
son origine.
Fig. 90. — Libellule déprimée Fig. 91 — Libellule déprimée.
{Insecte parfait.) k (Nymphe.)
Cette tribu, dont le genre Libellule forme la plus grande partie, est répandue dans tout l'univers,
et le nombre des espèces doit en être très-considérable. M. de Selys-Longchamps et la plupart des
entomologistes n’y forment qu'une assez petite quantité de genres; mais M. le docteur Rambur a
partagé cette tribu en douze coupes génériques, qui, d’après l'auteur lui-même, quoique assez faciles
à distinguer, ne présentent pas toujours des caractères bien importants.
On peut subdiviser, avec M. de Selys-Longchamps, les Libellulidés en deux sous-tribus : Libellu-
lines et Cordulines. ,
Dans les LigezLuuines, les yeux sont simples et sans prolongement au bord postérieur; le bord
anal des secondes ailes est arrondi, non excavé, semblable dans les deux sexes. Le seul genre im-
portant de cette division est celui des :
LIBELLULES (Libellula, Linné), ayant pour caractères : yeux contigus dans une étendue beaucoup
moindre que leur largeur; triangle des ailes antérieures régulier, beaucoup plus grand que les au-
tres cellules; côté intérieur à peu près aussi long que l'extérieur et formant avec lui un angle de
15° à 25°, dirigé-en bas, avec le côté interne ayant au moins la longueur du côté costal; nervure
costale entière; ailes postérieures élargies à la base, à membranule distincte; bord vulvaire n’at-
teignant pas l'anus. Ce groupe auquel peut S’appliquer presque complétement tout ce que nous
avons dit dans nos généralités sur les Libelluliens, est très-nombreux en espèces qui sont répandues
presque partout; M. le docteur Rambur, qui en distingue cependant plusieurs groupes exotiques
que nous aHons nommer, en décrit cent trente-neuf : sur ce nombre le quart-environ appartient à
104 HISTOIRE NATURELLE.
l'Europe, les trois autres quarts se rapportent à l'Asie, principalement aux Indes orientales, à l’Afri-
que, à l'Amérique tant méridionale que septentrionale, et même à l’Australasie. Parmi les espèces
qui se trouvent assez communément dans toute l’Europe, et que l’on rencontre même dans les en-
virons de Paris, nous nous bornerons à citer les Libellula depressa, Linné; quadrimaculata, Lin.;
conspurcata, Fabr.; cancellata, Linné; cærulescens, Fabr.; flaveola, Linné; vulgata, Linné, etc.
Comme type nous décrirons seulement les Lreezcures vucçaime (Libellula vulgata), longue de 0,03
à 0,04, sur une envergure un peu plus grande; tête jaune ou rougeätre, avec le bord postérieur
offrant des taches noires; yeux d’un rouge obscur en dessus .et plus jaunâtre en dessous; corselet
olivâtre; ailes blanches avec la base jaunâtre; abdomen caréné, presque triangulaire, d'un rouge
terne ou jaunâtre, etc., et pérrrmée (depressa) ou l'ÉLéonore de Geoffroy, à peu prés de la taille de
la précédente; le mâle d’un brun roussâtre avec l'abdomen bleuâtre en dessus, à l'exception du pre-
mier et du dernier segment brunâtres; femelle d’un jaune olivätre, avec les anneaux bordés de
jaune latéralement, sauf le premier et le dernier; cet abdomen large, déprimé dans les deux
sexes, etc. Parmi les espèces exotiques, nous nommerons uniquement les Libellula Indica, Fabr.,
de la Chine et des Indes orientales; lucia, Drury, du Sénégal, et bifasciata, Fabr., de l'Amérique du
Nord. Nous donnons, page 100, la fig. de la LIBELLULE À QUATRE TAGHES.
Il nous est impossible de faire connaître toutes les subdivisions de ce genre important; nous dirons
seulement que Toussaint Charpentier partage ce groupe en quatre sous-genres : Eprrneca, Diprax,
Ligezcura et Gurorosoma, et que M. le docteur Rambur y admet les genres suivants, la plupart créés
par lui et fondés sur quelques particularités différencielles présentées par la forme et la disposition
de l'abdomen, des yeux, des ailes, des nervures, etc. Ge sont les groupes génériques des: 1° NANNO-
PHYA; une espèce (pygmæa, Ramb ), dont la patrie n’est pas connue; 2° ACISOMA, deux espèces :
l’une du Bengale et l’autre de Madagascar; 3° ZYXOMMA, une espèce, de Bombay; 4° URACIS, une
espèce, de Buénos-Ayres; 5° LIBELLULA, Linné; 6° POLYNEVRA, six espèces, de Java, du Sénégal,
du Brésil, ete.; 7° PALPOPLEVRA, huit espèces, du Cap, de Benin et de Madagascar; et 8° DIASTA-
TOPS, trois espèces américaines. ;
Dans les CORDULINES, les yeux sont très-gros, contiqus, avec un prolongement à leur bord pos-
térieur vers les tempes; le bord anal des ailes postérieures est plus ou moins excavé dans le mâle;
le second segment de l'abdomen offre deux oreillettes latérales chez les mâles. Le groupe typique
est le genre :
CORDULIE (Cordulia, Leach); à yeux contigus, ayant vers le milieu du bord postérieur un petit
prolongement et une fossette; triangle des ailes antérieures large : celui des postérieures beaucoup
plus large que dans les Libellula, à angle anal plus ou moins saillant dans les mûles. Ce groupe,
qui représente des caractères communs aux Libellules, Æschnes et Gomphides, comprend une dou-
zaine d'espèces, de toutes les parties du monde, mais surtout européennes : le type est la Cordulia
metallica, Vander-Linden, de l’Europe tempérée et septentrionale, remarquable par ses ailes mé-
talliques, que nous figurons. +
Les autres genres sont ceux des : 1° MACROMIA, Ramb.; type M. splendens, Pictet, magnifique es-
pèce ayant l'aspect des exotiques et qui a été trouvée à Montpellier, et renfermant aussi quelques es-
pèces américaines; 2° EPITHECA, Charpentier, une seule espèce, surtout commune en Allemagne,
VE’ bimaculata, Charp.; et 3° DIDYMOPS, Ramb., groupe qui ne comprend que le D. Servillii,
Ramb., de l'Amérique septentrionale.
2e tribu, Gompumés. L'ancien genre Æschna de Fabricius a été partagé en plusieurs groupes;
parmi eux celui des Gomphus, Leach, est devenu la tribu des Gomphidés. Les caractères particuliers
de cette division sont : érois articles aux palpes labiaux, tandis que les Libellulidés n'en ont que
deux; les deuxièmes articles ne se touchant plus en dessus de la lèvre inférieure en couvrant la
bouche, laissant entre eux un espace assez considérable dans lequel on aperçoit le troisième article
des palpes, qui est très-apparent, assez long et terminé par une longue épire; tête un peu transverse,
peu globuleuse; lèvre couvrant le côté interne du deuxième article; yeux médiocres, très-rarement
contiqus ou à peine contiqus, très-petits; vertex très-abaissé, étroit, quelquefois nul; occiput habi-
tuellement transversal; abdomen ayant à son second segment un petit tubercule latéral dans les
ANNELÉS. —— NÉVROPTÈRES. 105
méûles; l'appendice anal inférieur presque toujours profondément fourchu ou échancré au bout; les
triangles discoidaux des ailes généralement courts, plus ou moins équilatéraux, rarement ou peu
allongés dans le sens de la longueur de l'organe; bord anal des secondes ailes excavé chez les
mûles.
Dans les Gomphidés, le corps est généralement jaune et noir, et les ailes ne présentent jamais de
taches sur le disque, mais elles sont quelquefois lavées de jaune, surtout dans les femelles. Le nom-
bre des espèces, qui sont cosmopolites, est assez considérable, car MM. de Selys-Longchamps et Hagen
en décrivent près de cent cinquante; elles se tiennent, au moins les européennes, constamment éloi-
gnées des eaux, volent peu de temps sans s'arrêter, et se posent souvent sur les buissons ou sur la
terre dénudée des chemins.
La distinction des genres de cette division a été commencée par Leach, qui a distingué les
Complhus et Petalura des Libellules; elle a été depuis continuée par M. le docteur Rambur, qui
admet sept genres, et surtout cette année même (1858) par MM. de Selys-Longchamps et Hagen,
qui, dans l’ouvrage monographique que nous avons cité, partagent les Gomphidés, qu’ils nomment
Gomphines, en deux divisions principales, quatre subdivisions, six légions (Gomphus, Gomphoïdes,
Lindenia, Chlorogomphus, Cordulegaster et Petalura), douze genres et trente-sept sous-genres; ce
derniers portant tous des noms scientifiques et, dès lors, deviendront, sans nul doute, de véri-
tables coupes génériques pour la plupart des entomologistes. Ces diverses divisions sont caractéri-
sées par la forme de la lèvre inférieure et par celle des triangles alaires, par la disposition des ner-
vures des ailes et des yeux, ainsi que par un certain nombre d'autres particularités tirées de l'ab-
domen, des palpes, des ailes, ete.
La légion des Gomphus ne comprend que le genre typique de la tribu, celui des :
GOMPHINES (Gomphus, Leach), qui entraient dans les Libellula de Linné, dans les Æschna de
Fabricius et de Latreille, dans les Lindenia de Vander-Hœven, dans les Diostomma de Toussaint
Charpentier et de Burmeister, et dont M. de Selys-Longchamps avait distingué quelques genres que
plus tard il n’a plus, conjointement avec M. Hagen, considéré que comme des sous-genres. — Les
Gomphus ont pour caractères : yeux nom contiqus, écartés; vertex peu élevé, à angles un peu arron-
dis; stemmates placés sur la même ligne; occiput transvers; lèvre inférieure à peu près aussi large
que longue; second article des palpes labiaux plus large que long; ailes à membranule très-étroite,
à peine visible : les quatre triangles n'ayant pas de nervules, plus courts aux ailes supérieures
qu'aux inférieures. Ges Névroptères sont excessivement nombreux, car on en décrit près de soixante-
dix espèces propres à toutes les parties du globe; mais dont les espèces de l'Amérique et de l'Océa-
nie semblent les moins nombreuses, et celles de l’Europe, au contraire, assez abondantes. M. de
Selys-Longchamps les a subdivisées en seize sous-genres : ceux des Oxycnocompnus, CErATOGoMPHUs
EnPerocomPuus, OPniocompuus, Eprcompnus, Macrocompaus, Hererocompuus, Microcompuus, ANonxo-
compuus, CxcLocompaus, PuyzLocompaus, PLarycompaus, Gompaus, AusrrocomPaus, HEmicompaus et Neo-
GomPuus, qui, à l'exception du sous-genre Gomphus, qui est cosmopolite, forment, en général, des
coupes géographiques bien circonscrites, et qui sont caractérisés, pour les deux sexes, par le nom-
bre des nervules anticubitales, par le ptérostigma, le prolongement de la nervule interne, la mem-
branule, l'occiput, le dessin du thorax et de l'abdomen, la longueur relative des trois derniers seg-
ments abdominaux, les dimensions des huitième et neuvième segments, et la longueur des pieds:
pour les mâles seuls, par des modifications de forme qu'éprouvent les appendices anals supérieurs
et inférieurs, le second article du pénis et la forme de l’angle anal des ailes inférieures, et pour les
femelles, par la forme de l’écaille vulvaire, les appendices anals et l’existence des oreillettes du
deuxième segment. Parmi les espèces européennes qui se rencontrent assez communément et que
l'on trouve souvent même dans nos environs, nous citerons pour type la LIBELLULE A TENAILLES Ou
Carorne, Geoffroy (Gomphus forcipatus, Linné), qui habite les contrées boisées et montagneuses,
et que nous représentons page 81; à tête jaunâtre, yeux gris, ailes blanches, diaphanes, avec la
tache marginale d’un brun roussâtre, etc. D’autres espèces sont les Gomphus Genei, Sélys, de Sicile;
serpentinus, Charp., de l'Europe centrale et méridionale; vulgatissimus, Linné, commun partout;
flavipes, Charp., d'Italie; Graslini, Ramb., des environs du Mans; simillisimus, Selys, d'Aix; nuca-
tus, Charp., du midi de la France, etc.
À. 14
106 HISTOIRE NATURELLE.
La légion des Gomphoïdes renferme les genres PROGOMPHUS, GOMPHOIDES (sous-genres : Gom-
phoides, Cyclophylla et Aphulla); LONOPHORA (sous-genres : Zonophora et Diaphlebia), et HAGE-
NIUS (sous-genres : Hagenius et Sieboldius), tous créés par M. de Selys-Longchamps et comprenant
des espèces, au nombre d’une vingtaine, toutes américaines, à l’exception du Sieboldius Japonicus,
provenant du Japon et de Bornéo.
La légion des Lindenia n’est subdivisée qu’en deux genres : DIASTATOMMA, Burmeister, et LIN-
DENIA, de Haan, Rambur (sous-genres : Gomphidia. Ictinus, Ramb.; Cacus et Lindenia). Une quin-
gaine d'espèces, surtcut des régions orientales, comme des Indes et de la Chine, et dont deux appar-
tiennent l’une au Sénégal et l’autre (Lindenia tetraphylla, Vander Linden) se trouve en Italie, en
Algérie, en Égypte et dans l'Asie Mineure.
Le genre CHLOROGOMPHUS, Sélys, ne renfermant que le C. magnificus, de Sumatra, forme à lui
seul la légion qui porte le même nom.
La légion des Cordulegaster n’est formée que des deux genres : CORDULEGASTER, Leach (sous-
genres : Theraphora, Anatogaster et Cordulegaster), et PETALIA, Hagen (sous-genres : Petalia et
Phyllopetalia). Un nombre restreint d'espèces propres aux Indes, à l'Amérique et à l’Europe; celles
de cette dernière partie du monde sont les Lisecrures axxuzée (Cordulegaster annulatus, Latr.) et
BIDENTÉE (C. bidentatus, Selys).
Enfin, dans la dernière légion, les Petalura, on comprend les deux genres : PETALURA, Leach
(sous-genres : Petalura et Uropetalia), et PHEXUS, Ramb., qui ne renferme que cinq espèces de
l'Océanie et de l'Amérique.
3° tribu, Æscuxinés. Cette tribu, formée avec le genre Æschna de Fabricius, a pour caractères :
yeux toujours contiqus situés en arrière; antennes insérées sur une ligne passant par le stemmate
moyen, mais non au-dessus; palpes labiaux à second article plus court que la lèvre inférieure, le
troisième cylindrique, plus de moitié plus court que le précédent; appendices supérieurs variés pour
la forme, jamais cylindriques ni en forme de stylet; triangles des ailes semblables; parties génitales
des femelles à peu près comme dans les Agrionidés, à bord vulvaire prolongé en une pointe cornée,
longue, formée de quatre pièces intimement unies et enveloppées duns deux valves saillantes, à l'ex-
trémité desquelles on voit un petit prolongement cylindrique portant une ou plusieurs sotes, ou le
plus habituellement un pinceau de poils serrés. Cette tribu comprend les plus grandes et les plus
belles espèces de Libelluliens; on n’en connaît pas un très-grand nombre d'espèces, mais elles sem-
blent propres à toutes les parties du monde. La tête est généralement grosse, à vertex et occiput
petits; la lèvre supérieure est échancrée; le front très-saillant; l'abdomen est très-allongé; les appen-
dices abdominaux, en général très-courts, sont semblables dans les deux sexes; les pattes ont le
dernier article des tarses très-petit. M. le docteur Rambur y admet trois genres dont le plus impor-
tant est celui des :
- ÆSCINES (Æschna), Fabricius; yeux plus ou moins contigus, presque toujours fortement sinnés
postérieurement; deuxième segment abdominal présentant sur les côtés un tubercule saillant, com-
primé, denticulé; appendice inférieur entier; bord anal des ailes postérieures des-mûles saillant,
avec le bord abdominal sinné. On décrit une trentaine d'espèces de ce groupe, et elles semblent ap-
partenir à toutes les parties du monde et surtout à l'Amérique, ainsi qu'à l’Europe. Les plus com-
munes dans ce dernier pays sont les Æscuxes BLEUE (Æschna cyanea, Latr.), pes docs (juncea,
Linné), MÉLANGÉE (mixéa, Latr.), GRANDE (grandis, Lin.), Irène (1rena, Fonscolombe), ete. Parmi
ces espèces, l’Æscnxe crane, la plus grande Libellule de nos environs, peut être prise comme typi-
que; elle a à peu près 0,07 à 0,08 de longueur; elle est jaunâtre, avec des bandes de chaque
côté sur le thorax : ces ailes, diaphanes, ont leur base costale bleuâtre, ainsi que des points latéraux,
qui manquent sur le premier et les deux derniers segments. Nous donnons dans nos planches sépa-
rées la figure de l’Æschna lrena.
Les deux autres genres de la même division sont ceux des ANAX, Leach, chez lesquels il n’y a
pas de tubercule sur le deuxième segment abdominal; l'angle anal des ailes postérieures nul dans
les deux sexes, fortement arrondi, ete. Une douzaine d'espèces propres aux pays étrangers, tels que
l'île de France, le Sénégal, etc., et dont deux, les Anaæ formosus, Vander-Linden, et Partenope,
ANNELÉS. -— NÉVROPTÈRES. 107
Selys, appartiennent à l’Europe; et les CYNACANTHA, Rambur, qui renferment sept espèces
exotiques.
4 tribu, Aewonpes. Le genre Agrion de Fabricius, démembré des anciennes Libellula, est devenu
pour les auteurs modernes une tribu ou famille particuhère; quelquefois elle-même partagée en
groupes primaires. Chez ces Libelluliens, la tête est fortement transversale, déprimée; les yeux sont
assez petits, très-éloignés les uns des autres, comme pédicellés; les stemmates sont placés en triangle
autour du vertex; V'occiput est étroit, linéaire; les antennes sont insérées au-dessus de ces stem-
mates, à premier article couché et appliqué sur la tête, long : second redressé, très-long; la lèvre in-
férieure est grande; le second article des palpes labiaux est à peu près moitié moins large que la
lèvre, et son dernier article étroit, presque cylindrique; la lèvre supérieure est entière, convexe,
arrondie; les ailes sont surtout composées d’oréoles quadrilatères et à bord postérieur s'arrétant le
plus souvent avant la base; appendices des mâles au nombre de quatre; abdomen gréle, très-long,
cylindrique. On indique une vingtaine de genres dans cette tribu. L'un des groupes typiques est
celui des :
CALOPTERYX (Calopteryx, Leach); yeux très-éloignés l'un de l’autre; lèvre inférieure allongée;
palpes labiaux couvrant très-peu la bouche; pattes très-grandes, bordées de cils minces; ailes à
réseau très-fin et très-serré, complétement semblables; abdomen plus long que l'aile, ete. Ce genre
dans lequel M. de Selys forme les sous-genres des Sylphis, Hagen, Calopteryx et Matrona, renferme
une vingtaine d'espèces propres à l’Europe, à l'Afrique méditerranéenne, à l'Asie et au nord de
l'Amérique, et dont aucune espèce ne se trouve en Océanie. Trois espèces sont très-répandues en
Europe, et se font surtout distinguer par la couleur du corps et des pattes dans les deux sexes, ainsi
que par la largeur des ailes; mais elles sont toutes sujettes à se modifier selon le climat, de sorte
que l'existence des races méridionales, très-distinctes des races septentrionales, avait d’abord fait
croire à un nombre plus considérable d’espéces, sans parler du changement que l’âge produit dans
la coloration des ailes et dans la forme du neuvième segment abdominal : ces espèces sont le Caro-
PTÉRYX VIERGE Ou l'Urrique, Geoffroy (Libellula virgo, Linné), le C. ÉcLaranr ou la Louise, Geoffroy
(Calopteryx splendens, Harris), et le G. némonruoïnar (Agrion hæmorrhoidalis, Vander-Linden). Le
C. virgo, qui se trouve dans nos environs, est long de 0,06 à 0,07; le mäle est d'un bleu ver-
dâtre métallique très-brillant, avec les ailes diaphanes, ayant une large bande transversale d’un
bleu verdàtre; la femelle est d’un vert bronzé, avec les ailes d’un vert métallique, présentant une
tache marginale jaune blanchâtre. Nous donnons les figures des deux sexes de cette espèce dans nos
planches séparées.
Les autres coupes génériques, que l’on peut ranger dans une même division que les Caloptéryx,
sont ceux des ÉCHO, Selys (subdivisé en Cris, Sapno, Mxaïs et Écuo); PHAON, Selys (sous-genres :
Paox et Neurorasis), VESTALIS, Selys; HETÆRINA, Selys (sous-genres : Lars et Herærena, Hagen);
EUPHÆA, Selys (sous-genres : AnisopLeura, Érazrace, Euruxa et Dyspuæa); HELIOCHARIS, Selys;
DICTORIAS, Selys; LIBELLAGO, Selys (sous-genres : Lisezraco et Rainocypua, Rambur); MICROME-
RUS, Ramb.; AMPHIPTERYX, Selys, et THORE, Hagen (sous-genres : Cnazcorréryx, THore et Cora).
Tous ces genres renferment un grand nombre d'espèces, dont on trouvera la description dans la Mo-
nographie des Caloptérygqines de MM. Selys-Longchamps et Ilagen; toutes sont exotiques, à l'ex-
ception de l’Euphæa fatime, Charp., de la Turquie d'Europe.
Un autre groupe typique beaucoup plus connu est le genre :
AGRION (Agrion, Fabr.) — Yeux comme pédicellés, très-éloignés l'un de l'autre; lèvre inférieure
ovalatre, très-échancrée; deuxième article des palpes labiaux plus court que la lèvre; pattes peu
allongées, avec des cils courts, épais, peu nombreux; ailes pédicellées, avec la plus grande partie
des aréoles quadrilatères ; appendices abdominaux très-courts. Ce genre, quoique considérablement
restreint par les auteurs qui suivirent Fabricius, renferme encore plus dé quarante espèces, dont
moitié est particulière à l'Europe et moitié aux pays étrangers. Deux espèces surtout commune dans
les environs de Paris, l'Acriox écécant (4. elegans, Vander-Linden et l'A. JEUNE FILLE Où FILLETTE
108 HISTOIRE NATURELLE.
(A. puella, Rœsel). Plusieurs sous-genres ont été formés dans ce genre : tels sont ceux des Near
LENtA, Envruromma, Pyrruosoma, Iscunura, AcRioN, etc.
Fig. 92. — Agrion Jeune fille. Fig. 93. — Agrion jeune fille
(Insecte parfait.) . (Nymphe.)
Des genres voisins de celui-ci sont ceux des PLATYCNEMIS, Charp., qui renferme des espèces eu-
ropéennes (type, P. latipes, Ramb., de Montpellier); LESTES, Leach, groupe dans lequel on a créé
plusieurs sous-genres et qui est nombreux en espèces d'Europe et des pays étrangers (type, le Lestes
barbara, Fabr., qui semble avoir pour patrie spéciale les côtes du bassin de la Méditerranée); AR-
GIA, Ramb., MECISTOGASTER, Ramb., MICROSTIGMA, Ramb., MEGALOPREPSIS, Ramb., etc.
Plusieurs auteurs se sont occupés des Libelluliens fossiles; parmi eux nous devons eiter MM. Heer,
Pictet, Westwood, Strickland, Germar, Muenster, Brodie, Vander-Linden, Toussaint Charpentier, de
Selys-Longchamps, etc.; mais M. Hagen en a surtout fait connaître le plus grand nombre et a donné
un résumé général de tout ee qu'on sait sur ces Névroptères antédiluviens. C’est exclusivement en
Europe que l'on a trouvé ces fossiles, aussi bien des débris d'Insectes parfaits que de larves et de
nympbhes, et le nombre des espèces connues est presque la moitié du nombre des espèces qui y sont
actuellement vivantes. Dans les terrains secondaires, on a trouvé des Libelluliens fossiles daps trois
couches distinctes; dans le système liassique d’Angleterre, le jurassique de Solenhofen (Allemagne)
et le crétacé Weldien d'Angleterre; dans les terrains tertiaires qui en possèdent autant d’espèces
que les couches secondaires, ces Insectes ont été rencontrés dans quatre dépôts; le terrain coeëne de
Monte-Bolea (Italie), le miocène dans l'Ambre (Prusse), le miocène dans les marnes de la Provence,
et le pliocène de Badobej et d'Œningen (Croatie). Aueune espèce fossile n’est analogue aux espèces
actuelles, et aucune n'a été trouvée à la fois dans plusieurs terrains ni dans plusieurs êtages des
mêmes terrains. Dans les terrains secondaires les Æschnidés prédominent, car on n’y a trouvé que des
espèces de cette tribu, sauf une Agfionidé et une Libellulidé, et, comme le fait remarquer M. de
Selys, si ces terrains sont en grande partie marins, cela devait être, car nos Æschnidés actuelles, par
leur vol élevé et soutenu, sont bien plus à même que les Agrionidés et Libellulidés de fréquenter les
côtes maritimes et les lagunes. Dans les terrains tertiaires, au contraire, le nombre des Agrionidés et
des Libellulidés augmente beaucoup, tandis que celui des Æschnidés diminue considérablement.
Toutefois de nouvelles découvertes pourront modifier ces conclusions; mais ce qui restera, c’est
l'importance de l'étude des Libelluliens fossiles au point de vue de la géologie, pour se faire une idée
de ce qu'était alors le pays où vivaient ces Insectes et leurs larves, dont les habitudes sont bien con-
nues pour nos espèces actuelles.
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Fig. 5. — Fourmilion de Percheron.
AË NÉVROPTÈRES Pl. 6.
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 109
SEPTIÈME FAMILLE. — MYRMÉLÉONIENS.
Le genre Fourmiziox, dont Linné a traduit le nom en Myrmeleo, étant devenu pour M. E. Blan-
.chard le groupe principal d’une famille de Névroptères, celle-ci a dû recevoir la dénomination de
Myrméléoniens. Aussi adopterons-nous ce nom tout en faisant remarquer qu'il est à peu près syno-
nyme de celui de PLanipenxes (Planipenna) appliqué précédemment par Latreille aux mêmes In-
sectes, à quelques différences près. Les Myrméléoniens ont pour principaux caractères : antennes
composées d'un très-grand nombre d'articles, beaucoup plus longs que la tête, n'ayant jamais la
forme d'un stylet; souvent pas d’ocelles; bouche avancée en bec, ou avec les branches extérieures cor.
nées chez les mâles; mandibules fortes; palpes maæillaires ordinairement filiformes, ou grossissant
peu vers l'extrémité, composés de quatre ou cinq articles; ailes en toit, très-réticulées, à nervures
saillantes; nervures transversales très-nombreuses : ailes inférieures presque égales aux supé-
rieures, n'étant jamais plissées; articles des tarses habituellement au nombre de cinq; des méta-
morphoses complètes.
Quoique ayant entre eux les caractères communs que nous venons d'énumérer brièvement, les In-
sectes qui entrent dans cette famille diffèrent assez notablement les uns des autres. Cependant ils se
distinguent assez facilement des autres familles de l’ordre des Névroptères; c’est ainsi qu’ils diffèrent
des Termiens, des Psociens et des Embiens, par le nombre des articles des tarses, qui n’est jamais
au-dessous de quatre et qui est presque toujours de cinq; qu'ils se distinguent surtout des Perliens,
Éphémériens et Libelluliens par la forme de leurs antennes, qui ne sont jamais disposées en stylets;
qu’on peut les séparer des Raphidiens, parce qu'ils n’ont pas ordinairement d’ocelles, ou que, s'ils
en présentent, leur bouche est avancée en museau et en bec, et qu’enfin ils sont distincts des Phry-
ganiens par leurs ailes semblables, et qui ne sont jamais sensiblement velues sur la membrane ou
largement frangées.
Nous nous étendrons peu sur les généralités des Myrméléoniens, car c'est en nous occupant des
groupes principaux qui ont été formés dans cette division que nous ferons connaître leurs caractères
et que nous donnerons l’histoire de leurs mœurs. Cette famille comprend au moins autant d'espèces
que la famille des Libelluliens; sous plusieurs points de vue, principalement sous celui de leur struc-
ture générale, ces Insectes se rapprochent très-manifestement des Libelluliens, malgré quelques
différences importantes. Mais c’est surtout sous leur premier état qu’ils s’en séparent le plus notable-
ment; leurs métamorphoses ne se ressemblent guère, et elles sont beaucoup plus complètes, c’est-à-
dire que les nymphes et surtout les larves ne ressemblent pas aux Insectes arrivés à leur état parfait.
Les Myrméléoniens, au moins pour ceux dont les transformations ont été observées, présentent des
larves qui, carnassières comme celles des Libelluliens, sont essentiellement terrestres et jamais
aquatiques. Ces larves sont généralement courtes, élargies, avec une tête large et supportant de
longues mandibules; elles vivent d’Insectes, dont elles s'emparent de diverses manières et presque
toujours avec un instinct admirable. Au moment de subir leur transformation en nymphe, elles se
forment en petit cocon soyeux, auquel sont ajoutées souvent des matières étrangères. La taille de ces
larves paraît très-petite, comparativement à celle des Insectes parfaits; c’est ainsi que du cocon pil-
luliforme assez petit d’un Fourmilion ou d’un Hémérobe sortira un Insecte d’une taille souvent con-
sidérable. On trouve des Myrméléoniens dans presque toutes les régions du globe; l’Europe en four-
nit beaucoup, mais c’est particulièrement dans les contrées chaudes qu’on en voit un plus grand
nombre, soit spécifiquement, soit individuellement.
Nous subdiviserons les Myrméléoniens en quatre tribus : celles des Myrméléonidés, Némoptéridés,
Hémérobidés et Panorpidés; quant à la division des Mantispidés, que quelques auteurs, à l'exemple
de Latreille, y réunissent, nous les laisserons avec M. E. Blanchard dans la famille des Rapmiprexs,
qui suivra immédiatement celle que nous étudions actuellement.
4e tribu, Myrmécéoninés. On’ range dans cette division les Myrméléoniens qui ont des antennes
plus ou moins longues, mais constamment renflées vers l'extrémité. La tête de ces Insectes est grosse,
110 HISTOIRE NATURELLE.
avec les yeux gros, arrondis ou oblongs, et alors divisés par un sillon; le premier article des an-
tennes est très-épais, quelquefois comme vésiculeux. Le corselet est tantôt étroit et en forme de
selle, tantôt allongé. L'abdomen, plus ou moins long, est souvent muni de deux appendices variables
pour la longueur, et avec les arceaux supérieurs et inférieurs souvent séparés. Les pattes sont assez
courtes, fortes ; le tarse composé de cinq articles, dont le premier et le dernier sont les plus longs,
et celui-ci presque toujours plus long que le premier, muni de deux onglets très-forts, à la base des-
quels il y a inférieurement une saillie garnie de soie ou d’épines. Les ailes sont grandes, allongées,
ressemblant un peu à celle des Libelluliens : elles ont un réseau serré et un certain nombre de ner-
vures longitudinales : ce système nervulaire présente quelques particularités selon les genres, aussi
M. le docteur Rambur l’a-t-il étudié avec soin et a-t-il donné des noms spéciaux aux diverses parties
qu'on y remarque.
Les larves de ces Névroptéres sont généralement mal connues, à l'exception de celles de deux es-
pèces de Fourmilions (Myrmeleo formicarius et tetragrammicus); elles sont ovoïdes, déprimées,
avec le corselet rétréci; leur tête est presque quadrilatère, armée de deux grandes mandibules creu-
ses, qui leur servent de suçoirs et de pinces pour saisir les Insectes dont elles se nourrissent; leurs
antennes sont assez longues, presque rétiformes, composées d’un assez grand nombre d'articles; les
yeux consistent en une saillie sur laquelle il y a six ocelles, comme sur la tête des chenilles, mais
plus serrés; l'abdomen et les deux dernières divisions du thorax, qui ne s'en distinguent pas, ont
sur les côtés de petits tubereules et de petites touffes de poils; la partie postérieure est hérissée d’é-
pines rangées par lignes; les pattes sont composées d’une hanche longue, qu'on prendrait pour une
cuisse, si elle ne portait pas un trochanter, d’une cuisse, d’un tibia et d'un tarse d’un seul article
long, à l'exception des dernières qui n'ont pas de tarses. Ces larves, comme nous le dirons, se for-
ment, dans le sable, une sorte d’entonnoir, piége redoutable pour les petits Insectes et surtout pour
les Fourmis qui y tombent fréquemment, et qui, du fond de ce trou ne pouvant facilement s’échap-
per, sont bientôt saisis par la larve du Fourmilion qui en fait sa proie. Ces larves se transforment en
nymphes immobiles dans une coque arrondie, d’où sortira l'Insecte parfait. M. Rambur a fait con-
naître des larves plus grosses qu'il rapporte, mais avec doute, à un genre Palpares et au genre plus
connu des Ascalaphus.
Ces Insectes, de taille moyenne ou même assez grande, sont ornés de jolies couleurs, volent avec
beaucoup d’agilité et se tiennent souvent acerochés aux plantes; on en trouve presque partout, mais
surtout dans les pays méridionaux; quelques espèces sont propres au climat deParis, ou ne s’y ren-
contrent qu’accidentellement.
Les Myrméléoniens peuvent être séparés en deux sections, correspondant aux grands genres fa-
briciens des Myrmeleo et Ascalaphus, dont plusieurs auteurs, tels que MM. Burmeister, Alex. Le-
febvre, le docteur Rambur, ete., se sont spécialement occupés, et qu'ils ont partagés en plusieurs
groupes génériques. Pour nous, nous n’admettrons que les deux genres Fourmilion et Ascalaphe.
FOURMILION (Myrmeleo, Linné). — Yeux gros, n'étant pas séparés; antennes en massue, qros-
sissant graduellement, ayant presque la forme d'un fuseau, avec leur extrémité crochue, à peu
près de la longueur de la tête et du corselet réunis; mandibules courtes, robustes, unidentées à l'in-
lérieur; palpes labiaux beaucoup plus longs que les mazxillaires et que les externes, et un peu plus
renflés extérieurement; ailes très-grandes, réticulées, dépassant ordinairement la longueur de
l'abdomen; ce dernier lui-même très-long, gréle, de forme cylindrique; pattes courtes; tarses de cinq
articles.
Les Fourmilions, que Geoffroy nommait Formicaleo, sont des Insectes d'assez grande taille, ayant
un corps grêle et très-long et de grandes ailes, et qui, à leur état d’Insecte parfait, volent pendant
la plus grande ardeur du soleil, dans les endroits secs, arides et sablonneux. Sous leur dernier état,
ils se nourrissent de petits Insectes, mais ils ne semblent pas avoir la même voracité que les Libel-
luliens. Leur vol est élevé et rapide, souvent ils planent pendant assez longtemps dans les airs.
L'anatomie de ces Insectes a été étudiée par quelques auteurs. Ils ont un canal intestinal assez
court, comme cela a lieu chez tous les animaux essentiellement carnassiers; leur œsophage est très-
grêle, renflé insensiblement en un jabot qui se prolonge jusque vers les deux tiers de la longueur
de l'abdomen, en présentant une sorte de panse latérale; à ce jabot succède un petit gésier ovoïde
ANNELÉS. — NEVROPTÈRES. ill
suivi d'un ventricule chylifique, granuleux extérieurement et terminé par un intestin se renflant en
un cœcum à son extrémité. Les vaisseaux hépatiques insérés à l'extrémité du ventricule chylifique
sont au nombre de huit, longs, capillaires, simples, flottant par leur extrémité. Le système nerveux
ressemble à celui des autres Névroptères.
Fig. 9%. — Fourmilion commun
4. Insecte parfait. — 2, Nymphe. — 3. Larve. — 4. Cocon. — 5. Coupe de l’entonnoir.
Les larves des Fourmilions, étudiées il y a déjà longtemps par les entomologistes du siècle der-
nier, ont été observées de nouveau assez récemment; toutes sont terrestres. Leur tête et leur corselet
sont étroits, fortement aplatis, et leur abdomen large, proportionnellement très-volumineux. La
bouche ne présente ni mâchoires ni palpes distincts, mais uniquement des mandibules plus longues
que la tête, grêles et un peu recourbées, formant une longue paire de pinces propres à saisir forte:
ment une proie; ces mandibules, garnies à l’intérieur de dents fortes et acuminées, ont à leur extré-
mité un petit ostéole absorbant, qui permet à ces larves de humer les parties liquides. Le canal intes-
tinal de ces larves a environ trois fois la longueur du corps lorsqu'il est déployé; habituellement il
est entouré d’une très-grande quantité de tissu graisseux, qui sans doute sert beaucoup à l’Insecte
pour supporter parfois des abstinences très-prolongées. Elles sont d’un blanc légèrement brunâtre,
et assez molles.
Le nom de Fourmilion vient de leur dénomination vulgaire de Rois des Fourmis, qui leur a été
appliquée, parce que l’on trouve souvent les larves au milieu des Fourmis dont elles se nourrissent,
et Linné n’a fait que traduire ce nom, lorsqu'il leur a appliqué la dénomination générique de Myr-
meleo (du grec pupuné, fourmi, et 2, lion); Geoffroy a agi de même en les appelant Formicaleo
(du latin formica, fourmi, et leo, lion).
Les Fourmilions sont assez nombreux en espèces; car on en a décrit plus de quatre-vingts espèces,
et, sans nul doute, il en existe beaucoup d’inédites dans les collections, et, en outre, leur recherche
a élé assez négligée jusque dans ces derniers temps. Il y a quinze ans encore que ce genre, adopté
par tous les entomologistes, demeurait intact et tel que l'avait formé Linné; mais M. le docteur
Rambur, dans son Histoire naturelle des Orthoptères, a commencé à le démembrer, et il a formé
les genres PALPARES, ACANTHACLISIS et MEGISTOPUS (ce dernier qu'il n'indique qu'avec doute).
Ces subdivisions, fondées sur de très-légères modifications dans la forme des ailes, dans les crochets
tarsiens et dans quelques autres organes de l'Insecte, ne sont généralement pas adoptés.
D'une manière générale, les Fourmilions paraissent répandus dans toutes les régions chaudes du
globe; ils sont abondants en Amérique; ils le sont également dans le midi de l’Europe, tandis qu’ils
viennent en quelque sorte finir dans le centre de la partie du monde que nous habitons, et auprès
de Paris nous n’en rencontrons plus qu’une seule espèce, qui n’y est pas rare ; c’est le Fonrmir1on
PROPREMENT Dir (Myrmeleo formicarius, Linné), qui, ayant été particulièrement étudié dans ses ha-
bitudes et son organisation, est considéré par tous les entomologistes comme type du genre. Il est
long de 0,04 environ; son corps est noirâtre, ses antennes noires, un peu plus courtes que le cor-
selet; la tête et le front lisses, avec un sillon dans son milieu et des taches annulaires jaunâtres; le
corselet est noir, velu, avec une ligne longitudinale dans le milieu et les bords latéraux d’rn jaune
112 HISTOIRE NATURELLE.
roussâtre; les ailes sont transparentes, siguës vers leur extrémité, tachetées de brun, avec le para-
stigma, une tache costale et quelques petits atomes blanchâtres; l'abdomen est noir, avec le bord
postérieur de chaque segment d'un jaune roussâtre assez pâle; les pattes sont d'un brun noirâtre.
On trouve la larve en abondance dans les endroits sablonneux les plus exposés aux rayons du soleil.
Elle est d'un gris rosé un peu pâle, et munie sur les parties latérales du corps de bouquets de petits
poils noirs. Les pattes sont assez longues et grêles : les antérieures dirigées en avant, de même que
les intermédiaires, tandis que les postérieures, plus robustes que les autres, demeurant très-serrées
contre le corps, ne peuvent servir à l'animal qu’à se diriger en arrière; ce qui est le seul mouve-
ment que ces larves exécutent; les crochets des tarses sont plus forts aux pattes antérieures, et les
tarses sont soudés avec les jambes, tandis qu'ils restent libres aux autres paires de pattes. Ces larves
se tiennent constamment dans les sables exposés au midi. Chacune se construit dans le sable mou-
vant une sorte d'entonnoir, en marchant à reculons et décrivant à l’aide de ses pattes des tours de
spire dont le diamètre diminue graduellement. Elle charge sa tête de sable. et, par un mouvement
brusque, le lance au loin. Dans l'espace d'une demi-heure, son travail est entièrement terminé. C’est
alors que la larve se blottit au fond de son trou, l'abdomen enfoncé dans le sable et la tête seule en
dehors; dans cette position elle attend patiemment et souvent, assure-t-on, pendant plusieurs jours
qu'un Insecte, en passant, vienne à se laisser glisser le long des parois de son entonnoir; dès qu'elle
s'aperçoit de sa présence, elle lui jette aussitôt du sable avec sa tête pour l’étourdir et le faire tout
à fait tomber au fond de son trou, ce qui ne manque pas d'arriver en peu d'instants; elle s'empare
alors de sa victime et la suce immédiatement avec ses mandibules, qui lui servent très-bien de si-
phon; elle hume toutes les parties liquides qu’elle contient et ensuite elle en rejette la dépouille
hors de sa retraite, Les Fourmis, étant très-nombreuses et ayant plus l'habitude de courir à terre
que les autres Insectes, sont surtout exposées à servir de pâture aux Fourmilions, et c’est, comme
nous l’avons dit, ce qui a valu à ces animaux les noms qu'ils portent. Du reste, ils se nourrissent
parfaitement de Mouches, d’Araignées et d’autres Articulés. Réaumur a dit que ces larves étaient
dépourvues d’anus, et qu’en conséquence tous les liquides absorbés profitaient à l'accroissement de
l'animal, le superflu s’échappant probablement par la transpiration; cependant il existe réellement
un anus excessivement petit et assez difficile à apercevoir à la simple vue : il y a aussi des exerc-
ments, mais ils sont si petits, qu'ils se perdent dans le sable.
Vers le mois de juillet ou d’août, les larves de Fourmilions ont acquis tout leur développement;
elles se forment alors un petit cocon soyeux, mêlé de grains de sable et parfaitement rond comme
une petite boule, dans lequel elles se transforment en nymphes. Ces dernières, dont la forme rap-
pelle déjà beaucoup celle des Insectes parfaits, se transforment vers la fin d'août et le commence-
ment de septembre. Il paraît toutefois que certains individus n’éclosent qu’au printemps suivant.
Une autre espèce que l’on trouve assez fréquemment dans nos environs, et qui a été souvent confon-
due avec le Myrmeleo formicarius, est le M. tetragrammicus, Pallas. Plusieurs autres espèces se ren-
contrent dans le midi de la France, tel est le Fourmizron occrranique (Myrmeleo occitanica, Villers),
qui entre dans le genre Acanthoclisis, Rambur, et surtout le Fouruizron zisezcuroïne (Myrmeleo libel-
luloides, Linné), type du genre Palpares de Rambur, plus grand que le Fourmilion proprement dit;
corps jaune, avec des lignes noires; antennes noires; tête noire antérieurement, jaune au sommet,
avec une ligne noire longitudinale; corselet jaunâtre, avec une ligne noire au milieu; ailes d’un
blanc grisâtre, avec des nervures jaunes, des taches et des points bruns; pattes brunâtres; abdomen
noir, avec quatre bandes longitudinales noires. (Voy. notre Atlas.) On assure que la larve de cette
espèce ne forme pas d'entonnoir et qu’elle peut se diriger en avant. Mais cela n’est pas certain, etl'on
s’est assuré positivement que, dans le midi de la France, en Orient, en Amérique, etc., beaucoup
d'espèces de Fourmilions ont des habitudes semblables à celles de notre espèce typique, et que les
larves se creusent des trous en entonnoir. M. Émile Blanchard a remarqué qu’en Sicile, sur le
Stromboli, au milieu des cendres volcaniques, il y a une quantité considérable de larves de Myrmé-
léons au fond de leur entonnoir, mais il n’a pu savoir à quelle espèce les rapporter.
Le second genre typique est celui des :
ASCALAPHES (Ascalaphus, Fabr.). — Antennes presque aussi longues que le corps, filiformes,
terminées brusquement en un bouton épais, pyriforme ou en forme de toupie, quelquefois allongé.
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 115
Les Ascalaphes sont de jolis Insectes dont les ailes sont habituellement variées de noir et de jaune,
et plus courtes ainsi que plus larges que celles des Fourmilions; leur taille est un peu plus considé-
rable; le corps et la tête sont très-velus; les antennes ressemblent assez à celles des Lépidoptères
diurnes; tous les palpes sont courts ; les labiaux à peine plus longs que les maxillaires, filiformes,
avec leur dernier article cylindrique; l'abdomen est ovalaire, guère plus long que le thorax; les
tarses ont cinq articles. On décrit une quarantaine d'espèces de ce groupe, et elles sont propres à
toutes les contrées chaudes du globe; quelques-unes habitent le midi de l’Europe. Leurs métamor-
phoses sont assez mal connues; les larves, selon M. Westwood, ressembleraient assez à celles des
Myrmeleo, mais elles seraient seulement munies d’appendices latéraux. On a dit que les larves ne
formaient pas d'entonnoir et qu’elles marchaient en avant et non à reculons, comme celles des
Fourmilions; mais cela est bien loin d'être démontré, etil paraît que l'Ascalaphus ltalicus creuse des
trous dans le sable comme le Formicaleo; seulement, tandis que le premier dispose son entonnoir
de manière qu'il soit à l’abri de la pluie, il paraîtrait que le second ne prend pas cette précaution :
ce qui peut s'expliquer aisément, puisqu'il vit sous un climat où il ne pleut souvent pas pendant six
à huit mois de l’année.
Pendant très-longtemps, le genre Ascalaphus n’a pas été démembré. M. Burmeister y a formé le
premier deux groupes génériques assez naturels : ceux des ASCALAPHUS ou Schizophthulmi,
Lefebvre, à yeux divisés par un sillon, et HAPLOGLENIUS, ou Olophthalmi, Lefeb., à yeux entiers.
Depuis MM. Alex. Lefebvre et le docteur Rambur ont créé un assez grand nombre de genres. Le
dernier auteur que nous venons de nommer, tout en n’adoptant pas tous les genres proposés par
M. Lefebvre, et qui sont au nombre de onze, en indique dix que nous nous bornerons à nommer,
et qui sont basés sur quelques particularités que présentent les veux, les ailes et les pattes; ce sont :
1° parmi les Schixophthalmi, les genres ASCALAPHUS, Fabr.; THELEPROCTOPHYLLA, Rambur
(TecerrocrePaycLa, Lefeb.); PUER, Lefeb.; BUBO, Ramb.; ULULA, Ramb.; CORDULECERUS, Ramb.,
et COLOBOPTERUS, Ramb.; et 2° parmi les Olophthalmi, ceux des BYAS, Ramb.; HAPLOGLENIUS,
Burm. (Prynx, Lefeb.), et AZESIA, Lefeb.
Fig. 95. — Ascalaphe macaron.
L'espèce typique est l’AscaLAPHE A LONGUES ANTENNES (Ascalaphus longicornis, Linné). Long de
0%,04 à 0,05, avec une envergure de 0,06 à 0"08; noir, à ailes d’un jaune roussâtre. Grande et
belle espèce qui habite surtout le midi de la France et unc partie de l'Espagne, mais qui a été prise
plusieurs fois dans la forêt de Fontainebleau et dans les bois de Lardy, où il a été signalé, il y a déjà
longtemps, par Alexandre Pierret et récemment par M. Villeneuve. Parmi les espèces de la France
méridionale, nous nommerons les Ascalaphus meridionalis, Charp.; Italicus, Fabr.; barbarus, Lat.:
Corsicus, Ramb.; Australis, Fabr. (G. Theleproctophylla); maculatus, Oliv. (G. Puer); agriodes,
Ramb. (G. Bubo), etc. Nous représentons l’Ascazapne macaron. Les autres genres ne renferment
pas d'espèces européennes; nous en donnons une provenanñt de Benin. (Voy. Atlas.)
de tribu, Némorréninés. Cette division, qui ne renferme que le genre NÉMOPTÈRE (Nemoptera,
Latr.), que, selon M. Rambur, on pourrait peut-être partager en trois petites coupes génériques
A. 45
114 HISTOIRE NATURELLE.
(Nemoptera, Halter et Brachystoma), présente pour caractères : téte un peu prolongée en bec; an-
tennes sélacées, presque filiformes; pas d’ocelles; palpes labiaux plus longs que les maæxillaires;
ceux-ci plus courts que les mächoires, qui sont droites, siliées, obtuses à l'extrémité; ailes posté-
rieures presque linéaires, souvent dilatées en forme de spatule vers l'extrémité; tarses de cinq arti-
cles : le premier et le dernier assez longs, les autres très-courts. Ce genre, auquel Leach a appliqué
la dénomination de Nemopteryx, remarquable en ce qu'il présente à la fois des rapports communs
avec les Fourmilions, les Hémérobes et les Panorpes, ne renferme qu'un nombre peu considérable
d'espèces propres aux contrées chaudes et surtout à l'Archipel (Nemoptera Coa, Linné); à l'Égypte
(Nemopteryx Africana, Savigny; Nemoptera halterata, Leach); aux environs de Bagdad (N. ex-
tensa, Oliv.), et à l'Espagne et au Portugal. Dans ces derniers pays on rencontre, quoique rarement,
la N. Lusitanica, Leach, qui a. 0",05 à 0®,06 d'envergure pour les ailes supérieures et 0,04 à
0,05 pour les inférieures, et qui est varié de jaune et de noir. Cette espèce a présenté à M. Léon
Dufour une particularité des plus intéressantes; malgré toutes ses recherches, ainsi que celles de
M. le docteur Laboulbène, et à un assez fort grossissement, il n'a pu découvrir dans cet Insecte au-
cune trace d'un système nerveux appréciable. Malgré cela, comme l'a fait observer M. le docteur
Sichel à la Société Entomologique de France, on ne peut admettre dans un Articulé aussi élevé dans
la série que ce Névroptère une absence complète de système nerveux, et peut-être que le cerveau et
les ganglions, au lieu d'être des lobes massifs, pourraient représenter des lobas à ramuscules très-
ténus; peut-être que tout le système nerveux pourrait se composer de cordons excessivement minces
et que toute sa substance constituerait une pulpe extrêmement molle et diffluente, sans qu'il y
eut là rien d'aussi contraire aux lois physiologiques que l’absence de système nerveux. Nous ren-
voyons au travail de M. Léon Dufour, inséré dans les Annales des Sciences naturelles, 1855, et nous
engageons nos collègues de la Société Entomologique, qui seraient en mesure de le faire, de nous
donner de nouvelles recherches à ce sujet. On ne connaît pas les larves de ces Insectes, car la larve
que M. Westwood représente comme propre aux Némoptères n'appartient propablement pas à ce
genre. Nous figurons (voy. Atlas) le NÉMOPTÈRE LINULE.
9° tribu, Hémérormés..Le genre Hemerobius de Linné et quelques groupes qu'on en a rapprochés
constituent la tribu ou famille des Hémérobidés, qui a pour caractères : tête non prolongée en bec,
quoique étant encore un peu saillante; antennes plus ou moins filiformes, sétacées, jamais renflées;
ailes postérieures arrondies, de forme ordinaire; pattes n'ayant pas d'ergots bien sensibles. Cette
division, quoique ne comprenant pas beaucoup d'espèces, renferme cependant plusieurs genres dont
deux peuvent être pris comme typiques :
4° NYMPIIES (Nymphes, Leach). — Abdomen très-long; tarses ayant entre leurs crochets une
pelote allongée et divisée. Ce genre, qui ne renferme que la Nymphes myrmeleonides, Leach, qui
babite la Nouvelle-Iollande, présente un aspect anormal, comme la plupart des animaux qui se
rencontrent dans le continent australasien, et semble se rapprocher beaucoup des Myrméléoniens,
dont il s'éloigne toutefois par la disposition de ses tarses qui le lie à la tribu que nous étudions.
90 THÉMÉROBE (Hemerobius, Linné). — Abdomen guère plus long que la tête et le crochet réunis;
torses ayant entre leurs crochets une petite pelote courte, non divisée. Les Hémérobes sont des Né-
vroptères à corps de consistance molle, à yeux globuleux et sans ocelles, à mandibules cornées, ar-
quées, très-échancrées intérieurement; à palpes assez longs, surtout les maxillaires; à mâchoires
membraneuses; à lèvre arrondie; à antennes allongées, insérées entre les yeux, avec des articles
courts, nombreux; à corselet à peu près carré; à ailes grandes, presque égales, très-réticulées; à
pattes grèles, avec les tarses courts. Les Hémérobes, auxquelles on a donné le nonf de Demoiselles
terrestres, sont de petite taille, ont le plus souvent des couleurs assez vives, des yeux ornés de
teintes métalliques très-brillantes, et exhalent une odeur exerémentitielle des plus désagréables.
Les femelles pondent à la partie inférieure des feuilles ou des tiges des œufs au nombre d’une dou-
zaine, de forme oblongue et de couleur blanche, qui sont fixés par un pédicule très-long et très-
mince, ce qui a fait prendre ces œufs, par quelques naturalistes, pour une espèce de Cryptogame.
Les larves ont assez d'analogie avec celles des Fourmilions, mais leur corps est plus élancé et leurs
habitudes sont vagabondes. Elles vivent au milieu des Pucerons, dont elles font leur nourriture, ce
ANNELÉS. —- NÉVROPTÈRES. 115
qui leur a fait donner par Réaumur la dénomination de Lions des Pucerons; elles saisissent ces In-
sectes avec leurs longues mandibules, qui ont assez l'aspect de cornes, et elles les sucent en quel-
ques instants. Au moment de se transformer en nymphes, ces larves, qui sont pourvues de filières
situées à l'extrémité de l'abdomen, se filent un cocon très-petit relativement à la grosseur de l'In-
secte. La nymphe, qui prend de plus en plus la forme de l'Insecte à son état complet, y demeure
pendant une quinzaine de jours avant de se métamorphoser pour la dernière fois. On a décrit une
trentaine d'espèces de ce genre; la plupart appartiennent à l'Europe, et quelques-unes sont particu-
lières à l'Asie. L'espèce type, que l'on rencontre assez communément dans toute l'Europe et qui
n'est pas rare dans les environs de Paris, est l'Hémérose perce (Hemerobius perla, Linné), d’un vert
jaunâtre, avec des ailes diaphanes, ayant leurs nervures légèrement verdâtres, et les yeux d’un
vert doré éclatant pendant la vie. D'autres espèces également abondantes partout en Europe et sur-
tout dans les bois sont les Hemerobius prasinus, Burm.; proximus, Ramb.; elegans, Burm.; Itali-
cus, Rossi, Genei, Ramb., etc. Nous figurons (voy. Atlas) une espèce étrangère de ce genre.
Fig. 96. — Hémerobe à yeux dorés. Fig. 97. — Ilémecrobe à yeux dorés.
(Insecte parfait.) (Œufs.)
Leach, Latreille, MM. Burmeister et le docteur Rambur ont créé plusieurs genres aux dépens des
Hemerobius. Les principaux sont ceux des OSMYLUS, Latr., à tête pourvue de trois ocelles sur le
vertez (H. maculatus, Fab.), qui se trouve en août près de Paris, dans les prairies, le long des fos-
sés; SISYRA, Burm., à dernier article des alpes maxillaires au moins aussi long que les deux pré-
cédents (H. fuscata, Fabr.), commun au printemps le long des fossés et des mares, dans toute l’Eu-
rope; MICROMUS, Ramb., à bord antérieur des premières ailes rétréci à la base (espèce principale:
M. tendinosus, Ramb.), commun dans toute l’Europe; MEGALOMUS, Ramb., ou DREPANOPTEPYX,
Leach, à bord antérieur des premières ailes fortement dilaté à la base; pas d'ocelles (H. phalænoi-
des, Linné; pyraloides, Ramb., etc), de Paris; MUCROPALPUS, Ramb., à dernier article des palpes
matillaires en pointe (H. lutescens, Fabr.; obscurus, Ramb.), de toute l’Europe, etc. D'autres grou-
pes sont ceux des Chrysopa, Leach; Polystæchates, Burm., etc. M |
4 tribu, Paxonrmés. Le genre Panorpa de Fabricius, ainsi que les groupes des Bittacus et Boræus
de Latreille, constituent une petite division ayant pour caractéristique : extrémité antérieure de la
tête prolongée en un bec très-prononcé ou une sorte de trompe; antennes sétacées; ayant trois ocelles
bien visibles ou étant aptères quand ils en manquent; ailes horizontales : les inférieures ordinaire-
ment égales aux supérieures, non plissées, arrondies, étroites, ayant tes nervures transversales
peu nombreuses; tous les tarses composés de cinq articles. Le genre principal est celui des :
PANORPES (Panorpa, Linné), qui ont surtout la téte pourvue d’ocelles sur le vertex; les ailes
bien développées, et les tarses présentant deux crochets pectinés. Ces Insectes ont les antennes pres-
que en scie, avec le premier article très-épais; les palpes maxillaires à dernier article au moins aussi
long que le précédent, en cône, une paire d'ergots sous les tibias; les onglets dentelés en scie, avec
une pelote saillante; l'abdomen des mâles est terminé par une partie presque ovoïde, en forme de
pince à l’extrémité, ete. On les trouve sur les plantes, sur les haies, sur les buissons; elles sont très-
“agiles et recherchent particulièrement les endroits humides. On ne sait rien de bien positif sur leurs
transformations, et leurs larves ne sont qu'incomplétement connues. Leur taille est assez petite. On
n’en a décrit qu’une dizaine d'espèces propres à l'Europe, aussi bien dans le midi que dans le nord
116 | IISTOIRE NATURELLE.
et à l'Amérique septentrionale. Le type est la Paxorpe cowmuxe (Panorpa communis, Linné), à corps
noir, tête noirâtre, tachetée de fauve autour des yeux; à corselet noir, avec deux points roussâtres;
à ailes transparentes, blanches, parsemées de taches noires irrégulières, et à abdomen noir avec les
trois derniers articles bruns. Commune dans toute l'Europe et se rencontrant abondamment aux en-
virons de Paris, dans les endroits humides et ombragés. Une autre espèce (Germanicu, Linné), ha-
bite les bruyères en France, dans les Alpes et probablement dans tout le nord de l’Europe. D'autres
sont les.P. Alpina, Ramb., de la vallée de Chamounix; meridionalis, Ramb., d'Espagne, etc.
Les deux autres genres sont : 4° BITTACUS, Latreille, chez lesquels les tarses n’ont qu'un seul
crochet; ce sont des Insectes qui ressemblent un peu aux Tipules, parmi les Diptères, et dont on ne
connait que trois espèces : les B. tipularius, Latr., entièrement d’un roux noirâtre, à tibias noirs,
qui habite une grande partie de l'Europe (pl. VIN, fig. 4); Blanchetti, Pictet, du Brésil, et co-
rethracius, Ramb., dont la patrie est inconnue. 2° BORÉE (Boreus, Latr.), chez lesquels la téte
n'a pas d'ocelles et dont les ailes sont totalement rüdimentaires. L'espèce unique de ce groupe
(Panorpa hyemalis, Linné) est de taille très-exiguë et habite le nord de l'Europe : on en trouve
quelquefois des quantités considérables d'individus sur la neige; elle est d’un noir luisant, un peu
bronzé et parfois à reflets verdàtres (pl. VIE, fig. 2).
HUITIÈME FAMILLE. — RAPHIDIENS.
Le genre Raphidia de Linné et quelques groupes, dont les deux principaux sont des Mantispa,
Iliger, et Semblis, Fabricius, ayant avec lui quelques rapports, quoiqu’en différant assez notable-
ment sous divers points de vue, constituent pour M. E. Blanchard une tribu ou famille assez peu
naturelle et qui porte la dénomination de Rarminrexs. Chez ces Insectes la téte, ou plutôt la bouche,
est un peu avancée en forme de bec; les antennes sont sétacées; le corselet est très-long; les ailes
sont presque égales, planes, pourvues de nervures transversales, peu nombreuses; les tarses sont
ordinairement composés de cinq articles, ete.
Les Raphidiens sont des Névroptères de taille variable et encore assez peu connus. On n'en a
décrit qu’un nombre très-restreint d'espèces, qui se trouvent cependant représentées dans presque
toutes les parties du globe, et qui ne sont pas très-abondantes en individus. Leurs larves sont beau-
coup plus allongées que celles des Myrméléoniens, et n’ont pas tout à fait le même genre de vie; en
effet, elles habitent tantôt sous les mousses humides, tantôt dans l’eau, etc. Mais, au reste, on ne
peut rien dire d'un peu général relativement à ces Insectes, car, s'ils présentent quelques caractères
extérieurs analogues, ils offrent aussi des différences typiques, selon qu’ils appartiennent aux trois
groupes qu’on y à formés (Mantispidés, Raphididés et Semblidés), et qui, selon quelques auteurs,
portent le nom de tribus. Si les Mantispes et les Raphidies doivent être rapprochés, comme cela est
certain, les Semblis devront sans doute en être séparés complétement. Les deux premiers types sem-
blent se lier aux Panorpiens tandis que le troisième présente des affinités avec les Perliens et les
Hémérobes. Tous ces rapports ne pourront être nettement appréciés que par l'étude profonde de l’or-
ganisation de ces êtres, car jusqu'ici ces trois divisions ont été tantôt isolées ou rapprochées, tantôt
placées dans d’autres groupes. Aussi, pour M. le docteur Rambur, les Mantispes forment une famille
de la tribu des Planipennes de Latreille, et les Raphidies sont placées dans la tribu des Semblides,
comme un simple genre de cette division. La difficulté de généraliser des faits de nature trop diffé-
rente nous engage à ne nous étendre plus longuement sur ce sujet qu’en passant en revue les grou-
pes secondaires des Raphidiens.
Dans le premier groupe on ne place que le seul genre MANTISPA, Illiger, ayant pour earactères :
corps assez grêle; antennes composées d'articles moniliformes, un peu plus longues que la tôte; cette
dernière légèrement plus large que le corselet, qui est long, très-étroit, légèrement renflé antérieu-
rement; mandibules très-petites; ailes en toit réticulées : supérieures ayant un parastigma très-
distinct; pattes gréles : antérieures ravisseuses, conformées comme celles des Mantes; jambes com-
primées, élargies, à partie inférieure garnie d'épines acérées; tarses antérieurs n'ayant pas
Termite lucifuge
Panorpe commun.
Fig. 2. — Ascalaphe du Brésil,
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77
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Fig. 4. — Fourmilion libelluloïde.
Fig, 6. — Ephémère limbée.
NÉVROPTÈRES
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Hémérobe à grosse tête
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ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 147
d'articles bien distincts, mais garnis d’épines en dessous : ceux des autres-pattes grêles, composés de
cinq articles. Les Mantispes sont des Insectes très-singuliers, que la conformation de leurs pattes de
devant, ravisseuses, a fait placer pendant longtemps parmi les Orthoptères, avec les Mantiens; mais
ce sont réellement des Névroptères; leurs ailes diaphanes à réseau assez lâche, et quelques autres
caractères tendent à les rapprocher des Raphidies et en même temps des Hémérobes. Leurs premiers
états ne sont pas connus; on à voulu cependant, par analogie, rapporter à une espèce de ce groupe
une larve assez semblable à celle des Raphidies, mais un peu plus large. On décrit une dizaine d’es-
pèces de ce genre, et elles sont répandues dans des régions du globe très-éloignées les unes des
autres. Le type est la Manrispe PAïENNE (Mantispa payanu, Ulig.), qui habite la France, l'Allemagne
et plusieurs autres contrées de l’Europe; elle est longue d'environ 0,01; son corps est entièrement
d’un jaune brunâtre; son corselet a quelques rugosités; ses ailes sont blanches, excessivement dia-
phanes : supérieures à côté marginal jaunâtre et parastigma brunâtre; pattes jaunûtre.
ISSES
AR
Fig. 98. — Simblide de la boue. Fig. 99. — Mantispe païenne. Fig. 100. — Simblide de la bouc.
(Insecte parlait.) (Larve.)
Dans le deuxième groupe on ne range également qu'un seul genre, celui des RAPHIDIES (Ra-
phidia, Linné), caractérisé ainsi : corps allongé; tête longue, rétrécie en arrière; antennes écartées.
à peu près de la longueur du corselet, composées d'une trentaine d'articles cylindriques; mandibules
petites, robustes, étroites, terminées en pointe aiqué; palpes courts, filiformes; corselet étroit, cy-
lindrique, un peu plus étroit antérieurement; abdomen allongé, comprimé; pattes grèles, à jambes
cylindriques et à tarses de quatre articles. Ces Insectes ont encore l'apparence d’Orthoptères par
leurs pattes ravisseuses, quoique plus simples que celles des Mantispes; mais la forme du corselet, la
présence d’une tarière chez les femelles, la disposition des nervules alaires, ete., montrent bien que
ce sont des Névroptères. Les Raphidies sont de médiocres dimensions. On les rencontre principale-
ment dans le voisinage des bois, et les espèces assez peu nombreuses qu’on en connaît proviennent
toutes du midi de l’Europe. Le type est la Raphidia ophiopsis, Linné, qui, par la forme allongée de
sa tête et de son corselet, ainsi que par la facilité avec laquelle elle contourne son corps en tous sens,
a recu vulgairement la dénomination de Moucne serpenr. Cette espèce, qui a environ 0®,015 de lon-
gueur, et qui se rencontre parfois dans nos environs, est noire, avec les ailes blanches, diaphanes,
avec une tache noire vers l’extrémité (pl. VII, fig. 7). Les larves de ces Névroptères vivent sous les
écorces d'arbres ou dans les bois, sous la mousse. Leurs mœurs et leurs métamorphoses ont été l'objet
des observations de plusieurs entomologistes : Linné d’abord, puis Latreïlle et M. Percheron, en France,
M. Waterhouse, en Angleterre, et M. Stein, en Allemagne. Ces larves ont une forme allongée et
étroite, avec la portion abdominale pubescente et moins solide que la portion céphalique et thora-
cique. Les mâchoires sont robustes, acuminées; les pattes courtes; les yeux situés à la base des an-
tennes, ressemblent à des ocelles. Ces larves marchent lentement, mais elles sautent et se meuvent
avec rapidité lorsqu'on vient à les inquiéter; elles paraissent se nourrir principalement d’In-
sectes. Elles choisissent de petites cavités pour y subir leur transformation; mais les nymphes ne
sont pas enfermées dans un cocon. Celles-ci, sans être capables de se déplacer et de chercher leur
nourriture, comme la plupart des nymphes de Névroptères aquatiques, semblent conserver cepen-
dant une assez grande agilité; ce qui a fait dire par certains observateurs que les nymphes de Rha-
phidies étaient immobiles, tandis que d’autres ont assuré qu’elles jouissaient de la faculté de mar-
cher. M. Waterhouse cherche à concilier ces deux observations, en faisant remarquer que cette
nymphe, à quelques égards, ressemble aux nymphes actives, ne pouvant toutefois être considérée
118 HISTOIRE NATURELLE.
comme telle avant le moment de subir sa dernière métamorphose, l'insecte ayant acquis seulement
alors assez de force pour marcher, enfermé cependant dans la peau de nymphe, qui est extrême-
ment mince. M. Westwood ajoute une remarque tendante à prouver que la nymphe est inactive dans
les premiers temps, parce que les jambes de derrière sont en partie converties en ailes.
Dans le troisième groupe caractérisé par sa téte courte, convexe; par son corselet très-court; son
abdomen sans tarière saillante, et ses pattes antérieures simples, on place surtout le genre Sem-
blis de Fabricius et quelques autres genres qui en diffèrent assez notablement.
Chez les SEMBLIDES, Fabricius, que Latreille appelle SIALIS, dénomination qui a parfois prévalu,
le corps est un peu arqué; la téte est déprimée et de la largeur du corselet; les antennes sont sétacées
et composées d'un grand nombre d'articles tous cylindriques; les mandibules sont petites, cornées,
dépourvues de dents intérieurement; les palpes maxillaires sont plus longs que les labiaux, de quatre
articles : labiaux de trois seulement; les ailes sont peu réticulées, avec des nervures très-saillantes;
les pattes sont simples, assez gréles. Les deux seules espèces placées dans ce genre se trouvent com-
munément dans toute l’Europe : ce sont la Semgcis DE La BouE (Hemerobius lutarius, Linné), longue
d'environ 0,01, à corps noirâtre, tête tachetée de jaune, corselet noir mêlangé de jaunâtre, ailes peu
transparentes, d’un bleu clair avec les nervures noires; et S. rucicneux (Semblis fuliginosus, Pictet).
Les métamorphoses de ces deux espèces ont été étudiées par M. Pictet. Les larves, essentiellement aqua-
tiques, ont une tête écailleuse, pourvue d’yeux et supportant des antennes courtes, composées de
quatre articles, dont le dernier en forme de soie; leurs mandibules sont arquées et munies au côté
interne d’une ou de deux petites dents; leurs tarses n’ont que deux articles et sont munis de deux
crochets; leur abdomen, comme celui des larves d’Éphémères, est pourvu d'organes respiratoires
externes, consistant en filets articulés, disposés par deux sur la portion latérale de chaque anneau.
Au moment de subir leur transformation en nymphes, ces larves sortent de l’eau et vont même au
Join se creuser dans la terre, au pied d'un arbre, une cavité ovalaire où elles se métamorphosent
bientôt, et demeurent pendant toute la durée de leur vie de nymphe. Sous ce second état, l'animal
est immobile; les pattes, les antennes et les rudiments des ailes sont très-visibles. L'insecte parfait,
venant à éclore, laisse sa dépouille de nymphe tout à fait intacte; il vit peu de jours, et les femelles
déposent leurs œufs par plaques, soit sur les feuilles, soit sur les roseaux, soit sur les pierres.
Chez les CHAULIODES, Latr., qui se distinguent surtout par les mandibules peu saillantes et les
antennes assex courtes, pectinées, au moins dans les mâles, avec les dents de peigne très-serrées,
on ne range que trois espèces propres à l'Amérique du Nord, dont l’Hemerobius pectinicornis, de
Géer, est le type. Un gene, qui ne s’en distingue guère que par ses antennes à dents de peigne
écartées, est celui des DILAR, Ramb. (une espèce, D. nevadensis), trouvée aux environs de Grenade.
Enfin un genre, NEVROMUS, Rambur, dans lequel les antennes sont à peine pectinées, et qui ne
différent peut-être pas des Chauliodes, ne renferme que quatre espèces américaines et asiatiques,
dont la principale est le N. maculatus, Fabr., de Philadelphie. .
Chez les CORYDALIDES, Latr., les mandibules sont ordinairement plus longues que la téte et le
corselet réunis, étroites, légèrement arquées, plus courtes dans les femelles; les antennes sont longues,
sétacées; l'abdomen est terminé dans les mâles par des appendices cornés. On ne connaît que deux
espèces de ce genre : le Corvpauis cornu (Hemerobius cornutus, Linné), grande espèce dont l'enver-
gure est d'environ 0,12, à corps gris brunätre, ailes grisàtres avec des nervures brunes, qui habite
l'Amérique du Nord (pl. VI, fig. 4), et le C. cephalotes, Ramb., du Brésil.
NEUVIÈME FAMILLE. — PHRYGANIENS.
Le genre Phryganea de Linné est devenu pour les entomologistes modernes la famille des Phry-
ganiens où Phryganides, que Latreille nommait Plicipennes, et pour quelques auteurs, à l'exemple
de Kirby, il constitue un ordre particulier d'Insectes, celui des Trichoptères. En effet, les Phryga-
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Fig. 1. — Bittaque tipulare.
Fig. 2. — Ascalaphe de Benin.
Fig. 5. — Borée hyémale.
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Fig. 4. — Corydale cornue
NÉVROPTÈRES
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 119
niens différent très-notablement des autres Névroptères, mais cependant pas assez, selon nous, pour
en être séparés; leurs caractères principaux sont les suivants : faciès de quelques Phalénites; tête
plus large que longue; yeux grands; ocelles au nombre de trois; bouche imparfaite; mandibules com-
plétement nulles; palpes au nombre de quatre : maxillaires ayant cinq articles au moins dans les
femelles : labiaux de trois articles; corselet plus long que large; ailes en toit, un peu croisées, ser-
rées contre le corps, toujours plus ou moins velues et frangées : antérieures un peu coriacées, colo-
rées : postérieures plus larges, peu ou pas colorées, presque constamment plissées dans le sens de la
longueur; abdomen un peu comprimé latéralement; pattes longues, armées d'épines; tarses longs,
de cinq articles dont le dernier muni de deux crochets.
Les Phryganiens se distinguent au premier coup d'œil de tous les autres Névroptères, et semblent
par leur forme se rapprocher un peu des Lépidoptères; mais les rapports qu’ils paraissent avoir avec
ces derniers Insectes ne sont qu’apparents, et ils s’en distinguent par des caractères bien tranchés :
leurs palpes maxillaires sont toujours bien sensibles et bien développés et, au contraire, le plus sou-
vent, nuls ou presque rudimentaires dans les Lépidoptères, où les labiaux sont très-développés et
protégent seuls le spiritrompe; les poils écailleux qui couvrent leurs ailes ont une organisation parti-
culière qui n’existe pas chez les Phryganiens; ces derniers ont de commun avec les autres de n'avoir
pas de mandibules, et, chez les espèces les mieux organisées, d'offrir un labre allongé qui, en s’ap-
pliquant sur une rainure de la lèvre inférieure, qui se prolonge un peu en arrière, tend à former
un rudiment de trompe; mais les mâchoires ne se prolongent presque pas. Leur tête est petite, plus
ou moins hérissée de poils placés souvent sur des tubercules et comme fasciculés; les yeux sont
sphériques, saillants, gros et placés latéralement; entre eux sont deux ocelles plus ou moins gros, et
un troisième entre les antennes; celles-ci, souvent très-rapprochées à la base, au moins aussi lon-
gues que le corps, quelquefois deux ou trois fois aussi longues ou plus longues, presque toujours
sétacées, formées d’un grand nombre d'articles, ordinairement à premier artiele très-long; palpes
maxillaires de cinq articles dans les femelles et variant de deux à quatre articles dans les mâles; ces
articles, de forme variable, glabres ou velus; palpes labiaux de trois articles; ces derniers plus grands
lorsque le nombre de ceux des maxillaires diminue; pas de mandibules; mâchoires réduites à une
sorte de lobe mince, large, peu allongé, placé sur les côtés de la lèvre; abdomen court, assez épais,
ayant habituellement chez les femelles, vers l'extrémité en dessus, une assez grande excavation qui
sert à loger les œufs que l'animal pond en volant; la partie anale, chez les femelles, offre souvent plu-
sieurs petites saillies très-variables suivant les espèces; pattes assez longues, avec des tarses de cinq
articles allant en décroissant de la base à l'extrémité, à l'exception du dernier, qui estsouvent plus long
que le précédent; onglets courts, courbés, ayant entre eux une pelote médiocrement saillante; ailes
allongées, ovalaires vers l’extrémité, avec un certain nombre de nervures non réticulées, mais dont
plusieurs s’anastomosent un peu au delà du milieu, pour former des aréoles allongées, très-grandes,
en triangle dont la base regarde le sommet; mais cette nervation assez compliquée varie aux ailes
antérieures et postérieures et aussi suivant les espèces; il en est de même de leur forme; la mem-
brane alaire peut être colorée, mais le plus habituellement la coloration des ailes est due aux poils
qu'on y remarque.
MM. Pictet et Léon Dufour ont donné des détails sur l'anatomie de ces Insectes. Leur tube diges-
tif est assez développé, car il atteint deux fois la longueur du corps, et cependant les Phryganiens
ne semblent prendre aucune nourriture à leur état parfait. L’œsophage, très-long, reste grêle dans
toute l'étendue du corselet; mais, à l’origine de l'abdomen, il se renfle en un jabot assez considéra-
ble. Le ventricule chylifique forme en avant un mamelon; c’est une sorte de gésier; puis en arrière
il s'atténue et donne insertion aux vaisseaux biliaires, qui sont au nombre de trois paires. L'intestin
est d’abord grêle, mais il se renfle avant son extrémité en un rectum garni ordinairement de bou-
tons charnus. De chaque côté de la bouche il y a deux petites glandes salivaires sous forme de
grappes. Les organes reproducteurs acquièrent un développement considérable; les ovaires occupent
un très-grand espace dans la cavité abdominale, et chacun d'eux est composé de trente à quarante
gaines multiloculaires.
Les Phryganiens se rencontrent dans les endroits marécageux, se tenant constamment au bord
des eaux, où, le soir, pendant les beaux jours de l'été, on les voit voler en grande quantité. Ils
semblent habiter toutes les régions du globe, car on en a rapporté des diverses parties du monde;
120 HISTOIRE NATURELLE.
mais, comme ils sont difficiles à saisir, comme on ne peut surtout pas aisément les conserver, à cause
de leur grande fragilité, on n'en connaît encore que peu d'espèces exotiques. Les européennes, au
contraire, ont été très-recherchées et très-bien étudiées : c’est principalement M. Pictet à qui l'on en
doit une excellente monographie, et le célèbre entomologiste de Genève ne s’est pas borné à décrire
les espèces à l’état parfait, mais il les a fait également connaître parfaitement sous les points de vue
des mœurs et des métamorphoses.
Leurs transformations sont complètes comme chez plusieurs ordres d'Insectes et particulièrement
dans les Lépidoptères. Les œufs sont toujours enveloppés dans des boules d’une espèce de gelée
transparente et ils sont accrochés aux pierres et aux plantes aquatiques, jusqu'à ce que les petites
larves en sortent. Celles-ci sont essentiellement aquatiques; elles ont une tête écailleuse; les trois
premiers anneaux de leur corps sont de consistance solide ou plutôt coriace: tous les autres sont ex-
trêmement mous, et le dernier, en outre, est constamment muni de crochets. Les parties latérales
des anneaux abdominaux sont munis de sacs respiratoires extérieurs, dont le nombre et la disposi-
tion varient suivant les genres et même suivant les espèces. Ces larves ont la plus grande parte de
leur corps dans un tel état de mollesse, qu’elles ne résisteraient pas aux attaques des Insectes car-
nassiers, si nombreux dans les eaux douces; mais elles savent se protéger. En effet elles se construi-
sent des fourreaux ou des étuis soyeux qu'elles recouvrent de corps étrangers solides, comme des
fragments de bois, de petites pierres, de petits coquillages, etc.; et ce qu'il y a de remarquable, c’est
que chaque espèce emploie toujours les mêmes matériaux pour la construction de son fourreau et
qu’elle les dispose de la même manière, à moins toutefois, ce qui arrive assez rarement, qu'elle ne
soit placée dans une condition où elle ne puisse s'en procurer. Ces larves, pour la plupart, traînent
leur fourreau en marchant; mais aussi beaucoup d’entre elles se construisent des abris immobiles.
La forme des fourreaux varie beaucoup selon les matériaux dont ils sont construits. Quand ils sont
dépouillés de corps étrangers, ils sont constamment réguliers et cylindriques; les brins d'herbe, les
morceaux de bois, les pierres et les coquilles, disposés et entrelacés de différentes manières, leur
donnent les formes irrégulières, variées, qu’on leur connaît.
Ces larves se transforment en nymphes dans leur fourreau même, en ayant soin d'en fermer l’en-
trée avec un peu de soie et quelques corps étrangers. Ces nymphes sont immobiles; elles ressemblent
beaucoup aux Insectes parfaits; elles commencent à présenter des rudimentsd'ailes, et leur tête porte
déjà deux crochets placés à leur partie antérieure. Au moment de l’éclosion, leur peau se fend sur
le dos, et l'Insecte parfait ne tarde pas à se débarrasser de cette enveloppe et à prendre son essor.
Fig. 101. — Phrygane jaune. Fig. 102 et 105. — Phrygane jaune.
(Insecte parfait.) (Larves dans leurs étuis.)
Les Phryganiens, quoique très-nombreux en espèces, se ressemblent au plus haut degré; ce qui
n’a pas empêché les entomologistes anglais, principalement Leach, M. Stephens, Westwood, Curtis,
d'établir un grand nombre de genres caractérisés par les plus légères différences dans la forme des
palpes et dans le nombre des épines des pattes. MM. Pictet et Rambur y ont aussi fondé beaucoup de
groupes génériques qui semblent mieux caractérisés, et ce dernier auteur admet vingt et un genres
dans la famille des Phryganiens; tandis que M. Emile Blanchard n'y range que onze genres. Quel-
ques-uns d’entre eux ont été rapportés dans la même division et ont été antérieurement créées : ils
sont dus à Fabricius, à Dalman, etc.
On peut subdiviser ces genres en quatre groupes particuliers correspondant chacun à une division
naturelle plus ou moins grande.
Dans le premier groupe, celui des Puryeanéires, les palpes maxillaires sont presque glabres,
ANNELÉS. — NÉVROPTÈRES. 121
beaucoup plus longs que les labiaux, et de quatre articles dans les mâles; les ailes sont pourvues de
nervures transversales. Le genre typique est celui des PHRYGANES (Phryganea, Linné), qui est
caractérisé d'une manière très-générale, par ses jambes intermédiaires et postérieures pourvues
de deux paires d'éperons. Chez ces Insectes les antennes sont sélacées, à peu près de la longueur du
corps; les palpes maxillaires sont un peu velues : ceux des mâles n'ayant que trois articles, et ceux
des femelles cinq : le dernier, ovoïde, moins long que les deux précédents réunis; les pattes
sont longues; les ailes sont assez grandes : les antérieures ayant des nervures transversales près la
bifurcation des principales nervures, et les postérieures larges et très-plissées. Un nombre assez
considérable. d'espèces toutes propres à l'Europe et dont plusieurs sont très-communes dans nos en-
virons; le type est la-PHRyGanE GRANDE (Phryganea grandis, Linné), qui se trouve communément,
pendant tout l'été, le long des étangs; elle est longue de 0,03, les ailes fermées, et son
envergure est de 0,05; son corps est d'un brun roussätre, pâle, un peu hérissé au cor-
selet; les ailes d’un gris blanchâtre, ayant une ligne maculaire longitudinale médiane, inter-
rompue, comme dilatée, noire, à l'extrémité de laquelle il y a un point blanc; quelques
autres stries noirâtres se remarquent antérieurement avant le sommet, et on voit postérieure-
ment une marque noire à la base; le mâle est plus petit que la femelle, nacré, à peine marqué
de noirâtre, ayant toujours le point blanc avant l'extrémité antérieure. Une autre espèce, qui a le
même habitat que la précédente, est la P. varia, Fabr. On réunit aux Phryganes le genre OLIGO-
TRICHA, Rambur, qui se distingue surtout par ses ailes presque glabres, et qui renferme quelques
espèces des parties septéntrionales de l’Europe, comme les Phryganea reticulata, Linné; phalænoi-
des, Linné, etc. Un genre plus distinet est celui des LIMNOPHILA, Leach, dans lequel principalement
les jambes intermédiaires sont pourvues d'un seul éperon vers le milieu. Une trentaine d'espèces,
toutes européennes, et dont plusieurs, communes partout, se rencontrent souvent pendant l'été au-
près de Paris : telles sont les Phryganea lineola, Schranck; striata, Pictet; rhombica, Linné; luna-
ris, Pictet; flavicornis, Fabr.; vittata, Fabr.; elegans, Pictet; fusca, Linné, ete. M. Rambur en fait
connaître beaucoup; mais il est très-probable que plusieurs étaient précédemment décrites. Comme
type nous décrivons brièvement la PHrvGAxe srriée (Limnophila striata), peut-être la plus commune
de toute la famille; longueur du corps de 0",02 à 0,03; envergure de 0",05 à 0,06; corps fauve;
tête avec quelques poils de la même couleur; yeux noirs; antènnes fauves à peu près de la longueur
des ailes; corselet brunätre, avec deux taches latérales plus obscures que le milieu; ailes antérieures
larges, d’un fauve clair, avec quelques petites taches plus foncées : postérieures moins colorées que
les autres, plus transparentes, irisées; abdomen fauve, d'une nuance légèrement plus obscure vers
son extrémité; pattes fauves, ayant leurs épines noires. Larve brune, avec une bande longitudinale
noire dans le milieu de son corselet; se formant d’abord un étui avec des feuilles; mais, quand elle .
grossit, l'augmentant avec des pierres, de facon que, lorsqu'elle a atteint toute sa croissance, son
étui n’est plus composé que de pierres; pour se métamorphoser en nymphe, elle s'enferme dans la
vase, et pour cette opération elle se retourne dans l’étui, creuse un trou et reprend ensuite sa posi-
tion ordinaire. C'est vers la fin de juin que l’insecte éclôt; se trouve dans toute l’Europe. M. le doc-
teur Rambur indique deux autres groupes qui peuvent rentrer dans le même geure et qui ne ren-
ferment chacun qu'une seule espèce décrite par lui pour la première fois : ce sont les ENOICYLA
(E. sylvatica), qui se trouvent communément dans les bruyères et les herbes des ipé, et MONOCEN-
TRA (M. lepidoptera), découverte en Sardaigne par Géné.
Dans le second groupe, celui des Héricosrouires, caractérisé par ses palpes maæillaires dilatés
dans les mâles, de deux à trois articles, ar ses antennes sétacées, et par ses ailes sans nervures
transversales; postérieures plissées, ne renferme que deux genres principaux et quelques subdivi-
sions créées par M. le docteur Rambur. Ce sont : 1° les HERICHOSTOMA, Pictet, à antennes ayantson
premier article très-grand, cylindrique; et à jamdes intermédiaires et postérieures offrant deux
paires d'éperons. On y range surtout les T°. picicorne, Pictet, des environs de Château-du-Loir et
de Suisse, et rufescens, Ramb., de Sardaigne. M. le docteur Rambur en rapproche les genres sui-
vants, qui ne s’en distinguent que par de très-lésers caractères : POGONOSTOMA (une espèce, P.
vernum, Rambur, commune dans toute l'Europe, pendant l'été); DASYSTOMA (type, D. pulchel-
lum, du midi de l'Espagne); LASIASTOMA (L. fulvum, abondant dans nos environs), et LEPIDO-
A 16
192 HISTOIRE NATURELLE.
STOMA (trois espèces communes en Europe, décrites par M. le docteur Rambur comme nouvelles,
mais qui étaient probablement déjà indiquées par les auteurs. 2° SERICOSTOMA, Latreille, à anten-
nes ayant son premier article court, globuleux; à jambes intermédiaires et postérieures ayant deux
paires d'éperons. Une dizaine d'espèces, toutes européennes, dont les plus connues sont les P. col-
lare, Schrank; multiguttatum, Pictet; atratum, Fabr.
Dans le troisième groupe, celui des HyprorsycmiTes, qui a les palpes maxillaires simples dans les
deux sexes; les antennes sétacées'et les ailes sans nervures transversales, on range un assez grand
nombre de genres, tous composés d'une petite quantité d'espèces qui habitent nos pays. Parmi ces
groupes nous citerons ceux des : 1° PSYCHOMIA, Latreille, à jambes postérieures ayant deux paires
d’éperons grands, épais, larges; bien différents des épines ordinaires, et à palpes maxillaires velus.
Une seule espèce, le P. annulicornis, Pictet. 2° RHYACOPHYLA, Pictet, à jambes antérieures ayant
trois éperons, et à dernier article des palpes ovoïde (type R. irrorella, Rambur), et un assez grand
nombre d’autres espèces, dont plusieurs forment pour certains auteurs des genres distincts; tel est
particulièrement celui des NAIS, Rambur. 3° TINODES, Leach, à jambes antérieures ayant deux
éperons, et à dernier article des palpes également ovoide. Ce genre, ainsi que celui des ANTICYRA.
Curtis, et quelques autres, sont assez peu connus. 4° PHILOPOTAMUS, Leach, à jambes antérieures
ayant deux éperons, et à palpes présentant un dernier article filiforme, très-long. Une dizaine d'es-
pèces dont la plus commune est la P. variegata, Fabr., qui habite principalement les régions mon-
tagneuses. 5° HYDROPSYCHE, Pictet, à jambes antérieures ayant trois éperons, et à dernier article
des palpes filifor me, long. Quelques espèces; l'A. atomaria Pictet en étant le type, et 6° MACRO-
NEMA, Pictet, à antennes deux ou trois fois aussi longues que le corps, avec les caractères princi-"
paux des Hydropsychites. M. le docteur Rambur en décrit deux espèces exotiques (M. scriptum, de
Medagascar, et auripenne, du Brésil). Cette dernière est représentée pl. VI, fig. 3.
6
ds
CR
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Fig. 104. — Phrygane poilue. Fig. 105. — Hydropsyche montagneuse. Fig. 106. — Phrygane poilue.
(Larve.) ‘ (insecte parfait.) (Earve dams son étui.)
Dans le quatrième groupe, celui des Mystacidites, caractérisé par ses palpes maxillaires très-longs
et poilus, de cinq articles dans les deux sexes; par ses antennes sétacées, deux ou trois fois plus
longues que le corps, et par ses ailes pourvues de nervures transversales, on ne place que trois
genres, dont un seul est véritablement bien connu. C’est le genre MYSTACIDA, Latreille, qui, avec
Les caractères précédemment indiqués, n’a que deux éperons aux jambes postérieures. On en indique
une vingtaine d'espèces, dont les mieux décrites et les plus reconnaissables sont les P. albifrons,
Linné, et nigra, Linné, qui sont communes partout et ne sont pas rares dans les environs de Paris.
Les fourreaux des larves sont minces et allongés; les filets respiratoires sont courts et disposés par
bouquets. Les deux autres genres du même groupe, qui ne se distinguent que par de trop légers
caractères pour que nous les indiquions, sont ceux des SETODES, Ramb. (type, P. punctata, Fab.,
de nos environs), et ODONTOCERA, Leach, qui aurait quatre éperons aux pattes postérieures et qui
ne renferme qu'une espèce trouvée en Angleterre et incomplétement connue.
Dans le cinquième groupe, celui des CHimarruTEs, ayant pour caractères : palpes maxillaires
glabres, de cinq articles; antennes sétacées; ailes postérieures non plissées; on ne range que le
genre CHIMARRHA, Leach, qui aux caractères précédents a encore ses jambes antérieures sans épe-
ANNELÉS. — TYMÉNOPTÈRES. 123
rons. Il ne comprend que la C. marginata, Linné, qui se trouve pendant l’été aux environs de Pa-
ris, ainsi que dans presque toute l'Europe.
Enfin, dans le sixième groupe, celui des IlvprorniiTes, ayant pour caractéristique : papes maxil-
laires hérissés, de cinq articles; antennes filiformes ou pectinées; ailes postérieures non plissées.
renferme trois genres, dont le plus connu est celui des HYDROPTILA, Dalman, à antennes simples:
jambes intermédiaires ayant deux éperons; une seule espèce, l’H. tineoides, Dalman), qui ressem
ble beaucoup à une Tinéite, et dont les larves se forment des étuis aplatis et ont un abdomen volu-
mineux par rapport à leur tête et à leur corselet, et qui n'offrent pas d'organes respiratoires exter-
nes. Les deux autres genres que nous nous bornerons à nommer, car ils sont assez peu connus, sont
ceux des : NARYCIA, Steph., à antennes pectinées, et AGRAYLEA, Curtis, à antennes simples, et
jambes intermédiaires ayant un seul éperon.
SIXIÈME ORDRE.
HYMÉNOPTÈRES.
Cette grande division de la classe des Insectes a été créée par Linné, qui lui appliqua la dénomi-
nation d'Hymenoptera (tirée des deux mots grecs vuxr, membrane, et rr:pov, aile), qui a été géné-
ralement adoptée par la plupart des naturalistes, quoique Fabricius, il y a plus d'un siècle, ait pro-
posé d'en changer le nom en celui de Pierates, tiré de particularités spéciales de la bouche. D'une
manière très-générale, les Iyménoptères sont caractérisés par leurs quatre ailes entièrement mem-
braneuses, simplement veinées, c'est-à-dire pourvues de nervures sans réliculations; ces ailes se
croisent horizontalement sur le corps pendant le repos : les inférieures étant plus petites que les
supérieures; par leur bouche composée de mandibules, de mâchoires en forme de valvules, de lèvres
tubulaires, libres, terminées par une languette propre à lécher : toutes ces parties rapprochées
pour constituer une sorte de trompe, et par une tarière ou un aiguillon dans les femelles.
Les caractères que nous avons indiqués suffisent pour séparer les Iyÿménoptères des autres In-
sectes; la présence de quatre ailes les différencie dé suite des ordres qui, de même que ceux des
Rhipiptères et des Diptères, n'ont que deux ailes manifestes, et de ceux qui sont tout à fait aptères,
comme les Thysanoures, les Parasites, les Suceurs, etc. Parmi les Insectes pourvus de quatre ailes on
les distingue facilement des Coléoptères, qui ont des élytres et des ailes; des Orthoptères,chez les-
quels les ailes supérieures sont plus ou moins coriaces et dont les métamorphoses sont incomplètes;
des Hémiptères, dont la bouche est autrement conformée et dont la base des ailes supérieures est
plus ou moins crustacée; des Névroptères à ailes ayant une réticulation fine, serrée et presque ré-
gulière, et des Lépidoptères, dans lesquels les ailes sont couvertes d’écaiiles farineuses, et à bouche
ne présentant aucune partie analogue aux mandibules.
Chez les Hyménoptères, qui sont intermédiaires entre les Insectes broyeurs et les Insectes su-
ceurs, ce que montre la conformation de la bouche, en général et comparativement à la dimension
du corps, la tête est grosse, arrondie ou ovalaire, ventrale, coupée droit en arrière et touchant
exactement le corselet : rarement cette tête est portée par un pédicule. Les yeux occupent souvent
un espace considérable, principalement dans le sexe mâle; ils sont assez grands, globuleux ou réni-
formes. Les ocelles manquent rarement; presque constamment il y a trois ocelles frontaux dispo-
sés en triangles. Les antennes varient considérablement dans leur forme et dans leur longueur; tan-
-tôt elles sont longues, filiformes, et tantôt elles sont courtes, à peu près en forme de massue : elles
différent souvent même dans les deux sexes d’une même espèce, et dans ce cas elles sont plus lon-
gues dans les mâles que dans les femelles; le nombre des articles qui les composent est aussi trés-va-
riable; 11 est de trois à onze chez les Térébrans, et de treize ou quatorze dans les Porte-Aiguillons.
+
194 HISTOIRE NATURELLE.
Les pièces de la bouche diffèrent notablement entre les diverses familles, mais toujours elles sont
libres et bien développées; dans certains groupes les mâchoires et la lèvre inférieure sont très-lon-
gues, ou au contraire, dans d'autres, ces parties sont très-courtes; dans les Hymênoptères qui sucent
la matière miellée dans le nectaire des fleurs, les appendices buccaux forment par leur rapproche-
ment une sorte de tube propre à aspirer ce liquide sucré. La lèvre inférieure est généralement
étroite, allongée, saillante, en forme de trompe. La languette est rétractile, souvent très-longue, trifide
et plumeuse. Les palpes maxillaires sont presque toujours de six articles, et les labiaux de quatre. Les
mandibules sont constamment robustes, munies de dents ou au moins très-inégales intérieurement,
de manière à leur permettre de triturer des corps extrêmement durs; dans les Insectes qui pom-
pent le miel des fleurs, ces mandibules sont à peu près aussi fortes que chez les autres, mais elles ne
leur servent nullement pour la manducation, et leur usage est seulement de triturer les corps qu’ils
ces Hyménoptères emploient pour la construction de leur nid.
Fig. 407. — Scolie des jardins. (Femelle.)
Le corselet est de forme arrondie ou quadrangulaire; le prothorax est constamment très-petit,
tandis que le mésothorax et le métathorax acquièrent toujours un grand développement; le méso-
thorax, portant les premières ailes qui sont les plus grandes, demeure également plus développé que
le métathorax, et, à la base des ailes, offre une petite écaille.
Les ailes sont au nombre de quatre; mais, par exception, elles peuvent manquer chez des femelles
avortées, ainsi que cela se voit chezcertaines Fourmis. Ces ailessont nues, deconsistance membraneuse,
souvent hyalines ou transparentes, croisées horizontalement sur le corps pendant le repos, et, lors-
qu’elles sont étendues, les antérieures sont unies aux postérieures par une rangée de petits crochets
qui garnissent le bord des secondes et accrochent le bord postérieur des premières; les réticulations
qu'elles offrent sont assez simples et ne présentent jamais plus de trois ou quatre nervures cornées
principales, longitudinalement disposées et réunies en travers par quelques petites nervules. Cepen-
dant les dessins produits par les nervures varient suivant les groupes, et les nervures peuvent
même presque complétement manquer. Quelques auteurs se sont servis des nervures alaires pour
classer les Hyménoptères; mais, quoiqu’on puisse en tirer un parti utile, il ne faut cependant les
regarder que comme accessoires, car elles feraient souvent éloigner les uns des autres des genres
ayant entre eux beaucoup d’affinité. Jurine est le premier entomologiste qui ait presque exelusive-
ment basé la classification sur le système nervulaire; il a désigné sous le nom de nervure radiale la
nervure la plus rapprochée du bord interne, et nervure cubitale celle qui est au-dessous; de là aussi
les dénominations de cellules radiale et cubitale appliquées aux cellules formées par les nervures
transversales aboutissant à l’une ou à l’autre de ces deux nervures; toutes celles qui occupent la
portion interne de l’aile ont été appelées nervures et cellules brachiales : toutefois, pour les distinc-
tions génériques, on ne s'est guère servi que des deux premières, qui, pour divers auteurs, portent
les noms de nervures marginales et sous-marginales. Ces dernières dénominations, comme le fait
remarquer M. Émile Blanchard, sont meilleures, car elles n’ont pas l'inconvénient de faire croire à
une analogie anatomique qui, en réalité, n’existe que dans les termes. En dernière analyse et mal-
gré les travaux synonymiques à ce sujet de M. de Romand, il est difficile de s’entendre sur les noms
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 495
des nervures, car leur nomenclature a varié considérablement dans les divers ouvrages sur les Hy-
ménoptères, et de bonnes figures seules peuvent éclairer ce point difficile de la science. Un fait cu-
rieux, c'est que la disposition ainsi que le nombre des nervures et des cellules des ailes supérieures
ont seuls été pris en considération pour la caractéristique, et que l’on n’a pas employé pour cela
les nervures des ailes postérieures, qui néanmoins offrent aussi des particularités différentielles.
L'abdomen diffère beaucoup suivant les divers groupes; dans les uns il est ovalaire, généralement
composé de sept anneaux dans les mâles et de six seulement dans les femelles, mais pouvant varier
en nombre de cinq à neuf; dans les autres il est très-allongé, très-grêle; enfin, dans certaines divi-
sions, il n’est plus sessile, c’est-à-dire attaché au corselet dans toute sa longueur, mais il est pédon-
culé, et alors le premier segment est d'une extrème ténuité. Les premiers segments abdominaux
viennent souvent se confondre avec le métathorax. Chez les femelles l'abdomen est terminé par
une farière plus ou moins longue, servant à déposer les œufs et à perforer les corps ou les sub-
stances animales et végétales dans lesquelles doit s'effectuer ce dépôt, ou bien par un aiguillon ayant
pour usage de tuer ou d’'engourdir les animaux qui en sont piqués. Ces deux pièces ont à peu près
la même composition; elles sont formées de trois fils écailleux, dont les deux latéraux constituent
une sorte de gaine à celui du milieu. Les tarières sont externes, souvent très-longues, quelquefois
logées dans une rainure de l'abdomen, et la tarière proprement dite est dentelée, pointue, terminée
en scie; parfois cet organe paraît formé de petits tubes pouvant rentrer les uns dans les autres, à la
manière d'une lorgnette d'approche, et est terminé par un petit dard; ce n’est plus alors une vérita-
ble tarière, mais un simple oviducte qui peut néanmoins percer des corps peu résistants. Les aiguil-
lons sont au contraire internes, courts, articulés; à leur base sont des glandes vénéneuses qui font
sortir leur liqueur lorsque l’aiguillon est lancé au dehors. Chez quelques Hyménoptères qui n’ont
pas d’aiguillon, ces glandes subsistent encore, et l’Insecte a la faculté de rejeter au loin le liquide
qu'elles renferment. ;
Les pattes sont généralement grêles, allongées et très-rapprochées à leur base. Leurs tarses, ha-
bituellement filiformes, ont presque toujours cinq articles; toutefois on croit que quelques petites
espèces ont, dans quelques cas, un nombre moindre d'articles tarsiens. Les jambes et les tarses pren-
nent dans divers groupes un accroissement considérable, qui est.en rapport avec certaines habitudes
de l’Insécte qui les présente. Ces appendices sont garnis ordinairement de cils roides, dont l'usage,
pour plusieurs d’entre eux, est de leur permettre de fouiller le sol, et pour d’autres de récolter le
pollen des fleurs.
Fig. 108. — Guêpe rouge. (Mäle.) Fig. 109. — Cimbex jaunâtre. (Femelle.)
Quoique l'on ne connaisse pas complétement l'organisation des Hyménoptères, on à cependant de
beaux travaux de M. Léon Dufour, principalement sur l'anatomie de la Scolia flavifrons. Le canal
intestinal varie beaucoup sous le rapport de sa longueur et de sa forme, suivant les diverses familles
et même quelquefois suivant les genres. Dans les Hyménoptères dont l'abdomen est pédonculé, le
tube digestif est ordinairement très-grêle dans toute la longueur du thorax, et il ne commence à se
dilater qu’au delà du pédoncule abdominal; chez ceux où l'abdomen est sessile, il s'élargit souvent
dès la partie antérieure du thorax. Dans les Scolies, les trachées respiratoires sont vésiculaires, ce qui
contribue à produire le bourdonnement que font entendre un grand nombre de ces Insectes. Du
reste, ces Insectes, en général; sont remarquables par le grand développement des trachées: les
Abeilles, les Bourdons et les Guëpes ont, dans leur abdomen, des poches aériennes d'une dimension
126 HISTOIRE NATURELLE.
énorme, comparativement à Ja taille de l'animal. Le système nerveux est incomplétement connu; on
sait cependant que les ganglions thoraciques offrent un degré d’accroissement chez les plus parfaits
des Hyménoptères, comme les Abeïlles, qu’on ne trouve jamais, même dans les Coléoptères. Les trois
centres nerveux thoraciques sont confondus en un seulement. Le nombre des ganglions abdominaux
varie suivant les groupes.
Les Hyménoptères subissent des métamorphoses complètes. Presque toutes leurs larves sont
molles, blänchâtres, privées de pattes, ressemblant à un ver blanc, ne vivant pas à l'air libre et se
trouvant fréquemment placées dans l'intérieur du sol; elles ont une bouche, mais toutes les parties
qui la composent sont dans un état très-rudimentaire. Dans une partie de la division des Porte-
Scies, comme dans la famille des Tenthrédiniens, les larves, au contraire, ressemblent assez à de
petites chenilles; elles ont six pattes écailleuses et à crochets, et très-souvent, en outre, douze à seize
autres pattes membraneuses; on les appelle fausses chenilles, parce qu’elles ont l'aspect général des
larves des Lépidoptères; elles ont également une tête écailleuse, et une filière qui leur sert à con-
struire la coque soyeuse dans laquelle doit se renfermer la nymphe. Chez beaucoup d'Hyménoptères
(Tenthrédines) les larves vivent dans l’intérieur des plantes et même du bois; dans d’autres (Pupi-
vores) les larves vivent principalement dans les chenilles, dont elles dévorent l'intérieur sans atta-
quer cependant les organes essentiels à la vie; enfin il en est (Cynips, ete.) qui piquent les feuilles,
ainsi que les branches des arbres, et y déterminent les excroissances qu'on appelle galles. Dans les
Térébrans, la nourriture des larves est préparée avec un soin qui doit exciter notre admiration; les
unes vivent solitaires dans des retraites que leur mère a préparées avec art, et où elle a amassé des
provisions suffisantes, soit des cadavres d’Insectes embaumés de manière à se conserver frais pen-
dant très-longtemps, soit de la poussière d'étamines, mêlée avec un peu de miel. D’autres larves
sont élevées en société et nourries de matières plus élaborées et souvent renouvelées; leur éducation
est confiée à des femelles avortées, qui portent la dénomination de neutres. Tels sont les mœurs
d'une grande partie des Abeilles ou Mellifères et des Fouisseurs; mais au milieu de ces peuplades
travailleuses on voit se glisser des congénères parasites qui viennent dévorer la nourriture recueillie
avec tant de peine par la mère pour sa progéniture légitime.
L'état de larve se prolonge quelquefois assez longtemps, mais celui de nymphe est beaucoup plus
court. Ces dernières, presque toujours placées dans des cocons de forme variable, se complètent en
peu de temps, et bientôt de la larve molle et apode le travail organisateur de la nymphe fera sortir
l'Insecte ailé, qui ne tardera pas à s’accoupler, à pondre et à mourir.
De tous les Insectes les Hyménoptères sont les plus intéressants sous le rapport des mœurs. C'est
parmi eux que l’on observe un instinct si remarquable, qu’il semble, dans quelques cas, être presque
de l'intelligence. Les habitudes des IHyménoptères ont été le sujet de beaux travaux de la part de
Réaumur, de de Géer, d'Huber et d’un grand nombre d’autres naturalistes tant anciens que mo-
dernes. On comprendra facilement que nous ne devions pas chercher actuellement à donner des dé-
tails à ce sujet; car, outre qu'il serait difficile, sinon impossible, de généraliser des faits si nombreux
et si importantsen quelques pages, nous ne pourrions que répéter ce que nous indiquerons en faisant
l’histoire spéciale des principales familles. Disons seulement que, si quelques Hyménoptères, comme
les Frelons et les Guêpes, nous piquent quelquefois cruellement, si d’autres, de même que les Ten-
thrèdes et les Urocères, font des ravages dans nos plantations, et que, si les Fourmis salissent et dé-
truisent nos provisions alimentaires, d’autres, en grand nombre, nous sont d’une grande utilité,
comme les Abeilles, qui donnent, dans toutes les parties du monde, un mets fort recherché, le miel,
et une substance très-employée dans les arts, la cire, et comme les Chalcidiens ainsi que les Ichneu-
moniens, qui nous débarrassent d’une immense quantité de chenilles et de larves, et qui, plus ha-
biles que nous, devenant innombrables lorsque l'apparition d'Insectes dévastateurs tend à prendre
un accroissement inusité, savent, en peu de temps, rétablir un juste équilibre.
On a donné la description de plusieurs milliers d'Hyménoptères, et un nombre plus considérable
sans doutereste encore à découvrir. En effet, ce n’est que depuis cinquante ans à peine qu'on a com-
mencé à rechercher ces Insectes dans les pays étrangers; jusque-là on n’avait guère étudié que nos
espèces européennes, el cependant ces êtres sont répandus sur toute la surface du globe, et, comme
on a remarqué que chez nous ils recherchaient principalement les régions chaudes exposées à l'ar-
deur du soleil, nul doute que les contrées équatoriales ne soient excessivement riches en Insectes de
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 127
ect ordre. Les pays tempérées et humides en renferment aussi beaucoup; mais ils diminuent consi-
dérablement en nombre vers le Nord. Les Iyménoptères sont essentiellement terrestres; aucun n’est
aquatique. Leur taille est généralement moyenne; toutefois on en connaît de petites espèces, etil
n'est pas rare d'en trouver d'assez grosses comparativement avec les autres Insectes. À leur état par-
fait, ils se trouvent sur les fleurs dont ils sucent les sucs.
On comprend que des êtres tels que l’Abeille, la Fourmi et plusieurs autres, ont dû attirer l'atten-
tion des naturalistes depuis la plus haute antiquité, et c'est ce qui a eu lieu. Aristote et Pline don-
nent déjà quelques détails sur les mœurs et les caractères de divers Hyménoptères; à la renaissance,
on s'en est également occupé; mais il faut arriver aux travaux des observateurs consciencieux,
eomme de Géer, Réaumur, Huber, pour trouver d'excellents détails sur les habitudes de ces animaux.
Les parties descriptives et classificatives sont encore plus récentes; quoique pressenti depuis lon-
gues années, c'est Linné qui établit l’ordre des Hyménoptères; mais cet ordre, encore mal caractérisé,
fut réuni par Geoffroy à celui des Névroptères, sous la dénomination commune de Tétraptères; Fabri-
cius compléta la caractéristique; dès lors cet ordre resta dans son homogénéité, et ne varia plus que
pour les caractères ou l’arrangement des divisions secondaires; mais, quoique envisagées de diffé-
rentes manières par les naturalistes, la plupart des familles qui composent cet ordre sont tellement
naturelles, qu’on les retrouve à peu près dans les mêmes limites dans la plupart des ouvrages.
Latreille (Caractères génériques des Crustacés, des Arachnides et des Insectes. — Règne ani-
mal, ete.) divise les Hyménoptères d'abord en deux grandes sections, selon que l'abdomen des fe-
melles est muni d’une tarière ou d’un aiguillon; pour lui, les premiers constituent la section des
TÉRÉBRANS, divisés en Porre-Scres (Tenthrédiniens et Siriciens); Purivores (Cynipsiens, Chalci-
diens, Proctotrupiens et Ichneumoniens), et Tusuuirères (Chrysidiens), et les seconds forment la sec-
tion des PORTE-AIGUILLONS ou Hyménoptères normaux, partagés en Hérérocynes (Formiciens et
Mutiliens); Foursseurs (Sphégiens et Crabroniens); Dipoprères (Euméniens et Vespiens), et Meccr-
FÈREs (Apiens). Pendant longtemps, ces divisions ont été généralement adoptées; mais, depuis une
vingtaine d'années, des modifications plus ou moins importantes ont été faites à cette classification.
Lepelletier de Saint-Fargeau (Histoire naturelle des Hyménoptères des Suites à Buffon, de l'éditeur
Roret, a essayé de classer tous les Hyménoptères d’après leurs habitudes, en faisant abstraction pres-
que complétement dela plupart des caractères zoologiques; et les rapprochements les moins naturels
ont été le résultat de ce système; les deux sections primaires de Latreille sont conservées, mais les
Térébrans sont nommés Ouiscaptes et les Porte-Aiguillons Ouitithers. Chacun de ces groupes est par-
tagé en plusieurs divisions, et cela d’une manière malheureuse, car souvent des Insectes voisins les
uns des autres par l’ensemble de leurs caractères en sont très-éloignés, parce que leurs mœurs dif-
fèrent. Enfin M. Émile Blanchard, dans l'Histoire des Insectes, de l’éditeur Didot, a suivi une mé-
thode qui se rapproche de celle de Latreiïlle, tout en en différant à certains égards; ayant reconnu qu'il
n’existait pas de limite bien appréciable entre les Térébrans et les Porte-Aiguillons, qui passent des
uns aux autres par des caractères insensibles, il supprime ces deux sections; puis, prenant les grou-
pes principaux de Latreille, qui eux-mêmes correspondent souvent aux grands genres de Linné, il
en forme treize tribus particulières, auxquelles il applique les noms de : Aprens, Vespiens, Euné-
NIENS, CRABRONIENS, SPHÉGIENS, FORMICIENS, CHRYSIDIENS, CHALCIDIENS, PROCTOTRUPIENS, IGHNEUMONIENS,
Cynrpsrens, SiRicIENS et TENTHRÉDINIENS.
Pour nous, dans le court résumé que nous allons donner, noussuivrons cette dernière classifica-
tion : toutefois nous indiquerons sous le nom de familles les diverses tribus de M. E. Blanchard.
Nous donnerons les caractères de ces groupes primaires, nous ferons connaître les mœurs des Hymé.
noptères qui y entrent et nous caractériserons leurs espèces et genres principaux; aller au delà
nous serait impossible, car le nombre des coupes génériques actuellement admises est trop considé-
rable pour que l'espace qui nous est réservé nous permette de les décrire toutes.
En effet, dans ces derniers temps, on a publié un grand nombre de travaux hyménoptérologi-
ques, et beaucoup de naturalistes se sont occupés de ces Insectes intéressants et ont donné soit des
ouvrages généraux, soit des monographies de familles ou de genres. Aux auteurs que nous avons
cités, nous joindrons seulement les noms de Jurine, Vander Linden, Gravenhorst, Spinola, et de
MM. Westwood, Roman, Brullé, de Saussure, le docteur Sichel, Guérin-Méneville, L. Fairmoire,
I. Lucas, etc., etc.
128 HISTOIRE NATURELLE.
PREMIÈRE FAMILLE. — APIENS.
La famille des Hyménoptères, à laquelle M. E. Blanchard applique ce nom, qui correspond pres-
que complétement aux Mellifères de Latreille, et qui a pour types principaux les genres Abeille
(Apis).et Bourdon (Bombus), a pour caractères principaux : mâchoires et lèvres habituellement
très-lonques, formant une trompe; lèvre inférieure plus ou moins linéaire, à extrémité garnie de
soie; ailes étendues pendant le repos; pattes postérieures le plus souvent conformées pour récolter le
pollen des étamines; tarses à premier article très-grand, en palette carrée ou trianguliforme, ete.
On connait un très-grand nombre d’Apiens, et ils sont répartis dans toutes les parties du globe.
Dans leur premier état, ces insectes vivent tous d'une sorte de miel préparé par les femelles propre-
ment dites ou par des femelles avortées qui portent la dénomination de neutres, parce que véritable-
ment elles n’ont pas de sexe, ou bien celle d'ouvrières, déduite des fonctions qui leur sont dépar-
ties par la nature. Beaucoup d’entre eux construisent des nids divisés à l’intérieur en petites loges
plus ou moins nombreuses, et qui servent de demeures pour leurs larves; ceux qui ne se construi-
sent pas d'habitations s'introduisent dans celles d'autres Insectes qui leur ressemblent assez par tous
les caractères de leur organisation et même de leur système de coloration; ils confondent leur
postérité avec celle des hôtes chez lesquels ils se sont établis, et vivent ainsi des provisions aceumu-
lées par ces derniers; c’est pour cela que Lepelletier de Saint-Fargeau a donné à ces Insectes le
nom de Parasites.
Six groupes principaux : ceux des Apides, Psithyrides, Anthophorides, Andrénides, Osmiides et
Nomadides, peuvent être formés parmi les Apiens, et chacun d’eux comprend quelques genres prin-
cipaux et un grand nombre de coupes génériques ou sous-génériques. En effet, on décrit près de
cent genres d'Apiens, et plus de la moitié sont assez complétement connus.
1° groupe, Armes. Languette cylindrique, presque aussi longue que le corps; pattes de derrière
ayant des jambes élargies et des tarses à premier article dilaté à l'angle externe de sa base. Les
Apides sont principalement remarquables parce que chez eux l'espèce se compose de trois sortes
d'individus : des mâles, des femelles et des neutres ou ouvrières ; ces derniers sont des femelles
dont les organes reproducteurs sont restés rudimentaires, et ils ont pour mission de soigner la pos-
térité des femelles fécondes. Quoique peu nombreux en espèces, ces Ilyménoptères ont été partagés
en trois divisions qui correspondent aux genres Apis, Melipona et Bombus, que nous allons succes-
sivement étudier.
Dans les ABEILLES (Apis, Linné), les jambes postérieures sont inermes, et surtout le premier
article des tarses est quadrangulaire avec son angle supérieur proéminent. Ces Insectes ont le corps
ovalaire, couvert d'un léger duvet; les antennes sont vibratiles, filiformes, à second article globu-
leux, plus court que le troisième : celui-ci un peu conique; la languette ou lèvre inférieure est pres-
que cylindrique, d'environ la longueur de la moitié du corps; les ailes existent dans les trois sortes
d'individus, offrant une cellule radiale étroite et très-longue, avec son extrémité un peu arrondie,
et légèrement écartée de la côte de l'aile; quatre cellules cubitales : la seconde très-rétrécie vers la
radiale, très-élargie vers le disque et recevant la première nervure récurrente; la troisième étroite,
oblique, recevant la deuxième nervure récurrente; la quatrième n'’atteignant pas entièrement le
bord de l'aile, et les trois cellules discoïdales complètes ; les pattes sont moyennes, avec une dent à
la base du premier article des tarses postérieurs, et les crochets tarsiens bifides. Ce genre ne ren-
ferme qu'un petit nombre d'espèces propres à l’ancien continent et surtout aux régions méditer-
ranéennes, dont le type est l'Abeille domestique, dont nous exposerons l’histoire avec soin.
L'ABeILLE COMMUNE ou DowEsriQue (Apis mellifica, Linné; À. domestica, Latr.) a le corps d’un
brun noirâtre, couvert d’une pubescence d'un gris roussâtre, plus abondante sur le corselet que sur
les autres parties du corps; les ailes sont transparentes, à nervures brunes; l'abdomen offre une
bande d'un gris cendré sur son quatrième et son cinquième segment dans les mâles; les antennes
Fi, 4. — Mélipone antidioide Fig, 2. — Nid du Bourdon l'ig. 5 — Collètes poilue,
(Neutre.) des jardins. (Mâle.)
Fig. 6. — Psithyre rupestre.
(Femelle.)
Fig. 4. — Halicte ceint
Mâle.
Fig. 5. — Xylocope violette
(Nid.
Fig. T. — Centris dénudée. Fig. 8. — Nid de la Chalicodome Fig. 9. — Xylocope violette.
(Femelle.) des murs. [Mile.)
A. HYMÉNOPTÈRES 8 pa. 9
ANNELES. -— JIIYMÉNOPTÈRES. 199
sont entièrement noires dans les femelles, dans les mâles elles sont roussâtres en dessous, et dans
les neutres l'extrémité du dernier article est seul de cette couleur; les ailes sont beaucoup plus lon-
gues que l'abdomen dans les mâles, un peu plus aussi dans les neutres et plus courtes dans les fe-
melles. On élève cette espèce dans toute l'Europe, pour récolter la cire et le miel qu'elle fournit;
mais il paraît qu’elle est originaire de la Grèce et de l'Anatolie. Deux autres espèces également do-
mestiques sont les Apis ligustica, Spinola, et fasciatu, Latr., voisines de la précédente et surtout
répandues, la première en Italie, en Grèce et dans l'Orient, et la seconde en Égypte.
Chez les Abeilles, et ce que nous allons dire s'applique presque exclusivement à l’Abeille domes-
tique, chaque espèce se compose de trois sortes d'individus, des mâles, des femelles et des neutres.
Les mâles, indiqués par les éducateurs sous le nom de Faux-Bourdons, sont généralement plus gros
que les neutres; leur tête est plus arrondie, ce qui est dû principalement au plus grand développe-
ment des yeux, et le premier article de leurs tarses est allongé. Les femelles, que l’on nomme aussi
Rois ou mieux Reines, ont leurs ailes plus éourtes que celles des mâles et des neutres; leur tête est
de forme triangulaire; l'abdomen est muni d’un aiguillon, et le premier article des tarses de leurs
pattes postérieures est dépourvu de brosse. Les neutres ou mulets, plus connus sous la dénomination
d'ouvrières, sont un peu moins grands que les précédents; ils ont un aiguillon dont la piqûre est
douloureuse; le premier article de leurs tarses postérieurs, nommé pièce carrée, s'articule au bout
avec la jambe par son angle antérieur, de manière à se replier sur elle, et cet article forme ainsi avec
la jambe une espèce de pince. Cet article, qui offre deux petites épines à l'angle opposé à son inser-
tion, est lisse au côté externe, mais sur la face interne il est garni de plusieurs rangées de poils
roides, qui ont fait appeler cette face la brosse, et la jambe a été nommée, d'après sa forme, la pa-
lette triangulaire; enfin, une légère cavité ou une surface externe a reçu le nom de corbeille.
Fig. 110. — Abeïlle commune. , Fig. 411. — Abeille commune. Fig. 112. — Aballe commune.
(Femelle.) (Mâle.) (Neutre.)
C'est avec l’aide de ces divers organes que l’Abeille exécute ses travaux et récolte le pollen des
étamines en le balayant avec la brosse et l’emportant avec la corbeille, et qu’elle s'empare également
d’une autre substance résineuse et odorante, nommée propolis, qui sert surtout à clore leur de-
meure. Les sécrétions produites par l’Abeille sont bien connues du vulgaire, et c’est sous ce rapport
que l’homme a su rendre cet Insecte utile : ces sécrétions sont la cire et le miel, ce qui fait que
l'Abeille domestique est indiquée souvent sous le nom de Mouche à miel. On avait pensé, pendant
longtemps, que la cire dont sont formées les alvéoles était due au pollen dont se nourrissent parfois
les neutres, et qui, étant élaboré dans leur estomac, était ensuite dégorgé par la bouche sous forme
d’une matière blanche, qui était la véritable cire. Mais un simple paysan de Lusace reconnut la vé-
ritable nature de cette sécrétion, en montrant des lamelles de cire engagées entre les arceaux des
anneaux abdominaux ou ventraux de l’Insecte, et, par suite, John Ilunter et Huber confirmèrent
cette belle découverte et prouvèrent que les Abeilles, nourries exclusivement de pollen, ne secrè-
tent pas de cire, et qu'au contraire elles en donnent quand elles mangent des matières sucrées.
La cire sert aux ouvrières à la construction des alvéoles, loges ou cellules destinées à recevoir les
œufs pondus par la reine; ces alvéoles, qui constituent une sorte de petit gobelet hexagonal fermé
d’un côté seulement par un fond pyramidal résultant de la réunion de trois rhombes, forment par
leur réunion ce que l’on nomme des gdteaux; et ces derniers sont le résultat de l’adossement de
deux couches d’alvéoles disposées de telle sorte, que le fond des uns devient le fond des autres; la
Ae - 17
130 HISTOIRE NATURELLE.
base de chaque cellule étant, en outre, formée par la réunion de trois cellules opposées : cette dis-
position montre que la matière est ainsi employée avec la plus stricte économie; enfin l'ensemble de
ces gâteaux et l'habitation entière des Abeilles est ce que l’on nomme la ruche. Lorsque l'ouvrière
doit construire, elle prend successivement, à l’aide de la pince formée par le premier article de ses
tarses et de ses jambes, les lamelles de cire sécrétées par les anneaux de son ventre; elle les triture
avec ses mandibules et les transforme en des sortes de filaments mous qu'elle applique contre la
voûte de la ruche, ou qu’elle joint aux lamelles déjà placées par d'autres travailleuses. Plusieurs
Abeilles, construisant simultanément, forment en peu de temps une masse assez étendue, et c'e:t
alors qu’elles y ereusent des cellules : celles-ci sont différentes suivant les larves qu’elles devront
contenir; quand il s’agit de larves d’ouvrières ou de mâles, elles auront la forme hexagonale que
nous avons indiquée, et seront petites pour les premières et moyennes pour les secondes; mais,
quand il s'agit des œufs et par suite des larves que doivent produire les femelles ou reines, ces cel-
lules seront grandes, oblongues et si massives, que le poids d’une seule est équivalent à celui d'un
grand nombre d’autres; elles sont toujours posées verticalement, de manière à paraitre détachées du
gâteau, et leur surface est plus ou moins guillochée; mais elles ne sont habituellement qu’au nom-
bre d'une vingtaine dans une ruche contenant plus de vingt mille individus neutres. Le plus ordi-
nairement dans l’intérieur ‘de la ruche les gâteaux sont disposés parallèlement les uns aux autres.
Fig. 4113 à 114. — Abeille commune.
4. Ruche dont l’enveloppe générale est coupée d'un côté pour montrer la disposition des gàteaux dans son
intérieur. — 2. Coupe d’une alvéole avec sa larve. — 3. Portion de gâteau faisant voir les grandes cellules
(celles des femelles), les cellules moyennes (celles des mâles), et les petites cellules (celles des ouvrières).
— 4, Autre coupe d’un gâleau montrant des Abeilles dans leurs cellules.
L'anatomie interne des Abeilles a occupé plusieurs naturalistes célèbres, Swammerdam, Huber,
M. Léon Dufour et plusieurs autres, et malgré cela elle est loin d'être suffisamment connue. Le
système nerveux se compose d'un cerveau formé de huit parties, rangées par paires, et d’une portion
moyenne qui est l’origine de la moelle épinière : celle-ci présente sept ganglions: du cerveau et des
ganglions naissent les principaux nerfs qui se distribuent aux divers organes. La cavité de la bouche
semble être le siége de l’odorat, et les antennes celui du toucher. L'organe de l’ouïe doit exister, mais
l'on ne sait où il est placé; en effet, ces insectes font entendre une espèce de voix qui n’estautre chose
qu'un bourdonnement très-nuancé; tantôt c'est la reine seule qui le produit, et elle prend alorz une
attitude particulière qui frappe les autres Abeilles d’immobilité; tantôt ce sont les jeunes reines qui,
retenues captives dans les alvéoles, produisent un son singulier; d’autres fois c’est un bruit général
qui a lieu, dans certaines circonstances, à l’intérieur de la ruche, et souvent enfin c’est le bourdon-
nement d’une ou de plusieurs ouvrières qui font part d’un danger. Le sens de la vision est très-per-
cant, et l’on sait que les Abeilles apercoivent de loin leur ruche et qu’elles savent y arriver en ligne
droite. L’organe du goût existe-t-il réellement? et, si la question est résolue affirmativement, son
siége est-il dans la trompe, qui est formée par le prolongement de la lèvre et qui sert principalement
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 151
à sucer les matières sucrées que donnent un grand nombre de plantes? Le canal intestinal consiste
en un æsophage aboutissant à un jabot renflé, ordinairement plein d’un liquide jaune, limpide,
ayant toutes les propriétés du miel. Après le premier renflement en vient un second, que Swammer-
dam nommait côlon, et qui est l'estomac proprement dit; ce dernier se continue avec l'intestin
grêle, et vers le point de leur réunion on voit un grand nombre de vaisseaux biliaires; enfin il y a
un cœcum, un rectum, et l'intestin se termine à l'anus. La respiration a lieu au moyen de tra-
chées naissant des stigmates, que l'on observe sur les côtés du corselet et sur les parties latérales de
l'abdomen, et elles aboutissent à quelques vésicules aériennes très-développées, ainsi qu’à un grand
nombre d’autres plus petites. À l'acte de la respiration se rattache la chaleur produite par les Abeilles
par leur accumulation dans les ruches, et le phénomène curieux de la ventilation, que les ou-
vrières produisent presque continuellement en agitant leurs ailes à la partie inférieure de la ruche.
Enfin les organes de la reproduction nous présentent des particularités remarquables, surtout chez
les femelles, car ceux des mâles sont disposés sur le même plan que dans la plupart des autres [ly-
ménoptères; les organes femelles se composent de deux ovaires subdivisés en plusieurs oviductes et
réunis en un canal commun : ils peuvent contenir un nombre prodigieux d'œufs, car Réaumur a
vu qu'une femelle, qui en avait déjà pondu vingt-huit mille, avait son abdomen encore plein de
plusieurs milliers d’autres; à ces organes se joignent un sac sphérique et deux vaisseaux aveugles
s’ouvrant dans le canal commun des oviductes, que Swammerdam, peut-être à tort, suppose ren-
fermer une liqueur visqueuse propre à enduire les œufs. Chez les individus neutres on trouve des
rudiments d'organes femelles, et nous dirons que des larves d'ouvrières nourries d'une certaine
manière peuvent produire de véritables femelles.
C’est toujours au printemps qu’a lieu l’accouplement; les mâles et les femelles s’envolent de la
ruche, et le rapprochement des sexes se fait constamment dans les airs et jamais dans l’intérieur du
nid; la femelle revient ensuite à la demeure commune, après avoir été fécondée, et elle est alors
le sujet de tous les soins de la part des ouvrières; c’est en général quarante-six heures après l'acte
de la reproduction que commence la ponte, qui se continue jusqu’au printemps suivant, et même,
dit Huber, pendant deux ans, sans que la femelle ait recu de nouveau l'approche d'aucun mäle;
car alors tous ceux qui restaient ont été impitoyablement massacrés. En effet, quelque temps après
l'accouplément de la reine, les ouvrières tuent les mâles, parce qu'ils sont inutiles à la ruche et
qu'ils ne font qu'user les provisions amassées par les ouvrières, et cependant, dans un autre temps,
on voit les ouvrières donner tous leurs soins aux larves et aux nymphes d’où naïîtront des mâles qui
seront nécessaires pour la fécondation des femelles. Au moment de la ponte, les ouvrières redou-
blent de prévenance auprès de la reine; elles la frottent avec leur trompe et lui offrent de temps en
temps le miel qu’elles dégorgent. Si la femelle est pressée de pondre, si elle laisse tomber plus d'un
œuf dans une alvéole, les ouvrières retirent aussitôt les autres et les détruisent. Ces œufs sont oblongs,
un peu courbés, d’un blanc bleuûtre, et ils sont pondus pendant presque toute l'année depuis le
mois de mars, quand la température est élevée. Une fois les œufs pondus, ils sont abandonnés aux
ouvrières appelées nourrices, parce qu’elles ne font que soigner les petits, par opposition à celles
nommées cürières, qui ont pour mission spéciale de construire la ruche. Divers observateurs rap-
portent que la nourriture donnée aux larves est différente suivant les âges; mais, si cela n’est pas
prouvé, il est bien démontré que la nourriture influe sur le développement des organes génitaux, -
et que celle donnée aux larves des femelles est très-différente de celle que recoivent les larves des
mâles et des ouvrières; 1} paraît, d'après Huber, que certaines larves d’ouvrières peuvent devenir
fécondes lorsqu'elles ont eu par hasard quelques parcelles de la gelée prolifique destinée spéciale-
ment aux larves des femelles. Toutes les fois qu'une ruche a perdu sa reine, s’il n'existe pas à ce
moment de larves destinées à devenir des femelles, les ouvrières ne tardent pas à adopter quelques
larves d’entre elles pour en faire des femelles fécondes; les alvéoles de ces larves sont agrandies, et
on ne leur donne plus qu'une nourriture exclusivement prolifique; mais, malgré cela, il paraît que
ces femelles, qui, pendant une grande partie de leur vie-de larve, n’ont recu que peu de temps la
gelée destinée à celles des femelles, ne pondent que des œufs de mâles, de même que le font les
jeunes reines au commencement de leur ponte.
Les larves des Abeilles sont blanchâtres, apodes, composées de quatorze, segments y compris la
tête, et celle-ci est munic de deux mandibules rudimentaires, d’une lèvre supérieure et d'une lèvre
152 HISTOIRE NATURELLE.
inférieure trifide. Chacune d'elles est renfermée dans une alvéole, et là les ouvrières lur apportent
chaque jour le miel destiné à sa nourriture; après plusieurs mues, ces larves ont acquis en très-peu
de temps leur entier développement : alors les ouvrières ferment la cellule au moyen d’un petit cou-
vercle de cire, et la larve se file dans l'intérieur un cocon soyeux, dans lequel elle se transforme en
nymphe; au bout de sept à huit jours, l’insecte parfait éelôt et perce lui-même le cocon, ainsi que le
couvercle de cire; dès qu'il est né, les ouvrières lui prodiguent tous les soins possibles, et si c’est un
des leurs, il se met immédiatement au travail. Souvent à ces époques d’éclosion le nombre des in-
dividus devient si considérable, qu’ils ne peuvent plus être tous contenus dans la ruche; car,
parfois, il n’est pas moindre de vingt-six à vingt-sept mille. C’est alors qu'il y a des émigrations
d'un certain nombre d'individus, auquel on donne le nom d'’essaim. Mais il est nécessaire pour
cela qu'il y ait une nouvelle reine qui soit éclose : alors l'ancienne abandonne la ruche, et va, avec
une partie des ouvrières, fonder une nouvelle colonie dans l'endroit qu’elles jugent le plus conve-
nable. La naissance d’une reine est toujours ce qui détermine une émigration, car il ne saurait ja-
mais se trouver deux femelles à Ja fois dans une ruche; quand cela arrive et qu’il ne peut se former
d'essaim, il y a entre elles un combat à mort, dnquel les ouvrières restent spectatrices, sans jamais
s'en mêler. Dès qu’une reine est née dans la ruche, elle cherche à détruire celles qui ne sont pas
encore sorties de leur loge; elle déchire avec ses mandibules le couvercle de l'alvéole et perce de son
aiguillon l’Abeille femelle qui vient de naître, et dans le eas où elle est encore en nympbhe, elle
l’abandonne sans la piquer après avoir déchiré son eouverele; mais, ainsi indiquée à la fureur des
ouvrières, elle ne tarde pas à être tuée. Si par hasard une ruche était privée de reine, et que les
ouvrières n'eussent pas d'œufs ou de larves qui puissent leur en fournir, elles l’abandonneraient
bientôt, ne construiraient plus aueune demeure et châcune mourrait bientôt isolément.
L'hiver diminue toujours la population des ruches, soit parce que c’est l’époque où les Abeilles pé-
rissent naturellement de vieillesse, soit que sa force ou sa durée leur soit fatale, soit encore qu’in-
vitées par les premiers beaux jours à sortir, un brusque changement de température leur soit
nuisible. Une température de quatre à cinq degrés au-dessous de zéro, au thermomètre de Réaumur,
suffit pour engourdir les Abeilles, et la durée de cet état ou un degré de froid plus considérable
que l'ordinaire peut occasionner leur mort. Dans ces derniers temps, pour remédier à ce mal, on a
proposé d’enfouir les ruches dans le sol, et ce moyen semble bon.
Les Abeilles ont de nombreux ennemis; aussi des sentinelles sont-elles préposées à la garde de Ja
ruche; il y a toujours des ouvrières à l'entrée de leur demeure qui touchent de leurs antennes cha-
que individu qui veut entrer, et lorsque des Frelons, des Sphinx à tête de mort, etc., cherchent à
S'introduire dans l'habitation commune, toutes les Abeilles se réunissent pour opposer leurs efforts
à l'entrée de ces ennemis. Car il paraît qu’il leur est presque impossible de s'opposer à leurs dégâts
lorsqu'ils ont pénétré dans la ruche,"et, quand cela arrive, les Abeilles en sont quelquefois réduites
à quitter leur demeure et à chercher ailleurs un endroit plus favorable pour en construire une
nouvelle. Outre un assez grand nombre d'Insectes, têls que des Teignes (principalement la Galechia
cereella), des Crabroniens, etc., les Abeilles ont encore un assez grand nombre d’autres ennemis,
surtout un Mammifère, la Souris, divers oiseaux, comme les Ilirondelles, les Fauvettes, les Mésan-
ges, ete., qui restent parfois dans le voisinage des ruches et font leur pâture de tous les individus
qui en sortent. Certains autres Mammifères détruisent aussi les nids de divers Apiens pour s’empa-
rer du miel qui s’y trouve.
Ces Hyménoptères nous rendent de grandsservices par leurs productions; le miel et la cire consti-
tuent des branches d'industrie très-considérables. Aussi s'est-on beaucoup occupé de ce point important
de l'entomologie appliquée, a-t on domestiqué les Abeilles et leur donne-t-on des ruches artificielles
de formes variées; mais il ne peut entrer dans notre sujet de traiter ici de ces insectes sous le point
de vue industriel. Disons seulement qu'une ruche fournit souvent plus de 6 à 8 kilogrammes de
mie: par an et une quantité de cire qui n’est pas beaucoup moindre, et que le produit des Abeilles
est déjà si immense en France que son revenu tient un rang élevé parmi nos produits agricoles.
Les Abeilles sont connues de toute antiquité; elles portaient le nom de Deborah chez le peuple
hébreu; c'étaient les pekoox où pourra des Grecs, et les Apis des Romains. On sait de quelle re*
nommée jouissait chez les anciens le miel des monts Ilymette et Hybla; tandis que, chez les mo-
lernes, celui de Narbonne est le plus apprécié. Aristote donne déjà quelques détails assez exacts sur
‘
ANNELES. — HYMÉNOPTÈRES. 153
les Abeilles; Pline mêle à leur histoire une foule de faits merveilleux. Une Abeille égyptienne (Apis
fasciata) est souvent représentée sur les monuments égyptiens, et elle semblait y être l'emblème
d'un peuple obéissant aux ordres de son roi. Mais ce n’est pas seulement chez les anciens que les
Abeilles furent regardées comme l'emblème de la royauté, et l’on n'ignore pas que de nos jours en-
core les manteaux des empereurs et des rois sont couverts d’Abeilles d’or.
Quant à l'histoire naturelle proprement dite des Abeilles, il faut arriver au dix-huitième siéele
pour trouver des observations exactes sur les mœurs si intéressantes et la description de ces Insectes.
Réaumur et Swammerdam indiquent quelques faits généraux, mais c’est surtout Huber père qui
nous a fait connaître l'histoire à peu près complète de ces Hyménoptères. C'est dans le célèbre ou-
vrage d'Iluber, dans les notices de MM. Braw, Hattorf, Audouin, etc., qu'ont été puisés la plupart
des détails qui se trouvent dans les publications récentes, principalement dans celle de Lepelletier
de Saint-Fargeau, sur les mœurs des Abeiïiles, et c’est là que nous avons pris ce que nous avons
dit dans notre court résumé. La partie descriptive des espèces est due à Linné, à Fabricius, à La-
treille, à Spinola et surtout à Lepelletier de Saint-Fargeau, qui, dans son Histoire naturelle des
Insectes Hyménoptères des Suites à Buffon de l'éditeur Roret, en décrit douze espèces.
Dans les MÉLIPONES (Melipona, Illiger), les jambes postérieures sont munies d'une espèce de
peigne à l'angle interne, le premier article des tarses est inerme,.et, en outre, l'abdomen est
convexe en dessus, à peine caréné en dessous, landis que dans deux genres qui en ont été démem-
brés, l'abdomen présente quelques particularités différentielles : c’est ainsi que chez les TRIGONA,
Latr., cet organe est triangulaire, court, caréné en dessous, et que chez les TETRAGONA, Serv. et
Saint-Fargeau, il est oblong, presque quadrangulaire, avec l'angle dorsal étant seul un peu arrondi.
Les Mélipones ressemblent à nos Abeilles, mais ils ont une taille beaucoup moins considéra-
ble, ct présentent une forme plus ramassée, des pattes postérieures plus longues et un corps plus
couvert de poils. Ils habitent exclusivement les régions méridionales de l'Amérique et quelques îles
de l'archipel Indien, où ils sont très-abondants en individus : les espèces semblent également mul-
tipliées, et l’on en décrit jusqu'ici une cinquantaine. Malgré les recherches de divers voyageurs,
principalement de MM. Maximilien de Neuwied et Auguste Saint-Hilaire, les habitudes de ces Hy-
ménoptères ne sont qu'imparfaitement connues. Cependant on sait que, comme les Abeilles, les
Mélipones vivent en sociétés très-nombreuses et également composées de trois sortes d'individus dans
‘une même espèce : mais 1l paraît, comme le pense Spinola, qu'il y aurait plusieurs femelles fé-
condes dans la même habitation, contrairement à ce que l'on observe chez les Apis. Ce qui le fait
penser, c’est surtout : 1° que leur abdomen peu considérable rendrait impossible l’existence d’un
grand nombre d'œufs; 2° qu'il n’y a pas d'aiguillon, d’où l’on doit induire que plusieurs femelles
fécondes peuvent vivre ensemble en bonne harmonie. On ignore si ces Insectes se multiplient par
essaims, si leurs sociétés sont durables comme celles des Abeilles (ce qui est probable), ou si elles
sont simplement annuelles comme celles des Guêpes et des Bourdons. On trouve suspendus aux
branches élevées des arbres des vastes forêts de l'Amérique du Sud des nids nombreux de Méli-
pones; dans l’intérieur de ces nids se trouvent des gâteaux de cire à un seul rang de cellules placées
horizontalement. De temps immémorial ces Insectes ont fixé l'attention des sauvages américains,
qui récoltent leur miel et leur cire et l'emploient aux mêmes usages que nous; seulement ils ne
craignent pas de détruire ces industrieux [lyménoptères pour s'emparer de leurs nids; souvent ils
les enfument pour en chasser les habitants, et d’autres fois ils coupent l'arbre auquel un de ces nids
se trouve attaché et ne manquent pas de le détruire tout à fait; il paraît néanmoins que quelques-
uns ont tenté de transporter une faible partie de couvain dans une ruche artificielle, ainsi qu'on le
fait pour nos Abeilles, et ce moyen, qui réussit pour quelques espèces, n'est pas bon pour toutes.
Du reste, ce miel est très-bon, aromatique, et, quoique moins doux que celui d'Europe, 1l est, pour
les Américains, ainsi que la cire, une branche de commerce assez importante. Comme espèce ty-
pique, la seule que nous citerons est la Mécipoxe rocuaire (Apis favosa, Lair.), qui habite les en-
virons de Cayenne. Nous figurons (pl. IX, fig 1) le Méciroxe aNripioïne.
Dans les BOURDONS (Bombus, Fabr.) les jambes postérieures portent deux petites épines à leur
extrémité, et les tarses sont à premier article diluté à l'angle externe de la base; les palpes maxil-
134 HISTOIRE NATURELLE.
laires sont très-petits, d'un seul article; es antennes sont coudées, filiformes, vibratiles. Chez les
Bourdons le corps est très-gros et velu; il y a trois ocelles sur le vertex, dispo:és en triangle; les
ailes supérieures ont une cellule radiale assez grande, séparée de la côte marginale à son extrémité,
et quatre cellules cubitales, sur lesquelles la dernière est très-incomplète.
Fig. 115. — Bourdon presque Fig. 116. — Dourdon presque interrompu. Fig. 117. — Bourdon presque
interrompu. (Mäle.) (Femelle.) interrompu. (Neutre.)
Dans l'espèce Bourdon, de même que dans l'espèce Abeille, il y a trois sortes d'individus : des
mâles, des femelles et des neutres ou ouvrières, et ecs dernières ont les pattes de derrière confor-
mées de la même manière que chez les Apis. Ces Insectes sont très-répandus en Europe. L'on en a éga-
lement trouvé dans FAmérique tant méridionale que septentrionale, à l’ile de Java, etc.; Lepelletier
de Saint-largeau en décrit vingt-cinq. Les Bourdons ont dans leur organisation et dans leurs mœurs
beaucoup de ressemblance avec les Abeilles. Ils construisent également des demeures étendues, dans
lesquelles ils élèvent leurs larves; ils forment des sociétés assez nombreuses, mais ce nombre est
peu considérable si on le compare à celui que donnent les Abeilles : habituellement chaque ruche
ne renferme que cinquante à soixante individus, mais dans quelques cas, néanmoins, il peut y en
avoir de deux à trois cents; ils établissent leur nid, pour la construction duquel ils emploient sur-
tout de la mousse, dans l'intérieur du sol, principalement.dans les prairies ou auprès des haies. Les
sociétés des Bourdons ne sont pas perpétuelles comme celles des Abeilles, elles ne durent jamais plus
d'une saison, et les individus qui les composent se dispersent chaque année vers le milieu de l'au-
tomne. Les femelles fécondes se cachent alors dans le creux des arbres ou dans les fissures des vieux
murs, etelles passent l'hiver dans un état plus ou moins complet d'engourdissement; les mäles et
les ouvrières paraissent au contraire mourir à l'approche de l’hiver et ne pas même chercher d’abri
pour attendre la nouvelle saison. Dès les premières chaleurs du printemps, la femelle sort de son état
de torpeur, et, le moment de la ponte approchant, elle doit se construire seule une demeure pour
recevoir ses œufs : pour cela, elle choisit une cavité qui lui semble convenable, la nettoie et va à la
recherche de mousse pour en recouvrir sa future habitation; elle s'occupe ensuite de récolter du
pollen et du miel qu’elle apporte dans son nid; puis, le moment de pondre étant arrivé, elle forme
des boules composées de ces deux matières et dispose un ou plusieurs œufs dans leur intérieur. Les
Jarves tardent peu à naître et trouvent auprès d'elles une nourriture convenable, qui, lorsqu'elle
vient à manquer, est renouvelée par leur mère. Tous les œufs pondus au printemps donnent nais-
sance à des ouvrières, qui, dès qu’elles sont arrivées à leur accroissement complet de larves, se
transforment en nymphes dans des coques de soie qu’elles savent se fabriquer, et, quelques jours
après, les Insectes parfaits sortent à l’extérieur et se mettent aussitôt à l’œuvre : agrandissant la ru-
che qui doit servir aux générations suivantes, et y ajoutant souvent une voûte nouvelle à paroi de
de cire. Mais cette cire, quoique produite de la même manière que celle des Abeilles, n’a pas les
mêmes propriétés, ne peut servir à nos usages ordinaires, car elle est d'un gris jaunâtre, brûle faci-
lement et ne devient liquide que quand on l’expose à une forte chaleur. Dans l’intérieur des nids les
gâteaux sont de formes très-irrégulières, composés de corps oblongs appliqués les uns contre les
autres. Un peu plus tard la mère Bourdon pond des œufs de mâles et de femelles, qui, développés
au milieu de l'été, produisent bientôt une nouvelle génération plus considérable que la précédente,
ne parvient à l’état adulte qu'au mois d'août. C'est à cette époque qu'a lieu l’accouplement des fe-
melles qui doivent passer l'hiver. Les Bourdons ont d’assez nombreux ennemis : tels sont des Tei-
ANNELÉS. — IIYMÉNOPTÈRES. 155
gnes, plusieurs Diplères (principalement les Conops), divers Ilyménoptères, des Acarides, ete.,
qui s’introduisent dans les nids, y pondent, et dont les larves vivent aux dépens des hôtes chez les-
quels ils se sont établis. Quelques-uns des organes intérieurs des Bourdons, surtout ceux de la re-
production, ont été étudiés par Réaumur et ressemblent assez à ceux des Abeilles. Les larves sont
à peu près semblables à celles des Apis, quoique en différant sous divers rapports.
Plusieurs espèces de Bourdons se trouvent auprès de Paris, dans les prairies ou dans les bois.
L'espèce typique est le Bounnon pes sannixs (Bombus hortorum, Lin.), qui est assez grand, noir, avec
l'extrémité du corps de couleur blanche; la partie antérieure du corselet et la base de l'abdomen
jaunes. (Voy. le nid, pl. IX, fig. 2.) D'autres espèces sont les Bombus Laponicus, Fabr.; fragrans,
Dahlbom; apricus, Fabr.; hypnorum, Lin.; terrestris, Fabr., ete., tous européens. Parmi les espèces
exotiques, nous nommerons seulement les B. Virginicus et Cayennensis, Fabr., de l'Amérique du Sud.
2° groupe, Psiruynipes, ayant pour caractères principaux : langue cylindrique aussi longue que le
corps; pattes postérieures simples, sans dilatation ni poils propres à retenir le pollen, non plus que
l'abdomen et ne renfermant que le genre PSITHYRUS, Saint-Fargeau, longtemps confondu avec le
genre Bourdon, mais en différant principalement par la disposition de leurs pattes de derrière. Chez
ces Hyménoptères, il n’y a que deux sortes d'individus : des mâles et des femelles; ils ne construi-
sent pas de nids : les femelles vont pondre dans ceux des Bourdons, et les larves qui en sortent vi-
vent aux dépens des provisions amassées par les hôtes chez lesquels ils ont pénétré. Ils ressemblent
tellement aux Bourdons, que ces derniers les accueillent sans difficulté et qu'ils-nourrissent leurs
larves très-analogues aux leurs. On n’en connait qu'un nombre très-restreint, et tous sont euro-
péens. Nous représentons (pl. IX, fig. 6) le Pstruyre RUPESTRE.
.
9° groupe, ANTHOTHORIDES, Caractérisé par sa langue toujours plus longue que la moitié du corps,
par ses jambes postérieures dilatées en forme de palette; et par ses tarses à premier article offrant
une palette en dessus et une brosse en dessous. Chez eux, comme dans les autres Apiens qu’il nous
reste à étudier, il n’y a plus que deux sortes d'individus dans l'espèce; ils ne forment plus d’asso-
ciation, ne sécrètent pas de cire; mais les femelles construisent des nids divisés en plusieurs loges,
devant recevoir chacune un œuf, et, plus tard, une larve, qui est nourrie avec une pâte assez sem-
blable à celle que l’on donne aux Abeilles. On y range une quinzaine de genres : les principaux,
dont on pourrait faire de petites divisions, sont ceux des Euglosse, Anthophore et Xolocope.
Dans les EUGLOSSES (Englossa, Latr.), les jambes postérieures sont très-renflées dans les mâles
et très-dilatées en forme de palette creuse dans les femelles ; le labre est carré, et l'écusson un peu
convexe avec une petite fosselte velue au bord postérieur, tandis que, dans les EULÆMA qu'en a
démembrés Saint-Fargeau, le labre est avancé, et l'écusson plat, sans facette. Dans les Euglosses, si
remarquables par leur trompe plus longue que leur corps, les couleurs des Insectes sont brillantes,
parfois métalliques, leur grande taille et le corps plus ou moins velu. On les trouve surtout dans
l'Amérique du Sud, et quelques espèces sont propres à l’Europe. Le type est PE. violacea, Blanch.,
à corps entièrement d’un beau bleu violet brillant, avec les ailes enfumées.
Dans les ANTHOPTIORES (4nthophora, Latr.), les mandibules sont étroites, pointues, munies
d'une seule dent ; les jambes postérieures sont garnies en dessus de longs poils, de même que le
premier article des tarses; en outre, leurs palpes maxillaires ont six articles et les antennes
sont courtes, filiformes dans les deux sexes. Is sont nombreux en espèces, qui se rencontrent prin-
cipalement dans le midi de l'Europe et dans le nord de l'Afrique, et ils sont individuellement très-
abondants. Assez semblables à l’Abeille commune, ils sont plus velus, d’une teinte grisâtre et de
grande taille. C’est dans les erevasses des vieux murs, dans la terre sablonneuse escarpée et dans
les sablières exposées à l'action des rayons solaires qu'ils placent leur nid. Ce nid ressemble, en
général, à un long tuyau divisé en une série de cloisons destinées chacune à renfermer un œuf. La
femelle élève ses larves à peu près de la même manière que le font les Apis. Le type est l'AnrnoraonE
DES MURAILLES (Anthophoria parietina, Fab.), de nos environs, noire, avec les derniers segments
abdominaux fauves, et dont le nid a été observé par Latreille.
136 HISTOIRE NATURELLE.
Parmi les genres voisins de celui des Anthrophores, qui s’en distinguent par quelques partieula-
rités des palpes et des antennes, et qui tous ont des représentants en Europe, nous nommerons seu-
lement les Sarropoda, Latr.; Macrocera, Spinola; Eucera, Scopoli (Lasius et Trachusa, Jurine);
Melissodus, Latr. (M. de Latreille, pl. X, fig. 5.);, Melituga, Latr.; Systropha; Illiger, et Kirbya,
Saint-Fargeau.
Dans les XYLOCOPES (Xylocopa, Fabr.), les mandibules, élargies à l'extrémité, sont étroites, sil-
lonnées, fortement unidentées; et les jambes postérieures sont garnies de longs poils en dessus et
en dessous, ainsi que le premier article des tarses. Très-grands et très-nombreux en espèces, ces
Hyménoptères sont particulièrement abondants dans l'Amérique du Sud, dans l'Afrique intertropi-
cale, dans les Indes orientales, etc., et une seule espèce, sur près de cent qui existent dans les col-
lections, se trouve en Europe, et n’est pas rare pendant toute la belle saison aux environs de Paris,
sur presque toutes les fleurs : c’est la X. viozetre où ABeiLLe perce-pois (X. violacea, Fabr.), (PL IX,
fig. 5 et9.) à corps gros, noir; à tête et corselet très-velus et à ailes noires, non transparentes, avec des
reflets violets. D’après Réaumur, lorsque cette espèce veut construire son nid, elle cherche du bois
mort, parfois pourri, le perfore avec ses mandibules, et y construit un ou plusieurs trous; puis elle
en garnit le fond de pollen et de miel, et y dépose un œuf; puis elle établit en dessus, au moyen
de sciure de bois et d’un liquide adhérent qu’elle sécrète, un plancher solide qui servira de fond à
une autre cellule, de telle sorte que son tube est partagé en une série de loges qui ne communiquent
pas ensemble et qui renferment chacune un œuf et toute la provision nécessaire pour la larve.
Les genres Centris, Fabr. (Megülla, Iliger; Trachusa et Perisia, Klug); Epicharis, Klug; Ancy-
lowlis, Latr., tous de l'Amérique méridionale, remarquables par leur livrée jaune ôu orange, assez
vifs et plus ou moins nuancés, le groupe européen des Ceratina, Latr., etle genre Lestis, Saint-Farg.,
dela Nouvelle-Hollande, se distinguent entre eux, et des Xylocopes, par la disposition de leurs man
dibules. (Voy. le Centris dénudé, pl. IX, fig. 7, et le Cératine à labre blanc, pl. X, fig. 1.)
Fig. 118. — Anthophore acervorum. Fig. 119. — Andrène à collier
(Femelle.) (Femelle.) i
4° groupe, Axprémes, qui ont les jambes postérieures munies de longs poils servant à la récolte
du pollen, mais avec des espaces lisses sur les hanches, à la base des cuisses et sur les côtés du
corps. Ils vivent tous solitairement ; les femelles creusent des trous assez profonds ou des tubes
longs de 15 à 20 centimètres, dans lès terrains argileux ou dans le mortier qui sert à lier les pierres
des murs, et presque toujours à une exposition méridionale : ces sortes de nids présentent, en ou-
tre, vers leur fond, plusieurs petits tubes dans lesquels est placé chaque œuf approvissonné de
miel et de pollen qui doit nourrir la larve; les habitudes de ces Insectes varient suivant les espèces
et suivant les genres, dont les principaux sont ceux des Dasypode et Andrène.
Dans les DASYPODES (Dasypoda, Fabr.), les palpes labiaux sont de quatre articles, les antennes
sont arquées dans les mâles, assez longues, légèrement renflées dans les femelles; la langue est
assez longue, linéairc ; les pattes de derrière sont allongées, et les tarses à premier article long,
garni de grands poils. On n’en connait que peu d'espèces, et le type est le D. À PATTES HÉRISSÉES
(D. hirtipes, Fabr.), qui est couvert d’une pubescence grisàtre très-serrée, est très-répandu dans
toute l’Europe et se forme des trous profonds dans les chemins. — Des genres voisins sont ceux des
Panurqus, Panzer, d'Europe et de Barbarie; Dufourea, Saint-Fargeau, du midi de la France, etc.,
qui ont six articles aux palpes, et dont les antennes offrent des particularités différentielles.
ANNELES. — HIYMÉNOPTÈRES. 157
Dans les ANDRÈNES (Andrena, Latr.), le premier article des tarses postérieurs est court, dé-
pourvu de longs poils: la langue courte, dilatée à l'extrémité ; les antennes sont longues et les
ocelles disposés en triangle. On en décrit une quarantaine d’espéces particulières au midi de l'Eu-
rope et au nord de l'Afrique; VA. pilpes, Fabr., n’est pas rare auprès de Paris. — D'autres genres
propres à presque toutes les parties du globe, et dont quelques-uns se trouvent auprès de nous,
sont ceux des Scrapter, Saint-Fargeau; Halictus, Latr. (H. ceint, pl. IX, fig. #4); Nomia, Latr.; An-
cylus, Saint-Fargeau, etc.
Dans les COLLÈTES, Latr., le premier article des tarses postérieurs est assex long, mais dépourvu
de longs poils, et la langue est courte, trilobée : on en connaît quelques espèces dont le type est la
C. pouue (C. hirta, Fabr.), qui se trouve auprès de Paris, et dont on voit les nids placés dans les
vieilles murailles. (Voy. pl. IX, fig. 3.)
o° groupe, Osmives, ayant pour caractéristique : pattes postérieures simples, impropres à récolter
le pollen ; une seule brosse sous le premier article des tarses; abdomen offrant une palette garnie
de poils étagés destinés à retenir le pollen. Insectes nidifiants, dont les femelles recueillent le
pollen d’une autre manière que ne le font les autres Apiens : ils sont répandus dans les diverses
parties du monde, mais sont surtout abondants dans le midi de l’Europe, ainsi que dans le nord de
- l'Afrique; ils se construisent des cellules ayant à peu près la forme d’un dé : tandis que chez quel-
ques-uns ces cellules sont rangées les unes à la suite des autres, chez plusieurs, elles sont agglo-
mérées les unes à côté des autres ; les matériaux employés pour la construction des nids varient
beaucoup suivant les genres : c'est ainsi que les Osmies et les Chalicodomes construisent leurs nids
sur les murailles avec un mortier très-dur; les Mégachiles, nommées pour cela coupeuses de feuilles,
composent les leurs avec des fragments de feuilles qu’elles savent découper avec leurs mandibules;
enfin, les Anthocopes n’emploient pour cela que des pétales de fleurs.
Le genre typique, celui des OSMIES (Osmia, Panzer), aux caractères précédemment indiqués,
Joint des mandibules bidentées, carénées, et des palpes maxillaire sde quatre articles, ce qui le dif-
férencie de coupes génériques nombreuses, telles que celles des Diphysis, Saint-Fargeau; Chalico-
doma, Saint-Fargeau; Mégachile, Latr., Lüthurgus, Latr.; Anthocopa, Saint-Fargeau; Anthidia,
Fabr.; Heriadis, Spinola ; Chelostoma, Latr., etc. Les Osmies sont nombreuses en espèces, répan-
dues presque partout; deux espèces, qui se trouvent communément en France, sont les Osmia bi-
cornis, Linné, et cornuta, Latr. (Voy. l'Osmie de Tunis, pl. X, fig. 2 ) — Parmi les espèces des
autres genres que nous avons nommées et qui habitent nos environs, nous citerons seulement les
Chalicodoma muraria, Fabr. (Voy. le nid du C. des murs, pl.'IX, fig 8.); Megachile pyrina, Saint-
Fargeau, cincta, Kirby, et centuncularia, Fabr.; Anthidium manicatum, Linné (Voy. l'Anthidie
florentine, pl. X, fig. 3.); Anthocopa papaveris, etc.
6° groupe, Nowanines, surtout caractérisés par leurs pattes postérieures simples sans dilatations
ni poils propres à recueillir le pollen, non plus que l'abdomen, et par leur langue à peine plus lon-
que que la tête. Les Nomadides, les derniers Apiens qu’il nous reste à étudier, ont une manière de
vivre très-différente de celle de la plupart des autres; ils ne construisent plus de nids pour abriter
leurs œufs et leurs larves, et ils ne vont plus chercher la nourriture nécessaire à leurs petits. Dés
Jors il fallait que ces Hyménoptères vécussent aux dépens des provisions amassées par des Apiens
d’autres espèces, et nourrissent ainsi leurs larves, qui sont incapables de se mouvoir et qui ont be-
soin cependant de vivre de pollen mélangé au miel, et c’est en effet ce qui a lieu. Parmi les genres
nombreux de ce groupe, on peut prendre comme type de petites divisions spéciales, celles des Phi-
lérèmes, Épéoles, Nomades, Sphécodes et Prosopes.
Dans les PHILÉRÈMES (Phileremus, Latr.), de même que dans les genres Ammobates, Latr.; Cw-
loxys, Latr.; Stelis, Panzer; Allodape, Serv. et Saint-Fargeau; Pasites, Jurine, etc.; les antennes
sont courbées, grossissant à l'extrémité; mais ces genres différent les uns des autres par quelques
particularités que présentent les palpes, l’écusson et les crochets des tarses : c’est ainsi que chez les
Philérèmes propres, les palpes maxillaires sont de deux articles et l'écusson bituberculé au milicu.
A. 18
158 HISTOIRE NATURELLE.
On n'en connait que quelques espèces européennes et africaines, et les femelles déposent leurs œufs
dans les nids des Mégachiles, auxquels ils ressemblent par leur aspect général et par leur système
de coloration. Le type est le P. punctatus, Fabr. — Dans les genres voisins de celui-ci, quelques
espèces remarquables sont les Cœlioxys conica, Latr., très-répandu en Europe; Ammobates rufi-
ventris, Latr,; Posites Schottii, Fabr.; Stelis aterrima, Panzer, etc., tous de nos environs. Nous ci-
terons aussi les Colloxys à queue rouge, figuré pl. X, fig. 7 et 9, et Ammobate bicolore, représenté
pl Xi.
Dans les ÉPÉOLES (Epeolus, Fabr.), les antennes sont coudées et les palpes matillaires d'un seul
article. On range dans ce genre un assez petit nombre d'espèces, dont l’une (Epeolus variegatus,
Latr.), se trouve assez fréquemment en France : ce sont de jolis Insectes dont les couleurs sont
. très-variées; leurs larves vivent dans les nids des Anthophores et des Osmies.
Dans les NOMADES (Nomada, Fabr.), les antennes sont coudées, les palpes maxillaires sont de
six articles; lécusson est élevé, bituberculé au milieu. On comprend dans ce genre une quantité
considérable de petites espèces européennes, presque glabres, ressemblant beaucoup par leurs cou-
leurs noires ou ferrugineuses, mélangées de jaune, à de petites Guêpes; on les voit, pendant toute
la belle saison, voltigeant dans les endroits chauds, et Lepelletier de Saint-Fargeau pense que leurs
larves vivent aux dépens des provisions amassées par les Bourdons; une espèce commune dans nos
environs est la N. ruficornis, Linné. (Voy. la Nomade variée, pl. X, fig. 4.)
Un assez grand nombre de genres, séparés les uns des autres par des caractères tirés des palpes,
du labre et de l’écusson, peuvent former avec les Nomades une division particulière : tels sont les
Aglae, Saint-Fargeau, fondé pour une seule espèce de la Guyane; Crocisa, Jurine, composé de
quelques espèces indigènes et exotiques; Melecta, Latr., qui renferme des espèces qui vont pondre
dans les nids des Mégachiles et des Anthophores, et qui se trouvent souvert chez nous; Oxea,
Klug; Acanthope, Klug; Hopliphorus, Mesocheira, Mesonychia, Mesoplia, Saint-Fargeau; Ctenio-
chela, de Romand, etc., qui appartiennent presque exelusivement à l'Amérique méridionale.
Dans les SPHÉCODES (Sphecodes, Latr.), les antennes sont coudées dans les femelles et arquées
chez les mäles. Ces Apiens, généralement noirs avec un abdomen ferrugineux, se trouvent fré-
quemment dans toute l'Europe; le nombre des espèces est peu considérable, et elles vivent à l’état
de larves dans les nids des Andrènes et des Halictes (type S. gibbus, Latr.). Tandis que dans les
Sphecodes vrais, l'écusson est mutique et les crochets des tarses bifides, chez les Rathymus, Saint-
Fargeau, établis pour une grande espèce de Sphécode propre à Cayenne, l’écusson est échancré
au bord postérieur.
Enfin dans les PROSOPES (Prosopis, Jurine; Hylæus, Fabr.), les antennes sont arquées dans les
deux sexes. Les espèces de ce genre sont toutes européennes; elles déposent leurs œufs dans les nids
des Collêtes : une espèce très-abondante dans toutes les parties de la France est la Prosope racuetÉe
(Prosopis signatu, Latr.), qui est noire et ornée de petites taches blanches.
DEUXIÈME FAMILLE. — VESPIENS.
Le genre Guêpe ou Vespa, de Linné, devenu assez nombreux en espèces, et partagé en quelques
groupes génériques, est devenu, pour M. Émile Blanchard, la famille des Vesriexs, qu'il caractérise
ainsi d'une manière générale : Mandibules courtes ; mächotres longues; labre petit, arrondi ; lèvre
inférieure également courte ; antennes coudées; pattes postérieures simples, avec les jambes armées,
à leur extrémité, de deux épines; ailes ployces longitudinalement pendant le repos.
Ces Hyménoptères forment, comme les Apiens, des sociétés souvent nombreuses, et même, chez
quelques espèces, il y a trais sortes d'individus; mais, de même que chez les Bourdons, ces sociétés
sont annuelles. Chaque printemps, une femelle, qui est parvenue à hiverner, édifie elle-même son
nid, pond ses œufs et soigne ses larves, et c’est seulement lorsque celles-ci sont arrivées à l’état par-
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‘g. 1 — Chartergue cartonnière Ris. 2. — Sphex du Cap. (Femelle.) Fig. 3. — Apioica de Virginie,
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Fig, 4. — Poliste française. Fig. 9. — Nid de Chartergue cartonnière. Fig. 6. — Poliste française.
(Mäle..) (Intérieur) (Femelle.
Pig. T. — Macromerys brillant. (Mâle.) - Fig. 8. — Hogardie roussätre. (l'emelle.)
\ HYMÉNOPTÈRES. PL 11
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 139
fait que la plupart d’entre elles, qui sont des ouvrières, se mettent à l’œuvre, agrandissent le nid,
et donnent tous leurs soins aux nouvelles larves.
Moins nombreux que les Apiens, quoique se trouvant dans presque toutes les régions du globe,
les Vespiens ont, en commun avec les Euméniens, un caractère qu’on ne retrouve pas chez les au-
tres Hyménoptères, et qui consiste à offrir des ailes antérieures repliées longitudinalement pendant
le repos. Ces Insectes s’attaquent presque exclusivement aux fruits et pénètrent dans les maisons, où
ils sont très-incommodes. On n’y admettait anciennement que trois genres : Guépe, Polistes, Épi-
pone; mais, dans ces derniers temps, on a indiqué quelques coupes génériques spéciales.
Genre GUÉPE (Vespa, Linné), ayant pour caractères essentiels : corps élancé; abdomen à premier
segment aminci en pédicule; chaperon à bord antérieur angulaire. Les Guêpes sont généralement
de taille assez grande; le corps est épais; les mandibules ont la première dent petite, obtuse, très-
éloignée des autres; la seconde beaucoup plus large que les deux dernières, et celles-ci portées sur une
même base; le corselet est ovalaire; les ailes ont une cellule radiale ne s’avançant pas plus près de
l'extrémité de l’aile que la troisième cellule cubitale : celle-ci est en carré long, et la seconde rétrécie
vers la radiale; les pattes sont fortes. Les espèces sont très-nombreuses et réparties dans toutes les
contrées du globe, mais surtout dans les régions chaudes; il y en a plusieurs en Europe, et toutes
ont une livrée générale : le fond de l’Insecte est noir et présente des lignes jaunes ou ferrugineuses.
La piqûre des Guëpes est très-mauvaise; en effet, les femelles et les ouvrières, comme cela se remar-
que dans un grand nombre d’autres Hyménoptères, sont armées d’un aiguillon venifère, qui produit
constamment une vive douleur lorsqu'on en ressent la piqûre. ”
Les Guêpes construisent des demeures très-vastes, nommées guépiers, et qui quelquefois ne le cè-
dent en rien, sous le rapport de la taille, aux ruches des Abeilles. La plupart des espèces de ce genre
établissent leurs habitations de différentes manières, et leurs guêpiers consistent en fibres de bois,
souvent en état de décomposition. L’Insecte détache les fibres ligneuses avec ses fortes mandibules,
puis il les divise de nouveau et les réunit ensuite à l'aide d’un liquide visqueux qu'il sécréte; ce
premier travail achevé, il emporte son fardeau et va commencer ou continuer son nid : tritu-
rant de nouveau ces matériaux, il les réduit en une feuille mince, papyracée, et la polit enfin avec
sa languette, ainsi qu'avec la liqueur gommeuse versée par sa bouche. L'intérieur de la terre, le
creux des arbres et l’entre-deux des branches d'arbres sont les endroits où les Guêpes établissent
leurs nids : une enveloppe générale, formée habituellement de cinq ou six lamelles papyracées,
superposées les unes sur les autres, ou parfois uniques comme, dans les Frelons, entoure le guêpier
et est fixée aux parois des corps auprès desquels les nids sont placés. La même substance est em-
ployée pour former les gâteaux : le premier est fixé au sommet du guêpier, le second vient ensuite
et est attaché de la même manière, et les autres sont pareillement disposés. Quand au printemps la
femelle a formé son premier nid et qu’elle a déposé ses œufs qui ne tardent pas à éclore, elle apporte
aux larves des fragments de fruits ou même d'insectes et elle leur dégorge une espèce de miel
qu'elle a humé sur les fruits ou à la séve des arbres. Ce miel semble aussi agréable au goût que
celui de l’Abeille commune; dans quelques cas on pourrait s’en servir avec avantage, mais il est assez
peu abondant. Les larves, au moins celles de nos espèces européennes, sont, comme les larves des
Abeilles, blanchâtres, molles, apodes; mais elles ont des mandibules plus fortes, ce qui leur donne
la facilité d'entamer les morceaux de fruits dont elles se nourrissent. Pour se transformer en nym-
phes, elles filent un petit couvercle soyeux pour clore leur cellule, et bientôt après l'Insecte parfait
en sort. La première génération ne produit que des ouvrières qui, à leur tour, prendront soin des
nouvelles larves pendant le cours de l'été. Le premier soin des ouvrières consiste à agrandir leur
demeure et à rendre l'ouverture inférieure du guêpier plus accessible; elles construisent des cellules
de trois sortes, dans lesquelles la femelle dépose bientôt des œufs nombreux de femelles, de mâles
et d'ouvrières, et elles seules pourvoiront à l'alimentation des larves qui en naïîtront. Vers les pre-
miers jours d'octobre, dans nos climats au moins, presque tous ces Insectes sont arrivés à leur état
parfait; les mäles et les femelles s’accouplent avant l'hiver : les premiers périssent presque immé-
diatement, de même que les neutres; les femelles seules hivernent pour former de nouvelles colo-
nies l’année suivante.
On ne connaît guère complétement les mœurs que des espèces européennes; mais les nombreuses
18°
140 HISTOIRE NATURELLE.
espèces exotiques du même genre doivent très-probablement avoir des habitudes analogues. Nous
ne dirons quelques mots que de trois espèces qui sont très-répandues dans nos environs. 1° GuÊrE
COMMUNE (Vespa vulgaris, Linné), longue d’à peu près 0,06 dans les femelles, et d’une longueur
moindre dans les mâles et surtout dans les ouvrières, à corps noir varié agréablement de jaune vif,
à tête jaune, etc.; le guêpier est établi dans la terre, et la substance papyracée qui le forme est so-
lide, très-gommée, d'un gris cendré obscur. 2° Guère pes ARBUSTES ou Guêre rousse (Vespa rufa,
Fabr.), plus petite que la précédente, de la même couleur en dessus, mais à ventre roussâtre; habite
les bois et forme un nid analogue à celui “de la Guêpe commune, mais placé entre les branches des
arbustes. 3° FRreLon (Vespa crabro, Linné), d’une longueur de plus de 0,07, pour les femelles, et un
peu moindre pour les autres individus; corps ferrugineux, avec une tache jaune pâle entre les an-
tennes, et offrant des teintes roussâtres; cette espèce, qui attaque divers Insectes et qui dérobe par-
fois le miel des Abeilles, se construit un guêpier très-grand, composé d’une substance jaunâtre,
très-friable et qu’elle place en général dans l’intérieur des vieux troncs d’arbres. Nous représentons,
page 125, la Guëpe rousse.
Genre POLISTE (Polistes, Fabr.), ayant le corps élancé; l'abdomen à premier segment élargi en
clochette de la base à l'extrémité; chaperon ayant un bord antérieur angulaire.Ce groupe renfermant
un certain nombre d'espèces réparties dans les diverses parties du monde et dont l'espèce typique est
la Pouisre Française (Polistes gallica, Fabr.), noire avec des taches et bandes jaunes, répandue dans
toutes les parties de l’Europe et n’étant pas rare dans les environs de Paris. La femelle de cette espèce,
d'après Geoffroy et Réaumur, qui l'ont étudiée avec soin, se fait au printemps un petit nid, n'offrant
pas d’enveloppe, disfiosé comme un simple gâteau ne renfermant que cinq ou six loges et attaché
par un pédicule à la tige de quelques petites plantes : c'est là qu'elle élève seule ses premiers œufs,
qui deviendront des ouvrières; celles-ci, quand elles sont développées, agrandissent le gâteau, en .
font quelquefois un second, et donnent ainsi à la femelle le moyen de produire un grand nombre
d’œufs, germes des trois sortes d'individus ; le reste de l'éducation a lieu comme dans les Guêpes.
Nous donnons le nid de cette espèce, et nous en représentons, pl. XI, fig. 4 et 6, deux sortes d’in-
dividus (mâle et femelle).
Deux genres démembrés, par Lepelletier de Saint-Fargeau, de celui des Polistes, et composés ex-
clusivement d'espèces exotiques, propres surtout à l'Amérique méridionale, sont ceux dés POLYBIA
à abdomen ayant un premier segment pédiculiforme, court, en massue et bituberculé latéralement,
et AGELAÏTA (subdivisés en Rhopalidia, Apioica et Agelaia), à premier segment äbdominal disposé
de même, mais unituberculé latéralement et à second segment campanulé. Nous donnons les figures
du Polybie sédule et celle de l'Apioica de Virginie (pl. XI, fig. 3).
Fig. 120. — Polyhbice sédule. Fig. 191. — Polyste française.
{Nid vu de profil.)
Genre ÉPIPONE (Epipona, Latr.), ayant pour caractéristique : corps court, assez épais; abdomen
an peu pédiculé; chaperon à bord antérieur angulaire; mandibules quadridentées : la première
dent très-forte. Ces Insectes, propres aux régions tropicales, et que l'on a trouvés à Cayenne, au
ANNELÉS, — HYMÉNOPTÈRES. 141
Sénégal et dans les Indes, sont de petits Vespiens de couleur noire, ayant ordinairement des cein-
tures jaunes. Le type est le Polistes morio, Fabr. (Epipona tatua, Saint-Fargeau), qui n’est pas
rare dans l'Amérique méridionale et dont M. Milne Edwards (Annales Soc. ent. de Fr., 1845) à
fait connaître le guêpier. Ce nid, remarquable par sa légèreté et le fini de son travail, est établi
autour d'une branche d'arbre qui le traverse dans sa plus grande longueur; il est arrondi, terminé
en pointe fusiforme; à l'intérieur il y a dix étages et autant de gâteaux circulaires complétement
isolés et liés les uns aux autres par des sortes de pédicules : la chambre commune est très-grande;
par son ensemble, ce nid ressemble grossièrement à une carapace de Tatou, et c’est pour cela que
les habitants de Cayenne nomment l'Insecte vulgairement Tatua.
Le genre CHARTERGUE (Charterqus, Saint-Fargeau), formé aux dépens des Epipona et n’en dif-
férant guère qu’en ce que la première dent des mandibules, également quadridentées, est très-petite,
et que l'abdomen est sans pédicule sensible, est célèbre par la composition du nid d'une espèce
et par les propriétés vénéneuses du miel d’une autre. On n’en connaît qu'un petit nombre d'espèces,
toutes propres à l'Amérique, principalement aux parties méridionales de ce continent. L'espèce la
plus anciennement connue est le CHarTERGUE caRTONNIER (Vespa nidulans, Fabr.), qui, commune à
Cayenne, est noire avec une ligne sur le corselet, une autre sur l'écusson, et le bord postérieur de
chaque anneau abdominal de couleur jaune. Les nids, aussi bien l’enveloppe que les gâteaux,
sont formés d’une sorte de carton de pâte, tellement analogue à du carton que, comme le dit Réau-
mur, le meilleur ouvrier cartonnier s'y méprendrait; ces guêpiers, qui dans l’origine ne contien-
nent qu'un, deux ou trois gâteaux, finissent par en avoir de huit à douze; aussi deviennent-ils
très-grands; l'ouverture de cette demeure est en dessous, et chaque gâteau est percé vers le milieu
pour laisser le passage libre aux habitants; nous représentons ce nid pl. XIE, fig. 5, et nous donnons,
même planche, fig. 1, la figure de l’Insecte parfait. Une autre espèce, la Lacnecuana des Américains
(Chartergus Brasiliensis, Latr.), très-voisine zoologiquement de la précédente, quoique plus petite,
etfabriquant des nids à peu près semblables, donne un miel quelquefois excessivement malsain, ainsi
qu'Auguste de Saint-Hilaire l’a constaté personnellement; c’est dans l'ouvrage de ce botaniste cé-
lébre que nous renvoyons ceux qui voudraient lire des détails des plus intéressants sur Fempoison-
nement qu'il a éprouvé. Toutefois nous cevons ajouter que les habitants du Brésil s'accordent à dire
que la Guëpe Lacheguana ne donne pas toujours un miel dangereux, et que ce n’est qu’accidentel-
lement qu'il oecasionne une sorte d'ivresse, de délire, dont on ne se délivre que par des vomisse-
ments, et qui peut aller parfois jusqu’à la mort.
Un nid assez analogue à celui des Charterqus, surtout remarquable par les tubercules et les
nombreuses aspérités dont il est couvert, et qui provient également de l'Amérique, a donné lieu à
la création d’un genre Myrapetra, White, pour l’Insecte qui le forme et que l'on ne connaît pas
encore.
Dans un travail commencé en 1855, et dont la publication n’est pas encore terminée (Études sur
la famille des Vespides : Monographie des Guëpes sociales ou de la tribu des Vespiens), M. Henri de
Saussure fait connaître beaucoup d'espèces nouvelles de la famille que nous avons passée en revue,
en donne de bonnes figures et décrit quelques genres nouveaux. En résumé, dans sa elassification,
il indique deux sections et onze genres. — Première section : Srecocvrrares. Genres : Ischnogaster,
Guérin (Stenogaster, Guérin, olim), quatre espèces de la Nouvelle-Guinée, de Java, ete.; Belono-
gaster, ou Raphigaster, Saussure, sept espèces d’Afrique, de Madagascar, etc.; Mischocyttarus,
Saussure, deux espèces américaines; Îcaria, Saussure, vingt et une espèces d’Australasie, de Mada-
gascar, etc.; Polistes, Fabr., soïxante-cinq espèces; Gyrostoma, Kirby, une espèce des Indes orien-
tales; Apioica, Saint-Fargeau, quatre espèces américaines; Vespa, Linné, quarante et une espèces;
Anthreneida, White, une espèce seulement.— Deuxième section : PæcyLocyrrares. Genres : Synæca,
Saussure, sept espèces de l'Amérique méridionale; Polybia, Saint-Fargeau (sous-genres : Clypearia,
.Saussure; Polybia, Parapolybia, Saussure), cinquante-quatre espèces. — Troisième section : Pra-
mocvrrares. Genres: Tatua, Saussure, deux espèces dont le type est l'Epipona tatua où morio;
Chartergus, Saint-Fargeau, neuf espèces; Nectaria, Shuck, dix espèces, dont nous représentons la
N. bilinéolée.
142 HISTOIRE NATURELLE.
TROISIÈME FAMILLE. — EUMÉNIENS.
Le genre Eumenes et quelques groupes voisins, quoiqu'il y en ait qui, comme les Masaris, ont
été regardés comme formant des divisions primaires spéciales, forment la famille des EUMÉNIENS, qui
a pour caractères principaux : mandibules étroites, prolongées en forme de bec; lèvre inférieure
longue, partagée en trois ou quatre filets; antennes simplement arquées; pattes simples avec les
jambes.postérieures très-épineuses; ailes ployées longitudinalement pendant le repos.
Les Euméniens et quelques familles qui vont suivre se nourrissent encore, à l’état parfait, avec
le miel qu’elles savent extraire du nectaire des fleurs; mais à l’état de larves, elles font exclusive-
ment leur proie d’Insectes. Aussi la femelle, qui est pourvue d'un aiguillon, a-t-elle le soin d'aller
à la recherche des Insectes, de les blesser sans les tuer, de les plonger ainsi dans une léthargie
complète, et de les placer dans son nid, formé soit par la cavité de quelques tiges de végétaux, soit
de la demeure de divers Hyménoptères afin que leurs larves puissent plus tard servir de: nourriture
aux siennes. Et ce qu'il y a de très-remarquable, c’est que presque toujours le même Euménien
s’atlaque à une espèce particulière pour en approvisionner son nid.
Les genres principaux placés dans cette division sont ceux des: Masaris, Ceramius, Synagris,
Eumenes et Odynerus, auprès desquels viennent se grouper certaines divisions fondées par Fabricius,
Latreille et Klug.
Dans les MASARIS (Masaris, Fabr.); les antennes, dont les cinq derniers articles sont totalement
confondus entre eux, sont renflées en mussue à l'extrémité, et plus longues que la tête et le corselet
réunis, fusiformes. Ce genre, dont le nombre des articles antennaires a donné lieu à une longue
discussion entre MM. de Saussureet Émile Blanchard, ne comprend qu’une seule espèce (Masaris
vespiformis, Fabr.), découverte en Barbarie. —Le genre Cælonites, Lair. (type unique du midi de
l’Europe et de Barbarie, C. apiformis, Latr.), ne s’en distingue guère que parce que ses antennes
plus courtes ont encore plus de longueur que la tête.
Dans les CÉRAMIES (Ceramius, Latr.), les antennes sont moins anormales que dans les Masaris, et
leurs cinq derniers articles sont un peu plus distincts, moins claviformes. On n’en décrit que cinq
ou six espèces, tant d'Europe que du cap de Bonne-Espérance, et l'on n’en connaît pas plus les ha-
bitudes que celles des Masaris.
Dans les SYNAGRES (Synagris, Fabr.), la lèvre est sans points glanduleux à l'extrémité et ter-
minée par quatre lanières allongées. Quelques espèces africaines dont le type est la Synagris cor-
nuta, Linné, d'Afrique.
Dans les EUMÈNES (Eumenes, Fabr.), la lèvre a quatre points glanduleux à l'extrémité, qui est
trilobée avec le lobe médian le plus grand, bifide; les palpes maæillaires sont plus longs que les
mâchotres; l'abdomen est campanulé à la base. Les Eumènes sont des Insectes à corps élancé, ayant
une livrée assez semblable à celle des Guêpes, qui, selon quelques auteurs, approvisionnent leurs
nids de miel, mais qui, d'après d’autres, ce qui paraît plus probable, nourrissent leurs larves avec
des Insectes. On en connaît un certain nombre d'espèces surtout propres aux pays chauds, dont
trois seulement sont particulières à l'Europe méridionale : parmi elles le type est l'EunÈnE Érran-
GLÉE (Vespa coactata, Linné), qui est noir avec la partie antérieure du corselet, une légère ligne
sur l’écusson et deux points sur le second segment abdominal, jaunes. Nous représentons l'Eumène
frontale. — Deux genres, voisins de celui-ci, sont ceux des ZETHUS, Fabr., à palpes maxillaires
longs, de six articles, qui renferme un petit nombre d'espèces exotiques; et DISC(ŒLIUS, Latr., à
palpes maxillaires de la longueur des mächoires, qui a pour type le Discæure à ceinrure (D. xonutus,
Fabr.), commun en France, et dont les larves se nourrissent de Chenilles et principalement de
celles de la Tortrix (Pyrale) de la vigne. — Nous donnons la figure du Zèthe bleu.
ANNELES. — iYMÉNOPTÈRES. 145
Enfin dans les ODYNÈRES (Gdynerus, Latr.), qui sont les mieux connus de tous les Euméniens,
la lèvre est disposée comme chez les Eumènes; mais l'abdomen est à peine pédiculé, et les palpes
mazxillaires sont longs. — Ce genre comprend un assez grand nombre d'espèces de taille moyenne,
à corps ovalaire, ressemblant à de petites Guêpes, toutes de couleur noire et ornées de taches, ainsi
que de bandes, jaunes; la plupart sont d'Europe. Réaumur, Audouin, MM. Léon Dufour et Schuckard
ont publié des observations intéressantes sur les mœurs de ces Insectes, et M. Wesmaël a publié
une monographie des Odynères de la Belgique, dans laquelle il partage ee genre en trois divisions
bien caractérisées. Parmi nos espèces indigènes nous dirons quelques mots des suivantes, et nous
exposerons les faits principaux relatifs à leurs habitudes.
L'Onynène À PATTES ÉPINEUSES Où GuÊre sozrraiRe, Réaumur (Vespa spinipes, Linné), noire, avec
quelques parties jaunes, habite assez communément une grande partie de l’Europe. La femelle pra-
tique dans le sable ou dans les murailles un trou profond de quelques centimètres, et y entasse huit
à douze petites larves verdûtres qui se rapportent à un Curculionite (Phytonomus variabilis); puis
elle pond un œuf près de cette provision et bouche son trou. Les larves, venant à éclore, se nourrissent
de la proie que la prévoyance de leur mère leur à donnée, et quand leur nourriture est épuisée, et
qu'elles sont arrivées à tout leur accroissement, elles se forment un cocon dans l’intérieur même de
leur cellule, y restent dans un état léthargique complet pendant près d’un an, et enfin se transfor-
ment en nymphes, d’où sortiront bientôt les Insectes parfaits.
L'Onynère pe Réaumur (Odynerus Reaumurii, L. Duf.), observée dans les environs de Saint-Sever,
et qui diffère zovlogiquement beaucoup de la précédente, a cependant des mœurs analogues.
L'Onxnère pe La Ronce (Odynerus rubicola, L. Duf.) propre à plusieurs parties de la France, et
qui ressemble beaucoup à l’O. spinipes, mais chez laquelle les pattes sont dépourvues d’épines,
établit le berceau de ses larves dans l’intérieur des branches sèches de la ronce. Après avoir enlevé
Ja moelle de la plante, l'Insecte y forme, avec une terre bien pétrie mêlée à des grains de sable, de
deux à dix loges séparées, et place dans chacune un œuf oblong, jaunâtre, qu'il approvisionne d’une
douzaine de petites larves verdätres; quand la larve a atteint tout son développement et qu’elle a mangé
toute sa provision, elle tapisse sa loge d’une matière soyeuse et construit un couverele pour clore
hermétiquement son habitation; reste dix à onze mois dans un état complet d’engourdissement;
à Ja fin d'avril elle se transforme en nymphe, et les Insectes parfaits apparaissent vers le commen-
cement de Juin.
_ On connaît aussi les mœurs de diverses autres Odynères; tels que les Odynerus cognatus, Anti-
lope, crassicornis, parietum, ete.; on sait aussi que diverses espèces de Diptères déposent leurs œufs
dans les nids des Odynères, afin que leurs larves puissent vivre aux dépens des provisions ramassées
par leurs hôtes, Nous figurons l'Odynère ovale.
Fig. 195 — Euméne fenestral. * Fig. 124, — Odynère ovale. Fig. 195. — Zèthe bleu.
Un genre voisin de celui des Odynerus, et n'en différant que par ses palpes maxillaires courts,
est celui des PTEROCHILES, Klug, dont le type est le P. phalænata, Panzer, de France et d'Alle-
magne.
L’esquisse rapide que nous venons de donner de la famille des Euméniens ne serait pas complète
si nous n'indiquions pas rapidement un travail récent publié par M. Henri de Saussure sur ces
144 | LHISTOIRE NATURELLE.
Insectes, et ayant pour titre : Monographie des Guépes solitaires. L'auteur partage les Euméniens,
dans lesquels il ne comprend pas les Masaris, Cœlonites et Ceramius, qu'il regarde comme devant
former une tribu spéciale, en trois sections et en une douzaine de genres. — Première section :
ANomaLoPrÈREs, comprenant les genres Raphiglossa, Saunders, trois espèces, une d’Albanie et deux
probablement d'Algérie; Stenoglossa, Sauss , une seule espèce : le S. odyneroides, Sauss.; Gayella,
Spinola, une seule espèce du Chili. — Deuxième section : Eurrères. Genres : Elimus, Sauss., une
espèce d’Australasie; Zethus, Fabr., vingt-cinq espèces; Discælius, Latr., cinq espèces; Eumenes,
Fabr., soixante-deux espèces; Pachymenes, Sauss., cinq espèces de l’Amérique du Sud; Synagris,
l'abr., douze espèces; Montezuma, Sauss., quatorze espèces américaines; Monobia, Sauss., six es-
pèces brésiliennes; Monorebia, deux espèces de Tasmanie; Rygehiana, Spinola, vingt-huit espèces de
l'Afrique australe, des Indes, de l'Australasie, ete.; Odynerus, Latr., cent trente-huit espèces parta-
gées en quatre sous-genres : Symmorphus, Wesm.; Ancistrocerus, Wesm ; Leionotus, Sauss.; Oplo-
pus, Wesm.; Leptochilus, Sauss., huit espèces d'Afrique et d'Amérique; Sterochilus, Klug, treize
espèces. — Troisième section : Miscnoprères. Genre : Alastor, Saint-Fargeau, dix-sept espèces.
QUATRIÈME FAMILLE. — CARBRONIENS.
Le genre Crabro de Fabricius et plusieurs groupes qu'on peut lui associer constituent la famille
nombreuse des CRABRONIENS, qui présente pour caractères distinctifs : Téte habituellement plus
large que le corselet; labre peu ou pas saillant; mäâchoires et lèvre inférieure courtes, ne formant
pas une trompe; antennes droites; pattes robustes : les postérieures plus longues que les autres,
les jambes de devant terminées par une large pointe.
Les Crabroniens sont des Hyménoptères de taille moyenne ou petite, répandus partout, quoique
principalement dans les contrées méridionales de l’Europe, et surtout reconnaïssables à leur tête
large et carrée, et à leurs jambes plus ou moins ciliées ou épineuses. La plupart des espèces sont
nuancées de jaune sur un fond plus ou moins noir, brun ou roussâtre, ce qui les fait ressembler un
peu aux Guêpes et aux Odynères. Les femelles sont constamment pourvues d’un aiguillen dont la
piqûre est très-douloureuse pour l'homme, et qui, chez quelques-unes, leur sert à approvisionner le
nid de leurs larves d'Insectes qui doivent les nourrir. En effet, si à l’état parfait les Crabroniens
vivent exclusivement sur les fleurs, leurs larves n’emploient pour s’alimenter qu'une proie vi-
vante. Plusieurs savent au printemps se former des nids dans le sable ou dans le bois; mais d’autres,
ne portant pas aux tarses et aux jambes des épines et des cils propres à fouir le sol, sont parasites,
selon Lepelletier de Saint-Fargeau, et déposent probablement leurs œufs dans les demeures des
Sphégiens ou des Crabroniens fouisseurs.
Fabricius, Latreille, Jurine, Shuckard, Curtis, Spinola, Lepelletier de Saint-Fargeau, M. Prullé, etc.,
ont créé dans cette famille un grand nombre de coupes génériques, que l'on peut rapporter à cinq
types principaux, ceux des Crabro, Cerceris, Nysson, Larre et Bembex, que l’on partagera ensuite
en divisions secondaires.
Dans les CRABRO (Crabro, Fabr.), le labre n'est pas visible; les mandibules sont unies, suns
échancrures intérieurement, terminées en pointe bifide; les antennes sont coudées, fusiformes dans
les mâles, filiformes dans les femelles, renflées à l'extrémité; l'abdomen n'a pas d'étranglement.
Ce genre, assez nombreux en espèces presque exclusivement propres à l'Europe méridionale et à
l'Afrique septentrionale, renferme quelques espèces dont les mœurs ont été étudiées par divers na-
turalistes. Shuckard a vu que le CraBroN À Grosse rÊre (Crabro cephalotes, Fabr.), qui se trouve
assez communément aux environs de Paris et qu’on peut prendre pour type, creusait des cellules
dans le bois pourri à l’aide de ses mandibules et en rejetant les parcelles ligneuses avec ses jambes
de derrière. D’autres entomologistes ont constaté que Les femelles approvisionnent leurs nids avec
des Diptères, des Pucerons, des petites Chenilles de Tortrix, etc. Lepelletier de Saint-Fargeau,
n'admet que quatorze espèces dans ce groupe, car, conjointement avec M. Brullé, il a formé à ses
dépens un assez grand nombre de genres qui n’en diffèrent pas d'une manière bien manifeste :
Lis. |. — Cératine à labre blanc. Fig. 2. — Osmie de Tunis. Fig. 3. — Anthidie florentine.
D D Le]
(Femelle..) (Femelle } (Näle.)
Fig. 4 — Nomade variée Fig, D. — Melissode de Latreñle fig. 6. — Crabron poli
(Femelle) (Mäle.) (Mâle )
lig. T. — Cœlioxys à queue rouve. Fig. . — Ammobate bicolore Fig. 9 — Cœælioxys à queue rouge.
(Femelle) (Mle.) (Mle..)
HVMÉNOPTÈLES, un Ï0
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 145
tels sont les Solenius, Blepharipus, Ceratocolus, Thyreopus, Crossocerus, Lindenius, Dasyproctus,
Corynopus, Physoscelus. Nous représentons, pl. X, fig. 6, le Crabron poli, màle.
Pis. 196. — Gerccris à grosse lêle. Fig. 197. — Goryte à moustache.
Des genres, voisins des Crabro, mais qui s’en séparent aisément, sont : 1° ceux qui, ayant des
épines aux pates, doivent avoir à peu près les mêmes mœurs : tels sont les STIGMUS, Jurine, à
mandibules arquées, tridentées; à antennes fusiformes non courbées; à jambes postérieures épi-
neuses, dont le type est le S. pendulus, Vander Linden, de Paris; SPILOMENUS, Shuckard, à an-
tennes coudées, fusiformes; mandibules bidentées dans les mâles, simples dans les femelles, et à
jambes de derrière inermes; dont le type S. rrocropvre (S. troglodytes, KFabr.) noir, avec le pre-
mier article des antennes et des tarses postérieurs ferrugineux, très-répandu dans presque toute
Europe, choisit pour demeure les pailles creuses du chaume qui couvre les habitations des cam-
pagnes et y place ses larves qu’il semble aimer à nourrir avec de petites larves de Thrips; DIODON-
TUS, Curtis, ne différant guère des précédents que par ses pattes épineuses, d'Europe; PEMPHRE-
DON, Fabr., à antennes coudées, dilatées, un peu en scie dans les mâles; à mandibules très-furtes,
quadridentées; à jambes épineuses; peu nombreux en espèces; toutes semblant européennes, et,
comme les Diodontes, se creusant des tubes dans le bois pourri et y apportant, pour nourrir leurs
larves, des Pucerons qu'ils vont chercher sur les plantes en les saisissant avec leurs mandibules;
CEMONUS, Jurine, à antennes coudées un peu dilatées dans les mdles et à mandibules fortes,
à trois dents, dont le type (C. lugubris, Jurine) qui se forme des nids dans le bois pourri dé-
pouillé de son écorce; MELLINUS, Fabr., à antennes à peu près filijurmes; mandibules tridentées
dans les mûles, bidentées dans les femelles, qui ne renferment que la M. arvensis, Fabr., noirâtre,
varié de jaune, se trouvant dans toute l’Europe, se creusant des nids dans les lieux sablonneux, les
approvisionnant de divers Diptères, et dont les larves, après avoir acquis toute leur croissance, se
font une coque de soie qu’elles solidifient avec les parties du corps des Insectes qui ont servi à leur
nourriture; PSEN, Latr., à antennes insérées au milieu de la face, renflées en mussue à l'extrémité,
à mandibules bidentées et à pattes épaisses; quelques espèces, toutes parisiennes, et dont le type
(P. ater, Saint-Fargeau) est entièrement noir, pubescent, et se creuse dans le bois des demeures ox
les larves sont nourries de petit Homoptères. 2° Ceux qui n'ayant pas d’épines robustes aux pattes
sont regardés comme parasites et ne peuvent pas se faire de demeures dans le sol ou le bois : tels
sont les TRYPOXYLONS, Latr., à antennes en massue et à mandibules bidentées, renfermant quel-
ques espèces européennes et une au moins (T. albifrons, Fabr.) de l'Amérique du Nord, qui sem-
blent tantôt approprier à leur usage les nids d’autres Hyménoptères et les approvisionnents d'Arai-
gnées, tantôt vivre tout à fait en parasites; GORYTES, Latr., à antennes filiformes et n'étant en
massue que tout à fait à l'extrémité, qui seraient parasites, mais dont cependant une espèce (G.
mystaceus, Fabr., voy. notre figure), commune dans presque toute l’Europe, transporterait sous son
corps, à l’aide des jambes du milieu, pour en nourrir ses petits, la larve de l'Aptérophrate écumante;
ALYSON, Jurine, à antennes filiformes, à mandibules tridentées et à cuisses de derrière présentant
une dent coriace à l'extrémité; quelques espèces (type À. spinosus, Jurine), dont les mœurs n'ont
pas été observées et qui se rencontrent surtout dans nos environs. — À ces genres, déjà nombreux,
on pourrait ajouter ceux des Hoplisus, Euspongus, Lestiphorus, Psammaætius, Arpactus, créés par
Lepelletier de Saint-Fargeau, en général aux dépens des Gorytes.
A. 19
146 HISTOIRE NATURELLE.
Dans les CERCEPIS (Cercerers, Latr.), le labre est caché; les mandibules unies, sans échanerure ‘
intérieurement, tridentées; les antennes rapprochées à la base, renflées en massue à l'extrémité;
les pattes sont épineuses, et surtout les premiers segments abdominaux ne sont pas étranglés. On con-
naît un grand nombre d'espèces de ce genre, et l’on n’a guère étudié les mœurs que de quelques-unes
de celles qui habitent l'Europe. Le Cercenis pes sagres (Cerceris arenaria, Vand.-Lind.), forme son
nid dans les lieux sablonneux, et nourrit ses larves avec certaines petites espèces de Gharancons,; le
C. onxé (C. ornatus, Vand.-Lind.), d’après Walckenaër, se creuse des demeures dans les chemins
exposés au soleil, et les approvisionne de divers Halictes. Une autre espèce (C. bupesticida), étudiée
par M. L. Dufour, s’emparerait de Coléoptéres de l'ancien genre Buprestis. Une espèce remarquable
que nous figurons est le Cerceris à grosse tête.
Le genre PHILANTHUS, Fabr., est voisin du précédent, et ne s’en distingue guère que par ses
antennes écartées à la base, brusquement renflées en massue à l'extrémité, et par ses mandibules
unidentées. Moins nombreux que les Cerceris, une espèce de Philanthe, le P. rRIANGLE Où APIVORE
(P. triangulum, Fabr.), commun dans toute l'Europe, noir, tacheté de jaune, l'abdomen de cette
dernière couleur et offrant une tache triangulaire noire sur chaque segment, est bien connu, parce
que les femelles nourrissent ses larves avec des Abeilles dont elles savent se rendre maîtresses en les
piquant d’un coup d’aiguillon avec une telle rapidité que l’Apien n’a ordinairement pas le temps
de se défendre. Ce Philanthe se creuse en été des trous nombreux dans les chemins arénacés:
chaque trou ne se compose que d’une galerie presque horizontale parfois d’une longueur d'environ
0,30; la demeure terminée, la femelle voltige de fleur en fleur, parfois auprès des ruches, guet-
tant les Abeilles, et, dès qu’elle en aperçoit une, s’élance sur elle, la saisit avec ses mandibules entre
la tête et le corselet, et lui plonge son aiguillon dans le ventre : c’est alors qu’elle porte dans son
terrier l’Abeïlle encore vivante, mais ne pouvant remuer; puis elle pond ses œufs à côté de sa vic-
time qui deviendra la pâture de sa larve. Celles-ci sont blanchâtres, molles, oblongues, et se filent
un cocon soyeux pour se transformer en nymphes.
Dans les NYSSONS (Nysson, Latr.), le labre est caché; les mandibules sont arquées, à une seule
dent; les antennes sont filiformes, gréles, et les pattes sont gréles. Comme la plupart des Crabro-
niens, ils se creusent de petits nids dans le sable, surtout dans les bois, et les garnissent de divers
Insectes pour la nourriture de leurs larves. Les Nyssons, dont Lepelletier de Saint-Fargeau a cru de-
voir distinguer un genre Bicyrtes, sont assez nombreux en espèces, surtout particulières aux envi-
rons de Paris, et dont, le type est le N. dimidiatus, Jurine.
Des groupes qui s’en rapprochent sont ceux des : ASTATUS, Latr., à mandibules bidentées;
jambes épaisses : peu nombreux en espèces, dont quelques-unes recherchent des Pentastomes et
des Blattes; OXYBELA, Latr., à mandibules aiquës et jambes intermédiaires et postérieures épi-
neuses, qui aiment à se tenir sur les fleurs des Ombellifères et s’y emparent des Mouches destinées
à leurs larves; NITELA, Latr., à mandibules bidentées à l'extrémité ct à pattes non épineuses;
PISON, Spinola, dans lesquels les ailes ont trois cellules cubitales : ces deux derniers groupes in-
complétement connus.
C4
Dans les LARRES (Larra, Fabr.) ou TACHYTES, Vand.-Lind., le labre est toujours caché; les
mandibules ne sont pas dentelées, mais ont une profonde échancrure au côté interne. Ce sont des
yménoptères qui habitent les lieux sablonneux et approvisionnent leurs nids de la même manière
que le font les Crabro; on n’a guère étudié que les espèces d'Europe et du nord de l’Afrique. La
Larra anathema, Fabr., petite, noire, velue, avec les ailes violacées et les deux premiers segments
abdominaux ferrugineux, commune auprès de Paris, nourrit ses larves de petites Chenilles.
‘On rapproche des Larres, les PALARUS, Latr. qui ont les mandibules dentées, arquées à l’extré-
mité, et les segments abdominaux comme contractés; propres au midi de la France, à PArabie, à
l'Égypte, ete.; LYROPS, Illiger, à mandibules terminées en pointe aiqué : quelques espèces euro-
péennes et particulièrement le Lyrops pompiliformis, Shuckard, dont les larves mangent de petites
Chenilles; MISCOPHUS, Jurine, à mandibules unidentées, tuberculées, ayant pour type le M. bi-
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 147
color, Fabr., qui se creuse, dit-on, des nids, quoique ses jambes soient dépourvues de cils; DINE-
TUS, Jurine, à mandibules tridentées, qui ne comprennent que le D. pictus, Latr., de Paris.
Enfin, dans les BEMBEX (Bembex, Fabr.), le labre est toujours visible, triangulaire; les mandi-
bules sont pointues, unidendées intérieurement; les mâchoires et le labre sont très-allongés formant
une sorte de trompe; les palpes sont courts : maxillaires de quatre articles : labiaux de deux. Les
Insectes de ce genre, ainsi que ceux des deux groupes des MONEDULUS, Latr., à palpes longs :
maxillaires de six articles et labiaux de quatre, et des STIZUS, Latr., à mächoires et labr'es cours,
ne formant pas de trompe, sont des Insectes d’une taille assez grande, à corps robuste, de couleur
noire entremêlée de taches jaunes. Ils habitent en général les régions chaudes et intertropicales du
globe, et disparaissent dans le nord de l’Europe et de l'Amérique. Ils sont très-agiles, volent avec
rapidité de fleur en fleur en faisant entendre un bourdonnement aigu et souvent interrompu, et
plusieurs d’entre eux répandent une odeur de rose assez prononcée. Leurs habitudes sont analogues
à celles de la plus grande majorité des Crabroniens. Les mœurs des deux ou trois espèces européen-
nes ont été étudiées, particulièrement par Latreille; le Bewrex À Bec (Bembex rostrata, Linné), se
creuse des trous profonds dans le sable, et y entasse ensuite une masse de petits Diptères, prin-
cipalement des Syrphides et des Muscides : y dépose alors ses œufs, et ferme l'entrée de sa re-
traite avec de la terre; le B. À LARGE rarse (B. tarsata, Fabr.) approvisionne son nid surtout avec
des Bombylies. — Lepelletier de Saint-Fargeau rapproche de ce groupe son genre HOGARDIA créé
avec deux espèces américaines anciennement placées parmi les Sphex; nous représentons (pl. XI,
fig. 8) la femelle de l’Hogardie roussûtre, espèce exotique. -
CINQUIÈME FAMILLE. — SPHÉGIENS.
Les genres Sphez, Scolia, Mutilla, et un grand nombre de coupes génériques qui en sont plus
ou moins voisines, constituent, pour M. Émile Blanchard, sa famille des Senéorexs, à laquelle il
assigne pour caractères : Téte large; labre toujours saillant; müchoires et lèvre assez courtes; an-
tennes habituellement longues, contournées dans les femelles; pattes propres à fouir; jambes ci-
liées : postérieures épineuses dans les femelles, beaucoup plus longues que les autres dans les deux
sexes; tarses fortement ciliés.
Les Sphégiens, nombreux en espèces, sont remarquables par la grande dimension de plusieurs
d’entre eux, qui peuvent être comptés parmi les Hyménopières de la plus grande taille; ils sont
répandus dans toutes les contrées du globe, mais celles des pays chauds sont plus grandes que les
autres. Presque tous sont d’une couleur bleue violacée, plus ou moins noirâtre et brillante, avec
des ailes qui ont habituellement la même coloration. Les femelles sont armées d’un aiguillon redou-
table. Leurs mœurs sont semblables à celles des Crabroniens, aussi n’y reviendrons-nous pas ac-
tuellement.
Des genres, en assez grande quantité, créés par Linné, Fabricius, Latreille, Spinola, Lepelletier de
Saint-Fargeau, Shuckard, Klug, sont rangés dans cette famille; nous ferons surtout connaître ceux
des Pompile, Sphex, Sapyge, Scolie et Mutille, comme types principaux, et auxquels nous ratta-
cherons plusieurs autres coupes génériques.
Dans les POMPILES (Pompilius, Latr.), les antennes sont longues, filiformes; les mandibules bi-
dentées; le corselet large, sans étranglement, etc. Les Pompiles, remarquables par leur grande agi-
lité, leurs antennes toujours vibrantes et leurs ailes sans cesse agitées, même quand ils se posent
sur une fleur, sont en général des Insectes exotiques, cependant on en connaît quelques espèces
indigènes, dont les mœurs de quelques-unes ont été observées. On sait qu’elles se pratiquent des
trous dans le vieux bois ou qu’elles se servent de nids déjà préparés; qu'elles nourrissent leurs
larves presque spécialement avec des Araignées qu’elles ne craignent pas d’aller attaquer même
dans leurs toiles. On a décrit plus de cinquante Pompiles européens, et l'on en connaît un nombre
à peu près égal d’exotiques. Les plus abondants dans presque toute l’Europe pendant la belle sai-
148 HISTOIRE NATURELLE.
son, sont le Pompilius variegatus, Linné, noir, avec l'extrémité des mandibules roussätre et les
ailes diaphanes offrant deux bandes transversales noirâtres, et le P. viaticus, Linné, également
noir, avec les trois premiers segments abdominaux roux et les ailes brunes à extrémité noire.
Plusieurs genres ont été formés aux dépens des Pompilius, et n’en diffèrent pas pour la plupart
notablement : tels sont les APORUS, Spinola; EVAGETES, Saint-Fargeau; PLANICEPS, Vander-Lin-
den; SALIUS, Vander-Linden (voy. la figure du Salius bicolore); MICROPTERYX, Saint-Fargeau;
CALICURGUS, Saint-Fargeau; ANOPLIUS, Saint-Fargeau; CEROPALES, Latr.; FERREOLA, Saint-
Fargeau, qui se trouve en Europe et dans le nord de l'Afrique; MACROMERIS, Saint-Fargeau, dont
nous donnons (pl. XI, fig. 7) la figure d’une espèce : le Macromerys brillant (mâle); PEPSIS, Linné
(groupe aux dépens duquel ont été formés la plupart des précédents) et les géants des Sphégiens :
les premiers des Indes orientales, les seconds, très-nombreux, de l'Amérique méridionale, et les
troisièmes de Java, du Brésil et d'Oran; PALLOSOMA, Saint-Fargeau ; EXEIRUS, Shuckard, propres
à la Nouvelle-HoMHande, etc.
Fig. 199. — Salius bicolore. Fig. 150. — Colpa dorée.
Dans les SPHEX (Sphex, Linné), les antennes sont sétacées; les mandibules larges, arquées, bi-
dentées; le corselet est rétréci, formant une sorte de cou très-distinct du mésothorax; Y'abdomen a
un pédicule habituellement très-long. Les Sphex renferment une grande quantité d'espèces exoti-
ques, et, au contraire, assez peu d'espèces indigènes qui ont été peu étudiées sous le rapport
des habitudes. On sait cependant que quelques espèces algériennes transportent à leurs nids des
Acridiens, et, dans l'Amérique du Nord, que le Sphex bleu (S. cyanea, Fabr.), qui peut être pris comme
type de genre, porte dans son nid des Araignées au moins huit fois plus pesantes que lui. Certains
entomoloyistes assurent que divers Sphex approvisionnent périodiquement leurs larves avec des
Puces vivantes; mais, comme le remarque M. Émile Blanchard, ce fait n’est probablement pas
exact, car les Sphégiens périssent peu de temps après avoir préparé des aliments à leur postérité, et
ils ne voient jamais les êtres auxquels ils ont donné le jour. Nous représentons (pl. XI, fig. 2) la fe-
melle du Sphex du cap de Bonne-Espérance.
Beaucoup de genres, qui peuvent rentrer dans ce groupe naturel ou qui en sont voisins, ont été
créés par divers auteurs; nous nous bornerons à citer les suivants : CHLORION, Latr., tous exoti-
ques, et des contrées chaudes des deux hémisphères, d’un bleu métallique plus ou moins vert ou
violacé, et dont le C. compressum dont Jurine a fait le type de son genre Ampulex, commun à l'ile
de France, à l'ile Bourbon, etc., est très-utile à l’homme, en ce qu’il fait une chasse acharnée aux
Blattes, dont il détruit un grand nombre d'individus; nous représentons, pl. XIE, fig. 1, la fe-
melle du Cnrorion verr d'airain (Chlorion æneus); APHELOTOMA, Westwood, groupe australien;
PRONŒUS, Latr., ne renfermant qu’une seule espèce (P. maæillaris, Latr.), d'Owarre, en Afri-
que; DYNATUS, Spinola, Saint-Fargeau, une seule espèce; AMMOPHILA, Kirby, groupe nom-
breux en espèces exotiques et européennes : parmi ces dernières nous citerons seulement l’A. sabu-
losa, Linné, très-allongé, grêle, noirâtre, avec l'extrémité du troisième segment abdominal, le
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 149
quatrième et la base du cinquième d’un roux vif; commun dans nos environs, se fait des nids dans
les endroits sablonneux, et approvisionne ses larves de chenilles de Bombycites, dont les poils, de
même que le poids, ne ies rebutent pas; MISCUS, Jurine, et COLOPTERA, Saint-Fargeau, qui peu-
vent être réunis aux Ammophiles; DOLICHURUS, Latr., qui ont pour type le D. corniculus, Saint-
Fargeau (ater, Latr.), noir, pubescent, répandu dans toute l’Europe; PELOPÆUS, Latr., se trou-
vant dans le midi de l'Europe, mais plus abondant en Afrique, dans l'Inde et dans l'Amérique
intertropicale, se construisant des nids, qui ont été observés par Réaumur, Disdéri, Palisot de Beau-
voir, etc. : le Pelopæus hemipterus, Fabr., commun à Bourbon, se construit, d'après M. L. Rous-
seau, des nids assez semblables à ceux des Osmies, consistant en un assemblage de six à vingt tubes,
placés verticalement par rapport au lieu qu'ils occupent et formés avec de la terre pétrie et cimen-
tée avec de la matière agglutinante dégorgée par l’Insecte, et que la femelle approvisionne pour
ses larves avec des Chenilles et des Araignées; PODIUM, Latr., de l'Amérique du Sud, très-remar-
quables par sa tête extrêmement large par rapport à la ténuité de leur corps; TRIROGMA, West-
wood, une espèce indienne.
Dans les SAPYGES (Sapyga, Latr.), les antennes sont épaisses, renflées, souvent fusiformes, plus
longues que la tête et le corselet réunis; les mandibules sont tridentées, ete. Ce genre est assez peu
nombreux en espèces, toutes indigènes, dont les larves vivent probablement en parasites dans les
cellules des Osmies; le type est la Sapyga punctata, Klug, noire, tachetée de blanc, des environs de
Paris; une autre espèce que nous figurons est la S. prisma. — Les genres qu’on en rapproche sont
ceux des : POLOCHRUM, Spinola, propre au Piémont; SCOTÆNA, Klug, du Brésil; ELAPSOTERA,
Guérin : une espèce du Chili et une de la Nouvelle-Hollande.
Dans les SCOLIES (Scolia, Fabr.), les antennes sont épaisses, fusiformes, plus courtes que la tête
et le corselet réunis; mandibules tridentées dans les mâles, sans dents, et fortement arquées dans les
femelles; palpes de trois articles; pattes épineuses. Ce genre, excessivement nombreux en espèces
propres aux régions méridionales de l'Europe et à presque toutes les contrées chaudes du globe,
a été partagé en plusieurs subdivisions génériques; celles basées sur les différences que pré-
sentent les nervures des ailes ne paraissent pas naturelles, et il semble, comme le démontre
M. H. de Saussure dans ses Mélanges hyménoptérologiques, et récemment (1858) dans un mé-
moire sur de nouvelles espèces inséré dans les Annales de la Société entomologique de France
(3° série, tome VI, p. 193), qu'il ne doit être partagé qu’en deux groupes distincts : Scozra et Eurs.
Les Scolies sont des Hyménoptères de grande taille, à corps noir marqué de rouge ou de-jaune, à
ailes violacées ou jaunûtres, et qui, surtout les femelles, présentent pour la plupart de grandes
taches jaunes sur l’abdomen. La Scout pes sarpins (Scolia hortorum, Fabr.), qui se trouve dans les
endroits sablonneux dans le midi de la France et en Italie, volant sur les fleurs pendant la plus
grande chaleur du jour, dont les habitudes ont été observées avec soin par M. Passerini, peut être .
prise pour type. Elle est longue de 0®,03 à 0",04, noire, velue, avec le front jaune tacheté de
noir dans la femelle; l'abdomen est noir avec une large bande transversale jaune sur les deuxième
et troisième segments, souvent interrompue dans les deux sexes, mais constamment chez la femelle.
Les larves de ces Hyménoptères sont nourries avec les larves de l’Oryetes nasicornis, et la femelle
sait s'en emparer, malgré teur taille énorme comparativement à la sienne; cette larve, quand elle a
pris toute sa croissance, se file une coque soyeuse, oblongue, brunâtre, mélangée de matière ag-
glutinante et ressemblant beaucoup par la texture à la coque de divers Tenthrèdes; nous figurons
cette espèce page 124. La S. À nougce cEINTuRE (S. bicincta, Fabr.), également européenne, se fait
des trous profonds dans le sable et y approvisionne ses larves de Sauterelles. Parmi les genres créés
d’après la forme des cellules alaires, nous nommerons celui des Colpa, Saint-Fargeau, qui ne doit
pas en être séparé; nous figurons la C. dorée.
Des genres un peu plus distincts sont ceux des : CAMPSOMERIS, Saint-Fargeau, de l'Amérique du
Sud, des Indes, etc.; TIPHIA, Fabr., renfermant quelques espèces européennes, de petite taille, et
ayant pour type la T. femorata, Fabr., dont la femelle, très-différente du mâle, à été décrite comme
espèce distincte sous le nom de Béthyla velutina, et qui perce des trous dans le sable; MERIA,
Latr.. dont le type est le M. tripunctata, Latr., du midi de la France, d'Italie et d'Espagne; TRI-
150 HISTOIRE NATURELLE.
GONALIS, Westw., deux espèces exotiques; MYRZINA, Latr., qui se trouve dans les contrées chaudes
de l’Europe, de l'Afrique et de l'Amérique, ete.
Enfin, dans les MUTILLES (Mutilla), les antennes sont filiformes, assex épaisses, parfois méme
sétacées; les mandibules sont unidentées dans les femelles et tridentées dans les mâles, etc. Les Mu-
tilles sont de jolis Insectes que l’on rencontre dans les lieux sablonneux exposés aux rayons solai-
res, elles vivent solitaires et sont assez peu répandues; petites en Europe, tandis que, beaucoup
plus abondantes dans les pays étrangers, elles y acquièrent une taille plus grande, ainsi que des
couleurs brillantes et très-vives, comme le jaune et le rouge. D’après la conformation des pattes, et
principalement de celles des femelles, il est à peu près certain qu’elles se fabriquent des nids et qu’elles
les approvisionnent d’Insectes pour la nourriture de leurs larves, mais rien de bien positif n’a été ob-
servé à ce sujet. La grande dissemblance qui existe entre les deux sexes a dû amener de graves erreurs;
les femelles, qui sont toujours aptères, et les mäles, qui ont constamment des ailes, ont été placés
fréquemment dans des genres différents, parfois même dans des familles distinetes. Ce n’est que
récemment que les sexes ont pu être assez convenablement rapprochés; cependant, dans quelques
cas, on a été obligé de fonder des espèces sur des femelles seulement. On décrit plus de cent espèces
de Mutilla; parmi celles d’Eurôpe, nous indiquerons comme type la Munze cHauve (Mutilla calva,
Fabr.), chez laquelle le mâle est entièrement noir, tandis que la femelle a le sommet de la tête et
le corselet roux et les bords de l'abdomen grisätres. Une espèce, commune en Algérie, et que nous
figurons, est la Mutilla maura, Saint-Fargeau. =:
Fig. 431, — Mutille maure. Fig. 132. — Mutille maure.
(Mäle.) (Femelle.)
Quelques genres doivent être placés auprès des Mutilles et former avec elles une petite division
particulière : ce sont surtout les METHOCA, Vander-Linden, qui comprend surtout la M. ichneu-
monoïdes, Latr., dont nous donnons (pl. XIE, fig. 3) la figure du mâle; espèce propre au climat de
Paris; THYNNUS, Fabr. : groupe propre à l'Amérique méridionale et à l’Australasie, dans lequel on
peut faire rentrer quelques divisions de certains entomologistes, et dont les femelles de plusieurs
espèces formaient le genre Myrmecodes, Latr.; PLESIA, Jurine, groupe étranger, qui comprenait
anciennement quelques femelles de Myrines, ÆLURA, Klug, ne renfermant que deux espèces du
Brésil; MYRMOSA, Latr., qui a pour type la M. melanocephala, Fabr., se trouvant dans une grande
partie de l'Europe; APTEROGYNA, Latr., dans lequel entrent trois espèces égyptiennes; PSAMMO-
TUERMA, Latr., remarquables par les antennes fortement pectinées des mâles : propres au cap
de Bonne-Espérance; SCHRODERMA, Klug, genre peu connu, etc.
SIXIÈME FAMILLE. — FORMICIENS.
Le genre Fourmi (Formica, Linné), et quelques groupes qu’on en a démembrés ou rapprochés,
constituent la famille des Formicrens de M. Émile Blanchard, ayant pour caractères : Téte triangu-
laire; labre large; mandibules fortes; mâchoires et lèvre inférieure au moins aussi courtes que les
mandibules; antennes constamment coudées; pattes assez allongées, gréles; abdomen ovalaire, at-
taché au corselet par un pédicule très-étroit.
ANNELÉS. — IIYMÉNOPTÈRES. 151
Les Formiciens, que quelques auteurs nomment Formicaires ou Hétérogynides, sont très-nom-
breux en espèces répandues dans toutes les parties du monde, et, dans beaucoup de cas, leurs
mœurs, au moins aussi remarquables que celles des Abeilles, ont été étudiées avec le plus grand
soin, et méritent toute l'attention des observateurs. Chez plusieurs d’entre eux, chez tous peut-être,
ily a trois sortes d'individus dans l'espèce : des mâles, des femelles et des neutres, On y admet
deux divisions ou tribus très-distinctes : celles des DORYLIDES et des FORMICIDES.
4 division : Dorvuies, ayant les antennes filiformes insérées près de la bouche; la tête petite et
l'abdomen long cylindrique. Ges Insectes, tous exotiques, et dont on n'a décrit que le sexe mâle,
sont très-imparfaitement connus, et l’on ne sait s'ils vivent isolés ou s’ils habitent en société. Ils
paraissent devoir établir le passage des Sphégiens aux Formicides; pendant longtemps on les a rap-
prochés des Mutilles, et ils paraissent plus voisins des Fourmis; mais c’est seulement lorsque
leur étude aura pu être faite d'une manière complète que leur place sériale pourra être défi-
nitivement déterminée. Les deux genres principaux sont ceux des : DORYLUS, Fabricius, à palpes
maæillaires aussi longs que les labiaux, de quatre articles : le type générique est le DoryE PAILLET
(Dorylus helvolus, Fabr.), propre au cap de Bonne-Espérance, et l’on peut réunir au même groupe
les Rhagmus, Shuckard, composés de quelques espèces propres à l'Afrique méridionale. Un autre
genre plus distinct est celui des LABIDUS, Latreille, dans lequel les palpes maxillaires, de la lon-
queur des labiaux, n'ont que deux articles : on en décrit quelques espèces particulières à l'Amérique
du Sud (type L. Latreillit, Jurinc). Enfin, c’est peut-être à la même tribu que doit se rapporter le
genre ÆNICTUS, Shuckard.
2e division : Formicines, ayant les antennes coudées, insérées près du milieu de la bouche; tête plus
forte que dans les Dorylides; abdomen conique, ovalaire ou elliptique. Cette division renferme les Hy-
ménoptères vulgairement indiqués sous le nom de Fourmis, c’est-à-dire ces Insectes qui vivent en
sociélés très-nombreuses placées dans des demeures spéciales, et qui renferment des mdles et des
femelles devant reproduire l’espèce, et des neutres ou ouvrières destinées à prendre soin des
œufs et à pourvoir à l'alimentation des larves. D’après cela on voit que, sous le rapport des habi-
tudes naturelles, il y a une grande ressemblance entre les Abeilles et les Fourmis; mais, chez les
premières, chaque habitation ne possède qu’une seule femelle, qui doit propager l'espèce, tandis
que chez les secondes il y a toujours plusieurs femelles chargées du même soin, et ces femelles
vivent constamment entre elles dans une parfaite intelligence; en outre, les Abeilles sont d’une
grande utilité pour l'homme; et les Fourmis, tout au contraire, lui sont nuisibles. Quoique l’on ait
beaucoup exagéré le mal qu’elles produisent, on doit dire néanmoins qu'elles nous nuisent souvent
en creusant la terre et en s’introduisant dans nos habitations, où elles s’établissent parfois dans les
poutres, qu’elles perforent en tout sens; qu’elles dévorent ou salissent dans quelques cas nos sub-
stances alimentaires, surtout les matières sucrées, et qu’elles sont incommodes par l’odeur qu’elles
répandent, ainsi que par la piqüre qu’elles nous font quelquefois.
Les Fourmis ont été étudiées de tout temps avec le plus grand soin, et sous le rapport de leurs
habitudes et sous celui de leurs caractères zoologiques : c’est ainsi que nous citerons les beaux
travaux de Réaumur, de Huber fils, de Latreille, et, de même ceux, beaucoup plus récents, de
MM. Mayer, Nylander et de plusieurs autres que nous aurons l’occasion de nommer, en présentant
l'histoire des divers genres de cette division. R
Les Formicides, et avant d'aller plus loin nous devons" dire que ce que nous allons rapporter,
en s'appliquant quelquefois à toutes les -espèces, concerne plus spécialement nos Fourmis indi-
gènes, qui ontété mieux étudiées que les autres; les Formicides vivent en sociétés individuelle-
ment innombrables, et se font des habitations souvent immenses, nommées fourmilières, où plu-
sieurs milliers d'individus travaillent en même temps; mais, comme les matériaux dont se compo-
sent ces nids, ainsi que la manière dont ils sont disposés, varient beaucoup suivant les espèces, ces
constructions différent également beaucoup entre elles; cependant, d’une manière générale, on
peut réduire à deux modèles les diverses fourmilières : les unes établies en terre, et les autres en
bois ou en autres matières végétales. C’est d’abord en creusant que les Fourmis commencent leurs
maisons; sans altérer la solidité des matières qu’elles minent, elles en enlèvent des portions, de ma-
152 HISTOIRE NATURELLE. /
nière à y former des salles, des chambres, des corridors disposés les uns au-dessus des autres, et se
communiquant entre eux par des passages souvent verticaux. La particule des matériaux enlevés
est portée dehors par l'individu qui l’a détachée de la masse, non pas comme chose inutile, mais
comme pouvant servir ailleurs. Celles qui travaillent dans l’intérieur du sol mettent la terre re-
tirée au-dessus des étages souterrains; l'instinct de quelques-unes d’entre elles les porie à abriter
leur fourmilière au moyen d’un grand amas de différents matériaux, tels que des brins de paille,
des fragments ligneux, des graines, de petites pierres, des feuilles et même des débris desséchés
d’Insectes, la terre retirée du nid sert à former au milieu de ees objets si peu solides d'eux-mêmes,
et que le vent pourrait enlever des couches que leur propre poids maintient solidement : ces cou-
ches de terre, qui forment des voûtes destinées à protéger l'habitation proprement dite, sont: quel-
quefois assez solides pour que les Fourmis y creusent des galeries supplémentaires. Quelques
espèces, qui sont dites mineures, ne placent sur leurs nids que des amas de terre; d’autres, pour
ne pas être exposées aux rayons du soleil lorsqu'elles vont chercher eur nourriture au dehors, se
construisent, avec la terre retirée du nid, des galeries qui les mettent à l'abri jusqu'aux fleurs, aux
“fruits ou aux familles de Pucerons qui doivent fournir aux larves une nourriture abondante. Les
Fourmis qui travaillent le bois s’établissent dans les arbres déjà attaqués par les larves d'autres In-
sectes qui, en y perçant des trous et en y vivant, ont déjà commencé la destruction du végétal;
elles détachent les parties du bois qui ont le moins de cohérence en les réduisant, au moyen de
leurs mandibules, en une espèce de sciure, et, transportant celle-ci au dehors, elles forment alors
en dedans différents étages de chambres, de galeries, de corridors, séparés entre eux par des plan-
chers et des murs, et soutenus par des piliers qu'elles ont laissés en profitant des parties les plus
solides du bois, ou qu’elles élèvent elles-mêmes avec la sciure qu'elles ont précédemment ôtée, et à
laquelle elles donnent de la solidité et de la cohésion en la pétrissant entre leurs mandibules avec
des sues gélatineux qu’elles tirent de leur estomac (voy. la fourmilière creusée dans un arbre,
représentée pl. XIL, fig. 5). Les chambres, les galeries, les corridors si multipliés et les divers
passages des fourmilières sont d’une nécessité absolue pour le service public. Les premières
contiennent, les unes des amas d'œufs, les autres des larves ou des nymphes, d’autres enfin des
femelles fécondes. Comme chacun de ces états exige de la part des ouvrières des soins différents, ils
sont séparés de logements, et même les larves de femelles fécondes ne sont pas réunies à celles qui
seront infécondes, parce qu’elles doivent recevoir une nourriture différente, qui, récoltée au jour
le jour par les neutres, leur sera donnée après avoir été élaborée dans leur estomac.
Quoique les mâles et les femelles se trouvent fréquemment réunis dans l’intérieur de la fourmi-
lière, il semble qu’il n’y a jamais là de rapprochement entre les sexes; mais, quand le moment de
l’accouplement est arrivé, mâles et femelles sortent de leur nid, s'élèvent dans les airs, et bientôt
après les femelles sont fécondées pour toute leur vie. Les mâles, beaucoup plus nombreux que les
femelles, ne peuvent, par conséquent, pas tous s'accoupler; mais ils ne rentrent pas dans la four-
milière, et meurent peu de temps après en être sortis. Quand les femelles, qui comme les mâles
étaient primitivement pourvues d'ailes, reviennent à l'habitation, leurs ailes leur sont enlevées par
les ouvrières, et parfois elles se lesarrachent elles-mêmes; dès lors ces femelles sont portées par les
ouvrières dans les loges les plus profondes de l'habitation, elles y sont nourries, et désormais il ne
leur est plus permis de se rendre au dehors. Les ouvrières, qui comme celles des Abeilles, sont des
femelles avortées et privées d’ovaires et non pourvues d’ailes à toutes les époques de leur vie, outre
les soins de la construction et de la répagation des nids, devront seules désormais pourvoir à ce que
l'espèce ne périsse pas.
Peu de jours après l’accouplement, les femelles commencent à pondre leurs œufs, et elles conti-
nuent longtemps cet utile travail. Les ouvrières recueillent ces œufs un à un dans la partie du nid
qui leur est réservée, et là, ces œufs recoivent les soins multipliés, qui sont nécessaires pour qu’ils
puissent réussir. Il ne s’agit pas de les couver; mais de leur faire éprouver, selon le besoin, les va-
riations de la chaleur et de l'humidité, plus ou moins fortes d’après les variations de la température
intérieure et extérieure: ce qui force les ouvrières de transporter, plusieurs fois dans un même
jour, ces œufs d’un étage à l’autre de l'habitation. Ces œufs augmentent de volume d'une manière
notable, et l'on a vu des ouvrières les faire passer entre leurs mandibules et les enduire en même
temps d'un liquide particulier, qui probablement est absorbé ct profite à l'embryon. Une quinzaine
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 153
de jours environ après la ponte, la larve brise la coquille de son œuf: son corps est alors d'une
transparence parfaite, et on y distingue la tête et les segments du corps, mais aueun vestige de pattes
ni d'appendices articulés. Les ouvrières doivent s'occuper constamment de ces larves, et une troupe
d’entre elles semble préposée à leur garde, toute prête à repousser les agressions; tandis que d'au-
tres troupes pourvoient à leur nourriture. Aux premiers rayons du soleil, les Fourmis placées au
dehors de l'habitation vont au plus vite en avertir celles qui sont restées dans l’intérieur : elles les
touchent avec leurs antennes, elles les entraînent avec leurs mandibules. C’est alors que la scène la
plus singulière va se passer. En peu d’instants toutes les issues sont encombrées par les Fourmis
qui se pressent vers le dehors; les larves sont emportées en même temps par les ouvrières, pour être
placées au sommet de la fourmilière et ressentir les effets de la chaleur du soleil levant; les larves
des femelles, plus grosses que celles des mâles et des neutres, sont transportées avec plus de diffi-
cultés à travers les passages étroits de l’habitation; mais on redouble d'efforts, on s’y met à plu-
sieurs, et on parvient toujours à les déposer près de celles des autres individus. Pendant quelques
instants, on voit aussi les ouvrières elles-mêmes se tenir réunies en groupes nombreux à la surface
de la fourmilière, soit pour se complaire aussi sous l'influence du soleil, soit pour se reposer. Ce-
pendant elles ne laissent pas longtemps les larves exposées à une chaleur directe aussi forte : elles
les retirent bientôt pour les mettre dans des loges peu profondes, où elles peuvent encore ressentir
une chaleur pleinement suffisante. Lorsque le moment de nourrir ces larves est arrivé, chaque
Fourmi s'approche de l’une d'elles, et lui donne sa nourriture. Ces ouvrières ne préparent pas une
substance particulière comme le font les Abeilles et les Guêpes, mais elles dégorgent par leur bouche
les fluides qu'elles ont puisés sur divers objets, et, écartant les mandibules des larves, c'est dans
leur bouche même qu'elles mettent la nourriture.
Fig. 153. — Myrmique rouge. Fig. 134. — Fourmi liquiperde. Fig. 155. — Fourmi liquipcrde.
(Mâle.) (Neutre.) (Femelle)
Les Formicides s’en prennent, pour leur sustentation, à toutes les matières qu'elles rencontrent;
on les voit se repaître sur les viandes fraiches ou corrompues, sur les fruits, et particulièrement sur
tout ce qui est sucré : elles sont aussi très-friandes d’un liquide particulier que les Pucerons et les
Gallinsectes sécrètent par deux petits tubes situés à l'extrémité de leur corps. Chaque fois qu'il
existe des Pucerons sur une plante, on est certain d'y rencontrer des Fourmis : celles-ci montent et
descendent le long des tiges, harcèlent les Pucerons et les excitent avec leurs antennes et leurs
palpes, pour les forcer à dégorger le liquide désiré, mais elles ne leur font jamais de mal. On assure
seulement que dans quelques cas elles emportent ces Pucerons pour les placer sur des plantes dans
le voisinage, ou au sein même de leur fourmiliére, afin de n'avoir pas à aller les chercher au loin : ce
sont leurs véritables esclaves, et Linné les appelle les Vaches des Fourmis. Dans les régions équato-
riales où il n’existe pas de Pucerons, on a vu les Fourmis faire le même manége auprès de certains
autres lémiptères Homopières, qui secrètent également divers liquides sucrés.
Les soins que les ouvrières donnent aux larves ne consistent pas seulement à leur procurer une
température convenable et une nourriture nécessaire et différente suivant les diverses sortes d'indi-
vidus d’une même espèce; elles doivent encore les entretenir dans une extrême propreté : avec leurs
20
A. A
154 HISTOIRE NATURELLE.
palpes elles les nettoient parfaitement et ne laissent jamais le moindre grain de poussière sur leur
corps. Au moment des mues que subissent les larves, elles sont fréquemment occupées à tirailler
leur peau, à l’étendre et à la ramollir. Les larves, eomme le rapporte Latreille, ressemblent, quand
elles sortent de l'œuf, à de petits Vers blancs, sans pattes, gros, courts et d’une forme presque co-
nique; leur corps est composé de douze anneaux, avec la partie antérieure coudée, et plus même
que le reste du corps; on remarque à la tête deux petites pièces écailleuses qui sont deux espèces de
crochets trop écartés pour pouvoir être considérés comme de véritables dents, etau-dessous, quatre
petites pointes ou cils, deux de chaque côté, et un mamelon presque cylindrique, mais rétractile,
par lequel la larve recoit la becquée. Ces larves grossissent successivement, commencent à s'organi-
ser davantage, et, avant de subir leur dernière mue, se filent pour la plupart (à l'exception des
Myrmica, Ponera et groupes voisins) une coque de soie; et c’est sous cette enveloppe assez épaisse
que, sous la forme de nymphes, elles se préparent à se métamorphoser en Insecte parfait. Cette
coque est cylindrique, allongée, d’un jaune pâle, très-lisse, et d’un uissu res-serré. L'Insecte, dans
l’état de nymphe, a acquis la forme qu'il aura désormais : il est aussi grand qu’il doit l'être, tous
ses membres sont distincts (une seule pellicule les enveloppant), et il ne lui manque plus que des
forces et un peu de consistance. Les nÿmphes des Fourmis sont d’abord d'un blane pur, et conti-
nuent à se mouvoir pendant un certain temps; puis elles deviennent d’une immobilité complète, et
changent successivement de couleur : passant au jaune pâle, au roussätre, au brun et même presque
au noir. L’Insecte parfait venant à éclore ne sait pas, comme les autres Insectes, rompre la coque de
soie dans laquelle il est contenu, car ses mächoires ne sont pas assez solidifiées pour qu'il puisse la
déchirer : ce sont les ouvrières qui, connaissant toujours le moment où les Insectes vont éclore, se
chargent de ce soin. Ce n’est pas sans difficulté que ces dernières y parviennent : plusieurs individus
se mettent à la fois après la même coque; ils commencent par arracher supérieurement quelques
fragments de soie pour amincir l’étoffe, et ils finissent par la percer d’abord un peu; et ensuite
agrandissent le trou afin que l’Insecte puisse sortir de sa prison. Lorsque cette opération est termi-
née, les ouvrières commencent, avec la plus grande précaution, à en tirer la nouvelle Fourmi;
l’Insecte est encore entouré de son enveloppe de nymphe, qui lui est enlevée; et, pendant plusieurs
jours encore, il doit être nourri et accompagné par ses nourrices; les ailes des mäles et des femelles
sont également nettoyées par les ouvrières avec la plus grande adresse.
Chez les Fourmis, de même que chez les Abeilles, il y a plus que de l'instinct, et l'intelligence
semble apparaître dans une foule de leurs actes. M. Émile Blanchard indique, d’après les auteurs
qui l'ont précédé, quelques faits à l'appui de ce que nous venons de dire; et nous rapporterons à
ce sujet quelques passages de l'Histoire des Insectes de notre savant collègue. « On reconnait,
dit-il, chez les Fourmis le discernement, le jugement, dans une foule de leurs actes. Si vous écra-
sez, si vous bousculez une partie d'une fourmilière, vous voyez aussitôt que les individus qui sont
à portée se mettent en état d'agression, et qu'aussitôt quelques autres vont prévenir tous les habi-
tants qui sont logés dans les étages inférieurs. Alors, en peu d'instants, on voit accourir de toutes les
_ parties de l’habitation une masse d’ouvrières, qui, en un clin d'œil, ont toutes compris qu’un danger
Jes menaçait : elles se jettent ordinairement sur l'agresseur, et cherchent à se venger sur lui du
dommage qu’il leur a causé. Si une Fourmi étrangère vient à pénétrer dans la fourmilière, elle est
aussitôt chassée par les habitants. Si les Fourmis de deux nids trop rapprochés viennent à se ren-
contrer souvent et à se gêner dans leurs opérations, des combats ont lieu avec un ordre et un en-
semble admirables. Lorsqu'une Fourmi a été blessée, celles qui la rencontrent s’empressent de lui
porter secours et de la rapporter au domicile commun. En toute occasion, on voit les Fourmis se
communiquer leurs idées. Si quelques-unes ont dans la pensée de s'occuper d’un travail quelcon-
que, elles savent faire comprendre leur intention aux autres; si un danger les menace, elles s’aver-
tissent mutuellement. Il n’est pas rare de voir des ouvrières se tirailler l’une l’autre, et se frapper
-de leurs antennes pour se faire comprendre réciproquement. À chaque instant nous voyons la rai-
son, l'intelligence apparaître dans les divers actes qu'exécutent les Fourmis, bien que la plupart
de leurs travaux semblent être entrepris instinctivement. Ici, comme chez les Abeilles, nous voyons
ces deux facultés paraissant se confondre; mais, chez les Fourmis, l'intelligence nous paraît se pro-
duire encore plus fréquemment. » Ajoutons encore que les Fourmis savent se prévenir en se touchant
avec les antennes ou les mandibules, soit d’un danger, soit d'une résolution prise, et que l’Inseete
.
ANNELES. — HYMÉNOPTÈRES. 155
ainsi prévenu obéit à celui qui lui a probablement transmis un ordre. Disons aussi quelles précau-
tions elles prennent pour se mettre à l’abri de tout danger : ces sentinelles placées au dehors des four-
milières, et qui, en cas de péril, savent prévenir en si peu de temps les habitants de l’intérieur. Une
foule d’autres actes intellectuels sont produits par les Fourmis; c’est dans l'ouvrage d’'Huber que nous
engageons nos lecteurs à les étudier, s'ils ne sont pas en position de les voir dans la nature même.
Un fait que nous devons rapporter, mais que l’on ne peut expliquer d’une manière satisfaisante,
se rapporte à l'histoire des Fourmis. Quelques Insectes, dont le nombre augmente chaque jour par suite
de nouvelles recherches, habitent les fourmilières, et, loin d’être chassés par les Fourmis, semblent
au contraire être reçus avec plaisir. Que vont faire ces Insectes dans les fourmilières? Vont-ils seu-
lement s’y réfugier pour trouver une température qui leur soit convenable? ou, tout à fait les hôtes
des Fourmis, se font-ils, comme on l’a dit, nourrir par elles? Quel avantage les Fourmis peuvent-
elles tirer de la présence de ces Insectes? On comprend qu’elles cherchent à attirer les Pucerons,
qui leur donnent une liqueur sucrée qu'elles recherchent. Mais les autres Insectes, cés’ Coléopté-
res, généralement si petits, leur donnentils quelques produits que nous ne connaissons pas encore
et qui leur sont utiles? C’est ce qu'on serait tenté de croire lorsqu'on les voit traiter avec tant de
soins les Clavigers et d’autres Insectes; mais comment n’expulsent-elles pas ces Myrmédonies, qui
n'entrent dans leurs nids que pour en faire leur proie? Des observations seraient nécessaires sur ce
sujet intéressant; mais, pour les recueillir, on ne devrait pas se borner, cemme le font nos entomo-
logistes, à tamiser les fourmilières pour en retirer les petits Insectes étrangers qui se trouvent avec
les habitants, ordinaires et il faudrait étudier les habitudes des hôtes des fourmilières.
D'un autre côté les Fourmis ont un grand nombre d’ennemis qui cherchent à détruire ou à péné-
trer dans leurs habitations, ou qui font leur nourriture spéciale de ces Hyménoptères. Plusieurs
Mammifères sont dans ce cas : tel est le Fourmilier ou Myrmécophage, qui entre sa longue langue
gluante dans l’intérieur des fourmilières et qui, la retirant chargée de Fourmis, s’empresse de les
manger; tels sont divers Insectivores et d’autres encore; différents Oiseaux et Reptiles sont également
myrmécophages, et il en est de même de plusieurs Insectes que les Fourmis cherchent à à empêcher
de pénétrer dans leur nid quand leur force le leur permet. En outre, l'homme en détruit aussi un
très-grand nombre, quelquefois pour empêcher leurs dégâts, souvent périodiques, mais le plus
souvent pour le seul plaisir de détruire. Pour arriver sûrement à se débarrasser des Fourmis, il
faut rechercher leur nid et y répandre des flots d’huilé ou d’eau bouillante en quantité suffisante
pour pénétrer tous les étages qui le composent.
Vers le commencement de l’automne, alors que les ouvrières ont fait les dernières éducations
annuelles des larves, un nouveau travail leur est encore assigné. Elles vont à la recherche de provi-
sions pour la froide saison: et ces provisions consistent surtout en fragments de fruits ainsi qu’en
Pucerons qu’elles tiennent captifs. En effet, au moins dans nos climats, si, pendant les hivers rigou-
reux, lorsque la gelée devient forte, les Fourmis éprouvent un engourdissement complet; au con-
traire, dans les hivers tempérés, elles restent constamment actives; d'autant plus que l’intérieur de
leur habitation conserve une assez grande chaleur, et que ce n'est qu’à deux degrés Réaumur au-
dessous de zéro qu’elles commencent à s’engourdir; mais alors, la pluie et la boue les empêchant de
pouvoir se procurer des vivres, elles ne tarderaient pas à mourir, si, dans leur prévoyance, elles
n'avaient auprès d'elles les matières propres à la vie. Du reste, il paraît qu’en hiver les liquides
contenus dans le corps des Fourmis s’évaporent beaucoup moins qu’en été, et que, quand la di-
sette se fait sentir, celles qui ont encore quelque chose dans leur estomac, le partagent avec celles
que la faim presse, et qu’elles leur dégorgent dans la bouche une partie de leur propre liquide
nourricier. Ces faits ont été niés par quelques auteurs, qui disent que les Fourmis s’endormernt
toujours pendant l'hiver; mais des observateurs consciencieux, Lepelletier de Saint-Fargeau entre
autres, assurent que, si pendant les fortes gelées elles tombent dans un état léthargique complet, le
reste du temps elles se meuvent, et que dès lors elles ont besoin d'aliments.
Les particularités qui accompagnent la formation d'une fourmilière sont encore incertaines. Hu-
ber croit qu’une femelle féconde échappée d'une ancienne habitation*la fonde seule, mais Lepel-
letier de Saint-Fargeau pense que des ouvrières l’aident dès le commencement, non qu’elles sortent
à sa suite du nid commun, commeles Abeïlles à la suite de leur reine, mais bien que, rencontrant
une femelle isolée dans leurs courses ordinaires, elles se vouent, en se joignant à elle et ne retour-
156 HISTOIRE NATURELLE.
nant plus à leur primitive patrie, à la fondation d’une nouvelle colonie. Telle habitation qui a
longtemps convenu à une société de Fourmis, peut cesser de leur être agréable; cela arrive souvent
lorsqu'une horde ennemie, établie dans les environs, a attaqué plusieurs fois la fourmilière pour
enlever soit les larves, les nymphes et les œufs, soit les Pucerons. Dans ces deux cas, menacées ou
de dépopulation ou de famine, il est ordinaire que les Fourmis cherchent un nouveau domicile,
effet que produisent aussi les dégâts habituels et répétés dans leurs constructions. La nouvelle
habitation est bientôt établie, et les ouvrières y transportent en peu de temps les œufs, les larves,
les femelles, et même les ouvrières nouvellement écloses.
Dans quelques espèces, comme Huber l'a démontré, les ouvrières savent s’exempter de toute be-
sogne et se faire servir par des ouvrières d’une autre espèce. Ce n’est pas au commencement de la
formation d’une fourmilière que l’on trouve des ouvrières étrangères dans une colonie de Fourmis :
cette conquête exige des combats, et, pour oser les tenter, il faut que la population des conqué-
rants soit forte; jusqu’à ce moment, elles ont travaillé, elles ont construit la fourmilière, mais à
présent elles ne veulent plus le faire, ne se réservant que le droit d’aller en guerre, et se faisant
servir pour tout le reste par des étrangères, qui bâtissent à leur place, soignent les petits et leur appor-
tent à elles-mêmes la nourriture dans l’intérieur de l'habitation, qu'elles ne quittent plus que pour
des expéditions nouvelles. Les Fourmis les plus fortes pénètrent, et cela deux ou trois fois par jour,
au moment où ce pillage doit avoir lieu, en masse dans certaines fourmilières formées d'espèces plus
faibles qu'elles, et s'emparent de vive force, parfois après de grands dangers, de larves ou plutôt
de nymphes d’ouvrières, qu'elles transportent dans leur demeure, qu'elles y élèvent avec soin, et
qui donneront naissance à ces ouvrières prisonnières, auxquelles elles ne commandent jamais, mais
qui les servent ponctuellement. C’est ce qui donne lieu à la création des fourmalières mixtes :
c’est-à-dire à celles dans lesquelles il y a des ouvrières de deux espèces, dont les unes n'y ont pas
de femelles fécondes de leur espèce. C’est dans l'ouvrage d’Iluber qu'il faut lire des détails cir-
constanciés à ce sujet : les rapporter ici nous entrainerait trop loin, et les-analyser serait im-
possible.
Certaines espèces de Fourmis attaquent également d’autres fourmilières pour s'emparer des Pu-
cerons que celles-ci contiennent, et qui y ont été amenés pour fournir, par leurs excréments sucrés,
un fonds de provision placé à portée des consommateurs et à l'abri des injures de l'air. Les incur-
sions que ces guerres nécessitent se passent à peu près de la même manière que quand les Fourmis
cherchent à acquérir de nouveaux serviteurs; mais les deux partis, étant souvent de force égale, y
font un usage plus meurtrier de leurs armes, c’est-à-dire les unes de leur aiguillon, les autres de
l’éjaculation d'un venin sécrété par leurs glandes anales, et il reste souvent un assez grand nombre
de morts sur le champ de bataille. |
On sait que les Fourmis ont la propriété de rejeter au dehors un liquide particulier, l’acide for--
mique, sécrété par des glandes anales, et qui a recu quelques applications dans les arts. Comme ce
liquide est répandu dans le corps des Fourmis, pour se le procurer, on pile un grand nombre de
ces Hyménoptères, et, après plusieurs opérations chimiques, on retire le produit qui doit servir à
l'homme. Une autre utilité des Fourmis pour l’homme est applicable à l'horticulture : ces ani-
maux, en s'emparant de la matière sucrée sécrétée par les Pucerons, empêchent ce liquide de se ‘
répandre sur les feuilles des plantes, principalement des Rosiers, et de les détruire en les cor-
rodant.
Les Formiciens paraissent être répandus dans le monde entier. Chaque espèce en particulier,
pour le plus grand nombre au moins, n’est pas trés-cosmopolite; mais chaque région du globe est
habitée par plusieurs Fourmis différentes. Les pays chauds en fournissent plus que les contrées
froides, qui en renferment aussi; le midi de l'Europe en possède beaucoup. L'Amérique du Sud en
compte une grande quantité, ainsi que l'Afrique; le sud de l'Asie, la Nouvelle-Hollande et les iles
de l'océan Pacifique ont aussi fourni nombre d’espèces particulières.
L’anatomie de ces llyménoptères a été faite en partie par M. Léon Dufour. Le canal intestinal n’a
guère qu'une fois et demie la longueur du corps; l’œsophage, d’une ténacité capillaire, se dilate
vers la base de l’abdomen en un jabot musceulo-membraneux très-expansible, auquel succède un
gésier divisé en deux parties; le ventricule chylifique est de forme variable; l'intestin, d'abord grêle
et flexueux, se renfle ensuite en un rectum turbiné. Les vaisseaux hépathiques sont insérés au-
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 157
tour de l'extrémité postérieure du ventricule chylifique. Les organes reproducteurs sont également
connus anatomiquement.
Trois groupes peuvent être zoologiquement formés parmi les Formicides : les Myrmicites, Poné-
riles et Formicites.
Dans les Myrmrcrres, le premier segment de l'abdomen forme deux nœuds, et les femelles sont
pourvues d'un aiguillon, ce qui leur permet de piquer et d'introduire dans Ja plaie qu’elles ont
faite une liqueur acide qui produit une sensation de brûlure et de l’enflure locale; la partie ainsi
enflée devient d’abord rouge et ensuite jaune, et souvent elle perd son épiderme au bout de quel-
ques jours : ce qui est surtout remarquable lorsque les piqüres sont nombreuses et rapprochées.
Ces espèces, qui ne sont pas très-nombreuses, sont propres à l’Europe ainsi qu'aux pays étrangers,
et ont été partagées dans les cinq genres principaux qui suivent.
CRYPTOCÈRE (Cryptocerus, Latr.), à corps inerme; palpes longs : maxillaires de cinq articles :
labiaux de quatre. On ne connaît qu'un très-petit nombre d'espèces propres à l’Amérique et aux
Indes orientales (type, Formica atrata, Linné, de Surinam), dont on n’a pas observé les ha-
bitudes, et que l’on a prétendu ne pas vivre en société comme les autres Fourmis. — ATTE
(Atta, Fabr.), qui, également avec un corps inerme, a des palpes très-courts. Ces Hyménoptères,
bien reconnaissables à leur tête très-grosse par rapport au corps, sont pour la plupart européennes.
Les espèces typiques sont les Arres À Grosse TÊTE (At{a capitata, Latr.), noire, très-luisante, à tête
grosse, à base des antennes, jambes et tarses bruns, qui se trouve sous les pierres dans le midi de
la France; et À. maconxe (A. structor, Latr.), à tête fauve, corselet et pieds d’un ferrugineux obscur,
abdomen brun noirâtre, également de la France méridionale : elle se construit des nids dans le sable,
et forme avec la terre qu'elle en retire une sorte de couvercle à l’entrée. Des espèces probablement
de cé genre, propres à l'Amérique, et connues sous le nom vulgaire de Fourmis de visite, viennent
en masse, dans certaines circonstances, dans les maisons et y font de grands dégâts; ces mêmes In-
sectes exercent, d'après M. Martins, de grands ravages dans les plantations de cannes à sucre, et,
selon M. Auguste de Saint-Hilaire, elles sont très-friandes du coton et du manioc, et une seule nuit
leur suffit pour détruire entièrement de vastes champs de cette dernière plante, ou pour dépouiller
les Orangers de leurs feuilles. — ŒCODOME (OEcodoma, Latr.), à corps épineux et à palpes excessi-
vement courts. Quelques espèces de l'Amérique du Sud, dont la plus connue, l'OE. cephalotes,
Latr., ouvrière, longue de 0,04 à 0,06, d'un brun marron ou noirâtre, avec la tête très-grande
ét luisante, offrant deux épines en arrière, et ayant le corselet avec six tubercules. Cette cu-
rieuse Formicide coupe les feuilles des arbres et les emporte pour construire son nid : elle a été .
étudiée par M. Lund, qui rapporte à ce sujet le passage suivant : « Passant un jour, dit-il, près
d’un arbre presque isolé, je fus surpris d'entendre, par un temps calme, des feuilles qui tombaient
comme de la pluie. Ce qui augmenta mon étonnement, c’est que les feuilles détachées avaient leur
couleur naturelle, et que l'arbre semblait jouir de toute sa vigueur; je m'en approchai pour trouver
l'explication de ce phénomène, et je vis qu’à peu près sur chaque pétiole était postée une Œcodome
à grosse tête qui travaillait de toute sa force. Le pétiole était bientôt coupé, et la feuille tombait par
terre. Une autre scène se passait au pied de l'arbre. La terre était couverte de Fourmis occupées à
découper les feuilles à mesure qu’elles tombaient, et les morceaux étaient sur-le-champ transportés
dans le nid. En moins d’une heure le grand œuvre s’accomplit sous mes yeux, et l’arbre resta en-
tièrement dépouillé. » — ECITON (Eciton, Latr.), à palpes très-petits; mandibules très-longues et
très-étroites, ayant pour type l'E. curvi-dentatum, Latr., de l'Amérique méridionale.— MYRMIQUE
(Myrmica, Latr.), qui ont les palpes maxillaires très-longs, de six articles et les mandibules trian-
gulaires. Ge genre comprend quelques espèces européennes, auxquelles peuvent s'appliquer une
partie des généralités que nous avons présentées en parlant des Formiciens, et quelques espèces
américaines. Parmi les espèces qui habitent presque toute l'Europe, et que l’on rencontre fréquem-
ment dans nos environs, nous citerons : 4° la Fourmi roue (Myrmica rubra, Latr.), qui est rou-
geâtre avec le premier nœud uni-épineux en dessous; l'abdomen lisse, brillant, à premier article
brun, et qui établit son nid dans la terre, sous les pierres ou sous des détritus de végétaux
(nous en représentons le mâle); 2° F. sourgrraine (M. sublerranea, Latr.), d'un brun ferrugineux,
158 HISTOIRE NATURELLE.
à abdomen et pattes roussâtres : se trouve au pied des arbres; 3° F. pouesrique (M. domestica,
Schuk.), très-petite espèce, qui a dans ces derniers temps causé de grandes dévastations en Angle-
terre, dans les maisons d’une partie de Londres et à Brighton, où elle établit sa demeure et dévaste
tout ce qui est à sa portée.
Dans les Poxérites, le premier segment abdominal forme un seul nœud, et les femelles sont ar-
mées d'un aiguillon. On n’y distingue que deux genres : ODONTOMAQUE (Odontomachus, Latr.), à
téle en carré long, très-échancrée en arrière, qui ne renferment que quelques espèces de l’Améri-
que du Sud, dont les mœurs sont inconnues, et PONERE (Ponera, Latr.), à tête triangulaire, à
peine échancrée, qui, outre quelques espèces du nouveau monde et une au moins du Sénégal, com-
prend une espèce parisienne : la Fourmi resserRéE (F. contracta, Fabr.), qui est d'un brun foncé,
glabre et luisant, avec la tête brun jaunâtre en avant : elle se tient sous les pierres en société peu
nombreuse, composée de sept à dix individus, ne quitte ordinairement pas sa retraite avant la
nuit, et ne s'accouple qu'au mois de septembre, tandis que les autres le font habituellement en
juillet.
Dans les Formicires enfin, le premier segment de l'abdomen est formé d'un seul nœud, et les fe-
melles, ainsi que les neutres, sont dépourvues d'aiguillon. Ces Hyménoptères, les plus nombreux en
espèces des Formiciens et les plus communs en Europe, quoique se trouvant également dans d’au-
tres pays, sont aussi ceux que l’on a le plus étudiés, et sous le rapport des mœurs et sous celui de la
classification. C'est à eux que s'appliquent surtout les beaux travaux d'Huber, et que peut se rap-
porter presque tout ce que nous avons dit dans nos généralités. Les deux genres qu'on y distingue
surtout sont ceux des : 1° POLYERGUES (Polyergus, Latr.), à mandibules étroites, arquées, terminées
en pointe crochue, ayant pour type la F. roussarre (F. rufescens), qui est très-commune dans toute
l'Europe, et surtout aux environs de Paris; elle est longue de 0,02 à 0,05, entièrement d'un
roux pâle : ainsi que nous l'avons dit, c’est cette Fourmi qui livre surtout des combats à quelques
autres Formicites, pour se créer des auxillaires utiles : on trouve des ouvrières des F. cunicularia
et fusca dans les nids de cette espèce. — 2° FOURMI (Formica, Linné), à mandibules.triangulaires,
très-dentées. On connaît aujourd’hui plus de cent espèces de ce genre, qui a été partagé en plu-
sieurs groupes sous-génériques : celles d'Europe, très-abondamment répandues partout, sont prinei-
palement très-nombreuses; mais l’on en a également pris dans toutes les autres parties du monde. La
plupart construisent leurs fourmilières dans la terre ou au pied des arbres. La forme des nids varie
considérablement; nous avons parlé de ceux que l’on trouve dans nos environs, et il ne nous reste
plus qu’à dire quelques mots des divers nids étrangers. Une fourmilière rapportée des Indes orien-
tales ressemble à une forteresse; elle n'offre qu'une seule ouverture à son sommet, est formée
d'une sorte de terre glaise jaunâtre; a environ 0,30 de diamètre, et ressemble à un immense la-
byrinthe dont le chemin est garni, dans toute sa longueur, d'un mur assez élevé pour protéger les
travailleuses. Un autre nid, provenant d'Amérique, n'offre à la vue qu'une masse immense de pe-
tites branches de bois enchevêtrées les unes dans les autres : sa forme est parfaitement arrondie.
Enfin trois autres nids que nous voulons encore signaler, sont : 1° de la F. smaragdula, du Séné-
gal, qui est formée de feuilles ajustées parmi les branches d'arbres; 2° celui de la F. fungosa, Fabr.,
de la Guyane, qui est composé d’une matière cotonneuse tirée des capsules du Bombux, ayant tout
à fait l'apparence de l’amadou; et 3° celui de la F. merdicola, Lund, qui, au Brésil, construit sa
fourmilière autour des branches en employant comme matériaux des excréments desséchés. —
Parmi les Fourmis communes auprès de Paris, nous nommerons les F. FuLiemneuse (F. fuliginosa,
Latr.); rousse (rufa, Lin.); sanGuine (sanguinea, Latr.); mineuse (cunicularia, Latr.); NorRe cENDRÉE
(fusca, Lin.); noire (nigra, Lin.); Écuancrée (emarginata, Latr.); save (flava, Fabr.); PyeméE (pyg-
mæa, Latr.); Norme Lisse (æthiops, Latr.) rouGe Noire (herculeana, Linné), etc. Comme type, nous
désignerons la F; rousse, qui est assez grande, roussâtre pour les femelles et les neutres, noire
pour les mâles : elle construit son nid dans les lieux sablonneux avec toutes sortes de fragments
de bois. Nous figurons la femelle et le neutre de la Fourmi ligniperde, qui vit dans le bois.
ANNELÉS. -- HYMÉNOPTÈRES. 159
SEPTIÈME FAMILLE. — CHRYSIDIENS.
Le genre Chrysis, de Linné, sert de type à une petite famille particulière qui porte les noms de
Curysines et de Gurysinrexs, et qui offre principalement pour caractères : corps presque cylindrique,
mais pouvant se replier en forme de boule; mandibules arquées, pointues; antennes insérées au-
dessous de la bouche,. coudées, légèrement amincies à l'extrémité; pattes courtes, avec les jambes
de devant armées d'épines; abdomen joint au corselet par un pédicule extrémement court.
Cette famille ne comprend qu’un nombre assez peu considérable d'espèces et de genres, répandus
dans les diverses parties du globe, et principalement en Europe. Ce sont de jolis petits Insectes or-
dinairement verts, bleuâtres ou d'un doré vif et rougeätre, qui ne le cèdent en rien, sous le rapport
de l'éclat des couleurs, à ce que nous connaissons de plus brillant parmi les pierreries; on les a sur-
nommées vulgairement pour cela Guépes dorées, parce qu’elles ressemblent beaucoup à de petites
Guêpes par l'aspect général de leur corps, en différant seulement par les nuances. Les Chrysidiens
sont surtoutremarquables par la structure de leur abdomen; les derniers anneaux peuvent s’engainer
les uns dans les autres, ou s’allonger à la manière des tubes d’une lunette. Les femelles sont armées
d’un aiguillon que quelques auteurs modernes ne regardent que comme une tarière ou un ovi-
ducte, dont la piqüre est un peu douloureuse; la facilité qu’elles ont de replier en dessous leur ab-
domen et d’en distendre les derniers segments les rend redoutables quand on veut les saisir. On
rencontre ces Insectes pendant toute la belle saison, ils voltigent de fleur en fleur pendant la plus
grande ardeur du soleil, et il paraît alors qu’on voit voler des perles de feu, tant leur corps est bril-
lant. Ils sont continuellement en mouvement, agitent sans cesse leurs antennes, et se trouvent sur-
tout sur les plantes de la famille des Ombellifères.
Les habitudes naturelles des Chrysidiens n’ont pas encore été observées d’une manière complète;
on sait seulement que la plupart d’entre eux déposent leurs œufs dans les nids de divers Hyménop-
tères, surtout dans ceux des Apiens, Crabroniens, etc.; seulement leurs larves ne vivent pas des
provisions amassées par ceux-ci pour leur progéniture; mais il est à peu près certain qu’elles dévo-
rent les habitants des demeures dans lesquelles elles se trouvent. Ce n’est quelquefois pas facile-
ment que les femelles de Chrysidiens parviennent à déposer leurs œufs dans les nids de divers
lyménoptères; elles y emploient souvent la ruse, et saisissent le moment où les Insectes qui doivent
nourrir leurs larves sont absents de leurs demeures pour s’y introduire et y pondre; d’autres fois
elles ont même des combats à soutenir. Chaque espèce de cette famille paraît être parasite d’une ou
de deux espèces particulières d'Hyménoptères; le Chrysis ignita est parasite du Philanthus apivo-
rus et peut-être du Cerceris ornata; l'Hedychrum regium, de l’Abeille maconne (Chalicodoma mu-
raria); l'Hedychrum lucidulum, d'une espèce d’Halicte; d’autres Chrysidiens ont été rencontrés
fréquemment avec des Odynères et des Épipones; quelques Chrysis se trouvent aussi avec des Ché-
lostomes, etc. Les larves sont apodes, blanchâtres; elles semblent ne sortir de l’œuf que quand les
larves des légitimes propriétaires des nids ont déjà pris une grande partie de leur accroissement;
elles se posent sur le dos de ces dernières, les attaquent et les sucent pour se nourrir, mais elles ne
les tuent que lorsqu'elles vont se transformer. Elles ne forment pas de coques pour se métamor-
phoser; et leur état de nymphe paraît très-prolongé, car l’Insecte ne paraît ordinairement que l'an-
née suivante.
Malgré les remarques d’un grand nombre d’entomologistes, spécialement de MM. Westwood,
Lepelletier de Saint-Fargeau, Klug, Walckenaër, Rudder, etc., un vaste champ est encore laissé aux
observations au sujet des mœurs des Chrysidiens. Il en est de même sous le point de vue zoolo-
gique, malgré les travaux monographiques de Lepelletier de Saint-Fargeau et Serville, Dahlbom,
Shuckard, Wesmael, et les observations de MM. Léon Dufour, Spinola, Erichson, Guérin-Mené-
ville, etc. Cette famille est très-curieuse à étudier, par suite même des affinités qu'elle présente;
en effet, placée à la fin de la section des Porte-aiguillons de Latreille, qui comprend toutes les divi-
sions primaires que nous avons passées en revue, cette famille offre des caractères de la section des
Térébrants, qui va être le sujet de nos observations ultérieures; et elle montre que cette division
160 HISTOIRE NATURELLE.
latreillienne n’est pas naturelle et doit être rejetée; elle offre aussi de grandes affinités avec les
Chaleidiens et les Proctotrupiens, et, d’un autre côté, avec les familles supérieures de l’ordre.
On y forme deux groupes spéciaux :
4e groupe, Parnoprres, ne renfermant que le genre PARNOPE (Parnopes, Latr.), seul de tous les
groupes de Chrysidiens dans lesquels les méles aient quatre segments visibles à l'abdomen, tandis
que dans les femelles il n'y en a que trois; les palpes maæillaires sont très-courts, à peine visibles,
de deux articles seulement; les mâchoires et la lèvre inférieure sont allongées, et constituent une
trompe; les mandibules sont longues, pointues, unidentées sur les côtés. On connaît quelques es-
pèces étrangères et indigènes de ce genre; le type, propre à nos provinces méridionales, est le P.
carnea, Latr., vert, avec l'abdomen couleur de chair, à l'exception du premier anneau; habite les
lieux sablonneux, dépose ses œufs dans les nids des Bembex, et les larves qui en naissent vivent et
subissent leurs métamorphoses dans ces demeures. (Voy. notre figure.)
9° groupe, Curysinires, chez lesquels l’abdomen a toujours trois segments dans les deux sexes;
les palpes assez allongés : les maxillaires de cinq articles et les labiaux de trois. Assez peu nom-
breux en espèces propres à toutes les parties du globe, ce groupe ne renferme que huit genres.
Le plus connu de tous est le genre CHRYSIS (Chrysis, Linné), ayant pour caractères : antennes
de treize articles : le troisième plus long que les autres, excepté le premier; palpes maxillaires lé-
gèrement plus longs que les labiaux; mandibules dentées; abdomen oblong; pattes de longueur et de
grosseur moyennes. On décrit au moins une cinquantaine d'espèces de ce genre, et elles habitent
l’Europe, surtout vers les contrées méridionales, plusieurs parties de l@frique et de l’Asie, l'ile de
Madagascar, l'Amérique tant méridionale que septentrionale, etc. Ce sont tous d'assez petits Hymé-
noptères parés de couleurs vives et brillantes, et qui, à juste titre, ont été, sous ce point de vue,
comparés aux Oiseaux-Mouches chez les Oiseaux, et ont recu leur dénomination de Chrysis, tiré du
mot grec ypuoos, doré. L'étude des mœurs de quelques espèces a été commencée, mais non complé-
tement faite; et c’est d'après ce qui a été dit par les auteurs que nous en avons parlé dans nos géné-
ralités. Une espèce, très-commune aux environs de Paris et dans presque toute l'Europe, est la
Cuvyrisis poRÉE (Chrysis ignita, Linné), d’un vert bleuâtre, avec l'abdomen d'un rouge doré des
plus brillants, et qui, comme nous l’avons rapporté, est parasite de plusieurs Hyménoptères; nous
représentons cette espèce. Un genre qui ne s’en distingue guère que par quelques particularités dans
les antennes est celui des PYRIA, Saint-Fargeau et Serv., entièrement exotique, et dont le type est
la C. oculata, Fabr., des Indes orientales. C’est aussi par quelques différences dans la conformation
des antennes et des pattes, comparée à celle des Chrysis, qu'a été fondé le genre PLEUROCERA,
Guérin-Méneville (P. viridis, du Chili).
Fig. 156. — Chrysis dorée. Fig. #57. — Parnope carnée. Fig. 138. — Clepte semi-doré.
Des genres plus distincts sont ceux des : 1° ÉLAMPE (Elampus, Spinola), à palpes maæillaires un
peu plus longs que les labiaux; à-mandibules bidentées, et à abdomen convexe, échancré à l'extré-
mité; quelques espèces européennes. 2° EUCHRÉE (Euchræus, Latr.), à palpes matillaires et la-
biaux de la méme longueur; à mandibules unidentées et à métathorax non prolongé; une seule
espèce, propre à nos pays, entre dans ce groupe, et les deux sexes en diffèrent tellement que chacun
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 161
d'eux a reçu un nom particulier : le mäle est l'E. festivus, et la femelle l'E. purpuratus. 3° STILBE
(Stilbum, Spinola), à palpes maxillaires et labiaux également de la même longueur, à mandibules
unidentées, à abdomen très-corvexe, et à métathorax prolongé en épine : ces Insectes habitent les
régions chaudes du globe; on en rencontre dans le midi de l’Europe, l'Afrique, l’Asie et l’Amé-
rique; ce sont les plus grandes espèces connues de Chrysidiens : les deux espèces européennes les
plus connues sont les S. splendidum et calvus, Fabr. 4° CLEPTE (Cleptes, Latr.) à palpes maæil-
laires beaucoup plus longs que les labiaux; à mandibules courtes, larges, dentées, et à abdomen
ovale, terminé en pointe; ce sont de jolis petits Insectes pariois assez abondants dans nos environs :
le type est la Crepre semi-ponée (Cleptes semi-aurata, Fabr.), d'un beau vert doré, avec la tête
ponctuée de cuivreux rougeûtre, et l'abdomen ferrugineux à extrémité noire : Lepelletier de Saint-
largeau a constaté que la femelle dépose ses œufs dans les nids des Tenthrèdes, et que les larves se
nourrissent de celles de ces Hyménoptères. (Voy. notre figure.)
Un dernier genre, le plus important de tous après les Chrysis, est celui des HÉDYCHRES (Hedy-
curum, Latr.), à palpes maxillaires beaucoup plus longs que les labiaux; à mandibules t'identées,
et à abdomen presque hémisphérique. Ces petits Insectes, parés de couleurs métalliques, rouges,
vertes, bleues ou violacées, comme les Chrysis, habitent l’Europe, se trouvent aussi dans les deux
continents américains, au Cap de Bonne-Espérance, etc. Les plus répandus dans notre pays sont les
Hépycures ROYAL (Chrysis regium, Fabr..), et rosé (A. roseum, Saint-Fargeau). - Lepelletier de Saint-
Fargeau a observé un Insecte de ce genre déposant ses œufs dans le nid d’une Osmie; après avoir
exploré la dmeure, il y rentrait à reculons, dans l'intention d’effectuer sa ponte; « sur ces entre-
faites, rapporte l’entomologiste que nous avons nommé, l'Osmie rentre au domicile avec une pro-
vision, et, apercevant l'Hédychre, elle s’élanca sur elle en la saisissant avec ses mandibules; l'Hédy-
chre, se contractant en boule, devenait invulnérable pour l’Osmie, qui se contenta alors de lui
couper les ailes; mais, dès qu’elle fut repartie chercher une nouvelle provision, le Ghrysidite revint
bientôt pondre dans le nid d’où il avait été si durement expulsé. » Quelques autres Hédychres ont
encore été vus recherchant les habitations de certains Apiens, tels que des Psens et des Halictes.
HUITIÈME FAMILLE. — CHALCIDIENS.
Les Gmarcnes (Chalcis, Fabr.) et les genres nombreux qui en sont plus ou moins voisins
constituent la famille des Cuaccinires ou CHaLcipieNs, ayant pour caractères principaux : corps
oblong, plus ou moins épais; mächoires assez longues; palpes maæillaires très-courts; antennes
habituellement coudées, de six à treixe articles; ailes n'offrant ordinairement qu'une seule nervure
bifurquée.
Fig. 139. — Psilogastre à pieds päles. Fig. 140. — Chalcide à pieds épais. Fix. 441. — Chirocère fourchue,
’
Cette famille, qui a recu de Dalman le nom de Pteromalini, et de Spinola celui de Diplolépaires,
se compose d’un très-grand nombre d'Hyménoptères parasites, remarquables en général par leur
4. 21
162 HISTOIRE NATURELLE.
très-petite taille et par leurs couleurs métalliques, souvent brillantes et quelquefois variées. La tête
est transversale, avec la face grande. Les antennes sont courtes, surtout dans les femelles. La lèvre
supérieure est petite, souvent cachée. Les mandibules larges, cornées, dentées à l'extrémité. Les
palpes : maxillaires de quatre articles : labiaux de deux ou trois. Le corselet, très-court ou assez
grand, est en carré triangulaire ou transversal. L’écusson est arrondi. Les premières ailes sont
presque dépourvues de nervures. L’abdomen est très-variable, suivant les espèces et même le sexe.
Il se compose ordinairement de sept segments dans les mâles et de six dans les femelles; il est sessile
ou pédonculé; la tarière des femelles, souvent cachée et quelquefois saillante, droite, est formée de
deux valves. Les pattes de devant sont le plus habituellement simples, tandis que celles de derrière
ont parfois les cuisses renflées et dentées en dessous, avec les jambes arquées; les pattes intermédiai-
res, ont souvent des jambes épaisses et armées d’un long éperon denté en scie intérieurement. Les
tarses ont cinq articles ou quelquefois quatre seulement. Dans quelques espèces, les ailes manquent,
mais cela n’est pas constant. Outre certaines particularités différencielles suivant les groupes, les
mâles différent des femelles par le nombre des segments abdominaux, la forme des antennes et celle
des différentes parties du corps.
Les Chalcidiens sont parasites, mais d’une autre manière que les Hyménoptères des dernières fa-
milles que nous avons étudiées, qui déposent leurs œufs dans les nids d’autres espèces sachant
construire, et dont les larves sortant des œufs vivent aux dépens des larves de leurs hôtes. Pour les
Chalcidiens, au contraire, leurs larves sont placées dans le corps même des Insectes qui doivent
leur servir de pâture, et ces derniers vivent assez de temps pour que les larves de l’'Hyménoptère
puissent prendre tout leur développement. Comment ces larves de Chalcidiens (et ce que nous al-
lons dire peut aussi s'appliquer aux Proctotrupiens et aux Ichneumoniens) se trouvent-elles placées
dans le corps d’une chenille ou de tout autre Insecte? La plupart des femelles, chez tous les Hymé-
nopières que nous avons passés en revue, étaient pourvues d'un aiguillon, comme arme défensive
et offensive. Les femelles de ceux qui nous occupent maintenant sont privées de cette arme; mais,
chez elles, le même organe est converti en tarière plus ou moins longue, acérée, composée de trois
filets réunis, servant de dépôt aux œufs; c’est avec l'extrémité de cet organe que la femelle fait une
piqûre à la peau d’une chenille, d’une nymphe, d’un œuf même, et y dépose au même instant son
œuf. Au bout de peu de jours, il en sort une larve ordinairement blanchâtre, toujours apode et
pouvant à peine se mouvoir. Gette larve se trouve donc ainsi dans le corps de l’Insecte où l'œuf a
été déposé, jusqu’à ce qu’elle ait pris tout son développement. L'Insecte peut vivre longtemps, tout
en étant rongé chaque jour; en effet, la larve de l’Hyménoptère n'attaque d’abord aucun des orga-
nes nécessaires à l'existence de l’Insecte qu’elle dévore, et elle ne mange que le tissu graisseux qui
entoure le canal intestinal; c’est seulement à l’époque de sa métamorphose en nymphe, lorsqu'elle
sent qu’elle n'aura plus besoin longtemps de sa pâture ordinaire, qu’elle immole sa victime : elle
s’en prend alors à tous ses organes et ne laisse souvent que la peau dans laquelle elle subit sa der-
nière transformation. Certaines larves de Chalcidiens et d’Ichneumoniens sortent à ce moment du
corps de l’Insecte qui les a nourris et se filent auprès de lui un petit cocon soyeux; mais il n’est par
rare de les voir fixer au-dessus d'elles la dépouille de l’être qui a été leur pâture, et de s’en servir
ainsi comme d’un abri protecteur. Parfois on ne trouve qu’une seule larve dans le corps d’un In-
secte attaqué de cette manière; cependant, dans des cas nombreux, surtout chez les Chalcidiens
et les Proctopruniens, et cela en raison de leur petite taille, on trouve une assez grande quantité
d'individus. Les chenilles et les diverses larves qui recèlent dans leur corps les jeunes de ces Hy-
ménoptères sont le plus habituellement faciles à reconnaître, surtout lorsque leur peau est lisse et
d’une nuance claire, car on peut y voir alors un ou plusieurs petits points noirs qui indiquent la
place où a pénétré la tarière de l'Hyménoptère. :
Ces Insectes sont principalement parasites des Lépidoptères, et c'est dans les chenilles qu'on en
trouve le plus habituellement. Mais les autres ordres d'insectes ne sont pas non plus épargnés; un
certain nombre de Coléoptères, d'Orthoptères, d'Hémiptères, d'Hyménoptères et de Diptères sont les
victimes de la voracité des Chalcidiens. Les espèces d’un même genre de cette famille s’attaquent
souvent à des Insectes bien différents; mais chaque parasite semble, dans le plus grand nombre de
cas, avoir une victime qui lui est spécialement destinée. Quelques espèces déposent leurs œufs dans
les galles produites par les Cécidomies et les Cynips, et les larves qui en sortent se nourrissent des
ANNELÉS. — HIYMÉNOPTÈRES. 163
larves renfermées dans les galles où les œufs ont été placés. Le Pteromalus ovulorum éelôt dans les
œufs mêmes de certains Insectes; le P. puparum subit toutes ses transformations dans le corps des
chrysalides et des chenilles de certains Lépidoptères où il vit en société, et il arrive quelquefois, sui-
vant Dalman, que des centaines d'individus de ces parasites sortent d’une seule chenille. Une circon-
stance des plus singulières nous est fournie par des Chalcidiens qui se développent dans le corps
d’autres Insectes eux-mêmes parasites, de sorte que ce sont, en quelque sorte, des parasites de
deuxième ordre.
C’est à l’histoire des Chalcidiens que paraît se rattacher celle de la caprification, procédé qui était
autrefois employé en Orient, et qui ne semble plus y être en usage aujourd’hui, tandis que les Ara-
bes de l'Algérie s’en servent encore. Ce procédé consiste à placer sur les figuiers cultivés des figues
sauvages, dont la maturité est accélérée par la piqüre de certains Ghalcidiens que-l’on rapporte au
genre Blastophaga et à l'espèce que Linné nommait Cynips psenes. Ces Insectes, en s’introduisant
dans les figues cultivées, y transportent avec eux la poussière fécondante, sans laquelle ces fruits
ne müriraient pas, ou au moins ne müriraient qu'à une époque plus reculée. Quelques botanistes
donnent de ce fait une explication beaucoup plus simple et qui nous semble plus rationnelle; ils
attribuent à la piqûre même de l'Insecte la maturité plus prompte du fruit. Quoi qu'il en soit, la
présence des Chalcidiens dans l’intérieur des figues n’est pas encore bien expliquée; on assure aussi
y avoir vu des larves, et par conséquent on dit qu’elles s’y développeraient: mais il n’est pas probable
que la figue elle-même puisse leur fournir leur alimentation, et l'on doit plutôt admettre qu’on y
trouve aussi certaines larves, encore peu connues, qui leur servent de pâture.
On comprend facilement que les Chalcidiens, et autres Hyménoptères essentiellement zoophages,
rendent d'importants services à l'agriculture et à l’horticulture, en détruisant chaque année une
quantité innombrable d'espèces phytophages, telles que des chenilles et autres larves; de là vient
aussi fréquemment que des arbres et des plantes rongés durant certaines années par ces espèces
phytophages s’en trouvent parfois presque complétement débarrassés les années suivantes, parce
que le nombre des parasites a considérablement augmenté. Mais il arrive aussi souvent que ces pa-
rasites périssent faute de pâture, et que les espèces phytophages reparaissent de nouveau en aussi
grande quantité qu'auparavant. C’est ce qui explique la variation très-grande remarquée d'une
année à l’autre dans le nombre des Insectes nuisibles aux végétaux.
Les larves des Chalcidiens sont de très-petits Vers dépourvus de pattes, blanchâtres et d'une con-
sistance charnue; elles sont ovalaires, allongées, avec l'extrémité postérieure amincie et de légères
traces d’articulation. Les nymphes n'offrent rien de bien particulier. A l'état parfait, ces Insectes
se trouvent en très-grand nombre sur les plantes de diverses familles, surtout dans les bois; pres-
que tous sont d'une taille très-exiguë. Aussi a-t-on beaucoup négligé les espèces exotiques, dont
peu ont été décrites; on ne connaît guère que des espèces européennes, dont les mœurs de plusieurs
ont été étudiées.
Un grand nombre de travaux ont été publiés sur les Chalcidiens; nous citerons seulement ceux
de Swederus, Kirby, Boyer de Fonscolombe, Spinola, Dalman, Bohemann, Nees d’'Esenbeck,
Ljungle, Panzer, Tourette, Klug, Schrank, Gravenhorst, Treviranus, Erichson, et de MM. West-
wood, Haliday, Walker, Guérin-Méneville, É. Blanchard, Aug. Brullé, etc.
La classification des Chalcidiens est encore peu arrêtée, et leur histoire est aujourd'hui, pour
ainsi dire, une science toute anglaise. Le nombre des genres admis par les auteurs est excessive-
ment considérable, aussi ne pouvons-nous pas les caractériser tous, et nous bornerons-nous à faire
connaître les principaux. Nous suivrons dans cette énumération le catalogue de Bristish Museum,
intitulé List of Chalcidites, publié en 1846 par M. Walker. D'après ce travail, nous partagerons
ces Insectes en onze groupes correspondant aux genres principaux.
4% groupe, Leucospines, à ailes antérieures pliées en long pendant le repos et offrant une
cellule radiale; corselet grand, en carré transversal; cuisses postérieures renflées et dentées en
dessous; tarière presque aussi longue que l'abdomen, remontant sur le dos. Deux genres seulement
entrent dans ce groupe, ce sont ceux des : LEUCOSPIS, Fabr., et MARRES, Walker. Le premier,
qui seul doit nous occuper, renferme un assez grand nombre d'espèces, toutes de grande taille pour
des Chalcidiens, et propres au midi de l'Europe, au nord de l'Afrique et à l'Orient. Ce sont des
164 [HISTOIRE NATURELLE,
Insectes noirâtres, ornés de taches jaunes ou rouges, et ressemblant un peu par ce système de colo-
ration, ainsi que par la disposition des ailes, à de petites Guêpes; les femelles déposent leurs œufs
dans les nids de certaines Chalicodoma et Vespa.
2° groupe, CHaLcinines, à farière située sous l'abdomen comme dans les groupes suivants; cuisses
et hanches de derrière grandes; jambes postérteures arquées; corselet en carré transversal; ailes
antérieures sans pli longitudinal, à nervure médiane courte, quelquefois bifurquée. On place dans
ce groupe un grand nombre de genres et d'espèces : celles-ci sont d'assez grande taille, et se ren-
contrent dans presque toutes les parties du monde, principalement en Europe. Les genres admis
par les auteurs sont ceux des : SMIERA, Spinola; CHALCITELLA, Westwood; EPITRANUS, Walker;
CHALCIS, Fabr.;, PHASGONOPHORA, Westw.; CONURA, Spin.; HALTICELLA, Spin.; DIRHINUS,
Dalman; NOTASPIS, Walker; AGAMERION, Haliday; HOCHERIA, Castelnau; BRACHYMERIA, West-
wood. Le genre CHALCIDE (Chalcis) comprend d’abondantes espèces, parmi lesquelles celles de
notre pays paraissent à la fin de la belle saison; elles vont déposer leurs œufs dans les petites che-
nilles nouvellemont éeloses : au printemps suivant les larves grossissent en même temps que les
chenilles, et quand elles ont pris tout leur accroissement, elles se filent une petite coque soyeuse
auprès de la depouille de leurs victimes, et y subissent leur transformation en nymphe. On a vu des
Chalcis sortir d'une chrysalide de Danaïde d’après Klug; suivant Audouin, la C. minuta vit aux
dépens de la Tortrix de la vigne; enfin Réaumur rapporte qu’une Ghalcide infecte souvent les nids
de la Chartcrgue cartonnière. Nous représentons le CHALCIDE À PIEDS ÉPAIS.
3° groupe, Eurvromnes, à corselet également grand et transversal sur le dos, mais à cuisses pos-
térieures simples, et jambes de derrière peu arquées; antennes des mâles ayant un article de moins
que celles des femelles, qui en ont douxe : premier sétacé, les autres en massue; abdomen com-
posé de sept segments; tarière un peu saillante. Un seul genre, celui des EURYTOMA, Illiger, entre
dans ce groupe, et a été lui-même partagé en plusieurs subdivisions, telles que celles des SYSTO-
LES, Walk.; ISOSOMA, Walk.; DECATOMA, Spin.; EPIMACHRUS, Walk.; ce sont des Insectes nom-
breux en espèces, surtout européennes, de couleur noire, lisses et brillants; ils vivent dans le corps
des larves d’autres Hyménoptères parfois parasites eux-mêmes.
4 groupe, Taorymines, ressemblant aux précédents par le corselet et l'abdomen, mais chez les-
quels les ailes antérieures ont la nervure stigmatique très-courte, arquée, avec l'extrémité fourchue
et sa branche inférieure allant gagner le stigma. Un petit nombre d'espèces européennes et exoti-
ques comprises dans les genres MEGASTIGMUS, Dalman; PALMON, Dal.; THORYMUS, Dal.; MONO-
DONTOMERUS, Walk.; DIOMORUS, Walk.; ORMYRUS, Westw.: CALLINOME, Spin. Les Ce de
ce dernier groupe pondent leurs œufs dans les larves des Cynips et autres habitants des galles,
qu'elles savent atteindre avec leur longue tarière.
5° groupe, Evcnarinives, à antennes petites, composées d'articles courts, serrés, parfois flabellés;
à métathorax très-développé, renflé ou convexe ; à écusson renflé, souvent épineux; à pattes gré-
les, etc. Genres : CHIROCERUS, Latr.; EUCHARIS, Latr.; THORACANTHA, Latr.; GALEARIA, Brul, ;
SCHIZOSPIDIA, West.; PERILAMPUS, Latr.; PSILOGASTER, Blanchard; CRATOMUS, Dal.; renfer-
mant des espèces des diverses parties du monde, dont les habitudes sont peu connues. Nous don-
nons la figure du PsyLOGASTRE À PIEDS PALES, ainsi que celle du CHIROCÈRE FOURCHU.
6° groupe, Acaonines, ayant une fosselte occipitale derrière la région des antennes; à nervure
stigmatique longue, oblique aux ailes antérieures; à cuisses antérieures et postérieures souvent
renflées et comprimées. Genres : AGAON, Dalm.; IDARNES, Westw.; BLASTOPHAGA, Grav.; SYCO-
PHAGA, Westw.
7° groupe, Srarancinés, à téte plus longue que large, à antennes insérées près de la ue à
corselet ayant son dos plus étroit en avant, à pattes simples. Genres : SPALANGIA, Latr., EROCE-
ANNELÉS, —. JIYMÉNOPTÈRES. 165
PHALA, Westw.; CHRYSOLAMPA, Noés; LÆSTHIA, Hal.; THEOCOLAX, Westw., dans ce dernier genre
les ailes sont rudimentaires ou nulles, et les segments alifères du corselet sont peu développés.
8° groupe, PréRoMALIDÉS, à téte velue, de même que le corselet qui est court, transversal, plus
large dans le mâle que dans la femelle; à antennes n'ayant ordinairement que treixe articles, fili-
formes dans les mâles, en massue duns les femelles; à abdomen pédiculé ou sessile : cylindrique,
linéaire, spatulé dans les mâles: ovale, presque linéaire, pointu dans les femeiles; à jambes droites,
armées d'épines à l'extrémité; parfois élargies dans les mâles; à tarière rarement saiilante. Gen-
res : ASAPHES, Walk. ; MACROGLENES, Westw.; CALYPSO, Haliday; PIRENE, Haliday; GASTRANCIS-
TRUS, West., ou MISCOGASTER, Walk.; UROLEPIS, Walk.; MEROMALUS, Walk.; RHAPHITELUS,
Walk.; PSILONOTUS, Walk.; ORMOCERUS, Walk. ; CYRTOGASTER, Walk., ou CHRYSOLAMPUS, Neës;
PACHYLARTHRUS, Walk. (Phagonia, Gurtis; Phascotomus, Neés); DICYCLUS, Walk.; TOXEUMA,
Walk.; SPHEGIGASTER, Spin., ou MERISMUS, Walk.; PROSODES, Walk.; SYNTOMOPUS, Walk.;
MEGORISMUS, Walk.; PANSTENON, Walk.; PAPHAGUS, Walk.; CORYNA, Walk.; LAMPROTATUS,
Westw.; SELADERMA, Walk.; SEMIOTUS, Walk.; SYSTASIS, Walk.; ISOCYRTUS, Walk.; SPANIO-
PUS, Walk.; PACHYNEURON, Walk.; MICROMELUS, Walk.; MERAPORUS, Walk.; METOPON,
Walk.; METASTENUS, Walk.; EUNOTUS, Walk.; MERISUS, Walk.; DIPARA, Walk.; NORBANUS,
Walk.; EUPSILOCERA, Westw.; PTEROMALUS, Swederus; HETROXYS, Westw.; CHIROPACHUS,
Westw.; MACRONEURA, Walk.; PROSODON, Walk.; TRIGONODERUS, Westw; PROSTENUS, Walk.;
- LELOPS, Walk.; EPISTENIA, Westw.; CEA, Walk.; CHRYSEIDA, Spin.; LYCISCA, Spin.; etc. Parmi
tous ces genres d'Europe ou des pays étrangers, un seul doit nous occuper : c’est celui des Préro-
MALES, dont on a décrit plus de cent espèces, qui ont pour mission de détruire un grand nombre de
chenilles. Le Pteromalus puparum, Fabr., qui est d'un vert bronzé, avec les jambes, les tarses et
le premier article des antennes testacés, a été vu fréquemment sortant de diverses chrysalides de
Vanesses; le P. larvarum, Fabr., qui diffère principalement du précédent par ses pattes entière-
ment jaunes, dévore les chenilles de plusieurs papillons, et est parasite de ia Tortrix de la vigne,
qui est attaquée également par plusieurs autres espèces du même genre. D’autres vivent aux dépens
des Pucerons, des Osmies, des Odynères, des Anthophores, de divers Braconides, etc.
9° groupe, EuPeLmnes, à jambes intermédiaires longues, et à premier article des tarses de la
méme paire très-grand, velu en dessous. Quelques groupes peu nombreux, tels que ceux des CLEO-
NYMUS, Latr.; STENOCERA, Walk.; PLATYNOCHEILUS, Westw.; NOTANISUS, Walk.; CALOSO-
TER, Walk.; EUPELMUS, Dalm.; METAPELMA, Westw.; PRONOPELMA, Westw. Le genre Eupelme
renferme des espèces qui attaquent des larves de Diptères, tel que l’E. Syrphi, Fabr., par exemple.
10° groupe, Excyrrinés, à dos du prothorax peu développé, plus ou moins rétréci en avant; à
antennes composées de plus de huit articles, et à jambes intermédiaires armées d’un fort éperon.
Genres : ERICYDNUS, Walk.; CHILONEURUS, Westw.; CERCHISIUS, Westw.; GERCOBELUS, Hal.;
ENCYRTUS, Dalm.; APHELINUS, Dalm.; COCCOPHAGUS, Westw. — Plusieurs Encyrtes attaquent
divers Hémiptères, principalement des genres Cochenille et Kermès; d’autres vivent aux dépens de
plusieurs Coléoptères, comme la Coccinella septem-punctata; il en est qui se trouvent dans des nids
d'Hyménoptères (Eumenes coarctata.)
11° groupe, Europnines, à dos du prothorax peu développé, plus ou moins étroit en avant; à an-
tennes composées de huit articles, parfois flabellées ou branchues, et à tarses composés de trois ou
quatre articles. Genres : TRICHOGRAMMA, Westw.; PTEROPTRIX, Westw.; ELASMUS, Westw.;
ENTEDON, Dalm.; PLEUROPACHUS, Westw.; EPICLERUS, Halid.; EUDERUS, Halid.; LOPHOCO-
MUS, Halid.;, OPHELIMUS, Halid.; EUPLECTRUS, West w.; ELACHECTUS, Spin.; BELLERUS, Walk.;
PENTACARDIA, Westw.; CIRROSPILUS, Westw.; EULOPHUS, Geoffroy. Ces deux derniers genres
renferment chacun plus de cent espèces; les Eulophes sont de jolis petits Hyménoptères très-
abondants sur toutes les plantes pendant l'été, et qui attaquent surtout les chenilles des Nocturnes
et parfois les larves des Diptères.
166 HISTOIRE NATURELLE.
NEUVIÈME FAMILLE. — PROCTOTRUPIENS.
Latreille et divers entomologistes anglais ont créé un grand nombre de genres de petits Hymé-
noptères assez voisins des Chalcides, dont le groupe des Proctotrupes peut être pris pour type, et qui
constituent la famille des Procrorrurrens ou Procrornurines, également appelés Codrini, Dalm.;
Oxyures, Latreille, et Psilotes, Fallen, qui a pour caractères spéciaux : corps oblong; mächoires
munies de palpes longs et pendants; lèvre supérieure petite; mandibules plus longues que dans les
Chalcidiens; palpes : maxillaires de trois à dix articles, filiformes : labiaux, plus courts, de trois
articles; antennes de dix à quinze articles, filiformes ou épaissies à l'extrémité, plus courtes dans
les femelles que dans les mûles; pattes simples, longues, gréles; tarses en général de cinq articles;
abdomen ovoïde ou conique, terminé dans les femelles par une tarière longue, aiguë ou rétractile;
ailes antérieures pouvant manquer : n'offrant qu'une seule nervure bifurquée, ou méme pas de
nervures.
Fig. 142 — Proctotrupe à pieds rouges.
Les Proctotrupiens ont les mêmes habitudes que les Chalcidiens, et sont également parasites de
divers Insectes; presque tous sont de taille tellement exiguë qu'ils échappent facilement à la simple
vue; ils sont très-agiles, et quelques-uns ont la faculté de sauter. Leurs couleurs semblent ordinaire-
ment obscures, mais observés au microscope, ils paraissent très-jolis : leur corps offre parfois di-
verses nuances bronzées et des ponctuations très-variées : leurs ailes présentent aussi toujours les
reflets les plus brillants de l'iris.On les rencontre sur les plantes, et quelques-uns fréquentent les lieux
sablonneux et chauds, tandis que d’autres se tiennent de préférence sur les végétaux aquatiques.
Très-répandus en Europe, on en a aussi signalé dans les autres parties du monde. On décrit un
grand nombre d'espèces de cette famille, et cependant on ne les a guère observés qu’en Europe : en
Allemagne et en Angleterre principalement.
On a pendant longtemps supposé avec Latreille que les larves de ces Insectes vivaient en terre;
mais plusieurs auteurs modernes ont montré que les femelles déposent leurs œufs dans des larves,
et que les nymphes de certaines espèces se renferment dans des cocons. Diverses espèces font leur
proie de Pucerons, de divers Diptères, tels que des Syrphus, des Cecidomyia, de Gynips parmi les
Hyménoptères, et surtout de plusieurs chenilles de Lépidoptères.
Un assez grand nombre de naturalistes se sont occupés de ces Insectes, sous le point de vue de
leur classification ou de leurs mœurs; nous nommerons seulement Shaw, Kirby, Klug, Dalman,
Jurine, Latreille, Ljung, Walker, Haliday, Nées d’Esenbeck, Erichson, MM. Say, Westwood, Bouché,
Schmidberger, Brullé, etc.
Les Proctotrupiens offrent entre eux une grande diversité de structure, surtout dans les ailes et
dans les antennes; aussi les a-t-on distribués en un grand nombre de genres répartis par MM. Hali-
day et Westwood en six groupes particuliers.
4e groupe, Draprines, à abdomen pédiculé, campanulé; à antennes insérées sur le front, de douxe
à quinze articles; à palpes maæillaires longs, formés de cinq articles. Genres : DIAPRTA; Latr., ou
ANNELES. — HYMÉNOPTÈRES. 167
PSILUS, Jurine; PLATYMISCHUS, Westw.; CEPHALONOMIA, Westw.; ANEURYNCHUS, Westw.;
GALESUS, Curtis; COPTERA, Say; PARAMESIUS, Westw.; BASALYS, Westw.; SPILOMICRUS,
Westw.; BELYTA, Jurine; CINETUS, Jurine; ISMARUS, Haliday; HELORUS, Latr. Le genre Diaprte
comprend un grand nombre d’espèces qui, dans notre pays, se trouvent abondamment sur la terre
et sur les herbes basses, dont quelques-unes, d'après M. Bouché, attaquent les larves de Cécido-
myies et dont les mâles sont remarquables par leurs antennes noueuses et par les bouquets de poils
qu'elles-portent.
2° groupe, Procrornurines, à abdomen à peu près sessile et campanulé, à antennes droites, de
douxe articles, insérées au-dessous du front, dans lesquels on ne range que le genre PROCTO-
TRUPES, Latr., ou CODRUS, Jurine, renfermant de nombreuses espèces européennes, dont quel-
ques-unes déposent leurs œufs dans le corps des larves de Tipules, et qui, par quelques-uns de
leurs caractères, se rapprochent des Chrysidiens. Nous figurons le P. À PIEDS RouGEs.
3° groupe, Gonaropines, à abdomen convexe, non campanulé, avec le dernier arceau ventral
caréné, à antennes droites, de dix articles, à ailes postérieures lobées. Ggs Insectes singuliers sem-
blent se rapprocher, pour quelques-uns au moins, des Scolies, et les femelles de quelques espèces
sont armées d'un aiguillon, ce qui semblerait indiquer que leur place serait peut-être auprès des
Sapiges; ils se nourrissent de chenilles, principalement de Tinéites; le Bethylus fornicarius, Panz.,
est parasite de la Tortrix de la Vigne. Genres : APHELOPUS, Dalm., ou HETERALEPIS, Esenb.;
ANTEON, Jurine; CHELOGYNUS, Halid.; LABEO, Halid.; MYRMEROMORPHUS, Westw.; EMBOLE-
MUS, Westw.; GONOTOPUS, Ljung., Klug; CAMPYLONYX, Westw.; CALYOZA, Westw.; BETHYLUS,
Latr.; EPIRIS, Westw. — Les Gonaropes se font surtout remarquer par leur corps privé d’ailes et
par l’étranglement du corselet, et il serait possible, comme le fait observer M. É. Blanchard, qu'ils
ne soient tous que des femelles de quelques Béthyles; mais leur petitesse extrême rend l'observation
de ces Insectes excessivement difficile.
4e groupe, CÉraPHROoNTIDES, à abdomen subsessile, campanulé, avec le deuxième arceau caréné;
à antennes coudées, insérées près de la bouche; à ailes presque entièrement dépourvues de cellules.
Des genres peu nombreux, comme ceux des : MEGASPILUS, Westw.; MICROPS, Halid.; CALLICE-
ROS, Esenb.; CERAPHRON, Jurine; qui, à l’état de larves, vivent aux dépens des Pucerons, des
Syrphes, etc.
»° groupe, PraryeastÉRIDESs, à abdomen sessile, déprimé, avec le premier arceau campanulé, à
antennes coudées, de dix à douxe articles, insérées près de la bouche. Genres : BÆUS, Halid.; HE-
MISIUS, Westw.; GRYON, Halid.; TELENOMUS, Halid.; THORON, Halid.; XENOMERUS, Halid.;
TELEAS, Latr.; MACROTELEIA, Westw.; CALOPELEA, Westw.; SCELIO, Latr.; SPARASION, Latr.;
PLATYGASTER, Latr.; EPIMECES, Westw.; INOSTEMMA, Halid.; IPHITRACHELUS, Halid. — Le
genre PLarvcasTre est le plus nombreux du groupe : on en connaît plus de cent espèces, ayant sou-
vent à peine 0,001 de longueur. Tous sont de couleurs sombres ou noirâtres, mais très-luisantes,
et remarquables par l’aplatissement de leur abdomen. Leur présence dans diverses localités est un
bienfait; car ils détruisent en quantité considérable les larves de plusieurs Cécidomyies, qui sont
trop fréquemment nuisibles à nos céréales. Les Tezxas, encore plus petits que les Platygastres, vi-
vent, pendant leurs premiers états, dans les œufs de divers Lépidoptères nocturnes, et, ce qu’il y a
de curieux, c’est que l’un d’eux (T. ovulorum, Linné) se trouve au nombre de dix à douze individus
à l’état de larve dans un seul œuf de papillon.
6° groupe, Mywaripes, à antennes insérées au-dessus du milieu de la face, longues, gréles dans
les mâles, en massue dans les femelles, à ailes étroites, velues, avec une très-courte nervure costale.
Genres : MYMAR, OOCTONUS, ANAPHES, POLYNEMA, LITUS, EUSTOCHUS, ANAGRUS et ALAPTUS,
tous créés par M. Haliday, peu nombreux en espèces, propres à l'Europe. Très-remarquables par
leur grande agilité, ces Insectes se trouvent sur les plantes basses, mais on n’en connaît pas les
métamorphoses.
168 HISTOIRE NATURELLE.
DIXIÈME FAMILLE. — ICHNEUMONIENS.
Le genre Ichneumon de Linné et des groupes génériques qui en sont plus ou moins voisins, con-
stituent la famille des Icuneumonienxs ou IcHNEUMONIDES, ayant pour caractères principaux : Corps
étroit, linéaire; mâchoires munies de palpes longs, antennes vibratiles, longues, gréles, filiformes,
très-rapprochées à la base et composées d'un grand nombre d'articles; palpes simples, gréles; ailes
très-veinées, offrant constamment des cellules complètes.
Les Ichneumoniens vivent de la même manière que les Chalcidiens et que les Proctotrupiens;
tous ont des habitudes analogues, et les femelles choisissent toujours des chenilles ou diverses lar-
ves pour y effectuer le dépôt de leurs œufs : ceux-ci éclosent et se nourrissent aux dépens de leurs
hôtes, et souvent d’une chrysalide qui semble pleine de vie, on voit sortir, au lieu d’un papillon,
un ou plusieurs Hyménoptères. Et ce qu’il y a de remarquable, c’est que ces larves insectivores sont
elles-mêmes parfois dévorées par d’autres zoophages. j
Ces Ir.sectes constituent une famille très-considérable, que l’on subdivise souvent en trois tribus
distinctes : celles des Braconpes, Icuneumonipes et Evananes, que l’on regarde même parfois comme
des familles particulières. Ce sont des Hyménoptères d’1ne taille moyenne, d’une forme élancée, et
bien reconnaissables à leurs antennes longues et toujours vibrantes, à leur abdomen attaché au
corselet par un pédicule court, et dans lesquels l'abdomen, chez plusieurs femelles, est excessive-
ment allongé. Les Ichneumoniens sont très-répandus dans toutes les parties du monde, et ils offrent
une grande variété dans le système de coloration, dans l'aspect général et même dans la taille. Mais
les espèces européennes sont presque les seules connues, car on s’est peu occupé de celles des pays
étrangers; toutefois, il y a une dizaine d'années (dans le tome IV de l'Histoire naturelle des Hymé-
nontères, 1846, des Suites à Buffon de l'éditeur Roret), M. Aug. Brullé a donné la description de
plusieurs centaines d'espèces exotiques de ces êtres, principalement d’après la collection de notre
Muséum.
Les services que les Ichneumoniens rendent à l’agriculture sont immenses; leur prodigieuse
multiplication met seule un arrêt au développement excessif des espèces d’Insectes phytophages.
C'est principalement à leur influence, ainsi qu'à celle des espèces des deux familles précédentes,
que le cultivateur doit fréquemment de voir cesser les ravages de certaines espèces dévastatrices.
Ils déploient un instinct vraiment surprenant pour découvrir soit des œufs, soit des larves, soit des
nymphes, qu'ils recherchent pour y placer leurs œufs. Le plus ordinairement chaque espèce n’at-
taque pas indifféremment le premier Insecte qu'elle rencontre, mais choisit toujours la même
proie : c’est là, comme le fait remarquer M. É. Blanchard, un fait bien singulier et véritablement
inexplicable que cet instinct merveilleux, car rien ne dit à la femelle de l’Ichneumonien dans le
corps de quel Insecte elle a passé ?2s premiers états de sa vie.
Beaucoup d'entomologistes se sont occupés de ces Hyménoptères. Gravenhorst surtout, dans son
Ichneumologia europæa (3 vol. in-8°, Breslau, 1829), a fait connaître une immense quantité d’es-
pèces propres à nos pays. Thunberg, Dalman, Trentepohl, Boerner, Marsham, Haliday, Spinola,
Nées d’Esenbeck, Olivier, Curtis, Krichson, Latreille, Iliger, Boyer de Fonscolombe, MM. Dahlbor,
Klug, Westwood, Guérin-Menéville, Wesmaël, Schiodte, Brullé, Léon Dufour, Ratzeburg, Hartig, et
beaucoup d’autres se sont aussi occupés de ces Insectes, soit sous le rapport descriptif, soit sous
celui des mœurs.
4 tribu, Bracoxines : Les palpes labiaux sont de trois articles seulement; antennes n'ayant pas
le petit article rudimentaire qui vient après le second dans les Ichneumonides, et ce dernier article
plus court que le précédent et que le suivant; ailes antérieures n'ayant qu'une nervure recurrente,
et pas de cellule discoïdale externe fermée; abdomen ayant ses deuxième et troisième segments
soudés, et n'étant distingués l'un de l'autre que par une fausse articulation : les trois premiers
segments plus grands que les autres: tarière plus longue ou plus courte que le corps ou entièrement
cactée
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 169
Un grand nombre de Braconides se développent dans des larves de Coléoptères, et surtout dans
celles de Curculionites, de Coccinelles et du Timarcha tenebricosa; d’autres vivent aux dépens des
Pucerons : tels sont ceux d’un genre qui, poùr ce motif, portent la dénomination d'Aphidius; il en
est, en grand nombre, qui font leur proie de Diptères ou des chenilles de Lépidoptères, et divers
d'entre eux vivent même en société nombreuse. On connaît les cocons de plusieurs d’entre eux, et il
en est qui savent le suspendre à un fil de soie. Les femelles de Chalonus, l’un des genres de cette
division, donneraient naissance à des petits déjà parvenus à l’état de nymphes, ainsi que l’a con-
staté M. Léon Dufour; mais ce fait, analogue à ce qui se passe chez les Pupipares, parmi les Diptères, :
a besoin de confirmation.
D’après MM. Wesmaël et Westwood, on peut partager ces Insectes en six groupes :
4e groupe, CxcLosrowes, à chaperon profondément échancré, à abdomen composé de six ou sept
segments, à ailes ayan la deuxième cellule sous marginale ou cubitale grande, mais pouvant man-
quer. Genres : BRACON, Fabr.; HISTEROMERUS, Wesm.; VIPIO, Latr.; MYOSOMA, Brullé; SYN-
GASTER, Brul.; MEGAPROCTUS, Brul.; BINAREA, Brul.; HETEROPTERON, Brul.; ROGAS, Esenb.;
ADEMON, Halid.; EXOTERUS, Wesm.; PELECYSTOMA, Wesm.; HECABOLUS, Curt.; HORMIUS,
Esenb.; CHREMYLUS, Halid.; SPATHIUS, Esenb.; ANISOPELMA, Esenb.; etc. Le groupe le plus
. nombreux de cette division, le genre Bracon, qui en est le type, renferme une grande quantité
d'espèces, propres à l’Europe ou que les voyageurs nous rapportent de toutes les parties du globe:
en effet, M. Brullé a décrit cent vingt-trois de ces derniers appartenant au Muséum. La plupart
sont d’une taille moyenne; leur corps est agréablement nuancé de couleurs vives, et leurs ailes sont
aussi diversement colorées. Durant la belle saison, on les voit voltigeant sur toutes les fleurs, et
cependant très-peu de faits sur leurs métamorphoses, de même que sur leurs premiers états, nous
sont connus. M. Bouché a néanmoins nommé B. nu Cis (Bracon Cis), une espèce qui attaque les Co-
léoptères de ce genre; M. Boudier père, de Montmorency, a signalé deux Braconides sortis de l’ab-
domen des Otiorhynchus lignarius et Barynotus elevatus, et M. Westwood assure que des espèces
de SpaTmiEs et d’AnisoPELMEs pénètrent dans les maisons dans le but de déposer leurs œufs dans le
corps des larves de Ptines qui rongent nos boiseries. Nous représentons le BracoN BICOLORE.
2° groupe, PocymorPxes, à chaperon entier, abdomen de six à sept segments, à vertex ayant la
partie postérieure convexe, et à ailes avec la deuxième cellule sous-marginale grande ou pouvant
manquer. Genres : OPIUS, Wesm.; PERILITUS, Esenb.; METEORUS, Halid.; RHOPALOPHORUS,
Halid.; STREBLOCERA, Westw.; LEIOPHRON, Halid.; ANCYLUS, Halid.; CENTISTES, Halid.; EU-
PHORUS, Halid.;, ICHNEUTES, Esenb.; BLACUS, Esenb.; GANYPHORUS, Halid.; PYGOSTOLUS,
Halid.; HELCON, Esenb., EUBADIZON, Esenb. (dans lesquels on peut distinguer les Calyptus,
Orgilus, Diospilus, Dyscoletes, Cenocælius, Halid.; Aspigonus, Phylax, Proterops, Wesm.; Ma-
crocentrus, Gurt.), et PAXYLLOMA, Brébisson. Tous ces genres, et d’autres que nous n'avons pas
nommés, sont assez nombreux en espèces que l’on trouve partout sur les fleurs.
3° groupe, ARÉOLAIRES, à chaperon entier, vertex et occiput échancrés en arrière, ailes à
deuxième cellule sous-marginale ordinairement très-petite. Genres : AGATHIS, Latr.; MICRO-
DUS, Esenb.; MICROGASTER, Latr.; ACAELIUS, Halid.; MIRAX, Halid.; CARDIOCHILES, Esenb.;
TROTICUS, Serv. — En général, une quantité d'espèces peu considérable représente chacun de ces
genres, si on en excepte toutefois les Acaruis et les MrcrocasrèrEs, qui sont très-répandus dans notre
pays. Ces derniers, surtout le Microgaster glomeratus, Linné, petite espèce noirâtre, avec les pattes
d’un fauve testacé ainsi que les bords latéraux du premier segment abdominal, attaquent les che-
nilles du papillon du chou (Pieris brassicæ), et sous ce point de vue, nous sont très-utiles. Deux
cents chenilles de la Piéride que nous avons nommée, recueillies, dit M.É. Blanchard, avant qu’elles
aient atteint toute leur grosseur, ne donnèrent que trois papillons, et les cent quatre-vingt-dix-sept
autres individus, étant attaqués par des Microgastres, ne purent effectuer leur transformation.
4° groupe, Gryprocasrres, à chaperon entier, partie postérieure du vertex convexe, à abdomen
semblant composé seulement de trois segments : les autres étant cachés, et à ailes à deuxième sous-
4. 22
170 HISTOIRE NATURELLE.
marginale grande ou pouvant manquer. Ces Insectes qui, avec ceux des trois groupes précédents,
constituent les Eunoponres, Wesmaël, à dents ou extrémité des mandibules fermées ou ne se tou-
chant pas, comprennent les genres : SYGALPHUS, Latr.; CHELONUS, Jurine; ASCOGASTER, Wesm.;
PHANEROTOMA, Wesm.; RHITIGASTER, Wesm.; ACAMPSIS, Wesm.; FORNICIA, Brul.; SPINARIA,
Brul., et TRACHYPETUS, Guérin. C’est surtout sur les Ombelliptères qu'en été on voit voler ces
Hyménoptères, et leurs habitudes ont été peu étudiées.
5° groupe, Exopowres, qui ont les dents des mandibules dirigées en dehors et ne se touchant pas:
ces mandibules larges, très-dentées, ouvertes après la mort. Genres : ALYSIA, Latr.; CHASMODON,
ÆNONE, DACNUSA, CHOREBUS et CHÆNUSA, Halid., et CŒLINIUS, Esenb. Ces Insectes semblent
être surtout parasites des Muscides; le genre ALYSIE renferme la plupart des espèces.
6° groupe, FLexiLivenTREs, à abdomen pouvant se replier sous le thorax, pour leur permettre
d'introduire leurs œufs dans le corps de leurs victimes. Genres : APHIDIUS, Esenb., ou HYBRIZON,
Fabr.; EPHEDRUS, PRAON, TOXARES, MONOCTONUS et TRIOXYS, Halid. Presque tous ces Insectes,
et principalement les Apninies, vivent aux dépens des Pucerons, surtout des femelles qui sont
aptères. Linné avait déjà observé ce fait, car il nomma le type de ce genre Ichneumon aphidium;
et Hyménoptère n’a pas plus de 0,0015 de longueur, il est noir, avec le devant de la tête et
celui du corps jaunes; se trouve très-communement dans toute l'Europe, où il attaque surtout
l’Aphis rosæ.
2€ tribu, Icuneumonnes. Les palpes labiaux ont quatre articles; antennes toujours pourvues de
deux petits articles placés à la suite du premier qui est grand; ailes offrant la troisième cellule
discoidale toujours fermée et deux nervures recurrentes; abdomen sessile ou pésonulé pourvu de
huit segments; tarière souvent grande.
Presque aussi nombreux que les Braconides, les Ichneumonides ont le même genre de vie, et
leurs larves vivent aux dépens de celles de presque tous les autres Insectes, mais surtout des che-
nilles de Lépidoptères. On y distingue trois groupes primaires ou types correspondant aux anciens
genres Pimpla, Ophion, Cryptus et Ichneumon, renfermant un grand nombre de genres pour la
plupart créés par Gravenhorst; aussi, dans l'indication que nous allons en donner, ne citerons-nous
pas le nom de ce savant entomologiste à la suite des noms génériques.
1° groupe, Prupzies, à abdomen déprimé dans toute son étendue et sessile; à tarière souvent longue,
mais quelquefois courte ou cachée dans l'abdomen, etc. Genres : RHYSSA, EPHIALTES, PIMPLA, Fabr.;
GLYPTA, LISSONOTA, MENISCUS, Schiodte; POLYSPHINCTA, SCHIZOPYGA, CLISTOPYGA, TRA-
CHYDERMA ; EPIMECIS, Saint-Farg.; ORTHOCENTRUS, EUCERAS, BASSUS ; METOPIUS, Panz., ou
PELTASTES, Illig.; XORIDES, XYLONOMUS, ODONTOMERUS, ECHTHRUS; BANCHUS, Fabr ; WEST-
WOODIA, Brul.; EXETASTES, COLEOCENTRUS, LEPTOBATUS, TROPISTES, AROTES et ACŒNITES.
— Ces Insectes sont essentiellement parasites des chenilles; mais quelques larves d’entre eux atta-
quent certaines Araignées ou des Hyménoptères eux-mêmes parasites. Le genre typique est celui
des Pimpues, qui est très-nombreux, et remarquable par la longueur de la tarière des femelles :
l'espèce principale est la Pimpla manifestator, Linné, assez grande espèce très-répandue en Europe,
dont les larves se nourrissent de diverses chenilles.
2° groupe, OPmionipes, à abdomen comprimé plus ou moins manifestement, à tarière courte et
souvent même peu ou pas visible. Genres : OSPRYNCHOTUS, Spin.; LAPTON, Esenb.; OPHION,
Fabr.; THYREODON, Brul.; OPHIPTERUS, Brul.; PANISCUS, CAMPOPLEX, MACRUS, ATRACTODES,
ONOMALON, PACHYMERUS (Collyria, Schiodte); PODOGASTER, Brul.; CREMASTUS, TRACHYNO-
TUS, PORIZON et HELWIGIA. — Le genre Opion, que nous citerons ‘seulement, est remarquable
par son abdomen en faucille et entièrement aplati sur les côtés. On en connaît plusieurs espèces
européennes, mais les exotiques sont beaucoup plus abondantes; le type est l'O. luteus, Fabr.;
commun dans nos environs, qui a été vu attaquant les chenilles de la Dicranura vinula et de la
ANNELES. — HYMÉNOPTÈRES. 171
Polia præcox. D'autres Ophions vivent aux dépens d’un grand nombre de chenilles ou de larves
d’autres Insectes. Les œufs ont une forme singulière : ils sont oblongs, offrant un long pédicule lé-
gèrement contourné : ils se fendent toujours par le bout opposé au pédicule, et la petite larve qui
en sort dégage d’abord la partie antérieure de son corps, tandis que son abdomen reste engagé dans
la coquille de l'œuf quand elle peut déjà sucer les matières graisseuses de sa victime.
3° groupe, Grypripes, à abdomen à pédicule étroit, allongé, et à tarière longue. Genres : MA-
CROGASTER, Brul.; CRYPTUS, Fabr.; HOPLISMENUS, PHYGADENON, MESOSTENUS; CRYPTA- :
NURA, Brul ; CHRISTOLIA, Brul.; BARYCEROS, NEMATOPODIUS, MESOCHORUS, HEMITELES,
ISGHNOCEROS, PEZOMACHUS, PHYTODIETUS, CYLLOCERIA, PLECTISCUS; HEMIGASTER, Brul.,
et AGRIOTYPUS, Walk.— Plusieurs de ces genres sont très-nombreux en espèces; nous citerons
particulièrement ceux des CrvPTes, qui en renferment beaucoup, toutes propres à l'Europe (voy. la
fig. du CryrTe BIEN RORMÉ, Cryptus formosus), et MÉsosrènes, au contraire, qui en possèdent un
grand nombre d’exotiques.
4° groupe, IcHNEUMONIDES PROPREMENT pirs, à pédicule de l'abdomen plus court que dans les autres
groupes, et à tarière très-courte. Genres : JOPPA, Fabr.; PRISTICEROS, TROGUS; ICHNEUMON,
Linné; ISCHNUS, CRYPTURUS, STILPNUS, BRACHYPTERUS, MICROLEPTES; ALOMYO, Panz.;
MESOLEPTUS; MEGASTYLUS, Schiodte; LABIUM, Brul.; TRYPHON; POLYBLASTUS, Hartig; EXEN-
TERUS, Hartig; EXYSTON, Guérin; EXOCHUS, SCOLOBATES et SPHINCTUS. — Le genre Icuneu-
yon, connu depuis très-longtemps, est l'un des plus abondants de toute la famille, et comprend
particulièrement un très-grand nombre d'espèces propres à l'Europe, dont les larves attaquent sur-
tout les chenilles, ainsi que peuvent le constater tous les entomologistes qui font des éducations de
chenilles pour en obtenir des papillons; en effet, très-fréquemment, au lieu de Lépidoptères, ils
voient sortir des [chneumoniens des chrysalides qu’ils ont obtenues. Nous figurons une espèce de
ce genre (pl. XII, fig. 7), la Joppa ANTENNÉE, femelle.
|
Fig. 443. — Crypte bien formé. Fig. 444. — Bracon bicolore.
3° tribu, Évaxipes. Les palpes labiaux sont de quatre articles; antennes fortes, presque coudées
à partir du deuxième article, ou bien gréles; ailes presque dépourvues de nervures ou en ayant plus
ou moins; à abdomen implanté sur le corselet, pédiculé, presque aussi large que ce dernier; tarière
longue ou presque nulle suivant les genres.
On place dans cette division des genres qui ne vont guère ensemble, mais qui ne seraient peut-
172 HISTOIRE NATURELLE,
être pas mieux placés ailleurs. Le nombre des groupes et espèces d'Évanides n’est pas très-consi-
dérable, mais on en a trouvé des représentants presque partout, quoique assez rarement en Eu-
rope. Ge sont des Insectes parasites; les uns vivent aux dépens des Apiaires, et les autres nous ren-
dent de grands services en détruisant les Blattes.
Nées d'Esenbeck, Dahlbom, Latreille, Audinet Serville, Illiger, Spinola, Klug, Erichson,
MM. Westwood, Guérin-Méneville, Aug. Brullé, etc., se sont occupés de la classification ou des
descriptions de ces êtres. MM. Spence et Kirby, Reid, Arnold, Westwood, Lewis et Stéphens ont es-
quissé l’histoire de leurs mœurs.
Les genres admis par les auteurs sont ceux des : EVANIA, labr.; BRACHYGASTER, Leach (Hyp-
tia, Nig.); FŒNUS, Fabr.; PELECINUS, Latr.; MONOMACHUS, Westw.; AULACHUS, Jurine; STE-
PHANUS, Jurine; MEGISCHUS, Brul.; MEGALYRA, Westw., et CAPITONIUS, Brul. — Trois de ces
genres doivent être spécialement mentionnés : 1° ÉvanIESs, à corps court et abdomen très-court, com-
primé et pédiculé dès la base; répandues partout, de couleur noire, et difficiles à reconnaitre spéci-
fiquement : la seule espèce propre à l’Europe est l’Evania appendigastra, Fabr., que nous repré-
sentons pl. XII, fig. 2, et des espèces exotiques, telles que les E. Desjurdinii, Blanch., minuta,
fulvipes, etc., déposent leurs œufs dans le corps de diverses espèces de Blattes. 2° Srépxanes, dont
le type est le Stephanus serratus, Fabr., de France et d'Allemagne, remarquables par leurs formes
anomales qui les rendent intermédiaires aux Braconides et aux Ichneumonides, tout en offrant aussi
les caractères des Éveniades. 3° Fænes, jolis petits Insectes répandus dans toutes les parties du globe
et rares partout, à corps grêle, antennes d’une extrême finesse, abdomen et tarière très-longs; la
seule espèce d'Europe, le Fœnus ejaculator, Fabr., long d'environ 0,02, noir, avec la base et l’ex-
trémité des jambes jaunes, et le bord des segments abdominaux roussâtre, attaque les larves des
Abeilles, et, dit-on, également celles des Guêpes. — Nous figurons deux espèces de cette tribu : le
Mécisque ANNULÉ (pl. XII, fig. 4), et le PÉLÉcINE poLycératE, mâle (pl. XIF, fig. 6), surtout remar-
quables par les longues soies qui terminent leur abdomen et forment la tarière.
ONZIÈME FAMILLE. — CYNIPSIENS.
Le genre Cynips, de Linné, comprenant des Hyménoptères qui pour la plupart se développent dans
les galles ou excroissances que la piqûre des femelles occasionne sur les feuilles ou sur les jeunes tiges
des végétaux, constitue aujourd'hui la famille des Cvnipsiens, qui a également recu les noms de
Cynipsires, Gazcinsecres et de DipLOLÉPIENS, et qui a pour caractères particuliers : corps oblong; mä-
choires munies de palpes maxillaires longs, de cinq articles : labiaux courts, de deux ou trois;
lèvre supérieure très-petite; mandibules courtes, épaisses, antennes insérées sur le milieu de la
face, filiformes, droites, de treixe à quatorze articles : celles des femelles plus courtes et plus épais-
ses que celles des mâles; tête petite, transversale; corselet large, épais, ovoïde, grand; abdomen
comprimé, un peu pédiculé; ailes : antérieures n'offrant que quelques nervures, une marginale et
deux ou trois cubitales : postérieures n'ayant qu'une seule nervure très-épaisse; tarière des fe-
melles extrémement grêle, roulée en spirale et logée dans l'abdomen, où elle est protégée par deux
valves ou demi-fourreaux.
Jusqu'ici nous avons étudié les Hyménoptères dont les larves vivent de miel et de pollen, celles
qui se nourrissent d'Insectes presque morts, et enfin celles qui se développent dans le corps même
de divers Insectes; les autres espèces qu’il nous reste à passer en revue, et qui sont généralement
distribuées en trois familles, ont un régime exclusivement végétal. C'est à l’aide des dentelures de
l'extrémité de Ja tarière que les femelles de Cynipsiens percent la surface des feuilles, des bour-
geons, ou des jeunes tiges des végétaux et même de leurs racines, pour introduire leurs œufs dans
l’ouverture qu'elle a pratiquée. Il pénètre en même temps, à ce que l’on croit, par cette ouverture
une certaine quantité d’un liquide dont l’action déterminerait la formation de ces excroissances
auxquelles on a donné le nom de galles, dont la nature varie beaucoup selon les espèces qui les ont
occasionnées, et qui sont produites surtout par la surabondance de séve amenée vers la blessure de
la plante. La petite larve, sucant ce qui l'entoure et dégorgeant sans doute un liquide particulier,
ANNELÉS: — HYMÉNOPTÈRES. 173
exeite encore la séve à se porter vers le point qu’elle habite, et il en résulte que la protubérance
végétale augmente de volume en même temps que la larve s'accroît. Il n’est pas rare, durant toute
la belle saison, principalement vers l'automne, de rencontrer fréquemment des galles sur une foule
de végétaux, et plusieurs d’entre elles sont employées avec avantage dans les arts. Telles sont les
excroissances végétales connues sous le nom de noix de galle, qui sont employées à la fabrication
de l’encre et des teintures noires en les mélangeant avec une dissolution d'acide sulfurique ou de
sulfate de fer. De même que nous l'avons dit dans nos généralités sur les Chalcidiens, les Gynip-
siens donnent lieu à la pratique de la caprification, au moyen de laquelle les figues acquièrent
plutôt leur maturité.
Réaumur, MM. Hartig, le colonel re et d’autres observateurs, nous ont fait connaître un
grand nombre de galles formées par des Cynipsiens, qui nous offrent des formes très-variées et
très-remarquables. Les diverses espèces de chênes sont les arbres chez lesquels on remarque le plus
de ces excroissances; mais on en trouve aussi sur les rosiers, le pavot, le blé, le navet, etc. La plu-
part sont sphériques et souvent très-dures, et, d'après leurs dispositions extérieures en forme de
fruits, elles ont recu les dénominations de pommes, de groseilles, de nèfles, etc.; quelques-unes,
irrégulières, couvertes de filaments, que l’on voit particulièrement sur les rosiers, ont été nommées
Bedeguar, Manne chevelue, ete.; il en est qui consistent dans un simple renflement de la surface
de la feuille, et semblent être des espèces de pustules ; des galles, qui ont donné lieu à de grandes
controverses parmi les commentateurs de la Bible, et qui se trouvent sur une espèce de chêne des
rivages de la mer Morte, portant le nom de Mola sodomitica ou insana, sont produites par un
Cynips, et acquerraient la grosseur d’une poire de moyenne taille; enfin des galles rougeûtres, de fi-
gure circulaire, de forme aplatie, occasionnées par la piqûre du C. longipennis, Fabr., ont recu de
Réaumur le nom de galles en champignon. Tantôt les galles sont tantôt habitées par un seul Insecte,
mais tantôt elles en logent un grand nombre, car M. Westwood en cite une dont il est sorti plu-
sieurs centaines d'individus.
Les œufs, assure-t-on, croissent en grosseur en même temps que la galle elle-même. Les larves
qui en sortent sont blanchâtres, apodes, et portent des tubercules charnus qui leur tiennent lieu de
pieds; elles passent cinq ou six mois dans ce premier état, se nourrissant de la substance interne
des galles qui les renferment, sans que celles-ci cessent de croître. Souvent ces larves se transfor-
ment dans l’intérieur des galles, et l’Insecte parfait y passe l'hiver, pour n’en sortir qu’au prin-
temps suivant; quelquefois elles abandonnent les galles après avoir acquis leur grosseur défini-
tive, et se retirent en terre pour y passer à l’état de nymphes. Quand les habitants des galles ont
quitté leur demeure, on voit à la surface de celle-ci les trous qui ont servi au passage des In-
sectes. Souvent aussi il sort de ces galles des Chalcidiens qui ont vécu aux dépens des larves de
Cynipsiens. +
Il paraît, comme on l’a observé dans ces derniers temps, que certains Cynipsiens sont parasites
d’autres Insectes. Tels sont en particulier les Allotria victrix et Cynips erythocephala et fulviceps,
qui déposent leurs œufs dans le corps des Pucerons du rosier; des Figites, qui vivent dans les Musci-
des des genres Syrphus et Anthomyia, etc. Un fait remarquable, et non encore hors de doute, doit
être signalé; il paraît, d’après M. Hartig, que les Cynips proprement dits seraient toujours femelles,
tandis que la plupart des autres groupes montrent des mâles et des femelles. Y aurait-il chez ces
Insectes quelque chose d’analogue à ce qui a lieu chez les Pucerons qui, pendant plusieurs généra-
tions successives, ne donnent naissance qu’à des individus femelles?
Les Cynipsiens, sous les divers points de vue de leur anatomie, de leurs habitudes et de leur
classification, ont été étudiés par Réaumur, Olivier, Curtis, Nées d'Esenbeck, Schæffer et Berg-
mann, Gerbi, Anthoine, Bose, Burgsdorff, Virey, Boyer de Fonscolombe, Dalman, MM. Westwood,
Bouché, Hammerschmidt, Brandt et Ratzeburg, Dahlbom, Erichson, Hartig, etc.
Il est probable que les Cynipsiens abondent dans presque toutes les parties du monde; mais leur
extrême petitesse les a fait échapper aux investigations des voyageurs. Aussi les espèces connues, et
leur nombre n’est pas très-considérable, appartiennent elles presque exclusivement à l'Europe, où
les excroissances occasionnées par elles sur les végétaux ont depuis longtemps attiré l’attention
des naturalistes.
On peut les subdiviser en deux groupes : les Ibaliites et les Cymapsites.
174 HISTOIRE NATURELLE.
4° groupe, Igaznrrs, à abdomen comprimé latéralement en forme de lame de couteau; ne renfer-
mant que le seul genre IBALIA, Latr., qui lui-même ne comprend qu'une espèce (1. cultrellata,
d'Italie), et qui est remarquable non-seulement par la disposition de son abdomen, mais encore par
celle de ses antennes.
Vig, 445. — Cynips tinctorial ou des galles,
2e groupe, Cynipsires, à abdomen ovale, comprenant une quinzaine de genres : ceux des FIGITES,
Latr.; EUCOILA, Westw.; KLEIDOTOMA, Westw.; BIORHYZA, Westw., (Apophyllus, Hartig); ANA-
CHARIS, Dalm.; LEIOPTERON, Perty; PERAS, Westw.; ÆGILOPS, Halid.; OXYCHIA, Halid.; CAL-
LASPIDIA, Dahl.; CYNIPS, Linné; ALLOSTRIA, Westw.; MELANIPS, Halid.; AMPHITECTUS, Hart.
— Deux de ces genres doivent seulement nous oceuper.: 1° les Frcrres, chez lesquels les antennes
des mûles sont longues, sétacées, composées de quatorze articles fusiformes : celles des femelles
plus courtes, de treize articles, plus minces au milieu qu'aux extrémités; V'écusson large, avec
deux cavités ou fossettes à la base; les ailes antérieures à deuxième cellule sous-marginale trian-
gulaire, et la nervure basale presque effacée; l'abdomen ovalaire. On assure que les Figites, dont on
connait un assez grand nombre d'espèces, toutes indigènes, sont des Insectes parasites; ce qui doit
surprendre en raison de leur affinité avec la plupart des Cynips, qui sont essentiellement phyto-
phazes. M. Newman a appelé Figites Syrphi une espèce qui serait parasite du Diptère qui porte le
même nom; M. Bouché a décrit un Figite parasite d’une Authomyie; enfin M. Costa en a signalé
une autre qui vivrait aux dépens des insectes de l’Olivier. 2° les Cyxres, dans lesquels les antennes
sont presque filiformes, composées de quatorze ou quinze articles; 'écusson convexe; les ailes
antérieures grandes, avec une petite sous-marginale triangulaire; Vabdomen court, comprimé en
dessous et tronqué obliquement à son extrémité. Les Cynips sont très-nombreux en espèces et en -
individus, et l’on n’a guère étudié cependant que ceux qui habitent l'Europe. Quelques espèces
doivent spécialement nous occuper. À. Le Cynips gallæ tinctoriæ, Linné, qui habite le midi de
l’Europe et surtout le Levant, produit par sa piqüre la noix de galle du commerce. Il est long d’en-
viron 0,005, d'un fauve pâle avec un duvet soyeux, blanchâtre, des ailes diaphanes marquées de
nervures jaune pâle, et un abdomen fauve présentant une tache noire au milieu. Quand le moment
de la ponte est venu, la femelle fait de petites entailles sur les feuilles du Quercus infectoria, et dans
chaque fente elle dépose un œuf; ces excroissances ne tardent pas à se développer, et la petite larve,
éclose peu de jours après la ponte, s'établit au centre de la noix de galle et se nourrit de la sub-
stance qui l'entoure; il en résulte une petite cavité arrondie dans laquelle elle prend tout son déve-
loppement. Les noix de galle sont de la grosseur de la moitié d’une noix; leur forme est ordinaire-
ment ronde, et narfois pyriforme; leur dureté est très-grande et leur surface d’un gris brunâtre
avec des tubercules plus ou moins prononcés. Un trou circulaire à la surface indique que l'Insecte
en est sorti. On recueille ces galles à différentes époques; avant la sortie de l’Insecte, alors qu’elles
ontiennent plus de matière astringente, elles sont désignées dans les arts sous le nom de galles
noires, bleues, vertes; on nomme, au contraire, galles blanches, celles dont l’Insecte s’est échappé.
Mais peut-être, parmi les galles employées dans le commerce, en trouve-t-on qui appartiennent à
d’autres espèces de Cynips : nous représentons cette espèce. — B. Le Cynips rosæ, Linné, forme ces
galles que l’on voit si abondamment sur nos rosiers; ce sont des excroissances chevelues de couleur
verte qui entourent les tiges du rosier : leur dimension n’est pas moindre de celle d’une petite
pomme ou plutôt d'une nèfle, dont elles rappellent un peu l'aspect; elles paraissent composées
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 175
d’une quantité immense de filaments très-serrés et très-compactes, dont plusieurs ont leurs extré-
mités libres et plus ou moins ramifiées : ces excroissances contiennent plusieurs individus de la
même espèce, qui est souvent attaquée par des Chalcidiens. — C. Cynips DES BAIES DE CHÊNE (Cynips
quercus baccarum, Linné), petite espèce d’un brun clair, qui produit par sa piqûre sur le chêne
commun (Quercus robur) des nodosités arrondies et pellucides placées à la base des feuilles, et que
l'on voit souvent dans les bois de nos environs.— D. Cynips DES PÉDONCULES pu CHÊNE (Cynips quer-
cus pedunculi, Fabr.), long de 0,004, grisâtre, piquant les chatons des fleurs mâles du chêne,
et produisant des galles rondes assez semblables à des grappes de groseilles. — ÆE. Cyxirs pes
FEUILLES DU CHÊNE (Cypnis quercus folii, Fabr.), qui occasionne de petites nodosités sur les nervures
mêmes des feuilles, ete. — Mais il ne faut pas conclure de ce que nous avons dit que les Cynip-
s'attaquent seulement aux arbres, et plus particulièrement à ceux du genre chêne, car il n’est peuts
être pas de feuilles de végétaux qui n’offrent des galles de ces Hyménoptères; mais, dans la plupart
des cas, on ignore quelles sont les espèces qui les produisent.
DOUZIÈME FAMILLE. — SIRICIENS.
Le genre Sirex, de Linné, auquel Geoffroy a appliqué la dénomination d’Urocerus, et trois grou-
pes qui en ont été démembrés, constituent une petite famille d'Hyménoptères qui a reçu les dénomi-
nations de Srricrens et d'UrocÉRIDES, et qui a pour caractères distinctifs : corps long, cylindrique,
plus ou moins déprimé dans les mûles; mandibules courtes, épaisses; mâchoires pourvues de palpes
filiformes; antennes longues, vibratiles, sétacées, filiformes, composées d'un grand nombre d'arti-
cles ; tête presque globuleuse; corselet très-développé, allongé en forme de col; pattes simples : jam-
bes antérieures n'ayant qu'un seul éperon; ailes en général pourvues d’un grand nombre de ner-
vures; abdomen sessile, ayant sa base unie au corselet dans toute sa largeur, et non pas pédiculé
comme dans Ja plupart des autres familles; tarière disposée de différentes manières, suivant les
deux groupes primaires qu’on y forme.
Les Siriciens sont des Insectes en général d'assez grande taille qui, par la forme de leur abdo-
_men sessile, ont pendant longtemps été réunis aux Tenthrédiniens sous le nom commun d'Hymé-
noptères sessiliventres. Ils fréquentent les bois très-couverts, et produisent en volant une sorte de
bourdonnement assez sonore. Les femelles pondent leurs œufs dans les arbres vivants; aussi re-
garde-t-on leurs larves comme exclusivement xylophages; cependant, d’après des observations de
Lepelletier de Saint-Fargeau, Serville et Spinola, il semblerait possible, quoique cela ne soit pas bien
prouvé, que quelques larves de Sirex vivraient, à la manière des Ichneumoniens, aux dépens de
larves de Coléoptères ou de chenilles de Lépidoptéres. Ces larves sont longues, cylindriques, char-
nues, avec les segments plissés en travers; leur tête est petite, privée d’yeux, pourvue de deux
antennes coniques formées de plusieurs articles; leurs mandibules sont fortes et dentées, mais les
autres parties de la bouche sont peu développées; les trois segments thoraciques portent chacun une
paire de pattes inarticulées : les anneaux abdominaux présentent en dessous des saillies charnues,
et le dernier segment est grand et armé d’une pointe en épine de consistance solide. Les larves vi-
vent en général dans l'intérieur des arbres qu’elles percent dans tous les sens, et leur présence
occasionne parfois de très-grands ravages dans les forêts d'arbres verts : c’est ainsi surtout que le
Sirex juvencus perce de très-nombreuses galeries dans les Sapins, et que l’on a cité des milliers de
S. duplex qui sont sortis des planches d'une maison construite depuis trois ans et dont le bois de
construction était supposé venir du Canada, d’où l’on a conelu que ces Insectes auraient mis plus
de trois ans à parvenir à l’état parfait. Lorsque ces larves ont atteint leur entier accroissement, elles
se filent, dit-on, un fin cocon de soie mêlé de débris de bois et de leurs excréments, et placé au
fond de leurs galeries. Les nymphes se transforment en Insectes parfaits, soit au bout d’un mois,
soit l’année suivante, quand la saison est trop avancée. Les deux sexes, à l’état d'insectes ailés,
différent beaucoup sous le rapport des couleurs, et les mâles ont, en vutre, les jambes ainsi que les
tarses postérieurs comprimés d’une manière remarquable. Les espèces connues, encore en petit
nombre, semblent avoir pour patrie l’Europe, surtout vers le Nord, et l'Amérique septentrionale
.
176 HISTOIRE NATURELLE.
Geoffroy a commencé l'étude des mœurs de ces Insectes; MM. Westwood, Raddan, Sell, Klug,
C. Duméril, ete., s’en sont également occupés. Leur histoire zoologique a surtout été l'objet des
études de Klug, qui a publié une monographie du genre Sirex; Fabricius, Latreille, Lepelletier de
Saint-Fargeau et Serville, Spinola, Erichson, MM. Newman, Dahlbom, Foggo, Guérin-Méneville,
Shuckard, etc., ont aussi donné quelques matériaux à ce sujet.
Nous subdiviserons, avec M. E. Blanchard, les Siriciens en deux tribus que quelques auteurs re-
gardent comme constituant des familles particulières.
1e tribu, Oryssires, à tarière capillaire, roulée en spirale dans l'intérieur de l'abdomen de la fe-
melle; ailes offrant un petit nombre de nervures et de cellules; antennes de onxe articles réguliers
dans les mäles, et dans les femelles de dix seulement, dont les quatrième et cinquième sont plus
courts que les autres et le dernier très-gréle. Cette tribu ne comprend que le seul genre ORYSSUS,
Latr., qui, à l'exception des caractères que nous venons d'indiquer, ressemble tout à fait aux Siri-
cites par la forme de leur corps, leurs mandibules robustes, la conformation de leurs pattes, etc.
M. Dablbom les rapproche des Cynipsiens et présume qu'ils vivent dans les galles à l’état de larves;
mais rien de positif ne peut être indiqué à cet égard, car on ne connaît pas leurs métamorphoses.
Les Insectes de ce genre sont très-rares; on les trouve au printemps dans les bois, se posant sur le
tronc des vieux arbres exposés au soleil, courant très-vite sur une ligne droite ou marchant de côté
ou en arrière, et semblant rechercher de préférence les sapins, les hêtres et les chênes. Le type que
nous représentons est l'Oryssus coronatus, Fabr., long de 0",012, d’un noir luisant, à abdomen
rouge fauve, avec les premiers anneaux de la couleur du corps : habite le midi de la France et
l'Allemagne; la seconde espèce, l'O. unicolor, Latr., plus petit que le précédent, à abdomen noir, a
été découvert jadis par Latreille au bois de Boulogne.
2° tribu, Sirteites, à tarière des femelles très-robuste, parfaitement droite, toujours saillante à
l'extérieur, acérée de manière à pouvoir entailler l'écorce des arbres; ailes parcourues par de fortes
nervures; antennes longues, composées d'un plus grand nombre d'articles que celles de la tribu
précédente. Un peu plus nombreux que les Oryssites, les Siricites ne renferment cependant que trois,
genres : Sirexæ, Tremex et Xyphidria.
Le sroupe typique, auquel on pourrait facilement joindre le genre TREMEX, Jurine, ne se distin-
guant que par quelques particularités du système nervulaire, et ne comprenant que quelques espèces
{type T. Servillei, Brullé, de l'Amérique du Nord), est celui des SIREX (Sireæ, Linné) ou UROCÈRE
(Urocerus, Geoffroy), dans lequel les palpes maxillaires sont très-petits, de deux articles. Ces In-
sectes, d'assez grande taille, habitent les forêts de pins et de sapins dans le nord de l’Europe et dans
l'Amérique boréale, et ils s'y montrent quelquefois en quantité si considérable, pendant certaines
années, qu'ils deviennent, assure-t-on, dans quelques pays, un sujet d'elffroi pour le peuple, ce
qu'augmente encore le bourdonnement analogue à celui des Bourdons et des Frelons qu'ils font fré-
quemment entendre. Presque tous les naturalistes ont considéré les Sirex comme xylophages, et
plusieurs d’entre eux, Jurine par exemple, ont décrit avec beaucoup de soin le procédé employé
par les femelles pour déposer leurs œufs dans le tissu même des végétaux; Lepelletier de Saint-
Fargeau et quelques autres entomologistes, ainsi que nous l'avons dit, regardent au contraire ces
insectes comme carnassiers; et par cetle supposition, qui est loin d’être justifée, ils les éloignent
des Tenthrédiniens pour les rapprocher des Pimpla parmi les Ichneumoniens.
Un fait curieux, qui a occupé il y a un an environ l’Académie des sciences (séances des 7 et 14
septembre 1857) et la Société entomologique de France, se rapporte à une espèce de ce genre.
M. le maréchal Vaillant a montré à l’Académie plusieurs paquets de cartouches dont les balles ont
été percées, quelques-unes de part en part, pendant le séjour de nos troupes en Crimée, par un Hy-
ménoptère queM.C.Duméril a reconnu être le Sirex juvencus, Linné. M. C. Duméril pense que ce sont
les femelles qui, à leur état parfait, ont perforé ces balles de plomb avec leur oviducte, de la même
manière qu'elles ont l'habitude d'entamer les tiges de sapins pour y déposer leurs œufs; M. Guérin-
Méneville (Revue zoologique, 1857, n° 9) pense, au contraire, que ce sont les larves qui ont produit
ce dégât, et il appuie son opinion sur ce que l’oviducte des Sirex ne serait pas assez dur pour per
:
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 477
cer un métal, et que l’on sait que les larves des espèces de ce genre peuvent perforer des galeries
dans un bois résistant, à l’aide de leurs mandibules fortes et puissantes. Quoi qu’il en soit, il est
très-probable que les caisses renfermant les cartouches contenaient des larves de Sirex, et que ces
larves elles-mêmes, ou les Insectes qui en provenaient, n’ont attaqué le plomb que parce qu'ils l'ont
trouvé sur leur chemin et qu'ils cherchaient à se livrer un passage à l'extérieur. Du reste les Sirex
ne sont pas les seuls Articulés qui attaquent parfois le plomb; nous avons, en 1844, dans la Revue
zoologique, donné une notice sur quelques perforations faites par les Insectes dans des plaques mé-
talliques, et nous avons rapporté des observat:ons relatives à des Apate capucina, qui avaient
transpercé et même entièrement percé des clichés typographiques. Ce n’est pas le lieu ici de don-
ner des détails sur ce sujet intéressant; nous y reviendrons lorsque nous exposerons dans cette
encyclopédie l’histoire des anciens Coléoptères xylophages, et, pour plus de détails, nous ren-
voyons le lecteur à notre notice, à quelques observations présentées depuis à la Société Entomolo-
gique et relatées dans son Bulletin, aux remarques de MM. Vaillant, G.Puméril et Guérin-Méneville,
que nous avons citées, et à un travail de M. Motschoulsky, publié par extrait dans les Compte
rendus de ? Académie des sciences, année 1858. |
Parmi les espèces assez nombreuses de Sirex, nous citerons : 4° le Srnex GÉANT (Sérex gigas,
Linné), long de 0,009 à 0%,040, noir; tête avec un renflement jaune derrière les yeux; antennes
jaunes, testacées; ailes d’un jaune violacé; pattes testacées; tarière brun roussätre; très-répandue
dans toute l'Europe, dans les forêts d'arbres résineux; et 2° le Srrex souvencEAu, plus connu en
France sous la dénomination d'Unrocère Jouvenceau (Sirex juvencus, Linné; Urocerus juvencus.
Geoffroy), auquel on doit probablement joindre le S. noctilio, Klug, un peu plus petit que le pré-
cédent; corps entièrement d’un bleu violacé foncé; antennes noirtres; ailes diaplanes, légèrement
testacées; pattes d’un jaune roussâtre; tarière noire. Même habitat que le S. gigas.
Fig. 146. — Oryse couronné. Fig, 147. — Xiphidrie fasciéc.
Le second genre, assez distinct des Siricites, est celui des XYPIHIDRIA, Latr., ayant surtout ses
palpes maxillaires longs, de cinq articles. Ges Hyménoptères, qui ont souvent beaucoup d'analogie
avec certains Tenthrédiens, sont de taille moyenne et appartiennent à l’Europe, où ils paraissent
néanmoins assez rares. Leur tête est globuleuse, et, comme elle est un peu séparée du corselet,
principalement après la mort, il paraît exister une espèce de cou. Les femelles déposent leurs œufs
dans le bois, et M. Westwood, qui a vu la larve d'une espèce, la représente comme très-analogue à
celle des Sireæ, quoique d'une taille moins considérable. Le type est le Xypnipr1E GHANEAU (Xyphidria
Camelus, Linné), long de 0,008 à 0,009, noire avec deux lignes blanches sur la tête, une petite
tache triangulaire de la même couleur sur presque tous les serments abdominaux, a été rencontrée
dans toute l'Europe et est cependant très-rare auprès de Paris. Les autres espèces sont les X. dro-
medarius, Fabr., annulata, Latr., fasciata, Saint-Fargeau, etc. : ce dernier que nous représentons.
ps
178 HISTOIRE NATURELLE,
TREIZIÈME FAMILLE. — TENTHRÉDINIENS.
Le genre Tenthredo, de Linné, et une quarantaine de groupes génériques qui en ont été démem-
brés ou rapprochés, forment la famille des Tenrarénixes ou TENTHRÉDINIENS, ayant pour caractères :
corps court, parallèle; mandibules longues, applaties, dentées; mâchoires longues, membraneuses;
palpes : maxillaires de six articles: labiaux de quatre; antennes assex courtes, Composées. de trois
à trente articles, de forme variable, c'est-à-dire sétacées, en massue, ponctuées ou ramifiées; corse-
let grand, plus large que la tête; pattes assex courtes; ailes offrant peu de nervures, et par consé-
quent, de cellules; abdomen arrondi en arrière, composé de neuf segments, tellement joint au cor-
selet qu ‘il semble n'en étre que la suite; tarière des femelles double, mobile, écailleuse, dentelée
en scie, pointue, logée entre deux autres lames qui lui servent d'étui.
La disposition si remarquable de la tarière des Tenthrédiniens a fait donner à ces Insectes le nom
vulgaire de Mouches à scie, dont Latreille a fait celui de Porte-Scie. Les femelles se servent de cette
tarière pour fendre les tiges de végétaux, dans lesquelles elles déposent leurs œufs, répandant en
même temps une sorte d’écume à laquelle on attribue la propriété d'empêcher l'ouverture de se
fermer : ces entailles augmentent promptement de volume et forment, dans divers cas, des excrois-
sances qui servent de domicile aux larves. Dans d’autrés cas, ces dernières, quand elles sont sorties
des œufs, pénètrent dans l’intérieur de la tige, surtout dans de j jeunes branches, et s’y développent
en les rongeant, de telle sorte que ce n’est que quand la larve a pris à peu près tout son accroisse-
ment qu’elle fait tant de mal au végétal, que les branches se flétrissent et se détachent même par-
fois du tronc de l’arbre. Cependant la plupart des T'enthrédiniens vivent dans leur premier état, à dé-
couvertsur les plantes, et se nourrissent de leurs feuilles : ils ressemblent alors beaucoup aux chenilles
par leur forme et leur coloration, mais leurs pattes membraneuses, ou ces mamelons que l’on voit
sur certains anneaux du corps, sont en nombre plus considérable, de quatorze à seize, que chez les
chenilles, où l’on n’en compte jamais plus de dix; en outre, ils sont en général pourvus, comme
ces dernières, de trois paires de pattes écailleuses représentant les pattes de l’Insecte parfait. Jusqu'à
présent nous n'avions pas signalé de larves d'Hyménoptères pourvues d’organes locomoteurs; mais ici
cela était utile pour les larves de Tenthrédiniens, qui vont souvent de feuille en feuille chercher
leur nourriture; c’est en raison de cette organisation que la dénomination de fausses chenilles leur
est assez souvent appliquée. Plusieurs se roulent en spirale et d’autres se relèvent le corps en forme
d'arc quand on les inquiète. Pour se transformer en nymphes, elles se filent une coque soyeuse,
soit dans la terre, soit sur les plantes où elles ont vécu : avant de se changer en nymphes, les lar-
ves restent souvent très-longtemps enfermées dans leurs coques et y passent parfois l'hiver. L'insecte
parfait éclôt toujours très-promptement après son changement en nymphe.
Les Tenthrédiniens, à leur état de reproduction, sont de taille moyenne, peu agiles, si l’on en
excepte les Lydes : ce sont en général des Insectes des régions tempérées, qu'on n’a guère étudiés
qu’en Europe, et qui s’y trouvent sur les fleurs, particuliérement sur celles de la famille des Om-
bellifères. Quoique ces Hyménoptères vivent habituellement du suc des fleurs, certains d’entre eux
sont carnassiers et s’attaquent aux autres Insectes : tel est en particulier le Tenthredo viridis. Ils
sont la proie d’une foule de parasites pendant leur état de larve, et M. Hartig a compté jusqu'à
vingt espèces qui vivent aux dépens du seul Lophyrus pini. Les caractères à l’aide desquels les Ten-
thrédiniens peuvent se reconnattre et se distinguer les uns des autres sont tirés surtout des antennes
et des ailes, et secondairement des pattes et de “quelques autres parties du corps.
Les anciens naturalistes : Goëdart, Geoffroy, Réaumur, de Géer, Vallisnieri, etc., et un grand
nombre de naturalistes modernes, comme Latreille, Curtis, MM. Dahlbom, Hartig, Bouché, West-
wood, Bergmann, Newmann, Bose, Newport, Ratzeburg, le colonel Goureau, etc., se sont occupés des
mœurs, des habitudes et de l'anatomie de ces Insectes; plusieurs des auteurs que nous venons de
citer, auxquels on peut joindre les noms de Klug, Fischer de Waldheim, Fallen, Leach, Say,
Spinola, Erichson, MM. Guérin-Méneville, E. Blanchard, Aug. Brullé, cte., se sont occupés de leur
classification et de la description des genres et espèces s
Fig. LÀ — Chlorion vert d'airain. Fig. 2. — Evanie à appendice ventral. Fig. 3. — Méthoque ichneumonoïde.
Femelle.) N (Mäle.)
Fig. D. — Nil de Fourmi dans l'intérieur
d'un &rbre
Fig. 4. — Megisque annulé. Fig. 6. — Pelecine polycérate
(mäle.)
l'ig. T. — Joppa antennée. (Eemelle }) Fig, 8. — Cèphe abdominal. Fig 9. — Cimbex de Kirby.
A. HYMÉNOPTÈRES PL. 42.
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ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 179
Nous subdiviserons les Tenthrédiniens en six groupes : ceux des Xyélites, Céphites, Lydites, Ten-
thrédites, Hylotomites et Cimbicites, qui correspondent aux principaux groupes indiqués par
M. E. Blanchard.
1° groupe, XveLires, à corps grête, comprimé; à tarière des femelles presque aussi longue que le
corps; à antennes longues, coudées, de treixe articles, dont le quatrième est très-grand et très-fort,
tandis que les suivants sont courts, ne renfermant que le seul genre XYELA, Dalm. On’ n'y place
qu’un petit nombre d’espèces propres au nord de l’Europe (type X. pusilla, Dalm.), dont les larves
vivent, selon Latreille, dans l'intérieur des végétaux ou des vieux bois.
2° groupe, GePniTes, à Corps grêle, comprimé; à abdomen comprimé, avec la tarière à peine
sallante; à antennes longues, composées d'un grand nombre d'articles. Un seul genre, celui des
CEPHUS, Fabr. (4status, Klug), qui a été partagé en trois sous-genres : Crpuus, à antennes un peu
en massue, d'environ vingt et un articles; Janus, Stéph., à antennes fililormes, et Payzzæcus, New-
mann, à antennes légèrement épaissies au delà du milieu, de vingt-sept articles. Les Cèphes sont
peu nombreuses en espèces, toutes européennes. Leurs larves sont molles, avec six petites pattes
écailleuses, leur corps est acuminé à l'extrémité, et les divers anneaux du corps sont privés de
pattes membraneuses; elles vivent dans l’intérieur des tiges de certaines plantes. On a signalé de-
puis longtemps la larve du Cèpue PvGmÉ (Cephus pygmæus) comme vivant dans les tiges du froment,
et y causant souvent des dégâts considérables; et il y a quelques jours (Société Entomologique,
séance du 8 décembre), M. le colonel Goureau a présenté une observation très-intéressante sur la
larve du Cène comprimé (Cephus compressus), qui habite les jeunes tiges du poirier et y fait parfois
beaucoup de mal en tuant les jeunes branches. Nous figurons (pl. XII, fig. 8) une autre espèce de
ce genre le CÈPHE ABDOMINAL.
Fig. 148. — Emprie à taches Fig. 149. — Lophyre du pin. Fig. 150. — Lyda fausta,
de couleurs pâles. (Mâle.)
5° groupe, Lypires, à corps court, épais; à antennes longues, sétacées, multiarticulées. Genres :
LYDA, Fabr.; TARPA, Fabr. (Megalodontes, Latr.); groupe peu nombreux appartenant à l'Orient;
PTERYGOPHORUS, Brullé, fondé sur une seule espèce (bifuciatus) de Van Diemen; et LOPHYRUS,
Latr. (Pteronus, Jurine). Les Lydes et les Lophyres sont les plus importants de ces genres. Dans les
Lvpa, les antennes sont gréles, sétacées, composées, de dix-huit à trente-six articles; ce sont des
Insectes répandus dans toutes les parties du monde, mais ne paraissant abondants dans aucun pays.
Les larves n’ont pas de pattes membraneuses, ce qui ne leur permet d'avancer qu'avec difficulté et
en contractant les anneaux de leur corps; en outre, elles sécrètent, comme certaines chenilles, des
fils qui les aident à marcher, et, lorsqu'elles descendent d'une feuille sur une autre, elles savent se
suspendre par un fil. Ces larves habitent en société sur divers arbres, dont elles dévorent les feuilles,
et chacune se file une loge séparée, mais toutes se trouvent ensemble cachées sous des feuilles re-
tenues par des fils. Quelques-unes d'entre elles ont été décrites; la Lyve pes rorèrs (Lyda sylvalica,
Fabr.), l'une des espèces les plus communes en Europe, noire, avec les antennes et les pattes jau-
nâtres, et à larve jaune à tête noire, vit sur le poiricr; la L. inanita, se nourrit du tremble, d'après
180 HISTOIRE NATURELLE.
M. Westwood; une autre habite le rosier, une dernière espèce est la Lyda fausta, dont nous don-
nons la figure, etc. Dans les LOPHYRUS, les antennes sont multiarticulées, avec deux rangs
de peignes dans les mâles, et en dents de scie dans les femelles. On en connaît un nombre
assez restreint d'espèces, toutes propres à nos pays; le type est le Lopayre pu pin (Lophyrus pin,
Fabr.), long de 0,005 à 0,006 : le mâle noir, la femelle ayant le corps jaune marqueté de noir,
et les jambes ainsi que les tarses jaunâtres; sa larve vit en abondance sur les pins et y occasionne
des dégâts très-considérables : en effet, Ratzeburg assure que cette espèce et quelques autres du
même genre, comme les L. pinastri, juniperi, erythrocephala, ete., ont détruit en Franccnie plu-
sieurs milliers d'actes plantés de pins, et des dégâts semblables, quoique moins considérarables, ont
été observés en France. Les larves dévorent les jeunes pousses des Conifères; elles se filent une coque
soyeuse sur l'arbre même, et jamais elles ne s'enferment dans la terre : nous représentons cette es-
pèce.
4° groupe, TenraRÉDITES, à corps court, épais; à antennes simples, assez courtes, de neuf à
quatorze articles. Des genres assez nombreux, créés principalement d'après la disposition des an-
tennes ou de la nervulation des ailes entrent dans ce groupe, tels que ceux des PERREYIA, Brullé,
ayant pour type et espèce unique le P. lepida, de l'Amérique du Sud; HETERARTHRUS, Stéph.;
PENELLA, Westw.; DRUIDA, Newm., tous trois fondés sur quelques espèces indigènes; DICTYNNA,
Westw., comprenant surtout le D. Westwoodii, Brul., du Brésil; ATHALIA, Leach, qui, parmi un
certain non.bre d'espèces très-communes en Europe, renferme surtout l'A. centrifoliæ, Fabr., qui,
à l'état de larve, vit sur le rosier à cent feuilles, auquel il cause parfois de grands dégâts et qui se
chrysalide en terre; CAMPTOPRIUM et AULACOMERUS, Spin., propres tous deux à la Guyane;
TENTHREDO, Linné, groupe typique sur lequel nous reviendrons, et auquel on pourrait peut-être
joindre les ALLANTUS, Panz.; DINEURA, Dahlb., et PECTINIA, Saint-Fargeau; WALDHEIMIA, Saint-
Fargeau, ayant pour type et espèce unique le W. Orbignyana, Brul., de Bolivia; SELANDRIA,
Leach, dont on a détaché les Pristis, Saint-Fargeau, et Hemichroa, Stéph., qui, comme les DOLE-
RUS, Jurine (sous-genres : Emphytus, Leach, ou Empria Saint-Farg. dont nous représentons une
espèce, l'EMPRIE À TACHES DE COULEURS PALES, et Dosytheus), sont assez voisins des Tenthrèdes; NE-
MATUS, Jurine (auxquels on peut probablement réunir les Messa, Leach; Priophorus, Saint-Farg.
et Crœsus, Leach), qui en sont plus distincts, de même que les CLADIUS, Klug; PRISTIPHORA,
Latr., qui comprennent des espèces qui vivent dans nos pays aux dépens de quelques plantes,
telles que la ronce, l’oseille, ete.; et enfin des genres moins connus, comme ceux des PTERONUS,
Jurine; STEVENIA, Saint-Fargeau; TRICHIOGAMPUS, Hartig, etc.
Parmi nos espèces indigènes nous devons citer quelques coupes génériques. Les Tenrarëpes ont le
corps assez épais, les antennes de neuf articles, et les mandibules dentées intérieurement; elles
constituent un genre nombreux, dont les larves, qui ont dix paires de pattes membraneuses, sont
parfois très-abondantes sur certains arbres, principalement sur le chêne, et sur un grand nombre
de plantes basses : telle est la Tenthredo scrophulariæ, qui dévore la Serophulaire, et dont la larve
se forme une coque en terre au pied du végétal. Les SELANDRIES, à Corps court assez large, à an-
tennes de neuf articles, un peu renflées à l'extrémité, parmi lesquelles M. E. Blanchard a observé
les mœurs de la S. À srernum Noir (Selandria melanosterna, Saint-Fargeau), long de 0,008, jau-
nâtre, à tête et sternum noirs, dont la larve jaunâtre vit sur les peupliers et se file un cocon à la fin
de l’été, d'où l'Insecte parfait sortira au printemps suivant. Les Nemares, à antennes simples et de
neuf articles; mandibules échancrées; à ailes ayant quatre cellules cubitales; on en connaît beau-
coup d'espèces dont les larves vivent à découvert sur les feuilles ou dans des galles produites par la
piqûre des femelles. Quelques-unes de ces larves détruisent les feuilles des saules, où on les trouve
par myriades pendant certaines années, et auxquels elles font de grands ravages, car on a rapporté
en Angleterre que la larve du Nematus capreæ a occasionné en une seule année une perte de cin-
quante mille francs en dévorant les feuilles nouvelles du Saule caprée et en détruisant ainsi les jeu-
nes arbustes. Le Nemare pu sauce (Nematus salicis, Linné), l'un des plus communs dans toute
l’Europe et qui y fait beaucoup de mal, est jaunâtre, avec le sommet de la tête de coweur noire :
sa larve est verte, ornée de séries longitudinales de points noirs. Le N. ochraceus attaque également
le même arbre. Un autre Nemate (N. grossulariæ, Fabr.) vit sur le groseillier et est très-abondant :
ANNELÉS. — HYMÉNOPTÈRES. 181
dans son premier état, il occasionne des dégâts très-considérables dans les endroits où les larves
pullulent, car elles vivent en société, et on en a compté plus de mille sur un seul groseillier; dès le
commencement de l'été, les feuilles sont dévorées à tel point que les fruits ne peuvent plus mûrir :
ces larves sont de couleur verdâtre claire; avec des stries transversales de tubercules piligères, et,
lors de la transformation en chrysalides, elles se filent des cocons, se tenant les unes après les au-
tres; deux fois par année on rencontre les larves de cette espèce, car cet Insecte a deux générations
annuelles. Les CLavres, à antennes de neuf articles, pectinées dans les mâles, renferment plusieurs
espèces indigènes; le type est le Cladius difformis, Latr., noir, avec les pattes blanches, dont la
larve d’un vert pâle avec la tête ferrugineuse, vit dans les Rosiers, surtout dans cc1x du Bengale, et
se mélamorphose dans une coque légère et jaunûtre.
5° groupe, Hycoromires, à corps court, épais; à antennes un peu renflées à l'extrémité, seulement
de trois à sept articles distincts : le dernier très-long et fusiforme. Genres : HYLOTOMA, Fabr.,
groupe typique sur lequel nous reviendrons; PACHYLOTA, Westw., une seule espèce de l'Amérique
du Sud; SCHIZOCERA, Saint-Farg. et Serv. (Ptilia, Saint-Farg.), quelques espèces tant indigènes
qu’exotiques; DIDYMIA, Saint-Farg. et Serv. (Gymnia, Saint-Farg.), qui renferme des espèces étran-
gères à l'Europe, de même que les genres SCOBINA, Saint-Farg. et Serv.; SERICOCERA, Saint-Farg.;
BLASTICOTOMA et CEPHALOCERA, Klug, groupes américains, dont le premier néanmoins comprend
une espèce propre à l'Allemagne.
Les HyLorowes, auxquels on rattache une assez longue série d'espèces, toutes d'assez petite taille,
et pour la plupart européennes, ont pour caractères principaux : antennes un peu en massue al-
longée, n'offrant que trois articles distincts. Le type est l'Hvcorome pe La rose (Hylotoma rosæ,
Fabr.), à tête noire, corselet jaune, sur sa partie dorsale noire ainsi que le sternum et l'abdomen;
pattes jaunes; sa larve, d'un jaune verdâtre pointillé de noir, ronge les feuilles du Rosier, où on
la trouve quelquefois en grande quantité; elle tient son corps relevé.
€° groupe, Cimeicrres, à corps court, très-épais; à antennes renflées er une forte massue, n'ayant
jamais lus de huit articles. Genres : PERGA, Leach, de grande dimentor ei propre à la Nouvelle-
Hollande; SIZYGONIA, PACHYLOSTICTA et PLAGIOCERA, Klug, tous trois propres à l'Amérique du
Sud; AMASIS et ABIA, Leach, genres comprenant des espèces indigènes et ne différant pas très-
notablement du genre typique : celui des CIMBEX, Fabr., sur lequel nous devons revenir.
Les Crusex, surtout reconnaissables à leurs antennes de cinq articles avant la massue, qui, elle-
même est bi ou triarticulée, et à crochets des tarses simples, éperonnés. Ils sont de taiie
moyenne, ont en général le vol lourd et produisent alors un bourdonnement assez fort; leurs
larves sont pourvues de neuf paires de pattes membraneuses, et leur peau est fortement chagrinée;
elles vivent sur divers arbres et sur plusieurs plantes basses, et se métamorphosent dans des co-
cons qu'elles se filent entre les branches. On en connait beaucoup d'espèces; et, comme type,
nous citerons le Cimex saune (Cimbex lutea, Fabr.), jaunâtre, mélangé de violacé brunäâtre, qui
n'est pas rare aux environs de Paris. Nous figurons (pl. XIT, fig. 9) une espèce de ce genre, le
Cimyex DE KiRLY.
Fig. 151. — Guêpe commune. (Voyez page 140.)
189 HAT HISTOIRE NATURELLE.
SEPTIÈME ORDRE. =
HÉMIPTÈRES.
Le nom d'Hémiprères (Hemiptera), tiré des deux mots grecs mure, demi; rrepoy, aile, a été em-
ployé pour la première fois par Linné pour indiquer un ordre considérable de la classe des Insectes;
mais l’illustre naturaliste suédois lui donnait une étendue plus grande que celle qui lui est accordée
depuis longtemps par les entomologistes, et il y comprenait nos Hémiptères actuels et les espèces à
mächoires, qui forment aujourd’hui nos Orthoptères. De telle sorte que les Hémiptères, dont les
types principaux sont les Insecies connus vulgairement sous les noms vulgaires de Punases, de
Cigales, de Pucerons et de Cochenilles, peuvent être caractérisés ainsi d’une manière générale :
ailes membraneuses à nervures nombreuses : antérieures souvent d'apparence cornée dans leur
première moitié; bouche composée de pièces soudées entre elles de manière à constituer un sucoir;
mandibules, mâchoires, lèvre inférieure servant de gaîne, lèvre inférieure qui les protége en des-
sus, ayant la forme de soies grêles.
Comme nous l’avons dit, c’est la particularité que présentent les ailes qui a valu à ces Insectes le
nom d’Hémiptères qu'ils portent généralement; mais comme ce caractère est loin de se retrouver
dans toutes les espèces, Fabricius, et depuis quelques naturalistes, ont voulu leur donner une
autre dénomination, celle de Ruyncores ou Ruvncuores (Rhyngota), tiré de la disposition de la
bouche qui forme une sorte de bec (pvyx0s); néanmoins, si l’on voit chez ces Articulés des élytres
homogènes, soit coriacées, soit membraneuses, on en trouve aussi qui, comme les Pucerons mâles,
n'ont pas de rostre. J
L'appareil buccal a la forme d’un rostre allongé, articulé, cylindrique, arqué ou courbé le
long de la poitrine; il se compose de six parties : la principale, qui représente la lèvre infé-
rieure, a la forme d'une gouttière qui sert de fourreau aux autres organes; dans le sillon qu’on re-
marque sur la face inférieure de cette gouttière, quatre soies roides : les deux inférieures sont or-
dinairement coudées et insérées un peu au-dessous des supérieures qui représentent les mandibules;
les premières sont les analogues des mâchoires; le labre prend la forme d’une pièce triangulaire,
filiforme ou tubulé, qui sert à retenir les soies dans la rainure de la lèvre inférieure; il n’y a pas
trace de palpes. Mais ces organes, dans lesquels on retrouve les parties qui constituent la bouche
des Insectes broyeurs, ne peuvent agir que par perforation et sur des matières liquides; il ne faut
pas croire cependant, comme on le dit trop souvent, que le rostre attire ces fluides par succion, car
la bouche des Insectes, n'étant pas le siége de larespiration, ne peut opérer le vide, et c’est par l'effet
de la capillarité ou par des compressions alternatives que les matières liquides sont forcées de re-
monter dans l’œsophage. D'après ce que nous venons de dire des organes buccaux, on voit qu'ils
ont de l’analogie avec ceux des Lépidoptères, mais aussi on doit ajouter qu'ils en diffèrent par des
particularités secondaires que nous avons signalées. La tête varie beaucoup de forme : elle est
quelquefois hérissée de pointes, prolongée en cône ou cylindrique, ou dilatée en vessie. Les yeux
existent toujours, et l’on voit le plus souvent sur le front deux ou trois petits corps ronds, lisses,
appelés ocelles. Les antennes varient beaucoup de forme et de longueur; le nombre des articles e:t
toujours peu considérable, etne se compose le plus habituellement que de trois, quatre ou cinq. Le
corselet est la partiela plus variable : sa forme régulière est celle d'un hexagone transversal, mais il
peut recouvrir tout l'abdomen et les ailes chez les Membracides, ou bien se renfler en vessie, se
transformer en épine et affecter les formes les plus bizarres. L'écusson, habituellement triangulaire
et petit, invisible dans certains groupes, prend chez d’autres un grand accroissement, au point d'en-
velopper les ailes et l'abdomen. Les ailes sont ordinairement au nombre de quatre : les supérieures
souvent appelées élytres, comme dans les Coléoptères, toujours d’une consistance plus solide que les
l'ig. 1. — Enchopore de Serville.
A mn
LM IS
,
lis.
4. — Euryÿbrachys retourné.
Fig. 5 — Aphane anmabie.
HÉMIPLERES.
ITS
lig. 2. — Pœciloptère phalénoïde
Fig. 5. — Eurybrachys basale.
PL. 16
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 183
inférieures, qui sont le plus souvent transparentes; dans la grande majorité des espèces, c’est-à-dire
chez les Hétéroptères, une partie notable de la longueur des élytres est coriace et bien distincte de
la partie apicale qui est membraneuse; mais chez d’autres, les Homoptères, la texture dés ailes su-
périeures est homogène et seulement un peu plus solide que celle des ailes inférieures. Les ailes
inférieures peuvent manquer, comme dans les Pucerons. Enfin un certain nombre d'Hémiptères ne
présentent ni élytres ni ailes, de même que la Punaise des lits, plusieurs Pucerons, les Cochenilles
femelles, etc. L’abdomen est formé de six, huit ou neuf segments, à bords souvent minces, tran-
chants, relevés sur les côtés et parfois d’une manière très-remarquable. Les femelles sont souvent
armées d’une tarière qui leur sert à déposer leurs œufs; d’autres offrent des appendices floconneux
blancs ou jaunûtres, qui servent probablement à recouvrir les œufs, et qui sont produits par une
sécrétion ciro-graisseuse. Les stigmates abdominaux sont au nombre de quatre à sept paires, sui-
vant le nombre des segments; ils sont toujours placés au côté ventral, en forme de petits trous ar-
rondis, pratiqués dans la substance coriace de chaque anneau et très-près du bord de chaque côté;
ils n’existent pas ou sont très-modifiés dans les Nèpes, qui ont un mode de respiration particulier.
Les pattes sont ordinairement grêles; elles sont comprimées et ciliées dans les espèces aquatiques;
robustes et propres à la course et à la préhension, chez les Réduvites; les pattes postérieures peu-
vent être disposées pour le saut, comme dans certains Homoptères. Les tarses ont presque constam-
ment trois articles.
Les métamorphoses des Hémiptères sont incomplètes, et ressemblent à celles des Orthoptéres, et
l’on pourrait même dire, avec M. É. Blanchard, qu’ils n’ont pas de métamorphoses proprement
dites; car chez eux, pendant toute la durée de leur vie, depuis leur sortie de l’œuf jusqu’à leur état
de reproduction, il n’y a aucune période de repos, d’inaction, comme l’état de chrysalide des Lépi-
doptères ou celui des nymphes des Coléoptères. En général les Hémiptères déposent leurs œufs par
petites plaques; ces œufs offrent à leur sommet une sorte de petit couvercle : quand le jeune Hémi-
ptère doit quitter l'œuf, il s'opère une déhiscence, et cette sorte de petit couvercle, pressé sans
doute par le jeune animal, se détache; et l’œuf est bientôt vide. Quand les larves naissent, elles ne
diffèrent pas beaucoup de l’Insecte parfait; elles n’ont jamais la forme d’un Ver, comme on le re-
marque chez les Coléoptères et les Hyménoptères, ni celle d’une chenille, comme dans les Lépido-
ptères : seulement les pattes et les antennes sont comme emmaillotées; les ocelles et les tarses sont
rudimentaires; les ailes n’existent pas encore. Après trois ou quatre mues, pendant lesquelles sa
taille se développe, la larve passe à l’état de nymphe et commence à présenter des rudiments d’ai-
les; mais, au lieu de tomber dans l’engourdissement et de se cacher dans une enveloppe épaisse,
l’Insecte conserve son activité, continue à grandir et à manger, et, après une semaine environ, ses
divers organes, et principalement ses ailes, ayant acquis tout leur développement, il devient Insecte
parfait et peut reproduire son espèce. Ces transformations ne sont même pas toujours aussi mani-
festes, et dans quelques espèces, la Punaise des lits par exemple, il n’y a véritablement pas d’autres
différences que la taille entre la larve et l’Insecte adulte.
L'anatomie des Hémiptères n’est pas encore entièrement connue, quoique l’on ait de bons tra-
vaux à ce sujet, travaux principalement dus à M. Léon Dufour. Nous n’en dirons actuellement que
quelques mots : on peut dire que leur organisation intérieure est plus simple que celle des Insectes
broyeurs; et surtout que celle des Coléoptères. Le système nerveux est en général très-centralisé;
tous les ganglions, refoulés dans le thorax, sont plus ou moins confondus ensemble, surtout dans les
groupes primaires. On remarque un appareil salivaire développé ordinairement au plus haut degré :
ce qui peut s'expliquer facilement. En effet, quand l'Hémiptère, avec son sucçoir, entame un végétal
ou un animal quelconque, il laisse échapper en même temps une certaine quantité d'un liquide
contenu dans ses glandes salivaires. C’est ce liquide excitant qui amène une plus grande abondance
des fluides vers la partie affectée et qui produit une douleur aussi vive que celle occasionnée par
une piqûre de Punaise ou de Réduve. On connaît l'odeur infecte de certaines Punaises; le liquide
qui répand cette odeur est préparé par un appareil particulier de sécrétion et lancé par un orifice
situé sur les côtés du corselet. C’est la seule défense que ces Insectes peuvent opposer à leurs enne-
mis, car ceux dont la piqûre est cruelle n’exhalent pas en général une odeur sensible. Néanmoins
quelques espèces, chez lesquelles on a constaté l'existence d'un appareil sécréteur, ne répandent
pas d’odeur appréciable, et chez d’autres cette odeur n’est pas désagréable. Cet appareil consiste en
184 HISTOIRE NATURELLE.
une bourse assez grande, placée à la base de l’abdomen, quoique son insertion ait réellement lieu
dans la région pectorale du corselet; l'humeur odorifique est sécrétée par les parois de cette bourse,
et non pas par des vaisseaux particuliers. Les intestins sont en général très-longs, re que devait faire
présumer leur régime presque exclusivement phytophage.
En effet, la plupart des Hémiptères vivent du suc des végétaux. D’autres, au contraire, sucent les
parties fluides contenues dans le corps d’autres Insectes, tels sont les Hydrocorises, les Réduves, etc.
Une espèce, la Punaise des lits, attaque l’homme, et, comme lui, est devenue cosmopolite. Aucun
ne vit dans les matières en putréfaction. Quelques-uns se rencontrent sous les écorces d'arbres ou
dans le sable.
Ce sont en général des Insectes de taille moyenne ou petite, et rarement grande. On en trouve
des espèces partout, mais l'Europe en possède assez peu, tandis que la zone torride en comprend
beaucoup. La Cochenille est le seul Hémiptère dont on retire de l'utilité et qui doit être étudié avec
soin; mais plusieurs doivent être également connus, parce que, au contraire, ils nous sont nuisi-
bles : tels sont les Pucerons, surtout le lanigère, qui causent tant de ravages sur les pommiers; les
Tingis, dont une espèce, appelée vulgairement Tigre, fait tomber les feuilles des poiriers; les Ré-
duves et quelques espèces aquatiques, dont la piqûre est très-douloureuse, de même que celle de Ja
Punaise des lits, ete. Les espèces connues s'élèvent à environ ‘cinq mille; mais ce chiffre serait
peut-être doublé si les entomologistes donnaient à cet ordre l'attention qu'il mérite, soit par les
formes bizarres et variées des espèces, soit par leurs couleurs souvent métalliques et éclatantes.
Fiz. 152. — Pl:gmatoptère vert de Prase.
Les anciens naturalistes se sont peu occupés des Hémiptères; cependant quelques-uns d’entre eux
ont été signalés depuis longtemps. Quelques points de l’histoire de leurs mœurs ont été traités par les
de Géer, Réaumur, Geoffroy, et par quelques auteurs récents, mais il y a encore beaucoup à faire
à ce sujet. Ces Insectes sont bien mieux connus sous le point de vue spécifique; Wolff, Fallen,
Linné, Fabricius, et plus récemment H. Schæffer, Spinola, Latreille, de Hahn, MM. Laporte de Castel
nau, Burmeister, Amyot et Serville, É. Blanchard, Guérin-Méneville, V. Signoret, L. Fairmaire, et
plusieurs autres, ont fait connaître beaucoup d'Hémiptères, soit dans des travaux généraux, soit
dans des monographies ou notices isolées. La classification de ces Insectes ne paraît pas susceptible
de subir de modification bien considérable, les divisions principales que nous nommerons familles,
et que d’autres appellent tribus, ayant pour la plupart des limites assez tranchées qui ne peuvent
pas échapper aux recherches des entomologistes, et qui offrent des caractères très-stables. Ces divi-
sions primaires correspondent en grande partie aux grands genres de Linné, qui ont dû être dé-
membrés, mais qui l'ont été chez les Hémiptères beaucoup plus que dans les autres ordres d'Insec-
tes. En effet, dans l'ouvrage de MM. Amyot et Serville, faisant partie des Suites à Buffon de l'éditeur
Roret, plus de cinq cents genres sont admis, et M. Amyot, dans son travail mononymique sur les
Rhynchotes de France (Annales de la Société entomologique de France, 1845 à 1847), a été beau-
ANNELÉS, ÉMIPTÈRES. 185
coup au delà dans ses subdivisions.En effet, imposant à chaque espèce un nom spécial, unique,
tiré des langues grecque, latine ou orientale, il a en quelque sorte créé autant de genres que d'’es-
pèces. Ce n’est pas le lieu de diseuter ici sur les inconvénients ou les avantages de cette méthode,
qui vient détruire la classification linnéenne, si nécessaire pour aider la mémoire; mais l’on conce-
vra que nous n’avons pas dû la suivre dans la courte analyse que nous allons présenter.
Au-dessus des familles on admet généralement, d’après Latreille, la division des Hémiptères en
deux sections : les Homoptères et les. Hétéroptères, d'après les caractères fournis surtout par les ailes
et l'insertion du bec; quelques auteurs ont même voulu faire de ces sections des ordres particuliers,
mais cette opinion n’a pas été en général adoptée.
Dans les HOMOPTÈRES, le bec naît à la partie inférieure de la tête; le corselet est plus court
que les deux autres segments du thorax; les élytres sont habituellement transparentes dans toute
leur étendue. — Nous y admettrons les familles des Ccccixiens, Apmiprens, Turipsiens, FuLsoriENs
et CIGADIENS.
Dans les HÉTÉROPTÈRES, le bec naît du front; le coselet est plus grand que les deux autres seg-
ments du thorax; les élytres sont coriaces dans leur moitié antérieure et transparentes dans le reste
de leur étendue. — Quatre familles : Néprens, RÉpuviexs, Lycéens et SCUTELLÉRIENS.
Fig 153, — Eurybie langule. Fig. 154. — Acucéphale à trois lignes Fig, 155. — Pangonie à long
i rostre.
PREMIÈRE FAMILLE. — COCCINIENS.
Le genre linnéen des Cocnenizces (Coccus) et quelques groupes qui en ont été distraits par divers
zoologistes constituent la division des Gazzinsecres des anciens auteurs; division que nous indique-
rons, avec M. É. Blanchard, sous la dénomination de Cocuniens, et à laquelle nous assignerons pour
principaux caractères : antennes fiiformes; tarses d'un ou de deux articles; femelles se fixant sur
les plantes pour y couvrir leurs œufs sous une forme analoque à celle d’une galle.
On ne range dans cette famille qu'un nombre assez restreint d'espèces, néanmoins répandues
dans presque toutes les parties du monde, et qui cependant sont loin d’être suffisamment connues.
Les femelles au moins sont constamment privées d'ailes, globuleuses et fixées sur certaines plantes,
avec le bec ou rostre enfoncé uans le tissu végétal d’où elles tirent les sucs propres à leur nourriture;
elles pondent leurs œufs sans se déplacer; puis, après la ponte, elles meurent très-promptement, et
leur corps desséché sert à protéger les œufs et ensuite les larves pendant un certain temps. Ces Hé-
miptères anormaux sécrètent, en plus ou moins grande abondance, une matière cotonneuse ou lui-
neuse, blanchâtre, qui les recouvre en partie. Les mâles sont encore très-peu connus; on a indiqué
comme tels des individus légèrement plus petits et moins boursouflés que les femelles, au reste très-
semblables à elles; mais aussi depuis Linné, et assez généralement tous les naturalistes, se basant
sur les remarques de Geoffroy, de Réaumur, etc., on regarde plutôt comme les mâles, de très-
petits Insectes privés de bec et n’ayant que deux ailes. Cependant cela n’est pas démontré complé-
à. 24
186 | HISTOIRE NATURELLE.
tement, et des observations de M. A. Costa, qui datent de trente ans, mais qui n'ont pas été con-
firmées depuis, tendraient à établir que ce sont de petits Diptères voisins, sinon analogues à des
Cécidomyies parasites des Cochenilles, et dont les larves vivraient dans le corps de ces derniers et
finiraient par les faire périr.
Ces Insectes sont employés dans les arts, et principalement dans ceux qui regardent la teinture;
plusieurs de nos espèces indigènes, comme les Kermès, étaient anciennement en usage et ont été
remplacées depuis par plusieurs Cochenilles étrangères, telles que celles du nopal, qui donnent une
belle couleur poupre. La Cochenille a done remplacé la pourpre des anciens, et peut-être bientôt
sera-t-elle entièrement remplacée elle-même par la garance. Ces Insectes paraissent faire de grands
torts aux arbres qu’ils attaquent : la séve qu'ils absorbent continuellement excite une surabon-
dance de transpiration qui occasionne des nodosités sur l'arbre, et qui l'empêche de porter des fruits.
On a formé quelques genres dans cette famille, et le groupe typique, le seul peut-être que l'on
doive admettre dans cette famille, est celui des :
COCHENILLES. Coccus, Linné : dans la femelle, le corps est épais, globuleux, aptère, formé de
quatorze anneaux bien distincts; les yeux pelits, peu apparents; les antennes courtes, de neuf arti-
cles; le bec court; l'abdomen garni à son extrémité de filets courts; les pattes grêéles, d'égale lon-
gueur, à tarses de deux articles; dans le mdle, les antennes sont longues, de dix articles; le bec
manque; il y a deux ailes transparentes assez grandes; les filets de l'abdomen sont allongés.
Une espèce de ce genre est justement célèbre, e’est la Cocnenizce pu nopau (Coccus cacti, Linné),
d'un rouge carminé, la femelle longue de 0%,002, globuleuse, farineuse, avec les soies caudales
quatre fois plus courtes que le corps, et le mâle, moitié plus petit, ayant les soies abdominales très-
longues. En effet, c’est à cette espèce, qui porte aussi les noms de Cochenille fine et de Honduras,
qu'est due la teinture pourpre et écarlate la plus célèbre dans l’industrie. On en obtient une belle
couleur cramoisie, qui devient écarlate en mélangeant sa décoction avec une solution d'étain au moyen
de l’acide nitro-muriatique; elle donne aussi le carmin de Cochenille dont on se sert pour la peinture.
On l’a employée longtemps sans la connaître; originaire du Mexique, et apportée en Europe sous
forme de petits grains de forme irrégulière, on la prenait pour une espèce de graine ou de fruit
d'une plante. La nature de ce produit entrevu par d'Acosta dès 1530, n’a réellement été définitive-
ment bien connue qu’en 1725. On distingue deux sortes de cette Cochenille, l'une fine, appelée
metèque, parce qu’on en fait la récolte à Metèque, dans la province de Honduras, et qu’on n'obtient
qu'au moyen de soins particuliers pris pour l'élever sur les plantes qu’on cultive pour la nourrir,
et qui est produite par le Coccus cacti; l’autre, nommée Cochenille sylvestre, qu'on recueille
sur des plantes qui croissent naturellement, qui fournit moins de teinture que l’autre, et qui, pour
M. É. Blanchard, constituerait une espèce distincte (C. sylvestris), couverte d'une matière coton-
neuse beaucoup plus abondante que celle qui enveloppe le C. cacti. Pour recueillir la première, les
Indiens plantent et cultivent autour de leurs habitations des nopals (Cactus coccimifera, Linné), sur
lesquels ils élèvent des Cochenilles; ils font plusieurs récoltes dans l’année, et la dernière a lieu
quelque temps avant la saison des pluies, qui est très-nuisible à ces Insectes. C’est alors qu'on coupe
des feuilles de nopal sur lesquelles sont de petites Cochenilles, et qu'on les porte dans les habita-
tions : ces feuilles fournissent une nourriture suffisante aux Hémiptères qui grossissent pendant que
dure cette saison, et qui sont en état de pondre quand elle est passée. Ce sont les Cochenilles qui
ont été ainsi conservées qui doivent être disposées pour fournir la récolte dans la belle saison; on
fait des espèces de nids avec de la mousse, du foin ou de la paille, et l’on met dans chacun d’eux
une douzaine de ces Cochenilles, puis on porte ces nids dans les plantations de nopal et on les
place entre les feuilles; elles s’accouplent et deviennent fécondes pour tout le temps de leur vie;
mais elles n’en conservent pas moins leur propriété tinctoriale, et elles peuvent être gardées plu-
sieurs années sans éprouver aucune altération. M. Burmeister, d’après M. de Humboldt, dit que la
Cochenille du nopal se tire principalement des provinces de Honduras, Guatimala, Guaxaca et Tla-
siala; que le revenu s’en est élevé jusqu’à sept millions quatre cent dix mille florins de Hollande,
pour huit cent quatre-vingt mille livres, chaque livre contenant environ soixante-dix mille Insectes;
mais que cette production a considérablement diminué depuis l’établissement des cultures propres
à la Cochenille dans d’autres contrées, comme à Saint-Domingue, en Espagne, à Cadix, à Malaga et
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 187
à Valence, à Java, ainsi que par la grande extension du commerce d’une autre espèce de Coche-
nille, le Coccus lacca, Kerr., ou C. ficus, Fabr., propre aux Indes orientales, et qui vit sur les
figuiers et donne la gomme laque. Depuis cette époque la culture de la Cochenille du nopal a été
introduite aux îles Canaries, où l’Insecte est redevenu en quelque sorte sauvage sur le nopal; plu-
sieurs essais ont montré qu'il pouvait réussir en Algérie et même en Corse, mais on n’a malheureu-
sement pas poussé assez loin une exploitation qui pourrait être très-avantageuse pour la France.
Nous représentons le mâle (PL. XXV, fig. 1), et nous l'avons rangé dans une planche de Diptères
pour montrer l’analogie qu'il a avec ces Insectes.
Une espèce que l’on place souvent dans nos serres, est le C. adonidum, Linné, qui se trouve sur-
tout sur les Coffea, Justicia, Musa, Canna, ete., et qui est rosée, de forme elliptique, munie d’ap-
pendices de chaque côté avec deux soies terminales très-courtes et épaisses.
On trouve aussi en Europe, sur différentes plantes, plusieurs autres espèces de Cochenilles, aux-
quelles on ne connaît aucune propriété pour la teinture, puisque l’on ne range plus dans le même
genre le Coccus polonicus, Linné. L’orme nourrit une Cochenille (C. ulmi) qui se place surtout
dans les bifurcations des branches qui ont un ou deux ans; vers le milieu de l'été, ces Insectes ont
acquis toute leur grosseur; ils ont alors la figure d’une petite masse ovalaire, d’un brun rougeûtre,
entourée d’une espèce de cordon blanc, cotonneux, qui ne laisse à découvert que la partie anté-
rieure du corps : cette matière forme une espèce de nid dans lequel le ventre du Coccus se trouve
placé, et qui est destiné à recevoir les petits. Ces derniers naissent en juillet; ils marchent vite, s’ac-
croissent lentement, car ils n’ont atteint toute leur grandeur qu’au printemps suivant.
Les Cochenilles ont de nombreux ennemis; et, sans parler du prétendu Diptère que, jusqu'à
preuve du contraire, nous. regarderons comme en étant le mâle, nous citerons plusieurs Chalci-
diens et Ichneumoniens, et des Coccinellides qui les dévorent dans leur pays natal, de même que
chez nous des Coléoptères de la même famille attaquent les Pucerons.
Un autre genre est celui des KERMÈS (Chermes, Geoffr.; Lecanium, Wliger), dans lequel le corps
de la femelle est globuleux, en forme de graine ou de galle, mais à anneaux disparaissant et cessant
d'être distincts, et à antennes de huit articles.
Geoffroy a étudié les mœurs de plusieurs espèces de Kermès qui offrent beaucoup d’analogie avec
celles des Cochenilles; les femelles cependant restent actives beaucoup plus longtemps que ces der-
nières, et ne se fixent que plus tard; les mâles, qui avant leur complet accroissement, ressemblent
tout à fait à de petites femelles, n’acquièrent leurs deux ailes que quand ils sont parvenus au mo-
ment où ils peuvent reproduire leur espèce : c’est sur les arbres, les arbrisseaux et les plantes qui
poussent l'hiver que croissent les Kermès, car il leur faut une plante qui les nourrisse pendant près
d’un an, limite de la durée de leur vie. L'espèce la plus célèbre, nommée vulgairement graine
d'écarlale, est celle qui vit dans toute l'Europe méridionale, sur le chêne vert (Quercus coccifera),
qui pour cela porte le nom de C. illicis, Linné, qui est de la grosseur d’un petit pois, d'une
couleur noire violette, et dont on tirait la couleur rouge qui était la plus estimée avant qu'on
se servit de la Cochenille. Outre son usage, à peu près abandonné aujourd’hui, quoique encore
usité dans quelques parties du Levant pour la teinture, ce Kermès est également employé comme
médicament et entre dans la composition d’un sirop cordial nommé alkerme. — D'autres espèces,
également indigènes, sont les Kermes variegatus, Oliv., propres aa chêne; persicæ, Schr., du poi-
rier, tiiæ, Lin., du tilleul; aceris, du hêtre; coryli, du coudrier; hesperidum, des orangers, Citron-
. miers et myrtes : c’est sur cette espèce que portent les observations de M. Costa, qui pense que les
mâles ne différent des femelles que par leur petitesse, et que les Insectes à deux ailes qu'on a désignés
comme eux sont des Diptères parasites qui ont la même couleur rougeàtre, etc.
Quelques genres moins connus sont ceux des : 1° ASPIDIOTUS, créé par M. Bouché, pour cinq
espèces européennes découvertes par lui, et qui vivent, nerii, sur les lauriers-roses et les arbousiers;
rosæ, sur la rose à cent feuilles; lauri, sur le laurier noble; echinocacti, sur plusieurs échinoco-
ques; palmatum, sur le palmier. 2° PORPIHYROPHORA, Brandt, comprenant surtout la CocRENILLE
DE Porocxe (Coccus polonicus, Linné), à corps d’un rouge sanguin, les femelles n'étant pas globu-
leuses, qui se trouve dans une grande partie du nord de l’Europe, et vit sur la racine du Scleran-
188 HISTOIRE NATURELLE.
thus perennis; cette espèce faisait autrefois une grande branche d'industrie pour la Pologne, avant
que la vraie Cochenille ait été importée: sa couleur est presque aussi belle, mais un peu plus
obscure; aussi n'est-elle pas aussi estimée, quoiqu’on l'emploie encore aujourd’hui en Pologne et en
Russie pour la teinture de différentes étoffes; une autre espèce du même groupe, employée égale-
ment pour la teinture en Arménie, est le P. armeniacus, Burm., qui se nourrit de Graminées du
genre Poa. 3° MONOPHLEBUS, Leach, ou CHIRONOMUS, Fabr.; groupe dans lequel les mâles sont
remarquables par leurs antennes de vingt à vingt-cinq articles, dont le type est le C. dubius, Fabr.
(atripennis, Burm.), qui provient de l’île de Java, et qui comprend également une espèce euro-
péerne (M. fuscipennis, Burm.) découverte auprès de Berlin.
DA
Fig. 156. — Cochenille du hêtre. (Mäle.) Fig. 157. — lorphyrophore polonais. (Mile.)
Fig. 159, -— Cochenille adonidum: Fig. 160, — Monophlèbe à élyres Fig. 164. — Porphyrophore polonais.
(Femelle.) brunes. (Femelle.) (Femelle.)
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 189
On doit probablement ranger dans la même famille, quoique se rapprochant aussi de Ja suivante,
le genre :
ORTHÉZIE (Orthezia, Bosc), ou DORTHESIA de la plu; art des auteurs, à antennes filiformes, de
neuf articles dans les mâles et de huit seulement dans les femelles; à corps couvert de fascicules
lamelliformes et velus, avec les faisceaux postérieurs plus longs que les autres dans les femelles; à
extrémité abdominale munie seulement de bouquets de poils dans les mâles, et à tarses n'ayant
qu'un seul article. Les Orthézies se distinguent surtout en ce que les femelles ne se fixent pas
comme celles des Kermès et ne forment pas une sorte de galle destinée à protéger les œufs et les
larves, mais qu’elles restent actives après comme avant la ponte, et toujours couvertes d’une ma-
tière blanche et laineuse, qui s’enlève au moindre attouchement.— L'espèce typique de ce groupe est
l'Aphis urticæ, Linné (Coccus characias, Orthez), long de 0,002 à 0,003, d’un brun ferrugineux
dans tout ce qui n'est pas couvert par une matière blanche; abondant, dans le midi de la France,
et se trouvant même auprès de Paris, sur l’euphorbe (Euphorbia characias), l'ortie, le groseillier,
le géranium, etc., et sur laquelle Bose et l'abbé Orthez ont publié d'intéressants détails. De même
que pour le Coccus cacti, nous avons donné, dans une planche de Diptères (PI. XXVIE, fig. 4), la
figure du mâle de vette espère. — Un genre voisin de celui-ci, et découvert à la Nouvelle-Hollande,
a reçu de M. Guérin-Méneville le nom de CALLIPALPUS (espèce unique : C. Westwoodii).
DEUXIÈME FAMILLE. — APHIDIENS.
Le genre Puceron (Aphis, Linné) et quelques groupes qu’on en a démembrés forment la famille
des Apmintens, que M. É. Blanchard caractérise surtout par ses {arses de deux articles et par ses an-
tennes composées de cinq articles.
Ainsi composée, cette famille ne comprend qu’une quantité peu considérable d'espèces, toutes de
très-petite taille, qui semblent répandues sur presque toute la surface du globe, qui n'ont guère été
étudiées qu’en Europe, et qui, pour la plupart, sont très-nuisibles aux végétaux. Leurs habitudes
. sont très-intéressantes à étudier, et comme elles différent très-notablement, de même que leurs ca-
ractères, dans trois groupes primaires ou tribus : celles des Azevronines, Apnipines et PsyLLipes,
c’est en traitant de ces divisions que nous exposerons les généralités que nous ne pourrions donner
maintenant d’une manière complète.
Fig. 162. — Aleyrode de la grande éclaire.
4% tribu, Azeyronines, à élytres et ailes ovalaires, presque égales, de consistance opaque : les pre-
mières offrant une seule nervure; corps farineux; antennes filiformes, composées de six articles :
le second très-long, les troisième et cinquième d'égale longueur; yeux échancrés; ne comprenant
que le seul senre ALEYRODES, Latr. (tiré du mot grec #}eupov, farine, et qui par conséquent devrait
s’écrire Aleurodes, comme le fait remarquer M. Burmeister), qui lui-même ne renferme qu'une
190 - HISTOIRE NATURELLE.
seule espèce (À. chelidonii, Latr.), indiquée par Geoffroy, sous la dénomination de PrraLène cuur-
CIFORME DE L'ÉCLAIRE, très-Commune dans toute l’Europe et surtout aux environs de Paris, pendant
toute l’année, et dont les larves vivent sur la grande éclaire (Chelidonium majus) et sur le chou
(Brassica oleracea). Gette espèce est de très-petite taille, car sa longueur ne dépasse pas 0,002;
d’un jaune rougeâtre, couvert d’une poussière farineuse; élytres et ailes blanc farineux mat, avec
une teinte rosée et quelques taches brunes. C’est un Insecte très-singulier par ses métamorphoses,
et qui n'appartient peut-être même pas à l’ordre des Hémiptères; les larves sont très-différentes des
Insectes parfaits; les nymphes sont immobiles et abritées par la dépouille des larves; les deux sexes,
à l’âge adulte, sont pourvus de quatre ailes. Réaumur a donné d'intéressants détails sur l’Aleyrode,
et nous en extrayons les passages qui vont suivre. Ces Insectes ne paraissent à la vue simple que
comme de gros points blancs; ils semblent n'avoir aucun goût pour les fleurs, et se tiennent contre
le dessous des feuilles dans lesquelles la pointe de leur bec est ordinairement piquée, la poussière
blanche qui recouvre les ailes est semblable à de la farine et disposée comme de petits flocons d'une
matière cotonneuse; le corps, les antennes et les jambes sont aussi couverts de cette poudre blanche;
ils ne volent guère qu’au crépuscule, et restent immobiles sur les feuilles pendant le jour. La
ponte se compose d’une douzaine d’œufs, qui sont d’abord transparents, quoique parfois recouverts
d’une poudre blanche, mais qui prennent bientôt une teinte jaunâtre; au bout ‘d’une douzaine de
jours, les larves éclosent, croissent rapidement, tout en ne bougeant pas de place et changeant plu-
sieurs fois de forme; les nymphes restent immobiles et se forment une couverture des dépouilles
de la larve. Réaumur fait remarquer qu’au moyen de générations multipliées de ces Insectes, plus
de deux cent mille individus peuvent, dans la même année, devoir la naissance à une seule femelle.
Il y a des larves qui sortent des œufs tous les mois; on a vu, dans les mois de décembre et de jan-
vier, après des gelées assez fortes, de même qu’en été, sur la même feuille d’éclaire, des Insectes
parfaits, des œufs, des larves dans le premier état, d’autres après le premier changement de peau,
et des nymphes. L’accroissement de l’Insecte dans ces différents états se fait pourtant plus lente-
ment en hiver qu’en été; mais, si l’on suppose seulement qu’il y ait sept générations par an, dans sept
mois consécutifs, pendant lesquels l’air est chaud ou tempéré, et qu'elles soient chacune précisément
d’un mois; si l’on suppose encore que chaque génération produise dix Insectes, et qu'il y ait parmi
eux autant de mèles que de femelles en état de pondre, on aura, au commencement d'avril, cinq
femelles qui donneront cinquante œufs. En suivant ce calcul, on aura, à la fin de septembre, une
septième génération de cent cinquante-six mille deux cent cinquante; si on prend la somme de
tous ces Insectes, en ajoutant les mâles, on en trouvera cent quatre-vingt-quinze mille trois cent
dix, et elle serait même de plus de deux cent mille, parce qu'on a mis le nombre des œufs au-des-
sous du terme moyen. Mais l’on doit cependant observer que le nombre des Aleyrodes, quoique
très-considérable, ne peut pas l'être autant que nous venons de le dire, car plusieurs Causes ten-
dent à détruire beaucoup de ces êtres, et plusieurs parasites des ordres des Coléoptères, Hymé-
noptères et Diptères en empêchent une quantité notable d'arriver à l’âge de reproduction.
2° tribu, Aruinines, à élytres et ailes infléchies, diaphanes, parcourues par plusieurs nervures:
corps ovalaire; tête élargie; antennes plus longues ou plus courtes que le corps, de cinq à sept arti-
cles; rostre presque perpendiculaire ou incliné, formé de trois articles distincts; yeux proéminents,
souvent globuleux; corselet très-petit; pattes simples, allongées, à tarses ayant leur dernier article
muni de deux crochets.
Les Aphidiens, ou, pour employer un nom plus vulgairement employé, les Pucerons, sont extré-
mement nombreux en espèces; toutes vivent en famille; chaque végétal en nourrit une espèce par-
ticulière et quelquefois même plusieurs, quoique l’on puisse rencontrer, quoique assez rarement, le
même Puceron sur des plantes différentes, mais seulement quand elles sont de la même famille et
ont entre elles une grande analogie. Le nombre des espèces connues, que l’on n’a guère étudié
qu'en Europe, ne s'élève qu'à une centaine, et ce n’est très-certainement qu'une bien faible
fraction de la quantité qui doit être répandue dans tout le monde, car d’après les quelques espèces
qui ont été rencontrées dans les contrées très-éloignées les unes des autres et situées sous des lati-
tudes très-différentes, on ne doit pas supposer que l’Europe seule en est pourvue : ce sont au con-
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. "49
traire des parasites attachés aux végétaux, et qui, d’après les lois de la nature, doivent très-proba-
blement accompagner les plantes partout où elles croissent.
En effet, les Pucerons vivent aux dépens du végétal sur lequel ils passent toute leur existence; ils
restent tous à la partie inférieure des tiges ou des feuilles, de manière à se trouver abrités des in-
tempéries des saisons et surtout de la pluie. Immobiles pendant des journées entières, ils sucent
continuellement la séve de la plante qui leur sert d'asile, et ils occasionnent ainsi des excroissances
considérables, qui finissent par amener la perte du végétal, ou tout au moins qui leur causent un
grand mal. Beaucoup d'arbres fruitiers, surtout les pommiers et les poiriers, sont infectés de ces
petits êtres, qui, absorbant continuellement leur suc, produisent des nodosités très-considérables,
qui fatiguent l’arbre, l'empêchent de porter des fruits et le font mourir en peu d'années. Leur mul-
tiplication est énorme et presque aussi considérable que celle des Aleyrodes; aussi, pour rétablir un
juste équilibre, ont-ils un grand nombre d'ennemis qui travaillent sans cesse à leur destruction. Il
est rare de rencontrer une plante qui nourrisse des Pucerons sans voir au milieu d’eux des Cocci-
nelles qui, tant à l’état de larves qu’à celui d’Insecte parfait, en dévorent une prodigieuse quantité;
les larves d'Hémérobes en font aussi leur nourriture ordinaire; les Fourmis les recherchent égale-
ment, mais elles ne leur font pas de mal, et, quoiqu’elles en fassent parfois leurs prisonniers, elles
les traitent doucement, et se bornent probablement à sucer la matière sucrée qui sort de deux petits
tubes qui terminent leur abdomen.
Les Pucerons présentent, dans la classe entière des Insectes, une très-curieuse exception sous le
point de vue de leur mode de reproduction. En effet, tous les Insectes en général, après s’être ac-
couplés, pondent des œufs d’où sortent de petites larves, qui, étant arrivées à leur état parfait, après
avoir passé par l’état transitoire de nymphe, devront s'accoupler pour reproduire; il en est tout autre-
ment pour les Pucerons, qui sont bien ovipares pendant une saison et qui pendant une autre de-
viennent vivipares. Réaumur les regardait comme hermaphrodites; mais, d’après un grand nombre
d'observateurs distingués, on sait positivement que les deux sexes existent réellement dans ces Hé-
miptères; mais l’on a constaté aussi que plusieurs générations ne produisent que des femelles,
tandis que d’autres donnent des mâles aussi bien que des femelles. On admet généralement que les
Pucerons produisent onze générations par année; la première naît au printemps d'œufs pondus par
la dernière génération de l'année précédente-et de femelles qui ont pu s’accoupler avec des mâles.
Cette première génération est composée de femelles qui, sans accouplement, au lieu de pondre des
œufs, ne produisent que des petits vivants, qui sont des femelles et qui, pendant dix générations
successives, donnent naissance également à des petits vivants et sans accouplement préalable : la
fécondation des individus éclos des œufs du printemps ayant suffi pour toutes les dix générations
suivantes. Ce ne serait done qu’en automne que les mâles rempliraient les fonctions qui leur sont
dévolues par la nature et qu'ils féconderaient les femelles. Quelques auteurs ont regardé ces faits
comme erronés et ne pouvant se concilier avec le mode de reproduction de tous les autres Insectes;
cependant ils sont le résumé des observations d’habiles naturalistes : aucune remarque relative aux
mœurs des Pucerons ou concernant leur anatomie n’a pu les infirmer. Cette question n’est donc pas
résolue aujourd’hui, et ce que nous avons dit doit être admis jusqu’à preuve du contraire.
La multiplication des Pucerons est véritablement prodigieuse; elle peut avoir lieu dans un es-
pace de temps très-court, et peut expliquer comment ces Insectes occasionnent de si grands dé-
gâts à l’agriculture, puisque quelquefois des arbres entiers en sont criblés, et qu’arrêtant la mar-
che de la séve ils peuvent parfois en causer la mort en détruisant les feuilles, ou tout au moins
empêcher le développement des fruits. M. Tougard (Annales de la Société d'horticulture) a étudié
avec un grand soin la reproduction du Puceron lanigère, et il a observé qu’un seul individu de la
première génération vivipare avait donné naissance, à la dixième génération, à un quintillon d’indi-
vidus. En effet, chaque Puceron pond de quatre-vingt-dix à cent quinze individus; en prenant
cent pour terme moyen, on trouve qu'un Puceron a donné naissance à cent autres Pucerons, qui,
en produisant chacun cent pour la troisième génération, formeront un total de dix mille, pour Ja
quatrième un million, et ainsi de suite jusqu’à la dixième génération.
Jusqu'au milieu de ce siècle, l’on avait supposé que les Pucerons éclos sur une plante y demeu-
raient toute leur vie; mais M. Morren (Annales des Sciences naturelles) a montré qu’ils pouvaient être
des Insectes émigrants, et il a rapporté à ce sujet les faits observés par lui dans une grande partie de
192 ; HISTOIRE NATURELLE.
la Belgique sur le Puceron du pêcher (Aphis persicæ), espèce alors inédite; ce Puceron se trouvait en
grande abondance dans les environs de Gand, ensuite il s’étendit du côté d'Anvers, puis de Bruxel-
les, et sur différents points du sud au nord et de l’ouest à l’est; les individus de cette espèce vo-
laient d’un point à l’autre en légions si serrées, que le jour en était obscurci, et que, lorsqu'on les
rencontrait, on en était inondé de mouière à être obligé de se couvrir le visage. Ces Pucerons se
jetèrent sur diverses plantes, mais surtout sur le pêcher, qu'ils semblaient rechercher; un violent
orage ayant éclaté dans quelques endroits, ils périrent par milliers, et couvrirent les murailles et
les vitres de leurs corps noircis et desséchés. Ces fait, sont d'autant plus intéressants, que jusqu’a-
lors on n’avait observé chez ces Insectes aucune émigration semblable, que l’on peut comparer à
celles des Sauterelles ou Criquets voyageurs; mcis doit-on la généraliser? Nous ne le pensons pas,
et nous croyons que ces émigrations du Puceron du pêcher étaient accidentelles, et qu'elles avaient
été produites par suite de causes accidentelles qui avaient permis une multiplication énorme de
cette espèce, et qui ne lui avait pas laissé la facilité de rester dans les lieux où elle avait pris nais-
sance.
C'est dans les travaux des entomologistes observateurs que l’on trouve des détails pleins d'intérêt,
et que nous n’avons pu qu’analyser trop succinctement, sur les mœurs des Pucerons. La décou-
verte du mode de reproduction des Pucerons, de leur génération spontanée comme on l'appelle,
date de 1740 à 1750, et est due à Bonnet, à de Géer, à Réaumur, à Geoffroy, dont les travaux ont
été répétés par M. Auguste Devau en 1895, et plus récemment par MM. Taugard, Ch. Morren et
Léon Dufour, etc. Les anciens auteurs, tels que Goëdart, Leuwenhoëch, Cestoni, de Lahire, ont
aussi donné des observations très-intéressantes sur ces Insectes, et, parmi quelques faits erronés,
ont présenté des remarques qui doivent être conservées même aujourd’hui. L’anatomie des Pucerons,
déjà commencée par Ramdohr, n'a guère été faite d’une manière complète que dans ces derniers
temps, d'abord par Dutrochet; mais surtout par MM. Ch. Morren et Léon Dufour. Les organes gé-
nitaux des femelles et des mâles ont principalement été décrits avec beaucoup de soin; l’appareil
digestif offre une exception très-remarquable dans la classe entière des Insectes : c’est l'absence
absolue des vaisseaux hépatiques; l'intestin ne se présente que comme un tube renflé dans deux de
ses parties, trois fois plus long que le corps, mais dépourvu de toute glande salivaire et de tout
vaisseau biliaire : il faut done, comme le dit M. Morren, d’après cette simplicité extrême, que la
séve des plantes puisse très-facilement s’assimiler à leur propre substance.
Fig. 163. — Puceron du tilleul. (Femelle.) Fig. 164. — Lachne du chêne. (Mäle.)
Le genre principal de cette tribu est celui des PUCERONS (Aphis, Linné), caractérisé principale-
ment par ses antennes de sept articles et par son abdomen ayant à son extrémité deux petits tubes
sécréteurs. Le nombre des espèces de Pucerons décrites jusqu’à ce jour, qui s’élèvent à plus d'une
centaine, presque toutes propres à l'Europe, n'est certainement qu'une très-faible partie de toutes
celles qui restent à connaître et qui, sans nul doute, doivent être répandues dans toutes les parties
du monde. Quelques naturalistes ont même prétendu qu'il en existait une espèce différente pour
chaque espèce de plante sur laquclle ils vivent; cela n’a pu être constaté, mais la vérité est qu'on
rencontre très-rarement sur deux espèces différentes de végétaux des Pucerons qu'on puisse, sans
ANNELÉS. _— HÉMIPTÈRES. 193
plus ou moins de doute, rapporter à la même espèce. Ces espèces sont, en général, désignées sous
le nom de la plante sur laquelle on les trouve, et on en rencontre parfois plusieurs différentes
sur le même végétal. Linné, Fabricius, de Géer, et plus récemment MM. Morren, Burmeister,
É. Blanchard, etc., ont surtout publié des travaux descriptifs sur les Pucerons. Comme types nous
indiquerons seulement les P. nu rosier (Aphis rosæ, Linné), long d’un peu plus de 0",001, vert,
avec les antennes noires ou quelquefois tout noir, qui vit sur les rosiers et fait partout de grands
dégâts à ces plantes d'ornement (Voy. pl. XII, fig. 2.); P. ou chêne (A. quercus, Linné); P. pu pEu-
PLIER (A. populi, Linné); P. pu sauce (A. salicis, Linné); P. pu mieu (4. tilliæ, Linné); P. pe
L'AMANDIER (À. amygdali, Blanch.); P. ou pavor (A. papaveris, Fabr.), etc.; tous très-répandus
dans nos environs, et le P. LaniGère (A. laniger, Tuggard), qui fait partout, surtout en Normandie,
de grands dégâts dans les plantations de pommiers, et qui est d’autant plus difficile à détruire qu’il
est recouvert d’une matière cotonneuse le protégeant de l’action de la pluie.
Les autres genres de la même division sont moins connus que celui des Pucerons : tels sont les
genres LACHNUS, Illiger, ayant pour types les À. pinus sylvestris, Fabr.., et quercus, Linné; RHIZO-
BINS, Burm., qui comprend deux espèces : R. pilosellæ, qui se trouve sur les racines d’une espèce
de lierreet sous les pierres, et R. pini, qui habite les racines du pin vulgaire ; PHYLLOXERA, Boyer
de Fonscolombe, probablement synonyme des CHERMES, Linné, dont l’A. ulmi, de Géer, peut être
pris pour type; et MYZOXYLUS, Blot, qui se distingue surtout en ce que l'abdomen ne présente pas
les deux tubercules que l’on remarque à son extrémité chez les Aphis : type le Myzoxyze vu PommIER
(M. mali, Blot), qui se trouve dans le nord de la France et en Belgique.
3° tribu, Psyzuines, dans lesquels les antennes ont dix articles; les élytres et les ailes sont dia-
planes et parcournes par plusieurs nervures, et dont les pattes sont propres au saut. Ces Insectes,
qui portent souvent le nom de faux Pucerons, sont en général couverts d'une matière cotonneuse,
vivent comme les Aphidiens, de la séve des arbres et de diverses plantes, sont de petite taille, et se
font principalement remarquer parce qu'ils sont doués de la faculté de sauter : ce qui leur a valu
leur dénomination, tirée du grec Yulx, Puce. On n’en connaît pas un très-grand nombre d'espèces,
et presque toutes celles qui ont été étudiées sont particulières à l’Europe.
Fig. 165. — Livie des joncs.
Le genre principal est celui des PSYLLES (Psylla, Geoffr.), dont les antennes sont filiformes,
plus longues que le corps, avec les deux premiers articles plus courts et plus épais que les autres.
Les mœurs de plusieurs espèces de ce groupe ont été étudiées par Réaumur, Geoffroy, Macquart, et
M: L. Dufour; les larves sont allongées et marchent lentement; les nymphes ont une figure longuc
etun air lourd, et quand elles veulent se métamorphoser, elles restent immobiles sous quelques
feuilles auxquelles elles s’attachent; l’Insecte parfait saute assez vivement par le moyen de ses
pattes postérieures, qui jouent comme une espèce de ressort. Parmi les espèces, nous citerons le
Psyie pv ricuter (Psylla ficus, Linné), observé par M. L. Dufour; le P. pu néLëze (P. laricis,
Macq.), type du genre Cnaphalodes, Latr., étudié par M. Macquart; le P. pu Buis (P. buxi, Linné),
dont Réaumur a présenté l’histoire, et qui produit au moyen d’une liqueur sécrétée par une glande
particulière ces corps blanchâtres qu'on remarque entre les racines du buis, etc.
Un autre genre est celui des LIVIES (Livia, Latr.), à antennes beaucoup plus courtes que le corps,
AE 29
194 HISTOIRE NATURELLE.
avec le premier article très-gros, le second grand et les suivants larges, courts. L'espèce unique de
ce groupe est la L. nes oncs (L. juncorum, Latr.), vivant et déposant ses œufs dans les fleurs des
jones, où elles occasionnent souvent des excroissances par l'absorption de la séve; commune auprès
de Paris. Un genre qui en ést vois:n est celui des DIRAPHIA, Waga, dont l'espèce unique (D. lim-
bata) a été trouvée en société nombreuse sur des buissons auprès de Varsovie.
a
TROISIÈME FAMILLE. — THRIPSIENS.
Le genre linnéen des Thrips constitue notre famille des Taripsrens, qui, comme nous le dirons,
forme pour la plupart des entomologistes modernes un ordre distinct d’Insectes, ayant pour carac-
tères : Bouche composée de pièces libres, lancéolées : mandibules lonques, sétiformes, seulement un
peu renflées à la base : mâchoires aplaties, dépourvues de galette, et munies d’un palpe articulé :
lèvre inférieure supportant aussi deux palpes articulés; antennes filiformes, toujours plus longues
que la tête, formées de cinq à neuf articles distincts : les derniers étant plus ou moins soudés en-
semble; yeux grands, latéraux : trois ocelles au sommet de la tête; ailes rudimentaires, au nom-
bre de quatre, longues, étroites, entièrement membraneuses, presque dépourvues de nervures, sans
plissures, garnies sur les bords de franges soyeuses, ou cils longs et très-serrés, étendues horixon-
talement sur le dos pendant le repos; tarses vésiculeux à l'extrémité, ne présentant que deux ar-
ticles.
D'après la caractéristique que nous venons de donner, on voit que les Thripsiens ne doivent pas
rester dans l’ordre des Hémiptères où les anciens naturalistes les rangeaient; néanmoins la forme
aplatie de leur corps, leur aspect général et quelques autres particularités les y avaient fait placer,
et on les rangeait auprès des Pucerons. Leur petitesse extrême, car ils n’atteignent souvent pas
à une longueur de 0,002 à 0®,003, n’a pas permis pendant longtemps qu’on les étudiàt; cepen-
dant de Géer avait déjà vu leurs palpes maxillaires; M. Straus Durkem avait reconnu la présence
de leurs mandibules; Latreille leur reconnaissait quelques affinités avec les Orthoptères, mais il
leur trouvait plus de rapport avec les Hémiptères; M. C. Duméril en fit une famille particulière
qu'il nomma Physopoda; M. Haliday, en 1858 (The entomological Magasin), créa avec eux un
ordre distinct d'Insectes, celui des Thysanoptera (du grec Ovsavor, franges; rrcoov, aile), que les
observations de MM. Westwood, Amyot et Serville, etc., semblent confirmer de plus en plus, et que
M. Émile Blanchard regarde comme plus voisin des Névroptères que des autres ordres de la même
classe. Nous aurions adopté cet ordre particulier si nous n’avions pas cru nuisible d'augmenter le
nombre des divisions primaires, et, tout en indiquant les différences que les Thrips offrent avec
les Hémiptères, nous avons cru devoir les laisser dans le même ordre. è
Les Thripsiens vivent sur les végétaux et occasionnent souvent des dégâts considérables. Les uns
se tiennent dans les fleurs, les autres s’attachent aux feuilles et les rongent dans toute leur étendue
en laissant à leur surface des taches qui ne sont autre chose que les parties rongées; et enfin quel-
ques-uns se trouvent sous l'écorce des arbres. Les céréales, et principalement le blé, sont attaqués
par ces Insectes, surtout par le Thrips cerealium, et en souffrent beaucoup; il en est de même de
l'olivier dans le midi de la France, et de beaucoup de plantes de serre chaude. Leurs métamorpho-
ses sont incomplètes; les larves, que l’on rencontre souvent au milieu des Insectes parfaits, ont la
même forme que ces derniers, et ne s’en distinguent que par l'absence d'ailes et leur couleur jaune
ou rougeâtre : après quelques mues elles prennent des rudiments d'ailes, leur coloration devient
brune ou noirâtre, et un peu plus tard les ailes se développent complétement et l’être est apte à re-
produire son espèce. Ces Insectes doivent être très-nombreux dans la nature; mais jusqu'ici, c’est
uniquement dans une partie de l’Europe, en France et en Aneleterre, qu’on en a recueilli. Les an-
ciens entomologistes les rangeaient dans un seul genre, mais M. Haliday, à qui l’on doit une mo-
nographie de ces Insectes, en a établi plusieurs, et les a répartis dans deux divisions principales.
Dans la première, celle des Tubulifera, que M. É. Blanchard nomme PaiœoruripsipEs, pour se
conformer à sa nomenclature, les palpes sont de deux articles; les ailes sont complétement sans
nervures, et il n’y a pas de tarière saillante dans les femelles. Le genre principal est celui des
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Fig. 1. — Dilobure corticale. 9,
Fig. 5. — Platypleure chouctle (Strir).
Fig. 4. — Fulgore porte-lanterne.
HÉMILTÈRES.
— Eurybranchys insigne
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 195
PHLŒOTHRIPS, Haliday, renfermant surtout des espèces qui se trouvent sous les écorces, et dont le
type est le P. coriacea, Haliday, d'un noir de poix, à côtés de la tête denticulés. Deux autres
groupes, formés aux dépens de ce genre, sont ceux des HOPLOTRHIPS et HAPLOTRHIPS, Amyot et
Serville.
Dans la seconde, celle des Terebrantia ou Turpsines, les palpes sont de trois articles; les ailes
ont deux faibles nervures parallèles, et l'abdomen des femelles est pourvu d'une tarière. On y
comprend aujourd'hui un assez grand nombre de genres que M. Haliday subdivise en deux grou-
pes : 1° Stenelytra ou Stenoptera, Burm., à ailes sans nervures transverses et à tarière recourbée
en dessous, genres : HELIOTHRIPS, SERICOTIIRIPS, CHIROTHRIPS, LIMOTHRIPS, BELOTHRIPS,
Haliday; PHYSAPUS, de Géer; THRIPS, Linné; ODONTOTHRIPS, TÆNIOTHRIPS, TIMETOTHRIPS,
Amyot et Serv. Le genre THRIPS, auquel de Géer avait appliqué précédemment le nom de Physa-
pus, est le seul sur lequel nous devions revenir; il est surtout caractérisé par le style des antennes
très-court, et par ses articles à peine distincts, et comprend beaucoup d'espèces qui vivent Sur un
grand nombre de plantes, se trouvent surtout auprès de Paris: le type est le Thrips urticæ, Fabr.,
jaunûtre, à élytres blanchâtres, commun sur les cressons, renoncules, orties, thalictres, où il vit
en société avec le Physapus ater; d'autres espèces sont les 1°. grossulariæ, Linné; ericæ, Hal.; co-
_rymbiferorum, Hal., ete. 2° Coleoptrata, à ailes à nervures transverses, frangées seulement posté-
rieurement, et à larière recourbée en dessus, renfermant les genres MELANTOHRIPS, ÆOLOTHRIPS
et COLEOTHRIPS, Hal. Ce dernier genre, à corps assez déprimé, court, à méso et métathorax
presque en carré, et à élytres offrant quatre nervures transverses, et ayant pour type le Thrips
fasciata, Linné, noir, avec le bout des élytres et l'extrémité blanches, et qui se trouve particuliè-
rement sur le réséda.
QUATRIÈME FAMILLE. — FULGORIENS.
Le genre Fulgora, de Linné, les genres Cercopis et Membracis, de Fabricius, et un grand nom-
bre d’autres groupes qui en sont plus ou moins voisins, constituent la famille des Fuzcoriexs de
M. Émile Blanchard, renfermant plusieurs tribus spéciales et ayant surtout pour caractères princi-
paux : antennes très-petites, de trois articles; tarses également de trois articles; abdomen privé
d'appareil pour le chant.
Les Fulgoriens, qui diffèrent principalement des Cicadiens parce qu'ils ne présentent ni dans le
sexe mâle ni dans le sexe femelle d'organes de stridulation, vivent sur les végétaux, dont ils sucent
Ja séve, mais ils n’y demeurent pas fixés comme les Aphidiens et les Cocciniens. On en connaît
un très-grand nombre d'espèces et de genres; ils sont répandus sur toute la surface du globe, et
ils sont principalement très-abondants dans les régions méridionales. L'Europe n’en renferme qu’un
nombre assez restreint. Plusieurs d’entre eux sont d’une grande taille, beaucoup sont d'une
moyenne dimension, et il en existe également de très-petits. Ces Insectes ont généralement des cou-
leurs vives et variées; leurs formes sont assez différentes suivant les espèces, et parfois très-extraor-
dinaires. Nous ne pouvons actuellement rien dire des particularités qu’on remarque chez les
Fulgoriens, et c'est dans l'étude des principaux groupes que nous entrerons dans quelques détails à
ce sujet. Nous chercherons à indiquer les groupes qu'il est utile de connaître, mais nous ne pouvons
pas faire connaître tous les genres qui ont été créés dans ces derniers temps, car nous serions obli-
gés de dépasser les limites qui nous sont assignées. Beaucoup d'auteurs se sont occupés de ces In-
sectes; nous devons particulièrement citer les travaux de Spinola à ce sujet. Nous partagerons cette
famille en trois groupes primaires : Cercopides, Membracides et Fulgorides.
4 tribu, Gercories, dans lesquels les antennes de trois articles sont insérées en avant des yeux,
les ocelles ne sont qu’au nombre de deux, le front est gros et court, et l'écusson constamment à dé-
cowvert. Cette tribu, à laquelle on applique parfois le nom de Cicadelliens, se compose d’un assez
grand nombre de genres, et quelques-uns d’entre eux renferment aussi une grande quantité d'es-
. pêces. La plupart proviennent de l’Amerique; toutefois l’on en rencontre dans les autres parties du
196 HISTOIRE NATURELLE,
monde, mais en beaucoup plus petit nombre. Plusieurs espèces sont assez grosses et ornées de
belles couleurs; la plupart sont de petite taille. Beaucoup d'auteurs s’en sont occupés, et, parmi eux,
nous citerons surtout Germar, Lepelletier de Saint-Fargeau et Serville, M. Burmeister et M. le doc-
teur V. Signoret, qui a spécialement publié dans les Annales de la Société entomologique de France
une monographie des Tettigonia, accompagnée de nombreuses planches.
Les genres principaux, pour la plupart démembrés de celui des Cercopis, auprès desquels nous
grouperons les coupes secondaires qu’on peut y rattacher, sont les suivants :
JASSE (Jassus, Fabr.), à téte large, courte, arrondie en avant; à ocelles peu distincts, placés
dans une fosselte en avant des yeux; à jambes épaisses, garnies d'épines aiguës. Ce genre renferme
un tré:-grand nombre d'espèces indigènes, presque toutes de petite taille, et ayant pour type le J.
atomarius, Fabr., long de 0,005 à 0,006, brunätre, parsemé de noir, avec les nervures des ély-
tres blanches, et l'abdomen noir présentant des bords blanchâtres : commun dans les prairies dans
toute l’Europe; on regarde comme ne s’en distinguant pas les Brythoscopus, Germar, Idiocerus et
Macropsis, Lewis; Onchopsis, Burm. (J. lania et varius, Fabr. de Paris), et Pediopsis, Burm. (J.
virescens, du midi de l'Europe). D’autres genres sont ceux des Aruysanus, Burm. (J. interstitialis);
AuscycernaLus, Gurt. ou Deltocephalus, Burm. (A. Germari, Curt., de Londres); Cæuinia, Burm.
(C. variegata, Germ., du Brésil); Acocepuaus, Germ. (A. bimaculatus); Evreux, Germ., qui,
parm. d assez abondantes espèces européennes, a pour type l'E. cuspidata, Fabr.; SoLENOcEPHALUS,
Germ. (S. obsoletus, Germ., d'Espagne).
LÉDRE (Ledra, Fabr.), à tête large, avancée, arrondie; à ocelles rapprochés sur le vertex; à
jambes postérieures ciliées; groupe ne renfermant qu'un petit nombre d'espèces propres à toutes
les parties-du monde (type (L. aurita, Lin., vivant sur le chêne et sur le coudrier, auprès de Paris),
et auquel on doit réunir les Epiclines, Amyot et Serv. On peut en rapprocher les Scaris, Fabr.
(S. ferruginea, Fabr., du Brésil); Gypona, Germ. (G. glauca, Fabr., du Brésil); Zinneca, Am. Serv.
(Z. flavidorsum, de l'Amérique du Nord); Paropra, Germ., d'Europe, et surtout Penraimia, Germ.,
qui renferme quelques espèces indigènes, dont le type est la P. atra, Fabr., de France et d'Al-
lemagne, qu'on trouve dans les vignes, où il occasionne des dégâts quand il se multiplie outre
mesure,
Fig. 166. Fig. 167. — Lèdre à oreilles. Fig. 168.
Penthimie noire. Œthalion reticulé.
TETTIGONE (Tettigoma, Geoffroy), à tête arrondie en avant, plus ou moins triangulaire; à
ocelles écartés, situés entre les yeux; à corps allongé, et à jambes ciliées, épineuses. Ce genre,
qui comprend, d’après M. V. Signoret (Ann. Soc. ent., 1853, 1854 et 1855), au moirs quatre
cents espèces répandues dans toutes les parties du globe, mais principalement communes dans l’a-
mérique méridionale, sont de jolis Hémiptères parés de couleurs vives, très-variées, et tranchan
souvent les unes sur les autres. Comme type, nous citerons seulement la Cicada fasciata, Linné,
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— Puccron du rosier.
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Typhlocyre chouette (wlulatz -
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Fig. 5. — Bythroscope veiné.
Dorydie lancéolé.
Sclénocéphale souillée.
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Eupélix allongé.
lie. 7.
Jasse varié,
Lis. 6.
HÉMIPTÈRES.
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. . 197
d’un rouge minium clair, avec des lignes noires, très-commune au Brésil. On peut regarder comme
n'en étant que des démembrements secondaires les genres Proconia, Lepel. et Serv.; Aulacixes,
Diostotemma et Acopsis, Amyot et Serv.; Ciccus, Latr.; Rhaphirhinus et Germaria, Laporte de
Castelnau, et quelques autres genres créés particulièrement par M. Walker, dans le Catalogue du
Bristish Museum. Le genre Evacanruus, Lepel. et Serv., qui comprend quelques espèces européen-
nes, dont ia C. interruptus, Linné, est le type, en diffère assez notablement.
APHROPHORE (Aphrophora, Germ.), à téte presque aussi large que le corselet; à jambes de der-
rière présentant deux fortes épines et une couronne de plus petites à l'extrémité, ainsi qu'au bout
des deux premiers articles des tarses. Ce genre renferme une assez grande quantité d'espèces, la
plupart européennes et de taille assez petite. Le type est l’A. Écumeuse (Cicada spumaria, Linné),
longue de 92,01, d'un grisäire cendré, avec deux bandes obliques bianchâtres sur les élytres, qui
est commune dans toute l'Europe, et dont les habitudes ont été étudiées depuis longtemps. Les
femelles pondent sur les Saules, au commencement de l'hiver, des œufs très-abondants qui n'éclo-
sent qu’au printemps; les larves sécrètent une matière blanche ou sorte d’écume, dans laquelle elles
s’enveloppent entièrement, probablement pour échapper à leurs ennemis, les nymphes y restent
constamment enfermées, et l’Insecte parfait en sort vers le mois d'avril. Cet Insecte produit des
sauts très-élevés et qui se font quelquefois, suivant de Géer, à la distance d'au moins deux mètres.
On rapproche des Aphrophores les genres Lepyronta, Am. et Serv. (type À. coleoptrata, Linné, des
environs de Paris); Prravezus, Lepel. et Serv. (Cercopis mirabilis, Blanch., de Madagascar); Gare
RuaPiA, Westw. (0. cassidioides, de Savana).
CERCOPE (Cercopis, Fabr.), à téte triangulaire, plus étroite que le corselet; à ocelles placés dans
une cavite entre les yeux; à jambes postérieures ayant une ou deux épines au milieu et une cou-
ronne de très-petites épines à l'extrémité. Ce genre, très-nomikreux en espèces propres à toutes les
parties du monde, a été, dans ces derniers temps, partagé en plusieurs groupes : c’est ainsi que
MM. myot et Serville y admettent les divisions des Tomaspis, Rhü.1ulax, Triecphora, Monoc-
phora et Sienorhina. Comme type nous ne citerons que le C. sanguinolents, Linné, noire en des-
sus avec trois taches rouges, offrant de nombreuses variétés, propre au midi de l Europe et même
à Paris, sautant de nlante en plante, mais avec peu de facilité en raison ..e son poids.
)
Fig. 169. — Jasse à atomes. Fig. 170. — Cercope sanguinolente. Fig, 171. — Eurymèle bicolore.
ULOPE (Ulopa, Fallen), correspondant aux Ortoraphia, Westw., à tête plus large que le corselet,
échancrée; à élytres larges, ovalaires, voûtées; sans aües; peu d'espèces dont le type est l'U. ob-
Lecla, qui se trouve sur la bruyère dans le midi de la France et même à Fontainebleau.
EURYMÈLE (Eurymela, Hoffmansego), à tête très-large, inc:inée, tronquée; à oce Îles petits
situés sur les côtés de la tête, et à jambes postérieures munies d'une, ou deux épines. Genre exoti-
que, dont le type est l'E. fenestrata, Lepel. et Serv., de la Nouvelle-Hollande. Des genres qui en
sant plus ou moins voisins sont ceux des : Cxruauezus, Percheron (C. infumatus, du Cap); Ærna-
LION, L°tr. (Æ. reticuiatum, du Brésil); Dorynium, Burm. (une espèce exotique), et TyPaLocyBa,
198 HISTOIRE NATURELLE.
Germar, qui renferme beaucoup de petites espèces et dont le type est le T. pusilla, Rossi, assez
commun sur les fleurs dans une grande partie de l’Europe.
Nous donnons dans nos planches à part plusieurs figures de Gercormnes, telles que : Typlocyre
chouette (pl. XIE, fig. 1); Solénocephale souillé (pl. XI, fig. 3); Bytroscope veiné (pl. XI, fig. 5);
Jasse varié (pl. XHE, fig. 6); Eupelix allongé (pl. XIE, fig. 7) et Dorydie lancéolée (pl. XHE, fig. 4).
2 tribu, Mémeracines, dans lesquels les antennes sont très-petites, insérées en avant des yeux;
les ocelles au nombre de deux; le corselet surtout dilaté de manière à couvrir le corps, soit en partie,
soit en totalité. Les Membracides sont des Insectes de petite taille; leur tête est grande, large, plus
ou moins triangulaire, rarement allongée et membraneuse; les yeux sont gros, parfois saillants;
les antennes sont courtes, de trois articles; le corselet varie à l'infini : quelquefois il enveloppe
complétement l'abdomen et les ailes, tantôt c’est une pyramide ou une plaque scutelliforme qui
couvre le métathorax sans cacher les ailes, tantôt un renflement vésiculeux, noduleux, ou bien ce
sont des cornes qui s'élèvent au-dessus des épaules ou des excroissances fongiformes qui donnent
au corps un aspect étrange; les élytres sont transparentes, d'une consistance assez solide : les cellules
ont la forme d’un carré long, d’un trapèze ou d’un rhomboïde, et leur nombre est variable; les pattes
antérieures sont courtes, prismatiques, parfois aplaties et foliacées : les postérieures sont longues,
jamais foliacées. Les Insectes renfermés dans cette tribu, remarquables plutôt par la bizarrerie et la
variété de leurs formes que par leur système de coloration, qui est généralement noir, tacheté de
jaune et de rouge, sont phytophages et sautent avec la plus grande facilité; quelques-uns vivent en
société, réunis en groupes presque immobiles sur les végétaux dont ils piquent les parties tendres.
Leurs mœurs sont peu connues, on sait cependant que quelques espèces exotiques, ainsi que leurs
larves, sont recherchées par les Fourmis, qui s'emparent de la sécrétion sucrée qui s'écoule de leurs
glandes anales, de même que cela a lieu chez nous pour les Pucerons. La distribution géographique
des Membracides est très-irrégulière : l'Europe n’en a que deux ou trois, l'Asie, l'Afrique et l’Aus-
tralasie en possèdent un petit nombre; l'Amérique méridionale, mais surtout le Brésil et la Colombie
en contiennent beaucoup plus que toutes les autres parties du monde réunies.
. Fig. 172. : Fig. 173. Fig. 174. Fig. 175.
Hypsamhène de Smilie à élytres tachetées. Membrace foliacé. Spongophore
Westwood. admirable.
Cette tribu, créée par Latreille, ne comprenait originairement que le genre MEMBRACIS, de Fa-
bricius, remarquable par son corselet prolongé en arrière, très-élevé et comprimé latéralement en
une sorte de feuillet, et pas ses jambes aplaties, ayant pour types les Cicada fusca, de Géer, et fo-
liata, Fabr., de Cayenne. Germar, Burmeister, Latreille, Laporte de Castelnau, MM. Amyot et Ser-
ville, y ont formé quelques genres, et M. Léon Fairmaire en a également créé plusieurs dans la
Monographie de ces Insectes (Soc. ent., 1844). Pour lui cette famille renferme environ quatre cents
espèces qu’il répartit en trente-sept genres, ceux des : XeropuyLzum, Fairm.; Memgracis, Fabr. (En-
chophyllum et Enchonope, Am. et Serv.); Bocsoxora, Am. et Serv.; Soncornonus, Fairm.; Prervcns,
Curt. (Notocera, Am. et Serv.); Oxvruacuis, Germ.; Horropnora, Germ.; Uusonia, Burm. (Physo-
phia, Am. et Serv.); Triquerra, Fairm.; Ceresa, Am. et Serv.; Swnioracurs, Fairm ; Smiura, Germ.;
AconoPxora, Fairm.; Nessonminus, Am. et Serv.; Porveivrra, Burm.; Exivura, Germ.; Oxvcona,
Fairm.; Taerra, Am. et Serv.; Hemiprycua, Germ.; Darnis, Fabr.; Tracora, Latr.; ParmuLa, Fairm.
(Tragopa, Burm.); Honrara, Fairm.; Opminerma, Fairm.; Scarnura, Fairm.;: Danvoïnes, Fairm.;
Fig. 1. — Hétéronote blessé. Fig. 2, — Umburnie noire. Lis. 5. — Ada enflée.
Fig, # — \ysidie à élytres blanches.
SSSBaEE
fig. 9. — Aionophore à pattes jaunes. Fig. 6. — Némipryque marginé. Fig. 7. — Muffonie inclinée
Lig. 8. — lsse grilloïde.
re. HÉNIPTÈRES. rl. 14
ANNELÉS. —. HÉMIPTÈRES. 199
Acuraus, Fairm.; Hereronorus, Cast.; Cypnonia, Cast.; Compornora, Burm.; Œna, Am. et Serv.;
Bocynium, Latr. (Sphæronotus, Cast.); Cenrrorus, Fabr. (Gargara et Uroxiphus, Am. et Serv.); Hy-
PSAUGHENIA, Germ.; Anomus, Fairm.; Lvconeres, Germ. (Stegaspis, Germ.), et LamProprera, Germ.—
Trois autres genres sont ceux des Cyphotes, Burm. Hypsamhena et Ada, etc.; quant au groupe des
Macuærora, Burm., ce n’est pas un Membracide, comme on l’a dit, mais un groupe de la tribu des
Cercopides.
Nous donnons quelques figures de Membracides dans notre atlas : Hétéronote blessé (pl. XIV,
fig. 1), Umbonie noire (pl. XIV, fig. 2); Ada enflée (pl. XIV, fig. 3); Aconophore à pattes jaunes
(pl. XIV, fig. 5); Nemipryque marginé (pl. XIV, fig. 6) et Muffonie inclinée (pl. XIV, fig. 7).
3° tribu, Furcorines, chez lesquels les antennes sont insérées au-dessous des yeux; front donnant
naissance à un prolongement; les ocelles, au nombre de deux, situés entre les yeux; le corselet non
prolongé; élytres et ailes enveloppant les parties latérales du corps. On décrit un grand nombre
d'’Homoptères de cette tribu, particulièrement propres aux pays chauds, généralement de taille
moyenne, et assez remarquables par leur coloration parfois brillante. Le nombre des genres qu’on
y forme est nombreux, il en est de même de celui des espèces, et Spinola en a présenté le tableau
général dans les Annales de la Société entomologique, 1839; nous indiquerons surtout ceux qui
peuvent former dans cette division des types bien distincts; ce sont ceux qui suivent :
TETTIGOMÈTRE (Tettigometra, Latr.), à front confondu avec les parties lutérales; à jambes
inermes : postérieures seules ayant une pointe à l'extrémité. Peu d'espèces, toutes européennes, et
dont le type est la Fulgora virescens, Panz., à corps vert jaunâtre tendre en dessus, et rougeätre en
dessous; se trouve dans les bois humides de nos environs.
ISSE (Issus, Fabr.), à front sans épines au-dessous des yeux, séparé par un rebord; à antennes
très-courtes; à corselet et métathorax plus larges que longs; à jambes simples. On y groupeun
assez grand nombre d'espèces, en général d'assez petite taille, et propres aux différentes parties du
globe; le type est l'I. coleoptratus, Fabr., à corps jaunûtre, de France et d'Allemagne. Des genres
qu'on doit en rapprocher ou même y réunir, sont ceux des : Eurvsracuis, Guérin; Mycroperes,
Spin., et Hysrerorrerun, Am. et Serv.
Fig. 476. Fig. 177. — Derbe à élytres rugueuscs. Fig. 178.
Tettigomètre verdâtre. Isse coléoptrate.
DERBE (Derbe, Fabr.), à front séparé par un rebord; antennes dépassant les joues, épaisses, in-
sérées aux angles de la face, avec le premier article très-court, le deuxième beaucoup plus grand;
à corselet et métathorax plus longs que larges, et à jambes postérieures mutiques. Propres aux con-
trées méridionales: les espèces de ce groupe sont rares dans les collections : le D. elongatus, Fabr.,
du Brésil, en est le type. Des genres qui en sont démembrés sont ceux des : Paenise, Westw.; Ano-
ta, Guérin (Deribia, Westw.); Orrocerus, Kirby (Cobax, Germ.).
DELPHAX (Delphax, Fabr.), à front séparé par un rebord; antennes dépassant les joues, à second
article plas long que le premier; corselet et métathorax plus longs que larges; jambes de devant
non foliacées : celles de derrière munies d'une épine forte à l'extrémité. Quelques espèces de pres-
* 200 | HISTOIRE NATURELLE.
que toutes les con‘rées du globe, et dont quelques-unes sont européennes, comme les D. limbata et
marginata, Kabr., de France et d'Allemagne. Des genres qui en sont voisins sont ceux des :
Ucyors, Guérin, et Asiraca, Latr. : ce dernier ayant pour type l'A. clavicornis, Fabr., petite espèce
propre à nos environs.
CIXIE (Cixius, Latr.), à front également séparé par un rebord; à tête étroite, très-petite; anten-
nes ne dépassant pus les joues, insérées au-dessous des yeux, avec le deuxième article très-gros;
corselet plus court que le métathorax; jambes postérieures mutiques. Ce genre renferme un assez
petit nombre d’espèces, toutes de petite taille, dont plusieurs sont propres à l’Europe; le type est le
C. nervosus, Linné, commun dans toute l’Europe, et dont M. Léon Dufour a fait l'anatomie. On en
rapproche plusieurs genres; le seul propre à l'Europe est celui des : Pseunopnana, Burm. (Dicéyo-
phora, Germ.), ayant pour type la F. europæa, Linné; les autres groupes particuliers aux régions
chaudes, comme le Brésil, Cayenne, le Bengale, etc., sont ceux des : Cranoniprera, Spinola (Clady-
pha, Am. et Serv.); Preronicrya, Burm.; Dicuorrera, Spin.; Lappina, Am. et Serv.; Monopsis, Spin.,
et peut-être Carixeuis, Cast. (F. Bonellii, Latr., de Sardaigne).
Fig. 179. — Delphax à élytres longues. Fig. 180. — Cixie du Dionyse, Fig. 181. — Acanaolie de Serville
FULGORE (Fulgora, Linné), à front séparé par un rebord, souvent prolongé en une sorte de ves-
sie aussi large que la tête; antennes ne dépassant pas les joues; corselet-aussi long que le mésotho-
raz; élytres réticulées. Les Fulgores, anciennement nombreux en espèces, sont répandues presque
partout, mais principalement dans les contrées méridionales, surtout dans l’Amérique du Sud, où
elles acquièrent une grande taille; elles sont ornées de couleurs très-vives et très-variées, et ont
parfois des formes très-singulières, surtout dans le prolongement de la tête, présentant des épines
ou des tubercules. Spinola en a démembré plusieurs groupes. Chez ces Insectes le corps est assez
allongé, les antennes très-cour: *, à second artiele globuleux, aussi large que long, avec une soie termi-
nale insérée à l'extrémité; il y a deux orelles placés au-dessus des veux; le bec est composé de trois arti-
cles atteignant au moirs là base des pattes de derrière; le corselet est un peu échancré au bord posié-
rieur, les élytres sont étroites, avec toutes les nervures transversales très-serrées, parallèles; les ailes
sont beaucoup pius larges que les élytres; les pattes sont longues, propres au saut, munies d’épines
au côté externe; il n’y a pas d’organe de stridulation. Quelques auteurs ont prétendu que les Ful-
gora, et surtout la plus grande espèce, la Fulgore porte-lanterne, répandaient une lueur phospho-
rescente qui résidait dans le prolongement de la tête, situé sur le front. Mademoiselle Sibylle de
Mérian, qui avait longtemps voyagé à la Guyane, et surtout à Surinam, où elle a récolté un grand
nombre d’Insectes qu'elle a représentés dans son ouvrage sur les Insectes de Surinam, -crut recon-
naîtré la première cette propriété que posséderaient les F'ulgores : elle rapporte qu’en ayant réuni
une certaine quantité d'individus dans une boîte, d'où elles s’échappèrent pendant la nuit et se ré-
pandirent dans sa chambre, elle fut effrayée en voyant cétte lumière, qui était assez vive pour que
l’on pût lire facilement, et que sa frayeur ne se dissipa que lorsqu'elle eût reconnu que cette lu-
mière était produite par les Fulgores. D’autres voyayeurs, qui ont également observé ces Hémipté-
res, prétendent que l'assertion de mademoiselle de Mérian est complétement fausse, et qu'ils n'ont
pu découvrir aucune trace de lueur phosphorescente chez ces Insectes, même dans la plus com-
plète obseurité. Ges deux versions si différentes ont jeté les naturalistes dans de grands doutes sur
cette propriété attribuée aux Fulgores, et qüelques-uns ont pensé qu'ils avaient, peut-être la faculté
de répandre de la lumière dans l'obscurité, mais que ce n’était sans doute qu’à certaines époques
Fig. 1. — Lippilla de l'ajonc Fig. 2. — Calvtoprocte lvstroïde.
QT LUN
Tu
de
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Lis, 4. — Lystre pulvérulente. Fig. 5. — Lystre moyenne.
A. HÉMIPTÈRES PL. 15.
ANNELES. — HÉMIPTÈRES. 201
de l’année : ce qui aurait pu mettre les observateurs en contradiction les uns avec les autres. D’au-
tres pensent que les voyageurs qui ont prétendu qu’ils étaient phosphorescents, ne les avaïent pas
observés par eux-mêmes, mais avaient probablement été trompés par les habitants. Néanmoins, quoi-
qu’on ne puisse encore aujourd’hui rien avancer de certain à cet égard, plusieurs espêces ont reçu des
noms qui indiquent cette propriété. — Nous citerons lé FuLFoRE PORTE-LANTERNE (Fulqora lanterna-
ria, Linné), long de 0",065, jaune, varié de noir; élytres d’un jaune verdàtre, varié de noir; ailes
de la couleur des élytres, avec une grande tache jaune ocellée, entourée d'un cercle brun; propre à
Cayenne, où on le trouve en assez grand nombre.
Parmi les genres voisins de celui des Fulgora, qu’on peut probablement y réunir, nous indique-
rons ceux des Hommus, Am.et Serv. (F.rorrr-cuanvezce, Lanternaria candelaria,.Linné; très-com-
mun à la Chine); Pyrops, Spin. (F. tenebrosa, Fabr., de la côte de Guinée); OmaLacEPnaLa, Spin.
(F. festina, Fabr., de la côte de Coromandel); Dicopura, Eriscius, Parictus, Eucnopnora, Cazypro-
procTus, Spin., de l'Amérique méridionale; Apxana, Burm. (Penthicus, Blanch.), de Java; Paenax,
Germ. (F. variegata, Oliv., du Brésil); Lysrra., Fabr. (F. lanata, Linné, du Brésil); ces derniers
Insectes sécrêtent, par la partie postérieure de leur corps, une matière blanche cireuse, qu’on
emploie aux Indes orientales et en Chine mêlée avec de l’huile, au lieu et place de la véritable
cire; Porcera, Cast., du Brésil, etc.
D’autres genres s’éloignent davantage du type, et, par la largeur de leurs ailes ressemblent
assez à des papillons; parmi eux nous citerons les genres : 1° FLATA, Fabr., qui a le front étroit,
à bords latéraux relevés, les élytres et les ailes larges, opaques; très-nombreux en espèces (type
F. limbata, Fabr.), propre à l'Afrique équatoriale, à Java, à la Nouvelle-Hollande, à l'Amérique du
Sud, etc. Ce groupe à été, dans ces derniers temps, démembré en un certain nombre de genres,
tels que ceux des : Pæcicorrera, Latr.; Acursius, Ecroiprera, Lopnors, Spin.; DELAPAX, COLOBESTRES,
Puyrivpnanra, Puazxmoresa, Am. et Serv. 2° ACANALIA, dont le type est l'A. Servillei, des envi-
rons de Philadelphie; et 3° RIGANTA , Germ., à front très-étroit, et élytres avec des réliculations assez
läches, comprenant des espèces américaines (F. reticulata, Fabr.) et indiennes, et dont on a séparé
deux groupes, ceux des : Nepuesa et Pocuazia, Am. et Serv.; ce dernier ayant recu antérieurement
le nom d'Euryptera, Guérin.
Parmi les figures de Fulgoriens que nous donnons dans notre atlas, nous citerons celles des :
Isse grilloïde (pl. XIV. fig, 8); Lystres pulvérulente (pl. XV, fig. 4) et moyenne (pl. XV, fig. 5);
Eladiptère à gros yeux (pl. XV, fig. 3); Euchophore de Serville (pl. XVIE, fig. 1); Aphane aimable
(pl. XVIE, fig. 5); Fulgore porte-lanterne (pl. XVIL, fig. 4); Eurybrachys retournée (pl. XVE fig. 5)
et insigne (pl. XVIE fig. 2), etc.
CINQUIÈME FAMILLE. — CICADIENS.
Cette famille qui, à deux ou trois exceptions près, ne renferme que le seul genre Cicare (Cicada,
Linné), a pour principaux caractères : antennes très-petites, de trois articles, terminées par une
soie; tête portant trois ocelles sur son sommet; abdomen des mäles offrant en dessous deux plaques
recouvrant des organes de chant : ces plaques rudimentaires chex les femelles; tarses de trois
articles.
Les Cicadiens, très-semblables aux Fulgoriens par l'ensemble de leurs caractères, en différent aussi
très-notablement par la présence d’un appareil destridulation très-compliqué et que nous venons de
signaler. Cet appareil, situé à la base de l'abdomen, n'existe à un état complet de développement que
chez les mâles seulement : il consiste, comme l’a surtout démontré Solier, en deux. cavités recou-
vertes chacune par une plaque cartilagineuse en forme de volet; à l'intérieur, ces deux loges, sépa-
rées par une cloison écailleuse de forme triangulaire, offrent en avant une membrane plissée, el
en dessous une autre membrane mince et transparente connue sous le nom de miroir; on distingue
encore de chaque côté une membrane plissée qu’on appelle la fimbale. Des muscles assez puissants,
qui sont attachés à ces organes, se contractant et se dilatant avec force et rapidité, frappent sur les
timbales et produisent des sons pénétrants que l’on peut même quelquefois produire après la mort
A. 26
202 HISTOIRE NATURELLE.
de l’Insecte, lorsque, ce qui arrive souvent, l’action des muscles peut encore avoir lieu. Le chant
des Cigales, regardé comme mélodieux par les poëtes grecs, et dont on a beaucoup parlé, n'est en
réalité qu'une stridulation rauque, monotone et même parfois insupportable. Les Cicadiens se
tiennent sur des arbrisseaux exposés à la plus grande ardeur du soleil, et on les rencontre parfois
en grande quantité dans toutes les parties chaudes du globe : quelques-uns habitent les parties mé-
ridionales de l’Europe, mais l’on n’en prend aucune dans le Nord. Les femelles ont une tarière
composée de trois pièces écailleuses, qui leur sert à entamer les tiges du bois mort pour y déposer
leurs œufs. Les jeunes larves qui en sortent quittent bientôt cette première demeure, et vont se ré-
fugier au pied des arbres, où elles croissent assez rapidement et se métamorphosent en nymphes qui
sont enveloppées dans une coque assez solide pour pouvoir conserver sa forme après que l'Insecte
parfait, étant parvenu à son complet développement, s’en est échappé.
Fig. 182. — Cigale plébéienne. (Insecte parfait.) Fig. 185. — Cigale plébéienne. (Larve.)
Le genre CIGALE (Cicada, Linné), auquel Fabricius appliquait la dénomination de Tettigonia, et
de Géer celle de Tibicen, comprend un nombre très-considérable d'espèces, dont plusieurs offrent
sur leurs ailes des couleurs très-vives et très-variées, mais dont le plus grand nombre a des ailes
transparentes et sans coloration. Chez ces Insectes le corps est épais, très-robuste, assez ramassé; la
tête est aussi large que le corselet et ne présente jamais de prolongement à sa partie antérieure,
comme cela a lieu chez les Fulgores; les ocelles sont gros, très-proéminents, au nombre de trois
disposés en triangle sur le sommet du front; les antennes, quoique très-courtes, ont six articles :
le premier assez épais et les autres très-grèles, diminuant vers l'extrémité en forme de stylet; les
élytres et les ailes ont la forme d’un étui enveloppant le corps pendant le repos; les pattes ne sont
nullement propres au saut; l'abdomen offre chez les mâles l'organe de stridulation, et chez les
femelles la tarière.
Les Cigales, dont le nom provient probablement du mot latin Cicada, petit Coq (petit animal
ailé qui chante), sucent la séve des végétaux, et, pendant les fortes chaleurs de l'été, demeurent
immobiles sur les branches des arbres, faisant entendre de temps en temps un son très-aigu que
l’on peut percevoir de très-loin, et qui sert au mâle à appeler sa femelle.
Ces Homoptères ont été non-seulement connus, mais même observés dès la plus haute antiquité.
Les Grecs mangeaient, dit-on, leurs nymphes et même les Insectes parfaits; ils les regardaient
comme le symbole de la musique, et trouvaient beaucoup de mélodie dans leur chant; il les con-
servaient dans des cages pour entendre leur stridulation, et les poëtes n’ont pas dédaigné de moduler
des vers pour ces Insectes, qu’ils pensaient être tendrement aimés des Muses et même d’Apollon. Les
Latins n’eurent pas une aussi grande vénération pour le chant des Cigales, car Virgile et quelques
autres auteurs ne les ont signalées que comme des Insectes produisant un son rauque et mème
désagréable. Les naturalistes modernes n’ont pas étudié les mœurs de ces Insectes autant qu’ils au-
raient pu le faire; ils n’ont pas présenté toutes les particularités que peut offrir leur organisme, et
se sont presque bornés à décrire l'organe du chant et celui de la ponte, et surtout à en faire con-
naître de très-nombreuses espèces. Quelques auteurs, spécialement MM. Amyot et Serville, ont
cherché à former des groupes génériques, qui, assez peu naturels, ne sont généralement pas adop-
tés; ce sont les divisions des : Tama, Tosena, Pxexa, Gæana, Hurcuys, Prarvpceuna, Hemisciera, Mo-
Fig. 1. — Pricanie pæciloptéroïde. Fig. 2. — Idiocère à élytres tachetées.
Fig. 3. — Cigale sauate.
Fig. 4. — Patare blanc.
HEMIPTERES, {L: ÀS:
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 203
GANNIA, ZamMara, Oxvpzeura, Terricanes, Cxecocnica, Dunouria, THopna, Finicina, Terricouvia et
CaRINETA.
Parmi les espèces de ce genre, nous citerons les deux espèces indigènes les plus connues : 1° la
Cicaze pu FRÈNE (Cicada fraxini, Fabr.), longue de 0,03, de couleur noire en dessus et d’un jaune
grisètre en dessous; à élytres transparentes avec une tache noire et jaune et à ailes hyalines et sans
tache; se trouve sur les arbres dans le midi de la France, et parfois même à Fontainebleau; d’après
Olivier, son chant est très-fort et très-aigu, et, selon Solier, il parait formé par une seule note ré-
pétée avec rapidité, qui s’affaiblit insensiblement après un certain temps et se termine par une
espèce de sifflement qu’on peut imiter en partie en prononcant les deux consonnes sf; 2° la CicaLe
DE L'ORME (Cicada orni, Linné), de la taille de la précédente, d'un jaune vert taché de noir; à ély-
tres et ailes hyalines, avec des nervures alternativement jaunes et brunes; très-commune dans le
midi occidental de la France, entre Bordeaux et Bayonne, où tous les ormes en présentent une
grande quantité d'individus; on la rencontre également en Espagne et dans diverses parties de l’Eu-
rope; son chant est comme enroué et ne se fait pas entendre de très-loin. Parmi les espèces exoti-
ques, beaucoup plus grandes que celles d'Europe, nous nommerons la C. speciosa, Illiger, qui
atteint 0,08, des Indes orientales; la C. fasciata, Fabr., de Java; la C. stridula, Linné, du cap de
Bonne-Espérance; la C. maculata, Drury, de Chine; la C. tympanum, Fabr., du Brésil, plebeya, etc.
MM. Westwood et Burmeister ont créé quelques genres qui diffèrent assez notablement de celui
des Cicada. Le groupe typique est celui des HEMIDIDICTA, Burm., dans lequel les élytres sont en
partie coriaces, et dont la moitié postérieure offre une réticulation à cellules hexagones, la côte
marginale ne présentant pas de division fourchue; une seule espèce, H. frondosa, du Brésil. Les
autres genres, dus à M. Westwood, sont ceux des Porvneura, des Indes orientales, et Cysrosoma, de
la Nouvelle-Hollande. Nous donnons dans l'Atlas les figures des : Platypleure chouette (pl. XVII,
fig. 5); Cigale sanate (pl. XVII, fig. 3), ete.
Les cinq familles que nous venons de passer en revue constituent la section des Hémiptères qui
por’? le nom d'Homoptères; celles qu’il nous reste à étudier forment la section des Hétéroptères.
SIXIÈME FAMILLE. — NÉPIENS.
La famille des Néprens, dort la dénomination a été tirée du nom du groupe typique, celui des
Nepa, de Linné, correspond complétement à la division des Hérénoprères uyproconses, de La-
treille, et comprend des espèces ayant pour caractères spéciaux : antennes très-courtes, cachées dans
des cavités placées au-dessous des yeux; bec naissant du front; corselet plus grand que les deux au-
tres segments du thorax; écusson petit; élytres coriaces dans leur moitié antérieure, et transpa-
rentes dans le reste de leur étendue.
Les Népiens renferment un nombre assez restreint d'espèces, qui se trouvent dans toutes les
parties du monde, particulièrement en Europe, et qui sont réparties dans une vingtaine de genres,
pouvant, d’une manière générale, être représentés par les groupes des Notonecta, Nepa et Galgulus,
que nous indiquerons comme formant des tribus distinctes. Ce sont des Insectes de taille petite ou
moyenne, habitant surtout les eaux douces, tant les mares que les étangs et les ruisseaux, mais
dont quelques-uns se rencontrent dans la vase auprès des eaux douces, ou dans le sable non loin des
eaux saumâtres; tous sont carnassiers, et, au moyen de leurs pattes antérieures, conformées de ma-
nière à saisir une proie, s'emparent d'autres Insectes dont ils sucent toutes les parties liquides.
Quelques espèces font des piqüres assez douloureuses. Les Népiens sont obligés de venir fréquemment
la surface de l’eau pour prendre de nouvelles provisions d'air; et quelques-uns ont l'extrémité de
leur corps munie de deux longs appendices servant à conduire l’air à des stigmates placés à l’ex-
trémité de l’abdomen.
4° tribu, Norowecnines, à corps assez convexe; à yeux très-gros; à pattes : antérieures courtes,
sans pince propre à retenir la proie : intermédiaires. plus longues que les précédentes : postérieures
204 HISTOIRE NATURELLE.
beaucoup plus grandes encore, ayant l'aspect de deux grandes rames ex garnies de longs poils. Ce
sont des Insectes nageurs, que l'on rencontre souvent en très-grande abondance dans les eaux tran-
quilles, respirant l’air en nature, et dont les habitudes sont très-carnassières, mais ils ne font leur
nourriture que d'animaux vivants.
Les deux genres principaux de cette tribu sont ceux des : Notonecta et Corixa.
NOTONECTE (Notonecta, Linné), à élytres ayant leur partie postérieure membraneuse; pattes
postérieures très-lonques, à tarses sans crochets; tarses des pattes antérieures de deux articles
distincts. La dénomination de Notonecta vient des deux mots grecs vosos, dos, et no, je nage, et
indique l'habitude qu'ont ces Hétéroptères de nager sur le dos. Le nom de Punaises à avirons, qui
leur a été aussi vulyairement appliqué, rappelle la même habitude et la grande disproportion
de leurs pattes antérieures comparativement aux autres, qui, par leur disposition spéciale, 'eur
permet de saisir assez fortement leur proie. Les Notonectes se rencontrent dans les mares, dont
ils sortent assez souvent le soir ou pendant la nuit pour se transporter de l’une à l'autre au moyen
de leurs ailes, et même, assure de Géer, de leurs pattes. Les femelles pondent une très-grande
quantité d'œufs, qu'elles fixent sur les plantes aquatiques; les larves n'éclosent qu’au printemps, et,
après plusieurs changements de peau, elles se transforment en Insectes parfaits. On les trouve dans
tout l'ancien continent; le nombre des espèces semble peu considérable : le type est le N. GLAUQUE
(N. glauca, Lin.), longue de 0,015, d’un brun grisètre, avec l'écusson noir, les élytres jaunes
nuancées de brun, le dessous noir; excessivement commune dans toute l'Europe, surtout au
commencement du printemps. Spinola en a séparé les Anisors, à front un pêu plus avancé dans le
mûle que dans la femelle, et les Éniruares, à côté du corselet très-eæcavé, qui ne sont généralement
pas admis. Le genre PLoa, séparé par Stéphens (N. minutissima, Fabr., de Paris), est plus distinct,
et se reconnait à ses élytres entièrement coriaces, à ses pattes postérieures médiocrement longues,
avec des tarses ayant deux crochets.
CORIXE (Corixa, Geoffr.), se distinguant surtout des Notonecta en ce que les tarses des pattes
antérieures n'ont qu'un seul article. Les Corixes, également européennes et peu nombreuses, se trou-
vent dans l’eau, se trainant sur la vase ou grimpant après les plantes aquatiques : elles nagent par
secousses en ramenant violemment leurs pattes de derrière près de la tête, et s’en servent comme
de deux grandes rames, car ces pattes sont beaucoup plus développées que les autres; quand elles
sont placées sur le sol, elles avancent difficilement et presque par sauts, mais leurs ailes leur per-
mettent de s'élever dans l'air et de se transporter facilement d'une mare à une autre. Une espèce
abondante dans nos environs est la N. punctata, Panzer, longue de 0,10, avec le corps d’un blanc
jaunâtre, lisse et très-brillant, les élytres avec des taches brunes, etc. — Fabricius en a distingué
un genre, SicarA, dans lequel le corselet est coupé presque droit à sa partie postérieure, et l’écus-
son visible, tandis que dans les Corixa propres le corselet est un peu avancé en arrière, et cache
en grande partie l’écusson.
2 tribu, Nérines, à corps aplati, habituellement allongé; tête médiocre; pattes : antérieures ra-
visseuses, c'est-à-dire conformées en pinces au moyen de la jambe et du tarse, qui se replient sur
la cuisse : intermédiaires et postérieures grèles, très-allongées. Chez ces Insectes, les pattes sont en
général peu propres à la natation, de telle sorte que, au lieu de nager, ils marchent au fond des
mares et s’accrochent après les plantes aquatiques pour aller à la recherche de leur nourriture ou
pour venir respirer l'air à la surface de l'eau. C’est surtout chez eux que l’on peut voir un appareil
respiratoire particulier, consistant en une espèce de siphon placé à l'extrémité de l'abdomen et
ayant l'apparence d'un tube grêle, fermé par deux pièces minces, allongées, et comme des espèces
de soies. On rencontre parmi eux des espèces d'assez grande taille, qui appartiennent aux régions
méridionales du globe, tandis que, chez nous, nous n’en possédons que d'assez petites espèces. Les
deux genres principaux sont ceux des Nepa et Naucoris.
NEPE (Nepa, Linné), ayant un corps assez large, aplati; des antennes de trois articles; des han-
ches courtes, épaisses; des tarses antérieurs munis d'un crochet. Les Nèpes ont des mouvements
très-lents, se trainant plutôt qu'ils ne nagent, se laissant prendre avec la main sans chercher à
ANNELÉS, — HÉMIPTÈRES. 205
fuir; elles sont très-carnassières et se dévorent entre elles : chaque femelle peut produire, au milieu
de l’été, de quatre-vingts à cent œufs. Quoique peu nombreux en espèces, on en trouve sur toute
la surface du globe; nous ne nommerons que la N. cinerea, Lin., très-commune dans les eaux
stagnantes de toute l'Europe, et dont la larve, elle-même earnassière, est bien connue. On doit
rapprocher de ce groupe le genre Ranarra, Fabr., qui, avec quelques espèces exotiques, renferme
la R. linearis, Fabr., petite espèce abondante dans les mares de ioute l'Europe. Un autre genre,
Cercormerus, Am. et Serv., ne renferme qu’une seule espèce (C. asiaticus, de Java).
NAUCORE (Naucoris, Geoffr.), à corps plat, acuminé en avant; antennes de quatre articles;
tarses des pattes antérieures armés de deux petits crochets. Les Naucores, ou tout au moins le
Naucoris cimicoides, nagent avec beaucoup de facilité, suivant de Géer, et sortent souvent de l’eau
pendant la nuit; ils sont voraces, attaquent des animaux plus gros qu’eux, et sont de ceux qui font
le plus de carnage dans les eaux, soit à l’état de nymphe, soit à l'état parfait; quelques points de
leur anatomie et de leurs métamorphoses ont été étudiés par M. Léon Dufour. Les N. cimicoides,
Lin., et maculata, Fabr., sont très-communs dans nos environs.
Des genres, tous exotiques, formés aux dépens des Vepa ou des Naucoris, ou pouvant s’en rappro-
cher, sont ceux des : BeLosrowa, Latr.; ce sont les plus grands des Hémiptères connus : leur longueur
peut égaler 0,09 à 0,10; ils sont très-carnassiers, attaquent, dit-on, parfois de jeunes Batraciens;
on en trouve dans les Indes orientales, à Java, etc. (B. indicum, Lepel. et Serv.), à Cayenne (B.
grande, Lin.); Zarrua, Am. et Serv., groupe américain, qui ne doit pas être séparé du précédent;
Arassus, Am. et Serv., du Sénégal; SPuæropema et Dipnonyenus, Cast., des Indes orientales.
5° tribu, Gacurines, à corps large, aplati; tête médiocre, à rebord antérieur un peu relevé; à an-
tennes ayant leur dernier article plus gros que les autres; yeux proéminents; deux ocelles; pattes
très-grêles : antérieures qui sont ravisseuses, et intermédiaires un peu plus courtes que les posté-
rieures. Ce sont, en général, de petits Insectes qui se trouvent le plus habituellement au bord des
eaux saumâtres, s’enfermant et se creusant des galeries dans le sable : cependant ils n'ont cette ha-
bitude que sous leurs deux premiers états de larve et de nymphe, et, à leur état d’Insecte parfait,
on les voit volant au bord des eaux et chassant des Insectes pour en faire leur proie.
On ne range d'une manière définitive dans cette tribu que deux espèces, chacune type d'un genre
particulier, et toutes deux propres à l'Amérique du Sud. Ce sont les GALGULUS, Latr., à yeux très-
saillants; cuisses peu épaisses; tarses pourvus de deux crochets (G. oculatas, Fabr.), du Brésil et du
Mexique; et les MONONYX, Cast., à yeux médiocrement saillants; cuisses très-épaisses; tarses n'of-
frant qu'un seul crochet (M. raptorius, Fabr., du Brésil).
Fig. 184. — Crise striée. l Fig. 189. — Galgule oculé, Fig. 186. — Notonecte blunhitre,
206 [HISTOIRE NATURELLE.
SEPTIÈME FAMILLE. — RÉDUVIENS,
M. É. Blanchard indique sous la dénomination de Répuviens une division très-nombreuse d'Hé-
téroptères, comprenant plusieurs types assez tranchés que nous désignerons comme formant des
tribus distinctes, et dont le principal est le genre Reduvius, de Fabricius. Chez ces Insectes, le bec
est acéré et naît du front; les antennes sont longues, gréles, toujours libres; la téte est rétrécie à
son insertion; V'écusson est petit; le corselet est plus grand que les deux autres segments du tho-
rax; les élytres sont coriaces dans leur moitié antérieure, et transparentes dans le reste de leur
étendue.
On ne peut rien dire de général sur les Réduviens, et c'est dans l'histoire spéciale des tribus et
des genres que nous entrerons surtout dans des détails sur les mœurs et les caractères de ces Hémi-
ptères. Nous ajouterons seulement que ce sont des Insectes de taille moyenne, presque tous car-
nassiers, vivant de rapines, quoique quelques-uns soient phytophages, et qu’on les rencontre dans
toutes les parties du monde, mais plus particulièrement dans les pays chauds.
Les quatre tribus sont celles des Saldides, Hydrométrides, Réduvides et Aradides.
4e tribu, Saznines, à corps déprimé, assez élancé; tête n'offrant pas d'étranglement en forme de
cou en arrière des yeux; ces derniers gros, très-proéminents; pattes longues, très- -grêles. Les Sal-
dides sont de petits Insectes presque tous indigènes, très-agiles, saisissant leur proie à la course ou
en sautant; habitant le bcrd des eaux dont ils ne s’éloignent jamais, et semblent établir le pas-
sage des Népiens, essentiellement aquatiques, aux Réduvides, qui sont tout à fait terrestres.
Deux genres principaux, tous deux peu nombreux en espèces que l’on ne rencontre qu’en Europe,
entrent dans cette tribu, ce sont : 1° lesSALDA, Fabr., à bec long, presque droit; sans ocelles, à pattes:
antérieures grêles, inermes : postérieures ayant quelques épines; vivant sur le bord des eaux dou-
ces ou saumâtres, où ils courent très-vite et sautent avec beaucoup d’agilité : ce qui leur permet de
se dérober facilement aux poursuites de leurs ennemis : les S. xosteræ, Fabr., pilosa, Fall., et sal-
tatoria, Linné, tous assez communs auprès de Paris, en sont les types; le S. flavipes, Fabr., égale-
ment propre à nos environs, formele genre Scionoprerus, Am. et Serv.; et 2° LEPTOPUS, Latr., à bec
très-court, épineux; ocelles au nombre de deux et portés sur une élévation; à pattes antérieures
munies d'épines; d'après les observations de M. Léon Dufour, qui a donné une monographie de ces
Insectes, les Leptopes vivraient dans les endroits secs, et les espèces qui habiteraient le voisinage des
eaux ne se rencontreraient jamais que dans les endroits couverts de cailloux et exposés à l'ardeur
du soleil : l'espèce la plus connue est le L. littoralis, L. Dufour, commun dans le midi de la
France. Peut-être doit-on ranger dans le voisinage de ce groupe le genre PELEGONUS, Latr., ayant
pour type le P. marginatus, Insecte riverain propre à l'Europe méridionale.
9e {:ibu, HYDROMÉTRIDES, à corps allongé, étroit, toujours couvert d'un duvet très-court; tête rétré-
cie postérieurement un peu en forme de cou; yeux légèrement proéminents; antennes cylindriques,
assez longues, composées de quatre articles d'égale épaisseur dans toute leur étendue; pattes anté-
,rieures plus courtes que les autres, dépourvues d'épines propres à retenir la proie; tarses de deux
articles, ayant les crochets en dehors. Cette tribu renferme des Insectes peu nombreux en espèces,
qui, quoique aquatiques, ne s’enfoncent jamais dans l’eau, à moins que ce ne soit accidentellement,
mais qui marchent et qui courent à la surface des eaux aussi facilement et avec beaucoup plus de
vivacité que s'ils étaient sur la terre : les poils courts et serrés qui recouvrent leur corps et le des-
sous de leurs tarses leur permettent de glisser sur l’eau sans se mouiller; tous sont carnassiers,
quoique leurs pattes ne soient pas ravisseuses; la plupart des espêces sont pourvues d'élytres et
d'ailes qui sont longues et étroites, quelques-unes sont aptères; leur patrie semble être presque ex-
clusivement l'Europe.
Les genres principaux sont ceux des :
RiuAe Fig. 2. l'iu. 9.
Graphosome linéolé. Agonoderme rayé de jaune. Trigonosome de Desfontune.
Fig: 6. Fig. 7. Lis. 8.
Asope de la Fioride. Ménénote courbé en croissant. Méginème à antennes courtes.
\- HÉMIPTÈRES. ps. 49.
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 207
VÉLIE (Velia, Latr.), à pattes intermédiaires et postérieures écartées à leur insertion; à cuisses
courtes, épaisses; à tarses de trois articles. Ce genre, étudié surtout par MM. Schummel et L. Du-
four, ne renferme qu'un petit nombre d'espèces, dort les deux principales, qui se trouvent dans
les eaux des ruisseaux et des fontaines des lieux ombragés du midi de Ja France, sont les V. rivulo-
rum et currens, Fabr., qui vivent ensemble en sociétés nombreuses. — Un genre qui en est très-
voisin, est celui des Micnovezra, Westw. (espèce unique, M. pulchella, de Saint-Vincent, en Amé-
rique). Peut-être doit-on aussi en rapprocher le genre Hegnus, Curtis, qui ne renferme que le H.
pusillus, d'Angleterre. ;
GERRIS (Gerris, Fabr.), à pattes intermédiaires et postérieures très-rapprochées à leur inser-
tion; à cuisses longues, gréles; à corps allongé; abdomen à segments longs, non relevés. Ce sont des
Insectes que l’on rencontre en grande abondance dès les premiers beaux jours du printemps et
pendant tout l’été, courant à la surface de l’eau des bassins, des mares et des étangs, se mouvant
avec beaucoup d'agilité, et glissant sur l’eau avec une vélocité telle qu'on ne peut facilement les
saisir. Les jambes de devant se replient sur les cuisses, de manière à retenir leur proie et à la
porter à la bouche, quoiqu'’elles ne soient pas armées d'épines qui indiquent ce genre de vie. Les
espéces sont peu nombreuses, mais répandues sur toute la surface du globe : plusieurs habitent les
environs de Paris, telles sont, par exemple, les G. lacustris, Linné, paludum, Fabr., et aptera,
Schum. — Le genre Harosares, Eschschotz (H. micans, de l'océan Atlantique, etc.), diffère surtout
des Gerris par son corps assez ramassé et son abdomen à segments très-courts, relevés. Un genre,
Pricomera, Am. et Serv. (G. laticauda, Hardwich, du Népaul), ne diffère guère des Gerris.
HYDROMÈTRE (Hydrometra, Fabr.), ayant toutes tes pattes gréles, à peu près d'égale longueur,
et les tarses munis de crochets, et ne comprenant qu’une seule espèce, le Cimex stagnorum, Linné,
propre à toute l'Europe, et qui se trouve au bord des étangs dans les herbages.
Fig. 187, — Zelus couronné. Fig. 158. — Halobate peint.
3° tribu, Rénuvines, à corps habituellement allongé; tête très-rétrécie vers sa partie postérieure, à
son insertion avec le corselet; bec court, épais, très-recourbé; antennes longues, gréles, de quatre
208 [HISTOIRE NATURELLE.
articles; corselet épineux ou dentelé, pattes longues, minces; avec les cuisses souvent renflées et ar-
mées d'épines; tarses de trois articles. Les Réduvides sont très-nombreux en espèces, toutes car-
nassières, douées de beaucoup d’agilité et vivant sur les fleurs, les arbres, ou parfois même se
trouvant dans nos maisons; ce sont des Insectes parés de couleurs très-variées et quelquefois très-
vives; leurs formes sont très-diverses, et souvent des épines ornent leur corselet : aussi a-t-on cru
pouvoir trouver dans ces particularités des caractères propres à y former un grand nombre de
genres. Ils habitent toutes les contrées chaudes du globe, et sont terrestres. Les groupes généri-
ques que l'on pourrait regarder comme des divisions plus élevées, sont les suivants :
MÈSE (Emesa, Fabr.), se distinguant principalement par ses pattes antérieures ravisseuses, et
n'ayant qu'un seul crochet aux tarses. Les Insectes de ce groupe, en assez petit nombre, ont, par
leur aspect général, une assez grande ressemblance avec quelques Orthoptères, et si l'on n'étudiait
la disposition de leur bouche, on pourrait les confondre facilement avec certaines Mantes; ils mar-
chent lentement et comme par saccades, se trainant sur leurs très-longues pattes comme sur des
échasses, et habitent particulièrement les contrées méridionales de l'Afrique, de l'Asie et de l’Amé-
rique du Sud. Le type est le Gerris filum, Fabr., des Indes orientales et de l’île de France. — On
en a distingué les Prorarra, Scopoli (Cerascopus, Heinck), dont une espèce (Cimex vagabundus,
Lin.), qui a l'aspect général d'une Tipule, habite le midi de la France et se trouve même dans nos
environs; et Emesonema, Spin. (P. domestica, d'Italie).
1
LELUS (Zelus, Fabr.), qui a la téte avancée en pointe triangulaire; les ocelles très-rapprochés;
les pattes antérieures simples, avec les jambes sans fossette spongieuse à l'extrémité; toutes les pat-
tes gréles, ete. Ce genre renferme une assez grande quantité d’espèces répandues dans toutes les
parties du monde, et dont on a fait plusieurs coupes génériques distinctes, et qui en différent plus
ou moins notablement, telles que celles des : Evacoras et Myocoris, Burm.; Isoconpyzus, Dipzopus,
DarBanus, Passacenrus, Saica, Arnacuezus, Heza et SixEa, Am. et Serv.
On doit rapprocher des Zelus, quoiqu’en différant plus notablement que les groupes précédents,
les genres Apromerus, Hahn; Benarus, Tricnosceuis, MicraNcHENUS, Ponerogta, HEREGA et Pristuevarma,
Am. et Serv., tous américains, excepté le dernier qui est de Java; ainsi que ceux des Harracron et
Prinorus, Cast.; Cinonia, Yornus, EuLyes, Sycanus, Prigsruesamus, HeLonorus, PyezopcLeura, Monrina
cet Prœæocasrer, Am. et Serv.; Arizus, Hahn, de toutes les parties du monde, à l'exception de l’Eu-
rope; Norocyrrus, Burm.; Sacconères, Spin.; Sava, Am. et Serv.; et peut-être celui des SPHÆRIDOPS,
Am. et Serv., tous incomplétement connus.
RÉDUVE (Reduvius, Fabr.), ayant une tête ovalaire avancée en pointe triangulaire; des yeux
saillants; des antennes à premier article épais, les deux derniers gréles; des pattes antérieures
simples, à jambes offrant en dessous une pelote spongieuse. Ce genre ne renferme aujourd’hui
qu'un petit nombre d'espèces, dont le type est le Réuve masqué (Reduvius personatus, Linné), long
de 0®,018 à 0",020, entièrement d’un brun noirètre, vivant dans les habitations, et s'attaquant
principalement à la Punaise des lits, mais en liberté dans la campagne, se cachant sous les écorces
et dévorant les Éphémères et les Mouches; à l’état de larve, il se couvre de poussière, probablement
pour mieux se cacher à ses ennemis et pour n'être pas apercu de ses victimes; sa piqüre est très-
douloureuse pour l'homme. Ce groupe a été, dans ces derniers temps, partagé en un grand nom-
bre de genres, tels que ceux des PLaryments, Cast.; Spinicer, Traropes, Burm.; TEerroxra, Acanrmas-
ris, BurçanDa, Am. et Ser., ete. — D’autres groupes, qui s'en éloignent davantage, sont ceux des
Macrors, Burm. (Macrophthalmus, Cast.); Ceruera et Saryavara, Am. ct Serv., de l'Amérique du
Sud et du Sénégal; Opus ou Tarrmus, Cast., de Java; Hammarocerus, Cast., et Porura, Am. et Serv.,
de Cayenne; Ecrricnonia, Lep. et Serv., et Paysonnynenvs, Am. et Serv., du Brésil, du Cap, ete.;
Permares, Serv., ou Prrares, Burm., comprenant parmi quelques espèces exotiques le P. stridulus,
Fabr., du midi de la France; Lesromerus, Carawrarus, Rasanus, Am. et Serv.; Pacaynomus, Klug:
tous exotiques; Prosremma, Cast. (Metastemma, Am. et Serv.), ayant pour type le R. guttula,Fabr.,
du midi de la France; Namis, Latr., qui renferme plusieurs espèces indigènes, comme les N. aptera,
Fabr; sabaptera, de Géer; fera, Linné; dorsalis, L. Duf.; Hororricuivs, Burm., une espèce (H. cy-
rilli, Costa), des environs de Naples, et Perarocuernus, Pal. Beauv., du royaume d'Oware.
ANNELÉS, — HÉMIPTÈRES. 209
CONORHINE (Conorhinus, Cast.), qui a le corps large, aplati; la tête prolongée en cylindre au delà
des yeux; les antennes à premier article court : les deux derniers très-gréles; les pattes antérieures
simples. Les Insectes de ce genre vivent du sang des Mammifères; ils viennent dans les maisons où
ils se tiennent cachés pendant le jour; mais ils volent le soir à la lumière et sucent leur proie :
leur piqûre est très-douloureuse; le type est le Cimex rubro-fasciatus, de Géer, du Brésil. On en
rapproche les Cimgus, Iahn, et Lopnocepnara, espèces asiatiques; Oxcocernarvs, Cast., Sasrrapona,
Cauruesancus, Raapuiposous, Am. et Serv.; Srenopopa, Cast.; Pycozamris, Germ., tous exotiques, à
l'exception du dernier, qui a pour type le Gerris pallipes, Fabr., qui se trouve, mais rarement,
dans les forêts du midi de la France. ,
HOLOPTILE (Holoplilus, Lepel. et Serv.), ayant la tête courte; les antennes poilues, avec chaque
article inséré avant l'extrémité, et qui a pour type l’H. ursus, petite espèce propre au cap de
Bonne-Espérance, remarquable par les poils nombreux qui le recouvrent. Deux genres qui s’en
rapprochent sont ceux des Prisocerus, Gray (Maotys, Am. et Serv.), de Java, et Pricocnemus,
Westw., de la Nouvelle-Hollande.
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Fig. 489 — Punaise des lits. Fig. 190. — Réduve sanglante. Fig. 191. — Tingis du Poirier.
4 tribu, Aranines, à corps fortement aplati, ordinairement arrondi; bec libre, inséré dans une
cavité dont les bords sont toujours saillants; tête pointue, s'avancant entre les antennes; élytres et
ailes reçues dans une dépression située au-dessus de l'abdomen ou pouvant manquer; tarses de trois
articles. Cette tribu se compose d'espèces groupées dans un nombre assez restreint de genres, ré-
pandues dans toutes les parties du monde, et ayant des habitudes assez différentes; en effet, les
unes sucent le sang de l’homme et des animaux, les autres attaquent des Insectes vivants, et il en
quelques-unes qui vivent sur les végétaux dont elles sucent la séve.
Parmi les vingt et quelques genres créés dans cette tribu, cinq peuvent être pris comme typi-
ques : ce sont ceux des :
PUNAISE (Cimeæx, Linné), à corps excessivement aplati, ovalaire; à téle sans rétrécissement
postérieur; antennes à premier article court : les deux derniers gréles; pas d'élytres ni d'ailes, au
moins dans la très-grande majorité des cas. Ce genre ne renferme qu’une seule espèce, la Puxaise
pes tirs, Geoffroy, que Linné plaçait dans le genre Cimex, sous la dénomination de C. lectularia,
et qui est devenu le type du genre Acanthia, Fabricius, nom adopté pour le genre qui nous occupe
par quelques entomologistes, tandis que d’autres lui laissent en propre celui de Cimeæ.
La Punaise des lits est longue d’un peu moins de 0,01, son corps est d’un ferrugineux rougeûtre;
son corselet fortement granuleux, avec quelques poils brunätres; ses pattes et ses antennes sont de la
couleur du corps. Se trouve parfois en grand nombre dans les habitations de l’homme et l'a suivi pres-
que partout où il s'est établi, si ce n’est peut-être dans les régions très-septentrionales, tandis qu’elle
pullule surtout dans les contrées méridionales. Cette espèce se nourrit essentiellement du sang de
l'homme; elle se blottit pendant le jour dans les interstices des boiseries, sous les papiers de tenture,
dans le bois et la sangle des lits, et elle échappe ainsi à toutes les investigations. On a souvent pro-
fité de la connaissance de cette habitude pour les détruire en leur mettant des claies d’osier, où elles
vont se loger, et dont on les fait sortir facilement en les secouant brusquement. Beaucoup de per-
2"
Le 21
210: HISTOIRE NATURELLE.
sonnes cherchent à se préserver des Punaises en éloignant leur lit des murailles, mais elles ne réus-
sissent guère à les éviter, parce qu’un instinct particulier semble les diriger vers l'endroit où l’on
repose; alors elles grimpent le long de la muraille et du plafond, et lorsqu'elles sont arrivées au-
dessus du lit, elles se laissent choir, et dès que le jour paraît elles regagnent leur retraite, de ma-
nière que le matin elles ont presque toujours disparu. Tout le monde connaît la douleur que
produit la piqûre des Punaises, ainsi que l’odeur fétide qu’elles exhalent, de même, quoique à un
degré souvent beaucoup plus faible, que toutes les espèces d'Hémiptères. La Punaise des lits pond des
œufs de couleur blanchâtre, de forme oblongue, un peu courbés à l’une de leurs extrémités, où l’on
aperçoit un petit bourrelet; et elle les loge habituellement dans les angles et les fissures des murail-
les poür les dérober à la vue de leurs ennemis. Lorsque les petites Punaises sortent de l'œuf, leur
couleur est d’un blanc sale; mais après quelques changements de peau, et sans passer par l’état de
nymphe proprement dit, au moins d'une manière manifeste, elles deviennent d'un brun rougeâtre
plus ou moins foncé, suivant la nourriture plus ou moins abondante qu'elles ont prise. Certains au-
teurs ont prétendu que les Punaises auraient été amenées d'Amérique, d'où elles auraient été introdui-
tes sur le continent européen par l'Angleterre, où elles ne furent guère indiquées que vers le seizième
siècle. Mais il est impossible d'admettre cela, car quelques auteurs anciens, Aristote lui-même,
les ont signalées dans leurs ouvrages. Les Punaises sont peut-être, comme le prétend M. Burmeister,
originaires des Indes orientales; mais on doit croire que, importées depuis une baute antiquité, pen-
dant longtemps on n'y a pas fait une grande attention dans quelques pays; et, d’un autre côté, il
est possible aussi que les Punaises n'aient été connues que beaucoup plus tard en Angleterre, et
Mouflet rapporte qu’en 1503 deux dames nobles furent effrayées à la vue des pustules produites
par ces Hémiptères, et se crurent attaquées par quelque épidémie. D'Azarra fait remarquer que les
Punaises n'infectent pas les hommes à l’état sauvage, mais seulement lorsqu'ils sont réunis en état
de civilisation dans des habitations, à la manière des Européens. Ce fait très-remarquable est-il
vrai? Une observation attentive pourra seule le démontrer. Quelques points de l'anatomie des Pu-
naises ont été étudiés par M. L. Dufour, qui a vu que chez ces Insectes le tube digestif avait trois ou
quatre fois la longueur du corps.
Ces Hétéroptères se multiplient en prodigieuse abondance, surtout dans les maisons malpropres; on
a employé beaucoup de moyens pour les détruire, mais plusieurs ne réussissent qu'imparfaitement,
et d’autres sont d’un emploi dangereux. Ceux dont on a usé avec le plus de succès sont l'essence
de térébenthine, que l'on étend sur toutes les murailles, en ayant soin de la faire pénétrer dans les
fentes, dans les cavités et dans tous les endroits inaccessibles à la lumière. Le sublimé corrosif dissout
dans l’esprit-de-vin les fait également périr, mais il faut éviter d'approcher cette liqueur des yeux,
de la bouche et des parties dénudées d'épiderme. Un procédé indiqué par M. Blanchard consiste à
placer au milieu de la chambre infectée un réchaud sur lequel on place un vase contenant du
soufre, après avoir hermétiquement bouché tous les endroits accessibles à l'air, et ce n'est que le
lendemain, quand la vapeur du soufre s'est exhalée et a dégagé tout l’acide sulfureux, que
les Punaises ont succombé. Mais aujourd'hui tous ces moyens, dangereux ou difficiles à mettre
en œuvre, doivent être rejetés; et il paraît que la poudredes fleurs de la Pyrêthre, ainsi que celle de
plusieurs autres plantes de la même famille, suffit pour tuer en très-peu de temps toutes les Pu-
naises qui sont en contact avec elle; ce sont ces fleurs concassées qui sont le principe actif des
poudres insecticides, qui portent tant de noms différents, que l'on vend partout depuis deux ou
trois ans, et qui‘étaient connues depuis longtemps sous la dénomination de Poudre persane. Di-
sons, en terminant ces remarques sur les moyens employés pour détruire les Punaises, que l'on
regarde vulgairement les fleurs de la Tanaisie comme propres à faire fuir ces Insectes, et qu’aujour-
d’hui que l’on connaît l'action positive de la Pyrèthre, on doit penser qu il y a peut-être quelque
chose de vrai dans cette croyance populaire, et que des observations sérieuses doivent être faites à
ce sujet.
Assez récemment M. Eversmann a fait connaître une seconde espèce de Punaise, qui attaquerait
également l’homme (C. ciliata), et qui a été trouvée dans plusieurs maisons de Casan. En outre,
Fabricius a nommé emiptera un Cimex de l'Amérique du Sud, qui ne diffère probablement bas
spécifiquement du lectularia.
- On prétend aussi que des Punaises vivent également du sang de quelques animaux, et qu’elles
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES 211
appartiennent à des espèces différentes; mais, jusqu'à présent, cette assertion n’a pas élé prouvée
d'une manière authentique.
ARADE (Aradus, Fabr.), à tête rôtrécie postérieurement; bec grêle, plus long que la téte; anten-
nes épaisses, cylindriques, à dernier article ovalaire; élytres sans réticulation. Groupe essentielle-
ment européen, et comprenant des espèces qui vivent d'Insectes et se trouvent sous les écorces; le
type est l’A. betulæ, Lin., que l’on rencontre communément auprès de Paris, sous les vieilles écor-
ces. On en a distingué les Presrosoma, Cast. (P. depressum, Fabr., de nos environs, sous les écorces
du chêne); Dysoniws, Saint-Farg. et Serv. (D. lunatus, de Cayenne); Bracuvrnynenus, Cast. (P.
orientalis, de Java, etc.); Crimia, Am. et Serv. (C. tuberculata, de Java), et Mezma, Am. et Serv.
(M. granulata, du midi de la France).
TINGIS (Tingis, Fabr.), à corps aplati, antennes à premier article grêle et le dernier épaissi en
forme de bouton; écusson recouvert par le bord postérieur du corselet; élytres réticulées. Ce genre
renferme des espèces européennes vivant sur les arbres et les fleurs, piquant les végétaux, dont
ils absorbent la séve, et occasionnant souvent des excroissances considérables; ce sont de très-petits
Insectes, qui offrent pour la plupart des couleurs peu variées, mais qui se font souvent remarquer
par la réticulation régulière des nervures des élytres et par des expansions du corselet : les T. pyri,
Fabr., et echii, Wolff, se rencontrent aux environs de Paris, sur les plantes dont ils portent les
noms. On en a séparé les genres Moxanruia, Saint-Farg. et Serv.; ayant pour type le M. cardui,
Lin., de nos environs; Canracapes, Am. et Serv. (C. quadricornis, Duf., d'Espagne); SERENTuRA,
Spin. (C. læta, Fall., commun en Europe), qui doivent peut-être y être réunis; tandis qu’on doit
probablement en isoler les groupes des Piesma, Saint-Farg. et Serv. (P. capitata, Wolff, d’Alle-
magne); ANOMALOPTERA, Perris (À. helianthemi, de Mont-de-Marsan), et Eurycera, Cast. (E. nigri-
cornis, des environs de Paris).
PHLÉE (Phlæa, Saint-Farg: et Serv.), à corps aplati; à antennes seulement de trois articles; bec
très-long; corselet et élytres dilatés; pattes gréles. La place que ce genre doit occuper dans la série
des Hémiptères n’est pas parfaitement fixée; il a pour type le Cimex formicatus, Drury, du Brésil,
et renferme également une espèce du Ghili, le P. paradoxa, de Hahn.
PHYMATE (Phymata, Latr.), à antennes plus longues que la tête, gréles, avec le premier article
très-allongé et le dernier en bouton; écusson petit; pattes à hanches allongées et à cuisses renflées.
Ce genre, auquel Fabricius a donné le nom de Syrtis, renferme des espèces européennes, telle que
la P. crassipes, Fabr., qui se trouve sur les fleurs dans les bois des environs de Paris, et américai-
nes, comme la P. errosu, Lin., des États-Unis. — Trois autres genres se rapprochent de celui-ci,
tout en S'en distinguant par quelques particularités tirées des antennes et de l’écusson, ce sont les
Oxvruvreus et Amecvravreus, Westw., et MacrocepuaLus, Swed, qui, tous trois, ne sont formés que
de quelques espèces exotiques.
\ HUITIÈME FAMILLE. — LYGÉENS.
Cette famille, qui a pour type le genre Lygæus, de Fabricius, comprend un très-grand nombre
d'espèces, qui ont pour caractères généraux : tte non rétrécie; bec naissant du front; antennes
longues, assex épaisses, toujours libres; corselet plus grand que les deux autres segments du tho-
rax; écusson petit; élytres coriaces dans leur moitié antérieure, et transparentes dans le reste de
leur étendue.
Les Lygéens constituent une très-nombreuse famille, aussi a-t-on dû y former trois tribus dis-
tinctes, celles des Coréides, Lygéides et Mirides, elles-mêmes partagées en plusieurs groupes parti-
culiers et en beaucoup de genres. Ces Hétéroptères sont tous essentiellement phytophages; leur bec
est plus court que celui des Réduviens; toutes leurs pattes sont simples, propres à la course : aussi
aucun d'eux n’est aquatique, et tous sont-ils terrestres. On les trouve sur les fleurs, sur d'autres
212 HISTOIRE NATURELLE.
parties des végétaux, sur le tronc et au pied des arbres, etc. Les Lygéens sont abondants en Eu-
rope, et c’est même la famille de l’ordre des Hémiptères qui a le plus grand nombre de représen-
tants dans cette partie du monde, mais cependant toutes les contrées du globe, HAS les
parties méridionales, en renferment.
Fabricius a commencé à former quelques genres, Latreille, Fallen, Thunberg, Lepelletier de
Saint-Fargeau et Audinet, Serville, MM. de Castelnau, Emile Blanchard, etc., en ont aussi créé
quelques-uns; mais c'est surtout dans les ouvrages récents de MM. Burmeister, Anryot et Serville,
qu'il en a été fondé un très-grand nombre, et nous serions même tenté de dire un trop grand nom-
bre. Plusieurs entomologistes observateurs ont étudié les mœurs de quelques espèces; enfin l’orga-
nisation de ces êtres n’est pas complétement connue, quoique l’on ait déjà de bonnes observations
de M. Léon Dufour et de plusieurs autres. Il nous sera impossible d'indiquer tous les genres, mais
nous tächerons de citer à peu près tous ceux admis par MM. Amyot et Serville, et en nous en occu-
pant, nous dirons quelques mots des mœurs de quelques-uns d’entre eux.
Fig. 192. — Araphe de la Caroline. Fig. 195. — Phyllomorphe Fig. 194. — Sphéridops aimable,
de Madagascar. :
4 tribu, Corémes, ayant la ééte aplatie; les antennes insérées à la partie antérieure de la tête,
sur la même ligne que les yeux; les tarses présentant deux appendices entre leurs crochets. Cette
division renferme une assez grande quantité de genres, dont quelques-uns sont très-nombreux en
espèces propres à toutes les parties du monde; plusieurs atteignent une grande taille, et offrent
parfois des formes bizarres, surtout dans la dilatation et le renflement des pattes de derrière; la
plupart se trouvent sur les plantes dont ils sucent les fluides; quelques espèces vivent en famille et
demeurent immobiles quelquefois pendant un temps considérable; leurs couleurs sont variées et
souvent brillantes. On peut y former deux groupes particuliers.
A. Ansoscérires. Les Lygéens de cette divison sont caractérisés, en général, par leurs antennes
à dernier article plus long que les autres, et par leurs pattes postérieures ordinairement inégales.
On y distingue unc quarantaine de genres, dont on rencontre les nombreuses espèces presque sur
tout le globe, principalement en Europe et en Amérique. Les genres les plus remarquables sont
ceux des : 1° LEPTOCORISA, Latr. (Myodochus, Oliv.; Colobatrites, Burm.), à téte allongée, ter-
minée en pointe bifide; à corps étroit, linéaire, et à pattes très-grèles, ayant pour type le Gerris
varicornis, des Indes orientales. 2° STENOCEPHALUS, Latr. (Dicranomerus, Hahn), à téte prolon-
yée en pointe; à pattes simples, avec les jambes droites, ayant pour espèce principale le Coreus nu-
gaz, Fabr., long de 0,015, brun obseur, répandu dans la plus grande partie de l'Europe, com-
mun aux environs de Paris, et dont M. Léon Dufour a étudié l’organisation; on peut rapprocher
de ce groupe les genres Micralytra, Cast.; Actorus, Burm.; Clevrosoma, Cast., ou Rhopalus, Schill.;
qui renferment surtout plusieurs espèces propres au midi de l'Europe. 5° ALYDUS, Fabr., à féte
élargie postérieurement; à corps linéaire, et à cuisses de derrière renflées, épineuses, qui comprend
surtout l'A. calcaratus, Fabr., long de 0,01, noirâtre, assez velu, abondant auprès de Paris, sur-
tout vers la fin de l'automne, et se trouvant sur les Euphorbes ainsi que sur les Genista scopa-
rüum et tinctoria; les genres Meloxa, Hyalymenus, Am. et Serv., Copius, Thunberg, Holhymenia,
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 915
Sant-Farg. et Serv., tous exotiques, et Camtopus, Am. et Serv. (ce dernier ayant pour type le
Coreus lateralis, Germ., du midi de la France), se rapprochent plus ou moins des Alydes. 4° ANI-
SOSCELIS, Latr., à tête un peu avancée; à pattes longues, avec Les cuisses postérieures ordinairement
aplaties, épineuses, et les jambes foliacées; groupe exotique, surtout américain, quoique égale-
ment d'autres contrées étrangères à l'Europe, ayant pour type le Lygæus membranacea, Kabr., des
Indes orientales, de l'île de France, de Madagascar, du Sénégal, etc., et dont on doit rapprocher,
sinon y réunir, les genres Diactor, Perty; Leptoscelis, Cast.; Astacops, Boisduval, Tynotoma, Am. et
Serv., etc. 5° PARYTHES, Burm., à téte très-courte; à pattes gréles, simples, comprenant des espèces
américaines (Coreus lætus, Fabr., de Cayenne), et dont se rapprochent les groupes des Homwocerus,
Burm., Sundarus et Chærommatus, Am. et Serv., et Verlusia, Spin., tous exotiques, à l'exception
du dernier, qui a pour type le Coreus quadratus, Fabr., petite espèce d’un brun jaunâtre en dessus,
jaune pàle en dessous, qui se rencontre très-communément sur diverses plantes dans nos environs.
6° NEMATOPUS, Latr., à tôte courte, arrondie; à pattes de derrière très-longues, avec les cuisses
renflées, garnies d'épines, de même que les jambes; on en connaît un grand nombre d’espèces
propres à toutes les contrées du globe (types Lygeus gallus, Fabr., et ruficrus, Perty, de l’Améri-
que méridionale); on en rapproche, ainsi que du groupe suivant, un grand nombre de genres,
tous exotiques, tels que ceux des: Discogaster, Burm.; Acanthocephala, Cast. (Metapodius,
Westw.); Pachylis, Saint-Farg. et Serv.; Physomerus, Burm.; Meropachus, Cast.; Archimerus,
Burm.; Moxena, Spathephora, Melacha, Piexogaster et Petalops, Am. et Serv.; et 7° MICTIS, Leach,
à tête courte; antennes simples, avec le dernier article renflé, et à pattes de derrière ayant les
cuisses renflées, éjineuses; ayant pour type le Cimex vulqus, Linné, grande espèce très-répandue
au cap de Bonne-Espérance, et dont MM. Amyot et Serville ont distingué les deux genres Dalader
et Molchina.
B. Cortes, renfermant dés Lygéens en grand nombre, chez lesquels le dernier article des an-
tennes est plus court et plus gros que l'avant-dernier, se trouvant partout, et dont les types princi-
paux sont les suivants : 4° RHOPALUS, Schiller (Myrmus, Hahn), à tête large, peu avancée, et à
antennes courtes, velues, sans coude, avec le dernier article en massue, ayant pour type le R. mir-
miformis, Fall., qui se trouve, mais rarement, en France; on en rapproche les genres : Theraphu,
Am. et Serv. (Cimex hyosciami, Linné, commun en Europe, et qui se nourrit du suc vénéneux
de la jusquiame); Pseudophæus, Burm. (Arenocoris, Hahn), qui comprend plusieurs espèces du
midi de la France (Coreus Fallenii, et Dahlmanni, Schill.), et Merocoris, Perty (Harmastes,
Burm.), de l'Amérique du Sud. 2° CORIZUS, Fall., à téte un peu avancée; à antennes avec le der-
nier article en massue. ayant pour type le D. crassicornis, Linné, abondant dans toute l’Europe,
et dont on a rapproché les genres Lygæomorphus, Blanch., et Kleidocerus, Westw. 3° COREUS,
Fabr., à téte courte; à antennes ayant son premier article long et le second ovalaire; groupe ré-
pandu sur toute la surface du globe. dont les espèces, qui vivent souvent en familles nombreuses,
sucent le-suc de différentes plantes, surtout dans les endroits humides et couverts : comme type,
nous ne citerons que le C. hirticornis, Fabr., long de 0,008, à corps d’un ferrugineux cannelle,
très-velu, assez ruguéux en dessus, commun auprès de Paris; un grand nombre de genres en ont
été distingués, tels sont ceux des Craspedum, Rambur; Phyllomorpha, Cast.; Gonocerus, Latr.:
Hypselonotus et Coreoris, Hahn; Pephricus, Zicca et Namausc, Am. et Serv., etc. 4° NEIDES, Latr.
(Berytus, Fabr.), à tête avancée entre les antennes : celles-ci gréles, allongées, formant un coude
après le deuxième article qui est renflé au bout; ce sont de petits Hémiptères ayant de très-longues
pattes, ce qui les fait paraître comme montés sur des échasses, se trouvant sur les herbes élevées,
dans les lieux humides et ombragés, dont on ne connaît qu'un petit nombre d'espèces européennes
et américaines (type Cimex tipularius, Linné, de toute l'Europe). 5° ACANTHOCORIS, Am. et Serv.,
dont le type provient de Java, et auprès duquel on rapporte les genres Hymeniphora, Cast.; Crino-
cerus, Burm.; Golema, Camptischium et Machtima, Am. et Serv., tous américains. 6° SYROMAS-
TES, Latr., à tête carrée; antennes à premier article gros, les suivants gréles, ayant pour type le
Cimex marginatus, Linné, très-commun en Europe, et dont l'anatomie a été faite par M. Léon Du-
four; on en a distingué les genres Enophlops, Am. et Serv., de l'Europe méridionale; Anasa, Am.
et Serv., du Brésil; Atractus, Cast. (A. cinereus, Cast., de l’Anjou et des environs de Paris), et
214 HISTOIRE NATURELLE.
Chariesterus, Cast., de l'Amérique du Sud. 7° SPARTOCERA, Cast., à ‘téte courte; antennes assez
épaisses, avec le dernier article fusiforme; à corselet ayant ses angles prolongés en lobes; groupe
contenant des espèces américaines, de même que les genres Menenotus, Cast.; Prismatocerus et
Sephina, Am. et Serv.
Fig. 195. — Acanthospe à six taches. : Big. 196. — Platychiria umbrosa. Fig. 197. — Mégarhynque à bec.
2 tribu, Lycéines, ayant les antennes insérées au-dessous des yeux, avec le dernier article ordi-
nairement plus gros que les autres, en forme de fuseau allongé; à tarses ne présentant pas d'appen-
dices entre les crochets. Les Lygéides ne sont pas aussi nombreux en genres que les Coréides, mais
plusieurs d’entre eux renferment un très-grand nombre d'espèces, et il y en a beaucoup de répan-
dues dans les parties méridionales de l'Europe et de l'Amérique. La plupart sont ornées de vives
couleurs : se tiennent habituellement en troupes nombreuses sur les plantes, sous les écorces et les
pierres, etc., tous les individus étant serrés les uns contre les autres, et ayant la tête dirigée vers
un point central. Ces Hémiptères se nourrissent en général du suc des végétaux, mais il paraît que
plusieurs ont des habitudes carnassières, et que quelques autres ne vivent pas d'Insectes vivants,
mais de ceux qui sont en partie en décomposition. On y forme trois groupes spéciaux :
A. Asreuuires, dans lesquels il n’y a pas d'ocelles. Genres : 1° ASTEMMA, Latr., à {éte avuncée,
et à corselet rébordé latéralement; groupe anciennement très-nombreux en espèces de toutes les
contrées du globe (types : Cicada aptera, Linné, et Phytocoris saltians, Fallen; communs aux en-
virons de Paris), mais dont on a, dans ces derniers temps, distingué les genres des : Chlamydatus,
Curtis (Pachytoma, Costa); Macrocherata, Lefebv. (Lohita, Am. et Serv.); Odontopus, Cast.; Physo-
pelta, Dysdercus, Ectatops, Am. et Serv. 2° PYRRHOCORIS, Rodhe, Fallen, à féte en ovale allongé;
à corselet un peu rétréci en avant, presque quadrangulaire; ayant pour type le Cimex apterus,
Linné, connu vulgairement sous les dénominations de Suisse, PunaisE DES Bois et LYGÉE APTÈRE :
c’est un Insecte long environ de 0",01, à corps rouge; tête et antennes entièrement noires; corselet
rouge, ayant dans son milieu une large tache carrée noire; écusson noir; élytres rouges, ayant cha:
cune un gros point noir vers leur milieu et un autre beaucoup plus près de leur base; pattes entière-
ment noires; sternum rouge tacheté de noir; abdomen noir, bordé de rouge; on rencontre, pendant la
belle saison, des masses d'individus réunis en famille sous les pierres, les écorces des arbres, au pied
des plantes, etc.; le plus souvent leurs élytres sont dépourvues de membrane, mais certains individus
ont des élytres entières; Hausmann a donné une note intéressante sur les-mœurs de cet Insecte, et
M. Léon Dufour a publié des détails anatomiques qui doivent être consultés. 3° LARGES, à téte courte,
et à corselel plan; comprenant quelques espèces de l’Amérique méridionale (type, Lygeus lunulatus,
Fabr.), et dont on a séparé les genres Euryophthalmus, Cast., et Acinocoris, Hahn.
B. Lycérrgs, qui ont, au contraire, des ocelles très-distincts. Genres : 1° LYGEUS, à antennes
ayant des articles courts, et à pattes égales entre elles; comprenant de nombreuses espèces répan--
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 915
dues dans toutes les parties du monde, toutes présentant des couleurs vives, noires, rouges ou jau-
nes, et se trouvant souvent sur les plantes en familles tellement abondantes, qu’elles forment une
masse rouge : les types sont le Lygeus militaris, Fabr., long d'un peu plus de 0%,014, à corps d’un
beau rouge tacheté de noir, qui habite le midi de l'Europe, et que l’on rencontre aussi dans le nord
de l'Afrique, aux Indes orientales, ete., et le L. equestris, Linné, qui se trouve parfois, quoique ra-
‘rement, dans nos environs; parmi les genres qu’on en a séparé, nous citerons seulement ceux des :
Henectaris, Spin.; Arocatus, Spin., auxquels on pourrait joindre des groupes nombreux, tels que
ceux des : Rhyparochromus et Polyacanthus, Cast.; Stenogaster, Hahn; Plociomerus, Say; Beosus,
Pterotmetus, OEdancala, Am. et Serv., ete. 2° APHANUS, Cast. (Pachymerus, Saint-Farg. et Serv.),
à tête étroite; à antennes avec le premier article court, et les autres égaux entre eux, à corselet
carré; ce groupe renferme beaucoup d'espèces à peu près toutes spéciales à l’Europe; types : Ly-
geus echii, Fabr., qui se trouve sur la Vipérine; Cèmeæ pini, Linné, que l'on rencontre sous les écor-
ces des arbres de haute futaie; L. luscus, Fabr.; margine-punctatus, Wolff, etc., tous des environs
-de Paris. 3° CYMUS, à antennes ayant le dernier article renflé en bouton, et à élytres presque
transparentes; renfermant quelques espèces surtout propres au climat de Paris : telles que les C.
resedæ, Panz., glandicolor, Hahn, et claviculus, Fall. : on en a séparé les genres Heterogaster,
Sehill. (H. urticæ, qui se trouve dans nos environs, sur l’Ortie dioïque), et Cymodema, Spin., qui
a pour type une espèce particulière à la Sardaigne. 4° ANTHOCORIS, Fallen, à téte avancée, à an-
tennes ayant un premier article court, et à corselet conique; comprenant un nombre d'espèces assez
restreint, toutes de petite taille, la plupart européennes et remarquables par leur forme rétrécie en
avant; le type est l'A. nemorum, Linné, à corps d’un noir brillant, très-variable par le système de
coloration des élytres et des antennes; habite toute l’Europe, et est très-commun dans les en-
virons de Paris, où il se tient sur les fleurs et les plantes, dans les lieux ombragés au bord des
ruisseaux; on a cru en devoir distinguer les groupes des Xycoloris, L. Duf.; Nægeus et Pedeticus,
Cast.; Xylophila, Kirby, ete. 5° OPHTHALMICUS, Schill., à téte très-large; yeux très-gros, et à
antennes gréles, avec le dernier article renflé; on en a décrit une dizaine d'espèces, ayant beau-
coup d'analogie entre elles par la forme et la disposition des couleurs, propres pour la plupart au
-eud de l'Europe, comme les Cimex grylloides, Linné; Salpa erythrocephalus, Saint-Farg. et Serv,,
et S. albipennis, Fabr.
C. Myonocuires, qui, avec des ocelles distincts, ont une tête étranglée en arrière, et qui ne se
composent que du seul genre MYODOCHUS, Latr., ne renfermant lui-même que le M. serripes,
Oliv., du Sénégal, remarquable par sa fonme générale, qui a beaucoup d'analogie avec celle des
-Réduves.
3 tribu, Mines, ayant les antennes insérées au-dessous des yeux, à dernier article très-gréle,
et chez lesquels l'abdomen des femelles offre une tarière parfois très-saillante. Cette division ren-
ferme un petit nombre de genres, mais la plupart offrent une très-grande quantité d'espèces, qui,
presque toutes, sont d’une taille très-pelite et présentent les couleurs les plus vives, les plus va-
riées. Ces Hémiptères sont répandus sur toute la surface du globe, quoique néanmoins le plus
grand nombre des espèces connues appartiennent à l'Europe; on les rencontre constamment dans
les endroits humides, au bord des ruisseaux, où ils se tiennent sur les plantes dont ils sucent la
séve; quand on veut les saisir, ils fuient avec une grande agilité. La forme de leur corps est en gé-
néral élancée, un peu aplatie, et leurs pattes sont longues et très-grèles. L'époque de la ponte et
des métamorphoses est encore inconnue; mais ce n'est qu’à la fin de l'été et pendant le courant de
l'automne qu’on les rencontre ayant atteint leur entier développement. À
Les genres principaux sont ceuSdes : 4° MIRIS, à féte prolongée en pointe, et à antennes lon-
ques; ne renfermant qu’un nombre restreint d'espèces, toutes propres à l'Europe, ayant pour type
le Cimex virens, Linné, à corps d'un vert clair passant quelquefois au jaunâtre, qui se trouve
très-communément dans nos environs. 2° PHYTOCORIS, à téte courte, arrondie; à antennes gréles; à
corps large, ovalaire; on en décrit beaucoup d'espèces, à peu près toutes européennes, et dont on a
- voulu séparer les genres : Globiceps, Latr.; Resthenia, Spin.; Pœcilasoma, Stéph.; Lyqus, Lopus,
216 HISTOIRE NATURELLE.
Phylus, Palymerus et Capsus, Hahn, Burm.; parmi les espèces nous citerons les P. striatus, Linné,
striatullus, Fabr., binotatus, Fabr., pavulinus, Linné, ete., qui se trouvent dans toute l'Europe,
et ne sont pas rares aux environs de Paris. 3° CAPSUS, Fabr., ne différant guère des Phytocoris
que par ses antennes ayant leur troisième article plus dilaté que les autres, et comprenant surtout
les C. capillaris, Fabr., et ater, Linné, variant beaucoup dans le système de coloration, et se trou-
vant dans une grande partie de l'Europe, 4° HETEROTOMA, Latr., à fête courte; à antennes à premier
et deuxième articles très-larges, comprimés; trois ou quatre espèces d'Europe, telles que les Capsus
spissicornis, Fabr., et H. pulverulenta, Burm. 5° ATTUS, Hahn (Séronyglocoris, Blanch.), à téte
large; à antennes gréles; cuisses de derrière renflées; ce groupe singulier a pour type le Cimex
leucocephalus, Linné, très-petite espèce, remarquable en ce qu’elle peut produire de petits sauts, et
qui se trouve dans une partie de la France. 6° EURYCEPHALA, Cast., à tte large; à antennes gré-
lex; à élytres sans partie membraneuse, et à cuisses de derrière renflées; également très-petits et
propres à l'Europe: les Eurycéphales ont pour type la Cicada aptera, Linné, longue de 0,008 à
0,010, d'un noir verdâtre très-brillant, qui se rencontre dans nos environs et se tient habituelle-
ment dans les endroits humides, sur les plantes de la famille des Ombellifères, où elle saute de
feuille en feuille.
Outre tous ces genres, la famille des Lygéens en renferme plusieurs autres, tels que ceux des :
Araphia, Sphæridops, Acanthospis, Platychiria, Megarhynchus, dont nous figurons des espèces.
Parmi les figures de Lygéens de notre atlas nous citerons celles des : Macroure grande (pl. XIX,
fig. 4); Charicotère nouveau (pl. XIX, fig. 5); Copius intermédiaire (pl. XX, fig. 4); Mychore gréle
(pl. XXE, fig. 4); Pandare miniator (pl. XXII, fig. 3); Harpocère de Burmeister (pl. XXII fig. 6), etc.
NEUVIÈME FAMILLE: — SCUTELLÉRIENS.
Cette famille, qui tire son nom du genre Scutellera, qui peut être pris pour le groupe typique,
offre pour principaux caractères : bec naissant du front; antennes assez allongées, quoique n'excé-
dant pas la longueur du corps, toujours libres; corps ovalaire; corselet plus grand que les deux au-
tres segments du thorax; écusson extrémement développé, couvrant en grande partie les élytres et
l'abdomen, et quelquefois en totalité; élytres coriaces dans leur moitié antérieure, et transparentes
dans le reste de leur étendue; pattes très-courtes.
Les Scutellériens, si remarquables par leur corps large, leurs pattes courtes, et surtout par la
structure de leur écusson, qui recouvre dans certains genres la totalité de leurs élytres et de leur
abdomen, ne le sont pas moins par leurs formes variées, parfois des plus bizarres, et par l'éclat des
couleurs d'un grand nombre d’entre eux, qui ne le cèdent pas, sous ce rapport, aux plus beaux
Buprestes prami les Coléoptères. Tous exhalent une odeur des plus pénétrantes, et plus forte que
chez la plupart des autres Hémiptères. Comme plusieurs des familles d'Hétéroptères que nous avons
successivement passées en revue, les Scutellériens vivent sur les végétaux dont ils sucent les parties
liquides, et se trouvent parfois en réunions nombreuses d'individus. Pendant l'accouplement, la
disposition du corps, qui est assez convexe, ainsi que celles des pattes, qui sont très-courtes, ne permet-
tent pas aux mâles de monter sur le dos des femelles : aussi les deux sexes, lors de l’acte de la re-
production, sont-ils fixés bout à bout, de manière que, quand l’un des deux avance l'autre ne peut
le suivre qu’à reculons. Les femelles pondent des œufs, le plus habituellement de forme ovalaire,
qu’elles laissent échapper un à un en les fixant sur les feuilles des arbres; on prétend qu'elles veil-
lent continuellement à la conservation de leurs petits, et les défendent contre les autres [nsectes
qui chercheraient à s’en emparer. Quelques espèces très-communes nuisent quelquefois beaucoup
aux plantes potagères, aux céréales, ete.
On connaît une très-grande quantité de Scutellériens qui se trouve répandue sur toute la
surface du globe, principalement abondante dans les régions tropicales. Ces Insectes sont divisés
en un grand nombre de genres, et plusieurs d’entre eux renferment une fort grande quantité
d'espèces. On a quelques détails sur les mœurs et l’anatomie de plusieurs d’entre eux. Les
genres principaux créés par Fabricius, Olivier, Latreille, Germar, Spinola, M. Guérin-Méne-
Fig. 4. — Discocéphale marmoré.
Fig. 4. lig. 5.
Piézomère à deux dents. Copius intermédiure. \podibye hellénique.
lis. 6. — Xénophore grise. Lie. 7. — Sciodoptère agréable.
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© HÉMIMTÈRES. PI220;
ANNELÉS. — HEÉMIPTÈRES. 917
ville, ete., ont été, dans ces derniers temps, partagés en beaucoup de coupes génériques spéciales,
particulièrement par MM. Laporte de Castelnau, de Hahn, Burmeister, Amyot et Serville, ete,
Nous y formerons trois groupes, ceux des : Pentatomites, Cydnites et Scutellérites.
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Fig. 198. — Pentatome (Loxa) verte. Fig. 199. — Ælie acuminée. ig. 200, — Edesse cert.
A. Penraromires, ayant un écusson triangulaire ne recouvrant pas la totalité des élytres et de
l'abdomen, et des pattes inermes, comprenant plus de la moitié des espèces de Seutellériens, et dont
les genres principaux sont les suivants : 1° MEGYNEMUM, Guérin, à téte à peu près carrée, échan-
crée; à antennes de quatre articles : les trois derniers ayant une expansion linéaire; ec groupe,
qui correspond à celui des Amaurus, Burm., ne renferme que quelques belles espèces propres à la
Nouvelle-Hollande, aux Indes orientales et à l'Amérique du Sud, dont le type est le M. dentatum,
Guérin, de Dorey. 2° PHYLLOCEPHALA, Cast., à tôte grosse, bifide; à antennes, courtes, épaisses,
ayant pour type le P. senegalensis, et dont on doit rapprocher, peut-être y réunir, les groupes
des : Megarhynchus, Cast.; Schixops, Spin.; Placosternum, Dalsira, Tetroda, Diplorhinus, Ma-
crina et Gonopsis, Am. et Serv., tous propres à l’Afrique occidentale ou à l’île de Java. 3° EDESSA,
Fabr., à téte petite, triangulaire; à antennes de cinq articles, et à abdomen ayant des épines laté-
rales; écusson en spatule allongée; comprenant une longue série d'espèces toutes propres à l’Améri-
que méridionale, dont on peut prendre pour type l'E. cervus, Fabr., long de près de 0°,02, à corps
vert, plus pàle en dessous qu’en dessus : trés-commun au Brésil; une autre espèce, abondante à
Cayenne, est l'E. antilope, Fabr., long de 0",025, jaune ou vert testacé en dessus, jaune clair en
dessous. Ce genre Edesse, démembré de celui des Pentatoma, a été partagé lui-même en plusteurs
groupes propres à l'Amérique, aux Indes orientales, à la Nouvelle-Hollande, à l'Afrique, cte., tels
que ceux des : Centoproctus, Hahn; Brachytethus, Eusthenes, Oncomeris, Aspongopus, Cast.; Aqa-
tophyta, Guérin; Terratoma, Saint-Farg. et Serv.; Peromatus, Dorypleura, Hyponys, Pygoda,
Aceratodes, Piexosternum, Hypencha, Mattiphus, Eurypleura, Dalcantha, Pycanum, Cyclopelta,
Am. et Serv., etc., qui, s'ils ne doivent pas tous en être regardés comme des divisions secon-
daires, en sont au moins génériquement très-voisins. 4° PENTATOMA, Oliv. et Latr., à téte petite,
un peu avancée; antennes de cinq articles, assez épaisses, un peu allongées; à abdomen mutique; ce
genre, auquel certains auteurs laissent en propre la dénomination de Cimex, Linné, que nous avons
eru devoir conserver pour la Punaise des lits, ce groupe renferme un nombre d’espèces extrêmement
considérable, connues vulgairement sous le nom de Punaises des bois, ete., qui sont répandues dans
toutes les parties du monde; on a cherché à y former beaucoup de coupes génériques, telles que
celles des: Eurydema, Rhaphigaster, Cast.; Strachia, Tropicoris, Hahn (ce dernier formant le genre
Cimex proprement dit de MM. Amyot et Serville, et ayant pour type le C. rufipes, Linné, répandu
dans toute l’Europe); Proxys, Calacanthus, Vulsirea, Arvelius, Spinola; Hymenarcys, Ædosoma,
Mirmidea, Myrochea, Galedonta, Loxa, Digloxys, Zalega, Nexara, Taurocerus, Evoptilus, Sas-
tragala, Am. et Serv.; Rhynchocoris, Westw.; Acanthosoma, Curtis, ete.; dont plusieurs doivent y
être réunis et quelques-uns seulement en être distingués; parmi les espèces européennes de Penta-
tomes, les seules dont nous voulions dire quelques mots, nous citerons les : Cimex griseus, Fabr.,
à corps d’un jaune grisâtre ponctué de noir, commun dans toute l’Europe, où on le rencontre en
famille sur les troncs des gros arbres, et particulièrement des Ormes qui bordent les grandes routes;
A, 28
218 HISTOIRE NATURELLE.
C. oleraceum, Oliv., à corps vert bronzé en dessus, noir en dessous, abondant sur toutes les plantes,
se rencontrant dans nos environs; P. ornatum, Linné, qui se trouve sur les choux, ainsi que sur
plusieurs autres Crucifères, ete.; les espèces exotiques sont plus grandes que les nôtres, et souvent
parées de très-brillantes couleurs. 5° HALYS, Fabr., à {éte avancée en forme de museau; à antennes
longues, de cinq articles : le premier assez épais, les autres très-grèles, et à abdomen mutique; on
en indique un grand nombre d'espèces, surtout de l'Afrique occidentale, des Indes orientales et de
l'Amérique méridionale, et l'on en distingue les coupes génériques des : Atelocera, Dinidor, Cast.;
Apodiphus, Cataulax, Erthesina, Phyllocheirus, Spin.; Platycoris, Guérin; Dalpoda, Mustha, Bra-
chymena, Theliaca, Necroscin, Menipha, Oxyrhimus, Buchava, Am. et Serv., ete. 6° SCIOCORSS,
Fallen, à téte très-large; à antennes de cinq articles, avec le premier très-court; et des genres
qu’on en rapproche tels que ceux des: Discocephala, Dryptocephala, Cast. (ce dernier ayant reçu de
Perty le nom de Storthia), de l'Amérique du Sud, et Dyroderes, Spin., de l'Europe méridionale
7e PHLÆA, Saint-Farg. et Serv., qui se distingue des précédents en ce que ses antennes n ont que
trois articles apparents; renfermant les C. corticatus, Drury, du Brésil, et Paracoris paradoxa,
Hahn, du Chili, et dont on rapproche le genre Coriplatus, White (Sachana, Am. et Serv.), ayant
pour type le C. depressa, de l'Amérique du Sud. 8° SPIRETHRUS, Cast, à rostre très-épais, à tête
presque carrée; à antennes de cinq articles : le premier court et les autres très-gréles; renfermant
des espèces de l'Amérique du Sud, et à côté duquel on place des genres du même pays, de Java, de
Manille, du Sénégal, ete. tels que ceux des : Discocera, Cast.; Spiritrosoma, Caxira, Platynopus,
Canthasona, Catastyrax, Am. etServ.; Phyllocheilus, Coryxorhapis, Spin.; Asopus, Burm.,etc., ainsi
que ceux des Picromerus et Zierona, Am. et Serv.: Arma, Hahn; Jalla, Burm. 9° ÆUIA, Fabr., à
tête avancée en museau, arquée; à antennes de cinq articles, grossissant vers le bout; on en indique
surtout deux espèces : l'Æ. acuminata, Linné, petit, jaunâtre, rayé longitudinalement de brun en
dessus, très-commun, en été, dans toute l'Europe, et se tenant à l'extrémité des épis des céréales,
et l’Æ. inflata, Wolff, du midi de la France.
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Fig. 201. — Scutellère à pieds bleus. Fig. 202. — Cératocore bucéphale Fig. 205. — Thyréocore coccinéloïde.
B. Cyxires, ayant l’écusson triangulaire ne couvrant pas tout le corps, présentant des pattes
garnies d'épines, et renfermant surtout le genre CYDNUS, Fabr., à corps ovalaire; antennes cour-
tes; jambes gréles; tarses assez forts, renfermant une longue série d'espèces, dont plusieurs sont
européennes, comme les Cimex bicolor et morio, Linné. MM. Amyot et Serville en ont distingué les
genres des : Labostoma, Hiverus, Adrisa, Brachypelta, Cryptomenus, Amblyathes, Sehirus, Trito-
megus, Dismegistus, Menaccarus et Pododus. Deux autres groupes créés plus anciennement, et qui
s’en éloignent davantage, sont ceux des : CEPHALOCTENUS, L. Duf., à corps bombé; yeux nuls;
jumbes très-épaisses; tarses d'une extrême ténuilé; espèce unique, C. scarabæoides, Linné, de
l'Europe méridionale et du nord de l'Afrique, et SCAPTOCORIS, Perty, à jambes très-épaisses :
antérieures crochues, et à tarses nuls; une espèce brésilienne (S. castaneus).
GC. Seureurénires, ayant l’écusson très-grand, recouvrant tout le corps, renfermant beaucoup
d'espèces et un grand nombre de genres, dont les principaux sont les suivants : 4° PACHYCORIS,
Burm., à corps ovalaire; antennes à deuxième et troisième articles presque égaux; tête arrondie
sur les bords, prolongée en pointe; ce groupe comprend des espèces propres à l'Afrique, à l’Améri-
Fig. 1. — Odontotarse blanc Fig. 2. — Asope tacheté.
Fig. 3. — Paudare miniator. Fig. 4. — Pétascèle rémipède. Fig. 5. — Catharante incarné.
Lis. 6. — Harpocère de Burmeister.
A. HÉMIPTÈRES. PL, 22.
ANNELÉS. — HÉMIPTÈRES. 919
que et à l'Europe; parmi ces dernières nous citerons le Cimex grammicus, Linné. à corps jaune,
ponctué : on en rapproche un assez grand nombre de genres, tous exotiques, tels que ceux des :
Scutiphora, Guérin (Peltophora, Burm.); Angocoris, Sphærocoris, Burm.; Alphocoris, Germar;
Odontolarsus, Spin.; Agonosoma, Cast.; Irochrotus, Hotea, Am. et Serv. 2° TETYRA, Fabr., à Corps
oblong; antennes à, deuxième article beaucoup plus long que le troisième; groupe ne renfermant
plus guère actuellement que des espèces européennes, car on a formé, avec la plupart des exotiques
et avec quelques indigènes, les genres des : Psacasta, Germar; Bellocoris, Hahn; Ventocoris, Hahn
(Ancyrosoma, Am. et Serv.); Trigonosoma, Ewrygaster, Graphosoma, Gast.; Coptochilus, Bolbocoris,
Am. et Serv. 3° SCUTELLERA, Lamarck, Latr., à corps ovalaire plus ou moins allongé; à tête étroite;
antennes longues, de quatre articles : le deuxième très-petit et le troisième long ; les Scutellères
ont tous des couleurs vives et métalliques: tous, à une seule exception près, sont exotiques, et sur-
tout communs dans les Indes orientales (type, Cimex stockerus, Linné); ils sont assez nombreux en
espèces, aussi a-t-on formé avec elles de nombreux groupes, tels que ceux des : Calliphara, Germar;
Tectocoris, Chrysocoris, Hahn; Valerius, Spinola; Calidea, Cast.; Cantoa, Eucorysus, Galostha,
Am. et Serv.; Solenosthedium, Spin. (Cæloglossa, Germar). 4° PODOPS, Latr., à antennes courtes,
avec les deuxième et troisième articles égaux et le dernier renflé; et surtout à yeux pédiculés;
ce groupe ne renferme que quelques espèces européennes, dont le type est le Cimex inunctus, Panz.,
propre au midi de la France, on y réunit les groupes des Phimodera, Germar, et Tarisa; Am. et
Serv., de l'Europe du Sud; Oxynotus, Cast., du Brésil, et Deroploa, Westw., de la Nouvelle-Hol-
lande. 5° ODONTOSCELIS, Cast. (Ursocoris, Hahn; Arctocoris, Germ.), à corps presque orbiculaire;
antennes courtes, insérées à la partie inférieure de la tête, avec le second article beaucoup plus long
que le troisième; jambes épineuses; ce groupe, dont on peut rapprocher ceux des Coreomelus,
White, et Galgupha, Am. et Serv., est surtout remarquable par l'armure de ses jambes, et renferme
.des espèces américaines et européennes, dont le type est le C. fuliginosus, de Paris. 6° CONOPSUS,
Fabr., à corps globuleux; antennes très-courtes, de quatre articles; jambes inermes; tarses de deux
articles; ce genre ne renferme plus que des espèces exotiques. 7° THYREOCORIS, Schranek, à
corps globuleux; antennes courtes, de cinq articles; jambes inermes; tarses de deux articles; ke type
est le T. cocciformis, Guérin, de Madagascar; plusieurs genres doivent en être rapprochés, tels que
les : Chlænocoris, Burm., de l'Amérique du Sud; Plataspis, Westw., de Java; Hetecatus, Am. et’
Serv., de Java; Strombosoma, Am. et Serv , du Sénégal, Coptosoma, Cast. (Globocoris, Hahn; Platy-
cephala, Brullé); ayant pour type le Tetyra globus, Fabr., à corps d’un noir bronzé, qui est très-
répandu en Europe, et probablement Ceratocoris, Burm.— Les planches XIX à XXII de l’atlas repré-
sentent plusieurs Scutellériens, tels que les : Graphosome linéolé, Asope de la Floride, Dinidor
maculé, Odontotarse blanc, Catharanthe incarné, ete.
Fig. 204, — Labosiome géant. Fig. 205. — Phricode histrion. Fig. 206. — Triphate déprimé.
290 HISTOIRE NATURELLE.
HUITIÈME ORDRE:
LEPIDOPTÈRES.
Créé par Linné et adopté par tous les naturalistes, l’ordre des Lépidoptères est, sans contredit,
l’un des plus naturels de la classe entière des Insectes, et offre pour caractères principaux : quatre
ailes recouvertes sur.les deux surfaces de petites écailles colorées et semblables à une poussière fari-
neuse; trompe plus ou moins longue, roulée en spirale; deux palpes plus où moins relevés, com-
posés de trois articles et insérés sur une lèvre fixe; deux antennes de forme variable et toujours
composées d'un grand nombre d'articles; une pièce assez développée, appelée ptérygode ou épaulette,
située à la base des ailes supérieures en dessus; abdomen constamment dépourvu de tarière et
ayant toujours un oviducte dans les femelles; jamais que deux sortes d'individus : des mâles et des
femelles.
Ce sont des Articulés à métamorphoses complètes : c’est-à-dire que des œufs sortent des larves
qui portent le nom de chenilles, et qui ont toujours des pattes écailleuses ou vraies pattes, et des
pattes membraneuses où fausses pattes; ces chenilles se transforment dans un éfat intermédiaire,
celui de nymple ou chrysalide, d'où sortent, après un temps plus ou moins long, les Insectes par-
faits, qui portent le nom de Papillons. Ges derniers, dont l'existence est en général de peu de
durée, ne se prolongeant guère au delà de l’époque de la reproduction pour les màles et de la
ponte des œufs pour les femelles, vivent du suc des végétaux qu'ils sucent au moyen de leur spira-
trompe, et; pour la grande majorité, volent avec la plus grande rapidité d'arbre en arbre ou de fleur
en fleur. Les chenilles se développent quelquefois en peu de temps : ce qui arrive le plus souvent,
mais d’autres fois elles peuvent passer sous cet état plusieurs mois; elles se nourrissent habituelle-
ment des feuilles des plantes, des tiges des jeunes plantes de divers fruits, et d’autres fois du bois
lui-même, ou d'un grand nombre de graines. C'est ainsi que, tout récemment encore, M. H. Lucas
a montré que les chenilles d’une espèce de Carpocapsa (C. Deshaisiana), du Mexique, vivent dans
les graines d’une Euphorbe, dans lesquelles elles se métamorphosent et qu'elles impriment même
un mouvement très-singulier à ces semences. Les nymphes sont dans tous les Diurnes placées à l'air
extérieur et supendues par une espèce de soie à divers corps; dans les Crépuseulaires et les Noctur-
nes, la coque qui les contient est plus généralement placée dans l’intérieur du sol, dans les troncs
pourris des arbres, etc. On connait un très-grand nombre de Lépidoptères : huit à dix mille à peu
près, et on en trouve dans toutes les parties du globe, mais c'est surtout dans les pays chauds et
humides qu’on en prend davantage, et que se rencontrent les plus belles etles plus grandes espèces.
En Europe on en a étudié près de trois mille espèces, et chaque jour on en fait connaître de nouvelles,
principalement parmi les petits Nocturnes, que l’on nomme habituellement Microlépidoptères, la
France et l'Allemagne sont très-riches en Insectes de cet ordre. Les mœurs des Lépidoptères présen-
tent des particularités des plus remarquables, et il en est de même de leur organisation.
Un grand nombre de naturalistes ont publié des travaux descriptifs sur ces animaux, tant à leur
état parfait qu'à ceux de chenille et de nymphe; c’est dans les deux volumes de cette Encyclopédie
consacrés à cet ordre d’Insectes qu'on trouvera des détails intéressants à ce sujet, et que l'on pourra
se faire une idée générale des Papillons en étudiant les nombreuses figures qui illustrent le texte et
qui se rapportent à l’atlas. C’est dans ces volumes que nous faisons connaître les Papillons utiles,
comme le Ver à soie, et ceux, en grand nombre, qui nuisent beaucoup à l’agriculture.
Les classifications proposées pour les Lépidoptères sont assez nombreuses; nous en citerons seu-
lement deux. Dans la méthode de Latreille, modifiée par les travaux de Duponchel, Treitscke, M. le
docteur Boisduval, Guenée, et de beaucoup d’autres entomologistes modernes; les Lépidoptères sont
ANNELÉS. — LÉPIDOPTÈRES. 994
partagés en trois familles, divisées elles-mêmes en beaucoup de tribus et de genres : 4° Diunnes, à
antennes en forme de massue, c’est-à-dire renflées à l'extrémité; à corps peu velu, petit relative-
ment aux ailes, présentant un rétrécissement notable entre le corselet et l'abdomen; à quatre ailes
d'égale consistance, non retenues ensemble par un frein, et se relevant perpendiculairement l'une
contre l'autre dans le repos; à vol diurne; à chenilles ayant serixe pattes, et se métamorphosant en
général à l'air libre, sans se renfermer dans une coque; tribus principales : Papilionides, Danaï-
des, Argynaîdes, Vanessides, Lybytéides, Nymphalides, Satyrides; Piérides, Rhodocérides, Eryci-
nides, Hespérides, ete. 2° Crépuscuzaires, à antennes plus ou moins renflées au milieu où avant
l'extrémité, prismatiques, cylindriques, pectinées ou dentées; à corps très-gros relativement aux
ailes, et sans étranglement entre le corselet et l'abdomen; à ailes étroites, en toit horizontal ou lé-
gorement inclinées dans le repos : antérieures recouvrant alors les postérieures, qui sont générale-
ment courtes et retenues par un frein aux premières; à pattes propres à la murche; à vol crépuscu-
laire dans le plus grand nombre des cas, parfois diurne ou nocturne; à chenilles ayant seize
pattes, glabres, velues ou pubescentes, se métamorphosant souvent duns des coques incomplètes,
dans la terre ou les troncs d'arbres; tribus principales : Sphingides, Sésieides, Zygénides. 3° Noc-
1URNES, à @n{ennes en forme de soie, C'est-à-dire dont la tige diminue de grosseur de la base à la
pointe; à corps tantôt grand, tantôt petit par rapport aux ailes, et sans étranglement entre le cor-
selet et l'abdomen; à ailes d'égale consistance, quand les supérieures ne servent pas de couverture
aux inférieures : retenues ensemble par un frein dans les mâles, jamais relevées perpendiculaire-
ment dans le repos, tantôt horizontales, tantôt en toit plus ou moins incliné, tantôt en fourreau en-
veloppant le corps; à vol nocturne; à chenilles ayant de dix à seize pattes, glabres, plus ou moins
velues, non épineuses, se métamorphosant soit en terre, soit dans l'intérieur des tiges ou des racines,
dans des coques souvent composées de soie; à chrysalides non suspendues à l'air libre; un très-grand
nombre de tribus, telles que celles des : Lithosides, Chélonides, Psychides, Liparides, Lasiocampi-
des, Bombycides, Attacides, Endromides, Hépialides, Endagrides, Limacotides, Platyptérides, Di-
cranurides, Notodontides, Pygérides, Bombycoides, Noctuo-Bombycides, Orthosides, Gortynides,
Nonagrides, Leucanides, Caradrinides, Apamides, Hadenides, Noctuélides, Amphipyrides, Xyli-
nides, Heliothides, Calpides, Plusides, Catocalides, Ophiusides, Anthophilides, Agrophilides,
Anomalides, Phalenæides, Goniatides, Acontides, Noctuo-Phanélides, Pyralides, Phalénides, Pla-
tyomides, Schénobides, Crambides, Yponomeutides, Tinéides, Ptérophorides, ete. Toutes ces tribus
sont fondées avec des genres des anciens auteurs.
Dans la classification de M. Blanchard, qui n’est que celle de M. le docteur Boisduval légèrement
modifiée, les Lépidoptères sont partagés en Acwarinorrères (Rhapalocères, Boisd.), correspondant
aux Diurnes, et ayant des : ailes dépourvues de frein et des antennes toujours renflées en massue
à l'extrémité, et en Cuarinoprènes (Hétéroptères, Boisd.), répondant aux Crépusculaires et Nocturnes
_réunis; les ailes sont presque constamment munies d'un frein pour les retenir dans une position hori-
zontale, et les antennes sont renflées en massue, fusiformes, plus souvent sétacées, parfois pectinées
dans les mûles.
Fig. 207, — Papillon Machaon.
292 . HISTOIRE NATUREILE.
NEUVIÈME ORDRE.
: DIPTÈRES.
Linné a créé, sous le nom de Diptères (du grec: du, deux, #r2p0v, aile), un ordre d’Insectes
adopté par tous les naturalistes, excepté par Fabricius qui, réunissant ces Articulés aux Parasites et
aux Acarides, en a fait son ordre des Anthliates. Les caractères principaux des Diptères sont les sui-
vants, d’après Macquart : corps à téguments légèrement coriaces; une trompe formant habituelle-
ment'une gaîne univalve, ouverte en dessous, renfermant ün sucoir composé de deux, quatre ou six
soies cornées; deux palpes; antennes composées habituellement de trois articles; yeux grands : ocel-
les ou stemmates souvent au nombre de trois; abdomen composé de quatre à sept segments distincts;
deux ailes présentant des nervures formant ordinairement une cellule discoidale, deux basilaires,
une costale, une médiastine, une ou deux marginales, une à trois sous-marginales, h'ois à cinq
postérieures, une anale, une axillaire et une fausse axillaire; deux balanciers semblant remplacer
les ailes postérieures qui manquent constamment; des métamorphoses complètes.
De tous ces caractères, c'est l'absence des secondes ailes qui sert principalement à distinguer les
Diptères de tous les autres Insectes; les balanciers, qui paraissent remplacer ces ailes et qui servent
à régulariser l’action du vol, sont des organes que nous n'avons pas encore vus dans les ordres d'In-
sectes que nous avons étudiés. La tête, souvent déprimée, peut s’arrondir, s’allonger, se dilater par
les expansions latérales du front, et elle disparaît presque complétement, selon les groupes. L'ou-
verture buccale, très-grande chez les Œstrides, est plus petite dans d’autres Diptères. La trompe,
qui montre que les Diptères doivent se nourrir de substances liquides, est composée d’une gaine
représentant la lèvre inférieure des Insectes qui se nourrissent de substances solides, du sucoir,
formé tantôt de deux pièces analogues à la lèvre supérieure ou labre, et à la langue, tantôt de deux
pièces de plus représentant les mâchoires, et rarement de deux autres encore, qui tiennent lieu de
mandibules; enfin de deux palpes. Cette trompe peut être membraneuse, courte, épaisse, terminée
par deux lèvres, ou bien cornée, longue, menue, à lèvres terminales peu distinctes; le suçoir offre
six soies dans les Culicides et Tabaniens, quatre dans les Tétrachœtes, et deux seulement dans
les Dichœtes. Les antennes ne présentent habituellement que trois articles, mais le dernier est sou-
vent accompagné d’un style ou soie allongée, composé lui-même de plusieurs sections, et que l'on
considère comme un appendice des antennes, quoique l’on puisse l’assimiler véritablement aux
articles : elles sont longues dans les Némocères, composées d'au moins six articles, et courtes au
contraire dans les Brachocères, c’est-à-dire dans la grande majorité des Diptères, où elles n’ont plus
que trois articles. Les yeux sont surtout gros, contigus dans les mâles, séparés par le front dans les
femelles, et envahissent parfois la presque totalité de la tête, ne laissant d'espace que pour l’ouver-
ture buccale, l'insertion des antennes et la place des ocelles : ces derniers sont placés sur le vertex.
Le tronc, recouvert de téguments moins coriaces que dans la plupart des autres Insectes, est com-
posé d’un prothorax ou corselet très-court, d’un grand mésothorax plus ou moins convexe, et d’un
métathorax très-court, qui s’unit à l'abdomen : le thorax peut s'élever, s’allonger ou offrir des proé-
minences; l’écusson varie de forme et de grandeur : est armé de pointes dans les Notacanthes, dilaté
dans les Célyphes, de telle sorte qu'il recouvre les ailes et l'abdomen. Celui-ci, encore moins solide
que le tronc, a ses derniers segments le plus souvent rentrés dans les précédents, de sorte qu’il n’en
paraît au dehors que cinq à sept : 1l affecte des formes diverses, et peut être cylindrique, conique,
ovale, orbiculaire, transversal, terminé en massue, etc. Les organes de la reproduction sont généra-
lement saillants. Les pattes ont la forme ordinaire de celles des autres Insectes; elles sont ordinaire-
ment assez grèles, courtes ou longues, nues, velues, ciliées, préhensiles, ete.; et les diverses parties qui
les composent présentent des dispositions particulières; nous citerons surlout leurs pelotes termi-
Fig. 1. — Blépharide coriace,
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Fe a honte NS IE rarié i é
Fig, 2. — Omatie à tache binche. Fig, 3. lanype varié. Rig, 4. — Oxyure agréable
Fig, 5. - Hoplistomère serripède.
A DIPTÈRES. PL. 24.
de Ï er je à 42} 1 Eh :
ANNELES. — DIPTÉÈRES. 9293
nales qui, dans quelques espèces, sont vésiculeuses et forment des espèces de ventouses. Les ailes
sont membraneuses comme celles des Hyménoptères et des Névroptères; mais elles en différent,
non-seulement par leur nombre, mais encore par la disposition des cellules et des nervures dont les
transversales sont moins nombreuses. Les nervures alaires sont beaucoup plus nombreuses dans les
familles supérieures que dans les inférieures, et l’on peut y trouver de nombreux caractères diffé-
rentiels. Les organes sexuels, três-diversifiés dans les mâles, présentent des crochets, des pinces,
des tenailles, des mains armées d'ongles crochus, etc.; ceux des femelles n’offrent à l'extérieur que
l'oviducte.
M. Marcel de Serres, et plus récemment M. Léon Dufour, ont publié des détails anatomiques im-
portants sur les Diptères. Le vaisseau dorsal est étroit. Le systéme respiratoire consiste en trachées
vésiculaires communiquant les unes aux autres par des trachées tubulaires, et sans être unies par
des cerceaux cartilagineux. Il y a des glandes salivaires. Le système nerveux est le plus générale-
ment composé d’un ganglion cérébriforme peu considérable, à lobes très-rapprochés, d’où partent
des nerfs optiques très-gros; les deux cordons médullaires ordinaires forment, de distance en distance,
environ neuf ganglions, dont trois thoraciques et six abdominaux. Le tube intestinal offre : 1° un
œsophage s'étendant jusqu’à la base de l'abdomen; 2° un estomac assez long, mais peu large, garni,
dès son origine, de vaisseaux hépathiques assez nombreux; 3° un duodénum cylindrique, accompa-
oné de vaisseaux semblables, mais moins longs; 4° un rectum assez court, musculeux. Lesorganes
reproducteurs des mâles consistent en deux testicules ovales, s’ouvrant, par les canaux déférants, dans
le canal spermatique commun, où se rendent aussi les vé“icules séminales, qui sont simples et fili-
formes, ou bilobées et ovales. Chez les femelles il y a deux ovaires, très-branchues avant la fécon-
dation, et communiquant par leurs deux canaux avec l’oviducte commun, qui a son issue dans la
vulve : en outre, les espèces qui fixent leurs œufs ont un organe particulier sécrétant l'humeur vis-
queuse propre à cet usage.
Les Diptères sont ovipares dans la grande majorité des cas; mais, chez les Sarcophages, ies œufs
se développent dans le corps des femelles, qui pondent des larves, et, chez les Pupipares, ce sont
des nymphes qui viennent au jour. Les larves sont en général apodes, et quelques-unes seulement
sont munies de mamelons qui leur tiennent lieu de pattes. Leur corps se compose de douze seg-
ments, non compris la tête, qui est cornée ou charnue; dans ce dernier cas, ce qui arrive le plus
habituellement, elle ne se distingue de l'extrémité postérieure que par deux crochets qui servent
probablement moins à la mastication qu’à retenir la larve sur le corps qu’elle veut sucer. La pre-
mière paire de stigmates est située sur le premier segment du corps, et les autres, au nombre de
deux à huit, sont accumulés sur le dernier segment. Ces larves, assez semblables entre elles dans la
plupart des espèces, éprouvent cependant des modifications assez profondes et appropriées au mi-
lieu dans lequel elles doivent vivre. C’est ainsi que celles des Cousins et des Tipulairés culiciformes,
qui vivent exclusivement dans l'eau, sont pourvues d'organes de nutrition et de respiration très-
différents de ceux des larves terrestres, et en outre, les organes de locomotion consistent dans des
appendices en forme de nageoires. Parmi les larves terrestres, quelques-unes sont pourvues de
filières, et s’'enveloppent de soie; celles des Œstrides, qui vivent dans l’intérieur des animaux, ont
la bouche souvent accompagnée de plusieurs mamelons, et les segments du corps quelquefois bordés
de pointes; celles des Pupipares, vivant dans le sein de leur mère, sont oviformes, sans aucun organe
distinct. Pour passer à l’état de nymphes, ces larves emploient deux modes principaux; dans le plus
grand nombre, il n'y a pas de mue : la peau se durcit, se contracte et devient une sorte de coque
ovale dans laquelle la nymphe se développe, paraît d’abord sous la forme d’une masse gélatineuse
sans organes apparents, et offre ensuite l’ébauche de diverses parties de l’Insecte parfait: dans les
autres, la transformation a lieu par un simple changement de peau de la larve. La plupart des
nymphes restent immobiles, mais celles de plusieurs Némocères aquatiques conservent la faculté de
se mouvoir à l’aide de nageoires, comme le font les larves elles-mêmes.
Ces Insectes se trouvent sur la terre, dans les airs et dans l’intérieur des eaux; tous les climats el
tous les sites leur sont bons; ils habitent les plaines ou les montagnes, les bois, les prairies, les
champs, les rivages, les eaux tranquilles, et même l’écume des mers; on en rencontre sur les nei-
ges des régions polaires, et quelques-uns, devenus presque domestiques, se plaisent exclusivement
dans nos maisons. Ils se partagent les. végétaux en adoptant soit les fleurs, soit les feuilles, soit le
994 HISTOIRE NATURELLE.
tronc des arbres. Leur alimentation, assez variée, est en quelque sorte indiquée par la conformation
de leur trompe; les Taons, les Cousins et les Asides s'abreuvent de sang; beaucoup de Muscides se
jettent sur les animaux pour humer la sueur, la sanie des plaies et autres sécrétions; les Empides
chassent certains Insectes pour en sucer toute la matière fluide; mais le plus grand nombre des
espèces se nourrissent exclusivement du suc des fleurs. Le plus souvent ils butinent toutes les fleurs
indifféremment, mais ilsont des préférences marquées pour telle ou telle plante. La pulpe des fruits
sucrés attire des essaims de Muscides; d'autres enlèvent la miellée des Pucerons répandue sur les
feuilles ou l'humeur qui découle des ulcères des arbres; enfin, dans nos habitations, toutes les ma-
tières alimentaires attirent la Mouche domestique.
Fig. 208. — Mouche commune.
On connait quelques particularités intéressantes relativement au rapprochement des sexes chez les
Diptéres. C’est dans les airs que l'union des sexes à le plus habituellement lieu: elle provoque tan-
tôt ces réunions innombrables de Tipulaires et d’Anthomyies, dont les danses aériennes sont de doux
préludes, tantôt les évolutions solitaires du Taon, qui vole en un instant de l’extrémité d’une lon-
gue avenue d'une forêt, s'arrête pour regarder autour de lui, se précipite à l’autre extrémité, s'ar-
rête encore en recommencant un grand nombre de fois le même manége, jusqu’à ce qu'enfin, dé-
couvrant une femelle, il s’élance rapidement sur elle. Les amours des Empides sont toujours
précédées d’une chasse aux petits Insectes, et l’on peut remarquer parfois que la femelle, tout en
étant réunie au mäle, continue encore à sucer sa proie. Quand la femelle va pondre ses œufs, elle
emploie un instinct merveilleux pour les placer dans des conditions convenables pour que les larves
qui en sortiront bientôt puissent trouver les substances nécessaires à leur alimentation. Les unes se
bornent à confier leurs œufs à la terre; d'autres les déposent sur les corps en décomposition qui
doivent servir de pature à leur progéniture; beaucoup de Némocères et de Notacanthes les répan-
dent sur les eaux en en formant parfois, en les réunissant, de légers radeaux; les Téphrites et les Gé-
cidomyies les fixent sur les bourgeons des plantes, où ils forment des excroissances ou galles;
parmi les espèces carnivores : les Syrphides placent leurs œufs au milieu des groupes de Pucerons,
et les larves, quoique aveugles, y trouvent une nourriture abondante; les Volucelles donnent pour
berceau à leurs larves les nids des Bourdons; les Tachinaires déposent en général leurs œufs dans le
corps même des chenilles, et les larves se développent aux dépens de ces dernières; les Œstrides
déposent leurs œufs sur différentes parties du corps des Mammifères, d’où les larves parviennent de
diverses manières à l’intérieur : c’est ainsi que l’un d'eux pond sur les épaules ou sur les jambes du
Cheval, et que celui-ci, en se léchant, transporte les jeunes larves à sa bouche, d'où elles passent
dans l'estomac, là seulement où elles doivent se développer. L'odorat est l'organe des sens qui sem-
ble le plus développé chez les Diptères: ce qui le prouve incontestablement, c’est que certaines
espèces de cet ordre, qui ont coutume de déposer leurs œufs dans les matières animales décompo-
sées, trompées par l'odeur de chair putréfiée qu'exhalent diverses plantes, telles que les Strupelia,
l'Arum dracunculus, le Phallus impudicus, ete., vont les confier à différentes parties de ecs plantes :
mais les jeunes larves qui en sortent ne tardent pas à mourir d'inanition au milieu d'une substance
végétale qui ne peut les nourrir. Outre l'instinct qui est propre à ces Insectes à l’état adulte, on
peut aussi mentionner celui qui est propre aux larves elles-mêmes. Certaines larves de Tipulaires
vivent dans des Champignons, et y creusent des galeries qu’elles tapissent de soie, celles des Chiro-
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lig. 1. — Exoprosope d’Audouin,
Fig. 2. — Cténophore jaunâtre. [Mäle.) Fig 5 — Néides élégant. (Femelle.)
Fig. 4. — Taphrie senomère.
A DIPTÈRES. PL. 28.
ANNELÉS. -— DIPTÈRES. 295
nectes vivent en société dans les eaux et se construisent des demeures particulières dont l'agglo-
mération forme souvent des masses très-singulières; la larve d'une Leptide, le Verlion, de même
que le Fourmilion parmi les Névroptères, se creuse dans le sable une espèce d’entonnoir au fond
duquel elle se cache, attendant patiemment qu'il y tombe quelque larve ou Insecte pour en faire sa
proie, elc.
« Si nous considérons les Diptères, nous dit Macquart, sous le rapport des modifications qui affectent
leurs organes, nous trouvons qu'ils ne le cèdent qu'aux innombrables Coléoptères dans la variété
prodigieuse de leurs races, tandis qu'ils les surpassent sans doute dans le nombre des individus, que
l'on ne peut comparer qu’à celui des feuilles des forêts ou des étoiles du firmament. Voyez ces nuages
vivants de Tipulaires, qui s'élèvent du sein de nos prairies comme l’encens de nos temples, et qui ren-
dent également hommage à la Divinité en nous montrant sa puissance créatrice; voyez ces myria-
des de Muscides répandues sur toutes les parties du globe, tourbillonnant autour de tous les végé-
taux, de tous les êtres animés, et même particulièrement de tout ce qui a cessé de vivre: la
profusion avec laquelle ils sont jetés sur la terre leur fait remplir deux destinations importantes
dans l’économie générale : ils servent de subsistance à un grand nombre d'animaux supérieurs;
l'Hirondelle les happe en rasant l'eau; le Rossignol les saisit de son bec effilé pour les porter à ses
nourrissons; ils sont pour tous une manne toujours renaissante. D'autre part, ils travaillent puis-
samment à consommer et à faire disparaitre tous les débris de la vie, toutes les substances en dé-
composition, tout ce qui corrompt la pureté de l'air : ils semblent chargés de la salubrité publique.
Telle est leur activité, leur fécondité et la succession rapide de leurs générations, que Linné a pu
dire, sans trop d’hyperbole, que trois Mouches consomment le cadavre d'un Cheval aussi vite que
le fait un Lion. Pourquoi faut-il que l'éclat de ce tableau soit obscurei par quelques torts que nous
avons à ler reprocher? Les Cousins, les Moustiques, les Maringouins, nous font une guerre cruelle,
et rendent presque inhabitables plusieurs contrées de la terre. Les Taons, les Asiles, les Œstres,
s'attaquent à nos bestiaux, les harcellent, les tourmentent, les mettent en fureur, et leur causent
quelquefois la mort. Nos moissons, et particulièrement nos céréales, sont aussi parfois exposées à
leurs dévastations. »
Fig. 209. — Psilose à lignes. Fig: 210. — Diaphore transparent.
Le nombre des espèces connues de Diptères est énorme: Macquart en indique près de quatre
mille cinq cents; mais il s’en faut bien qu'il ait décrit toutes les espèces que l’on possède dans les
collections. M. Th. Lacordaire, dans son Introduction à l'Entomologie, évalue à dix mille le nom-
bre de celles qui existent dans les diverses collections: et, comme l'ordre des Diptères est l’un de
ceux qui sont le plus négligés par les naturalistes voyageurs, il suppose que ce nombre ne re-
présente que la dixième partie des espèces répandues sur toute la surface du globe, ce qui les por-
terait par conséquent à cent mille. Lors même que cet aperçu serait exagéré et qu'on réduirait le
nombre des espèces, il en resterait encore assez pour étonner notre imagination. Quant à l'habitat
des Diptères, nous avons déjà dit qu’on en rencontre dans tous les pays, et nous ajouterons que les
2 29
226 HISTOIRE NATURELLE.
régions à la fois chaudes et humides en renfermaient surtout un très-grand nombre. L'Europe en a
principalement fourni beaucoup, mais, sans nul doute, les pays étrangers en présenteront au moins
autant lorsqu'on les y aura étudiés avec soin.
Depuis Aristote, qui a donné aux Diptères le nom qu'ils portent aujourd’hui, et Linné, qui, le
premier, a posé les bases de leur classification, un grand nombre de naturalistes se sont occupés de
ces Insectes. On doit surtout à Réaumur et à de Géer presque tout ce que l'on sait relativement à
leur transformations, et à MM. Marcel de Serres et Léon Dufour les points principaux de leur anato-
mie. Les auteurs qui se sont occupés des Diptères d’une manière générale, les seuls que nous vou-
lionseiter ici, sont: Fabricius, qui, dans son Systema Anthliatorum, modifiant la méthode linnéenne,
a posé les bases de la classification actuelle; Latreille, qui, dans son Genera Crustaceorum et Insec-
torum, etc., a encore amélioré la classification; Meigen, qui, dans ses Diptères d'Europe, a présenté
le tableau général des espèces de nos contrées; Fallen, qui, dans ses Diptera Scandinaviæ, a donné
une excellente monographie des Diptères de la Suède; Wiedemann, qui s’est exclusivement occupé
des Diptères exotiques; Robineau-Desvoidy (Essai sur les Myodaires; Études sur les Diptères des
environs de Paris, etc.), qui a montré que les seuls Muscides, ses Myodaires, comprenaient dans notre
propre pays des milliers d'espèces; et surtout Macquart, qui, dans ses divers travaux, tels que son
Histoire des Diptères des Suites à Buffon de l'éditeur Roret; ses Diptères exotiques, et les nom -
breux mémoires insérés dans les Annales de la Socifté entomologique de France, et dans les Mé-
moires de la Société d'histoire naturelle de Lille, a résumé complétement la science diptérologique;
enfin M. Émile Blanchard, qui, dans son Histoire des Insectes de Duménil, ainsi que dans un ou-
vrage portant le même titre, publié par M. Didot, a présenté un résumé générique de cet ordre. À
ces auteurs nous pourrions joindre les noms de plusieurs autres entomologistes; nous nous borne-
rons seulement à citer ceux de MM. Zetterstedt, qui s’est spécialement occupé des Diptères du nord
de l’Europe, et J. Bigot, qui, profitant des travaux publiés récemment, et les complétant par une
étude approfondie,donne depuis plusieurs années, dans les Annales de la Société entomologique de
France, un Essui d'une nouvelle classification des Diptères, dans lequel il présente une méthode
beaucoup plus naturelle que celle de ses devanciers, et où il cherche à rétablir une synonymie gé-
nérique, si nécessaire surtout dans cet ordre d’Insectes.
Les Diptères sont peut-être l’ordre d'Insectes dans lequel les subdivisions génériques sont les plus
nombreuses. Cela tient naturellement à l'énorme quantité d'espèces qu’on avait à étudier; mais
aussi souvent a-t-on donné une valeur générique à des caractères purement spécifiques. Il nous
sera impossible d'indiquer tous ces genres dans le tableau que nous avons à présenter de l’ordre
des Diptères; nous nous bornerons à faire connaître les plus importants, ainsi que la grande majo-
rité de ceux particuliers à l’Europe, et nous nous appliquerons principalement à faire connaître les
mœurs des espèces les plus remarquables, Nous aurions voulu pouvoir prendre pour guide le tra-
vail de M. J. Bigot, le plus récent de tous, mais nous n'avons pu le faire, parce que toutes les familles
n'ont pas encore été étudiées. Nous suivrons la classification de Macquart, et ce qui nous y engage
surtout, c’est que c’est la plus complète et la plus généralement adoptée jusqu'ici.
L'ordre des Diptères y est partagé en deux divisions primaires : les Némocènes et les BracHocÈRes,
qui comprennent elles-mêmes un assez grand nombre de familles.
PREMIÈRE SECTION. — NÉMOCÈRES.
Cette division, qui renferme beaucoup d'espèces, quoique beaucoup moins que les Brachocères,
et qui correspond aux Nemocera, Latr.; Tipulariæ, Meig.; Tipuliens, Blanch.; a pour caractères :
Corps ordinairement allongé, menu: tête petite; trompe tantôt longue, menue, et renfermant un
suçoir de six soies, tantôt courte, épaisse, à suçoir de deux soies; palpes de quatre ou cinq articles;
antennes fliformes ou sétacées, souvent de la longueur au moins de la téte et du corselet réunis,
de six articles au moins; corselet grand, élevé; abdomen étroit; pieds longs, gréles; aïles allon
gces, souvent étroites; cellules basilaires longues.
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Fig. 1. — Tipule gigantesque.
Fig. 2. — Néphrotome dorsal. Fig. 5. — Anophéles maculipenne.
\. DIPTÈRES. PL. 26.
ANNELES. — DIPTÈRES. 997
L'espèce de supériorité que présente l'organisation des Némocères sur les Brachocères consiste
dans la conformation moins simple des antennes et des palpes à l’état adulte, et dans celle de la
tête, toujours de nature écailleuse et de forme constante à l’état de larve; les autres organes, et
particulièrement les parties de la bouche, ne paraissent pas prendre part à cette sorte de progres-
sion; et si, dans les Culiciens, la trompe offre le plus haut degré de composition, elle se montre dans
les Tipulaires inférieure à celle de la plupart des Brachocères. Ces Diptéres, répandus dans tous les
lieux, vivent les uns du sang de l’homme et des animaux, d’autres des petits Insectes dont ils font
leur proie; beaucoup se nourrissent du suc des fleurs ou de la miellée qui couvre les feuilles. Nous
en rencontrons dans nos appartements, dans les bois, les prés, les champs, dans les climats les plus
divers et à toutes les latitudes. Cependant leur destination particulière est de vivre dans les lieux
frais et ombragés : c’est au bord des eaux, à l'ombre des vergers, dans l’épaisseur des forêts, qu'ils
habitent de préférence, et ce n’est que le soir qu'ils s'exposent aux derniers rayons du soleil; c’est
alors qu'on les voit se rassembler en troupes innombrables, tourbillonner dans les airs, et s’y livrer
à leurs amours. Quelque temps après les femelles déposent leurs œufs dans les eaux, dans la terre,
sur les bourgeons des plantes, sur les champignons, ete. Les larves terrestres sont vermiformes;
celles qui vivent dans les eaux ont des organes de locomotion et de respiration qui leur sont pro-
pres : il en est qui filent des cocons, et d’autres qui forment des galles sur les plantes. Les nym-
phes sont ordinairement nues et inactives; quelques-unes s'enveloppent dans une légère enveloppe
soyeuse, et celles qui habitent les eaux peuvent encore se mouvoir de même que les larves. Le dé-
veloppement, quelquefois assez lent, est souvent très-rapide, et plusieurs générations peuvent se
succéder dans la même année.
Les deux familles admises dans cette division sont celles des Culiciens et Tipuliens.
PREMIÈRE FAMILLE. — CULICIENS.
Le genre Culex, de Linné, est devenu le type de cette famille, qui a pour caractères : trompe
longue, menue, avancée, droite, terminée par deux petites lèvres; palpes droits, souvent allongés,
de cinq articles; antennes filiformes : plumeuses dans les mâles, poilues dans les femelles; yeux
lunulés, contigus dans les mâles; ailes courbées, à nervures couvertes d'écailles.
Cette famille, à laquelle Latreil.e et Macquart donnent le nom de Cuucrres, ne renferme que les
trois genres Anopheles, Meig.; Culex, Linné, ou Ædes, Holfmansegg. — Le groupe typique, celui
des COUSINS (Culex), doit seul nous occuper, et est caractérisé par ses palpes plus longs que la
trompe dans les mâles, et très-courts dans les femelles. Ces Insectes sont bien connus de tout le
monde; ils sont extrêmement avides du sang de l’homme, et le poursuivent jusque dans ses habita-
tions : ils percent la peau à l’aide de leur sucoir, qui est extrêmement délié et garni à l'extrémité de
dentelures, et en même temps ils laissent échapper un liquide qui fait gonfler la partie atteinte, et
détermine ces vives douleurs si tourmentantes pendant l’été. Cependant il paraît que les femelles
seules ont ce genre de vie, et que les mâles se nourrissent du suc des végétaux. C’est principale-
ment dans les endroits chauds et humides qu'ils pullulent le plus. Les espèces de Cousins ne sont
pas très-nombreuses, mais sont cependant répandues dans toutes les parties du monde. Le type du
genre, celui qui, dans notre pays, s'attaque si souvent à l’homme avec tant de ténacité, est le Cou-
sin suceuR (Culex pipiens, Lin.): petite espèce brunâtre, avec l'abdomen gris pâle, les cuisses
jaunûtres, et un point blanc à l'extrémité des jambes. Cette espèce a été bien observée dans ses ha-
bitudes depuis très-longtemps, et Réaumur en a donné une histoire assez complète. Les femelles
déposent leurs œufs à la surface de l’eau, tous auprès les uns des autres, de manière à en former
une petite masse flottante. Les petites larves éclosent promptement et fourmillent dans les eaux
stagnantes durant toute la belle saison. On les voit souvent venir à la surface pour respirer, et
leur thorax est à cet effet muni de sortes d’aigrettes; leur tête est arrondie et pourvue de petites
ant» nes. Ces larves ont une grande agilité : dès qu'on agite l'eau elles fuient de toutes parts en
faisant de nombreux soubresauts. Chez les nymphes, on distingue des rudiments d'ailes anpliquées
sur les parties latérales du corps; elles sont actives comme les larves. Quand le momert de. éelcsion
228 HISTOIRE NATURELLE.
de l’Insecte parfait approche, ces nymphes se tiennent à la surface de l’eau : leur peau ne tarde pas
à se dessécher et à se rompre longitudinalement. C’est alors un moment critique pour le Cousin :
car cette dépouille va lui servir de nacelle jusqu’à ce que ses ailes aient pris assez de consistance
pour lui permettre de prendre son essor : si un coup de vent vient à le faire chavirer, ses ailes se
mouillent, et il s’en retire rarement. On trouve en Amérique plusieurs espèces du même groupe,
appartenant en général au genre Megarhina, Rabineau-Desviedy : ce sont les Moustiques ou Mara-
gouins; tous les voyageurs parlent des souffrances que font endurer ces Diptères, surtout dans les
premiers temps qu'on habite le pays; pendant son sommeil on s’en préserve au moyen de gazes
connues sous le nom de moustiquaires. Le type est le M. mosquita. — Nous donnons, dans notre
Atlas, deux figures qui se rapportent à cette famille : l’Ædes cendré (pl. XXUHL, fig. 4) et l'Ano-
pheles maculipenne (pl. XXVI, fig. 3).
Fig. 211 — Cousin suceur.
DEUXIÈME FAMILLE. — TIPULIENS.
Le genre Tipula et une foule de groupes qui en ont été démembrés constituent la grande famille
de Némocères qui a reçu de Latreille et de Macquart la dénomination de Trruraires, ayant pour
caractéristique : trompe courte, épaisse, terminée par deux grandes lèvres; suçoir de deux sotes;
palpes recourbés, habituellement de quatre articles; yeux souvent séparés par le front. Les Tipu-
liens se bornent à sucer les fluides végétaux, et la conformation de leur trompe ne leur permettrait
pas d’attaquer l’homme ou les animaux. On en connait une infinité d'espèces et de genres, qui ont
été répartis dans cinq tribus particulières.
Are tribu, Caironowres, Blanch., ou Trpuraires curicirorwes, Meig., à antennes filiformes, plu-
meuses chez les mâles et poilues chez les femelles, insérées sur une élévation en forme de disque; à
yeux lunulés, séparés dans les deux sexes : sans ocelles; à thorax ayant trois élévations, et métatho-
rax grand; à abdomen de huit segments, et à ailes couchées, ete. Les Chironomites ont beaucoup
de rapport avec les Cousins, tant à l’état parfait qu’à celui de larves, et ils tendent à les lier aux Ti-
pules proprement dites; ils semblent ne se nourrir que de fluides répandus dans les feuilles : ils
restent pendant le jour posés sur les plantes, les pieds antérieurs dirigés horizontalement et dans
un mouvement lent, alternatif, mesuré, et ce n’est que le soir qu'ils quittent leur retraite et rem-
plissent les airs de leurs troupes innombrables. Les œufs sont déposés dans les eaux de la même
manière que ceux des Cousins, mais les femelles n’emploient pas pour cela autant d'industrie. Les
larves décrites par de Géer, Réaumur, MM. Guérin-Méneville, Bouché, Fries, etc., diffèrent assez
notablement entre elles. Les genres principaux qu’on range dans cette famille sont ceux des Core-
Fig. 4. — Cécidomyie leucopèze, (Mâle) Kig. ? — Plicoptère de Contamine. (Mâle.)
Fig. 3. — Parage bicolore. Fig. 4 — Sphecomvyie tachetée Fig, 5. — Odontomyre verdàtre.
Fig 7. — Mycétobie annulée.
A DIPTÈRES. « DL. O2
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 999
thra, Meig.; Chironomus, Fabr.: Tanypus, Meig.; Ceratopogon, Meig.; Macropexa, Meig. — Nous
représentons le Corèthre à antennes plumeuses (pl. XXV, fi. 2); le Tanype varié (pl. XXIV, fig. 3)
et le Mécropèze latéral (pl. XXIX, fig. 7).
Trois de ces genres doivent nous occuper spécialement : 1° les Corèrures, à antennes de qua-
torze articles, qurnies dans les mâles de longs poils verticillés; très-abondants dans nos environs,
ayant pour type le C. plumicornis, Fabr., qui a une larve hyalide allongée, tandis que celle du C.
cuhciformis ressemble beaucoup aux larves de Culex; 9° les Cuinonomes, à antennes de treixe arti-
cles dans les mâles et de six duns les femelles : le dernier très-long et les autres poilus; nombreux
en espèces européennes, dont la principale est le C. plumosus, Linné, dont la larve est vermiforme,
d'un rouge sanguin; et 3° les Cerarorocoxs, renfermant moins d'espèces que les genres précédents,
ayant cependant été partagées en plusieurs groupes, tels que les Sphæromyus, Prionomyia, Sté-
phens, etc.; à antennes de treixe articles : huit premiers globuleux, et les autres sétacés; et à tête
prolongée (type, C. communis, Fabr.), et dont les larves sont épaisses antérieurement, avec la tête
rétractile; se trouvant sous les écorces humides des arbres morts.
Fig. 212. — Cératopogon fémoral Fig. 213. — Macropèze albitarse. Fig. 214. — Chironome plumeux.
2° tribu, Tipuzres, Blanch., ou Tipuraires rErricoLEs, Latr., à antennes filiformes, de treize à
seize articles, pectinées ou garnies de poils verticillés, à tête sphérique, prolongée en museau ordi-
nairement court. Cette tribu renferme les plus grandes espèces de la famille; ces Insectes habitent
les sites frais et humides; c’est principalement dans les prairies, en automne, que l’on rencontre en
abondance les Tipules proprement dites : les Chionées ont un habitat très-extraordinaire; elles ne
se trouvent que sur la neige dans les régions montagneuses du nord de l’Europe. Les œufs sont dé-
posés dans le sol, soit dans le terreau qui se trouve au pied des arbres, soit dans la terre humide
des prairies, soit dans le limon au bord des eaux, au moyen d’une tarière écailleuse dont les fe-
melles sont pourvues. Les larves ont une bouche bien organisée, et leur extrémité est munie de
quatre tentacules locomoteurs et de deux stigmates respiratoires; les larves des Ptychoptères sont
exceptionnellement aquatiques. Les nymphes sont inactives. Les genres de cette tribu sont ceux
des : Ptychoptera, Meig.; Ctenophora, Meig.; Tipula, Lin.; Pachyrina, Macq.; Nephrotoma, Meig.,
Pedicia, Latr.; Ozodicera, Macq.; Rhamphidia, Meig.; Idioptera, Macq.; Limnophila, Macq.; Lim-
nobia, Meig.; Cylindrotoma, Macq.; Symplecta, Meig.; Erioptera, Meig.; Molophila, Curt ; Poly-
mera, Wied.; Mægistocera, Wied.; Trichocera, Meig.; Dolichopexa, Meig.; Dixa, Meig.; Aniso-
mera, Latr.; Chionea, Dalm. — Nous représentons le Nephrotome dorsal (pl. XXVI, fig. 2); le
Cténophore jaunûtre (pl. XXVIIE, fig. 2), et flavéolé (pl. XXX, fig. 3); la Limnobie rivose (pl. XXVH,
fig. 2), etc.
Le genre Tiruce, le seul sur lequel nous voulions revenir, a des antennes sétacées, de treize ar-
ticles : le deuxième très-petit; son corps est excessivement mince, et ses pattes sont d'une longueur
et d’une ténuilé extrêmes. On en connaît une très-grande quantité d'espèces, surtout dans nos cli-
230 HISTOIRE NATURELLE. :
mats et dans les endroits marécageux. Les larves vivent sur les racines de certaines plantes, et sont
souvent ainsi très-nuisibles. L'une des espèces les plus communes est la Treure ou cuou (Tipula
oleacera, Linné), que l’on rencontre en abondance dans les environs de Paris. Nous représentons
(pl. XXVL, fig. 1) le Tipule gigantesque.
3 tribu, Mycéropures, Blanch., ou Tipuratres Foncicores, Latr., à antennes filiformes, assez
courtes, habituellement de seixe articles; à tête sans prolongement, pourvue de trois ocelles, ete.
Ces Diptères sont assez petits; ils fréquentent les bois ombragés et se posent sur le feuillage; il n’est
pas rare d’en voir sur les vitres des fenêtres des habitations; ils sont d'une prestesse très-remar-
quable dans leurs mouvements : ce qui, joint au poli soyeux de leur corps, fait qu'ils peuvent se
glisser dans les moindres interstices. Les œufs sont introduits dans les champignons, et les larves
s’y développent, y vivent souvent en société, et s’y forment un léger tissu soyeux pour sæ transfor-
_mer en nymphes; toutelois quelques larves se développent dans des détritus végétaux. Les genres
principaux sont ceux des: Bolithophila, Hoffm.; Macrocera, Meig.; Mycetophila, Meig.; Leia, Meig.;
Sciophila, Hoffm.; Gnorista, Hoffm.; Asindulum, Latr.; Ceroplatus, Bose; Platyura, Meig.; Pachy-
palpus, Macq.; Synapha, Meig.; Mycetobia, Meig.; Macronevra, Macq.; Sciara, Meig. (Malobrus,
Latr.); Cordyla, Meig.; Campylomyza, Wied.; Chenesia, Macq. — Nous figurons (pl. XXVIL, fig. 1)
la Gnoriste apicale.
Le genre le plus nombreux en especes est celui des MycéroPuiLes, à antennes courtes, ocelles seu-
lement au nombre de deux, et à pattes garnies de deux rangées d’épines. Les larves, comme l’in-
dique le nom générique, vivent dans l'intérieur des Champignons; comme typedes espèces, nous
nommerons le M. lunatus, Fabr., qui est assez commun sur les feuilles de lierre en automne.
Fig. 215. — Bolithophile cendré Fig. 216. — Mycétophile à antennes brunes.
=
4 tribu, Gécinomvires, Blanch., ou TiruLaREs caruicoces, Meig., à antennes de quinze articles :
globuleux, verticillés dans les mâles, cylindriques dans les femelles. Ce sont de très-petits Diptères,
vivant le plus souvent à leur état de larve, de même que les Cynipiens, dans des excroissances
qu’elles déterminent sur certaines plantes, tantôt sur les tiges, tantôt sur les fleurs ou les feuilles,
mais ne formant parfois pas d’altérations aux végétaux sur lesquels on les rencontre. Les larves
sont sécuriformes, blanchâtres, souvent en société dans une même galle, et elles ont plusieurs en-
nemis surtout parmi les Pupipares. Les nymphes restent souvent dans les excroissances jusqu’au
printemps, époque où les Insectes parfaits en sortent, d'autres fois elles sont placées dans une
simple coque soyeuse sur les feuilles : ces nymphes sont habituellement rougeâtres. Macquart ne
range dans cette tribu que les genres : Lestremia, Macq.; Zygonevra, Meig.; Cecidomyia, Latr.;
Lasioptera, Meig., et Psychoda, Latr. : auxquels on pourrait joindre ceux des : Diomyza, Meig.;
Saccopteryx, Sycorax, Halid., ete.— Nous représentons les Cécidomyies bombyforme (pl. XXX, fig. 5)
et leucopèze (pl. XXXII, fig. 1). :
Fig. 1. — Gnoriste apicale. Fi.g 2. — Limmobie rivose.
Fig. 3. — Dorthésie de l’ortie. (Mäle.)
l'ig. #. — Macrocère boueux.
Fig. b. — Bibio des jardins.
DILTÈRES. PL O2).
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 951
Les deux genres sur lesquels nous voulions revenir sont ceux des : 4°Cécinomvres, à antennes lon-
ques, de vingt-quatre articles dans les mâles, et de quatorze dans les femelles; à ailes frangées,
ayant huit nervures longitudinales; on y renferme un nombre d'espèces déjà considérable, et qui
s’augmente chaque jour : les mœurs des espèces sont celles de la tribu d’une manière générale :
les types sont les : C. grandis, Meig., commune dans les bois, au mois de mai; palustris, Latr., qui vit
sur les épis du Vulpin, etc. 2° Psycuones, à antennes verticillées, de quatorze à quinze articles, et à
ailes larges, frangées, ayant de nombreuses nervures longitudinales; ces Diptères sont assez petits,
garnis de poils fins, et ressemblent en miniature à certaines Phalènes; ils vivent tantôt sur les im-
mondices, tantôt sur les murs humides : ils y pullulent tellement, que des individus innombrables,
rassemblés et immobiles, couvrent quelquefois des murailles entières; d’autres se trouvent dans les
bois ombragés, et courent avec beaucoup d’agilité sur le tronc des arbres couverts de mousse; enfin
quelques-uns vivent sur les plantes marécageuses; les larves se développent probablement dans les
ordures et dans les mousses humides; comme type nous indiquerons la Tipula phalænoides, Lin.,
commune sur les murs et sur les fleurs.
® tribu, Bisronires, Blanch., ou ‘TrpuLatREs FLORALES, Latr., à antennes plus courtes que la tête et
le thorax réunis; à yeux contiqus dans les mâles; à corps et tête épais. Ces Insectes font le passage
des Némocères aux Brachocères, et présentent des genres qui différent assez notablement entre eux,
et par leurs caractères et par leurs mœurs. Ils se tiennent le plus habituellement réunis sur diverses
plantes, et principalement sur les fleurs; et si, dans quelques espèces, ils ont des mouvements assez
lents, dans d’autres leur vol est rapide. Les larves habitent la terre, les immondices, les bouses, les
détritus de bois, etc. Les genres admis dans cette tribu sont ceux des : Rhyphus, Latr. (Anisops,
Meig.); Glochina, Meig.; Simulium, Latr.; Penthetria, Meig.; Plecia, Holfm.; Dilophus, Meig.;
Bibio, Geoffr. (Hirtea, Fabr.); Aspites, Hoffm., et Scathopse, Geoffr.
Les Ruypues ont des antennes de quatorze articles, globuleux à partir du troisième; ils se tien-
nent sur le tronc des arbres, se trouvent sur nos fenêtres, et se réunissent en quantité dans les airs
quand le temps est orageux; les œufs sont déposés dans les bouses; les larvessontlongues, cylindriques,
et les nymphes nues : type, Musca nigricans, Lin., très-commun en été. Les Siuuuies, à antennes
cylindriques, de onxe articles, sont remarquables en ce qu'ils marchent comme en tâtonnant appuyés
sur leurs tarses, qu’ils sucent avec leur trompe les sucs répandus sur le feuillage, et plus particuliè-
rement ceux produits par les Pucerons, et surtout parce que, comme les Cousins, ils attaquent
l'homme et lui font des piqüres douloureuses, surtout dans les contrées méridionales, où ils sont
connus sous le nom de Moustiques; type, C. reptans, Lin., qui se trouve chez nous en été et en
automne. Les Bigrons ont les antennes perfoliées, de neuf articles; les yeux occupant à peu près toute
la tête dans les mâles, et les palpes de cinq articles; is restent souvent immobiles sur les arbres
fruitiers, dont, suivant Lyonnet, ils font avorter les fleurs en se nourrissant de leur suc; les larves,
cylindriques, couvertes de poils, vivent pendant près d’une année dans la terre, allant habituelle-
ment prendre leur nourriture dans les bouses; le Bibio hortulans, Linné, commun dès le mois d'avril,
est l’espèce la plus connue. Enfin les Scaropses, ont des antennes cylindriques, de onxe articles, et
des palpes très-petits semblant composés d'un seul article; 11s se développent dans les immondices :
on en connaît un assez grand nombre d’espèces, et le type est la Tipula notata, Linné, qui est trés-
commune sur les murs et sur les fleurs. — Nous figurons la Simulie ornée (pl. XXXI, fig. 4); le Di-
lophe vulgaire (pl. XXX, fig. 1), et le Bibion des jardins (pl. XANIT, fig. 5).
DEUXIÈME SECTION. — BRACHOCÈRES.
Division indiquée par Macquart sous le nom de Brachocera, et ayant pour caractéristique : corps
peu allongé, assez large; tête habituellement hémisphérique, de lu largeur du corselet; trompe
tantôt longue, menue, saillante, coriacée : tantôt courte, épaisse, charnue, retirée dans la bouche;
sucoir composé de six, quatre ou deux soies; palpes d'un ou deux articles; antennes courtes, de
2352 HISTOIRE NATURELLE.
trois articles au plus : le dernier souvent accompagné d'un style; corselet peu convexe; abdomen
souvent assez large; pattes de longueur médiocre; ailes le plus souvent assez larges; cellules basi-
laires courtes.
Nous avons dit, en parlant des Némocères, que les Brachocères leur semblent inférieurs, prinei-
palement par l’organisation plus simple de leurs antennes et de leurs palpes. Il existe encore de
l'infériorité dans l’organisation des larves, qui ont le plus souvent la tête charnue comme le
corps, etc. Les mœurs de ces Insectes, tant à l’état parfaiuqu'à celui de larve, présentent de grandes
différences suivant les genres, et offrent sous ce rapport les particularités que nous avons signalées
pour les Némocères : il en est de même des caractères tirés de l'organisme.
D'après le nombre de soies qui composent le sucoir, Macquart a formé dans cette section trois
subdivisions principales : les Hexachætes, les Tétrachætes et les Dichætes.
Dans les Hexacuæres le sucoir, composé de six soies, est fort et peut percer la peau des animaux;
le corps est fort; les antennes n’ont bien que trois articles, mais le dernier est divisé en plusieurs
segments annulaires : ce qui montre une transition vers les Némocères; les tarses sont munis de
trois pelotes, et les ailes présentent toujours deux cellules sous-marginales et cinq postérieures :
c’est-à-dire le plus grand degré de composition. On n’y distingue qu'une seule famille : celle des
Tabaniens.
Dans les Térracuæres, les soies mandibulaires manquent, et le suçoir n’est plus composé que de
quatre soies; le troisième article des antennes est simple, mais ces organes ont souvent un style
apical composé de trois articles; il n’y a plus que deux pelotes aux tarses ; les cellules postérieures
des ailes se réduisent habituellement à quatre. On les sépare en trois familles : Sératiomyens, Asi-
liens et Syrphiens.
Enfin, dans les Dicuæres, les soies maxillatres disparaissent, ainsi que les mandibulaires, de telle
sorte qu'il ne reste plus que deux soies représentant la lèvre supérieure et la langue; les palpes
adhèrent à la face des mâchoires et se retrouvent sur le support de la trompe; le troisième article des
antennes, le plus ordinairement patelliforme, porte un style dorsal qui semble n'être plus qu’un
simple appendice; les ailes ne présentent plus qu’une seule cellule sous-marginale et deux ou trois
postérieures; le corps est très-petit. Deux familles : Musciens et Ornithomyens.
TROISIÈME FAMILLE. — TABANIENS.
Le genre Taon (Tabanus, Linné) est le type de la famille des Tavaxiens (Tabanii, Latr.), qui a
pour caractères particuliers : corps large; tête déprimée; trompe saillante, à lèvres terminales al-
longées; six soies lamelliformes dans les femelles, quatre dans les mâles; palpes insérés à la base
des soîies maxillaires, relevés dans les mâles, couchés sur la trompe dans les femelles : à deuxième
article ovoide chex les mâles et conique chez les femelles; antennes à troisième article ayant de
trois à huit divisions; jambes intermédiaires terminées par deux pointes; tarses ayant trois pe-
lotes; ailes habituellement écartées, présentant deux cellules sous-marginales, cinq postérieures ou-
vertes à l'extrémité, et une anale allongée.
Les Tabaniens ont un corps vigoureux, une force remarquable et une énergie qui les rend opi-
nitres, audacieux et insupportables pour l’homme et les animaux. Leur taille est supérieure à celle
des autres Diptères; les six soies qui forment la trompe sont aplaties et acérées; les divers organes
sont mus par des muscles puissants; leurs tarses, munis d’une pelote de plus que les autres Bracho-
cères, leur donnent plus de facilité pour s’attacher à la surface des corps; les yeux, ornés de couleurs
brillantes qui relèvent la livrée obscure du corps, ont, dans les mâles, les facettes supérieures plus
grandes que les inférieures.
Quoique assez nombreuse, cette famille ne présente qu’un nombre assez restreint de modifications
génériques, résidant dans la trompe, les palpes, les antennes, les yeux et les ocelles, les ailes, etc.
Ils sont répandus sur toute la terre, et chaque climat a des espèces qui y sont propres; quant à
l'instinct, il est partout le même, et leur avidité pour le sang des animaux est extrême : dans la
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 233
zone torride, le Taon recherche le Lion des déserts; dans les régions glacées, le Renne des Lapons;
dans les paystempérés, les Bœufs et les Chevaux. Au moment où l'Insecte parvient à se fixer, malgré
les mouvements adroitement dirigés de la crinière et de la queue de l'animal attaqué, la trompe perce
le cuir le plus épais, et le sang coule à l'instant; néanmoins les femelles seules éprouvent ce be-
soin, car les mâles vivent du suc des fleurs : on assure même que quelques femelles, principalement
celles des Pangonies, se trouvent également sur les corolles des végétaux. Les Tabaniens fréquentent
surtout les bois et les pâturages, et c'est pendant l'été et aux heures les plus chaudes de la journée
qu’ils se rendent le plus redoutables; leur vol est rapide et accompagné d’un bourdonnement. Les
métamorphoses de ces Diptères ne sont guère connues que par les observations des de Géer sur le
Taon des bæufs; la femelle dépose ses œufs dans le sol: les larves sont longues, cylindriques, rétré-
cies aux extrémités, apodes, jaunâtres; leur tête est cornée, étroite, allongée, munie de deux grands
crochets mobiles recourbés en dessous; on ne sait pas bien quelle est leur nourriture. Les nymphes
sont nues : chacun des segments de leur corps est bordé de longs poils, et le dernier est terminé
par six pointes écailleuses qui aident à l'[nsecte pour se rendre à la surface de la terre lors de la
dernièreiransformalion.
Fig. 217. — Chrysops aveugle. Fig. 218. — lématope pluviale.
Les genres que Macquart admet dans cette famille sont ceux des : Pangonia, Latr.; Dicrania,
Macq. (Diplocus, Blanch.); Rhinomyza, Wied.; Tabanus, Lin. Acanthocera, Macq.; Hæmatopoda,
Meig.; Hexatoma, Macq.; Sylvius, Meig.; Chrysops, Fabr.; Raphiorhynchus, Wied., et Acantho-
mera, Wied. à
Quatre de ces genres doivent particulièrement nous occuper : 1° les Panconres ont des antennes
à dernier article présentant huit divisions annulaires, et leur trompe est très-longue : ce sont des
Insectes de grande taille, dont le régime semble être végétal; on en connaît une vingtaine d'espèces
presque toutes propres au midi de l'Europe, mais dont quelques-unes appartiennent aux pays
étrangers; nous indiquerons la Pangonia maculata, Meig. (Tabanus proboscideus, Fabr.); grisätre,
à pieds ferrugineux, commune en Provence, et le P. fuscipennis, Wied., du Brésil, type du genre
Philoliche, Hoffm ; 2 les Taons, ayant leurs antennes à dernier article dilaté à la base et ensuite
échancré, avec cinq divisions; à trompe inclinée; sans ocelles : le plus nombreux des groupes de
cette famille; ce genre comprend des espèces propres à toutes les parties du monde, et qui sont
avides du sang des Mammifères; en Europe, elles percent la peau des Bœufs; en Afrique et en Asie,
elles tourmentent de même les Éléphants et les Chameaux, et partout elles attaquent également
l'homme : le type est le Taox pes pœurs (Tabanus bovinus, Lin.), long de 0,005 à 0,006, d'un
brun noirâtre; palpes, face et front jaunâtres; corselet de même couleur et marqué de lignes noires;
se trouve communément dans les bois de toute l'Europe. 3° les Cunysors, à antennes ayant le pre-
mier article à peine plus long que le deuxième, troisième subulé, à cinq divisions, et à front ayant
une callosité latérale, remarquables par la belle couleur d'or qu'offrent les yeux pendant la vie de
l'Insecte, et comprenant des espèces carnivores propres à l’Europe et à l'Amérique, et dont les deux
plus communes chez nous sont les Tabanus cœcutiens, Lin., et Chrysops relictus, Meig. 4° les Té-
MATOPES, à premier arlicle des antennes épais, velu, et à troisième subulé, avec quatre divisions,
et ayant pour type l'A. pluvialis, Lin., abondant dans nos environs.
A. 30
234 HISTOIRE NATURELLE.
QUATRIÈME FAMILLE. — STRATIOMYENS.
Latreille et Macquart ont appliqué le nom de Notacanthes à la famille que nous indiquons sous la
dénomination de Srrariomvens (tirée du nom du genre principal, celui des Stratiomys, Geoffroy), et
que M. Émile Blanchard réunit à la famille précédente sous le nom commun de Tabaniens. Les carac-
tères assignés à ces Diptères d’une manière générale sont les suivants : rompe ordinairement re-
tirée dans la bouche; lèvres terminales épaisses; palpes souvent de trois articles : le dernier habi-
tuellement globuleux; antennes à troisième article annelé, et à style apical ou nul; à écusson le
plus souvent muni de pointes; abdomen ordinairement de cinq segments distincts; tarses présen-
tant trois pelotes; ailes à cellule marginale n’existant plus ou étant confondue avec la stigmati-
que : deuxième sous-marginale souvent petite; ordinairement cinq postérieures rayonnant autour
de la discoïdale.
Les Stratiomyens ne diffèrent réellement des Tabaniens que par la composition de leur trompe,
qui n’est plus composée que de quatre soies au lieu de six; mais, chez les uns comme chez les au-
tres, on retrouve les mêmes divisions du troisième article des antennes, l'absence d'un style, trois
pelotes tarsiennes, des nervures alaires semblables, etc. Un caractère que l'on ne retrouve que chez
ces Diptères, et qui a donné lieu à la dénomination de Notacanthes, consiste dans les pointes qui
terminent leur écusson, et dont la destination est inconnue. Les Stratiomyens offrent moins d'u-
nité sous le rapport des habitudes que sous celui de l’organisation : les uns se trouvent dans les
bois posés sur le trone des arbres, d'autres sur le feuillage ou sur les fleurs des prairies et des
lieux aquatiques; leur régime semble exclusivement végétal; les œufs sont déposés tantôt dans le ter-
reau ou dans les ulcères des arbres, tantôt dans les bouses, quelquefois dans les eaux; les larves
terrestres ou aquatiques différent assez notablement suivant les groupes, et quand elles passent à
l'état de nymphe, leur peau leur sert de coque sans changer de forme.
On y forme trois tribus, celles des : Cænomyides, Xylophagides et Stratiomydes, dans lesquelles
l’organisation déeroit graduellement et très-rapidement, et dont les deux premières ne sont même
que de brusques transitions pour passer des Tabaniens aux Stratiomydes.
4e tribu, Cexonvines, Nobis, ou Sicares, Latr., à corps épais; tête moins large que le corselet;
palpes cylindriques; antennes plus courtes que la tète, avec le troisième article sans style et à trois
ou huit divisions; ailes ayant une cellule marginale distincte et une deuxième sous-marginale
grande. Ces Diptères, de petite taille, fréquentent principalement les bois, et exhalent l'odeur très-
prononcée du Mélilot bleu; on croit que leurs larves vivent dans le détritus du bois. Le genre typi-
que est celui des CÆNOMYIA, ayant les antennes à troisième article conique, avec huit divisions
annulaires et l'écusson muni de deux pointes : le nom de ce groupe a été emprunté de nos livres
saints, où il est employé pour désigner les Mouches qui désolèrent l'Égypte à la voix de Moïse; on
n'y place que peu d’espèces, dont la principale est la Cænomyia ferruginea, Latr., commune en
France, en juin et juillet. Un autre genre, placé dans la même tribu, est celui des PACHYSTOMUS,
Latr., assez anomal, à premier article des antennes plus long et plus épais que les autres, et à
troisième offrant trois divisions : espèce unique, P. syrphoides, Latr., d'Allemagne.
2° tribu, XyYLoPHAGIDES, à corps allongé; antennes à troisième article offrant huit divisions, sans
style; abdomen ayant ordinairement sept segments distincts. Cette division ne renferme qu'un
petit nombre de genres et d’espèces, tous assez anomaux, et offrant des modifications assez im-
portantes dans leur organisme : c’est ainsi que l’écusson peut être mutique ou armé de pointes,
que le premier article des antennes est long ou court, que les cellules alaires diffèrent, etc. Ces In-
sectes vivent dans les bois et se posent sur le tronc des arbres; les larves se développent dans les
ulcères ou le détritus des arbres, et, selon M. de Roser, celle du Xylophage varié, qui se trouve
dans les fentes du Chêne, est brune, allongée, atténuée aux deux extrémités, très-aplatie et com-
Fig. 1. -— Chrysochlore amérhyste.
Fig. 2. — Coria conopsoiïde.
lie.
Fig. 4. — Ædes cendré.
DIPTÈRES.
5. — Magistrorhynque longirostre.
l'ig. 5. — Medetère tacheté.
PL. 25.
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 255
posée de douze segments munis en dessus de poils insérés sur de petits tubercules; la nymphe con-
serve la même forme et reste immobile.
Les genres de cette tribu sont ceux des : Hermetia, Latr.; Xylophagus, Meig.; Subula, Meig., et
Beris, Latr., ou Actina, Meig. Les XyLopuaces ont les antennes à troisième article cylindrique et
avec huit divisions, et l'écusson mutique : ce sont des Diptères qui vivent dans le bois et habitent
l'Europe et surtout l'Allemagne (X. ater et cinctus, Fabr.). Les Béris, que nous voulons aussi si-
gnaler, et qui sont assez nombreux en espèces européennes, se distinguent par leurs antennes ayant
leurs deux premiers articles égaux et le troisième long, subulé, et leur écusson muni de quatre,
six ou huit pointes : l'espèce la plus connue est le BÉris armé (Beris vallata, Forst., ou Stratiomys
clavipes, Fabr.). — Nous représentons (pl. XXX, fig. 2) la Subule marginée.
9° tribu, SrrATIOMYDES, à corps large; lèvre supérieure échancrée : soies maæillaires semblant
nulles; palpes insérés à la base de la trompe; antennes à troisième article de cinq ou six anneaux,
et à dernier article terminé par un style; à abdomen déprimé, arrondi; ailes à nervures peu dis-
tinctes et n’atteignant habituellement pas l'extrémité. Ges Insectes sont inférieurs aux deux autres
tribus, surtout par la présence d’un style; suivant les genres, chaque organe principal tend à se
modifier plus ou moins profondément, tout en conservant les caractères du type. Les Stratiomydes
vivent sur les fleurs et sucent les sucs des nectaires; quelques espèces se posent uniquement sur les
feuilles. Toutes les larves connues ont la tête écailleuse, et se transforment en nymphes dans leur
propre peau; mais elles diffèrent de forme selon leur genre de vie : en effet, celles des Stratiomyies
et des Odontomyies sont aquatiques; celles des Ephippium et Pachygastres vivent dans le bois dé-
composé; celles des Sargues, dans les bouses de Vache, etc.
R2
Fig. 219. — Hératome à deux taches. \ Fig. 220. — Xylophage noir. Fig. 291. — Sargue très-rare.
Les genres assez abondants de cette tribu, comprenant beaucoup d'espèces presque toutes pro-
pres à l'Europe, peuvent être, comme le propose M. É. Blanchard, partagés en deux groupes :
4° les Srrariomvres. Genres : Péilocera, Wied.; Acanthinia, Wied.; Cyphomyia, Wied.; Stratio-
mys, Geoffr.; Odontomyia, Latr.; Oxycera, Meig.; Ephippium, Latr., ou Clitellaria, Meig.; Cyclo-
gaster, Macq. 2° les Sarcuires. Genres : Raphiocera, Macq.; Hoplistus, Macq.; Dicranophora, Macq.;
Platyna, Wied.; Chrysochlora, Latr.; Eudmeta, Wied.; Acrochæta, Wied.; Sarqus, Fabr.; Chry-
somyia, Macq.; Vappo, Latr:, où Pachygaster, Meis., et Nemotelus, Geoffr. — Nous représentons
(pl. XXI, fig. 4) le Chrysochlore améthyste.
Nous ne nous occuperons que de deux de ces groupes, et nous les prendrons avec d'autant plus
de raison comme typiques, que presque tous les autres genres ont été formés à leurs dépens, ce
sont : 4° les Srrariomies, à antennes ayant leur troisième article très-long, en massue linéaire,
avec cinq divisions, sans soies distinctes : ce sont d'élégants Diptères, dont l'abdomen est ordinai-
rement aplati, dont la cornée est parée de belles couleurs, et qui, à l'état parfait, fréquentent les
fleurs, tandis que les larves vivent dans l’eau. Ces dernières sont longues, aplaties, avec leurs der-
niers segments atténués en forme de queue terminée par des poils roides. On en connaît un assez
256 HISTOIRE NATURELLE.
grand nombre d'espèces pour la plupart propres à l’Europe, et dont l’une des mieux connues est le
Stratiomys chamæleon, Fabr., entièrement noir, qui se trouve au mois de mai particulièrement
sur les fleurs de l’aubépine, et qui, en été, se rencontre sur les plantes aquatiques : une espèce, si-
gnalée comme de Philadelphie, est le S. flaviceps, Macq. 2° les Sarçues, à antennes ayant le troi-
sième article lenticulaire ou sphérique, avec quatre anneaux, et un style inséré à la base de la
quatrième division : ce sont de petits Diptères à peu près tous européens, quoique l'on en ait
signalé plusieurs américains, et qui ont habituellement des couleurs métalliques et éclatantes : ce
que rappelle le nom de Chrysomyia, donné par Macquart à un genre démembré de celui-ci; comme
type nous nommerons le Sargus cuprarius,Fabr., d’un vert métallique, qui se trouve très-commu-
nément aux environs de Paris et dans toute l'Europe.
CINQUIÈME FAMILLE. — ASILIENS.
La famille des Tanvsrowes, de Latreille, que nous désignerons avec M. Émile Blanchard sous le
nom d’Asiciens, qui rappelle le nom du genre typique des Asilus de Linné, renferme un grand
nombre de Brachocères, ayant pour caractères communs : corps élancé; trompe coriace, ordinaire-
ment menue, allongée, à lèvres terminales très-petites, peu distinctes; antennes à troisième article
simple, et quelquefois à style terminal nul; ailes ayant souvent deux cellules sous-marginales :
quatre ou cinq postérieures, anale grande.
Les Asiliens, tout en offrant les caractères généraux que nous venons de signaler, présentent un
assez grand nombre de modifications dans leurs divers organes. La tête, le plus souvent hémisphé-
rique et de la largeur du corselet, peut être petite et globuleuse, ou se réduire à des dimensions
extrêmement exiguës. L’abdomen est déprimé, allongé ou conique. La trompe varie dans ses di-
mensions. Les antennes ont des formes variées. Les ailes sont couchées ou très-écartées, à nervures
variables, Les pieds sont robustes et hérissés de pointes; faibles et menus, etc. Ces Insectes sont
d'assez grande taille, très-agiles dans leurs mouvements, et produisent un fort bourdonnement pen-
dant le vol : on les rencontre souvent dans les endroits exposés à la plus grande ardeur du soleil, et
ils habitent toutes les parties du globe, quoique plus communs en Europe que partout ailleurs.
Leurs mœurs sont aussi assez dissemblables; très-sanguinaires dans les premières tribus, les Asiliens
le sont moins dans d’autres, et dans les dernières ont un régime exclusivement végétal. Quelques
espèces se réunissent en troupes nombreuses dans les airs. Les larves sont peu connues : les seules
qui ont été observées, celles des Asilides, ont la tête écailleuse et vivent dans la terre, principale-
ment sur les racines des plantes; elles sont apodes, allongées, déprimées, garnies d’épines, avec la
tête écailleuse, et se métamorphosent sans s’envelopper dans leur peau.
On admet dans cette famille huit tribus, elles-mêmes divisées en des genres nombreux; ces tribus
sont celles des : Mydasides, Asilides, Hybotides, Empides, Cyrtides, Nemestrinides, Bombylides et
Anthracides.
re tribu, Mypasives, ayant le corps robuste, allongé; la trompe avec les lèvres terminales triangu-
laires; et les ailes ayant toutes leurs cellules fermées. Les Mydasides sont les plus grands Diptères
connus, et par leurs caractères présentent des rapports avec les Asiliens et avec les Stratiomyens;
ils vivent de proie, et font la guerre aux autres Insectes, attaquent avec violence même les plus re-
doutables, les saisissant au vol, les serrant de leurs pattes robustes, .et en faisant leur pâture. On
n'y admet que deux genres : 1° CEPHALOCERA, Latr., à trompe en forme de siphon, longue et
avancée, qui ne comprend qu’une espèce propre au cap de Bonne-Espérance (Mydas longirostris,
Wied.); et 2° MYDAS, Fabr., à trompe courte, et à lèvres terminales triangulaires, comprimées :
quelques espèces de l'Amérique méridionale, de l'Égypte, et une trouvée au Portugal (Mydas lusi-
tanicus, Hoffm.). Une très-grande espèce (M. géant) est représentée pl. XXV, fig. 4.
2° tribu, Asirines, ayant le corps élancé; la trompe courte, dirigée en avant, et les ailes présentant
une cellule marginale fermée et cinq cellules postérieures. Ces Insectes, encore assez grands, habitent
Fig. 2. — Corèthre à antennes plumeuses.
. 4. — Mydas géant
DIPTÈMES
Fig. 5 — Rhaphie à antennes longues.
ANNELES. — DIPTÈRES. 237
les bois et les lieux les plus secs, et volent principalement lorsque le soleil est le plus ardent; ils vi-
vent habituellement d'Insectes, et les grandes espèces attaquent aussi les bestiaux et les tourmen-
tent avec acharnement; ils sont beaucoup plus nombreux dans les pays méridionaux que dans les
contrées tempérées, et un très-petit nombre d'espèces se rencontrent dans les régions septentrio-
nales. La seule larve connue, celle de l'Asilus forcipatus, observée par de Géer, ressemblant à celles
des Taons et vivant dans la terre.
On indique un assez grand nombre de genres renfermant souvent eux-mêmes beaucoup d'espè-
ces, plutôt exotiques qu'indigènes; tels sont ceux des : Rhopalogaster, Macq.; Xiphocera, Macq., ou
Enchocera, Blanch.; Laphria, Meig.; Megapoda, Macq.; Ceraturgus, Wied.; Dioctria, Meig.; Da-
sypogon, Meig.; Nicrostalum, Macq.; Leparthrus, Stéph.; Dolichodes, Macq.; Mallophora, Macq.;
Asilus, Linné; Ommatius, Wied.; Gonypes, Latr., ou Leptogaster, Meig.; Damalis, Fabr , ete. — Nous
figurons (pl. XXVII, fig. 4) la Lamphrie sénomère.
Le groupe typique est celui des Asixes, à antennes ayant le premier article assez long, de même
que le troisième, qui est subulé et terminé par un style de deux articles. Ce genre, quoique ayant été
divisé en plusieurs groupes que nous avons nommés, a encore été partagé en plusieurs subdivi-
sions; telles que celles des Trapanea, Erax, etc., et contient encore plus de soixante espèces : une
de celles qui se trouvent abondamment dans toute l'Europe est l'AsiLe FRELON (Asilus crabronifor-
mis, Linné), d'un jaune brunâtre, qui vit aux dépens des chenilles et d'autres Insectes, qu’il suce
avec une grande promptitude. s
Fig. 222, — Diotre à pieds rouges. Fig. 225. — Céphalocère à long bec. Fig. 29%. — Dasyposon ponctué
8° tribu, Hysorines, ayant la tête petite, sphérique; la trompe courte, horizontale; le corselet
élevé; les ailes avec une seule cellule marginale et trois ou quatre postérieures; l'abdomen menu.
Peu d’espèces, toutes de petite taille, entrent dans cette tribu, et ont un faciès qui semble, au pre-
mier éoup d'œil, les rapprocher des Tipules. Quelques Hybotides font la chasse aux Insectes; d’au-
tres vivent de la miellée répandue sur le feuillage, et les derniers se nourrissent uniquement du
suc des fleurs. On y admet les genres : Hybos, Meig.; Ocydromia, Hoffm., Leptopexa, Macq.; OEda-
lea, Meig.; Opetia, Meig., ete. — Le genre typique, celui des Ilvsos, caractérisé par ses antennes à
dernier article court, terminé par une longue soie, et par ses cuisses postérieures renflées, épineu-
ses, ne renferme qu’un petit nombre d'espèces européennes, dont la principale est l'H. funebris,
Meig., entièrement noire, commune sur les haies et les herbes.
4 tribu, Ewrines, ayant la téte arrondie, presque globuleuse; la trompe perpendiculaire; le cor-
selet élevé; les antennes à premier article souvent peu distinct; l'abdomen plus étroit que le corse-
let; les pieds assez longs, et les ailes souvent sans cellule discoidale. Les Empides sont très-nom-
breux, très-semblables aux Hybotides et surtout aux Asilides, pour l'aspect général et pour la
voracité, quoique d’une taille très-inférieure. Mais ils ne se bornent pas à s'emparer d’Insectes pour
en faire leur pâture, le suc des fleurs leur sert aussi de nourriture, et particulièrement aux
mäles, qui sont moins carnivores que les femelles. On ne connaît que très-imparfaitement leurs
238 HISTOIRE NATURELLE.
métamorphoses : M. Bouché, toutefois, a observé la larve de la Rhamphomyia spinipes, qui a la
forme d’un Ver apode, avec les anneaux du corps très-contractés, et dont la nymphe est épineuse.
On connaît beaucoup de genres de cette tribu, comme ceux des: Empis, Lin.; Pachymerina,
Macq.; Rhamphomyia, Moffm.; Hilara, Meig.; Enicopteryx, Stéph.; Brachystoma, Meig.; Gloma,
Meig.; Microphorus, Macq.; Hemerodromyia, Hoffm.; Tachydromia, Fabr.; Platypalpus, Macq.;
Xiphidicera, Macq.; Drapetis, Meig.; Ardoptera, Macq.; Elaphropexa, Macq.; Cyrtoma, Meïg., etc.
C'est le genre Eupis qui doit être pris comme type de toute la tribu; on y comprend une cin-
quantaine d'espèces européennes ou exotiques, ayant pour caractères communs : antennes à tlrot-
sième article conique, comprimé, terminé par un style court, biarticulé; pattes de derrière longues,
gréles; ailes ayant deux cellules marginales. Parmi les espèces communes dans nos environs, ainsi
que dans presque toute l'Europe, nous citerons les Empis tessellata, Fabr.; livida, Linné; ignota,
Meig.; etc. Les genres Rhamphomyie, Platypalpes, sont aussi très-nombreux en espèces.
o° tribu, Cyrrines ou VÉscuLEUx, ayant la {éte très-petite; les antennes à premier article excessi-
vement court; les yeux occupant presque toute la tête; ailes écartées, inclinées en toit, parfois sans
cellule discoïdale; abdomen très-épais, vésiculeux. Cette tribu est, par son organisation, l’une des
plus singulières de la famille des Asiliens : la disproportion entre la tête et le corps est énorme;
l'abdomen est très-épais, et sa transparence est semblable à une vésicule boursouflée; la trompe,
enfin, longue dans plusieurs genres, paraît en quelque sorte disparaître dans les Astomelles. La
place de ces Diptères n’est peut-être pas encore définitivement fixée, mais cependant, dans quelques-
unes de leurs subdivisions, ils se rapprochent des Empides. Ils vivent sur les fleurs : tantôt sur les
coteaux, tantôt auprès des eaux, et ils font entendre un léger bourdonnement : aucune de leurs
larves n’a été décrite. Les genres de cette tribu sont ceux des : Panops, Lamarck, ou Lasia, Wied.;
Mesophysa, Macq.; Philopota, Meig.; Cyrtus, Latr.; Astomella, L. Duf.; Henops, llliger, ou Agco-
des, Latr.; Acrocera, Meig. — Le groupe typique est celui des Cyrres, qui a les antennes insérées
sur le sommet du front, avec le dernier article ovale, terminé par un style, et chez lesquels le cor-
selet est très-gibbeux, et qui ne renferme qu'un très-petit nombre d'espèces, dont la principale est
le Cyrtus gibbosus, Meig., qui habite le midi de la France et le nord de l’Afrique.
Fig. 225. — Cyrte denté. | Fig. 226. Fig. 227. — Hybos à ailes vitreuses
Mulion commun.
6° tribu, Néwesrrinines, ayant le corps court et large; la trompe menue, allongée, dirigée sous le
corps; l'abdomen plus large que le corselet; les tarses munis de trois pelotes; les ailes écartées, ra-
battues sur les côtés du corps, avec trois cellules sous-marginales, et quatre ou cinq postérieures, la
plupart fermées. Les Némestrinides se rapprochent beaucoup des deux tribus qui vont suivre, mais
elles en diffèrent notablemént par la disposition des cellules alaires rappelant ce qui a lieu chez les
Mydasiens. On n'y place que deux genres ne renfermant que peu d'espèces, dont on n’a décrit ni les\
mœurs ni les métamorphoses; ces genres sont ceux des: Fallenia, Meig., et Nemestrinia, Latr. Ce
dernier, caractérisé par ses antennes courtes, terminées par un style de trois articles, et par ses
ailes ayant quatre cellules postérieures, ne renferme que des espèces étrangères (type, Nemestrina
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 959
reticulata, Latr., d'Égypte et de Syrie), tandis que la seule espèce connue de Fallénie (Fallenia fas-
ciata, Mig.) habite le midi de l'Europe.
7e tribu, Bomeyzines, ayant le corps court, large; la trompe grêle, longue; les palpes d’un seul ar-
ticle distinct; les antennes assez longues, rapprochées à la base; le corselet gibbeux, plus élevé que
la tête; les pieds menus; les ailes écartées, avec quatre cellules postérieures. Les Bombylides, qui
offrent des différences assez notables dans les divers groupes, sont des Diptères de taille moyenne;
leur vol est très-rapide; ils planent au-dessus des fleurs et en hument les sucs en volant; ils ne
prennent leur essor qu'aux rayons du soleil, et. font entendre un bourdonnement assez grave; quand
ils se posent, c’est le plus souvent sur la terre ou sur le tronc des arbres; ils sont beaucoup plus
communs dans les climats chauds que dans les régions du Nord : plusieurs habitent l’Europe, et ce-
pendant on ne connaît pas leurs métamorphoses.
Les genres admis par Macquart sont ceux des : Bombylius, Linné;, Usia, Latr.; Ploas, Latr.; Xes-
tomysa, Wied.; Toxophora, Wied.; Cyllenia, Latr.; Thlipsomyxa, Wied.; Apatomyza, Wied.;
Amictus, Wied.; Systopus, Wied.; Geron, Hoffm.; Phthiria, Meig., et Megapalpus, Macq. — Parmi
ces genres, le principal est celui des Bomwevces, caractérisé par leurs antennes à troisième article
très-long, subulé, terminé en pointe, et comprenant une trentaine d'espèces presque toutes euro-
péennes, et remarquables par l'élégante fourrure dont leur corps est revêtu, par la délicatesse de
leurs pieds, la longueur de leurs ailes, etc. Le type spécifique est le Bomzvce sicuon (Bombylius
major, Linné), noir, avec les pieds jaunes, qui n’est pas rare dans toute l’Europe.
8° tribu, Axruracines, ayant le corps court, large; la tête ordinairement urrondie; la trompe
courte, dirigée en avant; les antennes écartées; les yeux séparés; le corselet non gibbeux; les pieds
menus; les tarses à pelotes très-petites ou nulles; les ailes écurtées, avec quatre cellules postérieures.
Cette tribu, voisine de la précédente, s’en distingue par son corps plus aplati et par un faciès
tout particulier. On n’en connaît qu’un petit nombre d'espèces qui se trouvent partout, mais bien
plus fréquemment dans les contrées méridionales. Leurs larves ne sont pas bien connues : cepen-
dant on croit qu'elles sont carnivores, et qu'on les rencontre dans les nids d'Hyménoptères de la
tribu des Apiens. Les nymphes, suivant Latreille, sont nues, incomplètes, avec les segments du
corps munis de petites pointes. Les genres de cette division sont ceux des : Mulio, Latr.; Corsomyxa,
Wied.; Enica, Macq.; Anthrax, Scopoli; Tomomyza, Wied.; Lomatia, Meig.; Hirmoneura, Wied.
— Le groupe typique, celui des Anrurax, a pour caractères particuliers : antennes à troisième ar-
ticle court, à base sphérique; trompe plus courte que la tête. — Dans presque toutes les espèces,
qui sont nombreuses et appartiennent surtout à l'Europe, à l’Afrique et à l'Amérique, le dernier
article des antennes prend la figure d'une cornue, dont le long cou ne doit pas être confondu avec
le style qui se manifeste saus la forme d’une pointe peu distincte, ou même d'une petite couronne
de poils; on remarque chez ces Diptères une grande diversité dans les combinaisons du noir et du
blane des ailes, qui sont très-développées : cette sombre parure, jointe au noir velouté du corps,
souvent orné de bandes argentées, leur donne une élégance remarquable, et quand ils sont fixés
sur les corolles de l'églantier ou de l’aubépine pour en sucer les sucs, ils produisent le contraste le
plus piquant, et ne font pas moins ressortir leur propre beauté que celle des fleurs sur lesquelles
ils se trouvent. Les espèces sont partagées en groupes, d’après la disposition des cellules des ailes :
parmi celles que l’on trouve dans une grande partie de l'Europe, nous citerons les : Anthrax flava,
Hollm.; Hottentota, Fabr.; venusta, Meig.; sinuata, Fabr., etc.
SIXIÈME FAMILLE. — SYRPHIENS.
Nous appliquerôns ce nom à la famille assez peu naturelle des Brachocères que Macquart nomme
Bracuysromes, et qui a pour type principal le genre Syrphus de Fabricius. Ces Insectes ont pour ca-
ractères spéciaux : trompe courte, membraneuse; lèvres terminales épaisses; antennes à troisième
240 HISTOIRE NATURELLE.
article simple, souvent en palette, et à style le plus habituellement dorsal; ailes ayant ordinaire-
ment une cellule sous-marginale et trois postérieures; abdomen présentant cinq segmentsæistincts.
Les particularités différentielles que nous venons d'indiquer distinguent les Syrphiens des Insectes
de la tribu précédente; mais nous devons dire que l’on pourrait, à l'exemple de quelques naturalistes,
y former deux familles particulières : les Dolichopodiens et les Syrphiens propres. Divers de
leurs organes offrent des différences notables, qui permettent d'y créer quatre tribus distinctes,
qu'on devrait même regarder comme constituant des groupes d’un ordre supérieur. On en connaît
beaucoup d'espèces partagées en des groupes nombreux; les unes trouvent leur nourriture sur le
feuillage, sur le tronc des arbres ou sur les fleurs, d’autres vivent de proie. Les femelles déposent
leurs œufs tantôt dans les détritus du bois, tantôt sur le sol et sur les plantes, tantôt dans le sein des
eaux; les larves trouvent, dans ces diverses situations, les aliments nécessaires à leur développe-
ment; quelques-unes, principalement celles des Syrphies, sont parasites et vivent de la substance
d’autres Insectes; leur tête peut être cornée ou chornue, et varie considérablement de forme.
Macquart distribue ces Diptères en quatre tribus que nous nommerons Thérévides, Leptides, Do-
lichopodides et Syrphides.
1 tribu, Taérévines, ou Xylotomes, Meig., à trompe retirée dans la bouche; à palpes cachés, cy-
lindriques, terminés en massue; à antennes ayant un style apical; à abdomen conique, et à ailes
offrant ordinairement cinq cellules postérieures. Le genre principal de cette tribu est celui des
Tuérèves (Thereva, Latr.), qui a des antennes à premier article long, cylindrique, et à troisième
article court, renflé, avec le style biarticulé. Ce genre, qui renferme une quinzaine d’espèces euro-
péennes et quelques types exotiques, comme la Thereva bilineata, Wied., de la Nouvelle-Zélande,
était anciennement confondu avec ceux des Anthraæx et Tabanus. Les Thérèves sont de petits Diptères
souvent remarquables par le duvet argenté qui les couvre, qui se trouvent parfois communé-
ment en troupes innombrables, et qui, quoique leur nom fasse allusion à la chasse, vivent beaucoup
moins de proie que du suc des fleurs. C’est dans le terreau que les femelles déposent leurs œufs;
leurs métamorphoses nous sont connues par les observations de Frisch, de Meigen et de M. Bouché.
Les larves sont très-allongées, vermiformes; leur tête est petite; le corps, composé de vingt segments
distincts, se contourne dans tous les sens, et est terminé par deux tubes respiratoires. Les nymphes
sont oblongues. Parmi les espèces nous citerons les Thereva plebeia, Lin., et nobilitata, Fabr.,
qui se rencontrent dans toute l’ Europe : le premier communément, et le second un peu moins fré-
quemment. — Deux genres qui se rapprochent de celui-ci ont recu les noms de RUPPELLIA, Wied.
(R. semiflava, d'Égypte), et CHIROMYZA, Wied. (C. vittata, du Brésil).
2° tribu, Lerripes, à trompe saillante, avec les lèvres terminales allongées; à labre souvent tron-
qué; à antennes insérées vers la base de la téte, avec un style apical; à jambes intermédiaires et
postérieures terminées par deux pointes; à hanches de devant allongées; à tarses ayant trois pelotes,
à ailes ordinairement écartées, et avec cinq cellules postérieures. Les Leptides forment une tribu
peu naturelle, car les différences que l’on remarque dans les organes des divers genres qu'on
groupe ensemble sont loin de lui donner une homogénéité nécessaire. Ils semblent presque tous
vivre des liquides des Insectes qu'ils attaquent, mais quelques-uns se trouvent sur les fleurs; ils ha-
bitent les bois ou les prairies, se tiennent souvent sur les troncs d'arbres; mais, quelques-uns se
posent souvent sur les Graminées et les plantes herbacées. On connaît les métamorphoses de di-
verses espèces du groupe typique.
Les genres principaux de cette tribu, qui ne doivent probablement pas être tous admis, sont ceux
des : Leptis, Fabr.; (Rhagio, Latr.); Vermileo, Macq. (Psammoryctes, Blanch.); Chrysopila, Macq.;
Spania, Meig.; Atheryx, Meig., et Clinocera, Meig., qui ne one qu’un nombre assez res-
treint d'espèces, toutes propres à l Europe.
Les Lepris, qui se distinguent surtout par leur téte déprimée, leurs antennes à deuxième article
conique et à troisième article court, termié par le style, et par leur thoraæx tuberculeux, sont assez
nombreux en espèces : types, Leptis scolopacea, conspicua et vitripennis, Meig., tous assez com-
mups, principalement dans les bois et sur les troncs d'arbres exposés aux rayons solaires. Les œufs
sont déposés dans la terre : ils sont blancs, allongés. araués. Les larves de la Leptide bécasse sont
f ANNELÉS. — DIPTÈRES. 241
longues, cylindriques, rétrécies antérieurement, munies de mamelons en dessous; leur bouche est
petite, cornée. Les nymphes ont le bord dés segments garni de pointes. — Deux genres démembrés
des Leptis, et qui n’en diffèrent pas très-notablement, sont ceux des : VErmir1oN, à {éle presque hé-
misphérique, et CurvsoPnies, à thorax sans tubercule, et à corps couvert de poils dorés : le premier
de ces genres ne comprend qu’une espèce, le Vermicrow, Leptis vermileo, Fabr.(Vermileo Degeert,
Macq.), très-curieux par les mœurs de sa larve, qui a été observée par De Géer, et qui offre
beaucoup de rapport avec celles des Fourmilions. Cette larve est amincie, pouvant prendre toutes
sortes d’inflexions; sa tête est conique et armée de deux pointes cornées; son dernier segment ab-
dominal est terminé par quatre tubercules velus, ete.; eile vit de proie, et se fait dans le sable de
petits enfoncements coniques : pour y parvenir, elle lance le sable en courbant son corps et le dé-
bandant comme un ressort; puis, cachée au fond de ce piége, elle y vit au moins, assure-t-on, trois
ans, et y attend le moment où quelque Insecte y tombe : alors, levant brusquement la tête, elle serre
sa proie dans les replis de son corps et la dévore, et finalement en rejette la dépouille hors de son
trou. La nymphe est nue et simplement couverte de sable.
Fig. 228. — Chrysophile dorée. Fig. 229. — Vermilion (Leptis) de De Géer.
3° tribu, Dozrcaoponines, ou Dolichopodes, Latr., à trompe saillante; face étroite dans les mâles;
palpes à deuxième article déprimé, membraneux, recouvrant la base de la trompe; antennes à
style dorsal ou apical; yeux séparés; pieds allongés; abdomen cylindrico-conique; ailes courbées, à
cellule médiastine très-petite et fermée, sans discoïdale, souvent à trois cellules postérieures, etc.
Un nombre considérable d'espèces, presque exclusivement propres à l'Europe, entrent dans cette
tribu; ce sont de jolis Diptères à pattes souvent très-allongées, et se distinguant par l'éclat du vert
métallique dont ils brillent, et qui se nuance d’or, d'argent, d’azur et de pourpre. Ils vivent sur les
vég#taux, montrent beaucoup de vivacité, fréquentent les bois depuis le mois de mai jusqu’à celui
d'octobre, et se nourrissent le plus habituellement du suc des plantes, mais aussi parfois de petits
Insectes. On ne connaît que les métamorphoses du Dolichope à crochets, qui ont été observées par
De Géer; la larve habite la terre, et offre une bouche armée de deux espèces de mâchoires en forme
de tubercules.
Les genres formés dans cette division ne diffèrent souvent entre eux que par des ne. peu
considérables, principalement tirées des antennes : ces genres sont ceux des : Rhaphium, Meig.;
Porphyrops, Meig.; Hydrophorus, Fall.; Chrysotus, Meig ; Diaphora, Meig.; Psilopus, Megerle;
Medeterus, Meig.; Argyra, Macq.; Sybistroma, Megerle; Dolichopus, Latr.; Ortochile, Latr., ete
Nous figurons (pl. XXV, fig. 3) la Rhaphie à antennes longues, et (pl. XXIX, fig. 1) le Chrysote négligé.
Le genre Doricuope, ayant la trompe très-courte, les antennes à troisième article oblong, com-
primé, avec un style très-court, etc., renferme la grande majorité des espèces de la tribu, et a pour
types les : Dolichopus chrysoz TT el Fall.; chærophilli, Megerle; nigr ipennis, Fall, etc.,
communs dans presque tuutes les parties de l'Europe.
4 tribu, Syrpmines, à palpes renflées à l'extrémité; lèvre supérieure large, voûtée, échancrée;
face souvent proéminente; antennes à style ordinairement dorsal; abdomen déprimé, allongé;
A, 51
249 HISTOIRE NATURELLE.
. ailes ayant une cellule discoïdale, trois postérieures, quelquefois de petites nervures terminales, ete.
Les Syrphides sont très-nombreux en espèces indigènes; ils se font remarquer par leur grandeur et
par les couleurs dont ils sont ornés : éclat métallique qui les décore est très-souvent rehaussé par
des bandes ou des taches jaunes ou blanches diversement figurées; ils se trouvent presque exclusi-
vement sur les fleurs, et l'époque de l’éclosion de celles-là est aussi celle de l'apparition de-ceux-ci;
leur vol est pesant ou rapide, ondulé ou saccadé. Beaucoup de Syrphides, dans leur premier état,
sont carnivores et vivent aux dépens des Pucerons, des chenilles, ete.; d’autres se trouvent dans
l’eau; quelques-uns habitent les détritus. Toutes ces particularités de mœurs dépendent de diffé-
rences profondes dans leur organisme; en effet, on ne trouve de caractères véritablement bien
constants, pour toutes les espèces, que la lèvre supérieure large, convexe, échancrée à sa ter-
minaison, et la disposition des nervures qui se courbent avant l'extrémité et n'aboutissent pas or-
dinairement au bord de l'aile. Les genres offrent des différences très-grandes dans leurs divers
organes, et l'on peut, avec M. É. Blanchard, les partager en trois groupes particuliers.
À. Carysoroxires, à antennes plus longues que la tète. Genres : Ceria, Fabr.; Callicera, Meïg.;
Chymophila, Serv.; Aphritis, Latr. (Microdon, Meig.); Ceratophya, Wied.; Chrysotozum, Meig.;
Psarus, Latr.; Mixtemyia, Macq., etc.
Tous ces genres renferment des espèces surtout indigènes, et quelques exotiques, et l’on est loin
de bien connaître leurs premiers états : on croit seulement que c'est dans la terre que les larves
se développent. Le genre principal est celui des Cuaysoroxes, à antennes ayant le premier article
assez allongé et le deuxième plus long, renflé à l'extrémité, le troisième fusiforme; à écusson muni
de” deux pointes. On en décrit quelques espèces, toutes européennes, telles que les Chrysostozum
bicinctum, Fabr.; armatum, Linné; vespiforme, Fabr., communs partout.
Fig. 250. — Dolichopode royal. Fig. 251. — Éristale semblable.
+
B. VoruceLuires, à antennes plus courtes que la tête; corps large; ailes à cellule sous-marginale
pédiculée. Genres : Volucella, Geoffr.; Temnocera, Saint-Farg. et Serv.; Sericomyia, Meig.; Crio-
rhina, Hoffm.; Mallota, Meig.; Eristalis, Latr.; Didea, Macq.; Platynochætus, Wied.; Helophilus,
Meig.; Priomerus, Serv.; Palpoda, Macq.; Merodon, Latr., etc.-— Nous figurons (pl. XXI, fig. 8)
l'Hélophile pendulé.
Quelques-uns de ces genres doivent nous occuper en particulier. Les Vorucezes, à troisième ar-
ticle des antennes oblong, et avec le style cilié, sont assez nombreux en espèces, tant indigènes
qu'exotiques, et ont pour types les Volucella pellucens, espèce noire, comme transparente, assez
commune sur les aubépines, dès le mois d'avril, et xonaria, Meig., espèce se trouvant fréquem-
ment en automne sur diverses fleurs; les larves exercent leurs ravages dans les nids des Bourdons
(V. bombylans) et des Guêpes (zonaria) : elles sont allongées, étroites en avant, larges en arrière,
à corps ridé. Les ErisraLes, à antennes insérées sur une ie frontale, avec le troisième article
presque orbiculaire, un peu plus large que long; à cuisses simples, et à jambes droites, se trouvent
communément en Europe, dans les endroits humides (E. intricatus, Meig.; nemorum, Fabr.; ar-
te Fabr.; floreus, Fabr.; tenax, Linné, etc., tous très-communs presque partout). Les lar-
s, de même que celles des Néon) qui se distinguent surtout par leurs cuisses épaisses et par
ANNELÉS. —— DIPTÈRES. 243
leurs jarnbes arquées, habitent les eaux croupissantes, et leurs organessont appropriés à ce séjour :
les organes de la respiration ont extérieurement une longueur excessive, pour leur permettre de se
mettre en contact avec l'air extérieur, leur bouche présente une ouverture entourée d’un rebord
cartilagineux, et leur nourriture consiste dans les détritus de matières végétales et animales qu'ils
trouvent dans la vase; on y constate sept paires de pieds membraneux situés en dessous du corps;
avant de passer à l’état de nymphes, les larves sortent des eaux : elles cherchent, en rampant, un
abri souterrain, et se collent dans leur nouvelle retraite au moyen d'une liqueur visqueuse qui trans-
sude de leur corps; le tube respiratoire cesse ses fonctions, et la respiration se fait désormais à l’aide
de quatre petites cornes situées à la partie antérieure du corps; la peau se durcit, se dessèche, et
devient la coque de la nymphe. Les Méronons, à troisième article des antennes ovalaire, surmonté
d'un style de deux articles, et à cuisses épaisses terminées par une dent, sont assez abondants en
espèces, et le type, le Merodon clavipes, Latr., a une larve surtout remarquable en ce que ses stig-
mates postérieurs sont insérés sur un pédicule, et qui vit dans les bulbes du narcisse, comme l'a
constaté Réaumur.— Dans quelques autres genres les larves vivent dans la terre.
Fig. 232. — Voluselle zonée.
\
5° tribu, Syrpives, à antennes plus courtes que la tête; à corps étroit, et à ailes ayant la cellule
sous-marginale droite. Genres : Tropidia, Meig.; Stenogaster, Macq.; Xylota, Meig.; Brachypal-
pus, Macq.; Syritta, Saint-Farg. et Serv.; Eumerus, Meig.; Rhingia, Scopoli; Graptomyza, Wied.;
Brachyopa, Moffm.; Pelecocera, Hoffm.; Milesia, Latr.; Syrphus, Fabr.; Doros, Me:g.; Sphæropho-
ria, Saint-Farg. et Serv.; Ocyptamus, Serv.; Cheilosia, Megerle; Chrysogaster, Meig.; Orthonevra,
Macq.; Paragus, Latr. Pipixa, Fall; Psilota, Meig.; Ascia, Megerle; Sphegina, Meig.; Baccha,
Fabr., etc.
Le genre principal, le seul sur lequel nous devions surtout revenir, celui des Syrpues, à an-
tennes ayant leur troisième article ovalaire, avec un style pubescent, et à abdomen déprimé, ren-
ferme plus de cent espèces européennes et exotiques, et cependant on a formé à ses dépens plusieurs
groupes génériques qui pourraient y être réunis. Dans nos climats, les Syrphes, qui sont de taille
moyenne, se rencontrent habituellement dans les bois, se tenant sur le tronc des arbres et habitant
sur les fleurs : d’autres se trouvent dans les prairies et les vergers, où on les voit sur nos arbres à
fruits, comme le poirier, le groseillier, ete. Parmi nos espèces les plus communes nous citerons les
Syrphus pyrastri, Linné; balteatus, Meig.; ribesu, Lin.; corollæ, Meig.; scalaris, Latr.; mellarius,
Fabr.; scutatus, Meig., ete. La plupart des larves de Syrphes éclosent sur des tiges ou des feuilles
couvertes de Pucerons, dont elles sont des ennemis aussi redoutables que les larves des Hémerobes,
quoiqu'’elles soient conformées d’une manière bien moins hostile en apparence; semblables aux
larves de la plupart des Diptères, elles sont sans pieds et sans yeux : mais, nées au milieu des groupes
d'Aphidiens, il leur suffit d’allonger le corps et de porter la tête de côté et d’autre pour trouver leur
proie, et, quand elles ont dévoré tout ce qui était à leur portée, elles avancent en rampant et en
rencontrent de nouvelles; ces larves ont la tête armée d’un organe de succion, composé extérieure-
ment d’un dard à trois pointes, et, lorsque leur développement est complet, elles sefixent aux tiges ou
aux feuilles, et s'y attachent au moyen d’une liqueur visqueuse qu’elles font sortir de leur bouche :
leur corps se raccourcit, la peau se durcit, et elles passent ainsi à l’état de nymphes. — Parmi les
autres genres, plusieurs, tels que ceux des Xycores, SPuœropuores, CuEILOSIES, Pirizes, eic., ren-
244 HISTOIRE NATURELLE.
ferment beaucoup d'espèces :des autres n'en contiennent qu'un petit nombre; les larves de ces der-
niers.se trouvent dans la terre, dans le fumier, dans l’intérieur des champignons, etc.
SEPTIÈME FAMILLE — MUSCIENS.
L'énorme famille des Muscrens, ayant pour type le genre linnéen des Moucues, ou Musca, offre
pour caractères particuliers : suçoir de deux soies renfermé dans une trompe labiale; palpes insé-
rés ordinairement sur la base de la trompe; antennes à dernier article lenticulaire ou patelliforme;
à style habituellement dorsal; ailes ayant le plus souvent une seule cellule sous-marginale, trois
postérieures, une anale courte et étant quelquefois sans nervures transverses.
Les Muscrens, auxquels Latreille a appliqué le nom d'Arnéricères et que Robineau-Desvoidy nomme
Myopares, comprennent les Moucues proprement dites. Cette famille, surtout caractérisée par ses
deux soies du suçoir renfermées dans la trompe, comprend la plupart des Diptères inférieurs, et
renferme plus de la moitié des espèces de l'ordre entier. Leur organisation, quoique simple, peut
se modifier très-considérablement suivant les divers groupes, et si quelques tribus conservent en-
core une partie des particularités des familles précédentes, d’autres en diffèrent beaucoup : les
nervures des ailes peuvent être plus ou moins complexes; le style apical ou dorsal; la trompe lon-
gue, menue, ou s’oblitérant et disparaissant entièrement, de même que la cavité buccale, etc. Les
larves sont, dans quelques cas, parasites, soit des animaux supérieurs, soit des Insectes; dans beau-
coup d’autres cas, elles se nourrissent exclusivement de matières organiques en décomposition ou
de végétaux vivants.
Le nombre des espèces connues, répandues dans toutes les régions du globe, est énorme, et si
l’on considère que l’on n'a guère étudié que celles qui habitent l’Europe, et même que parmi elles
on en découvre chaque jour de nouvelles, on doit en conclure que ce nombre, encore beaucoup plus
considérable, est presque infini. Linné et les anciens naturalistes, qui n’avaient encore observé que
peu de Musciens, n'avaient aussi créé que peu de genres dans cette famille; mais, à mesure que la
quantité des espèces s’est augmentée, celui des groupes a suivi au moins la même progression, et
labricius, Latreille, Meigen, Fallen, Macquart, etc., en ont, fondé un grand nombre; mais Robi-
neau-Desvoidy surtout, ayant étudié spécialement ces Insectes, soit sous le point de vue zoologique,
soit sous celui de leurs mœurs, s’est plu à y former un nombre énorme de divisions génériques.
Plusieurs des genres de ce savant entomologiste sont très-naturels et doivent être conservés, mais
beaucoup aussi n'ont qu'une valeur purement secondaire, et, si on les adoptait, on arriverait
bientôt, en en créant d’autres par suite de légères modifications organiques d’égale valeur, au sys-
tème mononymique. Aussi dans notre travail, où nous ne pouvons qu'’effleurer l’histoire des genres,
laisserons-nous en partie de côté les travaux de Robineau-Desvoidy; toutefois nous répétons qu’on
y trouvera de bons documents scientifiques, et nous y renvoyons ceux qui voudraient approfondir
ce sujet : c'est principalement dans les Myodaires, insérés dans les Mémoires des savants étrangers
de l'Académie des sciences, 1850, dans les Annales de la Société entomologique de France, dans
les Mémoires de la Société d'histoire naturelle de l'Yonne, ete., qu'ils les trouveront.
Les huit tribus que nous admettrons, les sept premières peu nombreuses et la dernière renfer-
mant presque toutes les espèces de la famille, sont celles des : Scénopinides, Céphalopsides, Lon-
choptérides, Platypéxides, Conopsides, Myopides, OEstrides et Muscides.
2" tribu, Scénorinines, à érompe non saillante; à antennes insérées vers le bas de la téte, courtes,
à troisième article subulé, sans style; à abdomen allongé; à cuillerons petits; à ailes couchées,
avec deux cellules sous-marginales et une anale allongée. Un seul genre SCÉNOPINUS, Latr., ren-
fermant des espèces qui, comme le S. fenestralis, Linné, se trouvent sur nos vitres et sur les
murs exposés au soleil, et dont les larves doivent se développer dans l’intérieur de nos demeures
(PI. XXIX, fig. 3).
2° tribu, Ceriracorsines, à féle très-grosse; face étroite; trompe non saillante; palpes allongés, en
Fig. 2. — Chorosome du roseau. Fig. 5. — Scenopine fenestral.
Fig. 6. — Aneure lisse. Fig. 7. — Micropèze latéral.
EME Hélophile pendulé
DIPTÈNES br. 29
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 245
massue, terminés par deux petites soies; antennes. à troisième article subulé, terminé par un
style. Ce sont de petits Diptères qui se trouvent sur les buissons et les herbes des prairies, ne re-
cherchant pas les fleurs, et qui, chez nous, paraissent depuis le mois de mai jusqu'à celui de sep-
tembre. Le genre principal est celui des CEPHALOPS, Fallen, ou PIPUNCULUS, Latr., qui est nom-
breux en espèces (type P. campestris, Latr.), et dont Macquart a séparé le groupe des Atelenevra,
que Walker nomme Chalarus.
3° tribu, Loxcnorrérines, à antennes avec le troisième article arrondi, comprimé, ayant un style
triarticulé; ailes lancéolées, à nervures compliquées et variables suivant les sexes. On n’ÿ range
qu'un seul genre LONCHOPTERA, qui offre un faciès particulier, et qui ne renferme que peu d’es-
pèces vivant sur les herbes dans les lieux aquatiques.
4 tribu, Pcaryrézines, à face large; palpes cylindriques ou en massue; antennes avec le style
triarticulé; tarses de derrière souvent dilatés; ailes couchées, ayant trois ou quatre cellules posté-
rieures et une anale un peu allongée. Genres : Platypeza, Callomyia et Opetia, Meig. — Le groupe
principal, celui des PLarvrèzes, renferme un petit nombre d'espèces, toutes assez rares, se trou-
vant parfois réunies en troupes sous le chapiteau des champignons, ce qui fait supposer que les
larves s’y développent.
o° tribu, Conopsipes, à corps étroit; tête grande; trompe longue, menue, coudée à la base; lèvres
terminales petites, menues; front large; antennes légèrement plus longues que la tête, à troisième
article plus court que le second, à style terminal; pas d’ocelles; abdomen recourbé en dessous; ailes
couchées, à première cellule postérieure fermée, pédiculée, et à anale fermée, allongée. Un seul
genre, celui des CONOPS, Linné, constitue cette tribu : ce sont des Diptères de taille moyenne, dont
on connait une vingtaine d'espèces européennes, qui, à l’état parfait, se rencontrent fréquemment
sur les fleurs, mais dont les larves vivent dans l’intérieur de l’abdomen des Bourdons.
CER
. 236. — Myope ferrugineuse.
Fig. 234. — Conops à grosse tête. Fig. 235. — Zodion cendré. F
-
. 6° tribu, Mvorines, à trompe longue, menue, coudée à la base; face gonflée; front large; antennes
courtes, à deuxième article plus long que le troisième, et à style dorsal, court; abdomen recourbé
en dessous; cuillerons petits; ailes couchées, à première cellule postérieure ordinairement entr'-
ouverte, à anale allongée. Genres : Myopa, Fabr.; Dalmannia, Rob.-Desv. (Stachynia, Macq.):
Stylogaster, Macq.; Zodion, Latr. — Le genre principal, celui des Mvorrs, comprend un grand
nombre d'espèces vivant sur les fleurs, et dont les larves se trouvent, dit-on, dans les nids d’Apiens.
Ttribu, Œsrrnes, à corps velu; trompe nulle ou cachée dans la cavité buccale, fermée ou rudi-
mentaire, avec la bouche légèrement fendue; palpes distincts ou nuls; antennes courtes, insérées
dans une cavité de la face, à troisième article globuleux, avec le style dorsal, épais à la base; ab-
domen ovalaire; aïles écartées, ayant trois cellules postérieures : première fermée, entr'ouverte
ou très-ouverte. Les Œstrides, comme l’a montré surtout M. Joly dans ses Recherches anatomiques
et physiologiques sur ces Insectes (Annales de la Société d'agriculture de Lyon, 1846), montrent
246 HISTOIRE NATURELLE.
des particularités des plus remarquables et souvent des plus variées, tant dans leur organisme in-
terne que dans leur structure extérieure. Ce sont des Insectes déjà cités par Aristote et Pline, et dont
les auteurs anciens, comme Valisnieri, Réaumur, de Géer, Clarek, etc., se sont occupés, de même
que plusieurs entomologistes modernes. Ils vivent généralement peu de temps à l'état parfait; l’ac-
couplement pour les deux sexes et la ponte des femelles sont tout ce qui les occupe. Ces Diptères,
à leur état parfait, sont de taille moyenne ou petite, et ressemblent assez aux autres Musciens. On
les trouve sur les plantes dans les pâturages, et parfois ils se rencontrent dans les bergeries mêmes.
Ils déposent leurs œufs sur les grands Mammifères, de sorte que les larves parviennent soit dans
leur peau, soit dans l'intérieur de leur corps, et qu'elles se nourrissent de leur propre substance
Fig. 257. — Hypoderme du bœuf, Fig. 258 — (Estre du cheval.
Leur dénomination d'Œstres indique l’espèce de fureur à laquelle se livre l'animal harcelé par l’In-
secte, et qui ne peut se soustraire à ses poursuites. Chaque Œstride choisit pour ses œufs un ber-
ceau approprié au besoin des larves, et montre en cela un instinct merveilleux. C’est ainsi que la
- femelle de l'OEstre du Cheval dépose ses œufs sur les épaules ou sur la partie interne des jambes du
Cheval, afin que le Mammifère, en se léchant, enlève la jeune larve, la porte à sa bouche, et de là
dans l'estomac, où elle doit se développer. C'est ainsi que les Céphalémyies placent leurs œufs dans
les narines des moutons, d’où les larves pénètrent dans les sinus frontaux et maxillaires. C’est ainsi
encore que les Cutérèbres et Hypodermes effectuent leur ponte sur le dos des bœæufs et de divers
autres animaux, en percant la peau et en déposant un œuf dans la plaie qui devient une tumeur,
dans laquelle la larve passera sa vie. Les Œstrides attaquent presque exclusivement les Mammifères
herbivores, pachydermes et ruminants; chaque espèce, dans beaucoup de cas, semble prendre pour
victime une espèce spéciale, mais dans certaines circonstances cela n’a cependant pas lieu. L'Homme
n'échappe pas à l'atteinte des Œstrides, et quoiqu'on ne doive plus admettre aujourd'hui l'existence
d'une espèce qui lui soit spéciale (OEstrus hominis), on sait positivement que plusieurs larves
d'Œstrides, parasites des animaux, deviennent, dans quelques cas, des parasites humains. Tout récem-
ment (Société entomologique de France, séance du 12 janvier 1859), M. le docteur Ch. Coquerel a
fait connaître, d'après une observation de M. le docteur Chapuis, une larve d’Œstride, probable-
ment du genre Cutérèbre, appelée Ver macaque, trouvée à Cayenne dans une tumeur du bras d’un
déporté, et, à ce sujet, notre collègue, de même que l'avaient fait en partie MM. P. Gervais et Vari
Bénéden dans leur Zoologie médicale, a donné un résumé de ce qui a été dit jusqu'ici des Œstri-
des parasites de l'Homme. En général, la plupart des remarques qui ont précédé celles de M. Ch.
Coquerel et d’autres de Justin Gaudot, qui a décrit une larve d’un Cutérèbre (Cuterebra noxialis),
qui s'était développée dans l'Homme et se trouvait aussi en grand nombre parasite des Vaches, sont
incomplètes, et n'indiquent pas l'espèce d'Œstride à laquelle les larves appartiennent. C’est princi-
palement dans l'Amérique méridionale que ces Œstrides ont été observées. Les larves de ces Dipté-
res, selon leur genre d'habitation, ont été distinguées sous les dénominations de gastricoles, cu-
ticoles et cavicoles. Leur corps est conique, déprimé, à segments munis de pointes; l'ouverture
buccale présente de chaque côté une petite pièce cornée; l'extrémité du corps est munie destigmates;
et, en outre, elles diffèrent assez notablement suivant les-genres. Lors de la transformation de ces
larves, la peau se dureit et devient la coque de la nymphe; ce dernier état dure environ deux mois
Fig. 4. — Dilophe vulgaire. Fig. 2 — Subule marginée.
/
Fig. 4, — (Œdemagène du larande. fig. 5. — Sericomyic bombyalornre.
\ DILTÈRES PL. 90.
De 4 ANNELES. -— DIPTÈRES. 947
U semble n'y avoir qu'une génération annuelle, toutefois, dans la Céphalémyie du Mouton, il y en
aurait deux.
Les genres formés parmi les Œstrides sont ceux des : Cuterebra, Clarck, dont les larves se trou-
vent dans les tumeurs de la peau, vivant de la matière purulente qui s'y développe : habitent l'Amé-
rique du Sud, type C. cuniculi, Fabr., parasite du Lapin, Hypoderma et OEdemogena, Clarck, dont
les larves ont le même genre de vie que celles des Cutérèbres, types : H. bovis, Fabr., commun dans
» toute l'Europe, et qui attaque le Bœuf; et OE. farandi, Linné, qui, en Laponie, fait beaucoup de
mal aux Rennes; Cephenemyia, Latr., et Cephalemyia, Clarck, dont les larves habitent les cavi-
tés nasales et le sinus frontal des Mammifères : celles des Céphénémyies, dans le Nord, encore dans
le Renne, et celles des Céphalémyies, et spécialement la Cephalemyia ovis, Linné, propres à toute
l’Europe, et se développant dans le nez des Moutons; OEstrus, Linné, assez nombreux en espèces
européennes et américaines, et dont la larve de l'espèce typique (0E. equi, Linné), malheureuse-
ment abondante partout, se trouve fréquemment dans l'estomac des Chevaux; enfin Colax, Wied.,
du Brésil, et dont on ne connait pas les habitudes. — Nous donnons (pl. XXX, fig. 4) l'OEdemogène
du Renne.
8° tribu, Muscnes, Latr., ou Myopaires, Rob.-Desv., à antennes à style habituellement dorsul, et
à ailes ayant une seule cellule sous-marginale, trois postérieures et une anale courte. Cette tribu,
la plus considérable de tout l’ordre des Diptères, et celle qui est par excellence connue sous le
nom vulgaire de Mouches, est répandue avec profusion sur la surface du globe, et les espèces qu’elles
renferment se nourrissent du suc des fleurs, ou trouvent leur nourriture dans les matières ani-
males ou végétales en décomposition, ete. Une foule de modifications organiques se remarquent
chez ces Insectes, et donnent lieu à un grand nombre de subdivisions : nous n’indiquerons que les
principales et nous ne pourrons parler de beaucoup de groupes créés par Robineau-Desvoidy. Les
premiers de ces groupes sont ceux des trois sections des Musciles, Anthomyriles et Acalyptériles.
1e section, Muscires, à style des antennes de trois articles souvent distincts; cuillerons grands;
ailes le plus souvent écartées, à première cellule postérieure entr'ouverte et quelquefois fermée.
Comme l'indique le nom de Créophiles, que leur applique Macquart, les femelles de ces Insectes
déposent leurs œufs sur la‘chair des animaux morts; ce sont les Muscides les plus remarquables de
. tous par leur taille, leurs couleurs, la vigueur de leur corps et la rapidité de leur vol.
1© sous-tribu, Tacmmires, à antennes pourvues d'un style de trois articles, et à abdomen garni
de soies latérales. Genres : Echinomyia, Duméril; Anthophila, Rob.-Desv. (Micropalpus, Macq.);
Gonia, Meig.; Thryptocera, Rob.-Desv.; Siplhiona, Meig.; Rhamphina, Macq.; Trixa, Meig.; Nemo-
ræa, Rob.-Desv.; Senometopia, Macq.; Eurigaster, Maeq.; Masicera, Macq.; Metopia, Meig.; Ly-
della, Macq.; Tachina, Meig.; Gymnochæta, Rob.-Desv. (Chrysosoma, Macq.); Clytia, Rob.-Desv.;
Miltogramma, Meig.; Zophromia, Macq. (Macquartia, Rob.-Desv.); Dufouria, Rob'-Desv. (Cassidæ-
myia, Macq.); Sericocera, Rob.-Desv.; Ptilocera, Rob -Desv.; Melanophora, Meig., ete. Les Tachi-
nites, ou plutôt les Tachines, comprennent d'assez grosses Mouches, couvertes de teintes sombres,
noirâtres, rarement brillantes, et presque constamment hérissées de soies roides. Pendant leur état
de larve, elles vivent dans l’intérieur du corps d’un grand nombre d'Insectes de presque tous les
ordres, mais principalement dans le corps de certaines chenilles, dont elles mangent le tissu adi-
peux, et où elles se métamorphosent en nymphes.
2e sous-tribu, Ocyprértres, à antennes ayant un second article munr d'une soie, et à style glabre;
abdomen cylindrique, garni de soies latérales. Genres : Lophasia, Meig.; Duvaucelia, Rob.-Desv.
(Curtocera, Macq.); Phania, Meig.; Ocyptera, Latr. — Ce dernier genre est le principal de tous, et
l’une de ses espèces, l'O. bicolor, Oliv., habite, à l’état de larve, l'intérieur du corps de la Penta-
toma grisea : à l'état parfait, les espèces se fixent sur les fleurs dont elles sucent les sucs.
3° sous-tribu, Gymosomres, à antennes à deuxième article muni d'une soie, à style glabre; ab.
domen globuleux, dépourvu de sos. Genres : Gymnosoma, Meig.; Cistogaster, Latr.; Strongy-
gaster, Macq. — Ces Musciens se trouvent sur les fleurs, surtout sur celles des Carottes et des
Achillées : leurs métamorphoses ne sont pas connues.
248 HISTOIRE NATURELLE.
4° sous-tribu, Pnasires, antennes courtes, avec le style glabre; abdomen déprimé, dépourvu de
soies. Genres : Trichopoda, Latr.; Xysta, Meig. (Thereva, Fabr.); Phasia, Latr.; Alophora, Rob.-
Desv.: Elomyia, Rob.-Desv.; Hyalomyia, Rob.-Desv. — Ces Insectes se nourrissent du suc des
fleurs, principalement de la famille des Ombellifères; leur vol est très-léger, et quelques-unes s é-
lèvent en troupes nombreuses dans les airs : le genre Phasie en est le type.
Be sous-tribu, Dexrres ou Dexiaines, Macq., antennes courtes, avec le style souvent plumeux; ab-
domen garni de soies. Genres : Prosena, Saint-Farg. et Serv.; Zeuxia, Meig.; Dinera, Rob.-Desv.;
Dexia, Meig.; Sophia, Rob.-Desv. (Scotifera, Macq.); Rutilia, Rob.-Desv.;, Gymnostyla, Macq. —
Ces Muscides se trouvent sur les fleurs, principalement dans les lieux élevés; d’après Robineau-
Desvoidy, les femelles déposent leurs œufs dans les fumiers ou les matières en putréfaction; suivant
Labillardière, une espèce australasienne serait vivipare.
Ge sous-tribu. Sarcopmacrres, antennes longues, à style long, velu, avec l'extrémité nue; abdomen
cylindrico-conique dans les mâles, et ovalaire dans les femelles. Genres : Peckia, Rob.-Desv.
(Phrissopodia, Macq.); Sarcophaga, Meig.; Agria, Meig.; Cynomyia, Rob.-Desv.; Onesia, Rob.-Desv.
— Les Sarcophagites sont très-communs partout, et se trouvent le plus souvent sur les fleurs; les
femelles, au moins celles des Sarcophages et Onésies, sont vivipares, et les femelles déposent leurs
larves, en nombre immense, sur les cadavres et sur d’autres matières en décomposition Le type des
Sarcoruaces est Ja Moucue pe La vianne (Sarcophaga carnaria, Linné), qui recherche la viande pour
y placer ses œufs, d’où sortiront des larves ayant la forme de Vers mous, apodes, blanchâtres.
Fig. 259. — Lophasie fasciée. Fig. 240. — Loxocère ichneumonoïde.
7e sous-tribu, Muscrres, antennes longues, à style velu: abdomen ovalaire. Genres : Siomoxys,
Geoffr.; Hæmatobia, Rob.-Desv.; Glossina, Wied.; Idia, Meig.; Rhynchomyia, Rob.-Desv.; Ochro-
myta, Macq.; Lucilia, Macq.; Achias, Bose.; Calliphora, Macq.; Musca, Linné; Pollenia, Macq.;
Mesembrina, Meig.; Curtonevra, Macq , ete. — Les Muscites sont excessivement nombreux en es-
pèces que l’on rencontre partout, et en genres, dont nous n'avons indiqué que les principaux. Ce
sont les Mouches par excellence, et leur taille est presque constamment petite; leur couleur, ordi-
nairement cendrée et sombre, peut être plus ou moins noirâtre ou brunâtre, et quelquefois
métallique, comme chez les Lucillies. Les uns (Stomoxes et Hématobies) percent la peau des Mam-
mifères, même de l'Homme, avec leur trompe, et s’abreuvent de leur sang; les autres (Mouches et
Lucillies), mais principalement les femelles, incommodent beaucoup les bestiaux et l'Homme. En
effet, ils se nourrissent principalement des fluides qui transsudent du corps des animaux (tels que
la sueur, la salive, la sanie des plaies, etc.), et, dans quelques cas, recherchent aussi les sucs des
plantes. Certaines espèces sont, heureusement dans quelques cas accidentels, parasites de l'Homme,
et leurs larves se développent dans les sinus frontaux et dans les fosses nasales : c’est ainsi que plu-
sieurs faits semblables sont relatés par les auteurs, et que M. le docteur Ch. Coquerel a fait con-
naître (Ann. Soc. ent., 1858, et Archives générales de Médecine, maï 1858) la larve et l’Insecte
parfait d’une Lucillia (L. hominivorax), qui ont été trouvés dans divers déportés à Cayenne, et qui
ont causé la mort de plusieurs d’entre eux. — Le genre typique est celui des Moucuss (Musca), jadis
très-nombreux en espèces, et qui n’en comprend plus aujourd'hui qu’une quantité assez restreinte,
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 249
parmi lesquelles nous nous bornerons à citer la Moucue pomesrique (Musca domestica, Linné), si
désagréable dans nos maisons pendant tout l’été et le commencement de l'automne. (Voy. page 224.)
2° section, ANrHomyziILES, antennes couchées, à troisième article allongé, et à style de deux arti-
cles; yeux contiqus dans les mûles; tarses à pelotes allongées; cuillerons médiocres ou petits; ailes
à première cellule postérieure ouverte. Ges Musciens sont plus petits, en général, que les Musciles,
moins rapides dans leur vol, leur appétit a moins de véhémence, et ils se nourrissent soit de la
fiente des animaux, soit de sucs végétaux; ils aiment à se réunir en troupes immenses, et sont assez
nombreux en espèces, se tiennent ordinairement cachés sous les feuilles, soit dans les endroits secs,
soit au bord des eaux, et ne sortent de leur retraite que quand le soleil a réchauffé l'atmosphère.
On n'y forme qu’une seule sous-tribu, celle des Anruomvyzires, comprenant surtout les genres
des : Aricia, Macq.; Spilogaster, Macq.; Hydrophoria, Macq.; Ophyra, Rob.-Desv.; Limnophora,
Rob.-Desv.; Lispe, Latr.; Hylemyia, Rob.-Desv.; Drymeia, Meig.; Chortophila, Macq.; Atomogaster,
Macq.; Eriphia, Meig.;, Anthomyia, Meig.; Cænosia, Meig.; Pegomyiu, Rob.-Desv.
3e section, Scaromvzices, antennes à style d'un ou deux articles distincts; front large dans les
deux sexes; cuillerons rudimentaires ou pouvant manquer; ailes à première cellule postérieure ou-
verte. — Les Diptères de cette section, les Acalyptères de la plupart des auteurs, comprennent le
plus grand nombre de Musciens, et forment, comme le dit Macquart, un de ces groupes zoologiques
qui étonnent l'imagination par l’infinité des modifications dans les organes et dans les mœurs et
par la profusion avec laquelle les espèces ainsi que les individus sont répandus sur le globe. Plus
faibles que les Musciens dont nous venons de nous occuper, ils semblent fuir l'action du soleil,
se tiennent dans les bois humides, sur les plantes. Leur nourriture est très-variable, et se compose
soit de matières végétales vivantes, soit de matières organiques en décomposition.
4e sous-tribu, LoxocériTes, antennes inclinées, avec le troisième article plus long que le deuxième;
jambes intermédiaires terminées par deux petites pointes; abdomen linéaire. — Insectes vivant
dans les bois humides, courant sur le feuillage, et se rencontrant parfois sur les fleurs; comprenant
le genre Loxocera, Meig., dont Macquart a distingué celui des Platystyla.
2e sous-tribu, TéranocÉérires ou DorrcocÈères, antennes longues, horizontales, à deuxième ar-
ticle velu, aussi long que le troisième; abdomen long. Genres : Sepedon, Latr. (Baccha, Fabr.);
Thecomyia, Perty; Tetanocera, Duméril (Enthycera, Latr.). — Ils ont, en quelque sorte, une exis-
tence aquatique : ils vivent sur les roseaux, les joncs et les iris, y déposent leurs œufs, et se nourris-
sent des Pucerons qu'ils y trouvent : les larves dévorent les graines des plantes aquatiques.
3° sous-tribu, CorpyLurites, antennes à troisième article oblong, comprimé; abdomen allongé. —
Genres : Lissa, Meig.; Merodina, Macq.: Tetanura, Fallen, Chyliza, Fallen, Cordylura, Fallen;
Phrosia, Rob.-Desv. (Cleigastra, Macq.); Myopina, Rob.-Desv.— Vivant dans les bois et les prai-
ries humides; quelques-uns habitant les plantes littorales.
4° sous-tribu, ScaropnaGiTEs ou Scaromyzites, antennes à troisième article long, à style velu;
jambes intermédiaires épineuses à l'extrémité; abdomen ovalaire. — Genres : Scatophaga, Meïg.;
Dryops, Rob.-Desv. (Dryomyza, Macq.); Sapromyxa, Fall.; Toxonevra, Macq.; Sciomyza, Fall;
Lucina, Meig.; Helomyxa, Fall.; Blephariptera, Macq.; Heteromyza, Fall. Ces Insectes offrent des
genres de vie assez différents, et qui sont souvent les mêmes pour les larves que pour les Insectes
parfaits. Les Sciomyzes et le senre considérable des Hélomyzes vivent sur les champignons, et une
espèce de ce dernier groupe se nourrit aux dépens des truffes; les Scatophages comprennent des
espèces qui s'alimentent avec les matières excrémentielles des animaux supérieurs, et l’une des
principales est le Scatophage stercorarius, Lin., qui habite toute l'Europe.
b° sous-tribu, PsizomviTes, antennes assez courtes; jambes intermédiaires avec deux pointes à
l'extrémité; abdomen long. — Genres : Orygma, Meig.; Trigonometopus, Macq.; Eurina, Meig.;
Psilomyia, Latr.; Tetanops, Fall.; Pyrgota, Wied.; Otites, Latr. (Dictya, Fabr.); Platycephala,
Fall.; Doricera, Meig.— Les mœurs de ces Insectes sont peu connues : on sait qu'ils vivent sur les
À. 32
250 HISTOIRE NATURELLE.
plantes : un Psilomyie se plait sur les roses; les Otites, sur l’aubépine; les Platycéphales, sur les
Graminées, etc.
»
Ge sous-tribu, OrraziniTEs, antennes inclinées, à troisième article long, comprimé; jambes inter-
médiaires terminées par deux pointes; ailes sans pointes. Genres : Herina, Rob.-Desv.; Ortalis,
Fall.; Ceroxys, Macq.; Cleitamia, Macq.; Amethysa, Macq.; Notacanthina, Macq.; Ropalomera,
Wied.; Eurypalpus, Macq.; Platystoma, Latr.; Loxonevra, Macq. — Ces Muscides sont essentielle-
ment phytophages: une espèce du genre Ortalide, l'Ortalis cerasi, Linné, se nourrit, à l’état de
larve, de la pulpe des cerises.
7e sous-tribu, Téparirires, antennes inclinées, à troisième article long; jambes intermédiaires
à deux pointes à l'extrémité; ailes ayant une pointe au bord extérieur. — Genres : Dacus, Meig.;
Leptoxyda, Macq.; Batrocera, Guérin; Senopterina, Macq.; Pelatophora, Macq.; Urophora, Rob.-
Desv.; Terellia, Rob.-Desv.; Tephritis, Latr.; Acinia, Rob.-Desv.; Eusina, Rob.-Desv.; Ceratitis,
Mac-Leay. — Les deux groupes les plus nombreux sont ceux des Dacus, dont une espèce, D. oleæ,
Fabr., occasionne souvent des dégâts considérables aux oliviers dans le midi de la France, et des
Tépnernis, jolis Diptères dont les ailes transparentes sont ornées de bandes ou de taches brunes ou
noirâtres. Une espèce de Ceratitis vit dans la pulpe de l’Orange.
Fig. 241. — Sépédon sphégien. . Fig. 242 — Psilomyie du fumier.
8° sous-tribu, Sersires, antennes à troisième article oblong, avec le style glabre; jambes inter-
médiaires mutiques; abdomen souvent pédiculé. — Genres : Sespis, Fall.; Cheligaster, Macq.;
Nemopoda, Rob.-Desv.; Cephalia, Meig.; Michogaster, Macq.; Diopsis, Linné. — Les Sepsites vi-
vent, en général, sur les fumiers et dans les matières organiques en décomposition : c’est ainsi que
le Sepsis cynipsea, Linné, se trouve par myriades dans les excréments humains. Les Diopsides,
tous exotiques, sont remarquables par leurs yeux pédonculés.
9° sous-tribu, MicroPeziTes, antennes courtes, à style nu; corps filiforme; pattes longues, grêles:
— Genres : T'anypexa, Fall.; Calobata, Meig.; Tænioptera, Macq ; Micropezxa, Meig.; Nerius,
Fabr.; Longina, Wied.; Sepellia, Rob.-Desv. — Ces Diptères, à forme linéaire, vivent dans les bois
et se trouvent sur le tronc des arbres, sur les feuilles et sur les fleurs de Composées : les larves se
nourrissent du tissu végétal. :
10€ sous-tribu, Tayréopnortres, antennes courtes, à troisième article lenticulaire; palpes dilatés;
tête épaisse. Un seul genre, Thyreophora, Latr., aussi curieux par son organisation que par ses
mœurs; en effet, il semble fuir la lumière, ne vole que la nuit, éclairé par sa tête, qui est phospho-
rescente, et recherche les cadavres, et surtout les os desséchés : on en décrit trois espèces, l’une
qui préfère les os des Chiens (M. cynophila, Linné); une seconde (fureata, Latr.), les cadavres des
Chevaux et des Bœufs; et une troisième (anthropophaga, Rob.-Desv.) ceux de l'Homme.
41e sous-tribu, Uuinites, antennes courtes, insérées sous une saillie frontale, à troisième ar-
Fig. 1. — Similie ornée. Fig. 2. — Scathopse marqué
»
Fig. 3, — Sénobase anal.
Fig, 4 — Lisse lonocérine, Fig. 5. — Nomotelle panthérine. Fig. 6. — Diopse un peu lachetée.
A. DIVTÈRES. PL. 31.
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 251
ticle lenticulaire, et à style glabre, biarticulé; corps long. Genres : Actora, Meig.; Cœlopa,
Meig.; Gymnopoda, Macq.; Lipara, Meig.; Ulidia, Meig. — Ces Muscides sont peu connus sous le
point de vue de leurs habitudes, mais l’on sait que les Actores et les Gælopes vivent sur les bords de
la mer, se posent sur les fucus, et même sur l’écume des flots; se retirent sous les galets, et se nour-
rissent très-probablement du détritus des plantes et des animaux marins.
12° sous-tribu, LauxaniTEs, antennes à troisième article allongé, à style nu; abdomen déprimé.
Genres : Lauxanir, Latr.; Pacheyerina, Macq.; Lonchæa, Fall; Teremyia, Macq.; Celyphus,
Dalm. — Petits Diptères qui, chez nous, se trouvent dans les bois et dans les prairies; parmi les
Lauxanides, on remarque les Célyphes, des Indes orientales, dont l’écusson se dilate au point de
couvrir tout l'abdomen et les ailes.
13° sous-tribu, Noripaiires ou Hypromyzines, antennes à troisième article oblong, avec le style
garni de soies; abdomen oblong. Genres : Octhera, Latr.; Dryxo, Rob.-Desv.; Dichæta, Meig.; No-
tiphila, Fall.; Hydrellia, Rob.-Desv.; Discocerina, Macq.; Trimerina, Macq.; Discomyia, Meig.;
Cænia, Rob.-Desv. — Ces Insectes habitent généralement les lieux aquatiques; ils se tiennent sur
les plantes riveraines, y puisent des sucs nourriciers, y déposent leurs œufs, et les larves se déve-
loppent dans les tiges des végétaux.
1% sous-tribu, Piormirires, antennes à troisième article oblong ; jambes intermédiaires terminées
par deux pointes; abdomen oblong. Genres : Teichomyza, Macq.; Ephydra, Fall.; Scotimyza, Macq.;
Piophila, Kall.; Anisophysu, Macq.; Ochthiphila, Fall.; Campichæta, Macq.; Gitona, Meis.; Droso-
phila, Fall.; Stegana, Meig.; Diastata, Meig.; Leptopezina, Macq.; Opomyza, Fall.; Graphomysina,
Macq.; Camarota, Macq. — Les mœurs de ces Insectes varient beaucoup : les Teichomyzes vivent sur
les murs humides, et leurs larves minent le ciment; les Éphydres sont littorales; les Drosophiles
aiment les matières fermentées; les Piophiles sont avides de substances grasses, et leurs larves sont
connues sous le nom de Vers du fromage.
45° sous-tribu, SpxÉROcÉRITES, antennes à troisième article orbiculaire, à style long; pattes ro-
bustes; trompe épaisse. Genres : Ceroptera, Macq.; Sphærocera, Latr.; Borborus, Meig.; Crumomyia,
Macq.; Heteroptera, Macq.; Oliva, Rob.-besv.; Apterina, Macq. — Les Sphérocérites sont de pe-
tites Mouches qui fréquentent les lieux humides, ombragés, et surtout les fumiers et toutes les ma-
tières ‘en décomposition : elles en hâtent la dissolution en y puisant leur nourriture, tant à l'état
adulte que sous la forme de larves.
Fig. 243. — Oscinis cornue. Fig. 244. — Phora camariana Fig. 245. — Laphrie du Maroc
AGe sous-tribu, Oscnres ou Héréromyzines, antennes à troisième article lenticulaire, avec le
style nu; pattes simples. Genres : Diasema, Macq.; Aulacigaster, Macq.; Leptomyza, Macq.; Leu-
copis, Meig.; Mulichia, Meig.; Gymnopa, Fall.; Siphonella, Macq.; Homalura, Meig.; Heteronevra,
Fall.; Therina, Meig.; Meromyza, Meig.; Chlorops, Meig.; Oscinis, Latr.; Leiomyxa, Macq.; Agro-
myxa, Fall; Phyllomyxa, Fall.; Odontocera, Macq.; Phytomyza, Fall.; Asteia, Meig.; Elachiptera,
Macq.; Myrmemorpha, L. Dufour. — Ces Musciens sont généralement très-petits, mais infiniment
252 HISTOIRE NATURELLE.
nombreux; les œufs sont déposés sur les plantes herbacées dans les bois et dans les plaines, et leurs
larves sont souvent très-nuisibles aux végétaux. Une espèce de Curorops, jaunâtre, avec des bandes
noires (C. cereris, Meig.; C. lineata, Fabr.), est très-nuisible aux céréales, comme l'a surtout
montré M. Guérin-Méneville (Mém. Soc. roy. et cent. d'Agriculture, 1842). Une espèce très-com-
mune, du genre des Oscnis (0. Frit, Falb.), est parasite des grains d'orge, et l'on assure que c’est
la larve d’une autre espèce du même gfoupe qui cause la lèpre connue sous le nom d’Elephantiasis,
si fatale aux malheureux nègres de l'Amérique du Sud.
17e sous-tribu, Pnorires ou HypocÈres, antennes insérées près de l'épistome, à troisième article
globuleux, et à style long; pattes épineuses : cuisses postérieures dilatées. Genres : Phora, Latr.;
Gymnophora, Macq.; Conicera, Meig.— Petits Insectes fréquentant le feuillage, les fleurs, les vitres
des maisons, et s’y faisant remarquer par leur vivacité et la prestesse de leur course; les larves
sont peu connues et doivent se développer dans les détritus organiques : cependant M. Bouché si-
gnale une espèce qui est sortie d’une chenille de Sphinx du liseron.
HUITIÈME FAMILLE. — ORNITHOMYIENS.
Le genre Ornithomyia, de Meigen, pouvant être pris pour type de la dernière famille des Dir-
tères, cette dernière devra-prendre le nom d'Ornrnomvrexs, que lui a appliqué M. Émile Blanchard,
de préférence à celui de Purrpares, employé par Latreille ainsi que par la plupart des entomolo-
gistes, et qui a pour but de rappeler une particularité organique importante. Ces Insectes ont pour
caractères généraux : pas de trompe labiale; suçoir composé de deux soies insérées sur un pédicule
commun : deux sortes de palpes servant de gaîne au sucoir; antennes insérées aux extrémités laté-
rales et antérieures de la tête, d'un seul article distinct, ordinairement sans style, quelquefois peu
distinctes ou même nulles; ailes rudimentaires ou n'existant pas.
Les Ornithomyiens diffèrent très-notablement de tous les autres Diptères; la trompe, qui habituel-
lement sert de gaîne au sucoir, n'existe plus, et est remplacée dans ses fonctions par deux pièces
qui ont l’apparence de palpes : le sucoir, qui supplée à la bouche, assez analogue à ce qui a lieu
chez les Anoplures, est composé de deux soies écailleuses analogues à la lèvre supérieure et à a lan-
gue, et qui sont insérées sur un petit pédicule; l’article unique des antennes prend la forme de valves
ciliées; la bouche est excessivement modifiée; l'abdomen est recouvert d’une membrane suscep-
tible d’une assez grande dilatation, et non d’arceaux écailleux; les pattes sont robustes, terminées
par des ongles à deux ou trois lobes, servant à ces Insectes à se cramponner solidement; les ailes
. passent successivement des dimensions ordinaires à la forme étroite et échancrée, puis à l’état
rudimentaire, et enfin à l’absence complète : les nervures suivent aussi une gradation proportion-
née au développement des ailes; il n’y a plus de balanciers.
L'organisation intérieure est également très-extraordinaire, surtout en ce qui regarde les organes
reproducteurs des femelles. Elles ont une matrice très-extensible, dans laquelle se passe le premier
âge des petits; de l'ovaire, il se rend dans cette matrice de petits corps mous, oviformes, qui gros-
sissent graduellement, au point qu'ils finissent par occuper toute la capacité abdominale : ces
- sortes d'œufs semblent alors ne contenir qu'une espèce de bouillie, et ils sont doués de quelques
mouvements contractiles; quand le terme de la gestation est arrivé, ces corps sont expulsés de l'ab-
domen de la femelle : l'enveloppe se durcit, et l’on peut y trouver la nymphe toute formée, qui ne
tarde guère à passer à l’état adulte. C'est à cette particularité qu’est dû le nom de Pupipares que
portent ces Insectes, et qui montre que leurs petits se développent dans l'intérieur du corps, et
que les femelles ne pondent pas des œufs, mais des nymphes. C'est à Réaumur, à de Géer, et plus
récemment surtout à M. Léon Dufour, que l’on doit les observations les plus intéressantes sur l’ana-
tomie de ces Diptères.
Les mœurs des Ornithomyiens sont très-remarquables; ils vivent en parasites sur les Mammifères
et les Oiseaux, se cramponnant sur leur peau au moyen de leurs ongles fourchus, y courant avec
beaucoup d'agilité, même de côté, et se nourrissent du sang ou de la graisse des animaux.
ANNELÉS. — DIPTÈRES. 255
On n'en connait qu'un nombre assez restreint d'espèces, dont quelques-unes sont communes
dans toute l'Europe, et dont les autres se trouvent dans presque toutes les parties du monde; mais
il doit en exister beaucoup que l'on n'a pas été à même d'observer jusqu'ici. Quoique l'on n'ad-
mette dans cette famille qu’une dizaine de genres fondés par Linné, Meigen, Latreille, Wiedmann,
Leach, Kirby, Nitzsch, et caractérisés par la disposition des ailes, des antennes et des tarses, on y
forme cependant deux tribus, par suite de particularités importantes.
1% tribu, Onxrrnowxines ou Conracés : corps large, aplati; téte médiocre, souvent engagée dans
le corselet; suçoir dépassant les palpes, qui sont ordinairement comprimés, velus; antennes en
forme de tubercules ou de valves; yeux allongés; pas d'ocelles; corselet large, arrondi; abdomen
court, échancré en arrière; pattes épaisses; tarses à articles courts, excepté le cinquième, qui est
long : ongles très-crochus, à deux ou trois pointes; ailes à nervures médiastines, marginale et sous-
marginale souvent épaisses, colorées, une ou deux cellules basilaires, trois postérieures, pas
de discoïdale : dans quelques cas les ailes rudimentaires ou absentes. On place dans cette tribu
tous les Ornithomyiens, à l'exception du genre Nycteribia : Macquart y admet neuf genres.
STREBLA ; Wied., à ailes obtuses, croisées sur le corps; espèce unique, Hippobosca ves;ertilionis,
Fabr., qui se trouve communément sur les Chauves-Souris, dans l’Amérique méridionale. HIPPO-
BOSCA, Linné, à ailes obtuses; antennes à style apical, nu; tarses à crochets bilobés : les Hippo-
bosques vivent en parasites sur les Chevaux et quelquefois sur les Bœufs; le type, qui se rencontre
dans toute l’Europe, est la Moucue Araienée, Réaumur (H. equi, Linné). ORNITHOBYIA, Meig., à
antennes qglabres; tarses avec des crochets bidentés : une seule espèce (0. pallida), propre à l’Eu-
rope. OLFERSIA, Wied. (Feronia, Leach; Nirmomyia, Nitzsch).qui ont surtout les antennes ciliées,
et dont le type est l'O. ardea, Macq., prise sur un Héron en Sicile. ORNITHOMYIA, Latr., à ailes
obtuses; antennes velues; tarses à crochets tridentés : on en connaît quelques espèces (type, H. avi-
cularia, Linné), qui vivent sur plusieurs oiseaux, tels que les Perdrix, les Merles, les Pies, les
Rouge-gorges, les Mésanges, ete. OXYPTERUM, Kirby (Anapera, Meig.), se distinguant surtout des
Ornithomyies par ses ailes courtes, triangulaires, ayant pour type l'O. pallidum, qui vit sur les
Hirondelles. STENOPTERYX, Leach, à ailes très-étroites, arquées, pointues; tête portant des ocelles,
ce qui n'a pas lieu dans les autres Ornithomyiens, se trouvant en abondance dans les nids des Ili-
rondelles (H. hirundinis, Linné). LEPTONÆMA, à ailes très-rudimentaires, renfermant, en Europe,
le Pediculus cervi, Linné, abondant sur les Cerfs, Chevreuils, Daims, ete., et en Amérique, le L.
phyllostomatis, Nitzsch, trouvé sur une espèce de Phyllostome. MELOPIAGEUS, Latr. (Melophila,
Nitzsch), à ailes nr:lles, et ne renfermant que l'H. ovinus, Linné, qui vit sur les Moutons, dans l’é-
paisseur de la toison, et se nourrit de leur graisse.
2 tribu, Nycréripines ou Purminomvres, corps arrondi; tête très-petite, élevée verticalement; an-
tennes non distinctes; pattes écartées; cuisses et jambes épaisses : ces dernières avec de longs poils;
tarses longs, très-menus, à premier article très-allongé, arqué : les autr es très-courts; crochets ou
ongles simples; pas d'ailes ni de balanciers.
Cette tribu ne renferme que le seul genre NYCTERIBIA, Latr. (Phthiridium, Hermann), qui n’a
réellement de commun avec les autres Ornothomyiens que la conformation de la trompe, tandis qu’il
en diffère beaucoup par la structure de ses autres organes. Les Nyctéribies n’ont pas d'antennes dis-
tinctes, à moins que, comme le pense Latreille, elles ne soient remplacées par un petit tubercule
qu'on voit près des yeux. Comme on a observé une différence considérable dans la grandeur de plu-
sieurs individus d’une espèce de ce genre, on en a déduit qu’ils ne subissent peut-être pas de méta-
morphoses, et, si cette conjecture se confirmait, ce ne serait même plus des Diptères. On indique
deux espèces de Nycteribia : le type est le Pediculus vespertilionis, Linné, commun sur les Chauves-
Souris : la seconde espèce est la N. biarticulata, Saint-Farg. et Serv , également trouvée sur des
Chéiroptères.
254 HISTOIRE NATURELLE.
DIXIÈME ORDRE
APHANIPTÈRES.
L'ordre des Arnaniprera, Kirby, que de Géer désigne sous la dénomination de Sucgurs, et Latreille
sous celle de Svpxonarrera, ne renferme qu’un seul genre d’Insectes : celui des Puces ou Pulex,
Linné, qui peut être caractérisé ainsi d’une manière très-générale : suçoir de trois pièces, renfermé
entre deux lames articulées formant, par leur réunion, une trompe cylindrique; deux yeux lisses,
arrondis, petits, et non des yeux composés; pas d'ailes.
Ces singuliers Insectes, toujours de très-petite taille, subissent des métamorphoses complètes,
analogues à celles des Diptères, à côté desquels ils viennent naturellement prendre leur rang sérial.
Les femelles déposent leurs œufs dans la poussière, dans quelques endroits retirés où ils se trouvent
à l'abri, ou entre les poils même des animaux sur lesquels elles vivent. Les petites larves qui sortent
de ces œufs sont de forme allongée, cylindrique, privées de pattes, semblables à de petits Vers :
ces larves, qui ne peuvent se déplacer, sont nourries par leur mère, qui leur apporte leur nour-
riture, consistant.en parcelles de sang caillé; quand elles ont acquis tout leur développement, elles
se transforment en nymphes, qui ressemblent beaucoup déjà aux Insectes parfaits, et ces derniers
éclosent au bout de peu de jours. L’Insecte parfait, qui saute souvent avec une grande facilité, se
trouve sur l'Homme et les animaux, et se nourrit de sang, qu'il pompe facilement à l’aide de son
suçoir organisé pour percer la peau. On sait le mal que les Aphaniptères font, et l’on connaît les
procédés employés pour les détruire; d’après des expériences récentes, on a observé que de la Poudre
persane, placée sur des Chiens qui avaient beaucoup de Puces, a tué presque immédiatement
celles-ci. Avec de la propreté l'Homme se débarrasse aisément de cet ennemi, qui peut lui faire
beaucoup de mal. On n’ignore pas que les Puces, et surtout le Pulex irritans, sont susceptibles d’une
certaine éducation, et que plusieurs personnes ont su utiliser leurs mouvements pour leur faire faire
des sortes de tours d'adresse et pour les donner en spectacle. L'industrie des Puces travailleuses,
que l’on voit de temps en temps s'exercer dans nos grandes villes, n’est pas, au reste, de date ré-
cente : Mouffet et Geoffroy en parlent déjà dans leurs écrits.
Les mœurs et l'anatomie des Aphaniptères ont été étudiées par plusieurs naturalistes; nous cite-
rons seulement les observations de Leuwennoeck et de Ræsel, et un travail récent de Dugès, inséré
dans les Annales des Sciences naturelles.
PRE
Fig. 246. — Puce irritante.
°
Le seul genre qui entre dans cet ordre est celui des PUCES (Pulex, Linné), ayant pour carac-
tères : corps ovalaire, comprimé sur les côtés; tôte petite, comprimée, arrondie en dessus, tron-
quée et ciliée en dessous; müchotres réduites à de simples écailles, supportant un palpe de quatre
ANNELÉS. —- APHANIPTÈRES, ANOPLOURES. 255
articles; palpes labiaux formant les deux lames ou la gaîne du sucoir; mandibules sétiformes,
ainsi que la languette, et constituant le sucoir; antennes insérées dans une fossette en arrière des
yeux, très-petites, composées de quatre articles, dont le troisième plat, élurgi en palette et divisé
en lanières; pattes fortes, surtout celles de derrière, généralement propres au saut, épineuses, avec
les tarses de cinq urticles, dont le dernier terminé par deux longs crochets; abdomen très-gros. Les
espèces admises par tous les auteurs sont : 4° La Puce 1Riranre (Pulex irritans, Linné), qui, avec
un corps marron rougeûtre, n’a d'épines ni au chaperon ni au corselet, et vit du sang de l'Homme.
2° La Puce PÉNÉTRANTE ou Puce cuique (Pulex penetrans, Linné), d’un brun roussâtre clair, avec le
rostre très-grêle, de la longueur de la moitié du corps, très-abondante dans l'Amérique méridio-
nale, qui, d'abord très-petite, s’introduit sous l’épiderme de la peau de l'Homme, mais dont l’ab-
domen prend un accroissement énorme et devient aussi gros qu’un petit pois, et dont la présence
détermine souvent des ulcères difficiles à guérir. 3° La Puce pu Cuien (Pulex canis, Vugès), d'un
brun noirâtre, munie d’épines au chaperon et au corselet, qui vit sur les Chiens et les Chats, et
n'attaque l'Homme qu'accidentellement. Il est probable que beaucoup d'espèces de ce genre se
trouvent sur divers animaux, mais jusqu'ici on les a peu étudiées : on a cependant signalé les Pulex
felis, Bouché, musculi et vespertilionis, Dugès, et une trentaine d’autres. Curtis à établi le genre
Ceraropayzcus avec son C. hirundinis, et Haliday celui des Myceropuia avec le P. migra.
ONZIÈME ORDRE.
ANOPLOURES.
Latreille désigne sous Fa dénomination de Parasires l’ordre qui nous occupe, correspondant
pour Leach aux deux ordres particuliers : des Anorzures ou des Philoptères, et des Parasires ou des
Poux, et ayant pour caractères principaux ailes totalement nulles; abdomen dépourvu d’appen-
dices; bouche à peine saillante, composée de pièces tantôt propres à broyer, tantôt réunies pour
constituer un suçoir. Ce sont aussi les Érivzoïques de plusieurs auteurs.
Les AnopLoures, ou plutôt AnoPLuREs, désignés vulgairement sous les noms de Poux et de Ricins,
sont tous parasites : les uns sur l'Homme et les Mammifères, et les autres sur les Oiseaux, ainsi que
sur quelques Reptiles, comme cela a été constaté dans ces derniers temps. Ce sont des Insectes de petite
taille, et les femelles pondent des œufs généralement très-gros relativement à leur dimension ; il sort
de ces œufs des Insectes entièrement semblables, à la taille près, à leur mère, et chez eux iln y a que
des mues successives; l’état de larve et de nymphe n’est pas appréciable; et, par conséquent, il n’y a
pas de métamorphoses proprement dites. A l’âge de la reproduction, c’est-à-dire à l’état parfait, il
n’y a, dans aucun cas, de trace d'ailes, et les antennes sont très-courtes; mais, par plusieurs parti-
cularités de divers de leurs organes, et surtout chez plusieurs, par la disposition de leur suçoir, ces
Insectes ont d’assez grands rapports avec les derniers Diptères. Leurs pattes sont de grandeur mé-
diocre, robustes, monodactyles ou didactyles, et terminées par un crochet conique, recourbé, sus-
ceptible de se replier entre la jambe, et formant alors avec l'extrémité de cette dernière une pince
au moyen de laquelle ces Insectes se fixent aux corps sur lesquels ils se trouvent. La multiplication
de ces êtres est vraiment prodigieuse.
On a décrit et représenté une grande quantité de ces animaux, et, sans nul doute, leur nombre
augmentera considérablement lorsqu'on les étudiera avec plus de soin qu’on ne l’a fait jusqu'ici.
On distingue une dizaine de genres. Cinq auteurs s’en sont spécialement occupés; ce sont Leach,
Nitzsch (Germar. Mag., t. TT), Burmeister (Handbuch der Entomologie, t. M), Denny (Anopluror.
Britanniæ Monogr.), qui a donné le travail le plus complet que nous ayons sur ces animaux, et
250 HISTOIRE NATURELLE.
M. P. Gervais (t. IE, des Insectes aptères des Suites à Buffon, de l'éditeur Roret). Les premiers au-
‘ teurs qui en aient parlé sont Rédi et de Géer; pour Fabricius les Ricins étaient des Ulonates et les
Pediculus des Rhyngotes. 2.
On doit former deux tribus dans cet ordre, qui correspondent aux Poux et aux Ricins.
4" tribu, Pénicuzrens. Les Insectes de cette division sont surtout caractérisés par leur bouche
constituant un suçoir propre à sucer et à pénétrer l’épiderme, et, par conséquent, se nourrissent ex-
clusivement de sang. Ce sont les Parasites de Leach, et les Poux proprement dits, qui se trouvent
sur l'Homme et les Mammifères. Ces Insectes pullulent avec une rapidité effrayante chez les per-
sonnes qui négligent les soins de la propreté; ils sont ovipares, et leurs œufs, qui sont connus sous
le nom de lentes, sont déposés chez l'Homme sur les cheveux, dans les endroits du corps garnis de
poils et sur les vêtements; les petits en sortent au bout de cinq à six jours, et, après plusieurs mues,
au bout d'environ dix-huit jours ils sont en état de se reproduire. Ils multiplient beaucoup; les
expériences ont prouvé qu’en six jours un Pou peut produire cinquante œufs, et il en reste encore
dans le ventre. On calcule que deux femelles peuvent avoir dix-huit mille petits en deux mois.
Lorsque certaines causes qui nous sont inconnues favorisent extraordinairement leur multiplica-
tion, ces animaux donnent'lieu à l’une des maladies les plus horribles dont l'Homme puisse être
atteint, la phthiriasis. La propreté la plus grande ne suffit plus alors pour les expulser, et le malade
succombe après de longues douleurs. La teigne des enfants est presque constamment accompagnée
d’une multiplication à peu près semblable de ces Insectes. .
On y distingue trois genres principaux :
PHTHTRIUS, Leach : pattes antérieures et intermédiaires propres à la marche : postérieures con-
formées pour s'accrocher; thorax très-court, se confondant presque avec l'abdomen, qui s'élargit
subitement. Ne comprenant qu'une seule espèce, le P. inguinalis, Rédi, qui vit dans le poil du pubis,
des aisselles et des sourcils de l'Homme, et très-rarement ailleurs, dont la piqûre est beaucoup plus
vive que celle du Pou ordinaire, et qui s'attache plus fortement à la peau.
Fig. 247. — Pou des vêtements. Fi
CE)
. 248. -— Phlirie inguinale. Fig. 249. — Philoptère
. de l’Albatros.
PEDICULUS, Linné, toutes les pattes conformées pour s'accrocher; abdomen large, plat, de sept
segments. On en connaît une dizaine d'espèces, parmi lesquelles deux se trouvent sur l'Ilomme. Ce
sont : 4° le Pou orninatre, Geoffroy, ou Pou HUMAIN DE LA TÊTE, de Géer, Pediculus humanus capitis,
Linné; P. cervicalis, Leach; longueur 0,002 à 0,003, ovale oblong, cendré grisâtre, avec une
rangée de taches obscures, petites, de chaque côté du corps; se rencontre sur la tête de l'Homme, et
particulièrement des enfants; 2° Pov pes véremenrs ou Pou nu corps, P. vestimenti, Nitssch, de
ANNEÈLÉS. — ANOPLOURES. 257
moitié plus petit que le précédent, oblong, uniformément d'un blanc sale; se trouve sur le corps
de l'Homme et dans ses vêtements; 3° Pou pes macanes (P. tabescentium, Burm.), de la taille du
précédent, entièrement jaunâtre pâle; c'est l'espèce qui se produit en si grand nombre dans cer-
taines maladies de l'Homme, et qui cause l’affreuse maladie connue sous le nom de phthiriasis :
parfois ce Pou se développe avec une telle rapidité, que le vulgaire ne l'explique pas autrement que
par génération spontanée; le cadavre de certains individus qui, avant leur mort, n’avaient aucun
Pou, se trouve dans quelques cas couvert d'une innombrable quantité de ces parasites. Chez les ani-
maux, on connaît plusieurs espèces de ce groupe : tels sont le Pediculus bovis, Linné, du Bœuf;
eurysternus, Nitzsch, du Veau; phocæ, Lucas, du Phoque, etc. M. P. Gervais indique sous le nom
générique de Penecrnus le Pediculus eurygaster, Burm., parasite des Singes, dans lequel l'abdomen,
ovalaire et élargi, est de neuf segments.
HŒMATOPINUS, Leach, ne se distinguant guère des Pediculus que par son abdomen déprimé, de
huit ou neuf segments. Des espèces nombreuses et petites, parasites de divers Mammifères, comme
V'H. suis, Linné, qui se trouve sur le Cochon; l'H. piliferus, Denny, propre au Chien, etc.
2e tribu, Purcoprériexs. Ces parasites sont surtout caractérisés en ce que leu r bouche est munie de
mandibules très-distinctes, et par cette organisation même ils ne peuvent sucer le sang des animaux
dont ils sont parasites, mais vivent aux dépens des Mammifères et des Oiseaux, rongeant l’épiderme,
ainsi que les poils des premiers et les parties les plus délicates des plumes des seconds. Ce sont les
Anoplures proprement dits de Leach et de quelques auteurs, et de Géer les rangeait dans son genre
Ricin. On en connait de nombreuses espèces, et toutes sans exception sont épizoïques; l'Homme seul
en est exempt; mais les Mammifères et les Oiseaux en nourrissent au contraire habituellement plu-
sieurs espèces; et c’est ainsi que l’on en indique qui en ont jusqu'à cinq. Longtemps négligés, ces
nsectes sont aujourd'hui assez bien connus, grâce surtout aux travaux de MM. Nitzsch et Denny :
ce dernier principalement a publié un excellent ouvrage sur les espèces propres à l'Angleterre.
Nous n’indiquerons que les quatre genres principaux, tous créés par M. Nitzsch, aux dépens des
Pediculus, de Linné, Ricinus, de Géer, et Nirmus, Hermann; ce sont ceux des :
PHILOPTERUS : antennes filiformes, de cinq articles; palpes maæillaires non distincts; tarses
munis de deux crochets. Ce genre, nombreux en espèces, et subdivisé en quatre sous-genres : Doco_
phorus, Nirmus, Lipeurus et Goniodes, auxquels on peut joindre les Goniocotes et Ornithobius, de
Denny, renferme près de deux cents espèces surtout parasites des Oiseaux : telles que les P. ocel-
latus, Scopoli, ou corvicis, Fabr., parasite du Corbeau; squalidus, Nitzsch, se trouve sur le Canard;
falcicornis, Nitzsch, se rencontre sur le Paon, etc.
TRICHODECTES, qui diffère principalement du groupe précédent par ses antennes de trois ar-
ticles et ses tarses munis d'un seul crochet, et renferme des parasites de divers Mammifères,
comme le 1. equi, Denny, du Cheval; crassus, Nitzsch, du Blaireau; sphærocephalus, Nitzsch, du
Mouton, etc.
LIOTHEUM : antennes renflées en massue; palpes maæillaires distincts; tarses munis de deux
crochets. Ce genre, qui comprend beaucoup d’espèces parasites des animaux supérieurs, prinicipa-
lement des Oiseaux, a été partagé en plusieurs sous-genres principaux : Colpocephalum, Menopon,
Trinoton, Eureum, LϾmobothrion, Physostomma, N., et Nitzschia, D.; commetype nous nommc-
rons le L. dolichocephalum, Scopoli, qui se trouve sur le Loriot, etc.
GIROPUS, se distinguant du groupe précédent surtout par ses tarses munis d'un seul crochet,
ayant pour type le G. gracilis, Nitzsch, se rencontrant fréquemment sur le Cochon d'Inde.
Quant au singulier Insecte que Kirby appelait Pediculus melittæ, et dont M. L. Dufour a fait son
genre Triançuux (Triangulinus Andrenetarum), il est démontré aujourd’hui, principalement par
les observations de MM. Westwood, labre, etc., que c’est simplement une larve de Coléoptère du
genre Meloe.
A. 39
258 HISTOIRE NATURELLE.
DOUZIÈME QRURE.
THYSANOURES.
Latreille indique sous le nom de Thysanoures, qui devrait plutôt s'écrire Thysanures, et M. L:-
porte de Castelnau sous le celui de Monomorphes, un ordre d'insectes, le dernier que nous ayons à
étudier, ayant pour types les Podures et les Lépismes, et présentant pour caractères distinetifs prin-
cipaux : ailes totalement nulles; bouche composée de pièces libres et membraneuses; abdomen pourvu
d'appendices servant plus ou moins, au moyen de sauts successifs, à la locomotion; pas de métamor-
phoses. °
Les Thysanoures varient beaucoup sous le rapport de la forme générale et de la composition de
chaque organe en particulier : chez les uns le corps est allongé, pyriforme, convexe en dessus, et se
compose, non compris la tête, de treize segments, dont trois pour l2 thorax et dix pour l'abdomen.
Les parties de la bouche sont les mêmes que dans les Insectes broyeurs : c'est-à-dire coraposées d'un
labre, de mandibules, de mâchoires, d’une lèvre inférieure et de palpes. Les antennes sont longues,
sétacées, composées d’un grand nombre de petits articles. Les yeux, plus ou moins grands, sont
formés par la réunion d’un nombre variable de petits yeux lisses. Le thorax offre trois anneaux dis-
tincts. L'abdomen est terminé, dans les deux sexes, par trois filets servant à sauter, et par une
tariére dans les femelles. Les pattes sont grêles, à hanches trés-grandes, et les quatre postérieures
de celles-ci sont munies d’appendices lamelliformes pareils à ceux du ventre. Le corps est en entier
couvert d’écailles qui s’enlèvent au moindre contact. Chez les autres le corps est simplement poilu
et garni de petites écailles peu serrées et parfois glabres; sa forme est allongée sans être pyriforme,
ct assez souvent globuleuse; l’abdomen offre au plus cinq segments et se confond, dans quelques
cas, avec le corselet, de manière à ne pouvoir en être distingué : son extrémité, dépourvue de filets,
porte en dessous un appendice tantôt fourchu, tantôt simple, qui prend naissance sous l'avant-der-
nier arceau ventral, et se loge dans une gouttière au repos. En se débandant comme un ressort, cet
appendice envoie l'animal en l'air à une plus ou moins grande hauteur; la bouche ne présente plus
que des rudiments de mandibules et de mächoires; les antennes ne sont formées que de quatre ar-
ticles, dont le dernier paraît partagé en un grand nombre de petites articulations; enfin les yeux
sont également composés par la réunion de petits yeux lisses, mais seulement au nombre de six pour
chacun. Les Thysanoures, par l'absence de métamorphoses et par les appendices latéraux dont les
côtés de l'abdomen sont garnis dans quelques-uns d’entre eux, semblent faire le passage des véri-
tables Insectes aux Myriapodes, et pourraient peut-être composer une classe distincte. Tous sont
aptères; néanmoins ils sont très-agiles et échappent facilement, soit par une prompte fuite, soit en
sautant, à la main qui veut les saisir. Ils sont de taille très-minime; ils vivent presque exclusivement
dansles endroits humides; les uns dans l’intérieur des maisons, les autres sous les pierres, sur le pois
pourri, dans le fumier, les matières végétales et animales en décomposition, les feuilles, l'eau et
même la neige. On n’a guère observé que les espèces européennes, quoique cependant M. Say ait
fait connaître quelques espèces américaines, et la plupart d’entre elles n’ont acquis toute leur gran-
deur qu’à la fin de l’été ou même en automne.
Dans ces dernières années les Thysanoures ont été l’objet de nombreux travaux, qui sont venus
compléter les recherches des premiers naturalistes, tels que Fabricius, Leach, et surtout Latreille.
Ces travaux sont dus à MM. Templeton (Transact. of entomology Society, t. 1), Burmeister (Handb.
der Entomologie, t. W), Nicolet (Recherches pour servir à l'histoire naturelle des Podurelles, dans
ta Bibliothèque de Genève), l'abbé Bourdet (Mémoire sur les Podurelles, Mém. de la Soc. roy. et
, ANNELÉS. — TIIYSANOURES. . 259
centr. d'agriculture du Nord et Ann. Soc. ent. de France), M. Lucas (Observations sur les travaux
qui, depuis Latreille, ont été publiés sur l’ordre des Tuvsanura, Ann. Soc. ent. de France, 1843),
P. Gervais (Insectes aptères, des Suites à Buffon de l'éditeur Roret), ete.; on pourrait, en outre,
citer des observations de M. Guérin-Méneville sur les Machilis, de M. Waga sur un nouvel Acho-
rates trouvé à Varsovie, etc. Nous renvoyons à ces importants travaux et nous ne pourrons en pré-
senter qu'une très-courte analyse.
On forme dans les Thysanoures deux familles distinctes, qui correspondent aux genres linnéens
des Podura et Lepisma.
PREMIÈRE FAMILLE. — PODURIENS.
Les Insectes de cette famille sont principalement caractérisés par leurs antennes filiformes, plus
courtes que le corps, de quatre ou cinq articles; leurs yeux conglomérés, composés de six petits yeux
lisses; les parties de la bouche très-rudimentaires et les palpes très-courts, sétigères; l'abdomen dé-
pourvu d'appendices latéraux, ete. Ils sont de petite taille, mous, couverts d'écailles peu serrées, et
quelquefois paraissant glabres; ils forment assez souvent, par l'immense quantité de leurs individus,
ces espaces noirâtres semblables à de la poudre à canon fine qu'on observe sur les eaux stagnantes,
les plantes aquatiques, les trones d'arbres, les chemins et parfois même la neige; d'autres fréquen-
tent de préférence les feuilles de diverses plantes.
Fig, 250. — Achorute Fig. 251. — Podure Fig. 2592 — Isotome Fig. 253. — Smynthure
des mousses. ploribée, de Gervais. de Lussère.
Les genres actuellement admis dans cette famille, presque tous assez nombreux en espèces, sont
ceux des : Tomocerus, Nicolet (Macrotoma, Bourl.); Lepidocyrtus, Bourl.; Orchesella, Templ. (He-
terotoma, Isotoma et Ætheocerus, Bourl ); Podura, Linné; Isotoma, Bourl.; Desoria, Nicol.;
Cyphoderus, Nicol.; Degeeria, Nicol.; Achorutes, Templ. (Hypogastrura, Bourl.); Anoura, Gerv.;
Lipura, Burm. (Anurophorus, Nicol.; Adicranus, Bourl.); tous ces genres formant le groupe des
Popurines, ayant pour caractères : des antennes à articles égaux; Smynthurus, Latr., et Dicyr-
toma, Bourl., qui constituent le groupe des Suynraurioes, à antennes ayant les articles terminaux
très-petits.
Parmi ces diverses divisions génériques, nous reviendrons seulement sur les : 4° ORCHESELLES, à
antennes de six articles, comprenant une vingtaine d'espèces européennes, dont le type est la Po-
dura rufescens, Linné, commune partout, et dont on a voulu faire plusieurs espèces particulières;
2° Povures, à antennes de quatre articles; appendices sallatoires très-développés : groupe typique
renfermant anciennement toutes les espèces de l'ordre. et n'en comprenant plus aujourd'hui qu’une
vingtaine; types: P. arborea, Linné, commune sur les feuilles; viridis, Bourl., abondante par-
tout, etc.; 3° Acorures, antennes de quatre articles, plus courtes que dans les Podures; queue
absente; A. dubius, Templ , habite les eaux; maritimus, Guérin, trouvée sur la plage à l’embou-
260 HISTOIRE NATURELLE.
chure d’une rivière, sur les galets couverts par la mer, 4° Lipures, à antennes de quatre articles;
appendices saltatoires nuls ou très-rudimentaires : L. fimetaria, Fabr., dans les fumiers; ambulans,
Bourl., sur la terre, ete.; 5° Suynraures, à corps globuleut; antennes sétiformes : une douzaine
d'espèces; types : S. signatus, Fabr., trouvé sur les pierres humides; fuscus, Lacordaire, abondant
au printemps dans nos environs sur les végétaux; 6° Desontes, dont le type, D. nivalis, Nicol.,
a été souvent pris sur la neige dans les Alpes, etc.
DEUXIÈME FAMILLE. — LÉPISMIENS.
Les Thysanoures de cette famille ont surtout pour caractères : antennes sétacées, multiarticulées;
yeux conglomérés, composés d’un nombre variable de petits yeux; parties buccales plus complètes
que celles des Poduriens; palpes maxillaires longs : labiaux plus courts, quoique encore allongés;
abdomen pourvu de filets terminaux. Chez ces Insectes le corps est en ellipse allongée ou ovalaire,
avec le thorax gibbeux; l'abdomen est allongé, rétréci postérieurement, composé de dix segments,
tandis qu'il n yen a que cinq dans les Poduriens, portant en dessous neuf paires d’appendices
lamelliformes attachés aux arceaux par un pédicule articulé, et dont les derniers sont les plus
longs. Femelles ayant une tarière comprimée et formée de deux valves conniventes. Les Lépismiens,
qui portent le nom de Lépismènes, Latreille, et que l’on appelle vulgairement Poissons argentés,
sont de petite taille, entièrement couverts d’écailles brillantes; ils se tiennent cachés dans les lieux
humides où la lumière du jour ne pénètre pas.
On n’en décrit guère qu’une trentaine d’espèces, presque toutes observées en Europe, mais dont
quelques-unes, particulières aux pays étrangers, ont presque toujours été trouvées dans les caisses
contenant des marchandises ou d'autres objets; tel est, entre autres, le Lepisma Petitii, Guérin, qui
provient du Sénégal.
Fig. 254. — Lépisme saccharine. Fig. 255. — Machile fasciolé.
Les genres véritablement naturels des Lépismiens ne sont qu’au nombre de trois, que l'on pour-
rait même réduire à deux. Ce sont les : MACHILIS, Latr., à abdomen terminé par cinq filets; yeux
grands, contigus; dont l’organisation a été étudiée avec soin par Latreille et par M. Guérin-Méne-
ville; les jeunes apparaissent au printemps, et les individus ne sont adultes qu'en automne; on n'en
LTITTT
mn) j ï me 1
Fig. 1. — Jule lucifuge.
Fig. 3. — Polydesme (Frontaria)
de Virginie.
Fig. 2. — Polyxène Lagure.
Fig. 4. — Scutigère arénoïde.
Fig. 5. — Gloméris + Fig. 6. — Le même. Fig. 7. — Blaniule l'ig. 8. — Gloméris
marginé (En boule.) à gouttelettes. aplati.
Fig. 9. — Géophile de Walckenaër. (Très-grossi.)
MYRIAPODES. pr
Q+
ANNELÉS. — THYSANOURES, MYRIAPODES. 261
indique que peu d'espèces, telles que les M. cylindrica, Lacordaire, très-commun auprès de Paris
dans les lieux humides; brevicornis, Latr., prise à Fontainebleau sous les pierres; variubilis, Say,
abondant dans l'Amérique du Nord; PETROBIUS, Leach; différant surtout du groupe précédent par
ses antennes plus longues que le corps, et ayant pour type le Machilis maritimus, Latr., qui habite sur
les rochers qui bordent le rivage de l'Océan d'Europe; et LEPISMA, Linné, à abdomen terminé par
trois filets; à yeux petits, écartés, ete.; les Lépismes sont des petits animaux qu'Aldrovande et Geof-
froy avaient nommés Forbicines, et que l’on a comparés à de petits Poissons, en raison de la ma-
nière dont ils se glissent en courant et des couleurs brillantes de quelques espèces; ils se cachent
ordinairement dans les boiseries, les fentes des châssis qu’on n’ouvre que rarement, ou sous les
planches un peu humides, etc.; d’autres se tiennent sous les pierres; ils courent très-vite, et on ne
peut guère les saisir sans enlever les écailles qui couvrent leur corps; la mollesse des organes de la
mastication montre qu’ils ne peuvent ronger des substances dures : cependant Linné et Fabricius
ont dit que l'espèce commune se nourrit de sucre et de bois pourri : suivant le premier, elle ronge
aussi les vêtements de laine; Geoffroy, de son côté, pense qu’elle mange des individus du Psoque
pulsateur, connu sous le nom de Pou du bois. Cette espèce est la Lepisma saccharum, Linné, com-
mune en France, et originaire de l'Amérique suivant Latreille; la L. vittata, Fabr., habite les mai-
sons comme la précédente. D'autres espèces, communes dans les environs de Paris, sont les L.
annuliseta et subuittata, Guérin; aurea, Dufour, plus propre au midi de la France. Parmi les es-
pèces étrangères, plusieurs ont été recueillies en Égypte par Savigny, et décrites par M. II. Lucas.
DEUXIÈME CLASSE.
MYRIAPODES.
Les Articulés qui constituent la classe des Myriapodes sont des animaux terrestres à segments
nombreux, n'offrant pas de distinction apparente entre le thorax et l'abdomen; ayant un ganglion
nerveux, et le plus souvent une paire de pattes articulées pour chaque anneau du corps : d'où il
résulte que la quantité des paires de pattes, au moins au nombre de huit, est souvent de plusieurs
centaines; le système nerveux ganglionnaire est inférieur au canal intestinal, et placé sur la ligne
médiane; il n'y a jamais d'ailes ni de véritables métamorphoses; la tête est pourvue de deux an-
ennes; la bouche composée de plusieurs paires d'appendices; les deux ouvertures du canal intes-
tinal terminales sont opposées; les yeux sont stemmatiformes, composés ou nuls; la circulation est
incomplète; la respiration trachéenne, et la génération bisexuée, dioique, ovipare ou ovovivipare.
Le nom de Myriapodes (tiré des deux mots grecs pupuæ, dix mille; roÿe, roû6s, pied), appliqué par
Latreille à ces animaux, est la reproduction de leur dénominations vulgaires de Millepieds et de
Centipèdes. Cette classe, dont on a fait pendant longtemps un simple ordre de celle des Insectes,
comprend beaucoup d’espèces que l'on a réparties dans un nombre assez restreint de genres, dont
les principaux sont ceux des Jules, Scolopendres et Gloméris.
Les Myriapodes diffèrent très-notablement des quatre autres classes placées dans le même sous-
embranchement des Articulés Chez les Insectes, le corps, qui ne compte jamais au delà de treize
segments, est divisé en trois régions: la tête, le corselet, portant trois paires de pattes et souvent des
269 [HISTOIRE NATURELLE.
ailes, et l'abdomen; chez les Arachnides, on ne trouve plus, en général, que deux régions au corps:
l’une, le céphalothorax, formée par la réunion de la tête avec le corselet et muni de quatre paires de
pattes; l’autre, de l’abdomen, rarement formé d’anneaux distincts; dans les Crustacés, la constance
qui existe chez les deux classes précédentes, sous le rapport des divisions du corps et du nombre
des membres, fait place à la plus grande irrégularité : le nombre des segments du corps n'a plus
rien de fixe, et tous sont susceptibles de porter des appendices ou membres, sujets à leur tour à une
multitude de modifications, concernant leur forme, leur nombre et leur usage; chez les Cirrhipèdes,
au moins à leur état adulte, les segments du corps ne sont plus disposés de manière à former des
régions bien distinctes, et les pattes ont disparu; enfin, chez les Myriapodes, comme nous l’avons
dit, le corps est composé d'une suite de segments dont le nombre varie suivant les espèces, et même
selon l’âge dans la même espèce, segments tous semblables, sauf le premier, qui constitue la tête,
et le dernier, plus développé que les autres, et chacun est pourvu d’une ou deux paires de pattes.
Il résulte de ce que nous venons de dire que les Myriapodes sont plus voisins des Crustacés que des
Insectes et des Arachnides : aussi, dans ces derniers temps, quelques naturalistes, dont l'autorité
est d’un grand poids, tels qu'Erichson et M. Siebold, n'ont-ils fait aucune difficulté de les placer
dans la première de ces classes; mais, d’un autre côté, comme ils se rapprochent plus des Insectes
que des Crustacés par leur structure intérieure, on est en droit de conclure de cette conformité de
caractères qu’ils doivent former une classe à part, intermédiaire aux uns et aux autres.
L'anatomie des Myriapodes est aujourd’hui assez avancée, et peut être résumée en peu de mots.
Le canal intestinal est très-simple, et souvent, chez les lules principalement et comme chez les larves
des Insectes, il parcourt tout le corps en ligne droite sans former de circonvolutions : toutefois, chez
les Gloméris et les Zéphronies, le canal digestif est au moins double de la longueur du corps. L'æ-
sophage, l'estomac, qui donne insertion en arrière aux vaisseaux biliaires, l'intestin grêle, ete.,
offre quelques particularités différencielles suivant les divers groupes. Le foie présente beaucoup
d'analogie avec celui des Insectes. La respiration a lieu à l’aide de trachées, dont les stigmates s’ou-
vrent soit sur les côtés, comme dans les Chilopodes, soit à la partie inférieure du corps, comme
dans les Chilognathes. Le cœur consiste en un vaisseau dorsal analogue à celui des Insectes, mais
qui, ainsi que l’a fait connaître M. Newport, est accompagné d’un système assez compliqué de vais-
seaux artériels qui manquent dans cette dernière classe. Le système nerveux central consiste en
une chaîne abdominale comptant autant de ganglions qu’il y a de segments. Les organes de la re-
production aboutissent, chez les Chilopodes, à l'extrémité du corps, et, chez les Chilognathes, au
niveau du troisième ou du huitième segment antérieur, et en dessous, ce qui rapproche ces Myria-
podes des Arachnides et des Crustacés, qui ont une disposition semblable : ces organes offrent, en
outre, des particularités remarquables suivant les sexes ou même les groupes. Les Myriapodes ont
constamment, comme les Insectes, les sexes séparés sur des individus mâles et femelles; ils s’accou-
plent et ils paraissent être en général ovipares. L’oviparité a été constatée pour les Gloméris, Poly-
desmes, lules et Polyzonies d'Europe, et pour quelques-unes des espèces étrangères de ces groupes;
mais on a démontré que les Scolopendres sont ovovivipares.
Le corps, ressemblant toujours à celui des Néréides ou des chenilles, est presque constamment
allongé, vermiforme, cylindrique ou déprimé; ce n’est qu’exceptionnellement qu'il est ovale ou
oblong. La tête est en général bien distincte. Les antennes sont assez courtes, moniliformes, com-
posées de sept articles dans les Chilopodes, et sétiformes, formées d'un plus grand nombre d'articles
dans les Chilognathes. Les yeux semblent avoir la structure des yeux simples des Insectes, quoi-
qu'ils soient en général groupés en nombre plus ou moins considérable, et dé manière à simuler
des yeux composés : chez les Seutigères, les yeux sont réellement composés, et dans quelques
groupes ces organes manquent tout à fait. Les pattes, habituellement, excepté chez les Seutigères,
composées de six articulations et d’un ongle terminal simple, supportent le corps et ne sont généra-
lement pas très-allongées; néanmoins elles sont très-longues chez les Scutigères. Cette brièveté habi-
tuelle des organes locomoteurs, réunie à la longueur et à la flexibilité du corps, fait que la marche
de ces animaux ressemble assez à la reptation des Serpents, surtout dans les grandes espèces, car
cela n'a pas lieu dans les petites, qui peuvent marcher avec beaucoup plus de facilité. Il est quel-
ques-uns d’entre eux, qui, au repos ou lorsque certain danger les effraye. contractent leur corps
en boule, à la manière des Cloportes; telles sont les Gloméris; d’autres, les Iules, s’enroulent en
ANNELÉS. — MYRIAPODES. 265
spirale dans un même plan. La plupart, quand on les inquiète, exhalent une odeur désagréable
assez analogue à celle du chlore, et qui est produite par un fluide volatil qu’ils sécrètent par des
orifices situés sur les côtés du corps. Une autre sécrétion, plus remarquable encore, est celle d’un
fluide vénéneux, ce qui a lieu chez diverses Scolopendres et chez quelques autres espèces; les organes
qui servent d'issue à cette sécrétion consistent en deux forts crochets très aigus, percés d’un orifice
à leur extrémité, et qui accompagnent la bouche en dessous. Cette matière vénéneuse qu'ils peuvent
produire fait que leurs piqûres déterminent parfois chez l'Homme des symptômes très-douloureux,
quoique non mortels : aussi les grandes espèces de Scolopendra sont-elles très-redoutées dans les
pays où elles existent; mais ce n’est guère que dans les pays chauds que cela a lieu, et dans nos
contrées ces animaux ne sont pas dangereux. Quelques espèces, comme les Géophiles, sont phospho-
rescentes, ce que l’on peut surtout observer dans l’obscurité.
S'il n'y a pas de métamorphoses, même incomplètes, chez les Myriapodes, le mode d'après lequel
s'opère leur accroissement présente des particularités curieuses qui n’ont guère été observées que
dans ces derniers temps, et qui doivent être indiquées. Le mode d’accroissement qui leur est propre,
consiste en ce qu'au sortir de l'œuf ils ne possèdent qu’une faible partie des segments et des pattes
qu'ils auront plus tard; telle espèce qui, adulte, doit avoir soixante paires de ces derniers organes
et au delà, n'en présente que trois ou quatre, quelquefois même aucun à cette époque de leur vie :
ce n’est que peu de temps après, et à mesure qu'il se forme de nouveaux segments que les pattes ap-
paraissent. Un changement analogue a lieu pour lesantennes, qui acquièrent quelques articles de plus
qu'elles n’en avaient primitivement. Ce mode d'accroissement présente une analogie assez grande
avec ce qui a lieu chez certaines Annélides et chez quelques Vers, et ne peut être comparé aux mé-
tamorphoses incomplètes que subissent beaucoup d’Insectes. Du reste, le développement de ces ani-
maux, étudié d’abord par de Géer, et revu dans ces derniers temps par MM. Savi et P. Gervais, n’a
été observé que dans quelques espèces, et a besoin d’être revu dans un plus grand nombre. Une
particularité, qui peut jusqu’à un certain point se rattacher aux faits qui précèdent, est relative à
la vitalité des Myriapodes et à la force qu’ils ont de résister à des mutilations. Ces Articulés, princi-
palement les Scolopendres, peuvent continuer de vivre après avoir été séparés en plusieurs parties,
et l’on a remarqué qu'un morceau de l’un d'eux a continué encore à se mouvoir pendant quinze
jours. Les lules toutefois sont beaucoup moins vivaces que les autres.
Les Myriapodes fuient pour la plupart la lumière; un certain nombre d’entre eux, les Polydesmes,
les Blaniules, les Cryptops, ete., sont même tout à fait dépourvus d’yeux, et les autres n'ont que des
yeux simples ou stemmates : organes peu propres à une vision bien nette. Presque tous ontégalement
besoin d'humidité pour vivre : aussi les rencontre-t-on dans les bois, dans les plaines, dans les lieux
cultivés, presque exclusivement sous les mousses, sous les écorces et au pied des arbres, sous les
pierres, au bord des ruisseaux, dans les endroits frais et abseurs des habitations et autres lieux
analogues : diverses espèces habitent l’intérieur même de la terre; d’autres se trouvent dans les
fruits, etc. Ils se nourrissent de substances assez variées : c’est ainsi que les Scolopendres sont car-
nassières, tandis que les lules, les Gloméris, les Géophiles, ete., vivent particulièrement de sub-
stances végétales. Ces animaux se trouvent dans toutes les parties du monde; et les régions chaudes,
telles que l'Afrique, l'Inde et ses îles, l'Amérique intertropicale, ete., fournissent des espèces fort
diverses, et dont la taille l'emporte de beaucoup sur celle des espèces européennes : c’est ainsi que
l'on connaît des Myriapodes exotiques qui ont plus de 0%,30 de longueur, tandis que ceux de nos
climats n’ont guère plus de 0,02 à 0,03 de long, et souvent une taille beaucoup moindre. Du
reste, l'Europe, et même la France, sont très-riches en espèces de cette classe, et l’on y retrouve
des types de la plupart des genres.
Le nombre des espèces connues est peu considérable, car on n’en a donné la description que de
wo àävquatre cents, mais il est très-probable qu’il en existe beaucoup plus qui n’ont pas été obser-
vèes jusqu'ici, et cela semble d'autant plus vrai que les collections en renferment une grande quan-
tité d'inédits. En effet, si quelques Myriapodes étrangers sont parés de brillantes couleurs, et si
quelques particularités organiques appellent l’attention de l’observateur sur plusieurs d’entre eux,
la difficulté de distinguer les espèces, qui sont presque toutes d’une couleur sombre, peu remar-
quable, et qui ont de l'analogie par leur forme avec les Vers et les chenilles, ont fait que les natu-
ralistes, presque jusqu’à ces derniers temps, ont négligé la recherche de ces animaux.
264 HISTOIRE NATURELLE. ,
Les anciens auteurs se sont peu occupés des Myriapodes et n’ont guère rapporté que des observa-
tions inexactes. De Géer, le premier, nous a présenté des remarques importantes sur les mœurs et la
distinction des espèces, surtout parmi celles propres à nos climats. Il en est de même de Geoffroy;
mais il faut descendre jusqu'à Olivier, si l’on veut trouver quelques détails sur les Gloméris, précé-
demment confondus avec les Cloportes. Linné, dans le Systema naturæ, établit définitivement les
genres Scolopendra et lulus, mais n’indiqua pas positivement leur place sériale; il fut suivi en cela
par Fabricius et son école, et même par Blumenbach et G. Cuvier. Olivier (Encycl. méth.), suivit
mieux les affinités véritables des Myriapodes qu’il nomme Millepieds. De Lamarck rapporte ces ani-
maux à sa classe des Arachnides. Latreille, après quelques tâtonnements, réunit les Myriapodes aux
Insectes, et fonda les deux subdivisions primaires que nous regarderons comme des ordres distincts,
Leach les sépara définitivement, comme classe particulière, sous la dénomination que nous adoptons,
et fonda quelques genres. Depuis cette époque, plusieurs naturalistes comme Walckenaër, de Blain-
ville, MM. Strauss-Durckem, G. Duméril, etc., ne firent guère que discuter sur la place des Myria-
podes dans la série des Articulés, sans apporter beaucoup de faits nouveaux. Mais, à partir de 1833,
un grand nombre d'observations ont été publiées sur les êtres de cette classe, et en ont fait l’une
des mieux connues actuellement. On doit surtout citer les travaux anatomiques et descriptifs : 1° de
M. Brandt (Bulletins de la Société des naturalistes de Moscou, 1833; Acad. des sciences de Saint-
Pétersbourg, 184); 2° de M. Newport (Philosophacal trans. Soc. of London, 1843; Trans. linn.
Soc. of London, ete.); 5° de M. P. Gervais (Ann. des Sciences nat.; Revue cuviérienne; Ann. Soc.
ent. de France, et surtout dans le quatrième volume des Insectes aptères des Suites à Buffon de
l'éditeur Roret, 1847), et 4° IL. Lucas (Ann. Soc. ent. de Fr.; Hist. nat. des Crustacés, Arachnides
et Myriapodes, éditée par Duménil, 1840, et Exp. sc. en Algérie des animaux articulés). À ces
travaux nous pourrions joindre encore ceux de MM. Savi, Duvernoy, Carus, Tréviranus, Waga,
Kock, J.-E. Gray, Guérin-Méneville et de quelques autres.
Outre les espèces de Myriapodes actuellement vivantes que nous avons eues spécialement en vue
dans ces généralités, nous devons dire que l’on en a découvert quelques espèces fossiles, mais en
trop petit nombre pour qu'il soit possible d'en tirer des indications paléontologiques utiles. M. de
Münster a décrit, sous le nom de Geophilus proavus, un fossile des schistes lithographiques de
Kelhein, et conséquemment propre à l’époque jurassique. Relativement aux terrains tertiaires, on
cite, d'après M. Cotta, un Julus trouvé dans une chaux carbonatée qui remplit des fentes de gneiss,
non loin de Dresde. L’ambre jaune a fourni à MM. Kock et Berendt plusieurs espèces de Myria-
podes. Enfin, M. Marcel de Serres a trouvé, aux environs de Montpellier, dans un terrain quater-
naire d'eau douce, des empreintes que l’on peut, suivant lui, rapporter au genre lule.
Les Myriapodes sont subdivisés en deux divisions primaires : les CniLocnarnes et CuiLopopes, que
quelques auteurs regardent comme formant deux classes spéciales, mais que nous n’indiquerons
que comme deux ordres.
PREMIER ©@RDRE.
CHILOGNATRES:
Le genre Julus, de Linné, forme aujourd’hui l’ordre des CuirocxaTues, qui comprend les éspèces
de Myriapodes ayant pour caractères généraux : animaux vermiformes, à segments très-durs, plus
ou moins nombreux, composés de cinq pièces : une dorsale unique et deux latérales et inférieures
doubles, complétement soudées ensemble, ou plus ou moins distinctes, d'où leur distintion en Mo-
noxonies, Trixonies et Pentazonies; segments crustacés, réunis pour la plupart deux à deux en un
seul anneau ou xoonite, supportant deux paires de pattes : les premiers segments qui suivent la téte
n'offrant pas cette disposition, et les deux ou ‘trois derniers apodes; téte distincte; antennes au
ANNELES. — CHILOGNATHES. 265
moins uussi grosses vers le bout que vers la base, de sept articles; yeux formés de stemmates réunis,
parfois nuls; appendices buccaux disposés pour broyer ou pour sucer, jamais en épines; corps com-
posé d’anneaux semblables entre eux, sauf le premier et le dernier; pattes courtes, formées de six
articles et d'un ongle simple, insérées sous la ligne médio-ventrale sur la pièce inférieure des seg-
ments; une seule paire de stigmates par anneau, inférieure, percée dans la pièce qui porte les
pattes et en avant d'elles, ete.
[, fe, Li hits
Fig. 256. — Polydesme granuleux
Déjà présenté par de Géer, qui en avait indiqué les véritables limites, cet ordre a été créé par
Latreille sous le nom de CuiLoGnaTues (yeuos, lèvre; yuaños, mâchoire), et quelques zoologistes, tels
que de Blainville et M. P. Gervais, ont proposé d'en former une classe ou sous-classe particulière qu'ils
désignent sous la dénomination de Dipcoropes (dimdos, double, row, rodos, pied), qui exprime le
caractère le plus saillant de ces Myriapodes, qui est la présence de deux paires de pieds à chaque
articulation, ou du moins à la plupart des articulations du corps.
Outre les caractères que nous avons assignés à cet ordre, et qui montrent les particularités qui
les rapprochent d’un côté des Insectes et de l’autre des Crustacés, nous pouvons encore ajouter qu’ils
ont des poches sécrétoires déversant une liqueur par une ouverture sligmatique en général bilaté-
rale; que les organes reproducteurs internes mâles ou femelles sont doubles et débouchent par un
double orifice sous un des segments antérieurs, près ou à la base des pieds; que des forcipules
copulatrices se remarquent sous un des premiers segments, et remplacent une ou deux paires de
pattes, comme dans les Polydesmes, Iules et Polyzonies, ou se trouvent à la partie postérieure du
corps auprès de l'anus, de même que chez les Gloméris, etc. Le développement des individus offre
également des particularités remarquables; c'est ainsi que le jeune âge diffère surtout de l'adulte
par le petit nombre des segments du corps, qui n’a d'abord que trois segments pédigères : chacun
a une seule paire de pieds. La respiration se fait à l'aide de stigmates placés sur la pièce sternale
de chaque double anneau et communiquant à l’intérieur avec une double série de poches aérifères,
disposées en chapelet et isolées, desquelles partent les trachées. La nourriture de ces animaux con-
siste en matières animales ou végétales plus ou moins décomposées : une espèce attaque les fraises,
une autre ronge la chicorée, etc.; leur bouche est munie de mandibules dépourvues de palpes et
garnies de dents imbriquées, d'une espèce de lèvre inférieure et de deux paires de pieds semblables
aux suivants, mais plus rapprochés à leur base. Leur marche est très-lente, ils semblent glisser
plutôt que marcher, et se roulent en spirale ou en boule. Ils pondent leurs œufs dans la terre, et,
comme nous l'avons dit, les petits, au moment de leur naissance, ne ressemblent pas à leurs pa-
rents. On trouve ces Myriapodes dans les endroits humides, sous les mousses, soûs les écorces, etc.
A l’exemple de M. P. Gervais, dont nous suivons l'ouvrage dans cette analyse, nous subdivise-
rons les Chilognathes en six familles, auxquelles nous assignerons les noms de Polyxéniens, Glomè-
riens, Polydesmiens, luliens et Polyxoniens, pour nous conformer à la nomenclature que nous
avons adoptée. ?
4% famille, PozyxéNiENs, corps mou, oblong, muni postérieurement et. sur les côtés de poils for-
mant de petits pinceaux; segments moins nombreux que dans les autres familles; pattes au nombre
de douxe à vingt-quatre paires; yeux peu nombreux, agrégés. Un seul genre, POLYXENUS, Latr.,
entre dans cette famille, et ne renferme lui-même que quatre ou cinq espèces propres à l’Europe, à
l'Afrique et à l'Amérique du Nord; le type est la Scocorenpre A rinceaux, Geoffr. (Scolopendra la-
gura, Linné); long de 0,002 à 0,003, gris en dessus, blanc en dessous, 1l habite communément
toute l’Europe, et se trouve essentiellement sous les écorces. (PL. XXXIIE, fig 2).
A.
1
rs
966 HISTOIRE NATURELLE.
2e famille, GLomérrens, corps crustacé, sans appendices pénicilliforme, ovalaire, oblong, pouvant se
contracter en boule, et composé, outre la tête, de douxe segments, dont l’antérieur, plus étroit, forme
une sorte de collier en demi-cercle transversal, et dont le second, de même que le dernier, est plus
grand que les autres; de chaque côté des segments en dessous, à partir du second jusqu'au dernier
exclusivement, on voit une rangée de dix petites écailles lamelleuses; pattes au nombre de trente-
quatre dans les mäûles et de quarante dans les femelles. Les Glomériens; qui ont l'aspect général des
Cloportes, et plus particulièrement des Armadilles, se trouvent habituellement sous les pierres, par-
ticulièrement dans les parties montagneuses et couvertes de bois. Les genres qu’on y admet sont
ceux des : 4° GLOMÉRIS, Latr., à corps composé de douxe segments non compris la tête; à yeux au
nombre de huit en ligne longitudinale de chaque côté de la tête; groupe typique, comprenant une
quinzaine d'espèces européennes et quelques espèces propres au nord de l'Afrique et à l'Égypte,
toutes terrestres, se roulant en boule et vivant sous les pierres dans les terrains montagneux : type
GLOMÉRIS MARGINÉ (lulus limbatus, Oliv.), espèce brunâtre, liseré de blane ou de jaune, marbré de
châtain dans les mâles, long de 0®,048, très-commun dans le centre et le nord de l'Europe. Nous
donnons (pl. XXXIII, fig. 5 et 6) des figures de cette espèce; ainsi que (même planche, fig. 8) celle
du G. aplati. 2° ZEPHRONIA, R. E. Gray (Sphærotherium et Sphæropæus, Brandt), à corps composé
de treite segments; antennes presque claviformes; yeux en groupe arrondi, renfermant de nom-
breuses espèces vivant dans les régions intertropicales et australes de l'Afrique, à Madagascar,
dans l'Inde continentale et insulaire, est remarquable par son corps court, très-gros, onisciforme.
3° GLOMERIDESMUS, P. Gerv., pas d'yeux; antennes en massue, faisant le passage à la famille sui-
vante et ne comprenant que le P. porcellus, Gerv. et J. Goud., qui habite les Andes colombiennes.
3° famille, Poyorsuiens, segments complets, non décomposables, plus ou moins carénés bilatéra-
lement dans leur première moitié, ou momliformes, en plus grand nombre que chex les Glomé-
riens, et en quantité moindre que chex les luliens; pattes au nombre de trente paires dans les mâles
et de trente et une dans les femelles; yeux manquant presque constamment. Ces Myriapodes, assez
abondants en espèces, renferment les genres : Oxisconesmus, Gerv., une seule espèce (0. oniscinus,
Gerv. et J. Goudot), des Indes colombiennes; Cyrronesuus, Gerv., deux espèces propres à la Co-
lombie; Porvoesnus, Latr., groupe typique sur lequel nous reviendrons; Srroncycosoma, Brandt
(Syosayra, Gray), qui, parmi quelques espèces exotiques, renferme le Julus pallipes, Oliv., d'Eu-
rope; Craspenosoma, Rawlius, Leach (Platops, Newport; Cylindrosoma, Reasia et Cambala, Jones),
ayant des yeux agrégés derrière les antennes : quelques espèces européennes, dont le type est le
lulus polydesmoïde, Montagu, des environs d'Édimbourg et de Nice; PLarypesmus, Lucas, ayant une
paire d'yeux stemmatiformes et quatre-vingt-quatre paires de pattes environ : type P. polydes-
moîdes, de Guatémala. — Les POLYDESMES ou POLYDÈMES ont le corps plus ou moins caréné sur
les côtés; leurs segments au nombre de vingt; les pattes au nombre de trente et une paires : la
sirième modifiée en forcipule dans les mâles, et pas d'yeux; is sont nombreux en espèces (on
en décrit une soixantaine), propres à toutes les parties du globe, se trouvant sous les pierres
dans les lieux humides, et le type est le P. complanatus, Latr., petite espèce commune auprès de
Paris. Deux espèces décrites par Palisot Beauvois, sont les P. Virginianus (pl. XXXI, fig. 3),
d'Amérique, et granulosus, de Guinée, Deux genres, qui en ont été démembrés par Gray, sont
ceux des l'ontaria et Stenonia.
I
DT Vs
Fig. 257. — Stronoylosome à pieds pâles. Fig. 258. — Craspedosome polydesmoïde.
4° famille, [ucrens, corps plus ou moins cylindrique, vermiforme, allongé, composé d'un nombre
considérable de segments (cinquante et au delà); tête distincte du premier segment, qui est plus
ANNELÉS. —_ CHILOGNATHES. CHILOPODES. 267
grand que les autres, les trois suivants pourvus d'une seule paire de pattes, et les autres en portant
deux, à l'exception du préanal; yeux multiples, réunis en triangle, pouvant manquer; bouche dis-
posée pour broyer.—C'est la famille la plus nombreuse de l’ordre des Chilognathes, et elle offre des
représentants dans toutes les parties du monde. Certaines espèces acquièrent une taille considérable,
et il y en a qui ont près de 0,20 de longueur, et dont le corps surpasse la grosseur du doigt :
celles des régions intertropicales sont plus particulièrement dans ce cas, mais en Europe, principa-
lément dans le centre et dans le nord, les [uliens n'arrivent qu’à une taille beaucoup moindre. Ce
sont des animaux inoffensifs, qui vivent à terre, sous les écorces, dans la mousse, etc., surtou,
dans les lieux ombragés et humides, et qui se nourrissent principalement dematières végétales. La
quantité des espèces européennes est déjà considérable, mais celle des espèces exotiques est encore
beaucoup plus grande, et, quoique les caractères qu'ils présentent ne soient ni nombreux ni faciles
à saisir, on a pu néanmoins établir parmi eux un certain nombre de genres, dont les plus distincts
sont ceux des : LYSIOPETALUM, Brandt (Platcps, Newp.; Callipus, Leach; Cambalu et Spirostre-
phon, Say, etc.), renfermant des espèces européennes, africaines et américaines (type Julus fœtidis-
simus, Savi, du midi de l’Europe); IULUS, Linné (Spirostreptus, Spirobolus, Spiropœus et Spiro-
cyclistus, Brandt; Acanthiulus, Glyphiulus, Gerv., etc.), qui, aux caractères de la famille, joignent
des lamelles pédigères, des segments non mobiles, des yeux multiples, ete., dont M. P. Gervais
décrit cent quarante-quatre espèces (types : Julus sabulosus, Lin., brun cendré ou noirâtre; {erres-
tris, Lin., commun dans toute l'Europe, etc.). STEMMIULUS, Gerv., n'ayant qu’une seule paire
d'yeux stemmatiformes, et ne comprenant que le S. bioculatus, de Colombie. BLANIULUS, Gerv.,
sans yeux, espèce principale B. guttulatus, Bose. de Paris, dont nous donnons (pl. XXXIIE, fig. 7)
une figure. Nous représentons aussi (pl. XXXIIL, fig. 4) le Julus lucifuqus.
5° famille, Pocvyzoniens, corps iuliforme, mais plus déprimé; segments peu résistants, nombreux;
tête plus ou moins allongée; pièces buccales disposées en sucoir. On n'y indique que trois genres :
POLYZONIUM, Brandt (Platyulus, Gerv.), groupe typique, qui aurait trois paires d'yeux, très-rap-
prochés, occupant une petite surface ovalaire, situés entre les antennes, et qui a pour type le P.
Germanicum, Brandt; Platyulus Audouinii, Gerv., espèce assez répandue en Europe, qui cepen-
dant n'a été découverte qu'en 1836, et qui a donné lieu à des observations importantes de
MM. Brandt, Gervais et Waga. SIPHONOTUS, Brandt, ayant deux yeux sur le milieu de la partie
frontale, entre les antennes, du Brésil. SIPHONOPHORA, Brandt, à yeux nuls, une espèce de l’ile de
Porto-Rico, et une autre des Andes colombiennes.
DEUXIÈME ORDRE.
CIHILOPODES.
Le genre Scolopendra, de Linné, forme l'ordre ou la classe des Cuirorones, qui renferme les es-
pèces de Myriapodes caractérisées d’une manière générale de la manière suivante : animaux al-
longés, néréidiformes, à corps déprimé formé de segments plus ou moins nombreux, imbriqués ou
non, souvent inégaux, simples ou divisés transversalement en dessus, égaux en dessous, non crus-
tacés, à plaques dorsale et ventrale disjointes et ne portant qu'une seule paire de pattes chacun;
tête distincte, cordiforme; antennes sétacées ou moniliformes, ayant au moins quatorze articles;
yeux composés, quand ils existent; pièces buccales ayant de l'analogie avec celles des Insectes;
pattes insérées sur les parties latérales du corps, entre les scutes dorsale et ventrale, composées de
six articles et d’un petit crochet, sauf chez les Scutigera, dont le tarse est multiarticulé : deuxième
paire de pieds modifiée en forcipules : sa partie basilaire coudée en forme de lèvre plus où moins
268 HISTOIRE NATURELLE.
dentifère à son bord antérieur, la partie terminale en crochet aigu, recourbé, laissant échapper
par une petite ouverture une liqueur vénéneuse : première paire de pieds petile, cachée sous la se-
conde, palpiforme : les autres pieds ambulatoires égaux entre eux, sauf ceux de la derniere paire
qui sont plus longs ou plus courts; stigmates ouverts sur les parties latérales du corps, près de
l'insertion des pattes, et en moindre nombre ou en nombre égal à celui de ces dernières.
Le nom de Cuicorones, donné par Latreille aux Myriapodes, rangés par de Géer et Linné parmi
les Scolopendres, signifie, d'après son étymologie même (xzu0s, lèvre, mous, roc, pied), qu'une de
leurs paires de pattes est disposée en lèvre maxillaire; mais cette indication, exacte dans la plupart
des cas, ne l’est réellement pas dans tous.
Chez ces Articulés, les organes reproducteurs mâles ou femelles débouchent par un orifice parti-
culier auprès de l’anus et dans le même segment du corps. Comme chez les Chilognathes, le jeune
âge est semblable à l'adulte et n’en diffère que par le moindre nombre des anneaux du corps, des
pieds, des artieles des antennes, et même des yeux. L'anatomie de quelques espèces de cet ordre a
été faite par Gaëde, Treviranus, MM. Marcel de Serres et L. Dufour, et a présenté quelques particu-
larités que nous avons indiquées briévement dans nos généralités sur les Myriapodes. D'après
M. Brandt, la composition de la bouche de ces animaux serait la suivante : une lèvre supérieure
attachée au devant de la tête; deux mandibules propres à broyer; deux mächoires palpiformes ct
une lèvre inférieure composée de deux pièces oblongues ou linéaires, placées un peu en arrière des
mächoires.
Ces Myriapodes, assez nombreux en espèces, de grande taille dans les contrées chaudes, et plus
petite dans les régions tempérées ou froides, courent très-vite, sont carnassiers, nocturnes, et se
logent sous les pierres, les vieilles poutres, les écorces des arbres, dans:la terre, le fumier, etc.
Nous formerons dans cet ordre quatre familles spéciales, celles des : Scutigériens, Lithobiens,
Scolopendriens et Géophiliens.
47° famille, Seuricériexs. Corps cylindrique, large, peu déprimé; têle convexe, assez grande;
segments peu nombreux, semblant n'être qu'au nombre de huit en dessus, et en présentant quinze
apparents en dessous, sans compter ceux des forcipules et de l'anus; pieds en même quantité que
les segments inférieurs, longs, inégaux; les postérieurs plus longs que les autres, et tous ayant
leurs tarses décomposés en un nombre considérable de petits articles; antennes également longues,
sétacées, composées d'une multitude de petits articles non uniformes; yeux saillants, très-nombreux
et réunis comme les yeux composés des Insectes; trachées s'ouvrant dans les orifices stigmatiformes,
placées avant ou sur la ligne médio-dorsale, près de l’échancrure du bord postérieur des scutes.
Cette famille, dont M. Brandt fait un ordre distinct sous le nom de Schixotarses, qui rappelle la sin-
gulière conformation des tarses, ne ‘renferme que le seul genre SCUTIGERA, Lamarck, que Leach
désignait sous le nom de Cermaria. Les Scutigères sont essentiellement nocturnes et crépuscu-
laires, vivant dans nos pays auprès des habitations ou dans leur intérieur, et préférant surtout
les endroits où il y a du vieux bois; ils courent avec rapidité soit sur le sol, soit contre les parois
des mufs, et sont très-difliciles à conserver complets, à cause de l’extrême fragilité de leurs longues
pattes, qui se cassent habituellement au-dessous de la hanche. On en a recueilli, dans ces derniers
temps, sur presque tous les points du globe, en Afrique, en Asie, dans la Nouvelle-Zélande et dans
les deux Amériques; aussi a-t-on porté à une vingtaine le nombre des espèces. Le type est la Scuti-
gère coléoptrée (S. coleoptrata, Fabr.), petite, assez commune dans presque toute l’Europe, et dans
laquelle on a voulu, à tort, distinguer quelques espèces. Nous donnons (pl. XXXIIT, fig. 4) la figure
d’une autre espèce, la S. arénoïde. .
2 famille, Lrruosrexs. Pieds semblables entre eux, égaux, sauf ceux de la dernière pate, fornés
de six parties : la hanche, la cuisse, la jambe et trois articles pour le tarse; antennes moniliformes,
yeux rapprochés ou nuls, jamais composés; caractères communs aux Lithobiens et aux Myriapodes
des deux familles suivantes, dont ils se distinguent surtout par les particularités suivantes : segments
peu nombreux, à arceaux supérieurs imbriqués, alternativement grands et petits : un arceau supc-
rieur rudimentaire pour le segment forcipulaire; pates postérieures plus longues que les antéricures.
1
ANNELES. — CHILOPODES. 269
Les Lithobiens sont de petits Myriapodes vivant à terre, dans les lieux humides, dans les maisons, les
cours, les jardins, les bois, se retirant souvent sous les pierres et fuyant la lumière. On y distingue
deux genres : LITHOBIUS, Leach, dont les yeux sont nombreux; abondant en espèces d'Europe, d’A-
frique, de l'Inde, de l'Amérique, de la Nouvelle-Zélande, etc., et dont le type est le L. forcipata,
de Géer, très-commun à Paris; et HENICOPS, Newp., entièrement privé d'yeux, petit groupe aus-
tralasien et américain.
3° famille, Scocopenpriens. Pieds habituellement au nombre de vingt et une paires : la dernière
plus longue que les autres, épineuse sur l'article fémoral, et disposée pour saisir, avec la hanche
plus ou moins coudée au segment; tête scutiforme; antennes de dix-sept ou vingt articles sétacés ou
moniliformes; souvent quatre paires d'yeux; lèvre forcipulaire, forte, coudée sur la ligne mé-
diane : crochets forts, émettant une humeur vénéneuse. On décrit un grand nombre d’espèces de
cette famille, et on les place dans plusieurs genres distinets. C’est parmi ces Myriapodes, répandus
sur toute la surface du globe, que l’on trouve les plus grandes espèces de Chilopodes et celles dont
la morsure est le plus à craindre.
Les genres admis par M. P. Gervais sont les suivants : HETEROSTOMA, Newport (Branchiostoma,
Newp.); à stigmates cribriformes et à vingt et une paires de pieds, ne renfermant que des espèces
étrangères, SCOLOPENDRA, Linné, et CRYPTOPS, Leach, à stigmates valvuliformes et à vingt et
une paires de pieds; les premiers pourvus d'yeux et les autres en manquant complétement: SCO-
LOPENDROPSIS, Brandt; SCOLOPOCRYPTOPS, Newp., et NEWPORTIA, Gerv., à vingt-trois paires
de pieds : ces genres, ne renfermant que des espèces exotiques, se distinguent entre eux : le premier
par ses yeux au nombre de quatre paires, le second par l'absence de l'organe de la vision, et le der-
nier par ses farses postérieurs composés de douxe articles. — Les Scouopenvres sont répandues dans
toutes les parties du monde, mäis elles sont beaucoup plus abondantes et beaucoup plus grandes
dans les régions tropicales que dans nos contrées tempérées; elles se tiennent sous les pierres, dans
les trous du bois mort ou pourri, sous la mousse, ou plus ou moins enfoncées dans la terre; elies
sont voraces, et chassent de préférence les Insectes, les Acarus, les Araignées, etc.; elles les saisissent
avec leurs pieds de derrière et les tuent en les piquant au moyen de leurs pointes forcipulaires.
Leur piqüre est très-douloureuse, et sur l'espèce humaine même elle agit avec autant d'intensité
que celle des Scorpions. Quelques espèces sont, dit-on, phosphorescentes. Pendant très-longtemps
on a confondu la plupart des espèces de ce genre sous le nom de Scolopendra morsitans ; mais,
grâce aux travaux de MM. Newport, Brandt, P. Gervais, etc., on en a aujourd'hui la description de
plus de cent espèces : comme type nous indiquerons la S. singulata, Latr., du midi de l'Europe.
Fig: 259. — Scolopendre mordante. (Très-grossie.)
4 famille, GÉopururens. Segments du corps très-nombreux, doubles en dessus, simples en dessous,
et pourvus chacun d'une seule paire de pattes; antennes d'au moins quatorze articles; pas d'yeux
dans le plus grand nombre, et des yeux chex les autres, etc. On n’y distingue que deux genres :
SCOLOPENDRELLA, Gerv., antennes moniliformes, .de plus de quatorze articles; une paire
de stemmates : ne renfermant que la N. notacantha, découverte en 1839, auprès de Paris. GEO-
PHILUS, Leach, corps liénaire, al:ongé, composé de quarante segments et au delà; antennes de
quatorze articles; pas d'yeux; pieds au nombre de quarante à plus de cent cinquante paires, ete. —
Les Géophiles ressemblent beaucoup à des Vers; on les trouve dans les troncs d'arbres, les mousses
270 HISTOIRE NATURELLE.
dans la terre, ete.; ils sont très-phosphorescents el sécrètent une humeur purpurescente parfois
très-abondante; ils ne sont pas vénéneux comme les Scolopendres, mais c’est à eux qu'il faut attri-
buer quelques faits rapportés par les médecins d’Insectes qui auraient vécu dans les fosses nasales,
dans les sinus frontaux de l'Homme, et, ce qui est plus douteux, dans certains abcès. On décrit une
cinquantaine d'espèces de Géophiles : une d’entre elles, découverte dans nos environs, est le G.
maæillaris, Gerv.; nous représentons (pl. XXI, fig. 9) le G. Walckenaerii, Gerv.
TROISIÈME CLASSE.
ARACHNIDES.
Les Aracunines de Latreille (dont l’étymologie vient de Apæyvn, Araignée, ado, semblable), ou
Acères de Walckenaër, forment une classe d'Articulés tellement voisine de celle des Insectes, que
quelques auteurs l'y réunissent et ne la considèrent que comme en formant un ordre particulier.
D'une manière très-générale. les Arachnides ont pour caractères : tête confondue avec le corselet,
portant le nom commun de céphalothorax; pas d'antennes ni d'ailes; quatre paires de pattes; respi-
ration se faisant, dans le plus grand nombre de cas, à l'aide de cavités pulmonaires, et presque
exceplionnellement par des trachées; un appareil circulatoire complet, etc.
L'organisation des Arachnides présente des particularités remarquables dont nous devons pré-
senter un résumé général. Leur peau, ou squelette tégumentaire, est habituellement moins solide
que celle des Insectes. Leur corps est composé d’un petit nombre de segments formant deux parties
principales, presque constamment bien distinctes : le céphalothorax, composé de la tête et du corselet
réunis en un seul corps, et l'abdomen, formé habituellement, comme dans les Araignées, d’une
masse molle, globuleuse, sans divisions, ou bien séparé en segments distincts, de même que dans
les Scorpions.
Le céphalothorax porte antérieurement la bouche et les yeux. Dans le plus grand nombre des cas, '
c'est-à-dire dans toutes les Arachnides qui se nourrissent de petits animaux, la bouche est garnie
d’une pairede mandibules dépourvues de palpes, offrant des crochets mobiles ou disposéesen manière
de pinces; d’une paire de mächoires lamelleuses, ayant chacune un palpe plus ou moins pédiforme
et d'une lèvre inférieure; dans les espèces parasites, la bouche offre la forme d’une petite trompe,
d’où sort une espèce de lancette formée par les mâchoires. Le crochet mobile des mandibules pré-
sente, près de son extrémité, une petite fente qui est l’orifice du canal excréteur d’une glande ve-
nimeuse particulière, et dont le liquide, versé au fond des plaies, détermine immédiatement
l'engourdissement des Insectes auxquels les Arachnides font la chasse. Les yeux, toujours simples,
lisses, ordinairement au nombre de huit, mais souvent aussi en quantité plus considérable, ou pou-
vant manquer, offrent une structure particulière : chacun d'eux comprend une cornée transparente,
derrière laquelle il y a un cristallin et une humeur vitrée, une rétine produite par la terminaison
du nerf optique, et une enveloppe de matière colorante. L'audition existe chez ces Annelés, mais
l'on ignore où en est le siége; le toucher s'exerce surtout par l'extrémité des pattes et par les appen-
dices buccaux. Les paites sont constamment fixées sur le céphalotorax: elles sont, dans le plus
— Phryne réniforme,
Fig, 3 — Thélyphone géant.
— Araignée domestique
ARACHNIDES
Fig.
%
AS
— Éripe hétérogastre.
pl. 34
ANNELÉS. — ARACIINIDES. 271
grand nombre des cas et chez l'animal adulte, au nombre de quatre paires, à peu près composées
comme celles des Insectes, et presque toujours terminées par deux crochets; ces membres ont en
général une longueur très considérable et se cassent facilement, mais, de même que dans les
Crustacés, le moignon resté à l'animal, après s'être cicatrisé, reproduit une nouvelle patte qui croît
peu à peu et qui, finalement, devient semblable à celle qu’elle remplace; ils se composent d’une
suite de pièces tubuleuses articulées les unes avec les autres, de manière à se prêter à tous les
mouvements nécessaires : on y distingue une hanche globuleuse ou cylindrique, servant à l’inser-
tion du membre avec le céphalothorax, un exinguinal composé d’un petit article, un femur variant
de grandeur et de grosseur, un génual et un tibia n’offrant rien de particulier, et un tarse, partie
terminale, comprenant souvent deux et parfois trois articles, dont le dernier est armé de petits ero-
chets ou ongles, soit crochus, soit disposés en une sorte de pelote
Le thorax proprement dit et l'abdomen renferment la masse viscérale. Le canal intestinal est en
général.assez simple, mais présente quelquefois des appendices cœcaux qui pénétrent jusque dans
l'intérieur des pattes. Des éubes, analogues aux vaisseaux biliaires des Insectes, s'ouvrent dans
l'intestin auprès de l'anus, mais dans quelques espèces, comme chez les Scorpions cependant, il y
a un foie composé de quatre grappes glanduleuses. C’est également dans les environs de l'ouverture
anale que se trouvent les glandes sécrétaires de la matière soyeuse, et les filières si remarquables à
l’aide desquelles certaines Arachnides se construisent des toiles souvent très-étendues et d'une
extrême délicatesse.
Chez ces Articulés le sang est blanchâtre. Dans les Arachnides pulmonaires, il y a un appareil
cireulatoire complet; le cœur est placé sur la région dorsale: il a la forme d’un vaisseau allongé et
donne naissance à plusieurs artères : après avoir traversé ces derniers organes, le sang se rend aux
poumons et de là au cœur, en suivant, par l'intermédiaire de veines, une marche analogue à celle
qu'il offre chez les Mollusques. Dans les Arachnides à respiration trachéenne, l'appareil de la cireula-
tion est moins complexe, et il semble n'y avoir qu’un simple vaisseau dorsal sans artères ni veines.
La respiration est aérienne, de même que celle des Insectes. Le plus souvent elle est concentrée dans
des poches logées sous les côtés du ventre, appréciables extérieurement par des saillies jaunâtres
appelées poumons, ayant quelque analogie avec des branchies qui seraient intérieures, car ils offrent
une multitude de lamelles membraneuses disposées comme les feuillets d’un livre; on compte deux,
quatre ou huit poumons, selon les espèces, et chacun d'eux reçoit l'air par une ouverture placée à
la partie inférieure de l’abdomen. Dans quelques-uns, la respiration se fait par des 1rachées, tubes
respiratoires, dont la structure est essentiellement la même que dans les Insectes. Enfin chez quel-
ques Arachnides il y a simultanément des poumons et des trachées.
Les deux sexes existent toujours chez deux individus séparés. Les appareils reproducteurs sont
doubles, tantôt situés à l'extrémité des palpes, mais le plus souvent sous l'abdomen; l'appareil gé-
nérateur mâle est composé, pour chaque moitié du corps, d'un testicule ou organe principal, d’un
canal afférent terminé par une verge, et de quelques appendices accessoires; l'appareil générateur
femelle est composé, également pour chaque moitié du corps, d’un ovaire, d’un oviducte et d'une
vulve. La forme des palpes maxillaires et différentes autres particularités distinguent extérieurement
les mâles des femelles.
Le système nerveux, essentiellement ganglionnaire, offre des différences considérables, selon
les groupes, quoique cependant il présente une disposition générale des parties à peu près sem-
blables dans toutes les Arachnides : c’est ainsi que les ganglions antérieurs placés au-dessus ou
au-devant de l’œsophage, et regardés le plus habituellement comme représentant leur cerveau,
donnent naissance aux nerfs optiques en avant et se continuent en arrière avec le collier œsopha-
gien, etc.; que les autres ganglions, situés au-dessous du tube digestif, envoient des nerfs aux pattes,
aux appendices de l'abdomen, etc. Dans les Scorpions, les plus compliqués de ces Articulés sous ce
rapport, il se compose d’une série de huit masses ganglionnaires réunies entre elles par de doubles
cordons de communication, et formant une chaîne étendue d'une manière presque uniforme d'un
bout du corps à l’autre. Dans les Araignées, beaucoup moins compliquées organiquement, tous les
ganglions du thorax sont réunis en une seule masse, d’où partent en arrière deux cordons nerveux
qui aboutissent à un ganglion abdominal unique.
Les Arachnides sont carnassières; en général elles ne dévorent pas les animaux dont elles font
272 HISTOIRE NATURELLE.
leur proie, mais se bornent à sucer les humeurs contenues dans le cadavre de leurs victimes, et,
pour leur rendre plus facile la capture d'animaux dont ils pourraient redouter la force, un grand
nombre d’entre elles sont armées d’un appareil venimeux. Presque toutes se nourrissent d'Insectes
qu'elles saisissent vivants (Scorpions, Araignées, etc.); mais beaucoup d’autres vivent en parasites
(Acarides). Plusieurs sont douées d'instincts variés, qui sont parfois aussi remarquables que ceux
des Insectes, et on pourrait même peut-être leur accorder des facultés plus développées. Plusieurs
emploient des ruses particulières pour s'emparer de leur proie; d’autres montrent, dans la construc-
tion de leur demeure, une industrie singulière. On a même vu, assure-t-on, des Arachnides se
prêter à une espèce d'éducation et donner des signes d'une sorte d'intelligence.
Comme les Insectes, les Arachnides pondent des œufs qu’elles enveloppent presque toujours dans
un cocon de soie. Souvent la mère ne s'inquiète plus de sa progéniture dès qu’elle a pondu ses
œufs; mais parfois elle demeure avec sa jeune famille pour la protéger, et porte même, dit-on, les
petits sur son dos quand ils sont encore trop faibles pour marcher. Toutes les Arachnides subissent
plusieurs mues avant que de parvenir à l’âge adulte; quelques-unes éprouvent même une sorte de
métamorphose, car il en est, comme les Acarides, dont les pattes ne sont originairement qu'au
nombre de trois paires, et qui en acquièrent une quatrième à un âge plus ou moins avancé. Presque
toutes les Arachnides sont terrestres : un très-petit nombre seulement est aquatique. Les espèces,
très-peu nombreuses, qui ne sont pas carnassières, se rencontrent dans la farine, sur le fromage et
même sur les végétaux. On trouve des Arachnides dans toutes les parties du monde, et la RE
des espèces en est excessivement considérable.
Fig. 260. — Phiistrate bicolore.
Quoique certaines Arachnides, telles que les Araignées proprement dites et quelques autres
groupes de cette classe, aient dû être connues depuis la plus baute antiquité, cependant on trouve peu
de détails sur ces animaux dans les anciens auteurs, et ce n'est guère que dans ces soixante der-
nières années que l'on s'en est occupé d’une manière sérieuse. Aristote et Pline en ont dit quelques
mots dans leurs célèbres ouvrages; beaucoup plus tard, Isidore de Séville, Lister, Aldrovande, Ray,
Swammerdam, Ræsel, Leuwenhoek, de Géer, Cestoni, Réaumur, etc., s’en sontoccupés; enfin, dans
ces derniers temps, Linné, Fabricius, Pallas. G. Cuvier, Latreille, Savigny, MM. Treviranus, Léon Bu-
four, Strauss-Durckheim, Knoch, H. Lucas, P. Gervais, ete., et principaiement le baron Walckenaër,
ont.publié d'importants travaux sur ces animaux. Ce dernier auteur surtout a consacré toute sa vie à
l'étude de ces êtres; et c’est dans son Histoire naturelle des Insectes aptères, faisant partie des Suites
à Buffon de l'éditeur Roret (4 vol. in-8 avec pl.; Paris, 1837-1847), dont deux volumes sont pu-
bliés avec Ja collaboration de M. le professeur P. Gervais, que l’on trouve les meilleurs renseigne-
ments sur ces Articulés; c’est dans cet ouvrage que sont résumés tous les travaux publiés sur les
ANNELÉS. — ARACHNIDES PULMONAIRES. 273
Arachnides et que toutes les espèces connues il y a dix ans sont décrites. Nous y renvoyons ceux qui
voudraient approfondir ce sujet intéressant, ne pouvant pas entrer ici dans de grands détails.
La classification que nous suivrons est celle de Latreille, qui divise les Arachnides en deux or-
dres : 1° les Puzuoxaires, ayant des sacs pulmonaires, un appareil circulatoire complet, et des yeux
au nombre de six à huit paires; et 2° les Tracuéenxes, ayant des trachées pour la respiration, de
simples vestiges d'organes circulatoires, et des yeux au nombre de quatre au plus. Nous avouerons
que cette classification est loin d’être naturelle, car elle sépare certaines espèces très-analogues
entre elles, et l'existence des trachées dans cette classe n’est pas aussi importante qu’on pourrait le
croire au premier abord, puisqu'on voit ces organes dans diverses Arachnides pourvues de pou
mons, et que plusieurs espèces trachéennes différent à peine de diverses espèces pulmonées. En
outre, comme l'anatomie des animaux que nous étudions est loin d’être faite pour toutes les espèces
ce n’est souvent qu'avec doute que l’on range plusieurs d’entre elles plutôt dans l’un des ordres que
dans l’autre. Malgré cela, nous avons cru devoir suivre la méthode de Latreille, plus généralement
admise, de préférence à celle de Walckenaër, qui semble néanmoins plus naturelle; mais nous cher-
cherons à établir la concordance entre ces deux classifications.
PREMIER ORDER:
ARACHNIDES PULMONAIRES.
Cet ordre comprend les espèces les plus compliquées organiquement de la elasse des Arachnides.
Ces animaux respirent par des poumons, qui existent généralement seuls, mais qui parfois sont ac-
compagnés de trachées : les ouvertures ou stigmates par lesquels l'air pénètre dans ces organes ont
la forme de petites fentes situées sous l'abdomen, et sont au nombre de deux, quatre ou huit, tandis
que chez les Arachnides trachéennes, ces orifices ne sont qu’au nombre de deux. L'appareil circu-
latoire est complet, et non à l'état rudimentaire. Les yeux au nombre de six à huit, tandis qu'il est
moindre chez les autres, etc.
Deux familles : les Aranéines ou Araignées, et les PÉévipacpes ou Scorpions, entrent dans cet
ordre. à
Fig. 261. — Thomise chargé. Fig, 262. — Lycose ouvrière. Fig. 263. — Thomise Lronqué
PREMIÈRE FAMILLE. — ARANÉIDES.
Les Araxéines, ou Arachnides pulmonaires fileuses de Latreille, se distinguent surtout des Pédi-
palpes par quatre ou six appendices cylindriques ou coniques, articulés, placés sur la partie anale,
A, 39
274 HISTOIRE NATURELLE.
et désignés sous le nom de filières, parce que, à l'exception de deux, ils ont leur extrémité, soit
percée d’un très-grand nombre de trous livrant passage à des fils soyeux, soit hérissée de petits ma-
melons, d’où sortent également des fils. En outre, toutes les äranéides ont un céphalothorax en
forme de bouclier corné, ovalaire, bien marqué, c'est-à-dire que le corselet est réuni tout à fait à
la tête, qui n'est appréciable que par les yeux au nombre de huit ou de six, et par la bouche placée
antérieurement, présentant sous le labre deux mandibules ou pièces munies d'un seul onglet et
percées près de l'extrémité d'une petite fente servant au passage du venin sécrété par une glande
particulière, deux méchoires pourvues de deux palpes de cinq et parfois six articles s’avançant de
chaque côté, ressemblant à de petits pieds, terminés par une griffe dans les mâles, renflés au bout
offrant une structure compliquée dans les femelles : les mandibules sont séparées à leur base par une
lèvre sternale et une languette velue, membraneuse, d'une seule pièce, insérée entre ces parties.
Les huit pattes assez allongées, de sept articles chacune, terminées par deux ou trois griffes, dentées
ou en peigne, sont attachées presque circulairement; autour de ces pattes on voit une multitude
de poils aplatis à l'aide desquels ces animaux se fixent sur les corps les plus polis, et situés tout
autour du céphalothorax, à la partie postérieure duquel l'abdomen est suspendu par un pédicule
court, cartilagineux. Cet abdomen est mobile, habituellement mou, sous forme d’une masse renflée,
d'une seule pièce, terminé par une petite saillie, avec une fente au milieu, qui est la partie anale,
et par quatre ou six mamelons charnus placés au-dessous de la partie anale, destinés à élaborer la
soie, et qu'on nomme filière, ainsi que nous l’avors dit : cet organe offre en dessous, à sa partie
antérieure, dans les deux sexes, deux ou quatre fentes, ouvertures de la reproduction; on remarque
aussi dans les femelles un trou circulaire qui les distingue.
L'organisation des Arancides présente des particularités remarquables. Les cavités pulmonaires
sont au nombre de deux ou d'une seulement; elles sont situées près de la base de l'abdomen, et
leurs stigmates se montrent à l'extérieur sous la forme d'une tache jaunâtre ou blanchâtre. La cir-
culation est complète, de même que chez les Pédipalpes. L'appareil de la digestion est presque aussi
compliqué que chez les Insectes. Les organes génitaux sont doubles. Le système nerveux est formé
d'une série de ganglions, parmi lesquels on distingue un cerveau, et d'où partent les nerfs qui se
rendent aux diverses parties du corps. Les organes des sens sont assez développés; celui de l'odorat
existe, mais l’on n’en connaît pas le siége. Ces animaux sont exclusivement ovipares. Un venin par-
ticulier est sécrété par les Aranéides, mais, quelque violent qu'il soit, lorsqu'il est versé dans la pi-
qüûre faite par ces animaux aux Insectes dont ils veulent faire leur proie, il n'a, au moins dans nos
climats, aucune action sur l'Homme, et ne produit même pas l'effet fächeux du venin de la Punaise,
de la Guêpe, de l'Abeille, du Cousin, de la Puce, ete.
La soie avec laquelle les Aranéides se construisent des demeures, tendent des pièges à leur proie
et forment des cocons pour leurs œufs, est sécrétée par un appareil placé à la partie postérieure du
ventre, et consistant, intérieurement, en plusieurs paquets de vaisseaux contournés sur eux-mêmes
et aboutissant à des pores percés au sommet de quatre ou six mamelons ou filières placés au-dessous
de l’anus, ainsi que nous l'avons dit. La matière gluante expulsée à travers ces pores prend de la
consistance à l'air atmosphérique, et forme des fils d’une longueur considérable et d'une extrême
ténuité, parfois peu solides et d’autres fois assez résistants; l'animal, au moyen de ses pattes, réunit
une grande quantité de ces fils en une sorte de petite corde, et toutes les fois qu’en se balançant
ces filières touchent le corps sur lequel il se pose, il y fixe le bout d’un de ces fils, dont l’extrémité
opposée est encore renfermée dans l'appareil sécréteur, et dont, par conséquent, il peut à volonté
augmenter la longueur. La couleur et le diamètre de ces fils varient beaucoup; d’un gris noirâtre
chez les espèces de nos climats, ces fils peuvent, chez des espèces des pays chauds, présenter des
teintes brillantes : et une Aranéide mexicaine produit des fils rouges, jaunes et noirs. On a calculé
que dix mille fils sortant des pores d’une des filières de quelques-unes de nos Araignées européennes
n'égalent pas en grosseur un de nos cheveux, tandis que des espèces propres aux régions méridio-
nales forment des trames excessivement fortes. C'est avec ces fils que les Aranéides forment ces ré-
seaux destinés à attraper leur proie vivante, et que l’on désigne sous le nom de toiles d'Araignées.
Cependant quelques espèces se bornent à tendre simplement des fils irréguliers; mais le plus grand
nombre tissent ectte toile dont les mailles sont d’une régularité parfaite, dont la texture varie beau-
coup, et que nous avons tous admirée. Ces toiles sont de formes variées; ct on a cherché, d’après
ANNELES. — ARANÉIDES. 975
elles, à partager les Aranéides en plusieurs groupes, ainsi que nous aurons occasion de le dire. Les
mâles et les femelles habitent des toiles différentes, et ce n'est que lors de l'accouplement que les
premiers vont aux toiles des secondes. Une espèce ne peut impunément se rendre sur la toile d'une
autre espèce, car la plus forte tue immédiatement la plus faible. Si, dans nos climats, et pour les
espèces de petite taille, les toiles sont extrêmement fragiles, et ne peuvent seulement arrêter que
de petits Insectes, dans les contrées australes, on remarque de grandes Aranéides qui produisent
des toiles à trames tellement résistantes, qu’elles suffisent pour arrêter de petits Oiseaux, et que
l'Homme même a besoin de faire un effort pour les rompre, ce qui n'arrive jamais chez nous. Cette
prodigieuse . multitude de fils d’Aranéides que l’on voit en Europe dans le mois de septembre et en
octobre, ce nombre immense de toiles anciennes que recèlent les forêts et les campagnes, continuel-
lement baignées par les brumes humides de l’arrière-saison, s'agglomèrent et s’amoncellent en longs
écheveaux qui, séchés par le soleil et l'air chaud de la journée, acquièrent une blancheur extra-
ordinaire; puis, agités par les vents, ils s’enlèvent dans l'air, et forment les longs filaments blancs
nommés fils de la Vierge. Souvent les jeunes Araignées, répandues de tous côtés, qui se trouvent
accrochées par ces fils, sont prises dans leurs propres filets, et, ne pouvant s'en débarrasser ou y
restant volontairement, voyagent ainsi au loin; aussi n'est-il pas très-rare de voir dans les contrées
méridionales, où les Aranéides sont grosses et très-abondantes, les étangs, les rivières et les prairies
en être, en automne, en quelque sorte couveris.
On a cherché à utiliser les fils soyeux produits par les Aranéides, et, quoiqu’on soit parvenu à
former avec ces filaments des tissus particuliers, on n'a pas persévéré, en Europe au moins, dans ces
essais, parce que le prix de vente serait inférieur à celui de revient. Cependant il est regrettable que
l’on n'ait pas poussé plus loin ces esssais, car, en perfectionnant les procédés de fabrication, en ac-
climatant des espèces qui produisent plus de soie que nos Araignées indigènes, peut-être serait-on
arrivé à de bons résultats. C’est une question qu'il est utile de soumettre à la Société impériale zoolo-
gique d’acelimatation, et dont la solution pourrait avoir une grande utilité, aujourd'hui surtout que
l'on s'occupe avec tant de soin de tout ce qui a rapport à la production de la soie. Le président Bon
le premier, au commencement du siècle dernier, fit des expériences à ce sujet, et, avec la filoselle
d'Araignées de nos climats, c'est-à-dire avec le fil d’un amas de soie cardée qu'il fit filer, par-
vint à fabriquer des bas, des gants et autres objets. En 1710, Réaumur publia un mémoire sur
le même sujet, et montra que, malgré la difficulté, si l'on voulait obtenir un résultat satisfaisant,
il fallait opérer non sur la soie préparée, mais sur les fils tels qu'ils sortent de la filière, et il a
montré qu'il faudrait près de sept cent mille Araignées de notre pays pour obtenir une livre de
soie. Longtemps après, de 1777 à 4791, Raymondo Maria de Tremeyer fit en Espagne des expé-
riences nouvelles sur la soie d'Araignées, et principalement sur celle de l'Épeire diadème, tout
en faisant remarquer qu'il y aurait avantage à employer pour cet usage certaines grandes es-
pèces exotiques, comme l’Araignée aviculaire, par exemple; il réussit, ce qui a été répété depuis,
à obtenir directement la soie, à l’enrouler dans un dévidoir à mesure qu’elle sortait de la filière,
ct, tant par ce procédé qu’en cardant la soie, il parvint à fabriquer divers objets qui avaient l'éclat
et la finesse de ceux produits par le Ver à soie. Un négociant anglais, M. Rolt, a été récemment
plus heureux que Tremeyer dans les essais qu'il a faits pour dévider la soie d'Araignée; c’est en-
core sur l'Épeire diadème qu'il a opéré; ayant remarqué la facilité‘avec laquelle cette Arachnide
dévide son fil à mesure qu'on l’enroule, il mit en communication avec une machine à vapeur, et avec
une vitesse d'environ cinquante mêtres par minute, un dévidoir très-léger, autour duquel il enroula
le fil d’une Araignée à mesure qu'elle l’abandonnait, et il trouva que l'animal fournissait un fil
continu pendant un espace de trois à cinq minutes; un échantillon de soie, présenté à la Société
des arts de Londres, avait près de six mille/mètres, et avait été filé en moins de deux heures par
vingt-deux Araignées; ce fil est blanc, brillant, d’un aspect métallique : il est cinq fois plus fin que
le fil du Ver à soie, et, en supposant que la force relative soit proportionnelle à la finesse, et qu’une
Araignée fournisse deux fois l’an un fil de deux cent cinquante mètres, tandis que celui du Bom-
byx mori est de trois mille mètres, on voit que le produit de ce dernier est égal à celui de six
Araignées et demie. D'Azara rapporte qu’au Paraguay il existe une Araignée qui fait des cocons detrois
centimètres de diamètre, de couleur orange, que l'on file parce que sa couleur est permanente.
Alcide d'Orbigny nous a dit également que, dans son voyage dans l'Amérique méridionale, il s'était
276 HISTOIRE NATURELLE.
fait fabriquer avec des fils d'Aranéides un vêtement qui avait pu résister aux plus fortes fatigues.
Enfin tout récemment, un journal rapportait qu’en Chine, le pays natal des Vers à soie, on formait
cependant des étoffes soyeuses avec des fils d’Araignées.
Throughton à imaginé de substituer aux fils d'argent qu’on emploie pour les micromètres des
fils d'Araignées, et, ce moyen ayant réussi complétement, on le met en usage aujourd'hui.
Sous d’autres points de vue les Aranéides sont utiles à l’Iomme; elles détruisent, en effet, une
foule d Insectes qui lui sont nuisibles, et cependant en Europe où a une grande répugnance pour
ces êtres, et on s’empresse de les détruire dès qu'on les aperçoit. Des peuples sauvages, au con-
traire, les conservent avec soin, car ils savent qu’ils diminuent les Kakerlacs et d’autres Insectes
qui leur font du mal. Les habitants de la Nouvelle-Calédonie mangent avec délice une grande es-
pèce d'Épeire; quelques peuplades en agissent de même, et plusieurs Européens, parmi lesquels
nous pourrions citer l’astronome Lalande, en ont également mangé. On prétend que certaines es-
pèces ont une vertu aphrodisiaque, et causent à ceux qui les ont avalées une excitation dans les or-
ganes de la reproduction. Les anciens médecins employaient diverses Araignées dans leurs remèdes;
au Brésil, une espèce nommée Nhamdui, suspendue au cou, chasse, dit-on, la fièvre quarte. Enfin,
ce qui est plus certain, c’est que les toiles d’Aranéides ont la propriété d’arrêter le sang qui s’é-
panche dans les coupures ou dans les hémorrhagies : ces toiles ont-elles aussi, comme on l’a dit,
une vertu narcotique et antifébrile?
Ces Arachnides, comme nous l'avons dit, ne sont pas venimeuses. Aucune n'est nuisible à
l'Homme, et si leurs toiles donnent à nos appartements un aspect de saleté désagréable, le moindre
soin de propreté les fait disparaître. Cependant une espèce, le Theridion civicum, que M. H. Lucas
a fait dernièrement connaître, s'attaque aux murs de nos édifices, y formant des toiles qui y adhèrent
fortement et produisent ces taches noirâtres que l’on peut remarquer même sur des monuments ré-
cemment construits.
Les Aranéides sont susceptibles d’une sorte d'éducation, et peuvent venir même sur la main de
l'Homme rechercher leur nourriture : on cite, à ce sujet, des histoires intéressantes de prisonniers,
principalement celle de Pellisson, qui ont su les apprivoiser, et M. Léon Dufour a répété en partie
ces expériences. On dit qu'elles aiment la musique, et cela sur Ja foi de Grétry et de mademoiselle
de Béarn, comtesse de Villefranche, qui, comme le rapporte Walckenaër, a conservé pendant plus de
quatre ans une Araignée qu’elle gardait continuellement sur elle dans un flacon, -d’où elle ne sor-
ait que pour prendre sa nourriture et pour entendre le son du piano.
Le développement des Aranéides a été suivi avec soin par M. Mortz-Ilerold, et nous reuvoyons au
travail important de cet auteur. Les œufs sont excessivement nombreux, et il paraîtrait qu'un seul
accouplement suffirait pour les féconder dans les ovaires de la femelle, non-seulement pour plu-
sieurs pontes dans une même année, mais même pour les pontes qui se font dans deux années suc-
cessives; Tremeyer pense que les Aranéides ne recoivent le mâle qu’une fois dans leur vie, ce qui
pourrait expliquer le petit nombre des mâles comparativement à celui des femelles. Ils vivent, dans
le plus grand nombre des cas, isolément sur une toile; d'après d’Azara, quelques espèces habite-
raient en commun une seule et même toile. Les œufs sont différemment colorés: blancs en général,
on en connait de jaunes, de rouges, de vert tendre, de noirs, etc. Habituellement la femelle est plus
grosse que le mâle, et souvent la première dévore le second après l’accouplement. Les femelles seules
pourvoient aux soins que demandent les jeunes, et presque toujours elles enveloppent les œufs, en
nombre plus ou moins considérable, dans des cocons soyeux de formes assez variables, suivant les
espèces, et de couleurs parfois différentes. Souvent il n’y a qu'une ponte annuellement : on en re-
marque parfois deux : une au printemps et une en automne. Le cocon est presque toujours plus
gros que l’abdomen dela femelle. La diversité des lieux habités par les Aranéides et la nature de leurs
retraites ne sont pas moins variables que celles de leurs toiles et de leurs cocons. On connaît des es-
pèces, les Argyronètes, qui vivent dons l’eau; d’autres se pratiquent dans le sol des trous arrondis,
comme les Mygales; la plupart vivent à l'air libre, soit cachées dans des espèces de fourreaux, sous
des pierres, dans des creux d'arbres, ou restent purement et simplement à nu sur leurs toiles.
Les plus grandes Aranéides se trouvent dans les climats chauds, en Asie, en Amérique et en
Afrique; les plus petites espèces habitent l’Europe et s’y rencontrent parfois dans les contrées les
plus septentrionales. Les lieux qui produisent le plus d’Insectes sont ceux aussi qui possèdent le plus
ANNELES. — ARANÉIDES. 977
d'espèces de cette classe. Quelques-unes semblent cosmopolites. On sait avec quel soin, avec quelle
patience les Araignées guettent leur proie, et l’on comprend que la grosseur de celle-ci est propor-
tionnelle à celle de l’Aranéide. Ces animaux peuvent vivre longtemps sans manger; ils passent
l'hiver sans prendre de nourriture. On peut les transporter au loin sans les faire périr, et M. H. Lu-
cas a montré dernièrement à la Société entomologique une Mygale qui lui avait été adressée d’A-
mérique, et qui a pu vivre plusieurs mois à Paris. Beaucoup d'animaux recherchent les Aranéides
pour en faire leur proie : tels sont plusieurs espèces de Singes, les Écureuils, une Brebis noire qui,
dans les steppes de la Russie, déterre les Tarentules; un grand nombre d'Oiseaux, plusieurs Tor-
tues, Lézards, Grenouilles, Crapauds, des Scolopendres, divers Insectes, ete.
ù\:
Fig. 264. — Lycose Tarenlule narbonaise. (Femelle.)
Les obsérvations et les expériences modernes tendent à prouver que le venin des Aranéides est sans
action fàächeuse pour l'Homme, et que, dans les espèces des pays chauds, il peut tout au plus produire
une fièvre plus ou moins forte, mais bien loin d’être mortelle. Il n’est pas rare cependant de voir
des personnes qui, à leur insu, ont été piquées par quelques Insectes véritablement venimeux, at-
tribuer les suites fâcheuses qui résultent de ces piqûres à la morsure d'une Araignée, parce que c’est
souvent le premier animal qui s'offre à leur vue lorsque dans la nuit elles se trouvent réveillées en
sursaut par la démangeaison ou la douleur. Dans les climats chauds, qui nourrissent de très-grosses
Aranéides, la piqûre de celles-ci doit être plus forte et plus douloureuse, et, dans les moments de
grande chaleur, chez des personnes mal disposées, les effets négligés de la petite plaie qui résulte
de leur piqüre peut produire la fièvre, et celle-ci occasionner le délire sans l’action d'aucun
venin; telle est l’explication donnée par Walckenaër des effets extraordinaires attribués à la Taren-
tule en Italie et en Espagne, et à la Latrodecte malmignate, en Corse. Ces effets ont, au reste, été
très-exagérés; les observations qui les constatent sont toutes assez anciennes, et, dans le moment
où elles faisaient le plus de bruit, plusieurs observateurs consciencicux les ont traitées de fables. C’est
ainsi que, selon un assez grand nombre d'auteurs du dix-septième siècle, quand dans la Pouille on
était mordu, au temps de la canicule, par la plus grosse espèce de Lycose Tarentule, il en résultait
un spasme soudain, un froid mortel, puis une chaleur brûlante, une fièvre accompagnée d’un dé-
lire particulier, qui donnait une gaieté folle à celui qui en était atteint, et qui, sion n'y prenait
garde, pouvait se terminer par la mort. Le malade tarentulé criait, riait, dansait et faisait mille
contorsions et mille extravagances; il ne pouvait supporter la vue du rouge, et, au contraire, se ré-
jouissait à l'aspect du vert ou du jaune ; pour le guérir, on lui jouait deux airs : la Pastorale et la
Tarentula; alors le patient se mettait à danser, et on le laissait ainsi s'agiter jusqu’à ce que, épuisé
par la fatigue et par la sueur, il se laissät mettre au lit: là un sommeil de douze heures le rendait
à la santé, et il se réveillait sans se rappeler rien de ce qui s'était passé. Les femmes, à cause de
leurs longs vêtements, étaient le plus exposées à la morsure de la Tarentule; mais l'on a remarqué
que celles qu'on prétendait en avoir été atteintes, parce qu’elles présentaient des symptômes de ce
genre de fièvre qu'on nommait le farentisme, étaient celles qui se trouvaient dans l'âge critique du
278 HISTOIRE NATURELLE,
développement, ou d’autres, chez qui les évacuations particulières à ce sexe n'avaient pas lieu
régulièrement, ou d'autres enfin, d’une complexion particulière, offrant tous les indices d’un tem-
pérament inflammable et de nerfs singulièrement irritables.
Les espèccs connues d'Aranéides sont très-nombreuses et répandues sur toute la surface du globe,
et néanmoins le nombre des espèces décrites est très-peu considérable relativement à celui qui
reste à décrire. Beaucoup d'auteurs s’en sont occupés, et Walckenaër (Loco citato) a résumé tous
leurs travaux en y joignant les siens particuliers. Plusieurs classifications ont été proposées : pour
nous, dans l'indication des principaux genres que nous allons donner, nous suivrons celle de La-
treille, qui partage ces animaux en deux tribus particulières : les Aranéides tétrapneumones ou
Mygales, et les Aranéides dipneumones ou Araignées. '
4% tribu, ARANÉIDES TÉTRAPNEUMONES où My6ALEs, quatre poumons séparés à l'intérieur du corps,
et ayant au dehors quatre stigmtes apparents, qui sont l’ouverture de ses organes respiratoires;
yeux situés à l'extrémité du céphalothorax; mandibules et pattes très-fortes; trois crochets au bout
des tarses, peu ou point dentelés, fléchis au-dessous ou sur le côté inférieur; la quatrième paire de
pattes et ensuite la première les plus longues de toutes; filières au nombre de quatre : deux grandes
et deux petites.
Une première sous-tribu, les Terresrres, Walck., renferme les espèces qui habitent sur la terre,
suspendues dans l'air ou dans les cavités de rochers, d'arbres, de diverses plantes ou dans des trous
dans l’intérieur du sol. -
Dans la première section, les Vacagonnes, Walck., on trouve des Aranéides qui sortent et courent
hors de leurs habitations pour chasser et attraper leur proie.
La première sous-section, que Walekenaër nomme LarésricorEs, se cache dans des trous ou
des fentes, et comprend principalement les genres : MYGALE, Latr.; ATYPUS, Latr. (Oletera,
Walck.); ACTINOPUS, Perty (Sphodros, Walck.; Pachyloscelis, Lucas); GALOMMATA, Lucas; ERIO-
DON, Latr. (Missalena, Walck.); FILISTRATA, Latr.; DYSDERA, Walck., etc., pour la plupart
exotiques, et partagés en un assez grand nombre de races et familles selon Walckenaër.
Les MYGALES, surtout caractérisés par les crochets des mandibules repliés en dessous ; par leur
lèvre petite, presque nulle; leurs mächoires allongées, divergentes, cylindroïdes; leurs palpes
allongés, pédiformes; leurs pattes longues, fortes, peu égales entre elles, ete., renferment une
cinquantaine d'espèces et comprennent des types propres à l'ancien comme au nouveau conti-
nent. C’est aux Mygales qu’appartiennent les plus grandes Araréides connues : c’est ainsi que,
dans l'Amérique méridionale, on en rencontre qui, lorsque leurs pattes sont étendues, occupent un
espace cireulaire de vingt à vingt-cinq centimètres de diamètre, et on assure que ces énormes Arai-
gnées, que les colons nomment Araignées-Crabes, sont assez fortes pour s'emparer d'Oiseaux-Mou-
ches et de Colibris. Toutes, en effet, excessivement carnassières et chasseuses, recherchent active-
ment une proie vivante pour en sucer le sang et vont quelquefois loin de leurs demeures saisir
leurs victimes. Les espèces des pays chauds, dont quelques-unes passent, probablement à tort,
comme venimeuses, établissent leurs habitations dans les gerçures de l'écorce des arbres, entre les
pierres ou les feuilles, ou bien se forment un tube, dont le tissu fin et serré ressemble un peu à de
la mousseline. Les espèces européennes, propres aux contrées méridionales, beaucoup plus petites
que les autres, se logent dans l’intérieur de la terre, dans les lieux secs et montueux, et s’y forment
des galeries souterraines en forme de boyau, dont elles tapissent l'intérieur d’un tissu soyeux, et
dont elles ferment l'entrée à l’aide d’un couvercle garni d’une charnière et formé de plusieurs
couches de fils mêlés de terre gàchée : la disposition de cette sorte de porte est telle que son poids
seul suffit pour la fermer; mais quand l’Aranéide craint de voir sa demeure envahie par quelque
ennemi, elle s'accroche fortement à des trous pratiqués à la face inférieure de ce couvercle, du côté
opposé à la charnière et empêche de l'ouvrir. — Parmi des espèces, qui toutes sont de couleurs
sombres et noirâtres, nous citerons : la Mygale avicularia, Latr., espèce d'une longueur de 0®,06,
et qui se trouve communément dans l'Amérique méridionale, surtout à Cayenne et. au Brésil; et
ANNELÉS. -— ARANÉIDES. 279
cœæmentaria, Walck., espèce n'atteignant pas un centimètre, et qui n’est pas très-rare dans le midi
de la France. Nous représenterons (PI. XXXIX, fig. 8) la Mygale cancéroïde.
Les DYSDÈRES sont remarquables par la griffe des mandibules repliée sur la surface interne de
ces organes, qui sont très-forts; six filières; six yeux disposés en fer à cheval, et parce qu'ils se
logent dans un sac oblong, d’un tissu blanc, serré, ou dans des tubes de soie, sous les pierres et
dans les cavités des murs. On en connaît des espèces d'Europe; telle est la D. erythina, Walck., très-
commune dans toute la France, surtout vers le Midi, et retrouvée dans le nord de l'Afrique.
Les FILISTRATES enfin, qui se distinguent surtout des Dysdères en ce que leurs mandibules sont
petites, et que leurs huit yeux sont groupés sur une petite élévation, et dont le type est le F. bi-
color, Latr., longue de près de 0",02, d'une ccloration testacée livide, propre au midi de l’Europe,
fuyant le grand jour, et, tout en recherchant les lieux secs, se tenant toujours à l'abri du soleil.
(Voy. la figure de la Filistrate bicolore, page 272.)
2e tribu, ARANÉIDES DIPNEUMONES OU ARalGÉES, deux sacs pulmonaires, avec un stigmate extérieur
pour chacun, placé, un de chaque côté, à la base du ventre, dans quelques cas en même temps des
trachées; crochet des mandibules replié constamment sur la face interne de la pièce sur laquelle il
s'articule; appendices articulés de la partie anale, dont quatre composent les filières propres, au
nombre de six; languette saillante entre les mâchoires, qui portent extérieurement des palpes divisés
en cinq articles; organe copulateur très-compliqué, logé au moins en partie dans une cavité interne
du dernier article. Cette tribu, qui a pour type le genre Araignée, renferme la plupart des Ara-
néides, et comprend une cinquantaine de genres, ainsi qu'un nombre immense d'espèces propres
à toutes les contrées du globe.
La deuxième sous-section de Walckenaër, les Turicoes, comprend des espèces qui se renfer-
ment dans des tubes de soie, et qui ne forment que le genre SEGESTRIA, Walck.
Les SEGESTRIES, caractérisés par les yeux au nombre de six, presque égaux entre eux, rappro-
chés sur le devant du céphalothorax sur deux lignes; lèvre allongée, cylindroïde, plus étroite à la
base que dans son milieu, légèrement échancrée à son milieu et aux extrémités; mâchoires droites,
allongées, dilatées à la base, arrondies à l'extrémité; pattes très-fortes, allongées : les deux paires
antérieures les plus longues; deux poumons et en même temps des trachées. Les Aranéides de ce genre
sont lubicoles et vagabondes; elles forment, dans les interstices des murs et des rochers, en plein
air, ou dans les cavités souterraines, une toile peu étendue, horizontale, à tissu serré, à la partie
supérieure de laquelle se trouve un tube cylindrique, où elles se tiennent immobiles; à l’embou-
chure de ce tube sont dirigés, extérieurement, des fils, comme autant de rayons divergents; le cocon
est globuleux ou de forme ovoïde. Comme types nous citerons les S. perfida et senoculata, Walck.,
très-communes aux environs de Paris et dans toute l’Europe, qui filent dans les trous des murs un
tube de soie blanche.
La troisième sous-section, les Cezzuricoces, Walck., forment des petites cellules où elles se ren-
ferment, et comprennent les genres : SCYTODES, Latr., et UPTIOTES, Walck.
Les SCYTODES ont six yeux rapprochés, disposés par paires : les deux antérieurs sur une ligne :
transverse, les deux latéraux de chaque côté écartés des antérieurs et placés sur une ligne longitu-
dinale inclinée, ete. Espèces errant lentement, tendant des fils lâches qui se croisent en tous sens et
sur plusieurs plans, à cocons arrondis, enveloppés de bourres, habitant l'Europe, et ayant pour type
la S. thoracica; Latr., qui se trouve auprès de Paris, en Belgique, dans le nord de l'Afrique, etc.
La quatrième sous-section, les Coureuses, Walck., qui, comme l'indique leur nom, courent avec
agilité pour attraper leur proie, renferment les genres : LYCOSA, Walck.; DOLOMEDES, Walck.;
STORENA, Walck.; CTENUS, Walck.; HERSILIA, Sav.; SPHASUS, Walck.; MEGAMYRMECKION,
Reuss (Dyction, Walck.); DOLOPHONES, Walck., presque tous européens.
Les LYCOSES, le genre le plus nombreux et le plus important de cette division, renferment des
espèces ayant huit yeux inégaux entre eux, formant un parallélogramme allongé, placés sur le de-
280 HISTOIRE NATURELLE.
vant et les côtés du céphalothorax, sur trois lignes transversès presque égales en longueur; une
lèvre en carré; des mächoires droites, écartées, larges; des pattes allongées, fortes : la quatrième
paire un peu plus longue que les autres, ete. Les Lycoses chassent pour attraper leur proie, et por-
tent leur cocon attaché à la partie anale, soignent leurs petits et les portent sur leur dos. On y
forme trois groupes : 1° Terrénies, presque toutes les espèces qui se retirent dans des trous en terre
ou dans les fentes des pierres et des arbres; le type est la Tarenrue (Lycosa tarentula, Latr.), donton
a tant parlé et dont nous avons exposé l’histoire dans nos généralités sur les Aranéides. Longue d’un
peu moins de 0,01, à céphalothorax noir avec deux lignes latérales rougeâtres; habite surtout l'Italie,
principalement la Pouille, ainsi que les environs de l’antique Tarente, et a été prise en Espagne,
auprès de Valence. 2° les ConsaiREs, qui courent à la surface des eaux, et ont des cocons aplatis : type
L. piratica, Walek., se trouve dans toute l’Europe, sur le bord des étangs et des mares.-3° les Porre-
QueuEs (L. albimana, Walck., de Paris), qui courent à terre et se cachent sous les pierres, et ont des
cocons sphériques.
Fig. 265 — Thomise arrondi. Fig. 266. — Ségestrice perfide. Fig. 267. — Atte formicaire.
La cinquième sous-section, les Voriceuses, Walck., comprend des espèces pour la plupart d'Eu-
rope, sautant avec facilité pour attraper leur proie. Genres : MYRMECIA, Latr.; PALPIMANUS,
L. Duf. (Platyscelum, Aud.; Chersis, Latr.); ARESUS, Latr.; ATTUS, Walck. (Salticus, Latr.).
Les ATTES, sur lesquels nous devons revenir, ont luit yeux inéqaux, disposés sur trois lignes :
quatre sur l'antérieure et deux sur chacune des postérieures; la lèvre est allongée; les mâchoires
étroites, ete. Les Attes, qui renferment une centaine d'espèces, épient leur proie, la saisissant à
la course ou en sautant, et se renferment dans un sac de soie très-fine, entre des feuilles qu'elles
rapprochent, dans des réceptacles de fruits, des coquilles vides, des fentes et des cavités de
pierres, etc. Beaucoup sont très-communes en Europe; tel est l'A. scenicus, Walck. — Nous repré-
sentons (PI. XL, fig.6) l’Érèse cinabérine.
La sixième sous-section, les Marcueuses, comprend des Aranéides qui marchent de côté et en ar-
rière, et tendent occasionnellement des fils pour prendre leur proie. Genres : DELENA, Walck.,
ARKYS, Walck.; THOMISUS, Latr.; ERIPUS, Walck.; SELENOPS, Sav.; PHILODROMUS, Walck.
OLIOS, Walck.; CLASTES, Walck.; SPARASSUS, Walck. (Micommata, Latr.).
Le groupe principal, celui des THOMISES, renferme des espèces à huit yeux presque égaux, occu-
pant le devant du céphalothoraæx et placés sur deux lignes; à lèvre grande; mächoires allongées; man-
divules courtes; pattes articulées pour être étendues latéralement. Elles marchent de côté, avec len-
teur, épient leur proie, tendent des fils solitaires pour l'arrêter, se cachent sous des feuilles qu’elles
rapprochent, et produisent des cocons aplatis. On en connaît plus de soixante espèces répandues
partout; le type est le T. rotundatus, Walck., très-abondant aux environs de Paris. — Nous figurons,
outre les Thomises déjà indiqués (PI. XXXIV, fig. 4) l’Éripe hétérogastre.
Dans la deuxième section, les Erranres, Walck., on trouve des espèces errant autour des nids
qu’elles ont construits ou des fils qu’elles ont tendus pour attraper leur proie.
ANNELÉS. — ARANÉIDES. 281
La septième sous-section, les NirinèLes, sont des Aranéides errantes, mais se faisant de leur nid
une toile où aboutissent des fils pour saisir leur proie. Genres :-CLUBIONA, Walck.; DESIS, Walck.;
DRASSUS, Walck.
Les DRASSES ont huit yeux inégaux, sur deux lignes; mächoires en cintre; mandibules robustes,
se construisent, sous les pierres, dans les murs ou entre les feuilles, des cellules de soie blanche.
Type D. fulgens, Walck., commun auprès de Paris.
La huitième sous-section, les FixirÈLes, sont errantes, mais tendent de longs fils de soie dans les
lieux où elles se meuvent. Genres : CLOTHO, Walck. (Uroctea, L. Duf.); LATRODECTUS, Walck.;
PHALEUS, Walck.; ARTEMA, Walck.
Les LATRODECTES, à huit yeux presque égaux, placés sur deux lignes écartées, légèrement diver-
gentes, etc., comprennent surtout le L. malmignatus, Walck., propre à la Corse et à l’île d'Elbe,
qui se nourrit du sang des Scorpions, et auquel on a attribué des propriétés venimeuses.
Dans la troisième section, les Sénenraires, Walck., on trouve les espèces qui se construisent de
grandes toiles pour attraper leur proie, et qui se tiennent au milieu ou à côté.
La neuvième sous-section, les Turirèces, se fabriquent des toiles à tissu serré, en hamacs, et y
restent pour attendre les Insectes dont ils se nourrissent. Genres : ARANEA, Linné (eee
Walck.); LACHESIS, Sav.; ARACHNE, Sav. (Agelena, Walek.); NYSSUS, Walck.
Le groupe principal est celui des ARAIGNÉES, aujourd’hui plus généralement désignées sous le
nom de TÉGÉNAIRES, ayant huit yeux, dont quatre antérieurs disposés sur une ligne courbe; les
mâchoires droites, plus ou moins dilatables vers le bout. Ces Aranéides construisent, dans l'inté-
rieur de nos maisons, et au dehors sur les haïes, sur les pierres, etc., une grande toile à peu près
horizontale, à la partie antérieure de laquelle est un tube où elles se tiennent sans faire de mouve-
ment; elles y placent aussi leurs œufs renfermés dans une double enveloppe soyeuse, qui adhère
au reste de la toile. Le type est l’Ararcnée pomesrique (Araneus domesticus, Clerck) (PI. XXXIV,
fig. 5), qui habite toute l'Europe; nous citerons aussi l'A. agrestis qui se trouve communément
dans la campagne.
La dixième sous-section, les OrprrèLes, comprend des espèces qui tendent des toiles à mailles
ouvertes, régulières, en cercles ou spirales, et qui se tient au milieu pour attraper leur proie
Genres : EPEIRA, Walck.; DE Latr.; EUGNATHA, Sav. (Tetragnatha, Walck.); ULO-
BORUS, Walck.
Les ÉPEIRES, très-nombreuses en espèces, ont huit yeux, presque égaux, placés sur deux lignes :
les quatre intermédiaires formant un carré, et les latéraux très-rapprochés, ete. Type l'Épeire
diadème (Epeira diadema, Clerck); grande espèce roussâtre, veloutée, dont on voit en automne les
toiles nombreuses dans les jardins de nos environs et de presque toute l'Europe. — Nous donnons
(PL. XXXIV, fig. 2) une Epeira, réprésentée par Palisot Beauvois.
La onzième sous-section, les Tarirères, ne renferme que le genre LINYPHIA, Walck., ayant huit
yeux, dont quatre disposés au milieu en trapèxe, comprenant des espèces faisan! des toiles étendues
en nappes, et suspendues au milieu de réseaux réguliers. Type L. triangularis, Walck., de Paris.
La douzième sous-section, les RérirèLes, à espèces formant des toiles à mailles ouvertes, à ré-
seaux irréguliers, et se tenant au milieu ou à côté. Genres : ARGUS, Walck.; EPISINUS, Latr.; THE-
RIDION, Walck.
Ces deux derniers genres offrent huit yeux, dont quâtre au milieu en carré : les deux antérieurs
placés sur une petite éminence, et deux de chaque côté, situés également sur une élévation commune.
On en connaît un grand nombre d'espèces partagées en huit groupes. Comme type nous nommerons
le T. triangulifer, Walck., espèce assez rare, qui se trouve dans les maisons, et sur laquelle M. Dou-
merc a présenté d'intéressantes observations. :
À. 36
283 HISTOIRE NATURELLE.
Une seconde sous-tribu, des Aranéides, est celle des Aquariques, Walck., comprenant une espèce
nageant dans l’eau, y. logeant dans une cellule pleine d'air, y tendant des fils pour attraper sa
proie, dont on a fait la seconde section des Naceuses, et la treizième sous-section des AquirÈLes, ne
renfermant que le genre ARGYRONETA, Latr., et spécifiquement la seule À. aquatica, Walck., qui
se trouve dans les eaux tranquilles et dormantes d'une grande partie de l'Europe.
Les ARGYRONÈTES ont huit yeux, dont quatre médians représentent un quadrilatère, et les
deux situés de chaque côté plus rapprochés l'un de l'autre et portés sur une éminence, et dont les
mächoires sont plus hautes que larges, écartées. L'Argyronète aquatique, qui est d’une couleur
brun noirûtre, vit dans les eaux dormantes, nage l’abdomen entouré de bulles d’air, et se con-
struit pour demeure une coque ovale remplie d'air, et attachée aux plantes des environs par un
grand nombre de fils; retirée dans cette loge, elle guette sa proie et garde assidüment le cocon dans
lequel elle renferme ses œufs.
Il est, dans toutes les classifications en histoire naturelle, de ces groupes qui, par l’ensemble des
caractères que présentent les espéces qui y entrent, appartiennent à la fois à des divisions primaires
assez éloignées les unes des autres. C’est ce qui a lieu pour quelques animaux qui vont nous oc-
cuper, dont Latreille faisait son ordre des Aporoërancues, qu'il plaçait parmi les Arachnides, d’abord
comme seconde famille des Arachnides trachéennes, puis à la suite des Aranéides, et qui, comme
nous l'avons dit dans un autre volume de cet ouvrage, semble devoir se rapporter à la classe des
Crustacés.
Les APoroBRANCHES ont pour caractères : corps composé de quatre segments, occupant presque
toute sa longueur, et terminé à chaque extrémité par un article tubulaire, dont l'antérieur plus
grand, tantôt simple, tantôt accompagné d'antennes fixes ou de palpes, ou d'une seule sorte d'or-
ganes constituant la bouche; huit pattes propres à la course : femelles offrant en outre deux fausses
pattes, situées près des antérieures et servant à porter les œufs; pas d'ouvertures extérieures pour
l'appareil de la respiration.
On voit combien ces êtres, par quelques-uns de leurs caractères, et surtout par le nombre des
organes de la locomotion dans l’un des sexes, et par les appendices accompagnant le siphon, se rap-
prochent des Crustacés, et principalement des Læœmodipodes, comme l’a montré Savigny.M Milne-
Edwards les regarde comme des Crustacés chez lesquels la tête n’est pas distincte, et en fait son
ordre des Aranéiformes. Ms se trouvent parmi les plantes marines, sous les pierres près du rivage,
et parfois également sur les arbres. Latreille les subdivise en deux familles.
Dans les Nympuonies, le corps et les pattes sont longs; le siphon est accompagné d’appendices
consistant en deux chelicères, et souvent aussi en deux palpes. Trois genres principaux : 1° NYM-
PHON, Fabr.: corps très-long, très-étroit, grêle, ne comprenant qu'un thorax, ayant à sa partie
antérieure un suçoir tubulé portant des mandibules et des palpes. Type N. grossipes, Fabr.,
(PI. XXXV, fig. 5) des mers du Nord. 2° AMMOTHEA, Leach: corps quadriarticulé, avec tous les
seyments pédigères, présentant antérieurement un tuberucule et offrant deux yeux distincts :
une espèce, À. Carolinensis, Leach, des mers de la Caroline; et 3° PHOXICHILUS, Latr. : corps
portant des pieds très-longs, des mandibules en avant et pas de palpes. Type P. phalangioides,
Latr., des mers australiennes.
Dans les Pyexoconives, différant des Nymphonides en ce quela partie antérieure du corps est suns
mandibules et palpes, on ne range que le genre PYCNOGONON, Brunn., à corps ovalaire, à pattes
de moyenne grandeur, et ne renfermant que le P. balanarum, Fabr., trouvé sous des pierres dans
l'Océan européen.
a ANNELES. -—— PÉDIPALPES. 285
DEUXIÈME FAMILLE. — PÉDIPALPES.
Les PÉnipazres, ou Scorpioniens, n'ont pas de filières comme les Aranéides, et se reconnaissent
aisément à leurs grands palpes en forme de bras et terminés en pince ou en griffe, à leur gaîne té-
gumentatre assez solide, et à leur abdomen composé de plusieurs seyments distincts.
Les Arachnides rangées dans cette famille comprennent au moins deux types assez différents lesuns
des autres, les Phrynéides et des Scorpionides qui, comme nous l'avons dit, ont pour caractères com-
muns : deux grands palpes en forme de serres, terminés en pince didactyle ou par une griffe; deux
chelicères ou antennes-pinces finissant de la même manière; un abdomen toujours revêtu, ainsi que
le céphalothorax, d'une peau coriace, à segments membraneux, bien séparés les uns des autreset sans
filières au bout; organes reproducteurs des deux sexes situés à la base du ventre; yeux lisses, dis-
posés en trois groupes écartés, dont deux latéraux et le troisième médian. Ils diffèrent entre eux
principalement parce que les Phrynéides n'ont que quatre paires d'organes respiratoires sous forme de
branchies et un nombre semblable de stigmates extérieurs, huit yeux, ete., tandis que les Scorpio-
nides, s’éloignant sous ce rapport des autres Arachnides, ont constamment huit branchies, de six à
douze yeux, etc. Ges animaux, moins nombreux en espèces que les Aranéides, sont souvent de taille
moyenne pour des Arachnides, et sont propres aux pays chauds, principalement aux contrées
intertropicales.
1" tribu, Purvnémnes, céphalothorax d'une seule pièce en dessus, pourvu d'une languette styloide
en dessous; abdomen pédiculé, discoide, de dix anneaux, souvent boutonné à son extrémité, mais
dépourvu d'appendices génitaux en forme de peigne; mächoires et palpes monodactyles, terminés
par une griffe : palpes plus ou moins longs, épineux sur le bras, l’avant-bras et la main; jambes
el tarses de la première paire de pattes décomposés en un grand nombre de petits articles, gréles,
flagelliformes : turses des autres pattes triongulés ou à deux ongles : jambes de deux articles aux
deuxième et troisième paires de pattes, et de trois à la quatrième; huit yeux : deux très-rappro-
chés, sur la ligne médiane, près du bord antérieur du céphalothoraæx, et trois bilatéralement en
triangle, à la hauteur des pattes de la seconde paire; respiration pulmonaire; anus terminal.
. Cette division, dont on exclue, à l'exemple de M. P. Gervais, le genre Télyphone pour le reporter
parmi les Scorpionides, ne renferme que le seul genre PHRYNE, Oliv. Ce sont des Articulés propres
aux contrées chaudes du globe, et principalement aux régions septentrionales de l'Amérique et de
l'Asie; le corps de certains d’entre eux a 0",04 de longueur, et comme leurs palpes et leurs pattes
antérieurs ont ordinairement beaucoup de développement, leur volume paraît encore plus considé-
rable qu’il n’est réellement, et leur aspect a quelque chose de repoussant. Ce qui fait encore re-
garder les Phrynes comme redoutables, c’est que les nègres de Saint-Domingue disent qu'ils sont
venimeux comme les Scorpions. Comme type nous nommerons le P. reniformis, Pallas, propre au
Brésil : que nous réprésentons (PI. XXXIV, fig.1). Une espèce fossile a été signalée dans les gypses d'Aix.
2° tribu, Scorrionines, palpes didactyles, de même que les mächoires ou chélicères; céphalothorax
d'une seule pièce en dessus, sans languette inférieure; abdomen multiarticulé; deux à douxe yeux,
dont une paire souvent médiane, plus forte que les autres; respiration pulmonaire, etc.
Les Scorpionides, tels que nous venons de les caractériser, ne renferment, selon M. P. Gervais,
que les trois genres principaux, ou groupes plus élevés, des Télyphones, Scorpions et Pinces ou Ché-
lifères; mais, pour nous conformer à la classification de Latreille, nous ne parlerons pas actuelle-
ment du dernier d’entre eux.
4® groupe, TéLypnones, céphalothorax d'une seule pièce en dessus, deux pièces en dessous; abdo-
men ovaluire allongé, de huit segments : terminé par un appendice cordiforme composé de petits
articles; huit yeux : deux en une paire en arrière du chaperon : trois plus petits ou ocelles de
chaque côté du céphalothorax, derrière la base des mandibules; mâchoires formant une petite main
284 HISTOIRE NATURELLE. - “
ou chélicère didactyle; palpes dilatés en dessous, à bouche qui est épineuse et fait l'office de lèvre
inférieure, à trochanter, également épineux, remplissant les fonctions de mandibules, à cuisse
simples, à jambes ou bras spinifères, et à tarse ou corps didactyle, avec le doigt externe mobile sur
l'interne; six pattes : première paire gréle, à jambe longue, tarse antenniforme : autres paires
propres à la course, à tarses de cinq articles. Ce groupe ne renferme que le genre TELYPHONUS,
Latr., que Fabricius appelait Tarentula, dénomination généralement abandonnée; ces animaux,
qui vivent dans l'Amérique du Sud et dans l'Inde, ne sont pas connus sous le rapport de leurs habi-
tudes. Ils semblent n'avoir aucun organe vénéneux, bien que dans les pays où on les trouve, et où
on les indique sous la dénomination de vinaigriers, d’après l'odeur qu'ils répandent, on les redoute
beaucoup; mais leur ressemblance extérieure avec les Scorpions en est peut-être la seule cause.
M. H. Lucas en a publié une monographie. Comme type nous indiquerons le T. caudatus,
Fabr., d’un brun rougeàtre foncé en dessus, plus clair en dessous, commun à Java ; nous figurons
(PI. XXXIV, fig. 3) le Telyphone géant.
2 groupe, Scorpions, corps allongé, multiarticulé; céphalothorazx scutiforme en dessus, portant
de six à douze yeux disposés en une paire médiane plus grosse, et de deux à cinq paires latérales
plus petites, souvent inégales; thorax représenté en dessous par une plaque double entre les han-
ches des troisième et quatrième paires de pattes; abdomen de douxe articles : sept premiers élargis
en ventre, cinq derniers cylindracés, cordiformes, dernier portant l'anus; huit paires d'appendices,
deux pour la mastication, quatre pour la marche; maxilles ou première paire d'appendices masti-
cateurs, petites, didactyles; mandibules grandes, terminées par une main didactyle, servant à la
préhension; pattes composées de sept articles, dont le dernier offre deux ongles.
Fig. 268. — Scorpion africain.
Ce groupe ne renferme que le genre SCORPIO, de Linné, partagé en plusieurs groupes génériques
par les auteurs modernes. Les particularités qu'offrent les Scorpions ont occupé plusieurs natu-
ralistes, et plus particulièrement Latreille, Savigny, Dugès; G.Cuvier, Meckel, Treviranus, J. Muller,
Amorena, MM. Léon Dufour, Marcel de Serres, P. Gervais, ont étudié l'anatomie de ces animaux
et surtout celle des espèces indigènes. Le canal intestinal s'étend directement de la bouche à l'anus;
il est grêle, et présente quelques renflements ou rétrécissements qui portent les noms d'œsophage,
d'estomac et d’intestin proprement dit; des canaux biliaires s’y déversent. Les organes respiratoires,
au nombre de quatre paires, qui ont reçu longtemps le nom de poumons, sont des sortes de bran-
ANNELÉS. — PÉDIPALPES. 285
chies ou bourses munies à l’intérieur d’un certain nombre de petites lames ou feuillets perpendicu-
laires à leur grand diamètre et s'ouvrant au dehors par des stigmates. Le système circulatoire est
analogue à celui des Insectes; il y a un cœur, des vaisseaux qui se rendent aux divers organes, et
surtout le vaisseau dorsal logé dans la rainure médiane qui sépare en deux lobes le corps adipeux
interne, dilaté et étranglé successivement, et prolongé jusqu’à l'extrémité de l’appendice caudal. Les
muscles sont assez forts, d’un gris clair, formés de fibres simples et droites. Le système nerveux, situé
inférieurement sur la ligne médiane du corps, est formé de ganglions successifs, tous inférieurs au
canal intestinal, à l'exception du premier, qu’on appelle cerveau : on distingue des nerfs nombreux.
Les organes génitaux des mâles, de même que ceux des femelles, sont doubles comme dansles autres
Arachnides, et présentent des particularités qui ont été surtout rapportées par M. Léon Dufour.
La plupart, sinon tous les Scorpions, sécrètent par leur abdomen un venin très-dangereux pour
les animaux et même pour l'Homme. Ce venin est distillé par une glande renfermée dans une vési-
cule articulée à l'anneau anal de l'abdomen, et il sort à l'extérieur par une paire d’orifices poncti-
formes allongés, placés bilatéralement sur la pointe de l’aiguillon. Déjà Aristote, Pline, Gallien,
Tertullien, Élien, Aldrovande, Leuwenhoek, Redi, Maupertuis, s'étaient occupés du venin des Scor-
pions ainsi que de l’organe qui le produisait, et les auteurs modernes n’ont pas négligé ce sujet
important. Mais si les anciens ont souvent parlé des animaux qui nous occupent sous le rapport de
leur piqûre, l'incertitude dans laquelle on est encore aujourd'hui sur ses effets avait également lieu
de leur temps. Les Scorpions peuvent être alternativement funestes ou innocents, mais sans que l’on
puisse se rendre bien raison de la différence des effets de leur piqûre. Celle-ci a des conséquences
bien différentes suivant les pays et les climats, et surtout la disposition des personnes piquées;
Aristote rapporte que la piqüre des Scorpions de Phare et d’autres endroits n’est pas dangereuse,
tundis qu'elle est mortelle dans ceux de Carie; c’est peut-être là une exagération, mais Pline en
ajoute une bien plus extraordinaire en disant que les Scorpions du mont Latmus ne font aucun mal
aux étrangers, landis qu'ils tuent les gens du pays. Plutarque rapporte qu'on a vu des personnes
saines manger des Scorpions sans en être incommodées; Élien cite l'habitude qu’avaient les prêtres de
Coptos, en Égypte, de fouler impunément aux pieds les Scorpions, quiabondent autour de cette ville.
Quoi qu’il en soit, et sans preuves convaincantes, l’opinion la plus répandue est encore aujourd’hui
que la piqûre des Scorpions peut être mortelle, et les gens qui n’ont pas expérimenté par eux-mêmes
le soutiennent aussi bien pour la petite espèce de nos provinces méridionales que pour les grandes
espèces d'Afrique, de l'Inde ou d'Amérique, chez lesquelles cependant cela est bien plus manifeste-
ment vrai, ainsi que l'ont rapporté Barrère, Perty et plusieurs autres, qui disent que la mort peut
suivre la piqûre du Scorpion. Il semble ne résulter pour l'Homme, de la piqûre de nos Scorpions
d'Europe, qu’une inflammation locale plus ou moins vive, accompagnée de fièvre et d’engourdis-
sement, et quelquefois de vomissements, de douleurs dans tout le corps et de tremblements; pour
combattre ces accidents, les médecins conseillent l’usage de l’ammoniaque administrée à l’intérieur
aussi bien qu’à l'extérieur, et l’application de substances émollientes sur la plaie. Rédi, Maupertuis
et Amorena sont souvent parvenus à tuer des animaux de grande taille, comme des Chiens et des
Pigeons, en les faisant piquer par des Scorpions, mais leurs expériences n’ont pas toujours eu le
même résultat, et le premier observateur que nous venons de citer a vu un Scorpion en piquer un
autre sans que la mort du second en ait suivi Les petits animaux, et surtout les Insectes piqués
par les Scorpions, meurent presque toujours instantanément, et c’est le but que la nature s'était
proposé en donnant aux Articulés que nous étudions un appareil venimeux qui leur permit d’at-
teindre facilement la proie dont ils ont besoin pour leur alimentation. En marchant, les Scorpions
tiennent leur queue élevée et toute disposée à frapper la victime qu'ils convoitent ou l'ennemi qui
voudrait les attaquer. Ils marchent très-rapidement et saisissent leur proie avec leurs serres.
{ls vivent en général dans les lieux arides, souvent dans les endroits sombres, et se glissent par-
fois dans les habitations, dans les amas de bois et d’autres objets. On les rencontre rarement en-
semble et, si par hasard on en réunit plusieurs, il n’est pas rare qu'ils se battent entre eux, se tuent
même et s'entre-dévorent. Les mâles sont moins nombreux que les femelles, qui sont plus grosses
qu'eux et qui, assure-t-on, tuent leurs mâles après l’accouplement. Le nombre des petits peut s’é-
lever jusqu’à soixante, mais il est souvent moindre. La génération est ovovivipare, et, à leur nais-
sance, les petits sont portés par la mère comme ceux des Lycoses. Ratké a étudié le développement
s
280 HISTOIRE NATURELLE.
du Scorpio europæus. On connaît aujourd’hui une centaine d'espèces de ce genre, et M. le profes-
seur P. Gervais a fait connaître la plupart d’entre elles dans le troisième volume des Aptères des
Suites à Buffon de l'éditeur Roret. Les Scorpions se rencontrent principalement dans l'Amérique du
Sud, dans l'Asie continentale et insulaire, dans l’Afrique méridionale; on en trouve également,
mais en moins grand nombre, dans le nord de l'Afrique et dans le midi de l’Europe.
La classification des Scorpions a occupé plusieurs zoologistes, tels que Leach, MM. Hemprich et
Ehrenberg, Kock, etc., qui y ont fondé un grand nombre de genres créés principalement d’après le
nombre et la disposition des yeux, genres dont on trouvera la description dans les ouvrages spéciaux.
M. P. Gervais n’admet parmi ces groupes que les suivants, qu’il regarde même comme de simples
sous-genres : Anprocronus, Hempr. et Ehr., pourvus de douxe yeux; Cenvrurvs, Hempr. et Ebr., qui
ont dix yeux; Arreus, Kock, à dix yeux : les latéraux éqaux, équidistants sur une même ligne, ce
qui n’a pas lieu dans les précédents; Tezrconvs, Kock, Gerv., yeux du vertex à peu près médians,
latéraux petits, très-serrés, difficiles à voir; Buraus, Leach, Gerv., huit yeux : trois latéraux sur
une méme ligne, le postérieur plus petit, un peu reculé; Cuacras, Gerv., deux paires d'yeux seule-
ment; Sconrius, Hempr. et Ehr., deux yeux latéraux; Iscununus, Kock, Gerv., huit yeux : ceux du
vertex entre le premier et le deuxième tiers de la tête, latéraux au nombre de trois, à peu près
égaux, placés sur une même ligne.
Parmi les Scorpions, beaucoup d’espèces des régions chaudes sont très-remarquables par leur
grande taille. L'Europe n'en possède que deux que nous nous bornerons à faire connaître, ce sont:
4° le Scorpion roussarre (Scorpio Buthus, Leach; Androctonus, Gerv.; occitanus, Amorena), long
à peu près de 0®,04, d’un blanc jaunâtre sale; propre à l'Égypte, à la Grèce, à l'Italie, au Langue-
doc, à l'Espagne et à la Barbarie; 2° le Scorpion d'Europe ou Scorpion jaune à queue, de Géer
(Scorpio europæus, Schranck), long de 0,005, d'un brun très-foncé, noirâtre : espèce très-variable
qui se trouve dans tout le midi de l’Europe, depuis la Crimée jusqu’en Espagne : habite plusieurs
parties de l’Europe tempérée et se rencontre également dans le nord de l'Afrique. — On en indique
des espèces fossiles.
DEUXIÈME ORDRE:
ARACHNIDES TRACHÉENNES.
Cet ordre comprend des espèces d’Arachnides qui, pour la plupart, sont organiquement plus
simples que les Pulmonaires, quoique l’on doive avouer que certaines espèces trouveraient plus
naturellement leur place auprès de certains groupes de Pulmonaires, plutôt que d’en être séparées.
Les Trachéennes, comme l'indique leur nom, respirent par des trachées et non par des poumons;
les stigmates, au nombre de deux et ordinairement peu perceptibles, sont placés dans les uns près
de l'origine externe des pattes, et dans les autres sur le ventre. Le céphalothorax est souvent très-
petit comparativement à l'abdomen, qui est confondu avec lui, formant une masse plus où moins
arrondie ou ovoïde, et n'offrant, dans la plupart, aucune trace de segments ou d’articulations. Yeux
invisibles dans quelques-uns, au nombre de quatre au plus. Pattes au nombre de huit ou dix dans
les deux sexes.
Les Arachnides trachéennes sont habituellement très-petites, à peu d’exceptions près, comme
pour les Galéodes, Chélifères, ete.; beaucoup même sont microscopiques, comme les Acares, etc.
Malgré cela elles n’en jouent pas moins un rôle très-important dans Ja nature, puisqu'elles rongent et
corrompent plusieurs substances alimentaires, qu’ellesse fixent en parasites sur divers animaux, où
ils se multiplient d’une manière si effrayante qu'elles peuvent les faire périr. L'Homme lui-même
n’est pas à l'abri de leurs attaques, et on leur attribue l'origine de certaines maladies, comme la
ANNELES. — FAUX-SCORPIONS. 287
A
gale, la dyssenterie, ete., et il est certain qu’ils peuvent propager la première de ces maladies. Quel-
ques espèces sont simplement phyllophages.
Peu connus de Linné, de Fabricius et même de Latreille, ces animaux ont surtout été étudiés,
dans ces derniers temps, par Hermann, Dugès, M. Kock, ete., et aujourd’hui on en décrit un grand
nombre qui peuvent être placés dans les familles des Faux-Scorpions, PHALANGIENS et ACARIENS.
PREMIÈRE FAMILLE. — FAUX-SCORPIONS.
Cette famille, assez peu naturelle, renferme des espèces qui devraient, comme les Chélifères, ren-
trer dans les Pédipalpes. Les caractères généraux de cette division sont les suivants : corps ovale
ou oblong; thorax articulé avec le céphalothorax, beaucoup plus grand en forme de corselet; abdo-
men très-distinct, annelé; palpes très-grands, en forme de pieds ou de serres; pieds au nombre de
huit, avec deux crochets égaux au bout des tarses, les deux antérieurs au plus exceptés; deux an-
tennes-pinces ou chélicères apparentes, terminées par deux doigts et deux mächoires formées par
le premier article des palpes.
Les Faux-Scorpions, assez peu nombreux en espèces répandues en Europe, en Afrique et en Amc-
rique, se partagent en deux genres principaux.
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Van pr N
Et
Fig. 269. — Pince scorpioide. (Très-grossi).
4er genre, PINCE ou CHÉLIFÈRE (Chelifer, Geoffr.) : corps multiarticulé, scorpioïde, sans pro-
longement uroïde de l'abdomen, sans queue, sans aiquillon ni appendices pectiniformes de l'appa-
reil génital; anneaux abdominaux presque semblables; appendices masticateurs et ambulatoires
comme dans les Scorpions; deux ou quatre yeux sur le bouclier céphalothoracique en une ou deux
paires, pas d'yeux médians ou sur le vertex. Les Pinces sont en quelque sorte des Scorpions de très-
petite taille et privés de queue, aussi pendant longtemps ont-ils été placés dans le même groupe.
Quoique, à l’exemple de Latreille, nous les mettions dans deux ordres différents, ils n’en sont pas
moins sérialement placés à côté les uns des autres. Ces animaux habitent les mêmes pays que les
Scorpions et se voient dans des régions où l’on ne rencontre pas ces derniers; l'Europe en possède
plusieurs et ils s'étendent plus vers le Nord. Leurs mœurs sont à peu près les mêmes, mais ils ne
sont pas venimeux. Îls se tiennent à la surface du sol humide sous les plantes herbacées ou sous
les mousses; il y en a aussi sous l'écorce des arbres, sous les pierres, les pots de fleurs, etc., et d’au-
tres se trouvent dans les maisons et se fourrent souvent dans les papiers, dans les livres, dans les
herbiers; une espèce serait parasite, dit-on, de la Mouche domestique. Leach les partage en CHELIFER,
à une seule paire d'yeux et à céphalothorax marqué d'un sillon transversal, et en Omiscrun, à deux
paires d'yeur, et à céphalothorax non ou rarement partagé par un sillon transversal. Parmi les
nombreuses espèces de ce genre nous ne citerons que la Pince cancroïne (Chelifer cancroides, Lin.),
288 HISTOIRE NATURELLE.
longue de 0®,004, d’un brun obscur en dessus, plus pâle en dessous; se trouvant partout, et sur les
mœurs de laquelle de Géer, Ræœsel, Hermann, Kellemann, M. de Théis, etc., ont publié des obser-
vations intéressantes. — M. Gervais pense que ce genre doit rentrer dans la famille naturelle des
Scorpions, et que les Bdella, rangés dans les Acarides, doivent aussi y être réunis, et il ajoute
que quelques auteurs regardent les Limules non comme des Crustacés, mais comme les représen-
tants aquatiques de la même division.
2e genre, GALÉODE ou SOLPUGE (Galeodes, Oliv.; Solpuga, Lichtenstein): corps ovalaire al-.
longé, velu, divisé en trois parties assez distinctes : tête, thorax, abdomen; mächoires didactyles,
robustes; palpes sans crochets; deux yeux au bord antérieur ne a tête; céphalothorax de trois ar-
ticles en dessus, de cinq en dessous; abdomen distinct, de dix articles; anus terminal; première
paire de pattes sans ongles, les autres pourvues de deux griffes: hanches des dernières lamellifères.
Les Galéodes sont propres aux contrées chaudes et sablonneuses de l’ancien continent; on les trouve
en Asie, en Afrique et dans le midi de l’Europe: MM. de Humboldt et H. Lucas en ont décrit plu-
sieurs espèces américaines. Leurs mœurs sont peu connues; on sait seulement qu'elles ne filent
pas, qu'elles aiment l’obscurité, qu’elles courent très-vite et attrapent leur proie avec agilité. M. le
capitaine Hulton dit qu’une espèce, la G. vorax, du Bengale, est très-vorace, qu’elle peut dévorer
d'assez gros Lézards, des Moineaux, etc., qu’elle est très-irascible, mais qu’elle épargne constam-
ment sa progéniture. Ces Articulés ont la réputation d'être venimeux; mais Olivier, qui a eu occa-
sion d’en voir beaucoup dans son voyage en Perse, n’a jamais pu constater un fait authentique sur
le danger de leur blessure. M. Kock, dans une monographie de ce genre, en porte le nombre des
espèces à vingt-neuf, et il les subdivise en cinq groupes : Soruca, Gazéones, ÆcLorus, Raax et GLuvia.
Nous citerons : la GaLÉODE comÉnienxe (Galeodes scenica, Fabr.), noire avec des lignes blanches, dela
Grèce, de l’île de Crète, du royaume de Naples, ete.; et le Scorpion Araïcnée (G. areneoides, Pallas),
qui habite la Russie méridionale, la Sardaigne, l'Espagne, ete. Les espèces des pays chauds, comme
du Bengale, d'Amboïde et de l’Afrique australe, etc., sont moins petites, et leur taille peut dépasser
0®,01 et au delà. |
DEUXIÈME FAMILLE. — PHALANGIENS.
Le genre Faucueur (Phalangium), et quelques groupes qui en sont plus ou moins rapprochés,
forment une famille ayant pour caractères communs : céphalothorax d'une seule pièce en dessus;
deux yeux constamment placés sur le vertex; abdomen contracté, multiarticulé, à arceaux infé-
rieurs confondus et parfois aussi les supérieurs; pinces ou mailles didactyles; mandibules palpi-
formes, plus ou moins longues, filiformes ou épineuses; huit pattes onguiculées, souvent très-grandes;
des trachées et des stigmates, quand on les a observés, situés à la naissance des pattes postérieures
et cachés par leurs hanches.
Les Phalangiens qui, réunis aux Acariens, forment la division des Hozèrres de quelques auteurs,
sont des Arachnides de taille moyenne, tout à fait inoffensives, luciluges, vivant de petits Insectes,
ornées de fort jolies couleurs, et remarquables par leurs pattes très-allongées dans le plus grand
nombre de cas : ce qui leur donne un aspect très-singulier et tout à fait particulier. On en connaît
des espèces de toutes les parties du monde; mais c’est principalement en Amérique et en Europe,
dans les parties méridionales de ces continents, qu’elles sont le plus abondamment répandues.
Lister, de Géer, Geoffroy, Linné, Pallas, Herbst, Hermann, Lichtenstein, Fabricius, Olivier, n’ad-
mettaient dans cette famille que le genre Phalangium; Latreille y fonda deux autres genres;
MM. Kirby, Guérin-Méneville, Hope, Gervais, en formèrent également quatre autres; mais c'est sur-
tout MM. Perty et Kock qui y créèrent, dans ces derniers temps, un assez grand nombre de coupes
génériques. L’anatomie de quelques espèces, commencée par Hermann, a été donnée plus compléte-
ment par Tréviranus, Savigny et M. P. Gervais. Le canal intestinal du Faucheur commun se partage
en deux parties : un estomac, qui est une poche rétrécie vers la bouche, dilatée dans son milieu et
Fig. 2 — Gamase des Coléoptères. Fig. 5. — Mégamère vif. Fig. 4. — Hydrachne globuleuse.
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Fig D. — Nymphon à grosses pattes
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ANNELES. — PHALANGIENS, ACARIENS. 289
rétrécie au pylore, et un intestin court, droit, d'une seule venue. L’anus est percé dans le dernier
anneau abdominal. 11 y a un vaisseau dorsal. Un fait curieux est la persistance de la vitalité dans
les membres séparés du corps. La reproduction de ces animaux est ovipare, dans nos espèces eu-
ropéennes du moins. Le mâle est quelquefois très-différent de la femelle.
1® groupe, Gonycerres : palpes épineux; pattes inégales : postérieures très-cloignées des autres,
les plus grandes, à cuisses très-développées; abdomen plus ou moins contracté, caché sous le cépha-
lothorax, surtout chez les mâles. Tous les Gonyleptes sont américains : une espèce seulement, le P.
anacosnetus, Gerv., proviendrait de la Nouvelle-Hollande. Les genres admis par les auteurs sont les
suivants : GONYLEPTUS, Kirby; OSTRACIDIUM, Perty; GONIOSOMA, Perty; DOLICHOSCELIS, Hope;
STYGNUS, Perty; EUSARCHUS, Perty; MITOBATES, Sund ; PHALANGODUS, Gerv., etc.
Les Gonvzerres ont le céphalothorax trigone, épineux en arrière, recouvrant l'abdomen, et les
hanches des pattes postérieures rarement mutiques, souvent épaisses, épineuses. On y range un assez
grand nombre d'espèces, et le G. spinipes, Perty, en est le type.
2° groupe, Paarancres : palpes non épineux; pattes égales ou presque égales pour la longueur;
abdomen plus ou moins caché sous le céphalothorax. Les Phalangies sont des Arachnides de taille
moyenne, remarquables par leurs longues pattes; c’est parmi elles que l’on trouve nos espèces eu-
ropéennes de Faucheurs; on en rencontre beaucoup dans l'Amérique méridionale, et il en existe
dans presque toutes les parties du monde. Les genres des auteurs sont ceux des : COSMETUS, Perty;
DISCOSOMA, Perty; PHALANGIUM, Linné; TROGULUS, Latr.; CRYPTOSTEMMA, Guérin, ete.
Les FAUCHEURS ou Phalangium, ont surtout le corps ovoide ou orbiculaire; les pieds égaux,
longs, et l'abdomen libre, c'est-à-dire n'étant pas caché par le céphalothorax. Les Faucheurs sont
très-agiles, et vivent les uns à terre, les autres sur les arbres; ils ont recu des pattes aussi longues
que les leurs non-seulement pour pouvoir marcher plus facilement sur les buissons, sur les plantes,
mais encore pour mieux échapper à la poursuite de leurs ennemis, et pour être avertis de leur
présence; placés sur un mur, sur le tronc d’un arbre, ils étendent leurs pattes d’une manière cir-
culaire, et ils occupent ainsi un espace assez considérable : un animal vient-il à toucher quelqu’une
de leurs parties, ilsles relèvent aussitôt, et les pattes forment autant d’arcades sous lesquellesl'animal
passera s’il est petit, mais si le danger est pressant, le Faucheur a bientôt sauté à terre. La fuite est
prompte, car dans l’espace d’une seconde ils parcourent un sixième de mètre. Ils s’échappent aussi
souvent des doigts qui les ont saisis, mais c’est ordinairement en y laissant quelques-unes de leurs
pattes, qui se désarticulent facilement. Les Faucheurs renferment une cinquantaine d'espèces généra-
lement européennes, mais dont quelques-unes sont étrangères. M. Koch a cherché à subdiviser ce
genre, et il a proposé d'y former les genres des Phalangium, Opilio, Nemastoma, ete. Dans nos cam-
pagnes on trouve ordinairement au printemps de petits Faucheurs qui proviennent des œufs déposés
l'automne précédent. Ce n’est guère que vers la fin de l’été qu'ils ont pris tout leur accroissement :
c’est alors qu’ils s’accouplent, puis ils ne tardent pas à mourir, ear leur vie est loin d'être aussi
longue que celle des Aranéides. On a constaté, en France, l’existence d’au moins douze espèces de
Faucheurs; comme espèce principale nous citerons seulement le Faucueur pes muraizces, de Géer
(Phalangium cornutum, Linné), qui se trouve dans toute l’Europe et est très-commun en automne
dans les jardins et dans les bois des environs de Paris (pl. XXXV, fig. 1). Des espèces fossiles ont été
signalées dans les calcaires de Solenhofen (Phalangium priscum, Munster), dans les gypses d'Aix et
dans le succin. — Les TROGULES se distinguent des Faucheurs par leur corps plus allongé, plus dé-
primé; par leurs yeux plus écartés; par leurs pattes plus courtes, etc.; le type est le Trogulus nepi-
formis, Latr., qui se trouve sous les pierres dans les bois, principalement dans l’Europe méridionale.
TROISIÈME FAMILLE. — ACARIENS.
Les Mites ou Acarus des anciens auteurs, tels que de Géer, Geoffroy, Linné, ete., constituent l’im-
mense famille des AcatiEns ou Acanines, que Leach nommait Monomerosomata. La définition de
="
91
A.
200... HISTOIRE NATURELLE.
cette division est trés-difficile, parce que beaucoup de genres, dont les caractères diffèrent, y ont
été réunis, et que, malgré le grand nombre d'espèces décrites, leur organisation est loin d’être suf-
fisamment connue. Cependant, d’une manière générale, et pour la plupart des espèces, on peut les
définir des Arachnides, qui n’ont l'abdomen ni annelé ni pédiculé; qui présentent une bouche con-
ormée en une sorte de suçoir; organes de lu mastication n'étant pas libres, mais plus ou moins en-
veloppés dans une gaîne ou une sorte de cuiller formée par la lèvre inférieure; palpes maæillaires
étant seuls libres, et leur extrémité ordinairement armée d’un crochet ou d’une petite pince; yeux
au nombre de quatre, de deux, d’un seulement ou nuls.
Fig. 270. — Sarcople de la gale. Fig. 271. — Trombidie Fig. 279. — Sarcopte de la gale.
(En dessus.) du Faucheur. (En dessous.)
Les Acariens sont presque tous excessivement petits, et pour la plupart ne peuvent être étudiés
qu’à l’aide d'instruments grossissants, principalement du microscope : aussi sont-ils imparfaitement
connus, et les figures qu’on en a publiées et qui seules peuvent en donner une bonne idée ne sont-
elles pas toujours aussi soignées qu'elles devraient l'être. Ils pullulent beaucoup et sont presque
constamment parasites des animaux ou des végétaux, et même de l'Homme, quoique quelques-uns
vivent d'autres substances organiques à l’état plus ou moins avancé de putréfaction, et de substances
qui en proviennent, comme le fromage par exemple. On en connaît de partout, mais ce n’est guère
qu'en Europe qu'on les a plus spécialement étudiés. Ils sont terrestres ou aquatiques. |
Le système nerveux est ganglionnaire et inférieur au canal intestinal. [l n’y a pas de traces de
l'organe de l’ouie ni de celui de l'odorat; la gustation n’a pas d’organe spécial; les yeux sont disposés
par paires, et transformés en stemmates dans les Bdelles : il n’y a que de simples taches de pigment
chez les Hydracnes, et ces organes disparaissent tout à fait dans les Oribates, Sarcoptes et Gamases.
Les antennes et pédicules oculifères n'existent pas. La peau, molle chez les espèces aquatiques et
chez celles qui vivent cachées et à l'abri de tout choc, est endurcie chez d’autres qui se trouvent au
dehors, mais sans offrir les divisions de tête, de thorax et d’abdomen, quoique parfois fractionnée
en anneaux ou segments distincts. Le canal intestinal est court, ramifié en canaux latéraux à la
partie stomacale et ouvert à la partie inférieure de l'abdomen. La respiration est trachéenne, et les
stigmates, au nombre de deux, sont placés bilatéralement à la naissance inférieure de l'abdomen.
Il y a quatre paires d'appendices locomoteurs dans l'animal adulte, mais le jeune individu n’en
offre toujours que trois. Les pattes ont des formes et des proportions variées selon les espèces : chez
quelques-unes, telles que les Sarcoptes, elles ne se développent qu’imparfaitement, dans d’autres elles
sont toutes plus ou moins garnies de poils qui en font des sortes de rames; quelquefois courtes, elles
peuvent être aussi très-longues. Les appendices buceaux, qui donnent de bons caractères, sont au
nombre de deux paires. Ceux de la première paire, ou les maxilles, sont fréquemment en pinces et
plus longs que ceux de la seconde paire, dont la partie la plus développée recoit le nom de palpes :
ANNELÉS. —. ACARIENS. 291
ces derniers distingués sous différents noms suivant leur forme, de même que les pattes proprement
dites. Outre l'espèce de métamorphose produite par l'augmentation des pattes suivant l'âge des
Acariens, on a également signalé des changements importants dans la bouche et dans quelques au-
tres parties de l'organisme. Le corps est ovalaire, rarement sphérique ou plus ou moins allongé,
et l'animal est toujours petit ou microscopique, mais se distinguant par des couleurs très-vives et
souvent rougeûtres. Presque tous sontovipares. C'est surtout dans le jeune âge qu’ils sont parasites :
quelques-uns le sont pendant toute leur vie, mais d’autres cessent de l'être à l’âge adulte. Les mœurs
de ces animaux, qui vivent soit en parasites, soit dans les lieux sales et humides, varient considéra-
blement. Hermann les réunissait aux Phalangiens sous le nom spécial d’Holètres.
Aristote emploie le nom d’Axepr (formé de l’«, privatif, et de zepo, je coupe) pour désigner un
Acarien qui semble être notre Mite ou Ciron du fromage, et c'est de ce mot que vient la dénomina-
tion d’Acarus. Les anciens naturalistes, tels que Rédi, de Géer, Geoffroy, Müller, Schranck, Linné,
Fabricius, connaissaient peu ces animaux, quoiqu'ils s'en soient occupés: Hermann commença à
débrouiller leur histoire; puis vinrent les travaux plus récents et plus importants de Leach, La-
treille, Cuvier, de Lamarck, Nitzsch, Heyden, Sundevall, Koch, Dujardin, L. Dufour, etc., et surtout
de Dugès (Ann. Sc. nat.), et de M. P. Gervais (Insectes aptères, 1. I, 4844), qui résuma com-
plétement ce qui avait été fait par ses devanciers.
1tribu, BDELLES (Bdella, Latr.) : palpes antenniformes; mâchoires terminées en griffes ou en
pinces; bec en formé de tête allongée; yeux au nombre de deux à six, rarement nuls; un corselet plus
ou moins distinct de l'abdomen, qui est multiarticulé. Les Bdelles ont une grande analogie extérieure
avec les Pinces : ce sont de petits animaux à corps plus ou moins mous, assez agréablement colorés,
vivant dans les lieux humides; leurs mouvements sont lents, et ils peuvent, comme les Chélifères,
marcher à reculons: Heyden forme dans ce groupe des genres (Bdella, Cyta, Cunaxa) basés sur le
nombre apparent des articles des palpes; M. Koch y crée un genre Amonia; M. Dujardin y joint un
genre Molqus; enfin Dugès, considérant que chez les uns les palpes sont ronds, obtus, et chez les
autres courbés, filiformes à la pointe, y indique deux meilleurs genres : ceux des BveLLa pour les
premiers, et des Scrus pour les seconds. On en connaît une vingtaine d’espèces toutes européennes.
L'une d'elles, répandue partout, et que l’on a considérée à tort comme parasite de l'Homme, est l'A.
longicornis, Linné, excessivement petit, d'un rouge écarlate, à bec plus long que le corselet.
2e tribu, TROMBIDIONS (Trombidium, Fabr.) : palpes ravisseurs ou à dernier article obtus : le
second très-grand et l'avant-dernier onguiculé; yeux ordinairement latéro-antérieurs; pattes ambula-
toires, c’est-à-dire onguiculées. Par plusieurs de leurs caractéres et par leurs habitudes, les Trombi-
dions se rapprochent des Faucheurs, qu’ils semblent, en quelque sorte, reproduire en miniature.
Leur corps est excessivement mou et ne permet pas de les conserver facilement. On en trouve sou-
vent dans les lieux ombragés par des plantes peu élevées, et surtout dans les prairies; quelques
espèces à corps velu préfèrent les endroits desséchés; on en prend aussi sous les pierres et sous d’au-
tres abris; ils vivent isolément ou en familles plus ou moins nombreuses. Leur couleur est générale-
ment rouge ou brune. Dans le jeune âge, ils vivent fréquemment en parasites sur des Insectes et sur
des Arachnides; etcependant pendant toute leur vie ce sont parfois des parasites de certains végétaux.
On indique une centaine d'espèces de Trombidions, toutes de petite taille, et étudiées presque uni-
quement en Europe; aussi, Hermann, Latreille, Leach, M. L. Dufour, et surtout M. Koch, y ont-ils
formé un grand nombre de genres et de sous-genres, dont les principaux, admis par M. P. Gervais,
sont ceux des : Caevcerus, Latr.; Terraruyneuus, L. Duf.; Mecamerus, Dugès; Pacuyexaraus, Dugès;
Parmexaraus, Dugès, Swanis, Latr.; Ervrurævs, Latr: (Rhyncholophus, Dugès); Axisns, Ileyden:
caractérisés par des particularités tirées de la disposition de leurs palpes, de leur bec, de leurs
pattes, etc. Parmi les espèces nous citerons : le Cheyletus eruditus, Schranck, qui se trouve dans les
livres et dans les musées; le Tetrarhynchus telarium, Herm., nommé Acare tisserand, parce qu'il
enduit de fils parallèles et étouffe certaines plantes dans les serres et les jardins; le Megamerus
inflatus, Dugès, du midi de la France, où il vit sous les mousses en peuplades nombreuses; le Pa-
chygnathus villosus, Dugès, espèce automnale; le Raphignathus ruberrimus, Dugès, représentant
comme un point rouge, abondant en France; le Smaris papillosus, Herm., que l’on trouve surtout
999 HISTOIRE NATURELLE.
sur les troncs d'arbres; l'Erythræus Hermanni, Dugès, qui se voit sur la terre et entre les feuilles
sèches; le Trombidium holocericeum ou Mrrg saTINÉE TERRESTRE, de Géer, d’un beau rouge, qui ap-
parait en abondance dès la fin de l'hiver, se rencontre partout sur les murs, sur les arbres, sur le
sol; et l'Anystis ruricola, Dugès, qui est commun sous les pierres, dans le midi de la France. (Voy.
le Mégamère vif, pl. XXXV, fig. à.)
3° tribu, HYDRACHNES (Hydrachna, Müller) : palpes ancreux ou à pointe aiguë, épineuse, à
troisième ou quatrième article ordinairement le plus grand; corps mou, divisé en segments; han-
ches larges; pattes habituellement en rames, onguiculées, cilices, croissant de la première paire à
la quatrième; yeux supéro-antérieurs. Les Hydrachnes, par leur genre de vie essentiellement aqua-
tiques, au moins dans l’âge adulte, avaient depuis longtemps recu les dénominations d’Araignées
d'eau et de Mites aquatiques, et forment pour quelques auteurs une famille particulière d’Acariens.
Ils sont ovipares et essentiellement aquatiques; presque toutes sont fluviatiles, mais il y a aussi des
espèces marines. Parmi nos espèces fluviales, quelques-unes se rencontrent sur les plantes aqua-
tiques; beaucoup vivent librement au sein des eaux, et s’y nourrissent d'animaux ou de débris de”
végétaux, plusieurs sont parasites dans leur premier âge. On en trouve entre les lames branchiales
des Anodontes, et, selon M. Baër, on en a vu dans les oscules des Spongilles. L'immense majorité
des Hydrachnes connues vit en Europe; on en a signalé cependant d'Amérique et d’autres parties
du monde. On connaît aujourd'hui plus de cent espèces d'Hydrachna, dont de Géer, Müller, Dugès
ct M. Koch se sont spécialement occupés, et parmi lesquelles ils ont fondé un grand nombre de
genres, dont les principaux, les seuls que nous puissions citer, sont les suivants : Arax, Fabr., Du-
gès; Dirzoponrus, Dugès; Arrnenurus, Dugès; Evzais, Dugès; Limnocnares, Latr.; Hvpracuna, Müller,
Dugès. Parmi les espèces typiques nous citerons : l'Ilvoracane ArLEQUIN (A{ax histrinica, Herm.), qui
se trouve abondamment répandu dans les eaux tranquilles de l’Europe; l'H. scapucaire (Diplodontus
scapularis, Dugès, dont la femelle ressemble un peu à une petite Chrysomèle, mais dont le mâle est
beaucoup plus aplati, qui se trouve communément en petites troupes dans les eaux douces du midi
de la France, et chez lequel on a observé des métamorphoses très-manifestes, le petit ou la larve
étant, en sortant de l'œuf, loin de ressembler à ses parents; l’Arrenurus cuspidutor, Müller, qui,
comme plusieurs de ses congénères, a l'habitude de rejeter en dessus et en avant sés pattes posté-
rieures, et est abondant partout; l'Eylais extendens, Müller; la LinxocHare sariNée (Acarus aqua-
ticus, Lin.), qui ressemble beaucoup à un Trombidium, genre dans lequel Fabricius la plaçait : elle
ne nage pas, mais marche au fond de l’eau, à la surface du sol, comme si elle était à terre; et l’H.
SANGLANTE (Hydrachna cruenta, Müller), d’un beau rouge, commune dans toute i Europe. — Nous
Hgurons (pl. XXXV, fig. 4) l'Hydrachne globuleuse.
4° tribu, GAMASES (Gamasus, Latr.) : palpes filiformes, libres, c'est-à-dire à articles à peu près
égaux en épaisseur et ne variant guère de longueur; mandibules médiocres, en pinces didactyles, non
denticulées, plus où moins avancées; pieds de grandeur variable, à peu près égaux dans chaque
espèce, à dernier article terminé par deux griffes et une caroncule vésiculiforme ow bien par une
membrane lobée; pas d'yeux. Les Acariens, assez nombreux, essentiellement terrestres et de taille
qui n'est pas excessivement petite, qui se rapportent aux Gamases, sont en général parasites; on en
trouve sur les Mammifères, les Oiseaux, les Reptiles terrestres et les Insectes qui habitent dans les
mêmes circonstances : une espèce (l’Acarus marginatus), selon Hermann, vivrait dans l’intérieur du
corps de l'Homme, et un individu aurait été trouvé dans le cerveau près de la glande pinéale d'un
soldat grièvement blessé et mort à l'hôpital. Plusieurs Gamases vivent à terre et se tiennent dans les
lieux humides et ombragés, courant à la surface du sol ou sur les plantes avec beaucoup de rapi-
dité, et plusieurs sont considérés comme parasites de diverses plantes. Ceux qui sont parasites des
animaux ne restent pas le plus souvent immobiles et fixes sur un point déterminé du corps, mais
ils changent de place, et parcourent la surface de leur victime avec une grande facilité. Ils ne s’en-
lent pas autant que le font les Ixodes. Ces Acariens ont été surtout étudiés par Hermann. Latreille,
Heyden, Dugès, MM. Héring, Léon Dufour, Koch, etc., y ont fondé un assez grand nombre de coupes
génériques, telles que celles des Carpas ou Gamasus, Latr.; Uropopa, Latr.; Derwanyssus, Dugès, ou
Suaripia, Duméril; Caris, Latr.; Cecerpes, Montagu (Spinturnix, Meyden, Pteroptus, L. Duf.);
ANNELÉS. — ACARIENS. 293
Anças, Latr. (Rlynchoprion, Herm.); Hocoruyras, Gerv. Nous devons revenir sur plusieurs espèces
remarquables de ces divers groupes, telles sont : Ja Mire nes Cocéoprènes, Geoffr. (4. Coleopterorum,
Lin.), type du genre Gamasus (pl. XXXV, fig. 2), que l'on rencontre sur le corps d’un grand nombre
d'Insectes, principalement sur celui des Coléoptères, ainsi que dans les excréments des bestiaux;
l’Unorone vécéranr (Acarus vegelans, de Géer), qui a un pédicule à sa partie anale, servant à se fixer
sur divers Coléoptères fouisseurs, et pouvant vivre en hiver libre et placé sous des pierres; Derma-
NYSSE DES PETITS OisEAUx (D. avium, Dum.), qui attaque les petits Oiseaux, surtout en captivité, et se
réfugie dans l'intérieur des bâtons; D. Boryi, Gerv., espèce douteuse, qui serait sortie du corps
d'une femme; le Caris vespertilionis, Latr., parasite d’une Noctule; l’Anças pe Perse (A. Persicus,
Fischer), ou Puxarse 6 Mrana, qui remplacerait notre Punaise des lits dans l'Orient, mais dont la
piqûre serait très-dangereuse; et l'Holothyrus coccinella, Gerv., de la taille de la Coccinelle septem-
punctata, propre à l’île de France, et tendant à lier les Gamases aux Oribates.
5° tribu, IXODES (Ixodes, Latr.) : palpes canaliculés ou valviformes; maxilles en crochets; un
bouclier gastrique; deux yeux placés près du bord abdominal de ce bouclier. Les Ixodes, de taille
moyenne pour des Acariens, sont tous parasites des animaux; au moyen des crochets dont leurs appen-
dices buccaux sont armés, ils se fixent principalement au corps des Mammifères, en sucent le sang et
ne tardent pas à se gonfler outre mesure, leur abdomen prenantalors l'apparence d’une boule, dont
le volume est souvent décuple de celui qu'il avait primitivement. On en connaît qui sont parasites
d'Oiseaux et de Reptiles : Chéloniens, Sauriens et Ophidiens terrestres, etc., et la même espèce peut
se retrouver sur plusieurs animaux spécifiquement différents. Parfois les Ixodes enfoncent telle-
ment leur suçoir dans la chair des Chiens, des Bœufs ou d’autres animaux qu'on ne peut les en
détacher qu’en enlevant la portion de peau qui y adhère, et l’on assure que la multiplication de ces
parasites est quelquefois si considérable qu'ils font périr d’épuisement les Bœufs et les Chevaux sur
lesquels ils sont fixés. L'Homme n’est pas exempt de leurs attaques, et fréquemment ils se fixent
sur les chasseurs ou les voyageurs; les Chiens en ont plus souvent encore, et Aristote déjà désigne
ceux qui se fixent sur la peau de ces derniers sous le nom de Kuvopæoôns, dont Hermann s’est em-
paré pour faire son genre Cynorhæstes. Actuellement les Ixodes sont vulgairement désignés sous
les dénominations de Tiques et de Riaixs. Souvent on en trouve qui errent librement sur les végé-
taux; ils semblent ovovivipares. Quoiqu’on ait élevé le genre Ixones au rang de famille, on n’a pas
cherché encore à le subdiviser en groupes secondaires. On y comprend plus de cinquante espèces,
presque toutes européennes, mais dont quelques-unes se rapportent aux autres parties du monde.
Les espèces les plus remarquables sont : 1°la Tique nes Cuarens ou [xone micin (Acurus ricinus,
Linné; Ricinus caninus, Ray), d'un beau violet : l’un des Ixodes communs sur le Chien de chasse;
29 Ixone RÉDUVE (Acarus reduvius, de Géer), d’un rouge jaunâtre, parasite du Mouton et de quel-
ques animaux, comme les Cerfs, les Chiens, les Martres, etc.; 3° Ixone DE LA MÉsance (1. pari, Leach),
d'Angleterre, sur la Mésange grande charbonnière; 4° Ixone Nicua (Ixodes americanus, de Géer),
qui, en Amérique, attaque l'Homme et les animaux, etc. C'est l’Ixode pu Hérisson, que nous repré-
sentons (pl. XL, fig. 9).
6° tribu, ORIBATES (Oribata, Latr.) : corps de forme variable : allongé ou ovalaire; enveloppe
externe d'une grande dureté, ce qui l’a fait comparer à une cuirasse; bouclier dorso-abdominal
parfois unique, parfois coupé transversalement, de manière à simuler un thorax; plaque ventrale
portant les ouvertures génitale et anale, séparée souvent du bouclier dorso-abdominal par un re-
bord; yeux nuls ou non apparents; pattes plus ou moins longues, à un, deux ou trois ongles. — Les
parties de la bouche sont assez difficiles à reconnaître ; la carapace qui recouvre le corps est ailée
bilatéralement, et plus ou moins aiguillonnée de petites épines ou de poils très-forts, ce qui donne
à la physionomie des Oribates quelque chose de singulier. Ces Arachnides, qu'Hermann nommait
Notaspis, sont petites, de couleurs variées, et se trouvent le plus souvent sur la terre et quelquefois
dans les eaux, comme les : Oribata demersa, qui aurait un œil médian, et qui a été trouvée par
M. Dujardin dans un ruisseau à Fontainebleau sur l'Hypnum demersa, et l'O. marina, Duj., prise
sur des plantes marines à Lorient. Ils semblent tous être phytophages, ne sont pas parasites des ani-
maux, et sont eux-mêmes attaqués par certains Acariens, tels que les Dermanysses.
294 HISTOIRE NATURELLE.
On ne connaît qu’un peu plus d’une vingtaine d’Oribates; mais comme les espèces sont notable-
ment différentes les unes des autres, plusieurs auteurs, tels que Heyden et Koch, y ont formé un
certain nombre de genres, dont les plus importants sont ceux des : Norumus, Koch; Becva, Heyden
(Damœus, Koch); Gazumxa, Heyden; Hopornora, Koch; Sizrisaxo, Heyden, et Cæcuzus, L. Dufour.
Comme type spécifique nous ne citerons que l’OrrBaTe cmarain, Oribata (Nothrus) castanea, Herm.,
commun dans toute l’Europe, dont Dugès a décrit les nids qu’il a trouvés à la surface de quelques
grosses pierres, et auquel doit probablement se rapporter un genre Xenillus fondé par Robineau-
Desvoidy, et qu’il plaçait à tort parmi les Coléoptères.
Te tribu, ACARES (Acarus, Müller) : bouche disposée en rostre. Tel est l'unique caractère impor-
tant qui fasse réunir en une division les derniers Acariens que nous avons encore à étudier, et qui
peuvent se subdiviser de la manière suivante :
Les Acares ProprEMENT pirs (Acarus, Müller) ou Tyroczypnes Tyr oglyphus, Latr , Walck. : à
corps étranglé entre la deuxième et la troisième paire de pattes par une rainure transversale qui
semble la partager en thorax et en abdomen; pattes presque égales, vésiculaires. Ce genre a été par-
tagé en plusieurs groupes particuliers, tels que ceux des : Glyciphaga, Héring; Myobia, Heyden, et
Hyopus, Dugès, qui n’en diffèrent pas très-notablement, renferme une trentaine d'espèces, dont
quelques-unes détruisent nos substances alimentaires et d’autres sont parasites de divers animaux.
La plus célèbre est le Cinon pu FRoMAGE, Geoffr., ou Acare nowesriQue (Acarus domesticus, de'Géer;
Tyroglyphus siro, Héring), ayant un peu l’aspect d’un petit Coléoptère, blanchâtre, se trouvant en
grand nombre d'individus sur le fromage un peu fait, et formant par son association ainsi que par
ses œufs et ses fèces les vermoulures qu'on y remarque souvent. L’A. longior, Lyonet, habite avec
le précédent certains fromages, et surtout ceux de Gruyère et de Hollande. L’A. lactis, Fabr., qui
vit dans la crème conservée longtemps dans des vases ou dans ceux-ci. LA. dyssenteriæ, que Nyan-
der dit avoir constaté dans les déjections des personnes atteintes d’une dyssenterie qui, pour lui, est
une gale de l'intestin. L’A. (Glyciphagas) hippopodos, trouvé par Héring dans les croûtes ulcé-
reuses des pieds des Chevaux. La Mrre nes Moucues (A. Muscarum, Dugès), parasite de Diptères, etc.
Les Tricaonacryses (Trichodactylus, L. Duf.), remarquables par leur rostre court, garni de petites
soies, et leurs pattes de la quatrième paire plus courtes que les autres et garnies d'une longue soie.
On n'y groupe que le T°. Üsmiæ, trouvé par M. L. Dufour sur deux espèces d'Osmia, et par M. Bigot
sur le Xylocopa violaceum.
Les Psoropres (Psoroptes, Gerv.) à COTpS MOU, déprimé, épineux en dessous, au collier et à la
base des pattes; une des deux paires de pattes postérieures ou toutes les deux complètes ou caron-
culées et sétigères. La seule espèce de ce genre est le Psororre pu Cuevar (Sarcoptes equi, Héring),
qui vit en grand nombre dans les croûtes écailleuses formées de pellicules agglutinées qui recouvrent
la peau des Chevaux aux endroits atteints de la gale. C’est probablement par cet Acarien que cette
terrible maladie se transmet si souvent du Cheval à l'Homme.
Enfin les Sarcopres (Sarcoptes, Latr.) caractérisés par leur corps mou, armé de crochets au
collier et à la base des pattes; par leurs deux paires de pattes postérieures rudimentaires, lonque-
ment sétigères, et leurs deux paires antérieures seulement vésiculigères. Les Sarcoptes sont tous
parasites de l'Homme et des Mammifères, et se trouvent en grand nombre d'individus chez ceux qui
sont attaqués de la gale. L'espèce la plus connue est le Sarcopre où CIRON DE LA GALE DE L'HOMME
(Acarus ou Sarcoptes scabiei, de Géer); il est blanc, ponctiforme, à corps marqué en dessus de
stries en arc de cercle à son pourtour, et de petits mamelons à son milieu; l'abdomen est terminé
par deux grandes soies, ayant extérieurement auprès d’efles deux paires de soies”plus petites. Cet
Aptère vit dans la gale humaine dont il est l'origine. Longtemps ce fait a été nié par les médecins,
et il n’y a guère qu'une vingtaine d'années qu'à la suite d'observations plusieurs fois répétées il a
dû être admis par tout le monde. Nous regrettons de ne pouvoir entrer dans quelques détails à ce
sujet; nous aurions voulu pouvoir montrer que l'Acare qui produit la gale avait été indiqué dès le
douzième siècle, et qu’il a fallu cependant en venir aux travaux récents de MM. Raspail, Renucci et
de plusieurs aütres, pour que son existence ne fût plus niée; nous renvoyons aux ouvrages spéciaux
\
ANNELÉS. — CRUSTACÉS. 295
et au long résumé qu'en a présenté M. P. Gervais. Deux autres Sarcoptes sont les S. rupicapræ, des
croûtes galeuses du Chamois, et Dromedarii, Gerv., de la gale du Dromadaire : cette dernière es-
pèce est bien distincte du Sarcopte de l'Homme, quoique ayant une forme analogue. La gale du Dro-
madaire peut facilement se transmettre à l’Ilomme; comme l’Acarien qui la produit est plus gros
d'un tiers que le S. scabiei, et que ses pattes sont mieux armées, on conçoit comment la maladie
prise du Dromadaire fait plus souffrir les personnes qui en sont atteintes que celle qui est ordinaire
aux individus malpropres de notre espèce.
C’est probablement à la suite des Acariens, comme le font observer MM. P. Gervais et Milne-Ed-
wards, que l’on doit placer les animaleules microscopiques auxquels on a donné le nom de Tarnr-
GRADES, et que l’on range parmi les Rotateurs ou Systolides. Les Tardigrades sont pourvus de quatre
paires de pattes formées par un tubercule charnu et armé d’ongles crochus; leur tête porte des ves-
tiges d'antennes, et leur système nerveux semble se composer d’une chaîne de ganglions assez dé-
veloppés. On les prend dans les mousses, et ils possèdent à un haut degré la propriété, après
avoir été entièrement desséchés pendant longtemps, de revenir à la vie en absorbant de l’eau.
QUATREIËÈNE CLASSE.
_ ,
CRUSTACÉS.
Les Cnusracés sont des animaux articulés pourvus de membres ambulatoires, nataloires, ou
pouvant servir de supports, ayant des organes de circulation distincts, un sang blanc, et respirant
par des branchies qui se modifient plus ou moins profondément suivant les espèces. Ce sont des An-
nelés à enveloppe extérieure composée de segments ou anneaux assez analogues à ceux des Insectes,
mais d’une consistance plus solide, crustacée et d’une composition chimique différente. Leur tête
paraît soudée au tronc, et présente généralement une bouche pourvue, dans le plus grand nombre,
d'organes de mastication, et composée d’un labre, d’une languette, d’une sorte de mandibule, d'une
ou deux paires de mâchoires, entre lesquelles trois paires de pieds-mâchoires, qui servent tantôt à la
locomotion, tantôt à la mastication : la première ou la troisième paire forme l'appareil buccal et
remplace la lèvre inférieure qui n’existe pas. Presque tous ont des yeux composés, situés le plus
souvent sur un pédoncule habituellement mobile. Dans les espèces supérieures il y a quatre an-
tennes. Aucun ne présente d'ailes. Le nombre des pattes varie beaucoup; elles sont toujours plus
nombreuses que celles des Insectes, et moins que celles des Myriapodes, et terminées par un seul
ongle pointu ou un appareil propre à la natation; chez les Lernées, les pattes, visibles dans le premier
âge, s'atrophient et se transforment en de simples supports servant à fixer le Crustacé sur l’animal
dont il est le parasite. Les sexes sont toujours séparés, les organes reproducteurs sont doubles et
situés, non à l'extrémité de l'abdomen, mais sous la poitrine. Le système nerveux est libre, com-
posé de ganglions unis entre eux par des cordons nerveux. Ces animaux respirent par des bran-
chies analogues à celles des Poissons, à moins, comme quelques-uns, qu’ils n'aient pas d'appa-
reil spécial destiné à agir sur l'oxygène, et que la surface du corps n’en tienne lieu; les branchies
varient, suivant les genres, par leur nombre, leur forme et leur position. Ils ont des vaisseaux san-
guins assez compliqués, contenant un sang peu coloré, et mis en mouvement par un véritable
cœur aortique; ce n'est que dans quelques espèces que ce système circulatoire paraît manquer.
Ces animaux sont généralement aquatiques, vivant dans la mer ou dans les eaux douces, et três-
296 HISTOIRE NATURELLE.
peu d’entre eux sont terrestres, ou plutôt riverains ou côtiers. Ils sont essentiellement carnassiers.
Leur taille est habituellement moyenne; cependant on en connaît de grandes espèces, et beaucoup
sont de taille minime. Leur nombre est excessivement considérable; et l’on en trouve dans toutes
les régions du globe, quoique cependant ils semblent être plus abondants dans les régions chaudes
et tempérées que dans les contrées froides. La nature actuelle n’est pas la seule qui en possède; le
nombre des espèces fossiles décrites jusqu'ici, et appartenant à des terrains de formations et d’äges
très-différents, est assez considérable : et quelques-unes d’entre elles, comme les Trilobites, offrent
des formes tout à fait anormales. Parmi les Crustacés actuellement vivants, une grande quantité
donne à l'Homme une nourriture plus ou moins recherchée : on peut surtout citer à ce sujet quel-
ques Crabes, les Langoustes, les Homards, les Écrevisses, les Salicoques, les Crangons, les Pale-
mons, etc.; peu d'entre eux nous sont nuisibles : c'est ainsi que les Cloportes nous gênent plus
qu'ils ne nous font du mal. Beaucoup sont remarquables par leur forme ou par quelques particula-
rités de leur organisme; nous nommerons seulement les Limules à prolongement caudal si curieux,
les Pygnogonies, qui se lient si intimement aux Arachnides; les Pagures qui, par la mollesse de
leurs téguments, sont obligés de se mettre dans des coquilles pour être à l'abri de leurs enne-
mis, etc. Des espèces sont intéressantes par leur petitesse, comme les Daphnies, les Cypris, les
Monocles, etc.; enfin quelques autres, tout à fait parasites, sucent le sang des animaux un peu à la
manière des Sangsues; tels sont les Argules, les Caliges, les Ergasides, les Lernés et quelques autres.
Les Crustacés vivent plusieurs années et chacun d'eux donne naissance à plusieurs générations.
Tous sont ovipares, et leurs œufs éclosent après la ponte. Pendant longtemps on a admis que les
petits qui sortent des œufs ne subissaient pas de métamorphoses, et qu'ils changeaient seulement
de peau à différentes époques de leur vie, ce qui ne leur faisait, disait-on, éprouver que de légères
modifications, qui ne les empêchaient pas de conserver toujours la forme générale qu'ils avaient en
naissant, et que ce n'était enfin qu'après un certain nombre de mues qu'ils devenaient propres à
reproduire leur espèce. Mais il n’en est réellement pas ainsi, et des observations récentes démon-
trent que certains Crustacés, ce qui plus tard se généralisera probablement, sont sujets à des méta-
morphoses aussi complètes que celles des Insectes; d’où il est résulté que des genres placés dans les
classifications des auteurs, quelquefois à des distances assez considérables les uns des autres, ne
renferment réellement que des individus d’une seule et même espèce, mais à des âges différents de
développement. C’est ainsi que Thompson a montré, il y a une dizaine d'années, que les Zoes ne sont
autre chose que de jeunes Crabes; que MM. Nordmann et Van Bénéden sont arrivés à des résultats
analogués relativement aux Lernés; et, qu’en 1858, M. Hesse a fait voir à l’Académie des sciences
que les Pranizes ne sont que des larves d’Ancées, et enfin, que MM. Coste et Gerbe, en voyant éclore
de jeunes Langoustes, ont reconnu que ces Crustacés sont également sujets à des métamorphoses,
et qu'à la sortie de l'œuf ils ne diffèrent pas des Phyllosomes. — Nous renvoyons, pour plus de
détails, au volume de cette Encyclopédie où nous avons donné l’histoire de cette classe,
Fig. 273. — Pagure combattant.
ANNELÉS. — CIRRHIPÉDES. 297
CANQUEÈME CLASSE.
CIRRHIPÈDES.
Les CirruiPèDes ont de grands rapports avec les Mollusques, avec lesquels on les a longtemps
confondus; mais, comme nous l'avons démontré dans une autre partie de cette Encyclopédie, ce
sont réellement des animaux annelés, et ils se rapprochent beaucoup des Crustacés, avec lesquels
ils doivent peut-être même être confondus, comme en formant le type extrême.
Dans les premiers temps de leur vie, ces petits animaux, qui sont tous marins, nagent librement
et ressemblent beaucoup à certains Crustacés inférieurs, comme les jeunes Cyclopes ou Cypris; mais,
un peu plus tard, ils se fixent pour toujours sur quelques corps sous-marins, dont ils sont souvent les
parasites, et changent tout à fait de forme. C'est par le dos qu’ils adhèrent ainsi, et leur corps plus
ou moins pisiforme, recourbé sur lui-même, est renfermé soit en totalité, soit partiellement, dans
une espèce de coquille composée de plusieurs pièces; ils sont dépourvus d’yeux; leur bouche est
armée de mandibules et de mâchoires ayant la plus grande ressemblance avec celle de divers Crus-
tacés; la face abdominale du corps est coupée par deux rangées de lobes charnus, portant chacun
deux longs appendices cornés, garnis de cils, et composés d’un grand nombre d'articles, au nombre
de douze paires, et faisant les fonctions de bras ou de cirrhes, qui sont rétractiles, et que l'animal fait
constamment rentrer ou sortir par l'ouverture de sa gaine; l’anus se trouve sur une espèce de
queue ou long tentacule charnu terminant le corps; le système nerveux se compose d’une double
chaîne de ganglions; le cœur est placé dans la partie dorsale du corps; la respiration est branchiale
et les branchies sont de formes variables, etc. Les Cirrhipèdes formaient, pour Linné, le seul genre
Lepas; mais, à mesure que l’on découvrit des espèces nouvelles, plusieurs naturalistes, tels que
Bruguière, Gray, Sowerby, Ranzani, Rang, Say, et surtout Leach, y formérent un grand nombre de
coupes génériques; de Lamarck en fit une classe particulière d’Invertébrés; G. Cuvier les rangea à la
fin des Mollusques; de Blainville, les associant aux Oscabrions, les placa dans son type des Malen-
tozoaires; enfin, d’après les remarques récentes de Bellermann, Savigny, Thomson, MM. Martin
Saint-Ange, Milne-Edwards, etc., on les indique aujourd’hui comme une classe d’Annelés, — Les
deux groupes principaux sont ceux des Anarires et BALANES.
Tig. 274. — Anatifc. Fig. 275. — Balance.
A, 38
298 IISTOIRE NATURELLE.
Oeuaième Sous-aubrauchement,
VERS.
Chez ces Annelés il n’y a plus de membres articulés pour la locomotion comme chez les Articulés,
et tout l’organisme se dégrade de plus en plus, de manière que les caractères les plus importants
du type tendent de plus en plus à disparaître; néanmoins ils se distinguent encore des Zoophytes
par la disposition symétrique des organes; leur structure ne présente rien de radiaire, et le plus
habituellement leur corps est composé d’une série d'anneaux placés bout à bout.
Le corps des Vers est le plus souvent grêle, allongé, eylindriforme; quand les anneaux du corps
et le squelette tégumentaire des Articulés disparaissent, les segments sont encore marqués par des plis
de la peau. Chez les uns le corps est garni latéralement de soies ou de prolongements cutanés, dont
. Ja forme varie, et ces appéndices sétifères, chez plusieurs d’entre eux, sont portés sur des tuber-
cules charnus, de manière à constituer des espèces de pieds, dont le nombre est trés-considérable;
mais, chez les derniers, ces appendices disparaissent complétement, et l'animal ne peut plus se mou-
voir que par la reptation. Il n’y a plus chez eux de véritables métamorphoses, mais, suivant l’âge,
plusieurs d’entre eux subissent des changements excessivement considérables.
L'organisation offre aussi des particularités remarquables. Tantôt le système nerveux existe en-
core et offre le caractère essentiel du type des Articulés, c’est-à-dire deux cordons longitudinaux
symétriques par rapport à la ligne médiane; d’autres fois il y a une longue série de petits gan-
glions; mais dans beaucoup de cas le système nerveux ne présente plus que des vestiges : le cerveau
disparait le premier, et la chaîne ganglionnaire reste seule, et enfin, chez les Vers les plus simples,
il n'y a plus de traces apparentes de système nerveux. En général le tube intestinal est court et
simplement étendu d’un bout du corps à l’autre; l'anus est toujours éloigné de la bouche. La respi-
ration est essentiellement branchiale ou cutanée, et non trachéenne, comme dans la plupart des Ar-
ticulés. La circulation se fait ordinairement au moyen d’un appareil encore très-développé.
On connait beaucoup de Vers, répandus partout en grand nombre, et offrant des dimensions
très-différentes. Les uns sont terrestres, les autres aquatiques, soit marins, soit fluviatiles;
beaucoup d’entre eux sont parasites et vivent dans l’intérieur du corps de l'Homme et des animaux.
— On les partage en Annélides, Rotateurs et Helminthes.
PREMIÈRE CLASSE.
ANNÉLIDES.
Le genre des Néréides, Serpules, Vers de terre, Sangsues, et beaucoup d’autres, constituent a
classe des AnNÉLIDES, qui renferme un grand nombre d'espèces ayant pour caractères communs :
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Fig. 1. — Hésione splendide. Fig. 2 — Aphrodite épineuse.
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Fig. 3. — Térébelle méduse.
Fig. 4. — Albione des squales
ANNÉLIDES.
ANNELÉS. — ANNÉLIDES. 299
animaux articulés, à sang rouge, formés de segments réunis de manière que la tête elle-même
soit au plus distincte; n'éprouvant pas de métamorphoses, n'étant pas munis de pieds articulés, et
ayant d'ordinaire de chaque côté du corps une longue série de faisceaux de soies portés sur des tu-
bercules charnus, et tenant lieu de pattes.
Le corps des Annélides est généralement très-allongé, mou, et partagé en un grand nombre de seg-
ments transversaux, semblables dans toutes les régions, et qui doivent être considérés comme desim-
ples replis de la peau. La tête, rarement tout à fait distincte, et souvent entièrement réunie avec les
anneaux du corps, porte, dans un grand nombre de cas, des mâchoires et des antennes. Ces der-
nières, aussi nommées cirrhes tentaculaires, parce qu’elles ressemblent aux filaments ou cirrhes des
pieds, varient pour le nombre, qui ne dépasse que rarement cinq. La bouche est terminale; mais,
quand la tête n’est pas distincte, l'ouverture buccale est située sous la face inférieure, à l'extrémité
antérieure du corps; elle laisse souvent sortir une trompe charnue qui est, à l’état de repos, rentrée
dans l’intérieur du corps. Les mâchoires varient pour le nombre, elles ont la forme de crochets
cornés. Les yeux se présentent comme de petits points oculiformes, lisses, circulaires, variables dans
leur nombre. La partie antérieure du corps est quelquefois élargie et transformée en ventouses,
comme cela se remarque chez les Sangsues. Les pieds, que Lamarck nomme fausses pattes, ne sont
jamais que rudimentaires quand ils existent, et ne soutiennent pas le corps, dont le mouvement est
ondulatoire ou de reptation. Ces sortes de pieds sont composés de faisceaux de soies portés sur des
tubercules charnus; souvent il existe deux de ces organes placés l’un au-dessus de l’autre de chaque
côté des divers anneaux du corps : d’autres fois ces deux tubercules sétifères sont réunis, et presque
toujours il existe à la base de chacun un long appendice mou, cylindrique et rétractile nommé cirrhe;
dans quelques cas, la place des pieds est indiquée seulement par plusieurs poils roides, et d'autres
fois, il n’y a sur tout le corps aucune trace de membres. C’est principalement à l’aide de ces soies
que les Annélides peuvent ramper; et ces appendices leur fournissent aussi des armes pour leur
défense, car, en général, ils sont très-acérés et conformés de manière à s'implanter avec force dans
les corps mous contre lesquels ils frappent. Chez les Annélides dépourvues de soies, il existe aux
extrémités du corps des ventouses, qui sont des instruments de locomotion, tout en pouvant aussi,
dans certains cas, comme nous l'avons dit, remplacer la bouche. Le disque postérieur terminal de
quelques Annélides est l’une de ces ventouses locomotrices. L'on a donné le nom d'élytres à cer-
taines écailles dorsales de consistance membraneuse et assez molle.
Les organes respiratoires de la plupart des espèces sont des branchies extérieures qui varient
beaucoup pour la forme : ce sont tantôt des houppes, des panaches, des arbuseules : tantôt des
filaments simples ou pectinés; chez les Hirudo, ces organes sont internes et ont la forme de petites
vessies; enfin dans d’autres Annélides, comme les Lombries, cette fonction s'opère par toute la sur-
face de la peau. De ces dispositions organiques il résulte que chez les premiers la respiration est
aquatique, et que chez les derniers elle est aérienne. Le sang est presque toujours rouge; quelque-
fois cependant il est à peine coloré; ce liquide circule dans un système très-compliqué de vaisseaux,
dont les uns sont contractiles et tiennent lieu du cœur, et d’autres remplissent les fonctions d’artères
et de veines. Le canal intestinal, presque toujours droit et rarement contourné, est tantôt simple,
tantôt garni d’un nombre plus ou moins considérable de cœcums situés de chaque côté du corps; ce
canal aboutit par une de ses extrémités à la bouche et par l’autre à l'anus, qui occupe souvent l'ex-
trémité postérieure du corps, mais qui est parfois situé un peu sur la face dorsale. Le système
nerveux est peu développé et consiste en une chaîne simple ou double de très-petits ganglions
étendus d’un bout du corps à l’autre : l’un de ces ganglions nerveux, un peu plus développé que les
autres, porte le nom particulier de cerveuu.
Les Annélides sont hermaphrodites, c'est-à-dire que chaque individu est muni des organes pro-
pres aux deux sexes. Mais elles n’en ont pas moins besoin, pour la plupart du moins, de l’accou-
plement de deux individus semblables pour perpétuer leur espèce. Elles sont ovipares et pondent
généralement au printemps; les jeunes qui sortent des œufs sont tout à fait semblables aux individus
dont ils proviennent, et n’en diffèrent que par la taille; dans la plupart des espèces, leur dévelop
pement est assez rapide, et ils parviennent à l’âge adulte quelques mois après leur naissance.
Un fait très-remarquable, et qui semble contraire à toutes les lois de la physiologie, se présente
BriN) IISTOIRE NATURELLE.
chez les Annélides : c’est que le tronc, mutilé et divisé en un grand nombre de morceaux, se com-
plète et continue à vivre. Plusieurs expériences ont été faites à ce sujet, principalement sur les Vers
de terre, et l'on a vu que, si l’on partageait plusieurs de ces animaux en diverses parties, le tronçon
antérieur portant la tête et les portions les plus essentielles du système nerveux, avait la propriété
de reproduire les segments inférieurs qu’on lui avait enlevé, et qu’au bout d'un certain temps il
représentait un individu complet.
Ces animaux, quelquefois de très-grande taille et pouvant atteindre plus de 2 mêtres, comme cer-
taines espèces de Néréides, sont beaucoup plus souvent de grandeur moyenne, et dans quelques casils
sont petits. Leur habitat est très-divers : beaucoup se trouvent dans la mer; d’autres habitent les
eaux douces, tant fluviales que stagnantes : enfin il en est qui sont essentiellement terrestres et qui
se ereusent des demeures dans l’intérieur du sol. Parmi les espèces marines, un grand nombre savent
se construire des fourreaux tubulaires, qui sont formés de petits corps agglutinés, ou d'une matière
sécrétée par l'animal lui-même. Le système de coloration est très-variable : les Annélides terrestres
et d’eau douce sont ternes, et n’ont que des teintes en général sombres, brunâtres; les Annélides
marines, au contraire, sont ornées de couleurs du plus vif éclat, mais ces nuances brillantes dispa-
raissent aussitôt après la mort de l'animal. Quelques espèces marines sont douées de la faculté de
répandre une lumière phosphorique assez vive. Presque tous ces Annelés sont carnassiers; tantôt ils
s'emparent d’une proie vivante ou sucent le sang des animaux; tantôt, et c'est ce qui a lieu le plus
habituellement, ils ne se nourrissent que de matière animale en putréfaction. Quelques espèces
cependant ont un régime purement végétal.
Les anciens naturalistes, Aristote et Pline à leur tête, se sont peu occupés des animaux dont nous
parlons, et, tout en mentionnant les Sangsues et les Vers de terre, ils ont méconnu leur véritable ana-
logie sériale. Il en est de même des nombreux zoologistes qui les suivirent, et les auteurs même du
siècle dernier, tels que Linné, Fabricius, Müller, Pallas, Bose, Swammerdam, Olivier, Seba, Klein,
Bruguière, Othon Fabricius et plusieurs autres, tout en faisant connaître plusieurs des genres et
des espèces de cette grande division, les confondirent avec les Vers, groupe énorme et sans carac-
tères tranchés, qui renfermaient nos Annélides actuelles, des Helminthes, des Mollusques et même des
Zoophytes. G. Cuvier, le premier, établit la classe des Annélides, qu'il se contenta d'abord de dési-
gner sous la dénomination de Vers à sang rouge. De Lamarck leur assigna le nom d’Annélides,
qui indique la disposition de leur corps en anneaux, et circonscrivit ce groupe d’une manière natu-
relle. Depuis lors, ces animaux ont été l’objet d’un grand nombre de travaux; nous citerons surtout
les beaux mémoires de Savigny, présentés à l’Académie, et sa classification des Annélides, faisant
partie de l'ouvrage de la Commission scientifique d'Égypte; la monographie de la famille des Hiru-
dinées, de M. Moquin-Tandon; les articles importants que DeBlainville a insérés dans le Dictionnaire
des Sciences naturelles sur ces Annelés qu’il nomme Chétopodes; l'Histoire des Annélides de France
par Audouin et M. Milne-Edwards, dans laquelle la véritable place sériale:de ces êtres est démontrée,
leur organisation générale étudiée et beaucoup d'espèces et de genres nouveaux décrits avec un
grand soin; enfin les travaux de Leach, Rudolphi, Ocken, Risso, Johnston, Delle Chiaje, Montagu,
Viviani, Guilding, Dutrochet, Goldfuss, Schinz, Chamisso, Kirby, H. Lucas, et de plusieurs autres
zoologistes modernes les ont mieux fait connaître.
PREMIER ORDRE
ANNÉLIDES ERRANTES.
L'ordre des Annécines gnnaxres, de MM. Audouin et Milne-Edwards, a reçu antérieurement de
G. Cuvier le nom de Dorsibranches, et de Savigny celui de Néréidées; pour De Blainville, il com-
prend les deux groupes primaires des Homocriciens et Paramocriciens.
Presque toutes les Anneñdes errantes sont libres et ne se construisent pas d'habitation; et Le
ANNELES. — ANNELIDES ERRANTES. 301
petit nombre d'espèces qui se logent dans des fourreaux peuvent les quitter avec facilité, et parais-
sent n'y chercher qu'une habitation passagère; leur tête est parfaitement distincte du corps, munie
d'antennes, d'yeux, souvent de mâchoires et d'une trompe rétractile; leur corps est ordinairement
allongé, linéaire, garni d'appendices disséminés dans toute sa longueur, excepté chex les Péripates;
les pieds sont très-saillants, d'une seule sorte, sans soies à crochets, le plus souvent armés de soies
proprement dites, et presque toujours munis de cirrhes.
On connaît un grand nombre d’espèces de cet ordre, partagées en sept familles, répandues presque
partout, ayant toutes la faculté de nager et de ramper avec la plus grande facilité, se trouvant les
unes sur le bord de la mer, et les autres étant entièrement pélagiennes. Le plus habituellement ces
animaux vivent sous les pierres, parmi les coquilles ou enfoncés dans le sable. Une espèce de mucus,
qui suinte de leur corps, constitue souvent autour d’eux une gaine tubulaire dans laquelle ils ha-
bitent; mais ce fourreau n'offre jamais la solidité que l’on remarque dans celui de la plupart des
Tubicoles, et l'animal le quitte souvent pour aller à la recherche de sa nourriture.
1% famille, APnnoprriens : segments du corps dissemblables, offrant le plus habituellement des
élytres disposées alternativement; tête distincte; des cirrhes distincts aux pieds, branchies rudi-
mentaires.
Les genres principaux de cette famille sont ceux des : Aproprra, Linné, groupe typique sur le-
quel nous reviendrons; Pozynor, Sav. (Lepidonota, Leach), renfermant des espèces propres à toutes les
mers, se trouvant ordinairement sur les bancs d’huitres, et se construisant souvent des fourreaux avec
des fragments de coquilles; Ipnronea, Sav. : espèce typique, I. muricata, Sav., de la mer Rouge et
des côtes de l’île de France; Porvopowres, Renieri, ayant pour espèce unique la Phyllodoce maxil-
losa, Ranzani, de la mer Adriatique; Sicazron, Aud. et Edw., quelques espèces des côtes de France;
Pazmyra, Sav.; Eumorpe, Risso : type, E. fragilis, de la Méditerranée, etc.
Les APHRODITES, surtout remarquables par leur corps ovalaire, composé de peu d'anneaux; leur
tête convexe en dessus, en grande partie cachée sous les élytres; leur trompe entourée à son orifice
d'un cercle de petits tentacules subdivisés en forme de houppes; leurs antennes au nombre de trois;
leurs branchies dentelées; leurs pieds divisés en deux rames séparées, et garnis le plus souvent de
deux faisceaux de soies aux deux rames dorsale et ventrale, etc., sont assez nombreux en espèces,
et ont été partagés en deux sous-genres : Cyanippe et Amphitus, Cast. L'espèce principale est l’A-
PHRODITE HÉRISSÉE (Aphrodita aculeata, Baster), longue de 0,19, à corps blanchätre, avec des
écailles brunes, des soies entourant le corps et ressemblant à une frange verte et irisée; se trouve
communément sur les côtes de France. (Voy. l'A. épineuse, pl. XXXVE, fig. 2.)
2e famille, AuParinomrens : corps à segments semblables, non muni d'élytres; tête distincte; bran-
chies très-développées; des cirrhes distinctes aux pattes.
Genres : Curosra, Sav. (Chloe, Blainv.; Velleda, Cast.), ayant pour type Amyphinoe capillata,
Brug., de la mer des Indes; Ampninowa, Brug., ayant un corps épais, presque linéaire; tête portant
une caroncule; quatre yeux; antennes au nombre de cinq, et surtout des branchies en forme d'ar-
buscules, répandues sur toute la longueur du corps, etc.; une dizaine d’espèces propres à toutes les
mers : type, À. vagans, Sav., d'Angleterre; Evparosyna, Sav. (E. foliosa, Aud. et Edw.), des côtes de
la Manche; Hrpponoa, Aud. et Edw., créé pour une espèce australasienne; ARISTENIA, Sav., une es-
pèce de la mer Rouge; Zorxea, Risso, ayant pour type le Z. meridionalis, des environs de Nice.
3 famille, Eunrcrens : corps à segments ordinairement semblables, non muni d'élytres; tèté à
tincte; branchies nulles ou développées; pieds avec des cirrhes distincts.
Genres : Eunice, G. Cuv.; Onuemis, Aud. et Edw., ayant pour type l'O. eremita, des côtes de l'O-
céan; Dioparra, Aud. et Edw., type D. Italica, du golfe de Naples, se formant un tube cylindrique
avec du sable; Lysmice, Sav. (Nereidice, Blainv.), comprenant quelques espèces européennes, Lum-
Briners, Blainv.: type, L. Orbygnyi, Aud. et Edw., de la Rochelle; Scoreroma, Blainv. : espèce
unique, S. fragilis; Acraura, Sav. (A. fulgida, de la mer Rouge); Œxonr, Sav., etc.
302 HISTOIRE NATURELLE.
Les EUNICES comprennent un grand nombre d'espèces; aussi a-t-on proposé de former dans ce
genre plusieurs groupes distincts : Branchionereida et Nereidonta, Blainv.; Leodice, Sav., etc. Ces
Annélides ont un corps presque cylindrique, linéaire, un peu déprimé, à anneaux très-nombreux;
une trompe peu saillante; cinq grandes antennes; une téte lobée en avant; des pieds comprimés,
à une seule rame terminée par un tubercule portant deux cirrhes très-longs, etc. Les espèces se
trouvent sur les côtes de toutes les mers, aussi bien dans les contrées méridionales que dans les
régions septentrionales; parmi celles de nos côtes, nous citerons les À. gallica, Sav.; Harissii, Aud:
et Edw.; sanguinea, Montagu : les deux premières de l'Océan, et la dernière de la Méditerranée.
4° famille, Néréiprens : corps, comme dans les familles précédentes, composé de segments sem-
blables et non muni d’élytres; tête distincte, portant des antennes et des yeux; branchies en forme
de simples languettes ou nulles; pieds à cirrhes distincts.
Genres : Nereis, Linné; Lycasris, Sav.; Svcuis, Sav. (Nereisylla, Blainv.), Hesrone, Sav.; Arciopa,
Aud. et Edw. (4. Reynaudii); Myrraxa, Sav. (Nereimyra, Blainv.); Puyiuonoce, Sav. (Eulalia et
Etiona, Sav.; Nereiphylla, Blainv.); Nepurys, Cuv.; Goxrapa, Aud. et Edw.; Givcrra, Sav., etc. Nous
Ggurons l'Hésione splendide ‘pl. XXXVE, fig. 1), et la Sylle collier (pl. XXXVIL, fig. 4).
Les NÉRÉIDES, à corps grêle, très-allongé; pieds garnis à leur sommet de tubercules branchiaux,
et la trompe munie de deux mächoires très-fortes, sont très nombreux en espèces, dont plusieurs
habitent nos côtes : parmi ces dernières nous citerons les N. fucata, Sav., des côtes de la Manche;
Marionii, Aud. et Edw., de la Vendée, Ægyptiaca, Sav., d'Égypte, etc.
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KA ; ATEN W
Fig. 276 — Néréide d'Écypte.
5° famille, Arrictens : corps formé de segments uniformes, et non muni d’élytres; tte rudimen-
taire, peu distincte; branchies nulles ou en languettes; pieds avec des cirrhes distincts.
Genres : Arnicra, Sav. (Scolopus, Blainv.); Aons, Sav. (Scolelepis, Blainv.); Opuecra, Sav.; Cirrua-
ruLus, Lam. (Cirrhenereis, Blainv.), etc. — Le groupe typique est celui des ARICIES, dont l’Aricia
sertulata, de l'Océan, offre quatre antennes, tandis que l’A. Cuvieri, Aud. et Edw., des côtes occi-
dentales de la France, n’en a plus.
6° famille, Péripariens : corps presque cylindrique, divisé en segments peu nombreux, semblables
entre eux, et partagés chacun en plusieurs anneaux; tête bien distincte, portant des antennes
grosses, longues, une trompe, des mächoires très-développées, et des yeux représentés par un gros
tubercule de chaque côté; branchies nulles; pieds seulement munis de soies. Cette famille ne com-
prend que le genre PERIPATUS, Guilding, l’un de ces groupes anomaux dont la place sériale n’est
pas bien déterminée, dont De Blainville fait une classe spéciale sous le nom de Malacopodes, et qui,
par l’ensemble de ses caractères, tendant à le rapprocher des Iules, semble établir le passage des
Myriapodes aux Annélides. Le type est le P. iuliformis, Guilding, à corps granuleux, trouvé à la
Jamaïque et dans la rivière d'Approuague, près de Cayenne.
7° famille, Caéroprériens : corps long, un peu aplati, sans tête distincte : celle-ci n'étant indi-
quée que par un renflement large, aplati; antennes remplacées par deux petits tubercules; bouche
sans trompe ni mâchoires; pieds saillants, munis d'appendices très-développés, membraneux; pas
de cirrhes. Un seul genre, celui des CHETOPTERUS, Cuv., entre dans cette singulière famille, et ne
comprend que le C. pargamentacens, Cuv., espèce de la mer des Antilles, qui habite des tubes longs
et épais, ayant l'aspect du parchemin et recouverts à l'extérieur de sable fin.
Serpule ordinaire.
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Arénicole commune.
1. — Cirrhétule de de Lamarck
Sylle collier.
Fig. 4.
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ANNÉLIDES.
ANNELÉS. — ANNÉLIDES TUBICOLES. 503
DEUXIÈME ORDRE,
ANNÉLIDES TUBICOLES.
L'ordre des AnnéLipes rupicoes, de G. Cuvicr, comprend une partie des Serpulées de Savigny,
et les divisions des Hétérocrisiens et Siphostomes de De Blainville.
Chez ces Annelés, la {éte n'est pas sensiblement distincte du reste du corps : elle ne présente ni
mächoires, ni yeux, ni trompe rétractile; des appendices mous, nombreux, sont rassemblés anté-
rieurement près de l'endroit où l'analogie fait placer la tête, et sont considérés soit comme des
branchies, soit comme des organes préhenseurs de la proie ou même locomoteurs; les pieds de deux
sortes, et armés de soies à crochets chez les Siphostomes, sont nuls ou remplacés par de simples
soies chez les autres : dans les Hermelles seulement il y a des cirrhes aux pieds.
Les Annélides tubicoles, qui, par leur organisation, offrent beaucoup d'analogie avec les Annélides
errantes, en diffèrent beaucoup par leur genre de vie; elles habitent les unes dans des tubes calcaires
et homogènes, résultant de leur transsudation, et les autres dans des fourreaux formés de grains de
sable et de débris de coquilles. Par cette habitude de se loger dans des tubes, ces animaux semblent,
par leur aspect extérieur et quand on n’étudie pas leur structure toute différente, voisins de cer-
tains Mollusques, aussi a-t-on, pendant longtemps, rangé avec eux les Dentales, les Arrosoirs, ete.;
mais si leur mode d'habitation aide à ce rapprochement, il présente cependant aussi un caractère
différenciel très-important : c’est qu'aucun d’eux n’adhère à son tube par des muscles, tandis que la
coquille tubiforme des Mollusques est attachée, par ce moyen, au corps de l'animal. Les pieds des
Tubicoles, lorsqu'ils existent, sont peu saillants, et ne leur servent guère que pour s'élever ou pour
descendre dans leur tube; la plupart d’entre eux ne peuvent ni nager ni marcher, et ceux qui se
trainent sur le sol se déplacent à l'aide des longs tentacules dont leur bouche est entourée.
1 famille, Serpunens : branchies visibles, au nombre de deux; rames ventrales de deux sortes .
celles de la première paire de pieds portant des soies à crochets, et celles des suivantes ayant des
soies subulées; pas de tentacules. (Voy. pl. XXXVI, fig. 4, la Serpule ordinaire, et pl. XL, la S.
très-contournée.)
Deux genres principaux : 1° SERPULES (Serpula, Linné), dont le type est le Penicillum mari-
num, Seba, ou la Terebella serpula, Abildg., et qui comprend les groupes des Galeolaria et Vermi-
laria, Lam.; Serpula, Cymospira, Spimella, Blainv.; Helena, Cast. Ce sont des Annélides nom-
breuses, propres à toutes les côtes, qui vivent dans des tubes calcaires,contournés sur eux mêmes, et
qui ont l'extrémité antérieure du corps ornée d'une couronne d'appendices analogues à de beaux pana-
ches disposés en entonnoir : comme type nous ne nommerons que la S. contortuplicata, Linné, qui se
trouve souvent dans notre Océan attachée aux coquilles. 2° SABELLES (Sabella, Linné), qui sont
les Tubularia, Shaw., Penicillus, Rondelet, Spirographis, Niviani, et auxquelles on doit peut-être
laisser, avec Montagu, le nom d'Aweurrrires, dénomination qui a disparu de la science, reconnais-
sables aux grosses soies placées à leur extrémité antérieure, et disposées comme les dents d'un
peigne : quelques espèces des côtes des régions méridionales, ainsi que de celles d'Europe; type
S. penicillatus, Sav., commun dans la Manche.
2° famille, Hermezziens : n'ayant pas de tentacules; présentant des branchies visibles, au nombre
de deux, et des rames ventrales d’une seule sorte et portant toutes des soies subulées. Un seul genre,
HERMELLA, Sav., qui a pour type l’H. arenosa, Ellis, des côtes de l'Océan et de la Méditerranée.
5° famille, Térépezuiens : de longs tentacules; des branchies visibles, au nombre de deux à sit;
rames ventrales d'une seule sorte, portant toutes des soies à crochets. Deux genres principaux :
1° TEREBELLA, Cuv., ayant la bouche entourée de longs tentacules simples, derrière lesquels se
004 HISTOIRE NATURELLE.
trouvent deux ou trois paires de branchies rameuses, et qui vivent dans des tuyaux minces, enfoncés
dans le sable ou cachés sous des pierres : les espèces les plus caractérisées sont la T. conchylega,
Pallas, des côtes de l'Océan; medusa, Sav., belle espèce des rives de la mer Rouge; cirrhosa, Lin.,
des mers du Nord, etc. 2° PECTINARIA, Lam. (Chrysodon, Ocken; Pherusa, Ocken), genre différant
peu du précédent, et ayant pourtype la P. granulata, Lin., de l'Océan. — Nous figurons (pl. XXXVII,
lig. 5) la T'érébelle méduse.
4° famille, Crvuéniens : dans lesquels il n’y a pas de branchies, et qui ne renferment que le seul
genre CLYMENE, Sav.; espèces : C. uranthus, Sav., des côtes de l'Océan; C. amphistoma, Sax.,
qui a été trouvée dans le golfe de Suez, fixée dans l'interstice de corps marins.
o° famille, ArÉNIcouIENS : à branchies nombreuses, et à pieds d'une seule sorte. Un seul genre,
celui des ARÉNICOLES (Arenicola, Lam.), que M. Milne-Edwards range à la fin de l’ordre des An-
nélides errantes. Ces animaux, comme l'indique leur nom, vivent dans le sable; leur corps est
cylindrique, allongé, formé de peu de segments, mais offrant des sillons circulaires nombreux; ils
n'ont de branchies que sur la partie moyenne du corps; leur bouche est terminale, saillante, etc.
Les pêcheurs font un grand usage des Arénicoles pour amorcer leurs lignes. On trouve ces animaux
dans le sable à une profondeur qui peut varier entre 0®,30 et 0,60, et leur retraite se reconnaît aux
petits cordons de sable qu’ils rejettent au dehors. Quand on les saisit, ils font sortir de leur corps un
liquide jaune qui teint fortement les doigts. L'espèce la plus connue est le Lomeric maxi, de
Linné, Arenicola marina (pl. XXXVII, fig. 3), long d'environ 0,25, d’un cendré jaunâtre ou
rougeâtre, avec treize paires de branchies qui, lorsqu'elles sont remplies de sang, s’épanouissent
beaucoup; se trouve très-abondamment répandu sur les côtes sablonneuses de notre Océan.
TROISIÈME ORDRE
ANNÉLIDES TERRICOLES.
L'ordre des AnxéLines rerricoces, de MM. Audouin et Milne-Edwards, correspond aux Abranches
sétigères de G. Cuvier, aux Lombricines ainsi qu'à une partie des Serpulées de Savigny, et aux di-
visions des Paramocriciens et Homocriciens de De Blainville.
Les Annélides terricoles, qui ne sont généralement pas de grande taille, ont un corps cylindrique,
aminci aux deux extrémités et garni seulement de plusieurs rangées de soies qui leur tiennent
lieu de pieds; la téte n'est pas distincte; i\ n'y a pas en général d'yeux, d'antennes, de mandibules
ni de cirrhes : toutefois chez quelques espèces des genres Nais et Siponcules, on trouve encore
une trompe protractile et des points oculaires. Mais ce qui différencie surtout ces Annélides des es-
pèces des deux ordres précédents, c'est l'absence de branchies ou d'organes respiratoires extérieurs;
il semble que la surface entière de la peau, ainsi qu’un certain nombre de petites poches situées à
la partie antérieure du tronc, et communiquant au dehors par des pores, accomplissent cette im-
portante fonction. Les espèces peu nombreuses de cet ordre vivent dans la terre ou dans la vase.
4° famille, Lumericiens : corps long, cylindrique, partagé en segments nombreux; animaux es-
sentiellement terrestres.
Le genre typique est celui des VERS DE TERRE (Lumbricus, Linné), ayant pour caractères :
corps cylindrique, obtus à son extrémité postérieure, allongé, composé de segments courts, nom-
breux, plus distincts vers la bouche qu'à l'extrémité opposée : la plupart des segments compris entre
le vingt-sirième et le trente-septième renflés, formant à la partie antérieure et supérieure du corps
une sorte de ceinture : le dernier pourvu d'un anus longitudinal; bouche petite, un peu renflée, à
deux lèvres : supérieure avancée en trompe et lancéolée d'une manière obtuse, fendue en dessous :
ANNELES. — ANNÉLIDES TERRICOLES. 505
inférieure hrès-courte; soies courtes, dpres, comme onguiculées, au nombre de huit à chacun des
segments réunis par paires, quatre de chaque côté : formant par leur distribution sur le corps huit
rangs longitudinaux, dont quatre latéraux et quatre inférieurs.
Willis, Rédi, Montègre, Morren, MM. Léon Dufour, Audouin et Milne-Edwards, etc., se sont oc-
cupés de l’anatomie des Lombrics. L'intestin est dépourvu de cœcum et va droit à l'anus, après
avoir, durant son trajet, reçu plusieurs des fibres musculaires destinées au mouvement des segments
du corps, ce qui constitue autant de petits diaphragmes. La circulation s'opère au moyen d’une in-
finité de petites veines qui s’entre-croisent avec un grand nombre d’artérioles; ces vaisseaux naissent
à la surface interne de la peau et au canal intestinal, se réunissent sous le ventre en un tronc com-
mun, longitudinal, qui émet en avant cinq petits canaux qui aboutissent à un vaisseau dorsal, rem-
plissant probablement les fonctions de cœur, et ce vaisseau donne naissance à de petites artères qui
forment un réseau avec les autres veines. La respiration paraît s'effectuer par la surface de la peau.
Les organes reproducteurs sont près du plus gros anneau : ils offrent à l’intérieur deux mamelons
percés chacun d’une très-petite ouverture. Le cerveau est petit, arrondi; le cordon nerveux est une
suite de ganglions nombreux, très-petits et serrés les uns contre les autres.
Les Vers de terre sont hermaphrodites et portent chacun les organes des deux sexes. L’accouple-
ment a lieu hors de terre et pendant la nuit; deux individus sont nécessaires pour qu'il puisse
s'effectuer, et ces deux individus se tiennent alors si fortement unis, qu’on peut les écraser sans les
séparer. Ils pondent des œufs qui ont beaucoup de rapport avec ceux des Sangsues, et qui, as-
sure-t-on, renfermeraient plusieurs jeunes animaux.
La terre est souvent criblée par les trous des Lombrics; ils recherchent toujours les sols hu-
mides et préfèrent les terrains gras. Ils se nourrissent de la terre elle-même, dont ils retirent l’hu-
mus, et qu'ils rendent ensuite plusieurs fois par jour sous forme vermiculaire. Pendant les grands
froids et les fortes chaleurs, qu'ils redoutent également, ile se tiennent enfoncés à d’assez grandes
profondeurs dans la terre; mais, quand celle-ci a été ramollie par la pluie, ils se rapprochent de la
superficie du sol eten sortent même pendant les temps humides. Par cet habitat, on comprend qu'ils
font du mal à l’agriculture, non pas en mangeant les racines des végétaux, cemme on l’a dit, mais
en les déchirant lorsqu'ils veulent s'ouvrir un passage. L'on assure que ces animaux répandent
quelquefois une lueur phosphorescente. Quand on coupe en morceaux un Ver de terre, chaque
tronçon conserve longtemps un mouvement vital, et, comme des expériences directes de Bonnet
semblent le démontrer, chaque tronçon peut redevenir un animal complet.
- L'ancienne médecine, qui avait cru trouver un remède dans chaque corps de la création, em-
ployait les Lombries, et leur attribuait des propriétés sudorifiques et diurétiques. Dans certaines
perties de l’Asie, on assure que ces animaux servent encore aujourd’hui à l'alimentation de l'Homme.
Dans nos contrées, on les emploie à la nourriture de la jeune volaille et comme appât pour la pêche.
Pendant longtemps on a confondu sous le nom de Lumbricus terrestris, Linné, un très-grand
nombre d’espèces distinguées actuellement, et dont quelques-unes sont même des types de groupes
particuliers; mais cependant, malgré les recherches de Savigny, de Dugès, de MM. Audouin et
Milne-Edwards, et de plusieurs autres, ,ce sujet est loin d’être complétement élucidé. Les genres
formés aux dépens des Lumbricus, et qui n’en différent pas d’une manière bien manifeste, sont ceux
des : Enterion, Clitellio, Vermicularis, Sav.; Trophonia, Aud. et Edw., etc. : il n’en est pas de même
du genre HYPOGEON, Sav., ayant pour espèce unique l’H. hirtum, de l'Amérique du Nord, qui
s’en distingue manifestement.
Quoi qu'il en soit, notre Ver pe TERRE ORDINAIRE (Lummbricus terrestris) est long de 0,15 à 0,18,
rougeâtre, à segments du corps variant en nombre de cent à deux cents, selon l’âge; très-commun
dans toute l'Europe, et se rencontrant aussi, dit-on, en Amérique, ce qui est peu probable.
2e famille, Naïstens : corps allongé, linéaire, comprimé, partagé en anneaux peu marqués, dé-
pourvu-ordinairement de tentacules; des soies roides sur les côtés du corps; animaux vivant dans
les eaux douces.
On ne distingue d’une manière bien positive qu’un seul genre dans cette famille, c’est le groupe
des NAIS, Müller; mais nous devons faire observer néanmoins que plusieurs groupes, tels que ceux
des : Nais, Stylaria, Tubifex, Lam.; Proto, Ocken; Xantho, Dutrochet; Chætoqgaster, Baër, ete., en
A. 59
906 HISTOIRE NATURELLE.
ont été séparés par suite de quelques considérations tirées de la présence ou de l’absence d’une
trompe et des yeux, de la forme du corps, ete. — Les Nais sont de très-petites Annélides, dont la lon-
gueur ne dépasse pas souvent 0,01, qui vivent en abondance dans les eaux douces, et qui, suivant
Ræsel, Trembley et Gruithuisen, se multiplient de trois manières différentes : par des divisions na-
türelles, par des divisions accidentelles, et enfin par des œufs. Les espèces de Nais décrites par les
auteurs sont très-nombreuses, et, comme on n'a guère étudié que quelques-unes de celles propres
aux eaux douces de l’Europe, il est probable qu'on en découvrira une quantité beaucoup plus
considérable. Nous citerons le Nais vermicularis, Gmelin, qui se trouve communément dans les
caux stagnantes et surtout sur les Lentisques.
3° famille, SrruNcuLiENS : corps allongé, sans tête, mais avec un renflement terminal, et en avant
offrant un rétrécissement en forme de col étroit, cylindrique; bouche contenue duns une trompe ou
tentacule. On range dans cette famille quelques genres qui ont été pendant longtemps placés avec
‘es Zoophytes, parmi les Échinodermes et les Holothuries. En effet, ces groupes ressemblent assez à
Juelques-uns de ces derniers animaux par quelques-uns de leurs caractères, mais ils n’ont jamais de
lentacules ambulatoires, sont mous, cylindriques; leur sang est rouge, circulant dans un double
système vasculaire, et leurs organes de la déglutition ont une forme tubulaire.
Le genre principal de cette division est celui des SIPONCLES (Sipunculus, Linné), à corps nu,
allongé, cylindrique, formant en avant un col étroit, court, tronqué, et se rétrécissant en arrière
pour se terminer par un renflement; bouche orbiculaire, terminant le col, et placée à l'extrémité
d'une trompe rétractile, cylindrique, fuiblement garnie de papilles; anus placé à l'extrémité du
corps. Ces Annélides se trouvent sur les bords de la mer; ils se tiennent dans le sable, à peu de
distance des côtes. L'espèce européenne de ce groupe, le Sipunculus balanophorus, est connue depuis
longtemps; c’est sans doute elle qui a été rencontrée dans les étangs du Languedoc par Rondelet,
et qu'il indique sous le nom de Vermes macrorhynchoteros, et les anciens auteurs en citent deux ou
trois espèces fictives (nudus et saccatus), qui se rapportent à une seule espèce qui habite la Mé-
diterranée, où elle sert d'appät pour la pêche; suivant G. Cuvier, c’est également à cette espèce qu'il
faut rapporter le Lumbricus edulis, Gmelin, Pallas, qui sert à la nourriture des Chinois, que les
Malais vont chercher au milieu de leur archipel, et qui forme une des principales branches du com-
merce de ces régions, mais qu'il ne faut cependant pas confondre avec le Trépang.
Un autre genre est celui des THALASSÈMES, Cuv., que l’on a partagé en Thalassema, Echiuris
et Sternospis, chez lesquels la bouche est très-petite, contenue dans la base d'un tentacule large,
courbé, ouvert en bas; V'anus est petit, en cercle; le corps est très-mou, cylindroïde, obtus en arrière,
atténué en avant, formé d'un grand nombre d'anneaux serrés, peu distincts, entourés chacun d’un
cercle de papilles glanduleuses, saillantes, surtout postérieurement; les soies sont lisses, droites,
aplaties, formant, à la partie postérieure du corps, deux rangées circulaires : deux soies plus
fortes, crochues, rapprochées l'une de l’autre et placées sur son extrémité antérieure. L'espèce ty-
pique est le T. echiurus, Pallas, commun sur les côtes sablonneuses de l'Océan.
On range encore aujourd’hui parmi les Sipunculiens les, BONNELLIA, Rolando, dont le type est
la B. viridis, de la Méditerranée, sur laquelle MM. Milne-Edwards, Schmarda, de Quatrefages, et tout
récemment M. Lacaze-Duthiers (Acad. des sc., 1858), ont publié de bonnes observations.
Les Molpodia, Minyas, Priapulus et Lithoderma, se rapprochent aussi des Siponceles; mais ce
sont réellement des Iolothuriens, qui tendent à établir le passage des Zoophytes aux Annélides.
QUATRIÈME ORDRE.
ANNÉLIDES SUCEUSES.
L'ordre des AnNéLipEes sucEusEs des naturalistes modernes correspond aux divisions des Hirudines
de Savigny, Abranches sans soies de G. Cuvier, Hirudinés de Lamarek, Latreille, Maquin-Taudon, ete.
x
ANNELÉS. — ANNÉLIDES SUCEUSES. 307
La caractéristique de ces Annélides est la suivante: le corps est plus ou moins cylindrique,
pourvu à chacune de ses extrémités d'une cavité dilatable et préhensile, agissant à La manière d'une
ventouse et leur permettant d'adhérer fortement aux corps sur lesquels sont appliqués ces organes;
la bouche est placée au fond de la ventouse antérieure et munie de petites mächoires; anus est
situé à la base de la ventouse postérieure; la tête n'est pas distincte, mais on remarque sur l'extré-
mité antérieure de la face dorsale du corps un certain nombre de petites taches qui paraissent étre
des yeux rudimentaires; pas de soies d'aucune espèce sur le corps, et, par conséquent, aucun or-
gane locomoteur analogue aux pieds; pas d'appendices respiratoires quelconques à l'extérieur, ex-
cepté chez les Branchellioniens, dont le dos est gurni d'appendices membraneux.
Ces Annélides se nourrissent aux dépens des animaux dont ils sucent le sang ou qu'ils avalent en
entier. Quelques-uns s'attachent aux Poissons et aux Batraciens; d'autres dévorent des Mollusques,
des espèces de leur propre classe ou des larves d'Insectes; certains d’entre eux s’attachent aux Che-
vaux, aux bestiaux et même aux Iommes qui vont boire dans les mares ou les fontaines; ils se nichent
parfois sous la langue, dans les fosses nasales ou même jusque dans l’œæsophage, ou se fixent par leurs
ventouses à diverses parties de la peau, surtout aux extrémités des membres.
1% famille, Azsrontens : ventouse orale, d'une seule pièce, séparée du corps par un étranglement
petit, à ouverture longitudinale, unilobiée; pas de branchies extérieures. Deux genres principaux
et quelques groupes moins importants découverts dans ces derniers temps et parasites surtout de
divers Poissons : 4° PISCICOLA , Lamarck (Hæmocharis, Sav., Gnatho, Gold. et Schinz., Ichthyobdella,
Blainv.); ventouse orale d'un seul segment, peu convexe, en forme de coupe; huit yeux réunis par
paires; ventouse anale double de l'orale, convexe, elliptique, non bordée, terminant le corps d’une
manière oblique; organes génitaux placés sur les dix-septième et vingtième segments. Les Piscicoles
sont de petits Hirudiens, longs d'environ 0,02, à corps cylindrique, aminci en avant, formé de
segments nombreux et peu distincts, pour la plupart vivipares, vivant dans les eaux douces, princi-
palement en Europe, et étant parasites des Poissons. Les plus connus sont les : P. geometra, Linné,
parasite des Cyprins et des Brochets, commune à Paris, marginata, Müll., des petits ruisseaux du
Piémont, etc. 2° ALBIONE, Sav. (Pontobdellu, Leach; Phormio, Gold. et Schinz., ete.); bouche très-
petite, placée au fond de la ventouse orale, qui est d’un seul segment, très-concave, en forme de godet;
mâchoires formées de trois points saillants peu visibles; six yeux; ventouse anale terminale, très-con-
cave, bordée; organes génitaux situés dans la jonction des dix-huitième et dix-neuvième segments et
dans celle du vingtième au vingt et unième. Les Albiones sont du double ou du triple plus grandes que
les Piscicoles; leur corps est cylindrique, un peu conique, aminci antérieurement, formé d'une soixan-
taine de segments, qui sont généralement hérissés de tubercules, de pointes ou de verrues; ils sont
remarquables par leur couleur cendrée, terne, leur peau très-épaisse, coriace; habitent dans la mer,
et s’attachent aux Poissons, particulièrement aux grandes espèces carnassières, telles que les Re-
quins, les Raies, et meurent dés qu’on les place dans l’eau douce; nous citerons les Albione muri-
cata, Linné; squalorum (pl. XXXVI, fig. 4), et piscium, Baster, qui se rencontrent dans l'Océan et
dans la Méditerranée.
2e famille, Hrrupinrens : ventouse orale composée de plusieurs pièces, unie avec le corps sans
étranglement; ouverture sensiblement transversale, comme bilubiée; lèvre inférieure rétuse; pas de
branchies extérieures. Ges Annélides, toutes propres aux eaux douces et de taille moyenne ou pe-
tite, ont été désignées sous les noms de Sanguisugites, Sangsues ou Hirudinés bdelliennes, etc.;
elles renferment une dizaine de genres, dont le principal est celui des :
SANGSUES (Hirudo, Linné; Sanguisuga, Sav.; Jatrobdella, Blainv.) : corps allongé, déprimé,
obtus en arrière, rétréci graduellement en avant, allongé, sensiblement déprimé, composé de seg-
ments nombreux, courts, égaux, saillants sur les côtés, très-distincts : le vingt-septième ou vingt-
huitième et le trente-deuxième ou trente-troisième portant les orifices de la génération; bouche
grande; ventouse orale peu concave : lèvre supérieure très-avancée, presque lancéolée, formée par
les trois premiers segments; mâchoires dures, fortes, très-comprimées, à deux rangs de denticules
nombreux, très-pointus, très-serrés, d'autant plus gros et plus aigus qu’ils sont plus rapprochés
du bord antérieur; yeux au nombre de dix, peu saillants, disposés sur une courbe, six sur le pre-
308 HISTOIRE NATURELLE.
mier segment, deux sur le troisième, et deux sur le sitième : ces quatre derniers plus petits que
les autres; ventouse anale moyenne, terminée obliquement, légèrement sillonnée dans sa cavité.
au
ñ
ei
Fig. 977. — Sangsue médicinalc. :
Les Sangsues se trouvent dans les eaux douces des mares, des étangs, des fossés, des ruisseaux, etc.
Elles peuvent vivre assez longtemps hors de l’eau, et alors elles se contractent souvent en forme
d'olive; l’on peut les conserver assez longtemps et les transporter au loin en les plaçant dans la terre
humide. En hiver, elles s’enfoncent dans la vase et y restent dans un état d’engourdissement com-
plet pendant toute la froide saison. Elles reprennent leur mouvement au printemps et ne tardent
pas à reproduire leur espèce. Elles sont essentiellement carnassières et se nourrissent du sang des
animaux, qu'elles sucent avec une grande facilité; tantôt elles se fixent aux parties extérieures des
animaux, tantôt, pour les petites espèces, elles sont introduites dans la bouche avec l’eau prise pour
boire, et elles se fixent à la gorge, etc. L'ouverture de leur bouche leur permet de percer très-faci-
lement la peau de l'Homme pour en sucer le sang, et, à raison de cette faculté, on les emploie en
médecine pour pratiquer des saignées locales. Depuis quelques années, l’usage des Sangsues est de-
venu si général, que ces animaux sont aujourd'hui l’objet d’un commerce très-important, et qu'a-
près en avoir presque entièrement dépeuplé les étangs et les ruisseaux des diverses parties de la
France et de l'Espagne, où on les trouvait jadis en abondance, nous sommes obligés de les aller cher-
cher jusque dans la Hongrie et la Turquie. Nous regrettons de ne pouvoir entrer dans des détails
sur le commerce des Sangsues, sur leur usage, sur les moyens que l’on emploie pour les faire repro-
duire dans des mares disposées à cet usage, etc. Les Sangsues sont ovipares; les germes sont ren-
fermés, au nombre de six à dix-huit, dans de petits cocons, de forme ovoïde, formés extérieurement
d'une enveloppe spongicuse, et intérieurement de deux enveloppes membraneuses : à chaque extré-
mité du grand diamètre, on voit deux petits opercules qui, en se détachant, laissent à découvert
deux ouvertures par où sortent les petites Sangsues, qui, à l'exception de la taille, ressem-
blent complétement aux individus d’où elles proviennent. Ces Annélides ont beaucoup d’ennemis,
tels que les Poissons, les Oiseaux, quelques larves d’Insectes aquatiques, etce.; elles se détruisent
souvent même entre elles, et saignent celles qui sont gorgées de sang. Le sel les fait mourir, et on
l'emploie souvent pour faire lächer prise à celles qui sucent l'Homme avec trop d'avidité. On a re-
marqué que les Sangsues avaient l'habitude de monter à la surface de l'eau avant la pluie, et, dans
quelques parties de l'Europe, on s’en sert comme de baromètre.
On décrit un grand nombre d'espèces d’'Hirudo, et plusieurs sont aujourd’hui les types de groupes
distincts. Quoiqu’on ait plus spécialement étudié celles d'Europe, on en connaît également des pays
étrangers; telles sont les : H. Ægyptiana, Larrey, qui habite surtout les eaux du Nil, Zeylanica,
Valmont de Bomare, de Ceylan; Japonia, Bosc, du Japon; swampina, Bose, de la Caroline du Sud, etc.
Parmi nos espèces européennes, deux surtout sont employées en médecine, et présentent une assez
grande quantité de variétés, ce sont: 1° la Sancsue orricrxae (H. officinalis, Sav.), longue de
0%,08 à 0,10, à corps d’un vert noirâtre clair, à segments très-lisses : six bandes longitudinales
ferrugineuses tachetées de points noirs sur le milieu et sur les bords, dessous vert jaunâtre, sans
taches, avec un large bord noir, assez variable pour la couleur; et 2° la Sancsue méorcnaze (Hirudo
medicinalis, Ray, Linné) : un peu plus petite que la précédente, d’un vert foncé marqué de six
bandes longitudinales d'un ferrugineux clair, marquées chacune de-taches noires ordinairement
triangulaires, quelquefois carrées, se confondant rarement; dessous du corps verdâtre, bordé et ta-
cheté de noir; segments hérissés de mamelons grenus.
Parmi les autres genres d'Hirudiniens, nous indiquerons suriout les : 1° HÆMOPSIS, Sav.
Iypobdella, Blainv.), qui se distinguent des Hirudo par leurs mächoires ovales, non comprimées
y Si 5 ( le »
ANNELÉS. — ROTATEURS. 309
peu dentelées; un grand nombre d'espèces propres aux eaux douces, et dont le type est la Sancsue
ve Cnevar (H. sanguisaga, Berg.), qui est très-commune dans les étangs et fossés d'Europe, qui a
été confondue avec les Sangsues médicales, que Linné dit, probablement à tort, très-dangereuse pour
les Chevaux, et à laquelle on attribue à tort les accidents inflammatoires qui se développent chez
l'Homme à la suite de son application : en effet, cet Hæmopsis refuse constamment de se fixer sur
la peau de l'Homme, et ne l’entame jamais; il est même probable qu'elle ne peut entamer celle des
Vertébrés, et qu’elle ne se nourrit que d'animaux inférieurs. 2° GLOSSIPHONIA, Johnson (Erpo-
bdella, Sav.; Helluo, Ocken, Clepsine, Sav.), à bouche grande, munie à l'intérieur d'une sorte de
trompe simple, cylindrique, exsertile, en forme de tube : renferme de petites espèces : type, G. com-
planata, Linné, qui attaque les Limnées et les Planorbes. 3° LIMNATIS, Mocq.-Tand. (Bdella, Sav ;
Pabæobdella, Blainv.), à bouche moyenne : espèce principale, L. nilotica, Sav., des eaux douces d’É-
gypte. 4 AULOSTOMA, Mocq.-Tand., qui a une très-grande bouche, et comprend l'A. nigrescens,
Mocq.-Tand., des environs de Lyon. 5° NEPHELIS, Sav. (Erpobdella, Lam.), chez lesquels les mû-
choires sont représentées par trois plis saillants, et qui ne comprennent que des espèces très-petites
propres aux eaux douces d'Europe, et dont le type est la N. vulgaris, Müller, parasite de certains
Insectes aquatiques. 6° TROCHETA, Dutrochet (Géobdella, Blainv.), qui a un renflement remar-
quable aux segments portant les organes génitaux, et ayant pour type la T. subiridis, Dutr., Hiru-
dinien à corps d’un vert clair, marqué en dessus de deux lignes brunes, qui se trouve en France,
dans les endroits humides, et se nourrit de Vers de terre qu’il poursuit à terre.
3° famille, Bracuerziontens : des branchies extérieures; ventouse orale d'une seule pièce, séparée
du corps par un fort étranglement; ventouse circulaire. Un seul genre, celui des BRANCIJELLION,
Sav. (Branchiobdella, Blainv.; Polydore, Ocken), dont le corps est allongé, déprimé, formé de
nombreux segments, et renfermant surtout deux espèces, les : B. {orpedinis, Sav., qui se rencontre
sur la Torpille dans la Méditerranée, et B. pumatuus, Sav., qui s'attaque aux Tortues, et est sur-
tout commun dans l'Océan atlantique.
DEUXEEME CLASSE.
ROTATEURS.
On indique sous le nom de Rorareurs, ainsi que sous celui de Sysrouprs, une classe d'Annelés ne
renfermant que des animaleules microscopiques, qui se rencontrent clans les eaux stagnantes et
même dans l’eau où l’on a fait macérer diverses matières organiques, et qui jouissent de la singu-
lière propriété, quand ils sont mis dans des circonstances favorables, de reprendre leurs mouve-
ments et la vie, après avoir été entièrement desséchés pendant un temps assez long. Ces êtres,
d’une extrême petitesse, que l’on croyait autrefois composés seulement d’une sorte de gelée animée,
et que l’on supposait ne se nourrir que par imbibition, ont cependant uné structure très-compli-
quée qui tend à les rapprocher du type que nous étudions. ol
Les Rotateurs, qui ont moins de 0",0001 de longueur, ont le corps allongé, à moitié transparent,
et offrant assez souvent des traces distinctes de divisions annulaires; bouche à la partie antérieure
du corps; des cils vibratiles, dont les mouvements rotateurs sont très-remarquables, placés de chaque
côté du corps et même autour de l'orifice buccal ; arrière-bouche garnie de muscles puissants et
armée souvent de mâchoires latérales; canal intestinal droit, s'étendant d’un bout du corps à | autre,
et présentant habituellement vers le milieu un renflement qui est l'estomac; des corps glanduli-
310 HISTOIRE NATURELLE. — ANNELÉS. HELMINTHES.
formes de chaque côté du canal digestif; une sorte de cloaque, dans lequel viennent déboucher les
oviductes, et situé à l'extrémité postérieure; des vaisseaux assez compliqués; système nerveux ru-
dimentaire ou n'offrant que des ganglions sous-intestinaux, etc.
Ces animaux renferment principalement les groupes des : Rotifères, Hydatines et Brachions, que
nous avons signalés, en traitant des Infusoires, parmi les Zoophytes.
Fig. 278. — Rotifère. Fig. 279. — Ascaride.
TROISIÈME CLASSE.
HELMINTHES.
Ce n’est que récemment que les HezmmNrnes, souvent désignés sous les noms de Vers intestinaux
ou d'Entozoaires, ont été classés parmi les Annelés; pendant très-longtemps ces animaux avaient
été placés parmi les Zoophytes ou animaux rayonnés. Cependant les Helminthes ont, par l’ensemble
de leur organisation, une analogie évidente avec les Annélides, dont ils se distinguent du reste par
l'absence d’une chaîne de ganglions nerveux, par leur sang qui n’est pas rouge, et parce qu'ils
n'ont jamais de membres sétifères. En général leur corps est très-allongé, cylindrique ou déprimé,
et offre des traces plus ou moins apparentes de segmentations annulaires; ils n’ont rien qui res-
semble aux couronnes de cils vibratiles que l'on voit chez les Rotateurs; leur bouche cst armée de
crochets ou disposée en manière de ventouse, etc.
Les Helminthes sont de taille petite ou moyenne, et ont constamment une coloration blanchâtre;
la plupart d’entre eux sont parasites des animaux, surtout de l'Homme, des Vertébrés, de quelques
Mollusques et de divers Insectes; mais tandis que certains parasites que nous avons étudiés dans
ce volume, tels que les Poux, les Puces, etc., sont essentiellement extérieurs ou Épixoaires, les
Helminthes, pour la très-grande majorité au moins, sont exclusivement intérieurs ou Entoxoaires.
Ces Vers ne vivent que dans l’intérieur d’autres animaux, et se logent surtout dans le canal intesti-
nal, ainsi que dans la substance du foie, dans les yeux, dans le tissu cellulaire et les muscles, dans le
cerveau, dans lesang, etc. Les Helminthes se multiplient au moyen d'œufs, parfois ils produisent des
petits vivants; chez quelques-uns on a constaté la présence des sexes, et dès lors on n’a pas besoin
d'admettre, comme on l’a fait autrefois, l’existence d’une génération spontanée pour expliquer leur
existence. Toutefois on ne sait pas bien comment ils peuvent se transmettre d’un animal à un autre,
et comment ils pénètrent dans l'intérieur des organes dans lesquels ils vivent. La petitesse seule
de leurs œufs peut expliquer, jusqu’à un certain point cependant, cette transmission. Dans ces
derniers temps, on a reconnu que ces animaux éprouvaient des changements très-considérables
dans le cours de leur vie, et l’on s’est assuré que certains Helminthes, que l'on rangeait dans des
genres différents, n'étaient cependant que des individus d’une seule et même espèce à des degrés
différents de développement. Nous renvoyons à ce que nous avons dit des Helminthes en traitant des
Zoophytes dans cette Encyclopédie, et nous nous bornerons à donner comme type la figure d’une
espèce d’un des genres principaux, celui des Ascarides.
FIN DU VOLUME.
\
FABLE DES MATIÈRES.
Nberlle Anis ee ee 198
ABRANCHES SANS SOIES. . . , , 306
ABRANCHES SÉTIGÈRES.. . . . . . 000
Acubiens. Acridii.. , . . . . . 69
Æschne. Æschna.. . 406
Albione. Albioneg.. . . . . . . 307
ACTE ACTUS ME UE EURE 294
AGARIENS. ACarit. . . . . . 289
Agrion. Agrion.. . . . . . . . 107
Aleyrode. Aleyrodes.. 189
Amphinome. Amphinoma. . 301
Andrène. Andrena. . . . . . . 137
ANNELÉS. Annulata. . . . . A
ANNELIDES. Annelides. . . . . 298
ANNÉLIDES ERRANTES . 800
ANNÉLIDES SUCEUSES. . , . 806
ANNÉLIDES TERRICOLES. , . 304
ANNÉLIDES TUBICOLES. . . . . . » 503
ANOPLOURES. Anoplura. . . . 255
Anthophore. Anthophora… . . . 135
Anthrax An {raz ON NE 239
Aphaniptères. Aphaniptera.. . . 254
Apmipiens. Aphidii. . . . . . . 189
AIOHIEXS. ADI. ee 128
Aphrodite. Aphrodita. . . . . . 301
AporogrANCiEs. Aporobranchia. - 282
ARACHNIDES. Arachnides. 270
ARACUNIDES PULMONAIRES. . . , . 273
ARACIINIDES TRACHÉENNES. . +. . . 286
Arade. Aradus.. : . . . . 241
Araisnée. Aranea. . . . . 281
ARANÉIDES. Araneidæ.. 273
Arénicole. Arenicola. . . . . . 504
Areyronète. Argyronela. . 282
ARTICULÉS. Articulata. . 4
Ascalèphe. Ascalaphus.. . . . , 114
ASHEMASAUSS. e- Loe - s 0: 257
ASIRIENS ASE Zn à à 0 tete le 236
AÉBICIE PAC NS NE 502
PACE M BGCUIUS 51
Belle BdElIg..... . 294
Bembex. Bembex.. . . . . 147
Hinoro 1000 CONTE NE 231
DENT ONRORCRE 5
BLartriens. Blattii. . . . . . . 33
Bombyle. Bombylius. . . . . . 259
Bourdon. Bombus. . . . . . . 153
Brachellion. Brachellio. . . . . 511
BracuocÈères. Brachocera. . . . 2
COMENT STD
Bracon. Bracon.
CÉDUC RCE IS ER ER
Cercère. Cerceris.. . ,
Cercope. Cercorpis. . . |
Chalcide. Chalcis. . . . . ae
Chartergue. Chartergus. . . . .
Ghelfère (CREER NN
Chétoptère. Chetopterus.
CHILOGNATHES. Chilognathes.
CHILOPODES. Chilopodes. . .
Curysipiexs. Chrysidii. . . . . .
CHEN CNIUSS IEEE
CicaDiens. Cicadii.. . . . . .
Cigale. Cicada.
Tree Cimbez. . ne
CIRRIIPÉDES. Cirrhipedes .…
Clymène. Clymenes.. . . . . .
Coccnrens. Coccinti.. . .
Goche Ile SUCCESS
COLÉOPTÈRES. Coleoptera. .
Conops. Conops. . . . . . . .
Cordulie, Cordulia. . . .
Courtilière, Gryllotalpa. . . . .
COUSUMCULEL EEE RE
Crabron. Crabro. . .
Crabroniens. Crabronii. . . . .
CRÉCAGNU IIS PRE
Criquet. Acrydium. . . . . . .
CRUSTACÉS. Crustacea.
CURICIENS CU
Cynips. Cynips.. . . . . . . :
Cyxrsiexs. Cynipsüi.. . . . . .
Dermanysse. Dermanyssus..
DERMAPTÈRES. Dermaplera.
DIPTÈRES. Diptera. . . . . .
Dolichopode. Dolichopus. . . .
Dorsignancues. Dorsibranchia.. .
Embie. Embig.. . .. : : . |
Eugiexs. Embüi.. . .
Empuse. Empusa.. - .
Encyrie. Encyrtus. . . . . . .
ENTOZOAIRES. Entozoa.
Épeire. JEU RS E MOULE
Éphémère. Ephemera.. . . . .
Épnémèniens. Ephemerii. .
Éphippigère. Ephippigera.
Érémiaphile. Eremiaphila.
Eucharide. Eucharis. . . . . .
Eulophe. Eulophus.. . . . . .
Eumène. Eumenes.-. . . . . .
Euséniens. Eumenii… . . .
Eunice MAMILEME ER... .
Eurytome. Euryloma. . . . . .
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Faucheur, Phalangium. . . .
FAUX-SCORPIONS.. + . . : .
Forficule. Forficula.. . . . .
Fonmicrens. Formicü. . . . .
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Fourmilion. Myrmeleo… . . . .
Fulgore. Fulgora.. . . . . .
Furcortens. Fulgori. . . . .
Galéode. Galeodes. . . . . .
Galgule. Galgula.. . . . . .
Gamase. Gamasus.. . . . . . .
Géophile. Geophilus.. . .
Gomphine. Gomphina.. È
Gonylepte. Gonyleptes.. . . .
Grillon. Gryllus. . . . . A
GriLLontexs. Gryllonii.. .
Guêpe. Vespa. .
HELMINTIIES.
lHémérobe. Hemerobius.. .
HÉMIPTÈRES. Hemiptera.. . .
Hémopse. Hæmopsis. . . .
HéréroprÈres. Heferoptera. . .
Hermelle. Hermella. . . . .
Hérichostome. Hericostoma. . .
Hiruniens. Hirudinii.
HomorTÈres. Homoptera.. . . .
Hybos. Hybos.
Hydrachne. Hy ydrachna. NE
Hyletome. Hyletoma. . . . .
IIYMÉNOPTÈRES. Hymenoptera.
Ibalie- Toglig
Ichneumon. Ichneumon. . . .
IcuneunontENs. Ichneumontü.. .
INSECTES. Insecta.. . . . .
Iule. Zulus. .
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FÜR ES MDRT
Kakerlac. Kakerlac.. - . . .
Kermès. Kermes
CONTENT AT)
LÉPIDOPTÈRES. Lepidoptera. .
Lépisme. Lepisma. . . . . .
Lérismens. Lepismii. . .
Leptide. Leptis.
Leucospis. Leucospis. . . .
Libellule. Libellula.. . . . .
Lieccuztens. lâbellulii. . .
Lithobie. lithobius.. .
Mocuste LOLUSIO 0 0 0e
COCUSI RER
LocusrTiENs.
Lumpricrens. Lumbricii. .
Helminthes. . .
312
Lycose. Hycosa.. . . . « + « - 2
Lygée. Lygæus.. . .
Lycéens. Jygeñ . . . . . .
Mante Mans
MawTiens. Mantii.. . . . . .
Mantispe. Mantispa.. . . . .
Masaris. MOSGTIS
Membrace. Membracis.. . - .
Minis MISE RC CRETE
Midas MOTS RER
MONOMORPHES. Monomor ne
Mouche. Musca.. . . . - . .
Muscrens. Muscid..
Mutille. Mutilla. . - . . . .
Mycétophile. Mycetophila. . . .
Mygale. Mygale. . . : . . . .
Mymar. Mymar.
Nyopames. Myodarii. . . . .
MYRIAPODES Myriapoda.. .
MsnméLéontens. Myrmeleonii. . .
Mystucide. Mystacida.. . . .
Naïde NZIS
Némestrine. Nemestrinia. ;
Némocères. Nemocera.. . . .
Némoptère. Nemoptera. . : : .
Népe PNPDO NERO
\éphélide. Nephelis. .
Nérrexs. Nepü.. . . . . . .
INÉTÉIAES ANNE CEE
NÉVROPTÈRES. Nevroplera.. .
Nomade, Nomada.. . . .- - .
Notonecte. Notonectes.. . .- - - —
Nyctérybie. Nycterybia. . - .
Nymphon. Nymphon. . . . .
Odynère. Odynerus.. . - . . .
Œstre. OEstrus.
Ophion: Ophion. - - : - --
Orihate (Or bAIES UN ES
Ornithomyie. Ornithomyia.. . .
Onximmonviens. Ornithomyii. . .
ORTHOPTÈRES. Orthoptera. … .
Orysse lOrYSSUS UN
Oscinis. Oscinis.
OSmie USM ET
Panorpe. Panorpa. . . - . - -
PARASITES. Parasita. . . . .
Parnope. Parnopa. . . . . .
Pénipazrxs. Pedipalpes. . . . .
Pentatome. Pentatoma. . . . .
Perce-oreille. Forficula. . . .
Péripate. Peripaius
HISTOIRE NATURELLE. —
Perle Péri
Penciens. Perli. .
Puaranciexs. Phalangii. . . . .
Phasme. Phasma.. . . . . .
Puaswiens. Phasmü.. . . . .
Phrygane. Phryganea..
Panveanrens. Phryganii. . . . .
Phryne. Phryne. . : : : - .
Pince. Chelifer.: "= ©.
Piscicole. Piscicola. . . . .
Platygastre. Platygasler.. . : . :
Pneumore Pneunora.. . . .
Podure POdUrTG. RCE
Poouriexs. Podurii.. . . . .
Poliste. Polistes. . . - . .- . .
Polydesme. Polydesmus.. . : .
POU PPETICUIIS RE RTE EEE
Prochile. Prochilus.. . . . .
Proctotrupe. Proctotrupes.. . .
Procrorrurrens. Proctotrupii. . .
Proscopie. Proscopia. . - . .
Psithyre. Psifyrus. . . : . .
PSOGENS-#PSOUL- DCR
Psoque. Psocus.. «+ = - … :
Psoropte. Psoroptes.. . . . . .
Psylle. Psylla. : … 2... à
Ptéromale. Pferomalus. . . . .
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Puceron. Aphis. . . . . . .
Punaise. Cimex. .- . . - . .
Pycnozonon. Pycnogonon. - . .
Raphidie. Kaphidia. . . . . .
Rapminiexs. Haphidii. . . . .
Réduve. Reduvius.
RÉDUVIENS. RETUUITe ee, 0e
RHIPIPTÈRES. Rhipiptera. . .
ROTATEURS. Rofalora.. . . .
Rotifère. Rotifera. . . . . .
Sabelle. Sabella. . . . .
SO MSAUT o aEaiden 5
Sangsue. Hirudo.. . . . . .
D
Sarcophage. Sarcophagus. . . .
Sarcopte. Suwrcoples.. - . . .
Sauterelle. Locusta.. . . . . .
Scénopine. Scenopina.. . : . -
Scolie. Scolig. : à » à - .
Scolopendre. Scolopendra. .
Scorpion. Scorpio. .
Scutellère. Scutellera.. . + . .
ScurecLÉRIENS. Scutellerüi. . .
Scutigère. Seutigera. : . - .
Segestrie. Segestria.
Semblide. Semblis. . . . . .
FIN DE LA TABLF.
ANNELÉS.
. 93 | Serpule. Serpula.. . . . . .
. 92 | Siponcle. Sipunculus. . . . .
288 | Smicrens. Séricii. . . . . .
MDP STE STD Ce CE
. 41 | Solpuge. Solpuga.. . . . . .
421 | Spalangie. Spalangium. . . .
418 | Spnécrexs. Sphegii. . . . . .
10831 | SDREX SDREL Ne
. 287 | Srrarionvens Sératiomyü. .
307 | Stratiomys. Sératiomys. :
167 | STREPSIPTÈRES. Strepsiptera.
. 16 | Stylops. Séylops. . . . . . :
. 259 | SUCEURS. Susores.. . . . - .
. 259 | Syrphe. Syrphus.. . . . . :
140 | Syrrniens. Syrphii. . . . . .
966 | SYSTOLIDES. Systolides. . . .
. 256 :
. 66 | Tapamiens. Tabanüi. . . . . .
167 | Tachine. Tachina.. . . . . :
166 | Taon. Tabanus.. . + .: : - :
. 15 | TARDIGRADES. Tardigrada. .
. 455 | Taupe-Grillon. Gryllo-Talpa. . .
. 90 | Tégénaire. Tegenaria.. . . .
. 91 | Tenthrède. Tenthredo. . . .- .
994 | Tenraréoiniexs. Tenthredinii.. .
. 495 | Térébelle. Terebella.
465 | Terawens. Termii.. . . . . .
954 | Termite. Termes.. . . . . -
499) I TEtrix Teri NE TES
. 209 | Tettigone. Teffigonia. . .- . -
982 | Thalassème. Thalassemus. . .
Thélyphone. Thelyphonus. .
. 417 | Thérève. Thereva. . . . - -
. 416 | Thoryme. Thorymus. . . . :
. 208 | Thrips. Thrips.. . . . . . :
. 205 | Tunisiens. Thripsüi.. . . . . .
91 | THYSANOURES. Thysanura.. .
309 | Tipule. Tipula. … + . - : -
. 340 | Truuexs. Tipulüi.. . . - -
Trichodactyle. Trichodactylus. .
505 | Trochète. Trochæla.. - + - -
906 | Troglyphe. Troglyphus. + + :
507 | Trogule. Trogulus. - + + - . +
948 | Trombidion. Trombidium. . -
. 294 | Truxale. Truxalis. . . . . .
67
244 | VERS. Vermes.. :
. 449 | Vers de terre. Lunbricus. . . .
. 269 | VERS INTESTINAUX. Hebnin-
284 LRES EN 0 3 EN NE
949 | Vespiexs. Vespit. . . + . + .
. 26
, 268 | Xénos. Xenos. . . . . . -
919 | Xyèle. Ayels EE
A8 | Xylophage. Xylophagus. - . :
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Lacépède, G. Guvier, F. Cuvier, Geoffroy Saint-Hilaire, Latreille, oo
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PAR LE D° CHENU a +
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REPCEAAS 22:
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TRAITÉE COMPLET DE CETTE SCIENCE
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PAR LE D' CHENU
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Toutes les gravures ont été dessinées avec le plus grand soin sur les objets mêmes, soit vivants, soit déposés à notre
Muséum d'histoire naturelle. On a donc dans cet ouvrage la représentation de ce qu'offre la nature dans les diverses
parlies du monde, et‘on peut en suivre ef comparer les différences. La représentalion exacte de toutes les races de l'espèce
humaine réparties sur le globe offre seule un exemple de l’intérêt que présente l'Encyclopédie d'histoire naturelle.
Les tables générales du texte et les nombreuses gravures figurant dans les différentes parties de l'Encyclopédie d’His-
loire naturelle , indispensables pour faciliter les recherches à faire dans cet important ouvrage, ont été dressées par
M. E. DEsmAREsT, l’un des collaborateurs de M. le D' Cnaenu.
Afin de rendre ce travail utile à tout le monde, on donne, dans une première colonne et par ordre alphabétique, les
noms vulgaires sous lesquels sont connus les divers animaux décrits ou indiqués dans l’EncycLorénie, et lorsque ces ani-
maux n’ont pas encore reçu de noms vulgaires, on traduit en français leur dénomination laine. Une deuxième colonne est
uniquement consacrée aux noms scientifiques. Dans une troisième colonne, on fait connaître les tomes et les pages conte-
nant les descriptions, l’histoire des mœurs et les autres détails relatifs aux animaux dont on s’est occupé. Enfin, la qua-
trième colonne est spécialement employée à l'indication, par division de volumes, pages et numéros d’ordre, des nombreux
dessins qui illustrent le texte des volumes et de ceux qui figurent dans les planches tirées à part.
Grâce à ces listes, beaucoup plus complètes que celles précédemment données dans d’autres ouvrages, notre Cours
complet d'histoire naturelle par ordre des matières aura, tout en conservant les avantages de l’arrangement systéma-
tique, la même utilité usuelle que tous Les dictionnaires scientifiques.
DIVISION DE L’OUVRAGE :
Figures Planches Figures Planches
dans le en- dans le en-
Vol. texte. Lières (1). Vol. texte, tières (1).
Res +00 0008052 1 276 40 Report... 11
oléoptères.......... 3 1009 124 { Pachydermes, rumi-
ZO0LOGIE....... | Crustacés, Mollus- MAMMIFÈRES. ... | “nants, etc. ...... A 18 18
ques, Zoophytes.... 1 320 0 OISEAUX... 2. OISEAUX. eee 6 02080 240
Papillons diurnes ou Reptiles et pois-
PA Re a OCR RER 1 531 HU RRENIMERSRRES | Fons Le Roc he TS 5 © u8
°° ) Papillonsnocturnes ou Botanique ou phytolo-
tome IT.:.......... 1 199 40 | BOTANIQUE...... ge... RE see 2 525 96
Quadrumanes........ 1 236 410 Races humaines...
L Carnassiers..... Ra 226 80 RACES HUMAINES. ! Minéralogie........ 1 152 u0
MAMMIRÈRES Rongeurs et pachy- : Géologie:..........
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Coléoptères........................ 1 ; Reptiles et Poissons.......,....... qu
Crustacés, Mollusques, Zoophytes... 1 HOAnQUeE ere ecee CHOSE dl
TÉRITOPIÈLESS- 2e -epc-e-ee---repe 1 . Races humaines, Minéralogie et Géo-
Mammifères .... sp GE En ER nos ec ac OU
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TYPOGRAPHIE FIRMIN-DIDOT. — MESNIL (EURE).
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